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Date de la réunion : 16 mars 2017
Date de diffusion : 23 mars 2017
Lieu de la réunion : Siège de la SFEN au 103 rue Réaumur - Paris 2ème.
Rédacteur : Emilio RAIMONDO ; Revu par Maurice MAZIÈRE ;
Visa : Maurice MAZIÈRE
Participants : Mmes. DUTHEIL, COUNAS. MM. BARACHE, de BARRAU, BLANC, BOIRON, CROCHON, GAMA, JOLLY, LENAIL, LEROUGE, MAZIÈRE, NAUDET, NIEZBORALA, PERVÈS, RAIMBAULT, RAIMONDO, de SARRAU, SCHWARTZ, SORIN, SORNEIN, de TONNAC, YVON. Diffusion : Les membres du comité d’action, les représentants régionaux, les membres, les groupes transverses, les sections techniques, Valérie FAUDON, Boris LE NGOC.
I. Conférence du matin (10h30 – 12h30) :
Contraintes d’équilibre des réseaux d’électricité et intégration des énergies intermittentes (EnRi) par Georges SAPY (SLC)
II. Réunion de l’après-midi (14h).
1. Observations sur le précédent compte rendu. 2. Projet de texte sur les énergies renouvelables. 3. Informations générales et questions d’actualité, 4. Tour de table. 5. Examen du programme pour les prochaines journées.
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Pièces jointes au compte rendu : PJ 1 Présentation de Georges SAPY PJ 2 Lettre de Géopolitique de l'Electricité́ : L'Energiewende PJ 3 Coût de l'Energiewende PJ 4 Energiewende : a Disaster PJ 5 Energiewende : une catastrophe financière PJ 6 UBU chez les allemands. PJ 7 S. HUET Leçons tirées du bilan RTE 2016 PJ 8 B.DURAND Électricités intermittentes PJ 9 Eolien et nucléaire PJ 10 Livre de M. GAY "Au diable les EnR" PJ 11 OIE Coût pour les ménages PJ 12 OIE Garanties d'origine PJ 13 Le mirage du MIX énergétique PJ 14 Livre de Bertrand BARRÉ PJ 15 Livre de G. SAPY Faut-‐il avoir peur des centrales nucléaires ? PJ 16 S. HUET le climat démarre fort PJ 17 Atelier Pu démantelé́ à Cadarache PJ 18 Rapport de l'inspecteur général de la sûreté d'EdF PJ 19 Énergie nucléaire au Japon PJ 20 Fukushima 2017.
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1. Conférence du matin :
Le Président accueille et remercie Georges SAPY ancien ingénieur d’EDF et membre de « Sauvons le Climat ». Il en profite pour signaler son ouvrage « Faut-‐il avoir peur des centrales nucléaires ? Pourra-‐t-‐on s’en passer ? », édité chez L’Harmattan récemment, dont il nous dit un mot. « Ce livre est écrit en mettant l’accent sur les facteurs organisationnels et humains. En effet l’auteur est persuadé que les accidents nucléaires seront de moins en moins causés par les tsunamis, les tremblements de terre ou les problèmes techniques, mais à cause des erreurs humaines. Il développe donc ce point de vue dans ce livre qui a obtenu, par ailleurs, le prix « Yves CHELET » par la SFEN PACA. »
Le titre de sa conférence est le suivant :
Contraintes d’équilibre des réseaux d’électricité et intégration des énergies intermittentes
(EnRi) par Georges SAPY (SLC) Cette conférence s’appuie sur la présentation jointe (voir PJ 1) et suivra un plan en neufs points, rappelés sur la planche 2. Les échanges avec l’orateur sont placés au fil du texte, en italique. 1.1. Éloge des réseaux publics d’électricité Ces réseaux sont des outils de mutualisation, d’optimisation et de solidarité qui se caractérisent par trois apports majeurs :
• Relier les producteurs aux consommateurs. • Secourir les zones en déficit par les zones en excès. • Mutualiser et optimiser les moyens de production grâce au phénomène de foisonnement* des
consommations *foisonnement : à l’instant (t) l’ensemble des consommateurs reliés au réseau n’appelle pas sa puissance maximale. Par exemple, en France la somme des puissances installées chez les consommateurs s’élève à environ 600 GW, or nous disposons sur le réseau français d’environ 130 GW de moyens de production. Plus le réseau est grand et plus le phénomène de foisonnement est favorable
En France nous disposons de grands réseaux nationaux de transport, sous l’autorité de RTE, qui sont interconnectés avec des réseaux européens voisins et qui alimentent aussi les réseaux locaux de distribution. Il existe des réseaux isolés sur les îles nombreuses du territoire français métropolitain et d’outre-‐mer.
