nederlandse afdeling fac. rechtsgeleeroheid …pelant jusqu'au 9 mai 1950 et à l'officier...
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Nederlandse afdeling FAC. RECHTSGELEEROHEID 124
PASIC.RISIE BELGE
RECUEIL GENERAL DE LA JURISPRUDENCE
DES COURS ET TRIBUNAUX ET DU CONSEIL D'ETAT
ANNÉE 1952
lie PARTIE. - ARRÊTS DES COURS D'APPEL ET JURISPRUDENCE ÉTRANGÈRE
COUR D'APPEL DE GAND
9 mars 1951
PATERNITÉ ET FILIATION; DÉSAVEU. - ÉPOUX EN INSTANCE DE DIVORCE. - ABSENCE DE DÉCISION JUDICIAIRE SUR LA RÉSIDENCE SÉPARÉE DE LA FEMME. - DÉLAI DE TROIS CENTS JOURS PRÉVU PAR L'ARTICLE 313 DU CODE CIVIL. - POINT DE DÉPART.
L'm'ticle 313 du Code civil auto1'ise le niari, en cas de jugement ou niême de demande en divorce, à désavouer l'enfant né trois cents joitrs ap1'ès la décision qui aitra auto1'isé la femme à avoir une 1'ésidence séparée.
Uépoitse n'est pas teniœ de se faire autoriser par le juge à avoir une résidence .sépm'ée. Cette résidence peut être convenue ent1'e parties, et le consentement du mari peut n'être qite tacite.
S'il est constant qu'à la date du dépôt par le mari de la requête en divorce, l'épouse avait déjà quitté le domicile conjitgal pou1' se retire1' chez ses pm'ents, l'abstention du' mm'i, ait coitrs de la procéditre en divorce, de solliciter ime nouvelle résidence poiw son épouse impliqiœ de sa part consentement tacite à la résidence choisie par elle. En pareil cas, le procès-verbal de non-conciliation constitue le point de dépm't dit délai de t·rois cents .fou1's prévit pa1' l'article 313 dit Code civil.
PASIC., 1952. - Il6 PARTIE.
(D ... , C. V ... , q. q., ET M ... )
ARRÊT.
LA COUR; -Attendu que l'appelant, domicilié à Herseaux, rue de la Broche de fer, n° 105, époux de la seconde intimée depuis le 22 janvier 1945, avait à la date du 1 O août 1946 déposé une requête en divorce ; que dans cette requête il affirmait que sa femme avait abandonné le domicile conjugal le 15 novembre 1945 pour rentrer chez ses parents ·à Luingne, au « Café du Cheval blanc J>, Place, n° 417 ; que c'est à cette résidence que fut adressée la convocation prévue par l'article 238 du Code civil et qu'il résulte du procès-verbal de non-conciliation du 8 novembre 1946 que l'intimée y a donné suite ; que le jugement du 11 juillet 194 7, qui rejette la demande en divorce de l'appelant, mais qui admet le divorce sur demande reconventionnelle de l'intimée aux torts de son mari, confirme aussi bien dans ses motifs que dans ses qualités la séparation de fait des époux et l,a résidence choisie par l'intimée chez ses parents; que l'intimée s'abstint de signifier ce jugement à l'appelant jusqu'au 9 mai 1950 et à l'officier de l'état civil jusqu'au 26 juillet suivant;
Attendu que, sur plainte de l'appelant, l'intimée fut condamnée du chef d'adultère par le tribunal correctionnel de Courtrai, le 24 mai 1949; qu'il résulte du dossier pénal et du jugement de condamnation que l'intimée avait transféré sa résidence à Mouscron, rue de Rolleghem, n° 1 ; que dans cette ville,
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le 2 juin 1949, elle mit au monde un enfant du sexe féminin, qui fut inscrit . dans les registres de l'état civil sous le nom patronymique de l'appelant; que celui-ci s'empressa de désavouer l'enfant par déclaration signifiée à l'intimée et au tuteur ad hoc, le 39 juin 1949 ;
Attendu que le premier juge a rejeté l'action en désaveu de paternité, d'une part, parce que les conditions légales d'un désaveu par simple déclaration ne lui semblaient pas réunies, d'autre part, parce que les preuves de non-paternité offertes par l'appelant ne paraissaient pas concluantes ;
Attendu que l'article 313 du Code civil, modifié par la loi du 20 mars 1927, autorise le mari, en cas de jugement ou même de demande en divorce, à désavouer par simple déclaration l'enfant né trois cents jours après la décision qui aura autorisé la femme à avoir une résidence séparée ;
Attendu que l'épouse en instance de divorce n'est pas tenue de se f?-ire autoriser par justice à choisir une résidence en dehors du. domicile conjugal ; que les parties peuvent tout aussi bien convenir entre elles de cette résidence et que le consentement du mari dans le choix de sa femme peut résulter de son approbation tacite (PIÉRARD, t. Jer, n° 382, p. 684; Bruxelles, 23 mai 1908, PAsic., 1908, II, 231); qu'en l'occurrence, l'intimée avait déjà quitté le domicile conjugal avant le dépôt de la requête en divorce et avait réintégré le domicile de ses parents; que l'abstention de l'appelant, au cours de la procédure, de solliciter en justice une nouvelle résidence pour son épouse, impliquait de sa part un consentement tacite à la résidence choisie par elle;
Attendu que, si l'article 313, alinéa 2, du Code civil permet à l'époux en instance de divorce le désaveu 'de paternité par simple déclaration, il en est ainsi parce que, comme l'exprime le rapport de la commission de la Chambre (Pasin., 1927, p. 8 7, col. 1), da première chose que font les époux plaidant en divorce, c'est de se séparer )) ; qu'il existe en effet une impossibilité morale de cohabitation que le procès-verbal de non-conciliation prévu par l'article 239 du Code civil et la poursuite de la procédure en divorce rendent pratiquement définitive (Liège, 12 novembre 1937, PASIC., 1938, II, 107; Bruxelles, 29 mars 1939, PASIC., 1939, II, 117; Liège, 22 mars 1945, PASIC., 1945, II, 23; Liège, 29 novembre 1945, PASIC., 1945, II, 50);
Attendu que cette impossibilité morale est d'autant plus pertaine dans l'espèce, que le divorce entre parties a été admis par le tribunal le 11 juillet 194 7 ; qu'il est établi que depuis lors l'intimée a quitté le domicile de ses parents, non pour réintégrer le domicile conjugal, mais pour s'établir à Mouscron, dans un immeuble où fut constaté ensuite le flagTant délit d'adultère qui entraîna s,a condamnation; que de ce fait l'appelan't entama une nouvelle procédure en divorce, qu'il abandonna quand l'intimée fit transcrire le 26 juillet 1950 le jugement de divorce, obtenu le 11 juillet 194 7, dans les registres de l'état civil ;
Attendu qu'à défaut d'autorisation judiciaire expresse quant au choix d'une résidence séparée, inutile en raison du consentement tacite des époux, il y aurait lieu de considérer le procès-verbal de non-conciliation comme le point de départ du calcul des trois cents jours dont question à l'article 313, alinéa 2, du Code civil; que, même si l'on prenait comme :i;wint de départ, comme le propose l'appelant, le jug·ement du 11 juillet '191±7, qui autorise incontestablement l'intimée à quitter le domicile conjugal, puisqu'il admet le divorce, alors encore les trois cents jours seraient amplement acquis~ puisque la naissance de l'enfant désavoué date du 2 juin 1949 ; que c'est•donc à tort que le premier juge a refusé d'entériner le désaveu de paternité de l'appelant par simple déclaration, du 30 juin 1949 ;
Par ces motifs, vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935, ouï en son avis M. Vermeulen, premier avocat général, donne défaut contre les intimés, faute de comparaître ; déclare l'appel recevable et fondé, en conséquence met à ·néant le jugement dont appel et, faisant droit à la demande de l'appelant, déclare recevable en la forme et bien fondé quant au fond le désaveu de paternité du 30 'juin 1949 ; dit en conséquence que l'enfant Sonia Debyttere ne pourra porter le nom patronymique de l'appelant, qui n'est pas son père et à la famille dùquel elle ne peut appartenir ; ordonne que le présent arrêt soit transcrit dans les registres de l'état civil de la ville de Mouscron par l'officier de l'état civil aussitôt qu'il lui aura été remis et que mention en sera faite en marge de l'acte de naissance du 2 juin 1949, ainsi que sur les tables décennales; fait défense à l'officier de l'état civil de Mouscron de délivrer à l'avenir aucun extrait ou certificat de l'acte de naissance en question, sans mention du présent arrêt; condamne la
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seconde intimée aux dépens des deux instances.
Du 9 mars 1951. Cour de Gand. -1re ch. - Prés. M. de Brabandere, président. - .Min. publ. M. Vermeulen, premier avocat général. - Pl. M. P. Gillon (du barreau de Courtrai).
COUR D'APPEL DE GAND
5 octobre 1950
1° COMPÉTENCE. COMPÉTENCE << RATIONE LOCI >>. LIEU DU CONTRAT.
PLURALITÉ DE DÉFENDEURS. DOMICILES DIFFÉRENTS. - CHOIX DU DEMANDEUR.
2° VENTE. -AUTOMOBILE. - BUTIN DE GUERRE._:_ PROPRIÉTÉ DE L'ÉTAT. -AUTOMOBILE ABANDONNÉE PAR L'ENNEMI, ET NON DÉCLARÉE A L'AUTORITÉ BELGE. - PROVENANCE DÉLICTUEUSE. - VENTE NULLE.
1° L'article 42 de la loi du 25 mars 1876 sur la conipétence donne au demandeu1' la f aciûté de porter le litige devant le juge du lieu où l'obligation est née ou doit être exécutée. Il n'en fait pas une obligation.
S'il y a plitsieurs défendeiws, dont les uns sont domiciliés au lieit où l'obligation
(1) Tmdiwtion.
LA COUR ; - Vu les pièces, notamment le jugement rendu contradictoirement entre parties, le 13 octobre 1949, par la première chambre du tribunal de première instance de Furnes, siégeant consulairement;
Entendu les parties en leurs · moyens et conclusions ;
Attendu que l'appel est régulier; Attendu que l'action tend en ordre principal
à obtenir payement du châssis d'un camion automobile de la marque Albion, vendu par l'appelant aux intimés le 30 août 1945;
Attendu que la cause fut introduite devant le tribunal de première instance de Furnes, siégeant consulairement, et que les intimés ont opposé l'incompétence 1·atione loci de cette juridiction, pour le motif que deux d'entre eux, à savoir Edmond et Hilaire Soetaert, sont domiciliés à Ostende et que le troisième, Julien Soetaert, bien qu'inscrit aux registres de la population de Westende, doit néanmoins être considéré comme ayant son domicile à Ostende parce qu'il est associé
est née, et 1m autre dans itn autre arrondissement, l'action peut être valablement portée devant le juge du domicile de ce dernier défendeitr.
2° La détention frrégulière d'objets ayant appartenu à l'ennemi tombe soits la sanction de la loi pénale, et la vente de pa1'eils objets est, en raison de leu1' origine délict1te1tse, nulle par application des a1'ticles 6, 1131 et 1133 du Code civil.
(CASTELEYN, C. SOETAERT.)
ARREST (1).
HE')_' HOF; - Gezien de stukken, o. m. het vonnis tussen partijen op tegenspraak gewezen door de rechtbank van eerste aanleg te Veurne, wijzende in handelszaken, eerste kamer, op 13 October 1 %9;
Gehoord partijen in hun middelen en besluiten;
Overwegende <lat het hoger beroep tijdig en regelmatig werd ingesteld;
Overwegende <lat de eis in hoofdorde strekt tot betaling van het chassis van een autocamion merk Albion, door appellant aan geïntimeerden verkocht op 30 Augustus 1945;
Overwegende <lat deze zaak ingesteld werd voor de rechtbank van eerste aanleg te Veurne, zetelende in handelszaken, en <lat geïritimeérderi de onbevoegdheid ratione loci van deze rechtsmacht hebben
d'une société fondée conjointement par les trois frères et dont le siège social se trouve à Ostende, et que c'est dans cette ville qu'il exerce sa profession ;
Attendu toutefois que la résidence principale de Julien Soetaert se trouve bien à Westende, puisqu'il y a habité sans hiterruption depuis 1934 avec sa femme et ses six enfants;
Que partant le premier juge était compétent en vertu de l'article 39 de la loi du 25 mars 1876 ;
Que le jugement dont appel a décidé à tort que l'appelant devait saisir de son action le tribunal du lieu où l'obligation était née ou devait être exécutée, puisqu'il résulte des termes de l'article 42 de la loi précitée q_u'il ne s'agit là que d'une faculté et non d'une obligation (Ré13. pmt. dr. belge, v° Comipétence et ressoi·t en matiè1·e civile, n° 1521);
Attendu qu'il ressort des pièces produites que le camion litigieux fut vendu en 1938 à l'armée britannique; que les intimés prétendent qu'en 1940 il tomba aux mains des
UNIV~RSJTEIT LEUVEN Nederlandse afdeling
FAC. RECt-ITSGELEGRDHEID SIJLIOTHEEK
4 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
opgeworpen, omdat twee van hen, Edmond en Hilaire Soetaert, te Oostende gehuisvest zijn, en dat, alhoewel de derde, Julien Soetaert, ingeschreven staat op het bevolkingsregister te Westende, hij niettemin als wonende te Oostende dient beschouwd omdat hij lid is van een vennootschap, met zijn broeders gesticht, die· te Oostende haar zetel lfeeft, en dat hij daar zijn beroep uitoefent;
Doch overwegende dat het hoofdverblijf van Julien Soetaert wel te Westende is, vermits hij daar sedert 1934 ononderbroken woont met zijn echtgenote en zijn zes kinderen ;
Dat de eerste rechter dus, krachtens artikel 39 der wet van 25 Maart. 1876, bevoegd was ;
Dat het beroepen vonnis ten onrechte beslist heeft dat appellant de vordering moest brengen voor de rechtbank van de plaats waar de verbintenis was ontstaan of diende uitgevoerd, daar uit de tekst van artikel 42 van gezegde wet blijkt dat zulks niet verplichtend is (Rép. prat. dr. belge, v° Compétence et ressort en niatifre civile, nr 1521);
Overwegende dat uit de overgelegde stukken blijkt dat bewuste camion in 1938 aan het Britse leger werd verkocht en dat geïntimeerden beweren dat hij in 1940 in handen viel van de Duitsers, in 1944 als oorlogsbuit eigendom werd
Allemands, qu'en 1944 il devint la propriété des armées alliées à titre de butin de guerre et qu'il est parvenu illicitement en la possession des frères Vanwynsberghe, qui l'ont cédé à l'appelant;
Attendu que l'appelant ne nie pas la provenance du can-iion, puisqu'il prétend que les frères Vanwynsberghe l'avaient acheté à l'administration des dom.aines, chargée précisément de l'aliénation des choses provenant du butin de guerre et appartenant à l'Etat belge;
Attendu que, bien que les intimés contestent formellement la réalité de la vente par l'administration des domaines, l'appelant reste en défaut d'en fournir ou offrir la moindre preuve;
Que dès lors les intimés soutiennent à bon droit que la convention du 30 aoùt 1945 est nulle;
Attendu, en effet, qu'en l'absence d'une preuve quelconque de la vente litigieuse pa1' l'Etat belge aux frères Vanwynsberghe, il existe des présomptions sérieuses que le camion soit entré de façon illicite en possession de ces derniers, qui, en toute vraisemblance, l'ont conservé bien que l'ordonnance du
van de geallieerde legers, en op ongeoorloofde wijze in het bezit kwam der gebroeders Vanwynsberghe die deze vrachtwagen aan appellant overdroegen;
Overwegende dat appellant deze herkomst van de auto niet ontkent, vermits hij voorhoudt dat de gebroeders Vanwynsberghe de camion aangekocht hadden van het Beheer der Domeinen dat precies belast was met de vervreemding der goederen voortkomende van oorlogsbuit en aan de Belgische Staat toe- ~ behorende ; ·
Overwegende dat, alhoewel geïntimeerden de werkelijkheid van deze verkoop door het Beheer der Domeinen stellig betwisten, appellant geen het minste bewijs ervan levert noch aanbiedt;
Dat geïntimeerden dus terecht de nietigheid der overeenkomst van 30 Augustus 1945 opwerpen ;
Overwegende immers dat, bij gebrek aan enig bewijs van de aangehaalde verkoop door de Belgische Staat aan Vanwynsberghe, er zware vermoedens bestaan dat de vrachtwagen op ongeoorloof de wijze in het bezit is gekomen van Vanwynsberghe's, die deze auto hoogst waarschijnlijk bewaarden, alhoewel het besluit van 6 September 1944 hen verplichtte, onder sanctie van strafbepalingen, de camion onmiddellijk aan de openbare overheid af te leveren ;
Dat appellant van deze schuldige her-
6 septembre 1944 les obligeât, sous peine de sanctions, de le délivrer immédiatement aux autorités publiques ;
Que l'appelant doit avoir connu cette provenance irrégulière, puisqu'il déclare s'être informé auprès du vendeur et qu'à cette époque déjà l'absence de toute pièce à l'appui de la vente alléguée devait être acquise et l'inciter dès lors à la méfiance ;
Attendu, en conséquence, qu'à défaut, pour l'appelant, de prouver sa possession légitime, la vente du camion est nulle par application de l'article 1599 du Code civil;
Attendu que l'achat d'une chose acquise ou conservée à l'aide d'un délit constitue le recel et est, partant, également nul, par application des articles 6, 1131 et 1133 du Code civil;
-Qu'il échet d'observer qu'étant donné les présomptions relatives à la provenance irrégulière du camion, les intimés ne pourraient, en tant que possesseurs de mauvaise foi, invoquer l'article 2279 du Code civil, et seraient partant exposés à la revendication de la part de l'Etat belge (DE PAGE, t. V, n° 1056; cass., 12 novembre 1925, PAsIC., 1926, I, 57);
Attendu qu'étant donné la nullité de la
COURS D'APPEL 5
komst op de hoogte moest zijn vermits hij verklaart zich bij zijn verkoper te hebben vergewist van gezegde herkomst en dat de afwezigheid van elk stuk tot staving van de beweerde verkoop dan reeds moest bestaan en aldus zijn argwaan moest wekken ;
Overwegende dat appellant dus niet bewijst ooit de wettige eigendom van de auto verkregen te hebben, zodat de verkoop, bij toepassing van artikel 1599 van het Burgerlijk Wetboek reeds nietig is ·
'overwegende dat de aankoop van een goed dat met behulp van een wanbedrijf verkregen of bewaard werd, een heling uitmaakt en dus, bij toepassing van artikel 6, 1131 en 1133 van het Burgerlijk Wetboek, insgelijks nietig' is;
Dat er dient opgemerkt dat geïntimeerden, gelet op de vermoedens betreff ende de onregelmatige herkomst van de vrachtwagen, als bezitters te kwader trouw, artikel 2279 van het Burgerlijk 'lVetboek niet zouden mogen inroepen en dus blootgesteld zouden zijn aan een revindicatie vanwege de Staat (DE PAGE, b. V, nr 1056; verbr., 12 November 1925, PASIC., 1926, l, 57);
Overwegende dat, vermits de verkoop
vente, l'appelant est non fondé à poursuivre le payement des frais de garage ou de transformations effectuées aux roues du camion litigieux; que, par contre, la demande reconventionnelle des intimés en restitution de la somme de 25.000 francs versée à titre d'acon1pte est fondée ;
Attendu que vainement l'appelant conteste la recevabilité de cette demande en alléguant qu'il a· contracté non avec les intimés personnellement, mais avec la société existant entre eux;
Attendu qu'en assignant les intimés seuls, et non la société, il a reconnu que la convention litigieuse a été conclue exclusivement avec eux ( cass., 17 mai 1923, PAsrc., 1923, I, 316);
Attendu qu'en dehors du premier chef, relatif au ca~nion « Albion n, l'action de l'appelant porte sur un second chef, entièrement distinct du premier et tendant au payement d'une somme de 2.100 fr. 20 qu'il prétend être due pour travaux effectués à d'autres véhicules appartenant aux intimés ;
Que, les intimés niant devoir cette somme et l'appelant étant resté en défaut jusqu'à présent de fournir une preuve quelconque de sa créance, la cause, quant à ce chef, n'est pas en état d'être jugée;
Qu'elle l'est, par contre, en ce qui concerne
nietig iS, appellant niet gerechtigd is betaling te vorderen der kosten van berging of voor veranderingen aan de wielen van gezeg·de camion gebracht; dat, integendeel, de tegeneis van geïntimeerden tot terugbetaling der uitgekeerde afkorting van 25.000 frank wel gegrond is;
Overwegende dat appellant vruchteloos de ontvankelijkheid van deze tegeneis betwist omdat hij het contract zou hebben aangegaan niet met geïntimeerden ten persoonlijken titel, doch enkel met de vennootschap die tussen hen zou bestaan;
Overwegende immers dat hij enkel geïntimeerden, en niet de vennootschap heeft gedagvaard, en aldus heeft bekend dat bewuste overeenkomst slechts met geïntimeerden gesloten werd (ver br., 17 Mei 1923, PAsrc., 1923, I, 3'16);
Overwegende dat, buiten dit eerste punt betreffende de vrachtwagen << Albion ))' appellants eis insgelijks een gans verschillend punt beoogt strekkende tot betaling van 2.100 fr. 20, wegens werken uitgevoerd op andere rijtuigen toebehorende aan geïntimeerden ;
Dat geïntimeerden ontkennen deze som schuldig te zijn en appellant tot
le premier chef de +a demande et que la cour est dès lors en droit d'évoquer celui-ci et d'y statuer (cass., 9 décembre 1937, PAsrc., 1937, I, 376);
Qu'il résulte de ce qui précède que la dette de l'appelant s'établit hic et nnnc à 25.000 - 2.100,20 = 22.899 fr. 80;
Par ces n10tifs, rejetant toutes autres conclusions con1nie non fondées, entendu en son avis :M:. le premier avocat général Vermeulen, qui a déclaré s'en référer à l'avis de la cour, dit les appels principal et reconventionnel recevables et fondés clans la niesure ci-après précisée; met à néant le jugement attaqué ; dit que le premier juge était compétent pour connaître de l'action; évoquant, quant à la vente du camion « Albion n ainsi qu'aux frais de transfor111ation et de garage relatifs à ce camion, dit la vente nulle ; rejette la demande quant au susdit camion; condamne l'appelant à payer aux intimés la somme de 22.899 fr. 80 en plus des intérêts judiciaires à compter du 30 avril 1949 ; renvoie la cause au tribunal de première instance de Furnes siégeant consulairement, autren1ent composé, aux fins de statuer sur le second chef de la demande, relatif aux travaux effectués aux autres véhicules des intimés, et dont le coùt s'élève à 2.100 fr. 20; condamne l'appelant aux dépens d'appel.
6 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
nu toe geen bewijs van zijn inschuld levert, zodat dienaangaande de zaak zich niet in staat van wijzen bevindt;
Dat zulks integendeel wel het geval is voor het eerste punt der vordering en het hof dus, bij evocatie, over dat punt beslissen mag (verbr., 9 December 193 7, PASIC., 1937, I, 376);
Dat uit het bovenoverwogene blijkt dat appellant hic et nimc verschuldigd is 25.000 - 2.100,20 = 22.899 fr. 80;
Om deze redenen, alle andere besluiten als ongegrond verwerpende, gehoord in zijn advies de heer Vermeulen, eerste advocaat-generaal, die zich aan het oordeel van het Hof verklaarde te gedragen, verklaart beroep en tegenberoep ontvankelij k en in de hierna vermelde mate gegrond ; · do et het bestreden vonnis te niet; zegt dat de eerste rechter bevoegd was om kennis te nemen van de vordering; de zaak tot zich trekkende wat betreft de verkoop van de vrachtwagen « Albion >> alsmede de veranderingswerken en de bergingskosten aangaande deze camion, verklaart nietig deze verkoop; wijst af de vordering betreffende voormelde camion; veroordeelt appellant om aan geïntimeerden te betalen de som van 22.899 fr. 80 met de gerechtelijke interesten sedert 30 April 1949 ; venvijst de zaak naar de rechtbank van eerste aanleg te Veurne, zetelende in koophandelszaken, anders samengesteld, om te beslissen over het tweede punt der vordering aangaande de werken aan de andere wagens van geïntimeerden uitgevoerd, ten belope van 2.100 fr. 20; veroordeelt appellant tot de kosten op het hoger beroep gevallen.
Du 5 octobre 1950. - Cour de Gand. - Prés. l\II. de Brabandere, conseille·r faisant fonctions de président. - 1Vlin. pitbl. M. Vermeulen, premier avocat général. Pl. l\!Il\II. Boudolf (du barreau de Bruges) et Van Impe.
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
27 octobre 1951
10 COMPÉTENCE ET RESSORT. lVIESURES PRISES PAR DES AUTOHITÉS DISCIPLINAIRES DANS L'EXERCICE DE LEURS PRÉROGATIVES. - ACTIVITÉ ~OUVERAINE. -----:-- INCOMPÉTENCE DES
COURS ET TRIBUNAUX POUR APPRÉCIER L'OPPORTUNITÉ DES MESURES.
2° HUISSIER. - SYNDIC DES HUISSIERS. - POUVOIR D'AGIR DANS LE DOMAINE DISCIPLINAIRE, COMME REPRÉSENTANT DE LA CHAMBRE DE DISCIPLINE. - RAPPEL A UN HUISSIER DE CERTAINES PRESCRIPTIONS DE LA CHAMBRE, NON REVÊTUES DE LA FORCE RÉGLEMENTAIRE. - PAS D'EXCÈS DE POUVOIR.
30 RESPONSABILITÉ. HUISSIER REFUSANT, SUR L'INJONCTION DU SYNDIC, DE PRÊTER SON MINISTÈRE A UNE VENTE DONT LA PUBLICITÉ N'EST PAS COMPATIBLE AVEC LE CARACTÈRE OFFICIEL DE SES FONCTIONS. - ABSENCE DE FAUTE DE L'HUISSIER ET DU SYNDIC. - ACTION EN DOMMAGES-INTÉRÊTS INTENTÉE PAR L'ORGANISATEUR DE LA VENTE. - DÉFAUT DE FONDEMENT.
1° L'appréciation des mewres qii'imposent la dignité et la délicatesse professionnelles ressoPtit à la compétence souveraine des cmtorités disciplinaires légalement chaPgées de la siirveillance de ceux qiti exe1'cent mie profession oit des· fonctions déterminées, et le poiivoir jiidiciaire est incompétent poiw juger de l'opportunité de ces niesn1'es.
2° Le syndic des huùsie1's, plus spécialement chargé par la loi de la poitrsitite de l'action disciplinaire devant la chambre de discipline, agit d'ime manière générale, dans toiit ce qui concerne le domaine de la discipline, comnie représentant de la chambre et an nom de celle-ci.
Il peut notamment, sans excès de pouvoir, faire savoir à un huissier de son 1'esso1't qit'il s'expose à des ponrsiiites disciplinaires, s'il ne se conforme pas aitx 1Jresc1'iptions d'im avis de la chamb1•e de discipline, qui, bien que sans force réglementaire, avertit les lmissiers de ne pas autoriser, sans leur approbation préalable, la piiblicité des ventes publiques auxqiœlles ils 1n'êtent leur ministère.
3° L' hitissier qui refuse de p·rêter son ministère à ime vente dont la publicité est incompatible av13c le caractère officiel de ses fonctions, et le syndic qui enjoint à l' hiiissie1' d' oppose1' ce refiis, ne commettent pas de faute vis-à-vis de l'organisatem' de la vente, et l'action en dommages et intérêts, qiie ce dernie-r lenr intente, est sans fondement.
COURS D'APPEL 7
(DE LOBEL, C. NACKERS ET OSSEEL.)
ARRÊT (1).
LA COUR; - Attendu qu'il est constant que le 20 février 1948 l'appelant Osseel, huissier de résidence à Bruxelles, a, sur injonction de l'appelant de Lobel, agissant en qualité de syndic de la chambre de discipline des huissiers de l'arrondissement de Bruxelles, refusé de procéder à une vente publique de meubles qui devait avoir lieu les 22 ·et 23 février 1948 dans la salle de ventes exploitée par l'intimé ; que ce refus fut maintenu et réitéré par lettre du 21 février 1948, malgré les démarches de l'intimé, après que de Lobel en eut référé au procureur du roi de l'arrondissement de Bruxelles ; que de Lobel fit en même temps savoir à l'intimé qu'il ferait défense à tous les autres huissiers de l'arrondissement de procéder à la vente, motif pris de ce que les conditions de publicité dans lesquelles cette vente avait été annoncée dans un journal de Bruxelles, étaient incompatibles avec le caractère officiel des fonctions de l'huissier ;
Attendu que l'annonce dont s'agit comprenait tout d'abord, sous le nom et l'adresse de l'huissier Osseel, les indications habituelles relatives à toute vente publique de meubles (lieu, date de la vente, objets exposés en vente, etc.); que ces indications étaient suivies, sous un encadrement distinct, d'un texte concernant une vente publiqùe ultérieure, dite de printemps, texte qui se terminait par la mention ci-après : « .. . Lots de haute qualité. Dès à présent et sur demande, expertises gratuites à domicile et larges avances de fonds à valoir >> ;
Attendu que, la vente organisée par l'intimé ayant dù être remise, l'intimé a assigné les deux appelants en payement de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant pour lui du refus d'intervention opposé par l'appelant Osseel ainsi que de la mesure prétendument illégale prise par l'appelant de Lobel;
Qu'Osseel a appelé de Lobel en garantie des condamnations qui seraient éventuellement prononcées à sa charge; que, reconventionnellement, de Lobel a demandé condamnation de l'intimé au paye-
(1) Voy. le jugement dont appel, rendu le 3 janvier 1950 par le tribunal de première instance de Brùxelles (PAsrc., 1950, III, 53). ,
ment de dommages-intérêts du chef de procès téméraire et vexatoire ; .
Attendu que le premier juge a déclaré l'action principale fondée dans son principe à l'égard des deux appelants en se fondant, d'une part, sur ce que l'obligation de prester son ministère, résultant pour l'appelant Osseel de l'article 42 du décret du 14 juin 1813, n'aurait été levée ni par l'injonction comminatoire de de Lobel ni par l'effet d'aucune autre cause de justification, et, d'autre part, sur ce que l'appelant de Lobel, en adressant cette injonction, aurait commis une faute civile à l'égard de l'intimé ;
Qu'il a, pour le surplus, dit non fondées la demande en garantie formée par Osseel et la demande reconventionnelle de de Lobel;
Attendu que tant Osseel que de Lobel attaquent cette décision ;
Attendu qu'il échet d'examiner tout d'abord le caractère, la portée et la régularité de la mesure prise par de Lobel;
Attendu que l'appréciation des mesures qu'imposent la dignité et la. délicatesse professionnelles ressortit aux autorités disciplinaires chargées légalement de la surveillance de ceux qui exercent une profession ou des fonctions déterminées ;
Attendu que l'étendue de ces mesures ne peut être fixée d'une manière immuable et définitive, le pouvoir disciplinaire ne pouvant, de par sa nature même et en raison de la diversité des cas d'espèce, être soumis à une codification des règles d'ordre général qu'il a mission de faire respecter ;
Attendu que l'intervention des autorités disciplinaires tend non seulement à réprimer les fautes professionnelles commises par ceux qui relèvent de leur juridiction, mais encore à prévenir ces fautes et difficultés par l'établissement de critères dont doivent s'inspirer les intéressés pour éviter l'ouverture d'une action disciplinaire éventuelle;
Attendu que l'appréciation des autorités disciplinaires, agissant dans la sphère de leurs attributions, est souveraine; qu'elle ne relève pas du pouvoir judiciaire; qu'étant commandée par l'intérêt, d'ordre public, qui s'attache à l'organisation et à la surveillance de certaines fonctions et professions, elle s'impose tant à l'intéressé soumis à l'autorité disciplinaire qu'au tiers qui, sur le plan professionnel, a traité avec lui;
Attendu, dès lors, qu'en l'espèce il appartenait exclusivement aux autorités
8 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
disciplinaires au contrôle desquelles l'appelant Osseel était soumis, d'estimer si certaines conditions de publicité préalables à la vente publique qui devait s'effectuer à son intervention étaient ou non de nature à compromettre la dignité de ses fonctions d'huissier ;
Que le pouvoir judiciaire ne peut davantage se substituer aux autorités disciplinaires pour apprécier, comme le pro·pose l'intimé, l'opportunité des mesures prises en l'espèce, en se référant à des cas prétendument identiques qui n'auraient pas donné lieu à intervention disciplinaire ;
Attendu que, la décision des autorités disciplinaires étant souveraine, toute action judiciaire intentée contre elles et tendant à la réparation du préjudice résultant prétendument d'une mesure régulièrement ordonnée, advient non recevable;
Attendu, il est vrai, que l'intimé conteste la régularité de la décision intervenue et prétend que l'appelant de .Lobel aurait été sans qualité, en tant que syndic, pour prendre la mesure incriminée ;
Attendu que si le syndic des huissiers est plus spécialement chargé par la loi de la poursuite de l'action disciplinaire devant la chambre de discipline, il agit, d'une manière générale, dans tout ce qui concerne le domaine de la discipline, comme représentant de la chambre et au nom de celle-ci; que c'est à lui que sont adressées les communications du procureur général ou de ses substituts, qui, sous la haute autorité du Ministre de la justice, exercent la surveillance sur tous les officiers ministériels du ressort (loi. du 18 juin 1869, art. 155); ~Attendu qu'il appert des documents versés au débat que la question de la publicité faite à l'occasion de ventes publiques de meubles effectuées dans des salles de vente par ministère d'huissier a donné lieu, de 1919 à 1937, à plusieurs interventions du procureur du roi de Bruxelles auprès du syndic des huissiers de l'arrondissement; qu'à de multiples reprises, la chambre des huissiers s'est occupée de la même question en recommandant aux huissiers la plus extrême prudence, les invitant à ne pas autoriser· une publicité qui n'aur:;üt pas reçu leur approbation préalable et ajoutant qu' « elle se verrait obligée de sévir contre le confrère qui serait convaincu d'avoir toléré de semblables agissements>> (circulaire du syndic Slosse du 24 aoùt 1916); que par délibération en date
du 22 mai 1929, la même chambre mettait les huissiers en garde contre les conséquences disciplinaires de toute· publicité contenant des mentions non autorisées, telles que « Des avances de· fonds sont consenties au dépôt >> ; que cette délibération fut portée à la connaissance des huissiers par circulaire du syndic en date du 17 juin 1929 ; qu'elle· fut suivie de nouveaux avertissements émanant du syndic en exercice, en 1935, 1937, 1940 et 1943;
Attendu qu'en prenant les délibérations prérappelées, la chambre de discipline ne· s'écartait pas de sa mission qui, en dehors de l'action disciplinaire proprement dite, comporte l'obligation « de veiller au maintien de l'ordre et de la discipline parmi tous les huissiers >> (décret impérial du 14 juin 1813, art. 70);
Attendu que la surveillance et la réglementation de la publicité des ventes faites sous la direction d'un huissier,. encore que cette publicité soit payée par un tiers, doivent en effet être rangées au nombre des mesures qu'impose le souci de la correction professionnelle ;
Attendu, il est vrai, que l'intimé fait observer que les avis de la chambre des huissiers, pour avoir force rég'lementaire, doivent être revêtus de l'homologation du tribunal conformément à l'article 64 du décret impérial du 30 mars 1808 et que tel n'est pas le cas en l'espèce;
Attendu qu'il ne s'ensuit pas que fo défaut d'homologation ne permettrait pas au syndic de faire savoir à tel huissier déterminé de son ressort qu'il s'exposerait à des poursuites disciplinaires en ne se conformant pas à une décision de la chambre, qui, si elle ne le lie pas comme telle, conserve cependant la valeur d'une recommandation émanant des autorités dont il relève;
Attendu qu'il résulte de ces considérations que la notifi,cation faite les 20 et 21 février 1948 par l'appelant de Lobel à l'appelant Osseel ne constitue pas, dans le chef du premier, un excès de pouvoir;
Attendu, par ailleurs, qu'il importe de souligner que les délibérations et avis qui sont à l'origine de la mesure incriminée, loin d'être confidentiels comme l'intimé le soutient, étaient parfaitement connus de lui, l'appelant Osseel en ayant communiqué la teneur à l'intimé par ses lettres des 14 janvier 1943, 15 octobre 1943 et 4 aoùt 1944 ;
Que si l'intimé n'en a pas tenu compte en ne soumettant pas en temps opportun à . Osseel le modèle de ses annonces, il
COURS· D'APPEL 9
n'est évidemment pas fondé à soutenir actuellement que la mesure dont il se plaint aurait eté imprévisible et vexatoire· Qu~ l'intervention du syndic de Lobel
n:a ~'ailleurs eu ~our _conséquence que d obliger Osseel a faire usage d'une réserve qu'il avait expressément formulée·
Attendu qu'il résulte de l'ensemble des éléments exposés ci-dessus que, l'appelant d~ Lobel ayant agi en sa qualité de syndic et dans les limites de ses attributions, l'action principale, en tant que mue contre lui, est non recevable·
Que l'appelant Osseel, en se confor~ mant à l'avertissement donné par son syndic, n'a commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité·
. 9~e l'action principale, en ta~t que dirigee contre Osseel, n'est donc pas fondée;
Attendu que la non-recevabilité de la demande principale dirigée contre de Lobel rend non recevables l'action en garantie dirigée par Osseel contre de Lobel et la demande reconventionnelle formée par de Lobel contre l'intimé (cf. Rép. prat. dr. belge, v 0 Dernande reconvent'ionne~le, n°s 26 et 1) ;
Par ces motifs, statuant contradictoirement, rejetant comme non fondées toutes autres conclusions, entendu M. l'avocat général Stryckmans en son avis pour la plus grande partie conforme donné en audience publique, vu l'artidle 24 de la loi du 15 juin 1935, joignant comme connexes les appels inscrits sub nis 16567 et 17821 du rôle général, reçoit les appels; met à néant le jugement dont appel; émendant, dit l'action principale non recevable en tant que dirig·ée contre d~ . ~obel et non fondée en tant que dirig·ee contre Osseel; dit non recevables l'action en garantie dirigée par Osseel contre de Lobel et la demande reconventionnelle formée par de Lobel contre l'intimé; .condamne l'intimé aux dépens des deux mstances, y compris les dépens afférents à l'action en garantie rendue nécessaire par l'action de l'intimé mais à l'exception des dépens afférent~ à la demande reconventionnelle, qui incomberont à l'appelant de Lobel.
Du 27 octobre 1951. Cour de Bruxelles. - .se ch. ~ Prés. M. Scheyvaerts, conseiller faisant fonctions de président. - Min. publ. M. Stryckmans avocat général. - Pl. MM. Sand, Boel~ et Van Espen.
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
28 novembre 1951
INSTRUCTION EN MATIÈRE RÉPRESSIVE. - JUGE D'INSTRUCTION. INVITANT LA PARTIE CIVILE A CONSIGNER UNE SOMME SUPPLÉMENTAIRE POUR COÙVRIR LES FRAIS DE LA PROCÉDURE. DÉCISION ADMINISTRATIVE SANS CARACTÈRE D'ACTE DE JURIDICTION. - IRRECEVABILITÉ DE L'APPEL INTERJETÉ PAR LA PARTIE CIVILE CONTRE .CETTE DÉCISION.
La .déci~i01~ par laquelle le juge d'instruction invite la partie civûe à consigne1· itne so1?irne supplérnentaire poiw coitv1·ir les frais .de Ja. P.rocédure. n'est pas itn acte de Juridiction, rnais itne rnesitre adrn~nistrative prise pour la sauvegarde des intérêts du Tî'ésor et la garantie de la responsabilité pécitniaire personnelle de ce rnagistrat; partant, n'est pas recevable l'appel inte1jeté pm' la partie civile contre cette 1nesitrn adrninist1'ative.
(VAN S ... ET L ... )
ARRÊT.
LA COUR; - Vu l'appel interjeté par la partie civile préqualifiée le 26 septembre 1951 contre la décision prise par M. le juge d'instruction en date du 21 mars 1951, à elle notifiée le 25 mars 1951 par M. le commissaire de police de Bruxelles, se Division, l'invitant à effectuer un complément de consignation de 11.500 francs, portant ainsi cette consignation à 12.000 francs;
Vu le réquisitoire de M. le procureur général ainsi rédigé :
« Attendu qu'aucune disposition légale n'ouvre un recours à la partie civile contre pareille mesure;
l> Qu'aux termes de l'arrêté royal du 30 mai 1936, la partie civile est tenue, avant toute poursuite, de déposer au greffe la somme présumée nécessaire pour les frais de la procédure ; qu'une nouvelle somme doit être versée par elle si la première est devenue insuffisante;
)) Attendu que ces dispositions n'ont pour but que de sauvegarder les intérêts du Trésor; qu'il est du devoir du magistrat instructeur, saisi uniquement du fait allégué, d'envisager avec le procureur du roi la compétence possible d'une juridiction déterminée et de prévoir le m?ntant, approximatif 'des frais qui pourraient resulter de cette procédure;
10 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
i> Qu'en réclamant à la partie civile une consignation supplémentaire en raison de -ce que l'inculpé paraissait être justiciable de la cour d'assises, le magistrat instructeur, contrairement à ce qui est allégué }rnr la partie civile, n'a déterminé ni la nature de l'infraction, ni la juridiction compétente pour connaître de celle-ci }rnuvoirs qui n'appartiennent qu'aux juridictions d'instruction et de jugement-, mais s'est borné à prendre une mesure administrative à laquelle on ne saurait reconnaître le caractère d'un acte de juridiction;
i> Qu'il s'ensuit que l'appel n'est pas rece;vable ;
ii Vu les articles 135, 136, 217 et suivants du Code d'instruction criminelle, la loi du 19 août 1920, les articles 11, 12, 13, 16, 24, 31 à 37 et 41 de la loi du 15 juin 1935 ;
ii Requiert qu'il plaise à la cour, chambre des mises en accusation... déclarer non recevable l'appel formé par la partie civile contre la décision prise par M. le juge d'instruction d'exiger une consignation complémentaire de 11.500 francs; condamner la partie civile aux dépens de l'appel.
Bruxelles, le 20 octobre 19q1 Pour le procureur général,
(s.) DE BusscHER >i;
Attendu que la partie civile a interjeté appel, le 26 septembre 1951, de la décision du juge d'instruction en date du 21 mars 1951 et l'invitant à effectuer im complément de consignation de 11.500 francs;
Attendu que le recours contre les décisions du juge d'instruction n'est possible que pour autant que celles-ci ne constituent que des actes juridictionnels de ce magistrat;
Attendu que tel n'est pas le cas en la présente espèce;
Attendu, en effet, que la décision du juge d'instruction a un caractère purement administratif, car elle n'a pour but que de sauvegarder les intérêts du Trésor et de mettre à couvert la resirnnsabilité pécuniaire personnelle de ce magistrat ;
Attendu, en conséquence, que l'appel n'est pas recevable;
Par ces motifs, statuant contradictoirement, vu les articles 135, 136, 217 du Code d'instruction criminelle, la loi du 19 août 1920, les articles 11, 12, 13, 16, 24, 31 à 37 et 41 de la loi du 15 juin 1935, reçoit l'opposition et la déclare non fondée; confirme, en conséquence, l'ordonnance dont opposition et condamne
la partie civile aux dépens de l'opposition, taxés à 472 francs; la condamne en outre à payer à l'inculpé, à titre de dommages" intérêts, la somme de 1 franc; déclare non recevable l'appel formé par la partie civile contre la décision prise par le juge d'instruction d'exiger une consignation supplémentaire de 11.500 francs; condamne la partie civile aux dépens .de son appel.
Du 28 novembre 1951. Cour de Bruxelles. Chambre des mises en accusation. - Prés. Comte Hennequin de Villermont, conseiller faisant fonctions de président. - Min. publ. M. Dff Busscher, substitut du procureur général. - Pl. MM. Grandjean, Rolin et Sluszny.
COUR D'APPEL DE GAND
7 décetnbre 1950
DIVORCE ET SÉPARATION DE CORPS. - JUGEMENT PAR DÉFAUT FAUTE DE CONCLURE. - DÉLAI D'OPPOSITION. - APPLICATION DE L' ARTICLE 157 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE ET NON DE L'ARTICLE 248 DU CODE CIVIL.
En matière de divo1'Ce, le délai d'opposition à 'Un ji1rgement par défaiit, faitte de conclure, est réglé pa1' l'article 157 dit Code de procédit1'e civile, et non par l'article 248 dit Code civil (1).
Si l'article 248 dit Code civil, tel qii'il fut modifié par l'article 4 de l'arrêté royal du 7 février 1936, ne pa7'le qiie dit « jiigenient pcœ défaut))' sans spécifier, comme en son texte ancien (loi dit 14 décembre 1935), qu'il s'agit de jiigement par défaitt faille de comparnître, ce n'est pas dans le bitt de soiimettre aii niênie délai les jitgements par déf aitt f aitte de comparaît1'e et ceiix par défaut faiite de conclure, mais poiir mettre la nouvelle rédaction de l'article 248 en concordance avec le nouvel art,icle 247, leqiiel rendait désormais facultative la pit blication qui, sons l'ancien article 24, 7, était obligatofre.
L'article 248 ne peitt être séparé de l' a?'ticle 247, car il 1'egle l'exercice de l'oppo-
( 1) En sens contraire : Liège, 14 juillet 1949 (PAsrc., 1950, II, 33).
COURS D'APPEL
sition cm jugement par défaut dont question à l' àrticle 24 7, c' est-à-dfre le Jugement par défaut faute de coniparaître.
(VANDER MERSCH, C. DE GRAEVE.)
ARREST (1).
HET HOF; - Overwegende dat een vonnis, gewezen bij verstek wegens niet besluiten de 8 J anuari 1949 door de rechtbank van eerste aanleg te Gent, de scheiding van taf el en bed tussen partijen ten nadele van appellant heeft uitgesproken; '
Dat gezegd vonnis op 28 en 25 Fe-
(1) T1'adiwtion.
LA COUR ; Attendu qu'un jugement du 8 janvier 1949, rendu par défaut, faute de .conclure, par le tribunal de première instance de Gand, a prononcé la séparation de corps .entre les parties, aux torts de l'appelant;
Attendu que le dit jugement fut signifié it l'appelant et à son avoué respectivement le 28 et le 25 février 1949 ;
Que le 18 mars 1949 l'appelant y a fait -Opposition ;
Que le jugement dont appel a déclaré l'opposition non recevable pour le motif qu'elle fut introduite après l'expiration du délai de quinze jours prévu par l'article 157 du Code de procédure civile;
Attendu que l'appelant soutient que ce n'est pas l'article 157 du Code de procédure civile qui doit être appliqué, mais bien l'article 248 du Code civil, qui accorde un délai de deux mois pour faire opposition ;
Attendu que le texte ancien de l'article 248 du Code civil, tel qu'il fut modifié par l'article 1er de la loi du 14 décembre 1935, disposait que « le délai pour faire opposition aux jugements et arrêts par défaut faute de comparaître sera de deux mois à partir du dernier acte de publicité ; il sera d'un mois à partir de la signification, si elle est faite à personne ii;
Que la nouvelle rédaction de cette disposition, résultant de l'article 4 de l'arrêté royal du 7 février 1936, ne parle plus que du « jugement par défaut », sans préciser que l'article ne vise que les jugements rendus par défaut faute de comparaître, à l'exclusion des jugements pal' défaut faute de conclure;
Attendu, toutefois, qu'on lit dans le rapport au Roi précédant l'arrêté royal du 7 février 1936 : « Le caractère facultatif de la publication prévue à l'article 247 a rendu nécessaire une modification de l'article 248. Tel est l'objet de l'article 4 du projet i> (Recueil des lois et ct1'1'êiés 1·oyaux? 1936, p. 481);
bruari 1949 aan appellant en aan zijn pleitbezorger werd betekend ;
Dat appellant op 18 Maart 1949 teg·en dit vonnis in verzet is gekomen ;
Dat het beroepen vonnis het verzet niet ontvankelijk heeft verklaard, daar het na de termijn van vijftien dagen, voorzien bij artikel 157 van het Wetboek van burgerlijke rechtsvordering, werd ingesteld;
Overwegende dat appellant beweert dat niet artikel 157 van het Wetboek van burgerlijke rechtsvordering, doch wel artikel 24:8 van het Burgerlijk Wetboek, dat een termijn van twee maanden toestaat om in verzet te komen, dient toegepast;
Qu'il résulte de cette citation que l'article 248 du Code civil fut modifié uniquement dans le but de mettre son texte en concordance avec la nouvelle rédaction de l'article 247 du même Code, qui avait rendu facultative la signification - jusque-là obligatoire - du jugement par défaut faute de comparaître ;
Que si le législateur avait voulu étendre aux jugements par défaut faute de conclure la disposition exceptionnelle relative à l'opposition aux jugements par défaut faute de comparaître, il aurait certainement marqué cette intention dans le rapport précité;
Attendu, d'ailleurs, que, de toute évidence, l'article 248 du Code civil est en relation étroite avec l'article 247, puisqu'il règle le mode d'exercice du recours contre le jugement par défaut dont question à l'article 247, lequel ne parle que du « jugement ou arrêt par défaut faute de comparaître ii ;
Que si l'article 248 du Code civil avait prévu l'opposition tant contre les jugements rendus par défaut faute de conclure que contre ceux rendus par défaut faute de comparaître, on ne s'expliquerait pas qu'il n'ait pas déterminé le délai d'opposition pour le cas où le jugement est signifié à avoué ;
Attendu, dès lors, qu'à bon droit le jugement dont ap1Jel a décidé que le délai pour faire opposition était celui de l'article 157 du Code de procédure civile,. et non le délai prévu par l'article 248 du Code civil (PrÉRARD, Précis du divorce, n° 163; Bruxelles, 2 avril 1938, J. T., 1938, 286);
Par ces motifs, vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935, entendu en son avis conforme M. le premier avocat général Vermeulen, rejetant toutes autres conclusions con1me non fondées, dit l'appel recevable mais non fondé; en conséquence, confir1ne le jugement attaqué; condamne l'appelant aux dépens d'appel.
12 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
Overwegende dat de vroegere tekst van dit artikel 248 van het Burgerlijk Wetboek, zoals het gewijzigd was geweest door artikel 1 van de wet van 14 December 1935, bedong dat « de termijn om in verzet te komen tegen, wegens niet verschijnen, bij verstek gewezen vonnissen en arresten, heeft een duur van twee maand met ingang· van de laatste akte tot bekendmaking ; hij zal één maand bedragen te rekenen van de betekening indien deze aan persoon gedaan is >>;
Dat de nieuwe redactie van deze wetsbepaling spruitende uit artikel 4 van het koninklijk besluit van 7 Februari 1936, nog enkel spreekt van << het. bij verstek gewezen vonnis ))' zonder nauwkeuriger te bepalen dat dit artikel enkel deze vonnissen beoogt gewezen bij verstek wegens niet verschijning ter uitsluiting van deze gewezen. hij verstek wegens niet besluiten;
Overwegende nochtans dat in het verslag, dat het koninklijk besluit van 7 Fehruari 1936 voorafgaat, te lezen staat : « Door het feit dat de bij artikel 24 7 voorziene bekendmaking niet verplichtend is, was een wijziging van artikel 248 nodig. Daarvoor zorgt artikel 4 van het ontwerp >> ( Verzarneling de1' wetten en koninklijke besluiten, 1936, hl. 481) ;
Dat uit deze hewoordingen blijkt dat artikel 248 van het Burgerlijk Wetboek enkel en alleen gewijzigd werd om de tekst ervan in overeenstemming te brengen met de nieuwe redactie van artikel 247 van het Burgerlijk Wetboek die de vroeger verplichte bekendmaking van het verstek-vonnis, wegens niet verschijning, facultatief had gemaakt;
Dat, moest de wetgever de uitzonderlijke bepaling betreffende het verzet tegen de verstek-vonnissen hij niet verschijning tot deze wegens niet hesluiten hebben willen uitbreiden, hij voorzeker in gezegd verslag gewag zou hehben gemaakt van dit inzicht ;
Overwegende trouwens dat artikel 248 van het Burgerlijk Wetboek klaarblijkend in nauw verhand staat met artikel 247 van het Burgerlijk Wetboek, vermits het de wijze regelt waarop het verhaal tegen het verstek-vonnis, voorzien bij gezegd artikel 24 7, client uitgeoef end, en deze laatste wetshepaling enkel en alleen spreekt van « vonnis of arr est wegens ni et verschij ning bij verstek gewezen >> ;
Dat, moest artikel 248 van het Burgerlijk VVetboek het verzet voorzien hebben
zowel tegen de vonnissen gewezen bij verstek weg·ens niet besluiten als tegen deze gewezen bij verstek wegens niet. verschijning, het niet te verklaren is dat het de terrnijn van verzet niet vastgesteld heeft voor het geval het vonnis aan de pleitbezorger wordt betekend;
Overwegende dat het beroepen vonnis dus terecht heeft beslist dat de termijn van verzet bij artikel 157 van het Wetboek van burgerlijke rechtsvordering, en niet bij artikel 248 van het Burgerlijk Wetboek, bepaald was (PIÉRARD, Précis du divorce, nr 163; Brussel, 2 April 1938, J. T., 1938, 286);
Om deze redenen, gelet op artikel 24 der wet van 15 Juni 1935, gehoord in zijn eensluidend advies de heer Vermeulen, eerste advocaat-generaal, alle andere hesluiten als ongegrond verwerpende, verklaart het hoger heroep ontvankelijk maar niet gegrond ; bevestigt derhalve het bestreden vonnis ; veroor~ deelt appellant tot de kosten van beroep.
Du 7 décembre 1950. - Cour de Gand. - P1·és. M. De Clercq, premier président.
Niin. publ. M. Vermeulen, premier avocat g·énéral. Pl. M. Van Hille.
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
17 mars 1951
PENSIONS. - PENSION MILITAIRE. SUSPENSION PAR CONDAMNATION A UNE PEINE CRIMINELLE ET PENDANT LA DURÉE DE CELLE-CI (LOIS SUR LES PENSIONS MILITAIRES, COORDONNÉES PAR ARRÊTÉ ROYAL DU 11 AOÛT 1923, ART. 65). - POINT DE DÉPART. -DÉTENTION PRÉVENTIVE.
La suspension du payement de la pension · niilitaire pendant la ditrée d'ime peùie
crirninelle prend cou1's aii marnent où le condamné est placé en détention préventive, et non au rnoment où la condanination, acquiert fo1·ce de chose jitgée.
(ÉTAT BELGE, C. CL ... )
ARREST (1).
HE'l' HOF; - Gezien in regelmatige uitgifte voorgelegd het vonnis der recht-
(1) Trnduction.
