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AXE 3 : ORGANISATION DES FILIERES ET
VALORISATION DES PRODUITS AGRICOLES
PROGRAMME 3.1. : DYNAMIQUE DES FILIERES COTONNIERES
D'AFRIQUE CENTRALE FACE AU CONTEXTE GLOBAL ET LOCAL
DIAGNOSTIC DE LA QUALITE ET DU MECANISME
D'INCITATION ECONOMIQUE DES PRODUCTEURS DE
COTON EN CENTRAFRIQUE
Rapport d’étude
David KADEKOY-TIGAGUE Correspondant National
Bernard HAMADOU BELLO Chercheur
Mars 2007
lalalaladededede
APPUI A LA RECHERCHE REGIONALE POUR LE DEVELOPPEMENT
DURABLE DES SAVANES D’AFRIQUE CENTRALE
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TABLE DES MATIERES
LISTE DES ABREVIATIONS ............................................................................................................................ 3
RESUME ............................................................................................................................................................... 4
ABSTRACT ........................................................................................................................................................... 5
I. CONTEXTE ET JUSTIFIATION ................................................................................................................... 6
II. OBJECTIFS DE L’ETUDE ............................................................................................................................ 7
2.1. OBJECTIF GENERAL DU PROGRAMME ............................................................................................................ 7
2.2. OBJECTIFS DU PROJET ................................................................................................................................... 7
2.3. OBJECTIFS SPECIFIQUES DE L’ETUDE ............................................................................................................ 8
III. METHODOLOGIE ........................................................................................................................................ 8
3.1. APPROCHE METHODOLOGIQUE ..................................................................................................................... 8
3.2. OUTILS D’ INVESTIGATION ............................................................................................................................ 8
3.3. ZONE D’ETUDE ............................................................................................................................................. 8
3.3.1. Milieu physique ................................................................................................................................... 9
3.3.2. Milieu humain ...................................................................................................................................... 9
3.3.3. Activités agro-économiques ............................................................................................................... 10
IV. RESULTATS ET DISCUSSION ................................................................................................................. 10
4.1. STRATEGIES D’AMELIORATION DE LA QUALITE DU COTON-GRAINE ............................................................ 10
4.1.1. Application des techniques culturales appropriées ........................................................................... 11
4.1.2. Amélioration des techniques de récolte et des techniques post-récolte ............................................. 12
4.2. MECANISME D’ INCITATION ECONOMIQUE DES COTONCULTEURS POUR L’AMELIORATION DE LA QUALITE DU
COTON-GRAINE ................................................................................................................................................. 12
4.2.1. Organisation des marchés de commercialisation du coton-graine ................................................... 12
4.2.2. Fixation du prix d’achat aux producteurs et autres mesures incitatives ........................................... 13
4.3. CONTRAINTES AU MECANISME D’ INCITATION ECONOMIQUE DES PRODUCTEURS ........................................ 16
V. CONCLUSION ET PERSPECTIVES ......................................................................................................... 18
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES .......................................................................................................... 22
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LISTE DES ABREVIATIONS
AOC : Afrique de l’Ouest et du Centre
ARDESAC : Appui à la Recherche Régionale pour le Développement Durable des Savanes d’Afrique Centrale
BM : Banque Mondiale
CIRAD : Centre de Coopération Internationale pour la Recherche Agricole et le Développement
CORAF : Conseil Ouest et Centre Africain pour la Recherche et le Développement Agricole
FCFA : Franc de la Communauté Financière Africaine
FIDA : Fonds International de Développement Agricole
FMI : Fonds Monétaire International
GIR : Groupement d’Intérêts Ruraux
ICRA : Institut Centrafricain de la Recherche Agronomique
IRCT : Institut des Recherches sur le Coton, les Textiles et fibres exotiques
OP : Organisations des Producteurs
PPI : Production et protection intégrée
PRASAC : Pôle régional de recherche appliquée au développement des savanes d’Afrique Centrale
PTI : Programme triennal d’investissement
RCA : République Centrafricaine
RD : Recherche-développement
SOCADETEX : Société Centrafricaine de Développement de Textile
SOCOCA : Société Cotonnière Centrafricaine
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RESUME
Dans le cadre de l’analyse des fonctions critiques des filières cotonnières d’Afrique Centrale, une étude diagnostic de la qualité et du mécanisme d’incitation économique des producteurs de coton en Centrafrique a été réalisée. Cette étude vise à analyser les stratégies mises en œuvre par les sociétés cotonnières pour inciter les cotonculteurs à produire et vendre du coton-graine de bonne qualité. La méthodologie adoptée dans le cadre de cette étude est basée sur une recherche bibliographique couplée avec des entretiens semi-directifs avec les responsables des sociétés cotonnières, de la vulgarisation et les producteurs. Le principal outil d’investigation est un guide d’entretien orienté essentiellement sur les questions relatives à l’organisation et au fonctionnement de ce segment.
L’analyse des données collectées a permis de mettre en exergue les stratégies d’amélioration de la qualité du coton-graine ainsi que le mécanisme d’incitation économique des cotonculteurs. Les stratégies visant l’amélioration de la qualité du coton-graine portent essentiellement sur les actions telles que (i) la pratique des techniques culturales recommandées par la recherche ; (ii) les techniques de récolte sélective et soignée du coton-graine ; (iii) le triage du coton-graine ; (iv) les techniques de séchage du coton-graine ; et (v) les techniques de stockage du coton-graine. Le mécanisme d’incitation économique des cotonculteurs développé par les sociétés cotonnières est basé sur (i) l’organisation des marchés de commercialisation du coton-graine gérés par les producteurs (marchés autogérés) ; (ii) la fixation du prix d’achat du coton-graine en fonction de la qualité ; (iii) le versement de prime de précocité (5 FCFA/kg) ;(iv) le paiement de ristourne ; (v) la subvention accordée par l’Etat ; et (vi) la fourniture d’intrants à crédit. Globalement, l’application de ces différentes stratégies et la mise en œuvre des mesures incitatives ont permis aux cotonculteurs, non seulement, d’améliorer la qualité du coton-graine qu’ils produisent, mais aussi, d’accroître le niveau de leur rendement et en conséquence leur revenu cotonnier.
