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TableofContents
Synopsis
Données
Pagetitre
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-7-
-8-
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-10-
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-12-
-13-
Prochainement
Postface
L’auteure
Enviedeplus?
Jeteveux!2…prèsdemoi
JordaneCassidy
Kayaaacceptédesignerlecontratd’Ethan
stipulantqu’elledoitjouerlerôledesapetite
amiejusqu’àcequeMonsieurLaurensaccepte
lecontratd’AbberlineCosmetics.Mais
apprendreàvivreavecunconnardn’estpas
choseaiséequandcelui-cilapousseàrevoir
sesconvictionssurAdametsavieprécaire,et
neserévèlepasaussidétestablequ’ilyparaît.
QuantàEthan,jouerlacomédiepourtoutet
n’importequoicommenceàavoirraisondeses
objectifs.
Etsifairesemblantd’êtreensemble
devenaituneréalitéplaisantequechacunaitdu
malàaccepter,maisrépondantàunbesoin
évident?
Découvrezlasuitedelaprincessequia
rencontréunconnardentraindetomber
amoureux!
Premièreédition
Jeteveux!2…prèsdemoi
JordaneCassidy
©JordaneCassidy,2016,pourletexte
©Reines-Beaux,2016,pourlaprésente
édition
©NuanceWeb,2016,pourl’illustrationde
couverture
CollectionAmour,n°2016-1018
SuiviéditorialparHaydenFaley
Ceciestuneœuvredefiction.Les
personnages,lieuxetévènementsdécritsdans
cerécitproviennentdel’imaginationde
l’auteurousontutilisésfictivement.Toute
ressemblanceavecdespersonnes,deslieuxou
desévènementsexistantsouayantexistéest
entièrementfortuite.
Tousdroitsréservés.Cetteœuvrenepeutêtre
reproduite,dequelquemanièrequecesoit,
partiellementoudanssatotalité,sansl’accord
écritdelamaisond’édition,àl’exception
d’extraitsetcitationsdanslecadred’articles
decritique.
Avertissementsurlecontenu:cetteœuvre
dépeintdesscènesd’intimitéentredeux
personnesetunlangageadulte.Ellevisedonc
unpublicavertietneconvientpasauxmineurs.
La
maison
d’édition
décline
toute
responsabilitépourlecasoùvosfichiers
seraientlusparunpublictropjeune.
ISBN:978-2-39006-111-3
Cetitreestégalementdisponibleauformat
papier
sousl’ISBN:978-2-39006-112-0
Dépôtlégal:juillet2016
ÉditéenBelgique
JordaneCassidy
www.reines-beaux.com
-1-
Àdécouvert!
Kayaattendaitl’arrivéed’Ethan.Il
l’avaitdéposéedevantchezelletrois
heuresplustôt,prétextantqu’ildevait
fairecertaineschosespourleboulot,et
luiavaitsuggérédefaçonpresque
dictatorialedefairesesbagagesen
attendantqu’ilviennelarécupérer.Elle
s’étaitalorscontentéedeluiclaquerla
portedelavoitureaunezdansun
grognementdesoumissionforcéeetde
rentrerchezellesansattendre.Ilétait
partiaussisec,faisantcrisserlespneus
desavoitureaupassage.Au-delàdu
froidquil’incommodait,ellevoulait
surtoutretrouverunterrainfamilieroù
ellepouvaitreprendresesmarquesetse
reposer.Passercesquelquesheuresen
sacompagnieavaitétééprouvant.Même
s’ilsavaienttrouvéunterraind’entente
provisoire,rienn’étaitjouéettout
pouvaitencorearriver.Pirequecela,il
s’étaitproduitcequ’ellecraignaitle
plus:unnouveaucontactphysiqueavec
lui.Ill’avaitembrassée.
Outrelefaitquecelalagênaitvis-à-
visd’Adam,ellesesentaitacculée
commeaubordd’unprécipiceoùonlui
disait:«marcheavecmoioucrève».
Autrementdit,ellen’avaitd’autres
optionsquedemarchermalgréleprix
quecelaluicoûtait.Elleavaitouvertla
portedesonniddouillet,avaitrespiré
ungrandcoupenfermantlesyeux,mais
serenditvitecomptequecedontelle
avaitleplusbesoinpourserassurer
n’étaitpassonappartement.Dumoins,
cen’étaitpassuffisantpourcalmerson
angoisse.Elledevaitlevoir.Leplus
vitepossible.Ellerefermalaporte
d’entréepromptement,tournalaclédans
laserrureetcourutverslepremierarrêt
debusenbasdelarue.Ellefitletrajet
jusqu’aucimetièreenquinzeminuteset
sentitdéjàsoncœurbattredavantage.
C’étaitsouventcommeça.Un
mélanged’excitationdeleretrouveret
detristessedel’avoirperdu.Toutesles
semaines,ellenettoyaitsatombe,lui
racontaitsesdernièresaventures.Elle
n’avait
d’ailleurs
pas
oublié
de
mentionnersespremièresmésaventures
avecMonsieurConnard.Lejardinierdu
cimetièrelaregardaitsouventfairede
loin,pournepasbrisersonmoment
d’intimité.Illavoyaits’exprimeravec
degrandsgestes,ponctuésd’undialogue
qu’ildevinaitemporté,passionné.
Ensuite,ellepassaitunbonquart
d’heurecouchéesurlastèle,levisage
cachédanssesbrasetenfinrepartait.Le
jardinierenprofitaitalorspourprendre
desesnouvelles.C’étaitunefemme
qu’ilestimait,carellerespectaitle
cimetièreetceuxquiyreposaient,
n’hésitantpasàarroserunefleurqui
mouraitdesoifaupassageouramasser
unpottombéàcauseduvent.
Unenouvellefois,illavitcourir
verslatombedesonfiancé,commesisa
survieendépendait.Ilfermalesyeuxet
poussaunsoupirtriste.Aujourd’hui
avaitencoredûêtreunejournée
difficile.Elles’écroulasursatombeet
posasatêtedanssesbras.Elle
commença
à
lui
bredouiller
sa
confessiondelajournéeavecangoisse.
Luiannoncerqu’elledevaitêtrelapetite
amied’unautreenéchanged’argentla
rendaitminableetellesedoutait
qu’Adamdésapprouverait.Pourtant,tout
sedireétaitunpactequ’ilsavaient
passé,parmitantd’autres.Neriense
cacher.Labouledanssonventrese
resserraitunpeuplusàchaquefois
qu’unnouvelaveusortaitdesabouche.
Elleluiavaitcachéleurpetiteincartade
desvestiaires,maisnepouvaitnepas
luidirequ’ill’avaitunenouvellefois
embrassée.Ellesereleva,leslarmes
auxyeux,luiaffirmantquemalgrétout
ça,soncœurrestaitetresteraitàtout
jamaisàlui.Elleluiimploradelui
pardonner.QuemêmesiEthanlui
prenaitseslèvresàl’avenirde
nombreusesfois,iln’auraitpasson
cœur.Quec’étaitjustel’affaired’un
moisetqu’ellepourraitreleverlatête
unpetitmoment.Ellen’avaitpasd’autre
solutionpourlemoment,ayantperdu
toutesourcederevenus.Elleluipromit
dereveniràlamêmefréquence,mêmesi
ellen’habitaitplusaussiprèsdu
cimetièrependantunmois.Puislesyeux
fixéssurlemarbredelastèle,elle
caressalapierrecommeunactede
tendressequ’Adampouvaitressentir,un
instantàeuxseuls.Elleselevalesyeux
pleinsdelarmesetrentrafaireses
bagages.
Ethanarrivafinalementplustardque
prévu,cequiagaçaénormémentlajeune
femme.Illuiavaitditqu’ilviendrait
versquinzeheures,ilétaitdix-sept
heures.
Évidemment,unconnardnepeut
connaîtrelaponctualité!Endigne
connardqu’ilest,ilaimesefaire
désirer!Ilm’énerve!
Elletournaitenrondautourdeses
bagages,cherchantuntrucàfaire,quand
enfinelleentenditlemoteurronflantsi
typiquedelacorvetteC7Stingray.Elle
attrapasonsacdesport,sonvanityet
sonsacàdosetsortitentrombede
l’appartement.Elleputlevoirfermersa
voitured’un«bip»decléetsetourner
endirectiondel’escaliermenantàson
étage,quandillevasoudainlatêteetla
vit.Illuidécochaungrandsourirequila
surpritsurlecoup,cequil’irrita
davantage.
Elle
ferma
à
clé
l’appartementenattendantqu’ilvienneà
sahauteur.
—Bontiming,Princesse!
Kayaleregardauninstantavec
colère.
—ParcequeMonsieurConnard
connaîtlemot«timing»?
—Évidemment,jeparleanglais
couramment.
—Évidemment,jeparleanglais
couramment!lesingea-t-elleencore
plusagacéeparsadémonstrationde
logiqueindiscutable.Ilestdix-sept
heures!Pasquinzeheures!Vousn’êtes
doncpasdansunbon«timing»pour
reprendrevosparoles,Monsieurje-
sais-tout-et-je-suis-le-plus-fort!
Ethansouritunenouvellefois.
—Bienheureuxdesavoirquevous
mevoyezcommeceluiquisaittoutet
quiestleplusfort!Enfin,j’aidroitàun
compliment!Waouh!
Kayacroisalesbrassursapoitrine,
levisagesévère.Visiblement,latouche
d’humourqu’ilvenaitdetenterne
passaitpasetelleétaitpourla
ponctualité.
Oualorsc’estjusteparcequec’est
moi?
—Jen’avaispasdemoyenpour
vousjoindre,désolé.J’aidûbloquerla
datedugaladeprésentationdema
nouvellegammedemaquillageàsamedi
detouteurgence.Unimprévuquipeut
m’arriverassezsouventàvraidire.
Kayaneflanchapasdevantson
explication.Safaçondésinvoltede
racontersonexcusenel’aidaitpasà
pardonner.Commesielleallaitdevoir
s’yfaire.
—Jenesuispasvotretoutouqui
attend
sagement
que
son
maître
s’intéresseàlui,jevouspréviens.
—Non,c’estvrai…oubienj’aiun
pitbullàlamaisonquinem’épargnera
pasaumoindrefauxpas…comme
maintenant!
Kayalâchaun«oh»d’effroietlui
collasonpoingsurlebras.Ethanpouffa
envoyantquecettefois-ci,ilavaitfait
mouche,cequiluivalutunsecondcoup
àl’épaule.
—Maparole,maismapetiteamie
estvraimentuneviolente!Pirequ’un
pitbull!Unkangourouquiaimeboxer!
Kayasemorditlalèvreetlevales
poingsaucielpourrecommenceràle
frapper,maislaissafinalementtomber
sesbrasdanslevide,vaincueparson
impuissance
face
à
ce
type
si
exaspérant.Ethanavaitmissonavant-
brasenbouclierpourtenterdecontrer
unenouvelleattaquequinevintpas.Il
jetaalorsunœilpar-dessussa
protectiondefortuneetlavitprendre
sonsacàdosenruminant,etsediriger
verslesescaliers.
—OK,pasdesoucis,princesse!lui
cria-t-ildel’étage.Commetoutbon
serviteur,jeportevosbagages!Tsss!
Ethanouvritlecoffredelacorvette
pendantqueKayas’installasurlesiège
passager.
Il
la
rejoignit
rapidement
à
l’intérieurdel’habitacle.
—Onpeutrepasseraututoiement
maintenantquel’instantcolèreest
passé?J’aidemandéàAbbigailqu’elle
seprocureuntéléphonerapidementpour
toi.Jepourraisainsitecontacter
facilementettupourrasenfaireautant…
maistun’espasobligéedemeharceler
nonplus!Attention!
LesprunellesvertesdeKaya
fusillèrentunenouvellefoisEthanqui
sourit.
—Jenepeuxpasmepermettre
d’avoiruntéléphoneportable…,ça
coûtetropcher.
Kayalaissaretombersacolèredans
unsoupir,démontrantuneévidencequi
justifiaitaussileurproblèmede
communication.
—
Je
prends
en
charge
l’abonnement.Net’inquiètepaspourça.
Vucommetumeruinesdéjàavecnotre
contrat,jenesuisplusàunforfait
téléphoniqueprès!
Ildémarralavoituredansunsourire
ironiquequi,finalement,fittordrela
bouchedeKayadansunsourirequ’elle
voulaitdissimuler.
—Jesuisépaté.Jecroisquec’est
lapremièrefoisquejevoisunefemme
avecsipeudebagagesquandelle
voyage.BBatoujourstroisvalises
énormesquandonpartenvoyage
d’affaires.Etlepire,c’estquecelalui
semblevraimentimpossiblededevoir
fairemoins.
—Jen’aipasautantdechoixde
vêtementsqu’elle…réponditlajeune
femme,préférantregarderparsafenêtre
pourmasquerunenouvellefoissagêne
etnepasavoiràjustifiersaréponse.
Ethanjetauncoupd’œilverselleet
visasonjoggingetsesbasketssousson
grosmanteau.Ellen’avaitévidemment
pasl’élégancedeBB.Est-cequeson
niveaudeviefaisaitqu’ellerejetait
touteformedeféminitéparmanquede
moyensouétait-cevraimentsafaçon
d’être?
Ilsarrivèrentbientôtaudomicile
d’Ethan,unbâtimentàlafaçadeclassée
historiquement,danslesbeauxquartiers
deParis.Ilgarasavoituredansun
parkingprivéetsortitlesbagagesde
Kayaducoffre.Ilsprirentl’ascenseur
pourserendreaudernierétage
del’immeublepuisarrivèrentdevantla
ported’entréedesonappartement.Kaya
putconstatersonmalaiseaumomentde
chercherlesclésdanssespoches.Avait-
ilpeurdemontrersonappartementàune
femmeouétait-ceseulementlefaitde
savoirqu’ilallaitdevoirpartagerses
habitudesavecelle?Elleaussin’était
finalementplussisûredeleurchoix.Il
tournalaclédanslaserrureetouvritle
passageàKaya.
Lajeunefemmesefigeadans
l’entrée.Elles’attendaitàtoutsaufàça.
Elleavaitimaginéunappartementde
grandstandingavecdesmeublesultra
designaustyleépuré,unendroithyper
spacieuxoùelleauraitdûfairedes
kilomètrespourallerd’unepièceàune
autre.Iln’enétaitrien.Elleavait
également
imaginé
la
garçonnière
typiqueenchantier,oùvêtementssales
etmagazinesjonchaientlesolavecsur
lestablesdelanourrituredansdes
boîtesderestaurationsrapides,dela
vaisselledébordantdansl’évierdela
cuisineetuneodeurderenfermé,mais
cen’étaitpascequ’elleavaitsousles
yeuxnonplus.
L’appartementd’Ethann’étaitnitrop
grand,nitroppetitetd’unegrande
propreté.Uneconsoleétaitàl’entrée,où
ducourrierettroisbricolestrônaientsur
unepetiteassiette.Lesalonétaitgrand,
maisformaitunseulblocaveclasalleà
mangeretlacuisine.LapartieHome
cinéma,danslesteintesbleuchiné,était
contrelafenêtremenantsurunbalcon
quireflétaittrèsbienlejourdansla
pièce.Ilétait,aveclesofadecouleur
bleuchiné,entissudouxsurunniveau
deplancherinférieuraurestedusalon.
Unesorted’espacedélimitéparune
marchedonnaituncôtécosytrèssympa.
Unplaidblancautissuvisiblementdoux
etchaudétaitétalésurlesofa.Outrele
grandécranplat,ellefutsurprisepar
touteslesconsolesdejeux,juchéessur
l’étagèreendessous.Lacuisineétait
justederrièrel’espacecinéma,coupée
paruncomptoiretdestabourets.Des
élémentsdecuisinerougesoccupaient
deuxpansdemur.Unegrandetableà
mangerrectangulairesetrouvaitsurla
droite,enprolongementdel’entréedela
cuisine,avecdegrandeschaises.
Autour,plusieurspiècesaccessiblespar
desportes.Ellefitunpasàl’intérieuret
ensilence,duboutdesdoigts,entamasa
visiteseule,touchantmeubles,murset
portes,sousleregardàlafoisintéressé
etangoisséd’Ethan.
Kayacommençaparunepremière
porte,surladroitesurlemêmemurque
celledel’entrée.Ellel’ouvritsans
mêmedemanderuneautorisation.Àquoi
bon?Elleallaitvivreici.Lapièce
s’ouvritsurunbureauetunegrande
bibliothèque.Lebureauétaitnoir,des
dossiersempilés,unordinateur,des
chosesonnepeutplusclassiques.La
bibliothèqueprenaittoutunmur,dusol
auplafond.Ellepouvaitdeviner
qu’Ethanétaitvraimentunhomme
cultivéetintelligent.Tranquillement,
ellerefermalaportepuisouvritla
suivante:lesWC.Sansyvoirgrand-
chosed’intéressant,ellecontinuason
expéditionaveclasalledebain,qui
étaitsurlemurdedroitedusalonavec
lesWC.Lasalledebainétaitgrande.
Grandedanstoutcequ’ellevoyait:
grandedoucheauxparoisvitrées,grande
baignoiredontellepouvaitpercevoir
desjets,deuxgrandslavabossousun
grandmiroir.Lapièceétaitdanslestons
roses,finalementtrèsféminine.Assez
surprenantepourl’appartementd’un
hommeetpourtantrépondantbienàson
métierquirévélaitsonattraitpour
l’esthétismeféminin.Kayaadoraitdéjà
cettesalledebain.Était-cesoncôté
femme,justement,quirépondaitàson
plaisirdesyeux?Ilyavaitpourtant
danscettesalledebainquelquechose
quidonnaitenviedes’yplaireet
complaire,sefairebelle,prendredu
tempspoursoi.
Ethanarrivaderrièreelle,curieux
devoirpourquoiellerestaitsi
longtempsdanscettepièce.Sonsourire
jusqu’auxoreillesluidonnaundébutde
réponse.
Il
haussa
les
sourcils
d’étonnementespérantunmotdesapart
expliquantcesourire,maisiln’obtint
pasplus;ellelebousculapoursortirde
lapièceetcontinuersavisite.Elle
ouvritunenouvelleportesurlefondde
l’appartementetydécouvritune
chambre,lachambred’Ethan.Quelques
vêtementstrônaientsurunechaisenon
loindulit.Elleétaitdanslestonsgris,
bleuetblanc.Sobre,maisavecunair
trèsmasculinetmoderne.Unecouette
danslesmêmescouleurssurlelit,un
tableauau-dessus.Pasdefenêtres,
concédantuncôtétrèsintimisteavecdes
appliquesauxmurs.Ethans’appuyasur
lechambranledelaporteavecunair
amusétandisqu’elleregardaitlesphotos
d’uncadresurlatabledechevet.
Finalement,sonangoissepremièrese
dissipaenvoyantlesyeuxpétillantsde
Kaya,commesielledécouvraitune
sériedemystères.Ellenedisaitrien,ne
posaitaucunequestion,maisdéposait
sonregardsurtoutetn’importequoi.Il
auraitpulaissertraînerdeschoses
compromettantesqu’elleseseraitjetée
dessussanssouci,àsongranddésarroi.
Sacuriosité,loind’êtreagressive,était
amusante.Ilauraittellementaiméêtre
danssatêtepoursavoircequ’elle
pensaitàchaquechosequ’ellevoyait.
Elleétaitentraindedécortiquersavie
avecdesvêtements,desobjets,des
souvenirsoudesphotos,jugeantses
goûtsetsespassions.Unepetiteporte
latéraleàmoitiéouvertecaptaleregard
deKayaqui,avantdelatirer,regarda
Ethanpourluidemanderensilencesi
ellepouvaitl’ouvrir.Ethanlevason
visageauciel,simulantunehésitation
pouvantfairecroirequ’ungrandsecret
setrouvaitderrière.Puis,lesouriremi-
amusé,mi-stupéfaitparsoncôtésans-
gênequeluifitEthaneutraisondeson
envieetellel’ouvrit.Ungranddressing
setrouvaitderrière.Elletournalatêteà
nouveauversEthanquirigola,alors
qu’elleouvritsabouchedesurpriseet
d’admiration.
—Nuldoute!Tuesbienune
femme!Undressingetunesalledebain
etvoilàPrincesseauxanges!
Kayahaussalesépaulespourseule
réponseetsortitdelachambrepour
alleràcelled’àcôté,donnantderrière
lacuisine.Elleydécouvritunechambre
dansdestonsvertpastel,plus
lumineuse,puisqu’unefenêtresetrouvait
surlemurdegauche,murlongeantcelui
delacuisineetdusalonetayantpignon
surrue.Unepetitecommode,unetable
dechevetetunepsychéblanchey
laissaientuneatmosphèredepaixquilui
plaisait.
—Machambre?demanda-t-elleen
setournantversEthanqu’ellesavaitnon
loinderrière,aupasdelaporte.
—Tupréféreraisdormiravecmoi?
—Plutôtmourir!
—Pasaussidésespérénonplus!
Oui,c’esttachambre.Siçaneteplaît
pas,ilterestelecanapéaupire.
Kayaluimontraunsourireravi
tandisqu’elletestalematelas.
—Non,jeprends!J’aimebeaucoup
tonappartement!Jepensaistrouverun
appartementenbordel.Jedoist’avouer
quejesuisétonnéeparcequejevois.
Toutestbienrangéetjeletrouvetrès
chaleureux.
Ethanfitunegrimacedesurprise.
—Chaleureux?
—Oui,ilhumaniseunpeule
connardentoi!
Kayaattrapaalorsl’oreillerdeson
litetleluijetaàlafigure.Ethan
l’esquivamalgrécetacteinattenduetla
regarda,ébahi.Luiquisesavaitassez
distantaveclessentimentsvenaitde
prendreunepetiteclaqueendécouvrant
que
son
appartement
était
«chaleureux».Ilavaitpourtanttantde
chosesàcacher.Toutétaittellement
superficielparrapportàcequ’il
ressentaitauplusprofonddelui.Il
attrapal’oreillerausol,lefixauninstant
etsourit.
—J’endéduisquetun’aspas
besoindecetoreillerpourdormir?OK,
jelegardeavecmoi!Pasdeproblèmes.
—Qu…quoi!Non!Jedorsavec
unoreiller!
Ethansortitduchampdevisionde
Kayaavecunsouriremalicieux,
l’oreillersouslebras.
—Eh!Reviens!
Lesilenced’EthanobligeaKayaà
sortirentrombedesachambrepour
repérerquesonvoleurd’oreilleravait
disparu.Elleseprécipitadanscelled’à
côté,sedoutantqu’ilyétaitetentraen
catastrophe.Ellesentitalorsuneombre
derrièreelle,maisn’eutletempsde
réagir,qu’ellevitsoncoussinseplaquer
contresonvisage.Priseensandwich
entreEthanetsonoreiller,ellepoussa
uncridepaniquequifitéclaterderire
Ethan.
—Benalors,Princesse,jecroyais
qu’onvoulaitjoueravecdescoussins?!
—Jen’aipasditquejevoulais
mourirétouffée,connard!répondit-elle,
sesmotsentravésparl’oreiller.
Kayatentadesedébattre,maiselle
dutreconnaîtrequ’ilétaitfort.
—J’arriveplusàrespirer!hurla-t-
ellealorsqu’elletiraitdetoutesses
forcessurl’oreiller.Ethaaannnn!
Ethanrelâchasaproieetjeta
l’oreillersursonlit.Kayaposases
mainssursesgenouxpourreprendresa
respiration,puissoudainseprécipita,
follederagesurEthan.Ellecommençaà
letapersurletorse.Celui-ciluiattrapa
alorssespoignetspourlastopper.
—Onaditpasletorse,
Kaya!gronda-t-il.
—Etjetefrappeoùalors,pourme
venger?
Iln’eutletempsderépondrequ’il
vitlepieddeKayas’écrasersurlesien.
Ladouleurluifitlâcherpriseetil
s’attrapalajambedansunjuron.Kaya
sesaisitducoussinetallachercherses
bagagesàl’entrée.Ellerepassaalors
devantluisansunmotetallas’enfermer
danssachambre.Ethans’allongeasur
sonlitetsoupira.
—Jesensquecemoisvaêtre
terrible…
Kayasortitdesagrotteuneheure
plustard.Elleavaitprisletempsde
rangersesquelquesaffaires,fouiller
partout,puistournerenronden
réfléchissantàlamanièredontelleallait
pouvoirgérerlasituation.Elleétait
contente,carelleavaitunbonlitetune
supersalledebain.Leseulhicdansson
nouvelenvironnementétaitM.Connard
finalement.Elledevaitbienadmettre
queleurrelations’étaitnettement
améliorée.Ilsétaientpassésaustadedu
«jetedéteste,maisj’arriveàessayer
detesupporter».Bienmieuxquele«Je
tedétesteetjeteveuxleplusloin
possibledemoi!».Maistoutn’étaitpas
résoluetlepireallaitarriver.Elle
sentaitqu’ilessayaitdeprendresurlui
etfairedesefforts,maissaméfiance
vis-à-visdeluiétaitauniveauleplus
hautetellen’arrivaitpasàrepousseret
oublierleursantécédentschaotiques
pourlemoment.Ill’avaitfaitvirerdeux
foisetelleneseraitpasdanscet
appartementsichacunavaitmisdel’eau
danssonvinbienavant.Ellenesavait
pasvraimentcommentsecomporter.
Jouerlesrivales,pasdesoucis,maisles
amis,voireamants,cen’étaitpassi
simplequandonsedétestait.
Elleouvrittoutdoucementlaporte
desachambreetylaissauninterstice
suffisantpourqu’ellepuisserepérerle
dangernuméroun:Ethan.Sécuriserle
périmètreétaitlapremièrepartiedesa
stratégie.Lasecondeétantdefoncer
danslasalledebainpours’offrirune
vraiedouche.Pasd’EthanAbberline
danslesparages.Pasdebruitsde
télévision.Ildevaitbosserdansson
bureau.
AllezKaya!Go,go,GOOOO!
Niune,nideux,elleseprécipita
verslasalledebain.Elleavaitanalysé
lecheminleplusrapideetsans
obstacle.Aucunpiègenel’arrêterait
pourarriveràsonobjectif.Ellefonça,
avecunlégerdérapagedansunvirageà
90degréspouréviterlatableàmanger
etleschaisesautour,etfermalaportede
lasalledebainaussivitequ’ellel’avait
ouverte.Ellefermalesyeuxuninstant
pourseremettredesesémotionset
soupiraungrandcoup,soulagéedene
pass’êtrefaitsurprendre.Quandelleles
ouvritànouveau,sonregardrestafigé
surunpointbienprécis:Ethan.
Cedernier,avecpourseulvêtement
uneservietteautourdelataille,étaiten
traindesecouperlesonglesdesorteils
au-dessusdulavabo.Unejambeà
chevalsurlemeuble,uncoupe-ongles
danslesmains,celui-cifitdesyeux
rondsquandilaperçutKayaarriver
avecfracasdanssasalledebain.
Immédiatement,commeparréflexe
typiquementfémininetaprèsavoirvu
l’aspectgénéral,ellereluquaEthanplus
endétailencommençantparlespieds,
dumoins,parlepiedausol.Ethanétait
athlétique,sansnuldoute.Desjambes
muscléesetpoilues:molletsfermes,
cuisses
proéminentes.
La
position
d’Ethan,avecsajambeenl’air,faisait
releversaservietteàlaportedeson
intimité.Dequoidevinerbeaucoupde
chosessansenvoirlemoindremorceau.
Nifesses,nisexe.Pourtant,Kayaneput
s’empêcherdedéglutiretellesavait
bienquecen’étaitpasparcequ’ilétait
justefaceàelle.Elleremontasonregard
sursontorseetEthanputconstaterson
trouble.Letouts’étaitpasséenl’espace
dequelquessecondesetpourtant,ilposa
sonautrepiedausoltrèsrapidement.
Sonétonnementfitplaceàlapanique
puisàlacolère.Ilseprécipitasurelle,
leregardnoir,etlaplaquaviolemment
parlesépaulescontrelaporte.
Vousditesunmotsurcequevousvenezde
voir,jevoustue.Osezmeposerune
questionàcesujetetjevoustueégalement.
Vousn’avezrienvu.Est-ceclair?
Letonsérieux,sec,caverneux
d’Ethancoupatoutevolontédeparoleà
lajeunefemme.Illafixaitaveclemême
regardqu’elleavaitpuvoirauSilky
Clubfaceàlabandequiluiavaitfaitdu
mal.Ceregardsisombre,sividede
sentimentsetenmêmetempsaveccette
impressiondetristesseimmense,de
perteincommensurable,dedésespoiret
defatalitéprofonde.Ellepouvaitsentir
sesmainsfairedeplusenpluspression
sursesépaulescommepouraccentuersa
menace.Ellen’osaitlequitterduregard,
pourtantlacuriositéétaittropancréeen
ellepourenfaireabstractionetson
regarddéviaplusbas.Vudeplusprès,
lerésultatétaitencoreplusterrifiant.
Commentavait-ilpuenarriverlà?
Ellesétaientimmenses.Parlerde
cicatricesétaituneuphémismetantelles
étaientaffreuses.Deuxénormesbalafres
coupaientsontorsedefaçonplusou
moinsparallèle,degaucheàdroite.Une
légèrementau-dessusdesapoitrine,
l’autreau-dessous.Ilétaitfacilede
devineràquelleprofondeurl’entaille
quilesavaitprécédésétait.Combienil
avaitpusouffrir?Pourquoisontorse
étaitunepartiequ’ilréfutaitetdontil
refusaitneserait-cequelecontact.
Kaya!,cria-t-ilencoreplusdurement,ce
quilafitsursauter.
Elleregardasonvisageànouveau,
plongéedansuneréflexionquidéplutà
Ethan.Ilpouvaitliredanssesyeuxtout
cequ’ilcraignait:lapeur,ledoute,la
pitié,lequestionnement,latristesse.Il
nevoulaitpasvoirceregard.Ill’avait
déjàvu.Cemêmeeffroidanslesyeux
quandilavaitacceptédemontrerson
torseàCharles,puisàCindyetmêmeà
sasœur.Lelongtravailqu’ilavaitdû
fairesurlui-mêmepouraffrontercette
expressiontypiquesurlesgensqui
voyaitl’horreurqu’ilportaittelun
fardeau,maisquipourtant,luirappelait
laplusélémentairedesrèglesdesurvie.
Ellesétaientsahonte,ellesétaientson
dogme.Douloureuses,profondes,mais
ancréesdansuneréalitésansdoutes,
sansartifices.Unrappeldelaviequ’il
devaitmenerpourneplussouffrir.Plus
jamais.
Ils’enrappelaitcommesic’était
hier…
«Jevaistedonnertapremièreet
dernièreleçonpaternelle,àdéfaut
d’avoirunpère.Souviens-toitouteta
vied’unechoseaveclesfemmes:la
gentillesseapporteladouleur,l’amour
mèneàlasouffrance.Tuasvouluêtre
gentil,prouvertonamour…Regardeà
quoicelat’amené.Regarde-la.Elle
pleure,maistucroisqu’ellesouffre,
elle.Non.Toutn’estquecinéma.Elle
t’auraitvraimentaimé,ellenet’aurait
pastraitécommeunobjetdontellese
sertpourvivre,seconsolerous’amuser.
Lesfemmessonttoutespareilles…»
Cetonsec,tranchant.Cettevoix
rauque.Sesmainsrobustes.Ceregard
incisif.Etpuiscespleursàcôtédelui.
Cescris,sescris.Ladouleur.Desmots
encore.Etpuisletrounoir.Leblack-out
complet.
EthancontinuaàserrerKayaquise
mitàgesticulerdedouleur.Sesyeux
marrondevenusaussinoirsquel’onyx
dévoilaient
un
homme
tellement
différent.C’étaitpirequelagoujaterie
habituelle.C’étaitdifférent.C’étaitdela
haineetdelarancœuràl’étatpur.
—Turefusesderépondre…luidit-
iltoujourscassant.Trèsbien.Onva
t’aideràoublier.
Kayaécarquillalesyeux.
Viteuneparade!Kaya!Jouela
détachéeàfond!Trouveuntrucpour
renverserlavapeur!Ilpètesa
goupille!
Ellecherchadanssatêteune
solution.Luidirequ’elleavaitoublié
seraitmentir.
—Çava!Onsecalme!J’étais
justesurprisepar…tesabdominaux!,
fit-elleenbaissantlesyeux,ultragênée
desortirungrosmensonge,maispassi
grosqueçaenfait.Tuesvachement
muscléetçam’asurprise.Tuasdûen
baverpourarriveràuntelrésultat,non?
Ethandesserralégèrementson
étreinte,surprisparsaréponseaugoût
derévélation,maisaussiparcette
sensationderelâchedelatension
ambiante.
—Bahquoi?!C’estvrai….fit-elle
d’unetoutepetitevoixetregardantun
coindelasalledebain.Tuesunhomme
et…jeresteunefemme…Cen’estpas
uncrimenonplusquedematerles
musclesd’unhomme….
Ethanlacontemplauninstant,
analysantlevraidufauxdansses
propos.Ilrelâchacomplètementses
épaules.
—MademoiselleAdam-chérivame
fairecroirequ’ellereluqueunautre
homme?
IlcroisaalorslesbrasetKayaput
voirlechangementd’humeurdansses
yeux.Ilspétillaientdecettemalicesi
typiquement…Luietsonfichusourire
taquinétaientderetour.Elleneput
s’empêcherdesouriredevantlepiège
qu’ilrefermaitsurelle.Ladiversion
fonctionnait.
—Tusaistebattred’aprèsceque
j’aivu…Tupratiquesquoicomme
sport?
—Jen’enrevienspas!Princesse
s’incrustedanslasalledebain,me
reluqueetenplussecroitenpositionde
forcepourposerdesquestionssurmes
abdos.Tuveuxpeut-êtrevoiraussisous
laserviettepourt’assurersic’est
musclé?Tuveuxtâter?Aprèstout,tu
restesunefemme,non?
Kayasemorditlalèvre.
Retournementdesituationréussi,
maisàquelprix?!
—Rhaaa!J’aicompris,jesors!…
Jetedéteste!Tum’énerves!Onnepeut
vraimentpasparleravectoi!Gardetes
abdossecretsettoutleresteavec!Je
m’enfous!Connard!
Elles’empressadetournerla
poignéedelaporteetdesortirsansen
diredavantage.Ethanfermasaporteà
cléetposasonfrontcontre.
—Mesabdos…Charmanteexcuse.
Siseulementtunepouvaisvoirqueça…
-2-
Pédagogue
Ethansortitdelasalledebaindix
minutesplustard.Ilnemitpas
longtempsàrepérerKayaquizappaitles
chaînesdelatélévisionavecun
émerveillementqu’ilavaitdumalà
comprendre.Elleregardaitunfilm
catastrophe.Ils’assitalorsàcôtéd’elle
surlesofaetl’observa.Trèsvite,celle-
ciposalatélécommandeetsetourna
verslui,lesbrascroisésetattendantla
remarque,lasentenceouautrechosedu
mêmegenre,enréponseàleur
altercationdanslasalledebain.
—Tupeuxyaller.Laplaceest
libre…secontenta-t-ildeluidire.
D’abordsurprise,ellesesentit
soulagéefinalementdenepaslevoir
insisteretdécidadeparaîtredétachée.
—Super.
Elleselevaalorspourallerversla
salledebainsansattendreautrechose
desapart,maisEthanluiattrapale
poignetaupassage.
—J’étaissérieuxtoutàl’heure…
luidit-ilsanslaregarder.Jecomptesur
tonsilence.
Kayasoupira,maisneleregarda
pas.
Nejamaiscroirecertaineschoses
commeacquisesetrévolues…
—J’avouequecettefaçondese
couperlesonglesdesorteilsestassez
cocasse.Jediraipresquequeçacasse
l’imagedubeaugossePDG,maisjene
dirairien.Promis.Jepréfèresavourer
cegenredechosesensoloenmedisant
queMonsieurConnardaurabeausela
jouerdevantmoi,j’auraitoujourscette
visionridiculeàl’espritpourme
rappeleràquelpointtupeuxparfoisêtre
pathétique.
Elleosajeteruncoupd’œilalors
versluietsoudainpouffaderire.Ethan,
étonnéparlesujetdeleurconversation
dansunpremiertemps,marmonna
finalementpourlaformeetlalaissa
partir.Elleavaitlechicpourretourner
lasituationàsonavantageetàchaque
fois,ilfinissaitparensourire.Ilse
frottalescheveuxetlaregardaarriver
devantlaportedelasalledebain.
—Attends-moi!Dansdixminutes,
j’arriveentrombepourmefoutreaussi
detagueule!luicria-t-il.
—Désolée,MonsieurQI132,mais
moijefermelaportedelasalledebain
àclé!luirépondit-elleavantqu’il
n’entendelecliquetisdelaserrure.
—C’est150!150monQI!
Ethanattrapalatélécommandesans
convictionetcommençaàzapper.
Ellem’énerve!Ellem’énerve!Elle
m’énerve!MêmeBBnemechambre
pascommeça!
Kayasefrottalesmains.Elle
s’imaginaitdéjà,commedansunmanga,
avecdesétoilesdanslesyeux,lesjoues
rosiesdebonheur,despapillonsetdes
petitscœursautourd’elle,àl’idéedece
quil’attendait.Faireunchoixentrela
doucheetlabaignoireétaitdéjàunluxe
qu’elleneseseraitmêmepasimaginéil
yaunesemaine,maisdevantlamanière
dontellepourraitsedétendreet
savourercebonheurultimequ’estl’eau
chaude,sonchoixfutvitefait.
Qu’ilosemedirequelquechoseet
jelefaischanteravecsescicatrices,
na!Aprèstout,j’aibienméritéunbon
bainaprèslafroussequ’ilm’afichue!
Ethann’avaitpasl’habitudedevivre
avecquelqu’unetencoremoinsavecune
femmeetils’imaginaitdéjàdansquel
étatallaitressortirsasalledebain.Il
avaitentendul’eaudelabaignoire
couler.Toutdesuite,ils’étaitfaitle
genrederéflexionunpeupingre:«Elle
n’estpaschierd’utiliserautantd’eau
chaudesansmedemanderavant!»puis
soncerveaudivaguasurlafaçondont
ellepouvaitsedétendredanssa
baignoire.Iltentadeseconcentrersur
cequisedisaitàlatélévision,maisson
attentionrevenaittoujoursverslaporte
delasalledebain.Était-elleentrainde
sesavonner?Seprélasser?Se
caresser?
Putain,
merde
!
Ressaisis-toi,
Ethan!Tuescenséladétester!
Uneheures’étaitécouléeetilne
l’avaitpasentenduedepuisunmoment.
Ilseleva,sedirigeaverslaportesurla
pointedespiedsetposasonoreillepour
tenterd’entendreunindiceluiindiquant
quetoutallaitbien.
Etsielles’étaitévanouiedansla
baignoire?Jeneveuxpasd’unenoyée
dansmasalledebain!Jedevraispeut-
êtrevérifierque…non!Vaterasseoir,
crétin!Etarrêtedetefocalisersur
elle.
Ilallasejetersursonsofa,latête
dansuncoussin.
Ellearaison…Pluspathétique,tu
meurs!C’estquoitonproblèmeavec
cettenana?Ignore-laetfaistavie…
Montrequetuesintelligent,M.QI
150!
Ilregardauninstantl’écrandela
télévisionetsoupira.
Un
mois…
Un
mois
à
la
supporter…Unmoisàlatenirà
distance…Unjeud’enfant!
Laportedelasalledebains’ouvrit
etEthanfitunbonddusofa.Kayase
trouvaitdebout,nue,maisentourée
d’uneservietteetlevisagerougecomme
unetomate.
—Tournetatêteimmédiatement!lui
ordonna-t-elleenlevantl’indexversla
télévision.Regardel’écran!Vite!
—Etpourquoiça?
—Nemeregardepas!Tourneta
tête!
Voyantqu’Ethanneluiobéissaitpas,
ellefonçadanssachambreenletraitant
deconnardetententantdebaisserau
maximumsaserviettesursescuissesà
découvert.Ethans’esclaffa,maisneput
s’empêcherdepenchersatêteau
maximumpourvoircequepouvait
cacherletissu-éponge.Kayaressortit
deuxminutesplustardenjean,grospull,
sescheveuxmouillésetlâchéslelong
desesépaules,etseprécipitaverslui.
Elleattrapalecoussinquisetrouvaitsur
lesofaetluijetaàlafigure,devantles
yeuxstupéfaitsd’Ethan.
—Salepervers!Tut’esbienamusé
hein?Tut’esbienrincél’œil?
—Eh!Deuxsecondes!protesta-t-il
alors.Jen’airienfait!Deun,tun’as
qu’àpastebaladerdanslesalondans
cettetenueetdedeux,tuveuxqueje
matequoi?Iln’yarienàvoir!
Kayaluiassénaunsecondcoupde
coussinetEthansemitàrire.
—Jetedéteste!Vaenenfer!
—Maisoui,c’estça!Mauvaise
joueuse!
Elleselaissaalorstombersurle
sofaetcroisasesjambesetsesbras,
signequ’elleétaitvraimentfâchée.
—Entoutcas,jeconstatequetu
n’esvraimentpasl’amiedescoussins!
Quellebrute!fit-ilentapantlégèrement
surceluidontelles’étaitserviepourle
frapper,afindeluirendresonapparence
d’origine.
—Laferme!
—Ooooh!Mapetiteamieboude?
Letonmoqueurd’Ethanfitencore
plusrâlerKaya.Ilsepenchaalorssur
ellepourluitirerlajoue.
—Lapauvrepetiteprincesseveut
uncâlinderéconciliationdeson
connarddepetitami?
Ilcommençaalorsàluifrotterlatête
etàsecolleràluitoutengloussant.
—Nemetouchepas!luicria-t-elle
alorsqu’ilrigolaittoujoursplus.Vachez
lesGrecs!
—VachezlesGrecs?C’estquoi
cettemenaceringarde?Fautsortirde
tempsentemps,Princesse!
—Tuasraison.Tuenasbesoin!Va
faireuntourdehorspourvoirsij’y
suis!
—Aucunintérêtpuisquetueslà.
Kayalefusilladuregardtandisqu’il
semitàrigoleràs’entordrepresquele
ventre.Elleattrapaunautrecoussin
qu’elleluibalançaàlafigure.Ill’évita
sansdifficultéd’unreversdubras.
—Allonsmanger,va!Vilaine
Princesse,tortionnairedecoussins!
Kayafitunegrimace,maisétait
heureusedesoninitiative.Elleavaittrès
faimetn’osaitdemanderquoiquece
soit,aurisquedepasservraimentpour
une
profiteuse.
La
sonnerie
de
l’appartementretentitàcemoment-là.
Ilsseregardèrent,surpris.
—Bahquoi?Nemeregardepas
commeça!Cen’estpaschezmoiici
doncçanepeutêtrequepourtoi!
Ethanselevaetallaouvrir.
—Dis-moiquec’estuneblague!
Dis-moiquec’estuneblague,Ethan!Tu
n’aspasputelancerdansunetelle
histoire!?
—BonsoirSimon…
L’airblaséd’Ethann’affectaenrien
ladéterminationdeSimon.
—Elleestlà?Jeveuxlavoir!Sam
ditqu’elleesttropcanon!
Simonentrasansdemanderson
reste,bousculantaupassagesonami.
Sonregardbalayalesalonetillavit.
Ungrandsouriresedessinasurson
visageetilsetournaversl’entrée.
—Barney!Samdisaitvrai!Ilya
bienunefemmechezlui!
EthansetournaversBarneyqui
haussalesépaules,commesifinalement,
ilcompatissait,ayantluiaussiàsubir
quotidiennementlatornadeSimon.Il
entraalorssansunmot,suivid’Oliveret
Sam.
—Désolémec!ditSamaussiblasé
qu’Ethan.Àpartirdumomentoùilasu,
iln’apasvouluendémordre:ildevait
lavoir,luiaussi.
—Tuleconnais,continuaOliver,
avecsasempiternelleremarquedu«je
suistoujoursledernieraucourant».Il
avaitbesoinderattrapersonretard.
—Jevoisaumoinsquevousn’êtes
pasvenuslesmainsvides…constata
Ethanavecfatalisme.
—Onnesavaitpastropquoi
ramener,commentaBarney,alorsona
prisdesbières,duchinoisetdu
japonais.
—EtbienBarney,jecroisquetu
vasfaireuneheureuse…
Touss’approchèrentducoincinéma
oùKayasetenait.L’excitationdeSimon
étaitàsoncomble.Ilnedisaitrien,mais
commençaàdétaillerlajeunefemme,
tournantautourdecelle-cipourscruter
lesmoindresdéfautsoupeut-être
comprendrecommentsonamienétait
arrivélàavecelle.Kayan’osadireun
mot,trèsgênéeparl’attitudeinquisitrice
deSimon.
—Simon…
KayavitEthans’attraperlevisage
avecsamain,aussiconsternéqueses
amis.Ellepouffaalorsderire.Simonse
positionnadevantelleavecunlarge
sourire.
—Toietmoi,jesensqu’onvaêtre
devraisamis!Simon,amid’Ethan!lui
dit-ilenluitendantlamainqu’ellesaisit
pourlesaluer.Etlui,legrandavecla
bouffeetlesbières,c’estmonchéri.
Barney.Ontientunbardiscothèquedont
Ethanestactionnaire.
—Raviedevousconnaître!
—Jevouspréviens,cesoir,elleest
àmoi!Ceseramonbinôme!fitSimon
heureux.
—
Quoi
?!
s’offusqua
Sam.
Certainementpas!C’estmacopine!
Doncjefaiséquipeavecelle!
—Vousnecroyezpasqueceluiqui
devraitêtreenbinômeavecelleest
Ethan?lançaOliver,fatiguéàl’avance
decequiallaitarriver.
—Onal’habitudedeseretrouver
certainsjourspourunesoiréejeuxvidéo
oùl’onjouesouventenbinôme…
souffladiscrètementEthanàl’oreillede
Kaya,pourexpliquerlebutdecedébat.
—Ill’aquandilveut!Ilpeutbien
partager!rétorquaSimon.
—Toutàfait.Enplus,cen’estpas
vraimentsapetiteamiedonconn’est
pasobligédetoutletempsluilaisser!
ajoutaSam.
—Vousnoussaoulez.J’aifaim.À
table.
Barneyavaitclosladiscussionen
posantlessachetsdevictuaillessurla
tableàmanger.Ilavaitcedonde
remettreleschosesàleurplaceavecun
calmequiforçaitlerespect.Ilétait
grand
et
fin,
pas
spécialement
impressionnantphysiquement,maisil
étaittoujoursserein,réfléchi.Ilne
parlaitjamaissansraison,pourle
plaisir.ToutlecontrairedeSimonqui
n’étaitpastrèsgrand,lescheveuxmi-
longsbouclés,châtains,toutébouriffés
etlatchatchefacile.Aucundesdeux
n’affichaitunstyleefféminé.Simonétait
simplementplusvolubileetéparpillé
queBarney.Ethanétaitpersuadéquesi
touslesdeuxs’étaienttrouvés,c’était
bien
parce
qu’ils
étaient
complémentaires.
Ils
remplissaient
chacunlapartmanquantedel’autre.Il
regardauninstantKayaquisouriait
devantSametSimon,entrainde
négocierleschaisesautourd’elle.Ilse
demandaalorssisonAdamétait
vraimentl’opposédeKayaoupas.
Étaient-ilstousdeuxdifférentsou
similaires?Enétait-ilsystématiquement
detouslescouples?Faut-ilêtre
différentspours’accorder?
—BonsangEthan,disquelque
chose!suppliaOliverquisentaitsa
patiences’effriter.
—Queveux-tuquejedise?Ilsont
raison,cen’estpasréellementmapetite
amie.Etpuisdetoutefaçon,sijevenais
àbroncher,tuseraislepremieràtrouver
çasuspectetàmecharrier.
Il
attrapa
un
paquet
avec
nonchalanceetcommençaàsortirles
nemsetlessushis.Kayafitdesyeux
rondsetleluirepritdesmains,sejetant
presquepar-dessuslatable.Unsourire
gigantesquesedessinasursonvisageen
scrutantl’intérieurdespaquets.
—Dessushis…Jepeux?
Ethansemitàsourireetreplaçales
mèchesrebellesdesescheveux,de
dépit.
Cettefillesaits’imposer,pasde
doutes!
—Bonlesgars,lessushissonten
prioritépourKaya!Questiondevieou
demortpourvous!
—Unefandesushis?!Comme
moi!lançaSimon.Jetedisqu’onest
faitspourêtresupercopains!
Kayasecontentadegarderce
sourireétincelantquis’étaitancrésur
sonvisageenréponse.Oliverl’observa
quelquessecondespourtenterde
comprendresonamietsonchoix.
Apprendreàlaconnaîtreluisemblait
nécessairepourcomprendrepourquoi
sonamiluiportaittantd’attention,luisi
distantd’ordinaireaveclesfemmes.
—
Bon
Kaya,
parlons
sérieusement…commençaSimonenlui
parlant
doucement,
investi
d’une
mission.Jevaist’endireunmaximum
surEthanpourréussirlasignaturede
soncontrat.Jenesuispasl’expertès-
Ethan;c’estOliver.Maisilestpire
qu’unetombeàsonsujet.Jepensequ’on
peutdirequec’estunequalité,mais
pourmoi,c’estchiant.Ilsm’énervent
touslesdeuxavecleurssecrets.
—Tuvasmedirequ’ilfaisaitpipi
aulitjusqu’àseshuitans?luidemanda-
t-elleavecunpetitclind’œilde
connivence.
Simonlaregardauninstant,puisse
mitàrire.Illuimitsouslenezunnem
aucrabe.
—Malheureusement,jenesaispas
cequ’ilfaisaitàcetâge-làetilneparle
pasdesonenfance.Parcontre,ilest
tellementbutéqu’iln’enpeutplus!Il
n’yapasplustêtuquelui,aupointqu’il
peutêtreparfoisunvraiconnardpour
obtenircequ’ilveut.
Kayalefixauninstantetluioffritun
autreénormesourire.Ellepoussauncri
etsejetaàsoncou.Toussursautèrent,se
demandantcequetouslesdeux
tramaient.Simonfutleplussurprispar
cetélanaffectueux.
—Waouh!Quelenthousiasme!
Ethan,ellen’apaslelookdetes
conquêteshabituellesdoncsurlecoup,
çam’afaitunpeubizarre,maisje
comprendsmaintenant.
—
Et
tu
comprends
quoi
exactement?luidemanda-t-illabouche
pleine.
—Oooh…PourquoiSametOliver
étaientsiperplexes,toutsimplement!
—Euhhh….Kaya,tudevraislâcher
Simon,tusais….luisoufflaSamà
l’oreille.Barneypeutêtrejaloux,même
d’unefemme…
—Oh!Désolée!
EllesedétachadeSimonetlui
réajustalecolavecunsouriregêné.
—Onpeutsavoirpourquoitului
sautesaucou,demandaEthanméfiant.
Tuneleconnaisquedepuisdix
minutes!
—Tuesjaloux,Ethan?lançaSam
avecunsouriremoqueur.
—Non,maispourqu’ellefasseun
telgeste,jeseraiscurieuxdesavoirce
qu’ilabienpuluidirepourqu’ilentre
danssesbonnesgrâces.
—Riendebienméchant,répondit
Kayadefaçonneutre.
Kayalefixa,posantsesdeuxmains
soussonmenton,lescoudessurlatable.
—Ilajusteditquetupouvaisêtre
unvéritableconnardparmoments.Par
conséquent,c’estforcémentmonami!
Samselevad’unbond.
—OuiEthan,tuesuntrouduculde
connard!MaintenantKaya:dansmes
bras!
Toussemirentàrire,saufEthanet
Sam.L’unparcequ’àcausedeKaya,il
étaitétiqueté«connard»officiellement,
l’autre,carilétaitonnepeutplus
sérieuxsursesmots.Kayajouatoutefois
lejeuetalladanslesbrasdeSamqui
lâchaun«yes!»raviettiralalangueà
Simon.
—Jenelâchepasl’affairesi
facilement,Man!fitSamfièrement.
—Pfff!M’enfous,parexpérience,
lesfemmespréfèrentlesgays!
—Etbienmoijenefaispasde
préférences!conclutKayafermement.
J’aimetousceuxquilevoientcommeun
connard,c’esttout!
Kayaattrapaunsushietlemitdans
sabouche.
—Maisavantvous,j’aimeles
sushis…Mmmh!Celuiaveclesaumon,
unetuerie!
—Sicen’estpasdel’amour,ça!
rigolagentimentOliver.Ethan,devancé
parsespotesetdessushis!J’aurais
presquepitiépourtoi.
—Unefemmeetlabouffe,onne
rivalisepas!réponditEthantouten
mangeantsonnem.C’estconnu.Tiens,
mangeaulieudet’inquiéterpourmoi.
—Ahah!Cen’estpasplutôtavec
toiquelabouffenerivalisepas,
goinfre!
—Kaya,pourquoituletraitesde
connard?demandaalorsBarney
interloquéparsespropos.
—Parcequec’enestun!Jele
déteste,depuislepremierjour.
—Alorspourquoias-tuaccepté
d’êtrelapetiteamied’untypequetune
peuxpasvoirencouleurs?interféra
Simonenpostillonnantdurizcantonais.
—Parcequ’àcausedelui,jen’ai
plusdesalaire.Sapropositiond’argent
estlaseulechosequimemotive.
—Ilneteplaîtpasunpeu?lança
presqueinnocemmentSam.
Aussitôt,Ethanluienvoyaunbeignet
decrevettesdanslafigure.
—Quoi?Jem’informe!
—Tut’informesmal!lançaEthan.
Ilyadesévidencesquineméritentpas
d’êtremisesenavant:onsedéteste
donconnevapasseplaire!
—AllonsEthan,onsaitquetuplais
àtouteslesfillesquetucroises…
Simonavaitditcelacommeunfait
sansdébatspossibles.
—Iln’yaqu’unseulhommequime
plaîtetcen’estpasceluiquiestdevant
nous…réponditKayasanstropdegêne.
—Etonpeutsavoirquic’est?
demandaSamencorepluscurieuxdu
nouvelennemiquiseprofilaitdevant
eux.
—Monfiancé,Adam!
—Tu…tuesfiancée?
Simonposalaquestionquetous
doutèrentd’avoirbiencomprise.
—Et…iln’arienditpourton
contratavecEthan?lançaBarney
encoreplussceptique.
—Ilestmort.
Lavoixtranchanted’Ethanlaissaun
froidautourdelatable.Tousrivèrent
leurregardversKaya.
—Merde…
Lemotsortittoutseuldelabouche
deSamquiseposapleindequestions
surKayaalors.
—Rassurez-vous!leurdit-elleavec
unpetitsourire.L’amourvaau-delàde
lamort.Pasvrai,Simon?
Simonacquiesçasilencieusement,
maisaussidefaçonhébétée.
—J’aibeauaimerSimondetoutes
mesforces,jerefuseraisqu’ilsacrifiele
restedesavieàm’aimeralorsquejene
pourraisluirendrecetamour…déclara
Barneyd’untonassezcatégorique.
L’amoursevit,iln’estriensansactes
pourl’animer.C’estuntravaildu
quotidien,quis’entretientàdeux.Quand
l’unmeurt,onnepeutl’entretenirseul.
Kayaregardalatableavectristesse.
Ellecommençaàfairedesrondsdubout
del’index.LesmotsdeBarneyluifirent
maletpourtant,ellesecontentade
sourire.
—Jenetesouhaitepasdeperdreun
jourSimon,Barney.Carquandla
personnequetuaimesmeurt,toutle
resten’aplusd’importance.Toutton
mondemeurtavec.Touts’effondreette
paraîtvide,sanssaveur,fade.Tune
calculesplusrien.Toutt’indiffère.Ton
quotidienn’apaslieud’êtrepuisqu’ilse
vivaitavectamoitié.Toutestdétruitet
tunedemandesqu’àmourirtoiaussi.
Commentenvisagerlavieavecunautre
quand,toi-même,tun’asplusvraiment
l’impressiond’êtreprésentdansce
monde?Tun’asplusdebut,plusde
projets.Iln’yaquecetamourquetului
portesquiteraccrocheàlavie,qui
demeureintact.Luireste,mêmeau-delà
detouteactiond’affection.Ilestlà,au
fonddemoncœur,ancré,imprimédans
lachair,etlefaitbattre.Maviedépend
decetamourquejeluiporteencore
aujourd’hui.Cetamourestmapromesse
devieloindelui.Cen’estpasunchoix
quedecontinueràl’aimer,justeune
évidence,
un
état
de
fait,
une
complémentarité.C’estcetamourquime
faitsurvivre,quimemaintientdebout.
Barney
regarda
Kaya
avec
stupéfaction.SametOliverétaient
gênés.SimonattrapalamaindeBarney
pourluirappelerqu’ilétaittoujourslà.
CefutEthanquirompitlesilenceense
mettantàrire.
—Ridicule!L’amour,l’amour,
toujoursl’amour!Vousmefaitesbien
riretouslestroisavecvosbeaux
discours.Cequejevois,c’estsurtout
unebelleconneriequivousconforte
dansvosbeauxsentimentsetqui
finalementvousentraînedansune
souffrancetôtoutard.Kaya,ondirait
quecetamourestdevenufinalementune
fatalitéplutôtqu’unerichesse.Bien
heureuxestceluiquinetombepas
amoureux!Santé!
Ethanlevasabièreetbutculsecle
fonddesabouteille.Oliverbaissason
regardverssonassietteavecunsourire
amer.Toujourscettefermetéfaceaux
sentiments,toujourscetterengainefaceà
l’amour.Saml’observauninstantpuis
fixaEthan.Unteldiscoursvenantdesa
partnel’étonnaitfinalementpas,
pourtantiln’approuvaitpas.Ilsavaient
certestousdeuxfaitlechoixducélibat
assuméetdesconquêtesd’unsoir,mais
ilreconnaissaitquelesentiment
amoureuxétaituneexcitationdessens
merveilleux.MaisEthan,lui,c’était
différent.Ilcroyaitdurcommeferce
qu’ildisaitetilsavaitqu’Oliveraussile
savait,àladifférencequ’ilconnaissait
lesoriginesdecetteattitude.
—Bon,assezjacassé!Passonsaux
chosessérieuses!Auxmanettes!lança
Sampourallégerl’ambiancetrop
plombéeàsongoût.UnpetitMarioKart
avantd’attaquerleshostilitésavecdes
jeuxd’équipe?
OliverpritcetteinitiativedeSam
comme
une
brise
fraîche.
Faire
diversionpournepasappesantir
davantagel’ambianceetrisquerque
cettediscussiontourneauvinaigreétait
lameilleurechoseàfaire.Ilselevaet
allaallumerlatélévision.
—Oui!Bonneidée!lançaSimon
complètementchambouléparlediscours
deKayaàlafoisbouleversant,pleinde
sincéritéetsurtoutderegrets.
—Jesuisdésolée.Jen’aijamais
jouéàunjeuvidéodemaviealorsj’ai
bienpeurd’êtreunepiètrejoueuse!
déclaraKaya,timidement.
—Jamais?!s’étonnaSimon.Mais
d’oùsors-tu?
Kayafitunsouriregêné.
—Pasgravedegagnerouperdre,
onjoue,réponditBarney.Cen’estpas
uneaffaired’État.Iln’yaqu’Ethanqui
voitçacommeunperpétueldéfi;il
pourraittuersur-le-champunamipour
gagner.
ElleregardaalorsEthanqui
l’observait.
—Iln’yapasdegentillesseetde
compassionquandonjoue.Chacun-
pour-soi.Jenevoispaspourquoion
doitfairepreuvedecompassion.C’est
leprincipedujeuetdelaconcurrence:
aufinal,ilenresteun.Lemeilleur.
Principemêmedetouslesjeux:trouver
unseulgagnant.
—Saufquepourtoi,toutestun
jeu…commentaSamblasé.Mêmele
boulot!
—Simon,tuveuxbienm’apprendre
àjouer?demandaalorsKayaavecun
petitsourireembêté.
—Avecplaisir,machérie!
Simonluiouvritlesbrasavecun
grandsourire.
—Kaya,situveuxêtresûrede
perdre,jeteconseilleeffectivement
Simon!taclaalorsOliverenlançantle
jeusurlatélé.
—Oh.
—Cen’estpasvrai!Jesuisjuste
souventendéveine!sedéfenditSimon
avecunemoueboudeuse.
—Quiestboninstructeuralors?
demanda-t-ellealors,résignée.
Touslesregardssetournèrentvers
Ethan,déjàconcentrésurlatélé,surles
starting-blocks.Ethantournaalorslatête
del’écran,comprenantqu’onattendait
sonaide.
—Certainementpas!dit-ilense
levant.
—Tueslepluspédagoguedenous
tous!lançaSamcommeargumentde
poids.
—M’enfiche!Jen’aipasenvie.
—Tupourraisfaireçaquandmême.
Aprèstout,c’esttapetiteamie…
commentaBarneyavecunregardencoin
quivoulaittoutdire.
—Cen’estpasmapetiteamie.
—C’esttoilepetitgénie!Avectoi,
elleapprendraplusvitequ’avecmoi…
déclaraSimonavecuneminetriste,mais
résolue.
—Ellen’amêmepaslepermis!
Autantapprendreàunéléphantà
conduire!Ellenesaitrienfaire.Tout
justetenirunvolant!
Kayaseraiditenfaisantun«oh»
muet.
—C’estvraiqueMonseigneurQI
120atoutd’innéchezlui.Onneluia
rienappris!luidéclara-t-ellealorsavec
véhémence.
—C’est150!Bordeldemerde!
150!Mêmeça,tun’espascapabledele
retenir!
—Jelesais!luidit-elleense
rapprochantauplusprèsdeluipourlui
faireface.Maispourmoi,tuas
l’intelligenced’unmoineau!Tuesnul!
Zéro!Nada!Tunevauxrienavectes
idéespréconçuesettesremarques
désobligeantes.D’iciunmois,tuauras
10deQI!
—Euhlesgars,j’aiunQIde110
doncj’aiuneintelligencepluspetite
qu’unmoineau?
LavoixpenaudedeSimonretentit
alors.Kayaseretournaalorsetse
morditlalèvre.
—Jenesuispasfute-futepour
certaineschoses,maislà,c’estunpeu
vache.
Kayavoulutfaireungestedepardon
verslui,maisBarneyluiposalebras
autourdesoncouetluichuchota:
—Pasgrave.Tuastoutefoisun
cœurénorme.
Illuifitunclind’œilquirassura
immédiatementSimonetfitsourire
Kaya.
—Jeteconsacredixminutes.Pas
unedeplus!
Kayaseretournaànouveauvers
Ethanquigrimaçaetserassit.
—Etdépêche-toi,avantquejene
changed’avis!
—Moijevaisfumersurlebalcon.
Barney
sortit
son
paquet
de
cigarettesdesapochedejean.
—Jeviensavectoi,Barney!lança
Oliver.
—Jecroyaisquetuavaisarrêtéde
fumeravecmoi!s’indignaEthan.
—Tumegonflesalorsilfautqueje
décompresse.
Ethangrommela.
—Jereviens!lançaSam.Brigitte
vientdem’envoyerunmessage.Son
repasdefamilles’estécourté,comme
d’habitude.Elleadûencoreseprendre
latêteaveceux.Jevaislachercher.J’en
aipourdixminutes,unquartd’heure
grandmax.
SimonregardaKayaetEthan,unpeu
gêné,puisfinalementcompritqu’ilétait
peut-êtredetrop.
—Bahmoi,jevais….allerfairela
grossecommission…
Ilseprécipitaalorsverslestoilettes
tandisqu’Ethanl’affublad’un«crétin»
doucement.IlregardaKayauninstant
puissoupira.
—Jetepréviens,tuasintérêtàbien
écouter.Jenerépéteraipasdeuxfois.
—Jesais.
—Jeseraiintransigeant,sanspitié.
C’estlereversdemonapprentissage.
—Commed’habitudequoi!
—Bon…doncneteplainspas.
—Commesij’avaisl’habitudede
metaire.
Kayaseretintderigoler.Ethanla
fixadefaçonagacée.
Toujoursaussidésinvolte!
Ilécartalesjambesetlesbras.
—Assistoidevantmoi.
Kayahésita.
—Nevapastefairedesidées,
Princesseperverse!
—Necroispasquetouttourne
autourdechosesperverseschezmoi,
connard!
Elles’assitalorssansménagement
devantlui,entresesjambes.Ilreferma
sesbrassurelleettenditlevolant
devanteux.
—Attrapelevolant.Lebutpour
l’instantn’estpasdegagner,maisde
comprendrelefonctionnementetla
sensibilitédelamanette,OK?
—OK.
Ilposaalorssesmainssurles
siennesetdémarralapartie.Il
rapprochasatêtedesonépauledroiteet
fixal’écrantoutenluiexpliquantchaque
boutondoucementdanssonoreilleetla
sensibilisantsurlaconduitedesa
voiture.Sontorsetouchaledosde
Kaya,maisilnes’entrouvapasgêné;
ellenepouvaitluifairedemaldans
cetteposition.
—Onsefoutdelavitesseetdes
concurrents.Contente-toid’avanceret
d’appréhenderlarouteetlesobstacles.
—OK,OK!lança-t-elle,chargée
d’adrénalinealorsqu’ilétaitd’uncalme
olympien.Ohbonsang,c’esttrop
bizarre!
—Regardetarouteaulieude
parler!luidit-ilalorsenluiredressant
levolantverslagauche.
—Jefaisquoi?Jefaisquoilà!La
carapace!Jevaislapercuter!Elle
arrivedroitsurmoiii!
—Lebouton!Appuiesurle
bouton!
—Quelbouton?!cria-t-elle
presque,prisedepanique.
—Tun’asrienécoutédecequeje
t’aiditaudébutsurchaquebouton?!lui
répondit-ilénervé.
Kayapoussauncricatastrophéet
fermalesyeux.Lamusiquedujeu
continual’espacedequelquessecondes
avantqu’Ethanparle.
—Putain,maisrouvretesyeux!Tu
estoujoursdanslacourse!
—Quoi!?Quoi!
—Jetel’aifaitéviter!
—C’estvrai?fit-elleavecungrand
sourire
de
reconnaissance
en
le
regardant.
—Regardetaroute,crétine!
—Oui!Pardon.
—Sijen’étaispaslà,tuseraisdéjà
dansledécor.
—Ouietbienjefaiscequeje
peux!
—Redresse!Redresse!Tuvas
tomber!
—Redressequoi?!Tomberoù?
Un«Gameover»retentit,
accompagnéd’unemusiquesignalantle
glas,letrépas.
—Bah!Jesuistombéedans
l’eau?!
—Évidemmentquandonconduitles
yeuxfermésouqu’onregardeailleurs!
Illuiassénaunetapesurlatête.
—Non,maisçanevapas?!Çafait
mal!pesta-t-ellealors.
—Jet’aiditquejeseraisanspitié.
Recommence.
Tousdeuxseremirentenposition,
lesbrasd’EthanentourantKayaetses
mainssurlessiennes,poséessurle
volant.
—Ondéstresse.Onseconcentreet
onressentlaroute.Ilfautanticiperles
viragesenregardantlarouteàl’horizon.
—Commeça?
Ethanlâchatoutdoucementses
mainspourlalaissergérerseule.
—Qu’est-cequetufais?!demanda-
t-elledenouveau,prisedepanique.Ne
melâchepas!
—Concentre-toisurlaroute.C’est
bien.Jesuislà.
—Non,tum’asabandonnée!
—Nepaniquepas!Regardeles
obstacles.N’oubliepasqu’onestdans
lamêmevoiture.Jesuislà.Jesuiston
passager.
—Unpassagerestàcôté!Pas
derrière!
—Tuesmonchauffeuretjesuis
Prince.Çateva?
—Danscecas,jepeuxmeplanter
dansledécor!
—Faisçaettuprendsuneclaque
plusfortequelapremière.Àtoide
voir…
—Connard!
—Tais-toietconcentre-toi.Prends
l’étoileavecleboutondesaccessoires.
Tuirasplusviteettupeuxdégommerce
quetuveux.
—Youhou!Tropgénial!Tuasvu,
j’airattrapéunevoitureetjel’aienvoyé
valser!
Kayasemitàrire.Ethanlaregarda
uninstant,concentréesursonjeu.Il
pouvaithumerl’odeurdeshampooing
quisedégageaitdesescheveux.Ilavait
enviedelescaresser,passersesdoigts
entre,pourlescoiffer,lesdiscipliner.
