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29AlimentAtion des porcins en Agriculture biologique | itAb, ibb, crA pl, iFip | 2014
Antoine Roinsard (ITAB)
Chapitre
06Valorisation des ressources fourragĂšres par les porcins
pouRquoi utiliseR des FouRRAges dAns lâAlimentAtion des poRCins ?
une obligation rĂšglementairela distribution de fourrages, frais, secs ou ensi-lĂ©s pour les monogastriques est une obligation rĂšglementaire (voir chapitre 1). dĂšs lors, il est pertinent de les utiliser au mieux afin quâils puissent apporter un rĂ©el complĂ©ment Ă lâali-mentation, que ce soit via le pĂąturage des ani-maux dans le cas dâĂ©levage en plein-air ou via la distribution sous forme de fourrages conser-vĂ©s pour les animaux Ă©levĂ©s en bĂątiments.
Aspects santĂ© et bien-ĂȘtrelâapport de fibres dans lâalimentation est par-ticuliĂšrement recommandĂ© pour les truies en gestation et les porcelets. lors de la phase de gestation, les truies sont en situation de restriction alimentaire (environ 50 Ă 60 % de lâingestion spontanĂ©e) afin de favoriser les per-
formances de reproduction. lâapport de four-rages (paille et pĂąturage compris) permet globa-lement de contribuer Ă leur satiĂ©tĂ© alimentaire.Ainsi, certains comportements agressifs liĂ©s Ă cette restriction alimentaire peuvent-ĂȘtre limi-tĂ©s par lâingestion de fourrage (satiĂ©tĂ© et effet « rĂ©crĂ©atif »). pour les porcs charcutiers, oĂč la compĂ©tition Ă lâauge peut-ĂȘtre relativement importante, la distribution de fourrage permet de limiter les comportements agressifs et per-mettre aux animaux les plus dominĂ©s de se « rattraper » via lâingestion de fourrages.pour les porcelets, lâenrichissement en fibres fer-mentescibles de lâaliment pourrait permettre de limiter certains troubles digestifs lors du sevrage.
une ressource alimentaire disponibleen Ă©levage porcin biologique, la majoritĂ© des truies sont Ă©levĂ©es en plein-air (70 % dâaprĂšs le cAsdAr porc bio), et ont donc accĂšs Ă un parcours de surface consĂ©quente, gĂ©nĂ©ralement semĂ© en prairie temporaire. par ailleurs, dans
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beaucoup dâĂ©levages porcins, des surfaces four-ragĂšres sont disponibles et peuvent ainsi offrir une ressource alimentaire complĂ©mentaire via la distribution de fourrages conservĂ©s. bien uti-lisĂ©s, les fourrages peuvent permettre de faire des Ă©conomies importantes en aliment complet.
vAleuR AlimentAiRe des FouRRAges
de rares donnĂ©es sont disponibles concer-nant la valeur alimentaire des fourrages pour lâalimentation des porcins. en particulier, la digestibilitĂ© chez les porcins de lâĂ©nergie et des protĂ©ines issus de ressources fourragĂšres sont mal connus. on peut distinguer deux grands groupes de fourrages selon que leur contribution Ă la couverture des besoins des
animaux soit plutÎt énergétique ou protéique. les données suivantes sont présentées sans précisions sur la digestibilité et sont donc à considérer à titre indicatif.
les fourrages aux apports énergétiques tableau 16.
les fourrages aux apports protéiquestableau 17.
quelle utilisAtion pouR les poRCins ?
