on ne négocie pas la santé-la propriété intellectuelleet l’accès aux médicaments

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LES MÉDICAMENTS NE SONT PAS UN LUXE! On ne négocie pas la santé : La propriété intellectuelle et l’accès aux médicaments dans l’Accord de libre-échange des Amériques Pour un trop grand nombre de personnes en Amérique latine et dans les Caraïbes, les médicaments sont un luxe. Cette situation est en voie de changer dans certains de ces pays parce que la concurrence générique touchant les médicaments contre le sida permet de faire baisser radicalement les prix. Or voilà que cette évolution favo- rable est menacée par les dispositions relatives à la propriété intellectuelle proposées dans l’Accord de libre- échange des Amériques, un traité commercial régional s’appliquant aux Amériques à l’exception de Cuba. Estimant qu’il faut éviter de détruire la concurrence, parce que celle-ci favorise une baisse des prix des médica- ments et un accès accru aux traitements, MSF demande aux pays signataires d’exclure toute disposition relative à la propriété intellectuelle de l’Accord de la ZLEA. Les normes strictes proposées seront néfastes pour la santé publique dans les Amériques.

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Pour un trop grand nombre de personnes en Amérique latine et dans les Caraïbes, les médicaments sont un luxe. Cette situation est en voie de changer dans certains de ces pays parce que la concurrence générique touchant les médicaments contre le sida permet de faire baisser radicalement les prix. Or voilà que cette évolution favorable est menacée par les dispositions relatives à la propriété intellectuelle proposées dans l’Accord de libreéchange des Amériques, un traité commercial régional s’appliquant aux Amériques à l’exception de Cuba. Estimant qu’il faut éviter de détruire la concurrence, parce que celle-ci favorise une baisse des prix des médicaments et un accès accru aux traitements, MSF demande aux pays signataires d’exclure toute disposition relative à la propriété intellectuelle de l’Accord de la ZLEA. Les normes strictes proposées seront néfastes pour la santé publique dans les Amériques.

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L E S M É D I C A M E N T S N E S O N T PA S U N L U X E !

On ne négocie pas la santé :

La propriété intellectuelle et l’accès aux médicaments dans l’Accord de libre-échangedes Amériques

Pour un trop grand nombre de personnes en Amériquelatine et dans les Caraïbes, les médicaments sont unluxe. Cette situation est en voie de changer dans certainsde ces pays parce que la concurrence générique touchantles médicaments contre le sida permet de faire baisserradicalement les prix. Or voilà que cette évolution favo-rable est menacée par les dispositions relatives à la propriété intellectuelle proposées dans l’Accord de libre-échange des Amériques, un traité commercial régionals’appliquant aux Amériques à l’exception de Cuba.Estimant qu’il faut éviter de détruire la concurrence, parceque celle-ci favorise une baisse des prix des médica-ments et un accès accru aux traitements, MSF demandeaux pays signataires d’exclure toute disposition relative à la propriété intellectuelle de l’Accord de la ZLEA. Lesnormes strictes proposées seront néfastes pour la santépublique dans les Amériques.

Cont

exte

Le débat, qui a cours depuis quatre ans à l’échelle internationale relativement

aux répercussions qu’entraînent les règles commerciales sur la santé publique,

a soulevé des préoccupations sur les conséquences de la protection de la

propriété intellectuelle, et en particulier des brevets, sur le prix des médicaments

et l’accès à ces derniers. Les brevets sont des instruments d’intérêt public

dont le but présumé est d’assurer que les innovations sont bénéfiques

pour l’ensemble de la société. Mais pour les médicaments, des mécanismes

de protection des brevets trop stricts peuvent limiter, dans les pays en

développement, la capacité des pouvoirs publics et du secteur privé de

produire ou d’importer des médicaments abordables. Toutefois, il existe des

recours pour les gouvernements de pays des Amériques : ils peuvent tenter

de contrebalancer les effets négatifs des brevets en incorporant aux lois

nationales des garanties visant à protéger la santé publique.

Ce droit est enchâssé dans l’Accord de l’Organisation mondiale du com-

merce (OMC) sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui

touchent au commerce (ADPIC); il a été réitéré à l’occasion de la 4e rencon-

tre ministérielle de l’OMC à Doha, au Qatar, en novembre 2001 dans une

déclaration historique — la Déclaration ministérielle sur l’Accord des ADPIC et

la santé publique — désormais connue sous le nom de « Déclaration de

Doha ». Cette déclaration plaçait fermement la protection de la santé

publique devant celle des intérêts commerciaux privés, affirmant notamment

le droit des pays de prendre si nécessaire des mesures pour déroger aux

brevets, dans le but de protéger la santé publique et de promouvoir l’accès

aux médicaments pour tous.

La Déclaration de Doha réaffirme certains assouplissements à l’Accord

sur les ADPIC, notamment :

Le droit des pays d’accorder à leur discrétion une licence obligatoire (voir

glossaire page 11), et non seulement en situation d’urgence.

