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Reportage : Le Bô-nô-te, art ancestral du Japon n 1èfe revue mondi Si N°320 - février 2004 - 2 /aux * - fl * * Révélations sur LE DERNIER C A A >T^VT TTI A ¥ oAMOURAI Interview Tom Cruise conquis par le Bushido Témoignage ;£; Les dessous «•« «-r du tournage S! 1 ! • Les enjeux de 2004jH>ur Le Banner, Abidi, Jemel... Reporfage chez le roi du K-1, Remy Bonjasky. K-1 Dynamite : le dieu du Sumo pulvérisé par Bob Sapp. Les photos exclusives.

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Reportage : Le Bô-nô-te, art ancestral du Japon

n 1èfe revue mondiSi N°320 - février 2004 - 2

/aux

* - fl* * Révélations surLE DERNIERC A A >T^VT TTI A ¥oAMOURAI• InterviewTom Cruise conquis —par le Bushido• Témoignage ;£;Les dessous «•« «-rdu tournage S!1!

• Les enjeux de 2004jH>ur Le Banner,Abidi, Jemel... • Reporfage chez le roidu K-1, Remy Bonjasky. • K-1 Dynamite :le dieu du Sumo pulvérisé par Bob Sapp.Les photos exclusives.

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DossierLe guerrierle plusmystérieuxdes ArtsMartiaux sedévoile :découvrez lesfacettescachées duNinja. p.42

Grand reportage Le Bô-nô-te,art ancestral du bâton dédiéaux dieux, p.28

Savoir-faire Maîtrisez lessecrets de l'esquive avec nosexperts, p.70

Trajectoire Zeneï Oshiro,l'union des voies du KaratéetduKobudo.p.92

Rencontre Remy Bonjasky, le"King des kings", nous reçoità Amsterdam, p.98

Le calendrier 2004 de Karaté BushidoKaraté Bushido/févier 2004

sommaireÉditeur : Européenne de Magazines, 44, avenue George V75008 PARIS. Tél. : 01 49 52 14 00. Fax : 01 49 52 14 44.

Site Internet : http://www.karatebushido.comKaraté-Bushido N°320 - Février 2004Printed in FrancePhotos couverture : Ninja (remerciements à SFAM Norisqui a prêté la tenue ainsi qu'à Dara-lndo Oum, qui l'arevêtue) (J. Vayriot, design C. Guénet), Tom Cruise (WarnBros), Jérôme Le Banner (P. Iglicki).

4. Zooms

10. Festival de Bercy 200416. Courrier des lecteurs18. Edito20. Panorama et stages des Arts Martiaux24. Club Bruce Lee34. HistoireUrquidez, Wilson, Pinda et Kaman, des champions entrésdans la légende.

54. DécouverteLe Silek, l'un des styles majeurs du Penchak Silat.

58. Le club du moisLe Karaté Club Vaujours.

68. La chronique d'Henry Plée78. TaekwondoLes Championnats de France.

82. ChampionPascal Gentil, la star du Taekwondo français.

86. CinémaPlongez au cœur du tournage du "Dernier samouraï".

91. CinémaLa chronique de Manu Lanzi.

104.K-1 DynamiteBob Sapp s'offre une légende du Sumo pour les étrennes

106. Boxes pieds/poingsLes enjeux de 2004 pour les plus grands championstricolores.

110. ChampionOlivier Cerdan, une référence du Full Contact.

113. ÉvénementMahyar Monshipour au secours des sinistrés du séisme deBam (Iran).

114. Muay ThaïPrésentation du gala de Massy, ouverture de la saison.

116. Panorama du contact122. Les adresses

Le prochain numérode Karaté Bushido

paraîtra le 27 février

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Reportage

hommage auxUne fois Tan, dans la petiteville montagneuse d'Asuké(Japon), des fêtes sontorganisées en l'honneur desdieux. Elles sont l'uniqueoccasion d'assister à des tirsde mousquets anciens ainsiqu'à des démonstrationsde Bô-nô-te, art du bâtonpratiqué par les paysans de-puis plus de quatre siècles.