Cependant, selon les producteurs, certaines pratiques ne sont pas de nature à les inciter à mieux produire et constituent pour eux des sujets de découragement. Il s’agit entre autres : (i) de la pratique de récolte sélective est contraignante en terme de temps et de mobilisation de main d’œuvre ; (ii) du prix d’achat de coton-graine qui reste trop faible ; (iii) le déclassement unilatéral de la qualité initiale du coton par les responsables de la société cotonnière ; (iv) le ramassage tardif du coton-graine stocké par les OP ; et (v) le paiement tardif du coton-graine aux producteurs.
Ainsi donc, en vue d’améliorer et garantir la qualité de coton-fibre à vendre sur le marché international, travail pour lequel les cotonculteurs ont un rôle primordial à jouer à la base, un cadre de concertation permanente entre les différentes parties concernées (producteurs, société cotonnière, encadreurs, chercheurs) doit être créé. Ce cadre permettra d’engager des discussions autour des contraintes évoquées par les producteurs afin de corriger les faiblesses qui risquent d’entraver les efforts pour l’amélioration de la qualité du coton-fibre et par conséquent de la compétitivité de l’ensemble de la filière cotonnière.
Mots clés : Filière cotonnière, fonctions critiques, qualité, incitation économique, commercialisation, coton-graine, coton-fibre, Centrafrique.
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Abstract
Diagnosis of the quality and of the economic incentive’s mechanism of cotton producers in Central African Republic
Within the framework of the analysis of the critical functions of the cotton sectors in Central Africa Republic (CAR), a diagnosis study of the quality and the mechanism of economic incentive of the cotton producers in the CAR was realized. This study aims to analyze the strategies implemented by the cotton companies to incite cotton producers to produce and to sell of good quality cotton-seed. The methodology adopted within the framework of this study is based on a bibliographical research coupled with semi-directive interview with the persons in charge of the cotton companies, of extension services and the producers. The main tool of investigation is an interview guide directed essentially on the questions concerning the organization and the functioning of this segment.
The analysis of collected data allowed to highlight the strategies of improvement of the quality of cotton-seed as well as the mechanism of economic incentive of cotton producers. The strategies aiming at the improvement of the quality of cotton-seed concern essentially the actions such as: i) the practice of the cultural techniques recommended by the research; ii) the techniques of selective and well-kept harvest of cotton-seed; iii) the sorting of cotton-seed; iv) the techniques of drying the cotton-seed; and v) the techniques of storage the cotton-seed. The mechanism of economic incentive of cotton producers developed by the cotton companies is based on i) the organization of marketing the cotton-seed managed by the producers (self-managed market); ii) the fixation of the purchase price of cotton-seed according to the quality; iii) the payment of bonus of precocity (5 FCFA / KG); iv) the payment of discount; v) the subsidy granted by the State; and vi) the supply of inputs’ credit. Globally, the application of these various strategies and the implementation of the incentive measures allowed cotton producers, not only, to improve the quality of cotton-seed which they produce, but also, to increase their yield level and accordingly their cotton income.
However, according to the producers, certain practices cannot incite them to produce better and are subjects of discouragement. It is among others a question: i) of the practice of selective harvest which is constraining in term of time and labor mobilization; ii) of the purchase price of cotton-seed which remain too low; iii) the unilateral downgrading of the initial quality of the cotton by the persons in charge of the cotton company; iv) the late collection of cotton-seed stored by the producers organization; and v) the late payment of cotton-seed to the producers.
So, to improve and guarantee the quality of cotton-fiber to sell on the international market, work for which cotton producers has an essential role to play, a framework of permanent dialogue between the various concerned partners (producers, cotton company, extension agents, researchers) must be created. This framework will allow to start talks around the constraints evoked by the producers to correct the weaknesses which risk to hinder the efforts for improving the quality of the cotton-fiber and consequently the competitiveness of the whole cotton sector.
Keywords: cotton Sector, critical functions, quality, economic incentive, marketing, cotton-seed, cotton-fiber, Central African Republic.
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I. CONTEXTE ET JUSTIFIATION
En Afrique subsaharienne, le coton a une importance stratégique pour l’économie de
nombreux pays tout en participant au développement rural. Mobilisant plus de 8 millions de
personnes, la production cotonnière a amélioré le bien-être des populations des zones rurales
et contribué à la croissance économique des pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre (AOC)
pratiquant cette spéculation. Elle assure une part importante des revenus monétaires de la
population rurale des zones de production. La prédominance socio-économique de la culture
cotonnière est remarquable, car elle mobilise diverses catégories socio-professionnelles
(producteurs, artisans ruraux, sociétés industrielles d’égrenages et de transformation, ouvriers,
entreprises de transport et de services, etc.). Au cours de ces dernières années, la production
cotonnière des pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre a quadruplé, hissant la sous-région au
rang de deuxième exportateur mondial de coton, avec une part d’exportation mondiale
d’environ 15% (Fichet, 1998 ; Jouve, 1999).
Depuis son introduction dans les systèmes de production des pays d’Afrique francophone vers
les années 1920, la culture cotonnière a façonné le paysage agraire et a été à l’origine de la
structuration du monde rural de la zone des savanes d’Afrique francophone de l’Ouest et du
Centre en général et de la République Centrafricaine (RCA) en particulier. Au début des
années 1980, la production de coton dans ces régions n’a cessé d’augmenter. On compte plus
de 8 millions de personnes impliquées dans le secteur cotonnier dans ces deux régions.