LA COUR ; - Vu, produit en expédition régulière, le jugement du tribunal de première instance de Bruxelles du 14 juillet 1948 ;
Attendu que l'appel est régulier quant à
COURS D'APPEL 13
bank van eerste aanleg te Brussel de dato 14 Juli 1948;
Overwegende dat het beroep regelmatig is naar vorm en te gepasten tijde in-gesteld werd ; ·
Overwegende dat het huidig geding thans beperkt wordt in graad van beroep tot de betaling van de vervallen achterstallen van het militair ancienniteitspensioen ; dat inderdaad sedert de uitspraak van het bestreden vonnis de dato 14 J uli 194 8, en ingevolge de nieuwe wettelijke beschikkingen in zake toepasselijk, namelijk artikel 9 der wet van 10Augustus19.48, hetwelk de uitbreiding voorziet van §§ 1 en 2 van artikel 54 der wet van 26 Augustus 1947, beroepene definitief vervallen is van het recht tot
'1rnt genieten van het militair invaliditeitspensioen en van de rente voor frontstrepen, alsmede van het recht op de onbetaalde achterstallen van gezegde pensioen en rente; dat op dit punt het bestreden vonnis derhalve dient hervormd gelijkvormig deze nieuwe wettelijke beschikkingen;
Overwegende dat wat betreft het litigieus ancienniteitspensioen het recht tot het verkrijgen en genieten van zulk pensioen, ingevolge artikel 65 der bij
fa for1ne et qu'il a été introduit dans le délai légal;
Attendu que l'action est limitée, en instance d'appel, au payement des arriérés échus de la pension militaire d'ancienneté; qu'en effet, depuis le prononcé du jugement attaqué, du 14 juillet 1948, et ensuite des nouvelles dispositions légales applicables en la matière, notamment l'article 9 de la loi du 10 août 1948 qui étend les dispositions des §§ 1er et 2 de l'article 54 de la loi du 26 août 1947, l'intimé est définitivement déchu du droit à la pension militaire d'invalidité et à la rente pour chevrons .de front, ainsi que _du droit aux arriérés no11 payés des dites pension et rente ; qu'il échet, par conséquent, de réformer, qua11t à ce point, le jugement attaqué, en conformité de ces nouvelles dispositions de loi;
Attendu, en ce qui concerne la pension d'ancienneté litigieuse, que le droit à l'obtention et à la jouissance d'une telle pension est, en vertu de l'article 65 des lois sur les pensions militaires coordonnées par ·arrêté royal du 11 août 1923, suspendu par la condamnation à une peine criminelle, et ce pendant la durée de la peine ;
Attendu que les parties sont en désaccord sur l'interprétation à donner aux termes « pendant la durée de la peine >>; que l'Etat
koninklijk besluit de dato 11 Augustus 1923 samengeschakelde wetten op de militaire pensioenen, geschorst wordt in geval van veroordeling tot een cdminele straf, en dit tijdens de duur van de straf;
Ove_rwegende dat partijen het niet eens zijn over de interpretatie welke dient te worden gegeven omtrent de bewoording·en « tij dens de duur van de straf »; dat de Belgische Staat staande houdt dat de duur der straf, zijnde in casu vijf jaar gewone hechtenis, <lient berekend vanaf de in-v66rhechtenis-stelling, en niet vanaf de definitieve veroordeling, terwijl beroepene de tegenovergestelde thesis voorhoudt;
Overwegende dat de betaling van kwestieus pensioen in feite bij administratieve maatregel geschorst werd vanaf de datum der in-v66rhechtenis-stelling, zijnde 27 October 1944; dat aldus volgens de stelling van de Staat beroepene op geen achterstal van pensioen recht heeft vanaf 2 7 October 1944 tot op 27 October 1949, terwijl volgens beroepene de schorsing van betaling aanvang neemt op 18 Januari 1947, datum van het arr est van het krijgshof, om te eindigen op 18 Januari 1952;
Overwegende dat het stelsel van beroe-
belge soutient que la durée de la peine, en l'espèce cinq ans de détention ordinaire, se compte du début de la détention préventive, et non depuis la condamnation définitive, alors que l'intimé défend la thèse opposée ;
Attendu que le payement de la pension litigieuse fut suspendu, en fait, par mesure administrative, à la date de la mise en détention préventive, soit le 27 octobre 1944; qu'ainsi, dans la thèse de l'Etat, l'intimé ne peut prétendre à des arriérés de pension pour la période du 27 octobre 1944 au 27 octobre 1949, tandis que, suivant l'intimé, la suspension des versements prend cours le 18 janvier 1947, date de l'arrêt de la cour militaire, pour prendre fin le 18 janvier 1952 ;
Attendu que le système de l'intimé' ne peut être admis ni en fait ni en droit ;
Qu'en fait ce système aurait pour conséquence que la suspension des pa,yements se prolongerait après que la peine a été pleinement exécutée, alors que, cette suspension ne pouvant s'étendre au delà de l'expiation de la peine, l'Etat ne pourrait, une fois celle-ci exécutée, se soustraire à l'action de l'intimé;
Attendu, en droit, que l'article 30 du Code pénal prévoit que toute détention subie avant que la condamnation soit devenue irrévocable est imputée sur la durée de la peine ; qu'il s'ensuit que le calcul de la durée de la
JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
pene noch in feite noch in rechte kan aanvaard worden ;
Dat in feite dit stelsel voor gevolg zou hebben dat de schorsing van betaling van het pensioen zich verlenge nadat de straf in werkelijkheid einde genomen heeft bij volledige uitvoering·, als wanneer deze schorsing slechts tot de dag der uitboeting van de straf kan duren, en de Staat alsdan geen recht zou hebben zich aan de vordering van geïntimeerde te onttrekken na het verstrijken van de termijn van de volledige uitvoering ;
Dat in rechte artikel 30 van het Strafwetboek voorziet dat de hechtenis ondergaan v66r het onherroepelijk worden van de veroordeling toegerekend wordt op de duurtijd van de straf; dat hieruit
peine, en cas d'application de l'article 65 des lois sur les pensions n1ilitaires comdonnées par arrêté royal du 11 août 1923, doit se faire en tenant compte de la période de détention préventive ;
Que le système de l'Etat est conforme à l'intention du législateur et à l'intérêt du condamné ; que le législateur a voulu faire coïncider la suspension du payement de la pension avec la période durant laquelle la peine est effectivement exécutée, pour le motif que cette suspension est u1ie sanction accessoire de la peine principale et qu'il serait anormal que l'une perdure alors que l'autre a pris fin;
Que, par ailleurs, l'intérêt du condamné inême exige qu'il puisse jouir de sa }Jension dès sa mise en liberté, au moment où il en a le plus besoin ;
Attendu, pour le surplus, que les arguments avancés par le premier juge ne paraissent pas concluants ;
Qu'en ce qui concerne l'argument suivant lequel la détention préventive ne peut être qualifiée de peine, mais selùement d' « équivalent de la peine »,il échet d'observer que, s'il est vrai que la détention préventive n'acquiert le caractère de peine qu'au jom' de la condamnation définitive, il est néanmoins constant qu'en réalité la condamnation lui confère rétroactivement ce caractère (NYPELS et SER
VAIS, 3° éd., p. 110; Ré]J. ]J?'ai. cfr. belge, v 0 Inf1·actions, n° 147) ; que, pour apprécier si la détention préventive doit ou ne doit pas être considérée comme 'peine, il faut se placer au moment de l'introduction de la demande; qu'au dit moment l'intimé était déjà définitivement condamné et subissait, par conséquent, déjà sa peine depuis la date de son arrestation préventive;
Que l'argument tiré de la comparaison avec la disposition de l'article 21 du Code pénal, relatif à la déchéance légale pendant
voortvloeit dat de berekening van de duurtijd van de straf, in geval van toepassing van artikel 65 der bij koninklijk besluit van 11 Augustus 1923 samengeschakelde wetten op de militaire pensioenen, dient te geschieden mits inachtneming van de periode der v66rhechtenis;
Dat het stelsel van de Staat strookt met het inzicht van de wetgever en met het belang· van de veroordeelde ; dat de wetgever de schorsing van pensioenbetaling heeft willen doen samenvallen met de periode gedurende dewelke de straf werkelijk wordt uitgevoerd, om reden dat deze schorsing een bijkomstige sanctie is der ho of dstraf en het niet normaal is dat de ene zich verlenge wanneer de andere einde heeft genomen ;
la durée de la peine, n'apparaît pas non plus comme pertinent; qu'en effet il n'y a aucun intérêt, mais, au contraire, inconvénient grave, à donner à la déchéance effet rétroactif à la date de l'arrestation préventive, cette mesure entrainant la nullité des actes valable-1nent accomplis par le condamné pendant sa détention préventive, alors qu'en matière de pensions la situation est, pour les motifs susénoncés, toute différente ; que par ailleurs le but de l'article 21 du Code pénal est d'enlever au conda1nné la capacité d'administrer ses biens ou d'en disposer pendant l'exécution de la peine, afin de l'empêcher soit d'adoucir la rigueur de son régime, soit de faciliter son évasion au moyen de son patrin1oine ; qu'une telle mesure ne se conçoit pas pendant la détention préventive, puisqu'elle ne peut s'appliquer qu'au cas où le prévenu encourt certaines condamnations bien déterminées ; qu'ainsi la déchéance légale, étant l'accessoire d'une peine corporelle, commence et cesse nécessairement et de droit avec celle-ci (Code pén., art. 22; Rép. v1·at. dl. belge, v 0 Infractions, no 127);
Par ces motifs, vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935, entendu en son avis confornie, donné en audience publique, M. Couturier, substitut du procureur général, statuant con'tradictoirement, reçoit l'appel; faisant droit et statuant dans les limites de l'appel, met le jugement· dont appel à néant; émendant, dit la demande non fondée, en déboute l'in -timé; dit pour droit que l'intimé est définitivement déchu du droit à la jouissance de la pension d'invalidité et de la rente pour chevrons de front dont il est titulaire, ainsi que du droit aux arriérés non payés des dites pension et rente ; dit que le bénéfice, pour l'intimé, de la jouissance de sa pension d'ancienneté est suspendu pour une durée de cinq ans à compter du 27 octobre 1944; condamne l'intimé aux dépens des deux instances.
COURS D'APPEL 15
Dat anderzijds het belang van de veroordeelde zelf eist dat hij van zijn pensioen zou kunnen genieten zodra hij weer in vrijheid wordt gesteld, en op het ogenblik dat hij dit het meest nodig heeft;
Overwegende voor het overige dat de argumenten door de eerste rechter vooropgelegd niet als beslissend voorkomen;
Dat wat betreft het argument dat de v66rhechtenis niet ais straf kan gekwalificeerd worden maar slechts ais << équivalent de la peine))' dient opgemerkt dat indien waar is dat de v66rhechtenis slechts het karakter van straf verkrijgt op de dag der definitieve veroordeling, het niettemin vaststaat dat in werkelijkheid de veroordeling met terugwerkende kracht aan de v66rhechtenis het karakter van straf geeft (NYPELS en SERVAIS, 3e uitg., bl. '110; Rép. prat. d1'. belge, v 0 Infractions, nr 147); dat om te oordelen of de v66rhechtenis ja dan neen ais straf dient aanschouwd, men zich hoeft te plaatsen op het ogenblik van het inleiden der vraag ; dat op bedoeld ogenblik beroepene reeds definitief was veroordeeld, en aldus zijn straf al onderging vanaf de datum der in-v66rhechtenisstelling;
Dat wat betreft het argùment getrokken uit de vergelijking met de beschikking van artikeI· 21 van het Strafwetboek omtrent de wettelijke ontzetting tijdens de duur van de straf, dit evenmin ais beslissend voorkomt ; er bestaat inderdaad geen belang, maar integendeel gewichtig bezwaar om aan de wettelijke ontzetting terugwerkende kracht te geven vanaf de datum van de in-v66rhechtenisstelling, daar zulke maatregel voor gevolg zou hebben het nietig maken der akten, welke door veroordeelde geldig werden gedaan tijdens de v66rhechtenis, terwijl de toestand inzake pensioenen voor de hierboven aangehaalde redenen gans verschillend is ; dat verder het doel van
·~ artikel 21 van het Strafwetboek is aan ·-~de veroordeelde de bekwaamheid te ont
nemen zijn goederen te beheren of er over te beschikken gedurende de uitvoering van de straf, ten einde hem te beletten, bij middel van zijn vermogen, hetzij de gestrengheid van zijn regiem te verzachten, hetzij zijn ontvluchting te vergemakkelijken; dat zulke maatregel onbegrijpelijk is gedurende de v66rhechtenis, daar hij slechts van toepassing kan zijn indien de verdachte zekere welbepaalde veroordelingen oploopt ; dat aldus de wettelijke ontzettïng, een bijkomstigheid zijnde va~ een lijfstraf,
noodzakelijkerwijze en van rechtswege met deze straf aanvang neemt en ophoudt (Strafwetb., art. 22; Rép. prat. dr. belge, v 0 Infractions, nr 127) ;
Om deze redenen, gelet op artikel 24 der wet van 15 Juni 1935, gehoord ter openbare zitting in zijn eensluiden.d advies de heer Couturier, substituut procureur-generaal, rechtdoende op tegenspraak, aanvaardt het beroep; recht doende en beslissende binnen de perken van het beroep, doet het bestreden vonnis te niet; wijzigende, verklaart de vordering niet gegrond, wijst beroepene ervan af; zegt voor recht dat beroepene definitief vervallen is van het recht tot het genieten van het invaliditeitspensioen en de rente voor frontstrepen~ waarvan hij titularis is, alsmede van het recht op de achterstallen van gezegde pensioen en rente die onbetaald zijn gebleven; dat het recht van beroepene tot het genieten van zijn ancienniteitspensioen geschorst is voor een duurtijd van vijf jaar, vanaf 27 October 1944; veroordeelt geïntimeerde tot de kosten van beide aanleggen.
Du 17 mars 1951. Cour de Bruxelles. se ch. - P1'és. M. Eyben, président.
- Min. publ. M. Couturier, substitut du procureur général. Pl. MM. A. Chomé et Ooms (ce dernier du barreau d'Anvers).
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
20 avril 1951
JUGEMENTS ET ARRÊTS. MATIÈRE CIVILE. - OPPOSITION. - PROCÈSVERBAL DE CARENCE RÉGULIÈREMENT DRESSÉ ET NOTIFIÉ A LA PARTIE DÉFAILLANTE. - lRRELEVANCE DES CIR·coNSTANCES QUE LE PROCÈS-VERBAL N'AIT PAS ÉTÉ CONNU DE LA PARTIE DÉFAILLANTE OU QUE LA PREUYE DE CETTE CONNAISSANCE NE SOIT PAS RAPPORTÉE. JUGEMENT RÉPUTÉ EXÉCUTÉ ET OPPOSITION NON RECEVABLE. POR.TÉE DE L'ARTICLE 159 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE.
Un jitgement est répiité exéciité et l'opposition n'est pliis 1'ecevable, lorsqii'mi p1·ocès-ve1·bal de cm·ence a été régiûièrenient d1'essé et notifié à la partie défaillante, confo1'mément aiix presc1'iptions en matière çl' aj ou·rnement. Il n'est pas nécessaire qu'en oiitre le procès-ver bal ait été connu de la partie défaillante et
J6 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
q,ne la preiive de cette connaissance soit rapportée.
Il résulte du z,i bellé rnêrne de l'article 159 dit Code de procédiwe civile, qite les exigences de l'établissernent d'it procèsver bal de carence et de sa notification, d'une part, et la connaissance du procès-verbal par l'opposant, d'autre part, ne sont pas ciirnulatives. Une seule de ces conditions suffit pour que, le jugernent étant répitté exécuté, l'opposition ne piiisse plits être adrnise ( 1).
(FROIDEBISE, C. SOCIÉTÉ PRIVÉE D'APPLICATIONS MÉCANIQUES.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu, régulièrement produits, les jugements attaqués du 6 juillet 1950 et du 2 novembre 1950;
Attendu que la société intimée a assigné l'appelant devant le tribunal de commerce de Bruxelles en payement de la contrevaleur de 218.390 fr. français; qu'elle a obtenu à sa charge un jugement par défaut en date du 6 juillet 1950 ; qu'elle a tenté de poursuivre l'exécution du dit jugement; que l'huissier Bastiani, chargé par elle de l'exécution, dressa un })rocès-verbal de carence à l'endroit où l'appelant était alors officiellement domicilié, le 28 aoùt 1950;
Que le procès-verbal de carence fut notifié le même jour par l'huissier Bastiani; que l'huissier, n'ayant rencontré en ce domicile ni l'appelant, ni un de ses parents, serviteurs ou voisins, et la concierge ayant refusé la copie de l'exploit, en fi.t la notification à l'administration communale du lieu du domicile, -en la personne du fonctionnaire délégué;
Attendu que l'appelant fi.t opposition au jugement le 25 septembre 1950 ; que l'opposition fut déclarée non recevable en raison de sa tardiveté, le 2 novembre 1950;
Attendu que l'appelant s'est pourvu tout à la fois contre le jugement du 2 novembre 1950 et contre celui du 6 juillet 1950;
Sur l'appel dirigé contre le jugement. du 2 novembre 1950 :
Attendu que l'appel mù contre le
(1) La nouvelle rédaction de l'article 159 du Code de procédure civile a eu, précisément, pour but de mettre fin à la controverse qui existait dans la jurisprudence antérieurement à l'entrée en vigueur de l'arrêté royal n° 300 du 30 mars 1936, sur le point de savoir si la connaissance du procès-verbal de carence,
jugement du 2 novembre 1950 est recevable;
Attendu que l'appelant critique le jugement attaqué en tant qu'il a déclaré son opposition non recevable ;
Attendu que le jugement du 6 juillet 19.50 n'a pas été signifié parlant à la personne de l'appelant; que l'on n'est donc point dans les conditions de l'article 158, alinéa 1er, du Code de procédure civile, mais dans celles de l'article 158, alinéa 2, de ce code ;
Que, suivant cet alinéa, le jugement qui n'a pas été signifié à personne n'est plus susceptible d'opposition après son exécution;
Attendu qu'aux termes de l'article 159, un jugement est réputé exécuté quand un procès-verbal de carence a été régulièrement dressé et notifié à la partie défaillante, conformément aux prescriptions en matière d'ajournements;
Attendu que l'appelant soutient, se référant à une disposition de l'article 159, qu'il faut, en outre, que le procès-verbal de carence ait été connu de lui, et que la preuve de cette connaissance n'est pas rapportée ; ·
Attendu que le libellé même de l'article 159 démontre que les exigences du dressement et de la notification du procès-verbal de carence, d'une part, et de la connaissance de l'exécution par l'opposant, d'autre part, ne sont pas cumulatives ; qu'une seule de ces conditions ou des autres prévues par l'article 159 suffit pour que, le jugement étant réputé exécuté, l'opposition ne puisse être admise;
Attendu que le lieu où l'huissier constata qu'il n'y avait rien à saisir, était bien le domicile de l'appelant; que celui-ci n'établit pas qu'il ait été effectivement domicilié ailleurs; que son exploit d'opposition l'indique encore comme domicilié au dit lieu ;
Attendu que l'.huissier Bastiani relate qu'il n'a pas trouvé de biens saisissables au domicile de l'appelant après avoir mentionné que la concierge lui avait signalé la carence de tout objet mobilier appartenant à l'appelant dans l'immeuble;
Que l'appelant ne prouve ni même n'affirme que la déclaration de l'huissier,
par la partie défaillante, était requise pour que le jugement par défaut fût réputé exécuté et partant l'opposition déclarée non recevable (Pasinomie, 1936, p. 218, 1er col., et procureur général Hayoit de Termicourt, Joiwn. frib., 1936, col. 254).
COURS D'APPEL 17
quant à la carence de tout bien dans l'immeuble, était inexacte et ne f ustine pas, au surplus, qu'il aurait eu des biens saisissables dans quelque autre endroit ;
Attendu que la notifi,cation du procèsverbal fut faite selon les prescriptions relatives aux ajournements;
Attendu que l'appel contre le jugement du 2 novembre 1950 n'est donc pas fondé;
Sur l'appel dirigé contre le jugement du 6 juillet 1950 :
Du 20 avril 1951. - Cour de Bruxelles. - 5e ch. - P1·és. M. Simon, conseiller faisant fonctions de président.
Min. publ. M. Sottiaux, avocat général. - Pl. MM. N ossent et Coppieters de Gibson.
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
15 décembre 1951
1 o JUGEMENTS ET ARRÊTS. - MATIÈRE CIVILE. - NATURE DES JUGEMENTS. - DÉTERMINÉE PAR LA LOI ET L'ÉTAT DE LA PROCÉDURE, ET NON PAR LA QUALIFICATION DONNÉE PAR LE JUGE.
2° DIVORCE ET SÉPARATION DE CORPS. - DIVORCE POUR CAUSE DÉTERMINÉE. - PROCÉDURE POSTÉRIEURE AU PERMIS DE CITER. - MODES DE COMPARUTION DES PARTIES. -ÜBLIGATION DE COMPARAÎTRE EN PERSONNE OU D'ÊTRE REPRÉSENTÉES PAR UN AVOUÉ. - PROCÉDURE NE CONSTATANT NI LA PRÉSENCE PERSONNELLE DU DEMANDEUR, NI SA REPRÉSENTATION PAR AVOUÉ. - NULLITÉ.
1° La nature des jugements est déterminée par la loi et l'état de la procédure, et non par la. quali fi,cation donnée par le juge (1).
2° Les parties qui, après le permis de citer, procèdent en divorce pour cause déterminée, sont, à peine de nullité de la procédure, teniies de c01npamît1·e en personne oit par avoué. La présence personnelle du demandeur' ou sa représentation pm' avoué est une condition indispensable à la validité de la pro-
(1) Voy., outre les références citées, cass.,
1 :9 août 1945 (PAsrc., 1945, I, 208); 4 février 1952, publié à sa date.
PASIC., 1952. IIe PARTIE.
cédure suivie à sa reqiiête; la r·éalisation de cette condition doit 1·ésiilter des constatations du jiigement ou des pièces de la ptocédur·e.
L'avocat du demandeiit ne peut teptésentet valablement ce detniet et signer, en son no.m, des conclusions.
(LEFEBVRE, C. PICON.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu produit en forme régulière le jug·ement dont appel rendu par le tribunal de première instance de Tournai le 15 janvier 1951 ainsi que les autres rétroactes de la cause;
Attendu que l'appel est régulier en la forme et que sa recevabilité n'est pas contestée;
Au fond : Attendu que l'appelante soutient que
le jugement querellé serait nul de même que tous les actes de procédure ultérieure de l'intimé;
Attendu qu'elle se fonde sur ce que les conclusions prises par l'actuel intimé le 15 janvier 1951 devant le trib.unal de Tournai étaient signées par le conseil de celui-ci et que le jugement ne constate pas qu'il ait comparu en personne ou par avoué, alors qu'en matière de divorce les parties doivent comparaître en première instance soit par avoué, soit en personne;
Attendu que l'intimé invoque que le jugement querellé déclare statuer contradictoirement;
Attendu que la nature des jugements se détermine par l'état de la procédure ainsi que par le caractère fixé par la loi et non par la qualification qui leur est donnée par le premier juge (Rép. pmt. dr. belge, v0 Jugèments et arTêts et jurisprudence y citée; cass., 5 avril 1889, PASIC., 1889, I, 171; 24 juin 1897, ibid., 1897, I, 234);
Attendu qu'il ne résulte d'aucune autre constatation du jugement querellé, ni de la procédure, que l'intimé était présent en personne et ait pu tacitement entérin.er les conclusions de son conseil ;
Attendu que la représentation valable de la partie demanderesse est une condition sine qua non de la validité de la procédure poursuivie à sa requête ;
Attendu dès lors que se pose la question de savoir si, dans l'état actuel de la législation régissant la procédure , en divorce (procédure contentieuse faisant suite au permis de citer), la partie qui ne recourt pas en première instance au
18 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
ministère de l'avoué est tenue d'être présente· en personne ou si elle peut être représentée d'une autre manière ;
Attendu que sous l'empire du Code civil, la présence personnelle du demandeur en divorce était requise pour l'exposé et les discussions des fins de non-recevoir et du fond et que le ministère de l'avoué était en conséquence facultatif (cass., 15 mai 1919, PASIC., 1919, I, 143) ;
Attendu que la loi du 14 décembre 1935, modifiant l'article 241, prescrivait « que là cause serait instruite et jugée dans la forme ordinaire sauf dérogation apportée au dit chapitre », et abrogea l'article 248 du Code civil; que la présence personnelle de la partie . demanderesse devient ainsi facultative et la constitution d'avoué obligatoire;
Attendu que l'arrêté royal du 7 février 1936, modifiant à nouveau l'article 241 du Code civil, stipula que le ministère des avoués était facultatif;
Attendu que la doctrine et la jurisprudence en général estimèrent que la partie avait la faculté de comparaître en personne, mais que, si elle n'en usait pas, les règles de la procédure ordinaire devaient être suivies ; .que la loi avait prévu la représentation par un mandataire spécial mais dans un cas bien déterminé : article 2 3 9 bis, remise de la requête ; que c'était en somme le .retour partiel au régime ancien où la partie .ne pouvait avoir recours à d'autre mandataire que l'avoué (Code de proc. civ., art. 75; Rép. prat. dr. belge, v 0 Divorce et séparntion de corps, n° 30 et doctrine et jurisprudence y citée; DE PAGE, t. Jer, 2e éd., n° 875bis; Courtrai, 30avril1937, PAsic., 1937, III, 114; Arlon, 13 décembre 1938, ibid., 1939, III, 57); .,
Attendu que tel est si bien le sens qu'il faut donner au texte légal, que le rapport au Roi précédant le texte de l'arrêté royal du 7 février 1936 précise que cet arrêté a pour but de rendre à l'intervention de l'avoué << le caractère facultatif qu'elle a toujours eu en matière de divorce»;
Attendu que l'intimé demandeur n'étant ni présent ni valablement représenté à l'audience du 15 janvier 1951, l'action n'a pu être valablement poursuivie à sa requête par les conclusions prises à cette audience et que le jugement du 15 janvier 1951 ainsi que les actes de procédure de l'intimé qui l'ont suivi sont nuls;
Par ces motifs, écartant toutes conclusions plus amples ou contraires, entendu M. Colard, substitut du procu-
reur général, en son avis conf orme donné en audience publique, reçoit l'appel, le déclare fondé ; met à néant le jugement dont appel; dit pour droit que les conclusions du 15 janvier 1951, signées Vandevelde, et le jugement du 15 janvier 1951 ainsi que tous les actes de procédure de l'intimé ensuite de ce jugement sont nuls ; condamne l'intimé aux dépens de première instance sauf ceux antérieurs aux conclusions du 15 janvier 1951 et au jugement du 15 janvier 1951 qui sont
.réservés pour être statué à leur égard en même temps que sur l'action; condamne l'intimé aux dépens d'appel.
Du 15 décembre 1951. - Cour de Bruxelles. - 7e ch. - P1'és. M. Ooms, président. - Min. publ. M. Colard, substitut du procureur général. . - Pl. MM. Rysman de Lockerente (du barreau de Tournai) et Vandevelde.
COUR D'APPEL DE LIÈGE
12 juillet 1951
AVOCAT. TAXATION DES HONO-RAIRES. - CARACTÈRE. DE LA DÉCISION DU CONSEIL DE. L'ORDRE. -CONDITIONS DE SON INTEIWENTION.
La taxation des honorai1'es de l'avocat par le conseil de l' Ord1'e est un acte de juridiction g1'acieuse, non soumis à appel. ·
Le conseil de l' Ordre des avocats ne peut être saisi d'une demande de taxation d'honoraires qu' eri cas de contestation soulevée par le client ou en cas de ?'envoi devant le conseil ordonné pa1' une décision .iudiciai1'e.
(s ... , C. PROCUREUR GÉNÉ_RAL A LIÈGE.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu, en expédition régulière, la sentence rendue le 30 mai 1951 par le tribunal de première instance de Neufchâteau, faisant fonctions de conseil de l'Ordre des avocats, et les appels interjetés tant par Me S... que par M. le procureur général;
Sur l'appel de Me S ... : Attendu qu'il résulte du texte de l'ar
ticle 43 du décret du 14 décembre 1810 que l'instance en fixation d'honoraires est un acte de juridiction gracieuse, non soumis à l'appel; que le dit article 43 stipule formellement; en effet, qu' · « en
COURS D'APPEL 19
cas de réclamation contre la décision du conseil de discipline, on se pourvoira au tribunal J), ce qui implique que l'avocat poursuivra le payement des honoraires par la voie de l'instance judiciaire (TART, Le conseil de l'Ordre des avocats, ch. III, 28 partie, n° 11, p. 66; Rép. prat. d1'. belge, v 0 Avocats, n° 319) ;
Que l'appel n'est donc pas recevable; Sur l'appel de M. le procureur général : Attendu que l'article · 8 de l'arrêté
royal du 5 août 1836 confère au pro·cureur général le droit d'appel contre les décisions du conseil de l'Ordre (cass., 29 janvier 1934, PASIC., 1934, I, 155) ; que le dit appel, portant non sur l'appréciation faite du montant des honoraires mais sur la compétence de la juridiction saisie, est à ce· titre recevable (Bruxelles, 15 juillet 1896, PASIC., 1896, II, 405);
Au fond : Attendu que l'article 43 du décret du
14 décembre 1810 est conçu comme suit : « ... voulons que les avocats taxent euxrriêmes leurs honoraires )) ;
Qu'il faut déduire de ce texte très clair que le conseil de l'Ordre n'est pas appelé à taxer les états d'honoraires avant leur envoi au client, mais seulement sur contestation soulevée par celui-ci ou sur renvoi devant le conseil par une décision judiciaire (cf. TART, loc. cît. n° 6, p. 64; Rép. prat. dr. belge, vo Avocats, n° 317; Pand. belges, v 0 Usages corporatifs des avocats, n° 645) ;
Attendu que, l'état d'honoraires litigieux ayant été soumis au tribunal faisant fonctions de l'Ordre, par l'avocat, avant toute communication au client, le tribunal n'était pas compétent pour en connaître ;
Par ces motifs, ouï M. Dallemagne, premier avocat général, en ses réquisitions, réforme la décision entreprise; dit· que le tribunal de Neufchâteau était incompétent pour connaître de la demande; en déboute l'appelant Me S ... et le condamne à tous les dépens.
Du 12 juillet 1951. Cour de Liège. 1re ch. - Prés. M. Van de Kerckhove, président. - Min. publ. M. Dallemagne, premier avocat général. - Pl. M. Schneider (du barreau de Neufchâteau).·
COUR D'APPEL DE LIÈGE
22 noveITibre 1951
1° APPEL. - MATIÈRE CIVILE. CONFIRMATION DU JUGEMENT ENTRE· PRIS. - EFFETS.
2° EXÉCUTION DES ARRÊTS ET JUGEMENTS. - EXÉCUTION PROVISOIRE. - CARACTÈRE FACULTATIF. -CONSÉQUENCE QUANT A L'ÉCOULEMENT DES DÉLAIS.
3° ARBITRAGE. - JuGEl\ŒNT TENANT LIEU DE COMPROMIS. - EXÉCUTION .DANS LE DÉLAI DE TROIS MOIS. POINT DE DÉPART DU DÉLAI.
1° Par la confi1'mation du juge11ient entrepris, l'appel est mis à néant, et déso1'mais tout se passe comme s'il n'y avait pas eu d'appel. Mais cette conséquence n'a pas et ne peut avoir d'effet 1·étrnactif et agir ex tune quant aux événements qui auraient dû se passer pendant le temps qui s'est écoulé entre l'appel et la décision mettant celui-ci à néant. ·
2° L'exécution prnvisoire a été intrnduite dans le Code de prncédure civile au p1'0 fit des demandeurs particulièrement intéressants, pour éviter · les inconvénients des . retards de procédu1'e, mais, c1·éée à leU1' pro fit, elle est abandonnée à leur appréciation et. laissée à· leU1' risque. Elle ne peut être impôsée pa1· le défendeur, qui ne peut faire grief au demandeur ·de n'y avoir pas eu 1·ecours, même s'il l'a sollicitée.
3° Le délai de_ trois. mois, imp~rti par l'article 1007 du Code de procédure pour l'exécution pm· les arbit1·es de leur mission, s'applique aux pouvoirs des arbitres désignés par un jugement tenant lieu de comprnmis. A!f ais ce délai ne commence à cou1'ir qu'à compter du moment où la décision est devenue définitive (1). (Solution implicite.)
(TRIEF, C. SOCIÉTÉ ANONYME DES CHARBONNAGES DE HELCHTEREN ET ZOLDER.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu, en expédition conforme, l'arrêt rendu par la cour de cas-
(1) L'arrêt de la cour de cassation du 3 novembre 1950 (PAsrc., 1951, I, '112) ne tranchait pas les questions soumises à la cour de renvoi.
20 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
sation le 3 novembre 1950, cassant un arrêt de la cour d'appel de Bruxelles du 10 mars 1948 et renvoyant la cause à la cour d'appel de Liège ;
Vu la signification faite le 16 février 1951, à la requête de la société anonyme « Charbonnages de Helchteren et Zolder», au sieur V. Trief, avec assignation à comparaître devant la cour de céans, chambres réunies ;
Attendu qu'en raison de leur connexité, il échet de joindre l'appel interjeté par Trief contre les Charbonnages à la requête civile formée par ceux-ci devant la cour contre la sentence arbitrale;
Attendu que les parties ont, le 7 décembre 1935, conclu une convention, aux termes de laquelle la société intimée s'engageait à payer certaines redevances à l'appelant pour l'exploitation d'un brevet obtenu par lui, et ayant trait à un procédé de fabrication d'un ciment permettant la production, dans des conditions particulièrement avantageuses, de bétons offrant de fortes résistances ;
Attendu que cette convention contenait, sub 13, une clause compromissoire déférant à l'arbitrage de M. Magnel, professeur à l'Université de Gand, toutes contestations pouvant s'élever entre parties relativement à son exécution ;
Attendu qu'un differend ayant surgi et les parties ne parvenant pas à s'entendre sur la signature du compromis, Trief saisit le tribunal de première instance de Charleroi du litige ;
Vu, ensuite à cette , procédure, en expédition conforme, le jugement du tribunal de Charleroi en date du 7 mars 1941 ordonnant aux Charbonnages de signer un compromis permettant de soumettre les points litigieux au professeur Magnel et, en cas de refus, disant que sa décision en tiendrait lieu et ordonnant l'exécution provisoire nonobstant appel et sans caution ;
Vu l'appel des Charbonnages interjeté le 22 avril 1941 et l'arrêt de la cour d'appel de Bruxelles du 3 décembre 1942 qui confirme le jugement entrepris sous cette seule émendation que la société appelante aura le droit de faire insérer au compromis toutes demandes formulées par elle et rentrant dans la limite des pouvoirs conférés à l'arbitre ;
Vu la sentence du 27 février 1943 de l'arbitre Magnel, rendue exécutoire par ordonnance du président du tribünal de première instance de Bruxelles du 22 mars 1943, le tout signifié aux Charbonnages à la requête de Trief, le 27 avril de la même année;
Vu la signification faite, dès le 13 février 1943, c'est-à-dire avant le prononcé de la sentence, à la requête des Charbonnages, aux sieurs Trief et Magnel, opposant à ceux-ci la péremption des pouvoirs de l'arbitre par expiration du délai de trois mois prévu à l'article 1012, § 2, du Code de procédure civile et marquant le refus des Charbonnages d'accorder une prorogation ;
Vu l'opposition dirigée contre l'exécution de l'ordonnance prérappelée du président, par exploit du 1er mai 1943, avec assignation en déclaration de nullité de l'acte qualifié « sentence arbitrale »;
Vu en extrait régulier, avec les pièces annexées, le jugement du tribunal de première instance de Bruxelles du 8 janvier 1944, dont doit connaître la cour de céans, suite à l'appel interjeté par Trief le 29 février de la même année et à la cassation de l'arrêt rendu suite au dit appel;
Attendu que la décision attaquée a fait droit à l'opposition formée par les Charbonnages et annulé l'acte qualifié (( sentence arbitrale >>; que l'appel dont elle est frappée est régulier et sa recevabilité non contestée ;
I. Sur l'action en nullité dirigée contre l'acte qualifié de (( sentence arbitrale », fondée sur ce que le délai imparti au compromis, qui était celui de la 19i, à défaut par les parties d'en avoir stipulé un autre, était expiré à la date où l'arbitre a statué :
Attendu que le jugeme11t du .tribunal de Charleroi du 7 mars 1941 avait décidé
outre ce qui a déjà été dit ci-avant -que les Charbonnages avaient à signer le compromis dans les huit jours de sa signification, faùte de quoi il tiendrait lieu de compromis ;
Attendu que Trief fit signifier le jugement le 12 avril 1941 ;
Que l'intimée soutient que le délai de trois mois prévu aux articles 1007 et 1012, § 2, du Code de procédure civile a pris cours huit jours plus tard, c'està-dire le 21 avril 1941, ·et qu'ainsi, en statuant le 27 février 1943, l'arbitre a rendù sa sentence alors que ses pouvoirs av aient pris fin ;
A. Attendu que c'est à tort que l'appelant entend déduire des conclusions prises par la société intimée devant la cour de Bruxelles, lors du procès qui aboutit à l'arrêt du 3 décembre 1942, la reconnaissance de l'effet suspensif de l'acte d'appel frappant le jugement du tribunal de Charleroi ;
Attendu que l'intimée a, après avoir,
COURS D'APPEL '21
au principal, sollicité la nullité du compromis, postulé en conclusions subsidiaires la désignation d'un arbitre autre que le professeur Magnel et, au cas où la cour ferait droit à cette demande, conclut à l'extension des pouvoirs ainsi dévolus au nouvel arbitre, ce qui n'implique nullement, dans le chef de la concluante, reconnaissance que, durant l'instance d'appel, les modalités fixées par le tribun.al de Charleroi dans l'attribution des pouvoirs d'arbitre au professeur Magne! se trouvaient suspendues;
Attendu que postuler la nullité d'une clause comprommissoire, puis, subsidiairement, au cas de rejet de cette prétention, conclure à la désignation d'un arbitre autre que celui mentionné à la convention, avec fixation de pouvoirs plus étendus dans le chef de cet arbitre, ne comporte rien de contradictoire ou de diffus;
Que l'interprétation de semblables conclusions ne permet aucunement d'aboutir aux conséquences que veut en tirer l'appelant;
Attendu que l'on ne peut davantage trouver dans l'attitude des Charbonnag·es, au cours des différents litiges, un élément quelconque impliquant prorogation tacite du délai légal dans lequel devait se maintenir l'arbitre, la partie n'ayant manifesté, quant à ce, aucune intention claire et non équivoque ;
B. Attendu que si tout effet sµspensif ou prorogatoire du délai dérivant d'un acte émanant de l'intimée doit ainsi être écarté, il reste néanmoins à rechercher quand, aux termes du Code de procédure civile, doit avoir commencé à courir le délai légal donné à l'arbitre pour rendre sa sentence;
Attendu que le premier juge a admis que ce délai a pris cours huit jours après la date de la signification du jugement de Charleroi, comme le soutenait la société intimée;
Attendu que l'appel interjeté le 22 avril 1941 par la société anonyme « Charbonnages de Helchteren et Zolder » avait provisoirement enlevé au jugement du tribunal de Charleroi du 7 mars précédent sa force obligatoire et même, en principe, sa force exécutoire ; que celles-ci lui ont, certes, été rendues par l'arrêt confirmatif de la cour d'appel de Bruxelles du 3 décembre t 942, mais qu'entretemps les effets du jugement ont été tenus en suspens, si bien que le délai imparti par le jugement pour saisir l'arbitre n'a pu courir;
Attendu, sans doute, que par la con-
firmation du jugement entrepris l'appel est mis à néant et que désormais tout se passe comme s'il n'y avait pas eu appel; mais que cette conséquence n'a pas et ne peut avoir d'effet rétroactif et agir ex tune quant aux événements qui auraient dû se passer pendant le temps qui s'est écoulé entre l'appel et la décision mettant celui-ci à néant; qu'aucune disposition de lâ. loi n'autorise une fiction de rétroactivité ;
Attendu que le premier juge a considéré que l'appelant Trief ne pouvait se prévaloir des effets dévolutif et suspensif de l'appel interjeté par la société intimée, parce qu'il avait demandé et obtenu du premier juge le bénéfice de l'exécution provisoire de la décision ;
Attendu que l'exécution provisoire a été introduite dans le Code de procédure civile au profit des demandeurs particulièrement intéressants, pour leur éviter les inconvénients des retards de procédure, mais que, créée à leur profit, elle est abandonnée à leur appréciation et laissée à leur risque ;
Qu'en statuant comme il l'a fait, le premier juge a méconnu le caractère facultatif de l'exécution provisoire et a sanctionné d'une déchéance l'abstention prudente de l'appelant;
Qu'il suit de ces considérations que le délai pour saisir l'arbitre n'a pu courir qu'à compter au plus tôt de l'·arrêt confirmatif de la cour d'appel du 3 décembre 194:2 et qu'en statuant comme il l'a fait le 27 février 1 %3, l'arbitre a rendu sa sentence dans le délai prévu aux articles 1007 et 1012, § 2, du Code de procédure civile ;
II. En ce qui concerne le refus prétendument opposé par l'arbitre de procéder à certains essais de résistance sollicités par les Charbonnages, dont l'intimée entend déduire que l'arbitre a statué hors des termes du compromis :
Attendu que ce reproche n'est pas fondé;
Que si la clause 13 du compromis veut que l'arbitre soit tenu sur les réquisitions des parties de se livrer à des constatations et expériences, encore est-il que l'arbitre estime, avec raison, que les essais sollicités s'avéraient purement inutiles et dilatoires; qu'il déduit cette appréciation de certains éléments de la cause, particulièrement de la façon dont les_ parties ont fait application de l'article 12, alinéa 2, de la convention, qui prévoit que si les garanties - c'està-dire les bons résultats du procédé breveté par l'appelant - étaient obtenues
22 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
un mois après la mise_ en marche, le délai commencerait à courir pour le payement des mensualités prévues à l'article 4, litt. A;
Qu'il retient qu'une communication du 22 avril 1937 de l'intimée déclare expressément, après avoir trouvé prématuré de tirer au jour de sa rédaction des conclusions quant aux résultats, qu'il sera attendu qu'on ait travaillé pendant un mois conformément au contrat et procédé à de nombreux essais comparatifs, avant que de commencer le payement des redevances à l'appelant;
Attendu que, l'intimée ayant commencé à payer les mensualités dès le 1er mai 1937 et continué de ce faire régulièrement jusqu'au 28 féyrier 1939, l'arbitre en. déduit que les Charbonnages devaient être satisfaits des résultats ;
Attendu qu'à ce motif s'ajoute l'attitude contradictoire de l'intimée qui, postulant, d'une part, des expériences, refuse, d'autre part, toute prorogation du délai légal de trois mois, alors qu'elle sait pertinemment bien que ce délai est tout à fait insuffisant pour procéder à ce qu'elle sollicite;
Attendu que pareille attitude fait ressortir le but poursuivi par l'intimée de faire échec à l'arbitrage, la demande formulée n'apparaissant que comme un moyen pour parvenir à ses fins, puisque le dossier révèle que, les conditions de base ayant été modifiées de commun accord en cours d'exécution' du contrat, les expériences ne devaient nécessairement plus rien révéler de concluant, ce qui justifie le terme de dilatoire dont se sert l'arbitre à leur égard;
Attendu qu'il suit de ces considérations que l'arbitre a suffisamment justifié sa décision et que, statuant dans les conditions qui lui furent imposées, il n'avait pas à renvoyer les parties à se pourvoir comme de droit ;
III. Sur le reproche fait par l'intimée à l'arbitre d'avoir statué sur des choses non demandées et ainsi contrevenu à l'article 1028, 5°, du Code de procédure civile :
Attendu que la clause compromissoire délimitant les prérogatives de l'arbitre stipule que celui-ci << aura pour mission de statuer comme amiable compositeur, investi des pouvoirs les plus étendus et dispensé des formalités de procédure >>;
Attendu que la demande formulée par l'appelant, en l'assignation signifiée à sa requête le 29 janvier 1940, et que reprend, en son dispositif, le jugement du tribunal de Charleroi du 7 mars 1941,
tend à obtenir payement des redevances échues tant avant' qu'au cours de la présente instance, les sommes devant être évaluées à 100.oùo francs, sauf modification en cours d'instance;
Attendu que l'appelant s'était ainsi réservé la faculté de majorer sa demande à concurrence des indemnités qui seraient devenues exigibles en cours de procédure, l'évaluation à 100.000 francs représentant ce que le demandeur originaire estimait être dû à la date de son ajournement;
Qu1ainsi l'arbitre pouvait envisager et accroître la somme due de toutes les redevances à échoir au cours de l'instance d'arbitrage, qui ne prit fin que le 27 février 1943, par le prononcé de la sentence ;
Attendu que l'on doit tenir pour constant, eu égard aux mentions non discutées dans leur authenticité et insérées à la sentence arbitrale, que les parties mirent l'arbitre en possession de tous les éléments nécessaires pour établir sa décision, notamment que l'appelant a versé contradictoirement tout document justificatif de sa demande en majoration et que l'intimée a eu la faculté d'y défendre;
Attendu, en conséquence, que l'arbitre est resté dans les limites des pouvoirs à lui conférés, en considérant comme litigieuses toutes les redevances dues jusqu'au jour du prononcé dé sa décision, et n'a pas violé l'article 1028 du Code de procédure civile précité ;
Particulièrement quant aux intérêts : Attendu que la sentence arbitrale
alloue les intérêts légaux à 5 1/2 p. c. à dater du 1er .février 1940 jusqu'au 1er mars 1943, sur les redevances échues, soit 90. 942 fr. 30;
Attendu que l'assignation, pour obtenir l'exécution par l'intimée de ses obligations, constitue une sommation de payer mettant les Charbonnages en demeure de solder les redevances dues;
Attendu que dans les obligations qui de bornent au payement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard d'exécution ne consistent jamais que dans les intérêts légaux, lesquels sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte {cf. Code civ., art. 1153) et du jour de la sommation de payer ;
Attendu dès lors que l'arbitre, nanti · de pouvoirs les plus étendus et saisi dans
ces conditions, a pu, sans commettre un excès de pouvoir, étendre son examen
COURS D'APPEL 23
èt sa décision aux intérêts, accessoires des redevances et exigibles comme celles-ci ;
IV. Sur la requête civile introduite par l'intimée : ' Attendu que celle-~,i est . re9evable," inais que, pour les motifs repris ci-avant, elle n'est pas fondée; , . .
Attendu qu'eu égard a la JOnct10n des procédures, l'appelant ne jus~ifi~ pas d'un préjudice résultant particuherement de l'introduction de la requête civile; que sa demande en dommagesintérêts doit être écartée;
Par ces motifs, écartant comme non fondées toutes autres conclusions, statuant en audience solennelle comme cour de renvoi, suite à l'arrêt de la cour de cassation du 3 novembre 1950, première 'et seconde chambres réunies, conformément aux articles 22 de la loi du 4 août 1832 et unique, § XI, de la loi du 25 octobre 1919, M. le premier président étant légalement empêché, ouï en son avis conforme, donné en langue française et en audience publiq~e,, M. D.a~lemagne premier avocat general, JOmt l'appei interjeté à la requête civile introduite devant la cour et, par un seul et même arrêt, reçoit l'appel et, y faisant droit met à néant le jugement entrepris; faisa~t ce que le premier juge aurait dû faire déboute l'intimée de son action et la c~ndamne aux dépens de première instance et des deux instances d'appel; dit en conséquence que la sentence arbitrale rendue par le professeur Magnel; le 27 février 1943, et l'ordonnance qm l'a rendue exécutoire sortiront leurs pleins et entiers effets; déclare la requête civile introduite par l'intimée recevable, mais non fondée ; dit que la consignation de 150 francs faite par la demanderesse est acquise au défen~eur , à, titre ~'indemnité et que le prepose a la Caisse des dépôts et consigna~ions s~ra tenu, de A la lui remettre sur presentation de 1 arret; déboute le défendeur de sa demande en dommages-intérêts; condamne la demanderesse aux dépens de l'instance.
Du 22 novembre 1951. - Cour de Liège. - 1re et 28 ch. réunies. - Prés. M. Van de Kerckhove, président. -Min. publ. M. Dallemag'ne, premier avocat général. - Pl. MM. Musch, H. Botson, Collette (les deux derniers du barreau d'appel de Bruxelles) et Van Leynseele {du barreau de la cour de cassation).
COUR D'APPEL DE LIÈGE
28 juin 1951
TRIBUNAL CIVIL DE LIÈGE
8 mars 1951
PUISSANCE PATERNELLE. - DÉCHÉANCE. - PREUVE DES CAUSES DE DÉCHÉANCE. - RAPPORTS DES SERVICES SOCIAUX DE LA PROTECTION DE L'ENFANCE. - VALEUR.
La loi n'a irnposé aucun nwde de 1n'euve spécial pou1· établir les causes de déchéance de la puissance paternelle. Les cours et tribunaux peuvent donc accueillfr tous nwdes de p1·euve qili leiir paraissent pertinents. Mais ils aurnnt plus pm·ti9ulièrernent ég.ard au.x rapports établ1,s pm' les services sociaux de la protection de l'enfance, spécialenient qualifiés et entraînés pour rnener de.s enquêtes, en cette rnatiè1·e, dans l'esprit de la loi sur la p1·otection de l'enfance (1).
(MINISTÈRE PUBLIC, C. COUSSART ET AVRIL.)
En cette cause, le t·ribunal civil de Liège avait rendu, le 8 rnars 1951, le jitgement suivant:
LE TRIBUNAL; Revu le jugement rendu par défaut par la première chambre de ce tribunal, le 23 novembre 1950, enregistré ;
Attendu que l'opposition au jugement précité, formée dans les délais légaux, est recevable ;
Attendu qu'un nombre considérable d'informations concordantes remontant à plus de trois années, produite.s tant J?ar la police que par le service social, démontrent que les époux opposants mettent, l'un comme l'autre, en péril la santé, la moralité de leurs enfants mineurs par leur inconduite et lem négligence grave; que la mère, provenant elle-même d'un milieu immoral, libérée à sa majorité seulement d'un établisse-· ment spécial de rééducation, s'est aussi-
(1) Les décisions rapportées sont . particulièrement intéressantes au moment où le gouvernement vient d'organiser les services sociaux de la protection de l'enfance attachés au parquet et au juge des enfants, en exécution de la loi du 20 mai 1949 modifiant la loi du 15 mai 1912 sur la protection de l'enfance.
24 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
tôt livrée à une inconduite scandaleuse et avait déjà six enfants naturels lorsque ceux-ci furent légitimés par son mariage avec le défendeur, dont elle eut encore cinq enfants; que le père s'adonne fréquemment à la bqisson, laisse sa famille sans ressource et vit d'allocations et des secours qui lui sont alloués ; qu-e les enfants, mal entretenus, mal soignés, ont souvent été mendier, abandonnés sans surveillance par leurs parents; que malgré de légères améliorations temporaires, les conditions de promiscuité de l'habitation sont aggravées par une malpropreté repoussante, dangereuse pour la moralité; que l'action de la partie publique, loin d'être mal fondée ou prématurée, a été imposée par la plus urgente nécessité et n'a été introduite qu'après que deux des enfants eurent été l'objet de mesures pénales pour faits de délinquance ou d'in-discipline grave ; .
Quant à la question soulevée des modes de preuve :
Attendu qu'à la différence des chapitres II et III de la loi de 1912, le chapitre rer est soumis aux règles de la procédure civile, en raison de la répercussion des décisions sur les droits civils des parents et enfants intéressés;
Attendu que la loi n'impose aucun mode de preuve spécial au ministère public qui intente l'action (Rép. prnt. dr. belge, v 0 Puissance paternelle, n° 413 et les références) ;
Attendu que, tout comme dans les poursuites correctionnelles, la procédure s'opère aux diligences de la partie publique, des informations sont habituellement recueillies par la police, l'action de sauvegarde de l'ordre public se déclanche lorsque les enfants paraissent en danger dans le milieu familial ;
Attendu que la partie publique, mue par des principes d'équité, tient habituellement à assurer la preuve contraire sollicitée par la défense par les mêmes services de police, chaque fois que les questl.ons posées lui apparaîtront pertinentes; que l'équilibre des modes de preuve paraît ainsi sauvegardé; qu'au surplus la preuve par les voies civiles demem;e ouverte aux défendeurs ;
Attendu qu'en l'espèce aucune demande de faits pertinents quelconques n'a été introduite;
Attendu que, concurremment aux ren-
Haires tranche nettement sur l'activité de la police; que cette dernière vise en ordre principal à la répression des infractions et à la découverte des éléments qui les constituent ; que par contre le service social judiciaire, instauré dans le but d'assurer la protection de l'enfance, accomplit une tâche de relèvement, observant la personnalité et le comportement des individus, leurs insuffisances et · déficiences, afin que puissent être prises les mesures appropriées ;
Attendu, quant à la valeur de preuve des renseignements qu'ils fournissent, que les enquêtes des auxiliaires sociaux, opérées selon une technique rigoureuse, méthodique, apparaissent particulièrement dignes de foi dans leurs constatations objectives, lorsqu'elles ont été visées par le magistrat responsable du service; que cependant les « recommandations '' que déduisent les délégués de ces observations doivent être considérées comme de simples éléments d'une discussion à laquelle la décision du magistrat qualifié mettra fin sous sa responsabilité ;
Qu'à la lumière de ces considérations inspirées par la pratique, et en l'absence de toute disposition légale réglant la matière, l'on peut affirmer que le bienfondé de l'action introduite par le ministère public résulte en l'espèce d'un ensemble très complet de constatations concordantes, faites tant par la police que par le service social et portant sur plusieurs années aux collrs desquelles la situation périlleuse des mineurs en cause a été s'aggravant;
Par ces motifs, statuant contradictoirement, rejetant toutes autres conclusions, ouï M. Nève de Mévergnies, substitut du procureur du roi, en ses réquisitions en langue française, reçoit l'opposition, la déclare non fondée; ce fait, dit que le jugement rendu par la première chambre de ce tribunal le 23 novembre 1950 sortira ses pleins et entiers effets; condamne les défendeurs ';lux dépens d'instance et d'opposition.
