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1 SOMMAIRE INTRODUCTION ……………………………………………....... 3 PREMIERE PARTIE : DE L’EFFICACITE DE LA GUERRE ANTI-TERRORISTE …………………………........ 8 CHAPITRE 1 : Les acteurs de la guerre contre le terrorisme et leurs missions …………………………………………………………….….. 9 CHAPITRE 2 : La guerre contre le terrorisme : une “politique” anti-terroriste unilatéraliste bénéficiant d’un soutien international mitigé …….……………………………………………... 34 CHAPITRE 3 : Des acquis et de l’efficacité de la guerre anti- terroriste…………………………………………………………..…... 74 DEUXIEME PARTIE : DES IMPLICATIONS DE LA GUERRE ANTI-TERRORISTE SUR LES RELATIONS AMERICAINES …………………….…. 98 CHAPITRE 4 : Les réactions au 11 septembre, à la guerre contre le terrorisme et leurs motivations …………………………………….… 99 CHAPITRE 5 : Les implications de la guerre anti-terroriste sur les relations Etats-Unis/Europe et Etats-Unis/Russie .......................... 138

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1

SOMMAIRE

INTRODUCTION ……………………………………………....... 3

PREMIERE PARTIE : DE L’EFFICACITE DE LA

GUERRE ANTI-TERRORISTE …………………………........ 8

CHAPITRE 1 : Les acteurs de la guerre contre le terrorisme et leurs

missions …………………………………………………………….….. 9

CHAPITRE 2 : La guerre contre le terrorisme : une “politique”

anti-terroriste unilatéraliste bénéficiant d’un soutien

international mitigé …….……………………………………………... 34

CHAPITRE 3 : Des acquis et de l’efficacité de la guerre anti-

terroriste…………………………………………………………..…... 74

DEUXIEME PARTIE : DES IMPLICATIONS

DE LA GUERRE ANTI-TERRORISTE SUR

LES RELATIONS AMERICAINES …………………….…. 98

CHAPITRE 4 : Les réactions au 11 septembre, à la guerre contre le

terrorisme et leurs motivations …………………………………….… 99

CHAPITRE 5 : Les implications de la guerre anti-terroriste sur

les relations Etats-Unis/Europe et Etats-Unis/Russie .......................... 138

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CHAPITRE 6 : Les implications de la guerre contre le

terrorisme sur l’opinion publique musulmane et sur les

relations Etats-Unis/Régimes proaméricains ………………..……… 159

CONCLUSION …………………………………………….…… 189

DOCUMENTS ANNEXES ……………………………...…… 194

BIBLIOGRAPHIE …………………………………………..… 247

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INTRODUCTION

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Le 11 septembre 2001, à l’heure où les New-yorkais, dans leur grande

majorité, se rendaient au travail, deux avions de lignes américaines

percutent les Tours jumelles du World Trade Center (le symbole de la

puissance économique américaine). En même temps on apprenait qu’un

autre avion avait percuté le Pentagone (les locaux du Département de la

Défense et symbole militaire des Etats-Unis). Un autre avion s’écrasera

le même jour en Pennsylvanie ; officiellement les passagers se sont

rebellés contre les pirates pour leur empêcher d’atteindre leur objectif qui

était le Capitole ou la Maison Blanche.

En tout, quatre avions de lignes ont été utilisés comme armes le 11

septembre pour frapper, les symboles de la puissance américaine. Plus de

3 000 personnes seront tuées dans ces attaques. L’Amérique furieuse et le

monde ahuri se demandent « qui a osé faire cela ? ». Quelques jours

après cette tragédie, à la suite d’une gigantesque opération

d’investigation, Ossama Ben Laden et son organisation Al Qaïda sont

désignés comme les responsables des attaques1. La « quatrième guerre

mondiale » est déclenchée. Une guerre contre le terrorisme international

qui mobilise l’Amérique entière et ses moyens (diplomatiques, militaires,

économiques, judiciaires, etc.).

Ce n'était pas la première fois qu’Ossama Ben Laden et son organisation

Al Qaïda s’en prenaient à la puissance américaine. Dans les années 90 au

cours de la guerre somalienne, Al Qaïda avait publié une fatwa

demandant l’attaque par les musulmans des forces américaines dans la

Corne de l’Afrique. Par la suite, après le massacre de soldats américains

dans l’opération ″Restore Hope″, le groupe islamiste était soupçonné d’y

être lié. En 1993, Al Qaïda est impliqué dans l’explosion d’une bombe au

World Trade Center. L’attentat avait fait six morts. En 1996, 19 soldats

américains sont tués dans un attentat vraisemblablement orchestré par Al

Qaïda à Dharan en Arabie Saoudite. En 1998, deux attentats contre les

1 Voir Annexe I pour plus d’informations sur Ossama Ben Laden et Al Qaïda.

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ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie avaient fait plus de 200

morts dont la plupart étaient des ressortissants kenyans et tanzaniens. En

2000, un destroyer américain, le USS Cole, est attaqué dans le port

d’Aden au Yémen, par des terroristes financés par Ossama Ben Laden :

bilan de l’opération 17 marins américains tués2.

Jusque là, les Etats-Unis n’avaient pas pris de sérieuses options pour

neutraliser Ben Laden et son organisation. La seule chose qu’ils ont fait,

pour répliquer à certaines des attaques, a été de bombarder, avec des

missiles Tomahawk, des infrastructures supposées appartenir à Al Qaïda

(au Soudan et en Afghanistan). Mais depuis le 11 septembre, le ton est

tout autre : l’Amérique est décidée à éradiquer le terrorisme international

et à mettre la main sur ses cerveaux.

Depuis les terribles événements du 11 septembre, le terrorisme

international est devenu la préoccupation majeure de tous les Etats et de

toutes les organisations internationales. Il a remplacé, pour les Occidents,

le nazisme, le fascisme et le communisme d’hier. C’est le nouvel ennemi

de l’Occident mais pas seulement. Les pays musulmans, également,

notamment l’Arabie Saoudite, le Pakistan et autres, y voient une menace

crédible à leur stabilité. Ces pays, qui hier, avec la complicité de

l’Amérique, avaient soutenu et attisé l’intégrisme islamiste contre

l’ennemi soviétique, le voient aujourd’hui se retourner contre eux et les

empêcher de dormir tranquillement. La guerre que l’Amérique mène aux

terroristes est au centre de l’actualité internationale et n’est pas sans

conséquences sur les Relations internationales. D’où notre intérêt

d’avoir entrepris un travail de recherche sur le sujet : notre objectif étant

de voir si cette guerre a produit les effets escomptés et si elle a des

implications notables sur les relations entre les Etats-Unis et le reste du

monde.

2 Une chronologie sur les attaques terroristes commises par Al Qaïda ou dans lesquelles il est lié est disponible en Annexe II

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Noter bien que notre travail ne consiste pas à traiter la lutte internationale

contre le terrorisme. Il consiste uniquement à traiter la question du côté

américain. Plus clairement cela veut dire que ne sera pris en compte que

ce qui rentre dans le cadre de la guerre américaine contre le terrorisme.

Toutefois, les actions internationales se rapportant ou en réaction à cette

guerre seront développées.

Quand on évoque la guerre anti-terroriste, il est intéressant, à notre avis,

de se poser ces questions : Comment est-elle organisée ? Quelles sont les

mesures prises ? Comment les acteurs de la scène internationale y

réagissent-ils et quelles sont leurs motivations ? Bénéficie t-elle d’un

soutien international ? Produit-elle les effets escomptés ? A-t-elle

bouleversé les relations entre les Etats-Unis et le reste du monde ?

Nous organiserons notre réflexion autour de deux principaux axes dans

les quels nous chercherons à répondre à deux questions principales

englobant l’ensemble des réponses ou tentatives de réponse aux questions

que nous venons de soulever :

dans une première partie, notre démonstration consistera à voir

si vraiment cette guerre anti-terroriste produit des résultats

positifs ou si elle est contre productive (Chapitre 3). Mais avant

cela, nous allons identifier, dans un premier temps, les acteurs de

cette guerre et leurs missions (Chapitre 1) et ensuite, dans un

second temps, nous verrons les mesures anti-terroristes mises en

place par les Etats-Unis pour mener cette guerre, l’appui

international (notamment pour geler les avoirs des terroristes) et

la coopération militaire américaine avec certains pays (Chapitre

2).

dans une seconde partie, notre objectif consistera à voir si la

guerre contre le terrorisme a eu des implications notables sur les

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relations qu’entretiennent les Etats-Unis avec le reste du monde,

notamment leurs pays alliés et amis (en Europe et dans le monde

musulman) mais aussi avec leur adversaire d’hier la Russie

(Chapitres 5 et 6). Avant d’en arriver là, nous verrons d’abord

quelles ont été les réactions des acteurs de la scène internationale

(les Etats, les Organisations internationales et les Organisations

non gouvernementales) au 11 septembre et à la guerre anti-

terroriste (Chapitre 4). L’intérêt de ces réactions repose sur le

fait que, dans la plupart des cas, se sont elles qui ont canalisé les

relations des Etats-Unis avec les autres depuis le 11 septembre.

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PREMIERE PARTIE : DE L’EFFICACITE DE LA GUERRE

ANTI-TERRORISTE

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Chapitre 1 : Les acteurs de la guerre

contre le terrorisme et leurs missions

La “guerre contre le terrorisme” aux yeux de Washington est une

véritable guerre. Ce n’est pas que des mots. A y voir de prés, on assiste à

un véritable effort de guerre aux Etats-Unis. Tout le monde est mis à

contribution. Cela va du président au simple citoyen. Des plus hautes

autorités au “bas peuple”. Chacun a un rôle bien défini à y jouer. Une

grande partie de ces rôles est définie dans le document “National

Strategy for Homeland Security” (NSHS). Avant donc d’identifier les

acteurs de cette guerre et de présenter leurs missions, il serait utile

d’avoir un aperçu de ce qu’est la NSHS ; qu’est ce qu’elle cherche à

réaliser ; et comment elle compte faire pour y arriver.

I. Une brève présentation de la NSHS

La “National Strategy for Homeland Security” (Stratégie nationale pour

la sécurité de la Patrie) a été publiée en novembre 2002. Elle a été le

fruit d’une large consultation qui a duré huit mois3. Elle cherche a

répondre à « quatre questions fondamentales » que sont :

Qu’est-ce-que c’est que la “Homeland Security”, et quelles

missions lui attribuer ?

Que cherche t-on à accomplir à travers cette Stratégie

nationale de sécurité, et quels sont ses objectifs primordiaux ?

Quel est le rôle de l’Exécutif américain dans la réalisation des

objectifs de cette Stratégie nationale de sécurité ?

3 Les concepteurs de la NSHS ont prie le soin de consulter, avant de l’élaborer : des gouverneurs ; des maires ; des membres du Congrès ; des hommes d’affaires ; des professeurs ; des soldats ; des pompiers ; des policiers ; des familles des victimes du 11 septembre 2001 ; des journalistes ; des scientifiques etc.

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Quels sont également les rôles des gouvernements non

fédéraux, du secteur privé, et des citoyens américains ?

La NSHS a pour objectifs4 : d’empêcher des attaques terroristes sur le sol

des Etats-Unis ; de réduire leur vulnérabilité aux actes terroristes et de

réduire également au maximum les dégâts que pourraient leur causer de

tels actes. Pour atteindre ses objectifs, elle a défini dix domaines sur

lesquelles elle va s’appuyer. Chaque domaine renferme des objectifs

précis à atteindre. Ces domaines sont : le Renseignement et l’alerte

(Intelligence and Warning) ; la Sécurisation de la frontière des Etats-unis

et du transport (Border and Transportation Security) ; le Contre-

terrorisme domestique5 (Domestic Counterterrorism) ; la Protection des

infrastructures critiques et des capitaux (Protecting Critical

Infrastructures and Key Assets) ; la Protection contre les menaces

catastrophiques (Defending against Catastrophic Threats) ; l’état de

préparation des secours et de la réaction [face aux attaques terroristes]

(Emergency Preparedness and Response) ; la Loi (Law) ; la Science et la

technologie (Science and Technology) ; le Partage de l’information

(Information sharing and Systems) [entre les acteurs de la guerre contre

le terrorisme à l’intérieur des Etats-Unis mais aussi entre les Etats-Unis et

leurs partenaires internationaux] ; enfin la Coopération internationale

(International Cooperation).

Pour éviter de rentrer dans des détails inutiles, il ne serait pas nécessaire

de développer les objectifs de chaque domaine. Toutefois, les objectifs de

trois domaines (la Sécurisation de la frontière et du transport ; le Contre-

terrorisme domestique ; la Protection contre les menaces catastrophiques

et l’état de préparation des secours et de la réaction) seront développés.

4 Voir la lettre de George W. Bush qui est au début du document de la NSHS. 5 Aux Etats-Unis, le mot « domestique » remplace celui de « intérieure » dans le langage politique. Cela pour éviter que l’expression « intérieure » renvoie à la Commission sur la « sécurité intérieure » créée pendant le maccarthysme pour réprimer les comportements politiques anti-américains.

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Cela pourra permettre aux lecteurs d’avoir une idée de ce qu’envisage les

Etats-Unis dans la “Homeland Security”.

La Sécurisation de la frontière et du transport6

Dans ce domaine, les Américains envisagent, avec l’aide de leurs voisins

(le Mexique et le Canada) mais certainement aussi avec la coopération

des autres pays, de mieux contrôler les flux de personnes, de

marchandises et de services vers leur pays. La Stratégie nationale de

sécurité a fixé six objectifs dans ce domaine parmi lesquelles :

la création de « frontières futées » : c’est à dire des frontières

qui ne permettront pas aux personnes mal intentionnées de

rentrer aux Etats-Unis. A vrai dire cela signifie des contrôles

accrus et très stricts aux frontières ;

la mise en application de l’"Aviation and Transportation

Security Act" ;

la restructuration de la “US Coast Guard” (la Garde côtières

américaine);

la réforme des services d’immigration ; etc.

Egalement, dans le cadre de la sécurisation de la frontière et du transport,

le Président Bush avait demandé au Congrès de permettre le transfert de

certaines agences nationales (s’occupant de la surveillance de la frontière

et du transport) au nouveau Département de la Homeland Security7. Les

agences en question étaient : le Service d’immigration et de

naturalisation (relevant du Département de la Justice) ; le Service des

douanes (relevant du Département du Trésor) ; l’“Animal and Plant

Health Inspection Service” (relevant du Département de l’Agriculture) ;

l’Agence pour la sécurité du transport (relevant du Département du

6 Pour plus de détails sur ce domaine voir p. 21 à 24 du document de la NSHS. 7 A l’époque où le président Bush faisait cette demande, le Département n’était pas encore créé ; il était en projet.

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Transport) et de la Garde côtière des Etats-unis. Aujourd’hui ces agences

dépendent du Département de la sécurité intérieure (DHS).

Le Contre-terrorisme domestique8 : la Stratégie nationale de sécurité

recommande dans ce domaine :

de faciliter l’appréhension des terroristes potentiels : par le

vote de nouvelles lois qui le permettent par exemple ;

d’achever la restructuration du FBI pour accentuer la

prévention des attaques terroristes ;

de cibler et d’attaquer les finances des terroristes ;

de traquer les terroristes étrangers et de les traduire en justice ;

etc.

La Protection contre les menaces catastrophiques9

Ces menaces sont liées à l’utilisation des armes biologiques, chimiques,

radiologiques ou nucléaires par des terroristes ou toute autre personne ou

groupe hostile. Parmi les initiatives majeures définies dans ce domaine

par la Stratégie nationale de sécurité, nous pouvons relever :

la nécessité d’améliorer les techniques de décontamination et les

détecteurs chimiques ;

la mise au point de vaccins et d’antidotes [contre les agents

biologiques pouvant servir comme arme de destruction massive

(ADM)] ;

l’exploitation à fond de la connaissance et des outils scientifiques

pour contrer le terrorisme ; etc.

8 Pour plus de détails sur ce domaine voir p. 25 à 28 du document de la NSHS. 9 Pour plus de détails sur ce domaine voir p. 37 à 40 du document de la NSHS.

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L’état de préparation des secours et de réaction10

Dans ce domaine la Stratégie nationale de sécurité prône :

l’augmentation des stocks de médicament et de vaccin ; la mise en place

de “Citizen Corps”11 (Corps de Citoyen) ; la préparation à la

décontamination chimique, biologique et nucléaire ; la mise en place de

formation [pour organiser les secours en cas d’attaques terroristes] et

d’un système d’alerte national [contre les attaques terroristes] ; etc.

Parallèlement à la Stratégie nationale de sécurité, qui est (comme la

“United State National Strategy” ou Stratégie nationale des Etats-Unis)

une stratégie globale, d’autres stratégies plus spécifiques ont été

confectionnées. Il s’agit de :

la “National Strategy for Combatting Terrorism” : qui définie la

stratégie des Etats-Unis pour la guerre contre le terrorisme

international ;

la “National Strategy to Combat Weapons of Mass Destruction” :

qui a pour objectif d’empêcher aux Etats non nucléaires et aux

terroristes d’accéder aux matériels, à la technologie et au savoir

nécessaire pour développer des ADM;

la “National Strategy to Secure Cyberespaces” : qui vise à

protéger les systèmes informatiques des Etats-unis contre des

personnes ou groupes de personnes mal intentionnées comme les

Hackers, les Crackers ou encore les terroristes ;

la “National Money Laundering Strategy” : elle a pour but

d’empêcher le blanchiment de l’argent qui, selon les autorités

américaines, servirait de financement aux terroristes ;

la “National Defense Strategy” ; enfin

10 Pour plus de détails sur ce domaine voir p. 41 à 46 du document de la NSHS. 11 Voir la partie sur la mission des citoyens américains dans la guerre contre le terrorisme dans ce chapitre.

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la “National Drug Control Strategy” : pour lutter contre le trafic

et la consommation de drogue.

II. Le rôle des autorités fédérales américaines dans la guerre

contre le terrorisme

A la suite du 11 septembre, les autorités américaines ont mis en place un

bureau de rang ministériel pour coordonner les actions des acteurs de la

lutte contre le terrorisme. Ce bureau a servi de fondement au nouveau

ministère de la sécurité intérieure (DHS) qui aujourd’hui est censé

protéger les Etats-Unis contre des attaques terroristes dans le futur. Le

nouveau ministère, à l’instar des autres ministères, comme ceux du

Département de la défense, du Département d’Etat, du Département du

Trésor et autres, joue un rôle central dans la guerre contre le terrorisme.

Chaque ministère impliqué dans la guerre contre le terrorisme joue un

rôle spécifique et qui rentre dans ses compétences.

A. L’OHS : une agence de rang ministériel pour coordonner

la guerre contre les terroristes en attendant la création

d’un ministère de sécurité intérieure

Le “White House Office of Homeland Security” (Bureau de la Maison

Blanche pour la sécurité de la Patrie) est une agence de rang ministériel

créée le 20 septembre 2001. Il avait reçu pour mission de diriger la mise

en œuvre de la Stratégie nationale de sécurité du pays contre la menace

terroriste12. Le premier directeur de cette agence fut Tom Ridge actuel

Secrétaire du Département de la sécurité intérieure. M. Ridge avait pour

mission de coordonner l’ensemble des politiques de guerre contre le

terrorisme du gouvernement fédéral qui impliquait prés d’une

12 En novembre 2002 l’"Office de la Homeland Security" a publié le document de la NSHS.

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quarantaine d’agences, un certain nombre de ministères et le secteur

privé.

Après la création du nouveau Département de la sécurité intérieure,

l’OHS, qui lui a servi de fondement, a continué à fonctionner.

Actuellement, sa mission est, entre autre, de conseiller le Président des

Etats-Unis et, en collaboration avec l’“Office of Management and

Budget”, de développer et de défendre les propositions de budget du

Président Bush (c’est à dire le budget pour la défense de la Patrie). Il est

également chargé de certifier que le budget alloué aux ministères leur

permet d’assumer leurs responsabilités dans la guerre contre le

terrorisme.

B. La naissance du ministère de sécurité intérieure et sa

mission dans la guerre anti-terroriste

« L’idée de créer un “super ministère” de la sécurité intérieure n’a pas

germé dans les heures qui ont suivi la catastrophe du 11 septembre

2001 ; celle-ci a plutôt donné l’impulsion finale »13. Le président Bush

n’a fait que reprendre l’idée de son prédécesseur le président Clinton.

De 1993 à la fin des années 90, les Etats-Unis ont subi de nombreux

attentats terroristes très meurtriers (les attentats contre le Wold Trade

Center en 1993, les attentats contre un immeuble fédéral à Oklahoma

City en 1995, les attentats de Nairobi au Kenya et de Dar-es-salaam en

Tanzanie en 1998 etc.). A cela, s’était ajoutée « [une] multiplication des

attaques informatiques, contre les sites gouvernementaux ou les réseaux

civils »14.

13 Jean François RANCOURT et Stéphane ROUSSEL, « Le Département de la Homeland Security (DHS) Tour de Babel Bureaucratique Américaine ? », Bulletin d’information de l’institut LE MAINTIEN DE LA PAIX, n° 61, décembre 2002, p. 1 14 ibidem.

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Tout cela a participé à ce qui poussera les autorités fédérales américaines

à réactualiser le concept de “lead agency” ou “agence directrice”

(apparu aux Etats-Unis dans les années 80) dont le rôle est conféré, par la

“Directive 39” du Président Clinton, au FBI. La “lead agency” a pour

mission de coordonner les efforts des différents organismes fédéraux

dont les activités touchent aux mesures anti-terroristes. Rôle qu’a joué

l’OHS juste après le 11 septembre et que joue actuellement le DHS.

En novembre 2002, la loi de la Homeland Security est adoptée par le

Congrès. C’est elle qui a permis la création du Département de la sécurité

intérieure dont le Secrétaire est Tom Ridge.

M. Ridge est né le 26 août 1945 (60 ans). Il a grandi dans une famille de

la classe ouvrière. Il a été enrôlé dans l’Armée américaine lors de la

Guerre du Vietnam comme sergent de personnel d’infanterie. En 1982, il

est élu au Congrès pour ainsi devenir l’un des premiers vétérans de la

Guerre du Vietnam à y siéger. Avant d’occuper le poste de Secrétaire du

DHS, il a été le Directeur de l’OHS et auparavant le gouverneur de la

Pennsylvanie. Sa mission consiste à développer et à coordonner la

stratégie nationale de guerre contre le terrorisme pour renforcer la

protection des Etats-Unis contre les menaces et les attaques terroristes.

1) Les missions du DHS

Le DHS est chargé de renforcer la coordination entre les acteurs de la

lutte anti-terroristes, de faciliter la circulation de l’information entre eux

et de réduire les chevauchements et l’étendue des “zones grises” entre les

différents services et agences gouvernementaux à caractère fédéral,

étatique ou municipal. Il contribue également à la “guerre contre la

drogue” (par l’élimination des liens unissant le trafic de drogue au

terrorisme et en participant à la lutte contre les trafiquants) ; il participe à

la formation des “Citizen Corps” par l’intermédiaire du “Community

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Emergency Response Teams"15 ; enfin il gère le "Homeland Advisory

System"16

2) La structure17 du DHS

Les hauts fonctionnaires du Département sont : le Secrétaire, l’Assistant

spécial au secrétaire et les Officiers.

Il compte cinq “Divisions” ou Directions générales que sont: la Direction

générale de l’analyse du renseignement et de la protection des

infrastructures critiques (Information Analysis and Infractructures

Protection ou DG de l’IAIP) ; la Direction générale de la Science et de la

Technologie (Science and Technology ou DG ST ) ; la Direction générale

de la sécurité frontalière et des transports (Border and Transportation

Security ou DG BTS) ; la Direction générale de la gestion des mesures

d'urgence (Emergency Preparedness and Response ou DG EPR) et la

Direction générale du “Management”. Chaque direction générale est

dirigée par un Sous-secrétaire.

a) Les cinq directions générales du DHS et leurs

missions

La DG de l’IAIP

La DG de l’IAIP a pour mission de centraliser les données provenant des

services fédéraux, étatiques et locaux impliqués dans la guerre contre le

terrorisme. Ces informations permettent à la DG de l’IAIP d’identifier les

secteurs vulnérables du territoire, de détecter et d’évaluer les menaces

terroristes. Cette Division joue également un rôle de coordinateur entre

15 Voir la partie sur la mission des citoyens dans la guerre contre le terrorisme dans ce chapitre. 16 Voir la DG de l’IAIP un peu plus loin dans cette partie du chapitre. 17 Jean François RANCOURT et Stéphane ROUSSEL, op. cit., p. 2 - 4

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les différentes agences de renseignement mais aussi avec les acteurs

privés.

Le “Homeland Advisory System” est géré par la DG de l’IAIP. C’est un

système qui informe la population et les autorités sur le niveau de risque

d’attaque terroriste sur le territoire des Etats-Unis. Les niveaux d’alerte

sont au nombre de cinq et vont du “vert” au “rouge” en passant par le

“bleu”, le “jaune” et l’“orange”. « Le niveau vert signifie qu’il faut

évaluer les mesures d’urgence et maintenir les activités de formation,

tandis que le rouge indique aux autorités de se tenir prêtes à intervenir,

de fermer les édifices publics et de porter une attention particulière aux

transports. Entre ces deux extrêmes, les recommandations vont de la

réévaluation des mesures d’urgences (bleu), au renforcement de la

surveillance (jaune), jusqu’à l’annulation d’événements d’envergure

(orange). »18

La DG ST

La DG ST a pour mission de constituer suffisamment de stocks de

vaccin, d’antidote, de médicament et de matériel (des dispositifs de

détection par exemple) pour permettre aux Etats-Unis de faire face à

d’éventuelles attaques terroristes de type ADM ou de limiter leurs effets.

Elle travaille en étroite collaboration avec le secteur privé, les agences de

la Santé et de l’Energie (impliquées dans la lutte contre terrorisme) et les

institutions de recherche et d’enseignement.

La DG BTS

La DG BTS regroupe les “Douanes”, le Bureau de la Citoyenneté et de

l’Immigration, l’“Office for Domestic Preparedness” (Bureau pour l’état

de préparation domestique), le Bureau de la Sécurité des Frontières,

18 Jean François RANCOURT et Stéphane ROUSSEL, op. cit., p. 3

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l’Administration de la Sécurité des Transports et la “Garde côtière”. Elle

a pour mission de « (…) renforcer la sécurité aux points d’entrée (postes

frontière, ports et aéroports) aux Etats-Unis par l’achat d’équipement et

par l’établissement de mécanismes de contrôle. »19 Et de « (…) veiller

aux fonctions d’émission de visas, de documents douaniers, et de

coordination entre les différentes agences. »20

La DG EPR

La DG EPR a pour mission de maintenir un certain “état de préparation”

pour permettre aux Etats-Unis de réagir efficacement à une attaque

terroriste ou à une catastrophe d’envergure. La “Federal Emergency

Management Agency” (FEMA) est la pièce maîtresse de cette Division.

Elle a pour mission de planifier et de coordonner les efforts visant à

atténuer l’impact d’une catastrophe21 sur les Etats-unis.

La DG Management : elle est chargée de tout ce qui est de la gestion

matérielle et financière du DHS.

b) Les hauts fonctionnaires du DHS et leurs

missions

Le Secrétaire est nommé par le président des Etats-Unis, avec

l’assentiment du Sénat. Il attribue les tâches et définit les fonctions des

différentes unités administratives et des services qui font partie du

Département. Il peut octroyer des contrats ou conclure des ententes avec

d’autres agences. Le Secrétaire est également responsable de la

comptabilité des systèmes et des banques de données au sein du DHS.

19 ibidem. 20 Ibidem. 21 Tornades, feux de forêt, pluies diluviennes, tremblements de terre, attaques terroristes et autres.

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20

L’Assistant spécial au secrétaire a pour mission de faire le lien entre le

DHS et le secteur privé. Il doit informer le secrétaire des impacts des

nouvelles législations sur le secteur privé, promouvoir des partenariats

publics/privés et transmettre au Secrétaire les informations sur le

développement, par le secteur privé, de produits ou méthodes de travail

pouvant être utiles au Département.

Les Officiers sont : le Secrétaire adjoint, le Conseiller général et les

Sous-secrétaires. Ces personnes sont désignées par le Président des Etats-

Unis, avec l’assentiment du Sénat. En plus de ces officiers, il s’y ajoute :

le Directeur des Services secrets, le Chef de la Direction des Finances, le

Chef de la Direction de l’Information, le Chef de la Direction des

Ressources humaines et un “Officiers” pour les droit et libertés. Ces

officiers sont nominés par le Président sans l’assentiment du Sénat.

C. Les rôles des autres ministères dans la guerre contre le

terrorisme

Les ministères les plus en vue dans la guerre contre le terrorisme, en

dehors du DHS, sont le Département de la Défense, le Département de la

Justice, le Département d’Etat, le Département de la santé et des services

humaines ; le Département du Trésor et le Département de l’Agriculture.

Avant de présenter le rôle de chacun de ces départements, il est utile de

préciser leurs rôles d’origine et de faire une présentation de ceux qui sont

à leurs têtes (les Secrétaires). La présentation de certains des secrétaires

de département qui suit peut sembler trop détaillée ou banale mais elle

aidera à comprendre ou à mieux interpréter leurs engagements dans cette

guerre contre le terrorisme.

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21

Le Département de la Défense22 (DoD)

Le DoD, qui a remplacé le “National Military Establishment” qui

regroupait les anciens départements de la Guerre, de la Marine et de

l’Armée de l’air, a été créé en 1949. Son premier Secrétaire fut Lyndon

Johnson président des Etats-Unis de 1964-1968. Son Secrétaire actuel est

Donald Rumsfeld.

M. Rumsfeld, qui fait partie de ceux qu’on appelle les “Faucons”23 dans

l’administration Bush, a pris ses fonctions de 21e Secrétaire à la défense

le 20 janvier 2001. Il est né en 1932 (72 ans) dans l’Illinois. Il a servi

dans l’US Navy (ancien pilote de l’aviation naval) de 1954 à 1957. Il est

entré très tôt dans la politique. En 1962, à l’âge de 30 ans, il est élu à la

Chambre des Représentants. En 1975, sous la présidence de M. Nixon,

M. Rumsfeld est nommé Secrétaire à la défense et devient ainsi la plus

jeune personne à avoir occupé ce poste dans l’histoire des Etats-Unis.

Auparavant, de 1973 à 1974, il a été Ambassadeur des Etats-Unis auprès

de l’OTAN à Bruxelles (Belgique).

M. Rumsfeld a souvent servi dans le secteur privé. Avant de devenir

Secrétaire à la défense en janvier 2001, il était le Président de Gilead

Sciences Inc. Il a également occupé des postes de cadre supérieur dans

des entreprises de renom comme GD Seale and Co. (compagnie

pharmaceutique) et General Instrument Corporation (spécialisé dans la

technologie des télécommunications).

Son Département participe à la protection du territoire américain, dans le

cadre de la “Homeland Security”, en menant des opérations militaires à

l’extérieur (comme en Afghanistan en octobre 2001) et en venant en aide

22 La plupart des informations sur les ministères ont été extraites de l’ouvrage de Jean-Tacques LAVENUE, « Dictionnaire de la vie politique et du droit constitutionnel américain ». 23 M. Rumsfeld, à l’instar de Condoleezza Rice et Dick Cheney, fait partie de la “ligne dure” de l’administration américaine (c’est les “vas t’en guerre”)

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22

aux autorités civiles dans certaines situations où elles sont débordées ou

incapables d’intervenir (par exemple : une attaque terroriste d’ampleur,

des feux de forêt, des inondations, des tornades etc.). Egalement, le

Département de la défense peut être appelé à appuyer les autorités civiles

dans des missions dites de “Portée limitée” comme les événements

spéciaux (Coupe du monde de football, Jeux Olympiques etc.).

Le Département de la justice (DoJ)

Il a été créé en 1870. Le “Federal Bureau of Investigation” (FBI), le

LEAA24, le Service d’immigration et de naturalisation et le Community

Relation25 dépendent de lui. Il contrôle également l’administration des

prisons ainsi que les “US district attorneys” et les “US marshall” sur tout

le territoire américain. Son Secrétaire est John Ashcroft (l’Attorney

General).

M. Ashcroft est né le 9 mai 1942 (62 ans) dans la même ville et le même

Etat que Donald Rumsfeld (à Chicago dans l’Etat de l’Illinois). Il a été

gouverneur de cet Etat de 1984 à 1993. En 1994, il est élu au Sénat où il

a été, entre autre, président de la Sous-commission de la Constitution et

membre de la Commission judiciaire. L’Attorney General est chargé de

veiller à l’application de la loi pour permettre d’enquêter, de prévenir et

d’empêcher les activités terroristes sur le sol américain.

Son Département, à l’instar d’autres départements, est également chargé

de l’entraînement des intervenants civils des plus grandes villes

américaines pour affermir la capacité d’intervention rapide dans des

environnements contaminés par des agents chimiques, biologiques ou

24 LEAA = Law Enforcement Assistance Agency (Agence d’assistance à la mise en vigueur de la loi). Cette Agence a pour objectif d’aider les forces de police locale dans l’accomplissement de leurs missions. 25 Le Community Relations Services ou Bureau intercommunautaire a été créé par le Civil Rights Act de 1964 pour coordonner l’ensemble des activités du gouvernement fédéral relatives aux droits civiques.

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23

radiologiques. Il est responsable de la formation des VIPS26. Tout ce qui

concerne les arrestations, les autorisations de perquisition, la présentation

des terroristes devant la justice civile et autres relèvent de ses

compétences.

Le Département d’Etat (DoS)

Ce Département a été créé en 1789 et est chargé des relations extérieures

des Etats-Unis, de son personnel diplomatique et consulaire ainsi qu’une

bonne partie de son aide non militaire. L’aide est distribuée à travers des

agences comme l’AID27 et la “Peace Corps”28. Colin Powell y occupe

actuellement le poste de Secrétaire.

Monsieur Powell est né le 5 avril 1937 (67 ans) à New York. Issu d’une

famille d’origine jamaïcaine, il a grandi dans l’un des endroits les plus

“chaud” de New York (le Bronx). Il a été nommé Secrétaire d’Etat le 16

décembre 2000 et a pris ses fonctions le 20 janvier 2001. Avant

d’occuper cette fonction, M. Powell a été pendant 35 ans soldat

professionnel. Il a un rang de Général de quatre étoiles. De 1989 à 1993,

il fut le patron du Joint Chiefs of Staff, la position militaire la plus élevée

au Département de la défense. Pour terminer, en 1991 lors de la Guerre

du Golfe, il a été l’un des principaux acteurs militaires, avec le Général

Schwartzkopf, de l’“Opération Desert Storm” (Tempête du Désert).

Colin Powell, dont le Département joue un rôle déterminant dans la

guerre contre le terrorisme notamment au niveau de la coopération

internationale, est le détenteur de la “liste d’exclusion terroriste”. Sur

cette liste est inscrite toute organisation que Washington considère 26 Voir la partie sur la mission des citoyens américains dans la guerre contre le terrorisme dans ce chapitre. 27 AID = Agency for International Developpement (Agence pour le développement international) créée le 4 septembre 1961 pour la gestion des programmes d’aides et de développement économiques et militaires. 28 Peace Corps (Corps de la paix) est un programme de recrutement de volontaire pour servir dans les pays sous-développés. Il a été lancé par le président Kennedy.

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24

comme terroriste. L’habilitation de désigner un groupe comme étant

terroriste est donnée au Secrétaire d’Etat par l’article 411 de l’“USA

PATRIOT ACT” de 2001. Cette désignation se fait après consultation de

l’Attorney General (par le Secrétaire d’Etat) ou sur la demande de ce

dernier. Le Département est chargé de rechercher la coopération des

autres pays à la guerre contre le terrorisme, d’informer et de protéger les

citoyens et les intérêts américains à l’étranger contre les menaces

terrorismes, etc.

Le “Programme d’aide anti-terroriste” (ATA) est géré par le

Département d’Etat ; plus précisément par le Bureau de la sécurité

diplomatique. L’ATA a été créé en 1983 sur autorisation du Congrès. Il a

pour mission de dispenser une formation aux forces de police et de

sécurité à l’étranger pour lutter, dissuader et élucider des crimes de

nature terroristes. A ce propos, si l’on en croit au Département d’Etat,

« depuis sa création, l’ATA a permis de former plus de 25 000 personnes

de 117 pays »29.

Le Département de la santé et des services humaines (DHHS)

Le Département a été créé en 1979. Il a en charge la santé et les services

sociaux, et contrôle la "Food and Drug Administration" (FDA). Son

Secrétaire est Tommy Thompson.

Monsieur Thompson, né le 19 novembre 1941 (62 ans) dans l’Etat du

Wisconsin, a prêté serment le 2 février 2001 pour ainsi devenir le 19e

ministre de la santé et des services humaines des Etats-Unis. Avant

d’occuper ce poste de ministre, M. Thompson a été pendant 14 ans

(quatre mandats consécutifs dont le dernier date de 1998) gouverneur du

29 Alan BIGLER, « Le Programme américain d’aide à la lutte contre le terrorisme », fiche d’information diffusé par le Bureau des programmes d’information internationale du Département d’Etat, le 14 novembre 2001, p. 1

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25

Wisconsin. Il a également été réserviste dans l’armée et a servi dans la

“Garde nationale du Wisconsin”.

Le DHHS est chargé de l’acquisition des stocks d’antidote et des

ressources médicales pour le traitement des victimes d’attaques d’armes

de destruction massive [au cas où il y’en aurait]. Les “Centers for

Disease Control and Prevention”, les “National Institutes of Health”, qui

relèvent de ce ministère, sont chargés, d’une part, de fournir des

informations et de faire des recherches approfondies sur les maladies

pouvant être causées par les armes biologiques, et d’autre part, de limiter

les effets de ces armes sur les victimes en cas d’attaque.

Le Département du Trésor (DoT)

Le DoT a été créé la même année que le Département d’Etat (en 1789). Il

perçoit les impôts, émet les bons du Trésor, rembourse les dettes de l’Etat

américain, supervise l’émission de la monnaie et réglemente les

transactions financières internationales. Il dirige le Service des douanes

et le “Service secret” chargé de la protection du Président des Etats-

Unis, de son Vice-président et de leurs familles. Son Secrétaire actuel est

John W. Snow. M. Snow, né le 2 août 1939 dans l’Ohio (65 ans), a pris

ses fonctions en février 2003 en remplacement de Paul O’Neil.

Le DoT intervient dans la lutte contre les finances terroristes. Depuis les

attentats du 11 septembre 2001, il a monté un certain nombre

d’opérations visant à geler les avoirs des terroristes (l’“Opération Green

Quest” par exemple)30. Il est également très actif dans la lutte contre le

blanchiment de l’argent.

Le Département de l’agriculture (USDA)

30 Nous reviendrons sur ces opérations dans le deuxième chapitre.

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26

Créé un siècle après le DoS et le DoT en (1889), l’USDA31 a pour

mission de favoriser le développement de l’agriculture et de superviser le

commerce des produits agricoles pour maintenir des prix raisonnables.

Ann M. Veneman en est l’actuelle Secrétaire. Mme Veneman a pris ses

fonctions en janvier 2001. Elle a eu à occuper le poste de Sous-secrétaire

de ce département de 1991 à 1993 sous la présidence de Bush (père).

L’USDA a pour mission, dans la guerre contre le terrorisme, d’empêcher

à ce que les produits agricoles et les infrastructures alimentaires (par

exemple les stocks alimentaires, les fermes agricoles, les industries

alimentaires etc.) des Etats-Unis soient menacés par les terroristes. En

quelques mots, sa mission consiste essentiellement à lutter contre

l’“agroterrorisme”.

En outre des départements et de leurs secrétaires, on retrouve des

personnes qui eux aussi jouent un rôle central dans la guerre contre le

terrorisme. Parmi elles, nous pouvons citer : Richard B. Cheney (Vice-

président des Etats-Unis) et Condoleezza Rice (“National Security

Advisor” ou Conseiller national à la sécurité).

M. Cheney est devenu vice-président des Etats-unis après l’élection de

George W. Bush à la présidence américaine. Il est né dans le Nebraska le

30 janvier 1941 (63 ans). De 1989 à 1993, sous l’administration de

George Bush (le père), M. Cheney a été Secrétaire à la défense et a joué

un rôle crucial dans les campagnes militaires “Just Cause” (en 1989 au

Panama) et “Desert Storm” (dans le Golfe persique en 1991).

Mme Rice, nommée Conseiller national à la sécurité le 22 janvier 2001,

est née le 14 novembre 1954 (49 ans) à Birmingham dans l’Etat de

l’Alabama. Elle est professeur de sciences politiques et a enseigné à

l’université de Stanford où elle a été un membre du “Center for

31 USDA = United State Departement of Agriculture.

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27

international Securiry and Arms Control” (Centre pour la sécurité

internationale et la limitation des armements). Elle a eu à côtoyer, dans le

cadre de son service administratif, des entreprises et des fondations de

renom comme : Hewlett Packard, Carnegie Corporation, Carnagie

Endowment for International Peace, Rand Corporation, National

Council for Soviet and East European Studies, etc. Pour terminer, elle a

été l’une des plus proches collaboratrices de Georges Bush (le père)

lorsque celui-ci était président.

III. Les autres acteurs de la guerre contre le terrorisme et leurs

missions

La guerre contre le terrorisme aux Etats-Unis est l’affaire de tout le

monde. En dehors des ministères, les services de renseignement,

notamment le FBI et la CIA, sont naturellement impliqués. Les citoyens

américains, le secteur privé, les autorités des Etats fédérés et locales ont

eux aussi chacun un rôle à jouer dans cette guerre dans la mesure de leurs

compétences. Les actions des uns complètent celles des autres et chacun

fait son travail pour que l’autre puisse faire le sien.

A. Les agences de renseignements et la guerre anti-

terroriste

Le FBI et la Central Intelligence Agency (CIA) ont subi de vives

critiques pour n’avoir pas été capables d’empêcher les attaques du 11

septembre. Par la suite, ils se sont fixés de nouveaux objectifs, se sont

dotés de meilleurs moyens pour atteindre ces objectifs et se sont

restructurés pour mieux affronter le terrorisme.

1) Le FBI

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28

Le FBI, police fédérale des Etats-unis, a vu le jour en 1924. Son premier

directeur fut John Edgar Hoover. M. Hoover occupera le poste de

directeur pendant 48 ans (1924-1972). Le Bureau relève du Département

de la Justice. Il a pour mission d’enquêter sur les délits fédéraux à

l’intérieur des Etats-Unis. Robert S. Mueller en est actuellement le

directeur.

M. Mueller a été nommé Directeur du FBI une semaine avant les

attentats du 11 septembre 2001 (le 4 septembre 2001). Originaire de New

York, et vétéran de la Guerre du Vietnam, il a surtout travailler dans le

domaine judiciaire. En 1982 à Boston, où il travaillait pour le compte du

Département de la justice, il a eu à traiter plusieurs cas de fraudes

financières, de terrorisme, de blanchiment d’argent et de corruption.

Avant d’occuper sa fonction, il a été procureur général à Francisco.

L’implication du FBI dans la guerre contre le terrorisme date du début

des années 80. Depuis la moitié des années 90, il s’occupe non seulement

de la menace terroriste sur le territoire américain mais aussi à l’étranger.

Il s’occupe aussi de la lutte contre les cyber-menaces.

Le FBI s’est fixé comme nouvelles priorités, pour lutter contre le

terrorisme mais aussi contre la criminalité, de « protéger les Etats-Unis

contre des attaques informatiques et contre la corruption dans la

fonction publique à tous les niveaux ; protéger les droits civiques ;

s’opposer aux entreprises et réseaux criminels tant transnationaux que

nationaux ; combattre la délinquance d’affaires ; réprimer la criminalité

violente ; appuyer les organismes de police fédéraux, locaux et

internationaux ; enfin, moderniser les moyens techniques qui assurent

l’exécution de toutes ces missions. »32

32 Wendy ROSS, « La réorganisation du FBI à la suite des attaques du 11 septembre », diffusé par le Bureau des programmes d’information internationale du Département d’Etat, 30 mai 2002. Pour voir l’article vous pouvez consulter l’adresse suivante : http://usinfo.state.gov/regional/af/security/french/f2053003.htm

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29

Pour réaliser les objectifs qu’il s’est fixé dans le cadre de la guerre contre

le terrorisme, le FBI compte non seulement sur un partenariat renforcé

avec les autres acteurs mais aussi sur l’augmentation de ses capacités de

renseignement et d’analyse. Dans le cadre du partenariat, il « entend

améliorer ses échanges d’information avec l’Agence Centrale de

renseignement [CIA] »33. Il a mis en place ou intégré des groupes de

travail notamment les “Joint Terrorism Task Forces” (JTTFs), le

“National Joint Terrorism Task Force” (National JTTF), le “Foreign

Terrorist Tracking Task Force” (FTTTF) etc.

Les JTTFs, dont la première équipe a été créée en 1980, sont des équipes

au sein desquelles sont réunis des “officiers de la loi” des Etats et des

comtés ainsi que des agents du FBI et d’autres agents et personnels

fédéraux. Ces équipes ont pour mission de collecter du renseignement en

vue de prévenir des actes terroristes sur le sol américain.

Le National JTTF, qui a été créé par le FBI en 2002, est chargé de

collecter du renseignement et des informations sur le terrorisme (à

l’instar du JTTFs) pour ensuite en faire une redistribution aux JTTFs, aux

unités du FBI (impliquées dans la guerre contre le terrorisme) et aux

agences partenaires.

Le FTTTF a été créé en octobre 2001 par l’Attorney Général. Il se

compose des représentants du FBI, du Service d’immigration et de

naturalisation, du Service des douanes et d’autres agences fédérales. Les

membres du FTTTF ont pour mission d’empêcher des terroristes ou des

personnes suspectées comme telles d’entrer aux Etats-Unis. Si ces

personnes s’y sont déjà infiltrées, ils [les membres du FTTTF], doivent

les identifier et les localiser pour qu’elles puissent être arrêtées.

33 ibidem.

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30

Comme nous l’avons déjà annoncé ci-haut, le FBI compte également

multiplier ses capacités de renseignement et d’analyse pour accomplir sa

mission dans la guerre contre le terrorisme. C’est ainsi qu’il a entrepris

un certain nombre d’initiatives parmi lesquelles : la mise en place de

l’“Office of Intelligence”, du “Counterterrorism Watch” (CT Watch), du

“College of Analytical Studies”, etc.

L’“Office of Intelligence” est chargé de créer des opportunités

professionnelles pour des analystes et d’assurer le partage des données

des analyses et du renseignement au sein et à l’extérieur du FBI.

Le “CT Watch”, qui fonctionne 24h/24, est chargé de la prévention des

opérations terroristes au niveau national mais aussi à l’étranger.

Le “College of Analytical Studies” a élu domicile à l’Académie du FBI à

Quantico dans l’Etat de la Virginie. Il a pour mission de permettre à des

analystes du FBI et à ceux de ses partenaires, pendant une période de six

semaines, de se perfectionner dans les méthodes d’analyse.

2) La CIA

La CIA a été créée en 1947 par la “Loi sur la Sécurité Nationale”

(National Security Act.). Sa mission consiste à veiller sur la sécurité des

intérêts américains dans le monde. Elle a eu comme directeur Georges

Bush ancien président des Etats-Unis (1989-1993). Aujourd’hui, George

J. Tenet occupe le poste de directeur.

M. Tenet a pris ses fonctions de patron de l’“Intelligent Community” (qui

regroupe l’ensemble des agences de renseignement des Etats-Unis à

l’étranger et la CIA) le 11 juillet 1997 sous le second mandat du

Président Clinton. M. Tenet n’est pas un “bleu” à la Central Intelligence.

Il a été le Directeur adjoint de John Deutsch (Directeur du Central

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31

Intelligence ou DCI jusqu’en 1996). Après le départ de ce dernier, M.

Tenet avait assuré la transition.

La CIA recueille et analyse toute les informations liées aux menaces

terroristes potentielles à l’étranger. Il a joué un rôle très important dans

les campagnes militaires américaines menées dans le cadre de la guerre

contre le terrorisme et notamment la campagne en Afghanistan en 2001.

B. Le rôle des citoyens américains

Le peuple américain participe à la Homeland Security essentiellement à

travers des “Citizen Corps” (Corps de citoyen) qui sont une initiative de

l’“USA Freedom Corps”. C’est un regroupement de citoyens américains

volontaires pour participer à la Homeland Security. Dans chaque Etat

américain il existe un "Conseil des Corps citoyens" (Citizen Corps

Council) et dans chaque comté un "Conseil local des Corps citoyens"

(Local Citizen Corps Council). Ces conseils sont chargés d’informer,

d’encourager et d’orienter les citoyens pour qu’ils puissent participer aux

“Citizen Corps”.

L’action des “Citizen Corps” est coordonnée par la FEMA en

collaboration avec le DHHS, le DoJ et d’autres agences fédérales. Les

volontaires sont appelés à participer dans une variété de programmes

dont la plupart sont gérés par des ministères (DoJ, DHS et DHHS). Parmi

ces programmes on trouve :

le “Volunteers in Police Services (VIPS) Program” (Programme

des volontaires du service de la police), qui est sous l’aile du

Département de la Justice. Il forme des volontaires pour aider la

police dans l’exécution de fonctions non-assermentées. Ce qui

permet aux officiers de la police de pouvoir effectuer des

fonctions plus essentielles;

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32

Le “Medical Reserve Corps” (Corps médical de réserve) dépend

lui du DHHS. Il a pour objectif de constituer des réserves de

personnel médical pour aider les services locaux de santé à

répondre efficacement, à une urgence de type catastrophe

naturelle ou attaque terroriste en tant que premiers secours ;

Les “Community Emergency Response Teams” (CERT)

permettent aux citoyens américains de participer à la planification

et à la gestion des secours dans leurs localités ;

Le “Terrorist Information and Prevention System” (TIPS)

encourage les citoyens américains à identifier et à dénoncer toute

activité ou toute personne qu’ils soupçonnent d’être liées aux

terrorisme ou au crime.

C. Le rôle du secteur privé et des autorités

étatiques et locales

Le secteur privé, principal fournisseur des Etats-Unis en marchandises et

services, est propriétaire de 85% des infrastructures (économiques et

industrielles). En partenariat avec les autorités fédérales, il investit dans

la protection physique et informatique des infrastructures critiques. Il

peut être appelé par les autorités fédérales à fournir les ressources

nécessaires à la guerre contre le terrorisme.

Les compagnies pharmaceutiques doivent produire des vaccins contre les

maladies pouvant être causées par des armes biologiques susceptibles

d’être utilisées par les terroristes. Les industries de haute technologie sont

chargées de faciliter les contrôles aux frontières et la détection des ADM

par la mise au point de dispositifs de détection répondant à ces besoins.

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33

Les Etats34 et les gouvernements locaux35 ("Local governement") ont la

responsabilité primaire de placer, de préparer et d’actionner les services

de secours adaptés en cas d’attaque terroriste. Les gouvernements des

Etats sont chargés, à l’instar du gouvernement fédéral, d’encourager leurs

communautés à participer aux "Citizen Corps".

Après avoir déterminé "qui est qui" et "qui fait quoi" dans cette guerre

américaine contre le terrorisme, voyons maintenant quels sont les

instruments mises en place pour éradiquer cette nouvelle menace.

34 Le State ou l’Etat désigne les 51 Etats fédérés des Etats-Unis ainsi que le District de Columbia, Porto Rico, les Îles Vierges, les Samoa américaines, le Guam, la Zone du canal etc. Chacun des Etats est régi par une constitution qui le dote d’un législatif (Legislature) et d’un exécutif (Gouverneur et Lieutenant-gouverneur) et d’un système judiciaire (Cour Suprême de l’Etat et juridictions). 35 Le Local governement désigne toute comté, ville, village, district etc.

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34

Chapitre 2 : La guerre contre le

terrorisme : une “politique” anti-

terroriste unilatéraliste bénéficiant d’un

soutien international mitigé

A y voir de prés, la politique anti-terroriste américaine est beaucoup plus

unilatérale. Les Etats-Unis ont défini leur propre stratégie pour combattre

le terrorisme international dans un document intitulé "National Strategy

for Combatting Terrorism" publié au mois de février 2003. Leur

unilatéralisme se manifeste beaucoup plus dans le domaine militaire et

sécuritaire : domaines dans lesquels ils décident de tout et dirigent tout

selon leur “bon vouloir”. Toutefois, au niveau de la lutte financière, sans

trop avoir le choix, ils composent plus ou moins bien avec les autres

Etats et Organisations internationales (OI).

I. Présentation de la "National Strategy for Combatting

Terrorism"

Cette stratégie a pour objectif non seulement d’empêcher toute attaque

terroriste contre les Etats-Unis, leurs citoyens, leurs intérêts, leurs alliés

et amis mais également d’ôter toute liberté d’action et de mouvement aux

terroristes. Pour ce faire, les Américains comptent agir de quatre

manières :

attaquer les sanctuaires terroristes, leurs leaderships et

commandements, perturber leurs communications et, enfin, leur

ôter tout soutien matériel et financier ;

renforcer la coopération avec leurs partenaires régionaux pour

mieux isoler les terroristes ;

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35

aider les Etats faibles ("Weak States") à mettre en place des

institutions et à disposer des moyens nécessaires pour exercer leur

autorité sur l’étendue de leurs territoires et empêcher qu’ils

servent de refuges aux terroristes ; enfin

forcer, s’il le faut par l’usage de la force militaire, les Etats

réticents à ne pas soutenir le terrorisme.

Les Etats-Unis se sont, également, fixés quatre objectifs majeurs, dans

cette guerre contre le terrorisme, qu’ils ont appelé les 4D (Defeat, Deny,

Diminish, Defend)36. Ces 4D consistent à :

défaire les terroristes et leurs organisations ;

leur priver de tout parrainage, de tout soutien et de tout

sanctuaire ;

diminuer les conditions qu’ils cherchent à exploiter ; enfin

défendre les intérêts et les citoyens américains sur leur

territoire et à l’étranger.

Dans chacun des éléments 4D est défini un certain nombre d’objectifs à

atteindre et les moyens adéquats pour y parvenir.

Défaire les terroristes et leurs organisations (1D)

Les objectifs ici consistent à identifier les terroristes ainsi que leurs

organisations et à les localiser. Pour ce faire, les Etats-Unis comptent

s’appuyer sur le renseignement technique (avec leurs moyens

technologiques et informatiques) mais aussi sur le renseignement

humain. La Communauté de l’intelligence et le FBI, entre autres, sont

chargés de collecter le renseignement, de le traiter et de le distribuer aux

acteurs de la lutte anti-terroriste. Il est possible également qu’il soit

36 Cf. "National Strategy for Combatting Terrorism"

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36

distribué aux alliés des Américains si les autorités fédérales l’estiment

nécessaire.

Priver les terroristes de parrain, de soutien et de sanctuaires (2D). Cet

élément comporte comme objectifs :

l’élimination du parrainage du terrorisme par les Etats : le

Département d’Etat est chargé de mettre en place une

politique visant à encourager ou à décourager les Etats

parrainant le terrorisme à cesser de le faire. Les Etats-Unis se

disent prêts à coopérer avec tous pays le désirant, et à aider les

pays faibles à faire face aux terroristes qui voudraient utiliser

leurs territoires comme sanctuaires ou refuges ;

l’interdiction de tout soutien matériel et financier aux

terroristes ; enfin

l’élimination de tous sanctuaires et refuges terroristes à

travers le monde : la Communauté de l’intelligence, en

collaboration avec d’autres ministères (DoD, DoS, etc.), est

chargée chaque année de faire le point sur les sanctuaires

terroristes dans le monde et de mettre en place des plans pour

les détruire.

