pour le diplÔme d’État docteur en mÉdecinedoxa.u-pec.fr/theses/th0245507.pdf · ii b....
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UNIVERSITÉ PARIS VAL-DE-MARNE
FACULTE DE MÉDECINE DE CRÉTEIL
ANNEE : 2006 N°
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THÈSE
POUR LE DIPLÔME D’ÉTAT
DE
DOCTEUR EN MÉDECINE
Discipline : Médecine Générale
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Présentée et soutenue publiquement le
à CRÉTEIL (PARIS XII)
Par DELAYE Virginie
Née le 11 avril 1978 à Saint-Maurice (94)
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TITRE : Les antivitamines K chez le sujet âgé. Étude des facteurs de déséquilibre thérapeutique en milieu gériatrique.
DIRECTEUR DE THÈSE : LE CONSERVATEUR DE LA
M. Le Docteur CHATAP Guy BIBLIOTHÈQUE UNIVERSITAIRE
2
Remerciements
À mes parents, pour leur soutien permanent depuis le début de mes études, leurs
encouragements de chaque instant et leur amour tout simplement. Merci.
À mes grands parents, toujours présents dans mon cœur, qui seraient si fiers
d’être là aujourd’hui.
À Jérome, pour ses conseils, son aide et sa patience. Merci d’être si formidable.
À Colette, Daniel et Renée pour leur soutien.
À Sabine et Guillaume pour leurs encouragements « sucrés ».
À mes amis.
3
Aux membres du jury.
À M. Le Docteur Guy CHATAP, praticien hospitalier à l'hôpital Émile-Roux, qui a accepté
d’être mon Directeur de thèse. Je tiens à l’assurer de ma sincère et profonde reconnaissance pour
le temps précieux qu’il a consacré à ce manuscrit. Son esprit critique et ses conseils auront été
indispensables à la rédaction de cet ouvrage. Sa grande disponibilité, sa gentillesse et ses
encouragements m’ont beaucoup aidé. Je l’en remercie, qu’il trouve ici l’assurance de mon
estime.
Aux Docteurs Chantal LAUREAUX et Catherine CASSEREAU, médecins biologistes à l’hôpital
Émile-Roux, pour leur participation active à la mise en place et à la réalisation de l’étude.
À Mme Le Professeur Sylvie BASTUJI-GARIN, médecin épidémiologiste au CHU Henri
Mondor, pour son aide précieuse dans la phase préparatoire de l'étude et l’analyse statistique des
données.
À M. Le Docteur Jean-Pierre VINCENT, chef de service de Gérontologie 4 à l’hôpital Émile-
Roux, pour m’avoir accueillie dans son service et nous avoir permis de mener l’étude.
À M. Le Docteur Olivier HENRI, chef de service de Gérontologie 1 à l’hôpital Émile-Roux, pour
nous avoir permis de mener l’étude au sein de son service.
À l’ensemble des médecins des services de Gérontologie de l’hôpital Émile-Roux qui ont rempli,
de manière très consciencieuse, les fiches de recueil de données indispensables à la réalisation de
cette étude.
À Christine BOHEC, pour sa gentillesse, sa disponibilité et son aide experte en informatique.
À toutes les personnes que j’oublie, qui m’ont aidé directement ou indirectement dans la
réalisation de ce travail. Merci.
Merci à tous de me pardonner les imperfections qui persistent dans ce manuscrit malgré plusieurs
relectures.
4
TABLE DES MATIÈRES
REMERCIEMENTS PAGES 2-3
TABLE DES MATIÈRES PAGES 4-6
I. INTRODUCTION PAGES 7-8
II. LES ANTIVITAMINES K PAGES 9-21
II A. Pharmacologie des antivitamines K Pages 9
II A 1. Définition, mode d'action, classification Page 9
II A 2. Équilibre thérapeutique sous antivitamine K Page 13
II A 3. Pharmacocinétique Page 14
II B. Indications, contre-indications et surveillance des AVK Pages 15
II C. L’hypersensibilité des sujets âgés aux anticoagulants Pages 18
II C 1. Facteurs pharmacocinétiques Page 19
II C 2. Facteurs pharmacodynamiques Page 20
II C 3. Autres facteurs Page 20
III. MATÉRIEL ET MÉTHODE PAGES 22-24
III A. Matériel Pages 22
III A 1. Critères d’inclusion Page 22
III A 2. Critères d’exclusion Page 23
III B. Méthode Pages 23
III B 1. Le recueil des données Page 23
III B 2. La mesure de l'INR Page 23
III B 3. L'analyse des résultats Page 24
IV. RÉSULTATS PAGES 25-31
IV A. Caractéristiques de la population étudiée Pages 25
IV A 1. Comparaison des 2 groupes Page 25
IV A 2. Caractéristiques du traitement par AVK Page 26
IV B. Les complications hémorragiques Pages 28
5
IV C. Introduction récente de nouveaux médicaments Page 30
IV D. L’influence des pathologies intercurrentes Page 31
V. DISCUSSION PAGES 32-48
V A. Justification des traitements anticoagulants Pages 32
V A 1. La maladie thromboembolique veineuse chez le sujet âgé Page 32
V A 2. La fibrillation auriculaire chez le sujet âgé Page 33
V B. Justification de l'étude Page 34
V C. Les complications hémorragiques liées à l'excès d'anticoagulation Page 35
V D. Les facteurs spécifiques de déséquilibre des traitements anticoagulants Pages 37
V D 1. Les médicaments Page 37
• L’amiodarone Page 37
• Le paracétamol Page 39
• Le tramadol Page 42
• Les fluoroquinolones Page 43
• Le lactulose Page 44
V D 2. Les états pathologiques intercurrents Page 45
• Les états fébriles Page 46
• Les troubles de l’alimentation et la malnutrition Page 47
• La diarrhée et la déshydratation Page 48
VI. LE PROBLÈME POSÉ PAR L’INR PRÉCÉDENT L’INCLUSION PAGE 49
VII. LES LIMITES DE L’ÉTUDE PAGES 50-51
VII A. Limites liées à la population étudiée et au recueil des données Page 50
VII B. Limites liées à la définition de l’anticoagulation excessive Page 50
VII C. Limites liées à l’analyse des résultats Page 51
VIII. RECOMMANDATIONS DEVANT UN RISQUE
DE DÉSÉQUILIBRE DE L’INR PAGES 52-53
IX. LES PERSPECTIVES PAGES 54-58
IX A. Supprimer les limites de l’INR Page 54
6
IX B. L’apport attendu de la pharmacogénétique Page 55
IX C. L’arrivée des nouveaux antithrombotiques Pages 56
X. CONCLUSION PAGE 59
XI. ANNEXES PAGES 60-67
XII. BIBLIOGRAPHIE PAGES 68-75
LISTE DES FIGURES
Figure 1. Schéma de la coagulation Page 9
Figure 2. Apports alimentaires en vitamine K (µg/100 g) Page 10
Figure 3. Mécanisme d’action de la warfarine Page 11
Figure 4. Structure chimique des AVK Page 12
Figure 5. Métabolisme des isomères de la warfarine par les iso-enzymes
du cytochrome P450 Page 15
Figure 6. Principaux points d'impact des nouvelles classes d'anticoagulants Page 57
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1. Les antivitamines K disponibles en France en 2006 Page 13
Tableau 2. Demi-vie des facteurs de coagulation Page 14
Tableau 3. Principales indications gériatriques des antivitamines K Page 16
Tableau 4. Contre-indications gériatriques des antivitamines K Page 17
Tableau 5. Caractéristiques générales de la population étudiée Page 25
Tableau 6. Caractéristiques du traitement par AVK Page 27
Tableau 7. Complications hémorragiques sous AVK Page 29
Tableau 8. Les médicaments en rapport avec un INR excessif Page 30
Tableau 9. Les pathologies intercurrentes et l'excès d'anticoagulation Page 31
LISTE DES ANNEXES
Annexe 1. La fiche de recueil Pages 60-66
Annexe 2. Abaque de prescription de la warfarine pour les sujets âgés Page 67
7
I. INTRODUCTION
Les antivitamines K (AVK) sont une classe thérapeutique largement utilisée. En France,
400 000 à 580 000 individus par an (soit 1% de la population) sont traités par AVK et leurs
indications sont nombreuses (104).
Cependant, leur utilisation expose à des risques hémorragiques parfois sévères, qui
constituent un important problème de santé publique. Les complications hémorragiques liées aux
AVK sont, en France, au 1er rang des accidents iatrogènes et sont responsables, chaque année, de
17 000 hospitalisations, concernant particulièrement des personnes âgées (5 à 10% des motifs
d’hospitalisation après 65 ans et plus de 20% après 80 ans) (22, 50).
Chez le sujet âgé, il existe une susceptibilité accrue aux effets secondaires hémorragiques
des AVK, notamment due au vieillissement physiologique, à l’existence fréquente de
comorbidités et à la polymédication. Cela rend leur utilisation plus difficile, et explique
partiellement leur « sous-prescription » dans cette population, malgré des indications
incontestables. Les sujets âgés représentent la population qui tire le plus grand bénéfice de cette
classe thérapeutique.
En effet, les indications aux AVK augmentent avec l’âge. C’est ainsi que l’incidence
annuelle de la thrombose veineuse profonde passe de 1,8 pour 1000 pour les 65-69 ans à 3,1 pour
1000 pour les 85-89 ans, celle de l’embolie pulmonaire passant de 1,3 à 2,8 pour 1000 pour les
mêmes tranches d’âge. La prévalence de la fibrillation auriculaire non valvulaire passe de 14%
pour les 70-80 ans à 20% pour les 90-100 ans, dans une population qui vieillit : on estime qu’en
2040, 33% de la population aura plus de 60 ans, dont 7 millions de plus de 80 ans (80).
Dans ce contexte, il était intéressant de centrer notre travail sur l’utilisation des AVK chez
le sujet âgé, d’autant qu’il existe peu d’études sur ce thème chez le grand vieillard ; les sujets les
plus âgés étant le plus souvent exclus des grands essais thérapeutiques (57).
Cela a conduit à la réalisation d’une étude comparative de type cas-témoin, sur des
patients âgés traités par AVK, hospitalisés dans un centre gérontologique. Le but était de
rechercher, en plus des facteurs habituellement reconnus, l’existence de facteurs de déséquilibre
des AVK spécifiques au sujet âgé, et d’en évaluer les conséquences en terme de fréquence et de
sévérité des accidents hémorragiques.
8
La conséquence pratique envisagée était de permettre l’anticipation des situations de
déséquilibre thérapeutique chez le sujet âgé, afin de limiter les complications hémorragiques et
de favoriser une prescription adaptée des AVK.
9
II. LES ANTIVITAMINES K
II A. Pharmacologie des antivitamines K
II A 1. Définition, mode d’action, classification :
• Définition
Les AVK restent, à ce jour, les seuls anticoagulants administrables par voie orale en
traitement de longue durée. Ils agissent en inhibant certains facteurs ou certaines étapes de la
cascade de la coagulation sanguine, limitant ainsi la formation de la fibrine insoluble (Figure 1).
• Mode d’action
Leur mode d’action repose sur le blocage de l’effet de la vitamine K, qui est nécessaire à
la synthèse de plusieurs facteurs de coagulation dits "vitamine-K-dépendants " (facteurs II, VII,
IX, X, protéine C et S). Il en résulte l’obtention de taux bas et stables de ces facteurs, impliqués
normalement dans la survenue des thromboses (Figure 1).
Figure 1. Schéma de la coagulation.
10
1. Métabolisme de la vitamine K
Les AVK ont une structure chimique proche de la vitamine K, ce qui leur confère un
mode d’action commun.
La vitamine K est un dérivé de la naphtoquinone. Elle comporte une chaîne hydrophobe
qui diffère suivant son origine végétale (Vitamine k1 ou phylloquinone, ou phytoménadione) ou
bactérienne (Vitamine k2 ou ménaquinone). La vitamine K est une vitamine liposoluble apportée
par l’alimentation (20%), ou synthétisée par la flore intestinale (80%) (Figure 2).
Son absorption est étroitement liée à la fonction biliaire. Une fois absorbée, la vitamine K
se retrouve dans l’hépatocyte dans un cycle métabolique, où elle constitue un cofacteur
enzymatique qui permet la gamma-carboxylation des résidus glutamates des facteurs de
coagulation vitamine-K-dépendants en anticorps gamma-carboxy-glutamiques. Les résidus
gamma-carboxy-glutamates permettent le changement de conformation des facteurs de
coagulation, nécessaire à l'acquisition de leur activité biologique.
Figure 2. Apports alimentaires en vitamine K (µg/100 g)
11
2. Mécanisme d’action des antivitamines K
Les AVK et la vitamine K entrent en compétition au niveau des sites d’activation de l’époxyde
réductase, bloquant alors le cycle de la vitamine K et la gamma-carboxylation, ce qui empêche la
conversion de la forme époxyde de la vitamine K en sa forme hydroquinone (vitamine K réduite),
indispensable à la transformation, par les hépatocytes, des précurseurs des facteurs vitamine-K-
dépendants en facteurs biologiquement actifs. Les AVK inhibent donc la réduction de la vitamine
K, nécessaire à l’activité de la carboxylase qui active les facteurs de coagulation (Figure 3).
Figure 3. Mécanisme d’action de la warfarine (95)
12
• Classification des antivitamines K
Les AVK peuvent être distinguées :
♦ selon leur structure chimique
Les AVK appartiennent à plusieurs groupes de dérivés chimiques qui ont en commun une
parenté de structure avec la vitamine K. On commercialise, en France, les dérivés de l'Indanedione
(Pindione®, Préviscan®), et les dérivés de la coumarine (Sintrom®, Minisintrom®, Coumadine®,
et Apegmone®) (Figure 4).
Figure 4. Structure chimique des AVK (99)
13
♦ Selon leur demi-vie plasmatique (Tableau 1)
Il s'agit du temps au bout duquel, administrés à posologie constante, les AVK atteignent la
moitié de leur concentration plasmatique de stabilité.
