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I 1 Production de volaille dans les pays ACP Dans les différents pays ACP, le secteur de la volaille est une source importante de nutrition, de sécurité alimentaire et de revenus dans les zones rurales. Ce- pendant, son importance varie d’une région à l’autre. Le secteur de la volaille est le moins important dans la région Pacifique et le plus important dans les Caraïbes, où il est devenu la princi- pale agro-industrie. En effet, dans les Caraïbes, la valeur des ventes départ usine dans le secteur de la volaille dé- passe celle des secteurs du sucre, du riz et des bananes avec, en outre, des liaisons verticales importantes avec la production locale de céréales et des liens par le biais de la fourniture d’engrais avec la production de légumes. Avec une consommation par habitant de 46 kg par an, le secteur de la volaille représente 80 % de la consommation de viande dans les Caraïbes. Cependant, même dans les Caraïbes, compte tenu d’une forte dépendance à l’égard des importations d’aliments pour animaux, le secteur est vulnérable à la hausse mondiale des prix des céréales et aux mouvements de taux de change défavorables. Cela pose des prob- lèmes importants s’agissant des bénéfices nets, en termes de rentrées de devises, des mesures de politiques commerciales destinées à soutenir le développement du secteur de la volaille. En Afrique subsaharienne, la contribution du secteur de la volaille à la sécurité alimen- taire varie nettement. Au Mali, la consom- mation par habitant est faible (1,73 kg par habitant), alors qu’en Afrique du Sud elle s’élève maintenant à 31,83 kg par habitant (en hausse de 42 % entre 1997 et 2009). Cependant, en Afrique subsaharienne, la demande de volaille augmente du fait 1. Contexte et principaux enjeux Production de volaille dans les pays ACP Le secteur de la volaille de l’UE Le régime tarifaire des importations de l’UE La politique de restitution à l’exportation de l’UE dans le secteur de la volaille Autres mesures politiques de l’UE influençant le secteur de la volaille 2. Récents développements Évolution de la demande de viande de volaille par les consommateurs de l’UE Le commerce de viande de volaille de l’UE Exportations de volaille de l’UE vers les pays ACP L’ascension du Brésil 3. Implications pour les pays ACP Le problème du dumping des morceaux de volaille Le rôle de la politique tarifaire Politique régionale concernant la volaille Politique de restitutions à l’exportation de l’UE Implications de l’ascension du Brésil Les défis de développement du secteur de la volaille dans les pays ACP Répercussions de l’extension des réglementations du processus de production de l’UE aux pays tiers Secteur de la volaille 1. Contexte et principaux enjeux http://agritrade.cta.int/ octobre 2011

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I 1

Production de volaille dans les pays ACP

Dans les différents pays ACP, le secteur de la volaille est une source importante de nutrition, de sécurité alimentaire et de revenus dans les zones rurales. Ce-pendant, son importance varie d’une région à l’autre. Le secteur de la volaille est le moins important dans la région Pacifique et le plus important dans les Caraïbes, où il est devenu la princi-pale agro-industrie. En effet, dans les Caraïbes, la valeur des ventes départ usine dans le secteur de la volaille dé-passe celle des secteurs du sucre, du riz et des bananes avec, en outre, des liaisons verticales importantes avec la production locale de céréales et des liens par le biais de la fourniture d’engrais avec la production de légumes. Avec une consommation par habitant de 46 kg par an, le secteur de la volaille représente

80 % de la consommation de viande dans les Caraïbes. Cependant, même dans les Caraïbes, compte tenu d’une forte dépendance à l’égard des importations d’aliments pour animaux, le secteur est vulnérable à la hausse mondiale des prix des céréales et aux mouvements de taux de change défavorables. Cela pose des prob-lèmes importants s’agissant des bénéfices nets, en termes de rentrées de devises, des mesures de politiques commerciales destinées à soutenir le développement du secteur de la volaille.

En Afrique subsaharienne, la contribution du secteur de la volaille à la sécurité alimen-taire varie nettement. Au Mali, la consom-mation par habitant est faible (1,73 kg par habitant), alors qu’en Afrique du Sud elle s’élève maintenant à 31,83 kg par habitant (en hausse de 42 % entre 1997 et 2009). Cependant, en Afrique subsaharienne, la demande de volaille augmente du fait

1. Contexte et principaux enjeux

Production de volaille dans les pays ACPLe secteur de la volaille de l’UELe régime tarifaire des importations de l’UELa politique de restitution à l’exportation de l’UE dans le secteur de la volailleAutres mesures politiques de l’UE influençant le secteur de la volaille

2. Récents développements

Évolution de la demande de viande de volaille par les consommateurs de l’UE Le commerce de viande de volaille de l’UE Exportations de volaille de l’UE vers les pays ACP

L’ascension du Brésil

3. Implications pour les pays ACP

Le problème du dumping des morceaux de volailleLe rôle de la politique tarifairePolitique régionale concernant la volaillePolitique de restitutions à l’exportation de l’UEImplications de l’ascension du BrésilLes défis de développement du secteur de la volaille dans les pays ACPRépercussions de l’extension des réglementations du processus de production de l’UE aux pays tiers

Secteur de la volaille1. Contexte et principaux enjeux

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de la croissance de la population, du développement de l’urbanisation et de la hausse des revenus.

La part de la production locale dans l’approvisionnement total de volaille varie considérablement, pas unique-ment entre régions mais aussi au sein des régions. Dans les Caraïbes, l’autosuffisance a augmenté depuis 2005, de 65 % à environ 80 %. Dans les pays d’Afrique de l’Ouest, la fourchete est large, d’environ 28 % à 100 %, al-ors qu’en Afrique du Sud et au Kenya l’autosuffisance est respectivement de 84 % et de 100 %.

Il existe quatre grands types de système de production à travers les pays ACP :

production de village ou de jardins particuliers, en grande partie pour la consommation propre, avec quelques ventes limitées aux voisins ;

semi-commercial, où l’abattage a lieu en grande partie sur le lieu de production, et où les produits sont principalement vendus nettoyés sur les marchés locaux ;

commercial, impliquant un meilleur hébergement, une alimentation cor-recte et l’aide des services vétérinaires ;

industriel intégré, impliquant une grande util i sation d’intrants et l’approvisionnement et le traitement intégrés, généralement régis par des contrats formels le long de la chaîne d’approvisionnement.