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1.2. L’organisation du système électrique européen : l’ENTSOE La planche 4 montre l’intégration du réseau français (réseau maillé) dans le système électrique européen (ENTSO-‐E) auquel il est fortement relié par une quinzaine d’interconnexions. Certaines sont en courant alternatif avec la plaque synchrone et il existe aussi des connexions en courant continu pour les liaisons sous marines. Question : Est-‐ce le cas pour la Corse ? Réponse : Non la Corse est raccordée au réseau italien qui est plus proche. La capacité d’interconnexion française est autour de 12 GW et passera bientôt à 15.
L’ENTSOE a été créé en 2009 et regroupe les gestionnaires de réseaux de transport d’électricité de 34 pays européens. L’objectif de l’ENTSO-‐E est double :
• Coordonner, optimiser et sécuriser les réseaux nationaux • Faciliter les échanges d’électricité via le marché
Avant 2009 il existait divers organismes qui tentaient aussi de satisfaire ces objectifs. Question : Les pays Baltes sont-‐ils reliés au réseau Russe ? Réponse : Oui 1.3. Futurs « réseaux locaux de territoires » et autoconsommation
Il s’agit d’un sujet à la mode qui plait beaucoup aux élus locaux comme l’autoconsommation également. Est-‐ce que c’est complémentaire ou concurrent des réseaux publics ? Il n’y a pas de réponse définitive aujourd’hui, cependant il est possible de caractériser cette problématique. Si l’on considère les réseaux locaux de territoire d’une part, et l’autoconsommation individuelle autonome d’autre part (les deux s’appuyant sur des moyens de production locaux éoliens ou photovoltaïques), les premiers auront un faible foisonnement et les seconds un foisonnement négligeable. Cela conduit évidemment à sur-‐dimensionner les moyens locaux de production par rapport à ceux du réseau. Il faut aussi envisager un stockage local qui est indispensable pour des raisons de lissage et pour faire face à l’intermittence. Pour l’autoconsommation, il faut aussi un stockage inter-‐saisonnier car la production en hiver est faible (en particulier pour le photovoltaïque) alors que la consommation est forte et vice-‐versa en été. Les réseaux locaux de territoire auront de toutes façons besoin d’un appui de secours par le réseau public et là se pose la question de la rémunération. À quel tarif facturer ce secours qui sera précieux localement ? Cette question est éminemment politique, des démonstrateurs essaient de valider certains
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modèles économiques mais le retour d’expérience (REX) est insuffisant et on s’interroge sur la pertinence de ces réseaux locaux de territoires. Commentaires de Jean-‐Pierre PERVÈS : Ce point est crucial : aujourd’hui tous les consommateurs payent l’électricité au même tarif, demain en sera-‐t-‐il de même avec ces réseaux locaux ? Imaginons les régions alpines fortes de leurs moyens de production hydrauliques qui pourraient s’attribuer un tarif préférentiel et vendre leurs excédents à d’autres tarifs ! Pour l’autoconsommation individuelle, se pose un autre problème ; imaginons un producteur individuel de photovoltaïque, comme il est payé (fort cher) pour produire, il peut toujours trouver un moyen de consommer même inutilement en été (l’exemple cité imaginait d’alimenter des radiateurs électriques positionnés à l’air libre). La question est de savoir ce que l’on fait de la production excédentaire. La conclusion, sur ce point des réseaux locaux, il serait bon de dire que là où les réseaux publics sont présents et performants, et sauf exception pour des niches justifiées, il n’y a pas besoin de réseaux locaux. En revanche dans des régions ou pays où les réseaux publics sont défaillants ou inexistants, des réseaux locaux peuvent être des alternatives utiles et crédibles. Question : L’Allemagne n’est-‐elle pas en avance sur ces sujets ? Réponse : il existe des auto-‐consommateurs individuels mais cela représente peu de chose. Il existe des régies locales en Allemagne, comme en France d’ailleurs, mais elles sont connectées au réseau national. 1.4. L’équilibre instantané fréquence-‐puissance du réseau Comme l’électricité ne se stocke pas, à tout instant la production doit être égale à la consommation. La fréquence du réseau est un bon indicateur de cet équilibre ; si la production est supérieure à la consommation la fréquence augmente, elle diminue lorsque la consommation devient supérieure à la production. Cet équilibre est bien montré par une balance sur la planche 6. Les limites de fonctionnement autorisées sont très étroites. La plage normale de fréquence est de 50Hz + ou – 0,5Hz (soit + ou – 1%). La limite autorisée ultime va jusqu’à + ou – 1Hz et la limite basse de sécurité est à 49,2Hz. Ces limites sont en train d’être légèrement élargies par l’ENTSO-‐E. Question : Quelle est la valeur qui déclenche le « Black-‐out » ? Réponse : C’est lorsqu’on sort de ces limites au-‐delà d’un certain temps Questions : Quelles sont les conséquences si la fréquence sort de ces limites ? Réponses : Un mauvais fonctionnement des matériels alimentés électriquement ; cela est très variable selon les industries et les matériels, mais les conséquences peuvent être importantes sur des appareils de laboratoire particulièrement sensibles.
