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1 UNIVERSITE DE RENNES I UFR des Sciences Médicales Année 2008-2010 MEMOIRE Pour le Diplôme Inter-Universitaire de Soins Palliatifs et d’Accompagnement Par Brigitte HOUEDE Née le 17 03 1964 à Vannes Présenté et soutenu le 10 juin 2010 Soignants en EHPAD : quelles difficultés dans l’accompagnement en fin de vie? Guideur de mémoire : PIERRE-BONVALLET M.

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1

UNIVERSITE DE RENNES I

UFR des Sciences Médicales

Année 2008-2010

MEMOIRE

Pour le Diplôme Inter-Universitaire de Soins Palliatifs et d’Accompagnement

Par

Brigitte HOUEDE

Née le 17 03 1964 à Vannes

Présenté et soutenu le 10 juin 2010

Soignants en EHPAD :

quelles difficultés dans

l’accompagnement en fin de vie?

Guideur de mémoire : PIERRE-BONVALLET M.

2

Remerciements

Je tiens à remercier tout particulièrement :

Les soignants qui ont participé à cette recherche.

Monsieur Pierre-Bonvallet pour son soutien,

Mes collègues du Réseau Palliatif Centre Bretagne

pour leurs réflexions, leur écoute, leur disponibilité sans faille,

Ma famille pour leur patience,

Et à tous les autres …

3

Que vois-tu, toi qui me soignes, quand tu me regardes, que penses-tu ?

Une vieille femme grincheuse, un peu folle,

Le regard perdu, qui bave quand elle mange et ne répond jamais

Quand tu dis d'une voix forte "essayez" et qui

Semble ne prêter aucune attention à ce qu'elle fait...

Qui docile ou non, te laisse faire à ta guise,

Le bain et les repas pour occuper la longue journée.

C'est ça que tu penses, c'est ça que tu vois ?

Alors ouvre les yeux, ce n'est pas moi.

Je vais te dire qui je suis, assise là, tranquille,

Me déplaçant à ton ordre, mangeant quand tu veux...

Je suis la dernière des dix, avec un père, une mère;

Des frères, des sœurs qui s'aiment entre eux...

Une jeune fille de seize ans, des ailes aux pieds,

Rêvant que bientôt elle rencontrera un fiancé...

Déjà vingt ans, mon cœur bondit de joie

Au souvenir des vœux que j'ai fait ce jour-là.

J'ai vingt-cinq ans maintenant et un enfant à moi,

Qui a besoin de moi, pour lui construire une maison...

Une femme de trente ans, mon enfant grandit vite;

Nous sommes liés l'un à l'autre par des liens qui dureront...

Quarante ans, bientôt il ne sera plus là,

Mais mon homme est à mes cotés et veille sur moi.

Cinquante ans, à nouveau jouent autour de moi des bébés.

Nous revoilà avec des enfants, moi et mon bien-aimé.

Voici les jours noirs, mon mari meurt.

Je regarde vers le futur en frémissant de peur

Car mes enfants sont très occupés pour élever les leurs

Et je pense aux années et à l'amour que j'ai connus.

Je suis vieille maintenant et la vie est cruelle et

Elle s'amuse à faire passer la vieille pour folle.

Mon corps s'en va.

Grâce et forme m'abandonnent.

Et il y a une pierre là où jadis il y avait un cœur.

Mais dans cette vieille carcasse, la jeune fille demeure.

Le vieux cœur se gonfle sans relâche.

Je me souviens des joies et des peines.

Et à nouveau je revis ma vie et j’aime.

Je repense aux années trop courtes et trop vite passées

Et accepte cette réalité implacable.

Alors, ouvre les yeux, toi qui me regarde et qui me soigne.

Ce n'est pas la vieille femme grincheuse que tu vois...

Regarde mieux et tu verras...

Texte écrit par une vieille dame terminant sa vie en "gériatrie".

Les soignants ont retrouvé cette lettre sous son oreiller après son décès...

SOMMAIRE

4

1 – Introduction…………………………………………………………………...……….p. 1

2 - Les Concepts…………………………………………………………………......……..p. 9

2-1 Les définitions………………………………………………………………….........p.9

2-1-1 Qu'est ce qu'une EHPAD ?.............................................................................p. 9

2-1-2 Qu'est-ce qu'un réseau de soins palliatifs ?..................................................p.10

2-1-3 Qu'est-ce que l'accompagnement de fin de vie ?.........................................p.11

2-2 Le cadre législatif et les recommandations………………………….………..…...p.12

2-3 Les soignants………………………..………………………………………………p.14

2-4 Les représentations…………………...……………………………………………p.17

3 – La méthodologie………………………………………………………………………p.21

3-1 Le choix des lieux…………………………………….……………………………p.21

3-2 La population ciblée………………………………………………….……………p.22

3-3 La moyenne d’âge…………………………………………………………………p.23

3-4 Les conditions d’entretien…………………………………………………………p.23

3-5 Les limites de la méthode……………………………………………………….…p.23

3-6 La présentation des données…………………………………………………….…p.26

3-6-1 La fin de vie des personnes âgées……………………………..……………p.26

3-6-2 La place de la parole………………………………………………………...p.27

3-6-3 La formation………………………………………….…..…………………p.28

5

4 – La discussion……………………………………………………..……………………p.31

4-1 Les motivations…………………………………………………………………..…p.31

4-2 La fin de vie…………………………………………………………………………p.32

4-3 L’accompagnement de fin de vie………………..…………………………………p.33

4-4 La place à la parole…………………………………………………………………p.37

4-5 La formation………………………………………………………………………..p.41

4-6 La synthèse………………………………………………………………….………p.44

5 – Les propositions………………………………………………………….……………p.47

6 - Conclusion……….…………………………………………………………………….p.51

Bibliographie………………………………………………………………………………P.54

6

INTRODUCTION

7

1 - Introduction

Actuellement, mon temps de travail d'infirmière se répartit en deux mi-temps : l’un au

sein d'un réseau palliatif en tant qu’infirmière coordinatrice et l’autre dans un service de

médecine comportant six lits identifiés de soins palliatifs.

Pour ce travail de mémoire, j'ai choisi de rester dans le champ de mon activité au

réseau de soins palliatifs. Le fait d'y travailler en tant qu’infirmière coordinatrice me permet

d’explorer un autre secteur que l’hôpital. Il m’amène aussi à côtoyer l'univers du domicile

ainsi que celui des structures d’hébergement de personnes âgées. C’est d’ailleurs, dans ce

cadre EHPAD (Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes), que j’ai

choisi de cibler mon lieu de recherche. Ce secteur apparaissait également pertinent puisqu’il

me permettait de conjuguer un lieu et les situations de fin de vie.

J'ai également fait le choix de m'intéresser à ce secteur d’une part parce que j'y

rencontre des soignants en demande de partenariat, de collaboration et d’autre part parce qu’il

leur est souvent difficile d'accompagner leurs résidents en fin de vie. A ce propos, ils disent

fréquemment « ne pas être à la hauteur, se sentir impuissants face à la souffrance, face à la

pression des familles qui ne sont pas prêtes à se séparer de leurs proches ». Ces paroles

orienteront en partie mon mémoire.

Au réseau de soins palliatifs, nous sommes contactés pour diverses demandes. Elles

concernent par exemple l’aide à la décision éthique sur les thèmes de l'alimentation, du

renoncement thérapeutique, ou encore la demande d'aide à la prise en charge de la douleur.

Le réseau palliatif est aussi amené à rencontrer les équipes soignantes pour des groupes de

parole ou des formations. Toutes ces rencontres et ces échanges m'ont permis de réaliser que

les soignants travaillant en EHPAD, qui font parfois un long chemin avec leurs résidents, sont

éprouvés par l'accompagnement de fin de vie. Pourtant, on meurt beaucoup dans les EHPAD.

Alors se pose la question suivante : « y aurait-il des difficultés à accepter la mort ou

l’accompagnement de la fin de vie dans ces structures d’hébergement ? » ou « y aurait-il à

travailler sur ces points puisque faisant partie intégrante de leurs missions ? ». Je

m’interrogerais sur ces points dans mon écrit.

De plus, lors de mes interventions dans les EHPAD en tant qu’infirmière coordinatrice

8

du réseau palliatif, j'ai pu constater que chez les personnes âgées coexistent souvent plusieurs

pathologies associées à une perte d'autonomie, et à des troubles cognitifs. Dans ce contexte, il

n'est pas toujours facile de déterminer la pathologie terminale en cause ni le moment du

passage en soins palliatifs. C'est souvent d'ailleurs la multiplicité des maladies et leurs

complications qui orienteront vers la nécessité des soins palliatifs.

La prise en charge globale d’une personne en fin de vie est complexe. Aussi pour

argumenter ce constat, je vous invite à lire les situations suivantes, situations qui amèneront

l’émergence de ma problématique.

Lors de ces interventions en structures, plusieurs situations m'ont questionnée. Le

choix de certaines m’a permis quelques observations. En effet, elles m’ont notamment

amenées à noter le rôle difficile des soignants auprès de leurs aînés sur plusieurs aspects.

Le premier relevé concernerait la confrontation des soignants à une charge de travail

de plus en plus importante. Cette charge de travail toujours plus pesante, engendre parfois

chez les soignants « une mauvaise conscience », sentiment souvent associé à l’expression

« être de mauvais soignants ». Ces paroles apparaissent récurrentes dans les échanges.

La situation suivante fait apparaître une première difficulté d’ordre organisationnelle,

institutionnelle exacerbant le sentiment de « mauvais soignant » et complexifiant

l’accompagnement de fin de vie.

J'ai le souvenir de Mme G, résidente d'une EHPAD, hospitalisée au centre hospitalier

pour des douleurs. Cette dame savait qu'elle allait bientôt mourir. Elle avait émis son souhait

de décéder dans son lieu de vie, parmi les soignants qu'elle connaissait bien. Sa petite fille

adhérait d'ailleurs tout à fait au projet de sa grand-mère.

Mme G quitta l'hôpital avec un traitement à base de morphine sous cutanée comme

traitement antalgique. Malheureusement une fois arrivée sur son lieu de vie, elle est restée très

douloureuse et elle l'a exprimé. Le médecin traitant a aussitôt été contacté. Il s’est senti assez

désemparé par la prescription de morphine sous cutanée, sachant qu’il n'y a pas d'infirmière la

nuit pour assurer les injections quelque soit le traitement. Dans cette structure comme dans

beaucoup d'autres, c'est une aide soignante qui est présente la nuit.

9

L’inquiétude de l'équipe de jour sera d'anticiper au mieux la prise en charge de Mme G

et de faire en sorte que l'aide soignante présente cette nuit-là puisse gérer au mieux la

situation. Ce cas est assez courant. Aussi je peux me poser les questions suivantes : Quels

moyens auront-ils mis en œuvre pour que l’accompagnement de Mme G ne soit pas vécu

comme une souffrance pour l'aide soignante présente seule cette nuit-là ? Comment la rendre

plus sereine face à une mort annoncée ?

Il est assez fréquent que lors d’une situation apparaissant complexe, les équipes

n'estiment n'avoir d'autre choix que d'hospitaliser leurs personnes âgées. Elles pensent qu'elles

ne sauront pas ou n'auront pas les moyens de gérer ce genre de situation pouvant aller jusqu’à

la situation dite « de crise ».

La situation suivante, quant à elle, dévoile un autre aspect de l’accompagnement

aidant ou non.

J'ai en mémoire la situation de Mme B, une personne âgée de 101 ans résidente en

EHPAD depuis dix ans. Elle arrivait au terme de sa longue sa vie. Suite à un appel au réseau

de soins palliatifs, j'ai eu l’occasion de rencontrer une équipe soignante en difficulté. Nous

avions été contactés pour un problème de douleur. Mme B présentait une escarre sacrée

importante et les mobilisations lui étaient très pénibles. Une fois la douleur prise en charge et

améliorée, je sentais les soignants toujours « mal ». Cette observation ne concernait pas

seulement la douleur ou le gémissement qui perdurait mais amenait autre chose.

Mme B était très entourée par sa famille. Les soignants, très attachés à elle, lui

accordaient toute leur attention mais il persistait encore un mal-être palpable. Après avoir

questionné ce ressenti, il apparaissait qu’il leur était insupportable d'entendre les

gémissements de Mme B. Je me souviens aussi des transmissions écrites de l'aide soignante

de nuit. Elle vivait tellement mal ces gémissements qu'elle avait signalé minutes après

minutes toutes les fois où Mme B avait gémit. Cela représentait environ deux pages d'un

cahier et elle finissait sa nuit en notant : « Ce n'est pas possible qu'elle passe une autre nuit

comme cela». Cela sous-entendait pour l’aide soignante : « je ne pourrai pas supporter une

autre nuit comme celle là ». Certains membres de l'équipe pensaient d'ailleurs que sa place

n'était plus dans la résidence et qu'un service de soins palliatifs aurait été plus adapté.

