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www .fr .wikipedia.or g/wiki/acceuil (rubrique société) 39 @ INTERNET Les fondements des échanges internationaux I Le libre-échange A. Les théories traditionnelles du commerce international B. Les nouvelles théories du commerce international C. Le libre-échange en débat II Le protectionnisme A. Les instruments du protectionnisme B. La justification du protectionnisme C. Les coûts du protectionnisme Chapitre 2 D epuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’ouverture des économies aux échanges internationaux s’est accompagnée d’une phase de croissance économique sans précédent. Les faits semblent ainsi vérifier les effets positifs quant au bien-être mis en avant par les théoriciens du libre-échange. Ces auteurs vont fournir diverses explications complémentaires sur l’intérêt de la spécialisation et ses effets sur l’économie mondiale. Pourtant, malgré de nettes avancées, le libre-échange n’est pas encore une pratique totalement généralisée, même parmi les pays les plus libéraux comme les États-Unis. Le protectionnisme a été et reste préconisé par d’autres auteurs. Il est généralement présenté comme un moyen nécessaire à la mise en place d’une politique de développement dans les pays du tiers-monde ou à la reconversion de secteurs industriels dans les pays développés. De nombreuses controverses subsistent sur les avantages et les inconvénients respectifs de ces deux politiques.

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www.fr.wikipedia.org/wiki/acceuil(rubrique société)

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@I N T E R N E T

Les fondements des échangesinternationaux

I Le libre-échange A. Les théories traditionnelles du commerce internationalB. Les nouvelles théories du commerce internationalC. Le libre-échange en débat

II Le protectionnisme A. Les instruments du protectionnismeB. La justification du protectionnismeC. Les coûts du protectionnisme

C h a p i t r e 2

D epuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’ouverture des économiesaux échanges internationaux s’est accompagnée d’une phase de

croissance économique sans précédent. Les faits semblent ainsi vérifier les effets positifs quant au bien-être mis en avant par les théoriciens du libre-échange.Ces auteurs vont fournir diverses explications complémentaires sur l’intérêt de la spécialisation et ses effets sur l’économie mondiale.Pourtant, malgré de nettes avancées, le libre-échange n’est pas encoreune pratique totalement généralisée, même parmi les pays les plus libéraux comme les États-Unis.Le protectionnisme a été et reste préconisé par d’autres auteurs. Il est généralement présenté comme un moyen nécessaire à la mise en place d’une politique de développement dans les pays du tiers-monde ou à la reconversion de secteurs industriels dans les pays développés.De nombreuses controverses subsistent sur les avantages et les inconvénients respectifs de ces deux politiques.

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Les fondements des échanges internationauxChapitre 2 40

1. Quel est l’avantage reconnu au libre-échange ?

2. Bénéficie-t-il à tous les pays de manière identique ?

3. Des freins au libre-échange existent-ils toujours ?

Le libre-échangeLe libre-échange est une doctrine économique qui préconise la libertédes échanges internationaux de biens, de services et de capitaux. Ils’oppose donc à toutes formes d’entraves qui limiteraient le commerceinternational. Selon cette théorie, la spécialisation qui en résulte per-met aux différents pays d’être plus efficients et contribue à la richessedes nations.

A Les théories traditionnelles du commerce internationalCes théories considèrent que les nations se spécialisent dans les productions pour lesquelles les coûts sont les plus bas. La division internationale du travail qui en résulte permet de parvenir à une situation optimale.

1. La théorie des avantages absolus (A. Smith)Les avantages de la spécialisation et de l’échange international ont été misen évidence à la fin du XVIIIe siècle par Adam Smith (1723-1790), auteurclassique anglais. Il fonde son analyse sur les avantages absolus de coûtqu’un pays peut posséder sur un autre pays :– Un pays a intérêt à se spécialiser dans la production des biens pourlesquels ses coûts de fabrication sont plus faibles qu’à l’étranger et àimporter ceux pour lesquels ses coûts sont plus élevés.– Cette spécialisation permet la réalisation d’une production mondiale opti-male puisque les biens sont produits là où les coûts sont les plus bas, etmet en place une division internationale du travail (DIT) entre les diffé-rentes nations.La théorie des avantages absolus comporte cependant un inconvénientmajeur : comment un pays dont les coûts de production sont plus élevéspour tous les biens peut-il commercer ?

2. La théorie des avantages comparatifs (D. Ricardo)Un autre économiste anglais, David Ricardo (1772-1823), complète lathéorie de Adam Smith :– Un pays a toujours intérêt à se spécialiser dans la production pourlaquelle il possède un avantage relatif, c’est-à-dire un avantage le plusélevé en termes de coût ou un désavantage le moins élevé.– La spécialisation et le commerce international sont expliqués par des coûtset donc des techniques de production différentes.– Les nations obtiennent, grâce à l’échange international, une quantité debiens plus importante que celle dont elles disposaient sans échange. Ellesbénéficient ainsi d’un gain de bien-être.

3. La théorie des dotations de facteurs (Heckscher et Ohlin)Deux auteurs suédois, Eli Heckscher (1919) et Bertil Ohlin (1930), pour-suivant la théorie ricardienne, ont cherché à expliquer la configuration des échanges.Selon eux, les avantages comparatifs ne proviennent pas uniquement de laproductivité du travail mais de l’ensemble des facteurs de production(capital, terres, ressources minérales) dont dispose un pays.Les Canadiens exportent, par exemple, des produits forestiers vers les États-Unis, non parce que les bûcherons canadiens sont plus efficaces que les bûche-rons américains, mais parce que le Canada est richement doté en ressourcesforestières.

CP

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I

David Ricardo(1772-1823)

Économiste classique anglais,auteur Des principes de l’économiepolitique et de l’impôt (1817).

Théoricien de l’économie demarché, il développe les travaux de son prédécesseur, Adam Smith.

Sa théorie de l’échangeinternational demeure le pilier du libre-échangisme.

En écho à la fameuse «maininvisible » de Smith, il écrivait :«Dans un système de parfaite libertédu commerce, chaque pays consacrenaturellement son capital et sontravail aux emplois qui lui sont le plus avantageux. La recherche de son avantage propre s’accordeadmirablement avec le bienuniversel. »

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© Rue des Archives.

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Les relations économiques internationalesPartie I 41

Les coûts comparatifsPour démontrer sa théorie, D. Ricardo présente la situation suivante qui exprime les conditions de production de deux produits – le vin et le drap – par deux pays – le Portugal et l’Angleterre :

• Le Portugal a besoin de 80 heures de travail pour produire une unité de vin et de 90 heures pour fabriquer une unité de drap.

• L’Angleterre a besoin de 120 heures de travail pour produire une unité de vin et de 100 heures pour fabriquer une unité de drap.

PRATIQUE

1. Montrez que la théorie des avantages absolus nepeut être explicative d’échanges internationauxdans le cas présent.

2. Calculez le coût total de production d’une unitéde vin et de drap pour chacun des pays, puis lecoût total pour les deux pays, dans l’hypothèsed’une absence de spécialisation et d’échanges.