Par notre envoyé spécialau Japon, Sylvain Guintard

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L a ville d'Asuké, au cceurdes montagnes japonaises,a une importance non-

négligeable dans le paysage du Japond'aujourd'hui. Ici, toutes les personnesayant des responsabilités se nommentSuzuki. Bien qu'originaire de Kumano,c'est à partir d'Asuké que ce nom s'est ré-pandu dans le Japon. Auparavant, Asukése nommait "la ville de Suzuki" (Suzuki-shi). De plus, dans le hameau du hautd'Asuké, au lieu-dit Gotanda, tout lemonde se nomme Suzuki.C'est aussi l'endroit où choisit des'établir un ancien guerrier duShogun Yéasu de-

Chaque année, petits et grandsrevêtent des costumes

traditionnels pour offrir unedémonstration à hauts risques

aux divinités protectrices.

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Reportage?

Outre le combat de proximité, le Bonoté intègre également les affrontementsà distance. Bien que les positions du Bô-nô-te soient basses et ancrées au sol,les sauts font partie des déplacements courants.

PP venu moine Zen, Suzuki Shosan. Ilpratiquait une forme de méditation trèsparticulière: le Nyozazen, un zazen guer-rier. Ayant pris la tonsure tardivement, àl'âge de 42 ans, après ses faits d'armes, ilest célèbre pour avoir rédigé un mémoirecontre le catholicisme des jésuites et leurhégémonie au Japon.Outre cela, Asuké est l'un des trois en-droits les plus réputés au Japon pour sesérables rouges. À la fin novembre, toutela montagne semble en feu. Lorsque labrume matinale ne s'est pas encore levée,une rivière qui coulant au fond de lapetite vallée de Korankei, la magie qui sedégage de cet endroit semble sortie toutdroit d'un film. Mais, deux mois plus tôt,la ville tremble sous le fracas des détona-tions et du choc des bâtons.Dans cette petite ville de 15 000 habitantssituée à 100 kilomètres au Nord-Est deNagoya se perpétue un art martial sacréauquel on ne peut assister qu'une fois l'an,en hommage aux dieux. Dans la région, latradition remonte à 400 ans, à l'époque desgrandes guerres féodales. On ne peut as-sister à des démonstrations que lors desfêtes de villages. Cet art martial, classé pa-trimoine culturel régional par la provinced'Aïchi est le Bô-nô-te, nommé "Hanabo"(bâton fleuri ou en forme de nez, car il pos-sède quelquefois un crochet en fer) àl'époque Edo.

Une offrande à la divinité protectriceLe Bô-nô-te se pratique avec des bâtonslongs d'un mètre quatre-vingt, des lancescourtes de même longueur, des sabrescourts (wakizashi) ou des kusarigama(chaîne et faucille). Les écoles de Bô-nô-te dépassent le nombre de quarante :

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Dès leurenfance, lespratiquantsde Bô-nô-tecommencentà se préparerpour unfuturjalonné dedizaines decélébrations,utilisantparfois lesplussurprenantesdes armes.

Kamataryu, Kitoryu... Elles sont désor-mais le patrimoine culturel de nombreuxhameaux de "La région des trois rivières"(Mikawa). Lors des démonstrations, lespratiquants revêtent de flamboyants ki-monos d'époque féodale, un hachïmaki(ruban blanc) noué autour de la tête pouraffirmer leur résolution au combat. Cen'est pas un art secret, mais c'est devenuuniquement un art martial offert, à traversses démonstrations, à la divinité protec-trice du village, Hachiman Daimyojin,seigneur et protecteur durant les batailles.On commence l'étude du Bô-nô-te versl'âge de 10 ans, sous l'apprentissage auprèsdu chef bô-nô-te de son hameau (le Bô-nô-te Kumicho) et toujours avec le même

partenaire. Ceci est un point très impor-tant. Si l'on arrive à franchir les aléas dela vie pour pouvoir continuer à s'entraîneravec le même partenaire, on peut pour-suivre la pratique. Dans le cas contraire, iln'y a pas d'autre issue que son abandon.Seuls ceux qui demeurent en permanencedans leur village peuvent avoir cettechance. Cependant, au Japon commeailleurs, on assiste à une désertification descampagnes au profit des villes, plus pro-metteuses de travail.Pourquoi garder toujours le même parte-naire ? Lorsque je vivais dans la villed'Asuke, au nord de la ville de Toyota, j'aisouvent assisté, à la mi-septembre, à desdémonstrations de Bô-nô-te. J'ai égale-

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Dès l'âge de 10ans, les enfantsapprennent leBô-nfi-te avecun partenairequ'ils garderonttoute leur vie

La précision nécessaire est telle que seule une vie d'entraînement permet del'atteindre, risquant parfois la vie des pratiquants.

ment pu discuter avec les anciens du vil-lage, qui détiennent la connaissance surles origines de cet art.