Du 8 mars 1951. Tribunal civil de Lièg·e. - pe ch. - Prés. M. Comblen, vice-président. - Niin. publ., M. Nève de Mévergnies, substitut du procureur du roi. - Pl. M. Dubru.
seignements de police, des éléments de Su1• appel, la cowr de Liège rendit, le preuve sont produits par de nouveaux 28 juin 1951, l'arrêt suivant : auxiliaires de la justice, savoir des assis-tants sociaux assermentés; LA COUR; - Vu le jugement rendu
Attendu que la mission de ces auxi- 1 le 8 mars 1951 par le tribunal de pre-
COURS D'APPEL 25
mière instance de Liège et l'appel interjeté dans les formes et délais légaux;
Attendu que les appelants, constatant que la décision qui prononce leur déchéance de la puissance paternelle se fonde uniquement sur des procès-verbaux de police et des rapports d'assistants sociaux, soutiennent que le ministère public n'apporte pas la preuve suffisante de leur indignité;
Qu'ils tirent argument de ce que le chapitre 1er de la loi du 15 mai 1912 est soumis aux règles de la procédure civile, pour demander que la preuve des griefs soit faite par le recours à une enquête contradictoire, dans les formes prévues au Code de procédure civ.ile ;
Attendu q·ue les dites règles n'imposent aucun mode de preuve spécial en la matière ; que s'il est vrai que les procès-verbaux de police, rédigés plus spécialement en vue de la répression, risquent d'être insuffisants et de ne constituer qu'une preuve incomplète, il en va autrement lorsque, comme en l'espèce, ils sont nombreux et concordants et sont· complétés par les rapports très minutieux émanant des services sociaux attachés à la protection de l'enfance; que, sur ce point, la cour ne peut que faire siennes les considérations très judicieuses par lesquelles le premier juge met en relief la valeur des informations et recommandations données par ces auxiliaires assermentés et spécialement qualifiés;
Attendu que ces procès-verbaux et rapports sont portés à la connaissance des parents intéressés, qui ont toujours le droit de solliciter la preuve contraire, par enquête ou autrement; qu'à défaut d'avoir introduit pareille demande, les appelants sont sans grief contre le mode de preuve adopté par le jugement;
Attendu cependant que l'inconduite notoire ne paraît pas établie dans le chef des appelants; qu'aucun fait précis n'est relevé à charge du père et que la conduite de la mère, jadis déplorable, s'est, depuis son union avec Coussart, sérieusement amendée;
Attendu par contre que la négligence grave des époux dans l'accomplissement de leurs devoirs légaux est particulièrement patente et consiste dans leur incurie complète dans l'entretien du ménage, le soin des enfants, leur surveillance, et plus particulièrement dans l'absence totale d'éducation; que les rapports des assistants sociaux signalent notamment, et avec persistance, l'incapacité des parents à éduquer leurs enfants, leur
paresse et leur manque du sens de leurs responsabilités ; que cette dernière considération exclut évidemment la possibilité de limiter la déchéance au droit de garde, comme il est demandé à titre subsidiaire; qu'enfin les constatations faites quant à la conduite des enfants confirment en tous points l'urgence d'un changement radical;
Par ces motifs, ouï M. Dallemagne, premier avocat général, en ses réquisitions, confirme le jugement; condamne les appelants aux dépens d'appel.
Du 28 juin 1951. - Cour de Liège. -pe ch. - Prés. M. Van de Kerckhove, président. - Min. publ. M. Dallemag·ne, premier avocat général. - Pl. M. Dubru.
COUR D'APPEL DE LIÈGE
20 décenibre 1951
INSTRUCTION (EN MATIÈRE REPRESSIVE). - OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE. - PERQUISITION. - SAISIE DE PAPIERS, TITRES ET DOCUMENTS. - INTERPRÉTATION DE LA DÉLÉGATION DU JUGE D'INSTRUCTION.
La perqiiisition otdonnée pm· un ,jiige d' inst1·uction : en vue de la constatation d'une infraction implique pou1· l'officie1· de police judiciaire, chargé d'exécute1· cette mesure, le droit et le devoi1' de 1·assembler tous les éléments de p1'eiwe de cette infraction, y compris la 1'echerche des preuves écrites et la saisie de celles-ci. Il n'est pas nécessafre que le mandat l'exprime en termes exprès (1). (Loi du 20 avril 1874, art. 24.)
(MINISTÈRE PUBLIC, C. GOHIMONT ET DUJARDIN.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu le jugement rendu le 5 octobre 1951 par le tribunal correctionnel de Verviers ;
Attendu que l'appel formulé par le ministère public d'instance, le 9 octobre 1951, est régulier en la forme et qu'il a été interjeté dans les délais impartis par la loi; qu'il est donc recevable ;
Attendu que le premier juge a ren-
(1) Voy. RrnAux et TROUSSE, Les c1•imes et les délits dit Code vénal, t. II, p. 118 et 119 avec références.
26 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
voyé les prévenus des· poursuites, estimant que leurs aveux étaient basés sur des constatations faites au cours d'une perquisition illégalement opérée dans la correspondance personnelle de la prévenue, << alors que le. mandat se limitait au constat du flagrant délit d'adultère sans viser spécialement la recherché des papiers ou écrits, ni celle du contenu des correspondances personnelles » ;
Attendu que la perquisition ordonnée en vue de constater le délit d'adultère implique pour les officiers de police judiciaire, chargés d'exécuter cette mesure d'instruction, le droit et le devoir de rassembler· tous éléments de preuve de ce délit, y compris la recherche de preuves écrites et la saisie d'icelles ; qu'il n'existe pour le juge d'instruction aucune obligation d'ordonner spécialement aux agents qu'il délègue de s'enquérir de l'existence de documents écrits, puisque la recherche de ces documents est de droit, voire de bon sens ; que la seule obligation légale qui incombe à ce mag·istrat est de procéder personnellement à la saisie de papiers, titres ou documents, sauf toutefois faculté de délégation par ordonnance motivée et dans les. cas de nécessité seulement (loi du 20 avril .18'74:, art. 24:) ;
Attendu qu'en l'espèce le ·magistrat instructeur s'est strictement conformé à la loi lorsque, en déléguant aux fins susdites le commandant de gendarmerie de Verviers, il a motivé cette délégation par les mots : « Etant retenu en notre cabinet par d'autres devoirs urgents d'instruction »; que, par là même, il a visé le cas de nécessité ;
Attendu, surabondamment, que par l'emploi de la formule susmentionnée, et contrairement à l'opinion du premier juge, le juge d'instruction de Verviers a nettement - quoique implicitement -chargé son auxiliaire de procéder à la saisie de documents, pour autant qu'il s'en trouvât au domicile de la prévenue;
Attendu, dès lors, que la prévention mise à charge des prévenus a été dùment établie par l'instruction à laquelle il fut procédé en la cause ;
Par ces motifs, statuant contradictoirement, vu les articles 140 de la loi d'organisation judiciaire, 24: de. la loi du 15 juin 1935, 24: de la loi du 20 avril 18'74:, 38'7, 388 et 390 du Code pénal, 85 et 4:0 du Code pénal, 1er et 2 de la loi du 2'7 décembre 1928, modifiée par la loi du 14: aoùt 1 % '7, 9 de la loi du 31 mai 1888 modifié par la loi du 14: novembre 1%'7 et 1er de la loi du 25 octobre 1950,
reçoit l'appel et, y faisant droit, met à néant le jugement frappé d'appel; déclare la prévention établie à charge des deux prévenus et, spécialement en ce qui concerne le prévenu Dujardin, par la production de lettres écrites par lui; ce fait, statuant à l'unanimité, condamne chacun des prévenus à une amende de 100 francs augmentée de 90 décimes, soit 1.000 francs ou un mois d'emprisonnement subsidiaire, par admission de circonstances atténuantes résultant . de leurs bons antécédents; et attendu que les susdits prévenus n'ont pas encore encouru de condamnation à une peine d'au moins trois mois d'emprisonnement et qu'il y a lieu d'espérer leur amendement, leur accorde le bénéfice du sursis; en fixe la durée à trois ans ; condamne les prévenus chacun à la moitié des frais judiciaires, tant d'instance que d'appel, envers la partie publique.
Du 20 décembre 1951. - Cour de Liège. . LJ:e ch. Prés. M. Goossens, président. - Min. publ. M. Glesener, substitut du procureur général.
COUR D'APPEL DE LIÈGE
28 juin 1951
PUISSANCE PATERNELLE. - DÉCHÉANCE. EXCITATION DE L'UN DE SES ENFANTS A LA DÉBAUCHE. - CONDAMNATION CONDITIONNELLE A LA DÉCHÉANCE DES DROITS ET AVAN· TAGES DE LA PUISSANCE PATERNELLE PAR APPLICATION DE L'ARTICLE 3'78, ALINÉA 2, DU CODE PÉNAL. DÉCHÉANCE OBLIGATOIRE SUR PIED DE L'ARTICLE 1er DE LA LOI DU 15 MAI 1912. - DÉCHÉANCE DE LA MÈRE SEULE. INUTILITÉ DE LA CONVOCATION DU CONSEIL DE FAMILLE.
L'individu 1·econniL coupable d'infraction d'excitation de l'un de ses enfants 1winem·s à la débauche doit être déchu de la puissance paternelle à l'égard de tous ses enfants, par application de l' m·ticle 1er de la loi du 15 mai 1912, niême s'il n'a été condamné que conditionnellement à la déchéance des droits et avantages de la pilissance paternelle sur pied de l'a1·ticle 378, alinéa 2, du Code pénal.
Il n'est ·pas 1·eqiiis, pour l'application de l'article 1er de la loi du 15 mai 1912, que l'excitation à la débaiiche ait 1·evêtu un caractfre habitiiel.
COURS D'APPEL 27
Lorsque la mhe seiûe est déchue de la puissance paternelle, le tribunal ne doit pas, en prononçant la déchéance, 01·donner la convocation du conseil de famille. (Loi du 15 mai 1912, art. 5.)
(MINISTÈRE PUBLIC, C. B ... )
ARRÊT.
LA COUR; - Vu, en expédition conforme, le jugement rendu par le tribunal de première instance de Namur le 21 mars 1951 ;
Vu l'appel de ce jugement, régulièrement, interjeté par le procureur du roi de Namur le 31 mars 1951 ;
Attendu que l'intimée a été condamnée, le 1er décembre 1950, uar le tribunal correctionnel de Namur ... à une peine de huit mois d'emprisonnement et à l'interdiction pendant dix ans des droits énumérés à l'article 31 du Code pénal, nos 1er, 3, 4 et 5, ·et à la déchéance des droits et avantages à elle accordés sur la personne et les biens de son enfant mineur par le Code civil, livre Jer, titre IX cc De la puissance paternelle»> ; que ce jugement a été mitigé par le bénéfice d'un sursis de cinq ans ; qu'il est coulé en force de chose jugée ;
Attendu ,que pareille condamnation, par application de l'article.1er, 1 o, de la loi du 15 mai 1912, entraîne la déchéance obligatoire de la puissance paternelle ;
Attendu qu'à tort le tribunal a refusé d'ordonner cette déchéance, sous prétexte que la condamnation prononcée est, en l'espèce, conditionnelle;
Attendu que la loi de 1912 ne fait aucune distinctîon de .ce genre; qu'elle exige une seule condition : la condamnation, c'est-à-dire que l'individu poursuivi soit reconnu coupable, sans qu'il y ait lieu de tenir compte de la peine infligée, eu égard à la gravité plus ou moins grande des faits, aux antécédents judiciaires ou à l'amendement possible;
Que le sursis est à la fois une faveur accordée en raison des bons antécédents et une mesure destinée à favoriser l'amendement; que s'il. s'applique aux peines prononcées, il est sans influence aucune sur la déchéance prescrite par la loi de 1912, dont le but essentiel est d'assurer la protection de l'enfance;
Attendu qu'en vain l'intimée soutient que la mesure réclamée oar le ministère public ne peut être ordonnée, parce qu'il y a identité de cause, d'objet et de parties entre l'action pénale jugée et la présente poursuite; qu'en effet, outre
ce qui vient d'être rappelé de la différence entre les deux. déchéances, dont l'une
· est une peine, l'autre une mesure d'ordre civil, il échet principalement d'observer que les deux mesures n'ont pas-la même portée, celle de la loi de 1912 étant plus
. étendue dans ses effets ; que cette différence ne réside pas seulement dan:s le fait que la déchéance pénale ne s'applique qu'à l'enfant victime, tandis que l'autre s'éte.nd à tous les enfants, mais que la déchéance, mesure de protection de l'enfance, porte en outre sur le droit de consentir au mariage, à l'adoption, à l'option et sur celui d'émanciper (Rép. prat. dr. belge, v 0 Puissance paternelle, n° 383) ;
Attendu que l'intimée soutient encore que l'action n'est pas fondée, parce que l'excitation à la débauche dont parle l'article 1er, 1°, serait seulement celle que prévoyait l'article 379 du Code pénal, au moment du vote de la loi, c'est-à-dire un délit d'habitude; que ce n'est que par u:µe loi subséquente du 26 mai 1914 qu'un fait isolé a été constitué en délit, ce qui n'avait pas été préyu lors de la loi de 1912; qu'elle excipe à l'appui de cette thèse d'un arrêt de la cour de cassation du 12 novembre 1928 (PASIC., 1929, I, 12) ;
Attendu que l'identité de l'espèce tranchée par cet arrêt de cassation est seulement apparente; qu'il a trait à une loi de base interdisant l'ouverture de débits de boissons à certaines catégories de personnes se livrant «habituellement»·. à des actes contraires aux bonnes mœurs ; que l'arrêt précisl:! bien que le législateur avait en vue la débauche habituelle de mineurs;
Attendu qu'au contraire l'article 1er, 1°, de la loi de 1912 n'exig·e nullement que les crimes ou délits y prévus revêtent le caractère d'habitude, ce qui ressort du texte même : « Les père et mère· condamnés pour attentat à la pudeur, viol ou excitation de mineurs à la débauche>> ·
· que, l'élément habituel n'étant point spé: cifié, il importe peu que l'article 379 nouveau n'exige plus cette circonstance; que l'article 1er, 1°, reste donc d'appli-9a~ion (en ce sens Rép. prat. dr. belge, ibid., n° 384) ;
Attendu enfin qu'il importe peu que l'assignation en déchéance ne soit pas, par suite d'erreur, basée sur l'application de l'article 1er, 1°, mais sur l'article 3, 20 (déchéance facultative fondée sur l'inconduite notoire et la négligence gTave) ; qu'en effet, puisque le fait reproché à l'intimée rend la déchéance obligatoire en raison de la gravité du fait sanctionné,
28 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
a fortiori peut-on dire qu'il y a inconduite notoire ou négligence grave ; que l'erreur est donc sans conséquence et que les motifs invoqués dans l'exploit d'assignation suffisent à justifier la décision;
Par ces motifs, ouï M. Dallemagne, premier avocat général, en ses réquisitions, réforme la décision entreprise ; déclare en conséquence B ... , épouse de H ... , domiciliée à M ... , déchue de la puissance paternelle à l'égard de son enfant mineur Clément-Jules-Emile-Ghislain, né à Graux, le 21 jànvier 1934; et attendu que le père conserve les attributs de la puissance paternelle, dit n'y avoir lieu de réunir le conseil de famille ; condamne l'intimée aux dépens des deux instances.
Du 28 juin 1951. - Cour de Liège. -1re ch. - P1·és. M. Van de Kerckhove, président. - Min. publ. M. Dallemagne, premier avocat ,général.
COUR D'APPEL DE LIÈGE
16 novembre 1950
1° IMPOTS. - CONTRIBUTION FONCIÈRE. - Lor DU 28 JUILLET 1938 METTANT CERTAINES CONTRIBUTIONS A CHARGE DU PROPRIÉTAIRE NONOBSTANT TOUTE CONVENTION CONTRAIRE. - DISPOSITION D'ORDRE PUBLIC.
2° RÉPÉTITION DE L'INDU. - ExÉCU'l'ION VOLONTAIRE D'UNE DISPOSITION CONTRAIRE A L'ORDRE PUBLIC.
NON-RECEVABILITÉ DE LA DEMANDE EN RÉPÉTITION.
1° La disposition de la loi dit 28 juillet 1938 mettant certaines contributions à charge du p1·opriétaire, nonobstant toutes conventions contraires, est d'ordre pitblic.
2° La convention de bail dans laqiwlle a été sciemment insérée une clause contraire à la disposition de la loi du 28 juillet 1938, qui met à la charge du prnpriétaire certaines contributions, ne peut recevoir exécution forcée sm· ce point.
JV! ais l'exécution volontaire, et en connaissance de cause, pm· le locataire de cette disposition n'entraîne pas au p1·ofit de ce dernier le bénéfice de l'action en répétition de l'indu.
(BASTIN-LANGHOR, C. SOCIÉTÉ ANONYME KURSAAL.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu, en expédition conforme, avec les pièces annexées, le jugement du tribunal de commerce de Liège en date du 16 avril 1949;
Vu l'appel de cette décision, interjeté le 7 mai de la même année par la dame Bastin-Langhor;
Attendu que la recevabilité de cet appel n'est pas contestée; qu'il n'existe par ailleurs aucun moyen d'irrecevabilité que la cour doive soulever d'office;
I. Sur le premier chef de la demande : Attendu que l'appelante a été débou
tée d'une action tendant à obtenir le remboursement d'une somme de 120.295 fr. représentant le montant des contributions foncières supplémentaires afférentes aux exercices 1939 à 1944 inclusivement, qu'elle a payées en exécution d'une clause insérée au bail authentique du 6 mai 1939, lui donnant en location l'immeuble ou est installé à Liège le cinéma «Normandie », propriété de la société intimée ;
Attendu que, contrairement à ce qu'affirme l'appelante en son premier ajournement du 11 juillet 1947, ce n'est aucunement ensuite d'une « erreur manifeste » dans son chef que les payements litigieux ont été effectués;
Qu'au contraire la locataire savait pertinemment bien qu'une disposition de la loi fiscale du 28 juillet 1938, c'està-dire un acte législatif antérieur à la conclusion. du bail entre parties, mettait à charge du propriétaire, à l'exclusion du locataire, les contributions foncière et nationale de crise supplémentaire ;
Qu'ainsi donc, comme l'a judicieusement fait observer le premier juge, l'appelante n'a pu commettre et n'a pas commis une erreur de fait ou de droit;
Attendu que, dans cet ordre d'idées, les éléments de la cause révèlent que l'appelante a négocié et obtenu de la société bailleresse deux prorogations successives du bail, la dernière la dégageant de toutes ses obligations envers l'intimée qui acceptait qu'un tiers fût substitué aux obligations de l'appelante;
Attendu que l'on doit en déduire que l'exécution par la locataire de la clause critiquée, a constitué pour elle un moyen capable de déterminer la société intimée à consentir les concessions que l'on sollicitait et que l'on
1 obtint;
COURS D'APPEL 29
Qu'ainsi l'appelante a payé. volontairement et en connaissance de cause, en poursuivant un but d'intérêt personnel qu'elle semblait avoir atteint, d'ailleurs;
Attendu que, ces faits étant acquis, il €chet d'examiner successivement le mérite des trois moyens mis par la dame Bastin à la base de son action ;
Attendu qu'elle soutient d'abord avoir fait des payements indus ; que les premiers juges ont adéquatement repoussé ce moyen, les payements effectués trouvant leur cause dans la clause du contrat de bail librement avenu entre parties;
Que c'est en vertu de cette clause que les sommes étaient dues et qu'elles ont été payées par l'appelante, la notion de la licéité ou de la non-licéité de la clause étant une condition distincte à examiner seulement lorsqu'elle est soulevée;
Attendu que le second moyen, tiré de la notion de l'enrichissement sans cause, a été tout aussi bien écarté en la décision attaquée ; qu'il est, en .effet, de principe, comme l'admet d'ailleurs l'appelante en procédure d'appel, que cette institution juridique présente un caractère essentiellement subsidiaire et ne peut être invoquée qu'à défaut de tous autres recours possibles conformément au droit commun ;
Qu'au surplus, comme il est dit ciavant, les payements ont trouvé leur cause dans le contrat de bail ;
Attendu que le litige se limite donc à une .action en répétition de sommes après le prononcé de la nullité de la clause du bail en tant qu'elle met à charge de la locataire certaines contributions que la loi entend faire supporter par le propriétaire nonobstant toutes conventions contraires;
Attendu que la disposition de la loi du 28 juillet 1938 revêt un caractère d'ordre public ;
Qu'il s'agit, en effet, d'une règle d'ordre économique et social, restreignant la liberté de contracter des individus, établie pour la protection d'intérêts privés, mais destinée avant tout à protéger l'individu présumé faible contre l'emprise économique d'un cocontractant présumé fort;
Attendu que le législateur confère, de par sa seule volonté, à la loi son caractère d'ordre public, selon qu'il l'estime opportun, eu égard aux circonstances;
Qu'en l'espèce il veut que telle situation soit réglée ainsi qu'il en décide et
qu'il ne peut, dès lors, être dérogé par des particuliers à la règle légale ;
Attendu qu'il s'ensuit que la clause insérée au contrat est incontestablement nulle, dans la limite où elle fait supporter par la locataire les impôts repris ci-avant;
Mais attendu qu'en l'espèce la fraude à la loi a été concertée et consentie par l'une et l'autre des parties en cause;
Que l'appelante, ainsi qu'il a été dit à l'exposé des faits, a sciemment et volontairement admis la clause dans ce qu'elle avait d'illicite et d.e contraire à la loi, puis Jui a, en pleine connaissance de cause, donné complète exécution, pour parvenir à des fins qui lui étaient personnelles;
Qu'elle est mal venue présentement, après avoir manqué à l'observation de la loi, à inviter la justice à la restituer dans des droits qu'elle a elle-même méconnus; que, dans ce cas, le droit à répétition disparaît ;
II. Quant à la demande en payement d'une somme de 19. 731 francs :
Attendu, quant à ce, que la décision des premiers juges est purement préparatoire, ceux-ci s'étant bornés à fixer jour pour conclure et plaider ;
Que l'appel n'en est donc pas recevable;
Par ces motifs, écartant comme non fondées toutes autres conclusions 1° statuant sur l'appel interjeté contre le jugement en tant qu'il' déboute la dame Bastin - Langhor de son action en remboursement d'une somme de 120.295 francs, dit l'actfon Iiqt;J_ recevable, l'appelante ayant sciemment et volontairement agi en contravention de la loi; 2° déclare l'appel non recevable en ce qui concerne la demande ep_ payement d'une somme de 19. 731 francs; condamne l'appelante aux dépens d'appel
Du 16 novembre 1950. - Cour de Liège. - pe ch. - Prés. M. Van de Kerckhove, président. Pl. MM. L. Matray et Laurent-Neuprez.
COUR D'APPEL DE LIÈGE
11 octobre 1950 - ter mars 1951
1° FAUX. - CONVENTION RECONSTITUÉE. PRÉSENTÉE COMME CONVENTION ORIGINALE. - PRÉJUDICE POUR UNE ADMINISTRATION EXACTE
30 JURISPRUDENCE DE' BELGIQUE
DE LA JUSTICE. - FAUX EN ÉCRITURES. - Co'DE PÉNAL, ARTICLE 196.
2° PEINE. INTERDICTION DE CER-TAINS DROITS. - CONDAMNATION A UNE PEINE CORRECTIONNELLE. - OBLIGATION DE DÉTERMINER LES DROITS DONT L'INTERDICTION EST PRONONCÉE. - CODE PÉNAL, ARTICLE 33.
1° Constitue un faux en éc1·itu1'es, la 1•ep1·oduction d'une converition éc1'ite antérieure, qui a été égarée, lorsqu'elle est p1·ésentée,. contrafrement à la vérité, comme un titre Qriginal et que l'écrit ainsi fa briqué est de nature à comproniettre l'administration d'une exacte
.justice. (Premier arrêt.) Les .règles légales qui déte1·1nine.nt l'ad
mission des preuves en matière . civile sont édictées dans un intérêt collectif qui fait que leu1· violation constitue une atteinte à la foi publiqiœ sanctionnée par le titre III du livre II du Code pénal, lequel a pour objet d'assu1·er l'authenticité et la sincérité des formes. (Second arrêt.)
2° Les décisions répressives qui prononcent l'intàdict.ion de ce1'tains droits consécutivement à· la condam1iation à une peine c01·1·ectionnelle principale, doivent ·indiquM' si l'interdiction porte sut' tout ou pa1'tie des droits énumérés à l' article 31 dit Code pénal. (Second arrêt.)
{MINISTÈRE PUBLIC, C. A ... )
PREMIER ARRÊT.
Le 11 octobre 1950, la chambre des niises en accusation de la cou1· de Liège avait rendu l' atTêt suivant :
LA COUR;.- Attendu que l'ordonnan~e entreprise a renvoyé devant le tribunal correctionnel de Namur, Arthur D ... , Emile D .. : et Paul H ... du chef de participation au crime de faux en écritures et d'usage de faux, pour avoir fabriqué une fausse convention et fait usage de ce faux en justice ;
1
Attendu que Franz A.~., inculpé des mêmes préventions, a bénéficié d'un nonlieu;
Attendu que les faits qui ont motivé les poursuites peuvent se résumer comme suit : ·
Une dame R ... , d'Anvers, propriétaire d'une ferme qu'elle désirait vendre, donnait mandat, le 14 janvier 1948, à Arthur D ... , de lui trouver un acquéreur dans un délai expirant le 15 février suivant; elle promettait à D... une commission de 2 p. c. sur le prix de
vente en cas de réalisation de celle-ci dans le délai prévu ;
Quelques jours avant l'expiration du terme, D ... n'ayant pas trouvé acquéreur, convainquit H ... de jouer le rôle d'acheteur ; il annonça la vente à la dame R ... ;
Dans la suite, la ferme fut réellement vendue à un tiers, mais D ... prétendit obtenir la commission sur la soi-disant vente à H ... ; la dame R ... qui était per-suadée que la vente à H ... n'avait pas été sérieuse, refusa; D ... chargea Me A ... d'assigner la dame R ... en payement de la commission; l'affaire fut successivement plaidée devant le tribunal de première instance de Dinant et. devant la cour;
Tant en première instance qu'en appel, Me A ... produisit à l'appui de la demande un compromis constatant la soi-disant vente, signé par H ... et daté du 13 février 1948, date à laquelle D ... avait averti la dame R. .. de la conclusion de la vente à H ... , qui pour les comparses n'était que fictive (certificat de dépôt du faux au greffe, farde VIII) ;
Attendu qu'il est établi dès ores que le compromis qui fut produit devant les instances judiciaires était un compromis rédigé après coup; qu'on peut, semble-t-il, situer sa rédaction en mars 1949 (voy. à cet égard la lettre de Me A ... à son client D ... du 21 mai 1949, dont copie en tête de la farde II), c'est~à-dire à un moment ou Me A... mettait au point son dossier, et enfin que son auteur est Me A ... lui-même;
Attendu que Me A ... est en aveu sur la matérialité des faits, mais qu'il prétend avoir ignoré que son client n'avait conclu qu'une vente fictive et avoir rédigé la pièce arguée de faux dans la pensée qu'il ne faisait que reconstituer une pièce égarée ou, en tout cas, que transcrire une convention verbale antérieure;
Attendu que, accueillant d'emblée le système de l'inculpé, le premièr juge a considéré qu'il existait un doute sérieux sur la conscience que l'inculpé avait eu de la fausseté des énonciations de l'écrit qu'il avait rédigé d'après les explications de son client, et qu'en tout cas on n'apercevait pas l'intention fraudùleuse ou le dessein de nuire qui aurait pu l'inspirer;
Que, ce faisant, le premier juge a empiété sur les attributions du juge du fond;
Attendu, sur les éléments de fait, que pour justifier le non-lieu en faveur de l'inculpé A .. ., le premier juge a dû écarter sans discussion les déclarations
COURS D'APPEL 31
formelles des coïnculpés Arthur D ... et Emile D ... qui, tant en l'absence de l'in- · culpé A ... qu'en sa présence, ont affirmé que Me A ... avait été mis au courant dès l'origine du caractère fictif de la vente et qu'il avait accepté d'établir la pièce apocryphe sachant qu'elle ne correspondait pas à la réalité, de connivence avec Arthur D ... , pour les besoins du procès qu'il allait plaider (voir notamment pièces 25, 35, 44, 47 et 52) ;
Attendu que le premier juge a dû passer sous silence le fait que l'inculpé a lui-même reconnu que le texte rédigé par lui ne correspondait pas complètement à ce qu'il croyait, dans son système, avoir précédemment existé; que l'inculpé a déclaré avoir ajouté une clause donnant à la vente un caractère de vente sous condition suspensive; qu'il paraît résulter en outre que, dans 'sa plaidoirie devant la cour, l'inculpé A ... s'est servi de l'existence de cette clause pour affirmer la réalité du compromis;
Que le premier juge n'a pas retenu les explications embrouillées de l'inculpé et qu'il n'explique pas comment l'inculpé A... ne pêut dire exactement s'il a reproduit un acte antérieurement existant, mais égaré, ou s'il a établi par écrit les clauses d'une convention verbale;
Attendu, s'ur les éléments de droit, que le premier juge a dû, pour rendre sa décision, méconnaître une jurisprudence et une doctrine bien établies quant aux conditions d'incrimination, à titre de faux criminel, d'un acte faussement établi;
Attendu qu'en ne retenant que la partie la plus favorable des aveux d~ l'inculpé - abstraction faite de l'ajoute qu'il reconnaît et qui pourrait à elle seule ètre constitutive du crime - il y avait lieu de renvoyer A... devant la juridiction de fond pour s'expliquer sur les préventions mises à sa charge, que l'inculpé ait simplement reproduit une convention écrite égarée ou qu'il ait mis par écrit une convention verbale antérieure;
Qu'en effet, si l'écrit dressé par Me A ... avait pour but de constater une convention verbale antérieure, il pourrait être déclaré coupable des préventions libellées contre lui; qu'il a encore été récemment décidé par la cour de céans (14 juillet 1949, Jm'. Liège 1949-1950, p. 61) que la confection d'une convention antidatée revêt un caractère frauduleux qui la rend punissable, même si l'écrit n'est, selon l'inculpé, que la constatation d'une
convention verbale avenue entre parties à la date indiquée; .
Que si l'écrit dressé était la reproduction d'une convention écrite antérieure, mais qui avait été égarée, il y aurait encore matière à poursuite; qu'après avoir hésité, la doctrine et la jurisprudence ont reconnu que la reproduction d'actes vrais peut constituer un faux si elle est présentée, contrairement à la vérité, comme un titre original et qu'elle a été faite dans le but de se procurer un avantage illicite;
Qu'en effet, d'abord la légitimité du but poursuivi, qui était en l'espèce de faire aboutir une prétention juridiquement fondée (dans le système de l'inculpé, bien entendu), ne justifie pas l'illégalité et la malhonnêteté du moyen (DONNEDIEU DE VABRES, Essai SU1' la notion de préjudice dans la théorie générale du faux documentaire, p. 213 et suiv.; FAUSTlN RELIE, Pratique c1·iminelle, 5e édit., 1948, Droit pénal, t. II, n° 129; voy. aussi par analogie : cass., 23 juin 1941, PASIC.,. 1941, I, 248, avec une note de M. le procureur général Cornil);
Qu'ensuite le faux est conçu, dans notre droit pénal, non comme une atteinte à un bien privé; mais comme une atteinte à la vérité, bien collectif; que l'objet de la protection pénale, par l'institution des crimes et des délits contre la foi publiq-µe, est l'intérêt colleètif à l'authenticité et à la sincérité des formes, si bien qu'il y a faux dès qu'un· acte .est dépourvu de l'authenticité ou de la véridicité; que pareil acte porte atteinte à la confiance mutuelle qui est un des fondements principaux de la vie en société (DONNEDIEU DE VABRES, op. cit., p. 32);
Que, plus spécialement dans l'espèce envisagée, la reconstitution d'une convention égarée était de nature à mettre l'inculpé Arthur D ... dans une position devant la justice qui n'était pas celle
. qu'il aurait dû avoir s'il s'était présenté dans la situation conforme à la réalité; qu'ainsi l'écrit litigieux était de nature à compromettre l'administration d'une exacte justice;
Attendu qu'il semble résulter de la note de plaidoirie de l'inculpé A .. . devant la cour, au sujet du droit de D .. . à la commission, que l'inculpé lui-même faisait grand cas de l'acte-de compromis qu'il se gardait bien de signaler comme étant la simple reproduction de mémoire du compromis vrai ;
·Attendu enfin que le premier juge
32 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
paraît s'être mépris sur la notion de l'intention frauduleuse; que la recherche d'un intérêt personnel n'est pas un élémeµt constitutif du faux (Bruxelles, 3 avril 1939, Rev. dr. pén., 1939, p. 1532) ; que l'intention frauduleuse peut exister aussi bien lorsque le faussaire cherche à procurer un avantage illicite à autrui que lorsqu'il a agi dans un intérêt ou pour un avantage personnel (cass., 22 octobre 1928, P ASIC., 1928, I, 249 ; Bruxelles, 20 mai 1948, J. T., 1948, p. 559);
Attendu que de l'ensemble de ces considérations il résulte qu'il existe à charge de l'inculpé des indices suffisants de culpabilité des infractions libellées au réquisitoire ; .
Attendu que ces infractions sont punies par la loi de peines criminelles, mais qu'il existe en faveur de l'inculpé des circonstances atténuantes résultant de l'absence de condamnations antérieures;
Par ces motifs, la cour, chambre des mises en accusation, vu les articles 193, 196, 197, 213, 214, 7 9, 80 et 83 du Code pénal, 127 et 130 du Code d'instruction criminelle, 1er et 2 de la loi du 4 octobre 1867, 24 de la loi du 15 juin 1935, 140 de la loi d'organisation judiciaire du 18 juin 1869, statuant à l'unanimité, réforme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a décidé qu'il n'y avait pas lieu à suivre contre l'inculpé Franz A ... ; en conséquence renvoie le dit A ... devant le tribunal corr~ctionnel de Namur pour y être jugé conj ôin te ment avec les inculpés Arthur D ... , Emile D ... et Paul H ... du chef d'avoir: à Namur et de connexité à Dinant, Liège ou ailleurs en Belgique en 1948-1949, en tout cas depuis moins de trois ans, dans une intention frauduleuse ou à dessein de nuire, commis un faux en écritures authentiques et publiques et en écritures de commerce, de banque ou en écritures privées, soit par fausses signatures, soit par contrefaçon ou altération d'écritures ou de signatures, soit par fabrication de conventions, dispositions, obligations ou décharges, ou par leur insertion après coup dans les actes, soit par addition ou altération de clauses, de déclarations ou de faits que ces actes avaient pour objet de recevoir et de constater, en l'espèce en fabriquant une convention fictive de vente et en antidatant celle-ci; en outre à Namur et de connexité à Dinant, Liège ou ailleurs en Belgique, en 1948-1949, en tout cas depuis moins de trois ans, dans une intention frauduleuse ou à dessein de nuire, fait usage
de l'acte faux ou de la pièce fausse la sachant telle.
Du 11 octobre 1950. - Cour de Liège. - Ch. des mises en accusation; - Prés. M. Van de Kerckhove, président. -Nlin. publ. M. Brahy, substitut du procureur général. - Pl. M. P. Tschoffen.
SECOND ARRÊT.
Statuant comme jU1'idiction de jitgement, la coit1' 1'endit, le 1er mars 1951, l'ar1'êt sitivant :
LA COUR;
(On omet quant aux p1'éventions mises à chm'ge des coprévenus D ... et H .. .)
Attendu qu'il est acquis que l'écrit incriminé de faux est un acte fictif dressé pour les besoins de la défense des intérêts d'Arthur D ... , rédigé par le conseil de celui-ci, avec son accord, le 28 mars 1949, c'est-à-dire à une époque où le litige était pendant plusieurs mois devant le tribunal de Namur et sur le point d'être plaidé;
Mais attendu qu'alors que les D ... père et fils soutiennent, comme il a été dit antérieurement, qu'on se trouve en présence d'un acte fictif créé de to·utes pièces, le prévenu A ... continue à soutenir, bien qu'il n'ait pas toujours été aussi affirmatif, que la pièce produite devant le tribunal de Namur et devant la cour d'appel ne· serait que la reproduction en termes plus adéquats ou plus heureux d'un. compromis original signé le 13 février t 948 ;
Attendu qu'interrogé, au cours de l'instruction, sur le point de savoir pour quelle raison le compromis initial aurait été remplacé par celui produit aux débats, A... a déclaré à diverses reprises que c'est parce qu'il avait estimé que les termes du premier étaient peu heureux, au point de vue des conditions de payement; qu'à l'audience du tribunal de Namur, le 27octobre1950, il précisait: « J'ai trouvé que les expressions de ce papier n'étaient pas heureuses en ce qui concerne les conditions de payement et la date de payement; je l'ai dit a D ... , lequel a répondu : nous pouvons en faire un autre puisque H ... est d'accord; j'ai pensé que tout était correct et que les précisions que je voyais dans .le dossier corroboraient (sic) avec la seconde version de D ... ; j'ai dit à D ... qu'il pouvait faire un second papier; j'ai dicté la pièce à mon employé et, pour ne pas que H ... ait des ennuis avec l'enregistrement, j'ai ajoUté la clause disant que la vente était faite sous condition suspensive » ;
COURS D'APPEL 33
'Attendu qu'il résulte de ces différentes déclarations de A ... deux choses bien distinctes: la premiêre, que le remplacement du compromis initial aurait été motivé par le désir ou la nécessité d'employer des termes plus adéquats ou plus heureux, en ce qui concerne les conditions de payement et la date de payement; la seconde, qu'une clause de condition suspensive avait été ajoutée pour sauvegarder les intérêts de H ... ;
Attendu, quant à la première de ces choses, qu'on ne peut sérieusement croire qu'une simple question de forme. ou de rédaction, le respect des règles de style ou de la grammaire, auraient pu amener un praticien du droit, ayant déjà une longue expérience du barreau, à remplacer un instrument de preuve original par un texte nouveau qui devait nécessairement être antidaté; qu'il fallait évidemment plus, c'est-à-dire que, tel que l'instrument se présentait, il ne répondait pas à ce qu'en attendait D ... et son conseil, soit dans son entièreté, soit dans l'une ou l'autre de ses clauses, pour faire valoir le droit du premier; qu'on doit en conclure que le second écrit n'était pas une reproduction pure et simple du premier dans son esprit et changé uniquement dans sa forme, mais bien un texte modifié du premier écrit dans son esprit même et partant altéré pour donn~r à certaines de ses stipulations une force probante que n'avait pas le texte original; qu'il n'est en tout cas pas possible de concevoir que, pour la simple raison que certains termes employés n'auraient pas été heureux, on ait créé un acte nouveau pour le substituer à un acte régulier qui n'était ni perdu ni détruit; que d'ailleurs, à l'audience du tribunal de Namur (procès-verbal d'audience, p. 18), A ... a reconnu que la pièce qui lui aurait été exhibée par D ... ne disait pas la même chose, mais à peu près la même chose que celle rédigée par lui;
Attendu, quant à la seconde « clause suspensive ll, qu'il convient tout d'abord de relever que c'est à l'audience du tribunal correctionnel de Namur que le prévenu A... a pour la première fois déclaré que la clause suspensive avait été ajoutée en vue de garantir H ... contre les exigences éventuelles du fisc;
Attendu que cette ajoute, qui constitue une addition à la convention, ne pourrait se justifier si le compromis nouveau n'était que la reproduction, améliorée dans son style ou ses expressions, du texte ancien ; que la sauvegarde éventuelle des droits d'un tiers ne peut mo-
PASIC., 1952. IIe PARTIE.
tiver un fait aussi grave qu'un remplacement de texte ; que cette explication manque de sérieux; qu'il faut d'ailleurs relever que, si A ... a soutenu à l'audience du tribunal correctionnel de Namur que «cette clause avait été ajoutée pour éviter à H ... des. ennuis avec l'enregistrement et nullement pour permettre de dire que c'était une exigence de Mme R. .. qui était cause que H ... se retirait et que la vente ne pouvait avoir lieu ll, cette version n'apparaît nullement conforme à la réalité car, dans la note que A ... avait jointe à son dossier (tribunal civil de Namur), on lit textuellement: «L'acheteur, diligent en ce qui concerne ses droits, avait même stipulé qu'il n'achetait que sous la condition suspensive du respect absolu, pour la dame vendeuse, de la date de payement au jour de la passation de l'acte, au plus tard le 15 avril 1 %8 ll, et plus loin ajoutait : « Il est bien évident que dans ces conditions l'acheteur H ... a fait jouer la condition suspeRsive et a dit « Moi je me retire » ;
Attendu qu'on est péniblement surpris de l'audace avec laquelle A ... a donné au tribunal correctionnel l'explication mensongère qu'il a répétée à la cour et on se demande, en présence de ces faits, si ce n'est pas à tort que le premier juge a cru devoir accorder à A ... plus de crédibilité qu'il ne le faisait à D ... ; qu'il résulte en tout cas de ce qui vient d'être dit que, examiné sous le seul angle de la condition suspensive, le compromis se présente comme un faux punissable aux termes du Code pénal, tout comme il l'était indépendamment de cette clause suspensive, puisque destiné à apporter une preuve qui ne découlait pas ou ne pouvait découler du texte initial;
Mais attendu que les éléments de fait acquis aux débats rendent absolument inadmissible l'explication du remplacement d'un compromis initial par un texte nouveau; que, d'une part, si à certains moments, et encore devant la cour, A ... a soutenu ce système, il a été beaucoup moins affirmatif à d'autres moments, notamment lorsqu'on lui faisait remarquer le peu de sérieux de cette version; qu'il n'a pu alors que s'en référer à des souvenirs peu précis; que, d'autre part, les trois autres prévenus ont toujours, comme il a déjà été dit, dénié l'existence non seulement d'un compromis, mais encore d'une vente ou d'une promesse de vente ; que si les déclarations d'Arthur D ... peuvent être sujettes à caution, il n'en est pas de même en ce qui concerne les deux autres prévenus,
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34 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
qui semblent bien avoir fait montre de la plus grande sincérité dans le cours de l'instruction ; que, dans ces conditions, il faudrait supposer que D... ait dressé seul un premier faux, dont il aurait fait usage vis-à-vis de A ... ; que ceci paraît invraisemblable et que d'ailleurs A ... ne l'a jamais prétendu; que la lettre de A ... à D ... du 30 avril 1948, qui n'a jamais été envoyée, n'accuse réception que d'un seul compromis accompagnant le dossier, compromis relatif à un autre litige ; que sans doute A ... tente d'expliquer pour quelle raison un .second compromis ne lui aurait pas été envoyé à ce moment, mais que ce.tte explication est dépourvue de toute pertinence, puisque aussi bien un compromis se justifiait, que H ... soit homme· de paille ou qu'il soit acheteur pour son compte; qu'enfin les pièces du dossier elles-mêmes faisaient état d'un compromis et affirmaient son existence ; qu'on ne voit dès lors pas les raisons pour lesquelles, s'il avait existé, il ne se serait pas trouvé joint au dossier; qu'il résulte enfin de la lecture des conclusions déposées devant la cour que ce systèmé d'un compromis initial est actuellement abandonné par A ... , qui ne fait plus état que d'un accord verbal, en date du 13 février 1948, dont l'existence serait établie par la correspondance D ... -R. .. ;
Attendu qu'il convient dès lors d'admettre que, comme D... l'a toujours affirmé, il n'a jamais fait état auprès de son conseil d'éléments autres que ceux composant le dossier qu'il lui avait remis et qui a été soumis au tribunal de Namur, mais en laissant toutefois ignorer que H ... ne s'était jamais porté acquéreur de la Ferme du Pape et que la lettre du 21 février ne constituait qu'un acte de complaisance ;
Attendu qu'il est actuellement constant que l'écrit litigieux a été rédigé par A ... de l'accord de D ... le 28 mars et signé par H ... le 20 juin; que A ... soutient qu'il ne serait que la mise par écrit de faits vrais ou qu'il croyait vrais, et que ce ne serait pas, au sens de la loi, · « causer préjudice à quelqu'un » que de tenter de le contraindre par quelque moyen que ce soit à exécuter une obligation dont il est légalement et moralement tenu, et que ce n'est pas s'assurer un avantage illicite ou être mû par une intention frauduleuse que de tenter de faire admettre comme vrais, par la justice, des faits qu'on croit vrais (conclusions A ... );
Attendu, en effet, que dans ses con-
clusions A ... invoque, comme il l'a fait à différentes reprises à l'instruction (pièce 51, p. 4, et pièce 55, p. 3 in fine) et à l'audience du tribunal de Namur (p. 12), que, réserve faite de la mention finale, le compromis incriminé ne serait que la mise par écrit de faits vrais à lui affirmés par son client et établis par les éléments du dossier qui lui avait été remis, et desquels il résultait, pour tout homme non prévenu, que la vente litigieuse avait été effectivement conclue entre D ... et H ... , vente dont Mme R ... avait été informée en temps utile et que H ... avait confirmée; qu'ainsi l'écrit dressé par A ... n'avait fait que constater l'existence d'une convention verbale antérieure;
Attendu que l'examen des pièces du dossier qui fut soumis au tribunal de Namur ne permet pas d'admettre davantage ce soutènement du prévenu; que sans doute, dans ses lettres de février 1948, D ... annonçait à Mme R ... qu'il avait réalisé la vente, mais que ce n'étaient là que des affirmations, dénuées de toute base, et dont on ne peut trouver confirmation dans la lettre laconique et équivoque par laquelle H ... répondait à Mme R ... qui lui demandait de confirmer les dires de D ... ; que les termes ambigus de cette lettre ne permettent nullement de faire décider qu'elle venait confirmer les dires de D ... ; que c'est ce qu'a pensé Mme R ... et ce qu'a estimé le tribunal civil de Namur; qu'on se demande d'ailleurs pour quelle raison, si les éléments du dossier avaient eu la portée et la valeur que leur attribue A .. ., la confection d'un instrument de preuve se serait avérée nécessaire, puisque aussi bien cette preuve résultait, selon A ... , des éléments eux-mêmes;
Attendu qu'ainsi, quelle que soit la thèse de A .. ., qu'il s'agisse d'un écrit de remplacement ou d'un écrit constatant une conv13ntion verbale antérieure, ses explications ne se trouvent étayées par aucun élément sérieux, mais au contraire contredites par les faits et les circonstances qui apparaissent logiquement établis par l'ensemble du dossier; qu'il suit, quel que soit l'angle sous lequel on considère en fait l'acte incriminé, qu'il constitue une altération consciente de la vérité ou une addition destinée à suppléer à l'absence de preuve des prétentions émises par D ... et, par. voiE) de conséquence, à créer un préjudice pour son adversaire;
Attendu, enfin, qu'à supposer qu'il faille, ce qui est formellement .!=lxclu,
Nederlandse afdeling COURS D'APPEL FAC. RECHTSGELEERDHEID 35
admettre l'un ou l'autre des essais de justification du prévenu, encore conviendrait-il de décider que les préventions sont établies, ne pouvant être contesté que, par le fait même de l'antidate, l'écrit dressé par A ... revêtait un caractère frauduleux et se présentait, contrairement à la vérité, comme un titre original; que c'est là entraver l'accomplissement de la mission du juge et porter atteinte à la foi qui s'attache à sa décision; que pareil agissement tendait à placer son auteur . dans une position plus favorable que celle qu'il aurait dû occuper, ce qui constitait incontestablement un préjudice pour son· contradicteur; qu'enfin les règles légales qui déterminent l'admission des preuves sont édictées dans l'intérêt collectif qui fait que leur violation constitue une atteinte à la foi publique sanctionnée par le livre III du Code pénal, lequel a pour objet d'assurer le respect de l'authenticité et la sincérité des formes ;
Attendu que les peines prononcées sont légales; que celle prononcée à charge de A... est proportionnée à la gravité des faits ; qu'à bon droit le tribunal a accordé à A ... le bénéfice du sursis et a prononcé la confiscation du faux;
Attendu que les décisions qui prononcent l'interdiction concernant des droits par application de l'article 33 du Code pénal doivent indiquer si l'interdiction porte sur tout ou sur partie des droits de l'article 31 ;
Par ces motifs ... (Le 1·este sans inté1·êt).
Du 1er mars 1951. - Cour de Liège. -::--- 4e ch. Prés. M. Goossens, président. - Min. publ. M. Glesener, substitut du procureur général. - Pl. M. Paul Tschoffen.
COUR D'APPEL DE LIÈGE
30 novembre 1951
DONATIONS ET TESTAMENTS. ARTICLE 1098 DU CODE CIVIL. APPLICABLE AUX ENFANTS ADOPTIFS.
L'm·ticle 1098 du Code civil protège l'en{ ant adoptif qui se trouvait au foyer au moment du 1·emm·iage de l'adoptant contn les dangers que lui fait courfr · -
l'assimilation de l'enfant adoptif à l'enfant légitime (1).
(K ... , C. R ... )
ARRÊT.
LA COUR; - Vu en expédition, avec les pièces annexes, le jugement du tribunal civil de Liège en date du 24 mars 1951, déboutant le sieur K. .. -C ... de son action en réduction, conformément à l'article 1098 du Code civil, des avantages tant contractuels que testamentaires consentis par son père adoptif, feu Gaston C ... , à sa seconde épouse, née R ... ;
:V'!1 l'.appel interjeté par le demandeur or1gmaire;
Attendu que la recevabilité de cet appel, régulier en la forme et interjeté dans les délais légaux, n'est pas contestée;
Attendu qu'il.est constant et non dénié que feu Gaston C ... , époux en premières noces d'une dame N ... , veuve K ... , décédée le 14 janvier 1946, adopta le fils légitime de la défunte, actuellement appelant, par acte du 11 janvier 1946, homologué le 1er avril 1946 ;
Que le 28 octobre 1948 il contractait un second mariage avec la dame R ... , actuellement intimée;
Qu'il avantageait celle-ci en adoptant le régime de la communauté universelle et en lui léguant, en outre, toute la quotité disponible ;
Attendu que la question soumise à la cour est celle de savoir si l'enfant adoptif peut invoquer les dispositions de l'article 1098 du Code civil;
Attendu que la doctrine est hésitante sur cette question, qui n'a pas été envisagée résolument par le législateur (cf. DE PAGE, t. X, vol. II, n° 1035) ;
Que les partisans de la négative, notamment la jurisprudence française (cf. cour de cassation de France, arrêt du 11 décembre 1922), fondent exclusivement leur opinion sur un argument de texte, l'article 1098, qui est une disposition d'exception, n'accordant la réserve spéciale qu'aux enfants « d'un autre lit », donc nés d'un précédent mariage;
Attendu que cet argument n'est pas décisif; qu'il ne s'agit pas d'interpréter l'article 1098, qui est parfaitement clair, ni de l'appliquer par analogie, ce qui
la nouvelle union. La volonté du . (1) Cet al'rêt réforme le jugement du trilégislateu1' du 22 mars 1940 a été de bunal civil de Liège du 24 mars 1951 publié f avorise1· l'adoption et de 1·enfo1·ce1· PAsrc., 1951, III, 101.
36 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
ne serait pas licite, mais bien de le combiner avec les dispositions du Code civil relatives aux droits de l'enfant adoptif;
Attendu que l'article 350 ancien du Code civil définit nettement et sans aucune réserve les droits de l'enfant adoptif au point de vue successoral, en stipulant « qu'il aura sur la succession de l'adoptant les mêmes droits que ceux qu'aurait un enfant né en mariage >> ; qu'il est malaisé, sinon impossible, de ne pas considérer cette expression comme synonyme des termes «enfant légitime d'un autre lit));
Attendu que l'argument de texte invocrué par les partisans de la négative paraît donc renversé et contredit par la législation sur l'adoption; qu'il est d'ailleurs au moins douteux que, par les mots cc d'un autre lit », le législateur ait entendu écarter les enfants adoptifs; que ces mots peuvent avoir été introduits dans le texte par opposition au lit de la seconde union ; que certains auteurs font remarquer que les rédacteurs du Code peuvent avoir utilisé cette expression en statuant sur l'hypothèse la plus commune : de eo qiwd plerumque fit, ce qui est possible ;
Attendu que cette argumentation d'exégèse favorable à la _solution affirmative est renforcée par des considérations tirées de la logique, de l'équité et de l'esprit de la loi; que certaines de ces considérations judicieuses, reproduites dans le Sfrey, 1923, 1, 113 sous le commentaire de l'arrêt de la cour de cassation de France, sont ainsi conçues :
cc Il est manifeste que l'article 1098 entend protéger de manière générale les droits héréditaires des enfants se trouvant déjà au foyer de l'époux qui se remarie contre les dangers que leur fait courir cette union >> (dangers particulièrement menaçants pour l'enfant adoptif qui n'a pour lui qu'un lien contractuel et non les liens de sang) ; que s'expriment dans le même seüs certains auteurs dont l'avis est reproduit par HENRI CAPITANT dans une étude parue dans le Dalloz, 1925, p. 121 :
cc Il n'y a aucune raison de ne pas protéger l'enfant adoptif comme enfant légitime contre le danger d'un mariage de l'adoptant; il le mérite d'autant plus que l'adoptant serait inexcusable si, après avoir créé entre l'adopté et lui-même un rapport analogue à la filiation (il serait plus exact de dire cc assimilé >> et rion cc analogue»), il tendait d'en restreindre les effets en se mariant et en
dépouillant l'enfant d'une portion de sa réserve », ce qui est certes le cas en l'espèce, car feu C ... n'a pas hésité, pour ce faire, à adopter le régime matrimonial au moins inusité de la communauté universelle;
Attendu qu'on peut souligner encore que le législateur belge de 1940 est particulièrement favorable à l'adoption, pour des motifs d'ordre social-; qu'îl en a élargi et facilité la réalisation ; qu'il en a même augmenté les effets en accordant aux enfants légitimes de l'enfant adoptif un droit de succession sur les biens de l'adoptant;
Qu'enfin, si l'adoptant a des motifs suffisamment graves pour revenir sur la création de cette parenté artificielle, il peut recourir à la procédure organisée par l'article 360 pour faire révoquer l'adoption et priver ainsi régulièrement l'enfant de ses droits successoraux;
Attendu que cet ensemble de considérations paraît décisif en faveur de l'applicabilité de l'article 1098; que l'hésitation des partisans de la thèse opposée ressort nettement du commentaire de l'arrêt de la cour de cassation de France précité, dont M. HENRI SIMONET est l'auteur (cf. Dalloz, loc. cit.) ; qu'il se borne en effet à conclure cc qu'il est des plus vraisemblable » (sic) que, par l'article 1098, le législateur n'a entendu protéger que les enfants légitimes ... (enfants auxquels, il importe de le répéter, les enfants adoptifs ont été assimilés au point de vue successoral par l'article 350 ancien et l'article 352 nouveau du Code civil) ;
Quant à l'appel incident de l'intimée : Attendu qu'en ce qui concerne la dési
gnation des notaires chargés de la liquidation, l'appelant se déclare d'accord avec l'intimée sur le choix de Me Randaxhe de Montegnée et Me Putzeys de Grâce-Berleur;
Attendu qu'il ne peut être question de faire droit à la prétention de l'intimée de se voir décharger des dépens, car elle succombe en ses prétentions relatives aux bases de la liquidation-partage;
Par ces motifs, vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues, écartant comme non fondées toutes autres conclusions, dit l'appel principal recevable et fondé; ce fait, réformant la décision entreprise, dit pour droit que l'intimée ne peut recevoir, tant en vertu du contrat de mariage qu'en vertu des dispositions testamentaires de feu C ... , plus d'un quart des biens de celui-ci, ce par application de l'article 1098 du Code civil; statuant sur
COURS D'APPEL 37
l'appel incident, désigne, de l'accord des deux parties, MM. les notaires Randaxhe de Monteg·née et Putzeys de Grâce-Berleur pour procéder à la liquidation-partage telle qu'ordonnée par le premier juge; condamne l'intimée aux dépens des deux instances.
Du 30 novembre 1951. Cour de Liège. - 6e ch. - P.rés. M. Lefèbvre, conseiller faisant fonctions de président. - Pl. MM. P. Tschoffen, Bourlet et Nizet.