3. Expliquez pourquoi le Portugal va se spécialiserdans le vin et l’Angleterre dans le drap.

4. Calculez le coût total de production de deuxunités de vin par le Portugal et de deux unitésde drap par l’Angleterre, puis le coût total pour les deux pays dans l’hypothèse d’unespécialisation et d’échanges internationaux.

5. Déduisez de ces calculs les gains que permetl’échange international.

6. Comment ces gains peuvent-ils se répartir entre les deux pays ?

Production Productiond’une unité de vin d’une unité de drap

Portugal 80 heures de travail 90 heures de travail

Angleterre 120 heures de travail 100 heures de travail

La problématique du libre-échange

L’essor des échanges internationaux ces vingt dernièresannées, deux fois plus rapide que celui du PIB mondialréel (6 % contre 3 %), a accéléré l’intégration économiqueet relevé les niveaux de vie. Beaucoup de pays en dévelop-pement ont pris part à ce processus, qui leur a permis deresserrer l’écart qui les sépare des pays riches et de devenir,en tant que groupe, un acteur important du commercemondial. Leurs échanges ont augmenté plus vite que ceuxdes autres groupes et leurs relations commerciales ontprofondément changé par rapport au schéma traditionnelNord-Sud.

Ils assurent désormais près d’un tiers du commerce mon-dial, beaucoup d’entre eux ont fortement accru leursexportations de produits manufacturés et de services, et40 % de leurs exportations vont aujourd’hui à d’autrespays en développement. Toutefois, bon nombre de pays àfaible revenu n’ont toujours pas intégré l’économie mon-diale – sous l’effet conjugué de contraintes externes etinternes – et les plus pauvres d’entre eux ont même vuleur part des échanges mondiaux diminuer. En dépit decet acquis, le système commercial mondial doit encorerelever de formidables défis.

Premièrement… la protection resteraélevée et concentrée sur des domaines quiprésentent un intérêt particulier pour lespays en développement. Dans l’agriculture,seuls des progrès limités ont été accomplisdans la réduction des droits élevés et dessubventions qui faussent les échanges.

Deuxièmement, suite aux progrès de l’in-tégration économique et au recul des tarifsdouaniers et des restrictions quantitatives àl’importation, l’attention s’est déplacée versd’autres obstacles au commerce qui tou-chent aux politiques nationales, tels que lessubventions industrielles, les droits de lapropriété intellectuelle ou, plus récemment,l’investissement et la politique de la concur-rence. n

Anne MC GUIRK, « Le programme de Doha », Finances et développement, septembre 2002.

[ Le commerce a été un moteur de la croissance au cours du demi-siècle écoulé… ]

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Les fondements des échanges internationauxChapitre 2 42

1. Que signifie « avoir des dotationsfactorielles peu différentes » ?

2. Définissez les notions de commerceinternational interbranche et intrabranche.

3. Relevez et expliquez les phénomèneséconomiques qui ne sont pas pris encompte par les théories traditionnellesdu commerce international.

1. Définissez la notion d’économied’échelle et illustrez-la en recourant au tableau ci-contre.

2. Expliquez le mécanisme qui permetune amélioration du bien-être par le biais des échanges internationaux.

3. En supposant qu’en autarcie lesniveaux de production nationaux,compte tenu du marché intérieur,soient de 5 gadgets pour la Grande-Bretagne et de 10 gadgets pour les États-Unis, décrivez le mécanisme qui se mettra en œuvre en cas d’ouverture des frontières.

Les pays vont se spécialiser et exporter des produits qui nécessitent desfacteurs de production relativement abondants chez eux (et donc peu coûteux) et importer des produits recourant à des facteurs de productionrelativement rares (et donc onéreux).

B Les nouvelles théories du commerce internationalCes nouvelles théories se démarquent des théories traditionnelleset cherchent à expliquer les échanges de produits similaires entre les pays. L’existence d’économies d’échelle et la recherchede différenciation de firmes oligopolistiques, l’unification croissantedu marché mondial et les stratégies des firmes multinationalesen sont les déterminants principaux.

Il apparaît de plus en plus que les théories traditionnelles sont incapablesd’expliquer les caractéristiques du commerce international actuel. En particulier, la théorie des coûts comparatifs est explicative des échangesdits « interbranches » alors qu’aujourd’hui, plus de la moitié des échangessont « intrabranches ».À la suite de nombreux autres auteurs, Paul R. Krugman met particulièrementl’accent sur les économies d’échelle et la différenciation des produits pourexpliquer ces échanges.

1. Économies d’échelle et commerce internationalLes économies d’échelle (ou rendements croissants) expriment une réductiondu coût moyen du produit lorsque la quantité fabriquée augmente.Les firmes les plus efficaces dans un type de production ont donc intérêt à se spécialiser, à accroître leur volume de production pour réduire leur coût. Elles se trouvent alors plus compétitives et peuvent exporter leur production. À terme, seules les plus grosses firmes resteront efficientes et formeront unmarché mondial oligopolistique.

2. Marchés oligopolistiques et différenciation des produitsSur ces marchés oligopolistiques, les firmes cherchent à différencier leursproduits pour bénéficier d’une situation de monopole. De la sorte, des pro-duits de variétés différentes peuvent être proposés aux consommateurs etfont l’objet d’échanges intrabranches : certains consommateurs français achè-teront des véhicules Renault mais d’autres préféreront Fiat ou BMW… ; desconsommateurs italiens ou allemands achèteront des véhicules Peugeot…

3. La stratégie des firmes multinationalesL’influence des firmes multinationales est absente des analyses tradition-nelles du commerce international. Or, le développement des firmes multinationales a un impact important surles échanges internationaux en générant des flux déterminés par les stratégiesmises en œuvre :– Lorsqu’il s’agit d’assurer une présence sur les marchés étrangers,l’implantation d’une firme aura pour effet de réduire les flux d’échangesinternationaux initiaux (production sur place et réduction des exportationsdu pays d’origine).– Toutefois, aujourd’hui, les échanges entre les filiales de groupes multi-nationaux représentent plus du tiers du commerce mondial. Les raisons sontmultiples : taux d’imposition différents selon les pays, spécialisation desfiliales, coût de la main-d’œuvre, etc.

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Les relations économiques internationalesPartie I 43

Les insuffisances desthéories traditionnelles

w Contrairement aux enseignements de la théorie tradi-tionnelle, le commerce international se développe le plusentre les nations les plus développées dont les dotationsfactorielles sont peu différentes. Il s’agit donc d’un commerce entre nations très peu différenciées les unesdes autres, alors que la théorie traditionnelle met aucontraire en avant le rôle des caractéristiques différentesdes nations pour expliquer l’échange international.

w La part du commerce international intrabranche, quiexiste lorsqu’un pays importe et exporte simultanémentles mêmes biens dans le commerce mondial, est très significative et est la plus dynamique. La théorie tradition-nelle n’a pas d’explication à proposer d’un tel phénomènequi est incompatible avec sa vision de la spécialisationinternationale.

w La théorie traditionnelle ne laisse aucune place aux firmesmultinationales et au commerce intrafirme dans sonschéma, puisque ce sont les nations et elles seules quiéchangent. Cependant, les échanges entre des filiales defirmes multinationales implantées dans des pays diffé-rents représentent plus du tiers du commerce mondialde marchandises dans les années 1980.