Diminuer les conditions que les terroristes cherchent à exploiter (3D)

Pour ce faire, les Américains estiment qu’il est capitale de gagner la

« guerre des idées » ("The war of ideas")37 . Comment ?

En montrant que les actes terroristes sont illégitimes et en

faisant de sorte que le terrorisme soit vu comme l’esclavage,

la piraterie ou le génocide. Bref ce qu’aucun gouvernement

responsable ne pourrait soutenir ou tolérer.

37 Cf. "National Security Strategy of the United States"

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37

En soutenant les gouvernements modernes et modérés, en

particulier ceux du monde musulman, pour que les terroristes

ne puissent trouver dans aucune nation les idéologies et les

conditions qui leur sont avantageuses.

En s’assurant que la communauté internationale focalise ses

efforts et ses ressources sur les zones à risque.

En promouvant la liberté de penser, de s’exprimer librement,

de s’informer et en faisant naître l’espoir et les aspirations à la

liberté de ceux dont les sociétés sont sous la joug de tyrans et

de dictateurs doublés de terroristes ou qui les protégent.

Enfin, en résolvant le conflit israélo-palestinien : les

Américains admettent que la résolution de se conflit est un

élément crucial pour gagner la « guerre des idées ».

Défendre les intérêts et les citoyens américains sur leur territoire et à

l’étranger (4D)

Ce dernier élément des 4D inclus la protection physique et informatique

des Etats-Unis et ses principes démocratiques. Il est fait appelle à tous les

autorités fédérales, les autorités étatiques, les gouvernements locaux, le

secteur privé et à tous les citoyens américains pour faire face au

terrorisme.

Il est à noter que la stratégie de guerre contre le terrorisme vise plus

particulièrement les organisations terroristes de portée mondiale comme

Al Qaïda et les Etats qui sponsorisent le terrorisme et qui ne ménagent

aucun effort pour se doter d’ADM. Les Etats-Unis envisagent, pour

mener à bien cette stratégie, d’user de tous les moyens en leur disposition

(économique, juridique, diplomatique et militaire).

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38

II. Les mesures américaines de lutte contre le terrorisme : des

mesures unilatéralistes

Ces mesures vont des mesures juridiques aux mesures financières en

passant par des mesures sécuritaires et militaires. C’est dans ces deux

dernières que l’unilatéralisme américain se manifeste le plus. La plupart

de ces mesures sont très contestées et contestables. Les détracteurs sont

en général les Etats et les associations de défense des droits de l’Homme

et des libertés publiques. Mais, envers et contre de tous, les autorités

américaines fond la sourde oreille.

A. Les mesures juridiques et sécuritaires

Suite aux attaques du 11 septembre, les Etats-Unis ont adopté un certains

nombre de mesures très contestées et contestables pour faire face au

terrorisme. Parmi ces mesures controversées on retrouve le plus souvent

le Patriot Act, les commissions militaire etc. Toutefois, il y a eu quelques

mesures, dans le cadre des mesures sécuritaires, qui ne sont pas aussi

mauvaises que cela puisqu’elles permettent aux Etats faibles de

bénéficier d’une assistance pour pouvoir faire face au terrorisme : c’est le

cas du Programme de l’ATA.

1) L’USA PATRIOT Act

Adoptée par le Congrès le 25 octobre 2001, l’USA PATRIOT Act est

signée le lendemain par le Président Bush. Elle renforce les pouvoirs des

« organes chargés de l’action pénale » en matière d’enquête et de

surveillance. Elle étend les perquisitions, les écoutes téléphoniques, ainsi

que la surveillance des communications électroniques. Enfin, elle facilite

la collecte et l’analyse des informations sur certaines personnes

suspectées d’être liées au terrorisme ou à la criminalité.

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39

La loi a été très critiquée aux Etats-Unis mais également dans la plupart

des pays démocratiques. Les détracteurs les plus acharnés sont les

organisations de défense des droits de l’Homme et les organisations de

défense des libertés publiques38.

Elle définie le terrorisme. Elle considère comme étend un acte de

terrorisme tout acte qui est illégal en vertu du droit américain ou du droit

du lieu où il a été commis et qui prend les formes suivantes39 :

détournement ou sabotage d’un aéronef, d’un navire, d’un

véhicule ou d’autres moyens de transport ;

prise d’otages ;

attaque violente contre une personne protéger par le droit

international ;

assassinat ou emploi d’un agent biologique, d’un agent

chimique, d’une arme ou d’un dispositif nucléaire ou encore

d’un explosif, d’une arme à feu ou de toute autre arme ou

d’un dispositif dangereux (autrement qu’à des fins monétaires

d’ordre personnel) dans l’intention d’attenter directement ou

indirectement à la sécurité d’une ou de plusieurs personnes ou

de causer d’importants dommages à des biens.

Et considérait également comme acte de terrorisme, par la loi, « toute

menace, toute tentative ou association en vue d’exécuter l’un de ces

actes ».

La définition américaine du terrorisme, n’est pas partagée par la plupart

de leurs alliés et amis. Certains la trouvent très large et d’autres trouvent,

sans le dire officiellement, qu’elle va à l’encontre de leurs intérêts. Cette

38 Cf. au Chapitre IV 39 Cf. à « La Nouvelle Liste d’Exclusion Des Organisations Terroristes », Fiche d’information diffusée par le Bureau des programmes d’information internationale du Département d’Etat, le 21 novembre 2002, p. 1

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40

absence de consensus autour de ce qu’est le terrorisme met à rude

épreuve la coopération internationale (en particulier la lutte financière40).

Pour terminer, il faut également noter qu’en vertu de la loi, le secrétaire

d’Etat est habilité à inscrire une organisation sur la "Liste d’Exclusion

des Organisations Terroristes" (TEL) si celle ci41 :

commet ou incite à commettre des actes de terrorismes dans des

circonstances révélant son intention de causer la mort ou des

blessures ;

prépare ou envisage un acte de terrorisme ;

recueille des informations sur les éventuels objectifs d’un acte de

terrorisme ; enfin

fournit un soutien matériel en vue de faciliter un acte de

terrorisme.

2) Des commissions militaires pour juger les

terroristes

Le 13 novembre 2001, le Président Bush a émis un décret autorisant la

mise en place de commissions militaires pour juger « des terroristes

internationaux ». Le décret ne s’applique qu’aux non citoyens

américains « qui [se sont] livré [s] à des actes de terrorisme international

ou à des actes préparatoires, s’en [sont] rendus complice [s] ou [ont]

comploté en vue de les commettre menés au détriment des Etats-Unis ou

qui [ont] sciemment abrité un ou plusieurs individus répondant aux

critères précités. »42

40 Cf. au Chapitre III du doc. 41 « La Nouvelle Liste d’Exclusion Des Organisations Terroristes », op. cit., p. 1 42 Paul HOFFMAN, « Libertés Publiques Aux Etats-Unis Après le 11 Septembre », Bureau du secrétariat de presse de la maison Blanche, 13 novembre 2001, p. 3

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41

Le président des Etats-Unis est seul habilité à désigner les personnes

concernées par le décret. Les juges remplissent aussi le rôle des jurés. Il

est précisé qu’ « il n’y aurait aucune obligation d’apporter des éléments

probants au-delà du doute raisonnable, et ce ne serait pas à l’accusation

qu’incomberait la tâche de fournir des preuves. »43 Les sentences sont

rendues à la « majorité des deux tiers » des membres qui composent la

commission et ne sont susceptibles d’aucun recours ni devant une cour

internationale ni devant une cour américaine. Toutefois, le président des

Etats-Unis et le secrétaire à la Défense (sur autorisation du Président)

peuvent « demander une révision du jugement ».

Il est à noter que les jugements peuvent se tenir à huis clos pour éviter la

divulgation de renseignements classifiés ou susceptibles de l’être, pour

garantir la sécurité des membres du tribunal, des représentants du

ministère public et des témoins éventuels ou pour ne pas compromettre

les sources d’information, les méthodes ou les activités des services de

renseignement et d’action pénale, ou encore, toute autre question

touchant à la sécurité nationale.

L’instauration de ces commissions, à l’instar de l’USA PATRIOT Act, a

été objet à de très vives critiques à travers le monde. A la suite de ces

critiques, les autorités américaines avaient promis de revoir certaines des

dispositions les plus controversées du décret. Ainsi, le 21 mars 2002,

elles ont affirmé que lors des procès, la « présomption d’innocence » et la

« conviction au-delà du doute raisonnable » seront pris en compte et que

les inculpés pourront se faire assister de l’avocat de leur choix dans

certains cas. En outre, elles ont décidé que la condamnation à la peine de

mort se ferait à l’unanimité des membres de la commission.

Avec ce décret, les Etats-Unis adoptent ce q’ils ont toujours récusé des

autres pays : le recours aux tribunaux militaires, « au mépris des 43 Rapport Général de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La Lutte Contre le Terrorisme Résultats et Questions », paragraphe 66.

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42

garanties de procès juste et équitable ». En guise d’exemple, selon B.

Hoffman, les Etats-Unis ont émis des protestations à l’encontre de la

condamnation du citoyen américain Lori Berenson par un tribunal

militaire péruvien et a obtenu qu’il soit rejugé en appel par une cour

civile. Les Etats-Unis ont également émis des critiques similaires à

l’encontre du jugement de l’activiste nigérian Ken Sara Wiwa devant un

tribunal militaire et de son exécution.

3) L’US-VISIT44 : un programme pour filtrer les

entrées aux Etats-Unis

L’US-VISIT a été voté par le Congrès américain juste après les attentats

du 11 septembre 2001. Il a été lancé le 5 janvier 2004. Cette nouvelle

procédure d’entrée sur le territoire américain a recours à la biométrie, en

particulier au balayage électronique des empreintes digitales, pour

confirmer l’identité du visiteur étranger et vérifier son statut au plan des

visas. Le programme se sert aussi des données obtenues par les consulats

des Etats-Unis à l’étranger pour vérifier l’identité des visiteurs. A la fin

de l’année 2004, la même procédure devra être suivi par les étrangers à

leur sortie du territoire des Etats-Unis. L’US-VISIT est présent dans les

115 aéroports et 14 [c’est 15] ports américains45 et va être étendu d’ici

peu à 50 postes aux frontières canadiennes et mexicaines.

Sur une année pleine, 24 millions de voyageurs munis de visas devront se

soumettre à ces contrôles46. Les autorités américaines affirment, pour

défendre le programme, qu’il dissuade les terroristes ou criminels fichés

de se rendre aux Etats-Unis, protége les visiteurs en empêchant

l’usurpation de leurs documents de voyage et enfin garantie l’intégrité du

44 Voir également Annexe III 45 Voir Annexe IV pour les aéroport et ports concernés 46 Pascal RICHE, « Aux frontières américaines : souriez vous êtes fichés », Libération, 6 janvier 2004, p. 9

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43

système d’immigration américain en facilitant les voyages et en

respectant la vie des visiteurs.

Mais ce qui inquiète dans ce programme, notamment pour les

organisations de défense des doits de l’Homme et les organisations de

défense des droits civiques, « c’est la fiabilité des informations que

contient la base de données fédérale ». En plus, « des tas de gens y

figurent par erreur et, une fois qu’ils y sont, il est très difficile de les en

faire sortir »47. Ils affirment également craindre que le FBI s’en sert pour

y faire entrer qui bon lui semble. Pour réfuter l’argument selon lequel le

programme empêcherait aux terroristes d’entrer aux Etats-Unis, M. J.

Gohel (spécialiste de la Sécurité à l’Asia Pacific Foundation à Londres)

affirme que « les terroristes sont souvent des jeunes gens de bonne

famille, ayant fait des études et sans aucun casier judiciaire. »48

Toutefois, la plupart des ressortissants français, n’ayant pas besoin de

visa pour se rendre aux Etats-Unis, ne sont pas concernés par le

programme mais certaines catégories de voyageurs comme les étudiants,

les journalistes et autres, ayant besoin d’un visa américain, devront se

plier aux nouvelles règles. A l’instar des ressortissants français, les

ressortissants de 27 autres pays49 sont exemptés de l’US-VISIT (la durée

du séjour ne doit pas dépasser 90 jours). Cependant, au plus tard avant la

fin de l’année, ces 27 pays et la France, devront fournir à leurs

ressortissants des passeports avec une puce « contenant leur photo et des

informations biométriques : empreintes digitales scannées ou re-

production de l’iris »50

47 Crystal WILLIAMS (porte parole de l’American Immigration Lawyers Association) cité par Pascal RICHE, op. cit., p. 9 48 Pascal Riché, op. cit., p. 9 49 Allemagne, Andorre, Australie, Autriche, Belgique, Brunei, Canada, Danemark, Espagne, Finlande, Grande-Bretagne, Islande, Irlande, Italie, Japon, Liechtenstein, Luxembourg, Monaco, Nouvelle-Zélande, Norvège, Pays-Bas, Portugal, Saint-Marin, Slovénie, Suède, Suisse, Singapour. 50 Pascal RICHE, op. cit., p. 9

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44

En dehors de l’US-VISIT, les autorités américaines envisagent de mettre

en place à partir de cette année : le CAPPS II. Il consiste en une

utilisation d’informations communément fournies par les passagers ainsi

que les banques de données commerciales et les banques de données sur

les criminels afin de repérer les passagers qui pourraient faire peser une

menace sur les autres.

Selon les autorités fédérales, le CAPPS II aidera à protéger la vie privée

des gens tout en protégeant les vies et n’aura pas accès aux informations

bancaires, aux informations médicales ou aux données relatives aux

transactions commerciales par carte de crédit. Enfin, les autorités

assurent qu’une bonne partie des données concernant les passagers sera

effacée immédiatement après le vol.

4) Le programme d’aide anti-terroriste (ATA) : un

programme pour aider certains pays à former leurs

forces de sécurité

L’ATA, évoqué au premier chapitre, est l’un des programmes que les

Etats-Unis ont mis en place pour aider certains pays à lutter contre le

terrorisme.

Ce programme n’est ni une aide militaire ni une aide économique ; il se

rapproche beaucoup plus à une coopération policière. Pour rappel, l’ATA

forme les forces de police et de sécurité, de certains pays, à combattre, à

dissuader et à élucider les crimes de nature terroriste sur leurs territoires.

Après demande du pays intéressé, auprès des autorités diplomatiques

américaines sur son sol, de bénéficier du programme, une équipe

d’experts est envoyée sur place pour évaluer « les capacités de

dissuasion et de riposte du pays face aux terroristes » dans cinq

domaines :

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45

application des lois, maintien de l’ordre et protection des

personnes et des biens ;

protection des détenteurs du pouvoir national, du siége et des

fonctions du gouvernement, et du corps diplomatique, y inclus

celui des Etats-Unis ;

surveillance des frontières internationales ;

protection des infrastructures essentielles ; et

gestion des crises de portée nationale.

C’est à partir de là que les Etats-Unis vont déterminer de quel type de

formation le pays hôte nécessite et avec quel type d’équipement.

Toutefois, avant qu’un pays puisse participer au programme, les

Américains s’assurent d’abord s’il respect les droits de

l’Homme (condition essentielle pour bénéficier du programme).

La formation dure de deux à cinq semaines et se focalise essentiellement

sur la prévention, la gestion et le règlement des crises et sur les

investigations.

L’ATA a le mérite, comme l’affirme les autorités fédérales, de fournir

« aux forces de police et de sécurité des pays un cadre d’officiers

spécialisés qui connaissent les valeurs et la façon de penser des Etats-

Unis et sur lesquelles les officiers de sécurité régionaux et autres

responsables Américains peuvent compter en temps de crise. »51

B. Les mesures financières pour bloquer les avoirs des

terroristes

Les attentats du 11 septembre 2001 ont convaincu les Etats-Unis

combien il était important pour eux de lutter contre ce nouveau

51 Alan BIGLER , « Le Programme américain, d’aide à la lutte anti-terroriste », op. cit., p. 4

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46

phénomène qu’est le terrorisme et en particulier leurs finances sans

lesquelles ils ne pourraient pas fonctionner efficacement. Sans argent, les

auteurs des attentats du 11 septembre n’auraient, certainement, jamais

pus suivre des cours de pilotage, rester des mois sur le territoire

américain pour préparer minutieusement et sereinement leurs actes et

s’acheter des billets pour embarquer dans les avions qui leur ont servi

d’armes. Il semblerait que la préparation des attentats a coûté aux

terroristes environ 400 000$ US.

Pour lutter contre les finances du terrorisme, les Etats-Unis font appel à

deux types d’outils : le gèle des avoirs appartement à des terroristes à

titre individuel, à des groupes terroristes et aux Etats qui parrainent le

terrorisme ; le second outil est l’interdiction de tout soutien matériel aux

terroristes. Un certain nombre de mesures a été mis en place par les

autorités. Parmi les plus importantes nous pouvons noter : le décret

13224, l’"Opération Green Quest" et l’US PATRIOT Act.

Le décret 13224

Le décret 13224 a été signé par le président Bush le 23 septembre 2001.

Il habilite au Département du Trésor de bloquer les avoirs et transactions,

aux Etats-Unis, de personnes (donateurs, agents de transfert d’argent etc.)

ou institutions (banques, organisations charitables etc.) liées à des

terroristes ou à des organisations terroristes. Le DoT a également

l’autorisation de geler les avoirs des banques et institutions financières

étrangères sur le territoire américains, qui refuseraient de coopérer au

blocage des avoirs terroristes, ou de leur bloquer l’accès aux marchés et

capitaux Américains.

Ce décret n’est pas le premier du genre. Le président Clinton avait, sous

ses deux mandats, signé trois décrets similaires. Il s’agit des décrets

12947, 13099 et 13129.

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47

Le décret 12947 a été signé en janvier 1995. Il devait permettre la saisie

des capitaux des personnes ou organisations considérées comme étant

nuisibles au processus de paix au Moyen-orient.

Le décret 13099, signé en août 1998, prohibait toute transaction effectuée

aux Etats-Unis avec un certain nombre de groupes terroristes inscrits sur

une liste tenue par le DoT.

Enfin, le décret 13129 a été signé en juillet 1999 en réponse aux attentats

contre les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie. Il interdisait

toute transaction financière avec les Taliban. Il avait permis le gèle de

prés de 300 millions de dollars US.

L’"Opération Green Quest"

Juste après les attentats du 11 septembre 2001, c’est à dire en octobre

2001, le gouvernement des Etats-Unis a mis en place : le "Foreign

Terrorist Asset Tracking Center" (FTAT), l’"Opération Green Quest" et

le "Terrorist Financing Task Force". En plus de traquer les avoirs des

terroristes, ces organismes avaient pour missions de faciliter le partage

des informations, dans le domaine financier, entre les agences de

renseignement et les agences chargées de veiller à l’application de la loi.

Ils étaient également chargés d’aider et d’encourager certains pays à

identifier, à perturber et à faire échec aux réseaux de financement du

terrorisme.

L’"Opération Green Quest" a été déclenchée le 25 octobre 2001 par le

DoT. Il a mobilisé : les douanes ("US Customs Service"), les agents des

impôts (IRS), le Secret Service, le Bureau de contrôle des avoirs

étrangères (OFAC), le Réseau de répression de la criminalité financière

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48

(FinCen52), le Service d’inspection des postes et le Service naval

d’enquêtes criminelles. D’après Antoine Colonna53, l’Opération a permis,

entre octobre 2001 et février 2002, c’est à dire en l’espace de quatre

mois, le gèle de 14,6 millions de dollars US d’avoirs.

Le USA PATRIOT Act.

En matière de lutte contre le financement du terrorisme, la loi invite les

institutions financières privées à augmenter la transparence de leurs

transactions, de rechercher un système commun d’identification du client

et à trouver les moyens nécessaires pour empêcher leurs services

financiers d’être utilisés par des criminels ou des terroristes pour blanchir

de l’argent. En outre, elle encourage une coopération entre le

gouvernement et le secteur privé et facilite le partage de l’information

entre le gouvernement et les agences nationales.

C. Les mesures militaires

Les mesures militaires concernant la guerre contre le terrorisme,

notamment les opérations militaires, sont exclusivement unilatérales. Les

Etats-Unis ont agi en dehors des Nations Unies et n’ont pas beaucoup

sollicité l’aide internationale (pour ce qui est de la façon de mener les

opérations). Les opérations concernent essentiellement l’Afghanistan et

l’Irak. Même si elles se sont déroulées avec succès (techniquement), on

ne peut pas assurer qu’elles ont permis à avancer la guerre contre le

terrorisme.

Dans un souci de mieux mener leurs opérations militaires à l’extérieur

mais aussi pour protéger leur territoire, les Américains avaient opéré des

changements assez importants dans le domaine militaire.

52 Le FinCen est un groupe inter-agence créé récemment par le Trésor américain et le Secret Service. 53 « Guerre secrète contre Al-Qaeda », dir. Eric DENECE, p. 52

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49

1) Des changements intervenus dans le domaine

militaire depuis le 11 septembre

Depuis le 11 septembre 2001, les Etats-Unis estimant qu’ils font face à

de nouvelles menaces et à de nouveaux ennemis, affirment que les

principales priorités pour leurs armées sont de défendre le territoire

national et de réaffirmer leur rôle dans le monde. Ils estiment également

que leurs institutions militaires doivent être transformées pour faire face

aux défis du 21e siècle. Pour cela l’armée doit assurer les alliés et les

amis des Etats-Unis ; dissuader toute future concurrence militaire et

toutes menaces contre les intérêts américains, de leurs alliés et amis ;

enfin défaire de manière décisive tout adversaire si la dissuasion ne

fonctionne pas. Pour parvenir à cela, les Etats-Unis ont défini leur

stratégie de défense (Quadrennial Defense Review) et mis en place un

nouveau commandement (Northern Command ou Northcom).

a) La Quadrennial Defense Review (QDR)

La QDR est un document de référence relatif à la stratégie de défense des

Etats-Unis. Depuis 1993, la loi oblige chaque nouvelle administration

d’en établir un. L’administration Clinton en avait élaboré deux (en 1993

et en 1997). Celui de septembre 2001, le 3e du genre, a été élaboré par

l’administration Bush. La QDR a été présentée au Congrès le 30

septembre 2001. Le contenu de ce document a été très largement

influencé par les événements du 11 septembre 2001.

Face aux menaces terroristes, mais aussi face à la prolifération des

missiles balistiques et des CBRNE, le QDR a assigné quatre objectifs à

l’armée américaine54 :

54 Cf. Rapport d’information du Sénat français, n° 313, Session ordinaire de 2001-2002, p. 31 - 32

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50

le premier est d’assurer la « défense du territoire des Etats-

Unis », ce qui demande une implication beaucoup plus forte du

pentagone dans la « Homeland Defense » ;

le deuxième objectif est de « dissuader les agressions » grâce à la

présence militaire extérieure et à la capacité de réaction,

notamment par le redéploiement des troupes ;

le troisième objectif consiste, en cas de conflit, à « pouvoir

l’emporter simultanément sur deux théâtres majeurs », de

manière décisive sur l’un d’entre eux ;

le quatrième et dernier objectif vise à pouvoir conduire un

nombre limité d’opérations dans des « crises de faible intensité ».

Pour donner à l’armée les moyens d’atteindre ces objectifs, la QDR

prône une hausse du budget de la défense et la « transformation » des

forces armées américaines. Cette transformation s’appuie sur quatre

piliers55 :

le premier d’entre eux concerne le renforcement de la

coordination (« jointness ») à tous les niveaux : entre les armées,

notamment en matière de commandement et de contrôle, avec les

alliés et les pays partenaires dans le cadre de coalitions, entre le

Pentagone et les différentes agences gouvernementales

américaines ;

le deuxième pilier repose sur un développement de

l’expérimentation et de l’évaluation de nouveaux concepts

opérationnels, matériels ou équipements, afin de disposer d’une

plus large variété d’options ;

le troisième pilier consiste à exploiter l’avantage dont disposent

les Etats-Unis dans le domaine du renseignement, par le

renforcement du renseignement humain, par les développements

technologiques concernant les drones et les moyens aériens,

55 Cf. Rapport d’information du Sénat français, op. cit., p. 33 - 35

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51

navals et spatiaux, dédiés au renseignement et surtout pour une

meilleure intégration des diverses sources de renseignement ;

enfin

le quatrième pilier concerne les capacités des forces.

La « transformation » implique également de doter à l’armée la capacité

de pouvoir « déjouer les stratégies de déni d’accès » et d’ôter à l’ennemi

toute possibilité de bénéficier d’un « sanctuaire ».

b) La création d’un nouveau commandement

pour protéger le territoire américain : le

Northcom

Jusqu’en 2002, les Etats-Unis comptaient huit commandements unifiés :

quatre à vocation géographiques et quatre autres à vocation

fonctionnelles. Les quatre commandements à vocation géographiques

sont : le Southern Command (Southcom), le Pacific Command (Pacom),

l’European Command (Eucom) et le Central Command (Centcom). Les

quatre commandements fonctionnelles sont : le Strategic Command, le

Transportation Command, le Special Operations Command et le Joint

forces Command.

Le Centcom joue un rôle très important dans la guerre contre le

terrorisme. Il a été créé en 1983 et son Quartier général se trouve à Mac

Dill (Floride). Il couvre une zone de responsabilité de 25 pays parmi

lesquels les pays du Proche-Orient et du Moyen-Orient et les pays de

l’Asie centrale.

Depuis le début de cette guerre, les opérations militaires anti-terroristes

menées l’ont été sous son commandement. C’est le cas des opérations en

Afghanistan (en 2001) et en Irak (en 2003).

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Suite aux attentats du 11 septembre, les Etats-Unis ont mis en place un

neuvième commandements unifié : le Northcom qui est à vocation

géographique. Le Northcom est entré en fonction le 1e octobre 2002. Il

couvre les Etats-Unis, le Canada, le Mexique, une partie des Caraïbes et

les eaux environnant jusqu’à 500 miles (l’Océan Pacifique et l’Océan

Atlantique). Sa mission est de défendre le territoire américain (terre, mer

et air) et de coordonner l’assistance militaire fournie aux autorités civiles

nationales en cas d’attaques avec des ADM. Ce qui implique « des

actions militaires (protection des infrastructures critiques, de l’espace

aérien et des approches maritimes), tout autant que civilo-militaires

(participation aux plans d’évacuation et aux secours aux populations,

protection nucléaire, biologique, chimique et radiologique). »56

Désormais, le Commandant en chef du Northcom est aussi celui du

Norad. Le Norad est un organisme binational (Etats-Unis et Canada)

chargé de la surveillance aérospatiale et de l’espace aérien de l’Amérique

du nord.

Le Northcom emploie au moins 1000 personnes (militaires et civiles) et

possède un budget annuel qui tourne autour de 70 millions de dollar US.

2) Les opérations militaires

L’Opération Enduring Freedom (OEF) en Afghanistan et l’Opération

Iraqi Freedom (OIF) en Irak sont les opérations militaires les plus

importantes que les Américains ont mené dans le cadre de la guerre

contre le terrorisme, depuis le 11 septembre. Ils n’ont pas mis beaucoup

de temps à défaire leurs adversaires lors de ces opérations. L’OEF qui est

intervenue en riposte aux attaques du 11 septembre a été plus ou moins

soutenue par les Etats et les Nations Unies (l’ONU avait dépêché une

force d’assistance dans le pays après la chute des Taliban). Par contre

56 Rapport d’information du Sénat français, op. cit., p. 48

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53

avec l’OIF les Etats-Unis n’ont pas bénéficié dont soutien international à

quelques exceptions prés.

a) OEF

En Afghanistan, les gens étaient brutalisés par le régime en place.

Beaucoup de personnes ont souffert de famine. Les femmes n’étaient

autorisées ni à aller au travail ni à aller à l’école. Un homme risquait la

prison si sa barbe n’atteignait pas une certaine longueur. On pouvait très

facilement être arrêté et mis en prison pour avoir regardé la télévision. En

résumé, sous le régime des Taliban, les Afghans vivaient en esclavage.

En dehors de cela, Ben Laden, le présumé responsable des attentats du

11 septembre 2001, vivait dans ce pays avec la bénédiction des Taliban.

S’appuyant sur l’idée qu’il fallait libérer l’Afghanistan de son régime

archaïque qui réduisait son peuple à l’esclavage et ; voulant riposter aux

attaques du 11 septembre et mettre la main sur Ben Laden et ses amis,

les Américains ont monté une opération militaire sous l’appellation de

Enduring Freedom ou Liberté Immuable. Elle a été lancée le 7 octobre

2001.

L’opération militaire américaine, Enduring Freedom, en Afghanistan

avait quatre objectifs selon le Center for Defense Information57 (CDI).

Ces objectifs étaient : ôter à Al Qaïda son refuge afghan ; arrêter

Oussama ben Laden et ses hommes pour les traduire en justice ; rendre

Al Qaïda incapable de poser des menaces aux intérêts américains ; enfin

stopper le parrainage du terrorisme islamiste par le régime des taliban en

le détruisant si nécessaire. En voulant détruire le régime des Taliban, il

était clair pour les Etats-Unis que cette guerre était une guerre totale.

57 Sofia ALDAPE, « The US Campaign In Afghanistan : The Year In Review », Center for Denfense Information (CDI), 10 octobre 2002, p. 1 (Doc. Word)

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54

Une fois sur le champ de batailles, l’objectif principal des militaires

américains était de « s’assurer la maîtrise du ciel ». Pour cela, il fallait

« détruire par des frappes aériennes de nuit et à haute altitude l’aviation

des Taliban, les installations aériennes au sol et leur défense

antiaérienne, mais aussi les centres de contrôle et de commandement et

les camps d’entraînement des terroristes »58.

L’atteinte de cet objectif devait permettre aux Américains d’éliminer les

risques auxquels leur aviation s’exposer : la Défense contre avion (DCA)

et l’aviation des taliban (presque inexistante). Elle permettait également

de briser la cohésion des forces taliban et des hommes d’Al Qaïda en leur

ôtant tous moyens de communication, de surveillance, de renseignement

et toute liberté de mouvement et ainsi faciliter une intervention terrestre.

Cette intervention va se dérouler en deux phases : une première phase

aérienne et une seconde terrestre.

La première phase a porté sur des frappes aériennes ciblées et des

bombardements. Elle devait permettre aux Américains d’avoir la

« maîtrise des airs ». Les premières frappes ont d’abord visé les défenses

aériennes, l’aviation, les centres de commandement et de contrôle des

taliban et les camps d’entraînements d’Al Qaïda. Après dix jours de

frappes aériennes, pour permettre aux Forces de l’Alliance du Nord

(FAN) de progresser vers Kaboul et le sud du pays, les bombardiers

américains commencèrent à s’attaquer aux lignes taliban. En guise

d’exemple, le 31 octobre, des bombardiers B-52 avaient sévèrement

pilonné les lignes des taliban situées au nord de Kaboul.

D’après Loup Francart, dans les premières heures qui ont suivi le début

de l’Opération, les Américains ont tiré 50 missiles Tomahawk qui ont

58 Loup FRANCART et Isabelle DUFOUR, « Stratégies et décisions : la crise du 11 septembre », p. 225.

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tous atteint leurs cibles. Ces missiles ont été tirés à partir de trois

croiseurs et un destroyer positionnés en mer d’Arabie59.

Cette première phase a été accompagnée d’opérations de guerre

psychologiques qui consistaient à larguer des tracts à diffuser des

messages radios à la population afghane pour leur expliquer que leurs

actions [les Américains] visées uniquement les Taliban.

Après quatre semaines de bombardement, les défenses aériennes, les

installations militaires, les moyens de communication des taliban étaient

presque tous détruits et leurs lignes sérieusement atteintes. C’est à partir

de se moment que débute, véritablement, la seconde phase.

La seconde phase de l’Opération a porté sur une intervention des Forces

spéciales au sol. Cet intervention ne s’est pas faite par un envahissement

massif du territoire afghan par les troupes de la coalition. Elle s’est faite

plutôt au « coup par coup » et selon les besoins.

La principale mission des Forces spéciales était de traquer et d’arrêter les

terroristes et les Taliban. Sur le champ de bataille, elles étaient chargées

d’encadrer et de conseiller les FAN d’une part et de désigner les objectifs

au sol au profit des forces aériennes d’autre part. Dans certains cas, 20

minutes après avoir reçu les détails sur leurs cibles, l’aviation frappée.

Les frappes aériennes intensives et précises combinées avec une

intervention au sol des Forces spéciales agissant en concert avec les FAN

ont ôté aux taliban tout espoir et toute possibilité de transformer

l’Opération Enduring Freedom en une guerre d’usure. Moins d’un mois

après l’offensive terrestre, les taliban avaient perdu plus de 90% du

territoire qu’il contrôlait avant le début de l’Opération. Mazar-i-Sharif, la

première ville à être prise, est tombée le 9 novembre ; moins de deux

59Loup FRANCART et Isabelle DUFOUR, op. cit., p. 206 .

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semaines plus tard, Taloqan, Kaboul, Herat, Bamiyan tombaient ; le 25

novembre la ville de Kunduz tombe. Avant la Chute de la capitale

Kaboul le 13 novembre, les taliban s’étaient repliés dans leur fief

Kandahar. Cette ville tombera le 7 décembre. Le dernier refuge des

taliban et d’Al Qaïda, l’enclave de Tora Bora, tombera le 16 décembre.

A la fin de l’année 2001, l’Afghanistan était sous contrôle des FAN et de

la coalition américano-britannique. Les taliban et les membres d’Al

Qaïda qui ont eu la chance d’échapper à la mort ont eu le malheur d’être

prisonniers des Américains ou de vivre en cachette entre l’Afghanistan et

le Pakistan. Pour capturer ceux qui sont en fuite, les Américains ont

monté d’autres opérations. Parmi elles : l’Opération Harpoon et

l’Opération Anaconda respectivement en mars et en d’avril 2002, et

l’Opération Lions des Montagnes.

b) OIF

A la suite des événements du 11 septembre 2001, les Américains

affirmaient que leur principal soucis était de voir des groupes terroristes

lancé des attaques à partir du territoire irakien ou que l’Irak utilise ces

groupes pour attaquer les pays occidentaux. Soupçonnant l’Irak de

détenir des ADM (Chimiques et biologiques), les Américains craignaient

que le régime de Saddam Hussein donne ses armes aux terroristes. Ils

affirmaient aussi que l’Irak avait probablement des liens avec Al Qaïda.

Se fondant sur tout cela, ils ont estimé, à tort ou à raison, qu’il était

urgent de mener une action militaire contre l’Irak.

Pour justifier leur intervention, les Américains ont essayé par tous les

moyens, sans trop convaincre, de prouver le lien entre l’Irak et le

terrorisme ainsi que la détention d’ADM. Le président Bush avait à de

nombreuse reprises déclaré que l’Irak représentait « une menace

imminente » et que son pays disposait d’élément tendant à prouver

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l’existence de programmes interdites en Irak. Colin Powell s’était

présenté au Conseil de sécurité des NU, devant les médias du monde

entier, avec des photos prise par satellites (camions et sites), des

enregistrements téléphoniques (entre des personnes supposées appartenir

à l’armée irakienne et d’un groupe terroriste) et un flocon contenant de

l’Anthrax, pour convaincre les NU d’intervenir en Irak ou au moins de

cautionner leur intervention.

D’après certaines personnes, la volonté de l’administration Bush

d’intervenir en Irak date bien avant les attentats du 11 septembre. En

guise d’exemple, selon un rapport du sénat français, bien avant le 11

septembre, « l’élimination du régime de Saddam Hussein revêtait un

caractère prioritaire pour une large partie de l’administration. » En

outre, dans ses discours de politique étrangère, avant son élection,

George Bush ne cachait pas sa volonté d’en finir avec le régime de

Saddam Hussein.

Malgré l’opposition de la Communauté internationale, l’OIF débutera le

19 mars 2003 après plusieurs semaines de suspense. Cette guerre, comme

l’illustre les propos du président Bush, s’inscrit dans une logique de

guerre préemptive qui consisterait à s’attaquer au mal avant qu’il

n’émerge. En effet, le président Bush disait que l’intervention en Irak

consistait « de faire face à cette menace [irakienne] maintenant avec [l’]

armée de terre, [l’] armée de l’air, [la] marine, [la] garde côtière et [les]

Marines, pour ne pas avoir à y faire face plus tard avec des armées de

pompiers, de policiers et de médecins dans les rues de [leurs] villes. »60

Les objectifs, aussi bien politiques que militaires que les Américains

s’étaient fixés dans cette guerre, étaient les suivantes61 :

60 Cité par Bruno TERTRAIS, «Analyse et enseignements de la campagne Iraqi Freedom», FRS (Fondation pour la Recherche Stratégique), 24 avril 2003, p. 2 (Document Word) 61 ibidem

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58

mettre fin au régime de Saddam Hussein ;

identifier, isoler et éliminer les ADM ;

rechercher, capturer et expulser les terroristes ;

obtenir des renseignements sur les réseaux terroristes ;

obtenir des renseignements sur le commerce illicite d’ADM ;

d’apporter une aide humanitaire ;

sécuriser les installations pétrolières ; enfin

aider les Irakiens à créer un gouvernement représentatif.

Pour atteindre leurs objectifs, les militaires américains avaient planifié

ou envisagé un certain nombre d’options. Parmi elles : l’envahissement

de l’Irak par au moins deux fronts. Au nord à partir de la Turquie et au

sud à partir du Koweït. Une autre option était de procéder à des attaques

aériennes pour ensuite, soit en même tant que les frappes ou après, lancer

une offensive terrestre à partir du Koweït. Finalement, face au refus des

Turcs de l’utilisation de leur territoire, c’est la dernière option qui sera

adoptée.

Le 21 mars débute la campagne aérienne "Shock and Awe" (choc et

stupeur) assimilée par certaines personnes à une Blitzkrieg (guerre

éclair). Elle consistait à bombarder massivement la capitale irakienne

Bagdad dans le but de saper le moral de l’armée mais aussi de détruire le

système de commandement et de contrôle des forces irakiennes.

En même temps que se déroulait cette campagne aérienne, les

Américains et les Britanniques opéraient une offensive terrestre, à partir

de la frontière koweitienne, le long de l’Euphrate et du Tigre pour

remonter jusqu’à Bagdad.

Quelques jours après le début des combats la coalition américano-

britannique avait réussi à mettre la main sur les villes du sud comme

Bassora et le port de la ville d’Oum Qasr (le seul débouché de l’Irak à la

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59

mer). Les Britanniques devaient rester au sud pour sécuriser les villes

conquises. Quant aux Américains, ils devaient poursuivre leur avancée

vers Bagdad en tâchant d’éviter les villes qui ne revêtaient pas un intérêt

stratégique à leurs yeux.

Le 4 avril, soit prés de deux semaines après le début de l’opération, la 3e

Division d’infanterie américaine mettaient la main sur l’Aéroport

International à la périphérie de Bagdad après avoir défait la Division

irakienne Médina. A partir du 5 avril les troupes américaines

commençaient à investir la ville. Au 10 avril, Bagdad était entre les

mains des Américains. Saddam Hussein et compagnie s’étaient évanouis

dans la nature. A partir de cette date, en moins de trois jours, Kirkuk et

Mossoul (villes kurde se trouvant au nord de l’Irak) sont tombées sans

résistance entre les mains des Peshmergas. Tikrit, la ville natale de

Saddam Hussein où l’on croyait que le raïs s’était retiré avec sa Garde

républicaine et ses Feddayins, tombera sans grande difficulté le 14 avril.

En résumé, nous pouvons dire qu’à la mi-avril la guerre était gagnée par

la coalition américano britannique. A la déception de certaines personnes,

la « mère de toutes les batailles », qu’avait promise Saddam Hussein, n’a

pas eu lieu.

3) Le soutien international aux campagnes

américaines

De source militaire américaine, « 15 des 18 Alliés américains membres

de l’OTAN » ont participé à la campagne militaire en Afghanistan et 11

pays de l’OTAN ont déployé des forces terrestres sur le théâtre des

opérations et aux alentours.

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60

Selon un rapport présenté en novembre 2002 devant l’Assemblée

parlementaire de l’OTAN62, 23 pays ont mis des installations à la

disposition des Américains pour leurs opérations militaires en

Afghanistan ; 89 ont donné une autorisation de survol de leurs territoires

et 76 une autorisation d’atterrissage. Toujours selon le rapport, plus de

100 pays ont offert des forces militaires ; 27 pays partenaires de la

coalition ont fourni en matériels et en soldats : 104 avions, plus de 60

navires et 14 000 soldats (il faut noter que la plupart des soldats se

trouvaient à bord de navire opérant dans la région et non sur le terrain des

combats). Le Royaume-Uni, la France et l’Italie ont fourni des groupes

aéronavals.

Noter bien qu’une bonne partie des pays ayant participés, à la campagne

militaire en Afghanistan l’ont fait dans le cadre de la Force de sécurité et

d’assistance internationale (ISAF).

L’ISAF est une force de maintien de la paix envoyée en Afghanistan par

les Nations Unis63 vers la fin de l’année 2001. Elle se composait, en

2003, de 4000 à 6000 troupes de prés d’une vingtaine de pays64. Au mois

d’avril 2003, l’Allemagne avec prés de 2500 troupes était le pays qui

possédé le plus grand nombre de troupes dans l’ISAF. A la même date, la

France possédait prés de 550 troupes dans la force. La plupart des troupes

françaises étaient des troupes de déminage, de reconnaissance ou de

logistique.

La mission de l’ISAF est de sécuriser l’Afghanistan et en particulier la

capitale Kaboul; d’aider le gouvernement afghan à mettre en place ses

propres forces de sécurité et de défense et d’aider à la reconstruction du

pays.

62 Cf. Rapport Spécial de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La guerre contre le terrorisme », paragraphe 30

63 Résolution 1386 du Conseil de sécurité des NU adoptée le 20 décembre 2001. 64 Albanie, Australie, Azerbaïdjan, Bulgarie, République Tchèque, Danemark, Finlande, France,

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61

Il lui est reproché d’être présente uniquement dans les grandes villes du

pays comme Kaboul. Il est à noter que l’ISAF, comme les forces

américaines, les agents et fonctionnaires des OI et les autorités afghanes,

est la cible d’attaques terroristes, orchestrées vraisemblablement, par les

taliban déchus et les membres d’Al Qaïda.

En dehors de l’ISAF comme nous l’avons évoqué, des pays ont participé

à titre individuel à la campagne afghane. Le Royaume-Uni, lors de

l’Opération Enduring Freedom, a eu à effectuer de nombreuses missions

de reconnaissances aériennes. Ses forces navales ont mené des attaques

avec des missiles Tomahawk sur le territoire afghan (à bord de leurs

sous-marins HMS Superb, HMS Trafalgar et HMS Tiumph par exemple)

lors de la première phase de l’Opération. Leurs forces spéciales ont

participé à la seconde phase de l’Opération.

Le porte-avions français le Charles de Gaulles a été déployé de

décembre 2001 à juin 2002 sur le théâtre des opérations. Les forces

aériennes françaises ont eu à effectuer des missions de reconnaissance au

cours de l’OEF65. La France avait également déployé des appareils de

transport (C-160 Transall et C-130 Hercules) à Douchanbe au

Tadjikistan ; des avions ravitailleurs au Kirghizstan « à des fins d’aide

humanitaire, de transport d’appoint pour les troupes de la coalition et de

ravitaillement en vol ». Des Mirage 2000 basés à Manas, au Kirghizstan,

avaient été mis à la disposition de la coalition pour servir à des missions

de soutien aérien rapproché.

D’autre pays, comme l’Allemagne, le Canada, la Pologne, l’Ouzbékistan,

le Kirghizistan, le Tadjikistan et autres ont contribué diversement à la

réussite de la campagne militaire américaine en Afghanistan.

65 cf. Rapport Spécial de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La guerre contre le terrorisme », paragraphe 37

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Contrairement en Afghanistan, les Etats-Unis n’ont pas bénéficié d’un

très large soutien international dans la guerre en Irak. Avant le début de

l’OIF, les autorités américaines affirmaient que leur coalition comptait

prés de 50 pays « représentant au total plus d’un milliard d’êtres

humains. » parmi ces pays, selon Colin Powell le secrétaire d’Etat

américain, 15 n’ont pas souhaité que leurs noms soient divulgués. Donc

on se retrouvait avec une coalition de 50 pays dont les 35 étaient connus

et les 15 autres inconnus.

Toutefois, il faut retenir que ces pays, à l’exception du Royaume-Uni et

de l’Australie, n’ont pas participé militairement à la campagne ; ils n’ont

fait que déclarer leur soutien politique. En outre, une bonne partie de ces

50 pays n’avait aucun pouvoir de décision ou même de visibilité sur la

scène internationale. Tout ce qu’ils voulaient, c’étaient de gagner l’amitié

ou la confiance des Etats-Unis en perspective d’un éventuel soutien

économique ou financier.

III. La coopération internationale à la guerre contre les terroristes

A la suite des attaques du 11 septembre, de nombreuses OI et institutions

financières, notamment l’ONU, l’Union européenne, le Front monétaire

international (FMI), la Banque mondiale et autres, ont mis en place des

mesures pour lutter contre les finances des terroristes. Sur le papier ces

mesures sont très intéressantes et laissent croire que la traque des avoirs

des terroristes va être féroce.

En dehors de l’appui international à cette traque, l’autre forme de

coopération entre les Etats-Unis et les autres pays de la planète s’est faite

bilatéralement. C’est ainsi que les Philippines, la Georgie et le Yémen,

entre autre, ont reçu une importante assistance militaire pour pouvoir

faire face aux terroristes sur leurs territoires.

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A. L’appui internationale à la lutte contre les finances des

terroristes : l’un des rares domaines où l’étranger coopère

plus ou moins sérieusement

Après les attentats du 11 septembre 2001, prés de 197 pays et quelques

organisations intergouvernementales ont exprimé leur souhait d’aider les

Etats-Unis à bloquer les avoirs des terroristes. Certains de ces pays ont

aussitôt mis en place des mesures de gèle des avoirs terroristes et d’autres

ont sollicité l’aide des Américains pour y arriver. Ceux qui se sont le plus

illustrés dans cette lutte financière sont : les OI et les institutions

financières notamment les NU, l’Union européenne et un certain nombre

d’institutions et organisations régionales ou internationales.

1) Les NU et la lutte contre le financement du

terrorisme

Bien avant que se produisent les attentats du 11 septembre les NU

avaient pris des mesures pour lutter contre le financement du terrorisme.

Le 9 décembre 1999, l’assemblée générale des NU avait adopté à

l’unanimité une convention sous l’appellation de « Convention

internationale pour la répression du financement du terrorisme. »

Cette convention mettait en garde les membres de l’organisation contre

tous soutien financier à des terroristes et tout financement d’opérations

terroristes. Au lendemain des attaques du 11 septembre, elle n’était

ratifiée que par quatre pays66. Les Etats-Unis eux même ne l’avait pas

ratifié ; ce qui n’est pas surprenant. Toutefois, ils ont promis, suite au 11

septembre, d’encourager tous les pays de ratifier, la convention ainsi que

les résolutions qui vont suivre et qui concernerait le terrorisme.

66 Le Royaume-Uni, le Botswana, le Sri Lanka et l’Ouzbékistan.

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Après le 11 septembre, le Conseil de sécurité des NU dans sa résolution

7158, avait demandé les pays membres de geler les avoirs des

organisations terroristes et des personnes liées au terrorisme figurant sur

la liste du DoT. A la suite de cette résolution, le Conseil de sécurité

adoptera deux autres résolutions beaucoup plus contraignantes, sérieux et

célèbres (ou plus connues). Il s’agit des résolutions 1373 et 1390.

La résolution 1373 a été adoptée le 28 septembre 2001. Elle oblige les

Etats membres des NU à considérer comme délit l’usage ou la collecte de

fonds à des fins terroristes, geler les fonds de ceux qui sont impliqués

dans la planification d’attaques terroristes, coopérer aux enquêtes

internationales et refuser d’accueillir ceux qui exécutent, planifient ou

cautionnent des actes de terrorisme. Les Etats membres sont tenus de

faire part aux NU, par des rapports, de leurs efforts d’appliquer la

résolution.

La résolution 1390 a été adoptée le 16 janvier 2002. Elle oblige les

gouvernements des Etats membres à bloquer les avoirs des taliban (le

mollah Mohammad Omar et ses ministres) d’Oussama ben Laden, d’Al

Qaïda et de tous ceux qui y sont associés. Il est à noter que les noms, de

ceux dont les actifs sont bloqués, sont communiqués à la Commission

des sanctions des NU qui a 48 heures pour soulever d’éventuelles

objections. En l’absence d’objection, les noms concernés sont placés sur

la liste terroriste du Conseil de sécurité et tous les Etats sont tenus de

geler leurs actifs et d’empêcher qu’ils ne soient mis à disposition67.

2) L’Union européenne (UE) et le gèle des avoirs

terroristes

67 Cf. au Rapport Général de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « Les Conséquences économiques du 11 septembre 2001 et la dimension économique de la lutte contre le terrorisme », paragraphe 41

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65

Prés des trois quarts des avoirs terroristes gelés, depuis le 11 septembre

2001, l’ont été au sein de l’UE et des Etats-Unis. L’Europe joue un rôle

très important dans la lutte contre le financement du terrorisme. Des

sommes considérables d’argent appartenant à des terroristes ont été

gelées par les Etats membres de l’Union. Le 8 novembre 2002, les

autorités britanniques annoncées avoir gelé, sur 38 comptes bancaires

appartenant à des individus suspectés d’être liés au terrorisme, prés de

103 millions de dollars américains. Le lendemain (9 novembre), le

ministre de l’économie de l’Italie déclarait que son pays avait, moins de

deux mois après les attentats du 11 septembre, gelé 20 comptes bancaires

et surveiller attentivement les mouvements d’argent sur prés de 100

autres comptes suspects. En Allemagne, 214 comptes bancaires

contenant prés de 4 millions de dollars US ont été gelés par les autorités,

dans les premiers mois qui ont suivi les attaques du 11 septembre.

L’UE, probablement piquée par l’émotion qu’avait suscitée les attentats,

avait activement et presque sans réserve participer à la vague de gèle des

avoirs terroriste. Cela a été également le cas de nombreux pays à travers

le monde. Au fur et à mesure que l’on s’éloignait de ces attentats, on

remarquait que la coopération avec les Etats-Unis, sans s’interrompre, se

compliquait. En guise d’exemple, quand les Etats-Unis ont demandé à

l’UE d’inscrire sur sa liste terroriste le Hamas palestinien pour geler ses

avoirs, l’UE n’avait pas accepté sur le coup ; il a fallu quelques semaines

de tractations pour voir le Hamas inscrit sur la liste.

3) Le G7, le G20 et la lutte contre le financement du

terrorisme

Le G768 a été fondé en 1975 par les sept pays les plus industrialisés du

monde. On y a ajouté la Russie dans les années 90 d’où l’appellation

actuelle G8. Le groupe tient chaque année un sommet sur le territoire de 68 Le G7 ou Groupe des 7 se compose de l’Allemagne, du Canada, des Etats-Unis, de la France, de l’Italie, du Japon et le Royaume-Uni.

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l’un des Etats membres. Lors des sommets les Chef d’Etats et de

gouvernement discutent des problèmes de l’économie mondiale, de la

mondialisation, des crises internationales etc. Ils arrêtent ensuite des

mesures, non obligatoires, censées régler les « problèmes » de la planète.

Le 6 octobre 2001, au cours d’une réunion des ministres des finances du

groupe et des dirigeants des banques centrales, un plan d’action pour

combattre le financement du terrorisme a été établi. Le plan avait défini

comme priorités : l’« application vigoureuse des sanctions

internationales, dont le gel des avoirs des terroristes, [le] développement

et [la] mise en œuvre rapide de normes internationales, [l’]

accroissement du partage des informations entre pays et [le]

renforcement des efforts des superviseurs financiers pour contrer

l’utilisation pernicieuse du secteur financier par les terroristes »69. Le

plan prévoyait aussi la création d’unités de renseignement financier pour

faciliter le partage des informations sur le blanchiment de l’argent et le

financement du terrorisme.

Le G2070 a pour rôle de favoriser le dialogue entre les pays industrialisés

et les pays en développement, particulièrement sur des sujets globaux

(comme la mondialisation ou la lutte contre le financement du

terrorisme), où la coopération internationale est un impératif.

Le groupe avait établi le 17 novembre 2001, un plan d’action similaire à

celui du G8. Le plan prévoyait de fournir une assistance technique aux

69 Rapport Général de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « Les Conséquences économiques du 11 septembre 2001 et la dimension économique de la lutte contre le terrorisme », paragraphe 38 70 Le G20 a été créé en 1999 par le G7. Il réunit les pays membres du G8 (les Etats-Unis, le Japon, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, le Canada, l’Italie et la Russie), un certain nombre de grands pays émergents ou intermédiaires (Indonésie, Corée, Chine, Afrique du Sud, Brésil, Argentine, Mexique, Turquie, ainsi que l’Arabie Saoudite et l’Australie), et plusieurs institutions financières internationales (FMI, Banque mondiale, Comité du développement, Comité monétaire et financier international). Outre les Etats membres, l’Europe est fortement représentée au sein du G20 (Présidence de l’Union, Banque centrale). Les pays sont représentés par leurs ministres des finances et leurs banquiers centraux.

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pays nécessiteux pour qu’ils puissent lutter efficacement contre le

blanchiment de l’argent et le financement du terrorisme.

4) Le GAFI et la lutte contre le financement du

terrorisme

Le GAFI est un organisme intergouvernemental créé à l’origine pour

lutter contre le blanchiment de capitaux. Il se compose actuellement de

33 membres71 : 31 pays et gouvernements et deux OI.

A la suite des attaques du 11 septembre 2001, lors d’une réunion

extraordinaire tenue à Washington DC en octobre 2001, le GAFI a décidé

d’élargir sa mission au financement du terrorisme. Il a ainsi adopté « Huit

Recommandations Spéciales » susceptibles d’empêcher aux terroristes et

à ceux qui les soutiennent d’accéder au Système financier international.

Ces « Huit Recommandations Spéciales » engagent les membres du

GAFI à72 :

prendre des mesures immédiates pour ratifier et mettre en

œuvre les instruments appropriés des NU ;

ériger en infraction pénale le délit de financement du

terrorisme, des actes terroristes et des organisations

terroristes ;

geler et confisquer les avoirs des terroristes ;

fournir la gamme la plus vaste possible d’assistance aux

autorités opérationnelles et de réglementation d’autres pays

dans les enquêtes sur le financement du terrorisme ;

71 Afrique du sud, Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Brésil, Canada, Commission européenne, Conseil de coopération du Golfe, Danemark, Espagne, Etats-Unis, Fédération de Russie, Finlande, France, Grèce, Hong Kong, Chine, Irlande, Islande, Italie, japon, Luxembourg, Mexique, Norvège, Nouvelle-Zélande, Royaume des Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Singapour, Suède, Suisse et Turquie. 72 Cf. Site du Gafi : www.fatf-gafi.org

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imposer des obligations de lutte contre le blanchiment de

capitaux aux systèmes alternatifs de paiement ;

renforcer les mesures d’identification dans les transferts

électroniques de fonds internationaux et domestiques ;

s’assurer que les personnes morales, notamment les

organisations caritatives, ne puissent pas faire l’objet d’abus

pour financer le terrorisme.

5) Les institutions financières internationales et la lutte

contre le financement du terrorisme

Les institutions financières internationales en question sont le Fond

monétaire international (FMI) et la Banque mondiale. Ces institutions

fond parties du « Système des Nations Unies ».

Le FMI et la Banque mondiale ont été fondés suite à la conférence

internationale de Bretton Woods (d’où le nom d’institutions de Bretton

Woods) dans le New Hampshire aux Etats-Unis. Lapidairement, leur

mission consiste à rehausser le niveau de vie des pays membres. Plus

précisément, le FMI œuvre en faveur de la coopération monétaire

internationale et offre aux pays des conseils stratégiques et une assistance

technique pour les aider à bâtir et à maintenir des économies solides.