COUR D'APPEL DE LIÈGE
16 octobre 1950
SÉQUESTRE. - HONORAIRES DU SÉQUESTRE. - TAXATION PAR LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE. - INSTANCE SÉPARÉE. DROIT D'APPEL.
L'opposition à taxe requise par le séquestre est itn litige indépendant du litige principal en raison duquel le séquestre a été désigné. La décision rendue pm· le président dit tribunal est souniise à l'appel conformément au droit commun, nonobstant l'article 95 du tarif des frais et dépens en matière civile et commerciale (1).
(JOWA, C. MAUCOURANT.)
ARRÊT.
LA COUR; Vu, avec ces annexes, le jugement contradictoire rendu par le tribunal de première instance de Huy, le 18 janvier 1950;
Vu les actes d'appel signifiés respectivement par les époux Denoël et les époux Leplat au sieur Maucourant les 9 et 13 février 1950 et les assignations en arrêt commun signifiées par les appelants au sieur Jean J owa;
Attendu que ces causes sont intimement liées et qu'il y a lieu d'y faire droit par un seul arrêt ;
Attendu que par assignations du 4 mars 1949 les époux Denoël-J owa ont assigné leur frère, Jean J owa, et leur sœur et beau-frère, époux Leplat-J owa, en liquidation et partag·e des successions de leurs parents, les époux Albert J owaDemarteau;
. (1) Sur la recevabilité de l'appel, comp. Liège, 31 mars 1936, PAsrc., 1936, II, 165.
Que le litige portait particulièrement sur la cession faite par le père J owa à son fils Jean du fonds de commerce « Maison Ménage et J owa », dont Jean J owa se prétend propriétaire exclusif;
Attendu que par arrêt du 15 juillet 1949 l'intimé Maucourant a été nommé administrateur-séquestre de la firme litigieuse et qu'il a fait taxer son état d'honoraires par M. le président du tribunal de Huy (ordonnance du 6 octobre 1949) ;
Attendu que les consorts J owa ont fait opposition à cette taxe et ont été déboutés par le jugement dont appel;
Attendu qu'invoquant l'article 95 de l'arrêté royal du 24 mai 1933 (tarif des frais et dépens en matière civile), l'intimé Maucourant soutient que l'appel n'est pas recevable à défaut d'appel de quelque disposition sur le fond ;
Attendu que cette fin de non-recevoir ne peut être accueillie; qu'en effet l'article 95 de l'arrêté royal du 24 mai 1933 suppose la liquidation des dépens faite par le jugement ou l'arrêt qui les adjuge à l'une des parties à la charge- de l'autre;
Attendu qu'en l'espèce le litige principal est né entre les frères et sœurs J owa ·; qu'il est étranger à l'intimé Maucourant, particulièrement en ce qui regarde l'adjudication des dépens, parmi lesquels pourront être compris les honoraires par lui promérités à titre d'administrateur-séquestre ;
Attendu que, si le séquestre a cru devoir· requérir taxe de son état avant que sa mission soit terminée, il appartenait aux appelants de faire opposition à la taxe avant que les dépens puissent être adjugés par le jugement au fond et le droit d'appel leur était réservé, au même titre qu'au séquestre mis en cause par les opposants;
Attendu que cette procédure rie peut être considérée, en soi, comme un accessoire de l'action principale, mais un litige nouveau entre le séquestre, d'une part, et les parties liées par le contrat judiciaire qui a donné naissance à l'action principale ;
Au fond : ... (sans intérêt) ; Par ces motifs, rejetant comme non
fondées toutes conclusions plus amples ou contraires, joint les causes inscrites sous les n°s 3222, 3263, 3365 et 3371 ; reçoit les appels et les déclare fondés ; en conséquence, réforme le jugement a quo, sauf en ce qui concerne l'acte donné à l'assignation en intervention· Jean J owa; ce fait, taxe l'état de l'intimé Maucourant à la somme de 400.000 francs pour la période du 20 avril
38 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
au 31 décembre 1949 et condamne le même aux dépens des deux instances.
Du 16 octobre 1950. - Cour de Liège. ~ 3e ch. - Prés. M. Mons, président. -Pl. MM. Simont (du barreau de cassation), Fally (du barreau d'appel de Bruxelles), Dijon et Dehin (tous deux du barreau de Huy).
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
7 novembre 1951
1° BIENS. - IMMEUBLES. ET VENTE D'IMMEUBLES. ESSENTIELLEMENT CIVILS.
ACHAT ACTES
2° COMMERCE-COMMERÇANT. COURTAGE D'IMMEUBLES. - OPÉRATION DE CARACTÈRE SPÉCULATIF. -ACTE COMMERCIAL. - INDIVIDU EXERÇANT HABITUELLEMENT LE COURTAGE D'IMMEUBLES. - COMMERÇANT.
3° COMPÉTENCE ET RESSORT. -MATIÈRE COMMERCIALE. - IMMEUBLES. - ACTES CONSISTANT UNIQUEMENT A METTRE EN RAPPORTS VENDEURS ET ACHETEURS D'IMMEUBLES. -ACTES DE COURTAGE. - COMPÉTENCE DU TRIBUNAL DE COMMERCE.
1° L'achat et la vente d'immeubles ne constituent jamais des actes de commerce.
2° L'opération qui consiste à mettre, dans un but spéculatif, en rappm'ts des vendeurs et des acheteurs d'immeitbles est mi acte de courtage dont le caractère commercial est indépendant de la natitre civile ou commerciale de l'opération pour laquelle le courtiM' sert d'intet'médiaire.
3° Celui qiti, habituellement, se livre au courtage de biens immobiliers, est com-11ie1'çant et partant justiciable du tribunal de _commerce.
(GERMAIN, C. DERY.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu le jugement dont appel, daté .du 16 juin 1948 et par lequel le tribunal de commerce, siégeant à Bruxelles, s'est déclaré compétent ratione materiaè, puis, ayant constaté l'absence de toute discussion quant au fondement de la demande, a condamné l'appelant au payement de diverses sommes d'un total de 112.498 francs, des intérêts judi-
ciaires et des dépens, en remboursement d'un prêt de 100.000 francs et en règlement d'un mois de traitement;
Attendu que l'appel est recevable; Attendu que devant la cour, l'appe
lant, se disant « sans prQfession », s'est, à nouveau, borné à dénier la qualité de commerçant que lui a reconnue le premier juge et à contester la compétence de celui-ci ;
Attendu qu'à l'appui de ses affirmations et dénégations, l'appelant ne produit aucun élément quelconque de preuve, alors cependant que si, comme il le prétend, son activité avait consisté à acheter et à revendre des immeubles, il n'aurait eu aucune difficulté à l'établir, par la communication des actes notariés, de la correspondance et des quittances de semblables opérations ;
Attendu que, par contre, l'intimé a versé aux débats, avec la convention conclue, entre parties, le 26 aoùt 1948, les lettres à lui adressées par l'appelant;
Que ces documents prouvent qu'après avoir fait miroiter de juillet à octobre 1 %8 « les bénéfices importants sans le moindre risque » que lui donnait pré-
. tendument sa façon de travailler et avoir ainsi obtenu de l'intimé qu'il lui verse une somme de 100.000 francs, pour être utilisée dans ses opérations immobilières et que devaient garantir les maisons et terrains achetés et remplacés « au fur et à mesure de la vente par les nouvelles- acquisitions », l'appelant, invité deux mois plus tard à rembourser ce prêt et à payer, en outre, 10.230 francs pour appointement et frais, qu'il reconnaissait devoir, puis assigné en payement le 16 mai 1949, n'a, jusqu'à présent, absolument rien payé ni remboursé, ni offert aucune garantie quelconque, se contentant, en justice, d'opposer à la demande, dont il ne peut contester le fondement, le moyen dilatoire d'une exception d'incompétence, que la cour doit rencontrer;
Attendu qu'après avoir souligné que cc si les opérations du défendeur J> (l'appelant actuel) cc avaient été telles que décrites », il n'eùt pas été. compétent, le premier juge a exactement analysé l'activité de l'appelant, à la lumière des indications trouvées dans sa correspondance, et en a conclu qu'il avait joué «le rôle d'intermédiaire et non point d'acheteur personnel >J, ce rôle étant de mettre en rapports acheteur et vendeur d'un immeuble et non point d'acquérir luimême la propriété de celui-ci, pour le revendre ensuite à un tiers ;
COURS D'APPEL 39
Qu'il ressort, en effet, de cette corresrondance, et particulièrement des lettres de l'appelant des 30 décembre 1948, 2 janvier et 3 février 1949, que c'est inexactement que celui-ci a affirmé et soutient encore qu'il achetait et revendait des immeubles, alors qu'en réalité. il entendait si peu lever, pour lui-même, les options qu'il avait prises sur ces immeubles, que lorsqu'il n'avait point trouvé en temps utile des acheteurs de ceux-ci, il se résignait à perdre les garanties qu'il avait données pour obtenir ces options; que c'est d'ailleurs à de telles pertes qu'il a attribué son impossibilité de rien payer à l'intimé;
Que, partant, le bénéfice de l'appelant n'était point, comme il le soutient, « la différence entre le prix auquel il achetait et celui auquel il revendait ))' puisque lui-même n'achetait ni ne revendait, mais bien la différence, qu'il percevait comme intermédiaire, entre le prix payé par l'acheteur au profit duquel il levait l'option et le prix reçu par le donneur de cette option ;
Qu'enfin il arrivait à l'appelant de chercher, à la demande d'un acheteur, un immeuble pouvant convenir à celui-ci et pour l'acquisition duquel lui-même n'intervenait que comme intermédiaire agissant dans un but de lucre;
Attendu que si l'achat et la vente d'immeubles ne constituent jamais des actes de commerce, pour le motif que des immeubles ne sont jamais ni des denrées ni des marchandises (voy. Rép. prat. dr. belge, v° Commerce-commerçant, n° 85), au contraire, l'opération qui consiste à mettre, dans un but spéculatif, en rapports des acheteurs et des vendeurs d'immeubles est un acte de courtage, dont le caractère commercial est indépendant du caractère, civil ou commercial, de l'opération pour laquelle le courtier sert d'intermédiaire (Rép. prat. d1·. belge, v° Courtier, n° 24:, et v° Commercecommerçant, n° 259) ;
Attendu qu'enfin l'appelant conteste sa qualité de commerçant, pour le motif qu'il n'aurait pas fait sa profession habituelle des actes de courtage ci-dessus relevés;
Mais attendu que si, dans l'acte d'appel et devant la cour, l'appelant s'est déclaré « sans profession l>, il a été qualifié « marchand de biens l> dans la procédure de première instance et dans le jugement a quo, et lui-même s'est présenté à l'intimé, en 194:8, comme un « expert en immeubles J> dont le domicile situé à Ixelles, square de la Résidence, 4, et les
bureaux à Bruxelles, rue Joseph II, 17, étaient chacun reliés au téléphone, et qui traitait, par le moyen des opérations susdites, des affaires d'une importance et d'une continuité telles qu'elles le justifiaient à engager, comme collaborateur, l'intimé, à lui promettre « une situation qui sera, dès le début, très brillante et ne fera que s'améliorer de mois en mois ll, et à s'obliger envers lui, le 26 août 194:8, par la signature d'un
·contrat d'une durée de cinq ans, à proroger de commun accord, au payement d'une participation bénéficiaire fixe de 10.000 francs par mois et d'un pourcent sur la vente des maisons ainsi qu'au remboursement d'un abonnement général sur les chemins de fer belges ;
Qu'à l'intimé l'appelant déclare encore : << La région à travailler peut être le Brabant wallon et également Bruxelles et environs, car c'est dans ces deux régions que les affaires sont les plus productives l> (lettre du 26 juillet 1948), et une autre fois : « J'ai de très gros frais généraux inhérents à mon entreprise ... )) (lettre du 2 janvier 1949), ou aussi : « J'ai plusieurs affaires sur le métier ... cette façon de travailler garantit les capitaux qui sont dans mes affaires ... >> (lettre du 3 février 1949) ;
Attendu que, l'appelant étant donc bien un commerçant, c'est à bon droit que le tribunal de commerce s'est déclaré compétent pour le condamner ensuite au payement des sommes qu'il reconnaît devoir à l'intimé;
Par ces motifs, vu la loi du 15 juin 1935 et notamment son article 24:, entendu M. l'avocat général baron Verhaegen en son avis donné en audience publique, rejetant comme dépourvues de fondement ou de pertinence toutes conclusions autres, plus amples ou contraires, reçoit l'appel, mais le déclarant non fondé, en déboute l'appelant; confirme le jugement a quo; condamne l'appelant aux dépens d'appel.
Du 7 novembre 1951. - Cour de Bruxelles. - 2° ch. - Prés. M. Marcoux, président. - Min. publ. Baron Verhaegen, avocat général. - Pl. MM. J acquemin-Tulkens et Lousberg (ce dernier du barreau de Liège).
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
28 novenibre 1951
DIVORCE ET SÉPARATION DE CORPS; - ENQUÊTES; ___:. TÉMOINS.
40 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
REPROCHES, DOIVENT ÊTRE ADMIS OU REJETÉS PAR LE JUGE, SOMMAIREMENT ET PRÉALABLEMENT A TOUTE DÉCISION SUR LE FOND (CODE DE PROC. CIV., ART. 287). -PORTÉE DES REPROCHES. - REPRO,CHES ADMIS. - EFFETS. - DÉPOSITION DES TÉMOINS REPROCHÉS NE PEUT ÊTRE LUE (CODE DE PROC. CIV., ART. 291). - DÉTECTIVE PRIVÉ. -PERSONNES AU SERVICE DE CE DER-NIER. TÉMOINS REPROCHABLES. DOCUMENTS VERSÉS AUX DÉBATS. -DOCUMENTS VOLÉS AU CONJOINT. -DÉTENTION IRRÉGULIÈRE. - NE PEUVENT ÊTRE UTILISÉS EN JUSTICE PAR CELUI QUI LES DÉTIENT IRRÉGULIÈREMENT.
Les reproches tendent à faire écarte?' la déposition de certains témoins par l'allégation de faits susceptibl~s de démontrer le caractère siispect de leurs déclarations.
Le ji"ge .doit statue1· sur les reproches, sommai1·ement et préalablenient à toute
. décision sur le fond. Si _les 1·eproc!ies . sont admis, les déposi
tions des temoins 1·eptochés ne peuvent êt1·e lues.
Le détective p1·ivé ayant p1'esté ses services 1·émunéTés et les personnes à son service ?nt in:térêt à la cause ~ans laqiœlle ils inte1'viennent et n'ont, des lors, pas l'ind~pe1!dance in~ispensable pour que leitr temoignage p1·esente toutes les garanties requises. Il y a lieu d'admettre le reproche de ces témoins.
Le~ docume?it~ soust1:aits par un époiix a, ~on ,conJoi1~t p1·ovie.nnent d'im vol qui, s il n est point punissable pénalement, n'en demeii1·e pas moins im délit; ils ne peuvent être utilisés en jiistice pa1· celui qui les détient irrégulièrement.
{L ... , C. V ... )
ARRÊT.
LA COUR; Vu le jugement dont appel, par lequel le tribunal de première instance, séant à Bruxelles, a, le 24 avril 1951, statué : 1° sur les reproches proposés par l'appelant à l'égard de trois témoins, cités par l'intimée, demanderesse en séparation de corps et de biens · 2°. sur la .demande de l'a~pelant que n~ soient pomt lus les extraits de certains agendas que lui a dérobés l'intimée;
Attendu que le jugement des reproches, îndépéndant de la décision sur le fond est définitif et, par conséquent, suscep~
tible d'appel (Rép. prat. dr. belge, vo Enquête, n°8 431 et 432) ;
Que l'appel est, en l'espèce, régulier et donc recevable ;
Quant au fond : 1° Concernant les reproches : Attendu que pour juger les reproches
proposés par l'appelant, le tribunal devait vérifier si les faits allégués par ce]ui-ci étaient ou non de nature à rendre suspectes les dépositions des témoins reprochés et à les faire écarter
· de l'enquête (cf. Rép. prat. d1'. belge, v 0 Enquête, n° 188) ;
Qu'il avait à tenir compte de ce que, «pour empêcher le juge de subir', pour la décision du fond, l'influence de dépositions qu'il devrait éventuellement écarter i>, il doit être statué sommairement et au prét;tlable sur les reproches (Code de proc. c1v., art. 287; cf. cass., 13 juillet 1899, PASIC., 1899, l, 338; Rép. prnt. dr. belge, v 0 Enqiiête, n°s 418 et 428 et références citées), et, «si les reproches sont admis, la déposition du témoin reproch.é ne sera point lue >> (Code de proc. c1v., art. 291) ;
Attendu que ce serait donc en violation certaine de ces principes que le tribunal a décidé « qu'il sera procédé à la lecture à l'audience ii des déclarations des témoins reprochés, si réellement il considérait comme « restant ouverte la question de savoir s'il y a lieu d'écarter des débats leurs témoignages i>, dont l'appréciation ne pourrait selon lui.' « se faire qu'après lecture et comparaison avec ]es autres éléments de la cause >i ;
Mais attendu que, le tribunal ayant, d'autre part, estimé que la qualité de détectives salariés « des témoins reprochés n'est pas une raison suffisante pour écarter a priori leur témoignage », on peu~ trouver, dans cette opinion, le motif déterminant de sa décision·
Attendu que le témoin A ... a rkconnu cru'il était, à l'époque des faits, détective privé et qu'il a touché de l'intimée des émoluments, calculés d'après ~es heures de travail;
Que, suivant le témoin H ... , celle-ci bien que ne travaillant pas en qualité de détective, a accompagné, dans une filature de l'appelant, le témoin A .. ., son colocataire, qui le lui avait demandé mais ne lui paya aucune rémunération ;
Que, de même, le témoin D... a affirmé qu'étant chômeur, il avait, à la demande de A ... , fait, avec lui, certaines constatations,_ sans cependant recevoir aucune rémunération ;
COURS D'APPEL
Attendu qu'il résulte de ces indications qu'à l'époque des faits, le témoin A... faisait profession de rechercher, par des moyens d'investigations policières privées et pour le compte des clients, qui le rémunéraient, les éléments d'information et de preuve dont ils avaient besoin;
Que les témoins H ... et D ... ont assisté A... dans l'exercice de cette activité lucrative, et que c'est,. dans ces conditions, qu'après avoir été, en août 1943 puis en octobre 1946, chargé par l'intimée de surveiller ou de faire surveiller l'appelant, le témoin A ... a été cité par elle pour apporter, à l'appui d'une demande de séparation de corps et de biens, le témoignage des constatations, ainsi recueillies moyennant rémunération ;
Attendu que « tout témoin est reprochable, s'il a un intérêt personnel, ne fût-il que moral, à voir décider le procès en faveur de l'une ou de l'autre des parties litigantes )) (Liège, 1er juillet 1925, PASIC., 1926, II, 13) ou s'il a au procès un intérêt personnel direct ou même indirect assez puissant pour rendre son témoignage suspect (Rép. prat. dr. belge, vo Enquête, n°8 391 et 411, fo fine) ;
Attendu que le témoignage est un mode de preuve trop essentiellement subjectif et, partant, trop précaire et sujet à caution que pour l'admettre de la part de celui qui fait profession d'en réunir les éléments, qui a été payé pour cela et qui peut avoir un intérêt soit matériel, soit moral à ce que ces éléments servent le plus possible la cause d'une des parties, son client;
Attendu que le détective privé, ayant presté ses services rémunérés à une des parties en cause pour rechercher certains faits destinés à faire l'objet d'un témoignage défavorable pour la partie adverse, apparaît co:rnme ayant un intérêt certain à satisfaire le plus possible son client pour mériter sa rémunération et conserver ou même augmenter sa clientèle;
Qu'il n'a plus, dès lors, vis-à-vis de l'une des parties, son client, l'indépendance indispensable pour que son témoignage présente toutes les garanties requises;
Attendu que le reproche proposé par l'appelant à l'égard du témoin A ... est fondé;
Attendu qu'il en est de même pour les reproches des témoins H ... et D ... aux services desquels le témoin A ...
a fait appel et qui peuvent avoir servi ses intérêts, confondus, en l'occurrence,. avec ceux de sa cliente;
Attendu que, par erreur, l'intimée· argumente de l'article 246 du Code· civil;
Que cette disposition, dérogatoire au droit commun (Code de proc. civ., art. 268 et 283), ne peut être étendue~ par voie d'analogie, à d'autres personne& que celles qu'elle vise expressément : « les parents, à l'exception des descendants, et les domestiques des époux l>, lesquels sont souvent les seuls témoins. possibles des griefs que l'un des époux invoque contre l'autre (cf. DE PAGE, Traité élérn. de dJ·oit civil belge, t. 1er, n° 919; Rép. prat. dr. belge, v0 Divorce,. n° 315) ;
2° Concernant les extraits des agendas : Attendu qu'il résulte des éléments de
la cause et notamment des réponses faites par l'intimée à la police judiciaire, les 4 et 11 décembre 1946, qu'à l'insu et contre le gré de son mari, elle a emporté quatre agendas appartenant à celui-ci; qu'elle ne tenait pas à les. restituer; qu'elle les avait confiés à une de ses amies d'Ostende cc à l'effet, a-t-elle dit, de faire photocopier certaines. pages qui m'intéressent spécialement J>,. et qu'elle entend, actuellement, disposer de ces extraits pour s'en servir en justice, contre son mari;
Mais attendu que l'intimée s'est ainsi rendue coupable, au préjudice de celui-ci,. de la soustraction frauduleuse ou du vol de ces agendas et de leurs extraits,. vol qui, nonobstant l'immunité qui le couvre, reste un délit (Code pénal, art. 461 et 462; cass., 8 janvier 1940,. PAsrc., 1940, 1, 7, et 15 janvier 1885, ibid., 1885, 1, 37) ;
Que, dès lors, il doit être interdit à l'intimée de produire ou d'utiliser en justice ces agendas ou leurs extraits, qu'elle détient irrégulièrement;
Par ces motifs, vu la loi du 15 juin 1935 et notamment son article 24, entendu M. l'avocat général baron Verhaegen en son avis, en partie conforme,. donné en audience publique, rejetant, comme dépourvues de fondement ou de pertinence, toutes conclusions, autres, plus amples ou contraires, reçoit l'appel, et le déclarant fondé, met à néant le jugement a quo; émendant, admet les reproches proposés par l'appelant à l'égard des témoins A .. ., H .. ., et D ... ,. et dit que leurs dépositions ne seront point lues; dit que les agendas, dérobés.
4.2 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
par l'intimée à l'appelant dans la nuit du 17 au 18 novembre 1946, étant quatre agendas appartenant à ce dernier, et se rapportant aux quatre dernières années, 1946 y compris, sont rejetés des débats; qu'il n'en sera donné ni connaissance ni lecture, ni en entier, ni en extraits, et qu'ils ne pourront être produits, ni en original, ni en copie, ni en entier, ni par extraits, ni autrement, au dossier de la partie intimée; condamne l'intimée aux dépens des deux instances.
Du 28 novembre 1951. - Cour de Bruxelles. - 2e ch. - Prés. M. MarcouX, président. - Min. publ. Baron Verhaegen, avocat général. - Pl. MM. An:siaux (du barreau de cassation), Sand et Schoenf eld.
' COUR D'APPEL DE BRUXELLES
26 septetnbre 1951
INTERDICTION LEGALE. - CONDAMNÉ A UNE PEINE' CRIMINELLE. -ADMINISTRATION DES BIENS DU CONDAMNÉ. ASSUMÉE PAR UN CURATEUR. - CURATELLE DATIVE (CODE PÉN., ART. 23 [LOI DU 12JUILLET1931]) ET NON LÉGALE. - CONJOINT DE L'INTERDIT LÉGAL. - N'EXERCE PAS, DE DROIT, LA TUTELLE. - INAPPLICABILITÉ DE L'ARTICLE 506 DU CODE CIVIL (LOI DU 10 AOÛT 1909).
La curatelle des biens dit condamné en état d'interdiction légale, pm' application des articles 20 et suivants du Code pénal, est dative et non légale. Le conjoint de l'interdit légal n'exerce pas, de droit, la tutelle de ses biens, l'article 506 du Code ,civil n'étant pas applicable en pareil cas.
(vrnoux, c. ÉTAT BELGE.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu le jugement dont :appel, rendu par le tribunal de première instance de Nivelles le 14 juin . 1948 et aux termes duquel l'appelante a été condamnée, en qualité de curatrice légale ·de son mari, frappé d'interdiction légale par application des articles 20 et suivants du Code pénal; à payer à l'intimé la :somme de 30.000 francs à titre de dommages-intérêts;
Attendu qu'à bon droit l'appelante :soutient que, n'ayant. aucunement la
qualité de curatrice de son mari, l'action de l'intimé est irrecevable à son égard; qu'en effet la curatelle de l'interdit légal est dative et non légale et que l'article 506 du Code civil, sur lequel l'intimé se fonde pour attribuer à l'appelante la qualité de curatrice légale de son mari, n'est pas d'application en matière d'interdiction légale; que, d'autre part, l'intimé ne justifie pas que l'appelante aurait été régulièrement nommée curatrice de son mari; qu'il se borne, d'ailleurs, en ses conclusions d'appel, a se référer à justice;
Par ces motifs, vu la loi du 15 juin 1935 et notamment l'article 24 de cette loi, ouï en son avis conforme, donné en audience publique, M. l'avocat général baron Verhaegen, rejetant comme non fondées ou sans pertinence toutes conclusions autres, plus amples ou contraires, reçoit l'appel et y faisant droit au fond, le déclare fondé; met à néant le jugement dont appel; émendant, dit l'intimé non recevable en son action à l'égard de l'appelante; l'en déboute et le condamne aux dépens des deux instances.
Du 26 septembre 1951. - Cour de Br.uxelles. 2e ch. - Prés. M. Marcoux, président. - Min. publ. Baron Verhaegen, avocat général. - Pl. MM. Daumont et Van Reepinghen.
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
19 décetnbre 1951
BIENS. - STATUE AFFECTÉE AU SERVICE DU CULTE. - NON DÉSAFFECTÉE NI ALIÉNÉE EN VERTU D'UNE AUTORISATION ROYALE RÉGULIÈRE (ARR. ROY. DU 16 AOÛT 1824, ART. 5). - DOMAINE COMMUNAL. - CHOSE HORS COMMERCE (CODE CIV., ART. 2226). REVENDICATION PAR LA COMMUNE. -VALIDITÉ. -DÉTENTION DE LA STATUE PAR UN PARTICULIER. - IRRÉGULARITÉ. - NON COUVERTE PAR LA POSSESSION DE . BONNE FOI (CODE CIV., ART. 2279) NI PAR LA PRESCRIPTION TRENTENAIRE (CODE CIV., ARTICLE 2262). - PREUVE DE L'ALIÉNATION RÉGULIÈRE DE LA STATUE. -A CHARGE DU DÉTENTEUR.
Une statiie, affectée au service du culte et appartenant au domaine communal, est chose hors commerce. Le pa'l'ticulier, qui la détient et qiii ne prouve pas que
COURS D'APPEL
la statiie a été désaffectée et aliénée régulièrement avec l' aiito1'isation du Roi ou des autorités déléguées pm' lui, ne peut opposer à la 1·evendication de la co11im1rne ni la possession de bonne foi, ni la prescription trentenaire ( 1).
(M ... , C. VILLE DE NIVELLES.)
ARRÊT.
LA COUR; - Attendu que l'action des intimées, demanderesses originaires, tend à obtenir la restitution d'une statue romane, dite de sainte Gertrude, qui se trouve dans la collection de l'appelant;
Attendu que le rapport des experts €tablit et que, d'ailleurs, l'appelant ne conteste plus que cette statue provient de la collégiale Sainte-Gertrude à Nivelles et, plus précisément, du portail Saint-Michel de cette collégiale;
Attendu que les documents produits permettent de dire que la statue litigieuse a disparu de son emplacement, postérieurement à l'année 1868; qu'on ignore tout des circonstances de cette disparition et des avatars postérieurs de la statue ;
Attendu que ce n'est qu'en 1938, à la suite d'un article publié dans le Bulletin de la Société royale d'. a1'chéologie, que les fotimées ont pu soupçonner qu'elle se trouvait dans la collection de l'appelant; qu'il leur a fallu un certain temps pour acquérir la certitude que l'objet d'art mentionné dans cet article était bien celui qu'elles recherchaient et pour rassembler les éléments de preuve indispensables;
Attendu que l'appelant déclare avoir acheté la statue litigieuse vers 1900, chez un antiquaire actuellement décédé;
Attendu que l'identification de la statue étant assurée ainsi que sa pro~ venance, il est constant que jusqu'en 1868, au moins, elle fit partie de l'édifice public que constitue la collégiale de Nivelles, y étant scellée da:ns la pierre, à perpétuelle demeure ;
Attendu que c'est donc à juste titre que le premier juge a décidé que, jusqu'à cette époque, tout au moins, la statue était du domaine public et, à ce titre, inaliénable et imprescriptible ;
Attendu que l'appelant soutient qu'à la suite de son enlèvement, la statùe
(1) Le jugement a qtw, prononcé le 14 juillet 1948 pai· le tribunal de première instance
a perdu son affectation et est entrée dans le domaine privé où il l'a acquise de bonne foi; que cette acquisition s'est trouvée consolidée, pour autant que de besoin, par la prescription trentenaire;
Attendu que la matière est réglée par les articles 2226 du Code civil et 5 de l'arrêté royal du 16 août 1824; que la première de ces dispositions édicte que l'on ne peut prescrire le domaine des choses qui ne se trouvent point dans le commerce; que la seconde interdit l'aliénation des objets d'art placés dans les églises, Sans autorisation du Roi ou des autorités déléguées par lui;
Attendu qu'aucune décision régulière d'aliénation n'a été prise en ce qui concerne la statue litigieuse ; que ce fait est établi par la déclaration des président et secrétaire du conseil de fabrique de l'église Sainte-Gertrude, en date du 20 avril 1944, après vérification des registres du dit conseil depuis 1840;
Attendu que, par cette constatation, tirée par· des personnes à ce qualifiées de registres publics, les intimées ont fait la preuve qui leur incombe, c'està~dire celle qu'aucune désaffectation régulière n'est intervenue et que, conséquemment, la statue n'a jamais cessé d'appartenir au domaine public;
Attendu que l'appelant ne s'inscrit pas en faux contre cette constatation et n'offre pas de prouver que les écritures publiques attestées seraient incomplètes;
Attendu que la situation de pur fait qu'il invoque est sans pertinence car elle n'a pu être le résultat que d'une action illégale et arbitraire en son principe ; qu'une telle action n'a pu évidemment modifier la situation juridique de l'objet qu'elle affecte;
Attendu qu'est également sans pertinence le fait vanté mais non démontré d'une possession paisible et de bonne foi par l'appelant pendant plus de trente ans ; qu'en effet l'acquisition par presscription est formellement exclue par la loi dès qu'il s'agit de choses hors commerce;
Attendu, enfin, que l'appelant suppose que la statue aurait pu être désaffectée implicitement et serait passée dans le domaine privé communal ou elle aurait pu être valablement aliénée;
Attendu que rien n'étaye cette supposition ; que si une désaffectation
de Bruxelles, est reproduit dans la PASICRISIE,
1951, III, 66.
JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
implicite peut être admise pour certains éléments du domaine public, elle ne saurait l'être pour un objet auquel s'applique la disposition impérative de l'article 5 de l'arrêté royal du 16 août 1824;
Sur l'appel incident : Attendu que le premier juge a omis
de statuer sur la demande de dommages-intérêts formulée devant lui par les intimées;
Attendu que celles-ci sont fondées à craindre que la décision de justice ne soit pas exécutée par l'appelant ou qu'elle ne soit exécutée qu'avec retard;
Attendu qu'un tel retard leur porterait préjudice en raison du fait que les travaux de restauration de la collégiale sont actuellement en cours et qu'il convient de replacer la statue dans son cadre en profitant de ces travaux;
Attendu que la somme de 250 francs postulée à titre de dommages-intérêts par jour de retard n'est pas exagérée; qu'il y a cependant lieu de reporter le délai après lequel cette somme sera due, à un mois après la signification du présent arrêt;
Par ces motifs, vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935, ouï en audience publique M. l'avocat général Sottiaux en son avis conforme, rejetant toutes autres conclusions, dit l'appel recevable, mais mal fondé ; en conséquence, confirme le jugement a quo en tant qu'il a condamné l'appelant à remettre aux intimées la statue litigieuse et qu'il l'a condamné aux dépens; statuant sur l'appel incident, le déclare fondé; condamne l'appelant à payer aux intimées ou à l'une d'elles, la somme de 250 francs par jour de . retard en cas de non-remise de la
(1) Tmdiwtion.
LA COUR ; - Attendu que le premier juge s'est à bon droit déclaré compétent; qu'au inoment des faits, en effet, le premier prévenu ne se trouvait pas en service en qualité d'officier de police judiciaire;
Attendu qu'en vertu des articles 9 et 16 du Code d'instr~ction criminelle, le pouvoir des gardes champêtres d'agir comme officiers de police judiciaire est limité à la recherche des délits et contra ventions susceptibles de porter atteinte aux propriétés rurales et forestières ;
Attendu que le garde champêtre De Kempe soutient qu'il faisait, au moment de l'accident, sa ronde de service en vue du contrôle de la circulation et qu'il était entré ou se pro-
statue endéans le mois de la signification du présent arrêt; condamne en outre l'appelant aux dépens d'appel.
Du 19 décembre 1951. - Cour de Brnxelles. 4e ch. - Prés. M. Dermine~ président. - JYlin. publ. M. So.ttiaux~ avocat général. - Pl. MM. Lagasse,. Sand et Y. Delacroix.
COUR D'APPEL DE GAND
10 février 1950
COMPÉTENCE. - OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE. - PRIVILÈGE DE JURIDICTION. - GARDE CHAMPÊTRE. - RECHERCHE DES INFRACTIONS EN MATIÈRE DE ROULAGE OU D'IVRESSE. - ARTICLE 483 DU CODE D'INSTRUCTION CRIMINELLE INAPPLICABLE.
Le garde champêtre n'agit en qirnlité d' off( cier de police judiciaire que dans la mesure où il recherche les dél-its et les contraventions de police, qui ont porté atteinte aux propriétés 1'urales et forestiè1'es.
Lorsque le garde champêtre s'occupe de roche1'che1' des infractions aiix lois sur le 1'01ûage ou sm' l'ivresse publique, il ne peut être considéré comme étant dans l'exercice de ses fonctions d'officier de police judiciaire et il n'y a pas lieu à application de l'article 483 du Code d'inst'ruction criminelle.
{DE KEMPE, C. MINISTÈRE PUBLIC.)
ARREST (1).
HET HOF; - Overwegende dat de eerste rechter zich terecht bevoegd ver-
posait d'entrer dans une auberge quelconque dans le but d'y constater éventuellement une infraction, quelle qu'elle soit, à la loi ;
Attendu qu'au cas où il aurait constaté une infraction au Code du roulage ou à la loi sur l'ivresse publique, ou toute autre infraction non relative aux propriétés rurales et forestières, il l'aurait fait, non en qualité d'officier de police judiciaire, mais comme simple agent de police communale (loi du 1er février 1934, art. 4, 8°; arr.-loi du 14 novembre 1939, art. 15);
Attendu que les déclarations du garde champêtre ne font en rien présumer qu'il recherchait des délits concernant les propriétés rurales et forestières, délits qu'il n'avait le droit de rechercher qu'en qualité d'officier de police judiciaire ...
COURS D'APPEL 45
klaarde ; dat de eerste verdachte, toen de feiten gebeurden, zich inderdaad niet bevond in de uitoefening van zijn dienst als officier van gerechtelijke politie;
Overwegende dat krachtens artikelen 9 en 16 van het Wetboek van strafvordering de bevoegdheid van de veldwachter om als officier van gerechtelijke politie op te treden, beperkt wordt tot het opsporen van de wanbedrijven en politie-overtredingen, die de landelijke eigendommen schade zouden kunnen berokkenen;
Overwegende dat de veldwachter De Kempe beweert op het ogenblik van het ongeval op dienstronde te zijn geweest om controle uit te oefenen op het verkeer en de ene of andere herberg te zijn binnen gegaan of voornemens te zijn geweest binnen te gaan om er gebeurlijk een inbreuk op de wet, op welk gebied ook, vast te stellen ;
Overwegende dat, moest hij een overtreding van de Wegcode of van de wet op de openbare dronkenschap of elke andere overtreding, welke niet· landelijke eigendommen betrof, vastgesteld hebben; hij deze overtredingen niet als officier der gerechtelijke politie zou vastgesteld hebben, maar eenvoudig als ambtenaar van de gemeentelijke politie (wet van 1 Februari 1934, art. 4, 8° ; besl.-wet van 14 November 1939, artikel 15) ;
Overvvegende dat niets in zijn verklaring laat veronderstellen dat hij op zoek was naar misdrijven betreffende landelijke eigendommen, tot het opsporen waarvan hij slechts als officier van gerechtelijke politie mocht optreden ...
Du 10 février 1950. - Cour de Gand. - 5e ch. - Prés. M. Fiers, président. -JVlin. publ. M. Delahaye, avocat général.
(1) Traditction.
LE TRIBUNAL; - Vu les trois exploits d'assignation, enregistrés, signifiés le 6 novembre 1947 et l'exploit, enregistré, signifié le 8 mai 1948;
Vu les conclusions prises respectivement pum· la demanderesse société de personnes à responsabilité limitée « Inpakldstenfabriek Bastiaenssens » et pour la défenderesse cc Anversoise - Assurance contre les risques de guer1•e ii;
Attendu que la « Utrechtsche Algemeene Brandverzekering Maatschappij i> n'a pas comparu à l'audience du 26 novembre 1948 où la cause fut retenue, ni personne pour
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
23 février 1952
TRIBUNAL DE COMMERCE D'ANVERS
4 mars 1949
ASSURANCE. - ASSURANCE CONTRE LE RISQUE DE GUERRE. - DOMMAGE. - CONDITION D'INDEMNISATION. -CONSÉQUENCE DE CIRCONSTANCES DE GUERRE. - PERSONNE CONSIDÉRÉE COMME INCIVIQUE. - DÉSORDRE CAUSÉ PAR SON ATTITUDE. - DOMMAGE NON COUVERT.
L' assitrance contre le risqiœ de giter1'e couv1'e le dommage qiti est lié, par un 1'appo1't causal étroit, à des circonstances de guetre.
Ce 1·apport de cause à effet fait défaut lorsque le dommage est la conséquence de déso1'dres p1'ovoqués par l'attitude irJ'éfiéchie de l'ime des victimes, dont la foule, à tort ou à raison, considé1·ait la conduite durant l'occupation ennemie comme blâmable.
(SOCIÉTÉ DE PERSONNES A RESPONSABILITÉ LIMITÉE « INPAKKISTENFABRIEK BASTIAENSSENS », C. SOCIÉTÉ COOPÉRATIVE « ANVERSOISE - ASSURANCE CONTRE RISQUE DE GUERRE.}
Le 4 mars 194·9, le tribmial de commerce d'Anvers tendit le jugement suivant :
VONNIS (1).
DE RECHTBANK; - Gezien de drie geregistreerde dagvaardingen op 6 November 194 7 betekend en de geregistreerde dagvaarding op 8 Mei 1948 betekend;
elle, et entendu à la dite audience publique les explications et moyens présentés respectivement par Me Carlos De Baeck pour tous les demandeurs et par Me H. van der Mensbrugghe pour la défenderesse cc Anversoise - Assurance contre risque de guerre ii ;
Attendu que, le dimanche 13 mai 1945, un meeting suivi de cortège fut organisé . à Kapellen par le cc comité d'épuration ii local et la section locale du groupement de résistance _cc 1\fouvement national royaliste ii ;
Attendu que pendant le cortège des biens appartenant aux demandeurs furent soit endommagés, soit détruits ou enlevés par la foule;
46 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
Gezien de besluitschriften neergelegd een voor de eiseres, personenvennootschap met beperkte aansprakelijkheid cc Inpakkistenfabriek Bastiaenssens ))' en één voor de verweerster « Antwerpsche verzekering tegen oorlogsrisico )) ;
Gezien de « Utrechtsche Algemeene Brandverzekering Maatschappij >> ter rechtzitting van 26 N ovember 1948, waarop de zaak weerhouden werd, niet verschenen is, noch iemand voor haar, en gehoord ter zelfder openbare rechtzitting de uitleggingen en middelen respectievelijk voorgedragen voor al de eisers te samen door Mr Carlos De Baeck, advocaat, en voor de verweerster << Antwerpsche verzekering tegen oorlogsrisico ii door Mr H. van der Mensbrugghe, advocaat;
Attendu que les demandeurs prétendent être assurés contre les risques de guerre par leur participation à l'assurance mutuelle de la société défenderesse cc Anversoise - Assurance contre risque de guerre » et contre les risques de vol par une police contractée auprès de la « Utrechtsche Brandverzekering Maatschappij »;
Attendu qu'ils soutiennent avoir, de ce fait, un droit à réparation soit à charge de l' « Anversoise » soit à charge de l' cc Utrechtsche >> au choix du tribunal, tout en demandant toutefois à ce dernier de ne rendre une décision que dans la cause société de personnes à responsabilité limitée cc Inpakkistenfabriek Bastiaenssens » contre l' cc Anversoise >> et de surseoir à statuer dans les trois autres causes ;
Attendu qu'à titre de preuve des clauses et conditions de leurs engagements respectifs la société de personnes à responsabilité limitée cc Inpakldstenfabriek Bastiaenssens >> produit une police d'assurance des risques de dommages de guerre, section a, n° 5029, non datée mais prenant cours le 1 cr mars 1941, alors que la défenderesse cc Anversoise -Assurance contre risque de guerre >> dépose un certificat de participation, catégorie C, n° 5029, non daté mais faisant prendre cours à l'assurance le 1er mars ;
Attendu que, les termes des deux actes n'étant pas entièrement identiques, notamment quant à l'article 2, essentiel au litige, il y a lieu de retenir la cc police >> restée en mains de la demanderesse et dont l' cc Anversoise >> reconnaît la signature, puisque le litige porte sur la créance d'indemnité de la demand.eresse et que la dite cc police » constitue le titre, faisant preuve de l'obligation d'indemniser, remis par la débitrice de l'indemnité à sa créancière ;
Aangezien op Zondag 13 Mei 1%5 te Kapellen . een meeting gevolgd ·do or optocht ingericht werd door de plaatselijke « zuivering·sactie >> en door de plaatselijke afdeling van de weerstandsgroepering « Nationale Koningsgezinde Beweging >> ;
Aangezien tij dens de optocht goed van de eisers of beschadigd, of vernield, of weggenomen werd door de menigte ;
Aangezien de eisers vertogen da t zij tegen oorlogsgevaren verzekerd zijn door hun deelneming in de onderlinge verzekering van de verweerster « Antwerpsche verzekering tegen oorlogsrisico >> en dat zij tegen diefstal verzekerd zijn door polis bij de « Utrechtsche Brand,verzekering· Maatschappij >>;
Aangezien zij deswege aandragen dat
Attendu que la convention entrée en vigueur le 1er mal'S 1941 entre la société de personnes à responsabilité limitée cc Inpakldstenfabriek Bastiaenssens >> et l' cc Anversoise » visait à cc ... destiner autant que possible les cotisations des assurés mutuellistes à les indemniser des dommages de guerre qu'ils subiraient dans leurs biens ou intérêts assurés auprès de la société ... » et précise que cc ... par dommages de guerre il faut entendre le dommage causé par la guerre et les violences de guerre, les troubles intérieurs, émeutes, faits accomplis à l'occasion de l'exécution régulière ou irrégulière d'un ordre d'une puissance militaire quelle qu'elle soit ou en vertu d'une ordonnance prise par une puissance militaire, vols et pillages en cas d'évacuation éventuelle. En ce compris le risque d'incendie survenant durant l'occupation ... >> ;
Attendu que la société de personnes à responsabilité limitée cc Inpakkistenfabriek Bastiaenssens », dans son exploit d'assignation, qualifie les violences qui lui ont porté préjudice de cc ... ·troubles intérieurs, émeutes ... » tels que mentionnés à l'extrait de la police ci-dessus reproduit, alors que dans ses conclusions, se fondant sur l'arrêt de la cour d'appel de Bruxelles (3e chambre) du 5 mai 1948 relatif au pillage d'une usine entre la retraite de l'ennemi et l'arrivée des alliés, elle allègue que le dommage est la conséquence de la cc guerre >> - terme général qui se trouve au début de l'extrait ci-dessus cité de la police -, le meeting et le cor-tège ayant été organisés à Kapellen à l'occasion du rapatriement des prisonniers politiques des camps de concentration nazis;
Attendu que l' cc Anversoise », de son côté, conteste que le dommage litigieux rentre dans les termes de l'énonciation des risques assurés,
COURS D'APPEL 47
zij op vergoeding van hun schade gerechtigd zijn, ofwel lastens de « Antwerpsche i> ofwel lastens de « Utrechtsche ii ter keuze van de rechtbank, met verzoek evenwel slechts beslissing te willen verlenen in de zaak personenvennootschap met beperkte aansprakelijkheid « Inpakkistenfabriek Bastiaenssens ii
tegen « Antwerpsche verzekering tegen oorlogsrisico i> en beslissing op te schorten in de drie andere zaken ;
Aangezien ten bewijze van de bedingen en voorwaarden van hun wederzijdsche verbintenissen, de personenvennootschap met beperkte aansprakelijkheid « Inpakkistenfabriek Bastiaenssens ii een polis van verzekering tegen oorlogsschade, afdeling C, nr 5029, zonder dagtekening doch met aanvang op 1 Maart 1941, overlegt, terwijl de verweerster, « Antwerpsche verzekering tegen oor-
n'étant, d'après elle, résulté ni de la guerre ni d'émeutes ; .
Attendu, par conséquent, que la décision à rendre dépend de la réponse à deux questions : 1° Le rapport causal entre la guerre et le dommage est-il suffisamment étroit pour que la guerre puisse être considérée comme la cause du dommage? 2° Les événements qualifiés «d'émeutes » en l'espèce tombent-ils sous l'assurance?
Attendu, quant à la première question, que la seconde guerre mondiale, abstraction faite des opérations tant militaires qu'économiques faisant partie de la conduite proprement dite de la guerre, fut pour Jes nazis l'occasion de commettre des crimes contre l'·humanité, plus particulièrement par le traitement cruel qu'ils ont fait subir à ceux qu'ils avaient déportés en captivité ;
Attendu que le retour de ceux qui y survécurent a ranimé dans la population la sympathie pour les victimes et l'horreur que lui inspiraient les bourreaux;
Attendu que, le réveil de ces sentiments se révélant, pour diverses raisons, propice aux buts de certains groupements, ceux-ci organisèrent des manifestations, tel le meeting à Kapellen qui servit de prétexte aux violences qui causèrent le dommage litigieux ;
Attendu, dès lors, que la seconde guerre mondiale, facteur très éloigné et peu déterminant dans la chaîne de faits, circonstances, prétextes, etc., ayant un rapport direct ou indirect avec le dommage litigieux, n'a donc servi que de cadre aux cruautés nazies qui ont fourni le prétexte de la manifestation pendant laquelle le dommage est né, mais qu'elle ne peut être prise pour la cause véritable de celui-ci, c'est-à-dire la cause géné-
logsrisico >> een bewijs van deelneming, categorie C, nr 5029, zonder dagtekening doch met verzekeringsaanvang op 1 Maart ter inzage neerlegt ;
Aangezien beide akten hier en daar, en onder andere betrekkelijk het voor het geschil ho of dzakelijk artikel 2, in bewoording verschillen, het de « polis » is, die in handen van de eiseres gebleven is en waarvan de « Antwerpsche i> de handtekening erkent, die behoort weerhouden, omdat het geding gaat over de schuldvordering van de eiseres op vergoeding en de bewuste « polis ii de titel uitmaakt die de schuldenares van de vergoeding aan haar schuldeiser gaf ten bewijze van haar verbintenis om te vergoeden;
Aangezien de overeenkomst die op 1 Maart 1941 tussen de persorienvennootschap met beperkte aansprakelijkheid
ratrice proprement dite (Réty. vrat. d1·. belge, v 0 Resvonsabilité, n° 257);
Attendu qu'admettre l'opinion contraire, notam1nent que la guerre, prétexte ou occasion lointaine seulement du dommage, en serait la cause, conduirait à des absurdités telles qùe celle qui consisterait à prétendre que doivent être considérés comme «dommages de guerre » les dégâts causés par des manifestants ou des contre-manifestants soit le 11 juillet ou devant le « Lion » de Waterloo, ou encore par un accident survenu lors des fêtes de commémoration de la Guerre des Paysans, parce que les rassemblements ensuite desquels le dommage a été subi n'auraient pas eu lieu à tel jour ou à tel endroit déterminé, si soit la Bataille des Eperons d'or, soit la septième Guerre de coalition, soit la Guerre des Paysans n'avaient eu lieu auparavant;
Attendu que vainement les demandeurs invoquent l'arrêt du 5 mai 1948 ;
Qu'en effet cet arrêt retient comme cause du dommage l'insuffisance des forces de police et de gendarmerie résultant de l'état de guerre, mais qu'en l'espèce une situation analogue ne s'est pas présentée, puisque le bourgmestre de Kapellen expose dans son rapport qu'il a pu disposer de services de police et de gendarmerie voulus et les a employés comrrie il l'entendit.
Attendu, quant à la seconde question, qu'il échet tout d'abord de ne pas perdre de vue que la convention d'assurance reprise dans une police déterminée ne se trouve jamais isolée mais fait toujours participer l'assuré cocontractant, même à son insu, à l'opération complexe par laquelle l'assureur compense un ensemble de risques suivant les lois
JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
·« Inpakkistenfabriek Bastiaenssens )) en de « Antwerpsche )) van kracht werd, ten .doeleinde had « ... de verzekerden op onclerlingen grondslag uit hunne bijdragen zoveel mogelijk de oorlogsschade te vergoeden welke zij aan de bij de maat.schappij verzekerde voorwerpen of belangen mochten lijden ... )) en nauwkeurig bepaalt dat « ... onder oorlogs.schade wordt verstaan schade veroor.zaakt door oorlog en oorlogsgeweld, hinnenlandsche onlusten, oproer, daden verricht bij een juiste of onjuiste uitvoering van een last van eenige militaire macht of krachtens door een militaire macht vastgestelde verordening, ,en diefstal en plundering bij eventuele -evacuatie. Hier.onder begrepen, het risico van hrandschade tijdens bezetting ... )) ;
Aangezien de personenvennootschap met beperkte aansprakelijkheid « Inpak-1dstenfabriek Bastiaenssens )) in het exploot van rechtsingang de baldadig-
.de la statistique, c'est-à-dire que l'assureur,
.connaissant, d'une part, par des statistiques iteiiues régulière1nent à jour, le nombre de :sinisti•es s-m·venus pour un risque et une :période déterminés, et étant sûr, d'autre part, que clans la période pour laquelle il contracte le nombre de sinistres qui résultera du dit risque sera à peu près le même, calcule sur •Ces données le montant de la prime qu'il .devra percevoir de chaque assuré· pour pouvoir indemniser ceux d'entre eux qui seront touchés par le sinistre envisagé (VAN EECK
HOU'J', JVIanitel cl'assiwa:noes, n° 3; HÉMARD,
Phéorie et p1·atiqne cles a.<>siwanoes te1·resfres, t. Jcr, no 42);
Attendu que l'exécütion de la convention d'assurance conclue sur de telles bases et avec tels buts, et spécialenient le calcul de compensation des risques, s~ront inévitablement reinis en question par la survenance d'une 'ÜOnjoncture dans laquelle les sinistres provoqués par le risque considéré seront plus norn.breux que dans les circonstances envisagées lors de l'établissement des statistiques, .soit que la guerre fasse de la destruction et de la dépossession des moyens a e pression ou .de défense courants, soit qu'elle diminue dans une mesure exceptionnelle l'efficacité des :0rganes de sécurité (police, corps de pompiers, etc.) ou les inoyei1s de résistance au danger;
Attendu que l'article 19 de la loi du 11 juin 1874 sur les assurances remédie à cet inconvénient en prescrivant l'élimination des causes qui faussent le rythme de fréquence des sinistres servant de base au calcul compensatoire basé sur une statistique déterminée,
heden, waardoor zij benadeeld werd, bestempelt als zijnde « ... binnenlandsche onlusten, oproer, ... )) waarvan gewag· in de vorenaangehaalde opsomming uit de polis, terwijl zij in besluitschrift en aan de hand van het arrest van het hof van beroep te Brussel (3 6 kamer) van 5 Mei 1948 ter zake van een fabriekplundering tussen de terugtocht van de vij and en de aankomst van de geallieerden, staande houdt dat haar schade het gevolg is van de << oorlog ))' algemene term waarmede de voren aangehaalde opsomming uit de polis aanvangt, daar meeting en optocht te Kapellen belegd werden ter gelegenheid van de repatriëring van de politieke gevangenen uit de naziconcentratiekampen ;
Aangezien de « An twerpsche )) daartegenover loochent dat de kwestieuze schade onder de termen van de verzekeringsopsomming valt, hetzij als oorlogsgevolg hetzij als gevolg van oproer ;
et stipule que l'assurance ne comprend ni les risques de guerre, ni les pertes ou dommages occasionnés pa1• é1neutes, sauf convention contraire, c'est-à-dire à moins qu'il soit établi que le contrat tient compte de la fréquence exceptionnelle des sinistres en temps de guerre ou d'émeutes et inclut les sinistres à survenir de la sorte dans la compensation à établir;
Attendu que, suivant sa dénomination et l'article 1 cr de la police, stipulant que l'assurance tend à destiner autant que possible les cotisations à l'indemnisation des « dommages de guerre », la défenderesse « Anversoise - Assurance contre risque de guerre » est une société d'assurance qui s'est proposée de réparer uniquement les sinistres exceptionnels exclus de l'assurance ordinaire par l'article 19 de la loi sur les assurances et que, partant, la compensation qui lui incombe serait faussée, et son obligation résultant des termes de la police arbitrairement et injustement alourdie, si on lui imposait l'indemnisation de sinistres ordinaires, à la réparation desquels elle ne s'est pas obligée;
Attendu que, pour décider si le dommage litigieux est couvert par la défenderesse l' cc Anversoise », il échet de rechercher si les faits qui se sont produits à Kapellen constituent un événement normal ou s'ils résultaient d'une conjoncture susceptible d'accélérer la fréquence des shùstres ;
Attendu que les destructions, soustractions et autres actes de vandalisme commis par une foule sont ou bien des excès résultant de son excitation fiévreuse à la suite d'une émotion profonde, né~ spontanément et qui
COURS D'APPEL 49
Aangezien de te wijzen beslissing dientengevolge afhankelijk is van het antwoord van twee vragen : 1° Is het oorzakelijk verband tussen oorlog en schade nauw genoeg om de oorlog als oorzaak van de schade te aanzien? 2° Vallen de gebeurtenissen « oproer >> met de betekenis van deze woorden in het verzekeringswezen?