10

Qu'est-ce qui, dans la fin de vie d'une personne âgée de 101 ans, pouvait générer

autant d'inconfort ? Qu'est-ce qu'un service de soins palliatifs aurait pu apporter de plus à la

fin de vie de Mme B ?

Le cas de M. A a été une autre expérience difficile pour l'équipe soignante qui le

prenait en charge. Il s'agit d'un monsieur atteint d'un cancer de l'estomac avec des métastases

au foie et aux poumons.

Quand nous le prenons en charge au réseau ce patient douloureux, réclame une piqûre

pour ne plus souffrir. Ce monsieur est au courant de sa maladie. Il a d'ailleurs organisé ses

obsèques auprès d'une société funéraire. Il est très entouré par deux cousins et une tante.

Ceux-ci seront très présents auprès de lui dans la structure.

Durant cette prise en charge, M. A réitèrera plusieurs fois sa demande d'une piqûre

pour en finir. Il refusera aussi sciemment de se nourrir et de boire pour « partir » plus vite.

Face à ces comportements et ces demandes, l'équipe soignante se dira en difficulté. Ils diront :

- se sentir impuissants

- se sentir inutiles

- ne pas se sentir soutenus

- ne pas lui accorder suffisamment de temps

- ne pas pouvoir l'aider

- se sentir happé par le patient et sa famille

Toutes les expériences rencontrées m’amènent à me poser certaines questions et

notamment celles qui concernent l’accompagnement en fin de vie au sein d'établissements

pour personnes âgées. Elles me font réaliser qu'en gériatrie, les soignants ressentent

l'insatisfaction de leur travail. Dans une société où la mort est reniée, ils sont de plus en plus

confrontés aux décès de leurs résidents et le seront probablement encore plus.

Les EHPAD sont très souvent le dernier lieu de vie des personnes âgées ; le

vieillissement, les démences, les longs mourir et la mort sont générateurs de malaises pour les

équipes. Elles doivent faire face au manque de temps, au manque de reconnaissance.

Comment les soignants peuvent-ils envisager un projet de vie face à une mort annoncée et

faire en sorte qu'ils se sentent en confiance pour accompagner leurs résidents jusqu'au bout ?

11

La formation inter universitaire nous donne la possibilité de réfléchir à un thème qui

nous tient à cœur. C'est pourquoi j'ai choisi de prendre du recul et de m'interroger sur :

Pourquoi les soignants des EHPAD rencontrent-t-ils des difficultés

dans l’accompagnement de fin de vie ?

Pour ce travail de mémoire, j'ai choisi de me centrer sur le personnel aide soignant et

les aides médico-psychologiques. Ce choix, je l'explique par le fait, qu'étant infirmière

coordinatrice d'un réseau de soins palliatifs, c'est le plus souvent ces catégories de

professionnels que j'ai été amené à rencontrer lors de nos interventions en EHPAD. Les aides

soignants et les aides médico-psychologiques sont aussi plus nombreux que les infirmiers

dans les établissements pour personnes âgées. En général, ce sont les infirmières qui

contactent le réseau mais quand nous venons dans la structure ce sont bien souvent les aides

soignants et les aides médico-psychologiques qui nous parlent des situations.

Si effectivement, les soignants sont souvent pris au dépourvu dans des situations

difficiles lors de leurs accompagnements de fin de vie, plusieurs hypothèses me paraissent

envisageables pour apporter un éclaircissement à cette problématique.

Les représentations individuelles concernant la fin de vie des personnes âgées

peuvent venir biaiser les relations entre elles et les soignants.

Les soignants ont besoin d'être reconnus dans le domaine professionnel.

Les formations centrées sur la gériatrie et l'accompagnement de fin de vie ne

sont pas suffisantes.

Dans un premier temps, j'aborderai le cadre conceptuel auquel se confronte mon

questionnement.

Le second temps sera consacré à la présentation de la méthodologie, les entretiens

ainsi qu'à l'analyse des données recueillies et leur interprétation.

Le troisième temps me permettra de confronter l'analyse des données aux hypothèses

posées.

Le quatrième temps sera le temps de l’élaboration des propositions.

12

Enfin, je conclurai ce travail en soumettant des perspectives et en envisageant une

projection dans la fonction d'infirmière coordinatrice au sein d'un réseau palliatif.

13

CADRE CONCEPTUEL

14

2 - Les Concepts

2-1 Les définitions

2-1-1 Qu'est-ce qu'une EHPAD ? (Etablissement d’Hébergement

pour Personnes Agées Dépendantes)

« Dans les années 60 pour répondre au problème d'habitat d'une population

âgée, des logements foyers ont vu le jour. Encore à ce jour, il existe une multitude de

structures d'accueil : MAPA, EHPA, DC, HG... ayant pour mission la prise en charge de la

personne âgée. Peu à peu la dépendance et l'aggravation inéluctable de pathologies souvent

multiples de la population concernée, obligent les pouvoirs publics à uniformiser, dans une

démarche d'amélioration continue de la prise en charge globale, l'accueil de la personne

dépendante. »1

C'est dans ce contexte que vont naître les EHPAD qui prendront en charge des

personnes âgées dépendantes c'est-à-dire ayant perdu leur autonomie physique et/ou

psychique. C'est ainsi que les établissements sociaux et médico-sociaux deviennent des

EHPAD. Ces établissements ont la double mission d'être un lieu de vie et un lieu de soins.

La démarche des pouvoirs publics se formalisera par la réforme de la tarification qui

consiste en la signature d'une convention tripartite. Cette convention est signée pour 5 ans

entre l'établissement, le président du conseil général et l'assurance maladie. La tarification

journalière applicable aux EHPAD se décline par l'hébergement, la dépendance et les soins.

« L'une des nouveautés de la réforme de la tarification des EHPAD est la place faite

aux psychologues en établissements...La présence d'un psychologue est donc pour la première

fois reconnue dans les maisons de retraite et ses domaines d'action définis : compétence vis à

vis des résidents, de leur famille, du personnel soignant »2.

1 RIGAUD (Agnès)-les structures d'hospitalisation à domicile... pour personnes âgées dépendantes -Mémoire

DIU Brest 2008 - page5

2 Site web -PSYCHOLOGUE EN EHPAD (pages consultées le 15 mars 2010)Maison de retraite/Guer, en

ligne -www.ehpad-guer.com/psycho.htm

15

Il me paraît important d'avoir une vision prospective de la démographie croissante des

personnes âgées. En effet le vieillissement attendu de la population en France doit amener

tous les acteurs à réfléchir à ce que nous souhaitons comme fin de vie pour nos aînés. Dans sa

thèse de médecine sur la fin de vie des personnes âgées en institution, Dr LACASSAGNE

nous dit : « Si nous faisons l'addition des diverses statistiques entre les prévisions

démographiques, le nombre des personnes âgées atteintes de pathologies dégénératives

neurologiques qui s'ajoute à la constellation générale gériatrique ainsi que les personnes

âgées ayant un cancer qui entrainera à lui seul leur mort, et si nous prenons en considération

les divers scénarios prospectifs annonçant l'augmentation de 35 à 80 % du nombre des

résidents en établissements pour personnes âgées, nous comprenons que l'accompagnement

de fin de vie de ces patients se posera réellement, d'une manière qui sera loin d'être

rhétorique. »3

2-1-2 Qu'est-ce qu'un réseau de soins palliatifs ?

Le réseau de soins palliatifs a pour objectif de mobiliser et mettre en lien les

ressources sanitaires et sociales sur un territoire donné autour des besoins de la personne.

Comme le stipule la circulaire du 19 décembre 2002 relative aux réseaux de santé : « Les

réseaux de santé ont pour objet de favoriser l'accès aux soins, la coordination, la continuité

ou l'interdisciplinarité des prises en charge sanitaires, notamment de celles spécifiques à

certaines populations, pathologies ou activités sanitaires.... »4

Sur le plan général, les réseaux de soins palliatifs favorisent d'une part le respect du

désir des patients en ce qui concerne son choix du lieu de vie et le choix du lieu de soin et,

d'autre part d'optimiser le fonctionnement du système de santé en développant des

complémentarités.

Plus concrètement, un réseau de soins palliatifs a pour objectifs

Accompagner le malade et ses proches (famille et équipe soignante à

domicile ou en structures)

3 LACASSAGNE (Catherine) - Les personnes âgées en institution-Thèse Médecin-2007 - page 11

4 Circulaire n° DHOS/03/DSS/CNAMTS/2002/610 du 19 décembre 2002 relative aux réseaux de santé

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Coordonner, accompagner le retour et / ou le maintien à domicile

Faciliter une hospitalisation et mieux la cibler

Proposer un soutien psychologique

Proposer un suivi de deuil

Former et conseiller les professionnels de santé selon leurs besoins

2-1-3 Qu'est-ce que l'accompagnement de fin de vie ?

« L'accompagnement est un processus dynamique qui engage différents partenaires

dans un projet cohérent au service de la personne, soucieux de son intimité et de ses valeurs

propres. Approche globale et pluridisciplinaire, l'accompagnement en institution ou à

domicile relève d'initiatives et de procédures adaptées aux attentes et besoins de la personne

ainsi que de ses proches. L'accompagnement en fin de vie ne se limite pas à l'approche

spécifique de la phase terminale dès lors qu'il concerne la continuité du cheminement de la

personne dans sa maladie... L'accompagnement est une démarche dynamique et participative.

Il justifie des dispositifs d'écoute, de concertation, d'analyse, de négociation qui favorisent

une évaluation constante et évolutive des options envisagées... La pertinence et l'efficacité

d'un accompagnement relèvent de l'élaboration d'un projet coordonné, explicite et transparent

qui intègre la multiplicité des facteurs spécifiques à chaque situation. »5

Cette définition tirée de textes et recommandation de l’HAS (Haute Autorité de Santé)

anciennement ANAES (Agence Nationale d'Accréditation et d'Evaluation en Santé) fixe les

missions attendues des soignants. Si leur compétence demeure incontournable ils devront très

souvent se situer dans une réflexion éthique et savoir conjuguer « savoir faire » et « savoir

être » lors de leur prise en charge.

L'accompagnement de fin de vie, que ce soit dans les EHPAD ou par le biais de

réseaux de soins palliatifs, doit se référer au cadre législatif.

5 LIVRET DOCUMENTAIRE DU COLLEGE DES HAUTES ETUDES EN MEDECINE GENERALES –

Aspect psychologique, philosophique et éthiques - Avril 2005 - page 9

17

2-2 Le cadre législatif et les recommandations

Il apparaît comme incontournable de s'appuyer sur le cadre législatif existant, pour

évoquer l'accompagnement de fin de vie en institution. Historiquement, la circulaire de 1986

dite « circulaire Laroque » sera le point de départ important en officialisant les soins palliatifs

en France. Puis, la réforme hospitalière de 1991 inscrit les soins palliatifs comme missions

des établissements de santé. Les soins palliatifs se situent alors au même plan que les soins

préventifs ou curatifs. La loi fondatrice de juin 1999 viendra ensuite préciser un cadre

beaucoup plus éclairant en garantissant l'accès aux soins palliatifs et en le présentant comme

un droit pour toutes personnes malades dont l'état le requiert. Afin de permettre une

organisation cohérente des soins palliatifs, il est possible de s'appuyer sur la circulaire du

19/12/2002, sans pour cela oublier le droit des malades cité dans la loi du 04/03/2002.

Depuis, la loi Léonetti du 22/04/05 a permis de clarifier les limites, les droits et les

décisions éthiques dans le cadre de la fin de vie. Cette loi permet aussi de réaffirmer le

caractère obligatoire de la réponse aux besoins en soins palliatifs pour les établissements de

santé étendus aux établissements médico-sociaux.

La circulaire du 29/05/2006 viendra ensuite donner les orientations et les axes de

formation prioritaire ; ayant pour finalité de préciser les orientations dans le domaine de la

formation continue. Dans l'annexe 1, spécifique à la prise en charge de la douleur chez la

personne âgée, sont précisés les objectifs de l'action :

« Améliorer la prise en charge de la douleur et des soins palliatifs chez les personnes

les plus vulnérables.

- Intégration de formations « douleur et personnes âgées » et « douleur et

personnes handicapées » dans le programme de l'association nationale de la formation

hospitalière (ANFH), à l'attention des professionnels paramédicaux.

- Formation aux aspects spécifiques des soins palliatifs aux personnes âgées.

- Améliorer les compétences des professionnels de santé dans la prise en

charge de la douleur des personnes âgées, des handicapés, notamment dans l'évaluation de

l'intensité de la douleur.