Quant à la Banque mondiale, elle favorise le développement économique

à long terme et la réduction de la pauvreté en offrant aux pays un appui

technique et financier pour les aider à conduire des réformes sectorielles

ou à réaliser des projets particuliers (constructions de routes, d’écoles, de

structures hospitalières etc.).

A la suite des attentats du 11 septembre 2001, les institutions de Bretton

Woods ont adopté des plans d’actions devant leur permettre de lutter

efficacement contre le blanchiment de capitaux et les finances du

terrorisme. Basiquement, les plans invitaient les deux institutions à

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partager leurs stratégies de lutte contre le blanchiment d’argent pour

éviter que les terroristes se servent d’eux pour financer leurs opérations.

Les deux institutions avaient également promis d’étudier les systèmes de

transfère monétaires informels, comme le Hawala, pour empêcher que

les terroristes l’utilisent ; et de fournir une assistance technique aux Etats

nécessiteux pour qu’ils puissent combattre le blanchiment des capitaux et

le financement du terrorisme.

6) Les autres soutiens à la lutte contre les finances des

terroristes

L’ASEAN a été créée en août 1967 par la déclaration de Bangkok. Elle a

pour mission de promouvoir le développement économique, social et

culturel des Etats membres, ainsi que la paix et la sécurité collective. Elle

se compose actuellement de 10 pays73. L’ASEAN et le Conseil de

coopération du Golfe avaient également pris un certain nombre de

mesures pour manifester leur bonne volonté de combattre les finances du

terrorisme.

En novembre 2001, lors du sommet de l’ASEAN à Brunei, les Etats

membres avaient signé une déclaration conjointe en vue de lutter contre

le terrorisme. Ils avaient promis de coopérer étroitement pour stopper les

flux monétaires des terroristes dans la sous région.

L’Arabie Saoudite, d’où est originaire la plupart des commanditaires des

attaques du 11 septembres, et ses partenaires du Conseil de coopération

du Golfe avaient promis aux Américains de geler les avoirs des

organisations terroristes mais malheureusement cela est resté à l’état de

vœux pieux.

73 Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande, Brunei (1984), le Vietnam (1995), la Birmanie, le Laos (1997) et le Cambodge (1999).

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B. La coopération militaire bilatérale

Au niveau militaire, les Etats-Unis ont fourni une assistance à certains

pays dont les territoires sont considérés comme des sanctuaires pour

terroristes ou comme pouvant l’être du fait de l’incapacité de ces pays à

exercer leur autorité sur l’ensemble de leurs territoires. Cela a été le cas

des Philippines, de la Georgie et du Yémen.

1) L’assistance militaire apportée aux Philippines

Les Philippines sont un archipel qui se trouve en Asie du Sud-Est. Il est

situé entre la mer des Philippines, le sud de la mer de Chine et l’Est du

Vietnam. Le pays a été cédé aux Etats-Unis par l’Espagne en 1898 suite à

la guerre hispano-américaine. En 1946, après la fin de la seconde guerre

mondiale qui a mis fin à l’occupation japonaise, les Etats-Unis accordent

aux Philippins leur indépendance tout en y maintenant des bases

militaires. La dernière de ces bases a été fermée en 1992.

Depuis quelques années, les autorités philippines font face à des

mouvements d’insurrections musulmans dont le plus connu et le Groupe

Abu Sayyaf. Ce groupe est spécialiste des prises d’otages (notamment

d’otages occidentaux). Les otages sont souvent échangés contre de

l’argent qui sert, avec les fonds fournis par certaines ONG et pays

musulmans, à financer la guérilla. D’après les Etats-Unis et les autorités

philippines, le Groupe Abu Sayyaf est étroitement lié à Al-Qaïda. C’est

ainsi, et dans le cadre de la lutte mondiale contre le terrorisme, que les

Américains (en accords avec les autorités philippines) ont décidé de

déployer des troupes sur l’archipel.

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71

D’après un rapport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN74, un

contingent américain de 660 hommes (dont 160 soldats des forces

spéciales) a été déployé sur l’archipel en février 2002 pour une période

de six mois. Ce contingent était chargé de former les forces philippines

aux opérations de contre guérilla. Les autorités américaines avaient

promis à leurs homologues philippins de leurs fournir des équipement

d’« une valeur d’environ 100 millions de dollars U. »75

Le partenariat entre les deux pays a pris fin officiellement en juillet 2002,

et « l’armée philippines a annoncé que le nombre de membres d’Abu

Sayyaf avait considérablement diminué, passant de 2000 environ à

200. »76 Pour relativiser ces propos, certains analystes « ont […] observé

que cette diminution s’expliquait d’avantage par le nombre de déserteurs

que de prisonniers. »77 Ces mêmes analystes laissent entendre qu’il n’est

pas exclu que le Groupe Abu Sayyaf se reconstitue à l’avenir.

2) L’assistance militaire apportée à la Georgie

La Georgie est un pays de l’Asie du sud-ouest entouré au nord par la

Russie, au sud par la Turquie et l’Arménie, à l’ouest par la mer noire et à

l’est par l’Azerbaïdjan. Elle faisait partie de l’ex-URSS. Elle est devenue

indépendante après la dislocation de l’URSS en 1991. Le pays connaît

des troubles ethniquo-sécessionnistes (en Abkhazie, en Ossétie du sud et

en Adjarie), institutionnels et économiques très sérieux depuis son

accession à l’indépendance.

Les Gorges de Pankisi, près de la frontière troublée de la Tchétchénie,

sont suspectées d’abriter des combattants tchétchènes alliés supposés du

74 Rapport Spécial de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La guerre contre le terrorisme », paragraphe 66 75 ibidem 76 Rapport Spécial de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La guerre contre le terrorisme », paragraphe 67 77 ibidem

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groupe Al Qaïda. En plus, suite à la chute des taliban en 2001 avec

l’OEF, les autorités géorgiennes ont affirmé que des taliban et des

membres d’Al Qaïda se cachaient dans ces gorges. Les Etats-Unis,

craignant que la Georgie (qui n’a pas les moyens de faire face à cette

menace) devienne un abri pour les terroristes, ont offert leur soutien pour

les chasser.

En mars 2002, avec l’accord de la Russie, les Etats-Unis ont déployé

dans le pays environs 200 soldats de leurs forces spéciales dans le cadre

d’un programme de formation. Le programme prévu pour un an, avait

pour objectif de former « quatre groupes géorgiens à déploiement rapide

aux opérations de la lutte anti-terroriste et anti-guérilla. »

3) L’assistance militaire apportée au Yémen

Le Yémen se trouve au Moyen-Orient. Il est situé au nord par l’Arabie

Saoudite, au sud par la Mer d’Arabie, à l’ouest par la Mer Rouge et à

l’est par l’Oman. Jusqu’en 1990, la République du Yémen était divisée

en deux : le Yémen du sud et le Yémen du nord. Après la réunification,

en 1994, un conflit sécessionniste va éclater mais sera très vite subjugué.

Le Yémen a eu un différent frontalier assez sérieux, avec son voisin

l’Arabie Saoudite. Ce différent a été réglé en 2000.

La même année (en 2000), un attentat terroriste contre l’USS Cole

(navire militaire), dans le golfe d’Aden, avait tué 17 marins américains.

En 2002 un pétrolier français, le Limburg subissait une attaque terroriste

à 5 kms des côtes du Yémen. Après les attentats du 11 septembre 2001,

plusieurs membres d’Al Qaïda arrêtés à travers le monde étaient

d’origine yéménite ce qui laisse à penser que le groupe avait une base

solide dans le pays. En outre, selon un rapport de l’Assemblée

parlementaire de l’Otan cité ci-dessus, les services américains de

renseignement avaient localisé, plusieurs campements, le long de la

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frontière entre le Yémen et l’Arabie Saoudite, pouvant servir de refuges

aux combattants arabes fuyant l’Afghanistan.

En raison de tous cela, en mars 2002, suite certainement à des pressions

américaines sur les dirigeants yéménites, le Yémen a accepté de recevoir

sur son territoire des centaines de soldats américains dont la mission est

de former les troupes du pays à la lutte anti-terroriste. Les Etats-Unis

avait promis de former les gardes côtes yéménites et de leur « fournir 15

bateaux équipés de haute technologie pour effectuer des patrouilles dans

le golfe d’Agen. »78

En septembre 2002, pour avouer que la coopération avec le Yémen

n’avait pas fonctionné, le second de Donald Rumsfeld, Paul Wolfowitz,

avait reconnu que les Etats-Unis « n’avait pas réussi à atteindre au

Yémen le niveau de coopération ou de réussite atteint aux

Philippines. »79

78 Rapport Spécial de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La guerre contre le terrorisme », paragraphe 70 79 Rapport Spécial de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La guerre contre le terrorisme », paragraphe 71

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Chapitre 3 : Des acquis et de l’efficacité

de la guerre anti-terroriste

Le bilan de la guerre contre le terrorisme n’est pas assez mauvais mais on

ne peut pas non plus dire qu’il est reluisant. Autant les opérations

militaires en Afghanistan et en Irak ont été des succès techniques autant

ces pays restent instables. Autant la lutte financière avait pris un élan

considérable dans les premiers mois qui ont suivi les attaques du 11

septembre, autant elle s’est essoufflée maintenant. Quant à la coopération

judiciaire, qui paraît être l’une des meilleures solutions pour lutter contre

le terrorisme, elle n’existe presque pas. Tout cela fait qu’aujourd’hui les

attentats sont de plus en plus nombreux et les gens se posent des

questions sur l’efficacité de cette guerre contre le terrorisme. Est-elle

vraiment efficace ou lui manque t’il quelque chose ?

I. Le bilan des opérations militaires en Afghanistan et en Irak :

un bilan mitigé

Même si les opérations militaires en Afghanistan et en Iraq ont été de

véritables succès pour les Américains au niveau technique, elles sont

loin, pour le moment, d’avoir éradiqué le terrorisme international. Et il

reste beaucoup à faire dans la reconstruction et la stabilisation politique

des deux pays.

A. Les acquis des opérations

Le bilan de l’opération "Enduring Freedom" en Afghanistan a été en

général positif pour les Etats-Unis. Ils ont réussi à chasser le régime des

taliban qu’ils présentaient comme étant un régime abominable et cruel.

Ils ont ôté à Al Qaïda leur principal refuge, détruit leurs camps

d’entraînement, tué certains de leurs dirigeants (par exemple : Ali

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Mohamed adjoint de Ben Laden et responsable financier de

l’Organisation) et arrêté de nombreux membres du groupe. Ils ont installé

un gouvernement qui leur est favorable (H. Karzaï a la nationalité

américaine et y à vécu pendant longtemps). Enfin, la rapidité de

l’Opération et sa réussite ont permis aux Etats-Unis de faire taire les

critiques autour de la campagne.

Au niveau économique, si les Américains parviennent à stabiliser

totalement le pays, ils pourront réaliser leur projet de pipeline. Ce

pipeline permettra de faire passer le pétrole et le gaz de la mer

Caspienne, tant convoités par les Etats-Unis, de l’Afghanistan au

Pakistan pour ensuite être récupérés par des pétroliers et acheminés vers

les pays Occidentaux. Il [le pipeline] permettra également d’éviter le

passage par la Russie ou l’Iran.

Au niveau militaire, l’Opération a été un véritable succès. La presque

totalité des objectifs militaires ont été atteints. L’Opération s’est déroulée

très rapidement (moins de deux mois) avec un minimum de pertes

matérielles et humaines. Le bilan des pertes matérielles, à la fin de

l’Opération, s’élevait à moins d’une dizaine d’hélicoptères dont la

plupart ont été détruits par accident. En plus de ces hélicoptères, le 2

novembre 2001, les autorités militaires américains avaient déclaré avoir

perdu un drone qui s’était écrasé en raison du mauvais temps. Les pertes

humaines quant à elles tournées entre 10 et 20 hommes tués dont, là

aussi, la plupart ont été victimes d’accident ou de « tirs amis » (par

exemple : le 5 décembre 2001, trois soldats américains avaient trouvé la

mort à Kandahar à la suite d’une erreur de bombardement).

La campagne irakienne, à l’instar de celle de l’Afghanistan, a été un

véritable succès au point de vu militaire. Aucun des scénarios du pire ne

s’est réalisé, Donald Rumsfeld, qui avait prédit que la campagne durerait

« peut-être six jours, peut-être six semaines », avait gagné son pari

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comme le souligne M. Tertrais. Selon lui80, engagée avec moitié moins

d’hommes qu’en 1991 (280 000 vs 600 000), la guerre de 2003 a été

remportée en moitié moins de temps (21 jours) et moitié moins de morts

dans la coalition (157 vs 358). Le total des victimes et le nombre de

morts par jour de combat étaient en fait proches de ceux du conflit des

Malouines (293, avec une moyenne de 7,5 morts/jour), et sans commune

mesure avec les conflits précédents. Toujours, selon M. Tertrais, de la

première guerre mondiale au Vietnam, le ratio entre pertes et forces

engagées s’établissait à environs 1/15, à comparer avec 1/480 pour

l’Opération en Iraq.

Selon les estimations, entre le 20 mars 2003 et le 19 mars 2004, c’est à

dire un ans après le début de l’Opération Iraqi Freedom, la guerre a fait

au moins 8500 victimes civiles, 13 500 militaires irakiens, 563

américains, 59 britanniques et 42 soldats d’origines diverses. De

nombreuses victimes de cette guerre ont péri dans des attentats. Parmi

eux, nous pouvons citer :

L’attaque du 12 novembre 2003 prés du quartier général du

contingent italien à Nasiriya. Cet attentat à la bombe a fait au

moins 27 victimes dont 16 militaires italiens. D’après le journal

arabe Al-Majallah, Al Qaïda aurait revendiqué l’attentat.

L’attaque du 19 août 2003 contre le siége de l’ONU à Bagdad.

Cet attentat au camion piégé a fait 22 morts dont l’envoyé spécial

des NU en Irak Sergio Vieira de Mello.

L’attaque du 29 août 2003 à Nadjaf au sud de l’Irak. Cet attentat,

devant le mausolée d’Ali (le premier imam chiite et gendre du

prophète Mohamed PSL), a fait au moins 83 victimes. Al Qaïda

est soupçonné d’avoir orchestré l’attaque.

L’attaque du 1e février 2004 contre les siéges des partis politiques

kurdes (UPK et UDK). Cet attentat a fait prés de 105 morts.

80 Bruno TERTRAIS, op. cit., p. 6

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L’attaque du 2 mars 2004 contre des mosquées à Kerbala et

Bagdad. L’attentat a fait 170 morts.

Ces attentats terroristes montrent nettement que le terrorisme est loin

d’être éradiqué en Irak. On peut même dire qu’il a fleuris, s’il existait

bien sûr.

B. Les opérations militaires n’ont pas éradiqué le

terrorisme en Afghanistan et en Irak ; et la paix est loin

d’être gagnée dans ces pays

La paix n’est pas encore totalement acquise en Afghanistan. Les taliban

essaient de se regrouper dans les zones où l’autorité du gouvernement

afghan est absente. Les règlements de compte entre pro et anti-taliban

n’ont toujours pas cessé. Les "Seigneurs de guerre" ne sont pas tout à fait

sous le contrôle de l’autorité politique et se livrent, sans cesse, à de petits

conflits d’influence très meurtriers parfois. A tout cela, s’ajoutent les

attaques terroristes, les assassinats et les tentatives d’assassinats sur les

autorités politiques (par exemple : la tentative d’assassinat sur Hamid

Karzaï en septembre 2002 et l’assassinat du vice-président afghans Abdul

Qadir).

Bref, en s’appuyant sur les FAN, sur un effort significatif en matière de

renseignement et à l’emploi massif de l’aviation et des forces spéciales,

en ayant atteint la plupart de leurs objectifs en peu de temps et subit très

peu de pertes, les Américains ont fait de "Enduring Freedom" un succès

militaire incontestable. Toutefois, l’Opération n’a pas éradiqué le

terrorisme islamiste, n’a pas permis de capturer le chef du groupe Al

Qaïda (Ben Laden) et son ex-protecteur le mollah Mohammad Omar. Et,

paradoxalement, elle a renforcé la raison d’être du terrorisme islamiste et

sa popularité dans les pays arabes.

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En Irak, même si la guerre a été remportée très vite par la coalition

américano-britannique, les effets escomptés par Washington ne se sont

pas réalisés pour le moment. En effet, les Etats-Unis n’ont pas pu donner

aux Irakiens la responsabilité en ce qui concerne la sécurité et le

gouvernement de leur pays. Certes, il faut du temps pour cela mais la

situation de désordre et d’insécurité qui règne dans ce pays ne présage

pas un Irak stable et démocratique d’ici quelques bonnes années. Ajouté

à cela, l’Irak connaît aujourd’hui une rivalité ethnico-religieuse très

prononcée qui risque de déboucher, si jamais la coalition évacuée le pays,

dans une guerre civile.

La détention d’ADM par le régime de S. Hussein et ses liens avec Al

Qaïda, qui avaient justifié la guerre, ne sont toujours pas mis en évidence.

Aujourd’hui, des voix s’élèvent à Washington et à Londres pour

dénoncer la manipulation qu’il y a eu autour de cette affaire irakienne.

Aux Etats-Unis, Richard Clarke, un ancien responsable de la lutte anti-

terroriste au sein du « Conseil National de Sécurité », dans son livre

"Against All Ennemies", accuse le président Bush d'avoir négligé la

menace des activistes islamistes avant le 11 septembre 2001 et d'avoir

privilégié l'Irak comme « cible », au détriment d'Al Qaïda.

En dépit de la situation qui règne dans le pays de S. Hussein, les autorités

américaines insistent, persistent et signent qu’ils ont fait de considérables

progrès dans la reconstruction du pays. D. Rumsfeld affirmait, le 25

septembre 2003 dans un article qu’il a publié au Washington Post

qu’« en deux mois de temps, toutes les principales villes irakiennes et la

plupart des municipalités avaient des conseils municipaux – ce qui avait

pris huit mois après la guerre en Allemagne. Il a fallu quatre mois au

Conseil de gouvernement pour nommer un cabinet – ce qui avait

demandé quatorze en Allemagne. Une Banque centrale irakienne

indépendante a été établie et une nouvelle monnaie annoncée seulement

deux mois plus tard – il avait fallu trois ans à l’Allemagne pour ce faire

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après la guerre. Au bout de deux mois, une nouvelle force de police

irakienne effectuait des patrouilles avec les forces de police irakiennes,

et à l’heure actuelle quelque 56 000 irakiens participent à la défense de

leur pays. A l’opposé, il a fallu 14 mois pour établir une force de police

en Allemagne et dix ans pour commencer à former une nouvelle armée

allemande ». Même si la reconstruction en Irak est allée beaucoup plus

vite qu’en Allemagne , comme le démontre M. Rumsfeld, nous sommes

convaincus que les résultats, pour le moment, sont très loin d’être les

mêmes. En outre, loin de briser le terrorisme en Irak, l’une des objectifs

majeurs de la campagne, les Etats-Unis ont transformé le pays en une

base du terrorisme internationale.

En conclusion, dans ces affaires de campagnes militaire, nous pensons

qu’il serait prématuré de dire que les Etats-Unis ont échoué en

Afghanistan et en Irak. Dans toute chose, il est plus facile de détruire que

de reconstruire. Cela vaut pour les Américains comme pour tout le

monde. Les Etats-Unis ont besoin de temps en Afghanistan et en Irak. Ce

n’est que dans le long terme que nous pourrons véritablement les juger.

Peut-être ils pourront réussir à faire dans ces deux pays ce qu’ils ont

réussi à faire en Europe et au Japon après la 2nd guerre mondiale même si

nous sommes conscients que les situations et les caractéristiques des pays

ne sont pas les mêmes. Toutefois, pour espérer que cela puisse se faire,

les Etats-Unis doivent d’abord juguler le terrorisme qu’ils ont contribué à

augmenter par leurs actions militaires dans ces pays.

II. Les difficultés de la lutte internationale contre les finances des

terrorismes

Le fait de saisir les avoirs des terroristes n’a pas été chose facile. Comme

nous l’avons montré dans le chapitre précédent, durant les premiers mois

qui ont suivi les attentats du 11 septembre 2001, prés de 200 pays ont

participé ou manifesté leur désir de geler les avoirs des terroristes. C’est

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80

ainsi que des dizaines de millions seront gelé. Cette réussite a été l’œuvre

non seulement des nouvelles mesures mises en place par les Etats-Unis,

les OI, les institutions financières internationales mais aussi par la bonne

volonté et la disponibilité des Etats à coopérer. Malheureusement, plus

nous nous éloignons du 11 septembre, plus la coopération internationale

s’estompe ; cela pour des raisons diverses.

A. Les difficultés liées à la détermination et à la traque des

avoirs des terroristes

Les principales difficultés liées à la détermination des avoirs des

terroristes résident dans l’origine de ces avoirs, dans les systèmes de

transfert alternatifs et dans l’existence des Paradis fiscaux.

1) Les sources de financement des terroristes

compliquent le gèle de leurs avoirs

La difficulté de déterminer les avoirs des terroristes est liée aux

provenances de ces avoirs. Voyons dans les lignes qui vont suivre

quelques sources de financement des terroristes et les difficultés que cela

pose pour geler leurs avoirs.

D’après certains, Ben Laden aurait hérité entre 250 et 300 millions de

dollar US de sa famille. Cet argent, il l’a investit dans des affaires

légitimes et illégitimes à travers le monde. Cet argent a également

largement servis à financer Al Qaïda et ses filiales. Selon le FBI, Ben

Laden a mené des affaires tout a fait légitimes en Afrique du Nord, au

Moyen-Orient, en Europe et en Asie. Au Soudan, par exemple, entre

1991 et 1996, il a eu à investir dans l’agriculture, la construction, le

transport et dans des entreprises soudanaises. Selon le Département

d’Etat américain, Ben Laden a aidé le gouvernement soudanais à financer

des infrastructures civiles, des projets de développements et autres. Par

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81

ailleurs, on le soupçonne d’avoir des investissements à l’île Maurice, à

Singapour, en Malaisie, aux Philippines et probablement à Panama. Il est

soupçonné également d’avoir des comptes bancaires à Hong Kong, en

Malaisie, à Vienne, à Dubaï et à Londres même. La plupart de ces pays,

craignant que le gèle des avoirs (qui mine de rien sont très importants) ait

des répercutions sur le bon fonctionnement de leurs économies, refusent

de jouer le jeu ou fond traîner les choses.

En dehors des fonds propre à Ben Laden, Al Qaïda bénéficie du soutien

de certains citoyens du Golfe très riches et influents dans leurs

monarchies. Ils est très difficile voir impossible de geler les avoirs de ces

personnes surtout si elles appartiennent aux familles royales.

Les Organisations non gouvernementales islamiques (ONGI) jouent eux

aussi un rôle très important dans le financement des activités terroristes.

Les Etats-Unis ont inscrit un grand nombre de ces ONGI dans la liste

d'exclusion des organisations terroristes (TEL) diffusée par le

Département d’Etat américains en novembre 2001 et en novembre 2002.

Pour vous donner une idée des activités humanitaires et des liens que ces

ONGI peuvent entretenir avec les groupes terroristes, nous vous citons

ces trois81 :

La Holy Land Foundation. Initialement connue sous le nom de

Occupied Land Fund, la Holy Land Foundation a été établie en

Californie en 1989 en qualité d’organisation caritative non

imposable et non pas en tant que groupe religieux. En 1992, elle a

transféré son siége à Richardson (Texas). Elle a des bureaux en

Californie, dans le New Jersey et dans l’Illinois et des

représentants répartis à travers les Etats-Unis, en Cisjordanie et

dans la bande de Gaza. Moussa Mohamed Abou Marzouk, haut

responsable du Hamas, a fourni d’importantes sommes à la Holy 81 Les informations sur ces ONGI sont extraites du site du Département d’Etat américain et de l’ouvrage d’Ali LAÏDI, « Le Jihad en Europe ».

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82

Land Foundation dans les années 1990. En 1994, Marzouk (qui a

été désigné comme terroriste par le ministère américain des

finances en 1995) a choisi la Holy Land Foundation comme

principal responsable des collectes de fonds pour le Hamas aux

Etats-Unis. La Holy Land Foundation finance les écoles

administrées par le Hamas et qui servent les objectifs de cette

organisation en « encourageant les enfants à devenir de futurs

kamikazes ». Le Hamas des kamikazes en offrant de soutenir leurs

familles ; ce soutien est assuré en partie par les contributions de la

Holy Land Foundation.

Beit Al Mal Holdings. Beit Al-Mal Holdings est une société

d’investissements publics qui a des bureaux à Jérusalem-Est, en

Cisjordanie et dans la Bande de Gaza. Bien qu’officiellement, ses

activités commerciales consistent en prêts d’investissements dans

les projets de développement économique et social, Beit al-Mal a

d’importants liens avec le Hamas. La plupart de ses fondateurs,

actionnaires et employés sont associés au Hamas. La majorité de

ses actions appartiennent à des personnes identifiées avec le

Hamas et Beit Al-Mal investit, à Gaza et en Cisjordanie, dans des

projets appartenant à des militants du Hamas ou gérés par ces

derniers.

Al Haramein Islamic Foundation (AH) est basée à Djeddah et

est dirigée par un Saoudien: Akil Ben Abdel Aziz. Elle est bien

implantée en Albanie, Algérie, Autriche, Birmanie, Bosnie,

Cachemire, Grande-Bretagne, Kenya, Maroc, Russie et Tunisie.

L’AH est accréditée auprès du HCR et est financée par les riches

Saoudiens, ainsi que par le Saudi High Committee. Elle fournit de

l’aide aux réfugiés sous forme de logement, d’assistance

médicale, de nourriture et de vêtement.

Ces ONGI, bien qu’officiellement ayant pour activités de financer des

causes humanitaires, financent des terroristes. Le problème avec, ces

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83

ONGI, est qu’elles sont extrêmement populaires dans le monde

musulman pour les actions de solidarité qu’elles conduisent. De ce fait,

geler leurs avoirs pour de nombreux Etats musulmans demeurent

difficiles. « En Extrême-orient, selon Antoine Colonna, nombre d’entre

elles ont joué un rôle important lors de la crise asiatique, contribuant,

notamment en Indonésie et en Malaisie, à la stabilité des Etats lors du

mécontentement des populations affamées. »82 Selon le même auteur, les

autorités américaines maintiendraient « une liste d’ONG suspectes, dont

la divulgation serait mal comprise par les opinions publiques de

nombreux pays. »83

En dehors des ONGI, certaines activités criminelles constituent

également une source de financement du terrorisme. Ces activités sont le

plus souvent le trafic de drogue, la contrefaçon, la contrebande etc. Les

terroristes ont également recours à l’extorsion de fonds pour financer

leurs causes.

2) Hawala et Paradis fiscaux : un casse tête chinois

pour les traqueurs des avoirs terroristes

Il est très difficile de suivre la trace des fonds des terroristes à cause des

Hawala et des Paradis fiscaux.

Le Hawala est un moyen de transfert de fonds traditionnel reposant sur la

confiance. Ce système de transfert est souvent utilisé par les

ressortissants de l’Afrique, du Moyen-orient, de l’Asie centrale et du sud-

est. Il leur permet d’envoyer de l’argent à leurs familles, restées au pays,

sans avoir à payer des frais d’envoie très importants. Le système n’a rien

d’illégal mais il a été constaté que des organisations terroristes et des

organisations mafieuses s’en servent pour financer leurs opérations ou

pour blanchir de l’argent. Selon un rapport de l’Assemblée parlementaire 82 « Guerre secrète contre Al-Qaeda », dir. Eric DENECE, p. 72 83 ibidem

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84

de l’OTAN, « Al Qa’ida avait auparavant utilisé […] des sociétés

locales de transfert hawala pour financer les attentats à la bombe contre

les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie. »84 Toujours,

selon le même rapport, « des organisations criminelles Russes impliquées

dans le trafic de drogue ont utilisé beaucoup de ces institutions pour

blanchir et transférer de l’argent. »85

L’avantage que constitue le Hawala, pour ce type d’organisation, est

qu’il ne laisse pas la moindre trace des opérations effectuées. Pour ceux

qui traquent les fonds des terroristes les Hawala constituent un véritable

problème. Se ne sont pas des structures financières qu’on peut localiser

comme une banque ou une agence de transfert d’argent du genre

WESTERN UNION. Souvent c’est de « petits propriétaires d’épicerie

utilisant un simple téléphone mobile pour procéder à leurs

transactions. » Et c’est surtout cela qui pose problème.

Malgré la difficulté de la tâche, depuis le 11 septembre, les Etats-Unis et

certaines institutions financières internationales ont décidé de réguler les

Hawala. C’est ainsi que la loi USA PATRIOT oblige aux Hawala se

trouvant sur le territoire américain de s’enregistrer comme des "Money

services businesses" (MSBs). Et à l’instar des MSBs, ils seront,

désormais, soumis aux règles concernant le blanchiment de l’argent et

doivent signaler aux autorités américaines les transactions suspectes ou

qui impliquent des sommes d’argents assez importantes. Le GAFI a

demandé à tous les pays d’exiger aux entreprises pratiquant des systèmes

alternatifs de transfert de fond, comme le Hawala, de respecter les

mesures d’anti-blanchiment d’argent mises en place. En dehors des

Hawala, les Paradis fiscaux constituent un véritable casse tête chinois

pour ceux qui traquent les avoirs des terroristes.

84 Rapport parlementaire de l’OTAN, « Les conséquences économiques du 11 septembre 2001 et la dimension économique de la lutte contre le terrorisme », paragraphe 31. 85 ibidem

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85

Les Paradis fiscaux, dans la majorité des cas, sont de petites entités

géographiques de moins de 100 000 habitants. Ils n'ont pas d'ententes

fiscales avec les pays industrialisés. La confidentialité absolue y est

assurée et le secret bancaire intégral y est de rigueur. Toutes les grandes

banques occidentales y sont fortement représentées. Parmi les paradis

fiscaux, vous avez : les îles Caïmans, les Bermudes, les Bahamas, les îles

Turks et Caicos, l'île De Man, les Barbades, Luxembourg, Malte,

Monaco, Saint Marins, etc.

De tout temps, les gouvernements des pays européens (Grande-Bretagne,

Pays-Bas, Portugal, France, Espagne, etc.) ont laissé se développer ces

territoires qui, dans la plupart des cas, dépendent en fait plus ou moins

directement de leur juridiction. Les élus de ces pays ne veulent pas abolir

ces Paradis fiscaux, puisque, en dehors des terroristes et des mafias, ils

sont aussi utilisés par leurs riches concitoyens et entreprises desquels ils

sont largement tributaires.

Même les Etats-Unis se montrent réticent à lutter contre ces Paradis

fiscaux. Ils y a de cela quelques temps, les Etats-Unis ont décidé de ne

pas suivre une initiative de l'OCDE visant à obtenir un minimum de

coopération de 35 Paradis fiscaux : au nom du principe de la liberté du

commerce et des affaires, et aussi pour continuer d'aider nombre de

multinationales à échapper à la fiscalité de leur pays d'origine. Sans

intention de prendre partie, nous pouvons dire que les Etats-Unis, en

agissant ainsi, ont choisi de ne pas s'opposer à l'essentiel de la criminalité

financière.

Le succès de la guerre contre le terrorisme passe forcément par la

suppression ou au moins par le contrôle des Paradis fiscaux. Autrement

on peut toujours courir derrière les avoirs des terroristes sans succès total.

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86

B. Les autres facteurs de blocage de la lutte financière

contre les avoirs des terroristes

Parmi les autres facteurs de blocage de la lutte financière contre les

avoirs des terroristes, nous pouvons citer l’absence d’une définition

commune de ce qu’est le terrorisme ou de ce qu’il n’est pas et

l’« absence de volonté » des Etats à coopérer sérieusement.

1) L’inexistence d’une définition universelle du

terrorisme

Le problème de la définition du terrorisme porte un coup sérieux au bon

déroulement de la guerre anti-terroriste, et en particulier à la coopération

internationale pour la lutte financière. Il faut savoir que jusqu’à présent,

et malgré la prolifération du terrorisme dans le monde, il n’existe aucune

définition universellement admise de ce phénomène. Chacun y va de son

bon vouloir et dans la mesure ou cela lui arrange. Parmi les définitions

que l’on fait du terrorisme, nous pouvons retenir celles-ci :

« Le terrorisme […], s’il est d’abord action, […] dépassant

souvent le stade de l’initiative ponctuelle pour devenir une

véritable stratégie, […] postule l’emploi systématique de la

violence, pour impressionner soit des individus afin d’en tirer

profit, soit, plus généralement, des populations, soumises alors,

dans un but politique, à un climat d’insécurité ». [Encyclopedia

universalis]

Le terrorisme est un « ensemble d'actes de violence (attentats,

prises d'otages, etc.) commis par une organisation pour créer un

climat d'insécurité, pour exercer un chantage sur un

gouvernement, pour satisfaire une haine à l'égard d'une

communauté, d'un pays, d'un système. » [Le Petit Larousse

illustré 1999. © Larousse, 1998].

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87

Le Code Pénal français (art. 421-2), définie le terrorisme

comme « une entreprise individuelle ou collective ayant pour but

de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la

terreur. »

Pour d’autres, tout recours à la violence pour imposer sa volonté

peut être assimilé au terrorisme. Il est également défini comme le

recours à la violence ou à la menace de la violence afin de semer

la panique dans la société, d'affaiblir ou de renverser les autorités

en place et de susciter des changements politiques.

Ces définitions ne sont certes pas contradictoires et nous pouvons même

dire, en relativisant, qu’elles sont les mêmes, mais là où réside le

problème c’est quand vient le moment de les appliquer. Certains vous

dirons, par exemple, que le Hamas palestinien est un groupe terroriste et

vous le prouverons, tandis que d’autres vous dirons le contraire et vous

convaincrons que c’est un mouvement de libération nationale.

La définition américaine du terrorisme dans l’USA PATRIOT Act86 par

exemple reste très controversée. Les européens estiment qu’elle est très

large et ne fait pas la distinction entre mouvements de libération

nationales et organisations terroristes. Si les Américains considèrent que

toute personne ou organisation finançant des groupes terroristes est

terroriste, donc (si jamais les pays du Golfe acceptent cet argument) cela

entraînerait l’implication de nombreux dignitaires respectueux des

monarchies du Golfe.

Des pays refusent de geler les avoirs de certains groupes, supposés être

terroristes par les Américains, pour la simple et bonne raison, qu’à leurs

yeux, ces groupes ne le sont pas. En guise d’exemple, la Syrie et le Liban

avaient refusé de geler les fonds du Hezbollah (Parti de Dieu) quand les

Etats-Unis le leur ont demandé.

86 Cf. au Chapitre II.

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88

Au delà de la difficulté de trouver une définition universelle du

terrorisme, la nonchalance de certains Etats à coopérer a également

donné un véritable coup de frein à la lutte contre les finances des

terroristes.

2) La « mauvaise volonté » des Etats à coopérer

entièrement pour bloquer les avoirs terroristes

Les Américains sont convaincus de la présence d’avoirs terroristes dans

certains pays sans que ces pays aient fait quoique ce soit pour les

bloquer. Cela est dû soit à une absence de volonté politique soit à un

manque de moyens efficaces.

Au Moyen-Orient, par exemple, des pays comme le Bahreïn, le Koweït,

l’Oman, le Qatar, l’Arabie Saoudite et les Emirats Arabes unis, ont

accepté les « Huit Recommandations » du GAFI concernant le

blanchiment de l’argent et le financement du terrorisme. Cependant, la

plupart de ces pays n’appliquent pas convenablement ces

recommandations. Certains d’entre eux, comme l’Arabie Saoudite,

dépistent à peine les fonds des terroristes et refusent poliment de

travailler avec les Etats-Unis. En outre, l’Arabie Saoudite nie

catégoriquement l’implication de certaines de ses organisations de

charités islamiques dans le financement d’activités terroristes ; ce qui ne

facilite pas les choses.

En Afrique, en Asie centrale et dans le Caucase, le problème est

beaucoup plus dû à un manque de moyens pour dépister et bloquer les

avoirs des terroristes qu’à une absence de volonté politique. Les banques

dans ces régions ne sont pas bien équipées pour contrer efficacement le

blanchiment de l’argent. La faiblesse des institutions financières, en plus

d’attirer des fonds terroristes et mafieuses, favorise considérablement les

systèmes alternatifs de transfert de fonds comme le Hawala.

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Par ailleurs, certains pays se confectionnent des listes de terroristes qui

sont tellement différentes qu’une personne peut être considérée comme

terroriste dans un pays A et comme un homme d’affaire ou un simple

commerçant dans le pays B voisin.

Pour clore ce sous-chapitre, il faut savoir que la lutte financière contre le

terrorisme, à l’instar de la campagne militaire en Afghanistan, a eu pour

effet de décentraliser Al Qaïda. Nous assistons aujourd’hui à une

multiplication sans précédent des cellules terroristes. Ces cellules

agissent actuellement en petits groupes autonomes. Elles ont pris la

charge de leurs propres opérations et de leurs emplois du temps. Les

fonds sont désormais trouvés sur place avec des activités légitimes

(comme le commerce), l’extorsion de fonds, la contrebande, le trafic de

drogue, etc. C’est ces groupes qui, aujourd’hui, ont frappé en Turquie, en

Arabie Saoudite, au Maroc ou encore en Espagne.

III. L’absence d’une coopération judiciaire internationale affaiblie

la guerre anti-terroriste alors que la recrudescence des attaques

terroristes à travers le monde sème le doute quant à son

efficacité

La disproportion des efforts des Etats à lutter contre le terrorisme,

notamment l’absence d’une véritable coopération judiciaire, pourtant si

importante, explique en partie la recrudescence des actes terroristes dans

le monde. Aujourd’hui, aucun pays n’est à l’abri de tels actes. Même les

pays où sont originaires les terroristes sont sévèrement frappés. La

recrudescence des actes terroristes dans le monde depuis le début de la

guerre anti-terroriste sème incontestablement le doute quant à son

efficacité réelle.

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A. La coopération judiciaire internationale : un élément

essentiel de la guerre contre le terrorisme mais inexistant

Le fait de recourir à la justice pénale peut efficacement freiner le

terrorisme de plusieurs façons. Un terroriste condamné à la prison à

perpétuité ou exécuter est une assurance qu’il ne commettra plus

d’attentats. Le risque de se faire arrêter et condamner peut avoir un effet

dissuasif sur les terroristes et limite leurs mouvements. En guise

d’illustration, à la question de savoir pourquoi ils n’ont pas commis

l’attentat aux Etats-Unis, en Australie, en France, en Allemagne, aux

Pays-Bas ou encore dans d’autres pays alliés de Washington, l’imam

Samudra (l’un des islamistes arrêtés et condamnés à mort à la suite de

l’attentat de Bali en octobre 2002), répondait : « Parce que j’étais

wanted. »87

La médiatisation des procés, aux accents dramatiques incontestables,

peut également contribuer à conforter l’attachement du public à la lutte

anti-terroriste, à démonter la volonté de pourchasser les terroristes et à

encourager d’autres à faire pareil.

Toutefois, il faut noter que l’effet dissuasif que nous venons d’évoquer

est à relativiser. C’est une considération manifestement sans intérêt pour

un terroriste qui est prêt à se faire sauter, et peut-être pour celui qui n’est

qu’un pion sur l’échiquier, mais qui se révèle tout aussi déterminé et

désespéré.

Il faut savoir que malgré son efficacité, l’instrument judiciaire n’est pas

si simple à manier. Intenter un procés à un terroriste, comme le constate

Paul Pillar88, présente une difficulté concrète qu’est de réunir

87 Source : COURRIER INTERNATIONAL n° 680 du 13 au 19 novembre 2003. 88 Paul PILLAR, « La lutte contre le terrorisme et ses instruments », diffusé par le Bureau des programmes d’information internationale du Département d’Etat américain, le 6 décembre 2001, p. 2

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suffisamment de pièces à conviction qui soient juridiquement

admissibles. Aux Etats-Unis au moins, et contrairement à ce qu’on

observe dans les milieux du renseignement ou de la politique générale,

les tribunaux ne vont pas se contenter d’informations qui portent à croire

que telle personne ou telle autre est un terroriste. Il est particulièrement

difficile de produire des éléments matériels directs de nature à prouver

que telle décision ou tel ordre a été donné par des chefs de file du

terrorisme. Et M. Pillar de poursuivre, « la dispersion du processus de

planification et de prise de décision des groupes terroristes

internationaux fait qu’un grand nombre de démarches destinées à

aboutir à un attentat ont lieu à l’extérieur du pays visé, et donc en dehors

de la juridiction des principaux enquêteurs. »89 Donc, il est nécessaire

d’avoir une coopération sérieuse entre Etats pour pouvoir arrêter et

traduire les terroristes en justice. Mais l’implantation de cette coopération

est rendue difficile par la divergence de point de vue entre Etats et en

particulier entre les Etats-Unis et l’Europe.

D’après un rapport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN90, les

ministres de la Justice de l’Union européenne avaient, lors d’un Conseil

JAI (Justice et Affaires Intérieures) à Luxembourg entre le 25 et 26 avril

2002, autorisé « l’ouverture de négociations autour d’un accord

d’extradition et de coopération judiciaire » avec les Etats-Unis. L’accord

devait normalement être conclu à la fin de l’année 2002 ou au début de

l’année 2003. Face à la réticence des Européens à la peine de mort dans

certains Etats américains et face à la différence de perception quant à

l’utilisation des « données personnelles » des personnes suspectées, il

était évident que l’aboutissement de l’initiative n’allait pas être simple.

Mais pour éviter tout blocage ou malentendus, le mandat excluait toute

aide judiciaire (communication de preuves) et toute extradition si

l’intéressé risquait une condamnation à la peine capitale. Il excluait

89 ibidem 90 Rapport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, « La lutte contre le terrorisme : résultats et questions », paragraphe 50.

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également « toute assistance judiciaire si la personne poursuivie est

susceptible d’être traduite devant un tribunal spécial »91 (les

commissions militaires par exemple).

Beaucoup de personnes, liées à Al Qaïda92, ont été arrêtées en France, au

Pays-Bas, en Espagne, en Belgique, en Italie et en Grande-Bretagne sans

pour autant être extradées vers les Etats-Unis à cause des raisons déjà

évoquées. L’Allemagne, où Mohammed ATTA coordonnateur des

attaques du 11 septembre a résidé, a été l’un des premiers pays en Europe

à avoir jugé un terroriste impliqué dans les attaques. En effet, le 19

février 2003 le nommé Mounir Motassadek, un étudiant Marocain en

Allemagne, est condamné à 15 ans de prison ferme pour « complicité de

meurtres dans 3066 cas ». M. Motassadek, avait été arrêté le 28

novembre 2001 à Hambourg et faisait parti du groupe chargé du soutien

logistique de la « cellule de Hambourg. » Au début du mois d’avril 2004,

à la surprise générale, son jugement sera cassé. Actuellement il est en

liberté et attend d’être rejugé.

En dehors de l’Europe, d’autres personnes liées à Al Qaïda seront

arrêtées un peu partout. Les arrestations les plus importantes ont eu lieu

au Pakistan et ont concerné certains des membres les plus influents du

groupe terroriste de Ben Laden. Il s’agit de :

Abou Zoubeida, un Palestinien de 32 ans né en Arabie Saoudite et

proche collaborateur d’Oussama Ben Laden, arrêté au Pakistan le

28 mars 2002. Il est considéré comme le responsable du

recrutement et des opérations du groupe Al Qaïda.

Sheikh Ahmed Saleem, un Soudanais, arrêté le 12 juillet 2002. Il

est considéré comme étant l’un des conseillers financiers de Ben

Laden.

91 ibidem 92 Voir Annexe V pour les arrestations à travers le monde liées aux événements du 11 septembre.

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Ramzi ben Al-Shaiba, un Yéménite, arrêté le 11 septembre 2002.

Il faisait parti de la « cellule de Hambourg » et est présenté

comme l’un des coordinateurs présumés des attentats du 11

septembre 2001.

Khaled Cheikh Mohammed, arrêté le 1e mars 2003. Il est

considéré comme le numéro trois du réseau, après Ben Laden et

le docteur Ayman Al-Zawahiri. Il figurait sur la liste du FBI des

22 suspects d’Al Qaïda les plus recherchés.

Yassir al-Jazeeri, un Marocain, arrêté le 16 mars 2003. Il est

présenté comme le « responsable des affaires » d’Al Qaïda et fait

parti des « sept principaux » responsables du réseau terroriste.

Abou Zoubeida, Khaled Cheikh Mohamed et Ramzi ben Al-Shaiba

seront remis aux autorités américaines. Quant aux autres, nous ne savons

pas s’ils sont toujours au Pakistan, s’ils ont été extradés vers leurs pays

d’origines ou aux Etats-Unis. Mais il est très probable qu’ils soient entre

les mains des Américains.

Même si le Pakistan a accepté d’extrader ses prisonniers vers les Etats-

Unis, il faut reconnaître, comme nous l’avons vu précédemment avec

l’Union européenne, que cela n’a pas été le cas avec la plupart des pays.

Enfin, pour en terminer avec les limites de l’instrument judiciaire et

parler de la recrudescence des attentats depuis le 11 septembre, il faut

noter que les Commissions militaires américaines n’ont, à ce jour, jugé

aucun terroriste. Zacarias Moussaoui, ressortissant français arrêté le 25

août 2001 et inculpé dans le cadre des attentats du 11 septembre 2001

pour « complot visant à commettre des actes internationaux de

terrorisme », remplit bien les conditions pour y être jugé. Finalement,

son procés se déroulera devant une juridiction civile. Est-ce que la France

y est pour quelque chose ? C’est probable.

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Contrairement à Zacarias Moussaoui, les prisonniers de Guantanamo,

estimés à plus de 600, ont de réelles chances de passer devant ces

commissions militaires. Parmi eux, figurent des dizaines de ressortissants

occidentaux de la Grande-Bretagne, de la France, du Canada, etc. Delà,

nous pouvons nous demander si ces pays accepteront que leurs

ressortissants soient jugés devant ces commissions.

B. La recrudescence des attaques terroristes à travers le

monde laisse croire à une inefficacité de la guerre contre le

terrorisme

Depuis le 11 septembre, malgré les mesures mises en place pour contrer

le terrorisme, nous constatons une recrudescence sans précédent des actes

terroristes dans le monde. Parmi les plus importants, à l’exception de

ceux qui ont eu lieu en Iraq et que nous avons précédemment cité, nous

pouvons retenir :

L’attentat-suicide contre la synagogue de la Ghriba en Tunisie le

11 avril 2002 qui a fait 21 victimes, dont 14 Allemands.

L’attentat-suicide contre un hôtel à Mombasa, sur la côte du

Kenya le 28 novembre 2002 qui a fait 18 victimes. Dans le même

temps, un avion de la compagnie israélienne Arkia échappait au

tir de deux missiles lors de son décollage de Mombasa.

L’attentat à la voiture piégée contre une discothèque sur l’île

indonésienne de Bali le 12 octobre 2002 qui a fait 202 morts et

300 blessés, en majorité des Australiens. Cet attentat a été attribué

à la Jamaah Islamiyah, un réseau terroriste lié à Al-Qaïda. Le 5

août 2003 un autre attentat-suicide au fourgon piégé contre l’hôtel

américain Marriott, en plein centre de Jakarta, fera 12 morts, et

quelque 150 blessés. Il est attribué lui aussi à la Jamaah

Islamiyah.

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95

Le double attentat à la voiture piégée contre deux synagogues à

Istanbul en Turquie, le 15 novembre 2003, qui a fait au moins 23

morts et plusieurs blessés. Al Qaïda a revendiqué la double

opération, selon le journal Al-Qods Al-Arabi. Le 20 du même

mois, un autre double attentat-suicide contre le consulat

britannique d'Istanbul et les bureaux de la banque HSBC fera au

moins 27 morts dont le consul général britannique, Roger Short,

et plus de 450 blessés. Les attaques ont été revendiquées au nom

d'Al-Qaïda et du groupe turc Front islamique des combattants du

Grand-Orient (IBDA-C).

L’attentat-suicide de Casablanca au Maroc le 16 mai 2003 qui a

fait 45 morts, dont les 12 kamikazes. Il est attribué à Al Qaïda

aussi.

Le triple attentat-suicide dans un complexe résidentiel à Riyad en

Arabie Saoudite le 12 mai 2003 qui a fait 35 morts et 194 blessés.

Selon Washington et Riyad, les attaques ont été perpétrées par 15

kamikazes liés au réseau Al-Qaïda. Le 8 novembre 2003, un

nouvel attentat-suicide à la voiture piégée frappe encore une

résidence de la banlieue Ouest de la capitale, Riyad, faisant au

moins 17 morts, dont cinq enfants, et 122 blessés. Cet attentat a

été également attribué à Al-Qaïda.

Enfin, les attentats contre des trains de banlieue à Madrid en

Espagne le 11 mars 2004 qui ont fait prés de 200 morts et 1500

blessés. Ils ont été revendiqués par Al Qaïda. Des ressortissants

maghrébins ont été arrêtés dans le cadre de l’enquête.

Il faut à voir à l’esprit que, même si des attentats frappent le monde de

plus en plus, les forces de sécurités de la planète, notamment en Europe,

déjouent de plus en plus beaucoup d’autres. En guise d’exemple, le 30

mars 2004, au cours d'une grande opération anti-terroriste menée à

Londres et dans sa banlieue ouest, la police britannique a découvert 500

kilos de nitrate d'ammonium (un engrais chimique qui, mélangé à du

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96

fioul, peut constituer un explosif redoutable) dont la quantité, selon les

experts, est cinq fois supérieure à ce qui avait été nécessaire à Bali. Du

nitrate d'ammonium avait aussi été utilisé dans les attentats de Riyad et

d'Istanbul. Huit personnes, d'origine pakistanaise pour la plupart, ont été

arrêtées. Elles sont toutes de nationalité britannique et vivaient dans des

quartiers résidentiels de la banlieue londonienne.

Les attentats et les tentatives d’attentats terroristes sont plus que jamais

fréquents depuis le 11 septembre comme on l’a constaté. A notre avis

cela veut dire deux choses. La première est que la guerre contre le

terrorisme, en particulier celle menée par les Etats-Unis, est incapable de

juguler le terrorisme international et pire elle l’aggrave. La deuxième est

qu’elle souffre d’handicap majeur qui l’empêche de tenir l’équilibre et

d’être efficace.

Toutefois, nous pensons que même si elle est encore loin d’être gagnée, il

serait injuste et malveillant d’affirmait qu’elle est improductive. Des

résultats notables ont été acquis. Des dizaines, voir même des centaines,

de millions d’avoirs terroristes ont été gelés ; des régimes corrompus et

autoritaires, qui parrainaient le terrorisme, ont été mis à terre ; et des

centaines de terroristes croupissent aujourd’hui dans les prisons. Même si

les groupes terroristes, notamment ceux liés à Al Qaïda, se sont

restructurés en s’autogérant maintenant, la guerre que le "monde" leur

mène les a sérieusement affaiblie et à long terme, il est probable qu’ils

n’arriveront plus à s’autogérer et seront totalement étouffés.

Ce qu’il faut pour rendre cette guerre beaucoup plus efficace, et en

particulier pour les Etats-Unis, c’est d’instaurer la confiance entre les

Etats en acceptant par exemple de partager leurs informations ; de

prendre en compte les sensibilités politiques, sociales et culturelles des

Etats ; et de ménager les intérêts de chacun. Cela est certes difficiles à

réaliser mais pas impossible. C’est ainsi seulement qu’on pourra

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97

renforcer la coopération internationale pour lutter efficacement contre le

terrorisme. Car sans cette coopération, il est impossible, en particulier

pour les Etats-Unis, de vaincre cette nouvelle menace. Autrement, les

points de vue différeront toujours sur cette guerre et ses implications

risquent de mener le monde vers une catastrophe.

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98

DEUXIEME PARTIE : DES IMPLICATIONS DE LA

GUERRE ANTI-TERRORISTE SUR LES RELATIONS

AMERICAINES

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99

Chapitre 4 : Les réactions au 11

septembre, à la guerre contre le

terrorisme et leurs motivations

Tous les Etats, à quelques exceptions prés, ont condamné les attaques du

11 septembre. Cependant, ils ont vivement réagi contre les opérations

militaires américaines en Afghanistan et en Irak qu’ils trouvent trop

unilatéralistes et imprudentes de la part de Washington. C’est la

campagne irakienne qui a le plus soulevé les critiques des Etats à l’égard

de la politique anti-terroriste de Washington.

Les OI et les associations de défense des droits ou des libertés ont elles

aussi, à l’instar des Etats, condamné les attaques du 11 septembre. Les OI

ont apporté un soutien plus ou moins important (direct ou indirect) aux

Etats-Unis dans leur guerre contre le terrorisme. Elles ont presque tous

adopté de nouvelles mesures ou ont révisé les anciennes pour faire face

au terrorisme. Toutefois, elles se sont abstenues de tout soutien aux

Américains dans leurs campagnes militaires et en particulier dans la

campagne irakienne. Quant aux associations de défense des droits et des

libertés, elles ont réagi par rapport aux mesures mises en place pour lutter

contre le terrorisme mais aussi par rapport à la manière dont les

journalistes ont été traités lors des campagnes militaires en Afghanistan

et en Irak. Elles s’inquiètent de la violation des droits de l’Homme, des

libertés publiques et de l’atteinte aux libertés de la presse constatées

depuis le début de la guerre contre le terrorisme.

I. Les réactions des Etats : des réactions à motivations diverses

Dès l'annonce des attentats, les dirigeants de la planète (du continent

américain jusqu’en Asie en passant par l’Afrique, l’Europe et l’Australie)

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ont exprimé émotion et solidarité à l’Amérique. Mais, dés l’instant où les

Etats-Unis ont décidé de mener des actions militaires en Irak, les

réactions ne se sont pas fait attendre. Les Etats se sont dans leurs grande

majorité opposés au projet. Chacun avait ses propres raisons. Ces raisons

étaient le plus souvent une volonté d’apaiser les esprits ou de composer

avec les terroristes, une défense d’intérêts particuliers, un rejet de

l’unilatéralisme américain etc.

A. Les réactions aux attaques du 11 septembre et à la

guerre anti-terroriste en Europe

En Europe, la France et l’Allemagne se sont vivement opposées à

l’intervention en Irak. La France fut d’ailleurs le plus farouche opposant

à la guerre en Irak. Elle a annihilé toute espoir américain au

cautionnement de la guerre par les Nations Unis. La France et

l’Allemagne se sont opposées à la guerre non seulement pour défendre

des intérêts économiques (France) et respecter des promesses électorales

(Allemagne) mais aussi pour faire de l’Europe un interlocuteur privilégié

des Américains sur la scène internationale. En quelques sortes, les deux

pays voulaient imposer la diplomatie européenne, presque inexistante,

sur la scène mondiale.

Toutefois, la position de la France et de l’Allemagne ne traduisait pas

systématiquement celle de l’UE. Il faut reconnaître que de nombreux

pays européens soutenaient les Américains notamment, la Grande

Bretagne, l’Espagne, l’Italie, le Danemark et un grand nombre des

nouveaux pays de l’Union.

1) La réaction de la France

La population française, comme la plupart des populations des autres

pays, a été très choquée par les attentats du 11 septembre 2001. Elle a fait

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preuve d’une très grande compassion à l’égard de l’Amérique meurtrie.