M. RAINELLI, La Nouvelle Théorie du commerce international,

coll. « Repères », La Découverte, 2003.

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Économie d’échelle et commerce internationalE n pratique beaucoup d’in-

dustries sont caractériséespar des économies d’échelle (onparle aussi de rendements crois-sants) : la production est alorsd’autant plus efficiente quel’échelle sur laquelle elle estfaite est importante. Lorsqu’ily a des économies d’échelle, lefait de doubler les intrants (1)

dans une industrie augmentela production de cette indus-trie de plus du double…Nous pouvons utiliser cetexemple pour voir commentles économies d’échelle don-nent naissance à un échangeinternational. Imaginons unmonde composé de deux pays,l’Amérique et la Grande-

Bretagne, qui ont tous deux la même technologie pour laproduction de gadgets. Sup-posons en outre qu’au départchaque pays produit 10 gad-gets. Le tableau montre quececi demande 15 heures de tra-vail dans chaque pays : dans lemonde entier, 30 heures de travail sont utilisées pour pro-

duire 20 gadgets. Supposonsmaintenant que nous concen-trions la production mondialede gadgets dans un seul pays,par exemple l’Amérique, oùnous continuons à employer30 heures de travail. Dans unseul pays, ces 30 heures de tra-vail peuvent produire 25 gad-gets. Ainsi, en concentrant la

production en Amérique, l’éco-nomie mondiale peut, avec lamême quantité de travail, produire 25 % de gadgets enplus. n

P. R. KRUGMAN, M. OBSTFELD,Économie internationale,

De Boeck Université, 1996.

1. nda : intrants = facteurs de production.

Relation des intrants à la production dans une industrie hypothétique

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51015202530

101520253035

21,51,331,251,21,16

Production Intrants de travail (heures) Intrant moyen de travail

Le commerce international est dit interbranche si la nation considérée exporte des biens

différents de ceux qu’elle importe, par exemplele vin et le drap dans l’exemple de

David Ricardo. En revanche, l’importation et l’exportation simultanées de vin (ou de drap) est une situation de commerce intrabranche.

Les études empiriques menées dans ce domainemontrent premièrement que la part du commerce

intrabranche atteint, dans les années quatre-vingt, environ 50 % du commerce

international des pays développés etdeuxièmement que ce pourcentage a crusignificativement depuis les années 1960.

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Les fondements des échanges internationauxChapitre 2 44

1. Identifiez les deux causes majeures de l’implantation des firmes multinationales.

2. Relevez-en les conséquences sur la localisation des firmes.

1. Le libre-échange est-il favorable à la croissance ?

2. Pourquoi le libre-échange est-il un « vecteur » d’inégalités ? Comment pourrait-on y répondre ?

C Le libre-échange en débatÀ terme, les théoriciens du libre-échange considèrent que le commerce mondial permet une amélioration globale du bien-être des pays participant aux échanges. Pourtant de nombreuses questions restent controversées.

1. Le libre-échange est-il un facteur de croissancepour tous les pays ?

L’échange international est favorable à la croissance de l’économie mondiale.La division internationale du travail accroît l’efficacité des firmes, et laconcurrence mondiale incite à l’amélioration de la productivité. Toutefois, les gains réalisés au niveau mondial ne sont pas nécessairementbien répartis entre les différents pays. Les nouveaux pays industrialisés ont su bénéficier d’une stratégie de dévelop-pement axée sur l’insertion dans l’économie mondiale. En revanche, ces der-nières années ont été marquées par un appauvrissement relatif de nombreuxpays du tiers-monde. L’ouverture des échanges doit donc être accompagnéed’une politique de développement très volontariste.

2. La libéralisation des échanges est-elle un facteurde chômage ?

La concurrence internationale est devenue plus vive avec l’ouverture progres-sive des frontières. En France, par exemple, de nombreux secteurs économiques (sidérurgie,textile, habillement, etc.) ont subi la concurrence de pays dits « émergents »où les coûts de production sont nettement plus bas. La conséquence a étéla destruction de plusieurs centaines de milliers d’emplois. Le libre-échangeengendre donc un coût social important pour certaines régions.Par contre, de nouveaux débouchés se créent dans d’autres secteurs où laFrance reste compétitive (aéronautique, industries agricoles et alimentaires,automobile, etc.). Le commerce international a donc pour effet de trans-former la structure productive du pays.

3. Commerce international et environnementDe nombreux auteurs s’interrogent sur le coût écologique de l’expansion du commerce mondial. Pour bénéficier au maximum de leurs avantages comparatifs, les pays producteurs de matières premières ont tendance àintensifier leur production avec des conséquences négatives graves pourl’environnement : épuisement de ressources naturelles non renouvelables(pétrole, minerais) ou surexploitation de ressources renouvelables (poissons,eau, etc.).

Le protectionnismeLe protectionnisme est à la fois une doctrine et une politique économiques.Il vise à favoriser la production nationale et à décourager la concurrenceétrangère. Malgré les avantages généralement reconnus au libre-échange,le protectionnisme reste une pratique courante.

A Les instruments du protectionnismeLes pratiques protectionnistes visent à défavoriser les importationsde produits étrangers et à encourager les exportations des firmesnationales. On distingue trois grands types d’instrument : les barrièrestarifaires, les barrières non tarifaires et le protectionnisme monétaire.

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Des entreprises multinationales pour un marché mondial ?

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Deux logiques peuvent être à l’origine du développementinternational des firmes.

l La première est d’accéder au mar-ché : une implantation facilite toujoursle développement des ventes. Ellerend les clients plus confiants et per-met de mieux connaître le marchélocal. Elle incite les décideurs publicsà adopter un comportement plus favo-rable. La seconde raison est de pro-duire plus efficacement. Dans uncontexte où le coût des transports etdes télécommunications est orientéà la baisse, les firmes cherchent à pro-fiter des avantages comparatifs desdifférentes régions du monde. Maison se tromperait en pensant que ladivision internationale du travail entresites disséminés dans de multiplespays du monde est le modèle le plusrépandu.