- Sensibiliser les professionnels à la démarche palliative en direction de ces

personnes dans les établissements de santé et en établissements pour personnes âgées

18

dépendantes (EHPAD). »6

L'HAS a aussi élaboré des recommandations de bonnes pratiques pour aider les

professionnels à promouvoir une démarche palliative. A la question : Où mettre en œuvre les

soins palliatifs ? Les recommandations précisent : « les soins palliatifs peuvent être mis en

œuvre à domicile, dans les unités de soins palliatifs, dans les établissements de santé en court,

moyen et long séjour, dans des structures destinées aux personnes âgées avec le soutien des

unités mobiles de soins palliatifs »7

Tous ces textes de référence sous tendent aussi le fonctionnement des réseaux de soins

palliatifs. La circulaire du 25 mars 2008 relative au référentiel national d'organisation des

réseaux de santé en soins palliatifs précise quant à elle dans les objectifs opérationnels : « Les

réseaux de soins palliatifs ont pour objectif principal de promouvoir et de développer la

démarche palliative, à travers des modalités de fonctionnement visant le décloisonnement du

système de santé, l'amélioration de la cohérence et de la continuité des soins en proposant de

nouvelles pratiques professionnelles et bénévoles sous tendues par l'interdisciplinarité. Pour

cela les réseaux de soins palliatifs apportent conseil, soutien, appui et formation aux

différents intervenants à domicile, en établissement de santé ou en structures médico-sociales.

Les réseaux diffusent également des informations, ils proposent des actions de formation

auprès des professionnels... ».8

Cet extrait de la circulaire me paraît important, puisqu'il permet de clarifier certains

points de collaboration avec le personnel soignant dans les EHPAD. Il me paraît primordial de

pouvoir faire circuler la parole au sein de ces structures, de réfléchir à ses pratiques pour

éviter de rentrer dans un travail routinier, source d'insatisfaction pour les soignants. Selon

Claudine BADEY-RODRIGUEZ : « la communication et l'animation pédagogique de

l'équipe soignante sont la clé de voûte du changement dans les établissements d'hébergement

pour personnes âgées. Afin d'éviter de tomber dans la stéréotypie des tâches dans la routine

et la banalité mortifère, des lieux de coordination, de réflexion, d'interrogation et

l'élaboration de réel projet de soins doivent exister. » 9

6 Circulaire DHOS/P2 n°2006-233 du 29 mai 2006 relative aux orientations et axes de formation prioritaires

7 HAS (ANAES) - Recommandation des bonnes pratiques - Décembre2002

8 Circulaire n° DHOS/02/03CNAMTS/2008/100 du 25 mars 2008 relative au référentiel national d'organisation

des réseaux de santé en soins palliatifs

9 BADEY RODRIGUEZ (Claudine) - Les personnes âgées en institution vie ou survie - édition Seli Arslam -

page 179

19

Cependant, entre ce que nous impose le cadre légal, les recommandations de l' HAS et

la possibilité de collaboration avec des référents en soins palliatifs, la prise en charge des

personnes âgées en fin de vie n'en reste pas moins souvent source d'inconfort. On ne guérit

pas du vieillissement. La confrontation à la déchéance physique, à la démence, à la mort

renvoie les soignants à la question du sens de la vie;

Afin de pouvoir continuer plus loin dans l'avancée de ce travail, je souhaiterais aborder

le concept du personnel soignant et la représentation que suscite auprès d'eux la personne

âgée.

2-3 Les soignants

Comme je l’ai signalé dans l’introduction, j'ai choisi de me centrer sur le personnel

aide soignant et les aides médico psychologiques. Je féminiserai ces deux catégories

professionnelles car je n’ai pas rencontré d’homme au cours de cette recherche.

Il est vrai que de part leur fonction, elles sont très présentes auprès de leurs résidents,

notamment lors des toilettes, des repas. Les aides soignantes ont un rôle essentiel de recueil

des informations qui contribuera à l'amélioration du confort de la personne âgée. C'est bien

souvent lors de ces moments privilégiés qu'elles vont, par exemple, pouvoir déceler la

douleur. Par leurs gestes apaisants, leur présence, elles ont un rôle important dans

l'accompagnement des résidents en fin de vie. Pour ce faire, elles doivent acquérir des

compétences à la fois dans le domaine de la gériatrie mais aussi dans le domaine des soins

palliatifs. La formation initiale et la formation continue devraient y répondre.

Guy LE BOTERF, docteur en sociologie, dit à ce propos : « La formation générale est

une composante essentielle de la formation professionnelle. C'est elle qui permet aux

compétences d'évoluer et de s'adapter aux changements et mutations des situations de

travail. »10

Si on se réfère à l'arrêté du 22 octobre 2005 relatif au diplôme professionnel de l'aide

soignant, on s'aperçoit que plusieurs modules abordent la personne âgée et l'accompagnement

en soins palliatifs.

- module 1 : Accompagnement dans les activités de la vie quotidienne

10 LE BOTERFF (Guy) - Développer la compétence des professionnels-édition d'organisation – page 87

20

- module 2 : Etat clinique d'une personne

- module 3 : Les soins

- module 5: La relation communication

- module 7 : Transmissions des informations

- module 8 : Organisation du travail

Le circulaire n° 96-31 du 19 janvier 1996 relative au rôle et aux missions des aides

soignantes relève quant à elle, l'importance de la dimension relationnelle: « L'activité de l'aide

soignant comporte une dimension relationnelle très importante, compte tenu notamment du

temps passé auprès de la personne soignée et de sa famille. Cette relation doit prendre en

considération les habitudes de vie du patient, ses valeurs et son environnement, tout en

respectant sa personnalité et sa dignité. Elle revêt une importance toute particulière

notamment lorsque celui-ci est un enfant, une personne handicapée, une personne atteinte

d'une maladie chronique évolutive, une personne âgée, une personne en fin de vie. »11

En ce qui concerne les aides médico psychologiques, leur formation initiale est

surtout axée sur la relation d'aide. Toutes les activités quotidiennes seront utilisées comme

support à la relation. Dans le référentiel de formation, on retrouve des contenus qui les

aideront à la prise en charge des résidents en EHPAD.

Dans le contenu : « connaissance de la personne », on retrouve notamment les

représentations de la vieillesse, les pathologies liées au vieillissement.

Dans le contenu : « accompagnement éducatif et aide individualisée dans les actes de

la vie quotidienne », on retrouve : les dimensions affectives, éducatives, sociales et culturelles

des situations d'accompagnement.

Dans le contenu : « animation de la vie sociale et relationnelle », on retrouve les

représentations psychosociales du handicap et du vieillissement.

L'aide soignante ou l'aide médico psychologique veille à satisfaire les besoins de la

personne âgée en préservant son autonomie restante. Elles s'attachent à satisfaire bien sûr les

soins dits « de base », mais il est important aussi pour les résidents d'avoir une estime positive

11 Circulaire DGS/853/DH/FH1 n°96-31 du 19 janvier 1996 relative au rôle et aux missions des aides soignants

21

de soi-même. Pour se faire, les soignants veilleront à favoriser la communication, les

rencontres, l'animation, la créativité. Les personnes âgées ont besoin d'exister, des soignants

dépend leur quotidien. L'être vieillissant ne doit pas être considéré comme un objet de soins

mais reconnu en tant que sujet. Concernant ce travail de tous les jours, Renée SEBAG-

LANOE nous dit « L'expérience est difficile mais passionnante. Certains jours, la tâche

paraît insurmontable. Mais de petites satisfactions humaines réalimentent heureusement le

courage quotidien. » 12

Louis PLONTON professeur en gérontologie, quant à lui, nous expose sa vision sur

les difficultés rencontrées par les équipes auprès des personnes âgées : « L'idéal soignant est

quelque chose d'exigeant et la pratique gériatrique va en permanence prendre à défaut

l'image exigeante de soignant idéal pour renvoyer à une image de mauvais soignant. En effet

qu'est-ce qui peut gratifier un soignant: répondre à une demande ? En gériatrie elle est

qualitativement et quantitativement telle que ce n'est jamais possible : guérir, faire sortir de

l'hôpital, empêcher de mourir, c'est pleinement envisageable en chirurgie ou en médecine

générale, mais en faire des objectifs en gériatrie c'est s'exposer à subir beaucoup de

désillusions... »13

Dans le même ordre d'idée, Nicole COYERE et Bertrand BERGIER évoquent dans un

article, après avoir immergés dans un service de gériatrie: « Certes le travail en gériatrie n'est

pas gratifiant comme dans un service où l'on guérit. Les actes sont parfois répétitifs et

pénibles. La confrontation à des souffrances psychiques est doublée par la vision d'une

déchéance physique, corporelle. La difficulté à accepter l'état de dépendance se manifeste

souvent par l'anxiété, un repli sur soi, voire de l'agressivité verbale ou non verbale.

Questionner le sens des soins en gériatrie, c'est aussi interroger le sens de la vie. Il s’agit

d'un point crucial, éminemment personnel. Pourtant, les soignants sont impliqués avec le

résident dans et par ce questionnement. »14

Les soignants quels qu'ils soient, exercent leur profession au regard de ce qu'ils ont

apprit, ont pu vivre, au regard aussi de ce qu'ils sont. Les représentations qu'ils ont pu se

construire ne seront pas étrangères à la manière dont ils vont exercer leur travail.

12 SEBAG-LANOE (Renée) - Mourir accompagné - édition Desclée de Brower - page 35

13 L. PLONTON - La Souffrance des soignants en gériatrie - La Revue de Gériatrie - Tome 6 n°3 1981-page117

14 CROYERE (Nicole) ET BERGIER (Bertrand) - Une expérience ...en établissement d'hébergement - La

Revue Perspective Soignante-n°28-Avril 2007 - Page 18

22

2-4 Les représentations

La représentation se définit par « l'image fournie à la conscience par les sens, la

mémoire. »15

Personnellement, je définirais la représentation comme l'idée que l'on se fait d'une

situation, par la pensée.

La réalité passe en effet par différents filtres et nous ne sommes jamais

complètement objectifs. La vision que peuvent avoir les soignants vis-à-vis des personnes

âgées est elle aussi biaisée par leurs propres représentations. Bien sûr, selon notre expérience,

nous n'aurons pas les mêmes visions du « grand âge » puisqu'elles se nourrissent de nos

valeurs, de nos croyances et de nos connaissances.

Il existe plusieurs manières de concevoir la vieillesse :

- On peut la voir comme une étape de la vie où la personne s'est enrichie de

multiples expériences lui permettant d'observer un certain recul sur les évènements. Elle

pourrait atteindre ainsi une certaine sérénité et la vieillesse pourrait alors représenter une

période d'accomplissement.

- On peut avoir aussi vis-à-vis du vieillissement la représentation du déclin par

l'affaiblissement du corps et de l'esprit. En effet, les médias dans leur ensemble nous exposent

l'importance du corps parfait et le culte de la jeunesse éclatante. La vieillesse nous est

présentée, sous les traits de l'harmonie, de l'équilibre ou de la sérénité. Comment dans ces

conditions, ne pas avoir une vision négative de ses corps vieillissants et altérés ?

- Toutes ses modifications de capacités physiques et psychiques vont peu à peu

s'aggraver. Elles vont ainsi déterminer le degré de dépendance de la personne âgée. Cette

dernière va devoir alors apprendre à être dépendante des autres. Cette perte d'activité va aussi

bien modifier, le rôle social et familial de la personne âgée. Elle pourra l'entraîner notamment

vers l'isolement. Ces modifications vont dans la plupart du temps évoluer vers l’entrée en

institution.

