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Mise en pratique de l’approche de la sécurité humaine par le Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine Enseignements tirés du terrain Groupe Sécurité humaine, OCHA

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« Nous devons veiller à ce que les acquis d’aujourd’hui ne soient pas réduits à néant par les crises de demain. Ainsi, il faut qu’à tous les niveaux nos actions reposent

sur des stratégies axées sur les personnes, globales, adaptées aux contextes et préventives.

Telle est l’approche de la sécurité humaine. »

Ban Ki-moon, Secrétaire général des Nations Unies

Pour plus de renseignements sur la sécurité humaine et les projets financés par le Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine, consulter le site : www.unocha.org/humansecurity

Groupe Sécurité humaine Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) Nations Unies New York, NY 10017 États-Unis d’Amérique

Adresse électronique : [email protected]

13-43002

Mise en pratiquede l’approche de la sécurité humainepar le

Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine

Enseignementstirés du terrain

Groupe Sécurité humaine, OCHA

Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine Groupe Sécurité humaine OCHA

New York, 2013

Mise en pratiquede l’approche de la sécurité humainepar le Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine

Enseignementstirés du

Photos de couverture : Photos ONU

Introduction page 1

Le Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine page 2

Principes fondamentaux pour la promotion de la sécurité humaine page 3

Changements climatiques page 4

Consolidation de la paix page 9

Migrations page 14

Violence urbaine page 19

Réduction de la pauvreté page 24

Santé page 29

terrain

EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du 1

PNUD

« Guidée par les principes de la Charte des Nations Unies, l’approche axée sur la sécurité humaine souligne la nécessité d’un nouveau cadre combinant les programmes sur la paix et la sécurité,

le développement et les droits de l'homme d'une manière plus efficace, efficiente et préventive. »

Ban Ki-moon, Secrétaire général des Nations Unies

INTRODUCTION

Au cours des 13 dernières années, les projets financés par le Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine ont permis de tirer des enseignements importants concernant l’application de la sécurité humaine. Cette brochure souhaite présenter certains de ces enseigne-ments cruciaux et démontrer comment le concept de sécu-rité humaine peut donner lieu à des interventions efficaces, intégrées et orientées sur le terrain dans les situations de crises actuelles et émergentes. En se servant d’études de projets dans six domaines thématiques (changements cli-matiques, consolidation de la paix, migrations, violence ur-baine, pauvreté et santé), cette brochure montre comment des groupes de parties prenantes ont utilisé cette approche pour améliorer la survie, développer les moyens de subsis-

tance et renforcer la dignité des individus et des collectivités. Grâce à des stratégies axées sur les personnes, globales, adaptées au contexte et préventives, les projets financés par le Fonds d'affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine ont contribué à faire face à certaines des difficultés les plus généralisées et les plus graves aux-quelles se heurte la sécurité humaine dans les collectivités vulnérables. Les exemples thématiques présentés mettent en évidence la gamme de questions interdépendantes qui entrent en jeu dans la préservation de la sécurité humaine et viennent nous rappeler qu’elles sont mieux réglées par des interventions plus solides et mieux intégrées de la com-munauté internationale, des gouvernements et des acteurs locaux.

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EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du2

Le Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaineLe Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine a été créé en mars 1999. Grâce au finan­cement, dans 85 pays, de plus de 200 projets, y compris de projets régionaux, ce Fonds a joué un rôle de premier plan en impulsant des actions concrètes, basées sur le concept de sécurité humaine, qui ont contribué à renforcer la sécurité humaine des individus et des collectivités les plus vulné­rables de la planète.

Les projets financés par le Fonds d'affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine ont fédéré les compétences présentes dans le système des Nations Unies et donné aux organisations chargées de leur mise en œuvre les moyens pour s’attaquer aux menaces multidimension­nelles de grande ampleur qui pèsent sur les populations du monde entier. Ces projets offrent autant d’exemples de col­laborations multipartites réussies qui permettent d’étayer les mesures prises par les gouvernements pour répondre aux besoins des collectivités vulnérables, de mettre en évidence les carences institutionnelles qui empêchent de

remé dier correctement à des situations d’insécurité com­plexes, et de soutenir les mesures d'autonomisation et de renforcement des capacités permettant d'augmenter nette­ment la sécurité humaine des communautés et des person­nes les plus vulnérables.

Les projets sont choisis en fonction de leur aptitude à fournir des avantages concrets et durables aux personnes et collectivités menacées du point de vue de leur survie, de leurs moyens de subsistance et de leur dignité. Les autres critères sont : l’aptitude des projets à promouvoir une ré­ponse multisectorielle qui est pertinente dans un contexte donné, axée sur la personne humaine et qui privilégie la prévention; à favoriser les partenariats avec les autorités nationales et les acteurs locaux pour la conception et l’exé­cution des projets; et à combiner les mesures nécessaires de protection et d’autonomisation pouvant garantir l’adhé­sion locale et la viabilité à long terme.

À ce jour, ces projets ont contribué à reconstruire des collectivités dévastées par les guerres, protéger des popula­tions exposées à une extrême pauvreté, aux récessions éco­nomiques brutales et aux catastrophes naturelles, et à faire

À ce jour, le Fonds a financé plus de 200 projets dans plus de 80 pays à travers le monde.

Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine

EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du 3

face à la violence urbaine. D’autres ont permis de résoudre des problématiques complexes, telles que la traite des êtres humains, des armes et des substances illicites, de promouvoir la coexistence et le respect mutuel parmi et entre les commu­nautés, et de relever les défis interdépendants en matière de sécurité humaine dans des collectivités isolées.

Cette brochure vise à montrer comment la méthodolo­gie et les enseignements tirés des projets sur la sécurité hu­maine peuvent offrir des outils utiles pour évaluer et combat­tre les menaces existantes et émergentes contre la sécurité humaine. Dans chacun des six domaines thématiques de la brochure, la section sur l'intérêt que présente l’approche axée sur la sécurité humaine s'inspire de la gamme com­plète de projets mis en œuvre dans ce domaine. Les études de cas ont été choisies en fonction de leur aptitude à illustrer ces enseignements dans un contexte particulier et à montrer la notion de sécurité humaine à l’œuvre dans les différentes régions du monde.

Principes fondamentaux pour la promotion de la sécurité humaineGrâce à un mécanisme de protection et d’autonomisation, la sécurité humaine favorise des mesures axées sur l'être humain, globales, adaptées au contexte et privilégiant la pré vention, qui cherchent à réduire la possibilité de conflits, contribuent à surmonter les obstacles au développement et promeuvent les droits de l'homme à tous les niveaux.

Axée sur les êtres humainsLa sécurité humaine prend en compte le large éventail de conditions qui menacent la survie, les moyens de subsistance et la dignité des personnes, en particulier les plus vulnérables. L’approche soucieuse de la sécurité humaine favorise les sys­tèmes politiques, sociaux, économiques, environnementaux et culturels qui mettent les individus au centre et sont des éléments essentiels à la réalisation de la paix, du développe­ment et des progrès de l’humanité.

GlobaleEn comprenant comment une menace particulière peut af­fec ter négativement les libertés qui sont universelles et in­terdépendantes (liberté de vivre à l’abri de la peur, à l’abri

du besoin et dans la dignité), le concept de sécurité humaine induit des réponses globales, multisectorielles et concer­tées. Une telle démarche garantit la cohérence, élimine les doubles emplois et favorise des solutions intégrées, se tra­duisant par des améliorations plus efficaces et tangibles de la vie quotidienne des populations.

Adaptée au contexteReconnaissant que les causes et les manifestations des menaces varient considérablement au sein des pays et d’un pays à l’autre et à différents moments, le concept de sécurité hu­maine favorise des solutions qui sont ancrées dans les réalités loca les et se fondent sur les besoins, les fac­teurs de vulnérabilité et les moyens réels des gouvernements et des populations.

Centrée sur la préventionS’intéressant aux causes profondes d’une menace donnée, la sécurité humaine détermine les changements structurels (externes et internes) ainsi que com­portementaux qui sont nécessaires pour contribuer à atténuer l’impact des menaces actuelles et futures, et si possible les prévenir.

Protection (du sommet vers le bas) et autonomisation (à partir de la base)Les mécanismes de protection et d’autonomisation garan­tissent en outre l’élaboration de réponses appropriées à une menace donnée. En conjuguant la mise en place, du sommet vers le bas, de normes, processus et institutions — notam­ment des mécanismes d’alerte rapide, une bonne gouver­nance et des instruments de protection sociale — avec des processus participatifs qui donnent aux peuples une voix primordiale dans la définition et l’exercice de leurs liber­tés fondamentales et de leurs responsabilités, l'approche axée sur la sécurité humaine améliore les capacités locales, renforce les réseaux sociaux et assure la cohérence dans l’allocation des ressources et des politiques.

« Plutôt que de multiplier les actions des Nations Unies, la notion de sécurité humaine fournit à l’Organisation un mécanisme permettant de tirer parti de nos avantages comparatifs, de renforcer nos activités et redynamiser nos partenariats. »

Ban Ki-moon, Secrétaire général des Nations Unies

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ONU/Albert González Farran

Riposter aux conséquences multidimensionnelles des menaces liées aux changements climatiques

L’impact des changements climatiques sur les facteurs d’insécurité s'est révélé être l’une des problématiques les plus pressantes de notre époque. Les fluctuations du cli­mat, la dégradation de l’environnement et les conditions climatiques extrêmes perturbent les récoltes, épuisent les réserves halieutiques, érodent les moyens de subsistance, aggravent la propagation des maladies infectieuses, favo­risent les migrations et exacerbent la pauvreté. Par ailleurs, la convergence des variations climatiques, des tendances démographiques, des migrations et de l’urbanisation rapide

peut avoir des répercussions considérables sur la stabilité locale, nationale, régionale et internationale. De nos jours, l'élévation du niveau des mers menace de plus en plus la viabilité des établissements humains dans les régions de faible élévation, ce qui laisse présager d’énormes pertes humaines et économiques à mesure que ces niveaux conti­nuent d’augmenter.

L'évolution du climat et sa relation avec la sécurité hu­maine suscite un intérêt à de nombreux niveaux. Ces derniè­res années, les catastrophes naturelles ont causé plus de pertes en vies humaines et affecté plus de personnes que jamais auparavant. Rien qu’en 2011, on a recensé 302 ca­tastrophes naturelles qui ont affecté plus de 205 millions de

CHANGEMENTS CLIMATIQUES

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EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du 5

personnes à travers le monde et provoqué plus de 350 mil-liards de dollars des États-Unis de dégâts.

