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Le journal pour un usage différent de l’argent // numéro 2, 2013 // 19 juin 2013 P. P.  CH-4601 Olten 6 FASCINATION IRRATIONNELLE L’or, mythe et réalité 8 îLES CAïMANS, MONACO, ANDORRE ET LES AUTRES L’argent sale des petits pays 14 BAS SALAIRES, BONUS éLEVéS Quel écart salarial demeure acceptable ? 24 IL FAUT PLUS DE SOLIDARITé Réfugié-s : des victimes, pas des ennemi-e-s Petit mais de qualité

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Le journal pour un usage différent de l’argent // numéro 2, 2013 // 19 juin 2013

P.P.  CH

-4601 Olten

6 Fascination irrationnelle L’or, mythe et réalité

8 îles caïmans, monaco, andorre et les autres L’argent sale des petits pays

14 bas salaires, bonus élevés Quel écart salarial demeure acceptable ?

24 il Faut plus de solidarité Réfugié-s : des victimes, pas des ennemi-e-s

Petit mais de qualité

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2 moneta #2 // 19 juin 2013

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moneta le journal pour un usage diFFérent de l’argent // n¿ 2 // 19 Juin 2013

moneta paraît au moins quatre fois par an en français et en allemand. envoyé aux membres de l’association éditrice du moneta. la reproduction de textes est soumise à une autorisation écrite de la rédaction et doit impérativement indiquer la source // Editrice asso ciation éditrice moneta // Rédaction rené Hornung ( responsable ), simon rindlisbacher, cathy savioz, anna sax, dominique a. Zimmermann // Rédaction fran çaise moneta, c/o banque alternative suisse sa, case postale 161, 1001 lausanne, téléphone 021 319 91 00, [email protected] // Traduction sylvain pichon, mediamix.3 sagl, mario giacchetta, dominique roten // Graphisme et réalisation clerici partner design, Zurich // Couverture regula schaffer // Impression ropress genossenschaft, Zurich // Papier reprint Fsc // Tirage de cette édition 7200 exemplaires // Publicité et encarts moneta, c/o banque alter native suisse sa, case postale, 4601 olten, téléphone 062 206 16 16 // Abonnements annuel Fr. 20.– / soutien Fr. 50.– // Encarts et annonces nous attirons votre attention sur le fait que les encarts qui n’émanent pas de moneta sont assimilés à des publicités qui nous permettent de couvrir les frais de production.Si vous déménagez et que vous êtes client-e de notre banque, veuillez nous communiquer votre nouvelle adresse par écrit ou via le système d’e-banking.

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mise en bouche

éditorial

Valeurs à géométrie variablePetites mais de qualité, ainsi va-t-il de nos valeurs. Elles sont bien là, inoxydables et permanentes, mais si petites qu’elles n’empêchent pas les retournements de situation.

Un exemple parmi d’autres : les écarts de salaires sont désormais en vigueur à la Déclaration de Berne, l’association suisse pour un développement solidaire. Elle qui pratiquait depuis longtemps des salaires unifiés, introduit désormais une échelle de salaires au nom... de l’efficacité et du professionnalisme. Des valeurs capita-listes, bien éloignées des valeurs solidaires sur lesquelles elle s’est construite.

Oui, nos valeurs sont quelque peu écrasées par les argumentaires en boucle et recroquevillées sous les discours dominants.

Heureusement, l’harmonisation scolaire en cours en Suisse nous apporte quelque espoir : les valeurs – via l’enseignement du fait religieux – sont introduites à l’école, sans prosélytisme.

Dans tous les cas, il reste un refuge : le supermarché de La Fouly (VS) où le service inconditionnel aux villa geois-e-s, touristes et alpinistes est une valeur cardinale.

A vous, aux îles Caïmans ou au val Ferret, la rédac-tion de « moneta » vous souhaite un bel été !

Cathy Savioz | [email protected]

doSSIER PRInCIPAL : PETIT mAIS dE quALITé4 le dossier en pHotos

de Regula Schaffer

6 Fascination irrationnelleL’or, mythe et réalité

8 îles Caïmans, monaCo... L’argent sale des petits pays

12 les logements redeviendront-ils plus petits ? On peut vivre dans moins d’espace

13 bactéries Petites, dangereuses et indispensables à la vie

14 bas salaires, bonus élevés   Quel écart salarial demeure acceptable ?

16 petits projets, grands eFFets Incubateurs de projets durables

17 des rappeurs deviennent promoteurs de musique   Nation Music joue sa propre partition

22 petit et bien Fourni Un amour de supermarché

23 savoir agir, mais sur quelle base étHique ? Bon pour l’esprit et l’âme des enfants

PAGES bAS18 22e assemblée générale de la BAS, le 24 mai 2013, à Fribourg 20 Fin des obligations de caisse physiques 20 « moneta » : apprécié, mais légèrement vieillot 20 Un vent de renouveau souffle sur le conseil d’administration

En PERSonnE 24 il Faut plus de solidarité Réfugié-e-s : des victimes, pas des ennemi-e-s

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6 moneta #2 // 19 juin 2013

Fascination irrationnelle __Posséder de l’or passe pour le summum de la richesse, même si personne n’en a besoin pour vivre. une vieille ambivalence qui, dans le « Faust » de Goethe, a poussé marguerite à déclamer « Tout se presse après l’or ; de l’or tout dépend. Ah ! pauvres que nous sommes ! »

L’or, mythe et réalité

//__Le mythe de l’or est ancien et universel. Il a contami-né les pharaons de l’Egypte antique, les rois de Mésopo-tamie, les empereurs de Chine comme les rois des Incas et des Mayas en Amérique. Tous ont contraint leurs es-claves à extraire ce métal jaune du sol au prix de leur sang, de leur sueur et de leurs larmes. L’histoire de l’or est plus profondément enracinée dans la culture égyptienne que celle du monothéisme. Il y a 5000 ans que l’or a com-mencé à réifier la splendeur et la gloire des pharaons. Ce n’est qu’environ 2000 ans plus tard que Moïse a apporté la loi du seul vrai dieu de l’Egypte, qui exige la soumission absolue de ses fidèles et les en remercie par la vérité et la vie éternelles. Comme le rapportent les égyptologues, le développement de la civilisation dans la vallée du Nil re-pose sur la nécessité d’organiser l’irrigation et l’industrie minière. Le rôle suprême de l’or n’a pas tant tenu à sa fonction de moyen d’échange qu’à ses propriétés phy-siques, idéales pour confectionner des bijoux représen-tant divinités et pharaons. Cet élément inaltérable et inoxydable a symbolisé la grandeur, la beauté et l’éter- nité des rois-dieux. Un mythe demeuré intact.

Coïncidence ou non, la disparition des pharaons est survenue à peu près en même temps que l’intensification de l’usage de l’or en tant que moyen de paiement. Les pre-mières pièces d’or ont circulé en Asie-Mineure et en Perse au VIe siècle avant J.-C. Plus tard, les Grecs et les Romains ont frappé des pièces d’or, tout comme les Celtes au nord des Alpes. Au début du Moyen Age, la frappe de monnaie a diminué, pour reprendre son expansion alors que se dé-veloppait le commerce avec l’Orient au XIe siècle. Depuis, l’utilisation de l’or comme moyen d’échange a augmenté jusqu’à son apogée sous forme d’étalon-or international, en vigueur des années 1870 à l’éclatement de la Première Guerre mondiale, en 1914.

Le « Vreneli » accepté dans tous les paysCe régime fixait, pour la monnaie de chaque pays, un rap-port légalement défini avec une certaine quantité d’or phy-sique. Les billets de banque donnaient le droit d’obtenir à tout moment, auprès d’une banque, la quantité d’or indi-quée par leur valeur nominale. De 1865 à 1914, la Suisse fit partie de l’Union monétaire latine avec la France, la Bel-

Les lingots d’or sont en grande partie devenus de simples objets de spéculation.

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gique, l’Italie et la Grèce. Les pièces d’or suisses, appelées « Vreneli », pouvaient servir de moyen de paiement dans tous les pays avec un rapport de 1 :1. L’Allemagne, l’Angle-terre, les Etats-Unis ou encore la Russie organisèrent leur système monétaire selon le même modèle.

Par rapport aux monnaies des autres pays également basées sur l’étalon-or, le coût effectif du transport de l’or définissait automatiquement une variation maximale. Si-tôt que le cours du jour d’une monnaie allait au-delà ou en deçà de la valeur définie de l’or, il valait la peine d’im-porter ou d’exporter des pièces d’or. Londres abritait le négoce fondé sur ces écarts, car la livre sterling était alors la monnaie la plus répandue dans le monde.

Après la Première Guerre mondiale, l’Empire britan-nique fortement affaibli tenta en vain de réétablir l’éta-lon-or avec la livre comme monnaie de référence. L’éco-nomiste John Maynard Keynes qualifia en 1923 l’étalon-or de « relique barbare ». Il estima plus tard que le krach boursier de 1929 avait largement contribué à la dépres-sion des années 1930 à cause de la banque centrale qui aurait été encore engluée dans le dogme de l’étalon-or, empêchant ainsi l’augmentation de la masse monétaire en circulation, favorable à la croissance.

Les Accords de bretton WoodsAprès la Seconde Guerre mondiale entrèrent en vigueur les accords signés à Bretton Woods (dans le New Hampshire, aux Etats-Unis). Visant à instaurer un système monétaire mondial, ils n’aboutirent qu’à placer un étalon-or affadi sous le joug étasunien. Le système monétaire du bloc occi-dental fut organisé autour du dollar US, avec un rattache-ment nominal à l’or. Les Etats-Unis étaient tenus d’accep-ter — en tout temps et en quantité illimitée — les dollars des banques centrales et de les échanger contre la quantité d’or correspondante. Dans les années soixante, les Etats-Unis imprimèrent tant de dollars pour financer la guerre du Vietnam et leur déficit budgétaire que les accords de Bret-ton Woods s’effondrèrent. En 1971, le président Richard Nixon abrogea la convertibilité du dollar en or et, en 1973, le rattachement fixe du taux de change fut aussi supprimé. Il n’y a depuis lors plus de lien entre l’or et la monnaie, même si la plupart des banques centrales détiennent en-core une partie de leurs réserves en lingots.

La récente initiative sur l’or des conseillers nationaux UDC Lukas Reimann et Luzi Stamm ainsi que de l’ex-conseiller national Ulrich Schlüer vise un retour en ar-rière. Elle réclame l’interdiction de vendre l’or de la Banque nationale suisse et exige qu’il représente au moins 20 pour cent de ses actifs. En raison de la forte proportion de devises, sa part est présentement inférieure à 10 pour cent. Cinq mille années d’histoire, résumées ici en quelques lignes, peuvent expliquer rationnellement du mythe actuel de l’or. Sa capacité unique de préserver la ri-chesse à long terme justifie aujourd’hui encore son pou-voir de séduction. En Inde, en Chine, en Arabie saoudite et dans les Etats du Golfe, la classe moyenne en plein es-sor convertit généralement ses économies en métal jaune plutôt qu’en actions, obligations et produits dérivés. En Europe et aux Etats-Unis, les pessimistes achètent de l’or parce qu’elles et ils voient baisser la valeur des monnaies ou redoutent une évaporation hyper-inflationniste.

Valeur sur le marché et valeur intrinsèque déconnectéesL’or extrait à ce jour dans le monde totalise 160 000 tonnes, réparties à égalité entre bijoux et lingots. Malgré la

forte diminution des cours survenue à la mi-avril 2013, cette quantité vaut 7 billons de francs suisses. A l’instar de toutes les matières premières, la valeur de l’or sur le mar-ché ne tient pas à l’offre et à la demande du métal phy-sique, mais à la spéculation sur l’or scriptural. Environ 90 pour cent du commerce de l’or est virtuel, sans dépla-cement physique de matière, mais seulement de papiers valeur et dérivés basés sur l’or et négociables. Comme c’est généralement le cas dans la spéculation sur les matières premières, les obligations contractuelles sont compensées par un paiement correspondant à la valeur de l’or. Ce ne serait pas possible autrement, car il existe trop peu d’or physique.

Le négoce de l’or tient du mythe. Sauf après des crises graves comme une révolution ou une guerre perdue, les acheteuses et acheteurs sont toujours majoritaires. Il ne serait sinon pas rentable pour les sociétés minières de continuer l’extraction malgré l’augmentation rapide des coûts. Les personnes qui possèdent de l’or ne le vendent qu’en cas de nécessité absolue, alors que la demande grimpe en flèche notamment en Chine, en Inde, en Ara-bie saoudite et dans les Emirats arabes unis.

La valeur à long terme de l’or physique a fortement augmenté au cours du siècle dernier. En 1911, on pouvait acheter 50 onces d’or avec 1000 dollars US. Après la baisse de la mi-avril de cette année, 50 onces coûtaient pas moins de 70 000 dollars US. L’or s’en tire bien même en comparaison avec le cours des actions. En 2000, une unité de l’indice S&P du marché étasunien des actions va-lait 170 grammes d’or. A l’été 2011, elle ne valait plus que 14 grammes. Après l’effondrement du cours de la mi-avril, c’était le double, c’est-à-dire 28 grammes.