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Question : Quel est le pourcentage d’import-‐export qui contribue également à cet équilibre. Réponse : La France est généralement très exportatrice, c’est de l’ordre de 10 à 15% de la production française. Comment fait-‐on pour régler la fréquence et la maintenir dans les plages autorisées ? On utilise des réserves dites « primaires, secondaires et tertiaires » ; ce dispositif est représenté schématiquement sur la planche 7. On observe la chute de fréquence (courbe du bas) qui fait suite à un déclenchement provoquant une chute de puissance (courbe du haut). La réserve primaire est aussitôt mise en œuvre pour reconstituer la puissance manquante, d’une façon proportionnelle, le plus rapidement possible et en tout cas en moins de 30 secondes. La fréquence peut alors remonter mais ne reviendra pas aux 50Hz initiaux, il subsistera un écart (delta f) inhérent aux régulations proportionnelles. C’est alors que la réserve secondaire est appelée avec une régulation à action intégrale qui permet d’éliminer l’écart de fréquence pour rejoindre le point de consigne à 50Hz en moins de 15mn. Enfin le troisième niveau de défense fait appel à la réserve tertiaire qui permet de reconstituer durablement les réserves primaires et secondaires qui viennent d’être consommées et autorise le suivi de charge de certaines centrales. Question : C’est quoi ces réserves concrètement ? Réponse : En fait il s’agit de marges sur le point de fonctionnement nominal d’une tranche. Par exemple, la réserve primaire provient du fait que des tranches vont fonctionner à 98% de leur puissance nominale ce qui donne une possibilité de réserve de +/-‐ 2%. Pour la réserve secondaire, sur d’autres tranches la marge pourra être de +/-‐ 5%. En France la réserve primaire est d’environ 600 MW, la secondaire peut varier de 500 à 1200 MW. Pour le réseau interconnecté européen, chaque pays contribue à la constitution de ces réserves (3000 MW pour la réserve primaire européenne). Rôle de l’inertie pour l’équilibre instantané fréquence-‐puissance. L’inertie des masses tournantes joue un rôle crucial pour cet équilibre. Ces masses sont constituées pour 80% des groupes turboalternateurs de production et pour 20% des récepteurs industriels (moteurs majoritairement). Ces éléments jouent le rôle de volant d’inertie qui ont une action mécanique s’opposant aux variations brutales de vitesse, donc de fréquence et, également, un rôle de stockage et de déstockage d’énergie cinétique. Ces masses tournantes ont ainsi une action autorégulatrice que l’on peut observer sur le schéma de la planche 8 montrant une chute de fréquence en fonction de l’inertie ; avec une inertie importante, la chute de fréquence est plus faible. Un exemple concret d’incident survenu sur le réseau européen (aléa de production de 2800 MW) est montré sur la planche 9. Un creux maximum de fréquence est atteint en 10 secondes, l’inertie d’abord puis les réserves successives interviennent pour un rétablissement de la fréquence au bout de 7 mn. Question : Pratique-‐t-‐on les mêmes marges dans d’autres pays et notamment pour les variations de tension ?
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Réponse : Pour les variations de tension les marges sont plus importantes (+/-‐ 10% en distribution et +/-‐ 5% en HT). Mais si on revient à la fréquence, l’Europe est certainement la région la plus exigeante comparée à d’autres pays, c’est pour cela que les marges sur la fréquence vont être augmentées par l’ENTSO-‐E. Impact des productions intermittentes sur l’équilibre instantané fréquence-‐puissance. Le schéma de planche 10 symbolise cette problématique où les deux modes de production sont représentés :
• La production synchrone des générateurs électriques couplés électro-‐magnétiquement au réseau de 50 Hz (couplage rigide représenté par une chaine).
• La production photovoltaïque ou éolienne, comme elle est intermittente, on passe systématiquement par des onduleurs pilotables pour le raccordement au réseau, et ce couplage n’est pas synchrone (couplage lâche, symbolisé par des courroies). Le photovoltaïque n’a aucune inertie propre, les turbines éoliennes ont une inertie importante mais le mode de couplage ne permet pas d’en profiter.
