continuité de l'emploi et évolution des activités publiques
TRANSCRIPT
!"#$%&'#()*+%*,-!*%(*+%'*,-.'*+%*/0-+1!&!"#$%&'(!)*!)+,-'.!)/($,0,1-*!*'!)*!2*3'-,0!
($,&*!),$',+#&*!3$-*0$*3!3,$-#&*3!*'!4%1#0-'(3*!
*****
2345647658*9:*;0:<=;36*:5*8>3;75634*9:?*@A56>658?*=7B;6C7:?*
*!
!'5678!9:;<!=8!):>?:<@?!A8!A<:B?!9;C=B>!
9<D78E?D8!8?!7:;?8E;8!9;C=BF;8G8E?!=8!HI!J;BE!HKLH!!9@<!
!D7E6:;*F!-"!
!!
3:;7!=@!AB<8>?B:E!A8!1:E7B8;<!=8!M<:N8778;<!,G6;6==:*(%&"%.&%H!!*
F7EI**!
D@9@<:*2GE6?564:*D-!JK)*!"#$%&''%()*+,-.-/)0(1$&*%#-%)*%)'.)2%)$"3$4$%5-&"#)*%)'.)$%5-&"#)*3)5"#-%#-&%36)*3)!"#$%&')*+7-.-/)
0("8%$$%3().$$"5&1)9)'+:#&;%($&-1)0.(&$)<)0.#-=1"#4>"(?"##%)*
D@9@<:*2GE6?564:*"%-!L/%+!2*0("8%$$%3()*%)*("&-)$"5&.')9)'+:#&;%($&-1)*%)@"#-A%''&%()</)B.AA"(-%3()
)D@9@<:*-79:*&1!.%&%*
0("8%$$%3()*%)*("&-)A3?'&5)9)'+:#&;%($&-1)*%)C"(*%.36)<D)*
D@9@<:*&3M:4*"1J!%//1!*0("8%$$%3()*%)*("&-)A3?'&5)9)'+:#&;%($&-1)0.(&$),$-)!(1-%&'/)B.AA"(-%3()
)D34?6:7E!,G6;6==:*(%&"%.&%H!!
0("8%$$%3()*%)*("&-)A3?'&5)9)'+:#&;%($&-1)*%)0.3)%-)*%$)0.E$)*%)'+F*"3(/!)
D34?6:7E*+:4I?*9:*N%2O#//1"H**0("8%$$%3()*%)*("&-)A3?'&5)9)'+:#&;%($&-1)*%)0.3)%-)*%$)0.E$)*%)'+F*"3()
« La faculté n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans cette thèse ; celles-ci doivent être
considérées comme propres à leur auteur »
)
A mes parents et Sandra,
A Philippe et Maxime.
Au Russe blanc.
A Elisa.
5
!"#"$%&"#"'()*
*
*
Mes remerciements vont vers Monsieur le Professeur Philippe Terneyre pour la confiance qu’il m’a accordée en acceptant de diriger cette recherche en dehors des contingences classiques. Je n’aurais sans nul doute pu mener à son terme cette entreprise sans les conseils avisés qu’il m’a prodigués ni
la disponibilité et la compréhension dont il a toujours fait preuve à mon égard. Qu’il me soit permise de lui témoigner toute ma gratitude et toute mon admiration.
Ma reconnaissance et mon amour à Philippe, qui a su tout au long de ses quatre années, par sa patience, sa prévenance et sa confiance indéfectible, m’apporter un soutien des plus précieux.
Ma reconnaissance infinie à mes parents, pour la curiosité d’apprendre qu’ils m’ont transmise, et la liberté qu’ils m’ont toujours laissée.
Mes remerciements sincères à Maître Vianney Rivière, pour la confiance et le temps qu’il m’a offert, ainsi qu’à Olivier, Jean et Grégoire pour leur soutien, leur patience, et nos échanges toujours
enrichissants.
Mon amitié à mes proches et amis, qui, par l’intérêt qu’ils ont porté à ce travail et leurs encouragements renouvelés, ont contribué bien plus qu’ils ne le pensent à son aboutissement.
6
!"#$%&'%(&)*+,-+)"$%(&"#*./+"0+1,(*
!!!#O$'! ! ! ! ! ! #>?;@=B?D!J;<BABF;8!P!$:==8>?BQB?D7!?8<<B?:<B@=87!#O)#! ! ! ! ! ! #>?;@=B?D!J;<BABF;8!P!)<:B?!@AGBEB7?<@?BN!#O"M! ! ! ! ! ! #>?;@=B?D!J;<BABF;8!P!":E>?B:E7!9;C=BF;87!#<?R! #<?B>=8!!#77R!! #778GC=D8!A;!>:E?8E?B8;S!A;!$:E78B=!A/*?@?!#77R!M=DER! #778GC=D8!9=DEB6<8!A8!=@!$:;<!A8!$@77@?B:E!T;==R!>BQR! T;==8?BE!A87!@<<U?7!A8!=@!>5@GC<8!>BQB=8!A8!=@!$:;<!A8!
$@77@?B:E!T;==R!><BGR) T;==8?BE!A87!@<<U?7!A8!=@!>5@GC<8!><BGBE8==8!A8!=@!$:;<!A8!
$@77@?B:E) ) !T1-3! T;==8?BE!G8E7;8=!AVBEN:<G@?B:E!A87!7:>BD?D7!O:=W TO$&! ! ! ! ! ! T;==8?BE!J;<BABF;8!A87!>:==8>?BQB?D7!=:>@=87!TO$M! ! ! ! ! ! T;==8?BE!J;<BABF;8!A87!>:E?<@?7!9;C=B>7$#R! ! ! ! ! ! #<<U?!A/;E8!$:;<!A/@998=!$##R! ! ! ! ! ! #<<U?!A/;E8!$:;<!@AGBEB7?<@?BQ8!A/@998=!$$R! ! ! ! ! ! )D>B7B:E!A;!$:E78B=!>:E7?B?;?B:EE8=!$$$! ! ! ! ! ! $:E?<@?7!$:E>;<<8E>8!$:E7:GG@?B:E!$*! ! ! ! ! ! #<<U?!A;!$:E78B=!A/*?@?!$*!#QB7! ! ! ! ! ! #QB7!A;!$:E78B=!A/*?@?!$O$*! #<<U?!A8!=@!$:;<!A8!J;7?B>8!A87!$:GG;E@;?D7!
8;<:9D8EE87!$O%*! #<<U?!A8!=@!$:;<!A8!J;7?B>8!A8!=/%EB:E!8;<:9D8EE8!$@5R!)<:B?R!-E?8<>:R!! ! ! ! $@5B8<7!A8!A<:B?!A8!=/BE?8<>:GG;E@=B?D!$@5R!":E>?R!M;C=! ! ! ! ! $@5B8<7!A8!=@!N:E>?B:E!9;C=BF;8!$@5R!3:>R!C@<<8@;! ! ! ! $@5B8<7!7:>B@;S!A;!C@<<8@;!A8!M@<B7!$@77R!>BQR!! ! ! ! ! #<<U?!A8!=@!>5@GC<8!>BQB=8!A8!=@!$:;<!A8!$@77@?B:E!$@77R!><BGR!! ! ! ! ! #<<U?!A8!=@!>5@GC<8!><BGBE8==8!A8!=@!$:;<!A8!$@77@?B:E!$@77R!7:>R! ! ! ! ! #<<U?!A8!=@!>5@GC<8!7:>B@=8!A8!=@!$:;<!A8!$@77@?B:E!$R>:G9?87! ! ! ! ! $:;<!A87!>:G9?87!$5<:ER! ! ! ! ! ! $5<:EBF;8!!$-! ! ! ! ! ! $:==8>?BQB?D7!X!BE?8<>:GG;E@=B?D!$O*2! ! ! ! ! ! $@5B8<7!J;<BABF;87!A8!=/D=8>?<B>B?D!8?!A;!Y@Z!>:==R! ! ! ! ! ! $:==8>?B:E!>:GGR! ! ! ! ! ! $:GG8E?@B<8!!>:E>=R! ! ! ! ! ! $:E>=;7B:E7!!$R!8?!1M!! ! ! ! ! $:E?<@?7!8?!G@<>5D7!9;C=B>7!$:E7R!$:E>R! ! ! ! ! $:E78B=!A8!=@!>:E>;<<8E>8!)R! ! ! ! ! ! +8>;8B=!)@==:Z!AB<R!! ! ! ! ! ! )B<8>?B:E![7:;7!=@\!)M! ! ! ! ! ! )<:B?!9;C=B>!)<R!@AGR!! ! ! ! ! )<:B?!@AGBEB7?<@?BN!)<R!:;Q<B8<! ! ! ! ! )<:B?!:;Q<B8<!)<R!7:>R!!! ! ! ! ! )<:B?!7:>B@=!DAR! *AB?B:E[7\!*)$*! !*?;A87!8?!A:>;G8E?7!A;!$:E78B=!A/*?@?!!*M$-! !*?@C=B778G8E?!9;C=B>!A8!>::9D<@?B:E!BE?8<>:GG;E@=8!"@7>R! "@7>B>;=8!!2#O#! &87!Y<@EA7!@<<U?7!A8!=@!J;<B79<;A8E>8!@AGBEB7?<@?BQ8!<?&*G) <?&*%H)<*G) <*%H)2@ZR!M@=R!! 2@Z8??8!A;!M@=@B7!
7
ORX$=R! !O;<B7X>=@778;<!O$M!#R! &@!78G@BE8!J;<BABF;8!#AGBEB7?<@?B:E7!8?!>:==8>?BQB?D7!?8<<B?:<B@=87!O$M!*R! ! ! ! ! ! &@!78G@BE8!J;<BABF;8!*E?<89<B787!8?!@NN@B<87!O$M!3R!! ! ! ! ! ! &@!78G@BE8!J;<BABF;8!7:>B@=8!OR,R! ! ! ! ! ! O:;<E@=!:NNB>B8=!A8!=@!+D9;C=BF;8!N<@E]@B78!OR,R%R*R! ! ! ! ! ! O:;<E@=!:NNB>B8=!A8!=/%EB:E!8;<:9D8EE8!OR,R!#77R!E@?R!! ! ! ! ! O:;<E@=!:NNB>B8=!A8!=/#778GC=D8!E@?B:E@=8!OR,R!3DER!! ! ! ! ! O:;<E@=!:NNB>B8=!A;!3DE@?!O;<B79R! ! ! ! ! ! O;<B79<;A8E>8!O;<B79R!7:>R!&@GW!! ! ! ! O;<B79<;A8E>8!7:>B@=8!&@GW!&M#! ! ! ! ! ! &87!98?B?87!@NNB>587!1:ER!'M!! ! ! ! ! 1:EB?8;<!A87!?<@Q@;S!9;C=B>7!E^! ! ! ! ! ! 0;GD<:!,C7R! ! ! ! ! ! ,C78<Q@?B:E7!9R! M@Y8!9<D>R! 9<D>B?D!+)M! +8Q;8!A8!A<:B?!9;C=B>!8?!A8!=@!7>B8E>8!9:=B?BF;8!8E!"<@E>8!
8?!_!=/D?<@EY8<!+)'! +8Q;8!A8!A<:B?!A;!?<@Q@B=!+8>R! !+8>;8B=!&8C:E![+8>;8B=!A87!@<<U?7!A;!$:E78B=!A/*?@?\!+8>R!$O$*! !+8>;8B=!A87!@<<U?7!A8!=@!$:;<!A8!J;7?B>8!A87!
$:GG;E@;?D7!8;<:9D8EE87!<8FR! +8F;U?8!+D9R!)@==:Z! +D98<?:B<8!)@==:Z!+8QR!@AGR!! +8Q;8!@AGBEB7?<@?BQ8!+")#! +8Q;8!N<@E]@B78!A8!A<:B?!@AGBEB7?<@?BN!+O*M! +8Q;8!J;<BABF;8!A8!=/8E?<89<B78!9;C=BF;8!+O3! +8Q;8!A8!J;<B79<;A8E>8!7:>B@=8!+')!>:GR!! +8Q;8!?<BG87?<B8==8!A8!A<:B?!>:GG8<>B@=!3R! +8>;8B=!3B<8W!38>?R!! ! ! ! ! ! 38>?B:E!A;!>:E?8E?B8;S!A;!$:E78B=!A/*?@?!38GR!3:>R!&@GW! ! ! ! ! 38G@BE8!7:>B@=8!&@GW!?R! ! ! ! ! ! ?:G8!'#! ! ! ! ! ! O;Y8G8E?!A/;E!?<BC;E@=!@AGBEB7?<@?BN!'$! ! ! ! ! ! #<<U?!A;!?<BC;E@=!A87!>:EN=B?7!'5R! ! ! ! ! ! '5678!'M3! ! ! ! ! ! '<@Q@B=!9<:?8>?B:E!7@E?D
8
!"##$%&'!
,@E56:*#**
/%*P1"+%D%"(*F!&#+#Q!%*+%*/-*21"(#"!#(%*+%**/0%D,/1#*%"*2-'*+0%$1/!(#1"*+0!"%*-2(#$#(%*,!N/#Q!%*
$5@9B?<8! L! P! &8! N:EA8G8E?! J;<BABF;8! 98<G8??@E?! A/@77;<8<! =@! >:E?BE;B?D! A8! =/8G9=:B! A87!98<7:EE8=7!A8!A<:B?!9<BQD!
$5@9B?<8! H! P! &8! N:EA8G8E?! J;<BABF;8! 98<G8??@E?! A/@77;<8<! =@! >:E?BE;B?D! A8! =/8G9=:B! A87!98<7:EE8=7!A8!A<:B?!9;C=B>!
,@E56:*##**
/%'*D1.%"'*+0-''!&%&*/-*21"(#"!#(%*+%**/0%D,/1#*%"*2-'*+0%$1/!(#1"*+0!"%*-2(#$#(%*,!N/#Q!%*
$5@9B?<8!L!P!&87!G:A@=B?D7!98<G8??@E?!A/@77;<8<! =@!>:E?BE;B?D!A8! =/8G9=:B!A87!98<7:EE8=7!A8!A<:B?!9<BQD!
$5@9B?<8!H!P!&87!G:A@=B?D7!98<G8??@E?!A/@77;<8<! =@!>:E?BE;B?D!A8! =/8G9=:B!A87!98<7:EE8=7!A8!A<:B?!9;C=B>!
$5@9B?<8!`!P!&87!>@7!8S>89?B:EE8=7!A/@C78E>8!A8!>:E?BE;B?D!A8! =/8G9=:B!a! =87!G:A@=B?D7!A8!<;9?;<8!A8!=@!<8=@?B:E!A/8G9=:B!
,@E56:*###**
/%'*21"'%Q!%"2%'*F!&#+#Q!%'*+%*/-*21"(#"!#(%*+%**/0%D,/1#*%"*2-'*+0%$1/!(#1"*+0!"%*-2(#$#(%*,!N/#Q!%*
$5@9B?<8!L! P! &87! >:E7DF;8E>87! J;<BABF;87!A8! =@! >:E?BE;B?D!A8! =/8G9=:B! A87!98<7:EE8=7!A8!A<:B?!9<BQDR!
$5@9B?<8!H! P! &87! >:E7DF;8E>87! J;<BABF;87!A8! =@! >:E?BE;B?D!A8! =/8G9=:B! A87!98<7:EE8=7!A8!A<:B?!9;C=B>!
9
10
#45E397A5634*
*
« Lorsqu’une chose évolue, tout ce qui est autour évolue de même ».
Paulo Coelho
L’agent de nettoyage d’un établissement hospitalier qui procède au renouvellement du
marché public de prestations de nettoyage sur son site, l’agent commercial d’une société de location
de voiture implantée dans l’emprise d’un port maritime dont l’autorisation d’occupation du domaine
public arrive à échéance, la puéricultrice d’une crèche inter-entreprise reprise en régie par la
commune sur le territoire de laquelle elle est implantée, le technicien d’une régie communale d’eau
et d’assainissement dont l’activité est désormais confiée par la communauté d’agglomération à une
société privée dans le cadre d’un contrat de délégation de service public, l’ouvrier de parcs et ateliers
de l’ancienne direction départementale de l’équipement dont la compétence est transférée à la
collectivité territoriale départementale, la documentaliste d’une bibliothèque municipale dont la
commune transfère la compétence à la communauté de communes, le chef d’escale d’un aéroport
régional d’intérêt national « apporté » par l’Etat concédant à une société anonyme à capitaux
entièrement publics, le technicien ASSEDIC dont la mission d’indemnisation des chômeurs est
fusionnée avec la mission de placement des chercheurs d’emploi de l’ANPE au sein d’un organisme
unique d’intérêt public, Pôle Emploi, le facteur de la Poste dont l’administration est successivement
transformée en un établissement public puis une société anonyme, le professeur employé par
l’association Egide transformée en établissement public chargé de l’enseignement supérieur français
à l’étranger, Campus France, etc.
Derrière cet inventaire à la Prévert, et l’apparente hétérogénéité des profils décrits, se dessine
une interrogation unique, celle du sort des personnels confrontés à l’évolution d’une activité en lien
avec une personne publique. Qu’advient-il en effet des personnels affectés à une activité qui relève
ou est amenée à relever d’une personne publique lorsque celle-ci rencontre une évolution
significative dans son organisation ou sa gestion ?