Médicaments Nom commercial ½ vie plasmatique
(heures)
Délai équilibre
(heures)
Demi-vie courte ou intermédiaire
Phénindione Pindione® 5 -10 24 - 48
Acénocoumarol Sintrom®,
Minisintrom®
8 - 9 32 - 48
Tiocoumarol Apegmone® 24 96 -120
Demi-vie longue
Fluindione Préviscan® 30 120 -150
Warfarine Coumadine® 35 - 45 140 - 225
Tableau 1. Les antivitamines K disponibles en France en 2006
II A 2. Équilibre thérapeutique sous antivitamines K
L'objectif d'un traitement par AVK est d’obtenir des taux bas et stables des facteurs
vitamine-K-dépendants. Les taux plasmatiques des facteurs de coagulation dépendent de leurs
vitesses de synthèse et de dégradation, qui sont en équilibre dans des conditions thérapeutiques
stables. Quand la synthèse est bloquée (après administration d’AVK), seule l’élimination persiste,
et les facteurs atteignent de façon mono-exponentielle un nouveau niveau plus bas et stable.
L’équilibre sous traitement anticoagulant oral est estimé atteint lorsque tous les facteurs
vitamine-K-dépendants se retrouvent approximativement au même niveau, à posologie constante.
Ce niveau est atteint selon une vitesse dépendant de la demi-vie d’élimination de chacun des
facteurs, celle du facteur VII étant la plus rapide à décroître, et celle du facteur II la plus lente
(Tableau 2).
On estime qu’après une période de 4 à 5 demi-vies (soit une à deux semaines pour la
warfarine) qui suit une modification posologique, une situation stable est de nouveau atteinte.
14
Facteurs Demi-vie (h)
II
42-72
VII
4-6
IX
21-30
X
27-48
Protéine C
9
Protéine S
60
Tableau 2. Demi-vie des facteurs de coagulation vitamine-K-dépendants
II A 3. Pharmacocinétique
La résorption des AVK par le tractus digestif après une dose orale est presque intégrale. La
concentration maximale dans le plasma est trouvée 2 à 6 heures après l’ingestion.
Les anticoagulants oraux se lient à l’albumine du plasma si fortement que moins de 2% sont
retrouvés sous forme libre. Seule la fraction libre est active sur le plan pharmacologique. Lorsque
le niveau plasmatique de l’albumine est abaissé (notamment lors de la prise d’un médicament se
liant à l’albumine plasmatique), la quantité de fraction libre de l’AVK augmente et la quantité
d’AVK nécessaire s’amoindrit.
L’élimination des AVK passe essentiellement par des biotransformations exécutées par les
mono-oxydases et les conjugases du réticulum sarcoplasmique du foie. Les AVK sont métabolisées
au niveau hépatique par le système des cytochromes P450. Ce système comprend plusieurs iso-
enzymes et notamment : CYP3A4, CYP1A2 et CYP2C9.
15
Les dérivés coumariniques, et notamment la warfarine, sont des mélanges racémiques de 2
isomères, -R et -S. Ceux-ci ne sont pas métabolisés de façon identique par les iso-enzymes du
cytochrome P450. Le métabolisme de l’isomère -S est deux fois plus intense que celui de l’isomère
-R. Par contre, l’isomère -R a une activité inhibitrice sur l’époxyde réductase trois à cinq fois
supérieure à celle de l’isomère -S. Dans le sang, 60 à 70% de l’activité anticoagulante de la
warfarine est portée par l’isomère -S, contre seulement 30 à 40% pour l’isomère -R (99) (Figure 5).
La S-warfarine, tout comme le S-acénocoumarol, est principalement métabolisée par le
CYP2C9. D’autres voies métaboliques ont été identifiées pour les formes -R, faisant intervenir les
CYP2C9, CYP1A2, CYP3A4 et CYP2C19. La fluindione est aussi métabolisée au niveau
hépatique mais ses voies métaboliques spécifiques ne sont pas étudiées. Les substances, modifiées
ou non, peuvent être réabsorbées dans la voie digestive (cycle entéro-hépatique) ou excrétées par
les reins et les voies biliaires.
Figure 5. Métabolisme des isomères de la warfarine par les iso-enzymes du
cytochrome P450 (99)
II B. Indications, contre-indications et surveillance des antivitamines K (Tableaux 3 et 4)
16
II B 1. Principales indications gériatriques des antivitamines K (Tableau 3, résumé d’après www. affsaps.sante.fr)
Indications Observations Durée du traitement
Prévention primaire de la MTEV* Souvent après une héparinothérapie de 10 jours Fonction de la persistance du RTE*
Prévention secondaire de la MTEV En relais de l’héparine 3 à 6 mois dans la majorité des cas
> 6 mois si récidive ou persistance du RTE
Prothèse valvulaire Élément fondamental du traitement
3 mois si bioprothèse, en l’absence de facteur de risque surajouté
A vie si bioprothèse avec facteur de risque surajouté (FA*)
A vie si prothèse mécanique
Rétrécissement mitral (RM) Patient soit en FA, soit en rythme sinusal avec RTE* (dilatation de l’oreillette gauche,
thrombus intracavitaire, ou contraste spontané, RM serré, ATCD d’ATE*) A vie, ou tant que le rapport bénéfice/risque parait favorable
Insuffisance mitrale ou valvulopathie
aortique Uniquement si FA ou RTE (dysfonction ventriculaire gauche, …) A vie, ou tant que le rapport bénéfice/risque parait favorable
Fibrillation Auriculaire (FA) Si facteur de risque thromboembolique artériel surajouté (Antécédent d’AIT, d’AVC
ischémique, Insuffisance coronaire, Insuffisance cardiaque, HTA, Diabète,
Rétrécissement mitral, Myocardiopathie dilatée)
A vie, ou tant que le rapport bénéfice/risque parait favorable
Suites d’Infarctus du Myocarde (IDM)
Indication devenue rare
Si IDM compliqué (anévrisme ventriculaire gauche, thrombus intracavitaire,
dysfonction ventriculaire gauche sévère)
Si association à une FA ou à un antécédent thromboembolique artériel
Si IDM non compliqué, chez les intolérants à l’acide acétylsalicique ou au clopidogrel
1 à 3 mois, ou tant que le risque thromboembolique persiste
A vie, ou tant que le rapport bénéfice/risque parait favorable
A vie, ou tant que le rapport bénéfice/risque parait favorable
Prévention des thromboses sur cathéter A très faible posologie, ne modifiant pas l’INR Tant que le cathéter est en place
MTVE = maladie thromboembolique veineuse, RTE = risque thromboembolique, FA = fibrillation auriculaire permanente ou paroxystique, ATE = accidents thromboemboliques, FdR TE = facteur de risque
thromboembolique.
Tableau 3. Principales indications gériatriques des antivitamines K
17
Dans la majorité des indications précédemment citées, l’INR doit être compris entre 2 et 3. Dans
le cas des prothèses mécaniques en position mitrale (quelque soit le type), des prothèses multiples, des
prothèses aortiques de première génération et en cas d’antécédents d’accidents thromboemboliques ou de
facteurs de risque surajoutés (FA, dysfonction ventriculaire gauche sévère, dilatation cavitaire marquée)
l’INR attendu doit être entre 3 et 4,5. De même, lorsqu’un traitement anticoagulant est indiqué en cas de
rétrécissement mitral, l’INR doit être entre 3 et 4,5.
II B 2. Principales contre-indications gériatriques des antivitamines K (Tableau 4, résumé d’après
www. affsaps.sante.fr)
Contre-indications absolues Contre-indications relatives
Hypersensibilité connue au produit, ou à
sa famille, ou à l’un des excipients
Insuffisance hépatique sévère
Association avec :
Acide acétylsalicylique ≥ 3 g/j
Miconazole (voie générale ou gel
buccal)
Millepertuis
Phénylbutazone par voie générale
Risque hémorragique, et notamment :
Lésion organique susceptible de saigner
Ulcère gastro-duodénal récent et évolutif
HTA non contrôlée (diastolique > 120 mm Hg)
Intervention neurochirurgicale ou ophtalmologique
récente
AVC récent (sauf embolie systémique)
Anomalie préexistante de la coagulation
Insuffisance rénale sévère (clairance de la créatinine < 20
ml/mn)
Association avec :
Acide acétylsalicylique à faible dose par voie
générale
AINS par voie générale
Chloramphénicol
Fluoro-uracile
Tableau 4. Principales contre-indications gériatriques des antivitamines K
18
II B 3. Surveillance biologique des traitements par AVK
Les anticoagulants oraux nécessitent une surveillance biologique stricte, afin d'adapter leur
posologie à chaque patient, en particulier pour éviter le risque hémorragique spontané par excès
d'anticoagulation.
Cette surveillance repose actuellement sur l'International Normalized Ratio (INR). L'INR est le
mode standardisé du Temps de Quick (TQ) ; il est destiné à remédier aux variations dues aux différentes
thromboplastines utilisées par les laboratoires d'analyse. L'INR se définit par le rapport :
ISI
TémoinduQuickdeTemps
MaladeduQuickdeTemps
....
....
L'ISI (Index de Sensibilité International du réactif considéré) est une mesure de la sensibilité d’un
réactif donné à la diminution des facteurs vitamine-K-dépendants. Il caractérise chaque thromboplastine.
L’ISI est d’autant plus élevé que la thromboplastine est moins sensible. Il est généralement fourni par son
fabricant, mais en pratique, il doit être recalibré et calculé par le laboratoire d'analyse à chaque
changement de lot ou de type de thromboplastine.
Si l'expression du Temps de Quick par l'INR permet une meilleure comparaison des résultats entre
des laboratoires différents, la surveillance des traitements par AVK reste actuellement imparfaite pour
plusieurs raisons :
♦ le TQ explore 4 facteurs de coagulation (facteurs II, V, VII, X), dont l'un (le facteur V) n'est pas
vitamine-K-dépendant.
♦ le TQ ignore certains facteurs de coagulation vitamine-K-dépendants, et notamment, il n'inclut
pas le facteur XII et les Protéines C et S.
L'utilisation de l'INR a toutefois permis une amélioration du rapport bénéfice-risque des
traitements AVK.
II C. L’hypersensibilité des sujets âgés aux anticoagulants
Les AVK restent « sous-prescrites » en gériatrie, en particulier par crainte du risque hémorragique
qui leur est associé. Plusieurs facteurs expliquent l’hypersensibilité des sujets âgés aux AVK et à la
warfarine en particulier.
19
II C 1. Facteurs pharmacocinétiques
• modification de la distribution et du transport
Le vieillissement modifie la composition du corps humain, avec notamment l’apparition d’une
diminution du taux d’albumine plasmatique et la réduction du nombre de ses sites de fixation
(augmentation de la fraction libre active et risque de toxicité au pic).
• modification de l’élimination métabolique
Le métabolisme des anticoagulants oraux est principalement hépatique et le CYP2C9 est l'iso-
enzyme majoritairement responsable de leur élimination, en particulier pour les dérivés coumariniques
(warfarine ou Coumadine®, acénocoumarol ou Sintrom®). Concernant la fluindione (Préviscan®), son
analogie structurale avec les coumariniques et certaines interactions médicamenteuses laissent penser que
cette molécule pourrait également être métabolisée, au moins partiellement, par le CYP2C9 (1).
Mungall, qui a prospectivement étudié le métabolisme de la warfarine chez 163 patients âgés de
18 à 77 ans, a montré que la clairance de la warfarine (et donc son métabolisme) diminuait de 1% par
année d'âge (64).
Shepherd avait, auparavant, retrouvé une diminution de 14% de la clairance de la warfarine en
comparant l'effet d'une dose unique de warfarine administrée à deux populations d'âges différents, mais la
différence n'était pas statistiquement significative. Il indiquait également qu'à concentration plasmatique
équivalente, la warfarine déprimait de façon plus importante les facteurs de coagulation vitamine-K-
dépendants chez les sujets âgés (78).
Cette diminution du métabolisme des anticoagulants chez les sujets âgés est souvent attribuée à
une baisse, avec l'âge, de la quantité et de la qualité du CYP2C9.
L’âge induit également une diminution de la filtration glomérulaire, qui engendre une
augmentation de la demi-vie plasmatique et une diminution de la clairance plasmatique des médicaments
à élimination rénale comme le sont partiellement les AVK.
Il faut toutefois souligner qu’il existe de nombreuses variations interindividuelles.
20
II C 2. Facteurs pharmacodynamiques
Wynne a, en 1995, observé une corrélation significative entre l'âge, le volume du foie et la dose
d'anticoagulant oral nécessaire pour obtenir l'équilibre thérapeutique (102).
Bien qu'aucune étude spécifique n'en n'ait, à l'heure actuelle, fait la démonstration formelle,
beaucoup de spécialistes s'accordent sur le fait qu'avec le vieillissement hépatique, la cible des
antivitamines K (la vitamine K époxyde- réductase) connaît des modifications :
• Une affinité accrue pour la warfarine
• Une affinité diminuée pour la vitamine K
• Une diminution quantitative
Par ailleurs, le vieillissement hépatique s'accompagnerait également :
• D'une augmentation du catabolisme des facteurs de coagulation
• D'une diminution de la synthèse des facteurs de coagulation
L'ensemble augmentant la sensibilité des sujets âgés aux AVK.
II C 3. Autres facteurs
• La polymédication
La polyprescription est fréquente chez les patients de plus de 70 ans, qui prennent en moyenne 4 à
5 médicaments par jour, qu’ils soient au domicile ou en institution (50).
Cette polymédication est favorisée par de nombreuses situations (polypathologies, polymorbidités,
nomadisme médical, auto-médication, superposition de traitements symptomatiques, demande insistante
de médications pour des raisons physiques, psychiques et sociales …) ; elle majore le risque de mauvaise
observance et favorise le risque d’erreur dans la prise des médicaments. Elle favorise également les
interactions médicamenteuses. Plus de 30% des patients sous anticoagulants oraux, tous âges confondus,
absorbent au moins un médicament interagissant avec le traitement.
• La polypathologie
De nombreuses comorbidités semblent majorer le risque hémorragique lié aux AVK, et c’est
notamment le cas :
21
♦ des pathologies à l’origine d’une perturbation du métabolisme comme l’insuffisance
rénale ou hépatique, l’hypertension artérielle, l’insuffisance cardiaque, l’anémie …
♦ des pathologies susceptibles d’être révélées ou aggravées par les AVK comme les
lésions gastro-intestinales ou uro-génitales
♦ des troubles cognitifs, à l’origine de problèmes de compliance, de surveillance (erreurs
de posologies, auto-médication, surveillance inappropriée, ...).