15 Dictionnaire HACHETTE - édition 2006

23

Lors du placement, il existe généralement un « choc » ressenti pouvant être associé à :

- une perte des repères

- vivre en collectivité

- la confrontation à tous les stades du vieillissement

Cette étape de la vieillesse en institution renvoie les soignants à leur propre finitude

mais aussi à celle de leurs proches. Combien de fois n'ai-je pas entendu des collègues

exprimer leur souhait de ne surtout pas finir leur vie dans une maison de retraite. En effet les

vieillards vivants en institution ne sont-ils pas d'une certaine façon déjà morts ? J'entends ici

par mort, plutôt la mort sociale pas encore biologique. L'anthropologue Louis VINCENT

THOMAS écrit à ce sujet : « Plus que n'importe lesquels d'entre les humains, les vieillards,

tout comme les condamnés qui attendent leur exécution ou les malades en danger de mort,

sont des défunts en puissance... socialement inutiles... privés de leurs fonctions... Déjà ils se

réfugient dans le sommeil, ou, tout au moins, passent le plus clair de leur temps dans leur lit,

ou assis à leur fenêtre contemplant un monde qui ne les regarde plus. »16

Concernant l'isolement familial, très présent aussi en institution, le professeur en

sociologie, Pascal HINTERMEYER écrit: « ...Les liens entre la personne en fin de vie et ses

proches ne tendent-ils pas à se distendre ? L'éloignement affecte déjà une partie de l'effectif

du troisième et du quatrième âge, qui pris en charge dans les établissements spécialisés, voit

ses relations avec le monde extérieur se réduire graduellement. De nombreux vieillards

s'installent ainsi dans des situations de relégation sociale qui prélude à un isolement encore

accru lorsqu'ils s'acheminent vers la mort. »17

- Enfin la vieillesse peut aussi nous évoquer le temps de la mort, la mort

biologique cette fois. Le vieillard nous montre de manière évidente que la mort est l'échéance

inéluctable de l'être sur la terre. La psychologue Jeanine PILLOT écrit « Lorsque nous

sommes confrontés à la mort, nous allons plus ou moins pouvoir nous dire ce que vit l'autre,

cela me concerne et c'est quelque chose qui va m'arriver. » Elle écrit aussi :

« Nous mourront tous » : la mort de l'autre vient chaque fois me ramener à

l'idée que je suis mortel et qu'il faudra un jour que j'affronte cette épreuve.

« La mort de moi » : qu'est ce que ça me fait de voir la déchéance de l'autre, de

16 THOMAS (Louis Vincent) - Anthropologie de la mort - édition Payot - page 49

17 GERONTOLOGIE ET SOCIETE - Le bien Mourir - n°1 108 - édition FNG - page 82

24

voir l'angoisse de l'autre, de voir la souffrance de l'autre et tout ce que cela me renvoie

comme peur ou comme angoisse pour moi-même.

« La mort de toi » : C'est ce que la mort réveille au niveau de la séparation, de

la souffrance, de la déchirure qui va être amenée par l'absence de l'autre à notre besoin à

notre relation ».18

Ainsi, pour les soignants qui travaillent au chevet de résidents âgés, l'idée de guérir

s'étiole au fur et à mesure des prises en charge et pourra leur procurer un sentiment

d'impuissance. A ce propos, Renée SEBAG-LANOE écrit : « Tous les soignants, médecins

compris - ou incompri sont appelés du jour au lendemain, à jouer un rôle qui n'est plus

technique, mais presque exclusivement relationnel. C'est pratique courante pour le « psy » ;

mais on mesure ici combien sont démunis tous ces soignants, en seule possession de leur

technique, de leur agir, fût-il un savoir faire. Combien d'entre eux, au moment de leur études,

et même plus tard ont imaginé qu'ils pourraient un jour devenir « des passeurs ». Ca n'a

jamais été un métier. »19

Il semble alors important que les soignants fassent un travail sur leurs propres

représentations afin d'avoir une image réaliste de la vieillesse. C'est ainsi qu'ils pourront peut

être intervenir différemment auprès de leurs résidents. Savoir que vieillir n'est pas une

maladie mais bien une période de la vie qui a démarré à la naissance et qui n'a cessé de

s'enrichir jusqu'au moment ultime.

Suite à toute cette recherche, il est maintenant temps de partir explorer le terrain.

18 SOINS PALLIATIFS : REFLEXIONS ET PRATIQUES - édition FD - page 28

19 SEBAG-LANOE (Renée) Op. Cit. - page 11

25

METHODOLOGIE

26

3- La méthodologie

J'ai choisi la méthode des entretiens pour aborder mon sujet. Cela me paraissait plus

adapté pour recueillir la parole de différents soignants et pour pouvoir puiser des appuis

relatifs à mes hypothèses. Le procédé utilisé a été les entretiens semi- directifs. J'ai mené ce

travail à l'aide d'un guide d'entretien adapté aux interlocuteurs. Ils ont été garantis par

l'anonymat et l'explication d'une telle démarche. J'ai souhaité présenter aux interviewés les

motivations qui m'ont poussées à porter de l'intérêt à leur travail auprès des personnes âgées

en fin de vie

3-1 Le choix des lieux

J'ai mené mes entretiens auprès de soignants de deux EHPAD. Une que je nommerai A

se situant à environ vingt kilomètres de Pontivy. L'autre que je nommerai B se situant à

Pontivy même. Je les ai renommées, toujours dans le souci de garder l'anonymat.

La maison de retraite A est devenue un établissement hébergeant des personnes âgées

dépendantes depuis la signature de la convention tripartite (entre la résidence, l'état et le

département) en septembre 2003.

L' EHPAD A accueille 65 résidents à ce jour. Une extension est prévue et portera le

nombre de résidents à 80 dès la fin 2010 avec un secteur spécialisé de 12 places pour l'accueil

des personnes désorientées.

L'établissement est dirigé par une directrice. Il comprend un cadre de santé, trois

infirmières DE, des AS, des AMP, des agents de service, du personnel affecté à des missions

plus techniques : cuisine, lingerie, entretien, administration. Un médecin coordonnateur,

attaché à l'établissement assure une fonction de conseil auprès du personnel soignant et de

coordination auprès des différents médecins libéraux.

27

L’établissement de Pontivy B s'est ouvert quant à lui, en décembre 1989. Dans un

premier temps, il n'accueillait que des personnes valides. Il a dû s'adapter rapidement au

vieillissement de la population et 25 places de cures ont été créées. La dépendance s'étant

encore alourdie, l'établissement a été classé EHPAD en mars 2003.

L'établissement peut accueillir 82 résidents, il est situé en centre ville, entouré de

deux squares et d'une roseraie, il permet d'agréables sorties.

L'organigramme est sensiblement similaire à celui de l’EHPAD A. A savoir que

l'établissement est également dirigé par une directrice. Le reste du personnel est composé

d'une infirmière coordinatrice, d'AS, D' AMP, D'ASH et de personnel technique.

3-2 La population ciblée

J'ai choisi, comme je l'ai expliqué précédemment, de pratiquer mes entretiens auprès

d'aides soignants et d'aides médico psychologiques. J'ai donc rencontré trois aides soignantes

et trois aides médico psychologiques. Néanmoins deux agents de service hospitalier, ASH

(agents de service hospitalier) se sont spontanément présentés aux entretiens à l'EHPAD A.

A postériori, peut être aurais-je dû étendre mes entretiens aux ASH. Dans ce cas, il

aurait fallu que je fasse un guide d'entretien adapté à leur fonction. En effet, un des thèmes

que je souhaite aborder dans ce mémoire est celui de la formation, or les ASH n'ont pas ou

très peu de formation initiale. Au demeurant, si leur rôle est plus hôtelier, leur présence

quotidienne auprès des résidents en fait souvent des soutiens psychologiques importants.

Ensuite quand la question de mener des entretiens auprès d'ASH s'est posée, la notion

de temps s'est imposée. En effet, j'avais déjà fini mes entretiens AS et AMP et cela me

paraissait trop court pour refaire un autre guide d'entretien et retourner interroger d'autres

ASH.

28

3-3 La moyenne d’âge

Pour les aides soignantes, la moyenne d'âge est de : 34 ans

Pour les aides médico psychologiques, la moyenne d'âge est de : 43 ans

3-4 Les conditions d’entretien

Les entretiens ont été réalisés sur le lieu même des deux EHPAD. A l’EHPAD A, j’ai

dû organiser les entretiens sur deux après midi, alors qu’à l’EHPAD B, je n’en ai eu besoin

que d’une seule.

Ces rencontres ont eu comme premier point premier de générer de l’appréhension de

la part des interrogés, malgré les explications données au début de chaque entretien. C'est

surtout l'idée d'être enregistré qui générait cette appréhension.

Le temps des entretiens a été en moyenne de 26 minutes. J'ai veillé à ce que les

interviews ne soient pas trop longs, car ce temps était pris sur leur temps de travail.

A l'EHPAD B, les entretiens ont eu lieu dans un bureau, à l'écart de toute agitation.

Cela m'a permis de maintenir une certaine concentration.

En revanche pour l'autre EHPAD, là où les entretiens ont eu lieu sur deux après midi

cela a été différent. Les premiers ont été réalisés dans un coin de la salle à manger des

résidents ou il y avait du bruit et du passage. Les seconds entretiens ont par contre, eu lieu

dans un bureau malheureusement indisponible la première fois.

3-5 Les limites de la méthode

Deux difficultés se sont imposées à moi lors de mes entretiens.

29

La première est justement le fait d'avoir mené certains entretiens dans un endroit qui

n'était pas propice à la concentration. En effet, je les ai menés alors que le personnel

débarrassait les tables de la salle à manger et qu’il préparait les couverts pour le prochain

repas. Cela a été gênant pour moi et pour les interviewés car il y avait beaucoup de bruit.

La deuxième difficulté rencontrée a été le fait que deux ASH (agents de service

hospitalier) se sont spontanément présentés pour les entretiens sachant que je menais un

travail sur les soignants en EHPAD. Il est vrai qu'au tout départ, quand j'ai contacté les cadres

pour prévoir des dates des rencontres, je n'avais pas exclu les ASH. C’est au fur et à mesure

de mon avancée dans le mémoire, j'ai choisi de cibler les AS et les AMP. Je l'ai d'ailleurs

précisé plus tard aux cadres des structures. Néanmoins deux ASH se sont présentées. Voyant

leur intérêt pour mon travail, il ne me semblait pas acceptable de refuser leur participation. La

difficulté qui s'est présentée concernait le guide d'entretien qui n'était pas adapté à leur

fonction. J'ai néanmoins mené ces deux entretiens en adaptant plus ou moins mon

questionnaire.

Pour mon travail de mémoire, je n'ai pas inclus ces deux entretiens puisqu'ils ne

correspondaient pas à mon domaine de recherche. Cependant les informations recueillies, loin

d'être dénuées d'intérêt pourront être utilisables dans le cadre de mon travail au réseau

palliatif.

Enfin pour la présentation des données, les recueils d'entretiens étant basés

essentiellement sur des ressentis et mon échantillonnage étant restreint, il ne me semblait pas

pertinent de les présenter sous forme de graphique. J'ai donc cherché dans mes entretiens les

mots clefs qui pourraient m'aider à élaborer mon analyse.

30

Tableau synoptique des entretiens

(Les prénoms sont fictifs)

Prénoms Fonctions Age Nombre d'années dans la profession

E

H

P

A

D

B

Sylvie AS 37 ans 4 ans

Estelle AS 21 ans 2 ans

Laure AMP 45 ans 10 ans

E

H

P

A

D

A

Dominique AMP 35 ans 14 ans

Joëlle AMP 49 ans 8 ans

Catherine AS 35 ans 2 ans

31

3-6 La présentation des données

3-6-1 La fin de vie des personnes âgées

* Les Motivations et le parcours professionnel

Sur les six personnes interrogées, deux évoquent avoir fait le choix de travailler en

gériatrie. Pour les quatre autres soignants, c'est leur histoire personnelle qui les a conduit à

travailler en milieu gériatrique, mais à aucun moment elles n'ont exprimé d'inconfort à ce

propos.

* La fin de vie

A la question : « Qu'évoque pour vous l'expression « fin de vie » ? » trois soignants

emploient le terme de mort ou d'agonie. Les autres abordent le concept de fin de vie sous

l'angle de l'accompagnement.

* L'accompagnement de fin de vie dans leurs EHPAD

A la question : « Comment vivez-vous les accompagnements de fin de vie dans votre

structure ? » les soignants de l'EHPAD B ont surtout abordé les difficultés liées au manque

de personnel et au manque de temps. Les trois entretiens y ont fait référence. A l'EHPAD A,

une seule personne a abordé ce sujet. En évoquant le manque de temps, Estelle, jeune AS de

la structure B parle aussi du fait que certaines personnes en fin de vie meurent seules, sans

soignants, sans famille auprès d'eux. Elle parle alors d'un sentiment de frustration.

Sa collègue Laure exprime aussi cette difficulté à ne pas être présente au moment du décès.

Dans les deux EHPAD, est aussi abordé le sujet des familles. Dans l'EHPAD B c'est

surtout leur absence qui est évoquée, deux interviewées sur trois en parlent. A l'EHPAD A,

c'est surtout les difficultés de communication entre les soignants et famille qui est mis en

évidence.

32

Enfin, la notion d'attachement aux résidents est mentionnée par trois soignants ainsi

que la difficulté de les voir partir. Un soignant sur les six parle aussi du souhait de garder les

résidents sur leur lieu de vie plutôt que de les hospitaliser et de les voir mourir ailleurs.

3-6-2 La place à la parole

* L'équipe comme ressource

Quand est évoqué pendant l'entretien ce qui peut aider les soignants à prendre du recul

vis à vis de leur prise en charge de fin de vie, cinq personnes sur les six interrogées parlent

des transmissions orales et parlent aussi du travail en équipe comme aidant.

