volume iii, division iii: the spiritual creativity of the jewish people; jewish thought, mishnah and...
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World Union of Jewish Studies / האיגוד העולמי למדעי היהדות
/ לחידוש חקר משנתו של שפינוזה בצרפת RENOUVEAU DES ÉTUDES SPINOZISTES EN FRANCE Author(s): Gérard Israel and ג' ישראלSource: Proceedings of the World Congress of Jewish Studies / דברי הקונגרס העולמי למדעיVolume III, DIVISION III: THE SPIRITUAL CREATIVITY OF THE JEWISH ,היהדות, כרך הPEOPLE; JEWISH THOUGHT, MISHNAH AND TALMUD, RABBINIC LITERATURE, JEWISHPHILOSOPHY AND KABBALA; JEWISH LAW; HEBREW LITERATURE AND POETRY / ,כרך גחטיבה ג: יצירתו הרוחנית של עם ישראל: מחשבה יהודית, משנה ותלמוד, ספרות רבנית,... פילוסופיה עברית וקבלה; משפט עברי;שPublished by: World Union of Jewish Studies / האיגוד העולמי למדעי היהדותStable URL: http://www.jstor.org/stable/23522036 .
Accessed: 15/06/2014 01:00
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RENOUYEAU DES ETUDES SPINOZISTES EN FRANCE
Gerard Israel
Paris
C'etait, en 1970, le troisieme centenaire de la parution du Traite
theologico-politique de Spinoza. Ce texte longtemps meconnu n'a pas donne en France matiere ä de nombreuses etudes specifiques, du moins
jusqu' ä une date tres recente. Tout au plus les historiens du spinozime
s'y referaient-ils en mettant l'accent sur la partie purement politique. Les
tentatives visant ä rapprocher les concepts de l'Ethique de ceux du
Traite theologico-politique ont toujours ete considerees par la Sorbonne
comme artificielles et non philosophiques. Des efforts serieux dans ce sens
avaientpourtantete faits par Brochard1 et le Rabbin Wexler2 mais
ne servient de base ä aucune etude ulterieure serieuse. Spinoza n'avait-il
pas lui-meme exclu la religion du champ philosophique ?
L'Ethique, les ecrits reputes cartesiens, etaient les seuls ä inspirer les
historiens et les philosophes.
Certes, ces ecrits ont donne lieu, ä la fin du siecle dernier et jusqu'apres la deuxieme guerre mondiale, ä d'importantes etudes dont le souci
majeur etait de comprendre Spinoza dans sa determination cartesienne.
Citons entre beaucoup d'autres les travaux de Jules Lagneau (Quelques notes sur Spinoza, 1895), Victor Brochard (Philosophie Ancienne et
Moderne, 1912), Victor Delbos (Le spinozisme, 1916), Leon Brunschvicg
(Spinoza et ses contemporains— 1923) et M. Darbon (Etudes spinozistes
1946). Mais, malgre l'importance de ces etudes, l'auteur de l'Ethique etait
alors tenu par la Sorbonne pour un peu demoniaque, trop souvent
meprisant des concepts qui marquaient la philosophic du moment:
individu, liberte, experience, creation. Souvent meme l'ascendance juive de Spinoza valait ä sa philosophic des jugements peu amenes tels que celui porte par Foucher de Careil dans une introduction ä une " Refutation
inedite de Spinoza par Leibniz" (1854): parlant des influences cartesiennes
et... Kabbalistes sur Spinoza, Foucher de Careil ecrit:... "on congoit fort bien que cet accoumplement du cart esianisme et de la Kabbale dans un
cerveau vigoureux mais dijforme, ait produit VEthique".
1. Philosophie ancienne et moderne — Chapitre IV.
2. Dans Revue des etudes juives, n0 130, avril 1913.
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2 GERARD ISRAEL
Mais le Traite theologico-politique etait generalement considere par les historiens comme tout ä fait etranger ä la reflexion philosophique.