Telle est la réalité du mythe de l’or.__//

Gian Trepp | [email protected]

Mauvaises mines

La face sombre de l’augmentation de la demande d’or physique, ce sont les méthodes de production des mines et raffineries d’or, souvent socialement et écologiquement catastrophiques. Il n’y a plus de mine d’or en Suisse  depuis longtemps, mais les quatre raffineries du pays comptent parmi les dix principales du monde. En 2011, le pays a importé 2671 tonnes d’or brut, dont environ 900 tonnes en provenance des mines, ce qui représente un tiers de l’extraction annuelle mondiale. Y compris, comme toujours, de l’« or sale ». Ainsi, selon un reportage de l’émission « Weltspiegel » diffusée sur la première chaîne de télévision allemande, la raffinerie tessinoise Valcambi – propriété du géant minier américain Newmont – transforme de l’or de la mine Yanachocha, au Pérou. C’est là que la police a abattu en juin 2012 cinq personnes qui protestaient contre la destruction de l’environnement. Les  recherches menées par les journalistes allemands ont révélé que la police  locale a agi en complicité avec les compagnies minières. La Société pour les peuples menacés (SPM) et le conseiller national Cédric Wermuth ont exigé que les raffineries suisses aient désormais l’autorisation de traiter seule-ment de l’or brut dont l’extraction se déroule dans le respect des droits  humains et des normes environnementales.   GT

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//__Jadis, l’Angleterre dominait le monde. De l’Empire britannique ne demeure aujourd’hui qu’une poignée de minuscules territoires, no-tamment dans les Caraïbes. Ces petites îles semi-souveraines ont leur propre juridiction et sont devenues des repaires pour les transactions financières douteuses. S’il est une personne qui connaît parfaitement le jeu du chat et de la souris auquel se livrent flibustiers de la finance et autorités fiscales sur ces plaques tournantes extraterritoriales, c’est bien Rudolf Elmer, qui a travaillé dans les îles Caïmans pour la banque zurichoise Julius Bär. Lanceur d’alerte, il a largement contribué à mettre en lumière le monde souterrain des escrocs d’envergure inter-nationale. Quant à l’urgence de mettre enfin la main sur le trésor d’argent sale caché au milieu des palmiers et des bananiers, voici ce qu’il déclare à « moneta » : « Je sais où sont les fonds qui manquent pour payer l’éducation, l’infrastructure et les retraites ainsi que pour venir en aide aux personnes pauvres dans le monde. »

Les trusts blanchissent l’argent Les révélations de ce printemps sur le scandale des paradis fiscaux, bap-tisées Offshore Leaks, montrent que les sociétés de fiducie (trusts) des Caraïbes soutiennent efficacement l’évasion fiscale. Les actes de fidu-cie (trust deeds) sont incarnés par des avocats retors, maîtrisant l’art de présenter comme légitimes des actes légaux d’un point de vue tech-nique, mais pourtant bel et bien illégitimes, comme le souligne Nicho-las Shaxson dans son livre à succès Les paradis fiscaux : enquête sur les ra-vages de la finance néolibérale. Abrités derrière cette façade discutable, les véritables propriétaires tirent les ficelles en coulisses sans être inquiétés. Plusieurs sociétés de fiducie s’enchevêtrent souvent pour faire capoter les enquêtes d’autorités fiscales étrangères. On peut par exemple constituer une première société-écran dans les îles Caïmans, une deuxième dans les îles Vierges et une troisième aux Bahamas. Fina-lement, l’argent noir transitera longtemps et dans tous les sens par des banques au Panama ou au Guatemala, jusqu’à ce que même le plus fin limier ne puisse plus identifier les « structures » dépersonnalisées à l’ori-gine des fonds. Les échanges automatiques d’informations bancaires annoncés début mai par plusieurs paradis fiscaux des Caraïbes ne pour-ront rien y changer : n’étant pas des banques, les trusts ne tombent pas sous le coup de cette réglementation. On ne peut donc pas savoir de quel individu proviennent les fonds en fiducie.

//__Un tempo, il mondo era do-minato dall’Inghilterra. Dell’Im-pero britannico oggi restano solo alcuni minuscoli territori, so-prattutto in area caraibica. Si tratta di alcune isolette in parte sovrane con potestà giuridica propria, che sono diventate la breccia attraverso la quale s’infil-trano i loschi affaristi. Rudolf El-mer, che un tempo operava nelle Isole Cayman per conto della banca zurighese Julius Bär, cono-sce a menadito il gioco a rimpiat-tino tra truffatori finanziari e au-torità fiscali in queste piattaforme offshore. Vuotando il sacco, ha contribuito notevolmente a por-tare alla luce il mondo occulto dei banditi della finanza interna-zionale. Elmer sottolinea a « mo-neta » quanto sia urgente mettere finalmente le mani su questi ca-pitali in fuga, nascosti tra palme e banane : « So dove sono i soldi che mancano per pagare l’istru-zione, le infrastrutture e le pen-sioni, e per aiutare i più poveri del mondo. »

I trust e il riciclaggio di denaro sporcoSecondo le rivelazioni emerse la scorsa primavera, a seguito del cosiddetto Offshore Leaks, i trust dei paesi caraibici sono effettiva-mente un mezzo efficace per frodare il fisco. I prestanome di

questi contratti di trasferimen - to di beni (trust deed) sono scal-tri avvocati finanziari, maestri nell’arte « di far sembrare legit-time operazioni tecnicamente legali, ma in realtà non con - sen tite », come rileva Nicholas Shaxson nel suo bestseller « Le isole del tesoro. Viaggio nei pa-radisi fiscali dove è nascosto il tesoro della globalizzazione ». Dietro questa facciata discutibi-le, i veri proprietari reggono le fila, indisturbati. Per fare arenare nella sabbia le eventuali indagi-ni delle autorità fiscali straniere, i trust vengono per lo più anni-dati gli uni negli altri, secondo il principio delle scatole cinesi. Per esempio, si può costituire una prima società schermo nelle Iso-le Cayman, una seconda nelle Isole Vergini e una terza alle Ba-hamas. I fondi neri fanno tanti di quei giri, tramite le banche di Panama o del Guatemala, che neanche il più abile dei segugi ri-esce ad identificarne l’origine, se non nella forma di « strutture » spersonalizzate. Verosimilmen-te, non cambierà nulla, nemme-no con lo scambio automatico di informazioni sui dati bancari annunciato all’inizio di mag - gio da molti paradisi fiscali di area caraibica. I trust infatti, non essendo banche, non sono sog getti a questa normativa. Sa-

îles caïmans, monaco, andorre et les autres__

Trusts et fondations, comptes numérotés, fraude immobilière, exonération fiscale : derrière la jolie façade de petits, voire microscopiques Etats, les forbans de la finance trouvent toutes sortes de possibilités pour leurs transactions douteuses.

L’argent sale des petits pays

isole cayman, monaco, andorra e cHi più ne Ha più

ne metta __Trust e fondazioni, conti cifrati, frodi immobiliari, paradisi fiscali : dietro la facciata do-rata dei piccoli e piccolissimi stati, finanzieri senza scrupoli hanno opportunità a bizzeffe di fare affari discutibili.

I soldi sporchi dei microstati

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un refuge contre le fisc La Principauté de Liechtenstein propose ce genre de services finan-ciers opaques. Ainsi, dans ce que l’on appelle des fondations de fa-mille, un seul administrateur fiduciaire connaît le nom de la fonda-trice ou du fondateur, qui peut choisir très librement le but de sa fondation et la dissoudre à tout moment. Compte tenu de l’évasion fiscale endémique, Kurt Beck, alors président des sociaux-démo-crates allemands, a dénoncé des « chevaliers pillards des temps mo-dernes ». Dans une entrevue parue dans le magazine allemand Der Spiegel, le prince Hans-Adam a rétorqué à ces accusations que son pays serait un refuge contre les « chevaliers pillards du fisc ». Consé-quence de cette attitude récalcitrante, la Principauté a rejoint la liste des paradis fiscaux non coopératifs selon l’OCDE. Cette pression a eu un effet : le petit pays a fait appel à un expert renommé, le Suisse René Brülhart, pour prendre la tête de son unité des renseignements finan-ciers et lutter contre le blanchiment d’argent. Cela a permis que la Principauté sorte de la liste déshonorante en 2009. Cependant, la fraude fiscale et le blanchiment d’argent sont encore possibles dans les fondations anonymes liechtensteinoises, ainsi que l’explique Mark Herkenrath, expert fiscal d’Alliance Sud, la communauté de tra-vail de six organisations suisses d’entraide : « Comme la Suisse, la principauté fait toujours partie des places financières les moins trans-parentes du monde. »

rà pertanto impossibile risalire all’origine del denaro.

un baluardo contro la polizia tributariaAnche il Principato del Liechten-stein offre servizi finanziari poco trasparenti. Nelle cosiddette fon-dazioni di famiglia, per esempio, solo un fiduciario conosce il nome del fondatore, che è so-stanzialmente libero di scegliere la finalità della fondazione, scio-gliendola in qualsiasi momento. Le frodi fiscali imperversano a tal punto da indurre Kurt Beck, ex presidente dei socialdemocratici tedeschi, a parlare di « cavalieri predoni moderni ». In un’intervi-sta al settimanale « Der Spiegel », il principe Hans-Adam ha repli-cato a queste accuse affermando che il suo paese è un rifugio dal-

le « ladronerie delle autorità fi-scali ». Per la sua renitenza, il Principato è finito sulla lista OCSE dei paradisi fiscali non col-laborativi. Queste pressioni han-no prodotto qualche risultato : il piccolo stato ha designato lo svizzero René Brülhart, che ha fama di uomo energico, ai vertici della sua Financial Intelligence Unit. Sta di fatto che l’esperto è riuscito ad ottenere che nel 2009 il Principato venisse cancellato dalla lista della vergogna. La fro-de fiscale e il riciclaggio di de-naro sporco possono tuttavia continuare dietro lo schermo dell’anonimato delle fondazioni del paese, come spiega Mark Herkenrath, esperto fiscale di Al-liance Sud, Comunità di lavoro per la politica di sviluppo di Swissaid : « Con la Svizzera, il

blanchir de l’argent ne pose guère

de problème dans ces refuges que sont

les paradis financiers.

nei paesi-rifugio dei paradisi fiscali riciclare

denaro sporco è un gioco da ragazzi.

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Principato resta una delle piazze finanziarie mondiali meno tra-sparenti. »

I conti criminali del VaticanoNel maggio 2012, Brülhart ha ab-bandonato Vaduz per diventare, qualche mese dopo, direttore dell’organismo di controllo del Vaticano, con la stessa missione. Il Ministero degli Esteri statunitense aveva infatti inserito il Vaticano tra i paesi sotto osservazione poi-ché sospettati di riciclaggio di de-naro sporco. Finora, sembra però che Brülhart abbia ottenuto ben poco : all’inizio di gennaio di quest’anno, la Banca Centrale ita-liana ha accusato lo Stato della Chiesa di violazione degli stan-dard internazionali antiriciclaggio in materia di pagamenti elettroni-ci. In febbraio, Ettore Gotti Tede-schi, direttore della Banca Vatica-na fino a maggio 2012, è stato ascoltato per la seconda volta dal Procuratore della Repubblica. La prima perquisizione domiciliare (giugno 2012) era stata fatta nell’ambito di un’indagine sulle bustarelle versate per la vendita di elicotteri militari italiani all’India. In quell’occasione, gli investigato-ri avevano messo le mani su bozze di lettere di Gotti Tedeschi al Papa, secondo cui, stando ai resoconti della stampa, la Banca Vaticana sarebbe depositaria di conti cifrati per politici ed esponenti della ma-lavita organizzata. In occasione del recente interrogatorio di Gotti Tedeschi, all’inizio di febbraio 2013, si è invece parlato del suo coinvolgimento nel crollo della terza banca italiana, il Monte dei Paschi di Siena.

monaco : un patrimonio esentasse di miliardiMentre il Vaticano tiene il suo patrimonio ben nascosto, i Prin-cipi di Monaco hanno un ap-proccio diametralmente oppo-sto. Il Principe Alberto stila addirittura il bilancio trimestrale del suo piccolo paese di 202 etta-ri e 36 000 abitanti, come se si trattasse di un’azienda quotata in Borsa. Quest’« azienda » viene protetta dal più elevato numero di poliziotti pro capite al mondo. Le forze dell’ordine vegliano sul-la sicurezza di 39 banche che ge-stiscono un patrimonio com-plessivo di 78 miliardi di euro

per conto dell’élite finanziaria internazionale (dieci miliardi in più delle banche cipriote prima della serrata). Il Principato di Monaco non preleva nessun tipo di imposta patrimoniale. Come spiega Mark Herkenrath, quest’e-senzione dagli oneri fiscali non è illegale : « Sta di fatto però che i ricchissimi abitanti di Monaco spesso beneficiano di numerosi servizi pubblici negli altri paesi europei senza contribuire a fi-nanziarli attraverso le imposte. »