L'évolution du climat représente également un « multi-plicateur de risques » lorsque la perte de terres, conjuguée à la pauvreté persistante, aux déplacements de populations et à d’autres facteurs d’insécurité, déclenche une compé-tition pour l’accès à des ressources naturelles de plus en plus rares, ce qui peut entraîner des tensions sociales. Les pertes économiques et les décès liés aux change ments cli-matiques surviennent en majorité dans les régions vulné-rables, mais ils exercent aussi d’énormes pressions sur les systèmes sociaux et économiques de tous les pays. Certes, les groupes vulnérables sont plus particulièrement exposés aux risques, mais les menaces liées aux changements cli-matiques ont un impact sur les populations des pays déve-loppés comme des pays en développement, et pourraient mettre démesurément à contribution les ressources des États et des régions qui sont déjà fragiles ou en proie à des conflits.

La rapidité avec laquelle le climat évolue, ainsi que l’ampleur et la diversité de son impact sur les populations, nécessite une action immédiate de la part de la communauté internationale, des gouvernements nationaux et des popu-lations. La prise en compte du principe de sécurité humaine pour riposter aux changements climatiques et aux catas-trophes représente un pas important pour promouvoir des stratégies d’atténuation visant à réduire la responsabilité de l'homme en ce qui concerne les changements climatiques et l’élaboration des stratégies d’adaptation en vue de renfor-cer la résilience et la capacité des collectivités à gérer ces menaces de façon durable.

Intérêt que présente la notion de sécurité humaine face aux menaces liées au climatLes acteurs internationaux, nationaux et locaux peuvent mieux hiérarchiser les mesures à prendre à court et à long terme et déterminer les domaines où une collabora-tion accrue est nécessaire pour une action efficace. Bien adaptée aux défis multiformes, le concept de la sécurité hu-maine met en évidence les conséquences interdépendantes

et intersectorielles des changements climatiques et leur im-pact sur les différents domaines de la sécurité humaine. Une telle analyse améliore et élargit l’information nécessaire sur le niveau, les tendances et la répartition des risques et des facteurs de vulnérabilité aussi bien dans les pays qu’entre les pays. Elle permet également de différencier l'impact et de déterminer les lourdes conséquences des menaces liées au climat sur les diverses populations.

En plaçant les personnes au cœur de son concept, la sécurité humaine aide à évaluer les besoins, les facteurs de vulnérabilité et les capacités des populations et des collectivités de façon détaillée. Cela permet de comprendre plus finement les différences entre les groupes, les commu-nautés et les régions. De cette façon, des stratégies de pro-tection et d’autonomisation, plus ciblées et fondées sur des faits, peuvent être élaborées pour améliorer le bien-être des populations. Ces stratégies mettent l’accent sur l’élabora-tion de plans communautaires d’adaptation et d’atténuation destinés à pallier aux lacunes des stratégies nationales et internationales, à mobiliser les populations, à renforcer la résilience et à protéger les moyens de subsistance. De plus, des plans communautaires efficaces peuvent servir de base à des stratégies de réduction des risques de catastrophe de plus vaste portée pouvant être intégrées dans les plans na-tionaux de développement.

L’approche de la sécurité humaine offre un méca-nisme pouvant efficacement coordonner les réponses internationales, nationales et locales aux changements climatiques. Dans la mesure où la plupart des causes des changements climatiques dépassent la capacité de réaction individuelle et collective, les interventions internationales et nationales doivent cibler les causes profondes, recher-cher des stratégies concertées pour atténuer les impacts et maintenir l’engagement politique nécessaire pour faire face aux risques connexes. Les acteurs nationaux et locaux (et dans certains cas les acteurs internationaux) doivent s’atta-cher à améliorer les systèmes d’alerte rapide et élaborer des stratégies d’adaptation et de survie plus adaptées qui répondent aux besoins spécifiques et aux facteurs de vulné-rabilité des personnes sur le terrain. Un tel mécanisme de protection et d’autonomisation peut coordonner les efforts à tous les niveaux pour faire en sorte que les mesures axées

EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du6FAO

sur les acteurs et les communautés réduisent de façon plus efficace et efficiente les coûts humains, économiques et so­ciaux des catastrophes.

Dans ce domaine, les projets du Fonds d'affectation spé­ciale des Nations Unies pour la sécurité humaine ont révélé la complexité des effets, étroitement liés, que les change­ments climatiques et les catastrophes naturelles ont sur les êtres humains. En renforçant la capacité des collectivités à faire face et à réagir aux menaces liées au climat, ces projets s’attaquent simultanément aux facteurs d’insécurité alimen­taire, sanitaire et économique et contribuent à l’élaboration de mécanismes de riposte locale et na­tionale. Les propositions soumises au Fonds d'affectation spéciale des Na­tions Unies pour la sécurité humaine dans différentes régions du monde identifient de plus en plus les facteurs d’insécurité humaine liés au climat et à l’environnement comme une prio­rité pour l’action des Nations Unies1.

EXEMPLE PRATIQUELesotho

Renforcement des moyens de subsistance des populations rurales gravement touchées par la sécheresse induite par les changements climatiquesLes effets néfastes dus aux changements climatiques en­tra vent les progrès du développement au Lesotho dans plu sieurs domaines importants, notamment l’agriculture et la sécurité alimentaire, la réduction de la pauvreté, la ges­tion de l’eau, la santé publique et la réduction du risque de catastrophe. Près de 80 % de la population vit de l’agricul­

1 Certains des pays dans lesquels les projets ont été réalisés dans ce domaine thématique sont les suivants : Bolivie (État plu ri na­tional de), Grenade, Guatemala, Inde, Kenya, Lesotho, Mongolie, Ni ca ra gua, Pakistan, Pérou et Vanuatu.

ture, ce qui la rend particulièrement vulnérable aux aléas climatiques. En outre, étant donné que plus de 40 % de la population vit déjà en dessous du seuil de pauvreté, la dimi­nution de la productivité ainsi que la baisse persistante de la quantité et de la qualité des terres agricoles menacent de plonger davantage de personnes dans la pauvreté. Par ail­leurs, la fréquence croissante des sécheresses conjuguée à l’escalade des prix des denrées alimentaires et des produits de base exacerbent l’insécurité alimentaire et sanitaire, ag­gravant la situation des groupes vulnérables, notamment ceux qui sont tributaires de l’agriculture, les femmes et les enfants.

Afin de consolider les interventions nationales et de ren forcer la résilience communautaire face aux menaces com plexes induites par les changements climatiques au Le sotho, le projet vise à : i) améliorer la production végétale et la sécurité nutritionnelle; ii) protéger les enfants et les orphelins les plus vulnérables de la pauvreté et de l’insé­curité alimentaire; iii) renforcer la capacité des districts, des collectivités et des ménages à lutter contre l’impact de l’an­thrax sur l’agriculture; iv) améliorer les pratiques sanitaires; et v) renforcer la capacité des autorités publiques et des collectivités locales à s’adapter aux changements clima­tiques et à en atténuer les effets. Le projet a ainsi élargi les

EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du 7FAO

pratiques agricoles, renforcé l’accès à des denrées alimen­taires diversifiées, amélioré la sécurité sanitaire, consolidé les stratégies communautaires d’adaptation, renforcé la capacité nationale et la collaboration pour lutter contre les menaces liées au climat.

L’élaboration de réponses viables à long terme passe par une approche globale prenant en compte les liens d’in­terdépendance entre la productivité agricole, l’insécurité ali­mentaire et nutritionnelle, la mauvaise santé maternelle et infantile ainsi que l’insécurité économique. Le projet intègre de ce fait des activités visant à : améliorer les techniques agri coles et diversifier les produits alimentaires; former les professionnels de la santé, les parents et les dispensateurs de soins aux méthodes de nutrition et d’alimentation; éla­borer des programmes d’alimentation et de suppléments alimentaires pour les femmes enceintes ou allaitantes; et fournir aux jeunes, dans un cadre scolaire, une formation agricole et des compétences essentielles. La combinaison de ces interventions propose une réponse plus globale aux défis indissociables posés par les sécheresses récentes, amplifiant les avantages concrets pour les populations et favorisant ainsi la viabilité à long terme.

Un moyen essentiel pour réduire les effets nocifs des changements climatiques sur les êtres humains consiste à renforcer la résilience individuelle et communautaire tout en protégeant les moyens de subsistance qui sont particulière­ment vulnérables à l’évolution du climat. Dans cette pers­pective, le projet a favorisé l’agriculture de conservation, une technique d’adaptation bon marché pour les agriculteurs vulnérables au climat, qui offre des moyens de subsistance améliorés et durables tout en réduisant les coûts de pro­duction. Certes, l’agriculture de conservation ne représente qu’une stratégie d’adaptation parmi les nombreuses autres nécessaires pour protéger les moyens de subsistance ru­raux au Lesotho, mais le renforcement des capacités des petits exploitants agricoles s’est traduit par des avantages concrets dans le domaine de l’alimentation, de la santé et de la nutrition, renforçant la sécurité économique et environ­nementale des ménages et des collectivités et consolidant le secteur agricole en général. Par ailleurs, la réussite de cette stratégie communautaire d’adaptation donne à penser qu’elle pourrait être amplifiée en tant que stratégie géné­rale de réduction des catastrophes et de gestion des risques dans le cadre des plans nationaux de développement.

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Les stratégies communautaires d’adaptation efficaces reposent également sur une analyse détaillée, se traduisant par des réponses plus ciblées qui tiennent compte des dif­férences entre les communautés. L’agriculture de conser­vation constitue une stratégie pertinente pour les exploi­tants agricoles en milieu rural, mais d’autres moyens sont nécessaires pour faire face aux défis liés à l’alimentation, à la nutrition et à la pauvreté auxquels se heurtent les ména­ges ruraux dans l’ensemble du Lesotho. Étant donné que la plupart des familles ont accès à un petit lopin de terre situé près de leur maison, le projet leur a fourni une formation agricole de base pour leur permettre de créer des jardins potagers. Ceux­ci ont considérablement élargi l'accès à un plus grand nombre de produits alimentaires et ont amélioré leur disponibilité tout au long de l’année. Comme ces jar­dins contribuent efficacement à réduire l’insécurité alimen­taire et nutritionnelle, les écoles ont également mis en place des projets de jardins potagers, ce qui permet d’améliorer les résultats scolaires des enfants et de valoriser le capital humain à long terme.