Un soignant sur les six interrogés évoque le manque de projet de vie pour les

patients entravant ainsi une cohésion dans la prise en charge

* Le Réseau Palliatif

A l'EHPAD A, une des trois personnes interrogées trouve du soutien auprès du réseau

palliatif quand certaines situations de fin de vie sont plus compliquées. Pour les deux autres,

le réseau ne semble pas avoir, jusque là répondu à leurs attentes.

Pour l'autre structure, une seule personne parle de l'intervention du réseau, mais elle

n'était pas présente lors de leur prise en charge et de ce fait elle n'a pas d'avis sur la question.

Il est important de noter que comme AS et AMP, dans les deux établissements, elles

regrettent de ne pas avoir pu assister aux réunions de coordination qui ont eu lieu. Elles

précisent que c'est en général les infirmières qui y sont conviées.

* Le psychologue

A l'EHPAD A il n'y a pas d'intervention du psychologue, mais avec la restructuration

en cours de l'établissement, il est prévu d'en recruter une. Il est vrai que les trois soignants

pensent que cela leur manque.

A l'EHPAD B une psychologue intervient, deux interrogés sur les trois pensent que

c'est aidant.

33

* Les bénévoles

A l'EHPAD B, les trois soignants parlent de l'intervention des bénévoles dans leur

structure et cela est un soutien très important pour toute l'équipe. C'est l'association JALMAV

(Jusqu'à La Mort Accompagner la Vie) qui intervient chez eux et ils en parlent comme un

relais dans leurs accompagnements.

3-6-3 La formation

* La formation initiale et la fin de vie

Pour ce thème, j'ai différentié la formation initiale des AS de celle des AMP.

Pour les AS : Sylvie, AS depuis quatre années n'en a aucun souvenir. Estelle, AS

depuis deux années dit en avoir eu un peu mais que c'était assez succin. Et Catherine, AS

depuis deux ans dit que cela n'était pas assez poussé.

Pour les AMP, Laure diplômée depuis dix ans, Dominique depuis cinq années et

Joëlle depuis huit ans, les trois se souviennent avoir eu des cours sur l'accompagnement de fin

de vie.

* La formation continue

Je leur ai demandé si depuis qu'elles sont dans leurs structures, elles ont eu une

formation sur l'accompagnement de fin de vie.

Sur les six personnes interrogées, trois ont eu une formation concernant

l'accompagnement de fin de vie. Pour les trois soignants, cela a été enrichissant au niveau de

la communication avec les résidents au terme de leur vie.

Sur les trois soignants n'ayant eu aucune formation depuis leur diplôme, une a

demandé à pouvoir y prétendre. Les deux autres pensent qu'elle leur serait bénéfique.

. Je leur ai demandé si elles préfèrent avoir une formation sur leur lieu de travail ou à

l'extérieur de leur établissement.

34

Cinq personnes ont dit que la formation serait mieux à l'extérieur. Deux sur les cinq

disent qu'à l'intérieur de la structure cela a aussi de l'intérêt.

Le sixième soignant n'avait pas d'avis tranché sur la question.

Enfin je leur ai demandé s’ils avaient connaissance du projet MOBIQUAL (il s'agit

d'un outil de formation, traitant de la démarche palliative en EHPAD, crée par la SFGG

(Société Française de Gériatrie et Gérontologie) et la SFAP (Société Française

d’Accompagnement et de Soins Palliatifs). Aucune des six personnes interrogées en a

connaissance.

Je viens d'aborder la présentation de manière quantitative, je vais maintenant

poursuivre par la discussion au regard du contenu des entretiens. Un plan s'est dégagé tout

naturellement au fur et à mesure de la présentation des données de la manière suivante :

- Les motivations

- La fin de vie

- L'accompagnement de fin de vie

- La place à la parole

- La formation

35

LA DISCUSSION

36

4 - La discussion

J'ai cherché dans mes entretiens les réponses les plus significatives et celles qui étaient

en corrélation avec mes hypothèses. Au demeurant, il est apparu que trois grands thèmes s'en

dégagaient :

Les représentations individuelles

Le besoin d'exprimer ses ressentis

La formation

Il me semble important, pour commencer mon analyse, de parler des motivations et du

parcours des personnes que j'ai interviewées. En effet, je pense que de cette motivation

découle l'implication.

4 -1 Les motivations

Deux des soignants interrogés disent avoir fait le choix de travailler en gériatrie.

Sylvie évoque : « La personne âgée me plaît bien, enfin faut savoir les prendre au final ». Elle

rajoute aussi : « C'est plus facile de rentrer en gériatrie ». Laure dit à son tour : « J'aime bien

c'est pas un souci...c'est surtout je pense par rapport aux jeunes diplômés en fait, ils préfèrent

travailler dans des services actifs. Mais moi ça ne m'a jamais dérangée, au contraire. » Je

pense que chacun devrait pouvoir travailler en gériatrie par choix. Cependant le secteur de la

personne âgée étant plus porteur que d'autres, souvent y a-t-il réellement motivation?

Pour les autres soignants, c'est leur histoire personnelle qui les a conduits à travailler

en gériatrie. Aucune d'entre elles n'a exprimé des difficultés à être auprès de résidents âgés.

Concernant les motivations à travailler auprès des personnes âgées, Claudine BADEY-

RODRIGUEZ dit : « Il s'agit ici de faire le point sur les raisons de son choix de travail dans

le secteur de la gérontologie (que ces raisons soient d'ordre matériel, financier,

philosophique ou affectif) et de clarifier son type d'engagement, ce qui peut conduire chacun

à travailler sur ses valeurs et ses croyances, mais également sur ses attentes. La motivation

est entretenue si les attentes sont satisfaites et se perd lorsque les attentes sont

37

continuellement déçues ».20

Il me semble, en effet, que se sentir bien en milieu gériatrique, même si bien souvent

ce n'est pas un choix personnel, est un préalable. Ce dernier est très certainement un gage de

bien être et bien sûr de celui des résidents.

Il est vrai aussi que l'évolution démographique entraine une augmentation du nombre

des personnes âgées amenant les soignants à les prendre en charge de plus en plus souvent

dans divers lieux ( hôpital, HAD, MAPA, EHPAD...)

C'est dans ce contexte, que les équipes seront obligatoirement confrontées à la fin de

vie des personnes âgées.

4-2 La fin de vie

Pour trois soignants, la fin de vie évoque la mort, l'agonie. Estelle dit : « C'est un petit

peu le bout du chemin de la vie », quant à Sylvie « C'est aller vers la mort ». Dominique

emploie à peu près les mêmes termes en disant : « Je vois la mort forcément ». Elles

considèrent alors la fin de vie comme le moment ultime de la vie à trépas. La mort n'apparait-

elle pas alors comme un échec ou peut être comme un soulagement ? A ce sujet, Sylvie

évoque : « Peut être que j'ai de l'appréhension et puis des fois c'est peut être un soulagement.

A une dame qui n'était pas bien, il y a quelque temps, quand les filles m'ont dit qu'elle était

décédée, j'ai dit : ben! Écoute c'est mieux pour elle... ».

Claire Klebers évoque à ce sujet dans un article : « Pour se défendre autant que

possible contre le sentiment d'inutilité, d'échec, de perte, certains sont tentés de considérer la

vieillesse et la mort comme des événements sans espoir, banals finalement, sans importance

reconnue, ne nécessitant ni réaction ni commentaire particuliers, ni gestes, ni paroles, rien en

somme qui raviverait ou risquerait de raviver la gravité des situations auxquels entant que

soignants, ils sont quotidiennement confrontés »21

.

20 BADEY – RODRIGUEZ Claudine – Op. Cit. Page 158

21 KLEBERS Claire - Auprès des personnes âgées, pourquoi les soignants craquent-ils ? - site web consulté le

7/12/2009 - page 2

38

Les autres personnes interrogées abordent la fin de vie sous l'angle de

l'accompagnement. Joëlle dit à ce sujet : « Elle franchit une autre étape de son existence, mais

pour moi ce n'est pas la fin de vie. C'est vivre autrement... c'est adopter un autre rythme. Etre

en collectivité, ce n'est pas rien, mais c'est en aucun cas être en fin de vie ». Elle ne considère

pas la fin de vie comme le moment ultime. Cependant, l'entrée en institution semble être un

bouleversement tel, qu'il va s'accompagner à ce moment, de diverses pertes : sociales,

affectives... D'où l'importance me semble-t-il, de connaître l'histoire de vie du résident qui

vient d'être placé : quel est le sens de la vie pour cette personne ?

Claire Klebers rajoute dans son article à ce sujet : « Envisager la vieillesse sous le seul

angle d'une accumulation de pertes, c'est renvoyer chacun, vieux ou pas vieux, au seul état

d'objet, au seul état de dépendance, au seul état de victime... L'accompagnement, c'est à dire

le « prendre soin » que nous allons donner aux personnes âgées sera pour chacun d'entre

nous, pour nos vieux jours, un modèle d'identification. ».22

L'institution est souvent le dernier domicile et fréquemment le lieu où ils décèderont,

mais c'est d'abord un lieu de vie. Ne faut-il pas une continuité de vivre sans rupture entre le

déroulement de la vie et la fin de vie ? Je veux dire en cela qu'il est important de préparer la

personne avant son placement. Je pense aussi que de la manière dont il sera accueilli dans la

structure, dépendra son consentement à vivre cette nouvelle étape.

Tout ce temps accordé à connaître ce nouveau résident me paraît fondamental,

puisqu'il permettra à mon sens, un meilleur accompagnement de fin de vie.

4-3 L'accompagnement de fin de vie

A l'EHPAD B, les soignants ont tous évoqué des difficultés liées au manque de

personnel et au manque de temps. Il est vrai qu'en gériatrie, les ratios de personnel sont bien

inférieurs aux autres secteurs. Il y a une réalité économique et malheureusement, il faut faire

avec des moyens qui ne sont pas extensibles. Estelle dit à ce propos : « Malheureusement au

niveau du personnel, on est un petit peu partout, malheureusement, voilà l'effectif....On trouve

qu'on est pas assez nombreux et pour accompagner c'est pas évident quoi ».

22 Ibid page 3

39

Sylvie qui est dans la même structure ajoute : « Vu qu'on court partout, moi je trouve

qu'on est pas assez près d'eux... On passe à un autre résident parce que l'heure tourne et il va

être vite fait midi. On passe pas assez de temps auprès d'eux malgré tout ». Laure restera aussi

sur le même registre en disant : « Nous on manque de temps ici, c'est ici et ailleurs, dans

beaucoup d'endroits, dans beaucoup de structures, on a pas suffisamment de temps pour

rester avec eux. C'est un manque de temps en fait ».

A l'EHPAD A, une seule personne fait référence à cette notion de temps. Il s'agit de

Joëlle qui nous dit en parlant de l'accompagnement de fin de vie dans sa structure : « Mais il

n'empêche que c'est quand même un moment privilégié qui nécessite du temps si on veut

vraiment être avec la personne ».

On constate combien cette notion de temps reste prégnante pour ces soignants acculés

à différentes tâches toutes chronophages. N'y a-t-il pas dans ces témoignages matière à

réfléchir sur les emplois du temps, sur le caractère répétitif des soins et peut-être remettre en

question l'importance donnée à certains gestes quotidiens. En effet je pense qu'il faut réfléchir

à la nécessité de privilégier certaines tâches. Il est possible de se rendre plus disponible à ce

qui, un jour donné, semble plus important, notamment en matière d'accompagnement des

personnes en fin de vie.

Je pense aussi qu'auprès d'une personne en fin de vie, ce n'est pas tant le temps passé à

son chevet qui est essentiel que la qualité du temps accordé à l'autre. Par exemple :

- Etre vraiment présent lors du moment d'échange

- Signifier sa présence

- Savoir respecter les silences

- Signifier que nous ne sommes pas loin et que nous reviendrons plus tard et se

tenir à la parole donnée...

Je pense qu'il est important de sensibiliser les équipes soignantes à ne pas être

forcément dans « le faire » mais simplement « être avec ».

En évoquant le manque de temps, Estelle, jeune aide soignante de la structure B, nous

parle du fait que certaines personnes meurent seules, sans aucune présence. Elle parle alors

40

d'un sentiment de frustration. Elle dit : « C'est dur quoi, quand on sait qu'ils sont décédés en

regardant le plafond, c'est hyper difficile ». Pour Laure cela est aussi difficile : « C'est des

choses qui ne devraient pas arriver quoi ! Il devrait y avoir quelqu'un », rajoute : « on

culpabilise quand même ».