Aangezien ten aanzien van de eerste v:aag de tweede wereldoorlog, buiten de virrichtingen zowel van krijgskundige as van economische aard welke tot de e~·enlijke .oorlogsvoering behoren, bov.ndien voor de nazi's gelegenheid was tt het bedrijven van misdaden tegen de nmsheid, en meer bepaaldelijk tot de 0-menselijke wrede behandeling van eegenen die zij in gevangenschap wegge"llerd hadden ; Aangezien de terugkeer van de over
Jvenden bij onze bevolking· de gevoelens rn sympathie voor de slachtoffers en an afschuw voor de folteraars wederom 1vendiger maakte; Aang·ezien de opflikkering van deze
evoelens om redenen van allerlei slag e pas kwam in het kraam van zekere erenigfog·en, die dan ook betogingen irichtten, waarvan die te Kapellen ehouden, tot voorwendsel diende aan .e baldadigheden die de kwestieuze chade veroorzaakten ;
Aangezien de tweede . oorlog die dus tls een zeer verwijderde en zeer weinig >eslissende factor voorkomt in de aanienschakeling· van feiten, omstandig-
;e dissipe avec sa dispersion (Lm·oitsse médical, r° Foules [Folie des]; Dr LE BoN, La vsychoogie des foiûes), ou bien des moyens de preslion concertés en vue de la satisfaction de ?evendications ou pour défendre une opinion 'L l'égard du gouvernement, d'une autre ;lasse sociale ou d'un parti politique ;
Attendu que la première hypothèse énonce 1.1n cas relevant d'une évolution normale êles choses; qu'en effet, s'il est naturel que le peuple se rassemble et manifeste ses opinions dans des cortèges, il est tout aussi natm•el, sinon fatal, que de fortes émotions ·poussent les foules aux Bxcès; qu'il s'agit alors d'un cas rentrant dans la com.pensation des risques. usuels et normaux, laquelle, suivant l'article 1er de la police, est exclue de l'activité conventionnellement assignée à la défenderesse l' « Anversoise » ;
Attendu que, par contre, le cas de la seconde hypothèse résulte d'une conjoncture faisant échec aux prévisions basées sur les statistiques des temps normaux et que, dès lors,
PASIC., 1952. - IIe PARTIE.
heden, voorwendsels, enz., welke middellijk of onmiddellijk iets te maken hebben met de kwestieuze schade, dientengevolge louter de tijdsomstandigheden is waarin de nazistische gruweldaden gebeurden, die tot voorwendsel dienden aan de betog'ing tijdens dewelke de schade ontstond, <loch geenszins genomen mag worden voor de oorzaak van de schade, het is te zeg·gen <lat wat postitief de schade verwekte (Rép. prat. dr. belge, v 0 Responsabilité, n° 257) ;
Aangezien het aannemen van de tegenovergestelde mening, i. e. dat de oorlog slechts verwijderd voorwends.el of gelegen: heid, als oorzaak behoort te worden aanzien, tot ongerijmdheden zou voeren zoals de beweringen dat de schade toegebracht door betogers of tegenbetogers op 11 Juli of voor de cc Leeuw >> te Waterloo, ofwel noch door ongeval in de herdenkingsf eesten van de Boerenkrifa·, als c< oorlogsschade >> te aanzien is, omdat de volkstoeloop, die ze veroorzaakte op die bepaalde tijd of op die bepaalde plaats niet zou samengekomen zijn, indien noch de Guldensporenslag noch de zevende Coalitieoorlog, noch de Boerenkrijg te voren plaats hadden gevonden;
Aangezien de eisers zich tevergeefs beroepen op het arrest van 5 Mei 1948 ·
Aangezien dit arrest inderdaad al~ oorzaak van de schade weerhoudt de oorlogstoestand welke de politie en rijkswachtdiensten ontoereikend maakte en zulke feitelijke toestand zich ter zak~ rüet voordoet vermits de heer burge-
le risque qualifié d' cc émeute » rentre dans les risques précis que couvre l' cc Anversoise >>
suivant la police ; Attendu qu'il est établi par le rapport cle
M. le bourgmestre de Kapellen que la foule, déjà très surexcitée par le récent rappel des tortures nazies, se prit de colère à la vue du codemandeur Van Son, auquel elle reprochait des sentiments proennemis, de sorte que l'événement doit être attribué à ·une attaque de fièvre collective, cas non couvert par la c01tventio11 d'assurance litigieuse;
Par ces motifs... joint les causes inscrites au rôle général sous les nos 17367, 17368, 17369 et 20054 ; déboute la société de personnes à responsabilité limitée « Inpakkistenfabriek Bastiaenssens >> de son action contre la société coopérative «Anversoise - Assurance contre risque de guerre >> ; renvoie la cause au rôle général quant aux autr.es actions ; condamne la société de personnes à responsabilité limitée « Inpakkistenfab1•iek Bastiaenssens >> aux frais de son action.
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50 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
meester van Kapellen in zijn verslag uiteenzet dat hij over de wenselijke politie- en rijkswachtdienst beschikt heeft en ze gebezigd heeft zoals hij verkoos;
Aangezien ten aanzien van de tweede vraag, vooreerst behoort onderstreept dat de verzekeringsovereenkomst in een bepaalde polis gesteld, nimmer onafhankelijk staat doch de contractsluitende verzekerde, zelfs buiten zijn medeweten, deelachtig maakt in de omvangrijke bewerking waardoor de verzekeraar te samen genomen gevaren, die deze op zich neemt, compenseert, volgens de wetten van de statistiek, het is te zeggen, dat de verzekeraar, die enerzijds ,door de statistieken welke hij ononderbroken blijft bijschrijven, het aantal onh_eilen kent dat in het verleden door een beschouwd gevaar in een bepaald tijdsbestek ontstond, en die anderzijds overtuigd is dat in de naaste toekomst waarvoor hij contracteert, omzeggens hetzelfde aantal onheilen in dezelfde tijdsruimte zullen voorkomen uit hetzelfde beschouwde gevaar, op die gegevens het beloop becijfert van de premie die hij van ieder van zijn verzekerden zal invorderen om deze onder hen te vergoeden die door het beschouwde gevaar zullen geteisterd worden {VAN EECKHOUT, Manitel d'assurances, n° 3; HÉMARD, Théorie et pratique des assurances terrestres, t. I, n° 42) ;
Aangezien de tenuitvoerbrenging van de verzekeringsovereenkomst op zulke gronden en met zulke bedoelingen aangegaan en inzonderheid de compensatie- . berekening van de gevaren, onvermijdelijk spaak zullen lopen door het opkomen van een conjunctuur waarin de onheilen talrijker door het beschouwde gevaar verwekt worden dan in de omstandigheden die voor ogen stonden bij het opmaken van de statistieken, hetzij dat de oorlog verwoesting en ontvreemding tot een alledaags dwangof verweermiddel inricht, hetzij dat hij de doelmatigheid van de normale veiligheidsinrichtingen (politie, brandweer, enz.) in buitengewone mate wegneemt, of het weerstandsvermogen aan het gevaar ongewoon belemmert ;
Aangezien het artikel 19 van de wet van 11 Juli 1874 op de verzekeringen aan dit euvel verhelpt met de uitschakeling voor te schrijven van die oorzaken welke het rhythme schenden van de onheilen zoals zij voor compensatiedoeleinden beschouwd werden in een bepaalde statistiek en deswege bepaalt
dat de verzekering niet de oorlogsrisico's bevat noch het verlies en de schade veroorzaakt door oproer, tenzij het tegendeel bedongen is, het is te zeggen, tenzij het. blijkt dat de overeenkomst rekening houdt met het buitengewoon tempo van de onheilen in oorlogs- en oproertijd en de onheilen in dat tempo gebeurd insluit in de te verrichten compensatie ;
Aangezien de verweerster « Antwerpsche verzekering tegen oorlogsschade » zoals haar benaming luidt en zoals het eerste artikel van de polis bepaalt dat zij ten doel heeft uit de bijdragen van de verzekerden zoveel mogelijk oorlogsschade te vergoeden, een verzekeringsmaatschappij is, die zich voorgenomen heeft enkel en alleen die onheilen te vergoeden welke verwekt worden in het uitzonderlijk rhythme dat het artikel 19 van de wet op de verzekering uitscha-, kelt uit de gewone verzekering en men· derhalve de compensatie, welke zij te verrichten heeft, in de war zou sturen en willekeurig en· onrechtmatig haar in de polis gestelde verbintenis zou verzwaren, indien haar de vergoeding opgelegd werd v;rn onheilen die verwekt werden volgens het gewoon tempo, en waarvoor zij geen vergoedingsverbintenis aanging ;
Aangezien om te beslissen of de, kwestieuze schade door de verweerster « Antwerpsche verzekering tegen oorlogsschade >> gedekt is behoort onderzocht of .de gebeurtenis te Kapellen een normaal verschijnsel was ofwel afhankelijk was van een conjunctuur, vatbaar om een versnelling in het verwekken van onheilen teweeg te brengen ;
Aangezien de verwoestingen, ont-. vreemdingen en andere baldadigheden collectief door een volksmenigte begaan, ofwel de uitspattingen zijn van een aanval van volkskoorts ten gevolge van een diepe aandoening in de menigte spontaan ontstaan, en welke uitsterft met de ontbinding van de volkstoeloop (Larousse médical, v° Foules [Folie des]; Dr LE BON, La psychologie des foules), ofwel de beraamde dwangmiddelen uitmaken waardoor de bevrediging van aanspraken of opvattingen nagestreefd wordt tegenover de regering, een andere volksstand of een andere partij ;
Aangezien de eerste onderstelling een geval stelt dat tot de normale gang van zaken behoort, vermits het normaal is dat het volk samenkomt en zijn gezindheid door optochten uit, en vermits het even normaal en zelfs bijna onover-
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komelijk is dat sterlte aandoeningen menigten tot buitensporigheden kunnen drijven en het deswege een geval geldt dat onder te brengen is in ·de compensatie van gewone en normale gevaren, compensatie die volgens het eerste artikel van de polis buiten de bedrijvigheid valt, welke conventioneel aan de verweerster « Antwerpsche » toegewezen is;
Aangezien in de tweede veronderstelling het geval daarentegen uit een conjunctuur voortvloeit die de vooruitzichten volgens de statistieken voor gewone tijden bedrogen doet uitkomen, en het gevaar daarom onder de benaming van « oproer >> in het raam past van die bepaalde risico's waarvan de verweerster « Antwerpsche >> volgens polis de compensatie op zich neemt ;
Aangezien het verslag van de heer burgemeester van Kapellen het bewijs bijbrengt dat de menigte reeds overgevoelig door een pas gebeurde herinnering aan de nazif olteringen, in blinde woede geraakte bij het zicht van de medeëiser Van Son, aan wie zij provij andige g·evoelens verweet, zodat de gebeurtenis neerkomt op een geval van volkskoorts die niet door de kwestieuze verzekeringsovereenkomst als te compenseren aanzien wordt ;
Om deze redenen, maakt melding van de toepassing van de artikelen 2, 4, 36, lid 1, 40, 64 en 68 van de wet van 15 Juni 1935 voor het opmaken van het exploot om de andere akten van rechtspleging welke het vonnis
(1) Ti·adiwtion.
LA COUR; - Vu les rétroactes, notamment l'expédition produite en forme régulière d'un jugement rendu le. 4 mars 1949 par le tribunal de commerce d'Anvers, ainsi que l'acte d'appel du 1er avril 1949;
Attendu que l'appel fut introduit régulièrement et dans les délais ;
Attendu qu'il résulte des faits, tels qu'ils sont résumés par le procès-verbal dressé par le bourgmestre de la commune de Kapellen, que les excès ayant donné lieu aux actes dommageables furent provoqués par l'intervention irréfléchie du nommé V an Son dont le comportement pendant l'occupation fut considéré par la foule, à tort ou à raison, comme répréhensible; qu'avant ce moment il n'y e,ut ni destructions ni tentatives de destruction ;
Attendu que, suivant l'esprit de la convention d'assurance litigieuse, le dommage couvert doit être en relation causale étroite avec des faits ou des circonstances de guerre ;
is voorafgegaan ; voegt de zaken ter algemene rol opgenomen onder de nummers 17367, 17368, 17369 en 20054; wijst de eis van de personenvennootschap met beperkte aansprakelijkheid « Inpakkistenfabriek Bastiaenssens >> tegen de samenwerkende vennootschap « Antwerpsche verzekering tegen oorlogsrisico's >> van de hand ; verwijst de zaak aangaande de andere eisen naar de algemene rol ; verwijst de personenvennootschap met beperkte aansprakelijkheid « Inpakkistenfabriek Bastiaenssens >> in de kosten in verband met haar rechtsvordering ...
Du 4 mars 1 %9. - Tribunal de commerce d'Anvers. - 7e ch. - Prés. M .. Goris, vice-président. - Réf. M. Janssens, premier référendaire ·adjoint. Pl. MM. van der Mensbrugghe et de Baeck.
Sur· appel, la cout d'appel de Britxelles 1·endit l' an·êt suivant, le 23 février 1952 :
ARREST (1).
HET HOF; - Gezien het vroeger gebeurde, namelijk de in regelmatige vorm voorgelegde uitgifte van een vonnis in dato 4 Maart 1949 door de koophandelsrechtbank, zetelende te Antwerpen, geveld, alsook akte van beroep in dato 1 April 1949;
Attendu qu'en l'espèce il est impossible de découvrir pareille relation; qu'en effet, les événements qui se sont produits à Kapellen le 14 mai 1945 ne furent point provoqués par des troubles de guerre à caractère séditieux, mais par des divergences d'opinions purement intérieures; que les excès qu'on eut à déplorer ne doivent pas être considérés comme étant nés d'un mouvement populaire irrésistible, mais plutôt comme une manifestation violente de passions non directement provoquée par des situations ou des événements de guerre ; que les pillages limités qui furent corn.mis n'apparaissent pas comme la conséquence d'une poussée de masse à tel point violente qu'une force de police agissant en nombre n'eût pu la contenir;
Par ces motifs, rejetant toutes conclusions aùtres ou contraires, vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935, reçoit l'appel et, faisant droit, déclare l'appelant sans griefs; en conséquence, confirme le jugement entrepris ; condamne l'appelant aux dépens de l'instance.
52 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
Overwegende dat het beroep regelmatig en te bekwamer tij d werd ingesteld;
Overwegende dat uit het relaas der f eiten zoals zij samengevat zijn in het proces-verbaal opgesteld door de burgemeester der gemeente Kapellen de overtuiging vloeit dat de uitspattingen die aanleiding gaven tot de schadelijke · daden, werden uitgelokt door het onbezonnen optreden van genaamde Van Son wiens gedraging tijdens de bezetting door de samengeschoolde menigte te recht of ten onrechte als laakbaar werd aanzien ; dat, v66r dit ogenblik, geen vernielingen noch gepoogd noch gepleeg·d werden ;
Overwegende dat de geest van de . kwestieuze verzekeringsovereenkomst er op wijst dat de geleden schade in nauw oorzakelijk verband moet sta:an met oorlogsaangelegenheden ;
Overwegende dat het, in onderhavig geval, onmogelijk is een dergelijk verband te ontwaren; dat immers de gebeurtenissen die zich te Kapellen op 14 Mei 1 %5 hebben voorgedaan niet werden uitgelokt door een oorlogsgeest van oproerige aard, maar het karakter van loutere binnenlandse meningsver.schillen vertoonden; dat de buitensporigheden die te betreuren vielen, niet als een onbedwingbare volksbeweging dienen aanzien, maar veeleer als een :bewogen uitwellen van hartstochten die · niet rechtstreeks door oorlogstoestanden !
of oorlogsgebeurtenissen werd verwekt ; dat de beperkte plunderingen die : werden gepleegd geen verschijnsel : waren van een onweerstaanbare overrompeling welke een in getal optre- : dende politiemacht niet had kunnen • beteugelen.
Om deze redenen, alle verdere of · tegenstrij dige besluiten verwerpende, gelet op artikel 24 der wet van 15 Juni 1935, , ontvangt het beroep en, rechtdoende, verklaart beroeper zonder grieven ; dienvolgens bekrachtigt het bestreden vonnis; verwijst· appellant in de op het hoger beroep ontstane gerechtskosten.
Du 23 février 1952. - Cour de Bruxelles. - se ch. ~ Prés. M. Van .Dyck, président. - Pl. MM. De Baeck et van der Mensbrugghe (tous deux du barreau d'Anvers).
COUR D'APP:B;L DE BRUXELLES
9 avril 1952
TRIBUNAL CIVIL DE BRUXELLES
23 avril 1949
PRÊT. PRÊT A UN CAFETIER AVEC CONTRAT DE BRASSERIE. - CESSION DU FONDS DE COMMERCE A UN TIERS AVEC L'ACCORD DE LA BRASSERIE. -CESSIONNAIRE VIOLANT SES OBLIGATIONS ENVERS LA PRÊTEUSE. - RECOURS EXERCÉ PAR CELLE-CI SOLIDAIREMENT CONTRE LE CÉDANT ET CONTRE LE CESSIONNAIRE. - RÈGLES DE LA DÉLÉGATION INVOQUÉES PAR LA BRASSERIE POUR INTERPRÉTER LE CONTRAT. SOUTÈNEMENT CONTREDIT PAR LA CONVENTION. - CÉDANT AYANT REMPLI CONTRACTUELLEMENT SES ENGAGEMENTS ENVERS LA BRASSERIE. - RECOURS MAL FONDÉ A SON ÉGARD.
En cas de p1'êt à un cafetier rnoyennant convention cornpo1'tant obligation de se fournir de biè1'es exclusivernent auprès de la b1'asserie prêteuse, si le caf etie1', avec l'accord de la prêteus~, cède son fonds de cornrnerce à un tiers et si ultérieiirernent le cessionnaire viole ses obligations à l'égard de la brasserie, c'est à tort que celle-ci p1'étend que, pour interpréter les clauses conventionnelles, il y a lieu à application des ?'ègles de la délégation (Code civ., art. 1275), si cette thèse ne trouve pas son fondernent dans les disJ!ositions de la convention, qui fait la loi des parties.
Lorsque, aux terrnes de la convention intervenue, le cédant apparaît avoir rernpli ses obligaûons envers la brasserie et lorsque les circonstances de la cause rnontrent que l'intention des contrnctants a été de décharger le cédant, s'il a exécuté tous ses engagernents conventionnels, la brasserie est rnal fondée à exe·rcer un 1'ecoU?'s contre le cédant du chef des rnanquernents du cessionnafre.
Il est de la nature des choses que ce soit la brasserie elle-rnêrne qui peille à l'exécution des obligations relatives aux f oii1'nitures de bière et non l'exploitant d'un café, qui a cédé son établissement et n'est plus à rnêrne d'y exercer im contrôle.
COURS D'APPEL 53
(SOCIÉTÉ ANONYME BRASSERIE WIELEMANS-CEUPPENS, C. ÉPOUX HERMANSSCREVE ET GOYOUT.)
En cette cause le tribunal civil de Bruxelles avait rendit, le 23 avril 1949, le jugernent suivant :
LE TRIBUNAL; - Attendu . que l'action mue suivant exploit de sommation-assignation de l'huissier Mellaerts de Bruxelles en date du 2 avril 1948 tend après autorisation maritale ou de justice de l'épouse défenderesse à la condamnation des assignés à payer solidairement ou tout au moins conjointement et les uns à défaut de l'autre la somme de 125.000 francs;
Attendu que le troisième défendeur, bien que régulièrement assigné, n'a pas constitué avoué ; ·
Attendu que le 19 août 1943 la demanderesse prêta une somme de 125.000 fr. aux premiers défendeurs, les époux Hermans-Screve, qui s'engageaient solidairement;
Attendu que ce prêt était consenti aux deux premiers défendeurs pour les aider dan.s les frais de reprise d'un débit de boissons établi en l'immeuble sis avenue Fonsny, ~;
Attendu qu'en contre-partie de ce prêt les deux premiers défendeurs s'engageaient conventionnellement : a) à ne débiter et ne laisser débiter en leur établissement que des bières en fûts et en bouteilles, export et bock, fournies exclusivement et directement par la demanderesse ; qu'il était stipulé que la dite obligation devait exister pendant toute la durée du prêt ainsi consentie mais au moins pour une période de trois années consécutives prenant cours à dater du jour de la signature de l'armistice entre la Grande-Bretagne et l'Allemagne; b) au cas de cession de leur fonds de commerce avant l'expiration du terme ci-dessus indiqué, les soussignés de seconde part imposeront par écrit à leurs successeurs éventuels l'obligation de fournitures de bières jusqu'à l'expiration du présent contrat à peine des mêmes dommages que ceux fixés à l'article 2; ils s'engagent, au surplus, à remettre entre les mains de la soussignée de première part l'acte d'imposition de cette obligation dûment signé par les cessionnaires;
Attendu qu'il n'est pas contesté : 1° que les premier et deux;ième déf endeurs ont remboursé intégralement le prêt qui leur avait été consenti; 2° qu'ils
se sont régulièrement fournis de bières chez la demanderesse directement pendant toute la période de temps où ils ont exercé la profession de débitants de boissons; 3° qu'ils ont imposé l'obliO'ation de la brasserie à leur successeur
0 le
défendeur Goyout ; qu'il est avéré 'au surplus qu'avec l'assentiment de la demanderesse Goyout s'est fourni de bières chez elle pendant de nombreux mois;
Attendu qu'il n'est ni prouvé ni même allégué que les premier et deuxième défendeurs exploiteraient actuellement directement ou indirectement un débit de boissons ;
Qu'il convient d'admettre que, dans ces conditions, les premier et deuxième défendeurs ont exécuté toutes leurs obligations envers la demanderesse ;
Que la demanderesse prétend qu'il y aurait lieu, dans l'interprétation des clauses conventionnelles, à application des règles de la délégation ;
Attendu que la thèse assurément ingénieuse de la demanderesse, ne repose que sur des déductions et un raisonnement forgés après coup et ùnilatéralement; qu'elle ne trouve pas son fondement dans les dispositions de la convention qui fait la loi des parties ;
Attendu que la convention du 19 août 1943, qui comporte pourtant de nombreuses stipulations très explicites, ne fait allusion ni à la délégation ni davantage à la circonstance que les règles. de la délégation devraient être appliquées in carn; qu'il eût pourtant été normal, si telle avait été réellement la volonté des parties, qu'une déclaration exprimant pareille volonté y fût faite par les contractants;
Attendu que la demanderesse reste dès lors en défaut d'établir le bien-fondé de son soutènement;
Qu'il convient par conséquent de s'en tenir aux clauses mêmes du contrat en les analysant dans leurs termes exacts;
Que, tel que le contrat est rédigé, il comporte pour le débitant de boissons emprunteur les obligations précisées cidessus sa.us les n°8 1 à 3 et qui ont été remplies par les premier et deuxième défendeurs ;
Attendu que l'intention des parties, telle qu'elle se déduit des éléments de fait et des termes de la convention, apparaît au surplus avoir été de décharger les premier et deuxième défendeurs lorsqu'ils avaient, comme en l'espèce, exécuté toutes leurs obligations ;
Que cette intention des parties résulte
54 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
notamment : a) des termes de l'article 2 de la convention ; que «l'engagement pris par les premier et deuxième défendeurs de ne débiter ou ne laisser débiter en leur établissement que des bières fournies exclusivement et directement par la brasserie l> prend fin en cas de cession de l'établissement en question puisque, dans ce cas, il ne s'agit plus de leur établissement mais de l'établissement d'un tiers; b) de la teneur de l'article 4 de la convention qui dispose qu'en cas de cession de leur fonds de commerce avant l'expiration du terme ci-dessus indiqué, les soussignés de seconde part imposeront par écrit à leurs successeurs éventuels l'obligation de se fournir de bières chez la demanderesse;
Attendu qu'à défaut de disposition expresse, l'obligation visée à l'article 4 ne peut être étendue au delà de ce qui est stipulé ; que les premier et deuxième défendeurs sont libérés à partir du moment où ils ont imposé au cessionnaire cette obligation, au profit de la demanderesse, et en ont produit la justification;
Attendu d'ailleurs que la convention intervenue le 31 août 1945 entre les premier et deuxième défendeurs et le troisième défendeur est produite et révèle que l'obligation existant dans le chef des premier et deuxième défendeurs à l'égard de la demanderesse a été rappelée et précisée et que le cessionnaire a déclaré reconnaître la dite obligation ;
Attendu que l'intention des parties se déduit enfin de l'attitude de la demanderesse qui a manifesté qu'elle se désintéresserait des époux Hermans, avec qui elle n'a plus entretenu de relations depuis le 31 août 1945, tandis qu'elle fournissait et facturait de la bière à Goyout;
Attendu qu'il appert de ces considérants que l'action n'est pas fondée à l'égard des premier et deuxième défendeurs;
En ce qui concerne le troisième défendeur Goyout, défaillant :
Attendu que Goyout paraît avoir contrevenu aux obligations dont il avait reconnu l'existence le 31 août 1945;
Attendu que la somme de 125.000 fr. prévue à titre d'indemnité en cas d'inobservation des engagements souscrits, paraît due par le troisième défendeur Goyout;
Par ces motifs, vu les. articles 4, 34, 37 et 41 de la loi du 15 juin 1935, ouï en son avis conforme M. Toussaint,
substitut du procureur du roi, statuant contradictoirement à l'égard des deux premiers défendeurs et par défaut à l'égard du troisième défendeur, écartant comme non fondées toutes autres conclusions, dit l'action recevable mais non fondée à l'égard des deux premiers défendeurs ; en déboute la demanderesse ; dit l'action recevable et fondée à l'égard du troisième défendeur; condamne le troisième défendeur à payer à la demanderesse la somme de 125.000 francs avec les intérêts judiciaires et les dépens.
Du 23 avril 1949. - Tribunal civil de Bruxelles. - 13e ch. - Prés. M. Reyntens, juge unique. - Min. piibl. M. Toussaint, substitut du procureur du roi. -Pl. MM. Dohy, De Becker et Cakelbergh.
Sw' appel, fo cour de Briixelles rendit, le 9 avril 1952, l'arrêt wivant :
LA COUR; - Attendu que l'appel est régulier en la forme et que sa recevabilité n'est pas contestée;
Attendu que le premier juge a exactement exposé les faits de la cause, analysé le contrat liant les parties et précisé l'objet du litige;
Attendu qu'il a pertinemment répondu aux arguments que l'appelante ne fait que reproduire devant la cour ; que l'application de la clause pénale poursuivie par l'appelante ne se conçoit qu'en cas de manquement des intimés à leurs obligations et que le premier juge a constaté à juste titre qu'ils s'y étaient entièrement conformés;
Attendu que l'appelante, légitimement soucieuse de ses intérêts et qui impose à ses emprunteurs des conditions mûries, rigoureuses et précises, s'est bornée à exiger d'eux qu'ils imposent à leurs cessionnaires éventuels l'obligation de fourniture de bière leur incombant, sans stipuler leur responsabilité personnelle en cas d'infraction des dits cessionnaires ;
Que les intimés ne peuvent être tenus au delà de ce qui a été prévu au contrat;
Qu'à supposer même qu'il y ait lieu en l'espèce à application des règles de la délégation, encore s'agirait-il d'une délégation parfaite avec novation par changement de débiteur;
Qu'en effet, la convention décharge expressément les intimés, puisqu'elle les contraint d'imposer leurs obligations de fourniture de bière à leurs successeurs, marquant bien par là que ces derniers en reprendront la charge et que les intimés cesseront d'en être personnellement tenus;
COURS D'APPEL 55
Qu'il est d'ailleurs de la nature des choses que ce soit le brasseur lui-même qui veille à l'exécution de pareilles obligations et non l'exploitant d'un café qui a cédé son établissement et n'est plus à même d"y exercer un contrôle;
Par ces motifs et ceux du premier juge, vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935, écartant toutes autres conclusions, reçoit l'appel; le déclare mal fondé; confirme en conséquence le jugement a quo et condamne l'appelante aux dépens d'appel.
Du 9 avril 1952. - Cour de Bruxelles. - 46 ch. - Prés. M. Dermine, président. - Min. publ. M. Sottiaux, avocat général. - Pl. MM. Dohy et Cakelbergh.
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
23 avril 1952
1° COMMUNE. GUERRE. ÉDILES IMPROVISÉS EN L'ABSENCE DES AUTORITÉS COMMUNALES EN EXODE. - SANS QUALITÉ D'ORGANE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE. - EMPRUNTS CONTRACTÉS PAR EUX POUR LA COMMUNE. COMMUNE NON ENGAGÉE.
2° OBLIGATION. GUERRE. ÉDILES IMPROVISÉ8 EN L'ABSENCE DES AUTORITÉS COMMUNALES EN EXODE. -EMPRUNT AU PROFIT DE LA COMMUNE. - ENRICHISSEMENT SANS CAUSE DE LA COMMUNE. - EMPRUNTEURS N'AYANT PERSONNELLEMENT RIEN RETENU DES SOMMES ENCAISSÉES. - ACTION EN GARANTIE NON FONDÉE.
1° S'ils ont accompli un devoir civique estimable, les édiles improvisés qui, en l'absence des autorités communales en exode, ont contracté des emprunts pour faire face aiix nécessités vitales et impérieuses de la commune pendant la guerre, n'ont pu cependant agir en la qualité d'organes de la puissance piiblique, ni par conséquent lier la con1;niu~e.
2° Les emprunts que des édiles improvisés remplaçant les autorités communales en exode ont contractés, au pro fit excliisif de la commiine, sont, dans le chef de cette dernière, constitutifs d'un enrichissement sans cause, qui fonde les prêteiirs appaum·is à réclame?' à la commune, par l'action de in rem verso, le montant des sommes prêtées, augmenté des intérêts judiciafres à dater du jour de la demande. L'action en garantie dirigée
contre les emprunteurs, qui n'ont retenii aucune partie des sommes encaissées, n'est pas fondée.
(COMMUNE DE QUAREGNON, C. HECQUET ET CONSORTS.)
ARRÊT.
LA COUR; Attendu qu'au cours du mois de mai 1940, les armées françaises procédèrent à l'évacuation massive de la population du Borinage; que les autorités communales de Quaregnon se joignirent pour la plupart à l'exode, emportant les deniers communaux;
Attendu que le 28 mai 1940; les cinq conseillers communaux demeurés à Quaregnon élurent à l'unanimité l'intimé Gérard, qui ne faisait pas partie du conseil, pour exercer les fonctions de bourgmestre;
Attendu que les intimés Bonjean et Lancelle, qui étaient du nombre de ces conseillers communaux, assumèrent les fonctions d'échevins; ,
Attendu que ces édiles improvisés firent face à une situation très difficile créée par la disparition des fonds communaux et la misère des temps; qu'en y parant ils ont accompli leur devoir dans des conditions dont il y a lieu de leur savoir gré;
Attendu qu'au cours de l'hiver 1940-1941, il était urgent de pourvoir aux besoins des chômeurs, des femmes et enfants de prisonniers de guerre, des secourus de l'assistance publique, et de payer les traitements et salaires des employés et ouvriers communaux;
Attendu que, certes, il existait à ce moment la possibilité de se conformer aux règles légales en matière d'emprunts communaux, mais que leur observation eût pris du temps, alors qu'on se trouvait en face de nécessités vitales et d'une impérieuse urgence ;
Attendu qu'on pouvait craindre, à défaut d'une intervention immédiate des pouvoirs communaux, une indicible misère et l'éventualité de désordres;
Attendu que les emprunts critiqués ont été réalisés dans un effort de solidarité, sans distinction d'opinions; que la personnalité de ceux qui les ont sollicités et souscrits est garante de leur absolue nécessité;
Attendu qu'il n'est pas contesté que les intimés avançèrent : Roland 300.000 fr.; Duez 50.000 fr. et Becquet 25.000 fr.;
Attendu qu'il est établi que l'intégralité de ces sommes fut affectée aux
56 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
buts pour lesquels elles avaient été réunies; que la majeure partie en fut remise au receveur communal; qu'une part fut donnée à l'assistance publique et au comité de ravitaillement; ~Attendu que les intimés de première
part sont en possession de reçus rég·uliers délivrés par Gérard, faisant fonction de bourgmestre, et Bonjean et Lancelle, faisant fonction d'échevins;
Attendu que les iµtimés de première part ont assigné la commune de Quaregnon en remboursement des sommes ainsi avancées;
Attendu que l'appelante a appelé en garantie les intimés Gérard, Bonjean et Lancelle; que ceux-ci ont été ensuite assignés directement par les demandeurs originaires pour, au cas de mise hors cause de la commune, s'entendre condamner au remboursement des sommes et à des dommages-intérêts;
Attendu que la cour est saisie tant par l'appel principal de la commune de Quaregnon que par l'appel incident des demandeurs originaires ;
En droit: Attendu qu'avec raison le premier jug·e
a estimé qu'il n'y avait point en l'espèce d'obligation contractuelle parce que les personnes qui avaient, en raison des circonstances, assumé des fonctions qui n'étaient pas les leurs, n'.avaient pu agir en tant qu'organes de la puissance publique ni lier valablement celle-ci ;
Attendu qu'à juste titre également, le tribunal écarte la thèse de la gestion d'affaires; qu'il y a lieu d'ajouter aux motifs du jugement qu'à l'époque des emprunts, il y avait théoriquement moyen de respecter les règles légales ; que si l'urgente nécessité a contraint les intimés de seconde part à procéder autrement, il n'en reste pas moins que le gérant d'affaires ne peut faire plus que celui pour lequel il agit. aurait été autorisé à faire;
Attendu qu'à bon droit, enfin, le tribunal a décidé que les faits de la cause justifiaient au contraire les demandeurs originaires à se fonder sur l'enrichissement sans cause de la commune et donc à user de l'action de in rem verso;
Attendu en effet : 1° que l'appauvrissement des demandeurs .est constant à concurrence des sommes prêtées ; 2° que l'enrichissement de l'appelante ne l'est pas moins; qu'en effet, la plus grande partie de ces sommes entra directement dans la caisse communale, que le su,rplus fut versé à la commission d'assistance publique et au comité local de ravitaille-
ment; que, bien qu'il s'agisse d'entités juridiques distinctes de l'appelante, ce versement a sublevé celle-ci d'obligations qui lui eussent assurément incombé ne fût-ce que pour éviter des désordres; 3° qu'il y a un lien de causalité entre l'appauvrissement des intimés de première part et l'enrichissement de l'appelante; 4° qu'il n'existait pas de juste cause aux payements litigieux;
Intérêts et remboursements effectués : Attendu que l'enrichissement de· la
commune étant acquis à la date de l'assignation et qu'il correspond aux sommes non remboursées à cette date, il y a lieu de décider que les intérêts judiciaires sont dus depuis le 2 décembre 1 %1, date de l'exploit d'ajournement;
Attendu que des remboursements partiels ont été effectués le 2 juin 194 7 ; qu'il y a lieu, conformément à l'article 1254 du Code civil, de les impartir d'abord sur les intérêts acquis à cette date, ensuite sur le principal;
Attendu que le compte des sommes restant dues s'établit comme suit... (sans intérêt) ;
Action en garantie : Attendu que cette action n'est pas
fondée; qu'en effet, les appelés en garantie n'ont retenu indûment aucune partie des sommes encaissées; que les circonstances de fait où les emprunts furent conclus justifiaient d'ailleurs leur action même si, administrativement, celle-ci était en tachée d'irrégularité ;
Action des demandeurs originaires contre les intimés de seconde part :
Attendu que cette demande devient sans objet, mais que les frais entraînés par elle doivent demeurer à charge des demandeurs originaires ;
Par ces motifs, vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935, entendu en audience publique M. l'avocat général Sottiaux en son avis conforme, rejetant toutes autres conclusions, donne acte à l'intimé Jean Maton Duez de sa reprise de l'instance mue par son auteur décédé; reçoit les appels; faisant droit et statuant par un arrêt réputé contradictoire à l'égard de toutes les parties, confirme le jugement a qiw mais en tant seulement qu'il a joint les causes inscrites siib nis 957, 958, 959, 1057, 3875, 3858, 3859 et 5087 du rôle général du tribunal civil de Mons ; le met à néant pour le surplus; émendant, condamne l'appelante à payer à l'intimé Roland la somme de 155.373 francs, à l'intimé Maton Duez, en sa qualité
COURS D'APPEL 57
d'ayant droit de Philippe Duez, la somme de 25.896 francs, à l'intimé Hecquet, la somme de 12. 948 francs, avec les intérêts judiciaires sur ces sommes à dater du 2 décembre 1941 ; déboute l'appelante de son appel en garantie contre les intimés de seconde part; la condamne aux frais des deux instances de l'action principale et de l'appel en garantie; condamne les intimés de première part aux dépens de leur action contre les intimés de seconde part, action advenue sans objet.
Du 23 avril 1952. - Cour de Bruxelles. 2° ch. Prés. M. Dermine, président. Min. publ. M. Sottiaux, avocat géné
ral. - Pl. MM. Decroly, Alphonse Servais, Canonne (tous trois du barreau de Mons) et Micha.
COUR D'APPEL DE GAND
23 mars 1951
OBLIGATION. - REMISE D'UNE SOMME
(1) Tracliwtion.
LA COUR; - Vu les pièces, notamment le jugement rendu contr~dictoirement entre parties, le 2 février 1950, par la chambre civile à trois juges du tribunal de première instance de Courtrai ;
Entendu les parties en leurs moyens et conclusions ;
Attendu que l'appel a été introduit régvlièrement et dans le délai ;
Attendu que l'action introduite pa.r l'intimé tend au remboursement de 90.000 francs, solde d'une somme qu'il avait remise à l'appelant, le 4 octobre 1944, suivant une reconnaissance de dette ainsi rédigée : « Le soussigné, Maurice De Meulemeester, reconnaît avoir reçu de Maurice Lambrecht la somme de 100.000 francs »;
Attendu que l'appelant prétend que cette action n'est pas recevable, la dette de l'intimé ayant une cause illicite et étant dès lors nulle, en vertu des articles 1131 et 1133 du Code civil; qu'il soutient, en effet, que l'intimé lui a remis le dit argent parce qu'il prévoyait que les billets de banque allaient devoir être déclarés ou déposés et qu'il désirait le faire sous le nom de l'appelant, en vue d'échapper aux mesures fiscales de contrôle relatives aux bénéfices réalisés pendant la guerre ; que l'intimé dénie cette allégation et prétend a voir prêté la somme litigieuse à l'appelant en vue de lui permettre la reprise
D'ARGENT A UN TIERS EN VUE D'ÉLUDER L'APPLICATION DE LA LÉGISLATION SUR LE DÉPÔT DES BILLETS DE BANQUE. -CAUSE ILLICITE. - PAS D'ACTION EN JUSTICE.
Doit être considéi'ée comme ayant 1me cause illicite et, partant, comme n'étant pas susceptible de donner naissance à une action en justice, la 1·emise d'une somme d'argent faite par une personne à une autre, le 4 octobre 1944, en vue d'éluder l'application des dispositions légales imniinentes relatives au dépôt des billets de banque.
(DEMEULEMEESTER, C. LAMBRECHT.)
ARREST (1).
HET HOF; - Gezien de stukken, onder meer het vonnis tussen partijen op tegenspraak gewezen door de rechtbank van eerste aanleg te Kortrijk, burgerlijke kamer met drie rechters, de dato 2 Februari 1950 ;
Gehoord partijen in hun middelen en besluiten;
de l'a1neublement d'une ferme, mais qu'il reste en défaut d'apporter ou même d'offrir la preuve de la fausseté du fait dénié ;
Attendu que l'intimé soutient encore que l'opération litigieuse n'était pas illicite, puisqu'elle eut lieu le 4 octobre 1944, alors que l'arrêté-loi interdisant le transfert des billets de banque et ordonnant de les déclarer et déposer ne date que du 6 octobre 1944;
Mais attendu que, dès le 4 octobre 1944, le public, sans en connaître la na.ture exacte, avait déjà connaissance des mesures qui allaient être · prises en vue, d'une part, de combattre l'inflation en réduisant le nombre de billets de banque en circulation et, d'autre part, de détei;miner l'avoir des particuliers; que toute convention conclue, même avant la
, publicatimi de l'arrêté-loi susvisé, aux fins d'éluder les dites mesures de contrôle prévues, avait une cause illicite; qu'en tout cas, aux termes des articles 4, 8 et 20 du dit arrêté-loi, l'intimé ne pouvait permettre que l'appelant 'déclarât, sous son nom, des billets s'ils ne lui avaient été prêtés et, partant, appartenaient encore à l'illtimé ;
Attendu qu'il apparaît hautement invraisemblable que l'intimé ait remis à l'appelant la somme litigieuse à titre de prêt, lorsqu'on considère : 1° que ni la reconnaissance de dette, ni Ùlême l'assignation n'y font allusion; 2° qu'il ne fut stipulé ni délai de remboursement, ni intérêts; 3° qu'il ne résulte pas des pièces produites que l'intimé ait fait, avant
58 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
Overwegende dat het hoger beroep tijdig en regelmatig werd ingesteld;
Overwegende dat de eis door geïntimeerde ingeleid strekt tot terugbetaling van 90.000 frank, saldo van een som die geïntimeerde op 4 October 19.44 aan appellant overhandigde, volgens een aldus opgestelde schuldbeltentenis : « Ondergeteekende Maurice Demeulemeester bekent ontvangen te hebben van Maurice Lambrecht de som van 100.000 franken i>;
Overwegende .dat appellant beweert dat deze vordering niet ontvankelijk is omdat de inschuld van geïntimeerde een ongeoorloof de oorzaak heeft en dus, krachtens artikelen 1131 en 1133 van het Burgerlijk Wetboek, nietig is ;
Dat hij inderdaad voorhoudt dat geïntimeerde hem dat geld ter hand stelde omdat hij voorzag dat de bankbiljetten zouden moeten aangegeven of gedeponeerd worden en dat hij wenste dat zulks onder de naam van appellant zou geschieden, zodat hij, geïntimeerde, aan de fiscale controlemaatregelen betreffende de tijdens de oorlog verwezenlijkte winsten zou ontsnappen;
Dat geïntimeerde zulks loochent en staande houdt dat hij bewuste som aan appellant leende om hem toe te laten de bekleding van een hofstede over te ne,men, maar dat hij het bewijs van dat ontkende feit noch levert noch zelfs aanbiedt;
Overwegende dat geïntimeerde insgelijks opwerpt dat deze verrichting niet ongeoorloof d was, vermits ze op 4 October 1944 geschiedde, terwijl de besluitwet die de overdracht van de bankbiljetten verbood, alsmede hun aangifte en neerlegging oplegde, slechts van 6 October 1944 dagtekent;
octobre 1948, une démarche quelconque fn vue d'obtenir rem.bourse1nent; 4° que l'appelant devait être un agriculteur de condition très modeste, puisque le fisc a admis la déclaration de ses revenus annuels d'un montant de 6.000 francs et que, en dehors de la somme litigieuse, il n'a déposé que 13.000 francs; qu'il est difficile de croire que l'intimé eût prêté 100.000 francs à l'appelant sans aucune garantie personnelle ou réelle; qu'au contraire l'intimé, qui possédait 325.100 francs, en ce compris la somme litigieuse, avait manifestement intérêt à ne pas devoir déclarer un montant si élèvé, eu égard aux lourdes impositions qui allaient inévitablemen~ frapper les bénéfices de guerre ;
Attendu que, de ces faits, il résulte à suffi-
Maar overwegende dat vanaf 4 October 1944 het publiek reeds bewust was dat zekere maatregelen, waarvan de juiste aard nog niet bekend was, zouden getroff en worden ten einde enerzij ds de inflatie te bestrijden met het aantal der in omloop zijnde biljetten te verminderen en anderzij ds het vermogen van de particulieren te bepalen; . Dat elke overeenkomst die, zelfs v66r
d,e bekendmaking van voormelde besluitwet, ten doel had deze wel voorzienbare controlemaatregelen te. ontduiken een ong·eoorloofde oorzaak had;
Dat, in elk gèval, luidens artikelen 4, 8 en 20 van deze besluitwet, geïntimeerde niet mocht toelaten dat appellant deze bankbiljetten onder zijn naam zou aan"~ geven, indien ze niet werden geleend, en dus aan geïntimeerde nog toebehoorden;
Overwegende dat het hoogst onwaarschijnlijk voorkomt dat geïntimeerde deze som ten titel van lening aan appellarit overhandigd heeft, zo men inzjet : 1° dat noch de schuldbekentenis noch zelfs de dagvaardirig ervan gewag maakt ; 2° dat nach termijn voor de terug'betaling noch intresten werden bedongen; 3° dat uît de overgelegde stukken niet blijkt dat v66r October 1948 geïntimeerde enig·e voetstap aanwendde om terugbetaling te bekomen; 4° dat appellant een zeer nederige landbouwer moest zijn, vermits de fiscus de aangifte van een jaarlijkse inkomst van 6.000 frank heeft aanvaard en, buiten de litigieuze som, appellant enkel 13.000 frank deponeerde;
Dat men bezwaarlijk kan geloven dat geïntimeerde, buiten elke persoonlijke of zakelijke zekerheid, aan appellant 100.000 frank zou hebben geleend;
Dat, vermits geïntimeerde, erin begrepen bewuste som, 325.100 frank in zijn
sauce de droit que la somme litigieuse fut remise à l'appelant uniquem.ent en vue d'évite1• les mesures de contrôle destinées à déterminer les avoirs et les bénéfices de guerre; que la dette de l'intéressé est dès lors nulle, en raison de sa cause illicite, et ne peut, en vertu des articles 1131 et 1133 du Col!le civil, servir de fondement à une action en justice (Gand, 9 novembre 1949, Rev, crit. jurispr. belge, 1949, p. 335);
Par ces motifs, vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935, rejetant 'toutes autres conclu.; sions connue non fondées, dit l'appel recevable et fondé ; met le jugement entrepris à néant et, statuant à nouveau, dit que l'action est 11011 recevable ; condamne l'inthné aux dépens des deux instances.
COURS D'APPEL 59
bezit had, hij integendeel er klaarblijkelijk belang bij had geen zulk hoog bedrag te moeten aangeven, met het oog op de zware belastingen die onvermijdelijk de oorlogswinsten moesten treff en ;
Overwegende dat uit deze f eiten ten genoege van recht blijkt dat de litigieuze som enkel en alleen aan appellant ter hand gesteld werd om de controlemaatregelen betreffende het vaststellen der vermogens en der oorlog·swinsten te ontduiken;
Dat de inschuld van' geïntimeerde derhalve nietig is wegens haar ongeoorloof de oorzaak en dus, luidens artikelen 1131 en 1133 van het Burgerlijk. Wetboek., geen rechtsvordering mag gronden (Gent, 9 November 1949, Rev. crit. jurispr. belge, 1949, blz. 335) ;
Om deze redenen, gelet op artik.el 24 der wet van 15 Juni 1935, alle andere besluiten als niet gegrond verwerpende, verk.laart het hoger beroep ontvankelijk en gegrond ; doet het bestreden vonnis te niet; opnieuw wijzende, zegt dat de eis niet ontvankelijk. is; veroordeelt geïntimeerde tot de kosten van beide instanties.
Du 23 mars 1951. - Cour de Gand. tre ch. - Ptés. M. De Brabandere, président. - Min. publ. M. Delahaye, avocat général. - Pl. MM. L.-A. Gillon et Roelandts (tous deux du barreau de Courtrai).
COUR D'APPEL DE LIÈGE
7 février 1952
FAILLITE ET CONCORDAT PRÉVENTIF. - CONCORDAT JUDICIAIRE. - VOTE DES CRÉANCIERS TARDIFS. -CONDITION DU DÉPÔT DES PIÈCES A L'APPUI DES CRÉANCES. - DÉLAI DE HUITAINE. - DÉLAI PRÉFIX.
L'article 19 de la loi du 25 septemb1·e 1946 permet le vote au conc01·dat judiciaire pœr les créanciers qui ne figurent pas sm' la liste du débiteur et qui ne se sont pas présentés volontairement à l'assemblée des créanciers, sous la condition qu'ils déposent leur créance et un tit1·e authentique ou privé à l'appui dans la huitaine de l'assemblée. Ce délai est p1·escrit à peine de déchéance pour l'un et l'autre dépôts.
Passé le délai de huitaine, le créancier qui aurait déposé sa créance, sans les pièces à l'appui, ne pourrnit utilement répare?' son omission.
(SOCIÉTÉ DE PERSONNES A RESPONSABILITÉ LIMITÉE «ATELIERS NEVEN ET cie )},)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu, en expédition régulière, le jugement rendu le 15 décembre 1951 par lequel le tribunal de commerce de Liège rejette la demande de concordat de la société de personnes à responsabilité limité13 « Ateliers Neven et Cie));
Vu l'appel interjeté par la dite société dans les formes et délais légaux;
Attendu que le jugement constate que les créanciers ayant adhéré à la demande de concordat ne représentent pas, comme le prescrit l'article 2 de la loi du 25 septembre 1946, la majorité des deux tiers de toutes les sommes dues;
Que, pour établir ce calcul, le tribunal, comme le juge délégué, a écarté une série de créances produites dans la huitaine qui suit l'assemblée et ne figurant pas à la liste remise par la société débitrice ; que èe rejet est motivé par le fait que ces créanciers n'ont présenté à l'appui aucun titre authentique ou privé;
Atten'du que l'appelante a, dans la suite, présenté des justifications de ces créances et demande que leur montant soit retenu pour le calcul, ce qui donnerait, en faveur du concordat, la majorité des deux tiers ;
Attendu que les titres privés, produits seulement à l'audience du tribunal, sont, pour un créancier, un contrat de financement, pour les autres, un extrait des livres de l'appelante;
Qu'on ne , peut toutefois affirmer, comme le fait le tribunal, que la société appelante se ·crée ainsi un titre à ellemême; qu'en effet, chacun de ces extraits est revêtu de l'approbation du créancier, avec .affirmation que des écritures conformes ont été passées dans ses propres livres; qu'il s'agit donc de comptes approuvés par les débiteurs et pouvant être retenus comme titres privés;
Mais attendu que la loi du 25 septembre 1946 est d'ordre public; que le délai de huitaine imparti par elle à l'article 19 est prescrit à peine de déchéance, sans qu'il soit fait de distinction entre le dépôt de la créance et celui des titres à l'appui; qu'en pareille matière, les deux opérations rie pourraient être dissociées que si la loi l'autorisait formellement; qu'au contraire, le texte dit. que « le créancier ne pourra produire au greffe )) que « lorsqu'il y aura à l'appui titre authentique ou privé ))' ce qui implique
60 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
le dépôt simultané de tous les documents au greffe; . .Que, surabondamment, on peut encore
tirer argument de l'intention du législat~"!lr d'éviter toute fraude et, surtout, d mstaurer une procédure rapide; qu'encore le juge délégué doit faire rapport au tribunal sur les résultats du vote, ce qu'il ne peut faire si, comme en l'espèce il n'est pas en possession des élément~ d'appréciation; Att~n~u que ~es titres justificatifs ont
donc ete prodmts tardivement et qu'ils ne peuvent ainsi justifier l'admission des créances ; que la bonne foi de la société appelante et la sincérité des créances n.e pe,uvent j;-istifier une mesure d'exception a une regle d'ordre public, destinée à. prév~ni~ la ~raude et dont l'application doit etre rigoureuse ;
Par ces motifs, écartant toutes autres conplusions, ouï M. Dallemagne, premier avocat général, en son avis conforme, donné en audience publique et en langue fr~nçaise, confirme le jugement entrepris; condamne la société appelante aux dépens d'appel.
Du 7 février 1952. - Cour de Liège. -ire ch. - Prés. M. Van de Kerckhove président. - Min. publ. M. Dallemagne: premier avocat général. - Pl. M. Maisse.
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
8 mars 1952
DIVORCE ET SÉPARATION . DE CORPS. - DEMANDE RECONVENTIONNELLE INTRODUITE EN DEGRÉ D'APPEL. - RECEVABILITÉ (CODE CIV., ARTICLE 262 [LOI DU 14 DÉCEMBRE 1935, ART. 4]). - INJURES GRAVES. -PREUVE. - ENQUÊTES CONTRAIRES TENUES AU COURS DE LA DEMANDE PRINCIPALE. - PEUVENT ÊTRE PRISES EN CONSIDÉRATION.
La demande 1·econventionnelle en divat·ce, introduite pour la premièî·e fois en degré d'appel, est 1·ecevable aitx termes de l.'article 262 nouveau (loi du 14 décembre 1935, art. 4) du Code civil.
Le juge appelé à statuer sut' une demande reconve1~ti~nnelle en divorce peii.t puiser sa conviction dans les déclarations des tém.oins entendus lors des enquêtes cont'·1:aires, portant sur des faits admis à titte de preuve contmfre des f œits art1:culés dans l'action principale {'1).
(J .. ., C. D ... )
ARRÊT.
LA COUR; - Vu, produits en forme régulière, les rétroactes de la cause et notamment l'expédition du jugement ?- quo rendu par le tribunal de première n~st~nce d~ Charleroi le 16 janvier 1951, ams1 que 1 acte d'appel contre le susdit jugement et les conclusions d'appel aux termes desquelles l'appelante formule reconventionnellement une demande en divorce contre son mari;
Attendu que l'appel est régulier en la forme et qu'il a été introduit dans les délais légaux ; . I. Quant à la demande principale :
Attendu qu'à bon droit le premier juge a autorisé le divorce pour injures graves at~x torts et griefs de l'appelante et a confié l'enfant issu du mariage à l'intimé;
Attendu, en effet, que l'appelante a quitté le domicile conjug·al dans la nuit du 26 au 27 août 1948 en l'absence du demandeur retenu en service à la caserne de gendarmerie; qu'elle emporta à cette occasion une grande partie du mobilier;
Attendu qu'il est constant que l'intimé fit d'instantes démarches pour faire réintégrer par sa femme et son enfant le domicile conjugal ; qu'il appert des éléments de la cause que l'intimé souffrait de cette séparation et qu'il garda l'espoir pendant de nombreux mo:ls de voir son épouse se décider à y mettre fin par une réconciliation ;
Attendu qu'ayant signifié à son épouse trois sommations de réintégrer le domicile conjugal (les 31 août, 29 septembre et 28 octobre 1948), l'intimé se vit .chaque fois répondre par celle-ci qu'elle refusait de rentrer chez elle, « son mari lui ren-dant la vie impossible >> ;
Attendu que les enquêtes ont révélé que si le langage de l'intimé dans ses relations conjugales n'a pas toujours-été exempt de rudesse et même de grossièreté, les témoignages reçus n'ont cependant pas fait apparaître que l'attitude de l'intimé à l'égard de l'appelante était telle qu'elle rendait à celle-ci la vie en ménage impossible ;
Attendu, comme l'observe à juste titre le jugement dont appel, que l'abandon persistant du domicile conjugal de la part de l'appelante est dès lors gravement injurieux pour l'intimé; qu'il
(1) Cf. Bruxelles, 15 novembre 1933 (PAsro., 1934, II, 90) et note,
COURS D'APPEL 61
justifie le divorce entre parties au;x torts et griefs de l'appelante sur pied de l'article 231 du Code civil;
II. Quant à la demande reconventionnelle introduite en appel par l'appelante et tendant à lui voir accorder le divorce aux torts et griefs de son mari :
Attendu qu'à tort l'intimé c?nteste Ja recevabilité de cette demande mtrodmte par voie de conclusions pour la première fois en degré d'appel; que pareille demande est recevable aux termes de l'article 262 nouveau du Code civil (loi du 14 décembre 1935, art. 4) (Novelles, v 0 Divorce et séparation de corps, nos 802 et suiv., 869 et 870);
Attendu que l'appelante, pour établ!r le bien-fondé de sa demande, s'appme sur les témoignages recueillis au cours de l'enquête contraire à laquelle elle a fait procéder en réponse à la procédure en divorce introduite contre elle par son mari;
Attendu que rien ne s'oppose à ce que le juge puise sa conviction dans .les décl~rations de témoins sur des faits admis contradictoirement à preuve entre ll'JS mêmes parties;
Attendu, au surplus, qu'en l'espèce les renseignements fournis par les éléments de l'enquête co_ntraire se trouv~nt corroborés par certarns aveux de .1 mtimé formulés par voie de conclus10ns ; que ces aveux, faits en d~hors de to:ut danger de collusion et qm sont relatifs à l'inexactitude de certains reproches, peuvent éventuellement entraî"?:er ~a conviction de la cour sans qu il soit nécessaire pour l'appelante de recourir à un complément d'information (DE PAGE, éd. 1939, t. Jer, n°8 933 et 934; t. Jer, Complément, n°s 933 et 934) ;
Attendu, d'autre part, que les faits cotés par l'appelante pour justifier sa demande en divorce ou bien ne sont pas suffisamment établis, ou bien ne sont pas dans leur ensemble constitutifs d'injures graves pouvant justifier le prononcé du divorce sur pied de l'article 231 du Code civil; que, de plus, les témoignages ~es huitième, neuvième et dixième témoms de l'enquête contraire qui sont respectivement l'oncle, la sœur et le père de l'appelante, ne peuvent être pris en ·considéra-tion; .