Or, c'est negativement dans le Traite theologico-politique que Ton
peut trouver les fondements meme du Systeme spinoziste non seulement
parce que c'est dans cet ouvrage que Spinoza autonomise le champ de la
Philosophie par opposition ä la religion, mais aussi parce que la critique de la religion ouvre, de fagon positive, les voies de la connaissance et en
fonde la legitimite. Certains travaux recents, dont nous allons essayer de donner un
rapide apergu, ont peut-etre Oriente la recherche dans le sens d'une
conception plus globale du spinozisme, incluant dans une meme optique tous les ecrits de l'auteur et acceptant dans toute sa complexite son
Systeme de reference. De ce dernier point de vue il n'est pas exagere de
dire que la lecture actuelle de Spinoza ne peut plus se faire en l'absence
d'une reflexion sur le judai'sme 3, ouen tout cas sans essayer de sortir du
cadre traditionnellement chretien dans lequel le spinozisme etait enferme
depuis que Hegel avait qualifie la philosophic de Spinoza de "christia
nisme sans Christ."
Nous nous attacherons tout d'abord ä rendre compte sommairement
des travaux de M. Sylvain Zac qui a, coup sur coup, en 1963 et en 1965, consacre deux ouvrages ä Spinoza.4
Dans son etude sur le Traite theologico-politique M. Zac prend au pied
de la lettre 1'afBrmation de Spinoza dans la preface du Traite theologico politique: "J'ai acquis V entiere conviction que VEcriture laisse la raison absolument libre et n'a rien de commun avec la philosophie mais que Vune
et I'autre se maintiennent par une force propre ä chacune."
M. Zac pense que Spinoza devra, dans la lecture qu'il propose de
l'Ecriture, mettre entre parentheses sa propre philosophie et assigne au Traite Theologico-politique la mission de circonscrire avec precision le domai nedelafoi laissant apparaitred'autrepart et a contrario le domaine de la raison. M. Zac refuse de voir dans le Traite theologico-politique une sorte de cryptogramme destine ä masquer les fleches empoisonnees que Spinoza decoche ä la religion.
M. Zac analyse avec beaucoup de finesse les deux fagons de contrevenir
3. II n'existe pas en France d'ouvrages comparables ä celui de H. Wolfsoii paru en 1934 ä Cambridge (Mass.).
4. "L'idee de vie dans la Philosophie de Spinoza" (PUF, Paris 1963) et "Spinoza et
]'interpretation de l'Ecriture" (PUF, Paris, 1965).
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ETUDES SPINOZISTES EN FRANCE 3
au sens de l'Ecriture qui sont denoncees par Spinoza. Tout d'abord la retorsion que, selon Spinoza, Maimonide fait subir aux textes bibliques en y introduisant une dimension rationnelle qui, ä son tour, prouvera
que la connaissance est possible. Pour Maimonide, Dieu est en effet" a la
fois le connaissant, le connu, et la connaissance elle-meme, le tout ne
faisant qu'un."5 Au contraire, pour Spinoza les textes sacres sont l'illustration d'un
savoir particulier qui touche ä la verite, comme tout savoir, mais dont
l'essence n'est pas universelle, c'est pourquoi l'Ecriture doit etre abordee
de fa?on critique. D'autre part, M. Zac reprend ce que Spinoza presente comme la
deuxieme fa?on de contrevenir au sens de l'Ecriture, celle qui consiste ä
echapper ä la signification interne du texte par l'exploitation des meta
phores dont la Bible est prodigue.
