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UNIVERSITE PARIS VAL DE MARNE
FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL *************************************
ANNEE 2006 N°
THESE
POUR LE DIPLOME D’ETAT
DE
DOCTEUR EN MEDECINE Discipline : Médecine générale
---------------------------------------
Présentée et soutenue publiquement le / / 2006.
A CRETEIL (PARIS XII) ---------------------------------
Par MERRET Laurent
Né le 8 juillet 1974 à Colombes
--------------------------------- TITRE : Interprétation des hyperferritinémies à l’heure du diagnostic de l’hémochromatose génétique. DIRECTEUR DE THESE : LE CONSERVATEUR DE LA BIBLIOTHEQUE UNIVERSITAIRE :
Pr Galactéros Frédéric. Signature du directeur de thèse Cachet de la bibliothèque universitaire
2
A Delphine, Pour son amour et son soutien inconditionnels toute la
durée de ce travail.
A mes parents, En reconnaissance de leur soutien tout au long de mes
études.
A ma famille, ma belle-famille et mes amis Pour leur réconfort.
A mon beau-père, Pour son aide technique indispensable et sa
disponibilité.
A Monsieur le Professeur Galactéros Que je remercie de me faire l’honneur de juger ce travail.
Merci pour son accueil, sa disponibilité et sa confiance.
Qu’il trouve dans ce travail, l’assurance de ma gratitude et
de mon profond respect.
Aux docteurs Catherine Fabre et Vincent Philippe Pour l’enseignement qu’ils m’ont dispensé au cours de mon résidanat et
pour le plaisir qu’ils m’ont communiqué à exercer ce métier.
3
TABLE DES MATIERES.
INTRODUCTION……………………………………….. 7
I. PHYSIOPATHOLOGIE……………………………. 10
I.1. METABOLISME DU FER…………………………..…….. 10
a)Répartition du fer dans l’organisme ………………………………… 10
b) L’absorption …………………………………………………………… 11
c) Le métabolisme cellulaire du fer……………………………………… 12
d)régulation du métabolisme martial ……………………………………13
I.2. L’HEMOCHROMATOSE LIEE A HFE …………………… 15
a) Au niveau des entérocytes ...……………………………………………15
b Au niveau macrophagique……………………………………………… 16
c)Au niveau des hépatocytes……………………………………………… 17
I.3. HETEROGENEITE ALLELIQUE ET GENETIQUE DES
SURCHARGES EN FER PRIMTIVES…….………………….. 18
a)Hémochromatose liée au gène HFE ............................................... 18
b) Hétérogénéité génétique des surcharges en fer primaires ............. 19
II.EPIDEMIOLOGIE DE
L’HEMOCHROMATOSE…………………………. 20
III. PRESENTATION CLINIQUE DES
SURCHARGES EN FER…………………………...22
4
III.1. CIRRHOSE………………………………………………… 22
III.2. LE CARCINOME HEPATOCELLULAIRE …………… 23
III.3. L’ATTEINTE CARDIAQUE………………………………24
III.4. LE DIABETE ……………………………………………… 25
III5. L’ATTEINTE ARTICULAIRE……………………………. 25
III.6. AUTRES SYMPTOMES ET COMPLICATIONS……… 27
IV. PENETRANCE DE L’HEMOCHROMATOSE. 28
V. SURCHARGES EN FER SECONDAIRES……. 30
V.1.SURCHARGES HEMATOLOGIQUES………………….. 30
V.2. LA PORPHYRIE CUTANNEE TARDIVE………………..31
V.3. SURCHARGES LIEES A UNE HEPATOPATHIE…….. 31
a) Hépatopathie alcoolique ……………………………………………… 32
b) Hépatites virales…………………………………………………………33
c) Cirrhose …………………………………………………………………33
V.4 HEPATOSIDEROSE DYSMETABOLIQUE…………… 34
a)Définitions……………………………………………………………… …34
b)Expression clinique de l’HSD*……………………………………… …34
5
c)Relations entre métabolisme du fer, inflammation, insulinorésistance
et athérosclérose ……………………………………………………………37
VI. ETUDE D’UNE COHORTE DE 73 PATIENTS
SUIVIS POUR UNE SURCHARGE EN FER……...40
VI.1 MATERIEL ET METHODES……………………………. 40
VI.2 RESULTATS…………………………………………………42
VI.2.1 SPECTRE ETIOLOGIQUE DES SURCHAGES EN FER ……42
VI.2. 2. EXPRESSIONS PHENOTYPIQUE ET GENOTYPIQUE DES
SURCHARGES EN FER ………………………………………………… 44
a)Surcharges en fer primitives …………………………………………… 44
b)Surcharges en fer secondaires………………………………………… 55
c)Hépatosidéroses dysmétaboliques …………………………………… 61
VI.2.3 CIRCONSTANCES DE DECOUVERTE DES SURCHARGES
EN FER……………………………………………………………………… 72
a) circonstances de découverte des surcharges en fer primaires ……75
b) circonstances de découverte des surcharges en fer secondaires … 77
c) circonstances de découverte d’une HSD*…………………………… 78
DISCUSSION.…………………………...………… 81
CONCLUSION ……………………………………...96
6
BIBLIOGRAPHIE…………………………………..….101
GLOSSAIRE DES ABREVIATIONS………………. 117
ANNEXES………………………………………………..120
Suppléments 1 à 3 ……………………………………………….p121 à 125
Schémas 1 à 8……………………………………………………p126 à 134
Tableaux 1 à 10 ………………………………………………… p135 à 145
7
INTRODUCTION.
Le fer est indispensable à la vie, il entre notamment dans la composition de la
molécule d’hémoglobine. Mais ce métal est un élément est ambivalent car il est
toxique en situation de surcharge ; il est susceptible d’interagir avec les mem-
branes biologiques en produisant des espèces radicalaires oxygénées délétères [1].
Au cours de l’hémochromatose héréditaire (HCH*), la surcharge viscérale entraîne
ainsi un risque de diabète, de cardiopathie de carcinome hépatocellulaire et la
durée de vie est raccourcie en présence d’une cirrhose [2]. La surcharge en fer
semble dorénavant considérée comme un facteur diabétogène et une relation
réciproque s’établit entre le degré de charge en fer et le niveau d’insulino-
résistance [7, 133, 135, 154]. En outre, il existe des arguments épidémiologiques et
expérimentaux qui ouvrent aujourd’hui le débat sur les risques de cancer extra-
hépatique et cardiovasculaire au cours des surcharges en fer [3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10].
La ferritinémie est devenu un examen de routine en cabinet de ville, dans
l’exploration d’une anémie, par exemple. Elle suit assez fidèlement le niveau des
stocks en fer de l’organisme. Cependant, alors que l’orientation diagnostique reste
simple face à une situation d’abaissement de la ferritine, qui est toujours liée à une
carence martiale, il est moins évident d’appréhender toutes les questions soulevées
par une hyperferritinémie. Cela tient sûrement au fait que les plus importantes
découvertes sur le métabolisme du fer et sur la physiopathologie des situations de
surcharges sont très récentes. Depuis environ dix ans, de grands progrès ont été
réalisés, tant sur les plans moléculaire, que génétique et épidémiologique.
Il est aujourd’hui établi que l’HCH* repose sur une grande hétérogénéité
génétique et allélique ; la mutation C282Y homozygote, du gène HFE, est
responsable, à elle seule, de 80% des cas d’hémochromatose génétique en
Europe du Nord [11] et avec une prévalence dans la population générale française
de 2 à 8 ‰ [12], elle place l’HCH* au premier rang des maladies génétiques. Pour
autant, la pénétrance clinique de la maladie est incomplète et son estimation est
controversée [13,14]. Les complications de cette maladie, génotypiquement
fréquente et potentiellement grave, sont prévenues par des saignées. Pourtant la
méconnaissance de l’histoire naturelle et de la pénétrance de la maladie, la varia-
tion d’expression selon le sexe, la difficulté du choix entre méthode génotypique et
8
phénotypique et la difficulté du choix des valeurs seuils expliquent pourquoi le
travail de l’ANAES ne permet pas de conclure en faveur d’un dépistage de l’HCH
en population générale [12] (Cf supplément N°3). Le médecin généraliste est ainsi
remis au coeur du dépistage de l’HCH*; cela suppose qu’il soit sensibilisé aux
symptômes évocateurs, peu spécifiques, et qu’il ait une connaissance actualisée sur
l’étiologie des surcharges en fer et des hyperferritinémies.
Car la prévalence de l’homozygotie C282Y est loin de pouvoir rendre compte
de toutes les hyperferritinémies. L’hyperferritinémie (ferritine >300µg/l chez
l’homme et >200µg/l chez la femme) serait fréquente dans la population générale
adulte ; cette anomalie biologique toucherait environ 13% des survivants de la
cohorte de Framingham, âgés de 67 à 96 ans [167]. Elle atteint jusque 20% des
hommes âgés de 40 à 60 ans au Danemark [15]. Il existe ainsi d’autres causes
classiques de surcharges en fer secondaires (dysérythropoïèses, porphyrie cutanée
tardive, hépatopathies...). Mais la découverte d’une hyperferritinémie ne témoigne
pas toujours d’une surcharge. Son interprétation doit intégrer, outre le degré de
surcharge martiale, différents paramètres comme la cytolyse, l’hémolyse ou bien le
degré d’inflammation (Cf Tableau N°10). A côté, l’hépatosidérose dysmétabo-
lique (HSD*) est une entité récemment décrite, au cours de laquelle une hyperfer-
ritinémie s’associe à une surcharge en fer, à un syndrome métabolique et à des
atteintes hépatiques variables regroupées sous le terme de NASH* [16].
L’évolution vers la cirrhose et le carcinome hépatocellulaire est possible. Les
mécanismes qui génèrent une telle hépatosidérose ne sont pas bien définis au cours
du syndrome métabolique; de même, l’hyperferritinémie dysmétabolique pourrait
avoir une origine en partie inflammatoire, elle est en outre corrélée au degré
d’insulino-résistance tandis que la surcharge en fer n’est pas systématique. Compte
tenu de la fréquence du syndrome métabolique et de la prévalence de l’hyper-
ferritinémie au cours de ce dernier d’une part, et des rapports qu’établissent entre
eux surcharge martiale, insulino-résistance et risque hépatique d’autre part, ce
thème représente peut-être un enjeu à résoudre en terme de santé publique.
Autrement dit, faut-il émettre des recommandations quant au dépistage ciblé de ce
type de surcharge martiale?
Certains auteurs avancent que l’HSD* serait 10 fois plus fréquente que
l’HCH* et mettent en en avant l’intérêt d’un dépistage ciblé de ce type de
surcharge au cours du syndrome métabolique [135]. Le spectre des surcharges en
9
fer n’a jusque alors pas été décrit au sein de cohortes de patients traités par
saignées, avec évaluation de la surcharge en fer. Finalement quelle est la part de
l’HSD* dans le spectre des surcharges en fer traitées aujourd’hui? Quelle est
l’influence du syndrome métabolique dans l’expression des surcharges en fer ?
Quelles circonstances dans la pratique médicale actuelle conduisent-elles le plus
souvent au diagnostic de surcharge en fer ? Quelles étapes faut-il suivre depuis la
constatation d’une hyperferritinémie jusque la prescription des saignées ? Autant
de questions auxquelles permettent de répondre, du moins partiellement, bon
nombre de publications sur un sujet en pleine effervescence depuis une décennie et
qui ne peut se limiter à l’actualité sur l’HCH*.
Après un rappel des connaissances sur le métabolisme du fer, nous aborderons
les aspects physiopathologiques, génétiques et cliniques de l’HCH, des autres
causes de surcharges en fer, primaires mais aussi secondaires. Nous développerons
le thème de l’hépatosidérose dysmétabolique. Nous essaierons, à mesure que sera
évoquée chaque cause de surcharge, d’en dégager les enjeux thérapeutiques. Nous
décrirons ensuite de façon rétrospective une cohorte de 73 patients, saignés pour
cause de surcharge en fer au « centre des maladies génétiques du globule rouge ».
Nous étudierons le spectre étiologique des surcharges traitées actuellement avec
justifications phénotypique et génotypique. Nous évaluerons les circonstances
conduisant à la constatation d’une telle surcharge, en identifiant le prescripteur du
bilan martial initial et les motivations de la réalisation de cet examen et en
décrivant le bilan prescrit.
Le but de ce travail est de décrire le spectre des surcharges en fer au sein
d’une cohorte de patients saignés, de souligner le rôle de la voie métabolique au
sein d’un tel spectre. En étudiant les circonstances de découvertes des
perturbations du bilan martial dans cette cohorte, nous confronterons l’état des
pratiques à celui des connaissances et des recommandations actuelles, nous
préciserons le rôle du médecin généraliste quant à l’identification de ces
surcharges en fer.
10
I. PHYSIOPATHOLOGIE.
I.1 LE METABOLISME DU FER.
Si la présence du fer est vitale, cet élément peut devenir toxique en cas de
surcharge. Sous forme ferreuse et libre, il possède un fort pouvoir oxydant et
génère des espèces réactives oxygénées [1], comme le radical hydroxyle, selon
l’équation de « Fenton »: Fe2+ + H2O2 � Fe3+ + OH- + OH°.
La production de radicaux libres conduit à une instabilité des membranes bio-
logiques par des réactions de lipoperoxydations des acides gras polyinsaturés [17].
A côté, le fer ferrique pourrait générer des radicaux ferryl et perferryl, attaquant di-
rectement les acides gras polyinsaturés. L’organisme a donc élaboré des moyens
de défense en synthétisant des molécules porteuses ou en contrôlant son état
d’oxydoréduction. L’homéostasie du fer répond à des situations particulières
(anémie, activité érythropoïétique, inflammation) et se fait par mouvement adapté
au sein d’une compartimentation dans la cellule et dans l’organisme, et par
modulation de l’absorption.
a) répartition du fer dans l’organisme. (Cf. schéma N°1).
L’organisme contient 30 à 50 mg/kg de fer (3 à 5 g chez l’adulte) [18]. L’en-
semble des valeurs des besoins, des pertes et des apports recommandés figure dans
le Tableau 1. Les pertes en fer sont incompressibles.
L’hémoglobine représente 60 à 70% [19] de la quantité de fer de l’organisme
[1] (Cf. schéma N°1). Le reste du fer fonctionnel est contenu par d’autres
protéines héminiques et non héminiques à hauteur de 10% du fer total. La biosyn-
thèse de l’hème est ubiquitaire. L’hème est un composant de l’hémoglobine, de la
myoglobine et d’autres hémoprotéines impliquées dans des réactions d’oxydo-
rédution (cytochromes, catalases, peroxydase) [20]. Les étapes de sa synthèse sont
résumées sur le schéma N°2. Plusieurs déficits enzymatiques de cette voie sont
responsables des porphyries (Cf Tableau N°2). Le fer conditionne encore
l’activité d’enzymes ferrodépendantes comme la ribonucléotide réductase ou la
prolyl-hydroxylase impliquées dans la synthèse d’ADN ou celle de collagène [21].
11
Les stocks représentent 20% du fer de l’organisme [1], contenus à 95%, sous
forme de ferritine (dans les hépatocytes, les macrophages spléniques et acces-
soirement les cellules de Kupffer). La ferritine est constituée de 24 sous unité de
2 types ; la sous-unité H, possède une activité ferroxydase transformant le fer
ferreux en fer ferrique et la sous-unité L permet des phénomènes de nucléation du
fer et la formation de cristaux de phosphate d’oxyhydroxyde ferrique [22]. Ces
molécules s’associent dans des proportions variables en formant une coque
protéique contenant jusque 4500 atomes de fer ferrique.
Le sang, véritable organe de transit, ne contient pourtant que 4 mg de fer. Le
fer sérique qui a une demi-vie de 3 à 4 heures [23] est pris en charge par la trans-
ferrine (Tf*). Cette molécule, synthétisée majoritairement par le foie, présente 2
domaines capables de fixer le fer ferrique Elle est saturée de 30 à 45% en situation
normale. L’internalisation de la transferrine grâce à un récepteur spécifique,
RTf1*, représente la voie de captation du fer dans les cellules. L’atransferrinémie
chez la souris et chez l’homme [24-25], est caractérisée par la présence de FNLT*
(fer non lié à la transferrine), qui représente alors la forme sérique du fer en
association à des éléments de bas poids moléculaires (citrates, ADP*, acétate).
Cette forme inexistante à l’état normal, est quasi exclusivement captée par le foie
qui l’extrait avidement du plasma, à 70% lors du premier passage hépatique [21].
Un phénotype anémique, du fait d’une utilisation érythroblastique naturelle du
FLT* (fer lié à la transferrine), contraste avec la surcharge viscérale. Au cours des
thalassémies et de l’HCH la transferrine est saturée et le FNLT* apparaît.
b) L’absorption
Elle a lieu dans le duodéno-jéjunum. Le fer héminique représente les 2/3 du
fer absorbé contre 1/3 seulement du fer ingéré [18]. Après solubilisation dans
l’estomac, le fer est endocyté grâce à un récepteur spécifique de l’hème puis il est
libéré dans l’entérocyte après clivage du cycle héminique par l’hème-oxygénase.
Le fer non héminique, d’origine végétale est moins bio-disponible. Réduit dans
l’estomac, il est libéré de ses complexes et s’associe à des chélates (vitamine C)
qui en favorisent l’absorption. La captation du fer au pôle apical villositaire est
sous la dépendance de plusieurs protéines (Cf. schéma N°3) dont les rôles ont été
précisés sur la base de modèles expérimentaux ou pathologiques (cf. tableau N°3).
L’activité ferriréductase de Dcytb, (duodenal cytochrome b), au niveau de la mem-
12
brane plasmique, à l’apex, réduit le reste du fer non héminique encore à l’état fer-
rique [26]. DMT1* (Divalent Metal Transporter1) est un transporteur qui permet
alors au fer divalent de pénétrer dans l’entérocyte couplé au transport de l’ion H+
[27]. Son ARNm* est exprimé à l’apex villositaire des entérocytes et par les ma-
crophages [21]. Les souris mk/mk et les rats de Belgrade [28,29], présentent des
mutations au niveau des 2 gènes de DMT1. Ces animaux carencés en fer ont un
défaut d’absorption, lié à la disparition de DMT1 au niveau de la bordure en
brosse, mais aussi un défaut de captation du fer par les érythroblastes. Une fois
dans la cellule, le fer est intégré au pool labile en se liant de petites molécules
comme les citrates, des acides aminés, ou la mobilferrine, susceptible d’influencer
son transfert au pole basal [30], ou bien il est capté par la ferritine jusqu’à
desquamation dans la lumière digestive [19]. La sortie du fer au pole basal
dépend de deux molécules (Cf. schéma N°3). L’héphaestine permet, l’oxydation
du fer ferreux en fer ferrique, ce qui autorise sa fixation ultérieure sur la
transferrine plasmatique [19]. Son expression est limitée aux villosités intestinales.
Les souris « sla 1» présentent une délétion partielle du gène, situé sur le
chromosome X, et développent une carence en fer par défaut d’absorption avec
accumulation de fer dans l’entérocyte [31]. La ferroportine est un transporteur
membranaire permettant la sortie de fer au pôle basal des entérocytes matures. On
la retrouve au niveau des hépatocytes et des macrophages. Son expression est
corrélée à l’efflux de fer hors du cytoplasme des œufs de xénope [1].
c) Le métabolisme cellulaire du fer.
La captation cellulaire du FLT* est médiée par RTf1*, en quantité maximale
dans l’érythroblaste [19]. Il existe une forme soluble. RTf1* est exprimé à la
surface des duodénocytes cryptiques, des hépatocytes, macrophages et érythro-
cytes. Une fois le complexe RTf1-transferrine internalisé, le fer est réduit et se
libère de l’apotransferrine sous l’influence d’une baisse du pH. Il traverse la mem-
brane de la vacuole d’endocytose via DMT1 et rejoint le pool labile cellulaire.
RTf1 est recyclée vers la membrane plasmique, l’apotransferrine se délie de RTf1
et repart dans le sang [18] ; l’érythroblaste traite ainsi jusque 20 000 atomes de fer
en 10 minutes (Cf. schéma N°4). Un second récepteur de la transferrine, RTf2,
récemment cloné [32] est exclusivement exprimé par l’hépatocyte; son affinité
13
pour la transferrine est très inférieure à celle de RTf1. Plusieurs mutations du gène,
observées chez l’homme à l’état homozygote, entraînent une HCH classique [33].
Le pool labile intracellulaire est une zone d’échange entre les milieux intra et
extracellulaires et entre le fer des réserves et le fer fonctionnel. Sa composition
chimique est mal connue, sûrement associée à des éléments de bas poids molé-
culaires [19]. La concentration cellulaire de ce fer est heureusement très faible
[22], car il génère des radicaux libres, réactifs avec l’environnement immédiat.
La sortie du fer en dehors de la cellule dépend du couple céruléoplasmine-
ferroportine (Cf. schéma N°3). La céruléoplasmine, holoprotéine synthétisée par
le foie, possède 6 atomes de cuivre nécessaires à son activité ferroxydasique.
Analogue de l’héphaestine, elle permet l’efflux cellulaire de fer en l’oxydant sous
forme ferrique, couplée à l’action d’un transporteur, la ferroportine. L’acéruléo-
plasminémie congénitale est caractérisée chez l’homme par une surcharge
hépatique, pancréatique mais aussi cérébrale et rétinienne, qui ne sont pas des
atteintes classiques [34]. Une anémie complète le tableau. CST et sidérémie sont
bas, la transferrine ne captant pas le fer non oxydé. La mutation du gène de la
ferroportine entraîne une anémie sévère chez le poisson zèbre [1]. Plusieurs
mutations identifiées chez l’homme, entraînent une surcharge réticulo-endothéliale
à transmission autosomique dominante [29, 35, 36] et tendance à l’anémie avec les
saignées [37]. Un CST normal contraste avec une importante hyperferritinémie.
d) Régulation du métabolisme martial.
Le système IRE-IRP [38] régule de façon coordonnée RTf1, la ferritine,
DMT1, et la ferroportine, en fonction du contenu cellulaire en fer. L’ARNm de ces
molécules présente des structures non codantes, appelées IRE* (Iron Regulatory
Element), qui interagissent avec des protéines appelées IRP (Iron Responsive
Protein) dont deux types sont connus. Ces protéines présentent à l’état natif une
forte affinité de liaison pour les IRE. Cette affinité détermine l’activité IRP, condi-
tionnée par la quantité de fer du pool cellulaire. L’activité IRP est donc un bon
indicateur de celui-ci. IRP1 possède un noyau fer-soufre dont la présence, dépen-
dant d’une quantité suffisante en fer, lui confère une activité aconitase [38]. Quand
le fer manque, IRP1 perd son noyau, son activité enzymatique et retrouve son affi-
nité naturelle pour les séquences IRE des ARNm suscités. IRP2 ne possède ni
noyau fer-soufre ni activité aconitase, mais peut lier le fer, si la concentration est
14
suffisante, ce qui entraîne sa dégradation par le protéasome. Les IRP peuvent se
lier en région 3’ des ARNm de RTf1 et de DMT1 ce qui conduit à la stabilisation
de ces ARNm, alors qu’elles se lient en région 5’ des ARNm de la ferritine et de la
ferroportine, entraînant l’inhibition de l’initiation de la traduction (Cf. schéma
N°5). Il n’y a pas de régulation de la ferritine et de RTf1 dans les érythroblastes,
naturellement pauvres en ferritine et très riches en RTf1. Dans les autres cellules,
en cas de carence, le fer est orienté vers le pool fonctionnel en favorisant la capta-
tion cellulaire, grâce à la surexpression membranaire de RTf1 et de DMT1, et en
réprimant l’expression de la ferritine et de la ferroportine. Plusieurs mutations dans
les régions IRE des L et H ferritines provoquent des pathologies héréditaires auto-
somiques dominantes : une telle mutation dans le gène de la H-ferritine induit un
phénotype de surcharge classique [39]. Des mutations sur l’IRE de la L-ferritine
sont responsables du syndrome cataracte-hyperferritinémie [40].
L’hepcidine, véritable protéine de la phase aigue de l’inflammation [41], est
synthétisée par le foie. Elle est surexprimée au cours des surcharges en fer chez la
souris [42], en cas d’inflammation [43], et réprimée en cas d’anémie [43]. L’effet
inhibiteur de l’anémie prédomine sur l’effet inducteur de la surcharge.
L’inflammation augmente la synthèse d’hepcidine qui entraîne une diminution
d’absorption du fer et une séquestration macrophagique. Des modèles murins inva-
lidées pour le gène USF2*, naturellement déficientes en hepcidine expriment une
surcharge en fer préservant le système réticulo-endothélial [44]. Des souris trans-
géniques exprimant des copies supplémentaires du gène présentent à la naissance
une anémie profonde et meurent rapidement [45]. Une mutation du gène de l’hep-
cidine, associé à un tableau d’hémochromatose juvénile a été décrite chez l’hom-
me en 2003 [46]. L’ARNm codant pour l’hepcidine est paradoxalement diminuée
dans le foie de malades atteint d’HCH liée à HFE et sur des modèles HFE-/- [47].
La réexpression d’hepcidine grâce à des copies supplémentaires du gène, prévient
l’apparition de la surcharge en fer chez la souris HFE-/-. HFE n’est donc pas la
cible de l’hepcidine [48]. L’hepcidine régulerait en fait l’efflux cellulaire de fer, en
déclenchant l’internalisation de ferroportine [49]. Elle se comporte comme une
véritable hormone. Elle freine l’absorption du fer et en favorise la séquestration
macrophagique. Une méthode de dosage fiable trouverait sa place au sein d’un
arbre décisionnel diagnostique ; la découverte d’agonistes permettrait de corriger
certaines surcharges primitives, où le système réticulo-endothélial est préservé.
15
I.2. L’HEMOCHROMATOSE LIEE A HFE.
« Hémochromatose », qui signifie coloration par le sang, est un terme utilisé
par Von Recklinghausen en 1889, sur la base de l’observation d’une surcharge tis-
sulaire en fer dans plusieurs organes [40]. Des cas de cirrhose bronzée avec dia-
bète furent initialement décrits par Trousseau, en 1865, puis Troisier. Sheldon
souleva les bases d’une hypothèse génétique en décrivant des formes familiales
[50]. En 1976, Simon et al rendaient compte de l’association fréquente de la
maladie avec l’expression de l’antigène HLA*A3 et HLA B14 et situèrent le gène
sur le bras court du chromosome 6. Le mode autosomique récessif de transmission
fut ensuite démontré [51]. En 1996, enfin, Feder et al ont identifié et cloné le gène
responsable, initialement appelé HLA-H rebaptisé HFE (pour High Fer) [52]. La
mutation C282Y consiste en un remplacement d’une cystéine par une tyrosine, du
fait de la substitution G->A en position 845 du gène. Elle est présente à l’état
homozygote, chez 83% des sujets porteurs d’une HCH*, dans l’étude princeps. Le
rôle de HFE dans la maladie fut confirmé en démontrant une hyperabsorption di-
gestive et une surcharge en fer chez la souris ayant le gène HFE invalidé (HFE-/-)
[53]. HFE code pour une protéine transmembranaire qui possède 3 domaines
globulaires extracellulaires (Cf schéma N°6). Le domaine α3 crée une liaison non
covalente avec B2µ-glob* (β2-microglobuline), par formation d’un pont disulfure
[21]. La mutation C282Y invalide cette liaison et HFE, normalement exprimée à la
surface des cellules, reste en position intracytoplasmique [54, 55]. HFE est
exprimée par les hépatocytes, les macrophages et les cellules cryptiques
duodénales [39]. En outre, la protéine HFE sauvage est capable de s’associer au
pôle baso-latéral des cellules cryptiques duodénales avec RTf1 [56]. Cette
association diminue l’affinité de RTf1 pour la transferrine [57].
a) Au niveau des entérocytes.
Au cours de l’HCH liée à HFE, les duodénocytes expriment un phénotype
moléculaire de carence en fer, malgré la surcharge (l’activité IRP augmente
dans les duodénocytes [58] et l’ARNm de la ferritine logiquement diminué). L’ex-
pression de RTf1 n’est pas augmentée au cours de l’HCH mais elle semble nette-
ment supérieure à celle retrouvée chez des patients présentant une surcharge en fer
secondaire [59] (Cf. Tableau N°4). Plusieurs résultats expérimentaux montrent
16
également un recrutement inconstant de DMT1 et de la ferroportine à l’apex
villositaire au cours de l’HCH, chez la souris HFE-/- [67,179] et chez l’homme
[60,61]. Cette inconstance s’explique par des différences de pénétrance, selon les
souches animales utilisées [62, 63, 64], tandis que ce recrutement semble influencé
par les saignées chez l’homme [65]. Les quantités d’ARNm de DMT1 et de la
ferroportine, même lorsqu’elles semblent normales, sont, de toutes façons, bien au
dessus de ce qu’elles devraient, pour les taux de ferritine observés [66]. Pour
certains, la mutation C282Y induirait, par modification de l’affinité de RTf1 pour
la transferrine, la diminution de la pénétration de fer au pole basal [57] ; cette
carence relative en fer, induirait la maturation des cellules cryptiques en des
cellules de l’apex villositaire, hyperexprimant DMT1 [67], rendant compte de
l’hyperabsorption de fer. Cette hypothèse est paradoxale car l’absence de liaison
de HFE à RTf1 devrait une augmenter l’affinité de ce dernier pour la transferrine
et favoriser l’entrée de FLT* au pole basal.
b) Au niveau macrophagique.
Les macrophages semblent également relativement pauvres en fer au cours
de l’HCH [68, 69] (Cf. Tableau N°4). Et, même si leur contenu en ferritine aug-
mente malgré tout au cours de l’HCH* [70,71], on peut penser qu’il serait bien
plus élevé si l’activité IRP était au même niveau qu’au cours des surcharges secon-
daires. Le système réticulo-endothélial est ainsi relativement préservé au cours de
l’HCH liée à HFE, ce qui coïncide avec la répression paradoxale d’hepcidine [47],
molécule qui induit l’internalisation de la ferroportine au niveau des cellules HEK
293-Fpn [49] et une diminution de l’efflux de fer au niveau des macrophages J774
[72]. Or, la restauration fonctionnelle de la molécule HFE au sein de macrophages
de patients C282Y+/+, permet la réaccumulation de fer sous forme de ferritine, in
vitro [73]. L’homozygotie C282Y provoquerait donc, indépendamment de la ré-
pression d’hepcidine, une fuite macrophagique de fer liée à la surexpression de la
ferroportine. La molécule HFE, inhiberait en fait préférentiellement, selon le type
cellulaire, l’entrée de fer (dans les cellules HeLa) ou bien sa sortie (dans les cellu-
les THP1) tandis que l’effet inhibiteur sur l’efflux de fer ne serait pas lié à la capa-
cité de liaison de HFE à RTf1 [74]. Une perte d’inhibition de la sortie de fer, liée à
l’état C282Y+/+, expliquerait la préservation réticulo-endothéliale et possiblement
l’hyperabsorption de fer en extrapolant un tel effet au niveau de l’entérocyte.
17
c) Au niveau des hépatocytes. (Cf. Tableau N°4).
Au cours de l’HCH*, l’expression hépatocytaire de RTf1 diminue et la ferriti-
ne augmente [69] en adéquation avec l’élévation de la CHF*. A l’instar de ce qui
est décrit pour les cellules HeLa [74], l’homozygotie C282Y pourrait aggraver la
surcharge hépatocytaire, déjà liée à l’hyperabsorption du fer, par la perte du
pouvoir d’inhibition sur l’entrée de fer. L’hypo-expression d’hepcidine au cours
de l’HCH* paraît illogique au vu de la surcharge. In vitro, les hépatocytes seuls
sont incapables d’augmenter l’expression d’hepcidine dans un milieu riche en fer.
Par contre, l’hepcidine est stimulée par l’inflammation et la surcharge in vivo
[42,43]. L’IL6 et l’activation des macrophages par des LPS stimule la synthèse
hépatocytaire d’hepcidine in vitro [41], et également chez des souris HFE-/-, β2-
µglob-/- ou RTf2-/- [75]. Le mécanisme conduisant à la synthèse d’hepcidine au
cours des surcharges en fer est inconnu. On peut imaginer un rôle de « sensor »
pour les macrophages, modulant la production d’hepcidine selon leur niveau de
charge en fer, par un possible message cytokinique. Ainsi, les mutations dans le
gène de la ferroportine conduisent à une surcharge réticulo-endothéliale et une
augmentation de synthèse d’hepcidine [76], alors que l’hepcidine est réprimée et la
surcharge, relativement faible dans les cellules de Kupffer, au cours de l’HCH liée
à HFE. Pourtant, le blocage fonctionnel des macrophages in vivo, après adminis-
tration de fer, ne freine pas la synthèse d’hepcidine et l’enrichissement du milieu
en fer, en présence de macrophages n’influence pas non plus la production
d’hepcidine par les cellules HepG2, in vitro [77].