Malgré son caractère coercitif au moment de son introduction, le coton a fini par devenir l’une
des principales sources de devises dans la plupart des pays producteurs. Au niveau national, la
prédominance socio-économique de la culture cotonnière est remarquable, car elle mobilise
diverses catégories socio-professionnelles (producteurs, artisans ruraux, sociétés industrielles
d’égrenages et de transformation, ouvriers, entreprises de transport et de services, etc.).
En effet, au cours de ces dernières décennies, le coton occupe une place importante parmi les
principaux produits d’exportation, générant des recettes fiscales notables pour l’Etat et
contribuant largement à la constitution des revenus des producteurs ruraux et à l’amélioration
de la sécurité alimentaire. Outre la main d’œuvre familiale et salariale, et les employés des
services connexes (transport, égrenage, emballage, stockage), la filière cotonnière offre de
l’emploi à quelques 350 millions de personnes à travers le monde (Estur, 2003). Elle fournit
également des millions d’emplois additionnels dans les secteurs de facteurs de production, du
machinisme agricole et de l’équipement, industriel, de la trituration des graines et de la
filature. Le coton fait partie des rares productions agricoles qui soient à la fois source de
7
nourriture et de fibre, les graines de coton et leurs sous-produits sont généralement
consommés localement (huile alimentaire, savon, produits industriels, énergie domestique,
tourteaux, etc.) et la fibre est utilisée dans l’industrie textile.
Vu l’importance de cette production pour les industries de filature qui deviennent de plus en
plus exigeantes pour la qualité de fibres utilisées, les sociétés cotonnières, fournissant ces
fibres, qui tiennent à fidéliser leurs clientèles industrielles, réfléchissent sur les stratégies à
mettre en œuvre pour améliorer la qualité des fibres à produire. Les stratégies développées par
les sociétés cotonnières en ce sens sont orientées en priorité à promouvoir l’amélioration de la
qualité de coton-graine produit à la base par les producteurs.
En vue d’analyser l’efficacité des stratégies développées par les sociétés cotonnières, une
étude diagnostic du mécanise d’incitation des cotonculteurs pour améliorer la qualité de leur
coton-graine produit a été envisagée. Cette étude s’inscrit dans le cadre des opérations de
recherche envisagées par le programme 3.1 ; « Dynamique des filières cotonnières d'Afrique
Centrale face au contexte global et local » pour appréhender les dynamiques induites par les
différentes mutations au sein des filières cotonnières en Afrique Centrale par rapport à
l’environnement global et local dans lequel évoluent actuellement ces filières. Elle
s’intéressera particulièrement au mécanisme mis en œuvre par les sociétés cotonnières en
Centrafrique pour inciter les cotonculteurs centrafricains à améliore la qualité du coton-graine
qu’ils produisent.
II. OBJECTIFS DE L’ETUDE
2.1. Objectif général du programme
L’objectif général du programme est d’analyser l’organisation et la compétitivité des filières
cotonnières d’Afrique centrale dans un contexte de libéralisation des marchés, en vue de
fournir aux décideurs et opérateurs économiques des informations susceptibles d’améliorer
durablement la dynamique de ces filières.
2.2. Objectifs du projet
Les objectifs spécifiques visés par le projet « Analyse des impacts du processus de
libéralisation sur l’organisation et la compétitivité des filières cotonnières d’Afrique
centrale » du programme 3.1 consistent à :
- Tirer les leçons des expériences de privatisation des filières cotonnières en Afrique de
l’Ouest (en vue d'un processus de privatisation efficace en Afrique centrale);
8
- Etudier le changement d'adhésion des paysans à la culture cotonnière : facteurs et
conséquences.
2.3. Objectifs spécifiques de l’étude
Cette étude, qui vise à faire un diagnostic des fonctions critiques de l’organisation de la filière
cotonnière en Centrafrique, a comme objectif spécifique d’analyser les stratégies mises en
œuvre par les sociétés cotonnières pour inciter les cotonculteurs à produire et vendre du
coton-graine de bonne qualité.
III. METHODOLOGIE
3.1. Approche méthodologique
L’approche méthodologique utilisée pour réaliser cette étude est basée sur une recherche
bibliographique couplée avec des enquêtes à dire d’acteurs et entretiens semi-directifs avec
les principaux acteurs concernés (responsables des sociétés cotonnières, de la vulgarisation et
les producteurs) par la problématique de financement de la qualité du coton commercialisé par
la République Centrafricaine (RCA). En outre, la consultation des sources de données
secondaires disponibles a permis de collecter les informations complémentaires à l’analyse du
problème.
3.2. Outils d’investigation
Le principal outil d’investigation utilisé pour la réalisation des entretiens avec les acteurs sur
le terrain est un guide d’entretien spécifique adressé à chaque type d’acteurs. Ce guide a
permis, de collecter entre autres les données concernant :
- les stratégies d’amélioration de la qualité du coton-graine par les producteurs ; et
- le mécanisme d’incitation économique des cotonculteurs ;
- les principales contraintes ;
- les suggestions et les perspectives.
3.3. Zone d’étude
La zone d’étude est constituée des terroirs de référence du PRASAC (Ngoumbélé ; Ngouyali)
et de certains villages situés dans la zone des savanes cotonnières, notamment dans les
préfectures de l’Ouham (Bozélé II ; Bozélé I ; Bofango; Nzéré; Ngambaye ; Pont Ouham ;
Belle-vue ; Bea Bac) et de la Ouaka (Pouadé ; Yanédé ; Goubali-Kpéténé ; Tagbara ;
Madomalé ; Ndokoyo ; Bindi ; Yamalé ; Malo).