On peut ainsi répartir les systèmes entre production à faibles intrants et production à intrants élevés, qui utilisent générale-ment différents canaux de distribution pour desservir leurs marchés cibles. L’importance relative de ces différents systèmes de production varie. Au Mali, par exemple, 90 % de la production vient de la production traditionnelle de volaille de « jardins » non réglementée alors que, au Kenya, 80 % des poulets sont élevés dans des systèmes tradition-

bien sûr, d’un pays à l’autre. Cependant, même en Afrique du Sud où son système de production est très intégré, les défis rencontrés sont importants face aux exportations brésiliennes, compte tenu des coûts des intrants nettement moins élevés au Brésil (maïs, farine de soja et main-d’œuvre moins chers, aux coûts exacerbés par les récents mouvements de taux de change).

Dans les pays ACP, les canaux de com-mercialisation pour la production semi-commerciale et commerciale diffèrent : les producteurs semi-commerciaux desser-vent des réseaux de commercialisation locaux et souvent informels, tandis que les producteurs commerciaux desservent des composantes de distribution et de restauration du marché plus sophisti-quées. Dans les secteurs plus avancés de la volaille, les producteurs locaux de produits transformés se tournent vers des produits à valeur ajoutée, de marque et de consommation courante, qui représentent une grande part de la hausse de con-sommation de poulet dans certains pays ACP (p. ex. l’Afrique du Sud) et certaines régions (caribéennes).

Un problème central dans différents secteurs de la volaille ACP est la poli-tique commerciale adoptée au niveau national et régional et l’efficacité des mesures de mise en œuvre. En Afrique de l’Ouest, les réductions tarifaires dans le cadre du processus de la Commu-nauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont eu des effets particulièrement graves quand des réduc-tions importantes étaient requises (p. ex. au Sénégal, où les tarifs ont été réduits de 55 % à 30 %). En Afrique du Sud, pendant ce temps, le maintien de tarifs et l’utilisation de taxes anti-dumping sont considérés comme un facteur important pour la future trajectoire du secteur de la volaille : en 2009, les importations (dont 72 % provenaient du Brésil) représentaient seulement 15 % de la consommation. Des changements dans la politique com-

nels de production à faibles intrants. En Afrique du Sud, en revanche, la production commerciale de volaille est très intégrée et représente 24 % du PIB agricole. Alors que quelque 80 % des entreprises du secteur de la volaille sont de petites ou moyennes entreprises ou des micro-en-treprises, au moins 50 % de la production commerciale provient de deux entreprises, sept entreprises représentant 75 % de la production (voir article Agritrade « La structure changeante des exportations de volaille du Brésil suscite des craintes en Afrique du Sud », mai 2011).

Un certain nombre de contraintes à la production de volaille dans les pays ACP peuvent être identifiées :

coûts élevés de la nourriture pour ani-maux et d’autres intrants, la disponi-bilité dans certains sous-secteurs étant également une préoccupation (tant pour la nourriture pour animaux que pour les médicaments) ;

maladies animales, normes sanitaires et phytosanitaires (SPS) et, dans certains cas, normes de sécurité alimentaire, l’épidémie de grippe aviaire ayant des effets particulièrement graves dans certains pays ;

limites techniques de la transformation ;

infrastructure logistique et canaux de commercialisation mal développés, qui, parallèlement au sous-investissement et à de mauvaises pratiques de gestion, aboutissent à de faibles rendements dans certains secteurs et une vulnéra-bilité accrue de l’industrie de la volaille dans son ensemble aux perturbations liées aux maladies.

Dans l’ensemble, il s’avère que, dans la plupart des pays d’Afrique, les coûts de production sont élevés, en raison d’un manque de systèmes de production intégrés et automatisés et du fait des sous-investissements dans un domaine essentiel (contrôles vétérinaires, infra-structure logistique, de transformation et de commercialisation). La situation varie,

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merciale peuvent également poser les bases de la réhabilitation du secteur de la volaille, comme ce fut le cas, par exemple, au Sénégal et au Cameroun.

Les choix de politique commerciale au niveaux national et régional ont donc une très grande importance pour le développement du secteur de la volaille. Le problème de la coordination régionale du développement de ce secteur est déterminant, compte tenu du commerce illicite de volaille auquel peuvent donner lieu des mesures politiques nationales variables. Un tel commerce illicite peut non seulement ébranler les politiques nationales du secteur de la volaille, mais aussi avoir de graves implications pour la transmission des maladies animales et la sécurité alimentaire.

Le secteur de la volaille de l’UE

En termes de production, l’UE est un producteur de volaille aux coûts rela-tivement élevés, les coûts des aliments pour animaux en constituant la majeure partie. Alors que la réforme du secteur des céréales de l’UE a réduit les coûts des aliments pour animaux, la hausse des prix de la farine de soja et d’autres coûts de transformation d’aliments pour animaux ont empêché les producteurs de volaille de l’UE de réaliser pleinement ces économies. Les coûts relatifs des aliments pour animaux et d’autres coûts de différents producteurs de volaille mondiaux constituent donc un domaine permanent de préoccupations pour les producteurs de volaille de l’UE. Les droits de douane élevés ont néanmoins permis au secteur de la volaille de l’UE de se développer (de 4,8 % par an en-tre 2002 et 2010).

Le secteur de la volaille de l’UE a été décrit comme un secteur « allégé ». Les producteurs de volaille ne bénéficient pas de mesures d’assistance financière spécifiques au secteur ou de paiements

issus du régime de paiement unique. Le principal instrument de gestion de marché comprend une protection tarifaire, avec des restitutions à l’exportation fournies à une part en baisse des exportations totales de volaille de l’UE (principale-ment l’exportation de volailles entières congelées de Bretagne vers les marchés du Moyen-Orient). Pour faciliter la mise en œuvre du régime, toutes les importations et exportations de volaille sont sujettes à l’émission de licences. Les licences d’importation sont gérées sur une base du « premier arrivé, premier servi » ou d’examen simultané.