Les autorités françaises affirmeront apporter tout leur soutien et leur

détermination à aider les Etats-Unis à trouver et punir les auteurs des

actes. Le président français Jacques Chirac fut l’un des premiers chef-

d’Etats à se rendre sur le sol américain pour non seulement constater les

dégâts mais aussi pour discuter avec le président Bush de la manière dont

il envisageait de mener la riposte aux attentats.

Après que les Américains aient identifié les coupables des attentats, qui

étaient Ben Laden et Al Qaïda, et envisagé de frapper l’Afghanistan pour

débusquer les terroristes, Jacques Chirac affirmait : « La coopération

militaire naturellement peut se concevoir, mais dans la mesure où nous

nous serions préalablement concertés sur les objectifs et les modalités

d'une action ». Nous pouvons comprendre par là que, dés le départ, les

Français souhaitaient que la guerre contre le terrorisme se fasse dans le

cadre d’une coopération internationale. Ils souhaitaient aussi qu’elle se

fasse dans le cadre d’une coopération judiciaire et dans d’autres cadres

comme la lutte contre les finances des terroristes et l’échange de

renseignements. Et pas seulement par des actions militaires.

La France n’était pas catégoriquement contre des actions militaires pour

éradiquer cette menace qu’est le terrorisme. Elle a même fournie un

soutien assez notable aux forces américano-britanniques lors de la guerre

d’Afghanistan en octobre 2001. Elle a aussi activement participé à

l’ISAF93. Là où se sont corsées les choses c’est quand Washington a

ouvertement manifesté sa volonté de mener une action militaire en Irak

pour des raisons déjà évoquées94. La France a manifesté une opposition

radicale et n’a ménagé aucun effort pour empêcher une telle action.

93 Cf. au Chapitre II 94 ibidem

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Selon Martin Laberge95, l’opposition de la France contre le projet

américain en Irak s’est déroulée en trois phases successives :

Premièrement, à la fin de l’été 2002, face aux menaces d’une

intervention américaine en Irak, la France utilise la voie

diplomatique et l’opinion internationale pour exiger que le

règlement de la crise passe par les Nations Unies.

Deuxièmement, à l’automne 2002, la France fait pression sur les

États-Unis, à l’aide de la résolution 1441, pour que le litige soit

encadré par l’ONU et que le Conseil de sécurité détermine le

casus belli justifiant une intervention militaire.

Troisièmement, devant l’insistance américaine de régler la crise

par la force, Paris menace de bloquer le Conseil de sécurité en

utilisant son veto.

M. Chirac réaffirmera sa détermination de mettre le veto français, au

début du mois de mars 2003, pour s'opposer à un projet de résolution

déposé par les États-Unis, la Grande-Bretagne et l'Espagne donnant

jusqu'au 17 mars à Baghdad, pour se conformer pleinement à ses

obligations. Le président de la république française affirmait en ces

termes : « Quelles que soient les circonstances, la France votera non »96.

Pour éviter à avoir utilisé ce veto, ce qui aurait été très mal vu à

Washington, les autorités françaises avaient entamé une grande

manœuvre diplomatique au sein du Conseil de sécurité. Le ministre

français des Affaires étrangères, Dominique de Villepin, s'était rendu en

Angola en Guinée et au Cameroun, certains des membres du Conseil de

sécurité indécis à propos du projet de résolution américano-britannico- 95 Martin LABERGE, « La France et la politique américaine en Irak », POINTS DE MIRE, Vol. 4 no 3, 27 février 2003, p. 1 (Doc. PDF). Disponible à l’adresse : http://www.er.uqam.ca/nobel/cepes 96 Cité dans l’article « La France et la Russie opposeront leur droit de veto », Radio Canada, 10 mars 2003. Vous pouvez voir l’article l’adresse : http://www.radio-canada.ca/url.asp?/nouvelles/special/nouvelles/irak/200303/10/005-ONU--chefs-Etat.shtml

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103

espagnole. Le basculement de ces trois pays dans le « camp de la paix »

ou leur abstention au vote de la résolution permettait à la France de ne

pas avoir à utiliser son veto. Les Etats-Unis et la Grande Bretagne

courtisaient eux aussi les trois pays africains. La secrétaire d'État

britannique pour l'Afrique, Valerie Amos, avait, comme M. de Villepin,

entamé une tournée dans les trois pays.

Le Cameroun avait de réelles chances de basculer dans le camp de la

France. Quant aux deux autres pays rien n’était sûr. La Guinée entretient

des relations étroites avec la France, son principal bâilleur de fonds. Mais

les États-Unis, qui finançaient à hauteur de 400 000 dollars l'acquisition

d'équipements de transmission, apparaissaient comme un allié de plus en

plus important pour Conakry97. En 2002, l'assistance américaine à

Luanda, essentiellement humanitaire, s'élevée à 128 millions de dollars98.

Par conséquent, il n’était pas évident que l’Angola aurait suivi la France

au détriment des Etats-Unis.

Pour beaucoup de personnes, en s’opposant si ardemment au projet

américain, la France entendait sauvegarder sa position privilégiée dans le

monde arabe et musulman qui lui assure une part substantielle de son

approvisionnement pétrolier mais aussi de ses ventes d’armements. Pour

les Français la survie du régime de Bagdad était nécessaire pour

préserver leurs intérêts dans ce pays. Alors que pour les Américains la

chute du dictateur irakien renfermait un grand intérêt pour leurs

approvisionnements en pétrole mais aussi pour leurs entreprises.

97 « Londres et Paris se disputent l'Afrique », Radio Canada, 10 mars 2003. Vous pouvez visualiser l’article à l’adresse internet suivante : http://www.radio-canada.ca/url.asp?/nouvelles/special/nouvelles/irak/200303/10/001-villepin-afrique.shtml 98 ibidem

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Selon Thierry Gadault et Gilles Tanguy du magazine l’Expansion99,

depuis la mise en application du programme de l'ONU « Pétrole contre

nourriture », en 1996, la France est le premier fournisseur de l'Irak. En

2001, les entreprises françaises assuraient près de 14% de ses

importations, pour quelque 660 millions de dollars. En chiffre d’affaire,

la France doublait l'Australie, la Chine, l'Italie, le Vietnam et

l'Allemagne.

Selon les mêmes auteurs100, en décembre 2000, Peugeot avait signé un

contrat pour 1 000 modèles 406 et 5 000 modèles 306 avec l’Irak. En

outre, depuis 1997, chaque année le constructeur français lui vendait 200

ambulances (en partenariat avec la PME vendéenne Gifa, pour 8 à 10

millions de dollars par an). Renault, via sa filiale agricole, avait signé en

2001 un contrat portant sur 200 tracteurs avec l’Irak.

La BNP avait le privilège de gérer les fonds provenant du « Programme

pétrole contre nourriture » par lequel transitait, chaque trimestre, environ

un milliard de dollars. TotalFinaElf avait prospecté des sites pétroliers en

Irak et tenait à coeur à en profiter.

En plus des intérêts économiques, l’opinion publique française était

défavorable à une participation de leur pays à une intervention militaire

en Irak sans l’encadrement de l’ONU. Seuls 19% des Français étaient

favorables selon un sondage de l’IFOP publié dans le Journal du

dimanche le 12 janvier 2003.

On peut voir également à travers l’opposition française, une volonté

d’imposer l’Europe comme un interlocuteur privilégié des Américains

sur la scène international. En guise d’exemple, Jacques Chirac déclarait

99 Thierry GADAULT et Gilles TANGUY, « L'Irak, terre de contrats français », L’EXPANSION, 26 février 2003. Retrouvez l’article à l’adresse : http://www.lexpansion.com/art/17.303.65831.0.html 100 ibidem

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en janvier 2003, devant des députés français et allemands et en présence

de Gerhard Schröder : « Il est urgent que l'Europe s'impose comme un

acteur international. Elle est aujourd'hui un exemple pour tous ceux qui

refusent la fatalité de la guerre. Son rêve n'est pas une vaine gloire (...)

mais de mettre sa puissance au service de la paix ».

En Europe, à côté des pays « pacifistes » comme la France et

l’Allemagne, d’autres faisaient campagne sans relâche pour une guerre

en Irak.

2) Les réactions dans le reste de l’Europe

A l’instar de la France, la totalité des pays Européens ont été sidérés par

les attentats du 11 septembre 2001. Ils ont tous proposé leur soutien à

Washington pour trouver et punir les auteurs des attentats. Comme la

France également, la majeure partie de ces pays a participé à la lutte

financières contre les avoirs des terroristes et à la campagne militaire

américaine en Afghanistan. Ils ont également arrêté et jugé des centaines

de personnes liées directement ou indirectement aux attentats du 11

septembre. Mais quand les Etats-Unis ont décidé de s’en prendre à l’Irak

les Européens se sont scindés en deux blocs. D’un côté les pays qui sont

contre la guerre et de l’autre ceux qui sont avec Washington.

L’Allemagne, à l’instar de la France, était contre. Tandis que la Grande-

Bretagne, l’Italie, l’Espagne et les nouveaux pays entrant dans l’Union

Européenne étaient pour.

L’Allemagne et la France, souhaitaient que les inspections de l’ONU en

Irak soient prolongées jusqu’à ce qu’on découvre ou non les ADM. Ils

n’excluaient pas une action militaire mais si est seulement si l’Irak gênait

les inspections ou les refusait. Les deux pays ont mené une concertation

étroite et exemplaire pour donner toutes ses chances à la paix.

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L’attitude de l’Allemagne était dictée par une promesse électorale du

SPD de Gerhard Schroeder aux dernières législatives. C’est une simple

position de principe. Il faut noter aussi que l’Allemagne, qui rencontrait

des difficultés économiques au moment des préparatifs de la campagne

en Irak, ne tenait pas à financer cette guerre comme elle l’avait fait lors

de la guerre du Golfe. En outre, elle possédait des intérêts en Irak même

s’ils n’étaient pas assez importants.

La Grande-Bretagne, comme de coutume, était totalement acquise à la

cause américaine. Le premier ministre britannique, Anthony Blair, a

octroyé au Président Bush un soutient sans faille. Il n’a reculé ni devant

la pression de son peuple qui était contre la guerre, ni devant certains

membres de son parti et des parlementaires britanniques, ni même devant

la démission de l’un de ses ministres de renom Robin Cook. M. Blair a

même fabriqué des preuves pour montrer la culpabilité du régime de

Baghdad. Il sera, à un moment de la crise qualifié de « Secrétaire

d’Etat » des Etats-Unis tellement il menait des actions diplomatiques

pour le compte des Etats-Unis dans le but de convaincre le monde de

chasser Saddam Hussein du pouvoir.

L’Italie et l’Espagne, face à la détermination de l’Allemagne et de la

France de se faire les portes paroles de l’Union européenne, avaient

décidé de se ranger du côté des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne pour

contrer leur influence. A l’Italie, l’Espagne et la Grande-Bretagne

s’étaient ajoutés le Portugal, le Danemark (également membres de

l’Union européenne). Mais de tous ces pays, exception faite à la Grande-

Bretagne, c’est l’Italie et l’Espagne qui iront le plus loin dans l’affaire

irakienne.

Vers la fin du mois de janvier 2003, des journaux européens publiaient

une lettre d'appui aux États-Unis signée par les dirigeants de huit pays

européens. Les cinq que nous venons de citer plus la Hongrie, la Pologne

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et la République tchèque nouveaux membres de l’Union. Dans la lettre,

les huit pays avertissaient que la crédibilité des Nations Unies était en jeu

dans cette crise. « Notre force réside dans l'unité », indiquait elle. Elle

était vue comme une rebuffade à la France et à l'Allemagne, qui

plaidaient sans cesse pour une poursuite des inspections et des

discussions dans le cadre de l'ONU pour éviter la guerre. La Hongrie qui

avait signé le document, avait fait savoir que les premiers ministres des

gouvernements britannique et espagnol en étaient à l'origine.

Exaspéré par l’attitude des nouveaux membres, le Président Chirac

déclarait le 17 février, pour les remettre à l’ordre et leur signifier que

l’Allemagne et la France sont des poids lourds dans l’Union, « [c]es pays

ont été à la fois […], pas très bien élevés et un peu inconscients des

dangers que comportait un trop rapide alignement sur la position

américaine »101.

Le soutien des dirigeants de ces Etats au Etats-Unis ne traduisait

aucunement la volonté de leurs populations. Dans la presque totalité des

pays la majeur partie de la population était contre la guerre. Dans

certains, comme l’Espagne et l’Italie, les deux tiers de la population

étaient contre. Des manifestations ont eu lieu dans plusieurs villes de ces

Etats pour protester contre la perspective d'une guerre en Irak. Selon

Radio Canada102, moins d’une semaine avant le déclenchement de la

campagne en Irak, plus de 700 000 personnes, auraient manifesté à Milan

(Italie) pour protester contre l'adhésion de Berlusconi à la politique

guerrière des États-Unis. En Espagne, quelques 500 000 manifestants

sont descendus dans les rues de Madrid. En Grande Bretagne, Au

Portugal, au Danemark, en Pologne, en Hongrie pour ne citer qu’eux les

101 Cité par Martin LABERGE, op. cit. p. 2 102 « Les voix de la paix s'élèvent partout dans le monde », Radio Canada, 15 mars 2003. Vous pouvez visualiser l’article à l’adresse internet suivante : www.radio-canada.ca/url.asp?/nouvelles/special/nouvelles/irak/200303/14/008-manif-paix-irak.shtml

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populations ont vivement protesté contre le soutien de leurs pays à la

guerre.

La crise irakienne a une fois de plus démontré que la diplomatie

européenne n’existait pas et qu’elle aura beaucoup de mal avec certains

des nouveaux membres qui se sentent beaucoup plus proche des Etats-

Unis que de l’Allemagne ou de la France.

Comme dans la plupart des pays européens, les pays arabes et

musulmans ont eux aussi vivement réagi à la guerre en Irak. Il y en a eu

qui ont également protesté contre la guerre en Afghanistan.

B. Les réactions des pays musulmans au 11 septembre et

aux opérations militaires américaines

Dans le monde arabe et musulman, la plupart des autorités politiques ont

condamné les attentats du 11 septembre. Toutefois, dans certains pays les

populations se sont réjouies de ces attentats. Elles l’ont fait non pas parce

que les 3 000 victimes n’avaient aucune valeur à leurs yeux mais parce

que pour elles l’Amérique venait de récolter ce qu’elle avait semé. Ces

populations ont fait de Ben Laden leur nouveau héros. Pour elles, le chef

d’Al Qaïda venait de faire ce que leurs dirigeants n’ont jamais osé faire :

c’est à dire défier l’Amérique et lui dire « nous en avons a assez ».

Comme beaucoup de pays européens, les pays arabes et musulmans ont

été contre certaines des opérations militaires américaines menées dans le

cadre de la guerre contre le terrorisme notamment la guerre en Irak.

Cependant, des pays comme le Pakistan, la Turquie, l’Egypte, la Jordanie

et autres, bien qu’officiellement n’étant pas pour les opérations, ont

manifesté leur soutien aux Américains. Cette attitude était surtout

motivée par les relations qu’ils entretiennent avec Washington et qu’ils

comptaient sauvegarder.

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1) La réaction du Pakistan à la riposte américaine

contre les Taliban

Le Pakistan, qui a mis au pouvoir les taliban et qui les avait formé dans

ses madrassas (écoles coraniques), a subi de très fortes pressions venant

des Etats-Unis pour coopérer dans la riposte contre l’Afghanistan. En

outre, les Etats-Unis avaient promis aux autorités d’Islamabad de sortir

leur économie de la situation où elle se trouvait. Le 22 septembre 2001,

les sanctions imposées au pays, suite aux essais nucléaires effectués en

1998, seront levées. Cette levée des sanctions fut un moyen pour les

Américains de s'assurer la coopération d’Islamabad. Le président

pakistanais qui était un peu réticent à une coopération de son pays au

début va finalement céder.

La coopération entre Washington et Islamabad concernait : le partage

d'informations, l'utilisation des couloirs aériens pakistanais et un support

logistique. Les autorités pakistanaises devaient également prendre des

mesures et mener des actions contre les intégristes soupçonnés d’être liés

à Al Qaïda et qui se trouvaient sur leur territoire.

L’une des premières mesures prises fut de mettre en place un fichier

informatique, créé en collaboration avec les Américains, pour surveiller

enseignants et élèves des madrassas. Le président pakistanais, le général

Musharraf, restreindra, début novembre 2001, l'usage des haut-parleurs

sur les mosquées ; seuls les appels à la prière étaient autorisés ; les

prêches et les discours politico-religieux étaient proscrits. Selon le

journal "Dawn", « le pouvoir voulait éviter que les mollahs se servent des

minarets pour critiquer son soutien aux Etats-Unis ». Autre revirement :

alors que le Pakistan était l’un des rares pays à avoir reconnu le

gouvernement des taliban et à lui offrir une représentation diplomatique

sur son sol, l’ambassadeur taleb sera renvoyé.

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Le général Pervez Musharraf, pour éviter d’être évincé du pouvoir par

certains de ses proches collaborateurs qui n’appréciaient pas son soutien

aux Etats-Unis, procédera discrètement à des changements importants au

sein des forces armées du pays. C’est ainsi qu’il nommera le général

Mohammad Aziz Khan au poste de président du comité d'état-major des

forces armées (CJCSC) et le général Mohammad Yusuf au poste de chef

d'état-major adjoint. Ces généraux sont jugés beaucoup plus fidèles au

président Musharraf. Il ordonnera également, la mise en résidence

surveillée de Fazlur Rahman, le chef du parti Jamiat Ulema-e-Islam

(JUI), principal supporter pakistanais de Ben Laden et des Taliban.

La réaction au soutien des autorités pakistanaises aux Etats-Unis ne

s’était pas fait attendre. Les réactions les plus vives sont venues des partis

islamistes. Quand les Américains ont désigné Al Qaïda comme

responsable des attaques du 11 septembre, les représentants des partis

islamistes avaient fait part de leur opposition à la collaboration de leur

pays avec la coalition anti-terroriste et à l'intervention armée des forces

américaines et britanniques contre leur voisin afghan. Certains hauts

responsables de l’armée et des services secrets, sans trop faire de bruit,

n’appréciaient également pas ce soutien.

Quand les frappes ont débuté au mois d’octobre 2001, les mouvements

islamistes pakistanais, pro-taliban, les ont dénoncé et appelé au djihad.

Munawar Hassan, numéro deux du Jamiat, Jamaat-e-Islami, principal

parti religieux du pays, avait qualifié les frappes sur Kaboul d’« attaques

contre l'Islam » et prédit des conséquences graves pour le président

Pervez Musharraf. Ils avaient mobilisé la population qui avait vivement

protesté par des manifestations, à Lahore (est) et à Peshawar (ville

frontalière avec l'Afghanistan au nord-ouest du pays). Certaines de ces

manifestations ont été très violentes. Les villes Islamabad la capitale

administrative, Karachi la capitale économique et Quetta avaient elles

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aussi été les théâtres d'opérations « coup de poing » menées par des

groupes de plusieurs centaines de manifestants.

2) La réaction des pays arabes au 11 septembre

Comme nous l’avions déjà souligné, la majeure partie des autorités des

pays arabes a condamné les attentats du 11 septembre. Même la Libye

ennemi juré des Etats-Unis. Ce qui n’était pas le cas de Saddam Hussein.

Le raïs irakien s’était félicité des attaques : chose non surprenante quand

on connaît ses sentiments à l’égard de Washington. Dans les rues arabes,

comme en Palestine, les populations ont manifesté leur joie sans retenue.

Les autorités palestiniennes avaient réprimé ces manifestations et M.

Arafat, par un geste symbolique et pour exprimer à l’Amérique mais

aussi au monde son soutien et sa compassion ainsi que celle de son

peuple, fera un don de sang aux blessés des attaques devant des caméras.

L’Arabie Saoudite, premier pays exportateur de pétrole au monde et allié

des Etats-Unis depuis des décennies, a très vivement condamné les

attentats. Chose tout a fait normale si on se réfère aux relations des deux

pays mais aussi à l’implication de ressortissants saoudiens dans les

attentats que les autorités saoudiennes n’ont certainement jamais

souhaité. Cette implication de saoudiens a beaucoup gêné l’Arabie dans

la contestation des mesures anti-terroristes américaines qu’elle ne partage

pas du tout. Elle a mis un peu de temps avant de protester, mollement,

contre les attaques en Afghanistan. Les relations entre les deux amis sont

tendues103. Washington accuse Riyad de ne pas coopérer, notamment en

ce qui concerne le gèle des avoirs des terroristes et des personnes qui les

finances, et Riyad exige de Washington des preuves pour sévir contre les

groupes terroristes et les personnes soupçonnés de financer le terrorisme.

103 Cf. au Chapitre VI

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112

Le leader libyen Mouammar Kadhafi avait qualifié de « terribles » les

attaques et avait, malgré les « différends politiques » qui opposaient son

pays aux Etats-Unis, proposé l'aide de Tripoli au peuple américain. A cet

égard, il avait déclaré : « Les différends politiques et les conflits avec

l'Amérique ne devraient pas constituer un obstacle psychologique à

l'envoi d'une aide humanitaire au peuple américain et toutes les

personnes en Amérique, qui ont été profondément touchés par ces

attaques terribles »104. Il avait ajouté : « Cette vague d'attentats

terrifiants ne peut qu'éveiller la conscience humaine et il est de notre

devoir humanitaire de nous tenir aux côtés du peuple américain malgré

le conflit politique. »105 Le 27 septembre 2001, la Fondation Kadhafi de

bienfaisance, présidée par Seif al-Islam, fils du colonel Kadhafi, avait fait

un don en espèces d'un montant non précisé aux familles des victimes des

attentats du 11 septembre.

Le Soudan que Washington qualifiait d’« Etats voyous », comme la

Libye, avait lui aussi dénoncé les attaques. Lors d’une visite en Arabie

Saoudite, quelques jours après les attentats, le ministre des Affaires

étrangères, Moustapha Osman Ismaïl, avait, dans un communiqué,

dénoncé les attaques, présenté ses condoléances au gouvernement et au

peuple américain et réaffirmé « la volonté du gouvernement soudanais de

coopérer entièrement avec les Etats-Unis et la communauté

internationale pour combattre toutes les formes de terrorisme et de

traduire leurs auteurs devant la justice »106.

Le Soudan qui subissaient des sanctions économiques mis en place par

les Nations Unies mais aussi par les Etats-Unis, pour avoir soutenu le

terrorisme, voulait saisir l’occasion pour réchauffer ses relations avec

Washington et montrer à la Communauté internationale sa volonté de

104 Cité par Christophe CHAMPIN « Les Etats «voyous» solidaires de Washington », Radio France (RFI), 13 septembre 2001. Retrouvez l’article sur : http://www.rfi.fr/Fichiers/evenements/10septembre/chronologie_annee.asp#1 105 ibidem 106 ibidem

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113

combattre le terrorisme. Objectif atteint. Le 28 septembre 2001, le

Conseil de sécurité votait la levée des sanctions en vigueur contre le pays

pour sa coopération avec les Etats-Unis à la campagne anti-terroriste

internationale. Le 19 janvier 2002, suite à une promesse antérieure au 11

septembre d’aider le pays à trouver une solution à la guerre civile qui le

divise depuis des années, un accord de cessez-le-feu entre l'armée

soudanaise et la branche Nuba du SPLA est conclu sous l'égide des Etats-

Unis.

En fait la coopération du Soudan à la guerre contre le terrorisme n’est pas

la seule explication du changement d’attitude de Washington à l’égard de

Khartoum. Les Etats-Unis lorgnent également sur les ressources

pétrolières du pays.

D’autres pays arabes amis ou partenaire de Washington (ou seulement

des pays opportunistes), ont apporté leurs soutiens au Président Bush.

Parmi eux l’Egypte, la Jordanie, le Maroc, l’Algérie etc. Toutefois, il faut

retenir que ce soutien des pays arabes et même des pays musulmans non

arabes, la plupart du temps, ne s’est pas traduit en actes. Les musulmans,

loin d’aider les Américains, ont vivement protesté contre la façon dont ils

mènent la guerre contre le terrorisme notamment les opérations

militaires.

3) Les réactions de certains pays musulmans aux

opérations militaires

Beaucoup de dirigeants des pays musulmans ont dénoncé la campagne en

Afghanistan tout en comprenant la volonté des Américains de riposter

aux attaques du 11 septembre. Toutefois, les populations très remontées

contre les Américains et se sentant humiliées, avaient manifesté contre

les frappes. Pour ce qui est de la campagne irakienne, la presque totalité

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des dirigeants des pays musulmans était contre. La population plus

encore.

a) Iran : une réaction neutre

Dans l’affaire afghane, l’Iran, autre pays de l'« axe du mal » selon

George Bush, qualifiera les taliban de fanatiques religieux et les

Américains d’agresseur militaire hégémonistes. Elle n’excluait pas une

coopération avec les Etats-Unis mais à la seule condition que celle-ci soit

dans le cadre des Nations Unies. Selon le Financial Times l’attitude du

gouvernement iranien était avant tout pragmatique : Téhéran, comme

Washington, souhaitait le renversement du régime des taliban, contre

lequel il a failli entrer en guerre en 1998. En collaborant avec

Washington, l’Iran espérait en outre un allègement des sanctions

américaines à son encontre, notamment concernant l’exploitation des

ressources de la mer Caspienne.

Pour ce qui est de l’Irak, l’Iran avait condamné le déclenchement de la

guerre lancée par les Américains contre son voisin, la qualifiant

d'«injustifiable et illégitime». Malgré cette condamnation, l’Iran penchait

incontestablement pour la chute de Saddam Hussein pour un certains

nombre de raisons. D’abord parce que Saddam Hussein lui a mené une

très longue guerre au cours de laquelle elle a perdu beaucoup d’hommes

et beaucoup de temps : Saddam Hussein était un ennemi. Et ensuite parce

que le régime irakien réprimait les chiites (majoritaire en Irak), interdisait

leurs rites et en même temps leur ôtait toute liberté politique.

b) Les autres réactions

Suite au déclenchement des opérations en Afghanistan, des milliers de

personnes avaient défilé dans les grandes villes en Indonésie (le plus

grand pays musulman par sa population) notamment dans la capitale

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Jakarta. Ces manifestations se sont parfois accompagnées de violentes

affrontements entre forces de l'ordre et étudiants islamistes. Elles étaient

le plus souvent orchestrées par des groupes islamistes radicaux jugés

proches de Ben Laden et d’Al Qaïda. Quand la guerre contre l’Irak a

débutait, le gouvernement indonésien s’y était fermement opposé. La

population avait de nouveaux réagie par des manifestations en menaçant

l’Amérique et en appelant au Djihad (guerre sainte).

Les autorités turques ne se sont pas vigoureusement opposées aux

frappes contre l’Afghanistan. Là aussi c’est surtout la population qui

s’était distinguée en manifestant et en scandant des slogans hostiles aux

Etats-Unis. Elle fera la même chose lors de la crise irakienne. Quant aux

autorités turques, contrairement à la guerre en Afghanistan, elles

adopteront un autre ton. Ankara était contre une intervention

unilatéraliste américaine en Irak. Le président turc Ahmet Necdet Sezer

avait estimé que le processus de désarmement de l'Irak par les Nations

Unies devait se poursuivre. Les Tucs avaient refusé que leur territoire

serve à l’offensive terrestre contre leur voisin. Toutefois, le parlement

avait voté l'ouverture de l’espace aérien aux avions américains.

Ce qui inquiétait les Turcs dans l’affaire irakienne c’est surtout la

question kurde. En effet la Turquie, qui compte une importante

communauté kurde aspirant à l’indépendance, ne veut pas que les Kurdes

d’Irak, avec la chute de Saddam Hussein, s’affirment totalement et

donnent des idées ou du soutien aux siens.

Dans les pays musulmans de l’Afrique noire les populations ont dans

l’ensemble vivement protesté contre les opérations militaires des Etats-

Unis. Leurs autorités quant à eux ont soutenu les Etats-Unis sans pour

autant approuver à cent pour cent leurs actions. Au Nigeria les

populations musulmanes s’en sont prises aux populations chrétiennes :

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chose très fréquente dans ce pays. La plupart des pays africains ont

soutenu Washington pour s’attirer leurs bonnes grâces.

En dehors des pays que nous venons de citer d’autres pays comme le

Yémen, le Liban, la Syrie, le Bahreïn et autres ont condamné les attaques

américaines. Dans l’ensemble, les pays musulmans (arabes ou non

arabes) ont dénoncé les opérations en Afghanistan et en Irak.

C. Les réactions au 11 septembre et à la guerre anti-

terroriste dans le reste du monde

Nous allons voir la réaction de la Russie et leurs motivations ainsi que les

réactions de certains pays comme le Canada, l’Australie, la Chine ou

encore Cuba.

1) La réaction de la Russie : « oui à la guerre contre le

terrorisme et non à la guerre contre le “partenaire”

irakien »

Les jours qui ont suivi les attaques du 11 septembre ont vu Washington et

Moscou, les deux anciens adversaires de la guerre froide, se retrouver

pour déclarer la guerre au terrorisme. Les Russes avaient fermement

condamné les attentats et avaient promis de coopérer avec Washington

pour éradiquer ce fléau qu’est le terrorisme qui selon eux les touche

également. C’était là pour Vladimir Poutine le président russe une

occasion de mater la résistance tchétchène qu’il ne considérait rien

d’autre qu’un terrorisme.

Quand les Américains ont décidé de s’en prendre à l’Afghanistan, les

Russes leur ont bien facilité la tâche. En effet la Russie avait permis aux

avions de la coalition d’utiliser les bases aériennes des pays d'Asie

centrale. L’espace aérien russe fut également ouvert aux vols transportant

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de l'aide humanitaire, et la Russie s’était dite prête à prendre part, si

nécessaire, à des opérations de sauvetage et de recherches internationales.

Quand les taliban furent chassés du pouvoir, la Russie fut l’un des

premiers pays étrangers à entrer en Afghanistan pour officiellement

rapporter de l’aide à la population afghane. Mais on peut voir à travers

cette intrusion une volonté de Moscou d’être à nouveau présent en

Afghanistan.

En ce qui concerne la crise irakienne, le ton était tout autre. La Russie

était radicalement opposée à une intervention en Irak car elle avait des

intérêts non négligeables dans ce pays. Elle s’était rangée du côté du

« camp de la paix » avec la France et l’Allemagne, et avait menacé, à

l’instar de la France, d’opposer son veto à une résolution autorisant le

recours à la force contre le régime de Saddam Hussein. Quand la guerre

sera déclenchée, le président russe Vladimir Poutine avait demandé un

« arrêt rapide de l'opération militaire », et trouvé qu'elle était « une

grave erreur politique ». L’ancien président soviétique Mikhaïl

Gorbatchev ira dans le même sans que M. Poutine. Au cours du

Troisième Forum mondiale de l'eau qui se tenait au Japon, il avait

qualifié cette guerre de « grosse erreur politique » et accusé

l'administration américaine de considérer le monde comme sa

«propriété». Il avait ajouté : « La guerre va miner la sécurité du monde

et discréditer le Conseil de sécurité ».

Pour ce qui est des intérêts russes en Irak, il faut savoir que des

entreprises russes avait conclu des marchés pétroliers avec le régime de

Saddam Hussein. LUKoil, l’une des plus grandes compagnies de pétrole

de la Russie, avait signé un contrat de production de pétrole de plusieurs

milliards de dollars avec le raïs irakien, lui octroyant un enjeu majeur au

Kourna Occidental, un gigantesque champ pétrolifère irakien qui recèle

plus de 11 milliards barils de pétrole. Les entreprises russes ne pouvaient

pas exploiter le pétrole de l’Irak en raison de l’embargo. Mais, une fois

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l’embargo levé, elles avaient le droit de profiter des marchés qu’elles

avaient conclu.

Au delà des marchés pétroliers, que la Russie ne voulait pas perdre,

Moscou craignait également que la chute de Saddam Hussein entraîne

une hausse de la production du pétrole qui aurait pour conséquence de

faire baisser le prix du baril. Ce qui ne l’arrangeait pas du tout. En avril

2002, le Bureau d’Information Energétique du Departement de l’Energie

des Etats-Unis notait : « l’exportation de pétrole brut est une des sources

de revenus majeure pour la Russie, accordant au gouvernement 25% de

tous ses revenus. Une augmentation d’un dollar par baril du Blend Oural

apporterait presque 1 milliard de dollars de revenus supplémentaires à

la Russie. Inversement, une chute d’un dollar par baril est un sérieux

revers pour le budget russe ».

2) Les réactions des autres pays beaucoup plus liées à

une volonté d’apaisement

Des pays comme le Canada, la Chine, l’Australie, le Japon et autres

avaient vivement condamné les attaques du 11 septembre et avaient

apporté leurs soutiens aux Etats-Unis. Même Cuba, « Etat voyous » selon

Washington, lui avait assuré sa solidarité. Le gouvernement de La

Havane avait ainsi fait part de sa « douleur et de sa tristesse » à son

adversaire de toujours, allant même jusqu'à proposer une aide « à

caractère humanitaire ». Mais là aussi comme partout ailleurs c’est la

guerre en Irak qui a posé problème.

La Chine n’avait pas fait beaucoup de bruit dans l’affaire irakienne mais

s’était dite favorable à un règlement pacifique de la crise et à un rôle plus

important des Nations Unies si une action militaire devait être

déclenchée. Toutefois, Pékin s'était rangé aux côtés de Paris, Moscou et

Berlin.

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Le Canada, voisin des Etats-Unis, s’était dit contre toute action militaire

en Irak. Le ministre canadien de la Défense, M. John McCallum, avait

fait savoir qu’à moins de recevoir la preuve que Saddam Hussein

envisageait de s’en prendre au monde occidental son pays ne serait pas

favorable à une attaque contre l’Irak. Le 15 mars 2003, quelques jours

avant le début de l’intervention contre le régime de Saddam Hussein, des

centaines de milliers de personnes ont défilé dans les grandes villes du

pays. A Montréal, par exemple, plus de 250 000 personnes avaient défilé

ce jour là contre la guerre107.

L’Australie a soutenu les deux campagnes militaires en Afghanistan et en

Irak et le gouvernement s’est toujours inscrit sur la ligne de conduite des

Etats-Unis. La population australienne, contrairement au gouvernement,

était contre la guerre et des manifestations ont eu lieu dans les principales

villes du pays notamment à Sydney et Melbourne.

Selon des sondages, plus de 80% des Japonais étaient opposés à une

intervention contre l'Irak. Le gouvernement n'en a pas moins marqué sa

solidarité avec Washington.

En dehors des protestations qu’il y a eu autour des opérations militaires

américaines, certains Etats ont eu à protester contre les conditions de

détentions de leurs ressortissants sur le sol américain. Par exemple, en

janvier 2002, certains diplomates étrangers en poste aux Etats-Unis

avaient fustigé les autorités américaines qui ne respectaient pas, selon

eux, les droits fondamentaux de leurs ressortissants incarcérés depuis les

attentats du 11 septembre. A l'instar du Consul général du Pakistan à

New York, ils avaient rapporté que dans la plupart des cas, ils n’avaient

ni l'identité, ni le lieu de détention de leurs ressortissants. On affirmait

107 « Les voix de la paix s'élèvent partout dans le monde », Radio Canada, 15 mars 2003. Vous pouvez visualiser l’article à l’adresse internet suivante : http://www.radio-canada.ca/url.asp?/nouvelles/special/nouvelles/irak/200303/14/008-manif-paix-irak.shtml

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également que les autorités américaines faisaient pression sur les détenus

pour qu'ils n'accèdent pas à leurs droits à contacter leurs représentations

consulaires ou des avocats. Les associations de défense des droits ou des

libertés ont elles aussi dénoncé ces abus.

II. L’inquiétude des associations de défense des droits et des

libertés face aux nouvelles normes anti-terroristes

Les associations comme Amnesty internationale et entre autres Reporters

sans frontières ont à plusieurs reprises affirmées avoir constaté des

violations des droits et des libertés des personnes depuis le 11 septembre

un peu partout dans le monde. Des lois préventives et restrictives ont vu

le jour. Les pouvoirs policiers ont été étendus, les arrestations

préventives se sont multipliées, des processus sécuritaires sont mis en

place. Une législation de guerre s’est développée. Les étrangers sont

suspectés de tous les maux et expulsé ou sous surveillance. Les libertés et

la vie privée (écoutes, surveillance) des citoyens sont menacées. L'Etat de

droit est méprisé. La conservation des secrets d'Etat est arbitrairement

étendue. Les libertés s’érodent. Les violations des règles de la défense et

de la présomption d'innocence sont violées. Des journalistes sont tués ou

enlevés. L’information censurés, etc.

A. Une inquiétude justifiée

Aux Etats-Unis, dans les premiers jours qui ont suivi les attaques, des

centaines de personnes ont été interpellées et détenues. La plupart sont

restées sans jugement pendant longtemps. Dans la majeure partie des cas,

les prévenus (essentiellement interpellés pour infractions à la législation

sur les visas) n’ont pas pu rencontrer un avocat ou contacter leurs

familles. La communauté arabe et musulmane était la principale visée.

Cette communauté, dans les premiers mois qui ont suivi le 11 septembre,

a vécu de durs moments. Ses ressortissants ont été victimes de meurtres,

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d’agressions physiques, de pressions morales, de licenciements abusifs,

etc.

Le 13 novembre 2001, le ministère de la Justice avait demandé, aux

services de sécurité américaines d’interroger cinq mille personnes de

cette communauté, tous d’origine moyen-orientale, entrées régulièrement

aux Etats-Unis avec un visa de touriste. Le but de cette opération était

d’identifier d’éventuels complices des auteurs des attentats du 11

septembre ou des « agents dormants » du réseau Al-Qaïda d’Oussama

Ben Laden. Cet interrogatoire "géant" a contribué à mettre à l’index et à

marginaliser des étrangers moyen-orientaux, arabes ou musulmans et à

faire naître chez eux un sentiment de suspicion et d’injustice.

A cela, s’ajoutent ; le vote de la loi USA PATRIOT Act ; l’autorisation

de l'Attorney général, John Ashcroft, (le 31 2001) de mettre sur écoute

les conversations téléphoniques entre les suspects incarcérés dans le

cadre de l’enquête sur les attentats et leurs avocats ; la mise en place de

tribunaux militaires d’exception pour juger des terroristes présumés et

dans une moindre mesure la création du ministère de sécurité intérieure.

Les conditions de détention des 600 prisonniers suspects sur la base de

Guantanamo sont elles aussi décriées.

Pour ce qui est du DHS l’opposition n’était pas très grande car sa

création était motivée par la protection du territoire américain. Toutefois,

certaines associations de défenses des libertés publiques aux Etats-Unis

avaient manifesté leurs inquiétudes de voir ce ministre interférer dans la

vie privée des citoyens ou encore restreindre leurs libertés. L'American

Civil Liberties Union (ACLU) avait demandé aux législateurs d’exiger un

mécanisme de surveillance des activités du ministère. Laura Murphy,

directrice du bureau de Washington de l'ACLU, avait déclaré par voie de

communiqué : « Si ce nouveau ministère renforce les pouvoirs du

gouvernement, le Congrès doit également s'assurer qu'il existe des

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mécanismes appropriés pour éviter les abus. De tels mécanismes, comme

la nomination d'un inspecteur général, sont cruciaux étant donnée

l'ampleur des pouvoirs accordés au nom de la sécurité intérieure, des

pouvoirs qui toucheront à tous les recoins de nos vies et libertés. »

En résumé, aux Etats-Unis, ce qui inquiète le plus les associations

militant pour la défense des droits de l’Homme et des libertés (comme

l’Union américaine des libertés civiques [ACLU], la Commission des

droits de l’homme des Etats-Unis, Human Rights Watch, le Centre pour

la démocratie et la technologie et l’Association nationale des Arabes

américains)108 c’est :

la définition juridique du terrorisme, si vaste qu’elle pourrait

donner lieu à des mesures répressives arbitraires et

discriminatoires ;

le traitement réservé aux personnes incarcérées sur le territoire

américain à des fins d’enquête, et plus spécialement aux détenus

arabes et musulmans, qui sont soumis à des gardes à vue et à des

interrogatoires dont la durée a été dénoncée, sans parler de leurs

difficultés à s’entretenir avec un avocat ;

la révision des procédures d’immigration et d’expulsion, qui

autorise la détention sans procès, pour une période indéterminée,

d’immigrés et autres ressortissants étrangers si le ministre de la

Justice " est raisonnablement fondé " à les soupçonner de mener

des activités terroristes ou d’aider à la commission d’actes de

terrorisme, suivant l’acception lato sensu du terme ;

l’absence de lignes directrices quant à la durée autorisée de

conservation de données à caractère personnel et la possibilité

pour les autorités fédérales d’accéder à des renseignements

financiers d’ordre privé sans contrôle adéquat de l’usage qui en

108Rapport parlementaire de l’OTAN, « La lutte contre le terrorisme : résultats et questions », paragraphe 63.

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est fait ni obligation d’informer les particuliers concernés de la

surveillance exercée sur leurs transactions ; enfin

les limitations fixées aux procédures de révision judiciaire et de

supervision judiciaire.

En dehors des Etats-Unis, plusieurs pays à travers le monde ont adopté

des mesures très controversées dont certains ont servi à faire passer des

mesures impopulaires qui ne seraient jamais passées avant le 11

septembre et qui, dans la plupart des cas, n’ont rien à avoir avec la guerre

contre le terrorisme. En Europe, si nous reprenons Volker Kröning109, la

législation anti-terroriste française a prévu la possibilité d’incarcérer et

d’interroger pendant quatre jours, en l’absence de tout avocat, les

personnes soupçonnées d’aider des réseaux terroristes sur le territoire et à

l’étranger et, en cas d’inculpation, de les maintenir en détention

préventive pendant une période pouvant aller jusqu’à quatre ans. En

Italie, la période de détention préventive a été portée de 18 à 24 mois. Le

code pénal espagnol autorise désormais la détention d’auteurs présumés

d’actes terroristes pendant trois jours, délai susceptible d’être prolongé de

48 heures par ordonnance judiciaire. En plus, les forces de l’ordre ont

l’autorisation de leur bander les yeux, les coiffer d’une cagoule et les

garder au secret sans leur laisser le choix d’un avocat. Au Royaume-Uni,

la nouvelle loi sur le terrorisme (l’Anti-Terrorism Act 2001) permet

l’internement sans procès des personnes dont le ministre de l’Intérieur

juge qu’elles sont une menace pour la sécurité nationale.

D’autres pays, si l’on en croit à certaines ONG, ont profité de leur

soutien aux Etats-Unis pour détourner l’attention de la situation des

droits de l’homme chez eux et de la répression qu’ils exercent sur les

opposants politiques.

109 Rapport parlementaire de l’OTAN, « La lutte contre le terrorisme : résultats et questions », paragraphe 28.

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La liberté de la presse, elle aussi, n’a pas été ménagée par les mesures

anti-terroristes. Les associations militant pour la défense de la liberté de

la presse à l’instar de Reporters sans frontières et du collectif FEN110 ont

vivement protesté contre ces mesures et dénoncé les conditions dans

lesquelles les journalistes travaillent depuis le 11 septembre.

B. Une liberté de la presse mal éprouvée par la guerre anti-

terroriste

A la suite des attentats, les autorités américaines ont mis en place (ou ont

voulu le faire) un certains nombre de mesures pour contrôler l’accès de

l’information, relevant de la guerre contre le terrorisme, aux médias. Au

mois octobre 2001, le président des Etats-Unis avait interdit que des

documents confidentielles de la Maison Blanche soient transmis aux élus

du Congrès (ce qui est d’usage), par crainte de "fuites" dans la presse.

Cette décision était motivée par une fuite d’information venant de

parlementaires et publiée dans le Washington Post. Mais face à une vive

réaction des élus, la décision restera sans suite. Egalement, les autorités

américaines avaient demandé aux grands médias du pays de ne pas

diffuser les messages de Ben Laden au motif que ces messages pouvait

être des codes envoyés par le chef d’Al Qaïda à ces agents dormants sur

le sol américain. D’après certaines sources, le Pentagone avait mis en

place un bureau d’influence (Office de l'Information Stratégique) dont le

but était vraisemblablement de faire de la propagande et de désinformer

les médias étrangers. Mais face aux protestations, la Maison Blanche

affirmera que le Président Bush n’était pas mis au courant de l’existence

de ce bureau et demandera sa fermeture. Lors des campagnes militaires,

notamment en Irak, le Pentagone avait imposé des contrôles très stricts à

l’accès des images de guerre aux journalistes. Il avait même choisis ses

propres journalistes pour couvrir les opérations militaires.

110 Le Free Expresion Network est un collectif qui regroupe une douzaine d'organisations non gouvernementales anglo-saxonnes dont les mandats concernent la liberté d'expression, la cyberliberté et la liberté de la presse.

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Selon un rapport du FEN, des journalistes ont été licenciés aux Etats-

Unis pour avoir osé critiquer le président Bush ou la politique anti-

terroriste de son gouvernement. En guise d’exemple, le rapport cite, deux

journalistes, Tom Gutting (reporter au Texas City Sun) et Dan Guthrie

(éditorialiste au Grant's Pass Dial dans l’Oregon). Ces deux ont été

licenciés, quelques jours après les attaques du 11 septembre, par leurs

employeurs pour avoir, dans leurs articles, reproché à George W. Bush

d’être rentré à la Maison Blanche un peu tard après les attentats.

Le 3 mai 2002, à l’occasion de la 12 Journée internationale de la liberté

de la presse,

e

Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans

frontières, affirmait que « depuis les attentats du 11 septembre. Au nom

de la lutte contre le terrorisme, de nombreux régimes s'en prennent, sans

aucune retenue, aux journalistes qui osent les contester en les accusant

de faire le jeu des poseurs de bombes. » L’UNESCO ira dans le même

sens que M. Ménard. Pour l'organisation onusienne la campagne anti-

terroriste a facilité la répression de la liberté de la presse et a permis à

certains dirigeants d’adopter des mesures restrictives contre la presse qui

étaient « depuis longtemps dans les cartons. »

Les associations de défense de la liberté de la presse ont dénoncé aussi

l’installation de logiciels d’espionnage chez des fournisseurs d’accès à

Internet (FAI). D’après Loïc Coriou et Régis Bourgeat111 quelques heures

après les attentats du 11 septembre des agents du FBI se sont présentés

dans les locaux des FAI comme AOL, Earthlink et Hotmail pour installer

sur leurs serveurs ce genre de logiciels. Le but était de trouver

d'éventuels indices laissés sur le réseau par les auteurs des attentats. Cette

pratique sera officialisée avec l’adoption de la loi USA PATRIOT Act

par la Chambre des représentants. Désormais, ces logiciels peuvent

légalement être branchés sur les réseaux des FAI. Selon les défenseurs de

111 Loïc CORIOU et Régis BOURGEAT, « La liberté de la presse à l'épreuve de la politique anti-terroriste de l'administration Bush », 23 mai 2002. Retrouvez l’article sur : http://www.enduring-freedoms.org/article.php3?id_article=314

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126

la liberté de la presse, cela remet en cause la confidentialité de

l'information sur le Net. Ils craignent que les agents fédéraux abusent de

l’opportunité que leur offrent ces logiciels pour espionner qui bon leur

semble ou le faire sans mandat. Les logiciels que l’on évoque le plus

souvent sont : le logiciel "Lanterne magique" ("Magic Lantern") et le

logiciel Carnivore.

Le logiciel "Lanterne magique" appartient à la catégorie des

"keyloggers". Installé sur un micro-ordinateur, le keylogger surveille et

garde en mémoire les touches frappées au clavier par l'utilisateur.

Lorsque quelqu'un crypte ses communications avec un logiciel trop

difficile à casser, il est beaucoup plus simple de découvrir son mot de

passe ou bien le contenu de ses messages en récupérant les données du

keylogger. Quand on a évoqué l’existence de ce logiciel dans la presse, le

FBI avait nié le posséder tout en reconnaissant travailler sur sa

conception.

Carnivore est un logiciel d’espionnage installé sur une machine reliée

dans les locaux d'un FAI. Il est capable de filtrer les paquets de données

qui transitent entre l'utilisateur et le FAI et de reconstituer les messages

échangés : courriers électroniques mais aussi pages Web visitées, et

conversations en directes (chats). Avant lui il y a eu Etherpeek puis

Omnivore (1997) qui scannait 6 Go de données par heure. Carnivore

serait moins rapide (quelques millions d'e-mails par seconde quand

même !) mais est capable de reconstituer les pages Web et les cessions de

discussion en ligne (les chats). Son coût de développement est estimé à

6,8 millions de francs.

La façon dont les journalistes ont été traités et l’information censurée,

lors des campagnes militaires en Afghanistan et en Irak, a aussi été

dénoncée. D’après, Loïc Coriou et Régis Bourgeat, en Afghanistan, des

« journalistes et collaborateurs des médias ont été frappés ou menacés

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127

d'exécution par des soldats américains ou leurs alliés afghans »112.

Toujours selon la même source, le 10 avril 2002, un traducteur et

assistant du quotidien américain Boston Globe a été violemment frappé,

en présence des forces spéciales américaines, par des combattants des

FAN.

La façon dont la chaîne de télévision Al-Jazira basée au Qatar a été

traitée par les Etats-Unis, en Afghanistan mais également en Irak, a elle

aussi été condamnée par les défenseurs de la liberté de la presse. Les

Etats-Unis accuse la chaîne de faire passer les messages de Ben Laden et

d’« encourager des sentiments anti-américains » au Moyen-Orient. Les

locaux de la chaîne ont été pilonnés à Kaboul par l’aviation américaine

lors de la guerre d’Afghanistan. Les Américains avaient affirmé qu’ils les

soupçonnaient d'abriter des éléments d'Al-Qaida, par conséquent ils

étaient une cible militaire. Un journaliste de la chaîne serait prisonnier à

la base de Guantanamo et un autre aurait été tué lors de la guerre en Irak

par l’armée américaine.

III. Les réactions des OI aux attaques du 11 septembre et à la

guerre anti-terroriste

A la suite des attaques du 11 septembre, l’une des premières choses que

les OI (l’ONU et l’OTAN) ont fait, après avoir condamné les attaques, a

été d’adopter de nouvelles mesures anti-terroristes ou de réviser les

anciennes. Certains des membres de l’OTAN avaient souhaité une

transformation de l’organisation pour qu’elle puisse faire face aux

nouvelles menaces à l’instar du terrorisme. Comme nous l’avons déjà

indiqué, il est à retenir que, l’ONU et l’OTAN se sont gardées de fournir

tout soutien aux Etats-Unis dans la guerre en Irak. Cependant, elles leur

ont apporté un soutien assez important (non pas dans les opérations

militaire) lors de la campagne en Afghanistan.

112 ibidem

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128

A. Les nouvelles mesures mises en place par l’ONU et ses

organismes et sa réaction à la crise irakienne

L’ONU avec douze conventions113 en vigueur sur le terrorisme

international, est la seule entité d’envergure mondiale à préconiser une

coopération à l’échelle planétaire dans la guerre contre le terrorisme.

Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, le Conseil de sécurité

des Nations Unies a considéré d'emblée, dans ses Résolutions 1368 et

1373 adoptées les 12 et 28 septembre, les attentats comme une menace

contre la paix et la sécurité internationales et il a réaffirmé à cet égard le

droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective,

conformément à la Charte des Nations Unies avant même qu'il y ait des

preuves tangibles que ces actes émanaient de l'étranger. Il avait promis de

prendre toutes les mesures requises pour riposter à ces attaques.

Contrairement à ce que d’aucuns ont affirmé, selon Volker Kröning114,

les résolutions 1368 et 1373 n’ont pas autorisé les Etats-Unis à recourir à

la force armée de la même façon que la résolution 678 de 1990 l’avait

fait lors de la crise du Golfe. D’après lui, l’administration Bush s’est

appuyée sur le droit naturel de légitime défense inscrit à l’article 51 de la

Charte des Nations Unies qui n’est subordonné à aucune autorisation

préalable du Conseil de sécurité.

Après l’adoption de ces résolutions, le Conseil de sécurité va adopter

d’autres comme la résolution 1377 le 12 novembre 2001, la résolution

1390 le 16 janvier 2002115 etc. Outre le Conseil de Sécurité (CS), divers

organismes des Nations Unies ont réagi aux attaques en adoptant de

nouvelles mesures ou en émettant la volonté de le faire. On peut 113 Jusqu’en novembre 2002, seuls 24 Etats avaient ratifié les 12 conventions sur le terrorisme. Ces Etats sont: Autriche, Bolivie, Botswana, Bulgarie, Canada, Chili, Cuba, Danemark, Finlande, Grenade, Islande, Japon, Mali, Pays-Bas, Norvège, Panama, Pérou, Slovaquie, Espagne, Suisse, Turquie, Royaume-Uni, Etats-Unis et Ouzbékistan. 114 Rapport parlementaire de l’OTAN, « La lutte contre le terrorisme : résultats et questions », paragraphe 9 115 Cf. au Chapitre II

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129

citer parmi eux : le Comité spécial créé par la résolution 51/210 de

l’Assemblée générale du 17 décembre 1996, l’Agence internationale de

l’énergie atomique (AIEA), l’Organisation de l’aviation civile

internationale (OACI), l’Organisation maritime internationale (OMI),

l’Union postale universelle (UPU), L’Organisation mondiale de la santé

(OMS), et le Conseil économique et social des Nations Unies.

1) Quelques mesures anti-terroristes adoptées par des

organismes de l’ONU en réaction au 11 septembre

Le Comité spécial créé par la résolution 51/210 de l’Assemblée

générale du 17 décembre 1996 a réagi aux événements du 11 septembre

dans les limites de son mandat d’harmonisation de la guerre contre le

terrorisme par des moyens juridiques. Il a adopté deux traités, l’un

portant sur les attentats terroristes à l’explosif et l’autre sur la répression

du financement du terrorisme.

L’AIEA a pris des mesures pour élargir son examen des installations

nucléaires dans les États membres, pour cerner les améliorations de la

sécurité nécessaires et pour organiser les contributions financières

permettant de mettre en oeuvre ces mesures. L’AIEA a proposé la

création d’un mécanisme international de réaction aux menaces

nucléaires venant d’acteurs non étatiques et aux attaques contre les

installations nucléaires.

L’OACI avait annoncé son intention d’intensifier la mise en oeuvre et

l’exécution des conventions relatives à la sécurité aérienne, de renforcer

les mesures visant à contrer les menaces à la sécurité dans des États

donnés et de mettre l’accent sur les besoins des pays en développement.

L’OMI a élaboré 12 propositions en vue d’améliorer la sécurité

maritime. Ces propositions visent l’identification automatique obligatoire

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130

sur tous les navires de plus de 500 tonnes, des lignes directrices sur

l’évaluation de la vulnérabilité des ports, une pièce d’identité des gens de

mer dont le besoin est urgent, une nouvelle coopération douanière et de

nouvelles alarmes anti-terroristes à bord des navires.

L’UPU a offert des avis et une formation afin d’éliminer la transmission

de matières dangereuses par la poste. Elle a organisé de nombreux

séminaires comme celui sur le bioterrorisme organisé avec le Groupe

d’action pour la sécurité postale (GASP) en avril 2002. Ce séminaire

avait mis l’accent sur les événements bioterroristes survenus aux États-

Unis en octobre 2001. Lors de ce séminaire, des conférenciers de l’US

Postal Service (USPS) avaient présenté un aperçu de l’usage du

bioterrorisme par l’intermédiaire des envois postaux. Ils avaient

également décrit la façon dont ils ont traité la crise, ce qu’ils avaient

appris des événements et ce qu’il fallait maintenant pour protéger leurs

clients, leurs employés et le public contre les risques chimiques et

biologiques.

L’OMS a dégagé, à l’intention des responsables de la santé publique,

trois enseignements de la crise de l’anthrax d’octobre 2001 : réaction

rapide du système de santé au soupçon d’infections délibérées, vigilance

de tous les instants et information de la population.