Kayasentaitbonlapêcheoul’abricot.
C’étaitlapremièrefoisqu’illavoyait
avecsescheveuxdétachés.Ilsétaient
longsetsoyeux,arrivantàmi-dos.Il
avaitenviedelataquinerencoreen
passantsonindexdanslecreuxdeson
coupourqu’ellesetordesousla
chatouille.Maisils’abstint.
—Ohbonsang!J’ysuisarrivée!
J’aifinileparcours!
Kayafitalorsunbondducanapé,
complètementeuphorique,avantdelui
ressauterdessusetsemettreà
califourchonsurluipourleserrerdans
sesbras.Ethanrestatétanisé.Prisentre
lasurprise,sajoiecommunicativeetle
côtéincongrudelasituation,ilreferma
toutefoissesbras.
—Bravo.Maisilyaencoredu
travailavantquetusoismonbinôme
dansd’autresjeux.
Kayaseredressapourluidemander
àqueljeuilspouvaientêtreenbinôme,
maisBarneyetOliverrentrèrentdu
balcon.
—Etbienjevoisqueleschoses
arriventvitedansl’apprentissage!
déclaraOliveravecunregardcomplice
àBarney.
Kayaserelevaaussitôt,rougede
honte,
en
réalisant
sa
position
équivoque.Ethansecontentadesourire.
—Vousl’avezditvous-même:je
suisunbonpédagogue.
Kayaattrapaunenouvellefoisle
coussinpourluibalancerdanslafigure.
—Faisonsunepartiel’uncontre
l’autrequejet’explosetafacedebon
pédagoguepédant,Princeconnard!
—Effectivement,lançaBarney.Les
chosess’améliorent!
-3-
Embellissant
Ethan,allongésurlecanapédeson
salon,essayaitdeseconcentrersurun
desesdossiers,maissonattentionn’y
étaitpas.Elleétaitportéesurlaportede
lachambrequijouxtaitlacuisine:celle
deKaya.Ilétaitneufheurestrenteetelle
dormaittoujours.
Quellefeignasse!
Ilsoupirauncouppuisfinalement
balançasondossiersurlapetitetable,et
seleva,l’airdéterminé.Ilallaseposter
devantlaportepuis,d’ungestesec,
l’ouvrit.
—Deboutlà-dedans!Allez,
feignasse!
Ilattrapalacouettequirecouvraitla
jeunefemme,latiraafindelasortirde
soncocondouillet.Lasurprisequ’il
comptaitluiaffligerenlaissantpasser
l’airfraissursoncorpsluirevinten
pleineface,telunboomerang.Ilreposa
aussivitelacouverturesurKaya,pris
paruneénormegênedevantcequ’il
venaitdevoir:Kayaétaitenpetite
culotte,lesjambesnues.
Elleaenlevésonpantalonpendant
lanuit?
Kayagrommela,secachantsousson
oreiller.Ethanlaregardauninstant,ne
sachantquoifaire.Ilétaitpartagéentre
sonmalaisequinesemblaitpasavoir
affectéKayaplusqueça,l’enviedelui
gueulerdessus,maisaussideriredevant
soncôtémignon,àserenfrogner.Ilse
donnaunepetitetapesurlajouepourse
ressaisiretdécidad’ouvrirsesvolets
pourlaisserlesoleilentrer.Kayarâlaà
nouveau,sonsommeilperturbéparla
lumièreaveuglantedumatin.Elle
n’avaitpasdormicommeçadepuis
longtemps.
—Éteinslalumière!marmonna-t-
ellealorsqu’ils’attaquaitmaintenantà
soncoussin.
—Debout!Ilestneufheureset
demie.Tuasassezdormi.Jenepaiepas
unelarvequibavesurmonlit!
—Jenebavepas!Fous-moila
paix!gémit-elleententantdelefrapper
d’unemain,envain.
—Lève-toi!Onadeschosesà
faire.
Ethanluiattrapasamainvengeresse
etlabloqua.
—Pasenvie!luidéclara-t-elle
sèchementtoutenserecroquevillantun
peuplusdanssesdraps.
Ilplissadesyeux,peuenclinà
accepterunrefus.
—KayaLévy,Princessefeignasse,
nem’obligezpasàemployerlesgrands
moyens.
Kayaneréponditrien,àsongrand
étonnement,nimêmenerigoladevantsa
menacecommeelleavaitl’habitudede
lefaire.Ilfutaccueilliparungeste
allantfinalementau-delàdetoute
provocation:ellelevasasecondemain
puisdressasonmajeurcommeseule
réponseàsarequête.Ethanbaissalatête
etsourit,sidéréparl’aplombdelajeune
femmequiallaittoujoursplusloindans
leconflit.
Évidemment,jenel’aipasencore
eucelui-là,celanepouvaitqu’arriver!
Pluspercutantqu’ungloussementou
unhaussementd’épaules,forcément…
Onvatoujourscrescendoavecelle!
—OK,Princesseimpolie.J’aides
projetsetjenesuispasd’humeur
donc…
Kayaouvritunœilpourvoirquelle
seraitlasuitedu«donc»etnefutpas
auboutdesessurprises.Ethans’assit
surlelit,ungrandsourirevengeursurle
visage,etcommençaàl’enroulerdans
sacouettesibienquesesmembresse
retrouvèrentcoincésdedans.Cefut
l’élémentdécisifquil’obligeaàsortir
desasemi-léthargieetàouvrirlesdeux
yeuxcomplètement.Elletentade
s’extirperdesonemprise,maislaforce
etladéterminationdontfaisaitpreuve
Ethanfurentplusconvaincantes.Illa
souleva,capitonnéedanssacouverture,
puislaportajusqu’àlasalledebainen
tentantdegardersonairgraveetnonde
rigoler,alorsqu’ellehurlaitdes
«repose-moi!Jemelève!C’estbon!
Jemelève!».Ilouvritlerobinetdela
doucheetlaglissasouslepommeau.
Kayahurlaànouveau,cettefois-ciparce
quel’eaugelées’immisçaitsousla
couetteetàtraverssonsweat.Ethan
s’endonnaàcœurjoie.Plusellecriait
«jetedéteste!»,plusilpoussaitle
viceenbaissantlatempératuredel’eau.
Bientôt,elleseretrouvacomplètement
trempéeetneputqueserésoudreà
encaisserlasentenceduconnarden
puissancequ’étaitsonpseudopetitami.
Ethancoupal’arrivéed’eauaubout
dequelquesminutes.Ilavaitétéaussià
moitiémouilléparl’agitationdeKaya,
maisils’enfichait.Iltenaitenfinsa
vengeance.Unevengeanceàlaquelle
ellen’avaitpurépondre.Unevraie
vengeance!Ilsecouasesmainspour
faire
tomber
les
gouttelettes
récalcitrantes,unsourireéclatantsurson
visage,enparfaitcontrastedevantle
manquedejoiedesonennemie.Ellene
disaitrien,maislefusillaitduregard.La
couverturesedesserraalorsetKayaput
s’endéfaire.Elletombaàsespiedsetse
retrouvaànouveauenpetiteculotte
devantEthan.Elles’encontrefichait.
Elleétaitsurtoutgeléeetnesouhaitait
qu’unechose:seréchauffer.Elleretira
sonpull,maisgardasont-shirt,puis
rallumaladouchepourmieuxressentir
l’eaubrûlantesurlecorps.Ethanla
regardafaire.Ilnepouvaits’en
empêcher.
Ilfixaitsapetiteculotteendentelle
bleuclairtoutàfaitmignonne.Kayalui
tournaledospourmieuxapprécierla
chaleurquisortaitdupommeaude
douche.Sont-shirtcollaitcontresa
poitrine.Elleavançasesdeuxmains
devantellepouraccueillirl’eauqui
tombaittandisqu’ilbaissaitdecôtésa
têtepourmatersesfessesqueladentelle
caressait
de
façon
légère.
Les
gémissementsdesoulagementqu’elle
émettaitàretrouverunpeudechaleur
faisaientéchoàceuxdedésirqui
restaientcoincésdanslagorged’Ethan.
Ellesetournaversluiànouveau,
obligeantEthanàquitterdesyeuxson
objetdeconvoitisepournepaspasser
pourunpervers.Ilputalorsobserver
partransparencelesoutien-gorgequi
allaitaveclapetiteculotte.Ilrepensa
instantanémentàlasoiréeduSilkyClub
etàsesmainssursontéton.Ildéglutiten
s’imaginantrecommencer.Ellestoppala
doucheetsepostajusteàcôtédelui,
sansdireunmot.Elleattrapasa
servietteetseséchadumieuxqu’elle
put.
—C’estbon?!Jepeuxallerme
recouchermaintenantqueMonsieura
faitsamauvaiseplaisanterie?luidit-
ellefinalementsuruntonsarcastique.
Ethansetrouvainstantanémentface
àlaréalité.Siluiétaitàdixlieuesdece
réveilforcé,Kaya,elle,étaitloinde
l’avoiroublié.
—Ahah!Trèsdrôle!Osepour
voir!Tul’ascherché!Cen’estque
justiceaprèscequetum’asfaitsubir
depuishier.
Elleleregarda,surprise.
—Qu’est-cequej’aifaitdemal
hier?
—Tuosesmedireça!?luidit-il
estomaqué.Ahoui!C’estvrai!
Mademoisellenesesouvientpas!Suis-
jebête?Commentpouvait-ellese
rappelerquoiquecesoitvuqu’elle
s’estendormiesurmoi!
Kayaécarquillalesyeux.Elle
essayadesesouvenirdelafinde
soirée,maisdutserendreàl’évidence:
c’étaitletrounoir.Ellesemorditla
lèvreetpestacontreelle-même.
—J’ai….vraimentfaitça?fit-elle
alorsd’unepetitevoix,honteuse.
—Etcomment!J’aieuledroità
dessouriresdeconnivencedetoutle
mondejusqu’àcequ’ilspartent!Queje
tegardedansmesbras,c’estunechose;
onn’avaitpasdeplacepourtousjouer
enmêmetempsprèsdelatélé.Maisde
lààcequetut’assoupisses!Fautle
faire!
Kayatortillasesdoigtsdanssa
serviette,pleinederemords.Ellese
souvenaitdel’arrivéedeBrigitte,du
problèmedunombredemanettespar
rapportaunombredeparticipants.Elle
serappelaqu’elleavaitlaissélesautres
jouer,qu’Ethanenavaitfaitdemêmeet
après,plusrien.
—Désolée,luidit-ellepenaude.
—Tupeuxl’être!Lesgarsm’ont
chambréjusqu’àladernièreminute.Je
nepouvaismêmepasbougerpourles
raccompagnerjusqu’àlaporte!Etle
piredanstoutça,c’estquemalgréle
connardquejesuis,j’aiétéassez
gentlemanpourteporterjusqu’àtonlit
sansteréveiller.
—Oh.
—Unmerciseraitmieuxqu’un
«oh»!
Ethanfermalesyeuxuninstantet
soupira.
—Etpuisnonçava,jenemesuis
pasfaituntourdereinàtitreindicatif…
Mince!Onauraitvuenfinquelque
chosededrôle!
—Vat’habiller,onvaàAbberline
Cosmetics.
—Pourquoifaire?
—Pourchangercertaineschoses!
J’aivuunehorreurcematinenallantà
lasalledebains.Untrucquim’a
bousillélesyeux.
Kayaleregardasanscomprendre.Il
attrapaalorssatroussedemaquillageet
ensortitlesboutsdecrayonsetle
mascaraséché.
—Tuteprétendsêtrelapetiteamie
duroidumaquillageettutebalades
avecces….
Ilobservaavecdégoûtlesrognures
demaquillage.
—Tuesvraimentlediable.Me
dévaloriserdelasorte.Onnepouvait
pasfairepire!
Iljetasatroussedanslapoubelleet
sortitdelasalledebainengrommelant
un«etaprèsons’étonnequejesoisde
mauvaisehumeur…».
KayaetEthandébarquèrentune
heureplustarddansl’entreprise.Ilne
l’emmenapasdanssonbureau,nimême
danstouslesautresbureaux.Illa
conduisitàlaboutiqueofficielleoùles
clientspeuventtesteretacheterle
maquillage.EthantenaitlamaindeKaya
fermement.Ilétaitencored’humeur
boudeuseetellepouvaitsentirson
agacementrienqu’àlamanièredontilla
tiraàdroiteetàgaucheàtraversles
rayons.
Toutes
les
vendeuses
se
précipitèrentverslui.Ellessemblaient
toutes
ravies
de
le
voir.
Leur
professionnalismeavaitsoudainement
faitplaceàunesorted’admirationquifit
rirejaunelajeunefemme.
Encoredesgroupiesaveugles!
—MonsieurAbberline,bonjour.
Raviedevousaccueillirici.Enquoi
puis-jevousêtreutile?
Cellequisemblaêtrelachefdu
magasinluilançaunregardmielleuxqui
écœurapresqueKaya.Elleluimangeait
danslamain.C’étaitsonpatron,elle
pouvaitcomprendresaferveur.Mais
elleaffichaitaussiunairaffectueuxun
peutropdéplacéàsongoût.
Elleacouchéavecluiouquoi?
Ethanfitunrapidetourdumagasin
desyeuxpourvoirl’étatgénéraldu
pointventepuis,sansriendire,se
dirigeaversl’ateliermaquillage.Sans
mêmeunmot,nimêmeunregard
bienveillantenverssesemployées,il
posasesmainssursesépaulesetexerça
unepressionverslebaspourqu’elle
s’assoiesurletabouret.Puisil
commençaàarpenterseullesrayons.
Kayaleregardafaireavecsuspicion.
Àquoiest-cequ’iljoue?
Lesemployéesn’osèrentfairequoi
quecesoitquiauraitpulecontrarier.
Ellesétaientdansl’attented’une
éventuelleréprimandesurleurtravail.
Pourtant,quandEthancommençaà
choisircertainsfardsàpaupières,
crayons,eye-liner,lachefsedétenditet
allalerejoindre.Ellesepostaàcôtéde
luietleregardafaireavecadmiration.Il
prenaitletempsdebienexaminer
chaquecouleur,chaqueteinte.Illevaitla
têtedetempsentempspourlaisserson
regarddanslevague,montrantqu’ilétait
enpleineréflexion.Puisiltraversaità
nouveaulesrayons,reposantcertains
accessoires,enprenantd’autres.Son
manègeintrigualesvendeusesqui
n’osèrentbouger.Lacheflesuivaitdans
sesavancéesensilence,maisKayaput
observerquel’admirationqu’elleavait
vueaudébutavaitlégèrementchangé.
Ellel’admiraitnonpluspourson
physique,maispoursonœilde
professionnel.Ellesouriaitmême!Un
sourireravi,commesielleétaitdevant
quelquechosed’exceptionnel.Kaya
observaànouveauEthanquiregardait
lesmascaras.Ellenedoutaitpasdeson
talentd’hommesd’affaires,maisne
comprenaitpaspourquoiilnedemandait
pasconseilàlachef,toutsimplement.
—Préparez-moicettejeunefemme,
Élisabeth,s’ilvousplaît.
Lachefsepenchalégèrement.
—Toutdesuite,Monsieur.
CettedernièrerejoignitKayaet
l’exhortaàretirersonmanteau,puisà
mettreuntablier,commechezle
coiffeur.Elles’assuraensuitequeson
visageétaitàdécouvert,qu’aucune
mèchenepourraitgênerletravail.
—Élisabeth,quevoulez-vousque
l’onfassependantquevousla
maquillez?demandaunedesvendeuses.
—Riendutout,Sarah.Jevaisfaire
commevousetregarderavecattention.
Cequevousallezvoirestànotersur
votrecalendrierd’unecroixrouge,tant
vousneleverrezpassouvent.
Elleleursouritavecbienveillanceet
ravissement.Lesdeuxvendeusesfurent
perplexesdevantlesproposdeleur
chef.Ethanarriva,unpetitpanieràla
main,remplidemaquillagesentout
genre.Kayalouchasurlecontenudece
dernieraveccirconspection.N’ayant
jamaiseuautantdemaquillageensa
possession,ellesedemandaitàquoi
servaientlaplupartd’entreeux.Ethan
retirasonmanteauetsavestede
costumepuiss’assitfaceàKaya.Ilnela
regardapasuneseulefois,apparemment
trèsconcentréàenleverl’operculede
plastiquecouvrantchaqueaccessoire.
—Tusais,jen’aipasbesoindetous
ces…trucs!luidit-ellevraimentgênée
ethésitantesurlecomportementà
adopter.
—Tais-toietnebougepas…
—Pourquoi?
Ellen’eutpasderéponse.Illui
attrapasonmentondesamaingaucheet
commençaàluinettoyerlevisageavec
unelotionetuncotonquisetrouvaitsur
l’établi
de
maquillage.
Kaya
fut
surprise.
—Que…qu’est-cequetufais?
Ethanneluiréponditpas.Il
examinait
minutieusement
chaque
parcelledepeauqu’ilnettoyait.
—Ethan!Jepeuxlefaire!Jen’ai
pasbesoind’unchaperon!
Ellerepoussasamain,l’airunpeu
fâché.
—Jen’aipeut-êtrepasun
maquillageclinquantdansmatrousse,
maisjesaisencorememaquiller!Jene
suispasunegamine.
Ethanfronçalessourcils.
—Tudoutesdurésultatquejepeux
apporteràtonvisage?luidemanda-t-il
debutenblanc.
Kayafutétonnée.
—Évidemment!Tuvasmefaireun
visagedeclown!Jecommenceà
connaîtrel’hommeenfacedemoi!
Élisabethtoussotapourinterférer.
—Mademoiselle,sansvouloirvous
offenser,vousêtesentredebonnes
mains.Jediraimêmequevousnevous
rendezpascomptedevotreprivilège.
Kayajaugealachefuninstant.Elle
necomprenaitpassespropos.
—Unprivilège?
Depuisquandunconnardaccorde
desprivilèges?
Ellevoulutrigoler,maisleregard
noirqueluijetaEthanl’obligeaà
étouffersonriredanssagorge.Elleétait
sapetiteamieetelleavaittendanceà
oublierdejouersonrôle.Ellesoupira.
—OK,OK!Jen’airiendit!Fais-
moitespeinturesdeguerresurle
visage!
Ethancroisalesbras,visiblement
encoreplusagacéparsonmanquede
reconnaissance.
—Jeveuxbienêtrevolontairesi
vouslesouhaitez,Monsieur!ditalorsla
secondevendeuse,heureusedeservirde
cobaye.
—Julie,MonsieurAbberlinen’a
pasbesoindetoi.
Élisabethétouffadansl’œuftoute
envieàJuliedepouvoirserapprocher
desonpatron.
—Ilnemaquillepasn’importequi.
Ilnemaquilleplusdepuislongtemps,je
diraismême.S’ildécidedes’occuper
decettejeunefemme,cen’estpas
anodin.Tais-toietregardeplutôtsa
pratique.Ilaétémaquilleurpourdes
personnescélèbresavantdemonter
AbberlineCosmetics.Tonpatronsait
toutsurlafaçond’embellirunefemme.
Siaujourd’hui,tuascettechancedele
voir
faire,
alors
profites-en.
Ne
commentesurtoutpas!
Juliereculad’unpasetacquiesça
silencieusementtandisqueKayaregarda
maintenantEthancommeunebête
curieuse.
—
Tu
as
été
maquilleurprofessionnel?répéta-t-elle
avecstupeurpours’assurerqu’elleavait
bienentendu.
—Oui.Onpeutreprendre?
—Longtemps?
—Qu’est-cequeçapeutfaire?
—MonsieurAbberlineaétéle
maquilleurdenombreusesmannequins,
chanteusesetactricespendanttroisans!
déclaraavecfiertéSarah.
Ethanjetaunregardemplidecolère
àSarahquivenaitdeletrahir.Celle-ci
compritquesonenthousiasmevenaitde
lui
portait
préjudice.
Elle
se
recroquevillasurelle-même,désolée.
KayaobservaEthanavecahurissement.
Celui-cin’avaitpasdécroisésesbraset
attendaitsonapprobation.Elleapprocha
sonvisagedusienpourmieuxvoirdans
sesyeuxlasincéritédesesintentions.
Ethanfutétonnéparsongesteetfronça
unenouvellefoislessourcils.Kayafixa
intensémentsesyeux,cherchantlavérité
oulablagueaufonddesespupilles.
Finalement,ellesereculaunpeuet
déclarasasentence.
—OK,maquille-moi!Jem’en
fiche…Situmeridiculises,tu
ridiculisestapetiteamiedonctute
ridiculisesaussidevanttesemployées.
Tun’enviendraispasàcegenre
d’erreur,n’est-cepas?
Kayaluisouritavecunairdedéfi.
Ethandécroisasesbras.Ilattrapale
morceaudecotonqu’ilavaitposésur
l’établietrepritsontravail.Ilvoulut
gardersonsérieux,maisilétaitcontent.
Elleavaitaffirméqu’elleétaitsapetite
amiedevantsesemployées.Elle
commençaitàrentrerdanslejeuet
accepterlesrèglesquecemêmejeu
imposaitàchacund’eux.Illuisourit
quandilpassalecotonsursabouche
puisydéposaunpetitbaiserquifit
rougirinvolontairementlajeunefemme.
Lesvendeusessemirentàsouriredevant
cetactesimignondeleurpatron.C’était
sansdoutelapremièrefoisqu’il
montraituntelgested’affectiondevant
elles.
—Héééé!seplaignitKaya,rouge
dehonte.
—Quoi?
—Ça,cen’étaitpasobligé!
—Jem’assuraisdeladouceurde
teslèvrespourlerougeàlèvres!lui
répondit-ilfaussementinnocent.
—
Et
tu
faisais
ça
systématiquementaveclesfemmesque
tumaquillais?Charlatan!
—Plains-toi!Tuverras!Aprèsça,
tumeremercieras.
Kayabougonnapourlaforme.
Iln’amêmepascontreditma
remarque!Casanovadepacotille!
C’étaitjustepourmeprovoquer…
encore!
Pourtant,elledevaitadmettrequ’il
mettaitducœuràl’ouvrage.Ellen’osait
bougeretrépondaitàsesordressans
sourciller.Lamanièredontilla
regardaitladéstabilisaitautantqu’elle
lafascinait.Illaregardaitsanslavoir.Il
étaitabsorbéàsontravail.Examinant,
fixant,jugeant,testant…Ellecernade
plusenplusleprofessionnelqui
exprimaitsontalent.
SilevisagedeKayaétaitleterrain
dejeud’Ethan,celuid’Ethandevenait
aussilesieninvolontairement.Elleprit
letempsdelescrutersoustousles
angles.Ilnes’enrendaitpascompte,
tropobnubiléparlerésultatqu’iltentait
d’obtenir.Pourtant,elleputlevoirde
près,commelorsdeleurpetiteincartade
danslesvestiaires.Voirsesprunelles
marronchocolatquibougeaientselon
sesgestesétaitfascinant.Leursteintes
variaientselonl’éclairagedelasalle.
Puiselles’intéressaàsapetitecicatrice
àl’arcadesourcilièrequiluidonnaitce
côtérebelle.Elles’amusaàfairedes
hypothèsessursonorigine:avait-elle
étéfaitelorsdesonenfance?En
glissantdesasuperbaignoiredeson
appartement?L’issued’unebagarreà
laquelleilavaitprispart,commeelle
pouvaitl’imagineraprèsl’avoirvuà
l’œuvreauSilkyClub?Ellenerata
aucundétail:front,tempes,joues,
menton,lèvres.
Regarderseslèvreslamettaitmalà
l’aise.Ellerepensaàleursbaisers.Elle
lesavaitencoretouchéesquelques
minutesauparavantetpourtant,sila
premièrefoiselleavaitététrèsen
colère,elleadmettaitmaintenantqu’elle
objectaitpluspourlaforme.Seslèvres
n’étaientpasdéplaisantesensoi.Plutôt
doucesmême,aveccettefermetémalgré
toutquirassure.Deslèvresqui
conquièrentunterritoireinterdit,qui
s’imposentàvoussanscriergare,mais
quivouslaissentpantoise,surlatouche
dèsqu’elless’éloignent.Ellesvous
laissentcesentimentd’amertume,faitdu
«non,commentose-t-il?!»etensuite
du«pourquoipart-il?».Deslèvresqui
reflètentleparadoxemêmequ’estcet
homme:unconnardauxallurespouvant
finalementvousémouvoir.
Kayacommençaàrougirànouveau
etvoulutprendredeladistance.Ethan
perditalorssaconcentration,son
modèlefaisantdessiennes.Ill’observa
vraimentcettefois,d’abordagacé,puis
surpris
de
voir
qu’elle
semblait
embarrassée.Ilcherchaàcomprendre.
Ellerougissaitetn’osaitleregarder
vraiment.Ilcompritalorsquecette
positionface-à-faceenétaitsansdoute
lacause.
—Mademoiselleveutfaireune
pause?Mademoiselleachaud?luidit-
ilavecunairmoqueur.
—Non,çava…luirépondit-elle
confuse.
—OK,alorsfermelesyeux.On
passeauxpaupières.
Kayaleconsidérauninstant.Elle
savaitquesaremarquesurson
comportementcachaitunetaquinerie
qu’ilpouvaitaccentuersansproblème.
—Pasd’entourloupes!Attention!
—Grrrquelleprincessemenaçante!
luidit-ilalorspresqueenrigolant.
Lesvendeusessemirentàrireaussi.
EthanetKayaréalisèrentànouveau
qu’ilsn’étaientpasseulsetKayas’en
trouvaencoreplushonteuse.
Ont-ellesremarquémontrouble?
Ellecommençaalorsàs’inquiéteret
àgesticulersursontabouret,cherchant
uneéchappatoire.Quelquechosequi
pourraitlasortirdecetembarrasquine
laquittaitpasetquicommençaità
sérieusementl’agacer.
Pourquoijeflippecommeça!
Merde!Reprends-toiKaya!
EthanconstataqueKayaavaitperdu
desonassurance.Sontroubleselisait
danssonattitude.Quelquechosela
mettaitmalàl’aiseetildevinasans
peinequesesemployéesnedevaientpas
arrangercettesituation:elleluifaisait
enfinconfianceetellevenaitdemontrer
safragilité.
—Élisabeth,veuilleznouslaisser
seulss’ilvousplaît.
Élisabeths’étonnadesoninjonction.
Elles’exécutacependantetinvitales
vendeusesàvérifierlavitrinedel’autre
côtédumagasin.Kayasesentitencore
plusalarmée.Unstressqu’elletentade
maîtriser,maisdontellenetrouvaitpas
deréelleexplication.Ethanposases
accessoiresetsoupiraenattendantque
lesfillessoientàbonnedistance.Ilse
penchaalorsverselle.
—Quelestleproblème?lui
chuchota-t-il.
Kayasemorditlalèvre,encoreplus
gênée.
—Rien.Riendutout!
Ethannefutpasconvaincuet
continuaàl’observerpourcernerlevrai
dufaux.
—Arrêtedemeregardercomme
ça!Toutvabien,jetedis!Reprends.
—Sûre?
—Sûre!fit-elleavecunsignede
mainlepoussantàcontinuer.
—Alors,arrêtederougir!Çava
gâchermontravailsurlateinteà
adopter!
Kayas’immobilisaetlefixad’unair
d’abordcoupable,puisméprisant.Ilse
mitàrireetattrapaunpinceau.Ellele
tapaalorsàl’épaule.C’étaitplusfort
qu’elle.Ill’agaçaitaupointqu’elle
voulûtluirendreaucentupleson
agacement.Ethaneutlaréactioninverse
etsemitàriredeplusbelletouten
essayantdecontrersespetitesattaques.
—Iln’yaquelavéritéquifâche!
luidit-iltoutsourire.
—Jenesuispasfâchéeetiln’ya
pasdevérité!
—Maisoui,c’estça!Avouequeça
teplaîtqu’unhommetemaquille!T’es
bienunefemmefinalement!
—Biensûrquejesuisunefemme!
Tumeprendspourquoi?!Non!Jene
veuxmêmepassavoiràquoisongeton
QIdeconnard!
Ethantentadecalmersacrisede
rire.Kayaleregardaentraind’essayer
dereprendresaconcentrationet
finalementlaissaéchapper,elleaussi,un
sourire.
—Çavamieux?Onreprend?lui
dit-ilplusapaiséluiaussi.
—Jen’attendsquetoi!
Ethansemitàsourireànouveau.
Unephrasebienjoliepourl’homme
qu’ilétait,mêmesielleledisaitavec
unedérisioncertaine.
—OK,tuverras,ceseraplus
simple.Lesyeuxfermés,tun’auraspas
desenviesderougirdevantmon
magnifiquevisage!
—Ethaaannnnn!
—Ouiiiii!«Jetedéteste»!Je
sais!
-4-
Déstabilisant
—Alors?C’estbon?Çadonne
quoi?
EthanfixaitKayademanière
incertaine.Ilvenaitdeposertousles
accessoiresetobservermaintenantson
visageavecminutie.Sonregard
cherchaitdesréponsesetKayatentade
lestrouveraveclui.
—Tuasfiniouiounon?
—Oui…
—Faisvoir!
Lajeunefemmeseprécipitasurun
petitmiroirsetrouvantnonloindelà,
surl’établi.Ellerestafigéedevantson
refletquelquessecondes.Ethanla
regardafaire,attendantsonapprobation.
Ellerelevafinalementlesyeuxverslui,
interdite.
—Waouh.Impressionnant.C’est…
impressionnant…Pasd’autresmots.
Ellen’osasetoucherlevisage,mais
tournaitsatêtededroiteàgauchepour
voirlesrefletsdumaquillagesursa
peau.L’aspectnet,impeccablequien
ressortaitluidonnaitl’impressiond’être
unefemmed’unautremonde,d’êtreune
decesstarsmagnifiquesquidégagentun
charisme
insoupçonné,
une
beauté
particulière.Ellesevoyaitautre,mais
belle.Trèsbelle.Ellen’auraitmêmepas
imaginésetrouversijolieunjour.
Ellen’avaitjamaisvraimentcruen
sabeauté,mêmesiAdamluirépétait
sanscesse.Pourtant,faceàcemiroir,
elleneputquesourire.Ellesetrouva
mêmeémue.C’étaitunechosesi
impensablequ’unefemmecommeelle
puisseavoirunetellechance.Ellequi
n’avaitmêmepasassezd’argentpour
allersefairecouperlescheveuxchezun
coiffeur,sevoyaitavecunmaquillage
professionnel.
ElleregardaànouveauEthan.Ilput
ylireunmercimuetdesapart.Sesyeux
brillaientd’unefaçonrare.Desyeux
qu’ilavaiteuenviedefaireressortirde
laplusbellemanièrequisoit,quandil
avaitpulesvoirdeprèsdansles
vestiairesduSilkyClub.Voirce
mélangedemarronetdevertéblouirson
visageetvoussaisiraupointdeneplus
vouloirvousenséparer,etdeles
contemplerencoreetencore.Ilavaitses
yeuxmagnifiquesdevantluietilsétaient
d’unedouceuràsonégardqu’ilavaitdu
malàaccepter.Unereconnaissancequ’il
n’estimaitpasmériter.
—Çateva?luidit-ilunpeu
froidement.Onyva?
Kayareposalemiroir,unpeu
surpriseparsonattitudetoutàcoupplus
fermée.
—Oui…merci.C’esttrèsjoli.
—Parfait…alors,partons.
Illuiretirasontablieretluijetason
manteaupresqueàlafigure,puisenfila
lesien.Ellelepassasursesépaules
lentement,essayantdecomprendre
pourquoiilétaitmoinsaffable,plus
distant.Illuiattrapaalorslepoignet
sansplusdeconsidération.Kayapoussa
unpetitcridesurprisedevantson
entrainàquitterleslieuxsivite.Les
vendeusesetÉlisabeth,setrouvantà
l’entrée,
regardèrent
Kaya
avec
émerveillement.
—Vousêtes…magnifique!luidit
lachef.OnvoitqueMonsieurAbberline
n’arienperdudesontalent.Vousêtes
uneautrefemme!
—Merci,secontenta-t-ellededire
unpeugênéepartantdecompliments.
—MonsieurAbberline,vousavez
faituntravailsuperbe!seprécipitade
direJulie.
—Voustrouvez?!Vousavezalors
encorebeaucoupàapprendre.Élisabeth,
veuillezm’envoyerlepanierde
maquillageàmondomiciles’ilvous
plaît.Onyva,Kaya.
Julieserecroquevillaunenouvelle
foissurelle-même,peinéeparla
réprimandedesonpatron.Élisabethfut
elle-mêmesurpriseparlaprécipitation
etlafermetédontilfaisaitpreuve.Elle
opinadelatêteetfrottaledosdesa
protégéepourlaconsolertandisquele
couplequittaitlaboutique.Kayase
faisaittraînerparEthandanslarue
bondéedepassantsencettefinde
matinée,ententantdecomprendre
pourquoiilavaitétéaussidésobligeant.
Elleregardaitsondos,droitetsolide
commeunemuraille,sefrayaitun
chemin.Etluinelaregardaitpas.Ilétait
pourtantproched’elle,maisdistantdans
sonattitude.
C’estquoisonproblème?
Ellesoupiraettirauncoupsecpour
qu’Ethanlâchesonpoignetets’arrête.Il
setournaverselle,l’airinterrogateur.
—Pourquoifais-tulatronche?
Ethanl’observauninstant.
—Jenefaispas«latronche»,j’ai
justedeschosesàfaire.
—Pourquoituluiasditqu’elle
avaitbeaucoupàapprendre?Jecroyais
quetuétaisunpro?Etpourtant,tu
réagiscommesituétaispeuconvaincu
durésultat.Jesuissimochequeça?
—Tuescontentedurésultat,non?
—Oui!Très!
—Alors,c’estleprincipal.En
route!
Illuiattrapaànouveaulamainetfit
troispasavantqueKayanel’arrêteà
nouveau.
—Pourquoitoi,n’es-tupascontent
durésultat?C’esttoiquivoulaisme
maquiller.Jen’airiendemandé.Qu’est-
cequineteplaîtpas?Qu’est-cequine
vapassurmonvisage?
Ethansoupiraetlevalesyeux,ce
quiblessaencoreplusKaya.
—Pourquoimelaisses-tusortir
commeçasiçanevapas?Finalement,
tuvoulaisbienmeridiculiser…
Lesderniersmotsdelajeunefemme
seperdirentdanssagorge,lapeinela
submergeant.Ethans’agaçadavantage
ensoupirantcommeunbuffleet
grognant.Sonattitudevexalajeune
femmequiavaitl’impressiond’être
prisevraimentpouruneidiote.
—Connard…J’enaimarre!Je
rentre!Passeunbonaprès-midi,seul,
avectonmachiavélismeàdeuxballes.
Ellefitdemi-tour,laissantson
partenaired’infortunederrièreelle.
Ethans’attrapalescheveux,contrarié.
Merde,merde,MERDE!Ellese
barrevraiment!
—Çan’arienàvoiravectoi…
c’estmoi!fit-ilalorsdansla
précipitation.
Kayas’arrêta,maisgardasespoings
serrésparsonagacement.
—Commentça?luidemanda-t-elle,
perplexe.
—Laissetomber!Cen’estrien.
—Non!Jeveuxsavoir!lui
ordonna-t-ellepresque,toutense
retournant.Sijesuismoche,onenlève
tout!
—Tun’espasmoche!Arrête!Mon
travailnepouvaitêtremieuxfait….
enfinjecrois.
—Bonetbienoùestleproblème?
Désoléedenepasêtremannequin!
—Çan’arienàvoir!J’aifaitce
quej’aivoulu,maisjustement,ondirait
tropunefillequifaitlacouverturedes
magazines.Voilà!
Kayaécarquillalesyeuxetsemità
sourire.Ethanétaitembarrassé.C’était
commesionluiavaitarrachédesmots
desabouchequ’ilvoulaitgarder
secrets.Ellesesentittoutàcoupunpeu
plusestiméeetdoncsoulagée.Illui
faisaitfinalementunbeaucompliment.
—Tuesentraindemedireque
finalementjesuisaussijoliequ’untop
modèle?
—Nonjedisjusteque….que…
—Quequoi?
—Bonsang,cequetupeuxêtre
agaçanteàvouloirinsister!Jepréfèrete
voirsanstouscesartifices.Tuesplus
jolieaunaturel!Contente?!Çan’est
pastoi!QuandÉlisabethaditqu’elle
voyaituneautrefemme,çam’aencore
plusénervé,carc’estcequejevoyais
aussi:uneautrefemme.Orlebutest
queturestestellequetues.J’aidonc
échoué…
Ethanregardaleboutdesonpieden
traindebutercontreuncaillou,les
mainsdanslespochesdesonpantalon.
Ilétaitvexé,agacé,honteux.Son
professionnalismeenavaitprisuncoup,
safiertéaussi.Kayasouritdevant
l’hommequisetenaitdevantlui.Ilétait
pourunefoistouchantdesincérité.Elle
avaitpresqueenviedeleprendredans
sesbras,maisneputs’yrésoudre,caril
restaitquandmêmeunconnardpour
d’autreschoses.
—Jeretirecequej’aidit….tun’es
pasunconnard….
Ethanlevalatêteetlaregarda,
étonné.
—Jeparlepourcettefois!
Attention!Neteméprendspas.
Ellefitunpasversluietlui
murmura:
—Çacraintquandmêmepourun
hommecommetoi.Heureusementquetu
t’esplantésurmonvisageetpascelui
dequelqu’und’autre,cartaréputation
auraitfaitunesacréechutedansles
soiréesmondaines.Fiiiissshhh.
Kayafitdescendresonpouce
jusqu’àhauteurdesesgenouxpour
symboliserladégringolade.
—Ahah.Trèsdrôle.Jesuismortde
rire.
—Bahtuvoisqueçavamieux!
Elleluisourit,luiattrapalamainet
letirapourreprendreleurroute.Ethan
regardasamaintenantlasienneavec
soulagement:ellenepartaitplus.Il
avaitréussiàlaretenir.Ilsesentait
rassuréplusqu’ilnel’auraitimaginé.Il
étaitmêmeheureuxquecesoitellequi
revienneversluidecettemanière.
C’étaittoujoursavecunecertainedose
dedéfi,maisellesemblaitvouloir
finalementnepluspartir.
—Tuasunmoispourtrouverle
maquillagequimevalemieux,quisoit
leplusnaturelpossible!Tuasdela
chance!Tupourrasfaireplusieurs
essaispourrassurertonego.Mais
bon…
Kayalelâchaetsetournaverslui.
—Cen’estvalablequesiMonsieur
Laurensnesignepascesoir!Or,je
comptebienréussiràleconvaincre,
pourqu’avecmaprimegagnée,jepuisse
mefairemaquillerparunvrai
professionnel!
Elleluitiralalanguedefaçon
mutine.Ethansemitàrireetretrouva
sonespritvengeur.
—Toi…..Jecroisquejevais
t’étrangleravantcesoir!Jeteferai
mêmeunbeaumaquillagemortuairequi
montrerabienlaharpiequetues!
—Blablabla!Monsieurle
Maquilleurquiafaitsonapprentissage
dansunepochettesurprise!
—Jen’aipasfaitçadansune
pochettesurprise.
Ilsreprirentleurbaladedanslarue
plusposément,toujoursmaindansla
main.
—Jel’aifaitpendanttroisans.
Pendantmesétudesàlafac.Entredeux
coursj’avaisréussiàdécrocherune
placed’assistantauprèsd’ungrand
professionnelpournepasdépendrede
mesparentsadoptifs.Cemétierne
m’attiraitmêmepas,maisjevoulais
gagnerdel’argentparmoi-mêmeetne
riendevoiràpersonne.Contretoute
attente,cethommem’abeaucoupappris.
Ducoup,j’aicommencéàapprendreen
mêmetempslesficellesdushowbizzet
j’aieumonréseaumalgrémoi.Onm’a
sollicitépourdesséancesmaquillage
dansdescadresautresqueceluides
défilésoudesshowstélé.Jepassais
certainsweek-endspourdesshooting
photos,labarmitzvahdufilsd’ungrand
dirigeantouparcequejedevenaisla
distractiondecertainesfemmesdu
milieu.C’estaussiàcemoment-làque
j’aipuentendrelessouhaitsdeces
femmesquicherchaienttelsstylesde
maquillageouautresetquel’idéede
montermapropreboîteestvenue.
—Ettuasarrêtédéfinitivementde
maquillerducoup?
—Aaaaah!Jenepouvaispastout
faire.Montermaboîte,suivredes
formationsdemanagement,répondreà
touteslesdemandes.J’aidûfairedes
choixetceluidemaquillerfut
l’évidence.J’aicommencéàrefuser.Ça
aétéunpeudurpourcertaines
personnes,carj’enacceptaiscertainset
pasd’autres.Vous,lesfemmes,vous
êtesvraimentchiantesetexigeantes,en
plusd’êtrejalouses!
Ethanluisouritavecmalice.Kaya
fitlagrimace.
—Puisj’aicarrémentarrêté,
AbberlineCosmeticsmeprenanttout
montemps.Ilafallutroisanspoursortir
lepremiermodèledemaquillage.Ona
tousinvestitoutesnoséconomiesdans
ceprojet.Parchance,nousavonsconnu
lesuccèstrèsvite.Celafaitcinqans
maintenant.Aujourd’hui,jepenseque
monapprentissagedansunepochette
surpriseaplutôtservi,non?
—Tuasréussi,oui.Jeuneetdéjà
avecuntelposte.Tupeuxfairedes
envieux
effectivement.
Mais
personnellement,jenesaispassi
j’aimeraisêtreàtaplace.
Ethans’arrêta.
—Pourquoiça?
—Parcequetuaslaconfiancede
beaucoupdepersonnessurtesépauleset
je
commence
à
comprendre
ton
inquiétudesurtonimage.Plaire,faire
desgrandssourirespourgarderses
clients.Êtreaccompagnédepersonnes
vous
permettant
de
garder
votre
crédibilité.Paraîtretoujoursbiensous
toutrapportpouralimentertonréseau
doitêtrefinalementfatigant.Peux-tu
vraimentêtretoi-mêmeentoutes
circonstances?J’endoute.Etjetrouve
çadommage.Jen’aimeraispasnepas
pouvoirêtremoi-même.Ladouble
identité,trèspeupourmoi!
Ethanlafixa,déconcerté.Le
discoursqu’ellevenaitdeluitenirle
touchaitplusqu’ellenepouvaitle
supposer.Êtrelui-même…
Ilignoraitluiaussis’ilpouvait
l’êtreoumêmes’ill’avaitdéjàété.En
était-ilfatigué?Sansdoute.Malgréle
faitdedevoirparaîtreunautredepuissa
rencontreaveclesAbberline,ilyavait
toujourseuunescissiondanssonesprit
entreacceptersonnouveauluietvouloir
redevenirlepetitgarçonqu’ilétaitavant
cetteterriblejournée,oùilavaitdûfaire
deschoixdéchirantspoursonbien.Et
entrecesdeuxpostulats,ilyavaitses
certitudesquiluidisaientquecequ’il
étaitaujourd’huiétaitbienmieuxpour
lui.
Kayaregardaauloin,déterminée.
—OK,jevaisgardermon
maquillage,mêmecesoir.Situnepeux
êtrenaturelaveclesautres,alorsmoi
nonplus!Jouonslejeujusqu’aubout.
Ethanrestamuet,lasurpriselui
ayantôtétouteenvied’objecter.Ellele
soutenait.Elleallaitmêmeau-delàdece
qu’ilattendaitd’elle.Elleacceptaitde
devenirunecomplice,sacomplice
intime.Ellejouaitlasolidaritépourune
choseàlaquelleaucuneautrefemme
n’auraitsongé.
—Tun’espasobligéede…Enfin!
Jeveuxdire…M.Laurenst’apprécie
sansmaquillagealorspourquoivouloir
paraîtredifférente?
—Parcequel’onneseraitpas
crédibles!Simoijesuisnaturelleetpas
toi,
alors
comment
pouvons-nous
dégageruneimpressiondeconfiance
mutuelle?C’estcommesitumejouais
la
comédie
continuellement.
C’est
vexantpourmoietpaspertinentpour
ceuxquinousobservent.Parconséquent,
sionestdeuxàjouerunrôle,ilyaura
moinsd’ambiguïté.Uneimagedecouple
mondain,etuneautreplus…coolen
privé.Oncroiraàunvraicouple,c’est
bienlebut,non?
—Mais…
Kayaluiposasonindexsursa
bouchepourluienlevertouteenviede
s’opposer.
—Tais-toi!Jesuistrèsbiencomme
çaetRichardn’yverraquelapetite
amied’unPDGdumaquillage,comme
lesfillesdelaboutique!
Ethanlouchasursondoigtqui
touchait
ses
lèvres.
Il
avait
soudainementenviedeplus.Untoutpetit
peuplus,maistoutàlafois.Luisucer
sondoigt,etl’embrasser.Laprendre
danssesbrasetl’embrassersurla
bouche.Senicherdanssoncou,
l’embrasserluiaussi.
Sonimaginationleconduisaità
toujoursunpetitpeuplus.Soncœur
battaitplusfortementqu’àsonhabitude
etiln’aimaitpasça.Undésirdese
lovercontreelleetselaisserallerle
parcourut.Chaquepartiedesoncorps
voulaitêtreplusproched’elle.Un
sentimenttropbizarrepourquecelasoit
normal.Ilsavaitquec’étaitunsigne
qu’ildevaitréprimer.
Lagentillessemèneàladouleur,
Ethan…etl’amouràlasouffrance.Ne
telaissepasporterpardebons
sentimentsenverscettefemme.
Illuiattrapasamainposéesurson
visageetsourit,maisilsavaitqu’ilétait
entrainunenouvellefoisd’êtreunautre.
Sonsourireétaitforcé,faux.Illui
mentait.Ilneluidisaitpassesenviesde
l’instant.Ilcachaitsonenvied’êtrelui-
mêmeenn’agissantpascommetoutson
corpslevoulait.Sansdouteétait-ceplus
fortqueluioudevenuinstinctif?Maisil
gardaitcemasqued’indifférence,ce
masqueleprotégeantdelasouffrance
causéeparlesfemmes.Illegarderait
quoiqu’ilarrive.Ilneleretireraitpas.
Pasmêmedevantelle.
Ilvalaitmieuxquecesoitellequi
changequelui.C’étaitlameilleuredes
chosesàfaire.
Neplussouffrir….
—OK,faiscommetuveux.Je…
doisfaireencorecertaineschosesau
bureau.Jeteretrouveàlamaisonce
soiravantledînerchezLaurens.Jene
peuxpasfaireautrement.Legalaest
samedietj’aidesaccordsàdonner.
Kayaacquiesça,résignée.Illâchasa
mainettournalestalonslentement,la
regardauninstantdroitdanslesyeux,
puispartit.Ildevaitprendredela
distance.Ilenavaitunbesoinurgent.Il
étaittroubléetils’ensentaitindisposé.
Unematinéeavecelleetellele
déstabilisaitchaqueminuteunpeuplus.
Leursquerellesdecourd’école
laissaientplaceàdesdiscussionsd’une
portéeplusquesurprenante.Elle
l’embarrassait,
touchait
involontairementdescordessensibles
enlui.Elleétaitsincèredanstoutce
qu’elledisait,maisilvoyaitaussique
parfois,soninnocencelarendaitaveugle
surlessentimentsquiluttaientenlui.
Elleappuyaitsurcequ’ilvoulaitignorer
etelledéclenchaitdesenviesquine
devaientnaîtreenlui.
Ilrepensaàcequ’elleluiavaitdit
lorsducocktaild’AgnèsB.Ilsavaient
déjàdiscutédesonimageimpeccable
devantlesmédiasparrapportàce
qu’elleestimaitêtresavraieimage:
celled’unconnard.Ilsouritenrepensant
àcequ’elleavaitditquandilavait
démenti:«Etbien,montrez-moivotre
vraiefacettepourchangeralors,sielle
existe!».
C’étaitlasecondefoisqu’ellele
mettaitaudéfid’êtrevrai,authentique.
Àladifférencequ’aujourd’hui,elle
avaitprislestatutd’imitateur.Faire
commeluipourmieuxluimontrerqu’il
étaitridicule?Qu’ilseperdaitàvouloir
paraîtreunautre?Ildénonçaitson
maquillagequinelarendaitpas
naturelle,maisilenfaisaitautant.
Telestpris,quicroyaitprendre!Ce
n’estpasvrai!Jusqu’oùvas-tu
m’emmener
dans
l’agacement
?
MauditePrincesse!
Àdix-septheures,Kayasortaitson
browniedufour.Elleavaitdûs’occuper
commeellepouvait.Elles’étaitmangé
unsandwichpourmidietavaitfait
quelquescoursesnécessairespour
préparerlegâteaupréférédeM.
Laurens,avecl’argentqu’Ethanluiavait
laissé.Elleavaitmêmefaitundétour
auparavantparlecimetièrepour
raconteràAdamsesderniersdéboires.
Elleavaitensuitejugébondepasser
unpeul’aspirateurdansl’appartement
d’Ethanavantdesemettreaux
fourneaux.Ellepassapartoutesles
pièces,rangeadeuxtroisaffairesqui
traînaientdontlesdossiersdetravail
qu’Ethanavaitlaisséssurlapetitetable
dusalon.Elledécidadelesposerdans
lapièceoùsetrouvaitsonbureau.Cette
piècerespiraitlesérieux,l’éruditionà
premièrevue.Pourtant,ellesouritquand
elleregardaleslivrescumulésl’unà
côtédel’autredefaçonminutieuse,dans
lebonordre,surlesétagèresqui
servaientdebibliothèque.Ilyavaitdes
rangéesentièresdemangas.Desséries
complètes,plusoumoinslongues.Pas
untomenedépassaitparrapportà
l’autre.Aucunlivrenesemblaitvieuxou
corné.Kayaneputs’empêcherd’être
heureuse,ellequiadoraitenlireetqui
n’avaitpaseul’occasiond’enavoirun
enmaindepuislongtemps.Qu’importe
legenreoulesujet,elleenattrapaunet
commençaàlefeuilleter.Unepage,deux
pages.Bientôtellecommençasalecture,
sanstrouverlaforcedelelâcheren
coursderoute.Ellepréparason
brownie,unemaintouillantsonsaladier,
l’autretenantsonpetittrésor.Puiselle
courutchercherlasuitedesesaventures
danslabibliothèqueetunefoisle
browniecuit,ellerefermalesecond
tome.Elleentamalalecturedutroisième
volume,unespatuledanslamainpour
raclerlesbordsdusaladieretmangerla
pâtenoncuitedubrowniequandEthan
arriva.Ilposasescléssurlapetitetable
del’entréeetécarquillalesyeuxquand
illavit,laboucherecouvertede
chocolat,sonlivreàlamain.
Ilrestaunmomentfigéparcequ’il
avaitsouslesyeux.Maisau-delàdeson
étonnementàlavoirrecouvertede
chocolatsurleslèvresetdesidéespeu
catholiquesquecelapouvaitluiinspirer,
ilfixalelivrequ’ellelisait.Unventde
paniquelesaisitetilfonçasurellepour
luiretirerlelivredesyeux.Illeregarda
soustouslesanglesafindevoirs’il
n’étaitpasabîméourecouvertde
chocolat.
—Non,maisçanevapas!Onnelit
pasenmangeant!
—Jenesuispasuncochon!Jesais
mangercorrectement!
—…ditcellerecouvertede
chocolatsurleslèvres.
Ethanluijetaunregardsévère,mais
Kayaneselaissapasdéstabiliser.Elle
luitenditlaspatulecouvertede
chocolat.
—Relax!Tuenveux?!
Ethaneutunmouvementdereculde
latête,étonnédesaproposition.
—Vas-y,ilenresteencoreunpeu!
Fais-toiplaisir!Encompensationdeta
journéedetravail.
Ethanréfléchituninstant,méfiant,
puislaissaredescendresonirritabilitéet
s’assitàcôtéd’elle.
—J’ail’airdecurerlesfondsde
saladiers?
—Tun’espeut-êtrepasun
maniaquedessaladierscurés,maisun
maniaquedeslivres,ça,c’estcertain!
luirépondit-elleenraclantdesondoigt
lefonddusaladieravantdelemettre
danslabouche.
Ethanexpirafortement.Ilsortitalors
desapocheuntéléphoneportablequ’il
posasurlatable.Kayalouchadessus.
—Voicitontéléphone.Ilyamon
numéroperso,celuidubureau,d’Abby
etdescopains.S’ilyalemoindresouci,
tuappellesl’undenous.Jet’aimis
aussilenumérod’Eddy.C’estunamisur
quitupeuxcompter.
—Ilfaitquoicet«Eddy»?
—Tout!dit-ilavecunpetitsourire.
Ethansepenchaversellecomme
pourluiconfierunsecret.
—C’estmonespion!
—Tonespion?répéta-t-elle
doucement.
—Oui…Chaqueentrepriseaun
espionpourdénicherlesbonnesinfoset
surveillerlaconcurrence.
—Sérieux?!luifit-elleavecun
sourireémerveillé,commesiellese
rendaitcomplicedelaplusgrande
révélation.
Ethans’avançaunpeuplusau-
dessusdelatablepourserapprocher
d’elle.
—Sérieux…luidit-ilavecun
regardmalicieux.Autrementdit,sije
décidedeluidiredetesurveilleretque
j’apprendsquetuasencoretouchéàmes
livres,jetetue!Est-ceclair,lafemme
chocolat?
Kayasereculad’uncoupetgrimaça,
luimontrantquel’onnechangepasun
connardcommeça.Ellevoulutprendre
sontéléphone,maisEthanposasamain
dessus,avantmêmequ’ellepuissele
toucher.
—Tuoseraismettretesdoigtstout
collantsdessus?luidemanda-t-ild’un
tonsuspicieuxetmenaçant.
—C’estmontéléphone,non?J’en
faiscequejeveux!
—Mapetiteamiedoitavoirun
téléphonepropre!
—Parcequ’elleestavecun
maniaquedelapropreté?OKonva
changerça!Vienslàquejetebarbouille
tonvisagedeconnard!
Ethanécarquillalesyeux.Illavitse
leveravecsaspatuledechocolatàla
main,leregardinquiétant.
—T’espassérieuse,là?luidit-il
enprenantsaremarquepouruneblague
jusqu’àcequelaréponseluiarriveen
pleinvisage.
Ethanselevaetreculad’unmètre,
setouchantlevisagetachédechocolat.
—Aussisérieusequetonespion!
luidit-elleavantdeposerlaspatule
danslesaladieretdeprendreson
téléphonesurlatablepourtenterd’en
déchiffrersonfonctionnement.
Ethanrestastupéfaitparsonculot.Il
regardasesdoigtscouvertsdechocolat
etsourit.Iln’avaitqu’uneidéeentêteà
présent,commeàchaqueprovocation
qu’ellefaisait:luirendreaucentuple.Il
seprécipitasurlesaladieretlaspatule
pendantqu’ellepianotaitsursonclavier.
Elleeutjusteletempsdeleverlesyeux
pourcomprendresesintentions.Elle
reculadeplusieurspasautourdela
tablepourseprévenird’uneattaque
possible.
—Tunevaspasfaireça?
—Tuveuxparier,Princesse
rebelle?
Tousdeuxtournèrentautourdela
table,surveillantlemoindredétailde
sonennemipourcontre-attaquer.Kaya
chercha
une
échappatoire,
une
protection,quelquechosepouvant
l’aideràsedéfendre.Ellevitalorsle
mangasurlatableetsejetadessus.
Ethancompritquandelleposasesyeux
surlatablecequ’elleallaitfaire,mais
troptard.
—Touche-moietc’esttonlivrequi
ramassera!
Ethansecoualatête,épatéparson
aplomb.Ellenereculaitdevantrien.
—Jevoisunetracedechocolat
dessus,tuesmorte.Jetel’aidit.
—
Tu
abîmerais
mon
beau
maquillage?Allons,soitsérieux!
—Cellequiagâchésonmaquillage
c’esttoi!Regarde-toi!Taboucheest
recouvertedechocolat!Toutestà
refaire!
Kayalaissaretombersavigilanceun
instantpourpassersamainsursa
boucheetvoirlestracesdechocolatsur
sesdoigts.Ethanenprofitapourpasser
par-dessuslatable.Kayapoussaunpetit
cridesurpriseenvoyantlelionsurgir
devantelle.Elleseretournacommeseul
réflexe,pouréviterlasentence.Ethan
posasaladieretspatuleetlaforçaàse
mettrefaceàlui.Ellefermalesyeux,
tenantsonlivreetsontéléphonecontre
sapoitrine,prêteàlaterriblepunition.
Ethanpassasesbrasautourdesataille
etregardasonvisageplisséparla
craintequelquessecondes.Ilpouffaun
peu
devant
sa
réaction
presque
disproportionnée.Kayaouvritunœilet
vitquelesourired’Ethans’effaçaquand
ilglissasonregardverslelivrequ’elle
serraitcontreelle.
—Monlivreesttaché!Tuasmisdu
chocolatdessus!
Kayaouvritlesdeuxyeuxetbaissa
latêtepourvérifiersesdires.Elle
blêmitquandellevitlestracesmarron
surlareliuredulivre.
Oups…
Ethanattrapasamâchoireinférieure
desamaindroiteetl’avançaàquelques
centimètresdesonvisage.
—OKPrincesse,unepunition
s’impose.
—Quoi?!C’esttoiquiaslesdoigts
pleinsdechocolat!tenta-t-ellededire
entresesdoigtslaserrant.
—Tul’asdanslesmains,tues
fautive!Vengeance!
Ethanrapprochaunpeuplusson
visagedusien.Kayafitdegrosyeux
quandellevitleslèvresd’Ethanse
rapprocher
dangereusement
de
sa
bouche.Ellevoulutsedébattre,mais
Ethanlatenaitfermementparlataille
avecsonbrasgauche.Ilsouritet
commençaàlécherlechocolatautourde
sabouche.Kayafermalesyeux
instinctivement,commepourseprotéger
desonattaquesadique.Ethanpritson
temps.Ilneratapasunmillimètrede
peau,lentement,endouceur.Kayadonna
quelquescoupsdetêtepourl’empêcher
d’agir,maisilnevoulaitpasarrêteren
sibonchemin.Ilvoulaitjusterépondreà
uneenviequileperturbaitdepuisle
matin.Ilraffermitsonempriseetretira
aufuretàmesureduboutdelalangue
oudeseslèvrestoutlechocolatautour
desabouche.
Lajeunefemmesentaitsalangue
humidesurelle.Sielletrouvaitcela
dégoûtantenpremierlieu,ellen’eut
d’autrechoixquedes’yrésoudreetfinit
parselaisserfaire.Sonécœurementse
transformaaufuretàmesureenun
mélangedesensationsetdesentiments
contradictoires.Parcequ’elleavaitles
yeuxfermés,elleressentaitchaque
chosedefaçonplusaccrue:sonsouffle
contresonvisage,chaqueinstantoùsa
langueseretiraitaveccetteinterrogation
surunretourcontresapeau,chaque
contacttièdeethumidelaissantune
marqueplusfraîcheaprès.Etpuiscette
contradictionàvouloirqu’ilcontinue,à
vouloirenfairedemême,àespérer
qu’iltouchevraimentseslèvresaulieu
detournerautour,qu’ilarrêtecette
torturefinalementplusagréableque
répugnanteenl’embrassant.Elledétesta
cedésir.Ilétaitlepireconnardau
monde,unarrangement,uncontrat.
L’hommedesavie,cen’étaitpaslui.
Pourquoiéprouveruntelsentimentde
bien-êtredanssesbras?Illaforçaiten
agrippantsamâchoire,maisaufinal,il
avaitgagnéunconsentementqu’elle
refusaitd’admettre.
Quandellesentitqu’ilnetouchait
plussapeau,ellepaniquaetouvritles
yeux.Ethanlacontemplaitd’unefaçon
étrange.Unregardquiladéstabilisa
davantage.Ilétaitdoux,maissurtout
quémandeur.Sespupillesbrillaient,
marquéesparundésirtrouble.Elley
voyaitunehésitationetuneprofonde
enviedecontinueretfranchircertaines
limites.Ilsrestèrentquelquespetites
secondesàsecontempler,àchercher
uneréponsedanslesprunellesde
l’autre,unaccordtaciteentreeux,
n’importequoipouvantrépondreàcette
interrogation,ceconflitquigonflaiten
euxoujustelaforcedeserepousser.Le
jeuetlaprovocationavaientfaitplaceà
unsouhaitimplicite:celuidesatisfaire
leurcuriositémalsaine.Ethantentade
reprendrelecontrôle,maisn’enmenait
paslarge.
—VilainePrincesse…murmura-t-il
tandisqueleslèvresdelajeunefemme
l’appelaient.Meforceràmangerton
chocolat…
C’est
vraiment
très
sadique…
Ildonnaunlégercoupdelangue
provocateursurleslèvresdeKayaqui
sentitsoncœurs’accélérerdemanière
incontrôlable.Illaregardaànouveau
droitdanslesyeuxuninstant,pourvoir
saréactiontandisqueleboutdeleurs
nezsetouchaitpresque.Elleétaitinerte.
L’usagedelaparoleluiavaitfaitdéfaut,
visiblement.Leregardd’Ethanétait
dénuédetouteagressivité.Sonattitude
étaitmêmelatente.Ilvoulaitsavoirà
quoiellepensaitàcemoment-là.La
seulecertitudequ’ilavaitétaitqu’elle
nel’avaitpasrepousséetilléchaalors
seslèvresplusconcrètement,mais
toujoursaussilentement.Ilneputse
résoudreàtoutarrêter.Ilenavaitenvie,
trèsenvie….tropenvie.Sentirses
lèvresduboutdesalangueétaitaussi
délicieuxqu’unappelàunesensualité
quinedemandaitqu’ànaîtreentreeux.
Lesouffledeplusenplusaffirméde
l’autrelesenorgueillissait,lespoussait
versuneintimitéchargéed’interditsqui
n’attendaientqu’àêtrefranchis.Etil
avaitenviedelesfranchir,unparun.
Soncorpstoutentierleréclamait.
Caresserseslèvresavecsalangue
étaitdéjàunrégal.Iljouaitavecelle,la
testaitmêmesisoncôtémachoetviril
luicriaitd’yallerfranchementen
introduisantsalanguedanssabouche.
Pourjusteretrouvercesentimentde
plénitudequ’ilavaitressentilorsdeleur
premierbaiserdevantlacrêperie.
Retrouvercettesoifdelamaîtriser
entièrement,êtreledétenteurdeson
plaisircommedanslesvestiaires,la
fairechavirerencoreetencore,voir
dans
son
regard
un
sentiment
d’appartenancecomplète,totale,infinie.
Unsentimentqu’ilavaitdésirétoutesa
vie,maisqu’iln’avaitjamaisobtenu.Ce
mêmesentimentquiavaitfiniparle
détruire,lui,avectoussesespoirs,ses
illusions,sescertitudes.Sonentrainà
répondreàsespulsionsétaitentrain
d’avoirraisondetouscesmursqu’il
avaitérigéspourseprotéger.Justeun
coupdelangueetilétaitcomplètement
chamboulé.Ilsavaitquesielle
répondaitàsonappel,ilétaitfini.Il
devaitymettrefinavantqueseslèvres
touchentvraimentlessiennes,avant
qu’aucundesdeuxnepuissetrouverde
raisonsjustifiantcetteattirance.
BonDieu,Kaya,repousse-moi!
Bientôt,iln’yeutplusaucunetrace
dechocolatsurlevisagedeKaya.
Malgrécela,Ethancontinuaàlui
caresserleslèvresduboutdesalangue
parà-coup.Ildevaityrevenir.Les
quitter
définitivement
n’était
tout
simplementpaspossible.Uneobligation
quinetrouvaitaucunsensàpartceluide
rassasiercettefaimquileconsumait,ce
brûlantdésirdelasentircontrelui.
Kayaavaitsapoitrinequisegonflaitet
sedégonflaitaurythmedesesgestes.
Ellenesavaitplusquoifaire,comment
réagir.Elleseretrouvadanscette
positioninconfortableentreenvieet
raisonqu’elleavaitéprouvéedansles
vestiaires.Ethann’avaitpluslaforcede
secontenterdesimplescoupsdelangue.
Àchaqueapproche,seslèvresse
rapprochaientdecellesdeKaya.Illes
effleuraitaveclessiennes,lesoufflede
sapartenairel’exhortantàunplaisir
plusintense,unedélivrancepluschaude
etsensuelle.Ilresserraunpeuplusson
étreinte.LesmainsdeKayacontenantle
livreetletéléphonefaisaientbarrage
entreleursdeuxcorps,touchantletorse
d’Ethaninvolontairement.Bizarrement,
ilnes’enformalisapas.Ilvoulaitjuste
l’avoircontrelui.Ilcaressaduboutde
sonnezceluiduKayapuispassajuste
après,teluneffleurement,seslèvres
contrecellesdelajeunefemme.Unpetit
jeudecaresseslégères,vaporeusesoù
leursdésirsmutuelsprenaientune
ampleurfolle.Laprovocationétait
toujoursuneréponseàplusetKaya
voulaitplus.Plusdechaleur,plusde
sécurité,plusd’attention,plusdegestes
affectifs.Adamluimanquait,maisce
quesonfiancéluiapportaitluimanquait
toutautantetEthanétaitentraindelui
rappeler.Elleserraunpeupluslelivre
etsontéléphonedanssesmains.Elle
étaitentraindecraquerunenouvelle
fois,ellequiavaitjuréqu’uneseulefois
devantcethommeétaitsuffisante.Ellele
regardaalorsqu’ilsedétachaitune
nouvellefoislégèrementd’elleet
approchaalorsseslèvresdecelles
d’Ethanquandlasonneriedutéléphone
retentit.Tousdeuxsortirentdeleur
torpeuretregardèrentl’objetentreeux.
EthandesserrasonétreinteetKayavit
que
le
téléphone
s’éteignait.
Involontairement,elleavaitdûtoucherà
latoucheOFF.ElleregardaEthan,
gênée,etchacunputserendrecompte
quelecharmeétaitrompuetqueles
motsmanquaientpourtrouverune
explicationplausibleàcettepunitionqui
avaittournéendoucetorture.
Ilfallaitretrouverleurshabitudesau
plusvite.Celledesdeuxpersonnesqui
nes’aimaientpas,quinepouvaientpas
sevoir,mêmeenpeinture!
Elleluiplaquaalorssonlivrecontre
sontorseavecforce.Ethancomprit
immédiatementqu’elleremettaitdela
distanceentreeux.Cegestecontreson
torseétaitvolontaire,maisunenouvelle
fois,iln’objectapas.Uneprovocation
pourréaffirmerqu’elleledétestait,mais
dontilcompritlesenssous-jacent.Ilse
saisitdulivredoucement,sansriendire.
—La….lapunitionestfinie…
déclara-t-ellesansleregarder.Merci
pourletéléphone.
Ellelecontournaetfonçadanssa
chambresansplusdeconsidération.
Ethanlaregardapartir,maisn’ajouta
rien.Quepouvait-ildirealorsquelui-
mêmenetrouvaitaucunsensàtout
cela?Ilregardasonlivreunenouvelle
foisetmurmura:
—Jedétestelechocolat…
-5-
Enivrant
Kayacommençaitàtrouverla
situationplusqueridicule.Comment
deux
hommes
d’apparence
si
respectablespouvaient-ilsenarriver
là
?
Comment
pouvaient-ils
se
comporteravecsipeuderetenue?Ilsse
fixaient,telsdeuxcoqsprêtsàmontrer
leurvaillanceetleursbeauxatours,leur
ténacitéetleurgoûtdudéfi,maispourla
jeunefemmequ’elleétait,cen’était
qu’unspectaclepathétique.
Leurpetitetensiondudébutde
soiréeetlesilencegênéquis’étaient
instaurésentreEthanetelledansla
voituresuiteàleurpetitjeudéplacé
aveclechocolat,s’étaienttrèsvite
effacéslorsqueRichardLaurensleur
ouvritlaporteetlesinvitaàentrer.Son
sourireindiquaitqu’ilétaitheureuxde
lesvoir.Kayarelâchainstantanémentla
pression.Cethommerespiraitune
simplicitéavecellequiluifaisaitdu
bien.Toutescesconvenancesqui
devaients’appliquerpourgarderune
imageirréprochablelorsqu’elledevait
être
au
bras
d’Ethan
Abberline
disparaissaientdevantcethomme.Elle
luiavaittendusonplatcontenantle
brownieetRichardeneutlesyeux
brillantsdegourmandise.Faireplaisirà
cevieuxmonsieurluiréchauffaitle
cœur.Ilnelajugeaitpaspourcequ’elle
n’avaitpas,maislaremerciaitpourle
peuqu’ellepouvaitfaireouluiapporter.