L’homozygotie C282Y pourrait donc conduire donc à une double anomalie
fonctionnelle de la molécule HFE ; la perte d’inhibition de la sortie de fer au
niveau du macrophage (et possiblement des duodénocytes) rendrait compte de la
préservation réticulo-endothéliale (et peut-être de l’hyperabsorption), indépendam-
ment de la répression paradoxale d’hepcidine, dont le mécanisme reste inconnu, et
qui participe probablement au phénotype de surcharge observé. Une perte
d’inhibition de la pénétration du fer dans l’hépatocyte pourrait également aggraver
la surcharge hépatocytaire, déjà liée en partie à l’hyperabsorption.
18
I.3. HETEROGENEITE ALLELIQUE ET GENETIQUE
DES SURCHARGES EN FER PRIMITIVES.
a) Hémochromatose liée au gène HFE.
Elle est la forme classique et la plus fréquente de l’HCH*, transmise sur un
mode autosomique récessif et liée à l’homozygotie C282Y dans plus de 80% des
cas [11], recherchée désormais en pratique courante. L’étude combinée de quatre
références [12, 50, 78, 79] révèle l’étendue du polymorphisme du gène HFE ; 19
autres mutations, rares ou privées, ont été observées. Certaines s’associent avec
d’autres (souvent avec la mutation C282Y ou H63D) à l’état hétérozygote
composite (Cf. supplément N°1). Le rôle de la mutation H63D, dont la fréquence
allélique est la plus élevée parmi les mutations HFE en population générale, reste
mal précisé dans la genèse des surcharges primitives. D’après Merryweather-
Clarke et al, 74 à 100% des patients hémochromatosiques du nord de
l’Europe, non C282Y+/+, sont hétérozygotes composites C282Y/H63D [11].
Moirand et al [80] ont étudié l’expression phénotypique des mutations H63D et
C282Y du gène HFE. Dans leur série, 48% des patients surchargés en fer sont non
C282Y +/+. Il existe un enrichissement de la mutation H63D sur les chromosomes
non C282Y, lié en partie à la fréquence de l’hétérozygotie composite. CST* et
CHF* sont significativement plus bas chez les patients non C282Y+/+. Les symp-
tômes sont plus fréquents chez les patients C282Y homozygotes, comme la fibrose
hépatique, (liée à une consommation abusive d’alcool chez les patients non
C282Y+/+). Il n’y a pas de différence entre patients C282Y+/- stricts, H63D +/-
stricts ou le génotype sauvage, quant aux niveaux de ferritine et des CHF*. La sur-
charge est même identique entre patients H63D homozygotes et hétérozygotes.
Seule l’hétérozygotie composite C282Y/H63D montre une différence au niveau
des paramètres du fer par rapport aux autres sujets non-C282Y+/+. Dans cette
cohorte, l’hétérozygotie H63D stricte est plus fréquente que l’homozygotie ce qui
semble contraire au principe d’une transmission récessive. De plus il existe un
décalage entre la fréquence allélique élevée de la mutation H63D dans la
population (10 à 20% en Europe) et le faible nombre de cas de surcharges en fer
où la mutation est retrouvée. En pratique Moirand et al suggèrent de réserver la
recherche de la mutation H63D en cas d’hétérozygotie C282Y au cours des
19
surcharges hémochromatosiques. L’homozygotie C282Y est responsable de plus
de 80 % des cas d’HCH. L’hétérozygotie C282Y/H63D est associée à de nom-
breux cas documentés de surcharge en fer avec des phénotypes biologiques plus
marqués que les autres cas de surcharge non C282Y+/+. Aucune conclusion ne
peut être faite devant la constatation d’une hétérozygotie H63D ou C282Y. De tels
génotypes n’expliquent pas isolément la présence d’une surcharge en fer mais
pourraient être des facteurs en favorisant la survenue, associés à d’autres états
pathologiques (dysmétabolisme, éthylisme) ou à d’autres mutations du gène HFE
ou de gènes différents, non recherchées en pratique courante du fait de leur rareté.
b) Hétérogénéité génétique des surcharges en fer primaires.
Depuis la découverte du gène HFE, cinq nouveaux gènes ont été associés à des
formes d’HCH* et intègrent la nomenclature proposée par l’OMIM* (Online Men-
delian Inheritance in Man) dans laquelle l’HCH liée à HFE est appelée HFE1. Ces
surcharges différent de l’HCH classique, de par le mode de transmission généti-
que, de par la répartition de la surcharge (parenchymateuse ou mésenchymateuse)
ou encore de par l’âge de survenue (hémochromatose juvénile) et présentent aussi
un polymorphisme allélique (Cf. tableau N°5). L’HCH HFE 4, liée au gène de la
ferroportine serait la plus fréquente des formes d’HCH* non liée au gène HFE
[166]. Mais elle est différente de l’HCH liée à HFE en bien des points (transmision
dominante, surcharge splénique, hepcidine augmentée, CST normal).
D’autres gènes ne figurant pas dans la classification OMIM, sont aussi associés
à des surcharges génétiques en fer, parmi lesquelles l’atransferrinémie et l’acéru-
léoplasminémie déjà évoquées précédemment (Cf. tableau N°5).
L’HCH africaine, observée au sud du Sahara, est une surcharge mixte qui se
complique de cirrhose et de CHC* [40]. La cause était initialement rattachée à la
consommation de bière riche en fer (80 g/l), mais une origine génétique non liée à
HFE semble acceptée aujourd’hui [81].
20
II. EPIDEMIOLOGIE DE
L’HEMOCHROMATOSE.
Avant la découverte de la mutation C282Y du gène HFE, l’HCH était supposée
génétiquement homogène. L’ANDEM* estimait en 1995 la prévalence de l’HCH,
alors définie sur des critères phénotypiques et biopsiques, entre 1.5 et 3‰ dans les
populations européennes [12]. Depuis les travaux de Feder et al [52], qui
retrouvaient une homozygotie C282Y dans 83% des cas d’HCH, d’autres équipes
ont confirmé l’implication des mutations HFE au sein de leur cohorte de malades,
en examinant les fréquences respectives des 2 mutations du gène HFE (C282Y et
H63D) les plus souvent associées à une surcharge hémochromatosique. L’ANAES
a recensé en 2004, 7 études menées en France qui retrouvent une fréquence de
l’homozygotie C282Y, au sein de cohortes de patients avec phénotype patent,
allant de 52.4% à 96.2% [12]. La prévalence de l’homozygotie C282Y dans la
population générale, varie de 0 à 0.8% en France et de 2 à 8 ‰ d’après les
études incluant plus de 200 sujets.
La revue de littérature sur l’épidémiologie mondiale, de Merryweather-Clarke
et al, montre que plus de 80% des patients hémochromatosiques sont porteurs
de l’homozygotie C282Y, dans les populations d’Europe du Nord (ou qui en sont
issues: USA, Australie) [11]. Cette homozygotie se répartit en Europe selon un
gradient Nord-Sud. Ainsi, en Italie, 64% des patients hémochromatosiques,
seulement, sont C282Y homozygotes. L’Italie est le pays d’Europe qui enregistre
le plus fort taux de cas d’HCH non liée à l’homozygotie C282Y ; de 11.3 jusque
36.7% des cas, contre 0 à 12% dans le Nord de l’Europe. En Bretagne,
l’homozygotie C282Y concerne 80.2 à 92.4% des patients. La fréquence allélique
est maximale en Irlande, de 9.9% à 14% contre 1 à 2.3% en Italie. La fréquence
allélique de la mutation suit aussi un gradient ouest-est en Europe. Certains pays
d’Europe de l’Est semblent également relativement préservés. En France, la
fréquence allélique de la mutation C282Y suit aussi un gradient Nord-Sud et
Ouest-Est. Elle est de 7.6% en Bretagne, contre 4.9% dans le nord de la France et
2.6% dans le Sud. Peu d’études recensées par Merryweather-Clarke et al. [11] ont
porté sur des échantillons de plus de 1000 sujets; l’homozygotie concerne 0.1 % de
21
la population présumée saine en Finlande (n=1150 sujets), 0.7% de la population,
dans le sud du Pays de Galles (n=10566), 0.5% à 0.7% de la population bretonne
(n=1000 et 7000 respectivement), 0.7% de la population aux USA (n=1001), 0.5%
en Australie (n=3011), et même 1% en Nouvelle Zélande (n=1032). La mutation
C282Y semble être l’apanage des populations européennes car la fréquence
allélique est quasi nulle dans les populations africaines et en Asie. En ce qui
concerne la mutation H63D, la situation est moins tranchée. Tandis que la
fréquence allélique varie de 10 à 20% en Europe, elle est environ de 10% en
Afrique du Nord et en Ethiopie, et atteint des proportions similaires en Inde et au
Sri-Lanka. En Afrique noire, en extrême Orient et en Océanie, la fréquence
allélique de la mutation est inférieure à 5%.
D’après 11 études menées en Europe dans 6 pays différents (France,
Allemagne, Royaume-Uni, Irlande, Suède, Italie), Hanson et al. ont évalué la
fréquence des différents génotypes issus de l’association des mutations C282Y et
H63D au sein de cohorte de patients hémochromatosiques : 75.4% des patients
sont C282Y homozygotes, 3.9% sont hétérozygotes stricts (C282Y+/-), 5.9%
sont H63D hétérozygotes stricts, 1.6% sont homozygotes pour la mutation
H63D, 5.8% des sujets sont hétérozygotes composites C282Y/ H63D, et 7.4%
des patients ont finalement un génotype sauvage [82].
Hanson et al ont également mené une revue de la littérature sur la fréquence
des différents génotypes en population générale. Ainsi en Europe, 0.4% de la
population présente l’homozygotie C282Y, l’hétérozygotie C282Y stricte touche
9.2% de la population, l’homozygotie H63D concerne 2% de la population, 21.6%
de la population est H63D hétérozygote stricte, la fréquence de l’hétérozygotie
composite est de 1.8% et enfin, 65.1% de la population présente un génotype
sauvage (C282Y-/- ; H63D-/-).
L’hémochromatose semble donc fortement liée à l’homozygotie C282Y. La
mutation H63D, quoique fréquente en population générale, semble moins
pathogène car sa fréquence allélique au sein des cohortes hémochromatosiques est
beaucoup plus faible que l’homozygotie C282Y.
22
III. PRESENTATION CLINIQUE DES
SURCHARGES EN FER.
Ce chapitre décrira davantage les symptômes et complications liées à l’HCH
car ce modèle clinique est le mieux documenté. Le rapport ANAES a établi en
2004, plusieurs stades évolutifs chez les homozygotes C282Y [12] : le stade 0 est
latent ; CST et ferritine sont normaux et les symptômes, absents. Une surveillance
biologique est préconisée tous les 3 à 5 ans. Au stade 1, seul le CST* s’élève
(CST>45%) et la surveillance biologique doit être annuelle. Au stade 2, la sur-
charge devient significative dès que la ferritine dépasse 200µg/l chez la femme et
300 chez l’homme, ce qui justifie un programme de saignées [83,12]. Cette phase
asymptomatique peut aller de la deuxième à la cinquième décennie. Le diagnostic
est fait vers 50 ans. Au stade 3, la maladie s’exprime cliniquement ; l’asthénie, les
arthralgies et la cytolyse sont des signes précoces. Les complications apparaissent
au stade 4: diabète insulino-requérant, cardiopathie, cirrhose et CHC* [12]. Une
cirrhose ou un diabète peuvent survenir en l’absence de symptôme. La fréquence
d’un diabète ou d’une cirrhose semble corrélée au degré de surcharge. En dessous
de 35 ans il n’y aurait pas de fibrose sévère ; la femme est moins souvent et moins
sévèrement atteinte [84].
III.1 LA CIRRHOSE.
La répartition périportale de la surcharge en fer, avec gradient décroissant vers
la région centrolobulaire sur la PBH* témoigne de l’hyperabsorption intestinale, au
cours de l’HCH* [85]. L’évolution de la fibrose suit la même topographie. Une
surcharge kupfférienne apparaît pour des surcharges importantes. La cirrhose pré-
sente un aspect micronodulaire [86]. Le processus fibrosique serait lié à l’activa-
tion des cellules étoilées du foie [3]. Elles sont la source majeure de collagène dans
le foie normal ou cirrhotique. Les cellules de Kupffer, surtout quand elles sont
surchargées en fer, ou les lymphocytes, activeraient les cellules étoilées par un
message cytokinique fibrosant (TGF-β1), dans un processus inflammatoire local
lié à la production d’un stress oxydatif [87]. Des molécules issues de la lipo-
23
peroxydation comme le MDA* (Malon-dialdéhyde), de même distribution que la
surcharge, au cours de l’HCH, activeraient directement les cellules étoilées.
Au cours de l’HCH* une cytolyse pourrait toucher 65% des patients [88] mais
une évaluation plus récente est davantage modérée où 13 à 38% des malades
présentent une cytolyse [89]. Généralement inférieure à 3 fois la normale, elle
prédomine sur les ALAT*, contrairement aux cytolyses éthyliques [90]. Dans 70%
des cas elle s’améliore après saignées [2]. Une hépatomégalie (HMG) serait pré-
sente dans 25% des cas. Il peut exister des douleurs abdominales. A partir du stade
2 de la maladie, un bilan annuel comportant un dosage des transaminases et une
glycémie à jeun, est recommandé [83]. 50 à 80% des patients présentant une
cytolyse et 2/3 à 3/4 de ceux qui ont une HMG, ont une fibrose hépatique sévère
[89]. L’absence de cytolyse, d’HMG* et une ferritinémie < 1000µg/l prédit l’ab-
sence de fibrose sévère chez les patients hémochromatosiques C282Y+/+, avec
une excellente valeur prédictive négative [89]; la présence combinée d’une ferri-
tine >1000µg/l, d’une cytolyse et d’une HMG ne permet cependant d’identifier
qu’un tiers, voire la moitié des patients avec fibrose sévère. Cette méthode évite la
PBH chez plus de 45% des patients et identifie 60 à 65% des patients sans fibrose
sévère, sans faux négatifs. La prévalence d’une fibrose sévère est de 25% sur cette
étude de 1998, ce qui est loin des chiffres avancés par Niederau et al (69% sur une
étude de 1983) [2]. D’après ces derniers, l’espérance de vie est diminuée chez les
patients cirrhotiques par rapport aux non cirrhotiques ; les patients saignés indem-
nes de cirrhose ont une espérance de vie qui rejoint celle d’une population nor-
male. La cause du décès est liée à une cirrhose dans 18% des cas (soit 12 fois le
taux attendu). Les saignées pourraient améliorer le degré de fibrose et auraient
aussi un rôle positif sur l’HTP* et les varices oesophagiennes [84,91].
III.2 –LE CARCINOME HEPATOCELLULAIRE.
Le taux de décès par cancer du foie atteint 10% dans l’étude de Niederau et al,
(200 fois le taux d’une population normale); le CHC est responsable de 30% des
décès et peut survenir malgré une déplétion totale du fer en excès [2]. Tous les
patients développant un CHC*, avaient une cirrhose préalable. Le risque de CHC*
sur cirrhose ne semble pas plus élevé au cours de l’HCH* qu’au cours d’autres
24
états cirrhotiques [92]. Une seule étude a retrouvé un risque plus élevé de CHC*
chez des patients hémochromatosiques cirrhotiques par rapport à d’autres hépato-
pathies, mais elle n’intégrait pas l’état d’avancée de la cirrhose, tandis qu’une une
hépatite B ou une consommation excessive d’alcool étaient associées à une HCH
dans 50% des cas [5]. Or, le risque de CHC sur cirrhose est quintuplé en cas
d’hépatite B [93] et une consommation >60g d’alcool par jour multiplie le risque
de cirrhose par 9 au cours de l’HCH [94]. La surcharge en fer au cours des thalas-
sémies exposerait au risque de CHC*, mais la forte prévalence de cas d’hépatite C
chez ces patients ne permet pas de conclure. Au cours des « surcharges africai-
nes », d’origine génétique, le risque de CHC* semble aussi augmenté [3, 92].
Enfin, l’anti-oncogène p53 semble muté plus souvent au cours des CHC* liés à
l’HCH [92]. Des îlots sans fer ont été décrits au cours de surcharge en fer, en
l’absence de cirrhose [95] et sont connus pour évoluer du stade hyperplasique à la
dysplasie de haut grade. Le fer au contact des nodules pourrait servir de facteur de
croissance. La cirrhose prédispose au CHC* [3], pourtant le risque n’est pas nul en
l’absence de cirrhose ; il est documenté au cours de l’HCH* [96], mais de telles
publications sont rares. En dehors de l’HCH, le CHC sans cirrhose s’associe à
une surcharge modérée dans 50% des cas, qui serait plus fréquente au cours de
CHC* sans cirrhose, qu’avec cirrhose, ou encore de cirrhose sans CHC* [92].
III.3 L’ATTEINTE CARDIAQUE.
Une défaillance cardiaque représente seulement 5% des causes de décès, toute-
fois, la surmortalité est considérable car le risque est plus de 300 fois celui attendu
[2]. La cardiopathie est la cause la plus fréquente de décès au cours des sur-
charges thalassémiques [1]. Des anomalies électrocardiographiques sont obser-
vées : aplatissement, inversion de l’onde T, bas voltage et troubles du rythme [90].
Le trouble rythmique le plus fréquent est la tachycardie atriale [90, 97], mais il
peut exister une hyperexcitabilité ventriculaire. Les saignées semblent efficaces
sur la dysfonction ventriculaire surtout sur la cardiopathie non dilatée [97]. Une
arythmie est présente dans 20 à 29% des cas et il existe une insuffisance cardiaque
dans 15 à 35% des cas [84]. L’atteinte cardiaque est fréquente en cas de cirrhose.
Une échographique est recommandé dès le stade 3 de l’HCH [83].
25
III.4 LE DIABETE.
Il peut résulter de deux mécanismes. L’insulino-résistance hépatique, aggravée
par la survenue d’une cirrhose, est associée à une atteinte de l’insulinosécrétion, du
fait d’une s’accumulation élective de fer sur les cellules β-pancréatiques [90]. Le
fer est en soi diabétogène ; cela est démontré chez l’animal soumis à une adminis-
tration orale ou à des injections de fer et chez l’homme présentant une surcharge
secondaire post transfusionnelle [98]. L’insulino-sensibilité est inversement cor-
rélée à la ferritine au cours des thalassémies majeures [7]. Avant l’insulino-
thérapie, le coma diabétique était la première cause de décès au cours de l’HCH
[2]. La prévalence du diabète est très variable selon les études. Sur une étude de
1990 [99], elle atteint 40% (dont 40% sous insuline). Elle a été récemment
réévaluée à 10% des cas [85]. L’enrichissement de la prévalence de l’HCH* dans
les populations diabétiques est controversé. Selon une étude, 1.34% des patients
diabétiques ont une HCH, contre 0.2% sur une population témoin [100]. Une autre
étude ne montre pas d’élévation de la fréquence de l’HCH* au cours du diabète de
type 2 [101]. Cette fréquence, même si elle semble augmentée, l’est insuffisam-
ment pour justifier un dépistage génotypique systématique chez le diabétique
[102]. L’homozygotie C282Y semble aussi plus fréquente au cours des diabètes de
type 1 à révélation tardive [103]. Au cours de l’HCH*, la présence d’un diabète est
corrélée à la CHF*. Une surcharge en fer non hémochromatosique, peut également
induire l’apparition d’un diabète [102]. La présence d’un diabète au cours de
l’HCH* est plus élevée en présence d’une cirrhose (71% contre 20% chez les
patients non cirrhotiques), si bien que la surmortalité des patients diabétiques serait
fortement liée également aux complications hépatiques [2]. Les saignées font
diminuer les doses d’insuline. L’insulino-requérance n’est pas réversible [2]. Les
complications du diabète ne seraient pas plus fréquentes au cours de l’HCH ; la
rétinopathie serait moins proliférative [102].
III.5. L’ATTEINTE ARTICULAIRE.
Les arthralgies sont une manifestation commune et révélatrice de la maladie.
Elles touchent 30 à 40% des patients au cours de l’HCH [84] et 49% des patients
26
homozygotes auraient des symptômes en rapport avec une arthrite au moment du
diagnostic [80]. L’atteinte la plus évocatrice touche les deuxième et troisième arti-
culations métacarpo-phallangiennes (MCP*), responsable de la poignée de main
douloureuse. L’étude d’une petite cohorte de patients ayant une HCH, a montré
que 2/3 d’entre eux présentaient une atteinte clinique ou radiologique. Ces symptô-
mes, inauguraux dans 20% des cas, impliquent les MCP* 9 fois sur 10. Dans 50%
des cas, ces symptômes présentent un caractère inflammatoire, chronique, sans
accès aigu [104]. Les radiocubitales inférieures, la MCP* du pouce les interphalan-
giennes proximales comme les genoux, les hanches, les poignets, les chevilles et
parfois les métatarsophalangiennes peuvent être touchées [85, 90]. L’atteinte
intéresse davantage le rachis et les têtes fémorales chez les patients thalassémiques
polytransfusés [1]. L’arthropathie sous chondrale est caractérisée radiologique-
ment par un pincement articulaire une sclérose, des kystes sous chondraux et des
ostéophytes [85, 90]. Il n’y a pas de corrélation radioclinique dans l’arthropathie
hémochromatosique : certains patients arthralgiques n’ont pas de lésion radiologi-
que et inversement, l’atteinte radiologique ne s’accompagne pas de signe clinique
dans 20% des cas [85, 104]. Les symptômes, souvent assimilés par le médecin à un
processus dégénératif arthrosique, sont banalisés par le patient si l’intensité reste
modérée, ce qui entraîne un délai diagnostic souvent long [104]. Les lésions pour-
raient être liées à une inhibition de la pyrophosphatase tandis que la présence de
fer est retrouvée dans les chondrocytes. Une CCA* (chondrocalcinose articulaire)
des genoux ou des poignets est sans particularité radiologique par rapport à la
forme primitive [85]. Une déminéralisation osseuse occasionne des fractures rachi-
diennes. L’ostéopénie résulterait d’une carence en androgènes, liée à l’hypo-
gonadisme [85]. Les quantités de fer soustrait sont les mêmes chez les patients
sans arthralgies [84] ; ces dernières ne sont pas plus fréquentes en cas de cirrhose
[2], ni corrélées à la surcharge ; les saignées améliorent rarement les symptômes.
La fréquence allélique de la mutation C282Y est augmentée au sein d’une
population ayant des signes radiologiques évocateurs d’ostéoarthropathie et les
patients C282Y+/+ sont 3 fois plus nombreux chez des patients présentant une
pseudo-goutte et/ou une CCA* [105]. Beutler et al ont montré que la prévalence
des arthralgies n’est pas plus élevée que la normale chez des patients homozygotes
issus d’une population présumée saine. Le seul critère étudié était la présence de
douleurs, sans tenir compte du siège ou de critères radiologiques.
27
III.6 AUTRES SYMPTOMES ET COMPLICATIONS.
L’asthénie, touche 60% des patients [84], c’est le symptôme le plus fréquent ;
elle révèle la maladie dans 10% des cas [106] ; elle est améliorée par les saignées.
Signes phanériens. La pigmentation de la peau, liée à des dépôts de mélanine,
se localise aux zones d’exposition au soleil, aux organes génitaux et sur cicatrices.
Cette pigmentation évolue parallèlement à l’accumulation de fer dans les glandes
sudoripares et surviendrait plutôt au stade des complications. Une diminution de la
pilosité, une ichtyose, leuchonychie, platonychie, koïlonychie sont possibles [90].
L’hypogonadisme, hypogonadotrope [98], occasionne chez la femme une
ménopause précoce et une impuissance chez l’homme [90]. Cette complication
toucherait 10 à 40% des patients [84], qui sont plus âgés et dont les taux de
ferritine sont plus élevées que chez les sujets non hypogonades. Cirrhose et diabète
sont aussi plus fréquents. L’hypogonadisme est peu amélioré par les saignées [98].
L’hypothyroïdie. Des transfusions répétées comme l’HCH occasionnent une
infiltration de fer au niveau de la thyroïde et une hypothyroïdie [107]. Edwards et
al. ont retrouvé chez de sujets hémochromatosiques, 6% de cas d’hypothyroïdie
avec constante élévation d’anticorps anti-thyroïdiens. Un mécanisme immunitaire
conduisant de la surcharge à l’atteinte fonctionnelle était suspecté [108]. Murphy
et al [107] ont remis en question le mécanisme et l’existence de l’atteinte fonction-
nelle au cours de l’HCH* : sur 154 patients, ils ne retrouvent que trois cas d’hypo-
thyroïdie, dont deux d’origine iatrogène, sans élévation des anticorps.
Incidence de la surcharge sur la fréquence d’autres cancers. L’étude de
Niederau et al n’a pas mis en évidence de surmortalité liée à d’autres cancers que
le CHC au cours de l’HCH* [2], mais d’autres équipes trouvent une incidence
significativement augmentée de cancers extra-hépatiques [5,6]. Une étude montre
une augmentation modérée du risque de cancer en rapport avec une élévation du
CST* (CST>60%) [4]. Une autre étude montre une augmentation faible mais
significative de survenue de cancer du colon en cas d’élévation de la ferritine [109]
(dans ces études la présence d’une surcharge n’est cependant pas avérée). De plus,
le FNLT* produit un stress oxydatif, mutagène in vivo et in vitro [1] ; le fer est un
facteur de croissance tumoral connu sur des modèles murins de cancers du sein, du
colon, de l’oesophage, ou cutané. Enfin, l’injection de fer chez l’animal, provoque
des sarcomes au point d’injection ou des cancers du rein [3].
28
IV. PENETRANCE DE
L’HEMOCHROMATOSE LIEE A HFE
L’ANDEM* a évalué en 1995, la prévalence de l’HCH* sur des critères phéno-
typiques entre 1.5 et 3‰. Cette prévalence semble avoir été surestimée. Certains
cas de cirrhoses ou d’hépatosidéroses dysmétaboliques pourraient avoir été inclus
par erreur du fait de facteurs clinico-biologiques ou biopsiques confondants [110].
La pénétrance de la mutation C282Y semble incomplète. Selon une conférence de
consensus, 5% des patients C282Y+/+ pourraient ne jamais développer de
phénotype hémochromatosique [84]. La difficulté de l’estimation de cette péné-
trance tient à la diversité des critères utilisés pour la définir (critères biologiques,
cliniques ou évaluation des complications). La détermination de la pénétrance
complète a un intérêt direct dans la mise en œuvre d’un dépistage en population
générale. Des études génotypiques de cohortes ont tenté d’évaluer cette pénétrance
clinique ou biologique [13, 111, 14] au sein de populations présumées saines.
Olynyk et al [14] ont retrouvé chez seize patients homozygotes (sur 3011
sujets présumés sains), une élévation du CST (> 45%) et de la ferritine (>300µg/l),
respectivement dans 94% et 50% des cas. Sur le plan clinique, ¼ des patients
présentaient une fibrose ou une cirrhose à la PBH et une surcharge avérée. 50%
des patients présentaient une HMG, une asthénie, ou une mélanodermie).
Deugnier et al [111] ont dépisté 56 homozygotes C282Y sur 9396 sujets pré-
sumés sains, dans des centres d’examen de santé. 80% des patients de sexe
masculin auraient pu être dépistés biologiquement par une élévation du CST
(>55%) contre 70% par une ferritine > 210µg/l. L’élévation combinée du CST
(>50%) et de la ferritinémie au delà de 130µg/l aurait identifié tous les sujets
homozygotes masculins avec une spécificité de 95%. 90% de ces patients présen-
tent une expression patente de la maladie (asthénie, diabète, arthralgies ou cyto-
lyse). Chez les femmes, aucun modèle prédictif biologique fiable n’a pu être pro-
duit, car environ 1/3 des patientes homozygotes présentent une ferritinémie
<13µg/l. Le CST est élevé chez 41% d’entre elles et la ferritine chez 32%. 61%
des femmes homozygotes étaient symptomatiques.
Beutler et al ont publié des résultats très discordants [13]. Sur plus de 40.000
sujets présumés sains, ils identifient 156 sujets homozygotes. Ils comparent la pré-
29
valence des symptômes avec une population contrôle et ne montrent aucune diffé-
rence significative. Ils identifient ainsi un seul sujet C282Y+/+, qui présente une
expression clinique complète avec cirrhose. Ces résultats sont largement contro-
versés pour le caractère non documenté des arthralgies et le manque d’évaluation
biopsique [116]. Bon nombre de patients présentant une HCH* connue et déjà
prise en charge auraient, en outre, été exclus de l’étude.
Bulaj et al ont estimé la pénétrance du génotype C282Y+/+, au sein d’une
cohorte de 214 homozygotes dépistés par enquête familiale [112]. Un tel
recrutement permet d’étudier un nombre plus important de sujets homozygotes par
sujet génotypé, sans biais théorique imputable à l’expression de manifestation
clinique. La ferritinémie était augmentée chez 47% des hommes (>325µg/l) et
58% des femmes (>125µg/l). L’évaluation biopsique révélait une cirrhose chez
12.4% des hommes et une fibrose chez 11.5% d’entre eux, contre 2% et 4%
respectivement chez les femmes. 38% des hommes contre 10% des femmes
présentaient au moins un symptôme en rapport avec la maladie (arthropathie,
fibrose, cytolyse).
Deux points de vue s’opposent. Pour Beutler et al. [113], l’homozygotie
C282Y est un génotype dont la présence est nécessaire mais pas suffisante à la
survenue de complications liées à l’HCH, car la pénétrance de la mutation semble
éloignée des constatations cliniques observées sur les cohortes de malades. La
présence de facteurs environnementaux (alcool) ou de phénomènes épigénétiques
ou encore l’influence d’autres gènes liés au métabolisme du fer, joueraient un rôle
dans l’évolution de la maladie. L’absence de différence au niveau de la prévalence
de l’homozygotie C282Y entre des populations jeune et âgée laisse présumer que
« l’HCH n’est pas une maladie qui tue fréquemment » [114]. Cet argument est
démenti par une autre étude qui fait état d’une perte de moitié de l’effectif attendu
de sujets homozygotes dans une population âgée [115]. En opposition, Ajioka et
Kushner estiment que la pénétrance est d’au moins 29% chez les hommes de plus
de 40 ans et de 11% des femmes de plus de 50 ans en terme de morbidité [116].
La pénétrance biologique est donc au moins de 50%, tandis que la fréquence de
survenue des complications et notamment de la cirrhose (qui est associée à une
diminution de l’espérance de vie) varie de moins de 1% à 25% selon les auteurs.
30
V. SURCHARGES EN FER SECONDAIRES.
V.1 SURCHARGES HEMATOLOGIQUES.
La découverte d’une surcharge en fer en hématologie n’est pas rare. Une dysé-
rythropoïèse à moelle hyperplasique est capable d’entraîner une hyperabsorption
de fer et une surcharge parenchymateuse avec gradient décroissant depuis la zone
périportale. Au cours des hypoplasies et dysérythropoïèses sévères, la surcharge
est déterminée par les apports transfusionnels ; l’érythrophagocytose occasionne
alors une surcharge mésenchymateuse périsinusoidale [117] (Cf tableau N°6).
Les étiologies hypoplasiques sont les suivantes: hypoplasies congénitales, secon-
daires et idiopathiques du sujet âgé ; aplasies médullaires; érythroblastopénies ;
insuffisance rénale (particulièrement les formes réfractaires à l’érythropoïétine).
Les étiologies des hyperplasies érythroïdes sont : les syndromes thalassémiques
et les hémoglobines hyperinstables, toutes deux reconnaissables en présence de
corps de Heinz sur frottis ; les anémies sidéroblastiques congénitales (notamment
liée à l’X), ou acquises (plus fréquentes) ; le déficit en pyruvate kinase [118].
L’hémolyse chronique n’est pas une cause de surcharge en fer sans dysérythro-
poïèse, mais une surcharge a déjà été observée en l’absence d’explication transfu-
sionnelle au cours de sphérocytose, de drépanocytose ou en présence d’un trait tha-
lassémique, qui peuvent accélérer l’évolution d’une HCH sous jacente [118, 119].