Néanmoins, Estelle, qui n'a encore jamais assisté aux derniers instants d'un résident,

dit : « j'ai jamais été vraiment confrontée, j'ai eu de la chance de ne pas avoir vraiment vu un

décès ». En même temps, elle dit se sentir tout à fait prête à assister aux derniers moments :

« parce que, je me dis que le jour ou ça m'arrivera, j'espère un jour, j'espère que quelqu'un

sera là pour me tenir la main et me dire : tu peux y aller ».

Estelle exprime la représentation de ce qu'elle souhaiterait pour elle même. Cela est

bien en corrélation avec le concept de la représentation évoqué antérieurement.

Par ses représentations, elle va mettre en place une organisation pour exécuter le projet

de ne pas laisser les résidents mourir seuls. Elle mettra en place des stratégies d'adaptation

pour que cela soit plus supportable pour elle. Cependant, il existera toujours un décalage entre

sa représentation et ce qu'elle vivra réellement et là encore elle devra s'adapter. En effet,

malgré tout, elle appréhende ce moment puisqu'elle dit qu'elle a eu de la chance jusque là, de

ne pas avoir été présente lors d'un décès.

La représentation existe bien, guide d'une manière consciente ou inconsciente nos

interventions, nos actions. Le fait de se trouver en opposition avec nos représentations

n'entrainerait-il pas des ressentis ?

Joëlle, AMP, s'exprime aussi à ce sujet : « la mort ce n'est pas rien, c'est aussi se

projeter, c'est notre propre mort que les gens nous ramène à chaque fois ».

Si certains soignants nous ont parlé des résidents qui meurent seuls, sans leur

présence, certains autres évoquent ceux qui décèdent sans la présence de leurs proches. La

famille est abordée dans les deux sites d'interviews. Dans l'EHPAD B, c'est surtout leur

absence qui est mise en avant. A ce propos Sylvie parle d'un accompagnement qu'elle a vécu

dans sa structure : « Dernièrement, on a eu une dame, son mari est décédé avant elle et puis,

elle était déjà en fin de vie, puis elle n'avait pas d'enfant, pas de famille... Quand même son

mari est parti avant elle et puis il y avait personne...C'est dur de finir comme ça ».

41

Effectivement, n'existe t-il pas des spécificités du soin palliatif en gériatrie qui seraient

liés aux proches comme :

- La famille peut être éloignée d'un point de vue géographique

- Les résidents peuvent être les seuls à être encore en vie

- Les plus proches, comme le conjoint, peuvent être eux aussi très âgés

ou même malades

Nous retrouvons dans ce qui est évoqué, les propos tenus par Pascal HINTERMEYER.

Il évoque l'éloignement des proches qui affectent les personnes âgées. Ce sont bien souvent

les soignants qui assurent alors ce lien affectif.

A l'EHPAD A, c'est surtout les difficultés de communication avec les familles qui sont

évoquées. Catherine dit qu'elle se sent mal à l'aise avec les familles quand leur proche est en

fin de vie : « Je ne sais pas comment eux vont prendre ça, et voilà j'ai pas les mots quoi ».

Comment peut-on partager la souffrance des proches quand, soi-même, on a beaucoup de mal

à surmonter la sienne ? Cette difficulté de communication ne va-t-elle pas entrainer une

réaction de fuite et augmenter le sentiment de mal être pour le soignant et pour la famille ?

Toujours est-il que cette attitude de fuite pourrait avoir comme conséquence de ne pas se

mettre en position d'écoute. Mais il est vrai aussi que toute personne soignante a besoin de se

protéger et ne peut être disponible à écouter à tout moment.

Joëlle pense qu'il faudrait pouvoir avoir du temps et un lieu pour accueillir les

familles. Elle dit : « C'est de pouvoir et accompagner la personne et accompagner la famille à

côté, parce qu'il y a aussi la famille... Pouvoir trouver un espace qui puisse être convivial, qui

puisse être dans le calme, dans la paix... ». Il existe effectivement de tels lieux dans les

services avec des lits identifiés soins palliatifs ou dans les unités de soins palliatifs. Ces

espaces de convivialité permettent de quitter la chambre de la personne en fin de vie et de se

mettre quelque peu à distance. N'est-il pas envisageable de prévoir ce genre de locaux dans les

EHPAD ?

Trois soignants mentionnent la notion d'attachement aux résidents et parlent de leurs

difficultés à les voir partir. A ce propos Estelle dit : « Bon ! Même si on sait qu'ils ont vécus

avant d'arriver en gériatrie, on sait qu'ils ont vécus leur vie tout ça ! C'est toujours difficile

42

parce qu'on s'attache quand même, donc c'est ça qui est difficile ». Laure dit aussi : « C'est

difficile de ne pas s'attacher quand on travaille depuis des années avec les mêmes

personnes ». Joëlle quant à elle mentionne : « Il n'empêche qu'il y a des liens qui se créent

entre les gens et que c'est une émotion qui est humaine... Donc on ne se sépare pas comme ça.

Pouvoir dire à la personne, je me souviendrai toujours, parce que cette dame là, je lui ai dit

que j'étais heureuse d'avoir pu la connaître et que je la remerciais de m'avoir appris ce qu'elle

m'avait appris ». Cet attachement aux résidents, ne serait-il pas un moyen pour ne pas rester

indifférent et éviter de tomber dans la démotivation ?

Il est vrai qu'en institution, le personnel soignant joue souvent un double rôle, celui du

soignant mais aussi celui d’un substitut familial. Dans ce contexte le décès d'un résident peut

être douloureux. Ils accompagnent les résidents qu'ils connaissent depuis longtemps pour

certains, avec, de ce fait, une charge affective importante.

Enfin, une des personnes interrogées parle du souhait de garder les résidents sur leur

lieu de vie plutôt que de les hospitaliser et qu'ils meurent ailleurs « On essaie au maximum de

garder les résidents quand on peut, pour les soins, les soins de confort... Sinon il y en a qui

sont hospitalisés et puis il y en a qui décèdent à l'hôpital. On préfère les récupérer ou on

préfère qu'ils restent là. Mais si ils sont hospitalisés, on peut rien y faire ». (Sylvie)

N'est-il pas souhaitable effectivement de laisser ces personnes mourir auprès des

soignants qu'ils connaissent plutôt que d'aller à l'hôpital mourir dans l'anonymat ? Mais cela

nécessite, si possible, une réflexion en amont avec le patient, les soignants et les proches.

Comment permettre à des équipes de libérer les souffrances et les difficultés liées à la

fin de vie des résidents, si ce n'est peut être en leur donnant la possibilité d'en parler ?

4 - 4 La place à la parole

Il est important de noter, combien le fait de pouvoir exprimer ses ressentis est un

élément essentiel pour les soignants. Les transmissions orales semblent être un de ces

moments privilégiés pour s'exprimer. Ce sont des moments de partage où les difficultés

peuvent être verbalisées. Sylvie dit : « On parle beaucoup au moment des transmissions » .

43

Dans leur ensemble, toutes les soignantes interrogées disent trouver un espace de parole au

moment des transmissions orales. Malgré tout, cela n'est pas suffisant et bien souvent elles

improvisent des temps d'échange. Joëlle parle de la pause comme étant un de ces moments.

Laure regrette aussi le manque d'espace pour parler : « On n'a pas toujours le temps de se

poser, non plus, pour en parler entre nous, c'est pas toujours évident. Je me rappelle de cette

situation là parce que je sais qu'on avait craqué. On s'était posé dix minutes, un quart d'heure

et on en avait parlé entre nous et ça nous avait fait du bien et on avait pleuré... ». Il est en

effet nécessaire de pouvoir « restituer dans un cadre collectif ce qui a été ressenti à un niveau

individuel et personnel ».23

L'équipe est aussi une ressource face aux difficultés rencontrées, elle est contenante et

rassurante : « On en parle beaucoup quand même entre nous. Enfin moi je sais qu'avec mon

équipe on en parle, ne pas être tout seul quand même non plus, c'est important pour moi. »

(Sylvie). Joëlle dit que cela l'aide lors d'accompagnement de fin de vie : « Au niveau du

travail en équipe c'est plus facile à vivre parce qu'il y a une communication...et puis moi, je

vais avoir cinquante ans, donc aussi une facilité pour pouvoir mettre des mots sur les

émotions, les jeunes ont sûrement beaucoup plus de mal ». L’expérience d'une équipe

soignante permet de répartir le poids des difficultés. Cette notion d'équipe se construit tous les

jours avec la volonté de chacun.

Une des soignante interrogée évoque le manque de projet de soins pour les résidents.

Cela semble être un frein à la cohésion de la prise en charge en équipe : «On n'essaie pas

d'établir quelque chose, que j'ai vu en formation, qui se met en place. Cela ne se met pas en

place comme ça au bout de huit à quinze jours, il n'y a pas de projet » (Sylvie). Il est vrai que

l’accompagnement s'inscrit dans un projet de vie, un projet de soins. La prise en compte de la

globalité de la personne en fin de vie et la réponse singulière à ses besoins dépend d'une

réflexion en équipe. Il est nécessaire d'avoir une cohérence dans les soins donnés, pour que les

soignants n'aient pas un sentiment d'insatisfaction.

Dans l'EHPAD A, Dominique trouve justement que l'intervention du réseau palliatif

permet d'apporter cette réflexion pluridisciplinaire, nécessaire à la cohérence des soins :

« Depuis que le réseau de soins palliatifs vient dans l'établissement, ça se passe beaucoup

23 BONDON Michel – La Souffrance Des Soignants – 2009 -RENNES -COURS DIU

44

mieux, parce que déjà, il y a des réunions avec le personnel, avec les médecins, la famille, ce

qui est important parce que on sait ce que veut la famille, ça nous aide pour

l'accompagnement ». Dans ses propos, Dominique exprime bien cette idée de projet de soins

réfléchi en équipe pluridisciplinaire. L'intervention du réseau n'aurait-elle pas un rôle de

catalyseur pour l'aide à la prise en charge ?

Cependant, les deux autres soignants du même établissement ont une vision plus

critique de l'intervention du réseau : « C'est intéressant parce que on va pouvoir échanger, on

va pouvoir communiquer, on va pouvoir faire des choses ensemble. Or ce que j'ai pu voir

depuis le début, ça tient au matelas à air, au matériel... » (Joëlle). Enfin Catherine connait

l’existence du réseau, mais en dehors des réunions de coordination auxquelles elle n'a jamais

assistée, elle n'en connait pas le fonctionnement.

Sylvie de l'EHPAD B trouve que le réseau l'aide dans les décisions : « Oui parce qu'on

se dit: comment je fais ? Elle ne mange pas, oh la la ! Est ce qu'on la lève, est ce qu'on ne la

lève pas ? ». Le réseau lui permet de prendre un peu de recul vis à vis des soins. Le fait d’être

à plusieurs à réfléchir sur une prise en charge lui permet de se dire : « On n'a pas à regretter

ce qu'on a fait, ou ne pas regretter ce qu'on a pas fait non plus ». Le partage de la décision

prise en allège le poids. Laure de l'EHPAD B regrette de ne pas être conviée aux réunions

avec le réseau palliatif. Elle dit que c'est souvent l'IDE qui est présente : « Quand ils

interviennent en fait, nous on y va pas forcément. Cela pourrait être bien peut être, que

quelqu'un du personnel soignant puisse accompagner, c'est vrai que nous on y va pas, ça

pourrait être un plus pour nous. Parce que les infirmières, forcément, elles sont là toute la

journée, mais bon! C'est les aides soignants qui y sont le plus ». Les propos de Laure

expriment un besoin de reconnaissance tout à fait légitime.

Concernant, le besoin de mettre des mots sur les émotions, à l'EHPAD A, tous les

soignants parlent du manque de psychologue : « C'est vrai qu'un psychologue dans

l'établissement, enfin pour la fin de vie, même pour autre chose, enfin pour parler un peu de

tout, les ressentis, tout ça, ça me manque, ça nous manque. » (Catherine). Joëlle renforce ces

propos :« ...Là ou je trouve que les psychologues sont indispensables dans les établissements,

surtout pour les gens qui sont atteints de démences et pour les familles, le personnel, les

résidents et les familles, comment faire face ? ». La dernière soignante (Dominique), dit aussi

qu'un psychologue lui manque. Elle attend la restructuration de son EHPAD, avec le

45

recrutement d'un psychologue. En attendant, elle dit que c'est le réseau palliatif qui l'aide, en

organisant des débriefings à la demande du personnel : « Une psychologue, moi ça me

manque. Comme je le disais tout à l'heure, le réseau de soins palliatifs revient après pour

pouvoir en discuter, quand il y a une situation plus difficile et cela nous a permis de poser les

choses ».