Andorra, rifugio dei capitali spagnoliRispetto a Monaco, Andorra tie-ne un profilo basso. I ricchi ven-gono attirati nel Principato pire-naico da tasse basse e immobili residenziali dai prezzi relativa-mente accessibili. Per godere di questi vantaggi bisogna investire almeno 400 000 euro in loco, dopodiché si ottiene un permes-so di residenza che a sua volta dà accesso alle sei banche del paese. Queste pratiche sono diventate a malapena più trasparenti, sebbe-ne l’OCSE, quattro anni fa, sia ri-uscito ad ottenere a forza un’at-tenuazione delle norme sul segreto bancario. Come ha rive-lato un insider andorrano al quo-tidiano spagnolo « El País » : « Qui non si può più investire come un tempo. Ma possiamo comunque mostrare come farlo a Panama o alle Bahamas. » Ciò nonostante, non sempre va tutto per il verso giusto. La giustizia spagnola, per esempio, è attualmente alle cal-cagna del clan Pujol, insediato per decenni nella stanza dei bot-toni della politica catalana. Al centro delle indagini, l’origine e la destinazione di 34 milioni di euro che i Pujol hanno trasferito ad Andorra e in una dozzina di altri paesi. Quest’esempio mo-stra che l’evasione fiscale è or-mai un fenomeno planetario. I nascondigli più gettonati sono il Lussemburgo, l’Isola di Jersey, Guernsey, l’Isola di Man, Gibil-terra, Malta, Singapore, Hong-kong, Macao, Vanuatu e le Isole Marshall. Anche alla Svizzera viene periodicamente rinfaccia-to l’occultamento di capitali, e per questo viene messa sotto pressione anche in questo mo-mento : di questo tema « moneta » si occuperà anche in futuro.

Comptes blanchis au Vatican En mai 2012, René Brülhart a démissionné de son poste à Vaduz ; il est devenu quelques mois plus tard directeur de l’Autorité d’informa-tion financière du Vatican. Le Département d’Etat des Etats-Unis avait auparavant placé le Vatican sur une liste de pays sous observation, en raison de soupçons de blanchiment d’argent. Toutefois, René Brülhart semble avoir pour l’instant obtenu peu de résultats : début janvier 2013, la Banque centrale italienne a suspendu tous les paiements électroniques de l’Etat pontifical pour non-respect des normes anti-blanchiment. Et en février, Ettore Gotti Tedeschi, directeur de la Banque du Vatican jusqu’en mai 2012, a comparu pour la deuxième fois devant le ministère public italien. Une première perquisition a eu lieu en juin 2012 pour enquêter sur des pots-de-vin dans le cadre de la vente d’hélicoptères militaires italiens à l’Inde. La justice a aussi mis la main sur des brouillons de lettres d’Ettore Gotti Tedeschi au pape, desquels il ressort — selon des articles parus dans la presse — que la Banque du Vatican gère des comptes numérotés pour des respon-sables politiques et des pontes du crime organisé. Enfin, lors de la ré-cente audition d’Ettore Gotti Tedeschi début février 2013, il a été question de son implication dans l’effondrement de la capitalisation boursière de la banque Monte dei Paschi di Siena, la plus ancienne au monde et la troisième plus grande en Italie.

monaco : des milliards exonérés d’impôt Alors que le Vatican demeure muet sur sa fortune, la Maison princière monégasque agit tout à fait à l’opposé. Pour son petit Etat de 36 000 âmes sur 202 hectares, le prince Albert publie un rapport trimestriel comme une société cotée en bourse. Une « société » protégée par la plus grande présence policière par habitant-e au monde. Cette force de sé-curité surveille aussi les 39 établissements bancaires abritant les avoirs de l’élite financière internationale à hauteur de 78 milliards d’euros — 10 milliards de plus que les banques chypriotes avant leur mise à ge-noux. Monaco n’impose pas la fortune. Bien que cette exonération fis-cale ne soit pas illégale, Mark Herkenrath trouve « choquant que de riches Monégasques profitent de nombreux services publics dans les autres pays européens sans contribuer à leur coût via les impôts ».

Fuite des capitaux espagnols vers l’Andorre En comparaison avec Monaco, l’attrait de l’Andorre paraît plutôt mo-deste. Cette principauté pyrénéenne cherche donc à attirer les riches grâce à un taux d’imposition bas et à des logements relativement abor-dables. Pour profiter de ces avantages, il faut investir au moins 400 000 euros en Andorre. La contrepartie est un permis d’établissement don-nant accès aux six banques du pays. Leurs pratiques sont devenues presque transparentes, bien que l’OCDE ait requis il y a quatre ans un assouplissement des règles de confidentialité. « Vous ne pouvez plus investir ici comme auparavant. Mais nous pouvons vous montrer comment le faire à Panama ou aux Bahamas », a révélé un initié andor-ran au journal espagnol El País. Tout ne tourne pas rond pour autant. Ainsi, le pouvoir judiciaire espagnol est actuellement aux trousses du clan Pujol, qui fut pendant des décennies aux commandes de la poli-tique catalane. La question est : d’où viennent et où sont allés les 34 millions d’euros que les Pujol ont fait transiter par l’Andorre ainsi que par une douzaine d’autres pays ? Cet exemple prouve que les montages facilitant l’évasion fiscale s’étendent désormais à tout le globe. Les ca-chettes les plus courantes sont en particulier le Luxembourg, Jersey, Guernesey, l’île de Man, Gibraltar, Malte, Singapour, Hongkong, Ma-cao, Vanuatu et les îles Marshall. La Suisse, constamment accusée de dissimuler des fonds est donc aussi sous pression — un sujet auquel « moneta » continuera à s’intéresser.

maurice, plaque tournante des matières premières L’Etat insulaire qu’est la République de Maurice s’éveille. Rudolf El-mer a travaillé jusqu’en 2010 dans le secteur financier mauricien et est retourné dans le pays ce printemps : « J’ai été sidéré de voir à quel

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mauritius, piattaforma delle materie primeAnche lo stato insulare di Mauri-tius è in fermento : fino al 2010, Rudolf Elmer operava nell’in-dustria finanziaria mauriziana. Questa primavera si è nuova-mente recato sull’isola : « Sono rimasto a bocca aperta nel con-statare lo sviluppo delle infra-strutture in due anni e mezzo. Nel centro delle attività finanzia-rie, i grattacieli delle banche Bar-clays, HSBC, Standard Bank of Africa e PricewaterhouseCoopers sono spuntati come funghi. » Mauritius diventerà la piattafor-ma per gli scambi elettronici e la porta della Cina verso l’Africa. Nonostante una popolazione di appena 1,3 milioni di abitanti, secondo Elmer, tra il 2010 e il

2012 Mauritius ha investito di-rettamente in India circa 55 mi-liardi di dollari. Non c’è dubbio che sotto le palme dell’Oceano Indiano stia crescendo una gi-gantesca piattaforma per l’inter-scambio di materie prime tra l’Africa, la Cina e l’India, un nuo-vo paradiso per transazioni fi-nanziarie di ogni genere. __//

Elias Kopf | [email protected]

Per maggiori informazioni :www.taxjustice.netwww.swisswhistleblower.comLettura consigliata :Nicholas Shaxson : Le isole del tesoro. Viaggio nei paradisi fiscali dove è nascosto il tesoro della globalizzazione. Feltrinelli, 2012

Echange immobilier frauduleux sur le mont Athos

Les petites principautés et le Vatican ne sont pas seuls à se retrouver sur  la liste des suspects : le mont Athos, sur la presqu’île égéenne de la Chalci-dique, en Grèce, les a rejoints. Comme les îles britanniques des Caraïbes, cette république monastique autonome bénéficie de l’exemption de toute taxe douanière ou fiscale de l’Union européenne. Selon un article publié dans le quotidien « Neue Zürcher Zeitung », de plus en plus de monastères  du mont Athos revendiquent de prétendues donations de terrain dans un passé lointain. Les moines du lac Vistonida peuvent témoigner qu’il y a beaucoup d’argent à la clé. Ce plan d’eau situé au nord-est du mont Athos aurait été prétendument cédé voilà mille ans par l’empereur byzantin.  En 2008, avec la complicité de fonctionnaires corrompus, les moines ont  surestimé la valeur de ce parc naturel isolé et ont échangé le lac contre 260 biens fonciers sous-évalués du gouvernement grec, entraînant une perte de 100 millions d’euros pour le secteur public. Ce n’est qu’en décembre 2011 que l’archimandrite Ephrem, supérieur du monastère et cerveau de l’opération, a quitté sa cellule de Vatopédi pour en rejoindre une d’un autre genre dans une prison d’Athènes.   EK

Permute immobiliari dubbie sul Monte Athos

Oltre ai piccoli principati e al Vaticano, nel cono d’ombra è entrato anche un luogo sacro come il Monte Athos, sulla Penisola Calcidica greca, affacciata sull’Egeo. Questo territorio autonomo monastico rappresenta un’enclave doganale e fiscale a sé stante rispetto al territorio dell’Unione Europea, come le isole caraibiche britanniche. Secondo «NZZ», un numero crescente  di monasteri del Monte Athos accampano pretese sulla base di presunte  donazioni di terre avvenute in tempi remoti. Quanto ci sia da guadagnare,  i monaci l’hanno mostrato con il lago di Vistonida. Questo bacino situato  nel Nord-Est della Grecia sarebbe stato donato al Monte Athos dall’impera-tore bizantino 1000 anni fa. Nel 2008, con l’aiuto di governanti corrotti,  i monaci hanno sovrastimato il parco naturale, situato in un’area remota, scambiandolo con 260 lotti di terreno di proprietà dello Stato greco,  sottostimati rispetto al valore reale. Il danno per la collettività è stato di  100 milioni di euro. Secondo quanto riferisce «Der Spiegel», il «gran bu-rattinaio» di quest’operazione, l’abate del Monte Athos Efraim, ha potuto  essere arrestato solo nel dicembre 2011, nel monastero di Vatopedi, da  dove è stato trasportato in un carcere di Atene.   EK

point l’infrastructure s’est développée en deux ans et demi. Les gratte-ciel des banques Barclays, HSBC et Standard Bank of Africa et de la so-ciété d’audit PricewaterhouseCoopers poussent dans le centre finan-cier. » Maurice deviendra certainement la plate-forme d’échange électronique et la porte de la Chine vers l’Afrique. En outre, selon Ru-dolf Elmer, bien que l’île ne compte que 1,3 million d’habitantes et d’habitants, près de 55 milliards de dollars d’investissements directs ont été réalisés en Inde depuis Maurice. Aucun doute : sous les pal-miers de l’océan Indien pousse une gigantesque plaque tournante pour le négoce de matières premières entre l’Afrique, la Chine et l’Inde. Un nouveau paradis pour toutes sortes de transactions finan-cières.__//

Elias Kopf | [email protected]

Informations supplémentaires :  www.taxjustice.netwww.swisswhistleblower.comLecture recommandée : « Les paradis fiscaux : enquête sur les ravages de la finance »,  Nicholas Shaxson, éd. André Versaille, 2012

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12 moneta #2 // 19 juin 2013

les logements redeviendront-ils plus petits ?__Chaque personne habite aujourd’hui dans plus de 50 mètres carrés en moyenne. Voilà qui explique aussi l’inexorabilité de l’étalement urbain. des projets voient le jour pour enrayer cette tendance.

On peut vivre dans moins d’espace

juguler, l’objectif suprême est aujourd’hui l’aménagement du territoire. Certains maîtres d’ouvrage et investisseurs ont pris des me-sures ; des coopératives zurichoises ont déjà diminué leurs exigences quant à la taille des logements. A Zurich, dans le quartier du Ma-negg, un grand ensemble résidentiel verra le jour sous le nom de Green City, avec une forte proportion de logements coopératifs, dans un quartier visant les critères de la so-ciété à 2000 watts. Réduire l’empreinte éco-logique nécessite des habitations plus petites. Les investisseurs commerciaux cherchent, eux aussi, des pistes inédites. Dans les nou-veaux quartiers du Glattpark à Opfikon, au nord de Zurich, l’importateur de voitures

AMAG possédait depuis longtemps un terrain à bâtir. Il a lancé, avec le cabinet de conseils immobiliers Wüest & Partner, un concours d’architecture pour un édifice de cent petits appartements de 40 mètres carrés chacun, pour un loyer d’environ 1000 francs par mois. Les architectes ayant participé au concours ont conçu des plans ingénieux avec une utilisation optimale de l’espace : rien à voir avec les « clapiers à lapins » des années 1960 et 1970. Un projet du bureau zurichois Emi-Architekten l’a emporté, avec de hauts plafonds et des jardins d’hiver intégrés dans lesquels il sera même possible d’installer un lit surélevé. Ces appartements intéresseront surtout des personnes qui voudront emmé-nager en ville, mais n’auront rien trouvé de convenable ou d’abordable dans le centre, ou qui ne vivront ici qu’une partie de la semaine. Il est donc prévu de proposer un service fa-cultatif de type hôtelier. Et l’immeuble dispo-sera d’espaces de rencontre afin de remédier à la relative étroitesse.