Outre la facilitation du fonctionnement du marché unique, des normes de com-mercialisation pour l’UE sont établies pour la volaille, impliquant un classement selon la catégorie, la qualité et le poids.

Le secteur de la volaille de l’UE est af-fecté par d’autres aspects de la politique agricole de l’UE, en particulier :

les réglementations de sécurité alimen-taire ;

les réglementations sur le bien-être des animaux ;

les programmes d’aide au dével-oppement rural (en particulier les pro-grammes visant à améliorer la compé-titivité des producteurs alimentaires et agricoles de l’UE) ;

les réformes du secteur des céréales – particulièrement importantes à cause de leur impact direct sur le prix des aliments des volailles.

Le secteur de la volaille bénéficie égale-ment de l’aide de l’UE pour gérer les épidémies de maladies animales, alors que, avec les États membres, l’UE cofi-nance des systèmes de compensation liés à l’abattage des élevages touchés par la maladie. En outre, dans le cadre des règles communément admises, l’aide financée au niveau national pour les producteurs de volaille peut être étendue.

Le régime tarifaire des importations de l’UE

Selon une évaluation de 2005 des Organisations communes des marchés (OCM) pour le porc, la volaille et les œufs, les tarifs d’importation jouent « un rôle essentiel dans la restriction du volume d’importations des pays tiers dans l’UE ». En 2005, selon des estimations, les tarifs d’importation ont maintenu des prix entre 11,5 % et 13,1 % plus chers et une produc-tion entre 7 % et 13,3 % plus élevée qu’en l’absence de protection tarifaire (variant selon les niveaux de prix des marchés mondiaux). Les parties pre-nantes dans l’industrie de la volaille de l’UE pensent que « en l’absence de tarifs d’importation, […] le marché de l’UE serait rapidement influencé par les produits importés et que les producteurs de l’UE seraient de plus en plus restreints à approvisionner les marchés de niche ».

L’UE maintient un régime tarifaire très désagrégé pour la volaille, allant de tarifs consolidés de seulement 187 €/tonne à 1 024 €/tonne, et des taux ad valorem de 10,9 % à 15,4 %. L’UE maintient le niveau le plus élevé de protection tarifaire pour la viande de volaille fraîche, avec des niveaux plus faibles de protection tarifaire pour les produits de volaille transformés.

Dans le cadre de l’Accord du cycle d’Uruguay, les tarifs d’importation ont été réduits et des contingents mini-mums en matière d’accès au mar-ché établis, sur lesquels les droits de douane étaient limités à un pourcentage spécifié du tarif de base. Un mécanisme de sauvegarde spéciale a cependant été retenu, à déclencher si les prix des importations baissent sous un niveau spécifié dans le cadre de l’Accord du cycle d’Uruguay. Cette clause de sauvegarde spéciale, sujette à une révision mensuelle, a été invoquée en permanence.

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Le fonctionnement de ce système tarifaire a entraîné certaines distorsions com-merciales et différends commerciaux, le principal différend étant lié aux importa-tions de parties de poulets désossés surgelés avec un taux de sel entre 1,2 % et 3 % (code NC 02109939). Cette ligne tarifaire est soumise à une taxe de seule-ment 15,4 % (un tiers du tarif en vertu du code 02074110). Grâce à l’utilisation de cette ligne tarifaire, les barrages de protection tarifaire de l’UE ont pu être évités et les importations de l’UE de cette catégorie sont passées de 83 000 tonnes en 1993 à 387 000 tonnes en 2002. Alors que l’UE a réagi au départ en limitant les importations en vertu de cette ligne tarifaire, l’organe de règlement des différends de l’Organisation mon-diale du commerce (OMC) a demandé en 2005 à l’UE de modifier son régime d’importations et une série de contin-gents tarifaires (CT) ont été ouverts pour résoudre le différend. Par conséquent, les importations de volaille par l’UE ont fortement augmenté en 2007 (+ 12,3 %).

Cependant, un volume important et croissant d’importations de produits préparés de volaille arrive également sur le marché de l’UE, moyennant paiement de droits de douane, en grande partie pour le marché de la restauration. En effet, les importations deservent de plus en plus le marché commercial de la restauration, alors que la production intérieure de l’UE se concentre sur des morceaux frais de grande qualité. Cela suggère que l’impact des réductions tarifaires peut être moins redouté par les organisations d’agriculteurs de l’UE, en particulier compte tenu des initia-tives de différenciation de produits en cours et des changements d’exigences d’étiquetage (l’extension d’étiquetage du pays d’origine pour les produits de viande transformés) actuellement en-visagés. Cependant, la situation varie dans l’UE d’un État membre à l’autre.

La politique de restitution à l’exportation de l’UE dans le secteur de la volaille

Les restitutions à l’exportation de l’UE visent à garantir que les exportations de volaille de l’UE restent compétitives. À ce titre, des niveaux de restitution sont définis en référence aux « différences de coûts de production entre les producteurs de l’UE et des pays tiers » reflétées dans les prix des céréales pour les aliments pour animaux. L’Accord du cycle d’Uruguay a cependant mené à une réduction des niveaux autorisés de recours aux restitu-tions à l’exportation (– 36 % en valeur d’exportations et 21 % en volume) et le volume autorisé d’exportations soutenues par des restitutions est passé de 76 000 tonnes à 286 000 tonnes. Cette évolution a permis de changer la composition des exportations de volaille de l’UE, et la part des morceaux de volaille dans les expor-tations totales a augmenté de manière significative. Un pourcentage bien plus faible des exportations totales de volaille de l’UE bénéficie maintenant d’un recours aux restitutions à l’exportation (en baisse, de 89 % en 1998 à 21 % en 2002), la part fluctuant au vu des niveaux globaux d’exportation des parties de volaille.