• Les chutes à répétition.
Les chutes, outre les pathologies traumatiques qu’elles peuvent provoquer (fractures
essentiellement), sont redoutées chez la personne âgée sous anticoagulant, en raison du risque potentiel de
traumatisme crânien et de constitution d’hémorragie intracrânienne (hématome sous-dural surtout) (Cf.
partie DISCUSSION, les complications hémorragiques liées à l’excès d’anticoagulation).
22
III. MATÉRIEL ET MÉTHODES
Il s’agit d’une étude épidémiologique, analytique, rétrospective (inclusion prospective), de type
cas-témoins et monocentrique. Elle a été réalisée à l'hôpital gérontologique Émile-Roux (Assistance
Publique-Hôpitaux de Paris), situé à Limeil-Brévannes (Val de Marne), sur une période de 18 mois.
L'objectif principal était de rechercher, chez le sujet âgé fragile, l'existence de facteurs spécifiques
de déséquilibre des traitements par AVK.
Il s'agissait aussi d'apprécier, sur ce terrain particulier, la fréquence et la sévérité des complications
liées aux excès d'anticoagulation, et en particulier les conséquences hémorragiques.
III A. Matériel
L’hôpital Émile-Roux compte 904 lits répartis en unités de gériatrie aigue (36 lits), de Soins de
Suite et de Réadaptation (SSR, 377 lits), de Soins de Longue Durée (SLD, 467 lits) et en hôpital de jour
(24 lits).
Cette étude s'est déroulée au sein des services de Gérontologie 4 (Dr V.) et de Gérontologie 1 (Dr
H.), qui comptent chacun respectivement 76 et 102 lits de SSR, 109 et 138 lits de SLD.
Elle a été conçue et conduite par une équipe médicale pluridisciplinaire regroupant un médecin
gériatre, un résident en Médecine Générale et deux médecins biologistes, avec l'accord des chefs de
service. Avant le début de l'étude, une fiche standardisée de recueil de données avait été réalisée (Annexe
1).
Le rôle des médecins biologistes était double : d’une part, lister quotidiennement le nom des
patients, issus des services de gérontologie 1 et 4, pour lesquels un dosage d’INR était réalisé au sein du
laboratoire et d’autre part, communiquer cette liste, avec les résultats des prélèvements, au médecin
gériatre.
Sur la base de cette liste, les patients dont l'INR étaient strictement supérieur à 4,5 était
consécutivement inclus, associés, chacun, à deux témoins choisis au hasard sur la même base, mais dont
l’INR était resté en zone thérapeutique (entre 2 et 3). Les patients et les témoins, appariés pour l'âge, le
sexe et les indications aux AVK devaient répondre aux critères d'inclusion retenus au préalable.
III A 1. Les critères d'inclusion retenus pour les patients et les témoins étaient :
• un âge supérieur ou égal à 65 ans,
• une hospitalisation depuis au moins 4 semaines consécutives dans l’un des deux
services de gérontologie,
• l'existence, avant l’inclusion, de deux INR consécutifs dans la zone thérapeutique
habituelle (entre 2 et 3), mesurés dans le laboratoire de l’hôpital.
23
III A 2. Les critères d'exclusion étaient :
• un âge inférieur à 65 ans,
• un patient ou un témoin déjà inclus dans l'étude depuis moins de 4 semaines,
• l'hospitalisation dans un service de l'hôpital ne participant pas à l'étude,
• une hospitalisation depuis moins de 4 semaines consécutives,
• l'absence de deux INR consécutifs antérieurs dans la fourchette thérapeutique.
III B. Méthode
III B 1. Le recueil des données
La fiche standardisée de recueil de données était renseignée par un médecin, à partir des données
du dossier médical. La durée de suivi des patients, pour cette étude, était de 30 jours après leur inclusion.
En l’absence d’informations dans le dossier médical, le médecin enquêteur avait recours au
médecin-référent du patient, dans le service d’origine. Celui-ci, par un examen clinique ou
anthropométrique, précisait l'état nutritionnel et d'hydratation du patient, sans prélèvement biologique
spécifique pour l’étude, compte-tenu des difficultés à obtenir un consentement éclairé de la part de
patients aux fonctions supérieures parfois altérées.
Le degré de sévérité des hémorragies était déterminé selon les critères habituels et était qualifié de
majeure ou grave (18) :
• si elles étaient à localisation intracrânienne,
• si elles justifiaient une intervention chirurgicale,
• si elles s’accompagnaient d’une perte d’au moins 2 points d’hémoglobine,
• si elles justifiaient la réalisation d’une transfusion sanguine,
• si elles étaient fatales.
III B 2. La mesure de l’INR
Les mesures de l’INR étaient effectuées au sein du laboratoire de l’hôpital Emile-Roux, sur un
automate ST4 STAGO (technique BIOMERIEUX Thrombomat (ISI=2)).
24
III B 3. L’analyse des résultats
L’analyse des résultats a été réalisée par un médecin épidémiologiste du CHU Henri Mondor.
Une fois les différents recueils de données renseignés, l’ensemble des données était organisé sous
la forme de tableaux Excel.
Les données de ces tableaux étaient ensuite analysées, par le médecin épidémiologiste, à l’aide du
logiciel STATA.
Les caractéristiques des cas étaient alors comparées à celles des témoins par le test du Chi 2 ou le
test exact de Fischer, pour les variables qualitatives et par l’analyse de variance ou le test non
paramétrique de Mann-Whithney, pour les variables quantitatives.
25
IV. RÉSULTATS
IV A. Caractéristiques de la population étudiée
IV A 1. Comparaison des 2 groupes (Tableau 5)
Entre le 1er Janvier 2002 et le 30 Juin 2003, 159 patients âgés de 88,7±7,7 ans, avec un sex-ratio
de 3 en faveur des femmes et traités par une antivitamine K orale, ont été inclus dans l’étude.
A leur inclusion, les "cas" (n=53) avaient un INR moyen de 6,26 (IC 95%, 5,29-7,22) alors que ce
dernier était, jusque-là, dans la zone thérapeutique habituelle (entre 2 et 3).
Les "témoins" (n=106), qui étaient comparables pour l'âge, le sexe et les indications aux AVK,
avaient gardé un INR thérapeutique sur la même période, avec une valeur moyenne de 2,36 (IC 95%,
2,28-2,45).
Les indications aux anticoagulants oraux étaient largement dominées par la maladie
thromboembolique veineuse (66,04%) et la fibrillation auriculaire (29,56%).
Cas
n=53 (%)
Témoins
n=106 (%)
p
Sexe
Hommes 11 (20,8) 30 (28,7)
Femmes 42 (79,2)
75 (71,4)
0,29
Age (ans) 89,5 ± 7,7
88,4 ± 7,7
0,4
Indications des AVK
Prévention primaire TVP 7 (13,2) 22 (20,8) 0,25
Prévention II TVP 28 (52,8) 48 (45,3) 0,37
Fibrillation auriculaire 15 (28,3) 32 (30,1) 0,8
Cardiopathie ischémique 1 (1,9) 5 (4,7) 0,66
Cardiopathie valvulaire 0 6 (5,7) 0,18
Thrombus OG 2 (3,8) 2 (1,9) 0,6
Artériopathie MI 1 (1,9) 5 (4,7) 0 ,66
Autres* 6 (11,3) 2 (1,9) 0,01
* (Dilatation de l'oreillette gauche, Anticoagulant lupique, Prothèse valvulaire)
Tableau 5. Comparaison des 2 groupes
26
IV A 2. Caractéristiques du traitement par AVK (Tableau 6)
• Répartition des AVK
Les trois principales antivitamines K commercialisées en France ont été concernées par l'étude,
avec une prédominance pour la warfarine, liée au fait que les médecins de l’un des services participant à
l’étude ont validé et publié un schéma d’induction posologique de ce produit pour les personnes âgées
(Annexe 2) (13).
C’est ainsi que 72,1% des patients (73,5% des cas et 71,4% des témoins) étaient sous warfarine
(Coumadine®), 21,5% (18,8% des cas et 22,8% des témoins) sous fluindione (Préviscan®) et 6,3% (7,5%
des cas et 5,7% des témoins) sous acénocoumarol (Sintrom®). La répartition des AVK était comparable
dans les deux groupes (p=0,77).
• Ancienneté du traitement anticoagulant
L’ancienneté du traitement anticoagulant était comparable pour les 2 groupes, soit 5,8±9,5 mois
pour les cas, et 8,9±11,4 mois pour les témoins (p=0,08).
• Date du dernier prélèvement avant l'inclusion
La durée, en jours, séparant le dosage de deux INR était en moyenne de 13,2±11,66 chez les cas et
de 12,21±11,16 chez les témoins (p=0,62). Les modalités de surveillance du traitement par AVK étaient
donc comparables dans les deux groupes.
• Valeur du dernier INR avant inclusion
La valeur moyenne de l’INR précédant l’inclusion semble intéressante à souligner, car tout en
restant en zone thérapeutique, elle est statistiquement plus élevée (p<0,001)) chez les "futurs" cas, où elle
est de 2,69 (IC 95%, 2,53-2,85) que chez les témoins, où elle est de 2,36 (IC 95%, 2,26-2,46) soit un delta
d’INR entre les deux groupes d’environ 15%.
27
• Temps passé dans la zone thérapeutique sous anticoagulant
Le temps passé dans la zone thérapeutique des AVK (sans modification posologique), avant
inclusion, était de 42,69±82,76 jours pour les cas et de 70,56±80,75 jours pour les témoins, sans
différence statistiquement significative entre les 2 groupes (p=0,06).
Cas (%)
Témoins (%)
p
Ancienneté du traitement
(mois) 5,8 ± 9,5 8,9 ± 11,4
0,08
INR précédant l’inclusion 2,69 ± 0,5 2,36 ± 0,51
< 0,001
INR à l’inclusion
6,06 ± 3,5
2,4 ± 0,46
< 0,001
AVK
0,77
Warfarine (Coumadine®)
39 (73,6)
75 (71,4)
Fluindione (Préviscan®)
10 (18,9)
24 (22,9)
Acénocoumarol (Sintrom®)
4 (7,6)
6 (5,7)
Dernier contrôle INR avant
inclusion (jours)
13,18 ± 11,66
12,21 ± 11,16
0,62
Dernier changement
posologique avant inclusion
(jours)
42,69 ± 82,76
70,55 ± 80,7
0,06
Tableau 6. Caractéristiques du traitement par AVK
28
IV B. Les complications hémorragiques (Tableau 7)
Les hémorragies représentent la principale complication des traitements par les antivitamines K et
sont, selon l’AFSAPS, responsables de 17000 hospitalisations, chaque année, en France. Dans le cadre de
notre étude, 8,9% des patients sous AVK (soit 10 cas et 4 témoins) ont présenté des épisodes
hémorragiques, statistiquement plus significatifs chez les patients en excès d’anticoagulation (p=0,003).
Les hémorragies survenues chez les témoins étaient toutes mineures, n’entrainant pas
d’interruption du traitement, ni même d’adaptation posologique de celui-ci.
Dans le groupe « cas », 10 sujets (19,2%) ont présenté un épisode hémorragique : il s’agissait
d’hémorragies mineures pour sept d’entre eux. Trois patients, représentant 1,89% de l’ensemble des
patients sous AVK, ont été victimes d’hémorragies majeures (avec perte d’au moins 2 points
d’hémoglobine) nécessitant une transfusion sanguine. Certains de ces cas ont présenté simultanément
plusieurs sites hémorragiques mineurs.
Il n’y a eu aucun cas d’hémorragie intracrânienne ou d’hémorragie fatale durant la période de l'étude.
29
Cas
n=53 (%)
Témoins
n=106 (%)
p
Total
10 (19,2)
4 (3,9)
0,003
Hémorragies mineures
Gingivorragies
0
4 (3,8)
0,3
Hématomes
cutanés
3 (5,7)
0
0,04
Epistaxis
3 (5,7)
0
0,04
Hémoptysie
0
0
-
Hématémèse
0
0
-
Méléna
2 (3,8)
0
0,11
Plusieurs types de
saignement mineur
2 (3,8)
0
0,11
Hémorragies majeures
Hémorragies avec
transfusion
3 (5,7)
0
0,04
Hémorragies
intracrâniennes 0 0 -
Hémorragies
fatales 0 0 -
Tableau 7. Complications hémorragiques sous AVK
30
IV C. Introduction récente de nouveaux médicaments (Tableau 8)
68,2% des sujets en excès d'anticoagulation ont bénéficié de l’introduction d'au moins un
médicament, largement prescrit en milieu gériatrique, dans les trente jours précédent leur inclusion
dans l'étude, contre seulement 32% des témoins (p<0,001).
Les médicaments significativement corrélés à un excès d'anticoagulation étaient :
• l'amiodarone, introduite chez 9,4% des cas, contre aucun chez les témoins (p=0,004)
• le paracétamol, prescrit chez 18,9 % des cas, contre 0,9% des témoins (p<0,001)
• le tramadol, administré chez 3 cas et aucun témoin (p=0,04)
• les fluoroquinolones, introduites chez 11,3 % des cas et 1,9 % des témoins (p=0,02)
• le lactulose, initié chez 11,3 % des cas et aucun témoin (p=0,001)
Médicament
introduit
Cas
n=53 (%)
Témoins
n=106 (%)
p
Amiodarone
5 (9,4)
0 0,004
Paracétamol
10 (18,9)
1 (0,9)
< 0,001
Tramadol 3 (5,7) 0 0,04
Fluoroquinolones 6 (11,3)
2 (1,9)
0,02
Lactulose 6 (11,3)
0
0,001
Tableau 8. Les médicaments en rapport avec un INR excessif
31
IV D. L'influence des pathologies intercurrentes (Tableau 9)
25 patients (16,2%) ont présenté, dans les 30 jours précédents leur inclusion dans l'étude,
une pathologie intercurrente modifiant leur état physiologique. Il s'agissait de 23 cas et de 2
témoins. Nous retenons que les déséquilibres des traitements anticoagulants chez les personnes
âgées en institution sont significativement corrélés à un état pathologique intercurrent, retrouvé
chez 45,1% des cas, contre seulement 1,9% des témoins (p<0,001).