Peu d’expériences avec le « logement minimal »Les planificatrices et planificateurs sont cer-tains que ce genre d’habitation fera office de premier pied-à-terre, en tout cas dans le péri-mètre des villes. Reste à voir si des gens s’y installeront pour longtemps. Les expériences sont encore rares en Europe. Les projets de logement minimal (minimal housing) exis-tants sont destinés à un court séjour, comme chambre d’étudiant, appartement de va-cances ou hébergement d’urgence.

Mais certaines personnes passent toute leur vie dans quelques mètres carrés, par exemple au Japon. Les petits appartements y ont une longue histoire et on en a construit beaucoup. Même si le projet zurichois n’est pas minimaliste à la japonaise, un apparte-ment de 40 mètres carrés est déjà un effort si-gnificatif contre l’étalement urbain. Bien que Kati Schindler ne dispose pas de la moitié de cette surface dans sa roulotte.__//

Anna Sax | [email protected]

//__Il y a peu de gens comme Kati Schindler. Quand elle ne vit pas sur l’alpage en été pour y garder des animaux, elle se contente des 16 mètres carrés de sa roulotte. « Evidemment, on doit toujours se demander si les choses sont vraiment utiles ou non et souvent faire de l’ordre », tient-elle à préciser. Pour vivre dans un si petit espace, y dormir et y mettre un bureau, il faut mûrement penser l’organi-sation et consentir de temps en temps à un réagencement : les vêtements d’hiver sous le lit en été et vice-versa. Kati Schindler a même la place de faire du yoga. Il n’y a toutefois ni cuisine ni salle de bain dans son ancienne roulotte de cirque. Elle dépend d’une infras-tructure externe, « mais d’une façon ou d’une autre, ça va », dit-elle. Sa roulotte est devenue sa maison, « l’une des rares constantes dans ma vie ». Cela tient à son travail. En plus de son engagement comme alpagiste, elle exerce des emplois très différents : organiste dans deux communes de la vallée de Schams, dans le canton des Grisons, superviseuse de civi-listes participant à des projets écologiques, aide agricole ici ou là. Agricultrice de métier, elle a géré une exploitation l’an dernier, mais l’appel de la vie en roulotte a été plus fort que l’idée de s’installer à la ferme.

Peu de gens sont capables de vivre dans un espace si exigu. La plupart rêvent d’un loge-ment plus grand et déménagent sitôt qu’une occasion se présente. D’où une utilisation du sol toujours plus importante, sans que l’on sache trop comment interrompre cette ten-dance. Les appartements de trois pièces nou-vellement construits mesurent 100 à 120 mètres carrés. Les quatre pièces tels qu’ils ont été réalisés en ville il y a cent ans couvrent 70 à 75 mètres carrés et sont souvent occupés par une seule personne. C’est pourtant une famille de cinq ou six personnes qui y vivait jadis, souvent même avec une ou un sous-locataire.

Toujours plus de mètres carrésLa demande en surface actuelle, combinée à la croissance ininterrompue de la popula-tion, conduit à l’étalement urbain. Pour le

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Cette roulotte de 16 mètres carrés offre un espace habitable nettement inférieur à la moyenne.

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bactéries__Par le passé, peste, choléra, lèpre et tuberculose ont dépeuplé des régions entières. Ces maladies comme d’autres sont causées par des bactéries, de minuscules organismes parfois dangereux, mais le plus souvent inoffensifs, voire indispensables à la vie.

Petites, dangereuses… et indispensables à la vie

//__Elles sont sur Terre depuis longtemps, sans doute plus que toute autre forme de vie. On les a découvertes et iden-tifiées comme risque sanitaire au XVIIe siècle, et vu que de nombreuses maladies sont dues à des bactéries, nous les craignons et luttons vigoureusement contre elles. La peur des germes pathogènes n’est pas fortuite, car ils sont ex-trêmement flexibles et déjouent tôt ou tard les médica-ments destinés à les combattre. Mais ce que l’on ignore trop souvent, c’est que dans leur grande majorité, les or-ganismes microscopiques sont inoffensifs, utiles, voire indispensables. La valeur des « bonnes » bactéries est lar-gement sous-estimée.

Nous nous efforçons d’attaquer avec des détergents et autres produits de nettoyage antibactériens les milliards d’organismes invisibles avec lesquels nous partageons notre habitation, nos vêtements et notre corps. Pourtant, si une hygiène absolue est importante dans un hôpital, elle n’a aucun sens dans la vie de tous les jours. A la mai-son, les produits antibactériens sont non seulement inu-

tiles, mais nuisibles aussi bien pour l’environnement que pour nous-mêmes. Ils tuent également les « bonnes » bac-téries et sont à l’origine de nombreuses allergies.

Les bactéries vivent par billions dans notre intestin, notre salive et sur notre peau. Sans flore intestinale, pas de digestion, donc pas de vie ; sans flore cutanée, pas de protection contre les micro-organismes de l’extérieur. Les enfants qui grandissent dans un environnement trop sté-rile développent davantage d’allergies et ont un système immunitaire plus faible que ceux qui ont commencé à ramper dans une étable. Il existe aussi des bactéries qui éliminent la saleté que nous laissons dans l’eau et dans l’air. Elles se chargent de l’épuration biologique des eaux usées et sont même capables de décomposer d’énormes nappes de pétrole en mer. Dans le sol, les bactéries sont nécessaires à la préparation des substances qui nour-rissent les végétaux.__//

Anna Sax | [email protected]

chronique

Le nain bleu//__Un nain bleu est assis au bord de l’univers. Ses jambes pendent dans le vide. Il fait sa lessive. Derrière lui tourne le sèche-linge. Pour faire passer le temps, il a installé un télescope : la vue depuis le bord de l’univers est impre-nable. Le nain observe sa galaxie préférée à travers l’ins-trument et aperçoit sur une petite planète bleue des créa-tures, beaucoup de créatures, qui naviguent dans de petits bateaux sur une vaste étendue d’eau bleu sale. Parfois, une embarcation disparaît. Certaines créatures ont des plis au-dessus des yeux, se tiennent sur des caisses et parlent devant des caméras. Elles prononcent des mots comme « sauvetage », « austérité » et « Fonds européen de stabilité financière ». D’autres, fort nombreuses, bran-dissent des images, vocifèrent, sifflent et brûlent des dra-peaux bleus ornés d’étoiles couleur or sale. Elles crient « Du travail ! », « Escrocs ! » et « Dégagez ! ». Soudain, d’autres créatures surgissent et frappent celles qui hurlent avec des bâtons. Le nain a du mal à se retenir de rigoler. Quel peuple amusant ! Il se tient les côtes. Il braque ensuite son objectif sur des QqarrrKKKk en cinq dimensions qui

s’adonnent à leur jeu favori consistant à respirer du KCaKüQq, un genre de musique non répétitive sous forme gazeuse, dans des trous de ver. Dans les profon-deurs où tous ces trous se rejoignent réside ZqurZzQ, gé-nérateur de nombres aléatoires antimatière, qui produit un nouveau SssuNNsz, une sorte de son, avec 666 666 pixels prélevés dans l’histoire de l’univers.

Oups ! Il semble qu’en riant, le nain ait décalé son té-lescope quelques galaxies vers la gauche, plus exactement en direction de la planète WwWrSSt. Il le déplace vers la droite pour retrouver sa préférée, la petite bleue. TOUT y est recommencement. Encore des drapeaux enflammés, des créatures qui en tapent d’autres avec des bâtons. Des qui crient. D’autres qui brûlent. Feu. Fumée. Bateaux qui coulent. Le nain bleu se dit : cette boule bleue est comme moi, petite, mais costaude ! Puis il prend ses vêtements secs et s’en va.__//

Jürg Odermatt | [email protected]

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14 moneta #2 // 19 juin 2013

//__Notre revenu n’est pas seul à déterminer notre degré de satisfaction : nous nous com-parons aussi aux autres. Les femmes ne voient pas pourquoi elles gagnent en moyenne 677 francs par mois de moins que des hommes ni plus qualifiés ni plus expéri-mentés qu’elles. Une personne qui confec-tionne des aliments ne touche que les deux tiers environ de quelqu’un qui travaille dans l’industrie du tabac. En déménageant de l’Arc lémanique au Tessin, on peut faire une croix sur un bon millier de francs de salaire men-suel. Une partie de ces écarts peut s’expliquer par des différences de valeur ajoutée ou de coût de la vie ainsi que par l’échelle régionale des marchés du travail. Cependant, quel que soit l’angle sous lequel on le considère, l’écart salarial croissant, soit le rapport entre la ré-munération la moins élevée et la plus élevée dans une même entreprise, est toujours plus injuste. Les chiffres montrent qu’il ne se jus-tifie pas par des facteurs liés au marché ou à la performance, mais — comme dans le cas du salaire des femmes — à la seule discrimi-nation. Les excès salariaux au niveau direc-torial de nombreuses sociétés suisses sont contraires à toute logique économique.

L’écart salarial se creuse En Suisse, l’explosion des revenus dans les classes supérieures et les plus élevées a contri-bué, ces dernières années, à l’augmentation continuelle de l’écart de rémunération. Les

bas salaires ont stagné alors qu’il n’existe aucun plafonnement. L’organisation faîtière syndicale Travail.Suisse suit cette évolution depuis de nombreuses années. En 2012, chez Novartis, le rapport entre le salaire le moins élevé et celui du PDG Joseph Jimenez a été de 1 :219. Le directeur de Roche Severin Schwan a même gagné 261 fois la plus basse rétribu-tion de son entreprise, encaissant ainsi en-core plus d’argent que l’année précédente.

Mais pourquoi est-ce inéquitable, alors que le pouvoir d’achat des couches sociales à faible revenu ne bouge pas malgré l’écart sa-larial ? Pour Martin Flügel, président de Tra-vail.Suisse, l’équité tient également à la pos-sibilité de justifier les différences : « Quand le grand patron gagne deux cents ou trois cents fois le plus bas salaire de son entreprise, ce n’est plus justifiable. Nous nous trouvons alors face à un problème de justice sociale. » Martin Flügel distingue une tendance : à l’ombre des acteurs mondiaux comme UBS et Novartis, l’écart salarial croît aussi rapide-ment dans des sociétés plus petites et typi-quement suisses comme Clariant ou Lonza, entre autres.

Comment détermine-t-on les salaires ? La notion de salaire « équitable » est une af-faire complexe. Un revenu doit-il permettre de subsister et, si oui, à une personne ou à toute une famille ? Doit-il reposer sur le be-soin ou sur la performance ? Dans ce dernier

cas, comment la mesurer ? Quel rôle doivent jouer l’expérience ou l’ancienneté ? Dans son ouvrage récemment paru sur l’initiative « 1 :12 », l’économiste, entrepreneuse et poli-ticienne Jacqueline Badran s’est mise en quête du principe d’égalité, posant la ques-tion des « proportions de l’inégalité justi-fiée ». Elle explique les bases des principes d’équité, de besoin et de performance. Sur le marché du travail, ce dernier principe de-vrait aboutir à quelque chose comme « l’éga-lité de la performance », mais cela semble ne pas fonctionner, en particulier entre niveaux hiérarchiques. « Il reste à déterminer ce que devrait être un écart salarial équitable entre, par exemple, un cadre supérieur et une res-ponsable administrative », écrit Jacqueline Badran. Si elle ne s’offusque pas de la diffé-rence de rémunération des performances, elle se demande pourquoi une personne qui touche l’aide sociale doit se justifier jusque dans le moindre détail alors que « l’accumu-lation de richesses et l’inégalité salariale n’ont pas besoin d’être légitimées ».

La performance de plus en plus évaluée Au cours des dernières années, l’importance des paiements spéciaux a augmenté par rap-port aux salaires normaux, tout particulière-ment dans la finance et les assurances. Près d’un cinquième du total des rémunérations versées par les banques en 2010 l’a été sous la forme de bonus. Selon l’Enquête suisse sur la structure des salaires, 31 pour cent des hommes, mais seulement 23 pour cent des femmes reçoivent une part de leur revenu en bonus. Ce que l’on appelle les « avantages so-ciaux » (ou fringe benefits) a aussi gagné en importance, qu’il s’agisse d’une place de sta-tionnement gratuite, d’un téléphone mobile ou de chèques Reka. Les hommes profitent davantage que les femmes des bonus et avan-tages sociaux, comme l’a déterminé l’organi-sation de femmes actives Business & Profes-

bas salaires, bonus élevés__du point de vue du personnel, les négociations salariales pour 2013 ont été à peu près convenables, notamment vu le renchérissement annuel de – 0,7 pour cent en 2012. Le pouvoir d’achat des ménages a pu être maintenu. Les motifs de grogne tiennent toutefois à l’écart salarial qui s’est amplifié ces dernières années : les petits salaires restent petits tandis que les gros n’arrêtent pas de grossir.