Avant l’Accord du cycle d’Uruguay, des restitutions à l’exportation ont également soutenu le commerce de morceaux de vol-aille et de viande séparée mécaniquement. Cependant, les restitutions à l’exportation sont maintenant utilisées presque exclu-sivement pour soutenir les exportations de volailles entières congelées (comme mentionné ci-dessus, ce sont principale-ment des exportations de Bretagne en France vers les marchés du Moyen-Orient). Le commerce de morceaux de volaille est « essentiellement mû par la nécessité d’écouler les morceaux non désirés, pour lesquels la demande est très faible sur le marché intérieur de l’UE ». Selon les acteurs de l’industrie mentionnés dans le rapport d’évaluation, ce commerce se poursuivra,

« à condition que les prix à l’exportation (sans les coûts de transport) [soient] su-périeurs aux coûts d’écoulement ».

Alors que les morceaux de volaille sont en grande partie exportés de l’UE vers les marchés africains, ce commerce ne béné-ficiant pas de restitutions à l’exportation, des exportations, pour 21 593 tonnes, de poulets entiers surgelés vers le Bénin ont été rapportées, dans un contexte de hausse des exportations de volaille de l’UE en 2010 (voir article Agritrade « Les exportations de volaille de l’UE vers certains pays ACP explosent », janvier 2011). On ne sait pas clairement dans quelle mesure ce commerce a bé-néficié de restitutions à l’exportation et dans quelle mesure les exportations de poulets entiers surgelés vers d’autres pays d’Afrique de l’Ouest étaient soutenues par des restitutions à l’exportation. Quelque 14 pays ACP étaient répertoriés sur le site Web « Global Commerce Alert » comme des destinations potentiellement affectées par les programmes de restitutions à l’exportation de l’UE, notamment le Bénin, le Congo, la RDC, la Guinée équatoriale, le Gabon, le Ghana, le Nigeria et le Togo en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale. L’Angola, l’Afrique du Sud, le Soudan dans d’autres parties de l’Afrique, et Sainte-Lucie et Saint-Vincent-et-les Grenadines dans les Caraïbes figuraient également sur cette liste.

Les restitutions à l’exportation pour les poulets entiers surgelés s’élevaient à 400 €/tonne de janvier au 17 juin 2010 et à 325 €/tonne à partir du 18 juin 2010. Les niveaux de restitutions à l’exportation peuvent donc varier en réaction aux conditions du marché. Les conditions de marché difficiles tendant à entraîner une extension de la gamme des produits de volaille couverts par des restitutions à l’exportation (p. ex. des restitutions à l’exportation auraient été prévues concernant les pattes de volailles pour l’exportation vers les marchés russes et du Moyen-Orient face aux restrictions d’exportations liées à la grippe aviaire).

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Autres mesures politiques de l’UE influençant le secteur de la volaille

La position commerciale de l’UE dans le secteur de la volaille a nettement changé à la suite du processus plus vaste de réforme de la PAC. Au départ, la réforme du secteur des céréales, en réduisant les prix des aliments pour animaux (de 11,7 %, selon les estimations), a stimulé la production et les exportations de volaille. Sous l’impact de la réforme du secteur des céréales, les exportations de l’UE ont rapidement augmenté de 400 000 tonnes à plus de 1 million de tonnes, avec un record à 1 002 335 tonnes en 2002 (voir article Agritrade « Évaluation de l’OCM pour la viande de volaille », mai 2006).

Ces avantages concurrentiels ont ce-pendant été compensés en partie par :

« la hausse des coûts associés à la législation communautaire sur les ali-ments pour animaux » (un développe-ment lié à la sécurité alimentaire) ;

les objectifs d’« élimination des engrais et de réduction des émissions » (ré-glementations environnementales) ;

les réglementations sur le bien-être des animaux et la santé animale.

Alors que ce dernier point a été en partie compensé par l’aide de l’UE proposée dans le cadre du pilier de l’expansion du développement rural de la PAC, cela reste une préoccupation constante pour les producteurs de volaille de l’UE, qui souti-ennent de plus en plus que l’absence d’équivalence entre les réglementa-

tions de l’UE et des pays tiers dans ces domaines donne aux fournisseurs des pays tiers un avantage concurrentiel sur le marché de l’UE.

Ces préoccupations mènent à un nom-bre croissant de demandes pour des exigences plus strictes concernant le respect du processus de production de l’UE à inclure dans les accords commer-ciaux bilatéraux couvrant le commerce de la volaille.

2. Récents développements

Évolution de la demande de viande de volaille par les consommateurs de l’UE

Les producteurs de viande de volaille de l’UE ont bénéficié d’une baisse progres-sive d’intérêt des consommateurs pour les cuisses, en raison de préoccupation liées à la santé. Cette tendance sous-jacente a cependant été influencée par différentes rumeurs en matière de sécurité alimentaire, qui ont généré d’importantes fluctuations de la demande des consommateurs. Néanmoins, depuis 1997, la consom-mation de viande de volaille par habitant dans les pays de l’UE-15 a augmenté de près de 15 %, alors que la consomma-tion enregistrée par habitant dans les dix nouveaux États membres a augmenté de 69 %. Dans l’ensemble, la consommation totale de viande de volaille dans l’UE a progressé de 10 % entre 2002 et 2010.

En 2010, la croissance de la consom-mation de viande de volaille dans l’UE a stimulé les investissements dans un certain nombre d’États membres de l’UE (six), malgré les craintes des agriculteurs quant à l’impact de l’accord Mercosur sur le secteur de la volaille. Ces nouveaux investissements sont liés aux initiatives de différenciation des produits basée sur la qualité et de systèmes d’étiquetage spécifiques. L’augmentation de la con-sommation dans l’UE a, cependant, été tellement importante que tant la production nationale que les importa-tions ont augmenté.

