protection des sources d eau et mécanismes d indemnisation
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Protection des sources d’eau et
mécanismes d’indemnisation
pour les producteurs agricoles
présenté par : Me Yves Chaîné
dans le cadre du congrès 2015 de la
Fédération québécoise des municipalités
À jour : septembre 2015
Table des matières
1. L’entrée en vigueur du Règlement sur le
prélèvement des eaux et leur protection
2. Les objectifs du règlement
3. Le régime d’autorisation des prélèvements des
eaux
4. Les dispositions particulières en matière agricole
5. Les critères exigés par la Commission de la
protection du territoire agricole du Québec pour
des prélèvements d’eau à l’extérieur du périmètre
urbain
6. Les mécanismes d’indemnisation des producteurs
agricoles
L’entrée en vigueur du Règlement sur le prélèvement des eaux et leur protection
• Le Règlement sur le prélèvement des eaux et leur
protection est entré en vigueur le 14 août 2014.
• Il remplace le Règlement sur le captage des eaux
souterraines.
Exceptions
Le règlement est entré en vigueur en août
2014 à l’exception :
1. Les articles 11 à 30 sont entrés en
vigueur le 2 mars 2015.
2. Les articles 68 et 75 sont entrés en
vigueur le 1er avril 2015.
Régime législatif en matière de prélèvement des eaux
1. Loi sur la qualité de l’environnement
articles 31, 31.81, 46, 115.27 et 115.34
2. Loi affirmant le caractère collectif des
ressources en eau et visant à renforcer
leur protection (ci-après : Loi sur l’eau)
articles 33, 34 et 35
Les objectifs du règlement
Compléter l’entrée en vigueur de la Loi
affirmant le caractère collectif des ressources
en eau en établissant un nouveau régime
d’autorisation de prélèvement.
Renforcer la protection des eaux prélevées à
des fins de consommation humaine ou de
transformation alimentaire.
Orientation du Ministre
31.76. Le pouvoir d'autorisation dévolu au Ministre par la présente
sous-section doit être exercé de manière à assurer la protection des
ressources en eau, notamment en favorisant une gestion durable,
équitable et efficace de ces ressources ainsi qu'en prenant en compte
le principe de précaution et les effets du changement climatique.
En outre, toute décision que prend le Ministre dans l'exercice de ce
pouvoir doit viser à satisfaire en priorité les besoins de la population en
matière de santé, de salubrité, de sécurité civile et d'alimentation en
eau potable. Elle doit également viser à concilier les besoins:
1° des écosystèmes aquatiques, à des fins de protection;
2° de l'agriculture, de l'aquaculture, de l'industrie, de la production
d'énergie et des autres activités humaines, dont celles liées aux loisirs
et au tourisme.
Personnes soumises à l’autorisationarticle 31.75 L.Q.E.
Tout prélèvement d'eau est subordonné à l'autorisation du ministre ou,
dans les cas prévus par règlement pris en vertu de l'article 31.9, du
gouvernement.
Sont cependant soustraits à cette autorisation les prélèvements suivants:
1° un prélèvement dont le débit maximum est inférieur à 75 000 litres
par jour, sauf exception
2° un prélèvement, temporaire et non récurrent, qui est effectué dans
une situation d'urgence ou à des fins humanitaires ou de sécurité civile;
3° tout autre prélèvement déterminé par règlement du gouvernement
Personnes soumises à l’autorisationarticle 5
Est subordonné à l'autorisation prévue à l'article 31.75 de la Loi
sur la qualité de l'environnement (chapitre Q-2), malgré le fait que
son débit maximum soit inférieur à 75 000 litres par jour:
1° un prélèvement d'eau effectué à des fins de
consommation humaine pour desservir un campement industriel
temporaire alimentant plus de 80 personnes, lorsque ce
campement est assujetti à l'autorisation prévue à l'article 32 de la
Loi sur la qualité de l'environnement;
2° un prélèvement d'eau effectué à des fins de
consommation humaine pour desservir tout autre établissement,
installation ou système d'aqueduc alimentant plus de 20
personnes;
Personnes soustraites à l’autorisationarticle 6
Les prélèvements d'eau suivants sont soustraits à l'autorisation
prévue à l'article 31.75 de la Loi sur la qualité de l'environnement:
1.un prélèvement d'eau effectué au moyen d'un fossé, d'un drain
ou d'un égout aménagé pour recueillir les eaux de ruissellement ou
pour rabattre les eaux souterraines.