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Les relations économiques internationalesPartie I 45

l En pratique, le développement international des firmes vise surtout à tirer les bénéfices classiques liés à la dimension. Elles peuvent ainsi allonger les séries produites et bénéficier d’économiesd’échelle croissantes. Elles disposent de meilleurs rapports de forceavec leurs fournisseurs et leurs distributeurs et d’une plus forte noto-riété vis-à-vis du consommateur final. En termes organisationnels,on observe surtout des spécialisations par produit, chaque usinefabriquant intégralement un produit ou une gamme de produits poursa région, voire pour l’ensemble du monde. La libre circulation desmarchandises permet d’allonger les séries de chaque établissement,tout en apparaissant aux yeux des consommateurs et des États commeune marque « locale ».l En bonne logique, les firmes transnatio-nales devraient plutôt chercher à vendredans les pays riches, là où sont les princi-paux marchés, et produire dans les payspauvres, où les salaires sont les plus bas.Cette logique s’applique à de nombreux pro-duits, comme les chaussures de sport, laconfection, l’assemblage électronique…Mais elle ne doit pas être généralisée. Lesactivités mettant en œuvre des équipementscoûteux et une main-d’œuvre qualifiéedemeurent localisées dans les régions lesplus développées. Là sont les savoir-fairepour produire et les marchés les plus vastes.l Et puisqu’on peut produire pour l’en-semble du marché mondial à partir d’unseul point de la planète, certaines firmesn’ont même plus besoin de multiplier lesimplantations : Microsoft concentre la quasi-totalité de ses activités à Seattle.

l Certes, les investissements en direction de l’Asie se sont specta-culairement développés durant les années 1990, mais la raison n’enétait pas seulement la faiblesse des salaires locaux. La Chine s’esteffectivement spécialisée dans la vente à bas prix de sa main-d’œuvreaux firmes étrangères. Mais une grande partie des multinationalesqui ont investi dans la région étaient surtout attirées par la crois-sance rapide de la zone et par la progression du pouvoir d’achat despopulations. Plutôt que de délocalisations, il vaudrait mieux parlerde relocalisation : l’Asie est devenue un des pôles moteurs du déve-loppement du capitalisme. n

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La liberté profite au plus fort

L ’ouverture des marchés contribue effectivement à rendre l’économie plusproductive : la mise en concurrence fait disparaître les producteurs les moins

efficaces, et l’élargissement des marchés encourage une spécialisation quiengendre des économies d’échelle. Mais cette belle mécanique profite d’abord auxplus forts, qu’il s’agisse des individus, des firmes, des territoires ou des pays.

L’ouverture des frontières favorise un mouvement de polarisation de la richesse.Cela peut se lire au niveau des pays (les nations les plus développées concentrentles activités à haute valeur ajoutée), des territoires (au profit des grandesmétropoles), des firmes (les multinationales accèdent à tous les marchés etorganisent à leur profit la division internationale du travail), et des hommes (lesplus qualifiés profitent de l’ouverture tandis que les moins qualifiés sont mis enconcurrence). Le libre-échange est donc un vecteur d’inégalités quand aucune règlecommune ou aucune politique compensatoire ne vient en tempérer les effets.

À l’inverse, il peut se révéler profitable lorsqu’il met en concurrence des agentséconomiques aux performances voisines, et que des mécanismes collectifsredistribuent une partie des gains d’efficacité qui en résultent, des gagnants versles perdants, afin de les aider à se remettre à niveau. Autrement dit : on peuttrouver avantageux d’acheter des produits textiles à bas prix, mais on doit aussiaccepter de payer les impôts nécessaires pour faciliter la reconversion des salariésvictimes des délocalisations. n

Philippe FRÉMEAUX, Alternatives économiques, hors-série n° 59, 1er trimestre 2004.

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Philippe FRÉMEAUX, in « L’état de l’économie en 2000 », Alternatives économiques, hors-série n° 44, 2e trimestre 2000.

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Les fondements des échanges internationauxChapitre 2 46

1. Analysez les causes du déclin de l’emploi industriel.

2. Analysez les conséquences de la recherche de compétitivité à tout prix.

3. Justifiez l’interrogation de l’auteur surle coût écologique de l’accroissementdes échanges internationaux.

Expliquez le mode de fonctionnement desmesures protectionnistes présentées dansle texte.

1. Les barrières tarifairesElles consistent à élever artificiellement le prix d’un produit importé en luiimposant une taxe appelée « droit de douane ».En rendant plus chers les produits étrangers, cette pratique cherche soit àen réduire la consommation nationale, soit à l’orienter vers des produitsnationaux devenus plus compétitifs.

2. Les barrières non tarifairesElles regroupent un nombre important de mesures qui produisent des effetsdirects ou des effets indirects beaucoup plus insidieux sur le volume d’impor-tations :– Les contingents (ou quotas d’importations) fixent des limites quanti-tatives maximales à l’importation de catégories de produits.– Les barrières techniques sont mises en place par l’obligation de respectercertaines « normes » de qualité ou labels. Ces normes contraignent géné-ralement les entreprises étrangères à fabriquer des séries plus courtes etdonc plus coûteuses destinées aux exportations vers le pays qui dicte cesnormes. Les délais d’homologation sont aussi très longs.– Les barrières administratives ont pour objet d’accroître le coût duproduit ou de rallonger les délais d’entrée sur le territoire national par desformalités administratives lourdes et pénalisantes.– Les restrictions volontaires d’exportation sont des mesures par lesquellesles pouvoirs publics d’un pays importateur s’entendent avec ceux d’un paysexportateur en vue de restreindre le volume d’exportation de ce dernier.Elles résultent généralement de pressions du pays importateur, le terme« volontaire » signifiant simplement qu’il s’agit d’accords bilatéraux. Ces mesures se sont multipliées ces deux dernières décennies.– Les subventions à l’exportation, versées par l’État, permettent aux entre-prises nationales qui en bénéficient de réduire artificiellement leurs coûtset d’abaisser leur prix de vente à l’étranger.

3. Le protectionnisme monétaire (ou dumping monétaire)Cette forme de protectionnisme, très pratiquée par les NPI pour assurer leurdécollage industriel, consiste à maintenir la parité de la monnaie nationaleà un cours artificiellement bas pour être compétitif sur les marchés mon-diaux et favoriser les exportations.

B La justification du protectionnisme Le protectionnisme est justifié pour permettre le développement ou la reconversion d’industries nationales qui ne supporteraient pas la concurrence étrangère.

1. La protection des « industries dans l’enfance » (F. List)Cette théorie est proposée par Friedrich List (1789-1846), économiste alle-mand de la seconde moitié du XIXe siècle.La mise en place de mesures protectionnistes par un pays est justifiéepar la construction d’avantages comparatifs dans certaines industries« naissantes » qui n’ont pas encore les moyens de soutenir la concur-rence des autres pays industrialisés.En effet, lorsqu’un pays veut se lancer dans la production d’un nouveau bien,celle-ci ne peut être compétitive en raison de sa taille limitée (économied’échelle insuffisante), des délais d’apprentissage nécessaires et des coûtsfixes importants à amortir. L’État doit donc protéger cette industrie le tempsqu’elle soit en mesure d’affronter la concurrence internationale.

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Le dumping est une pratique qui consiste, pour une entreprise, à vendre à un prix inférieur à soncoût de revient. Les subventions à l’exportation ou des monnaiessous-évaluées, en abaissantartificiellement le coût du produit, correspondent à un dumping déguisé.

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Les relations économiques internationalesPartie I 47

7 Les formes du protectionnismePays industriels, et pays en dévelop-pement payent un lourd tribut au pro-tectionnisme. Selon diverses sources,dont la Banque mondiale (2002), lalevée des obstacles au commerce desmarchandises dégagerait… de 250 à620 milliards de dollars par an, dontune part comprise entre un tiers et lamoitié irait aux pays en développement.