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Globalement, la zone des savanes cotonnières centrafricaines couvre les préfectures de
l’Ouham et de l’Ouham-Pendé (dans le Nord-Ouest), la Ouaka, la Nana-Gribizi et la Kémo
(dans le Centre-Est). Cette zone représente 25% du territoire national et compte 41% de la
population totale du pays.
3.3.1. Milieu physique
La zone cotonnière est influencée par un climat du type soudano-guinéen, caractérisé par une
saison sèche allant de novembre à mars et une saison pluvieuse allant d’avril à octobre. La
pluviométrie annuelle moyenne est de l’ordre de 1.400 mm, dont 90% répartis sur la période
végétative allant de mai à septembre. La température moyenne est de 26°C avec une
amplitude thermique se situant entre 12°C et 38°C. Associée à la pluviométrie, elles offrent
des conditions favorables pour la production agricole.
La végétation est arbustive, parfois arborée et assez dégradée par des feux de brousse qui les
ravagent chaque année. La densité de cette végétation décroît du sud de la zone cotonnière au
nord et constitue l’une des contraintes au développement de la traction animale dans le sud.
La végétation est dominée par les espèces pyrophiles telles que : Daniella oliveri, Terminalia
laxiflora, Isobernia doca, Vitex simplicifolia, Ficus etrangulaire, Combretum sp, Khaya
senegalensis, Borassus aethiopium (rônier), etc. La strate inférieure est constituée des
graminées pérennes telles que : Citenia sp, Imperata cylindrica, Andropogon gayanus,
Zelezine indica, Hyparemea rufa, etc.
Les sols, de type ferrugineux, relativement riches en éléments chimiques, demeurent sensibles
à l’érosion hydrique. La profondeur de ces sols est faible et constitue avec les curasses
latéritiques un facteur limitant à leur exploitation.
3.3.2. Milieu humain
La population de la zone cotonnière centrafricaine est composée de divers groupes ethniques :
Banda, Gbaya, Mandja et Sara qui sont des autochtones agriculteurs, et mbororos d’origine
peulh, qui sont essentiellement des éleveurs. La densité moyenne de la population dans cette
zone est 6,5 hab./km². Cette densité reste très faible comparativement à celles des zones
cotonnières du Tchad (entre 50 et 80 hab./km²) et du Cameroun (plus de 100 hab./km²).
10
3.3.3. Activités agro-économiques
Diverses activités agro-économiques sont pratiquées par les producteurs de cette zone, à
savoir : l’agriculture, l’élevage et les activités para-agricoles. L’agriculture fait partie
intégrante de l’organisation sociale des terroirs et occupe la quasi-totalité de la population
active. Les systèmes de cultures sont caractérisés par les grands groupes de cultures telles
que : (i) le coton comme culture de rente ; et (ii) les plantes à racines et tubercules (manioc,
igname, patate douce) ; (iii) les légumineuses à graines (arachide, haricot) ; (iv) les céréales
(maïs, riz, sorgho) ; (v) les protéagineux (courges, sésame) ; et (vi) les cultures de contre-
saison (amarante, jute, solanum, etc.).
Le type d’élevage le plus répandu dans la zone et l’élevage du petit bétail (volailles, caprins,
ovins et porcins) pratiqué par la quasi-totalité des exploitations agricoles. L’élevage bovin est
pratiqué par les éleveurs peulhs et quelques agro-éleveurs sédentaires. En outre, les activités
para-agricoles fréquentes sont la transformation des produits, la cueillette, la chasse, la pêche
et l’apiculture. Les produits issus de ces différentes activités font l’objet d’autoconsommation
et de vente.
IV. RESULTATS ET DISCUSSION
Dans ce nouvel environnement économique global caractérisé par la compétitivité des
produits mis sur les marchés, on a noté qu’au cours de ces dernières années les fibres
synthétiques entrent en concurrence avec les fibres de coton. Par ailleurs, les industries de
filatures ont défini la qualité comme critère discriminant pour le choix de coton fibre mis sur
les marchés par les sociétés cotonnières. Ainsi, pour fidéliser leur clientèle, les sociétés
cotonnières d’Afrique Subsaharienne ont développé diverses stratégies visant à améliorer la
compétitivité de leur coton-fibre. Les sociétés cotonnières centrafricaines n’ont pas été du
reste dans cette dynamique. C’est dans cette optique qu’elles ont défini les stratégies
d’amélioration de la qualité du coton-graine élaboré le mécanisme d’incitation économique
des producteurs à améliorer la qualité du coton-graine qu’ils produisent.
4.1. Stratégies d’amélioration de la qualité du coton-graine
La qualité du coton-graine dépend avant tout de l’application des techniques culturales
appropriées de production et de protection intégrée du cotonnier et de la manière dont il a été
récolté et conditionné. Ce qui sous-entend qu’il faut accorder une attention particulière aux
conditions dans lesquelles le coton est produit par les exploitants qui représentent le premier
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maillon dans le processus d’amélioration de la qualité du coton. C’est dans cette optique que
les sociétés cotonnières centrafricaines ont développé des stratégies basées prioritairement sur
les actions suivantes.