11
Le droit « commun » du travail s’est depuis longtemps emparé de cette question à l’endroit
des salariés de droit privé intervenant dans le secteur économique classique. Placée au cœur des
préoccupations sociales, la question du sort des personnels affectés à une activité soumise à de
profondes évolutions figure ainsi parmi les thèmes originaires du droit social en droit interne, et
continue d’y occuper une place éminente. Le législateur d’abord, dès le début du vingtième siècle1, à
travers les dispositions du fameux article L. 122-12 du code du travail devenu L. 1224-1 du code du
travail2, les partenaires sociaux ensuite, se sont attachés à ériger des mécanismes protecteurs de
l’emploi en cas de transferts d’entreprise, en prévoyant le transfert des contrats de travail attachés à
l’activité transférée. Phénomène rare pour être noté, le législateur communautaire s’est également
saisi de la question sociale soulevée par les transferts d’entreprise en adoptant, sur le modèle
allemand, la directive n°77/187/CEE du Conseil du 14 février 1977, modifiée par la directive
n°98/50/CE du 29 juin 1998 et codifiée en 2001 à travers la directive n°2001/23/CE du 12 mars 2001
concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des
travailleurs en cas de transfert d'entreprises, d'établissements ou de parties d'entreprises ou
d'établissements.
Préoccupation centrale en droit social, aux contours juridiques désormais précisément définis
sous l’œuvre interprétatrice des juridictions sociales et communautaires, la question du sort des
personnels affectés à une activité économique « classique » en cas d’évolution dans la situation
juridique de cette dernière n’échappe donc pas, loin s’en faut, aux activités relevant ab initio ou
amenées à relever d’une personne publique, comme en témoigne l’énumération précitée. Nous
aurions d’ailleurs pu, sans difficultés, multiplier à l’envi les exemples illustrant les hypothèses dans
lesquelles une telle problématique est susceptible d’apparaître. Les exemples ici mis en exergue, qui
renvoient chacun à une des configurations possibles d’évolutions d’activités en lien avec une
personne publique, témoignent de la diversité des hypothèses où celle-ci est amenée à être soulevée :
diversité au regard de la nature des personnels, de la nature des structures d’emploi d’origine et
d’accueil mais également des évolutions potentielles. Ainsi, contrairement à l’idée qui jaillit de
prime abord à son évocation, la question du sort des personnels à l’occasion de l’évolution d’une
activité publique ne se réduit nullement à la seule hypothèse d’une réorganisation administrative et
encore moins au seul cas des agents non titulaires de droit privé employés par des personnes
publiques. Elle concerne ainsi tout autant les salariés de droit privé que les agents de droit public du
point de vue des personnels, des structures d’emploi privées et publiques du point de vue des
employeurs, traduisant par là même avec acuité la pluralité des modes d’exercice de leurs activités
1 Loi du 19 juillet 1928 codifiée à l’article 23-8° du Livre I du code du travail puis à l’article L. 122-12 du code du travail. 2 A l’occasion de la recodification du code du travail en 2008 par l’ordonnance n°2007-329 du 12 mars 2007 (J.O. du 13 mars 2007, p. 4740), ratifiée par la loi n°2008-67 du 21 janvier 2008 (J.O. du 22 janvier 2008, p. 1122) et les décrets en Conseil des ministres n°2008-243 (J.O. du 12 mars 2008, p. 4482) et décret en Conseil d’Etat n°2008- 224 du 7 mars 2008 (J.O. du du 7 mars 2008, p. 4243).
12
par les personnes publiques, et, au-delà, les évolutions profondes du champ et des modalités
d’intervention des personnes publiques.
Avant d’entrer plus avant dans l’analyse, commençons par préciser les termes de la présente
étude (I) pour ensuite saisir les raisons qui en motive la conduite (II). *
#R*/:*AG@<=*9:*;08579:*
Dans la démarche globale qui est la nôtre, le choix des termes de l’étude volontairement
générique prend tout son sens. Il a vocation à mettre en lumière la diversité des hypothèses
qu’embrasse la question du sort des personnels en cas d’évolution du mode d’organisation ou de
gestion d’une activité en lien avec une personne publique. Il implique dès lors de s’arrêter un instant
sur les définitions des termes de l’étude, pour permettre une parfaite appréhension des
développements qui vont suivre, de l’ampleur et, par là-même, de l’enjeu de la problématique du sort
des personnels à l’occasion de l’évolution dans la situation juridique d’une activité publique.
Après avoir déterminé l’acception retenue de la notion d’activité publique (A), il s’agira d’en
percevoir les possibles évolutions (B) avant d’examiner ce que recouvre la notion de continuité de
l’emploi (C).
-*S*/@*435634*90@A56>658*=7B;6C7:*T*;:*;6:4*@>:A*74:*=:E?344:*=7B;6C7:*
Ensemble des actions menées par une personne dans un domaine déterminé, la notion
d’activité s’inscrit, dans le cadre précis des mécanismes classiques de protection des contrats de
travail, dans une dimension essentiellement économique. C’est bien par le jeu des contingences et
des nécessités du marché amenant les entreprises à évoluer sans cesse qu’apparaît la question sous-
jacente du sort des personnels affectés à l’activité en cause. Les activités des personnes publiques −
dont la présente étude se propose d’examiner les effets sociaux en cas d’évolution d’organisation ou
de gestion − dépassent fort logiquement ce seul cadre économique, sans pour autant s’en extraire
totalement (2). Le rôle des personnes publiques, au-delà des débats sociologiques et politiques qu’il
appelle, renvoie en effet avant tout aux notions d’intérêt général et de service public sur les bases
desquelles a pu émerger en droit interne un droit administratif autonome (1).
UV 23<=85:4A:?H* <6??634?* 9:* ?:E>6A:* =7B;6A?* :5* @A56>658?* 9:?* =:E?344:?*=7B;6C7:?*
La présente étude aurait pu retenir comme angle d’attaque des notions classiques et
fondamentales du droit administratif telles que les notions de compétences des personnes publiques
ou de service public.
13
La détention d’une compétence, c’est-à-dire l’aptitude pour l’autorité publique à effectuer
certains actes, ne constitue en effet à notre sens qu’un préalable – certes indispensable – à l’exercice
à proprement parler de l’activité par la personne publique, au déploiement de son pouvoir. A une
notion de compétences, la notion d’activité renvoie à l’inverse à une certaine dynamique, traduisant
la volonté d'action de la collectivité publique (a).
La notion de service public se révèle quant à elle bien trop restrictive à notre sens pour embrasser
la multitude des hypothèses où les personnels peuvent voir leur situation évoluer sous l’effet des
changements affectant leur structure d’emploi. La circonstance que l’activité revête ou non le
caractère d’un service public ne nous semble en effet nullement pertinente pour définir le champ
d’étude de la présente recherche. Nombre d’activités qui, pour relever de l’intérêt général ou d’un
intérêt public n’en constitue pas nécessairement des activités de service public, se trouvent
également affectées par des évolutions substantielles nécessitant que la question du sort des
personnels qui y sont affectés soit résolue (b).
Le choix assumé de la notion « d’activité des personnes publiques » en premier lieu vise à
mettre en lumière le dynamisme intrinsèque des interventions de la personne publique qu’elle
manifeste. Le lien avec une personne publique, en second lieu, pour traduire l’importance du
rattachement de l’activité à une personne publique dans l’appréhension de la dimension sociale de
l’évolution de l’activité, et surtout l’indifférence que ce lien soit direct ou indirect.
@R 23<=85:4A:?*:5*@A56>658?*9:?*=:E?344:?*=7B;6C7:?**
L’intervention d’une personne publique dans un secteur spécifique part d’un présupposé, que
celle-ci dispose de la compétence pour ce faire, c’est-à-dire de l’« aptitude légale, matérielle,
territoriale, temporelle et personnelle pour agir »3. C’est en matière de collectivités territoriales que
la notion de compétences trouve une actualité sans cesse renouvelée sous l’effet des transferts à la
fois horizontaux – de l’Etat vers les collectivités territoriales – et verticaux – entre collectivités
territoriales4. L'existence d'une clause générale de compétence en faveur des collectivités territoriales
figure incontestablement parmi les questions les plus discutées du droit des collectivités territoriales5.
Traditionnellement assise sur l'article 61 de la loi municipale du 5 avril 1884 selon lequel « le conseil
municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune »6 et codifiée à l’article L. 3211-1
du code général des collectivités territoriales au profit de la commune et du département, étendue à la
3 Lexique de politique, Dalloz, 1992. 4 Laetitia JANICOT, « Réflexions sur la notion de compétences propres appliquées aux collectivités territoriales en droit français », AJDA, 2004, p. 1574. 5 J. CAILLOSSE, « Repenser les responsabilités locales. Du débat sur la "clarification des compétences" et la "clause générale de compétence" à celui d'un changement de modèle territorial », Cah. Institut Décentralisation 2006, 8-II, p. 5. 6 J.-M. PONTIER, « Sur une clause générale de compétence » RDP 1984, p. 1443 ; F.-P. BENOIT, Collectivités locales, t. 1, Dalloz, p. 322.
14
région par les dispositions de l’article L. 4221-1 du code général des collectivités territoriales7, elle
traduit pour nombre d'auteurs la vocation générale des collectivités territoriales à agir dans l'intérêt
public local indépendamment d'une habilitation législative spéciale et expresse8. Une collectivité
territoriale disposerait, par principe, de « la plénitude de représentation des intérêts de la
communauté humaine concernée », « [gérant] l'ensemble des intérêts publics des habitants de son
territoire »9. La doctrine s’accorde d’ailleurs à penser que les différentes lois d'attribution de
compétences n'ont pas conduit à revenir sur cette présentation classique10.
BR -A56>658?*9:*?:E>6A:*=7B;6A*:5*@A56>658?*9:?*=:E?344:?*=7B;6C7:?!
Rarement notion n’a engendré pareil engouement, suscité autant le débat et ce avec une telle
permanence. Clé de voûte du droit administratif français11, soumise aux assauts du droit
communautaire, la notion de service public à la française traduit la conception retenue par la société
du rôle de l’Etat, celui de satisfaire un intérêt public c’est-à-dire un intérêt qui bénéficie à tous.
Comme le souligne fort justement certains auteurs, « si les collectivités publiques disposent de
prérogatives de puissance publique – exorbitantes de droit commun –, elles n’existent que pour
assurer au mieux le service de l’intérêt général, c’est-à-dire le service public, les services publics ou
le service au public »12. Une activité de service public implique ainsi, pour être identifiée, la réunion
de deux critères cumulatifs, l’un organique – le rattachement, direct ou indirect, à une personne
publique –, l’autre matériel – la satisfaction d’un intérêt public –, ou pour reprendre les termes de
René Chapus d’« être assurée ou assumée par la personne publique en vue d’un intérêt public»13 .
Pour qu'une activité soit qualifiée de service public, il faut donc qu'elle poursuive un intérêt
public, notion par essence subjective et contingente en fonction de l'évolution des mœurs et des
idéologies, des attentes sociales et de l'interventionnisme croissant des collectivités publiques dans la
vie économique et sociale des individus. Pour autant, toute mission d’intérêt général ou d’intérêt
public ne revêt pas nécessairement le caractère d’un service public, surtout si elle est exercée par une
7 Il convient de noter que dans le cadre de la loi du 7 juin 1983, le législateur procédait par voie d'énumération législative pour déterminer les nouvelles compétences des collectivités territoriales. Voir en ce sens J. CHAPUISAT, « La répartition des compétences, commentaire de la loi du 7 juin 1983 », AJDA 1983, p. 81, qui estime au contraire que l'énumération des compétences par la loi vaut suppression de la clause générale de compétence. 8 J.-F. BRISSON, « La loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 portant réforme territoriale ou le droit des collectivités territoriales en miettes, J.-Cl. Adm., Fasc. 116-50, n°7. 9 A. de LAUBADERE, « Vicissitudes actuelles d'une distinction classique : établissement public et collectivité territoriale. À propos des groupements des collectivités territoriales », Mélanges Couzinet, 1974, p. 411 ; É. FATOME et J. MOREAU, « L'établissement public territorial. Mode de gestion du service public ? », AJDA 1988, p. 699. 10 J.-C. DOUENCE, Réflexions sur la vocation générale des collectivités territoriales à agir dans l'intérêt public local in Quel avenir pour l'autonomie des collectivités locales, Éd. de l'Aube, 1999, p. 317 ; B. Faure, Droit des collectivités territoriales, Dalloz, 2009, p. 479 s. ; N. KADA [ss dir.], L'intérêt public local, regards croisées sur une notion juridique incertaine, PUG, 2009 ; M.-C. ROUAULT, L'intérêt communal, Presses univ. Lille, 1991, p. 276. 11 J.-L. SILICANI évoque quant à lui un « pilier fondamental du pacte national » dans le Livre blanc sur l'avenir de la fonction publique : faire des services publics et de la fonction publique des atouts pour la France, Doc. fr., 2008, 240 p. ; R. DENOIS DE SAINT MARC parle lui du « fondement de la cohésion nationale » in Le Service public, rapport au Premier ministre, Doc. Fr., 1996, p. 14. 12 L. RAPP, Ph. TERNEYRE, N. SYMCHOWICZ [ss. rir.], Lamy droit public des affaires, Ed. Lamy 2011, n°345 p. 157. 13 R. CHAPUS, Droit administratif général, t. I, Montchrestien, 2001, 15e éd.
15
personne privée dans le cadre d’un contrat confié par la personne publique compétente. La
jurisprudence administrative exige en effet que la personne publique exerce à l’encontre de son
cocontractant privé un véritable contrôle, manifesté par l’existence de prérogatives de puissance
publique, un contrôle renforcé ou encore un lien notamment financier avec la personne publique.
Plusieurs arrêts de la haute juridiction administrative sont intervenus au cours des cinq dernières
années pour clarifier l’état du droit à ce sujet. Par un arrêt APREI rendu en formation de section le 22
février 200714, le Conseil d’Etat a ainsi précisé qu’«indépendamment des cas dans lesquels le
législateur a lui-même entendu reconnaître ou, à l'inverse, exclure l'existence d'un service public,
une personne privée qui assure une mission d'intérêt général sous le contrôle de l'administration et
qui est dotée à cette fin de prérogatives de puissance publique est chargée de l'exécution d'un service
public ; que, même en l'absence de telles prérogatives, une personne privée doit également être
regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard
à l'intérêt général de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu'aux mesures
prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que
l'administration a entendu lui confier une telle mission ». Comme a pu le souligner le Conseil d'Etat
à l’occasion du recours porté devant lui concernant la nature de la mission confiée par la Ville de
Paris à l'association Paris Jean Bouin pour gérer le stade de rugby du même nom, et partant de la
procédure de passation du contrat, les différents éléments de cette mission, « s'ils concernent des
activités d'intérêt général, ne se traduisent pas par un contrôle permettant de caractériser la volonté
de la ville d'ériger ces activités en mission de service public »15.
La circonstance que l’activité ait « simplement » un caractère d’intérêt général et non le
caractère d’un service public se traduit essentiellement au stade – certes fondamental en droit public
des affaires – de la passation du contrat par lequel la personne publique confie l’activité à une
personne privée, qui échappe aux règles contraignantes de passation posées par la loi « Sapin » du 29
janvier 199316 à l’égard des contrats de délégation de service public17.
Elle n’emporte en revanche aucune incidence déterminante selon nous sur la délimitation de
la question du sort des personnels affectés par l’évolution de l’activité à l’exercice de laquelle ils
participent. Certes le caractère de service public de l’activité s’avère être un critère essentiel pour
qualifier la nature des agents concernés par l’évolution et, partant, le régime juridique qui leur est
applicable : les agents des services publics industriels et commerciaux étant classiquement rangés
14 CE Sect., 22 février 2007, Association du personnel relevant des établissements pour inadaptés, req. n° 264541, Rec. p. 92, concl. C. VEROT, AJDA 2007, p. 793. 15 CE, 3 décembre 2010, Ville de Paris et autre, req. n° 338272, Rec. p. 472. 16 Loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques (J.O. du 30 janvier 1993, p. 1588). 17 CE, 5 octobre 2007, Société UGC-Ciné-Cité, req. n° 298773, Rec. p. 418, Dr. adm. 2007, n°165, obs. A. MENEMENIS, RJEP avril 2008, p. 27, note D. MOREAU.
16
dans la catégorie des salariés de droit privé, tandis que les agents des services publics administratifs
revêtent par principe la qualité d’agents publics.18
Pour autant, les activités d’intérêt général dépourvues d’un tel caractère de service public
n’en sont pas moins exercées par des salariés de droit privé dès lors qu’elles sont assurées par des
personnes privées, des agents de droit public lorsqu’elles sont directement assumées par la personne
publique.
Elle ne revêt pas la moindre pertinence à l’égard de la question du sort des personnels qui se
pose à notre sens avec la même acuité que l’activité en lien avec la personne publique revête le
caractère d’un service public ou non. Pour reprendre le cas de missions examinées par le Conseil
d’Etat dans les jurisprudences précitées, le renouvellement du contrat confiant l’organisation du
festival d’Aix-en-Provence à l’association à l’origine du festival de musique et qualifié par la Haute
assemblée de contrat de délégation de service public19 soulève tout autant la question du sort des
personnels employés à l’occasion de ce festival que l’expiration du contrat par lequel une commune
confie à une société d’économie mixte l’exploitation de salles cinématographiques sur son
territoire20, hypothèse dans laquelle l’activité se voit qualifiée d’intérêt public et non de service
public.