Apres avoir rappele les conceptions spinozistes de la prophetie et du
miracle, M. Zac concede que l'Ecriture, si eile n'impose aucune philo
sophie, est tout de meme le vehicule de la parole de Dieu, c'est-ä-dire ä la
fois un discours divin, l'expression des commandements divins et meme, chose divine. Mais la parole de Dieu vise ä l'obeissance et non ä la
connaissance, c'est-ä-dire qu'elle n'est pas un discours interpretatif de la
nature. La parole de Dieu inspire simplement l'obeissance et le senti
ment qui y est lie, c'est-ä-dire la foi. Avoir la foi c'est obeir ä Dieu sous le
benefice de la revelation prophetique et non pas sous l'empire de la
raison.
Apres avoir demontre que le prophetisme n'impose aucune philosophic,
que la parole de Dieu laisse le philosophe fibre de chercher par des voies
speculatives le chemin de la verite, que la verite, que la foi qui prend sa
source dans l'Ecriture n'a rien de commun avec l'amour intellectuel de
Dieu, Spinoza peut, selon M. Zac, conclure ä la totale liberte du philo
sophe, tant pour ce qui concerne le domaine de la verite que pour le
jugement qu'il pourra porter sur l'Ecriture, ä la condition toutefois qu'il
respecte la methode que tout homme sense doit s'imposer, c'est-ä-dire
celle qui consiste ä interpreter l'Ecriture par l'Ecriture.
Et M. Zac peut conclure son etude en affirmant: "Onpeut etre philo
sophe, c'est-ä-dire spinoziste, sans pour autant etre athee ou incroyant etant donneque la parole de Dieu ne comporte aucun contenu sp e'culatif."
La methode adoptee par M. Zac pour analyser le Traits theologico
politique est en elle-meme une petite revolution pour la philosophic
5. Livre de la Connaissatice — Chapitre II, Proposition X,
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frangaise. M. Zac prend au serieux le Traite theologico-politique, de
meme peut-on dire qu'il prend au serieux le concept de substance dans
I'Ethique... II a en effet consacre un autre ouvrage ä la notion de vie dans
la philosophic de Spinoza. Partant du postulat spinoziste de l'existence necessaire de Dieu, M.
Zac pose la question de savoir si ce postulat signifie que Dieu est vivant.
L'union necessaire en Dieu de la pensee et de l'etendue fait, selon M.
Zac, que Dieu vit de la meme fagon que l'homme en tant qu'il est
union necessaire de fame et du corps. En consequence, s'il y a la vie, Dieu a la vie. Mais la vie, comme tout ce qui est, procede necessairement
de la nature divine. Par consequent, non seulement Dieu vit mais encore il est la vie, c'est-a־dire qu'il est dispensateur de la vie par la puissance de
sa nature. Mais comment Dieu peut-il donner la vie si Ton ecarte le
postulat de la creation dont le mecanisme demiurgique n'a aucun sens
pour Spinoza ?
M. Zac explique que Dieu produisant les choses par l'effet de sa propre puissance, c'est la puissance divine (le conatus) qui est la vie. Mais qui ditvie dit conscience desoi. Or Spinoza retire äl'individu toute exis tence legitime dans sa philosophie. M. Zac resout cette difficulty en
soulignant que c'est parce que la connaissance est possible que la con
science l'est egalement, meme si elle ne se rapporte pas ä un sujet pensant individuel... Cette approche experimentale du spinozisme, parce que phenomenologique, n'aurait pas ete, il y a quelques annees encore,
acceptee par la Sorbonne.
Parmi les autres ouvrages qui, dans la ligne que nous avons definie, indiquent une nouvelle direction des etudes spinozistes, nous signalerons simplement la these de M. Andre Malet: "Le Traite theologico-politique et la pensee biblique" (Paris 1966) en attirant cependant !'attention sur le caractere un peu artificiel du concept de pensee biblique. Nous citerons egalement la belle etude de M. Jean Preposiet: "Spinoza et la liberte des hommes" (1967) dans laquelle M. Preposiet tente une analyse des rapports entre la substance infinie et la realite humaine qui le conduit ä opposer la necessite de la substance ä la liberte des hommes.