Sur la planche 11 figurent des relevés faits, au niveau de la France entière, qui montrent que les capacités régulatrices des EnRi sont bien moins importantes que celles des alternateurs pilotés, car elles sont aléatoires. Malgré le foisonnement important sur tout le pays, la variabilité des EnRi est très importante ; on sort très fréquemment d’une zone de +/-‐_5% en moins d’un quart d’heure. Par opposition, on observe la faible variation des moyens pilotables essentiellement due aux variations de consommation. En conclusion, contrairement aux productions traditionnelles, les EnRi ne permettent pas de bénéficier de l’effet d’inertie, peuvent avoir une certaine capacité de réglage, mais seulement en cas de baisse de fréquence et, surtout, n’ont aucune possibilité de constituer des réserves, sauf en cas de stockage, ce qui est loin d’être réalisé aujourd’hui. 1.5. Études récentes d’insertion des énergies intermittentes (EnRi) Trois études publiées en 2015, (d’inégales valeurs) sont présentées sur la planche 12 :
• L’étude ADEME pour la France, 100% de renouvelables en 2050. C’est une étude un peu hors sol qui ne retient pas notre attention tant elle est jugée peu réaliste.
• L’étude AGORA Energiewende par Fraunhofer –IWES relative à 7 pays européens. Elle se fixe une échéance à 2030 et est basée sur une base météorologique réduite à l’année 2011.
• L’étude d’EDF R&D pour l’ensemble des pays européens réunis dans l’ENTSO-‐E Cette étude, avec un taux de renouvelables de 60% (40% de EnRi et 20% d’hydraulique et de biomasse)
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se fixe sur un objectif à 2030 et prend en compte une base météorologique de 30 ans. Les trois études sont basées sur des statistiques de production et de consommation au pas horaire, or nous avons constaté que cela est insuffisant pour observer des phénomènes instantanés qui se produisent en quelques secondes. Seule l’étude EDF prend en compte l’équilibre instantané du réseau, qui est une contrainte indispensable à respecter, en appliquant des lois physiques assez complexes. Question : Dans l’étude EDF quel est le back-‐up pour les 40% d’intermittent ? Réponse : Une grosse partie de fossile car l’étude couvre les pays de l’ENTSO-‐E. Une autre étude récente, à laquelle a participé Jean-‐Pierre PERVÈS, examine l’intermittence et le foisonnement des EnRi sur la planche 13. Elle porte sur la puissance éolienne cumulée des 7 pays européens les plus équipés avec une extrapolation en 2030. Malgré tout le foisonnement important, avec 7 pays, on observe une variabilité colossale ; pour une puissance installée de 200 GW, on atteint une puissance max de 126 GW mais une puissance minimum de 4 GW soit à peine 2% de la puissance installée. Cela détruit le mythe qui consiste à croire qu’il y a toujours du vent quelque part !
1.6. Principaux enseignements de l’étude EDF R&D Les principaux enseignements de l’étude EDF sont donnés sur les planches 14, 15 et 16. Avec une puissance totale nécessaire en 2030 de 1200 GW, les EnRI en représenteraient 700 (60%). Cependant, comme on peut le voir sur les graphiques de la planche 14, l’introduction des EnRi réduit peu les besoins en puissance des moyens pilotables ; ceci est dû au nécessaire « back-‐up » lorsque les EnRi ne produisent pas. Le seul résultat intéressant, dans ce scénario, est la réduction importante de la consommation de charbon. Sur la planche 15 on observe l’évolution du bilan carbone en Europe et en France. Il peut être amélioré en Europe, en passant de 350 g/kWh de CO2 à 125 g avec du charbon et à 73 (division par 4,8) si le charbon est remplacé par du gaz. L’orateur a fait l’exercice en remplaçant le charbon par du nucléaire ce qui conduit à un résultat très intéressant de 25 à 35 g/kWh de CO2, ce qui montre l’efficacité du nucléaire dans la réduction des émissions de CO2. La France, avec des rejets moyens de 35 à 45 g/kWh de CO2 est le bon élève européen et contribue à la baisse de la moyenne générale.
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Le résumé de l’étude EDF stipule qu’avec 40% d’EnRI, en 2030, c’est possible à deux conditions :
• Des contributions indispensables (mais insuffisantes) : o Renforcement des interconnections d’ici 2030. o Recourir davantage aux importations et exportations pour l’équilibre des réseaux. o Faire participer les EnRi, même de façon limitée, aux réglages de fréquence. o Utiliser un peu plus le stockage/déstockage d’énergie. o Faire une gestion active de la demande (effacement ou report pour lisser les pointes). o Gérer les perturbations des réseaux dues aux surplus d’EnRi.
Pour réaliser toutes ces exigences il faudra introduire de l’intelligence dans les réseaux (automatismes complexes = « smart grid »). Cela conduira évidemment à des coûts systémiques très élevés (stockage d’énergie, moyens pilotables de substitution et extension ou complexification des réseaux).