WV -A56>658?*9:?*=:E?344:?*=7B;6C7:?*:5*9E365*9:*;@*A34A7EE:4A:**
L’exercice d’une activité par une personne publique suppose que cette dernière en détienne
la compétence, c’est-à-dire le pouvoir en vertu d’une habilitation légale, réglementaire ou
contractuelle. Il postule en outre que la personne publique en ait également le droit, c’est-à-dire que
la loi ou la jurisprudence lui reconnaisse la faculté d’agir en ce sens.
La question du rôle de l’Etat, éminemment politique, renvoie alors à la problématique plus
spécifique de la régulation des rapports entre l'action publique et l'activité privée21, et la nécessité
d'assurer un équilibre entre, d’une part, la réalisation des intérêts généraux que poursuivent les
personnes publiques et , d’autre part, le nécessaire respect des conditions dans lesquelles les
personnes privées développent leurs activités économiques, garantit par le principe de la liberté du
commerce et de l'industrie. Car si les activités des personnes publiques ne sont pas, par principe, des
activités économiques, il n’est toutefois pas exclu qu’une telle qualification leur soit appliquée. Dans
18 TC, 25 mars 1996, Préfet de la Région Rhône-Alpes, dit Berkani, Rec. p. 535 ; RFDA 1996, p. 819, concl. MARTIN ; AJDA 1996, p. 354, chron. STAHL et CHAUVAUX ; D. 1996, jurispr. p. 598, note SAINT-JOURS ; Dr. soc. 1996, p. 735, obs. PRETOT ; CJEG 1997, p. 35, note LACHAUME ; Gaz. Pal. 10-11 juillet 1996, note PETIT ; JCP G 1996, II, 22664, note MOUDOUDOU 19 CE, 6 avril 2007, Commune d’Aix-en-Provence, req. n°284736, BJCP 2007, n°53, p. 283, concl. F. SENERS, AJDA 2007, p. 1020. 20 CE, 5 octobre 2007, op. cit. 21 Voir pour une analyse très précise de cette question : L. RAPP, Ph. TERNEYRE, N. SYMCHOWICZ [ss. rir.], Lamy droit public des affaires, Ed. Lamy 2011, n°30 à 104.
17
un tel cas de figure, l’activité d’intérêt général exercée par une personne publique peut alors entrer en
confrontation avec les intérêts des opérateurs privés qui auraient pu assurer une telle mission.
L’appréciation du juge administratif, a profondément évolué depuis l’arrêt Chambre
syndicale du commerce en détail de Nevers du 30 mai 193022 qui marque, rappelons-le, la fin de
l'interdiction des initiatives publiques dans la sphère normale d'exercice des activités privées et la
consécration d’une liberté d'intervention.
Cette mutation dans la perception du champ d’action des personnes publiques trouve son
origine dans la philosophie dégagée par le droit communautaire en matière économique, irriguant le
droit de la concurrence. La démarche du juge communautaire se caractérise par un grand
pragmatisme, tant en ce qui concerne la nature de l’entité gestionnaire que de la finalité même de
l’activité. En effet, le caractère public ou privé de l'entité gestionnaire se révèle ainsi indifférent pour
l'application du droit de la concurrence : les articles 81 et 82 CE23 ainsi que le règlement CE
no 139/2004 du 20 janvier 200424 s'appliquent aux personnes physiques comme aux personnes
morales et, en ce qui concerne ces dernières, aux entreprises publiques ou semi-publiques, voire à
tout organisme ayant une activité économique25. Qu’importe en outre que l’entité en charge de
l’activité « ne poursui[ve] pas un but lucratif », cela « n'enlève pas à l'activité qu'elle exerce sa
nature économique dès lors qu’ (...) elle peut donner lieu à des comportements que les règles de
concurrence visent à réprimer »26. De plus, constitue une « entreprise », au sens du droit
communautaire, toute entité exerçant une activité économique indépendamment de son statut et de
son mode de financement. La banalisation de l’activité économique qui en résulte implique dès lors
un champ d’application élargi du droit de la concurrence, qui englobe l’action économique des
personnes publiques27.
Le droit de l'intervention économique publique, qui reposait sur un principe de non-
concurrence entre les activités publiques et privées, est désormais assis sur un nouveau fondement,
celui du principe d'égale concurrence entre les opérateurs économiques intervenant sur un marché,
quel que soit leur statut public ou privé28.
22 CE, 30 mai 1930, Chambre syndicale du commerce en détail de Never, Rec., p. 583. 23 Devenus art. 101 et 102 TFUE. 24 Qui a remplacé le règlement n°4064/89/CEE du 21 décembre 1989 depuis le 1er mai 2004. 25 P. BLANC, « Les entreprises publiques face à la concurrence », Rev. conc. consom. 2002, n° 125, p. 5. 26 CJCE, 16 novembre 1995, aff. C-244/94, Fédération française des sociétés d'assurances et autres c/ ministre de l'Agriculture, Rec. CJCE, I, p. 4013 27 La directive 2004/1827 fait ainsi explicitement entrer dans son champ d'application les personnes morales de droit public en tant qu'opérateurs économiques (Directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services, J.O. L 134 du 30 avril 2004, p. 114.) 28 C. BERGEAL, concl. sur CE Avis, 8 novembre 2000, Société Jean-Louis Bernard Consultants, RFDA 2001 p. 112, C. et MP. 2000, comm. 8, chron. 2, LPA 9 novembre 2000, n°224, p. 3, BJCP 2001, p. 111.
18
L’économie serait ainsi devenue le « patrimoine juridique commun » de tous les juges, y
compris du juge administratif29. Le Conseil d’Etat semble avoir tiré toutes les conséquences qui
s’imposaient. Guidé par un évident soucis de synthèse et de pédagogie, il a, par un arrêt
d’Assemblée en date du 31 mai 2006, retracé le champ des possible d’(es) intervention(s) de la
puissance publique dans le champ des activités plus naturellement dédiées aux opérateurs privés :
« les personnes publiques sont chargées d'assurer les activités nécessaires à la réalisation des
missions de service public dont elles sont investies et bénéficient à cette fin de prérogatives de
puissance publique ; si elles entendent, indépendamment de ces missions, prendre en charge une
activité économique, elles ne peuvent légalement le faire que dans le respect tant de la liberté du
commerce et de l'industrie que du droit de la concurrence ; qu'à cet égard, pour intervenir sur un
marché, elles doivent, non seulement agir dans la limite de leurs compétences, mais également
justifier d'un intérêt public, lequel peut résulter notamment de la carence de l'initiative privée ;
qu'une fois admise dans son principe, une telle intervention ne doit pas se réaliser suivant des
modalités telles qu'en raison de la situation particulière dans laquelle se trouverait cette personne
publique par rapport aux autres opérateurs agissant sur le même marché, elle fausserait le libre jeu
de la concurrence sur celui-ci »30.
XV -A56>658?*E:;:>@45*:5*@<:48:?*Y*E:;:>:E*9074:*=:E?344:*=7B;6C7:*
C’est donc à ces multiples visages des activités des personnes publiques que la notion
d’ « activité en lien avec une personne publique » entend ici répondre. Il ne s’agit ainsi pas de viser
dans le cadre de la présente étude les seules activités obligatoires31 comme facultatives32 inscrites par
29 J. CAILLOSSE, « Le droit administratif français saisi par la concurrence ? », AJDA 2000. p. 99 30 CE Ass., 31 mai 2006, Ordre des avocats du barreau de Paris, req. n°275531, Rec., p. 272 ; CJEG 2006, p. 430, concl. D. Casas ; AJDA 2006, p. 1584, chron. LANDAIS et LENICA. 31 Il s’agit des activités pour lesquelles les personnes publiques n'ont aucun pouvoir d'appréciation sur la création et la gestion. Le code général des collectivités territoriales énumère les services publics communaux obligatoires : gestion et entretien des cimetières (articles L. 2213-8 et s., L. 2223-1 et L. 2223-3 du CGCT) ; assainissement des eaux usées (article L. 2224-7 du CGCT) ; service de désinfection, d'hygiène et de santé (article L. 2321-2, 12° du CGCT) ; gestion et entretien des voies communales (article L. 2231-2, 20° du CGCT); élimination des déchets ménagers et assimilés (article L. 2321-2 du CGCT) ; gestion des archives publiques (article L. 212-12 et s. du code du patrimoine) ; gestion des écoles (article L. 212-1 et s. du code de l’éducation) ; instruction et délivrance des permis de construire dans les communes dotées d'un plan local d'urbanisme approuvé (article L. 421-2-1 du code de l’urbanisme). Les départements et les régions se voient également assignés une obligation de création et de gestion de certains services publics. Construction et entretien de la voirie départementale (CGCT, art. L. 3321-1, 16°), construction et entretien des collèges (C. éduc., art. L. 213-1 et s.), transports scolaires (CGCT, art. L. 3551-27), action sociale, santé et insertion relevant de la compétence des départements (C. action soc. et fam., art. L. 121-1. – CGCT, art. L. 3221-1, 10°) ; entretien des ports maritimes de pêche et de commerce non pris en charge par l'État (CGCT, art. L. 3321-1, 15°) ; bibliothèques départementales (C. patr., art. L. 320-2) ; archives départementales (C. patr., art. L. 212-8) ; lutte contre l'incendie (CGCT, art. L. 1424-1 et s.) pour les Départements ; coordination des actions de développement économique (CGCT, art. L. 1511-1), création et fonctionnement des lycées et des établissements d'éducation spécialisée (C. éduc., art. L. 214-1 et s.), formation professionnelle et apprentissage (C. éduc., art. L. 214-12), inventaire général du patrimoine culturel (L. n° 2004-809, 13 août 2004, art. 95, Libertés et responsabilités locales) pour les Régions. Voir pour une vision complète : E. GINTRAND, « Services publics locaux », J.-Cl. adm., Fasc. 126. 32 Certains services publics revêtent ainsi un caractère facultatif, la loi se contentant d’en prévoir l’existence tout en laissant aux collectivités territoriales le soin de décider de leur création effective. Il en va ainsi par exemple du service du transport public de voyageurs (L. n° 82-1153, 30 déc. 1982, d'orientation des transports publics) ; de la gestion des halles et marchés (CGCT, art. L. 2224-18) ou de la distribution de l'eau dans les secteurs non desservis par un réseau. En principe tous les
19
la loi33 dans le champ de compétences des personnes publiques ; il s’agit d’y adjoindre les activités
que la personne publique entend exercer de sa propre initiative en leur conférant le caractère d’une
mission d’intérêt public ou de service public au moyen d’une décision créatrice de son assemblée
délibérante34. La seule circonstance que l’activité relève, à un moment ou un autre, de la compétence
publique interroge en effet sur les conséquences sociales de l’évolution de l’activité concernée.
N*S*/@*435634*908>3;75634*90@A56>658**
Fruit d’une œuvre législative en droit interne comme en droit communautaire et objet d’une
jurisprudence aussi récurrente qu’abondante, la notion d’évolution d’activité perçue au travers du
prisme de ses effets sociaux renvoie, en droit social, à des contours précisément définis (1). L’étude
plus générale que nous nous proposons ici de mener, en ce qu’elle porte sur l’évolution de toute
activité publique, retiendra une acception plus large, où bien qu’elle occupe une place déterminante,
la notion d’évolution d’activité telle que dégagée par les juridictions sociales n’en demeurera qu’une
focale parmi d’autres (2).
UV !4:*@AA:=5634*@7Z*A34537E?*=E8A6?8<:45*98[646?*=@E*;:*9E365*?3A6@;*
Evolution d’activité et transfert d’une entité économique autonome"!Entendue dans son
acception générale, l’évolution marque le processus continu de transformation d’un élément, le
passage progressif d'un état à un autre. Changement volontaire ou non de certains traits ou de
certains éléments de quelque chose sans en altérer nécessairement la nature ou l'essence, l’évolution
marque donc un « avant » et un « après ». La notion d’évolution d’une activité économique en droit
social traduit cette idée de transformation de l’entité gestionnaire de l’activité envisagée sous l’angle
de ses effets sociaux. Ce n’est ainsi que dans la perspective de savoir si les personnels attachés à
l’activité modifiée doivent accompagner le changement de la structure qui les emploie que le droit
social prend soin de définir la notion d’évolution d’activité. !
services publics locaux à caractère industriel et commercial sont facultatifs, à l'exception du service d'élimination des déchets et de l'assainissement. 33 En ce qui concerne les services publics locaux, ils sont pour la plupart visés par le code général des collectivités territoriales et notamment dans la première partie au livre IV (archives, bibliothèques, musées, archéologie, service d'incendie et de secours, réseaux et services locaux de télécommunications) et dans la seconde partie au titre II du live II (cimetières et opérations funéraires, assainissement, ordures ménagères, halles et marchés, abattoirs, électricité et gaz, distribution d'eau). Cependant, l’exercice de certaines missions de service public ne résulte pas nécessairement des dispositions du CGCT et peut trouver sa source dans d’autres législations. Il en vas ainsi des transports publics de voyageurs (L. n° 82-1153, 30 déc. 1982, loi d'orientation des transports publics) ; des remontées mécaniques (C. tourisme, art. L. 342-7 et s.) ; des ports de plaisance (C. tourisme, art. L. 341-4 et s.) ; des aéroports (C. aviation, art. L. 221-1 et s.) ; des écoles, collèges et lycées (C. éduc., art. L. 211-1 et s.) ; de l'action sociale (C. action soc. et fam., art. L. 121-1 et s.) ; du logement social (CCH, art. L. 622-1 et s.) ; du chauffage urbain (L. n° 80-531, 15 juill. 1980) ; de l'organisation d'activités sportives (L. n° 84-410, 16 juill. 1984, relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives). 34 CE Sect., 6 janvier 1995, Ville Paris, Rec. p. 3, JCP G 1995, IV, p. 104 ; CE Sect., 6 janvier 1995, Synd. nat. personnels techniques administratifs et service équipement CGCT, Rec. p. 5, JCP G 1995, IV, p. 94, note M.-C. ROUAULT.
20
Les termes retenus par le droit interne et le droit communautaire s’inscrivent dans une
perspective où l’économique renvoie au juridique : les dispositions de l’article L. 1224-1 du code du
travail évoquant « une modification dans la situation juridique de l'employeur » en donnant quelques
exemples non exhaustifs « notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise
en société de l'entreprise » ; l’article 1er a) de la directive 2001/23/CE vise quant à lui « tout
transfert d'entreprise, d'établissement ou de partie d'entreprise ou d'établissement à un autre
employeur résultant d'une cession conventionnelle ou d'une fusion ».
Derrière ces rédactions apparemment quelque peu différentes des dispositions internes et
communautaires se dessine une définition unique de l’évolution d’activité impliquant le transfert
corrélatif des personnels, théorisée à travers la notion fondamentale d’entité économique autonome
dégagée par les juridictions communautaires dans une démarche empreinte de pragmatisme et de
réalisme à l’occasion d’un arrêt Süzen du 11 mars 199735 et repris en termes identiques par la Cour
de Cassation depuis un arrêt du 7 juillet 199836. Pour que l’évolution de l’activité emporte transfert
corrélatif des contrats de travail, elle doit ainsi « porter sur une entité économique stable », (qui) ne
se borne pas à l’exécution d’un ouvrage déterminé. La notion d’entité renvoie ainsi à un ensemble
organisé de personnes et d’éléments permettant l’exercice d’une activité économique qui poursuit un
objectif propre ».
La combinaison d’une condition économique − une activité exercée au sein d’une entité
dédiée poursuivant un objectif propre − et d’une condition d’autonomie − l’existence de moyens
matériels et incorporels propres – confèrent à l’appréciation des évolutions rencontrées par les
activités économiques par les juridictions sociales une lecture profondément réaliste et, partant,
modulée en fonction des circonstances de chaque cas d’espèce. Qu’importe ainsi que l’évolution
d’activité ne concerne qu’une seule branche d’activité de l’entité d’origine37, que cette activité revête
un caractère accessoire ou secondaire par rapport à l’activité principale38 ou que cette activité ne
détienne que des moyens corporels ou incorporels39.
Entité économique autonome et identité d’activité"! Au demeurant, il ne suffit pas que
l’évolution de l’activité porte sur un ensemble de facteurs affectés à un même objet économique, il
faut encore que l’entité économique initiale conserve son identité à l’issue de l’évolution qui
l’affecte. Cette exigence, dégagée par la Cour de Cassation à l’occasion d’un arrêt d’assemblée du 16
mars 199040, implique que les moyens d’exploitation transférés conservent leur destination au sein de
la nouvelle entité gestionnaire. Là encore, les juridictions sociales font montre de pragmatisme et
35 CJCE, 11 mars 1997, Sûzen, aff. C-13/95, Rec. I, p. 1259, RJS 1997, n°770 : 36 Cass. Soc., 7 juillet 1998, Bull. civ. V, n°363. 37 Cass. Soc., 15 décembre 2004, Roudil c. Alsthom Power turbomachines, RJS 2005, n°124. 38 Cass. Soc. 18 juillet 2000, pourvoi n°97-20535. 39 Cass. Soc. 27 septembre 1992, Bull. civ. V, n°363. 40 Cass. ass. plén., 16 mars 1990, pourvois n° 85-44.518 et 86-40.686, D. 1990, jurispr. p. 305, note A. LYON – CAEN ; Bull. civ. ass. plén. 1990, n° 3 et 4.
21
considèrent que le maintien de l’identité de l’entité économique autonome s’apprécie non par
référence à l’ensemble de l’activité initialement exercée mais au regard du seul secteur d’activité
transféré lorsqu’il peut faire l’objet d’une activité autonome41.