Le droit des pays de déterminer eux-mêmes ce qui constitue une

urgence nationale ou une situation d’urgence extrême, auquel cas la procé-

dure à suivre pour délivrer une licence obligatoire est facilitée et accélérée.

Quelques pays ont commencé à se prévaloir des flexibilités réaffirmées à

Doha. Toutefois, les pays riches exercent des pressions énormes sur les pays

en développement pour que ceux-ci acceptent des propositions à l’occasion

de négociations multilatérales, régionales et bilatérales qui limiteraient leur

capacité de mettre en œuvre la Déclaration de Doha et de protéger la santé

publique. Les pays des Amériques subissent tout le poids de ces pressions.

À titre d’exemple, les États-Unis ont signé une entente bilatérale avec le

Chili et négocient actuellement un accord régional avec cinq pays d’Amérique

centrale (le Costa Rica, le El Salvador, le Honduras, le Guatemala et le

Nicaragua), connu sous le nom de l’Accord de libre-échange de l’Amérique

centrale (CAFTA), dont l’issue est prévue pour la fin de 2003. On vante ces

ententes comme des modèles souhaitables pour la Zone de libre-échange

des Amériques (ZLEA) qui sera en vigueur à l’échelle des trois Ameriques.1

À ce jour, il s’agit de la tentative la plus ambitieuse d’affaiblissement de la

Déclaration de Doha jamais entreprise à l'échelle des trois Amériques.

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Mai 2000—Avril 2003

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209 $295 $350 $ 347 $ 201 $

727 $

Détail : Janvier 2001—Avril 2003

médicament générique

médicament de marque

Les effets de la concurrence des génériquesUne trithérapie antirétrovirale (ARV) de première ligne : stavudine (d4T) + lamivudine (3TC) + nevirapine (NVP). Les prix les plus bas au monde par patient, par année (en $US)

1 À cause de l’absence de transparence dans les négociations, l’avant-projet de la CAFTA n’apas été rendu public; il est par conséquent impossible de fournir une analyse éclairée desdispositions sur la propriété intellectuelle qu’il renferme. Les dispositions à cet égard con-tenues dans d’autres ententes bilatérales du même type (p. ex. l’accord entre les États-Uniset Singapour) sont explicitement ADPIC-plus et analogues à celles qui sont prévues dansl’Accord de la ZLEA. On peut donc supposer sans craindre de se tromper que les mêmesdispositions sont proposées dans la CAFTA. Même si on réussissait à exclure ces dispositionsde la ZLEA, les pays d’Amérique centrale pourraient être liés, dès décembre 2003, par desrègles plus strictes que les normes précisées en vertu des ADPIC, dans l’éventualité où l’issuedes négociations respecte l’échéancier prévu.

2

3O N N E N É G O C I E PA S L A S A N T É D A N S L A Z L E A !

La Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA) désigne une proposition

d’accord commercial entre 34 pays d’Amérique du Nord, d’Amérique cen-

trale, d’Amérique du Sud et des Caraïbes, à l’exception de Cuba. Si elle est

adoptée, la ZLEA deviendra la plus vaste « zone de libre-échange » au

monde, un marché de 13 trillions de dollars américains comptant plus de

800 millions de personnes. Les négociations en vue d’arriver à cet accord

ont été lancées en avril 1998 et devraient aboutir en 2005.

L’avant-projet de l’Accord de la ZLEA contient un ensemble de proposi-

tions renfermant entre autres des dispositions relatives aux droits de pro-

priété intellectuelle, aux services, aux investissements, à l’agriculture et à l’ac-

cès aux marchés. Neuf groupes de négociations participent à la rédaction du

texte de l’entente, dont un chargé de la propriété intellectuelle.2

Au fil des négociations portant sur la propriété intellectuelle, il est devenu

apparent que les États-Unis exerçaient des pressions pour élargir la protection

qu’offrent les brevets sur les médicaments détenus par les sociétés pharmaceu-

tiques créatrices (qu’on désigne parfois par le terme « médicaments de marque

déposée ») et réduire les droits des pays de la région relativement aux mesures

nécessaires pour protéger la santé publique. En d’autres termes, les États-Unis

tentent d’imposer des normes qui dépassent largement les exigences spécifiées

dans l’Accord sur les ADPIC .3 Voici quelques exemples de ces propositions :

Restreindre de façon radicale les circonstances dans lesquelles il est pos-

sible d’accorder des licences obligatoires, alors l’Accord des ADPIC n’inclut

pas de telles limites et que la Déclaration de Doha, adoptée par tous les

États Membres de l’OMC, stipule que chaque pays « a la liberté de détermi-

ner les motifs pour lesquels de telles licences sont accordées ». À titre d’exem-

ple, les propositions contenues dans le texte de l’avant-projet de la ZLEA

restreindraient l’octroi de licences obligatoires aux « situations d’urgence

nationale » ou à d’autres situations d’urgence extrême, et ce, au sein du

secteur public exclusivement. Conséquemment, les pays n’auraient plus le

droit d’accorder une licence obligatoire en vue de contrebalancer le prix élevé

des médicaments et ainsi remédier au problème de l’accès ou de stimuler la

concurrence dans le secteur privé de manière à favoriser un accès accru aux

médicaments essentiels protégés par un brevet.