4.1.1. Application des techniques culturales appropriées
Les actions entreprises en ce sens ont concerné principalement la pratique des techniques et
opérations culturales appropriées recommandées par la recherche : semis à bonne ; sarclages
précoces et réguliers ; fertilisation ; protection phytosanitaire ; etc. En effet, la date de semis
est un facteur très important dans l’élaboration du rendement du cotonnier. Les études
antérieures menées par la recherche ont montré qu’en semant le coton trop tard, il subit, en fin
de cycle, un déficit hydrique qui se traduit par une baisse de rendement considérable de
l’ordre de 6 à 10 kg/ha/jour de retard (L. Richard, 1988). Ainsi, les périodes optimales
recommandées pour la mise en place de la culture du coton se situent du 1er au 15 juin pour le
bassin tchadien (zone du Nord-ouest du pays) et du 15 au 30 juin pour le bassin oubanguien
(zone du Centre-Est). La pratique de semis à bonne date couplée avec l’application de la
fertilisation minérale permet de produire des capsules ayant un poids moyen capsulaire
intéressant (supérieur à 4 grammes) et en conséquence accroître le niveau de rendement.
Les pratiques de sarclages précoces et réguliers couplées avec les traitements insecticides
permettent de réduire la pression parasitaire sur le cotonnier et d’assurer une meilleure
protection phytosanitaire. L’application de ces pratiques permet d’éviter l’attaque des
capsules du cotonnier par les ravageurs et les maladies susceptibles d’endommager les
capsules et par conséquent dégrader la qualité du coton-graine. Pour garantir et avoir une
qualité optimale du coton-graine (coton blanc de premier choix), il est recommandé
d’appliquer au moins trois sarclages réguliers et au moins 5 traitements insecticides.
D’une manière générale, l’application de ces différentes techniques permet aux cotonculteurs,
non seulement, d’améliorer la qualité du coton-graine qu’ils produisent, mais aussi,
d’accroître le niveau de leur rendement et en conséquence leur recette. En effet, les résultats
d’une étude antérieure réalisée sur le niveau d’intensification de la culture ont montré un net
accroissement du rendement en coton-graine (894,2 kg/ha) pour un producteur pratiquant le
sarclage régulier (au moins 3), appliquant l’engrais minéral (60 kg/ha en moyenne) et le
traitement insecticide (en moyenne 5 traitements), comparativement au rendement obtenu
(346,6 kg/ha) par un producteur qui ne réalise que le sarclage (au moins 2 sarclage).
12
4.1.2. Amélioration des techniques de récolte et des techniques post-récolte
Les opérations de récolte, de triage, de séchage et de stockage sont très importantes pour
améliorer la qualité de coton-graine à commercialiser. Pour ce faire, des séances de formation
sur les techniques de récoltes et de conditionnement post-récolte sont organisées à l’intention
des producteurs. Un coton-graine chargé de quartiers d’orange, parasité par les chenilles,
mouillé, comportant des débris végétaux, etc., ne peut donner qu’une fibre de mauvaise
qualité. Les opérations de récolte soignée ou sélective (capsule bien floconnée, ouverte avec
des carpelles bien sèches, présentant du coton-graine propre et sec) et de triage du coton-
graine permettent de séparer le coton-graine en plusieurs catégories :
- le coton blanc ou coton de 1er choix1 ;
- le coton jaune ou coton de 2ième choix2 ;
- le coton de 3ième choix3 (coton jaune avec des débris) ;
- le coton sale avec des débris végétaux, parasité ou mouillé.
Les catégories de coton-graine destinées à la commercialisation sont le coton de 1er choix,
2ième choix et 3ième choix. Concernant les opérations de pesées et de stockage, il est
recommandé que le coton-graine soit pesé et stocké dans des bâches, au lieu de paniers, pour
éviter l’intrusion des morceaux de ces paniers dans le coton-graine. En outre, les opérations
de regroupement, de pesée et de stockage du coton-graine produit par les membres du
groupement doivent être réalisées au centre d’achat retenu par le groupement.
4.2. Mécanisme d’incitation économique des cotonculteurs pour l’amélioration de la qualité du coton-graine
Le mécanisme d’incitation économique défini par les sociétés cotonnières vise à la mise en
œuvre des actions devant encourager les cotonculteurs à améliorer davantage la qualité du
coton qu’ils produisent. Ces stratégies sont basées entre autres sur les actions ci-après.
4.2.1. Organisation des marchés de commercialisation du coton-graine
L’organisation des marchés de commercialisation du coton-graine est au centre des
préoccupations des sociétés cotonnières par rapport au mécanisme d’amélioration de la qualité
du coton-graine. Ces marchés, organisés de commun accord par les sociétés cotonnières et les
1. C’est du coton blanc qui, après récolte et triage, est débarrassé des quartiers d’orange, capsules immatures et parasitées et débris végétaux. Il doit être sec (humidité inférieure à 10%) et ne doit pas être en contact avec le sol. 2 Il s’agit du coton qui n’a pas été récolté correctement, un peu jaunis sous l’effet de l’humidité, mais dont la qualité est améliorée par le tri pour le débarrasser des quartiers d’orange, des capsules immatures, des capsules parasitées et d’autres débris. 3 Il s’agit du coton jaune qui n’est pas correctement trié et comportant encore quelques débris végétaux.
13
OP dans les zones de production, sont directement gérés par les responsables des OP. Ceux-ci
s’occupent des opérations de regroupement, de pesée et du stockage du coton-graine au
niveau du centre d’achat. Ils veillent également à la tenue des documents comptables par
apports à l’achat du coton-graine, l’évacuation du coton-graine au niveau de l’usine, la
perception et la distribution des recettes.
Le centre d’achat choisi par chaque OP doit être :
- facilement accessible afin de permettre le transport du coton-graine et
l’approvisionnement en intrants des OP par les camions de la société cotonnière ;
- disposer d’une aire de stockage maintenu propre à tout moment afin d’éviter le
salissement du coton-graine stocké ;
- disposer d’une ceinture de sécurité de 10 m de rayon pour protéger le stock du
coton-graine contre les incendies et les feux de brousse.