Question : au niveau français cela suppose-‐t-‐il d’autres moyens de substitution à part du nucléaire ? Réponse : Au niveau français on a 15 GW d’hydraulique et il restera du gaz qui sera indispensable au travers des cycles combinés ou des turbines à combustion.
• Limitation volontaire du taux instantané d’intermittence pour garantir la stabilité du réseau La planche 17 met en évidence cette condition avec un diagramme où le taux d’EnRi est en ordonnée et la demande en abscisse ; Quand la demande est faible (250 GW) on ne peut pas dépasser 25% d’EnRi sous peine d’instabilité du réseau et du risque de « Black-‐out ». Quand la demande est moyenne (autour de 400 GW) le taux d’EnRi augmente aux environ de 35 à 38% et en cas de demande forte (au-‐delà de 600 GW), le taux d’EnRi peut aller jusqu’à 70%. La raison de ces limites vient de l’inertie qui est en gros proportionnelle à la demande. Lorsqu’on approche de ces zones rouges d’instabilité, l’opérateur devra démarrer préventivement des moyens pilotables pour stabiliser le réseau et éviter le black-‐out. Question : Et s’il y a beaucoup de vent dans ces cas ? Réponse : Si on a des moyens de stockage on stockera sinon il faudra écrêter mais on ne pourra pas utiliser toute l’énergie éolienne ou solaire sinon le réseau sera instable. La grande conclusion de cette étude c’est que les contraintes d’équilibre des réseaux limitent le taux d’insertion instantané des EnRi. On voit bien ici le manque de crédibilité des scénarios qui envisagent 100% de renouvelables (ADEME) compte tenu des moyens encore limités de stockage.
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1.7. Les SURPLUS des productions EnRi, gravement perturbants... Quelles sont les perturbations induites par les surplus de production par les EnRi ? Deux types de perturbations sont identifiés :
• Distorsion de concurrence • Écroulement des prix de gros
La planche 18 illustre ces éléments en positionnant les moyens de production en fonction de leurs coûts (ordre de mérite). À l’heure actuelle le prix du marché est fixé sur le coût variable marginal charbon. Les EnRi ont des privilèges car ils sont déjà payés au travers des subventions et ils ont légalement une priorité d’accès aux réseaux ; quand il y a trop d’énergie sur le réseau on va d’abord diminuer les énergies pilotables avant de songer à toucher à l’éolien et au solaire. Cela déstabilise le marché et conduit parfois à des prix négatifs en cas de surplus de production. La baisse du prix de marché (marginal charbon) provient aussi de la baisse du prix du charbon, elle-‐même occasionnée par la forte production du gaz de schiste aux USA qui a remplacé le charbon qui s’est retrouvé en stock et vendu à bas prix. Une cause qui va dans le même sens est le faible prix du marché européen du CO2 qui est à 5 euros la tonne ce qui rend non rentables les cycles combinés au gaz qui tournent très peu. Des calculs montrent que si le prix du CO2 passait à 30 euros la tonne, les cycles combinés au gaz passeraient avant le lignite et le charbon dans l’ordre de mérite. Cela aurait deux effets positifs en marginalisant le lignite et le charbon et en remontant le prix de marché. Question : Le lignite est-‐il subventionné en Allemagne ? Réponse : Le lignite et le charbon sont effectivement subventionnés en Allemagne. Question : N’y a-‐t-‐il pas distorsion de concurrence avec tout cela ? Réponse : En fait, à la Commission, ce sujet était entre les mains du commissaire à l’énergie et non de celui chargé de la concurrence, mais les choses semblent changer, affaire à suivre... Il semblerait par ailleurs que les Français ne sont pas assez présents en terme de lobbying et que dans nos ministères les compétences dans le domaine de l’énergie sont absentes. Pour les réseaux de distribution, les surplus des EnRi provoquent aussi des perturbations fonctionnelles et des surcoûts. Sur la planche 19 on représente :
• Le réseau de transport qui est doté de capacités de réglage (fréquence – puissance et tension). • Des postes « source », constitués de transformateurs régleurs qui permettent d’ajuster la
tension en fonction de la charge (environ 2900 en France) et qui alimentent le réseau de distribution à partir du réseau de transport.
• Le réseau de distribution qui lui est « passif », soumis à la seule loi d’Ohm.
Que se passe-‐t-‐il si on injecte des EnRI sur ce réseau de distribution ? Plusieurs effets sont observés : • La tension locale est modifiée au niveau de l’injection. • S’il y a plusieurs points d’injection, il faut tirer de nouvelles lignes d’où une augmentation des
coûts et des pertes en ligne. • Si la puissance injectée est inférieure à la consommation en aval, il peut se produire des
inversions de circulation de courant, comme cela est représenté en rouge sur le schéma. Si
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les autres lignes du réseau de distribution ne peuvent pas l’absorber cela provoque un refoulement de puissance active vers le réseau de transport et pose des problèmes complexes de protection.