Le Conseil économique et social des Nations Unies a voté deux

résolutions qui mettent l’accent sur le terrorisme et les droits de la

personne. La première résolution, datant du 16 avril 2002, condamne les

actes terroristes « en tant qu’actes qui visent l’anéantissement des droits

de l’homme, des libertés fondamentales et de la démocratie » et appelle à

une action multilatérale vigoureuse « en conformité avec les obligations

internationales applicables, aux termes des instruments relatifs aux

droits de l’homme et du droit humanitaire international. »116 La

116 E/CN.4/2002/L.50/Rev. 1, le 16 avril 2002.

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131

deuxième résolution, demande que le Haut Commissaire des Nations

Unies aux droits de l’homme fournisse des orientations sur la protection

des droits et des libertés dans le contexte de la guerre contre le terrorisme

en aidant et en conseillant les États et l’ONU, en soumettant des

recommandations à propos d’éléments précis du droit international

relativement à des mesures qui sont proposées, en analysant les

répercussions des mesures anti-terroristes et en puisant dans les

enseignements tirés des interventions, des recommandations et des

décisions antérieures, ainsi que de l’expérience.

Dans l’ensemble, les Nations Unies ont bien réagi aux attaques du 11

septembre. Elles ont adopté de nouvelles mesures et amélioré les

anciennes. Contrairement à avant, depuis le 11 septembres beaucoup de

pays adoptent ces mesures par crainte d’être taxés de mauvaise foi pour.

Toutefois, l’adoption de ces mesures par les Etats, ne signifie pas qu’elles

sont respectées comme il le faut.

2) L’ONU et la crise irakienne

Pour ce qui est des campagnes militaires en Afghanistan et en Irak,

l’ONU a eu des réactions différentes. La campagne en Afghanistan, sans

vouloir dire qu’elle a été autorisée par l’ONU, était acceptée par

l’Organisation. Après la chute des Taliban, les Nations Unies ont envoyé

en Afghanistan l’ISAF117.

Pour ce qui est de l’Irak, les Nations Unies avaient refusé de cautionner

une intervention militaire comme les Etats-Unis le souhaitaient. Quand

les Américains ont estimé qu’il fallait attaquer l’Irak, les Nations Unies

avaient proposé d’envoyer des inspecteurs vérifier si elle possédait des

ADM avant toute action militaire. Le 08 novembre 2002 le Conseil de

sécurité adoptait la résolution 1441. Par cette résolution, il ordonnait à

117 Cf. au Chapitre II

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132

Bagdad de se soumettre aux inspections et de détruire tous ses

programmes d’armes de destruction massive sous peine d’un recours à la

force. Cette résolution n’était pas ce que les Américains souhaitaient

mais ils s’en sont contentés le temps de se déployer dans le Golfe et de

trouver une faille pour attaquer l’Irak. Le suédois, Hans Blix, était le chef

des inspecteurs. L’AIEA était également présente avec son directeur

Mohamed El Baradei.

Après plus deux mois d’inspections, Hans Blix déclarait au siège des

Nations Unies « Si vous demandez s'ils coopèrent activement, je

répondrais non, ils ne sont pas encore arrivés à ce stade. Si nous avons

une coopération active, s'ils font véritablement un effort, nous ne

devrions pas avoir besoin de beaucoup de temps. Si nous n'avons pas ce

type de coopération, cela (le processus d'inspection) peut s'éterniser »118.

Toutefois, il avait précisé que « des progrès ont été faits (...) »119 et qu’il

leur fallait encore un peu de temps. Ce temps, les Américains ne le leur

laisseront pas. Au mois de mars (2003) les Etats-Unis agiront

unilatéralement pour désarmer l’Irak et couper ses liens avec le

terrorisme. Mais auparavant, ils avaient tout fait pour que l’ONU

cautionne l’intervention. Et sans l’opposition de la France, de la Russie et

de l’Allemagne, ils auraient certainement réussi.

B. La réaction de l’OTAN et sa transformation face aux

nouvelles menaces comme le terrorisme international

A la suite des attentats du 11 septembre 2001, l’OTAN a pris un certain

nombre de décisions pour soit soutenir ou soit exprimer sa solidarité avec

les Etats-Unis. C’est ainsi qu’elle avait activé l’article 5 du Traité.

Certains Etats-membres, notamment les Etats-Unis, avaient jugé

118 « Les positions semblent inconciliables », Radio Canada, 30 janvier 2003. Voir : http://www.radio-canada.ca/url.asp?/nouvelles/Index/nouvelles/200301/22/006-irak-mercredi.shtml 119 ibidem

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133

nécessaire de transformer l’organisation pour lui permettre de faire face

au terrorisme mais également à la prolifération des ADM et autres. Cette

probabilité devait être discutée au sommet de l’OTAN à Prague.

1) La réaction de l’OTAN aux attaques du 11

septembre

Le Conseil de l'Atlantique nord a commencé par adopter une position

assez prudente en convenant, le 12 septembre, que, s'il était prouvé que

les attaques du 11 septembre contre les Etats-Unis avaient été

commanditées de l'étranger, elles devaient être considérées comme

relevant de l'article 5 du Traité de Washington, qui stipule qu'une attaque

armée contre l'un ou plusieurs des alliés survenant en Europe ou en

Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre eux

tous. En octobre 2001, pour la première fois dans l'histoire, l’article 5 du

traité de Washington sera activé.

Dans le même mois d’octobre 2001, après que les Etats-Unis aient

demandé à leurs Alliés de l’OTAN de prendre des mesures spécifiques

pour appuyer leur campagne militaire en Afghanistan, les Alliés ont

décidé120 :

d’intensifier leur coopération dans le domaine du renseignement

(collecte et partage) sur le plan bilatéral comme à l’intérieur de

l’Alliance ;

d’accorder - en tenant dûment compte des dispositions requises

pour le trafic aérien et des procédures nationales - des

autorisations générales de survol pour les appareils des Etats-Unis

et de l’OTAN mis en œuvre dans des opérations anti-terroristes ;

120 Rapport parlementaire de l’OTAN, « La lutte contre le terrorisme : résultats et questions », paragraphe 13

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d’aider les membres de l’Alliance (et des pays extérieurs) qui

risquaient d’être exposés à des menaces accrues en raison de leur

soutien à la campagne contre le terrorisme ;

de prendre les mesures nécessaires pour renforcer la sécurité des

installations américaines en Europe ;

de remplacer, dans la zone de l’OTAN, les moyens alliés

susceptibles d’être nécessaires ailleurs, toujours dans le contexte

de la campagne contre le terrorisme ; et

de permettre aux Américains et aux autres Alliés engagés dans les

opérations anti-terroristes d’accéder aux ports et aéroports situés

sur leurs territoires respectifs, notamment à des fins de

ravitaillement en carburant, dans le respect des procédures

nationales en la matière.

L’OTAN en tant que telle n'a pas participé directement aux opérations

militaires contre le régime des Taliban. Toutefois, certains de ses

membres, à titre individuel, ont apporté un soutien non négligeable aux

Américains dans leurs opérations. Retenez que l’ISAF est sous

commandement de l’OTAN.

2) La transformation de l’OTAN à la suite du 11

septembre

Depuis les attaques du 11 septembre, beaucoup de gens pensent que

l’OTAN doit transformer ses institutions et ses capacités pour faire face à

cette nouvelle menace qu’est le terrorisme. En septembre 2002 à

Varsovie, au cours d’une réunion des ministres de la défense de l’OTAN,

Donald Rumsfeld avait proposé la création d’une « force de riposte » au

sein de l’organisation. Le délai de déploiement de cette force devrait se

situer entre 5 et 30 jours. Elle devrait atteindre sa « capacité

opérationnelle initiale » au plus tard au mois octobre de cette année, et

devrait être opérationnelle à cent pour cent avant 2006. Selon un rapport

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parlementaire de l’OTAN, la force de riposte proposée par le Secrétaire à

la Défense américain « interviendrait au titre de Groupe de forces

interarmées multinationales (GFIM) de l’OTAN, sous le commandement

du chef d’état-major des GFIM. Elle pourrait se composer d’un

maximum de 21 000 hommes, avec une force terrestre de la taille d’une

brigade, des moyens aériens capables d’effectuer jusqu’à 200 sorties de

combat par jour, et des forces navales dont la taille pourrait égaler celle

des forces navales permanentes de l’OTAN (qui peuvent comprendre de

8 à 15 frégates et destroyers). »121 Sa mission serait entre autres

d’« intervenir notamment dans des opérations de réponse aux crises (par

exemple, l’évacuation des civils), pour prévenir les agressions en jouant

le rôle d’un groupement de forces « proactif » appelé à accepter des

renforts, ou comme force d’entrée initiale dans le cadre d’opérations de

grande envergure comme celles de l’OTAN au Kosovo (elle assurerait

alors la sécurité des ports et des voies de communication, et préparerait

le théâtre des opérations). »122

La mise en place de cette force de riposte inquiétait certains membres de

l’OTAN pour deux raisons. La première est le risque de la voir

concurrencer la « Force de réaction rapide européenne ». La seconde est

la crainte de la voir « transformait l’Alliance en une organisation aux

responsabilités planétaires ». Les membres s’étaient donnés rendez vous

au Sommet de Prague pour examiner cette proposition du Secrétaire

d’Etat américain Donald Rumsfeld.

Lors de la réunion du Conseil de l'Atlantique Nord tenue à Prague le 21

novembre 2002, les chefs d'Etat et de gouvernement ont adopté un

ensemble de mesure pour permettre à l’OTAN de relever les défis pour la

121 Rapport parlementaire de l’OTAN, «La guerre contre le terrorisme», paragraphe 59. 122 ibidem

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sécurité des forces, des populations et des territoires des pays membres.

Il a été décidé123 :

de créer une force de réaction rapide de 20.000 hommes (utilisant

des technologies de pointe, facilement déployable, apte à soutenir

des opérations prolongées) comportant des éléments terrestres,

maritimes et aériens prêts à se transporter partout où il le faudra ;

de rationaliser les arrangements de commandement militaire de

l'Alliance. La nouvelle structure consolidera le lien

transatlantique, entraînera une réduction sensible du nombre de

quartiers généraux et de centres d'opérations aériennes. Il y aura

deux commandements stratégiques. Le commandement

stratégique "opérations", basé en Belgique, appuyé par deux

commandements interarmées en mesure de constituer des groupes

de force interarmées multinationales (GFIM) terrestres et

maritimes. Le commandement stratégique "transformation" sera

basé aux Etats-Unis avec une antenne en Europe ;

d’approuver l'Engagement Capacitaire de Prague (PCC) afin

d'améliorer les capacités existantes et en développer de nouvelles

pour une guerre moderne dans un environnement caractérisé par

un haut niveau de menace. Améliorer les capacités dans 8

domaines : défense contre les menaces chimique – biologique –

radiologique, surveillance terrestre aéroportée, renseignements,

communication protégée, munitions guidées, transport aérien et

maritime stratégique, ravitaillement en vol, défense antiaérienne

et brouillage électronique ;

d’entériner le concept militaire agréé de défense contre le

terrorisme ;

123 Ces informations sont extraites à l’adresse : http://www.robert-schuman.org/synth69.htm. Vous pouvez vous référer également à la Déclaration du Sommet de l’OTAN à Prague. Retrouvez cette déclaration à l’adresse : http://www.defense.gouv.fr/dga/fr/pdef/declaration_sommet_prague.pdf

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de souscrire à la mise en œuvre d'initiatives de défense contre les

armes nucléaires, biologiques et chimiques (NBC) ;

de renforcer les capacités de défense contre les cyberattaques ; et

d’engager une étude de faisabilité sur la défense antimissile de

l'OTAN.

Outre ces mesures, les chefs d'Etat et de gouvernement, dans la

Déclaration du sommet, s’étaient engagés à appuyer « pleinement la mise

en application » de la résolution 1441 du Conseil de sécurité des Nations

Unies et avaient appelé l'Irak à se conformer « intégralement et

immédiatement » à cette résolution. Ils avaient aussi promis de prendre

« des mesures efficaces pour aider et soutenir les Nations Unies dans

leurs efforts visant à faire en sorte que l'Irak respecte intégralement et

immédiatement, sans conditions ni restrictions, la résolution 1441 »124.

En dehors de l’ONU et de l’OTAN, d’autres OI ont réagi aux attaques du

11 septembre en adoptant un certains nombre de mesures pour protéger

les populations de leurs Etats membres ou pour soutenir la lutte anti-

terroriste américaine. C’est le cas de l’Union européenne, l’Organisation

pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), l’Organisation de la

Conférence islamique (OCI) etc.

Dans l’ensemble, les attaques du 11 septembre ont été condamnées par

tout les acteurs de la scène internationale. Cependant la manière dont les

Etats-Unis mènent la guerre contre le terrorisme n’est pas du goût de tout

le monde. Ceux qui ont accepté de les suivre comme ce qui ne

l’acceptent pas ont vu leurs relations avec Washington se transformaient

(positivement ou négativement) ou leurs différents éclater au grand jour.

124 Cf. à la Déclaration du sommet de l’OTAN à Prague du 21 novembre 2002.

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Chapitre 5 : Les implications de la

guerre anti-terroriste sur les relations

Etats-Unis/Europe et Etats-Unis/Russie

La guerre contre le terrorisme a incontestablement eu un impact négatif

sur les relations transatlantiques. Européens et Américains voient de plus

en plus le fossé se creuser entre eux. Ils ont des points de vue très

opposés dans la façon de lutter contre le terrorisme. Les Américains

parlent de “guerre” et prônent l’usage de la force, à l’instar des autres

moyens, pour écraser le terrorisme international. Les Européens parlent

de “lutte” et n’intègrent l’usage de la force dans cette “lutte” qu’en

dernier recours. Mais de tout ceci, c’est l’affaire irakienne qui a mis la

poudre au feu sur les relations transatlantiques.

Contrairement aux relations transatlantiques, la guerre anti-terroriste a eu

des effets positifs sur les relations américano-russes ; même si la Russie

s’est vivement opposée à la guerre en Irak. Moscou compte, avec la

“bénédiction” de Washington, mater la rébellion tchétchène, nouer un

partenariat stratégique et trouver une solution au problème des gorges de

Pankisi en Georgie.

I. Les implications de la guerre anti-terroriste sur les relations

transatlantiques

« Samuel Huntington avait raison de prophétiser un choc des

civilisations dans le courant du XXIe siècle. Il s’est juste trompé de

casting. Le choc, dont les prémices commencent à se faire jour, loin de

ressembler à un affrontement généralisé entre l’Orient et l’Occident, est

en réalité en train de prendre la forme d’un profond divorce au sein

même du bloc occidental. Un divorce entre l’Europe et les Etats-

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139

Unis »125. Actuellement, les relations transatlantiques vacillent tellement

que l’on se demande si elles ne vont pas se « crasher ». Les disputent

entre l’Europe et les Etats-Unis ne datent pas d’aujourd’hui. Déjà à

l’époque de l’ennemi soviétique Européens et Américains ont eu des

pommes de discorde. A la suite de la chute de l’URSS, de la chute du

mur de Berlin et du renforcement de la Communauté européenne, les

Etats-Unis et l’Europe ont vu leurs intérêts et leur vision du monde

diverger peu à peu. Cette divergence vas éclater au grand jour à partir

des événements du le 11 septembre et notamment avec la crise irakienne.

Cette crise a mis à jour les différents qui existent depuis longtemps entre

l’Amérique et l’Europe. Pour Robert Kagan126, cette divergence est très

profonde et porte notamment « sur le rôle que doit jouer la puissance

militaire dans la politique internationale, et sur ce que devrait être

l’ordre mondial aujourd’hui »127. Malgré tout, Européens et Américains

conservent des valeurs communes et des intérêts convergents pour

dépasser leurs divergences et préserver leurs relations. Et ceci même si

avec certains pays, comme la France, les relations avec Washington sont

sérieusement entamées.

A. Les pommes de discorde entre le “Vieux” et le “Nouveau

continent”

Aujourd’hui ce qui oppose l’Europe et l’Amérique est assez notoire. Ces

entités s’opposent sur des contentieux commerciaux, politiques et même

stratégiques. Il n’y a pas longtemps, quand les Etats-Unis ont augmenté

les droits de douane sur les importations d’acier avec pour objectif de

protéger leur propre industrie sidérurgique qui ne se portaient pas bien,

125 Samy GHORBAL, « Europe/Etats-Unis : la fracture », JEUNE AFRIQUE L’INTELLIGENT (JAI), n° 2235, du 9 au 15 novembre 2003, p. 27 126 Robert KAGAN est politologue et membre de la Fondation Carnegie pour la paix internationale. Il fait parti des « faucons » de l’administration Bush qui sont considérés comme des partisans de la stratégie musclée de Bush. 127 Cf. à l’interview de Dominique SIMONNET, « L’Amérique doit mener la politique des forts », L’EXPRESS, 06 mars 2003. Retrouvez cet interview à l’adresse : http://www.lexpress.fr/info/monde/dossier/bush/dossier.asp?ida=383143

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l’Union européenne a porté plainte devant l’Organisation mondiale du

commerce et avait menacé de surtaxer certains produits américains. Cet

exemple n’est qu’un parmi les contentieux commerciaux qui oppose le

« Vieux continent » et l’Amérique.

Autre sujet de discorde, l’environnement, plus précisément le protocole

de Kyoto. Ce protocole est issu de la Convention-cadre des Nations

Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) adoptée à l'issue du

Sommet de la Terre, qui s'est tenu en juin 1992 à Rio de Janeiro, au

Brésil. Son but est de réduire les émissions de six gaz à effet de serre de

5,2 % entre 2008 et 2012, par rapport aux niveaux de 1990. Les Etats-

Unis refusent de ratifier le protocole alors même qu’ils sont les plus gros

pollueurs de la planète. Washington craint que les mesures auxquelles

contraint le protocole ne nuisent son industrie. Cette attitude est jugée

égoïste par l’ensemble des pays européens qui se sont fermement

engagés pour la protection de l’environnement.

D’autres contentieux opposent le « Vieux continent » et le « Nouveau ».

Ces contentieux font croire plus que jamais que le fossé se creuse

considérablement entre les deux vieux amis de la Guerre froide. Selon S.

Ghorbal128 sur le plan intérieur : les Européens sont opposés à la peine de

mort et à la libre circulation des armes, alors que les Américains y sont

favorables ; ils sont généralement partisans de la protection sociale, alors

que les Américains y sont allergiques ; ils sont devenus areligieux, alors

que l’Amérique se verse dans la bigoterie et le manichéisme ; ils

s’interdisent de mélanger politique et religion, chose que les Américains

font en permanence. Sur le plan extérieur, M. Ghorbal avance que les

sociétés du Vieux Continent sont multilatéralistes, favorables à l’ONU, et

n’envisageant le recours à la force qu’en dernière extrémité alors que les

Américains sont unilatéralistes, interventionnistes, partisans des guerres

préventives, et « cultivent un mépris sans limites pour les institutions

128 Samy GHORBAL, op. cit., p. 27

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onusiennes » ; enfin, l’Amérique est contre la justice pénale

internationale et l’interdiction des mines anti-personnel alors que

l’Europe et pour.

Comme nous l’avons déjà souligné, la crise irakienne a véritablement

révélé les divergences entre l’Europe et l’Amérique. En effet lors cette

crise, globalement, l’Union européenne était contre une intervention

contre Saddam Hussein sans l’aval des Nations Unies. Les pays de

l’Union qui se sont le plus illustrés dans cette opposition, comme nous

l’avons vu antérieurement, ont été la France et l’Allemagne que le

secrétaire d’Etat à la défense Donald Rumsfeld a qualifié de « vieille

Europe ». Contrairement à la France et à beaucoup d’autres pays de

l’Union, l’Allemagne avait fait comprendre qu’elle ne participerait pas à

une intervention militaire en Irak quand bien même celle-ci serait

approuvée par l’ONU.

Certains intellectuels, notamment américains, avaient interprété le refus

des Européens, pour des actions militaires, comme une faiblesse. Pour

eux, l’Europe étant faible militairement préfère faire appelle aux lois

internationales pour écarter les dangers qui menacent le monde ; et que

les Etats-Unis étant puissant préfèrent faire disparaître ces dangers par la

puissance de leur armée. Pour illustration, d’après R. Kagan « Quand les

Etats-Unis étaient faibles, ils pratiquaient les stratégies de la voie

détournée, les stratégies de la faiblesse. A présent qu’ils sont forts, ils

adoptent le comportement des nations fortes. Quand les grands pays

européens étaient puissants, ils croyaient au pouvoir et à la gloire

martiale. Mais aujourd’hui, ils voient le monde par les yeux des nations

faibles. Ces deux points de vue très différents ont naturellement donné à

des prises de positions stratégiques opposées, à des évaluations

contraires des menaces et des moyens appropriés pour y répondre, à des

calculs d’intérêt différents et à des points de vue différents sur la valeur

et la signification du droit international et des institutions

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internationales. »129. Et Victor Davis Hanson130 d’ajoutait : « au lieu des

moyens d’envoyer des divisions aéroportées en Afghanistan, de

bombarder l’Irak avec leurs porte-avions ou de lancer des ultimatums à

des régimes rétifs comme le Pakistan, les Européens frustrés ont mis leur

foi, à tort ou à raison, dans des organismes internationaux tels que les

Nations Unies ou la Cour pénale internationale, tout en feignant de ne

pas remarquer que seule la puissance américaine leur a permis de rêver

qu’ils habitent un monde enchanté peuplé de gens raisonnables »131.

Nous précisons à M. Hanson que les Américains n’y sont pas parvenus

en solitaire. Ils avaient derrières les Européens et d’autres. Le « monde

enchanté » dont il parle est une entreprise collective.

D’autres affirment que cette opposition est due en partie à une différence

de perception de ce qui constitue un danger. Si l’Irak était une menace

pour l’Amérique est-ce qu’elle l’était forcément pour l’Europe dont

certains pays y avaient des intérêts économiques ? Et si l’Irak ne

constituait pas une menace aux yeux des Européens quel intérêt avaient-

ils pour suivre les Américains dans leur politique ? Selon Steven Everts,

rapportait par M. Kagan132, aujourd’hui les menaces pour les

responsables américaines ne sont pas tout à fait les même que celles des

responsables européens comme c’était le cas durant la Guerre froide. M.

Everts avance que pour les Américains, les menaces sont la prolifération

d’armes de destruction massive, le terrorisme et les « Etats voyous » alors

que pour les Européens les menaces sont les conflits ethniques, les

migrations, le crime organisé, la pauvreté et la dégradation de

l’environnement.

129 Robert KAGAN, « La puissance et la faiblesse : les Etats-Unis et l’Europe dans le nouvel ordre mondial », p. 20 130 C’est un historien militaire de réputation internationale. 131 Victor Davis HANSON, « Adieu à l’Europe », Le DEBAT, n° 123, janvier-février 2003, p. 20. (Le présent article a initialement paru dans la revue Commentary, octobre 2002. Il est traduit en français par Pierre Emmanuel Douzat). 132 Robert KAGAN, op. cit., p. 54

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Pour appuyer cet argument, prenons par exemple le cas de la pauvreté. A

la suite des attaques du 11 septembre, les Européens, bien que n’étant pas

catégoriquement opposés à des actions militaires pour lutter contre le

terrorisme, avaient avancé l’idée selon laquelle une réduction de la

pauvreté serait l’un des meilleurs moyen de réduire ou de faire disparaître

le terrorisme. Plus précisément, pour les Européens la pauvreté est l’une

des causes majeures du terrorisme. Argument contestait par les

Américains. Pour eux la pauvreté ne transforme pas des personnes en des

terroristes et des meurtriers. Toutefois ils admettent qu’elle est une

condition que peuvent exploiter les terroristes pour avoir l’appui des

populations et qu’elle peut également rendre les Etats faibles vulnérables

aux réseaux terroristes et aux cartels de drogue. Si l’on s’y penche de

prés, on peut dire, sans intension d’affirmer que les Européens ont tord,

que les Américains ont certainement raison. Pourquoi ? Parce que la

plupart des kamikazes du 11 septembre sont issus de pays riches et en

outre Ben Laden qui est leur chef n’est pas quelqu’un qui a connu la

pauvreté. Sa fortune est estimée à des milliards de dollars.

Aujourd’hui, le « Vieux continent » et le « Nouveau continent » ont

certains de leurs intérêts qui sont divergents. Ils ont une vision du monde

et de la menace qui sont différentes. Ils ont une perception de mener la

guerre contre le terrorisme qui n’est pas tout à fait la même. Tout cela

complique les bonnes relations qu’ils entretiennent depuis des décennies.

Pour autant est-ce que cela peut entraîner une rupture complète des

relations transatlantiques ? Nous pensons que non. L’Europe et

l’Amérique sont liées par des valeurs communes et des intérêts

convergents notoires qui leur permettront de veiller à leurs bonnes

relations et dépasser leurs différents.

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B. L’Europe et l’Amérique : des valeurs communes et des

intérêts convergents malgré les pommes de discorde

Comme le reconnaît R. Kagan, « il y a un Occident culturel, politique,

économique » malgré les divergences. L’Europe et les Etats-Unis ont des

valeurs, des cultures, des principes communs. Les deux rives de

l’Atlantique sont animées par la démocratie, le respect des libertés et du

droit. Elles sont les gardiennes du capitalisme et sont issues d’une même

origine judéo-chrétienne. En outre leurs intérêts économiques

convergent. L’Europe et l’Amérique ont pour objectifs, aujourd’hui

comme hier, de promouvoir l’économie de marché, la croissance des

échanges commerciaux, l’augmentation de la croissance économique

mondiale, etc.

En matière commerciale, les deux continents sont étroitement liés et

dépendent l’un de l’autre. L’un est le meilleur partenaire commercial de

l’autre et vis versa. En outre avec la mondialisation les liens financiers et

économiques des deux rives de l’Atlantique se sont densifiés.

Face au terrorisme qui sévit aujourd’hui dans le monde, face à la

prolifération nucléaire et balistique dans des pays n’ayant pas une culture

occidentale, face au mécontentement des populations du Sud qui

s’estiment exploitées par les Occidentaux, face à l’instabilité des foyers

d’approvisionnement en pétrole de l’Occident, nous pensons que

l’Amérique et l’Europe ont tout intérêt à coopération dans la lutte contre

ces fléaux.

En résumé, si nous reprenons Colomban Lebas133, Européens et

Américains ont intérêt à pérenniser les relations transatlantiques.

133 Colomban LEBAS, « Quel avenir pour la relation transatlantique », Etude menée pour la fondation Robert Schuman, septembre 2002, p. 51 – 53

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Pour l’Europe, les enjeux sont :

de bénéficier des retombées de la prospérité américaine à travers

un commerce lucratif et stimulant ;

de bénéficier de la protection américaine sans en supporter la

totalité des coûts ;

de bénéficier d’un rôle dans le gouvernement multilatéral du

monde, conditionné par le bon fonctionnement des institutions

internationales (Conseil de Sécurité par exemple) lui-même

dépendant du bon état de la relation transatlantique ;

d’être reconnu comme partenaire particulier par les Etats-Unis ce

qui permet à la fois de bénéficier d’un accès particulier à la

puissance américaine tout en gardant une position de

commentateur légitime de l’évolution des affaires internationales

et de la gestion de celle-ci par les Etats-Unis (à défaut de

réellement maîtriser le calendrier et les thèmes du débat

international comme les Etats-Unis), sans représailles

américaines, et tout en bénéficiant aux yeux du monde des gains

diplomatiques de cette posture critique et un brin moralisant ;

enfin

pour les Européens de l’Est, la relation transatlantique est une

occasion formidable de bénéficier de la paix que procure le

parapluie américain. Elle est aussi la perspective de bénéficier à

l’avenir d’une relation commerciale nourrie, en particulier par le

truchement de l’intégration européenne.

Pour les Etats-Unis, les enjeux sont :

de maintenir une présence en Europe suffisante pour éloigner la

tentation européenne de la puissance tout en les incitant à mieux

se prendre en charge militairement afin de libérer des ressources

pour augmenter la visibilité américaine dans les zones les plus

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stratégiques de l’Asie centrale au sens large, du Proche-Orient, de

la Chine. Les associer – en contrôlant qu’ils ne développent pas

de monopoles dans les techniques militaires clef – au sein des

grands programmes militaires américaines (bouclier antimissile,

JSF) (meilleur contrôle, maintien de leur dépendance) ;

de cultiver le partenariat économique stimulant et irréversible

avec une Europe dont les marchés sont relativement proches en

termes culturels et de pouvoir d’achat, tout en maintenant des

positions fermes de négociation autant que possible (acier) et en

défendant l’industrie américaine, et l’agriculture américaine ;

de continuer les fructueuses exportations culturelles (en terme de

musique ou d’habillement, de comportement et de mode vie) qui

induisent des profits économiques directs et indirects, en jouant

sur la fascination qu’exerce le mode de vie américain ;

l’aspect heurté des relations permet d’éviter un monolithisme trop

affirmé du bloc occidental qui donnerait une prise aisée à la

critique, tout en maintenant la certitude d’une solidarité sans faille

dans les moments historiques cruciaux ;

de posséder des alliés inconditionnels en cas de crise ;

de maintenir un lien avec d’autres pays culturellement et

idéologiquement proches ; enfin

d’accroître son influence en Europe centrale et orientale,

idéalement de la Mer noire à la Baltique.

Mais pour que les relations transatlantiques puissent se pérenniser

facilement, il est nécessaire pour l’Europe de relever quelques défis pour

mettre en place une relation équilibrée et complémentaire avec les Etats-

Unis. Pour cela, elle devra devenir une entité politique forte et se doter

d’une véritable politique étrangère.

Avant de clore cette partie sur les relations transatlantiques, nous allons

voir les implications de la guerre contre le terrorisme, notamment avec

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l’opposition de la France à la guerre en Irak, sur les relations franco-

américaines. Pour précision, nous ne donnerons qu’une vue d’ensemble

de ces implications.

C. La relation franco-américaine et la crise irakienne

Depuis la fin de la 2nd Guerre mondiale, et peut être bien avant, les

relations franco-américaines ont connu des hauts et des bas. A chaque

fois que la France n’était pas d’accord avec les Etats-Unis, elle l’a fait

savoir. Et cela a toujours agacé les Américains qui y voient une volonté

de s’affranchir. Quelqu’est pues être les divergences entre les deux pays,

ils sont toujours parvenus à les résoudre ou au moins à les atténuer. « Nos

divergences sont parfois crispantes, acides, explique un diplomate. Mais

quand cela va trop mal, nous sommes toujours capables de nous prendre

la main et de nous dire : est-ce vraiment sérieux ? Et on trouve une

solution. »134 Depuis la crise irakienne, Américains et Français ont du

mal à surpasser complètement leurs différents.

Comme nous l’avons déjà vu dans le Chapitre IV, la France s’était

vivement opposée à une intervention américaine en Irak. Elle se fera le

porte drapeau du « camp de la paix » et empêchera en quelque sorte le

cautionnement de cette intervention par l’ONU. Ce qui n’a pas été du

goût des Américains. A partir de là débute une campagne de

diabolisation de la France en Amérique.

Les Américains avancent que si se n’étaient pas eux « aujourd’hui la

France parlerait l’allemand ». Ils prétextent que c’est leurs "boys" qui

ont libéré la France de l’occupation allemande et, par conséquent, elle

leur doit reconnaissance. Cela n’est pas complètement faux. Mais il faut

savoir que cette libération était aussi une victoire et une ″libération″ pour

134 Mireille DUTEIL, « Diplomatie : une amitié houleuse », LE POINT, N°1515, 28 septembre 2001, p. 74

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l’Amérique, l’Europe et le monde entier. En outre, les Américains

n’étaient pas seuls dans cette affaire. La France et l’Amérique, en partie,

défendaient chacun ses intérêts en Irak. Et ces intérêts n’étaient pas les

mêmes. Delà, l’Amérique mécontente n’a ménagé aucun effort pour le

faire savoir à la France.

Au mois de mars 2003 la Chambre des représentants avait supprimé du

menu de ses cafétérias les ″French Fries″ pour les remplacer par des

"Freedom Fries" ("frites de la liberté"). Un représentant républicain du

Congrès, Bob Ney (président de la commission chargée de

l'administration de la Chambre des représentants), avait affirmé que la

mesure était « un effort petit mais symbolique pour exprimer le fort

mécontentement de nombreux membres du Congrès à propos des

décisions prises par [leur] soi-disant allié, la France»135.

Un boycott des produits français, par la population, a également été

constaté. Il affecter surtout les produits emblématiques de l'image de la

France, comme les vins et les fromages. Il faut reconnaître que si le

boycott était bien suivi, il aurait eu des répercutions assez considérables

sur les exportations françaises. Les Etats-Unis sont le 6ème client de la

France, avec plus de 26 milliards d'euros de biens et de services exportés

par an.

Les Américains n’avaient aucun intérêt à boycotter les produits français

car les entreprises françaises qui sont chez eux emploient des centaines

de milliers d’Américains et payent des sommes considérables d’impôts.

Si ces entreprises ne fonctionnent pas, c’est des emplois et des impôts de

moins. En outre, cela aurait pris assez de temps à la population

américaine pour trouver des produits de substitutions. Et rien ne dit qu’ils

allaient trouver mieux. En plus du boycott, certains américains, qui

135 « Pas de "French Fries" au Capitole! », RADIO CANADA, 11 mars 2003. Voir : http://www.radio-canada.ca/nouvelles/special/nouvelles/irak/200303/11/005-patriotisme-frites.shtml

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avaient payé des billets d’avions pour se rendre en France, avaient annulé

leurs voyages en guise de protestation à la position française dans la

crise.

Tout ce que nous venons de citer n’est rien par rapport à ce que les

animateurs vedettes des talk-shows et certains journalistes américains

disaient sur la France. Leurs propos ne peuvent être qualifiés autrement

que d’offenses. David Letterman, dans l’une de ses émissions très suivie

aux États-Unis mais aussi dans certains pays européens, affirmait : « La

dernière fois que les Français ont demandé des preuves, elles sont

arrivées dans les rues de Paris avec un drapeau allemand »136. Le

célèbre humoriste Dennis Miller, en arguant donner des conseils à W.

Bush, disais : « Je dis qu'il faut envahir l'Irak, puis la France, et installer

un pipe-line sous la tour Eiffel. Comme ça on aura le plus grand derrick

de la planète ! »137

Malgré toutes ces tentatives de punir ou de diaboliser la France, selon

Ulysse Gosset, des millions de gens sur le territoire américain étaient

sensibles aux arguments « des chevaliers Chirac et Villepin ». Mary

Mac-Grory, une journaliste du Washington Post, avait écrit : « Il y a

beaucoup d'Américains qui se surprennent à crier « Vive la France ! » et

à murmurer la « Marseillaise », en se retournant tout de même pour

vérifier si le ministre de la Justice, l'Attorney général, le très croyant

John Ashcroft, ne les entend pas... »138

Avant la guerre en Irak, Dominique de Villepin avait averti les Etats-

Unis en tenant ces propos : « L’option de la guerre peut apparaître a

priori la plus rapide. Mais n’oublions pas qu’après avoir gagné il faut

construire la paix. Et ne nous voilons pas la face : cela sera long et

136 Ulysse GOSSET, « Singes capitulards mangeurs de grenouilles », OUEST-FRANCE, mai 2003. Vous pouvez visualiser l’article à l’adresse internet suivante : http://dossiers.ouestfrance.fr/dossiers/irak_article.asp?iddoc=9216 137 ibidem 138 ibidem

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difficile, car il faudra préserver l’unité de l’Irak, rétablir de manière

durable la stabilité dans le pays et une région durement affectés par

l’intrusion de la force »139. Actuellement si on voit ce qui se passe en

Irak, on peut affirmer que les Français n’avaient pas complètement tort

de s’opposer à une intervention militaire contre le régime de Saddam

Hussein ; et que s’ils l’ont fait c’étaient, peut être aussi, pour éviter aux

Américains les difficultés qu’ils rencontrent aujourd’hui. L’Amérique a

du mal en Irak et il est probable que la France, dont elle se moquait hier,

vienne à son secours. La Russie qui comme la France c’était opposée à

l’intervention en Irak n’a pas connu le même destin dans ces relations

avec les Etats-Unis.

II. La guerre contre le terrorisme : une aubaine pour Moscou de

nouer un partenariat stratégique avec Washington, de mater la

rébellion tchétchène et d’apaiser les tensions au sujet des gorges

de Pankisi

Depuis le 11 septembre, la page de la Guerre froide semble

définitivement tournée, la Russie s’est vraiment rapprochée des Etats-

Unis et les deux pays se sont engagés dans une coopération ayant pour

credo, la guerre contre le terrorisme. Ils se sont également engagés dans

un nouveau partenariat stratégique. Résultat de cette « entente », les

Américains ferment les yeux sur la Tchétchénie et les Russes tolèrent la

présence américaine dans « l’étranger proche » de Moscou. Malgré cette

« entente », Russes et Américains restent opposés sur certaines questions

internationales.

139 Extrait de l’intervention de Dominique DE VILLEPIN, ministre des Affaires étrangères français, au Conseil de sécurité le 14 février 2003.

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A. Le nouveau « partenariat stratégique » entre Moscou et

Washington

Les attaques terroristes du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis ont donné

une impulsion aux efforts pour l'établissement d'un partenariat

stratégique entre la Russie et les Etats-Unis. Les Russes ont accepté de

céder face à certains sujets traditionnels de friction comme

l’élargissement de l’Alliance atlantique ou la défense antimissile. En

contrepartie les Américains s’engagent à soutenir l’économie de la

Russie, à financer son désarmement etc.

Le 13 décembre 2001, les Etats-Unis annoncent leur retrait du traité

ABM (Antiballistic Missile Treaty), clef de voûte à la dissuasion

nucléaire depuis 1972. Ce traité, interdisant tout système de défense

antimissile balistique, est jugé obsolète par les Etats-Unis qui veulent

désormais déployer un bouclier antimissile sur leur sol, face à la menace

d'Etats "hors-la-loi" soupçonnés de détenir l'arme nucléaire. Le retrait

américain du traité n’a pas compromis les relations bilatérales entre les

deux pays.

Au mois de mai 2002, les Etats-Unis et la Russie signaient à Moscou un

accord portant sur une réduction des deux tiers en dix ans de leurs

arsenaux nucléaires stratégiques. Le texte prolonge les deux traités

START (1991, 1993). Par cet accord, les deux pays s’engagent à ne

disposer, d’ici 2012, que de 2000 têtes nucléaires opérationnelles.

L’accord a été présenté comme le symbole d’une nouvelle relation

stratégique et d’un partenariat de portée historique, liquidant

définitivement l’héritage de la guerre froide.

Le 28 mai 2002 à Rome, au sommet OTAN/RUSSIE réunissant les 19

pays membres de l'Otan et la Russie, est avalisé de manière officielle la

création du nouveau Conseil OTAN-Russie. Il doit permettre des prises

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de décision communes en matière de guerre contre le terrorisme, de

gestion des crises, de défense, de non-prolifération des armes de

destruction massive et de contrôle des armements.

Au sommet du G8 à Kananaski les 26-27 juin 2002, Bush a annoncé un

budget de 20 milliards de dollars, pour le contrôle et le démantèlement

d’armes de destruction massive chimiques et nucléaires russes, y compris

les sous-marins nucléaires vétustes, et dans le cadre des accords russo-

américains de réduction en la matière.

Le 26 septembre 2002, par un accord de coopération gouvernementale

sur la lutte contre le trafic de drogue, le crime organisé et les réseaux de

blanchiment d’argent, les Etats-Unis ont prévu un versement de 1,9

millions de dollars à la Russie.

Au delà du partenariat stratégique, les Etats-Unis, au nom de la guerre

contre le terrorisme et par soucis de ménager la Russie, ont décidé de

fermer les yeux sur ce qui se passe en Tchétchénie. En échange, la

Russie accepte un « partenariat » pour régler des crises en Georgie, en

Azerbaïdjan et en Asie centrale. En d’autres termes, elle tolère les Etats-

Unis dans son arrière-cour. Russes et Américains s’étaient également mis

d’accord de mener « des efforts pour développer les vastes ressources

énergétiques de la Russie et de la région de la Caspienne ».

B. La guerre contre le terrorisme : une occasion pour

Moscou de mater la rébellion tchétchène et de lui priver sa

zone de replie en Georgie (les gorges de Pankisi)

1) La « benladénisation » du conflit tchétchène

La Tchétchénie, située dans le Nord-Caucase russe, le 1er novembre

1991 avait proclamé son indépendance. Le 11 décembre 1994 les troupes

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russes interviennent dans la République tchétchène. Dés lors débute une

guerre très sanglante (surtout pour les Tchétchènes) entre

indépendantistes tchétchènes et Russes. C’est la « première guerre de

Tchétchénie ». Elle s'est achevé en mai 1997 par un accord portant les

signatures du Président russe Boris Eltsine et du président tchétchène

Aslan Maskhadov. Le 27 janvier 1997, M. Maskhadov devient président

lors des premières élections libres, sous la surveillance d’observateurs de

l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). En

1999, à la suite d'attentats meurtriers qui ont endeuillé plusieurs villes de

la Russie, et qui ont été attribués aux indépendantistes tchétchènes,

l'armée russe intervient une fois de plus dans la république séparatistes.

Ce fut le début de la « seconde guerre de Tchétchénie » qui continue

jusqu’à présent. Cette guerre a été dénoncée par de nombreux pays,

notamment les Etats-Unis et les pays de l’Union européenne. Ces pays

accusent la Russie de ne pas respecter les droits de l’Homme en

Tchétchénie.

A la suite du 11 septembre, comme l’affirme Hélène Carrére

d’Encausse : « L’adhésion de Poutine à la lutte anti-terroriste des Etats-

Unis lui a permis d’inscrire la résistance tchétchène dans la catégorie

des mouvement terroristes, donc lui a laissé toute latitude pour la

briser»140. Moscou a réussi à faire passer les indépendantistes

tchétchènes pour des terroristes aux yeux de l’Occident. Maintenant, M.

Poutine a les mains libre en Tchétchénie grâce au soutien des

occidentaux et notamment celui des Etats-Unis. La prise d’otages à

Moscou, le 23 octobre 2002, va accentuer ce soutien.

Le président Poutine « répète à l’envi que le combat des indépendantistes

tchétchènes correspond à celui des islamistes d’Al Qaïda »141. Les

autorités russes ont toujours soupçonné Al Qaïda de soutenir les

140 Cité par Frédéric ENCEL et Olivier GUEZ, « La grande Alliance, de la Tchétchénie à l’Irak : un nouvel ordre mondial », p. 111 – 112. 141 Cité par Frédéric ENCEL et Olivier GUEZ, op. cit., p. 112.

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tchétchènes. Elles affirment, depuis des années, que le réseau terrorisme

fournissait aux islamistes tchétchènes des explosifs, des armes

automatiques et même des moyens informatiques. Le réseau de Ben

Laden, d’après Moscou, a acheminé en Tchétchénie plus de 10 millions

de dollar. La Russie et les Etats-Unis ont maintenant un même ennemi.

En septembre 2002, à la suite de la campagne afghane, Russes et

américains ont participé à des opérations armées communes et

conjointes, pour soutenir des troupes géorgiennes engagées dans les

gorges de Pankisi à neutraliser des éléments d’Al-Qaïda.

2) La Russie tolère la présence américaine en Georgie

dans l’espoir de priver les rebelles tchétchènes de

leur refuge des gorges de Pankisi

Trois acteurs géopolitiques se partagent le pays : le pouvoir géorgien

évidemment, croulant sous les difficultés économiques et politiques ; la

Russie, ancienne puissance tutélaire qui cherche à garder son influence ;

les Etats-Unis qui s’intéressent à la Transcaucasie comme acteur

privilégié dans les échanges pétroliers, mais également comme fenêtre

sur l’Iran et l’Irak.

Après leur indépendance, pour échapper à une influence de la Russie sur

leur Etat, les Georgiens se sont rapprochés de l’Occident : entrée au

Conseil de l’Europe, demande d’assistance à l’Union européenne, appel à

une intervention économique américaine dans les domaines culturel,

économique, militaire et politique, etc. Les Russes n’ont pas apprécié

cette attitude. Ils « se représentent les Georgiens comme un peuple bien

ingrat, lui qui bénéficia durant les dernières décennies soviétiques d’une

sorte de statut privilégié sinon en droit, du moins en fait : la République

autonome était alors la vitrine de l’URSS avec son niveau de vie plus

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élevé que la moyenne au sein de l’Empire, ses productions d’agrumes,

son secteur touristique balnéaire »142.

Dés le lendemain du 11 septembre, la Georgie offrait aux Etats-Unis son

espace aérien. Les Georgiens pensent que la Russie veut leur empêcher

de se constituer en Etat-nation viable. Ainsi lorsque Tbilissi a voulu sortir

de la Communauté des Etats indépendants (CEI), a accepté le tracé

américain du pipeline Bakou-Tbilissi-Ceyhan, a appelé les Américains à

l’aider à former une armée contre le terrorisme dans les gorges de

Pankisi, Moscou leur a mis la pression.

Les Russes affirmes que les gorges de Pankisi abritent des rebelles

tchétchènes. Ils ont maintes fois demandé aux autorités de Tbilissi de

leur permettre de passer par leur territoire pour prendre les séparatistes

tchétchènes à revers. Chose que la Georgie a toujours refusé. En début

2002, face à un nouveau refus de Tbilissi, M. Poutine ordonne une

intervention unilatérale qui sera empêchée grâce aux Américains. En

septembre de la même année, dans une lettre adressée au Secrétaire

général et au Conseil de sécurité des Nations unies, le président Poutine

accusait la Georgie de soutenir les rebelles tchétchènes. Il affirmait : « Le

succès de notre opération anti-terroristes en Tchétchénie a contraint les

terroristes survivants à se réfugier en Georgie où, grâce à la

complaisance des autorités, ils se sentent à l’aise et continuent à recevoir

des aides militaires et financières. Personne ne peut nier que ceux qui

sont impliqués dans les actes de terrorisme aux Etats-Unis et les

explosions d’immeubles en Russie se soient retranchés sur le territoire

géorgien »143. Il menaçait également de mener une intervention militaire

en Georgie « en conformité avec le droit international et la résolution

1368 du Conseil de sécurité de l’ONU adoptée en réponse aux actions

142 Frédéric ENCEL et Olivier GUEZ, op. cit., p. 224 143 Laurent NICOLET, « Vladimir Poutine menace de suivre en Georgie l’exemple américain », LE TEMPS (Genève), 18 septembre 2002, p. 8

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terroristes barbares commises le 11 septembre aux Etats-Unis »144. En

dehors de ces accusations et de ces menaces, les avions russes violaient,

de temps en temps, l’espace aérien de la Georgie à la recherche de

combattants tchétchènes.

Même avec les événements du 11 septembre et la présence de rebelles

tchétchènes liés à Al Qaïda sur le territoire géorgiens, les Etats-Unis se

sont toujours montrés hostiles à une intervention militaire de Moscou en

Georgie. Ils ont même envoyé des instructeurs militaires dans le pays

pour aider les autorités à lutter contre le terrorisme145. Moscou, en accord

avec Washington, a toléré le déploiement de ces soldats américains sur

son arrière-cour.

Selon Frédéric Encel, en dehors de la guerre contre le terrorisme, la

présence des Etats-Unis en Georgie est motivée par trois raisons :

défendre le Bakou-Tbilissi-Ceyhan (BTC), compléter l’encerclement

« amical » de la Russie et avoir une vue imprenable sur l’Iran et l’Irak.

Quoiqu’il en soit, il est incontestable que les Etats-Unis ont réussi une

percée assez importante en ″Asie russe″.

Si dans l’ensemble la Russie a bien coopéré avec les Etats-Unis sur

certains dossiers. Il en a été tout autre en ce qui concerne l’Irak et, à un

moindre degré, l’Iran.

C. La coopération dans la guerre contre le terrorisme n’a

pas fait disparaître les divergences russo-américaines

Comme nous l’avons souligné dans le Chapitre IV la Russie avait des

intérêts géopolitique et économique en Irak sous Saddam Hussein. Elle a

insisté sur une solution pacifique de la crise dans le cadre de l'ONU, et

144 Ibidem. 145 Cf. au Chapitre II

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s'est opposé fermement à la guerre. Le président Poutine avait condamné

avec des termes forts l'action militaire contre l'Irak et avait accusé les

Etats-Unis d’avoir violer le droit international ainsi que la Charte des

Nations Unies. « Tous les pays souverains ont perdu le sens de

sécurité », avait noté le président russe. Les Américains, de leur côté

avaient reproché à la Russie d'avoir vendu des armes à l'Irak. Ils avaient

envoyé des avions de reconnaissance près de l'espace aérien de la Russie

et bombardé un quartier qui se trouve près de l'ambassade russe à

Bagdad. Un acte que les Russes n’avaient pas du tout apprécié.

Les relations entre Moscou et Washington ont été très tendues lors de la

crise irakienne. Le président russe ira même jusqu’à dire que les relations

entre les deux pays ont rencontré la plus grave crise depuis la fin de la

guerre froide. Toutefois, la Russie étant consciente qu’elle a besoin des

Etats-Unis plus que ces derniers ont besoin d’elle, a tempéré ses ardeurs.

M. Poutine avait adouci ses critiques contre la guerre et avait même

affirmé qu'un échec des Etats-Unis n'était pas dans l'intérêt de la Russie.

L’Iran est considérée comme un « pays voyous » par les Etats-Unis. Le

président Bush, après le 11 septembre, l’a classé dans « l’Axe du mal » en

compagnie de la Corée du Nord et de l’Irak (sous Saddam Hussein). La

Russie est un allié traditionnel de l’Iran et personne n’ignore qu’elle vend

des armes à Téhéran. Les Etats-Unis reprochent à Moscou le transfert par

la Russie de technologies sensibles vers ce pays dans les domaines

nucléaire et balistique. Depuis le 11 septembre, Washington a accentué la

pression sur Moscou notamment en ce qui concerne l’aide fournie à

Téhéran pour la construction dans le sud du pays de la centrale nucléaire

de Boucher. En réponse aux Etats-Unis, tout en rejetant les soupçons, M.

Poutine a proposé de placer la centrale, qui devait être mise en route en

septembre 2003, sous un régime d’inspection internationale.

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En guise de conclusion, nous pensons, comme l’on déclarait si souvent

les deux pays, que Washington et Moscou doivent coopérer dans les

domaines tels que le maintien de la stabilité stratégique dans le monde, le

désarmement nucléaire, la prévention de la prolifération des armes de

destruction massive et la guerre contre le terrorisme. Les Russes et les

Américains ont beaucoup à gagner dans cette coopération. Les Russes

peut être beaucoup plus que les Américains.

Si cette coopération parvient à bien se mettre en place et perdure,

l’Amérique pourra ranger aux oubliettes les différents qui l’ont opposé à

l’ex-URSS puis à la Russie depuis la 2nd Guerre mondiale. Elle pourra

également se trouver un autre adversaire idéologique pour mettre en

exergue sa puissance. Cette adversaire pourrait être le monde musulman.

Tout porte à y croire depuis le 11 septembre.

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Chapitre 6 : Les implications de la

guerre anti-terroriste sur l’opinion

publique musulmane et sur les relations

Etats-Unis/Régimes proaméricains

Le monde musulman se sent visé à travers la guerre anti-terroriste. Aux

Etats-Unis, dans les mois qui ont suivi les attaques du 11 septembre, des

musulmans ont été massacrés, torturés et injustement arrêtés. Jusque là

les opérations militaire américaines menées dans le cadre de la guerre

contre le terrorisme n’ont visé que des pays musulmans (ce qui est tout à

fait logique car, étant donné que les Américains font la guerre au

terroristes islamistes ce n’est pas en Corée du nord qu’ils vont aller les

chercher). Il s’y ajoute que M. Sharon réprime l’Intifada palestinien sans

retenue (avec la bénédiction américaine selon les musulmans). Tout cela

fait qu’aujourd’hui l’opinion publique musulmane et très remontée contre

le "Grand Satan". Et ceci n’est pas sans conséquences sur les relations

entre les Etats-Unis et leurs pays alliés et amis du monde musulman.

I. Les implications de la guerre contre le terrorisme sur l’opinion

publique musulmane

La guerre contre le terrorisme a attisé l’anti-américanisme et un

sentiment d’injustice de plus en plus grandissant dans le monde

musulman. Ce sentiment d’injustice est aggravé par des sujets à

frustration datant bien avant le 11 septembre et pour lesquels les

musulmans estiment que l’Occident, et en particulier les Etats-Unis, est

directement ou indirectement impliqué.

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A. La guerre anti-terroriste attise l’anti-américanisme et

exaspère le sentiment d’injustice des musulmans

Les réactions des opinions arabes et musulmanes aux attentats du 11

septembre ont été mitigées et ambiguës. D’un côté, les musulmans ont

condamné l’acte du fait des milliers d’innocent qui y ont péri; de l’autre,

il y a eu une certaine fierté que des musulmans aient eu le courage de

s’attaquer aux puissants américains et de défendre leurs frères opprimés.

Selon Lahouari Addi, Ben Laden est présenté comme un « défenseur de

l’islam bafoué » dans le monde musulman et dans le monde arabe en

particulier. « Il y apparaît comme le justicier et le rebelle capable

d’organiser des opérations de représailles avec une précision militaire.

Il rappelle le héros musulman portant des coups mortels à l’adversaire,

en l’occurrence les USA, obligés à l’avenir de tenir compte des réactions

des musulmans dans le Proche-Orient. Certains n’hésitent pas à

revendiquer ses actions avec fierté, à exhiber son portrait et à écrire son

nom sur les murs, nom qui revêt à lui seul une signification

antiaméricaine tranchée »146. A cette élévation de Ben Laden à l’ordre de

« grand défenseur » du monde musulman contre l’oppresseur américain,

certaines personnes rajoutent que les attaques du 11 septembre ne sont

rien d’autre qu’une punition divine du fait du mal que cause les

Américains dans le monde par leur politique extérieure. Delà, vous

imaginez certainement la réaction américaine connaissant leur

attachement à la religion.

Depuis le 11 septembre, les musulmans ont le sentiment d´être

injustement catalogués comme des terroristes à cause d´une minorité

d´extrémistes. Dans les pays arabes, plus particulièrement, un sentiment

d'incompréhension, d'injustice et de colère vis-à-vis de l'Occident et en

146 Lahouari ADDI, « La perception des attentats du 11 septembre dans le monde arabe et musulman », CONFLUENCES MEDITERRANEE, N°40, Hiver 2001-2002. Voir à l’adresse : http://www.ifrance.com/Confluences/textes/40addi.htm

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particulier des Etats-Unis a grandi. Les populations accusent les Etats-

Unis, sous des prétextes sécuritaires et politiques, de dénigrer l'Islam.

Aux Etats-Unis, dans les premiers jours qui ont suivi le 11 septembre des

musulmans ont été persécutés non seulement par la population

américaine mais aussi par les autorités. Des mesures très controversées

ont été mises en place. Des milieux hostiles à l’islam en ont profité pour

faire l’amalgame entre islam et terrorisme comme le constate Abdel

Majid Al-Khoie, un dignitaire chiite irakien. Il affirme : « Les

événements du 11 septembre ont été utilisés par des milieux hostiles à

l´islam, bien connus en Occident, qui ont intérêt pour des raisons

politiques à faire des amalgames sur le plan des valeurs, des idées et de

la religion afin d´en tirer prétexte pour attaquer l´Islam et les pays

arabo-musulmans »147. Dans ce contexte du 11 septembre, des

restrictions dans la délivrance de visas pour se rendre aux Etats-Unis ont

été à maintes reprises constatées dans certains pays arabes et musulmans.