4.2.2. Fixation du prix d’achat aux producteurs et autres mesures incitatives
La fixation du prix d’achat de coton-graine aux producteurs est faite en se basant sur le calcul
du prix minimum garanti. Ce travail est fait chaque année par le Comité de Suivi et de
Gestion des prix du coton-graine. Le prix ainsi fixé est communiqué aux producteurs avant le
démarrage de la campagne agricole (mars). Il vise à garantir aux producteurs :
- une rémunération minimale journalière de la main d’œuvre de 500FCFA, sur la
base d’une durée normative des temps de travaux de 131,5 jours/ha, soit 65.750
FCFA ;
- la couverture du coût des intrants agricoles (engrais, insecticide, semences, etc.) ;
- l’amortissement du petit matériel agricole ;
- une marge pour imprévu de 10%.
Le gouvernement a instauré le mécanisme de la flexibilité des prix du coton-graine par arrêté
interministériel n°041/MAE/MFB du 29 octobre 1999. Il a mis en place un Comité Paritaire
de détermination des prix flexibles d’achat du coton-graine par décision n°079/MPMR du 4
mai 2000. Ce comité se compose de 12 membres dont :
- 4 représentants de l’Etat : 2 représentants du Ministère de l’Agriculture et de
l’Elevage, 1 représentant du Ministère des Finances et 1 du Ministère du Plan ;
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- 4 représentants des producteurs : 1 pour la préfecture de l’Ouham-Pendé, 1 pour la
préfecture de l’Ouham, 1 pour la préfecture de la Nana-Gribizi et de la Kémo et 1
pour la préfecture de la Ouaka ;
- 4 représentants de la Société Cotonnière.
En vue d’encourager les producteurs à améliorer la qualité de leur coton-graine, le prix
d’achat du coton-graine est déterminé en fonction de la qualité du coton récolté. Par exemple,
en 2005-2006, le prix d’achat du coton-graine est fixé comme ci-après :
- Prix d’achat du coton de 1er choix = 150 FCFA/kg ;
- Prix d’achat du coton de 2ième choix = 105 FCFA/kg ;
- Prix d’achat du coton de 3ième choix = 75 FCFA/kg.
Outre cette stratégie d’achat du coton-graine en fonction de sa qualité, la société cotonnière a
prévu d’autres mesures incitatives pour les producteurs afin des les encourager à améliorer la
qualité du coton-graine. Il s’agit entre autres des mesures suivantes :
- le versement de prime de précocité (5 FCFA/kg) pour tout coton-graine récolté et
chargé dans les caisses avant janvier ;
- le paiement d’un fonds de contrepartie pour le service de commercialisation assuré
par le groupement (ristourne) de 4,27 FCFA/kg de coton-graine livré, dont 1
FCFA/kg pour la rémunération du suivi de la campagne par le Délégué Technique
du groupement (interlocuteur entre l’OP et la Société Cotonnière chargé du suivi
des exploitations cotonnières et de la collecte des données techniques sur la culture
de coton) et 3,27 FCFA/kg pour les opérations de collecte primaire au profit de
l’OP.
- la subvention, par l’Etat, des coûts des intrants fournis aux producteurs ;
- la fourniture d’intrants à crédit.
15
Figure 1: Evolution du prix d'achat au producteur du coton-graine (FCFA/kg)
150
170
155 150
105
125
65
75 75
0
20
40
60
80
100
120
140
160
180
1992-93 1993-94 1994-95 1995-96 1996-97 1997-98 1998-99 1999-00 2000-01 2001-02 2002-03 2003-04 2004-05 2005-06
Année
Pri
x d'
ach
at
Coton 1er Choix Coton 2 ième Choix Coton 3 ième Choix
Source : SOCADETEX, 2005 ; Cellule Coton, 2007.
L’analyse de cette figure met en évidence qu’au cours de ces deux dernières décennies, le prix
d’achat moyen du coton-graine aux producteurs a connu une fluctuation assez importante. Il
est passé de 75 FCFA/kg en 1992-93 à 149 FCFA/kg en 1997-98 pour tomber à 137 FCFA/kg
en 2004/05. Cette baisse de prix moyen d’achat aux producteurs est la conséquence directe de
la chute des cours du coton-fibre sur le marché international. Toutefois, il est à noter que, par
rapport à sa stratégie d’encourager les producteurs, le Gouvernement a maintenu le prix
d’achat aux producteurs du coton-graine à un niveau stable (150 FCFA/kg pour le coton de 1er
choix) depuis les campagnes agricoles 2000/01 à 2005/06. Comparativement aux autres pays
de la sous-région, ce niveau de prix reste relativement bas : en 2002/03, le prix d’achat au
producteur est de 179 FCFA/kg au Cameroun, il est de 160 FCFA/kg au Tchad.
L’analyse du prix d’achat en fonction de la qualité de coton-graine révèle un net différentiel
de prix entre le coton-graine de 1er choix et le coton-graine de 2ième choix (45 FCFA/kg). Ce
différentiel de prix est de 75 FCFA/kg entre le coton de 1er choix et de 2ième choix, et de 30
FCFA/kg entre le coton de 2ième choix et de 3ième choix. Ces différentiels de prix montrent les
avantages que les producteurs ont à gagner s’ils se donnent la peine à améliorer la qualité de
leur production de coton-graine.
16
4.3. Contraintes au mécanisme d’incitation économique des producteurs
En dépit de ces stratégies et mesures incitatives mises en œuvre afin d’améliorer la qualité du
coton-graine et, par conséquent, améliorer la compétitivité du coton-fibre, certains facteurs
constituent des contraintes à l’atteinte de ces objectifs. En effet, les producteurs jugent que
certaines pratiques ne sont pas de nature à les inciter à mieux produire et à améliorer la qualité
de leur production.