Quel écart salarial demeure acceptable ?

Il n’y a pas de réponse claire quant à ce que devraient être des salaires équitables et, surtout, un écart salarial équitable. Le débat s’intensifiera ces prochains mois.

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sional Women Switzerland il y a un an (lire « moneta » 1/2012). Les syndicats se plaignent d’une tendance persistante à l’individualisa-tion du salaire plutôt qu’à son universalisa-tion. Selon Travail.Suisse, cela renferme « le danger de l’arbitraire et du favoritisme » dans les entreprises dont le système de rémunéra-tion n’est pas transparent. Comme l’a révélé le quotidien alémanique Tages-Anzeiger à la mi-mai, la distribution de bonus chez Novar-tis a tourné au vinaigre cette année, car le budget des primes a été épuisé trop vite et de nombreux membres du personnel ont vu leur part réduite au strict minimum.

même des entreprises alternatives ont un système salarial à composante variable Le salaire unitaire a longtemps été la norme dans de nombreuses entreprises alternatives et organisations à but non lucratif. Les dé-cisions étaient prises collectivement et les fonctions dirigeantes réparties sur toutes les têtes. Aujourd’hui, seules quelques entre-prises comme l’hebdomadaire alémanique de gauche Wochenzeitung (WOZ) ont mainte-nu de façon cohérente la collectivité et l’uni-té salariale. Ainsi que le confirme fièrement Alessio El Mais, employé à la réception et aux archives de la WOZ, les cinquante collabora-trices et collaborateurs — qui se partagent une trentaine de postes à plein temps — per-çoivent un revenu mensuel brut de 5000 francs. D’autres organisations comme la Dé-claration de Berne (DB), qui se consacre à des questions de politique de développement, ont abandonné le salaire unitaire. La DB a en-gagé un directeur et nommé des responsables de département, ce qui se reflète aussi dans la structure salariale. Selon le porte-parole de la DB Oliver Classen, la croissance soutenue et le regroupement des sections (auparavant réparties par région linguistique) ont rendu cette étape nécessaire : « L’introduction de ni-veaux hiérarchiques exprime une profession-nalisation. Une organisation de notre taille ne peut plus fonctionner efficacement dans le collectif. »

Il n’y a pas de réponse claire quant à ce que devraient être des salaires équitables et, surtout, un écart salarial équitable. Le débat sur l’égalité s’intensifiera ces prochains mois et années, en Suisse, car plusieurs initiatives populaires visent une nouvelle répartition entre bas et hauts revenus (lire encadré).__//

Anna Sax | [email protected]

www.juso.ch/fr/initiative-1-a-12 www.salaires-minimums.ch www.inconditionnel.ch 

Lecture recommandée : les ouvrages de Thomas Paine  (1737 – 1809), intellectuel, pamphlétaire et révolutionnaire an-glais puis américain, à l’origine du concept du revenu de base.

L’écart salarial à la BAS est de 1 :3,66

Les bonus excessifs versés par les banques ont largement contribué au lancement de  l’initiative 1 :12. Pour ce qui est des salaires aussi, la BAS montre qu’il existe une autre voie. Ses statuts fixent un écart de rémunération maximal de 1 :5. Fin 2012, l’écart réel était bien plus faible, soit de 4120 à 15 078 francs par mois, ou 1 :3,66. L’échelonnement repose sur  le principe du salaire justifiable selon les tâches, les qualifications et le cahier des charges. Chaque fonction dans l’entreprise fait l’objet d’une évaluation et d’un classement avec  la participation du personnel. Il n’y a pas de bonus. Les revenus des membres du conseil d’administration et de la direction sont publiés dans le rapport d’activité. En outre, les  salaires de toutes les collaboratrices et de tous les collaborateurs sont publics au sein  de la BAS.   SR

Une loi pour des salaires plus justes

En ce moment, trois initiatives populaires portent sur la question de l’équité salariale.  La personne qui perçoit le plus haut salaire dans une entreprise ne doit pas gagner  chaque mois davantage que ce que touche en un an l’employé-e dont la rémunération est la plus basse. C’est ce que réclament les Jeunes socialistes avec leur initiative popu-laire « 1 :12 – Pour des salaires équitables ». L’ancrage de la limite supérieure du salaire dans la Constitution vise à mettre un terme à l’explosion du revenu des dirigeantes et di-rigeants. Le vote devrait avoir lieu en novembre 2013. 

A l’autre extrémité de l’écart salarial, on trouve l’initiative sur les salaires minima de l’Union syndicale suisse « Pour la protection de salaires équitables ». Elle exige un salaire minimal légal de 4000 francs par mois, soit selon les syndicats le strict nécessaire pour qu’une personne puisse vivre de son revenu en Suisse. L’initiative a abouti il y a plus d’un an ; elle est en cours d’examen par la Commission de l’économie du Conseil des Etats.

Quant à l’initiative populaire fédérale « Pour un revenu de base inconditionnel », elle  a obtenu fin mai les 100 000 signatures nécessaires. Ses initiatrices et initiateurs reven-diquent 2500 francs par mois pour chaque adulte : une sorte de rente qui assurerait une existence digne à toute la population. Cela permettrait de libérer du temps pour des  activités auxquelles on se consacre avec plaisir, mais qui ne rapportent rien ou peu, ou encore pour des formations continues, un engagement culturel ou politique, etc. En outre, le travail accompli aujourd’hui bénévolement serait rémunéré. Le comité d’initia-tive prévoit de déposer les signatures à la Chancellerie fédérale le 1er août prochain.   SR

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16 moneta #2 // 19 juin 2013

petits projets, grands eFFets__Les incubateurs aident les jeunes entreprises dont l’activité repose sur un projet durable. Souvent, ces incubateurs sont eux-mêmes des projets-pilotes.

Incubateurs d’idées durables

//__Une bonne idée ne suffit pas toujours à fonder une en-treprise, mais elle en est l’impulsion décisive. Il faut en-suite du savoir-faire et un capital, qui ne sont pas faciles à trouver non plus. Pas plus en Suisse qu’ailleurs. Mais cela pourrait changer grâce aux nouvelles aides au dé-marrage proposées aux jeunes entrepreneuses et entre-preneurs. Elles mettent la priorité sur les valeurs sociales et prennent la durabilité en compte. On les appelle « incu-bateurs ». A Viège, BlueArk soutient des projets qui aug-mentent la production d’électricité d’origine hydrau-lique. A Orbe, TecOrb parraine des jeunes pousses dans les secteurs du développement durable, des technologies de l’environnement ou des énergies renouvelables. En Suisse alémanique, The Hub Zurich, Cewas ou Ashoka aident des projets à but non lucratif dans le domaine so-cial ou environnemental, à l’échelle mondiale.

Hub Zurich a pris racine en 2011 dans la ville au bord de la Limmat. Il est lui-même une jeune pousse qui sou-tient et met en réseau d’autres jeunes pousses. La fonda-tion du Hub a été rendue possible, entre autres, grâce à un prêt du Fonds d’innovation de la BAS. L’idée du Hub n’est nouvelle qu’en Suisse : il existe trente structures similaires dans le monde, de Londres à Johannesburg. The Hub Zu-rich propose par exemple une quarantaine de postes de travail à louer pour 490 francs par mois.

Mais il a fallu s’organiser au préalable. Il est compara-tivement facile, en Suisse, de trouver un emploi bien ré-munéré, rappelle Niels Rot, membre de l’équipe fonda-trice du Hub Zurich. Dans sa troisième année, The Hub Zurich a atteint 70 pour cent de ses capacités et ses reve-nus sont sur la bonne pente. En plus des différentes entre-prises en démarrage, on y trouve des travailleuses et tra-vailleurs indépendants ainsi que des personnes employées par de grandes entreprises. Ce mélange est l’un des atouts de l’endroit. Les jeunes pousses peuvent établir des rela-tions avec des juristes, des spécialistes de la finance ou encore des Webmaster, et développer ainsi leurs projets.

Sur le thème de l’eau Un incubateur dont la mission est limpide se trouve à Willisau, dans le canton de Lucerne. Cewas (International Centre for Water Management Services) a ses bureaux de-puis 2011 à l’étage au-dessus de la fabrique de meubles Wellis. Il se consacre à un seul thème : la gestion durable de l’eau. Pour chaque programme d’un an, Cewas fournit une infrastructure, établit le contact avec des expertes et experts, propose des formations. Michael Kropac, co-directeur, décrit la structure comme internationale, « dans les universités, au moyen de lettres d’information, par le biais d’organisations partenaires ou de communautés

d’anciennes étudiantes et anciens étudiants ». Des entre-preneuses et entrepreneurs du Zimbabwe, d’Iran et du Ve-nezuela ont rejoint le premier programme. Le troisième cours démarrera en septembre 2013. L’expérience est fi-nancée par des dons et par les contributions aux frais des personnes participant aux cours. Le canton de Lucerne et le Seco apportent aussi leur soutien. Michael Kropac sou-ligne que « Cewas n’est pas impliqué dans les entreprises en démarrage et conserve donc son indépendance ».

Une des premières jeunes pousses que Cewas a pu contribuer à mettre sur pied est Wasser für Wasser (« Eau pour eau »), dont l’idée est la suivante : des établissements de restauration servent et font payer l’eau du robinet en carafe, puis ils consacrent l’argent ainsi encaissé à des projets dans d’autres régions du monde pour y permettre l’accès à l’eau potable. Un autre exemple est Aquasis So-lutions, où des spécialistes aident des entreprises indus-trielles à améliorer leur bilan environnemental. Des chimistes et ingénieur-e-s en environnement mesurent la consommation d’eau et d’énergie ainsi que le coefficient d’utilisation du sol pour proposer des améliorations concrètes.

Incubateur étasunien Ashoka est un incubateur provenant des Etats-Unis et ac-tif dans le monde entier, y compris en Suisse depuis peu de temps. Il a même récemment ouvert sa propre repré-sentation pour la Suisse allemande. Là aussi, l’activité porte exclusivement sur des projets durables et sociaux. Le soutien vise des personnes en emploi, mais voulant lancer une nouvelle idée de façon indépendante. Elles peuvent obtenir des conseils d’Ashoka et postuler pour une bourse de trois ans. Parmi les bénéficiaires, citons Christiane Daepp, enseignante bernoise qui a ainsi pu dé-velopper son Ideenbüro (« Bureau d’idées »), dans lequel des élèves conseillent leurs camarades plus jeunes avec l’appui de travailleuses et travailleurs sociaux. D’ici 2016, il devrait y avoir 600 « Bureaux d’idées » dans toute la Suisse. Pour Ashoka, il était important que le projet ait un rapport avec sa propre histoire, explique Christiane Daepp. Elle a voyagé pour rencontrer d’autres bénéfi-ciaires d’un soutien, en Allemagne, avant que les réu-nions aient lieu en Suisse. Par ailleurs, dans l’incubateur, on peut aussi profiter de l’appui de consultant-e-s de McKinsey en matière d’élaboration de plans d’affaires. Ashoka fonctionne comme intermédiaire : elle collecte des fonds dans les milieux économiques et cherche de jeunes pousses éligibles.__//

Andreas Kneubühler | [email protected]

dossier

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portrait de crédit

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sérieux et à avoir travaillé avec », se souvient Florian Rieser. Ils se considèrent plutôt comme des soutiens discrets, des décideurs d’arrière-plan. Voilà comment, pas à pas, d’une petite entreprise produisant tout d’abord de la mu-sique pour un marché de niche, Nation Music s’est occupée de plus en plus du marketing et de la distribution. Ils ont géré ou distribué des noms bien connus comme Seven, Bligg, Sek-tion Kuchikäschtli, Phenomden ou Gimma, ce qui leur a permis de percer. Un disque d’or orne déjà les murs de l’entreprise : « Vendre plus de 25 000 CD de hip-hop suisse aléma-nique est déjà un joli résultat », souligne avec satisfaction Florian Rieser.

nouveau siège, nouvelle banqueNation Music est devenue une société. Marc Brandtner et Florian Rieser en sont au-jourd’hui les deux propriétaires et ont démé-nagé le siège d’Aarau à Zurich. Ils ont égale-ment changé de banque. « Il nous aurait probablement semblé étrange de voir un banquier cravaté arriver dans nos bureaux », note Florian Rieser, qui ne peut s’empêcher de rire en regardant sa tenue : t-shirt et ber-muda. Leur fiduciaire leur a recommandé la BAS et les choses sont devenues claires dès le premier entretien. « Nous nous considérons avant tout comme faisant partie de la scène culturelle. » Le courant a donc rapidement passé avec la BAS. Depuis lors, jusqu’à huit

personnes travaillent pour Nation Music, parfois en collaboration extérieure. « Vu que nous occupons encore une niche musicale, nous avons un avantage sur la concurrence », relève Marc Brandtner. Nation Music est res-tée fidèle au hip-hop. Mais ce style compte- t-il encore vraiment après vingt ans ? Marc Brandtner sourit : « On l’a souvent déclaré mort et pourtant il s’épanouit encore. » Pas d’inquiétude à ce sujet. Mais Nation Music s’occupe maintenant d’artistes dans plusieurs autres genres musicaux, un exemple récent étant la Zurichoise Anna Känzig, jeune et ta-lentueuse chanteuse de folk, country, jazz et pop. Parfois, l’agence accepte aussi des man-dats de promotion de labels internationaux qui n’ont pas de représentation en Suisse ou ne s’y trouvent plus, car la situation est morose dans l’industrie de la musique. Les ventes de CD ont chuté, le revenu des télé-chargements numériques ne compense pas la diminution des ventes. En revanche, les concerts continuent à attirer un vaste public. Quand des groupes de l’étranger cherchent un contact pour le marché suisse ou veulent s’y produire, Nation Music peut les aider grâce au réseau tissé au fil du temps avec des organisateurs locaux.