Pourtant, le protectionnisme persiste,sous des formes différentes et dans desproportions plus fortes que ne le révè-lent les références traditionnelles à lamoyenne des taux (1) applicables à lanation la plus favorisée (NPF). En effet,ces moyennes ne reflètent pas les droitsspécifiques et contingents tarifaires, lesmesures de rétorsion commerciale (droitsantidumping) ou les effets des normesd’environnement et règlements tech-niques. Elles ne permettent pas non plusde saisir l’impact des crêtes tarifaires oude la progressivité des droits ou d’autresmesures qui, en faisant peser l’incerti-tude sur l’accès au marché, découragentles exportations.

wwwCrêtes tarifaires. Bien que les droits moyens sur les produits industriels soienttombés entre 6 et 14 % pour les membres de la Quadrilatérale – Canada, États-Unis,Japon et UE – les lignes tarifaires sont sujettes à des crêtes (droits supérieurs ouégaux à 15 %). Au Canada et aux États-Unis, les crêtes tarifaires se concentrent surles textiles et vêtements ; dans l’UE et au Japon, elles visent l’agriculture, les produitsalimentaires et les chaussures.

wwwLes pays industriels et les pays en développement jouent sur la progressivité desdroits de douane. Pour protéger un secteur de son industrie manufacturière ou de trans-formation, le pays importateur impose des droits peu élevés sur les matériaux importésqu’utilise ce secteur et des droits élevés sur les produits finis qui concurrencent la pro-duction nationale. Il fait ainsi obstacle aux pays qui essaient de renforcer leur capacitétechnologique en les décourageant de développer leur industrie de transformation et dediversifier leurs exportations, les condamnant à rester dépendants de produits de baseaux prix souvent volatils.

wwwNormes. Les normes et règles jouent un rôle important dans le commerce, car ellesassurent la qualité, la sécurité et la compatibilité technique des produits et des proces-sus de production. Cela dit, elles sont parfois plus contraignantes qu’il ne faudrait, etcertains en abusent pour alourdir les coûts de leurs concurrents potentiels. Entre 1996et 1999, les pays à revenu faible ou intermédiaire ont notifié qu’ils ne pouvaient pas satis-faire aux obligations sanitaires et phytosanitaires sur plus de 50% de leurs exportationspotentielles de poisson, viande, fruits et légumes dans l’UE. On a pu dire que ces mesuressont des obstacles plus importants que les droits de douane et les contingents. n

Hans-Peter LANKES, « Ouvrir les marchés aux pays en développement », Finances et développement, vol. 39, n° 3, septembre 2002.

1. Il s’agit de la moyenne des taux des droits de douane appliqués, les crêtes correspondent à des taux très supérieurs à cette moyenne (nda).

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Le développement des importations enprovenance des pays émergents est-il

un facteur de chômage et de montée desinégalités dans les pays riches ? Certainséconomistes et l’opinion publique ont popu-larisé cette thèse au cours des années1990, quand le développement des impor-tations en provenance d’Asie s’est accom-pagné d’un fort déclin de l’emploi indus-triel dans nos pays, notamment dans lessecteurs employant une importante main-d’œuvre peu qualifiée (confection, chaus-sure, jouet, assemblage électronique). Enfait, si certains secteurs ont payé un lourdtribut à la concurrence des pays à bassalaires, le déclin de l’emploi industriels’explique plus sûrement par les gains deproductivité observés dans l’industrie, quipermettent une baisse des prix relatifs deses productions, obligeant ainsi la demandeà se tourner toujours plus vers les services,où l’emploi s’accroît rapidement.n La mondialisation des firmes constituenéanmoins un puissant accélérateur de lamise en concurrence des territoires et doncdes salariés. Certes, au fur et à mesure que

progresse le rattrapage, les salaires s’élè-vent dans les pays en développement pourse rapprocher de ceux pratiqués dans lespays développés, mais le maintien durantune longue période d’écarts de coûts sala-riaux supérieurs à l’écart des productivi-tés a eu, et aura encore, des conséquencessur l’évolution des structures écono-miques des pays riches. n Si l’ouverture des frontières débouchesur une compétitivité à tout prix, fondéesur la recherche du moindre coût, notam-ment via des politiques économiques restrictives et une pression à la baisse surles salaires, la demande intérieure ne peutaugmenter. Les gains de productivité permis par l’élargissement du marché n’engendrent pas une croissance qui béné-ficie à tous : chaque pays tente d’exporterson chômage chez l’autre. Les politiquesde désinflation compétitive menées par lespays européens durant les deux dernièresdécennies ont ainsi montré combien la guerre commerciale pouvait conduire à brider la croissance. L’ouverture n’estbénéfique que pour autant que les poli-

tiques économiques nationales et leurcoordination permettent d’assurer unecroissance de l’activité. On est enfin endroit de s’interroger sur le coût écologiquede l’expansion continue du commerce demarchandises, facilitée par le trop faibleprix des énergies fossiles. Est-il logique devendre de l’eau minérale française auxÉtats-Unis ou d’importer de la bière duMexique ?n Le développement des échanges n’estdonc pas en soi synonyme de progrès :autant l’accès de tous aux médicamentsou aux équipements de production per-mettant d’économiser le travail et la peineapparaît comme un plus pour l’humanitédans son ensemble (pour autant que ceuxqui en ont besoin aient les moyens d’yaccéder, ce qui n’est pas le cas), autant lemonde à la fois uniforme et inégalitairequ’engendrerait un libre-échange sansrègles apparaît peu désirable.

Stéphanie LAGUERODIE, Philippe FRÉMEAUX, « Le libre-échange est-il bon

pour le développement ? », Alternatives économiques, n° 191, avril 2001.

Les coûts du libre-échange

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Les fondements des échanges internationauxChapitre 2 48

1. Poursuivez l’analyse de chaquesituation de la première matrice desgains (sans aide à Airbus) commencéedans la note des auteurs (nda).

2. Expliquez la raison qui conduit Airbusà ne pas produire sans aide, alors queBoeing est déjà présent sur le marché(premier cas).

3. Décrivez chaque situation de la deuxième matrice des gains(deuxième cas) (avec aide à Airbus).

4. Expliquez la raison qui conduit Airbusà entrer sur le marché, alors que Boeingest déjà présent (deuxième cas).

Comment les coûts du protectionismes’expliquent-ils ?

Ces politiques sont appliquées tant par les pays du tiers-monde quiengagent une politique de développement que par les pays industrialisésquand ils sont contraints de reconvertir des secteurs industriels vieillissants.Historiquement, les États-Unis et l’Allemagne au XIXe siècle, le Japon pen-dant les années 1950-1970 ont développé leur industrie à l’abri de barrièresprotectionnistes.

2. « La politique commerciale stratégique »James Brander et Barbara Spencer justifient, dans les années 1980, l’appli-cation par un État d’une « politique commerciale stratégique » dans le cadrede marchés mondiaux oligopolistiques.Ainsi, un pays peut avoir intérêt à soutenir une entreprise nationale pourpénétrer sur un marché lorsque la production d’un bien : – procure de fortes économies d’échelle ; – se situe sur un marché où la taille critique(1) ne permet l’existence que dequelques firmes (2) ;– permet la réalisation de surprofits(3) dont l’entreprise nationale aidée pourrabénéficier.