Les principales contraintes énumérées par les producteurs concernent entre autres :
- la pratique de récolte sélective est contraignante en terme de temps et de
mobilisation de main d’œuvre pour les producteurs. Généralement, la période
de récolte du coton-graine coïncide avec celle des cultures vivrières (sorgho,
sésame, courges, riz), d’où un engorgement de la main d’œuvre disponible sur les
exploitations. Très souvent, les producteurs décident en priorité de récolter les
vivriers pour assurer les besoins alimentaires de leur famille. Cette décision a pour
conséquence la récolte tardive du coton-graine qui commence à se charger de
poussière, de débris végétaux (feuilles de cotonnier sèches, herbes sèches, etc.),
voire mouillé avec l’arrivée précoce des pluies, etc., perdant ainsi de sa qualité si le
triage n’est pas bien effectué.
- le prix d’achat du coton-graine reste trop faible et n’arrive pas à couvrir les
coûts des intrants (engrais et insecticides) qui ne cessent d’accroître alors le prix
d’achat du coton-graine est resté constant. Pour ce faire, les producteurs estiment
que leur effort pour améliorer la qualité du coton-graine n’est pas du tout
récompensé.
Tableau 1 : Evolution du prix d’achat de coton-graine et des intrants
Campagne agricole Prix de coton (FCFA/kg) Prix d’engrais (FCFA/kg) Prix d’insecticide (FCFA/L) 1990/91 100 120 1.180 1991/92 90 120 1.180 1992/93 80 120 1.180 1993/94 80 100 950 1994/95 120 100 1.500 1995/96 150 100 2.850 1996/97 155 100 2.850 1997/98 170 100 2.850 1998/99 155 192 3.600 1999/00 150 250 4.300 2000/01 150 269 4.300 2001/02 150 280 4.520 2005/06 150 360 5.720 Source : Cellule Coton, 2007.
17
- le déclassement unilatéral de la qualité initiale du coton par les responsables
de la société cotonnière, au niveau du pont bascule, malgré le triage effectué par
les producteurs, entraînant un manque à gagner pour les OP. Cette situation crée
parfois un climat de méfiance et de suspicion des membres des OP envers leurs
responsables qui sont accusés d’entreprendre des magouilles avec les responsables
des usines de la société cotonnière pour détourner une partie de leur revenu.
- le ramassage tardif du coton-graine stocké dans les centres d’achat. Au cours
de ces dernières années, la société cotonnière éprouve d’énormes difficultés à
assurer correctement les opérations de ramassage et d’évacuation du coton-graine
stocké par les OP. Ces difficultés sont dues par les impacts de la crise cotonnière
sur la société qui se confronte à des difficultés financières pour renouveler son parc
automobile. Au cours de ces trois dernières années, suite au pillage du parc
automobile de la société cotonnière lors des événements d’octobre 2002 à mars
2003, elle est obligée de faire recours au service des transporteurs privés pour
assurer les opérations d’évacuation du coton-graine des centres d’achat à l’usine.
Très souvent, ces camions, de faibles capacités de charge, sont inadaptés pour
assurer correctement ces opérations. Ils tombent constamment en panne entraînant
ainsi des retards dans le programme de ramassage de coton-graine.
Figure 2 : Un camion privé évacuant le coton-graine des OP à l’usine de Bossangoa, mais en panne à 5 km de la ville,
sur l’axe Bossangoa-Ouham Bac
18
- la mise en place tardive des intrants dans les groupements. Etant donné que la
mise en place des intrants (engrais, insecticides, semences de coton) dans les
groupements s’effectue au moment où les camions passent dans les centres d’achat
pour la collecte du coton-graine, elle se fait également avec beaucoup de retard
(quelque fois vers le mois de mai ou juin). Cette mise en place tardive perturbe le
plan prévisionnel de production de la nouvelle campagne. Certains exploitants,
n’étant pas rassurés d’être approvisionnés, prennent la décision d’emblaver leurs
parcelles destinées au coton avec des vivriers.
- le paiement tardif du coton-graine aux producteurs. Au cours de ces dernières
années, les producteurs se plaignent du retard pour le paiement de leur coton-graine
ramassé et évacué à l’usine. Le délai entre l’évacuation du coton vers l’usine et le
versement des fonds aux responsables des OP peut aller au-delà d’un mois. Par
exemple, le coton-graine, ramassé depuis les mois de décembre 2006 et janvier
2007, n’est pas encore payé aux OP. Ce retard dans la perception du revenu
cotonnier perturbe le plan de trésorerie des producteurs et rend difficile la
réalisation de nouveaux investissements prévus par ces derniers. Il est à noter que
le montant total des arriérés de coton-graine dû aux cotonculteurs au titre des
campagnes cotonnières 2001-02, 2002-03 et 2003-04 est évalué à 2,326 milliard de
FCFA. Suite aux pourparlers engagés par l’Etat avec ses partenaires au
développement, l’Union Européenne a donné son accord de principe pour le
règlement de ces arriérés d’ici à mi-mai 2007.
V. CONCLUSION ET PERSPECTIVES
La dégradation de l’environnement socio-économique des filières cotonnières d’Afrique
Centrale a incontestablement réduit l’intérêt de la culture cotonnière pour les producteurs. Elle
a entraîné des débats autour des principales questions relatives telles que : (i) à l’efficience de
l’organisation des fonctions critiques au sein des filières cotonnières ; (ii) les inquiétudes des
producteurs sur le maintien de certains services à l’agriculture suite à la libéralisation de
certaines fonctions dans les filières cotonnières ; (iii) les types d’appui à apporter aux
organisations des producteurs (OP) pour redynamiser la production cotonnière ; etc.