Parrainage de groupes en devenirAdolescent déjà, Florian Rieser avait saisi le rôle central que l’internet allait jouer sur la scène musicale. Le site www.aightgenossen.ch est un magazine en ligne aussi bien qu’une plate-forme d’échange entre les musiciennes et musiciens et leurs fans. Sur www.hiphop-store.ch, on trouve non seulement de la mu-sique, mais également tout ce qui s’y assortit, de la casquette aux chaussures en passant par les lunettes de soleil et les t-shirts.

Nation Music a commencé il y a deux bonnes années à parrainer des groupes en de-venir et scolaires. « Nous proposons un kit de démarrage grâce auquel les jeunes groupes peuvent par exemple diffuser leur musique sur l’internet ou sur CD », explique Marc Brandtner. Ce service est payant, mais il per-met au groupe de se faire connaître. Personne d’autre n’offre cela en Suisse. Nation Music peut compter sur son réseau dense. La petite équipe ne tarit pas de passion et d’enthou-siasme pour dénicher et promouvoir sans ré-pit de nouvelles et nouveaux artistes.__//

René Hornung | [email protected]

//__« Tout vient de notre passion de jeunesse. » Les souvenirs assaillent Marc Brandt ner dans la salle de réunion de Nation Music, aména-gée dans un immeuble de bureaux récem-ment rénové aux environs de l’Albisrieder-platz, à Zurich. Son allure, comme celle de Florian Rieser — tous deux propriétaires de Nation Music — a changé, mais leur label et leur agence de promotions ne renient pas leurs origines. Aujourd’hui toutefois, leur ho-rizon musical s’est élargi, notamment à la musique noire comme le rap, le reggae et la soul, mais aussi à la pop, la chanson à texte ou au jazz et à la country folk.

Quatre jeunes gens se sont rencontrés par hasard sur scène il y a près de vingt ans et ont rapidement décidé de faire quelque chose en-semble : Marc Brandtner, dessinateur-électri-cien avec une prédilection pour le graphisme et la photographie, faisait de la musique et des CD. Florian Rieser, informaticien, admi-nistrait déjà le site web www.aightgenossen.ch, resté à la pointe de l’actualité. Comme le constate Marc Brandtner, « après quelques rencontres, tu sais avec qui tu peux et veux travailler, qui arrive à l’heure et qui a fait le travail comme convenu ».

disque d’or pour du hip-hop en dialecteNation Music s’est d’abord consacrée au hip-hop suisse alémanique. « Nous sommes proba-blement les premiers à avoir pris ces artistes au

Les anciens hip-hoppers de nation music promeuvent aujourd’hui des musiciens et des musiciennes de diverses orientations musicales.

des rappeurs deviennent promoteurs de musique__Plus jeunes, les gens de nation music étaient fans de hip-hop, puis se sont engagés sur la scène musicale. Aujourd’hui, ils sont devenus des promoteurs importants pour de nombreux artistes.

Nation Music joue sa propre partition

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L’assemblée générale a élu à une nette majori-té les quatre nouveaux membres du conseil d’administration proposés. Après quelques dé-parts ces dernières années, l’effectif du CA est repassé à onze personnes. Cinq sont des femmes et trois sont originaires de Suisse ro-mande. Eric Nussbaumer, qui reste président, a dirigé l’AG avec son habituelle maestria.

Dans son discours d’ouverture, Eric Nuss-baumer s’est réjoui des 1636 nouvelles clientes et nouveaux clients qui ont rejoint la BAS l’an dernier : « La BAS continue de grandir chaque année. » Mais parmi la clientèle et les actionnaires, de nombreuses personnes pour-raient se demander en quoi cette croissance serait favorable et si la BAS voulait vraiment grandir, a relevé Eric Nussbaumer. Il a la cer-titude que « le développement de la BAS est une bonne chose ». « Nous mettons en pra-tique de façon crédible ce que doit être un modèle bancaire socio-écologique au service de l’économie réelle. (…) En aucun cas nous ne voulons stopper cela. »

Tous les problèmes dont s’occupe le conseil d’administration ne sont pas résolus. La situa-tion des taux d’intérêt demeure difficile. La BAS doit continuer à se différencier, il lui faut davantage de fonds propres et elle doit étayer sa notoriété dans l’économie réelle. Avec la crise bancaire, une nouvelle ère a commencé pour la BAS également, car ce secteur obéit à des réglementations de plus en plus contrai-gnantes. Cela à cause des erreurs d’autres éta-blissements, et non pas de la BAS : elle n’a ja-mais été opaque ni n’a souffert de manque de liquidités. Et elle ne verse pas de salaire ni de bonus indécents. Mais les nouvelles exigences en matière de couverture de fonds propres s’appliquent également à la BAS. Elle aura donc besoin de six millions de francs de capi-tal supplémentaires ces prochaines années, et encore plus à moyen terme.

Eric Nussbaumer a désigné trois champs d’action où poursuivre le développement de la Banque. Premièrement, l’engagement soli-daire doit constituer la motivation première pour souscrire des actions de la BAS. Elle est synonyme d’engagement durable, écologique et social judicieux, lequel doit être bien plus qu’un placement individuel. Deuxièmement, il faut renforcer la confiance dans l’idée commune. Troisièmement, la motivation qui nous anime est globale. La BAS prouve que

l’on peut gagner de l’argent honnêtement et en respectant l’environnement, mais cela ne suffit pas : elle veut s’impliquer davantage pour une meilleure justice sociale.

un nouvel outil et une nouvelle structure Martin Rohner, président de la direction, s’est dit particulièrement fier du lancement des nouveaux outils pour les hypothèques et les crédits de construction, avec lesquels il est possible de mesurer à quel point une nouvelle construction participe au mitage du territoire. Les réactions ont été plutôt positives, mais des critiques se sont aussi élevées. Il a été de-mandé si c’était bien la mission d’une banque que de résoudre des problèmes sociaux. Pour Martin Rohner, la réponse est claire : la BAS assume ses responsabilités.

Au cours de l’exercice 2012 et après avoir analysé l’organisation en détail, la direction et le conseil d’administration ont établi les bases d’une nouvelle structure. La direction passera de trois à quatre personnes, la qua-

trième place étant vacante à ce jour. Ces quatre personnes seront à la tête des secteurs Gestion d’entreprise, Financements, Place-ments ainsi que Logistique et services. La di-rection des domaines d’activités et celle des secteurs ont fusionné, ce qui a permis de re-noncer à un niveau hiérarchique. Cette réor-ganisation a aussi donné lieu à des change-ments au sein du personnel. Le président de la direction a exprimé sa gratitude aux colla-boratrices et collaborateurs qui ont quitté la BAS, dont certaines et certains y travaillaient depuis sa fondation.

L’année 2012 a été fructueuse : 28 000 clientes et clients ont fait confiance à la BAS et lui ont confié 115 millions de francs sup-plémentaires. La somme du bilan a augmenté de 11,1 pour cent. Si la progression devait continuer à ce rythme, le total du bilan de la BAS atteindrait deux milliards de francs d’ici cinq ans. Le portefeuille des crédits est allé pour près de moitié au logement social et coopératif. Le renforcement dans les énergies renouvelables est particulièrement réjouis-sant : leur part s’est élevée à 10 pour cent. La marge brute a été de 6,3 millions de francs (+11 pour cent), le bénéfice net à 705 591 francs. Martin Rohner a remercié toute l’équipe pour son excellent travail.

22e assemblée générale de la BAS, le 24 mai 2013, à Fribourg « La BAS est-elle sur la bonne pente ? »

on recherche des actionnaires supplémentaires_// La bAS ne cesse de grandir, bouclant l’exercice 2012 avec un bénéfice net de 705 000 francs. Ces prochaines années, son capital-actions doit augmen-ter conformément aux récentes exigences en matière de couverture de fonds propres. La situation sur le front des taux d’intérêt reste difficile. L’association du personnel a suscité le débat en votant contre trois des quatre nouvelles et nouveaux membres du conseil d’administration.

Avant l’AG, plus de septante actionnaires ont visité deux entreprises clientes de la bAS et ont pu observer les fruits de leur engagement.

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En 2013, la priorité ira à la gestion de pa-trimoine, aux placements fiduciaires et au Fonds d’innovation. Par ailleurs, il s’agira d’appliquer les nouvelles directives bancaires et d’augmenter les fonds propres.

L’adoption du rapport d’activité a été sui-vie par le message de bienvenue de Marie Garnier, première conseillère d’Etat « verte » du canton de Fribourg. Elle s’est déclarée par-ticulièrement heureuse de l’engagement de la BAS dans le domaine de l’agriculture biolo-gique, ne serait-ce que parce que Fribourg y investit et se trouve sur de bonnes voies pour devenir un « pôle alimentaire ».

Aborder activement les conflits économiques Anita Wymann, vice-présidente du conseil d’administration, et Ulrich Thielemann, de l’organe indépendant de contrôle d’éthique, ont commenté le rapport 2012 de la commis-sion d’éthique sur le thème des conflits éco-nomiques. Vu la faiblesse des taux d’intérêt et une situation économique globale toujours plus difficile, la BAS aurait pu courir le risque de renier ses valeurs. Mais elle les a respec-tées, a assuré Anita Wymann. La Banque ne considère pas ses clientes et clients comme des « porte-monnaie ambulants », mais veut grandir tout en restant une partenaire équi-table et responsable. Ulrich Thielemann en a souligné la signification pour le contrôle d’éthique : aucun effet négatif ne doit résulter des activités de la BAS. En termes d’entrepre-neuriat social, cela implique de modérer la maximisation de l’intérêt individuel. D’où

cette idée : « Nous vivons une époque de sur-accumulation. Il y a beaucoup trop de capi-taux dans ce monde », a conclu Ulrich Thiele-mann. Il a espéré que la réduction nécessaire des capitaux aura lieu et que la BAS sortira renforcée de la restructuration du secteur fi-nancier.

quatre nouveaux membres au conseil d’administration L’assemblée générale a réélu sans discussion et à l’unanimité l’ensemble des membres sor-tants du conseil d’administration. Avec l’élec-tion de quatre membres supplémentaires, le CA visait à retrouver un effectif de onze per-sonnes après les départs des trois dernières années. Il proposait Tineke Ritzema, Sven Li-dén, André Günter et Nicole Bardet comme représentante du personnel (portraits, lire page suivante). En préambule au vote, l’asso-ciation du personnel a informé l’assemblée générale qu’elle ne voterait que pour sa re-présentante et qu’elle s’opposerait à l’élec-tion des trois autres candidat-e-s arguant que huit membres au conseil d’administration de-vaient suffire. Après une brève discussion, au cours de laquelle il a été question de l’activité de Sven Lidén, gestionnaire de capital-inves-tissement privé, les quatre personnes candi-dates ont été élues, malgré quelques opposi-tions et abstentions lors de l’élection de Mme Ritzema ainsi que de MM. Lidén et Günter.

Enfin, l’économiste Christian Arnsperger, qui a étudié pendant un an des sujets d’ordre éthico-économiques à la BAS, a répondu de-

vant l’assemblée générale à la question d’un actionnaire genevois qui s’inquiétait de la création de monnaie scripturale par la BAS. La BAS crée 0,015 pour cent de la masse moné-taire en Suisse, mais différemment des autres banques. Il s’agit malgré tout d’examiner le sujet de manière approfondie et de prendre position vis-à-vis de l’initiative monétative.Anna Sax | [email protected]

D’avantages de photos de l’AG disponible sur:www.bit.ly/photosag13

Souscrivez des actions BAS et soutenez ainsi une économie  sociale et écologique.