Des risques importantsSelon eux, "le fait de travailler toujours avecla même personne nous relie à elle. Commec'est un art fait pour ravir les dieux, no-tamment Hachiman Daimyojin, ces der-niers sont habitués à nous voir toujoursavec la même personne. C'est comme unmariage ! Que diraient les dieux si vouschangiez de partenaire à chaque exhibi-

tion ? C'est la même chose avec votreépouse : si vous alliez faire vos courseschaque fois avec une femme différente, queraconteraient les gens du quartier ? Cela nese peut ! D'année en année, on apprend àse connaître et l'on augmente la vitessed'exécution au point d'arriver parfois à per-cer le dos de la veste du partenaire avec lalance lorsqu 'if s'abaisse pour esquiver. Deplus, nos dieux aimant que du saké (alcoolde riz nommé "omiki" dans les fêtes reli-gieuses) leur soit offert, j'avoue qu 'il nousarrive de boire abondamment entre amis

La vie à Asuké\ 'a'

I et travaillé sixsai-I sons dans le vil-

• I lage artisanal de^^J Sanshu AsukéYashiki, où les traditions,notamment martiales, seperpétuent. Ainsi, j'y aiappris à tresser les san-dales (waragi) et les man-teaux en paille dont on seservait encore à l'époqueEdo (largement représen-tée dans les estampesd'Hokusai oud'Hiroshigé). Par ailleurs,je m'étais également fa-miliarisé avec l'artisanatjaponais et la façon defaire des sceaux en pierre.Les spécialités culinairesd'Asuké sont uniques enleur genre. Letofu "mai-

son", sorte de pâté desoja fait par le chef LiéIshihara de l'aubergeKomputé est un régal. Ilprépare un tofu à l'an-cienne, à base de haricotsbruns, que l'on ne trouvenulle part ailleurs auJapon. On peut égale-ment y déguster des bro-chettes de tofu dorées aucharbon de bois et recou-vertes d'une sauce chaudede miso, un véritable dé-lice !Si vous passez dans la ré-gion fin novembre, arrê-tez-vous au moins unejournée et une nuit pouradmirer les érables rougeset les lumières nocturnesqui enflamment la mon-tagne, vous ne le regret-

terez pas. Outre leBonoté, c'est un endroitunique au Japon pour cesérables à l'automne, l'arti-sanat rural et sa sourcethermale, Yagami no yue.Autrefois, la ville d'Asuké,étape importante del'acheminement du seldepuis la mer vers lesmontagnes, était sous lecontrôle du seigneurSuzuki Shigénori. Denombreuses bataillescontre le clan de TakédaShingen s'y déroulèrent.C'était une place forteavant d'arriver à la villed'Okazaki, où se trouvel'ancien château du clanMatsudaira, nom de fa-mille du shogun YéasuTokugawa."

Karaté Bushido/février 2004

avant l'exhibition, si bien que nous sommessaouls la plupart du temps. Je n 'irai pas of-frir ma vie à quelqu'un que j'aurais ren-contré la veille. Si quelqu'un doit m'ôter lavie, autant que ce soit mon plus procheami /"II est fort possible que le Bô-nô-te ait étécréé à l'origine par les shugenja et yama-bushi de la région, qui se rendaient engrand nombre en pèlerinage dans lesmonts Ontaké. Ils durent s'enrôler dansles troupes des seigneurs militaires, commecelles du fondateur de la ville d'Asuké. leseigneur Suzuki Shigénori. La province deMikawa fut une région de batailles féo-dales. Selon le professeur Suzuki Sigérou,ancien directeur du musée des archives(Shiryokan kancho) de la ville d'Asuké,"le fait que des techniques militaires, pourperpétuer la tradition martiale, aient été dis-simulées à travers des offrandes aux dieux.,comme dans les kagoura (danses sacrées)du temple Kannonji du canton voisind'Horai-chô a déjà été relevé chez les ya-mabushi. "

Tirs et explosionsLors de l'exécution des katas à deux, quise réalisent tous très bas et en fente avantpour la plupart, on voit rapidement qu'ilsont été inventés par des gens ayant à sedéplacer dans les rizières. Une fois leskatas commencés, il y a peu de déplace-ments de jambes, comme si celles-ci étaientembourbées.Les écoles de Bô-nô-te sont principale-ment des écoles de fantassins à pied, crééespour des paysans à qui l'on remettait bâ-tons et piques et que Ton obligeait proba-blement à se battre. Les techniques desabre longs (daïto et katana) comme t-k-

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Les pratiquants de Bô-nô-te n'ayant qu'un seul partenaire leur vie durant, il estrare de voir les anciens rester liés pour les démonstrations au fil des années.

