10-06-2011

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BRUXELLES 2 SYNDICATS N°11 10 JUIN 2011 En front commun syndical contre la droite européenne! Au lendemain de la crise écono- mique et financière, nous n’enten- dions parler que de «régulation du marché» . Aujourd’hui, non seulement il n’a pas été mis en place de régulation stricte des marchés financiers mais l’on doit bien constater que la puissance publique a globalement reculé. Et on peut s’attendre au pire avec ce qu’annoncent le programme euro- péen de gouvernance économique et le «Pacte pour l’Euro» . Dans ce contexte très particulier, il a semblé important à la FGTB de Bruxelles de renouer avec la pra- tique du front commun syndical. C’est donc ensemble que la FGTB et la CSC de Bruxelles ont tenu, le 24 mai dernier, au Parlement bruxel- lois, une séance de sensibilisation à la problématique de la gouver- . e n n e é p o r u e e u q i m o n o c é e c n a n Y avaient été également conviés des représentants de tous les par- tis démocratiques représentés au Parlement régional. Au cours de cette séance, Ronald JANSSEN, de la Confédération euro- péenne des syndicats (C.E.S.), a fait un exposé éclairant sur les chan- gements – notamment pour le monde du travail – qu’induira cette nouvelle politique européenne. Il en ressort le constat d’une attaque frontale contre les travailleurs. En effet, c’est un tournant historique que l’Europe s’apprête à prendre, qui ferait basculer des questions sociales essentielles hors du champ de la démocratie. Sous couvert de maîtriser les dépenses publiques (mais sans toucher aux revenus du monde financier ni mettre en cause les mécanismes qui ont cau- sé la crise), ce que l’UE veut mettre en place, c’est un plan d’austérité permanente, «constitutionalisée» . Non seulement ce plan contient des attaques virulentes contre les travailleurs européens, mais sa mise en œuvre aggraverait la crise! Après analyse, ont été dégagées 5 raisons majeures de dire «non» à la droite européenne. 1. Nos démocraties soumises au contrôle de la Commission européenne et aux intérêts fi - nanciers Le pacte pour l’Euro augmenterait les prérogatives des institutions européennes quant aux choix nationaux de politique budgé- taire, prérogative essentielle des 27 parlements. La Commission se chargerait de contrôler «avant son adoption» le projet de budget de chaque Etat-membre, de vérifier s’il est bien conforme aux politiques néo-libérales de l’Union et, les cas échéant, de sanctionner les Etats par des amendes. Toute marge de manœuvre réelle dans le choix des politiques futures serait ainsi confisquée par avance... 2. Baisse des salaires et affai- blissement de la négociation collective Le pacte entend «réexaminer les dispositifs de fi xation des salai- res et, le cas échéant, le degré de centralisation du processus de né- gociation collective ainsi que les mécanismes d’indexation» . Que vise ici l’Europe? Nos C.C.T. natio- nales et sectorielles! L’idée est de décentraliser complètement (voire d’individualiser) la négociation des salaires. Le texte appelle encore à «veiller que les accords salariaux dans le secteur public viennent soutenir les efforts de compétiti- vité dans le secteur privé» . Pour atteindre ces objectifs, l’harmoni- sation sociale par le bas est claire- ment prônée: «les Etats-membres prendront comme référence les pays les plus performants, qu’il s’agisse des pays européens ou des principaux partenaires commer- ciaux comparables» . La perversité de ce mécanisme de comparaison de la compétitivité des salaires (c’est-à-dire des coûts salariaux) en fonction des partenaires com- merciaux réside dans le fait qu’elle formalise et légitime un dumping salarial permanent, en instaurant un mécanisme de détection des augmentations salariales trop éle- vées, au risque d’enclencher une spirale négative de dévaluation et de modération des salaires, en pre- nant comme modèles les pays «les plus performants», notamment l’Allemagne… l i a v a r t e d s p m e t u d é t i l i b i x e l F . 