Ceux qui parvenaient à avoir ces visas, une fois arrivé à destination

étaient sujets à des fouilles exagérées, des délits de faciès, des insultes,

des regards soupçonneux au contrôle des passeports et autres.

Au sein de la communauté musulmane, aux États-Unis, un malaise s'est

installé du fait du lien établi entre les pirates de l'air, le Moyen-Orient, les

Arabes et l'islam. La communauté arabo-américaine et musulmano-

américaine s'est sentie visée et s'est subitement trouvée dans une position

très inconfortable.

En effet, cette communauté, dans les jours qui ont suivi les attaques, a été

contraintes de s’excuser pour des actes qu’elle n’avait pas commis et de

« jurer ouvertement fidélité et dévouement » à l’Amérique. Des lieux de

culte musulmans ont été attaqués, des ressortissants musulmans injuriés,

147 Christian CHESNOT, « Le monde arabo-musulman refuse les amalgames », RADIO FRANCE INTERNATIONALE (RFI), le 5 septembre 2002. Retrouvez l’article sur : http://www.rfi.fr/Fichiers/evenements/10septembre/islam.asp

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licenciés et dés fois même massacrés par la population. Pourtant, parmi

ces gens maltraités figuraient des Américains, originaires du Moyen-

orient, qui n’ont jamais mis les pieds dans cette partie du monde et ne

savent même pas parler l’arabe. Bref des gens qui sont nées et grandis

aux Etats-Unis et qui ne connaissent que les Etats-Unis.

« Le passage de l’US Patriot Act et les décisions politiques prises par le

ministère de la justice, le service d’immigration et de naturalisation et le

ministère des Finances ont créé un climat qui laisse croire que les gens

venus du Moyen-orient et de l’Asie du Sud sont des populations

particulières ne pouvant bénéficier des droits civiques garantis par la

Constitution. Cette politique a conduit [des centaines de] personnes en

détention, sans que leur nom ni les accusations retenus contre elles

n’aient été révélés. Plus de la moitié de ces détenus ont été déportés, des

milliers de résidents étrangers venus de pays arabes ont été interrogés

alors qu’une déclaration arbitraire (car fondée sur des preuves

confidentielles) affirmaient que certaines organisations religieuses ou

politiques soutenaient activement le terrorisme, en particulier celles

accusées d’avoir des liens avec les opposants à l’occupation par Israël

de la bande ouest de Gaza, ce qui légitime le blocage de leurs biens

financiers et la criminalisation de leurs membres.

Le Patriot Act II […] étend le pouvoir du gouvernement à retirer la

citoyenneté américaine, là encore sur une preuve qui reste confidentielle.

Ainsi, une personne mise en accusation peut se trouver privée de l’accès

aux cours de droit civil et aux protections légales déportée ou détenue

indéfiniment, jugée par un tribunal militaire et même exécutée »148.

Face à cette situation des musulmans en Amérique, des pays du Moyen-

Orient et des ONG de défenses des droits et des libertés ont émis de vives

148 Andrew SHRYOCK, « Les Arabes de Detroit et la "guerre contre le terrorisme" de l’Amérique : la remise en question de leur citoyenneté américain », HERODOTE, n° 109, 2e Trimestre 2003, p. 120.

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protestations. Les autorités américaines, craignant que la situation

déborde et en voulant ménager les pays musulmans amis qui étaient sous

pression de leurs populations, prirent un certain nombre de mesures pour

non seulement stopper la persécution des musulmans mais également

pour faire savoir au peuple américain, une fois de plus, qu’islam

n’équivaut pas à terrorisme.

Dans les jours qui ont suivi les attaques terroristes, le gouvernement avait

pris des mesures pour protéger les populations musulmanes sur le

territoire américain. Ainsi, dans un mémorandum paru deux jour après la

catastrophe, le bureau de l’Attorney général John Ashcroft prévenait que

« toutes menaces de violence ou de discrimination envers les Arabo-

Américains ou les Américains musulmans ou les Américains d’origine

sud-asiatique ne sont pas seulement immorales et antiaméricaines, mais

elles sont aussi illégales et seront traitées comme telles »149.

Le président Bush avait entrepris un certain nombre d’actions pour

rassurer le monde musulman, mais aussi ses alliés occidentaux, que la

guerre qu’il mène contre le terrorisme n’est pas une guerre contre l’islam.

Peu après les attaques terroristes, il a visité le Centre islamique de

Washington pour rencontrer les chefs musulmans américains et leur

fournir un message de tolérance et de solidarité. Il avait lancé le

“Friendship Through Education”, encourageant des enfants en Amérique

et des enfants dans des nations musulmanes à se relier par email.

L’objectif étant de leur permettre de mieux se connaître et de se

comprendre. Le 19 novembre [2001], au cours du mois de Ramadan, M.

Bush avait invité, des dirigeants politiques musulmans et des

ambassadeurs des nations musulmanes sur le sol américain à une rupture

du jeûne à la Maison Blanche. Le 17 décembre [2001], le Président avait

accueilli des enfants musulmans à la Maison Blanche en l'honneur de

l’Aïd el Fitr (fête de la fin du Ramadan). Il leur avait lu des histoires et

149 Mémorandum 01 408 du département de la Justice américain, 13 septembre 2001.

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leur avait fait des cadeaux pour la fête. Tout cela avait été une très belle

opération de charme en apparence. Mais pour autant le monde musulman

ne s’était pas rassuré, sa frustration avait augmenté et l’antiaméricanisme

de plus en plus important.

Cet anti-américanisme ne date pas d’aujourd’hui. Jusqu’aux terribles

événements du 11 septembre, il s’était fait moins apparent et les

dirigeants des pays musulmans ont pu le contenir sans une très grande

difficulté dans leurs Etats. Mais depuis le 11 septembre, les choses ont

bien changé. L’homme de la rue ne décolère pas contre la guerre au

terrorisme déclarée par Washington et dont il considère que l'islam est la

véritable cible. Les gouvernements du Moyen-Orient sont sur la

défensive et tentent de modérer leurs opinions publiques tout en

préservant une alliance stratégique souvent cruciale avec la première

puissance mondiale.

Les musulmans, la plupart d’entre eux et notamment ceux dans les pays

arabes, gardent une grande haine pour les Occidentaux et en particulier

pour les Américains pour des raisons bien antérieures au 11 septembre

comme nous l’avons souligné. Cela est dû en grande partie à un certain

nombre de questions pour lesquelles les musulmans se sentent humiliés

et injustement traités.

B. Les sujets à frustration

Parmi les questions qui révoltent le monde musulman et surtout arabe, il

y a : le conflit israélo-palestinien, l’Irak et la Tchétchénie (qui ne

concerne pas directement les Occidentaux). Pour beaucoup

d’observateurs, une réussite de la guerre contre le terrorisme passe

nécessairement par le règlement de ces problèmes notamment le conflit

israélo-palestinien.

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1) Le conflit israélo-palestinien

En 1948, l’Etat d’Israël a été créé par un plan des Nations Unies dans la

colonie de la Palestine qui se trouvait sous mandat britannique. Le plan

prévoyait également la création d’un Etat arabe à côté de l’Etat d’Israël.

L’idée était de permettre aux juifs, qui avaient été persécutés par le

régime nazi d’Hitler, d’avoir un territoire où ils pouvaient vivre et se

constituer en Etat-nation. Vu la façon dont le peuple juif avait souffert

lors de la 2nd guerre mondiale, l’idée était louable et toute personne

ayant du cœur était sensée l’accepter. Les Etats arabes de la région

n’étaient pas de cet avis. Au lendemain de la déclaration d'indépendance

de l'État juif, le 14 mai 1948 les armées de Transjordanie, d'Égypte et de

Syrie, aidées de contingents libanais et irakiens, entrent en Palestine : ce

fut le premier conflit israélo-arabe. L’Etat juif remportera le conflit.

« Mais tous les Etats arabes ont refusé de reconnaître l’existence

d’Israël et ont tenté de l’étrangler en décrétant un boycott économique et

en lançant des opérations sporadique de guérilla »150. La guerre de 1948

sera suivie de deux autres en 1967 et en 1973. Mais auparavant Israéliens

et Egyptiens s’étaient affrontés lors de la crise de Suez en octobre 1956.

La guerre de 1967 dite des "Six Jours", en raison de la durée des

opérations militaires proprement dites, c'est également soldée par une

écrasante victoire de l'armée israélienne. Israël avait quadruplé la

superficie de son territoire avec l'occupation de Jérusalem-Est, de la

Cisjordanie, de Gaza, du Golan et du Sinaï.

La guerre de 1973 ou guerre du Kippour est le dernier affrontement

militaire entre Israël et ses voisins arabes. Menée par surprise par les

arabes, la spécificité de l’opération a tenu à la percée, temporaire, que les

troupes égyptiennes et syriennes parvinrent à réaliser dans les lignes

israéliennes. Bien que suivie d'un succès militaire d’Israël, cette

150 Henry KISSINGER, « La nouvelle puissance américaine », p. 185

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provisoire "victoire" fut vécue, du côté arabe, comme la revanche des

humiliations subies en 1948 et 1967. Le président Egyptien Anouar el-

Sadate va user du prestige que lui a valu la guerre du Kippour pour

négocier la paix et récupérer ses territoires que l’Etat hébreu avait

conquis lors des conflits précédents. Mais la normalisation des relations

avec Israël fut très mal perçu par les islamistes et les pays arabes, qui

voyaient en Sadate un traître. Le 6 octobre 1981, tandis qu'il assistait à un

défilé militaire à l'occasion de la fête nationale, Sadate fut assassiné par

des soldats islamistes.

Les arabes n’ayant pas pu libérer la Palestine par des guerres

conventionnelles recourent maintenant au terrorisme. Depuis les années

60-70, la république d’Israël est soumise à des attaques terroristes

orchestrées par des mouvements radicaux palestiniens dont la plupart

sont financés par des Etats arabes ou musulmans. Aujourd’hui, le conflit

israélo palestinien et le point central de la frustration du monde

musulman et en particulier du monde arabo-musulman. Les arabes

affirment que la souffrance que l’Etat d’Israël fait subir au peuple

palestinien est cautionnée par les Etats-Unis. Ils se sentent humiliés par la

situation en Palestine. Ce qu’ils souhaitent maintenant, dans leur grande

majorité, c’est de voir la création d’un Etat palestinien, alors qu’hier ils

voulaient la disparition de l’Etat d’Israël. Chose impossible aujourd’hui

car Israël est devenue un grand Etat militaire avec à sa possession l’arme

atomique qui le protége de toute tentative d’anéantissement.

Les attentats du 11 septembre ont eu des conséquences négatives pour le

peuple palestinien. A la suite de ces attaques, les attentats des

mouvements palestiniens comme le Hamas, la Brigade des Martyrs d'Al

Aqsa et autres, ayant pour objectif la libération du territoire palestinien,

ont été tout de suite présentés par Ariel Sharon, le premier ministre

israélien, comme des actions terroristes. Il estime que sa lutte est la

même que celle des Américains. Ce qui lui a valu sans mal le soutien

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inconditionnel de Washington. Aujourd’hui, Israël s'est placée à l'avant-

garde du front anti-terroriste mondial. La lutte du peuple palestinien est

en mauvaise posture, surtout au sein de l'opinion publique américaine.

Avec les événements du 11 septembre, M. Sharon a les mains libres dans

le conflit qui l’oppose aux palestiniens et il ne se prive pas de l’occasion

pour mater la résistance. Face à cette situation, aujourd’hui plus qu’hier,

les musulmans ressentent un sentiment d’injustice et sont révoltés par le

soutien inconditionnel des Etats-Unis à Israël qui opprime les

Palestiniens selon eux. L’opinion publique musulmane jusque là craintive

de la répression des pouvoirs politiques commence à élever la voix contre

le terrorisme d’« Etat d’Israël » mais aussi contre la guerre et

l’occupation de l’Irak par les troupes américano-britanniques. Les Etats-

Unis concentrent aujourd'hui leurs efforts sur le règlement de la situation

au Proche-Orient. Mais leurs récentes tentatives ne suffisent visiblement

pas à enrayer l'engrenage terroriste.

2) L’affaire irakienne

Pour ce qui est de l’Irak la frustration du monde musulman date de la

première Guerre du Golfe. Ensuite, à la fin de la guerre, se seront les

sanctions économiques imposées au pays et qui ont durement éprouvées

la population. Enfin, c’est la dernière guerre et l’occupation américano-

britannique.

a) La Guerre du Golfe

Avec le conflit israélo-palestinien, c’est la question irakienne qui

cristallise et exacerbe toutes les frustrations du monde arabo-musulman.

Le problème de l’Irak ne date pas de la récente crise. Elle remonte de la

première guerre du Golfe au début des années 90. Ce conflit à servi de

marketing à Al Qaïda.

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Le 2 août 1990, l’Irak de Saddam Hussein envahissait le Koweït. L'émir

al-Sabbah et son fils gagnent l'Arabie Saoudite. Le royaume des Saoud

n’était pas à l’abri d’une invasion des forces irakiennes. C’est pour cette

raison que les autorités ont demandé la protection des Etats-Unis. Les

Américains conscients du danger que représentait la mainmise de l’Irak

sur prés de 50% des réserves de pétrole mondiale (l'Arabie Saoudite

possède à elle seule plus de 25 % des réserves mondiales de pétrole,

l'Iraq et le Koweït réunis pourraient disposer de près de 20 % de ces

mêmes réserves) acceptent et décident de déloger Saddam Hussein de

l’émirat du Koweït. Pour cela, une coalition internationale d’une grande

variété de race, de religion, de culture et d’idéologie politique s’est

formée autour des États-Unis. Le 17 janvier 1991, après l’expiration de

l’ultimatum fixé par les Nations Unies à l’Irak pour se retirer du Koweït,

l’opération « Tempête du désert » débute. En un peu plus d’un mois,

après le début de l’opération, l’Irak succombe. Bilan : 200 morts du côté

de la coalition; 100 000 soldats irakiens périssent, 300 000 sont blessés et

des dizaines de milliers de civils meurent.

Lors de la crise, remarquant que la rue arabe et musulmane était

largement contre la guerre (contrairement à leurs dirigeants), le président

irakien avait tenté de gagner leur soutien. Bagdad affirmait mener une

guerre des pauvres contre les riches, thème qui touche particulièrement

les masses arabes défavorisées. Le raïs irakien avait également appelé

tous les Arabes à la "guerre sainte" (le djihad) pour libérer La Mecque

lieux saints de l'islam à proximité de laquelle étaient présentes des forces

américaines (des non-musulmans). Cette présence américaine, en partie,

a favorisé la création d’Al Qaïda par Oussama Ben Laden.

b) Les sanctions économiques imposées à l’Irak

par la communauté internationale après la

guerre du Golfe

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Juste après l’invasion du Koweït par l’Irak, les Nations Unies avaient

décidé de mettre en place des sanctions économiques contre le pays.

L’objectif était non seulement d’obliger à S. Hussein de se retirer du

Koweït mais aussi de l’affaiblir économiquement et financièrement avant

une opération militaire ou avant qu’il n’utilise ses biens pour s’acheter

des armes. Cet acte des Nations Unies rentrait dans le cadre de la logique

de sa Charte qui recommande de mener des actions non militaires, avant

toute action militaire, contre tout pays ayant menacé la paix et la stabilité

du monde. L’ONU adoptera la résolution 661.

Cette résolution obligeait à tous les Etats d’interrompre leurs relations

commerciales avec l’Irak et leur ordonnait de bloquer les avoirs irakiens

et koweitiens à l’étranger. Elle avait été votée à l’unanimité par les

membres du Conseil à l’exception de Cuba et du Yémen qui s’étaient

abstenus. Prés de trois semaines après l’adoption de cette résolution, plus

précisément le 25 août 1990, pour faire respecter l’embargo et le boycott,

le Conseil adopte une autre résolution (Résolution 665) autorisant la mise

en place d’un blocus, c’est à dire l’usage de la force contre toute

personne ou Etat qui violerait les sanctions.

L’embargo et le boycott, qui frappait l’Irak, étaient totaux et portaient sur

les domaines suivants :

le domaine financier : avait pour but non seulement de bloquer les

avoirs de l’Irak pour l’affaiblir financièrement mais aussi

d’empêcher à Saddam Hussein de mettre la main sur les avoirs

koweitiens ;

le domaine pétrolier : les exportations irakiennes dépendaient à

plus de 90% du pétrole. Donc on a cru que si on leur privait de

ces exportations, cela les obligerait à se plier à la volonté de la

Communauté internationale ;

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le domaine alimentaire : on interdisait de livrer à l’Irak des

céréales, fruits, légumes, viandes etc. L’objectif était d’affamer la

population pour qu’elle se soulève contre le régime ;

le domaine industriel : suspension des livraisons de pièces

détachées nécessaires à la maintenance des usines irakiennes et

des unités d’extractions de pétrole ;

le domaine militaire : interdiction de livrer des équipements

militaires à l’Irak.

Selon M. H. Labbé, vers la fin de l’année 1990 début 1991, « les

sanctions avaient interrompu plus de 90% des importations et plus de

97% des exportations [et] […] privaient Saddam Hussein de 1,5 milliard

de dollars par mois »151. Malgré tout, à l’exception de la libération des

otages occidentaux, les Nations Unies n’ont pas atteint leurs objectifs, à

savoir : le retrait de l’Irak du Koweït et la restauration du gouvernement

koweitien. Finalement, il a fallu l’intervention militaire du 17 janvier

1991 pour voir la réalisation de ces objectifs.

A la fin de l’intervention militaire, la résolution 687 avait reconduit les

sanctions contre l’Irak pour l’obliger à se désarmer et à stopper son

programme nucléaire. Cette résolution était moins sévère que la

précédente car elle « prévoyait un système complexe mais souple, pour la

levée des sanctions. »

Face aux images chocs de la situation alimentaire et sanitaire de la

population irakienne, dans une tentative d’assouplir les sanctions, le

Conseil de sécurité adopte la résolution 986 du 14 avril 1995 qui en

principe permettait à l’Irak d’échanger du pétrole contre de la nourriture

d’où l’appellation « Programme pétrole contre nourriture. »

151 Marie-Hélène LABBE, « L’arme économique sur les relations internationales », p. 87

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Les sanctions économiques contre l’Irak, ont certes permis d’asphyxier

son économie et d’affaiblir son armée, mais elles n’ont pas pu obliger

Saddam Hussein de quitter le Koweït, provoquer un soulèvement

populaire contre son régime ni même changer le comportement du raïs.

Par contre, elles ont réussi à exacerber un sentiment d'injustice chez les

musulmans et chez les arabes en particulier du fait de leurs effets sur la

population irakienne qui a été très éprouvée.

Aujourd’hui malgré la levée des sanctions économiques, l’opinion du

monde musulman se sent plus que jamais humilié du fait de

l’intervention américano- britannique en Irak en mars 2003, mais aussi de

l’occupation qui n’est rien d’autre aux yeux des musulmans qu’un néo-

colonialisme. L’Irak est devenue aujourd’hui le principal front des

islamistes radicaux. Et il est à craindre qu’elle devienne pour les Etats-

Unis l’Afghanistan de l’URSS.

Pour clore cette sous partie sur les implication de la guerre contre le

terrorisme sur l’opinion musulmane, il faut noter que la situation en

Tchétchénie a également fait naître chez bon nombre de musulmans un

sentiment de mécontentement à l’égard de l’Occident bien que celui ci ne

soit directement lié à cette affaire. Avant le 11 septembre, les musulmans

reprochaient aux occidentaux de ne pas faire assez de précision sur la

Russie pour mettre fin aux exactions de l’armée russe en Tchétchénie.

Après le 11 septembre, ils leur reprochent (notamment aux Américains)

d’avaliser la « brutalité » de Moscou à l’encontre des musulmans de la

Tchétchénie au nom de la guerre contre le terrorisme.

Depuis les événements du 11 septembre, revendication assumée

publiquement ou non et rumeur indiquent l’état d’esprit de la rue arabe et

musulmane où l’antiaméricanisme des masses met en difficulté les

positions modérées des dirigeants, dont le seul souci est de durer avec

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l’appui encombrant mais néanmoins indispensable des pays occidentaux

et en particulier des Etats-Unis.

II. Les implications de la guerre contre le terrorisme sur les

relations Etats-Unis/Régimes proaméricains

Nous n’irons pas jusqu’à dire que le 11 septembre a totalement

bouleversé les relations entre les Etats-Unis et ses amis du monde

musulman, mais il est sûr qu’il les a remis en cause. Avec l’Arabie

Saoudite, elles sont très tendues. L’Egypte conteste de plus en plus les

décisions américaines : concernant l’Irak, le conflit israélo palestinien ou

encore les projets américains au Moyen-Orient. Toutefois, certains pays,

comme la Jordanie et le Pakistan, ont saisi l’occasion que leur offrait le

11 septembre pour renforcer ou pour améliorer leurs relations avec

Washington.

A. Les implications de la guerre contre le terrorisme sur les

relations Etats-Unis/Arabie Saoudite

L’Arabie Saoudite entretient de bonnes relations avec les Américains et

cela date de l’époque du président Franklin D. Roosevelt. Ces relations se

sont renforcées avec la Guerre du Golfe dans les années 90. Mais depuis

le 11 septembre 2001, elles sont très tendues.

1) L’historique des relations Etats-Unis/Arabie

Saoudite

L’Arabie Saoudite, dirigée par la famille Saoud, est une monarchie

absolue dont les fondements reposent sur le Wahhabisme. Le

Wahhabisme est une doctrine fondée par Abdul Wahhab (1720-1792),

qui épousa une des filles de Mohamed ibn Saoud. Cette doctrine est

censée être celle des "salafi" (successeurs de Mahomet), les plus

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fantastiques conquérants de toute l'histoire humaine. La plupart des

mouvements terroristes islamistes se réclament d’elle.

Elle interdit la mixité, le cinéma, la musique et le tabac. Elle impose le

port de la barbe aux hommes et celui du "djelbab" (voile recouvrant le

corps et le visage), ou au moins de "l'abaya" (vêtement ample cachant les

formes du corps), aux femmes. Tout ce qui s'oppose à cet islam,

sévèrement codifié à partir d'une lecture littérale des textes coraniques,

est considéré comme "bidâa" (invention humaine), et donc contraire à la

charia (loi divine). Pour cette idéologie qui fonde aujourd'hui l'islam

politique, la souveraineté populaire ne peut s'opposer à celle de Dieu,

telle que définie par le Coran et la Sunna (ensemble de textes juridico-

religieux basés sur les actes et les paroles du Prophète). Au nom de cette

conception de la société, la démocratie est "kofr" (péché) et les libertés

illicites. La société doit être dirigée par un "majliss echoura" (conseil

consultatif) composé d'oulémas (docteurs de la foi). L'islamisme ignore

l'Etat-nation qu'il considère comme une hérésie et défend l’Oumma

(communauté des croyants) telle qu'elle existait au temps du Prophète

(PSL). Les Wahhabites prônent le "tahrib" (contrainte) pour imposer

l’islam, tandis que les musulmans modérés sont pour l’"etabligh"

(persuasion).

En 1744, Mohamed Ibn Saoud et Mohamed Ibn Abdul Wahhab avaient

signé un pacte. « Cet accord instituait une alliance entre les religieux et

le pouvoir politique, mais établissait une séparation entre les affaires de

l’Etat, dont la famille Saoud avait la charge, et la religion, laissée aux

mains de l’establishment religieux »152. Ceci explique l’importance et

l’influence du Wahhabisme dans le royaume.

En dehors du Wahhabisme, l’Arabie Saoudite est réputée pour son « or

noir ». En effet, le royaume est le premier exportateur mondial, et le 152 Cité par Alain GRESH, « Lendemain de "Victoire" : les grands écarts de l’Arabie Saoudite », MONDE DIPLOMATIQUE, juillet 2003, p. 16 et 17.

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deuxième producteur de pétrole, après la Russie et devant les États-Unis.

Il possède 25% des réserves mondiales de pétrole prouvé. C’est surtout

grâce à ce pétrole qu’il a pu nouer des liens avec les Etats-Unis grand

consommateur de la matière.

Les bases de la relation Etats-Unis/Arabie Saoudite ont été jetées dans les

années 40 entre le roi Ibn Saoud, fondateur du royaume dans les années

30 et le président américain, Franklin D. Roosevelt. A partir de là, se

dessine une alliance à long terme, fondée sur de solides intérêts

communs. Ibn Saoud compte sur les Etats-Unis pour protéger l’intégrité

du royaume et, en contrepartie, les Etats-Unis pouvaient profiter de

l’immensité des réserves saoudiennes pour assurer leurs

approvisionnements. Toutefois, il serait malveillant de limiter l’alliance

américano-saoudienne à un échange "sécurité contre pétrole". L’Arabie a

occupé, durant toute la guerre froide, une place particulière dans le

dispositif antisoviétique, finançant des mouvements aussi peu musulmans

que l’UNITA en Angola ou la Contra au Nicaragua. Elle jouera un rôle

pivot dans l’aide aux moudjahiddins afghans et contribuera grandement à

la défaite de Moscou dans les années 1980. Mais l’effondrement de

l’URSS a fait perdre à l’Arabie une partie de son rôle. Elle a également

joué un grand rôle dans la tentative des occidentaux d’isoler le raïs

égyptien Nasser dans les années 50 - 60, et dans celle des Américains

d’isoler le régime islamiste iranien de Khomeiny.

A l’époque du communisme, l’argent saoudien a servi à lutter, au sein

des sociétés arabo-musulmanes, contre la montée en puissance des partis

marxisants et autres mouvances nationalistes laïques tout au long des

années 1950-1970153. En 1979, avec l’arrivée du régime islamiste de

Khomeiny au pouvoir et l’invasion de l’Afghanistan par l’armée

soviétique, américains et saoudiens ont estimé qu’ils était plus que jamais

nécessaire de renforcer leur partenariat pour faire face à ces périls. 153 Cf. à l’ouvrage de Frédéric ENCEL et Olivier GUEZ, « La Grande Alliance de la Tchétchénie à l’Irak : un nouvel ordre mondial », p. 58

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Selon Ali Laïdi, la politique étrangère des Etats-Unis dans le Golfe

reposait sur ce qu’on a appelé la « Théorie des piliers »154. Le pilier

politique en Iran et le pilier financier en Arabie Saoudite. Avec la chute

du Shah d’Iran, le premier pilier avait cédé et en plus le nouveau régime

était très hostile aux Américains. Washington se devait de revoir sa

politique dans la région.

L’arrivée de Khomeiny représentait également un danger pour le régime

des Saoud. Khomeiny avait manifesté sa volonté d’exporter sa révolution

islamique chiite155. Or autour des frontières de l’Arabie Saoudite sunnite,

de fortes minorités chiites pouvaient se laisser gagner à la tutelle du

grand frère persan, du Sud irakien à la pétromonarchie de Bahreïn en

passant par les Zaïdites du Yémen156.

Face à cette situation, l’Arabie Saoudite demande une meilleure

protection des Etats-Unis. « Cette assistance est formalisée dans le cadre

de l’US Central Command qui fait de la région une zone hautement

stratégique pour les Etats-Unis. Dorénavant, le contrat entre Saoudiens

et Américains est clair : les premiers se chargent de la sécurité militaire

du royaume, tandis que les seconds doivent renforcer leur influence dans

le monde arabo-musulman. Washington donne ainsi son aval à

l’expansion du Wahhabisme. Objectif : contrer la concurrence religieuse

des nouveaux maîtres de Téhéran grisés par le succès de leur révolution.

Il est vrai que l’Iran est un challenger de taille. Le pays possède, lui

aussi, une manne pétrolière qu’il peut mettre au service de son

154 Ali LAÏDI, « Le Jihad en Europe : les filières du terrorisme islamiste », p. 64 155 Le Chiisme est une branche minoritaire de l'Islam qui regroupe environ 10% des musulmans de par le monde. Les chiites sont issus d'une division survenue au VIIème siècle entre partisans d'Ali, cousin et gendre du Prophète, et partisans du Calife Mouawiya, le fondateur de la dynastie Omeyyade, qui n'avait aucun lien de parenté avec Mohammed. Les chiites estiment que la succession du Prophète doit légitimement être attribuée à un descendant de la lignée de Ali. Cinq pays arabes ont une partie importante de leur population qui se rattache à l'une ou l'autre des branches du Chiisme: l'Irak (+ 50 %, Duodécimains), Bahreïn (+ 50 %, Duodécimains), le Liban (25% environ, Duodécimains), Oman (60%, Kharijites) et le Yémen (55 % environ, Zaydites). Le chiisme est hérétique aux yeux des sunnites. 156 Cf. à l’ouvrage de Frédéric ENCEL et Olivier GUEZ, op. cit., p. 59

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rayonnement extérieur »157. Pour contrer la concurrence de Téhéran,

Riyad va investir, à travers le monde musulman, des milliards de dollars

dans les mosquées, les organisations humanitaires islamiques, les

mouvements politiques (islamistes) et autres. Les Saoudiens ont pratiqué

« la politique du chéquier ; une politique à courte vue qui sèmera les

graines de l’islamisme radical »158.

En décembre 1979, l’URSS intervient en Afghanistan pour aider le

régime communiste afghan à se maintenir au pouvoir. Chose qui n’a pas

plu aux Etats-Unis. En guise de protestation, comme l’URSS importait

une grande partie de son blé des Etats-Unis, les Américains décrètent un

embargo contre elle. Malheureusement, cet embargo n’a pas réussi et

s’est même répercutée sur les Etats-Unis. Ne pouvant pas intervenir

directement dans l’affaire, les autorités américaines décident de se servir

de l’Arabie Saoudite, mais aussi du Pakistan, pour monter et financer une

rébellion contre les soviétiques. Le royaume wahhabite investira des

millions de dollars dans le « djihad » qui a opposé les moudjahiddines

afghans et les soviétiques. De nombreux ressortissants saoudiens

participeront au conflit. Et c’est de là qu’est née Ben Laden qui, à la suite

du retrait soviétique de l’Afghanistan, a jugé nécessaire avec ses

compagnons de continuer le djihad qu’ils avaient commencé avec l’aide

des Etats-Unis. Maintenant l’ennemi c’est l’Amérique qui s’est installé

sur les « Lieux saints » de l’Islam, et le régime des Saoud qui a permis

cette installation.

Le déploiement en Arabie Saoudite d’environ 4 500 soldats américains

après la guerre du Golfe de 1990-1991 a été très contesté par une partie

de la population saoudienne et surtout par les islamistes radicaux. C’est

cette présence militaire d’« infidèles sur les Lieux saints de l’Islam » qui

a le plus poussé Ben Laden à mettre en place Al Qaïda. L’une des

objectifs majeurs de l’organisation est de bouter les militaires américains 157 Ali LAÏDI, op. cit., p. 64 158 Ali LAÏDI, op. cit., p. 65

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hors de l’Arabie Saoudite. C’est également cette présence militaire qui a

coupé les liens entre Ben Laden et la famille royale et lui a valu la

destitution de sa nationalité saoudienne.

Critiquée verbalement au début, la présence américaine va être

combattue violemment par les islamistes. Le 13 novembre 1995, un

attentat est perpétré contre un immeuble de la Garde nationale

saoudienne, abritant des conseillers militaires américains, à Riyad. Bilan

de l’attaque 7 morts. L’année suivante, plus précisément le 27 juin 1996,

un attentat à la voiture piégée frappe la base américaine d’El Khobar,

prés de Dahran. Bilan environ 19 morts et plus de 500 blessés. Ce type

d’action contre les Américains se poursuivra en Arabie Saoudite mais

aussi dans certains pays arabes comme le Yémen et le Soudan.

Comme vous l’avez constatez, l’Arabie Saoudite et les Etats-Unis, dans

leurs relations de complicité, ont largement contribué au lancement et à

l’éclosion des mouvements islamistes. Ces mouvements qu’ils

manipulaient hier pour arriver à leur fin se sont aujourd’hui retournées

contre eux et ont jeté le trouble dans leurs bonnes relations d’antan.

2) Les relations américano-saoudiennes depuis le 11

septembre : des relations houleuses

Après les attentats du 11 septembre, le FBI a découvert que 15 des 19

pirates de l'air directement impliqués étaient d'origine saoudienne. Il a été

découvert que l’argent qui servait à financer Al Qaïda provenait en

grande partie du Royaume Wahhabite. Les services de renseignement

américains ont découvert que de grandes personnalités du royaume

(banquiers, hommes d’affaires etc.) finançaient le réseau de Ben Laden à

travers des ONGI caritatives. Il semblerait également que des membres

de la famille royale sont impliqués dans le financement d’Al Qaïda.

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Depuis le 11 septembre et la découverte des liens entre Al Qaïda et

l’Arabie, les Etats-Unis font une forte pression sur les Saoudiens pour

qu’ils coopèrent dans la guerre contre le terrorisme, notamment dans la

lutte financière. Ils leur demandent également de prendre des mesures

vigoureuses contre les islamistes radicaux et ceux qui les soutiennent sur

leur territoire [le territoire saoudien]. Il faut le reconnaître, cela n’est pas

une simple affaire pour les Saoudiens car ils se trouvent devant un

dilemme. Ils ont le choix entre soutenir pleinement les Etats-Unis dans

leur lutte et s’aliéner leur opinion publique ; ou ne pas le faire et s’attirer

la colère américaine. Pour le moment, les Etats-Unis estiment que

l’Arabie ne coopère pas assez.

Au mois de septembre 2001, l'Arabie a rejeté une demande des Etats-

Unis d’utiliser leurs bases aériennes sur le sol saoudien pour mener des

frappes contre les taliban et le réseau d’Oussama Ben Laden Al Qaïda.

La coopération du régime des Saoud aux enquêtes sur les réseaux

finançant Al Qaïda et à leur démantèlement a été jugée timide et

manquant de conviction par Washington. Toutefois, selon Alain Gresh,

les Saoudiens ont coopéré avec les Etats-Unis sur Al-Qaïda et,

notamment, sur son financement, en conformité avec les différentes

décisions de l’ONU. La preuve en est qu’un décret gouvernemental

oblige désormais toutes les organisations caritatives saoudiennes à

transmettre au ministère des affaires étrangères le détail de chaque

intervention à l’étranger avant de l’entreprendre159.

Comme dans l’affaire afghane, Riyad avait refusé que les bases

américaines sur son territoire servent de rampe de lancement aux

opérations en Irak. Mais d’après certaines personnes, les Saoudiens ont

secrètement coopéré avec les Américains pour chasser Saddam Hussein

du pouvoir. La base Prince Sultan a servi de centre de commandement de

toutes les opérations aériennes et que parallèlement, des troupes d’élite se 159 Alain GRESH, « ARABIE SAOUDITE : Coup de froid sur les relations avec Washington », LE MONDE DIPLOMATIQUE, juin 2002, p. 14

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sont installées sur les bases d’Arar et de Tabouk, dans le nord-ouest du

pays, d’où elles ont accompli des missions à l’intérieur de l’Irak160.

« Jamais nous n’aurions pu mener la guerre contre l’Irak comme nous

l’avons fait sans l’aide de l’Arabie »161, commente un diplomate

américain.

Les attentats du 11 septembre ont beaucoup contribué à ternir l’image de

l’Arabie Saoudite aux yeux de l’opinion publique américaine.

Aujourd’hui certaines grandes personnalités de l’administration Bush

estiment que l’Allié saoudien n’est plus digne de confiance et qu’on doit

l’obliger, bon gré mal gré, à coopérer entièrement. Ayant vite compris

que les attaques avaient terni ou allaient ternir son image, les autorités du

royaume entreprirent des « opérations de charme ».

Le prince Al-Walid Ben Talal, neveu du roi Fahd, avait proposé d’offrir

10 millions de dollars à la ville de New York, et plus précisément aux

familles des secouristes emportés par l’écroulement des « Tours

jumelles ». Le maire de New York, Rudolph Giuliani, avait refusé l’offre.

Par la suite la famille royale avait entrepris d’acheter, par dizaines, des

pleines pages dans les grands quotidiens américains (notamment New-

yorkais) pour y rappeler la qualité de l’ancienneté des relations

chaleureuses entre les sociétés saoudienne et américaine, et condamner

encore les attentats162.

Toujours dans l’optique de redorer son blason, l’Arabie Saoudite par

l’intermédiaire de son prince héritier Abdallah avait proposé, en février

2002 lors d’un entretien accordé à une télévision américaine, un plan de

paix israélo-palestinien. La proposition s'articulait autour d'une

"normalisation complète" des relations entre Israël et les pays arabes, en

échange d'un retrait des troupes israéliennes de tous les territoires

160 ibidem 161 ibidem 162 Frédéric ENCEL et Olivier GUEZ, op. cit., p.74

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palestiniens qu'elles occupent depuis 1967. Certains ont vu dans ce plan

un moyen d’apaiser les esprits critiques américains de l'Arabie Saoudite

et pour les empêcher de s'attaquer aux tensions intérieures du royaume.

Pour être effective, l'initiative devait être avalisée par les membres de la

Ligue arabe au Sommet de Beyrouth, les 27 et 28 mars 2002. Finalement,

elle restera sans suite. Et c’était prévisible au vu de la réaction de certains

pays arabes à l’annonce du plan. Les autorités égyptiennes considéraient

l’initiative comme une simple conversation. La Libye avait elle offert sa

propre proposition, censée être plus "globale et complète". Le Hezbollah

par l’entremise de son leader, Mohammed Fadlallah, l’avait définit

comme la soumission des Arabes. Enfin, la Syrie exigeait, pour

l’accepter, la garantie que ses intérêts au Golan seraient protégés.

Cette « offensive de charme » saoudienne avait atténué les critiques

américaines mais n’avait pas fait disparaître les soupçons et la méfiance à

l’égard du royaume. Certaines personnes à Washington affirmaient haut

et fort que l’Arabie Saoudite ferait mieux de mener des réformes internes

et de s’ouvrir à la démocratie pour une meilleure poursuite de ses

relations avec le monde occidental en général. Une frange de la

population saoudienne, notamment des opposants à la famille royale et

certaines minorités du royaume, étaient favorables à l’idée.

Les Etats-Unis ont également mis la pression sur certains de leurs alliés

musulmans, comme l’Egypte, le Pakistan, la Jordanie etc., pour qu’ils

coopèrent dans la guerre contre le terrorisme. En plus, comme avec

l’Arabie Saoudite, Washington avait estimé qu’il était temps pour ces

pays de s’ouvrir à la démocratie (même si on connaît le danger que cela

représente pour eux dans certains pays comme le Pakistan par exemple).

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B. Les implications de la guerre contre le terrorisme sur les

relations Etats-Unis/Autres régimes proaméricains et les

desseins américains au Moyen-Orient depuis le 11

septembre

Outre l’Arabie Saoudite, les relations des Etats-Unis avec certains de

leurs alliés musulmans ont été bien affectées par les événements du 11

septembre : c’est le cas de l’Egypte par exemple. Toutefois certains pays

ont su, par opportunisme ou par contrainte, profiter de l’occasion pour

améliorer ou pour renforcer leurs relations avec Washington à leurs

risques et périls : c’est le cas de la Jordanie et du Pakistan. Mais la

Jordanie depuis quelques temps commence à élever la voix pour

contester le projet américain de Grands Moyen-Orient (GMO). Projet

faisant partie des desseins américains dans cette région pour s’attaquer

aux conditions qui favorisent le terrorisme.

1) Les relations américaines avec les autres régimes

proaméricains du monde musulman : Egypte,

Jordanie et Pakistan

a) Egypte/Etats-Unis : des relations éprouvées

par la guerre anti-terroriste

L’Egypte est l’un des Etats arabes les plus important,

démographiquement parlant. C’est également l’un des Etats au Moyen-

Orient qui entretient le plus de bon rapport avec Washington mais aussi

avec l’Etat hébreu. Il se présente comme un Etat musulman modéré et se

targue d'être à l'avant-garde de la lutte contre l'islamisme extrémiste. En

dehors d’Israël, le régime du président Moubarak est celui qui reçoit la

plus forte aide financière américaine au monde. Il reçoit 2 milliards de

dollars par an. Cette aide contribue énormément à la survie du régime.

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Depuis le 11 septembre 2001, les relations entre les deux amis se

trouvent éclipsées. Cela est plus dû à la divergence de point de vu sur

certains grands dossiers proche-orientaux. Parmi eux : la question

palestinienne, l’Irak et le projet du « Great Middle East » (Grand Moyen-

Orient ou GMO).

Dans le dossier palestinien, l’Egypte est plus que concernée, non

seulement par solidarité avec les Palestiniens, mais aussi pour des raisons

de sécurité. Gaza se trouve à ses frontières et il faudra du doigté pour

éviter des troubles potentiels. Pour ce qui est de l’Irak, l’Egypte s’était

opposée à une action militaire contre le régime de Bagdad. Ce refus

pouvait se comprendre pour quelques raisons : d’abord du fait que la

presque totalité des pays musulmans était contre la guerre, ensuite parce

que M. Moubarak ne voulait pas s’attirer la foudre de l’opinion publique

égyptienne, et enfin parce que des ressortissants égyptiens travaillaient en

Irak (même avec l’embargo) et constituaient un soutien financier non

négligeable pour leurs familles en Egypte.

N’ayant rien pu faire pour éviter la guerre, l'Egypte avait proposé le

remplacement progressif des forces américaines en Iraq par d'autres

arabes, africaines et asiatiques, comme forces de maintien de la paix sous

la surveillance des Nations Unies et de la Ligue arabe. Cette proposition

n’avait aucune chance d’aboutir. L’important pour M. Moubarak c’était

de faire croire à son opinion publique mais aussi à celui du monde arabo-

musulman qu’il faisait tout son possible pour empêcher une occupation

durable de l’Irak par les forces de la coalition américano-britannique.

Les relations entre l’Egypte et les Etats-Unis, certes loin de ressembler à

celles entre Américains et Saoudiens, ont été très éprouvées par les

événements du 11 septembre. Actuellement, le président Moubarak

revient peu à peu vers les Etats-Unis pour éviter toute friction mais aussi

pour continuer à profiter des bonnes grâces de Washington à l’instar du

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Pakistan et de la Jordanie qui ont magistralement su profiter de la guerre

contre le terrorisme en se ranger derrière l’Amérique.

b) La Jordanie et le Pakistan : deux pays qui ont

su tirer profit de la guerre anti-terroriste

1. La Jordanie

Répondant au nom officiel de Royaume hachémite de Jordanie, la

Jordanie fut l'un des très rare États arabes, avec l'Egypte, à avoir conclu

une paix avec l'Etat hébreu. Elle entretient de bonnes relations avec les

Etats-Unis qui lui assure une importante part de son aide économique à

l’instar de l’Egypte.

Au début des années 90, lors de la Guerre du Golfe, le roi Hussein avait

choisi de rester à l'écart de la coalition internationale. Il entendait ainsi

prévenir une insurrection des Palestiniens de Jordanie (majoritaires dans

le pays), favorables à Saddam Hussein. Par mesure de rétorsion,

Washington avait supprimé l'essentiel des subsides versés au royaume,

qui s'était enfoncé dans une crise économique sans précédent.

A la suite des attaques du 11 septembre, le roi Abdallah II, né en 1962 et

qui a succédé à son père le roi Hussein (mort en 1999), fut l’un des

premiers dirigeants arabes à se rendre aux Etats-Unis pour présenter aux

président Bush les condoléances du peuple jordanien et pour lui apporter

son soutien dans la guerre contre le terrorisme qui se préparait. Le roi

avait pris un certains nombre de mesures dans son royaume pour lutter

contre les terroristes. Ces mesures furent très décriées par les ONG de

défense des droits de l’Homme qui accusaient les autorités de vouloir

asphyxier l’opposition politique et la ″presse libre″.

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Au moment de la crise récente de l’Irak, le roi se trouvait dans une

position très délicate. Sa population, majoritairement palestinienne,

soutenait Bagdad. Economiquement, la Jordanie, dépendait à la fois des

États-Unis mais aussi de l'Irak, son premier partenaire commercial.

Finalement, la Jordanie s'est officiellement opposée à une attaque contre

l'Irak, tout en accordant, selon certains observateurs, un appui discret aux

Américains à l’instar des Saoudiens. Contrairement à son père (lors de la

Guerre du Golfe) le roi Abdallah II s'est montré, cette fois, plus

compréhensif envers les Américains. En échange de cette bonne volonté

à hauts risques, les Etats-Unis avaient promis de débloquer une aide de 1

milliard de dollars163.

2. Le Pakistan

Le fait que la plupart des réseaux terroristes ultra-violents se situent, ou

se situaient, en Afghanistan et au Pakistan, est largement dû à un

décalage historique de la guerre froide, à partir de l’instant où ces

territoires ont été utilisés pour la lutte de Mohamed (PSL) contre Marx,

c’est-à-dire les soutiens occidentaux à tous ces pays dans le but d’évacuer

les troupes soviétiques de l’Afghanistan dans les années 80. Pour rappel,

les Américains, à la suite de l’invasion soviétique de l’Afghanistan en

1979 s’étaient servis du Pakistan pour former les moudjahiddines afghans

à combattre l’URSS. Washington comptait non seulement contrer le

communisme mais aussi faire vivre à Moscou ce que qu’elle avait vécu

au Vietnam. A l’époque, le Pakistan entretenait de très bonnes relations

avec Washington.

Après le retrait soviétique de l’Afghanistan en 1989, les relations

américano-pakistanaises connurent un coup de froid à cause du nucléaire

militaire pakistanais. Vers le milieu des années 90, grâce aux pétrodollars

163 Dominique LAGARDE et Tangi SALÜN, «Guerre d'Irak : le grand écart des régimes arabes», L'EXPRESS, le 3 avril 2003. Retrouvez l’article sur : http://www.lexpress.fr/info/monde/dossier/mondearabe/dossier.asp?ida=387693

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saoudiens et sous l’oeil attentif des Américains, les services de

renseignements pakistanais (ISI) formèrent et portèrent au pouvoir les

Taliban.

A la suite des attentats du 11 septembre, le Pakistan dont les relations

n’étaient pas au beau fixe avec les États-Unis, en a largement profité pour

s’attirer ses bonnes grâces. Le président Musharraf a accepté de coopérer

dans la guerre contre le terrorisme au péril de son pouvoir. Il a pris un

certain nombre de mesures très contestées par sa population largement

anti-américaine164. Cette population, notamment les islamistes radicaux,

considèrent aujourd’hui M. Musharraf comme un traître qui mérite d’être

abattu. Pas moins de deux tentatives d’assassinats sur sa personne ont été

tentées cette année et l’année dernière.

En s'alliant avec les États-Unis, Islamabad a obtenu la levée de toutes les

sanctions américaines, un effacement important de sa dette, la réduction

des tarifs et des aides etc. Il n'empêche que peu d'investissements

étrangers franchissent les frontières pakistanaises. Les Etats-Unis fond

tout pour réchauffer les relations entre le Pakistan et l’Inde et ainsi éviter

à Musharraf d’avoir à surveiller deux fronts : les islamistes radicaux dans

son pays et l’Inde. En outre, la constitution pakistanaise (très contestée et

contestable), adoptée récemment et qui a permis au général Musharraf

d’être réélu, a été dénoncée du bout des lèvres par les Etats-Unis

champion de la démocratie.

Aujourd’hui, les Etats-Unis entretiennent de bonnes relations avec le

général Musharraf. Et ils y ont tout intérêt car son éviction du pouvoir ou

une défaite à une élection présidentielle pourrait profiter aux islamistes

radicaux. Etant donné que le Pakistan est un Etat nucléaire, la prise du

pouvoir par des islamistes représente un grand danger pour l’Occident et

en particulier pour les Etats-Unis. Comme vous le savez, ces islamistes

164 Cf. Chapitre IV

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ne portent pas dans leurs cœurs l’Amérique qu’ils accusent, à tort ou à

raison, de combattre l’Islam.

2) Les desseins américains au Moyen-orient depuis le

11 septembre

Depuis le 11 septembre, et même bien avant, les Etats-Unis ont pour

objectifs au Moyen-Orient :

d’instaurer la paix entre les pays arabes et Israël (en réglant le

conflit israélo-palestinien),

de préserver la sécurité et le bien-être d'Israël,

d’assurer la libre circulation du pétrole du Golfe,

d’endiguer les menaces que font peser l'Iran, l'Irak et la Libye,

de lutter contre le terrorisme,

d’enrayer la prolifération des armes de destruction massive,

d’assurer l'accès des entreprises américaines à la région, enfin

de promouvoir des régimes politiques et économiques plus

ouverts ainsi que le respect des droits de l'homme.

Pour ce qui est du règlement de la crise israélo-palestinienne, les Etats-

Unis ont publié, en 2003, un document intitulé la "feuille de route". Ce

document prévoit les mesures que les Israéliens et les Palestiniens

doivent prendre pour parvenir à un règlement du conflit dans des délais

impartis, sous les auspices du Quatuor, qui se compose, en outre des

États-Unis, de l'Union européenne, de l'Organisation des Nations Unies

et de la Fédération de Russie.

Le règlement de ce conflit constitue un point central pour les Etats-Unis

dans leur guerre contre le terrorisme. S’ils veulent convaincre le monde

musulman (que ce n’est pas l’islam qui est visée à travers cette lutte mais

le terrorisme) et avoir leur soutien, ils doivent résoudre le problème

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israélo-palestinien. Pourtant depuis des décennies, les Etats-Unis

essayent tant bien que mal de le régler (Oslo, camp David etc.). Il est

utile de savoir, même s’ils ont une grande influence sur l’Etat hébreu, ils

ne peuvent pas leur obliger à faire une chose que ce dernier considère

comme allant de sa survie. Ils peuvent faire pression sur l’Etat hébreu

mais pas leur forcer la main.

En dehors de la résolution du conflit israélo-palestinienne, les Etats-Unis

estiment qu’il est nécessaire pour eux de s'attaquer aux racines

économiques, sociales et politiques du terrorisme au Moyen-orient. A

cette égard, Mme Rice déclarait : « Nous avons trop longtemps toléré

l'oppression au nom de la stabilité. Trop de liens nous ont conduit à

fermer les yeux sur les responsabilités des dirigeants. Soixante ans de

soutien inconditionnel de la part des États-Unis ont nourri trop de

frustrations, de sentiments refoulés, d'idéologies de la haine »165. Le 20

janvier 2004, dans son discours sur l'état de l'Union, George W. Bush

synthétise : « Tant que le Proche-Orient demeurera la proie de la

tyrannie, du désespoir et de la colère, il produira des hommes et des

mouvements qui menaceront la sécurité de l'Amérique »166.

C’est dans ce cadre que l’initiative GMO a été lancée. Lapidairement, le

projet a pour objectif de pousser les pays moyen-orientaux à entamer des

réformes, à adopter la bonne gouvernance et à s’ouvrir à la démocratie. Il

a été très critiqué par les pays concernés qui y voient une pure ingérence

de la part de Washington. Ces pays pensent que si des réformes doivent

intervenir au Moyen-Orient c’est à eux d’en décider et non un intervenant

extérieur. Le président Moubarak a pris la tête de la fronde anti-GMO et

a enrôlé à ses côtés le roi Abdallah II de la Jordanie et le prince héritier

d'Arabie Saoudite, Abdallah. Il s’est rendu dans les principales villes

165 Cité par François SOUDAN, « Rêve ou cauchemar ? », JAI, 14 mars 2004. Vous pouvez consulter l’article à l’adresse internet suivante : http://www.jeuneafrique.com/gabarits/articleJAI_online.asp?art_cle=LIN14034rveouramehc0# 166 ibidem

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européennes (Rome, Paris et Londres) pour dénoncer le projet. Il faut le

dire, de nombreux pays Européens ne sont pas d’accord avec le projet.

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CONCLUSION

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Au début de notre travail, nous nous sommes posés deux questions à

savoir si la guerre anti-terroriste produit les effets escomptés et si elle a

eu des implications notables sur les relations Etats-Unis/Reste du monde,

notamment avec les pays alliés et amis européens et du monde musulman

ainsi qu’avec l’ancien adversaire la Russie.

La guerre contre le terrorisme, à son lancement, avait pour objectifs

d’empêcher toute attaque contre les Etats-Unis, leurs citoyens, leurs

intérêts, leurs alliés et amis et d’ôter toute liberté d’action et de

mouvement aux terroristes. Trois ans après son déclenchement, il est

impossible d’affirmer que ces objectifs ont été atteints. Même si le

territoire américain n’a plus été frappé depuis le 11 septembre, il en est

tout autre pour leurs citoyens et leurs intérêts à l’extérieur. Leurs pays

alliés et amis connaissent une recrudescence sans précédent d’actes

terroristes. Ils sont en permanence en alerte et ceux qui ne sont pas

encore frappés par les terroristes sont conscients que tôt ou tard ils

devront y faire face. Ce n’est qu’une question de temps.

Certes les Etats-Unis ont asséné un sérieux coup à Al Qaïda mais ce coup

ressemble beaucoup plus à un coup sur une niche d’abeille ou sur une

fourmilière qu’à un coup portant atteinte à la survie du terrorisme. En

effet, on remarque qu’aujourd’hui, les organisations terroristes sont plus

que jamais nombreuses et sont présentes un peu partout dans le monde.

Elles s’autogérent et décident de leurs propres emplois du temps. Elles

n’ont plus de base centrale, plus de connexion entre eux, et ont des

structures très réduites et impossibles à cerner. Elles sont devenues de

véritables électrons libres. Et cela rend impossible leur appréhension et

met la planète entière en danger du fait que chaque groupe aura

désormais ses propres objectifs qui dans certains cas risquent de côtoyer

le ridicule.

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La guerre anti-terroriste, au lieu de neutraliser le terrorisme ou au moins

de l’atténuer, a largement contribué à son éclosion. Ce dernier affiche

aujourd'hui une capacité de nuisance de plus en plus importante. Cela est

en partie lié à l'intervention américaine en Irak. Ce pays est devenu le

front des terroristes islamistes et son occupation par les forces

américaines est devenue l’un de leurs tremplins favoris pour justifier leur

barbarie à travers le monde (comme en Espagne).

En bref, les Etats-Unis se voient aujourd’hui engagés dans une véritable

escalade de violence dans laquelle ils ont entraîné des pays qui ne l’ont

certainement pas voulu.

En réponse à notre deuxième question, à savoir si la guerre anti-terroriste

a eu des implications notables sur les relations entre les Etats-Unis et le

reste du monde, nous répondrons par l’affirmative. En effet, cette guerre

a mis au grand jour les divergences entre Américains et Européens mais

aussi entre Européens. Elle a fait de la Russie un partenaire et un

interlocuteur privilégié des Etats-Unis notamment en ce qui concerne les

questions de sécurité internationale. Enfin, dans le monde musulman, les

populations sont plus que jamais anti-occidentales ; l’Arabie Saoudite

s’éloigne de plus en plus de l’Amérique et connaît une insécurité notable

tandis que le Pakistan renoue avec elle en risquant sa stabilité. L’Egypte,

le principal allié américain du monde musulman, conteste de plus en plus

les décisions de Washington.

Nous pensons qu'il y a plusieurs leçons à tirer de cette guerre anti-

terroriste, et la principale en est la suivante : tant qu'il y a des problèmes

urgents assez graves dont souffre une grande partie de l'humanité, qui ne

sont pas résolus ou bien ne sont pas discutés, débattus et collectivement

réglés, il est certain que nous allons voir arriver dans l'avenir des

expressions violentes comme celles du 11 septembre. Il y a dans le

monde actuel trop de problèmes, extrêmement complexes et urgents qui

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n'arrivent pas à attirer l'attention des autorités publiques nationales et

internationales et qui risquent d'être pris en charge par des organisations

à travers des actes de violence, lesquels constitueront un facteur

aggravant qui pourrait mettre en péril la paix et la stabilité dans le

monde. Ces problèmes sont : la pauvreté et l’absence de démocratie dans

de nombreux pays. C’est aussi, comme l’a si bien constaté Ibn Warraq,

« les déséquilibres profonds provoqués par le libéralisme sauvage dans

ce monde globalisé qui multiplie les exclusions, aggrave les injustices et

cautionne l’absolutisme. Ce sont également les politiques agressives et

les humiliations répétées ciblant le monde musulman, justifiées et mises

en avant par les néo-conservateurs de la Maison Blanche »167.