Alors qu’il existe des variations régionales dans la manière dont la viande de volaille est consommée (p. ex. la préférence pour des poulets complets de plus grande taille dans certaines régions d’Italie), la demande globale des consommateurs de l’UE s’oriente vers des morceaux de poulet (en particulier la poitrine) et des produits de poulet frais, congelés ou transformés plus pratiques. La demande de morceaux frais de haute qualité est principalement satisfaite grâce à la pro-duction intérieure de volaille de l’UE. La demande de nourriture transformée et dans le secteur de la restauration enregis-tre une forte croissance et est de plus en plus satisfaite par le biais d’importations, souvent en vertu d’arrangements de CT, mais également avec paiement complet de droits à l’importation.

La demande n’est limitée que pour les poulets entiers surgelés et les « pro-duits de moindre qualité » (pattes, cui-sses, viande mécaniquement séparée, etc.). Cette tendance a des implications

Tableau I : Restitutions à l’exportation pour le secteur de la volail le de l’UE, 2005-2011 (en mill ions €)

2011* 2010* 2009** 2008** 2007** 2006** 2005**

Restitutions à l’exportation pour la viande de volaille (réf. 05021505) 61,0 80,0 91,6 97,2 86,0 55,0 80,0

* Crédit budgétaire ; ** dépassement budgétaire. Source : tableau extrait du budget pertinent sur le site Web « Budget en ligne » de l’UE. http://eur-lex.europa.eu/budget/www/index-fr.htm

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importantes pour le commerce de viande de volaille avec l’Afrique : étant donné que la consommation de poitrines de volaille augmente dans l’UE, le volume de morceaux « de moindre qualité » à écouler augmente lui aussi. Entre 2009 et 2020, la consommation de viande de volaille de l’UE devrait s’accroître de 9,8 % (plus de 1 million de tonnes), alors que la production devrait augmenter de 6,9 % (plus de 800 000 tonnes).

Le commerce de viande de volaille de l’UE

L’expansion de la demande de l’UE en viande de volaille a entraîné une hausse des importations considérable, de 267 000 tonnes en 1997 (pour l’UE-15) à un niveau record de 849 000 tonnes en 2009. La croissance de la demande de viande de poulet transformée est de plus en plus satisfaite par des pro-duits de volaille importés. Durant les 15 dernières années, les importations n’ont pas seulement été stimulées par les tendances de consommation dans l’UE, mais également par des modifi-cations des classifications douanières de l’UE, les foyers de maladies et des préoccupations de sécurité alimentaire.

Les épidémies de grippe aviaire ont joué un rôle majeur dans les modèles d’importation et d’exportation de viande de volaille de l’UE, car ils ont tendance à générer des fermetures préventives de marchés sur des bases SPS. À la suite d’un foyer de grippe aviaire, l’UE est devenue importateur net de viande de volaille pour la première fois en 2007. Cependant, la situation n’a pas duré, l’UE redevenant exportateur net en 2008.

Les projections de la CE suggèrent que l’UE restera exportateur net jusqu’en 2015, après quoi elle sera de plus en plus importateur net, sur la base de la hausse des importations et de la baisse des exportations.

L’UE exporte deux principaux types de viande de volaille : des volailles entières surgelées et des morceaux surgelés, chaque type visant des marchés différents. Les volailles entières surgelées sont prin-cipalement exportées vers les marchés du Moyen-Orient, avec l’avantage des restitutions à l’exportation, alors que les morceaux de volaille sont exportés sans l’avantage des restitutions à l’exportation et sont de plus en plus destinés aux mar-chés ACP, principalement en l’Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale.

L’essor des exportations de morceaux de volaille est très lié à l’évolution des tendances de consommation de l’UE, à savoir une hausse de la consommation de poitrine de volaille et un déclin des opportunités de marché pour les autres parties du poulet dans l’UE. Les exporta-tions de morceaux de volaille dominent maintenant les exportations de volaille de l’UE. Le principal développement, dans une perspective ACP, est donc la tendance de la consommation dans l’UE de poitrine de volaille produite dans le pays, car c’est cette tendance qui gé-nère le besoin « d’écouler les morceaux non désirés, pour lesquels la demande est très faible sur le marché intérieur de l’UE ». Les frais de transport sont essentiels dans ce commerce. Tant que les prix à l’exportation (moins les frais de transport) dépassent les coûts d’écoulement des parties non désirées, ce commerce prospérera.

Exportations de volaille de l’UE vers les pays ACP

En 2010, l’UE a exporté de la viande de volaille dans 52 pays ACP. Les exporta-tions sont concentrées dans huit pays, qui représentaient 87,5 % des exportations de viande de volaille de l’UE. Vingt-deux pays ACP ont importé moins de 100 tonnes de viande de volaille (15 pays important entre 100 et 1 000 tonnes, et sept entre 1 000 et 10 000 tonnes). Les exportations vers les Caraïbes en 2010 ne s’élevaient qu’à 2 633 tonnes, avec au moins 76,6 % de cette viande de volaille destinée à Saint-Vincent et Sainte-Lucie. Un seul pays du Pacifique, Tonga, a importé de la viande de volaille de l’UE (50 tonnes).

Les principaux marchés ACP pour les exportations de volaille de l’UE sont situés en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale, et ces marchés sont de plus en plus importants pour les exportateurs de viande de volaille de l’UE. Les politiques commerciales intérieures mises en place par les gouvernements ACP dans les régions visées par les exportations de volaille de l’UE ont une forte influence sur les modèles commerciaux actuels.

Actuellement, les trois principaux mar-chés d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale pour les exportations de volaille (Bénin, Ghana et République démocra-tique du Congo) représentent 16,1 % des exportations totales de volaille de l’UE (2010), contre 10 % en 2004 (et moins de 5 % en 1996). Durant la période 2004-2010, les exportations de l’UE vers ces trois pays ont plus que doublé (de 88 666 tonnes à 180 931 tonnes).

Au Ghana, cette situation conduit à des niveaux importants de plaintes et de cri-

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Secteur de la volaille

tiques de la part des producteurs de volaille, critiques qui affirment que la politique tarifaire gouvernementale au Ghana « était à courte vue », car elle ouvre les vannes aux importations et, ce faisant, n’affaiblit pas seulement la position des producteurs ghanéens de volaille, mais également celle des producteurs locaux de céréales qui fournissent des aliments pour animaux aux producteurs de volaille (voir article Agritrade « Le secteur de la volaille en Afrique de l’Ouest lutte contre les importations de volaille bon marché », décembre 2010). Cela fait partie des plaintes de longue date des producteurs ghanéens de volaille, qui envient les mesures politiques adop-tées en Côte d’Ivoire pour soutenir les producteurs de volaille.