Prolonger la durée des brevets au-delà des vingt ans prévus en vertu

des ADPIC. Cette mesure prolongerait le monopole dont jouissent les déten-

teurs de brevets et retarderait encore davantage la possibilité de recourir aux

médicaments génériques.

Attribuer aux organismes de réglementation pharmaceutique un nouveau

rôle de « police des brevets ». Ces organismes sont normalement chargés de

garantir la sécurité et l’efficacité des médicaments sans toutefois détenir de

mandat en ce qui a trait aux brevets. Les règles proposées obligeraient ces

organismes à tenir compte du statut des médicaments relativement aux

brevets avant d’autoriser les fabricants de génériques à commercialiser leur

produit. Cette mesure pourrait mener à l’application de brevets nuls étant

donné que les organismes de réglementation ne sont pas en mesure de

vérifier si un brevet est valable ou non.

Accorder des droits exclusifs sur les données pharmaceutiques qui sont

communiquées aux organismes de réglementation. Puisque les fabricants de

médicaments génériques dépendent sur ces données pour être en mesure

de démontrer que leur produit est sûr et efficace, ce droit à l’exclusivité

retarderait considérablement l’introduction des génériques même dans les

cas où les brevets ne posent pas d’obstacle.

Parmi les autres motifs d’inquiétude que soulève le texte de l’Accord de la

ZLEA, soulignons le fait que, contrairement à ce qui est spécifié dans la

Déclaration de Doha, le traité pourrait limiter l’importation parallèle au territoire

même de la zone, ce qui aurait pour effet d’empêcher les pays de la ZLEA de

faire le tour du marché international pour importer des médicaments au prix

le plus avantageux. En outre, l’avant-projet comprend une proposition visant à

interdire l’exportation de médicaments produits sous licence obligatoire, alors

que l’Accord sur les ADPIC le permet, jusqu’à un certain point.

Ces propositions, décrites par les experts comme des dispositions

« ADPIC-plus »4 soumettraient les pays des Amériques au régime le plus

contraignant et onéreux de toute la planète. Un pays moins avancé comme

Haïti serait forcé d’adopter des règles strictes en matière de brevets, et ce,

même si la Déclaration de Doha permet aux pays les moins avancés (PMA)

de ne pas imposer de brevets sur les médicaments avant 2016. Une fois

signé, l’accord lierait les 34 pays sans exception et aurait préséance sur

l’Accord sur les ADPIC et la Déclaration de Doha.

2 Ces groupes de négociations se rencontrent à tous les mois à Puebla au Mexique. Deplus, un comité des négociations (regroupant les vice-ministres du commerce), co-présidépar le Brésil et les États-Unis, se réunit sur une base régulière; quant aux ministres duCommerce des pays respectifs, ils se rencontrent annuellement. Parmi les rencontres lesplus importantes à venir, soulignons la VIIIe Rencontre ministérielle prévue les 21 et 22novembre 2003 à Miami et la IXe Rencontre ministérielle, devant clore le processus, quise tiendra au Brésil en 2004.

3 Les objectifs de négociation des États-Unis en matière de propriété intellectuelle ont étérendus publics et sont affichés à l’adresse http://www.ustr.gov/regions/whemisphere/intel.pdf

4 Prendre note que l’expression « ADPIC-plus » est un terme non technique, qui désignetoute disposition relative à la propriété intellectuelle plus stricte que les exigences pré-cisées dans l’Accord sur les ADPIC. Selon l’OMS, « étant donné que les incidences desprescriptions de l’Accord sur les ADPIC sur la santé publique n’ont pas encore étépleinement évaluées, l’OMS recommande aux pays en développement de se montrerprudents lorsqu’ils envisagent d’adopter une législation allant au-delà de ce qui estprévu par l’Accord sur les ADPIC. » (Perspectives politiques de l’OMS sur les médica-ments, no. 3, mars 2001.)

La zone de libre-échangedes Amériques (ZLEA)

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2001

Une volontaire de MSF examine des enfantspour des signes de malaria en Colombie.

L E S M É D I C A M E N T S N E S O N T PA S U N L U X E !4

Quel est l’enjeu pour les peuples des Amériques?

Une femme atteinte du VIH rencontreun volontaire de MSF à la pharmaciede l’hôpital Roosevelt à Guatemala Cityafin de recevoir son traitement ARV.

La crise du VIH/sida et les disparités énormes

entre pays riches et pays pauvres en matière

d’accès aux médicaments constituent l’illustration

la plus frappante de l’enjeu des négociations

de la ZLEA pour les peuples des Amériques. Cet

exemple permet de démontrer à quoi ressemblera

la situation au début de 2005 au moment où

tous les nouveaux produits pharmaceutiques pour

des maladies endémiques dans la région telles

que la maladie de Chagas, la malaria et la leish-

maniose seront protégés par des brevets sous

l’Accord sur les ADPIC. (En Amériques, Haïti devrait

constituer une exception puisqu’il est classé comme

étant un PMA.)