WV ,E3=3?65634*9074:*@AA:=5634*;@E\:*:4*9E365*=7B;6A*8A343<6C7:*
La notion d’évolution d’activité en droit social renvoie donc principalement à un transfert
d’entreprise, marquant la succession d’opérateurs dans la conduite d’une activité économique
autonome. Sans être étrangère aux activités publiques, une telle conception ne figure cependant
seulement qu’une des hypothèses des évolutions rencontrées par ces activités. S’y ajoute une
dimension essentielle tenant dans la réorganisation des structures en charge de ces activités.
Marquant le transfert d’une activité d’une entité vers une autre, l’évolution d’une activité
publique recouvre en effet plusieurs visages selon qu’elle porte sur l’organisation de la structure
gestionnaire de l’activité ou sur le mode de gestion de l’activité concernée. C’est là la manifestation
directe de ce que l’organisation administrative est, pour reprendre les termes de René CHAPUS, une
« réalité complexe » dans laquelle « les activités publiques (qui pour la plupart, sont précisément des
activités de service public) sont exercées aussi bien par des personnes (ou « institutions » ou
« organismes ») de droit privé que par des personnes publiques ». 42
Evolution portant sur l’organisation de la structure gestionnaire de l’activité publique.
Nombre de mutations profondes ont émaillé l’organisation même des structures en charge des
activités publiques : d’un Etat marqué par une concentration des pouvoirs au niveau central, la
France a peu à peu évolué vers un Etat déconcentré, puis un état décentralisé consacrant le
développement des pouvoirs reconnus aux collectivités territoriales43. La réorganisation de
l’administration44 sous l’effet de la mise en place de politiques territorialisées s’effectue, pour
l’essentiel, entre collectivités territoriales dans le cadre de la coopération intercommunale. Cet outil
privilégié de « mutualisation » traduit en réalité deux phénomènes, la « mutualisation ascendante » –
à savoir la mise à disposition des moyens des communes vers un établissement public de coopération
intercommunale – et la « mutualisation descendante » – qui est la mise à disposition de
l'établissement public de coopération intercommunale au profit des communes. Fondamentale en
pratique45, cette dernière dimension de l’intercommunalité ne sera cependant pas abordée dans le
41 Cass.soc. 29 octobre 2003, UD Mutuelles de Meurthe et Moselle c. Gillot, RJS 1/04, n°7. 42 R. CHAPUS, Droit administratif général, Montchrestien, t. 1, 15ème éd., 2001, p. 167, n°195 et n°196. 43 Loi n°82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, départements et régions (J.O. du 3 mars 1982) ; Loi constitutionnelle n°2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République (J.O. du 29 mars 2003, p. 5568 ; Loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (J.O. du 17 août 2004, p.14545 ; loi n° 2010-1563, op. cit. 44 Au sens de la directive 2001/23/CE du 12 mars 2001 (J.O.C.E. n° L. 82, 22 mars 2001, p. 16). 45 V. GABORIAU, « La mutualisation dans les services publics, nouvel enjeu de coopération », Rev. de droit sanitaire et social 2012, p. 45.
22
cadre de la présente étude en ce que, si elle demeure une réelle coopération, elle n’emporte en
revanche pas de changement de gestionnaire de l’activité comme en matière de transfert d’une
compétence d’une collectivité à un établissement public de coopération intercommunale46.
L’action administrative s’est également déplacée d’une administration générale vers des
structures spécialisées, dans un premier temps par l’apparition des grands établissements publics au
lendemain de la seconde guerre mondiale, puis à partir des années 1980 à travers la multiplication
« d'autorités administratives indépendantes » 47. Les modifications structurelles sont à présent
d’ordre organique, à l’image de la création de sociétés anonymes en lieu et place d’établissements
publics48. Elles revêtent en outre, à travers la création des sociétés publiques locales49, un attrait
nouveau en permettant d’échapper, par l’instauration d’un mécanisme in house, aux règles de
publicité et de mise en concurrence prescrites par le droit communautaire50, mais également « d'allier
maîtrise publique et souplesse du régime juridique »51 pour parvenir à une coopération optimale
entre collectivités locales.
Les évolutions structurelles apparaissent ainsi polymorphes. La présente étude ne pourra
raisonnablement les traiter dans leur ensemble. Elle n’abordera pas à ce titre les dispositifs
successivement mis en place tels les « stratégies ministérielles de réforme »52, les « audits de
modernisation », la création d'une « direction générale de modernisation de l'Etat » au sein du
ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie53, pas plus que la réorganisation des entités
déconcentrées de l'Etat54, dont les effets, essentiellement d’ordre interne, aux services relèvent
davantage d’une logique de rationalisation des moyens plutôt que d’une évolution dans
l’appréhension de leurs activités publiques par les personnes publiques.
46 Voir sur la mise en exergue de ce phénomène : F. BOULEY, « Vers une généralisation de la mutualisation des services entre collectivités locales ? », AJDA 2012, p. 468. 47 Qualificatif expressément utilisé par le législateur dans la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés pour caractériser la Commission nationale de l'Informatique et des Libertés (C.N.I.L.). 48 France Télécom, La Poste, ADP, EDF, GDF Suez, pour ne citer que les plus emblématiques. 49 Loi n° 2010-559 du 28 mai 2010 pour le développement des sociétés publiques locales (J.O. du 29 mai 2010, p. 9697), S. NICINSKI, « La loi du 28 mai 2010 pour le développement des sociétés publiques locales », AJDA 2010, p. 1759. 50 : CJCE, 18 novembre 1999, Teckal, aff. C-107/98, Rec. CJCE 1999, I, p. 8121 ; CJCE, 11 janvier 2005, Stadt Halle, aff. C-26/03, Rec. CJCE 2005, I, p. 1, Dr. adm. 2005, comm. 36, note A. Alonso GARCIA et A. Maillard ; C. ET MP. 2005, comm. 68, note G. ECKERT ; CJCE, 13 novembre 2008, Coditel Brabant, aff. C-324/07, Rec. CJCE 2008, I, p. 8457 ; voir pour une synthèse de la question : R. NOGUELLOU, « Retour sur les marchés in house », Dr. adm. n°11, novembre 2008, alerte 72 ; voir pour une actualité de la question : J.-F. AUBY, « Les sociétés publiques locales, un outil aux contours incertains », RFDA 2012 p. 99. 51 J.-M. PEYRICAL, « De nouvelles voies pour la gestion des services publics locaux, Services d'intérêt économique général, partenariats public-privé institutionnalisés et sociétés publiques locales », AJDA 2011, p. 934. 52 Circ. min. du 25 juin 2003 (J.O. du 17 juillet 2003), les « audits de modernisation » (Circ. min. 29 sept. 2005, J.O. du 4 octobre 2005), précisée par Circ. min. 13 juillet 2006 (J.O. du 26 août 2006). . 53 Dépendant aujourd'hui du ministère du Budget, des Comptes publics, de la Fonction publique et de la Réforme de l'Etat et chargée notamment de « l'animation et de la coordination de l'évaluation des politiques publiques » (Décret n° 2005-1792, 30 déc. 2005, (J.O. du 1er janvier 2006). 54 Voir notamment Circ. min. du 7 juillet 2008 (J.O. du 9 juillet 2008). Au niveau régional, les directions passent ainsi de 35 à 8 permettant à la région de devenir le lieu de pilotage des politiques publiques au niveau local (Décret n°2010-146, 16 février 2010 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements, J.O. du 17 février 2010).
23
Evolution portant sur le mode de gestion de l’activité publique.!En dehors de ces évolutions
structurelles, l’activité publique peut simplement connaître des évolutions dans ses modalités de
gestion par la personne publique. Les deux modes de gestion classiquement retenus, la gestion
directe et la gestion déléguée, distinguent selon l’intensité de l’intervention matérielle et juridique
que la personne publique entend donner à l’activité pour laquelle elle est compétente. La personne
publique est ainsi libre d’exercer directement l’activité en régie l’activité, avec ses propres moyens
ou, à l’inverse, d’en confier l’exercice à un tiers par la voie contractuelle. Ces évolutions,
constantes de par la réversibilité du choix du mode de gestion par la personne publiques, représentent
la majeure partie des évolutions rencontrées par les activités publiques. Successions de
cocontractants dans le cadre de missions contractuellement confiées à des tiers, externalisation55 ou
délégation d’une activité jusqu’alors assurée en régie par la personne publique elle-même ou, à
l’inverse, reprise en régie d’une activité par le passé confiée à un tiers par voie contractuelle, sont
autant de configurations possibles que de mode de gestion envisageables pour la personne publique.
L’évolution d’une activité représente ainsi au sens de la présente étude toute modification
substantielle dans l’organisation ou la gestion d’une activité relevant ou amenée à relever d’une
personne publique emportant des effets pour les agents qui y sont affectés. !
2*S*/@*435634*9:*A345647658*9:*;0:<=;36*!
Avenir et pérennité des personnels dans le nouveau contexte d’exploitation. Qu’advient-il
ainsi des personnels mobilisés pour l’exercice d’une activité publique, ou amenée à le devenir, à
l’issue de l’évolution rencontrée par cette activité dans son organisation ou sa gestion ? Ces
personnels demeurent-ils affectés à cette activité ? Quel régime leur est alors applicable sous
l’empire du nouvel exploitant, dont la nature et le régime juridique peuvent profondément différer
par rapport au contexte qui préexistait à l’évolution de l’activité concernée ? A l’inverse, continuent-
ils de servir leur employeur initial si celui-ci n’est plus en charge de l’activité transférée à un
nouveau gestionnaire ? La question du sort des personnels renvoie aux effets de l’évolution d’une
activité publique sur la situation juridique des personnels qui y sont attachés, au moment même du
transfert comme à l’issue du transfert. Son appréhension répond, de manière générale, à une finalité
protectrice des intérêts des personnels (1). Elle diffère selon la nature des personnels concernés, de
droit privé ou de droit public et selon l’intensité du lien organique et matériel avec la personne
publique (2). *
55 J.-D. DREYFUS, « L'externalisation, éléments de droit public », AJDA 2002, p. 1214 ; J.-D. DREYFUS, « Externalisation et liberté d’organisation du service », AJDA 2009, p. 1529 ; P. COSSALTER, « Le droit de l'externalisation des activités publiques dans les principaux systèmes européens », Chaire MADP, Sciences-po, séminaire 27 mars 2007, disponible sur : chaire madp.sciences-po.fr ; même auteur, Les délégations d'activités publiques dans l'Union européenne, LGDJ, 2007.
24
UV /@* [64@;658* =E35:A5E6A:* 9:?* 96?=3?656[?* ;8\@7Z*9:* E8?3;75634*97* ?3E5* 9:?*=:E?344:;?*:4*9E365*=E6>8*
La directive 2001/23/CE du 12 mars 200156 concernant le rapprochement des législations des
États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises,
d'établissements ou de parties d'entreprises ou d'établissements évoque en préambule la nécessité
d’instaurer des dispositifs de nature à « protéger les travailleurs en cas de changement de chef
d'entreprise en particulier pour assurer le maintien de leurs droits ».
Qu’il résulte des dispositions bien connues de l’ancien article L. 122-12 du code du
travail57, d’une convention collective ou encore d’un contrat de cession d’entreprise, le transfert
des contrats de travail dans le cadre d’un changement de gestionnaire constitue, en toute
hypothèse, une dérogation expresse aux dispositions de l’article 1165 du code civil qui dispose
que « les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point au
tiers ». Sans un dispositif organisant expressément la succession d’employeurs, le contrat de
travail, qui ne lie que le salarié et l'employeur qui l'ont initialement conclu, ne pourrait être
poursuivi avec un nouvel employeur, alors considéré comme tiers au contrat, et ce, quand bien
même l’activité concernée ne subirait aucune modification dans son exécution.
En érigeant différents systèmes translatifs des contrats de travail, tant législatifs que
conventionnels, le droit social s’est donc attaché à atténuer la rigueur civiliste des dispositions de
l’article 1165 du code civil, difficilement compatible avec son ambition protectrice des relations
sociales et la recherche de la pérennité du lien contractuel de travail et de la stabilité de l'emploi.
Et c’est là la première apparition de ce que l’on peut appeler l’autonomie du droit du travail, par
rapport à la règle civile d’interprétation58.
Ces « dispositifs translatifs », qu’ils puisent leur source dans la loi ou dans un accord
collectif, obéissent au même mécanisme juridique : la cession de contrat59. Le mécanisme de la
cession de contrat est irréductible à une stipulation pour autrui60, à une novation par changement
de débiteur61 ou à une délégation de créance62. « La cession de contrat a pour objet le
remplacement d'une partie par un tiers au cours de l'exécution du contrat. À la différence de la
cession de créance ou de la délégation, il s'agit non seulement de transmettre à ce tiers un droit
56 Directive 2001/23/CE du 12 mars 2001, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises, d'établissements ou de parties d'entreprises ou d'établissements (J.O.C.E. L 82/16 du 22 mars 2001). 57 Aujourd’hui l’article L.1224-1 du code du travail à l’issue de la recodification du code du travail de 2008. 58 P. LAFARGE, « L’article L.122-12 du code du travail est-il compatible avec le régime des marchés publics ? », Conférence prononcée le 25 mai 1985 devant l’Association pour le droit public de l’entreprise, Rev. Marchés publics. 59 P. MORVAN, « Application conventionnelle de l'article L. 122-12 et accord du salarié : plaidoyer pour un revirement », JCP S. n° 49, 5 Décembre 2006, p. 1964. 60 Article 1121 du code civil. 61 Article 1271 2° du code civil. 62 Article 1275 du code civil.
25
ou une obligation, mais surtout de l'investir de la qualité de partie »63. Dans les transferts
d'entreprise, il permet d'étendre le lien contractuel à un tiers et d'opérer une substitution
d'employeur garantissant la poursuite de la relation de travail.
WV /:?*9:7Z*>6?@\:?*9:?*=:E?344:;?*A34A:E48?*=@E*;:?*8>3;75634?*90@A56>658?*=7B;6C7:?*
Que l’activité relève par essence d’une personne publique ou qu’elle ait vocation à pénétrer
sa sphère de compétence, la seule circonstance qu’elle puisse avoir un lien avec la personne publique
interroge quant à la nature des agents qui y sont affectés, et par suite quant aux effets de l’évolution
de l’activité à leur égard. Renvoyant à la summa divisio qui gouverne l’ordre juridique en droit
interne, la différenciation des personnels en deux catégories − les salariés de droit privé et les agents
de droit public − relevant de règles juridiques spécifiques structure la résolution de la problématique
du sort des personnels à l’occasion de l’évolution d’une activité en lien avec une personne publique.
Conditionnée par la nature de la structure employeuse et la nature de l’activité exercée, la qualité des
agents affectés à une activité en lien avec une personne publique se révèle au surplus bien plus
polymorphe que cela eut a priori pu paraître.
C’est là le premier enseignement de la présente étude : la problématique du sort des
personnels affectés à une activité publique soumise à une évolution sensible dans son organisation ou
sa gestion concerne, contre toute attente, aussi bien les salariés de droit privé que les agents publics.
La nature des personnels se révèle d’ailleurs être le critère décisif d’examen des effets de l’évolution
de l’activité sur le sort des personnels. Il convient dès lors d’identifier les hypothèses dans lesquelles
les personnels affectés à une activité publique revêtent la qualité de salariés de droit privé, et celles
où leur est reconnue la qualité d’agents publics.
@R '@;@E68?*9:*9E365*=E6>8*:5*@A56>658?*=7B;6C7:?**
Salariés de droit privé et activités en lien avec une personne publique confiées à un tiers
personne morale de droit privé. Dédiées à la protection du personnel salarié et à l’organisation de
ses rapports avec la direction de l'entreprise64, les dispositions du code du travail s’appliquent par
principe aux personnes privées dans leurs relations employeurs-employés, et partant ont vocation à
régir les relations des travailleurs salariés65.
63 MALAURIE Ph., L. AYNES L. et Ph. STOFFEL-MUNCK, Les obligations, Defrénois, 2e éd., 2005, n° 906. 64 L. ROZES, Dalloz Entreprise, 1991, Entreprise, CHAPITRE 1er-Notion d'entreprise SECTION 1re-Eléments constitutifs
de l'entreprise, Art. 1er - Personnel salarié. 65 G. LYON-CAEN, Le droit du travail non salarié, 1990, Sirey, notant que les règles du code du travail ont tendance à s'élargir au travail non salarié.
26
La conception française du champ d’application du code du travail66 implique dès lors un premier
constat essentiel pour la question du sort des personnels affectés par l’évolution d’une activité
publique traitée par la présente étude. Dès lors que l’activité en lien avec la personne publique se
trouve exercée par une personne privée, que ce soit dans le cadre d’une externalisation ou délégation
contractuelle − marché, délégation de service public ou encore convention d’occupation − ou d’une
privatisation du statut juridique de l’entité gestionnaire de l’activité − par transfert de propriété d’une
entreprise du secteur public au secteur privé au sens de l’article 34 de la Constitution ou encore,
modification de la forme juridique de l’entité gestionnaire conduisant à la privatisation de son régime
juridique et non nécessairement de son capital67 −, les personnels qui y sont affectés relèvent par
principe d’un régime de droit privé et, partant, des dispositions de droit privé du travail. Compte tenu
de l’ampleur des activités publiques effectivement dévolues à des entités de droit privé, on comprend
très vite l’importance (quantitative ?) des contingents de personnels de droit privé affectés à des
activités publiques, que celles-ci revêtent un simple caractère d’intérêt général ou caractérise une
véritable mission de service public, administratif comme industriel et commercial.