Les initiatives de prévention efficaces, comme le dé­veloppement de systèmes d’alerte rapide, nécessitent la coopération entre les collectivités sur le terrain et les gou­vernements chargés d’institutionnaliser les interventions. Au Lesotho, un projet tente de donner aux populations les moyens de participer au système d’alerte rapide en leur fournissant les informations qui leur permettent d’évaluer les circonstances, de prendre des mesures collectives, de participer aux débats publics et d'avoir un rôle de premier plan dans les décisions qui touchent leur vie de tous les jours. De ce fait, le projet a mené de nombreuses campagnes publiques de sensibilisation et dispensé des formations en

vue de renforcer la capacité des populations à déterminer et dénoncer les problèmes pouvant affecter leur collectivité. Les collectivités locales, associées à des institutions locales réactives, jouent un rôle plus important et plus proactif dans la lutte contre les menaces à la sécurité humaine liées aux changements climatiques.

Ce projet a non seulement développé les moyens d’ac­tion des citoyens, mais il a aussi éliminé les lacunes asso­ciées au mécanisme de protection en vue de renforcer l’im­pact des stratégies d’atténuation et d’adaptation. Un réseau d’acteurs nationaux, comprenant notamment le Ministère de l’agriculture et de la sécurité alimentaire, le Ministère des ressources naturelles et le Bureau de coordination de l’alimentation et de la nutrition, favorise le partage des res­sources et les transferts de compétences entre leurs per­sonnels, améliorant ainsi l’efficacité de leurs efforts indivi­duels et collectifs. Cette collaboration a également permis d’établir des liens plus solides avec les collectivités locales. Les initiatives collectives des ministères ont encouragé une plus large participation et réduit la lassitude de la popula­tion. En fin de compte, cet engagement à travailler de façon concertée a amélioré la confiance des collectivités envers les autorités locales et nationales.

En appliquant une approche globale de sécurité humaine, le projet du Lesotho démontre la valeur ajoutée qu'ap porte la coordination des efforts entre secteurs connexes : davantage de résultats positifs, renforcement de l’efficacité et réduction du risque de délaisser certains secteurs ou régions. En outre, il met en évidence l’avantage de lier les approches commu­nautaires qui tirent parti des capacités existantes et réduisent leurs lacunes en les associant à des stratégies institutionnel­les fondées sur la collaboration et la cohérence.

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Transition vers la paix et le développement durablePlus de 1,5 milliard de personnes, soit une personne sur cinq dans le monde, continuent de vivre dans des zones en proie aux conflits et fragilisées. Alors même que des cessez-le-feu et des accords de paix marquent la fin d'affrontements violents, la période après un conflit demeure instable et, dans la plupart des cas, des tensions persistent entre les forces opposées. Après des situations de violence armée à grande échelle, les défis sont nombreux : déplacements internes de populations, flux de réfugiés, propagation de maladies infectieuses, manque d’accès aux denrées ali-mentaires et au logement, conditions socioéconomiques fragiles et tissu social déchiré. Sans un appui efficace du-rant la période suivant immédiatement un conflit, ainsi que tout au long de la transition vers la paix et le développe-

ment durable, de nombreuses sociétés sortant d’un conflit connaîtront pendant des décennies un cycle de conflits et d’instabilité, se traduisant par des coûts humains, sociaux et économiques considérables qui peuvent persister pendant des générations.

Les conditions politiques instables, les privations socio-économiques et la violence persistante constituent un en-semble complexe, menaçant pratiquement tous les aspects de la sécurité humaine. Les sources d’insécurité étant mul-tiples et liées, les initiatives de reconstruction au lendemain d'un conflit, ou de stabilisation d’un contexte fragile, doi-vent proposer des solutions qui soient à la fois globales et intégrées. Elles doivent aussi s’attaquer aux conséquences humaines de la violence et de la précarité — traumatismes, collectivités fragmentées, manque de confiance à l’égard des institutions, niveaux élevés d’anxiété et de peur, perte

UNOD

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consolidation de la paix

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EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du10

les efforts de protection comprennent la mobilisation de la société civile, des services de médiation et de réconciliation, l’élaboration de systèmes d’alerte rapide et la promotion de pratiques inclusives, y compris la prise en compte d'une démarche soucieuse d'égalité entre les sexes.

L’approche axée sur la sécurité humaine peut contri­buer à garantir l’efficacité de l’appui assuré par l’en­semble du système des Nations Unies. Elle y parvient en élaborant une intervention fondée sur les réalités du terrain et qui combine les différentes thématiques pour répondre à des priorités définies au plan local. Les besoins, les facteurs de vulnérabilité et les lacunes en matière de capacité sont constamment évalués et le plan d'action des Nations Unies est ancré sur une architecture de consolidation de la paix qui renforce les capacités locales et nationales.

Une partie non négligeable du financement du Fonds d'affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité hu­maine est consacrée à des projets dans des pays sortant d'un conflit ou fragilisés. Ces projets ont adop té une ap­proche multisectorielle, visant à promouvoir des solutions viables à long terme. Ils mettent l’accent sur le rétablisse­ment de la confiance à l’égard de l’action collective, le ren­forcement de la sécurité des citoyens, l’amélioration de la prestation et de l’accès aux services sociaux primordiaux, le rétablissement des moyens de subsistance et la promotion de la réconciliation des communautés2.

2 Des projets ont notamment été exécutés dans ce domaine thé­matique dans les pays suivants : Afghanistan, Bosnie­Herzégo­vine, Colombie, Ghana, Îles Salomon, Kosovo, Liban, Libéria, Né­pal, Ouganda, Philippines, République démocratique du Congo, République du Congo, République­Unie de Tanzanie, Sou dan, Sri Lanka et Timor­Leste.

de l’espoir et de l’investissement dans l’avenir —, conjoin­tement avec des mesures visant à rétablir la gouvernance, renforcer les institutions et redémarrer l’économie.

Malgré ces défis de taille, la transition d'une situation de conflit à une situation de paix et de développement offre des possibilités considérables de s’attaquer aux causes pro­fondes des conflits, de rétablir la confiance, de réduire les inégalités et de renforcer les relations entre l’État et la so­ciété. Enfin, lors de cette période critique et fragile, les droits des peuples aux libertés politiques, économiques, sociales et culturelles doivent être protégés pour que les sociétés puissent véritablement se relever au lendemain des conflits.

Intérêt que présente une approche axée sur la sécurité humaine pour la consolidation de la paixLes initiatives nationales de consolidation de la paix doi­vent être globales et inclusives. Une paix durable est su­bordonnée à la capacité des populations à vivre à l’abri de la peur, du besoin et de l’exclusion. La sécurité humaine traduit ces objectifs en interventions concrètes qui contribuent à rompre le cycle de la violence et favorisent la transition vers une paix durable et le développement. Elle y parvient par des mesures globales et intégrées résultant de l’évaluation centrée sur les besoins des personnes, des vulnérabilités ainsi que des capacités individuelles et collectives. Les ac­tions nationales visant à instaurer et à consolider la paix sont élaborées grâce à des processus participatifs auxquels participent de nombreux acteurs en réseau et rapprochent les décideurs des personnes qui sont les plus touchées par le conflit.

Les mesures d’autonomisation venant du terrain ins­taurant des partenariats avec les acteurs locaux amé­liorent l’efficacité des stratégies de protection mises en place par les autorités. Les partenaires locaux peuvent jouer un rôle de premier plan en promouvant la réconcilia­tion et la coexistence et en rétablissant la confiance envers les institutions. Ainsi, le mécanisme de protection et d’auto­nomisation représente un élément important de l’application de la sécurité humaine dans l’environnement au lendemain d'un conflit. Les stratégies d'autonomisation qui consolident

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EXEMPLE PRATIQUERépublique démocratique du Congo

Soutien aux initiatives d’autonomisation des communautés et à la consolidation de la paix en IturiEn dépit de ses abondantes res sources naturelles, de la ré silience et de l'esprit d’en­tre prise de sa population, la Ré publique dé mocratique du Congo a abordé les années 90 avec de faibles perspectives de paix et de développement à long terme. Le district de l’Ituri, dans le nord­est du pays, avait des possibilités particulièrement limitées. La présence de groupes armés résiduels, la persistance de la violence eth nique, le man­que d’infra struc tures et les déplacements massifs de populations ont dégradé les conditions politi ques et so­cioéconomiques né ces saires au relèvement à long terme. Parallèlement, l’Accord de paix global de 2006 et le processus de décentralisation ont ouvert une nouvelle possibilité de contribuer à atténuer les conséquences du conflit, améliorer l’accès aux services sociaux et les opportunités économiques et renforcer la sécurité humaine des populations en Ituri.

En s’attaquant aux causes et aux manifestations des défis complexes et interdépendants en Ituri, ce projet, qui s’est étendu sur deux ans à partir d’octo bre 2008, visait à : i) rétablir les moyens de subsistance et les moyens de pro­duction dans les zones les plus touchées par le conflit et les plus négligées; ii) appuyer les processus d’autonomisa­tion des collectivités; iii) améliorer la prestation et l’accès aux services sociaux de base tels que les services de santé,

d’éducation et d’approvisionnement en eau; et iv) promou­voir une culture de coexistence pacifique entre des collecti­vités divisées. Ce projet a réussi à redynamiser l’éco nomie locale; il a amélioré les possibilités d’emploi, enrichi la qua­lité et la prestation des services de base et renforcé les liens communautaires et économiques des zones les plus tou­chées par le conflit en Ituri.

Mettant à profit les contributions des collectivités par­ticipantes, les partenaires du projet ont cherché à créer un cadre de sécurité humaine qui appuie un processus mené à l'échelon local de transformation après un conflit. Une des principales priorités a consisté à tirer parti des capacités individuelles, institutionnelles et sociétales existantes. De ce fait, une des premières mesures a été de déterminer les compétences et les connaissances — dans les domaines de l’agriculture et de la construction, de la mécanique, de l’arti­sanat et de l’enseignement — et à offrir de nouvelles pos­sibilités aux personnes désireuses d’acquérir des capaci­tés supplémentaires. Cette approche a encouragé un solide engagement parmi de nombreux membres de la collectivité,

EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du12PN

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favorisé le sentiment de fierté et mis en place une solide base pour l’expansion d'activités génératrices de revenus.

Parallèlement, afin de mettre en commun les res­sources de différents secteurs, les partenaires ont déter­miné les articulations entre les domaines prioritaires et ont élaboré des solutions pour optimiser leur impact sur la sécurité humaine. Par exemple, les partenaires du pro­jet ont pris conscience qu’il était possible de renforcer la cohésion sociale en combinant des activités économiques et des initiatives favorisant la réconciliation entre les commu­nautés divisées en Ituri. Par conséquent, les actions visant à améliorer les activités agricoles ont été liées à la mise en place de marchés communs dans les principaux districts, ce qui s’est traduit par une plus grande coopération entre des groupes qui étaient auparavant en conflit. En outre, la croissance des activités économiques a induit suffisamment d’avantages dans les collectivités et a permis de réduire les tensions au niveau local.