C Les coûts du protectionnismePour les auteurs libéraux, les effets du protectionnisme sont néfastes globalement pour l’économie.

1. Une perte de bien-êtreLes effets sont favorables pour certains agents économiques mais défavo-rables pour d’autres.Les effets sont positifs :– pour les firmes nationales de la branche qui bénéficie des mesuresprotectionnistes. Selon leur situation, ces firmes peuvent soit majorer leursmarges, soit devenir compétitives par rapport aux firmes étrangères. Autotal, le surplus du producteur s’accroît ; – pour l’État qui perçoit les droits de douane.Les effets sont négatifs :– pour tous les agents (consommateurs mais aussi entreprises) qui doiventpayer un prix plus élevé pour obtenir le produit taxé et qui vont donc réduireleur consommation ;– de manière générale, la perte de bien-être subie par les consommateursest supérieure aux gains dont bénéficient certaines entreprises et l’État.

2. Un frein à la capacité d’adaptation des industries nationalesEn étant protégées, les industries nationales ne sont pas incitées à innoverpour réduire leurs coûts ou pour présenter de nouveaux produits.Des entreprises nationales subsistent artificiellement alors qu’il serait plusprofitable que les fonds investis s’orientent vers de nouveaux secteurs.Finalement, le protectionnisme retarde les mutations et les reconversionsindustrielles au prix d’un coût très élevé.

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9

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1. Taille nécessaire pour qu’une entreprise soit rentable.2. Marché oligopolistique.3. Profits supérieurs à ce qui serait obtenu sur un marché de concurrence parfaite.

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Les relations économiques internationalesPartie I 49

La politique commerciale stratégique : Airbus contre Boeing8

l Supposons qu’on envisage de construire un nouveautype d’avions de transport qui représente un marchépotentiel de 210 millions de dollars. Si la fabricationexige un investissement de 110 millions de dollars, lebénéfice escompté par Boeing sera de 100. Mais si uneautre firme (Airbus) se lance sur le marché, chacunedevant faire le même investissement initial alors qu’ellesse partageront le marché, elles perdront chacune 5 mil-lions de dollars. Dans ces conditions, il est peu pro-bable qu’Airbus entre sur le marché. n

Frédérique SACHWALD, in Philippe CABIN,L’Économie repensée, Sciences humaines, 2000.

Premier cas

l Supposons maintenant que les gouvernements euro-péens versent à Airbus une subvention de 25 millionsde dollars. Il devient alors profitable pour Airbus d’en-trer sur le marché, que Boeing se maintienne ou non.Il est probable également que, face à une telle offen-sive, Boeing se retire du marché car il perdrait 5 mil-lions de dollars dans l’affaire. Dans ce dernier cas, lesgouvernements européens, en investissant 25 millionsde dollars, auront permis à Airbus de réaliser 125 mil-lions de dollars de bénéfices. n

Second cas

Boeing

Produit

Produit

Ne produit pas

Ne produit pas

Airbus

bénéfice Airbus : – 5bénéfice Boeing : – 5

bénéfice Airbus : 0bénéfice Boeing : 100

bénéfice Airbus : 100bénéfice Boeing : 0

bénéfice Airbus : 0bénéfice Boeing : 0

Boeing

Produit

Produit

Ne produit pas

Airbus bénéfice Airbus : 20bénéfice Boeing : – 5

bénéfice Airbus : 125bénéfice Boeing : 0

n Zone bas/Gauche : dans l’hypothèse où Boeing produit lenouveau type d’avion mais pas Airbus, le bénéfice d’Airbusest 0 et le bénéfice de Boeing est de 100 millions de $.

n Zone haut/Gauche : dans l’hypothèse où Boeing et Airbusproduisent le nouveau type d’avion, ils réalisent chacun uneperte de 5 millions de $ ;

NDA : cette matrice des gains se lit de la manière suivante :

On comprend alors que les gouvernements européens perçoivent un intérêt à aider leur firme à entrer sur le marché. Le modèle est un argument fort en faveur d’une subvention, même si elle vicie les règles du jeu du commerce international.

Le modèle Brander-Spencer a donc pu être considéré comme unencouragement à l’adoption d’une « politique commercialestratégique » qui constitue une forme d’interventionnisme en faveurdes industries nationales.

Le coût du protectionnisme9

L e régime de protection avantage la recherche de rentesplutôt que la compétitivité économique. Les droits dedouane et certaines autres protections non tarifaires assu-rent la rentabilité des entreprises qui produisent en rem-placement des importations. La demande de protectionse maintiendra, voire se renforcera, si cette rentabilité estmenacée par les progrès techniques et économiques réali-sés à l’extérieur ou si une hausse des coûts est enregistréeà l’intérieur du pays concerné.

L es subsides et les avantages apportés aux exportationsproduisent les mêmes effets de gaspillage et de sclérose.Étant financés par les prélèvements obligatoires, ils ontpour effet immédiat une diminution du pouvoir d’achat,et donc une réduction de la demande domestique, dontles effets négatifs sur la croissance et l’emploi peuventvenir compenser, voire dépasser, les effets positifs induits,à court terme, par les protections sur les entreprisesexportatrices.

Aide de 25 M de $ à Airbus

Lahsen ABDELMALKI, René SANDRETTO, « Les effets contrastés de la libération de échanges », in Benoît FERRANDON, Mondialisation et commerce mondial, coll. « Les Cahiers français », n° 325, La Documentation française, Mars-Avril 2005.

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Un autre monde est-il possible ?2

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Do

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Les pays pauvres doivent d’abord compter sur eux-mêmes.Les pays qui se sont bien débrouillés récemment ont réussi grâce à leurs propresefforts. L’aide et les marchés n’ont joué en la matière qu’un rôle mineur.

Prenons l’exemple d’un pays en développement disposant d’un accès libre etpréférentiel au marché de son grand voisin, qui se trouve être l’économie laplus puissante au monde. Supposons que ce pays soit capable d’envoyer desmillions de ses citoyens travailler de l’autre côté de la frontière, reçoive unénorme volume d’investissements étrangers et soit intégré aux chaînes de pro-duction internationales. […] La mondialisation ne pourrait se présenter sousde meilleurs auspices.

Considérons maintenant un second pays. Celui-ci doit faire face à un embargocommercial sur le plus grand marché mondial, ne reçoit ni aide étrangère nisoutien de la part du monde occidental. Si ces handicaps extérieurs n’étaientpas suffisamment débilitants, on peut y ajouter une économie qui érige elle-même des barrières contre le commerce international (commerce d’État, taxesà l’importation et restrictions quantitatives).Ces pays existent : il s’agit duMexique et du Vietnam.

Examinons maintenant les performances économiques de ces deux pays.Depuis la signature de l’Accord de libre-échange nord-américain (Alena) endécembre 1992, l’économie mexicaine a connu une progression annuellemoyenne d’à peine plus de 1 % par tête.