Commentaires : Ces phénomènes de refoulement peuvent se produire en été lorsque la consommation est plus faible, alors qu’il y a du soleil et du vent, et surtout dans des régions peu peuplées où les lignes sont souvent sous dimensionnées. RTE indique le refoulement depuis peu sur leur réseau « éco2mix », on peut voir par exemple que 70% de l’éolien est refoulé. Cela conduit dans certains cas à réaliser un réseau de distribution exclusivement pour des EnRi. 1.8. Stockage d’énergie, clé du développement des EnRi ou... Nucléaire ? Le stockage d’énergie est un complément naturel des EnRi mais cela pose des questions qui ne trouvent pas encore de réponses. L’intérêt du stockage est de rendre les productions intermittentes de flux les plus abondantes dans la nature (vent et soleil), compatibles avec les consommations. Cependant il est hors de portée aujourd’hui de pouvoir stocker l’équivalent d’une journée de consommation de pointe du réseau français, par exemple.
Sur la planche 20, sont notés quels seraient les besoins de stockage dans un scénario sans moyens pilotables thermiques fossiles et nucléaire. Au moment du pic de 19h00 il faudrait un déstockage de 60GW ce qui est gigantesque, ne serait-‐ce que par rapport aux STEP qui ne représentent que 5 GW. De même le besoin en énergie sur 24 heures est de 1,4 TWh, les STEP peuvent fournir 0,1 TWh ?
On voit qu’on est loin du compte, il faudrait 12 fois plus de STEP pour satisfaire le besoin en puissance et 14 fois en énergie. Un seul moyen qui serait à l’échelle c’est la fabrication de gaz de synthèse, soit hydrogène soit méthane à partir de l’électricité EnRi. Ici il y aurait un avantage important, c’est l’existence d’un stockage illimité dans le réseau de gaz existant mais il faudrait des puissances très importantes. En revanche les rendements ne sont pas bons (30 à 40% pour l’hydrogène et de 20 à 32% pour le méthane). Pour le méthane cela veut dire que pour déstocker 1kWh il faut en consommer 5 !!! À ce stade, cette voie n’est pas rentable compte tenu des rendements et d’un facteur de charge faibles. Les STEP et les batteries ont de meilleurs rendements mais leurs capacités sont faibles par rapport aux besoins. En conclusion, il n’y a pas de solutions de stockage qui combine la bonne taille, le rendement et l’économie, à l’échelle de 24 heures ou plus du réseau français. Il y a cependant des solutions (STEP et batteries) pour des besoins d’effacement ou reports de lissage ce qui représente tout de même un intérêt.
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Et le Nucléaire dans tout cela ? Il faut que le nucléaire ait une manoeuvrabilité importante compte tenu des variations de la consommation et de variabilité des EnRi. Le suivi de charge est déjà très performant, et de longue date sur les réacteurs du parc français. Comme cela a déjà été indiqué plus haut, le suivi de charge permet les réglages primaires (+/-‐ 2%Pn) et secondaires (+/-‐ 5%Pn) ainsi que le réglage tertiaire avec des capacités très importantes de variation (on peut descendre à 20% de la Pn en 30 mn). La manoeuvrabilité peut encore être améliorée avec l’effet de parc compte tenu du grand nombre de réacteurs et de l’optimisation des arrêts de tranches et de leur positionnement dans le calendrier. Ces modes de fonctionnement ont quelques conséquences négatives mais relativement limitées :
• Les effluents sont légèrement augmentés mais ils sont majoritairement recyclés. • La maintenance est aussi légèrement impactée mais concerne surtout la partie non nucléaire. • Il y a environ 4% d’énergie non produite pour assurer les différents réglages. Mais cette énergie
existe toujours dans le combustible et elle peut être utilisée ultérieurement et même dans des conditions économiques plus intéressantes si le prix du marché augmente alors.
1.9. Les risques de black-‐out, leurs causes et conséquences Le « Black-‐out » ou écroulement est une panne électrique généralisée au niveau régional ou national. Les principales causes sont notées dans un ordre croissant sur la planche 22, on relève :
• Les moyens pilotables, centrales hydrauliques et nucléaires qui sont sûrs.
• Les postes électriques, un peu plus vulnérables
• Les moyens EnRi qui peuvent être inexistants en cas de pluie ou de nuages pour le photovoltaïque ou s’il n’y a pas de vent ou trop de vent (vitesse < 10 km/h ou > 90 ou 100 km/h). pour l’éolien.
• Les lignes aériennes sont les parties les plus fragiles avec les tempêtes, les orages, etc.