Les patients hétérozygotes H63D, présentant un trait thalassémique, ont un fer
sérique et un CST* modérément élevé par rapport au génotype sauvage. Cela serait
plus évident pour l‘hétérozygotie C282Y [120]. Au cours des thalassémies majeu-
res, qui sont la cause principale de surcharge secondaire en hématologie, les trans-
fusions sont le plus souvent responsables de la surcharge. Un retard de croissance,
une HMG* avec fibrose ou cirrhose peuvent survenir. Le pronostic est dominé par
la survenue d’une cardiopathie [119]. Au cours des surcharges d’origine hématolo-
giques, CST* et fer sérique sont normaux dans les surcharges débutantes à modé-
rées mais certaines situations interférent avec ces paramètres (alcool, hémolyse,
cytolyse hépatique, syndrome inflammatoire) [121]. Le traitement repose sur les
saignées quand cela est possible. Sinon, lorsqu’un programme transfusionnel est
31
nécessaire, un traitement par un chélateur du fer, classiquement la desferroxamine,
est administré par voie parentérale, du fait d’une absorption médiocre et d’une
demi-vie courte. Ce traitement contrôle le stock martial, améliore le pronostic et
notamment la fonction cardiaque, mais aussi pancréatique, et offre aussi un
bénéfice pour la croissance et la maturation sexuelle. La desferroxamine peut
entraîner une cataracte, une rétinopathie, surdité et insuffisance rénale [119].
V.2 LA PORPHYRIE CUTANEE TARDIVE.
C’est une maladie rare, définie par la diminution d’au moins 50% de l’activité
de l’uroporphyrinogène décarboxylase, impliquée dans la synthèse de l’hème (Cf
schéma N°2). Le déficit peut être acquis, et ne concerne que le foie, ou bien trans-
mis de façon autosomique dominante et il est généralisé à tous les tissus. La PCT*
sporadique représente 3/4 des porphyries. Cliniquement, une photodermatose bul-
leuse parfois douloureuse, des zones exposées, surtout des mains et du visage, une
fragilité cutanée et une hypertrichose malaire sont exprimées et laissent la place à
des cicatrices hypo- ou hyperpigmentées. Certains médicaments, l’hépatite C, l’al-
cool, les oestrogènes et la surcharge en fer sont des facteurs précipitants. Cette sur-
charge, mixte et modérée, est présente dans 60 à 80% des cas [119, 20]. Les
saignées améliorent la clinique et l’excrétion des porphyrines urinaires. La
réascension des stocks de fer induit une rechute. Le mécanisme par lequel le fer
induit une hypoactivité de l’UPD* n’est pas connu. Les génotypes HFE mutés sont
parfois significativement associés à ces surcharges : tantôt l’hétérozygotie C282Y
[20], tantôt l’état composite C282Y/H63D [122], ou l’homozygotie H63D [119].
20% d’une cohorte britannique serait même C282Y+/+ [20]. Un trouble du méta-
bolisme hépatocytaire du fer est évoqué chez les patients avec hépatite C [20].
V.3 SURCHARGES LIEES À UNE HEPATOPATHIE.
Au cours de nombreuses hépatopathies, les paramètres biologiques du fer
peuvent augmenter. La surcharge n’est pas automatique et, quand elle existe, elle
ne répond pas toujours au même mécanisme de constitution. La question qui se
32
pose chaque fois, est l’influence de la surcharge sur le pronostic hépatique. Au
cours de l’HCH, le seuil fibrogénique des surcharges en fer parenchymateuses
nécessite des CHF élevées, de près de 300 voire 400µmol/g de tissu [123, 124];
Cependant, des surcharges beaucoup plus modestes sont décrites comme des co-
facteurs pathogènes dans la survenue d’une cirrhose au cours des NASH* [125].
a) hépatopathie alcoolique.
L’alcool est inducteur de la synthèse de ferritine, en l’absence de surcharge en
fer. CST et fer sérique sont également élevés dans 50 % des cas au cours de l’éthy-
lisme chronique. A l’arrêt de l’alcool, CST et fer sérique se normalisent en une
semaine et la ferritine en trois mois [126]. Une surcharge peut se constituer chez
1/3 des sujets alcooliques [119]. Le fer recyclé par les macrophages et les cellules
de Kupffer à partir d’hépatocytes lysés induit une surcharge mésenchymateuse,
habituellement minime à modérée [117]. Un éthylisme chronique peut induire une
hyperabsorption de fer, du fait de la teneur en fer de certaines boissons alcoolisées
(ce qui est surtout vrai pour l’HCH africaine), ou de l’acidification du pH de
l’estomac [117], ou bien encore d’une carence en folates qui augmente le turn-over
du fer sérique [94]. Une surcharge plus importante peut être observée dans 20%
des cas d’hépatopathies éthyliques terminales, associé à un état hémolytique [94].
Chez le rat alcoolisé, un régime modérément enrichi en fer entraîne une fibrose
plus sévère [127]. La fréquence des patients buveurs excessifs parait historique-
ment élevée chez les patients présentant une HCH patente ; elle atteint jusque 40%
d’entre eux [94] ; ces résultats publiés avant l’ère du diagnostic génotypique sont à
interpréter prudemment, du fait d’un mimétisme de l’HCH au cours des cirrhoses
éthyliques avec surcharge [119]. A l’inverse, le rôle des mutations HFE dans
l’hépatopathie alcoolique n’est pas clair [127]: pour certains, surcharge en fer et
fibrose hépatique ne sont pas corrélées à la présence des mutations HFE, tandis
que d’autres ont retrouvé des fréquences alléliques C282Y et H63D significative-
ment plus élevées chez des patients ayant une hépatopathie éthylique par rapport à
une population témoin. La présence des mutations était reliée à la sévérité des
lésions. Au cours de l’HCH liée à HFE, une consommation supérieure à 60g/j d’al-
cool, multiplie par 9 le risque de cirrhose [94], qui serait plus liée au stress oxy-
datif causé par l’alcool, qu’à une éventuelle accentuation de la surcharge. Au cours
de l’hépatopathie alcoolique les CHF* sont identiques avec ou sans fibrose [123].
33
b) hépatites virales.
Une hépatite chronique virale C s’associe dans 1/3 des cas à une hépatosidérose
[119]. La surcharge est minime, kupfferienne dans 2/3 des cas. Elle devient mixte
pour des niveaux de charge plus importants. Cependant une surcharge parenchy-
mateuse est aussi observée [117]. La surcharge mésenchymateuse correspond à
une phagocytose des hépatocytes nécrosés alors que la surcharge parenchymateuse
est associée à la présence d’une cirrhose. Un rapport CHF/âge >1.9 évoque la pré-
sence d’un co-facteur favorisant un état de surcharge, comme une mutation homo-
zygote sur le gène HFE ou une cirrhose. De façon controversée, la surcharge serait
un facteur de moindre réponse au traitement par interféron α [117, 119, 127]. Et,
bien qu’elles s‘avèrent efficaces sur la cytolyse, les saignées ne permettent pour-
tant pas d’amélioration de la charge virale [117,]. La surcharge n’apparaît pas en
revanche comme un facteur de non-réponse au traitement combiné IFN*α-
Ribavirine [128]. Une corrélation est toutefois décrite entre le degré de fibrose ou
la présence d’une fibrose et le degré de surcharge [127]. Il n’y a pas d’attitude
consensuelle à adopter donc, face a une surcharge en fer au cours de l’hépatite C.
L’hépatite chronique virale B peut s’associer à une surcharge mésenchymateuse.
L’inflammation semble corrélée au degré de fibrose et de surcharge [117,]. La
réplication virale serait supérieure au sein d’hépatocytes riches en ferritine [3].
c) cirrhose.
Toute cirrhose, peut générer une surcharge en fer. De type parenchymateuse,
dans 20 à 76 % des cas [117], elle se répartit de façon très hétérogène d’un nodule
à l’autre, si bien qu’une PBH* réalisée à un stade avancé de cirrhose, au sein d’un
nodule fortement surchargé en fer pouvait conclure à tort à une HCH avant l’ère
du diagnostic génotypique. La surcharge épargne, le tissu fibreux les vaisseaux et
les canaux biliaires, contrairement à l’HCH [119]. Plusieurs phénomènes sont im-
pliqués dans la constitution d’une surcharge au cours d’une cirrhose [119]. Une
hypotransferrinémie, liée à l’insuffisance hépatique, associée à une augmentation
de l’absorption de fer conduirait à une élévation du FNLT, avidement capté par le
foie [21]. Des shunts porto-systémiques favoriseraient la survenue d’une surcharge
à l’instar de certaines anastomoses porto-caves chirurgicales [117]. Une étude
rétrospective a montré chez des cirrhotiques, qu’un CHC était plus fréquent en cas
de présence de fer dans des nodules de régénération (dits « sidérotiques ») [129].
34
V.5. HEPATOSIDEROSE DYSMETABOLIQUE.
a) Définitions.
Les NAFLD* (Non Alcoholic Fatty Liver Disease) constituent une entité histo-
logique mimant les lésions histologiques des hépatopathies alcooliques en l’absen-
ce de consommation d’alcool. Elles vont de la simple stéatose (NAFLD de type 1),
s’associant à un infiltrat inflammatoire à polynucléaires neutrophiles ou macropha-
gique (type 2), une ballonisation hépatocytaire (type 3), des corps de Mallory, et
une fibrose (type 4). Les NAFLD sont fréquentes chez l’obèse, 6 fois sur10 [130].
La stéato-hépatite non alcoolique (NASH* pour les anglo-saxons), correspond
aux types 3 et 4 des NAFLD et touche ¼ de la population obèse qui développe une
cirrhose dans 2 à 3% des cas. Les lésions histologiques nécessaires au diagnostic
sont les suivantes : stéatose principalement macrovacuolaire, un infiltrat inflamma-
toire lobulaire mixte, à polynucléaire neutrophile ou macrophagique, ballonisation
hépatocytaire. Divers stades de fibrose à localisation périsinusoïdale, une surchar-
ge en fer, des corps de Mallory sont souvent observés mais non obligatoires [130].
Le syndrome métabolique présente une prévalence élevée ; aux USA elle
atteindrait 25% de la population générale et en France, elle serait de 8% chez les
femmes et 12% chez les hommes (sans inclure les patients diabétiques) [131]. Le
syndrome métabolique répond à plusieurs définitions (Cf. tableau N° 7) [131], qui
peuvent paraître complexes en pratique clinique et manquer de sensibilité quant à
l’identification d’une insulino-résistance elle-même.
b) Expression clinique de l’HSD*.
Au cours des NASH, une surcharge en fer peut se constituer dans 23% à 58%
des cas [125, 132]. Cette hépatopathie exprime une forte association avec les élé-
ments cliniques du syndrome métabolique (Cf. Tableau N°8). A côté, Moirand et
al. ont décrit en 1997, une cohorte de patients présentant une surcharge en fer
modérée sans élévation notable du CST, une hyperferritinémie et la présence d’au
moins un des éléments du syndrome métabolique dans 95% des cas [16]. Inverse-
ment, une hyperferritinémie est fréquente au cours du syndrome métabolique dans
15 à 30% des cas [133] (Cf. tableau N°9). La présence de lésions histologiques
compatibles avec une hépatopathie alcoolique était un critère d’exclusion ; les
35
NASH étaient donc exclues de fait dans cette cohorte. En pratique, l’HSD*
coexiste avec des lésions de NASH et on observe une stéatose échographique ou
biopsique dans 62% et 60% des cas [134]. Au cours des NASH, une étude rapporte
une surcharge en fer chez tous les sujets de plus de 60 ans [132]. Ces entités sem-
blent donc appartenir au même cadre nosologique. Un rôle pour les mutations HFE
dans ces surcharges dysmétaboliques est possible. Pour certains, la fréquence
allélique de la mutation C282Y est élevée au cours des NASH* avec une forte
représentation de l’homozygotie, dans 7,9% des cas [125]. Ailleurs, la mutation
H63D semble plus fréquente, mais n’est pas associée à des niveaux de surcharge
plus élevés et le degré de surcharge n’est pas corrélé à l’extension de la fibrose
[132]. Une autre équipe a encore montré une fréquence élevée d’hétérozygotes
composites C282Y/H63D avec surcharges plus importantes [134]. La prévalence
de l’HSD* est mal évaluée ; certains auteurs l’estiment à environ 1% de la popula-
tion générale, 10 fois plus que l’HCH [135]. L’hyperferritinémie est constante en
cas d’HSD, habituellement <1000 µg/l [16]. La surcharge, hépatocytaire ou mixte,
se localise préférentiellement à la zone périportale dans sa composante parenchy-
mateuse [16, 136]. Elle est modérée et la CHF* reste le plus souvent inférieure à
100µmol/g. Le CST est normal ou modérément élevé dans 35% des cas [134].
L’IHF* est supérieur à 1.9 dans 1/3 à 47% des cas [16, 134], le CST* est alors plus
élevé [16] et la surcharge de simuler une HCH* et de motiver une recherche géné-
tique. Cliniquement on observe une asthénie, une HMG* dans 29% des cas, une
hépatalgie, des arthralgies dans 8% des cas, touchant volontiers les MCP* et les
IPP* [136, 135, 137]. Une cytolyse modérée, prédominant sur les ALAT, n’est pas
rare au cours des NASH ; les γGT sont élevées dans près d’1/3 des cas et un lien
avec l’obésité est évoqué [132]. Cette cytolyse est davantage liée pour certains, à
l’activité stéatosique qu’à la surcharge. Cette dernière est négativement corrélée à
la stéatose, comme si elles se limitaient mutuellement [125].
Le risque de survenue d’une cirrhose à 5 ans est de 15% au cours des NASH
[130]. Une fibrose sévère est retrouvée chez 27% des patients; 10% ont une fibrose
en pont et 17% une cirrhose) [138]. Une stéatose isolée connaît la plupart du
temps une évolution bénigne, mais conduit parfois à la cirrhose [130, 139]. De la
même manière, au cours de l’HSD* la prévalence d’une fibrose en pont ou d’une
cirrhose serait de 10% [136]. Certains facteurs seraient prédictifs de fibrose au
cours de l’HSD ; les patients âgés de moins de 45 ans et/ou présentant un BMI <
36
25kg/m², ne sont pas à risque de fibrose ; il est donc recommandé de réserver la
PBH à visée pronostique chez les patients de plus de 45 ans, ayant un surpoids
(BMI>25 kg/m²). Une cytolyse ou les paramètres biologiques du fer n’augurent
pas de la présence d’une fibrose [140]. Au cours des NASH, l’absence de diabète
ou d’obésité et un âge <45ans sont les meilleurs outils permettant d’exclure une
fibrose sévère et d’éviter la PBH à 19% des patients [138]. L’inversion du rapport
ASAT/ALAT (>1) semble lié à la présence d’une fibrose sévère; 54% des patients
avec fibrose sévère ont un rapport ASAT/ALAT>1, et 47% des patients présentant
un rapport inversé ont une fibrose. Toutefois 23% des patients présentant un
rapport <1, ont une fibrose sévère. Le Fibrotest pourrait peut-être à l’avenir, pré-
dire le risque de fibrose au cours des HSD*. Cet outil semble fiable au cours
l’hépatite C, des NAFLD, des hépatopathies alcooliques et de l’hépatite B mais n’a
pas été évalué au cours des surcharges en fer [141]. Au cours de l’HSD*, la fibrose
est plus fréquente en cas de stéatose, et le degré de fibrose, plus important lorsqu’il
existe des lésions de NASH associées [134]. Inversement, la surcharge en fer,
lorsqu’elle est présente au cours des NASH, est corrélée au degré de fibrose [125].
La surcharge en fer générerait un stress oxydatif qui induirait une peroxydation
lipidique dont les produits de dégradation activent les cellules étoilées du foie. Ce
stress oxydatif et l’activation de ces cellules ont été mis en évidence pour des sur-
charges minimes. Or toute cause de stéatose chez la souris et la stéatose alcoolique
chez l’homme conduit à une peroxydation lipidique. Surcharge en fer et stéatose
ont un effet fibrogène synergique sur modèle animal [125].
Un CHC* a rarement été décrit au cours de telles surcharges [142, 143]. Il peut
se développer sur cirrhose [3] ou d’autres types de lésions au cours de l’HCH*: les
« îlots sans fer » [95]. Ceux-ci multiplient par 6 le risque de CHC* [135]. La
peroxydation lipidique induirait des dommages hépatocytaires favorisant la proli-
fération de cellules ovales et certains produits de la peroxydation lipidique pour-
raient favoriser des mutations de l’anti-oncogène p53 [144]. Un cas de CHC, au
cours d’une surcharge modérée (CHF à 112µmol/g), compatible avec une HSD, a
été rapporté en l’absence de cirrhose et de stéatohépatite [143], mais en présence
d’une forte consommation d’alcool et de tabac. Asare et al viennent de démontrer
sur des rats, que la surcharge en fer peut favoriser l’apparition d’îlots sans fer puis
un CHC en l’absence de cirrhose [145], mais les niveaux de surcharge observés
chez ces animaux sont comparables à ceux d’une HCH*.
37
c) Relations entre métabolisme du fer, inflammation,
Insulino-Résistance (IR) et athérosclérose.
L’hyperferritinémie signe une HSD dans 37% des cas seulement au cours des
NASH [125]. A ferritinémie égale, la surcharge en fer serait 2,5 fois plus faible au
cours d’une HSD* qu’au cours de l’HCH* [16]. L’hyperferritinémie pourrait être
liée en partie à la cytolyse, mais aucune corrélation n’a été mise en évidence [132].
En fait la ferritinémie est un marqueur de l’IR ; elle est présente dans 15 à
30% des cas au cours du syndrome métabolique [133] et elle corrélée au degré
d’IR*, à l’insulinémie, à la glycémie, la tension artérielle diastolique, au BMI*, au
LDL-cholesterol et aux triglycérides [146]. Or l’IR semble être influencée par une
voie cytokinique inflammatoire. Une relation positive existe entre IL6 ou TNFα et
degré d’obésité, et entre les quantités circulantes d’IL6 et l’IR [147]. L’élévation
de la CRP est aussi associée à un risque de survenue de diabète au cours de l’IR
[148]. Le TNFα est un médiateur adipocytaire dont le rôle est majeur dans la
genèse de l’IR [149] ; l’invalidation de son gène diminue l’IR* chez l’animal
obèse. Le TNFα inhibe l’expression des effecteurs intracellulaires du récepteur de
l’insuline (IRS1) et d’un transporteur du glucose (GLUT4). Il réduit l’interaction
du récepteur de l’insuline avec IRS1 et induit également une diminution des taux
d’adiponectine, impliquée dans l’oxydation musculaire des AGL. Il participe à
l’augmentation des AGL circulants en stimulant la lipolyse adipocytaire et en inhi-
bant la voie de stockage sous forme de triglycérides. Les AGL* court-circuitent la
cascade de phosphorylations des post récepteurs de l’insuline en activant les
pyruvate-kinases C, et favorisent l’accumulation de triglycérides dans les hépato-
cytes et cellules musculaires du fait d’une sous utilisation mitochondriale [149].
L’hyperferritinémie dysmétabolique pourrait procéder en partie d’une ori-
gine inflammatoire, car la ferritine tout comme la CRP sont des protéines de
l’inflammation et leurs synthèses sont modulées par l’IL1, l’IL6 et le TNFα au
cours du syndrome inflammatoire [150]. Le profil biologique d’un syndrome
inflammatoire révèle une hyposidérémie mais aussi une hyperferritinémie et un
CST normal [151]. L’absence d’élévation du CST (ou le caractère modéré de cette
élévation) au cours de l’HSD*, peut témoigner d’une imprégnation cytokinique. Si
cette imprégnation est réelle au cours de l’HSD, le niveau de synthèse d’hepcidine,
stimulable par l’IL6 surtout et par l’IL1 [41, 152], devrait alors être augmentée et
38
la surcharge observée, kupfferienne. Or la répartition de la surcharge, périportale
dans sa composante parenchymateuse, laisse entendre qu’il existe une hyper-
absorption de fer au cours de l’HSD*. Enfin, un polymorphisme du gène du TNFα,
au cours duquel le TNFα est augmenté, module l’expression phénotypique de
l’HCH, peut-être du fait de l’influence du TNFα sur la synthèse de ferritine [153].
Il existe de nombreuses interactions entre le métabolisme du fer et celui du
glucose. L’insuline augmente l’expression membranaire de RTf et donc la capta-
tion de fer par les adipocytes et induit l’expression de ferritine dans des cellules
gliomateuses de rat [7]. La transferrine plasmatique aurait un effet anti-insuline et
le fer jouerait un rôle de cofacteur dans l’activité des transporteurs insulino-
dépendants [133]. RTf, transporteur du glucose et récepteurs à l’IGF2 sont co-
localisées au sein de la membrane microsomale des adipocytes [7]. Selon une
étude prospective, des patients surchargés en fer sans IR* initiale, évoluent vers
des niveaux d’IR* plus importants que des patients avec une IR au départ, sans
surcharge [135]. L’extraction d’insuline par le foie diminue avec l’augmentation
des stocks en fer ; cette situation conduit à une hyper-insulinémie [7]. Les dons de
sang diminuent l’hyperinsulinémie post prandiale, améliorent l’insulino-sensibilité
et protègent de la survenue du diabète de type 2. De la même façon, des saignées
améliorent l’insulino-sensibilité et les taux d’HbA1C chez les diabétiques de type
2 présentant une hyperferritinémie [7]. Les saignées améliorent l’IR* chez les
patients intolérants au glucose avec NAFLD* [154]. Inversement, la correction des
paramètres morphométrique et biologique du syndrome métabolique, ne suffit pas
à normaliser les paramètres biologiques du fer chez les patients présentant une
HSD [155, 156]. Seuls certains de ceux qui présentent une ferritine <450µg/l
normalisent leur ferritine voire la surcharge en fer ; les auteurs préconisent donc
des saignées au delà de cette valeur. La ferritine est plus souvent stabilisée quand
le contrôle du poids est plus strict [156]. Plusieurs traitements sont efficaces au
cours des NAFLD*, tant sur le plan histologique que de l’IR*, comme la perte de
poids, la metformine ou les thiazolinediones, les statines (aussi efficaces sur
l’activité cytolytique) et enfin le losartan qui améliore aussi la ferritinémie [130,
137, 111]. L’efficacité de ces molécules dans l’HSD* n’est pas connue.
Athérosclérose et insulino-résistance sont influencées par la voie inflam-
matoire. L’IR* expose au développement de l’athérosclérose, triple le risque
coronarien et augmente la mortalité cardiovasculaire de 80% [131]. Athérosclérose
39
et IR partagent l’implication physiopathologique de cytokines pro-inflammatoires
comme l’IL6 et le TNFα ; la CRP serait même associé à un risque prédictif de
cardiopathie ischémique [157]. Ces cytokines agissent précocément au stade de
dysfonctionnement endothélial, en entraînant des troubles vasoactifs et de la per-
méabilité, en particulier pour les LDL dont l’oxydation est potentialisée en présen-
ce d’AGL [148, 158]. Ce phénomène est amplifié par la production de protéogly-
canes qui fixent les lipoprotéines et les exposent davantage au stress oxydatif.
TNFα et IL6 induisent la synthèse d’autres cytokines pro-inflammatoires, de
protéines de l’adhésion moléculaire et de facteur chémotactant pour les cellules
inflammatoires [148]. Celles-ci phagocytent les débris matriciels, les corps apopto-
tiques et internalisent, de façon incontrôlée, des LDL oxydés qui initient le centre
nécrotique. Le polymorphisme R92Q du gène du récepteur du TNFα, semble être
associé à la survenue d’infarctus du myocarde, au développement de la plaque
athéromateuse chez le fumeur, ou à l’épaississement de l’épaisseur de l’intima et
de la média [159]. L’insuline a des propriétés anti-inflammatoires ; elle contrôle
l’expression du TNFα, des molécules d’adhésion et chémotactantes [148].
Surcharge en fer et athérosclérose sont liées épidémiologiquement et expéri-
mentalement. La desferroxamine améliore la dysfonction endothéliale chez des
patients atteints de cardiopathie ischémique [7]. Chez le lapin, la surcharge accélè-
re le développement des lésions athéroscléreuses [7]. L’épaississement de l’intima
et de la média au niveau des carotides est un facteur prédictif précoce de coronaro-
pathie et du risque cardiovasculaire. Il est significativement augmenté au cours de
l’HCH* tout comme la fonction de vasodilatation endothéliale est altérée au
niveau de l’artère brachiale [8]. Ces anomalies semblent améliorées après phlébo-
tomies. Sur le plan épidémiologique le taux de ferritine serait un facteur de risque
d’évolutivité de la plaque athéromateuse au niveau carotidien, surtout aux stades
précoces de l’athérogenèse. Le taux de LDL-cholestérol aurait un pouvoir prédictif
synergique [9]. Une ferritinémie supérieure à 200 µg/l doublerait le risque de
survenue d’infarctus du myocarde [10]. L’oxydation des LDL, serait favorisée par
des stocks en fer consistants, et jouerait un rôle dans la phase initiale de l’athéro-
genèse [9, 10]. Pourtant une méta-analyse montre que ce lien épidémiologique
entre ferritine et risque cardio-vasculaire est plus qu’inconstant [160].
40
VI. ETUDE D’UNE COHORTE DE 73 PATIENTS
SUIVIS POUR UNE SURCHARGE EN FER.
VI.1 MATERIEL ET METHODES.
Il s’agit d’une étude descriptive et rétrospective menée dans le service des
maladies génétiques du globule rouge de l’hôpital H. Mondor. 73 cas de patients
suivis pour surcharge en fer et saignés dans le service sont décrits; les patients
phlébotomisés dans le cadre d’une polyglobulie ou d’une drépanocytose étaient
exclus. Le nombre de patients inclus était déterminé au départ. Les données étaient
recueillies sur la base de la consultation d’un dossier médical, d’un dossier de sai-
gnées (suivi des paramètres biologiques, consignation du volume de sang prélevé
et tolérance) et d’un interrogatoire réalisé auprès du patient, un jour de saignée,
afin de compléter les informations manquantes (cette partie de l’étude était donc
réalisée prospectivement). Les patients étaient sélectionnés sur la base d’un
numéro d’identifiant attestant d’un suivi depuis moins de 4 ans, dans le but, d’une
part, que le spectre étudié soit le plus représentatif possible de la situation actuelle
et d’autre part pour des raisons historiques au sein du service qui prend en charge
depuis cette période, les patients saignés jusque là par l’établissement français du
sang de proximité. L’étude fut arrêtée le jour où le nombre de patients a atteint 70.
Les objectifs sont :
- de décrire le spectre étiologique et l’expression phénotypique et génotypique des
surcharges en fer au sein d’une cohorte de patients saignés et de montrer
l’importance du rôle joué par la voie métabolique au sein d’une telle cohorte.
-de définir les circonstances de découverte de ces surcharges en fer (en identifiant
le prescripteur du bilan martial initial, les raisons qui ont conduit à la réalisation de
cet examen biologique et en décrivant le bilan prescrit initialement), afin d’établir
une confrontation entre l’état des pratiques, l’état des connaissances et les
recommandations actuelles et afin de préciser le rôle du médecin généraliste quant
à l’identification de ces surcharges.
Les données recueillies étaient :
41
-L’âge de découverte, le sexe.
-La composition du bilan biologique initial prescrit (ferritine, ferritine et fer
sérique fer sérique seul, CST seul, etc..), l’identification du médecin prescripteur
(généraliste ou spécialiste) et les raisons ayant motivé la réalisation d’un tel bilan.
-Le diagnostic final était fondé sur un faisceau d’arguments reposant sur les
données suivantes lorsqu’elles étaient disponibles:
-l’étude d’un bilan martial initial, (ferritine, CST, fer sérique et parfois
ferritine érythrocytaire et RSolTf) à nouveau prescrit par le service avant saignées
et réalisé dans le laboratoire de biochimie de l’hôpital H. Mondor;
-un génotypage HFE ;
-la recherche d’antécédents familiaux ; la présence d’un dysmétabolisme
évalué à l’interrogatoire (traitement à base de statine, fibrate ou antihypertenseur),
par la détermination du BMI (retenu comme anormal si >25) la présence d’une
stéatose hépatique à l’échographie ou sur la base de données biologique (glycémie,
bilan lipidique); la consommation d’alcool;
-l’évaluation de la surcharge en fer grâce à l’IRM, au volume total des
saignées ou sur les données biopsiques. La surcharge a été classée de minime à
sévère selon les critères rapportés ci-dessous d’après une conférence de consensus
[84] :
Si 1ml de globule rouge vaut 1 mg de fer [118], le volume de sang prélevé,
pondéré de l’hématocrite, a permis de calculer rétrospectivement la surcharge chez
nos patients, dès lors que la ferritine devenait <150 µg/l, avec les saignées. La
PBH n’est plus nécessaire pour quantifier la surcharge, car l’IRM est devenu la
technique de référence pour la mesure de la concentration hépatique en fer (CHF*)
Surcharge minime
Surcharge modérée
Surcharge sévère
Ferritine (µg/l)
< 500.
> 500
et < 750 >750.
CHF* (µmol/g de tissu)
>30
et <100.
> 100
et < 200. > 200
Surcharge globale (en g)
>1g et <2g >2g et <5g. >5g
42
[12], avec une bonne sensibilité, pour des CHF* allant de 80 à 350 µmol/g de tissu
(normale <36µmol/g) [165]. L’index hépatique en fer (IHF*) correspond au
rapport CHF/âge. Cet index permettait de repérer les surcharges en fer liées à
l’HCH homozygote, des états hétérozygotes (IHF<1.9) et d’autres surcharges se-
condaires, notamment alcooliques (IHF<1.7) [86]. Grâce au génotypage, ce critère
n’est plus essentiel au diagnostic d’HCH, d’autant que 15% de ces patients présen-
tent un IHF* <1.9 [169] et qu’il est souvent dépassé au cours de l’HSD* [16, 134].
-les données biopsiques sur PBH*;
-la présence de complications (diabète, fibrose hépatique, cirrhose insuffisance
gonadique, hypothyroïdie, α.FP*.) a également été recherchée. Des anomalies du
bilan hépatique ou échographique étaient recherchées. Des sérologies des hépatites
B et C étaient réalisées en cas de cytolyse. Une NFS*, un dosage de
l’orosomucoide couplé à l’haptoglobine et une électrophorèse des protides sériques
étaient aussi utiles afin d’éliminer une hyperferritinémie d’origine inflammatoire.
VI.2 RESULTATS.
La cohorte est constituée de 73 patients, dont 55 hommes avec un sexe ratio de
3. Les femmes sont âgées de 37 à 86 ans au moment du diagnostic et les hommes
de 33 à 74 ans. Les patients n’ont aucun lien de parenté entre eux ; ils n’ont pas
tous pu être déplétés au moment de l’étude, chez certains la surcharge n’a donc pu
être évaluée. Les ferritinémies observés sur le bilan initial, réalisé avant saignée,
allaient de 460 à 5532 µg/l chez l’homme et de 303 à 2090 µg/l chez les femmes.
Les moyennes et écarts types seront décrites pour les sous-groupes homogènes sur
le plan étiologique et lorsque l’écahantillon est assez grand.
VI.2. 1 SPECTRE ETIOLOGIQUE DES SURCHAGES EN FER.
L’ensemble des données génotypiques et phénotypiques ont permis de diviser
la cohorte en trois groupes étiologiques distincts représentés sur le schéma suivant.
Groupe 1 (=37%) : surcharges en fer primitives ;
Groupe 2 (=13.7%): hémochromatoses secondaires, à l’exclusion des HSD*;
Groupe 3 (=49.3%) : Hépatosidéroses dysmétaboliques (HSD*).
43
Groupe 1 : surcharges primitives n=27
- 20 patients C282Y+/+
- 4 patients C282Y/H63D
dont 1 avec 1 déficit en PK*
et 1 avec une thalassémie hétérozygote)
- 1 patient C282Y+/-
- 2 patients non génotypés (dont 1 supposé
C282Y+/+ et 1 HCH supposée type HFE4)
Groupe 2 : surcharges secondaires n=10
- syndrome thalasémique intermédiaire :,,,,,,,,,,,,3 patients
- β0 thalassémie hétérozygote + elliptocytose:,,,1 patient
- anémie sidéroblastique : ,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,1 patient
- dysérythropoïèse :,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,1 patient
- transfusions multiples :,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,1 patient
- PCT*+hépatite C : ,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,, 1 patient
- Hépatopathie alcoolique :,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,2 patients
(dont 1 H63D +/+)
Spectre étiologique des surcharges en fer
37%
13,7%
49,3%
Groupe 3 : hépatosidéroses dysmétaboliques
n=36
- 35 patients dont : 10 HFE sauvage
(dont 1avec 1 trait α thalassémique)
1 C282Y-/- ; H63D?/?
7 C282Y+/-
5 H63D+/+
1 H63D/S65C
2 H63D+/-
10 non génotypés
44
VI.2. 2. EXPRESSIONS PHENOTYPIQUE ET GENOTYPIQUE
DES SURCHARGES EN FER.