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5O N N E N É G O C I E PA S L A S A N T É D A N S L A Z L E A !

5 Centers for Disease Control and Prevention (CDC). HIV/AIDS Surveillance Report 2001;13 (no. 1) : 1 - 41

6 L’Initiative « Accélérer l’accès » (AAI) a été mise sur pied en mai 2000 par BoehringerIngelheim, Bristol-Myers Squibb, GlaxoSmithKline, Merck et Roche, en collaboration avec ONUSIDA, l’Organisation mondiale de la santé, la Banque mondiale, l’UNICEF et leFNUAP. Abbott Laboratories s’est joint par la suite. Voir http://www.unaids.org/acc_access/index.html.

7 Merck a une politique distincte de fixation des prix pour les pays à indice moyen dedéveloppement ayant un taux de prévalence du VIH/sida de 1 % chez la populationadulte, et ceux ayant une prévalence inférieure à 1 %. Roche a une politique spécifiquepour les pays de revenu intermédiaire à faible, suivant la classification de la Banquemondiale. Toutes les autres sociétés négocient leurs prix « au cas par cas » avec les paysles moins avancés et les pays africains à l’extérieur de la région subsaharienne. VoirDémêler l’écheveau des réductions de prix. Un guide des prix pour l’achat des ARVspour les pays en développement, 4e édition, 24 avril 2003, Médecins Sans Frontières(MSF). http://www.accessmed-msf.org/documents/FRENCH15thMay2003.pdf

8Les négociations incluaient aussi des diagnostiques clés pour le VIH. Voir http://www.paho.org/English/DD/PIN/pr030612.htm

Ces deux enfants du Hondurassont infectés par le parasitecausant la maladie de Chagas.En Amérique latine, 100 millionsde personnes sont à risqued’être infectées.

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Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 1,9 million de personnes

vivent avec le VIH/sida en Amérique latine et dans les Caraïbes. Les Caraïbes

sont la deuxième région la plus touchée dans le monde après l’Afrique subsa-

harienne. De plus, l’épidémie du sida exacerbe d’autres maladies dans la

région, notamment la tuberculose.

Dans les pays riches comme les États-Unis et le Canada, les médica-

ments antirétroviraux (ARV) prolongent et améliorent la vie des personnes

vivant avec le VIH/sida; ils ont permis de réduire de plus de 70 % les décès

associés à cette maladie.5 Or dans les pays en développement des

Amériques, des centaines de milliers de personnes atteintes n’ont pas accès

à ces médicaments qui pourraient leur sauver la vie, tout simplement parce

qu’elles n’ont pas les moyens de les acheter.

Les pays d’Amérique latine sont déjà désavantagés en matière d’accès

aux médicaments abordables. Ces dernières années, par l’intermédiaire d’un

programme appelé Initiative « Accélérer l’accès », la plupart des sociétés créa-

trices ont réagi à la concurrence générique et aux pressions du public en

adoptant des politiques différentielles de fixation des prix pour les antirétrovi-

raux dans les pays en développement.6 Dans la plupart des cas, toutefois, les

pays d’Amérique latine ont été laissés pour compte.

Alors que les sociétés pharmaceutiques créatrices ont radicalement baissé

les prix dans les pays les moins avancés et en Afrique subsaharienne, seules

Merck et Roche ont établi des prix différentiels pour les pays en développe-

ment à moyen revenu.7

Toutefois, l’accès aux médicaments génériques a récemment entraîné

une baisse des prix en Amérique latine. En juin 2003, l’Organisation

panaméricaine de la santé (OPS) a annoncé la conclusion de négociations

sur les prix entre dix pays d’Amérique latine (Argentine, Bolivie, Chili,

Colombie, Équateur, Mexique, Paraguay, Pérou, Uruguay et Venezuela),

lesquelles touchaient également l’industrie des génériques. La concurrence

générique a provoqué une chute du coût annuel du traitement de première

intention, le faisant passer d’une fourchette de 1000 $US à 5000 $US à une

fourchette de 350 $US à 690 $US. Aucune société créatrice fabricant des

ARV, à l’exception de Abbott Laboratories, n’était disposée à proposer un prix

régional commun et toutes se sont retirées des négociations.8 Le fait que cer-

tains médicaments soient protégés par des brevets dans certains pays n’a

pas empêché les gouvernements concernés de mener leurs négociations à

terme et de signer une entente susceptible de leur faire épargner, au total,

une somme évaluée à 120 millions $US par année, à condition qu’ils puis-

sent jouir d’instruments favorables aux licences obligatoires.

La concurrence générique a été la force la plus importante, sûre et puis-

sante afin de de réduire considérablement les prix des médicaments. Si la

ZLEA raffermit les protections accordées aux brevets, elle détruira la

dynamique de concurrence générique qui a jusqu’ici permis de faire chuter

les prix des ARV dans certains pays de revenu faible ou intermédiaire. Un

accord commercial renfermant des dispositions ADPIC-plus risque d’avoir un

impact catastrophique sur la vie de millions de personnes vivant avec le

VIH/sida et d’autres maladies.