A l'EHPAD B, un psychologue intervient et deux soignantes disent que c'est aidant,

mais qu'elles ne le voient pas souvent. Laure précise : « C'est important que quelqu'un

intervienne parce que ça nous permet aussi de décharger aussi tout ce qu'on a ». Elle met

aussi l'accent sur la confidentialité des propos recueillis par le psychologue : « En plus c'est

des entretiens qui restent. Enfin, il fait son rapport forcément à la direction, mais bon! Ça

reste quand même à la limite. Il ne va pas dire telle ou telle personne... ». Elle parle

également du besoin de décharger verbalement : « Parce qu'il y a beaucoup de stress quand

même, beaucoup de remise en question forcément, tous les jours... ».

Au regard des entretiens, on constate que même si des emplois de psychologue sont

prévus dans les EHPAD par la réforme de la tarification, ils sont loin d'être opérationnels

partout. Leur temps de présence est pour l’instant infime et ce manque se fait réellement sentir

auprès du personnel.

Il me paraît important de parler de l'intervention des bénévoles (JALMAV) dans

l'EHPAD B. En effet, les trois soignants sont satisfaits de ce partenariat : « Ils viennent même

discuter, comme ça, avec les résidents qui vont bien. Ils viennent partager des moments avec

eux. Mais on a eu le cas d'un monsieur, il allait décéder et ils sont venus en fait prendre le

relai. Et au moment où la dame a senti que ça allait être le moment, elle a sonné en fait pour

nous prévenir. Donc on a pu aller lui dire au revoir, donc ça, c'est quand même super

appréciable. On se dit qu'on ne l'a pas laissé tout seul quoi! ». Cette collaboration aura

certainement déculpabilisé les soignants quant au fait de laisser mourir seuls les résidents.

Par ailleurs, ne faut-il pas entendre dans les propos d'Estelle le besoin de partenariat,

de collaboration ? L'accompagnement des personnes en fin de vie n'appartient pas qu'aux

soignants. Les bénévoles ont cette action de complémentarité à celle des soignants. La

collaboration fait aussi partie des préoccupations de l'association JALMAV, comme en

témoigne cette phrase tirée de leur revue : « Partageant le même projet, équipe soignante et

46

association ne peuvent s'ignorer et doivent évidemment collaborer, chacun dans son rôle

propre ».24

Les bénévoles sont le trait d'union entre le monde extérieur et le résident. Ils sont à

l'écoute du malade et de sa famille. La maladie, la démence isole le patient et ses proches. Les

bénévoles peuvent rompre cet isolement et maintenir le lien social. Cette expérience positive

du bénévolat exprimé par les soignants de l'EHPAD B ne montre t-elle pas tout l'intérêt de

leur venue dans ces établissements ? Bien sûr ils doivent bénéficier d'une formation à

l'accompagnement des personnes âgées.

En évoquant la nécessité de formation pour les bénévoles, j'en viens tout naturellement

à discuter de celle du personnel soignant.

4-5 La formation

Je vais débuter ce sujet, par la formation initiale des aides soignantes sur

l'accompagnement de fin de vie. L’une d'elle diplômée depuis quatre ans, ce qui est peu me

semble-il, dit ne plus en avoir de souvenir. Les deux autres évoquent un contenu beaucoup

trop succinct. Il est vrai que la formation d'aide soignante se déroule sur neuf mois, avec

beaucoup de notions à aborder. Cela paraît effectivement condensé, avec aussi une grande

place accordée à la technique des soins plutôt qu'au « prendre soin ». Et puis de la théorie à la

pratique, il y a un écart. C'est d'ailleurs ce que nous soumet Estelle: « Je crois que tant qu'on

est pas confronté réellement, on aura beau avoir des cours, c'est vraiment quand on le vit

qu'on sait comment ça se passe et qu'on essaie de faire au mieux quoi ». Bien sûr l'expérience

est, je pense, fondamentale et nous enrichie. Cependant, la formation initiale permet

d'acquérir des connaissances, de réfléchir en amont. Ces acquisitions peuvent permettre d'être

mieux armé lors de la première confrontation à une situation difficile, car il y a toujours une

première fois.

Concernant la formation initiale des aides médico psychologiques, toutes s'en

souviennent très bien. Mais comme leurs collègues aide soignantes, elles en regrettent

l'insuffisance pour se sentir mieux préparées aux accompagnements de fin de vie. Joëlle parle

24 SCHAERER René-Les bonnes pratiques de l'accompagnement bénévole organisé dans le mouvement

JALMAV – revue de la fédération Jusqu' A La Mort Accompagner la Vie- revue n°91- décembre2007-page 9

47

aussi de l'importance de l'expérience : « Mais, je crois qu'il n'y a pas de secret, c'est sur le

terrain qu'on apprend ».

Si, effectivement, l'expérience nous aide à mieux appréhender les situations, c'est aussi

parce que tout au long d'une carrière, on peut l'enrichir. La formation continue y contribue

largement. Elle permet en effet au regard de ses objectifs d'améliorer le « savoir », le « savoir

faire », et le « savoir être ».

Parmi les six soignants que j'ai interviewés, trois ont pu prétendre à une formation sur

l'accompagnement de fin de vie.

Grâce à la formation continue, la communication et la relation avec les résidents en

fin de vie ont été facilitées. Elles disent avoir des soucis sur le comportement à adopter, savoir

quoi dire au patient et à la famille. La formation les a aidées dans ce sens : « C'est vrai que

comme je vous le disais, que j'avais du mal quand même à en parler avec les résidents

quelque fois. Ils ont les mots pour justement parler de la fin de vie, ça m'a permis quand

même de comprendre et puis d'en parler avec eux...Parce que avant, j'avais tendance à

bichonner, à changer de conversation, alors que maintenant, je leur demande ce qu'on peut

faire » (Dominique). La formation lui aura, je pense permis de comprendre qu'elle mettait en

place des mécanismes d’adaptation. En prenant connaissance de ses propres réactions, elle

pourra effectivement être plus à l'écoute du patient et être dans la relation « vraie ».

Sylvie explique aussi le bien fondé de la formation continue pour mieux adapter son

comportement à celui qui va mourir. Mais elle pointe un élément qui me semble important en

gériatrie, il s'agit de l'évaluation physique. Quand je lui demande ce que lui a apporté la

formation, voici ce qu'elle répond : « Le comportement, prendre un peu plus de temps avec

eux aussi, même si on n'en a pas beaucoup. Et puis d'évaluer un petit peu plus le

physique...On fait attention à tout ce qui est escarre...Mais je pense qu'on fait encore plus

attention à ça quoi ». Je pense qu'en gériatrie l'observation est un élément fondamental de

prise en charge, puisqu'il permettra de l'optimiser. Chez les patients déments, cela est encore

plus vrai, observer le comportement, le faciès, les gestes, permettra d'être au plus près des

besoins du patient. Dans ce domaine, ce sont bien les aides soignantes et les aide médico

psychologiques qui lors de leurs soins de nursing, seront les mieux placées.

Joëlle qui n'a pas eu de formation sur l'accompagnement de fin de vie, parle de l'aspect

48

financier des formations. Par conséquent, il faut que les formations trouvent leur utilité sur le

terrain compte tenu du coût : « voilà faut que ça suive, faut pas faire une formation pour en

faire une non plus, ce sont des formations très onéreuses ». Il est vrai que l'aspect financier en

gériatrie est à prendre en compte et qu'il est un frein dans l'élaboration des plans de formation.

En même temps, on peut se demander si elle n'a pas une mauvaise expérience sur des retours

de formation qui n'ont rien apportés sur le terrain. Y a t-il réel retour sur investissement ?

En parlant de formation, Joëlle le voit plus sous forme d'analyse de pratique : « Qu'il y

ait un professionnel qui soit spécialisé dans ce domaine, enfin spécialisé, qu'il ait une

expérience dans ce domaine, qu'il puisse voir l'équipe ou à plusieurs, enfin par petits groupes.

Et puis dire : et bien voilà, vous en êtes où dans vos accompagnements, quelles difficultés

vous rencontrez ? Comment vous désirez que ça se passe ? Dans l'avenir, qu'est ce que vous

voulez mettre en place ? Là oui ! ce serait intéressant ». Mais n'a-t-elle pas, elle aussi, une

certaine expérience qu'elle peut mettre au service de ses collègues ? En effet pouvoir se poser

en équipe et réfléchir à sa pratique est fondamental. Joëlle exprime bien l'idée de la nécessité

d'échange. Et pourquoi ne pas échanger avec des professionnels d'autres structures ? C'est

avec cette idée que je leur ai demandé si elles préféraient avoir une formation au sein de leurs

établissements ou en dehors.

Cinq d'entre elles disent que c'est mieux à l'extérieur de leurs structures. La raison

unanimement évoquée est la possibilité de rencontre avec d'autres professionnels : « Pouvoir

parler avec d'autres filles ou d'autres garçons, de ce qu'ils ont pu rencontrer comme

problèmes et tout ça quoi. Et puis échanger, voilà, dans un lieu à part, à part du

boulot »(Catherine). Sortir de son lieu de travail, rencontrer d'autres collègues venant d'autres

horizons permet de rompre avec le pesant du quotidien, de s’extraire de sa routine. Ces temps

de formation, sont l'occasion d'utiliser des énergies différentes qui bien souvent permette de

« recharger les batteries ».

Laisser partir en formation une partie plus ou moins grande d'une équipe n'est pas

chose aisée en pratique. Il existe des freins organisationnels et de coût.

Enfin, au sujet de la formation, je leur ai demandé si elles connaissaient le projet de

formation appelé MobiQual ( Mobilisation pour la Qualité). Unanimement, elles m'ont

répondu ne pas en avoir connaissance. Sachant que cet outil de formation a été spécialement

49

conçu pour leurs établissements, je me suis demandé pourquoi elles ne le connaissaient pas.

Au décours de mes rencontres, l'infirmière coordinatrice de l'EHPAD B m'a expliqué

que le projet n'a pas été exploité sur la structure. Mais que le CDrom fournit avec le kit de

formation est installé dans un ordinateur à la disposition des soignants.

A l'EHPAD A, le cadre trouve ce projet de formation très intéressant, il souhaiterait

s'en servir avec son équipe, mais ne sait pas encore sous quelle forme et quand. Actuellement

toute son équipe se forme au concept d'humanitude, cela a un coût, il faut faire des choix en

matière de formation.

Il faut savoir que ce kit de formation, gratuit, propose aux soignants et aux médecins

coordonnateurs des outils de travail pratiques. Il répond à un des objectifs de la tarification

qui est d'améliorer la qualité des pratiques de soins.

Suite à cette discussion sur les difficultés que rencontrent les soignants lors de la prise

en charge des personnes âgées en fin de vie, un retour à mes hypothèses s’impose. Je les

reprendrai donc dans la synthèse qui suit.

4-6 La synthèse des résultats

J'avais évoqué trois hypothèses au tout début de mon travail.

La première évoquait les représentations individuelles comme un frein à la relation

soignant-soigné. Je dirais que cela c'est partiellement vérifié. En effet, seulement trois

soignants ont utilisé des termes évoquant les représentations comme un frein. Pour les autres,

cela n'apparaissait pas clairement exprimé. C'est pourquoi je ne puis valider cette hypothèse.

La seconde hypothèse concernait le besoin pour les soignants d'être écoutés, soutenus

et d'avoir un espace de parole. Elle me paraît tout à fait vérifiée puisque toutes les soignantes,

à un moment ou à un autre, parlent de la nécessité d’échanger. Elles choisissent pour cela des

50

moments formalisés, comme les transmissions ou lors de temps informels comme leurs

pauses. De même, la quasi totalité des soignants interrogés exprime le besoin d'un temps de

psychologue dans l’établissement pour verbaliser et pour avoir du soutien.

La troisième hypothèse que j'avais énoncée était celle concernant le manque de

formation. En ce qui concerne la formation initiale, je dirais que c'est vérifié, puisque toutes

ont exprimé son insuffisance, tant en quantité qu'en qualité.

Pour ce qui est de la formation continue, il s'avère au travers de mes entretiens que

c'est plus une nécessité qu'un manque. En effet, trois sur les six personnes interrogées ont déjà

eu une formation sur l'accompagnement de fin de vie. Une autre en a fait la demande estimant

cela nécessaire. Les deux dernières pensent également que cela les aiderait dans leurs prises

en charge futures. La formation leur a permis, ou leur permettrait, de développer des

connaissances théoriques, des compétences relationnelles. Cela laisse à penser que leur

institution a aussi pris en compte cette nécessité.

Fort de cette analyse et du retour sur les hypothèses, je vais m’orienter maintenant sur

les propositions qui ont émergées au décours de l’avancée de ce travail.