Les situations pathologiques relevées étaient : les états fébriles (7,6%), la malnutrition
protéino-énergétique (5,7%), les états de déshydratation (4,4%), la diarrhée (3,1%), et les
troubles de l’alimentation (4,4%).
Cas
n=53 (%)
Témoins
n=106 (%)
p
Fièvre 11 (20,8) 1 (0,9)
<0,001
Dénutrition 9 (17) 0
<0,001
Déshydratation
6 (11,3)
1 (0,9)
0,006
Diarrhée
5 (9,4)
0
0,004
Troubles alimentaires
7 (13,2)
0
<0,001
Tableau 9. Les pathologies intercurrentes et l'excès d'anticoagulation
32
V. DISCUSSION
V A. Justification des traitements anticoagulants
Les principales indications des traitements anticoagulants, en pratique courante, sont la prévention
primaire et secondaire de la Maladie Thromboembolique Veineuse (MTEV) en milieu chirurgical et
médical et la prévention des embolies artérielles liées à la Fibrillation Auriculaire (FA). Parmi les autres
indications des AVK, il faut retenir les situations à haut risque embolique après infarctus du myocarde et
les prothèses valvulaires.
Cette hiérarchie des indications aux AVK est également retrouvée dans notre étude, dans laquelle
la MTVE et la FA représentent à elles seules 95 % des indications aux anticoagulants : 66 % des
prescriptions d'AVK sont liées à une MTEV (18,2% en prévention primaire et 47,8 % en prévention
secondaire), alors que 29,5 % des patients sont sous AVK pour une FA. Nous remarquons également que
quelques patients présentent simultanément plusieurs indications aux AVK.
V A 1. La Maladie thromboembolique veineuse chez le sujet âgé.
L'incidence et la prévalence de la MTEV augmentent sensiblement avec l'âge : c'est ainsi qu'en
1991, une étude portant sur des patients hospitalisés pour une thrombose veineuse profonde ou une
embolie pulmonaire indiquait que l'incidence de la MTEV était multipliée par 200 entre la deuxième et la
huitième décade de vie (2).
Plus récemment, Stanke retrouvait, sur 150 patients âgés admis consécutivement en milieu
gériatrique et systématiquement explorés par une échographie doppler des membres inférieurs, une
prévalence de 23 % de sujets présentant une thrombose veineuse profonde (86).
En France, l'étude d'Oger a objectivé, dans la région Bretagne, une incidence de MTEV de 1,83
pour 1000 habitants, avec un chiffre atteignant 10 pour 1000 chez les personnes de plus de 75 ans,
précisant que la MTEV survient en situation médicale dans 95 % des cas (69).
Toujours en France, une étude cas-témoins, multicentrique, réalisée au sein de 19 hôpitaux
gérontologiques (dont l'hôpital Émile-Roux à Limeil-Brévannes) et portant sur des patients âgés en
moyenne de 85 ans, retrouve, par échographie doppler des membres inférieurs, une incidence de 158
thromboses veineuses profondes pour 1000 patients-années en Unité de Médecine Gériatrique (court
séjour), de 35,3 pour 1000 patients-années en unité de Soins de Suite et de Réadaptation et de 10 pour
1000 patient-années en Unité de Soins de Longue Durée (97).
33
Dans le cadre de la MTEV, l'indication à un traitement anticoagulant n'est pas discutée et
s'impose, y compris chez la personne âgée, lorsqu'on appréhende ses redoutables conséquences
potentielles : les séries autopsiques indiquent, en effet, que l'incidence des embolies pulmonaires fatales
atteint 33 % chez les sujets âgés institutionnalisés (87).
V A 2. La Fibrillation auriculaire chez le sujet âgé
La FA est, de loin, le plus fréquent des troubles du rythme cardiaque. En France, cette pathologie
affecte 1 million de personnes (2,2 millions de personnes aux Etats-Unis). Sa prévalence est liée à l'âge,
allant de moins de 1 % avant 60 ans à 4 % après 60 ans, et 10 % après l'âge de 80 ans (27, 89).
La FA est associée à une augmentation de la morbidité en rapport avec les accidents vasculaires
cérébraux (AVC) parfois mortels. En France et dans les pays industrialisés, les AVC constituent la
première cause de morbidité et la troisième cause de mortalité (104). Compte tenu de l'accroissement de
l'espérance de vie dans ces pays, cette pathologie neurovasculaire est un fléau et un problème de santé
publique par ses conséquences économiques, sociales et humaines. La morbidité souvent associée
(hospitalisations prolongées, handicaps moteurs, troubles cognitifs, démence, dépression, épilepsie,
troubles de déglutition, infections diverses) est souvent très lourde et responsable d'un bouleversement
dans la vie des patients et de leur entourage : elle est fréquemment à l'origine d'un placement en
institution gériatrique. On estime qu'un médecin généraliste ayant en charge 2000 personnes soigne 18
survivants d'AVC et voit un nouvel AVC tous les trois mois (56).
La FA est la première cause d'embolie cérébrale d'origine cardiaque et l’on estime qu'il y a, en
France, 150 000 AVC chaque année, soit un AVC toutes les 3 à 4 minutes (104). Elle est associée à 36,2
% des AVC (tous types confondus) survenant entre 80 et 89 ans (101).
La conférence de l'"American College of Chest Physicians" (ACCP) recommande, en l'absence de
contre-indication, une anticoagulation au long cours pour tous les patients présentant une FA non
valvulaire, si celle-ci est associée à un facteur de risque élevé ou à plus d'un facteur de risque modéré. Les
facteurs de risque élevés incluent : l'âge supérieur à 75 ans, un antécédent d'accident vasculaire cérébral
transitoire ou constitué, un antécédent d'hypertension artérielle et une fonction ventriculaire gauche
altérée ; les facteurs de risque modérés incluent un âge entre 65 et 75 ans, l'existence d'un diabète et une
maladie coronaire (52).
Cette recommandation se base sur les résultats de plusieurs études randomisées de prévention
primaire ou secondaire réalisées, il y a quelques années, démontrant qu'une anticoagulation adéquate
réduisait, chez les patients en FA, le risque d'AVC de 68 % (52).
34
V B. Justification de l'étude
Malgré les recommandations consensuelles, un grand nombre de médecins et de gériatres restent
réticents à la prescription des AVK chez les sujets âgés ayant une fibrillation auriculaire : alors que 40 à
80 % des personnes de plus de 75 ans présentant une FA répondent aux critères de l'ACCP et sont
éligibles pour un traitement par AVK, seules 25 à 55 % d'entre-elles sont effectivement traitées (10).
Interrogés sur cette sous-prescription, les médecins avancent des motifs hétérogènes :
• des motifs liés aux patients :
♦ le risque hémorragique sous AVK augmente avec l'âge des patients
♦ les chutes, fréquentes chez le sujet âgé, augmenteraient le risque de survenue des
hémorragies intracrâniennes, ce qui limite la prescription des AVK
♦ la démence est un facteur important de non-compliance thérapeutique, pouvant
rendre risquée la consommation des AVK
• d'autres motifs liés aux antivitamines K :
♦ leur pharmacologie est mal connue des prescripteurs
♦ les anticoagulants sont susceptibles de nombreuses interactions médicamenteuses, ce
qui majore le risque hémorragique chez les personnes âgées fragiles, souvent
polymédiquées.
• enfin, d'autres facteurs en rapport avec leur propre pratique :
♦ la surveillance des patients sous AVK est "chronophage"
♦ l'efficacité préventive des traitements par AVK est souvent méconnue
Dans une enquête auprès de 280 praticiens (cardiologues, neurologues, internistes, médecins de
famille), Bungard et collaborateurs indiquent nettement que les médecins sous-estiment la réduction du
risque relatif d’AVC chez les patients sous AVK (53 % contre 68 % réels) et surestiment clairement le
risque de survenue d’une hémorragie majeure sous anticoagulant (10 % contre 1 % en réalité) (12).
En France, l’AFSSAPS signale environ 580 000 individus (soit 1 % de la population) sous
traitement anticoagulant au long cours. Les AVK sont au premier rang des causes d’hospitalisations pour
iatrogénie médicamenteuse.
35
L’incidence des complications hémorragiques sous AVK en milieu gériatrique n’est pas connue.
Notre étude s’est attachée à identifier, chez le sujet âgé hospitalisé en milieu gériatrique, des facteurs de
risque spécifiques d’anticoagulation excessive et à déterminer l’incidence et la sévérité des complications
hémorragiques liées aux AVK.
V C. Les complications hémorragiques liées à l’excès d’anticoagulation
Dans notre étude, les hémorragies sous antivitamines K sont significativement plus fréquentes
chez les patients en excès d’anticoagulation : 19,23 % des patients dont l’INR est supérieur à 4,5
développent une complication hémorragique, contre 3,85 % des patients dont l’INR est resté dans la zone
thérapeutique (p<0,002). Ces hémorragies sont le plus souvent mineures et seuls 3 cas (5,66 %) vont
présenter une hémorragie grave, toujours associée à un INR élevé, avec une perte d’au moins 2 points
d’hémoglobine justifiant une transfusion sanguine, ce qui représente 1,89 % de l’ensemble de notre panel.
Nous n’avons relevé aucun cas d’hémorragie intracrânienne ou d’hémorragie fatale.
Nos connaissances sur les relations entre le risque hémorragique et l’âge des patients sous AVK
sont issues d’études desquelles les patients très âgés et fragiles sont souvent exclus ; ces études, qui
donnent généralement peu d’indications utiles en pratique gériatrique courante, produisent des résultats
souvent discordants.
En 1996, Fihn, dans une étude-référence, combinée (prospective et rétrospective), réalisée dans 6
cliniques d’anticoagulation réparties sur le territoire des Etats-Unis et qui inclut 2376 patients suivis
pendant 3702 patients-années, dont 81 personnes de plus de 80 ans, signale que l’âge ne constitue pas un
facteur déterminant de risque hémorragique en cas de traitement par warfarine. L’incidence des
hémorragies mineures est calculée à 18 pour 100 patients-années chez les moins de 50 ans et à 16,3 pour
100 patients-années chez les personnes de plus de 80 ans, la différence n’étant pas significative sur le plan
statistique. Aucune différence n’est notée pour les hémorragies majeures, dont l’incidence est de 9,3 pour
100 patients-années avant 50 ans, et de 4,4 pour 100 patients-années pour les sujets de plus de 80 ans, qui
sont toutefois plus concernés par la survenue d’hémorragies fatales (28).
Plus récemment, Torn, dans un travail comparable effectué à la clinique d’anticoagulation de
Leiden (Pays-Bas) et qui inclut 4202 patients sous AVK dont 696 sujets de plus de 80 ans, retrouve une
augmentation de l’incidence des événements hémorragiques avec l’âge. L’incidence des hémorragies
majeures passe de 1,5 pour 100 patients-années avant 60 ans, à 4,2 pour 100 patients-années chez les plus
de 80 ans (90).
Entre temps, Copland, après une étude rétrospective réalisée dans des conditions comparables,
chez des patients sous AVK pour une fibrillation auriculaire, a signalé que lorsque la surveillance du
36
traitement anticoagulant était optimisée, l’incidence des complications hémorragiques majeures n’était
pas plus élevée après 75 ans (2,8 pour 100 patients-années), comparativement à un groupe contrôle plus
jeune (2,9 pour 100 patients-années) (18).
Nous retrouvons, dans notre travail, des taux d'hémorragies sous antivitamines K comparables aux
meilleurs résultats signalés dans la littérature, même si les études publiées se sont essentiellement
intéressées à des patients âgés ambulatoires, vivant au domicile. Comme nous l'avons signalé plus haut,
les risques hémorragiques sous AVK sont largement surestimés par la plupart des médecins, dont les
craintes sont souvent peu fondées.
C'est ainsi, par exemple, que quelques études associent une augmentation du risque d'hémorragie
intracrânienne spontanée aux patients âgés sous anticoagulants oraux, ce qui peut limiter la prescription
des ces produits dans cette tranche de la population (25). Mais de nombreux travaux, dont celui de Man-
Song-Hing et l'étude Stroke Prevention in Atrial Fibrillation Investigators (SPAFI), prouvent que cette
augmentation du risque d'hémorragie intracrânienne spontanée est essentiellement retrouvée chez les
patients dont l'hypertension artérielle n'est pas contrôlée : il est donc raisonnable, en pratique courante, de
retarder l'initiation d'un traitement par AVK jusqu'à l'obtention d'une pression artérielle systolique et
diastolique acceptable (59, 107).
Un autre exemple est celui de la surestimation du risque hémorragique chez les patients âgés sujets
aux chutes, avec l'éventualité de survenue de traumatisme crânien susceptible d'engendrer un hématome
cérébral. Il a été calculé que même sous anticoagulant, le risque de développer un hématome sous-dural
post-chute était si faible que le sujet en fibrillation auriculaire présentant un risque moyen d'AVC (5 %
par an), devrait être victime d'environ 300 chutes par an pour que le risque du traitement anticoagulant
soit supérieur au bénéfice attendu (60). Cela n'empêche pas, évidemment, de prendre en institution
gériatrique ou au domicile, les mesures nécessaires pour limiter le risque des chutes et leur sévérité.
Nous estimons, avec d'autres, que ce qui est déterminant pour limiter le risque hémorragique chez
le patient sous anticoagulant, outre le respect des contre-indications indiscutables présentes chez le patient
(diathèse hémorragique connue, thrombopénie, hypertension artérielle non contrôlée, non-compliance
thérapeutique), c’est l'optimisation de la qualité de la prise en charge et de la surveillance du traitement.
C'est largement ce qui explique, selon nous, dans notre étude, une incidence relativement faible des
complications hémorragiques sous AVK.
En effet, l'un des services ayant participé à cette étude a acquis une "culture de l'anticoagulation"
du patient âgé. Cela se matérialise concrètement par la publication et l'application d'un protocole validé
d'initiation d'un traitement par la warfarine pour les personnes âgées, un enseignement régulier aux
médecins sur le maniement des antithrombotiques et une collaboration étroite avec le laboratoire local
37
pour l'optimisation des contrôles biologiques, ce qui a notamment facilité la réalisation de cette étude (13,
14).