^^ le Kenjutsu sont inexistantes. Bâtonset lances s'étudient contre des sabres

courts tenus à deux mains. Il existe une di-zaine de katas par école.Souvent, les démonstrations ont lieuconjointement à des tirs de mousquets (hi-nawaju) qui, eux aussi, se déroulent encostume traditionnel avec des armesanciennes. Le canon est solidement atta-ché au manche en bois par une tresse sa-crée nommée Bonten. On remplit le canonavec de la poudre avant de le bourrer debandes en papier avec une grande tige enbois. Ensuite, on s'agenouille, la crosse en-foncée en terre, canon pointé vers le ciel,bras tendu et, à l'aide d'une mèche rou-geoyante que Ton fait tournoyer au-des-sus de sa tête pour la maintenir allumée,on met le feu à la base du canon. Ainsi,une vingtaine d'individus par hameau en-viron, des centaines ensuite, souvent desjeunes entre 20 et 40 ans, se baladent ainsitoute la journée, en file indienne avec leurmousquet sur l'épaule, bandes de papierà bourrer et poudre à la ceinture.

Le danger s'invite à la fêteLà encore, le saké coulant à flots, à la tom-bée de la nuit, on met peu de poudre dansle canon. Cinq fois sur six, on économisela poudre pour en avoir beaucoup la 6' lois,afin de faire une grande flamme et un trouénorme dans la terre, quitte à faire explo-ser le canon et à déclencher des accidentsdont les dommages peuvent aller jusqu'àla mutilation. Quelquefois, des participantsse brûlent ainsi le visage. Il arrive égale-ment que des canons explosent, causantquelques dégâts pour les mains et le visage.

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Le danger estune facettedu Bû-nû-te etles pratiquantssont prêts à enassumer tousles risques

Les déflagrations sont si importantes que,les jours suivant les cérémonies, les oreillesdes participants bourdonnent si fortementqu'ils ne peuvent aller travailler.Le danger lors du Bô-nô-te ou del'Hinawaju semble faire partie du lot,comme lors des courses de chars de plu-sieurs tonnes tirés à grande vitesse (dan-jiri). Si l'on craint pour sa vie, il ne faut pasy participer. Les Japonais pensent quemourir pendant la fête du village fait aussipartie du rituel. Après avoir participé àl'une de ces fêtes palpitantes, on peut com-prendre pourquoi les pratiquants du Bô-nô-te s'enivrent d'allégresse durant les cé-rémonies. Le Bô-nô-te est bien le seul art

Les costumes traditionnels revêtus parles pratiquants de tous les âges partici-pent à la beauté de la fête.

Les armes utilisées pour la défense faceau sabre sont très variées et issues desobjets usuels des paysans du 17" siècle.

Vc

martial sur la planète que l'on pratiqueavec de l'alcool dans le sang. L'alcootestétant positif, tous les protagonistes s'en re-tournent chez eux à pied, sabres et mous-quets sur l'épaule. Rapidement, chacun re-commencera à s'entraîner pour l'annéeprochaine. |

Karaté Bushido/février 2004

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DOSSIER

LES NINJA

Pr militaires de la famille Takeda, leKôyô Gunkan, donne le terme deKagimono Hiki. Le fameux chef de guerreOda Nobunaga (1534-1582) avait sespropres Ninja dont le nom était Kyôdan,"celui qui perçoit les murmures". MêmeTokugawa leyasu (1542-1616) utilisa desNinja rescapés de la bataille d'Iga où ilsconnurent une fin tragique. Il employa lesdifférents Ninja selon leurs aptitudes ettalents respectifs afin de contrôler tous lesrisques de débordements durant la périoded'Edo (1603-1867).Les appellations se multiplièrent alors,comme Onmitsu (agent secret), lesOniwaban (garde du corps) des Tokugawadans le château, les Metsu-ke, sorted'indicateurs qui rapportaient tout typed'information permettant de maintenir lapaix. Enfin les Tcppô-taï, groupes armésqui servaient au shogun de protectionrapprochée lors de ses déplacements,furent à l'origine des différents groupesde police, la future armée qui prendraforme durant la période d'Edo (1603-1867).