Mais l'evenement important de ces dernieres annees a ete la traduction
pour la premiere fois en frangais de la Grammaire hebraique de Spinoza par Joel Askenazi et Jocelyne Askenazi-Gerson.
On sait que dans cet ouvrage inacheve Spinoza traite l'hebreu comme une realite objective, c'est-a-dire, pour parier la langue d'aujourd'hui, comme une structure. Pour Spinoza, les lois de la langue sont aussi universelles que les lois de la nature. II parle d'une connaissance univer
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ETUDES SPINÖZtSTES EN FRANCE 5
seile de la langue hebra'ique qui suppose la possession de donnes et de
principes certains. II souligne que tous le mots de la Bible ont la valeur et la propriete du nom.
M. Joel Askenazi, dans son introduction, montre la fecondite de la reflexion de Spinoza sur la notion de nom lorsqu'elle est elargie au nom
propre et au nom de Dieu lui-meme.
Mais l'universite frangaise reste l'universite frangaise et conserve,
profondement ancree, une tradition cartesienne de lecture du spinozisme. II est certain que la recente parution du "Spinoza" de M. Martial
Gueroult, Professeur au College de France, constitue dans cette optique la plus riche etude moderne de l'Ethique.
Nous nous bornerons ä attirer l'attention sur les chapitres VIII ä XII
de cet ouvrage intitules respectivement: "Le Dieu cause" et "Le Dieu
effet". M. Gueroult attache, d'une fagon generale, une importance extreme ä l'ordre d,exposition des concepts et il a donne dans son oeuvre
anterieure une interpretation particuliere de la preuve de l'existence de
Dieu par les effets dans l'oeuvre de Descartes. Appliquer cette methode
au spinozisme s'impose tout naturellement puisque l'Ethique est eile
meme exposee more geometrico.
Apres avoir etabli comment il fallait concevoir l'intelligibilite complete de Dieu et les rapports entre l'entendement fini et l'entendement infini, M.
Gueroult fait une place importante dans 1'appendice nD 3 aux theses de
M. Wolfson dont il critique cependant le nominalisme, lui-meme tire,
d'apres M. Gueroult, de la tradition juive. En effet, M. Gueroult abordant le difficile probleme du passage de la
substance ä l'attribut, rejette categoriquement les tentatives de M.
Wolfson pour "phenomenaliser" les attributs. M. Gueroult pense qu'il y a un anachronisme dans cette tentative d'inspiration kantienne et que, de
meme, le nominalisme des auteurs juifs du Moyen-äge ne peut rendre
compte du Spinozisme. Est-il sür que Spinoza les ait beaucoup lus?
demande M. Gueroult, qui conclut sur ce point, qu'en aucune fagon pour
Spinoza l'entendement permet le passage de la substance aux attributs
pensee et etendue. De meme M. Gueroult critique Maimonide et ceux
qui le reprennent pour expliquer Spinoza en accordant une realite aux
attributs. Le defaut de cette fagon de voir est de "casser" la substance.
M. Gueroult critique avec la meme vigueur M. Wolfson lorsque ce
dernier assimile Dieu (Jehovah) ä la substance et Dieu (El Chadal) aux
attributs.
Pour M. Gueroult il y a chez Spinoza une homogeneite de la substance
qui s'enoncerait ainsi: Substantia, sive attributa sive Deus, sive Natura.
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6 GERARD ISRAEL
A la difference de Descartes pour qui Dieu est finalement incomprehensi
ble, Spinoza etablit que nous pouvons avoir une idee, certes non ex
haustive, mais claire et distincte de Dieu, done nous connaissons parfaite ment son essence absolue — voilä le Spinozisme.
Au terme de ce rapide panorama, disons quMl est indeniable que le
spinozisme connait un regain d'interet, voire meme d'actualite, en
il est interessant de constater que e'est ä travers un meilleur entendement
France et des sources juives de Spinoza que s'opere ce qu'il faut bien
appeler un redressement des etudes spinozistes.
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