En Côte d’Ivoire, selon des articles de presse, « en 2005, le gouvernement ivoirien a imposé une nouvelle taxe sur les produits dérivés de la volaille im-portés », qui a grosso modo doublé le prix de la volaille importée. Selon les représentants de l’industrie, les produc-

teurs ivoiriens de volaille étaient, grâce à ces mesures, « en position de tenir le coup malgré une concurrence féroce des importations ». Selon la presse, ce changement politique n’a pas seulement profité aux producteurs de volaille, avec de nouveaux investissements importants, mais également aux fournisseurs locaux de produits pour l’alimentation animale. Dans l’ensemble, entre 2005 et 2009, la production de volaille ivoirienne a aug-menté de 9 000 tonnes à 20 000 tonnes. En janvier 2010, le gouvernement de la Côte d’Ivoire s’est engagé à « maintenir les droits à l’importation ». Cette mesure est cependant destinée uniquement à aider l’industrie de la volaille dans le pays à « mieux s’organiser », car « les importateurs vont certainement bientôt se donner les moyens de contourner cette mesure et de faire entrer leurs produits sur le marché » (voir article Agritrade « Les importations de volaille suscitent des craintes en Afrique de l’Ouest », septembre 2010).

Cette réalité est illustrée par l’importance du commerce illégal de morceaux de vi-

ande de poulet entre le Bénin et le Nigeria. Les estimations de la Banque mondiale suggèrent que 90 % des importations de volaille du Bénin sont réexportées vers le Nigeria, où une interdiction d’importations de viande de volaille est théoriquement en vigueur depuis 2000. Ce commerce n’ébranle pas seulement la politique com-merciale gouvernementale du Nigeria dans le secteur de la volaille, mais donne également lieu à une grave transmission de maladies animales et à des enjeux en matière de sécurité alimentaire.

La situation au Ghana et les débats poli-tiques qui y ont lieu rappellent d’anciens débats similaires au Cameroun, où les producteurs de volaille locaux ont fait activement campagne pour un change-ment de politique gouvernementale, afin de favoriser une réhabilitation du secteur de la volaille au vu des perturbations des marchés locaux par des importations de morceaux de volaille de l’UE (voir ar-ticles Agritrade « Les exportations de viande de volaille de l’UE vers le Camer-oun sont unanimement condamnées »,

Tableau II : Pays ACP important plus de 10 000 tonnes de viande de volail le en provenance de l’UE en 2010 (en tonnes)

2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010

Bénin 49 794 47 611 47 003 63 665 82 320 84 328 113 600

Ghana 20 215 24 258 29 966 28 697 30 750 28076 40 511

RDC 18 657 26 196 25 049 23 797 20 763 20 755 26 820

Gabon 9 755 12 550 11 425 12 015 12 154 13 245 20 006

Angola 6 032 6 647 16 520 12 068 12 599 9 208 16 798

Afrique du Sud 18 428 9 486 14 461 6 083 4 651 5 138 16 154

Congo (Rép.) 17 040 12 896 11 468 8 200 10 417 13 329 15 923

Togo 9 805 8 476 3 554 8 385 12 035 10 322 12 203

Total ACP 237 786 192 840 193 259 188 242 203 732 206 386 299 326

Exportations de l’UE : total 888 751 856 614 812 481 756 520 857 057 885 662 1 124 290

Part des exportations de l’UE à destination des pays ACP (%) 26,8 22,5 23,8 24,9 23,8 23,3 26,6

Sources : COMEXT, Eurostat.

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septembre 2004, et « Une campagne est lancée concernant les exportations de morceaux de poulet de l’UE vers l’Afrique », décembre 2004).

L’ascension du Brésil

La valeur des exportations brésiliennes de volaille depuis 2004 a dépassé celle des exportations de viande de volaille de l’UE et la hausse des exportations de l’UE en 2010 n’a fait que combler en partie cet écart. Selon le département américain de l’Agriculture (USDA), les exportations brésiliennes de volaille ont augmenté de 5,6 % en 2010 pour atteindre des niveaux records. Cependant, une nouvelle hausse de 4 % des exportations brésiliennes de volaille est prévue en 2011.

Alors que l’UE a commencé à développer une fois de plus ses exportations de volaille au-delà de l’Afrique de l’Ouest et centrale, vers l’Afrique du Sud, les importations de carcasses de poulet du Brésil préoccupent beaucoup plus le secteur de la volaille d’Afrique du Sud. Les importations de carcasses de poulet du Brésil vers l’Afrique du Sud étaient en janvier 2011 de 33 % plus élevées qu’en janvier 2010 et étaient vendues à un prix inférieur de 23 % aux prix moyens en Afrique du Sud (la valeur des importations du Brésil a augmenté de 31 % entre 2009 et 2010). Les taux de change ont également accentué certains de ces avantages en matière de coûts dont bénéficie le secteur brésilien de la volaille (voir article Agritrade « La struc-ture changeante des exportations de volaille du Brésil suscite des craintes en Afrique du Sud », mai 2011).

Alors que les facteurs influençant le com-merce de la viande de volaille Brésil-Afrique du Sud sont assez différents des facteurs régissant le commerce de la viande de volaille entre l’UE et l’Afrique de l’Ouest et centrale, la situation en Afrique du Sud met en évidence une tendance importante, à savoir le rôle croissant du Brésil dans le commerce de la volaille dans les pays ACP.

3. Implications pour les pays ACP

Le problème du dumping des morceaux de volaille

Le problème du dumping des morceaux de volaille est commun aux pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, même si l’origine de ce commerce varie (UE, États-Unis et Australie respectivement). La ques-tion se pose de savoir quelles mesures politiques peuvent être prises en réaction aux effets perturbants potentiels de ce commerce « résiduel » sur les marchés locaux concernés. Un certain nombre d’options semblent être disponibles, selon les engagements fermes de politique com-merciale pris par les gouvernements ACP.