L E S M É D I C A M E N T S N E S O N T PA S U N L U X E !6

Exem

ples

Au Guatemala, 67 000 personnes – dont 4800 enfants – vivent avec le

VIH/sida.9 C’est un pays dans lequel on accorde peu d’attention à cette mal-

adie. Il est possible de se procurer des antirétroviraux, mais leur prix est telle-

ment élevé que la vaste majorité des patients ne peuvent se les acheter. Le

traitement coûte environ 320 - 800 $US par mois, alors que le salaire men-

suel moyen se situe autour de 160 $US. MSF traite actuellement près de

400 patients dans les hôpitaux de Guatemala et de Coatepeque et prévoit

doubler ce nombre l’an prochain.

Le fait que les ARV ne sont pas protégés par un brevet au Guatemala

permet à MSF de recourir à des médicaments génériques dans ses pro-

grammes. Il y a an à peine, la différence entre ce que payait MSF pour les

médicaments génériques et ce que payait le gouvernement pour les médica-

ments de marque était de l’ordre de 75 % à 99 %. Même si, au cours de la

dernière année, le prix des médicaments originaux a diminué radicalement

en raison de la concurrence générique, ceux-ci coûtent en général deux à

cinq fois plus chers que les médicaments génériques de qualité (voir le

tableau à la page 7). Si le gouvernement lançait un programme de traitement

national en utilisant des médicaments génériques, il aurait le droit, en vertu

des lois actuelles, d’acheter les médicaments génériques abordables dont

MSF se sert actuellement. Or si la ZLEA impose de nouvelles règles plus

Guatemala

Cette femme est candidate pourrecevoir une thérapie antirétrovirale(ARV) grâce au programme de MSF au Guatemala. Son nom est surla liste d’attente depuis 11 mois.

« La situation relative à l’accès aux médicaments au

Guatemala est terrible, atroce même. En ce qui

concerne le VIH/sida, environ 1500 personnes sui-

vent un traitement antirétroviral à l’heure actuelle et

un tiers d’entre elles sont soignées par MSF. Nous

achetons des médicaments génériques de qualité.

S’il fallait qu’on nous retire la possibilité d’acheter

ces derniers, traiter les patients vivant avec le

VIH/sida deviendrait une tâche impossible dans ce

pays. Si on ne disposait que des médicaments de

marque, pratiquement aucun patient ne pourrait

recevoir de traitement. »

Luis VillaChef de missionMSF au Guatemala

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7O N N E N É G O C I E PA S L A S A N T É D A N S L A Z L E A !

Un docteur de MSF examine unhomme atteint du VIH, au Guatemala.

rigoureuses, l’accès à ces médicaments sera beaucoup plus restreint et les

budgets de santé déjà grevés ne suffiront plus pour couvrir les dépenses.

Les brevets ne sont pas le seul mécanisme par lequel la ZLEA pourrait

limiter l’accès aux médicaments. En avril 2003, de fortes pressions pour

adopter les normes américaines en matière de protection des données phar-

maceutiques ont été exercées sur le gouvernement guatémaltèque qui a

établi un décret modifiant sa loi sur la propriété intellectuelle. Ce décret

accorde aux sociétés pharmaceutiques créatrices une exclusivité de cinq ans

sur les données d’essai qu’elles doivent fournir en vue de faire approuver un

médicament. Cela se traduit par un délai automatique de cinq ans pour les

médicaments génériques, même si les produits en question ne sont pas

brevetés. Pour des milliers de Guatémaltèques vivant avec le VIH/sida, ces

cinq années sans accès à un traitement ARV abordable pourraient faire toute

la différence entre la vie et la mort. De concert avec les groupes de la

société civile guatémaltèque, MSF exhorte le gouvernement à révoquer le

décret et à abolir le principe d’exclusivité sur les données, afin de promouvoir

la concurrence générique et améliorer l’accès à des médicaments de qualité.

À l’heure actuelle, le Guatemala est le seul pays d’Amérique centrale à

accorder cette période de cinq années de protection exclusive sur les don-

nées d’essai. Or la ZLEA risque d’étendre une telle disposition à tous les pays

des Amériques liés par l’accord.

9 ONUSIDA, 2002.

10 GlaxoSmithKline offre la même combinaison à 329 $US/an aux pays les moins avancés(indice de l’ONU), aux pays de l’Afrique subsaharienne et aux pays éligibles en vertu del’Initiative « Accélérer l’accès ». Bien que le Honduras et le Guatemala soient sur la listedes pays désignés par cette dernière (selon le site Web de l’ONUSIDA), ils ne jouissentpas de ce prix.

11 Bristol-Myers offre le même médicament à 55 $US/an aux pays de l’Afriquesubsha-rienne, mais exige de négocier ses prix « au cas par cas » avec les autres paysen développement par l’intermédiaire de l’Initiative « Accélérer l’accès ».