Le caractère rétrospectif et les manques d’évaluation systématique des compli-
cations et de réalisation de PBH* ne sauraient faire de cette étude phénotypique,
une étude de pénétrance de la mutation C282Y ou de l’HSD; celle-ci permet
cependant de justifier la classification de nos patients dans cette cohorte au sein du
spectre étiologique des surcharges en fer et également de souligner l’influence du
dysmétabolisme sur l’expression phénotypique de ces surcharges.
a) Surcharges en fer primitives
(Groupe 1= P1 à P27).
Ce groupe est composé de 27 patients avec un sexe ratio de 2.9 et représente
37% de la cohorte. Le taux de ferritine varie de 303 à 5532 µg/l; chez les
femmes elle va de 303 à 1300 µg/l et chez les hommes de 481 à 5532 µg/l.
Dans les deux sexes (n=27)
Chez les hommes
(n=20)
Chez les femmes
(n=7)
Age moyen +/- IC =intervalle de
confiance à 95%.
(écart-type)
50 +/- 3 ans.
--------
(9 ans)
49+/-4 ans.
------
(10 ans)
50 +/-5 ans.
-------
(7 ans)
Age médian 50 ans. 50 ans. 50 ans.
Ferritine moyenne +/- IC.
---- (écart-type)
1316 +/- 405µg/l.
------
(1073 µg/l)
1553 +/- 501µg/l.
------
(1144 µg/l)
638 +/- 260µg/l.
-------
(351µg/l)
Ferritine médiane
958 µg/l 1326 µg/l 507 µg/l
45
Expression phénotypique des surcharges en fer primitives. (;*, **, ***=surcharge minime, modérée et sévère ; N=normal(e), H(S)MG=
hépato(spléno)mégalie ; HTA hypertension artérielle ; HyperTG hypertriglycéridémie ; DNID=diabète non insulino-dépendant ; IG=intolérance
au glucose.)
Identification
Age de
découverte
(Sexe)
Bilan initial
Ferritine/CST
(µg/l/%)
Génoptype
HFE Surcharge
ASAT/ALAT
γGT
Echographie
abdominale Symptômes / complications.
Elément du
Syndrome
dysmétabolique
et/ou alcool
P1 40 ans. (M)
2522 / 106% C282Y+/+ 14.405g
***
ALAT<2N,
γGT<2N=>persistant Non faite Asthénie HTA, HyperTG
P2 43 ans. (M)
890 / 68% C282Y+/+ 1.88g
* N Non faite Asthénie (BMI ?)
P3 39 ans. (M)
481 / 71% C282Y+/+ 0.8g
* N N.
Asthénie, arthralgies
(genoux, poignets, chevilles) N
P4 55 ans (M)
5532 / 97% C282Y+/+ 14g
*** ALAT 2N
γGT<2N=>N
Stéatose
HSMG
Asthénie, arthralgies
(genoux, poignets, épaule)
PBH = Cirrhose.
BMI : 30.11
P5 49 ans (F)
507 / 70% C282Y+/+ 2.66g
** N Non faite Asthénie. N
P6 56 ans (M)
549 / 85% C282Y+/+ 6.88g
*** N Non faite
Asthénie, arthralgies
(genoux). N
P7 33 ans (M)
481 / 109% C282Y+/+ 3.864g
** N Non faite Gonalgies, asthénie. N
P8 60 ans (F)
778 / 61% C282Y+/+ 1.216g
* γGT ?
HMG
Stéatose N
DNID
BMI : 28.63 P9
43 ans (M) 546 / 52% C282Y+/+
1.9g
* N Non faite Asthénie. BMI : 26.53
46
Expression phénotypique des surcharges en fer primitives (suite…)
Identification
Age de
découverte
Sexe
Bilan initial
Ferritine/CST
(µg/l/%)
Génoptype
HFE Surcharge
ASAT/ALAT
γGT
Echo-
graphie
abdominale
Symptômes / complications.
Elément du
Syndrome
métabolique
et/oualcool
P10 57 ans (M)
1580 / 95% C282Y+/+ 5.575g
***
ALAT<2N=>
Normalisés
Stéatose
HSMG Asthénie BMI : 26.53.
P11 55 ans (F)
790 / 75% C282Y+/+ 5.08g
*** N
Stéatose
HMG limite
Asthénie, gonalgies, hypothyroïdie
sous lithium N
P12 55 ans(M)
958 / 118% C282Y+/+ 7.6g
*** N N Asthénie N
P13 47 ans (F)
333 / 56% C282Y+/+ 1.2g
* N Non faite ? BMI ?
P14 54 ans (F)
303 / 79% C282Y+/+ 2.56g
** ? Non faite N N
P15 45 ans (M)
1830 / 98% C282Y+/+ 8.1g
***
ASAT, ALAT
3 à 5 N => N
γGT ?
Non faite
PBH : fibrose
portale et périportale
Stéatose discrète
BMI : 25.73
Alcool :
4 verres/j
P16 41 ans (M)
835 / 92 % C282Y+/+
3.696g
CHF
435µmol/g
***
ASAT/ALAT
x2 N =>N N
Gonalgies
PBH : fibrose portale et périportale,
Stéatose minime
DNID
BMI:27.25
P17 57 ans (M)
2060 / 86% C282Y+/+ Marquée***
sur la PBH
ALAT : 2xN
persistant N
Arthralgies (MCP*)
PBH : fibrose portale et périportale
Stéatose minime
Alcool: 3 à 4 verres /j
P18 61 ans (M)
1410 / 63% C282Y+/+
2.23g
CHF: 100
µmol/g **
ALAT<2N,
γGT<2N=>N Stéatose ?
IG
BMI : 33.05
47
Expression phénotypique des surcharges en fer primitives (suite…)
Identificatio
n Age de
découverte
Sexe
Bilan initial
Ferritine/CS
T
(µg/l/%)
Génoptype
HFE Surcharge
ASAT/ALAT
γGT
Echographie
abdominale
Symptômes /
complications.
Elément du
Syndrome
dysmétabolique
et/ou alcool
P19 57 ans (M)
1230 / 106% C282Y+/+
CHF
300µmol/g
***
N Non faite N BMI : 25.20
P20 55 ans (M)
1241 /65% C282Y+/+ 5.76g
***
ASAT et
ALAT<2N HMG
Asthénie,
Gonalgies N
P21 51 ans (M)
1930 / 101%
Non fait
Présumé
C282Y+/+
>5g
***
ASAT/ALAT
x2N
=> persistant
Non faite. Arthralgies
Dysérection
Dyslipidémie
mixte
P22 49 ans (M)
833 / 70% C282Y+/-
H63D+/-
2.632g
** N N ESV BMI: 25.26
P23 50 ans (F)
1300 / 63% C282Y+/-
H63D+/-
2.533g
** N N
Asthénie, Arthralgies
(genoux, épaules,
coudes).
HyperTG
modérée
BMI : 27.58
P24 73 ans (M)
1600 / 76% C282Y+/-
H63D+/-
5g
*** N
Foie hyperéchogène
de taille N, avec
contours bosselés
Gonalgies
Hypothyroïdie
HTA
BMI : 28.409
P25 39 ans (M)
2588 / 88% C282Y+/-
H63D+/- 6.53 g
***
ASAT et ALAT
x2N => N Stéatose sans HMG Asthénie N
P26 37 ans (F)
453 / 84% C282Y+/-
H63D-/- >1.3g N
HMG (15cm)
Stéatose N N
P27 38 ans (M)
1960 / 26% HCH HFE
type IV ?
1.68g
* ? Stéatose discrète N
hyperTG, IG
BMI : 25.7
48
La surcharge a pu être classée de minime à sévère dans tous les cas
d’homozygotie C282Y. La surcharge n’est pas connue dans un cas (cas unique
d’hétérozygotie C282Y+/- : P26) mais elle semble réelle (déjà plus de 1.3g de fer
soustrait au moment de l’étude). La surcharge est minime (entre 1 et 2 g de fer
soustrait) dans 6 cas sur 26 (4 hommes et 2 femmes), soit 23% des patients ; la
surcharge est modérée (entre 2 et 5 g de fer soustrait) dans 6 cas (3 hommes et 3
femmes) soit 23% des patients; la surcharge est sévère (>5g de fer soustrait, ou
bien CHF>200 µmol/g) dans 14 cas (13 hommes pour 1 femme) soit 54% des cas.
La surcharge est sévère chez 65% des hommes contre 16.7% des femmes.
-Les patients C282Y+/+ (P1 à P20) sont au nombre de 20 (dont 15 hommes).
Ils représentent à eux seuls 80% des sujets génotypés (20 patients sur 25) et au
moins 74% du groupe (20/27 car 2 n’ont pas été génotypés au moment de l’étude).
La surcharge est sévère dans 11 cas (10 hommes pour 1 femme) soit dans 55% des
cas. La surcharge est sévère chez 2/3 des hommes et chez 20% des femmes. Le
génotype C282Y homozygote suffit à classer ces patients dans le groupe des sur-
charges en fer primitives, tous présentant un CST élevé et une hyperferritinémie.
-Un patient n’a pas bénéficié de génotypage HFE (P21). La surcharge en
fer, mesurée rétrospectivement chez ce patient, est sévère, alors que l’état de
désaturation n’est pas atteint au moment de l’étude. L’hyperferritinémie se corrige
avec les saignées (de 2230 µg/l à 502 µg/l après soustraction de plus de 5g de fer),
mais le CST reste invariablement très élevé a 90%. Sur le plan clinique, des
arthralgies importantes sont exprimées ainsi qu’une cytolyse qui ne s’améliore pas
avec les saignées ; une impuissance complète le tableau, fortement évocateur
d’une homozygotie C282Y+/+ (mais pourrait correspondre aussi à une HCH HFE
3, liée à une mutation dans le gène de RTf2 : Cf Tableau N°5). Si ce patient est
bien C282Y+/+, ce génotype représente alors 77.77% du groupe 1.
-Les patients hétérozygotes composite (C282Y/H63D) sont peu nombreux
(P22, P23, P24, P25 : trois hommes et une femme).
P22 présente une surcharge modérée (2.6g de fer soustrait) mais la ferritine
atteint des niveaux dépassant la valeur seuil de 750µg/l, définissant une surcharge
sévère au cours de l’HCH. P22 présente un BMI à 25.26 kg/m², laissant penser
49
qu’un dysmétabolisme influence probablement la ferritine chez ce patient, d’autant
que le CST se normalise rapidement chez lui. P22 ne présente ni stéatose ni
cytolyse. Finalement, il n’est pas impossible que ce patient puisse présenter une
surcharge mixte, génétique et dysmétabolique.
P23 est une patiente qui présente une surcharge modérée et une ferritine au
dessus des valeurs attendues pour une telle surcharge (1300µg/l) ; un déficit en PK
avec anémie régénérative modérée et hémolytique est susceptible d’influencer ce
paramètre à la hausse. De même un dysmétabolisme (BMI à 27.58 et hyper-
triglycéridémie modérée) pourrait rendre compte de cette forte élévation de la
ferritine et expliquerait le fait que le CST se normalise avant la ferritine au cours
des saignées. Il n’existe pas de cytolyse ni anomalie échographique chez cette
patiente qui présente tout de même des arthralgies chroniques. La participation du
déficit en PK et du syndrome métabolique est donc probable dans l’expression
biologique et la constitution de la surcharge, chez cette patiente.
P24 présente également un dysmétabolisme (BMI à 28.4, stéatose échographi-
que et HTA) mais une surcharge sévère (à 5g) ; la ferritine est donc logiquement
très élevée mais elle semble là encore au dessus de ce qu’elle devrait être en com-
paraison à d’autres patients du groupe 1 et qui présentent une surcharge équiva-
lente avec des taux de ferritine pourtant bien moindres. Toutefois l’importance de
la surcharge et la réascension précoce du CST après obtention de l’état de désatu-
ration plaide davantage en faveur d’une surcharge hémochromatosique. Ce patient
semble exprimer une surcharge symptomatique voire des complications compa-
tibles avec la sévérité de la surcharge. P24 présente ainsi au moment du diagnostic
des gonalgies, une insuffisance thyroïdienne d’étiologie inconnue et substituée.
L’échographie hépatique révèle un foie hyperéchogène de taille normale et des
contours bosselés, en l’absence de perturbation du bilan biologique hépatique
pourtant. La présence d’éléments du syndrome métabolique chez ce patient (HTA
et BMI à 28) doit tout de même faire envisager le rôle d’une NASH* vis-à-vis des
anomalies échographiques constatées. La présence d’une cirrhose n’est pas recher-
chée par PBH* au moment de l’étude.
P25 est le quatrième patient à présenter une hétérozygotie composite ; la
surcharge est sévère chez lui (6.53 g de fer soustrait), et elle est très certainement
aggravée par la présence d’une thalassémie intermédiaire (thalassémie β0 hétéro-
zygote, hémolytique avec anémie à 9.3g/dl associée à une « hémoglobinose D-
50
Punjab »). Une stéatose, en rapport avec un dysmétabolisme, est probablement en
partie responsable au même titre que l’hémolyse et qu’une cytolyse hépatique d’un
taux de ferritine initial trop élevé (1600µg/l), en regard de la surcharge (par rapport
à P12, par exemple. Il semble que le secteur plasmatique soit difficilement désatu-
rable, ce qui laisse présager d’un rôle prépondérant pour l’hétérozygotie composite
C282Y/H63D et le syndrome thalassémique par rapport à la voie dysmétabolique
dans la constitution de la surcharge (CST difficile à normaliser).
-P26 est une patiente hétérozygote stricte C282Y+/- . La surcharge n’a pu
être calculée chez cette patiente mais elle semble réelle (plus de 1.3g de fer
soustrait au moment de l’étude) et le CST se corrige très mal (CST encore à 89%
pour une ferritine à 193 µg/l au moment de l’interprétation de l’étude). Cette
patiente ne présente aucun symptôme clinique en rapport avec une surcharge
(asthénie, arthralgie ou palpitation) ou biologique (pas de cytolyse, pas de diabète,
TSH* normale). L’attention doit tout de même être attirée par la présence d’une
stéatose hépatique et d’une hépatomégalie limite chez cette patiente. L’absence
d’évaluation de la surcharge chez cette patiente ne permet pas d’imputer ces
anomalies échographiques à un dysmétabolisme (même s’il est probable que la
surcharge reste modérée), d’autant qu’il n’existe aucun argument clinico-
biologique supplémentaire chez elle pour un syndrome d’insulino-résistance sous
jacent (ni consommation excessive d’alcool d’ailleurs). La forte saturation de la
transferrine ne plaide de toutes façons pas en faveur d’un rôle dominant pour un
dysmétabolisme dans la constitution de la surcharge.
-P27 semble être le seul cas de surcharge en fer primitive de notre cohorte
qui ne soit pas du tout liée au gène HFE. Les antécédents familiaux chez ce
patient d’origine portugaise sont fortement évocateurs d’une transmission autoso-
mique dominante (Cf schéma N°7). Biologiquement une hyperferritinémie impor-
tante (1960µg/l) contraste avec un CST normal voire limite bas (CST initialement
à 26%). La surcharge calculée reste malgré tout minime (1.68g de fer soustrait) en
regard d’un âge de découverte relativement jeune (38 ans). L’expression d’un syn-
drome métabolique (hypertriglycéridémie à 3g/l, intolérance au glucose, BMI>25
et stéatose échographique discrète) ne semble pas pouvoir expliquer isolément les
anomalies biologiques au vu du « trait familial hyperferritinémique » mais est sus-
51
ceptible encore une fois d’en moduler l’expression. Il est difficile d’étiqueter l’ori-
gine de l’intolérance au glucose chez ce patient (rôles respectifs de l’IR hépatique
liée à la surcharge en fer et du syndrome métabolique lié au surpoids). Le patient
n’a pas eu d’évaluation biologique du bilan hépatique mais reste par ailleurs
asymptomatique sur le plan clinique. P27 présente donc un tableau clinique
évocateur d’HCH* de type IV, liée à des mutations dans le gène de la ferroportine.
L’asthénie est le symptôme le plus fréquent ; elle est présente chez 2/3 des
patients C282Y+/+ interrogés et chez 56% des patients du groupe des surcharges
primitives.
Les arthralgies sont également fréquentes. Elles concernent 44.4% des sujets
C282Y+/+ et 44% sur l’ensemble du groupe. Les arthralgies les plus fréquentes,
chez les homozygotes sont les gonalgies ; elles sont présentes chez 7 patients
C282Y+/+ sur 8 et sont isolées dans 5 cas sur 7. Une CCA* du genou est
documentée dans 3 cas. Les autres arthralgies concernent les poignets (2 patients
sur 8), les chevilles (1 patient sur 8), les épaules (1 patient sur 8) et les MCP* (1
patient sur 8).
L’expression hépatique de la maladie est fréquente.
Une cytolyse hépatique modérée et prédominant sur les ALAT est présente
chez 8 patients C282Y +/+ sur 19 explorés (42%) et chez 40% des patients du
groupe 1 (10 sur 25 patients explorés). Ils sont tous de sexe masculin. Cette
cytolyse est régressive dans 6 cas sur 10, persistante chez 3 patients tandis qu’elle
n’a pas été réévaluée chez un patient, à la fin du programme des saignées. Tous ces
patients, sauf un (P18), présentent une surcharge sévère, mais un ou plusieurs
éléments du syndrome métabolique, en incluant la stéatose, (chez 8 patients =
P1, P4, P10, P15, P16, P18, P21 et P25) et/ou une consommation excessive
d’alcool (chez 2 patients = P15 et P17) est/sont présent(s) également dans 9 cas
sur 10.
Une échographie abdominale a été réalisée chez la moitié des patients
homozygotes (10/20) et chez près de 60% des patients du groupe (16 sur 27). Une
HMG* est donc présente chez 37.5% des patients du groupe 1 et chez la moitié
des homozygotes C282Y ayant bénéficié d’une échographie. L’HMG est donc
présente chez au moins 22.2% des patients du groupe. Cinq des six patients
52
hépatomégales, ont également une stéatose échographique (P4, P8, P10, P11,
P26). Parmi ces 5 patients, 3 d’entre eux (P4, P8, P10) présentent aussi un ou
plusieurs éléments du syndrome métabolique (essentiellement un BMI>25). Une
HMG* est contemporaine d’une cytolyse hépatique chez 3 patients (P4, P10 et
P20) tous atteints d’une surcharge sévère dont 2 présentent un BMI>25. Ces 3
patients ont également une ferritinémie initiale >1000µg/l, pourtant un seul a
bénéficié d’une PBH (P4) selon les suggestions de l’équipe rennaise [89].
Une PBH a été réalisée chez 4 patients homozygotes. L’un d’entre eux (P4)
présente une cirrhose avérée et les trois autres une fibrose portale et périportale
modérée (P15 à P17). Tous présentent une surcharge sévère, mais là encore il
existe soit une consommation excessive d’alcool (P15 et P17) soit un élément du
syndrome métabolique (P4 : BMI à 30 et P16 : BMI à 27 associé à un DNID*).
Aucun cas de CHC* n’est documenté chez les patients C282Y homo-
zygotes ; l’αFP* a été prélevée chez 18 patients C282Y+/+ et chez 22 des 25
patients appartenant au groupe des hémochromatoses primitives. Elle est élevée
chez un seul patient (P20), mais l’échographie ne met en évidence aucune lésion
focale nodulaire évocatrice ; aucune PBH n’a été réalisée chez ce patient.
L’expression hépatique de la maladie (en ne considérant que la présence d’une
HMG et/ou d’une cytolyse), est considérée en regard de la présence d’un
dysmétabolisme ou pas :
-11 patients C282Y homozygotes et 18 patients du groupe présentent au moins
un élément du syndrome métabolique et/ou une stéatose (dont un en rapport avec
un éthylisme isolé et un autre en rapport avec un surpoids et un éthylisme). Une
stéatose échographique et/ou biopsique est présente chez 70.6% des patients du
groupe 1 et chez 72.7% des homozygotes qui ont bénéficié d’une échographie
et/ou d’une biopsie hépatique. La surcharge reste minime à modérée dans 7 cas sur
18 sur l’ensemble du groupe et dans 3 cas sur 11 chez les homozygotes qui
présente un dysmétabolisme possible. Un dysmétabolisme et/ou une stéatose
est/sont associé(s) à une expression hépatique de la maladie (cytolyse et/ou une
HMG et/ou une anomalie des contours hépatiques et/ou une fibrose) chez 9
homozygotes sur 11 et chez 13 patients sur 18 dans le groupe.
-Quand aucun élément du syndrome métabolique n’est présent (sans considérer
la présence ou pas d’une stéatose), il n’y a pas de cytolyse 8 fois sur 10 chez
l’homozygote et dans 9 cas sur 12 sur l’ensemble de la cohorte.
53
-Lorsque une cytolyse est absente, un syndrome métabolique est également
absent huit fois sur 11 chez les patients homozygotes (en ne considérant pas la
présence d’une stéatose).
Ainsi l’expression hépatique de la maladie (chez P1, P4, P8, P10, P11, P15,
P16, P17, P18, P20, P21, P24, P25, P26) se traduisant par une HMG et/ou
cytolyse, et/ou fibrose et/ou cirrhose est quasi systématiquement associée soit
à un éthylisme (P15 et P17) et/ou un élément du syndrome dysmétabolique
(P1, P4, P8, P10, P15, P16, P18, P21, P24, P25, P26).
Un diabète non insulinodépendant est retrouvé chez deux patients (P8 et P16
tous deux homozygotes C282Y). P8 présente un dysmétabolisme avec BMI>28 et
une surcharge minime et P16 présente une surcharge sévère avec fibrose hépatique
mais également un BMI>27 et une stéatose biopsique. Une intolérance au glucose
est retrouvée chez deux autres patients (P18 qui est C282Y homozygote et P27 qui
présente une HCH de type HFE IV). La surcharge est minime à modérée chez eux.
Le premier présente un BMI à 33 et l’autre, une hypertriglycéridémie associée à un
BMI à 25 ainsi qu’une stéatose échographique dans les deux cas. Les quatre
patients du groupe des surcharges en fer qui présentent un trouble du
métabolisme glucidique ont tous un BMI>25 tandis qu’un seul présente une
surcharge sévère.
Sur le plan biologique la ferritine est fréquemment disproportionnée en
regard des paliers établis pour chaque niveau de surcharge d’après la
conférence de consensus de Sorrente. L’influence d’un dysmétabolisme est
probable puisque cinq patients homozygotes, sur sept qui expriment une telle
ferritine, ont également au moins un élément du syndrome métabolique (P4, P8,
P9, P10, P18). Une cytolyse touche aussi quatre de ces sept patients (P4, P10, P18,
P20) et peut influencer ce paramètre à la hausse. Tous les patients C282Y/H63D
hétérozygotes composites expriment également une ferritine qui semble au dessus
des valeurs établies pour leur niveau de surcharge ou bien supérieurs à celles
observées chez d’autres patients homozygotes pour le même degré de charge en
fer. Tous ces patient ont aussi au moins un élément du syndrome métabolique
tandis que deux d’entre eux ont également une hémolyse (lié à un déficit en PK et
à un syndrome thalassémique).
54
L’évolution des paramètres du fer est connue chez 18/20 des patients
C282Y+/+ (CST et ferritine). Cette évolution est caractérisée par une normalisa-
tion de la ferritine avant le CST dans 15 cas sur 18. La ferritinémie semble
décroître de façon linéaire la plupart du temps, tandis que le CST est souvent bien
difficile à normaliser et à stabiliser.
Trois patients normalisent malgré tout leur CST en premier (P4, P8, P18).
Tous les trois présentent un élément du syndrome métabolique tandis que la
ferritine parait disproportionnée chaque fois, en regard de la surcharge. L’un des
trois patients (P4) présente une cirrhose et une cytolyse pouvant jouer sur les taux
de ferritine tandis que le CST est tout de même initialement élevé à 97%. Les deux
autres (P8 et P18) présentent des surcharges respectivement minime et modérée et
des taux de ferritine bien au dessus de ceux définis par la conférence de consensus
de Sorrente, pour de tels niveaux de surcharge. Leur CST est initialement
modérément augmenté et se normalise rapidement. P8 présente un BMI à plus de
28 et P18 à 33 kg/m². Une stéatose et un trouble du métabolisme glucidique
complète dans les deux cas le tableau de cette surcharge en fer qui semble
davantage correspondre finalement à une HSD telle que décrite par l’équipe de
Rennes [16, 136, 133]. P18 est d’ailleurs le seul patient du groupe à exprimer une
cytolyse sans surcharge en fer sévère.
Parmi les patients hétérozygotes composites 2 sur 4 voient leur CST se
normaliser en premier (P22 et P23 qui présente un déficit en PK). Tous deux
présentent une surcharge et une élévation du CST, modérées, ainsi qu’un
dysmétabolisme (P22 a un BMI>25 et P23, un BMI>27kg/m² et une hypertrigly-
céridémie). P22 et P23 ont une surcharge en fer dont l’expression phénotypique est
aussi compatible avec une HSD.
La patiente C282Y hétérozygote stricte (P26) présente une évolution plutôt en
faveur d’une hémochromatose puisque la ferritine se normalise avant le CST qui
est initialement fortement augmenté, en l’absence de cytolyse.
Le fer sérique est très inconstamment élevé au cours des HCH liée à HFE (13
fois sur 20) dans notre cohorte; chez les patients C282Y homozygotes il existe une
hypersidérémie seulement 9 fois sur 15 (60%).
55
L’analyse des dossiers a permis de retrouver 8 dosages du récepteur soluble de
la transferrine (R. Sol Tf*) sur le bilan martial initial (7 patients homozygotes
C282Y : P1, P3, P7, P9, P14, P19 et P20) et 3 patient hétérozygotes composites
C282Y/H63D : P22, P23 et P25. Le R.Sol Tf* reflète l’activité synthétique du
RTf*. 75% de cette synthèse est liée à l’activité des cellules de la lignée rouge. Sa
concentration sérique est indépendante de l’âge et du sexe et n’est influencée ni
par l’inflammation ni par la cytolyse [163] ; elle augmente en cas de carence en fer
avec retentissement fonctionnel, ou en cas d’augmentation de l’activité érythro-
poïétique [151]. Cet examen présente un intérêt dans l’évaluation du stock en fer
au cours des anémies inflammatoires. Ce paramètre, qui est augmenté au cours des
situations de carence martiale [151], est abaissé dans 3 cas sur 10 seulement et
normal chez 5 autres patients dans le groupe N°1. Il est même normal chez un
patient présentant une surcharge évaluée à 14g de fer soustrait (P1) tandis qu’il est
abaissé chez une patiente dont la surcharge reste pourtant modérée (P14). Le RSol
Tf est augmenté chez P23 et P25 qui présentent tous deux une hémolyse liée à un
déficit en PK et à un syndrome thalassémique. Ces derniers sont donc susceptibles
d’aggraver les taux de ferritine du fait de l’hémolyse mais aussi l’hyperabsorption
vue l’augmentation du taux de RSol Tf plasmatique.
La ferritine érythrocytaire (F.E*) est un résidu de l’activité érythroblastique.
Cet examen est pratiqué par des laboratoires spécialisés. La ferritine érythrocytaire
est diminuée tardivement au cours de la carence en fer et n’est pas influencée par
un syndrome inflammatoire. Elle permet de distinguer une surcharge modérée liée
à une hépatopathie, au cours de laquelle elle s’élève modérément (à 5 fois la nor-
male), d’une HCH (au cours desquelles elle atteint 50 fois la normale) [163]. La
ferritine érythrocytaire a été mesurée chez 8 patients homozygotes. Elle est
systématiquement élevée (de 80 à 698 attog/c soit 3 à 29 fois la normale) mais
semble mal corrélée au degré de surcharge. Elle est inférieure à 200 attog/c dans 2
cas sur 8 (FE* à 80 et 191 attog/c), qui présentent pourtant une surcharge en fer
sévère. Inversement, quand la FE* dépasse la valeur de 200 attog/c, la surcharge
reste minime à modérée dans 3 cas sur 6.
b) Surcharges en fer secondaires.
(Groupe 2 = P28 à P37).
56
Expression phénotypique des surcharges en fer secondaires hormis les HSD* (*, **, ***=surcharge minime, modérée et
sévère ; N=normal(e), H(S)MG= hépato(spléno)mégalie ; HyperTG hypertriglycéridémie ; HTA : hypertension artérielle ; IG intolérance au
glucose ; DNID=diabète non insulino-dépendant ; n=Normal(e))
Identification
Age de
découverte
(Sexe)
Bilan initial
Ferritine/CST
(µg/l/%)
Génoptype
HFE
(C282Y ;
H63D)
Surcharge ASAT/ALAT
γGT
Echographie
abdominale
Symptômes /
complications.
Elément du
Syndrome
dysmétabolique
et/ou
alcool
P28 60 ans (M)
2573 / 108% -/- ;-/- 9.486 g
***
ALAT x2N
=>persistant
Foie
légèrement
hyperéchogène
N DNID.
P29 42 ans (M)
1110 / 63% -/-,+/-
2.898g
CHF:200µmol/g
** à ***
IHF : 4.65.
N Non Faite Palpitations 26.54.
P30 40 ans (M)
1590 / 102% ? CHF:350µmol/g
IHF 8.54 ALATx2N HSMG Asthénie N
P31 59 ans (M)
1840 / 89% -/- ; -/-
CHF>350µmol/g.
***
IHF >5.74.
N Non faite Asthénie BMI ?
P32 86 ans (F)
1040 / 57% ? 1.425 g
* N Non faite N HTA
57
Expression phénotypique des surcharges en fer secondaires hormis les HSD*...suite.
Identification
Age de
découverte
(Sexe)
Bilan initial
Ferritine/CST
(µg/l / %)
Génoptype
HFE Surcharge
ASAT/ALAT
γGT
Echographie
abdominale
Symptômes /
complications.
Elément du
Syndrome
dysmétabolique
et/ou
alcool
P33 43 ans (F)
581 / 35 ?
CHF 90 µmol/g
*
IHF : 2.14.
N SMG N N
P34 39 ans (F)
2090 / 17 -/- ; -/- 3.6 g
** N Non Faite N N
P35 39 ans (F)
304 / ? ? ?
ASAT et ALAT=
2 à 3xN=>
persistant
HMG
stéatose. N N
P36 73 ans (M)
1153 / 36% -/- ; +/+ 0.8g
*
Cytolyse ASAT
>ALAT
Légèrement
hyper-
échogène.
Asthénie
IG, hyperTG
BMI = 25.49
Alcool.
P37 69 ans (M)
2041 / 37% ? 1.805g
*
ASAT 260
ALAT 97
HMG gonalgie
Homocystéine
élevée
Dyslipidémie
mixte
Alcool.
58
Ce groupe, qui compose 13.7%, compte 10 patients seulement âgés de 39 à 86
ans; le sexe ratio est presque équilibré à 1.5. L’age moyen ainsi que la ferritinémie
moyenne et les écarts types ne sont pas calculés car absolument sans intérêt ni
significativité, étant donné le très faible échantillonnage du groupe en regard d’une
multitude d’étiologies rapportées. Ce groupe est fortement dominé par les causes
d’origine hématologique, dans 7 cas sur 10 (4 syndromes thalassémiques, 1 anémie
sidéroblastique du sujet âgé, 1 dysérythropoïèse d’origine indéterminée et 1 leucé-
mie aigue avec très nombreuses transfusions). Le premier fait marquant est que le
mécanisme de constitution au cours des surcharges d’origine hématologique est
rapporté à une polytransfusion une seule fois.
Chez les patients présentant un syndrome thalassémique, (P28 à P31) la
surcharge se constitue, par le seul mécanisme d’une hyperabsorption de fer liée à
l’hyperactivité érythropoïétique compensatoire comme l’indique l’hyper réticulo-
cytose et l’élévation du RSolTf*, entre 2 et 6 fois la normale (contrairement à ce
qui est observé chez les patients du groupe des surcharges en fer primitives). Ces
patients sont tous des hommes et aucun n’est originaire du Nord de l’Europe.