Attendu que l'intimé, qui semble avoir un attachement sincère pour son épouse, a pu être brusque et maladroi~ envers celle-ci, mais n'a cependant fait apparaître aucune intention méchante dans son comportement journalier; qu'il ne semble pas avoir voulu blesser ou grave-
ment injurier l'appelante; que celle-ci semble avoir supporté les violences de caractère de l'intimé avec une susceptibilité excessive ;
Attendu qu'il suit de ce qui précède que la demande reconventionnelle en divorce formée par l'appelante manque de fondement et que, de plus, il n'échet pas d'autoriser la preuve des douze faits cotés par elle ;
Attendu qu'il échet de confier la garde de l'enfant issu du mariage à l'intimé qui obtient le divorce à son profit (Code civ., art. 302), comme le fait à juste titre le jugement querellé ;
Par ces motifs, entendu en audience publique M. Colard, substitut du procureur général, en son avis conforme, écartant toute conclusion autre et notamment la demande à preuve subsidiaire de l'appelante, reçoit l'appel ·et la demande reconventionnelle formulée par l'appelante;
I. Sur l'appel : dit l'appel non fondé ; en déboute l'appelante; confirme le jugement a quo qui autorise le divorce sur base de l'article 231 du Codè civil au profit de D ... et aux torts qe J..., et confie la garde de l'enfant is$p du mariage à l'intimé et condamne l'~ppelante (défenderesse principale origiqaire) aux dépens ; ·
II. Statuant sur la demande reconventionnelle formulée en degré d'appel : la dit recevable mais non fondée ; en déboute l'appelante; condamne l'appelante aux dépens d'appel.
Du 8 mars 1952. - Cour de Bruxelles. - 7e ch. Prés. M. Ooms, président. - J.Win. publ. M. Collard, substitut du procureur général. - Pl. MM. Henry et Chaudron (tous deux du barreau de Charleroi).
COUR D'APPEL DE GAND
9 mars 1951
MANDAT. - PARTIE RECONNAISSANT AVOIR REÇU UNE SOMME A TITRE DE MANDATAIRE. - AVEU INDIVISIBLE. -PREUVE DE L'INEXISTENCE DE CE MANDAT. - RÈGLES DU DROIT COMMUN.
Est indivisible l'aveu par leqiœl une partie reconnaît avoir reçu une somme d' a1'gent, non à tit1·e personnel, mais en qualité de mandatafre.
La preuve de l'inexistence dit mandat
62 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
allégué do'Ît, en ce cas, être ?'apportée suivant les règles du droit commun \ 1).
(SCHELTJENS ET CONSORTS, C. GEERINCKX.)
ARREST (2).
HET HOF; - Gezien de stukken,
(1) Voy., outre les références citées dans l'arrêt annoté, cass., 10 mars 1952 (PAsrc., 1952, I, 423).
(2) T1'ltcliiction.
LA COUR.; - Vu les pièces, notamment le jugeinent rendu contradictoirement entre parties, le 11 mai 1950, par la première chambre du tribunal de première instance de Termonde, statuant en matière civile ;
Entendu les parties en lem•s moyens et conclusions ;
Attendu que l'appel a ,été introduit régulièrement et dans le délai ;
Attendu que les parties reconnaissent que le 9 juin 1948 une sormne de 500.000 francs, destinée à aider la Société anonyme « Air Transport i> à sortir de difficultés finan.cières temporaires, fut remise par feu Alphonse Van den Sype, ayant cause des appelants, à l'intimé Etienne Geerinckx ;
Attendu qu'alors que les appelants soutienn.ent que Van den Sype avait prêté la somme litigieuse à l'intimé agissant en nom propre, tenu, dès lors, au re1nboursement, celui-ci. prétend, au c011traire, n'avoir agi qu'en tant que mandataire de la société anonyme « Air Transport ))' laquelle · serait, partant, seule débitrice ; que, sans être contredit par les appelants, il avance que le prêt invoqué contre lui présenterait un caractère civil et ne peut, par conséquent, aux termes de l'article 1341 du Code civil, être prouvé qu'au n1oyen d'un écrit; que d'ailleurs les appelants n'offrent de faire la preuve par témoins qu'en tant que complémei1t d'un commencement de preuve par écrit qui résulterait des conclusions de l'intimé, celles-ci contenant so11 .aveu qu'il a fait transcrire la somme litigieuse au compte de la société cc Air Tri;i,nsport », qui l'a portée au crédit de l'intimé;
Mais attendu que, si l'h1timé a, en effet, reconnu ces faits, il a ajouté que c'est par suite d'une erreur qu'il fut nientionné comme créditeur dans les livres de la société cc Air Transport >> et que, dès qu'il en fut informé, il a fait transcrire le prêt au crédit de V an den Sype, la somme ne lui ayant été remise qu'en tant que mandataire de la société anonyme cc Air Transport >> ; qu'une telle décla-
onder meer het vonnis tussen partijen op tegenspraak gewezen door de rechtbank van eerste aanleg te Dendermonde, eerste kamer, zetelende in burgerlijke zaken, op 11 Mei 1950 ;
Gehoord partijen in hun middelen en besluiten ;
Overwegende dat het hoge:r: beroep tijdig en regelmatig werd irigesteld;
ration ne constitue pas un commencement de preuve par écrit, mais un aveu dont il résulte que l'intimé a reçu la somme litigieuse en tant que mandataire de la société « Air Transport >> ; que cet aveu est indivisible et que, si les appelants sont recevables à apporter la preuve de la non-existence du mandat allégué, ils doivent le faire conformément aux règles du droit commun relatives à la preuve (cass., 17 mars 1949, PASIC., 1949, I, 208; DE PAGE, note sous cass., 2 juin 1949, Rev. c1'it ju1·ispr. belge, 1950, p. 18 et 19) ; qu'aux termes de l'article 1341 du Codé civil, cette preuve ne pom'rait réslùter que d'une reconnaissance de dette écrite, signée par l'intimé agissant en son nom propre, et que les appelants restent en défaut de produire une telle pièce ;
Attendu que ne saurait constituer un commencement de preuve par écrit la mention dans les livres de la société cc Air Transport >i
que l'intimé est créditeur de la somme visée, cette mention n'émanant. pas de l'intimé;
Attendu, par conséquent, que l'offre de preuve par témoins, faite par les appelants, n'est pas recevable;
Attendu, au surplus, que les appelants ne contestent pas qu'Alphonse Van den Sype a reçu, dans le courant du mois de juillet 1948, m1 écrit signé par Van Puymbroeck, administrateur-délégué de la société anonyme « Air Transport ))' mais qu'ils prétendent que cet écrit i1e contenait pas de reconnaissance de dette ;
Attendu toutefois qu'il échet d'observer : 1° qu'ils ne fournissent pas la moindre explication concernant l'objet et le contenu de cette pièce; 2° que leur conseil, Me Michiels, écrivait le 25 janvier 1949 à Me Jacobs, curateur de la société en faillite « Air Transport >> : cc Dans la suite M. Geerinckx a apporté à mon client une reconnaissance de 500.000 fr. signée par M. V an Puymbroeck, administrateur-délégué de cc Air Transport >>; 3° que les appelants ne produisent pas ce document, prétendant que, vraisemblablement, il fut détruit par leur ayant cause, bien qu'on puisse difficilement admettre que V an den Sype, qui ne disposait d'aucune preuve de la somme prêtée, eût détruit l'unique pièce qui constituait au moins un commence1nent de preuve par écrit; que, s'il n'est pas établi avec certi-
COURS D'APPEL 63
Overwegende dat partijen het eens zijn dat op 9 J.uni 1 %8 wijlen Alfons Van den Sype, rechtsvoorganger van appellanten, geïntimeerde Etienn-e Geerinckx een som, groot 500.000 frank, ter hand stelde, die bestemd was om de naamloze vennootschap « Air Transport )) uit tijdelijke geldverlegenheid te helpen;
Overwegende dat terwijl appellanten beweren dat Van den Sype deze som geleend had aan g·eïntimeerde, handelende in eigen naam, zodat hij gehouden is tot terugbetaling· ervan, geïntimeerde integendeel voorhoudt dat hij enkel opgetreden ~s als mandataris van de naamloze vennootschap «Air Transport i>, die dus alleen bewuste som verschuldigd is ·
'nat geïntimeerde aanvoert, zonder ontkenning vanwege de appellanten, dat de te. zijnen laste ingeroepen lening een burgerlijk karakter zou vertonerr en dat ze dus, luidens artikel 1341 van het Burgerlijk Wetboek, enke1 door geschrift rnag hewez13n worden ; , . Dat appellanten trouwens het bewijs door getuigen enkel aanbieden tot aanvulling van een begin van bewijs door geschrift dat uit de besluiten van geïntimeerde zou spruiten, waarin hij bekent dat hij bewuste som liet overschrijven op rekening van « Air Transport )) die ze op het crediet van geïntimeerde heeft gebracht;
Maar overwegende dat zo geïntimeerde inderdaad deze beide f eiten heeft bekend, hij erbij voegde dat het tengevolge van ee:q vergissing is dat hij in de boeken van <c Air Transport )) als schuldeiser van deze som werd vermeld, en dat, zohaast hij zulks vernam, hij de lening op het crediet van Van den Sype liet overschrijven, omdat dit geld hem enkel als mandataris van de naamloze vennootschap « Air Transport)) overhandigd werd;
Dat zulke verklaring geen begin van bewijs door geschrift uitmaakt, doch wel een bekentenis waaruit blijkt dat geïntimeerde de litigieuze som als mandataris van cc Air Transport )) ontvangen heeft;
Dat deze bekentenis onsplitsbaar is en
tude que le document en question contenait une reconnaissance de dette, il existe pourtant des présomptions graves qu'il en était bien ainsi et que le prêt fut effectivement consenti à la société anonyme (( Air Transport », la signature de son adniinistrateurdélégué Van Puymbroeck ne pouvant s'expliquer que dans cette hypothèse ;
dat, zo appellanten het tegenbewijs van de aangevoerde lastgeving mogen leveren, zij zulks overeenkomstig de regelen van het gemeen rech t · betreff ende de bewijsmiddelen moeten doen (verbr., 17 Maart 1949, PASIC., 1949, I, 208; DE PAGE, noot onder verbr., 2 Juni 1949, Rev. c1'it. jurispr. belge, 1950, blz. 18 en 19);
Dat, krachtens artikel '1341 van het Burgerlijk Wetboek, dit bewijs dus enkel uit een schriftelijke schuldbekentenis; ondertekend door geïntimeerde, handelende in eigen naam, zou kunnen spruiten, en dat appellanten in gebreke blijven zulk stuk over te leggen ;
Ovërwegende dat niet als begin van bewijs door geschrift mag gelden de melding in de boeken van c< Air Transport )) dat geïntimeerde schuldeiser zou zijn van bewuste som, daar deze inschrijving niet van geïntimeerde uitgaat;
Overwegen:de dat het aanbod van bewijs door getuigen van appellanten derhalve niet ontvankelijk is;
Overwegende daarenboven dat appellanten niet betwisten dat Alfons Van den Sype in de loop der maand Juli 1948 een geschrift heeft on tvangen, ondertekend door Van Puymbroeck, afgevaardigde-beheerder der naamloze vennootschap <c Air Transport )J, maar dàt ze beweren dat het geen schuldbekehtenis bevatte;
Overwegende nochtans dat dient opgemerkt : 1° dat ze geen de minste uitleg verstrekken nopens voorwerp en inhoud van dit stuk; 2° dat hun raadsman, Mer Michiels, de 25 Januari 1949 aan Mer J acobs, curator van de gefailleerde vennootschap cc Air Transport i>, schreef : c< Dans la suite M. Geerinckx a apporté à mon client une reconnaissance de 500.000 francs signée par M. Van Puymbroeck, administrateur-délégué de cc Air Transport )) ; 3° dat appe~lanten dit bescheid niet overleggen, bewerende dat het waarschijnlijk door hun rechtsvoorganger · werd vernietigd, alhoewel men bezwaarlijk aannemen kan dat Van den Sype, die over geen enkel bewijs der geleende som beschikte, het enige stuk dat minstens een begin van bewijs door
Par ces motifs, vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935, rejetant comme non fondées toutes conclusions plus amples et contraires et notamment celles tendant à autoriser la preuve par témoins, dit l'appel recevable mais non fondé ; confirme le jugement entrepris; condamne les appelants aux dépens de l'appel.
64 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
geschrift uitmaakte, zou h1?bben vernield ; dat, zo het niet stellig vaststaat dat bewuste stuk een schuldbekentenis bevatte, er niettemin zware vermoedens bestaan dat zulks wel het geval was en de lening dus aan de naamloze vennootschap « Air Transport )) werd toegestaan, daar de handtekening van haar afgevaardigde-beheerder Van Puymbro·eck enkel in deze veronderstelling te verklaren is ;
Om deze redenen, gelet op artikel 24 der wet van 15 Juni 1935, alle meerdere en strijdige besluiten, en namelijk deze strekkende tot bewijs door getuigen, ve.rwerpende als ongegrond, verklaart het hoger beroep ontvankelijk maar niet g·egrond ; bevestig·t het bestreden vonnis ; veroordeelt appellanten tot de kosten van beroep.
Du 9 mars 1951. - Cour de Gand. pe ch. - Prés. lVI. de Brabandere, président. - Pl. MM. de Coninck van Noyen (du barreau de Termonde) et Van Leynseele (du barreau de cassation).
COUR D'APPEL. DE LIÈGE
23mars 1952
1° NAVIRE-NAVIGATION. - ABORDAGE. BATEAUX BELGES. - SUR LE RHIN. - COMPÉTENCE DES TRIBUNAUX BELGES.
2° LOI. - CONVENTION INTERNATIONALE. - NON PUBLIÉE EN BELGIQUE. - PAS OBLIGATOIRE POUR LES CITOYENS EN PARTICULIER.
1° En la supposant même applicable en . Belgique, la convention de M dnnheim
dt(, 17 octobre 1868 ne pourrait empêcher des citoyens belges de saisir les tribunaux belges pom· la répm·ation des dommages rérnltant d'un abordage sur le Rhin, al01·s que seuls des intérêts belges sont en ca·nse. La dite convention ne peut, en l'absence d'une disposition absolument formelle, avofr cette portée exorbitante de déposséder les tribunaux belges de leur d1·oit de ju1·idiction entre citoyens belges pour le règlement de leim litiges d'ordre privé (1).'
2° Une convention internationale ne peut êt·re obligatofre pour les C'itoyens, dans la mern1·e où elle est de natûte à exercer ime infiuence sur la jouissan'ce de leurs
(1) Comm. Liège, 13 février 1951 (Jiw. Liège, 1951, p. 173; Jiw. port d'Anve?·s, 1951,
droits privés et publics, que si elle a été publiée dans les f 01·mes pt'escrites par la lo·i du 16 aV1'il 1898.
(BOILEAU, C, MÉLARD ET VEUVE WYCKMANS.)
ARRÊT.
LA COUR; - Attendu qu'à la suite d'.un accident de navigation survenu sur le Rhin à Lobith, en territoire hollandais, le 17 octobre 1948, deux actions sont nées, l'une suivant assignation donnée le 26 mars 1949 par le sieur Mélard au sieur Albert Boileau, .l'autre suivant assig·nation donnée par la veuve Wyckmans aux sieurs Albert et Joseph Boileau et Mélard ;
Attendu que le tribunal de commerce de Liège, saisi des deux assignations, ordonna, de l'accord des parties, par jugement du 5 octobre 1949, non frappé d'appel, la jonction des actions en même temps qu'il désignait un . expert pour décrire l'accident de navigation litigieux, en rechercher les causes et déterminer les fautes éventuellement commises;
Que le rapport de l'expert judiciaire fut déposé le 22 février 1950;
Que, postérieurement, les appelants soulevèrent une exception d'incompétence rntione materiae à laquelle a répondu la décision entreprise;
Attendu que les intimés ont porté leur action devant un tribunal compéte11t tant matériellement que territorialement, conformément aux articles 12 et 39 de la loi du 25. mars 1876, contenant le titre rer du Livre préliminaire du Code de procédure civile;
Attendu que pour fonder leur exception et faire échec aux dispositions légales précitées, les appelants invoquent l'article 34 de la convention de Mannheim du 17 octobre 1868 pour la navigation du Rhin, suivant lequel les accidents de navigation survenus sur le Rhin seront de la compétence exclusive des tribunaux rhénans ;
Attendu que la Belgique ne fut pas partie à la convention de Mannheim de 1868, mais que les appelants soutiennent qu'elle le serait devenue par suite de la ratification du Traité de Versailles du 28 juin 1919, lequel par ses articles 354 et 355 aurait imposé le régime de 1868 aux puissances dorénavant représentées
p. 26); cont1'a: comm. Anvers, 21 mars 1950 (Jiw. port d'Anvers, 1950, p. 119).
COURS D'APPEL 65
à la comm1ss10n centrale pour la navigafüm du Rhin ;
Attendu que la convention de Mannheim n'a pas été publiée en Belgique; qu'elle n'est dès lors pas obligatoire pour les Belges dans la mesure où elle e$t de nature à exercer une influence sur la jouissance des droits privés et publics <le ceux-ci;
Attendu, au demeurant, que, tenant J)OUr acquis l'application des dispositions de la convention de Mannheim
qitod non - aux bateliers belges naviguant sur le Rhin, par suite de la ratification par la Belgique du Traité de Versailles, encore faudrait-il refuser à l'article 34 de la dite convention la })Ortée que veulent lui donner les appeJants;
Qu'on ne peut admettre que cette ·disposition empêcherait des citoyens belges de saisir les tribunaux belges, compétents en vertu des lois belges, d'un litige d'ordre privé qui n'intéresse .aucun étranger ;
Que ni le texte de la convention ni le texte du protocole de clôture n'autorisent cette interprétation ;
Que les appelants font état des discus.sions antérieures à la signature de la convention, mais que ces discussions n'ont Jrn avoir d'autre portée que de démontrer une divergence de vue entre les plénipotentiaires des puissances contractantes;
Que cette divergence est, à elle seule, la preuve que l'article 34 de la convention ne peut avoir la portée exorbitante ·que Jui prêtent les appelants; qu'en ·effet, le concours de volontés indispen:sable à la conclusion d'une convention internationale doit porter sur tous les points envisagés dans Je traité ;
Que la Belgique ne peut en tout cas ·être tenue que par les termes des actes cOfficiels ;
Attendu enfin qu'on n'aperçoit aucun ]Jrincipe d'intérêt public international qui empêcherait les parties de saisir les tribunaùx nationaux de leurs conflits ·d'ordre privé;
Qu'il en est surtout ainsi lorsque les JJarties, comme c'est le cas en l'espèce, ont été d'accord sur la compétence des tribunaux nationaux;
Par ces motifs, ouï M. Dallemagne, premier avocat général, en son avis conforme, donné à l'audience publique .en langue française, déclare les appelants ·sans griefs ; en conséquence, met leur appel à néant, confirme la décision ·entreprise et condamne les appelants .aux dépens d'appel; renvoie la cause en
PASIC., 1952. - IIe PARTIE.
prosécution devant le tribunal de commerce de Liège.
Du 23 mars 1952. - Cour de Liège. -ire ch. - Prés. M. Van de Kerckhove, président. Min. p-ubl. M. Dallemagne, premier avocat général. Pl. MM. Gérard (du barreau de Huy), Marissiaux et van Berckel.
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
28 novetnbre 1951
ACCIDENT DU TRAVAIL. NOTION. - SECRÉTAIRE STÉNO-DACTYLOGRAPHE. - ACCIDENT SURVENU PENDANT LES HEURES DU TRAVAIL, MAIS AU COURS D'UNE EXCURSION AVEC SON EMPLOYEUR. NON-APPLICABILITÉ DES LOIS COORDONNÉES SUR LA RÉPARATION DES DOMMAGES RÉSULTANT DES ACCIDENTS DU TRAVAIL .
Les lois coordonnées sur la réparation des doniniages résultant des accidents d·u trava'Ïl tendent à coiivrir les travaillwrs des 1·isques inhérents à leiw travail; lem· application est liniitée aux accidents sitrvenits dans le coitrs et par le fait dit contrat de trava'Ïl.
La sec·rétaire sténo-dactylographe qiti, pendans les he'llres d'll travail, accepte lib1'ement de partic1:per avec son employeur à 'Une part1:e de plaisir et est, ait cou.rs de cette dernière, victime d''lln accident, ne se troitve pas dans l' exéc'lltion de son contrat d'emploi et ne pe'llt, dès lors, p1·étendre po·uvoir bénéficier des dispositions des lois coo·rdonnées (t).
(1 o ÉPOUX CROZAZ-VANDENDRIES, C. GHYSELS ET CONSORTS' 2° SOCIÉTÉ D'ASSURANCES « ZURICH' », C. ÉPOUX CROZAZ-VANDENDRIES.)
ARRÊT.
LA COUR; - Attendu que les causes inscrites sitb nis 17177 et 17890 du rôle général sont connexes et qu'il échet de les joindre ;
Vu le jugement, produit en expédition régulière, rendu le 10 mars 1950, par le tribunal de première instance de Bruxelles;
Vu les actes d'appel régulièrement
(1) Cons. cass., 3 février 1950 (PAsrc., 1950, I, 378).
5
66 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
signifiés dans les délais, les 8 et 11 mai 1950, à la requête de Crozaz et Vandendries et le 1 O mai 1950, à la requête de la société anonyme « Zurich)) ;
A. Quant à la nature de la responsabilité :
Attendu que le jugement dont appel a dit pour droit que la réparation de l'accident dont l'appelante fut victime le 6 juillet 1948, devait se régler en conformité des dispositions des lois coordonnées sur la réparation des dommages résultant des accidents du travail;
Attendu qu'à cet égard, il suffira d'un bref rappel des notions ayant essentiellement inspiré cette législation pour éclairer la portée de la dérogation au droit commun, telle que l'entend la loi du 24 décembre 1903 ;
Que si, depuis 1903, existe, en matière d'accidents du travail, un droit à réparation, à concurrence de 50 p. c., sans nécessité de prouver la faute de l'auteur du dommage et même en cas de faute lourde de la victime, c'est uniquement parce que le législateur a, pour d'impérieuses raisons d'opportunité et de paix
' sociale, entendu couvrir les travailleurs des risques professionnels qu'intensifiait le rapide et constant développement du machinisme ;
Qu'ainsi s'explique que les lois coordonnées sur les accidents du travail limitent leur application à l'accident survenu dans le cours et par le fait de l'exécution du contrat de travail; qu'en cette matière spéciale, la solution juridique dépend étroitement des circonstances de fait;
Attendu qu'en l'occurrence, il serait abusif de prétendre que l'appelante Marie-José Vandendries, engagée comme sténo-dactylo, s'est exposée à des risques d'ordre professionnel, en acceptant de déjeuner avec son employeur et en donnant son accord à une excursion au château d'Ardenne, but d'une simple partie de plaisir;
Qu'il résulte notamment des éléments soumis à la cour que, le jour des faits, l'appelante ne s'est, en fait, livrée à aucune occupation relevant de ses obligations de secrétaire ;
Qu'elle n'assista même pas à l'entretien de son patron avec le seul client visité dans la matinée;
Que son comportement fut, exclusivement, celui d'une compagne de plaisir;
Qu'on ne peut sérieusement considérer qu'en se prêtant aux caprices d'un patron singulièrement soucieux, semble-t-il, des délassements d'une jeune secrétaire, elle
exécutait un travail commandé et rentrant dans le cadre de ses fonctions ;
Que l'intimé Ghysels cessait de se comporter en maître de l'ouvrage dès le moment où il n'attendait plus, de sa compagne, après l'euphorie d'un déjeuner en tête-à-tête, qu'une complaisante participation à des projets de joyeuse randonnée;
Attendu que l'accident, s'étant produit au cours de cette partie de plaisir, apparaît sans aucun rapport avec l'exécution normale du contrat de travail et est exclusivement justiciable, dès lors, du droit commun ;
Qu'il est sans relevance, en l'espèce, que l'accident ait eu lieu avant 18 heures, puisque, en fait, cette après-midi-là, Marie-José Vandendries ne se trouvait pas en service ;
Qu'on peut d'autant moins considérer que son employeur la ramenait du lieu de son travail que cette excursion, qui, d'ailleurs, éloignait l'appelante de son domicile, fut entreprise, comme il est dit ci-avant et reconnu par les intéressés, dans un seul but d'agrément et nullement à des fins professionnelles ;
Attendu qu'il ressort de l'ensemble de ces considérations que l'accident dont l'appelante Vandendries fut victime ne constitue pas un accident du travail au sens des lois coordonnées sur la matière ;
Qu'il échet donc, par suite, de mettre hors cause la compagnié « Zurich ll,
uniquement appelée à la cause en sa qualité d'assureur-loi de Ghysels pour les accidents du travail;
B. Au fond : Attendu que la responsabilité civile
de l'intimé Ghysels est acquise ensuite du jugement de condamnation, coulé en force de chose jugée, rendu le 25 octobre 1949 par le tribunal correctionnel de Dinant, et produit aux débats;
Attendu qu'avant de statuer plus avant, il échet d'enjoindre aux parties restant à la cause de s'expliquer quant au dommag'e résultant de l'accident du 6 juillet 1948 ;
Par ces motifs, vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935, entendu M. l'avocat général Sottiaux en son avis conforme, donné en audience publique, écartant toutes conclusions autres ou contraires, reçoit les appels et, y faisant droit, met à néant le jugement dont appel; émendant, prononce la jonction des causes inscrites sub nis 17177 et 17890 du rôle général ; met hors cause sans frais la compagnie «Zurich)); constate que la responsabilité civile de l'intimé Ghisels
COURS D'APPEL 67
est acquise par l'effet du jugement de condamnation, coulé en force de chose jugée, rendu le 25 octobre 1949 par le tribunal correctionnel de Dinant; ordonne aux parties restant à la cause de s'expliquer, avant qu'il soit statué plus avant, quant au dommage résultant de l'accident du 6 juillet 1948; fixe jour, à cet effet, à l'audience publique de la cour du 22 janvier 1952, à 9 heures du matin, pour être par les parties restant à la cause conclu et plaidé et, par la cour, statué ensuite comme il appartiendra; condamne les intimés Ghysels et la société <<Aigle de Paris>> aux dépens des deux instances, mais seulement en ce qui concerne la remise en cause de la compagnie << Zurich >i; réserve le surplus des dépens des deux instances.
Du 28 novembre 1951. - Cour d'appel de Bruxelles. - 4e ch. - Prés. M. Dermine, président. - 1\!fin. publ. M. Sottiaux, avocat général. - Pl. MM. Botson, 'ii'\Taha et A. Janssens.
COUR D'APPEL DE LIÈGE
8 avril 1952
DROIT D'AUTEUR. - INTERDICTION DE PHOTOGRAPHIER UNE ŒUVRE ARTISTIQUE. - CONDITIONS.
L' a'uteiw d'une œuvl'e artistique ne peitt en inte1·dfre la 1·eproditction photogrnphiqite que dans la mesitre où cette reproduction est de nature à nitire à ses intérêts a'rtistiques, professionnels oit scientifiques.
Il y a là une quest1:on d'appréciation laissée aitx cours et tribuna1tx.
(WELLER, VEUVE THILL ET AUTRES, C. DESSART:)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu en expédition régulière le jugement rendu par le tribunal de· première instance de Marche le 3 novembre 1951, dont appel;
Attendu que l'appel est régulier en la forme;
Attendu que deux derrümdes sont soumises à la juridiction 'd'appel : d'une part, celle de l'appelante 'Veller, veuve Thill, à qui l'appelante Association BelgoAméricaine, après avoir fait construire le mémorial du Mardasson à Bastogne,
a concédé le droit d'éditer et de vendre les cartes postales illustrées du monument; d'autre part, celle de la dite association en sa qualité de titulaire ou cessionnaire des droits d'auteur des artistes qui ont édifié le mémorial, ainsi que celle des dits artistes eux-mêmes, l'architecte, auteur des plans, et l'artiste-peintre, auteur des décorations murales intérieures;
Attendu que les appelants reprochent à l'intimé d'avoir, sans autorisation, édité et vendu des cartes-vues illustrées représentant le monument du Mar-_ dasson et les décorations murales de la crypte;
Qu'ils invoquent les dispositions des lois des 22 mars 1886 et 23 mai 191 O sur les droits d'auteur ainsi que les usages suivis en la matière, qui interdiraient la reproduction d'œuvres architecturales et plastiques, même par procédés photographiques, sans l'autorisation préalable et expresse des titulaires des droits d'auteurs ou de leurs ayants droit, et a fortiori la diffusion de ces reproduc-tions dans le public ; .
Attendu que les demandeurs originaires avaient les qualités requises pour agir au moment où ils ont introduit l'action·
Attendu que la loi protège les droits de l'auteur et lui réserve la faculté d'autoriser les reproductions de ses œuvres ;
Attendu que, pour définir le terme << reproduction ))' les parties proposent plusieurs critères ;
Attendu que ce n'est pas la question de lucre qui intervient lorsqu'il s'agit de déterminer si une reproduction tombe sous le coup de la loi ;
Qu'il faut admettre qu'un peintre ou un architecte peut se plaindre si une personne copie un tableau pour l'exposer chez lui ou un plan pour construire une maison de.stinée à sa propre habitation ;
Attendu que ce n'est pas davantage l'importance relative que l'œuvre reproduite occupe dans un ensemble qui doit être pris_e en considération ;
Qu'il n'y a pas de raison de distinguer, notamment à propos de la représentation par photographie, dessin ou gravure d'une construction, entre le cas où celle-ci se trouve isolée et le cas où elle est figurée au milieu d'un ensemble de bâtiments;
Qu'il paraît certain que,' si l'architecte pouvait interdire à quiconque de photographier une de ses constructions, il faudrait lui reconnaître ce droit quel que soit l'espace graphique occupé par
68 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
ce bâtiment, dès le moment où la représentation est suffisamment nette; que rien ne permettrait d'enlever ce droit à l'auteur du fait que son œuvre n'occuperait pas la place principale dans la représentation qui en serait fournie;
Attendu que le critère à adopter en matière de droits intellectuels se trouve dans l'intérêt artistique, littéraire, professionnel ou scientifique de l'auteur; qu'il faut tenir compte de sa personnalité et du caractère de son activité pour décider ce qui constitue la reproduction ou le plagiat de ce qu'il a créé ;
Que l'auteur d'un ouvrage scientifique ou littéraire peut empêcher les tiers de reproduire ou d'imiter son travail en tout ou en partie; que le peintre ou le dessinateur peut interdire de copier ou de faire revivre son œuvre par un procédé de peinture, de dessin, de gravure ou de projection, tout comme le compositeur peut empêcher un musicien de plagier son œuvre et un éditeur de la copier ou de la reproduire par un procédé mécanique, électrique ou autre ; mais qu'il ne peut être question de droit d'auteur lorsque l'expression choisie n'est pas de nature à éveiller une émotion au moins semblable, sinon égale, à celle que soulève l'original;
Qu'il s'agit là d'une question d'appréciation, en ce sens qu'il pourra être permis de représenter un tableau par des moyens rudimentaires dans un journal sans tomber sous le coup des dispositions qui protègent le droit des auteurs, et, d'autre part, qu'il pourra au contraire être interdit de reproduire la même œuvre par des moyens plus perfectionnés dans un journal plus spécialisé ou mieux outillé ;
Attendu, spécialement en ce qui concerne l'architecte, . que son intérêt de technicien et d'artiste l'autorise à empêcher les autres de reproduire ou d'adopter ses conceptions, tant comme plans ou comme dessins d'ensemble que comme construction ;
Qu'en ce qui concerne le photographe, il peut empêcher les tiers de reproduire les photos qui sont son œuvre, mais ne peut interdire aux autres de photographier les objets qu'il a choisis;
Attendu que les cartes postales incriminées, dépourvues de toute prétention artistique ou technique, ne peuvent
( 1) L'arrêt insiste particulièrement sur les circonstances de fait qui dérn.ontrent l'intention de fraude du mari en proposant à sa femme les avantages faisant l'objet du contrat.
tenir lieu de plans, ne donnent aucune émotion analogue à celle que doivent susciter les décorations murales de la crypte, ne constituent pas des reproductions des vues publiées par l'appelante Weller et n'ont vis-à-vis d'aucun des appelants le caractère d'un plagiat;
Qu'elles ne constituent que de simples représentations des lieux et ne peuvent être comparées à des programmes ou comptes rendus de concerts, à des appréciations de critiques d'art, à des résumés d'ouvrages littéraires ou scientifiques et sont simplement de nature à conserver le souvenir d'une visite à un lieu historique au même titre que les représentations du mémorial sur les mêmes objets (drapeaux, etc.) vendus à Bastogne;
Attendu que les actions ne sont donc pas fondées ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande reconventionnelle; qu'il doit, en effet, être admis que les appelants ont pu se méprendre s1,ir l'étendue de leurs droits.
Par ces motifs, recevant les appels en la forme, les déclare non fondés; confirme la décision dont appel; et, statuant sur la demande reconventionnelle, la déclare également non fondée; en déboute l'intimé; condamne les appelants aux dépens de l'instance d'appel.
Du 8 avril 1952. - Cour de Liège. -2e ch. - P1'és. M. Elens, président. -~Min. publ. M. de Froidcourt, avocat général. - Pl. MM. Henrard, Marclens (tous deux du barreau d'appel de Bruxelles) et Legros.
COUR D'APPEL DE LIÈGE
14 février 1952
DIVORCE ET SÉPARATION DE CORPS. CONVENTION SUR LA PEN-SION ALIMENTAIRE APRÈS DIVORCE. -CONVENTION CONCLUE PENDANT L'INSTANCE EN DIVORCE. - NULLITÉ.
Est nulle conime ayant ime cause ûlicite, la convention ùitervenite, pendant l'instance en divorce, sur les avantages qil'Î seront faits à l'époux demandeu1' après l'·instance, alo1's qit 'û apparaît qite cette convention a été conclite dans le but de réal'Ïser fraitditleitsernent la ritpture cZ.U l1:en conjugal (1). .
Cependant, l'arrêt pose aussi le principe général de la nullité des conventions sur la pension ali1nenta.ire après divorce, intervenues pendant le mariage.
COURS D'APPEL 69
(B ... , C. G ... )
ARHI~T.
LA COUR; - Attendu qü'il résulte des rétroactes que l'intimée a intenté, le H décembre '194 7, une action en divorce qui s'est terminée par un jugement du 3'1 janvier '1949, autorisant la rupture du lien conjugal aux torts et griefs du mari, celui-ci ayant fait défaut à tous les actes de la procédure ;
Attendu que ce jugement, ayant acquis autorité de chose jugée, fut transcrit le 2 mai '1949 par l'officier de l'état civil compétent; qu'un peu plus de quatre mois plus tard, le 5 septembre de la même année, l'appelant contractait un nouveau mariage;
Attendu que l'intimée a fait assigner le 29 avril 1950 son ex-mari afm de le contraindre d'exécuter l'engagement, pris envers elle au cours de la procédure en divorce, de lui payer, à titre d'indemnité, après transcription du divorce, une rente viagère égale au traitement annuel d'un greffier près le tribunal de première instance de Verviers, ayant huit ans de fonctions, sans que jam ais cette rente puisse être inférieure à 75.000 francs par an, rente payable par trimestre et par anticipation;
Attendu que le montant annuel, compte tenu de la majoration des traitements prévue par la loi du '10 mars1950, en a été fixé dans l'assignation à '105.600 francs;
Attendu qu'il convient de souligner que la convention litigieuse a été conclue le 25 juin '1948, c'est-à-dire environ trois mois avant le prononcé du jugement interlocutoire du 27 septembre de la même année, qui a admis l'intimée à fournir la preuve des faits par elle articulés contre son conjoint;
Attendu qu'il était accessoirement stipulé entre parties que l'épouse continuerait à percevoir les revenus de ses biens propres, en l'espèce ceux produits par deux immeubles : une maison de rapport sise à Bruxelles, rue Calvin, et une petite ferme, sise à Bruyère Battice, sans que ces avantages puissent avoir pour effet de diminuer, en quoi que ce soit, le montant de la rente viagère que le mari promettait de servir ;
Attendu que l'appelant reconnaît expressément que la convention discutée est établie dans le but d'arriver à indemniser l'intimée conformément à l'article 30'1 du Code civil, ce qui prouve que les parties préjugeaient de la décision du tribunal dans l'action en divorce et
admettaient que le mari devait certainement succomber;
Attendu que c'est compte tenu de ces données, qu'il importe de rechercher la valeur juridique que l'on peut attribuer à pareil contrat;
Attendu qu'avenue après divorce, quand les époux sont devenus étrangers l'un à l'autre et que la femme a recouvré l'exercice de la plénitude de ses droits civils, une convention réglant des indemnités dérivant de l'application de l'article 30'1 du Code civil doit, en principe, être tenue pour valable;
Qu'en effet la disposition légale qui accorde à l'époux innocent une pension à charge de l'époux coupable, constitue une modalité d'application du principe général inscrit en l'article 1382 du Code civil qui veut que tout fait illicite et dommageable oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer;
Que la perte, subie par l'époux Üm{)cent, des avantages dérivant du mariage et de la vie commune, constitue une cause de préjudice dont il est dù réparation;
Attendu qu'un droit à indemnité étant né et actuel, les parties capables de con tracter peuvent conventionnellement fixer le montant de la réparation, pareil acte ne comportant rien d'illicite, ni de contraire à l'ordre public et aux bonnes mœurs · Atte~du que la situation s'avère toute
différente lorsque, comme en l'espèce actuelle, à la conclusion de la convention les parties se trouvent toujours dans les liens du mariage et que les biens des époux demeurent régis par leurs conventions matrimoniales ou, à défaut, par la loi;
Attendu que l'un des conjoints, en s'obligeant sur ses biens présents et à venir, et l'autre, en stipulant à son avantage une pension, en en fixant de commun accord préalablement et définitivement le chiffre et en convenant des circonstances dans lesquelles elle deviendra exigible,· dérogent conventionnellement à leur statut matrimonial qui n'a rien prévu de tel et qui a été définitivement fixé par la célébration du mariage, ce qui est expressément prohibé par l'article '1395 du Code civil;
Attendu que reconnaître la validité de pareille convention mènerait aux pires abus et inconvénients et serait de nature à porter atteinte à la moralité publique, puisque l'on faciliterait la collusion entre époux lors des procédures en divorce, en permettant au conjoint, désireux de rompre le lien conjugal, d'arracher le
'70 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
consentement de l'autre par l'attrait de larges avantages assurés après la dissolution du mariage ;
Attendu qu'en l'espèce, il n'est que trop évident que l'appelant souhaitait ardemment la rupture du lien conjugal puisque, comme il a déjà été dit, il devait contracter bientôt une nouvelle union;
Attendu, d'ailleurs, que de nouveaux éléments, caractérisant l'illicéité de la convention, sont apparus en degré d'appel, suite aux déclarations faites par les parties au cours d'une comparution devant la cour;
Qu'il en résulte que celles-ci se sont rendues chez un seul et même conseil qui fut le rédacteur de l'acte discuté;
Que l'appelant n'a, au cours de toute la procédure en divorce, jamais consulté d'autre conseil que celui de l'intimée, qu'il en a scrupuleusement suivi les directives, en acceptant de prendre tous les torts à sa charge et à faire défaut à tous les actes de l'instance ;
Attendu que du rapprochement des déclarations faites par les parties devant la cour, des lettres des 5 janvier et 17 février 194:8, versées au dossier de l'appelant, l'on doit conclure qu'il existe une corrélation certaine entre l'intentement de l'action en divorce et la signature par le mari, à la veille de l'ouverture de la procédure contentieuse, de l'engagement de pourvoir, après divorce, largement aux besoins de l'épouse;
Attendu d'ailleurs que l'appelant eùt été dans l'impossibilité absolue d'obtenir la dissolution du lien conjugal, l'intimée seule possédant des griefs sérieux à faire valoir; que l'on doit admettre, dès lors, qu'il a voulu déterminer celle-ci à en faire usage, non pas dans son avantage à elle, mais dans son propre intérêt à lui puisqu'il désirait recouvrer sa liberté pour en faire l'usage que l'on sait;
Attendu que la convention discutée apparaît, dès lors, comme conclue durant le mariage, dans le but de réaliser frauduleusement la rupture du lien conjugal;
(1) Tracfoction.
LA COUR; - Vu les pièces, notamment le juge1nent rendu contraclictoirem.ent entre parties, le 7 juin 1950, par le tribunal de pre1nière instance cl'Auclenarcle, siégeant en matière consulaire ;
Entendu les parties en leurs 111.oyens et conclusions ;
Attendu que l'appel a été introduit régulièrement et clans le délai ;
Attemlu que Gilbert Campens a exploité
Qu'elle a ainsi une cause illicite, comme contraire à la fois à l'ordre public et aux bonnes mœurs, et tombe sous l'application des articles 1'131 et 1133 du Code civil qui la privent de tout effet;
Par ces motifs, écartant comme non fondées toutes autres conclusions et sans avoir égard à tout document versé après la clôture des débats, sans demande de réouverture, ouï M. Dallemagne, premièr avocat général, en son avis conforme, donné en audience publique et en langue française, reçoit l'appel; le déclare fondé ; faisant ce que les premiers juges auraient dù faire, déclare nulle et de nul effet la convention conclue entre parties le 25 juin 1948 ; déboute en conséquence l'intimée de son action et la condamne à tous les dépens.
Du 14 février 1952. Cour de Liège. - pe ch. - Prés. M. Van de Kerckhove, président. - Niin. 7ntbl. M. Dallemagne, premier avocat général. Pl. MM. Dumoulin et Schoonbroodt (tous deux du barreau de Verviers).
COUR D'APPEL DE GAND
29 juin 1951
FONDS DE COMMERCE. - INDIVISION. - DÉNOMINATION. - USAGE. -
ABSENCE DE DROIT PERSONNEL D'UN INDIVISAIRE.
Lorsqu'mi fonds de commerce et sa dénoniinat·ion, qu.i en constitiie l'un des élé·ments, appartiennent en indivision à plitsieitt'S personnes, l'une de celles-ci n'a pas le droit de fai?'e itsage, pour son compte personnel, de la dite dénorninat1:on.
(TAELMAN, C. CAMPENS.)
ARREST (1).
HET HOF; Gezien de stukken, onder meer het vonnis tussen partijen
depuis 1930 un fonds de c0111merce de bonneterie à Audenarde, Brooclstraat, 20; sous l'enseigne << In den Groten l\'Ieter »; que suivant les inentions du registre du c-on1.lllerce, il cessa cette exploitation le 1 7 mai 1943 et que son fils, Maurice Campens, se fit inscrire c0111me exploitant un connnerce analogue, dans le iuê1ne i111meuble et sous la inênie raison sociale ;
Attendu que Gilbert Campens est décédé le 12 novembre 194 7, mais que sa veuve,
COURS D'APPEL 71
op tegenspraak gewezen door de rechtbank van eerste aanleg te Oudenaarde, zetelende in handelszaken, op 7 Juni 1950. '
Gei10ord partijen in hun middelen en besluiten ;
Dverwegende dat het hoger beroep tij dig en reg el ma tig werd ingesteld ;
Overwegende dat Gilbert Campens sedert 1930 een handel in ellegoederen uitbaatte, te Oudenaarde, Broodstraat, 20, onder den handelsnaam « In den Groten Meter l> ;
Dat, volgens de meldingen van het handelsregister, hij, op 17 Mei 1943, een einde stelde aan deze exploitatie, terwijl zijn zoon, Maurice Campens, geïntimeerde, denzelfden dag zich liet inschrijven ais drijvende denzelf den handel in hetzelfde huis en onder dezelfde henaming <<In den Groten Meter )) ;
Overwegende dat Gilbert Campens op 12 November 1947 overleden is, maar dat zijn weduwe, Martha Gyselinck, en zijn drie kinderen, Maurice, André en Maria Campens, in voormeld huis zijn blijven wonen tot 1949 en gezegden handel aldaar hebben voortgezet ;
Dat Maria Campens op 4 Juni 1948 in den echt is getreden met René Tael-
J\Tartha Gyselinck, et ses trois enfants, Maurice, André et Maria Ca1npens, ont continué à habiter l'immeuble susvisé jusqu'en 1949 et y ont continué le commerce litigieux ; que, le 4 juin 1948, Maria Cam.pens a épousé René 'l'aelman, lequel se fit inscrire, le 22 juin 1948, au registre du c01rnnerce com111e exploitant depuis . le 1 cr juin 1948 un conunerce de bonneterie clans l'innneuble visé, également sous la raison sociale " In den Groten Meter >> ;
Attendu que l\fa.rtha Gyselinck et ses deux fils, Maurice et André, ont transféré leur -exploitation clans un inuneuble situé à Audenarde, Krekelput, 5, où ils la continuent .sous l'enseigne '' In den Groten l\ieter »;
Attendu que l'action dirigée par l'intimé l\faurice Campens contre les époux TaehnanCampens tend à entendre faire défense aux .appelants d'utiliser la raison sociale " In den Groten l\'Ieter », alors que les appelants par voie d'action reconventionnelle prétendent, .au contraire, faire interdire aux intimés l'emploi de la dite dénomination;
Attendu que l'intimé prétend, sans en .apporter la preuve toutefois, que son père, Bilbert Ca.mpens, lui aurait transmis la raison sociale litigieuse ; que le seul fait que, le jour même où Gilbert Carnpens déclara cesser son exploitation,, l'inthné c01n1nença un com-1nerce analogue dans le n1ê1ne irn1neuble ne suffit pas à étayer le soutènement de l'intimé,
man, en deze laatste, op 22 Juni 1948, zich liet inschrijven in het handelsregister ais uitbatende, sedert 1 Juni 1948, een handel in ellegoederen in gezegd huis, onder dezelfde benaming « In den Groten Meter )) ;
Overwegende dat Martha Gyselinck en haar twee zonen, Maurice en André Campens, hun exploitatie hebben overgebracht naar een huis gelegen te Oudenaarde, Krekelput, 5, alwaar zij voort handel drijven onder het uithangbord << In den Groten Meter )) ;
Overwegende dat de eis door Maurice Campens, geïntimeerde, ingesteld tegen de echtgenoten Taelman-Campens, appellanten, strekt tot het horen zeggen dat appellanten geen gebruik mogen maken van den handelsnaam << In den Groten Meter ll, terwijl appellanten, bij tegeneis, vorderen dat het, integendeel, aan geïntimeerde zou verboden worden deze benaming te benuttigen;
Overwegende dat geïntimeerde beweert dat zijn vader, Gilbert Campens, hem bewusten handelsnaam zou overgedragen hebben, maar geen bewijs daarvan levert;
Dat het louter feit dat, op denzelfden dag, Gilbert Campens verklaarde een
d'autant plus que ce dernier, lors de sa corn.parution en cha.111bre du conseil, a. reconnu que, depuis 1943, tous les bénéfices provenant de l'entreprise litigieuse furent partagés entré sa 111ère, son frère, sa sœur et lui-111ê1ne; d'où il suit que l'exploitation dont question et, partant, la raison sociale qui en fait partie, ne sont à aucun i1101ne1it devenues sa propriété exclusive ; que vainement les appelants soutiennent que l\'Iartha Gyselinck aurait fait donation de la dénomination litigieuse à Marie Carnpens;
Attendu, en effet, que si l'acte passé le 12 avril 1948 pa.r-devant le notaire Van Wetter à Audenarde stipule qu'il est fait donation d'une " niaison de c0111nierce avec dépendances et cour, dén01nmée " In den » Groten l\'Ieter », située Broodstraat, 20, à Audenarde », cette dénomination visait uniquement à mieux identifier le bien ; qu'il ne peut nullement s'en déduire l'intention, dans le chef de Martha Gyselinck, de céder la raison sociale à sa fille; qu'il ne se c01nprendrait pas qu'une raison sociale fût transférée indépendamment de l'exploitation dont elle fait partie, alors que celle-ci est · continuée ;
Attendu, au surplus, que, puisque le fonds de commerce et l'enseigne qui en forme un élément appartenaient en indivision à l\fartha Gyselinck et aux héritiers de Gilbert Cam-
72 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
einde te stellen aan zijn handel en geïntimeerde denzelfden handel begon in hetzelfde huis, niet volstaat om de aanvoering van geïntimeerde te staven, des te meer daar deze laatste, tij dens 'zijne verschijning in de raadkamer, bekend heeft dat al de winsten voortkomende van deze handelszaak sedert 1943, onder zijn moeder, zijn broeder, zijn zuster en hem zelf werden verdeeld, en daaruit noodzakelijk volgt dat' gezegde handelszaak en derhalve de handelsnaam, die er deel van uitmaakt, nooit zijn uitsluitende eigendom zijn geworden;
Dat appellanten vruchteloos voorhouden dat Martha Gyselinck giïte zou hebben gedaan van den litigieuzen handelsnaam aan Maria Campens;
Overwegende immers dat, zo de akte verleden op 12 April 1948 voor notaris Van vVetter te Oudenaarde, vermeldt dat schenking wordt gedaan van « een handelshuis met afhangen en koer, genaamd « In den Groten Meter l>, gestaan en gelegen Broodstraat, 20, te Oudenaarde l>, deze henaming enkel hestemd was om het onroerend goed beter te vereenzelvigen, maar dat uit deze tekst geenszins kan worden afgeleid dat Martha Gyselinck het inzicht zou hehhen gehad den handelsnaam aan haar dochter over te dragen ;
Dat het immers niet begrijpelijk zou zijn dat een handelsnaam afzonderlijk zou worden afgestaan en aldus afgescheiden van de handelszaak waarvan hij deel uitmaakt, als wanneer die handelszaak voort 1vordt uitgebaat;
Overwegende daarenboven dat, vermits de handelszaak, en de naam die een der bestanddelen ervan is, in onverdeeldheid toehehoorden aan Martha Gyselinck en aan de erfgenamen van Gilbert Campens, het haar niet toegelaten was dezen naam zonder toestemming der medeëigenaars af te staan;
Dat appellanten dus niet gerechtigd
pens, celle-ci ne pouvait pas céder cette enseigne sans l'assentinient de ses copropriétaires ;
Que, dès lors, les appelants ne sont pas en droit d'utiliser la dénomination, laquelle dépend, enseinble avec le fonds de comnierce, de la communauté aya1it existé entre Gilbert Campens et Martha Gyselinck; corn -munauté non liquidée jusqu'à présent; qu'en sa qualité d'héritière de Gilbert Ca:rùpens, l'appelante Maria Campens peut uniquement faire valoir ses droits en tant que copropriétaire du fonds de co1nmerce et de la raison
zijn gehruik te maken van deze benaming die, met de handelszaak, afhangt van de huwelijksgemeenschap welke bestaan heeft tussen Gilbert Campens en Martha Gyselinck, gemeenschap die tot heden nog niet vereffend en verdeelcl werd ·
Dat in haar hoedanigheid van erfgename van Gilbert Campens appellante Maria Campens enkel haar rechten mag laten gelden als medeëigenares van voormelde handelszaak en handelsnaam, maar dezen naam enkel voor eigen gebruik zou mogen henuttigen indien, tengevolge van de vercleling der roerende goecleren afhangende van voormelde nalatenschap en namelijk van de hanclelszaak, de uitsluitende eigendom van de litigieuze naam haar zou worden toehedeelcl ;
Om deze redenen, gelet op artikel 24 der wet van 15 Juni 1935, alle andere hesluiten als ongegrond verwerpende, verklaart het hoger beroep ontvankelijk maar niet gegrond; bevestigt het bestreden vonnis in al zijn beschikkingen; veroordeelt appellanten tot de kosten van heroep.
Du 29 juin 1951. Cour de Gand. pe ch. - Prés. M. De Bersaques, conseiller faisant fonctions de président. -i\!Iin. pilbl. M. Vermeulen, premier avocat général. - Pl. MM. Kickx et De Munter (ce dernier du barreau cl'Audenarde).
COUR D'APPEL DE LIÈGE
4 juillet 1951
DONATIONS ET TESTAMENTS. TESTAMENT. CLAUSE D'INALIÉNABILITÉ. CLAUSE ILLICITE. - NULLITÉ DE LA LIBÉRALI'l'É SI CETTE CLAUSE EXPRIME LE BUT DE CELLE-CI.
Est 'illicite coninie contrafre à l' ord1·e Jnlblic,
sociale litigieux, mais qu'elle ne serait autorisée à utiliser la dénomination à titre privatif que si, ensuite du partage cles biens meubles dépendant de la succession susvisée, et notan1111.ent du fonds de comnierce, la propriété exclusive de cette dénomination lui était attribuée ;
Par ces motifs, vu l'article 24 de la loi· clu 15 juin 1935, rejetant toutes autres conclusions c01nme non fondées, dit l'appel recevable mais non, fondé ; confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; . con -damne les appelants aux dépens d'appel.
COURS D'APPEL 73
la .cla'use d'un testament interdisant ait légataire l' aliénat1:on dit bien lé gité.
Lorsque cette clause exprime le bnt de la libérnlité, la raison impulsive et déter-11iinante, exclitsive et f'ondamentale de celle-ci, elle entraîne lCL nullité de la l1; bérCLlité.
(TRINE-BELOT, C. TRINE-DAVID.)
ARRÊT (1).