Pour éviter le black-‐out il faut maîtriser simultanément dans des délais très courts (s, mn) les trois paramètres suivants :
• La fréquence à 50 Hz +/-‐ 2 % • La tension à +/-‐ 10% • Les surintensités transitoires de secours des lignes.
C’est la perte de l’un ou de plusieurs de ces trois paramètres qui conduit au black-‐out. Le cas le plus fréquent est le déclenchement en cascade de lignes aériennes par effet domino.
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Pour éviter ces situations, les gestionnaires de réseaux peuvent prévenir les black-‐out en procédant à des îlotages ou des délestages partiels. Malgré ces mesures préventives, on a dénombré une quinzaine de black-‐out majeurs dans le monde au cours de ces 50 dernières années (voir tableau de la planche 23) dont celui de décembre 1979 en France. Les black-‐out peuvent avoir des conséquences humaines et économiques majeures compte tenu de tout ce qui fonctionne à l’électricité. Heureusement il y a des systèmes de secours pour les dispositifs vitaux (hôpitaux, etc.). De source RTE, pour la France, le MWh non distribué coûterait 25 000 euros et, une journée de black-‐out aurait un coût de 10 Mds d’euros. L’introduction des EnRi sur les réseaux augmente significativement les risques de black-‐out compte tenu de leur instabilité. Pour restaurer un réseau, après un black-‐out, l’hydraulique est idéal, il n’a pas besoin d’électricité pour démarrer et il est très stable. Dans tous les cas le redémarrage doit être très progressif. Question : Est-‐ce qu’il y a des exercices d’entrainement pour restaurer le réseau après un déclenchement ? Réponse : Il y a eu, pour le programme nucléaire français, des tests effectués pour le démarrage d’une centrale nucléaire à partir d’une centrale hydraulique dédiée qui était parfois à une très grande distance. Ce n’est pas un exercice facile, cela doit se faire très progressivement.
Le président remercie chaleureusement l’orateur pour cette présentation fort intéressante.
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2. Réunion de l’après-‐midi 2.1. Observations sur le précédent compte rendu Au § 2.3 « Tour de table », pour l’intervention de Jean-‐François SORNEIN, il convient de lire : « …en vieillissant, le béton devient un puits de carbone car il se carbonate » ; le CR indiquait qu'il se décarbonate. 2.2. Informations générales et questions d’actualité Maurice MAZIÈRE nous communique les informations suivantes : Sur la transition énergétique Allemande :
• La lettre de Géopolitique de l’Électricité N°72, traite de l’ « Energiewende » et souligne notamment l’énorme difficulté à tenir les engagements affichés, voir PJ 2.
• Un texte complémentaire à la lettre ci-‐dessus, relatif aux coûts de la transition énergétique Allemande, voir PJ 3.
• Un rapport en anglais rédigé par un Allemand, un peu plus ancien qui parle de désastre à propos de la transition énergétique Allemande, voir PJ 4.
• Un texte récent, intitulé : « Transition énergétique : une catastrophe financière … », sur les difficultés financières des deux principaux producteurs d’électricité Allemands E.O.N et R.W.E, voir PJ 5.
• UBU chez les Allemands par Jean pierre RIOU ; une analyse très détaillée des coûts et des effets de l’Energiewende, voir PJ 6.
Sur les énergies renouvelables : • Un article de Sylvestre HUET qui fait une analyse du dossier RTE diffusé avec le dernier compte
rendu, et en tire huit leçons assez critiques, voir PJ 7. • Un document de B. DURAND sur les problèmes avec les énergies intermittentes de 15 pays, voir
PJ 8. • Un document sur lequel on peut suivre un échange musclé à propos de l’opposition éolien et
nucléaire, voir PJ 9. • Un nouveau livre de Michel GAY intitulé « Au diable les énergies renouvelables », voir PJ 10. • Un premier document de l’OIE, « La transition énergétique : quelles conséquences pour les
ménages ? » voir PJ11. • Un deuxième document de l’OIE sur les garanties d’origine de l’électricité, Voir PJ 12. • Une analyse de C. LEBRUN et d’autres ingénieurs et physiciens sur le « mirage du MIX
énergétique », voir PJ 13. Autres document signalés :
• Le nouveau livre de Bertrand BARRÉ, dont on avait déjà fait l’annonce lors de la diffusion du dernier compte rendu, voir PJ 14.
• Le livre de l’orateur de ce jour G. SAPY, « Faut-‐il avoir peur des centrales nucléaires », voir PJ 15. • Un article de Sylvestre HUET sur le climat, « Climat : 2017 démarre fort » voir PJ 16. • Un autre article de Sylvestre HUET, paru sur son blog, sur l’assainissement de l’atelier Plutonium
de Cadarache qui vient de se terminer, voir PJ 17. • Un article sur le rapport de l’inspecteur général d’EDF, voir PJ 18.