Des guerriers dissidentsAutant de noms, appellations et defonctions qui montrent combien l'originedu Ninjutsu reste très difficile à cerner.Aussi, à la simple évocation des différentstermes ci-dessus, on entrevoit que sacomplexe diversité est à l'image de sacréation. Cette discipline débute commeune contre-culture assez vague, uneréaction forcée contre le courant dominantdes traditions politiques, économiques etsociales japonaises. Absorbant tout ce qui

Les Ninja utilisaient beaucoupd'artifices comme le masque derrièrela tête, ils faisaient ainsi croire qu'ilspouvaient courir tout en regardantderrière eux et donc, que les Ninjaavaient des yeux dans le dos.

^ ( Un Ninja en tenue d'apparat, tel qu'ilse présentait au public.

peut lui permettre de surpasser n'importequelle situation, tel est le Ninjutsu.Du fait de leurs caractéristiquesgéographiques difficiles d'accès, les régionsd'Iga et Kôga représentaient l'endroit idéalpour les groupes culturels, dissidents etautres guerriers qui cherchaient à éviter lepouvoir de l'époque. C'est entre le 6e et le1" siècle, avec l'arrivée de nombreux

immigrés venus de Chine et de Corée etl'introduction de nouveaux courantsreligieux ou ésotériques que le Ninjutsuprit un visage multiculturel tout en gardantsa spécificité japonaise d'origine.

Iga, la fin des grandes famillesLa première apparition historique des Ninjadate de la bataille de Magari No Jin en 1487

Ces ananymes devenus célèbresI

I y a de nombreux Ninjacélèbres dont les filmsjaponais d'après-guerre sesont empressés de raconter

les histoires. Parmi ceux-ci,Hattori Hanzo, chef du clandes Ninja d'Iga, qui devint lechef de la police secrète de lacapitale Edo (Tokyo), et lemaître Sandayu Momochi quiassurait la double fonction dechef des deux villages ennemisd'Iga-Uéno et de Koga.On retient également lecélèbre Uésugi Kenshi, à lasolde du général TakedaShingen durant les guerresféodales, et les corsaires-Ninjade l'école Kukamishin et leurbateau-dragon (une espèce de

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submersible) qui parcouraientles eaux des îles d'Awaji.Les Ninja se divisaient en troiscatégories. Les exécutants(Génin) rendirent les Ninjacélèbres car ce sont eux quiaccomplissaient les exploits. Legroupe intermédiaire (souventdes artisans, commerçants ouprofessions libérales)correspondait à la classe(Chunin) qui transmettait lesordres venant d'en haut. Ceux-ci, qui mettaient en place lesstratégies à exécuter parGénin, étaient appelés lesShunin ou Shonin (personnesd'en haut). Ils se trouvaientproches du pouvoir politique,parmi les seigneurs féodaux ou

les conseillers des dictateurs.Parmi les histoires célèbres queles "apprentis-Ninja" aiment àse raconter autour d'un feulors d'une veillée, deux sedétachent. La premièreraconte comment UésugiKenshi, le fameux seigneur deguerre, s'est fait assassinerdans ses toilettes par une finetige de métal enfoncée dansson fondement. L'auteur decet assassinat mémorable n'estautre que Kasumi Danjô,célèbre Ninja du 16e siècle.Au petit matin, on trouva leseigneur féodal mort au-dessusde ses toilettes.La seconde histoire est celle duNinja Sanada qui, pour tuer un

seigneur, avait glissé de finscopeaux de bambou dans sasoupe de miso. Lorsqu'ils sonttrès fins, ils s'entortillent sureux-mêmes comme desressorts, ressemblant à de laseiche ou du poisson séché. Lescopeaux de bambou, une foisdans l'estomac, se gonflent etse détendent pour en percerles parois comme des"moustaches de tigre" ou, plussimplement, de véritablesaiguilles acérées. Nul ne sutcomment mourut notreseigneur féodal, mais celui-cifinit sa vie dans d'atrocessouffrances !

Sylvain Guintard

Karaté Bushido/février 2004