C’étaitunequalitéquilaréconfortait.
Sesderniersamisl’avaientabandonnée,
carelleleurapportaitplusdedéception
quedeplaisir.Elleétaitdevenuela
personnelourdeàgérer,àquitoutlemal
arrivaitetquinesortiraitpasdece
tourbillondemalchance.Unepersonne
quimontraitauxautressadétresse,
mêmesiellenes’enplaignaitjamais.
Ellemettaitmalàl’aisesonentourage
quivivaitbien,quiselassaitdelavoir
sedémenerenvain.Leursregardstristes
etcompatissantsavaientfaitplaceàun
regardascendant,chargéd’unedose
d’agacementquifinissaitparlablesser.
Son
éloignement
s’était
fait
progressivement,chacunnesouhaitant
devinerlesnon-ditsdel’autrepourtant
sivisibles.C’étaitmieuxainsi.
RichardLaurensétaitcettepetite
lumièrequivouslaissaitespérerque
toutn’étaitpasperdu,qu’ellepouvait
encoresefairedesamis,quesoncas
n’étaitpassidésespérécommeonavait
pulesous-entendreauparavant.
Ilsavaientbienmangé.Richard
avaitfaitveniruntraiteurpourproposer
unrepasqu’ellen’auraitpuimaginer.Le
choixn’enviaitenrienlegoûtdechaque
metsurlatableetquandcefutle
momentdudessert,elletrouvason
browniebienridicule.Richardluisourit
etannonçacependantlacouleur:
—Jevouspréviens,lamoitiéest
pourmoi!
Kayaneputs’empêcherd’enêtre
heureuse.Ilavaitcettemalicedansles
yeux,telunenfantdevantungâteau
d’anniversaire.Elleluiendécoupala
moitié.Ilseléchalesbabinestant
l’objetconvoitéluifaisaitplaisir.Elle
tenditensuiteunmorceauàEthanqu’il
déclina.Elleleregardasurprise,puis
baissalesyeux,nesouhaitantpas
insister.Lebrownieétaitlederniersujet
dediscordeentreeuxetlaraisondeson
refusdevaitenêtrelacause.Pourtant,
secrètement,elleauraitvoulusavoirs’il
letrouvaitbonoupas.CefutRichard
quiintervintpourleverledoute.
—Vousnefaitespashonneuràla
cuisinedevotrepetiteamie,Monsieur
Abberline?
—C’estàdireque….
Ethansoupira.Fairesemblantc’était
biengentil,maisilyavaitdeslimitesau
sacrifice.
—Jen’aimepaslechocolat.Depuis
toutpetit,jen’aijamaisaimé.
—Vraiment?s’étonnaRichard
Laurens.Etbien,tantmieuxpourmoi!
J’auraiungâteauexclusivementfaitpour
moi!
Lesouriregourmandetlaréponse
deRichardnechangèrentenrienla
surprisequeKayaéprouvaitencet
instant.Disait-ilvrai?N’aimait-il
vraimentpaslechocolat?Alorsdansce
cas,pourquoil’avoirmangésurses
lèvres?Unepunition,avait-ildit….
maisaupointdefaireuntelsacrifice?
Ethanputliredegrossesinterrogations
surlevisagedeKaya.Iln’aimaitpas
devoirs’expliquersurdeschoses
futiles,maisilcomprenaittrèsbien
pourquoielleledévisageaitdelasorte.
Lui-mêmeréfléchissaittoujoursau
«pourquoi»ilavaitétéjusqu’àen
mangersursonvisage.Ilavaitenviede
luidirequ’iln’yavaitpasderéponsesà
cela,quec’étaitcommeça,maisla
véritéétaitquelarepousserdansses
retranchementsrendaitlechocolattant
détestédélicieux.
—Jen’airiencontretongâteau,je
t’assure.Jemangeraitoustesautres
gâteaux,maispasavecduchocolat.
Kayafutàmoitiérassuréeparsa
réponseetn’insistapas.Elleconsidéra
doncquesonacteétaitjusteune
provocation.Leurhaineréciproqueétant
sigrandequ’ilsétaientprêtsàtoutpour
sevenger,mêmeàmangercequ’ils
détestaient.
Richardserégaladevantleurs
regardsamusésparsagourmandise.Il
nesegênapaspourgémirdeplaisir
jusqu’àcequ’ilneresteplusriendans
sonassiette.Ethansefélicitadesa
décisiond’avoirpactiséavecKaya:le
succèsdecedînerétaituneévidence.
RichardetKayas’entendaientbien
mieuxqu’ilnel’avaitsongé.Ils
plaisantaientbeaucouptouslesdeux,se
taquinaientgentimentcommeunpère
avecsafille.Ilavaitpuobserverle
comportementdechacunavecune
certainesurprise.Tousdeuxagissaient
defaçonvraimentdécontractéeetilse
sentaitpresquedetropdansleurentente.
IlputvoirlajoiedeKayaàpartagerdes
discussionsaveccethommequetout
opposaitàelle.Ilsriaientetsefaisaient
desconfidencesdontilétaitun
spectateur
distant,
un
observateur
attentif,untémoinprivilégié.Ilenvenait
presqueàenviercetteententeentreeux.
Ilavaitcertescetterelationamicale
avecsesamis,maisilnel’avaitpas
avecelle.Illadécouvraitsousun
nouveaujourets’étonnadenes’en
rendrecomptequemaintenant.Devoirà
quelpointellepouvaitêtreàlafois
drôle,affligeante,ridiculeparmoments,
enthousiasteoucomplètementengagée,
emportée,belle.Ilavaitencorecette
envied’endécouvrirplus.Ellele
surprenait
constamment
et
chaque
surpriseenappelaitàundésirplus
profonddelaconnaîtreencoreet
encore.Plusilcreusait,plussonenvie
devouloirl’intéresser,l’impressionner
prenaitdel’ampleur.Leursdisputeset
sonressentimentenversellepouvaient-
ilss’expliquerparlefaitqu’ilvoulait
qu’elleleremarque?Pouvait-ellele
voirunjour,commeellevoyaitM.
Laurens,aveccetintérêtparticulier?
Serait-ilunjouraussicompliceavec
elle?
Tuladétestes,crétin!Pourquoi
vouloirêtreàlaplacedecevieux
bougre!?
Ethans’imaginacetteententeavec
l’hommequ’elleaimait.Illaissaaller
sonespritsurlequotidienqu’elleavait
vécuavecson«Adam».Quelsétaient
leurshobbies?Qu’est-cequil’amusait
enlavoyantprèsdelui?L’avait-il
observéecommeluipouvaitl’observer
cesoir?Ilavaiteuceluxed’examiner
chacunedesesréactionsàtoutmoment
delajournée.Seréveillait-iltousles
matinsprèsd’elle?Laregardait-il
dormiraussi?Aimait-ilcela?Quelles
confidencesluifaisait-elle?
Ilregardasonverredevinet
repensaàsesrelationsaveclesfemmes.
Pouvait-ildirequ’ilavaitdéjàété
complice
avec
l’une
de
ses
conquêtescommeKayaetAdam
l’avaientété?Desaccordsentreeux
avaientétédemisepouréchapperaux
médias,maisdelààsesentiren
confianceoumêmeseconfier….La
seuleavecquiiléchangeaittoutluiavait
vitefaitregrettercechoix.Laseuleà
quiilaccordaitsaconfianceallaitde
soi,laseulepourquiilauraitpuvouer
unamourau-delàdutempsetdela
distancel’avaitmanipuléenjouantavec
soninnocence.
Uncoupsurlatablelefitsursauter.
Richardavaitceregardbrillant,pleinde
défiquiindiquaitquec’étaitl’heure.
Ethansouritdoucementetcompritquele
contratallaitsejouermaintenant.Si
Kayaavaitaccomplisapartdumarché,
c’étaitdorénavantàluidefairele
nécessaire.IlvitRichardselever,sortir
troispetitsverresetunebouteille
d’alcoold’unbardesonsalon.Kaya
jetauncoupd’œilàEthanquisouriait
toujours,aveccetteassurancesans
faille.
—Onpasseauxchosessérieuses,
montrèscherAbberline?
—Jesuistoutàvous!luirépondit
celui-cileplussérieusementdumonde.
Ilcommençaàremplirlesverres
aveccequeKayaconclutcommedela
vodka.Illuitenditunverrepuisenfit
autantpourEthanetlui-même.Kayase
sentitunpeugênée.
—Pardon,jesuisdésolée…jene
boispasd’alcool.
—Tiensdonc?fitRichard,surpris.
Mêmepasunegoutte?Cettevodkaest
untrésor,voussavez!
—Mêmeunegoutteneseraitpas
conseillée.Jenetienspasdutout
l’alcool.
—Oooh!Voilàpourquoivous
tournezàl’eaudepuisledébutdela
soirée.Peuimporte,ceverren’estpas
perdu,n’est-cepasAbberline?
EthanregardaitKayadefaçon
consternée.Ilréalisaitunnouveaupoint
auquel
il
n’avait
pas
pensé
la
concernant:laraisonducocktailplutôt
queduchampagnelorsdelaréception
d’AgnèsB.
Etmoiquipensaisquec’était
encoredelaprovoc!Pourunefois,
elleavaitunebonneraison.
Ilsecoualatêteetsourit.Entrel’un
quin’aimaitpaslechocolatetl’autre
l’alcool,
il
semblait
qu’ils
se
rejoignaientdansleurscachotteries.
Unpointpartout!
IlattrapaleverrequeRichardlui
avaitservietlebutd’unetraite.Ilen
avaitbesoin.Ellelebaladaitcomme
ellelevoulaitetluitombaitdehautà
chaquefois.Richardseréjouitdeson
initiative,avalaégalementsonverre
d’unseulcoupetlesresservit.Les
hostilitésétaientlancées.Unverre,deux
verres,troisverres,dixverres…
Kayaétaitdoncsurcestatutde
spectateurblaséparcejeuoùchacun
tenaittêteàl’autreetRichard
remplissaitlesverresaurythmedeses
remarquesprovocatricespourfaire
fléchirlavolontéd’Ethan.
—AllezAbberline,onvientde
prendrel’apéritif,commençonsàparler
ducontrat.Onvavoirsivoustenezla
route!
Abberlinelevasonverreetavala
soncontenusanseffort.Kayacomprit
quecettemiseenscèneétaitunesortede
ritedepassagequ’imposaitRichardà
sespotentielspartenairescommerciaux.
Ethanétaitentrédanssonjeusansciller.
Saufqu’àpartird’uncertainnombrede
verres,l’entraindevenaitmoindredes
deuxcôtésetlesespritscommençaientà
setroublersérieusement.Kayatrouvait
celaaffligeant.Leregardhagarddel’un
répondaitausouriresuffisantdel’autre.
Lesgestessefaisaientdeplusenplus
hésitants.Laferveurcommençaità
fléchirdevantlemanquedeluciditéde
chacun.Maisl’honneur,cettefameuse
valeurqueleshommesencensenttelun
culte,étaitleurmoteurpourtenir,pour
continueràavalerleliquidebrûlantleur
gorge.Chaqueverreenfiléseponctuait
d’unequestionconcernantleurtravail,
leursattentes,leursintérêts.Ethanavait
faceàluiunterribleadversaire.L’âge
avancédeRichardn’altéraitenriensa
façondetenirsibienl’alcool.Onavait
presquel’impressionquetouscesverres
glissaientsursoncorps.Ethanétaitbien
plusivrequeRichardetKayas’inquiéta
surledevenirdecettesoirée.Lorsque
Richarddécidaderemplirunnouveau
verreàsonpseudopetitami,elle
craqua.Elleselevabrusquementdesa
chaiseetlesfusilladuregard.Lesdeux
hommess’interrogèrent,maisleregard
qu’elleleurjetaitn’indiquaitriende
bon.
—Quandcesmessieursaurontfini
leursgamineriespoursavoirquiala
plusgrosse,onpourrasansdoute
continuerlasoiréeconvenablementà
trois.
Lesdeuxhommesseregardèrentet
pouffèrentderire.L’alcoolaidant,
chacundesdeuxrigolaenmatérialisant
dansleurtêtelaremarquedeKaya.
—Iln’yapasdedoute!C’estmoi
quiailaplusgrosse!chantonnaEthan.
Kayaécarquillalesyeux.
Iln’apasosé?
Sonsourireamuséetfierluirappela
quesi.
—Bahbahbah!Votrejeunesse,
Abberline,n’impliquepasl’expérience!
Carleplusimportantestbienlaqualité
delaprestation!Etenterme
d’expérience,
je
vous
bats
sans
problème!
Tousdeuxpouffèrentderireà
nouveautandisqu’unnouveauverrese
levaversleurslèvres.
Dépitée,Kayasetapalefront.Elle
n’auraitjamaisimaginéentendreces
deuxhommesavoirdetelspropos,alors
qu’ils
étaient
censés
parler
d’investissements.Richardversadela
vodkadansleverred’Ethan,puisdans
lesien.Ethantenditleverreenavant,
commepourtrinquer.
—Auxfemmes,àleurfaussepudeur
etànotrepénisquilesfaitjouir!
LesyeuxdeKayas’arrondirentà
nouveau,offusquéeparsagrossièretéet
soninsolence,maisaussiparlaréaction
deRichardquiadhérait.Levieilhomme
rigolaetlevasonverrepourrépondreà
sonhommage.Ethanportaalorslesien
jusqu’àseslèvres,maisiln’arriva
jamaisàdestination.Lajeunefemmele
luipritdesmainsetenbutsoncontenu
d’unetraiteparcolère.Ellelereposa
aussisecsurlatable.Danslafoulée,
ellesesaisitdeceluideRichardetfit
demême,puislereposaégalement.Elle
fitunpasenarrière,puisdeux.Sesyeux
s’exorbitèrentetelletapadupoingsa
poitrinepourfairepasserleliquidefort
danssagorge.Elleexhalaplusieursfois,
cequifitrireEthandéjàbienivre.La
bouchedeRichardrestaouverte
quelquesinstants,tantlasurprisefut
grandedevantlesagissementsdeKaya.
Ethanseservitunnouveauverreet
trinquaunenouvellefois.
—Àmasuperpetiteamiequiveut
jouerdanslacourdesgrandshommes
auxgrospénis!
Ilbutculsecsavodka.Aumême
moment,unbruitfracassantsefit
entendrejusteàcôtédelui.Kaya,
complètementvaseuse,s’effondrasurle
sol,emportantavecellesonassietteà
dessertetsachaise.Richardseleva
immédiatementpourcourirverselle.
Ethan,leverretoujoursenmain,resta
immobileetlaregardaàcôtédelui,en
traindevacilleretrigoladeplusbelle.
—Kaya,mondieu,çava?demanda
Richard,inquiet.
—Je…gère….déclaraKayad’une
voixnébuleuse.
—Non!Vousnesemblezpasgérer
justement.Pouvez-vousvouslever?
—Évidemment!fit-elleavecun
grandsourireetlesyeuxbrillants
d’ivresse.
Richardl’attrapaparlebraspour
l’aideràsemettredebout,maiselle
titubaplusieursfois.
—Abberline,aidez-moi,voyons!
Votrepetiteamienesemblevraimentpas
tenirl’alcool.
Ethansouffla.
—Ellen’avaitqu’ànepasboire
monverre!
—Connard!C’estparcequevous
étiezentraindedevenirdeuxidiots!lui
cria-t-elleenbafouillant.
—L’idiotemaintenant,c’esttoi!
Mêmepascapabledetenirdebout!
KayasejetadanslecoudeRichard
etcommençaàpleurnicher.
—Jeledéteste!Ilm’énerve!Voyez
commeilestméchant!marmonna-t-elle
danssoncou.
Ethanlevalesyeuxaucieltandis
qu’ilavalaitunnouveauverredevodka,
toujoursassisdefaçonnonchalantesur
sachaise.RichardfrottaledosdeKaya,
attristé.
—Neditespascela.Jesuissûr
qu’iltientàvousplusquevousnele
pensez.
—Oooohoui!lançaEthan.Aimer
unefemmequivoustraitedeconnard
constamment,quelpied!J’adore!
—Abberline,soyezindulgent!Vous
voyezbienqu’elleestpompette.Ellene
lepensaitpas.L’alcoolexagèrenos
pensées.Vousdevriezrentrer.Jelaporte
pratiquementetmesjambesn’ontplusla
vigueurd’antan.
Ethanposasonverresurlatable,
visiblementtrèsagacé.
—Ellemeferachierjusqu’aubout!
—Jecroisquevousaussi,vous
exagérezvospensées…
Ethanluijetaunregardnoir,mais
Richardneluientintpasrigueuretse
contentadeluisouriregentiment.Le
PDGselevaalorsbrusquement,pris
danssonénervement,maisilsentit
soudainl’universtournerautourdelui
uninstantettituba.Lachaisequile
portaitquelquessecondesavanttomba
également.Kayaéclataalorsderire
devanttoutcefracas.
—Laprochainefois,Monsieur
Abberlinedevrasemettreàl’eauaussi!
luidit-ellepoursevenger.
—Laferme!
Kayacontinuaàrigolerdeplus
belle.Richardluifrottaunenouvelle
foisledosavecunregardbienveillant.
Ilpréféraitlavoirsourireplutôtque
pleurer.Ethanpritlerelaisetpassason
brassousceluideKayapourla
maintenirdebout.Richardallachercher
leursmanteauxtandisquelecouplese
dirigeaitnonsansmalversl’entrée.
EthanaidaKayaàenfilersonmanteauet
luimitsonbonnet.Kayarigolait
toujours.Elles’amusaitàluitirerles
jouesenluimurmurant:«T’esbourré!
T’esbourré!».Richardpouffadevant
sesamis.Ethans’agaçadavantage
devantsataquinerieetluienfonçason
bonnetdanslatêtepourlafairetaire.
Kayacriaalors.
—Lalumière!Jenevoisplusrien!
Ethanluidonnauncoupavecson
frontetsourit.
—Unevraiecatastrophe!
Kayaremitenplacesonbonnet,
soulagéederetrouverlavue,puis
s’approchadesonoreilledroite.
—Ettoi,t’esbourré!
Ethanluisourit.Lavoirivreétait
finalementmignon.Ilsemitàrire
légèrement.Ilapprochaseslèvresde
sonoreilleégalementetluichuchota:
—Ettoi,tuviensdegâcherla
soirée.Tssss!Vafalloirterattraper,
vilaine!
Ilreculasatêtepourvoirsa
réaction.Kayaleregardaattentivement,
puisregardaRichard.
—Richard,monbrownieétaitbon,
hein?!Jen’aipasgâchélasoirée?!lui
demanda-t-ellealors,inquiète.
—Nonmonenfant!Brownie
parfait!luidéclara-t-ilaffectueusement.
Kayaluisourit,soulagée.
—Bahvoilà!Lemonsieuraditque
c’étaitparfait!Donc,jen’airienà
rattraper.
Elleouvritlaported’entréeetsortit,
lepasvacillantàgauchepuisàdroite.
Ethans’étranglaavecsasalive,effaré
parsonaplombtoujourssiprésent
malgrésonébriété.Iltenditalorsla
mainpoursaluerRichardetlarejoignit.
Leuramilesregardasortirdechezluiet
fermalaporteavecunpetitsourire
amusé.
Kayas’avançadanslaruepouraller
verslavoiture,maisfinalements’assit
surletrottoir,sentantsesjambeslui
fairefauxbond.Ethanlaregardafaire.
Ellerapprochasesgenouxcontreelle,
semitenboule,cachasonvisage,puis
sebalançad’avantenarrière.
—Unproblème?luidit-ilperplexe.
Sonabsencederéponsel’exaspéra.
Ilvoulutl’accablerunpeuplussurson
état,maisilsepritfinalementdepitiéet
s’agenouilladevantelle.Iltoquasursa
têtepourl’interpeller,envain.
—L’alcoolt’alobotomiséton
cerveau?Effectivement,ilnefaut
surtoutpasquetuboives…T’es
vraimentuncas,tusais.
—Tum’enveux,pasvrai?lui
demanda-t-elle,levisagetoujourscaché
entresesgenouxetsapoitrine.
—J’auraisespéréqueçafinisse
autrement,c’estsûr.
—J’aitoutfoutuenl’air.C’estpour
çaquetuesparti…
Ethananalysasadernièrephrase
avecsurpriseetintérêt.
—Parti?Qu’est-cequetu
racontes?Jesuislà.
—Tunevasplusmequitter,hein?
Turestesprèsdemoi?entendit-il
faiblement.
—Jenet’aijamaisquittée.Jen’ai
pasbougé…Jecroisquetuesvraiment
fatigué…
Ethanregardaautourd’eux.Le
quartierétaitcalme.Ilétaittard.Lui-
mêmen’étaitpastrèsclairetprendresa
voiturepourrentreràl’appartementétait
troprisqué.Ilexpiraunboncoup,
réaliste.Ilallaitdevoirappeleruntaxi.
Ilseredressaalors,maisKayasortitde
sabulleetleretintenpassantsesbras
autourdesoncou.Ellegardasonvisage
enfoui,maisilputvoirqu’ellepleurait.
Illaportaalorspourl’aideràse
relever.
—Parspas….luimurmura-t-elle
doucementetsuppliante.Reste.Tume
manquestellement.
Lentement,Kayafrôladeseslèvres
soncou,puisremontalelongdeson
visage.Sesyeuxétaientfermés,mais
Ethanputyvoirdeslarmescoulerle
longdesesjoues.Elleeffleurasajoue
puisposaseslèvressurlessiennes
doucement.Ilputsentirquesesbras
faisaientpressionsursanuquepour
qu’ellepuissemieuxsavourercebaiser.
L’hésitationlesaisit.Quedevait-il
faire?Commentdevait-ilréagir?Son
discoursn’étaitpasvraimentcohérentet
elleétaitivre.Sapropreraisonétait
imbibéed’alcool.Ildécollatoutefois
seslèvresdecelledesapartenaire.
—Kaya…
Celle-ciouvritlesyeux.Leslarmes
redoublèrent.Ilputylireunetristesse
quilemettaitmalàl’aise.
—Adam,jet’aimetellement.Neme
repoussepas!Jet’enprie…Jeneveux
plusêtreséparéedetoi.
Kayafonditànouveausurses
lèvres,maisavecunempressementbien
plusmarqué.Ellelesembrassaitencore
etencore.Ethancompritquesonébriété
troublaitsonjugement.Iln’étaitpas
Adam.Ilnedevaitpasacceptercela.Il
nepouvaitprofiterdelasituation.Illui
restaitsuffisammentdeconsciencepour
qu’ilmettedeslimitesetarrêtecela.
Pourtant,l’entrainqu’ellemettait,la
chaleurdeseslèvresetcettesensation
siplaisanted’êtrelàpourquelqu’unle
poussaientàretardercetteéchéance.
Chaquemouvementdeseslèvrescontre
lessienneslemettaitausupplice.Plus
tôtdanslajournée,ilpensaitquela
torturepouvaitselimiteràunjeupuéril
avecduchocolat,maiscetourmentétait
bienridiculedevantceluiquil’habitait
encetinstant.
—
Kaya….
dit-il
dans
un
gémissementempreintdesouffrance.
—Tuenasenvieautantquemoi…
luidit-elletouteneffleurantseslèvres
duboutdesalangueetquémandantplus.
Ethanfermalesyeux,pensantsans
doutequelesupplicel’affecteraitmoins.
Ilserenditvitecomptequec’étaitune
mauvaiseidée,cessensationsétant
décuplées.Ilenavaiteffectivement
envie.Unefolleenvie.Uneenviequ’il
repoussaitdepuisplusieursheures,voire
plusieursjours.Ilnesavaitpaspourquoi
il
la
désirait
autant
à
chaque
provocation,maisc’étaitincontrôlable.
Tropfortpourqu’ilarriveàrésister.
Tropbizarrepourquecelasoitlogique
oucohérent.Elleéchappaitàtout
raisonnement.Ildevaitsatisfairecette
envie,avantquecelle-cineletue.
—Etmerde!lâcha-t-ilcommeune
capitulation.
Illaserradanssesbrasunpeuplus
fortetréponditàsonbaiserqu’ilne
pouvaitplusignorer.Leurslanguesse
mêlèrenteffrontément.Leseffluves
d’alcoolnegênèrentenrienleurenvie
del’autre.Kayaluicaressalescheveux
tandisquelesmainsd’Ethannetenaient
plusenplace.Ellesparcouraientson
dosettrèsvitedemandèrentplusde
contact.Ellesglissèrentplusbas,surses
fessesqu’ilmalaxaitsansretenue.Ethan
poussaungrognementdesatisfaction
alorsqueKayaselaissaitcomplètement
allerdanscetteétreinte.Leurslèvres
jouaient,
se
cherchaient
puis
se
trouvaient.Leurslanguessecaressaient
encoreetencore,avecuneardeurde
plusenplusévidente.Chacunpouvait
sentirunsoulagementàêtreprèsde
l’autre,contrel’autreetàrépondreà
chaquedésirquiparcouraitleurcorps.
Ethanneputs’empêcherdesourire.Il
étaitheureux.Ill’embrassaitetiladorait
ça.Ilavaitimaginécelaplusieursfois
depuis.Unvraibaiser,oùlesdeux
partissesentaientimpliqués.Illa
poussalentementenarrièrejusqu’àce
queledosdelajeunefemmetouchele
murservantdeclôtureàlapropriétéde
RichardLaurens.
Cecontactcontreunélémentferme
leurservantd’appuiaugmentad’uncran
leursdésirs.Ethanpouvaitlaisseraller
soncapriceens’assurantqu’ellenelui
échapperaitpas.Ilfitdescendrela
fermetureéclairdesonmanteauetglissa
sesmainsfroidessouslepulldeKaya
quipoussaunpetitcridesurpriseen
sentantlafraîcheurdesesdoigtscontre
sapeau.Ethanfitmigrerseslèvresvers
lecoudesapseudopetiteamie.Kaya
levasajambedroiteetl’accrochaàla
hanched’Ethan.Celui-cigrognaune
nouvellefois.Quitterlachaleurdesa
peauluiétaitdifficile,maissonenviede
lasentirencoreplusprèsdeluiétait
tropforte;ilsortitunemaindesousson
pull,attrapasajambejuchéesurla
hancheetlamassa.Samainsebalada
unenouvellefoisverssesfessesetd’un
gestesec,fitrapprocherlebassindesa
partenairecontrelesien.Kayapoussa
ungémissementcomplaisant.L’autre
maind’Ethantrouvarapidementun
terraindejeusouslesoutien-gorgede
Kaya.
Ethanvoulaittoutàlafois:
l’embrassersurlabouche,danssoncou,
titillerduboutdesalangueletétonqu’il
pinçaitsansménagement.Maispar-
dessustout,ilvoulaitlavoirprendredu
plaisir,commelapremièrefoisdansles
vestiaires.Ilvoulaitvoirsonvisagepris
dansuneextasequ’ellenepouvait
maîtriser.Ilvoulaitretrouvercette
osmoseentreeux,cepetitquelquechose
quilesavaientlaisséstousdeux
complètementhorsjeuàlafin.Tantpis
pourAdam.Tantpispourlabonne
conscience.Tantpispourlelendemain.
Lasentircontreluivalaittousces
sacrifices.
Jesuislepireconnardaumonde,
maistantpis.
L’hivermaintenantbienprésent
affichaitdestempératuresdenuit
presquenégatives,pourtantaucundes
deuxn’avaitfroid.«L’alcoolréchauffait
lescœurs»,disait-on…Dansleurcas,
ilréchauffaitbienplus.Ethanavait
chaud.Trèschaud.Ilavaitmêmedumal
àcontrôlercebouillonnementenlui
qu’elleamplifiaitparsesgémissements
etsescaressesdanssescheveux.
—PutainKaya,tuvasmerendre
fou…
Ethanfonçaunenouvellefoissurses
lèvresauxquellesiltrouvaunenouvelle
foisuneréponse.Uneréponsequilui
faisaitunbienfou.Exitlesdisputes,
l’aversionqu’ilsavaientl’unenvers
l’autre.Justecebesoindecomblerun
désir
évident
pour
l’autre,
juste
retrouvercetteintimitésiattirante,ce
jardinsecretrienqu’àeux.Sonardeur
s’intensifia
encore
et
il
souleva
soudainementlepulldeKayapour
goûtersontétondurciparsesdoigts.
Kayaexerçaunepressionsursatête
pouraccentuercettenouvelleétreinte,
pourquechacunpuissemieuxsavourer
cettedélicieuseattaqueannonciatricede
pleindenouvellessensations.La
complicitédelajeunefemmeàchacun
de
ses
gestes
l’enorgueillissait
davantage.Ilsentaitqu’ilpouvaittoutse
permettre.Iltenaitfermementsonbassin
contrelui,sentantsonexcitationprendre
del’ampleurdanssonpantalon.Kaya
ondulaitcontreluipourtenterde
satisfairesondésirleplusévidentetle
simplecontactdeleurssexesàtravers
lestissusdeleursvêtementsincitaEthan
àretrouverleslèvresdeKayapourla
posséderunpeuplus.Plusrienautour
n’avaitd’importance.Iléprouvaitun
besoinincontrôlabledelaposséder.Il
enroulasalanguedanslasienneencore
etencore,toutenmassantsafessedroite
etsonseingauche.Ilsavaitquelelieu
n’étaitpaspropiceàplus,maisilne
voulaitpasnonpluscassercette
ambiancesiparticulière.Ilvoulaitque
çadureinlassablement.Tousdeuxse
trouvèrenttrèsviteàboutdesouffleet
Kayalerepoussatoutdoucement.Ethan
nevoulaitpass’arrêter;ilrepritle
siègedesoncou.Kayarespiradeplus
enplusfort.Bientôt,ellesuffoquaet
repoussaplusénergiquementEthanqui
necompritpascechangementbrutalde
statut.
—ça…çanevapas…luidit-elle
blême,enposantsesmainsàplatcontre
lemur.
Sa
poitrine
se
soulevait
par
intermittence.Ethanputliredansson
visageunproblème.Elleétaitpâle.Il
tentadelareprendredanssesbraspour
nepasrompreleurintimité.
—Dis-moi…
—J’ai…..j’aienviedevomir!
Elleeutjusteletempsdefinirsa
phrasequ’unhaut-le-cœurluisaisitla
poitrine.D’ungestevif,ellerepoussaau
loinEthanetvomitsurletrottoir.Ethan
écarquillalesyeux,àlafoisperturbé,
perplexe,dégoûté.
Commentromprelamagied’un
momentintimeenuninstant?
DemandezàPrincesseKaya!Elle
m’auratoutfait!
Ethansesentitimpuissant;ilne
pouvaitfaireunpasdeplusverselle.
Lui-mêmenesesentaitplustellementen
formeenlavoyantrégurgitertoutson
repas.Toutdésirpourelles’étaitenvolé
commeunfétudepaillesouslevent.Il
sentait,luiaussi,lemaldecœurveniret
iln’eutlaforcedelasoutenirsans
manquerdevomirégalement.Ilallaàsa
voitureetyrécupérasonpaquetde
Kleenexetunpaquetdechewing-gum.
Kayaréussitàcalmersesmaux,mais
étaittrèspâle.Ellefinitpars’éloigner
desonchampdebatailleimproviséen
titubant.Ethanvintàelleetluitenditles
mouchoirsetleschewing-gums.
—Fautedemieux….luidit-ilblasé.
Kayalesattrapa,s’essuyalabouche
etmâchadeuxchewing-gums.Elle
s’assitalorsentailleurenpleinmilieu
delaruedéserte,nesentantplusaucune
forcelamaintenirdebout.
—Tunevasquandmêmepasfaire
unsittingici!Debout!
—Jenepeuxpas!Jemesenstrop
faible.
—Tuplaisanteslà!Ilesthorsde
questionquetudormesici!Onbouge!
J’appelleuntaxi.
—Sijemontedansuntaxi,jepense
quejevaisylaissercarrémentmes
tripes!
—Etonfaitcomment?
Aucuneréponsenevintdelapartde
lajeunefemme,complètementamorphe
maintenant.Ethans’attrapalescheveux
decolère.Cettefemmeétaitune
calamité.Ellearrivaitàlefairepasser
d’unétatd’excitationallantau-delàde
touteraisonàceluidedépitet
d’énervementenuneminute.Iln’avait
jamaisrencontréunefemmepouvant
jouer
autant
avec
ses
nerfs.
Malheureusement,iln’avaitpaslechoix
etdevaitfaireavec…
—OK,tupeuxmarcher?Marcher
vanousfairedubien.
Kayagémitdedéconvenue.
—Jeveuxdormir!Jesuisfatiguée
etj’aimalaucœur…
Ethans’agenouilladevantelleet
tentadelasoulever.
—Faisuneffort.Unefoisrentrée,tu
pourrasdormir.
—Tuneveuxpasmeporter?lui
demanda-t-elled’unevoixenfantine
alorsqu’elles’agrippaitàluiune
nouvellefois.
—T’espassérieuselà?
—Porte-moi!lesupplia-t-elletout
engémissant.Porte-moi…
Ethanlaregarda,telleuneenfant
malade.Ilsemitàrire,ébahiparses
changementsd’humeuretladécouverte
desesnouvellesfacettesd’elle.
—Certainementpas!
Kayafitunemoueboudeuse.
—Alors,jenebougepas!
—OK,bahrestelà!Moi,jerentre
toutseul!J’espèrequetun’aspaspeur
lanuitetquetunecrainspaslefroid…
Salut!
Ethans’éloignasansmêmese
retourner.Kayas’offusquasurle
moment,maislaperspectivederester
seuledanscetteruedéserteenpleine
nuitglacialenel’enchantaitguère.Elle
serésolutdoncàsuivresontortionnaire.
Tousdeuxfirentplusieursmètres,lui
devant,elleplusloinderrièrejusqu’àce
qu’Ethans’arrêteetsetournepourlui
tendresamain.Lajeunefemmele
regardauninstant,puissouritetlasaisit,
heureuse.Ellesemblaitavoirreprisun
peusesesprits,maisl’alcoolagissait
encoresurlacoordinationdeses
mouvements.Marcherdroitluiétait
difficile.Aussi,l’aided’Ethanétaitla
bienvenue.Envoyantsadémarche
hésitanteauboutdequelquesmètres,
celui-cis’agaça.
—Jetedéteste!Tunepouvaispas
tecontenterderegarder…Non!
Mademoiselle
a
voulu
faire
son
intéressanteenbuvantnosverreset
voilàlerésultat!
Ilsoupiraetfermalesyeux.Les
veinesdesestempesressortaient,signe
évidentdesonagacement.Pourtant,
quandilluitournaledosetsecambra,
Kayanecompritpas.
—Monte!Maisjetepréviens,c’est
justeunpeu!
Lajeunefemmeclignadesyeux.
Ilveutbien?
Ellesouritetsautasursondos.
Ethanpoussaungrognementsousle
poidsqu’elleexerçait.Ilattrapaalors
sesjambesetcommençaàmarcher.
—Jevousjure,qu’est-cequ’ilne
fautpasfaire?Franchement,t’abuses!
Ethanavançadanslanuit,faisantle
décomptedesminuteslesrapprochant
deleurdomicile.
—Pourquoia-t-ilfalluquejete
rencontre,sansdec’?Pourquoia-t-il
falluquel’onserencontredeuxfois?
Uneseulefoisnesuffisaitpas.Non!
Deuxfois,c’étaittellementmieux!
Mauditkarma….
Lefroiddecemoisdedécembre
formaitdelavapeuràchaqueexpiration
qu’ilfaisait.Soneffortétaitdeplusen
plusperceptibleaufuretàmesurequ’il
avançait.
—Putain,pourquoisuis-jerevenu
cheztoipourcefoutucocktail?
Pourquoi?Jevousledemande!Jene
pouvaispasresterdansmoncoin.Non!
Ilafalluquejereparteàlacharge!
Maisquelcon!Voilàquejemeretrouve
àporterunegrosselarve!
Ethans’arrêtapourlasouleverd’un
gestesecetlaremettremieuxsurson
dos.
—Surtout,nefaispastalégère!
Portebientouttonpoidssurmoi.Iln’ya
pasdesouci!Tumetuesledos,maisje
suissûrquetuprendstonpied,là!
N’est-cepas?Etcommeuncon,jedis
encoreamen.Iln’yapaspluscrétinque
moi!Pourtant,jesaisquelagentillesse
mèneàladouleur.Alorspourquoiai-je
l’impressiond’êtreunmasoquien
redemande?
Iljetaunœilpar-dessussonépaule,
maisKayaavaitsonvisageenfouicontre
soncou.
—Netegênepasàmerépondre!
C’estsansdoutetroptedemander!
Ils’arrêtauninstantpourvoirsitout
allaitbien.
—Eh!Çava?Tunedorspas,
j’espère?
Lesilencefutsaseuleréponse.Kaya
nebougeapasd’unpoil.
—Jen’ycroispas…Elledort!Ah
ah!Elledortetmoijemepaietoutle
saleboulot.
Ilsouffla,puisregardaducoinde
l’œillacheveluredeKaya.
—Tuvasencorem’enfairebaver
jusqu’àlafindenotrecontrat,pasvrai?
Ilregardaalorslecielchargé
d’étoilesetsourit.
—Çameva…maisnemefaispas
tropsouffrir.
-6-
Changé?
L’appartementsemblevide…
Kayaregardaendétaillesalon,
maisnevitaucunetraced’Ethan.Ellefit
letourdel’appartement,maisrien.
Ildoitêtreaubureaud’Abberline
Cosmetics…
Dansunsens,Kayaétaitsoulagée.
Ellenesesentaitpasd’attaqueàentrer
enconflitaveclui.Ellesetrouvait
engourdie,patraque,chancelante.Ses
souvenirsdelasoiréeétaientconfuset
elleneparvenaitpasàseremémorer
l’issuedecedîner.Ellen’osaimaginer
soncomportement.Ellesedoutaitbien
queboiredel’alcoolavaitdûaltérerses
sens.Ques’était-ilpassé?Pouvait-elle
se
permettre
de
demander
une
explicationsansqu’ilnesefâche?Si
celasetrouvait,elleavaitdéjàfaitune
chosequil’avaitfâché.
Ellesoupiraetallaverslacuisine
pourboirequelquechose.Ellen’avait
pastrèsfaim.Lesnauséesfaisaientle
yoyodanssonestomacetl’idéemême
d’avalerquoiquecesoitl’écœurait.
Malgrécela,saboucheétaitpâteuseet
elleavaitsoif.Ensedirigeantversle
comptoirquiséparaitlesalondela
cuisine,ellevitunpost-itcolléenplein
milieuduplandetravail,accompagné
d’uncompriméd’aspirine.
«Arrange-toipourêtre
encorevivantequandjeserai
rentré!Ethan»
Kayajetaunœilverslachambre
d’Ethanetgrimaça.
Unsimplebonjourpourcommencer
lajournéeluiécorcheraitleslèvres!Il
estdoncbienauboulot…
Elleouvritleréfrigérateuretse
contentadeboireunpeud’eauavecson
cachet.Nilelait,nilejusd’orangene
luidonnaientenvie.Ellesecalacontre
lecomptoiretregardal’heure.
Dixheures…
Sonregardfitletourdelapièceune
seconde
fois,
cherchant
quelle
occupationellepouvaittrouveren
attendantqueletempspasse.Quandon
n’estpasvraimentchezsoietseule,les
minutespeuventdevenirdesheures.Et
elledevaitreconnaîtrequeletemps
passaitbienplusvitequandson
tortionnairen’étaitpasloin.Elleposasa
bouteilled’eausurlecomptoiretcourut
danssachambre.Elleattrapason
téléphoneetcommençaàpianotersur
sonclavierunSMS.
—Etben,tuentiresunetêtedebon
matin!
Ethansortitdel’ascenseursans
mêmesaluerOliver.Ilsedirigead’un
paslourdverssonbureau.Ilposa
ensuitesoncafésurunepilededossiers
etselaissatombersursonfauteuil,la
têteenarrière.Oliverlesuivit,amusé.
—IlsembleraitqueMonsieur
Laurenst’aitachevéavecsonrituelde
passage…As-tufiniparsigner?
Ethanrelevalatêteetluilançaun
regardlas,blasé.
—Tucroisfranchementqueje
tireraiscettegueulesij’avaissigné?
—Oui.Tupourraisbienmarcher
commeunzombieensachantquetun’as
plusderaisond’êtreavectacharmante
petiteamie.
—Sijen’étaisplusavecelle,je
danseraislemoonwalksurlebureau!
—Donc,j’endéduisquetues
toujoursencontratavecelle,etnonavec
Laurens.
—Nonseulementjesuistoujours
avecelle,maisenpluselleafoutuen
l’airlasoirée.J’allaisl’étaler,levieux.
Ilnememanquaitquequelquesverres
pourluifairesafêteetqu’ilsigne!Le
tantrenommé«gouffrescandinave»
allaitflancher.Jeletenaiscefoutu
contrat.Maisilafalluqu’elle
intervienne,qu’ellesefasseremarquer
etpatatras!Toutaétégâché!
Oliver
sourit,
amusé
par
les
péripétiesdesonami.
—Qu’est-cequ’ils’estpassé?
—Cequ’ils’estpassé?Cequ’il
s’estpassé!Maislaprincesseabudeux
verresets’estétaléeausol!
Mademoisellem’aforcéàrentrer,car
ellenetenaitplusdebout,Mademoiselle
m’asautéaucouetm’achaufféaupoint
quej’aifaillicommettreunviol,
Mademoisellem’arepousséaussisecet
afaillidégueulersurmespompes.Tout
çapourqu’aufinal,jemepaieunmalde
dosàlaporterpendantunkilomètre
avantdevoirqu’elleronflaitsurmon
épauleetquej’appelleuntaxi!Voilàce
quis’estpassé!
Oliverleregardauninstant,avec
desyeuxdemerlanfrit,puiséclatade
rire.
—Sansrire?
—Ai-jel’airdeplaisanter?
Ethansefrottalevisagedesesdeux
mains,commepourtenterd’effacerla
lassitudeetlesurmenagedecesderniers
jours.
—Ellet’achauffé.Vraiment?Tu
veuxdirequ’ellet’afaitdurentre-
dedans?
—Pasdirectementàmoi….àson
Adam…souffla-t-ilenattrapantson
styloetlefaisantvirevolterentreses
doigts.Ellem’aconfonduavecluià
causedesonivresse.
—Mincealors!Ettun’aspasété
capablederésister?soutintOliveravec
unsourirecomplice.
—Varésister,toi!Tuenasde
bonnes!Onvoitquecen’étaitpastoi
quisubissaissesassauts.
Ethanjetasonstylod’agacement
tandisquesonamitentaitdegarderune
attitudesérieuseetcompréhensive.
—Ethan,agressésexuellementpar
lafemmequil’énerveleplus!Bendites
donc!finit-ilpardireavantderirede
plusbelle.
Ethanpestacontresonmanquede
solidaritéetsafaçonmoqueusede
commentersespropos.
—Ohhé!Çava!Netefouspasde
magueule!
Olivers’appuyaalorscontrele
dossierdesonsiège,songeur.
—Tusais,cettefemmeestun
cadeau.
—Tum’excuseras,maispourmoi
elleestloind’êtreuncadeau.Plutôtune
malédiction!
—Non,unmiracle!luidéclara
Oliverenluimontrantsonindex.Tu
viensdetoutmedéballersanst’en
rendrecompte!D’ordinaire,tuaurais
cachétonenvied’elle.Elleteperturbe
vraiment.Elletepousseàagir
différemmentdeteshabitudesetjedis:
«Tantmieux!».
—Cen’estpascequetucrois…
—Etjecroisquoi?
—Arrêteavectapsychologieà
deuxballes!Laseuleraisonquifaitque
j’aieuenvied’elleestjusteque…
que…
—Que?
—…quejenepeuxentoucherune
autreàcausedecefichucontrat!
—Ben,voyons!Tuvasmedireque
c’estjusteparcequetuesenmanque?
—Tout-à-fait!
Oliverritlégèrement,puisseleva
desachaisedefaçondépitée.Ilse
dirigeaverslasortieetsetournaune
dernièrefoisversEthan.
—Enattendant,lamanièredontelle
arriveàtedéstabiliserestinespérée.Tu
asbeaulenier,maistonregardne
trompepas.Ilestdifférentdevantcette
femme-là.Onatousremarquéçal’autre
soir,cheztoi.Etilestdetoutefaçon
évidentqu’ellen’estpascommeles
autresettulesais!Tusemblesmoins
méfiant,plusnaturel,moins…inquiet.À
croirequ’ellepourraitdomptertesplus
grandescraintessurlesexeopposé…
Moijesuiscontentquetul’aies
rencontrée.
Ilquittalapiècesansattendrede
réponse.Ethanexpirabruyammentet
grimaça.Ilregardasoncafé,songeur.
—L’amourmèneàlasouffrance,
Oliver.Aucunrisquequejeretombe
danslepanneauunenouvellefois.Iln’y
ariendenouveauchezmoi.Elleneme
changerapas…Iln’yariende
réjouissantouàespérer.
Lasonneriedesontéléphone
portableretentitàcemoment-là.Il
cherchadetouteurgencedansses
pochesl’objetmauditetregardaquilui
envoyait
un
texto.
Ses
yeux
s’écarquillèrent.
Kaya…
Niune,nideuxilouvritsonmessage
pourlelire.
Jeu.4Dec.201410:05,Kaya
Net’inquiètepas,jevais
tenterderestervivante
suffisamment
longtemps
pourqu’àtonretourje
puissetetraiterdeconnard!
Ilneputs’empêcherdesourire;elle
avaitlusonpetitmessagesurle
comptoirdelacuisine.Ilcommençaà
taperuneréponsesansattendre.
Jeu.4déc.201410:07,Ethan
Hâtedevoirça!Jene
rentreraipaspourmidi.Trop
deboulot.
Jeu.4déc.201410:08,Kaya
Tantmieux!Pourune
foisquejenet’auraipasà
mesbasques!
Jeu.4déc.201410:09,Ethan
Pourunefoisquejene
t’auraipassurledos!
Kayalutsonmessageetjetason
téléphonesurlelit.Ellegrognapourla
forme.
Toujoursàtrouverunerépartie!Il
m’énerve!
Elles’allongeaunmomentetfixale
plafond.Ilallaitfalloirmeublercette
journéeavantsonretour.Elledevait
alleraucimetière,maissonétatfaiblard
nel’encourageaitpasàaffronterlefroid
hivernal.Pourquoiavait-ilfalluqu’elle
boive
leurs
verres
alors
qu’elle
connaissaitlesconséquences?Elle
attrapasonoreiller,enfonçasonvisage
dedansetcriatoutenfaisantgesticuler
sesjambesdanslevidepourévacuerla
ragequilaconsumaitd’êtreaussiidiote.
LajournéepassaetKayas’était
contentéedevégétersurlecanapéà
regarderlatélévision.Ethanrentraune
nouvellefoisplustôt.Ilavaitréussià
déléguerunepartiedutravailet
n’attendaitqu’unechose:s’allonger.Le
maldetêtenel’avaitpaslâchédepuisle
matin,telunvicieuxrappelque
certainessoiréesnes’oubliaientpas.
Unefaçoninsidieusedeluidirequel’on
nerécoltaitquecequel’onsemait.Or,il
n’avaitpasrécoltéuncontratcomme
fruitdesasemence,maisunetempête
quiravageaittoutsoussonpassage:
Kaya.L’idéemêmededébattreavecelle
luimartelaitlecrâne.Ellen’avaitrien
réponduàla«perche»qu’illuiavait
tendueparSMS.Sesouvenait-ellede
quelquechose?Ilauraitaiméquece
soitlecas,maisilsavaitquecela
entraîneraitunetensionquiamplifierait
samigraine.Aussi,ilpréféranepasy
penser.
Ilouvritlaported’entréeavec
nonchalance,jetasescléssurl’assiette
dupetitmeublesursadroitecommeà
sonhabitude,retirasavesteetla
balançasansménagementausol.Il
balayaduregardlesalon.Kayaétaiten
trainderegarderlatélé.Ilpouvaitvoir
sesgrossesvachesquiluiservaientde
chaussonsdépasserdusofa.Ilretirases
chaussuressansmêmelesrangeret
s’avançaversellejusqu’àarriveràses
pieds.Kayaluilançaunregardde
travers,maisnebougeapas,nimêmene
luiadressaunmot.Ellesereplongea
aussitôtsurcequisemblaitêtreunfilmà
l’eauderoseouunfeuilletonétranger
pourménagèresdequaranteans.Ilposa
alorslegenousurl’accoudoiretse
laissertomberentreKayaetledossier
ducanapé.Kayasursauta.
—Non,maisçanevapas?!Qu’est-
cequetufabriques?
Ethanpassaunbrasautourdesa
taillepoursepositionnerunpeumieux.
—Çanesevoitpas?Jem’allonge
surmoncanapé!
Ilglissaalorssonvisageentrele
coussinetlescheveuxdesacolocataire
afindesecacherdelalumièrequi
accentuaitsadouleuràlatête.Kaya
tentadetournerunpeulasienneverslui
pourvoircequ’iltramaitdanssondos.
—Jesuissurtoncanapéaucasoù
tunel’auraispasremarqué!
—J’aivu…dit-ild’unevoix
étouffée.Tupeuxpartirsiçaneteva
pas.Moi,jen’aipasl’intentionde
bouger.Jesuismortetj’aimalaucrâne.
—Etbien,vat’allongerdanstonlit.
—Non!J’aipourhabitudede
m’allongersurMONcanapéquandje
rentre.Jenevaispaschangermes
habitudespourtoi.
—Tunel’aspasfaithier!
—Jen’aipaseuletemps,j’avais
monlivreàsauver.Maintenant,tais-toi!
J’aimeraisdormir.
Kaya
ouvrit
la
bouche
de
stupéfaction.
Vas-y,MonsieurConnardSans-
Gêne!J’hallucine!
Elletournaànouveaulatêtevers
l’écrandelatélévisionetsepinçales
lèvresdedéconvenue.Ellenesavait
quoifaire:partirdelàetluidonner
satisfactionenluilaissantsonfoutu
canapéouluitenirtêterienquepourlui
montrerqu’elleexistaitetqu’ellenese
laisseraitpasboufferparleméchant
loupqu’ilétait.Pirequecela,elle
n’osaitvraimentpasbougerdepeur
qu’ilcroiequ’elleseblottissaitcontre
lui.Ellepouvaitsentirsonsoufflesursa
nuqueetsescheveux.Ill’enlaçaitetne
bougeaitpas.Sarespirationlente,mais
régulièremontraitqu’ilnesemblait
nullementembarrasséparleurproximité
oulecaractèreincongrudeleurs
positions.
—Turegardesquoi?entendit-elle
doucementalorsqu’ilavaittoujoursson
visagecachécontreelle.
—Jecroyaisquetuvoulais
dormir…Qu’est-cequeçapeutte
faire?
—C’estjustepoursavoirsij’éteins
latélévisionoupas.Çasemblenulton
trucetlebruitmedérange.
—Touchelatélécommandeetjete
tuesurplace.Jevaisfaireressortirton
cerveauparlesnarinesetonverrasitu
osesteplaindrequetuasmalàlatête…
C’estundramacoréen,unfeuilleton.
Ethansoupira.
—Onauratoutvu….grommela-t-il
enresserrantsonétreinteetsecalantun
peupluscontrelecanapé.Leurlangue
m’arrachelesoreilles.Tunepeuxpas
regarderuntrucpluscivilisé,sans
déconner,etenfrançais.
—Jet’emmerde.Jeregardeceque
jeveux!
—Toujoursunvocabulaireaussi
classepouruneprincesse!
Kayapestaintérieurementetpréféra
jouerlasagesseennerépondantpas.
Elletournalégèrementlatêteaprèsune
minutedesilencepourvoircequ’il
faisait.Iln’avaitpasparlédepuisetelle
trouvacelasuspect.Était-ilvexé?En
mêmetemps,elleignoraits’ilétaitfâché
pourhiersoiretsielleavaitgaffé.Elle
regrettavitesonemportementetd’avoir
étéaussigrossièreaveclui.Elledécida
doncdetempérer.
—Tuasprisdel’aspirine?
—Jeterappellequejesuisdoté
d’unegrandeintelligencequimepermet
desavoirsij’aibesoind’uneaspirine.
Oui,j’aipris.
Letonsecd’Ethanetsadésinvolture
firentleverlesyeuxdeKaya.Aumoins,
ellesavaitqu’ilnedormaitpas.Mais
pourcequiétaitdesasoirée,elle
doutaittoujoursd’avoirrienàse
reprocher.
Soyezgentilleetilvouslerendra!
Elledécidadel’ignorer.Cen’était
qu’unidiotquineméritaitfinalement
pasuneoncedecompassiondesapart.
Elleseconcentrasursonfeuilleton
téléviséetrelâchaaufuretàmesurela
tensionqu’elleavaitéprouvéequandil
s’étaitallongécontreelle.Sentirsa
poitrinesesouleveretseretirerde
contresondosl’apaisaitplusqu’ellene
l’auraitpensé.Sonbrasluioffraitune
protectionquiluipermettaitdesentirsa
chaleurcorporelle,telleunecouverture
laprotégeantdufroid.Elleselaissaun
peuplusallercontresoncoussinet
fermalesyeux.Justeunpeupourles
reposer.
Kayalesouvritdansunélande
panique.Elles’étaitassoupiesanss’en
rendrecompte.S’endormirdanslesbras
d’unhommeautrequ’Adamétait
impensableetcelafaisaitdeuxfoisque
cela
arrivait
pourtant.
Elle
leva
légèrementsatêteetvitqu’ellenelui
tournaitplusledos.Elleétaitcontreson
torse.Combiendetempss’était-elle
assoupie?Avait-ilsentiqu’elles’était
retournée?Ethandormaittoujoursàson
plusgrandsoulagement.Ellefermales
yeuxuninstant,pourserabrouer
mentalementd’êtreaussibêteet
inconsciente,puisregardaànouveau
Ethan.Ilsemblaitserein.Pasinquietou
tourmenté.Complètementrelâchéet
vulnérable.Étonnammentmignonpourle
connardqu’ilétaitquandilétait
éveillé…
Kayasouritenvoyantcevisage
paisible.Ellepouvaitlevoirendormiet
s’enréjouit.
Unpartout!Chacunsontour!
Elleremarquasesmainscontreson
torse.Sesmainsqu’elletenaitcontre
elle,maisquitouchaientaussilazone
interdite,lalimitequ’illuiavait
imposée.
Elle
se
remémora
les
cicatricesqu’elleavaitvues,àprésent
cachéessoussachemise.Pourquoi
refusertoutcontactdessus?S’ilvenaità
seréveiller,l’engueulerait-ilpouravoir
touchéinconsciemmentsontorse?Elle
leval’indexverssachemise,maisn’osa
allerplusloin.Finalement,Ethanétait
unhommebizarre.Froid,distantpar
moment,unvéritableconnard,puis
d’autresfoisaffichantunesensibilitéet
unintérêtpourlesautresévidents.Une
façonbienàluidedédramatiseretde
vousfairevoussentirbien,àvotre
place.Elleavaitressentidéjàcette
impressionquandilss’étaientretrouvés
danslevestiaireduSilkyClub,quand
ilsavaientmangédescrêpesensemble
ouencoreàlasortiedeleurséance
maquillage.Encetinstantencore,
allongéelà,contrelui,ellesesentait
bien.Cettesensationquivouslaisse
penserquequoiqu’ilarrive,ilestlà
pourvotrebien.Ladernièrefoisqu’elle
avaitperçucela,c’étaitdanslesbras
d’Adam.Souvenirsiagréable,maiselle
nepouvaitêtrequedéroutéeparce
sentimentdeprotection.Ellenedevait
pasacceptercela.L’idéemêmequ’elle
puissepartagercebien-êtreavecun
autrehommeétaitinconcevableet
encoreplusavecl’hommequiluifaisait
face.Etpourtant,laseulechosequ’elle
souhaitait,c’étaitdefermerencoreles
yeux,deresterdanscettebulleque
représentaitcecanapéetsesentiren
sécurité.
LesoleilétaitcouchéquandEthanse
réveilla.Ilsesentaitengourdietcomprit
vitepourquoi.Kayaétaitcontrelui,
blottiecontresapoitrineetendormie.La
premièrepenséequiluivintàl’esprit
étaitdeprotégersontorseetsonréflexe
futdeposersamainsursonbraspourla
repousser,maisilfuttoutaussivite
attiréparsonvisagecomplètement
calmeetsansintentionsmalhonnêtes.Ce
n’étaitpaslapremièrefoisqu’illa
voyaitendormie.Ilsoupira,lasd’être
unenouvellefoissoncoussin.Ilgrimaça
devantsamoueangélique.
Etdirequecommeçaonlui
donneraitleBonDieusansconfessions
alorsqu’unefoisréveillée,cettefille
estleDiablepersonnifié!
Ilétiraseslèvresdansunrictusde
dépitettentadebougersonbrascoincé
pourlefairepasserpardessuslatêtede
Kaya.Celle-cigémitunpeu,contrariée
danssonsommeil.Alorsqu’elles’agita
unpeu,ilenprofitapourpasserson
épaulesouslatêtedelajeunefemmeet
laporterunpeupluscontrelui.Ilexpira
desoulagementquandilsentitles
fourmillementsdesonbrass’estomper.
Kayacalasatêtebiencontreluietlui
souritinconsciemment.Ethanlaregarda
uninstant,effaréparsonmanquede
vigilanceetsavulnérabilitélorsqu’elle
dormait.Ilpouvaitenfairecequ’il
voulait;elleavaitunsommeildeplomb.
Ilrestaainsiplusieursminutesàattendre
jusqu’àcequ’iltrouveletempslong.
Sonmaldetêteétaitpasséetilsemblait
êtredéjàtard.Illorgnasursamontre.
Dix-huitheurestrente…
Ilobservaunenouvellefoisla
princesseendormieetsourit.Ilarrivaità
lagardercontreluisanscrainte.Il
repensaauxmotsd’Oliveretneput
qu’admettrequ’ellel’apprivoisaitsans
qu’ilnevoiel’attaquevenir.Ilne
pouvaitnotersadéfaitequelorsquele
faitétaitaccompli.Cettefemmebalayait
d’unreverstoutessesdéfensesetmême
s’iltrouvaitçatroublantetdéconcertant,
voireagaçantauxpremiersabords,ilse
surpritàs’ensentirsoulagéensuite.
CindyAbberline,samèreadoptive,lui
avaitdéjàrépétéqu’ildevaitfairela
paixaveclagentféminine,qu’unjour
viendraitoùiln’auraitpaslechoix,
qu’il
devrait
surmonter
ses
appréhensions.Forceétaitdeconstater
queKayaétaitcetélémentimposédans
saviepourpeut-êtrelefaireavancer.
Maisjusqu’àquelpointpouvait-il
s’autoriseràavancer?Ill’ignorait.
Quelleslimitespouvait-ilfranchirsans
prendrelerisqued’êtreànouveau
blessé,sesentirsivulnérablequ’il
faillefairesaignersoncœurpourne
pluséprouverladouleur?
«Jevaistedonnertapremièreet
dernièreleçonpaternelle,àdéfaut
d’avoirunpère.Souviens-toitouteta
vied’unechoseaveclesfemmes:la
gentillesseapporteladouleur,l’amour
mèneàlasouffrance.Tuasvouluêtre
gentil,prouvertonamour…Regardeà
quoicelat’amené.Regarde-la.Elle
pleure,maistucroisqu’ellesouffre,
elle.Non.Toutn’estquecinéma.Sielle
t’avaitvraimentaimé,ellenet’aurait
pastraitécommeunobjetdontellese
sertpourvivre,seconsolerou
s’amuser.Lesfemmessonttoutes
pareilles…
Jevaisterendreserviceetsoigner
ladouleurqu’ellet’ainfligée.Durant
dessiècles,onestimaitquepourguérir
decertainesmaladies,ilfallaitretirer
lesangimpurdesoncorps.Certains
utilisaientdessangsues,d’autres
faisaientdessaignées…Maisqu’en
est-ildesmaladiesd’amour?Cemal
quivousrongelapoitrine,vousétouffe,
vousempêchederespirertantla
souffrancevousécrase…Ilsuffitdela
traiterdefaçonindélébile,pourqu’à
chaque
rechute,
on
agisse
en
conséquence!Iln’yariendemieux
quelaprévention!Jevaistevacciner
contrecesentimentridiculequ’est
l’amour…
Ethandéglutitenserappelantcejour
oùilétaitdevenuunhommesanscœur.
Cejouroùilavaitcomprisqueles
sentimentsétaientlapirechosequisoit.
Lejouroùsonsangcoulapourse
libérerdesasouffrance…Ilsesouvint
alorsdecetteautredouleurquecellede
soncœurenmiettes,unedouleurplus
insidieuse,d’abordlégère,aussifine
qu’unelamepuisgrandissante.Tuerla
douleurparuneautredouleur.Tuerses
démonspoursenettoyerdetoutes
impuretés.Seprotéger,seprévenir
commeleluiavaitapprisleseulhomme
quiaitvraimentexistédurantson
enfance.Sescicatricesétaientdevenues
sontalisman.Unealarmequise
déclenchait
dès
que
le
moindre
sentimentvenaitréparersoncœur
meurtri.Durantdesannées,ilavait
gardésoncœurenl’étatpournepasle
voirencoreplusbrisé.Ils’étaitforgé
unecarapaceallantau-delàdesimples
convictions.Ilétaitdevenuautrepour
quel’espoirnenaissepasetqu’ille
regretteensuite.
Pourtant,devantcettefemmequi
dormaitcontrelui,sontalismanne
s’activaitpas.Sonalarmenesonnait
pas.Sescicatricess’estompaientenun
lointainsouveniralorsqu’ellesétaient
d’ordinaireincrustéesdanssamémoire
teluntatouage,uneempreintemarquée
auferbrûlant.Kayaarrivaità
neutralisersesdéfensesalorsmême
qu’ellenecherchaitpasàatteindreson
cœur.Était-cejustementparcequ’ellene
voulaitpasdesessentimentsqu’illui
laissaitautantdelibertés?Parcequ’il
avaitcettegarantiequ’entreelleetlui
riennepouvaitfonctionner?Parcece
qu’ellesavaitdéjàleblessersansmême
l’aimer?
Ilscrutasonvisagesereinun
moment,cherchantlaclédumystère
«Kaya».Ellen’avaitriendeparticulier
ensoiquipouvaitentraînerson
changementderéactiondevantelle.
Plutôtmignonne,maispasforcémenttrès
classe.Visiblementsanslesou.Un
caractèredechien.Ilavaitbeau
l’observer,ilnecomprenaitpas
pourquoiavecelle,toutparaissait….
simple.Illevaalorssonindexpourlui
toucherduboutdudoigtseslèvres.
Toutétaitcompliquéavecelleà
premièrevue,ilssedisputaienttoutle
temps,s’injuriaient,sefrappaient,mais
parmoment,ils’étonnaitderessentirde
lasimplicitéavecelle.Iln’yavaitrienà
cacher,rienàprouver,rienàprotéger.
Son
doigt
caressa
sa
lèvre
supérieurepuisildescenditsursalèvre
inférieure.
Toutétaitcompliquéavecelle,mais
plusilspassaientdutempsensemble,
plustoutluisemblaitnaturel,tout
semblaitallerdesoi.Vouloirêtreprès
d’elle,laserrerdanssesbraspuis
s’embrasseretêtrelui.
Ilsetournalégèrementpourpouvoir
mieuxsepencherau-dessusd’elle.Son
doigtécartadoucementleslèvresdela
jeunefemmequiappelaientlessiennes.
Kayaétaitsansdéfense,offerteàluietà
sesintentionsdeconnard.
Toutétaitcompliqué,maissonenvie
étaitlimpide.Ilnepouvaitfinalement
qu’admettrequ’ildésiraitréitérerleur
incartadedelaveille.Ilsepenchaun
peupluspourpouvoirgoûterune
nouvellefoisàsesbaisers,maisKaya
gémitànouveauetgesticulalégèrement.
—Mmm…Arrête…déclara-t-elle
alorsdanssonsommeiltoutendétachant
d’ungestedelatêtesurlecôtéses
lèvresdesdoigtsd’Ethan.
Ethaneutunmouvementdereculde
latête,surprisparl’interprétationqu’il
devaitdonneràsademande.Illavit
sourirelégèrement,puissecalmer.Il
souritàsontour,aimantsafaçonsi
particulièredes’opposeràlui,même
pendantsonsommeil.Illuicaressaà
nouveausalèvresupérieure.Kaya
s’agitaànouveaudansungrognement
quilefaisaitriredoucement.Même
endormie,latorturerétaitunvéritable
plaisirqu’ilserefusaitdevoirluiêtre
retiré.
—Laisse-moidormir…Moiaussi
jet’aime…
LesdeuxderniersmotsdeKaya
s’éteignirent
dans
un
souffle
et
foudroyèrentsurplaceEthanquisentit
soncœurseserrer.L’entendredireces
deuxmotsétaitàlafoisplaisantet
terrifiant.
«Jet’aime».Lafameuseformule
qu’ilavaitbanniedesonvocabulaire,
qu’ilavaitrenduestérileparnécessité
venaitdelesaisirsanscriergare.Kaya
avaitditcelaavecuneévidenceetune
facilitéaberrantes.Commesicelaallait
desoi,quec’étaitlogique,quele
momentétaitpropice.Etcommeuncon,
cesdeuxmotslerendaientheureuxalors
qu’ilauraitdûenavoirpeur,lesrejeter
aussinet.Bienplusgrave,sonalarme
interneauraitdûhurlerledangeretlui
diredeseméfier,maisils’était
fourvoyé.Soncœuravaitréagiplus
qu’iln’auraitdû.Ilavaitsentile
pouvoirdecesdeuxmotsluienvoyer
cettedosed’adrénalineetdebien-être
quirendaitlesgensamoureux.Cette
sensationqu’ilavaitconnueetqu’il
avaitadoréressentiràuneépoqueet
qu’ilsouhaitaitmalgrétoutréentendre.
Soncœurbattaitplusfortquela
normale.Ilagissaitdefaçonirraisonnée,
chaotique.Soncerveaun’arrivaitpasà
calmer
cette
montée
d’excitation
absurde.Ildevaitsesentirpaniqué,sur
ladéfensive,maistoutsoncorpslui
dictaitl’inverse.Sonattraitpourses
lèvresdevenaitpluslancinant.Ilvoulait
laposséder.S’assurerquecesdeux
petitsmotsnes’évaporeraientpasaussi
sec.Ilavaitcetteirrépressibleenvie
d’enêtrevéritablementl’acquéreuren
lesmatérialisantparlecontactdeleurs
lèvres.Celanepouvaitêtrepossible.
Commentpouvait-elleluidiredetels
mots?Sonsubconscientparlait-ilpour
elle?Ilsepenchaànouveauverselle
pourprendreactedesesdeuxderniers
mots,lesconfirmer,quandKaya
prononçadansunsoupir:
—…Adam.
Ethansefigea.Levisagequilui
faisaitfaceétaittoujoursaussiinnocent,
angélique,maisellevenaitdelui
assénerlecoupdegrâce.Unefoisde
plus,ilserenditcomptequ’ilétaittrop
faible.Passertantd’annéesàs’endurcir
neservaitàrien.
«Tusaisquelesttonproblème
Ethan,c’estquetuesungossefaible.
Tudégoulinesdeconfianceenversles
autres.Tuestropgentil.»
Ethanserralesdentsetfermason
poingdecolère.Colèreenverselle,
enverslui.LesmotsdeStanlui
revenaientàlafigureetlereplacaient
danssaréalité.
Lagentillesseapporteladouleur,
l’amourmèneàlasouffrance.Crétin!
Commentpeux-tutelaisseramadouer
delasorte?Elletetouchelecœur
d’unmillimètreetvoislemalqui
s’ensuit!Tucroyaisquoi?Commesi
ellepouvaitt’aimer…Elletedéteste!
Commesitupouvaisyrépondre…Tu
n’espasamoureux,nonplus!Àquoi
penses-tu,crétin?L’amour,çan’existe
pas.Depuisquandtuattendsdecette
femmedel’amour?