La pauvreté ne saurait certes pas justifier le terrorisme mais les terroristes

peuvent l’exploiter pour gagner le soutien des populations. C’est un

terrain fertile pour leurs idéologies. En Algérie par exemple, les

islamistes du FIS ont exploité la misère de la population et l’absence de

l’Etat pour gagner la ferveur des jeunes chômeurs algériens et des chefs

de familles désespérés. Au Pakistan, les familles pauvres, qui n’ont pas

les moyens de nourrir, de vêtir leurs enfants et de leur assurer une

éducation minimale, les envoient étudier dans des madrassas où on leur

offre le gîte et le couvert, ainsi qu’un endoctrinement religieux ; ce qui

explique en grande partie le développement de ces madrassas et leur

mainmise sur la jeunesse168.

A l’heure actuelle, il serait une erreur de croire que la guerre contre le

terrorisme est une affaire exclusivement américaine. Aucun pays n’est à

l’abri des attaques terroristes. Même si l’Amérique a agis de manière

unilatérale, à notre avis, il serait dangereux pour le monde entier de ne

pas réagir. Nous devons marcher avec les Américains et non derrière eux.

167 Ibn WARRAQ, « Contre l’islamisme militant », POLITIQUE INTERNATIONALE, n° 95 - printemps 2002. Vous pouvez voir cette article à l’adresse Internet suivante : http://www.politiqueinternationale.com/PI_PSO/fram_revpde_re_0795.htm 168 ibidem

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Et l’Amérique de son côté doit comprendre qu’elle ne peut pas à elle

seule venir à bout du terrorisme international et que son unilatéralisme ne

contribuera qu’à creuser le fossé avec ses alliés et amis. Elle doit aussi

comprendre que c’est pas elle en tant que telle qui est rejetée et

condamnée par le monde musulman mais sa politique extérieure.

Maintenant qu’elle est dans l’impasse en Irak, peut être elle repensera à

sa stratégie de lutte anti-terroriste et y intégrera les pays avec lesquels

elle partage le même combat.

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DOCUMENTS ANNEXES

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ANNEXE I

Un homme et un réseau terroriste mondial (Article du New York Times du 14 janvier 2001 de Stephen Engelberg)

L'article ci-après est le premier d'une série d'articles intitulée « Guerriers

du djihad » publiée par le New York Times les 14, 15 et 16 janvier 2001.

Cet article-ci se fonde sur une enquête menée par Craig Pyes, Judith

Miller et Stephen Engelberg, et a été rédigé par M. Engelberg.

Guerriers du djihad

Premier d'une série de trois articles :

Un réseau terroriste

L'article qui suit est basé sur un reportage de Craig Pyes, de Judith Miller

et de Stephen Engelberg, et a été rédigé par M. Engelberg.

« Le temps est venu de lancer un djihad mondial ! » déclare Oussama

Ben Laden, en 1987, à ses amis. Après avoir passé plusieurs années à

entraîner des volontaires arabes à guerroyer contre l'armée soviétique

pour la chasser d'Afghanistan, il a, dès cette année-là, le projet de mener

une guerre sainte islamique contre les gouvernements laïcs corrompus du

Moyen-Orient musulman et contre les puissances occidentales qui les

soutiennent. Ce milliardaire saoudien va alors commencer à accueillir et

former, dans ses camps d'entraînement afghans, des militants islamistes

du monde entier - jusque-là préoccupés seulement d'objectifs locaux -

dans le but d'en faire un réseau mondial chargé de replacer tous les

musulmans sous le règne d'une version militante de la loi islamique.

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Certains de ses compagnons d'armes sont sceptiques et lui disent que son

but est hors d'atteinte. « J'ai discuté un jour avec Oussama et je lui ai

demandé ce qu'il voulait faire », se souvient Abdoullah Anas, un

Algérien qui a combattu en Afghanistan à l'époque et a donné une des

rares descriptions personnelles que l'on ait de la formation donnée par

l'organisation de M. Ben Laden. « Je lui ai dit : 'Imaginez un Malais qui

rentre dans son pays au bout de cinq ans. Comment pourra-t-il ne pas

oublier que vous êtes son chef ? Il se mariera, aura des enfants et

travaillera dans son pays. Comment pouvez-vous créer un camp pour un

djihad mondial ? ».

Mais, comme d'autres incrédules, il a été le témoin de la façon dont M.

Ben Laden - aujourd'hui le suspect de terrorisme le plus recherché par

l'Amérique - a engagé la réalisation de son projet. Son récit, corroboré

par d'autres témoignages et par les renseignements recueillis par les

polices et services secrets des États-Unis et de pays du Moyen-Orient et

d'Europe, nous donne une idée très concrète de la naissance d'un

mouvement moderne de guerre sainte, avec nombre de détails inédits. Ce

qui a commencé comme une guerre sainte contre l'Union soviétique a

pris, selon M. Anas, une nouvelle dimension lorsque M. Ben Laden s'est

émancipé et a créé un nouveau mouvement islamiste dont les ambitions

allaient bien au-delà de l'Afghanistan.

À partir de ses camps afghans, M. Ben Laden a créé et continue de

développer un réseau terroriste islamiste qui, selon les responsables

américains, non seulement conduit ses propres opérations mais encore

forme et soutient les militants de divers pays, reliant les opérations

locales pour en faire une croisade mondiale.

L'un de ses nombreux noms de code, l'Entrepreneur, évoque bien sa

stratégie. Le groupe qu'il a fondé il y a 13 ans, Al-Qaïda, nom arabe

signifiant « La Base », est dirigé par des tacticiens hors pair qui adaptent

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leur action aux conditions du moment, tantôt enseignant la technique des

explosifs, tantôt envoyant leurs propres agents, tantôt suivant simplement

leur inspiration.

Ce groupe est devenu la référence pour ses islamistes malais, algériens,

philippins, palestiniens, égyptiens et même américains qui voient les

États-Unis, puissance impériale soutenant Ce des gouvernements athées

et corrompus, comme leur principal ennemi. M. Ben Laden a multiplié

les efforts pour fédérer en un seul mouvement des groupes qu'ont

longtemps opposés divergences doctrinales et diversité ethnique et

géographique. « Leurs actions sont commandées par des objectifs

politiques locaux, mais sous-tendues par une vision commune, explique

Robert Blitzer, ancien responsable de l'antiterrorisme au FBI. C'est une

affaire mondiale. C'est : 'Nous voulons être là et compter dans une

centaine d'années. »

Selon les recherches récentes de la CIA, le mouvement Al-Qaïda dirige

une douzaine de camps d'entraînement en Afghanistan, qui ont déjà

permis la formation de quelque 5.000 militants, aujourd'hui installés dans

une cinquantaine de pays où ils ont créé chacun leur cellule. Selon des

responsables de services secrets le groupe expérimente des armes

chimiques, notamment des gaz neurotoxiques, dans l'un de ces camps.

M. Ben Laden et ses partisans s'appuient sur des interprétations

séculaires du Coran pour justifier la violence au nom de Dieu, même

contre des coreligionnaires et des passants - vision extrémiste de l'une

des religions les plus répandues dans le monde. Mais les moyens qu'ils

utilisent sont, eux, tout à fait modernes : courrier électronique crypté,

CD-ROM où sont exposées des méthodes de fabrication de bombes,

liaisons satellitaires entre téléphones portables.

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Selon des enquêteurs de la police judiciaire américaine, le groupe planifie

ses attentats des mois voire des années à l'avance. Un ancien sergent de

l'armée américaine, Ali A. Mohamed - qui a travaillé pour M. Ben Laden

et est aujourd'hui un témoin à charge - a expliqué au procureur qui

l'interrogeait comment Al-Qaïda apprend à ses agents « planqués », ou

« sous-marins », à vivre au sein de la population sans se faire remarquer.

M. Ben Laden est loin d'avoir atteint ses buts ultimes : il n'a pas

augmenté le nombre des musulmans respectant la loi islamique, il n'a

renversé aucun des gouvernements arabes qu'il vise et n'a pas chassé les

États-Unis du Moyen-Orient. En outre, sa violence, qui rebute de

nombreux croyants, a provoqué de sévères répressions dans les États

arabes où les libertés politiques étaient déjà restreintes.

Mais, avec le noyau de son organisation, il constitue une grave

préoccupation pour les autorités américaines, car il est capable de

paralyser des ambassades, de contrecarrer des projets d'exercices

militaires et d'inquiéter les Américains se trouvant à l'étranger et de

mettre en danger leur sécurité. Au début de janvier 2001, les États-Unis

ont dû fermer pendant près de deux jours leur ambassade à Rome, en

raison d'un risque d'attentat découvert par les services secrets.

Les autorités américaines accusent M. Ben Laden d'avoir commandité les

attentats de 1998 contre deux de leurs ambassades en Afrique - qui ont

fait plus de 200 morts - et le suspectent d'être impliqué dans l'attentat

d'octobre dernier contre le destroyer « U.S.S. Cole » au Yémen, qui a tué

17 marins. Quatre hommes ont comparu à partir de janvier 2001 pour les

attentats en Afrique devant un tribunal de New York.

Les autorités américaines examinent par ailleurs le rôle d'Al-Qaïda dans

trois projets d'attentats prévus pour les fêtes du millénaire en 1999 :

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contre un autre navire de la flotte américaine - une première dans

l'histoire récente - et contre des sites touristiques et un hôtel en Jordanie.

Plus récemment, le groupe de M. Ben Laden a tenté des opérations contre

Israël, un tournant dans sa stratégie, selon des responsables américains et

moyen-orientaux. Ceux-ci notent qu'il a assuré la survie de son

organisation, au cas où il serait arrêté ou bien qu'il mourrait, en désignant

comme successeur son collaborateur de longue date, Abdoul-Aziz Abou

Sitta, un Egyptien connu sous le nom de Mouhammad Atef ou Abou

Hoffs Al-Masri, dont la fille a, selon Al Djazira, chaîne de télévision

arabe diffusée par satellite, épousé son fils au début de janvier 2001, à

Kandahar, en Afghanistan.

« Nous espérons vivement réussir à l'arrêter, mais ce ne sera qu'une

étape. Il nous restera beaucoup à faire pour éradiquer le réseau de ses

organisations », a déclaré Richard Clarke, responsable de la lutte anti-

terroriste à la Maison-Blanche.

La cause de la guerre afghane attire de jeunes combattants arabes

Al-Qaïda a pour origine le djihad prêché par des intellectuels musulmans

contre l'armée soviétique qui avait envahi l'Afghanistan en 1979. Ces

hommes ont publié des ordonnances religieuses (des « fatwas »)

exhortant les musulmans, où qu'ils soient, à défendre contre les infidèles

la terre musulmane de ce pays. Dans les années qui ont suivi, plusieurs

milliers de jeunes arabes ont rejoint les rangs de la résistance afghane.

L'un des premiers à avoir répondu à cet appel à la guerre sainte a été un

jeune Algérien, du nom de Boujema Bounouar, qui devait prendre pour

nom de guerre Abdoullah Anas. Dans de récentes interviews accordées à

Londres, où il habite aujourd'hui, celui-ci a raconté comment M. Ben

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Laden est allé en Afghanistan pour combattre les Soviétiques et a été

attiré vers un groupe d'Egyptiens qui voulaient lancer un djihad mondial.

M. Anas, qui est aujourd'hui chef d'un parti politique islamiste algérien,

n'est pas un observateur impartial. Il affirme s'être opposé à M. Ben

Laden, dont le programme terroriste a, selon lui, terni la réputation de

milliers d'Arabes qui se sont battus honorablement pour la cause afghane.

Mais son récit de témoin direct, corroboré par les renseignements obtenus

par les services secrets occidentaux, est l'un des rares à décrire comment

M. Ben Laden est devenu responsable d'un mouvement islamiste.

De nombreux éléments rapprochaient ces deux hommes. M. Anas a

raconté son itinéraire d'enseignant du Coran devenu militant du djihad en

1984, alors qu'il avait 25 ans et qu'il vivait avec sa famille dans l'ouest de

l'Algérie. À la bibliothèque locale, il lut, dans un hebdomadaire, un

article commentant une fatwa selon laquelle faire la guerre aux

Soviétiques était le devoir de tout musulman.

« Au bout de quelques jours, se souvient-il, tout le monde avait entendu

parler de cette fatwa et commençait à se poser des questions : 'Où donc

est l'Afghanistan ? Quel est ce peuple ? Comment pouvons-nous aller là-

bas ? Combien coûte le billet ? ».

Cette année-là, il se retrouve dans la foule des musulmans qui participent

au Hadj, le pèlerinage annuel à la Mecque, en Arabie Saoudite. « Vous

vous sentez sanctifié, explique- t-il. Vous êtes entouré de musulmans du

monde entier, du Zimbabwe à New Delhi. Chacun porte deux simples

vêtements de coton blanc. Tout le monde est ainsi vêtu. Vous ne pouvez

pas savoir qui est ministre, qui est président. Pas de bijoux, pas de beaux

costumes. » A la Mecque, les chefs de prière parlent avec émotion du

djihad en Afghanistan.

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Il se trouve, raconte-t-il, sur l'esplanade de marbre de la Grande Mosquée

au milieu de 50.000 autres pèlerins lorsqu'un ami lui désigne un

intellectuel palestinien radical, du nom de Abdoullah Azzam, qui est en

train d'organiser le soutien arabe aux Afghans et dont les écrits, qui vont

susciter le renouveau du djihad au XXe siècle, commencent à faire parler

d'eux.

M. Anas se présente à lui et lui demande si l'article du magazine qu'il lu à

la bibliothèque est exact :

« - Les chefs religieux sont-ils tous d'accord pour dire que combattre en

Afghanistan est un devoir pour tous les musulmans ?

« - Oui, répond l'autre, c'est vrai !

« - Bon, d'accord, dis-je. Et si je veux partir en Afghanistan, qu'est-ce que

je dois faire maintenant ? »

M. Azzam lui donne sa carte de visite. Il y figure un numéro de téléphone

à Islamabad, au Pakistan, où il est professeur d'université. Une semaine

plus tard, M. Anas est à bord d'un avion l'emmenant d'Arabie Saoudite au

Pakistan. Il n'a aucune idée de l'endroit où il va, ni de ce qu'il va y faire.

En arrivant, il compose le seul numéro de téléphone qu'il connaisse au

Pakistan et parle avec M. Azzam, qui lui offre de l'héberger à son

domicile, un lieu de rendez-vous animé, fréquenté par des étudiants et

des intellectuels. C'est là qu'il aperçoit pour la première fois la plus jeune

des filles de M. Azzam, qu'il épousera cinq ans plus tard. M. Azzam lui

présente un visiteur saoudien qui s'identifie à la façon arabe

traditionnelle, comme Abou Abdoullah, c'est-à-dire le père d'Abdoullah,

son fils aîné. C'était Oussama Ben Laden.

Les deux hommes échangent quelques banalités. Le nom de M. Ben

Laden est bien connu. Il est présenté comme le plus jeune de 24 frères

d'une famille qui dirige l'une des plus importantes entreprises de travaux

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publics du monde arabe. M. Ben Laden n'apparaît pas différent des autres

volontaires arabes qui commencent à arriver au Pakistan, se souvient M.

Anas. La conversation porte sur la façon dont les volontaires peuvent

aider les Afghans à gagner leur djihad et la façon dont ils peuvent leur en

apprendre davantage sur l'Islam.

Dans le conflit afghan, les forces soviétiques disposent à ce moment-là

d'un atout décisif : la puissance de feu de leurs hélicoptères qui leur

donne la maîtrise de l'espace aérien tandis que leurs troupes au sol

tiennent les grands axes routiers. Mais les rebelles ont de puissants amis.

Les États-Unis et l'Arabie Saoudite dépensent des millions pour fournir

des armes aux Afghans par le canal des services secrets pakistanais.

M. Anas commence par enseigner le Coran aux rebelles afghans, qui ne

comprennent pas l'arabe et apprennent les versets par cœur, sans les

comprendre. Il dirige par ailleurs les prières dans une « maison des

hôtes » créée par des volontaires arabes. À l'époque, il n'y a, selon lui,

dans le pays, guère plus de quelques dizaines d'Arabes épaulant les

rebelles. Pas un ne connaît la moindre des langues parlées en

Afghanistan.

Au bout de quelques mois, M. Anas part à pied pour l'Afghanistan afin

de rejoindre une unité combattante. Il l'est l'un des trois Arabes qui se

déplacent au sein d'une colonne de 600 soldats afghans. Il apprend le

farsi et adopte un rôle de médiateur, se déplaçant d'un camp de

combattants rebelles à l'autre. Il passe l'essentiel de son temps, chaque

année, en Afghanistan.

Il devient un proche collaborateur du Commandant Ahmed Shah

Massoud - dont les troupes contrôlent à l'époque le nord de l'Afghanistan

et disputent aujourd'hui le pouvoir aux taliban - qui soutiennent M. Ben

Laden.

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Comme beaucoup de musulmans qui ont rejoint les rebelles, M. Anas

s'attend à mourir dans le djihad afghan et à mériter le sort réservé, selon

le Coran, aux martyrs, dont les péchés sont pardonnés et qui vont au

Paradis où ils jouissent de la présence de belles jeunes femmes.

« Devenir un sahid ou un martyr n'était ma préoccupation principale

mais, reconnaît-il, cela faisait partie de mon projet. »

Selon les services secrets américains et moyen-orientaux, c'est vers le

milieu des années 80 que M. Ben Laden s'installe à Peshawar, ville du

Pakistan proche de la frontière afghane, qui sert à l'époque de base arrière

pour la lutte contre les soviétiques et où les officiers de renseignement

américains, français et pakistanais intriguent et se concurrencent,

cherchant à manipuler la cause afghane chacun à l'avantage de son pays.

Dans ce milieu, la fortune de M. Ben Laden, plusieurs centaines de

millions de dollars, lui assure un succès immédiat. « Il n'était que l'un de

ceux venus faire le djihad en Afghanistan, poursuit M. Anas, mais,

contrairement aux autres, il avait beaucoup d'argent. Ce n'est pas un

spécialiste de la politique ni de l'organisation, mais c'est un activiste à

l'imagination féconde. Il mange et dort très peu. Il est très généreux :

pour un peu, il vous donnerait ses vêtements, son argent. »

Toujours selon M. Anas, qui revient tous les ans des champs de bataille

afghans pour rendre visite à M. Azzam au Pakistan, M. Ben Laden a

d'abord dormi dans la maison des hôtes de ce dernier, à Peshawar, sur un

coussin posé à même le plancher et, rapporte M. Anas, M. Azzam aimait

dire : « Vous voyez cet homme ? Il a tout ce qu'il lui faut dans son pays,

mais ici, il vit dans cette pièce au milieu des pauvres ! »

C'est en 1984 que M. Azzam créé l'organisation qui va jouer un rôle

décisif dans le déclenchement du djihad mondial au cours de la décennie

suivante. Il l'appelle le Makhtab al Khadimat, en français « le Bureau des

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Services ». Son but est de recruter et entraîner des volontaires musulmans

pour le front afghan. Il récolte des fonds pour son organisation dans des

pays étrangers, jusqu'aux États-Unis, et fait des discours enflammés pour

défendre la cause afghane. M. Ben Laden adhère à l'idée dès le début et

devient l'un de ses collaborateurs, lui apportant son soutien financier et

s'occupant des affaires militaires.

M. Ben Laden travaille avec des petits groupes, poursuit M. Anas.

« Lorsque vous êtes assis auprès d'Oussama, vous n'avez pas envie de

quitter la réunion. Vous voulez poursuivre la discussion avec lui, car il

est très calme et très éloquent. »

L'un des grands objectifs du Bureau des Services est alors, toujours selon

M. Anas, d'empêcher les volontaires, qui arrivent d'ailleurs en nombre

croissant, de prendre parti dans les luttes entre factions rebelles. « Nous

sommes en Afghanistan pour aider le djihad et l'ensemble du peuple

afghan », répète alors M. Azzam.

Mais de nombreux jeunes musulmans, préoccupés du sort de leur propre

pays, sont de plus en plus insatisfaits de réserver l'action du Bureau des

Services à la cause afghane. Certains contactent M. Ben Laden et,

rapporte M. Anas, lui suggèrent de « ne pas rester avec Abdoullah

Azzam qui ne parle que de l'Afghanistan et ne veut rien faire contre les

régimes au pouvoir en Arabie Saoudite, en Égypte ou en Algérie. Ces

gens, poursuit M. Anas, répétaient à Oussama : 'Vous devriez créer

quelque chose, proposer une orientation claire à tous ces gens-là pour

d'autres guerres après celle de l'Afghanistan. ».

Parmi les plus assidus auprès de M. Ben Laden, se trouve un groupe

d'Egyptiens radicaux, portant le nom de Djihad islamique égyptien, qui a

participé à l'assassinat du président Anouar el-Sadate en 1981 et dont le

programme est le renversement des gouvernements par le terrorisme et la

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violence. L'une des figures de proue de ce groupe, le Docteur Ayman al-

Zawahiri, qui s'est réfugié en Afghanistan va, d'après M. Anas et les

services secrets occidentaux, avoir une influence décisive sur l'évolution

de M. Ben Laden. Il ferait aujourd'hui, selon certains services secrets,

partie de la direction d'Al-Qaïda.

M. Azzam, lui, a d'âpres disputes avec ces Egyptiens. M. Anas raconte

qu'il a, un jour, été témoin d'une vive querelle entre M. Azzam et le

Cheikh Omar Abdel Rahman, un intellectuel religieux radical, qui

défendait l'idée que le mépris de la loi islamique manifesté par des gens

comme le président pakistanais Mohammed Zia ul-Haq et le président

égyptien Hosni Moubarak faisait d'eux des infidèles que l'on était en droit

d'assassiner. Ce Cheikh s'est ultérieurement installé à Brooklyn, où il

s'est associé à une antenne du Bureau des Services. En 1995 il a été

condamné pour participation à des tentatives d'attentats visant à détruire

des immeubles de New York.

C'est en 1986, selon M. Anas, que M. Ben Laden a commencé à suivre sa

propre route, information que confirment des responsables de services

secrets moyen-orientaux. Il créé son propre camp d'entraînement - qu'il

appelle Al Masadah, l'Antre du lion - pour un groupe d'une cinquantaine

d'Arabes du golfe Persique qui vivent dans des tentes dressées à l'écart de

celles des autres combattants afghans.

En à peine plus d'un an, la scission du mouvement est consommée : M.

Ben Laden et les Egyptiens ont fondé Al-Qaïda, en français la Base, pour

ce qu'ils espèrent être une croisade mondiale.

M. Azzam confie alors à M. Anas, toujours selon ce dernier, que les

idéologues égyptiens ont courtisé M. Ben Laden pour avoir accès à ses

moyens financiers. « Un jour, il m'a confié : 'Je suis très contrarié au sujet

d'Oussama. Cet homme est un ange envoyé par le ciel, mais je suis

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inquiet pour son avenir s'il reste avec ces gens-là. » Mais les différends

entre ces deux hommes étaient essentiellement tactiques, indique M.

Anas qui note que les deux hommes restaient amis. Ennemi juré d'Israël,

M. Azzam pensait que les combattants arabes devaient centrer leur action

sur la création d'un État islamique en Afghanistan, ce qui pouvait

demander des dizaines d'années. M. Ben Laden, lui, s'était, selon M.

Anas, laissé convaincre que la guerre pouvait être menée dans plusieurs

pays en même temps.

« Ce débat était très secret, poursuit M Anas. À l'époque, trois ou quatre

personnes seulement étaient au courant. » M. Azzam voyait peu de

différence entre les États-Unis et l'Union soviétique et affirmait dans ses

articles et ses discours que tous deux étaient des ennemis de l'Islam,

mais, selon M. Anas, il était opposé à l'utilisation du terrorisme contre

l'Occident.

À la fin des années 80, Peshawar est devenu un centre d'attraction pour

les jeunes musulmans mécontents qui partagent les vues de M. Ben

Laden. À ce moment-là, se souvient M. Anas, « dix personnes ouvraient

une maison d'accueil et commençaient à prononcer des fatwas,

proclamaient :'Nous allons faire la révolution en Jordanie, en Égypte, en

Syrie !', mais n'avaient aucun contact avec le vrai djihad qui se déroulait

en Afghanistan. »

Pendant ce temps, le rapport des forces se renversait en Afghanistan, les

missiles Stinger, fournis dans le cadre d'un programme secret américain,

obligeant l'aviation soviétique à ne survoler les champs de bataille que de

très haut. C'était devenu une sorte de Viêt-Nam pour Moscou. En février

1989, les Soviétiques s'étaient retirés.

Selon un responsable de la CIA, celle-ci avait conscience du changement

de nature du djihad et pris des mesures pour contrer cette menace,

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mesures que toutefois ce responsable n'a pas voulu préciser. Mais cette

affirmation est contredite par Milt Bearden, qui était à l'époque

responsable du bureau d'Islamabad de la CIA et, à ce titre, coordonnateur

des efforts antisoviétiques de l'Agence en Afghanistan. Selon lui,

« l'Union soviétique, armée jusqu'aux dents, s'écroulait et une guerre se

déclenchait dans le golfe Persique. Bref, l'Afghanistan n'était plus une

priorité. » La guerre s'est terminée « et nous avons décampé ».

La lutte des rebelles afghans ne s'arrête pas pour autant. Ils s'en prennent

d'abord au gouvernement prosoviétique resté en place, puis se déchirent

entre eux. Le 24 novembre 1989, M. Azzam et deux de ses fils sont tués

à Peshawar par l'explosion d'une voiture piégée, alors qu'ils se rendaient

à la prière du vendredi, un attentat qui n'a pas été élucidé.

M. Anas affirme qu'il a alors tenté de prendre la direction du Bureau des

Services. Selon la CIA, le groupe s'est scindé ; la faction extrémiste l'a

emporté et s'est rangée aux côtés de M. Ben Laden. « Ils aimaient les

idées d'Oussama et la personne d'Abdoullah Azzam, mais, raconte M.

Anas avec nostalgie, ils ne m'aimaient pas. »

La Base : de nombreux pays réunis sous une même bannière

Enflammés par leur victoire sur les Soviétiques, les Arabes qui avaient

combattu en Afghanistan rentraient chez eux, animés du désir d'appliquer

chacun les principes du djihad à son pays.

Le Coran fixe des règles strictes sur le moment et la façon d'engager une

guerre sainte. Mais, selon Gilles Kepel, grand spécialiste français de

l'Islam contemporain, les anciens combattants de l'Afghanistan se

fondaient sur une interprétation radicale des textes sacrés de l'islam.

« Intoxiqués par la victoire musulmane en Afghanistan, écrit-il, ils ont

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cru qu'ils pouvaient la reproduire partout ailleurs et que le monde entier

était mûr pour le djihad, ce qui est contraire à la tradition islamique. »

Ils se sont appelés les Afghans arabes. En Jordanie, ils ont fondé un

groupe, Djaich Mouhammad, dont le but, selon ses responsables, était

d'abattre le roi Hussein, dont la famille s'honore de descendre du

Prophète Mahomet. En Algérie, ils ont participé à la création du Groupe

islamique armé (le GIA), le plus radical des groupes islamistes qui sont

apparus après l'annulation des élections, en 1991, par le pouvoir militaire.

Le GIA a commencé par des attentats contre des cibles militaires, puis

s'est lancé dans des tueries de civils algériens n'adhérant pas au djihad.

Selon M. Anas, un Algérien qui avait combattu avec lui en Afghanistan

et avait rejoint Al-Qaïda à la fin des années 80 faisait partie des

fondateurs du GIA. M. Anas a affirmé avoir été informé que M. Ben

Laden avait fourni une partie de l'argent ayant financé le GIA à ses

débuts.

Le début des années 90 est une période difficile pour M. Ben Laden. Il

est furieux que le roi Fahd ait laissé des troupes américaines mener la

guerre du Golfe à partir d'une base installée en Arabie Saoudite, terre de

deux lieux saints, les plus sacrés de l'islam. Sa colère est dirigée contre

les États-Unis et le pouvoir saoudien et, avant la fin du conflit, il s'est

réinstallé en Afghanistan.

Ce nouveau séjour va être bref. Quelques mois plus tard il quitte le pays,

disant à ses associés que l'Arabie Saoudite a ordonné aux services secrets

pakistanais de le supprimer. On ne possède aucune confirmation de

l'existence d'un tel projet. Toujours est-il qu'en 1991 il s'installe au

Soudan, où un gouvernement islamiste a pris le pouvoir.

Au cours des cinq années suivantes, il s'emploie à développer un réseau,

en combinant affaires commerciales officielles et soutien à la guerre

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sainte. Il s'engage dans l'accomplissement de son but suprême qui est de

rassembler les principaux groupes islamistes extrémistes sous une seule

bannière. Selon des autorités moyen-orientales, lui ou ses émissaires ont

alors rencontré des groupes radicaux du Pakistan et d'Égypte et leur ont

proposé la création d'un front islamiste international, devant être dirigé

par des anciens combattants d'Afghanistan et lutter contre les Américains

et les Juifs.

Al-Qaïda va alors commencer à former ses propres agents. Ali

Mohamed, témoin à charge qui a reconnu avoir organisé le déplacement

de M. Ben Laden au Soudan, a avoué à la police judiciaire américaine

avoir formé des membres du groupe à la manipulation des armes et des

explosifs, aux enlèvements, à la guérilla urbaine, au contre-espionnage et

à d'autres disciplines, dans des camps en Afghanistan et au Soudan. Il a

également reconnu avoir montré à certains stagiaires comment créer des

cellules « pouvant être utilisées dans des opérations ».

L'envoi de troupes américaines en Somalie, fin 92 début 93, dans le cadre

d'une mission des Nations unies, que l'Administration Bush a présentée

comme une opération humanitaire, constitue pour M. Ben Laden un

nouvel affront. Selon des responsables américains, un transfuge d'Al-

Qaïda a déclaré que ce groupe avait vu ce déploiement militaire comme

une dangereuse extension de l'influence américaine dans la région et une

étape vers la déstabilisation du gouvernement islamique du Soudan. Des

fatwas, indiquent des procureurs fédéraux Américains, ont été prises en

privé par Al-Qaïda enjoignant à ses membres d'attaquer les soldats

américains en Arabie Saoudite, au Yémen et dans la Corne de l'Afrique.

Selon cette source, M. Ben Laden a envoyé son responsable militaire, un

Egyptien qui est à ses côtés depuis la création d'Al-Qaïda, étudier les

faiblesses des forces des Nations Unies en Afrique. Toujours selon cette

source, Al-Qaïda créé une cellule au Kenya destinée à constituer un point

d'appui pour des opérations en Somalie. Les membres de cette cellule

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s'intègrent dans la société kenyane, ouvrent officiellement des

commerces de vente de poisson et de négoce de diamants et créent une

organisation charitable islamique.

Toujours selon ces procureurs américains, au moins cinq membres du

groupe sont ensuite passés en Somalie, où ils ont entraîné certains des

éléments qui ont participé à l'embuscade du 3 octobre 1993 contre les

forces spéciales des États-Unis qui a fait 18 morts parmi les américains et

plusieurs centaines parmi les Somaliens. Le souvenir de ce revers des

forces américaines, le plus notable dans l'histoire récente, va jouer un

rôle important dans les débats ultérieurs du gouvernement Clinton

concernant l'hypothèse d'une utilisation de troupes au sol. Ce n'est que

plusieurs années plus tard que les services secrets américains

découvriront le rôle d'Al-Qaïda dans cet accrochage.

Toujours selon cette source judiciaire, le groupe a envisagé d'attaquer les

Américains au Kenya en représailles de la mission en Somalie. Dans sa

déposition, M. Mohamed a affirmé que M. Ben Laden l'avait envoyé à

Nairobi, fin 1993, pour y repérer des cibles américaines, françaises,

britanniques et israéliennes pour d'éventuels attentats, en accordant un

intérêt particulier à l'ambassade des États-Unis. Il a également déclaré

avoir pris des photos, dessiné des schémas et rédigé un rapport, tous

éléments qu'il a fait parvenir à son chef à Khartoum. « Ben Laden a

regardé la photo de l'ambassade des États-Unis, a-t-il déclaré, et désigné

l'endroit où devrait se diriger le camion chargé d'une attaque suicide. »

Selon les procureurs américains, les plans d'Al-Qaïda étaient encore plus

ambitieux : un de ses membres dirigeants, un Irakien, Mahdouh

Mahmoud Salim - dont M. Anas a dit qu'il gravitait déjà autour de M.

Ben Laden en Afghanistan - a tenté d'acheter de l'uranium enrichi en

Europe.

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Cet Irakien a facilité l'établissement de liens entre le groupe de M. Ben

Laden et d'autres soutenus par l'Iran. Il a rencontré un responsable

religieux iranien à Khartoum et, peu après, toujours selon les procureurs,

des membres d'Al-Qaïda ont reçu une formation du Hezbollah, groupe

chiite libanais soutenu par l'Iran et passé maître dans l'organisation

d'attentats à la voiture piégée. Selon certains responsables américains,

cette alliance avait ceci de notable que c'était la première collaboration

entre des radicaux de la branche chiite minoritaire de l'Islam et des

extrémistes de la branche sunnite majoritaire.

Au Soudan, les entreprises commerciales de M. Ben Laden - une

tannerie, une société de transport et une entreprise de bâtiment - lui

permettaient d'obtenir de l'argent et, selon des responsables américains,

servaient de couverture pour les déplacements de M. Salim et d'autres

agents. Selon cette source, ces sociétés ont accaparé le marché des

exportations soudanaises de gomme, de tournesol et de sésame et M. Ben

Laden a investi 300 millions de francs d'argent de sa famille dans une

nouvelle banque islamique à Khartoum.

Un réseau comme celui de l'Afghanistan, mais à l'échelle mondiale

Le nouveau djihad s'est nourri de la guerre civile qui a ravagé

l'Afghanistan au début des années 90. Les camps d'entraînement qui

avaient servi à former des moudjahidin contre l'ennemi soviétique

accueillaient désormais des islamistes plus intéressés à fomenter la guerre

sainte une fois rentrés chez eux - en Amérique, en Europe ou au Moyen-

Orient - qu'à la lutte pour le pouvoir en Afghanistan.

Selon des autorités européennes et américaines, le Bureau des Services,

le groupe basé au Pakistan que M. Azzam avait fondé dans les années 80

pour recruter les moudjahidines de la cause antisoviétique, organisait les

déplacements de certains de ces nouveaux combattants du djihad.

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Beaucoup de ceux qui étaient liés à ce bureau partageaient, selon M.

Anas, l'optique de M. Ben Laden sur la nécessité d'une stratégie

mondiale. Certains responsables américains pensent qu'ils s'étaient mis

sous ses ordres, mais les experts du renseignement ne sont pas tous

d'accord sur ce point. Quoi qu'il en soit, c'est seulement en 1993 que la

police judiciaire américaine est tombée sur les premiers indices du

nouveau djihad mondial, au cours de son enquête sur l'attentat du World

Trade Center qui avait fait six morts et plus de mille blessés.

Cette enquête a en effet révélé que les quatre auteurs de cet attentat

avaient des liens avec le Cheikh Omar Abdel Rahman, qui a été accusé

de diriger une « organisation djihad » mondiale ayant commencé dès

1989 à projeter la mort d'Américains. Ce Cheikh a été ultérieurement

condamné pour tentative d'attentats contre des sites sensibles de New

York, notamment contre l'immeuble des Nations unies. Mais ce n'est que

quelques années plus tard que les services secrets américains

découvriront que cet individu et les auteurs de l'attentat du World Trade

Center avaient des liens avec Al-Qaïda.

Les éléments de preuve réunis sont concordants, mais pas totalement

concluants. Plusieurs de ceux qui ont été condamnés dans l'affaire du

World Trade Center étaient liés au centre de réfugiés de Brooklyn qui

constituait une antenne du Bureau des Services, l'organisation basée au

Pakistan que M. Ben Laden a contribué à financer et à diriger. Ce centre

de Brooklyn était, à un moment, dirigé par Mustafa Shalabi, Egyptien

assassiné en 1991, dont le meurtre n'est toujours pas élucidé. Or, selon

des révélations récentes de la police judiciaire, M. Mohamed, le témoin à

charge fédéral, a déclaré que M. Ben Laden avait eu recours à ce M.

Shalabi en 1991 lorsqu'il avait voulu s'installer au Soudan.

L'un des condamnés pour l'attentat du World Trade Center, Ahmed M.

Ajaj, après avoir passé quatre mois au Pakistan en 1992, est revenu aux

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États-Unis en possession d'un manuel expliquant comment fabriquer des

bombes, manuel que les autorités américaines ont saisi plus tard. Selon la

traduction en anglais de ce document qui a été présentée à titre de preuve

au procès du World Trade Center, ce manuel aurait été daté de 1982, été

publié à Amman, en Jordanie, et portait pour titre, sur la première page et

sur les suivantes : « La règle de base ».

Malheureusement, ces indications étaient erronées. Deux autres

traductions distinctes du document, dont une effectuée à la demande du

New York Times, montrent que le titre est en fait Al-Qaïda, le nom du

groupe de M. Ben Laden, que l'on doit traduire par La Base. En outre, le

pays et la date de publication indiqués dans le document sont, non pas

Jordanie, 1982, mais Afghanistan, 1989, c'est-à-dire un an après la

fondation par M. Ben Laden de son organisation. Ces erreurs, dit Steven

Emerson, l'expert du terrorisme qui, le premier, les a signalées, ont privé

les enquêteurs d'un indice ténu mais précoce de l'existence de

l'organisation de M. Ben Laden.

Le procès du World Trade Center s'est achevé en 1994 et ce n'est qu'en

1996 que la justice fédérale a ouvert une enquête criminelle sur les

activités de M. Ben Laden et du groupe Al-Qaïda. « Si les autorités

judiciaires avaient disposé d'une traduction correcte de ce document, a dit

M. Emerson, elles auraient pu comprendre que les auteurs de l'attentat du

World Trade Center et le groupe de M. Ben Laden étaient liés. »

Interrogé sur ces erreurs de traduction, un porte-parole du bureau du

procureur fédéral, qui n'a pas voulu que l'on cite son nom, a simplement

déclaré que M. Ajaj transportait « un important volume de documents

imprimés de diverses organisations. », ajoutant que leurs titres parlaient

de conspiration internationale, d'opérations de commando et de

fabrication d'engins explosifs.

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Le mouvement du djihad s'est également développé en Europe. En août

1994, trois jeunes musulmans français d'origine nord-africaine, portant

des cagoules et armés de mitraillettes, ont ouvert le feu sur des touristes

dans le hall d'un hôtel de Marrakech, au Maroc, tuant deux Espagnols et

en blessant un troisième. Enquêtant sur cet attentat, la police française a

découvert qu'il avait été préparé par deux Marocains anciens combattants

d'Afghanistan qui avaient recruté à Paris et Orléans des commandos pour

cette attaque et avaient envoyé plus d'une douzaine de leurs membres

s'entraîner en Afghanistan.

L'endoctrinement des jeunes recrues commençait par la religion, selon

des pièces à conviction et des dépositions d'un tribunal français.

Mohamed Zinedine, professeur de mathématiques et interprète du Coran

qui demeurait à Orléans, avait réuni autour de lui un groupe d'hommes

des banlieues de cette ville qui souhaitaient apprendre à prier. Selon la

même source, il leur a ensuite enseigné l'idée d'un djihad à mener contre

les gouvernements corrompus, disant que c'était un stade avancé de

l'observance de la loi islamique.

Un jeune Marocain a déposé que ce M. Zinedine, actuellement en fuite,

lui a présenté une bande vidéo montrant « des musulmans torturés en

Bosnie, des bébés ayant eu la gorge tranchée, des femmes enceintes

éventrées, les ongles arrachés. Il m'a dit, a-t-il poursuivi, qu'il y avait une

façon de les aider et que je devais m'y engager. » Les prières pour des

gens comme les musulmans de Bosnie étaient insuffisantes, selon

l'instructeur, et, selon les mots de celui-ci, il devait devenir un

« humanitaire armé ».

Les polices européennes enquêtant sur le réseau afghan en France, en

Belgique et en Allemagne ont trouvé trace d'appels téléphoniques entre

les islamistes établis en Europe et le Bureau des Services au Pakistan. En

mars 1995, les enquêteurs belges ont découvert une autre pièce à

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215

conviction : un CD-ROM trouvé dans la voiture d'un autre Algérien, qui

avait été entraîné en Afghanistan en 1992 et était membre d'une cellule

du GIA à Bruxelles. Les autorités belges ont reconnu avoir ignoré ce CD

au début de l'enquête.

Elles n'ont fait traduire son contenu que quelques mois plus tard et

découvert qu'il contenait plusieurs versions d'un manuel de terrorisme qui

circulait au sein des groupes islamistes depuis le début des années 90. Ce

volumineux manuel couvre divers sujets, allant de la « guerre

psychologique dans l'Islam » à « l'organisation des services secrets

israéliens » en passant par le « recrutement selon la méthode

américaine ».

Ce manuel contient également des méthodes détaillées de fabrication de

bombes, indiquant par exemple le moment adéquat pour mélanger les

produits chimiques, la façon d'utiliser une montre comme détonateur et

de tuer des gens au moyen de toxines, de gaz et de drogues. La préface

comporte une dédicace au nouveau héros de la guerre sainte : Oussama

Ben Laden. Ce manuel a été largement diffusé sous diverses versions et

des exemplaires ont été saisis par les polices de différents pays

européens.

La CIA, selon Reuel Gerecht, un de ses anciens hauts responsables,

n'aurait, d'après ce qu'on lui a dit, pu disposer d'un exemplaire de ce

manuel que vers la fin de 1999. « Ce guide terroriste, le plus important

jamais écrit, nous faisait défaut, dit-il, depuis des années. » Cette

transmission tardive aurait, selon lui, été la conséquence de la réticence

de l'Agence à examiner les conséquences de son soutien au djihad

antisoviétique. Mais, selon un responsable actuel de celle-ci, elle avait,

dès la fin des années 80, « accès à des versions » de ce manuel. « Ce n'est

pas le Saint-Graal que Gerecht prétend », a-t-il déclaré, ajoutant que les

parties portant sur le terrorisme étaient des ajouts assez récents.

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216

C'est vers le milieu des années 90 que les autorités américaines ont

commencé à prêter attention à M. Ben Laden et à son entourage au

Soudan. Il était, pour elles, la personnalisation d'une dangereuse

évolution récente, un promoteur apatride du terrorisme utilisant sa

fortune personnelle - qu'un responsable du Moyen-Orient a estimée à

près de deux milliards de francs - pour financer les causes extrémistes.

Les autorités américaines ont alors demandé au Soudan d'expulser M.

Ben Laden et, en 1996, obtenu satisfaction, succès diplomatique qu'elles

devaient plus tard regretter amèrement. M. Ben Laden revint alors en

Afghanistan, où un nouveau groupe de jeunes militants islamistes, les

Taliban, prenait le pouvoir. Selon des responsables américains et moyen-

orientaux, une partie de l'argent utilisé par les taliban pour se rallier les

chefs de guerre locaux leur a été fournie par M. Ben Laden. Sans tarder,

ces nouveaux dirigeants intégristes de l'Afghanistan lui ont permis

d'utiliser leur pays pour y poursuivre son objectif de créer « un camp

pour un djihad mondial », selon les mots de M. Anas.

L'édit faisant un devoir sacré pour les musulmans de tuer tous leurs

ennemis

En février 1998, deux ans après son retour en Afghanistan, M. Ben Laden

annonçait publiquement ses intentions. Dans un camp situé à Khost, dans

l'est de l'Afghanistan, entouré de dirigeants d'autres groupes islamistes, il

annonçait qu'ils avaient fondé le Front islamique international pour le

djihad contre les Juifs et les Croisés, regroupant Al-Qaïda et des groupes

notamment égyptien, pakistanais et bangladais, et que ce Front prenait la

fatwa suivante : « Tuer les Américains et leurs alliés, tant civils que

militaires, est un devoir personnel pour tout musulman qui en est capable,

dans tout pays où c'est possible. »

Le 7 août 1998, huit ans après le débarquement de troupes américaines en

Arabie Saoudite, M. Ben Laden mettait, selon le parquet américain, ses

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menaces à exécution : des bombes explosaient à quelques heures

d'intervalle dans les ambassades des États-Unis au Kenya et en Tanzanie.

Il s'est agi d'une opération de dimension véritablement internationale,

selon les procureurs fédéraux, qui affirment que ces attentats ont été

perpétrés par des musulmans de Tanzanie, d'Arabie Saoudite et de

Jordanie, qui, pour la plupart, ont été entraînés en Afghanistan. Selon la

même source, les terroristes kényans qui ont participé à l'opération se

sont entretenus directement avec M. Ben Laden par liaison téléphonique

satellitaire pour préparer leur action.

Ces attentats allaient coûter cher à Al-Qaïda. Moins de deux semaines

après, les États-Unis bombardaient des camps de M. Ben Laden en

Afghanistan. Au cours des deux années qui ont suivi, la police et les

services de renseignement du monde entier, souvent à l'instigation des

États-Unis, ont arrêté plus d'une centaine de ses militants dans une

vingtaine de pays.

Il ne se passe guère de mois sans que des autorités n'arrêtent et

n'interrogent des personnes ayant des liens avec Al-Qaïda. À la fin de l'an

dernier, dans le cadre d'une affaire que des responsables américains ont

qualifié de particulièrement alarmante, la police du Koweït a arrêté un

citoyen de ce pays, ancien combattant d'Afghanistan, qui a avoué être lié

au groupe de M. Ben Laden et préparer des attentats contre des cibles

américaines et koweïtiennes. Selon les autorités américaines, il a

finalement conduit la police à une cache d'armes où elle a découvert près

de 150 kilos d'explosifs et plus de 1.400 détonateurs.

On a évoqué plus haut la fermeture pendant deux jours de l'ambassade

des États-Unis à Rome, il faut y ajouter une alerte plus récente provoquée

par la possibilité d'un attentat d'Al-Qaïda qui, selon les autorités

américaines, a conduit les États-Unis à détourner un de leurs navires de

transport de troupes qui devait accoster à Naples.

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218

Les autorités américaines reconnaissent que M. Ben Laden, avec son

organisation, s'est révélé un adversaire ingénieux et coriace. Aujourd'hui,

une partie importante de sa fortune personnelle a été dépensée ou se

trouve sur des comptes bancaires qui ont été bloqués. Mais, indiquent ces

autorités, il reçoit de l'argent d'un réseau d'organismes charitables et

d'entreprises. Dans de nombreux pays, il reconstitue ses réseaux aussi

rapidement qu'ils sont démantelés.

Et l'échec conduit parfois à la réussite. Selon des responsables

américains, une tentative d'attentat organisée fin 1999 par un groupe de

Yéménites contre un navire américain, The Sullivans, alors qu'il transitait

par le Yémen, a échoué : le bateau des terroristes, bourré d'explosifs, a

coulé à quelques mètres du rivage. Mais, selon la même source, c'est un

agent saoudien du groupe de M. Ben Laden qui avait participé à cette

tentative d'attentat qui a organisé, avec certains des Yéménites impliqués,

l'attentat contre l'U.S.S. Cole au Yémen.

Les répressions nationales contre les militants islamistes, tels les efforts

largement couronnés de succès du pouvoir algérien pour juguler le GIA

au milieu des années 90, ont, dans plusieurs cas, renforcé le djihad

international. Selon les autorités américaines, les islamistes algériens les

plus radicaux collaborent aujourd'hui avec M. Ben Laden. En 1999, elles

ont arrêté Ahmed Ressam au moment où, venant du Canada, il tentait de

franchir la frontière avec un chargement d'explosifs. C'était la première

fois que des Algériens se trouvaient impliqués dans des opérations

terroristes sur le sol américain. Le procès de M. Ressam doit avoir lieu

cette année à Los Angeles.

Selon des responsables américains et moyen-orientaux, Israël qui, jusque

récemment, considérait M. Ben Laden comme un problème

« américain », fait maintenant partie des cibles d'Al-Qaïda. Selon ces

sources, cette organisation a financé et entraîné un groupe anti-israélien,

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219

Asbat al Ansar, qui opère à partir d'un camp de réfugiés palestiniens situé

au Liban.

Selon une inculpation confidentielle israélienne de juin dernier, un

membre du Hamas qui préparait des attentats visant des cibles situées en

Israël, notamment des colons et des militaires, avait été entraîné dans un

camp afghan de M. Ben Laden. « Al-Qaïda veut participer à la nouvelle

intifada contre Israël », a déclaré un responsable américain.

Selon Olivier Roy, spécialiste français des activités des groupes

islamistes, le grand atout d'Al-Qaïda est de disposer de milliers de

partisans du djihad, situés dans le monde entier, qui ne voient plus leur

combat en termes strictement locaux ni même nationaux, ce qui les rend

insensibles aux pressions politiques ou miliaires ordinaires. « Les actions

de M. Ben Laden, dit-il, ne sont pas la continuation de la politique par

d'autres moyens. Oussama Ben Laden ne veut pas négocier. »

1979 : Invasion de l'Afghanistan par des troupes soviétiques. Déclaration

par les musulmans de ce pays d'un « djihad » contre les envahisseurs, que

les États-Unis et l'Arabie Saoudite vont soutenir.

1981 : Assassinat du président égyptien Anouar el-Sadate imputé à des

islamistes.

1984 : Création du Bureau des Services par Abdoullah Azzam, islamiste

jordanien, dans le but de recruter et soutenir des partisans du djihad.

1984 : Départ d'Oussama Ben Laden de l'Arabie Saoudite pour le

Pakistan dans le but d'aider Azzam à créer les camps d'entraînement en

Afghanistan.

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220

1986 : Création par Ben Laden d'Al Masadah, camp d'entraînement pour

les Arabes des États du Golfe.

1988 : Création par Ben Laden d'Al-Qaïda, groupe chargé de mener un

djihad mondial.

1989 : Retrait des troupes soviétiques d'Afghanistan. Fermeture par les

États-Unis de leur ambassade dans ce pays. Formation d'un

gouvernement provisoire afghan. Retour de Ben Laden en Arabie

Saoudite pour travailler dans la société de travaux publics familiale.

Mort d'Azzam dans un attentat à la voiture piégée ; scission du Bureau

des Services dont la faction extrémiste rejoint Al-Qaïda.

1990-1991 : Envoi de forces américaines et alliées en Arabie Saoudite

pour chasser l'Iraq du Koweït. Guerre du Golfe.

Installation au Soudan de Ben Laden, furieux de la présence américaine

près des lieux saints de l'islam, ainsi que du siège d'Al-Qaïda.

1992 : Annulation par l'armée algérienne des élections législatives en

cours. Tentative de renversement du gouvernement par des groupes

islamiques armés et début de la guerre civile.

Envoi de troupes américaines en Somalie pour une mission humanitaire

de l'ONU. Publication par Al-Qaïda d'une fatwa demandant l'attaque par

les musulmans des forces américaines en Arabie Saoudite, au Yémen et

dans la Corne de l'Afrique, notamment en Somalie.

1993 : Explosion au World Trade Center de New York faisant six morts.

Découverte de liens entre le Bureau des Services et Al-Qaïda, sans que

cela puisse conduire à une inculpation de Ben Laden.

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221

1993 : Attaque d'une opération humanitaire de l'ONU par des tribus

somaliennes, qui selon un parquet américain ont été entraînées par Al-

Qaïda. Dix-huit morts américains.

1994 : Montée des taliban comme force décisive dans la guerre civile

d'Afghanistan.

Retrait par l'Arabie Saoudite de la citoyenneté de Ben Laden qui est

désavoué par sa famille.

Explosions dans le métro de Paris, imputées à des militants algériens

entraînés en Afghanistan, faisant huit morts.

1995 : Explosion à Riyad d'une voiture piégée qui tue cinq Américains et

deux Indiens. Exécution par décapitation de quatre Saoudiens qui ont

avoué avoir été influencés par Ben Laden.

1996 : Sous l'influence des États-Unis, expulsion du Soudan de Ben

Laden, qui se réinstalle en Afghanistan.

1996 : Explosion près des Tours Khobar à Dhahran, en Arabie Saoudite,

d'un camion bourré d'explosifs, qui tue 19 soldats américains.

1998 : Publication par le Front islamique international pour le djihad

contre les Juifs et les Croisés - regroupement international

d'organisations islamistes sous la houlette de Ben Laden - de sa première

fatwa : Il est du devoir personnel des musulmans de tuer des Américains,

civils comme militaires, partout où c'est possible.

Attentats contre les ambassades des États-Unis au Kenya et en Tanzanie

faisant plus de 200 morts. En représailles, bombardement par l'aviation

des États-Unis de sites au Soudan et en Afghanistan.

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Inculpation, pour complicité d'attentats, de Ben Laden, aux États-Unis,

qui offrent cinq millions de dollars pour sa capture.

1999 : Annonce par la Jordanie de la découverte du projet, imputé à Al-

Qaïda, d'une série d'attentats contre des sites touristiques à Amman qui

devaient avoir lieu pendant les fêtes du millénaire.

Arrestation aux États-Unis, à un poste de douane de Port Angeles, État de

Washington, d'Ahmed Ressam qui conduisait une voiture de location

contenant des explosifs dissimulés.

2000 : Dans le port d'Aden, au Yémen, attentat contre le destroyer U.S.S.

Cole, qui fait 17 morts parmi l'équipage, opération qui, selon les

enquêteurs, a été montée par Ben Laden.

Reconnaissance par Ali Mohammed, ancien sergent de l'armée

américaine, de sa participation à la conspiration tramée par Ben Laden

dans l'affaire des attentats contre les ambassades des États-Unis en

Afrique orientale.

2001 : Début de la sélection du jury pour le procès de quatre personnes

accusées dans l'affaire des attentats contre les ambassades des États-Unis,

devant le Tribunal fédéral de District de Manhattan.

Reconnaissance par un ancien sergent de l'armée américaine de sa

participation à une conspiration fomentée par Ben Laden et destinée à

réaliser les attentats contre les ambassades des États-Unis en Afrique

orientale. (Source : Département d’Etat américain)

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ANNEXE II

Chronologie

3, 4, 5 février 1986, 17, 20 mars 1986, 8, 12, 14, 15 et 17 septembre

1986. Attentats en France attribués au CSPPA (Comité de solidarité aux

prisonniers politiques arabes) allié des FARL (Fraction armée

révolutionnaire libanaise). Bilan : une quinzaine de morts et plus de 200

blessés. Fouad Ali Salel, le responsable de cette vague d'attentats, est

arrêté en avril 1987.

26 février 1993. Attentat contre l'une des tours du World Trade Center. 6

morts.

9 novembre 1993. Première rafle dans les milieux islamistes en France :

opération « Chrysanthème ». Principaux visés : les cadres de la FAF

(Fraternité algérienne en France), affiliée au FIS algérien.

8 novembre 1994. Arrestation des membres du réseau Chalabi, base

arrière de soutien logistique aux combattants de l'Armée islamique du

salut (FIS) et des GIA.

24 décembre 1994. Détournement par quatre hommes des GIA du vol

d'Air France Alger-Paris. L'affaire se clôt par l'intervention du GIGN à

l'aéroport de Marignane (Marseille).

1er mars 1995. Neutralisation du réseau islamiste belge dirigé par Ahmed

Zaoui, considéré par la police comme l'homme fort des GIA en Belgique.