3 patients (P28, P30, P31), d’origine asiatique, présentent tous une surcharge
sévère (dont 2 évaluées par IRM) avec ferritine initiale très élevée (de 1590 à
2573µg/l). Ils expriment un α-thalassémie intermédiaire avec anémie (hémoglo-
bine allant de 8.8 à 10.2 g/dl) et une « hémoglobinose H » (β4). P28 présente une
cytolyse et une hémolyse qui influencent certainement la ferritinémie, tandis que la
surcharge n’est pas évaluée par IRM chez lui. P30 présente une α-thalassémie
associée à un trait « Constant Spring » et une β thalassémie composite ; une telle
association s’exprimait par une hémoglobinose H et E. P28 et P31 ont un géno-
type HFE sauvage, tandis que le génotype HFE n’est pas connu chez P30.
Le quatrième patient (P29), d’origine italienne, présente une surcharge
modérée à sévère (CHF à 200µmol/g de tissu) sur une thalassémie β0 hétéro-
zygote, avec une anémie modérée à 11.6g/dl, microcytaire, régénérative et hémo-
lytique. L’hyperabsorption est certainement potentialisée chez lui par une ellipto-
cytose associée, tandis que le génotype HFE retrouvé chez ce patient (hétéro-
zygotie H63D) ne permet pas d’expliquer seul la constitution de la surcharge. La
ferritinémie initiale est > 1000µmol/l. Le RsolTf na pas été prélevé chez ce patient.
Sur le bilan initial le CST est systématiquement augmenté chez ces 4 patients.
Il est très augmenté chez ceux qui présentent une hémoglobinose H, mais
59
contrairement à ce que nous avons observé au cours de l’HCH liée à l’homozygo-
tie C282Y, le CST peut se normaliser avant la ferritinémie au décours des saignées
malgré une surcharge majeure (P28). Chez P29 l’influence d’un dysmétabolisme
est possible (BMI à 26.5) car le CST se normalise rapidement et avant la ferritine
qui semble au dessus de ce qu’elle devrait être au vu de la surcharge (initialement
à 1110µg/l quand elle devrait être environ à 750µg/l : Cf matériel et méthodes).
La ferritine érythrocytaire (FE*) est disponible chez P28, P30 et P31 ; elle est
très augmentée, dans un ordre de valeur de 65 à 261 fois la normale soit beaucoup
plus qu’au cours des surcharges en fer primaires (de 3 à 29 fois la normale en
dehors de P25 qui présente une β-thalassémie hétérozygote associée à une
hétérozygotie composite C282Y/H63D mais que nous avons classé dans les sur-
charges en fer primitives).
Une asthénie est présente chez 2 patients sur 4 mais les arthralgies sont en
revanche absentes.
Une cytolyse modérée (prédominant sur les ALAT et < ou = à 2N) est présente
chez 2 des 4 patients thalassémiques, associée à une surcharge sévère chaque fois
et à une stéatose légère et un DNID chez P28 mais sans élévation du BMI. P29 et
P31, qui présentent respectivement des surcharges modérées à sévère et sévère,
n’expriment pourtant pas de cytolyse.
Une échographie hépatique a été réalisée chez 2 des 4 patients thalas-
sémiques. Il existe une HSMG* seulement chez l’un d’entre eux et une stéatose
légère chez l’autre associées dans les deux cas à une cytolyse.
L’αFP* est normale chez les 4 patients thalassémiques. Aucune PBH n’est
réalisée au moment de l’étude chez eux.
Il existe un DNID, uniquement chez P28, en regard d’une surcharge sévère. Ce
patient présente également une cytolyse qui ne se normalise pas avec les saignées
et une stéatose. Ce patient ne présente pas d’obésité ni de dyslipidémie ou HTA ;
Ce patient normalise le CST avant la ferritine. Il est donc difficile d’imputer chez
ce patient le rôle d’un dysmétabolisme (stéatose) dans l’expression de la maladie
(cytolyse et DNID) par rapport à celui de la surcharge en fer.
Ces patients n’ont pas eu d’évaluation cardiaque par échographie au moment
de l’étude alors que cette complication est responsable de la plupart des décès au
cours des thalassémies majeures; seul P29 exprime des palpitations semblant plus
en rapport avec l’anémie (tandis que la surcharge est limite modérée à sévère).
60
Chez les autres patients présentant une surcharge secondaire d’origine
hématologique, on compte 3 femmes âgées de 39 à 86 ans (P32, P33 et P34). Une
hyperabsorption est le mécanisme de constitution de la surcharge chez 2 d’entre
elles (anémie sidéroblastique, dysérythropoièse non étiquetée). P32 souffre d’une
anémie sidéroblastique acquise du sujet âgé. P33 présente une dysérythropoièse
non étiquetée avec hyper-réticulocytose chronique et augmentation du RSolTf,
ayant une traduction clinique au cours d’accès érythroblastopéniques rares. P34
présente une surcharge modérée, d’origine iatrogène, liée à de nombreuses trans-
fusions (n=36) dans le cadre d’une chimiothérapie pour leucémie aigue myélo-
blastique (LAM-2).
Les taux de ferritine paraissent élevés au regard du caractère minime à modéré
de ces surcharges chez P32 et P34. Chez P34, la chimiothérapie et un syndrome
inflammatoire (d’autant que le CST est abaissé sur le bilan initial à 17%) sont
susceptibles d’influencer ce paramètre. Chez P32, la présence d’un dysméta-
bolisme (HTA traitée) est le seul paramètre retrouvé qui pourrait également
influencer la ferritinémie. La patiente ayant une dysérythropoièse (P33) présente
une hyperferritinémie modérée qui semble adaptée au degré minime de surcharge.
L’évolution des paramètres biologiques du fer, disponible chez les 3 patientes
montre une normalisation du CST avant la ferritine.
Une asthénie est présente chez deux patientes ; aucune ne souffre d’arthral-
gies en revanche.
Aucune cytolyse n’est observée chez les 3 patientes ; une échographie
hépatique n’est réalisée que chez deux patientes et est normale dans les deux cas.
L’αFP* est normale dans tous les cas. Il n’existe pas de cas de diabète ou
d’intolérance au glucose. Une échographie cardiaque n’est réalisée que chez P32
(anémie sidéroblastique avec surcharge minime) et est normale.
Trois patients présentent une surcharge en rapport avec une cause
hépatique :
-Un cas de PCT* sporadique est relevé en association avec une hépatite C
(P35). L’hyperferritinémie constatée, et qui a conduit à la réalisation des saignées,
est modérée, à 300µmol/g. Le CST initial et le génotype HFE ne sont pas dispo-
nibles dans le dossier de cette patiente. La surcharge n’est pas évaluée car la
ferritine n’est pas normalisée au moment de l’étude (après 5 saignées de 300ml).
61
Cette difficulté à normaliser la ferritine peut être en rapport chez cette patiente
avec une aggravation de la cytolyse (>3N), au cours du programme de saignées.
Une stéatose et une HMG sont également présentes à l’échographie. L’évaluation
biopsique de l’activité virale ou de la fibrose n’a pas été réalisée au moment de
l’interprétation de l’étude.
-Deux patients de sexe masculin présentent une hépatopathie éthylique avec
surcharge minime (estimée sur la quantité de fer soustrait) associée à une
hyperferritinémie qui paraît toutefois disproportionnée (ferritinémie à 1153 et
2041µg/l). L’absence de réalisation d’une IRM ne permet pas de garantir la
présence d’une surcharge chez ces deux patients, compte tenu de l’existence d’une
forte consommation d’alcool, d’une cytolyse ou d’un dysmétabolisme qui peuvent
tous les trois influencer la ferritinémie. L’homozygotie H63D+/+ chez P37 ne
semble pas jouer un grand rôle dans l’hyperferritinémie constatée puisque la
surcharge calculée n’est pas significative et n’excède pas 0.8g de fer soustrait. Ces
deux patients n’ont pas bénéficié de PBH, mais le tableau est davantage évocateur
d’une hépatopathie éthylique que d’une HSD. L’indication aux saignées n’est donc
pas claire chez ces patients.
P36 présente ainsi une cytolyse modérée prédominant sur les ASAT associée à
une élévation des γGT et une hypertriglycéridémie (dont l’évolution semble suivre
rétrospectivement celle des γGT de la ferritine et de la consommation d’alcool).
L’échographie hépatique montre la présence d’une stéatose sans HMG. Chez ce
patient, l’hyperferritinémie est également à confronter à un dysmétabolisme
(hypertriglycéridémie, intolérance au glucose et BMI >à 25) et à l’expression im-
portante de complications vasculaires (AOMI*, coronaropathie traitée par pontage
aortico-coronarien). Le CST, initialement normal augmente parfois modérément.
P37 présente une cytolyse importante, à plus de 5 fois la normale,
prédominant sur les ASAT, une élévation des γGT à mettre en relation avec la
consommation avouée d’alcool et une cholestase anictérique. Une HMG est aussi
présente sans stéatose. La participation d’un dysmétabolisme au tableau est
possible (dyslipidémie traitée par statine et hyper-homocystéinémie).
c) Hépatosidéroses dysmétaboliques.
(Groupe 3 = P38 à P73).
62
Expression phénotypique des HSD*. (*, **, ***=surcharge minime, modérée et sévère ; N=normal, HTA=hypertension artérielle;
H(S)MG=hépato(spléno)mégalie ; DNID=diabète non insulino-dépendant ; HyperTG =hypertriglycéridémie; IG=Intolérance au glucose.)
Identification
Age de
découverte
(Sexe)
Bilan initial
Ferritine/CST
(µg/l/%)
Génoptype
HFE
(C282Y;
H63D)
Surcharge ASAT/ALAT
γGT
Echo-
graphie
abdominale
Symptômes
complications.
Elément
du Syndrome
métabolique
et/ou alcool
P38 38 ans (M)
840 / 29% -/- ;-/- 1.176g
*
ALATx2N
=> N Non faite Asthénie BMI : 25.95.
P 39 59ans (M)
759 / 28% ? ? N Stéatose Asthénie HTA
BMI : 36.22.
P40 68 ans (F)
784 / 38% ? 0.96 g* ALAT<2N=>N
γGT<2N=>N Non faite Palpitations
HTA, IG
BMI : 30
P41 53 ans(F)
328 / 29% ? 1.044 g* ALAT<2N=>N
γGT<2N=>N
Stéatose
HMG
thyroïdectomie pour
cancer, palpitations,
asthénie
IG, HTA, hyperTG
BMI : 30.85
P42 60 ans(M)
989 / 36% ?
CHF
280µmol/g
***
IHF 4.59
N Stéatose
HMG N
Dyslipidémie
Mixte, HTA
BMI : 30.46
P43 58 ans (M)
1051 / 29% ? 1.782g* ALAT<2N=>N
γGT<2N=>persistant Non faite Gonalgies
IG, HTA, hyperTG
BMI : 29.45
P44 65 ans(F)
361 / 32% ? 0.588g* ASAT ALAT et γGT
<2N=>persistant. Non faite
Arthralgies
(pouce, IPP).
HTA
BMI : 25
P45 56 ans (M)
635 / 30% ? 1.417g* ALAT 2N
=>persistant N N BMI : 30.93
P46 50 ans (M)
1280 / 19% ? 1.66g* ASAT1.5N=>N
ALAT 3N=>persistant
Stéatose
HMG Asthénie, gonalgie
HyperTG, DNID
BMI : 32.16
P47 48 ans (M)
471 / 46% ? 2.44g** ALAT et γGT
<2N=>persistant Non faite N
IG, HTA
BMI : 32.49
63
Identification
Age de
découverte
(Sexe)
Bilan initial
Ferritine/CST
(µg/l/%)
Génoptype
HFE
(C282Y ;
H63D)
Surcharge ASAT/ALAT
γGT
Echographie
abdominale
Symptômes /
complications.
Elément du
Syndrome
métabolique
et/ou alcool
P48 58 ans (M)
649 / 37% ? 1.12g* ALAT <2N=>N Stéatose
HMG
Arthralgies (épaule
MCP, genoux),
asthénie
HTA
BMI : 29.75
P49 64 ans (M)
1100 / 55% -/- ; -/- CHF 60µmol/g*
IHF 0.935
ALAT et
γGT<2N N ?
hypercholestérolémie
HTA BMI ?
P50 56 ans (M)
655 / 47% -/- ; ? CHF100µmol/g**
IHF 1.69 N Non faite Asthénie
BMI : 25.24
Sportif++
P51 71 ans (M)
1480 / 51% -/- ; -/-
CHF 250 µmol/g
***
IHF 3.47
N
1 nodule
hyper-
échogène
Asthénie HTA
BMI : 28.67
P52 64 ans (M)
1240 / 53% -/- ; -/- CHF:180µmol/g**
IHF 2.77 N
Stéatose
HMG N
HyperTG, IG
BMI : 29
P53 69 ans (M)
807 / 21% -/- ; -/- 1.62g* γGT 2N=>N N N
Dyslipidémie,
DNID, HTA
BMI : 29.43
P54 50 ans (M)
950 / 59% -/- ; -/- CHF: 80µmol/g*
IHF 1.6 ALAT<2N=>N Stéatose N
IG, dyslipidémie
BMI : 27.45
P55 53 ans (M)
748 / 13% -/- ; -/- 1.845g* ALAT<2N
=>persistant Non faite
Arthralgies (IPP)
Asthénie
HyperTG
BMI : 33.63
P56 58 ans (M)
1147 / 44% -/- ; -/- 2.058g** N N Asthénie Dyslipidémie, IG,
HTA, BMI : 34.75
64
Identification
Age de
découverte
(Sexe)
Bilan initial
Ferritine/CST
(µg/l/%)
Génotype
HFE
(C282Y ;
H63D)
Surcharge ASAT/ALAT
γGT
Echo-
graphie
abdominale
Symptômes /
complications.
Elément du
Syndrome
métabolique
et/ou alcool
P57 67 ans (M)
643 / 42% -/- ; -/- 3g** N N Asthénie BMI : 25.05
P58 70 ans (F)
1050 / 30% -/- ; -/- ? N Stéatose discrète N HTA, hyperTG.
P59 55ans (M)
581 / 36% +/- ;-/- 1.892 g* N N Asthénie
DNID (régime
seul), HTA
BMI : 35.29
P60 44 ans (M)
1660 / 76% +/- ;-/- 3.23g**
ASAT, ALAT
et γGT <2N
=>persistant
Non faite Arthralgies (poignets)
Asthénie
DNID, HTA,
alcool (2 à 3
verres/j)
BMI : 29.45
P61 51 ans (F)
460 / 40% +/- ;-/- 0.72g*
CHF: 80µmol/g
IHF1.57
N N N HTA
P62 68 ans (M)
1080 / 65% +/- ;-/- CHF:
160µmol/g**
IHF 2.3
ALAT<2N
=>persistant
Stéatose
HMG Asthénie
HTA, hyperTG,
DNID
P63 48 ans (M)
692 / 21% +/- ;-/- CHF:
140µmol/g**
IHF 2.86
N Stéatose N IG
BMI ?
P64 60 ans (M)
936 / 30% +/- ;-/- 1.4g.
CHF: 70µmol/g*
IHF 1.17
N Non faite
Hypothyroïdie,
Palpitations,
Gonalgies, asthénie
HTA, hyperTG
P65 74 ans (M)
799 / 41% +/- ;-/- ? N N N IG
65
Identification
Age de
découverte
(Sexe)
Bilan initial
Ferritine
/CST
(µg/l/%)
Génoptype
HFE
(C282Y ;
H63D)
Surcharge ASAT/ALAT
γGT
Echographie
abdominale
Symptômes /
complications.
Elément du
Syndrome
métabolique
et/ou alcool
P66 50 ans (M)
1350 / 36% -/- ;+/-
S65C+/-
CHF120µmol/g**
IHF 2.4 N stéatose Asthénie
HyperTG, IG
Cardiopathie
ischémique
Alcool : 2
verres/jour
BMI : 27.91
P67 37ans (M)
3039 / 58% -/- ;+/- 2g** ALAT et γGT<2N
=> N N N BMI : 38
P68 58 ans (M)
912 / 30% -/- ;+/- 2.234g** N Non faite
Asthénie,
arthralgies
(épaule)
HyperTG
BMI : 30.11
P69 39 ans (M)
837 / 39% -/- ;+/+ 1.656g* N Stéatose
Asthénie,
arthralgies
(MCP, genoux)
HyperTG, HTA
BMI : 25.71
P70 59 ans (F)
1020 / 32% -/- ;+/+ 1.15g* N Non faite N
HyperTG
HDL-cholestérol :
diminué
P71 60 ans (M)
1200 / 73%
-/- ;+/+
R92Q
TNFα
3.108 g**
CHF : 139µmol/g
IHF 2.3
ASAT, ALAT, γGT
<2N =>persistant
Non faite
PBH : stéatose
macrovacuolaire
N HyperTG, HTA
BMI : 27.16
P72 56 ans (M)
1750 / 46% -/- ;+/+
CHF : 60µmol/g*
IHF 1.05
1.89g
ASATx2N=>N
ALATx3N=>persistant Non faite
Dyslipidémie
mixte, IG
BMI: 26.6
P73 59 ans (F)
1300 /63% -/- ;+/+ ? ? Stéatose
HMG Asthénie
HTA, DNID
BMI : 37.89.
66
Ce groupe est composé de 36 patients, soit 49.3% de la cohorte, avec un sexe-
ratio de 4.1. L’âge et les taux de ferritine initiale sont détaillés ci-après.
Dans les deux sexes (n=36)
Chez les hommes (n=29)
Chez les femmes (n=7)
Age moyen +/- IC=
(écart-type)
57 +/- 3ans.
(9 ans)
56 +/- 3ans.
(10 ans)
61 +/- 5 ans.
(7 ans)
Age médian 58 ans. 58 ans. 59 ans.
Ferritine moyenne
+/- IC
(écart-type)
988 +/- 159µg/l.
(488µg/l)
1044 +/- 182 µg/l.
(500µg/l)
758 +/-284 µg/l.
(383µg/l)
Ferritine médiane 924µg/l 936 µg/l 784 µg/l
La surcharge a pu être classée de minime à sévère dans 32 cas sur 36: 18 cas
de surcharge minime, 12 cas de surcharge modérée et 2 cas de surcharge sévère.
Seulement 13 IRM ont été réalisée dans le but de quantifier la surcharge. La
surcharge a été évaluée chez les 18 autres patients par mesure de la quantité de fer
soustrait après obtention d’une ferritinémie <150µg/l. La mise en évidence d’une
surcharge est donc manquante chez 23 patients du groupe et l’indication des
saignées n’est donc pas formellement posée.
Chez les hommes:13 patients sur 27 présentent une surcharge minime (48.1%),
12 ont une surcharge modérée (44.4%) et 2 ont une surcharge sévère (7.4%),
avérée à l’IRM (CHF>200µmol/l). Chez les femmes, 5 patientes ont achevé leur
programme de saignées au moment de l’étude : toutes présentent une surcharge
minime. Une autre patiente n’a pas atteint l’état de désaturation après soustraction
de 2.56g (ferritine encore à 800µg/l et CST à 44%).
Le statut génotypique est inconnu chez 10 patients rattachés à ce groupe. Un
génotypage a été réalisé chez 26 patients, parfois sans notion d’élévation du CST*
(15 de ces patients n’ont pas d’élévation du CST* sur le bilan initial prélevé dans
le service). Parmi ces 26 patients, 10 sont exempts des deux principales mutations
du gène HFE (C282Y-/- et H63D-/-). Un autre est exempt de la mutation C282Y
mais n’a pas été testé pour la mutation H63D. 7 patients sont C282Y+/- sans
mutation H63D. 3 patients sont H63D+/- stricts, et l’un d’entre eux présente une
hétérozygotie composite H63D/S65C. 5 autres sont H63D homozygotes.
67
Le CST est supérieur à 45% sur le bilan initial chez 12 patients sur 36 (11
hommes pour une femme), soit le tiers de l’effectif du groupe. Chez ces patients,
la surcharge est minime 3 fois sur 11, modérée 7 fois sur 11 et sévère une seule
fois. L’évolution des paramètres du fer montre que le CST se normalise toujours
avant la ferritinémie et que cette normalisation est le plus souvent rapide. La
normalisation de la ferritine est parfois difficile et son évolution peut alors se faire
en dent de scie au fur et à mesure des saignées, ce qui témoigne de l’influence
d’un autre paramètre sur la ferritine (probablement l’intensité du dysmétabolisme).
Seule P73 présente une évolution capricieuse du CST qui peut réaugmenter de
façon importante en cours de saignées et laisse penser que l’homozygotie H63D
participe, chez elle, au phénotype biologique observé.
Le BMI est calculé chez 34 patients ; il est <25 dans 6 cas (17.6%), entre 25 et
30 chez 15 patients (44.1%) et >30 chez 13 autres (38.2%).
Au moins un élément du syndrome métabolique est présent chez tous les
patients inclus dans ce groupe. Par ordre de fréquence décroissant, on observe une
élévation du BMI (> 25 dans 82.4% des cas), une HTA (58.3%), une dyslipidémie
dans 52.8% des cas (avec hyper triglycéridémie isolée souvent), un trouble du
métabolisme glucidique dans 47.2% des cas (intolérance au glucose ou diabète non
insulino-dépendant). La moitié des patients du groupe présente 3 ou plus de ces
éléments. En incluant la stéatose dans les critères diagnostiques du syndrome
métabolique on obtient même un taux de 58.3% de cas qui présentent au moins
trois éléments dysmétaboliques.
Le symptôme le plus fréquent est l’asthénie, présente dans la moitié des cas.
Les arthralgies touchent 9 patients sur 36 (25%) et les articulations les plus
souvent touchées sont, comme au cours des surcharges en fer primaires, les
genoux (chez 5 patients sur 9). Viennent ensuite les articulations IPP* et MCP* (4
patients sur 9 en souffrent), les épaules (2/9) et les poignets (1/9).
Un bilan thyroïdien est disponible chez 11 patients. 9 bilans sont normaux.
Un cas d’hypothyroïdie post-chirurgicale (P41) dans le cadre d’un cancer de la
thyroïde est noté. Un autre patient présente un bilan qui met en évidence une
hypothyroïdie modérée, non bilantée sur le plan étiologique et qui est associée à
une surcharge minime (CHF à 70µmol/g à l’IRM).
68
Une HMG est présente dans plus de 30% des cas où l’échographie est
disponible et dans près de 20% des cas au moins sur le groupe; elle est
systématiquement associée à une stéatose (comme c’était le cas de la quasi-totalité
des patients hépatomégales du groupe des surcharges en fer primitives).
Une stéatose est présente dans au moins 38.9% des cas (13 cas avéré par
échographie et un cas de stéatose macrovacuolaire >10% du parenchyme, affirmée
sur PBH) et dans 58.3% des cas rapportés au nombre de fois où l’échographie ou
la biopsie sont disponibles.
Une cytolyse, <2 fois la normale (à 3 fois la normale une seule fois) et
prédominant toujours sur les ALAT, est présente chez 17 patients sur 35 (48.6%).
L’évolution après saignées, du bilan biologique hépatique est disponible chez 16
patients sur 17. La cytolyse est complètement réversible dans 43.8% des cas. Il
existe une élévation modérée des γGT dans 35% des cas ; cette élévation est
associée à une cytolyse 11 fois sur 12.
L’αFP est disponible chez 33 patients, elle est normale chaque fois et à la
limite supérieure de la normale dans un cas seulement (P71).
L’expression hépatique de la maladie (HMG et/ou cytolyse et/ou augmen-
tation des γGT) parait donc fréquente car elle concerne 58.33% des patients du
groupe. Cette expression semble influencée par l’intensité du syndrome métabo-
lique et par la présence d’une stéatose
Ainsi, lorsqu’il existe 3 éléments ou plus du syndrome métabolique (sans
inclure la stéatose comme l’un de ces éléments), une stéatose est associée dans au
moins 55.6% des cas (10 fois sur 18) et dans 76.9% des cas où l’information est
disponible (10 fois sur 13). A l’inverse, la stéatose n’est présente que chez 22.2%
des patients qui présentent moins de 3 éléments du syndrome métabolique (4 fois
sur 18) et chez 36.4% d’entre eux où l’information est disponible (4 patients sur
11). Une HMG, une cytolyse et ou une élévation des γGT, est/ sont présentes chez
14 patients sur 18 (77.8% des cas) qui ont plus de 3 éléments dysmétaboliques,
contre 7 patients sur 18, seulement, qui en présentent moins de 3.
L’expression hépatique de la maladie est également plus fréquente lorsqu’il
existe une stéatose. Une HMG et/ou cytolyse et/ou augmentation des γGT est/sont
présente(s) chez 9 des 14 patients stéatosiques contre 4 des 10 patients non stéato-
siques. Enfin, quand il existe au moins 3 éléments dysmétaboliques et une stéatose
il existe une expression hépatique de la maladie dans 8 cas sur 10.
69
Expression hépatique au cours de l’HSD en fonction de la présence d’une
stéatose et du nombre d’éléments du syndrome métabolique (parmi un
BMI>25, une HTA, une dyslipidémie, une intolérance au glucose et un
diabète) et expression d’une stéatose en fonction du nombre d’élément
dysmétabolique.
Présence d’une HMG*
et/ou d’une cytolyse et/ou
d’une élévation des γGT
N=21
Présence d’une
Stéatose
N=14
Stéatose
N=14
9 patients sur 14
(64.4%)
Absence de stéatose
N=10
4 patients sur 10
(40%)
Présence de 3
éléments
dysmétaboliques ou
plus
N=18
14 patients sur 18
(77.8%)
Stéatose chez 10
patients sur 13 chez
lesquels l’échographie
ou la biopsie est
disponible (76.9%)
Présence de moins
de 3 éléments
dysmétaboliques
N=18
7 patients sur 18
(38.9%)
Stéatose chez 4 patients
sur 11 chez lesquels
l’échographie ou la
biopsie est disponible
(36.4%)
Présence d’au moins
3 éléments
dysmétaboliques et
d’une stéatose
N=10
8 patients sur 10
(80%)
70
Il est difficile de dire si les génotypes HFE sauvage sont associés à des
tableaux moins pénétrants au niveau des paramètres du fer. Les ferritinémies et le
nombre de patients présentant un CST> 45% paraissent ainsi plus élevés chez les
patients H63D+/+ que chez les patients ayant un génotype HFE sauvage mais eux-
mêmes semblent plus atteints que les patients C282Y+/-. La surcharge est minime
à modérée chez tous ces patients sauf un qui présente un génotype HFE sauvage
avec surcharge sévère. Le génotype H63D+/+, semble proportionnellement
beaucoup plus représenté dans cette cohorte que dans la population générale par
rapport au génotype C282Y+/- même si, dans cette cohorte, l’hétérozygotie
C282Y+/- stricte reste plus fréquente que l’homozygotie H63D.
Le fer sérique est normal dans 81.2 % des cas. Il est modérément élevé
uniquement chez 5 patients sur 32 ; il est normal chez P51 qui présente pourtant
une surcharge sévère à l’IRM. Il est même abaissé chez un patient qui présente
aussi un CST diminué : cela laisse présumer d’une part inflammatoire relativement
importante dans la constitution de l’hyperferritinémie dysmétabolique chez ce
patient (qui ne présente pas d’autre argument biologique en faveur d’un syndrome
inflammatoire : numération formule sanguine, orosomucoide et électrophorèse des
protides normaux).
La FE* est relevée chez 23 patients ; elle est normale dans 5 cas, tous
présentant une surcharge minime; elle est discrètement augmentée (< 3fois la
normale) dans la moitié des cas (11 patients), tous présentant une surcharge
minime à modérée. Elle peut atteindre des taux plus élevés, de 5 à 7 fois la
normale (comme on peut le voir au cours de certaines hépatopathies [163]), chez 4
patients (P51, P60, P66, P71). Parmi ces patients, 3 présentent un génotype HFE
muté (P60, P66, P71) et le quatrième (P51) présente une surcharge sévère (CHF :
250µmol/g) en l’absence de mutation HFE ou d’autre explication à cette
surcharge. P71, d’origine basque, présente une homozygotie H63D associée au
polymorphisme R92Q de la voie du TNFα (décrit comme un facteur possible
d’athéromatose [159]) ; la surcharge reste modérée chez ce patient qui présente
une cytolyse non résolutive et une augmentation minime de l’αFP. Un autre patient
(P66), d’origine portugaise présente une hétérozygotie composite H63D/S65C et
une consommation régulière d’alcool. Ce patient présente également une
expression dysmétabolique importante (intolérance au glucose, hypertriglycéridé-
71
mie, BMI>27, stéatose) compliquée d’une cardiopathie ischémique. P60 présente
également un génotype HFE muté (C282Y+/-) et une consommation régulière
d’alcool estimée à 20g d’alcool/jour ; ce patient présente aussi un dysmétabolisme
fort (BMI à 29, HTA) compliqué d’un diabète non insulinodépendant.
Chez trois patients enfin (P38, P72 et P73), la FE* atteint des taux très élevés
tels qu’observés dans notre groupe de surcharges en fer primitives (de 10 à 24 fois
la normale). P72 et P73, tous deux d’origine portugaise, présentent aussi une
homozygotie H63D. P72 affiche pourtant une surcharge minime d’après l’IRM
ainsi qu’une élévation modérée du CST qui évolue rapidement de façon favorable.
La ferritine érythrocytaire pourrait surtout être influencée par une dysérythropoièse
sous jacente chez lui (Hb à 16g/dl et RsolTf élevé avec hyper-réticulocytose à
132.000/mm3). P38 présente, quant à lui, un trait thalassémique sur une α-thalas-
sémie hétérozygote (sans anémie ni hémolyse ou hyperréticulocytose mais avec
une élévation modérée du RsolTf), qui ne semble pas pouvoir expliquer à lui seul
la surcharge en fer, qui reste minime. Le fait que le CST n’est jamais élevé chez ce
patient et la présence d’un BMI à 26 font classer ce patient dans le groupe des
HSD. P73 est une patiente qui présente une surcharge au moins modérée (ferritine
à 806µmol/l après 2.56g de fer soustrait) avec une ferritine qui s’abaisse difficile-
ment et un CST plus long à normaliser que chez les autres patients du groupe.
L’influence de l’homozygotie H63D est donc possible chez cette patiente qui
présente une surcharge mixte probable (dysmétabolique et hémochromatosique).
Une élévation notable de la FE* ne semble donc forcément pas associée à des
surcharges importantes au sein du groupe 3, comme chez P51. Une telle
observation semble fréquemment associée à des états HFE mutés non C282Y+/+
(P60, P66, P71, P72, P73), ou à la présence de facteurs de comorbidité (alcool
chez P60 et P66, polymorphisme de la voie du TNFα chez P71) susceptible
d’influencer l’évolution du dysmétabolisme vers des complications (DNID,
cardiopathie ischémique respectivement chez P60 et P66) ou d’aggraver l’atteinte
hépatique (P71). Les taux les plus importants sont associés à un trouble
hématologique, susceptible d’influencer ce paramètre somme cela est le cas dans
le groupe N°2 (P38 et P72), ou bien à un état de surcharge mixte soumis à
l’influence de l’homozygotie H63D +/+ (P73 +/- P72).
Le RSol Tf a été réalisé chez 10 patients avant saignées. Ce paramètre n’est
jamais abaissé au cours de l’HSD, contrairement à ce que nous avons inconstam-
72
ment observé au cours des surcharges en fer primitives ; cette variable biologique
est discrètement augmentée chez deux patients (P38 et P72) qui présentent une
augmentation importante de la ferritine éryhtrocytaire en rapport avec une
pathologie hématologique sous jacente comme nous venons de le voir.
VI.2. 3 CIRCONSTANCES DE DECOUVERTE DES
SURCHARGES EN FER.
Dans 2/3 des cas, le bilan martial initial, conduisant à l’évocation d’une sur-
charge en fer, est réalisé selon 3 motivations médicales
-un bilan martial est prescrit dans 35% des cas à titre systématique, quasi
exclusivement par un médecin généraliste (dans 25 cas sur 26), sans argument
médical pour la recherche d’une surcharge ou d’une carence en fer ;
-une asthénie conduit à la prescription d’un bilan martial dans près de 18%
des cas dans notre cohorte et là encore, le médecin généraliste est le plus souvent
le prescripteur de ce bilan initial (12 cas sur 13) ;
-un dépistage familial motive la prescription du bilan dans près de 14% des
cas, toujours prescrit à l’initiative du médecin généraliste.