LA COUR; - Attendu qu'à l'action en partage de la succession de la dame Laure-Marie Trine, les appelants opposent un testament olographe de la de cujus en date du 20 mars 1948 par lequel la défunte lègue sa maison d'habitation avec ses dépendances au fils mineur des appelants, Jacques Trine;
Attendu que ce legs est affecté d'une charge illicite, en vertu de laquelle le léo·ataire «ne peut jamais la vendre>> (1~ maison et ses dépendances) ; que le caractère illicite de cette clause n'est pas contesté par les parties, mais que celles-ci sont en désaccord sur le pomt de savoir si, aux termes de l'article 900 du Code civil, la nullité comminée par cet article affecte la clause seule ou bien la disposition testamentaire dans son entier;
Attendu que sur la feuille de papier contPnant le testament, on relève les lignes ci-après, tracées incontestablement par la dé fun te :
Première ligne : «si toutefois, vous avez envie de»;
Deuxième ligne : « vendre ma maison, voici ce que je décide » ;
Troisième ligne, séparée de la deuxième par un blanc de '16 millimètres : << Barvaux, le 20 mars 1948 »;
Quatrième ligne, séparée de la troisième par un blanc de 13 millimètres : << Je donne et j'abandonne »;
Cinquième ligne, séparée de la quatrième par un blanc de 2 centimètres << Barvaux, le 20 mars 1948 »;
Sixième lig·ne : «Voici mon testament >> ; Septième ligne : « Je donne et j'aban
donne ma>>; Huitième ligne : << maison à mon petit
J acqui Belot, mon filleul, avec toutes>>; Neuvième ligne : « ses dépendances.
Mais il ne peut jamais la>>; Dixième ligne : « vendre >> (Signé)
Laure Trine;
(1) Un pourvoi a été fonné contre cet 1:1rrêt, pourvoi qui a donné lieu à l'arrêt de la cour de ca.ssation du 31 octobre 1952.
Attendu qu'à tort le premier juge a écarté du litige les quatre premières lignes sous le prétexte que ces lignes se présenteraient comme des actes préparatoires, des tâtonnements auxquels la de cujus se serait livrée avant d'établir un texte définitif;
Attendu en effet que ces lignes font corps avec la disposition testamentaire, aussi bien matériellement qu'intellectuellement, sans rature ni surcharge ni biffures, et que si les lignes postérieures sont consacrées à l'acte de disposition proprement dit, les quatre premières en constituent un préambule où il est aisé de r'etrouver, de façon non douteuse, la pensée, le motif et la volonté qui ont dicté l'acte de disposition contenu dans les six dernières lignes ;
Attendu qu'il est manifeste que, si la testatrice a, après la quatrième ligne, interrompu sa rédaction pour écrire à nouveau la date et les mots « voici mon testament )), elle a repris textuellement les mots qu'elle avait employés à la quatrième ligne, et achevé clans les septième et lignes suivantes la mêm.e pensée et la même volonté qu'elle avait commencé d'exprimer;
Attendu que si l'on peut relever, dans ce feuillet, une interruption matérielle, d'ailleurs sans importance, il est absolument impossible d'y voir une interruption intellectuelle; que bien au contraire, dans les quatre premières lignes, la testatrice annonce, sans ambiguïté, qu'elle va décider quelque chose, en donnant et abandonnant... (quatrième ligne); qu'elle reprend, à partir de la septième ligne, la même pensée et dans des mots identiques, ce qui donne à l'écrit tout entier un sens et une volonté où U est impossible de déceler la moindre contradiction ou le moindre hiatus intellectuel;
Attendu en définitive que, clans le même écrit, la testatrice révèle, sans discontinuité mentale, et le motif qui l'a fait agir, et l'acte de disposition auquel elle se décide en fonction du motif qui le précède ;
Attendu en conséquence qu'il y a lieu de considérer cet écrit comme un tout cohérent dont une partie éclaire l'autre et qu'il n'est pas possible de le diviser sans fausser la pensée de la te~tatrice; qu'il importe peu qu'elle ait interrompu matériellement sa rédaction, pour préciser par écrit que c'était bien son testament, et que la place occupée par cette mention, au milieu de l'écrit, n'est pas de nature à justifier une scission
?4 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
ou une modification de pensée ou de volonté; qu'au surplus, si elle avait eu l'idée ou la crainte de voir surgir un doute sur sa pensée, il lui suffisait de biffer ce qu'elle voulait désavouer, mais que cette biffure ne pouvait émaner que d'elle et que le juge ne peut pas s'y substituer;
Attendu qu'il se voit ainsi que, loin de recourir à des éléments extrinsèques, il suffit de prendre l'écrit tel qu'il se présente pour être éclairé de façon décisive sur le processus intellectuel qui a été celui de la testatrice ;
Attendu que la première ligne s'adresse manifestement à ses héritiers naturels et légaux, sans qu'il soit possible de supposer d'autres destinataires que ceux-ci; que cette première ligne commence par un «si ii dubitatif suivi d'une disjonctive antithétique « toutefois ii, qui, incontestablement, fait suite à un raisonnement intérieur qui n'est pas exprimé, mais qu'il est aisé de reconstituer comme étant l'hypothèse contraire à celle énoncée dans la première ligne ; que la rédaction de cette première ligne indique clairement que la testatrice, avant de la rédiger, avait tout d'abord envisagé mentalement l'hypothèse où . ses héritiers ne vendraient pas la maison familiale; que le silence gardé par l'écrit sur cette première hypothèse démontre que, clans le cas envisagé mentalement, elle n'avait pas de dispositions spéciales à prendre, mais que, par contré, elle s'est arrêté par écrit à l'hypothèse contraire, et a révélé à ce moment, par une phrase très claire, le fond de sa pensée ;
Attendu que par cette phrase (première et deuxième lignes) la. testatrice a explicité la hantise qui la possédait à cet instant, à savoir le danger qu'elle voulait éviter à tout prix de voir sortir de la famille la maison ancestrale avec ses dépendances; que cette pensée domine tout l'écrit, au point d'être reproduite sous une forme impérative et radicale dans les dernières lignes du testament;
Attendu que l'on peut en conclure que le but recherché et poursuivi par la testatrice consistait essentiellement à bloquer la maison familiale au sein de la famille ; que pour atteindre ce but, elle a eu un recours à un stratagème malhabile d'où l'idée de libéralité est refoulée à un point tel que si elle avait eu la certitude que la maison ne serait pas sortie de la famille, elle n'aurait certainement pas testé comme elle l'a fait;
Attendu que ce raisonnement trouve
une confirmation dans le fait que la testatrice avait déjà pris d'es dispositions de faveur au profit de son filleul dès le 16 novembre 1942 en lui constituant une assurance-vie différée, et qu'aucun élément du dossier, y compris les preuves d'affection spéciale invoquées par les appelants, ne pourrait expliquer la disproportion importante que la réalisation du legs en traînerait entre les héritiers d'une part et le filleul de l'autre;
Attendu qu'il résulte de ces considérations que, par ignorance de la loi, la testatrice a subordonné complètement sa libéralité à un but unique exclusif, mais illicite, celui de, maintenir la maison dans la famille, et que le legs n'a été, dans son esprit, qu'un moyen maladroit de réaliser son but et d'apaiser sa hantise; que ce dernier état d'esprit se conçoit aisément, lorsqu'on songe que le testament a été écrit le jour même où mourait sa bellesœur, dont le décès faisait soudain surgir, au sujet de la maison familiale, des dangers et des hypothèses qu'elle a voulu prévoir et déjouer;
Attendu que par de judicieux motifs, que la cour adopte, le premier juge a décidé que la clause d'inaliénabilité était bien la raison du legs ; que cette clause illicite constituait la cause impulsive et déterminante qui a guidé la testatrice dans tout son écrit et notamment dans l'acte de disposition qui devait, selon elle, servir à réaliser son but fondamental;
Attendu qu'avec raison presque tous les civilistes modernes, tant belges que français, font valoir que, dans la réalité de la vie, un testateur n'est pas mù par une volonté purement abstraite de se dépouiller, mais par des raisons concrètes et personnelles qui varient selon les cas et les personnes ;
Que si cette raison devient la raison impulsive et déterminante, exclusive et fondamentale de la libéralité et qu'elle revêt, comme en l'espèce, un caractère illicite, la nullité comminée par l'article 900 du Code civil doit s'étendre à la libéralité elle-même, sous peine de violer le principe d'ordre public inscrit dans l'article 6 du Code civil; qu'il en est d'autant plus ainsi dans l'espèce actuelle que, comme il a été démontré plus haut, la dame Trine n'aurait pas testé en faveur de son filleul si elle avait eu la certitude morale que ses héritiers légaux ne ·vendraient pas la maison familiale;
Attendu que les appelants postulent en conclusions que certaines indications cadastrales de l'assignation originaire
COURS D'APPEL 75
soient rectifiées; que les intimés ne concluent pas sur ce point et qu'il y a lieu dès lors pour les parties de s'en référer aux indications extraites de ]a matrice cadastrale ;
Par ces motifs, ouï M. le chevalier de Longrée, avocat g·énéral, en son avis conforme donné en audience publique et en langue française, écartant comme non fondées toutes conclusions autres ou contraires, reçoit l'appel et le déclare non fondé; faisant droit aux conclusions des intimés quant aux motifs du premier juge, dit que l'écrit du 20 mars 1948 doit être pris dans son entier et qu'aucun mot ne peut en être écarté; confirme la décision entreprise et condame les appelants aux dépens.
Du 4 juillet 1951. - Cour de Liège. -3e cl~. - Prés. M. Mons, président. -JV!in. pitbl. M. Guyaux, substitut du procureur général. , Pl. MM. Van den Bossche, Musch et Coart-Frésart.
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
10 octobre 1951
DIVORCE ET SÉPARATION DE CORPS. - INJURE GRAVE. - NOTION.
L',injiire grave suppose la volorité d'infli ge1· (fü conjoint une souffrance 1norale intense 'l'endant la vie commitne intolérable; elle comporte Z'animus injuriandi et iin élément 11iaté1·iel.
Un défaut de caractère, la niauvaise humeur même chronique, une attititde dépourvue de délicatesse vis-à-vis des beau,x-pœrents, une tentative brutale et nialad1·01'.te de reconqidrir l'affection de son conjoint ne constituent pas des in}wres graves.
(D .. ., C. R ... )
ARRÊT.
LA COUR; - Attendu qu'en date du 30 novembre 1938, l'appelante a introduit une requête en divorce pour injures graves contre l'intimé; que, par jugement du 11 décembre 1939 du tribunal civil de Bruxelles partiellement réformé par arrêt de cette cour du 12 mars 1941, l'appelante a été autorisée à faire la preuve de cinquante et un faits, tandis que l'intimé était admis à établir trentesept faits en termes de preuve con traire ;
Attendu que par jugement du tribunal de première instance de Bruxelles, en
date du 13 juillet 1949, l'appelante a été déboutée de son action ; que, par acte du 16 août 1949, elle a régulièrement relevé appel de cette décision ;
Attendu que parties sont d'accord pour admettre comme constituant un résumé complet et précis des griefs invoqués, l'énumération en six groupes établie par le jugement a quo;
Attendu qu'avant d'examiner ces griefs en tant qu'ils ont été établis par des enquêtes et par la correspondance produite, il y a lieu de rappeler : 1° que pour qu'il y ait injure grave, il faut << une souffrance morale infligée volontairement et à tort par l'un des époux à l'autre et tellement intense qu'elle rende à celui-ci la vie commune intolérable » (Novelles, t. II, p. 152, et jurisprudence citée) ; 2° que l'injure postule un élément matériel et un élément moral, ce dernier se caractérisant par l'animus injuriand'i (DE PAGE, t. Jer, n° 853) et requérant l'intention de nuire au conjoint (PLANIOL et RIPERT, t. II, n° 517) ; 3° qu'il est en conséquencè de doctrine et de jurisprudence que des mouvements de vivacite ou de mauvaise humeur, même à l'état chronique, les défauts de caractère, ]a simple difficulté de vivre en harmonie ne suffisent pas à constituer la cause de divorce que la loi caractérise sous le terme d'injure grave (DE PAGE, t. 1er, n° 870 et jurisprudence citée) ;
Attendu que, si l'on examine les faits établis à la lumière de ces principes, il est évident qu'aucun d'entre eux ne revêt les caractères matériels et moraux de l'injure grave;
Attendu que certes l'intimé a fait souvent preuve au cours de sa vie conjugale d'un manque total de délicatesse, d'une incompréhension répréhensible des sentiments les plus légitimes de sa femme et, pour tout dire, de peu de considération pour ce qui n'était pas son avenir professionnel ;
Mais attendu que cette attitude, issue d'une nature fruste et égoïste, n'a pas donné lieu à des actes précis où l'on pourrait déceler l'intention de nuire à l'appelante ou de lui causer personnellement du chagrin; que, du moins, de tels actes ne sont pas établis à suffisance de droit; qu'il est impossible, en effet, à l'aide des éléments dont la cour dispose, d'affirmer que, suite à l'attitude de l'intimé, la vie commune des époux était devenue intolérable;
Attendu en particulier : 1° que le départ de l'intimé pour le Congo, s'il semble établi qu'il a eu lieu en infraction
76 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
a un engagement formel antérieur au mariage, paraît avoir été autorisé, fùt-ce à contre-cœur, par l'appelante; que la correspondance indique, en effet, que celle-ci n'a pas ressenti ce départ comme une injure et que son amour pour son mari n'en fut pas atteint; 2° que la correspondance échangée entre les époux lors du séjour de l'intimé au Congo ne révèle pas davantage dans le chef de R ... un désir conscient d'outrager l'appelante ; que la froideur et le caractère quasi commercial de ses lettres relèvent plus d'un manque de tact inhérent à sa nature que du désir de peiner sa femme; 3° que les circonstances qui ont entouré le retour de l'intimé ne révèlent pas, elles non plus, l' aniniiis injiirùtndi qui les eùt promues au rang de causes de divorce ; que l'explication que l'intimé en donna est plausible sinon déterminante et qu'ici encore, c'est un défaut inné de cœur et de délicatesse qui leur a donné l'aspect déplaisant qu'elles ont revêtu, sans qu'on puisse dire avec certitude que l'intimé a agi clans l'intention de blesser sa femme; 4° que l'attitude de l'intimé envers ses beaux-parents et envers son beau-frère - attitude que la plus élémentaire délicatesse eùt dù lui interdire, ne fùt-ce que par considération pour l'appelante - n'est point constitutive d'une injure grave visà-vis de celle-ci (à ce sujet : PLANIOL et RIPERT, t. II, n° 516); 5° que l'incident de septembre 1938, survenu après la séparation des époux, se résume à une tentative brutale de l'intimé en vue de renouer les relations interrompues; que s'il faut· déplorer une attitude grossière et même indécente, il convient de souligner que, quelque blâmables que puissent être les moyens employés par l'un des époux contre l'autre, lorsque le but a été de ramener ce dernier à l'affection, il n'y a pas d'injure grave (Novelles, t. II, n° 55) ;
Attendu qu'en fin de compte, la cour manque d'éléments sur les motifs immédiats de la séparation des époux; que les griefs antérieurs avaient été pardonnés et que l'appelante n'articule aucun élément nouveau qui eùt, à cette époque, rendu la vie commune insupportable;
Attendu qu'on est forcé de conclure que des influences extérieures ont agi sur l'appelante, alors qu'une nouvelle et loyale tentative d'accord aurait pu et clù être faite clans l'esprit de concessions réciproques qui est le fondement de toute vie conjugale ;
Attendu que c'est donc à raison que le premier juge a déclaré l'action de l'appelante non fondée et qu'il l'en a déboutée;
Par ces motifs, vü l'article 24 de la loi du 15 juin 1935, entendu en audience publique l'avis conforme de M. l'avocat général Sottiaux, rejetant toutes conclusions autres, confirme le jugement dont appel; condamne l'appelante aux dépens d'appel.
Du 10 octobre 1951. - Cour de Bruxelles. - 4e ch. - Prés. M. Dermine, président. - I\1in. piibl. M. Sottiaux, avocat général. - Pl. MM. Hayoit de Terrnicourt et Sand.
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
5 décembre 1951
PATERNI'l1 É ET FILIATION. - RECONNAISSANCE D'ENFANT NATUREL. -ACTION EN CONTESTATION, INTENTÉE PAR LA iVIÈRE, DE LA RECONNAISSANCE FAITE PAR ELLE LORS DE SON MARIAGE AVEC LE PÈRE. - RECEVABILITÉ. - ENFANT MÉTISSE. - ENFANT DÉPOURVUE D'ACTE DE NAISSANCE. MÈRE RÉSIDANT, AU MOMENT DE LA NAISSANCE, EN UN LIEU DIFFÉRENT DE CELUI DU LIEU DE LA NAISSANCE DE L'ENFANT, CE DERNIER ÉTANT DÉTERMINÉ UNIQUEMENT PAR LES DÉCLARATIONS DU PÈRE ET DE LA :MÈRE, DANS LES ACTES DE HECONNAISSANCE. - PREUVES INSUFFISANTES DE L' ABSENCE DE FILIATION HÉELLE. -- PREUVE. - ANALYSE DU SANG. - MODE DE PREUVE ADMISSIBLE. - CONSENTEi\ŒNT DES PARTIES INDISPENSABLE.
La 1nère est recevable à intenter ime action en contestation de la reconnaissance de sa fille ·1u1.tiirelle faùe par elle lo'l's de son mariage avec le père.
Les C'irconstances qne l'enfant natiirelle '/'econnite est rnétisse, qn' elle est dépottrvite d'acte de naissance, qne le lfrn de sa naissance - préterul'll·rnerit ch fférent dn l·ieii où se t'/'onvait la nière lors de cet événenient - ne Pésillte qiie des déclarations dit père et de la m.ère dans les actes de reconnaüsance, ne sont pas des preuves siiffisantes de l'absence de filiation.
L' ànalyse des groit.pes sanguins, comme élément de p1·wve de la filiatiori, est adniissible à condition que les parties
COURS D'APPEL
consentent à se prêter à une prise de sang.
Le refus de se prêter à une prise de sang ne peitt, de la part de l'enfant, être consùléré conirne itn aveit.
(G .. ., C. L ... -s ... )
ARRÊT.
LA COUR; - Vu le jugement dont appel, rendu le 22 octobre 1949 par le tribunal de première instance de Bruxelles et aux termes duquel l'appelante, qui lors de la célébration de son mariage avec Narcisse L ... le 12 juillet 1933, avait reconnu pour sa fille l'intimée Yvonne L .. ., enfant naturelle déjà reconnue antérieurement par le dit Narcisse L .. ., a été déboutée de son action tendant à faire annuler cette reconnaissance ainsi que la légitimation qui s'en est ensuivie;
Attendu que l'intimé S ... ne comparaît pas ni personne en son nom; ..... Attendu qu'à bon droit et par des motifs que la cour fait siens, le premier juge a déclaré recevable l'action de l'appelante; que, d'ailleurs, l'intimée ne conteste plus cette recevabilité devant la cour puisqu'elle y conclut à la confirmation pure et simple du jugement;
Au fond: Attendu qu'il incombe à l'appelante,
pour établir le bien-fondé de son action, d'apporter la preuve décisive que l'intimée n'est pas sa fille;
Attendu que pareille preuve ne pourrait résulter du seul fait que l'intimée serait une métisse; qu'il faudrait, par contre, la tenir pour acquise s'il était dûment établi, comme le soutient l'appelante, d'une part que l'intimée est née le 1er décembre 1917 à Luebo (Congo belge), et d'autre part qu'à la même date l'appelante résidait effectivement en Belgique;
Mais attendu que ce soutènement n'est appuyé, ni dans l'une ni dans l'autre de ses deux branches, d'éléments absolument décisifs ;
Attendu, en effet, d'une part, que la double circonstance que l'appelante a été inscrite sur les registres de la population de la commune de Saint-Gilles-lez-Bru~elles depuis le 20 août 1917 jusqu'au '19 février 1918 et sur les registres du personnel d'une firme bruxelloise depuis le 17 décembre 1917 jusqu'au 15 octobre 1919, ne suffit pas à démontrer de manière péremptoire qu'elle aurait effectivement résidé à Saint-Gilles-lez-Bru-
xelles ou ailleurs en Belgique à la date du 1er décembre 191 7 ;
Attendu, d'autre part, que l'acte de naissance de l'intimée n'est produit ni en copie ni en extrait certifiés conformes, pour la bonne raison, semble-t-il, qu'un tel acte n'existe pas; qu'il n'est fait mention du lieu et de la date de naissance de l'intimée que dans l'acte de reconnaissance de celle-ci par Narcisse L ... et dans l'acte de mariage des époux L ... -G ... ; que ces mentions, qui appa-remment ne reposent que sur une simple affirmation de Narcisse L .. ., ne peuvent constituer la preuve requise quant au lieu et à la date de naissance de l'intimée;
Attendu qu'en ordre subsidiaire l'appelante sollicite la désignation d'un expert-médecin qui aurait pour .mission « de dire si l'appelante peut être la mère de l'intimée, en procédant, notamment, à une analyse du sang prélevé sur les deux parties intéressées » ; .
Attendu qu'en~ principe un tel mode de preuve n'est pas exclu en la matière, mais qu'il ne peut être admis et ne pourrait en tout cas être mis en œuvre que si les deux parties intéressées consentaient à se prêter à l'intervention chirurgicale qu'il comporte, à savoir une prise de sang ; qu'il est acquis dès à présent qu'e l'intimée se refuse à cette intervention puisque, en réponse à la demande d'expertise, elle se borne à conclure à la confirmation pure et simple du jugement;
Que, d'autre part, on ne pourrait interpréter ce refus comme un aveu puisque les faits mêmes qu'il s'agit de prouver (circonstances matérielles de sa propre naissance) sont de ceux que par la force même des choses l'intimée n'a pas été à même de constater et qui, dès lors, ne peuvent faire l'objet d'un aveu valable de sa part; qu'il résulte de ces considérations que la mesure d'instruction sollicitée serait frustratoire;
Par ces motifs, vu la loi du 15 juin 1935 et notamment l'article 24 de cette loi, ouï en son avis conforme, donné en audience publique, M. l'avocat général baron Verhaegen, rejetant comme non fondées ou sans ,pertinence toutes conclusions autres, plus amples ou contraires, donne défaut contre l'intimé S .. ., faute de constituer avoué ; autorise d'office l'intimée Yvonne L .. ., épouse S .. ., à ester en justice; reçoit l'appel et y faisant droit au fond, le déclare non fondé ; en déboute l'appelante ; confirme en conséquence le jugement dont appel; condamne l'appelante aux dépens d'appel.
78 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
Du 5 décembre 1951. - Cour de Bruxelles. - 2e ch. - Prés. M. Marcoux, président. - Min. publ. Baron Verhaegen, avocat général.-Pl. MM. J. Nyssens et N auwelaers.
COUR D'APPEL DE LIÈGE
10 avril 1952
PREUVE. LE'l"fRES MISSIVES. PRODUCTION EN JUSTICE. - PEUT SERVIR DE DÉFENSE A UN PRÉVENU. -LICÉITÉ. POSSESSION DES LETTRES. - PRÉSOMPTION DE BONNE FOI.
S1'., en principe, les lettres niissives ont im cm'actère confidentiel, qui s'oppose à leur proditction en J·ust·ice, ime except·ion doit être faite lorsque l'inté-rêt de la société la jitsti fie. Il en est ains1'. notmnnient lorsque cette proditction a pour ,bitt d'établi?' l'innocence d'mi prévenn.
Le possessewr de lettres missives est présitmé de bonne foi. Il appm't'Ïent à leut' destinatafre de démontrer le caractère illicite de la possession.
(PROCUREUR GÉNÉRAL, C. HAULOTTE ET FADEUR.)
ARRÊT.
LA COUR; - Attendu que les appels dirigés contre la décision du tribunal de Namur du 9 novembre 1951 sont réguliers en la forme; qu'ils ont été interjetés dans les délais légaux; qu'ils sont recevables;
Attendu que le prévenu sollicite l'autorisation de verser aux débats les photocopies de lettres adressées à la partie civile par son épouse, documents qu'il estime essentiels à la défense de ses intérêts;
Que la partie civile s'oppose à ce que ces lettres soient produites en justice;
Attendu que le caractère confidentiel et secret des lettres missives s'oppose, en principe, à ce qu'il en soit fait usage devant les cours et tribunaux;
Attendu cependant que, l'intérêt particulier devant s'effacer devant l'intérêt de la société, il peut être fait exception à ce principe dans des circonstances exceptionnelles ;
Attendu qu'à l'appui de cette thèse, le prévenu Haulotte cite en conclusions certaines références de doctrine et de
jurisprudence auxquelles les références suivantes peuvent être ajoutées :
1° Une étude de PERSON, Les lettres niissives, n°8 275 et suivants et n° 279;
2° Un arrêt de la cour de cassation de France du 9 juin 1883 (Dall. pér., 1884, 1, 89) qt~i s'exprime comme suit : « Attendu que l'inviolabilité du secret des lettres est un principe de haute moralité qui intéresse essentiellement l'ordre public, mais que le respect qu'il commande n'est pas si absolu qu'il ne doive exceptionnellement fléchir, dans une certaine mesure, dans l'intérêt de la vérité en matière de justice criminelle; que sans doute, même en cette matière, aucune .atteinte ne saurait être portée au principe de l'inviolabilité du secret des lettres au moyen de procédés délictueux rentrant dans la prohibition même de la loi, mais qu'il ne suffit pas pour faire repousser, par la justice criminelle, la preuve d'un délit ou d'un crime résultant d'une correspondance produite devant elle, que la possession de cette correspondance· ait été obtenue par des moyens qui, n'étant pas coupables aux yeux de la loi, pouvaient blesser certains scrupules>>;
3° Un arrêt de la cour de Bruxelles du 28 mars 1892 (Belg. jnd., 1892, 1'197) qui édicte en principe « qu'en matière répressive, dans un intérêt d'ordre public, toutes lettres missives peuvent être invoquées en vue d'établir le fondement' ou l'inanité de la prévention; ... qu'il n'est fait exception que pour le seul cas où l'usage des lettres trouverait son origine dans un délit >> ;
Attendu qu'encore convient-il de n'admettre l'exception que formule ce dernier arrêt qu'avec réserve et de déclarer qu'une discrimination doit être faite entre le cas où c'est le plaignant, l'accusateur, qui entend se prévaloir d'une correspondance qui n'est entrée entre ses mains qu'à la suite d'un acte illicite, et le cas où c'est l'accusé, le prévenu, qui, pour établir' son innocence, prétend apporter des lettres dont la détention a une semblable origine ; que dans le premier cas ne s'affrontent que deux intérêts particuliers, celui du plaignant possesseur de la correspondance et celui du propriétaire de cèlle-ci, le destinataire ; que la concurrence de ces intérêts particuliers ne pourrait justifier une atteinte à l'un d'eux basée sur un acte illicite; qu'au contraire dans le second cas ce ne sont plus seulement deux intérêts particuliers qui se trouvent opposés, mais encore l'ordre public : l'intérêt
COURS D'APPEL ?9
général qui ne peut souffrir la condamnation d'un innocent; que ce qu'on est convenu d'appeler « erreur judiciaire », frappe non seulement celui qui en est la victime, mais la société tout entière qui en porte la responsabilité; que devant pareil intérêt social les intérêts parti~ culiers ne peuvent que s'incliner, et qu'interdire l'usage d'une correspondance pour établir l'inanité d'une accusation constituerait un déni de justice; que, comme l'estimait le rapporteur d'un arrêt de la chambre des requêtes (Sirey, 1873, 1, 313) : « On abuse dans l'intérêt de certains plaideurs du principe de l'inviolabilité du secret des lettres ; à côté de ce principe il en est un autre, à savoir le droit et le devoir qu'ont les juges de rechercher la vérité »;
Attendu qu'il échet dès lors de rechercher si les conséquences que le prévenu entend déduire de la correspondance litigieuse sont de nature à controverser ou à énerver l'accusation portée contre lui;
Attendu qu'il soutient que les lettres écrites par la dame Evrard, qui se trouve à la base de l'accusation, révèlent << qu'ayant à se plaindre d'un tiers, cette dame n'hésite pas à concevoir pour se venger de celui-ci, d'user de dénonciation c-alomnieuse et de prévoir que si cette manœuvre ne réussit pas elle en ferait d'autres >> ;
Attendu qu'étant donné les circonstances et la matière dont les autorités judiciaires ont été saisies des faits reprochés à Haulotte, il n'est pas douteux que, si une telle mentalité était établie dans le chef de la dite personne qui se trouve à l'origine de la plainte déposée par la partie civile, son époux, ce fait enlèverait tout crédit aux déclarations de la petite victime, qui, déjà en raison de l'âge de celle-ci, ne peuvent être accueillies qu'avec la plus grande circonspection ; qu'il apparaît dès lors judicieux de faire droit à la demande. du prévenu;
Attendu,· au surplus, que le prévenu conteste formellement le caractère délictueux de sa possession; que si certains auteurs (HANSSENS, Du secret des lett1·es ·missives, n° 234) enseignent que << c'est à la partie qui verse une lettre aux débats, à justifier de l'existence dans son chef du droit qu'on lui dénie de la produire et d'en faire usage, il semble plus juridique d'admettre avec d'autres auteurs que c'est au contraire au destinataire qu'il incombe de prouver le caractère
illicite de la possession >>; que du moment que celui qui invoque la lettFe apparaît lettre en main (original ou copie), on doit le présumer de bonne foi, indépendamment de tout consentement dûment établi de la part du destinataire, et tant que celui-ci n'a pas réussi à le déposséder par une revendication en règ·le, il reste fondé à proposer sa preuve ; que vainement objecterait-on la << confidentialité >>
des lettres, celle-ci restant sans influence sur la propriété comme sur la disposition, qui jusqu'à preuve contraire doit être reconnue à tout possesseur (GENY, Du droit sw' les lettres niissives, t. II, p. '14?);
Par ces motifs, écartant comme non fondées toutes autres conclusions, reçoit les appels; et statuant avant faire droit sur le fond, dit la partie civile non fondée en ses conclusions tendant à faire écarter des débats les lettres litigieuses ; autorise en conséquence le prévenu à faire usage des photocopies qu'il a fait établir des lettres émanant de l'épouse de la dite partie civile adressées à cette dernière et qui avaient été déposées sur les bancs du tribunal de Namur par le conseil du prévenu; fixe au 12 mai pour plaider au fond; réserve les dépens.
Du 10 avril 1952. - Cour de Liège. -46 ch. - Prés. M. Goossens, président. -Nfin. publ. M. Glesener, substitut du procureur général. - Pl. MM. LaurentNeuprez et Kerkhofs (ce dernier du barreau de Namur).
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
21 octobre 1951
DIVORCE. EFFETS QUANT AUX BIENS. - REMONTENT, ENTRE LES ÉPOUX, AU JOUR DE LA DEMANDE (CODE CIV., ART. 266bis [LOI DU 14 DÉCEMBRE 1935, ART. ?]) . - l:MMEUBLE PROPRE A LA FEMME. -VENDU AU COURS DE LA PROCÉDURE EN DIVORCE. PRIX EN PROVENANT. - N'ENTRE PAS EN COMMUNAUTÉ.
Les effets du jugement ou de l'arrêt définitif accordant le div01·ce temontent, entre époux, au jour de la demande en ce qui toiwhe lem·s biens.
Ainsi, le prix provenant de la vente ait
cours de la procédit1•e en divorce, d'un im1neuble ptopre à la femme, ne tombe pas en communauté.
80 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
(DUPONT, c-. BOGAERTS ET LEEMANS.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu, produit en expédition régulière, le jugement dont appel en date du 31 janvier 1949, signifié le 15 février 1949 ·
Vu l'acte d'appel régulièrement notifié les 8 et 9 avril 1949 ;
Attendu que l'appel est recevable· Attendu qu'il y a lieu de rappele1: les
rétroactes du litige en rectifiant quelques erreurs matérielles dans la date de certa~ns .faits repris dans l'exposé du premier JUge :
Les époux Dupont-Bogaerts ont contracté mariage à Bruxelles, le 2 décembre 1903, sous le régime de la commu~iauté réduite aux acquêts, comme Il conste de leur contrat de mariage d;1 .22 octobre 1903; la cour d'appel d Aix-en-Provence, confirmant un jugem~nt du 5 mars 1946, rendu par le tribunal de première instance de Grasse, par arrêt du 28 janvier 1948, a prononcé le divorce d'entre les époux; cet arrêt fut signifié à l'intimée Berthe Bogaerts par exploit du 10 mai 1948, et il ~st ,devenu définitif le 10 juillet 1948, a defaut de pourvoi en câssation dans le délai légal; au cours de la procédure, l'intimée obtint, par arrêt de la c,our d'.Ai~ en date du 28 janvier 'l948, 1 autorisat10n de consentir, sans le concours de son mari, et en accord avec les autres intéressés, à la vente amiable d'un immeuble situé à Saint-Josseten-N oode et qui lui est advenu, pour ~a part, de la succession de son père; 11 est. constant que cette part indivise constitue un propre de l'intimée· le bien litigieux fut vendu par acte' du second intimé passé à Saint-J osse-tenN ~ode, le 10 avril 1948 ; la part du prix de vente revenant à l'intimée soit la moitié de 700.000 francs sou~ déduction de diverses sommes, au total 29.~00 francs, pour frais, impôt sur le capital, etc., reste 32'1.000 francs a été d.épos~e à la Caisse des dépôts ~t consignations des notaires ;
Attendu que l'action originaire tend à. f.aire décl,arer bonne et valable l'opposition de 1 appelant sur la dite somme et en conséquence à faire condamner le second intimé à remettre la somme à l'appelant; subsidiairement, dire que les fon~s ve~sés à la Caisse des dépôts et consignat10ns des notaires, y resteront déposés jusqu'à liquidation complète et définitive de la communauté litigieuse ; plus subsidiairement, à faire
désigner un séquestre qui sera chargé de conserver les fonds jusqu'à liquidation de la dite communauté·
Attendu que l'appelant prétend fonder sa demand~ ~u~ cette ?irconstance qu'au moment ou il mtentait son action soit le 7 mai 1948, il était toujours ch,ef de ~a ,coi;nmunauté; qu'à cette époque, il e~ait . seul qualifi~. pour percevoir et detemr les fonds litigieux ;
Attendu que les époux, actuellement divorcés, sont tous deux de nationalité belge;
Attendu que les effets du divorce quant à leurs biens sont déterminés par leur loi nationale, c'est-à~dire en l'espèce, par l'article. 266 bis du Code ?ivil b~lge, qui. au su~plus est identique a la 101 française (101 du 26 juin 1919, art. 2; Dalloz, Jur., 1919, p. 330);
Attendu que le texte de l'article 266 bis du Code civil décide clairement en des termes qui excluent la nécessit'é d'une i~terprétation, que l'arrêt définitif de divorce remontera, quant à ses effets ent~'e époux en ce qui touche leurs biens, au Jour de la demande ;
Attendu que la demande en divorce date de 1940; que rarrêt qui le prononce est devenu définitif le 10 juillet 1948 en exécutio,n de la loi française, applic~ble en l'espece en vertu de la règle de droit international privé Locits regit actmn;
~ttendu en conséquence que la dissolut10n de la communauté ayant existé ent~e. parti~s r.étroagit à une période anterieure a l'mtentement de l'action actuelle;
, A.ttei~du que les fonds provenant de la reahsat10n du propre de l'intimée et des revenus ou des intérêts de ces fonds ne sont donc pas tombés en une prétendue communauté qui n'existait plus à l'époque de la réalisation de l'immeuble;
At~en.du qu'à tort l'appelant invoque le prmcipe que pour apprécier le mérite ~'une action judi~iaire,. il faut se placer ~la date ~el~. nobficat10n de son exploit mtroductif d mstance, sans avoir égard aux ~vé!1ements postérieurs; qu'en effet c~ prmc1pe ne vaut pas lorsque, par suite d un changement dans la qualité ou l'état des parties en cours d'instance, le fondement même de l'action vient à disparaître;
Attendu que vainement l'appelant invoque à l'appui de son soutènement cette circonstance que l'autorisation de la cour d'appel d'Aix du 28 janvier 1948 a été donnée à l'intimée en sa qualité d'épouse, et que l'autorisation ne l'habilitait pas à recevoir le prix de la réalisa-
COURS D'APPEL 81
tion envisagée au mépris du droit de l'appelant en sa qualité de chef de la communauté;
Attendu que l'autorisation demandée par une femme, alors encore dans les liens du mariage, ne pouvait être accordée que dans des termes tels que ceux employés dans l'arrêt puisque, à la date de cet arrêt, .l'arrêt du même jour, prononçant le divorce, n'était point définitif· que, bien plus, il ne l'était pas encore ~ la date de vente de l'immeuble soit le '10 avril 1948 · '
Attendu q~'en outre à titre sub~ .sidiaire !'.appelant demande à titre conservatoire que les fonds restent bloqués pour garantir la dette que l'intimée pourrait avoir, à la suite des opérations de liquidation, soit vis"à-vis de la communauté, soit vis-à-vis de lui-même·
Attendu que l'intimée affirme ne ~ien de.voir,; .qu'il apparten~it à l'appelant de faire. dil~gen~e pour activer les opérations <le hqmdation et établir s'il échet les créances dues par l'intimée devant la juridiction compétente;
Attendu qu'aucun texte de loi n'autorise l'appelant à rendre indisponible <les fonds qui sont manifestement la l)ropriété de son épouse, pour garantir. une créance dont l'existence n'est même point actuellement justifiée;
Attendu quant à l'action dirigée contre le second intimé, que le jugement entrepris a dit pour droit que le notaire ~e~et~ra ou fera remettre à la première mtimee les fonds dont il s'agit;
Attendu que la demande de condamnation contre l'intimé n'est pas fondée· qu'en effet cette partie n'a jamais été .débitrice de l'appelant et que celui-ci ne peut donc réclamer payement d'une créance qu'il n'a pas; ·.
Attendu au surplus que l'intimé s'en réf~re à j:ustice quant au point de savoir ~m a dr?1t de touc,he! les deniers déposés a la Caisse des depots et consignations <les notaires;
Par ces motifs, vu l'article 24 de la loi du \15 juin f935, rejetant toutes autres c,on?lusiôns, ouï en audience publique 1 avis conforme donné par M. l'avocat gé?éral ,sottiaux, dit l'appelant sans gnefs; deboute l'appelant des demandes formées contre les intimés · confirme en conséquenc~ le jugement 'dont appel; condamne l appelant aux dépens d'appel.
Du 21· octobre 1951. - Cour de Bruxelles. - 4e ch. - Prés. M. Dermine, président. Min. publ. M. Sottiaux, avocat général. - Pl. MM. Hamaicle, De Keersmaecker et Labbé.
PASIC., rnG2. IIe PARTIE.
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
,28 novembre '1951
TRIBUNAL CIVIL DE BRUXELLES
3 juillet 1948
1° APPEL. - MOYEN NOUVEAU EN DEGRÉ D'AJ>PEL. - RECEVABILITÉ.•
2° MINORITÉ - TUTELLE - ÉMANCIPATION. - MINEUR. - ENFANT NATUREL NON RECONNU. - CONVOCATION DU CONSEIL DE FAMILLE A LA DEMANDE DE LA TUTRICE DÉCHUE (CODE CIV., ART. 395). VALIDITÉ.
3° ADOPTION. - MINEUH. ENFANT NATUHEL NON RECONNU. - CONSEIL DE FAMILLE. - COMPOSITION. PRÉSENCE DE L'ADOPTANT PARMI LES SIX MEMBRES CONVOQUÉS ET PRÉSENTS. l_____.
ABSENCE DE FRAUDE. - IHRÉGULARITÉ NON SUBSTANTIELLE. ~ DÉLIBÉRATION SUR LE CONSENTEMENT A L'ADOPTION. - ABSTENTION DE L'ADOPTANT A CETTE DÉLIBÉRATION. - ' DÉLIBÉHATION VALABLE. MOTIVATION NON NÉCESSAIRE. - VÉRIFICATION PAR LE CONSEIL DE FAMILLE DE L'EXISTENCE DES CONDITIONS LÉGALES DE L'ADOPTION. - INCOMPÉTENCE DU CONSEIL DE FAMILLE. - CONDITIONS DE L'ADOPTION. - ADOPTANT. -ABSENCE DE DESCENDANT LÉGITIME - VÉRIFICATION. - COMPÉTENCE D~ TRIBUNAL SAISI DE . LA DEMANDE D'HOMOLOGATION DE L'ADOPTION. -DÉLIBÉRATION DU CONSEIL DE FAMILLE SUH LE CONSENTEMENT AL' ADOPTION. - ACTION EN ANNULATION DE CETTE DÉLIBÉHATION.- MOYEN FONDit SUH L'EXISTENCE, CHEZ LES ADOPTANTS, D'UN ENFAN'l' CONÇU EN LÉGITIME MARIAGE. - MOYEN NON FONDÉ DANS LA MESURE OÙ IL VISE LA DÉLIBÉRATION SUR LE CONSENTEMENT A L'ADOPTION ET NQN L'ACTE D' ADOPTION LUI-MÊME.
1° L'appelant est recevable à soulever pour la p1'Mm:ere f'ois devant la cour d'appel des moyens nouveaitx, non une demande noirnelle.
2° f:e ji~g.e de paix, soü d'office, soù sur 1·eguisition, ,convoque le conseü de famille charge de donne1' son consentement à l'adoption d'un niineur, enfant nat·urel non reconnit.
3° La présence de l'adoptant pann·i les niembres du conseü de f'a·mille réitni P.our d,onne'I' ~on consentement à l' adoption d un mineur, enf'ant naturel non 1?econn·u, n' aff'ecte pas la validité de la
G
82 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
' •délibération sui· le d'Ît consentenient, en l'absence. de fra·ude, si l'adoptant s'est abstenii de· voter et s·i le noinbre de ]Yt'ésences, reqwis pa1' la loi, était atteint indépendmnnient de l'adoptant.
La délibération du conseî'.l de faniille ne doit pas êt1·e motivée.
Le conseil de faniille appelé à statuer sur le consentement à l'adoption d'un niineiir, enfant natiirel non reconnii, n'est pas compétent pour vé?'i fier si les conditions légales de l'adoption se trouvent réunies. Cette vé?'ification appartient au t1·ib1mal de première instance saisi de l'homologation de l'adoption.
Le nwyen tendant à l'annulation de la délibération d'im conseil de fa mille, consentant à l'adoption d'im mineur, enfant natiirel non reconnii, est non fondé dans la niesiire où il vise cette délibération et non l'acte d'adoption lui-même.
(c ... , C. P ... ET D ... )
ARRÊT.
En cette caiise, le tribunal civil de Bruxelles avait rendii, le 3 jiiillet 194.8, le jugement suivant :
LE TRIBUNAL; - Attendu que le conseil de famille de l'enfant JacquelineFrançoise-Simone A... a exprimé son consentement à l'adoption de la mineure par la dame A ... , sa mère, et par son mari ainsi qu'à la substitution du nom de B ... à son nom patronymique; que l'action tend à l'annulation de cette délibération.
Attendu que le conseil de famille fut réuni le 5 mars 1943, à la requête de la dame A ... en sa qualité de tutrice de la mineure; alors qu'elle était déchue de la tutelle pour ne s'être pas fait confirmer dans ses fonctions avant la célébration de son mariag·e avec le sieur B ... (Code civ., art. 395 et 396bis); que le demandeur déduit la nullité de la délibération du conseil de sa mise en mouvement irrégulière ;
Attendu que le juge de paix ordonne ou autorise la convocation du conseil de famille soit d'office, soit sur réquisition; que la loi qui requiert le consentement du conseil de famille à l'adoption des mineurs (Code civ., art. 347) ne précise pas à la diligence de qui il doit être réuni; que raisonnablement, à défaut de texte, il peut l'être à la requête de la future adoptante, qu'elle soit ou non tutrice; que, cette qualité étant en l'espèce légalement indifférente, la mise
en mouvement du conseil de famille n'est pas irrégulière;
Attendu que le demandeur s'incline devant l'avantage évident de la mineure d'être adoptée par sa mère; qu'il conteste ce même avantage en ce qui concerne l'adoption par le sieur B ... et allègue que, dans ces limites, la délibération est contraire aux intérêts de l'enfant;
Attendu que l'état de droit du demandeur ne lui permet pas d'adopter;
Attendu que l'adoption par la mère substitue la qualité d'enfant adoptée à celle d'enfant naturelle non reconmie; que l'adoption par le sieur B... efface toute trace d'une situation que le législateur refuse de reconnaître; qu'appelée à vivre au foyer du mari de sa mère, il est de l'intérêt de la mineure qu'aucune distinction de droit ou de fait n'existe entre elle et les enfants à naître de l'actuelle union de sa mère ;
Vu l'article 4 de la loi du 15 juin 1935; Par ces motifs, statuant contradic
toirement, entendu en son avis conforme M. de le Court, substitut du procureur du roi, rejetant comme non fondées toutes conclusions autres, plus amples ou contraires, déclare l'action recevable mais non fondée, en déboute le demandeur et le condamne aux dépens.
Du 3 juillet 1948. Tribunal civil de Bruxelles. - ge ch. - Siég. M. Vullers, juge unique. - Min. publ. M. de le Court, substitut du procureur du roi.
Sur appel, la cou·r de Brnxelles rendit, le 28 novembre 1951, l'arrêt siiivant :
LA COUR; - Vu le jugement à.ont appel rendu le 3 juillet 1948 par le tribunal de première instance de Bruxelles et aux termes duquel l'appelai:it a été débouté de son action tendant à l'annulation de la délibération par laquelle le conseil de famille compétent a donné, en application de l'article 346, dernier alinéa, du Code civil, son consentement à l'adoption de la mineure JacquelineFrançoise-Simone A .. ., enfant naturelle non reconnue, par sa mère naturelle, la dame Mariette A ... , et par l'époux de celle-ci, le sieur B ... ;
Attendu qu'aux termes de l'assignation l'appelant invoquait uniquement à l'appui de son action un moyen de fond, prétendant que, contrairement à ce qu'en avait décidé le conseil de famille, l'adoption projetée était contraire aux intérêts bien compris de la mineure;
Attendu que clans les conclusions qu'il
COURS D'APPEL 83
a· prises devant le tribunal, l'appelant fit état d'un autre moyen; de forme celui-ci et tiré de ce que le conseil de famille avait été réuni à la requête de la dame Mariette A... en sa qualité de tutrice, alors qu'elle était déchue de la tutelle pour ne s'être pas fait confirmer dans ses fonctions avant la célébration de son mariage avec le si.eur B ... (Code civ., art. 395 et 396bis, al. 3) ;
Attendu qu'à bon droit et par des motifs que la cour fait siens le premier juge a rejeté comme non fondés ces deux moyens;
Attendu que dans les conclusions qu'il prend devant la cour, l'appelant met en avant deux autres moyens, l'un de forme et l'autre de fond;
Attendu que, s'agissant de moyens nouveaux (et non d'une demande nouvelle), l'appelant est recevable à les soulever pour la première fois devant la cour;
Sur le fondement de ces deux nouveaux moyens;
A. Quant au nouveau moyen de forme :
Attendu qu'il est exact, comme le fait observer l'appelant, que l'une des six personnes convoquées pour composer le conseil de famille n'avait pas qualité pour participer à la délibération, étant la future adoptante, et que, celle-ci s'étant abstenue, le conseil a délibéré au nombre de cinq membres (au lieu de six) outre le juge de paix;
Mais attendu que cette irrégularité n'est pas de nature à entraîner l'annulation de la délibération litigieuse, étant donné qu'aucune fraude n'est alléguée, qu'il n'est pas établi que l'irrégularité commise a pu nuire aux intérêts de la mineure et qu'il ne s'agit pas en l'occurrence de la violation d'une formalité substantielle (DE PAGE, t. II, 2e éd., n° 119) ;
Qu'au surplus le conseil peut délibérer valablement dès que les trois quarts des membres convoqués sont présents (Code civ., art. 415), taux qui a été atteint et même dépassé en l'occurrence, puisque cinq sixièmes des membres convoqués ont participé à la délibération;
B. Quant au nouveau moyen de fond : Attendu que l'appelant expose que
l'adoptante a donné naissance le 24 septembre 1943 à un enfant issu de son mariage avec l'adoptant, que cet enfant était donc déjà conçu au 5 mars 1943, date à laquelle la délibération litigieuse a été prise, et que, par application de la
maxime Infans conceptus pro jam nato habetur, qu,oties de· conirnodis eju,s agitiw, le dit enfant qui est d'ailleurs né vivant et viable devait être considéré comme déjà né à cette dernière date, de. tout quoi il prétend déduire que la délibéra~ tion litigieuse serait nulle, à défaut de réalisation, au moment où elle a été prise, dè l'une des autres conditions de fond de l'adoption, à savoir l'absence d'enfant chez les adoptants;
Mais attendu que le conseil de famille a motivé sa décision par la seule considération « que l'adoption projetée présente des avantages évidents pour la mineure >>; qu'à vrai dire il n.'était même pas tenu de motiver sa décision (DE PAGE, ibid., n° 117, dernier alinéa); que de toute façon il ne lui appartenait pas de vérifier si les autres conditions requises étaient remplies, mission qui a été impartie par la loi au tribunal saisi de la demande d'homologation (Code civ., art. 355, al. 3) ;
Qu'au surplus, en ce qui concerne plus spécialement la condition de .fond qui est ici en question, à savoir l'absence d'enfant chez les adoptants, la vérification de la réalisation de cette condition échappe nécessairement ·au conseil de famille puisque cette vérification ne peut se faire en connaissance de cause qu'au moment même de l'homologation (Code civ., art. 344, al. 3) et que la délibération du conseil de famille, antérieure ou tout au plus concomitante à l'acte d'adoption, est nécessairement antérieure à l'homologation ; qu'il suit de là que le moyen invoqué par l'appelant, tout au moins en tant qu'il vise à l'annulation non de l'acte d'adoption lui-même, mais de la délibération du conseil de famille portant consentement à l'adoption, n'est pas fondé;
Attendu que les intimés sont recevables, mais non fondés en leur demande reconventionnelle tendant à la condamnation de l'appelant à 10.000 fr<jiCS de dommages-intérêts pour appel téméraire et vexatoire; qu'il n'est pas établi en effet, que l'appelant aurait usé de son droit d'appel avec mauvaise foi ou avec une légèreté condamnable ;
Par ces motifs, vu la loi du 15 juin 1935 et notamment l'article 24 de cette loi, ouï en son avis conforme, donné en audience publique, M. l'avocat général baron Verhaegen, rejetant comme non fondées ou sans pertinence toutes conclusions autres, plus amples ou contraires, reçoit l'appel ainsi que la demande reconventionnelle formée par les intimés et,
84 J URlSPRUDENCE DE BELGIQUE
y faisant droit au fond, les déclare tous deux non fondés ; confirme en conséquence le jugement dont appel; condamne l'appelant aux dépens de l'appel et les intimés aux dépens de leur demande reconventionnelle.
Du 28 novembre '195'1. - Cour de Bruxelles. ~ 2e ch. - Prés. M. Marcoux, président. - Min. publ. Baron Verhaegen, avocat général. - Pl. MM. Ch.-A. Le Clercq et Paquet.
COUR D'APPEL DE LIÈGE
17 mai 1952
APPEL. - MATIÈRE RÉPRESSIVE. DESTRUCTION DU DOSSIER APRÈS LE JUGEMENT DONT APPEL. - EXISTENCE DU JUGEMENT DONT APPEL. - lNAPPLICABILITÉ DE LA PROCÉDURE INSTAURÉE PAR L'ARTICLE 524 DU CODE D'INSTRUCTION CRIMINELLE. - Évoci..TION PAR LA JURIDICTION D'APPEL.
Lm'sqiie la jit'l"Îdiction d'appel est saisie d'une affafre dont le dossier a été anéanti, mais que l'expédition dit jugement entrep,ris subs?'.ste et est ?'éguliè?'ement produite, il n'y a pas lieii à application de l' a1'ticle 524 dit Code d'instriiction C'l'iminelle, aux termes diiqitel, en cas de· disparition des pièces, l'instruction doit. être recommencée à partfr dit point où les pièc,es se troiivent manquer, tant en rnini1,te qii' en expédit,ion oit copie cmthentiqiie.
Toiitefois, dans l'impossibûité où elle se t?'ouve de vérifier la régulm,ùé de la proc1fdm'e devant la jiwidùtion dit pre11iie1' degré, la .i'urùlùt1'.on d'appel anniile cette procédiwe et le jitgement qiti s'en est ensiiivi, évoq'ue la caiise et base sa déC'is1:on SU'I' l'instruction et les débats qui ont eii lien devant elle.
(PROCUREUR GitNÉRAi ET CONSORTS DE BON, C. lHALOIR.)
ARRÊT.
LA COUR; - Attendu que les appels sont recevables;
Attendu, en l'espèce, que si le dossier original a été égaré, les pièces servant de base aux poursuites ont pu être reconstituées ;
Attendu par ailleurs que, l'expédition du jugement rendu en première instance subsistant, c'est à tort que le prévenu conclut à l'application de l'article 524 du Code d'instruction criminelle ;
Que cet article est en effet sans application lorsque, le dossier d'une instance répressive étant anéanti, l'expédition du jugement rendu par le tribunal correctionnel subsiste et a été régulièrement produite devant la cour d'appel; que, dans ce cas, celle-ci se prononcera valablement sur la prévention en se fondant sur l'.instruction et les débats qui ont lieu devant elle (Les Novelles, Procédwre pénale, t. Il, v 0 ApJJel en matière 'l'épressive, n° 329b,is) ;
Attendu toutefois que, la feuille de l'audience devant le tribunal correctionnel n'étant pas reproduite, la cour se trouve dans l'impossibilité de vérifier si les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées devant les premiers juges;
Qu'il y a lieu, dans ces conditions, d'annuler la procédure d':-,rndience du tribunal correctionnel et le jugement qui s'en est ensuivi et d'évoquer la cause;
Par ces motifs, rejetant toutes autres conclusions, vu les articles 2'15 du Code d'instruction criminelle et 24 de la loi du '15 juin '1935, constate que l'expédition du jugerpent dont appel subsiste et dit n'y avoir lieu en conséquence à application de l'article 524 du Code d'instruction criminelle; annule toutefois la procédure d'audience devant le tribunal correctionnel et le jugement qui s'en est ensuivi; évoquant, reporte la cause à l'audience du H juin '1952 à 9 heures du matin, pour y procéder à l'instruction de la cause, y entendre les témoins et débattre au fond ; réserve les frais et les dépens; ordonne l'exécution provisoire du présent arrêt.
Du '17 mai '1952. - Cour de Liège. -7e ch. - Prés. M. Destexhe, conseiller faisant fonctions de président. - Nhn. pitbl. lVI. Poncelet, substitut du procureur général. Pl. MM. Pauchenne et Bodson.
COUH D'APPEL DE BRUXELLES
19 décembre 1951
'1° .JUGEMENTS ET ARRÊTS. ERREUR MATÉRIELLE. - POUVOIR DU JUGE DE LA CORRIGER PAR UNE DJ~CISION RECTIFICATIVE. - ABSENCE D'ATTEINTE A, L'AUTORITÉ DE LA CHOSE JUGÉE.