À l’instar de nombreuses situations après un conflit, l’infra structure des services de base a presque entièrement disparu en Ituri, laissant les populations avec un accès

très limité aux centres médicaux, aux écoles et à l’eau potable. Grâce aux ac­tions collectives des organismes des Nations Unies, du Ministère et de la Di­rection des affaires sociales de l'Ituri, ainsi que des collectivités locales, trois centres de soins primaires ont été ré­novés et 10 centres de rattrapage ont été construits pour fournir des ser­vices intégrés de santé et d’éduca­tion à plusieurs districts. En outre, le projet a renforcé les compétences des enseignants, du personnel de santé et des professionnels de la santé des communautés. Plus important encore, les anciens enfants soldats et d’au­tres jeunes vulnérables ont bénéficié de l’accès à l’éducation de base par le biais de services non structurés, ce qui leur a permis de s’intégrer dans la société.

EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du 13

Ces processus participatifs d’autonomisation ont été ac­compagnés par un éventail de mesures de protection mises en place par les autorités et visant à éliminer les problèmes de sécurité publique qui entravaient le retour à une vie sociale et économique épanouie dans la région. Dans le cadre de l’une de ces initiatives, les partenaires ont assuré des forma­tions conjointes en vue d’améliorer les capacités technique, administrative et organisationnelle de la police nationale congolaise et la rénovation des postes de police de Bunia/Sukisa, Djugu et Mahagi. Grâce à des bâtiments fonctionnels, de meilleurs équipements et des compétences renforcées, la police a été en mesure d’offrir des services complets et spécialisés à la population locale, ce qui a considérablement amélioré la sécurité personnelle et communautaire.

En fin de compte, en s’attaquant à toute la gamme de facteurs d’insécurité auxquels étaient exposés les habitants et les collectivités en Ituri, ce projet a créé des mécanismes positifs d’adaptation pour toutes les couches de la popula­tion, en particulier les plus touchées par le conflit. Concrète­ment, ce projet a mis en évidence l’importance capitale des initiatives visant à instaurer et à consolider la paix au niveau des collectivités. Par le biais d’un mécanisme de protection et d’autonomisation à la fois complet et adapté au contexte, ce projet a consolidé les efforts de promotion de la paix et de la stabilité et redonné l’espoir aux collectivités qui sont toujours confrontées à des difficultés de taille.

Réalisation d’un consensus sur les avantages de l'approche axée sur la sécurité humaine

Avant le démarrage du projet, la notion de sécurité humaine était inconnue de la majorité des personnes vivant et tra­vaillant en Ituri, et la plupart des activités de développement étaient des interventions dans un seul secteur destinées à répondre à des besoins sociaux de base ou de sécurité publique. Au cours de la phase de développement du projet, les consultations participatives aux différents niveaux ont mis en évidence les lacunes de telles interventions et sensibilisé aux avantages de la mise en place d’un cadre intégré de sécurité humaine combinant les connaissances techniques et les capacités d’exécution d’un vaste réseau d’acteurs. Les membres de la collectivité non seulement ont déterminé leurs besoins, leurs facteurs de vulnérabilité et leurs capacités, mais ils ont collaboré avec les autorités locales et les organismes des Nations Unies à l’élaboration de stratégies de protection et d’autonomisation visant à renforcer leur résilience face aux difficultés actuelles et futures. À la fin du projet, les parties prenantes — autorités locales, partenai­res d’exécution et collectivités participantes — ont indiqué qu’elles appréciaient particulièrement l’approche globale et multisectorielle du projet; un bon nombre d’entre elles ont déclaré que le principe de sécurité humaine devrait orienter les futures interventions dans les situations au lendemain d'un conflit.

EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du1414

Protéger et rendre autonomes les réfugiés, les personnes déplacées dans leur propre pays, les migrants économiques et autres migrants

Une multitude de facteurs motivent la décision des person­nes de se déplacer. La plupart des personnes se déplacent pour améliorer leur situation économique, rechercher de nouvelles opportunités ou échapper à la pauvreté. D’au­tres se déplacent par nécessité ou y sont contraintes par suite d'une guerre, d'un conflit violent, d'abus des droits de l'homme, d’expulsion ou de discrimina tion. Les facteurs environnementaux ont aussi une incidence sur les tendances des migrations, comme on peut le constater dans les situa­

tions de catastrophes naturelles aux effets particulièrement perturbateurs de ces dernières années.

En 2010, on comptait environ 214 millions de migrants internationaux et 740 millions de migrants internes dans le monde. Parmi ces personnes, plus de 70 millions étaient des migrants forcés, déplacés par les conflits, les troubles politiques, la violence et les catastrophes, y compris environ 15,2 millions de réfugiés, 27,1 millions de personnes dépla­cées dans leur propre pays et 12 millions d’apatrides. En outre, la traite d’êtres humains est devenue une entreprise mondiale d’envergure. Cette traite, facilitée par la pauvreté et les conflits ainsi que la libéralisation des marchés inter­nationaux, la circulation de la main­d’œuvre et les trans­ports, fait jusqu’à 2,4 millions de victimes à tout moment.

ONU/Martine Perret

MIGRATIONS

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EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du 15

Bien que la migration fasse partie intégrante du déve­loppement social et économique, la communauté internatio­nale et les gouvernements demeurent mal préparés à gérer efficacement ce processus, ainsi qu’à riposter aux menaces complexes sur la sécurité humaine auxquelles sont exposés les migrants avant, pendant et après leur déplacement. De ce fait, les migrants peuvent subir des violations des droits de l'homme et des abus; souffrir de façon importante de maladies causées par la mauvaise nutrition, le manque d’accès aux soins de santé et l’exposition à des maladies contagieuses; ils peuvent également se heurter à des pro­blèmes de sécurité personnelle, notamment la violence et la détention administrative dans un pays hôte ou de tran­sit. En outre, une fois arrivés dans leur pays de destination, les migrants peuvent se heurter à l’exclusion sociale, aux barrières linguistiques et à un manque d’accès aux servi­ces essentiels. Les migrations peuvent certes apporter des retombées positives, mais uniquement lorsque les multiples menaces pesant sur ces personnes en déplacement ont été correctement gérées.

Intérêt du concept de sécurité humaine pour répondre aux besoins des personnes en déplacementConsidérer les migrations à travers l’optique de la sé­curité humaine met en évidence leurs aspects politiques, civiques, sécuritaires, économiques et sociaux et offre une base globale et nuancée qui permet de promouvoir leurs avantages et de faire face aux enjeux et aux défis auxquels sont confrontées les personnes en mouvement. À cet égard, le concept de la sécurité humaine peut appuyer les initiatives visant à améliorer l'équilibre entre les besoins des person­nes et les préoccupations liées aux impératifs nationaux de souveraineté, de sécurité et de développement.

L’application du principe de sécurité humaine aux questions de migration permet aux parties prenantes de créer et de gérer des réponses plus ciblées et plus hu­maines. En favorisant une approche axée sur la personne humaine, globale et adaptée au contexte, l’analyse fondée sur la notion de sécurité humaine peut donner lieu à une vue détaillée des causes, des motivations, des risques et des impacts potentiels des migrations. Une telle analyse met en

évidence les résultats éventuels pour les pays d’origine, de transit et de destination, tout en différenciant entre les divers groupes de migrants et les différents risques qu’ils peuvent courir tout au long du processus de migration. Par consé­quent, les parties prenantes peuvent gérer plus efficacement les différentes formes de migration et éviter des réactions excessivement punitives, en particulier dans le cas des per­sonnes qui migrent pour tenter de se protéger.

Le mécanisme de protection et d’autonomisation per­met de déterminer les lacunes de l’infrastructure de pro­tection qui exposent les personnes à des menaces impor­tantes sur la sécurité humaine tout au long des phases de migration. Il met l’accent sur les normes, les politiques et les processus internationaux et nationaux tout en mettant en relief les conditions nécessaires pour donner aux migrants les moyens de participer à la mise en œuvre de leur sécu­rité. Le mécanisme permet à la fois de coordonner les poli­tiques au plus haut niveau et de répondre à la nécessité de protéger les migrants au niveau le plus local, ce qui réduit les menaces et les risques de sécurité humaine et favorise les aspects bénéfiques des migrations.

Les projets du Fonds d'affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine dans ce domaine thématique s’intéressent à un large éventail de situations3, de la migra­tion économique aux réfugiés et aux personnes déplacées dans leur propre pays, ainsi que certaines des questions les plus difficiles, telles que la traite d’êtres humains et le statut d'apatride. Les projets de sécurité humaine montrent comment des problèmes complexes peuvent être réglés en mettant l’accent sur la corrélation entre les politiques et processus institutionnels et les activités communautaires d’autonomisation. Ce faisant, les projets attirent l’attention sur les régions et les collectivités particulièrement vulné­rables et celles qui pâtissent souvent des lacunes des po­litiques migratoires et sont mal servies par les institutions

3 CertainsdespaysdanslesquelslesprojetsduFondsd'affecta­tion spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine ont été exécutés dans ce domaine thématique sont les suivants : Alba­nie, Arménie, Cambodge, Équateur, État de Palestine, Gabon, Guinée, Indonésie, Kenya, Mexique, Philippines, République démocratique populaire lao, République de Moldova, Somalie, Tadjikistan, Turkménistan et Viet Nam.

EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du16PN

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ou qui vivent dans les conditions sociales et économiques les plus déshéritées.

EXEMPLE PRATIQUETadjikistan

Développement communautaire par la création d’emplois et la meilleure gestion des migrations dans la vallée du RashtDe 1992 à 1997, la guerre civile au Tadjikistan a provoqué des déplacements et des bouleversements économiques considérables. La vallée du Rasht, un des districts les plus éprouvés par la guerre et les moins aidés du pays, a pâti de la diminution des possibilités d’emploi et de perspectives peu reluisantes de reprise économique durable. Dans une telle situation, de nombreux hommes ont recherché des emplois à l’étranger, ce qui s’est traduit par une migration économique à grande échelle, les femmes et les enfants restés dans le pays devenant particulièrement tributaires des activités agricoles peu rentables ainsi que des envois de fonds à partir des pays voisins. En tant que migrants écono­miques, les hommes ont souvent été confrontés à la menace de travaux forcés, de traite d’êtres humains et de violation des droits de l'homme et, lorsqu’ils se retrouvaient pris au

piège de situations de travail abusives, ils avaient souvent trop honte pour rentrer dans leur pays ou étaient incapables de le faire, laissant alors leurs familles dans des situations plus précaires et plus défavorisées.