D’unmouvementbrusque,ilse
relevaducanapé,emportantsurson
passagelajeunefemmequitombadans
unbruitsourdausol,cequilaréveilla.
Ellesefrottalebras,l’airperdu,puis
tournalatêteversEthan.
—Eh!Çafaitmal!dit-elleagacée.
Sonregardnoirétaitderetour.Il
semblaitfurieux.
—Jenesuispasunoreiller.Ne
prendspasdemauvaiseshabitudeset
resteàtaplace!
LabouchedeKayaformaun«O.»
destupéfactionalorsqu’ill’enjamba
pourallers’enfermerquelquesminutes
danssachambre.
Ilmereprocheçaalorsquec’est
luiquis’estcalécontremoile
premier!Iln’estpasgonflé!
Ethan
en
ressortit
d’un
pas
déterminé.Ils’étaitchangé.Ilportaitun
sacdesportàl’épauleets’étaitvêtu
d’unjogging.Ilsedirigeaversl’entrée,
ramassaseschaussureslaisséesenplan
etlesrangea.Puisilattrapasapairede
basketsetcommençaàlesenfiler.
—Tuvasoù?luidemanda-t-elle
curieuse.
—Loindetoi!
Kayagrimaçaetcroisalesbras.
—Tuvasfairedusport,c’estça?
C’estloin?
—Sansdoutepasassezencorepour
êtresûrquetumefouteslapaix.
—Jeveuxvenir!
Ethanseredressaetlatoisaun
instant,levisagetoujoursaussifermé.
—Tuesidioteoutulefaisvraiment
exprès.Jeparlepourtantfrançais!
—J’aitrèsbiencompris,maisje
m’enmoque!Jemesuisennuyéetoute
lajournéedanstonappartement.Prends-
moiavectoisinonjesensquejevais
péteruncâbleàresterici.
—Sijet’emmène,c’estmoiqui
vaispéteruncâble.
Kayahaussalesépaules,comme
pourluisignifierquecen’étaitpasson
problème.Ethancroisaàsontourles
brascontresapoitrine.Sespupillessi
noiresdecolèrevenaientdeseteinter
d’unelueurdedéfiqu’ellene
connaissaitquetropbien.
Iln’yapasderaisonquejesoisle
seulconàmefaireavoir!Finile
pauvretypegentil!Jevaisreprendre
lesrênesettemontrerquidécidequoi!
—Tuveuxvenir?Trèsbien.
Embrasse-moi!
—Quoi?demanda-t-ellecommesi
onluiavaitavouéunechoseimpensable.
—Tuastrèsbienentendu.
Embrasse-moi!
—Etpourquoiferais-jecela?
Ethanattrapasonmanteaulaisséau
sol.
—Àtoidevoir…Tchao!
Ilsedirigeaverslaported’entrée
sansplusdeconsidérationpourelle.
—Attends!cria-t-ellepresque.
Ethans’immobilisaetsourit.
—Onn’apasbesoindefaireça.Il
n’yarienquijustifiecebaiser.Personne
devantquiilfautprouverquoiquece
soit.
—
Effectivement…
dit-il
calmement.
—Alorspourquoitumedemandes
ça!s’énervaKaya.
—Parcequejesaisquec’estlapire
chosequ’onpuissetedemanderetquetu
neleferaspas.Doncjepeuxpartirseul
ettranquille.Surce…
Ethanouvritlaporte,lesourire
sournois.Kayaluiattrapalamanche
pourleretenirunenouvellefois.Ilposa
sesyeuxsurlamaindelajeunefemme
etsouritdeplusbelle.
—
Arrête
de
sourire
outrageusement!luidit-elleengrinçant
desdents.
Ethansetouchaleboutdunezdu
reversdesonindex,heureuxdetenirsa
vengeance.
—Tuasréfléchi?Tuveux?
Kayabaissalatête.Ilétaitévident
qu’elleétaitcontre.Elletentaalors
l’approchedelasuppliante.
—S’ilteplaîtEthan…jeseraisage
commeuneimageetjeteprometsdeme
teniràdistance.
Ethanl’observauneseconde,peu
convaincu.Ilfitungestebrefdel’épaule
poursedétacherdesonempriseetpassa
lepiedsurleseuildelaporte.La
paniquesubmergeaKayaquivoyaitsa
soiréedeveniraussiennuyeusequesa
journée.
—Jenecomprendspas!Pourquoi
tumedemandesçaalorsquetume
détestestoutautant!Quelplaisir
éprouves-tuàdemanderunechosequite
répugnetoiaussi?
Ethansetournaetfitunpasvers
elle.Ilsepenchasursonvisageetla
fixadroitdanslesyeux.
—Parcequemonplaisirest
ailleurs,danslasouffrancequejepeux
t’infligeràlefaire!Embrasserunefille
n’estrienpourmoi.J’enaiembrassé
tellementquej’aifinidecompterilya
bienlongtemps.Parcontre,toi…C’est
tellementsacrécheztoiquejesais
l’effetécœurantquejepeuxteprocurer.
Etça,putainquec’estbon!
Kayaseraiditderage.Ilavait
raison.Ilavaitentièrementraison.Sa
demanderelevaitdusuppliceàsesyeux.
Iln’yavaitqu’Adamquicomptaitetrien
d’autre.Toutsoncorpsluiappartenait.
—
Connard
!
lança-t-elle
douloureusement,avecpresquel’envie
depleurerdesonimpuissance.
Ethanlaregardad’unairtriomphant.
Ilétaitunconnardetçaluiallait.Il
reprenaitsesmarques,reposaitses
fondements,imposaitsesdistancesavec
elle.Sonenviedel’embrasserdevenait
unsujetvain.Ilavaitl’affirmation
qu’ellelerepousseraitquoiqu’ilarrive.
Unsoulagementquiluifaisaitdubien.Il
avaiteusonmomentdefaiblesse,maisà
présentilretrouvaitdesasuperbeet
pouvaitreprendreseshabitudes.Il
s’avançadanslecouloir,rassuréet
laissantderrièreluil’objetdeses
conflitsintérieurs.Ilappuyasurle
boutondel’ascenseuravecpanache,
commes’ildébordaitànouveaude
vitalité.Iljetaundernierregardvers
Kayaquisemordaitlalèvrede
frustration.Lesportesdel’ascenseur
s’ouvrirent.Ilsemitàrire,ravide
constaterqu’ilavaitgagnécettebataille
quandsoudain,illavitveniràlui.Elle
luiattrapalecoldesonmanteauet
l’obligeaàavancersonvisageversle
sien.Lecontactentreleurslèvresfut
brusque,maladroit,maisintense.Kaya
relâchalégèrementsonemprise.Ethan
seliquéfiasurplace.Sanouvelleardeur
venaitdedisparaîtreaussivite.Ses
résolutionss’étaientànouveauenvolées
enunefractiondeseconde.Ilsentità
nouveauceplaisirfrappertoutsonêtre,
cetespoirquiréveillaitl’endorphineet
ladopamine,hormonesqu’onfabrique
quandonestphysiquementattiréparune
personne.Exitl’enviedeluifairepayer
sesmotsdetroplorsdesonsommeil.Il
pouvaitsatisfairecetteattiranceetle
choixfutvitefait:acceptersonbaiser.
Ilputconstaterqu’elleavaitlesyeux
fermés.Elleavaitétébrouillonnedans
songeste,maisellel’avaitfait.Elle
l’avaitchoisi,lui.PasAdam.Lui.Une
victoirequiluifaisaitchavirerlecœur
d’unemanièreinsoupçonnée.Ilpouvait
bizarrementtoutluipardonner.
Kayasedétachadeluiaussi
brusquement.Ellesemblaitessoufflée,
commesielleyavaitmistouteson
énergie.Elleleregardauninstant,puis
serecomposauneallurefière.
—J’enaipourdeuxminutesle
tempsdemechanger…
Ellefitdemi-touretrepritlechemin
del’appartement.Ethanrestaestomaqué
etcomplètementcharmé.Ilvouluten
rire,maisn’yarrivapas.Encoreune
fois,elleétaitalléeau-delàdeses
convictionspourlefairetaire.Elle
l’avaitànouveaucoifféaupoteau,mais
commeàchaquefois,ilenvoulaitplus.
Peut-êtrequecelamarcheraitune
nouvellefoissi…
—Saufquetatentativemême
courageusen’estpassuffisante.Jeveux
unvraibaiser!Aveclalangueetla
passion!Necroispasquejesoisun
connarddebasétage!
Kayasefigea.Elletournalatête
verslui,effrayée.
—Tu…tuplaisantes,n’est-cepas?
—Jesuistrèssérieux.Tuveux
venir,mets-yvraimentlesmoyens!
Ethanposasespoingssurses
hanches,l’airprovocateur.Kayaserrala
mâchoirederage.Ellerevintverslui,
vindicative.
—Tun’aspasledroit!Tum’avais
promisquetum’emmèneraissije
t’embrassais.C’estfait!Alors,respecte
taparole!
—Monplaisirestplussadique,
Kaya.Nemesous-estimepas.Tuaurais
dûtedouterquequandjeveux,c’està
fond!Unbaiserdepacotille,c’estquoi
quandjepeuxtedemanderplusette
mettrevraimentàmamerci?
—Jetedéteste.Ilesthorsde
questionquejelerefasse.
Ethanexpirabruyamment.
—Aaaah…queldommage!Un
sacrificevain…Bonnesoirée!
Ilentradansl’ascenseurets’appuya
contre,lesmainsdanslespoches,faceà
elle.Kayatapadupied,affectéeparla
situationdanslaquelleellesetrouvait:
tropavancéepourreculer,passuffisante
pourobtenirgaindecause.EtEthanqui
refusaitd’arrondirlesangles…Elle
regrettaitmaintenanttrèsclairementde
l’avoirfait!Elleauraitpuprendreses
cliquesetsesclaquesetpartirfaireun
tourdanssoncoin.Elleauraitdûignorer
sondéfi,commetoutepersonnesensée.
Mais,encetinstant,ilétaittroptard.
Ellepayaitsaspontanéitéetsafiertéà
vouloirlefairetaire.
—Jetedéteste!luidit-elleune
secondefois,lesyeuxhumideset
affligéedeconstaterqu’elles’était
fourvoyéepourdesprunes.
—Tantmieux!Moiaussi!
Illuifitunaurevoirdelamainet
appuyasurleboutonzérodurez-de-
chaussée.Sonsourirevicieuxétaitle
pireaffrontqu’ilpouvaitluifaireencet
instant.Lesportesdel’ascenseurse
fermèrentetchacunnevoulaitse
détacherduregarddel’autre,commesi
l’affrontementn’avaitdefinquelorsque
l’autrecéderaitlepremier.Ethann’avait
plusrienàperdre,ilavaitgagnéla
partie.Ilavaiteusonbaiseretpouvait
savourerlapaixd’êtreseulloind’elle,
àprésent.Maisilvoulaitlaprovoquer
jusqu’àladernièreseconde,dans
l’espoirderessentircesprémices
devenirunfeud’artificeouquelque
chosequilesubmergerait.Ilétaitdans
unecontradictiontotale:larepousser
pournepasflancher,lasentirprèsdelui
pourapprécierchaquemiettequ’ellelui
accorderait,
pour
découvrir
des
sensations
insoupçonnées
en
sa
présence.
—C’estquandmêmebêtequetune
puissespasdéfoulertacolèredansune
salledesport!conclut-ilalorsqu’ilne
lavoyaitpresqueplus.
Kayajetaalorssonpiedentreles
deux
portes
qui
se
rouvrirent
automatiquement.Ethanfixasonpied,
étonné.Elleentradanslacageetlui
attrapaunenouvellefoislecoldu
manteau,avecforce.
—Jetehais!
L’intonationdesavoixétaiten
accordaveclafaçondontelle
l’agrippait:féroce.Illarévulsaitde
façonévidente.Sesyeuxétaientemplis
dedégoûtetdetristesse.Pourtant,elle
s’avançacontreluietposaunenouvelle
foisseslèvrescontrelessiennes.De
façonplusdouce,moinsmaladroite,plus
calculée.Ethansubitcontretouteattente
cettesecondechargecommeune
délivrance.Ilétaitheureuxdepouvoir
accentuercedésirquinelequittaitpas.
Leréitérerencoreetencore.Leurs
bouchess’entrouvrirentetleurslangues
setrouvèrent.Leurspaupièresse
fermèrentàl’unisson.Ethansentitson
cœurs’emballerànouveauetsonbesoin
d’assouvirsonenvied’elleexploseren
lui.Ilpritsonvisageencoupeet
accentualeurdansequ’ilvoulaitfaire
durer.Kayadétachasesmainsdelui
pourtenterdeprendredurecul,maisil
lamaintenaitfermementcontresa
bouche.Elletentadereculer,maisilla
dominaitaupointquetoutsoncorps
faisaitpoidscontreelleetqu’il
avançait.Bientôt,ilssecognèrentcontre
undesmursdel’ascenseuretEthan
quittaunedesesmainssursonvisage
pourlaposersursondos.C’était
devenuinstinctif.Vouloirlasentircontre
lui,commelaveille.Vouloircalmer
cettefrustrationquinel’abandonnaitpas
ettrouverdesréponsesauxquestions
dontilcraignaitl’issue,maisqui
apaisaientsonâmetemporairement.
Justeprofiterdecetinstantsidélicieux
sanssepresser,tranquillement.Kayase
sentait
asservie.
Elle
dépendait
entièrementdubonvouloird’Ethan.Ilne
luilaissaitaucunemargedemanœuvre
pourfuir.Seulslesassautsdesalangue
autourlasiennecomptaient.Etmalgréla
forcephysiquequ’ilexerçaitsurelle,
ellesentaitbienunecertainedouceur
danscebaiser.Unesensationapaisante
quinelalâchaitpas.Ill’encerclaitde
sesmainsetsesbras,maisson
emportementétaitcontrôlé,commes’il
voulaitquecebaisernesoitpasdu
grandn’importequoi.Elleseretrouva
rapidementàboutdesouffleettentade
lefairesavoiràEthanengesticulant.
Celui-cidétachaseslèvresdessiennesà
contrecœur,maisgardasonfrontcontre
lesienetsamainsursonvisage.Il
voulaitlasentirencoreunpeucontrelui.
Ilouvritlesyeuxetregardaceuxde
Kaya.Ellesemblaittroubléeetil
pouvaitadmettrequ’iln’enmenaitpas
largenonplus.Sapoitrinesesoulevaità
unrythmeassezsoutenu,signequ’elle
avaitbesoindereprendreunpeud’air.
Maisc’étaitplusfortqueluietillui
déposa
un
nouveau
baiser.
Il
transgressaitunpeuleurmarchéenlui
envolantunautre.Maisqu’importaitla
suite!L’appeldeseslèvresétaittrop
puissantpournepasyrépondre.Tous
deuxsecontentèrentdesimplespetits
baisersqu’Ethanluidérobaitàlavolée
alorsqueKayasesentaitsubjuguéepar
lesprunellesmarronssiquémandeuses
del’hommequiluifaisaitface.C’était
complètementabsurdedesecomplaire
danscettesituation;pourtant,aucundes
deuxn’arrivaitàymettreunfrein.Kaya
selaissaitfaire,subissantlapression
deslèvresd’Ethansurlessiennes
commesichaquefois,illuilançaitun
charmequiluiendormaitlecerveau
pournedevenirquesensations.Elle
étaitunpantindanssesbrasetelle
s’imaginapourlapremièrefoisquelle
pourraitêtrelasuiteàtoutça.Comment
soncorpsréagirait-ils’ilvenaitàla
touchersoussesvêtements?Elleavait
déjàconnul’extaseavecluirien
qu’avecdeuxdoigtsetelleavaitpeurde
cequ’ellepourraitressentirsi…sice
baiservenaitàtropseprolonger.
Undéclicenellesurvintetla
ramenaàlaréalité.
—Ethan…murmura-t-ellealors
qu’ilvenaitdetirerversluisalèvre
inférieure.Jepeuxveniravectoi,
maintenant?
Ethangémit,nevoulantpasmettre
finàcedéfi.
—Jeprendsçapourunoui….lui
déclara-t-elleavantdeposersesmains
sursontorseetd’appuyer.
Ethansestoppanet.Ilnereculapas
brusquement,maispritdeladistance.
Ellecommençaitàconnaîtreseslimites
etilvoyaitbienqu’elleenjouaitquand
celaétaitnécessaire.Ellebaissales
yeuxetsortitdel’ascenseur.Ethanne
bougeapas,tropaffectéparleurbaiser.
—Prendsdesaffairesderechange
etdequoiprendreunedouche.Je
t’attendsdanslavoiture…luidit-il
doucement.
Kayafilaversl’appartementsans
mêmeseretourner.Ethanappuyasurla
touchedurez-de-chausséeuneseconde
foisdefaçonmécanique.Ilavaitencore
dumalàcomprendretouslessentiments
quisemélangeaientenlui.Ilnetrouvait
paslemoyend’analyserlachosede
façon
cohérente.
Les
portes
de
l’ascenseurserefermèrentetilselaissa
glisserausol.Ils’attrapalescheveuxet
secachalevisage.
—Putain,maisqu’est-cequi
m’arrive?
-7-
Sportif
Kayaarrivaentrombedansla
Corvette.
—Jesuislà!Onpeutyaller!
Ethanlaregardauninstantreprendre
sonsouffleetdémarra.Kayadésamorça
lesilencepesantdanslavoitureaubout
dequelquesminutes.
—Alors,elleestoùcettesallede
sport?
—Tuverras.
—Jevaisenfinpouvoirsavoirquel
sporttupratiques!Nerveux?
Ethans’arrêtaàunfeutricoloreet
tournalatêteverselle.Sontonenjoué
montraitquecequivenaitdesepasser
dansl’ascenseurnesemblaitplusla
tourmentervraiment,alorsqu’ilétait
toujoursdanscetroubleplutôteffrayant.
Ilpensaitlaperturberenlamettant
devantunultimatumdontlesdeux
possibilitéslemèneraientversla
victoireetfinalement,c’étaitluiquien
faisaitlepluslesfrais.Depuisledébut,
cequ’ilentreprenaitcontreellese
retournaitensadéfaveur.
Effectivement,ilétaitnerveux,mais
pourdesraisonsdifférentesàcelles
auxquellesellepensait.Chaquenouvelle
journéeensacompagnielemettaitdans
unétatprochedelacrisedefolie.Il
passaitpartoutessortesd’émotionsà
caused’elleetarrivaitdifficilementà
gérertoutcela.Etentrelasoiréedela
veilleetcesoir,sonétatémotionnel
avaitétésérieusementtouché.S’il
pensaitquecequ’ilyavaiteuentreeux
devantchezLaurensavaitétéomisdesa
mémoireàcausedel’alcool,ilne
pouvaitémettrecettesuppositionpour
aujourd’hui.Pourquoiapparaissait-elle
danssavoituresansêtreplusaffectée
quecela?Commentarrivait-elleàfaire
commesitoutétaitnormalaussi
rapidementalorsqu’ellea«trahi»
quelquepartsonAdamadoré?Mais
surtoutpourquoilui,sesentait-ilaussi
touchéparunsimplebaiser?Pourquoi
avait-ilfalluqu’illatestedecette
manièreplutôtquedeluifairemordrela
poussièrecommeàleurpremière
rencontreparunmoyenplusapproprié?
Qu’est-cequiavaitchangépourqueson
comportementseradoucisseautant,pour
qu’iljoueautantaveclefeu?Pourquoi
ressentait-ilunteldésirdelafaire
sienne?
Tantdequestionsauxquellesles
réponsesrestaientfloues.Soncorps
répondaitausieninstantanément,dès
qu’ilsétaientproches.Lesentait-elle
aussi?Sentait-ellecetteattractionquile
poussaitàsecomporterdefaçonsi
contradictoire?Avait-elleaussicette
impressionincontrôléedevouloirêtre
plusprochedeluimalgréson
engagementenversAdam?
Ilnel’aimaitpas,maisladésirait.
Enanalysantbienleschoses,celanele
changeaitpasdesautresfemmes.
Pourtant,ilressentaitundangeravec
elleplusgrand.Uneintimeconviction
qu’ilseperdraits’ils’enapprochait
trop.CommeIcarequiserapprochaitdu
soleiletbrûlaitsesailesavantde
tomber.
Malgré
cela,
sa
chaleur
l’attirait.Ilétaitcepapillondenuit
devantlalumièreaveuglante,àtenterde
touchermaladroitementl’ampoulepour
nefairequ’unetilredoutaitcedestin
funestequipouvaits’ensuivre.Illa
désirait,maisnedevaitpasflancherau
risquedes’anéantirunenouvellefois.Il
avaitbeausedirequetoutcelane
mèneraitnullepart,ilnecessaitde
repenseràceplaisirqu’ilressentait
quandilpouvaitl’embrasser,latoucher.
Ildevaitsavoir.Savoirpourquoiil
n’arrivaitpasàgardercettefroideur
avecelle.Savoirpourquoiilsesentait
sidémunidevantsesréactions.Mais
surtout,ilvoulaitserassurer.Sentirque,
quoiqu’ildécide,ellelerepousserait
bien.Quoiqu’ilfasse,elleseraitune
secondebarrièreàsonattirance.
—Kaya…Tutesouviensde
quelquechoseàproposdelasoirée
d’hier…jeveuxdire,unefoisqu’ona
quittéledomiciledeLaurens?
ReparlerdecettesoiréechezM.
Laurensluiapparaissaitcommeune
évidenceàprésent,uneimportance
capitalepourneplusfocaliserdessus
parlasuite.Illaregardauninstant,
cherchantuneexpressionsursonvisage
pouvantl’aideràsavoirsilui-mêmene
l’avaitpasrêvé,siellenetentaitpas
justededissimulerlamêmecrainteque
lui.Ilneputqueremarquerlafindeson
enthousiasmedevantsaquestion.
—
J’ai
eu
un
comportement
déplaisant,n’est-cepas?luidemanda-t-
ellegênéeaprèsunsilence.Jet’assure
quej’ensuisdésolée.Quandjebois,
c’estlacatastrophe.Jenemesouviens
derienensuite.Jesuiscomplètement
désinhibée.Adams’étaitmoquédemoi
unefois,carj’avaisfini…
Ellepoussauncrid’horreuretse
jetasurEthan,implorante.
—Nemedispasquej’aifinien
petiteculottesurlatable!
Ethanlafixa,sansvoix.
Enpetite…
Iltoussotapouréviterderougiren
pensantàlascèned’undéhanchélascif
surunetable,lesmainssursesseins.
—Nondutout…
—Ouf!fit-elleenposantlamain
sursapoitrinedesoulagement.Tant
mieuxsimadignitéestsauve!
LefeupassaauvertetEthan
redémarralavoiture.Ilhésitaà
continuerladiscussion.Ilétaitpartagé
entrel’idéed’éclaircircertainspoints
avecelleetlasimpleenviedepasserà
autrechose,vuqu’ellenesemblaitpas
avoirdeflashback.Pourtant,ilvoulait
savoirsil’épisodeduvestiaireetleurs
derniersbaisersavaientunsens,une
suitelogique,qu’elleluidisesielle
avait
aimé.
Était-elle
prête
à
recommencer?Ilserralevolant,fâché
parsonindécisionàremuerdes
souvenirsquipouvaiententraînerde
gravesconséquencesdanssoncas.Kaya
lefixaensilenceetcompritquequelque
chosen’allaitpas.
—Qu’est-cequ’ils’estpassé
alors?
—Riendutout.
—Menteur.C’estenrapportavec
Richard?
—Non.Tut’esjustefaitpasserpour
uneivrogne.Riendegravequandon
veutsigneruncontrat!
—Ohhé!Çava!Jem’excuserai
auprèsdelui.C’estunhommeintelligent
luiaussi!Etsurtoutdotéd’ungrand
sensdupardon….pascommecertains
quiaimentrabâcher!finit-ellepardire
entresesdents.
Ethanfitvirersonvolantversla
gauchedansunepetiteruemenantdans
unhangar.Ilstoppalemoteurdela
Corvetteetsetournaunenouvellefois
verselle.
—Donctunetesouviensvraiment
derien?
Kayasondasespupilles,perplexe.
—Pourquoiinsistes-tu?Qu’est-ce
quetutentesdemedire?
Ethansoupira,maisneréponditpas.
Ilouvritlaportièredelavoitureet
sortit.Kayapaniqualégèrementdevant
sonsilencevolontaire.Elles’activaà
attrapersonsacdesportetquitta
l’habitaclepouralleràsonencontre.
Elleluiattrapalebraspourqu’illui
fasseface.
—Ethan!Qu’est-cequej’aifait?
dit-elleplusqu’inquiète.
Illajaugeauninstant.
—Rien.Jevoulaisjustetedire
qu’iln’yapasdemalàéprouverdes
besoinsetvouloirlessatisfaire.C’est
humain.
—Pou…pourquoimedis-tuça?
Dequelsbesoinsparles-tu?
—Desbesoinsqu’unefemmepeut
éprouverdevantunhomme.
Kayatentadecomprendreoùil
voulaitenvenir,maissonvisage
désemparéforçaEthanàluirévélerla
vérité.
—Tum’asembrassé.
Kayalâchasonbrasetreculade
deuxpas,visiblementaffligéeparcette
révélation.
—Oh.
—Oui,oh.Ettuyasmisde
l’ardeur.Beaucoup.Aupointquej’en
viensàpenserqu’aufondnotrepetitjeu
danslesvestiairesduSilkyClubt’a
vraimentpluetquetuaimeraisbien
recommencer.
Ethansemitàsouriredefaçon
entendue,ravienyrepensant.Cefoutu
sourirequinelelâchaitpasquandil
trouvaitdequoilarabaisseroula
fustiger,lamettremalàl’aise.Elle
pouvaitdevinerqu’ilétaitheureuxet
fierdelui.Maispirequecela,elleétait
inquiète.Jusqu’oùétait-ellealléepour
qu’ilfassedetellesconclusions?
Pouvait-ellevraimentlecroire?Nese
moquait-ilpasd’elleaufinal?
Ethanfitdeuxpasensadirectionet
approchasonvisagedusien.
—Etmonpetitdoigtmeditquetu
asbeaumedétester,tunedétestaispas
cequis’estpassédansl’ascenseurnon
plus.
Ilfittressautersessourcilspour
lancerlejeudelaprovocationdontil
venaitdetrouverunécho,unefaçonbien
àluid’effacersontroubleetexhorterce
quilerongeaitendéposantlestortssur
elle,enlamettantaupieddumur.Kaya
bredouillaundébutdephrasesans
arriveràensortirquelquechosede
concret.Saconsternationétaitévidente.
Sahontevisiblesurtouslesporesdesa
peau.Sadéceptionlisibledanssesyeux.
Iln’attendaitplusqu’uneréponse
acceptabledesapart,maintenantqu’il
l’avaitmisedevantcesvérités.Elle
trouvalaforcederépondreenle
repoussantdesesdeuxmainssurson
torse.
Ethansesentitàlafoisencolère,
mais
heureux.
Malgré
ses
recommandations,
elle
avait
une
nouvellefoisposésesmainssurluien
sachantqu’ilseraitagacé.Ellevoulaitle
mettreàdistance,remettreleschoses
dansleurcontexteetçaluiconvenait:
pasdeconcessions,pasd’affinités,pas
d’espoirvain.Uneréponseconcrèteà
une
question
concrète.
Un
refus
manifestedetoutespossibilités.Un
accident,unefaiblessepassagère,rien
del’ordred’unquelconquesentiment.
Rienquimérited’êtreressassé.
—Queleschosessoientclaires…
dit-elleavecunregardmauvais,ilne
s’estrienpassé.Nidanslesvestiaires,
nihiersoir,nimêmeilyauneheure
dansl’ascenseur.J’aimeAdam.Je
n’éprouveaucunplaisiràmefaireavoir
partesmanigances.Monseulbesoin,
c’estquetusoisloindemoirapidement
etquejeretrouvemeshabitudes.Jen’ai
pasenvied’assouvirmalibidoavecun
connard,nimêmemafrustrationouquoi
quecesoitd’autres.Jepeuxtrèsbien
pratiquerl’abstinencesic’estpour
gardermessouvenirsd’Adam.C’estle
seuldontjeveuillegarderdes
souvenirs.Est-ceclair?
—Trèsclair.Alors,arrange-toi
mêmeivrepourgardercetteconviction!
—Arrange-toipourneplusme
demanderdesbaiserssansjustifications
pertinentes….murmura-t-elleendéviant
sonregardverslebas,sensiblement
gênée.
Ethansouritmalgrélui.Ilsvenaient
desemettred’accordsurlefaitqu’il
n’yavaitriendephysiqueentreeuxet
pourtant,elleavouaitàdemi-motque
leurdernierbaisernel’avaitpaslaissée
demarbre.Songranddiscourssurson
désintérêtvenaitdes’effacerparcette
simple
demande,
révélatrice
d’un
égarement,d’unbouleversementenelle.
Elleavaitaimé,trouvéunesensation
suffisamment
agréable
pour
lui
demanderdenepaslarevivre.
Toutétaitclair,maissafrustrationne
semblaitpasdisparaîtrepourautant.Sa
gêneétaitadorable,saremarque
justifiée,maisimpossibleàaccepter.Il
avaitencoreenviedelatoucher.Lui
faireunepichenette,laserrerdansses
bras,luidéposerunbaisersurlefront
ouailleurs.Ilserraalorssamâchoirede
frustrationetsemauditd’êtreaussi
idiot,influençable.Ildevaitsefaireune
raisonmalgrécetteattirance:elleetlui
c’étaitunecombinaisoninconcevable,
un
calcul
trop
compliqué,
une
conjoncturetrophasardeusepours’y
attarderenvain.Mêmesicebaiserdans
l’ascenseurlesavaittroublés,mêmesi
elle
lui
demandait
de
ne
plus
recommencer,uneforcelepoussaità
espérerencore.
—OK.
Ilnetrouvariend’autreàajouter.
Prendresesdistances,semettre
d’accordsurleslimitesluiparaissait
êtrelasolutionlapluspertinente.Ilne
devaitpasselaisserprendreparun
béguin.Ilétaitplussolidequecela.Tant
qu’elleletiendraitelleaussiàdistance,
toutiraitbien.Chacunàsaplace,chacun
avecsonrôle,niplus,nimoins.
—Allons-y…dit-ilplussèchement
qu’ilnel’auraitvoulu.
—C’estquoicehangar?
—Undojo!
Kayasuivitdequelquespasson
partenaire,incrédule.
—Undojo?Tupratiquesdoncbien
unartmartial!Lequel?
Ethanouvritlaported’entréeet
Kayaputentendredescrisvenirde
l’intérieur.Illuicédalepassagedansun
actecourtoisetelleputvoirunlong
couloir,recouvertdeposterssurdes
événementssportifsoudelaprévention.
Judo,karaté,kendo,lutte…Autantde
sportsquedepossibleshypothèsessur
cequepouvaitexercerEthan.Illaguida
alorsversunegrandesalle,avec
plusieurstatamis.Despersonnesen
kimonos’échauffaientous’entraînaient.
—Jepratiqueletaekwondo.C’est
unsportdecombat,decontactoùtudois
touchertonadversaireavectespiedsou
tespoings.
Kayasetournaverslui,admirative.
Ilregardaitlesautressportifss’entraîner
avecunelueurenthousiastedansles
yeux.
—Tuvasmemontrercommenton
fait?luidemanda-t-ellequémandeuse.
Ilbaissasatêteverselleetlafixa.
—Tuveuxtebattreavecmoi?lui
demanda-t-il
avec
cette
incitation
sournoisedanssonsourire.C’estvrai
quetuaimesbienmefrapper!
Kayagrimaça,puissourit.Elleétait
contente.Elleendécouvraitunpeuplus
surlegrandEthanAbberlineetelle
pouvaitaussiprofiterd’unedécouverte
grâceàlui.Ellejouaittoujoursaveclui
lechaudetlefroid,maisellepouvait
admettrecesoirqu’elleaimaitça.
—Jevaisterétamer,connard!
Ethansourit,unenouvellefois
sidéré
par
son
aplomb
et
sa
déterminationàluitenirtête.
—Onvavoirça…jevaismettre
matenuedanslesvestiaires.Jereviens.
IllaissaKayaquelquesminutes
seule.Elleputprendreletempsde
regarderenquoiconsistaitcesport.
Ethanrevintavecunkimonoblanc,
agrémentéd’uneceinturenoire.Elle
souritquandellelevitlaréajusteravant
delatrouver.
—Noire!Jecomprendsmieux
pourquoilestypesduSilkyClubont
ramassé!
—Impressionnée?luidemanda-t-il
fièrement.
—Oui,jelereconnais…
Kayavoulutseretenirdesourire
pournepasluidonnertropdejoie,mais
ellen’yarrivapas.Celui-cisemblait
tropheureuxpourquesonsourirenesoit
pascommunicatif.Illuiattrapalamain
etsedirigeaverssescollègues.
—Hieverybody!lança-t-ilen
chantonnant.
—Hééé!Ethan!Tevoilà!Ona
commencéleséchauffements.
Unhommed’unetrentained’années
commeEthan,maisplusfluet,vintàeux.
—
Oui,
je
vois
ça.
Exceptionnellementcesoir,jeresteraià
distance.J’ai…uneenfantàbaby-
sitter!
Kayas’offusquaunpeuetluidonna
uncoupdecoude.Ethanencaissala
douleurenclignantd’unœil,mais
rigola.
—Depuisquandturamènestes
conquêtessurletatami?s’étonnaun
autred’unecinquantained’années,typé
asiatique,cachédansuncoindelasalle.
Ildégageaituneforcetranquille,un
respectindiscutable.Sansdouteun
professeur.Ethanluiserralamainquand
ilarrivaàeux.
—JevousprésenteKaya,esquiva-t-
ilpournepasavoiràjustifierleur
relation.Kaya,voiciMaîtreKimYeong-
Cheol,monprofesseur.Elleveutqu’on
sebatte,doncjenevaispasmefaire
prieretjevaisluifairegoûterle
plastiquedutatami!Iln’yapasd’autres
raisonsàsaprésence.
Legroupecomposéd’unedizaine
d’hommessemitàrire.
—Méfie-toiKayaalors!ditun
grandbrunauxyeuxbleusqu’elletrouva
toutàfaitàsongoûtphysiquement.
Ethanestvraimentsanspitiédansun
dojo.C’est«pasdequartier»!Tuen
pratiquesdéjà?
—Euuh…non.C’estlapremière
fois.
—Jevois…
IlregardaEthanavecunpetit
sourire.
—S’ilesttropduravectoi,viens
mevoir!Çaseraitembêtantquetu
sortesdececlubtraumatisée!
—Héé!Onvoitquevousnela
connaissezpas!fitEthanfaussement
contrarié.C’estuneteigne,cettefille!
Tunedevraispasfairedespropositions
aussiinconsidéréesavantdesavoirdans
quoitutelances,Léo.
Kayaluibalançaunsecondcoupà
l’épaule.Ethanpoussaungémissement
bref,signequelecoupavaitétéplusfort
quelepremier.
—Envoicilapreuve!gémit-ilen
setenantlescôtes.Jenevoispas
pourquoijedevraisêtreconciliant.Elle
nem’épargnepas,elle!
—Léo,oncommencequand?
minaudaKayapourluieffacersonair
plaintifsurlevisage.
—Maisquandtuveux!luisourit-il
enlafixantdesesyeuxbleuspleinsde
promesses.
Ethanobservalascèneavec
effarement.Était-ilentraindelaséduire
oufaisait-ilcelajustepourl’agacer?
—Tuchangesvitetonfusil
d’épaule,àcequejevois!
—Tun’asqu’àarrêterd’êtreaussi
désobligeantavecmoi!déclaraKayaun
peuhautaine.
—Maistuesunetêteàclaques!
C’estinstinctif!
Kayapoussauncridestupéfaction.
—Léo,allons-y!dit-ellealors
fermement,toutenfusillantduregard
Ethan.
Etmerde!Ilnemanquaitplusque
ça!Léo,dequoijememêle!
Ellepassasonbrassousceluide
Léoquifitunclind’œilpar-derrièreà
Ethan.Celui-cipestadevoirqu’ilse
retrouvaitcommeuncon,sousleregard
desautresamusésparleurcharmante
petitescène.
—Parfait!Bonvent!luicria-t-il
alorsqu’elleétaitentrainderireàune
blaguequeLéovenaitsansdoutedelui
dire.Enfinlapaix.
Ilseretiraalorsdansuncoinet
commençasesétirements.Ilvoulutfaire
levidedanssatête,seconcentrersur
ses
échauffements,
faire
comme
d’habitudeetsedétacherdetout,mais
sonregardnecessaitdebifurquervers
LéoetKaya.Lavoirdanslesbrasd’un
autreattisaitsondésarroi.
Bahvas-y!Fais-toitripotersous
couvertd’un«jet’apprendsàleverla
jambe»!Etaprèsellevamesortirdes
«Adamchériquej’aimeplusque
tout».Foutagedegueule,oui!
Kayas’amusaitbien.Léoétait
patientetprenaitletempsdebienlui
expliquerlesbonsgestespournepasse
blesser.Illuiavaitapprisàfrapperavec
lepiedàdifférenteshauteurs,àse
défendreencasd’attaque,àparerdes
coups.FrapperdanslaraquettequeLéo
luitenaitluifaisaitdubien.Ellepouvait
déchargertoutessesangoisses,sa
rancœur,
sa
fatigue
dessus.
Léo
n’hésitaitpasàlaféliciter.Ilnelevait
jamaisletonetsesyeuxmagnifiques
n’enlevaientrienauplaisirdecelle-ci,
vraimentsaisieparsoncharme.Malgré
cela,ellenepouvaits’empêcherdejeter
uncoupd’œilfurtifversEthan.C’était
plusfortqu’elle.Uneinquiétudeàne
pasl’avoirdanssonchampdevision?
Àlevoirpréparerunmauvaiscoup?
Unesimpleenviedeserassurer?Un
besoindelesentirprèsd’elle?
Ilnesemblaitpasaffligéparson
absenceàsescôtés.Ils’échauffaitseul,
donnantdescoupsdanslevide,suivant
unecertainerigueuretundéroulement
qu’ellepouvaitassocieràunedanse.
ElleretrouvasonvisagedurduSilky
Club.
Un
visage
emprunt
d’une
déterminationetd’unefroideurévidente,
maisilyavaittoujoursceplaisircriant
àlibérertoutecettefouguequ’ilavaiten
lui.
—Kaya,tucontinuesouturegardes
notrecherEthan?
KayasetournasubitementversLéo,
rougedehonte.
Flagrantdélitconstaté!Idiote!
—Pardon…jet’écoute.
—Ilestincroyable,pasvrai?
déclaraLéoabattu.Ilfautreconnaître
qu’ildégageuneassurancenaturellequi
nevouslaissepasindifférent.Quandje
l’airencontrélapremièrefois,c’était
ici.Ilneparlaitpasbeaucoup,maisétait
unadversaireefficace.Ilestdeceuxqui
saventcequ’ilsveulentettrouvent
toujourslesmoyenspouryparvenir.Ila
une
capacité
d’analyse
assez
hallucinante.C’estduràadmettre,mais
jel’admire.
—Tut’esdéjàbattucontrelui?
—Oui.Plusieursfois.Etilest
redoutable.
Kayabaissalesyeux,concédantses
propos.Sport,travail,jeu,paroles,
gestes…ilétaitredoutablepartout.On
nepouvaitéchapperàEthanAbberline
etfinirqu’écrasé.Mêmesiserebeller
étaitunexercicequiluicoûtaitcher
pourgardersadignité,ellecommençait
àbienconnaîtresafaçondeprocéder:
onlepaietoujoursàunmomentdonné.
Ellel’observaunenouvellefois.Son
regardcroisaalorslesien.Ellelui
souritinstinctivement,puisserenfrogna
d’êtresiconciliante.Ethancessases
mouvementsetlafixaintensément.Elle
sesentitbizarrementtrèsgênée,comme
sisesyeuxappelaientlessiens,comme
sicesimpleregardluiordonnaitde
revenirauprèsdelui,commesisaplace
n’étaitauprèsdepersonned’autreque
lui.Ellepaniquauninstantettournala
tête
pour
rompre
cette
alchimie
fantasquequ’ellevenaitderessentir.
Ethansecrispaunpeuplus.Il
n’aimaitpasl’idéequ’ellelerejette
autant,qu’ellel’ignorevolontairement.
Ilaimaitencoremoinsqu’ellelefasse
pourresteravecunautrehomme.Il
devaitsedéfouler,passersesnerfs.Il
attrapaunplastrondanssonsac,
s’équipadesesprotectionsauxjambes
etauxbras,misunecoquilleàson
entrejambeetenfilasoncasque.
—David!Çateditunpetit
combat?!cria-t-ilàundesespotes,tout
ensautillantsurlapointedesespieds.
—Pourquoipas!
EthanavaitchoisiDavid,caril
savaitquec’étaitunadversairedetaille
etqu’iltrouveraituneréponseàses
attaques.
—Voilàquidevientintéressant….
s’enthousiasmaYeong-Cheol.Voyons
voircequeçavadonneraujourd’hui…
Ilstoppasadémonstrationàdeuxde
sesélèvesets’approchadutatami.
—Chris,tuvaslesarbitrer!
ordonna-t-ilavecunpetitsourire
sadique.
—Bonetbienjecroisqu’onva
fairecommetoutlemondeetregarder…
Léoallas’asseoirsurunbanccontre
l’undesmursdelasalle.IlinvitaKaya
àenfairedemême.
—C’estunsacréattirailqu’ilsont!
Ilestvraimentnécessaire?
—
Tu
vas
vite
comprendre
pourquoi!ritlégèrementLéodevantsa
remarque.Quandl’arbitreannoncele
débutducombat,lescoupsportés
peuventêtreimpressionnants.
—Oh.
Kayaposalesmainssursesgenoux
etobservalesdeuxadversairesse
mettreenplace.Chrisprononçaune
injonctiondansuneautrelangueetles
deuxhommessesaluèrentalors.Puis,il
déclaraunenouvellephraseetlecombat
commença.Tousdeuxsemirentà
sautiller,chacunsurlequi-vive.Ethan
souriait,leregardvif.Sesprunelles
brillaientetavaientretrouvéleur
noirceurprésentantsoncôtéplus
sombre,plusrebelle,plussauvage.
Davidselançaenpremieretattaqua
d’unpetitcoupdepiedverslahanche
gauchequ’Ethanparasansproblème.
Puiss’enchaînèrentlestentativeset
contre-attaques.Elleputconstaterla
souplessedesdeuxconcurrentspardes
coupsdepiedsretournéspouvant
atteindrelatêtedel’adversaire.Comme
l’avaitsoulignéLéo,lesgestesétaient
impressionnantsderapidité.Uncoup
pouvaitviteblesserl’adversairemême
sichacundesdeuxsportifsprenaitla
précautiondenepastropforcer.David
avaitsensiblementl’avantage.L’attaque
nécessitaituneattentionpourchacundes
deuxhommes:l’unpoursedéfendre,
l’autrepourprévoirlacontre-attaque
éventuelle.
—Çavavite…commentaKaya,
assezabasourdieparlabeautédu
combat.
—Oui…murmuraLéoàsonoreille.
C’estlarapiditéetl’anticipationqui
fontlematch.Ilsembleraitqu’Ethanne
soitpasencorerentrédanslecombat.
Enmêmetemps,onnepeutintercepter
uneattaqueetregarderlajolie
demoiselleassiseàmescôtésenmême
temps!
KayatournasonvisageversLéo,
gênéeparsaremarque.Celui-cilui
souritetluifitunclind’œil.C’estàce
moment-làqu’Ethanjetasonattention
surKaya.Celle-ciavaitlesyeux
exorbités.Ilpouvaitlavoirrougiralors
queLéoladévoraitduregard.Par
colèredenepasêtrelecentre
d’attention,Ethantentauncoupdepied
verslatêtequeDavidcontraparun
autreinverséettouchacelui-cienplein
torse.Ethanchancelapuistombaàterre,
souslaforcedugestedeDavid.
L’arbitreordonnaunepausepourque
celui-ciserelève.
Ethanregardaunenouvellefoisvers
Kayaqui,cettefois-ci,l’observait.Il
pouvaityvoirunfrancsourire.Unpeu
honteuxdes’êtrefaitavoirparDavid,il
luirépondittoutefoisparunsourire
avantquecelle-cinehurle:
—Vas-yDavid!Rétame-le!Venge-
moi!
DavidtournalatêteversKaya,
complètement
surpris
par
son
encouragement.Elleluimontrason
pouceenl’airpourleconforterdansses
actions.Ilsemitalorsàrougir,
enorgueilliparlafiertédeplaireàcette
femme.Ethansesentitridicule.Il
pensaitl’avoircommesupportrice,mais
finalement,commeàsonhabitude,elle
seréjouissaitdesesmalheurs.Lacolère
montaenlui.
Mademoisellem’abandonnepour
allerdraguerouvertementdevantmoi
etenplus,elleencouragemonennemi
ensecomportantavecluidefaçon
équivoque!AttendKayaquejetermine
cecombat!Jevaistefairetafête!
L’arbitreprononçalareprisedu
combat.Ilretiraàpeinesonbraspour
laisser
aux
deux
adversaires
la
possibilitédesebattrequ’Ethanlança
uneattaquedirectesurlethoraxde
Davidquiseretrouvarapidementpris
depaniquedevantsavélocité.Ethan
enchaînaunsecondcouppuisun
troisièmeenpleinetêtesansqueDavid
puissecontrerquoiquecesoit.
L’arbitreordonnaunenouvelle
pause,lepauvrehommetropacculépar
lesassautsd’Ethan.Tousdeuxse
replacèrentaucentredutatamietle
matchreprit.
—Ilsemblequetuaiesvexé
Ethan…souffladoucementLéoàKaya.
Ilareprisdupoildelabête.Ilmènela
secondepartie.
Kayafitunemoueboudeuse,peu
raviedevoirsonpoulainperdre,mais
finalementsourit.Ethandéployaitenfin
sontalent.Fortheureusement,iln’avait
pasceregarddestructeurcommelorsde
labagarreauSilkyClub.Ilétait
simplementcombatif,déterminéet
prenaitunplaisirmanifesteàrendreles
coups.
L’arbitreordonnalafindumatchau
boutd’uneminute,concédantlavictoire
àEthan.Lesdeuxsportifssesaluèrentet
seserrèrentlamain.Davidvoulutdire
unmotàEthan,maiscelui-cifonça
immédiatementhorsdutatami,vers
Kaya.Ilretirasonplastron,puisson
casquesurlecheminetsepostadevant
elle,furieux.
—Alors?Quiest-cequetu
encourageais?Rappelle-le-moi?J’ai
gagnéettonchampionamangémonpied
danslafigure.Tufaismoinslamaligne,
là,avoue!
Kayasoupira,puisselevadubanc.
Elleleregardadelatêteaupied,peu
décontenancéeparsontondereproche
etsourit.
—Topelà!luidit-ellealors
heureuseetlevantsamaindevantlui.
Ethanconsidérauninstantsa
demandeetsamainlevéeverslui.Était-
ellefinalementcontentequ’ilaitgagné?
Ilnesutcommentinterprétercela:
moquerie,provocation,nonchalance?
Voyantsonmanquederéaction,
Kayaajouta:
—Etbientuvoisquandtuveux,tu
peux!Monpetitamiestlemeilleur!
Ethanputvoirunpetitsourire
complicesurseslèvres,cequi
l’enchanta.
Monpetitami?
Cetteappellationluifitchaudau
cœur.Celaallaitsansdirequ’ilétaitson
petitamiparleurcontrat,maislavoirle
revendiquerétaitbientropatypiquepour
qu’ilnes’enenthousiasmepas.Iljeta
soncasqueàterreetpouffa,saisipar
l’attitudetoujoursplussurprenantede
Kaya.Illuiattrapasamainlevéeetla
portapar-dessussonépaule,loin
derrière,laforçantàsecolleràlui.
Kayaseretrouvaàquelquescentimètres
desonvisage,embarrassée.Illuipassa
sonautrebrasautourdesataillepour
qu’ellenes’échappepasoupuissese
défendre.
—Serais-tuentraindedirequetu
asfaitexprèsd’encouragerDavidpour
quejemefâcheetquejegagne?
Kayasemitàsourire,raviequ’il
comprennesesintentions.
—Whouaaaa!TropfortMonsieur
QI180!
—180?Lavache!J’aivachement
augmenté!Jevaisgagnermescombats
autaekwondoplussouvent!Un
compliment!
—Iln’empêchequeçaamarché!
Tuesvraimentprévisible!Titillezla
fiertéetlajalousied’unhommeetcelui-
cipeutfairedesmiracles.
Ethanfronçalessourcilsetlevala
maindesataillepourlarabattre
sèchement
sur
ses
fesses.
Kaya
écarquillalesyeux,nes’attendantpasà
recevoiruntelgeste.
—Jenesuispasjaloux!Jen’aime
simplement
pas
que
les
choses
m’échappentettun’étaispasavecmoi,
maiscontremoi.
—Ettuesobligédem’encollerune
surlesfesses?!luicria-t-ellesurprise.
—Siturecommences,laprochaine
resteragravéeunbonmomentsurta
peau,crois-moi!
Ethanlalâchaetluitournaledos.
—Onyva…Vaprendretadouche.
Kayaleregardapartirversles
vestiaires,déconcertéeparsamenace.
Elles’esclaffaunmomentavantde
grogner:
—Non,maispourquiilseprend?!
-8-
Affamés
EthanattendaitKayadansl’entrée
ducouloirdel’entrepôtoùsetrouvaitle
dojo.
—Pourquoiunefemmemet-elle
autantdetempspoursedoucheretse
préparer?Rhaaaa…
Iltapacontrelemurd’agacement.
—Pourquoileshommesnesavent-
ilspasuserdepatienceavecles
femmes?
Kayas’approchadeluiavecunpetit
sourire,sonsacdesportsurl’épaule.
—Ahbahquandmême!J’aifaim,
moi!Allonsmangeravantqueje
deviennevraimentdésobligeant…
—Pfff…Etjerâleencoreet
encore!Çanetefatiguepas?Respire
unpeu!Cool…Ondéstresseunpeuet
onsourit!
Kayaétiraduboutdesdoigtsses
lèvrespourenfaireunsourire,qu’il
repoussasèchement,peusensibleàsa
boutade.
—Commentveux-tuquejereste
«cool»avecunepersonnecommetoià
mescôtés?Rienquedetevoir,jesens
l’angoissemonterenmedemandant
quellesurprisetuvasencoremefaireet
àquelpointjevaisregretterdene
pouvoirrevenirenarrièrepourtout
effacer.
Kayagrommelaunjuronetlepoussa
aupassage.Elleouvritlaporteetsortit
del’entrepôtsanssesoucierdevérifier
sisonpetitamilasuivait.Ethansoupira
ettousdeuxmontèrentdanslavoiture.
—Oùveux-tumanger?lui
demanda-t-ilenattachantsaceinture.
—C’esttoiquiasfaim,c’esttoiqui
vois.
Ethanlafixauninstant,découragé
devantsaréponse.
Unjour,fera-t-ellequelquechose
quimesatisferadèsledépart?
Ilmitlecontactetengageala
Corvettedanslacirculation.
—Dis…murmuraKayaauboutde
quelquesminutes.
—Hum…
—Jemangeraisbienungros
hamburger.
—Troptard…fit-ilauboutde
quelquessecondessansréponse.J’ai
décidécedontj’avaisenvie.C’estbien
cequetum’asdit,non?Doncj’ai
choisi.Laprochainefois,tume
répondrasdesuite.
Ethannecherchapasàvoirsa
réaction,plutôtconcentrésursaroute.Il
semblaitvraimentsérieuxdansles
proposqu’ilvenaitdeteniretKaya
croisalesbras,fâchée.
Queltypesusceptible!
—Etonvamangeroù?
—Tuverras.
—Etsijen’aimepas?
—Pasmonproblème,tantque
j’aime.
—Tuesdonccegenredetype…
—Quelgenre?
—Dugenreconnardégoïste!
—Tunel’avaispasencore
remarqué?luidit-ilcettefoisenla
regardantavecungrandsourire,qui
contrastaaveccesphrasesabruptes,
d’uneneutralitéàfairepeur.
—Jepensaism’êtretrompée,mais
finalementnon.
—Qu’est-cequit’afaitdouter?
—Jenesaispas…Enfait,jemele
demande.
Lavoitures’enfonçadansunparking
souterrain.Ilssortirentduvéhiculetous
deuxsurlesnerfs.
—Lerestaurantestdansunerue
marchande.Ilvafalloirmarcher.
—…Commesij’avaislechoix…
EthandevançaKayad’unmètre,
montalesmarchesdel’escaliermenant
verslasortieduparking,puiss’engagea
dansuneruepiétonne.Kayalesuivit
avecdifficulté.
—Tumarchestropvite!Ralentis!
Tufaisunpaspendantquej’enfais
trois!luidit-ellealorsunpeu
essoufflée.
Ethans’arrêta,seretournaetpencha
latêteversKaya,unbrinagacé.Il
fronçalessourcilsetsoupiraune
nouvellefois.
—J’aifaim!Jen’aipratiquement
rienmangécemidietjesuisd’humeur
massacrantesij’ail’estomacvide.Jete
l’aipourtantdit,ilmesemble…
—Heureusementquetumepréviens
pourtonhumeur,jen’avaispas
remarqué!luirétorqua-t-elleavecun
souriremoqueur.
Ethanl’observauninstantet
finalementcapitula,sachanttrèsbien
commenttoutcelaallaitfinir:elle
obtiendraitgaindecauseparn’importe
quelmoyen.
—OK,jeralentis…maistoi,
accélère!Netraînepasnonplus!
—Oùva-t-onmanger?C’estdela
cuisinefrançaise?luiredemanda-t-elle
avecmalice.
Ethanpouffa.
—Tunepeuxpaschangerde
disque!?Tuterépètes!Provoque-moi
autantquetuveux,jenecéderaipas.Tu
verrasbien…
—Tunepeuxpasmerépondre?
Celam’éviteraittoutsimplementdeme
répéteretdeteprovoquer!
Ethanlevalesyeuxaucieletinspira
unboncoup,sentantsapatience
s’effriter.
Princessetêtue,quetupeuxêtre
épuisanteparmoment!
—Plustumeposeraslaquestionet
turalentirasnotrecheminementversce
fouturestaurant,plustuvasm’énerver
Kaya,etçavamalfinir!Conclusion…
Il
lui
attrapa
le
bras
sans
ménagementetlajetaenavant,loin
devantlui.
—…Avance!finit-ilpardire
suffisammentsèchementpouryespérer
aucunsignederébellion.
Kayajetaversluiunregard
mécontent.
—DommagequeDavidnet’aitpas
vaincufinalement…J’auraispuau
moinsmeremémorersavictoireencet
instantetmedirequedetempsentemps,
ilt’arrivedemordrelapoussière!
Ethans’avançaàsonniveauetla
regardad’unœiltorve.
—Mapetiteamieestcenséeêtre
attentionnéeavecmoi.Aulieudeça,
j’aiunefemmequifaitexprèsdeme
laissercreverladalleetquipréfèreme
voirsouffrirplutôtquedemerendre
heureux.Superladélicatesse!
—Monpetitamiestcensémarcher
àlamêmeallurequemoipournepasme
fairecourirparcequ’ils’assuredemon
bien-êtreavantlesien,parcequejesuis
lachoselapluschèreàsesyeux,parce
qu’ilm’aime.Onestd’accordqu’onest
loind’untelconstat—ettantmieuxsoit
ditenpassant!—,doncjenevoispas
pourquoijedevraisêtrecompatissanteà
tonsujet.
Kayaposalesmainssurses
hanches,levisagevisiblementdéterminé
ànepasselaisserengloutirparson
caractèresoupeaulait.Ethans’esclaffa.
Iln’enrevenaitpas.Toujourslaréponse
pourlecontrer.Toujourslepetitdétail
quiagaceaupointdesentirunerage
intérieurevousgonflerd’unénorme
orgueiletvousobligeràriposterencore
plusviolemment.Ilrelevalatête
fièrementetlafixad’unairsournois.
—Tuasdeuxsolutions,Princesse
rebelleetpasgentilledutout:outume
suissansbroncher,oujeteportecomme
unvulgairesacdepommesdeterresur
monépauledevanttoutlemonde.Quoi
qu’ilensoit,monventrecriefamineet
c’estladernièrefoisquejem’arrête!
Alors,tuchoisisquoi?
Kayas’agita,cherchantuneréponse,
uneparadequinevenaitpasàson
ultimatum.Ellepestaunegrossièreté
doucement,puisfrappal’airdeson
poing,afind’évacuersafrustration.
—Pourquoifaut-ilque….?
Rhhaaaa!Tum’énerves!Jetedéteste!
Jetejureque…
—C’estça!luidit-ilenlui
attrapantlamainetlaforçantà
reprendrelaroute,sansqu’elleaitle
tempsdefinirsaphrase.Tun’asrienà
répondrecettefois-ci,donctunetrouves
quetonsempiternel«jetedéteste»
commeinsulte.Engros,c’estune
nouvellevictoirepourmoi!Quec’est
grisant!dit-ilavecunimmensesourire.
Cesoir,jesuisdansunjourdechance.
Toutmeréussit!
—J’espèrequetut’étoufferasavec
tonrepas!
—Nesoispasmauvaisejoueuse!
Avouesimplementquetuesàcourt
d’argumentsetquejesuislemeilleur!
Ethanluifitunclind’œiletouvritla
marcheàtraverslesbadauds.Aubout
dequelquesminutes,ilss’arrêtèrentà
nouveau.
—Allonsmanger!dit-ilheureux.
Tousdeuxsetrouvaientdevant
l’enseigned’unfast-foodcélèbre.Kaya
ledévisagea,netrouvantlesmotspour
exprimersesémotionsàcemoment-là.
Iltentaitdefairel’innocent,maisson
sourireindiquaitqu’ilétaitsatisfaitde
sasurprise.LaconsternationdeKaya
n’avaitd’égalequelajubilationd’Ethan
del’avoirmenéeenbateaudepuisle
début.Ellenesavaitsielledevaitle
frapperouluisauteraucou.Ellesourit
toutefois,heureusequ’ilaitprisen
comptesesdesiderata.
—Tum’énervesvraiment!luidit-
ellealorsenposantsonfrontcontreson
bras.Jen’arrivepasàtecerner.Tues
l’hommeleplusfrustrantqueje
connaisse.
—Vas-y!Traite-moideconnard
pendantquetuyes!Tun’espas
contente?
Kayadécollasonfrontdubras
d’Ethanetlevalatêteverslui.
—Si…luidit-elleavecunregard
affectueuxquiledécontenançaun
instant,luiquines’attendaitpasàvoir
aufonddesesprunellesunetelle
gratitude.
Elleluiattrapalamainetleguida
verslaported’entrée.Ellepritles
devants,nevoulantqu’ils’aperçoivede
sonsourirequ’ellearrivaitdifficilement
àcontenir.Ellesesentaitflattée,mais
elleavaitpeur:siellevenaitàtrop
appréciercespetitesattentions,elle
seraitcapabled’enespérerplus.Or,ce
constatneluiapportaitqu’unbonheur
éphémère,sespetitsgestesbienveillants
n’étaientpoussésqueparlesouhaitde
collaborerdansuneambianceplus
saine.Ellelesavait.Iln’yavaitpasde
sincérité.Pasd’égardsportésparun
quelconquesentimentaffectueux;ils
étaienttropdifférentsetpeucompatibles
dansleurcaractèrepouryvoirune
expressiondetendresseoud’estime.
Malgrécela,ellecraignaitd’yprendre
goûtetd’aimerpasserdutempsaveccet
hommequiétaitpourtantloind’être
appréciable.Ilyavaittellement
longtempsqu’onn’avaitpasprissoin
d’elleetdesesenviesquelesactes
d’Ethanlaperturbaientbienplusqu’ils
neledevaient.
L’odeurdeshamburgersetdesfrites
embaumaitlasalleoùlesclientsse
restauraient.Kayainspirafort,commesi
cefumetsiparticulierpouvaitdéjà
comblersonestomacmaintenantaffamé.
—Tusais,çadoitbienfaireau
moinsdeuxansquejen’aipasmangé
dansunfast-food!luirévéla-t-elleen
regardantlesmenusau-dessusdu
comptoirdescommandes.
—Sérieux?
Ellehochalatêteaffirmativement,
lesyeuxpétillantsd’envie.Ethanputy
voirunejoieévidenteetfutcontent.
Étonnamment,ilnesavaitpaspourquoi,
maisilsefélicitaitdelarendre
heureuse,mêmepoursipeu.
—Etbien,mangeons!J’enpeux
plus!Jeveuxuntrucavecdeuxétages,
pleindesaladeetdégoulinantdesauce!
Kaya
lui
sourit
et
applaudit
l’initiative.
—Moiaussi!déclara-t-ellealors
ensautillantsurplace,impatientede
pouvoirtenirlesandwichdansles
mains.
—Avecpleindeketchup!répondit
Ethanenexagérantenouvrantsesbraset
s’amusantdesonexcitation.
—Etdestonnesdefrites!
Kayaétaitremontéecommeun
automate,complètementexaltéepar
l’événement.Ethansemitàrireparson
impétuositéàprendresacommandeet
discuteraveclaserveuse.
—T’esvraimentuncas!Ilyadix
minutes,c’étaittoutjustesituvoulais
mangeravecmoietlà,tuseraispresque
prêteàallercuisineraveclesemployés,
jesuissûr,pourpouvoirmangerplus
vite.
—Cen’estpasdrôle…Moque-toi
tantquetuveux,siçatefaitplaisir!Je
meconsoleraiavecmonhamburger
cheddar,steak,saucemoutarde,salade
etoignons…BonDieu,unetuerie!
Elledéclaracelatoutendévorant
desyeuxl’emballagequiluifaisaitface.
Laserveuseposaitaufuretàmesure
chaqueproduitdesacommandesurle
plateauetàchaquefois,ellesemordit
la
lèvre
d’empressement.
Ethan
l’observaavecunedoucesensationde
sérénité.Encetinstant,ilsesentaitbien.
Ilneressentaitpaslebesoind’être
méfiantoudeparaîtredifférent,distant,
àl’affût.Lesourirequ’elleaffichait
soussonnezétaittroublantdesincérité,
commes’ilvenaitdeluioffrirleplus
beaudestrésors.Ilneregrettait
nullementladécisiond’avoirfinalement
optépourcerestaurant.
Ellen’estvraimentpasnette!
Quellefemmes’extasieraitdevantun
hamburger?Quellefemmeapprécierait
desinstantsaussisimplesquecelui-ci
aveclui?Onluidemandaittoujours
plus.Plusdecadeaux,debijoux,de
vêtements.Plusdegestesaffectifs,de
compliments,desentiments.Kayanelui
réclamaitrienetpourtant,ilprenait
plaisiràluifaireplaisir.Ilétaitréceptif
àlamoindredemandequ’ellepouvait
souhaiter.Ilespéraitpresquequ’ellese
tourneversluipoursatisfairesesdésirs
matériels,ellequid’ordinairene
demandaitrien.Commesisessouhaits
pouvaientlesoulagerintérieurements’il
lesexauçait.Ilvoulaitjusteêtrelà,près
d’elle,pourpouvoirl’observeret
recevoircesmorceauxdedouceurqu’il
avaiteulachancedepercevoirà
certainsmoments.Unedouceurquile
déstabilisaitautantqu’ellelecalmait.
Unedouceurqu’ildevaitrejeter
fermement,maisdontilétaitfinalement
demandeur.
Avecelle,toutétaitdifférent.Il
pouvaitluiaccordersonattentionsans
avoiràdonnerintimementdesa
personnes’ilnelesouhaitaitpas.Il
pouvaitpartageravecelledesmoments
simplestoutensachantqu’ellenelui
demanderaitpasdel’aimeroului
prouverunquelconqueattachementen
retour.Ilétaitlibredechoisir,delui
accordercequesoncœurétaiten
mesuredeluioffrir.Pasdepression,pas
d’entourloupe.Ilpouvaits’affranchirde
sesconvictionssurlesfemmesavec
elle,toutengardantlecontrôle.Du
moins,tentait-ildelegarder!
MêmeavecBB,ilavaittoujoursle
besoindemettreunedistancequandil
sentaitquecelaprenaitunetournure
ambiguë.Ilsavaitqu’ellen’étaitpas
indifférenteàsescharmes,maisilne
voulaitpaslablesser,commeille
faisaitaveclesautres.BBétaitune
femmefoncièrementgentille,commelui.
Unepersonnequioffraittoutsans
compteretquifinissaitparseramasser
àcausedepersonnesquinel’estimaient
pasàsajustevaleur.Ilnesouhaitaitpas
lafairesouffrir;sesdémonsétaienttrop
effrayantspourqu’ellelesacceptesans
enêtreblessée.Brigitteétaitcapablede
l’acceptertelqu’ilétait.Illesavait.
Maisilsavaitaussiqu’ellen’avaitpas
lesépaulesassezsolidespourvivre
avecsessecrets.Iln’auraitpaslaforce
delasoutenir,lui-mêmenepouvaitles
supporter.Elleméritaitmieuxquedes
tergiversationsàcausedelui.
Etpuisc’étaitsanscomptersurSam
etlessentimentsparticuliersqu’il
entretenaitavecelle.Sesdeuxamis
avaient
toujours
eu
une
relation
particulière.Samavaitprisl’habitude
dechoyerBrigitte.C’étaitlaseule
femmedugroupe.Elleétaitunpeuleur
frangineàtous,cellequel’onsurveille,
quel’onprotège,quel’oncocoone.Sam
étaitceluiquienfaisaitleplusavec
elle.MalgrésesairsdeDonJuan,il
n’enétaitpasmoinsunhommefaible
devantcettefemme.Ilétaitcapablede
toutpourelle.Ethannedoutaitpasdesa
sincéritéetdesessentimentsplus
profondspourellequepourlesautres
femmes.Ilyavaitunesortedejeuentre
eux.Illaséduisait,commeillefaisait
avecd’autresetellelerepoussaitsans
ménagement,prétextantquelescoureurs
dejuponsnel’intéressaientpas.Plusil
ladraguait,plusilsemontraitlourd,
insistantetmaladroit,plusellele
remballaitavecfermeté.C’étaitdevenu
uneroutinedanslaquelletouslesdeux
avaienttrouvéleursmarques.Pourtant,
dèsqu’elleavaituncoupdedéprime,
unedisputeavecsesparentsouqu’elle
pleurait,Samétaitlepremieràla
consoler,àluiprouverqu’elleétait
importante
à
ses
yeux.
En
y
réfléchissant,Ethanyvoyaitplusune
peurdel’engagementdechacundes
deuxqu’unesimpleamitié.Finalement,
ilsétaientunpeucommelui:ilsne
voulaientpassouffriretperdrelepeu
qu’ilsavaient.BBprétendaittoujours
chercherl’amour,leseul,l’unique,mais
serefusaitmalgrétoutd’avouerqu’il
étaitsansdouteplusprèsd’ellequece
qu’elleprétendait.QuantàSam,les
conquêtesd’unesemainelerassuraient
sursonincapacitéderendreunefemme
heureusetouteunevie.
Ethanposasonplateausurlatable
queKayaavaitchoisie.Ill’observa
brièvement.Lajeunefemmeétait
surexcitéedevantseshamburgersau
pointqu’ellenetenaitpasenplacesur
sachaise.
—Bonappétit!luilança-t-ellesans
mêmeattendresonconsentementpour
commencer.
Elleseprécipitasurl’emballage
qu’elleretirasansattendre,attrapason
hamburgeravecsesdeuxmainsetouvrit
grandlabouchepourycroquer
copieusementdedans.Ethanneput
s’empêcherderire.Illatrouvait
touchante,maisaussipeugracieuse.Un
mélangeparticulierdanssonattitudequi
luiplaisait.Lasaucedégoulinaitentre
sesdoigtsaumomentoùellecroquaau
milieudesonhamburger.Ellepoussaun
petitcrid’effroi.Ethanrigoladeplus
belleenluitendantuneservietteen
papier.Ellenesesouciaitnullementde
l’imagequ’ellepouvaitluirenvoyer.
Seulsonappétitimportait.Elleétait
juste«elle»,simple,sanschichis,sans
mensonges,sansartifices…Unboutde
femmequinecherchaitpasàplaire,
maisquienfindecompteobtenaittoute
sonattention.Ildéballasonsandwichet
morditdedans.Ilputl’entendregémiren
avalantunmorceaudefrite.