La première option implique l’utilisation d’une structure tarifaire différenciée, avec des taxes spécifiques plus élevées sur les morceaux de volaille surgelés, qui constituent la principale source de préoccupation. Cette option ciblerait le domaine problématique spécifique sans augmenter excessivement le tarif moyen appliqué et refléterait l’approche de politique tarifaire utilisée par l’UE dans le secteur de la volaille. Cela exigerait cependant une très bonne capacité de mise en œuvre de droits de douane.

La deuxième option implique l’utilisation de restrictions quantitatives ou d’interdictions d’importations de morceaux de volaille – éventuellement sur des bases de sé-curité alimentaire, compte tenu des taux élevés de contamination détectés dans les morceaux de volaille surgelés au moment de la consommation, résultant de manque-ments dans le stockage et la manutention. Cependant, ces mesures devraient être coordonnées au niveau régional pour éviter l’apparition d’un commerce illicite impor-tant : dans le cas du Bénin et du Nigeria, le commerce transfrontalier illégal peut

atteindre entre 5 % et 10 % de la consom-mation de viande de volaille au Nigeria.

La troisième option est d’émettre des licences d’importation liées à des préoc-cupations de sécurité alimentaire et ces licences ne seraient accordées qu’aux entreprises ayant accès à l’infrastructure physique nécessaire pour garantir un stock-age et une manutention sûrs des morceaux de volaille surgelés. Cela refléterait, dans une certaine mesure, la pratique de l’UE dans le secteur laitier, où des licences d’importation ne sont émises depuis de nombreuses années que pour les « en-treprises approuvées » pouvant garantir l’intégrité du stockage et de la manutention des produits laitiers (exclusivement des entreprises laitières de l’UE).

Le rôle de la politique tarifaire

La politique tarifaire occupe une place centrale dans la gestion du marché de la volaille de l’UE et dans la gestion du dével-oppement du secteur de la volaille dans les pays ACP. La politique tarifaire peut jouer un rôle essentiel dans la stimulation des investissements et le développement d’un secteur moderne de la volaille. Cependant, il faut reconnaître que la protection tarifaire et les restrictions d’importations ne peuvent que donner du temps pour l’investissement en vue d’améliorer la compétitivité de la production commerciale nationale de volaille. Compte tenu des changements entrepris pour la libéralisation du commerce et des contraintes d’application des droits de douane dans les pays ACP, la politique tarifaire ne peut pas proposer une solu-tion à long terme et doit être considérée comme complémentaire des stratégies plus vastes de développement du secteur de la volaille.

À court terme, comme illustré par la réussite rencontrée dans les Caraïbes, l’importance du développement du secteur de la volaille par rapport à la sécurité alimentaire, au PIB et à la création d’emplois ne peut pas

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être surestimée. Cependant, comme l’a montré l’expérience caribéenne, cela pose des questions sur les bénéfices économiques nets, quand une telle part des intrants est importée. Ce problème se pose également dans d’autres pays ACP, où des intérêts spéciaux peuvent mettre largement de côté toute évaluation objective des frais réels et des avantages des politiques du secteur de la volaille.

Politique régionale concernant la volaille

Une approche régionale coordonnée de la politique commerciale du sect-eur la volaille semblerait nécessaire afin d’éliminer les incohérences du traitement des produits de volaille. Le commerce d’exportation de l’UE de morceaux de volaille est très mobile, passant d’un marché à l’autre, selon les mesures na-tionales de politique commerciale mises en place. Cette particularité peut entraîner un commerce intrarégional de morceaux de volaille importés, ce qui n’ébranle pas seulement les politiques nationales du secteur de la volaille, mais constitue aussi de graves menaces SPS et de sécurité alimentaire. Cependant, dans certaines régions, notamment l’Afrique de l’Ouest et centrale, cela va à l’encontre du défi de garantir non seulement la mise en œuvre cohérente des engagements politiques convenus, mais également que le cadre politique régional tient compte des spé-cificités du commerce international de volaille. Il s’agit d’un enjeu politique crucial.

Politique de restitutions à l’exportation de l’UE

La majeure partie des exportations de volaille de l’UE vers les marchés ACP ont lieu sans l’avantage des restitutions à l’exportation. Cependant, les pays ACP sont répertoriés comme des destinations éligibles au paiement des restitutions à l’exportation de l’UE. Compte tenu

des efforts en cours pour développer la production de volaille dans les pays ACP, un engagement politique clair est indispensable pour que l’UE n’accorde pas de restitutions à l’exportation sur les exportations de volaille vers les pays et les régions ACP cherchant à développer leurs propres secteurs de la volaille. Cela s’applique à l’exportation de volailles en-tières et de morceaux de volaille surgelés, qui peuvent bénéficier de restitutions à l’exportation durant des périodes de crise de marché.

Implications de l’ascension du Brésil

La hausse des exportations brésiliennes de volaille vers l’Afrique du Sud et d’autres marchés africains en 2010 ne doit pas faire oublier la baisse des exportations brésil-iennes vers l’UE (– 9,6 % en 2010). Avec la pression des organisations d’agriculteurs de l’UE pour appliquer les réglementations de production de l’UE aux importations de viande de pays tiers, ce processus de diversification des exportations brésil-iennes dans le secteur de la volaille devrait s’accélérer. La conclusion d’un accord UE-Mercosur ne peut influencer cette tendance que de manière marginale.

Alors que le principal défi commercial actuel rencontré par les producteurs de volaille en Afrique de l’Ouest tient aux exportations de morceaux de vol-aille de l’UE, le commerce d’exportation de volaille du Brésil en pleine évolution vers l’Afrique de l’Ouest peut en venir à ressembler à son commerce avec l’Afrique du Sud. Un facteur influençant ces développements peut être les liens commerciaux croissants entre le secteur de la volaille du Brésil et le secteur de la volaille de l’UE, certaines entreprises de l’UE étant des acteurs majeurs dans le secteur de la volaille du Brésil et cer-taines entreprises brésiliennes étant des acteurs majeurs dans le secteur de la volaille de l’UE.