Le Vietnam, cependant, a connu une progression annuelle de 5,6 % par têtedepuis les balbutiements de ses réformes économiques en 1988 et le réta-blissement des relations diplomatiques avec les États-unis en 1995, et a connudepuis une croissance rapide et continue au rythme de 4,5 %. Le Vietnama vu sa pauvreté baisser de façon spectaculaire, tandis que le Mexique a connuune chute des salaires réels. Ces pays ont fait l’expérience d’un décollage prononcé du commerce international et des investissements étrangers, maisla situation est contrastée dans le domaine le plus important : l’améliorationdes niveaux de vie, surtout pour le plus pauvres.

Ce que ces exemples démontrent c’est que les efforts intérieurs éclipsent lesautres éléments dans la détermination des fortunes économiques d’un pays.Tout ce que le marché américain avait à offrir au Mexique n’a pas pu contre-balancé les conséquences des erreurs politiques sur le marché intérieur, par-ticulièrement […] d’étendre les gains de productivité obtenus dans les acti-vités tournées vers l’exportation au reste de l’économie.

Ce qui compte le plus reste l’adoption par un pays d’une stratégie de crois-sance appropriée. Sans aucun des avantages dont a bénéficié le Mexique, leVietnam a poursuivi une stratégie centrée sur la diversification de son éco-nomie et sur l’amélioration des capacités de production locales. Les expé-riences d’après-guerre étayent le constat de l’importance majeure des poli-tiques domestiques. La Corée du Sud a décollé au début des années 1960,non pas lorsque l’aide étrangère était à son summum, mais quand elle a com-mencé à se tarir. Taïwan n’a pas bénéficié d’aide étrangère ni d’accès privilé-gié à certains Marchés.

Dani RODRIK, Le Monde du 20 septembre 2005.

Le libre-échange est-il réellement profitable à tous ?ZOOMZOOM

En matière de commerce international, les contes-tataires n’ont pas tort de dénoncer l’hypocrisie

des pays du Nord qui militent pour mettre à bas lesprotections des pays en développement alorsqu’eux-mêmes ne s’ouvrent que parcimonieuse-ment aux produits exportés par ces derniers. Demême lorsqu’ils s’élèvent, de plus en plus énergi-quement, contre ces subventions du Nord aux expor-tations de produits agricoles, souvent ruineusespour le Sud. Ainsi, par exemple, la Côte-d’Ivoireproduit la viande de bœuf à 1,84 euro le kilo contre2,65 euros pour l’Europe. Mais, une fois les subventions de la Politique agricole commune (PAC)encaissées, l’Europe y vend son bœuf à 1,58 euro,ce qui, bien sûr, met à mal l’élevage local.

u De même, on cite souvent l’exemple du cotonaméricain qui reçoit 5 milliards de dollars de subventions qui bénéficient à moins de 25 000 producteurs : la conséquence n’est autre que laruine de pays africains comme le Mali ou le Bénindont plus de la moitié de la population est concer-née par cette production.u C’est à bien d’autres niveaux du commerce inter-national qu’on trouve ces dérives qui deviennentde plus en plus insupportables aux pays qui lessubissent. Toutefois, celles-ci sont, dira-t-on, bienpeu de chose par rapport aux bénéfices énormesqui résultent de la libération des échanges tant ducôté des consommateurs, avec les baisses de prixqui accroissent leur bien-être, que des producteurseux-mêmes. Ces derniers, s’il n’y avait pas cetaiguillon permanent de la concurrence internatio-nale, sombreraient dans la routine et les retards deproductivité. D’ailleurs, on sait bien aujourd’hui queles pays qui demeurent « fermés » sont ceux quistagnent et parfois même affament leurs popula-tions (Corée du Nord, Cuba). Il ne saurait, dès lors,être question de remettre en cause l’énorme travailde démantèlement des entraves aux échanges entre-pris avec le GATT, il y a maintenant presque undemi-siècle. […]u Dès lors, pourquoi ne pas tenir compte, disentles contestataires, de tous les coûts externes quecrée le développement exponentiel du commerce

Les fondements des échanges internationauxChapitre 2 50

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possible ?

3

Do

c

La mondialisation fait l’objet de vives critiques, fondées sur des considérationssociales, politiques, culturelles ou environnementales. Les critiques adressées à la mondialisation dans ses relations avec l’environnement se résument,lorsqu’on les synthétise, à deux assertions principales.

1. Comparez les situations et les résultats des pays pris en exemple. (Doc 1)

2. Quelles conclusions peut-on en tirer à propos des conséquences du libre-échange sur la croissance ? (Doc 1)

3. Relevez les mesures protectionnistes pratiquées par les pays du Nord,quels sont leurs effets sur les pays du Sud ? (Doc 2)

4. Quels sont les « coûts externes » générés par le développement ducommerce international et non pris en compte sur un plan économiquepour évaluer les gains de l’échange international ? (Docs 2 et 3)

Mondialisation des échangeset environnement

m Premièrement, la mondialisation aurait pour effet de donner un avantage compétitif auxpays les moins rigoureux en matière d’environnement, ce qui aurait pour effet deconduire, soit à des délocalisations d’entreprises industrielles, soit à un recul desnormes environnementales dans les pays développés.mDeuxièmement, l’ouverture économique, en stimulant la croissance, conduirait à une aggra-vation insoutenable des émissions de polluants et des pressions sur le milieu naturel.[…] On a employé l’expression de « dumping environnemental » pour décrire ce phé-nomène : les États rivaliseraient pour attirer des firmes multinationales en adoptant desnormes environnementales moins rigoureuses. […]La mobilité croissante des facteurs de production entre pays fait craindre que la capa-cité d’action des États en matière environnementale ne soit considérablement réduite.Dès 1988, les économistes Baumol et Oates ont proposé une modélisation des consé-quences de la libéralisation des échanges entre deux pays qui appliquent des normesenvironnementales différentes.m La démonstration de Baumol et Oates suggère que l’application de normes environne-mentales dans les pays développés transformerait les pays en développement en lieuxd’accueil des activités polluantes. Les pays en développement deviendraient ainsi,selon ce modèle, des « havres de pollution » (traduction de l’anglais pollution havens).Les politiques environnementales nationales perdraient de leur portée, du fait desdélocalisations d’activité. L’effet du libre-échange sur la pollution serait géographiquementdifférencié : les émissions polluantes se réduiraient au Nord, mais augmenteraient auSud. L’effet global serait cependant négatif pour l’environnement, du fait de l’abandondes technologies propres, et de l’augmentation de la demande pour les produits à bascoûts fabriqués dans les pays du Sud.m Naturellement, les États développés victimes des délocalisations seraient découragésde renforcer leurs normes environnementales (« paralysie réglementaire »), voire pour-raient s’engager dans une « course au moins-disant » environnemental (race to the bot-tom) pour retrouver un avantage comparatif dans certaines productions industrielles.Dans l’un et dans l’autre cas toutefois (formation de « havres de pollution », ou « courseau moins-disant» environnemental), l’environnement mondial pâtirait de la libéralisationdes échanges. n

Les relations économiques internationalesPartie I 51

Serge LEPELTIER, « Mondialisation : une chance pour l’environnement ? »,Les rapports du Sénat, rapport n° 233, mars 2004.