3 et affaiblissement du droit so- cial Comme à l’accoutumée, les règles qui protègent les travailleurs sont présentées comme des «lourdeurs administratives à éliminer» . Il faut «ouvrir davantage les secteurs pro- tégés, notamment dans le secteur des services et du commerce de détail, afin de renforcer la concur- rence» . Cela signifie tout bonne- ment que les règles qui protègent la fermeture du dimanche, par exemple, devraient être suppri- mées. Le pacte vise aussi à «ré- former le marché du travail et (à) favoriser la fl exicurité» , notam- ment en facilitant l’activation et les petits boulots. Il s’agit de pro- mouvoir l’emploi à tout prix, au risque de généraliser la pratique du travail précaire : chômeurs forcés d’accepter des emplois aux rému- nérations non-conventionnelles, augmentation du nombre des em- plois intérimaires avec des revenus moindres pour des compétences égales, etc. 4. Augmentation de l’âge de la retraite et encouragement à l’épargne privée Le pacte voudrait que l’on «adapte l’âge réel de départ à la retraite» en le liant automatiquement à l’accroissement de l’espérance de vie. Il veut aussi «limiter les ré- gimes de préretraite» , activer les plus de 55 ans et mettre en avant l’épargne privée comme alterna- tive à la pension par répartition. Il ne tient absolument pas compte de la pénibilité de l’emploi, ni de l’écart d’espérance de vie entre les travailleurs et les patrons, ni de la persistance du chômage massif, notamment des jeunes. Il vise à diminuer le montant des pensions légales. Cela augmenterait inévita- blement les inégalités face à la re- traite et condamnerait au chômage la grande majorité des travailleurs victimes de restructurations... e n U . 5 scalité favorable aux grandes fortunes et aux mul- tinationales Le pacte encourage, enfin, un rap- prochement des politiques na- tionales sur le plan fi scal, ce qui pourrait être positif en soi – avec, par exemple, la défi nition d’une «assiette commune pour l’impôt des sociétés» – si ce n’est qu’il ne franchit pas le pas décisif: la fi xa- tion d’un seuil minimum pour l’im- pôt des sociétés… La piste générale demeure d’alléger la fiscalité des entreprises et de faire payer da- vantage les citoyens: il faut que la scalité «contribue à la compétiti- vité des entreprises, sans incidence sur les recettes» et donc «accroître les impôts indirects, élargir la base d’imposition» , en clair: augmenter la T.V.A., cette fi scalité catastrophi- que en termes de redistribution! Le Pacte évite donc de traiter les véritables options pour une fi sca- lité juste: surpression des paradis scaux, instauration immédiate d’une taxe européenne sur les tran- sactions financières, etc. On le voit, une certaine Europe per- siste à vouloir faire payer la crise aux travailleurs, aux ménages, aux particuliers. La FGTB et la CSC ont appelé les partis politiques à re- fuser catégoriquement, via leurs eurodéputés mais aussi via le gouvernement fédéral, la logique européenne de l’austérité. Il s’agira notamment de refuser: les mesures de contrôle et de sanction ciblant les pays en déficit; les contraintes sur les politiques nationales de formation des salaires (en proté- Cotisations à partir du 01/07/2011 Hommes actifs 14,80 e Femmes actives 14,80 e Travailleurs et travailleuses à temps partiel 11,25 e Hommes au chômage complet 9,40 e Femmes au chômage complet 9,40 e Prépensionné(e)s 10,20 e Jeunes qui viennent de quitter l’école avec allocation d’attente Ateliers Protégeants 7,80 e Pensionné(e)s 3,90 e Malades: après 3 m. jusqu’à invalidité 9,40 e Invalides: après 12 m. de maladie 5,50 e Femmes de ménage - Sans papiers 3,90 e La Centrale Générale de Bruxelles-Vlaams Brabant geant l’indexation mais aussi le niveau des salaires dans la fonction publique); l’affaiblissement de la représentation des interlocuteurs sociaux; tout passage vers un sys- tème de pension par capitalisation. En outre, au contraire de la logique de diminution des budgets publics, nous demandons l’instauration de règles claires d’harmonisation scale permettant d’augmenter les ressources des Etats. Aujourd’hui, les syndicats ont obtenu une clause de sauvegarde portant sur les sa- laires (via l’affirmation que l’U.E. n’a pas de compétence en termes de régulation des salaires) mais l’essentiel des dangers est encore bien présent. L’occasion, pour le Secrétaire gé- néral de la FGTB de Bruxelles, d’appeler, en conclusion, toutes les centrales professionnelles à la mobilisation pour l’Euromanif du 21 juin prochain à Luxembourg…