—Tantqueça?luidemanda-t-il
heureux.
Kayasecoualatêtepositivement,la
bouchepleine.
—C’estenmangeantcertaines
nourrituresrarementqu’onenapprécie
quedavantagelegoûtquandonles
retrouvecontresonpalais!luidit-elle
toutenmâchant.
Ethanattrapaquelquesfritesen
mêmetempsetlesportaàsabouche.Il
n’arrivaitpasàdécrochersonregardde
Kaya.Ellepapillonnaitentreses
sandwichs,songobeletremplideCoca-
Colaetsesfritesavecunentraindigne
d’uneogresse,sansmêmeserendre
comptequ’ill’observaitattentivement.Il
passaitaucriblechacunedeses
réactions,
analysant
ses
gestes,
interprétantsesémotions.Unspectacleà
elletouteseule,dontilprenaitplaisirà
enêtreleseultémoin.
—Çafaitlongtempsquetufaisdu
taekwondo?luidemanda-t-elleaprès
avoiravalélatotalitédesonhamburger.
Ethanfutsurprisparsaquestion.
Pourquoiluiposait-ellecettequestion?
Qu’ygagnait-elleàlesavoir?
—Assez…
—Genrecinqans,dixans,quinze
ans?
Ilentamasonsecondhamburgertout
enlaregardant.Kayaycompritune
nouvellesortedeprovocation,comme
s’ilnevoulaitvraimentpasluirépondre,
jouantencoreavecsoncôtémystérieux
etbuté.
—
Ta
cicatrice
sur
l’arcade
sourcilière,c’estdûàuncombat?
Ethanavaladetravers.Iln’aimait
pasparlerdelui.Cesquestionsaussi
futiles
soient-elles
en
apparence
l’obligeaientàendireplussursavie,
détailquin’étaitpascenséêtre
mentionnédevantelle.Kayaluitendit
sonverredeCoca-Colapourl’aiderà
fairepassersonmorceaudehamburger
coincédanssagorge.Celui-ciregarda
legobelet,confus.
—Tuneveuxpasm’enparler?lui
demanda-t-ellealorssansdétour.Jesais
qu’onn’estpasobligédetoutsedire,
mais…jedoisavouerqueçamerend
curieuse.Etpuissituasunautresujet
deconversationàproposer,jet’écoute
danscecas.Nousn’allonsquandmême
pasfairetoutlerepasensilence!
Ethanbutunegorgéedesoda,puisle
posasurlatableetlafixa.
—Qu’est-cequeçat’apporterade
lesavoir?Est-cequejetedemandesi
tuasdescicatricesetcommentelles
sontvenuessurtapeau?
Kayaclignadesyeux,tandisqu’elle
aspiraitavecsapaillesaboisson.
—Oh!Moi,c’estsimple!J’enai
uneici,surmondoigt!dit-ellealorsen
posantprécipitammentsongobelet.
Ellesepenchaau-dessusdelatable
pourmieuxluimontrersonindex.
—Elleesttoutepetite,maiselleest
là!C’estAdamquimel’afaiteavec
unecigarette!Jel’auraistué!
Ethans’imaginatoutàfaitlascène,
elleentraindel’engueuler.
—Jedétestaisça!Ils’étaitmisà
fumeraulycée.Ilvoulaitsedonnerun
genreàl’époquepourpouvoirtraîner
avecunebandedejeunestrèsbizarres.
Suiteàcetincident,jeluiaifaitlatêtependant
une
semaine.
La
diète
complète!Mêmepasunregard,zéro
câlin,pasuneparolen’estsortiedema
bouche…Iladucouparrêtédefumer!
Saconclusionclaquacommeune
victoiredontelleétaitfièreetdontelle
nevoyaitpasd’autresissuespossibles.
Ethan
examina
son
doigt
plus
attentivement
et
se
sentit
las.
Bizarrement,ileutunmomentde
compassionpourAdam.Legenrede
solidaritémasculinedevantlesfutilités
typiquementfémininesquel’onpouvait
avoirdanscegenredesituation.
—Tuesunevraiechieuse,ma
parole!
—Hééé!luifit-elleenluidonnant
uncoupdepoingàl’épauleavantdese
remettrecorrectementcontreledossier
desachaise.Jen’aimepasça!La
fumée,letabacfroid…trèspeupour
moi!Heureusementquetunefumespas
d’ailleurs,carjecroisquecelaaurait
étérédhibitoirepourlecontrat!
—Jevaispeut-êtreenvisagerde
reprendrealors…dit-iltoutà-coup
songeur.J’aiarrêtéenpariantavec
Oliver,maisjepourraisrecommencer
rien
que
pour
pouvoir
t’énerver
davantagesitumegonflestrop!
Ouais…Fautquejelenotedansuncoin
dematête!
—Tuasfumé!?luicria-t-elle
presque,prisedesurprise.Quand?Ily
alongtemps?
Putain…Unequestionenamène
uneautre.Jem’enfonce!
—Oui,ilya…uncertaintemps…
luirépondit-ilévasifenrepensantàcette
époqueavecmélancolie.
—Çatetueraitd’êtreplusclair?!
Tutriches!Jet’aiparlédemoietdema
cicatrice.Tunejouespaslejeu.Ce
n’estpassympa.
—Jenet’airiendemandé.Tuas
décidétouteseuledemeracontercette
anecdote.
—Tumel’assuggéré!C’estbien
toiquim’asdit:«Est-cequejete
demandesituasdescicatrices?»C’est
commedireuntrucgenre«jetedissitu
medis!».
—Iln’yarienàdiredemoncôté.
—Trèsbien.
Kayas’essuyalaboucheavecune
servietteenpapieretentamasaglaceen
silence.Ellel’ignoracomplètement
alors,secontentantd’observerlefond
desonpotdeglacediminuer,lui
signifiant
que
son
dessert
était
finalementbienplusintéressantquesa
cicatricesurlesourcilousonsport.Une
sorted’attitudevexéequ’ellenese
gênaitpasd’amplifierensoupiranteten
fixant
d’autres
clients
visiblement
heureuxdeparlerentreeux.
—Nemedispasquetume
boudes!?
Elleraclaleborddesonpotsanslui
adresserlemoindremot,nimêmeun
regard.
—Tuplaisantes?dit-ilen
s’esclaffant.Maisquellegamine!
Elleposaalorssonpotetluifitun
doigtd’honneur,visiblementencoreplus
agacéeparsadernièreremarque.
—Kaya…dit-ilmenaçant.Cen’est
pasdigned’unefemmecegenredegeste
etcen’estpasgentildutout.
—Quimeparle?fit-ellealorstout
encherchantàdroiteetàgauche,puis
souslatablelasourcedesparoles
venantd’êtreprononcées.
—Parfait!luidit-ilmaintenant
offenséparsonattitudepuérile.Faista
maligne…Puisqueçat’amuse…Le
silence,çamevaaussi!
Ilcroisalesbras,biendécidéàne
pascédercettefois-ci.Elleluisouritde
façonnarquoise,puisseleva.Son
sourcildroitseredressa,annonçantque
lasuiten’allaitpasluiplaire.Elleprit
sonplateauetglissalesemballagesdans
lapoubelle.Unefoissonplateaurangé,
elleattrapasonmanteauetluitirala
langueavantdesortirdurestaurant.
Ethanseretrouvaseulàsatable,
analysantavecunsourireahurilascène
qu’ellevenaitdeluifaire.Ilsecouala
têtepourtenterdeseréveillerdece
qu’iljugeaitêtreunehallucination,puis
jetasaserviettesursonplateauagacéet
seleva.Ildéversasesemballagesdans
lapoubelleetmitsonmanteauetses
gants.
Ellem’auravraimenttoutfait!
Quellebourrique!
Ilsortitdufast-foodetlacherchadu
regard.Elleétaitassisesurunbancnon
loindelà.
—Jevoisquetum’asattendu.Dois-
jeenêtreheureux?luidemanda-t-il
vexé,envenantàelle.
—Tum’asoffertmonhamburger.Je
nesuispasrustreaupointdeteplanter
définitivement.J’aijusteréponduàmes
élansdegamineentefaisantmasortie
spécialepourconnard!
Ethanritlégèrement.
—Tumereparlesdonc?se
renseigna-t-ilalorsensepenchant
devantelle,avecunpetitsourire
malicieux.
Elleselevaenlebousculantet
commençaàmarcherdanslarue
commerçantesansmêmel’attendre.
Ethanlaregardafaire,heureux.Ilsentait
sespoumonssegonflerd’excitation.Une
fébrilitéquiparcouraittouslesporesde
sa
peau
chaque
fois
qu’ils
se
retrouvaienttouslesdeuxàsechercher
despoux.Ildevaitl’admettre,ilaimait
cejeuavecelle.
Mademoiselleveutsefairedésirer
ouseplaindre,ondirait…Bahvoyons!
Illasuivitdeloin,lesmainsdans
lespochesdesonmanteau.Ilattendait
patiemmentderrièreelle.
Cen’estpasmoiquivaisvenir
Kaya.Jenecraqueraipas.C’esttoiqui
vasrevenir.Viensàmoi,Princesse
indocile,viens!
Kayas’arrêtaauboutdequelques
minutesetseretourna.Ethanstoppasa
progressionethaussaunsourcil,
attendantlasuiteavecungrandintérêt.
Ellevintàluiengesticulant,lesbras
tenduslelongdesoncorpsetlespoings
fermés.
Ethan
afficha
un
sourire
suffisant,contentd’avoirréussiàla
fairereveniràlui.
—Oùva-t-on?Jesuisgelée.Je
n’aipasdepochesetjenesensplusmes
mains.
—Quimeparle?feint-ilen
regardantderrièreelle.
Kayafronçalessourcils,mais
finalementsourit.
—OK.Bienjoué!Unpointpartout.
Ellefitunemouechagrinedevant
l’évidence.
—Tuasgagné.Maissachequeje
suisjustetrèsdéçue.Ilestclairqueje
n’arriveraijamaisàdiscuteravectoi.
Onesttropdifférent.Cen’estpas
commesijet’avaisdemandédemedire
lemontantexactdetoncompteen
banqueoumeracontertapremièrefois.
Jenepensepasêtreimpolie.Jeneme
suispasimmiscéenonplusdansles
grandssecretsdetavieprivée…
Kayasoupiraetbaissalatête.
—Cen’estpascommesij’avais
demandélesraisonsdescicatricessur
tontorse…finit-ellepardired’une
petitevoix.
Ethansesentitmalàl’aiseetdésolé.
Sonsilencel’avaitblesséplusqu’ilne
l’avaitpensé.Iln’auraitjamaissongéà
lavoirsiaffectéeparsonentêtementà
nerienvouloirluirévélersurlui.
Pourquois’intéresserait-elleàlui?Il
n’yavaitriend’heureuxdanssavie,rien
quipuissejustifierdeleclameràqui
veutl’entendre.
—Kaya…
Ilvoulutluiattraperlamainpour
rompreladistancequ’ilavaitimposée,
maissecontentafinalementdelessortir
despochesdesonmanteau,netrouvant
paslaforcesuffisantepourjustifierses
raisons.
—Nonc’estbon.Jenete
demanderaiplusrien.Pasdesoucis!lui
dit-elleavecunpetitsourireforcéalors
quesespupillestremblaientsoussa
déception.Aprèstout,nousnesommes
mêmepasamis.C’estvraiquoi!On
n’estrienl’unpourl’autre.Jesuissans
doutetropnaïve,ouexigeante,chiante,
idéaliste…commetuveux.
Ethannesutcommentréagir.Il
n’aimaitpasparlerdeluietdevait
admettrequesesquestionsneportaient
passurdessujetstropintimes.Maisen
direneserait-cequ’unpeusursonpassé
l’obligeaitaussiàrepenseràcequile
tourmentaitencoreaujourd’hui.Pourtant,
devantsonattitudedéçue,ilsesentit
coupableetconsentitàcequ’ellele
traitedeconnard,d’abruti,d’idiot,
d’entêté.
—Onrentre?luidemanda-t-elle
avecunpetitsourirecontrit.
Kayamitsesmainsdevantsabouche
etsoufflaplusieursfoispourles
réchauffer.Elleavaitleboutdunezet
desoreillesrougisparlefroid.Ethanne
savaitpasquoidireoufairepourlui
montrerqu’iln’étaitpasentièrement
ferméàsesdemandes,qu’illesavait
entenduesetquemêmes’ilsn’étaient
pasamis,ilsn’enétaientpasmoins
complices
dans
ce
concours
de
circonstancesqu’étaitcecontrat.Etpuis
ilyavaittoujourscetteattirance
indéfinissablequilepoussaitàrevoir
sesconvictionsetallerau-delàpour
elle.Ilyavaittoujourscetteimpression
de
simplicité
qui
le
forçait
inconsciemmentàbaissersagarde,àne
passeméfier.Ilyavaitconstamment
cettepetitevoixintérieurequileguidait
verscequeressentaitsoncœur.
Ilretiraalorslegantdesamain
droitesousleregardinterrogateurde
Kaya.Illuisaisitsamaindroitesansun
motetluienfilasongant.Kayaselaissa
faire,sansparler.Puisdesamaindroite
nue,ilpritlamaingauchedesa
partenaireetlaglissaaveclasienne
danslapochedesonmanteau.Lajeune
femme
l’observa
un
instant,
décontenancée
par
son
geste
bienveillant.Ellecompritquec’étaitune
façonpropreàluidesefairepardonner
etréduireladistancequ’ilavaitmise
entreeuxplustôtenneparlantpasdesa
vie.Ellebaissalesyeuxetsesentit
soulagée.Ellen’étaitfinalementpas
devantunmurinfranchissable.SiEthan
n’estpasunhommepromptàs’étendre
verbalement,iln’enétaitpasmoinsun
hommed’actionquipouvaitêtre
troublantpardesgestesauxantipodesde
l’imagequ’ilreflétaitaupremierabord.
—Necomptepassurmoipourte
filerl’autregant!luidit-ilfranchement.
Tonautremaindevraitreprendrevie
aveclachaleurdelamiennedansma
poche.Jegardemonautregant!Jen’ai
paslesensdusacrificesuffisamment
grandpouryperdremamaingauche
danslabataille.Tamainesttrèsbien
dansmapocheauchaud.
Kayasourit.Elleputvoirqu’Ethan
étaitunpeugênéparsaprévenance,
commes’ilsetrahissaitunpeu.
—Merci…luidit-elledoucement.
Ilsecontentad’unhaussement
d’épaulesettousdeuxreprirentleur
marcheversleparking,maindansla
main,l’uncontrel’autre,ensilence.Elle
pouvaitsentirsesdoigtsentrelessiens,
lachaleurdesamainluiréchauffaitla
sienne.Grande,douce,protectrice.Illa
serraitsuffisammentfort,commepour
s’assurerqu’ellenes’échapperaitpas,
qu’ilnelaperdraitpas.Bizarrement,
l’ambianceavaitprissubitementune
autretournure.Unesortedetorpeur,une
bulledanslaquelleilss’étaientréfugiés
etoùilssesentaientbien,apaisés.Kaya
nepouvaitsedétacherdelui,oumême
éloignerlégèrementsoncorpsdusien.
Ellereconnaissaitquesonidéeétait
géniale,carellesesentaitmoins
refroidie.Sansdoutelefaitd’êtrelà,à
marchercontrelui,lacouvraitunpeudu
froid.Sagrandestaturefaisaitofficede
rempartàlalégèrebriseglacialequi
soufflait.Ethanregardaitdroitdevant
lui.Lescoupsd’œilqu’elleluijetait,lui
indiquaientqu’ilneparaissaitpas
vraimentperturbéparleurproximité
alorsqu’ellesesentaitunenouvellefois
portéeparunemultituded’émotions
contradictoiresquiserésumaitparun«
fuirloindeluiouprofiter?».
DesmusiquesdeNoëlprovenantde
boutiqueslongeantletrottoirleur
parvenaientauxoreilles.Accompagné
parlesdécorationslumineusesdecette
find’année,Ethansetrouvaserein.Ileut
l’impressiond’êtrepourunefoiscomme
toutlemonde,aubrasdeKaya,menant
uneviesanstracas,sansappréhension.
Unedrôledesensationqu’ilne
parvenaitpasàcomprendre.Pourquoi
ressentait-ilcettetendanceàlabéatitude
alorsqu’iln’étaitpasdugenreà
s’extasierouàmontrersesémotions?
Pourquoisecomportait-ilainsiensa
présence?Pourquoin’arrivait-ilpasà
êtrecommed’habitudeetàposerses
limitesavecelle?Commentfaisait-elle
pourrenverserlavapeuravecautantde
facilitéaupointqu’ilfinissepartoutlui
accorder?Iljetaunregardverselle.Il
sentaitunedoucechaleurluiparvenir.
Était-cesamaindanslasienne,son
corpscontrelesien?Sansdoute,mais
passeulement.Toutsonêtres’apaisait
aucontactdeKayaetilcommençaità
s’yhabituerdefaçonalarmante.Ce
n’étaitpasbon,ilallaitleregrettertôt
outard.Pourtant,ilrepoussaitcette
possibilitédeplusenplusfacilement.Il
nedevaitpasselaisseralleràéprouver
dessentimentspourelleetmalgrétout,
ilsecomplaisaitdanscettesituationoù
elleluioffraitdesmomentssi
particuliers.Desinstantsoùiltrouvait
unéchoàtoutcequiluimanquait,tout
cequ’ilavaittoujourscherché.Ilne
pouvaits’empêcherd’envierAdamdans
detelsmoments.Unacteaussianodin
quesebaladermaindanslamainavec
ellel’avait-ilaussirenduheureux?Sans
nuldoute.Elleavaitdûluidonnerbien
plusquecequ’ilavaitobtenudesapart.
Nuldoutequ’Adamavaitdûsacraliser
cesmomentsautantqueceuxqu’ils
avaienteusplusintimement.
IlobservaKayaalorsaveccette
mêmeenviequ’ilavaitressentilesjours
précédents,uneenviedeplusencore,
uneenviedeconnaîtrecequ’Adamavait
connu.Cetteidéedesavoirjusqu’àquel
pointelleavaitpurendreheureuxcet
homme,sansleblesser,sansl’humilier.
Êtrelàjustepourlui,rienqu’àlui.Tout
cedontilavaittoujoursdouté.
Ilregardaalorslesol,mélancolique.
Ilsongeaàcequ’ilavaitperduetce
qu’ilavaitcomprisàcausedeson
passé.Avait-ilfinalementtort,commele
luiavaientsuggérélesAbberline?Y
avait-ilunechancequ’ilaccepteenfin
l’idéequelesfemmesnesontpastoutes
dangereuses
quand
il
s’agit
de
sentiments?Illorgnasurseschaussures
mécaniquement.Droite,gauche,droite,
gauche.Ilavançait,maisenécartantson
champdevision,ilputvoirqueles
chaussuresdeKayasuivaientson
rythme.Unecadenceàl’unissonquile
troubla.Iln’étaitpasseul,elleétaitlà,à
côtédelui.Soncœurrataunbattement
etseserra.Iltournaprestementsatête
verselle,pourvoirsiellelefaisait
exprès,sic’étaitencoreuneformede
provocation.Pourtant,elleétaitlà,
contrelui,regardantlesvitrinesdes
magasinssanssesoucierdesa
démarche.Ilregardaànouveauleurs
pas.Laconfusionavaitdûavoirraison
deleurcadencequin’étaitplusvraiment
synchronisée.Uneangoissenaquitau
fonddelui.Ilputlasentirprendreson
cœurenotagealorsqu’iltentaitenvain
delarepousser.Mettredescadenas
autourdesoncœurétaitlaseulesolution
pournepasselaisserenvahirparcette
paniqueirrationnelledelasavoirsur
uneautrelongueurd’ondequelui.Il
venaitdeserendrecomptequ’ilavait
peurqu’ellesoitsicompatibleaveclui,
maisaussiqu’ilseraittrèsdéçusielle
nel’étaitpas.Ildevaitseressaisir.
Retrouverdel’aplombetcesserde
cogitersurdetellesineptiesla
concernant.
—C’estsympacetteambiance
particulièredesfêtesdefind’année,tu
netrouvespas?luidit-ilalorspour
fairelaconversation.
Kayaregardalesol,visiblement
loindepartagercetavis.
—Jenesuispasfandesfêtesde
Noël.Jenelesfêtepasd’ailleurs.
—Pourquoiça?
—Parcequejen’aipaseu
forcémentdebonssouvenirsliésàcet
événement.Iln’yaeuquetrèspeude
bonsNoëlsdansmavie.
Ethanobservasonattituderésolue,
maistristedevantsonaveu.Ilsavaitque
safamillen’étaitplusetlamortdeson
fiancénedevaitpasl’aideràen
appréciersonintérêt.Commentaimer
cesfêtesalorsquel’onn’aplusde
famillepourpartagercemoment?Il
n’osaladétromperetsetût.Kayase
renditcomptequ’elleavaitunpeu
étouffélabonnevolontéd’Ethanàfaire
laconversationavecsontoncatégorique
surlesujet.
—Maisjecomprendsquel’on
puisseyattacherdel’importance.Je
supposequetuvaslefêteravectes
parents?
—
Je
ne
m’y
attache
pas
particulièrement.C’estplutôtmafamille
quiymetunpointd’honneur…C’estun
peu
le
rendez-vous
familial
incontournablequirassuremesparents
surlefaitquel’onestbienunefamille.
Onseretrouvetouschezeux,dansleur
maisonauxÉtats-Unisetonmange
commedix.
Kayas’arrêta,cequiobligeaEthanà
enfairedemême.
—AuxÉtats-Unis?!répéta-t-elle
choquée.Tu…tuesaméricain!?
—Oui…j’ailadoublenationalité.
Jesuisnéfrançais,maisj’aivécuune
partiedemavieenAmérique.
—J’oseespérerquenousaurons
signéd’iciàNoël.Jenevoudraispas
êtredansl’obligationdefaireunrepas
defamilleavectoicommefaussepetite
amieàprésenteràmesparents.Ilsvont
meprendrepourunfou.Cindyva
s’alarmeretmecollerunenouvelle
thérapie!
Kayaledévisagea.Êtrebeletbien
unefamille?Ellesavaitqu’ilavaitété
adopté,quelestroisenfantsAbberline
avaientétéadoptésetdoncqueles
Abberlineétaientunefamillede
substitutionenquelquesorte,maiselle
commençaitàdevinerqu’ilyavaiteu
quelquechosedeplussombreaussidans
saviepassée.Unenouvellethérapie?
Était-ilungarçonayanteubesoinde
séanceschezunpsy?Était-cedansla
périodeantérieureàsonadoptionou
auprèsdelafamilleAbberline?Devant
levisageperplexeetréfléchideKaya,
Ethanserenditcomptequ’ilavaitfait
unegaffe.Ilavaittropparlé.Ilavait
refusédeparlerdesacicatricesurson
arcadesourcilièreetlevoilàentrainde
s’épanchersursafamille.
Pourquoisuis-jealléluiparlerde
nouvellethérapie?Pourquiva-t-elle
meprendre?Crétin,crétin,crétin!Et
aprèstuneveuxpasqu’elleseposedes
questions!
Kayas’aperçutqu’ilsesentaitmalà
l’aisetoutàcoup.Ellecompritquele
mieuxétaitdenepasrelancersurce
sujet.Iln’étaitapparemmentpasprêtà
seconfier,auvudel’épisodedufast-
food.Malgrécela,ilavaitparléunpeu
deluietelleétaitcontente,mêmesi
c’étaitnonintentionnel.
—Jenecomptaispasmefaire
inviter.Jesuistrèsbientouteseule.Ne
t’inquiètepas.
—CeseraitlouchesiLaurensvenait
àsavoirquetunepassespasNoëlavec
moi.
—Ilesthorsdequestionqueje
rencontretafamille.Jen’airienày
faire!
—Jesuisd’accord.Signonsdonc
viteavecLaurens.
—Tuaseudesnouvelles…A-t-il
appelé?
—Non.Maisonleverrasamedi
pourlelancementdemagammede
maquillagelorsdugala.Tuaurastoutle
loisird’excusertoncomportementd’hier
soir.
Kayasoufflapourmontrerson
mécontentementàressasserleschoses.
Ethanneputs’empêcherderire.Kayale
bouscula
pour
qu’il
cesse
ses
moqueries,maissamaintenantla
sienne,elledutinvolontairementle
suivreunpeudanssadérive.Ethan
rigoladeplusbelleetlapoussa
légèrementpourlaremettresurledroit
chemin.
—Tupensesêtreprêtpoursamedi?
—Oui!Onlesera.Onn’apasle
choix.Eddym’aremontéuneinfoqui
nousaobligésàavancerladatepour
éviterd’êtreprisdecourtfaceàla
concurrencequilorgnesurnosprojets.
Çavanousfaireperdredesinvités,mais
onvajouersurl’effetdesurprise,
l’inattendu.Dansunsens,cen’estpas
plusmal,carellevatomberpile-poil
avantNoël,cequiseraunebonne
excusedevente.Demain,jerisquedene
pastevoirdelajournée,nimêmedela
soirée.Ilfautquejesoisprésentpour
m’assurerquetoutestOK.
—D’accord.
Ilsarrivèrentdevantlavoitureet
Ethanretiraleursmainsdelapochede
sonmanteauetlâchacelledeKaya.
—J’aimeraisretournerchezmoi
avant,siçanetegênepas?lui
demanda-t-elleunpeuconfuse.Je
voudraisrécupérerencorequelques
affaires.
—Vosdésirssontdesordres,
Princesse!C’estévident…dit-ilde
façonsarcastiquetoutenselaissant
glissersurlesiègeduvéhiculedefaçon
lasse.
—Jen’enaipaspourlongtemps.
Arrêtederâler.Jeneveuxpasfinirpar
mebaladeràpoildansl’appartement
nonplus.
Ethan
haussa
un
sourcil,
la
perspectiveétantfinalementalléchante.
Kayas’offusquadevantsonairentendu
etlefrappaunenouvellefois.
—Go!luicria-t-ellepresque
commeunordre.Salepervers!
—Laprochainefoisquejesors
avectoi,jemerevêtsd’unearmure!
marmonna-t-ilensemassantlebras
endolori.
Lavoituresegaradanslapetiterue
donnantsurlebâtimentoùsetrouvait
l’appartementdeKaya.L’éclairagedela
ruelleétaittoujourspeuprésent.Un
frissonparcourutKaya.Sid’ordinaire,
cetappartementétaitsonrefuge,elle
ressentaitunecertaineangoisseenle
voyantcesoir.Ilreprésentaitsavie:
vide,morne,fatigante.Revenirsurson
lieuprivilégiéluiétaitenfindecompte
plusdifficilequ’ellenel’auraitpensé.
Maintenantqu’elleavaitpusavourerla
joied’unvraiappartementavecunlit,
unetélévision,unebaignoireavecde
l’eauchaudeettouscespetitsdétailsqui
fontunchez-soi,elleneputqu’accepter
lefaitquesavieétaitvraimentminable.
Ilétaitcedurretouràlaréalitéauquel
elledevaits’attendreunefoislecontrat
fini.Saréalité.Unappartementà
l’imagedesalocataire.
—Jet’attendsici…luidit-ilunpeu
froidement.
Kaya
hocha
de
la
tête
affirmativementetsortitduvéhicule,
laissantEthanauvolant.Ellemontales
marchesmenantaupalierdesonHome
SweetHome,d’unpaslourd.Elleavait
ànouveaufroidauxmains.Elleavait
rendulegantàEthandanslavoitureet
sesentaitàprésentnue.Unesensation
qu’ellen’aimaitpas.Unenuditéchargée
d’uneimpressiondesolitudequinela
lâchaitpas.Elleinséralaclédansla
serrure
et
déglutit.
C’était
son
appartement,laplusbellehistoiredesa
vie,carc’étaitlecoconqu’elleavait
crééavecAdametpourtant,ellese
sentait
oppressée
par
ce
qu’il
représentaitàprésent:unloyeren
retard,desfacturesrecouvrantlefrigo,
unlieusombreéclairéàlalumièredela
bougieetsanschaleur.Elleinspiraun
boncoupetouvritlaporte.Rienne
semblaitavoirchangé.Ellefonçaversla
bougieetallumauneallumettepoury
déposerlafaiblesourcedelumièreetde
chaleursurlamèche.D’unpas
mécanique,elleallafermerlaporteet
posasonfrontcontre.C’étaitça,savie.
Riend’autre.Elleposasonmanteau
dansleplacarddefaçonlasse,letemps
derécupérertoutessesaffaires.Elle
n’avaitpaslegoûtd’arpenterson
appartementpourrécupérercequilui
manquaitàlalueurd’unebougie.Elle
retournaverscelle-cietregardaun
instantlaflammescintiller.Ellepensaà
Adam.Cetteflamme,c’étaitunpeu
Adam.Laseulechoseconcrètedanscet
appartementquiapportaitdel’espoir
danssesténèbres.
—Tevoilàenfin!
Lavoixgravequivenaitderésonner
dansl’appartementlafitsursauter.Ils
étaienttousdeuxlàdansuncoinsombre
dusalon,l’unassis,l’autredebout
contrelemur.Philavaittoujourssa
cigarettejuchéesursonoreilleetce
souriremauvaissurlevisage.Quantà
Al,sonregardvicieuxn’ôtaitrienau
personnagelugubrequ’ilprésentaitaux
gens.Petit,sec,maisnerveux.Limite
toxicoenmanquedesadose.Elleneles
avaitpasvus.Commentétaient-ils
rentrés?Commentavaient-ilsfaitpour
resteràcôtéd’ellesansqu’elles’en
aperçoive?
—Cen’estpasbiendenousfaire
attendre…Encorepirededisparaître
sansdonnersignedevie.Nousavonsété
obligésderendredescomptesaupatron.
Cen’estpasbiença,Kaya.
Phils’avançalentementverselle.
Kayasentitsonangoisseprendretout
sonsens,envoyantlevisagesombrede
Phils’approcherverselle,seulement
éclairéparlalueurdelabougie.
—Jenevousaipasoubliés!tenta-
t-elled’articulerdifficilement.Jenesuis
paspartie.Jesuistoujourslà.J’étais
juste…entraindetravailler!
—Ettontravailaprisautantde
temps,aupointdeneplusrentrerchez
toi.Meprends-tupourunidiot?
Alsemitàglousserderrière.
—Non,non!dit-elleenbougeant
sesmainsdevantluietreculant.J’aurais
unepartiedemonsalaireenfinde
semaine.Tuaurasmonversementdans
lafoulée!Jetelejure.
—Nemeprendspaspouruncon!
hurla-t-ilalors,énervéparsesréponses.
Tuasduretardsurtesversementsettu
osesmedemanderundélaialorsqueça
faitcinqjoursquetuasdisparu?Tume
prendspourqui?
PhilsaisitKayaàlagorged’une
main
et
commença
à
serrer.
Instinctivement,elleposalessiennes
autourdel’étauquil’empêchaitde
respirerpoursedégager,envain.
—Jeteprometsdetepayer!
bredouilla-t-elletandisqueleslarmes
commençaientàdéborderdesesyeux.
—Lespromesses,çafaitbien
longtempsquejen’ycroisplus.Avec
Al,onaunefaçonbienparticulièrede
rappelercequidoitêtrefaitentempset
enheuresauxrécalcitrants,surtoutsice
sontdesfemmes.
Alricanaetsefrottalesmains.Phil
projetaKayasurlematelasquise
trouvaitausol.Ellen’eutpasletemps
decomprendrequoiquecesoit:Alse
positionnaau-dessusdesatêteetbloqua
sesbrasavecsesgenouxpendantque
Philluiretenaitlesjambes.
—
Pour
t’excuser
de
ton
impolitesse,onvas’amuserunpeu…
-9-
Maudite
Elleauraitdûs’endouter.Un
momentdereposnepouvaitluiêtre
accordésanscontrepartie.Onluiavait
toutdonné,onluiavaittoutrepris.Elle
savaitquelebonheurn’étaitpasgratuit.
Siellepouvaits’accorderledroitd’être
heureuse,ellen’ignoraitégalementpas
quecedroitavaitunprix.Adamenavait
étélapreuve.Elleavaitétéheureuse
aveclui;onleluiavaitretiré.
Aujourd’hui,cecerclevicieuxavaitfini
ànouveausaboucle;onallaitune
nouvellefoisluireprendrecettepartde
bonheur,sommetoutedérisoire,mais
certainequ’elleavaiteuencompagnie
d’Ethan.Ethanavaitétéunebouéesur
laquelleelleavaitpus’accrocherpour
espérerresteràlasurfaceetrespirer,
maisPhiletAlétaientcesalguesquila
tiraientirrémédiablementverslefond.
Aprèstantdetemps,ellen’auraitpasdû
être
aussi
insouciante.
Elle
les
connaissait.Adamenavaitfaitlesfrais.
Elleauraitdûprévoirleurcolère.Elle
auraitdûêtreplusprudente.Elle
n’auraitpasdûespérer.L’espoir.Ce
sentimentquivousfaitavancer.Àquoi
bon?Sic’estpourfinirparreveniren
arrièreetcoulerànouveau…
Ellenepouvaitcrier;ilsluiavaient
bâillonnélabouche.Lesvoisinsne
pouvaientl’entendre.Philluiavait
baissélepantalonetretiréses
chaussurestandisqu’Allamaintenait
immobile.Kayanepensaitqu’àune
seulechose,quelaflammedelabougie
s’éteigne.Détailsommetoutefutileface
àcequisepassaitetpourtant,ellene
voulaitplusrienvoir.Siseulementelle
nepouvaitplussentircessalesmains
sursescuisses,siseulementellepouvait
seséparerdesoncorps…Elle
maudissaitcettefichueflammequila
maintenaitfaceàlaréalité.Siellelui
avaitfaitpenseràAdamàsonarrivée
dansl’appartement,telunpharetoujours
deboutdevantlesaffresdesavie,elley
voyaitmaintenantsonenfersurTerre.
Elleavaittentédesedébattre,maisà
quoibon?Phill’avaitfrappésifort
qu’elleeutl’impressionquesonventre
avaitéclatéenmorceaux.Elleavait
cessédegigoterimmédiatement.Iln’y
avaitplusrienàfaire,aucunesolution
possible,
aucune
échappatoire
envisageable.
—C’estvraimentdommagepourtoi
Kaya,maisçanel’estpaspourmoi,tu
sais.Tuasunepeautrèsdouce.
EllepouvaitsentirlesdoigtsdePhil
effleurersapeau.Ilsallaientetvenaient
lelongdesacuisse,prenantbienson
tempsaumomentoùils’attaquaità
l’intérieurdecesdernières.Unfrisson
dedégoûtluidonnantlachairdepoule
lasaisit.Unesensationsidésagréable
qu’ellerepensaàAlecdansleSilky
Club.Mêmefaçondeseservirdeson
corpssanssonautorisation,sousla
menace.Mêmeécœurement,même
constatd’impuissance.Ellesedétestait
d’êtreaussifaible.Passerdutempsavec
Léoàapprendrelesbasesdeself-
défenseaudojon’avaitserviàrien.
Puis,ellepensaàsesprièrespour
qu’Ethanvienneunenouvellefoisla
sortirdelà.Direquetoutsepassaitlà,
alorsqu’ilétaitjusteàcôté,dansla
voiture.Ilnesuffiraitdepasgrand-
chose.Gagnerunpeudetempspour
qu’ils’agaceetmontevoircequ’elle
fichait.Justeunpeuplusdetemps.
Philsortitalorssoncouteaudesa
veste.Aurait-ellevraimentcetempsen
plus?Ellefinitparendouterquandses
yeuxremarquèrentlalametranchantedu
couteau.Toutallaitviteetpourtantune
sensationd’éternitél’accablait.Comme
une
bulle
spatio-temporelle
dans
laquelleellesetrouvaitetquidonnait
uneperceptiondelongueurmonotone,
alorsqu’àcôtélaréalitépassaitbien
plusvite.Ilfitbrillerlalamedeson
couteauàlueurdelabougieetvérifiasi
celle-ciétaitsuffisammentaiguiséeen
passantsonpoucedessus,avecun
sourirediabolique.Ellenepouvait
bougernimêmenégocier.Lebâillon
l’empêchaitdebienrespireretlapeur
qu’elleressentaitnel’aidaitpas.Elle
suffoquait.Lepoidsd’Alsursesbraset
soncorpsau-dessusdesatêtelui
engendraitunesensationd’étouffement
quelapièceobscureaccompagnait.Tout
setroublaitautourd’elle.Ladouleur
danssonventre,l’airmanquant,les
larmesnedemandantqu’àquitterses
yeuxetl’oppressiondecesdeux
hommessurelleprovoquèrentun
engourdissementqu’ellen’arrivaitpasà
repousser.Ellenedevaitpass’évanouir,
maissebattre,mêmesicetteidée
finalementlaséduisait.Neplusêtre
conscienteallégeraitsapeine,son
traumatisme.Neplusrienvoir,ni
ressentir.Ladéconnecterdumonde
quelquesheuresletempsquecelapasse.
MaislorsquePhilcoupanetavecson
couteauladentelledesaculotte,elle
compritquesoncorpslamaintiendrait
éveillée,qu’illuirappelleraitchaque
sensationjusqu’àlafindesesjours.Une
croixqu’elledevraitporterjusqu’àsa
mort,àmoinsqu’ellen’arriveplusvite
queprévu.Enfindecompte,elle
l’espérait.Ellen’attendaitqueça,quela
GrandeFaucheuseviennelachercheret
qu’ellepuisseenfinretrouverAdam.
C’étaitlaseulesolutionquiluiplaisait
pournepasêtrerongéeensuiteparle
désarroid’avoirétésouillée.Elle
pourraitenfinêtreenpaix,loindes
tracasdecetteviepourriequ’elle
acceptaitavecfatalisme.Pourquoi
continuerdevivreuneviesidure?
Commentdirequelavieestuncadeau
magnifique,unbonheurdontondoitêtre
reconnaissant,aprèsdetelsmalheurs?
Lebonheur,c’étaitAdam.C’étaitses
lèvressurlessiennes,sonnezcontreson
cou,sesmainscontresontorse.C’était
ladouceuretlasécurité.C’étaitson
sourireetsesyeuxbleusquila
regardaientavecamour.Seslarmesse
mirentàcoulerlelongdesesjoues.
Adam.Ellerepensaàtouscesmoments
àdeux,danslelit.Puisleur
emménagementensemble,sadispute
avecsesparentspourpouvoirrester
avecelle,sademandeenmariagesi
particulière.Adam.Ellevoulaitle
retrouver.C’étaituneévidencequilui
transperçalecœur.Ellevoulaitencet
instantmourir.
Philluiavaitretirésaculottesans
qu’ellenerésiste.Sadouleurdansle
ventreetcellequ’Alexerçaitcontreses
brasavecsesgenouxl’avaientrendu
amorphe.Alsemitàricaner,telleune
hyènedevantunmorceaudechair.Phil
luiécartalesjambessansménagement.
LepoulsdeKayas’accéléra,provoqué
parlapanique.Iln’yavaitplusdedoute
maintenant,c’étaitfini:ilallaitla
toucher,lavioler.
Ellefermalesyeux.C’étaitcequi
luisemblaitlaseulesolution.Fermerles
yeuxpourneplusvoirlalueurdela
bougiesurlevisagemauvaisdePhil.Al
déboutonnalemanteaudelajeune
femmeetcommençaàpalpersapoitrine
par-dessussonvêtement,toujoursà
califourchonau-dessusdesatête,touten
geignantdeplaisir.Puis,toutàcoup,il
tirad’uncoupsecversluilepullet
cachalevisagedeKayaavec.Laterreur
s’installaenelleetellecria,ellehurla,
tentantdegesticulerenvain.Sescris
s’étouffèrentdansletissuetlessanglots
restèrentcoincésdanssagorge,ne
pouvantselibéreràcausedesabouche
obstruéeparlebâillon.Alfitdavantage
poidssurellepourlamaintenir
fermementcontrelematelassurlequel
ilsl’avaientpoussé.
—N’aiepaspeur,luiditAlde
façondoucereuse.Çavateplaire.
Philritdevantlaremarquedeson
amietglissalalameducouteauau
milieudesapoitrine.Ilsectionnale
soutien-gorgedelajeunefemmeenson
milieu,d’unmouvementsec.Al,telun
loupaffamé,s’empressaalorsdeposer
sesmainssursesseins.Kayapleurait
toutesleslarmesdesoncorpset
pourtantavaitlasensationquerienne
sortait,quesatristesseétaitétoufféepar
sonbâillonetsonpull.Lapaniquela
faisaithaleter.Ellen’arrivaitplusà
respirercorrectement.Soncœurfrappait
contresapoitrine,commeemprisonnéet
nedemandantquelaliberté.Elleétait
fatiguée.Philposasesmainssurson
aineetl’agrippadechaquecôté,
pressantbiensonpoucedessuspourla
maintenir.Ildérivaensuiteversson
pubisquisetrouvaencerclébientôtpar
sesdoigts.Kayaarrachaungémissement
detristessequandileffleurasaféminité.
Alleregardaitfaireavecdélectation
tandisquePhilétaitabsorbéparcequi
allaitsuivre.Ilglissasonpoucecontre
lachairdesonclitorisetcommençaàle
caresser.Kayapoussaungémissement
guttural,cricoincéparlacrispationetla
peur.Peurdumaintenant,peurde
l’après,peurdetout.
—AllonsKaya,pleurernerésoudra
rien.Réfléchisplutôtàlamanièredont
tuvasréglertadette.Enyréfléchissant,
est-ce
vraiment
une
punition
?
Profiteautantquenous!Siçaavaitété
lepatron,tuauraismorflébienplus
avant.Onestplutôtsympaavect…
Laportedel’appartements’ouvrit.
PhilsetournaetAlrelevalatêteversla
porte…
Ethans’impatientaauboutd’une
demi-heure.Ilnecessaitderegarderla
ported’entréedel’appartement.S’ily
allait,ilpasseraitpourunrâleuretun
impatient.Ilnevoulaitpasluidonnerla
joiedeleluirappeler.Ilsoupira,se
rendantcomptequecen’étaitpasla
premièrefoisqu’ilétaitdevantchez
elle,danslavoiture,àl’attendre.Ilse
sentitétrangementblasé.Rienn’avait
évolué;ellelemenaittoujoursparle
boutdunez.Toujourslààl’attendre,à
espérerquelquechosed’elle.Toujours
cettetergiversationimpatienteàlavoir
veniràluioupas.Sontableaudebord
étaitproprecettefois.Ilnepouvait
passersesnerfsdessus.Ilobservaune
nouvellefoisdesaplace,auloin,la
portedesonappartement.Ildevait
relativiser.Illesavait.S’agacersurde
tellesfutilitésquandils’agissaitde
Kayanelemèneraitàrien.Ilposaun
instantsesmainssurlevolantetlaissa
allersonfrontcontre,puisfermales
yeux.
Ellevaarriver…Oui,elleva
arriver.
Auboutd’uneminuteàtenterde
parfairesaséancedeyogaimprovisée
poursecalmer,ilrelevalatêteetsortit
entrombedelavoiture.L’action,iln’y
avaitqueçadevrai!Elleallaitentendre
dupays!Ildévalalesescaliers
extérieursmenantàsonperronetentra
sanstropréfléchir,nivraimentprêter
attentionauxchoses.
—Putain,qu’est-cequetuf…
Saphraserestaensuspensquandses
yeuxrencontrèrentceuxdedeuxhommes
aumilieudecequisemblaitêtreun
salonavecunmatelascontreunmur.Il
restafigé,lamainsurlapoignéedela
portequelquessecondes.Ilcrutsurle
coupàunehallucination.Legenrede
mirageglauquequel’onretrouvaitdans
certainsfilmsviolents.L’obscurité,une
flammedebougie,deuxhommessurune
femme,
les
jambes
écartées.
Un
spectaclequ’iln’auraitjamaispensé
voirenouvrantlaporte.Unspectacle
qu’ils’étaitjurédeneplusrevoir.Un
spectaclequipourtantleblessaità
nouveau,carcen’étaitencoreunefois
pasn’importequellefemme.C’étaitune
femmepartageantsavie.Ilpouvait
entendrelespleursmeurtris.Ilpouvait
devinersestremblements.Encoreune
fois,ilsentaitsonimpuissancefaceàce
quisepassait.Ilarrivaittroptard.Il
étaittoujourslàquandlemalétaitdéjà
fait.Illarevoyaitlà,danscequileur
servaitdetaudis,aveccesdeux
hommes.Laseuledifférenceétait
qu’ellen’avaitpaslevisagecouvert
commeKaya.Laseule…Ethanlâchala
poignéedelaporteetseredressa.Non,
leschosesétaientdifférentes.Iln’était
pluscommeavant.Ilavaitchangé,il
avaitévolué.Ilétaitdevenuplusfort.Il
avaitgrandi.Sonregards’obscurcit
immédiatement.Leschosesétaient
différentes,carcettefois-ci,ilétait
davantagedetaillepoursebattre.Il
avaitgagnéenpuissance,endextérité.Il
s’étaitforgéuncorpscapabledecontrer
touteslesattaques,denepass’étaler
commeunvulgairemoucheroncontreun
mur.
Unsilencelourdrégnaitdans
l’appartement.Seulslespleursétouffés
deKayarésonnaient.PhillâchaKayaet
seleva.Ilseléchaledoigt,imprégnéde
l’odeurdecelle-cietfitfaceàEthan.
—T’esqui,toi?luilançaPhilavec
unsouriremauvais.Tunousavaiscaché
quetuavaisremplacéAdam,Kaya?!
IlsetournaversKaya,immobileet
toujoursàlamercid’Al,ignoranttoutde
cequisetramaitentreEthanetPhil.
Tropacculéeparsapeurpourpenserà
répondre,ellen’avaitsansdoutemême
pasréalisél’arrivéed’Ethan.
—Tum’excuserasmonpote,mais
onestentrainderéglerdeux,trois
détailsavectacopinedoncilvautmieux
quetuattendesdehors.C’estdanston
intérêt.
Philluifitmiroitersoncouteau.
Ethanneflanchapas.Sespoingsse
fermèrentetsoncœurseresserra,se
transformantlentementenuneénorme
pierredure,incassable.Unpoidsdans
sapoitrinetellementmarquéparla
souffrance,quelerendreimperméableà
toutetristesseétaitsonseulsalut.
S’endurcir.Neplusressentir.Pasde
sentiments,
pas
de
pitié.
Avoir
suffisammentdereculpournepasêtre
affectéetleregretter.Sespupillesse
rétractèrent;sonregardsefitnoir,
balayanttouteémotionpouvantletrahir.
Ilseretrouvaitsubitementplongéen
enfance.Illarevoyaitaveccesdeux
hommes,entraindeprofiterdeson
corps.Samèrenelesempêchaitpas,
maisilvoyaitqu’àsonvisage,celane
luiplaisaitpasdesmasses.Ilsétaientlà
àlapeloter,àlaprendresansvergogne,
àricaner.Celaarrivaitrégulièrement.
Deshommessurelle,réguliersou
différents,seservantdesoncorps.Elle
sejustifiaitendisantqu’ilsétaient
gentils,maisilvoyaitbienquesamère
n’étaitpasheureuse.Ceshommeslui
donnaientdel’argentpourqu’ils
puissentmanger.C’étaitlebut.Maisil
n’aimaitpasl’idéequ’ellepuisseêtre
malheureuse.Ellen’aimaitpasça.Ille
savait,maisl’enfantqu’ilétaitne
pouvaitpasgrand-chose.Ilavait
pourtantessayé…
C’étaitlorsqu’ilétaitrentréunefois
del’écoleavecunsourirejusqu’aux
oreilles,carilvenaitderamenerundix
surdixenmaths…Safiertés’estompa
quandilvitcespectacleblessantson
jeunecœur.Ilétaitentrédansla
chambreaveccettepeurviscéralepour
elleetelleluiavaitdit:«Monchéri,
veux-tum’attendredehorss’ilte
plaît?».Ilavaitbredouilléun
«mais…»inquiet.Elleluiavaitalors
sourienluidisantquetoutallaitbien,
qu’elleallaitvitelerejoindre.Encore
unefois,toutallaitbien…Etildevaitla
croire…Ilétaitalorssortietavait
attrapésabattedebase-ballqueStanlui
avaitofferte.Puis,ilétaitentréà
nouveaudanscettepiècededébaucheet
avaithurlé«Lâchemamère!»surun
desgarstoutenfrappant.Sisoncoup
avaitétéfort,celuiqu’ileutenréponse
l’avaitétéencoreplus.Ilavaitatterri
contreundesmursdelapièce,àmoitié
sonné.Ilavaitpuentendrevaguement
ensuitelesexcusesdesamèreauprèsde
cesdeuxhommes,lapromessequecela
nesereproduiraitplus.
Samâchoireseserra.Celas’était
reproduit.Plusieursfois,ilavaitessayé
delasauver.Ettoujourslemêmesourire
désolésurlevisagedesamèreaprès.
Toujourscettehabitudeàcontinuerà
voirdeshommesdéfilerdanssonlit.
IlbaissalesyeuxversKayaetsourit
delamêmemanière.Siàl’époque,il
avaitététristedenepouvoiraidersa
mère,ill’étaitencoreaujourd’hui,caril
s’étaitcontentéderesterdehors,à
attendre…encoreunefois…
—Ilfaittropfroiddehorsdoncje
reste.Maisparcontre,c’estvousqui
allezsortir.
—Voyez-vousça!TuentendsAl!Il
nousprovoque,cefou?
—Tunemanquespasdecran!fit
Al.Ilauncouteau,noussommesdeuxet
tuprétendspouvoirnoussortird’ici.
Tousdeuxsemirentàricaner.Ethan
souriaittoujours.Cen’étaitàl’évidence
pasdubonheur,delajoie,maisun
souriretriste.Uneautrepersonne,une
autrefemme,maisunmêmeconstat.
—Jenesaispassic’estdelafolie,
maissijesors,c’estmoiqui
m’ouvrirais
la
poitrine
avec
un
couteau…
Unesentencequiparaissaitlogique
danssabouche.Ilsentaitencoreson
cœurs’alourdir;lapierredevenait
plomb.
—Laisse-moit’épargnercette
peine!luiassénaPhiltoutensejetant
surluiavecsoncouteau.
Ildonnaplusieurscoupsqu’Ethan
esquivasansmaletquifinirentdansle
vide.Sonregarddevintplussombre
encore,quanduneouvertures’offritàlui
pourcontre-attaquer.Ill’attrapaparle
poignetetl’envoyaalorsvalsercontre
laported’entrée,têtelapremière.Le
chocfutsuffisammentimportantpour
quePhiltitube,sonné.AlenjambaKaya
etsemitenpositionpoursepréparerau
combat.Ethanbaissalatêtedecôté.
Aucuneémotionneressortaitdeson
visage.Sonsourireavaitdisparu.Pasde
peur,pasdedoutes,rien.Uneneutralité
quiinterloquaitAl,voyantquesonami
étaitdéjàbienamochéparsaluttecontre
lui.
—Tuasunregardquej’aidéjàvu.
Cevideentoi,jeleconnais.Tuconnais
lemilieu,pasvrai?
Ethanl’ignoraetretournas’occuper
dePhilquisesecouaitlatêtepourse
ressaisir.Soncouteauétaitausol,perdu
lorsdesonimpactcontrelaporte.Ses
mainsétaientcouvertesdesang.Il
compritqu’ilsaignaitdelatête,mais
n’eutletempsderéagir:ilsesentit
partirsansretenuedansuncoindusalon
ets’étalamollementcontreundesmurs.
Ethanouvritlaported’entréeetdonna
ungrandcoupdepiedaucouteauqui
passapar-dessuslebalconservantde
palier.Puis,ilattrapaànouveauPhil,
parlecolcettefois-ci.Incapablede
retrouverentièrementl’équilibre,ilse
laissaéjectersansrésistancesurle
perron.EthansetournaensuiteversAl,
sonregardtoujoursaussilugubre.
—Dehors!ordonnasèchement
Ethan,lessourcilsfroncés.
Aln’aimaitpasqu’onluidonnedes
ordres,surtoutvenantd’untypedontil
ignoraittout.Mêmesisonregardnoirne
luidisaitriendebon,iln’étaitpasle
sbiredeGianniBarrateropourrien!Il
jetaunœilversPhilquinecachaitplus
saragedesefairerétameretquise
relevaittantbienquemalsurlepalier.
Enunsourirecomplice,ilsattaquèrent
ensembleEthan,biendécidésàavoirle
derniermot.EthancontraPhilen
bloquantsonbras,puispritappuisurlui
pourfrapperdupiedleventred’Al.
Celui-cisepliaendeuxsouslaforcedu
contact.Alorsquel’attentiond’Ethan
étaitsurAl,Philenchaînaunsecond
coupdepoingdesamainlibre,qui
touchasacible.Unsouriresedessina
sursonvisage.Ethanlelâchaetperdit
légèrementl’équilibresousl’impact.Il
sefrottalajoueetlesregardaavec
haine.
—Onestfroissé?lançaPhil,ravi
del’avoirtouché.
Ethanvérifias’ilsaignaitenpassant
sonpoucesurseslèvres.
—Tuasuncoupdepoingde
fillette!
Philgrinçadesdentsdevantla
provocation.EthanregardaAluninstant.
—C’estça,lescaïdsdumilieu?
Pfff!Vousavezencoredutravail!
Sentantleursangbouillirdansleur
veine,AletPhillancèrentunenouvelle
attaquesimultanée.Ethansemità
souriretoutàcoup.PhiletAlse
trouvèrentdécontenancésparcesourire,
alorsqu’ilsétaientenpleinassaut.Un
sourirevil.Unsourirefuneste.Un
sourirediabolique.Unsouriremalsain.
Ethanpliasesgenoux,pourbien
s’ancrerausol.D’unbras,ilparale
poingd’Alquidéviasaroutepour
trouverlevidependantqu’ilarmaitson
autrebraspourbalanceruncoupde
poingdanslevisagedePhil.
—Voilàunvraicoupdepoing!lui
cria-t-ilavecrage,presquepossédé.
Philreculaettombasurlesfesses.
Ethanavaitdûluicasserunedent,caril
saignaitdelabouche.Allaissaparlersa
colèreetenchaînalestentativesde
coupsdepoing.Ethanévita,paraavec
uneaisancequinefaisaitquerenforcer
lacolèred’Aletdoncsamaladresse.
Ethanfinitparluisaisirsonbrasetlui
murmura:
—Etsijetepétaislebras?
Sapropositionnetrouvad’échoque
danssonacte.Iltiraverslebassonbras
etdonnaungrandcoupdegenoudedans.
Alpoussaunhurlementdedouleuretse
pliaànouveauensetenantsonmembre.
Ethanenprofitapourluidonneruncoup
depiedauxfesses.Altitubaversla
ported’entréeets’étalafinalementsur
leperron.Philn’attenditplussonreste
etseprécipitaverslaported’entrée,
relevantcommeilputsonacolytequi
gémissait.
—Onn’enapasfiniavecelle!lui
déclara-t-ilalorsvéhément,touten
soutenantsonamiavantdedisparaître.
Ethanregardaunmomentlaporte
d’entréeparoùlefroids’engouffrait.Sa
montéed’adrénalinel’avaitportévers
uneexcitationdontiltrouvaitencorede
lafrustration.Deuxhommesnelui
suffisaientpas.Ilétaittellementàfleur
depeauqu’ilauraitpuêtreunsoldatde
péplum,sebattantpoursonroyaume
dansuneguerreoùsonarméen’avait
pasl’avantagedunombre.Ilsesouvint
d’une
époque
où
ces
montées
d’adrénalineétaientsibienfaisantes,où
ilsesentaitrempli,plusserein,plus
vivant.Ilaimaitlabaston.Ilaimait
prendredescoupsetsurtoutendonner.
Letaekwondoluipermettaitdese
défoulertoutenaméliorantsatechnique,
maisl’absencedecadresluimanquait
aussiparfois.Uneépoqueoùpeut
importaitlerésultattantqu’ilpouvaitse
défouler,exultersacolère,exprimerpar
lespoingssondésarroi.Donnerdes
coupsouenrecevoir,c’étaitleseul
prétexteàsonautodestruction.
LespleursdeKaya,toujours
prostréeavecsonpullretournésursa
têteluifirentreprendrepied.Illa
regarda,recroquevilléeetimmobile,et
lapaniquelesubmergeatoutàcoup.Son
cœursilourdtremblapourelle.Il
n’avaitpaseupeuruninstantdevantses
deuxagresseurs,maisfaceàelle,ilétait
pétrifié.
Ilfermalaporte,retirasonmanteau
ettournasurlui-même,cherchant
commentréagir.
—Putain…Jenesaispas
consoler…selamenta-t-ilalors,enne
sachantquoifaire.
Lavéritéétaitqu’ilnevoulaitpas
consoler.Consolersignifiaitlivrerune
partiedesoipourl’autre.Fairepreuve
d’uneabnégationtotaledesoipour
apaiserl’autre,maisdontlereversdela
médaillepouvaitêtreencoreplus
douloureux,carpersonneneviendrait
voussoulagerencontrepartie.Ilsavait
consoler.Tropbien.Maisilétaithorsde
questiondereplongerdanssesvices.Et
pourtant,ilavaitfailli.AuSilkyClub,il
s’étaitlaisséaller.Danscesvestiaires,
ilavaitouvertunebrèchedansses
convictions:ill’avaittouchéepourla
réconforter.Ilavaitoubliétoutesses
mesuresdedéfense.Ellel’avait
foudroyéenunregardetilavaitagi
commeavant.Ilavaitutilisésoncorps
pourapaiserleurspeines.Kayaétaiten
traindelereplongerdanslepassé,faire
remonteràlasurfacedesdétailsqu’il
voulaitoublier.
Ilsavaitqu’ildevaitlaprendredans
sesbras,larassurerenluidisantque
c’étaitfini,quetoutallaitbien,maisils’yrefusait,carilnes’encontenterait
pas.C’étaitprendrelerisquederevenir
enarrièreetretrouversesvieuxdémons.
Pasd’étreintes,pasdemotsdoux,pas
depromesses.Etpourtant,seulement
l’actiondesesdoigtsavaitsuffipour
qu’ilrepartedanssestraversdansles
vestiairesdecefoutuclub…
Nesurtoutpasconsoler…
IltombaàgenouxdevantKaya,
complètement
dans
la
détresse.
Lentement,ils’approchad’elle.Elle
trembladavantageensentantlematelas
s’affaisser
sous
son
poids.
Tout
doucement,illuiretiralepulldeson
visage,elle-mêmen’ayantpaspercuté
qu’ellepouvaitàprésentretrouver
l’usagedesesmains,Aln’étantplussur
elle.Ellepoussauncrietcachason
visagedanssesbras.
—Lalumière!Lalumière,c’estla
réalité.Ilnefautpaslavoir.Ilfaut
resterdansl’obscuritépournepasvoir
lesombresdansersurlesmurs.
Ethanfuttétaniséparl’attitudede
Kaya.Elleétaitsouslechoc,répétant
sondéliresurlalumièreencoreet
encore.Ilregardalabougiesurle
comptoir.Ilselevaetenprofitapour
mieuxvoirl’appartement.Quatremurs.
Seulementquatremurs.Pasdemeubles,
pasdedécorations.Desmursblancs,un
rideauopaqueàlafenêtremenantsurle
balcon.Uncomptoir,maisriendessus,
mêmepasunecorbeilleàfruits.Seulle
réfrigérateurappelaitsonattention.Il
pouvaitydevinerdesfactures.Unbon
paquet.Illaregardaànouveau,toujours
danssontraumatisme,allongéesurce
matelasquidevaitluiservirdelit.Il
repensaàsonbesoind’argent,àla
colèrequ’elleavaitéprouvéecontrelui
quandill’avaitfaitvirer,àsafaçonde
négocierlemoindresou.Ilcompriten
voyantcetappartementquesonniveau
devieétaitbienloindusien,qu’elle
étaitvraimentauxabois,qu’ilétait
vraimentqu’unconnardàs’êtreentêté
contreelle.
Ilattrapaalorslabougieetla
déposaausol,justedevantKaya.Celle-
cihurlaettentadereculerleplusloin
possible,maisEthans’allongeaderrière
ellesurlematelasetlabloqua.Illaprit
danssesbrasetlaserracontrelui,
refermantsureuxlacouettequiétait
abandonnéeausol,àcôtédulitde
fortune.Kayacriaànouveau,sesentant
ànouveauprisonnièreetàlamercide
quelqu’un.Ellegesticulapourse
dépêtrerdesonétau,maisEthanne
lâcharien.Iltentadeseraisonner:la
prendredanssesbras,cen’étaitpas
mal.Tantqu’iln’allaitpasplusloin,tout
iraitbien.
Justenepasallerplusloin…
—Calme-toiKaya.Tun’asrienà
craindre
avec
moi,
murmura-t-il.
Chuuuutttt.
—Lalumière!Ilfautéteindrela
lumière!cria-t-elledanssonsanglot.La
réalité,jeneveuxplusvoir…Fermer
lesyeux,c’estmieux.L’obscurité,c’est
l’oubli.Oui,ilfautoublier!Éteindrela
lumièrepourêtreenfinheureuse…
Fermerlesyeuxpouréteindrelalumière
etneplusriensentir,neplusvoir
personne…
—RegardeKaya,cen’estpasla
mêmelumière…luichuchota-t-ilà
l’oreilledoucement.
Illuicaressalescheveuxtendrement
pourqu’elles’apaise,qu’elleretrouve
laraison.
—Cen’estpaslalumièresurle
comptoir,çaenestuneautre.Elleestà
côtédenous.Ouvrelesyeuxs’ilteplaît.
Laflammeestchaudeetdouce.Tula
sens?Regardecommeelleestbelle.
Kayasecoualatêtenégativement,
refusantdel’écouteretdelecroire.
Ethancherchalesmotsjustes,pouvantla
rameneràlui,pouvantluifaire
comprendrequ’elleétaitensécurité.
Dansunélandetristesse,mélangé
toutefoisd’espoir,illuichuchotaalors:
—C’estmaréalité.Tun’asrienà
craindredansmaréalité.
Kayaouvritlesyeuxdoucement.
Elleregardalaflammescintillersous
sesyeux.Ethancontinuaàluicaresser
lescheveuxtandisqu’ilsourit,heureux
delavoirpar-dessussonépaule
l’écouter.
—Tuvoiscommeelleest
tranquille?Regarde…C’estmonjardin
secretmaintenant…Tutesouviens?
—Ellevafaireapparaîtreles
ombressurlesmurs…murmura-t-elle
fatiguée,toutenserongeantlesongles.
—Impossible!C’estmacaverne.
Onn’yentrepasfacilement!Ilfautmon
autorisation!Ellesnerentrerontpassi
jeneleveuxpas.
Ilresserrasonétreinteautourdesa
tailled’unbrasetlesrecouvritunpeu
plusaveclacouverture.
—C’estmoncoconetpersonnene
peutnousdéranger.
Kayaregardalaflammesemouvoir
dansl’obscuritédel’appartement,
envoûtante,intrigante,fascinanteà
présent.
—Ilsnevontplusmefairedumal?
Ethans’arrêtauninstantdelui
caresserlatête.
—Non,ilsnetetoucherontplus.Je
suislà.Jeresteprèsdetoi.
Ellesemitàpleurerdeplusbelle,
lapaniquefaisantplaceausoulagement.
Savoixtranquille,rassurante,détachée,
réussissaitàl’apaiser.Ethanlaretourna
lentementpourlaprendrecontrelui.
Ellesecollacontresontorse,maisen
cetinstant,toutcequ’ilsouhaitait,
c’étaitqu’elleluifasseconfianceet
qu’ilsretrouventleurshabitudes.Illui
caressal’arrièredelatêtepourla
rassurer,luimontrerqu’ilétaitlà.Kaya
lâchacomplètementlesvannes,ne
pouvantpluscontenirtoutesapeuretsa
tristesse.Ellepleuraencoreetencore.
Pluselleexprimaitsatristesse,pluselle
secollaitàEthan.Bientôt,ellepassases
brasautourdesoncouetl’agrippaavec
force,commepours’assurerquemême
leventetlesmaréesneluiferaientpas
quittersoncou.Ethanluidéposaalors
desbaiserslégerssursonfrontetsa
tempe.
—C’estfini…luichuchota-t-il.Je
nepensepasqu’ilsreviennentdesitôt.
Kayaluifitalorsface;sonregard
étaitinquietmalgréleslarmes.
—Ilsvonts’enprendreàtoi!Tues
endanger.Ilnefautpasqueturestes
avecmoi!
—Calme-toi.Toutvabien.
—Non!dit-ellefermementen
repoussantsamaincaressantsajoue.
Adamm’avaitditlamêmechoseetil…
Unsanglotétouffasesmots.
—JenesuispasAdam.
—Ilsvontrevenirets’attaqueràtoi
pourm’atteindre.Iltefautm’éviter.Je
doisromprelecontrat.
—JENESUISPASADAM!dit-il
enhaussantlavoixetensaisissantcette
foisdesesdeuxmainssesjoues,et
collantsonfrontetsonnezcontrelesien
pourqu’elleluifassebienface.
Kayafutsurpriseparsabrusquerie
soudaine,maissiaffectueuse.
—Nemecomparepasàlui!dit-il
moinsfort,maistoujoursagacé.Regarde
autourdetoi!Tulesvois?Non!
Évidemment,jem’ensuischargé!Ils
sontrepartislaqueueentrelesjambes.
J’aimêmecassélebrasdel’und’entre
eux!Ilnem’arriverarien.Net’inquiète
pas.
LeslarmesdeKayadévalèrentses
jouessansqu’ellenepuisselesretenir.
—Ilsreviendrontplusnombreux,
Ethan.Tunefaispaslepoidsseul.Je
t’enprie,ilfautquetum’évites.Tune
saispasàquituasaffaire.S’ilt’arrivait
quelquechoseàtoiaussi,je…
Ethanluicaressaleboutdunezavec
lesienetlaregardaplustendrement.
—Etbien,dis-moiquisontces
types.Raconte-moitout,pourqueje
puisseévaluermoi-mêmeledanger!
Kayatournalatêteetsedétachade
sesmains.Ellesavaitcequ’ilcherchait
àfaire…
—Non,jeneveuxpasquetusois
davantageimpliqué.Celaneteregarde
pas.
—Kaya….luilança-t-ild’unton
plusmenaçant,maisinsistantàvouloir
gardertoujourssesmainssursesjoues,
malgrésonrejet.Jecroisquec’estun
peutard.Ensignantcecontrat,tues
entréedansmavie,maisjesuisaussi
entréinvolontairementdanslatienne.
—Non!Jepeuxencorechangerles
choses.S’ilteplaît…
Elleluilançaunregardimplorant
quinetrouvapaslapitiéqu’elle
espérait.Ilvoulaitsavoir.Pourquoices
garsenavaient-ilsaprèselle?Pourquoi
savieétait-ellesiaustèreetpar-dessus
tout,commentAdamétait-ilmort?Était-
ceàcausedeluiqu’ellevivaitainsi?
Commentavait-ilpuluiinfligerça?
Commentpouvait-elleencorel’aimer?
—Trèsbien,puisquetuneveuxrien
medire,jevaisdevoirmoiaussi
devenirméchant…
—Quoi?chuchota-t-elletoutàcoup
paniquéeparsespropos.Quevas-tu
faire?
Ethanadoptasonvisagetaquin:
souriremalicieux,sourcilrelevé,qui
indiquaitquelejeuallaitcommencer.
Ellevitquelquechosebougersousla
couverture,puissoudainsentitun
pincementàsontéton.
—Nemetouchepas!fit-elle
scandalisée,toutenprenantdela
distanceetsecachantsapoitrinesousla
couvertureavecsesbrasquiquittèrent
lecoud’Ethanprécipitamment.Qu’est-
cequiteprend?
—Alors?Jecontinue?Moiaussi
jepeuxdevenirméchant.N’oubliepas,
jepeuxêtreunvraiconnardsijeveux!
Parle!
Kayadéglutit,maisnepipamot.Il
nepouvaitqueplaisanter.Iln’iraitpas
aussiloindanslaprovocation.Pasaprès
cequ’ellevenaitdevivre.Cen’étaitpas
possiblequ’iljoueàcegenredejeu.