2. un prélèvement d'eau effectué par une installation permanente
aménagée à des fins de sécurité civile;
3. un prélèvement d'eau effectué à même un étang d'irrigation
alimenté par l'infiltration d'eau souterraine ou par des eaux de
ruissellement (conditions à remplir)
4. un prélèvement d'eau temporaire et non récurrent effectué.
Exceptions
Le cas des prélèvements faits avant
l’entrée en vigueur du nouveau
règlement (article 33 Loi sur l’eau): Les autorisations de prélèvement d'eau délivrées par le
Ministre du Développement durable, de l'Environnement et
des Parcs antérieurement au 14 août 2014 sont réputées avoir
été délivrées en vertu du nouvel article 31.75 de cette loi.
Ces autorisations sont valides pour une période de 10 ans à
compter de la date mentionnée ci-dessus et sont
renouvelables.
Le cas des prélèvements faits le jour de
l’entrée en vigueur du nouveau
règlement (article 34 Loi sur l’eau): Les prélèvements d'eau qui sont légalement effectués le 14
août 2014 et pour lesquels aucune autorisation n'a été délivrée
en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement (chapitre Q-2)
peuvent être continués dans les mêmes conditions pour la
période de 10 ans qui suit cette date.
À l'expiration de cette période, leur continuation est
subordonnée à une autorisation délivrée conformément à ces
nouvelles dispositions.
Le régime d’autorisation des prélèvements des eaux
Les particularités des municipalités•Dans le cas d’un prélèvement d’eau alimentant un système
d’aqueduc exploité par une municipalité, l’autorisation est non
renouvelable. (art. 31.81 de la LQE)
•Le demandeur d’une autorisation pour un prélèvement d’eau
effectué à des fins de consommation humaine doit soumettre une
évaluation d’impact économique pour les activités effectuées dans
les aires de protection.
•Lorsque les activités agricoles sont concernées, l’évaluation doit
décrire les moyens que le demandeur a pris ou entend prendre pour
minimiser les impacts économiques, telle la signature d’une entente
d’aide financière. (mécanisme d’indemnisation)
Catégories de prélèvement d’eau
Catégorie 1:
Prélèvements d’eau effectués pour
desservir un système d’aqueduc
municipal alimentant plus de 500
personnes et au moins une résidence.
Catégorie 2:Prélèvements d’eau effectués pour desservir:
un système d’aqueduc municipal alimentant de 21 à 500
personnes et au moins une résidence;
tout autre système d’aqueduc non municipal alimentant 21
personnes et plus et au moins une résidence;
un système de distribution ayant son propre site de prélèvement
(système indépendant d’un système d’aqueduc) et alimentant 21
personnes et plus et au moins un ou plusieurs établissements
d’enseignement, de détention ou de santé et de services sociaux
Catégorie 3:Prélèvements d’eau effectués pour desservir:
un système de distribution ayant son propre site de
prélèvement et alimentant exclusivement un ou plusieurs
établissements utilisés à des fins de transformation alimentaire;
un système de distribution ayant son propre site de
prélèvement et alimentant exclusivement une ou plusieurs
entreprises ou un ou plusieurs établissements touristiques ou
touristiques saisonniers;
tout autre système alimentant 20 personnes et moins (ce qui
inclut les ouvrages de captage individuels).
Aire de protection
Aire de protection immédiate (art. 54)
• Catégorie 1 et 2 = 30 mètres
• Catégorie 3 = 3 mètres
Aire de protection intermédiaire (art. 57)
• Catégorie 1 = déterminée par un professionnel
• Catégorie 2 = bactérie : 100 m virologie : 200 m
• Catégorie 3 = bactérie : 30 m virologie : 100 m
Aire de protection éloignée est aussi à considérer
pour les catégories 1 et 2 et est respectivement
déterminée par un professionnel ou de 2 KM (art. 65)
Choix d’un site de captage
La municipalité a la responsabilité de la localisation des ouvrages
de captage des eaux.
Elle a recours aux services professionnels d’un hydrogéologue ou
d’un autre professionnel qualifié aux fins des travaux de
recherche en eau.
Elle doit soumettre sa proposition aux organismes de contrôle:
1.La CPTAQ (en zone verte)
2.Le MDDELCC (en tout lieu et en tout temps)
Lorsqu’elle est en mesure d’exercer un choix de localisation, la
municipalité tient compte notamment de la catégorie de
prélèvement, des aires de protection et de l’absence de site
exploitable à l’extérieur de la zone agricole.