Salariés de droit privé et indifférence du mode de gestion d’une activité de service public
industriel et commercial. Au demeurant, une dernière catégorie de salariés de droit privé employée à
l’occasion d’activités publiques doit être ici mentionnée, celle des salariés de droit privé employés
par des personnes publiques exerçant une mission de service public industriel et commercial dans le
cadre d’un établissement public industriel et commercial ou d’une régie personnalisée.
L’association des notions de service public et de salariés de droit privé n’est certainement
pas celle qui vient à l’esprit au premier abord lorsque l’on évoque les personnels affectés à l’exercice
d’activités publiques. La soumission des personnels affectés à des missions de service public au droit
privé en général, et au droit du travail en particulier dans leurs relations avec leur employeur, est
pourtant un principe acquis depuis longtemps, et ce, même lorsque l’employeur se trouve être une
personne publique. Dès lors que l’activité de service public industriel et commercial se trouve
exercée par un opérateur économique dans le cadre d’un contrat public ou par la personne publique
dans le cadre d’une régie autonome personnalisée, ses personnels relèvent de plein droit des
dispositions de droit commun du droit du travail. Dans ce cas de figure, « le Conseil d’Etat a tiré les
conséquences du fait que lorsque l’Etat, au lieu de concéder à une personne privée l’exploitation
d’un service public industriel et commercial, le prend en charge en créant à cette fin un
établissement public à caractère industriel et commercial, les relations individuelles entre
l’établissement public et le personnel, pas davantage que les relations individuelles entre
l’établissement public et ses clients, ne mettent en cause les principes fondamentaux de
l’administration publique, et n’ont pas, dès lors, de motif légitimes d’êtres soustraites du droit
66 F. MELLERAY, C. MAUGUE, A. COURREGES, « code du travail et personnes publiques », AJDA 2008, p. 855 67 S. NICINSKI « La transformation des établissements publics industriels et commerciaux », RFDA 2008, p. 35.
27
commun. (…) La règle est donc que, dans les services publics industriels et commerciaux érigés en
établissements publics, seuls relèvent d’un statut de droit public les agents chargés de la direction de
l’ensemble des services de l’établissement et le chef de la comptabilité, lorsque ce dernier possède la
qualité de comptable public »68.
BR -\:45?*=7B;6A?*:5*@A56>658?*=7B;6C7:?**
« Constituée » selon les termes de René Chapus « par l’ensemble des personnels qui,
occupant à titre professionnel un emploi salarié dans les services des personnes publiques sont
soumis à un statut de droit public »69, la fonction publique se révèle être une notion aux contours
plus que jamais en pleine mutation70, notamment sous l’effet de la loi du 12 mars 2012 relative à
l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la
fonction publique71. Dans le langage courant, les membres de la fonction publique sont
indistinctement assimilés à des « fonctionnaires», liés à la personne publique employeur par un « lien
de droit public », réputés occuper les emplois permanents au sein des personnes publiques et revêtant
la qualité de fonctionnaires titulaires en application du principe posé à l’article 3 de la loi du 13
juillet 198372. Cette catégorie emblématique de personnels de droit public, dont les principales
caractéristiques tiennent au recrutement des agents par voie de concours, à la titularisation dans un
grade qui leur permet d’occuper les emplois correspondants, et la soumission au système de la
carrière, ne saurait cependant résumer à elle seule − loin s’en faut − les différentes « espèces73 »
d’agents publics qui coexistent aujourd’hui au sein de la fonction publique. Des distinctions existent
ainsi au sein des agents publics, entre ceux placés à l’égard de l’administration « dans une situation
statutaire et règlementaire» − les fonctionnaires − et les agents publics non titulaires, principalement
les agents contractuels. Censés être recrutés exceptionnellement, ces derniers sont, comme le
souligne Marcel Piquemal, « les mals aimés et mals nommés de la fonction publique. Mal aimés
parce que sous-estimés par l’administration et admis avec difficulté par les organisations
68 Conseil d’Etat, Perspectives pour la fonction publique, EDCE n°54, 2003, p. 309. 69 R. CHAPUS, Droit administratif général, Montchrestien, t. 2, 15ème éd., 2001, p. 797, n°1. 70 J.-L. SILICANI, Livre blanc sur l'avenir de la fonction publique : faire des services publics et de la fonction publique des atouts pour la France, Doc. fr., Paris, 2008, 240 p. ; du même auteur « Il nous faut construire la fonction publique des vingt prochaines années : soyons ambitieux ! (entretien avec...) », JCP A 2008, p. 2142 ; du même auteur, « Faire cohabiter la fonction publique de carrière avec une gestion moderne des ressources humaines (questions à...) », AJDA 2008, p. 1020 ; D. JEAN-PIERRE, « Les propositions du Livre blanc sur l'avenir de la fonction publique », JCP A 2008, act. 403 ; F. MELLERAY, « Une profonde rupture intellectuelle avec la conception française de la fonction publique (questions à...) », AJDA 2008, p. 900 ; M.-C. de MONTECLER « Quarante propositions pour transformer la fonction publique », AJDA 2008, p. 836 ; R. NOGUELLOU, « Remise du Livre blanc sur l'avenir de la fonction publique », Dr. adm. 2008, alerte 37. 71 Loi n° 2012-347 du 12 mars 201271 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique (J.O. du 13 mars 2012 p. 4498) ; D. JEAN-PIERRE, « La lutte contre la précarité dans la fonction publique territoriale depuis la loi du 12 mars 2012 », JCP A n°15, 16 Avril 2012, p. 2107 ; P. LINGIBE, « Résorption de la précarité dans la fonction publique territoriale », AJCT 2012, p. 164. 72 Article 3 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale (J.O. du 27 janvier 1984, p. 441). . 73 F. MELLERAY, Droit de la fonction publique, Ed. Economica, coll. Corpus droit public, 2005, p. 111.
28
professionnelles. Mal nommés parce que définis de manière négative par rapport à une situation de
référence dont on leur refuse l’accés » 74.
Au demeurant, qu’il soit titulaire ou non, la qualité d’agent public répond à deux exigences
cumulatives posées par la jurisprudence de manière extrêmement classique en droit administratif : la
première est d’ordre organique, la seconde, d’ordre matériel. La première condition sine qua none
repose ainsi sur le rattachement direct de l’agent à un employeur public, seule une personne publique
pouvant employer un agent public. La prégnance du critère organique dans la jurisprudence
administrative est d’ailleurs renforcée par l’appréciation stricte opérée par les juridictions
administratives. A cette condition nécessaire mais non suffisante s’ajoute une seconde condition.
Consistant en la nature des missions assignées à l’agent, celle-ci renvoie à la dichotomie service
public administratif/service public industriel et commercial classiquement retenue dans l’affaire dite
du Bac d’Eloka75, traduisant elle-même la distinction ancienne opérée par le commissaire du
gouvernement Romieu et le Conseil d’Etat à l’occasion de l’arrêt Terrier en 190376. Au terme d’une
jurisprudence hésitante, ou à tout le moins fluctuante77, le Conseil d’Etat a finalement dégagé à
l’occasion de l’arrêt Berkani en date du 25 mars 199678 une position désormais stabilisée en faveur
d’un bloc de compétence du juge administratif pour connaître des litiges intéressant les personnels
des services publics administratifs, en considérant que « les personnels non statutaires travaillant
pour le compte d’un service public administratif sont des agents contractuels de droit public quelque
soit leur emploi ». Cette solution, bien qu’empreinte d’une certaine rigueur, se révèle d’une portée
indéniablement simplificatrice. L’état du droit assure en effet aujourd’hui une identification facilitée
des agents publics, qui pourrait parfaitement être résumée par le considérant dégagé par le Tribunal
des conflits dans un arrêt du 22 octobre 200179. Ainsi, « sauf dispositions législatives contraires, les
personnels non statutaires travaillant pour le compte d’une personne publique gérant un service
public administratif sont soumis à un régime de droit public quelque soit leur emploi ». Il n’est ainsi
plus besoin de s’intéresser, comme le commandait la jurisprudence Affortit et Vingtain80, au degré de
participation de l’agent à la mission de service public administratif assignée à l’établissement dont il
74 M. PIQUEMAL, « Le fonctionnaire et l’agent des services publics », Les non-titulaires, t. 3, Berger Levrault, 1981, p. 15. 75 TC, 22 février 1921, Société commerciale de l’Ouest Africain, D. 1921, III, p. 1, concl. Paul MATTER. 76 CE, 6 février 1903, Terrier, Rec. p. 94, concl. J. ROMIEU, S. 1903, III, p. 25, concl. J. ROMIEU et note Maurice HAURIOU. 77 CE sect., 4 juin 1954, Affortit et Vingtain, Rec. p. 342, concl. CHARDEAU, AJDA 1954.II.6 bis, chron. GAZIER et LONG consacrant un critère d’identification reposant sur la participation directe ou non de l’agent au service public administratif dont l’application conduisait selon les termes mêmes du commissaire du gouvernement Chardeau qui avait présidé à son institution à des solutions quelque peu « byzantines » selon les circonstances de l’espèce. 78 TC, 25 mars 1996, Préfet de la Région Rhône-Alpes, dit Berkani, Rec. p. 535 ; RFDA 1996, p. 819, concl. MARTIN ; AJDA 1996, p. 354, chron. STAHL et CHAUVAUX ; D. 1996, jurispr. p. 598, note SAINT-JOURS ; Dr. soc. 1996, p. 735, obs. PRETOT ; CJEG 1997, p. 35, note LACHAUME ; Gaz. Pal. 10-11 juillet 1996, note PETIT ; JCP G 1996, II, 22664, note MOUDOUDOU, op. cit. 79 TC, 22 octobre 2001, Cabanel c. Recteur de l’académie de Grenoble, req. n° 3271. 80 Ibid.
29
relève, à l’exception remarquable des agents des établissements dit à « double visage » où la dualité
de missions exercées oblige à opérer un tel examen81.
Il en résulte que par principe, les agents employés par une personne publique pour l’exercice
d’une mission de service public administratif sont des agents publics, au même titre que le directeur
et l’agent comptable des services publics industriels et commerciaux82. Les seules dérogations
résultent d’une intervention directe du législateur, d’ailleurs souvent motivée par la volonté de faire
évoluer l’organisation ou le mode de gestion de l’activité, à l’image des établissements publics
administratifs transformés en établissements publics industriels et commerciaux ou de ces mêmes
EPIC transformés en société anonyme.
##R*/06458E]5*9:*;08579:*
Justifier l’opportunité d’étudier la question du devenir des personnels affectés à une activité
publique à l’occasion de l’évolution rencontrée par cette dernière conduit à souligner l’ampleur,
sinon la diversité des mutations qui ont affectés au cours des dernières années l’organisation et la
gestion des activités des personnes publiques. Cela impose également de mesurer l’enjeu du volet
social sur la réussite générale du projet d’évolution de l’activité publique (B), et de constater, par là
même, que cette dimension est souvent minimisée ou envisagée à trop court terme en dépit de sa
récurrence (A).
-*S* /@* E8A7EE:4A:*9:?*8>3;75634?*9@4?* ;03E\@46?@5634*:5* ;@* \:?5634*9:?*@A56>658?*=7B;6C7:?*
Phénomène classique en droit privé du travail, l’évolution d’une activité et le sort réservé
aux salariés de droit privé qui y sont affectés figure parmi les thèmes fondamentaux du droit social
contemporain, et fait, à ce titre, l’objet d’une jurisprudence relativement stabilisée et d’une littérature
abondante. La problématique sociale des évolutions d’activités en lien avec une personne publique,
pour être tout aussi essentielle sinon plus que celle qui irrigue le secteur économique classique,
souffre à l’inverse d’un manque d’analyse globale et approfondie, du moins de l’absence d’une mise
en perspective de l’ensemble des hypothèses où elle est amenée à être soulevée83. Certes la doctrine
publiciste n’a pas manqué de se saisir de certaines problématiques qui ont pu, en fonction de
l’actualité législative et juridictionnelle, suscité le débat. L’obligation de reprise des personnels de 81 CE, 3 décembre 2003, Houte, JCP A 2004, p. 1146, note J. MOREAU, à propos de Voies navigables de France. Les employés des chambres de commerce et d’industrie sont également particulièrement visés. Voir par exemple : 82 CE, 8 mars 1957, Jalenques de Labeau, Rec. p. 158, D. 1957, jurispr. p. 378, JCP G 1958, II, 1987, note DUFAU ; CE Sect., 15 décembre 1967, Level, Rec. p. 501, AJDA 1968, II, p. 230, concl. Braibant, D. 1968, jurispr. p. 387, note LECLERCQ. 83 On relèvera cependant les approches menées par certains ouvrages, à l’image du Lamy droit public des affaires ; voir également F. MELLERAY, op. cit., n° 65 à 69 ou encore L. LAMBLIN, La fonction publique de l’Etat confrontée à la concurrence, Th. Paris II, 2007.
30
droit privé par une personne publique reprenant en régie une activité de service public administratif
figure à cet égard au rang des hypothèses d’évolutions d’activités les plus traitées et discutées84.
Dans le même sens, le transfert des techniciens et ouvriers scolaires des lycées, communément
désignés sous l’acronyme TOS85, du ministère de l’éducation vers les départements ou plus
récemment encore celui des ingénieurs ou ouvriers des parcs et ateliers de l’équipement vers les
mêmes départements ont fait l’objet d’une lecture attentive par les auteurs spécialisés86. Exception
qui confirme la règle, la dimension sociale de la transformation emblématique de l’administration
des PTT successivement en un établissement public, France Télécom, puis en une société anonyme
du même nom, a largement irriguée les pages des revues juridiques87. Ces hypothèses, au demeurant
profondément intéressantes, ne sauraient cependant résumer à elles seules un mouvement bien plus
vaste à notre sens, et caractérisé par sa récurrence.
Force est de constater en effet que si la plupart des évolutions d’activités publiques –
externalisation, reprise en régie, décentralisation, création de groupements intercommunaux,
transformation en établissement public ou société anonyme, etc. – ont largement été analysées en
doctrine, leur dimension sociale a souvent été traitée de manière cursive et artificielle, voire a pu être
totalement éludée. C’est là ignorer, à notre sens, un enjeu majeur de ces mutations potentiellement
exacerbé par l’ampleur des hypothèses concernées, et leur récurrence sous l’effet combiné de
plusieurs facteurs.
UV +:*;0:[[:5*97*;6BE:*AG36Z*9:?*<39:?*9:*\:?5634*
Compétente en vertu d’une loi, d’un acte administratif, ou encore d’un contrat, la personne
publique n’en assure cependant pas nécessairement l’exercice par elle-même, dans le cadre d’une
régie. Dès lors que l’activité publique présente un caractère « délégable »88, la jurisprudence du
Conseil d'État consacre au profit de la personne publique compétente un principe général de liberté
de choix du mode de gestion du service public. Fondée sur la libre administration des collectivités
territoriales, cette liberté, par essence politique, implique qu’aucun contrôle juridictionnel de son
84 G. CLAMOUR, « Plaidoyer pour l’arrêt Lamblin », AJDA 2005, p. 1205 ; D. JEAN-PIERRE, « L’article L. 122-12 du code du travail et le droit de la fonction publique : quand l’incompréhensible se conjugue à l’inapplicable », JCP G n°52, II 10200 ; Europe 2005, n°44, obs. CASSIA. 85 Voir par ex. : D. JEAN-PIERRE, « Le transfert des TOS aux départements et régions », JCP A n°8, 20 février 2006, 1043 ; R. ALLEMAND et P. TIFINE, « Le transfert aux collectivités territoriales des personnels techniques et ouvriers de service de l’éducation nationale : l’analyse des questions statutaires », AJDA 2006, p. 1260 ; R. ALLEMAND, Y. GRY (dir.), Le transfert des personnels TOS de l'Education nationale, L'Harmattan, coll. « GRALE », 2007. 86 D. JEAN-PIERRE, « Le transfert de personnels des parcs de l’équipement aux départements », JCP A 2009, n°2296 ; M.-C. de MONTECLER, « Adoption de la loi sur les parcs de l'équipement », AJDA 2009, p. 1864 ; J. COURTIAL, « Les parcs de l’équipement : de curieux services de l’Etat confrontés à la décentralisation », JCP A 2006, n°1265. 87 L. RAPP, « La privatisation de France Télécom : « de l’exemple français » à l’ « exception culturelle », CJEG 1994, p. 356 ; L. RICHER, « Le statut des agents de France Télcom », AJDA 1994, p. 463 ; CHEVALLIER, « La nouvelle réforme des télécommunications : ruptures et continuités », RFDA 1996, p. 937. 88 CE Avis, 7 octobre 1986, in circulaire du ministère de l’Intérieur du 7 août 1987. Le Conseil d’Etat précise ici que tout service public peut être confié à un tiers « sous réserve toutefois que le service ne soit pas au nombre de ceux qui, par leur nature ou par la volonté du législateur, ne peuvent être assurés que par la collectivité territoriale elle-même ».