Ellenevoulaitpaslecroirecapable
d’unetelleintention.Ethansemità
souriredevantsonpetitcourageetson
incrédulité,malgrésatristeexpérience.
Elleavaitprotesté.Pasdefaçon
violentecertes,maiselleavaitréagi.Il
luirestaitencoreunpeudevolontéà
résister,àprotester,ànepasselaisser
faire.Ill’admirait,maissurtouts’en
ravit,carleprincipaldeleurrelation
étaittoujourslà:tenirtêteàl’autre
coûtequecoûte.Pouvait-elleêtre
commeçaavecquelqu’und’autre?
Était-ceseulementluiquilapoussaità
trouvercetteforceauplusprofond
d’ellepourluirésister?Pouvait-il
espérerêtreledéclencheurdeson
assurancequ’ellemettaitàprofità
chaquefoisqu’elleétaitpousséeà
bout?Ilaimaitsoncaractèrefort.Sa
façondesereleveràchaquefois.De
garderlatêtehautequoiqu’ilarriveface
àl’imprévuouaumalheur.Cesoir
encore,elleavaitencoreuneoncede
volontépourlutterànouveauetnepas
accepterlafatalité.Cesimplefaitle
rassura.Elleétaitchoquée,maisgardait
encoredel’entêtementpourfaireface.
Toutn’étaitdoncpasperdu.
—Tunemeferaispasça…Pas
aprèseux…luidit-elle,inquiète,mais
confiante.
—Jepeuxêtreprêtàbeaucoupde
chosespourobtenirdesréponses.Alors,
parle.
Kayaneluidonnaraison.Entre
parleretlesauver,ouprotégersavertu,
lechoixétaitvitefait:elletoucheraitsa
compassionetilcesserait.Aucunedes
deuxoptionsn’étaitenvisageable.La
voyanttoujoursdoutersursesobjectifs,
Ethanréajustalacouettequilescouvrait
etlançasonsecondassautenposantses
mainssursesfesses,toujoursnuessous
lacouverture.Ilavaitbesoindela
retrouver.Retrouverleurjeu,leurs
provocations,leurschamailleries.Il
voulaitretrouversacombattivitéet
s’assurerqu’elleallaitbien.Elledevait
se
défendre,
le
frapper
comme
d’habitudepuis,aumieux,cracherle
morceausurl’identitédecesgars.Kaya
fermalesyeuxetsemorditlalèvre,
maisnebougeapas,nineprotesta.
Devantsonmanquederésistance,Ethan
setrouvaalorscommeunidiot.Ilavait
sesmainsplaquéessurlesfessesde
Kaya,celle-cicolléeàluietvoilà.Pas
derejet,pasdesentimentvraiment
offusqué,pasdereprocheetencore
moinsderévélations.C’étaitpirequela
première
attaque.
Reculait-elle
finalement?Ilnesutcomment
interpréter
son
inaction
:
déni,
provocation,résignation,invitation?
—EuhKaya…Tuescenséeme
frapper,metraiterdeconnard,puistout
medéballer,là!C’estdelatorture,ce
quejetefais!Bats-toi,quoi!Fais
quelquechose,bonsang!Bouge!
Frappe-moi,aupire!
—Tatechniquepourmefaireparler
estobsolète.Jenetedirairien.Etje
n’aipluslaforcedemebattreavecqui
quecesoit.Pascesoir…Maissije
peuxencoresauvertavieente
protégeantparmonsilence,jeleferai…
Jepréfèreencoresentirtesmainssur
moiquecellesdePhiletAl,s’illefaut!
fit-ellealorsd’unetoutepetitevoix.Tant
quejenetemetspasendanger,cen’est
pasgrave.Ceneserapaslapremière
foisquetumetouches…Quoiqu’ilen
soit,jeneparleraipas!
Ilignoraitsielleserendaitcompte
del’ampleurdesespropos,maislui
s’entrouvaconfus.Ilnesavaits’il
devaitgardersesmainsenplaceoules
retirer.Pirequecela,ilsesavaitentrain
derougir.Lesbattementsdesoncœur
s’accélérèrenttoutàcoup.
—Kaya,tuanalysescequetuviens
demedireoupas?Caronpourrait
presquecroireà…euh…une…
invitationàcontinuer?
Kayacachasonvisageentreleurs
deuxpoitrines,gênée.Maissonsilence
confirmasonimpression.Malgréla
faiblelueurdelabougie,ildevinait
qu’elleaussiétaitconfuse.
—Tecrois-tuvraimentcapable
d’êtreplusconnardqu’euxdeuxréunis,
dis?luimurmura-t-elletoujourssans
oserleregarder.Tuesplusdouxqu’eux,
non?Tunemeferaispasdemal.
Surtoutpouratteindreuntelobjectif…
Jen’arrivepasàcroirequetupuisses
forcerquelqu’un.
Kayaserendaitcomptequ’elleétait
entraindejoueraveclefeu,queses
questionsmettaientenavantunconstat
quechacundesdeuxserefusaità
accepterréellement:unecertaine
familiarité.Ilpouvaitêtreunvrai
connard,ellen’endoutaitpas.Maiselle
sesentaitbienplusapaiséedepuisqu’il
l’avaitrassurée,depuisqu’ill’avait
prisedanssesbrasetqu’illuiavait
caressélescheveux.Elleavaitsentisa
chaleurserépandreautourd’elle.Une
chaleursidouce,siréconfortantequ’elle
envoulaitencore,justepourêtreunpeu
plusréconfortée.Mêmesic’étaitlui.
Ethan.Sonpireennemidepuisune
semaine.
Ethansentitledouteprendrede
l’ampleurenlui.Elleletrouvait
«doux».
Depuisquandsuis-je«doux»?
Putainnon!Nemedispasquejesuis
gentil!Surtoutpastoi!
Silagentillesseétaitdevenuepour
luiundéfaut,pourellecelasemblaitêtre
uneaptitudeappréciable.Ellenele
repoussaitplusavecautantdeferveur
qu’àsesdébuts.Ellecommençaità
cernerunedesespiresfaiblesses.
C’étaittellementimprobablevenant
d’elleetdeleursdéfispermanents,qu’il
nesavaitquoidire.Quandavait-elle
sentisadouceur,sagentillesse?
Etmerde…tuesunconnard,un
enfoiré!Maiseffectivement,jenesuis
pasnonplusunsalaud…Jenepeux
paslavioler!Maisjenesuispasun
gentilnonplus!Jenedoispasl’être!
Êtreunconnard.Cemotavaitune
connotationnégative.Celaluiconvenait.
Aumoins,illatenaitunminimumà
distanceaveccestatut.Maisavait-on
déjàvuunconnarddoux?N’yavait-il
pasunparadoxe?Sonrefusdela
consolerétaitentraindeluiexploseren
pleinvisageetdeluidire«qu’est-ce
quetuattends?Vas-y!Agisenvrai
connard,maintenantquetut’évertuesà
lerevendiquer!Puisquetun’espasun
gentil,prouve-levraiment!Continuede
l’agresser,crétin!»Oui,ilétaitun
connard.Unvraidevrai…enfin,
jusqu’àunecertainelimite!
—Etbien…çadépend…répondit-
il,incertaindesesréponsesetdeplus
enplusinquietparledoutequi
s’installaitenlui.Ilfautvoircequ’ils
ontfaitpourque….jepuissejugersije
peux…fairepire.
Sabouchesefittoutàcoupplus
pâteuse.Ilavaitdumalàretrouverune
contenance.Leurdiscussionavaitpris
unenouvelletangentequ’iln’aurait
soupçonnée.Saprovocationbon-enfant
avaittrouvéuneréponsepourlemoins
surprenanteetsurtoutimprévue.
—Tupensesdoncpouvoirêtreplus
odieuxetimmoralqu’eux?
—Jel’aidéjàétéauSilkyClub,
non?N’ai-jepasunpeuabusédela
situationetdetabienveillance,sans
regret?
Kayasefigeaetleregardadansla
pénombre.Celui-cisemblaitcrispémais
certainquesonproposferaitmouche.Il
étaitbienunconnard.Ilnepouvaitque
refuserd’êtreclassécommeuntype
gentil,unhommedouxaveclesfemmes.
Ilnel’étaitpas;ilslesavaienttousles
deux.Ilétaitunepeaudevache,loin
d’avoirdebonssentiments.Ildevaitle
luirappeler.Ilavaitabusédela
situation.Ilavaitabusédesafaiblesse.
Pouvait-il
avoir
des
gestes
plus
déplacésquecesgars?Rienqueson
passéétaitunoutrage!Ilnevalaitsans
doutepasmieuxqu’eux,etildevaitle
luifairesavoir.Iln’yavaitpasde
douceurchezlui.Encoremoinsde
gentillesse.L’idéeétaitquecelaétait
toutbonnementimpossiblequ’euxdeux,
etmalgrésondésirpouvantflirteravec
lafrustration,puissenttrouverunterrain
d’ententeàceniveau.Ellenedevaitpas
seméprendre.Mêmelesexechezlui
étaitunactedistant,dénuéd’une
quelconquebonté.Etpourtant…Ilavait
enviedeluiprouverqu’ilpouvaitaller
plusloinquesesdeuxoppresseurs.Pas
dansl’oppressionqu’elleavaitpu
ressentir,pasdanslaviolenceetla
subordination,maisenétantlemême
connardconciliantlorsdesvestiaires.À
lafoisignoble,maisprésentpourson
bien-être.Ilétaitprêtàluiproposerle
mêmegenredeprestationqu’auSilky
Club.Finalement,ellelepoussaitencore
unefoisàrompresesengagements
contresonpasséetàconsoler.Àla
différencequecettefois-ci,avecKaya,
iln’yavaitpasdepromesses,nide
sentiments.Ils’imaginaitpouvoirla
consoler,maisd’uneautrefaçon:àla
manièreduconnardqu’elleconnaissait.
Finalement,
cette
perspective
le
séduisait.Unréconfortbienparticulier
pourunefemmetoutaussiparticulière.
—C’estvrai…dit-elleenriant
amèrement.Jen’aitoujourspascompris
parqueltourdeforcetuasréussicet
exploit!Tuasraison…Jeraconte
vraimentn’importequoi!Oubliema
question…Tun’espasmieux.
Kaya
resta
interdite
quelques
secondes.
Il
avait
bien
été
un
opportunistesionyréfléchissaitavecdu
reculmaisenmêmetemps,ilavait
réussiàluifaireoublierlesmains
d’Alecsursapoitrine.Ill’avaitlibérée
d’unpoids.Elles’étaitsentiedésirée
d’uneautrefaçon.Devantsapassivité,
Ethans’inquiétaetnesutcommentlui
fairecomprendrequeleconnardqu’il
était,pouvaittoutefoisluiapporterdu
bon.Maintenantquelapossibilités’était
insinuéeenlui,ilnepouvaitlafaire
partirsifacilement.Ilpouvaitla
consolerdelamêmefaçonqu’auSilky
Club.Êtreodieux,immoral,maisdontle
résultatpouvaitlasoulager.Ilpouvaitla
réconforterd’unefaçondifférentede
cellequ’ilconnaissaitetdontilrefusait
la
possibilité.
Même
si
c’était
annonciateurd’undangerpossibleencet
instant,illavoulait.Aussiinconcevable
etridiculequetoutcelaétait,ilavait
trouvéunmoyendecontournertousleurs
problèmes.Ilnedevaitpaslalaisser
réfléchir,nilalaisserdouter.Illui
fallaitagir,vite.C’étaitdevenuune
évidence.Ilenavaitbesoinetelleaussi.
—Tuveuxqu’onteste?Voirsije
suisunconnardtoujoursaussibon?lui
dit-ilavecunpetitsourirepleind’espoir
dissimulé.
Kayaleregarda,confuse.La
propositionn’étaitplusvraimentpour
répondreàundébatsursaqualitéde
connardàfairepirequesesdeux
agresseurs,maisbiensûrcequ’elle
pouvaitaussiattendredelui,cequ’elle
pouvaitespérergrâceàsonintervention.
Lesujetavaitdéviésurlebienqu’il
pouvaitluiapportersouscouvertde
fairepirequ’eux.Ilss’enrendaient
comptetouslesdeuxaveccettemention
duSilkyClub.L’atmosphèreentreeux
deuxvenaitdechanger.Lapeurfaisait
placeàuneattentesilencieusedesdeux
côtés.
—Jepeuxessayerdetefairetout
oublier,Kaya…luimurmura-t-ilavec
unevoixpresqueétrangléeparl’émotion
quilesubmergeait,àl’idéedecequ’il
pourraitressentirsielledisaitoui.Je
feraimieuxqu’eux,maisàmamanière.
CommeauSilkyClub.Tuveux?
Kayasefigea.Plusdedoute.Il
pensait
la
même
chose
qu’elle,
maintenant.Ilnevoulaitplusvraimentla
toucherpourlafaireparler,maisbienla
toucherpourlaconsoleràsamanière.
Toutsoncorpsfutpartagéentrele«non,
cen’estpasraisonnableetcomplètement
inconcevable!»etle«oui,sauve-
moi!».Lapropositionlaplusindécente
qu’onaitpuluifaire.Malgrétout,sa
promessetrouvaitunerésonancequilui
serraitlecœur.Toutoublier.Àsafaçon.
CommeauSilkyClub.Devantson
mutismeetsonimmobilismeàlui
répondre,Ethans’allongeaalorsdetout
sondossurlematelasenlaportantsur
lui.
Kaya
se
sentit
soulevée
soudainementetsortitdesaréflexion.
Ellesetrouvabientôtàcalifourchonsur
luisouslacouette,sansculotte,les
fessesàl’airetsonpullcachantsa
poitrinelibéréedetouteentrave.Ellese
mitàrougiroutrageusement,cequifit
sourireEthan.
—Montre-moiKaya.Montre-moi
oùjedoisposermesmains…
-10-
Réconfortant
KayaregardaEthansanstropsavoir
quoifairenicequ’elleattendaitdelui.
Ellenevoulaitpasd’unautrehomme
qu’Adamcontreelle,etpourtantla
présenced’Ethanlarassurait,l’exhortait
àvouloirqu’illaréconforte.C’était
elle,laplusblesséeetc’étaitmalgré
toutluiquiétaitàsamerci,àattendre
ses
réponses.
Elle
le
détestait
d’habitude,ilnel’aimaitpasnonplus.
Etmalgrétout,ilsétaientlà,tousles
deux,àespérerdesgestesaventureux,
invraisemblables,maissouventrêvés.
Commentavaient-ilspuenarriverlà?
Elleneréalisaitpasvraimentcequ’elle
faisait.Etmalgrétout,ellenetrouvait
paslademanded’Ethansiinconsidérée
quecela.Ellevoulaitjuste…
D’un
mouvement
hésitant,
elle
attrapalamaind’Ethan.Celui-cisentit
soncœursegonflerd’impatience,mais
aussidedésiràsoncontact.Ilobserva
samaindanslasienneavecunecertaine
appréhension.Peurd’êtredéçusurce
quiallaitsuivre,peurd’êtretrop
heureuxsiellerépondaitàsessouhaits
lesplusabsurdesdelaposséder.Kaya
regardalamaind’Ethan,indécise.Elle
sesentaitmalàl’aise.Comment
pouvait-elleluidemanderdelatoucher,
justepoureffacerlestracesdePhiletAl
surelle?Quellefemmeétait-ellepour
lecontraindrefaceàsadétresseàfaire
quelquechosedontiln’avaitsansdoute
pasréellementenvie,justepoursoulager
sadétresse?Ellenesereconnaissait
pas.Ellenesecomprenaitpas.Elle
devraitsouhaiterêtreloindetout
homme,lesmaudireetleurcracherau
visage,maisavecEthan,toutétait
différent.Elledevaitlerepousser,lui
aussi;c’étaitunhommeaprèstout.Mais
curieusement,ellenesouhaitaitpas
partirenguerrecontrelui;ellevoulait
qu’ilsoitsonterritoiredepaix,leseul
qu’elleconnaissaitsuffisammentau
pointdepouvoirserelâcherunpeu,se
laisserallercommeelleavaitpulefaire
danscertainscas.Elleavaitbesoind’un
refuge,ilpouvaitêtresonhavrede
sérénité.Leseulprésentauprèsd’elle
aujourd’hui.Versquid’autrespouvait-
ellesetournerfinalement?Ellen’avait
plusd’amisetAdamn’étaitpluslà.Ilne
pouvaitpluslaprendredanssesbras,
effacercesmarquessursapeauparson
amourpourelle,luifaireoubliercesi
péniblesouvenir.Luidirequ’elleavait
justefaitunvilaincauchemar,qu’ilétait
là.Justelàpourelle.
Ethanétaitlà.Pasd’amour.Pasde
tendresse.Sonréconfortneseraitpasà
lahauteurdecequ’ellesouhaitait.Mais
ilétaitlààlaregarderavecsesyeux
marronpleinsd’attente.Ilavaitdéjà
effacélessouvenirsduSilkyClubd’une
façonsisurprenanteetpourtantsi
efficace.Ellen’auraitjamaissongé
qu’unautrehommequ’Adampuisse
arriveràdetelsgestessurelleet
pourtant,ill’avaithypnotisé.Ilavait
réussiàmettresesdoutesetsescraintes
decôté,letempsd’uninstantdontlui
seulencontrôlerlesablierdutemps.Il
avaitrepoussésescertitudessurson
amourpourAdampourrévélerses
besoinsdefemme.
Elleregardasamain,maiscomprit
qu’ellenepouvaitsepermettrede
changerdecomportementaveclui.En
findecompte,elleabusaitdelui,desa
gentillesseàvouloirlaréconforter
malgrésesexcusesdemauvaisgarçon.
Ilcomposaitenfonctiondeses
réactions.Ellenepouvaitpaslui
imposerseslubies.Effacerlecontactde
deuxhommesparunautre,sousprétexte
qu’ellepréfèreencorequecesoitlui…
autantsedonnerauplusoffrant.Autant
perdretoutamourpropre.Qu’était-elle
devenue?Quefaisait-elledesonamour
pourAdam?Unefumisterie?
Pourtant,samainchaudedansla
sienneadoucissaitsasolitude,la
délestaitdecefroidquiluiavaitglacé
lesentrailles.Samainallégeaitses
tourments.Ellesavaitcequ’ilpouvait
faireavecsesmains.Ellesavait
comment
elles
l’apprivoisaient,
commentellesarrivaientàétancherses
besoins.Non,iln’étaitpasAdam.C’est
vrai.Iln’avaitrienàvoiraveclui,mais
sesmainsétaientaussidoucesqueles
siennes,sonintérêtdanssonregardétait
chargédelamêmeenviepourelleque
cellequ’Adamavaitpuressentir.
Denouvelleslarmessemirentà
coulerlelongdesesjoues.Ellene
devaitpasattendreaprèscettedouce
chaleur.Ellenedevaitpasjoueravec
lui.ElleaimaitAdam;iln’yavaitdonc
pasdesuitespossiblesentreeux.Il
n’étaitpasAdam.Iln’étaitpaslui.Elle
nedevaitpasprendresamainpourcelle
d’Adam.Ellenedevaitpastout
confondre.Lelaissers’immiscerdanssa
vie,c’étaitprendrelerisquedele
rendremalheureux,del’entraînerdans
sontourbillonetneplusensortir…
commeAdam.
Ellelâchaalorssamainàregret.
Ethanvitquesontroublel’avaitmenéà
unchoixderetrait.Ellereculait.Elle
renonçaitàsademande,ellerefusaitde
selaisserallercontrelui,ellerepoussait
samaintendueverselle.
—Kaya…parle-moi.Dis-moioù
ilst’onttouchée.Dis-moioùtuveuxque
j’effacetoutça.
Lajeunefemmesecoualatête
négativementtoutensanglotant.Ethanse
redressaetpassasesbrasautourd’elle.
—Pourquoi?luidit-ildefaçon
étranglée.
Sonregardcherchauneréponsedans
laprunellevert-marrondeKaya,mais
ellerefusaitdelevoir.Ellepréférait
gardersonvisagetournéloindelui.
Commesileregarder,c’étaitcraquer.
—Qu’est-cequitefaitchanger
d’avis?Jesaisquejenesuissansdoute
paslemieuxplacépourt’aider,mais…
Ilbaissaalorslesyeuxetsoupira.Il
serendaitcomptequ’endéfinitive,tout
n’étaitpasaussisimpleentreeux.Leurs
divergencesétaientsansdoutetrop
fortespourquecequidevaitsuivre
trouveunelogique.
—Kaya…situenasenvie….situ
enéprouvesvraimentlebesoin,
j’effacerai…commelapremièrefois.
Ilrelevalesyeuxversellepour
qu’ellecomprennequ’iln’yavaitpasà
s’inquiéterdesoncôté,pourqu’elle
voiequ’ilneluiporteraitpasatteintesi
ellenelesouhaitaitpas,pourluidire
quesaseuleenvie,c’étaitd’êtreson
réconfort.Ilnepouvaitplusreculer
maintenant;sesvicesrevenaientàlui
aussiévidentsqu’avant.Ilenvoyaittout
sonintérêt.Nefairequ’unpourqu’elle
nesesenteplusseule,pourqu’ellesoit
ànouveauheureuse.
—Kaya…regarde-moi,s’ilteplaît.
Kayasemitàpleurerànouveauà
chaudeslarmes.Elleportasesmainssur
sonvisage.Ilserraalorssesbrasautour
desataille,fautederéponsesconcrètes,
pours’assurerqu’elleneluiéchapperait
pas.Iléprouvaitlebesoindel’avoir
contrelui.Tropd’espoirsenquelques
minutesnepouvaitêtreaussifacilement
oubliés.Pasaprèscequ’ilavaitpu
ressentiraprèslerepasdeLaurens
quandleschosesavaientchaufféentre
euxoudansl’ascenseur,aprèsleurs
baisersenflammés.Ildevaitrassasier
cetteéventualitéd’un«deux»pardes
actespalpables,desgestesphysiques.
Lesmotsn’étaientpassonfort;seulsles
gestesétaientéloquents.Ilfallaitqu’il
serassurequ’ellerestebienprèsdelui
pourpouvoirmieuxlaréconforter,
mieuxsoulagersonattentegrandissante.
—Kaya…arrête…arrêtede
pleurer.J’aicompris.Tuneveuxplus…
dit-il
malgré
tout,
à
contrecœur.
D’accord.Jen’insistepas,maisarrête
depleurer.
Aprèsunebonneminuteassisesur
lui,Kayatentadesecalmeretdesécher
sesnouvelleslarmes.Ethanluicaressa
lesjouespourlesessuyeretluisourit
tendrement.Sentirsesmainssurson
visageluifaisaitunbienfou.Plusillaregardait,plusellevoulaitfermerles
yeuxetselaisserallercontrelui.Elle
collaalorssonfrontcontrelesien.
Ethannelâchapassonvisageencoupe
danssesmains,maissouritunpeuplus.
Ellerevenaitverslui,ellerelâchaità
nouveausaméfiance.Ilrestaainsi
quelquessecondesàfermerlesyeuxet
sentirsarespirationetsessanglots
contresonvisage.Puis,ildécidadela
presserunpeuplusdanssesbras.Kaya
n’avaittoujourspasdécrochésonfront
dusienets’étaitmaintenantmisen
boule.Petitàpetit,sonchagrindiminua.
Ilrestaitlà,contreelle,sansriendire.
Sonsilencelatranquillisa.Ellepouvait
mêmesentirsonpoucefaireundemi-
cerclecontresesreins.Uncontactléger,
régulier,maisbienfaisant.Puis,cefut
toussesdoigtsquientamèrentunedanse
lascivesurtoutlebasdesondos.Elle
laissaalorssonfrontsedétacherde
celuid’Ethanpourallersenicherdans
soncou.Ethanputs’apercevoirqu’elle
selaissaitvraimentréconfortercontre
lui,qu’elleacceptaittemporairementson
soutien.
—Jetedemandepardon…lui
murmura-t-elle,toujoursnichéedansson
cou.
—Pourquoi?luidemanda-t-il
interloqué.
—Jetedistoutletempsquejete
détesteetpourtant,jesuislà,àsolliciter
duréconfort,àtedemanderdeschoses
idiotes,dontmoi-mêmej’aihonte.Te
comportercommeauSilkyClub,c’est…
minable.Tuespeut-êtreunconnard
parfois,maiscelanedoitpasinduire
quetul’essurcommande.Madétresse
nedevraitpast’obligeràagirautrement
qu’àteshabitudes.Pardon.
Ethanfutsurprisparcetaveu,
certainementvrai,maisaussichargé
d’unegrandesincérité.Ellen’avaitpas
toutàfaittort.Ilnevoulaitpasla
consoleraudépart,etpourtantilétait
prêtàêtreplusintimeencore,à
dépasserseslimites,àselibérerdeses
impératifs,justepourelle.Soncœur
battaitdefaçonirrégulièredepuis
maintenantplusieursminutes.Ilsentait
toutsoncorpsprêtàrépondreàses
moindresdésirs.Ilpouvaitidentifier
sansmalcettevaguedeplaisirle
traverseretluiserrerlecœur.Sonodeur
contresesnarines,cecontactqu’il
devinaitduboutdesesdoigtsàtravers
sonpull,sonsouffledanssoncou…
autantdedétailsauxquelsilétait
sensibleetquilerendaientfébrile.Il
éprouvaitlebesoinderessentirencore
cepetitbonheurquilegrisait,l’aiderà
sesentirvivant.Aimercettesensation
quipapillonnaitenluietàlafaire
grandirencoreetencore.
—
Princesse
idiote
!
dit-il
doucement.Depuisquandmeforce-t-on
àfairecequejeneveuxpas?Depuis
quandsuis-jecensét’obéirsijen’enai
pasenvie?
Kayaseredressaalorsetle
contempla.Lalueurdelabougie
éclairaitsonvisagesûrdelui,arrogant,
maisaussiespiègleetexaspérant.En
parfaitcontrasteaveclessiens,rougis,
fatiguésetmouillésparleslarmes.
—Tuveuxdirequecelanete
gêneraitvraimentpasdefaire…enfin,tu
voisquoi…d’êtreunconnardaltruiste.
Ellesemitàrougiretjuradevant
l’absurditédesonderniermot.Ethan
s’esclaffadevantsasoudainetimiditéà
reconnaîtrel’inavouable.Ilapprocha
alorsseslèvresdesonoreilleetlui
chuchota:
—N’oubliepaslecontrat,Kaya.
Pasd’amour,pasdesentiments.
N’oubliepasquelhommejesuis.Pasde
promesses.Pasdecompassion.Juste
des
arrangements.
Juste
des
négociations.Desaccordspourque
chacunytrouvesonintérêt.
Kayas’écartadeluipourluifaire
face.Laprunelledesesyeuxindiquaità
quelpointsadéterminationétait
présente,àquelpointilcroyaitdur
commeferensesparoles.
—Jevoiscettepossibilitécomme
telle.Unaccordentredeuxpersonnesoù
chacunedesdeuxpartiesytrouveun
intérêt.Toi,c’estquetunesentesque
mesmainssurtapeau,uniquementmes
mains,effaçantlestracesdecesdeux
abrutis.
Ethanglissasoudainementsesdeux
mainssurlesfessesnuesdeKayaetles
agrippafermement,cequifitsursauter
légèrementlajeunefemme.
—Etdevinequelpeutêtremon
intérêt?!luidit-ilalors,visiblementtrès
amuséetsoudainementplusjoueurque
prévu.
Devantsonairmalicieux,Kaya
fronçalessourcilsetlerepoussadeses
deuxmainssurlesépaules.Ethanse
laissaretombercontrelematelasen
rigolant,maisgardanttoujourssesmains
contreelle.Puis,ilpritunairplus
sérieuxetluirépétaplusposément:
—Dis-moioùtuveuxquejepose
mesmains,Kaya…
—
Pervers…
murmura-t-elle
finalementattendrie.Leshommessont
touspareils!Dèsqu’ils’agitdetoucher
unefemme,ilssonttousprésents!
Comment
puis-je
être
à
califourchonsurlui?Commenta-t-il
faitpourquej’enarriveàuntel
résultat,alorsquejedevraisrepousser
toutcontactsurmapeau?
—Hééé!Monobjectifpremierest
quandmêmedesoulagerlaconscience
demapseudopetiteamie,quiaencore
beaucoupàfaireetquidoitvite
remontersursonvélopouravancer!Je
veuxmoncontratavecLaurens!
—Évidemment!
—Évidemment…
Ethanluisouritdefaçonentendue.
Sonregardbrillaitàlalueurdela
bougie.L’artdetoujoursretombersur
sespieds,detoujoursavoirledernier
mot.
—
Effectivement,
aucune
compassion,justeservirtesintérêts.Une
prévenanceauxalluresdedesseinsplus
machiavéliques!
Kayasourit,maislecœurn’yétait
pas.Àquoisongeait-elleaujuste?Plus
de
sentimentalisme
?
Plus
de
reconnaissance?
Jevoulaisjuste…
Sesintérêts…Ilétaitseulement
fidèleàlui-même.Commed’habitude.
Commed’habitude…
—Bon,jeteprometsd’essayer
d’êtreleplusagaçantpossible!luifit-il
avecunclind’œil.Tuvasmesupplier
decontinueràêtrehorrible!
—Pfff!luilança-t-elledésabusée,
maisfinalementamusée.
Oui,commed’habitude…Juste
commed’habitude…Toi.Moi.Etnos
accordsbizarroïdes…
—Tuveuxretrouverleconnarden
moi,levoilà!dit-ilenhaussantles
épaules.
—Rhhaaaa!Voilà!cria-t-elle
agacée,toutenpassantsesmainsautour
ducoudel’hommequiluifaisaitface.
Tum’énervesmaintenant!J’aiplutôt
enviedet’étrangler!
—Lacolèrenerésoudrapaston
problème,tusais.Situm’étrangles,je
nepourraispascontinuermonescapade.
Ethanjoignitlesgestesàsesmotset
fitglisserlentementsesmainssurses
cuisses.Kayasecrispasoudainement,
sentant
les
frissons
brusquement
remonter
son
échine.
Ses
joues
s’empourprèrentànouveauetEthanse
mitàrireànouveau.
—Vas-y!Serre!Maissijemeurs,
turateraslereste!
Ilpouffadeplusbelleenvoyantle
doutes’insinuerdansl’espritdelajeune
femme.Elleleregardaitsansvraiment
levoir.Toutessessynapsesétaient
focaliséessurcecontactcajoleursurses
cuisses.Sesdoigtsfaisaientdepetits
cercles,lapulpedesonpouce
s’enfonçantunpeuplussursapeaupour
effacerlesdoigtsdégoûtantsdePhilety
posersamarque.Ellesentaitlachaleur
prendreformesoussesdoigtset
regrettaitmêmequ’ilnereviennepasà
nouveauverssesfesses.Elledesserra
alorssesmainsdesoncouetposasa
têtecontresonépaule,s’allongeantà
moitiésurlui.
—Jetedéteste…
—Jesais.Ilnepeutenêtre
autrement.Pasvrai?luidit-iltout
doucement.
Kayaneréponditpas,nesesentant
paslaforcedeparler.
Commed’habitude…jefinispar
aimertesattentionsdéplaisantes…
Ethanaccentuasescaressespardes
gestesplusamples,quirevinrentà
nouveauverssesfesses.Sapeau
s’imprégnaitpasàpas,doucement,de
sesdoigtsetsesmains.Ellepouvait
ressentirledégoûtdisparaîtrepour
laisserlaplaceàunplaisirquiappelait
salibidoàseréveillermalgréelle.
—Peut-êtredevrais-jearrêter?lui
dit-ilauboutd’unevingtainede
secondes.Situmedétestes,tudoisaussi
détestercequejefais….luisouffla-t-il
toujoursàl’oreille.
Ilstoppasesgestessubitement.Kaya
seredressainstantanémentetprotesta
parun«Non!»sanséquivoque.Elle
portalamainàsabouchecommesielle
avaitretenutroptardsesparoles.Elle
semitàrougir,priseenflagrantdélitde
délectation.
Jetedéteste…
Ethansemitàsourire.
—Ilsembleraitquejesoisun
connardefficace!constata-t-ilamusé.
Devantl’évidence,Kayaneput
contrediresespropos.Ellelaissaalors
retombersatêtecontreluienlâchantun
gémissementdésabusé.
—OK,jecontinuedonc…
Illaprojetaalorssoudainement
contrelematelas,laretournantafinde
seretrouveràprésentau-dessusd’elle.
Kayasefigea,surpriseparce
revirementdesituation.Délicatement,il
fitglissersesdoigtssursonventre.
Kayasecontractaunpeuplus.Ethanne
lalâchaitpasduregard.Ilavaitretrouvé
sonairsérieux,commesichacundeses
gestesétaitcalculépourqu’illafasse
parleràtraverslesexpressionsdeson
visage.
—Héééé…regarde-moi.
Kayaleregardasansvraiment
accrochersesprunelles.
—Kaya,regarde-moi!dit-ilplus
menaçant.
Elles’agaçaetfixasonregarddans
lesien.Sonangoisseetsonénervement
furentaufuretàmesuredesescaresses
remplacésparunesortedetorpeurdans
laquelletouslesdeuxsenoyaientà
traversleregarddel’autre.Une
attractionvisuellequipermettaitàKaya
derelâchersescraintesetd’apprécierà
nouveauseseffleurements.Unmoyen
pournepenseràriend’autre.Unefaçon
dedériverdanssonregard,commeun
bateauselaissantallerlàoùlesvagues
lemèneraient,auhasarddeleurvolonté.
Ethanmenaitteluncapitainesabarque.
Ilmaintenaitparsonregardle
gouvernaildesesémotions.Illes
contrôlaitaugrédesesenvies.Ses
doigtssedéportèrentunenouvellefois
verssescuisses.Ilputs’apercevoirque
lespeursdeKayas’animaientdansses
yeuxlorsqu’illaissaitallersamainvers
l’intérieur.
—NequittepasmesyeuxKaya…
luidit-ilposément,maissansla
brusquer.Regarde-moi!
Kayasentaitsoncœurs’affolerau
furetàmesurequ’ils’approchaitdeson
pubis.Ellen’arrivaitplusàvraiment
s’accrocheràsonregard.Sesyeux
bifurquaientinconsciemmentversses
cuisses,verssahantise,jusqu’àceque
samainviennestopperdistinctement
celled’Ethan.Celui-cisoupiraetretira
brusquementsamaincaressante,sousle
visagestupéfaitetalarmédeKayaqui
regrettaittoutefoissongeste.
—OK,dit-ilavecindulgence.Onva
faireautrement!
Illuisourit,puissedéportaalorssur
lecôtéetl’attrapaparlataillepour
collersondoscontresontorse.Kaya
criaun«Ethan!»desurprisedevantsa
façondelamanipulersansménagement.
—Aaaah!Jecroisquemêmele
piredesconnardsnepeutpasgrand-
chose…luirévéla-t-ildoucement.Jene
t’enveuxpas.
Ilserrasatailleunpeupluscontre
luietfermalesyeuxuninstantpour
tenterderetrouvercettesérénitéentre
eux.Kayaétaitperdue.Illuisoufflaitle
chaudpuislefroid.Elle-mêmeétait
parcourued’unedoucechaleurquiétait
ànouveaucontrebalancéeparcette
vagueglaciale,souvenirterriblequesa
peauavaitencoredumalàrepousser.
Ethancalaalorssarespirationsurcelle
deKaya.Celle-cisentitsapoitrinese
souleverdanssondos,aurythmedela
sienne.Elleappréciaitunenouvellefois
cettesécuritédanssesbras.Cette
bienveillance,cetteprévenancequila
réconfortaientmêmesiellenesavait
plusvraimentquelleattitudeavoirà
présent.
—Kaya…guide-moi…dis-moioù
jepeuxposermesmains…luidit-iltel
unmurmuredanssondos.Laisse-moi
effacertatristesse.
Toujourslamêmephrase.Toujours
lamêmedemandequiprenaitdeplusen
plusdesalluresdesuppliques.Kaya
déglutitausondesavoixquémandeuse.
Accepterqu’illatoucheétaitunechose,
leguiderverscequiluiplaisaitenétait
uneautre.Pourtant,elleéprouvaitle
besoindesentirsesmainscontreelle.
Un
besoin
aussi
incroyable
qu’improbablesisonétatpsychologique
n’avaitpasétémarquéparlaperfidiede
PhiletAl.Ellevoulaitquesesmains
prolongentlepouvoirprotecteurdeses
brassursoncorps,qu’elleslaissentune
couchesécurisantesursapeau,toutesa
peau.Cequiluiétaitdifficilement
admissibleilyaquelquesminutesétait
devenuévidentàprésent.Pluselley
pensait,plusl’échéanceétaitrepoussée,
plussonbesoinfinalementaugmentait.
Justesentirqu’ellen’étaitpasseule,
qu’onpouvaitêtrelàpourelle,qu’on
s’intéresseàelleetàsesenvies.
Ellesesaisitalorsdelamain
d’Ethanqu’elleenveloppa,etglissases
doigts
dans
les
siens.
Ethan
s’enthousiasma
intérieurement.
Elle
avaitentendusarequêteettentaitd’y
répondremalgrélesdernièrestentatives
infructueuses.Docilement,ilselaissa
guiderparlamaindeKayaquiglissa
soussonpulljusqu’àcequ’elleécrase
samainsursonsein.Ethancrutse
liquéfiersurplacequandilsentitson
tétoncontresapaume.
—Ilm’atouchélà…murmura-t-elle
lagorgeserrée,toutencachantson
visagedanslematelas.
Ethandéglutit.Iln’osabougersa
main.Celle-citenaitfermementsonsein,
maisétaitaussipriseenétauparcelle
deKaya.Ilpouvaitsentirlapoitrinede
celle-cisesouleverparintermittence
rapideetdémesurée,indicedeson
angoisse,desonmalaise.
—OK,alorseffaçonscela,tuveux?
Lavoixsuaveetfaussementposée
d’Ethan,
pas
du
tout
agressive,
encouragealajeunefemme.Ellebougea
latêteaffirmativement,maisneditpas
unmot.Lentement,ilcommençaà
bougersamainetàcaressersonsein.
Sesgestesétaientprécis,nesouhaitant
allertropvitepournepaslafaire
reculer.Ilsesaisitdesontétonet
commençaàletitillerdélicatement.
Kayanedisaitrien.Ellefermaitles
yeux.Nepaslerepoussersignifiait
qu’elleacceptaitsesattouchements.Très
vite,unemainnesuffisaitplusàEthanet
ilglissalasecondesoussonpull
délicatementpoursesaisirdeson
secondseinetlespalpersimultanément.
Ilpouvaitenfinlaréconfortercommeil
savaitlefaire.
LapoitrinedeKayasegonflaitetse
retiraitdeplusenplusnettement.Les
caressesd’Ethanlaperturbaient.Elles
étaientàlafoisdoucesetengagées,la
faisantoscillerentrerecherchedu
plaisirenfouietcraintedevoirce
qu’elleavaitvécurecommencer.Ethan
fermalesyeuxetposasajouecontrela
sienne,cherchantplusdecontact,à
défautdepouvoirvoirsonregard.Ses
lèvresn’attendaientqued’effleurerson
visage,maisillasentaitencorefébrile
soussesdoigts.Ildevaitlarassurer,lui
fairecomprendrequ’ellen’avaitrienà
craindreaveclui,quesesgestesse
voulaientseulementdouxetdévouésà
sonseulbien-être.Illâchaalorsunde
ses
seins
et
descendit
précautionneusementverssonventre,
puiscommençaàleluicaresseravec
sonpouce.Lesmouvementscirculaires
avaientuneffetapaisant,hypnotiquesur
Kayaquicommençaàrelâcherla
tensionqu’elleexerçaitsursoncorpsà
causedesapeur.Sapudeurs’effaçait
lentementetsonvisageavaitquittéle
matelaspourselaisserallersousles
caressesdesonsauveurimprobable.
Ethanpouvaitlasentirsecambreraufur
etàmesureetluidonnerlibreaccèsà
seszonesérogènespouraméliorerson
travail.Rapidement,sapoitrinenelui
suffisaitplus.Sonventrenonplus.Il
voulaitl’explorerdavantage.
—Kaya…oùencore…Montre-
moi.
Sademandeavaitcettefois-ciun
goûtempresséqueKayaapprouvasans
réelledifficulté,sentantquesondésir
s’éveillaitànouveauenelle,queson
corpsneréagissaitpasavecdégoût,
maisavecalanguissement.Elleattrapa
samainsursonseinetlaguidalelong
desonabdomen,retrouvantl’autre,puis
continuasoncheminsursesfesses.
Sabouches’entrouvritensentantla
maind’Ethaneffleurersapeauety
laisserdespicotementsdeplaisirdans
sonsillon.Unesensationtellement
délicieusequ’elleenarrivaitàla
vouloirplusforte,plusvolontaire.De
sonautremain,elledirigeaEthanvers
sescuisses.Ethansentaitsonsang-froid
s’émietter.Sondésiraugmentaiten
mêmetempsquesonsexegonflaitdans
sonpantalon.Ildevaitgarderlatête
froide.C’étaitunaccord.Pasde
sentiments.Nepasselaisseralleràdes
émotions.Nepasselaissersubmerger
pourquesoncœurnesoitpasblessé.Il
plongeasonvisagedanssoncoupourne
pasvoirsesréactionsenréponseàson
toucher.Ellestoppacependantsa
migration.Lapartielaplusdélicate
arrivaitetellenetrouvaitpaslaforce
desentirquelqu’unyposersesdoigts
dessus.Ethanledevina.Sarespiration
étaittoujoursforte,maissonentrainétait
moindre;ellebloquait.
Ilrelevalatêtepourvoircomment
ellesesentait.Ellesemordaitlalèvre,
tentantdeseforceràbraverson
angoisse,maisenvain.Ilretiraalorssa
maindesacuisseetlaposafinalement
surcelledelajeunefemme.
—Fais-le…luidit-ildoucement.
Cettefois,c’estmoiquit’accompagne;
oninverselesrôles.Trouvetonplaisir,
Princesse.C’esttoiquicommandeston
corps,c’esttoiquileconnaispour
savoircequ’illuifautoupas.Moi,je
suislà,jetesuis.Jesuiston…
accompagnateur!
Ethanluimassaalorslafesse
doucement,pourtenterdecalmerson
angoisse.Kayasetournalégèrement
versluipourvérifierqu’ilétaitbienle
dépositairedecetteproposition.Ethan
compritàsonregardqu’elleétait
perplexe.Ill’interrogeaduregard,puis
sourit.
—Iln’yapasdegênelàoùilyadu
plaisir!sedéfendit-ilavecunairunpeu
désolé.Iln’yariendechoquantou
gênantlà-dedans.
Lajeunefemmeserepositionna,lui
tournantànouveaulatête.
—Cen’estpasune…pratique…
quej’aipourhabitudedefaire!lui
confia-t-ellealorstimidement,sansoser
recroisersonregard.
Ethansemitàsourireetlaissa
tombersonvisagesursonépaule,
déconcerté.
—Jet’interdisdetemoquer!lui
invectiva-t-elle,agacéeparsonpeu
d’indulgence.
—Jenememoquepas.Jesuis
juste…chamboulé.
Unsilencesuivit,symboled’une
gênedesdeuxcôtés.
—Jenevoispaspourquoi,lui
réponditKayadefaçonunpeuplus
emportée.Cellequidoitl’êtrec’est
plutôtmoi!
Ethanrelevalatêteetluisoufflaà
sonoreille:
—Parcequetupeuxavoirune
premièrefoisavecmoi.C’est…assez
grisantpourunconnard!
Kayaseretournasubitementverslui
unesecondefois,stupéfaite.Une
premièrefoisaveclui…Autantsignifier
qu’ilsétaientintimes,qu’ilspartageaient
vraimentquelquechosedepersonnel.
Mêmesilescirconstanceslesavaient
poussésàseretrouverdansuncontexte
plusprivéparfois,unepremièrefois
aveclui,c’étaitdifférent.C’était
accepterqu’ilensoitletémoin
privilégié,qu’ilsoitl’uniqueacteur
d’uneinitiationdontelleétaitlanovice,
c’étaitunpartagesecretlesunissant.
Ethansemorditlalèvre,leregard
charmeur,demandantimplicitementsi
elleétaitsurlamêmelongueurd’onde
quelui,siellevoulaitêtresanovice.
Ellerepritaussivitesaposition
originale,
se
crispant
devant
l’éventualitéqu’ellepuissevraiment
acceptercettepremièrefoisaveclui.
Kaya,arrêtederéfléchir!Tune
peuxpas!C’estgrotesque!Toutest
grotesque!
Ethanluicaressaànouveausafesse
etsamainpourdédramatisersa
demande.Outrelebesoindelaconsoler,
illadésiraitréellement.Ill’avait
comprisaprèslasoiréechezLaurens.
Surcetrottoir,c’étaitsondésirquiavait
prédominé.
C’était
des
pulsions
purementphysiquesquil’avaientpoussé
àcetteétreintesauvagecontrelemurde
lapropriétédeLaurens.Cesoir,illa
désiraittoujoursautant,ilvoulaitla
réconforter,maisaveccettemêmeenvie
inconsidérée.Toutleresten’avaitplus
d’importance.
Kayaserralesdents,nesachant
comment
réagir.
Elle
aimait
ses
caresses,maisnesavaitcomment
continuer,quellefindonneràtoutcela.
Ethanpassaalorssesdoigtsentreles
siensetellesentitànouveaucette
intentionprotectricedelapartdeson
partenaire.Samainchaudecouvraitla
sienne,laserraitpourlarassurer,pour
laconforter.Bientôt,sonautremainse
déplaçasursahanche.Pasunmotne
sortaitdeleurbouche.Seulsleslégers
mouvements
des
mains
d’Ethan
effleurantledessousdelacouetteen
cajolantsapeaudevenaientaudibles.
Sescaressesfinirentpars’étendrede
sesfessesenpassantparseshanches
puisredescendreverslehautdeses
cuisses.Kayafermalesyeux,selaissant
bercerparsesattouchementssensuels.
Ellepouvaitsentirsesdoigtsdansersur
sapeau.Ilslesfaisaientglisser,puis
rouler,lalaissantdansunelangueur
temporairepourfinalementlasaisirplus
fermementetéveillerenellesa
sexualité.
Lentement,ildirigeal’autremainde
Kayaaveclasienneversl’intérieurde
sescuisses.Elleputsentirbientôt
l’empreintedesespropresdoigtssurses
poilspubiens,puistraversercettezone
humidequ’étaientseslèvresgénitales.
Lentement,ellecommençaàremuerses
doigts,pousséeparlesencouragements
delamaind’Ethansurlasienne.Son
désirmontaitenéchodevantlecontact
francdesespropresdoigts.Elle
contrôlaitsesenvies.Uneffetenivrant
quededominersespulsionsetchoisir
commentlessatisfaire.Unegêneàla
foisdeseretrouverainsiàlefaireen
oublianttoutlereste.Unempressement
lasaisitàvouloirdécuplersalibido.
Ethanretiradélicatementsesdoigts
pourlalaissergérertotalementson
bien-êtreauboutdequelquesminutes,
tandisqu’ilselanguissaitdéjàdesa
poitrine.Ilattrapaalorssesdeuxseinsà
pleinesmainssoussonpulletcollad’un
gesteseclajeunefemmeunpeuplus
contrelui.Lasurpriseluicoupal’air
verssespoumonsquandellesentit
l’anatomied’Ethanpoindrecontreses
fesses.L’excitationmontad’uncran
supplémentaireenelle.Ethancachason
visagedanssoncou,respirantsadouce
odeurtoutencontinuantsondélicieux
supplice.Sesgrandesmainsencerclaient
sesseinsetnelesépargnaient
maintenantplus.Cefutuneraison
suffisantepourqu’elleglisseundoigten
elle,exacerbéeparsesmanièresplus
viriles,plusaffirmées.Ellegrognaalors
desatisfactionetbougeasonbassinpour
sentirdavantagelesbienfaitsdeson
gesteenelle.Ethanenfonçaalorsses
doigtssansretenuedanssapeau,broyant
littéralementsesseinsetsupportant
difficilementlesupplicequeson
derrièreimposaitcontresonsexe.
Ilnesavaitplussic’étaitdetenirsi
fermementsapoitrinedanssesmains,le
frottementdesesfessescontresonpénis
oudelavoirsedonnerduplaisirseule
quil’excitaitleplus.Ilvoulait
l’embrasser.Encore.Ressentircette
foliedansl’ascenseurquelquesheures
plustôt.Maisl’embrasser,c’était
prendreunrisquepoureuxd’eux.La
possibilitéqu’ellerejetteunenouvelle
foistoutenbloc.
Putain,tuvasmerendrefou…
Kayaenfonçaunseconddoigten
elleetsemitàgémir,sonsouffle
devenantchaotique.Lessoupirslascifs
desabelleeurentraisondelui.Ilquitta
brusquementlesseinsdeKayaet
s’écartad’elle.Kayasestoppanet,se
demandantcequiluiprenait.Iljetala
couverturequilesrecouvraitetseposta
àsespiedsavecempressement.D’un
gestedéterminé,ilsesaisitdeses
chevillesetlatiraàlui,l’obligeantà
retirersesdoigtsenelle.Ellepoussaun
soupirsurpris,maiscompritvitequ’il
n’étaitplusapteàtergiverser,àréfléchir
oumêmeànégocier.Sesyeuxchocolat
montraientsesintentions:ilenvoulait
plus.Ilpassasansunmotsesbraspar
l’intérieurdesesgenouxetsepencha
surelle.Kayaposainstinctivementses
mainssursachevelurepourstopperson
action.
—
Non
!
lui
fit-elle
catégoriquement.Pasça…
Ethanluilançaunregardqui
n’admettaitaucuneobjection,puis
commençaàl’embrasserautourdeson
pubissansattendreunequelconque
approbation.Kayaplissasespaupières
faceausupplice.Sonexcitationlui
imploraitlabienveillanceàlelaisser
continuer;saraisonluiimposaitdetout
arrêter.Maislalangued’Ethantrouva
soncheminàl’intérieurdeseslèvreset
ilsemitàtitilleroutrageusementson
clitoris.Saraisons’envolaenmême
tempsqu’elledesserralentementson
étreintesursachevelure.Unrépitqui
enorgueillitEthanetamplifiases
attentions,ladévorantsansrelâche.Sa
soifd’elledevenaitinextinguible.
Illavoulait.Peuimportecomment,
peuimportelesraisons.
Dansunmouvementprécipité,illa
soulevapourpouvoirposersesmains
sursesfessestoutencontinuantses
assautslinguaux.Kayasecambrade
plaisirets’essouffla.Ellesesentait
désirée,ellesesavaitofferte,ellese
sentaitvivante.L’emprisequ’ilavaitsur
ellephysiquementlagalvanisait.Elle
haletadeplusenplusfort,appuyantun
peuplussursatêtepourqu’ilintensifie
lecontactdesalanguecontreson
clitoris,voulantressentirencoreplus
franchementleplaisirquipartaitdeson
bas-ventreetenvahissaitsoncorps,
faisaitpalpitersoncœur.Elleprononça
alorsun«Ethan!»àlafoissuppliant,
inquietmaispleindepromessesquand
lajouissancelasaisit,telleunedécharge
quitraversasoncorpsdepartenpart.
Ethangrogna,prisparladouleurqu’elle
exerçaitsursatignassedécoiffée.Puis,
quandl’extasesedissipadoucementet
qu’ellerelâchasonemprise,illareposa
délicatementets’essuyalabouchedu
reversdubras.
Kayas’allongeasurlecôtéet
attrapalacouverturepoursecouvrir.
EllejetaunœilversEthantoujoursà
genouxàsespieds.Illuiaffichason
plusgrandsouriredevainqueur,fait
d’unsoupçondetaquineriequila
stupéfia.Elleattrapaalorssonoreiller
etleluibalançaàlafigure.Ethansemit
àrire,savourantsagênequ’iltrouva
mignonne.Ilsetrouvaitcomblé,même
s’iln’étaitpasalléenelle.Ill’avait
réconforté,ill’avaiteucontrelui.Il
pouvaits’encontenter.
Celle-cisecachaunpeuplussous
sacouette,encoreplushonteuse,
lorsqu’ilvintàramperau-dessusd’elle
ettenterdesouleverlacouverturede
l’indexpourvoirsonvisage.
—Onveutjoueràcache-cache,
mademoiselleLévy?luidemanda-t-il
amusé,toutentirantsurlacouverture
qu’elles’évertuaitàgarder.
Kayaconcédaàsortirleboutdeson
nezdesouslacouverture.
—Tum’énerves!Tun’espas
obligédesourirecommeça!
Ethanriadeplusbelle.
—Cen’estpascequetuvoulais?
Tuasoubliélesdeuxzigotospouravoir
àlaplaceunejolie…gâterie!
—Non!Cen’estpascequeje
voulais!
Ethanhaussaunsourcil,sous-entend
un«enes-tusûr?».
—D’accord!Audébut!Mais
quandmême…qu’est-cequej’aifait?
dit-elled’unevoixplaintive.
—Tuvasmelarefairecommela
premièrefois?Tuvastefâcheretne
plusvouloirmeparler?luidemanda-t-il
ensouriantdefaçonprovocante.Jet’ai
pourtantécouté.Jen’aifaitquerépondre
àtesdemandes…
—Jetedéteste!marmonna-t-elle.
Vas-y!Vante-toi!Tuesmonsauveur!
C’estvrai.
Ethantiraunpeuplussurla
couverturepourpouvoirvoirenfinson
visageentièrement.Ilvoulaitsavourer
satortureenappréciantchaquemimique
qu’ellepouvaitluioffrir.
—Jepeuxbienmériterdes
louanges.J’aiétéplutôtbon,non?Ne
suis-jepaslemeilleurconnardquisoit?
Kaya
repoussa
la
couverture
brusquement,lebousculantaupassage.
—Évidemment!Tuestropfort.
Missionaccomplie.Unconnardking
size!Lemustduconnard!Tun’étais
pasobligéd’allersiloinquandmême!
—C’estvrai,maisreconnaisque
malangueestbienplusagréablequeles
deuxdoigtsdel’autre.Etpuis….pourle
kingsize,nevapastropviteen
besogne;jen’aipasencorebaisséle
pantalon!
—Pasencore…quoi?!
Ethanéclataderire.Kayatentadele
frapper,maisilparasansproblèmeses
coupsdepoing.
—Mêmepasenrêve!Jeneveux
mêmepasmel’imaginer!Ohmon
Dieu!Depireenpire…
Elle
attrapa
la
couette
pour
disparaîtresouslahonteetsecachale
visagedanssesmainspourneplusvoir
sonsatanésourirefierets’imaginerce
quedissimulaitsonpantalon.MaisEthan
s’amusaàlataquinerententantdetirer
de
ses
doigts
la
couette
pour
entrapercevoirlaprunelledesesyeux.Il
rigolaencorelorsqu’ellegrognapourse
défendre.Finalement,dansungeste
précipité,ellelerepoussaànouveauet
seréfugiacomplètementsousla
couvertureenmodehérisson.Ethan
continuaàs’esclaffer.Ils’amusaà
appuyeravecsonindexsurlacouette
danslebutdetoucherdesparties
sensiblesdesonanatomie.Kayase
tortillasoussesassautstoutenrâlant.
Ethans’arrêtauninstantetregarda
l’amasdevantlui.Ilsesentaitbien.
Serein.Ilavaitfailli.Ilavaitcraqué.Il
l’avaitréconforté,maismêmes’ilse
devaitdeleregretter,iln’yarrivaitpas.
Laconsolerétaituncadeaufinalement.
Ilpouvaitenfinl’avoirpourluitoutseul
danscesmoments-là.Desminutessi
raresqu’ellesendevenaientprécieuses.
C’étaitunrisquequ’ilprenait.Cela
pouvaitmalfinir,maisqu’importe,cela
répondaitàsacuriositémalsaineà
vouloirendécouvrirtoujoursplussur
elleetencetinstant,ilpouvaitdirequ’il
adoraitcequ’ilvoyait.Ilétaitmêmeà
deuxdoigtsdeluisauterdessuspour
l’embrasser.Ilnecomprenaitpas
vraimentcesursautdebonheur,cette
attirancetoujoursplusforte,maistant
pis,lerisqueenvalaitlachandelle
mêmepouruneheuredebonheur…
—Inutiledetecacher,princesse.Je
n’enaipasfiniavectoi.Turisquesde
voirmonkingsizesitunemedispas
quiétaientceshommes.
Kayasortitunœilpar-dessusla
couverture.
—Tuinsinuesquoi?
Ethanlarenversasurledos,virasa
couverture,puissemitalorsà
califourchonsurelleetpritsonair
sournois.
—Quesitunemedispasquiils
sont,jecontinueetbaissemonpantalon!
Aprèstout,tuaseutonpetitplaisiret
moi,tumelaissesunedeuxièmefois
avecmon«copain»surlatouche.
L’altruismeaseslimites.
—Tun’espassérieux,là?
—Tuveuxparier?luirétorqua-t-il
avecplusdegravitédanslavoixetun
visagebienplusfermémaintenant.Je
veuxsavoircontrequijemesuisbattu.
Enplus,ilyenaunquim’aretournéune
droitedoncjetrouvelogiquedevouloir
connaîtreceluiquiaosémeprovoquer.
Kayatentadelerepousser.
—Ethan,c’estmavie.C’estmon
problème.Jesuisdésoléepourla
bagarre,maisjefaisçapourtoi.
Ethansoupira,peuconvaincu.
—OK,j’auraistendanceàcroire
quetun’attendsqueça.Jenetepensais
passicoquine.Tuveuxplusquedes
attouchements.Avoue!
D’un
mouvement
rapide,
il
s’allongeasurelle.
—Qu’est-ceque…?Tuplaisantes!
Lejeuestfini.Laparenthèseest
refermée.Ôte-toidelà!
—C’estça!Causetoujours!
Ethancommençaàl’embrasserdans
lecou,tandisqu’ellesedébattait.
—Lâche-moi!Jenetrouvepasça
drôle!
—Parlealors!
—Non!
Ethanattrapasonpullettentadele
luienlever,maiscelle-ciluttapourqu’il
resteenplace.
—Nemetouchepas!cria-t-ellede
façonbienplusinquiètemaintenant.
—Quisontcestypes?luicria-t-il
toutenessayantderemontersonpull
plushaut.Commenttonsimerveilleux
petitamia-t-ilputemettredansune
tellemerde?C’estcommeçaqu’il
t’aime?
Ethanavaitréussiàlibérerla
poitrinedeKaya,prêtàensaisirson
tétondeseslèvres.Ilbloquaalorsles
jambesdelajeunefemmeavecses
genoux,toutenempêchantsesbrasdele
repousser.
—Arrête!hurla-t-ellemaintenant,
tandisqu’Ethanglissaitsatêtecontresa
poitrineenvuedeluilécherlesein.
—Tuparlesàunconnard,jete
rappelle.Jefaiscequejeveux!Ça
tombebienquetusoisconsentante,car
ilyapleindetrucsquej’aienviede
faire!
—Oùas-tuvuquej’étais
consentante,là?S’ilteplaît,arrête!
l’implora-t-elleàboutdeforce.
—Jen’entendspas!luidit-ilalors
quesonseinn’étaitplusqu’àun
centimètredesabouche.Jevaiscroquer
tonseintoutcru!Attention,j’arrive!
Ethansemitàsouriredefaçon
suffisammentmachiavéliquepourla
fairecraquer.
—Iln’yestpourrien!cria-t-elle
enfin,abattue.Adamn’arienfait,c’est
moi!Tunecomprendspas,c’estmoila
responsable.C’estmoiquil’aitué!
-11-
Repentant
Ethancessanetsesattouchements
devantsarévélation.Kayasemità
pleurer.Lechagrinlasaisitànouveau.
Sesentantpluslibreunefoisqu’Ethan
sefûtredresséetpoussé,ellese
recroquevillapourlaisserparlersa
peinetandisqu’ilanalysaitsanscesse
sesmotsdanssatête.
—Commentça,tul’astué?
demanda-t-ilchoqué.
—Toutestdemafaute.S’ilne
m’avaitpasrencontrée,ilseraitencore
envie.
Leslarmesdévalaientsesjoues.Sa
tristesseétaitperceptible,carelleétait
accompagnéepardesgémissements
plaintifs.Seslarmesn’étaientpasune
réponseàsesgestesdéplacés,maisbien
àunepeinepluslourde.Révélersa
culpabilitéàvoixhauteavaitdûla
replongerdanssespiressouvenirs.Sa
douleurétaitfinalementbienplus
profondequecellequ’elleavait
ressentieplustôt,avecl’agressionde
PhiletAl.Ethansetrouvabouleversé
parsonaveuetsarésonance.S’ilen
avait
connaissance
auparavant,
il
pouvaitàprésentavoirlacertitudeque
cethommecomptaitpourelled’une
façonincommensurable.Ilnelapensait
pascoupabled’untelacte,carilvoyait
bienqueseslarmesétaientdevéritables
larmesd’amour.Malgrétout,toutesles
questionsqu’ilseposaitàprésentne
demandaientquedesréponses.
—Tufinisenfinparmeparler…Tu
mefaisvraimentemployerdesméthodes
passympas.Pourquoifaut-ilquetume
poussesàbouttoutletemps?
Ilfermalesyeuxuninstant,puis
s’allongeaàcôtéd’elle.Ilrabattitune
nouvellefoislacouverturesureuxetne
bougeaplus,lalaissantàsasouffrance.
Ilregardasondosprisparles
soubresautsdesespleursense
demandants’ilpouvaitlaprendredans
sesbras.Réactioncomplètementbizarre
pourluiquinedevaitpasconsoler.Il
reconnaissaitquelaméthodepourla
faireparlern’étaitpaslaplus
judicieuse,sachantcequ’ellevenaitde
vivre,maisparfoislesélectrochocs
étaientbienplusefficacesquen’importe
quellegentilleparole.Illesavait.
Ladélivranceenexpiantla
souffranceparuneautresouffrance…
Ilsetouchaletorseenrepensantà
sasouffrance,àladélivrancequien
suivit.Sonpassélarongeait.Ilfallait
qu’ellel’évacue,qu’elletrouveunécho
jusqu’àlui.Ilsavaitaussiquela
solituden’étaitpasuneamie.Ilavaitsu
s’entourerdepersonnessurquiils
pouvaient
compter.
Kaya
était
désespérémentseule,maisilétaitlà.Il
fallaitqu’ellelecomprenne.
Finalement,ilsecontentadelui
caresserledosduboutdudoigt,mais
elles’écartadelui.Ilsoupira.Elle
pouvaitluienvouloir,ilneluien
voudraitpas.Maisildevaitsavoir.Quoi
qu’ilarrive,ilauraitsesréponses.
—Raconte-moi…Qu’est-cequi
s’estpassé?Pourquoidis-tuquetul’as
tué?Commentest-ilmort?Kaya…
—Jedoisdel’argent…finit-elle
paravouersèchement.Beaucoup.
Savoixétaitferme,preuvequ’elle
étaitvraimentfâchéecontrelui,mais
fatiguéededevoirrendredescomptes.Il
nes’enformalisatoutefoispas.
—Combien?
—Ladetteétaitdedeuxcentmille
euros.Adametmoil’avonsréduiteà
centcinquantemille.Voilà,tuescontent.
Maintenant,dégagedechezmoi!Je
veuxêtreseule!Jeneveuxplusvoir
personne.Jeveuxqu’onm’oublie…
finit-elleparunnouveausanglot.
Ethanbafouillaenvoulantrépéterle
montanténoncé.Cen’étaitpasunepetite
somme.C’étaitmêmeénorme.Sa
dernièrerequêtepassacommeuncoup
devent.Partirétaitloind’êtreson
envie.Ilrestaitplutôtbloquésurles
zérosquis’alignaientderrièreles
premierschiffres.
—Commentas-tufaitpouren
arriverlà!?s’agaça-t-ilsansvraiment
levouloir.Onnedépensepasautant
d’argentcommeça!Lescréditsàla
consommation,cesontdescercles
vicieuxànesurtoutpascumuler.Tute
rendscompte:deuxcentmilleeuros!
Commentas-tupuêtresiinconsciente?!
Kayarepritplusfortsessanglots.
Ethansoupira.L’accablern’étaitpasla
meilleurefaçondeluirépondre.
—OK…Pardon…Maremarque
étaitdéplacée.Tun’eseffectivementpas
prêteàtoutrembourser.Jecomprends
aussipourquoituvisdansuntelétatde
pauvreté…
Ilvoulutunenouvellefoisla
toucher,maisserétracta.
—Pardon,jemerendscompteque
jesuisunidiot.J’aimanquéde
clairvoyanceàtonégard.J’auraisdû
comprendre
ta
situation
vraiment
précaire…
Ilsoupiradedésarroietsecontenta
deluicaresserlapointedesescheveux
complètementdécoiffés.
—Cequejenecomprendspas,
continua-t-ildoucement,c’estquisont
cestypes.Desagentsderecouvrement
neseconduisentpascommeça.Pourqui
travaillent-ils?Tunemedispastout,
pasvrai?
Kayacontinuadepleurer.Elle
secoualatêtenégativement,maisson
silenceensuiteluimontraqu’elle
refusaitd’endireplus.Elleluien
voulait.Sonagressivitéàvouloirla
faireparleravaiteuraisondetoutesa
bonnevolontéàtenirdeboutet
l’entêtementd’Ethanàresterprèsd’elle
avec
ses
questions
lui
devenait
insupportable.
Elle
était
psychologiquementépuisée.
—Kaya…dit-ilmenaçant.Jen’ai
pasenviederecommenceràte
contraindredequelquemanièrequece
soit.Écoute,jeneseraisjamaisallé
jusqu’aubout.Jevoulaisjustetefaire
parlerparcequetuneveuxrienmedire.
Jereconnaisquejen’auraispasdû
employerdetellesméthodesaprèsce
quetuviensdevivre.Tefairepeur
commeçaétaitnul.Pardon.Etpuisde
toutefaçon,cen’estpassigrave,ma
bouche
connaît
déjà
ton
téton,
marmonna-t-ilpourlui-même,sachant
trèsbienqu’elleavaitzappédeuxou
troisdétailslorsdelasoiréechez
Laurens.Mais…j’aibesoindesavoir.
Çamefoutenrognequetunemedises
rien!Jesuissûrquejepeuxt’aider,
merde!Aieconfiance.Tonidéedeme
protégerestinutile,carj’enaivu
d’autres,crois-moi!Detouteévidence,
jenepartiraipastantquejen’auraispas
desréponses!
Kayareniflaencoreetencore.Ethan
sesentitaffligéparsonentêtementà
vouloirleteniràdistance,maisaussi
agacéparcetteimpasse.Àluisoufflerle
chaudetlefroid,elleenavaitfinipar
refermersacoquilleunebonnefoispour
toutes.Ilfinissaitparregrettertoute
cettesoirée.S’ilnel’avaitpriseavec
luipourallerfairedusport,ellene
seraitpasdanscetétat.Sapatiencelui
faisaitdéfaut.Sacolèrecommençaitàle
ronger.Colèrecontrelui-mêmed’être
arrivétroptard,denepasêtreun
exempled’intégritéaupointdeprofiter
desafaiblesseetluifairefairedes
chosesdontilsavaitquecen’étaitpas
labonnesolution.Cindy,samère
adoptive,luiavaitdéjàditquelesexe
n’étaitpasunesolutionprimordialeau
réconfort,laviolenceouladomination
nonplus.Maisquepouvait-ilfaire
d’autre,sansylaisserdesregretsetson
cœuraupassage?
Ilétaitaussiencolèrecontreelle.Il
savaitqu’ilnedevaitpass’énerver,
maisilsupportaitdemoinsenmoinsson
manquedereconnaissance.Ilétaitlà,
maissaprésencenesuffisaitpas.Ellele
mettaitencoreàl’écartdeses
problèmes.Ilpouvaitquelquepartla
comprendre.Lui-mêmeneluidisaitpas
toutsursaviequandellelelui
demandait.Ilétaitunconnard,après
tout.Ilsétaientdeuxétrangersdontles
intérêtssetrouvèrentfortuitementparce
contratavecLaurens.Etaprès?Il
n’étaitpassonami.Commentpouvait-il
serevendiquerconfident?Quepouvait-
ilespérer?Pourtant,unecertaine
complicitéétaitnéecesquelquesjours.