En réponse aux effets cumulés de la pauvreté, de la stagnation du développement et de l’émigration sur les col­lectivités de la vallée du Rasht, le projet de deux ans, qui a démarré en mai 2007, visait à : i) rendre les hommes et les femmes autonomes par le biais d'activités de formation professionnelle et de génération de revenus, qui ont permis d’inverser la migration illégale et de réduire les cas de traite d’êtres humains; ii) renforcer la capacité des institutions na­tionales et locales chargées de protéger les droits des tra­vailleurs tadjiks, à l’étranger et dans leur pays; et iii) veiller à ce que les travailleurs migrants de la vallée du Rasht, y com­pris les victimes de la traite d’êtres humains, aient davan­tage accès à l’information et aux mécanismes juridiques de réparation. Ainsi, l’amélioration des conditions d’emploi et de l’infra struc ture sociale dans la vallée du Rasht a réduit les migrations involontaires et la gestion des migrations a été renforcée, améliorant la sécurité humaine des migrants tadjiks, à l’étranger ou en route vers leur destination.

Pour réduire les risques de sécurité humaine liés aux migrations illégales, il faudrait des politiques et des proces­

sus globaux, systématiques et préven­tifs de gestion des migrations qui soient bien coordonnés au niveau international, national et local. Dans cette perspec­tive, le projet a instauré entre les inter­locuteurs tadjiks, russes et kazakhs des partenariats étroits dans le domaine des services de migration, tout en renforçant les capacités et en instituant des méca­nismes de coordination entre les minis­tères nationaux, les autorités policières et judiciaires, les agences de placement privées, les syndicats et les employeurs au Tadjikistan. Les dispositions de gestion des migrations qui en ont résulté étaient plus synergiques et plus proactives, met­tant l’accent sur la prévention et la ré­pression de la traite des êtres humains

EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du 17PNUD

et du travail forcé, la réglementation des agences de placement privées et la prestation de services d’aide et d’information aux migrants vulnérables, qu'il s'agisse d'hommes ou de femmes. Ce sys­tème global a permis de mieux répondre aux be­soins et aux facteurs de vulnérabilité propres aux migrants tadjiks et à leurs familles.

Parallèlement, il est possible d’atténuer cer­taines des circonstances induisant les migrations illégales par la création de conditions propi ces au développement économique solidaire, qui per­mettent à chacun d’être l’acteur de son propre épanouissement. Dans la vallée du Rasht, les partenaires du projet ont privilégié les femmes dont la vie était profondément affectée par l’émi­gration de longue durée. Dans la mesure où les femmes étaient souvent chefs de ménage par défaut, il fal­lait impérativement élargir leurs possibilités de générer des revenus sur place et renforcer leur aptitude à tenir leur bud­get efficacement. À la longue, du fait de la sécurité écono­mique croissante, les ménages — les hommes comme les femmes — ont été en mesure de prendre différentes déci­sions concernant la migration économique, ce qui a réduit le risque de traite d’êtres humains et a favorisé les possibilités de migration dans de meilleures conditions de sécurité et en connaissance de cause.

La promotion du développement local ouvert à tous et l’atténuation des conséquences néfastes de la migration économique reposaient aussi sur un véritable engagement des collectivités locales. À cet égard, le projet a exécuté des sous­projets axés sur les envois de fonds des migrants dans le cadre desquels les collectivités pouvaient réinvestir les gains procurés par ces fonds dans des activités d'améliora­tion de l’infrastructure sociale. Choisis de manière concer­tée, ces projets portaient essentiellement sur la construc­tion et la rénovation des installations d’adduction d’eau, des réseaux d’irrigation, des barrages, des routes et des ponts, ainsi que l’acquisition d’équipements médicaux pour les centres de santé. Cette nouvelle infrastructure a créé un en­vironnement qui était plus sain et plus propice aux activités économiques, qui à leur tour ont permis d’atténuer l’impact de la pauvreté et d’améliorer le bien­être des populations.

Par ailleurs, les communautés ont pris une part importante au développement de proximité, assumant la responsabilité des décisions et des mesures visant à améliorer leurs vies et leurs moyens de subsistance.

Afin de préserver les investissements destinés à la sé­curité et au développement, l’approche de sécurité humaine appelle l’attention sur les risques potentiels et favorise les réponses qui renforcent la résilience et protègent les popu­lations contre les conséquences les plus nuisibles lorsque les chocs se produisent. Dans la vallée du Rasht, où les mé­nages tributaires des envois de fonds des migrants étaient vulnérables aux ralentissements de l’économie locale, na­tionale et internationale, le projet a renforcé la capacité des ménages à réaliser des activités génératrices de revenus à petite échelle. Grâce à des ateliers de conseil aux entre­prises et l’accès aux possibilités de microfinancement, les participants ont pu créer leurs propres entreprises, aug­menter leurs revenus et réduire leur servitude pour dettes. Par ailleurs, dans de nombreux ménages, le niveau des revenus réalisés était suffisant pour leur permettre de supporter la diminution de 30 % des envois de fonds pro­voquée par la crise financière et économique mondiale de 2007­2008.

En appliquant le mécanisme de protection et d’autono­misation, le projet a démontré l’importance des approches mises en pratique depuis le sommet jusqu'à la base et des

EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du18

processus participatifs, qui engagent à la fois ceux qui sont touchés par les conséquences des migrations et ceux qui ont, au niveau national, l’influence politique nécessaire pour en atténuer les répercussions néfastes. En outre, le projet a confirmé que le renforcement des réponses institutionnel­

les et des mécanismes de réglementation était indispensable pour la croissance et la viabilité des initiatives communau­taires, visant à réduire les répercussions négatives de la migration économique et les perspectives de développement peu encourageantes de la vallée du Rasht.

Réduire l’impact humain de la violence urbaineÀ présent, plus de personnes vivent dans des villes que ja­mais encore dans l’histoire de l’humanité, soit 3,6 milliards en 2011. D’après les estimations, l’urbanisation devrait continuer à progresser dans le monde entier; d'ici à 2050 les citadins représenteraient 86 % de la population dans les régions plus développées et 66 % de la population dans les régions moins développées. En outre, les régions qui s’urbanisent le plus rapidement se trouvent dans les pays les moins avancés : la moitié de la population d’Asie devrait vivre dans les centres urbains d’ici à 2020 et l’Afrique devrait atteindre un taux d’urbanisation de 50 % d’ici à 2035.

Le processus d’urbanisation rapide pose de nombreux défis pour les administrations locales et nationales. Les 20 dernières années, la criminalité est devenue de plus en plus un problème majeur dans les zones urbaines du monde entier. Il est donc particulièrement important de bâtir des villes sécurisées pour prévenir la violence et la criminalité et protéger les populations urbaines. L’absence de sécurité pu­blique peut se traduire par des niveaux de violence compa­rables sinon supérieurs à ceux qui se produisent pendant une guerre civile. Les conséquences sont particulièrement importantes pour les jeunes, les femmes et les enfants, dans la mesure où leur recrutement dans les réseaux de crime organisé et leur exploitation par ces réseaux, ainsi

VIOLENCE URBAINE

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EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du20

que la violence de proximité endémique, ont tendance à aug­menter.

Par ailleurs, les rapides mutations économiques et dé­mo graphiques dans de nombreuses villes du monde se tra­duisent par l’aggravation de la pauvreté urbaine, la proli­fération de bidonvilles et les problèmes qui en résultent en matière de développement humain. Des ressources ainsi que de solides moyens institutionnels et une bonne gou­vernance sont nécessaires pour garantir des infrastructures urbaines suffisantes pour la prestation des services de loge­ment, d’hygiène, de santé et d’éducation aux habitants des villes. Faute de quoi, des collectivités urbaines marginali­sées peuvent être exposées aux maladies et à la pollution et ne bénéficier que de services de base médiocres, qui exa­cerbent le manque de sécurité publique.

Intérêt du concept de la sécurité humaine pour faire face à la violence urbaineL’application du principe de sécurité humaine repré­sente une approche globale et flexible qui peut prendre en compte la complexité des facteurs contribuant à la violence urbaine. On ne peut pas aborder de façon isolée la multitude de facteurs interdépendants aux niveaux ins­titutionnel et communautaire qui induisent la violence et la criminalité urbaines : faible gouvernance, pauvreté, accès insuffisant aux services de base tels que l’éducation et la santé, manque de cohésion sociale, exclusion sociale, en­tre autres. Ils nécessitent une approche intégrée et multi­sectorielle qui s’intéresse aux causes structurelles de la violence urbaine, renforce la résilience communautaire et met l’accent sur la participation à la promotion de la sécurité individuelle et communautaire.

La notion de sécurité humaine reconnaît la nécessité de combiner les stratégies institutionnelles et de proxi­mité pour élaborer des réponses appropriées. Des acteurs non étatiques, tels que les gangs et les groupes d’auto­défense, peuvent nuire aux institutions de l’État et profiter des « vides de gouvernance » localisés. Les mécanismes de protection et d’autonomisation permettent au concept de la sécurité humaine de mettre en évidence les lacunes de la

gouvernance et des systèmes de justice que peuvent exploi­ter des groupes opportunistes, ainsi que des mécanismes de renforcement de la participation publique, en vue de contrer ces lacunes. De ce fait, les expériences des citoyens peuvent mieux éclairer les initiatives de renforcement des capacités institutionnelles qui se traduisent par des mesures à carac­tère plus préventif et mieux ciblées.

En favorisant les processus participatifs, l’approche axée sur la sécurité humaine appuie le développement de réseaux de divers acteurs et la création de mécanismes formels de collaboration. Cette approche peut renforcer le dialogue entre les gouvernements et leurs citoyens, donnant lieu à des niveaux améliorés de confiance et une plus grande participation citoyenne. En outre, elle favorise l’interaction fréquente et la communication entre les résidents urbains, ce qui peut renforcer le capital social positif et la cohésion sociale.

Les projets du Fonds d'affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine dans ce domaine thémati­que mettent en grande partie l’accent sur l’autonomisation des col lectivités pour leur permettre de relever les défis complexes de la violence et de la criminalité urbaines, tout en ren forçant les mécanismes de protection locaux et natio­naux qui tiennent compte de l’insécurité des citoyens. Ces projets cherchent à améliorer l’infrastructure et la presta­tion de services essentiels, élargir les possibilités d’emploi, améliorer la cohésion sociale, instaurer le dialogue et la col­laboration entre les autorités et la population et renforcer la capacité des instances policières et judiciaires. Compte tenu de leur réussite, plusieurs projets sont actuellement appli­qués à plus grande échelle ou mis en place dans d’autres régions, avec l’appui des gouvernements concernés ou de nouvelles sources de financement4.