Analyse par le Ministre
Le Ministre tient compte,
• impacts environnementaux du prélèvement d'eau visé par sa décision
• Les conséquences :
a)sur les droits d'utilisation d'autres personnes ou municipalités
b)sur la disponibilité et la répartition des ressources en eau, dans le but
de satisfaire ou concilier les besoins actuels ou futurs des différents
usages de l'eau;
c)sur l'évolution prévisible du milieu rural et du milieu urbain, en lien avec
les objectifs du schéma d'aménagement et de développement de toute
municipalité régionale de comté;
d)sur le développement économique d'une région ou d'une municipalité.
Le Ministre doit également prendre en considération les observations
que le public lui a communiquées relativement à ce prélèvement d'eau
Les dispositions particulières en matière agricole
La recherche de site doit d’abord se faire
dans des secteurs qui ne sont pas situés
dans la zone agricole.
Si l’ouvrage de captage doit être installé en
milieu agricole, la municipalité doit
demander à la CPTAQ d’autoriser l’activité
demandée et l’autorisation de
morcellement, le cas échéant.
Analyse par la CPTAQ
La CPTAQ se préoccupe notamment des
éléments suivants:1.Dans la mesure du possible, favorise l’implantation de
l’ouvrage de captage et son aire d’alimentation dans
une partie boisée de la zone agricole, à l’écart des
parcelles exploitées.
2.À l’écart des établissements de production animale
(ne peut être situé dans les aires de protection).
3.Éviter que les contraintes aux activités agricoles ne
s’accroissent avec les années.
Acquisition du terrain
Lorsque l’ouvrage de captage est en milieu
agricole, il faut acquérir une superficie
minimum de 30 mètres de rayon, incluant
les servitudes et le droit de passage.
L’acquisition d’une si petite parcelle, faite
de gré-à-gré ou par expropriation, doit
généralement être précédée d’une
demande d’autorisation auprès de la
CPTAQ (morcellement)
Les mécanismes d’indemnisation des producteurs agricole
Le règlement a pour effet d’imposer des mesures de
protection autour des ouvrages de captage d’eaux
souterraines.
Ces mesures de protection dépendent notamment de la
catégorie de prélèvement.
Les mécanismes d’indemnisation ont été mis en place afin de
pallier la perte d’espace à l’agriculture et sert à indemniser
seulement les agriculteurs au sens de l’article 1 j) de la Loi
sur les producteurs agricoles.
Compensation pour les inconvénients
La municipalité a l’obligation de remettre
les lieux en état.
AUSSI, elle doit verser des
compensations pour les inconvénients
suivants:
Contournement des ouvrages de captage
S’applique à l’encombrement occasionné
par la présence d’un ouvrage de captage
en tenant compte du coût additionnel de
contournement.
Montant forfaitaire: 500,00$
Temps du propriétaire
Sert à compenser le temps consacré
par le propriétaire à certains travaux et
à l’évaluation des dommages de
construction.
Montant forfaitaire : 300,00$
Espace de travail temporaire
Compense l’usage temporaire
d’un espace de terrain dans le
cadre de l’exécution des travaux.
Montant forfaitaire : 500,00$
Inconvénients liés aux travaux
Cette indemnité vise à pallier les pertes, les
dommages accidentels ou autres que le
propriétaire pourrait subir en raison des
travaux.
Ex: déplacement du passage des bestiaux.
Montant forfaitaire : 300,00$
Pertes financières agricoles
L’implantation d’un ouvrage de captage en milieu
agricole a des conséquences directes et indirectes
se rapportant de nouvelles interdictions pour le
propriétaire de se livrer à certaines pratiques
agricoles.
2 sortes de conséquences:
1.L’interdiction de certaines pratiques agricoles
2.Limitation des types de productions agricoles
Changement de procédés culturaux
Cette perte financière est basée sur les
charges de production supplémentaires
engagées pour maintenir le rendement
ou la culture en production.
1.Coût de remplacement des engrais
2.Autres coûts liés à d’autres pratiques
culturales
Perte de superficie
Cet élément de l’indemnité vise à
compenser la perte de superficie pour
l’épandage d’engrais organiques.
Les propriétaires se retrouvent, avec la
perte de superficie par rapport aux
bilans de phosphore, avec un surplus
d’engrais organique.
Changement de mode de production
Lors du changement de mode de production,
deux pertes financières sont possibles:
1.Les charges de production supplémen-taires
pour maintenir les activités de production
2.Les coûts de relocalisation des bâtiments
Limitation d’agrandissement
Avec l’imposition d’aire de protection, le droit
de propriété des producteurs agricoles peut
être affecté puisqu’il existera des limitations
d’agrandissement de bâtiments et d’enclos
d’hivernage existants.
Le montant des dommages sera établi de gré
à gré ou dans le cadre d’une décision en
matière d’expropriation.