Maintenant sur www.bas.ch/actions

L’assemblée générale a approuvé toutes les propositions du conseil d’administration :– le rapport annuel 2012, le rapport du contrôle d’éthique et le rapport de l’organe de révision; – les comptes 2012; – la décharge au conseil d’administration; – l’utilisation du bénéfice inscrit au bilan; – le paiement des dividendes avec les réserves en capitaux; – les modifications statutaires; – l’augmentation du capital-actions; – l’élection de quatre nouveaux membres au conseil d’administration.

Les décisions de l’assemblée générale de la BAS

Renforcez votre participation !

La conseillère d’Etat fribourgeoise marie Garnier salue l’action de la bAS en faveur de l’agriculture biologique.

Les actionnaires ont été invité-e-s à s’exprimer lors de seize votes au total.

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Fin des obligations de caisse physiques

Dès à présent, la BAS n’émettra plus d’obligation de caisse sur papier. Le coût de l’impression, de l’envoi, du paiement des intérêts et du remboursement a constamment augmenté ces dernières années, jusqu’à devenir disproportion-né. En outre, la protection des dépôts ne vaut pour les obligations de caisse que si elles ont été confiées à la banque qui les a émises. 

Rien ne change pour les clientes et clients qui n’ont pas d’obligation de caisse physique. Si vous en possédez, votre conseillère ou conseiller à la clien-tèle prendra contact avec vous avant leur échéance. Mais vous pouvez agir dès maintenant en ouvrant un compte auprès de la BAS et en lui remettant vos obligations de caisse. La remise et le dépôt sont gratuits. 

Pour toute information supplémen-taire : Walter Naegeli, responsable conseil en placement, [email protected], tél. 062 206 16 40.

« moneta » : apprécié, mais légèrement vieillot

Le journal « moneta » est apprécié et beaucoup de gens le lisent volontiers, même s’il devient un peu vieillot. Voilà, en bref, le résultat du questionnaire  envoyé aux lectrices et lecteurs fin 2012. 

Les lectrices et lecteurs aiment les  articles thématiques longs et fouillés, tout comme les comptes rendus sur la BAS et son engagement. La majorité voudrait davantage de textes comme ceux-là, mais ils devraient plus traiter d’économie et en particulier du système financier, sur lequel des explications  et des débats critiques en rapport avec l’actualité seraient bienvenus. 

« moneta » est instructif : d’après les  réponses au questionnaire, les articles sont clairs et d’une bonne longueur  judicieuse. Le rythme de quatre paru-tions par an semble approprié. Les  lectrices et lecteurs souhaitent qu’à l’avenir, le journal soit aussi publié sous forme électronique. 

Sur la base des résultats du ques-tionnaire, un groupe de travail reconsi-dérera et améliorera « moneta » au cours des mois à venir.

Le 24 mai 2013, l’assemblée générale de la bAS a élu quatre nouveaux membres au conseil d’administra-tion. de qui s’agit-il et qu’est-ce qui les motive dans leur nouvelle fonction ?

nicole bardet a 32 ans. Elle travaille depuis 2011 en tant que conseillère en financements à la BAS et représente désormais le personnel au sein du conseil d’administration. « En tant que représen-tante de l’association du personnel au sein du conseil d’administration, je veux donner une image claire de la réalité des employées et em-

ployés dans leurs métiers. Lors de décisions stra-tégiques, je veux que les membres du conseil d’administration connaissent les implications pour le personnel. » En plus de ses activités pro-fessionnelles, elle est présidente de la section fri-bourgeoise de la Fédération romande des consom-mateurs (FRC) et siège au conseil général de la ville de Romont. La BAS en profitera également : « Mon engagement politique et associatif m’a per-mis d’acquérir une certaine expérience dans la négociation et la conciliation d’intérêts souvent divergents. Avec mon expérience au sein d’une grande banque cantonale, mais aussi aujourd’hui en tant que conseillère en financement à la BAS, j’apporterai également une plus-value « métier » au sein du conseil d’administration », explique Nicole Bardet, titulaire d’un bachelor en manage-ment de la faculté des Hautes Etudes Commer-

ciales (HEC) de l’université de Lausanne. Elle vit à Romont avec son mari.

« Avec quinze ans d’expérience dans le secteur bancaire traditionnel, dans le domaine du crédit et de la gestion de fortune, ainsi que huit ans dans la microfinance et le financement solidaire, j’aimerais à nouveau donner un sens plus large à mes engagements et participer à la poursuite du développement de la stratégie de la BAS, de même qu’au développement de la communauté d’aujourd’hui et de demain en rejoignant le conseil d’administration de la BAS » : c’est ainsi

que Tineke Ritzema décrit son intérêt pour la BAS. D’origine néerlandaise et âgée de 47 ans, elle vit à Genève depuis 1995 avec son conjoint et leurs deux enfants. Elle est titulaire d’une maîtrise en économie de l’Université d’Amsterdam et tra-vaille comme conseillère indépendante pour des ONG et des PME dans les domaines du finance-ment et du développement durable. « Dans un monde financier en crise, la BAS montre une al-ternative prometteuse dans laquelle je me recon-nais », ajoute Tineke Ritzema.

Sven Lidén espère pouvoir apporter à la BAS sa longue et riche expérience de conseiller en déve-loppement, entrepreneur, directeur et aussi client de banque : « Après trente-cinq ans de participa-tion active à des placements de capitaux, j’ai beaucoup d’idées quant à la façon dont la BAS pourrait continuer à se développer avec succès. »

Un vent de renouveau souffle sur le conseil d’administration

Les nouveaux membres du conseil d’administration. de gauche à droite : Sven Lidén, nicole bardet, Tineke Ritzema, André Günter.

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01 – 03. 07 Sion

05 – 07. 07 La Chaux-de-FondS

08 – 10. 07 neuChâteL

11 – 13. 07 yverdon-LeS-BainS

15 – 20. 07 LauSanne

22 – 24. 07 Porrentruy

25 – 27. 07 Bienne

20 – 25. 08 genève

26 – 28. 08 Carouge

29 – 31. 08 nyon

02 – 04. 09 vevey

05 – 08. 09 FriBourg ou BuLLe

Films

WadjdaDe Haifaa Al Mansour, Arabie Saoudite, 97 min, 2012

noDe Pablo Larraìn, Chili, 115 min, 2012

La viSite de La FanFare De Eran Kolirin, Israël, 86 min, 2007

Le voLeur de LuMière De Actan Arym Kubat, Kirghizistan, 77 min, 2010

BoMBón – eL Perro De Carlos Sorìn, Argentine, 97 min, 2004

Bike For Bread De Raphaël Jochaud et Claude Marthaler, documentaire, France/Suisse, 26 min, 2013

Informations sur les dates et les heures, les lieux de projection et les abris en cas de pluie ainsi que le blog:

www.cinemasud.ch

Cinéma Sud – le cinéma solaire itinérant d’Helvetas, à vélo et en plein air. L’écran est tendu entre deux arbres, les films sont projetés à l’énergie solaire récoltée durant la journée. Les spectateurs amènent leur siège.

Avec le soutien de:

Titres : frais de transfert plus élevés

Le transfert de titres de la BAS vers  une autre banque est facturé 120 francs par position depuis le 6 mai 2013. En contrepartie, la BAS prend à sa charge tous les frais de tiers liés à un transfert.

Désormais en ligne: Rapport d’éthique 2012

Le rapport 2012 de l’organe de contrôle d’éthique analyse dans quelle mesure  la BAS réussit à rester fidèle à ses valeurs dans le contexte économique actuel  difficile. 

L’intégralité du rapport est disponible dès à présent sous www.abs.ch/ethikbericht/ (en allemand seulement).

Né en 1963, ce citoyen suédois parle couram-ment cinq langues et vit à Freienbach (SZ) avec sa compagne et leurs trois enfants. Il a fait des études en économie et en relations internatio-nales à l’Université de Saint-Gall. Depuis 2011, il est PDG d’Adveq Management SA à Zurich, socié-té active globalement dans la gestion de capital-investissement privé, qui compte un effectif de quatre-vingt-cinq personnes. L’activité de la so-ciété de Sven Lidén dans le domaine du capital-investissement privé a suscité une discussion critique au sein de l’actionnariat. Il connaît par-ticulièrement bien les prescriptions de la Finma, ce qui sera aussi utile à la BAS. Et d’ajouter que, pour lui, « rencontrer de nombreuses personnes passionnantes dans le cadre de ce mandat » constitue une motivation supplémentaire dans ses nouvelles fonctions.

« La BAS est une banque qui a le courage d’avancer de façon cohérente et claire. Elle as-sume sa responsabilité ; elle affirme aussi ses

lignes directrices et sa stratégie vis-à-vis de ses actionnaires, de sa clientèle, de son personnel et de ses partenaires commerciaux », déclare André Günter. Voilà ce qui l’a motivé à rejoindre le conseil d’administration de la BAS. Il ajoute : « J’aimerais que mes connaissances, mon expé-rience et mes idées puissent aider la BAS à conti-nuer à progresser de manière fructueuse. » Agé de 43 ans, il vit à Zurich avec sa compagne. Il est PDG et délégué du conseil d’administration de Sias SA à Hombrechtikon (ZH), une entreprise spécialisée dans l’automatisation du transport de liquides. « Mon acti vité entrepreneuriale actuelle et ma fonction de PDG d’une PME m’ont permis d’expérimenter et de comprendre tout ce qu’il faut pour réussir la mise en œuvre d’une straté-gie. Une formation bancaire approfondie et plu-sieurs années dans un service de révision interne ont développé chez moi une forte prise de conscience des questions de contrôle interne, de gestion des risques et de conformité. »

Un vent de renouveau souffle sur le conseil d’administration

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22 moneta #2 // 19 juin 2013

petit et bien Fourni__C’est au supermarché que bat le cœur du village valaisan de La Fouly. Et l’âme de cet endroit, c’est sa propriétaire, dominique Coppey. depuis 2001, elle amène le soleil à celles et ceux qui séjournent dans cette station familiale – 66 habitant-e-s à l’année – blottie au fond du val Ferret, à près de 1600 mètres d’altitude.

Un amour de supermarché

zaine de minutes en voiture, à Orsières. Et c’est aussi l’un des ingrédients de sa réussite. « Les gens jouent le jeu, je leur en suis très re-connaissante. Nous ne serions rien sans nos clients. Et nous avons aussi de la chance, l’hi-ver cela fonctionne bien grâce au ski – les re-montées sont à deux pas – et l’été, comme nous sommes situés sur le Tour du Mont-Blanc, nous profitons de cette clientèle de randonneurs. » En plus bien sûr de tou-te-s celles et ceux qui louent ou possèdent un chalet au village. En haute saison, la popula-tion atteint, voire dépasse, le millier de per-sonnes dans la station.

Elle et personne d’autreL’épicerie, Dominique Coppey n’est pas tom-bée dedans quand elle était petite. Elle a long-temps travaillé dans un bureau en bas, dans la vallée, à Orsières. Elle et son mari Jean- Benoît, guide de montagne, avaient acquis il y a des années un petit appartement dans un chalet ancien à La Fouly.

Ses trois enfants sont déjà adolescents lorsque la propriétaire du camping de La Fou-ly lui signale que le supermarché du village est à remettre. Elle hausse une oreille, mais passe

à autre chose. « Elle est revenue à la charge, en me disant que c’était moi et personne d’autre qu’elle voyait ici », se rappelle-t-elle en riant. Et de conclure : « Elle avait raison ! »

A l’écoute de sa clientèleLes premières années, son changement de vie lui vaut quelques insomnies. « Je n’avais au-cune idée de la façon dont on gère un stock. Combien de légumes faut-il commander ? Et le pain ? J’ai suivi mon instinct. » Aujourd’hui, elle anticipe les hauts et les bas, sait qu’un week-end à la météo morose sera calme et qu’une belle journée fait fleurir les visiteurs comme les perce-neige au printemps. Et sur-tout, elle connaît sa clientèle fidèle et a tou-jours en stock ce qui lui fera plaisir. Une cliente possède un cochon d’Inde ? « Je m’ar-range pour avoir un concombre lorsque je pense qu’elle va venir. Et je sais que cela lui fera très plaisir. » Si elle n’arrive pas, tant pis, le légume trouvera un autre acquéreur ou donnera une bonne salade. « J’aime ce par-tage, c’est la vie comme elle doit être. »

Au fond, c’est cela le secret du succès de Dominique Coppey : vous donner envie de revenir au village. Même par un jour où le printemps et le beau temps se font désirer. « Vous voyez, j’aime cet endroit parce qu’on a l’impression de pouvoir toucher les mon-tagnes. Au soleil avec les deux glaciers, l’A Neuve et le Dolent, c’est magnifique… ». On se dit que l’on reviendra. Et pour le pique-nique, on passera chercher du pain frais, une bonne saucisse et du fromage au supermar-ché. Et si, par hasard, on a oublié sa crème so-laire ou ses chaussettes, ça n’est pas grave, elle saura nous dépanner.__//

Sylvie Ulmann | [email protected]

//__Habitant-e-s, touristes et alpinistes : toutes et tous ressortent du magasin de Dominique Coppey avec la tête en vacances. « Ici, on fait tout », résume la propriétaire. Du pain, de la viande – de la bonne, elle se fournit chez deux bouchers d’Orsières –, du fromage de la région, des yaourts de brebis et des reines d’Hérens, bref, toutes les denrées imagi-nables. Plus des journaux de Suisse et d’ail-leurs, du vernis à ongles, des collants et des prises électriques, de la vaisselle en plastique ou en porcelaine, des jouets, des produits de nettoyage écologiques… « Si un client ne trouve pas ce qu’il cherche, je m’arrange pour qu’il l’ait le lendemain », souligne la pa-tronne.