4 CertainsdespaysdanslesquelslesprojetsduFondsd'affec­tation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine ont été exécutés dans ce domaine thématique sont les suivants : Afghanistan, Afri que du Sud, Brésil, Colombie, El Salvador, Gua temala, Honduras et Madagascar.

EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du 21PN

UD

EXEMPLE PRATIQUE

El Salvador

Promotion de la coexistence et amélioration de la sécurité des citoyens dans trois municipalités de SonsonateQuinze ans après la négociation des accords de paix qui ont mis fin à plus d’une décennie de conflit, des progrès notables ont été enregistrés dans les domaines du règlement des conflits, de la réduction de la criminalité et du développe­ment humain dans de nombreuses régions d'El Salvador. Toutefois, les dividendes de la paix ont mis du temps à parvenir aux collectivités vulnérables et marginalisées du département de Sonsonate dans l’ouest du pays. En 2005, Sonsonate avait l’un des taux d’homicide les plus élevés d'El Salvador, soit 62 homicides pour 100 000 habitants, contre une moyenne nationale de 54,5. Par ailleurs, l’appli­cation insuffisante de la loi a permis la prolifération de gangs de jeunes, de trafic de drogues, d'armes à feu et de violence

sexiste. Les communautés de Sonsonate ont les niveaux de pauvreté les plus élevés du pays, avec des taux de natalité en service de maternité nettement inférieurs à la moyenne nationale, et un accès limité à l’éducation.

Pour faire face à ces défis interdépendants en matière de sécurité humaine, le projet (exécuté de mars 2008 à la fin juin 2011) a appliqué une approche globale visant à amé­liorer la sécurité immédiate et à long terme de la popula­tion, par des mesures consistant à : i) promouvoir l’action coordonnée entre les institutions publiques et la société ci­vile; ii) améliorer des espaces urbains pour instaurer une meilleure sécurité; iii) mettre en œuvre des stratégies de prévention et de réduction de la violence armée; iv) renforcer la prévention contre la violence intrafamiliale, l’exploitation sexuelle et la traite d’êtres humains; et v) promouvoir les initiatives visant à réduire les inégalités entre les sexes. Par conséquent, le projet a renforcé la sécurité des citoyens, favorisé le développement urbain solidaire, encouragé la coexistence pacifique et instauré des partenariats produc­tifs entre l’État et la société.

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Pour réussir à réduire la violence et la criminalité, il a fallu une approche intégrée et multidimensionnelle visant à faire face à la multitude de facteurs interdépendants aux niveaux institutionnel et communautaire à Sonsonate. Étant donné que la violence avait pris plusieurs formes (sexiste, liée aux gangs et aux réseaux de crime organisé), les acti­

vités de sensibilisation destinées à changer les attitudes à l’égard de la violence ont été combinées à des initiatives institutionnelles tendant à restreindre l’accès aux armes à feu, réduire les écarts entre les sexes en matière d’emploi et l'accès aux postes à responsabilités, et à appliquer des mécanismes formels de protection, en particulier au pro­

fit des enfants et des jeunes. La combinaison de ces mesures a permis de mettre en place un vaste réseau de parties prenantes qui ont pu ensemble commencer à exercer un contrôle cohérent sur le territoire et promouvoir les conditions nécessaires pour contrecarrer la criminalité et la violence.

Pour permettre au réseau de fonctionner ef­fi cacement dans une région où un manque de confiance existait entre les collectivités et les ins­titutions publiques, le projet a mis l’accent sur la nécessité critique d’un cadre de mesures de pro­tection et d’autonomisation se renforçant mutuel­lement, qui consoliderait les relations entre l’État et la société. Les mesures de protection appliquées en partant du sommet ont consisté à renforcer la capacité des forces de police et l’esprit d’initiative des maires locaux, tandis que les activités parti­

EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du 23

cipatives d’autonomisation partant de la base s'assuraient que les collectivités soient engagées dans l’élaboration de mesures de sécurité et de programmes communautaires au niveau de la municipalité. Il en a résulté une vision plus large et plus globale de la manière dont les institutions et les collectivités déterminent leurs rôles respectifs dans l’instauration de la sécurité des citoyens et le maintien de la coexistence pacifique.

Au plan institutionnel, le projet a mis en évidence le rôle crucial des autorités locales en tant que première ligne de défense face aux menaces et en tant que partenaires les plus à l’écoute de la société civile. Par conséquent, une approche adaptée au contexte a mis l’accent sur le renforcement de la capacité des autorités municipales et sur l’instauration de partenariats plus solides et plus efficaces entre les autorités municipales, nationales et régionales. Cela a permis l’inté­gration nécessaire en amont et en aval des décisions prises, comblant ainsi les lacunes de l’architecture de protection et donnant aux autorités municipales la latitude nécessaire pour élaborer des réponses plus ciblées et préventives en vu d’améliorer la sécurité des citoyens au niveau local.

Un complément essentiel de ces mesures de renforce­ment des capacités institutionnelles et communautaires a consisté à remettre en état l’infrastructure urbaine en vue de créer un environnement communautaire sécurisé. Œuvrant de concert, les autorités municipales et les collectivités lo­cales ont construit des centres communautaires, rénové des établissements scolaires et réaménagé les terrains de sport et les espaces communs. La sécurité personnelle et collec­tive a été considérablement améliorée par la récupération de

ces espaces publics et leur utilisation pour des activités cul­turelles et récréatives, en mettant particulièrement l’accent sur les enfants, les adolescents, les femmes et les popula­tions autochtones. En outre, des manifestations sportives et des festivals à l’échelle de la communauté ont favorisé le renforcement de la cohésion sociale et le sentiment de fierté de la collectivité, les deux étant des facteurs essentiels de la sécurité publique.

La sécurité des citoyens à Sonsonate dépendait aussi de l’engagement sans réserve des membres de la collecti­vité, plus particulièrement les groupes à risque ou margina­lisés tels que les jeunes. Les contributions positives de tels groupes sont trop souvent négligées, ce qui met en péril le développement du capital social à long terme et accroît les risques de comportement antisocial. Grâce à une meilleure application des politiques de protection des enfants et des adolescents et l’offre de diverses possibilités d’éducation et de formation professionnelle, les enfants et les jeunes ont pris une part active au développement communautaire et à l’instauration de la coexistence pacifique.

En fin de compte, le projet a montré comment le concept de sécurité humaine peut se traduire par des stratégies glo ba les, concertées et systémiques pouvant intégrer les contri bu tions des différentes parties prenantes et aboutir à des initiatives efficaces pour prévenir la violence et renforcer la cohésion sociale. En outre, l’application du mécanisme de protection et d’autonomisation a unifié les rôles et les responsabilités des différents acteurs dans le cadre d’une vision partagée, qui a contribué à l’utilisation efficace de res­sources limitées et à l’instauration de partenariats durables.

Transposition du concept de sécurité humaineL’une des réalisations les plus notables du projet de Sonsonate a été l’adoption de la notion de sécurité humaine par des acteurs œuvrant pour l’amélioration de la sécurité des citoyens dans d’autres villes. Plus précisément, c’est la métho­dologie globale et adaptée au contexte appliquée par le projet qui a incité plusieurs autres municipalités à transposer le concept de sécurité humaine. En outre, le Ministère de la sécurité publique et de la justice d'El Salvador a utilisé cette approche pour réduire la prolifération des armes à feu dans 20 autres municipalités. La transposition et l’expansion du projet ont été encouragées par des investissements publics dans le capital financier et humain, ainsi que par l’appui technique et financier de donateurs bilatéraux.

EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du24

RéDUCTION DE LA PAUVRETéPromotion de l’inclusion sociale et du développement local dans les zones isoléesLa pauvreté demeure l’un des plus grands défis que doit re-lever la communauté internationale. En tant que phénomène multidimensionnel, elle va au-delà de la pauvreté monétaire et englobe une multitude de privations que connaissent les pauvres et les groupes les plus vulnérables, notamment le sous-emploi, la mauvaise santé, le manque d’accès à l’édu-cation, l’inégalité entre les sexes et l’exclusion sociale. En 2012, près de 2,5 milliards de personnes dans le monde avaient un revenu inférieur à 2 dollars par jour et 1,3 milliard de personnes vivaient dans l’extrême pauvreté. En outre,

2,6 milliards de personnes dans le monde n’ont pas accès à des services d’assainissement de base; 1,1 milliard de per-sonnes dans les pays en développement ont un accès insuf-fisant à l’eau; et plus de 900 millions de personnes souffrent de la faim.

Comme l’indique le rapport du Secrétaire général inti-tulé « La crise financière et économique mondiale et son incidence sur le développement » (A/CONF.214/4), les ef-forts visant à réduire la pauvreté ont été également contre-carrés par la diminution du nombre d’emplois et de sources de revenus, la baisse du commerce des biens et services et la chute spectaculaire des transferts de fonds du fait de la crise financière et économique mondiale. La hausse récente des prix des denrées alimentaires a en outre entravé la ré-

PAM

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EnsEignEmEnts terrain : mise en pratique de l'approche de la sécurité humaine tirés du 25

duction de la pauvreté pour certains, et les changements climatiques posent des défis nouveaux et plus que jamais importants pour le développement économique et social.

Certes, le monde est devenu moins pauvre au cours des dernières décennies et l’inégalité des revenus monétaires au plan international diminue régulièrement, mais l’inégalité au sein des pays augmente et des poches de pauvreté irré­ductibles restent des obstacles majeurs pour le développe­ment et la sécurité humaine. La corrélation entre l’inégalité et la croissance économique est complexe; on constate que l’inégalité monétaire persistante limite les perspectives de développement national en entravant l’accès au crédit, aux actifs et aux services de santé et d’éducation, et en limitant les possibilités de croissance partagée, l’esprit d’entreprise et la représentation élargie.

Intérêt d’une approche axée sur la sécurité humaine dans des situations de pauvretéEn examinant les rapports entre l’économie, la répartition des revenus, les dynamiques sociales et environnementa­les, la notion de sécurité humaine permet de remanier d’une manière plus interdépendante et systémique des éléments auparavant délimités et séparés. En outre, en analysant une situation de pauvreté donnée dans ce contexte plus large, l’approche axée sur la sécurité humaine présente une image plus globale des causes et des conséquences de la pauvreté à divers niveaux. Une telle analyse peut permettre de déter­miner les seuils en dessous desquels la survie, les moyens de subsistance et la dignité des personnes sont gravement menacés, ainsi que de détecter les éventuelles zones de ten­sion ou les points au­delà desquels la vulnérabilité et l’insé­curité pourraient s’aggraver considérablement. En consé­quence, les réponses peuvent mieux prendre en compte les facteurs contribuant à la pauvreté, aux niveaux international, national et local, et garantir des perspectives d’avenir qui réduisent la vulnérabilité de manière durable.