Changement de production
Lorsque le producteur agricole doit changer le
type de culture, l’indemnité pour ce
changement est calculé comme suit:
Culture initiale – culture de remplacement
Déplacement des amas au champs
Il y aura lieu de prévoir un montant de
compensation advenant que le propriétaire
doit disposer des amas à un nouvel endroit.
La perte économique sous ce chef est
calculée en fonction du déplacement
supplémentaire entre l’étable et l’amas et
entre l’amas et le champs.
Le Code de gestion des pesticides
Selon le Code de gestion des pesticides il est interdit de préparer ou
d’appliquer des pesticides sous certaines conditions.
Article 35. Il est interdit de préparer un pesticide:
2° à moins de 100 m d'un site de prélèvement d'eau de
catégorie 1 ou 2 au sens des paragraphes 1 et 2 de l'article 51 du
Règlement sur le prélèvement des eaux et leur protection (chapitre
Q-2, r. 35.2) ou d'un site de prélèvement d'eau destiné à la
production d'eau de source ou minérale au sens du Règlement sur
les eaux embouteillées (chapitre P-29, r. 2);
3° à moins de 30 m d'un site de prélèvement d'eau de catégorie
3 au sens du paragraphe 3 de l'article 51 du Règlement sur le
prélèvement des eaux et leur protection ou de tout autre site de
prélèvement d'eau souterraine.
Article 50. Il est interdit d'appliquer un pesticide:
1° à moins de 100 m d'un site de prélèvement d'eau de catégorie 1
ou 2 au sens des paragraphes 1 et 2 de l'article 51 du Règlement sur le
prélèvement des eaux et leur protection (chapitre Q-2, r. 35.2) ou d'un
site de prélèvement d'eau destiné à la production d'eau de source ou
minérale au sens du Règlement sur les eaux embouteillées (chapitre P-
29, r. 2);
2° à moins de 30 m d'un site de prélèvement d'eau de catégorie 3 au
sens du paragraphe 3 de l'article 51 du Règlement sur le prélèvement
des eaux et leur protection;
3° à moins de 3 m de tout autre site de prélèvement d'eau
souterraine.
Le Code de gestion des pesticides ne prévoit pas que le propriétaire
qui ne peut pas produire de culture se voit indemnisé.
Toutefois, ces dispositions font en sorte qu’une interdiction
d’appliquer pourrait amener une superficie à ne plus produire de
culture.
C’est uniquement dans ce cas que la municipalité indemnise pour la
perte de culture.
Cette indemnité est calculée en remplaçant la production de culture
perdue par une «culture X».
Le type de culture utilisé pour évaluer les pertes financières à
long terme est celui qui présente le meilleur potentiel de
production. Il s’agit de la culture qui semble la plus apte à
générer le meilleur revenu net pendant une période donnée.
Il doit s’agir :
• Culture profitable
• Culture probable
• Culture non spéculative ou conjecturale
• Cette culture doit avoir été produite au moins une fois au
cours des cinq (5) dernières années.
Expropriation
En cas d’expropriation, s’il n’y a pas
d’entente sur la valeur, le Tribunal
administratif du Québec sera compétent
pour déterminer l’indemnité à payer en
fonction notamment de la Loi sur
l’expropriation.
Calcul de la compensation
Taux de capitalisation suggéré en 2006: 3.5% pour
les pertes annuelles récurrentes.
Total des compensations:
1.Acquisition du terrain
2.Compensation pour les inconvénients
3.Compensation pour les pertes financières
agricoles
montant dû au propriétaire/agriculteur
Cas terre en location
Lorsque la terre est louée, les compensations
pour pertes financières seront versées soit au
propriétaire, soit au locataire ou encore aux 2
selon l’entente qu’ils auront établie.
S’il n’y a pas d’entente, le Guide prévoit que
ni le propriétaire, ni le locataire n’auront droit
à la compensation pour les différents types
de pertes.
Conclusion
Malgré l’apparente disponibilité de
vastes superficies propices à
l’implantation d’ouvrages de captage
dans la zone agricole, les municipalités
doivent tout mettre en œuvre pour
éviter une telle localisation en raison
des exigences de l’article 61.1 de la loi.
Des recherches en eau hors zone
agricole doivent être accomplies
de façon sérieuse.
Même lorsqu’il ne subsiste que
l’option « zone agricole », encore
faut-il démontrer que le site retenu
est celui de moindre impact.
Lorsque ces démonstrations sont
faites, à la satisfaction des
autorités (CPTAQ), encore faut-il
prévoir l’indemnisation des
producteurs dont les activités
seront affectées par la mise en
service de l’ouvrage de captage.