Le tiers des patients restant se voit prescrire un bilan martial devant des
situations diverses. La recherche ciblée d’une surcharge en fer constitue 19% des
prescriptions du bilan martial ; une surcharge est ainsi recherchée devant des
symptômes évocateurs (arthralgies, diabète) ou face à des arguments biologiques
évocateurs (cytolyse ou pseudo-polyglobulie) ou encore en tant que complication
ou état associé à une maladie (dysérythropoièse, transfusions au cours d’une
leucémie, bilan d’une PCT). Une cytolyse conduit à la prescription d’un bilan
martial dans 8% des cas (2 fois sur 3 par un hépato-gastroentérologue), des
arthralgies dans 4% (bilan prescrit 2 fois sur 3 par un spécialiste : un rhumatologue
et un généticien) et un diabète dans un peu plus de 1% (par un médecin
généraliste). A l’inverse, 8% des prescriptions font suite à l’évocation ou au
dépistage d’une carence en fer (anémie, chute de cheveux, bilan au cours d’une
grossesse, tachycardie, malaise, réévaluation du statut martial avec antécédent de
métrorragies).
73
Motivation médicale faisant réaliser le bilan martial inaugural.
Groupe 1 Surcharges primitives
Groupe 2 Surcharges secondaires
Groupe 3 HSD*
Total
Bilan systématique
7 (25.9%) 2 (20%) 17 (47.2 %) 26 (35.6%)
Asthénie 6 (22.2%) 7 (19.4%) 13 (17.8%)
Dépistage familial
8 (29.6%) 2 (5.6%) 10 (13.7%)
Cytolyse 1 (10%) 5 (13.9%). 6 (8.2%)
Arthralgies 2 (7.4%) 1 (2.8%) 3 (4.1%)
Diabète inaugural 1 (3.7%) 1 (1.4%)
Anémie 1 3 (30%) 4 (5.5%)
Bilan d'une grossesse.
1 1 (1.4%)
Antécédents de
metrorragie 1 1 (1.4%)
Malaise 1 1 (1.4%)
Tachycardie 1 1 (1.4%)
Programme
transfusionnel
(chimiothérapie)
1 1 (1.4%)
Surveillance
d’une
dysérythropoièse
1 1 (1.4%)
Pseudo-
polyglobulie 1 1 (1.4%)
Prurit 1 1 (1.4%)
Chute de cheveux 1 1 (1.4%)
Bilan d’une PCT* 1 1 (1.4%)
Prise de poids 1 1 (1.4%)
Talalgies / épines
calcanéennes 2 (5.6%) 2 (2.7%)
Total n=27 n=10 n=36 n=73
74
La composition du bilan martial initial est disponible chez 57 patients sur 73.
Prescriptions biologiques exécutées.
Groupe 1 n (%)
Surcharges primitives
Groupe 2 n (%)
Surcharges secondaires
Groupe 3 n (%) HSD*
Total n (%).
Ferritine isolée
8 (38.1%) 3 (50%) 15 (50%) 26 (45,6%)
Fer sérique isolé
1 (4.8%) 1 (17%) 1 (3.3%) 3 (5.3%)
Fer sérique + ferritine
4 (19%) 0 1 (3.3%) 5 (8.8%)
Fer sérique + CST*
1 (4.8%) 0 1 (3.3%) 2 (3.5%)
Ferritine + CST*
5 (23.8%) 2 (33%) 12 (40%) 19 (33.3%)
CST isolé 2 (9.5%) 0 0 2 (3.5%)
Total des bilans disponibles
21 6 30 57 (100%)
Bilans comprenant une ferritine
17 (81%) 5 (83.3%) 28 (93.3%) 50 (87.7%)
Une ferritine est prescrite isolément dans 45% des cas, en association avec
un CST dans 1/3 des cas, un fer sérique est prescrit en association à un CST dans
3.5% des cas et un CST est isolé dans 3.5% des cas. Le fer sérique seul est prescrit
initialement dans 5% des cas, ou en association à la ferritine dans près de 9% des
cas. La ferritine est donc l’examen qui fait le plus souvent partie du bilan initial
(dans 87.7 % des cas) devant le CST (dans 31.5% des cas) et le fer sérique (13.7%
des cas).
Le médecin généraliste est identifié comme le prescripteur majoritaire du bilan
initial ayant conduit au diagnostic de surcharge en fer (dans 78% des cas).
Les médecins spécialistes prescrivent un bilan martial essentiellement dans le
cadre de la recherche ciblée d’une surcharge (cytolyse, arthralgies, bilan d’une
75
PCT, surveillance au cours décours de transfusions multiples, surveillance d’une
dysérythropoièse). Le bilan initial est prescrit par les spécialistes à titre
systématique 2 fois sur 16, une fois par un rééducateur spécialisé dans les suites
d’un AVC* hémorragique, une autre fois par un médecin du travail. Enfin, la
recherche d’une carence en fer indiquait le bilan dans 2 cas, dans le respect des
recommandations de l’ANDEM (Cf. Supplément N°2) (bilan d’une grossesse
prescrit par un gynécologue, et bilan d’une anémie microcytaire prescrit par un
médecin interniste).
a) circonstances de découverte des surcharges en fer primaires.
Le dépistage familial est la principale motivation qui conduit à la réalisation du
bilan martial initial dans le groupe 1 (chez 8 patients, soient dans 29.6% des cas).
Le bilan est prescrit à titre systématique dans 25.9% des cas et motivé par une
asthénie dans 22.2% des cas. Le bilan initial est prescrit par un médecin
généraliste dans 81.5% des cas (Cf. tableau suivant).
Circonstances de découverte des surcharges en fer primaires. (MG : Médecin généraliste).
Identification Bilan martial
initial
Prescripteur du bilan
martial initial.
Motif de prescription du bilan martial initial
P1 Ferritine Médecin
rééducateur
Bilan systématique au
décours d’un AVC*
P2 Ferritne+CST MG Asthénie
P3 CST MG Dépistage familial.
P4 Ferritine MG Asthénie
P5 Ferritine MG Asthénie
P6 Ferritine + fer
sérique. MG Dépistage familial.
P7 ? MG Bilan systématique
P8 Ferritine + fer
sérique. MG Bilan Systématique
P9 CST MG Asthénie
P10 Ferritine Interniste PseudoPolyglobulie
P11 Fer serique MG Bilan systématique
P12 Ferritine MG Dépistage familial
P13 Ferritine + fer
sérique MG Dépistage familial
76
Le dépistage familial est entièrement le fait de l’activité du médecin
généraliste dans 100% des cas. La composition du bilan martial initial est
disponible 6 fois sur 8 : les pratiques semblent différentes d’un médecin à l’autre :
un CST est prescrit seul une fois, une ferritine est associée deux fois au fer sérique
sur le bilan initial et une ferritine est isolée deux fois. 2 patients supplémentaires,
mais issus du groupe 3 de notre cohorte, se sont vus prescrire un bilan martial dans
le cadre d’un dépistage familial : tous deux présentaient une ferritine isolée sur ce
bilan initial. Tous les patients ayant bénéficié d’un génotypage, ont eu un bilan
martial auparavant.
Le bilan initial systématique est prescrit 5 fois sur 7 par un médecin
généraliste. Les pratiques de prescription sont, là encore, assez différentes d’un
médecin à l’autre, puisque une ferritine est prescrite isolément chez 2 patients, en
association avec un fer sérique une autre fois, ou couplée à un CST une autre fois.
Un fer sérique est aussi prescrit une fois isolément à titre systématique.
Le bilan martial initial réalisé dans le cadre d’une asthénie est une ferritinémie
dans 2 cas, ou un CST isolé une fois ou une association des deux dans 2 cas.
P14 Ferritine + fer
sérique MG
Vertiges avec
antécédent de
métrorragie
P15 ? MG Dépistage familial
P16 ? MG Dépistage familial et
diabète inaugural
P17 Ferritine MG Malaise
P18 Ferritine MG Dépistage familial
P19 Ferritine MG Bilan systématique
P20
Ferritine + CST
MG Asthénie
Polyarthralgies
P21 ? Médecin
du travail Bilan systématique
P22 Ferritine + CST MG Bilan systématique
P23 ? MG Asthénie
P24 Ferritine + CST Rhumatologue Polyarthralgies
P25 Ferritine + CST MG Bilan d’une anémie
P26 Fer sérique +
CST Gynécologue Bilan d’une grosssesse
P27 ? MG Dépistage familial
77
Des arthralgies conduisent rarement à la réalisation d’un bilan martial,
seulement chez deux patients du groupe 1 tandis qu’une cytolyse n’est
étonnamment jamais à l’origine d’une telle prescription biologique.
b) circonstances de découverte des surcharges en fer secondaires.
Le pourcentage de médecins spécialistes prescripteurs semble plus élevé que
dans le groupe 1 (5 spécialistes pour 5 généralistes). Le motif conduisant à la pres-
cription du bilan martial est le plus fréquemment la découverte d’une anémie ou
un symptôme s’y rapportant (tachycardie) dans 4 cas sur 10, dans le cadre d’un
syndrome thalassémique à chaque fois. Un bilan systématique est réalisé 2 fois sur
10 seulement. La recherche spécifique d’une surcharge motive le bilan dans 4 cas
sur 10 ; il est lié à la découverte d’une cytolyse, à la surveillance d’une dyséry-
thropoièse ou à de multiples transfusions ou encore complète l’exploration biolo-
gique d’une PCT. Le bilan initial, dans ce groupe, est une ferritine isolée dans trois
cas ou en association avec un CST dans 2 cas. Un fer sérique est prescrit isolément
une fois par un médecin généraliste.
Circonstances de découverte des surcharges en fer secondaires
(en dehors de l’HSD*).
Bilan martial initial Prescripteur du
bilan martial initial
Motif de prescription du
bilan martial initial
P28 ? Hépatologue Cytolyse
P29 Fer Sérique MG Bilan d’une
tachycardie
P30 Ferritine Interniste Bilan d’une anémie
P31 ? MG Bilan d’une anémie
P32 ? MG Bilan d’une anémie
P33 Ferritine + CST Généticien
Surveillance
biologique d’une
dysérythropoïèse
78
P34 Ferritine Hématologue
Suivi transfusionnel
dans le cadre d’une
chimiothérapie
P35 ? Dermatologue
Bilan d’une
porphyrie cutanée
tardive
P36 Ferritine + CST MG Bilan systématique
P37 Ferritine MG Bilan systématique
c) circonstances de découverte d’une HSD*.
Le médecin prescripteur est un généraliste dans 83.3% des cas (Cf. tableau
N°19). Le bilan martial initial est le plus souvent prescrit à titre systématique,
dans 47.2% des cas et chaque fois par un médecin généraliste. Une asthénie
motive le bilan dans 19.4% des cas et une cytolyse dans 13.8% des cas (alors que
le bilan n’est jamais prescrit devant une cytolyse dans le groupe des surcharges en
fer primitives). Deux patients présentant un phénotype d’HSD* ont été bilantés
dans le cadre d’un dépistage familial d’une HCH* (chaque fois par une
ferritinémie isolée). Des arthralgies conduisent rarement à la réalisation du bilan
martial initial dans ce groupe (une seule fois). Les autres motivations conduisant
au bilan martial sont anecdotiques et sans rapport évident avec une surcharge en
fer (talalgies, prurit, chute de cheveux). Une patiente s’est vue prescrire un bilan
martial dans le cadre d’une prise de poids par un endocrinologue ; il s’agit du seul
cas au cours duquel un élément du syndrome métabolique conduit à la réalisation
d’un bilan martial dans ce groupe. Une ferritine isolée compose le bilan initial
dans 15 cas (50%), une ferritine et un CST dans 11 cas (40%). Un fer sérique est
prescrit 3 fois sur le bilan initial par un médecin généraliste (une fois seul, associé
à un CST, une fois et à une ferritine une fois).
79
Circonstances de découverte des hépatosidéroses dysmétaboliques.
Bilan martial
initial
Prescripteur du bilan martial
initial.
Motif de prescription du bilan martial
initial P38 Ferritine + CST MG Asthénie
P39 Ferritine MG Bilan
systématique
P40 Ferritine+CST MG Bilan
systématique
P41 Ferritine+CST Gastroentérologue
Cytolyse
et douleur
abdominale
P42 ? Dermatologue Prurit
P43 Ferritine MG Cytolyse
P44 Ferritine+CST MG
Cytolyse et
élévation des
γGT
P45 Ferritine MG Bilan
systématique
P46 Ferritine MG Bilan
systématique.
P47 Ferritine MG Epine
calcanéenne.
P48 Ferritine+CST Généticien Arthralgies
+ Asthénie
P49 Ferritine+CST MG Bilan
systématique
P50 Ferritine+CST MG Asthénie
P51 Ferritine MG Bilan
systématique
P52 Ferritine Hépatologue
Cytolyse
persistante
au décours
d’une hépatite
médicamenteuse
P53 ? MG Bilan
systématique
P54 Ferritine
+ fer sérique MG
Bilan
systématique
P55 Ferritine+CST MG Asthénie
P56 Fer sérique MG Talalgies
P57 Ferritine+CST MG Asthénie
P58 Ferritine MG Chute de
cheveux
80
P59 Ferritine MG Dépistage familial
P60 Ferritine MG Dépistage familial
P61 ? Endocrinologue Prise de poids
P62 ferritine MG Asthénie
P63 Ferritine+CST MG Bilan systématique
P64 Fer sérique +CST MG Bilan systématique
P65 Ferritine MG Bilan systématique
P66 ? MG Bilan systématique
P67 Ferritine MG Bilan systématique
(lipomes multiples)
P68 ? MG Bilan systématique
P69 Ferritine MG Asthénie
P70 ? MG Bilan systématique
P71 Ferritine+CST MG Bilan systématique
P72 Ferritine MG Bilan systématique
P73 Ferritine+CST Gastroentérologue Cytolyse
81
VII. DISCUSSION.
Cette étude permet de préciser le spectre étiologique des surcharges en fer
traitées par saignées, et plus particulièrement l’importance relative des surcharges
primitives par rapport aux hépatosidéroses dysmétaboliques. Il semble que l’HSD*
soit bien, à l’heure actuelle, la principale cause des surcharges en fer traitées. Ce
groupe représente ainsi près de la moitié (49.3%) des patients saignés dans notre
cohorte, contre plus d’un tiers (37%) de patients présentant une surcharge primi-
tive. Le groupe des surcharges en fer secondaires est minoritaire dans cette
cohorte, si on en exclut les HSD. Il représente 13.7% de l’effectif de la cohorte.
Un biais de recrutement lié à l’activité du service (centré sur les « maladies
génétiques du globule rouge »), explique en partie la forte prédominance des
étiologies d’origine hématologiques par rapport aux étiologies hépatiques
(hépatites virales, alcooliques). La surcharge en fer est pourtant fréquente au cours
de l’hépatite C [119]. Au cours des thalassémies majeures, la surcharge est
associée à un risque de cardiopathie qui est la cause la plus fréquente de décès [1],
mais aussi à un risque de cirrhose [119] et à une diminution des niveaux
d’insulino-sensibilité [7]. L’indication aux saignées semble donc beaucoup plus
justifiée qu’au cours des hépatopathies où l’influence de la surcharge n’a pas
d’incidence avérée sur l’espérance de vie. Ainsi si l’alcool multiplie le risque de
cirrhose au cours de l’HCH [94], il n’est pas évident qu’une surcharge en fer en
relation avec une hépatopathie éthylique et qui reste en général minime à modérée
joue à l’inverse un rôle aussi important sur le pronostic hépatique. Chez des rats
alcoolisés, une supplémentation modérée en fer conduit toutefois à des degrés de
fibrose plus importants [127]. Les saignées au cours de ces hépatopathies
alcooliques sont de toutes façon loin d’être prioritaire tant que persiste l’exposition
à l’alcool qui représente le vrai problème de fond chez ces patients. De la même
façon, si le fer semble parfois être un facteur de mauvaise réponse au traitement
par interféron α, au cours de l’hépatite C, le traitement de cette surcharge améliore
la cytolyse mais ne semble pas améliorer la réponse thérapeutique au niveau de la
charge virale [119,127]. Il n’existe pas de consensus sur l’attitude à adopter au
cours des surcharges en fer liées aux hépatites virales. Ces explications permettent
de justifier, en partie, un tel écart de représentation entre les surcharges en fer
82
hématologiques par rapport aux surcharges ayant une origine hépatique dans notre
cohorte, qui devrait dans l’absolu être plus nombreuses. Les syndromes thalas-
sémiques représentent 4 patients sur 10 dans le groupe des hémochromatoses
secondaires. La surcharge semble liée à la sévérité du phénotype exprimé ; elle
paraît plus importante quand l’anémie est marquée ou lorsqu’il existe une
thalassémie intermédiaire avec hémoglobinose H ou E. Trois autres patients
présentent un syndrome thalassémique dans notre cohorte. Deux ont une
thalassémie hétérozygote dont l’une est associée à une elliptocytose qui poten-
tialise l’absorption du fer et l’autre une hétérozygotie composite C282Y/H63D ;
un autre patient, présentant un trait thalassémique, exprimerait une surcharge dans
le cadre d’une HSD. L’interprétation d’une anomalie de l’électrophorèse de
l’hémoglobine doit donc être prudente. Une surcharge en fer associée à un
syndrome thalassémique doit faire suspecter une cause associée dans la genèse de
cette surcharge en dehors des thalassémies intermédiaires et majeures. L’absence
d’antécédent transfusionnel chez les patients présentant un syndrome
thalassémique dans cette cohorte permet d’affirmer que le mécanisme principal de
constitution de la surcharge par hyperabsorption est le plus fréquent en dehors des
thalassémies majeures. Un seul cas de surcharge en fer, dans notre cohorte, est
imputable à une série de transfusions. Il est à noter que nous n’avons pas relevé de
cas de thalassémie majeure dans notre cohorte, lesquels, lorsqu’un programme
transfusionnel est nécessaire, sont traités par chélateur du fer, d’autant plus que
l’HAS vient de classer ces thalassémies majeures dans les contre-indications
permanentes aux saignées [83].
Le spectre étiologique des surcharges en fer concerne des patients traités dans
notre cohorte. Il est bien différent de celui relevé dans une autre étude [170] qui
donne pour étiologie principale les étiologies liées à une hépatopathie (33% de cas
d’hépatite C) devant l’homozygotie C282Y (16%) qui elle-même devance l’HSD
(14% des cas). Dans cette série la surcharge n’est pas traitée ni même quantifiée et
de nombreux cas de surcharge en fer pourraient en fait correspondre à de simples
hyperferritinémies, sans surcharge (liées à une activité cytolytique ou à la
consommation d’alcool). Le rapport entre le nombre de cas d’HSD et le nombre de
patients C282Y+/+ dans cette étude est sensiblement le même que dans notre série.
L’on observe ainsi dans notre cohorte, 3 patients hémochromatosiques pour 4
patients présentant une HSD. Certains auteurs avancent pourtant que l’HSD* est
83
10 fois plus fréquente que l’HCH* [135]. Ils évaluaient ce rapport sur la base
qu’environ 50% des patients diabétiques présentent une hyperferritinémie. Il est
pourtant clair qu’au cours du syndrome métabolique, une hyperferritinémie ne
signe pas la présence d’une surcharge. Ainsi dans notre cohorte le rapport
HSD/HCH est donc discutable. En ne comptant que les patients ayant bénéficié
d’une IRM pour attester d’une surcharge on dénombre seulement 13 patients sur
36 dans le groupe 3. Si l’on ajoute à ces 13 patients, 8 autres qui présentent une
ferritinémie >1000µmol/l dans le groupe 3, on peut estimer qu’au moins 21
patients présentent effectivement une surcharge en fer (au cours des NASH une
hyperferritinémie pouvant atteindre au maximum 970µmol/l a été observée en
l’absence de surcharge [125]). On obtient ainsi au moins 1 patient C282Y
homozygote pour 1 cas d’HSD* dans notre cohorte.
Pourtant, un tel rapport de 10 entre les deux pathologies en terme de
prévalence est possible ; en considérant que la pénétrance biologique de l’homo-
zygotie C282Y atteint au moins 50% (élévation du CST et de la ferritine), on
atteint une prévalence pour les surcharges en fer liée à l’homozygotie C282Y
d’environ 0.1 à 0.4% de la population générale en France [12, 112]. Parallèle-
ment, on peut estimer la prévalence de l’HSD ainsi: si la prévalence du syndrome
métabolique atteint 10% de la population générale adulte (en excluant le diabète de
la définition) [131], que la prévalence du diabète est de 3% [171], qu’une
hyperferritinémie est présente, respectivement dans 15 à 30% des cas chez les
premiers [133] et dans 47% des cas chez les seconds [135] et qu’on estime encore
qu’une hyperferritinémie dysmétabolique atteste de la présence d’une HSD* dans
37% des cas [125], on obtient une prévalence de l’HSD allant de 1 à 1.63%
dans la population générale adulte. L’HSD pourrait donc être 2.5 à 16 fois
plus fréquente que l’HCH*. Il semble donc que le rapport entre les deux
pathologies soit en dessous de ce qu’il devrait être dans notre cohorte.
----------
Sur le plan génotypique, l’homozygotie C282Y+/+ représente 74 à 77.7% du
groupe 1 (selon qu’on inclut ou pas P21 qui présente un phénotype complet et
évocateur de l’homozygotie). On retrouve une HCH liée à HFE chez 96.3% des
patients hémochromatosiques dont 80.8% sont C282Y+/+ et 19.2% des patients
présentent un génotype HFE muté non homozygote (une patiente C282Y
hétérozygote et quatre patients hétérozygotes composites C282Y/H63D). Le seul
84
cas d’HCH présumé non lié à un génotype HFE muté est probablement une HCH
de type IV (liée à une mutation du gène de la ferroportine). Ces données paraissent
en adéquation avec celles de la littérature puisque au moins 80% des surcharges en
fer primitives sont liées à l’homozygotie C282Y et que 74 à 100% des états non
C282Y+/+ au cours de l’HCH sont liés à une hétérozygotie composite
C282Y/H63D [11].
L’hétérozygotie C282Y et l’homozygotie H63D+/+ paraissent plus fréquentes
au cours de l’HSD, que dans la population générale (au moins 20% et 14%
respectivement contre 9 et 2% en population générale [82]). L’hétérozygotie
H63D ne paraît pas surreprésentée car elle ne concerne que 3 patients mais l’un
d’entre eux présente une hétérozygotie composite H63D/S65C qui joue peut-être
un rôle au même titre que l’homozygotie H63D. Il est donc possible que les
mutations HFE précipitent l’évolution vers l’expression d’une surcharge, au cours
du syndrome métabolique. Cependant l’effectif de la cohorte étant trop petit il
n’est pas possible d’analyser l’influence de ces mutations sur la sévérité de la
surcharge. Ces résultats sont compatibles avec la littérature qui rapporte une
augmentation de fréquence des mutations du gène HFE au cours de l’HSD [125],
tantôt avec un rôle prépondérant pour l’hétérozygotie C282Y, ailleurs pour la
mutation H63D [132] ou encore l’hétérozygotie composite [134]. Ces mutations
peuvent parfois être associée à une surcharge plus sévère mais il ne semble pas
exister de corrélation entre le risque de fibrose et le génotype [134]. D’après
George et al, l’homozygotie C282Y serait même fréquente au cours de l’HSD
[125]. Dans notre cohorte, deux cas d’homozygotie C282Y+/+ (P8 et P18),
pourtant classés dans le groupe des surcharges en fer primaires, présente
l’expression d’une surcharge en fer de type dysmétabolique: surcharge minime à
modérée associée à une hyperferritinémie disproportionnée et un CST
discrètement augmenté, qui se normalise rapidement ainsi qu’à l’expression d’un
syndrome métabolique et une stéatose échographique.
L’étude de corrélation génotype-phénotype menée par Moirand et al sur une
cohorte de patients surchargés en fer [80] concluait que la plupart des états
C282Y+/- nécessitaient la présence d’un cofacteur pour exprimer une surcharge
(une autre mutation du gène HFE, une mutation dans un autre gène, ou un état
dysmétabolique). Cette donnée est confirmée dans notre cohorte (Cf. tableau
suivant).
85
Diagnostic des surcharges en fer en regard des génotypes HFE mutés.
Identification du
patient Génotype HFE Diagnostic(s) associé(s).
P1 à 20. C282Y+/+
Etats hémochromatosiques
sauf P8 et P18 : expression
et évolution d’une
surcharge de type
dysmétabolique.
P22 C282Y+/- H63D+/- Etat hémochromatosique
+/-dysmétabolique
P23 C282Y+/- H63D+/-
Etat hémochromatosique +
déficit en Pyruvate-Kinase
+/- dysmétabolisme.
P24 C282Y+/- H63D+/- Etat hémochromatosique
+/- dysmétabolique.
P25 C282Y+/- H63D+/- Etat hémochromatosique +
Syndrome thalassémique.
P59 C282Y+/- H63D -/- Etat dysmétabolique
P60 C282Y+/- H63D -/- Etat dysmétabolique
+/- influence alcoolique.
P61 C282Y+/- H63D -/- Etat dysmétabolique.
P62 C282Y+/- H63D -/- Etat dysmétabolique.
P63 C282Y+/- H63D -/- Etat dysmétabolique.
P64 C282Y+/- H63D -/- Etat dysmétabolique.
P65 C282Y+/- H63D -/- Etat dysmétabolique.
P29 C282Y-/- H63D+/-
Syndrome thalassémique
et elliptocytose
+/-état dysmétabolique
P67 C282Y-/- H63D+/- Etat dysmétabolique
P68 C282Y-/- H63D+/- Etat dysmétabolique
P66 H63D+/- S65C+/- Etat dysmétabolique
P36 C282Y-/- H63D+/+ Hépatopathie éthylique et
état dysmétabolique.
P69 C282Y-/- H63D+/+ Etat dysmétabolique
P70 C282Y-/- H63D+/+ Etat dysmétabolique
P71 C282Y-/- H63D+/+ Etat dysmétabolique
P72 C282Y-/- H63D+/+ Etat dysmétabolique
+/- dysérythropoïèse
P73 C282Y-/- H63D+/+ Etat dysmétabolique
et hémochromatosique
Ainsi 7 patients C282Y+/- hétérozygotes stricts sur 8, retrouvés dans notre
cohorte présentent en fait une HSD (surcharge minime à modérée, avec CST
discrètement augmenté, se normalisant facilement avec les saignées), un autre
patient C282Y+/- présente un état hémochromatosique (CST franchement élevé et
86
qui se normalise difficilement après la ferritine) et donc s’associe probablement à
une mutation autre que H63D dans le gène HFE ou dans un autre gène lié au
métabolisme du fer. Un dernier patient présente encore un hétérozygotie C282Y+/-
en association avec un hépatopathie alcoolique. Quatre patients hétérozygotes
composites C282Y/H63D ont été classés dans le groupe des surcharges en fer
primitives du fait de la seule observation de ces génotypes; dans chacun des quatre
cas une cause hématologique (un cas de déficit en pyruvate kinase et un autre cas
de syndrome thalassémique) et/ou un dysmétabolisme sous-jacent pourrait, en fait,
en moduler l’expression phénotypique. Enfin les 5 cas de surcharges associées à
une homozygotie H63D sont également rapportés à une HSD.
L’HSD* représente donc en pratique, la principale cause de surcharge en
fer associée à un état HFE muté, non C282Y homozygote dans notre étude
L’étude du spectre des surcharges biochimiques en fer, précédemment citée,
rapporte pareille constatation [170]. La moitié des cas de surcharge liée à une
hétérozygotie composite, de même que tous les cas d’homozygotie H63D sont as-
sociés à une cause secondaire de surcharge en fer (mais la plupart du temps il
s’agit d’une consommation abusive d’alcool ou une hépatite C dans cette étude).
----------
Le groupe des surcharges primaires et le groupe des HSD* présentent des ca-
ractéristiques phénotypiques semblables à celles issues de la littérature : le sexe-
ratio est bien en faveur d’une sur-représentation masculine dans les groupes 1 et 3.
Les patients hémochromatosiques ont l’air discrètement plus jeunes que les
patients présentant une HSD*, quelque soit le sexe, avec une distribution autour de
la moyenne d’âge qui semble identique dans les deux groupes, même en
considérant séparément les deux sexes. Dans chaque groupe, la différence d’âge
selon le sexe semble faible (avec une tendance moins âgée pour les hommes).
Cependant les effectifs semblent trop petits pour assurer une valeur fiable de la
distribution des âges autour de la moyenne, sauf pour l’effectif global du groupe 3
qui dépasse 30 patients. La ferritinémie avant saignées, semble plus élevée et la
surcharge semble aussi plus fréquemment sévère chez les hommes au cours de
l’HCH qu’au cours de l’HSD. La tendance est inversée pour les femmes tandis que
la surcharge reste la plupart du temps minime à modérée dans les deux groupes, ce
qui souligne l’importance du rôle joué par la voie métabolique dans l’expression
de la ferritine par rapport à la surcharge au cours de l’HSD et rend peut-être
87
compte du délai plus long à l’expression d’une surcharge chez les femmes au
cours de l’HCH. La dispersion de la ferritinémie autour de la moyenne semble plus
grande dans le groupe des surcharges primitives du fait d’une plus grande
inhomogénéité dans les surcharges observées (probablement liée en partie à une
plus grande représentation des femmes dans ce groupe), d’un effectif trop modeste
(mais presque suffisant), et pourquoi pas d’une influence dysmétabolique, qui peut
d’un sujet à l’autre intervenir sur les chiffres de ferritine.
Certaines données cliniques et biologiques sont facilement accessibles
rétrospectivement dans notre étude concernant les groupes des surcharges en fer
primitives et des HSD. Ces données sont compatibles avec celles décrites dans
d’autres cohortes de malades (Cf. Tableau suivant).
HCH liée à
l’homozygotie C282Y
Données
comparées de
la littérature
Groupe des HSD*
Données
comparées
de la
littérature
Asthénie
66.66% 60% [84] 48.6%
Arthralgies
44.44% 30 à 41% [80,
84] 25% 8% [136]
Cytolyse
42% 13 à 65% [88,
89] 45%
Présence d’un
dysmétabolisme
45%
(1 seul
élément : 55%
des cas ; 2
éléments :
45% des cas)
100% 95 à 97%
[16-136]
Trouble du
métabolisme
glucidique=
intolérance au
glucose et
diabète.
(diabète
considéré seul)
14.3%
(10%).
?
(10 à 40.3%)
[85-99]
48.6%
(17%) 47% [136]
88
Le caractère rétrospectif de l’étude ne permet pas en revanche d’analyser la
prévalence de la fibrose hépatique dans les deux groupes par manque d’évaluation
biopsique.
Chez les patients C282Y homozygotes, une cytolyse est présente dans 42%
des cas (dans les mêmes proportions que les données récentes de la littérature [89])
et dans 40% des cas sur l’ensemble du groupe. Une surcharge sévère est
généralement associée, cependant il existe au moins un élément du syndrome
métabolique dans 80% des cas où il existe une cytolyse. Inversement, lorsqu’il
n’existe aucun élément dysmétabolique, il existe une cytolyse seulement dans 25%
des cas sur l’ensemble du groupe et dans 20% des cas chez l’homozygote C282Y.
L’HMG est associée à une stéatose échographique 4 fois sur 5 dans le groupe 1.
80% des patients ne présentant ni cytolyse ni HMG sont indemnes d’élément du
syndrome métabolique. Enfin 4 patients expriment différents grades de fibrose
jusqu’à la cirrhose, en association soit à un éthylisme, soit à un élément du
syndrome métabolique. Une étude réalisée sur une cohorte de 214 sujets
C282Y+/+, vient de souligner l’influence de la stéatose au cours de l’HCH* [172].
41.1% des patients de cette cohorte présentent une stéatose biopsique; ces derniers
présentent une hyperferritinémie plus marquée, malgré une CHF et un CST plus
bas, montrant en cela l’influence probable du dysmétabolisme. L’activité
cytolytique est significativement plus élevée dans le groupe de patients
stéatosiques. La stéatose comme le BMI sont également associés au
développement d’une fibrose. La stéatose est d’autant plus fréquente que le stade
de fibrose est avancé, sauf au stade de cirrhose qui est associée à des niveaux de
surcharge plus sévère (et qui semble limiter le développement d’une stéatose).