2° OBLIGATIOI\S. - INTÉRÊTS LJ~GAUX. - TAUX. - CIVIL OU COMMEHCIAI,. - SUIVANT QUE LE CRÉANCTTrn
COURS D'APPEL 85
EST UN NON-Cû:\L\IERÇANT OU UN COMl\ŒRÇANT.
1° Le juge peut, pa1· iine décision 1'ectificative, C01'1'iger une e1·1·eiu· maté1'1:elle de sa décision à l'aide des éléments fowrnis pm· la décision elle-111ême, sans po1·ter atteinte à l'autorité de la chose ji~,gée.
2° L'intérêt légal appelé à ,indemnise1' fo1'f aitairement le retard dans le payement d'une créance, est au taux civil ou commercial sitivant que le c1·éancie1· est u,n non-co11111ierçant ou mi com,11w1·çant ('1).
( CRICKX, C. SEUVIE.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu la requête en intyrprétation de l'arrêt de cette cour en date du 7 mai '195'1 et le dit arrêt produit en expédition régulière ;
Attendu que la partie de Me Lermusiaux demande à la cour d'interpréter son arrêt du 7 mai '195'1, arrêt qui confirme le jugement dont appel, rendu par le tribunal de commerce de Bruxelles, le 22 janvier '1949, en ce qui concerne deux points du dispositif qui condamne l'appelant : '1° au payement d'une somme. de 2'1.999 fr. 98 du chef d'indemnité supplémentaire de préavis; 2° au payement des intérêts judiciaires;
I. Attendu que l'arrêt dans ses motifs reproduit la base du calcul (80.000 fr. par an) indiquée dans un des attendus du jugement a quo, base qui a servi à calculer le montant de l'indemnité de préavis supplémentaire due pour les trois !nois non payés ; que dans son dispositif Il confirme celui du jugement qui fixait à 2'1.999 fr. 98 la somme due à l'intimé· ~ttendu q_ue le requérant estime qu'il
existe une d1sconvenance entre le motif et le dispositif de l'arrêt; que le quart de la somme de 80.000 francs s'élève à 20.000 francs et non point à la somme indiquée au jug·ement que la cour confirme;
Attendu que le jugement, dans un attendu précédent, motive clairement sa décision en ces termes : c< • • • que les parties sont d'accord pour reconnaître que la rémunération totale du demandeur a été de 87 .000 francs y compris les commissions >> ;
Attendu que l'inscription de la somme de 80.000 francs dans un attendu sub-
(1) Comp. cass., 4 novembre 1948 (PAsrc., 1948, I, 609).
séquent constitue manifestement une erreur matérielle ; ,
Attendu que la cour a entendu retenir le chiffre de base de 8 7. 000 francs fixé par le premier juge;
Attendu que la rectification d'une erreur matérielle au moyen des éléments fournis par les décisions elles-mêmes ne porte point atteinte à l'autorité de la chose jugée (BRAAS, P1'0cédU1·e civile, 3e éd., n° 928, § 3, n° 460 ; Bruxelles, 22 janvier '1937, PASIC., '1937, Il, '165);
Attendu que l'indemnité pour trois mois sur base de 87 .000 francs l'an, soit le quart de cette somme, est non point 2'1. 999 fr. 98, comme le dit le jugement confirmé par l'arrêt et le défendeur en interprétation dans ses conclusions, mais 2'1.750 francs;
II. Attendu que l'arrêt se borne à confirmer le jugement dont appel qui condamne l'appelant aux intérêts judiciaires sur les deux sommes allouées ;
Attendu que le point de savoir si ces intérêts judiciaires doivent être fixés à 4,5 p. c., taux de l'intérêt civil, ou à 5,5 p. c., taux en matière commerciale, n'apparaît point, d'après la procédure, avoir été débattu entre parties dans les instances précédentes ;
Attendu que l'appelant prétend que c,~ tf:lu:x; est c~lui de 4,5 p. c., tandis que 1 mtime soutient que ce taux est celui de 5,5 p. c., parce que, selon lui, toute condamnation prononcée par la juridiction commerciale produit un intérêt de 5,5 p. c.;
Attendu qu'il existe dans les termes de l'arrêt une imprécision qui laisse les parties en désaccord quant au sens à donner au dispositif de l'arrêt;
Attendu que l'arrêt doit être interprété (PIRET, <<Intérêts légaux, civils ou commerciaux, Jiw. comrn. Bruxelles, 39e année, mai-juin '1946, p. 7) ;
Attendu que les sommes allouées par la juridiction commerciale ne portent point nécessairement. intérêt au taux commercial;
Attendu que l'intérêt légal prévu à l'article '1'153 du Code civil est destiné à indemniser le créancier du fait que sa créance ne lui est pas payée à la date de l'ajournement;
Attendu que l'intérêt légal appelé à indemniser forfaitairement le retard est différent, selon que le créancier de l'indemnité est un commerçant ou un noncommerçant;
Attendu qu'en l'espèce les créances nées du louag·e de services sont, dans le chef de l'intimé, de nature civile ;
86 JURISPRUDENCE I)E BELGIQUE
· Attendu qué les créances dont il s'agit à l'arrêt portent donc des intérêts judiciaires au taux civil, soit 4,5. p. c. (PIRET, « Intérêts légaux))' p. '12 et '13; civ. Bruges, 30 juin '1950, Rev. ass·ur. resp., 1951, n° 4723);
Par ces motifs, vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935, statuant par voie d'interprétation de son .arrêt du 7 mai 1951, dit pour droit : 1° que l'appelant (Crickx) est redevable à l'égard de l'intimé d'une somme de 21. 7 50 francs en principal (et non point 21.999 fr. 98 inscrite par erreur matérielle au jugement dont appel confirmé par l'arrêt dont il s'agit); 2° que la condamnation aux intérêts judiciaires sur les sommes dues à l'intimé doit être calculée au taux de 4,5 p. c.; donne acte à la partie de Me Lermusiaux de ce qu'elle fait défense au défendeur à peine de nullité et de dommages-intérêts de passer outre à l'exécution de l'arrêt, avant. qu'il ait été statué sur les fins de sa demande en interprétation; faisant masse des dépens de l'incident, condamne chacune des parties à la moitié des dits dépens.
Du '19 décembre 195'1. - Cour de Bruxelles. - 48 ch. - Prés. M. Dermine, président. - l\!Iin. pitbl. M. Sottiaux, avocat général. - Pl. MM. Van Reepinghen et Forgeur (ce dernier du barreaü d'appel de Liège).
COUR D'APPEL DE LIÈGE
2 juillet 1952
CONVENTION. - VICES DE CONSENTEi\ŒNT. - ERREUR PORTANT SUR LE MOTIF DÉTERMINANT DE LA CONVENTION. - NULLITÉ DE LA CONVENTION.
L' er1·eu1· qui a ·ff'ecte le consentement à la convention ne doù pas nécessairement porte?' su1· l'objet niême de la conventfon : elle entraîne la niûlité de l'engagement dès qu'elle affecte le fait qui a principalement déterniùié le consentement.
Aù1,s1:, est niûle la convention par laqitelle im tiers accepte d'être le nouveau débiteitr dans ime novation, pm' change·ment de débiteitr, soits la condition qite l'ancien débitew;~ liti fournùse ime garantie déterminée, lo1·squ'1:l appara.ît qite la garantie promise était inexistante et qite le· créancier sava'Ît que cette garantie était.: déte1·minante de la vo- · lonté du tiers dd con.s'en.tir à la novatfon.
(MASSAGE, C. TOUSSAINT.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu en forme régulière le jugement a q'lto, l'acte d'appel et les pièces annexes ;
Attendu que la cour adopte l'exp-0sé des faits tel qu'il a été libellé par le premier juge ;
Attendu que le litige porte principalement sur le point de savoir si l'obliga.tion (novation par changement de débiteur), contractée par l'appelante envers l'intimé, le 28 décembre 1946, est ou non entachée d'une erreur susceptible d'engendrer la nullité de cette obligation ;
Attendu, à cet égard, que c'est à tort que le premier juge a considéré cette obligation comme un acte distinct et sans relation étroite avec les deux .autres conventions passées le même jour et à la même table, savoir la cession par le fils de l'appelante à celle-ci de la maison de la rue des Vennes à Liège 'et le mandat donné par l'appelante au notaire Denoel de Vivegnis, de verser à l'intimé la somme de 750.000 francs à prélever sur le prix de vente d'une maison appartenant à l'appelante et située à Liège, rue Forgeur;
Attendu en effet qu'il résulte de l'enquête répressive dont la copie figure au dossier, comme auss1 du texte et de l'esprit des trois convèntions passées le 28 décembre 1946, que ces différents écrits, quoique rédigés séparément, ne constituent en réalité qu'une seule et même opération ;
Attendu que cette opération complexe, élaborée entre toutes les parties en cause, co.nsiste en ce que : 1° l'appelante prenait à sa charge la dette de 750.000 fr. contractée le 19 octobre précédent par son fils envers l'intimé ; 2° eii ce que l'appelante faisait vendre son immeuble' de la rue Forgeur et ,donnait mandat au notaire chargé de la vente, de prélever 750.000 francs au profit de l'intimé; 3° en ce que le fils de l'appelante cédait à celle-ci un immeuble dont il se prétendait propriétaire et sis à Liège, rue des Vennes, '139;
Attendu que les déclarations faites devant le juge d'instruction par M. l'avocat de Halleux, conseil de l'intimé, de l'appelante et de sonfils, font apparaître sans le moindre doute que les trois écrits n'ont été rédigés qu'après que chacun des intéressés eut donné son accord sur tous et chacun .des détails de. l'opération destinée à rembourser l'intimé de sa
COURS D'APPEL 87
créance, à sauver le fils de l'appelante 1
de . poursuites judiciaires et à éviter à l'appelante un dépouillement complet sans contrepartie;
Attendu que, dans la déposition faite le 23 janvier '1947 devant M. le juge d'instruction, Me de Halleux a notamment déclaré (p. 78 de la copie du dossier répressif) qu'au moment où l'intimé lui a fait part de son projet de novation (qui est devenu la troisième convention, base du présent litige) le dit Me de Halleux lui a répondu « que cette chose ne pourra se réaliser que : 1° si JVIme Orban de Xivry (appelante actuelle) est d'accord, et 2° qu'en même temps son fils Albert la garantisse complètement et au delà, en lui vendant immédiatement sa maison de la rue des Vennes J);
Attendu qu'à la page 79 de la même copie du même dossier, il est acté que Me de Halleux a fait part à l'appelante du projet de novation de l'intimé et a demandé à l'appelante son accord pour mandater le notaire Denoel aux fins de vendre sa maison de la rue Forgeur, ajoutant textuellement « qu'il est bien entendu qu'à l'instant même, s'il est d'accord, son fils lui vendrait sa maison de la rue des Vennes de manière à la garantir et au delà, du sacrifice qu'elle consentait pour le sauver >>;
Attendu encore qu'à la page 81, le même témoin déclare que, lorsque l'intimé eut terminé l'exposé de l'opération envisagée dans tous ses détails, il (Me de Ha]Jeux) ajouta de suite que « si d'une part, Mme Orban de Xivry acceptait la novation, il fallait qu'au même instant son fils lui vende sa maison, de telle manière qu'elle soit garantie et au delà de ses sacrifices J>; et il ajoutait (p. 83) « que, dans son esprit comme dans celui de l'appelante, la novation n'était acceptée . qu'à la condition de devenir propriétaire de la maison de son fils J> ;
Attendu que le même témoin déclare encore (p. 83) « qu'il a, à nouveau, longuement exposé les raisons pour lesquelles, à ses yeux, non seulement l'appelante était garantie par la vente citée, mais qu'elle ferait même une opération avantag·euse J>;
Attendu que tous ces exposés ont été tenus en présence de l'intimé et que celui~ci n'a .donc pas pu ignorer que l'appelante faisait de la vente de la maison de son fils, la. condition sine qua non de la novation qu'elle s' apprêtait à souscrire en faveur de Toussaint; que tous les détails de l'opération ont
été connus de toutes les parties en cause et que leur accord a été nettement formulé avant même que l'on passe à la rédaction et à la signature des trois écrits; que si ceux-ci ont été rédigés séparément, il n'en reste pas moins certain que les trois conventions ne constituent qu'une opération unique dans l'intention des parties, et que chacune d'elles y a joué un rôle qui se lie intimement à celui des deux autres;
Attendu que cela est si vrai que la première convention fait mention expresse de la seconde, que la seconde reproduit l'essence de la première, et que la troisième précise qu'il y aura compensation avec la créance née, dans le chef de l'appelante contre son fils, en vertu de la première convention (celle-ci étant à la base du présent litige) ;
Attendu en outre que l'intimé a tellement bien compris que les trois écrits étaient indissolublement liés, qu'il les a emportés tous les trois, le jour même de leur rédaction, sans même en laisser un double à l'appelante ... ;
Attendu qu'il résulte de ces considérations que l'appelante ne s'est engagée envers l'intimé que dans la conviction qu'elle serait couverte, et au delà, par la cession que son fils lui faisait de sa propre maison; que l'intimé a connu cet état d'esprit et cette intention et qu'il ne peut, dès lors, se retrancher derrière le propos du notaire Richard qui lui aurait déclaré « qu'il n'avait pas à s'occuper, en tant que tiers, des arrangements qui pourraient survenir entre Albert Orban de Xivry et sa mère >>;
Attendu. que, quelques jours après la signature des trois conventions, il s'est avéré qu'Albert Orban n'était nullement, et n'avait jamais été propriétaire de la maison qu'il venait de vendre à sa mère, et que son titre de propriété n'était qu'un faux testament rédigé par lui;
Attendu que l'appelante devenait ainsi victime d'une fraude qui existait au moment de la convention et qui portait précisément sur la condition sine qua non de l'obligation née de la novation souscrite envers l'intimé;
Attendu qu'il se voit ainsi qu'elle n'aurait pas souscrit cette novation si elle avait su que la maison de la rue des Vennes n'était pas la propriété de son fils ; que l'intimé a su, de façon claire et précise, que le mobile détel'minant de l'obligq.tion souscrite par l'appelante consistait principalement ;elans. la conviction qu'elle ne courait aucun
'88 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
risque puisqu'elle se voyait propriétaire d'une maison quf avait plus de valeur que la sienne ;
Attendu que si l'erreur invoquée ne porte pas sur l'objet même de la novation, c'est parce qu'un contrat n'a pas d'objet, au sens technique du mot : ce sont les obligations nées du contrat qui en ont un (RIPERT et BOULANGER, t. Il, n°s 198 et suiv;) ; qu'a\l surplus la jurisprudence la plus récente considère comme dirimante une erreur, même étrangère à la chose, mais portant sur un fait qui a déterminé principalement le consentement (voy. Orléans, 19 janvier 1895, Dall., 1895, 2, 41? ; req., 19 janvier 1925, Dall. hebd., 1925, ?? ; req., 1? juin 1946, Gaz. du pal., 1946, 2, 204; voy. aussi RIPERT et BOULANGER, loc. dt., n° 199; GRAULICH, Coitrs de d'l'o'Ît civil, t. Jer, n° 29, p. 15) ; qu'à la vérité, dans ce dernier cas, il s'agit plutôt d'un désaccord fondamental dans l'intention des parties ,qui empêche le contrat .de se former (POTRIER, Obligations, n° 20) ;
Attendu que l'unité de l'opération complexe étant démontrée. et chacune des parties ayant su que l'acquisition de la maison du fils de l'appelante était la condition s'Îne qua non de la novation litigieuse, il devient évident que l'article 1341 du Code civil ne fait pas obstacle à la preuve du fait qui est à la base de l'erreur dont se prévaut à bon droit l'appelante et qui vicie son obligation;
Attendu que l'erreur étant admise au bénéfice de l'appelante, il advient sans objet d'examiner les autres griefs de l'appel; .
Par ces motifs, écartant. comme non fondées toutes autres conciusions, reçoit l'appel et le déclare fondé; met à néant la décision entreprise; déboute l'intimé de son action et le condamne aux dépens des deux instances.
Du 2 juillet 1952. - Cour de Liège. -3e ch. - Prés. M. Mons, président. -Pl. MIVI. Herbiet et Coart-Frésart.
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
14 juillet 1952
PROTECTION DE L'ENFANCE. DÉCHÉANCE DE LA PUISSANCE PATERNELLE. ~ Pl~RE INTERNÉ, MAIS NON DÉMENT. -RECEVABILITÉ DE L'ACTION EN DÉCHl~ANCE. - CONDITION.
Un pè,l'e interné, mais non dément, peut être déchu de la puissance paternelle stw base de l'article 3, 2°, de la loi du. 15 ma'i 1912, lo'rsque le maintien des droüs de la pttissance paternelle niet en péril la mornlité de l'enfant.
(C. F., C. PROCUREUR GÉNÉRAL.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu, produites en forme régulière, les pièces de la procédure et notamment l'expédition du jugement rendu par le tribunal de première instance d'Anvers, Je 2 8 décembre 1951, signifié le ~3 février 1952 et l'acte d'appel contre ce Jugement, en date du 26 février 1952;
Attendu que JYie Buvens, avoué, consti~ tué pour l'appelant, ne conclut pas;
Attendu que l'appel est régulier en la forme et a été introduit dans les délais légaux;
Attendu que, partant, il est recevable; Attendu qu'il est établi, en la cause,
que l'appelant s'est livré, au cours des mois de juin et juillet 1950, à de graves attentats à la pudeur sur la personne d'une fillette âgée de onze ans en présence de deux autres fillettes du même âge;
Que l'appelant a été interné du chef de ces faits pour une dur,ée de cinq ans, par ordonnance de la chambre du conseil du tribunal de première instance d'Anvers en date du 4 juillet 1951 ;
, Attendu que l'instruction a, en outre, révélé que l'appelant, indépendamment des faits qui ont donné lieu à son internement, est de moralité fort douteuse et que par suite de son inconduite notoire il néglige gravement l'accomplissement de ses devoirs lég·aux, mettant ainsi en péril la sécurité et la moralité de ses enfants mineurs;
Attendu que le premier juge constate judicieusement que l'appelant, en dépit de la mesure d'internement qui le frappe et l'~loigne de son milieu, peut encore, en fait, abuser de sa puissance paternelle à l'égard de ses enfants mineurs;
Que tel serait notamment le cas si la mesure d'internement, toujours révocable, venait à être levée et si l'appelant était mis en liberté soit à l'essai, soit' définitivement; ·
Attendu, au surplus, que l'appelant ne 'pourrait alléguer qu'étant interné, il doit être considéré comme dément et que, dès 'lors, il ne peut être tenu pour responsable d'actes accomplis involontairement ou de négligences commises inconsciemment;
Qu'en effet la mesure d'internement
COURS D'APPEL 89
prise contre lui ne démontre aucunement que l'appelant serait atteint de démence, mais prouve uniquement qu'il souffre de troubles mentaux;
Que d'ailleurs il est et demeure capable de contrôler certains de ses actes ;
Attendu, en outre, que les droits inclus dans l'exercice de la puissance paternelle ne sont pas à vrai dire dévolus en propre aux parents, mais que ces droits leur sont attribués principalement en vue de la sauvegarde des intérêts des enfants, sur qui ils s'exercent; 1
Que, dès lors, les parents doivent être déchus de -Qes droits lorsqu'il apparaît, comme en l'espèce, que leur maintien mettrait en péril la moralité des enfants ou ne protégerait qu'insuffisamment celle-ci;
Attendu que la procédure a été introduite et poursuivie régulièrement;
Que l'épouse de l'appelant, mère des dits enfants, a été appelée régulièrement devant la cour;
Que l'avis écrit de M. le juge de paix a été recueilli ;
Que néanmoins le premier juge a déclaré, à tort, le jugement exécutoire, nonobstant appel et sans caution préalable;
Par ces motifs, entendu M. l'avocat général Mahaux en ses conclusions et en son avis conformes donnés en audience publique, donne défaut contre l'appelant et son avoué, Me Buvens, et, pour le profit : reçoit l'appel; le déclare non fondé; en déboute l'appelant; confirme le jug·ement attaqué; dit toutefois que ce jugement a été déclaré à tort exécutoire nonobstant appel et sans caution préalable; condamne l'appelant aux dépens d'appel.
Du t4 juillet t 952. - Cour de Bruxelles. - ire ch. - Prés. M. Rutsaert, conseiller faisant fonctions de président. - Nlin. piibl. M. Mahaux, avocat général.
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
27 février 1952
APPEL. - RECEVABILITÉ. - JUGEMENT SUR CONCLUSIONS CONSENTIES. - ACCORD NON ENTÉRINÉ PUREi\ŒN'f ET SIMPLEMENT PAR LE JUGE. - EXÉCUTION VOLONTAIRE CONFORMÉMENT A L'ACCORD INTERVENU DANS L'IGNORANCE ET AVANT LA SIGNIFICATION DU JUGEMENT MODIFIANT L'ACCORD INTER-VENU. APPEL RECEVABLE.
Si un jugenient 1'endii swr conclusions consenties n'est pas, appelable en principe, c'est à la condt'.tion qu'il enté1·ine piirement et simplement l'accord des parties.
L'exécution de l'accord intervenu ent1·e parties par l'une d'elles, dans l'igno-
, rance et avant la signification du juge-, nient modifiant l'accord inte1·venu, ne fait pas obstacle à la recevabilité de l'appel.
(SERLEZ, C; JANSSENS.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu le jugement dont appel rendu par le tribunal de première instance de Bruxelles le 21 mars 194 7 ;
Attendu que ce jugement a été rendu sur conclusions d'accord dont le dispositif était ainsi libellé : << Condamner le déf endeur (l'actuel appelant) à payer à la demanderesse (l'actuelle intimée) la somme de 17.000 francs à raison de t.OOO francs, par mois à partir du 15 mars 1947 ;
>> Dire qu'à défaut de payer une seule mensualité dans les huit jours de son échéance, le solde restant dû en principal, intérêts et ,frais sera immédiatement exigible;
>> Le condamner aux intérêts judi-ciaires; ,
>> Le condamner à la moitié de tous les dépens exposés à ce jour en ce non compris le droit d'enregistrement qui restera intégralement à charge du défendeur>>;
Attendu que le premier juge a repris ce libellé dans le dispositif de sa décision, mais en y introduisant toutefois deux modifications; que, d'une part, il a fixé la première échéance au 1er avril (au lieu du 15 mars), ce qui s'explique par la circonstance qu'au moment où il prononçait son jugement, la date du 15 mars était, déjà dépassée; que, d'autre part, il décide que la totalité des sommes restant dues sera exigible à défaut de payement de l'une des mensualités << à l'échéance >>, alors que les conclusions d'accord portaient << dans les huit jours de l'échéance », ce qui ne peut s'expliquer, semble-t-il, que par une inadvertance; que, mettant à profit cette inadvertance et en violation, par conséquent, de l'accord intervenu, l'intimée, n'ayant pas reçu, le jour même de l'échéance, payement de la mensualité échue le 1er mai 194 7, signifia le jugement, dès le lendemain 2 mai, avec commandement de payer la totalité des sommes restant
90 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
dues et, dès le 27 mai, fit faire itératif .commandement suivi de saisie-exécution; que c'est dans ces conditions qu'appel fut interjeté le 4 juin suivant
I. Sur la recevabilité de l'appel: Attendu que les moyens d'irrecevabilité
soulevés par l'intimée ne sont pas fondés; Attendu què si un jùgement rendu sur
conclusions consenties n'est pas appelable, c'est àla condition qu'ilentérinepurement et simplement l'accord des parties, condition qui n'est pas réalisée en l'espèce, ainsi qu'il a été exposé ci-dessus;
Attendu qu'au momentoù l'appel a été interjeté deux mensualités avaient été versées par virement postal du compte du conseil de l'appelant au compte du conseil de l'intimee; que l'ordre de virement relatif au premier versement avait été émis dès avant le 19 mars 1%7, date à laquelle il a été exécuté par l'Office des chèques postaux, c'est-à-dire que l'appelant, faisant confiance à l'accord intervenu, avait même anticipé sur le .iugement qui devait entériner cet accord; que l'ordre de virement relatif au second versement a été exécuté le 5 mai 1947 et qu'il n'est pas exclu qu'il ait été émis antérieurement au 2 mai, c'est-à-dire à un moinent où l'appelant, qui n'a reçu signification du jugement que le 2 mai, continuant à faire confiance à l'accord intervenu, pouvait ignorer la modification que le jugement y avait apportée;
Qu'on ne peut affirmer qu'èn versant deux mensualités dans les conditions qui viennent d'être rappelées l'appelant aurait acquiescé au jugement;
II. Au fond : . . . (sans fritfrêt) Par ces motifs, vu la loi du 15 juin 1935
et notamment l'arfacle 24 de cette loi, rejetant comme non. fondées ou sans pertinence toutes conclusions autres, plus amples ou contraires, reçoit l'appel et, y faisant droit au fond, met à néant le jugement dont appel; émendant, condamne l'appelant à payer à l'intimée la somme de 8.000 francs et les intérêts judiciaires; dit la demande reconventionnelle de l'intimée recevable, mais non fondée ; condamne chacune des parties à la moitié des dépens de première instance et d'appel, sauf que les droits d'enregistrement resteront à la charge exclusive de l'appelant et les frais d'exécution du jugement dont appel à la charge exclusive 1de l'intimée.
Du 27 février 1952. Cour de Bru-xelles. - 2El ch. - P1'és. M. Marcoux, président. - Nlin. pitbl. Baron Verhaegen, avocat g·énéral. Pl. MM. Ga~ISe Fromès et Félix. . : '.
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
4 mars 1952
'1° APPEL. - RECEVABILITÉ. - TAUX DU DERNIER RESSORT. - NOTION. -VALEUR CONTESTÉE TELLE QU'ELLE RÉSULTE DES DERNIÈRES CONCLUSIONS DES PARTIES EN PREMIÈRE INSTANCE.
FRUITS ÉCHUS AYANT UNE CAUSE ANTÉRIEURE A LA DEMANDE. - DOIVENT S'AJOUTER AU PRINCIPAL.
2° DONATIONS ET TESTAMENTS. -LEGS UNIVERSEL PORTANT SUR LA NUE PROPRIÉTÉ DES BIENS DU TESTATEUR.
LEGS PARTICULIERS DE SOMMES D'ARGENT. - CRÉENT, AU PROFIT DES LÉGATAIRES PARTICULIERS, UN DROIT DE CRÉANCE, NON GREVÉ DE L'USUFRUIT AFFECTANT LE LEGS UNIVERSEL. - lNAPPLICABILITÉ A CES LEGS PARTICULIERS DE L'ARTICLE '1020 DU CODE CIVIL.
'1° Le taitx chi dern·ier ressort se déterrnine par le niontant de la demande, étant la ·valeur contestée telle qu'elle est fitcée par les derrâè·res conclitsions prises par les pm·ties en p1'emiè·re instance, les fruits échus ayant une cœuse antériwre à la demande devant s' aj 01tter au p'l'incipal.
2° Le légataire m1:iversel de la nite propriété des biens du testatewr est tenu d' acqwitte1· les legs particulie'l's de sornmes d'argent. Ces legs créent, an profit de lewrs bénéfic'Îaires et à chm'ge clit légata'Îre mi·iversel, des droits de créance qm: ne f'ont point partie de la succession comme' tels, et ne pe1went être grevés de l'itsitfrnit affectant le legs imiversel.
(VAN PARYS, C. TRIGAUX ET CONSORTS.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu l'arrêt de réouverture des débats prononcé en la cause le 30 janvier 1952;
Attendu que, par conclusions lues et déposées le 26 février 1952, parties sont d'accord pour reconnaître et déclarer que la personne dénommée, soit dans le testament litigieux, soit dans les extraits de procédure, l'acte d'appel, l'expédition du jugement et les conclusions des parties, tantôt Moïse.Libies-Mossart, tantôt Moïse -Libies-Massart, tantôt Moïse LabiesMassart est bien la même personne et se nomme. en réalité Moïse Labies, • né à Roisin, le 25 mars '1879, ancien· marbrier, époux d'Aurélie Massart, domicilié n° 81, Grand-Rue, à Rance;
COURS D'APPEL 91
Vu le jugement dont appel rendu le 2 juillet 1951 par le tribunal d.e première instance de Charleroi et statuant sur l'action intentée par les quatre intimés sur base du testament d'un sieur Léon Thomas, en date du 5 juin 1942, et tendant à faire condamner l'appelant en sa qualité de légataire universel à leur délivrer les legs particuliers dont ils ont été gratifiés et portant sur les sommes de 100.000 francs, 30.000 francs, 25.000 fr. et 25.000 francs, respectivement, ce avec les intérêts judiciaires et les fruits naturels et civils produits depuis le 1er février 1949, date du décès du de cujus;
Attendu qu'aux termes du jugement dont appel le premier juge a fait droit à la demande des intimés, sauf qu'il a décidé que les fruits naturels et civils n'étaient dus qu'à dater de la demande;
I. Sur la recevabilité de l'appel à l'égard des troisième et quatrième intimés :
Attendu que ces deux intimés soutiennent que l'appel serait irrecevable à leur égard defectu sumniae, étant donné que la demande formée par chacun d'eux ne dépasserait pas le taux du dernier ressort, soit 25.000 francs (loi du 20 mars 1948, art. 2, modifiant l'article 16 de la loi du 25 mars 1876) ;
Attendu qu'en l'espèce le taux du dernier ressort est déterminé par le montant de la demande; que par les mots « montant de la demande » il faut entendre la valeur contestée telle qu'elle est fixée par les dernières conclusions prises par les parties en première instance (cass., 2 juillet 1896, PASIC., 1896, I, 231); qu'en l'espèce, suivant les dernières conclusions des troisième et quatrième intimés, datées du 2 novembre 1950, et signifiées le 7 novembre 1950, la demande de chacun d'eux avait pour objet, outre le principal de 25.000 francs, notamment les fruits produits depuis le 1er février 1949, lesquels ayant une cause manifestement antérieure à la demande, doivent, pour la détermination du ressort, s'ajouter au principal (loi du 25 mars 1876, art. 22); qu'il suit de là que le moyen d'irrecevabilité soulevé par les dits intimés n'est pas fondé ;
II. Au fond : Attendu que le testament litigieux
porte notamment ce qui suit : << Je donne et lègue tous les biens
meubles et immeubles qui composeront ma succession à M. le général Van ParysMesureur (l'appelant)... mais à charge de remettre à :
)) 1° -M. Ernest TrigauxcPestiaux (pre-
mier intimé) ... la somme de 100.000 fr.; l> 2° M. Deflorenne (deuxième intimé) ...
la somme de 30.000 francs; l> 3° M. Moïse Libies-Mossart (troisième
intimé) ... la somme de 2.5.000 francs; )) 4° M. Gabriel Pestiaux (quatrième
intimé) ... la somme de 25.000 francs l>; Mais attendu qu'il est apparu que,
par son contrat de mariage en date du 23 juillet 1931, le de cujus avait déjà irrévocablement disposé au profit de son épouse survivante de l'usufruit des biens meubles et immeubles qui composeraient sa succession, de telle sorte que le legs universel qui, suivant les termes du testament, est fait à l'appelant en pleine propriété se trouve en réalité réduit à la seule nue propriété;
Attendu que l'appelant prend prétexte de cette réduction pour soutenir qu'il ne serait lui-même tenu d'acquitter les Jeg·s particuliers mis à sa charge qu'en nue propriété;
Attendu qu'il fonde ce soutènement notamment sur l'article 1020 du Code civil, aux termes duquel, « si, avant le testament ou depuis, la chose léguée ... est grevée d'un usufruit, celui qui doit acquitter le legs n'est point tenu de la dégager, à moins qu'il n'ait été chargé de le faire par une disposition expresse du testateur l>;
Attendu que deux conditions positives sont donc requises pour l'application de cette disposition légale : d'abord qu'il y ait «chose léguée l> (legs), et ensuite que cette « chose léguée l> soit grevée d'usufruit;
Attendu que lorsque, comme en l'espèce, la charge est apposée à un legs d'universalité, est établie au profit de tiers et porte sur une somme d'argent, cette charge s'analyse en un legs (DE PAGE, t. VIII, vol. II, n°8 1015, 1021 et 1120, 1°) ; que, d'ailleurs, parties sont d'accord p'our considérer les attributions de sommes litigieuses comme des le~ts ;
Mais attendu qu'à tort l'appelant prétend que ces Jegs seraient grevés de l'usufruit établi au profit de la veuve du de citj'us; que cet usufruit ne porte en effet que sur les éléments, tous et chacun des éléments, qui composent la succession : immeubles, meubles meublants, créances, argent comptant, etc. ;
Que les sommes faisant l'objet des legs litigieux ne figurent pas parmi les éléments repris. à l'inventaire (dressé Je 9 juillet 1949 par le notaire Deneufbourg) ; qu'aussi bien, s'agissant (le choses de genre (sommes .d'argent) non encore individualisées, les legs qui s'y
92 JURISPRUDENCE DE BELGIQUE
rapportent n'ont pas pour effet de conférer à leurs bénéfiCiaires un droit de propriété sur ces sommes, mais seulement un droit de créance; qu'ils sont donc, à proprement parler, des legs de créances, créances qui sont créées par le testament lui-même directement à charge du légataire universel et au profit des légataires particuliers et qui, comme telles, ne font pas et n'ont jamais fait partie de la succession et, par conséquent, ne peuvent être grevées de l'usufruit dont s'ag·it;
Attendu qu'il suit de ce qui précède que, faute de l'une des conditions requises, l'article 1020 du Code civil n'est pas d'application en l'espèce;
Attendu qu'à l'appui de son soutènement l'appelant fait encore état de ce qu'il ne serait pas obligé d'acquitter les legs particuliers nltrn vires; que, s'il entend par là que, ne recevant lui-même que de la nue propriété il ne peut délivrer que de la nue propriété, il suffit pour pour écarter cet argument d'observer qu'au point de vue de l'étendue de l'obligation aux dettes et charges les forces de la succession s' ap1îrécien t non en nature, mais en valeur ; que, s'il prétend simplement que la valeur des legs particuliers (en pleine propriété) excéderait la valeur de son legs universel (en nue propriété), il lui incomberait tout d'abord, et avant tout, de justifier cette prétention; qu'il ne lè fait pas ni n'offre de le faire;
Par ces motifs, vu la loi du 15 juin 1935 et notamment l'article 24 de cette loi, ouï le 5 décembre 1951, en audience publique, l'avis conforme de M. le substitut du procureur général Richard, quant à la recevabilité de l'appel, ouï le 26 février 1952, en audience publique, M. l'avocat général baron Verhaegen demandant qu'il soit fait droit aux conclusions déposées à cette date par les parties, r,ejetant comme non fondées ou sans pertinence toutes conclusions, autres, plus amples ou contraires, donne acte aux parties de ce qu'elles reconnaissent et déclarent que la personne dénommée, soit dans le testament litigieux, soit dans les extraits de procédure, l'acte d'appel, l'expédition du jugement et les conclusions des parties, tantôt Moïse Libies-Mossart, tantôt Moïse Libies-Massart, tantôt Moïse Labies-Massart est bien la même personne et se nomme en réalité Moïse Labies, né . à Roisin, le 25 mars 1879, ancien marbrier, époux d'Aurélie Massart, domicilié n° 81, Grand-Rue, à Rance; reçoit l'appel et, y faisant droit au fond, le déclare non
fondé, en déboute l'appelant; confirme, en conséquence, le jugement dont appel en rectifiant l'erreur matérielle relative à l'orthographe du nom Moïse Libies-1\!Iossart y mentionné ; dit que ce nom est en réalité Moïse Labies-Massart; condamne l'appelant aux dépens d'appel.
Du 4 mars 1952. - Cour de Bruxelles. - 2e ch. - Prés. M. Marcoux, président. - Nlin. publ. Baron Verhaegen,. avocat général, et M. Richard, substitut du procureur général. - Pl. MM. Baugniet et Degrelle (ce dernier du barreau de Charleroi).
COUR D'APPEL DE BRUXELLES
5 mars 1952
IMPOTS. IMPÔT EXTRAORDINAIRE SUR LES REVENUS EXCEPTIONNELS RÉALISÉS EN PÉRIODE DE GUERRE. -RECOUVREMENT. - APPLICATION A CET IMPÔT DES DISPOSITIONS DE L' ARRÊTÉ ROYAL D'EXÉCUTION DES LOIS COORDONNÉES RELATIVES AUX IMPÔTS SUR LES REVENUS (ARR. ROY. DU 22 SEPTEMBRE 1937). - PRIVILÈGE DU TRÉSOR. - MEUBLES DU REDEVABLE. - NOTION. - CRÉANCE PORTANT SUR LE PRIX DE VENTE D'UN IMMEUBLE. - CARACTÈRE MOBILIER. - AFFECTÉE AU PRIVILÈGE.
Les dispos'Ïtions de l' mTêté ·royal du 22 septenibre 1937, concernant l'exécittion des lois coordonnées relatives aitx inipôts swr les ·revenits, sont applicables ait recouvrement de l'ùnpôt extrao'1'd1:nafre s·wr les revenits exceptionnels 1·éalisés en période de guerre ( 1).
Le privilège dit Trésor porte sur tous les nienbles par leur nat·ure appa1·tenant au contribuable et siw ses b·iens meubles par la détermination de la loi.
Une créance portant swr le p1·ix de vente d'un im.meuble est une créance de caractère mobilie'I' affectée cm privilège.
(ÉTAT BELGE, MINISTRE DES FINANCES, C. DUSSENNE ET SCHELFAUT.)
ARRÊT.
LA COUR; Vu le jugement dont appel par lequel le tribunal de première
(1) Cf. loi du 16 octobre 1945, art. 19; cass., 25 janvier 1049 (PASIC., 1949, I, 75); les conclusions du ministère public avant cass., 10 avril 1951 ('ibül., 1951, I, 532); cass., 26 juin 1951 (ibid., 1951, I, 734).
COURS D'APPEL 93
instance séant à Charleroi le 31 décembre 1948 a, d'une part, fait droit pour partie à l'action introduite, suivant ajournement du 16 juillet 1947, par les époux Dussenne-Deppe, actuellement premier et deuxième intimés, et ce : 1° en disant pour droit qu'il n'existe pas de privilège au profit du Trésor public sur la créance de 65.000 francs des époux Schelfaut-Moreau (troisième et quatrième intimés) à charge des époux DussenneDeppe, pour prix d'un immeuble vendu suivan.t acte du notaire Demaret à Houdeng-Goegnies, en date du 13 avril 1946, et qu'en conséquence, c'est sans titre ni droit que le receveur des contributions d'Houdeng-Aimeries avait adressé aux débiteurs de ce prix, le 18 février 1947, la demande valant sommation prévue par l'article 74 de l'arrêté royal du 22 septembre 1937 ; 2° en condamnant les premier et deuxième intimés à payer ce prix aux troisième et quatrième intimés, et en disant que sur la justification de ce payement, · le conservateur des hypothèques du deuxième bureau de Charleroi devra radier l'inscription d'office prise au profit des époux. Schelfaut-Moreau et à charge des époux Dussenne-Deppe, le 6 1mai 1946; et, d1autre part, s'est déclaré incompétent pour faire défense à l'Etat belge, appelant, de faire aucun acte d'exécution contre ces derniers; puis, . a dit non recevable une demande introduite sous la forme reconventionnelle par les époux Sche]faut-Moreau contre l'Etat belge pour payement par celui-ci des intérêts à 5 p. c. sur le prix de 65.000 francs depuis le 1er juillet '1945, date de son exigibilité, et ·enfin a condamné l'Etat belge, en la personne du Ministre des finances, aux frais et dépens de l'instance;
Vu la signification du jugement à parties du 16 juin 1949 et l'appel régulièrement interjeté par l'Etat belge, le 21 juin 1949 ;
Attendu que cet appel est recevable;
Attendu qu'après une analyse exacte des éléments de fait et de droit du litige et la constatation que, les vendeurs étant redevables au fisc de l'impôt extraordinaire sur les bénéfices exceptionnels (loi dù 16 octobre 1945), c'est pour assurer le recouvrement · de cet impôt que le receveur des contributions de Houdeng-Aimeries avait, le 18 février 194 7, adressé aux acheteurs une opposition au payement du prix aux vendeurs et la demande de
le payer, entre ses mains, à l'acquit du redevable, le premier juge a parfaitement souligné que cette opposition et cette demande étaient faites conformément aux §§ 1er et 2 de l'article 74 de l'arrêté royal en date du 22 septembre 1937, concernant l'exécution des lois coordonnées relatives aux impôts sur les revenus (Pasinomie, 1937, p. 291), dispositions applicables au recouvrement de l'impôt extraordinaire précité, suivant l'article 19 de sa loi organique;
Attendu qu'au regard de ces dispositions, la demande litigieuse apparaîtra fondée si le prix de vente qui en a fait l'objet était légalement affecté au privilège du Trésor public, lequel, suivant l'article 71 des lois coordonnées par le dit arrêté, porte « sur tous les revenus et meubles du redevable, en quelque lieu qu'ils se trouvent et sur ceux de sa femme non séparée de biens et sur ceux de leurs enfants dont ils ont la jouissance légale )> ;
Attendu qu'une dette d'argent est toujours mobilière, même si elle représente le prix d'un immeuble (cf. DE PAGE, Traité élém. de di·oit civil belge, t. Jer, n° 596, a; Bruxelles, 17 novembre 1905, Belg. jud., 1906, 195) ;
Que la question est, dès lors, de savoir si, en l'espèce, la dette active et mobilière du redevable peut être considérée comme un des meubles visés par l'article 7t précité;
Attendu qu'il doit être répondu affirmativement à cette question;
Attendu que si l'article 71 indique comme objet du privilège << tous les revenus et meubles du redevable, en quelque lieu qu'ils se trouvent », on ne saurait voir dans ces derniers mots la preuve qu'il ne s'agit que de meubles corporels (contra : THUYSBAERT, Sfrretés réelles et personnelles, 1934, n° 69, p. 41), mais seulement l'indication que le privilège porte sur tous les revenus et meubles, fussent-ils même à l'étranger (DE PAGE, t. VII, no 108, 1°);
Attendu qu'on ne saurait, non plus, argumenter de l'article 533 du Code civil. pour préteridre, avec le premier juge, que dans l'article 71 des lois coordonnées le mot « meubles » est << employé seul » et donc dans Je sens restrictif de cet article 533 qui << ne comprend pas l'argent comptant... les dettes actives ... », puisque l'expression << sur tous les revenus et meubles » du redevable doit, à l'évidence, s'analyser comme la contraction des mots << sur tous les revenus et sur tous les meubles ... )) ;
JURISPRllJDENCE DE BELGIQUE
Attendu que le libellé de l'article '71 des lois coordonnées par l'arrêté du :1 · juin 1941 a été repris de la loi du 29 octobre 1919 établissant des impôts cédulaires sur les revenus et un impôt complémentaire sur le revenu global (Pasinomie, 1919, p. 169 et suiv.) dont le rapporteur de la section centrale à la Chambre, M. \iVauwermans, avait déclaré : « Quant aux dispositions relatives au privilège... elles ne sont que la reproduction des textes de lois actuellement en vig'ueur » (Doc. pœrleni., 1918-1919, n° 320, p. 74) ;
Que ces textes de loi alors en vigueur procédaient de la loi du 12 novembre 1808 relative au privilège du Trésor public pour le recouvrement des contributions directes, dont l'article 1er spécifiait que «le privilège du Trésor public pour le recouvrement des contributions directes ... s'exerce avant tout autre ... 2° pour l'année échue et l'année courante des contributions mobilières ... et toute autre contribution directe et personnelle, sur tous les meubles et autres effets mobiliers appartenant aux redevables, en quelque lieu qu'ils se trouvent J>
(Pasinomie, 1806-1809, p. 318; LOCRÉ, Code civil, t. VIII, 11, III, p. 273 et suiv.);
Que si l'on rapproche cet énoncé de Fassiette du privilège («tous les meubles et autres effets mobiliers ») des définitions des articles 533 et 535 du Code civil, il apparaît que le privilège du Trésor public devait comprendre généralement tout ce qui est «censé J> meuble d'après «les règles >> des articles 527 et suivants : soit donc les meubles par leur nature ou par la détermination de la loi, sans que le complément « en quelque lieu qu'ils se trouvent >> puisse en restreindre la portée;
Qu'en outre, la loi du 12 novembre 1808, en son article 2, assujettissait tous fermiers, locataires et autres dépositions et débiteurs de « deniers affectés au privilège du Trésor public à payer en l'acquit des redevables et sur les fonds qui sont en leurs mains, les contributions dues par ces derniers>> (exposé des motifs fait par Jaubert au Corps législatif le 3 novembre 1808, LocRÉ, ·ib·id., p. 2?3 à 275) ;
Attendu qu'il ne se concevrait pas que, tandis que la complexité de la vie sociale, les besoins de l'Etat et son emprise sur la vie et les biens des contribuables n'ont cessé de s'accroître en étendue et en profondeur, le législateur aurait, le 29 octobre 1919 et jus-
qu'au 15 janvier 1948 inclusivement (arr. Rég. du 15 janvier 1948, Pasinomie, 1948, p. 21 et· suiv.), voulu n'accorder au fisc pour recouvrer son dù que :des moyens plus réduits que ceux dont il disposait avant cette période;
Attendu qu'on ne saurait tirer argument du fait que la loi du 24 décembre 1948, relative aux droits et privilèges du Trésor en matière d'impôts directs et taxes y assimilées (Pasinomie, 1948, p. 901), a remplacé l'article '71, tel que libellé le 29 octobre 1919, par une disposition nouvelle, qui reconnaît au Trésor public « un privilège général sur les revenus et les biens meubles de toute nature du redevable, à l'exception des navires et bateaux J>, puisque le rapporteur de la commission des finances et du budget à la Chambre a, dans son analyse du projet de cette loi, rappelé que jusqu'alors, «les objets soumis au privilège )) avaient compris « Régime ancien : tous les meubles du redevable >> (Doc. parlem., Ch., 1948-1949, n° 7, rapport Discry, p. 2, .A, 1, a) et que la loi du 24 décembre 1948 n'a pas innové sur ce point;
Attendu que c'est donc à tort que le premier juge a dit pour droit qu'il n'existait pas de privilège au profit .du Trésor public sur la créance des époux Schelfaut-Moreau à charge des époux Dussenne-Deppe, et qu'il a condamné ceux-ci à en payer le montant à ceux-là;
Attendu que les intimés ont, les uns et les autres, conclu à la confirmation du jugement a quo;
Par ces motifs, vu la loi du 15 juin 1935 et notamment son article 24, entendu M. l'avocat général baron Verhaegen en son avis donné en audience publique, rejetant, comme dépourvues de fondement ou de pertinence, toutes conclusions autres, plus amples ou contraires, reçoit l'appel et, y faisant droit, met à néant le jugement a quo; émendant, dit pour droit que le privilèg'e du Trésor, établi par l'article 71 des lois coordonnées par l'arrêté du 3 juin 1941 et relatives aux impôts sur les revenus, portait sur la créance de 65.000 francs des époux Schelfaut-Moreau à charg'e des époux Dussenne-Deppe; en conséquence, dit pour droit qu'était fondée la demande valant sommation, suivant l'article 74 de l'arrêté royal du 22 septembre 1937, adressée par le receveur des contributions d'Houdeng-Aimeries, le 18 février 1947, aux époux DussenneDeppe, premier et deuxième intimés;
COURS D'APPEL 95
condamne ces derniers à satisfaire à cette sommation par le payement de la somme de 65.000 francs à l'acquit de Fernand.Jules Schelfaut~M6reau, en mains dù receveur des contributions d'HoudengAimeries ; dit que sur justification de ce payement, le conservateur des hypothèques du deuxième bureau de ·Charleroi devra, sur la production de l'expédition du présent arrêt, certifié coulé en force de chose jugée, radier l'inscription d'office prise au profit des époux Schelfaut-Moreau et à charge des époux Dussenne-Deppe le 6 mai 1946; condamne les troisième et quatrième intimés aux dépens des deux instances.
Du 5 mars 1952. - Cour de Bruxelles. 2e ch. Prés. M. Marcoux, président. Nlin. pwbl. Baron Verhaegen, avocat
général. - Pl. MM. De Vis, Laffineur et Leroy (ce dernier du barreau de Mons).
COUR D'APPEL DE LIÈGE
3 juillet 1952
VENTE. - MARCHAND DE BIENS. -OPTION D'ACHAT POUR S'ASSURER LE BÉNÉFICE DE LA SURVENTE. - CONSÉQUENCES.
Le niarchand de biens peut se faire consentir par le futur vendeur d'wi innnwble une option d'achat poiw s' assu1'er le bénéfice de la survente comme pn:.-c de son intervention.
La réalisation de la v~nte entre le vendeur et un tie1's par l'intermédiaire du marchand de biens n'entraîne pas ipso facto la résolution de l' opt1:on d'achat au dét1'iment du marchand d'ùnrneitbles.
Celui-ci conserve le droit de de11iande1' la résolutiori de l'option d'achat avec dom-11iages-intérêts au cas où le vendeur se refuserait à lui payer le montant de la survente. Dans ce cas, le montant des dom1?iag~s-ùitfrêts correspond à celu·i de la sttrvenle.
(D'AFFNAY, C. LABEYE.)
ARRÊT.
LA COUR; - Vu en expédition régulière avec les pièces annexées le jugement rendu le 17 février 1944 par le tribunal de première instance de Liège ;
Vu l'acte d'appel signifié le 13 mars suivant à la requête des sieurs Adrien et Henry d'Affnay;
Attendu que cet appel est régulier, que sa recevabilité n'est pas contestée et qu'il
n'existe aucune cause de non-recevabilité que la cour ·entende soulever. d'office;
Attendu que .fa. 'demande dictée par les appelants tend à la résolution d'une convention avenue entre parties le 26 juin '.l 941 avec allocation d'une somme de 50.000 francs à titre de· dommagesintérêts;
Attendu qu'il est acquis aux débats que le 26 juin 1941 les époux Vernier~ Labeye, ici intimés, mettaient les appelants en possession d'une option d'achat sur un bien leur appartenant, sis à Julémont au lieu dit Coronmeuse, pour le prix de 650.000 francs et ce pour une durée d'un mois (( à compter de ce jour));
Attendu que par lettre recommandée du 24 juillet 1941, postée le lendemain vers '16 heures et parvenue aux intimés le 26 juillet, c'est-à-dire avant l'expiration du délai fixé, les appelants faisaient connaître aux intimés qu'ils levaient l'option;
Attendu qu'entretemps le bien avait été vendu par les intimés à la société Mutuelle du Notariat, suivant acte passé par les notaires Biar et J amoulle de Lièg·e, le 25 juillet 1941,. pour la somme de 700.000 francs;
Attendu que pour répondre à l'action, les intimés ont soutenu que l'option était nulle pour avoir été accordée en fraude de la loi fiscale; qu'ils ne renouvellent pas ce moyen devant la cour; que d'ailleurs il y fut répondu adéquatement par les premiers juges qui l'ont écarté par des motifs que la cour adopte ;
Attendu que les intimés ont également soutenu que !es appelants avaient, dès avant la vente du 25 juillet 1941, renoncé à se prévaloir de· leur option ; que les premiers juges ont accueilli ce moyen et l'ont adopté comme argument pour débouter. les appelants de leur action;
Attendu qu'il n'est pas contesté que les appelants ont connu le projet de vente entre les intimés et la société Mutuelle du Notariat; qu'il en est tellement bien ainsi que ce sont les appelants qui ont mis les parties en rapport et ont négocié les conditions de la vente;
Attendu pourtant que ce fait n'impliquait pas de la part des appelants renonciation au bénéfice de l'option qui leur avait été consentie;
Attendu, en effet, que les appelants sont marchands de biens, que les intimés leur avaient confié à ce titre la charge de rechercher un acquéreur, ainsi que cela résulte à suffisance des lettres adressées par l'intimé Vernier aux appelants les 9 et 10 juin 1941;
96 JURISPRUDENCE DE ·BELGIQUE
Attendu dès lors que la remise aux appelants d'une option d'achat ne pouvait avoir pour autre signification que d'assurer aux appelants le bénéfice d'une survente comme prix de leur intervention;
Que les intimés reconnaissent. euxmêmes en conclusions que «l'option conférée n'avait que le caractère d'une garantie propre à assurer aux appelants l'exclusivité de la recherche d'un acquéreur dans un délai détermin~ )) ;
Qu'ils ajoutent que l'option était la justification pour les appelants de leur droit de réclamer de l'acquéreur éventuel la rémunération de leur qualité d'inter~ médiaire;
Que s'il en est ainsi, on ne voit vraiment pas en quoi aurait consisté cette rémunération si ce n'est dans le supplément de prix que l'acheteur consentirait au delà de la somme réclamée par les vendeurs;
Que la rétribution des courtiers d'immeubles, par la différence entre le prix de vente consenti par les vendeurs et le prix obtenu de l'acheteur, est de pratique constante dans les transactions immobilières et en soi parfaitement licite;
Attendu que les intimés devaient connaître cette pratique; que par lettre du 2 juillet 1941, informés de ce que le bien avait trouvé un acquéreur dans la société Mutuelle du Notariat, ils ont de nouveau confirmé aux appelants leur accord de recevoir la somme de 650.000 francs à titre de prix de vente;
Attendu qu'en se refusant lors de la vente à remettre aux appelants le bénéfice de la survente, soit 50.000 francs, les intimés ont manqué à leurs engagements et ont mis les appelants dans l'obligation de lever l'option d'achat qui· leur avait été consentie à titre de ga-
rantie pour faire constater le manquement;
Attendu que, l'option d'achat ne pouvant plus être exécutée, elle doit être résolue aux torts et griefs des intimés;
Attendu qu'il n'est pas contesté que le montant de la survente est de 50.000 francs; que cette somme représente le bénéfice que les appelants auraient recueilli de l'exécution correcte par les intimés de leur.s eng·agements;
Qu'ils sont donc fondés à réclamer cette somme à titre de dommag·es-in térêts comme dommage subi par suite de la résolution du contrat;
Par ces motifs, écartant toutes autres conclusions comme dénuées de pertinence, notamment la conclusion que les appelants auraient modifié le contrat judiciaire en instance d'appel, puisqu'il résulte de ce qui précède que c'est par le mécanisme même de la résolution du contrat intervenu que la débition des dommages-intérêts doit être prononcée, reçoit l'appel, le déclare fondé; en conséquence prononce la résolution de la convention d'option d'achat avenue entre parties le 26 juin 1941 aux torts et griefs des intimés; condamne les intimés à payer aux appelants la somme de 50.000 francs à titre de dommagesintérêts, avec les intérêts judiciaires, et les condamne aux dépens des deux instances; et vu le sort réservé à la demande principale, déclare les intimés non fondés dans leur action reconventionnelle; en conséquence les en débo1\te; les condamne aux dépens de cette action s'il en est.
Du 3 juillet 1952. - Cour de Liège. - 1 re ch. - Prés. M. Le Roux, conseiller faisant fonctions de président. - Nlin. publ. M. Dallemag·ne, premier avocat général. - Pl. MM. Yves Philippart et Thiry.
ETABL. EM. BRUYLANT, 5, a., rue de la Régence, 67. - R. c. 13r. 1()357. Un dir. gén. : R. BRUYI,ANT, av. Brugmarm, 421, Uccle.