51

PROPOSITIONS

52

5 Les propositions

Suite à la discussion, plusieurs propositions me viennent à l’esprit. Je les organiserai

sur plusieurs niveaux. Dans un premier, il semble important d’inclure les établissements afin

qu’ils soient porteurs de projets, sans eux, rien n’est possible. Dans un second temps,

j’orienterai mes propositions vers les soignants, dans leur ensemble et enfin vers les résidents.

5-1 Propositions auprès des institutions

Elles sont la clé de voûte du bien être des soignants et des résidents. De ce fait, la

volonté institutionnelle déployée fera en sorte que le personnel se sente impliqué. En effet, si

l’institution n’est pas partie prenante, les démarches n’avancent pas (projet de vie, plan de

formation, etc.….).

Les réseaux palliatifs et les équipes mobiles d’accompagnement et de soins palliatifs

peuvent, par leur savoir faire, leur collaboration, aider à véhiculer la démarche palliative.

D’ailleurs, sur le secteur huit, l’élaboration d’un avenant pour le partenariat entre le réseau de

soins palliatif et de l’équipe mobile est en cours de discussion, cela pour proposer des

formations auprès des EHPAD.

Comme je l’ai évoqué précédemment, l'outil MobiQual, conçu pour la formation à la

démarche palliative peut rester dans l'établissement. Il pourra alors servir de référence pour la

formation interne. Les documents peuvent être adaptés ou modifiés par le formateur selon les

besoins. MobiQual donne aux médecins coordonnateurs et aux équipes soignantes des

éléments pratico-pratiques, répondant à améliorer la qualité des pratiques de soins.

Au cours des entretiens, les soignants ont évoqué le besoin d’improviser des temps

d’échanges lors de situations difficiles. Ces temps informels ne sont pas prévus dans

l’organisation mais ce n’est certainement pas du temps perdu, s’il est contenu. Il appartient à

l’institution de prendre conscience de cette nécessité pour le bien être du personnel. Le mieux

étant bien sûr, de pouvoir proposer des temps beaucoup plus formels avec, si possible un

psychologue.

53

5–2 Propositions auprès des soignants

Même si les rôles sont différents, les connaissances différentes, chacun en EHPAD à

un rapport particulier avec les résidents et un rôle à jouer. Il me semble important de pouvoir

étayer la motivation lorsque l’on travaille auprès des personnes âgées. Pour se faire, il faut

pouvoir favoriser les échanges, prévoir des analyses de pratique, des débriefings. S'il n’y a pas

de psychologue dans l’établissement, le réseau palliatif peut être le tiers qui permettrait

d’animer ces temps de parole. Cette motivation peut aussi être entretenue par la formation.

Sur le secteur huit, le réseau propose plusieurs thèmes qui peuvent aider le personnel à

réfléchir sur les prises en charge des fins de vie :

- Hydratation, alimentation et décision éthique

- Les symptômes gênants de la fin de vie

- Les rites funéraires

- La prise en charge de la douleur

- Soins palliatifs et gériatrie

Tous ces thèmes pourront, je pense, aider les soignants à avoir une représentation

différente de la fin de vie des résidents. Toutes ces réflexions pourront aussi, peut être les

aider à prendre du recul par rapport à la notion de temps :

- Pouvoir prioriser certains soins

- Donner du sens aux soins que l’on dispense

La diffusion de la loi Léonetti passe de manière directe ou indirecte tout au long de ces

temps de formation. Je pense soit par des temps formels d’information, soit en utilisant les

supports de formation déjà présents, comme les décisions éthiques.

Les entretiens m’ont fait prendre conscience que parfois les aides soignants et les aides

médico psychologiques et même les agents hospitaliers, ne sont pas conviés aux réunions de

coordinations. Si l’organisation le permet, il me semble important que certains de l’équipe

puissent y participer. En tous les cas, à l’avenir, je proposerai leur présence. En matière de

pluridisciplinarité, tout le monde à sa place. C'est en réfléchissant tous ensembles que nous

agirons au mieux pour les résidents.

54

La mise en place d’un référent en soins palliatifs dans l'établissement me semble être

un moyen efficace pour mettre en œuvre une prise en charge optimale.

Il est vrai aussi que certaines situations de fin de vie réclament des soins plus

techniques et, ou plus lourds. Il y a possibilité d'avoir recours à l'Hospitalisation A Domicile

(HAD). Cela peut être une alternative sécurisante pour tous les acteurs.

5-3 Propositions auprès des résidents

Il me semble essentiel de connaitre l’histoire personnelle du résident et qu'elle soit

incluse dans un projet de vie, dans un projet de soins. L'EHPAD est bien un lieu de vie, il faut

se demander quel est le sens de cette vie pour le résident qui rentre en institution. Ainsi en tant

que soignants, nous pourrons apporter du sens à nos soins jusqu'au bout. Pour être au plus

près du résident, il faut bien évidement inclure ses proches, s’ils existent. Ces derniers

demeurent bien souvent la mémoire de la personne âgée surtout quand celle-ci a des troubles

cognitifs. Ils permettent de la raccrocher à son histoire.

Au cours des entretiens, il a été évoqué des difficultés de communication avec les

familles. La formation peut, là aussi, aider les soignants à accompagner les proches dans les

épreuves. Maintenir la communication entre famille et soignants est primordial. La présence

d'un tiers est parfois nécessaire. Le réseau palliatif peut aussi être ce tiers pour maintenir ou

rétablir la communication afin d'œuvrer au mieux-être du résident.

Pour en terminer avec ces propositions, il convient d'inclure les bénévoles. Les

soignants ne sont pas les seuls à entrer dans la sphère du résident. Lorsque les établissements

peuvent bénéficier de la présence de bénévoles, il semble que les soignants y trouvent un

relais. Pour les résidents, cette démarche maintient le lien avec l'extérieur.

55

CONCLUSION

56

6 - Conclusion

Ce travail de recherche aura eu l'intérêt de m'interroger sur les difficultés rencontrées

par les aides soignants et les aides médico psychologiques dans l'accompagnement de fin de

vie des résidents.

Comme je l'évoquais au début de cet écrit, ce questionnement est parti de ma propre

expérience. Il s'est enrichi des lectures que j'ai eues plaisir à découvrir, car elles m’ont

apportées des éléments de réponse et élargies mon champ de vision.

Ce travail d'écriture aura été un exercice de mise à distance, pour un regard plus

objectif sur un sujet qui me tenait à cœur. Les soignants que j'ai rencontrés lors de mes

entretiens ont eu une place prépondérante dans le cheminement de ma réflexion, en

m’amenant sur des pistes auxquelles je n’avais pas pensées.

Pour une infirmière coordinatrice dans un réseau de soins palliatifs, la formation du

diplôme inter-universitaire m’a permis, via les acquisitions théoriques, le stage, les échanges,

les rencontres d’engranger une multitude de connaissances. Ces apports diversifiés seront

aidants pour m’adapter aux demandes futures. Ces temps de réflexion, pleins d'enseignements

m'auront amenés à transformer mon regard pour un partenariat plus serein avec les soignants

en EHPAD.

Lors des formations que j'aurai l’occasion de dispenser au personnel prenant en charge

des personnes âgées, je souhaite, à mon tour, comme les formateurs, pouvoir me montrer

convaincante. J'espère être suffisamment attentive à leurs attentes lors de nos interventions. Et

qu’ensemble, en équipe pluridisciplinaire, nous puissions accompagner jusqu'au bout les

résidents et leurs proches en leurs apportant les compétences et le soutien dont ils auront

besoin.

Pour mieux accompagner les personnes âgées arrivées au terme de leur vie, il paraît

primordial de développer une démarche palliative. M. Régis AUBRY disait, lors du dernier

57

congrès de la CBSP (Coordination Bretonne de Soins Palliatifs) « Tous soignants devraient

intégrer dans sa pratique la notion de soins palliatifs ».25

.

Dans une société qui revendique le bien être des soignants, le bien être des

soignés, avec un financement le plus indolore possible, pouvons-nous faire mieux que

rassembler ces compétences au chevet du résident, pour qu'il puisse rester dans son lieu de vie

jusqu'au bout, si tel est son choix ?

25 AUBRY(Régis) Congrès de la coordination bretonne de soins palliatifs-St Brieuc Décembre 2009

58

BIBLIOGRAPHIE

59

BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES

BADEY-RODRIGUEZ (Claudine) - Les personnes âgées en institution vie ou survie-

Editions Seli Arslan, 1997, 1920 pages

CASTRA (Michel) - Bien mourir, sociologie des soins palliatifs, le lien social - Editions Puf,

2003, 365 pages

GERONTOLOGIE ET SOCIETE - Le Bien Mourir - n° 108 - Edition fng - Mars 2004 - 246

pages

LE BOTERF (Guy) - Développer la compétence des professionnels - Editions d'organisation,

2003, 312 pages

SEBAG-LANOE (Renée) - Mourir accompagné - Editions Desclée de Brouwer, 1986, 296

pages

SOINS PALLIATIFS: REFLEXIONS ET PRATIQUES - 3ème

édition - Editions FD, 228

pages

THOMAS (Louis Vincent) - Anthropologie de la mort - Editions Payot, 1975, 535 pages

REVUES

COYERE (Nicole) et BERGIER (Bertrand) - Une expérience d'observation de la fin de vie

des personnes âgées dépendantes en établissement d'hébergement - La Revue Perspective

soignante - n°28-Avril 2007

LIVRET DOCUMENTAIRE DU COLLEGE DES HAUTES ETUDES EN MEDECINE

GENERALES – Aspect psychologique, philosophique et éthiques - Avril 2005

PLONTON (Louis) – La Souffrance des soignants en Gériatrie - l Revue De Gériatrie-Tome 6

n°3 - Mars 1981

SCHAERER (René) -Les bonnes pratiques de l'accompagnement bénévole organisé dans le

mouvement JALMAV – revue de la Fédération Jusqu' A La Mort Accompagner la Vie- revue

n°91- décembre 2007

CADRE LEGAL

Circulaire n° DHOS/03/DSS/CNAMTS/2002/610 du 19 décembre 2002 relative aux réseaux

de santé

Circulaire DHOS/P2 n°2006-233 du 29 mai 2006 relative aux orientations et axes de

60

formation prioritaires

Haute Autorité de Santé (ANAES) - Recommandation des bonnes pratiques - Décembre2002

Circulaire n° DHOS/02/03CNAMTS/2008/100 du 25 mars 2008 relative au référentiel

national d'organisation des réseaux de santé en soins palliatifs

Circulaire DGS/853/DH/FH1 n°96-31 du 19 janvier 1996 relative au rôle et aux missions des

aides soignants

WEBOGAPHIE

Site web : CEFEM (pages consultées le 7/12/2009) Auprès des personnes âgées, pourquoi les

soignants craquent ils ? En ligne, adresse : http://www.cefem.be/lecture/seniors

Site web : PSYCHOLOGUE EN EHPAD (pages consultées le 15 mars 2010) Maison de

retraite/Guer, en ligne -www.ehpad-guer.com/psycho.htm

CONGRES

AUBRY(Régis) Congrès de la Coordination Bretonne de Soins Palliatifs - St Brieuc

Décembre 2009

COURS

BONDON (Michel) - La Souffrance Des Soignants – 2009 -RENNES - Cours DIU

THESE

LACASSAGNE (Catherine) - Les personnes âgées en institution-Thèse Médecin-2007

61

Soignants en EHPAD :

Quelles difficultés dans l’accompagnement en fin de vie ?

RESUME :

La démographie est telle que les équipes soignantes sont amenées à prendre en charge

des personnes âgées de manière très fréquente. Les Etablissements d’Hébergement pour

Personnes Agées Dépendantes (EHPAD) devenant leur dernière demeure, les soignants sont

de plus en plus sollicités pour les accompagner au terme de leur vie.

Aides médico psychologiques et aides-soignantes interviennent de concert dans la

démarche avec des formations initiales différentes, qui leur laissent peu de souvenirs. Ces

intervenants, tous diplômés, se retrouvent alors démunis.

Lorsque l’éclatement familial est une réalité, le soignant ne devient-il pas l’ami ? Cet

accompagnement n’est pas aisé au regard des représentations individuelles.

Confronté au cadre législatif, aux contraintes organisationnelles, au manque de temps

et à leurs propres exigences, les équipes semblent avoir besoin de repères.

Une aide dans la démarche s’impose. Là se pose la question de la place de la

formation continue, des personnes ressources et de l’utilisation des outils mis à disposition.

Au-delà de toutes ces difficultés, il existe des possibilités qui, pour l’instant, sont peu

exploitées. Les réseaux de soins palliatifs, les outils de formation créés par des gériatres…

peuvent aider à diffuser la culture palliative.

MOTS CLES :

Etablissement d’Hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD)

Soignants

Accompagnement de fin de vie

Formation

Réseau de soins palliatifs