Dans notre série comme dans cette étude, le syndrome métabolique par
l’intermédiaire de la stéatose, semble donc être l’élément modulateur le plus
fréquent de la pénétrance de l’homozygotie C282Y au niveau de l’atteinte
hépatique, devant la consommation excessive d’alcool.
Une cytolyse paraît tout aussi fréquente, sinon plus, au cours de l’HSD que
chez les patients C282Y+/+ dans notre étude, puisqu’elle touche 48.6% d’entre
eux. La cytolyse est complètement réversible dans 43.8% des cas. La cytolyse est
exprimée en même temps qu’une stéatose 6 fois sur 7 (lorsque cette donnée est
disponible). Une HMG est fréquente, présente dans 29% des cas, systématique-
ment associée à une stéatose, qui elle est présente dans 58% des cas. La stéatose
89
semble là encore, comme au cours de l’HCH, être un élément déterminant dans
l’expression hépatique de la maladie. D’ailleurs au cours des NASH* la fréquence
d’une fibrose sévère semble plus importante que sur un cohorte de patients
présentant une HSD* « pure » (27% contre 10% [136,138]). Le rôle de la
surcharge en fer dans le processus fibrosant ne doit donc pas faire oublier l’impor-
tance relative des lésions de NAFLD dans un tel processus au cours de l’HSD.
Ainsi, si une corrélation significative entre la surcharge en fer et le degré de
fibrose a été mise en évidence au cours des NASH [125], l’inverse est vrai aussi
car la présence d’une NASH est associée à des degrés de fibrose plus sévères au
cours de l’HSD [134]. Le fer ne serait finalement que faiblement fibrogénique, car
le seuil de concentration hépatique en fer nécessite d’atteindre des taux élevés (de
300 à 400 µmol/g de tissu hépatique [123, 124]) pour induire un fibrose au cours
de l’HCH*. En pratique, cette fibrose nécessite probablement la présence d’autres
facteurs pour survenir à des niveaux de surcharge modérée (stéatose, infection
virale, consommation d’alcool) [125, 132]. Au cours de l’hépatite C, la stéatose
apparaît fréquente et touche plus de la moitié des patients ; la stéatose semble là
encore être associée à des niveaux de fibrose plus sévère [173].
Dans le même esprit, les troubles du métabolisme glucidiques sont 3 fois
plus fréquents au cours de l’HSD qu’au cours de l’HCH alors que la surcharge est
plutôt minime à modérée dans le groupe 3. Il paraît évident que le diabète s’inscrit
dans le cadre d’une IR* dans le groupe 3, lié à un syndrome métabolique et à un
surpoids la plupart du temps. Il n’existe aucun cas de diabète insulino-dépendant
dans notre cohorte. Le rôle de l’atteinte pancréatique dans la genèse des troubles
glucidiques paraît discutable dans le groupe hémochromatosique, car chacun des
trois cas de diabète ou d’intolérance au glucose, chez nos patients C282Y+/+, est
associé à un BMI >27 et car la surcharge n’est marquée que dans un cas sur trois
en association à une fibrose hépatique. Or, dans la cohorte de patients
hémochromatosiques de Niederau et al [2], un diabète complique le plus souvent
des surcharges sévères associées à l’expression d’une cirrhose. De la même façon
que l’évolution vers une cirrhose coïncide souvent avec la présence d’une
NAFLD*, il n’est pas impossible que la majorité des diabètes observés aujourd’hui
au cours de l’HCH, rendent compte davantage d’une IR hépatique liée à la
surcharge en fer (même modérée) et conditionnée par un état dysmétabolique préa-
lable, que d’une atteinte viscérale pancréatique. L’amélioration des désordres gly-
90
cémiques observés après saignées au cours des HSD, n’est pas forcément liée à
l’élimination de la surcharge elle-même, mais peut résulter d’une réorganisation de
l’architecture moléculaire hépatocytaire, liée à une co-localisation et peut-être à
une co-expression probable des RTf et des transporteurs du glucose. Ainsi au cours
des NAFLD*, les saignées menées chez des patients insulino-résistants, qui ne pré-
sentent pourtant pas de surcharge, améliorent le degré d’insulino-sensibilité [154].
Dans la cohorte de Moirand et al, la survenue d’un diabète chez les patients non-
C282Y homozygotes est aussi à rapprocher d’un taux plus élevé d’obèses [80].
-------------
Il parait évident, au vu de l’interconnexion fréquente des différentes étiologies
entre elles (dysmétabolique, hématologique et génétique), dans cette cohorte, qu’il
n’existe pas de démarche diagnostique standard. Littérature à l’appui, il est toute-
fois possible d’édicter quelques principes dans la construction de cette démarche.
L’anamnèse doit rechercher un terrain familial d’HCH, et de cataracte (dans le
cadre d’un syndrome « cataracte-hyperferritinémie »). L’origine ethnique peut être
évocatrice et orienter vers diverses étiologies comme l’HCH classique, une thalas-
sémie, une acéruléoplasminémie ou pourquoi pas une HCH africaine). Le patient
sera interrogé sur son hygiène de vie (alcool, activité physique), sur les traitements
en cours (pour diabète, HTA, dyslipidémie). Une prise de fer et des antécédents
transfusionnels sont recherchés. L’interrogatoire recherchera des symptômes com-
pliquant les surcharges (asthénie, arthralgies, palpitations, dyspnée, impuissance).
L’examen clinique précise le poids et la taille avec calcul du BMI. L’examen
recherche une HTA, une mélanodermie, une HMG, des signes d’hypertension
portale, une insuffisance hépatocellulaire et une insuffisance cardiaque.
Un bilan complémentaire sera prescrit. Le CST jugera de l’opportunité d’un
génotypage du gène HFE en l’absence de contexte évident. Un bilan hépatique
recherchera une cytolyse ; une élévation des γGT s’intégrera dans un contexte
cytolytique, dysmétabolique ou évoquera un éthylisme chronique. En cas de point
d’appel hépatique une échographie hépatique sera réalisée fournissant des rensei-
gnements sur la taille, l’échogénicité du foie et sur les contours hépatiques. Une
NFS* avec compte réticulocytaire cherchera une anémie et orientera le diagnostic
vers un syndrome thalassémique, une anémie sidéroblastique ou autre dysérythro-
poïèse (et même une atransferrinémie ou une acéruléoplasminémie). Une macrocy-
tose pourra évoquer un éthylisme. Enfin une glycémie à jeun et un bilan lipidi-
91
que rechercheront un dysmétabolisme. Le bilan pourra être complété d’une
bilirubinémie, d’une haptoglobine, voire du RSolTf et d’une électrophorèse des
protides ou de l’hémoglobine, d’une CRP, à la recherche d’une hémolyse, d’une
dysérythropoïèse, d’un syndrome inflammatoire ou d’une insuffisance hépatique.
A l’issue de cette première consultation, le médecin devra éliminer les hyper-
ferritinémies non liées à une surcharge en fer. La recherche de l’homozygotie
C282Y s’appuiera sur les résultats du CST (Cf schéma N°8). En cas d’hyper-
ferritinémie avec CST normal, on éliminera une homozygotie C282Y. En l’absen-
ce de contexte évident, en l’absence de cytolyse ou avec cytolyse modérée (<3N)
et en cas d’élévation du CST, la recherche de la mutation C282Y sera envisagée.
Une homozygotie C282Y signe le diagnostic d’HCH. En cas d’hétérozygotie
C282Y, il peut être utile de demander la recherche d’une mutation H63D qui peut
être responsable de tableau hémochromatosique avec surcharge en fer moins
sévère qu’en cas d’homozygotie C282Y, mais qui, dans notre cohorte, est associé
chaque fois à un autre facteur modulateur de la surcharge (état dysmétabolique ou
cause hématologique). Tout autre génotype évoquera, en l’absence de contexte
évident, une autre surcharge héréditaire et conduira à la réalisation d’une IRM ou
d’une PBH selon le contexte, en l’absence de test génétique disponible.
Il n’est pas de valeur seuil de la ferritine qui permette de discriminer une sur-
charge d’une simple hémolyse et la réalisation d’une IRM semble donc nécessaire
avant traitement au cours des thalassémies intermédiaires, qui semblent suffire à la
constitution de la surcharge dans notre cohorte. Les anémies hémolytiques non
dysérythropoïétiques (sphérocytose, drépanocytose), ou encore un déficit en PK*
une thalassémie intermédiaire ou un trait thalassémique sont généralement
exempts de surcharge en fer en l’absence d’antécédent transfusionnel ; pourtant il
peut arriver qu’une telle surcharge soit observée en la présence d’une mutation
HFE [121, 119], ou associé à un dysmétabolisme, comme dans notre cohorte.
Au cours des hépatites aigues, une ferritinémie importante peut être observée.
L’absence de normalisation de la ferritinémie après normalisation des transamina-
ses doit faire discuter l’existence d’une surcharge en fer. En cas d’hyperferritiné-
mie et d’intoxication éthylique, un sevrage doit être conduit sur 3 mois; fer sérique
et CST se normalisent en une semaine et la ferritine en 3 mois [126]. Le diagnostic
et l’évaluation des lésions hépatiques peuvent nécessiter le recours à une PBH
(hépatite virale, hépatopathie alcoolique, cirrhose) ; la détermination de la CHF
92
sera alors demandée sur l’anatomopathologie. En l’absence de cytolyse, ou si elle
reste modérée (<3N), dans un contexte dysmétabolique, avec hyperferritinémie
et/ou stéatose échographique (et en l’absence de consommation d’alcool), en
l’absence de forte élévation du CST, une IRM peut être demandée afin de
démarrer un programme de saignées dans le cadre d’une HSD*.
Notre étude permet d’analyser rétrospectivement l’évolution de la ferritine et
du CST à la fin du programme de saignées au cours de l’HCH et de l’HSD ; dans
la grande majorité des cas la ferritine se normalise avant le CST chez les patients
atteints d’HCH liée à HFE. La ferritine décroît généralement d’une façon régulière
au fil des saignées tandis que le CST est difficile à normaliser dans le temps. Au
cours de l’HSD, c’est l’inverse qui se produit et le CST se normalise rapidement le
plus souvent tandis que la ferritine est plus longue à normaliser et peut même voir
ses taux réascensionner pendant le programme de saignées. L’évolution des para-
mètres du fer pourrait permettre ainsi de présumer du type d’atteinte dans des cas
litigieux où la surcharge accompagne un tableau mixte avec présence d’un dysmé-
tabolisme, d’une élévation du CST et de la ferritine et de mutations du gène HFE.
Enfin, l’étude phénotypique de notre cohorte permet de récuser le RSol Tf en
tant qu’examen discriminant des situations de surcharges en présence d’une hyper-
ferritinémie d’origine dysmétabolique. En effet ce paramètre est très inconstam-
ment diminué chez nos patients présentant une HCH et jamais abaissé au cours de
l’HSD y compris chez ceux qui ont une surcharge avérée sur l’IRM. Celle-ci reste
donc l’outil le plus fiable aujourd’hui pour signer la présence d’une surcharge au
cours de l’HSD. Ceci est en opposition avec une étude qui concluait à la rareté de
la surcharge en fer au cours des hyperferritinémies chez le diabétique sur la base
de la normalité de ce paramètre [174].
La ferritine érythrocytaire est généralement plus élevée au cours des syndro-
mes thalassémiques, dans le groupe des surcharges secondaires, qu’au cours de
l’HCH ; dans les deux cas l’élévation est constante. Au cours de l’HSD cette élé-
vation n’est pas systématique et reste minime la plupart du temps. Une élévation
plus importante est possible et s’associe à une expression plus importante du syn-
drome métabolique (avec complications hépatiques probables et/ou cardiovasculai-
res) ou à des mutations dans le gène HFE ou bien à une surcharge sévère ou encore
à un problème hématologique surajouté. Etant donné qu’il existe une zone de
chevauchement dans les valeurs relevées au cours de l’HCH et de l’HSD, ce
93
paramètre métabolique ne semble pas pouvoir servir de discriminant entre les deux
pathologies ; ce paramètre semble de plus mal corrélé à la surcharge au cours des
surcharges primitives. Son utilité semble donc limitée.
------------
La présentation clinique s’est modifiée ces dernières années. Les patients sem-
blent diagnostiqués plus tôt, avant les stades symptomatiques, probablement grâce
à la réalisation de dépistages familiaux ou au recours fréquent à la biologie en
pratique courante [97]. Sur la cohorte de Bacon et al, 82% des patients sont
asymptomatiques au moment du diagnostic [175]. Les manifestations cliniques
conduisent au diagnostic dans 17 à 35% des cas, contre 18 à 20% grâce au dépis-
tage familial et 45% à 65% face à une anomalie biologique [106, 175]. Chez des
patients diagnostiqués suite à un dépistage familial, 16% et 5% présentent respec-
tivement un diabète et une cirrhose [84].
L’analyse des circonstances de découverte des surcharges en fer dans notre
cohorte, met en relief le rôle prépondérant que joue le médecin généraliste quant à
l’identification de ces surcharges, puisqu’il est le prescripteur du bilan martial
initial dans près de 80% des cas. Trois causes principales indiquent la prescription
d’un bilan martial et font découvrir une surcharge en fer :
-Un bilan est prescrit à titre systématique dans 35% des cas, quasiment
toujours par un médecin généraliste. Une telle pratique permet d’identifier plus d’1
cas sur 4 d’HCH* et presque la moitié des cas d’HSD*. Le rapport entre le nombre
de patients présentant une HSD et ceux présentant une HCH ainsi dépistés est de
2.43. Ce rapport correspond à l’estimation minimale que nous avons faite sur la
base des prévalences présumées de l’HSD et de l’HCH en population générale. Un
tel rapport s’affranchit des biais de recrutement relatifs à des symptômes évoca-
teurs de surcharge en fer. Une différence dans les motivations qui indiquent la
prescription d’un bilan martial, d’un diagnostic à l’autre, peut donc en partie
expliquer la sous représentation des HSD dans notre cohorte.
-Le dépistage familial indique la réalisation d’un bilan martial chez près de
30% des patients hémochromatosiques, ce qui tend à augmenter la part de ces sur-
charges en fer au sein du spectre étiologique de notre cohorte. C’est la circonstan-
ce de découverte la plus fréquente de l’HCH. De tels résultats permettent d’affir-
mer qu’un tel dépistage paraît bien conduit aujourd’hui car la conférence de con-
sensus de Sorrente estime que pour 10 cas d’HCH il est possible d’identifier 8
94
patients hémochromatosiques par dépistage familial, ce qui correspondrait idéale-
ment à 44% des circonstances menant au diagnostic [84]. L’ANAES a estimé que
sur 800 probants homozygotes découverts annuellement en France, il est possible
d’identifier près de 200 sujets homozygotes sur 1496 testés par un dépistage
familial, en retenant un taux de participation de 50% [12]. Ce rôle est exclusive-
ment pris en charge par le médecin généraliste dans note cohorte.
-Une asthénie conduit à la réalisation du bilan martial initial dans environ 20%
des cas d’HCH et d’HSD. Une étude menée par l’INSERM a tenté d’appréhender
l’HCH au sein d’une cohorte de patients adressé par leur médecin généraliste pour
une fatigue inhabituelle et prolongée ; aucun cas d’HCH n’a été identifié (sur 120
patients), mais une hyperferritinémie est relevée dans 38% des cas et un
dysmétabolisme semble fréquemment lié à ces hyperferritinémies dans cette étude
(sans présumer de la présence d’une surcharge en fer ou pas) [176].
-Une cytolyse hépatique, des arthralgies ou encore un diabète conduisent
insuffisamment aux diagnostics d’HCH ou d’HSD en regard de leur prévalence
dans les groupes 1 et 3 (Cf. tableau p87). Les médecins généralistes doivent donc
être sensibilisés vis-à-vis de ces points d’appel cliniques ou biologiques qui sont
des circonstances de découverte potentiellement fréquentes.
La composition du bilan martial prescrit initialement est hétérogène. Dans 87%
des cas, une ferritinémie figure logiquement dans ce bilan initial, dans notre étude.
Dans 1/3 des cas, on retrouve une ferritine et un CST sur le bilan martial et dans
45% des cas la ferritine est prescrite seule. Un CST est rarement prescrit isolé-
ment. Une telle prescription serait pourtant adaptée à la première étape phéno-
typique de la conduite d’un dépistage familial de l’HCH liée à HFE, car le CST
s’élève avant la ferritine au cours de l’histoire naturelle de l’HCH (Cf. supplé-
ment N°3). Tous les patients diagnostiqués sur la base d’un dépistage familial ont
eu une évaluation phénotypique avant de se voir prescrit un test génétique dans
notre cohorte. Un fer sérique est parfois prescrit seul ce qui va à l’encontre des
recommandations de l’ANDEM [161]. L’hypersidérémie est inconstamment asso-
ciée aux situations de surcharges martiales (le fer sérique n’est élevé que dans 63%
des cas d’HCH et dans 20% des cas d’HSD dans notre cohorte). Ce test, peu sensi-
ble et peu spécifique dans la détection des carences en fer car il s’abaisse tardive-
ment [151], manque aussi de sensibilité pour le diagnostic de l’HCH [162]. Il est
surtout utile à la détermination du CST*. Un fer sérique est parfois prescrit en as-
95
sociation à une ferritinémie, dans notre cohorte ce qui est inutile et encore une fois
contraire aux RMO*, en l’absence de détermination du CST. Dans 14% des cas,
un fer sérique est prescrit en dehors des recommandations de l’ANDEM ou des
RMO dans notre étude (Cf. supplément N°2). Un tel chiffre parait acceptable,
toutefois l’hypersidérémie étant une anomalie insuffisamment sensible pour détec-
ter une surcharge, ce taux est probablement biaisé dans notre étude ; l’utilisation
du fer sérique à titre systématique est certainement plus courante en pratique médi-
cale. Une étude menée par le service médical de Seine et Marne [177], a évalué les
pratiques de prescription biologique des paramètres du fer des médecins généra-
listes, au vu de l’augmentation régulière des coûts relatifs à ces prescriptions. Elle
souligne aussi la prépondérance des examens réalisés à titre systématique (dans
plus de 60% des cas, contre 6% pour la recherche d’une carence en fer et 3% des
prescriptions liées à la recherche d’une surcharge). Le manque de fondement basé
sur les recommandations de l’ANDEM et le non respect des RMO dans la majorité
des cas y est vraiment flagrant par rapport à notre étude. L’évaluation du statut
martial semble donc être devenu une pratique courante en dehors de ces recom-
mandations en médecine générale. Une telle constatation trouve peut-être en partie
une explication dans le fait que le thème des surcharges en fer est mis de façon
récurrente sous les feux d’une actualité médicale depuis 10 ans; la médiatisation de
l’HCH, liée à une forte demande des associations de malades, sous la forme de
journées nationales d’information est probablement un facteur déterminant du dé-
veloppement de telles pratiques. Cette pratique se substitue à l’avis négatif de
l’ANAES quant au dépistage de l’HCH en population générale [12]. Une telle
pratique systématique ne garantit pas forcément l’identification de toutes les
surcharges en fer, car les paramètres utilisés ne sont pas forcément adaptés à cha-
cune des situations considérées. Ainsi, le bilan martial demandé en ville est une
ferritine isolée dans la moitié des cas ; la prescription d’un CST seul ou en associa-
tion à une ferritine est très faible (moins de 1 prescription sur 1000) [177]. Certains
patients qui ont une élévation seule du CST au cours de l’HCH et qui nécessitent
une surveillance [83], risquent donc de ne pas être identifiés. La co-prescription
d’un fer sérique et d’une ferritine est beaucoup plus fréquente que dans notre étude
et représente 20% des prescriptions. Pire, ¼ des prescriptions ne comprennent
qu’une fer sérique isolé et n’ont pas d’intérêt en pratique clinique [177] car un fer
sérique normal ne peut formellement éliminer une surcharge en fer.
96
CONCLUSION.
L’évaluation du statut martial semble être devenue une pratique courante en
médecine générale. 60% des bilans du métabolisme du fer sont aujourd’hui
prescrits à titre systématique en ville. Une telle pratique, malgré les conclusions
récentes de l’ANAES quant au dépistage systématique de l’HCH en population
générale, est probablement liée à une forte actualité scientifique et à une
médiatisation importante, autour du thème de l’HCH. Dans notre étude plus de
80% des prescriptions biologiques relatives au fer et qui révèlent une surcharge
martiale, relèvent de l’activité des médecins généralistes ; ces bilans sont réalisés
de façon systématique dans plus d’un tiers des cas dans notre cohorte. En pratique
clinique, les paramètres du fer utilisés sont fréquemment inadaptés à chacune des
situations, en regard de la motivation de l’examen, du diagnostic ou des recom-
mandations officielles relatives à leur utilisation.
L’hyperferritinémie est une orientation diagnostique potentiellement fréquente
en consultation de médecine générale car elle touche jusque 20% de la population
adulte (selon l’âge et le sexe). La prévalence de l’HCH liée à HFE, exprimant une
hyperferritinémie (et donc une surcharge) serait au moins de 0.1 à 0.4% en France.
L’hyperferritinémie est souvent liée, en secteur hospitalier, à une infection ou
associé à un état néoplasique. Toutefois, le syndrome métabolique pourrait rendre
compte d’une grande partie de ces hyperferritinémies en cabinet de médecine
générale. L’hyperferritinémie dysmétabolique parait fréquente et toucherait près de
3 à plus de 4.5% de la population générale adulte selon nos estimations ; elle est
corrélée au degré d’insulino-résistance. La voie cytokinique pourrait jouer un rôle
important dans sa constitution. Ce type d’hyperferritinémie n’est pas synonyme de
surcharge, laquelle, quand elle existe, est surestimée au simple regard de la
ferritine. La proportion de patients présentant une hyperferritinémie
dysmétabolique et qui ont effectivement une HSD* n’est pas connue. Au cours des
NASH, l’hyperferritinémie dysmétabolique témoigne d’une surcharge dans plus
d’1/3 des cas (37%). En extrapolant ce résultat à la population diabétique et à celle
présentant un syndrome métabolique, la prévalence de l’HSD* pourrait être au
moins de 1 à 1.6% dans la population générale ; elle pourrait toucher 7.77% des
sujets hypertendus et 17,4% des sujets diabétiques de type 2 (Cf. tableau N°9). Il
97
n’est pas possible de dire si l’absence d’amélioration de la ferritine après
correction du syndrome métabolique permet de prédire ou pas de la présence d’une
HSD*. L’intérêt de l’évaluation de la surcharge par IRM semble donc logique
avant traitement. En terme de santé publique, se pose clairement la question de
l’intérêt du dépistage ciblé de ces hyperferritinémies, afin d’éviter les compli-
cations hépatiques (le risque de décès lié à une hépatopathie chronique ou une
cirrhose est 2.82 fois plus élevé chez le patient diabétique [178]), d’améliorer
potentiellement le pronostic cardiovasculaire, et d’éviter la survenue d’un diabète
au cours des syndromes dysmétaboliques.
Compte tenu de la prévalence élevée du syndrome métabolique et du diabète,
l’HSD* est la première cause de surcharge en fer, attendue et observée, dans notre
étude. Cependant cette étiologie semble relativement sous représentée dans notre
cohorte car l’on pouvait s’attendre au moins à un doublement du nombre de cas
d’HSD en comparaison au nombre de cas d’HCH. Cette observation résulte d’un
déséquilibre entre l’état des connaissances et l’état des pratiques.
L’HCH est une maladie décrite depuis plus d’un siècle et il est maintenant bien
admis que les saignées permettent de maintenir une espérance de vie normale chez
les patients qui ne sont pas compliqués de cirrhose. La démarche diagnostique est
par ailleurs simplifiée grâce à l’identification de la mutation C282Y du gène HFE,
responsable de la maladie dans 80% des cas. L’ANAES a émis un avis favorable
sur le développement du dépistage familial de l’HCH, reposant sur un diagnostic
génotypique en association avec la réalisation d’un bilan martial. Le dépistage
familial de l’HCH même s’il reste phénotypique en pratique, semble mobiliser
l’intérêt du médecin généraliste car c’est le premier mode d’entrée dans le
diagnostic chez les patients hémochromatosiques, dans notre étude. Ce recrute-
ment favorise donc la représentation de l’HCH dans notre cohorte. L’ANAES a
également émis des recommandations récentes dans la prise en charge de l’HCH
[83] ; le recours aux saignées est ainsi facilité devant la constatation d’une éléva-
tion simultanée du CST et de la ferritinémie chez les patients C282Y homo-
zygotes. Enfin l’expression clinique de la surcharge, essentiellement sur le plan
des arthralgies, semble plus importante au cours de l’HCH, même si celles-ci
restent des circonstances de découverte encore trop rares.
En opposition, la description de l’HSD est très récente, et a suivi d’un an la
découverte de la mutation C282Y. Cette dernière a probablement dilué l’impor-
98
tance de la première et l’HSD demeure certainement encore méconnue des
médecins généralistes. La découverte d’une HSD est certainement facilitée par la
pratique actuelle qui consiste à réaliser une ferritine à titre systématique, mais cet
avantage semble largement compensé dans notre étude, par un taux de dépistage
familial de l’HCH plutôt satisfaisant. Un autre frein à la représentation de l’HSD
par rapport à l’HCH est expliqué par la difficulté aujourd’hui de mettre en
évidence la surcharge en fer en cas d’hyperferritinémie dysmétabolique, tandis que
le recours à une IRM reste nécessaire. En cas de surcharge avérée, un programme
de saignées pourra être mis en route. Un autre facteur limitant la représentation de
l’HSD dans le spectre des surcharges en fer traitées, réside dans le fait qu’il n’y a
pas eu à ce jour d’étude contrôlée qui souligne le bénéfice des saignées en terme
de morbi-mortalité au cours de l’HSD. Cependant une atteinte hépatique au cours
du diabète de type 2 pourrait représenter la deuxième cause de mortalité chez ce
type de patient. Il est difficile du fait de la co-expression fréquente d’une NASH et
d’une HSD, de présumer du rôle prépondérant de l’une ou de l’autre des deux
entités dans la survenue d’une cirrhose. L’effet synergique fibrogène de la surchar-
ge en fer et de la stéatose est démontré expérimentalement chez l’animal. Chez
l’homme, la présence d’une NASH est associée à des degrés de fibrose plus
sévères au cours de l’HSD et, inversement, la surcharge en fer, lorsqu’elle est
présente au cours des NASH, est corrélée au degré de fibrose. La deuxième
motivation pouvant conduire à la réalisation de saignées est issue des liens du
métabolisme du fer avec l’insulino-résistance. La réalisation de saignées, même en
l’absence de surcharge améliore l’insulino-sensibilité au cours des NASH. Ces
rapports entre surcharge en fer et insulino-résistance pourraient être liée à
l’organisation moléculaire à l’échelle de l’hépatocyte des RTf et des transporteurs
du glucose. Il n’est pas établi d’ailleurs si la surcharge en fer hépatique est le
témoin d’une authentique surcharge de l’organisme au cours de l’HSD, ou si elle
résulte simplement d’une redistribution du fer en faveur d’une captation hépatique.
Dans de telles conditions, les données expérimentales et les liens épidémiologiques
qui s’établissent entre la surcharge en fer et le risque cardiovasculaire d’une part
(cf. chapitre VIII.4.e) et le risque de survenue de cancer extra-hépatique d’autre
part (cf. chapitre V.6), ne peuvent servir d’argument, dans l’état actuel des
connaissances, pour justifier un dépistage ciblé de l’HSD dans un but
thérapeutique.
99
Notre travail a montré l’interconnexion des différentes voies entre elles,
dysmétabolique, génétique et parfois hématologique. Le diagnostic n’est pas si
aisé en pratique clinique. Ainsi, le syndrome métabolique rend compte de la
plupart des causes de surcharge en fer associées aux mutations dans le gène HFE,
non C282Y homozygotes. De même un phénotype de surcharge en faveur d’une
véritable HSD pourrait s’exprimer chez d’authentiques patients C282Y+/+.
L’évolution des paramètres biologiques du fer contribue, après obtention de l’état
de désaturation, à déterminer le type de surcharge exprimée dans certains litigieux
où une hyperferritinémie et une élévation du CST modérée s’associent à une
mutation du gène HFE. Il semble que les hémochromatoses secondaires qui
conduisent le plus fréquemment aux saignées dans notre cohorte soient d’origine
hématologique. Certaines de ces pathologies, comme un déficit en PK ou un
syndrome thalassémique, sont aussi susceptibles de moduler l’expression d’une
HSD ou d’une hétérozygotie composite H63D/C282Y par le biais d’une
hyperabsorption digestive compensatoire. Il n’est pas exclu que l’homozygotie
H63D ou l’hétérozygotie C282Y puissent également moduler la surcharge en fer
au cours de l’HSD. La présence d’éléments du syndrome métabolique ou d’une
NAFLD semble associée à l’expression hépatique d’une cytolyse ou à celle d’une
HMG au cours de l’HCH elle-même. La présence d’une stéatose est également
corrélée au degré de fibrose au cours de l’HCH dans la littérature. De la même
façon il est probable que l’expression d’une cytolyse ou d’une HMG soit souvent
liée à des lésions de NASH au cours de l’HSD, même si la surcharge est connue
pour influencer l’évolution vers la fibrose hépatique. La prise en charge
thérapeutique du syndrome métabolique ne suffit pas à corriger l’HSD lorsque la
ferritinémie dépasse 450µg/l. Il paraît difficile aujourd’hui d’appréhender les
problèmes soulevés par une surcharge hépatique en fer au cours de l’HSD et même
de l’HCH, séparément des NASH. La prise en charge globale doit viser à diminuer
le risque de cirrhose outre le risque cardiovasculaire et l’évolutivité vers un
diabète, au cours du syndrome métabolique. Certaines molécules semblent déjà
avoir une efficacité au niveau des lésions histologiques au cours des NASH,
pourtant toutes ces molécules n’ont pas d’AMM dans cette indication.
Le médecin généraliste doit donc dès aujourd’hui acquérir les connaissances
épidémiologiques ainsi qu’une stratégie diagnostique et thérapeutique autour du
thème de l’hyperferritinémie développées dans ce travail. Il doit également
100
apprendre à se familiariser avec la sensibilité des différents tests biologiques et à
appuyer ses prescriptions sur les recommandations officielles afin d’éviter des
examens inutiles ou peu sensibles. De même, il doit être sensibilisé aux points
d’appel clinico-biologiques, fréquents au cours des surcharges, comme l’asthénie
chronique, les arthralgies, un diabète, une cytolyse, ou une HMG, qui sont pourtant
très insuffisamment à l’origine de la prescription du bilan martial initial.
Ainsi que le préconisent certains auteurs [135], des recommandations officiel-
les pourraient un jour être émises, dans le but de dépister ces surcharges en fer au
cours du syndrome métabolique. L’on pourrait donc s’attendre dans quelques
années à voir augmenter le nombre de prescriptions des saignées en France. Faut-il
encore en mesurer l’utilité, mais aussi l’acceptabilité en terme de coût liée au
recours à l’IRM, qui reste nécessaire pour l’instant dans l’arbre décisionnel
diagnostic et thérapeutique. L’activité liée aux saignées, également pour des
raisons de coût et de disponibilité pourrait se déplacer en ville grâce à la
coordination du médecin généraliste. Une telle éventualité est déjà envisagée et
proposée par l’ANAES aujourd’hui en ce qui concerne la prise en charge de
l’HCH ; une telle pratique est encore pour l’instant soumise à de nombreuses
conditions et pose surtout le problème de l’élimination des déchets sanguins. En
attendant, il n’est pas possible de condamner la pratique actuelle des médecins
généralistes qui consiste à prescrire un bilan martial à titre systématique car il
conduit à l’identification de la moitié des cas d’HSD et presque à 30% des cas
d’HCH, qui représentent à elles deux plus de 80% du spectre étiologique des
surcharges en fer traitées par saignées.
101
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117
GLOSSAIRE DES ABREVIATIONS.
ADN : Acide Désoxyribo-Nucléique.
ADO : Anti-Diabétiques Oraux.
AFSSAPS : Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.
AGL : acides gras libres.
AMM : autorisation de mise sur le marché.
ANDEM : agence nationale pour le développement et l’évaluation médicale.
ANAES : Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé.
A-L-A S 2 : Acide delta-amino-lévulinique synthétase 2.
AOMI : artérite oblitérante des membres inférieurs.
ARN m : Acide Ribo-Nucléique messager.
AVC: accident vasculaire cérébral.
BMI : Body Mass Index
β2µ-glob. : Béta2 micro globuline.
β2µ-glob -/- : caractérise les modèles murins ayant le gène de la Béta2-
microglobuline, invalidé.