V D. Les facteurs spécifiques de déséquilibre des traitements anticoagulants
V D 1. Les médicaments
Les interactions médicamenteuses sont une cause majeure d’excès d’anticoagulation. Notre étude
indique que certaines modifications thérapeutiques sont significativement corrélées à un risque d’INR
excessif. C’est ainsi que 83,24% des patients en excès d’anticoagulation ont reçu, dans les 30 jours
précédents, un nouveau médicament, contre 29,59% seulement pour les témoins, restés en zone
thérapeutique (p=0,000). Ces médicaments sont largement prescrits en milieu gériatrique.
• L’Amiodarone.
L’amiodarone, classiquement considéré comme un antiarythmique de classe III dans la
classification de Vaughan Williams, est utilisé depuis de nombreuses années dans le traitement et la
prévention des troubles du rythme ventriculaire et supra-ventriculaire.
En France, ce médicament est autorisé dans :
♦ la prévention des récidives de tachycardies ventriculaires menaçant le pronostic vital ou
documentées symptomatiques et invalidantes
♦ la prévention des récidives de tachycardie supra-ventriculaires en cas de résistance ou de contre-
indication aux autres thérapeutiques
♦ le traitement des tachycardies supra-ventriculaires.
Si la fibrillation auriculaire, trouble du rythme cardiaque le plus fréquent chez la personne âgée,
affecte 10% de la population générale après l’âge de 80 ans, elle atteint une proportion bien plus
importante chez les octogénaires en institution, avec une prévalence de 30%.
Dans cette pathologie, l’amiodarone est, chez le sujet plus jeune, retenue comme médicament de
deuxième, voire de troisième intention (après les antiarythmiques des classes Ic et Ia), en raison de ses
complications extra-cardiaques. Mais chez le sujet âgé, présentant très souvent des contre-indications aux
antiarythmiques de référence (insuffisance cardiaque, dysfonction systolique, angor, bronchospasme,
insuffisance rénale) (14), ce produit a une très large prescription.
38
Une étude rétrospective réalisée par requête sur les systèmes informationnels du régime général de
l’Assurance Maladie de l’Aveyron, entre Avril 2002 et Mars 2003, indique une prévalence de patients
sous amiodarone de 42 pour 10 000 habitants, avec une médiane entre 75 et 79 ans (109).
En 2003, l’amiodarone représentait 45 % (en montant) des médicaments de la classe des
antiarythmiques vendus en Région Rhône-Alpes (108).
En institution, la prévalence de patients traités par amiodarone n’est pas connue, mais elle est
probablement très importante, compte-tenu de la fréquence de la fibrillation auriculaire dans cette
population et du nombre de patients victimes d'accident vasculaire d'origine thromboembolique qui y sont
accueillis.
Notre étude indique que 9,43 % des patients en anticoagulation excessive ont bénéficié, dans les
jours précédents, de l’introduction d’amiodarone (Cordarone®) dans leur traitement, alors qu’aucun des
témoins à INR stable n’avait reçu ce traitement (p<0,001).
Dans une enquête prospective réalisée en France en 2003, dans une population de patients
hospitalisés, âgés de plus de 70 ans et portant sur les "surdosages" en antivitamine K, Siguret et al.
signalaient que sur 59 cas de "surdosage" identifiés, 10 cas (16,5%) concernaient des patients pour
lesquels l’amiodarone avait été introduite dans les 10 jours précédents la découverte du "surdosage" (79).
Cette prévalence est apparemment plus importante que celle retrouvée dans notre étude, mais le travail de
nos confrères portait sur une structure incluant, outre des lits de SSR et d’SLD, des lits de court séjour
gériatrique (Unités de Gériatrie Aigüe et Médecine Gériatrique), plus propices à la découverte de
nouveaux cas de fibrillation auriculaire.
L’effet potentialisateur de l’amiodarone sur les antivitamines K et la warfarine en particulier, est
connu depuis 1981, avec un niveau de preuve important (61, 73, 15). Cet effet a, depuis, été confirmé par
plusieurs travaux, le plus fréquemment cité étant celui de Kerin et al., publié en 1988 : il s’agit d’une
étude rétrospective portant sur une série de huit patients recevant concomitamment de l’amiodarone et de
la warfarine et qui ont été suivis pendant huit semaines. Tous ces patients, dont l’INR était en zone
thérapeutique au préalable, avaient reçus une dose de charge identique d’amiodarone, suivie par une dose
d’entretien allant de 200 à 400 mg par jour ; dans les 15 jours suivants l’introduction de l’amiodarone,
l’INR mesuré chez les huit patients avait augmenté en moyenne de 44 % (44).
Les études les plus récentes ont montré que l’interaction amiodarone-warfarine était dose et
concentration plasmatique d’amiodarone dépendantes et que le niveau de déstabilisation de l’INR était
étroitement corrélée à la dose d’entretien de l’amiodarone, justifiant de réduire, à l’introduction de
l’amiodarone, la dose d’anticoagulant de 25 à 40 % (76).
39
Cette interaction se manifeste après un temps de latence variable, correspondant à l’accumulation
de l’amiodarone dans l’organisme, en particulier dans les tissus adipeux et les poumons, mécanisme
dépendant de la demi-vie plasmatique de l’amiodarone (en moyenne 28 jours, soit 13 à 107 jours selon les
sujets). En fonction des doses de charge et d’entretien de l’amiodarone, l’interaction avec la warfarine se
traduit plus ou moins rapidement par une élévation de l’INR et peut persister plusieurs semaines, jusqu’à
obtention de l’équilibre plasmatique de l’amiodarone, atteint le plus souvent entre 4 et 12 semaines, mais
parfois après plus d’un an, pour les sujets chez lesquels la demi-vie de l’amiodarone est la plus longue
(15, 76).
L’interaction entre ces 2 produits est de type pharmacocinétique. Ils sont tous les deux métabolisés
au niveau hépatique, par l’intermédiaire du cytochrome P450. La warfarine, mélange racémique de 2
énantiomères, produit des métabolites inactifs sous l’action des iso-enzymes CYP1A2 et CYP3A4 (sur
l’isomère –R) et CYP2C9 (sur l’isomère –S qui possède des propriétés anticoagulantes six fois
supérieures). Le métabolite actif de l’amiodarone, le déséthylamiodarone (DEA) inhibe de façon
compétitive les iso-enzymes CYP2CP et CYP1A2, limitant la métabolisation des 2 isomères de la
warfarine par cette voie ; cela se traduit par une diminution de la clairance plasmatique et une
augmentation des concentrations plasmatiques de la warfarine, d’où une potentialisation de son effet
anticoagulant (66, 48).
• Le Paracétamol
Depuis sa découverte fortuite par deux médecins strasbourgeois, Cahn et Hepp, en 1886 (72), le
paracétamol s’est imposé comme antalgique et antipyrétique de référence.
En France, les quatre médicaments les plus vendus, en quantité, en officine, sont l’Efferalgan®, le
Doliprane®, le Dafalgan® et le Di-Antalvic®, spécialités qui contiennent toutes du paracétamol (106).
En institution pour personnes âgées, le paracétamol était, en 2003, retrouvé dans 15,7% des
ordonnances (71).
Le paracétamol est considéré comme l’antalgique et l’antipyrétique de première intention chez les
patients sous antivitamine K, car il n’interfère pas avec l’hémostase primaire, ce qui n’est pas le cas de
l’acide acétylsalicylique ou des anti-inflammatoires non-stéroïdiens, qui, de plus, sont associées à un
risque hémorragique digestif accru chez les personnes âgées.
Par ailleurs, la douleur est le symptôme le plus fréquent rencontré chez la personne âgée, au
domicile ou en institution ou elle est retrouvée, selon les enquêtes, chez 50 à 83 % des sujets. Cela se
traduit, dans ce milieu, par une large association paracétamol - antivitamine K.
40
Dans notre étude, 18,87 % des patients en excès d’anticoagulation ont reçu, dans les jours
précédents l’élévation de leur INR, du paracétamol, ce qui n’est le cas que de 0,94 % des témoins
(p<0,0001). Cela suggère une potentialisation du traitement anticoagulant par le paracétamol.
La suspicion d’une telle interaction est ancienne, évoquée dès 1968, étayée depuis par plusieurs
études, mais est parfois discutée, et peu d’études sont disponibles sur le sujet.
En 1968, dans une étude prospective, contrôlée, randomisée et en double-aveugle, Antlitz
détermine qu’une prise prolongée et à dose élevée (2600 mg par jour pendant quatre semaines) de
paracétamol chez des patients sous doses stables d’AVK augmente significativement le temps de
prothrombine (3).
En 1998, Hylek et al. conduisent une étude rétrospective, de type cas-témoins, chez des sujets
ambulatoires (93 patients et 196 témoins), avec pour objectif d’identifier, les causes d’anticoagulation
excessive chez des sujets d’âge moyen de 70 ans en fibrillation auriculaire : ils identifient que 56 % des
patients dont l’INR est supérieur à 6 ont pris, dans les jours précédents, du paracétamol (le plus souvent à
visée antipyrétique), contre 36 % des témoins, dont l’INR est resté thérapeutique, entre 1,7 et 3,3
(p<0,001) et déterminent une corrélation positive entre la dose totale de paracétamol ingérée et le niveau
d’augmentation de l’INR (42).
Plus récemment, Mahé et al., au terme d’une étude prospective, contrôlée, en double aveugle, chez
11 patients ambulatoires d’âge moyen de 66 ans, sous warfarine à dose stable, retrouvent également une
augmentation significative (p=0,001) de l’INR après ingestion de paracétamol pendant 14 jours, à la dose
de 4 g par jour, confirmant l’existence d’une potentialisation de la warfarine par le paracétamol (58).
Enfin, en 2004, Wittkowsky, dans une étude longitudinale portant sur près de 135 000 patients
sous warfarine, montre que les médicaments contenant du paracétamol arrivent en tête, par leur fréquence
de prescription (22,7% des patients), dans l'accroissement de l'INR lié à une interférence médicamenteuse
(100).
Mais certaines études n’aboutissent pas aux mêmes conclusions. C’est ainsi qu’en 2002, Fattinger
et al., dans une étude de type cas-témoins, réalisée en Suisse chez des patients hospitalisés âgés de 65 ans
en moyenne (54 malades et 180 témoins), ne retrouvent pas de modification significative de l’INR après
une co-prescription de 2220 mg de paracétamol et de phenprocoumone (dérivé coumarinique non
commercialisé en France, dont la demi-vie plasmatique est très longue, entre 5 et 10 jours) durant 5 jours,
suggérant que l’interaction AVK-paracétamol ne concerne que la warfarine (26).
Cette absence d’interaction entre le phenprocoumone et le paracétamol est confirmée par
Gadisseur, au terme d’une étude randomisée, en double-aveugle, portant sur 31 patients (10 patients sous
placebo, 11 patients sous 1500 mg par jour de paracétamol et 10 patients sous 3000 mg par jour de
paracétamol) (29).
41
Depuis peu, des travaux tentent d’expliquer ces résultats apparemment contradictoires et le cas
rapporté par Gebauer semble intéressant à décrire : il s’agit d’un homme âgé de 74 ans, sous warfarine à
dose stable pour une fibrillation auriculaire, chez lequel l’INR s’élève brutalement sous paracétamol. Afin
d’enquêter sur ce phénomène, et après correction de son INR, il lui est de nouveau administré du
paracétamol à la dose de 4 g par jour pendant 3 jours, ce qui se traduit par une nouvelle augmentation de
l’INR, qui passe de 2,3 à 6,4. Parallèlement, d’autres paramètres sont mesurés, notamment l’activité des
facteurs vitamine-K-dépendants et la concentration plasmatique de warfarine : c’est ainsi que l’activité
des facteurs VII et X passent respectivement de 29,4% et 27% avant l’introduction du paracétamol à
15,5% et 20,2% après 3 jours de co-médication, au moment où l’INR est mesuré à 6,4, alors que la
concentration plasmatique de warfarine reste paradoxalement stable, posant l’hypothèse d’une interaction
de type pharmacodynamique entre le paracétamol et la warfarine (30).
D’autres travaux, comme ceux de Whyte, ont d’ailleurs confirmé, chez les patients sous warfarine,
la diminution de l’activité des facteurs de coagulation vitamine K dépendants, en particulier du facteur
VII. En effet, cette diminution, qui est constatée lors des intoxications au paracétamol, disparaît après
l’administration de N-acétylcystéine, l’antidote du paracétamol (98).
L’étude conjointe des métabolismes de la warfarine et du paracétamol semble pouvoir expliquer
les résultats apparemment contradictoires décrits dans la littérature. Comme nous l’avons décrit plus haut,
la warfarine est un mélange racémique de 2 énantiomères, l’isomère -S ayant un pouvoir anticoagulant
beaucoup plus puissant que l’isomère -R. La S-warfarine est essentiellement métabolisée en 7-
hydroxywarfarine par l’iso-enzyme CYP2C9 alors que la R-warfarine est métabolisée par les iso-enzymes
CYP1A2 et CYP3A4, qui participent également, de manière partielle, à la métabolisation du paracétamol,
qui est prioritairement métabolisée par l’iso-enzyme CYP2E1.
La plupart des études soulignent que le paracétamol ne potentialise pas le traitement anticoagulant
chez les sujets sains, comme l’a démontré Kwan (49). Il est donc avancé que l’interaction entre la
warfarine et le paracétamol ne serait cliniquement significative que sur des terrains particuliers, lorsque la
métabolisation du paracétamol n'est plus possible par les voies habituelles : c’est ainsi que chez le sujet
âgé, chez lequel il a été démontré une diminution, liée au vieillissement, de l’activité de l’iso-enzyme
CYP2E1, le paracétamol utiliserait les voies des iso-enzymes CYP1A2 et CYP3A4, inhibant de façon
compétitive la métabolisation de la R-warfarine et déstabilisant le traitement anticoagulant (51). Le même
phénomène est observé chez les patients hypertendus et ceux en hypoxie tissulaire (insuffisance
cardiaque, cœur pulmonaire aigu ou chronique, fibrillation auriculaire).
D’un autre côté, une étude récente de Thijssen et al., sur la base d’un travail biologique, vient de
montrer que le métabolite actif du paracétamol, le N-Acétyl-Para-benzoQuinone-Imine (NAPQI), exerçait
un effet inhibiteur sur l’activité de la vitamine K époxyde réductase (VKOR), cible des antivitamines K,
42
aboutissant en cas de co-prescription, à une situation d’excès d’anticoagulation, en particulier chez le
sujet âgé (88).