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• Une présentation du Conseiller Nucléaire Sunil FELIX sur l’Énergie nucléaire au Japon et notamment des informations relatives à Fukushima, voir PJ 19.
• Le compte rendu de la visite de la CLI de la Manche au Japon dans la zone affectée par l’accident de Fukushima pendant une semaine. Document très complet qui donne des informations sur la situation sanitaire dans cette zone, la chaine alimentaire (agriculture et pêche), le retour des populations et la situation de la centrale, voir PJ 20.
2.3. Projet de texte sur les énergies renouvelables.
Faisant suite à une idée lancée par Bernard LEROUGE, déjà évoquée lors de la dernière réunion, les participants estiment qu’il existe déjà des livres sur ce sujet (ceux de MM. BUTRÉ, GAY et HACKET). En revanche Sylvestre HUET, que nous avons contacté par ailleurs, propose aussi -‐ plutôt que de rédiger un livre -‐ de profiter de son blog, du journal Le Monde, sur lequel nous pourrions rédiger des articles pour lesquels il nous demanderait une contribution. Il donne d’ailleurs quelques pistes qu’il juge pertinentes.
En conclusion de cet échange il est décidé de prendre contact avec Sylvestre HUET pour examiner comment nous pouvons collaborer sur son blog qui dispose d’une très bonne audience (Maurice MAZIÈRE se charge de reprendre contact). 2.4. Tour de table. Philippe RAIMBAULT : Nous signale l’initiative de la SFEN 78 qui a organisé le 22 février à Versailles un déjeuner de presse auquel a participé un seul journaliste (la SFEN 78 avait lancé 21 invitations). Il y a eu un article dans le journal local (Toutes les nouvelles) qui met en avant les nombreuses implantations de sociétés travaillant dans le nucléaire, dans le 78. Gérard de Giovanni a également participé à une émission de la télévision locale (Yvelines). On peut revoir cet entretien à l’adresse suivante : https://www.tvfil78.com/78-‐lhebdo-‐vendredi-‐24-‐fevrier-‐2017/117997/ Jean-‐Marc NIEZBORALA : Nous signale que des travaux vont être entrepris à l’usine de La Hague sur les dissolveurs de l’atelier de concentration PF avant vitrification. Jean-‐Paul CROCHON : Hervé MACHENAUD sort un livre « la France dans le noir », en cours d’impression. 2.4. Examen du programme pour les prochaines réunions : Maurice MAZIÈRE fait savoir qu’il manque de conférenciers pour les prochains mois et interroge le groupe pour savoir ce que l’on fait en avril si cette situation persiste. Il est décidé de maintenir la réunion et si on ne trouve pas de conférencier d’ici là on garde la réunion du matin pour aborder les points habituels de l’après midi.
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Hors réunion Maurice MAZIÈRE a obtenu l’accord de Jean-‐Louis BUTRÉ pour participer à notre réunion du matin, le jeudi 20 avril, au cours de laquelle il ne souhaite pas faire une présentation formelle mais réaliser un échange avec les participants à partir d’une liste de questions que nous lui enverrions à l’avance. Rappel des sujets de possibles conférences déjà évoqués :
• Le démantèlement des tranches nucléaires, Jean-‐François SAUVAGE a déjà contacté EDF et on attend la réponse.
• Trouver quelqu’un de la CRE pour un exposé sur le nouveau panorama des aides aux renouvelables (Françoise DUTHEIL est en contact avec la CRE).
• Un sujet proposé par B. LEROUGE sur l’émergence des cancers en liaison avec l’énergie (on pense à C. HILL, R. MASSE).
• Jean-‐Paul CROCHON propose de parler de nouveau du problème des pièces forgées pour lequel il y a en fait trois aspects différents : La cuve EPR de Flamanville – Le taux de carbone sur les fonds de GV – Le dossier AQ du Creusot. On évoque la possibilité de faire venir quelqu’un de l’IRSN comme Thierry CHARLES.
• L’éolien off-‐shore, difficulté à trouver quelqu’un chez GE, anciennement ALSTOM. • Le projet CIGEO. • Le nucléaire en Inde par le conseiller nucléaire. • Tchernobyl, 30 ans après ; se rapprocher de l’IRSN. • Le transport nucléaire. • Un sujet sur l’Uranium proposé par Bruno COMBY et Jean-‐Pierre de SARRAU qui proposent des
orateurs possibles.
Prochaine réunion le jeudi 20 avril à 10h30.
Échanges et discussion avec Jean-‐Louis BUTRÉ sur la base de son dernier livre "Éolien, une catastrophe silencieuse".