Prix en dollars américains payé annuellementpar patient pour des médicaments génériques etdes médicaments de marque au Guatemala

Nom du médicament AZT+3TC d4T (40 mg)

Prix exigé par les fabricants 4198 5271de médicaments de marque juillet 2002

Prix exigé par les fabricants 68610 27011

de médicaments de marque juillet 2003

Prix exigé par les fabricants 352 53de médicaments génériquesjuillet 2003

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L E S M É D I C A M E N T S N E S O N T PA S U N L U X E !8

L’accès facile aux médicaments abordables peut permettre aux programmes

de traitement du VIH/sida établis par les pays concernés d’atteindre des

résultats spectaculaires. En recourant à la production et à la concurrence

générique pour fournir des médicaments de qualité à petit prix, le pro-

gramme national de lutte contre le sida au Brésil garantit l’accès au traite-

ment pour tous les Brésiliens et Brésiliennes vivant avec le VIH/sida. Si la

ZLEA avait été en place, au moment où une loi sur l’accès a été promulguée

par décret présidentiel, il aurait été impossible d’instaurer ce programme et le

Brésil n’aurait jamais connu pareille réussite : 90 000 décès associés au sida

évités, 60 000 cas de sida évités et 358 000 hospitalisations reliées au sida

évitées entre 1996 et 2002, des économies pour les gouvernements de plus

de 2 milliards $US durant la même période.12

Les militants anti-sida brésiliens sont très inquiets des conséquences

négatives qui découleront des propositions américaines sur la propriété intel-

lectuelle pour la ZLEA.

12 Paulo R. Texeira, Marco Antonio Vitoria, Jhoney Barcaralo. « The Brazilian Experience inProviding Universal Access to Antiretroviral Therapy ». J.P. Moati, dir. Economics of AIDSand Access to HIV/AIDS Care in Developing Countries. Issues and Challenges. Paris,ANRS/Agence nationale de recherche sur le sida, 2003, p. 80.

« Mon pays doit être capable d’émettre des

licences obligatoires quand il juge que cela est

nécessaire, pour que la population puisse accéder

aux médicaments dont elle a besoin; aucun accord

commercial, y compris celui de la ZLEA, ne doit

l’empêcher de le faire. Actuellement, notre pro-

gramme national de lutte contre le sida distribue

gratuitement des antirétroviraux à 115 000 person-

nes. Les nouveaux médicaments dont certains

d’entre nous avons besoin sont déjà très chers; les

licences obligatoires font certainement partie de la

seule solution possible pour que le programme

brésilien continue à fonctionner. La santé est un

droit fondamental pour tous les êtres humains;

aucun accord commercial ne doit primer sur elle. »

Jorge BeloquiMilitant anti-sidaGrupo de Incentivo a Vida (GIV)São Paulo

BrésilLors de la Journée mondiale du sida, des militants anti-sidacélèbrent les 90 000 décès qui ont été évités grâce au pro-gramme antirétroviral au Brésil.

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9O N N E N É G O C I E PA S L A S A N T É D A N S L A Z L E A !

Pérou

Une mère amène sa fillette quisouffre de leishmaniose au centrede santé de MSF au Pérou afin de recevoir des soins.

Environ 76 000 personnes vivent avec le VIH/sida au Pérou,13 mais

seulement 2 % d’entre elles ont accès aux ARV. Le traitement coûte en

moyenne 1100 $US par personne par an, soit l’équivalent du revenu

annuel moyen dans ce pays.

MSF administre deux programmes de prévention du VIH/sida et de

soins aux malades, l’un au sud de Lima dans un bidonville et l’autre à la

prison de Lurigancho. En vue d’aider les patients à accéder aux ARV qui pro-

longent la vie, l’organisme soutient également un groupe appelé Colectivo

Para la Vida [Collectif pour la vie], un regroupement d’ONG péruviennes et

de groupes de soutien, qui travaillent à accroître l’accès aux médicaments

essentiels, incluant les ARV. MSF prévoit introduire la thérapie ARV au sein

de ses projets d’ici 2004.

Les antirétroviraux génériques pénètrent progressivement le marché

péruvien et concurrencent les médicaments de marque; cela n’est toutefois

possible que parce que très peu de médicaments sont brevetés au Pérou.

Depuis que les pays de la région andine ont révisé leur législation afin de se

conformer aux normes établies par les ADPIC, les fabricants font des deman-

des de brevet pour chaque nouveau médicament arrivant sur le marché, telle

la combinaison AZT + 3TC commercialisée en 1998 par GlaxoSmithKline sous

l’appellation Combivir®. En vertu de la législation actuelle dans les pays

andins, le Pérou aurait un recours si Glaxo demandait un prix trop élevé pour

son médicament. Selon les règles actuelles, il suffit pour un pays d’invoquer

l’intérêt national et d’ordonner au bureau des brevets d’octroyer une licence

obligatoire aux autres fabricants capables de produire le médicament à un

prix moins élevé. Si l’avant-projet d’Accord de la ZLEA est accepté, il devien-

dra impossible de recourir à ce mécanisme tout simple.