Il semble donc que chez le sujet âgé, du fait du vieillissement hépatique, de la diminution en
quantité et en qualité des iso-enzymes du cytochrome P450, l’administration conjointe du paracétamol et
de warfarine comporte un risque de potentialisation du traitement anticoagulant devant inciter à limiter les
doses de paracétamol, la durée de la co-prescription, et à intensifier la surveillance de l’INR.
• Le Tramadol
L'impact du phénomène douloureux est si important chez le sujet âgé que les antalgiques de palier
I, tel le paracétamol, trouvent rapidement leurs limites en terme d'efficacité. Dans ce contexte, l'arrivée,
en 1997, du tramadol sur le marché a constitué une étape importante. Il est classiquement considéré
comme un opioïde faible (palier II-III). Il possède un mécanisme d'action triple : une action agoniste mu,
une inhibition de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline qui contrôlent les voies descendantes
de la douleur, et une libération accrue de sérotonine. Sa galénique favorise son utilisation chez la
personne âgée : en effet, se présentant sous des formes à action immédiate ou retard, il peut être
administré en perfusions continues ou discontinues, voire à l'aide de pompes d'auto-analgésie. Le
tramadol présente, par comparaison aux morphiniques, un faible risque de dépression respiratoire et
semble avoir un intérêt dans la sédation des douleurs mixtes, malgré la relative fréquence des effets
indésirables digestifs à type de nausées.
Notre étude indique que 5,66 % des patients en excès d'anticoagulation ont récemment reçu du
tramadol, contre aucun chez ceux dont l'INR est resté en zone thérapeutique (p<0,01), indiquant une
possible interaction entre les antivitamines K et le tramadol.
Lors de l'association du tramadol à un traitement anticoagulant, quelques cas d'allongement des
temps de coagulation, avec parfois des conséquences hémorragiques, ont été publiés, concernant aussi
bien la warfarine que l'acénocoumarol ou le fluindione, chez des personnes âgées (77, 75, 36, 16).
Toutefois, dans le cadre d'une étude prospective contrôlée et en double aveugle, portant sur 19
patients à INR stable sous anticoagulant oral, Boeinjinga et al. ne retrouvent aucune influence du
tramadol chez les patients traités par le phenprocoumone, suggérant une absence d'interaction entre les 2
produits (9).
Les données de la littérature sont donc apparemment contradictoires, et, tout comme avec le
paracétamol, plusieurs observations explicatives peuvent être soulignées.
43
Tout d'abord, l'étude de Boeinjinga est de type expérimental et inclut des sujets jeunes (âge moyen
inférieur à 50 ans), sains et volontaires, auxquels il est administré le phenprocoumone, dérivé
coumarinique à demi-vie particulièrement longue. A l'opposé, tous les cas publiés dans la littérature et
suggérant une interaction entre le tramadol et les anticoagulants oraux concernent des patients âgés,
polypathologiques, souvent dénutris, à fonction rénale altérée.
Ensuite, le tramadol et la warfarine ont une voie métabolique commune, via l'iso-enzyme
CYP3A4 (également utilisé par le paracétamol), site d'interaction potentiel (36).
Il est donc plausible que cette interaction se manifeste dans les mêmes conditions que celles
suggérées pour le paracétamol, à savoir l'utilisation de doses élevées, chez des patients fragilisés par le
vieillissement, la dénutrition et la diminution des capacités métaboliques, qui génèrent une augmentation
de la forme libre et donc active des anticoagulants par déplacement de leurs sites de liaisons protéiques
(16).
Nous suggérons aux gériatres une prudence et un monitorage plus attentif des patients sous
antivitamines K recevant par ailleurs du tramadol
• Les fluoroquinolones
Une étude américaine récente, réalisée dans 11 structures hébergeant au long cours des personnes
âgées indique que les fluoroquinolones sont les antibiotiques les plus prescrits, représentant 28 % des
administrations d'antibiotiques (22 % pour la seule lévofloxacine), loin devant les furanes (19 %) (65).
En France, cette sous-classe d'antibiotique, bien que moins prescrite que d'autres, est, selon les
données de l'Union Régionale des Caisses d'Assurance Maladie de la région Rhône Alpes, celle qui
augmente le plus en volume et en montant remboursé.
En effet, les fluoroquinolones, par leurs caractéristiques pharmacologiques, représentent une
excellente alternative à l'amoxicilline-acide clavulanique : tout en provoquant, par voie orale, moins
d'effets digestifs indésirables, leur volume de distribution important est intéressant pour le traitement des
infections respiratoires, hépato-biliaires, urinaires et cutanées ; de plus, leur spectre d'action est large.
Ils sont donc susceptibles d'une co-administration avec les antivitamines K.
Dans notre étude, 11,3 % des sujets avec un INR excessif ont reçu un traitement par
fluoroquinolone, contre seulement 1,9 % des témoins (p<0,01), ce qui semble impliquer ce produit dans
l'augmentation de l'INR.
44
Ces dernières années, plusieurs cas d'anticoagulation excessive liée à une administration
simultanée entre des fluoroquinolones (en particulier la lévofloxacine, la ciprofloxacine et la
norfloxacine) et des anticoagulants oraux ont été publiés, soulevant le problème d'une possible interaction
(43, 32, 4, 24).
Toutefois, cette interaction reste controversée et n'est pas retrouvée par tous les auteurs (55, 103,
23). Mais les études contestant cette interaction souffrent souvent de biais méthodologiques relevés par
plusieurs auteurs (34, 19) : faible taille des échantillons, répartition aléatoire peu rigoureuse, sujets
souvent jeunes et sains, administration d'une dose unique de warfarine.
Paradoxalement, toutes ces études concluent à la nécessité d'une co-prescription prudente des 2
produits et aux Etats-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) a obtenu qu'un changement soit
apporté à la monographie du Levaquin™ (Lévofloxacine), à la suite de notifications spontanées issues des
milieux médicaux.
Il semble donc que l'interaction soit surtout l'apanage de terrains particuliers, notamment les
personnes âgées et fragiles. Selon les cas signalés, l'effet de la warfarine augmente dans un délai de deux
à 16 jours suivant l'ajout de la fluoroquinolone (24).
Les mécanismes régissant la possible interaction entre les fluoroquinolones et la warfarine sont
incertains et il est évoqué : soit le déplacement de la warfarine de ses sites de liaisons protéiques, soit la
réduction de la flore intestinale produisant la vitamine K, soit une diminution du métabolisme de la
warfarine (43).
• Le lactulose
La constipation est fréquente chez le sujet âgé.
La personne âgée normale a une fréquence de selles comparable à celle de la personne jeune, mais
elle se distingue par une diminution des pressions sphinctériennes au repos et à l'effort, ainsi que par une
augmentation de la pression intra-rectale lors des manœuvres de distension (63). Ce phénomène est
beaucoup plus marqué chez la femme âgée, favorisé par les grossesses multiples et le syndrome de
descente du plancher pelvien.
D'autres éléments favorisent la constipation chez le sujet âgé fragile : la sédentarité et la réduction
des activités physiques, la déshydratation relative, la faiblesse de la musculature abdomino-pelvienne, les
comorbidités.
45
La constipation est l'un des principaux symptômes dont se plaignent les sujets âgés. Une récente
enquête française, réalisée par questionnaire, portant sur 7 000 sujets âgés de plus de 75 ans, dont 1440 de
plus de 65 ans, indique que près de 20 % des sujets âgés souffrent de constipation (82, 40). Dans les
institutions gériatriques, cette prévalence est encore plus élevée et la constipation affecte, selon les
sources, de 27 à 42 % des patients (40, 31, 92).
La personne âgée se distingue par une consommation accrue de laxatifs : 30 % contre 6 % avant
40 ans (62). Il n'est donc pas surprenant de retrouver, chez les séniors, une co-administration laxatif-
antivitamine K.
Dans notre étude, 11,3% des patients en excès d’anticoagulation ont reçu, dans les jours
précédents le déséquilibre de leur INR, du lactulose, contre aucun chez les témoins (p < 0,001), ce qui
suggère l'existence d'une interaction entre les deux produits.
La littérature internationale est très pauvre sur une éventuelle potentialisation des anticoagulants
par les laxatifs. A notre connaissance, une seule étude a enquêté sur ce thème, confirmant nos
observations. Il s'agit d'une étude de cohorte, prospective, qui a suivi 1124 patients sous anticoagulant au
long cours (acénocoumarol ou phenprocoumone), dans un centre d'anticoagulation ; dès qu'un INR était
supérieur à 6, la consommation de laxatifs par les patients était analysée. Après ajustement des facteurs
confondants, il en ressortait que le lactulose était le seul facteur associé à une anticoagulation excessive,
aussi bien en analyse univariée que multivariée, avec un risque relatif de 3,4 (IC 95%, 2,2-5,3). Les autres
laxatifs n'étaient pas impliqués dans ce risque d'INR excessif, qui concernait quasi-exclusivement des
personnes âgées (96).
L'hypothèse avancée pour expliquer cette interaction, qui reste à confirmer par d'autres travaux,
est que le lactulose, qui accélère le transit intestinal, diminue plus l'absorption digestive de la vitamine K
que celle des antivitamines K, en particulier chez les personnes âgées et fragiles, engendrant une
anticoagulation excessive. De plus, il a été montré une diminution de production de ménaquinone
(vitamine K2) par les bactéries du tractus intestinal après administration de lactulose (94).
V D 2. Les états pathologiques intercurrents
Certains états pathologiques sont connus pour déstabiliser un traitement anticoagulant. C'est ainsi
que la littérature est bien documentée sur l'augmentation du risque hémorragique sous AVK chez les
patients en hyperthyroïdie (fréquente chez le sujet âgé) ou présentant une insuffisance hépatique (le taux
de prothrombine en est d'ailleurs un excellent marqueur).
46
D'autres situations sont suspectes d'interaction avec les traitements par AVK, mais les éléments de
preuve manquent, faute d'études spécifiques, malgré quelques cas rapportés : c'est notamment le cas de
l'insuffisance rénale aiguë, de l'insuffisance cardiaque, des pneumopathies, des cancers, des troubles
nutritionnels, de la diarrhée, des états fébriles, voire des polypathologies (21).
Dans notre travail, les déséquilibres des traitements anticoagulants associés à des états
pathologiques intercurrents concernent 45,1 % des patients, contre seulement 1,94 % des témoins
(p<0,001).
• Les états fébriles
Les infections nosocomiales sont très fréquentes en institution gériatrique, avec une incidence
allant de 3 à 7 pour 1000 résidents/jour, soit 1 à 2 infections par résident par an (11). En France, leur
prévalence est estimée à 9,9% (81).
Les infections constituent, en fréquence, la troisième cause de transfert des résidents en structure
de court séjour (6).
En milieu gériatrique, les infections sont favorisées par plusieurs facteurs :
♣ la polypathologie
♣ la dépendance (pneumopathies de déglutition)
♣ l'alitement (risque d'escarres)
♣ le déficit intellectuel (déambulation favorisant la contamination)
♣ la vie communautaire (repas, animations)
♣ les procédures invasives (sondes diverses)
♣ le manque de chambres individuelles
Les infections de l'appareil respiratoire représentent 40 % des infections nosocomiales et sont, de
loin, la première cause de mortalité par infection hospitalière (41).
Dans notre étude, la fièvre, symptôme principal de l'infection, est significativement présente chez
les patients en excès d'anticoagulation, retrouvée chez 20,75 % d'entre eux, contre seulement 0,94 % des
témoins (p<0,001), ce qui est en faveur d'une interaction "état fébrile-AVK".
Cette possible interaction, suspectée depuis longtemps, est peu documentée dans la littérature.
Dès 1943, Richards décrivait que l'induction d'un état fébrile chez les rats augmentait
considérablement la réponse au dicoumarol (74).
47
Plus récemment, en 1964, Loeliger et al., démontraient que les taux biologiques des facteurs de
coagulation II, VII, IX et X diminuaient chez les patients fébriles (53).
Plusieurs hypothèses sont avancées, pour expliquer cette possible influence des états fébriles sur
les traitements anticoagulants.
L'une est liée au traitement antipyrétique utilisé pour soulager les sujets fébriles. Comme nous
l'avons indiqué plus haut, le paracétamol est actuellement l'antipyrétique de référence ; nous avons
souligné que dans certaines conditions, l'association paracétamol-AVK entrainait une diminution de la
métabolisation de la warfarine au niveau des iso-enzymes du cytochrome P450. Sonne a montré qu'en cas
de pneumopathie fébrile, la clairance des antipyrétiques était diminuée de 36 % (84).
Une autre hypothèse est celle de l'augmentation de la clairance des facteurs vitamine-K-
dépendants chez le patient fébrile, comme le montre Loeliger (53).
Enfin, une troisième hypothèse tient à l'hypoalbuminémie relative démontrée par Oester chez le
patient fébrile sous AVK, responsable d'une augmentation de l'effet anticoagulant (68).
• Les troubles de l'alimentation et la malnutrition
La malnutrition protéino-énergétique (MPE) est fréquente chez le sujet âgé. Elle est favorisée par
la polymédication, les troubles dentaires (hygiène, prothèse inadaptée ou non portée), les troubles de la
déglutition, l'isolement socio-affectif (veuvage, absence d'intervention médico-sociale ou familiale), la
dépression, les troubles cognitifs et la perte d'autonomie.
Sa prévalence est estimée à 1% de la population des personnes âgées saines vivant au domicile, à
4% des patients recevant des soins à domicile, à 5% des patients atteints de la maladie d’Alzheimer et
suivis au domicile, à 20% des patients hospitalisés et à 37% des sujets âgés institutionnalisés (35).
Notre étude identifie, chez les patients en situation d'INR excessif, 30,2 % de cas présentant une
malnutrition protéino-énergétique et/ou des troubles de l'alimentation (anorexie, troubles de déglutition),
contre aucun cas dans le groupe témoin (p<0,001), ce qui laisse présager une interaction entre un état
nutritionnel altéré et une anticoagulation excessive.
Les risques liés à une modification du régime alimentaire chez les patients sous AVK au long
cours sont généralement sous-estimés, malgré la description de plusieurs cas, rapportés dans la littérature.