En s’intéressant plus particulièrement à la prévention précoce et aux risques d'aggravation de la situation, le concept de la sécurité humaine met l’accent sur les fac­teurs de risque qui entravent le développement, aggra­

vent la pauvreté et accroissent la vulnérabilité. De ce fait, les réponses en matière de réduction de la pauvreté peuvent mieux intégrer : i) des initiatives de prévention et d’atténua­tion des risques et des menaces; ii) des mesures visant à protéger ou aider les personnes et les collectivités à faire face aux risques et aux menaces; et iii) des mécanismes qui renforcent la résilience et les opportunités sociales sur le long terme. La combinaison de ces trois éléments est essentielle pour des stratégies durables de réduction de la pauvreté qui renforcent les relations entre l’État et la société et donnent les moyens aux collectivités d'être des agents actifs du changement.

Un avantage certain du concept de la sécurité hu­maine réside dans son analyse détaillée, qui permet de mettre en évidence la situation des personnes et des com­munautés se trouvant en dessous des seuils de pauvreté. En mettant l’accent sur les caractéristiques individuelles de la sécurité humaine en termes de région, classe, âge et sexe plutôt que sur des macro­indicateurs globaux, les décideurs et les praticiens ont une compréhension plus nuancée de la façon dont les régions et les groupes sociaux manifestent ou vivent différents types de menaces et de vulnérabilités. En conséquence, les réponses visant à réduire la pauvreté peuvent être mieux ciblées et tenir compte de l’impact des inégalités de revenus et de richesse, de l’exclusion sociale et de la discrimination, qui sont de nature à perpétuer la pau­vreté en dépit de stratégies par ailleurs efficaces. En outre, une telle approche centrée sur la personne peut contribuer à la prise en compte des obstacles subjectifs au dévelop­pement, qui sont tout aussi difficiles et pénibles que les ob­stacles objectifs, en élaborant des plans de réduction de la pauvreté différenciés et adaptés.

Les projets du Fonds d'affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine dans ce domaine thématique mettent l’accent sur les situations de pauvreté découlant des inégalités de traitement ainsi que de situations instables, comme la baisse soudaine de l’activité économique et les catastrophes naturelles. Les projets portent généralement sur les causes structurelles, telles que le manque d’accès aux ressources, le développement des infrastructures et les politiques de prestation de services de base, ainsi que la vulnérabilité aux chocs sociaux, économiques et environ­

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nérables, le projet visait à : i) améliorer la gouvernance et l’accès à des services publics de qualité, notamment l’in­frastructure, les soins de santé et l’éducation; et ii) auto­nomiser les familles et les collectivités pour leur permettre d’œuvrer en vue d’atteindre des niveaux de vie minimaux et de réaliser la cohésion sociale. En conséquence, le projet a amélioré l’intégration sociale des communautés isolées, renforcé la prestation de services sociaux, et a rendu auto­nomes ces collectivités afin qu’elles soient plus indépen­dantes grâce à de meilleurs moyens de subsistance, renfor­çant ainsi les revenus durables et le bien­être.

Pour réduire efficacement la pauvreté persistante, il fal­lait impérativement renforcer la capacité de gouvernance locale de la région et mettre en œuvre des politiques et des pratiques plus inclusives. La régularisation du statut de ci­toyenneté des résidents musulmans était certes un proces­sus ne rentrant pas dans le cadre du projet, mais celui­ci a renforcé les mécanismes de protection en sensibilisant davantage les autorités locales aux normes des droits de l'homme et à l’enregistrement de l'état civil; en améliorant la qualité des services publics et leur accès; et en instaurant un dialogue et une coordination entre les différents acteurs de la région.

Par exemple, pour améliorer davantage le bien­être des résidents de l’État d’Arakan, le projet a élaboré une ap­proche globale en matière de santé qui permet de faire face simultanément aux lacunes d’infrastructure et d’équipement et de réduire les insuffisances des effectifs et des connais­sances des collectivités. Cette stratégie à plusieurs volets comprenait : la construction et la rénovation des centres de santé ruraux et l’équipement de ces centres avec les maté­riaux qui étaient nécessaires de toute urgence; la mise en place de mécanismes communautaires pour améliorer l’ac­cès aux services de soins de santé primaires; la prestation de services de formation spécialisée au personnel de santé et aux sages­femmes; l’élaboration de programmes et de campagnes de sensibilisation pour rapprocher les commu­nautés et les agents de santé gouvernementaux; et la pro­motion de la modernisation des infrastructures telles que les ponts, les jetées et les sentiers en vue d’améliorer l’ac­cès aux centres de santé. La combinaison de ces multiples initiatives de façon intégrée s’est traduite par des avantages

nementaux. La combinaison de ces facteurs a favorisé des réponses intégrées et durables, qui ont soutenu le dévelop­pement communautaire dans des zones isolées et particu­lièrement vulnérables5.

EXEMPLE PRATIQUEMyanmar

Renforcement de la sécurité humaine pour les résidents musulmans et d’autres personnes vulnérables dans le nord de l’État d’ArakanL’une des régions les plus pauvres du Myanmar, le nord de l’État d’Arakan, compte environ 724 000 résidents musul­mans, pour la plupart dépourvus de certificat de nationalité, ce qui les rend apatrides de facto. La région étant égale­ment parmi les plus pauvres, les résidents musulmans et bouddhistes souffrent de l’insécurité alimentaire, de l’accès insuffisant à des services publics de base, de faibles résul­tats scolaires, du mauvais état de santé en général et de perspectives d’emploi peu encourageantes, en particulier parce que plus de 90 % de la population est directement ou indirectement tributaire de l’agriculture dans une région très propice aux inondations et aux glissements de terrain. En outre, l’absence d’intégration et de communication entre les groupes ethniques de la région alimente la dis crimination et l’exclusion et, dans certains cas, entraîne l’exode massif des communautés minoritaires du fait de la violence inter­communautaire.

Pendant deux ans, à partir d’avril 2010, le projet a cherché à faire face à la série de facteurs complexes et in­ter dé pendants qui entravent la réduction de la pauvreté et compromettent la sécurité humaine pour les résidents des municipalités de Maungdaw, Buthidaung et Rathedaung dans l’État d’Arakan. En privilégiant les communautés vul­

5 CertainsdespaysdanslesquelslesprojetsduFondsd'affec­tation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine ont été exécutés dans ce domaine thématique sont les suivants : Bhoutan, Cambodge, État de Palestine, Ghana, Inde, Indoné­sie, Kosovo, Malawi, Mongolie, Myanmar, Nicaragua, Pakistan, République démocratique populaire lao, Sénégal, Serbie, Thaï­lande, Zambie et Zimbabwe.

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en termes d’amélioration de l’état de santé et du bien­être dans toute la région.

Parallèlement, les initiatives d’auto­nomisation des collectivités ont considéra­blement amélioré l’implication et la parti­cipation, qui peuvent avoir une importance cruciale dans les situations d’extrême pau­vreté dont la persistance peut priver de leur dignité des personnes et des collectivités. À cet égard, le projet a constitué des groupes autosuffisants dans lesquels les membres de la collectivité ont mis en commun leurs ressources financières et humaines dans une optique synergique. Ces groupes ont fonctionné également comme un méca­nisme supplémentaire de protection so­ciale, offrant aux membres l’accès à des crédits réguliers et abordables et donnant aux femmes la possibilité d’apporter une contribution économique au ménage. Ce mécanisme a permis de réduire considéra­blement la vulnérabilité, dans la mesure où les membres de la collectivité ont pu profi­ter pleinement du fruit de leur travail, éviter les marchés abusifs et s’aider mutuellement à répondre aux besoins de consomma­tion d’urgence, de santé ou autres besoins du ménage. Par ailleurs, ces groupes ont contribué à renforcer la confiance et la cohé­sion entre les collectivités, en facilitant une meilleure intégration sociale des rapatriés et des groupes marginalisés.

L’exclusion sociale peut maintenir les collectivités dans un état de pauvreté persistant du fait du manque d’accès à des services de base et à l’emploi formel. De même, en empêchant certains membres de la collectivité de contri­buer, comme les femmes, les enfants ou les handicapés, on risque d’entraver le développement communautaire. Par conséquent, la lutte contre l’exclusion de certains groupes a été un élément central du projet. En mettant l’accent sur l’amélioration de la participation des femmes et en four­nissant des possibilités d’éducation non formelle aux fem­

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mes musulmanes et aux adolescentes, le projet a permis aux femmes de jouer un rôle plus actif dans les activités de développement communautaire, améliorant ainsi leurs propres moyens de subsistance. Grâce à l’amélioration des revenus des ménages, de nombreuses familles ont été en mesure d’envoyer régulièrement leurs enfants à l’école. En outre, étant donné l’augmentation des opportunités et la re­connaissance du rôle des femmes, celles­ci sont devenues des participantes essentielles à l’instauration de la cohésion sociale dans la région.

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En fin de compte, le projet a favorisé la mise en œuvre d’une approche globale et intégrée en matière de survie, de moyens de subsistance et de la dignité des groupes les plus vulnérables de la région. Il a joué un rôle de premier plan en rapprochant les réseaux de parties prenantes et en ren­forçant la coordination entre le système des Nations Unies,

les autorités gouvernementales, les ONG et les collectivités locales. Ce faisant, il a encouragé l’intégration des objectifs d’autonomisation et de protection à long terme; une pers­pective qui peut contribuer à orienter les futurs efforts visant à réduire les formes chroniques et extrêmes de pauvreté dans la région.

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Lutter contre les causes économiques, environnementales et sociales des facteurs d’insécurité liés à la santé

La bonne santé est tout aussi indispensable et déterminante pour la survie de l'homme, que ses moyens de subsistance et sa dignité. Elle permet aux gens de faire des choix, de rechercher les possibilités de promotion sociale et de pla-nifier leur avenir. Un enfant en bonne santé peut apprendre, grandir et s’épanouir, et un adulte guéri d'une maladie peut reprendre le travail pour faire vivre sa famille. En revanche, l’absence de bonne santé peut avoir des répercussions au-delà d’une maladie, d’une population ou d’un lieu donnés et peut se traduire par des souffrances considérables avec

des conséquences graves pour des collectivités entières et, pire encore, pour des sociétés entières et dans toutes les régions.