CCA : chondrocalcinose articulaire.
CHC : Carcinome hépato-cellulaire.
CHF : Concentration hépatique en fer.
CMH : complexe majeur d’histocompatibilité.
CST : Coefficient de saturation de le transferrine.
C282Y+/+ : caractérise les patients homozygotes pour la mutation C282Y.
DNID : diabète non insulino-dépendant).
DMT1 : Divalent Metal Transporter 1.
Dcytb : Duodenal cytochrome b.
FE : ferritine érythrocytaire.
FLT : Fer lié à la transferrine.
FNLT : Fer non lié à la transferrine.
γGT : gamma glutamyl transferase
Hb : Hémoglobine.
HCH: hémochromatose héréditaire.
118
HDL : High density lipoprotein.
HeLa (cellule) : modèle cellulaire conçu pour exprimer en bonne quantité la
molécule HFE.
HepG2 (cellule) : lignée cellulaire humaine, bien différenciée, issue d’hépatome.
HFE : High Fer.
HFE-/- : ayant le gène HFE invalidé.
HMG : hépatomégalie.
HOMA = Homeostasis model assessment of Insulin Resistance = Insuline
(mUI/l) / glycémie (µmol/l).
HSD : Hépatosidérose dysmétabolique.
HTA : hypertension artérielle.
IC : intervalle de confiance.
IHF : index hépatique en fer = CHF*/âge (µmol/g/an).
IPP : Inter phalangienne proximale.
IR : Insulino-Résistance
IRHIO: Insulin Resistance associated Hepatic Iron Overload.
IRM: Imagerie par résonance magnétique.
MCP : désigne une articulation métacarpo-phalangienne.
HLA : Human Leucocyte Antigene.
IDM:infarctus du myocarde.
IRE: Iron Regulatory Element.
IRP : Iron Regulatory Protein.
LAM : Leucémie aigue myéloblastique.
LDL Low Density Lipoprotein.
LPS : Lipo-polysaccharides.
MCP : métacarpo-phalangienne.
MDA : malondialdéhyde.
mk/mk : modèle murin de souris présentant une mutation homozygote dans le
gène de DMT1.
NAFLD: Non Alcoholic Fatty Liver disease.
NASH : Non Alcoholic Steato Hepatitis= Stéato-hépatite non alcoolique.
NFS: numération formule sanguine.
NRAMP : Natural Resistant-Associated Macrophage Protein (Nramp2= DMT1).
OMIM : Online Mendelian inheritance in Man.
119
OMS : organisation mondiale de la santé.
PBG : Porphobilinogène.
PBH: Ponction Biopsie Hépatique.
PCT: Porphyrie Cutanée Tardive.
PK : Pyruvate kinase.
Rsol Tf : récepteur soluble de la transferrine.
RTf (1ou2): Récepteur de la transferrine (1ou2).
RMO : recommandations médicales opposables
SFT: stimulator of Fer transport.
Sla: Sex linked anemia.
SLC 11 A3: solute carrier family 11 member A3.
SMG : splénomégalie.
Tf: transferrine.
TIBC: total iron binding capacity (capacité total de fixation du fer par le sérum)
TNF alpha: Tumor Necrosis Factor Alpha.
TSA : Tronc Supra Aortique.
TSH : thyroïd stimulating hormone
UPD: Uroporphyrinogène Décarboxylase.
USF2 :upstream stimulatory Factor2.
VPP: valeur prédictive positive.
120
ANNEXES.
Suppléments 1 à 3 ……………..p121 à 125
Schémas 1 à 8…………………..p126 à 134
Tableaux 1 à 10 ………………. p135 à 145.
121
Supplément N°1
HETEROGENEITE ALLELIQUE DE L’HEMOCHROMATOSE HFE1.
Les autres mutations faux-sens :
-La mutation R6S dans le premier exon (g18G>C : arginine ->Sérine) est une
mutation privée, décrite au cours d’une greffe hépatique. Le donneur était C282+/-
et le receveur R6S +/-[12, 50].
-La mutation V53M dans l’exon 2 (g157 C>A : Val-> Met) a été décrite
uniquement chez des sujets noirs et des bushman, au sein d’une population
contrôle en Afrique du Sud, selon l’étude de De Villiers et al. [79]
-En revanche, dans la même étude, la mutation V59M (g175 G>A ; Val ->
Met) a été observée chez un Sud-africain d’origine caucasienne [79].
-La mutation S65C, dans le second exon (g193A>T : Ser->Cys) est également
exclusive des mutations C282Y et H63D. Elle est bien plus rare que celles des
mutations C282Y et H63D. Maximale en Suède, elle touche 0.6 à 1.95% des
populations d’origine caucasienne [180]. La fréquence allélique de la mutation est
enrichie sur les chromosomes non C282Y et non H63D parmi les patients ayant
une ferritine ou un CST augmenté [50, 180]. Ces patients présentant un paramètre
biologique du fer augmenté, ont une surcharge avérée plus fréquente lorsqu’ils
sont porteurs de la mutation S65C qu’en l’absence totale de mutation HFE.
L’hétérozygotie peut être stricte ou composite, en association avec les mutations
H63D ou C282Y [180]. La mutation S65C peut ainsi conduire à des surcharges
martiales minimes à modérée. Cependant la mutation n’est retrouvée en
association ni à une expression clinique, ni au développement d’une fibrose
hépatique étendue.
-La mutation G93R (g277 G>C : Gly-> Arg) est privée [12, 50], a été décrite
chez un patient hémochromatosique à l’état composite C282Y/G93R.
-Une autre mutation privée, I105T (g314T>C : Thr-> Ile) concernait un patient
atteint d’hémochromatose et présentait l’hétérozygotie composite H63D/I105T
[12, 50].
122
-La mutation Q127H dans l’exon 3 (g381 A>C : Gln->His) est particulière;
elle a été retrouvée, tout comme la mutation S65C, en association avec la mutation
H63D à l’état hétérozygote composite chez une jeune fille de 11 ans, qui présentait
une porphyrie variegate [79], due à la mutation R59W du gène de la
protoporphyrinogène oxydase.
-La mutation E168Q (g502 G>C) consiste en la substitution d’un glutamate par
une glutamine au niveau de l’exon 3 [50].
-La mutation privée A176V (g527C>T : Ala-> Val) a été décrite à l’état
hétérozygote [12, 50].
-Une autre mutation en position 282 substitue une sérine à la place d’une
cytosine (g845G>C = C282S). [12, 50]
-La mutation Q283P (g848 A>C: Gln->Pro) ; dans l’exon 4.
-Une dernière mutation faux-sens R330M (g989 G>T) est décrite chez 1 des 13
patients hémochromatosiques, d’origine caucasienne qui étaient indemnes des
mutations C282Y et H63D dans la cohorte Sud Africaine [79].
Les mutations non sens.
Elles induisent des codons « stop »; il s’agit de la mutation R74X dans l’exon 2 et
des mutations E168X et W169X [12, 50] dans l’exon 3 associé à des tableaux
d’hémochromatoses (à l’état hétérozygote composite C282Y/ W168X ou W169X).
Des délétions.
Elles ont également été décrites dans l’exon2 (L50-L57delinsC et V68 delins G) et
dans l’exon 3 (P160 delins P) à l’état hétérozygote [50].
Des mutations d’épissage.
Deux sont connues : la mutation IVS5 +1G>A, dans le cinquième exon et la
mutation IVS3 +1 G>T décrite chez un patient présentant une hémochromatose
typique associée à l’hétérozygotie C282Y+/- [78].
123
Supplément N°2.
REFERENCES MEDICALES OPPOSABLES
(Journal officiel du 15/12/1998).
Thème 52 référence 1 : « Il n’y a pas lieu pour dépister une carence martiale de
prescrire simultanément un dosage de fer sérique et de la ferritinémie* ».
* « Le dosage de la ferritine sérique est le test le plus sensible et le plus
spécifique, sauf s’il existe un syndrome inflammatoire ou une ferritinémie normale
n’exclut pas un carence martiale ».
Thème 52 référence 2 : « Il n’y a pas lieu de prescrire un dosage de fer sérique en
présence d’une ferritinémie basse ».
RECOMMANDATIONS DE L’ANDEM
(de novembre 1996.)
Hématologie en pratique courante.
-L’évaluation d’un éventuel déficit martial nécessite le dosage de la ferritine ou le
dosage simultané du fer sérique et du CST*.
-Le fer sérique ne peut être interprété que s’il est associé à la détermination du
CST.
-Un hémogramme et un dosage de la ferritine sérique devraient être pratiqués au
cours du premier trimestre de chaque grossesse.
-Toute femme réglée devrait avoir une évaluation de ses réserves en fer au moins
une fois tous les 5 ans, en dehors de la grossesse et des circonstances
pathologiques.
-Toute femme réglée donneuse de sang devrait avoir un dosage de la ferritine
sérique avant lors du premier don d’érythrocyte, puis une fois par an si elle est
donneuse régulière.
124
Supplément N°3.
LE DEPISTAGE DE L’HEMOCHROMATOSE.
L’HCH est la maladie héréditaire potentiellement la plus fréquente en France.
Cette maladie, facile à diagnostiquer, expose à des complications graves que les
saignées préviennent efficacement [2], avec une bonne observance. L’HCH pré-
sente donc des conditions propices à la réalisation d’un dépistage en population
générale.
La méthode du dépistage phénotypique pose le problème des faux positifs et
des faux négatifs (hyperferritinémies non liées à l’HCH et authentiques C282Y
homozygotes sans anomalie biologiques des paramètres du fer). Ce type de
dépistage permet d’identifier directement les patients avec surcharge contrairement
au dépistage génotypique. L’élévation du CST est le paramètre biologique le plus
sensible pour un dépistage de l’HCH. Le choix d’une valeur seuil élevée pour le
CST augmente la spécificité vis à vis de l’homozygotie C282Y ; l’abaissement de
cette valeur permet d’augmenter la sensibilité au détriment de la spécificité et de la
valeur prédictive positive [169,110]. Une valeur seuil élevée pour le CST aug-
mente aussi le nombre de sujets présentant une hyperferritinémie associée [164]. Il
semble pourtant difficile d’établir un modèle prédictif fiable chez la femme pré
ménopausée car la carence en fer est fréquente [111]. Il ne semble pas exister de
cirrhose avant l’âge de 35 ans [84]. Une première évaluation biologique pourrait
intervenir au cours de la trentaine, afin de détecter les formes précoces et une
deuxième vers l’âge de 50 à 55 ans pour détecter les formes tardives (surtout chez
la femme) [110]. L’ANAES a comparé les coûts de dépistage génotypique et phé-
notypique en population générale avec comme seul but l’identification des sujets
homozygotes, chez les hommes de plus de 35 ans et chez les femmes de plus de 55
ans. Deux stratégies sont proposées pour un dépistage phénotypique : la recherche
de l’homozygotie est réalisée après mise en évidence d’une élévation du CST à
deux reprises ou en cas d’élévation du CST puis de la ferritinémie. Cette dernière
est plus coûteuse que la première. Le dépistage génotypique serait plus écono-
mique que le dépistage phénotypique en dessous d’un coût par test génétique de 15
euros. Cette évaluation ne prend toutefois pas en compte la nécessité de réaliser
125
CST et ferritine après dépistage génotypique pour poser l’indication aux saignées
ni le surcoût lié à la prise en charge des faux positifs. Le choix de la période néo-
natale pour un dépistage génotypique serait adapté à la logique d’un dépistage de
masse, toutefois l’éventuel retentissement psychologique familial de l’annonce du
génotype pose problème, car l’évolutivité est incertaine et le délai de latence biolo-
gique, potentiellement long. Le dépistage génotypique expose également à un
risque de discrimination génétique par les assurances [110]. La méconnaissance de
l’histoire naturelle et de la pénétrance de la maladie, la variation d’expression
selon le sexe, la difficulté du choix entre méthode génotypique et phénotypique, la
difficulté du choix des valeurs seuils expliquent pourquoi le travail de l’ANAES
ne permet pas de conclure en faveur d’un dépistage de l’HCH en population
générale [12]. En revanche, le dépistage familial est préconisé [12]. L’HAS recom-
mande un dépistage phénotypique chez les parents du probant et génotypique et
phénotypique dans la fratrie, où le risque est majeur [83] : un bilan tous les 3 à 5
ans est conseillé en cas d’homozygotie C282Y sans élévation des paramètres du
fer, et tous les ans en cas d’élévation du CST seul. En cas d’hétérozygotie C282Y,
aucun suivi n’est nécessaire sauf en cas de perturbation de la biologie. Un
génotypage du conjoint est utile si le couple a plus de deux enfants, sinon le
génotypage individuel de la descendance est préconisé à l’âge adulte [12].
126
Schéma N° 1. Répartition du fer dans l’organisme.
(D’après [18, 19, 23]).
APPORT : 10 à 20 mg/jour. | | V
ABSORPTION : 1mg/jour.
L’organisme contient 3 à 5g de fer (30 à 50mg/kg).
POOL DE RESERVE
20 à 30% du fer total.
POOL DE
TRANSPORT 0.1%
du fer total.
POOL FONCTIONNEL
60 à 70% du fer total.
FOIE+RATE
(hépatocytes,
macrophages et cellules
de Kupffer).
Ferritine (95%) et
Hémosidérine (5%)
SANG
Transferrine
Fer lié à la
transferrine
(4mg).
MOELLE OSSEUSE
+FOIE
-Hémoglobine :
60% à 70% du fer total.
(environ 2.5g)
-Autres protéines hémininiques
(myoglobine cytochromes…)
et non héminiques :
5 à 10% du fer total.
| | V
PERTE : 1mg/jour.
128
Schéma N°3. Mouvement du fer dans le duodénocyte mature et le macrophage (d’après Beaumont C. M/S 2004 ; 20: 68-72).
A : le fer non héminique est capté à l’apex villositaire par le couple « Dcyt b-DMT1 » et le fer héminique par une hème-oxygénase. Le
fer peut ressortir au pole basal grâce au couple Ferroportine-héphaestine », s’il n’est pas enfermé auparavant au sein de la coque
protéique formée par la ferritine jusqu’à desquammation dans la lumière digestive.
B : Le fer est essentiellement capté par les macrophages du système réticulo-endothélial par hémophagocytose des globules rouges
sénescents dans le but d’être recyclé à destination de l’érythropoïèse à raison de 25mg/j [5]. Le fer pénètre du phagosome dans le
cytoplasme grâce à l’activité d’une hème oxygénase ; il ressort grâce au couple « ferroportine-céruléoplasmine ».
131
Schéma N°6.
La protéine HFE, composée d’un domaine transmembranaires et de trois
domaines globulaires extra-cellulaires dont α3 qui crée une liaison non covalente
avec la β2-µglobuline (d’après Busque L. Le clinicien ; janvier 2000).
132
Schéma N°7 : Hyperferritinémie familiale chez P27
ferritine : 600 µg/l
P 25
ferritine :
2000 µg/l
ferritine :
1920 µg/l
ferritine :
280 µg/l.
13 ans 9 ans 5 ans
ferritine:
400 µg/l
133
Schéma N°8. Diagnostic des surcharges en fer : 1ère partie
Hyperferritinémie sans surcharge en fer.
Hypersidérémie et/ou augmentation de la saturation de la transferrine
sans surcharge en fer.
(IRM- Biopsie hépatique)
Surcharge en fer.
HYPERFERRITINEMIE
Interrogatoire - Examen clinique NFS – Réticulocytes
ALAT- ASAT – γGT – CRP Saturation transferrine
Glycémie à jeun - bilan lipidique
-Bilan systématique
-Asthénie
- Dépistage familial de l'HCH
-Arthralgies -Cytolyse hépatique -Diabète
Cytolyse (foie, muscle, hématies) (1) Diminution transferrinémie : - insuffisance hépatocellulaire (2) - syndrome néphrotique… Alcool
Cytolyse (foie, muscle, hématies) (1) Augmentation de la synthèse de la ferritine : - Activation macrophagique - syndrome inflammatoire - érythrophagocytose - maladie de surcharge (Gaucher) - Alcoolisme chronique (1) : après sevrage: normalisation du CST et du fer sérique en une semaine et de la ferritine en 3 mois - hyperthyroïdie - maladies tumorales (hématologiques, viscérales)
- syndrome hyperferritinémie-cataracte.
134
Schéma N°8bis. Diagnostic des surcharges en fer : 2ème partie
NON OUI
Parfois : HSD HCH type HFE IV Acéruléoplasminémie
CST CST N ou CST
Homozygotie C282Y
Surcharge en fer non liée au gène HFE
Surcharges acquises : - apport excessif en fer - Hépatosidérose dysmétabolique - maladie chronique du foie - maladies hématologiques ( dysérythropoïèses) - porphyrie cutanée tardive. Surcharges héréditaires : - hémochromatose HFE III, IV et V. - hémochromatose juvénile. - atransferrinémie héréditaire
- surcharge africaine
Hémochromatose liée au gène HFE
Hétérozygotie composite C282Y/H63D
+/- - Dysmétabolisme
ou Alcool ou Déficit en pyruvate Kinase
ou Trait thalassémique
135
Tableau N°1 : Besoins et apports quotidiens recommandés en fer. (D’après [18]).
Besoins (mg)
Pertes (mg) Apports
recommandés (mg)
Nourrisson
(taux d’absorption :
30%)
0.6 0.2 3.5
Enfant
0.3 0.4 6
Adolescent
0.7 0.8 13
Adolescente
0.4 1.4 16
Homme
(taux d’absorption :
10 à 15%)
1mg
(60% par
desquamation intes-
tinale, 30% par pertes
cutanées et 10% par
pertes urinaires.)
9
Femme
1.6 14
Femme enceinte
(taux d’absorption :
20%)
3.6 0.9 29
Femme allaitante
1.1 9.5
Femme
ménopausée
0.9 8
136
Tableau N°2. Synthèse de l’hème et porphyrie. (D’après [20])
Enzymes
Porpphyrie Type Transmission
ALA deshydratase Porphyrie de DOSS Hépatique aigue. Autosomique récessive
PBG désaminase Porphyrie aigue intermittente Hépatique aigue. Autosomique dominante
Uroporphyrinogène III
Synthétase Maladie de Günther Erythropoïétique Autosomique récessive
Uroporphyrinogène III
Décarboxylase Porphyrie cutanée tardive Hépatique
Autosomique
dominante / sporadique
Coprporphyrinogène
Oxydase Coproporphyrie Héréditaire Hépatique aigue. Autosomique dominante
Protoporphyrinogène
Oxydase Porphyrie variegata Hépatique aigue. Autosomique dominante
Ferrochélatase Protoporphyrie érythropoïétique Erythropoïétique Autosomique dominante
137
Tableau N°3. Gènes dont les mutations, délétions ou invalidations entraînent des pathologies du métabolisme du fer. (d’après [19]).
Gène muté ou non exprimé Pathologie humaine Modèles animaux Fonction
DMT1
souris mk/mk,
rats de Belgrade: carence en fer
Transporteur transmembranaire (influx).
Ferroportine Surcharge systémique en fer. poisson zèbre :
anémie Transporteur transmembranaire (efflux).
Héphaestine Souris sla 1: Carence en fer
Ferroxydase entérocytaire (efflux).
Transferrine Atransferrinémie :
Anémie + surcharge en fer Anémie Transporteur plasmatique du fer.
Céruléoplasmine Acéruléoplasminémie :
Surcharge en fer Surcharge en fer Ferroxydase (efflux).
Β2-microglobuline Surcharge en fer Association aux molécules HLA de classe I.
HFE Hémochromatose génétique. Surcharge en fer Mal connue. (Molécule HLA de classe I).
Récepteur de la transferrine 2. Surcharge en fer Captation hépatocytaire de fer.
Hepcidine Hémochromatose juvénile Surcharge en fer Régule l’absorption et la séquestration
macrophagique du fer.
Hémojuvéline Hémochromatose juvénile Non précisé
Frataxine Ataxie de Friedreich Régulation du fer mitochondrial.
Panthoténate kinase 2 Syndrome d’Hallevorden-Spatz Synthèse du CoA.
ALA synthétase 2 Anémie sidéroblastique. Synthèse de l’hème.
ABC-7 Anémie sidéroblastique, ataxie Export mitochondrial de Cluster Fe-S.
H-Ferritine Surcharge en fer Stockage cellulaire du fer
138
Tableau N°4. Le niveau d’activité IRP, l’expression moléculaire de RTf1, de la ferritine, de DMT1 et de la ferroportine sont influencés différemment par la mutation C282Y, selon le type cellulaire concerné au cours de l’Hémochromatose liée à HFE.
Récepteur de la transferrine
Ferritine. Activité IRP.
DMT1=Nramp 2. Ferroportine.
Entérocyte. (il existe un
flux trans-entérocytaire
de fer à partir de la
lumière digestive,
probablement initié par
une fuite au pole basal).
Expression normale
(mais diminuée par
rapport aux
surcharges
secondaires) [59].
Diminuée [58]. augmentée [58].
Expression
faussement normale
(au dessus de ce
qu’elle devrait être,
compte tenu de la
surcharge [66]) ou
augmentée [60, 61].
Expression
faussement normale
(au dessus de ce
qu’elle devrait être,
compte tenu de la
surcharge) [66] ou
augmentée [60, 61].
Macrophage, cellule de Kupffer. Il existe une
faible teneur en fer
(ferritine modérément
augmentée) liée à une
fuite de fer qui explique
la relative préservation
réticulo-endothéliale.
Expression
augmentée [68].
L’expression est
modérément
augmentée (en
rapport avec le
degré de
surcharge de
l’organisme)
[70-71].
augmentée [40]. Expression supposée
augmentée [73].
L’Hépatocyte est surchargé en fer.
Expression diminuée
[69].
Expression
augmentée [69].
Supposée diminuée
au vu de la surcharge
hépatocytaire [69].
139
Tableau N°5. Classification des surcharges en fer primaires (d’après [40, 50]).
Mode de
transmission locus Gène impliqué
Type de surcharge
Phénotype clinique observé
Phénotype biologique observé
HFE1.
Autosomique
récessif. 6p21. HFE
Parenchymateuse
ou mixte
Surcharge hépatique,
pancréatique,
cardiaque
de l’adulte
CST* augmenté puis
hyperferritinémie.
HFE 2A.
HFE 2B.
Autosomique
récessif.
Autosomique
Récessif.
1q21.
19q13.
Hémojuvéline
Hepcidine (HAMP).
Parenchymateuse
Hémochromatose
juvénile.
Défaillance cardiaque
et insuffisance
gonadotrope vers
30 ans.
CST* et ferritine
augmentés.
HFE 3.
Autosomique
récessif. 7q22.
Récepteur de la
transferrine 2.
Parenchymateuse
ou mixte Comme HFE1.
CST* et ferritine
augmentés.
HFE 4.
Autosomique
Dominant. 2q32.
SLC 11 A3 = SLC 40
A1
(Ferroportine)
Mésenchymateuse
ou mixte.
Surcharge hépatique
et SPLENIQUE.
Ferritine augmentée
CST normal ou bas
tendance à l’anémie
avec les saignées.
HFE5.
Autosomique
Dominant. 11q13. H-Ferritine. Comme HFE1. Phénotype semblable à HFE1.
140
Tableau N° 5 bis (suite) Classification des surcharges en fer primaires (d’après [40, 50]).
Mode de
transmission locus Gène impliqué
Type de surcharge
Phénotype clinique observé
Phénotype biologique observé
Atransferrinémie
congénitale.
Autosomique
récessif 3q21. Transferrine. Comme HFE1.
Surcharge hépatique,
pancréatique, rénale,
myocardique, thyroïdienne.
Hyperferritinémie
et anémie
Acéruléo-plasminémie.
Autosomique
récessif. 3q21-24. Céruléoplasmine Surcharge mixte.
Surcharge mixte,
hépatique, pancréatique
et structures cérébrales.
Hyperferritinémie
mais CST bas.
Anémie.
Hémochromatose
africaine.
? ?
?
Non liée à HFE
Mixte. Surcharge hépatique.
Risque de CHC*
Hémochromatose
néonatale.
? ? ? Parenchymateuse
.
Surcharge massive.
insuffisance hépatocellulaire
sur cirrhose.
Mortalité périnatale.
CST* et ferritine
augmentés.
Syndrome GRACILE
Autosomique
récessif. 2q33-37. BCS1L.
Retard de croissance,
Amino-acidurie, cholestase,
acidose lactique surcharge
en fer, décès précoce.
141
Tableau N°6. Troubles de l’érythropoïèse occasionnant des surcharges en fer secondaires (d’après [121]).
A- Causes des surcharges en fer liées
à un apport transfusionnel.
-Dysérythropièses congénitales sévères : β thalassémies majeures et
hémoglobines hyper-instables, déficit en pyruvate kinase, autres dyséry-
thropoièse congénitales.
- Dysérythropièses congénitales intermédiaires aggravées par un
hypersplénisme.
- Dysérythropièses acquises, anémies réfractaires du sujet âgé.
-Insuffisance de production :
-Hypoplasies congénitales : Fanconi ; Blackfan-Diamond.
-Hypoplasies idiopathiques du sujet âgé.
-Insuffisance rénale réfractaire à l’érythropoïétine.
-Ostéopétroses.
-Erythroblastopénies primitives ou secondaires, chroniques.
-Aplasies médullaires.
-Maladies hémolytiques sévères : Drépanocytose, sphérocytose,
certains déficits enzymatiques ;α thalassémies
B- Causes des surcharges en fer liées à une hyperabsorption.
-Dysérythropoièses à moelle riche. -Traitement martial +/- alcool dans un contexte d’hyperabsorption.
-contexte hémolytique sans dyérythropoièse (rare).
142
Tableau N°7. Définitions du syndrome métabolique (d’après [131]).
OMS EGIR NCEP-ATP III.
BMI (kg/m²)
Tour de taille(cm)
Rapport Taille/Hanche
> 30
>0.9 (H) / 0.85(F)
> ou égal 94 (H) / 80 (F)
< 102 (H) / 88 (F)
PAS/PAD (mm Hg)
Traitement
> ou égal 140 / 90 > ou égal 140 et > ou égal 90
+
> ou égal à 130 / 85
Glycémie à jeun (g/l)
Glycémie à 2h (g/l)
Traitement
> ou égal à 1.10 et/ou
> ou égal à 1.40 et/ou
+
> ou égal à 1.10 et < 1.26 > ou égal à 1.10 et < 1.26
Insulinémie HOMA > Q4 A jeun > Q4
Triglycérides (g/l)
HDL cholestérol (g/l)
Traitement
> ou égal à 1.50 et/ou
< 0.35 (H) / 0.39 (F)
> 1.75 et/ou
< 0.39 et/ou
+
> ou égal à 1.50 et/ou
< 0.40 (H) / 0.50 (F)
Microalbuminurie
+
Définition du syndrome Insulinémie et ou glycémie
avec 2 autres critères.
Insulinémie à jeun avec 2
autres critères 3 critères.
OMS : organisation mondiale de la santé ; EGIR : groupe européen pour l’étude de l’insulino-résistance ; NCEP-ATP III : national
cholesterol education program expert pannel on detection evaluation and treatment of high blood cholesterol in adults.
143
Tableau N°8 Expression des différents éléments du syndrome métabolique
au cours de l’HSD et des NASH.
NASH
[125, 132, 138]. HSD
[16, 136].
Au moins 1 élément du syndrome métabolique
Dans 95% des cas.
Surpoids 77.4% des cas Dans 40 à 72% des cas.
Trouble du métabolisme glucidique
>51.6% des cas Dans 43% des cas.
Dyslipidémie Dans 58.1% des cas. Dans 65 à 79.5% des
cas
HTA Dans 32% des cas 19% à 51% des cas
Hyperferritinémie Dans 53 à 62% des cas Dans 100% des cas.
Surcharge en fer Dans 23 à 58% des cas Dans 100% des cas
144
Tableau N°9. Présence d’une hyperferritinémie ou d’une surcharge en fonction
de la présence d’une HTA, d’un diabète, d’une IR*, ou d’une NASH. (D’après [125, 132, 133, 135, 138, 181])
Hyperferritinémie Surcharge en fer.
HTA
Dans 21% des cas Non évaluée.
Diabète Dans 47 % des cas Non évaluée.
Syndrome
métabolique Dans 15 à 30% des cas Non évaluée.
NASH Dans 53 à 62% des cas Dans 23 à 58 % des cas
145
Tableau N°10. Facteurs influençant les paramètres biologiques du fer. Nomenclature des examens biologiques (d’après [151,163])
Diminution Augmentation Valeurs normales Nomenclature
Fer sérique
Anémie ferriprive Syndrome inflammatoire
Infections cancer.
Surcharges en fer. Déficits en folates et B12.
Hépatites, cirrhoses, éthylisme.
Hémolyses, leucémies aigues,
syndromes myélodysplasiques.
Homme adulte :
10-30 µmol/l.
femme adulte :
8-28µmol/l.
B30.
Transferrine
Surcharge en fer. Syndromes inflammatoires, infections.
Insuffisance hépatocellulaire,
néphropathies, malnutrition, cancer.
Atransferrinémie constitutionnelle.
Anémie ferriprive. Grossesse.
Contraceptifs oraux.
1.8 à 3.2 g/l B35.
CST*
Déplétion en fer. Grossesse.
Syndromes inflammatoires, infections.
Surcharges en fer. Anémies hypersidérémiques.
Homme adulte :
20 à 40%
Femme adulte :
15 à 35%
B50.
Ferritine
Déplétion en fer.
Surcharges en fer. Syndromes inflammatoires, infections,
Cancers.
Hépatites, cirrhoses, éthylisme, cytolyse.
Hémoglobinopathies, leucémies aigues.
Hyperthyroïdie.
Syndrome cataracte-hyperferritinémie.
Syndrome d’activation macrophagique.
Homme adulte :
30 à 300 µg/l.
Femme adulte :
20 à 200µg/l.
B70.
R sol Tf*
Surcharges en fer. Hypoplasie érythroblastique.
Déficit fonctionnel en fer.
Polyglobulies anémies hémolytiques
Anémies mégaloblastiques.
Variable selon les
techniques. B60.
146
ANNEE : 2006.
NOM ET PRENOM DE L’AUTEUR : MERRET Laurent.
DIRECTEUR DE LA THESE : Pr. FREDERIC GALACTEROS.
TITRE DE LA THESE : Interprétation des hyperferritinémies à l’heure du
diagnostic de l’hémochromatose génétique.
Depuis dix ans l’identification de la mutation C282Y a bouleversé la stratégie
diagnostique de l’hémochromatose. De nombreux progrès, réalisés tant sur les plans
moléculaire qu’épidémiologique, ont permis d’identifier une nouvelle entité,
l’hépatosidérose dysmétabolique. Nous montrerons, en nous appuyant sur une revue
de la littérature, l’importance jouée par le syndrome métabolique au niveau du
spectre des surcharges en fer. Nous tenterons de donner une stratégie diagnostique
quant à l’identification des surcharges en fer à partir de cette anomalie biologique
potentiellement fréquente en médecine générale qu’est l’hyperferritinémie. Nous
essaierons également de dégager les enjeux thérapeutiques soulevés autour de ce
thème. Nous étudierons le spectre des surcharges en fer au sein d’une cohorte de
patients traités par saignées ; nous identifierons les circonstances de découverte qui
mènent au diagnostic des surcharges en fer, en tentant de confronter l’état des
connaissances et des recommandations à l’état des pratiques.
MOTS-CLES :
- surcharge en fer
- hémochromatose génétique
- syndrome métabolique X
- stéatose hépatique
ADRESSE DE L’UFR : 8, rue du général Sarrail 94010 CRETEIL CEDEX
147
Titre de la thèse :
Hyperferritinemia at the time of the hereditary haemochromatosis diagnosis.
Résumé en anglais
Since ten years, the discovery of the homozygote C282Y mutation in the HFE gene,
allowed to improve knowledges about iron metabolism, epidemiology of
haemochromatosis and simplified the diagnosis of this disease. In the same time, Insulin-
Resistance related hepatic iron overload (IRHIO) was described. Hyperferritinemia and
iron overload related to the metabolic syndrome might be quite frequent in the general adult
population, in everydays physicians’ practising. We will describe the aetiological spectrum
of iron overloads in a cohort of phlebotomized patients, regarding phenotype and genotype
data. We will try to underline the importance of the dysmetabolic pathway in such a cohort.
We will examine then, the circumstances that leed to the dagnosis of iron overload, and will
confront physicians’ practises to the official recommandations.