Certainement
pas
une
amitié
indestructible,maisilpouvaitadmettre
qu’ilavaitpartagécertaineschosesqu’il
neseseraitmêmepaspermisavecune
autrefemme.C’étaitsansdoutecequile
blessaitleplus.Ils’étaitunpeuouvertà
elle,maisellel’ignorait.Ellenese
rendaitpascomptedeseffortsqu’il
avaitdéjàfaits,mêmesid’unpointde
vueextérieur,celapouvaitparaître
normal,logique.Ellenevoyaitpasla
légitimitédesademande.
—BordelKaya!Réponds-moi!Ne
me
laisse
pas
avec
toutes
ces
interrogations!Jesuismajeuret
vacciné.Ensignant,ons’estmis
d’accord
pour
s’accommoder
des
contraintesdel’autre.Saufquelà,je
subisaulieud’agirenconséquence.Je
restepassifaulieudepouvoirchercher
dessolutions!
—Iln’yapasdesolutionsau
problème!luicria-t-elleauxabois,tout
enseretournantpourluimontrerqu’elle
neplaisantaitpas,qu’elleavaitfaitle
tourdetouteslesoptions.Jedoiscent
cinquantemilleeuros,j’aidesimpayés
partout.
Où
crois-tu
trouver
une
solution?
Ethanladévisagea,agacépar
l’impuissancefaceàlaquelleellele
confrontait.Certes,ilnepouvaitpaslui
donnerl’argentqu’illuimanquait.Il
n’avaitaucuneraisondelefaire,même
s’ilenavaitlacapacité…Maisilétait
là.Ilétaitàsescôtés,endépitdetout.
—Nemeprendspaspourunidiot!
luirétorqua-t-ilsuruntonmenaçant,ne
souhaitantpasselaisserdéstabiliserpar
sontonagressif.J’aitoujourstrouvéune
solutionàmesproblèmes.Raconte-moi
cequetuasfaitavecAdametaprèson
analysera.
Kayaleconsidérauninstant.Était-il
fou?Inconscient?Oucarrémentcrétin?
Illuicaressaalorslevisage.Un
gestequiradoucitinstantanémentla
tensionentreeuxdeux.Ungestequi
l’exhortaitàs’ouvriràlui,àcesserleur
haussementdeton.Kayaplongeason
regarddanssesprunelleschocolatetput
yliresacolère,satristesse,sonbesoin
desavoir,maisaussisoninquiétude.
Ellesemorditlalèvreetfermalesyeux.
Ethanputapercevoirquesonesprit
luttait,qu’ellehésitait.
—Jenesuispasidiot,Kaya…lui
répéta-t-ilplusdoucement.J’aijuste
besoindesavoirpourmieuxréagiren
fonction.Jenerompraipaslecontrat
quej’aiavectoi.Tiens-toi-lepourdit!
J’aibesoindececontratavecLaurens.
Parconséquent,ilvafalloircomposer
avecmoi,quetuleveuillesounon.Tu
netedébarrasseraspasdemoicomme
ça,aussifacilement.Jenepartiraipas.
Jesuisunduràcuire!Jecrainsquetu
n’aiespasd’autreschoix,Princesse…
Kayabaissalatête.Ellesavaitqu’il
pouvaitsemontrertêtu.Ellesavaitqu’il
étaitcapabledebiendeschosespour
obtenirgaindecause.Elleagrippale
pulld’Ethandansungestederage.Elle
luienvoulaitdes’obstinerainsi.Ellele
détestaitencoreplusàtoujoursvouloir
s’imposeràelle,telleuneévidence.
Ellenevoulaitpaslemettreendanger
maissafaçonsiparticulièredenepas
luilaisserd’alternativepossiblelui
faisaitaussidubien,carellenese
sentaitplusseule.Onlaremarquaitenfin
etonvoulaitl’aider.Ilcomblaitunvide
quilasuivaitdepuisunmoment:neplus
êtreabandonnée.
—ToncontratavecRichardnevaut
pastouslesrisquesquipeuvent
découlerdemoi…luimurmura-t-elle.
Ethanpritunegrandebouffée
d’airpourtrouverencoreunpeude
force,decourage;elles’obstinaitdans
sacrainte,maiselleluirépondait.Ses
larmess’estompaientetelleluiparlait,
dumoinsellen’étaitpastotalement
hermétiqueàsesparoles.Lafaçondont
elleseraccrochaitàluilerassurait,
mêmes’ilyvoyaitdelarageparles
veinesquiressortaientdesesmains.
Commesielleluttaitpourquesacolère
gardeencoreunbien-fondéalorsqu’elle
nevoulaitpasqu’ilparte,qu’elle
appréciaitquandmêmesaprésence.
—J’aiuncôtétêtebrûlée,tusais!
Illuisouritgentiment,commesi
cetteconfidenceétaitlasolutionàson
dilemme.Soncôtésuicidaireétaitune
marquedegarantie.
—Dis-moiKaya,confie-toiàmoi.
JenesuispasAdam.Jenecomptepas
mourirsansavoirdécrochécefoutu
contratalorsparle.S’ilteplaît.
Contretouteattente,Kayas’esclaffa.
Sonentêtementàvouloiràtoutprixson
contratavecLaurenslafitsourire.
Commesitoutleresten’étaitque
peccadilles,despetitsaléassansgravité
qu’ilécrasaitsursonpassagetelun
bulldozer.
Toujours
atteindre
ses
objectifs…Ethansemitàsourireen
voyantlesien.Latensions’estompait,sa
colèredisparaissait,l’ambiancese
radoucissait.
—Bahaumoins,j’airetrouvéton
souriredanstoutça!
—Idiot!luidit-elletandisqu’elle
tentaitdesemontrermoinsamusée.
Ethanseréajustaunpeuplusàsa
hauteursurlematelaspourmieuxvoir
sonvisage,bouffiàprésentparla
fatigueetleslarmes.Kayaregardaalors
levisaged’Ethan,ànouveauunbrin
espièglefaceàelle.Ilposasatêtesur
soncoudereplié,poursemettreàson
aise,commes’ilétaitsursoncanapéà
regarderlatélé.Elleneputs’empêcher
de
sourire.
Par
moments,
son
détachementfaceauxchosesgraves
l’épatait.Ilréussissaitenunregard,un
sourire,uneposition,àdédramatiserla
piresituation,àvousfairerelativisersur
n’importequelpoint.
—Tuveuxvraimentsavoirtoute
monhistoire?luidemanda-t-ellepar
capitulation.
Ilsecoualatêteaffirmativement,
ravidevoirenfinsarequêteentendue.
Ellevoyaitpresqueunenfantattendant
sonconteavantdes’endormir,lalueur
delabougieaidantbienàl’atmosphère.
—Vraimenttoute?Çavaêtrelong,
tusais!
—Tuvasmefairecroirequetavie
estunfeuilletonaussi!Tantquetune
commencespasàlanaissance…
—Non!Çacommenceàmestrois
ans!
Ethansemitàrire.Mêmedansles
momentsdurs,ilretrouvaittoujoursun
momentdelégèreté.Ilsarrivaient
toujoursàretombersurunepetite
plaisanterie.Ilenvenaitàchérirces
moments,
au
point
de
vouloir
l’embrassersurlabouchetellementil
aimaitcesbadinagesavecelle.Ilse
contentadel’attraperavecsonautre
brasetlaramenerprèsdelui.Dansde
tellessituations,seullefaitdedevoir
combler
la
distance
l’importait.
Retrouverleurbulle,leurjardinsecret.
Justeêtreseulsaumonde,aussi
invraisemblablequesoitcetteenvie,
cettesituation.Kayaselaissafairesans
riendire.Elleretrouvasaquiétude,elle
retrouvaitcetteproximitéavecluiqui
l’avaitbercéeunpeuplustôtquandil
l’avaitgardéeunmomentdanssesbras.
Cepetitmomentoùtoutleurpetitmonde
n’existaitplus,oùleurstracasetleurs
querellesétaientoubliésetoùseulela
présencedel’autresuffisait.
—Tuesobligéederemonteraussi
loin?
—C’estàcetâgequej’aiconnu
Adam…
Lecœurd’Ethanrataunbattement.Il
s’attendaitàtoutsaufàça.Ilavaitpensé
àuneidylleàsapériodeadulte,une
rencontreestudiantineclassiqueouun
hasardcommeaveclui,maiscette
premièrerévélationfutbienplus
perturbante:ilsavaientdoncgrandi
ensemble.
—Nousnoussommesconnusàla
maternelle…
commença-t-elle.
On
n’arrêtaitpasdes’embêter.Ilpiquait
mescrayons,jegribouillaissesdessins.
Mamèrel’appelait«lefiancé!».Elle
l’aimaitbeaucoupetaimaitbienme
taquineravecça.Commejetel’aidit,
mamèreestmorted’uncanceràmessix
ans.Jen’aipasbeaucoupdesouvenirs
d’elle,maisjesaisqu’onparlaitsouvent
d’Adamquandellevenaitmerécupérer
àl’écolelesoir…Çal’amusait!
LevisagedeKayas’illuminaitàce
souvenir,cequiagaçaunpeuEthan.
«Lefiancé»,etpuisquoiencore!
Commesiàtroisansonpouvaitse
marier!
Qu’elleaitdesivieuxsouvenirs
d’Adaml’énervait.Ilavaitdoncbien
grandiavecelle.Ilpouvaitdeviner
qu’ilsseconnaissaientdoncparcœur,
chosequiétaitloind’êtresoncas.Quant
àsamère,ilenviaitunpeucettelueurà
lafoistristeetheureusedansses
prunellesàsonévocation.Ilnepouvait
pasvraimentdirequ’ilavaitéprouvéle
mêmebonheurqu’elle.Savraiemère
n’étaitjamaisàl’heureàlasortiedes
classesetsescamaradesdeclassene
cessaientdesemoquerdeluietdesa
maman«chelou».
—Quandmamèreestmorte,cefut
trèsdur.Monpèren’acessédepleurer
pendantdesmois.Ilseretrouvaità
devoirmegérerseul,enplusdeson
deuil.Iln’apasététrèsprésentpourme
consoler,lui-mêmeincapabledetrouver
laforcepoursécherseslarmeslesoir.
Jen’avaisplusdegrands-parentschez
quimeréfugieroutrouverdesréponses
àladisparitiondemamère.Jen’avais
quel’écolepourmedistraire,jen’avais
qu’Adam.Ilatoutfaitpourquejene
pleurepas,pourquejesourie.Ille
faisaitdefaçondétournée,maisje
savaisquec’étaitlui.Letempsapassé
etj’aicomposéavecmatristesse.J’ai
aimél’école.Jecroisquemonamour
pourAdamacommencévraimentàce
moment-là.Ilmetardaitd’êtrele
lendemainpourlevoir.Certainsjours,
ons’ignorait,maisd’autres,nosregards
secroisaient,onsebousculaitplusou
moinsvolontairementàlacantine,ouil
faisaitexprèsdefairetombersonstylo
ousagommepourvenirprèsdemoi.On
trouvaittoujoursuneexcusepour
s’interpeller,poursignifieràl’autre
qu’onétaitlà.C’étaitunmerveilleux
ami.Monmeilleurami.
Àsesaveux,unebouleseforma
danslagorged’Ethan.Plusilen
apprenaitsurceluiqu’ilvoyaitunpeu
commeunrival,plusilréalisaitqu’il
étaitloindel’égaler.Luiquisecroyait
proched’elleétaitbienridiculepar
rapportàcequ’elleavaitconnu.
—
Tout
bascula
au
collège.
L’entreprisedanslaquelletravaillait
monpèrefitfaillite.Ilseretrouvadonc
auchômage.Ilenchaînalespetits
boulots,maisilneparvintpasàtrouver
unestabilitéetlesloyersetlanourriture
venaientenfonctiondesesrentrées
d’argent.Lequotidiendevintplus…
difficile.Nousavonsétéobligésde
déménager.Fauted’argent,monpère
trouvaunlogementpluspetit,maisdans
unarrondissementpluslointain,cequi
nousobligeapourdesraisonspratiques
àchangeraussilelieudemascolarité.
Cefutterriblepourmoi.Jeperdais
Adam.Jen’avaisplusmonami,mon
confident,monexutoire.J’aicommencé
àmerenfermersurmoi-même.Mon
père,quantàlui,travaillaitdemoinsen
moinsetcommençaitàboire.
Kayafitunepausedanssonhistoire.
Ethanputremarquerquesonvisage
s’assombrissait.
Son
sourire
à
l’évocationd’Adamvenaitdes’effacer.
—C’estàpartirdelàqueles
chosessesontgâtées.J’airetrouvé
Adamaulycée,enpremière.C’étaitle
seulétablissementenseignantledessin,
alorsj’ysuisallée.J’aimaisbeaucoup
dessiner.Çamecalmait.Retrouver
Adamdansmonnouvelétablissementfut
unchoc.Sij’avaisl’airmoinspétillante
qu’avant,luiaussiavaitbeaucoup
changéenquelquesannées.Iltraînait
avecunebandedejeunestrèsbizarres.
Ilfumait,cequ’ilnefaisaitpas
auparavant.Ils’habillaitcommeun
junkie.Iln’étaitpluslegarçonqueje
connaissais.Quandilm’avuela
premièrefois,j’aipuconstatersa
surprise.Ilavaitluiaussisansdoutedu
malàmereconnaître.Mesvêtements
étaientvieux,usés.Jenememaquillais
pas,jegardaismatignasseenvrac.Rien
debienattrayant,jedoislereconnaître.
Enmêmetemps,jen’avaisaucune
raisondefaireceteffort.Jen’étaisplus
quel’ombredemoi-même.
Maiscefutbienpirequandiltourna
latêtepourm’ignorercomplètement;il
signamafinquandilsetournaversune
filledelabandepourl’embrasser…La
piretrahisonqu’ilpouvaitmefaire…Je
nel’intéressaisplus.Ilenaimaitune
autre.Notreséparationdequelques
annéesavaiteuraisondenous.
Les
mois
ont
passé
dans
l’indifférencetotale.Jepassaistousles
joursdevantsabandeetluipourrentrer
chezmoi.Jenemangeaisplus.J’étais
squelettique.Sescopainssemoquaient
demoietilnedisaitrien.Avecle
temps,jen’arrivaismêmeplusàluien
vouloir.Jelecomprenais.Jen’étaispas
une
fille
intéressante,
ni
même
mignonne.Jen’avaisrienàvoiravecsa
petiteamiedumoment.Comment
rivaliserquandonn’enapasla
possibilité?Jen’avaisplusgoûtàrien.
Lamaisondevenaitundépotoirde
bouteillesvidesetl’écoleunsupplice
permanentàmoncœur.J’allaisaulycée
entraînantdespieds,jerentraischez
moientraînantdespieds…
Kayafitunepause.Cesouvenir
semblaitresterencoredifficileà
accepter,auvudesesyeuxtristes.
—Puisunjour,ilm’accostapar
surprise.Ilm’adit:«jenet’aimepas
commeça.Faisuneffort.»puisilest
reparti.Jen’avaisjamaisétésiheureuse
detoutemavie!
Kayasemitàrireenrepensantàsa
remarque.Sespupillesbrillaientde
bonheuràcetinstant.Ethanfutfrappé
parlechangementsoudaind’émotionen
unefractiondeseconde.Adamétait
vraimentunesourcedebonheurpour
elle.Iln’yavaitpasdedoutes.
—Jesuisrentréeetj’aifoncédans
machambre.J’aitriémesaffaires,
cherchédansmeséconomiesdequoi
m’acheterdumaquillage–cenefut
qu’uncrayonkhôlaufinal,maismon
toutpremier–etmesuisamuséeàme
trouvertoutessortesdenouvelles
coiffures.Lelendemain,unnouveaumoi
s’affichaitdevantlui,latêtehaute!
Ethans’imaginasansmallascèneet
cequeputpenserAdamàcemoment-là.
Ilsemitàsourireendécouvrantson
côtémidinetteavecplaisir.Kayanelui
entintpasrigueur.
—Adamsemitalorsàriredevant
toutlemondecommeunidiot,sansque
sescopainsousapetiteamien’en
comprennentlaraison.Cefutledébutde
notreréconciliation.Onsecroisaitdans
lescouloirsetilm’effleuraitlamain.
Toutlemondeignoraitnotrepassé
communetcefutunamusemententre
nousencoreplusappréciable,caril
fallait«garderlesecret».Illarguatrès
vitesacopine.Monpremierbaiseravec
luifutmaladroitetfougueux,maisle
plusbeaudesbaisersetnousnous
retrouvâmesauboutducompteànous
bécoteraudétourd’unescalierpendant
l’interclasseleplussouventpossible.Je
retrouvaismamoitié.Nouspassionsnos
journéesendehorsdel’écoleensemble.
Illaissatombersonblousonencuiret
s’éloignadesabandedepotes.Ilarrêta
aussidefumeràcausedemacicatrice
surmamain.
Ethansouritàcetteanecdotequ’il
pouvaitmaintenantresituerdansson
contexte.Cettefameusecicatricequilui
avaitvalusasortiethéâtraledufast-
food.
—
Le
secret
ne
tint
pas
longtempsdanslelycée;onnese
quittaitplusetnousétionsdemoinsen
moinsdiscrets.Ilmeraccompagnait,
maindanslamain,venaitmechercherle
lendemainmatin.J’étaisfolledelui.
Nousavonseunosdiplômesetavons
commencél’université.Monpère,quant
àlui,vivotaitenjouantaucasino.Au
départ,ilrentraitravi.Ilrevenaitavec
del’argentetbuvaitmoins.Maiscene
futqu’unmirage.Lesjoursdedisette,il
reprenaitsavieillehabitude.Unefois,
pouruneraisonquej’ignoreencore,il
m’enacolléunedevantAdam.Adamfut
choqué,maissurtoutinquietdeme
laisseraveclui.Nousavonsdonc
décidédevivreensemble.Cefuttrès
difficile.Jen’aimaispasl’idéede
laissermonpèreseul.Jel’abandonnais
alorsqueluiavaitcontinuétantbienque
malderesterprèsdemoidepuislamort
demamère.Jen’avaispasd’argentet
lesparentsd’Adamvoyaientd’untrès
mauvaisœilnotrerelation,maisils
acceptèrentdenousaider.Jen’étaispas
lafillequ’illuifallaitseloneux,mais
Adamfutpersuasif.Nousavons
commencéàvivrecommeuncouple.
Nousétionssurexcités.Jetravaillaisle
soiraprèslescourspouraiderauloyer
etauxchargesdel’appartement.Nous
avionsprisnoshabitudesjusqu’àceque
monpèreviennemedemanderde
l’argent…Audébut,c’étaitdepetites
sommes.Puisj’aieudespromesses,des
fleursetdes«tuesmerveilleusema
fille…»,maisilrevenaittoujoursme
demanderauboutducomptedel’argent.
Cefutcommeçajusqu’àcequ’onle
tabasseunsoir,carilvenaitdeperdre.
Kayaserraunpeupluslepull
d’Ethan.Ilvoyaitquelesrévélations
montaientcrescendoensouffrance,que
sonbonheurdevenaitdeplusenplus
éphémère,quelatristessesemarquaità
nouveausursonvisage.
—Enl’emmenantàl’hôpital,les
docteursluiontdiagnostiquéuncancer
dufoieenphaseterminale.Sansdoute
desannéesd’alcoolquinel’ontpas
aidé.Ilcrachaitparmomentsdusang,
maiss’étaitabstenudemeledire.Avec
Adam,nousavonsprismonpèreen
charge.Jerefusaisdelelaissermourirà
petitfeuseuletAdamrefusaitdeme
voirmalheureuse,mêmesicelalui
demandaitdessacrifices.Monpèrea
donccommencéàvivreavecnous.Mais
aveclui,d’autresennuisontcommencé
aussi.PhiletAlonttrouvénotre
appartementetontcommencéàexiger
leurdû.Sespertesaucasinoétaientbien
tropimportantespourqu’ilsenfassent
l’impasse.
Lesmotscommencèrentàsortirplus
difficilementdesabouche.Soneffortà
poursuivresefaisaientsentir.Ethanposa
alorssamainsurcelledeKayalui
tenantsonpull,devinantquelamortde
sonpèreallaitsuivre.
—Maislesfraisd’hospitalisation
devinrentimportants.Toutnepouvait
êtrecouvertparnospetitesassuranceset
cotisations.Adamcherchaalorsunjob,
encomplémentdesesétudesluiaussi.
Audébut,nousyarrivions,maisj’avais
dumalàtoutconcilierentrelafac,mon
pèreetleboulot.Alors,jeprisla
décisiond’arrêtermesétudes.Adam
étaitévidemmentcontre,maislecancer
demonpèreprenaittropd’ampleuretje
devaisêtreàsonchevet.Ilmourutau
printempsdemes23ans.Jefustriste,
maisenmêmetempssoulagée.Soulagée
denepluslevoirsouffrir,soulagéede
neplusimposercettevieàAdamquifut
sipatientpourmoi,soulagéedepouvoir
reprendrelecoursdelavietout
simplement.
Kayafitunepause.Sonregardse
chargead’amertumealors.
—Cesoulagementnedurapas.Ma
viepaisibleetheureuseavecAdamne
commençapas.PhiletAlrevinrent
toqueràlaportedecheznous,malgréla
mortdemonpèrequelquetempsplus
tard,
décrétant
que
nous
étions
maintenantleshéritiersdesadette.
Adamnevoulutpasl’entendredecette
manière,etilsfinirentparletabasser.
J’aidoncacceptéledeal.Saufqu’en
plus
du
versement
habituel,
ils
réclamèrentaussiceuxutiliséspourles
frais
d’hospitalisation
maintenant
économisés,plusunehaussepouravoir
refuséd’obtempérerdèsledébut.La
menaceencasderébellionétait
évidentepourmoi,envoyantdéjàce
qu’ilsavaientpufaireàmonpèrepuisà
Adam.Jefuscontrainted’accepter.Je
dustravailleralorscommeunefolle.
Adamdevenaitdingue.Iln’aimaitpas
sonimpuissance,iln’aimaitpasma
minefatiguée,iln’aimaitpascequ’était
devenuenotreviequ’onvoulaitparfaite.
Sesparentsacceptaientdemoinsen
moinsqu’iltravaillepourm’aider,en
plusdesesétudesqu’ilavaitdeplusen
plusdemalàsuivre.Ilsluiposèrentun
ultimatum:leuraidepoursesétudesou
moi.Adamserefusaitdemequitteretje
refusaisquesesparentscessentde
financersesétudes.Ilnemedemanda
pasmonavisetdécidadetoutarrêter,se
mettantàdossesparentsaupassage.
J’étaisencolère.J’aidoncvoulu
rompreavecluiet…ilmedemandaen
mariage!
Kayalâchaunsanglotamusé.Son
chagrinlafrappaitànouveau.Elleétait
partagée
entre
l’impétuosité
irresponsabled’Adampouvantfairerire
etlatristessequienavaitsuivi.Elle
serraunpeupluslepulld’Ethan,posa
sonfrontcontresontorseetbaissasa
têtepourluicacherseslarmes.Ethan
pritsurluipournepaslarepousseren
lasentantcontresapoitrine,maisaussi
pourpouvoirgardersajalousieàl’abri
duregarddelajeunefemme,enécoutant
lecomportementsiparfaitd’Adam.Il
n’avaitplusdedoutessurlefaitqu’illa
méritait.Bienplusquelui.Ilsesentait
siminableencomparaison.Tousles
effortspourdevenirunhommebien
jusque-làluiparaissaientsuperficiels.
Ilaimaitjoueravecelle,ilaimaitse
battreavecelle,ilaimaitcesmoments
pluspersonnelsoùtoutd’uncouptout
basculaitdansuneintimitéquilelaissait
pantoisaufinal.Ilaimaitcettefaçon
qu’elle
avait
de
le
surprendre
constamment,sonsourireetsesyeux
pétillantsquandelleappréciaitquelque
chosederare.Kayalesortaitdeson
quotidien.Ellel’obligeaitàsedévoiler,
àmontrersesfaiblesses.Tantôtils’en
accommodait,tantôtilnelesupportait
pas.Maiselleavaitleméritedele
bousculer,desuscitersonintérêt.Iln’en
étaitpasdemêmepourlui.Lui,quiétait
sisouventconvoitéparlesfemmes,lui
quinelaissaitjamaisindifférentsles
gensqu’ilcôtoyait,carl’indifférence
c’étaitcommeperdre,seretrouvait
ignoré.
Ilnevoyaitpascommentfaire
mieux.Ilnepouvaitleprétendre.
Effectivement,iln’étaitpasAdam,il
étaitloindel’être.Effectivement,elle
nepouvaitquel’ignorerencomparaison
desonfiancé.Ilnefaisaitpaslepoids.
Ilneferaitjamaislepoids.Sefaire
remarquerparcettefemmerelevaitdu
défiinsurmontable.Croirequ’ilpourrait
chamboulersonamourpoursonfiancéà
coupdevannesetquerellesétait
ridicule.Croirequ’ilpourraitfaire
mieuxqueluietluiprouverqu’elleavait
tortétaitunebêtise.
—Cefutleplusbeaujourdema
vie.Malgrél’adversité,j’étaisheureuse.
Tantqu’ilétaitlà,jen’avaispaspeurde
l’avenir…continua-t-elleenpleurant
contrelui.
Ethanserralesdentsdecolère.Ilne
devaitpassesentirsimalàl’aise
devantsesaveuxetpourtant,ilsesentait
bouillirintérieurement.Ilsentaitson
impuissance
chambouler
tous
ses
fondementsqu’ilavaitdûreconstruire
enluipourdevenirfort.Ilnecontrôlait
finalementrien.Nienlui,niautourde
lui.Depuisledébut,ilétaitéchecetmat.
Illecomprenaitcesoir.Ilnemaîtrisait
nisessentiments,nisesdémons,ni
mêmecequifaisaitdeluicethomme
fier.Etilnecontrôlaitpasnonplusles
sentimentsdeKaya.Ilpensaitpouvoirla
faireflancher,ilpensaitqu’elleavait
craquéàdeuxreprises,maiscen’était
quedelapoudreauxyeux.Ellele
mettaitàgenouxrienqueparsesmots.Il
pouvaitessayerdedéplacertoutesles
montagnes
du
monde,
cela
ne
remplaceraitpascethommeauxyeuxde
Kaya.
Ellel’aimaitdecetamouruniqueet
merveilleuxqu’onluichantaitdepuis
quelquetempsetdontildoutait
connaîtreunjourlateneur.Ilcomprenait
maintenantsondiscoursàSimonet
Barneysurl’après,lorsquesamoitié
meurt.Ilcomprenaitquelui,n’avait
jamaisréellementaimé.Samèren’était
pasunange,ellenel’avaitenfinde
comptejamaisrenduheureux.
«Onnepeutaimerunepersonnequi
nevousestimepascommeille
faudrait.»
LesparolesdeCindyprenaientun
peuplusdesens.
«NemélangepastoutEthan,unjour
tucomprendrascequ’estlesentiment
amoureux.C’estavanttoutunsentiment
quisepartage,pourêtrepleinement
heureux,maisc’estaussiunsentiment
quetupartagesdifféremmentselonles
personnes…»
IlenviaitAdam.Ilenviaitcet
hommequi,àsoninverse,avaitvraiment
euceretour.Kayaleluirendaitencore
aujourd’hui.S’ilavaitétélàpourelle,
elle-mêmedemeuraitlàpourlui.Toute
savie,ellen’avaitpenséqu’àlui.Et
lui?Avait-onpenséàluicommeça?
Ilignoraitoùétaitsamère,ce
qu’ellefaisait.Était-elleencoreavec
Stan?Sansdouteétait-ellemorted’une
overdose…Ilavaittoujoursrefusédela
revoir.Lacassureavaitéténette,comme
lesdeuxcicatricesquiséparaientson
torseendeuxetqui,aupassage,avaient
missoncœurencharpie.
Àl’entendre,àlavoir,àimaginer
Kayaaveclui,ilendevenaitjaloux.Un
sentimentqu’iln’avaitjamaisvraiment
ressentijusqu’àmaintenantnonplus.La
jalousievadepairavecl’amour.Sans
amour,pasdejalousie.Envierlesautres
luiétaitétrangerjusqu’àmaintenant.Il
neregardaitquesespropresobjectifs.
Sontableaudesréussites…Symbole
detoutesafaçond’être.Cetableauqu’il
remplissaitetsuivaitàlalettre.Ce
tableauquilesuivaitpartout.C’était
Charles,sonpèreadoptif,quienavait
eul’idée:unecolonnepourcequel’on
veut,unecolonneindiquantlesmoyens
pouryparvenir.Nosactesfontceque
noussommes.Chaqueactedonneun
résultat.Onseconstruitsoi-même,onne
doit
rien
à
personne.
Devenir
pragmatiquepourêtreplusfort.C’était
ainsiqu’ilavaitévolué,qu’ilavait
avancé.Ill’avaitsursontéléphone
portablepourpouvoirgarderses
objectifsconstammententête,n’importe
oùoùilirait.
Aussi,ressentiruntelsentiment
d’envielemettaitencolère.Ilavait
l’impressiondeplongerdansl’inconnu.
Lesactesneserviraientàrienavecelle.
Lui,l’hommed’action,étaitbattu.Son
tableauétaitinutileavecKaya.Il
pouvaitécriredessus:«jelaveux»,
qu’iln’endétermineraitpaslesobjectifs
pourl’obtenir.Lesbiensmatérielsne
changeraient
pas
la
donne
des
sentiments.C’étaituneguerredes
sentimentsqu’ildevaitluidéclarer.Lui
montrerquesonAdamn’étaitpasun
amourinfaillibleenluiprouvantqu’elle
pouvaitéprouverd’autressentimentsen
d’autrescirconstancesavecd’autres
hommes.Utiliserlessentimentspour
pouvoirpercerlemystèredecette
femme,c’étaitjusteimpensable.Être
remarquéparcettefemmeenusantde
parolesmielleusesétaitjusteimpossible
pourlui.Ilnepouvaitprendrecerisque,
ilnevoulaitpasquesoncœursaigneà
nouveau.Commentleconcretpouvait-il
vaincrefaceautempspassé?Faceaux
sentimentsqu’Adamluiavaitdonnéset
que
lui-même
était
incapable
d’exprimer?Ilétaitdansuneimpasse.
Quepouvait-ildoncfaireàpartêtre
spectateur?Resterlà,impuissant?
Resterinvisibleàsesyeux?Se
contenterd’oublierd’éluciderl’énigme
Kayaetpassersonchemin?
Kayatrouvaunnouvelélande
couragepourcontinuer.
—Suiteàsaruptureavecses
parents,Adamcommençaalorsà
travailleràpleintemps.Nousfinissions
parnouscroiser.Leseulbutétaitd’en
finirrapidement,maisPhiletAl
devinrentdeplusenplusgourmandsen
voyantquenousarrivionsàtenirnos
engagementsetàcontinuerdevivre.Ils
nousétranglaientdeplusenplusavec
l’augmentationdumontantdeleurs
versements.L’annéedernière,Adam
décidadeprendreunsecondjob.Jene
voulaispas.C’étaitdonnéuneoccasion
àPhiletAld’endemanderencoreplus.
Nousavionsdeplusenplusdemalà
releverlatête.Onpayaitleloyer,mais
leschargesdevenaientuncontinuel
casse-tête.Devantl’évidence,jefinis
parcéderetilentamaunboulotle
soir…Noëlarriva.Notrerepasde
réveillonfutrapide.Nousnousétions
contentésd’unbonsteakavecdes
pommesnoisette.Adamgardaitle
sourire,maisjevoyaisbienquelecœur
n’yétaitpas.Ilsesentaitdésolé,en
colère,impuissant.Ilnedisaitriende
cettelassitudedenotrevie,maiselle
transparaissaitsursonvisage.Notre
coupleenpâtissait.Celanousrendait
nerveux.Nousn’avionsplusdeprojets,
plusdemomentsànousetlepeuque
nousavionsnousmettaitmalàl’aise.On
devenaitdeparfaitsinconnus.J’ai
craqué.J’aibalancélesassiettesloinde
latableetj’aicraqué.Adamm’a
regardépétermoncâble.Nousn’étions
mêmepasfichusdepasserunréveillon
deNoëlheureux.Ilnemeréponditrien.
Iln’yavaitrienàdire.Ilm’aprisedans
sesbrasetm’abercéetoutelanuit.Le
lendemain,noussommesrestésaulit
toutelajournée.Adamtenaitabsolument
àpasserdutempspournousretrouver,
pournepasoublierl’essentiel.Puis,il
estrepartiautravaillesoir.
Kayasetutquelquessecondes.Elle
agrippalepulld’Ethanavecsaseconde
main.
—Lelendemainmatin,àsept
heures,onfrappaàmaporte.C’étaitun
policier.Ilvenaitm’annoncerque…
qu’onavaitretrouvéunevoiture
accidentéecontreunarbre,sansdouteà
causeduverglasoudelafatigue,et
qu’Adamn’avaitpassurvécu.
LesmainsdeKayasemirentàtirer
simultanémentsurlepulld’Ethan.Son
chagrinrepritdeplusbelle,mais
maintenant
il
pouvait
comprendre
pourquoielles’envoulait.Pourquoielle
sesentaitcoupable.Pourquoilamort
d’Adaml’avaitprofondémentmarquée.
Ilsoupiraetlaserradanssesbras.Kaya
passalessiensautourdesataillepour
pouvoirselaisserallercontresonpull.
Ilvoulaitluidiredesmotsréconfortants,
maisnesavaitpaslesquels.Ilvoulait
allégersapeineparuneblague,maisil
netrouvaitpas.
—TunedoispasresterEthan.Situ
medétestessuffisammentalorsva-t-en!
luilança-t-elledansundernierespoir.
Ethansemitàrire.
Sijetedétestesuffisamment?
Ilneputs’empêcherderire
amèrement.Ladétester.Illadétestait,
maisilnepouvaitpartir.Outreson
contrat,ilnevoulaitpasenfiniravec
ellecommeça.C’étaitplusfortquelui.
Il
détestait
cette
sensation
d’avilissement
qu’elle
exerçait
involontairementsurlui.Ildétestaitcette
impressionagréabledèsqueleursdeux
corpsétaienttropproches.Ildétestait
êtrelacinquièmerouedesoncarrosse
debois.Ildétestaitneplusdétesterêtre
avecelle.
—Jet’aiditmaréponse,Princesse
butée.
—Ilsvontteretrouverette
menacer.Ilsnevontpastelâcher!
—Etbienonverra,s’ilsontdu
cran.Danstouslescas,çanechange
rienànousetnotreaccord.
Kayaleregardaalors,stupéfaite.Il
souriaitdefaçondétendue,commesi
sonlongdiscoursn’avaitpasémaillé
sonassurance.
—As-tuentenducequejeviensde
tedire?
—Ouioui,luidit-ildefaçonlasse.
UnehistoiredeBarbieavecsonKen.
Riendebienfantastique.
Kayalouchasurlui,nesachantsi
elledevaits’envexerouleprendreavec
humour.
—Tutefousdemoi?
Illasondaquelquessecondes,puis
luiaffichasonsourireentendu.
—Pasdequoifouetterunchat!Ton
Adam,mêmepascapabledeconduire
unevoiture!Sansdec,çacraint!Ilne
vautpastouscestourments.
Kayalerepoussa,blesséeparses
propos.
—Tuneleconnaispasetmes
tourmentsneregardentquemoi,alors
arrêtedetelajouersup…
Kayan’eutletempsdefinirsa
phrase,Ethanlarattrapapourlaramener
contreluietposasonnezcontrelesien.
Kayasesentitrougir,affoléepourune
raisonquemêmesoncœurn’arrivaitpas
àcomprendre.
—Jesuisbienmieuxquelui!Pour
preuve,jesaismebattre!Macicatrice
surmonarcadeenestlapreuve.Jeme
lasuisfaiteenmebattantcontreEddyil
yatrèèèèslongtemps!Ilnem’arrive
pasàlacheville,tonAdam.
Kayasedécollaunpeudeson
visagepourobserversacicatrice.Cette
fameusecicatricedontilrefusaitdelui
endirelacauseaufast-food.
—Eddy…Tonami-espion?
—Lui-même!dit-ilenriantdevant
lesurnomdesonami.
Ellelevalamainpourtoucherdu
boutdudoigtlamarquesursonarcade
sourcilière.Ethanenfutsurprisetse
sentitsubitementmalàl’aise.Soncœur
s’emballaitjusteparcesimplecontact.
Ilavaitpourtantconnupire,maisun
simplegestevenantd’elleetc’étaittout
soncorpsquis’alarmaitetréagissaiten
dedélicieuxpicotements.Ellelacaressa
légèrementpuisleregarda.Ilsemità
rougir,bouleverséparcegestepourtant
anodin.
—Coupdepoing?
Ilhochalatêtesansréussirà
décrochersonregardobnubiléparsa
cicatrice.
—Troispointsdesuture…mais
j’enaieuunaussilà,faitaujourd’hui
même,luidit-ilenmontrantsamâchoire
unpeurouge,enluirappelantlecoup
qu’ilvenaitderecevoir.
—Unvraibadboy!s’amusa-t-elle
àdire.
—Tuterendscompte….tuasun
badboyconnarddepetitami!Tues
gâté…
Illuisourit,maisn’attendait
finalementqu’unechose.Soncœurn’en
pouvaitplusdetambourinerdanssa
poitrine.
Kaya…console-moi…
Selonsaréponse,ilneseretiendrait
plus.
—Tulesaligneseffectivement.Tu
comptesobtenirtouteslesnuancesde
connardpossibles?Tuesplutôtbien
parti,maisjepréféreraisêtreprévenue
avantquetum’ensortesunenouvelle,
quejemeprépareaupire!Parce
qu’entreleconnardpervers,leconnard
intelligent,leconnardkingsize,le
connarddominateur,jecommenceà
franchement
m’inquiéter.
Ça
fait
beaucouppouruneseuleetmême
personne!Etencore,jen’aipastout
dit!
Ethansemitàrire.Ilnes’attendait
pasàcetteréponse.Encoreunefois,elle
leprenaitaudépourvu.
—Tudevraisalorst’accrocherdès
maintenant,carj’aiunenuancede
connardquiestentraindenaîtreetqui
nevapasteplaire!
Vas-y,Princesse!Dis-moi«quoi
donc?»quejet’embrassecommeun
fou!PutainKaya,dis-le,quejete
sortelaversionconnardfougueux!
—Etbien,retiens-laaufonddetoi!
Tantqu’àfaire,j’aiétéassezbousculée
moralementcesoirdoncjepréférerais
m’enpasser!Tuesunhommetrop
compliquéàcerneretjen’aipasbesoin
denouvellessurprisespourlemoment.
Kayaseredressaetcherchases
affaires.Ethanlaregarda,scotché.Une
claquen’auraitpaseupireeffet.Il
pouvaitravalersonbaiserettoutespoir
avec.Mêmepaseuletempsde
comprendrequ’ilvenaitencoreunefois
deseprendreunedouchefroide.Ellese
rhabillasansmêmeleregarder.
S’ilétaitunconnard,nuldoute
qu’elleétaituneprincessesanspitié.
Ilsouritcependant.Ilvenaitde
retrouverlafemmededéfiqu’il
connaissait.Ilsentaitqueçaluiprenait
auxtripes…Ilattrapasontéléphone
portabledanssapocheetouvrir
l’applicationoùsetrouvaitsontableau
desobjectifs.Danslacolonne«ceque
jeveux»ilinscrivitengros«KAYA»,
danscelledesmoyenspouryparvenir,
ilsecontentad’unseulmot:«Tous».Il
serelevaauboutd’uneminuteet
ramassalabougieausol.Ilsouffla
dessusetdéclarapourlui-même:
—Cen’estquepartieremise,
Princesse…
-12-
Loser
Kayaseréveillatard.Sanuitavait
étéagitée.Ellen’avaitcesséde
ressassercequiluiétaitarrivédepuis
aussilongtempsqu’elles’ensouvenait.
Ellenedevaitpasenvouloiràsonpère,
pourtantcettenuitellel’avaitdétesté.
Toutétaitdesafautemêmesielleavait
toujoursadmisqu’illuiavaitété
difficiledesubvenirauxbesoinsdesa
filleetdelui-même.Malgrécela,savie
avaitradicalementchangéquandilavait
commencéàsombrerdansl’alcooletles
jeux.
Leur
famille
n’était
plus
qu’illusion.Lefaitd’avoirunefille:un
détailquin’étaitplussasourcede
bonheur,lefruitdesonunionavecsa
mère,maisbienunechargedontilse
seraitpassé.Oui,cettenuit,ellel’avait
détestéplusquecertainsjours.Bienplus
quelejouroùill’avaitfrappédevant
Adamaprèsavoirbu,bienplusquela
foisoùilavaitdépensél’argentqu’elle
avaitsidurementgagnéenjeuxau
casino.Ellel’avaitdétestébienplus
encorequelorsquelapoliceluiavait
annoncélamortd’Adam.Oui,toutétait
desafaute.Ilétaitàl’originedetous
sesmaux.Etcettenuit,ellen’avaitpas
trouvélaforcedeluipardonner.Malgré
toutl’amourqu’unefillepouvaitporterà
sonpère,cettefois-ci,ellenepouvait
plus
accepter
ses
circonstances
atténuantes.
SiEthann’avaitpasétélà,quisait
commentelleseseraitréveilléece
matin?Toutcelaàcausedelui,son
père.SiEthann’avaitpasfaitfuiraussi
efficacementPhiletAl,quisaitcequi
auraitpuêtresignalécematin:un
meurtre?Doubléd’unviol?Quiaurait
pucroirequesaprévenanceirait
maintenantjusqu’àl’inquiétude.Il
voulaitcontacterlapolicepourporter
plaintepouragression.Elles’y
refusait.Ilvoulaitagir,elleaffirmait
quepersonnenepourraitl’aider.Il
s’étaitfâché,elleavaittempérésa
frustrationparunsourireetune
caressesursajoue.Sonsoupirde
capitulationenréponseavaitétéaussi
éloquent
que
l’impuissance
dans
laquelleellel’avaitmis.SiEthan
n'avaitpasétélà...dansquelétat
d’espritserait-ellevraiment?
Ellesortitdesachambreetalla
machinalementverslacuisine.Sesyeux
s’écarquillèrent
en
remarquant
le
comptoir.Descroissantsavecunverre
dejusd’orangeetunerosesetrouvaient
surunplateau.Unpost-itaccompagné
l’ensemble.Ellesesaisitdumotetle
lut.
«Jerentreraitard,cesoir.Ne
m’attendspas.Parcontre,tuasmon
téléphone.Situasunsouciouqueçane
vapas,tupeuxm’envoyerunmessage.
Jet’envoiedequoiterassurer…Ethan»
—Dequoimerassurer?
Perplexe,Kayapritlarosedanssa
mainetenhumaleparfum.Ellepouvait
lemaudiresifacilementd’ordinaire,
maisdevantcescroissants,ellesourit.Il
faisaitpreuvedebeaucoupd’attentionà
sonégarddepuislaveille,depuisson
agressionetcelaluifaisaitdubien.
Commesilahachedeguerreétait
provisoiremententerréeetqu’unepause
s’étaitinstauréepourqu’ellenesoitplus
aussiaffectéeparsaviechaotique.
Depuisledébut,Ethanluiapportait
bizarrementcettetouchedesérénité,de
douceurdontelleavaitbesoinpourse
relever,pourfairefaceetcroirequele
malheurn’étaitpasdevenuunehabitude.
Mêmesisoncaractèrelaissaitàdésirer,
ellenepouvaitseplaindredesavie
aveclui.Illuiredonnaitenviedevivre,
desavourercequ’ellen’avaitplusla
possibilitédegoûter.Despetitsdétails
commeduconfort,delabonnebouffeou
dessoiréesentouréesdemondequ’elle
s’obligeaitàoublierpournepasen
souffrir.Ethanluirappelaitqu’elle
pouvaityavoirdroitelleaussi…Y
avoirdroit…Pouvait-ellevraimentle
croire?Combiendetempscespetits
bonheursallaient-ilsencoreréellement
durer?
Ellesesaisitd’uncroissantet
croquadedans.Ellerepensaalorsàla
veilleetsessouvenirsbifurquèrentsur
lafaçondontill’avaitconsolé.Ellese
mitàrougirinstinctivement.Soncœurse
serra.Ellepouvaitencoresentirson
souffledanssoncouquandilmurmurait
«cen’estrien,jesuislà…».Sesmains
sursescuisses,sesfesses,sesseinsqui
effaçaientlentementledégoûtquis’était
incrustésursapeau.Lesouvenirde
cetteparenthèseluifitbattresoncœur
plusfort.Elleposasoncroissantet
s’attrapalesbraspours’apaiser,se
bercer.Ungestequ’ellepensaitefficace,
maisquinefaisaitqueconfirmerson
besoind’êtreunenouvellefoisdansles
brasd’unhomme.Ellegrognade
déplaisir.
Kaya,tunevaspastefaireavoiret
tomberdanssesbrasàlamoindre
excusequandmême!Ressaisis-toi!Tu
peuxtepasserdelui!Tuasbienréussi
jusque-là!
Ellesoupira,sonregardlorgnantson
croissant.Unpetitdéjeunerauquelelle
n’avaitjamaissongé.Descroissants…
Uneéternitéqu’ellen’enavaitpas
mangés.Ellecaressalespétalesdela
rosedoucement.PourquoiEthanse
montrait-ilsiprévenant?Pourquoila
rose?Pourquoipasuniquementlepetit
déjeuner?Ilavaitdûseleverencore
plustôtpourachetertoutcela.Pourquoi
faisait-iltouscesefforts?Ilenavait
déjàfaitsuffisamment.
Lecontactduveteuxdespétalesla
laissasongeuse.Uncontactquilui
rappelaladouceurd’Ethanmalgréles
apparencestrompeuses.Sesdoigtssur
sa
peau.
Un
effleurement
léger,
vaporeux,maisredoutabled’efficacité.
Ellepouvaitencoreressentirsestouches
suavesetsensuellessursestétons
d’abord,puissursonventre,surses
hanches…
jusqu’à
ce
qu’elles
deviennentaussipiquantesqueles
épinesdecetterose.Seremémorerla
façondontilavaitsaisisapoitrinela
perturba.Doucepuissiemportée.
Contretouteattente,elleavaitaussi
aimécettebrutalitésurlafin.Cette
étreinteviolenteavaitréveilléenelle
sonbesoindesentirunhommeprès
d’elle.Elleavaittoujoursvécuavec
Adam.Sonabsencenefaisaitque
confirmerqu’ellen’aimaitpasêtre
seule,qu’elleavaitbesoind’être
accompagnéedanssavie,d’être
cajolée,d’êtrel’objetdetoutesles
attentionsd’unhomme.Ellenesavait
pasvivreseule.
Elleattrapasoncroissantetarracha
un
morceau
de
ses
dents
avec
agacement.Ellesesentaitsoudainement
fébrileetdevaitreveniràlaréalité.Ne
passeconfortersurlaprésenced’Ethan
àsescôtés.Malgrétout,lasuite
inévitableluivintàsonesprit.Salangue
indécentesursavulve,laléchantde
façonàlafoiscâlineetredoutable,
dévastantaupassagelesdoigtscrasseux
dePhilpourluilaisserunesensation
plaisante,voluptueuse.Elleposases
mainssursesjoues.Elleavaitchaudet
nedoutaitpasd’êtrerougecramoiside
honteenyrepensant.Ellen’étaitpasdu
genrefarouche.AvecAdam,elleavait
apprisàselibérerdetoutegêne,à
acceptersesdésirsetsasensualité.Elle
pouvait
devenir
impudique,
provocatrice,mêmedévergondée.Elle
semitàsourireàcetteidée.Elle
repensaàAdamettoutcequ’elleavait
étéprêteàfairepourlui.Ellerepensaà
sonsourirepolissonquandellelui
faisaitunesurprisecoquine.Sonregard
libidineuxetcettefaçondontilsejetait
surellepoursatisfairesesinstincts
bestiaux.Leursheurespasséesaulitàse
caresser,s’embrasser,s’unirdefaçon
plusoumoinsinconvenante.
Kayapouffa.Encoreaujourd’hui,
elles’étonnaitdecedontelleétait
capabledefairepourlui…Elle
s’étonnaaussidecequ’elleavaitpu
fairelaveilleavecEthan.Toutcela
n’avaitniqueue,nitête.Comment
avaient-ilspuenarriverlà?Comment
avait-ellepusetoucherdelasorte?
Unepremièrefois…
Elle
resta
songeuse
quelques
secondes.Aprèspresqueunandedeuil,
jamaisellen’enavaitéprouvélebesoin
etEthanleluiavaitsuggéréavecune
tellefacilité,unetelleévidence,comme
sicelacoulaitdesource.Ellesecacha
lesyeuxdesesmains.Repenseràçala
marquaitplusqu’ellenelevoulait.Se
permettredetelleschosesaveclui
relevaitdel’inimaginableetpourtant…
AvecEthan,leschosesétaientbien
compliquées.Pasdesentiments,maisil
sevoulaitrassurant.Pasd’amour,mais
ilavaitpusemontrerdoux.Pasde
promessesd’affectionentreeuxet
malgrécela,elleavaitréussiànepenser
qu’àluietàpersonned’autrependant
plusieursminutes.Adamnecomptait
pluspourvuqu’ilarriveàrassasiersa
soifderéconfort.Ilavaitréussiàmême
luifaireoublierl’uniquehommedesa
vieetsespromessesd’amour.Ethan
était
un
homme
mystérieusement
incroyable.
Kayarigolaironiquementdecette
situation.Ilavaitmarquédesesdoigts,
deseslèvresavecunefacilité
déconcertante.Ellel’avaitlaisséfaire,
allantau-delàdetoutelogique.Ilavait
raison:elleenavaitbesoin.Besoinde
prévenance,d’égards,desérénité.Juste
seviderlatêteunpeuetselaisseraller.
MêmeAdamparmomentsluiparaissait
commeunpoids.Sonamourpourluine
faisaitqueressasserceséchecs,ses
pertes,saviesimédiocre.Ethanlui
avaitdonnéunsecondsouffledontelle
nepensaitpasavoirbesoin.Juste
oublierunpeuetnepenserqu’àelle.Il
avaitcettecapacitédéroutanteàvous
menerparleboutdunez,àvousfaire
fairedeschosesquevousn’auriez
jamaispenséfaire.Ill’avaitsauvéeau-
delàdesonaltercationavecPhiletAl.
Ill’avaitsecourued’elle-même.Même
sielleavaitencoredel’amertumeen
elleàcausedesonpère,ellepouvait
reconnaîtrequ’ellen’étaitpastriste.
Ellenesesentaitpaspourautant
dévastée.Toutefemmeauraitdû
l’êtreaprèsunetelleagression;ce
n’étaitpasvraimentsoncas.Mêmesi
toutétaitencoretroubledanssatête,il
avaitanesthésiésescraintes.Elle
attrapaànouveausonpost-itpourle
reliretoutenbuvantsonjusd’orange.
—Jet’envoiedequoiterassurer…
Qu’est-cequ’ilmijote?
Lasonnetteretentitàcemoment-là.
Kayafixalaporteavecsurprise.Elle
regardaunenouvellefoislemessagesur
sonboutdepapieretinstinctivementse
méfia.Ellen’étaitpassurson31.Son
longt-shirtd’Adamdebasketàl’effigie
desChicagoBulls,cheveuxenbataille,
cernessouslesyeuxsansnuldoute.Elle
soupiraquandlasonnetterésonnaune
secondefoisdansl’appartement.Elle
quittalecomptoirdelacuisine
nonchalammentetexaminalaporte
d’entréeavecattention.
Etsic’étaitAletPhil?
Lentement,elleregardadiscrètement
danslejudas,puisconsidérauninstant
lasituation.Nil’unnil’autre.Unhomme
aucrâneraséavecungrostatouagedans
lecouattendaitdevantsaporte.
Quicelapeut-ilbienêtre?Un
complicedePhiletAlm’ayant
retrouvé?
Elledéglutit,sentantsapoitrinese
gonflerd’angoisse.Lasonnetteretentit
unetroisièmefois,maisavecplus
d’insistance.
Sicelaavaitétéundessbiresdu
Patron,ilauraitsansdoutedéfoncéla
porte…
Doucement,elleattrapalapoignée
delaporteetouvritens’assurantquele
loquetdelaporteétaitbienattaché
avant.
Kaya
put
voir
dans
l’entrebâillementunhommedontle
physiqueneluiindiquaitriendebon.À
soncrâneraséetsontatouagequ’elle
pouvaitidentifiercommeétantunetête
deloupfaitensymboletribal,s’ajoutait
unetenuepourlemoinsparticulière,
dontunemèreauraitpuvivement
s’inquiéter.Vesteencuir,pullnoir,
treilliskaki,rangerspleinsdeterre.Des
tatouagessurlesdoigtsquemêmeses
grossesbaguesnecachaientpas.Un
loubardmadein«bienvenuedansma
raveparty!»setenaitdevantelle.Le
typelouchelatoisauninstantdefaçon
sévère.
—KayaLévy?TuesbienKaya
Lévy?
Kayafixaintensémentsonregard
pour
tenter
de
comprendre
ses
intentions.Sonallureetlefaitqu’il
sachesonnomnelarassurèrentpas.
—Désolée,vousvousêtestrompé
d’adresse.
Aussivitequepossible,ellereferma
laporte,maisl’undesrangersdutype
s’interposaentrelaporteetlemurla
tenant.
—Ohnon!L’adresse,j’ensuis
certain!Pasdedoute!Ilm’avaitditque
tuavaisuncaractèredechien.Vuce
regardpleindedéfimaintenant,nul
doutequec’esttoi!
Kayal’inspectaunenouvellefoisde
latêteaupied,tentantdecomprendreet
devinerquiétaitcethomme.
—JesuisEddy.Enchanté…dit-ilen
voyantsaperplexité.C’estEthanqui
m’envoie!
Kayasefigeaàl’écoutedeses
présentations.
—L’ami-espiond’Ethan?!
—J’espèrequetuasunebonne
raisonpourmefairevenirsitôtici!
lançaEddytoutens’avachissantsurle
siègequifaisaitfaceàEthan.
—J’aibesoindetoipourune
missionbienparticulière.
—OK,jet’écoute.
—Jevoudraisquetusurveilles
quelqu’un.
—Çanechangepasded’habitude,
ça.
—Jevoudraisquetulaprotèges.
—Quejelaprotège?Dequoi???
—C’estunelonguehistoire…
soufflaEthan.Jevisavecunefemmeen
cemomentquiadesproblèmes.
—Pardon!?
Lastupéfactionqu’Ethanputliresur
levisaged’Eddylefatiguad’avance.
—Oui,jesais.Depuisquandjevis
avecunefemme?Aussiincroyableque
celapuisseparaître,j’aisignéuncontrat
avecellepourqu’ellem’aideàsigner
uncontratjuteuxavecuninvestisseurqui
l’aimebien.Suiteàunquiproquo,nous
devonsjouerlecouplemerveilleux.
Maiselleaeudessoucishierquifont
quej’aibesoinquetulasurveilles.
—Ooookay!répondit-ilperplexe
devantcetaveu.Quelsgenresde
soucis?
Ethanpassasamaindansles
cheveuxetrepoussalesdossierssurson
bureau.
—Elles’estfaitagresserhiersoir.
J’aipuinterveniravantqu’iln’yaitpire,
maiselleaétésensiblementbousculée.
Jevoudraisaussiquetuvérifiessielle
vabien.
—Quellebienveillancedetapart?
Jecroisquec’estbienlapremièrefois
quejetevoist’inquiéterautantpourune
femme.Tutiensvraimentàcecontrat?
Aupointdefairelaconcessiondejouer
lesamoureuxavecelleetdem’envoyer
lasurveiller?
—Oui,j’ytiens.Ils’agitde
beaucoupd’argent.Etàcôtédecela,
Kayan’estpascommetouteslesautres
femmes.Elle…
Laphrased’Ethanseperditdansses
pensées.Eddyhochalatêtedecôté.
Jerêveoùmonamiestvraiment
affectéparcequepeutluiprocurer
cettefemme?!
—Bref!coupacourtEthanpourne
passetrahirdevantsonami.Tu
acceptes?
Eddyputvoirsonamitracassé.
Maisau-delàdecela,ils’interrogeasur
sonrapportaveccettefemme.Iln’était
pasdupe.Ilsemblaittroubléen
l’évoquant.L’espaced’unbrefinstant,il
avaitmêmecrulevoirsourire.C’était
léger,maisilavaitsourienpensantà
elle.
Ai-jebienEthandevantmoi?
Quellemouchel’apiqué?
EddyfixaEthansérieusement.Tout
celalerendaitdeplusenpluscurieux.
—Elles’appelleKaya.OK.Kaya
comment?
—KayaLévy.Châtainclair,des
yeuxmarron-vertetuncaractèrede
chien.Tuverras,c’est…uneprincesse
rebelle!fit-ilavecunsourireattendri
quisurpritencoreplusEddy.
Là,pasdedoute!C’étaitbienun
sourireheureux,pasamer!Merde,il
estmalade!?
—Elleestcheztoidepuis
longtemps?Tusemblesbienla
connaître.
Ethantiquasursaremarque.
—Non.Seulementquatrejours…
répondit-ilens’esclaffant,gêné.Qu’est-
cequitefaitdireça?
Eddylefixa,droitdanslesyeux.
—Pourquoitesens-tusimalà
l’aisetoutàcoup?Aurais-jetouchéun
pointsensible?
—Pasdutout!réponditEthantout
encommençantàgesticulersurson
fauteuildePDG.Iln’yarienaveccette
femme.Riendutout!Elleestjuste
imprévisible,ons’engueuletoutle
temps.Onsedéteste.Voilàcequeje
saisd’elleetçamesuffit!Pasbesoinde
décortiquersavie!
—Maistuveuxquejelaprotège…
Ethanfronçalessourcils.Eddyétait
unfinobservateuretsonplusvieilami.
Ilpouvaitdifficilementgrugeraveclui,
maisnevoulaitpassejustifier.Ilavait
assezavecSametOliver.
—Oui,jeveuxquetulaprotèges.Je
sersmesintérêts,commed’habitude.
—OK…
Eddyselevacommepourpartir,
maisfinalementsepenchaau-dessusde
sonbureausoudainement.
—Avouequetuascouchéavec
elle!Ceseraplussimple.
Ethanseleva,nesouhaitantpasse
laisserintimider.
—Jen’aipascouchéavecelle.
—Redis-le-moidanslesyeuxpour
voir.
Ethan
se
sentit
confus,
mais
s’exécuta.Ils’avançaaussiau-dessusde
sonbureauetapprochasonvisagede
celuidesonami,puislefixa.
—Jen’aipascouchéavecelle.
—Maisilyaquelquechose…Tu
estendu.
—Tum’énerves.Sansdoutepour
ça.
—Jet’énerveparcequej’airaison.
Tuesperturbé.Dis-moicequite
tracasse.Etcen’estpasquecette
agression.
—Dis-moiseulementquetu
acceptesmamission…s’ilteplaît.
Eddyserecula.Ethanétaitun
hommepeuexpansifenparoles.Il
gardaitsouventtoutpourlui.Illesavait.
Etl’entendredire«s’ilteplaît»était
justetropanormalpourquelqu’undesa
trempe,aussidouédanssonposte
d’exécutif,dePDG.Eddyn’eutplusde
doutes.
—Trèsbien.J’yvais.Maisc’est
bienparcequejevoisqu’ilyaquelque
chosedelouchedanstoutçaetqueje
comptetrouvermesréponsesavecelle.
Surce…
Eddysortitdubureausansattendre
lesreprésaillesdesonami.Ethanse
rassitdanssonfauteuil,posasescoudes
contrelebureauets’attrapalatêtede
sesmains.Iln’arrivaitpasàse
concentrer,alorsqu’ildevaitfinirles
préparatifsdugaladeprésentationdesa
nouvellegammedemaquillage.Ilne
cessaitderessasserleursoirée.Ils
étaient
rentrés
sans
un
mot
à
l’appartement.
Elle
était
restée
longtempssousladouche,sansdoute
parnécessitédeseretrouver.Ils’était
postéderrièrelaporte,impuissant,ne
sachantquoifairedeplus.Elleavait
encorepleuré.Était-ceuniquementà
causedel’agression?Avait-ellepleuré
aussiàcausedeluietdesafâcheuse
façondeconsoler?Puis,elleétaitsortie
delasalledebainetluiavaitdit
«bonnenuit»sansrienajouterdeplus.
Enrepensantàtoutcela,ilregrettait
vraimentd’avoirposésesmainssur
elle.Ill’avaitsansdouteplusperturbée
qu’ilnel’avaitvoulu.
Consoler…non,ilnesavaittoujours
pascequecelasignifiait.
Kayasefrottalatêteuninstant.Elle
portaitencorelet-shirtd’Adamquilui
servaitdechemisedenuit,sonesprit
étaitencoreunpeuembrumépartoutes
lesémotionsparlesquelleselleétait
passéedepuislaveilleetlespectacle
qu’elleavaitsouslesyeuxluifaisait
songerqu’elledevaitêtretoujoursdans
sonlitentraindedormir.Eddyétait
avachisurlecanapé,leschaussures
pleinesdeterresurlatabledusalon,en
traindezapperleschaînesdela
télévisionsansunmot.Pasuneseule
explicationn’étaitsortiedesabouche.
—Vas-y!Faiscommecheztoi
surtout!
—T’inquiètes,jeconnaislamaison
commemapoche!
Devantl’apathied’Eddy,Kaya
s’insurgea.Cen’étaitpasluiquiallait
gâcherlepeudebonnehumeurqu’elle
avaitencore.
—Ettuasl’habitudedeposertes
godassespleinesdemerdesurlatable
dusalon!?Tuvasmedirequ’Ethan
acceptecela?
—Tuasétéengagéecommefemme
deménage?Remarque,celapourrait
expliquerpourquoiiltegardechezlui!
Encemoment,iln’apasletempsde
s’amuseràjouerlesféesdulogisauvu
duboulotqu’ilamasse.Tusavaisqu’il
étaitunmaniaquedurangement?Mais
c’estquetupourraispresqueêtreson
épouseàcestade!
Kayacroisalesbras,franchement
agacée.Cetypeluiparaissaitd’entrée
antipathique.
Son
allure
et
sa
nonchalanceapparenteleclassaient
d’officedanslacatégorie«boulet
parasite».
—Pourquoitueslà?luidemanda-t-
ellesèchement.
Eddy
soupira
et
jeta
la
télécommandeàcôtédelui.
—Jesuislàparcequ’ilmel’a
demandé.Maintenant,celanemeplaît
pasforcémentnonplusdejouerles
baby-sitters.
—Tuveuxdireque….c’esttoile
«dequoimerassurer»?
Eddyl’observaencherchantà
comprendre.Kayas’esclaffadedépit.
Laprochainefoisqu’iladetelles
idées,jel’étrangle!
—Tupeuxrepartirsanssouci.Jene
suispasunegamine.
Eddysecural’oreilleavecsonpetit
doigt,feignantdenepasêtreintéressé
parsespropos.Kayas’offusquaune
nouvellefoisdedevoirparlerdansle
vide.
—Tuessourd?Tupeuxpartiret
dégueulasseruneautretable,ailleurs!
Jen’aipasbesoindechaperon.
—Combienmepaies-tu?
Lastupeursefigeasurlevisagede
Kaya.SiellevoyaitEthancommeun
connard,celuiqu’elleavaitenfaceétait
aussiunbeauspécimen.
—Ethanmepaiepourtebaby-sitter.
Ilmepaiebienpourchaquemission
confiée.Crois-tupouvoirmepayer
plus?
Kayaregardalesol,désoléeet
impuissante.Ellen’avaitpasunrond
pourPhiletAl,alorspourEddy…
—C’estbiencequejepensais…
Maisbon,netefaispasdebile,jefais
toujoursbienmonboulot.
Eddyluisouritdefaçonentendue.
Kayalevalesyeux,effaréeparsa
vanité.
—Jeviensdecomprendrepourquoi
Ethanettoiêtesamis.Aussiarrogant,
arrivisteetconnardquelui!
Eddyhaussalesépaules,commesi
saremarquenelechoquaitpasoutre
mesure.Kayasouffla.
—Jesensquemajournéevaêtre
longue.
—Etmoidonc!luidit-iltoutaussi
las.Ilm’auratoutfaitfaire,cecrétin!
—C’estvraiquetuespionnespour
soncompte?
Eddysourit.
—Pourquoi?Tudoutesqueje
puisselefaire?
—Etbien,vutonallure,permets-
moid’endouter.Tunepassespas
inaperçu!
Eddysejaugeauninstant,surpris.
—Elleaquoi,monallure?Jesuis
enjournéeoffaujourd’hui.Donc,j’en
profite
pour
retrouver
mes
fondamentaux.
Kayal’observa,sceptique.
—Tes…fondamentaux?Autantdire
àtoutlemonde«Regardez-moi!Jesuis
chelou!»!
Eddyselevaducanapéetseposta
devantelle.Illatoisad’unœilmauvais.
—Jesaismefondreparfaitement
dansledécoretmesfondamentaux,
personnenemeleschange.Pasmême
unefemmemaniaquedelapropreté!
Kayarelevalementon,pour
remettresonairhautainaurasdes
pâquerettes.
—Tesfondamentauxsontmoches.
Ilsmanquentdegoût.Tuneressemblesà
rien!Etpuiscetatouagedanslecoute
permetdetefondredanslepaysage?
Onnevoitqueça.Permets-moid’en
douter!
—Cetatouage,c’estmavie.Ilaune
symboliqueimportante.
—Unetêtedelouptribale?Une
symbolique?
—Toutàfait.Ilreprésentela
famille.Etréfléchisbienàcequetuvas
dire,carEthanrespectecetatouage
autantquemoi!
—Pourquoiça?Ilalemême?
—Non,ilatoujoursrefusédele
porter.Ila…d’autressignesdistinctifs
luirappelantsafamille…quilui
tiennentplusàcœur.
Kayatentadesonderdanssesyeux
deséclaircissements,maiscompritqu’il
n’endiraitpasplussurcessignes
distinctifs.Faisait-ilallusionàses
cicatricessursontorse?Ellenepouvait
luidemander.EllenesavaitsiEddyles
avaitvuesetelleavaitpromisàEthan
deneriendireàcesujet.Ellesongea
aussiàcetteidéedeporterlemême
tatouage….quellesymboliqueavait-il
pourquemêmeEthanensoitsusceptible
deleporter?Beaucoupdequestions
dontelledoutaitavoirlesréponsesavec
Eddy.
—Signedistinctifoupas,çafait
affreux!reprit-ellepourrevenirauvrai
sujet.
Unsourcild’Eddytressauta,celui-ci
piquéauvifdevantsonairprovocateur
etl’insultequ’ellevenaitdeproférer.
—Alors,voicidoncKayaLévy,la
femmequitroubleàcepointmonami.
C’estclair,tuesbienuneemmerdeuse.
Ethannes’étaitpasgouré.Jepensais
qu’ilexagérait,maisnon.Putain,mais
qu’est-cequ’iltetrouve?Tun’asrienà
voiravecsongenredemeuf!Alors
pourquoiveut-ilquejeteprotège?
L’argentnefaitpastoutetc’estbienla
premièrefoisquejevoisEthanprendre
untelrisquepourlui-mêmeavecune
femme,rienquepourdestunesqu’il
pourraitavoirautrement!
—Jepeuxteretournerlaremarque.
Qu’est-cequ’ilficheavecuntype
commetoiàsescôtés?Iln’ariend’un
voyou.Vousn’avezencommunque
votrearrogance.Jenecomprendspas.
Vousêtesvraimentdedeuxmondes
différents.
—Rienencommun?Mondes
différents?Visiblement,ilnet’apas
encoretoutdit.Quelquepart,çame
rassure…Tuesencoreloindedevenir
sonépouse.
—Quiaditquejevoulaisêtreson
épouse!Plutôtmourir!Êtreamoureuse
d’unconnard…jamaisdelavie!Alors,
arrêteavecça!
Eddysemitàsourire.Illuicaressa
lehautducrânedesamain.
—Tuasencorebeaucoupà
apprendredu«Bleu»…enfins’il
acceptedeteracontersavieunjouret
qu’ilréussitàtesupportersuffisamment
longtempspourenvoirl’intérêt.
Eddysedirigeaalorsverslefrigoet
attrapaunebièrequ’ildécapsulaavec
sesdents.Kayasesentitconfusedevant
cegestesommetouteaffectueux,malgré
cetteimpressiondeleçond’ungrand
frèreenverssapetitesœur.Elleanalysa
uninstantsespropos.