les parcours peuvent contribuer de maniĂšre significative Ă lâalimentation des porcins dans les systĂšmes dâĂ©levage en plein-air. globale-
% MS % MAT (sur sec)
% MAT sur brut
Energie brute (MJ/kg de MS)
Energie brute (MJ/
kg brut)
Lysine (%) sur MS
Pomme de Terre cuite 20,2 10,8 2,2 16,9 3,4 0,53
Topinambour (racine) 22,2 7,4 1,6 17,1 3,8 0,33
Betterave fourragĂšre (racine) 16,3 6,7 1,1 16,7 2,7 -
% MS % MAT (sur sec)
% MAT sur brut
Energie brute (MJ/kg de MS)
Enrgie brute (MJ/
kg brut
Lysine % sur MS
Luzerne déshydratée < 16 % MAT 91,4 15,1 13,8 16,4 15,0 0,7
Ensilage de luzerne (1er cycle) 18,7 19 3,6 19,3 3,6 0,9
Enrubannage de luzerne (1er cycle) 55 18,9 8,5 18,2 8,2 0,9
Enrubannage de trĂšfle violet (1er cycle) 55 18,3 8,2 18,9 8,5 1,0
Ensilage de trĂšfle violet (1er cycle) 17,6 17,8 3,1 18,9 3,3 0,9
Ensilage de ray-grass anglais (1er cycle) 18,1 15,1 2,7 16,6 3,0 0,8
Enrubannage de ray-grass anglais (1er cycle) 55 14,3 7,9 16,8 9,3 0,7
Tableau 17Valeur alimentaire indicative de quelques fourrages aux apports protéiques (tables INrA 2007 ; Feedipedia 2014)
Tableau 16Valeur alimentaire indicative de quelques fourrages aux apports énergétiques (tables INrA 2007 ; Feedipedia 2014)
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ment, on peut distinguer 2 grands types de parcours utilisables en Ă©levage porcin : âș des parcours productifs non pĂ©rennes : bet-
teraves, topinambour, choux ou colza four-rager⊠;
âș des prairies temporaires : gĂ©nĂ©ralement se-mĂ©es en ray-grass anglais/trĂšfle blanc, ou des prairies Ă flore variĂ©e (voir de la luzerne ou du trĂšfle violet).
ingestion d'herbe par les truies
Une Ă©tude menĂ©e Ă la ferme expĂ©rimentale des TrinottiĂšres (CA 49) et en partenariat avec lâUR AFPA-INRA, dans le cadre du projet CORE ORGANIC ICOPP a permis de quantifier lâingestion dâherbe par des truies en lactation, via la mĂ©thode des n-alcanes (dosage dâun marqueur dans les fĂšces, ce qui donne une « photographie » de la consommation dâherbe Ă un instant t). Les rĂ©sultats montrent quâil existe une trĂšs grande variabilitĂ© dans le comportement de pĂąturage des truies (de 200 g Ă 1,6 kg de MS pour une mĂȘme pĂ©riode) et une diffĂ©rence entre saisons. Cet essai permet de montrer que la consommation dâherbe par des truies au pĂąturage est significative, et quâil y a donc intĂ©rĂȘt Ă maintenir un couvert vĂ©gĂ©tal de qualitĂ© pour maximiser cette consommation.
parcours productifs avec un apport essentiellement Ă©nergĂ©tiquepour les espĂšces citĂ©es en exemple, le par-cours peut ĂȘtre valorisĂ© entre mars et octobre. diffĂ©rents modes de gestion peuvent-ĂȘtre envisagĂ©s, un systĂšme de pĂąturage avec avancement au fil permet de bien maĂźtriser la consommation. bien que ces espĂšces per-mettent une bonne productivitĂ© de matiĂšre sĂšche Ă lâhectare, elles ne peuvent-ĂȘtre uti-lisĂ©es quâune partie de lâannĂ©e et un travail de rĂ©implantation est nĂ©cessaire aprĂšs le passage des animaux (en particulier pour les betteraves et topinambours, oĂč la racine va ĂȘtre consommĂ©e par les animaux). lâĂ©levage de porcs charcutiers sur un parcours de topinambours peut permettre de diminuer les apports dâaliment complet de lâordre de 30 % sans trop pĂ©naliser les performances (ta-bleau 18). en outre, lâindice de consommation sâen trouve amĂ©liorĂ©. le seuil de substitution doit-ĂȘtre adaptĂ© en fonction des objectifs de performances de lâĂ©levage et des volumes de topinambour mis Ă disposition des porcs (char-gement animal et productivitĂ© de la parcelle). plus les porcs pourront en consommer et plus la diminution de lâaliment complet pourra ĂȘtre importante.
lâidĂ©al, pour coller au mieux aux besoins des animaux est dâadapter la formulation de lâali-ment, lorsque câest possible, pour calculer la substitution possible des cĂ©rĂ©ales (tableau 19).