31
opportunité ne puisse être effectué89. Le choix opéré par la collectivité publique de gérer directement
une activité publique ou de la déléguer à un tiers, en qu’il résulte des prérogatives de puissance
publique de la collectivité, n’est d’ailleurs pas assimilable à une activité de production, de
distribution ou de services de la part de la collectivité publique, et échappe, en conséquence, au
contrôle des autorités de concurrence au regard des articles L. 410-1 et suivants du code du
commerce90 et du principe de liberté du commerce et de l'industrie91. Par un arrêt d’assemblée en
date du 26 octobre 201192, le Conseil d’Etat a rappelé93 dans un considérant de principe « que les
personnes publiques ont toujours la possibilité d'accomplir les missions de service public qui leur
incombent par leurs propres moyens ; qu'il leur appartient en conséquence de déterminer si la
satisfaction des besoins résultant des missions qui leur sont confiées appellent le recours aux
prestations et fournitures de tiers plutôt que la réalisation, par elles-mêmes, de celles-ci ; que ni la
liberté du commerce et de l'industrie, ni le droit de la concurrence ne font obstacle à ce qu'elles
décident d'exercer elles-mêmes, dès lors qu'elles le font exclusivement à cette fin, les activités qui
découlent de la satisfaction de ces besoins, alors même que cette décision est susceptible d'affecter
les activités privées de même nature ».
Activité publique et principe de mutabilité et de continuité du service public. Le mode de
gestion d’une activité « délégable » est donc par essence évolutif, sinon réversible, selon les
contingences politiques, juridiques, économiques ou sociologiques. A l’expiration d’un contrat par
lequel elle a pu confier la gestion d’une activité qui relève de sa compétence, la personne publique
peut parfaitement souhaiter en reprendre la gestion en régie, par ses propres moyens. A l’inverse, la
personne peut souhaiter mettre fin à l’exploitation en régie d’une activité et décider du principe
d’une délégation de service public pour sa poursuite. Le caractère discrétionnaire du choix du mode
de gestion d’un service public94 découle directement du principe de mutabilité du service public95, lui
même corollaire du principe de continuité du service public, principes à valeur constitutionnelle qui
89 CE, 18 mars 1988, Loupias, Rec. p. 975 ; CE, 10 janvier 1992, Association des usagers de l'eau de Peyreleau, Rec. p. 13 ; CE, 7 juin 1995, Comité mixte de la SEML Gaz de Bordeaux, Rec. p. 226 ; CE, 27 novembre 2002, SICAE de la région de Péronne et SICAE du secteur de Roisel, req. n° 246764, C. ET MP. 2003, comm. 33, obs. E. DELACOUR. 90 Cons. conc., avis n° 99-A-21, 8 déc. 1999 relatif à l'intervention des parcs départementaux de l'équipement dans le secteur de la production d'émulsions de bitume et des travaux routiers, BOCC 31 mars 2000 ; Mon. TP 5 mai 2000, n° 5032, suppl. TO, p. 412. 91 CE, 29 avril 1970, Société Unipain, Rec., p. 280 ; AJDA 1970, p. 340, concl. BRAIBANT, RDP 1970, p. 423, note M. WALINE ; CE, 6 janvier 1971, SA L'indépendante, DA. 1971, comm. 37 qui juge que « la liberté du commerce et de l'industrie ne fait pas obstacle à ce que l'État satisfasse, par ses propres moyens, aux besoins de ses services ». 92 CE Ass., 26 octobre 2011, Assoc. pour la promotion de l'image et a., req. n° 317827, 317952, 318013 et 318051, Rec. 2012, n°4 ; V. TCHEN, « La base de données du passeport biométrique », Dr. adm. n° 1, janvier 2012, comm. 1. Le litige portait en l’espèce sur la légalité de la possibilité pour les agents chargés de l'instruction des demandes de passeports de prendre eux-mêmes des clichés numériques du visage des demandeurs ne fournissant pas de photographie d'identité. 93 CE, 29 avril 1970, op. cit. 94 C.C.., 18 septembre 1986, déc. n° 86-217 DC, Rec. CC., p. 141, considérant 9, à propos du service public non constitutionnel de la communication audiovisuelle. 95 G. VEDEL, P. DELVOLVE, Droit administratif, Thémis, PUF, 1992, t. 2, p. 742.
32
s'imposent quelle que soit la nature juridique de la personne morale chargée d'assumer la gestion du
service public96.
WV +:* ;@* [@A7;58* 97* =37>36E* =3;656C7:* 9:* =E3A89:E* Y* 9:?* E8[3E<:?* 9@4?*;03E\@46?@5634*:5*;@*\:?5634*9:?*<6??634?*C76*;76*64A3<B:45**
Au travers de la liberté de dévolution de leurs activités par les personnes publiques ou de
gestion par leurs propres moyens transparaît, plus généralement, l’essence même du pouvoir
politique détenu par les autorités publiques qui n’a d’autre finalité que de mettre en œuvre les
réformes censées améliorer le sort des citoyens. Qu’elle prenne la forme d’un changement dans le
mode de gestion de l’activité ou plus structurellement dans son organisation, l’évolution d’une
activité publique ne fait que traduire la volonté exprimée par la société à un instant donné, et mise en
œuvre par le pouvoir politique. Certaines réformes qui seront développées au cours de la présente
étude traduisent avec acuité cette imbrication. La création, au printemps 200897, d’une nouvelle
institution publique nationale98, le Pôle Emploi, marquant la fusion de l’Agence nationale pour
l’emploi (A.N.P.E.) dédiée au placement des chômeurs, et des associations pour l’emploi dans
l’industrie et le commerce (A.S.S.E.D.I.C.) en charge de l’indemnisation des chômeurs, ou encore la
transformation d’associations et groupements d’intérêt public en établissements publics chargés
d’assurer le rayonnement de la France à l’étranger99, en sont des exemples particulièrement
symboliques. Le mode d’organisation et de gestion des activités publiques est donc, par essence,
soumis à de potentielles évolutions, à mesure que le contexte politique, juridique ou économique
change.
XV +:*;064[;7:4A:*97*9E365*9:*;@*A34A7EE:4A:*?7E*;:?*@A56>658?*=7B;6C7:?**
Egal accès à la commande publique et remise en concurrence fréquente. L’ampleur de
l’influence du droit de la concurrence issu des principes communautaires en droit public économique
interne est patente100 : le droit de la concurrence a ainsi intégré le bloc de légalité des contrats
96 C.C.., 23 juillet 1996, déc. n° 96-380 DC, Loi relative à l'entreprise France Télécom, AJDA 996, p. 692, comm. O. SCHRAMEK ; D. TRUCHET, « Unité et diversité des « grands principes » du service public », AJDA 1997, n° spécial, p. 38. 97 Loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi (J.O. du 14 février 2008, p. 2712) 98 Article L. 5312-1 du code du travail ; relevons que derrière la notion sui generis retenue par le législateur se cache un établissement public administratif comme est venu le préciser le décret n° 2009-661 du 9 juin 2009 complétant le décret n° 84-38 du 18 janvier 1984 fixant la liste des établissements publics à caractère administratif prévue au 2° de l'article 3 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984. 99 Loi n° 2010-873 du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'Etat (J.O. du 28 juillet 2010, p. 13921). 100 CJCE, 21 septembre 1988, C-267/86, Van Eycke, Rec. CJCE 1988, p. 4769 témoignant de ce que la Cour de justice considère depuis longtemps que les règles de concurrence se voient appliquer le principe de l'effet utile des règles communautaires : « S'il est vrai que l'article [82] s'adresse aux entreprises, il n'en est pas moins vrai aussi que le traité impose aux États membres de ne pas prendre ou maintenir en vigueur des mesures susceptibles d'éliminer l'effet utile de cette disposition [...]. Les États membres ne sauraient édicter des mesures permettant aux entreprises privées de se soustraire aux contraintes imposées par les articles [81 à 89]” (CJCE, 16 nov. 1977, C-13/77, GB-Inno / ATAB : Rec.
33
administratifs101 comme celui des actes administratifs102 lorsqu'ils sont susceptibles d'affecter des
activités de production, de distribution ou de services. Une telle pénétration dans l’ordre juridique
interne aurait presque pu faire oublier le principe originel en matière de contrats administratifs, selon
lequel les contrats des personnes publiques n’ont pas à être précédés d’une mise en concurrence, qui
constitue le corollaire du principe de libre choix par la personne publique de son cocontractant103.
Simple dérogation au plan du droit, le principe de mise en concurrence égalitaire104 transcende
désormais l’ensemble des règles qui président à la passation des contrats de la commande publique,
règles fixées par la loi dite Sapin du 29 janvier 1993105 pour ce qui concerne les délégations de
service public et codifiées à l’article L. 1411-1 et suivants du code général des collectivités
territoriales, par le code des marchés publics106 et l’ordonnance du 6 juin 2005 pour les marchés107.
Pour que l’objectif d’égal accès à la commande publique qu’il poursuit soit atteint, le
principe de mise en concurrence implique ainsi que la durée du contrat attribué après publicité et
mise en concurrence permette un renouvellement suffisamment fréquent pour ne pas conférer au
titulaire un avantage injustifié. Il en résulte un encadrement juridique de la durée des contrats de la
commande publique. L’article 40 de la loi précitée du 29 janvier 1993 précise ainsi que la durée des
délégations de service public est « déterminée par la collectivité en fonction des prestations
demandées au délégataire ». Mettant fin au silence des dispositions antérieures du code des marchés
publics, la rédaction de l’article 16 du code des marchés publics s’inspire désormais des dispositions
applicables aux délégations de service public en précisant de manière plus sibylline108 que « sous
réserve des dispositions fixant la durée maximale pour les accords-cadres et les marchés à bons de
commande, les marchés complémentaires passés en procédure négociée ainsi que les marchés
relatifs à des opérations de communication, la durée d'un marché ainsi que, le cas échéant, le CJCE 1977, p. 2115). La Cour a ensuite eu l'occasion de préciser cette jurisprudence constante, en estimant que “par eux-mêmes, les articles [81 et 82] du traité concernent uniquement le comportement des entreprises, et ne visent pas les mesures législatives ou réglementaires émanant des États membres. Il résulte cependant d'une jurisprudence constante de la Cour que les articles [81 et 82], lus en combinaison avec l'article [10] du traité, imposent aux États membres de ne pas prendre ou maintenir en vigueur des mesures, même de nature législative ou réglementaire, susceptibles d'éliminer l'effet utile des règles de concurrence applicables aux entreprises ». 101 CE Sect., 3 novembre 1997, Société Million et Marais, Rec. p. 406, concl. STAHL, GAJA, 13e éd., Dalloz, 2001, p. 803 ; RDP 1998, p. 256, note Y. GAUDEMET ; AJDA 1998, p. 247, note O. GUEZOU Désormais, ce contrôle tend à se systématiser (CE, sect., 26 mars 1999, Société EDA, Rec., p. 107 ; AJDA 1999, p. 427, concl. J.-H. STAHL, note M. BAZEX ; Sur l'ensemble de la question, voir BRECHON-MOULENES, « Le juge administratif et le contentieux économique », AJDA 2000, p. 679 et s.; M. DREYFUS, « L'immixtion du droit privé dans les contrats administratifs », AJDA 2002, p. 1373. 102 CE, 7 décembre 1992, Synd. du commerce moderne de l'équipement de la maison [SYCOMEN] et Société Conforama, Rec. p. 782. 103 CE, 24 juillet 1919, Clauzel, Rec. p. 68 ; CE Sect., 12 octobre 1984, Chambre syndicale des agents généraux d’assurances des Hautes-Pyrénées, RFDA 1985, p. 13, concl. DANDELOT ; CE, 24 janvier 1990, Mme Martinetti, Rec. p. 862. 104 L. RAPP, Ph. TERNEYRE, N. SYMCHOWICZ [ss. rir.], Lamy droit public des affaires, Ed. Lamy 2011, n° 2897, p. 1255. 105 Loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite Loi SAPIN (J.O. du 30 janvier 1993, p. 1588). 106 Décret modifié n°2006-975 du 1er août 2006 portant code des marchés publics (J.O. du 4 août 2006, p. 11627). 107 Ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics (J.O. du 7 juin 2005, p. 10014). 108 N. SYMCHOWICZ, « La notion de délégation de service public, critiques des fondements de la jurisprudence Préfet des Bouches-du-Rhône », AJDA 1998, p. 195.
34
nombre de ses reconductions, sont fixés en tenant compte de la nature des prestations et de la
nécessité d'une remise en concurrence périodique ».
Droit de la concurrence et structures gestionnaires d’activités publiques. Prégnante à
l’égard des procédures d’attribution des contrats de la commande publique, l’influence du droit de la
concurrence sous l’effet des principes communautaires l’est également à l’égard des formes
juridiques des structures gestionnaires d’activités publiques. La Commission européenne considère
ainsi que, dans la sphère économique, l'État doit passer « d'un rôle d'opérateur direct à un rôle
d'organisateur, de régulateur et de contrôleur »109. Plus largement, elle estime qu'il appartient aux
personnes publiques non plus de « faire » mais de « faire faire »110. Cette évolution se retrouve
notamment dans le règlement n°1370/2007 du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de
transport de voyageurs par chemin de fer et par route111 qui généralise le recours à des « contrats de
service public » dont le contenu est réglementé et qui sont, en principe, conclus « par voie de mise en
concurrence ». Elle est également soulignée par la doctrine pour qui « il y a tout à parier que nous
nous dirigeons vers une généralisation des contrats de service public »112. 113
^V +:* ;@* E83E\@46?@5634* =E3[349:* 9:?* 64?56575634?* @9<646?5E@56>:?*[E@4_@6?:?*
Entre décentralisation114 et intercommunalité, les transferts de compétences entre
collectivités publiques se sont multipliés au cours des trois dernières décennies. Si la
décentralisation, qui marque le transfert de compétences de l’Etat vers les collectivités
territoriales115, semble aujourd’hui toucher à sa fin tant les compétences transférées ont été
nombreuses et diverses116, le phénomène d’intercommunalité qui consiste en la mutualisation des
moyens de plusieurs collectivités territoriales au sein d’un même établissement public dit de
coopération intercommunale semble désormais atteindre son paroxysme sous l’effet de la loi du 16
109 Comm. européenne, Livre Vert sur le partenariat public-privé et le droit communautaire des marchés publics et des concessions, COM(2004)327 final, point n°3, 30 avril 2004. 110 G. ECKERT, « Notion et choix du contrat », J.-Cl. Contrats et Marchés Publics, Fasc. 400, n°79. 111 JOUE n° L 315/1, 3 déc. 2007 et, sur ce texte, D. BROUSSOLLE, « Les services de transports rail et route dans le "paquet" normatif européen du 23 octobre 2007 », AJDA 2008, p. 393 ; F. LLORENS et P. SOLER-COUTEAUX, « Le nouveau visage des contrats de transport public de voyageurs », C. et MP. 2008, Rép. n° 4. 112 M. KARPENSCHIF, « Vers une définition communautaire du service public ? », RFDA 2008, p. 62. 113 J. FOURNIER, « Le devenir des entreprises publiques dans le droit et la pratique de l'Union Européenne », RJEP 2005, p. 135 ; M. LOMBARD, « L'établissement public industriel et commercial est-il condamné ? », AJDA 2006, p. 79 ; R. NOGUELLOU, « Les entreprises publiques sous le feu du droit communautaire », Dr. adm. n° 11, Novembre 2007, alerte 32. 114 L. TESOKA retrace l’origine de l’utilisation de ces expressions. Selon lui, l’apparition de ces termes remonte au début des années quatre-vingt dix. L. TESOKA, Les rapports entre les collectivités territoriales, PUAM, 2004, p.p. 19-20. 115 Initiés sous la IIIème République dès la loi départementale du 10 août 1871 qui avait consacré l’existence d’une clause générale de compétence du conseil municipal pour administrer « les affaires de la commune », les transferts obligatoires de compétence de l’Etat vers les collectivités territoriales ont connu au début des années 1980 avec les lois DEFERRE une ampleur inédite. 116 La loi du 13 août 2004 est à ce titre particulièrement éloquente dans la mesure où elle a opéré le transfert de compétences dans près de 15 domaines.
35
décembre 2010117. En obligeant chaque collectivité territoriale du territoire française à intégrer un
groupement intercommunal à l’horizon du 1er juin 2013118 et en contraignant les collectivités à la
rationalisation matérielle, le législateur exacerbe l’enjeu de la question du sort des personnels
affectés aux structures intercommunales condamnées à se regrouper.
N*S*/0:4`:7*9:*;@*96<:4?634*?3A6@;:*9:?*8>3;75634?*9@4?*;03E\@46?@5634*:5*;@*\:?5634*9:?*@A56>658?*=7B;6C7:?*
UV !4* @?=:A5* [349@<:45@;* 9:* ;@* E87??65:* 9:* 5375:* 8>3;75634* 90@A56>658*=7B;6C7:**
En repensant l’organisation ou la gestion de leurs activités, les personnes publiques attachent
la plupart du temps la plus grande importance au transfert des moyens matériels et financiers de la
structure originelle vers la nouvelle entité compétente. Les ouvrages juridiques s’en font d’ailleurs
l’écho, en traitant traditionnellement le régime des biens et du patrimoine financier à l’échéance des
contrats publics ou des réorganisations administratives. L’aspect social n’apparaît souvent qu’au
troisième plan, considéré comme un paramètre subsidiaire.
Il nous semble bien au contraire que loin d’être secondaire, le sort des personnels à l’issue de
l’évolution conditionne la réussite du projet d’évolution menée par la personne publique, et ce, tant
au moment même où s’opère l’évolution souhaitée, qu’après que celle-ci soit achevée. Le traitement
de la question du sort des personnels a ainsi des répercussions à court comme à long terme. Il est
ainsi primordial que l’évolution de l’activité emporte une relative adhésion des personnels concernés.