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BRUXELLES2 SYNDICATS • N°11 • 10 JUIN 2011

En front commun syndical contre la droite européenne! Au lendemain de la crise écono-mique et fi nancière, nous n’enten-dions parler que de «régulation du marché». Aujourd’hui, non seulement il n’a pas été mis en place de régulation stricte des marchés fi nanciers mais l’on doit bien constater que la puissance publique a globalement reculé. Et on peut s’attendre au pire avec ce qu’annoncent le programme euro-péen de gouvernance économique et le «Pacte pour l’Euro» .

Dans ce contexte très particulier, il a semblé important à la FGTB de Bruxelles de renouer avec la pra-tique du front commun syndical. C’est donc ensemble que la FGTB et la CSC de Bruxelles ont tenu, le 24 mai dernier, au Parlement bruxel-lois, une séance de sensibilisation à la problématique de la gouver-

.enneéporue euqimonocé ecnanY avaient été également conviés des représentants de tous les par-tis démocratiques représentés au Parlement régional.

Au cours de cette séance, Ronald JANSSEN, de la Confédération euro-péenne des syndicats (C.E.S.), a fait un exposé éclairant sur les chan-gements – notamment pour le monde du travail – qu’induira cette nouvelle politique européenne. Il en ressort le constat d’une attaque frontale contre les travailleurs. En e�et, c’est un tournant historique que l’Europe s’apprête à prendre, qui ferait basculer des questions sociales essentielles hors du champ de la démocratie. Sous couvert de maîtriser les dépenses publiques (mais sans toucher aux revenus du monde fi nancier ni mettre en cause les mécanismes qui ont cau-sé la crise), ce que l’UE veut mettre en place, c’est un plan d’austérité permanente, «constitutionalisée». Non seulement ce plan contient des attaques virulentes contre les travailleurs européens, mais sa mise en œuvre aggraverait la crise! Après analyse, ont été dégagées 5 raisons majeures de dire «non» à la droite européenne.

1. Nos démocraties soumises au contrôle de la Commission européenne et aux intérêts fi -nanciers

Le pacte pour l’Euro augmenterait les prérogatives des institutions européennes quant aux choix nationaux de politique budgé-taire, prérogative essentielle des 27 parlements. La Commission se chargerait de contrôler «avant son adoption» le projet de budget de chaque Etat-membre, de vérifi er s’il est bien conforme aux politiques néo-libérales de l’Union et, les cas échéant, de sanctionner les Etats par des amendes. Toute marge de manœuvre réelle dans le choix des politiques futures serait ainsi confi squée par avance...

2. Baisse des salaires et a�ai-blissement de la négociation collective

Le pacte entend «réexaminer les

dispositifs de fi xation des salai-res et, le cas échéant, le degré de centralisation du processus de né-gociation collective ainsi que les mécanismes d’indexation». Que vise ici l’Europe? Nos C.C.T. natio-nales et sectorielles! L’idée est de décentraliser complètement (voire d’individualiser) la négociation des salaires. Le texte appelle encore à «veiller que les accords salariaux dans le secteur public viennent soutenir les e�orts de compétiti-vité dans le secteur privé» . Pour atteindre ces objectifs, l’harmoni-sation sociale par le bas est claire-ment prônée: «les Etats-membres prendront comme référence les pays les plus performants, qu’il s’agisse des pays européens ou des principaux partenaires commer-ciaux comparables» . La perversité de ce mécanisme de comparaison de la compétitivité des salaires (c’est-à-dire des coûts salariaux) en fonction des partenaires com-merciaux réside dans le fait qu’elle formalise et légitime un dumping salarial permanent, en instaurant un mécanisme de détection des augmentations salariales trop éle-vées, au risque d’enclencher une spirale négative de dévaluation et de modération des salaires, en pre-nant comme modèles les pays «les plus performants», notamment l’Allemagne…

liavart ed spmet ud étilibixelF .3et a�aiblissement du droit so-cial

Comme à l’accoutumée, les règles qui protègent les travailleurs sont présentées comme des «lourdeurs administratives à éliminer» . Il faut «ouvrir davantage les secteurs pro-tégés, notamment dans le secteur des services et du commerce de détail, afi n de renforcer la concur-rence» . Cela signifi e tout bonne-ment que les règles qui protègent la fermeture du dimanche, par exemple, devraient être suppri-mées. Le pacte vise aussi à «ré-former le marché du travail et (à) favoriser la fl exicurité» , notam-ment en facilitant l’activation et les petits boulots. Il s’agit de pro-mouvoir l’emploi à tout prix, au risque de généraliser la pratique du travail précaire : chômeurs forcés d’accepter des emplois aux rému-nérations non-conventionnelles, augmentation du nombre des em-plois intérimaires avec des revenus moindres pour des compétences égales, etc.