ressource fourragĂšre
Poids initial porcs Aliment complet Ecart de GMQ Indice de
Consommation TMP
Topinambours 60 kg - 28 %- 13 %
GMQ témoin = 1.064 g
- 17 %IC témoin
= 3.0
Pas de différence
MatiÚre premiÚre brute Quantité brute Equivalent céréales
Pommes de terre cuite 4 kg 1 kg
Topinambours 4,5 Ă 5 kg 1 kg
Betteraves 5 kg 1 kg
Tableau 18Exemple de performances pour des porcs charcutiers engraissĂ©s sur une parcelle de topinambours (dâaprĂšs A. G. Kongsted, UniversitĂ© dâAarhus, Projet ICOPP ; essai en Ă©levage bio)
Tableau 19 Quelques repĂšres en Ă©quivalent cĂ©rĂ©ales (dâaprĂšs Albar, 2011)
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des prairies temporaires pour un apport mixte ou protĂ©iquele pĂąturage des truies ou des porcs sur des prairies temporaires est significatif. les quelques rĂ©fĂ©rences disponibles montrent une grande variabilitĂ© de cette consommation, due aux saisons, Ă la qualitĂ© du couvert, Ă la quantitĂ© dâaliment complet distribuĂ©, et Ă la mĂ©thode de mesure. plus la densitĂ© Ă©nergĂ©-tique et protĂ©ique de lâaliment complet ainsi que la quantitĂ© distribuĂ©e est faible, et plus la consommation par les animaux va augmenter. de la mĂȘme maniĂšre, une bonne qualitĂ© nutri-tionnelle du couvert vĂ©gĂ©tal influence positi-vement la consommation (les porcins peuvent exercer une certaine sĂ©lectivitĂ©).globalement, on peut retenir les fourchettes suivantes Ă titre indicatif (tableau 20):
Tableau 20 Variation de lâingestion dâherbe (tous types de couverts) par les porcins au pĂąturage (synthĂšse bibliographique ; Programme ICOPP)
pour favoriser une bonne consommation du couvert vĂ©gĂ©tal, il est nĂ©cessaire de maintenir une bonne qualitĂ©. cela implique dâeffectuer des broyages lorsque les graminĂ©es ont dĂ©jĂ Ă©piĂ©, ou bien des rĂ©coltes lorsque la hauteur dâherbe est trop importante avant lâarrivĂ©e des animaux. ce fourrage pourra alors ĂȘtre distri-buĂ© aux truies ou porcs charcutiers, lors de pĂ©riodes oĂč la pousse de lâherbe est faible ou dans le cas oĂč les porcs sont logĂ©s en bĂątiment. les pĂ©riodes de lâannĂ©e privilĂ©giĂ©es pour la
Stade physiologique Quantité brute/jour Quantité sur sec/jour
Porc charcutier 0,5 Ă 3,2 kg 100 g Ă 650 g de MS
Truies gestantes 1,8 Ă 12,5 kg 0,9 Ă 2,5 kg
Truies en lactation 1 Ă 8 kg 0,2 Ă 1,6 kg
consommation sont le printemps et lâautomne. lors des pleines pĂ©riodes de pĂąturage, lâherbe peut couvrir jusquâĂ 20-25 % des besoins des truies en gestation, ce qui peut permettre de diminuer lâaliment complet de 1 Ă 1,5 kg.
exemple : du pĂąturage au fil pour des porcs charcutierspour des porcs charcutiers, deux types de couverts ont Ă©tĂ© comparĂ©s : de la luzerne (dĂ©jĂ bien implantĂ©e), ainsi quâune prairie ray-grass anglais / trĂšfle blanc (tableau 21). chaque porc disposait quotidiennement de 4 m2 de luzerne ou de prairie (pĂąturage au fil). lâaliment Ă©tait dĂ©concentrĂ© en lysine (par rapport aux lots tĂ©moins sur les mĂȘmes couverts) afin dâencourager la consommation du couvert par les animaux, et lâaliment complet rationnĂ© Ă 2,2 kg pendant 40 jours. JusquâĂ lâabattage, les animaux Ă©taient ensuite nourris ad libitum (croissance compensatrice).la restriction en lysine pour le couvert luzerne semble trop forte, les calculs ont montrĂ© quâelle pouvait apporter environ 40 % des besoins quo-tidiens en lysine des animaux. le « rattrapage » des animaux lors de la finition conduit Ă une aug-mentation significative de lâindice de consomma-tion. en fonction des systĂšmes de production, celui-ci peut ĂȘtre compensĂ© par les Ă©conomies rĂ©alisĂ©es sur le coĂ»t de lâaliment complet.