13 Ministère de la Santé, 2001.

« Je veux être là pour voir grandir mon fils, le voir

aller à l’école, être présente le jour de sa première

communion, danser avec lui lorsqu’il fêtera ses 18

ans. Ces bébés, ils ne savent pas de quoi ils sont

atteints [VIH/sida], ils ont le droit de continuer à

vivre, ils veulent vivre. Je voudrais avoir accès aux

meilleurs médicaments, mais les antirétroviraux

sont trop chers pour moi. »

Veronica30 ans, une patiente de MSF à Lima au Péroudont le mari et le filsvivent eux aussi avec le VIH/sida

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erge

Sib

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001

10 L E S M É D I C A M E N T S N E S O N T PA S U N L U X E !

Certains prétendent que l’octroi de brevets pour protéger les innova-

tions de l’industrie pharmaceutique est le meilleur moyen de sti-

muler la recherche et le développement en vue de mettre au point de

nouveaux médicaments et technologies de la santé. Les brevets con-

stituent en effet un facteur dans un système complexe susceptible

de motiver les investissements dans la recherche dans certaines cir-

constances, c’est-à-dire dans les cas où l’on peut s’attendre à un bon

rendement du capital investi. Or qu’en est-il des maladies telles la

dengue, la leishmaniose, le trachome ou la maladie de Chagas

touchant des personnes n’ayant aucun pouvoir d’achat ou très peu?

La trypanosomiase américaine ou maladie de Chagas tue envi-

ron 50 000 personnes annuellement sur le continent américain. On

estime que 18 millions de personnes en sont atteintes et qu’envi-

ron 100 millions de personnes sont à risque d’être infectées dans

21 pays d’Amérique central et du Sud. Cela représente 25 % de la

population de l’Amérique latine. En Bolivie, par exemple, 3,5 mil-

lions de personnes, soit la moitié de la population, sont à risque de

contracter la maladie; la maladie de Chagas est la 4e cause de

décès chez les 15 à 75 ans.

La maladie est causée par le Trypanosoma cruzi, un parasite

protozoaire transmis aux humains par un insecte suceur de sang

qui vit dans le murs et les toits de boue et de paille des habitations

que l’on retrouve souvent dans les zones pauvres des campagnes

et dans les bidonvilles de l’Amérique latine. La maladie peut aussi

se transmettre par transfusion sanguine et de la mère à l’enfant

durant la grossesse.

Il n’existe aucun traitement pour le stade chronique de la mal-

adie, laquelle continue à handicaper et à tuer des gens en pleine

maturité. Une enquête sur les principales sociétés pharmaceu-

tiques effectuée en 2001 démontre qu’un seul fabricant sur onze

travaillait actuellement à la mise au point d’un médicament contre

la maladie de Chagas et que, depuis les cinq dernières années,

aucun n’avait commercialisé de produit visant à la traiter.

Certains négociateurs de la ZLEA cherchent à raffermir les

mécanismes de protection de la propriété intellectuelle en prétex-

tant que ceux-ci créeront des incitatifs à la mise au point de nou-

veaux médicaments. Or tout indique qu’en l’absence de marché

lucratif, le durcissement des normes de protection fera augmenter

les prix sans pour autant stimuler la recherche nécessaire concer-

nant des maladies comme la maladie de Chagas. MSF coordonne

trois projets pour lutter contre la maladie de Chagas, soit en

Bolivie, au Guatemala et au Nicaragua.

Des mesures rigoureuses de protection des brevets ne sont-elles pasessentielles pour assurer la mise au point de nouveaux médicaments?

En tant qu’organisme humanitaire, Médecins Sans Frontières(MSF) est témoin privilégié des conséquences néfastes qu’en-traînent les mécanismes rigoureux de protection de la pro-priété intellectuelle dans les pays en développement; lorsqueles prix des médicaments sont élevés, les personnes qui enont besoin n’y ont pas accès. Les garanties comprises dans lesADPIC, et réitérées dans la Déclaration de Doha, procurent auxÉtats une soupape de sécurité nécessaire que la ZLEA risquede leur nier.

MSF demande aux pays des Amériques d’honorer

l’obligation de considérer la santé publique avant

les intérêts commerciaux en mettant en œuvre la

Déclaration de Doha et en se prévalant pleinement

aux flexibilités prévues dans l’Accord sur les ADPIC.

MSF demande aux pays des Amériques d’exclure

toute disposition relative à la propriété intellectuelle

de l’Accord de la ZLEA en vue de protéger la santé

publique et de promouvoir l’accès aux médicaments.

MSF demande à l’Organisation mondiale de la santé

(OMS), à l’Organisation panaméricaine de la santé

(OPS) et à ONUSIDA d’appuyer publiquement l’exclu-

sion de toute disposition concernant la propriété

intellectuelle de la ZLEA.

Conclusions et recommandations

11O N N E N É G O C I E PA S L A S A N T É D A N S L A Z L E A !

Glo

ssai

reQu’est-ce qu’un médicament générique?

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), un médicament générique

est un produit pharmaceutique destiné à être interchangeable avec le produit

original, et généralement fabriqué sans licence de la part de la société créa-

trice. Les produits génériques peuvent être commercialisés sous une dénomi-

nation commune ou approuvée plutôt que sous une dénomination spéciale.