Les 20 dernières années, l’amélioration de la santé dans le monde a fait des progrès sans précédent. Le ren-forcement des mécanismes de surveillance et des dispo-sitifs de lutte contre les pandémies sanitaires s’est traduit par un recul continu du nombre de décès causés par des maladies. Mais, en dépit de nos avancées, les objectifs du Millénaire dans le domaine de la santé sont loin d’être at-teints. En outre, les disparités dans et entre les pays n’ont pas disparu, et l’action engagée pour améliorer la santé et la prestation des soins n’a pas réussi à atteindre les groupes les plus vulnérables.

SANTÉ

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L’amélioration dans le domaine de la santé nécessite de notre part une volonté constante d’accroître la disponi­bilité des soins de santé et de renforcer les systèmes de prévention des maladies, mais elle dépend également de facteurs sociaux, économiques et environnementaux qu’il importe de ne pas négliger si nous voulons avancer dans ce domaine essentiel. Dans certaines régions, la pauvreté, des conditions inadéquates de logement et la dégradation de l’environnement peuvent être les principaux facteurs qui contribuent à la mauvaise santé. Dans d’autres régions, les crimes violents et les violences familiales et sexuelles re­présentent les principales menaces à l’amélioration de la santé. Par ailleurs, des chocs ou des événements soudains, tels des catastrophes naturelles ou des ralentissements de l’activité économique, peuvent dévaster les systèmes de soins de santé et dégrader davantage l’état de santé des groupes les plus vulnérables.

Intérêt d'une approche axée sur la sécurité humaine pour faire face aux facteurs d’insécurité liés à la santéEn favorisant une analyse multidimensionnelle, l’ap­proche axée sur la sécurité humaine fait ressortir un en­semble spécifique de facteurs qui contribue à la morbidité et fait obstacle à l’amélioration de l’état de santé glo­bal. Afin de réduire l'incidence mondial des maladies, il est essentiel de prendre en compte la santé dans l’ensemble de son contexte social, économique et environnemental. Si les approches centrées sur des maladies précises sont utiles, elles doivent aussi s’accompagner de stratégies globales. Cette compréhension de la situation favorise l’élaboration de solutions intégrées d'un secteur à l'autre, et tire parti des avantages comparatifs de différents acteurs qui offrent des réponses plus ciblées, efficaces et rentables.

Le mécanisme de protection et d’autonomisation améliore l’état de préparation pour faire face aux défis actuels et nouveaux liés à la santé. La réussite des efforts visant à prévenir, suivre et anticiper les menaces liées à la santé consistent notamment à mettre en place des méca­nismes d’alerte et d’intervention rapides et à renforcer l’état de préparation nécessaire pour identifier, confirmer et maî­

triser les risques sanitaires. Les mesures de renforcement de la capacité d’action misent quant à elles sur l’amélio­ration des systèmes de soins de santé, la formation des professionnels de santé, l’éducation et la mobilisation du public et la création à l’échelon local de systèmes d’assu­rance maladie couvrant les groupes les plus vulnérables. Une approche de la sécurité humaine globale met également l’accent sur une offre de soins de santé abordables, opéra­tionnels et accessibles, qui contribuent à la prospérité et au développement à long terme.

En prenant en compte le large éventail des facteurs es­sentiels à l’amélioration de la santé, la sécurité humaine examine les façons dont les stratégies de santé publique sont entravées par des situations complexes d’insécurité, telles que les catastrophes naturelles, les conflits, la pau­vreté, le mauvais assainissement et l’insécurité alimentaire. Ce processus a donné lieu à l’élaboration de réponses inté­grées portant à la fois sur les changements systémiques et comportementaux nécessaires à l’amélioration de la santé. À cet égard, les projets du Fonds d'affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine forment les profes­sionnels de la santé, renforcent la capacité des autorités locales de fournir des services publics plus efficaces et plus adaptés, remédient au manque d’infrastructures de services et d’assainissement et visent à améliorer la sensibilisation, l’éducation et les réponses des collectivités aux change­ments liés à la santé6.

6 CertainsdespaysdanslesquelslesprojetsduFondsd'affec­tation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine ont été exécutés dans ce domaine thématique sont les sui­vants : Afghanistan, Angola, Bangladesh, Bolivie (État plurina­tional de), Botswana, Burkina Faso, Cambodge, Chine, Cuba, Érythrée, Guatemala, Haïti, Honduras, Kazakhstan, Mali, Mon­golie, Népal, République démocratique du Congo, Suriname, Swaziland, Tadjikistan, Thaïlande et Viet Nam.

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UAP

EXEMPLE PRATIQUEPérou

Amélioration de la santé et de la sécurité pour les femmes et les enfants des AndesDans les départements d’Apurímac et d’Ayacucho de la région andine où près de la moitié de la population vit dans l’extrême pauvreté, l’impact disproportionné de la pauvreté sur les enfants et les femmes peut se remarquer dans les taux élevés de mortalité infantile et maternelle, la malnu­trition chronique et l’analphabétisme. Les services se sont améliorés au cours de la dernière décennie, mais d’impor­tantes barrières culturelles limitent l’accès aux services de santé de base et de santé génésique, ce qui contribue à la persistance de la vulnérabilité parmi les enfants et les femmes. En outre, les niveaux élevés de violence dans la

région ont réduit davantage la sécurité humaine des groupes les plus vulnérables.

Sur une période de trois ans, de janvier 2006 à dé­cembre 2008, le projet a répondu à l’ensemble complexe de facteurs qui menacent la sécurité humaine des enfants, des adolescents et des femmes d’Apurímac et d’Ayacucho. Il visait à réduire les taux de mortalité infantile, la malnu­trition chronique, la mortalité maternelle et les grossesses d’adolescentes et indésirables, par des mesures consistant à : i) améliorer l’éducation et les services de santé de base et de santé génésique; ii) instituer des pratiques de déve­loppement des jeunes enfants; et iii) prendre systématique­ment en compte les droits des enfants, des adolescents et des femmes dans ses programmes pertinents au plan infra­national. De ce fait, le projet a considérablement amélioré la qualité des soins fournis aux nourrissons, aux enfants et

aux mères dans les établissements de santé, a intégré efficacement l’enseignement bilingue interculturel dans l’ensemble des écoles maternelles et primaires, a beau­coup renforcé le rôle des adolescents en tant qu’acteurs sociaux et a consolidé les systèmes de défense et de protection des droits des femmes et des enfants.

Étant donné la combinaison complexe de la pau­vreté, du mauvais état de santé et de la violence dans la région, il fallait s’intéresser à la fois aux contextes social, économique, institutionnel et infrastructurel, d’une part, et aux lacunes de capacités individuelles et communautaires, d’autre part. À cet égard, le projet a intégré des stratégies visant à améliorer la qualité des soins de santé, la santé de base et la santé génésique, une participation citoyenne élargie et la protection des droits. Ces mesures ont permis de mettre en relief les rôles et les responsabilités des divers acteurs et d’ali­gner ces efforts afin d’amplifier l’impact des interven­tions.

En tant que volet important de cette approche in­tégrée, le projet a favorisé des mesures de protection pour prévenir et surveiller les menaces sanitaires, en prenant en compte les problèmes de développement social et humain dans le programme d’action des auto­rités locales. Par exemple, afin de renforcer les méca­

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nismes actuels de protection des droits des femmes, des enfants et des adolescents, le projet a financé la création et le renforcement de 25 centres municipaux de défense pour les femmes, les enfants et les adolescents, de cinq centres de défense de l’école pour les enfants et les adolescents et de trois centres de défense communautaires. La coordi­nation entre ces centres leur a permis de devenir une res­source de proximité primordiale pour prévenir la violence sexiste et familiale et y répondre, ce qui a contribué à réduire cette violence et à améliorer les établissements de soins spécialisés, qui peuvent mieux répondre aux besoins des victimes de la violence.

Les mesures d'autonomisation visent à amé liorer les systèmes de soins de santé, la formation des professionnels de santé, l’éduca­tion et la mobilisation du public et la création à l’échelon local de systèmes d’assurance mala­die couvrant les groupes sociaux les plus vulné­rables. À cet égard, le projet a adopté des straté­gies innovantes de soins maternels, notamment les maisons d’accueil avant l’accouchement et l’adaptation de pratiques obstétriques au contexte culturel de la région. Avec l’appui des autorités municipales, ces maisons d’accueil et d’au tres établissements de santé ont reçu du matériel moderne ainsi qu’une formation pour les professionnels de soins obstétriques et néonatals. En outre, les activités communautaires appro­priées ont permis de s’assurer que les femmes enceintes vivant dans des zones éloignées utilisent ces installations et accouchent dans des mater­nités. De ce fait, le projet a contribué à améliorer sensiblement la qualité des soins de santé fournis aux mères dans les établissements de santé.

Dans la mesure où les efforts communau­taires concertés se sont révélés indispensables pour préserver à long terme des acquis dans le domaine de la santé et faire face à des enjeux transversaux, par exemple en matière d’édu­cation, le projet a renforcé la capacité des pro­fessionnels de la santé et des enseignants à répondre aux besoins de santé propres aux

PAMPNUD

adoles cents. Six centres de développement des jeunes ont été créés pour fournir aux adolescents des services de conseil et de santé préventive, ainsi qu’un espace d’échange d’idées sur leurs droits, le développement et la notion de citoyenneté. En conséquence, les adolescents ont davantage participé à la prise de décisions aux niveaux des collectivi­tés et des municipalités, y compris au processus participatif de budgétisation pour les programmes des administrations locales.

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En fin de compte, le projet a mis en relief l'intérêt de l’approche axée sur la sécurité humaine pour renforcer les relations entre l’État et la société. La participation des au­torités municipales à la gestion et l’exécution des activités du projet fondées sur les besoins et les vulnérabilités réels des collectivités a permis d’accroître leur légitimité en illus­trant leur attachement à l’amélioration des communautés locales. Grâce à un sentiment renouvelé de confiance et aux

avantages concrets tirés du projet, des groupes marginali­sés auparavant, notamment les femmes et les adolescents, se sont davantage engagés. Le renforcement des relations entre l’État et la société a offert une plate­forme indispen­sable à la poursuite des efforts de lutte contre les facteurs d’insécurité complexes liés à la pauvreté, au mauvais état de santé et à la violence dans la région.

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« Nous devons veiller à ce que les acquis d’aujourd’hui ne soient pas réduits à néant par les crises de demain. Ainsi, il faut qu’à tous les niveaux nos actions reposent

sur des stratégies axées sur les personnes, globales, adaptées aux contextes et préventives.

Telle est l’approche de la sécurité humaine. »

Ban Ki-moon, Secrétaire général des Nations Unies

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