témoignage de philippe betton, éleveur en mayenne :
« Durant les pĂ©riodes de pleine pousse de lâherbe et lorsque les truies gestantes ont des besoins moins Ă©levĂ©s (du printemps Ă lâautomne), elles ne sont alimentĂ©es quâavec des cĂ©rĂ©ales. Le maintien dâune bonne valeur de lâherbe, grĂące Ă un pĂąturage tournant permet de complĂ©ter les besoins en protĂ©ines des truies grĂące Ă la prairie. »
ressource fourragĂšre
Poids initial porcs
Aliment complet Ecart de GMQ Indice de
Consommation TMP
Luzerne 58 kg - 60 % de lysine
- 18 %GMQ témoin = 900 g/j
+ 16 % IC témoin = 2,5
Pas de différence
Ray-rass anglais/ trĂšfle blanc 42 kg - 30 % de lysine - 6 %
GMQ témoin = 752 g/j+ 10 %
IC témoin = 3,1Pas de
différence
Tableau 21 Exemple de performances pour des porcs charcutiers engraissĂ©s sur une luzerniĂšre ou en prairie ray-grass anglais / trĂšfle blanc (dâaprĂšs A. G. Kongsted, UniversitĂ© dâAarhus, Projet ICOPP ; essai en Ă©levage bio)
33AlimentAtion des porcins en Agriculture biologique
distribution des fourragesil peut ĂȘtre intĂ©ressant de distribuer des four-rages aux porcins pour diminuer lâutilisation dâali-ment complet et le coĂ»t alimentaire. bien que les porcins ne soient pas des ruminants, ils ont une certaine capacitĂ© Ă valoriser les fourrages.ce sont les truies qui valorisent le mieux le fourrage (en gestation il peut substituer sans problĂšmes 10 % dâaliment complet), en parti-culier celles de rang Ă©levĂ©. la phase de gesta-tion est la plus propice, dans la mesure oĂč les besoins des animaux en Ă©nergie, protĂ©ines et acides aminĂ©s essentiels y sont faibles. pour les porcs charcutiers, la phase dâĂ©levage Ă privilĂ©gier est la finition, et dans une moindre mesure, la phase de croissance. du maĂŻs ensi-lage peut ĂȘtre distribuĂ© aux porcelets pour des raisons sanitaires (acidification de la ration et apport de probiotiques).
les fourrages sont distribuĂ©s soit Ă cĂŽtĂ© de lâali-ment (dans une auge), soit mĂ©langĂ©s dans lâali-ment. pour la distribution Ă cĂŽtĂ© de lâaliment, cela peut permettre aux animaux dominĂ©s de se « rattraper » sur une autre ressource (pour un mode de distribution en groupe). en revanche, pour favoriser la consommation, il serait plus judicieux dâincorporer le fourrage, si possible hachĂ© finement, directement dans lâaliment. cela est plus compliquĂ© Ă mettre en Ćuvre. pour limiter les refus, la distribution de fourrage doit-ĂȘtre limitĂ©e Ă 15 - 20 % de la ms pour des porcs charcutiers. de plus, mieux vaut privilĂ©gier de lâensilage ou de lâenrubannage qui seront plus appĂ©tents.le mode de stockage est important car, selon la taille des Ă©levages, et la prĂ©sence ou non de ruminants, la consommation de fourrage peut-ĂȘtre faible. dans ce cas, privilĂ©gier la conserva-tion en ensilage afin de pouvoir utiliser progres-sivement le stock de fourrage et conserver une bonne qualitĂ© tout au long de lâannĂ©e.
pour en savoir plus (cliquez sur lâicĂŽne pour suivre le lien)
JT ITAB, 2001. Alimentation et systĂšmes
dâĂ©levage en agriculture biologique.
www.itab.asso.fr/downloads/actes%20suite/actes-elev-01-porc.pdf
Page ITAB du projet ICOPP.
www.itab.asso.fr/ programmes/icopp.php
Page européenne du projet ICOPP.
www.organicresearchcentre.com/icopp/?page=home
CRA PL : Valorisation de lâherbe par
les truies élevées en plein-air.
www.paysdelaloire.chambagri.fr/ uploads/media/article_04_valorisation_herbe_truies_plein_air_tp.pdf
Dossier Alter Agri : Valorisation de lâherbe par
des truies en plein-air. Mai-juin 2014.
Le Gall M., Montagne L., Meunier-SalaĂŒn M.C.,
Noblet J., 2009. Valeurs nutritives des fibres, consĂ©quences sur la santĂ© du porcelet et le bien-ĂȘtre de la truie. INRA Prod. Anim., 22 (1), 17-24.
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Vandenheede M., Nicks B., 2008. Les fibres dans lâalimentation des truies gestantes : effets sur la nutrition, le comportement, les performances et les rejets dans lâenvironnement. INRA Prod. Anim., 21, (3), 277-290.
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de fibres dans un régime de gestation sur les performances zootechniques et le comportement des truies. Journées Rech. Porcine, 32, 105-113.