international et qui diminuent sen-siblement le gain global net del’échange et que sont : la consom-mation d’énergie (le fret maritimeexige une énergie à peu près égaleà celle qui est nécessaire à deux payscomme le Brésil et la Turquie), lesrisques de saturation des grandesvoies maritimes, les atteintes à l’en-vironnement et à la biodiversité, lesfermetures de sites et le chômageinduit, etc. L’altermondialisationdoute, dès lors, de l’intérêt à pour-suivre toujours plus avant dans lavoie de l’ouverture. Pourquoi – etjusqu’où – multiplier, par exemple,ces convois « croisés » de porte-conteneurs qui transportent, en fait,à peu de chose près les mêmesbiens, avec les risques que l’on saitde catastrophes maritimes ? Demême, est-il bien rationnel deconduire des millions de paysansmexicains (avec l’Aléna) ou indiens(demain avec l’OMC) à la ruine, auprétexte d’accepter l’entrée du maïsaméricain en franchise? De la mêmefaçon, jusqu’où les paysans de Gambie ou du Sénégal doivent-ilsacheter à bas prix les caissettesd’abats de poulet américain au détri-ment de l’élevage local ? Qui pren-dra alors en charge les coûts sociauxde ces populations dont une partieviendra grossir les masses qui s’agglutinent autour des grandesvilles ? Ne faudrait-il pas, dans cetteligne, intégrer au calcul économiqueles avantages de tous ordres de produire au pays ? n

Henri BOURGUINAT, « L’Altermondialisation :

essai d’évaluation », Commentaire sur la mondialisation, Problèmes économiques, n° 2875,

La Documentation française, 11 mai 2005.

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Prépa BTS examenTravail méthodologique

Pour les économistes orthodoxes, le libre-échange favorise l’enrichis-sement de tous ; chaque pays tend à se spécialiser dans les productionspour lesquelles il est le plus efficace. Ce qui lui permet de vendre pluset d’accroître son pouvoir d’achat en achetant à d’autres ce qui est produit ailleurs à moindre coût au lieu de le produire lui-même. C’est pourquoi le Fonds monétaire international (FMI) et la Banquemondiale ont poussé la quasi-totalité des pays du Sud à libéraliser leurséchanges extérieurs. C’est peu dire que tous les pays n’ont pas réussileur développement !Cette constatation empirique commence à être reconnue par leséconomistes : l’ouverture commerciale est une condition nécessaireau développement (aucun pays ne s’en est sorti par l’autarcie), maiselle est très loin d’être suffisante. Elle est nécessaire parce qu’elle permet d’obtenir, en contrepartie, un accès aux marchés des paysriches et d’acheter les biens d’équipement nécessaires au dévelop-pement. Mais elle peut aussi empêcher la diversification progressivedu tissu productif national, soumis à la concurrence des producteursplus efficaces du reste du monde. Chaque État doit donc mettre en œuvre des politiques adaptées en matière de formation et de dévelop-pement des infrastructures, ainsi qu’un soutien à l’offre locale et à l’accueil de l’investissement étranger.II devra y parvenir dans un contexte où les pays du Nord continuent àréguler le commerce international dans un sens défavorable au Sud.Les barrières tarifaires qu’ils imposent découragent la transformationdes produits par les pays du Sud : ainsi, une fève de cacao, selon qu’elleest brute, légèrement transformée ou prête à faire du chocolat, est taxéerespectivement à 0,5 %, 9,7 % et 30,6 % par l’Union européenne. Parailleurs, les subventions accordées aux producteurs européens encou-ragent une offre abondante qui tire les prix vers le bas : en 2001-2002,les États-Unis, l’Europe et la Chine ont ainsi distribué 6 milliards de dollarsde subventions à leurs producteurs de coton, l’équivalent du montantdes exportations mondiales de coton sur la période !Tout cela ne facilite pas la diversification des économies du Sud. D’autant que les pays pauvres ressentent bien plus fortement les contre-coups des soubresauts de l’économie mondiale. Certes, l’émergencede plusieurs pays en Asie et en Amérique latine montre que le parin’est pas impossible, mais cette émergence réclame plus qu’une simpleouverture aux grands vents des échanges.

Alternatives économiques, n°225, mai 2004.

Ouverture et croissance : un lien discutable

Ouverture commerciale et développement vont-ils de pair ?

Le libre-échange favorise-t-il la croissance ? (Pour traiter votresujet, vous prendrez appui sur la partie méthodologique dont lesdocuments et les questions posées vous fournissent à la fois leséléments pour rédiger votre introduction et le développement.)

Développement structuré

Ce sont indiscutablement F. Rodriguez et D. Rodrik(1999) qui, au terme d’un vaste travail de synthèsethéorique et de vérifications économétriques, expri-ment le plus grand doute sur l’existence d’une rela-tion explicite entre ouverture, croissance et bien-être : « nous sommes sceptiques sur le fait qu’il y ait unrapport général et non ambigu entre ouverture com-merciale et croissance. Il y a des raisons de penser quece rapport est contingent et qu’il dépend à la fois decaractéristiques internes à de nombreux pays, mais ausside caractéristiques externes à ces derniers […]. Les poli-tiques commerciales peuvent avoir des effets positifs surle bien-être sans affecter le taux de croissance écono-mique. Réciproquement, même si les politiques quientravent le commerce international ont pour effet deréduire la croissance économique, elles ne réduisent pasnécessairement le niveau du bien-être ».

Le succès de la libéralisation commerciale passe doncaussi, et sans doute d’abord, par des actions d’en-vergure sur les structures de production et la qua-lité des institutions. Un système commercial (acteurs,marchés et institutions) performant est celui qui formeun ensemble harmonieux avec les enchaînementséconomiques, les processus techniques et les systèmesde valeurs qui caractérisent chaque nation, touteschoses qui confèrent au développement sa véritablesignification. I. Bensidoun et A. Chevallier (2002)soulignent à juste titre que : « la capacité des gouverne-ments à mettre en œuvre les réformes macro et micro-économiques qui doivent accompagner l’ouverture (réformefiscale, amélioration de l’accès des entreprises au finan-cement, réforme juridique, …) est tout aussi essentielleque l’ouverture elle-même. Dans la mesure où elle setraduit par une plus grande exposition aux chocs,l’ouverture réclame des ajustements macroéconomiquesqui peuvent être entravés par la faiblesse des institu-tions chargées de la gestion des conflits d’intérêts ».

Dès lors, faut-il croire ou ne pas croire aux vertusde la libéralisation des échanges ?

Lahsen ABDELMALKI, René SANDRETTO, « La nouvelle géographie du commerce international »,

in Benoît FERRANDON, Mondialisation et commerce mondial,

coll. « Les Cahiers Français », n° 325, La Documentation française, Mars-Avril 2005.

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Les fondements des échanges internationauxChapitre 2 52

1. Quels sont les mécanismes qui permettentde dire que le libre-échange est favorable à la croissance et au bien-être ?

2. Montrez pourquoi l’ouverture au commercemondial est une condition nécessaire à la croissance mais pas suffisante. Quelles sont les autres politiques qui doivent être mises en œuvre ?

3. Pourquoi les conditions actuelles ne sont-elles pas favorables aux pays en développement ?

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