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20 juin 1995. Démantèlement du réseau Salim. 131 personnes interpel-

lées dans le cadre d'un réseau de soutien aux GIA dirigé par Mohammed

Kerrouche.

11 juillet 1995. Assassinat à Paris du cheikh Abdelkader Sahraoui, l'un

des fondateurs du FIS.

25 juillet 1995. Attentat dans une rame du RER B à la station Saint-

Michel. 8 morts.

17 août 1995. Une bombe placée dans une poubelle au 44 avenue de

Friedland fait 17 blessés.

26 août 1995. La bombe placée sur la voie du TGV Paris-Lyon n'explose

pas.

3 septembre 1995. Le système de mise à feu d'un engin explosif placé

sur le marché Richard-Lenoir à Paris ne fonctionne pas.

4 septembre 1995. Une bombe est découverte dans une Sanisette place

Charles-Vallin à Paris.

7 septembre 1995. Un véhicule piégé explose à proximité d'une école

juive de Villeurbanne (Rhône). Un blessé grave.

29 septembre 1995. Khaled Kelkal, principal suspect dans la vague

d'attentats de 1995, est abattu à Vaugneray, dans la région lyonnaise.

6 octobre 1995. Un attentat avenue d'Italie à Paris fait 16 blessés légers.

17 octobre 1995. Attentat dans le RER C. 30 blessés.

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1er novembre 1995. Arrestation de Boualem Bensaid, l'un des chefs du

réseau responsable de la vague d'attentats de 1995.

4 novembre 1995. Rachid Ramda, considéré comme le financier du

groupe, est arrêté à Londres.

13 novembre 1995. Une bombe tue 7 personnes dans un bâtiment

abritant des militaires américains à Riyad (Arabie Saoudite).

29 mars 1996. Neutralisation du réseau Al Qaïda à Roubaix.

3 décembre 1996. Attentat dans le RER B à la station Port-Royal. 4

morts.

27 juin 1996. Une bombe explose dans le camp américain d’Al Khobar

(Arabie Saoudite) faisant 19 morts.

17 novembre 1997. 68 touristes sont massacrés à Louxor (Egypte).

Attentat attribué à la Jama'a Islamiya égyptienne.

7 août 1998. Attentats contre les ambassades américaines de Nairobi

(Kenya) et Dar es-Salaam (Tanzanie) attribués à Al Qaïda. Plus de 200

morts.

12 octobre 2000. Attaque suicide contre le destroyer américain USS

Cole dans le port d'Aden (Yémen). Attentat attribué à AL Qaïda. 17

morts.

9 septembre 2001. Assassinat du commandant Massoud, héros de la

résistance afghane, par deux Tunisiens appartenant à AL Qaïda.

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226

11 septembre 2001. Quatre avions de ligne détournés par des terroristes

s'écrasent sur les tours du World Trade Center, sur le Pentagone et dans

un champ en Pennsylvanie. Bilan : près de 3 000 morts.

19 septembre 2001. Opération « Justice sans limites », rebaptisée plus

tard « Liberté immuable ». Déploiement des forces américaines dans le

golfe Persique.

5 octobre 2001. L'État de la Floride annonce le décès d'une personne dû

à la maladie du charbon (anthrax). La crainte d'une attaque biologique

gagne l'ensemble du pays.

7 octobre 2001. Début des bombardements américains en Afghanistan

13 novembre 2001. Chute du régime taliban. Les troupes de l'Alliance

du Nord entrent à Kaboul. Début de la traque de Ben Laden et de ses

hommes dans les montagnes de Tora Bora à la frontière afghano-

pakistanaise.

6 décembre 2001. Reddition des taliban à Kandahar, fief du mollah

Omar.

13 décembre 2001. Un attentat suicide contre le Parlement fédéral de

New Delhi fait une quinzaine de morts. Cette action meurtrière est

attribuée aux extrémistes musulmans du Cachemire.

22 décembre 2001. Richard Reid, sujet britannique, tente de faire

exploser une bombe cachée dans ses chaussures lors du vol Paris-Miami.

23 janvier 2002. Un journaliste du Wall Street Journal, Daniel Pear1, est

enlevé à Karachi (Pakistan). Il est assassiné le 21 février par ses

ravisseurs.

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227

17 mars 2002. Un attentat à la grenade fait 5 morts dans un temple

protestant fréquenté par des diplomates à Islamabad (Pakistan). Action

attribuée à des terroristes islamistes.

11 avril 2002. Un camion-citerne explose tout près de la synagogue d'El

Ghriba sur l'île tunisienne de Djerba. Une vingtaine de morts, dont 14

touristes allemands. Auteur présumé de l'attentat : Nizar Ben Mohammed

Nasr Nawar, un Tunisien.

8 mai 2002. Un véhicule bourré d'explosifs percute le bus des ingénieurs

français de la Direction des constructions navales (DCN) à Karachi. 14

morts, dont 11 Français. Al Qaïda est fortement soupçonnée.

19 mars 2003. Début de la guerre en Irak*.

Avril 2003. chute du régime de Saddam Hussein*.

1 mai 2003. Le président Bush déclare la fin de la guerre en Irak*.

11 mars 2004. Attentats en Espagne. Bilan : 197 morts. Al Qaïda en est

le responsable*.

(Source : Ali Laïdi, « Le Jihad en Europe », pages 283-286)

*Moi même

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228

ANNEXE III

HOMELAND SECURITY

US-VISIT is a U.S. Department of Homeland Security program

that enhances our country's entry and exit system. It enables the United

States to effectively verify the identity of incoming visitors and confirm

compliance with visa and immigration policies.

The goals of US-VISIT are to :

Enhance the security of our citizens and visitors

Expedite legitimate travel and trade

Ensure the integrity of the immigration system

Safeguard the persona] privacy of our visitors

The initiative will involve collecting travel information and "biometric

identifiers" (such as fingerprints, using a simple, inkless device) from

visitors to assist the border officer in making admissibility decisions.

The identity of visitors who need a visa to travel to the U.S. will be

verified upon their arrival and departure. These entry and exit procedures

address our critical need for tighter security and our ongoing

commitment to expedite travel for the millions of legitimate visitors we

welcome each year to conduct business, learn, see family, or tour the

country.

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229

The verification process strengthens security by more accurately

verifying the identity of visitors who legitimately travel into the United

States. By capturing "biometrics" through the use of simple fingerprint

scanners, we will be able to conduct this verification process more

quickly and with more certainty than by searching databases by name

alone.

Upon Arrival

Many of the arrival processes will remain unchanged and will be familiar

to international visitors. At an airport or seaport, travel documents such

as a passport and a visa will be reviewed and a U.S. Customs and Border

Protection Officer will ask specific questions regarding the visitor's stay

in the U.S.

As part of the enhanced procedures, most visitors traveling on visas will

have two fingerprints scanned by an inkless device and a digital

photograph taken. All of the data and information is then used to assist

the border inspector in determining whether or not to admit the traveler.

These enhanced procedures will add only seconds to the visitor's overall

processing time.

All data obtained from the visitor is securely stored as part of the visitor's

travel record. This information is made available only to authorized

officials and selected law enforcement agencies on a need-to-know basis

in their efforts to help protect the nation against those who intend to harm

American citizens or visitors to our country.

Page 230: Chapitre 1 : Les acteurs de la lutte contre le terrorisme ...infostrat.typepad.fr/terrorisme.pdf · 4 Voir la lettre de Georg eW. Bush qui est au début u document d la NSHS. 5 Aux

230

US-VISIT Arrival Process for Visitors Traveling with a Visa

Page 231: Chapitre 1 : Les acteurs de la lutte contre le terrorisme ...infostrat.typepad.fr/terrorisme.pdf · 4 Voir la lettre de Georg eW. Bush qui est au début u document d la NSHS. 5 Aux

231

Upon Departure

The most notable change for international visitors will be new exit

procedures.

As part of US-VISIT, most visitors who require a visa will eventually

need to verify their departure. The US-VISIT system is being designed to

make this check out process easy by planning the placement of

automated self-service workstations in the international departure areas

of airports and seaports. By scanning travel documents and capturing

fingerprints on the same inkless device, the system is intended to validate

the visitor's identity, verify their departure, and confirm their compliance

with U.S. immigration policy.

Compliance with these new security procedures is critical because the

exit information will also be added to the individual's travel record to

protect their status for future visits to the United States.

Page 232: Chapitre 1 : Les acteurs de la lutte contre le terrorisme ...infostrat.typepad.fr/terrorisme.pdf · 4 Voir la lettre de Georg eW. Bush qui est au début u document d la NSHS. 5 Aux

232

Upon completion of testing and evaluation, the law requires that US-

VISIT capability be implemented at airports and seaports by December

31, 2003.

US-VISIT will enhance the security of the United States while expediting

legitimate travel and trade. While this has required some changes in our

entry and exit procedures, many things have not changed. The United

States of America is still a nation where diversity is celebrated and

people from all over the world are welcome. Today we - like most other

countries - are working to keep our borders secure while we maintain the

freedom to exchange ideas, keep businesses thriving, and enrich lives all

over the world.

US-VISIT helps to secure our borders, expedite the entry/exit process

and enhance the integrity of our immigration system while respecting the

environment and the privacy of our visitors.

(Source: www.dhs.gov/US-VISIT)

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233

ANNEXE IV

AIR PORTS OF ENTRY DESIGNATED FOR US-VISIT

JANUARY 5, 2004

RANK ENTRY AIRPORT RANK ENTRY AIRPORT

1 MIAMI IAP, FL 33 SAN ANTONIO,TX

2 TORONTO, CANADA 34 FREEPORT, BAHAMAS

3 JFK IAP, NY 35 HAMILTON, Bermuda

4 LOS ANGELES IAP, CA 36 SHANNON, Ireland PFI

5 VANCOUVER, CANADA 37 CINCINNATI, OH

6 MONTREAL, CANADA 38 BALTIMORE, MD

7 SAN FRANCISCO, CA 39 DENVER, CO

8 HOUSTON Intercontinental ,TX 40 TAMPA , FL

9 CHICAGO OHARE, IL 41 SAN DIEGO, CA

10 CHICAGO MIDWAY, IL 42 DUBLIN, IRELAND PFI

11 CALGARY, CAN PFI 43 MEMPHIS, TN

12 NEWARK, NJ IAP 44 Charlotte-Douglas, NC

13 ATLANTA, GA 45 PITTSBURGH, PA

14 DALLAS FT. WORTH, TX 46 TUCSON , AZ

15 DULLES, VA IAP 47 ARUBA

16 HONOLULU IAP, HI 48 ST. THOMAS, VI

17 DETROIT IAP, MI 49 West Palm Beach, FL

18 NASSAU, BAHAMAS 50 SANFORD, FL

19 OTTAWA, CANADA 51 NEW ORLEANS, LA

20 BOSTON LOGAN, MA 52 LAREDO, TX

21 SEATAC IAP, WA 53 Raleigh-Durham, NC

22 SAN JUAN, PR 54 BANGOR, ME

23 EDMONTON, CANADA 55 SALT LAKE CITY, UT

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234

24 ANCHORAGE IAP, AK 56 ST. CROIX, VI

25 LAS VEGAS, NV 57 ST. LOUIS, MO

26 MINNEAPOLIS ST. PAUL, MA 58 FORT MYERS, FL

27 WINNIPEG, CANADA 59 BELLINGHAM, WA

28 AGANA, GUAM 60 CLEVELAND, OH

29 ORLANDO, FL 61 SPOKANE, WA

30 FORT LAUDERDALE, FL 62 KONA, HI

31 PHILADELPHIA, PA 63 PROVIDENCE, RI

32 PHOENIX , AZ 64 BRADLEY

RANK ENTRY AIRPORT RANK ENTRY AIRPORT

65 PORTLAND, OR 99 KENMORE, WA

66 NORFOLK, VA 100 KING COUNTY, WA

67 ERIE, PA 101 KODIAK, AK

68 Brownsville-South Padre, TX 102 MANCHESTER, NH

69 KEY WEST, FL 103 MCALLEN, TX

70 MILWAUKEE, WI 104 OAKLAND, CA

71 FAIRBANK, AK 105 ONTARIO, CA

72 INDIANAPOLIS, IN 106 OPA-LOCKA

73 WILMINGTON, NC 107 Pease Tradeport, NH

74 PORTLAND, ME 108 RICHMOND, VA

75 MAYAGUEZ, PR 109 SACRAMENTO, CA

78 DOVER, DE 110 SAN JOSE, CA

79 PONCE, PR 111 SARASOTA, FL

80 AUSTIN BERSTROM, TX 112 ST. LUCIE, FL

81 DEL RIO, TX 113 ST. PETERSBURG, FL

82 SANDUSKY GRIFFIN, OH 114 Tamiami Executive, FL

83 NASHVILLE, TN 115 TETERBORO, NJ

84 JUNEAU, AK

85 JACKSONVILLE, FL

86 INTERNATIONAL FALLS, MN

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235

87 RENO, AZ

88 CHARLESTON, SC

89 COLUMBUS, OH

90 KANSAS CITY, KS

91 ALBUQUERQUE, NM

92 VICTORIA - SYDNEY, CANADA

93 AGUADILLA, PR

94 BUFFALO, NY

95 EL PASO, TX

96 FAJARDO, PR

97 GREENVILLE, SC

98 ISLA GRANDE, PR

SEA PORTS OF ENTRY

GALVESTON RCI, TX

LONG BEACH CARNIVAL CRUISE, CA

MIAMI - RCI, FL

PORT CANAVERAL, FL

PORT CANAVERAL, TERMINAL 10 FL

SAN JUAN PAN-AMERICAN, PR

SAN PEDRO WORLD CRUISE CENTER, CA

SEATTLE SEAPORT, WA

SEATTLE, WA BIRTH 30, CRUISE TERMINAL

TAMPA, FL TERMINAL 3

TAMPA, FL TERMINAL 7

VANCOUVER, BALLANTYNE PIER, CAN

VANCOUVER, CANADA PLACE, CAN

VICTORIA, PRE INSPECTION, CAN

WEST PALM SEAPORT, FL

(Source : www.dhs.gov/US-VISIT)

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ANNEXE V

1. Organisations et individus accusés d'activités

terroristes par les États-Unis après les attaques du 11

septembre 2001

Les organisations

Al Qaïda ; le réseau Abou Sayyaf, essentiellement implanté aux

Philippines; les Groupes islamiques armés (GIA algériens) ; le Groupe

salafiste pour la prédication et le combat (GSPC algérien) ; Harakat al

Moujahidine (Cachemire) ; le Mouvement islamique d'Ouzbékistan ;

Jihad islamique (Égypte) ; Jama'a Islamya (Égypte) ; Asbat al Ansar

(Liban) ; le Groupe de combat islamique libyen; Al Itihad al Islamiya

(Somalie) ; Armée islamique d'Aden (Yémen) ; Jaish-e-Mohamed

(Armée de Mahomet) implantée au Pakistan.

Les Hommes

Oussama Ben Laden ; Mohammed Atef (mort en novembre 2001 en

Afghanistan) ; Sayf al Adl ; Cheikh Saïd ; Abou Hafs ; Ibn al Cheikh al

Libi ; Abou Zoubeida (arrêté le 3 avril au Pakistan) ; Abdel Hadi al Iraqi;

Ayman al Zawahiri ; Tharwat Salah Chihata ; Tarek Anouar al Sayyed

Ahmad ; Mohamed Salah ; Mamoun Darkanzali ; Bilal Ben Marouan ;

Saad al Sharif ; docteur Amin al Haq ; Hadji Abdul Manan Agha;

Mohamed al Hamati ; Sakar al Djadaoui ; Ahmed Saïd al Kader; Yassine

al Kadi ; Ayadi Chafik Ben Mohammed ; Raed Hijazi ; Rachid Ahmed

Ladehyanov ; Omar Mahmoud Ousman ; Tohir Iouldachev ; Mohamed

Zia ; Abdel Rahmane Yassine ; Khaled Cheikh Mohamed ; Ahmed

Ibrahim al Moughassil ; Ali Saïd Ben Ali el Houri; Ibrahim Salih

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237

Mohamed al Yacoub ; Abdelkarim Hussein Mohamed al Nasser ; Fazul

Abdallah Mohamed ; Mustapha Mohamed Fadhil ; Fahid Mohamed Ally

Msalam ; Cheikh Ahmed Salim Souedan ; Ahmed Khalfan Ghaïlani ;

Abdallah Ahmed Abdallah ; Ahmed Mohamed Hamed Ali ; Mouchine

Moussa Matwalli Atwah ; Imad Moughniyeh ; Ali Atwa ; Hassan Izz al

Din.

Organisations non gouvernementales islamiques (ONGI)

Makhtab Al Khidamat ; AL Kifah ; Wafa ; AL Rashid Trust; Al

Haramein.

Sociétés

Al Hamati Sweets Bakeries ; Al Shifa Honey Press for Industry and

Commerce; Jamia Ta'awoun Al Islamia; Fonds Rabita.

2. Principales arrestations dans les milieux islamistes

liées aux événements du 11 septembre 2001

Nous avons choisi de présenter les principales arrestations dans les

milieux islamistes liées aux attentats contre les États-Unis afin de

montrer l'ampleur du phénomène dans le monde. Précisons que toutes les

personnes citées bénéficient de la présomption d'innocence tant qu'elles

ne sont pas jugées.

Afghanistan

John Walker Lindh (21 ans). taliban américain, appréhendé le 1er

décembre 2001 au fort de Qala-e-Jhangi, près de Mazar-e-Charif.

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Allemagne

Mounir al Motassadek (27 ans). Marocain, arrêté fin novembre

2001. II aurait été en contact avec les trois kamikazes de

Hambourg (Atta, Al Shehhi et Jarrah).

Mandat d'arrêt contre le Marocain Zakariyah Essaabar (24 ans) et

le Yéménite Ramzi Bin al Shibh (29 ans), colocataires d'Atta. Bin

al Shibh avait tenté d'obtenir en août 2001 un visa pour les États-

Unis. Il a fui le 5 septembre 2001. Autre mandat d'arrêt contre

Saïd Bahaji (26 ans) qui aurait vécu dans le même appartement

qu'Atta à Hambourg. Il a quitté le pays le 3 septembre 2001 pour

le Pakistan.

Arabie Saoudite

Le 18 juin 2002, les autorités saoudiennes ont officiellement

annoncé l'arrestation de sept hommes présumés appartenir au

réseau AL Qaïda. C'est la première fois que Riyad reconnaît

l'existence de réseaux à l'intérieur de ses frontières. Parmi ces

hommes figure un Soudanais arrêté à Khartoum et expulsé vers

l'Arabie Saoudite. Cet homme est accusé d'avoir préparé des

attentats au lance-missiles contre la base militaire du Prince-

Sultan à Kharj.

Belgique

Tarek Maaroufi. Belge d'origine tunisienne, arrêté le 18 décembre

2001 et soupçonné d'avoir recruté des activistes pour le compte

d'Al Qaïda.

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239

Nizar Trabelsi. Ancien footballeur professionnel tunisien, arrêté

le 13 septembre 2001. Il aurait préparé un attentat contre

l'ambassade américaine à Paris en relation avec le réseau de

Djamel Beghal.

Mohammed Sliti. Arrêté en février 2002 en Iran et extradé en

Belgique en raison de sa nationalité belge. A séjourné avec sa

famille plusieurs années en Afghanistan. Il se serait occupé du

recrutement et de l'entraînement des jeunes recrues.

Espagne

Imad Eddin Barakat Yarbas, alias Abou Dahdah. Espagnol

d'origine syrienne, chef présumé d'une cellule démantelée à la mi

novembre 2001. Serait un proche de l'Algérien Mohammed

Bensakhria, détenu en France et soupçonné d'être le relais Al

Qaïda (arrêté à Madrid le 22 juin 2001). Abou Dahdah est

soupçonné par le juge Garzon d'avoir directement participé à la

préparation des attentats du 11 septembre. Il aurait été souvent

aperçu à Londres en compagnie d'Abou Qutada, considéré par les

policiers comme le guide spirituel d'Al Qaïda en Grande-

Bretagne.

Najib Chahib Mohammed. Marocain, appréhendé en janvier

2002. Il serait l'auteur d'un manuel de fabrication d'explosifs.

Ahmed Brahim. Algérien, placé en détention le 17 avril 2002. Il

est soupçonné d'avoir participé au financement des attentats

contre les ambassades américaines du Kenya et de Tanzanie en

1998.

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240

Mohamed Galeb Kaladje Zouaïd. Arrêté le 23 avril 2002, il est

accusé par la police de financer le réseau Al Qaïda en Europe.

Le 16 juillet 2002, la police espagnole a interpellé trois hommes

soupçonnés d'appartenir à Al Qaïda : Adbelrahman Alarnaat,

Mohammed Khan, considéré comme un financier d'AL Qaïda, et

Ghasoub al Abrash, dit Abu Mousab.

Etats-Unis

Zacarias Moussaoui (33 ans). Franco-Marocain, arrêté le 16 août

2001 par la police de Saint Paul (Minnesota) pour sa conduite

étrange dans une école de pilotage.

Mohammed Jawid Azmath (-47 ans) et Ayoub Ali Khan (51 ans).

Arrêtés le 12 septembre en possession d'une grosse somme

d'argent et de cutters dans un train au Texas. Ils sont aussi pilotes

débutants.

Nabil Marabh (34 ans) et Walid Batouni. Appréhendés par le FBI

le 20 septembre à Chicago. Le FBI soupçonne Marahb d'avoir

joué un rôle d'intermédiaire entre Ben Laden et les dix-neuf

kamikazes.

Bassam Kanj. Chauffeur de taxi arrêté à Boston. Il est soupçonné

d'avoir été en relation avec les terroristes du 11 septembre. Il

serait lié à Raed Hijazi, Jordanien détenu à Amman (il aurait

préparé des attentats), considéré comme un proche de Ben Laden.

Moataz al Hallak. Imam résident à Laurel (Maryland). Il est

soupçonné par le FBI d'avoir été en relation avec Ben Laden en

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241

1999 dans le cadre d'une collecte de fonds pour une association

musulmane.

Omar Bakarbasha (26 ans). Arrêté par le FBI entre les 19 et 21

septembre à San Diego (Californie). L'homme aurait remis de

l'argent aux kamikazes et les aurait initiés au Web.

Al Badr Mohammed al Hazmi (31 ans). Saoudien, arrêté à San

Diego pour ses éventuels liens avec les pirates de l'air.

Richard Reid. Britannique. Arrêté le 22 décembre 2001 alors qu'il

tentait de faire exploser le vol Paris-Miami. Il est accusé d'avoir

été entraîné dans les camps d'Al Qaïda.

José Padilla, alias Abdoullah al Moudjahir. Citoyen américain

arrêté le 8 mai 2002 à Chicago. I1 aurait été chargé par Al Qaïda

d'organiser un attentat à la « bombe sale » : une charge explosive

classique entourée d'éléments radioactifs.

France

Jérôme Courtallier. Arrêté aux Pays-Bas le 18 septembre 2001 en

compagnie de deux autres personnes pour « faux en écriture et

fabrication de faux documents en vue de préparer un attentat ».

Son frère, David Courtallier, a été arrêté début 1999 à Caen

(Calvados), mis en examen pour « association de malfaiteurs en

relation avec une entreprise terroriste ». Converti à l'islam à

Londres, il aurait suivi un stage militaire en Afghanistan en 1997-

1998.

Djamel Beghal. Ce Français est considéré comme une pièce

maîtresse en France du réseau Al Qaïda. Il aurait recruté le Belge

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Trabelsi et Kamel Daoudi. Il a été arrêté le 28 juillet 2001 à

Dubaï en provenance du Pakistan et extradé en France le 30

septembre 2001.

Yacine Akhnouche. Arrêté plusieurs fois avant le 11 septembre

pour avoir passé trois ans en Afghanistan. Il aurait raconté aux

policiers sa rencontre avec Zacarias Moussaoui dans les camps

d'Al Qaïda.

Youssef el Aouni (28 ans). Français d'origine marocaine, écroué

le 30 novembre 2001 pour «falsification de documents

administratifs et association de malfaiteurs dans un but

terroriste» ; Adel Tebourski (38 ans), Français d'origine

tunisienne, arrêté dans une ferme du Nord, a été mis en examen le

3 décembre 2001 pour « association de malfaiteurs dans un but

terroriste ». Tous les deux appartiendraient au réseau qui a livré

les faux papiers ayant servi aux meurtriers de Massoud. Deux

complices ont été arrêtés le 18 janvier 2002 : l'Algérien

Abderahmane Ameroud (24 ans) et le Français d'origine

algérienne Mehrez Azouz (34 ans).

Ghulam Mustafa Rama. Pakistanais. Il a été arrêté le 12 juin 2002

avec deux autres hommes. La justice française le soupçonne

d'avoir apporté son soutien à Richard Reid, l'auteur de la tentative

d'attentat sur le vol Paris-Miami, le 22 décembre 2001.

Grande-Bretagne

Lofti Raissi (27 ans). Pilote algérien arrêté le 21 septembre, puis

libéré sous caution. Suspecté d'avoir instruit certains kamikazes.

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243

Bagdad Meziane (36 ans) et Brahim Benmerzouga (30 ans).

Algériens poursuivis pour leurs liens éventuels avec Al Qaïda,

appréhendés en septembre 2001 à Leicester en même temps que

Kamel Daoudi, expulsé vers la France.

Amar Makhnulif, dit Abou Doha. Arrêté avant le 11 septembre

dans le cadre d'une affaire de réseau italien. Cet Algérien est

suspecté d'avoir préparé un attentat contre l'aéroport de Los

Angeles. Les Américains ont demandé son extradition.

Seifallah Ben Hassine: Tunisien basé à Londres et recherché par

les policiers dans le cadre d'une affaire italienne.

Yasser al Siri (38 ans). Égyptien, arrêté le 23 octobre 2001 et

inculpé de complicité dans le meurtre du commandant Massoud.

Il aurait fourni la lettre de recommandation.

Abou Qutada (41 ans). Palestinien, réfugié politique. II a disparu

après l'adoption d'une loi sur l'élargissement de la détention voté

après le 11 septembre. Considéré comme le guide spirituel d'Al

Qaïda en Europe.

Khalid al Fawwaz (37 ans). Égyptien. Incarcéré depuis 1998. Les

Américains souhaitent son extradition; ils le soupçonnent d'avoir

été le chef d'Al Qaïda en Grande-Bretagne et d'être impliqué dans

les attentats contre les ambassades américaines au Kenya et en

Tanzanie, en 1998 (224 morts).

Inde

Mohamed Afroz Abdul Razzak. Libéré le 9 avril 2002 après

quatre mois de détention. L'homme a versé une caution de 2 000

dollars environ.

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244

Italie

Avril 2001, le réseau des Tunisiens de Milan tombe. Fin février,

les membres sont condamnés à des peines allant jusqu'à 5 ans de

prison (Ben Khemais ; Mohammed Aouadi Ben Belgacem;

Mokhtar Bouchocha et Tark Charaabi : tous tunisiens). Chef de

cette cellule, Essid Sami Ben Khemais, alias « Saber », considéré

comme le chef du recrutement d'Al Qaïda en Italie, est soupçonné

d'avoir été en relation avec Omar Chaabani, alias Abou Jaffar,

l'un des lieutenants de Ben Laden.

Depuis le 11 septembre, la police italienne a opéré 73

arrestations. Trois autres Tunisiens soupçonnés d'appartenir à Al

Qaïda comparaissent le 18 février devant le tribunal de Milan :

Madhi Kammoun, Abdel Ben Soltane et Jelassi Riadh.

Mi-septembre 2001, le réseau napolitain de Takfir Wal Hijra (16

arrestations) est démantelé.

Entre les 14 et 29 novembre 2001. arrestations d'Abdel Halim

Hafed Remadna (Algérien), Yassine Chekkouri (Marocain),

Nabel Bennatia (Tunisien). Ils fréquentaient le Centre d'études

islamiques de Milan.

Sami Kishk, alias Hammada. Égyptien basé à Paris, arrêté à

l'aéroport de Rome, le 20 novembre 2001. Sous le coup d'un

mandat d'arrêt italien depuis le 5 octobre, il serait, selon la police,

le faussaire d'une cellule du GSPC (Groupe salafiste pour la

prédication et le combat) installée à Milan.

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Huit Marocains sont arrêtés fin février 2002. Ils sont soupçonnés

d'avoir préparé un attentat contre l'ambassade des États-Unis à

Rome.

Maroc

Abou Zoubair el Haili. Saoudien, surnommé « l'ours ». Il a été

interpellé au Maroc à la mi-juin 2002. Il est considéré par les

services américains comme un cadre important d'Al Qaïda,

proche de Ben Laden.

Début juin 2002, les services de sécurité marocains ont neutralisé

un groupe de Saoudiens appartenant à Al Qaïda. Les trois

hommes - Hilal Djaber Aouad al Assiri, Zouhair Hilal Mohamed

al Tbaïti et Abdullah M'Sfer Ali al Ghamdi - sont suspectés

d'avoir préparé des attentats suicides contre des navires de guerre

américains et britanniques stationnés dans les ports marocains.

Pakistan

Cheikh Omar. Soupçonné d'être le commanditaire du rapt et de

l'assassinat de Daniel Pearl (journaliste au Wall Street Journal), il

est arrêté le 12 février 2002. Les Etats-Unis ont demandé son

extradition.

Abou Zoubeida. Responsable du recrutement d'Al Qaïda. Il est

arrêté le 3 avril 2002 à Faisalabad et remis aux Américains.

Singapour

Début janvier 2002, arrestation de treize suspects liés à Al Qaïda.

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Mi-février, arrestation de treize suspects accusés de préparer des

attentats à l'explosif (21 tonnes de nitrate d'ammonium).

Turquie

Ahmed Mahmud, Mustapha Hassan et Firas Suleiman, qui se sont

présentés respectivement comme jordanien, palestinien et irakien

à la police turque, ont été arrêtés le 15 février 2002 en Turquie

orientale. Soupçonnés de préparer des attentats en Israël, ils

provenaient d'Afghanistan via l'Iran. (Source : Ali Laïdi, « Le Jihad en Europe », pages 275-281)

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BIBLIOGRAPHIE

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248

Ouvrages

1) ACHCAR Gilbert, « Le Choc des Barbaries », Paris, Complexe,

2002.

2) BODY-GENDROT Sophie, « La société américaine après le 11

septembre », Paris, Presses de Sciences Po., 2002.

3) BONANATE Luigi, « Le terrorisme international », Rome

(Italie), Casterman, 1994.

4) BRISARD Jean-Charles et DASQUIE Guillaume, « Ben Laden

la vérité interdite », Paris, éd. Denoël, 2002.

5) CHALIAND Gérard, « L’Arme du Terrorisme », Paris, Louis

Audibert, 2002.

6) CHOMSKY Noam, « De la guerre comme politique étrangère

des Etats-Unis », éd. Agone, 2001.

7) CHOMSKY Noam, « Pouvoirs et Terreur », Paris, Le Serpent à

Plumes, 2003.

8) COOLEY John K., « CIA et Jihad 1950-2001 (Contre l’URSS,

une désastreuse alliance) », Paris, Autrement, 2002.

9) DELAPORTE Murielle, « La politique étrangère américaine

depuis 1945 », Paris, Complexe, 1996.

10) ENCEL Frédéric et GUEZ Olivier, « La Grande alliance de la

Tchétchénie à l’Irak : un nouvel ordre mondial », Paris, Flammarion,

2003.

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249

11) FRANCART Loup et DUFOUR Isabellle, « Stratégies et

décisions : "la crise du 11 septembre" », Paris, Economica, 2002.

12) FREYMOND Jacques, « La Paix Dangereuse », Neuchâtel

(Suisse), éd. La Baconniére, 1986.

13) GERE François, « Demain la guerre : une visite guidée », Paris,

Calmann-Lévy, 1997.

14) « Guerre secrète contre Al-Qaïda », dir. par DENECE Eric,

Paris, Ellipses éd. Marketing S.A, 2002.

15) GUNARATMA Rohan, « Al Qaïda: Au cœur du premier réseau

terroriste mondial », Paris, Autrement, 2002.

16) HASSNER Pierre et VAÏSSE Justin, « Washington et le

Monde », Paris, Autrement, 2003.

17) HEISBOURG François, « Hyperterrorisme : la nouvelle

guerre », Paris, Galilée, 2002.

18) HOFFMAN Bruce, « La mécanique terroriste », Paris,

Calmann-Lévy, 1999.

19) KAGAN Robert, « La puissance et la faiblesse: les Etats-unis et

l’Europe dans le nouvel ordre mondial », Paris, Plon, 2003.

20) KISSINGER Henry, « La nouvelle puissance américaine »,

Paris, Fayard, 2003.

21) LABBE Marie-Hélène, « L’arme économique dans les relations

internationales », Paris, PUF, 1994.

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250

22) LABEVIERE Richard, « Les dollars de la terreur », Paris,

Grasset et Fasquellle, 1999.

23) LAÏDI Ali, « Le Jihad en Europe : les filières du terrorisme

islamiste », Paris, Seuil, 2002.

24) « La première guerre du XXIe siècle », dir. par JEAMBAR

Denis, Paris, L’Express, 2001.

25) LAURENT Eric, « La guerre des Bush », Paris, Plon, 2003.

26) LAVENUE Jean-Jacques, « Dictionnaire de la politique et du

droit constitutionnel américain », Paris, L’Harmattan, 1995.

27) « Les stratégies du terrorisme », dir. par CHALIAND Gérard,

Paris, Desclée de Brouwer, 1999.

28) « Lutte contre le terrorisme et droits fondamentaux », dir. par

BRIBOSIA Emmanuelle et WEYEMBERGH Anne, Bruxelles

(Belgique), Bruylant, 2002.

29) RAMONET Ignacio, « Guerres du XXIe siècle », Paris, Galilée,

2002.

30) RETIVEAU Michel, « La convention de terreur : terreur légale

et terrorisme dans les sociétés démocratiques », Paris, L’Harmattan,

1994.

31) ROY Olivier, « Les illusions du 11 septembre : le débat

stratégique face au terrorisme », Paris, Seuil et La République des

Idées, 2002.

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251

32) VAREILLES Thierry, « Encyclopédie du terrorisme

International », Paris, L’harmattan, 2001.

Documents officiels

1) Mémorandum 01 408 du département de la Justice américain, 13

septembre 2001.

2) "National Strategy For Homeland Security", par l’Office of

Homeland Security (OHS), juillet 2002.

3) "The National Security Strategy of the United States", septembre

2002.

4) "National Strategy for Combatting Terrorism", février 2003.

5) Rapport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (AV 187/EC

(02) 7), « Les conséquences économiques du 11 septembre 2001 et la

dimension économique de la lutte contre le terrorisme », par Paul

HELMINGER, 23 septembre 2002.

6) Rapport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (AV 172/CC

(02) 9 rév. 1), « La lutte contre le terrorisme : résultats et

questions », par KRÖNING Volker, novembre 2002.

7) Rapport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (AV 181/DSC

(02) 15 rev. 1), « La guerre contre le terrorisme », par SHIMKUS

John, novembre 2002.

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8) Rapport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (54 DSC 03

E), « Progress in the war against terrorism », SHIMKUS John et

MUÑOZ-ALONSO Alejandro, 28 avril 2003.

9) Déclaration du sommet de l’OTAN à Prague le 21 novembre

2002 (OTAN).

10) Résolution 1373 du Conseil de sécurité adoptée le 28 septembre

2001 (S/res/1373).

11) Résolution 1386 du Conseil de sécurité des NU adoptée le 20

décembre 2001.

12) E/CN.4/2002/L.50/Rev. 1, le 16 avril 2002 (Nations Unies).

13) A/57/273 – S/2002/875, 6 août 2002 (Nations Unies).

14) Rapport d’Information du Sénat français, n° 313, Session

ordinaire de 2001-2002.

Articles de presses

1) ADDI Lahouari, « La perception des attentats du 11 septembre

dans le monde arabe et musulman », CONFLUENCES

MEDITERRANEE, N° 40, Hiver 2001-2002.

2) CHAMPIN Christophe, « Les Etats "voyous" solidaires de

Washington », RFI (Radio France Internationale), 13 septembre 2001.

3) CHESNOT Christian, « Le monde arabo-musulman refuse les

amalgames », RFI (Radio France Internationale), 5 septembre 2002.

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4) CORIOU Loïc et BOURGEAT Régis, « La liberté de la presse

à l'épreuve de la politique anti-terroriste de l'administration Bush »,

REPORTERS SANS FRONTIERES, 23 mai 2002.

5) COURRIER INTERNATIONAL N° 680 du 13 au 19 novembre

2003.

6) De La GORCE Paul-Marie, « Aux sources de la dispute franco-

américaine », LE MONDE DIPLOMATIQUE, mars 2003.

7) DUTEIL Mireille, « Diplomatie : une amitié houleuse », LE

POINT, N° 1515, 28 septembre 2001.

8) GADAULT Thierry et TANGUY Gilles, « L'Irak, terre de

contrats français », L’EXPANSION, 26 février 2003.

9) GHORBAL Samy, « Europe/Etats-Unis : la fracture », JEUNE

AFRIQUE L’INTELLIGENT (JAI), n° 2235, du 9 au 15 novembre

2003.

10) GOSSET Ulysse, « Singes capitulards mangeurs de

grenouilles», OUEST-FRANCE, mai 2003.

11) GRESH Alain, « Arabie Saoudite : Coup de froid sur les

relations avec Washington », LE MONDE DIPLOMATIQUE, juin

2002.

12) GRESH Alain, « Lendemain de "Victoire" : les grands écarts de

l’Arabie Saoudite », LE MONDE DIPLOMATIQUE, juillet 2003.

13) HANSON Victor Davis, « Adieu à l’Europe », LE DEBAT, N°

123, janvier-février 2003.

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14) LABERGE Martin, « La France et la politique américaine en

Irak », POINTS DE MIRE, Vol. 4 N° 3, 27 février 2003 (CEPES ou

Centre d’Etudes des Politiques Etrangéres et de Sécurité se trouvant

au Canada).

15) « La France et la Russie opposeront leur droit de veto », RADIO-

CANADA, 10 mars 2003.

16) LAGARDE Dominique et SALÜN Tangi, « Guerre d'Irak : le

grand écart des régimes arabes », L'EXPRESS, 3 avril 2003.

17) « Les positions semblent inconciliables », RADIO-CANADA, 30

janvier 2003.

18) « Les voix de la paix s'élèvent partout dans le monde », RADIO-

CANADA, 15 mars 2003.

19) « Londres et Paris se disputent l'Afrique », RADIO-CANADA,

10 mars 2003.

20) NICOLET Laurent, « Vladimir Poutine menace de suivre en

Georgie l’exemple américain », LE TEMPS (Genève), 18 septembre

2002.

21) « Pas de "French Fries" au Capitole! », RADIO-CANADA, 11

mars 2003.

22) RICHE Pascal, « Aux frontières américaines : souriez vous êtes

fichés », LIBERATION, 6 janvier 2004.

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23) SHRYOCK Andrew, « Les Arabes de Detroit et la "guerre

contre le terrorisme" de l’Amérique : la remise en question de leur

citoyenneté américaine », HERODOTE, n° 109, 2e trimestre 2003.

24) SIMONNET Dominique, « L’Amérique doit mener la politique

des forts », L’EXPRESS, 6 mars 2003.

25) SOUDAN François, « Rêve ou cauchemar ? », JAI, 14 mars

2004 (Article extrait du site internet de l’hebdomadaire).

26) WARRAQ Ibn, « Contre l’islamisme militant », POLITIQUE

INTERNATIONALE, n° 95 - Printemps 2002

Divers

1) ALDAPE Sofia, « The Us Campaign In Afghanistan : The Year

In Review », Center for Denfense Information (CDI), 10 octobre

2002.

2) BIGLER Alan, « Le Programme américain d’aide à la lutte

antiterrorisme », diffusé par le Bureau des programmes

d’information internationale du Département d’Etat, 7 décembre

2001.

3) HOFFMAN Paul, « Libertés Publiques Aux Etats-Unis Après le

11 Septembre », diffusé par le Bureau du secrétariat de presse de la

Maison Blanche, 13 novembre 2001.

4) Intervention de Dominique de VILLEPIN, ministre des Affaires

étrangères français, au Conseil de sécurité le 14 février 2003.

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5) « La Nouvelle liste d’exclusion des Organisations Terroristes »,

Fiche d’information diffusé par le Bureau des programmes

d’information internationale du Département d’Etat, 21 novembre

2002.

6) LEBAS Colomban, « Quel avenir pour la relation

transatlantique », septembre 2002 (Etude menée pour la fondation

Robert Schuman).

7) PILLAR Paul, « La lutte contre le terrorisme et ses

instruments », diffusé par le Bureau des programmes d’information

internationale du Département d’Etat, le 6 décembre 2001.

8) RANCOURT Jean François et ROUSSEL Stéphane, « Le

Département de la Homeland Security (DHS) : Tour de Babel

Bureaucratique Américaine ? », Bulletin d’information "Le Maintien

de la paix", n° 61, décembre 2002 (Canada).

9) ROSS Wendy, « La réorganisation du FBI à la suite des

attaques du 11 septembre », diffusé par le Bureau des programmes

d’information internationale du Département d’Etat, 30 mai 2002.

10) TERTRAIS Bruno, « Analyse et enseignements de la campagne

Iraqi Freedom », FRS (Fondation pour la Recherche Stratégique), 24

avril 2003.

Sites interne t

1) http://news.bbc.co.uk/

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257

2) http://usinfo.state.gov/ (Site officiel du Département d’Etat des

Etats-Unis).

3) www.army.mil (Site de l’armée américaine).

4) www.cairotimes.com/ (Site de l’hebdomadaire égyptien Cairo

Times).

5) www.cdi.org: (Center for Defense Information (CDI). Site

d’information sur la défense américaine. Vous pouvez y retrouver des

informations sur la campagne irakienne, sur la campagne afghane, sur

le partenariat stratégique Etats-unis/Russie etc.)

6) www.centcom.mil (Site du commandement militaire américain

Centcom responsable des opérations en Afghanistan)

7) www.defense.gouv.fr/dga/fr/pdef/declaration_sommet_prague

.pdf (Site du ministère de la défense française. Vous retrouverez à

cette adresse la Déclaration du sommet de l’OTAN à Prague le 21

novembre 2002).

8) www.defenselink.mil (Site du Département de la défense des

Etats-Unis).

9) www.enduring-freedoms.org (Site créé par Reporters sans

frontières pour dénoncer les atteintes aux libertés collectives et

individuelles engendrées par la guerre contre le terrorisme).

10) www.er.uqam.ca/nobel/cepes (Site du Centre d’Études des

Politiques Etrangéres et de Sécurité ou CEPES).

11) www.fatf-gafi.org (Site du GAFI).

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12) www.frstrategie.org/ (Site de la Fondation pour la recherche

stratégique).

13) www.globalsecurity.org

14) www.gulfnews.com/ (Site du quotidien Gulf News au Emirats

Arabes Unis).

15) www.ifrance.com

16) www.jeuneafrique.com (Site de l’hebdomadaire africain Jeune

Afrique l’Intelligent).

17) www.kuwaittimes.net/today/index.php (Site du quotidien

koweitien Kuwait Times).

18) www.lefigaro.fr

19) www.lemonde.fr

20) www.lexpansion.com (Site du Magazine l’Expansion).

21) www.liberation.fr

22) www.radio-canada.ca (Site de Radio Canada).

23) www.rfi.fr (Site de Radio France Internationale).

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TABLE DES MATIERES

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260

SOMMAIRE …………………………..…………...…………..…… 1

INTRODUCTION ……………………………..…………….......... 3

PREMIERE PARTIE : DE L’EFFICACITE DE LA

GUERRE ANTI-TERRORISTE …………..…………..…........ 8

CHAPITRE 1 : Les acteurs de la guerre contre le terrorisme

et leurs missions ……………..……………………………….……….... 9

I. Une brève présentation de la NSHS ……………..……….... 9

II. Le rôle des autorités fédérales américaines dans la guerre

contre le terrorisme …………..…………………..……...... 14

A. L’OHS : une agence de rang ministériel pour

coordonner la guerre contre les terroristes en attendant

la création d’un ministère de sécurité intérieure ………..... 14

B. La naissance du ministère de sécurité intérieure et sa

mission dans la guerre anti-terroriste ……...……............... 15

1) Les missions du DHS ………………………...…. 16

2) La structure du DHS ……………..…………...…. 17

a) Les cinq directions générales du DHS et

leurs missions ……...………...………...…….. 17

b) Les hauts fonctionnaires du DHS et leurs

missions …………………...………...……….. 19

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261

C. Les rôles des autres ministères dans la guerre contre le

terrorisme ………………………...…………………...….. 20

- Le Département de la Défense (DoD) ……...…...... 21

- Le Département de la justice (DoJ) ……...….......... 22

- Le Département d’Etat (DoS) …...……………….. 23

- Le Département de la santé et des services

humaines (DHHS) ……...……………….................. 24

- Le Département du Trésor (DoT) ……………...… 25

- Le Département de l’agriculture (USDA) …......…. 25

III. Les autres acteurs de la guerre contre le terrorisme et leurs

missions …………………………………………………...……. 27

A. Les agences de renseignements et la guerre anti-

terroriste……...……………………………………...…..... 27

1) Le FBI ………………………………...……….... 27

2) La CIA ………………………………………….. 30

B. Le rôle des citoyens américains ……….…………….... 31

C. Le rôle du secteur privé et des autorités étatiques et

locales…………...……………………………….…...…… 32

CHAPITRE 2 : La guerre contre le terrorisme : une “politique”

anti-terroriste unilatéraliste bénéficiant d’un soutien international

mitigé ………………….…………………………………….........…... 34

I. Présentation de la "National Strategy for Combatting

Terrorism"……………………………………………………….. 34

II. Les mesures américaines de lutte contre le terrorisme : des

mesures unilatéralistes ……………………...…………….…..… 38

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262

A. Les mesures juridiques et sécuritaires …………...……. 38

1) L’USA PATRIOT Act …………….....…………... 38

2) Des commissions militaires pour juger les

terroristes…………………………...…...………….. 40

3) L’US-VISIT : un programme pour filtrer les

entrées aux Etats-Unis ………………………...…… 42

4) Le programme d’aide anti-terroriste (ATA) : un

programme pour aider certains pays à former leurs

forces de sécurité ……………...………………...…. 44

B. Les mesures financières pour bloquer les avoirs des

terroristes ……..…………………………...……………... 45

C. Les mesures militaires ……………………………....… 48

1) Des changements intervenus dans le domaine

militaire depuis le 11 septembre ………………........ 49

a) La Quadrennial Defense Review

(QDR)………..……………………………..... 49

b) La création d’un nouveau commandement

pour protéger le territoire américain : le

Northcom…...………………………………... 51

2) Les opérations militaires ……….……...………... 52

a) OEF …………………….……………......... 53

b) OIF ………………………….……….......... 56

3) Le soutien international aux campagnes

américaines……………………………...……...…... 59

III. La coopération internationale à la guerre contre les

terroristes………………………….………………………….…. 62

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263

A. L’appui internationale à la lutte contre les finances des

terroristes : l’un des rares domaines où l’étranger coopère

plus ou moins sérieusement …………..…………...….….. 63

1) Les NU et la lutte contre le financement du

terrorisme……………...……………...…………...... 63

2) L’Union européenne (UE) et le gèle des avoirs

terroristes ………………………………...……….... 64

3) Le G7, le G20 et la lutte contre le financement du

terrorisme ………………………...……………….... 65

4) Le GAFI et la lutte contre le financement du

terrorisme ………………………...…………...…..... 66

5) Les institutions financières internationales et la

lutte contre le financement du terrorisme …........….. 68

6) Les autres soutiens à la lutte contre les finances

des terroristes ………………………………...…...... 69

B. La coopération militaire bilatérale ……...…………….. 70

1) L’assistance militaire apportée aux

Philippines…............................................................. 70

2) L’assistance militaire apportée à la

Georgie…………....................................................... 71

3) L’assistance militaire apportée au Yémen ...……. 72

CHAPITRE 3 : Des acquis et de l’efficacité de la guerre anti-

terroriste………..…………………..……………...…………………... 74

I. Le bilan des opérations militaires en Afghanistan et en Irak :

un bilan mitigé ……...………………………...………...…......... 74

A. Les acquis des opérations …….…………………...…... 74

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264

B. Les opérations militaires n’ont pas éradiqué le

terrorisme en Afghanistan et en Irak ; et la paix est

loin d’être gagnée dans ces pays ….………………...….… 77

II. Les difficultés de la lutte internationale contre les finances

des terrorismes …………………...……………………..…...….. 79

A. Les difficultés liées à la détermination et à la traque

des avoirs des terroristes ……………………………...….. 80

1) Les sources de financement des terroristes

compliquent le gèle de leurs avoirs …….…...……... 80

2) Hawala et Paradis fiscaux : un casse tête chinois

pour les traqueurs des avoirs terroristes …….……... 83

B. Les autres facteurs de blocage de la lutte financière

contre les avoirs des terroristes ………...……...……......... 86

1) L’inexistence d’une définition universelle du

terrorisme ………………………...……………........ 86

2) La « mauvaise volonté » des Etats à coopérer

entièrement pour bloquer les avoirs

terroristes…………………………...………...…….. 88

III. L’absence d’une coopération judiciaire internationale

affaiblie la guerre anti-terroriste alors que la recrudescence

des attaques terroristes à travers le monde sème le doute

quant à son efficacité ………………..…………………...…….. 89

A. La coopération judiciaire internationale :

un élément essentiel de la guerre contre le

terrorisme mais inexistant ………………...…………….... 90

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265

B. La recrudescence des attaques terroristes à travers le

monde laisse croire à une inefficacité de la guerre contre

le terrorisme………………………………………......…... 94

DEUXIEME PARTIE : DES IMPLICATIONS DE

LA GUERRE ANTI-TERRORISTE DANS LES

RELATIONS AMERICAINES ……………………….…….... 98

CHAPITRE 4 : Les réactions au 11 septembre, à la guerre contre

le terrorisme et leurs motivations …………………….………..……… 99

I. Les réactions des Etats : des réactions à motivations diverses . 99

A. Les réactions aux attaques du 11 septembre et à la

guerre anti-terroriste en Europe ………..…………..…… 100

1) La réaction de la France ……………….….…… 100

2) Les réactions dans le reste de l’Europe …......…. 105

B. Les réactions des pays musulmans au 11 septembre et

aux opérations militaires américaines ……………........... 108

1) La réaction du Pakistan à la riposte américaine

contre les taliban …….............................................. 109

2) La réaction des pays arabes au 11 septembre ..… 111

3) Les réactions de certains pays musulmans aux

opérations militaires …………...…………………. 113

a) Iran : une réaction neutre ……….....….…. 114

b) Les autres réactions ……………...…....... 114

C. Les réactions au 11 septembre et à la guerre

anti-terroriste dans le reste du monde ……………........... 116

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266

1) La réaction de la Russie : « oui à la guerre contre

le terrorisme et non à la guerre contre le

“partenaire” irakien » ……………...………….…... 116

2) Les réactions des autres pays beaucoup plus

liées à une volonté d’apaisement ……...……...…... 118

II. L’inquiétude des associations de défense des droits et des

libertés face aux nouvelles normes anti-terroriste ….…...….…. 120

A. Une inquiétude justifiée ……………………………... 120

B. Une liberté de la presse mal éprouvée par la guerre

anti-terroriste ………………………………….…....….... 124

III. Les réactions des OI aux attaques du 11 septembre et à la

guerre anti-terroriste …………………………………………... 127

A. Les nouvelles mesures mises en place par l’ONU

et ses organismes et sa réaction à la crise irakienne …..... 128

1) Quelques mesures anti-terroristes adoptées par

des organismes de l’ONU en réaction au 11

septembre………...……………………………….. 129

2) L’ONU et la crise irakienne …….…….……….. 131

B. La réaction de l’OTAN et sa transformation face aux

nouvelles menaces comme le terrorisme

international……………………..………….…………… 132

1) La réaction de l’OTAN aux attaques du 11

septembre …………………………………………. 133

2) La transformation de l’OTAN à la suite du 11

septembre …………………………...………….…. 134

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267

CHAPITRE 5 : Les implications de la guerre anti-terroriste

dans les relations Etats-Unis/Europe et Etats-Unis/Russie .................. 138

I. Les implications de la guerre anti-terroriste sur les relations

transatlantiques ……………...………………………….……... 138

A. Les pommes de discorde entre le “Vieux” et le

“Nouveau continent” …..…………………….………….. 139

B. L’Europe et l’Amérique : des valeurs communes et des

intérêts convergents malgré les pommes de

discorde……………………………………....………….. 143

C. La relation franco-américaine et la crise

irakienne………………………………………...…….…. 147

II. La guerre contre le terrorisme : une aubaine pour Moscou de

nouer un partenariat stratégique avec Washington, de

mater la rébellion tchétchène et d’apaiser les tensions au

sujet des gorges de Pankisi ……...……………………...…....... 150

A. Le nouveau « partenariat stratégique » entre Moscou

et Washington ……………………….………………..… 150

B. La guerre contre le terrorisme : une occasion pour

Moscou de mater la rébellion tchétchène et de lui

priver sa zone de replie en Georgie (les gorges

de Pankisi) …..……………...………………………...…. 152

1) La « benladénisation » du conflit tchétchène ..… 152

2) La Russie tolère la présence américaine en

Georgie dans l’espoir de priver les rebelles

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268

tchétchènes de leur refuge des gorges de

Pankisi …………..……………………………...… 154

C. La coopération dans la guerre contre le

terrorisme n’a pas fait disparaître les divergences russo-

américaines ………...…………………………………..... 156

CHAPITRE 6 : Les implications de la guerre contre le terrorisme

sur l’opinion publique musulmane et sur les relations

Etats-Unis/Régimes proaméricains ………………………....……….. 159

I. Les implications de la guerre contre le terrorisme sur

l’opinion publique musulmane …………………………....…... 159

A. La guerre anti-terroriste attise l’anti-américanisme et

exaspère le sentiment d’injustice des musulmans ………. 160

B. Les sujets à frustration …………………….………… 164

1) Le conflit israélo-palestinien ………….……….. 165

2) L’affaire irakienne …………….…….…………. 167

a) La Guerre du Golfe…………….…….…... 167

b) Les sanctions économiques imposées à

l’Irak par la communauté internationale

après la guerre du Golfe ……………...…...... 168

II. Les implications de la guerre contre le terrorisme sur les

relations Etats-Unis/Régimes proaméricains ………..……….... 172

A. Les implications de la guerre contre le terrorisme sur

les relations Etats-Unis/Arabie Saoudite ……..…….…… 172

1) L’historique des relations Etats-Unis/Arabie

Saoudite………………………...…………….…… 172

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2) Les relations américano-saoudiennes depuis le

11 septembre : des relations houleuses …….……... 177

B. Les implications de la guerre contre le terrorisme sur

les relations Etats-Unis/Autres régimes proaméricains et

les desseins américains au Moyen-Orient depuis le 11

septembre……………………………………...……….... 181

1) Les relations américaines avec les autres

régimes proaméricains du monde musulman :

Egypte, Jordanie et Pakistan ……………..…..…… 181

a) Egypte/Etats-Unis : des relations éprouvées

par la guerre anti-terroriste ……………......... 181

b) La Jordanie et le Pakistan : deux pays qui

ont su tirer profit de la guerre anti-terroriste .. 183

1. La Jordanie ………………………...…...... 183

2. Le Pakistan …………………….……..….. 184

2) Les desseins américains au Moyen-orient depuis

le 11 septembre ...……………………………......... 186

CONCLUSION ……………………………………………..…… 189

DOCUMENTS ANNEXES …………………………….……... 194

BIBLIOGRAPHIE ……………………………………….…….. 247