Les apports alimentaires en vitamine K sont probablement en cause dans ces modifications de l'INR (17).
Sorano et al. avaient montré qu'un apport quotidien de 20 à 40 µg de phylloquinone (vitamine K1,
d'origine végétale), soit 2 fois moindre que ce qui est généralement recommandé, était suffisant pour
maintenir la stabilité thérapeutique d'une anticoagulation orale (85).
48
Les sujets sous AVK et en situation de malnutrition protéino-énergétique, avec un apport
insuffisant en vitamine K1, seront donc à risque d'anticoagulation excessive et d'hémorragie.
À l’inverse, des cas d'INR bas ou de résistance aux antivitamines K sont décrits chez des sujets
recevant une diète riche en protéine et pauvre en glucide, voire des compléments alimentaires
multivitaminés, souvent trop riches en vitamine K1 (47, 5, 45).
• La diarrhée et la déshydratation
Un état diarrhéique et/ou une déshydratation clinique sont retrouvés chez 22,9 % des patients en
INR excessif, contre seulement 0,9 % des témoins (p<0,006), dans notre étude, ce qui semble impliquer
ces situations dans les causes d'excès d'anticoagulation.
À notre connaissance, seuls quelques cas d'INR excessif en rapport avec une diarrhée sont
rapportés dans la littérature, dont celui d'une femme de 56 ans, antérieurement contrôlée sous warfarine,
qui a présenté six épisodes d’augmentation de l'INR, chaque épisode ayant été associé à une diarrhée
aiguë d'une durée de un à quatre jours. La patiente n'avait pas pris de doses supplémentaires de warfarine
et n'avait pas débuté de nouveaux médicaments avant les épisodes. Il n'avait pas été diagnostiqué de
maladie hépatique ou de syndrome de malabsorption aiguë ou chronique, la patiente rapportant toutefois
une baisse de 25 à 50 % de ses apports alimentaires habituels (83).
L'explication la plus plausible à cette interaction est celle d'une malabsorption de la vitamine K1
(origine alimentaire), en cas de diarrhée aiguë, au niveau de l'intestin proximal, ce qui peut prédisposer
les patients sous warfarine à un INR excessif, avec un risque hémorragique, comme dans le cas décrit par
Black (7).
49
VI. LE PROBLÈME POSÉ PAR L’INR PRÉCÉDENT L’INCLUSION
Bien qu'en zone thérapeutique, L'INR précédent l'inclusion, mesuré environ 12 jours avant
l'inclusion, est statistiquement plus élevée chez les "futurs" cas : il est de 2,69 ((IC 95%, 2,53-2,85),
contre 2,36 (IC 95%, 2,26-2,46) pour les témoins (p<0,001).
Cela peut suggérer que la survenue, au cours d'un traitement anticoagulant oral, d'un delta d'INR
significatif (environ 15 % dans notre étude), malgré un INR en zone thérapeutique, serait prédictif d'un
déséquilibre thérapeutique imminent, avec ou sans conséquence hémorragique.
Cette observation rejoint les conclusions récentes de Kucher et coll. Au sein d'une cohorte de 2391
patients âgés de 60 ans en moyenne, suivis dans un centre d'anticoagulation, 32 patients ayant présenté
une hémorragie majeure (justifiant une hospitalisation) ont été appariés à 64 témoins comparables pour
l'âge, le sexe, l'indication à la warfarine et l'ancienneté du suivi par le centre. Les auteurs ont comparé,
entre les 2 groupes, les séries d'INR précédant la date de survenue du phénomène hémorragique. L'INR au
moment de l'événement hémorragique était de 5,9±5,9 pour les cas, contre 2,3±0,7 pour les témoins
(p<0,001) ; l'INR précédent, mesuré respectivement 11 et 18 jours avant (différence non significative),
tout en étant dans la zone thérapeutique pour les 2 groupes, était de 3±1,2 pour les cas, et de 2,3±0,8. Il
était plus élevé chez les "futurs" cas (p<0,001). Les INR antérieurs étaient comparables pour les 2
groupes (46).
L'INR semble donc s'élever très peu de temps avant la survenue d'une complication hémorragique,
rendant celle-ci difficilement prévisible en pratique clinique courante.
50
VII. LES LIMITES DE L’ÉTUDE
VII A. Limites liées à la population étudiée et au recueil des données
L'étude a été réalisée au sein d'une population très âgée, en milieu hospitalier spécialisé. Cette
population est très hétérogène et inclut notamment des patients présentant des troubles cognitifs ou des
incapables majeurs.
Les contraintes découlant des textes réglementaires et en particulier le respect de la loi relative à la
protection des personnes se prêtant à des recherches biomédicales (Loi dite Huriet-Serusclat du 20
décembre 1988, modifiée en 2004), imposant le recueil du consentement écrit et éclairé des personnes
concernées, ont limité les possibilités d'investigations biologiques et/ou morphologiques sur les sujets de
l'étude et des cas d'hémorragies occultes ont pu échapper aux investigateurs.
Dès la phase de conception, il avait été décidé de s'abstenir de tout prélèvement biologique
spécifique pour les sujets de l'étude. C'est ainsi que l'évaluation de l'état nutritionnel ou de l'état
d'hydratation ne s’est pas appuyée sur des données biologiques et a reposé uniquement sur l'appréciation
clinique des médecins-référents. Un biais est donc ici possible, dans la mesure où, au préalable, il n'a pas
été proposé une définition rigoureusement homogène des critères cliniques de malnutrition protéino-
énergétique ou de déshydratation.
De même, l'absence de prélèvement biologique complémentaire, il n'a pas été permis de
déterminer, comme cela est suspecté par certains auteurs, si l'insuffisance rénale aiguë augmentait l'effet
anticoagulant des antivitamines K.
VII B. Limites liées à la définition de l'anticoagulation excessive
Il n'existe pas de définition consensuelle de l'anticoagulation excessive. Pour notre étude, nous
avons choisi d'inclure, comme "cas", les sujets dont l'INR était supérieur à 4,5. Cette décision s'est
appuyée sur le fait que, généralement, on estime que c'est à partir de ce chiffre qu'apparaît, pour le patient
sous anticoagulant, le risque de développer une hémorragie dite "sérieuse". D'autre part, c'est à partir d'un
INR supérieur à 4,5 que la plupart des sociétés savantes recommandent une intervention correctrice, avec
ou sans administration de vitamine K1.
51
Cette décision excluait donc, de fait, les patients dont l'INR était compris entre 3 et 4,5, ainsi que
ceux ayant pu développer une complication hémorragique alors que leur INR était resté dans l'intervalle
thérapeutique.
Plusieurs études indiquent que la majorité des épisodes hémorragiques sous AVK surviennent
alors que l'INR n'est que modérément élevé, voire même dans la zone thérapeutique (4% des témoins
dans notre étude) (70, 33). Ces observations soulignent d'ailleurs, encore une fois, les limites de l'INR
pour la surveillance des traitements anticoagulants.
VII C. Limites liées à l'analyse des résultats (biais de confusion)
La population étudiée est polypathologique et polymédiquée. Sa complexité peut rendre difficile
une analyse fine des causes d'anticoagulation excessive, car tous les sujets présentent des éléments
confondants ne permettant pas de déterminer avec précision le niveau d'implication individuelle de
chaque facteur dans la survenue d'un INR "hors-norme".
C'est ainsi qu'un sujet pourra présenter une anticoagulation excessive, au décours d'un épisode
diarrhéique consécutif à une ingestion de fluoroquinolone prescrite elle-même pour juguler une
pneumopathie fébrile, en association avec des doses importantes de paracétamol. Il sera alors difficile
d'imputer l'élévation de l'INR à un facteur spécifique.
52
VIII. RECOMMANDATIONS DEVANT UN RISQUE DE DÉSÉQUILIBRE DE
L'INR
Cette étude, réalisée en milieu gériatrique, nous a permis d'identifier plusieurs facteurs de risque
de déséquilibre des traitements anticoagulants chez les personnes très âgées. Ces facteurs, sans être
exclusifs au sujet âgé, se caractérisent par leur prévalence particulièrement élevée dans la tranche d'âge
supérieure de la population :
• L'introduction de certains médicaments :
♦ le paracétamol à dose importante
♦ le tramadol
♦ l'amiodarone
♦ les fluoroquinolones
♦ le lactulose
• La survenue de certains états pathologiques :
♦ les états fébriles
♦ les troubles de l'alimentation et la malnutrition protéino-énergétique
♦ les états diarrhéiques et la déshydratation
Face à l'une de ces situations à risque, qui peuvent évidemment se combiner, deux attitudes sont
possibles pour le gériatre ayant en charge un patient sous anticoagulant oral :
1) L'anticipation du déséquilibre thérapeutique, par une baisse "préventive" de la posologie de
l'AVK, mais cela pose plusieurs problèmes :
♦ la réponse pharmaco-toxicologique des patients aux AVK est individuelle. Elle est très variable
selon les individus et soumise, comme nous l'avons indiqué plus haut, à de multiples facteurs (notamment
génétiques, environnementaux et physiopathologiques). À l'heure actuelle, il n'est pas possible, en pratique
courante, de prévoir la réaction d'un patient à une modification posologique.
♦compte-tenu de la demi-vie longue d'un produit comme la warfarine, l'impact d'une modification
posologique sur la coagulation sanguine risque de se produire avec un décalage clinico-biologique, alors que
l'événement aigu a été résolu.
53
♦ en cas de modification posologique empirique, le risque est grand d'induire une période
d'instabilité thérapeutique pouvant durer plusieurs semaines, voire de favoriser la survenue d'un événement
thrombotique.
Toutefois, il a été récemment montré qu'une réduction posologique de la dose d'AVK était possible
lors de l'introduction de l'amiodarone. En effet, après avoir démontré que le niveau d'interaction
amiodarone-warfarine était corrélé à la dose d'entretien de l'amiodarone, Sanoski et Bauman, au terme d'une
étude de cohorte, déterminent que selon la dose d'amiodarone introduite chez le patient sous AVK,
l'équilibre thérapeutique du traitement anticoagulant peut être maintenu en réduisant la dose de warfarine :
- de 30% en cas de "charge" d'amiodarone
- de 40%, 35%, 30% et 25% pour des doses d'entretien d'amiodarone qui seraient
respectivement de 400, 300, 200 ou 100 mg/j (76)
2) L'intensification de la surveillance biologique du taux d'INR, qui a notre faveur, pour plusieurs
motifs :
♦ notre étude, comme nous l'avons décrit plus haut, indique que l'INR, même en restant en zone
thérapeutique, s'élève, avec un delta de 15% (30% dans l'étude de Kucher) (46), lors de l'imminence d'un
déséquilibre thérapeutique des traitements par AVK ou d'un phénomène hémorragique. La surveillance
rapprochée de l'INR peut permettre de déceler précocement ce moment et d'ajuster alors le traitement, chez
les patients identifiés, en suivant les recommandations des sociétés savantes.
♦ tous les individus n'ont pas la même réponse physiologique face aux situations intercurrentes et
cette attitude non uniforme permettra une intervention ciblée sur les patients réagissant réellement à
l'introduction d'un nouveau traitement ou à un état intercurrent.
Cette intensification de la surveillance de l'état de la coagulation sanguine par l'INR (malgré ses
limites) pourra éventuellement se traduire par un rythme de prélèvement raccourci de 50 % par rapport au
rythme habituel (par exemple, prélèvement tous les 3 jours pour une surveillance habituellement
hebdomadaire).
54
IX. LES PERSPECTIVES
IX A. Supprimer les limites de l'International Normalized Ratio (INR)
La principale complication redoutée chez les patients sous anticoagulant est le risque
hémorragique. Or, celui-ci n'est que partiellement corrélé à l'intensité de l'anticoagulation, mesurée par
l'INR, dont il a surtout été montré que l'élévation s'associait à une mortalité importante ; c'est ainsi que
Odén, sur la base d'une cohorte de 42 451 patients, soit plus d'un million d'INR, à partir de 46 centres
d'anticoagulation suédois, indique que le taux de décès double pour chaque point d'INR au-dessus de 2,5
(67).
Par contre, un certain nombre d'études indiquent que la majorité des hémorragies surviennent pour
des INR bas, souvent en zone thérapeutique. C'est notamment le cas de l'étude ISCOAT (Italian Study on
Complication of Oral Anticoagulant Therapy) : dans cette cohorte prospective incluant 2745 patients
consécutifs (dont 8 % âgés de plus de 80 ans) issus de 34 centres d'anticoagulation en Italie, 6 (27%) des
22 épisodes hémorragiques "majeurs" surviennent alors que les patients ont un INR en zone
thérapeutique.
De même, dans une étude de cohorte rétrospective incluant tous les sujets sous anticoagulant de la
ville de Rochester, Minnesota, les auteurs indiquaient que l'INR médian lors d'un épisode hémorragique
était relativement bas, soit 4,2 (33).
Enfin, dans notre étude, près de 4% des témoins développent un phénomène hémorragique alors
que leur INR est thérapeutique, entre 2 et 3.
Il est donc légitime de conclure que l'International Normalized Ratio, qui n'est déjà pas un bon
marqueur de l'état de la coagulation sanguine, n'est pas, non plus, un bon marqueur du risque
hémorragique chez les patients sous anticoagulant oral. Plusieurs articles récents jettent un sérieux doute
sur son utilisation pour mesurer l'état de la coagulation sanguine lors des traitements anticoagulants, en
raison notamment de l'existence de variations analytiques importantes.
Dans l'une de ces études, l'influence de variables pré-analytiques (temps et température de
conservation) et analytiques (température de centrifugation), sur la mesure de l'INR, a été évaluée et les
auteurs ont démontré qu'une conservation de 6 heures provoquait un changement de plus de 10% de la
valeur de l'INR pour 25% des spécimens, les poussant à recommander l'analyse de l''INR avant un délai
maximum de 6 heures (91).
55
Dans une autre étude, Horsti et al. évaluent la variabilité des résultats d'INR sur un même appareil
(BCS de Dade Behring) provoquée par l'utilisation de 7 réactifs commerciaux (thromboplastines)
différents, sur des échantillons sanguins provenant de 150 patients sous anticoagulant et centrifugés de
manière identique. Il retrouve que l'écart-type de l'INR varie de 0,54 à 1,07 pour un INR moyen à 2,5 et
que seuls 2 réactifs donnent des résultats concordants (39).