Si un consensus total paraît ici utopique, il est certain cependant qu’un climat social serein participe
d’une réalisation optimale de l’opération, et notamment d’une maîtrise des délais impartis. Il est en
outre évidemment essentiel que la personne publique accorde à la question du sort des personnels
une attention particulière. L’absence d’anticipation des éventuelles rigidités que pourraient entraîner
le changement de régime juridique de la structure de gestion de l’activité concernée sur le statut des
personnels transférés peut en effet devenir un lourd handicap dans le cadre du fonctionnement de la
nouvelle entité gestionnaire, tant d’un point de vue organisationnel qu’humain.
L’enjeu est ainsi tout autant politique, social que financier. Le « coût social » potentiellement
engendré par le changement de contexte d’exploitation, qu’il résulte des indemnisations de ruptures
éventuelles de relation d’emploi ou qu’il consiste à une adaptation du régime social des personnels
concernés figure, à ne pas en douter, parmi l’un des paramètres essentiels de toute réforme dans la
gestion ou l’organisation d’une activité publique.
117 Loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales (J.O. du 17 décembre 2010, p. 22146). 118 Ibid., article 60.
36
WV !4:*A34[E345@5634*=35:456:;;:*9:?*6<=8E@56[?*=E35:A5:7E?*9:?*5E@4?[:E5?*9:*=:E?344:;*@7*9E365*9:*;@*A34A7EE:4A:**
Véritable enjeu pour la conduite efficiente de toute évolution d’activité en lien avec une
personne publique, le sort des personnels à l’issue de l’évolution l’est également pour la légalité
même de l’opération au regard des principes d’égale concurrence qui président au renouvellement
des contrats par lesquels les personnes publiques confient la gestion de leurs activités à des
opérateurs économiques privés. Le sort des personnels suscité par l’évolution d’une activité en lien
avec une personne publique peut ainsi se révéler, en outre, une contrainte supplémentaire marquant
la confrontation entre le droit social et les libertés économiques.
Si une telle confrontation n'est pas une nouveauté contentieuse119 et résulte directement de la
nature même de l'entreprise qui est le lieu naturel de la rencontre des contraintes sociales et
concurrentielles120, elle oblige les acteurs de toute évolution d’une activité en lien avec une personne
publique à procéder à « une (difficile) conciliation entre, d'une part, les objectifs d'ordre social de
nature à justifier que les règles définies par les signataires d'une convention ou d'un accord collectif
soient rendues obligatoires pour tous les salariés et employeurs du secteur et, d'autre part, les
impératifs tenant à la préservation de la libre concurrence dans le secteur en cause »121.
Les dispositifs protecteurs de la relation d’emploi entre les agents affectés à l’activité et ses
gestionnaires successifs ne doivent ainsi pas aboutir « à dissuader les concurrents de présenter leur
candidature et à aggraver les distorsions de concurrence entre les concessionnaires sortants et les
soumissionnaires ». Cette position de principe, adoptée par le Conseil d'État dans son arrêt de
Section du 30 avril 2003122 par lequel il a annulé l'arrêté du ministre de l'emploi portant extension de
la convention collective nationale des services d'eau et d'assainissement dont l'article 2-5 avait pour
objet de généraliser l'obligation de reprise des contrats de travail des salariés de l'employeur sortant,
alors même que les conditions d'application de l'ancien article L. 1224-1 du code du travail n'étaient
pas remplies, témoigne du maniement délicat des mécanismes de résolution du sort des personnels
119 A. ANTOINE, « Droit social, droit de la concurrence et juge administratif, à propos de la décision du Conseil d’Etat du 21 mai 2008, Société nouvelle du remorquage du Havre », AJDA 2008, p. 1689. 120 Ainsi, les litiges relatifs à la nature des prestations sociales (CJCE, 16 novembre 1995, FFSA, aff. C-244/94, Rec. CJCE I-4013 ; D. 1996. Jur. 317, note M.-C. BERGERE), à leur modalité d'exploitation (CE, 16 juin 2004, Mutuelle générale des services publics, Rec. p. 611, AJDA 2004. 1508, obs. N. CHARBIT ; BJCP 2004. 367, concl. J.-H. STAHL ; Dr. adm. 2004, comm. 140, obs. M. BAZEX et S. BLAZY ; CCC 2004, comm. 155, obs M. MALAURIE-VIGNAL ; RLC 2005/1, n° 46, note S. DESTOURS, JCP E 2005. 277, note S. GRANDVUILLEMIN), à l'obligation d'affiliation à un régime de fonds de pension, à la reprise des personnels (CJCE, 12 septembre 2000, Pavlov et autres, aff. C-180/98 à C-184/98, Rec. CJCE I-6451) et enfin à l'extension de conventions collectives (CJCE, 21 septembre 1999, Albany International BV, aff. C-67/96, Rec. CJCE I-5751 ; CE Sect., 30 avril 2003, Syndicat professionnel des exploitants indépendants des réseaux d’eau et d’assainissement, Rec. p. 189, RJS 2003, n°1043, concl. J.-H. STAHL ; AJDA 2003, p. 1150, chron. F. DONNAT et D. CASAS ; D. 2004 SC. p. 1702, note X. PRETOT et D. CHELLE ; Dr. adm. 2003, comm. 123, note M. BAZEX et S. BLAZY ; G. ORSINI, « Extension d’une convention collective : compatibilité avec le droit de la concurrence », RTD Com. 2003, p. 490). 121 CE Sect., 30 avril 2003, Syndicat professionnel des exploitants indépendants des réseaux d’eau et d’assainissement, Rec. p. 189, op. cit. 122 CE Sect. 30 avril 2003, Syndicat professionnel des exploitants indépendants des réseaux d'eau et d'assainissement, op.cit.
37
dans les activités en lien avec une personne publique. L’affaire de la crèche de Bouc Bel Air portée
au début des années 2000 devant le Conseil de la concurrence123 est, à ce titre, particulièrement
symptomatique de cet enjeu124. Censurée par l’autorité administrative indépendante chargée de
veiller au respect du droit de la concurrence, le dispositif discriminatoire instauré par le titulaire d’un
contrat public lui confiant la gestion d’une crèche municipale témoigne des intérêts en présence lors
d’une telle évolution et de la possible instrumentalisation de la donnée sociale dans sa mise en
œuvre.
###R*/03B`:5*9:*;08579:*
Constituant à notre sens un enjeu essentiel, sinon plus, de la réussite des changements
engagés par les personnes publiques dans l’organisation ou la gestion de leurs activités, la dimension
sociale de ces évolutions – tout comme toutes choses égales la dimension fiscale – nous semble avoir
été quelque peu minorée, et souvent appréhendée de manière restrictive sous l’angle d’hypothèses de
travail circonscrites, témoignant peu de l’universalité et de la récurrence de cette question.
L’approche de la présente recherche est, à l’inverse, d’envisager la problématique sociale
liée aux évolutions d’activités en lien avec une personne publique dans sa globalité, en embrassant
l’ensemble des hypothèses génériques concernées tant d’un point de vue organique – nature des
personnels concernés comme nature des entités d’origine et d’accueil – que matériel – externalisation
d’activités publiques, reprise en régie, décentralisation de compétences, transfert intercommunal de
compétences, privatisation d’établissements publics, etc.
L’ambition est ici de révéler le caractère primordial de la donnée sociale dans la conduite des
évolutions d’organisation ou de gestion des activités publiques, et d’apporter, dans la démarche
pratique qui est la nôtre, les clés essentielles à la résolution de la problématique sociale qu’elle peut
engendrer, quelque soit l’hypothèse sur laquelle elle porte.
Il s’agit en outre de mesurer l’influence de la nature juridique des agents concernés par
l’évolution d’une activité publique sur les règles de transfert qui s’appliquent alors à eux et, par là-
123 Cons. conc., 27 juin 2006, déc. n° 06-MC-02, Commune de Bouc Bel Air, par laquelle le Conseil a enjoint au délégataire sortant de supprimer un avantage accordé à son personnel ; G. DECOCQ, « Abus de position dominante à l'occasion d'un appel d'offres », CCC n° 8, Août 2006, comm. 163 ; M. MALAURIE-VIGNAL, « Avenant à un contrat de travail comportant des clauses drastiques destinées à entraver le bon fonctionnement de la concurrence lors d'un appel d'offres », CCC n° 11, novembre 2006, comm. 236. 124 À l'occasion d'un appel d'offres ayant pour objet d'attribuer la gestion des crèches dans la commune de Bouc Bel Air une association – Bouc'Choux – titulaire sortant du marché avait adopté un avenant au contrat de travail de ses salariés prévoyant, d'une part, une compensation de 100 000 € pour chacun des salariés dès lors que l'effectif de leur employeur dépasserait 60 personnes et, d'autre part, une clause limitant aux structures de l'association implantées sur la seule commune de Bouc Bel Air la mobilité de son personnel. Or, cet avenant ne concerne pas les relations entre l'association et ses salariés puisqu'il n'existe aucune perspective que ses effectifs atteignent les 60 salariés. Cet avenant est destiné à régir les relations qui se noueraient entre le successeur de l'association pour la gestion des crèches de la ville et les salariés repris en application de L. 1224-1 du code du travail. Ainsi, si un concurrent emporte le marché, il devra verser aux salariés environ 3,3 M € et ne pourra réorganiser la répartition de ses effectifs. L'avenant a pour objet et a eu pour effet de dissuader les entreprises concurrentes de soumissionner à l'appel d'offres. C’était là une véritable barrière à l’entrée.
38
même, de s’interroger sur les raisons des convergences et divergences qui peuvent apparaître selon le
régime juridique, initial et final, de l’agent.
La dualité des régimes juridiques des personnels affectés à une activité en lien avec une
personne publique structurera dès lors l’ensemble des développements de la présente étude, afin de
distinguer, mais également de mettre en miroir, à chaque stade de la réflexion, les règles en présence
pour chacun des deux régimes. C’est bien en effet la nature même de l’agent dont le transfert est
envisagé qui conditionne a priori les règles juridiques qui président au traitement de la question
sociale de l’évolution de l’activité.
Dans cette perspective, l’analyse du sort des personnels affectés par l’évolution d’une activité
en lien avec une personne publique nous semble dès lors devoir reposer sur un raisonnement en trois
temps : elle implique d’identifier au préalable sur quel fondement juridique la continuité d’emploi
peut être assurée (Partie I) avant de pouvoir en dégager les modalités de mise en œuvre (Partie II) et
d’en déterminer enfin les conséquences pour chacun des acteurs en présence (Partie III).
39
!"#$%&'(!*
!"#$%&'"("&)#*+,-'-.+"#!"#$"%%&'%()*&++,#"#(-&(
!"#$%#&%$'()*(+,*-.+"%(!"#$%&#!!"#$%&'($)!!"!"#$
!"#$%$#&'()*+$,)!
40
A l’évocation de la problématique du sort des personnels à l’occasion d’un transfert
d’activité surgit immédiatement l’image des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail,
ou plus précisément de l’article L. 122-12 sous l’intitulé duquel le mécanisme translatif a acquis
ses lettres de noblesses, comme si cette disposition et les mutations quotidiennes de la vie
économique ne faisaient qu’un. Fondement originel il est vrai, fondement principal
incontestablement, l’article L. 1224-1 du code du travail ne saurait cependant constituer à lui seul
l’unique fondement du transfert des personnels à l’occasion de l’évolution de gestion d’une
activité, qui plus est si celle-ci relève d’une personne publique.
D’abord parce que toute évolution d’activité n’est pas nécessairement assimilable à une
« modification dans la situation juridique de l’employeur » au sens des dispositions de l’article L.
1224-1 du code du travail ;
Ensuite parce que le mécanisme translatif légal revêt un caractère d’ordre public dont la
rigidité sied parfois peu aux nécessités d’adaptation que peut commander l’évolution d’une
activité publique ;
Enfin, parce que les dispositions légales du code du travail, en ce qu’elles régissent par
définition la situation juridique des salariés de droit privé ou des agents des personnes publiques
« employés dans des conditions de droit privé » au sens de l’article L. 1111-1 du code du travail,
ne s’avèrent d’aucune utilité pour organiser le transfert de personnels de droit public à l’occasion
d’une modification dans l’organisation ou la gestion d’une activité publique.
Cette dernière précision se révèle essentielle dans l’appréhension de la problématique du
sort des personnels à l’occasion d’une activité publique, notamment au stade de l’étude préalable
du fondement juridique du transfert des personnels. Le choix retenu d’aborder les personnels de
droit privé (Chapitre 1) distinctement des personnels de droit public (Chapitre 2) s’explique ainsi
par le fait que la nature juridique de l’agent s’avère le critère premier de détermination du régime
juridique « social » applicable : c’est bien la nature même de l’agent dont le transfert est envisagé
qui conditionne a priori les règles juridiques qui président au traitement de la question sociale de
l’évolution de l’activité.
41
2G@=65E:* U* S* /:* [349:<:45* `7E696C7:* =:E<:55@45* 90@??7E:E* ;@*A345647658*9:*;0:<=;36*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=E6>8*
Amorcer l’étude de la question du transfert des contrats de travail dans le cadre d’une étude
relative aux évolutions d’activités publiques par l’analyse de la situation des personnels de droit
privé peut, de prime abord, étonner. Le choix d’un tel parti s’explique pourtant aisément par
l’origine125 même des dispositions relatives au transfert des contrats de travail, dont l’ambition était
de régler la situation des personnels de droit privé employés par des personnes morales de droit
privé. Si ces dispositions sont peu à peu venues pénétrer la sphère des activités publiques, et par là-
même régir des catégories plus larges de personnels, elles n’en demeurent pas moins destinées à
régler en premier lieu la situation des personnels de droit privé qui pourraient être employés par des
entreprises privées à l’occasion d’une activité publique. Ce constat étant dressé, il reste alors à
identifier, d’une part, quels agents sont en réalité considérés comme des « personnels de droit privé »
par le code du travail et, d’autre part, à délimiter les hypothèses d’évolution d’activités publiques
dans lesquelles la question de leur transfert est amenée à se poser.
La détermination des personnels de droit privé est directement liée à la définition par le code
du travail de son propre champ d’application à l’article L.1111-1 : « les dispositions du présent livre
sont applicables aux employeurs de droit privé ainsi qu'à leurs salariés […] Elles sont également
applicables au personnel des personnes publiques employé dans les conditions du droit privé ».
Deux catégories de salariés et agents sont donc directement visées par le code du travail, et qui
intéressent au premier chef notre sujet : classiquement les salariés de droit privé liés à leur
employeur par un contrat de travail, et plus spécifiquement les personnes employées par des
personnes publiques dans des conditions de droit privé.
Si la première branche du dispositif n’appelle pas de remarque particulière tant elle résume
le droit commun, la seconde branche nécessite quant à elle une plus ample attention. Une analyse
exégétique du texte amène ainsi à s’interroger sur les hypothèses dans lesquelles les personnes
publiques sont considérées comme employant leur personnel dans des conditions de droit privé. La
soumission des personnels de personnes publiques au droit privé concerne en réalité principalement
les établissements publics industriels et commerciaux. Le principe qui prévaut est en effet que les
personnes publiques exerçant une mission de caractère industriel et commercial entretiennent, en
dépit de leur nature publique comme en dépit du caractère de service public de leurs activités, des
relations de droit privé126 avec trois catégories de personnes – leurs usagers, leurs agents, et les tiers
125 Loi du 19 juillet 1928, D. 1929 p. 154. 126 CE, 26 janvier 1923, De Robert Lafreygère, req. n° 62529, Rec., p. 67, RDP 1923, p. 224, concl. R. RIVET.
42
– et agissent, de manière plus générale, sous un régime de droit privé dès lors qu'est en cause l'une de
leurs missions127.
Dans le même sens, la plupart des personnels des entreprises publiques, quelle que soit leur
forme juridique, sont en principe des agents de droit privé, soumis aux dispositions du code du
travail et relevant de la convention collective du secteur concerné. La nature privée des agents
d’entreprises publiques ne souffre aucune exception. Pour preuve, même les agents recrutés par
l’entité auparavant établissement public et souhaitant conserver des avantages du statut de la fonction
publique lorsqu'ils en sont originairement issus revêtent la qualité d’agents privés. Ces personnels
soumis à un statut législatif ou réglementaire ne présentent pour unique, mais néanmoins
significative, différence à l’égard de leurs collègues « purement privés » que celle d’être exclus du
domaine des conventions collectives du travail. Dans de telles hypothèses en effet, le statut se
substitue simplement aux conventions collectives128, mais n’a pas pour autant pour effet de placer les
agents dans une situation réglementaire de droit public. Selon le Conseil d'État, « le statut n'exclut
pas l'existence de contrats individuels de travail conclus dans son cadre »129.
Quant aux hypothèses d’évolution susceptibles d’entrer ici en jeu, elles sont au nombre de
trois.
En premier lieu, le transfert des personnels de droit privé concerne avant tout et surtout
l’hypothèse classique d’un transfert de l’activité publique d’un opérateur économique privé vers un
autre opérateur économique privé, à l’issue de la remise en concurrence d’un contrat public par la
personne publique qui en détient la compétence.