Ces enjeux amènent alors à réfléchir sur les problématiques de l’amélioration de l’efficience et de
la compétitivité de ces filières dans ce nouvel contexte économique caractérisé par les
19
processus d’ajustement structurel et de libéralisation du commerce. Cela n’est possible qu’à
travers des analyses approfondies de la dynamique des différents segments de ces filières face
au contexte global et local de libéralisation. Ces analyses permettront de mieux appréhender
l’organisation et le fonctionnement des segments de ces filières, les logiques et le rôle des
acteurs concernés (producteurs, organisations des producteurs, sociétés cotonnières, Etat,
partenaires au développement), les stratégies mises en œuvre par ces acteurs pour améliorer la
compétitivité e ces filières.
C’est ainsi que le programme 3.1 « Dynamique des filières cotonnières dans un contexte
global et local en Afrique Centrale », du PRASAC/ARDESAC, a entrepris l’étude diagnostic
de la qualité et du mécanisme d’incitation économique des producteurs de coton en
Centrafrique. Cette étude a comme objectif spécifique d’analyser les stratégies mises en
œuvre par les sociétés cotonnières pour inciter les cotonculteurs à produire et vendre du
coton-graine de bonne qualité. La méthodologie adoptée dans le cadre de cette étude est basée
sur une recherche bibliographique couplée avec des entretiens semi-directifs avec les
responsables des sociétés cotonnières, de la vulgarisation et les producteurs. La collecte des
données est faite à l’aide d’un guide d’entretien orienté essentiellement sur les questions
relatives à l’organisation et au fonctionnement de ce segment.
L’analyse des données collectées a permis de mettre en exergue les stratégies d’amélioration
de la qualité du coton-graine ainsi que le mécanisme d’incitation économique des
cotonculteurs développées par les sociétés cotonnières. Les stratégies visant l’amélioration de
la qualité du coton-graine portent essentiellement sur les actions telles que (i) la pratique des
techniques culturales recommandées par la recherche ; (ii) les techniques de récolte sélective
et soignée du coton-graine ; (iii) le triage du coton-graine ; (iv) les techniques de séchage du
coton-graine ; et (v) les techniques de stockage du coton-graine. Le mécanisme d’incitation
économique des cotonculteurs mis en œuvre les sociétés cotonnières est axé sur (i)
l’organisation des marchés de commercialisation du coton-graine gérés par les producteurs
(marchés autogérés) ; (ii) la fixation du prix d’achat du coton-graine en fonction de la qualité ;
(iii) le versement de prime de précocité (5 FCFA/kg) ;(iv) le paiement de ristourne ; (v) la
subvention accordée par l’Etat ; et (vi) la fourniture d’intrants à crédit. Globalement,
l’application de ces différentes stratégies par les producteurs et la mise en œuvre de ces
mesures incitatives par les sociétés cotonnières ont permis aux cotonculteurs, non seulement,
d’améliorer la qualité du coton-graine qu’ils produisent, mais aussi, d’accroître le niveau de
20
leur rendement et en conséquence leur revenu cotonnier. En outre, l’analyse du prix d’achat
du coton-graine en fonction de la qualité a mis en évidence un différentiel de prix positif entre
les différentes qualités du coton-graine. Ces différentiels de prix montrent les avantages que
les producteurs ont à gagner s’ils se donnent à améliorer la qualité de leur production de
coton-graine.
Cependant, en dépit de ces stratégies et mesures incitatives visant l’amélioration de la qualité
du coton-graine et, par conséquent, de la compétitivité du coton-fibre, certains facteurs
constituent des contraintes à l’atteinte de ces objectifs. En effet, les producteurs jugent que
certaines pratiques ne sont pas de nature à les inciter à mieux produire et à améliorer la qualité
de leur production. Il s’agit notamment : (i) de la pratique de récolte sélective qui est
contraignante en terme de temps et de mobilisation de main d’œuvre ; (ii) du prix d’achat de
coton-graine qui reste trop faible et n’arrive pas à couvrir les coûts des intrants ; (iii) le
déclassement unilatéral de la qualité initiale du coton par les responsables de la société
cotonnière entraînant un manque à gagner pour les OP ; (iv) le ramassage tardif du coton-
graine stocké par les OP pouvant avoir des conséquences sur la qualité du coton-graine suite à
des aléas climatiques ; et (v) le paiement tardif du coton-graine aux producteurs peut perturber
le plan de trésorerie des exploitants et rend difficile la réalisation de nouveaux
investissements.
Ainsi donc, en vue d’améliorer et garantir la qualité de coton-fibre à vendre sur le marché
international, travail pour lequel les cotonculteurs ont un rôle primordial à jouer à la base, un
cadre de concertation permanente entre les différentes parties concernées (producteurs, société
cotonnière, encadreurs, chercheurs) doit être créé. Ce cadre permettra d’engager des
discussions autour des contraintes évoquées par les producteurs afin de corriger les faiblesses
qui risquent d’entraver les efforts pour l’amélioration de la qualité du coton-fibre et par
conséquent de la compétitivité de l’ensemble de la filière cotonnière centrafricaine. En outre,
le rôle et la place de l’Etat dans ce processus de relance et du renforcement de la compétitivité
de la filière cotonnière centrafricaine doivent être sérieusement considérés si l’on tient compte
de l’importance stratégique de la filière cotonnière dans l’économie nationale : amélioration
du revenu des cotonculteurs, recettes et taxes d’exportation pour l’Etat, création d’emploi,
flux monétaires induits et d’activités induites pour les opérateurs économiques (fournisseurs
et distributeurs d’intrants, transporteurs, banques, etc.), activités connexes (recherche,
21
vulgarisation, production de semences, etc.) et les arrières effets sur la production des
vivriers.
22
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