Générique ne veut pas dire contrefait ou inférieur aux normes. Récemment,

l’OMS, en collaboration avec d’autres organismes des Nations Unies, a lancé

un projet visant à accorder une « préqualification » aux fabricants de médica-

ments antirétroviraux, y compris les fabricants de médicaments génériques,

en vue d’aider les pays en développement à évaluer la qualité des produits.

De nombreux antirétroviraux génériques ont ainsi été jugés par l’OMS con-

formes à des normes internationales de qualité; cette liste est régulièrement

mise à jour.

Qu’est-ce que l’Accord sur les ADPIC?

Adopté en 1995, l’Accord de l’Organisation mondiale du commerce sur les

aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce

(ADPIC) désigne une entente internationale sur la protection de différents

droits de propriété intellectuelle, dont les brevets, les droits d’auteurs et les

marques déposées. Il établit des normes minimales en matière de protection

de la propriété intellectuelle, auxquelles doivent se conformer tous les États

Membres de l’OMC en fonction d’un échéancier précis. La date limite a été

reportée en 2016 pour les pays les moins avancés, en vertu du paragraphe 7

de la Déclaration ministérielle sur l’Accord des ADPIC et la santé publique

(la « Déclaration de Doha »).

Qu’est-ce qu’une licence obligatoire?

L’octroi d’une licence obligatoire autorise la production ou l’importation d’un

médicament générique sans avoir à obtenir le consentement du détenteur

du brevet (en échange toutefois d’une compensation adéquate). Les pou-

voirs publics peuvent accorder une licence obligatoire en invoquant des

raisons diverses, dans l’intérêt de la santé publique ou en cas d’urgence

notamment, mais sans être limités à ces circonstances. Le recours à ce

mécanisme est autorisé dans l’Accord sur les ADPIC et considéré comme

une disposition allant de soi dans toute bonne législation relative à la pro-

priété intellectuelle. Les pays industrialisés comme les États-Unis y ont

recours de façon régulière. Les licences obligatoires sont l’un des méca-

nismes les plus utiles pour favoriser la concurrence générique.

Qu’est-ce que l’importation parallèle?

L’importation parallèle est un mécanisme qui permet à un pays de « faire le

tour des marchés » pour trouver un médicament de marque au meilleur prix

possible, sans avoir à obtenir la permission du détenteur de brevet. Il s’agit

d’une mesure attrayante pour les pays en développement lorsque le même

médicament se vend à des prix différents d’un marché à l’autre. Plusieurs

pays européens, le Royaume-Uni par exemple, profitent largement du com-

merce parallèle pour réduire les dépenses globales liées aux médicaments.

L’importation parallèle ne concerne pas l’achat des médicaments génériques.

En quoi consistent les « stratégies visant à accélérer l’introduction des médicamentsgénériques »?

Pour vendre une version générique d’un médicament, le fabricant doit faire

subir différents tests à son produit en vue de le faire homologuer. La « dis-

position Bolar » est une stratégie destinée à accélérer l’introduction des

médicaments génériques, en permettant au fabricant de mener ces tests

avant l’expiration prévue du brevet. Le fabricant est alors en mesure de com-

mercialiser son produit dès que le brevet est échu. Sans cette disposition,

l’introduction d’un médicament générique pourrait être retardée de deux à

quatre ans suivant l’expiration du brevet.

Un technicien de laboratoire examinedes lamelles pour des parasites causantla malaria.

© R

emco

Boh

le

Les médicaments ne sont pas un luxe!On ne négocie pas la santé dans la ZLEA!

Photo couverture : © Serge Sibert 2001Au Pérou, un docteur de MSF examine des enfants afin de détecter des signes de leishmaniose, unemaladie infectieuse.

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MSF coordonne des projets dans 11 pays des Amériques — en Argentine, en Bolivie, au Brésil, en Colombie, en Équateur, au Guatemala, en

Haïti, au Honduras, au Mexique, au Nicaragua et au Pérou. Ses équipes dispensent des soins de santé primaires, des soins materno-infantiles,

de même que d’autres services, aux populations déplacées et sans abri et aux populations autochtones et elles soignent également les

personnes souffrant du VIH/sida, de la maladie de Chagas et d’autres maladies infectieuses.

Contactez Médecins Sans Frontières (MSF)

MSF est un organisme humanitaire médical indépendant œuvrant dans plus de 80pays; il dispense des secours d’urgence aux victimes de conflits armés, d’épidémies,de désastres naturels ou causés par l’être humain, de même qu’aux personnes n’ayantpas accès aux soins de santé en raison de leur marginalité sociale ou géographique.MSF a reçu le prix Nobel de la paix en 1999; la même année, l’organisme lançait sacampagne Accès aux médicaments essentiels, née de la frustration de ses équipesmédicales face à la difficulté croissante de traiter les patients en raison soit du prixexcessif des médicaments, soit de l’interruption de leur production, de leur inefficacitégrandissante ou, purement et simplement, de l’inexistence de traitement adéquat.

Pour plus d’information sur la ZLEA et la campagne Accès aux médicaments essentielsde MSF, visitez :

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