Ethan
aurait
tant
de
points
communsqueçaavecEddy?
Touteslesinterrogationspossibles
germèrentalorsdanssatête.Leur
rencontre?Leurrelation?Leurs
affinités?Quesavait-ilvraimentsur
Ethan?
—Pourquoil’appelles-tu«le
Bleu»?
EddyfixaKayaavecintérêttouten
buvantsabière.
—Parcequ’ilest«leBleu»etille
resteraàmesyeux.
—Pourquoi?Ilestnoviceenquoi?
Eddys’approchad’elleetlasonda
uninstant.
—Quet-a-t-ilditsurlui?
Kayasesentitpriseaudépourvu.
Quepouvait-ellediresurlui?Ilrefusait
deluirévélerlamoindrepetitechose.
Elleclaquacependantdesdoigtsense
rappelantd’undétailquipouvait
meublersademande.
—Quec’étaittoiquiluiavaisfaitla
cicatriceàsonsourcil!
Eddysourit,plutôtsurpris.
—Ilt’aditça?Etilnet’apastué
après?Tiensdonc…Alors,ila
commencéàseconfier?Intéressant…
Eddybutunenouvellegorgéetouten
observantKaya.
—Trèsintéressant…
—Ilm’amenti?
—Non.Effectivement,c’estmoiqui
luiaidéfoncésagueuledepetitconily
alongtemps.
—Défoncé?Tuveuxdirequ’ila
perdu?
Kayaécarquillalesyeux.Imaginer
Ethanseprendreunedérouilléelui
paraissaitdifficilementenvisageable,au
vudescombatsauxquelselleavaitété
présente.
Etaprèsilfaitlebadboyen
comparaisond’Adam….Pauvretype!
—Qu’a-t-ilfaitpourmériterton
poingdanslafigure?
Eddypouffaenseremémorantce
souvenir.
—Ilm’aprovoquéenduel.Jeluiai
laisséunbeausouvenirenplusdesa
déculottéepourqu’ilsacheàquiilavait
affaire.C’étaitunjeuneprésomptueux.
Elleluivabiensacicatrice,non?
—C’était…ilyalongtemps?
demanda-t-ellecurieused’ensavoirplus
etnevoulantrépondreàcettequestion
peupertinente.
Eddylevalesyeuxpourretrouver
l’annéedanssatête.
—Trèslongtemps,oui…Ilavait
quatorzeans.
Kayasourit.Enfinuneinformation
concrètesurluidontellepouvaitse
réjouir.Ellesesentaitmoinsmiseànue.
Luiracontersavielaveilleluiavait
laisséuneimpressiondemiseà
découvertquilagênaitunpeu.Eddy
rétablissaitunpeul’équilibre,mêmesi
l’informationétaitmince.
—14ans?Etaujourd’hui,ilabien
latrentaine.Doncçafaitbienquinzeans
quevousvousconnaissez…
—Hum…Untruccommeça…
déclara-t-ilsongeur.
Unsilences’installaentreeux.Eddy
repensaàEthan,àsesréactionsetàla
descriptionqu’illuiavaitfaite.
Unenanavraimentinintéressante
pourtoi,Ethan?Jesuissûrquetuas
creusébienplusquetumel’as
prétendu…
Ill’observauninstant.Kayasesentit
passéeauxrayonsX.Lorsqu’ilsemità
souriretoutensirotantsabière,ses
jouess’empourprèrent.Ellebaissa
instinctivementsont-shirtunpeuplus
sursescuissespourqu’ilcessede
s’imaginerquoiquecesoit.
Plutôtbienfoutue…Caractèrebien
trempé…dequoit’attirertouten
t’énervant?Dequoitemettreaupied
dumur…J’aihâtedevoircommenttu
vasgérertoutça,monpote!
—Continueàregarderettuesun
hommemort!
Ilposasabouteillesurlecomptoir
etrigola.
—C’estqu’ellemordrait!
—Tuveuxtenterpourvoir?J’en
connaisunquil’aregrettéetquidoit
encores’ensouvenir!
—Saufquetuasdevanttoison
mentor!Onn’apprendpasàunvieux
singeàfairelagrimace.
IlcontournaalorsKayaetseposta
aumilieudusalon.Ilsetournaalors
verselleetl’invitad’unsignedemainà
lerejoindrepourmettreenactionson
avertissement.Celle-cilevasonmenton
dansunmouvementhautainetsedirigea
verssachambre,lelaissantseuldansle
salon.Elleclaqualaporte.Eddysemit
àrire.
—Onapeurdugrandméchant
loup?Onneveutplussebattre?lui
cria-t-ilamusé.
—
Je
mets
une
tenue
plus
appropriée,luirépondit-elledela
chambre.
—J’adoreladentellerougepour
information.
—Elleestbelletonamitiéavec
Ethan.Tuesunhommesansscrupules!
Ellerouvritlaporteetapparuten
jean,sweet,baskets.
—Jecomprendsmieuxpourquoiil
estcommeça,sic’esttoiquiluias
appriscertaineschoses.Iln’yapasde
quoiêtrefier,mêmesitusemblesêtreun
bonmentor.Perversetconnard!Ahoui,
tuluiasbienappriscertaineschoses.
Tesproposindécentspourraientêtre
vraimentchoquants,tusais.Jete
rappellequejesuiscenséeêtresapetite
amie!Jenecomprendspaspourquoiil
tefaitconfiance.Iln’yarienqui
m’obligeàenfaireautantentoutcas,si
cen’estquej’aiconfianceenEthan.
Tuasconfianceenlui?Deplusen
plusintéressant…Unconnardenquitu
asconfiance?Pourquoi?
Ils’avançajusqu’àcequesoncorps
soitàuncentimètrededistancedecelui
deKaya.Cettedernièreneflanchapas
devantcetteproximité,ellen’eutmême
pasunsoupçondeméfianceou
d’hésitation.Elle-mêmes’étonnadeson
assurancealorsquelaveille,ellelui
avaitfaitdéfaut.Sansdoute,parce
qu’elleavaitpuconnaîtrelesautres
amisd’Ethanetqu’ellelesavait
appréciés,sansdouteparcequ’Ethanlui
avaitpromisqu’ilneluiarriveraitplus
riendegrave,sansdouteparcequ’au-
delàdesonallureetsoncomportement,
ellevoulaitlaisserlebénéficedudoute
àEddyetquefinalement,ill’amusait
aussiunpeu.
—Tun’espasréellementsapetite
amie,pasvrai?Doncdanslesfaits,je
nedisriendemal,non?
—Serais-tuentraindesuggérerque
tupeuxmedraguerenconséquence?
—Voudrais-tucela?
—Jetiensàtedirequetuesmal
barré.Tudégueulasseslesalonavectes
chaussuresboueusesettuasdes
«fondamentaux»peuàmongoût.
—Doncsijeretiremesrangerset
quejememetsàpoil,j’aimes
chances?!
Kayaouvritlabouchedesurprise.
Vraimentaucuneretenue,aucun
scrupule!Incroyable!
Ellesepinçaleslèvres,cherchantle
meilleurmoyendeleremettreàsa
place.
—OK.Àpoil!dit-elledansune
lueurdedéfiquil’amusaitdéjà.
Eddyhaussaunsourcilperplexe.
Elles’estvraimentfaitagresserla
veille?Non,çacacheautrechose,
maisquoi?Trèsbien.Jouons!
—Sérieux?
—Sérieux!
Eddysouritetretiraseschaussures
sur-le-champ,devantleregardtaquinde
Kaya.Aucundesdeuxnelâchaitl’autre
desyeux.Unsourireaccompagnait
chaquevêtementquitombaitausol.
C’étaitàceluiquicraqueraitenpremier
etserétracterait.Eddyputvoirque
Kayaétaitbienimprévisible.Iln’aurait
jamaiscrudevoirfairedetelleschoses
pourlatester,pourvoirpourquoison
amiétaitsitroublé.Ilcomprenaità
présentqu’elleétaitvraimentdifférente
desautresfemmesqu’ilaitconnues,à
biendeségards.Maiscejeul’amusait.
Elleavaituntempéramentquilui
plaisait.Untempéramentquinelaissait
pasdemarbre.
Ethan,tuastouchélegroslotavec
elle?Était-elleenplussexyettendre
devanttoiparmoments?
—Tuveuxvraimentqueje
continue?luidemanda-t-iltoujoursravi
decepetitjeuentreeux.
Céderaoucéderapas?
—Jetepréviens…àlafin,jete
sautedessus!Ceseratroptard!
—Allez,arrêtedeparler!Tu
saoules!Lepantalon!
Eddys’exécuta.Entredéfietdésir
émoustillé,
il
retira
aussi
ses
chaussettes.Seulsoncaleçondemeurait
encoresurlui.Kayasemorditlalèvre
d’amusement.Eddyétaitvraimentun
hommeatypique.Sontorseétait
recouvertdetatouages.Unpiercingsur
letétondroitluisaitàlalumièredujour.
—Alors?Ravidevoirunhomme?
Unvrai!luidit-iltaquin.Ethan,c’estde
lagnognotteàcôté!Avoue!
Kayapouffadevantsespropos.
—Laisse-moiprendredureculpour
admirerlabête!luidit-elle,coquine.
Eddypritlapose,amusé.Ilposales
mainssurleshanchesetfitressortirsa
musculature.Kayalescrutasoustousles
angles,seretenantderiredevantla
scèneplusquegrotesque.
—Alors?Jeretirelecaleçon?Tu
verrascommeçavraimentlabête!
Kayasemitàrire.Toutàcoup,elle
sortitdelapochearrièredesonjeanson
téléphoneetluilança:
—FaisunsourirepourEthan!
Unclicretentit.Lesyeuxcommedes
soucoupes,EddyfonçasurKaya.
—Salebourrique!Tun’aspasfait
ça!Tuvasmelepayer!
—Approcheetj’appuiesur
«envoyer»,etlà…adieul’ami,lapaie
etlaconsidération!
Ellelevabienhautsontéléphone,
prêteàdégainer,commesisonbouton
étaitledétonateurd’unebombe.Eddyse
figea,àl’affûtdumoindregestepouvant
indiquersafin.
Commentsefairepiégeren
beauté…etmerde!
—Donc,tuvasterhabiller
gentiment,posertesgodassespourriesà
l’entrée,nettoyerlaterresurlatabledu
salonsansbroncheretaprèsonverra…
—Jevois…duchantage.Bienjoué.
Jedoisavouerquetum’asbieneu.
J’attendaistontourdepasse-passe,mais
jenepensaispasquetuiraisjusque-là.
J’avaisdumalàcomprendreEthan;je
suisservi.
Eddyattrapasontéléphoneportable
danslapochedesontreillisétaléausol
etcomposaunnuméro.Ilyeutunsilence
dequelquessecondes,avantqu’iltrouve
soninterlocuteur.
—Ethan…c’estmoi!Oui,ne
t’enflammepas!Toutsepassebien…
enfin,çadépendsousquelangleonvoit
leschoses…çava,çava!Nemontepas
aucréneau.Jet’appellejustepourte
direque«taKaya»,c’estofficiel:jela
déteste.
Kayaleregarda,incrédulesurle
coup,puisluichuchotaun«moiaussi»
avecungrandsouriresurleslèvres.
—Oui,jet’appelledoncpour
t’informerquec’estlapremièreet
dernièrefoisquejefaisdubaby-sitting
pourtoi,quellequesoitlasomme…Tes
problèmes,tulesrèglestoutseul!
Eddyraccrochaaussisecetse
rhabillatoutengrommelant.
—Bon,etmaintenant,onfaitquoi?
Kayaluisouritsournoisementtouten
luimontrantlatableànettoyer.
-13-
Gourmand
—OnestOK?Jepeuxvouslaisser
gérer?
Ethanregardad’unœilinterrogateur,
maissurtoutempressésescollèguesde
travail,assisautourdelatabledela
sallederéunion.
—Tuabuses,franchement.Legala
estdemainettoutcequitepréoccupe,
c’estcettefille!rétorquaBrigitte,
agacée.Jeveuxbienaccepterqu’elle
soitlegaged’unesignatureavecun
investisseur,maislà,c’estabusé.Tuvas
toutplanter.Tun’asaucunegarantie
avecelle,tandisqueladémonstrationde
demain,c’estletravaildetoutlemonde.
Toninsouciancemefaitpeur;ellenete
ressemblepas.
—Brigitte…déclaraEthannavré.
—Brigitte,arrêtedefaireta
jalouse!déclaraSam.Ilaledroitd’être
inquiet.Netefaispasdebile.Mêmesi
Ethann’estpluscélibataire,mêmes’il
estamoureux,moijeseraitoujourslà
pourtoi!
Àlasuitedesesdoucesparoles,
SamsevautrasurBrigitteenquêted’un
câlinqu’ellerepoussaenrâlant.
—Cecontrataveccettefille,jene
lesenspasetcen’estpasdelajalousie.
N’interprètepasmalleschoses.
—MaisouiBB,l’entrepriseavant
sespropresintérêts…luirépondit-il,
pasdupe.
—Parstranquille!fitAbbigail,sa
secrétaire.Onatesinstructionsetje
gérerailereste.
—MerciAbbi,tuesgéniale.Fais-
moipenseràt’augmenter!luidéclara
Ethanenl’embrassantsurlajoue.
Abbigailsetrouvatroubléeparcet
élanaffectueuxsipeuhabituel.Cette
affaireavecKayasemblaitvraimentlui
teniràcœurpourqu’ilsepermettede
telsgestesavecelle.Ilenfilaensuiteson
manteauenquatrièmevitesseetse
tournaunedernièrefoisversSam.
—Avantdepartir,notebiencelasur
toncalepin,Sam:jenesuispas
amoureuxdecettefille!
—Ouais,c’estça!«L’amourmène
àlasouffrance»…Onconnaîtla
chanson!
Samjetasonstylosurlatablede
façondésabusée.OliverregardaEthan
uninstant,puissourit.
—Fais-luiungroscâlindenotre
part!luidit-ildefaçonentendue.
—Tunevaspast’ymettreaussi!
Pitié!Pastoi!
—Bahquoi?Jel’aimebienetje
suissûrquetun’attendsquecegenre
d’excusepourluienfaireun!
Ethanlaissatombersatête,dépité.
—
Je
suis
vraiment
entouré
d’enfoirés!Vousêtesvraimentdes
enfluresavecmoi!J’auraisdûvous
donnerplusdeboulotencore,pourvous
remercierdevotresoutienindéfectible
enversmapetitepersonne!
Ethanleurfitalorsdegrosyeux
menaçants,maisaucundesesamisne
semblaperturbéparlapseudomenace
deleurpatron.
—Ouais,c’estça!Fais-nouston
pauvreCaliméro!luiréponditSam.On
vateplaindre!Maissituveux,j’yvais
àtaplacelacâliner,moi!Pasde
problème!Turesteslààbosseretje
vaisvoirtapetiteamieàtaplace!
—Mêmepasenrêve!luirétorqua
lePDG.Chacunsontravail!Et,oui,je
suisunevictime!Vousnevousrendez
pascomptedecequejesubis,depuis
qu’elleestentréedansmavie!C’est
fou,ça!C’estunecatastropheetvousla
chouchoutez,telunange!
—Sic’estsidurpourtoi,pourquoi
pars-tu
la
rejoindre
?
Pourquoi
n’arrêtes-tupastoutcecirque?le
sermonnaBrigitte.
—
J’aurai
mon
contrat
avec
Laurens!C’estlaseuleetuniqueraison
quifaitquejeserrelesdents!
—EtvoilàcommentBrigitteest
devenuecettedroguéeduboulot!semit
àrireironiquementSam.Onadevant
noussonmentoravecsesobjectifsetses
intérêts!Vousêtesirrécupérables,autant
l’unquel’autre!Allez,va!Casse-toi!
Vatravaillertoncontrataucorpsàcorps
avecKaya!
—Oui!J’yvais!Jevais
travailler!luilançasèchementEthan,
maisunpeuvexé.Maispasaucorpsà
corps!Avecelle,c’estplutôtàcoupsde
poing…marmonna-t-ildanssabarbe.
Ethanattrapasonattaché-caseet
n’attenditmêmepaslasuitedes
remarquesdesesamis.Ilsedirigeavers
laported’unpasferme,maiscontrarié,
puislaclaquasansmêmeunregard
reconnaissantouamical.
—Jevousledis!Ilestaccro,
l’ami!seprécipitadedireSam,dèsque
laportefutfermée.
—C’estvraiquejel’airarementvu
siinquietouimpatientpourune
femme…
continua
Abbigail.
D’ordinaire,toutcequiconcernelagent
fémininepasseendernierlieu.Etmême
s’ilyacecontratàlaclé,jetrouve
plutôtmignonnesafaçonderéfuter
qu’elleluiplaise.Çacrèvepourtantles
yeux.
—Jenesuisdoncpaslaseuleà
avoirremarquésoncomportementplus
qu’anormalquandils’agitdecettefille!
fitremarquerBrigitte.Iln’estpas
commed’habitude.Nedevrait-onpasy
mettreunvetodessus?Aprèstout,elle
lemènepeut-êtreenbateau?Quinous
ditqu’elleneprofitepasunpeudelui?
Ellenousl’aembobiné,jevousdis!
Rienn’indiquequeLaurensvasigner
grâceàelle.Cen’estpasuntypeaussi
influençablequeça.
—T’enpensesquoi,Oliver?
demandaSamunpeuperdu.Perso,je
n’aipasressentidemauvaisesintentions
chezKaya.
—Dèsqu’ils’agitd’unefemme,il
n’yatoujoursquedesbonnesintentions
detonpointdevue,detoutefaçon!
s’invectivaBrigitte.Tun’espas
objectif.
LetonfroidetsarcastiquedeBB
provoquaunegrimacechagrinesurle
visagedeSam.Unepetitepiquefacile
sursoncomportementdragueur,mais
qu’illuiaccordavolontiers.
—Cequej’enpensedetoutçaaura
peud’importance…réponditfinalement
Oliver.Iln’apasbesoindemoi,nide
vouspourfairecequ’ilveutfaire.Ilest
têtupourtout.Poursesfréquentations,
pourcequ’ilaime,cequ’iln’aime
pas…Ilest,jepense,incapablededire
dansquellecaseKayaappartientdanssa
viesicloisonnée,schématisée.Ettant
qu’ilnel’aurapasmisedansunecase
quiluipermettradediresiellepeut
fairepartiedesavieounon,il
continueraàs’acharnerjusqu’àcequ’il
trouvesapropreréponse.Iln’yapasde
grischezlui.C’estoutoutblanc,outout
noir.Kayaestunenouveautéaussi
déstabilisantequemystérieuseàses
yeux.Onl’atousremarqué.Ets’ila
orchestrétoutcemicmacavecelle,ce
n’estpasanodin.Jesuissûrqu’ilaen
têtebienplusdechosesqu’ilnele
laissesous-entendre.Cen’estpasun
démonstratif,maisçanel’empêchepas
deressentir,mêmes’ils’yrefuse.
—Oliver…Monpsypréféré!Tuas
vraiment
raté
une
vocation
!
s’enthousiasmaSam.
Oliverritlégèrementàsaremarque.
—C’estjustedel’observationetje
commenceàleconnaîtreparcœur,notre
Ethan.
—Tucroisqu’ilestréellement
intéresséparellesurunplanplus
privé?demandaBrigitteplusinquiète.
—Jecroisqu’ellenelelaissepas
indifférent,c’estcertain.Jecroismême
qu’elle
ne
laisse
aucun
homme
indifférentetc’estsansdouteçaquifait
qu’ilnelâchepasl’affaire.Ellemetà
malsesambitionsetobjectifs,son
caractèreautoritaire,exclusif,dominant.
Ellejouesurseshabitudesetnuanceson
pragmatisme.Soncôtécartésienest
chambouléparlesémotionsnouvelles
qu’ellepeutluiapporter.Sansparlerde
lafaçondontellemonopolisel’attention
desonentourage.Moi,jesuistrès
curieuxdesavoirjusqu’oùilestprêtà
alleravecelle…
Ethan
sauta
dans
sa
voiture
précipitamment.Iln’avaitpasressenti
unetelleimpatiencepourquelqu’un
depuislongtemps.L’appeldesonami
l’avaitlaissésongeur.Eddyladétestait.
Quisaits’illaprotégeraitcommeille
voulaitdanscesconditions?Serait-il
vraimentaussivigilants’ilavaitdes
atomescrochusavecelle?Commelui,
lapremièreapprochefutapparemment
unfiasco.Kayan’avaitpasbesoind’une
ambiancehostilepourreprendredupoil
delabête.Ildevaits’assurerquetout
allaitbien.Ilsavaitqu’Eddypouvait
devenirmauvais,carrémentchiant
même,sionlecherchaittrop.Ilnela
blesseraitpas,maisilpouvaitluifaire
passerlapirejournéedesavie,sitant
estqu’ilpuissefairemieuxquece
qu’elleavaitvéculaveille.Depuisqu’il
avaitquittél’appartement,ilsebouffait
lesdoigtsd’angoisseàl’idéedel’avoir
laisséeseule.AppelerEddyàla
rescousseétaitsonuniqueoption.Lui
seulpouvaitlaprotégersilesdeux
salaudsducasinovenaientàla
retrouver.Mêmes’ilsavaitqu’Eddy
étaitassezconciliantquandils’agissait
desmissionsqu’illuiconfiait,ilsavait
aussiàquelpointKayaétaitfortepour
faireflancherlaplusgrandedes
patiences.
Depuisl’appeltéléphoniquedeson
ami,ilregrettaitfinalementcechoix
qu’ilpensaitjudicieuxàlabase.Ilavait
écuméuntravailmonstreenquelques
heures.Ilétaitsansdoutepassépourle
pireconnardaumondeauprèsdeses
employés,usantdesonautoritéà
outrance
pour
répondre
à
cette
impatiencedelaretrouverleplustôt
possible.Ilavaitpuentendremarmonner
danssondos,seplaindredeson
comportementdictatorial,maisils’en
fichaitàl’heureactuelle.Uneseuleidée
l’importait:voirKaya.
Elleneluiavaitenvoyéaucun
message.Mêmepasunpourleremercier
dupetitdéjeuner.Avait-elleapprécié?
Enavait-iltropfait?Enmêmetemps,ce
devaitêtrebienlapremièrefoisqu’il
faisaitunetellechose.Quelleétaitla
justemesuredanscescas-là?Cepetit
déjeunerimproviséluiavaitsemblé
opportunsurlemoment.Unsignelui
montrantqu’iln’étaitpascontreelle
aujourd’hui.Sansdoute,avait-ellepris
celacommeunenouvellemoqueriede
sapart,unenouvelleprovocation?Lui
envoulait-ellepourcequiavaitpuse
passerlaveilleentreeux?Avait-elle
réfléchi
et
changé
son
fusil
d’épauledepuis?Sonsilencedévorait
sapatience,sacompréhension.Plusil
regardaitsontéléphone,plusson
suppliceaugmentait.Pirequetout,il
ressentaitunbesoinindéfinissabledela
revoir.
Quelquechoseavaitchangéetcequi
s’étaitpasséentreeuxsurlematelasde
sonappartementluiavaitconfirmé
qu’ilsn’étaientpluslespiresennemisdu
monde,quesousleurschamailleries,ils
arrivaientenfinàcommuniqueretà
s’apprécier,mêmes’illuiétaitencore
difficiledesavoirparquellefaçon.Ilne
sauraitdirecequ’ilsétaientvraiment
devenusàprésent:ennemisintimes,
amis,fauxamants?Ilss’étaienttrouvés
surunterraind’ententequ’ilappréciait
chaqueminutedeplusenplus…àson
granddésarroi.Ilnepouvaitplus
réellementsevoilerlaface:lasoirée
d’hier,
malgré
l’épisode
de
son
agression,avaitétéagréable.Ilavait
aiméenapprendreplussurelle,ilavait
aimélafaçondontelles’étaitreposée
surlui,contrelui.Ilnedevaitpas
apprécierêtrecettesoupape,êtrece
refuge.C’étaitprendreunrisquetrop
granddesouffrirànouveauetpourtant,
hier,ilavaitflanché.Ilavaitréponduà
sesvieillespulsionsetaujourd’hui,bien
qu’ildoutaitdelapertinencedeson
choixetdesesconséquences,ilne
regrettaitrien.Ilsavaientsignéun
armisticeletempsd’unsoiretilavait
puladécouvrirànouveauunpeuplus,
commelorsdelasoiréeauSilkyClub.
Ilsavouraitdavantagecettetrêve,
sachantqu’ellel’avaittoujourstenuà
distancejusque-là.Unesortedepaix
provisoireentreeuxquiavaitentraîné
unepaixdesonâme,bienplusgrande
quelorsqu’ils’évertuaitàlatenirà
distance.Ilnepouvaitdirequ’ilétait
comblé,carbeaucoupdepointsles
tenaientencoreéloignésl’undel’autre,
maisilavaitréussienfinàtrouverune
petiterécompenseàforcedecreuser.Il
nesavaittropcequ’ilavaittrouvé
durantcettesoiréesidifficilepour
Kaya,maisilsesentaitbienplusproche
d’ellequ’avant,plusimpliqué.Cette
perspectiveluiplaisait.
Ilyavaitsongétoutelanuit.
Chercherpourquoiellel’intriguaitautant
depuisledébut.Savoirsiàforcede
creuser,iln’allaitpass’enterrertout
seulaufonddutrou.S’imaginercequ’il
allaittrouverenfouillantdavantage.Se
demander
pourquoi
toutes
sortes
d’émotions
contradictoires
se
bousculaientenlui,encoreettoujours
plusoppressantes,àchaquemorceaude
terresoulevé.Ils’étaittournéetretourné
danssonlitdesdizainesdefois,
grognantdenetrouverdesolutions
valables,lui,lemaîtredesobjectifs
réalisables.Etc’étaitsanscomptersur
cettedettedontilnetrouvaitpasde
solutionsnonpluspourlemoment.
Iln’aimaitpascetteincertitudeface
àlaquelleKayalemettait.Iln’aimait
pasquandilnevoyaitpasde
dénouementsacceptables.Ilavançaiten
aveugleavecelleetsesentait
déconcerté.Soncœurnecessaitde
battredefaçonanarchiquedepuisqu’il
l’avaitrencontrée.Unesensationsi
désagréableparmoments,maissidouce
àd’autres.
Ethanrâlaententantdeserecentrer
surl’essentiel…
«Lagentillessemèneàladouleur.
L’amouràlasouffrance».
Ilsesentaitfaibleensevoyant
craquercommeçadanssavoiture,
complètementàlamercidubonvouloir
decettefille,maisiln’arrivaitpasàse
raccrocher
à
son
dogme,
à
sa
philosophiequ’ils’étaitdémenéde
garderjusqu’àprésent.Ilappuyasur
l’accélérateursanstenircomptedece
quil’entourait.SeullevisagedeKaya
apparaissaitdanssonpare-brise.Son
seulobjectif,satranquillité.Ilgarala
corvetteauboutd’unquartd’heuredans
uncrissementdepneusdansleparking
desonimmeuble.Ilnepritpaslapeine
d’attendrel’ascenseurmenantàl’étage
desonappartementetclaqualaporte
desescaliersdesecourspuismontales
marchestroispartrois.Quandilarriva
enfinàl’étage,ilsesentitplussoulagé;
il
allait
enfin
la
retrouver.
Un
soulagementàlafoisamer,mais
heureux.Ilsepostadevantlaporte
d’entrée,rajustasesvêtementsetsa
tignasseletempsdereprendreson
souffle,puistoussotapours’éclaircirla
voix.Ilcollal’oreillecontrelaporteet
putyentendredelamusique.Ilregarda
uninstantsaported’entrée,surpris.Ilne
savaitpastropàquois’attendreen
arrivant,maisiln’auraitjamaispenséà
yentendredelamusique.
Ilsaisitlapoignéeetentradans
l’appartement.Sonassuranceretrouvée
futbalayéeinstantanément.S’ilavait
penséfaireuneentréeremarquée,iln’en
étaitrien.S’ilpensaitretrouverun
champdebataille,iln’enétaitriennon
plus.EddyetKayaétaientdanslesalon,
musiqueenfond,entraindedanser.Si
voirEddybougersonbassinsurdu
Shakiraétaitdel’ordreducauchemar,
voirKayasedéhancherrelevaitdurêve
éveillé.Sesyeuxnepouvaientse
détacherdesonderrière.Iln’aurait
jamaispenséqu’ellepuisseêtreaussi
libérée
quand
elle
dansait.
Ses
mouvementsétaientmaladroits,pas
forcémentenrythme,maissonsourireet
sescrisemplissaientlapièced’unejoie
communicative
et
Ethan
en
fut
directementlacible.Illatrouvait
touchanteetdrôle,admirablementbelle.
Ellefaisaitn’importequoi.Sespasde
danseneressemblaientàriendeconnu,
mais
elle
semblait
complètement
détendue.Unefaçond’êtrequisemblait
avoireuaussiraisond’Eddyqu’il
voyaitdanserpourlapremièrefoisde
savie.Unexploitensomme.Ilétaittout
aussipiètredanseurqu’elle,maisàeux
deux,ilsformaientunsacréduodebras
cassésetapportaientunetouche
comiquequifaisaitdubienaumoral
inquietd’Ethan.Pourautant,ilregrettait
denepasenêtrel’instigateur.Ilse
sentaitridiculeàcôté.Ellenesouriait
pasautantaveclui.Ellenes’étaitjamais
libéréeainsiensaprésence.Son
inquiétudesetransformaenunesombre
jalousie.Ellelerongeait,maisil
n’arrivaitpasàlarepousseretson
souriresetransformaenquelquechose
deplusfroid,plussévère.
CefutEddyquiremarquaenpremier
saprésence.Sabonnehumeurtomba
aussivitequesondélire.Prisentrela
honteetleflagrantdélit,ilsestoppanet,
sefrottantlesmainscontresonpantalon
quiavaitretrouvésesjambes,pour
tenterdesedédouaner.Iltoussota,mais
Kayacontinuaitdesautercommeun
cabritoutenremuantsonderrière.Elle
l’exhortaàcontinuer,maisdevantson
changementbrutaldecomportement,elle
s’interrogeajusqu’àcequ’illuifasse
comprendred’unregardquelaraison
étaitauniveaudelaported’entrée.Elle
setournaalorsetremarquaEthan.Elle
déglutitcommesilegrandméchantloup
venaitdelatrouver,puisseprécipita
verslachaînehi-fipourl’éteindre.
Pasunbruitneretentitpendant
plusieurssecondesjusqu’àcequ’Eddy
tented’établirundialogue.
—Helloman!Déjàrentré?!
Ethan
retira
son
manteau
et
s’approchasansunmot.Iln’avaitentête
quesonéchecàlarendreplusheureuse
alorsquesonamiavaitréussiuntourde
forcedontilignoraittoujoursles
subtilités.Ilsepostaensuitedevantelle
etlafixa,lamâchoireserrée.Ilauraitdû
êtrerassuréqu’elleaillebien,maisil
avaitl’impressionquecen’étaitpas
grâceàlui.Pire,ils’envoulaitd’êtresi
faible,deselaisserrongerparune
inquiétude
que
lui
seul
semblait
ressentir.
—Jenesavaispasquetupouvais
détesterdespersonnesdelasorte
Eddy…déclaraalorsEthan,toujoursen
fixantKayaduregardavantdelui
attraperlamain.Tuasundrôlede
comportementavectesennemis.
Samainsidoucequ’iltenaitenfinle
rassura.Illacaressadesonpoucetout
encontinuantdelasonder.Ungeste
tendre,maissurprenantquifitsourire
Kaya.
—Tuveuxdanseravecnous?lui
dit-elleavecmalice.
—MerciEddy…répondit-ilsans
mêmeluifairefaceetignorantla
demandedesapartenaire.Jeprendsle
relais.
Eddy
soupira,
mais
comprit
qu’Ethanmarquaitàsamanièreson
territoire.Uneréactionàlafois
surprenantedesapart,maisqu’il
pouvaitcomprendreàprésent.Ilalla
alorsjusqu’àlaported’entréeetenfila
seschaussures,puissetournaune
dernièrefoisverseux.
—Tuasintérêtàgardernotre
secret,secretKaya!luifit-ilavecun
clind’œil.
EthancontinuaitdefixerKayatout
enluicaressantlamaintandisquecelle-
ciluifitunaurevoirdesamainlibre
avecunsourirecomplice.
—Aufait,cequejeviensdefaire
avecelleàl’instant,c’estunpeucomme
toiEthan,ettafaçondeladétesterenlui
caressantlamainavectonpouce!Tu
n’espasmieux!
Ethanécarquillalesyeuxetserua
verslaported’entréeencriant«espèce
d’enfoiré»,maisEddyclaqualaporte
dansunéclatderireetsortit.
—C’estça!Barre-toi,connard!
Fous-toidemagueule!ETTUPEUX
TEBROSSERPOURTAPAIE,
BÂTARD!
Kaya
rigola
légèrement.
Ethan
rougit.Eddyvenaitdeleprendreen
traîtreetrévélerunecertainevéritéqui
aprésentlemettaitmalàl’aise.
—N’écoutepasunmotdecequ’il
dit,toi!Etarrêtederire!s’énerva
Ethan,confus.
Kayasepinçaleslèvrespourtenter
deréprimersonfourireetfaire
l’innocente,maisdetouteévidence,cela
sefinissaitpardespouffementsdesa
part.Ethanrâlapourlaforme.
—Maisvas-y!Continue!Jevois
quec’estlaforme!
Kayarepritsesriresdeplusbelle.
Ethanfitalorsungestedubras
d’agacement,
et
alla
retirer
ses
chaussuresàl’entrée.
—JepensaisquedemanderàEddy
detesurveillerétaitunebonneidée,
maislà,j’aidesérieuxdoutes…
Ilrevintverselleensoupirant.
—Tum’énerves!Jetedéteste.
Commentpeux-tumefairetourneren
bourriquecommeça?
Kayatiquadevantsaremarque,ne
comprenantpasoùelles’étaitmontrée
désobligeante.Ethanlafixauninstant,
dépité,puisglissasesbrassousceuxde
Kayaetlacollacontrelui.Cette
dernièresefigea.Cecâlinimpromptula
laissaperplexe.Ellenesavaitsielle
devaitlerepousservivementoule
laisserfaire.Oùdevait-elleposerses
mains?Était-ilvraimentinquietpour
elle?
—Commentvas-tu?luisouffla-t-il
doucementdanssoncou.
—Çava…Toutvabien.
—Sûr?
Elleposasesmainssursesépaules
etlefrottadoucementpourlerassurer.
Ellefermalesyeuxuninstant,savourant
sachaleur.Ilétaitvraimentinquietpour
elle.Lepetitdéjeunerdecematinétait
bienunsigneindiquantqu’ilavaitété
réellementtouchéparsadétresse.Elle
nepouvaitlelaisserdanscetteangoisse.
Cen’étaitpassonrôle,nidansson
tempérament.Ilsétaientplutôtdugenreà
sebagarrer,plutôtqu’àsecâliner.
—Sûr!Ledébutaétéunpeu
difficileavecEddy,maisnousavonsfini
partrouverun…accord!
Ethanrelevasatêteetlafixa,
intrigué.
—J’aidûuserdestratégieavec
lui…unpeucommeavectoi!
—C’est-à-dire?
—
Nous
avons
pactisé
un
arrangement!Ilm’aditêtretonmentor.
Donc,sivousêtessisimilaires,j’ai
optépourlemêmefonctionnement.
—Tuassignéuncontrataveclui?!
luidemanda-t-ilencoreplussurpris.
—Pasbesoindesigner…Disons
quenousavons…
—Unsecret!C’estça?Sa
remarqueavantdepartir!
Kayaluisouritpourconfirmer.
—Etjesupposequetunem’en
diraspasplus.
—C’estévident!
Ethanfitunemoueagacée.Il
n’aimaitpasqu’onluicachedeschoses.
Etencoreplusquandc’étaitavecce
filoud’Eddy!
Tuneperdsrienpourattendremon
pote!
—Rassuré?luidit-ellealors
amusée.Tupeuxmelâcher?
Ethanexaminalasituationuninstant.
Ilétaitbienainsietnevoulaitpasla
lâchercommeça.Mêmesiellepouvait
interpréter
les
choses
de
façon
impropre,ilsesentaitplusserein
depuis.
—Tuessûrequetuvasbien?Etlà,
jeneparlepasdetonrapportavec
Eddy,maisbiendetoi.Tu…asle
moral?
Kayaneputs’empêcherdele
regardertendrement.Mêmesic’était
inhabitueldesapart,elletrouvaitça
touchant.
—Jevaisbien!Contretouteattente,
çava.Jen’aimêmepaspleuré!
Ethancherchadanssesprunellesla
véritéoulemensonge.Kayasentitsur
ellesonexamenapprofondietsesentit
toutàcoupmalàl’aise,commes’il
cherchaitàcreuserettrouverles
morceauxblessésdesoncœur.Elle
baissalesyeuxpourqu’iln’aillepas
plusloin.
—Arrêtedemescrutercommeça!
J’ail’impressiondepassersousrayons
X!Tu…asétélàetaujourd’hui,jedois
bienavouerquejen’aipaseutrople
tempsdecogiteravecEddy.Onpeut
direquedansuncertainsens,ilaété
efficace,carjen’aipasruminé.Sa
présencem’afaitdubien.
—Plusquemoi?luisoufflaEthan,
avecunepointedetristessequeKayane
savaittropcommentinterpréter.Tune
m’asmêmepasenvoyéunmessagepour
mediresitoutallaitbien.Tuas…vu
monpetitdéjeuner?
Kayasemitàsourire.Ethansentit
soncœurrevivretoutàcoupavecce
sourirerienquepourlui.Sensation
complètement
débile
dont
il
ne
comprenaitmêmepaspourquoicelalui
faisaittantd’effet,maispourtant…
—C’étaitunesuperbesurprise!Je
n’avaispasmangédecroissantsdepuis
deslustres.Jemesuismêmedemandési
tuallaisbien!
Ellesemitàrireunpeu.Ethanse
sentitidiot.Effectivement,celanelui
ressemblaitpasdutout.
—Àcroirequetumefaisfaire
vraimentdestrucssansqueuenitête.
Évitequecelasereproduise,veux-tu?
Jetelaisseunrépit,maisnecroispas
queçavadurer!Demain,onreprendles
vieilleshabitudes!
Ilsedétachaalorsd’elleetse
dirigeaverslacuisine.Ilouvritun
placardpoursesaisird’unverreet
sortitunebouteilledeCoca-Cola.Ils’en
versaunpeu.
—Trèsbien…déclaraKaya,
aucunementinquièteparsonpetit
avertissement.Alors,profitebiende
mongâteauaujourd’hui,cardemain,tu
n’yaurasplusdroit!
Ethanlaissasongesteensuspens,
tentantderéalisersespropos.Ilposala
bouteille,sonverreseulementàmoitié
plein.
—Tongâteau?Tuasfaitun
gâteau?
—Oui!Tum’avaisditquetu
n’aimaispaslesgâteauxauchocolat
alors….j’enaifaitunauxpommes.
Kayabaissalesyeux,unpeugênée.
—…C’estpourteremercier…
d’avoirétélàhier….etpourles
croissants…et…larose.
Ethandéglutit.Illaregardatouten
sedemandants’ilnerêvaitpas.
—Tuasfaitungâteaupourmoi?
répéta-t-ilcomplètementsceptiqueet
stupéfait.
—J’aidûmebattrepourqu’Eddy
n’ytouchepas,mais…oui,ilesttout
pourtoi!finit-ellepardireavecunpetit
sourire.
Ethanréfléchitauxfoisoùonlui
avaitcuisinédesrepas.Cindyétaitune
reinedesfourneaux.Sansnuldoute,il
adoraitsacuisine.Mais,mêmesisa
relationparentaleavecelleétait
particulière,ellerestaitsamère
adoptiveetensoi,sespetitesattentions
relevaientd’unecertainenormalité.Ily
avaiteuaussicertainesdeses
conquêtes.Certainespensantqu’en
«
achetant
son
ventre
»,
elles
attraperaientsoncœur.Peineperdue,car
ilrefusaitcatégoriquementlesrepasde
n’importequellefemme.Autantluidire
quelesvilainessorcièresvoulaient
l’empoisonner.Illuiavaitfalluun
momentpouraccepterdemangerun
repasdeCindy,alorsmangerlerepasde
femmesaussivénalesquesuperficielles,
c’étaitimpensable.
—J’espèrequetuaimesles
pommes…Eddym’aditqueoui.
J’espèrequ’ilnem’apasmenti.
Ellepassaalorsàcôtédeluiet
sortitd’uncoindel’établidecuisineun
platsousunpapieraluminium.Elle
retiralepapieretluimontrasonjoli
gâteau,fièredesontravail.
—J’espèrequ’ilvaêtrebon,çafait
longtempsquejen’enavaispasfait.
Ethan
regarda
le
gâteau
complètementincrédule.Ilétaitbeau,
appétissant.Unpeudesucreglacesurle
dessusavecdesmorceauxdepommes
apparaissant.Ilpouvaitsentirson
parfumluichatouillerlesnarineset
aiguisersagourmandise.
—Tuveuxygoûter?luidemanda-t-
elle,satisfaitedurésultat.
Ethanlaregarda,complètement
ahuri.
—Tum’asfaitungâteau?
—C’estcequej’aidit,oui.
—C’estbiencequejepensais…
D’ungestevif,illarepritlaserra
contreluietl’obligeaàposersesbras
autourdesoncou.Ill’invitaensuiteà
posersatêtesursonépaule.
—Tunevaspasbien!Attends…
TUM’ASFAITUNGÂTEAU!Moi,le
connarddeservice!Çanevapasdu
tout!
Kayafutànouveausurpriseparcet
élanaffectueuxdesapart.
—Maisqu’est-cequetufais?Je
vaisbien,jetedis!
—Jenetelâchepastantquetune
medispascequinevapas!
—Maisarrête!Celadevient
ridicule!
—Toutàfait!Depuisquandtues
gentilleavecmoi!?Parle!
Kayas’esclaffa,déconcertée.Elle
pensaitqu’ilseraitcontent,quesa
surpriseluiferaitplaisiretmonsieurse
lajouaitincréduleetinquiet.
—Lâche-moi,jetedisqueçava!
Jenesuispasnonplusidioteetsans
cœur!Jepeuxreconnaîtrequeparfois…
endetrèstrèsraresoccasions,tupeux
êtreattentionné!Enquoiest-cemal?
Ethansedétachalégèrementd’elle
etposasamainsursonfront.
—Tudoisavoirdelafièvre.Oui…
c’est
ça
!
Maintenant,
tu
me
complimentes!
Kayarejetasamaind’ungeste
agacé.
—Çasuffit!Situneveuxpasde
mongâteau,dis-letoutsimplement!
Eddyenferasonaffaire!
Ethanlalâchaetseprécipitasurle
gâteau.
—C’estmongâteau!Pastouche!Il
n’yaquemoiquiaieledroitdedécider
decequejevaisenfaire!
Kayacroisalesbras.
Qu’est-cequ’ilpeutêtreagaçant
parmoments!
—Oui,tuasraison!Jevaismême
tefaireunesuggestion!Étouffe-toi
avec!Tum’énerves!
Kayapassadevantlui,agacée.Sa
surprisen’avaitpaseul’effetescompté.
Crétin!
Ethanregardalegâteauuninstantet
semorditlalèvre.Illevalesyeux,
blasé,etluiattrapalepoignetpour
l’empêcherdesuspendreleurdiscussion
parundépartqu’ilnevoulaitpas.
—Cuisinière!Coupes-enmoiun
morceau!
Kayaregardasonpoignet,encerclé
parlesdoigtsd’Ethan.
—Coupe-le-toi,toi-même!
—Situveuxfaireleschosesbien,
fais-lesjusqu’aubout!Sersenmoiune
part.
Kayatapadupiedetsouffla.Ellefit
finalementdemi-tourets’enquitd’un
couteau,d’unecuillèreetd’uneassiette,
sousleregardplusrassuréd’Ethanqui
finalements’amusadetoutça.Elle
découpalegâteaud’ungestesec,précis,
puisenposaunepartdansl’assietteet
luijetaletoutsoussonnezsans
ménagement.
—Voilà!Monsieurestservi!
Mauvaisappétit!
Kayacontournaunenouvellefois
Ethanpourquitterlacuisine,maiscelui-
ciluiattrapaunenouvellefoislebras.
—Goûte-leavant!Onnesait
jamais!
Kayaouvritgrandlabouchede
stupéfaction.
—Tuinsinuesquoilà?Queje
pourraist’empoisonner?
Ethanluimontraduregardl’assiette,
telunordre.Kayagrommelaetfinitpar
enporterunmorceauàsabouche,
qu’ellemâchamécaniquement,sans
mêmeluisignifierparunsourireson
goût.Elleavalaletoutetluifitunsigne
detêteluidisantun«satisfait?»,puis
croisalesbras.Ethansourit.Ilse
retenaitmêmederire.Illuiouvritgrand
saboucheetluifitun«aaaah»plein
d’attente.Kayaseliquéfia.
—T’espassérieux?Jenevais
quandmêmepastedonnerlabecquée!
Ethaninsistaens’approchantunpeu
plusd’elleetouvrantunenouvellefois
sabouche,sesyeuxpleinsdemalice.
Kayadécroisasesbrasets’esclaffaune
nouvellefoisdedépit.Elleattrapala
fourchetteetencoupaunmorceau.Ethan
attrapaalorssoudainementlafourchette,
sousleregardinterrogateurdeKaya.
—Fais-leavectesdoigts!luidit-il
encoreplusamusé.
—Ethaaann!!!s’offusqua-t-elle.
Ethansemitàrire,maisluiouvrit
unenouvellefoissabouche.Kaya
s’étonnadesadentitionparfaiteau
passage.
Évidemment,pasunecariepour
cornersaparfaitegueuled’ange
démoniaque!
Elleattrapaunmorceaudegâteauet
leportafinalementàsabouche.Ethan
s’ensaisit,amusé,etlegoûta.Ilmâcha
lentement,toutenlafixantavec
jubilation.Sonvisageenchantéfit
décrocherunsourirecontretouteattente
àKayaquineputs’empêcherdetrouver
cettesituationridicule.Ethanouvrità
nouveaugrandsabouche,videdetoute
nourritureetànouveauquémandeuse.
Ellesoupira,nevoulantêtreson
esclave.
—Encore!luidit-il,telleune
évidence.
—Dois-jeendéduirequec’est
bon?
—Ilfautquejegoûteànouveau
pourpouvoirémettreunjugement.
Kayaattrapaunnouveaumorceau,
peuconvaincueparsesargumentsetle
portaàsabouche.Ethanlecroquaen
plusieursfois.Lemorceauétaitplus
grosetKayapassasamainsoussa
bouchepourrécupérerlesmiettes.Elle
semitàrirequandellevitlesjouesde
hamsterd’Ethan.Elleretirasamain
pleinedesucreglace,maisEthanattrapa
sonpoignetsubitement.Ilmâchacomme
ilputsonmorceau,puisl’avala.
—Onnegâchepas,mademoiselle
Lévy!
Illaregardaalorsavecunregard
pleindedéfietportasamainàsa
bouche.Ilcommençaàlécherlesdoigts
pleinsdesucreglacé,sousleregard
médusédeKayaquisesentitrougir
outrageusement.Elletentadeluifaire
lâcherprise,maiscefutpeineperdue;
Ethannecomptaitpasabandonnerses
doigtspourautant.Sonregarddevenait
deplusenplussérieux,deplusenplus
insistant.
Comme
s’il
voulait
la
transpercerettouchercequ’ilyavaitde
plussensibleenelle.Salanguecaressait
sesdoigtslentement,délicatement.
Chaque
nouvelle
attaque
était
accompagnéed’uncoupd’œilsurles
réactionsqu’ilprovoquaitenelle.Elle
pouvaitvoirqu’ils’enamusait,mais
aussiqu’ils’endélectaitvraiment.Il
fermaalorslesyeuxquandsonindexet
sonmajeurentrèrentdanssabouche.Un
gestetellementindécentqu’ellesentit
toutsoncorpsvrillersousl’humiditéde
sasalivesursesdoigts.Soncœurne
cessaitdebattredanssapoitrine.Ellese
sentaithypnotiséeparchacundeses
mouvementssursesdoigtsquitrouvaient
unéchosursonbas-ventre.Quandil
rouvritlesyeux,sesdeuxprunelles
chocolatintenselafixèrentavecdésir.
Ellesesentitminusculetoutàcoup,
devantsonemprise.Siridiculedevant
soncharisme.Complètementhappéepar
sonregardbrûlant.Illuisouritune
nouvellefoisaveccettepointede
provocationquiluiétaitsitypique.Il
allaitencorefairequelquechosequi
allaitl’agacer;ellelesavait.
Kayaouvritlégèrementsabouche
quandilretirasesdoigts.Elleinspira,
l’airbloquédanssapoitrineparsa
déception,àl’idéequecettesensationsi
puissantedevouloirqu’ilcontinuene
trouvepasd’écho.
Alors,voilàoùilvoulaitenvenir.
Mefaireregretterqueçanedurepas…
Connard!Ilm’énerve!Etmoiqui
espère
qu’il
continue
?
Mais
effectivement,çanevapas!Fautque
t’arrêtes,mapauvre!
Ethanpassaalorssoudainementson
brasautourdesatailleetlaramenad’un
gesteseccontrelui,avantdesesaisirde
sanuquedesonautremainpourposer
seslèvressurlessiennes.D’abord
surprise,Kayaposasesmainssurses
épaulespourtenterdeletenirà
distance.Tentativevaine,illaserrait
tropfermementcontreluipourqu’elle
puisseluiéchapper.Illuicaressaalors
leslèvresaveclessiennes,toutenne
cessantdelafixer.Sonregardétait
direct,franc,sansdétour,maissurtout
teintéd’uneassurancequipouvaitfaire
flanchern’importequellefemme.Il
attrapasalèvreinférieureetlatiravers
lui,puisfonçaànouveausurseslèvres
pourunbaiserappuyé.Kayanetrouva
mêmepluslaforcederésister,tentant
tant
bien
que
mal
de
ne
pas
complètementsuccomberàtousses
assautschargésuncoupdedouceurpuis
deférocité.Soncœurs’affolait,mais
finalement,elleselanguissaitdecette
suite.Ethanapprivoisaitseslèvresavec
dextérité,ponctuantchaquetentativepar
descaressesduboutdesonnezcontrele
sienoupardesregardsquisefaisaient
deplusenpluspressants,commesisa
viesejouaitsurcesbaisers.Lachaleur
desonétreinteetsonemportement
eurentraisondubonsensdecelle-ciet
ellenerésistapaslongtemps.Lalangue
d’Ethantrouvavitelasienne.Ilsoupira
alorsd’aise,ravidepouvoirla
retrouver,soulagéd’enfinpouvoirla
sentircontreseslèvres.Comme
lorsqu’ils
se
retrouvèrent
dans
l’ascenseur,trèsvite,leplaisirles
gagna.Leursyeuxsefermèrentpour
mieuxsavourercettedansedanslaquelle
Kayaselaissaitporter.Ethann’hésita
pascettefois-ciàfairedespausespour
apprécierdavantagechaquenouveau
baiser.Ilvoulaits’enimprégnerencore
etencore.Pouvoirencernerleur
douceur,leurtendresse.Sentirsoncœur
battredefaçonincontrôlableaupointde
seposerlaquestiond’uneéventuelle
explosiondanssapoitrinesicesfoutus
battementsnecessaientpas,desesentir
morts’ilquittaitleslèvresdeKaya.
Quantàcettedernière,elleprenaitde
pleinfouetlafougued’Ethan,insatiable.
Priseaupiège,maisaussiheureuse
bizarrementd’êtreàsamerci.Illui
faisaitdubien.Elleserendaitcompte
qu’elle
commençait
à
apprécier
vraimentsaprésencecontreelle.Illui
attrapalalanguepourlamordre
légèrementdansunsouriretaquin,puis
lalâchaànouveaupourpresseraussi
viteseslèvrescontrelessiennes.Kaya
s’étonnaqu’ilprennedetellesaises
avecelleets’enamusalégèrement.Un
sourirequicombladejoieEthanquine
seprivapasdecontinuerdejoueravec
elle,entrepetitespousséesduboutde
sonnezcontrelesienoucontreses
lèvres,ouparunesuccessiondepetits
baisersappuyés.
—Ethan…murmura-t-elledèsqu’il
luienlaissalapossibilité.
—Hummm…
—Tun’asaucuneraisonde
m’embrasser…arriva-t-elleàprononcer
alorsqu’ilécrasaitunenouvellefoisses
lèvrescontrelessiennes.
—Ah?prononça-t-ilrapidement
avantdeplongerunenouvellefoissa
languedanssabouchepourrenforcer
sonemprisesurelle.
Kayaposasesmainssursesépaules
etserralesvêtementsdesonfauxpetit
ami.Elledevaitreprendrelesrênesen
main,avantquecelafinissedefaçon
tropimpudique.Ethansedétachaà
nouveau
d’elle
pour
les
laisser
reprendreleursouffle,bienquecelane
l’empêchâtpasdel’arroserdepetits
baiserssursesjoues,sesyeux.Kaya
sentitunpincementluisaisirlecœur.Si
tendre,sivolontaire,siadorable,mais
si…interdit.
—Iln’yapasRicharddansla
pièce,tun’asaucuneraisonde
m’embrasser!luidit-elledansunseul
souffle.Tudéviesducontrat!
Ethans’arrêtaaussitôt,etsondason
regardqu’ilvitplusferme,moins
asserviqu’ilyavaitquelquessecondes.
—Vraiment?luidemanda-t-il,
surpris.
—Lesobjectifs,Ethan!Uncontrat
estuncontrat.Tunedoism’embrasser
pourjustifierquejesuistapetiteamie
quedevantdespersonnespouvanten
douter.Ici,iln’yapersonne.
Le
visage
d’Ethan
se
ferma
instantanément.Kayaremettaitcette
distanceentreeuxvolontairement.S’il
avaitpuêtreheureuxd’avoirsignéce
contrat
avec
elle
dans
certaines
occasions,encetinstantilsouhaitaitle
déchirersoussesyeux.Toutn’était
qu’uncontrat.Unaccordservantses
foutusobjectifs.Objectifssichersàses
yeux,siimportantspourseconstruire,
qu’ellevenaitdeluirenvoyerenpleine
figureavecaplomb.Pourlapremière
fois,ildétestaavoirdesobjectifs.Il
détestacecontrat.IldétestaLaurenset
toutcecinémaautour.
—Etalors?Jefaiscequejeveux.
Jesuischezmoi!
Laréponsefutferme,cinglante,
commesidevantleroi,ilnefallaitque
s’inclineretnesurtoutpasrétorquer.Il
sedétachaaussitôtd’elleettournales
talons.
—Jevoulaisjustevérifiersiton
gâteauétaitaussiboncheztoiquechez
moi.
Ilsefrottalatête,nonchalamment.
—Mouais…passitopqueça.
Kayafitdesyeuxronds.Ilse
moquaitd’elle.Iltournaitcequivenait
desepassertelunfaitanodin,sans
grande
importance,
sans
teneur.
MonsieurleGénéralquis’amusaitavec
sonpetitsoldat.Riendebienfaramineux
encebasmonde.Elleserralespoings.
Monsieurestblessédanssafierté
etiljouelemecdétaché?Connard!
Connard!Connard!
—Jenesuispasunjouetquetu
peuxutilisercommebontesemble!
Iltournalégèrementlatêteverselle,
levisageneutre.
—Vraiment?Ilsembleraitquejene
puisseréussiràtenirjusqu’àdemain
pourterappelercertaineschoses!
Ilquittaalorslecomptoirdela
cuisinepourallerdanslesalon.
Faites-luiungâteauetilvousle
rendra!
TelleétaitlaleçonqueKayapouvait
retenirdelapartd’Ethanoucomment
faired’unmomenttendreunvéritable
cauchemar.Enmêmetemps,elleaurait
pusedouterqu’aveclui,rienn’était
rose.Lesbisounoursn’existaientpas
chezlui.Ilavaitledondebalayerles
détailsennuyeuxouagaçantsdevantsa
ported’uncoupdepied.
Etregardez-le-moientraindese
tenirdroit,telunmurinfranchissable!
Tuvasvoircequejevaisenfairedece
mur,moi!
Kayaseprécipitaalorssurluietlui
sautasurledos.Ethanlavitdébouler
surlui,maisneputréagiràtemps.
Lavoilàdenouveausurmondos!
Çafaisaitlongtemps!
Kayaserrasesbrasaussifort
qu’elleputautourdesoncou,
encouragéeparlacolèrequ’ilavaitune
nouvellefoisfaitnaîtreenelle.
—Qu’est-cequetufous?!Çaneva
paslatête!luicria-t-iltoutententantde
sedéfairedesesbrasencombrants.
—Jenesuispasunjouet!
—Etc’estuneraisonpourmesauter
dessus!
—Excuse-toi!
—Quoi?!
—Excuse-toi!
Ethansemitàsourire,tandisqu’elle
exerçaitunepressionplusforteavecson
bras
pour
l’étrangler.
Bientôt
il
s’étouffa,
sentant
qu’elle
broyait
vraimentsagorgesansménagement.Il
regardarapidementlecanapéetattrapa
desesdeuxmainslesdeuxjambesde
Kaya,accrochéesàsataille,puisfonça
surlesofa.Kayapoussauncriapeuré
quandilsautadessusetl’écrasadetout
sonpoids.Ellerelâchainstantanémentla
pressionalorsqu’ilreprenaitson
souffle.Ilsetournasurelleetluiattrapa
brusquementsespoignetspourles
coincerau-dessusdesatête.
—Quejem’excuse?C’esttoiqui
viensdem’agresseretquidevrais
t’excuser!
—Quoi?!Tuplaisantes!Mes
lèvresnesontpasunterraindejeu.Ce
n’estpasparcequ’onestcheztoique
toutt’estpermis!
—Teslèvresentoutcasétaient
plutôt
heureuses
de
trouver
les
miennes…sansparlerdecettepetite
langueindécentequis’enroulaitdansla
mienne…
—Indécente?Indécente!Pasdu
tout!s’offusqualajeunefemme.
Ethansemitàlouchersurleslèvres
deKayaengémissantàl’idéedene
pouvoirlesretrouver.Ellesétaientle
piresupplicequ’ilaitpuvivrejusque-
là.Kayasemitàrougir.Ellepaniquait
devantcettevéritéquilamettaitmalà
l’aise.Lanouvelleproximitédeleurs
corps,allongéssurlecanapé,la
déstabilisaitetleregardqu’ilposaitsur
seslèvresnelarassuraitpas.
—Kaya…luisouffla-t-ilalors.Tu
doistefairepardonner…Méchante
princesse.Commentpeux-tumefairesi
mal?
Simal?Commesijel’avaisouvert
aucouteau!Ilexagèrelà!
Leregardd’Ethansefitplus
suppliant,plustendre.Sesprunelles
chocolatreflétaientuneattentequise
répercutaitsurletondesademande,si
pressant.Uneimpatiencequ’ilneput
contenirlongtemps.
—S’ilteplaît,Kaya…Console-
moi.
Ilécrasaseslèvresunenouvellefois
surlessiennes.Ellesétaientunappelà
ladérive,unpêchéqu’ilnepouvait
vaincre.LapoitrinedeKayasegonfla
depanique,maisaussidedésir.Elle
avaitenviederépondreàcettedemande,
maisnepouvaitselepermettre.Ellene
pouvaitquesubir,faisantabstractionde
sondésir.ElledevaitpenseràAdamet
riend’autre.
—Onpeutgardernotrecontrat…
continua-t-il
tout
en
l’embrassant
légèrementencoreetencore.Pasde
sentiments.Pasdepromesses.Mais
juste…uneoptionàrajouteràcela.
Kayafermalesyeux,redoutantsa
proposition,tandisqueseslèvres
migraientverssoncou.Chaqueassaut
mettaitàmalsesrésolutionsvis-à-vis
d’Adam.Chaquegested’Ethanlui
rappelaitcequ’elleavaitvéculaveille
avecluietcequipourraitadvenirsielle
selaissaitallerentièrementcontrelui.
—Consolons-nousmutuellement,
Kaya.
Prochainement
«Consolons-nousmutuellement,
Kaya.»
Tellefutlapropositiond’Ethanpour
le
moins
aussi
surprenante
qu’inconcevable.Pourtant,Kayan’y
restaitpasindifférente.Lacohabitation
aveclui,bienquemouvementéeet
détestableparmoments,pouvaitparfois
s’avérerréconfortante,etc’étaitbienlà
sonplusgrandsouci!Ilétaithorsde
questiondeselaisserséduireparles
manigancesd’unconnard!
Maistoutescesconsidérations
n’avaientquepeud’importance…Le
grandgalaannonçantlasortiedela
gammedemaquillage«Magnificence»
arrivaitàgrandspasetilétaittempsde
mettrelespetitsplatsdanslesgrands
poursignerlecontratavecRichard
Laurens!
Postface
Etdedeux!
Oui,jesais…Cen’estpastroptôt!
Ilaétélongàvenir.Commecertainsle
saventviamapageFacebook,Twitterou
monsiteweb,l’écrituredutome2apris
dutempsetpourcause:ilfaisaitàla
baseledoubledutome1entermede
pages.Cetome2adoncétéscindéen
deuxetvousavezlapremièrepartie
danslesmains.L’autremoitiéserale
tome3etarriveradoncnormalement
plusvitequecelui-cidansvos
bibliothèques.
Cette
coupure
me
permettraaussidegagnerdutempspour
écrireletome4.
Cettelonguepériodededisettepour
vousaétéaussiuneincroyablepériode
pourmoi.Jetenaisd’abordàvous
remercierd’avoirétésinombreuxàlire
cepremiertome.J’aiétéheureusede
voirqu’ilaplumajoritairement.Pourun
premierlivre,iln’yariendeplus
gratifiant.Aussi,j’aiévidemmentune
pressionénormesurlesépaulespource
tome2.Vousa-t-ilplu?Vousa-t-il
déçu?L’avez-vousdévoréoun’avez-
vouspaspulefinir?L’auteurades
choixàfairedanssonhistoirequi
plaisentounon.Iln’yapaspire
interrogationquedesedemandersinous
avonsfaitlebonchoix,nousles
fabricantsd’histoires.Enmêmetemps,
jenepensepasquevousauriezce
secondtomesouslesyeuxsijen’en
étaispassatisfaite.J’aifaitdeschoix
risqués,maisdeschoixquipermettent
aussi
de
développer
une
vraie
psychologieautourdespersonnages.
Celapeutdéplaireàcertains,en
offusquersansdoute.Malgrétout,jene
voulaispasdehérosfades,sans
profondeur.Jelesvoulaisuniques,etce,
mêmeavecleurstraversetlejuste
acceptable.
Parfois,onfaitdeschoixbizarres,
onréagitdefaçondisproportionnéeou
complètementàcôtédecequ’auraitfait
laplupartdesgens.Ons’interroge,onse
surprenddenosréactionssurl’instant.
J’aimetravaillercesfailles,cette
complexité,j’aimevoirlespersonnages
sefairedesnœudsaucerveaulàoùtout
pourraitêtresisimple.J’aimelesdoter
d’uncomportementtantôtagaçant,tantôt
attachant.Lesgensnesontpasparfaits.
Ilsonttousleursdéfauts,leurs
caractères,leurshumeurs.Cettehistoire
estteintéedetouscesétatsd’âme,dece
qu’ilsauraientpufaireetn’ontpasfait,
decequ’onauraitfaitàleurplaceet
pourtant…
Cetome2rentreunpeuplusdansla
relationentreKayaetEthan.Cen’est
queledébutd’unerelationcomplexe,
maisonsentbienquel’attiranceentre
euxestlà,leurbesoindeconnaitre
l’autreestunmoteurpoursoulagerleurs
questionnements.Onapprendàconnaitre
Ethanetsonmonde.Onperçoitaussila
détressedeKaya,soninnocence,mais
aussisonauthenticité.
Authenticité.Voilàunmotbien
bizarrequandonparledelittérature,
d’histoire.Onl’associesouventàla
vraisemblance.
Parmi
les
retours
négatifsquej’aieus,onm’areprochéce
problèmedevraisemblance.Tropde
querellestuentlaquerelle,tropde
situationsincongruestuentlacohérence,
etc.D’autresm’ontremerciéd’avoir
posélasituationàParisparchauvinisme
ouparcequeçafaitdubiend’êtreancré
dansunlieuconnu,réel.Quedire,sice
n’estquecesontdeschosesquime
passent
complètement
au-dessus
!
Désolée,jesuiscomplètementhorsde
cesconsidérations.
Quiaditquelaromancedevait
s’ancrerdanslaréalité?Jen’ai
franchementpaspenséàcela.Cela
auraitpuêtreSingapour,Denver,
Bisounoursland!Quiaditqu’une
histoired’amournepouvaitexistersans
situationsimprobables?Pourquoivos
hérosnepourraient-ilssequereller
autant?Quelleloirégitcela?Nevous
est-iljamaisarrivéderencontrer
quelqu’unquevousnepouvezmêmepas
voirenpeinture?Non?Pourtant,je
vousassurequec’estpossible!
Jusqu’oùiriez-vouspourfairetaire
votrepireennemi?C’estbienlà,le
propredutome1.
Pourmoi,laromance,c’estdurêve.
Laromance,c’estmêmedufantasme.
Certes,voirsonhéroïnesefaire
enfermerdansuncoffredevoituren’a
riendetrèsromantique.Çanefaitpas
forcémentrêver.Pourtant,jepenseque
c’estcegenredesituationtellement
choquante,incongrueouimpensablequi
faitcettedifférenceentrelaromancede
noslivresetlaréalité.Laréalitéest
assezlinéaire.Pournepasdiremorne.
Métro,boulot,dodo,commeondit.Les
grandesromancesdanslaréalitésont
finalementpeuconnuesetonnepeut
diresisaproprehistoired’amourferait
rêvertoutlemonde.L’avantaged’écrire
delaromance,c’estjustementquel’on
peutdirequetoutestpermis.Onsortdu
carcantantconventionneld’unehistoire
d’amourclassiquepourenfairequelque
chosed’incroyable.Onpeutdevenir
excessif.Onpeuts’inspirerdelaréalité,
maisonpeutaussirêverd’unehistoire
impossibleavecunprinced’unpays
n’existantpasdansleglobe,ayantdes
pouvoirs,volantsurundragon.Pourquoi
chercherdeshistoiresinreallifealors
qu’onnousamunisd’uncerveaupour
rêveretinventertantdebelleschoses?
Jenesouhaitepasêtreenfermée
dansunstylederomance.D’ailleurs,Je
teveux!estàlafoisunecomédie,dela
romancecontemporaineetdelaromance
érotique.Cettesagatoucheplusieurs
genresderomancevolontairement.
Pourquoisecantonneràunstylealors
quelemélangedeplusieurspeutdevenir
sympa?Enfait,siondoitmemettre
dansunecase,jepensequej’aimerais
qu’onmemettedanslacasedugenre
«romanceJordaneCassidy».Jeveux
justecréermonpropregenrede
romance,
loin
de
toutes
ces
considérationssurcequ’estlaromance.
Est-cedelaprétention?Pourquoifaut-il
enmêmetempsconstammentêtre
comparéauxautres?Tantqu’onsefait
plaisiretqu’onrêve…Peuimportela
manière…Jeveuxvoyager.Jeneveux
pasmepriver.Jeneveuxpasentrer
dansunmoule,unemode,unprofil.
J’écrisjustedesromancesàmafaçon.
Bienvenuedansmonmondebizarre,
bienvenueàtousdansmaromance.
JordaneCassidy
L’auteure
Deformationlittéraire,c’esten
écrivantdesfanfictionspourunmanga
queJordaneCassidys’estessayéeà
l’écriture.Avoiruncadredéjàdéfinilui
permetalorsdeprendreconfianceet
d’acquérirl’engouementdelecteurs
saluantsonstyle:entrefamilieret
soutenu,mélangeanthumour,amouret
action.
Aprèsunepausedequelquesannées,
ellerevientsursonclaviermaiscette
fois-cipourécrireunehistoiresortant
entièrementdesonimagination.Une
comédie
romantique
érotique
initialementprévueen4tomes…
Retrouvez-laaussiici:
Sonsite:www.jordanecassidy.fr
Facebook:
https://www.facebook.com/JordaneCassidyAuteurTwitter:
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