Les défis de développement du secteur de la volaille dans les pays ACP

Les priorités de développement du secteur de la volaille varient d’un pays ACP à l’autre. Cependant, il existe un certain nombre de problèmes communs qui doivent être abordés, à savoir :

améliorer la santé animale dans le sect-eur de la volaille pour réduire les taux de mortalité et augmenter les rendements ;

contrôler la hausse des coûts des aliments pour animaux en favorisant des liens plus forts entre les secteurs (p. ex. lien entre la production de bio-combustibles et l’approvisionnement d’aliments pour volailles) ;

soutenir le développement des chaînes d’approvisionnement de la volaille (par le biais de mesures aussi diverses que la promotion de l’investissement dans les entrepôts frigorifiques, l’aide aux organisations d’agriculteurs, et en développant des liens en termes d’approvisionnement entre les producteurs de céréales et les producteurs de volaille pour amé-liorer le fonctionnement des chaînes d’approvisionnement) ;

appuyer la transition de la production semi-commerciale vers la production commerciale.

La collaboration entre les pays et les ré-gions ACP pourrait permettre de relever ces défis. Ils vont des stratégies requises dans les petites économies insulaires pour stimuler la production de volaille (leçons des Caraïbes pour le Pacifique) à l’expérience de commercialisation de la production de volaille de petits exploitants (leçons de l’Afrique du Sud pour d’autres pays africains).

Cela constitue un agenda conséquent d’« aide au commerce ». Cependant, compte tenu de la contribution importante du secteur de la volaille pour la sécurité alimentaire, la génération de revenus et la

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de volaille de l’UE (p. ex. les règles de densités d’élevage liées au bien-être des animaux pour la production de poulets). Cela concernerait principalement l’Afrique du Sud, et n’influencerait pas directement d’autres producteurs de volaille ACP car, en vertu des exigences SPS existantes de l’UE, aucune exportation vers l’UE n‘a lieu. Cependant, cela affecterait probablement les exportateurs de bœuf ACP, car ces exigences plus strictes s’appliqueraient à toutes les importations de produits ani-maux, ce qui toucherait principalement le Botswana et la Namibie.

Principales sources

1. Agra CEAS Consulting (pour la CE), « Evaluation of the Common Market Organisation (CMOs) for Pigmeat, Poultrymeat and Eggs », Rapport, Contrat 30-CE-0009330/00-422134/CC/November 2005, novembre 2005 http://ec.europa.eu/agriculture/eval/reports/pig_poultry_egg/fullrep_en.pdf

2. Parlement européen, Direction générale des politiques internes de l’Union, « The poultry and egg sectors: evaluation of the current market situation and future prospects », avril 2010 http://www.isapoultry.com/fr-FR/Information/Publications/Magazine%20articles/~/media/Files/ISA/Information/magazine%20articles/2011/20110131%20en%20The%20Poultry%20and%20egg%20sectors%20evaluation%20and%20future%20prospects.ashx

3. CE, « Prospects for agricultural markets and income in the EU », série de rapports annuels (en anglais) 2010 : http://ec.europa.eu/agriculture/publi/caprep/prospects2010/index_en.htm 2009 : http://ec.europa.eu/agriculture/publi/caprep/prospects2008/index_en.htm Archive : http://ec.europa.eu/agriculture/analysis/markets/archive_en.htm

4. USDA, « EU-27 poultry sector growth to slow in 2011 », GAIN Report n° FR9049, 1er sep-tembre 2010 http://gain.fas.usda.gov/Recent%20GAIN%20Publications/Poultry%20and%20Products%20Annual_Paris_EU-27_9-2-2010.pdf

5. Evans School of Public Affairs, University of Washington, « Poultry market in West Africa: Over-view and comparative analysis », par K. Schneider and R. Plotnick, EPAR Brief n° 82, 16 juillet 2010 http://www.evansuw.org/files/Evans%20UW_Request%2082_Poultry%20Market%20Analy-sis%20Overview_7-16-2010.pdf

Sites Web utiles

Globaltradealert.org, site Web fournissant des informations sur les mesures commerciales adoptées qui pourraient avoir des impacts sur le commerce http://www.globaltradealert.org/measure/ec-fixing-export-refunds-poultry-meat

création d’emplois, il s’agit d’un secteur prioritaire important pour l’assistance « aide au commerce ».

Répercussions de l’extension des réglementations du processus de production de l’UE aux pays tiers

Compte tenu du volume croissant d’importations de volaille et des perspec-tives d’expansion de l’accès CT pour les principaux fournisseurs de pays tiers en vertu d’accords de zone de libre-échange

(ZLE), les organisations d’agriculteurs de l’UE mettent la pression sur la CE afin d’inclure des exigences pour un respect complet des normes SPS, de sécurité alimentaire et du processus de production de l’UE dans tous les ac-cords commerciaux. Cela fournirait des « conditions de concurrence égales » en exigeant des producteurs de pays tiers souhaitant exporter vers l’UE qu’ils prennent en charge les mêmes coûts d’investissement pour satis-faire et appliquer toutes les normes de l’UE imposées aux producteurs

À propos de cette note de synthèse Cette note de synthèse a été publiée en octobre 2011. D’autres publications dans cette série et des ressources supplémentaires sur le commerce agricole et de la pêche ACP–UE peuvent être trouvés en ligne à http://agritrade.cta.int/

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Le Centre technique de coopération agricole et rurale (CTA) est une institution conjointe ACP–UE active dans le développement agricole et rural des pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP). Le CTA a pour mission de promouvoir la sécurité alimentaire et la nutrition, et encourage une gestion durable des ressources naturelles. Cela est réalisé en fournissant des produits et services permettant un meilleur accès à l’information et des connaissances, facilitant le dialogue politique et de renforcement des capacités des institutions de développement agricole et rural et des communautés dans les pays ACP.