Il apparaît donc nécessaire de développer de nouveaux tests biologiques pour surveiller plus
efficacement les patients sous traitement anticoagulant. Des propositions ont été avancées, les plus
récentes suggérant de suivre ces patients par une mesure de la concentration sérique ou plasmatique de
l'anticoagulant, ce qui est rendu possible, en pratique courante, avec les nouveaux automates, très
performants, voire par la mesure de la concentration de la forme libre d'anticoagulant et même par la
mesure de la concentration de vitamine K oxydée (54, 95).
IX B. L'apport attendu de la pharmacogénétique
Le métabolisme des AVK est essentiellement hépatique, et le cytochrome P450 2C9 (CYP2C9)
est l'enzyme majoritairement responsable de leur élimination, notamment pour les dérivés coumariniques
(warfarine ou Coumadine® et acénocoumarol ou Sintrom®). L'activité du CYP2C9 peut varier sous
l'influence de facteurs environnementaux (alimentation plus ou moins riche en vitamine K, coprescription
de certains médicaments interférant avec les AVK, malnutrition sévère ), physiopathologiques ou
génétiques. Des travaux indiquent que les doses de warfarine nécessaires pour atteindre l'équilibre
thérapeutique diminuent selon le nombre d'allèles CYP2C9 fonctionnels.
Les gènes et les polymorphismes des cytochromes P450 sont bien connus. C'est ainsi que les
différentes versions génotypiques du CYP2C9 sont à l'origine de deux phénotypes de patients : les
métaboliseurs rapides, les CYP2C9*2 (homozygotes sauvages, ils portent 2 allèles sauvages) et les
métaboliseurs lents, les CYP2C9*3 (ils sont homozygotes mutés ou hétérozygotes mutés). Dans le cadre
d'un traitement anticoagulant, une prescription standard d'AVK va exposer le sujet métaboliseur lent à un
risque de réaction exagérée avec un risque hémorragique important (64, 93).
Higashi a montré, au terme d'une étude rétrospective de cohorte conduite dans 2 centres
d'anticoagulation et portant sur 185 patients sous AVK, que les sujets homozygotes mutés nécessitaient
une réduction posologique plus grande que les hétérozygotes et jusqu'à 50% de la dose utilisée chez les
homozygotes sauvages. Il confirme également que les polymorphismes CYP2C9*2 et CYP2C9*3 étaient
associés à une augmentation du risque d'anticoagulation excessive et d'hémorragie (38).
D'autre part, dans le cadre d'une étude prospective, Bodin et coll., administrant une dose unique
d'acénocoumarol à 263 volontaires sains, analysent leur ADN et démontrent que 2 polymorphismes
56
génétiques, l'un dans le CYP2C9 et l'autre dans le gène de la Vitamine K oxydo-réductase (VKOR1,
cible des AVK), permettent à eux-seuls d'expliquer 50 % de la variabilité de la réponse aux AVK. La
présence simultanée des deux mutations chez le même patient expose à un risque d'anticoagulation
excessive multiplié par dix. Ces éléments ont été récemment confirmés par D'Andrea et al. (8, 20).
Il apparaît donc qu'avec la généralisation actuelle du séquençage de l'ADN, le génotypage
systématique du CYP2C9, voire du VKORC1 avant l'instauration d'un traitement par AVK, pourrait
rapidement permettre une amélioration de la prise en charge thérapeutique et une meilleure prédiction du
risque hémorragique des patients.
IX C. L'arrivée des nouveaux antithrombotiques
Les caractéristiques de l'anticoagulant idéal pourraient être :
♦ une origine biologique
♦ une administration orale et parentérale
♦ une action immédiate et prévisible
♦ une demi-vie longue (une seule prise par jour)
♦ une absence de surveillance biologique
♦ une élimination rénale faible
♦ un minimum d'interaction médicamenteuse et alimentaire
♦ un coût économique faible
♦ un bon rapport bénéfice-risque en clinique
♦ l'existence d'un antidote dénué de danger
Les antivitamines K sont incontournables dans nombre de pathologies. Ces produits sont utilisés
en pratique médicale depuis les années 1940. Ils constituent l'une des rares classes pharmacologiques qui
n'a pas évolué depuis son origine, malgré les très nombreux problèmes posés par leur utilisation.
Il est donc légitime, surtout avec le vieillissement de la population dans les pays occidentaux qui
va accroitre les indications aux anticoagulants, que les chercheurs et les grandes firmes pharmaceutiques
s'intéressent à ce segment économiquement "prometteur".
La meilleure connaissance du mécanisme de la coagulation sanguine et la modélisation des
techniques de recherche poussent les chercheurs à proposer des produits dont les modes d'action sont
différents et dont l'objectif est d'inhiber spécifiquement soit un facteur de la coagulation, soit une étape de
57
cette coagulation (Figure 6). De nombreux produits sont, à l'heure actuelle, en cours de développement
avec des essais cliniques, à des stades souvent très avancés.
Figure 6. Principaux points d'impact des nouvelles classes d'anticoagulants.(d'après G. Helft. AMC
pratique, 2005;140:29-34) (37)
À ce jour, un seul produit est réellement arrivé à maturité : il s'agit d'un inhibiteur spécifique du
facteur X activé, le Fondaparinux, commercialisé en France sous le nom d'"Arixtra®". C'est un
pentasaccharide synthétique de l'héparine, qui a actuellement des indications dans de nombreuses
pathologies. Toutefois, il ne peut prétendre prendre la place des AVK, notamment pour la prise en charge
de maladies chroniques comme la fibrillation auriculaire, faute d'essais cliniques, et surtout, par son mode
d'administration (injections quotidiennes), et sa relative contre-indication chez les insuffisants rénaux.
Une forme à longue durée d'action (une injection hebdomadaire), l'Idraparinux, sera peut-être
proposée, avec une indication dans la fibrillation auriculaire, mais elle se confrontera au problème de la
réversibilité de son action en cas d'hémorragie sérieuse. D'autres inhibiteurs du facteur X activé,
administrables par voie orale, sont actuellement à l'essai.
Une autre classe intéresse les chercheurs, celle des inhibiteurs directs de la thrombine (facteur II
activé) actifs par voie orale, avec plusieurs candidats.
Un produit pourtant très prometteur, le mélagatran (Exanta®), se rapprochait sensiblement de
l'anticoagulant idéal. Il semblait efficace dans la plupart des indications des AVK, mais il a été
58
rapidement retiré du marché en raison d’une toxicité hépatique inexpliquée. D'autres médicaments, de la
même classe, prétendent actuellement à sa succession.
Même si les AVK resteront encore pendant longtemps des produits de référence, il est souhaitable
que des produits nouveaux, plus simples dans leurs utilisations, administrables sans risque important chez
les personnes âgées, soient rapidement à la disposition des gériatres.
59
X. CONCLUSION
Avec le vieillissement de la population, les indications aux traitements anticoagulants sont de plus
en plus nombreuses, en particulier dans les pays occidentaux. Plusieurs études d'envergure ont notamment
démontré leur intérêt pour la prévention primaire ou secondaire des accidents thromboemboliques
artériels chez les sujets en fibrillation auriculaire.
Toutefois, ces produits restent largement sous-prescrits par les médecins et les gériatres, en raison
d'un rapport bénéfice-risque souvent défavorable, dominé par la crainte légitime du risque hémorragique
associé aux antivitamines K.
Notre étude, menée en milieu gérontologique, sur des patients très âgés, polypathologiques, a
identifié plusieurs facteurs indépendants de risque de déséquilibre des traitements par AVK sur ces
terrains fragiles : il s'agit d'interférences médicamenteuses (dont certaines avec des produits d'utilisation
banalisée et en vente libre comme le paracétamol et le lactulose) et physiopathologiques. Leur survenue
doit justifier, de manière systématique, une intensification de la surveillance de l'état de coagulation par
l'INR, qui en reste l'examen de référence, malgré ses importantes limites (reflet imparfait de l'état de la
coagulation sanguine, piètre marqueur du risque hémorragique sous AVK).
Nous estimons que les bénéfices des traitements anticoagulants oraux seront supérieurs aux
risques qu'ils comportent si les médecins prescripteurs maitrisent mieux la pharmacologie de ces produits
redoutés, mais encore indispensables. À défaut, et à l'instar de ce qui se pratique dans plusieurs pays
(Pays-Bas surtout), il faudrait encourager la création de centres d'anticoagulation dont il est démontré
qu'ils allongent significativement, pour les patients suivis, le temps passé dans l'INR thérapeutique et
diminuent le risque hémorragique. Il semble également souhaitable d'impliquer plus les patients dans la
gestion de leur traitement et de favoriser, chez les sujets aptes, après éducation, l'auto-surveillance de leur
INR, comme cela se pratique dans des pays limitrophes. Enfin, l'apport de la pharmacogénétique pourrait,
dans un avenir proche, diminuer sensiblement les risques liés aux traitements anticoagulants et permettre
d'attendre la mise au point de l'anticoagulant idéal.
60
XI. LES ANNEXES
Annexe 1. La fiche de recueil
61
62
63
64
65
66
67
Annexe 2. Abaque de prescription de la warfarine pour les sujets âgés
68
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ANNÉE : 2006
NOM ET PRÉNOM DE L’AUTEUR: DELAYE Virginie.
DIRECTEUR DE LA THÈSE : CHATAP Guy.
TITRE DE LA THÈSE : Les antivitamines K chez le sujet âgé. Étude des facteurs de déséquilibre thérapeutique en milieu gériatrique.
RÉSUMÉ : En raison de leurs complications hémorragiques éventuelles, les antivitamines K restent sous-prescrites chez les sujets âgés, malgré un nombre croissant d'indications et bien que les résultats de grandes études épidémiologiques démontrent leur intérêt pour prévenir les thromboses vasculaires, notamment en cas de fibrillation auriculaire. L'objectif principal de l’étude était de déceler des éléments permettant d’améliorer le rapport bénéfice-risque des AVK chez la personne âgée fragile, en recherchant, sur ce terrain, des facteurs spécifiques de déséquilibre de l'INR. L'étude devait également apprécier la tolérance des AVK chez les sujets âgés en termes d’intensité et de fréquence des complications hémorragiques. Sur une période de 18 mois (Janvier 2002 à Juin 2003), nous avons mené une étude rétrospective, comparative de type cas-témoin, monocentrique, portant sur les patients sous AVK au long cours, en milieu gériatrique, à l’hôpital Émile-Roux. Nous avons inclus d'une part 53 patients, jusque-là équilibrés sous AVK, ayant présenté un déséquilibre inattendu de leur INR (> 4,5) et d'autre part un groupe témoin de 106 patients dont l’INR était, sur la même période, resté en zone thérapeutique. Les 2 populations étaient comparables pour l'âge, le sexe et les indications aux anticoagulants oraux. Les données recueillies étaient notamment : l’introduction récente de nouveaux médicaments, l’apparition d’un état pathologique spécifique à la personne âgée et les complications hémorragiques liées à l'excès d'anticoagulation. L’introduction récente de médicaments fréquemment utilisés en gériatrie (amiodarone, paracétamol, tramadol, fluoroquinolones et lactulose) est significativement corrélée à un déséquilibre de l’INR. Des états pathologiques banals par leur fréquence (états fébriles, troubles alimentaires et malnutrition, diarrhée et déshydratation) sont également corrélés à un déséquilibre des traitements par les anticoagulants oraux. Une meilleure connaissance de la pharmacologie des anticoagulants oraux, des mécanismes responsables de l'hypersensibilité des sujets âgés aux AVK, des limites de l'INR, ainsi qu'une meilleure gestion des situations à risque et l'éducation des patients lorsque cela est possible doit permettre d'optimiser leur utilisation sur des terrains fragiles. L'intégration de la pharmacogénétique dans notre pratique devrait rendre plus sûre leur prescription, en attendant l'arrivée d'une nouvelle génération d'antithrombotiques et de l'anticoagulant "idéal". Mots-clés :
♦ Vitamine K-Antagonistes et inhibiteurs
♦ Sujet âgé
♦ Services de gériatrie
♦ Taux normalisé international
Adresse de l'UFR. : Faculté de Médecine de Créteil- Paris XII
8 Rue du Général SARRAIL
94010 CRÉTEIL CÉDEX
77
TITLE : Oral anticoagulant therapy in the elderly. A study on the therapeutic imbalance factors in geriatrics.
ABSTRACT : Because of their possible hemorrhagic complications, oral anticoagulant therapy (OAT) is under prescribed for the elderly, despites a growing indication number and the fact that large epidemiological studies bring several results attesting their interest to prevent vascular thrombosis, especially in case of auricular fibrillation. The main purpose of this study was to detect some possible improvements of the benefit/risk rate of the OAT for at-risk old patients , by looking for specific imbalance factors of the international normalized ratio test (INR) in this particular field. During 18 months (from January 2002 to June 2003), we carried out a retrospective study, of monocentric witness-case, focusing on patients under long lasting oral anticoagulant treatment , in a geriatric ward at Emile-Roux hospital. On one hand, we included of the 53 patients that had been well balanced up to this time and among whom INR were unexpectedly unbalanced (greater than 4.5), on the other hand, we included a 106 patients witness group among whom INR had staid in therapeutic field during the same period.. The two populations were comparable concerning their age, sex and oral anticoagulant indications. The collected data were among others : the recent introduction of new medications, the appearance of a pathological state specific to the old people and hemorrhagic complications related to the excess of anticoagulation. The recent introduction of medication frequently used in geriatric medicine (amiodarone, paracetamol, tramadol, fluoroquinolone and lactulose) is significantly correlated to an imbalance of the INR. Some pathological states which are commonplace due to their frequency (febrile states, dietary troubles and malnutrition, diarrhoea and dehydratation) are also correlated to an imbalance by the oral anticoagulants. A better knowledge of the oral anticoagulant pharmacology, of the mechanisms responsible of the OAT hypersensitivity of the elder subjects, of the limits of the INR and a better management of the at-risk situations and the patients’ education as much as possible, must be able to optimize their use on diathesis. The integration of pharmacogenetics in our practice should make their prescription safer, waiting for the incoming of a new generation of antithrombotics and of the “ideal” anticoagulant.