Son magasin est ouvert tous les matins de l’année, « oui, même le Premier de l’an, le lun-di de Pâques et tous les jours fériés ». En sai-son, l’ouverture s’étend à l’après-midi. Avec ses quatre employés et son mari qui vient de temps à autre donner un coup de main, elle mise sur une grande disponibilité et un ac-cueil souriant. « On écoute les clients, on prend le temps de causer, on répond ‹Je vais voir ce que je peux faire › ». Voilà ce qui dis-tingue ce supermarché des autres, à une dou-

dominique Coppey propose des spécialités locales dans son supermarché au fond du val Ferret.

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dossier

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savoir agir, mais sur quelle base étHique ?__Les enfants sont censés acquérir des valeurs éthiques à l’école primaire déjà. nul ne conteste cet objectif, mais le contenu d’un tel enseignement est sujet au changement. La philosophie pour les enfants fait ses preuves lorsqu’elle dépasse la religion.

Bon pour l’esprit et l’âme des enfants

//__En Suisse, c’est traditionnellement l’enseignement reli-gieux qui initie les enfants à l’éthique. Les différences entre cantons sont importantes. A Bâle-Ville par exemple, connu pour son multiculturalisme, les Eglises nationales s’oc-cupent à ce jour de l’instruction religieuse à l’école pri-maire. La matière s’appelle encore souvent « biblique ». En la confiant au personnel de l’Eglise, l’Etat économise de l’argent. La participation aux cours est officiellement facul-tative, mais il existe peu d’alternatives : certains enfants vont à la garderie plutôt qu’à l’enseignement biblique, d’autres font des devoirs surveillés. On peut comprendre que la plupart finissent par choisir de suivre l’instruction religieuse. Le contenu de ces heures de religion dépend de qui donne les cours. L’éthique ou l’enseignement des diffé-rentes religions sont traités de manière très variable. Sou-vent, on se contente de lire aux enfants des passages de la Bible. Des exemples montrent que la séparation de l’Eglise et de l’Etat comme celle des rituels et d’une éducation neutre sont fréquemment bafouées.

La situation est bien différente à Genève. Le « fait reli-gieux » a été introduit récemment, en particulier au cycle d’orientation, car il est apparu que les enfants ne savaient parfois rien de Jésus ni de Marie, faute d’instruction reli-gieuse à l’école primaire genevoise. La réaction de l’Eglise réformée a été de se rapprocher des jeunes au moyen d’un théâtre de marionnettes : les Théopopettes. Par ailleurs, l’association proPhilo, qui vise à rendre la philosophie ac-cessible aux enfants et aux adultes, s’est récemment instal-lée en Suisse romande.

Enseigner l’éthique plutôt que la religion« Lehrplan 21 », le programme d’enseignement commun des cantons alémaniques, continue d’insister sur l’impor-tance de l’instruction théologique. A Zurich, la religion et l’éthique sont enseignées dans les petites classes sous l’ap-pellation « nature, humanité, société ». Les pédagogues sou-lignent la différence d’avec l’éducation religieuse tradi-tionnelle : aujourd’hui, c’est « l’enseignement sur les religions » et non plus « l’instruction religieuse » qui pré-vaut. Mais le corps enseignant doit être formé à cela. L’évo-lution de l’éducation religieuse fait l’objet d’une recherche scientifique, dont les résultats utilisables dans la pratique sont à disposition des autorités, des politiques, des écoles et des communautés ecclésiastiques.

Un complément à l’instruction biblique ou religieuse est la philosophie pour les enfants. Conçue spécifiquement à leur intention, elle peut les encourager à mener une ré-

flexion sur l’éthique et sur des questions essentielles. Si les enfants développent eux-mêmes des réponses, cela peut leur apporter plus tard plus que la simple transmission d’une matière. Avec la philosophie pour les enfants, il est aussi possible de proposer une éducation laïque à égalité avec les cours de religion dans un système scolaire séculier.

Eva Zoller Morf, enseignante en philosophie, s’efforce depuis des années de promouvoir cette matière auprès des enfants. Elle voudrait avant tout éveiller leur intérêt en les amenant à se poser des questions. Cet « art de la sagesse » exige un entraînement, car il porte sur les grandes interro-gations de l’humanité auxquelles les enfants réfléchissent volontiers : l’origine, l’amour, la mort, l’amitié, le bonheur. Eva Zoller Morf a aménagé le centre de documentation « s’Käuzli » à Altikon (ZH). Elle doit son inspiration au cé-lèbre professeur Thomas E. Jackson d’Hawaï, qui dirige de-puis 1984 le projet « P4C, Philosophy for children ».

Il existe d’innombrables livres pour enfants qui encou-ragent à parler philosophie avec eux. Entre autres, sur le thème de la mort : Nulle part partout de Gaëtan Dorémus (éd. Autrement) ou A quoi ça sert de vivre si on meurt à la fin ? d’Emmanuelle Piquet (éd. Sarbacane). Ou la collection « Philoz’enfants » chez Nathan. Comme l’explique Eva Zol-ler Morf : « Pour toutes et tous les pédagogues, y compris les parents, ces livres sont une bonne occasion de développer un rapport existentiel avec les enfants. Les différences d’âge et de connaissances sont reléguées au second plan au profit d’une véritable rencontre entre deux êtres humains. » Des dictons peuvent également servir de tremplin à la ré-flexion, par exemple « chacun est l’artisan de son propre bonheur ».

En sensibilisant les enfants et les adolescents aux ques-tions éthiques et philosophiques, en les encourageant à penser par eux-mêmes de façon critique et créative en lien avec la société, on peut les aider à mieux résoudre les pro-blèmes sociaux et écologiques actuels ainsi qu’à mieux ré-partir le bonheur dans le monde.__//

Dominique Zimmermann | [email protected]

Liens et littérature : www.pro-philo.ch Programme national de recherche PNR 58 : www.nfp58.ch/f_index.cfm

Jacques Scheuer, Adolphe Gesché, Kadri Agha, Albert Guigui : « L’être humain  au regard des religions. Hindouisme et bouddhisme, judaïsme, christianisme, islam », Lumen Vitae, 1999. 

Alain de Botton : « Petit guide des religions à l’usage des mécréants »,  Flammarion, 2012.

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24 moneta #2 // 19 juin 2013

en personne

Les citoyen-ne-s suisses viennent de se prononcer sur une nouvelle révision de la loi sur l’asile : comment le comprenez-vous ?Le nombre de révisions de la loi sur l’asile en Suisse est tout à fait remarquable et lié, en par-tie, à la démocratie directe. L’asile est un do-maine qui génère beaucoup de controverses et, entre autres, le Parlement et le peuple se servent régulièrement des instruments à leur disposition pour produire des propositions lé-gislatives. Ce n’est pas mauvais en soi, mais le corollaire, c’est que cela consomme beaucoup d’énergie et de ressources et le système ne gagne pas en efficacité. Il faut répondre aux propositions ; anticiper les changements légis-latifs à venir ; adapter les législations fédérales et cantonales ; vérifier et réviser le traitement de chaque dossier de réfugié-e-s, etc. On a l’impression que le débat est centré sur les peurs et les perceptions négatives. Cela rend plus difficile l’application de solutions prag-matiques qui tiennent compte du fait qu’il s’agit de personnes fuyant la violence et la persécution.

En comparaison internationale, la petite Suisse accueille-t-elle beaucoup de réfugié-e-s ?Il y a environ 43 millions de personnes dé-placées dans le monde. Les deux tiers le sont dans leur propre pays. Les autres franchissent bien la frontière, mais restent, pour le 80 ou 90 pour cent d’entre elles, dans les pays limi-trophes. Prenons le cas de la Syrie. Il y a actuel-lement plusieurs millions de personnes dépla-cées dans le pays ; 1,4 million de réfugié-e-s hors de Syrie, selon les chiffres de l’UNHCR qui augmentent rapidement. Le Liban, pays voisin de 4 millions d’habitants, en a accueilli 400 000 en un an. Proportionnellement, c’est comme si la Suisse recevait 800 000 personnes. En Suisse, les réfugié-e-s, les personnes admises de manière provisoire et les deman-deurs et demandeuses d’asile représentent un pour cent de la population. Il faut plus de solidarité avec les pays qui reçoivent plus de personnes déplacées.

Comment suivez-vous la politique suisse : par médias interposés, en allant sur le terrain ?Mon équipe de quatre personnes, basée à Genève pour des raisons historiques, se rend

Réfugié-e-s : des victimes, pas des ennemi-e-sil Faut plus de solidarité__La Suisse est petite et ne peut ouvrir ses portes à l’immigration : une image souvent brandie dans les débats sur la politique d’asile. Comment le Haut Commissariat des nations unies pour les réfugié-e-s (unHCR) perçoit-il la situation en Suisse ? Entretien avec Susin Park, cheffe du bureau pour la Suisse et le Liechtenstein de l’unHCR.

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Susin Park (*1965)dirige le Bureau pour la Suisse et  le Liechtenstein du Haut Commissa-riat des Nations unies pour les  réfugié-e-s depuis 2009. Cette Amé-ricano-suisse, qui a grandi à Berne, œuvre depuis 1994 pour l’UNHCR, tant à Genève que dans l’Union  européenne, en Bosnie-Herzégovine ou au Kosovo. Elle a étudié à l’Uni-versité Nord-Ouest (Etats-Unis) et à l’Institut universitaire des hautes études internationales à Genève.

souvent à Berne. Nous suivons les médias bien sûr, mais nous entretenons également des contacts directs avec les autorités – fédé-rales, cantonales et municipales – et la socié-té civile. Nous allons aussi sur le terrain. Nous visitons les centres de réception de ré-fugié-e-s et parlons aussi bien avec la popula-tion concernée qu’avec les responsables.

qu’est-ce qui vous étonne dans la politique d’asile en suisse ?Le processus d’asile fonctionne assez bien, quoiqu’on puisse toujours l’améliorer. La du-rée des procédures et le besoin de renforcer la protection juridique sont perfectibles. Il y a aussi une particularité frappante, peu connue, sur le traitement réservé aux personnes dépla-cées par la guerre et la violence généralisée. En Suisse, ce motif n’est pas reconnu, et ces personnes voient leur demande d’asile systé-matiquement rejetée assortie d’un ordre d’ex-pulsion, lequel n’est pourtant pas mis à exécu-tion. Elles reçoivent une admission provisoire sans statut de protection ni autorisation de séjour. Ces cas sont comptabilisés comme des demandeuses et demandeurs abusifs. Par comparaison, les pays de l’Union européenne leur accordent une protection et une autorisa-tion de séjour d’au moins trois ans.

Constatez-vous des différences de sensibilité selon les régions ?La généralité selon laquelle les populations les plus diversifiées sont les plus accueil-

lantes envers les réfugié-e-s et les moins mé-langées les plus craintives se vérifie aussi en Suisse. Quand la peur domine, la marge de manœuvre pour faire face aux situations concrètes se réduit drastiquement.

dans un proche avenir, quel est votre plus gros défi ?Il y en a plusieurs. La plupart des personnes déplacées se trouvent dans les pays du Sud où les flux migratoires sont importants, non seu-lement pour les conflits médiatisés, mais aus-si pour ceux qui sont chroniques et/ou ou-bliés. Les pays limitrophes, qui accueillent la plus grande partie des réfugié-e-s, sont sou-vent pauvres et en équilibre instable. Leurs ressources ne suffisent pas. Ni même celles des acteurs internationaux. En Syrie, on ne couvre pas même les besoins les plus basiques.

L’UNHCR constate aussi un besoin crois-sant de places pour les refugié-e-s qui ne peuvent pas rester là ou ils se trouvent. Les débats sur la restriction des admissions qui ont cours en Suisse et dans d’autres pays in-dustrialisés nous préoccupent. Ce sont l’insé-curité et les persécutions qui font fuir les gens : qu’un pays se ferme, cela ne résoudra rien. C’est un problème global. On a ten-dance à oublier que les réfugié-e-s sont des victimes, pas des ennemi-e-s.

Propos recueillis par Cathy Savioz | [email protected]

Susin Park, cheffe du bureau pour la Suisse et le Liechtenstein du Haut Commissariat des nations unies pour les réfugié-e-s.