4. Augmentation de l’âge de la retraite et encouragement à l’épargne privée

Le pacte voudrait que l’on «adapte l’âge réel de départ à la retraite» en le liant automatiquement à l’accroissement de l’espérance de vie. Il veut aussi «limiter les ré-gimes de préretraite», activer les plus de 55 ans et mettre en avant l’épargne privée comme alterna-tive à la pension par répartition. Il ne tient absolument pas compte de la pénibilité de l’emploi, ni de l’écart d’espérance de vie entre les

travailleurs et les patrons, ni de la persistance du chômage massif, notamment des jeunes. Il vise à diminuer le montant des pensions légales. Cela augmenterait inévita-blement les inégalités face à la re-traite et condamnerait au chômage la grande majorité des travailleurs victimes de restructurations...

fi enU .5 scalité favorable aux grandes fortunes et aux mul-tinationales

Le pacte encourage, enfi n, un rap-prochement des politiques na-tionales sur le plan fi scal, ce qui pourrait être positif en soi – avec, par exemple, la défi nition d’une «assiette commune pour l’impôt des sociétés» – si ce n’est qu’il ne franchit pas le pas décisif: la fi xa-tion d’un seuil minimum pour l’im-pôt des sociétés… La piste générale demeure d’alléger la fi scalité des entreprises et de faire payer da-vantage les citoyens: il faut que la fi scalité «contribue à la compétiti-vité des entreprises, sans incidence sur les recettes» et donc «accroître les impôts indirects, élargir la base d’imposition» , en clair: augmenter la T.V.A., cette fi scalité catastrophi-que en termes de redistribution! Le Pacte évite donc de traiter les véritables options pour une fi sca-lité juste: surpression des paradis fi scaux, instauration immédiate d’une taxe européenne sur les tran-sactions fi nancières, etc.

On le voit, une certaine Europe per-siste à vouloir faire payer la crise aux travailleurs, aux ménages, aux particuliers. La FGTB et la CSC ont appelé les partis politiques à re-fuser catégoriquement, via leurs eurodéputés mais aussi via le gouvernement fédéral, la logique européenne de l’austérité. Il s’agira notamment de refuser: les mesures de contrôle et de sanction ciblant les pays en défi cit; les contraintes sur les politiques nationales de formation des salaires (en proté-

Cotisations à partir du 01/07/2011

Hommes actifs 14,80 e

Femmes actives 14,80 e

Travailleurs et travailleuses à temps partiel 11,25 e

Hommes au chômage complet 9,40 e

Femmes au chômage complet 9,40 e

Prépensionné(e)s 10,20 e

Jeunes qui viennent de quitter l’école

avec allocation d’attente

Ateliers Protégeants 7,80 e

Pensionné(e)s 3,90 e

Malades: après 3 m. jusqu’à invalidité 9,40 e

Invalides: après 12 m. de maladie 5,50 e

Femmes de ménage - Sans papiers 3,90 e

La Centrale Générale de Bruxelles-Vlaams Brabant

geant l’indexation mais aussi le niveau des salaires dans la fonction publique); l’a�aiblissement de la représentation des interlocuteurs sociaux; tout passage vers un sys-tème de pension par capitalisation. En outre, au contraire de la logique de diminution des budgets publics, nous demandons l’instauration de règles claires d’harmonisation fi scale permettant d’augmenter les ressources des Etats. Aujourd’hui, les syndicats ont obtenu une clause de sauvegarde portant sur les sa-

laires (via l’affi rmation que l’U.E. n’a pas de compétence en termes de régulation des salaires) mais l’essentiel des dangers est encore bien présent.

L’occasion, pour le Secrétaire gé-néral de la FGTB de Bruxelles, d’appeler, en conclusion, toutes les centrales professionnelles à la mobilisation pour l’Euromanif du 21 juin prochain à Luxembourg…