En second lieu, le transfert des personnels de droit privé peut s’effectuer d’une personne privée
vers une personne publique. Deux cas de figures sont envisageables. D’une part, une personne
publique peut succéder à une personne privée en charge de la gestion d’une activité publique dans le
cadre d’une convention de délégation de service public ou d’un contrat de marché public. La reprise
des personnels de droit privé auparavant employés par une entité privée s’opère alors au profit d’une
personne publique agissant en qualité de cocontractant d’une autre personne publique, autorité
délégante ou pouvoir adjudicateur. D’autre part, une personne publique décide de reprendre en régie
la gestion d’un service public auparavant confiée à un opérateur économique privé dans le cadre d’un
contrat de délégation de service public ou d’exécuter elle-même une prestation de service
externalisée dans le cadre d’un contrat de marché public. Ici, la reprise des personnels de droit privé
par la personne publique répond à une réorientation de la gestion du service par la personne
publique, en sa qualité d’autorité délégante ou de pouvoir adjudicateur.
127 CE, 15 mai 2000, Glaise, Rec. p. 897 128 Cass soc., 17 novembre 1955, Bull. civ. IV, n° 828. 129 CE, 1er mars 1968, Syndicat unifié des techniciens de la RTF, Rec. p. 150, Dr. soc. 1966, n° 33, concl. QUESTIAUX.
43
Dans ce contexte « pluriel », la réponse juridique à la problématique du transfert des
personnels de droit privé n’est fort logiquement pas unique et plusieurs fondements juridiques
s’offrent aux acteurs concernés pour opérer le transfert de leurs personnels, selon les circonstances
de l’espèce. Le transfert peut ainsi s’opérer en vertu du mécanisme légal institué par les dispositions
de l’article L. 122-12 du code du travail devenu L. 1224-1 et aux contours désormais bien définis par
les juridictions (Section 1) ou de mécanismes contractuels imaginés par les acteurs du transfert pour
pallier l’inapplicabilité du dispositif légal dans certains cas (Section 2).
':A5634* U* S* /:* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =E6>8* ?7E* ;@* B@?:* 9074*[349:<:45*;8\@;*
Le transfert des contrats de travail des personnels de droit privé en cas de changement dans
la situation juridique de l’entité économique repose principalement sur un socle légal, qui revêt une
place éminente dans la jurisprudence sociale130. L'article L.122-12, alinéa 2, devenu L.1224-1 du
code du travail apparaît en effet probablement comme l'une des dispositions les plus connues du
code du travail, témoignant par là-même de son intérêt dans la vie économique quotidienne. Conçue
à l'origine pour assurer la garantie d’emploi des salariés, et objet d’une abondante jurisprudence qui
est venue en délimiter le champ d'application, elle prévoit qu'en cas de modification de la situation
juridique de l'entreprise, les contrats de travail demeurent en vigueur sous l’empire du nouvel
employeur131.
Très vite, se pose la question de l’application de cette disposition en matière d’activités
publiques. La circonstance que le transfert entre personnes morales ou physiques de droit privé
survienne à l’occasion d’une activité publique peut en effet a priori instiller le doute quant
l’applicabilité des dispositions légales de transfert. L’évolution constante des jurisprudences, tant
judiciaires qu’administratives, témoigne cependant de l’indifférence que revêt la dimension publique
de l’activité sur le sort des contrats de travail des personnels affectés à cette activité. Le
raisonnement opéré par les juridictions quant à l’existence d’une obligation de transfert dans
l’hypothèse d’une évolution dans la situation juridique d’une entité économique est en effet
sensiblement le même à l’égard d’une activité publique que d’une activité économique « classique ».
La démarche à suivre pour identifier l’existence d’une obligation de transfert des salariés de droit
privé repose ainsi sur deux branches : d’une part, vérifier l’applicabilité du dispositif légal à l’égard
des salariés concernés (paragraphe 1), d’autre part, dans l’affirmative, vérifier la réunion des
conditions d’application posées par les dispositions du code du travail au cas d’espèce
(paragraphe 2).
130 R. de GOUTTES, avis n° 04-14.788 sous Cass. ch. Mixte., 7 juillet 2006, pourvoi n°04-14.788. 131 J.-J. TOUATI, L.1224-1 à la loupe, Restructurations et contrats de travail, coll. Liaisons sociales, 2° Ed., Lavoisier, 2008.
44
,@E@\E@=G:* UR* /0@==;6A@B6;658* 9:?* 96?=3?65634?* ;8\@;:?* 9:* 5E@4?[:E5* @7Z*?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8*@[[:A58?*Y*74:*@A56>658*=7B;6C7:**
L’existence d’un cadre légal protecteur des contrats de travail des salariés est depuis
longtemps acquise et mise en application par les juridictions judiciaires de manière constante et
récurrente. Les concepts dégagés par la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de Cassation
sont désormais parfaitement maîtrisés par les juridictions et assimilés par les opérateurs économiques
dans leurs relations avec leurs partenaires. La Cour de Cassation accepte depuis longtemps de
connaître de litiges relatifs au transfert de contrats de travail de salariés de droit privé dans le cadre
d’activités publiques (A).
Lorsque la modification de la situation juridique de l’employeur implique en revanche une
mutation de l’activité d’une personne privée vers une personne publique autorité concédante ou
pouvoir adjudicateur, la solution paraît moins évidente (B). Elle est pourtant similaire à celle dégagée
en matière de transferts entre personnes privées, que l’activité revête la qualité d’une activité de
service public industriel et commercial ou d’une activité de service public administratif. Les
difficultés théoriques autrefois soulevées sont à cet égard désormais résolues tant par les juridictions
judiciaires que les juridictions administratives.
-* S* /@* E:=E6?:* 9:?* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =E6>8* =@E* 74* 3=8E@5:7E*8A343<6C7:* =7B;6A* 37* =E6>8* T* 74:* @==;6A@5634* 9:* =E64A6=:* 9:?* =;7?*A;@??6C7:?*
La reprise d’une activité par une nouvelle personne morale de droit privé est des plus
classiques dans le secteur privé. Tant le droit interne que le droit communautaire ont élaboré des
dispositifs assurant la continuité des contrats de travail dans un souci de protection sociale lorsque la
situation juridique de l’employeur est appelée à évoluer, en adoptant une approche finaliste
indifférente tant de la nature juridique de l’activité transférée elle-même (1) que de celle de
l’opérateur économique au profit duquel s’exerce le transfert de l’activité publique (2).
UV /06496[[8E:4A:* 9:* ;@* 4@57E:* =7B;6C7:* 9:* ;0@A56>658* ?7E* ;0@==;6A@B6;658* 97*96?=3?656[*;8\@;*@7Z*5E@4?[:E5?*9:*?@;@E68*9:*9E365*=E6>8*
Approche extensive du champ d’application des textes garant de la continuité de l’emploi.
En introduisant dans le code du travail une disposition spécifique concernant le transfert des contrats
de travail en cas de modification dans la situation juridique de l’employeur, l’article L.122-12 alinéa
2 devenu L.1224-1, le législateur a entendu assurer une protection renforcée aux salariés de droit
privé face aux aléas, nombreux, de la vie économique des entreprises. La définition légale des
45
évènements susceptibles d’impliquer un transfert des contrats, résolument large et non exhaustive132,
permet ainsi d’embrasser l’ensemble des hypothèses de « modification dans la situation juridique de
l’employeur », quelque soit le secteur d’activité concerné ou la forme juridique que revêt
l’entreprise.
La directive européenne du 14 février 1977133, adopte elle-aussi une interprétation large de
son champ d’application et reçoit la notion de « travailleur » comme s'entendant de « toute personne
qui, dans l'État membre concerné, est protégée en tant que travailleur dans le cadre de la législation
nationale sur l'emploi »134. Il est à noter en outre que la directive « ne [portant] pas atteinte au droit
national en ce qui concerne la définition du contrat ou de la relation de travail »135, la délimitation
des bénéficiaires de la protection légale offerte en France par l'article L. 1224-1 du code du travail
relève exclusivement de la compétence des États membres136. Aussi, le droit français met-il à profit
la liberté concédée par le droit communautaire pour étendre la notion de travailleur en ce domaine :
d'une part, à des contrats dont la validité est subordonnée à un acte juridique extérieur (convention
conclue avec l'État, habilitation...) ; d'autre part, à des contrats assimilés, par voie de fiction légale, à
des contrats de travail. Dans tous les cas, l'article L. 1224-1 du code du travail, qui ne vise
littéralement que les contrats de travail, est interprété largement137.
Neutralité de l’activité exercée. La démarche finaliste des juridictions, tant nationales que
communautaires, conduit donc à une appréhension extensive des bénéficiaires des dispositions
légales de transfert des contrats de travail. Reste à envisager l’application des dispositions du
L.1224-1 du code du travail du point de vue des activités concernées, et par là-même à savoir si ce
dispositif est applicable de droit aux salariés de droit privé employés dans le cadre d’une activité
publique, que ce soit par une personne morale de droit privé ou une personne morale de droit public.
Si les entreprises privées s’inscrivent en effet de jure dans le champ d’application de ces
diverses législations d’origine nationale et communautaire lorsqu’elles évoluent dans le secteur
privé, la question paraît moins évidente pour ce qui concerne celles intervenant dans le secteur
public, à la demande des personnes publiques et appelle une réflexion quant à l’incidence de la
nature publique de l’activité exercée par l’entité qui fait l’objet d’un changement dans sa situation
juridique. Répondre à cette problématique impose de rechercher la philosophie même des textes
nationaux et communautaires relatifs au maintien des contrats de travail, qui n’est autre que d’assurer
la protection des travailleurs lors de mutations dans leur environnement social. Cette démarche
finaliste est donc axée sur l’intérêt du salarié, et l’entité économique en charge de l’activité
132 L’article L.1224-1 du code du travail évoque une modification « notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société ». 133 Dans sa rédaction issue de la directive du 29 juin 1998, reprise par celle du 12 mars 2001. 134 Ibid., article 2, § 1, d. 135 Ibid., article 2, § 2. 136 Voir en ce sens, CJCE, 11 juillet 1985, A/S Danmols Inventar, aff. C 105/84, Rec. CJCE 1985, p. 2639. 137 P. MORVAN, « TRANSFERT D'ENTREPRISE – Conditions d'application », J. Cl. Travail Traité, fasc. 19-50, 2010.
46
n’intervient que dans un second temps, au stade de la vérification des conditions d’application de
l’article L.1224-1 du code du travail. La nature juridique de l’opérateur initialement gestionnaire est
donc indifférente dans l’application des dispositions du code du travail, et seule importe la nature
juridique du nouvel opérateur exploitant qui conditionne le statut de ses salariés.
Comme le confirme l’arrêt du 25 janvier 2001 de la Cour de justice des communautés
européennes dans l’affaire Oy Liikenne138, le fait que le transfert se fasse suite à une procédure
d’attribution ne pose pas de problèmes spécifiques quant à l’application de la directive sur le
transfert d’entreprises139. La directive communautaire 2001/23/CE applicable en la matière vise ainsi
« à assurer la continuité des relations de travail existantes […] indépendamment de la nature des
fonctions que ces personnes exercent »140. L’article 1 c) de la directive est d’ailleurs sans ambiguïté
et dispose que « la présente directive est applicable aux entreprises publiques et privées exerçant
une activité économique qu’elles poursuivent ou non un but lucratif ».
Le juge judiciaire national n’a lui-aussi formulé aucune objection de principe à l’application
des dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail aux activités publiques. Preuve en est
l’origine même de sa jurisprudence en la matière qui concerne un changement de concessionnaire de
service public de l’éclairage municipal141, affaire dans laquelle la Cour de Cassation a considéré que
« le nouveau concessionnaire d’un service public, qui à l’expiration d’un précédent contrat de
concession passé avec une autre personne, est chargé par l’autorité compétente de continuer le
fonctionnement du même service public, doit être considéré comme un nouvel entrepreneur, au sens
du texte susvisé, tenu, dès lors de respecter les contrats de travail en cours ».
En dépit de cette solution de principe, un réel débat a nourri – et divisé – pendant de
nombreuses années la doctrine sur la question de la compatibilité de l’ex-article L.122-12 du code du
travail au régime des marchés publics142, et plus généralement au régime des activités publiques. En
considérant que « les dispositions de l’article L.122-12 du code du travail avaient une portée
générale et qu’elles concernaient tous les secteurs d’activité régis par la législation du travail, dès
lors que leurs conditions d’application étaient réunies », la 1ère Chambre de la Cour d’Appel de Paris
dans son arrêt en date du 15 mai 1985143 a finalement tranché en faveur de la neutralité de la nature
publique de l’activité sur les dispositions du code du travail relatives au transfert des contrats de
travail, et consacré une solution depuis n’a depuis lors jamais été démentie dans son principe. 138 CJCE, 25 janvier 2001, Oy Liikenne Ab, aff. C 172/99, Rec. CJCE 2001, p. 745, RJS mai 2001, n° 690. 139 Comm. Eur., Communication interprétative de la Commission sur le droit communautaire applicable aux marchés publics et les possibilités d’intégrer des aspects sociaux dans lesdits marchés, 2001/C333/08 (J.O.U.E. du 28 novembre 2001). 140 CJCE, 14 septembre 2000, Renato Collino et Luisella Chiappero, aff. C-343/98, Rec. CJCE, I, p. 6659 et Cons. UE, dir. n° 2001/23/CE, 12 mars 2001 (J.O.C.E. n° L. 82, 22 mars 2001, p. 16). 141 Cass. Civ., 27 février 1934, Goupy c/. Société Union hydroélectrique de l’Ouest constantinois, DH 1934, p. 252 ; Gaz. pal.1934.2.40 ; S.1934.1.179. 142 Voir en ce sens le dossier « L’article L.122-12 du code du travail est-il compatible avec le régime des marchés publics ? » consacré à cette problématique par la revue Marchés publics, à l’occasion de l’arrêt de la Cour d’Appel de Paris du 15 mai 1985. 143 CA Paris, 1ère chbre, 15 mai 1985, Desquenne et Giral, n° 31 497, 31 498, 35871, considérant n°2.
47
Critère décisif du transfert d’une entité économique autonome conservant son identité. Il
apparaît ainsi que la circonstance que ce transfert entre personnes morales ou physiques de droit
privé survienne à l’occasion d’une activité en lien avec une personne publique soit sans incidence sur
l’application du code du travail et de ses dispositions relatives au transfert des contrats de travail. Il
en résulte que le critère essentiel et décisif pour établir si les dispositions légales de transfert,
nationales ou communautaires, s'appliquent dans les cas de changement de gestionnaires d’activités
en lien avec une personne publique n’est donc pas celui de la nature de l’activité mais bien celui du
maintien de l’identité de cette activité à l’issue du changement. La question qui doit animer la
réflexion autour de l’applicabilité des dispositions légales de transfert des contrats de travail est donc
celle de savoir si l'entité économique transférée garde son identité144 par-delà son transfert. Elle
renvoie à cet égard aux critères dégagés par la jurisprudence communautaire pour permettre de
caractériser l’existence d’une entité économique autonome dont l’activité demeure effectivement
poursuivie145. Il s’agit ainsi de s’assurer de ce qu’un ensemble organisé de manière stable de
personnes et d'éléments permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif
propre146 perdure en dépit de l’évolution de l’activité publique. Pour déterminer si les conditions d'un
transfert d'une entité économique sont remplies, il faut alors prendre en considération l'ensemble des
circonstances de fait qui caractérisent l'opération en cause. Ces éléments ne constituent toutefois que
des aspects partiels de l'évaluation d'ensemble qui s'impose et ne sauraient, de ce fait, être appréciés
isolément par le juge national auquel il appartient d'établir cette appréciation147.
∴
La circonstance que l’activité transférée revête une nature publique, en raison de son lien
intrinsèque avec une personne publique qui en est la détentrice originelle, s’avère ainsi sans
incidence sur l’applicabilité des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail. La nature
juridique de l’entité reprenant l’activité publique se révèle tout aussi indifférente à l’applicabilité du
dispositif translatif légal, dès lors que celle-ci ne se trouve conditionnée que par la seule qualité de
salarié de droit privé de l’agent dont le transfert est envisagé. !
*
144 CJCE, 14 avril 1994, Schmidt, aff. C-392/92, Rec. CJCE p. I- 1311 ; CJCE, 19 septembre 1995, Rygaard, aff. C-48/94, Rec. CJCE p. I-2745 ; CJCE, 26 septembre 2000, Mayeur, aff. C-175/99, Rec. CJCE, p. I-7755. 145 CJCE, 18 mars 1986, Spijkers, aff. C-24 /85, Rec. CJCE 1986, p. I-1119 ; CJCE, 11 mars 1997, Ayse Süzen, aff. C-13/95, Rec. CJCE, p. I-1259, D. 1997. IR. 84 ; CJCE, 10 décembre 1998, Hernandez Vidal e.a., aff. C-127/96, C-229/ 96 et C-74/97, Rec. CJCE p. I-8179 ; CJCE, 10 décembre 1998 ; CJCE, 2 décembre 1999, Allen e. a., aff. C-234/98, Rec. p. I-8643. 146 Par exemple les affaires Süzen, Hidalgo e.a., Allen e.a. et Oy Liikenne précitées. 147 Affaires Spijkers, Süzen, Sanchez Hidalgo e.a. et Hernández Vidal précitées.
48
WV /06496[[8E:4A:* 9:* ;@* 4@57E:* `7E696C7:* 9:* ;03=8E@5:7E* 8A343<6C7:*E:=E:4@45*;0@A56>658*=7B;6C7:*
Opérateur économique de droit public et principe d’égale concurrence. Les données
contextuelles de l’application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail sont, en
matière d’activités privées « classiques », des plus simples : le transfert d’activité intervient entre
deux entités de droit privé, soumises l’une et l’autre au champ d’application du code du travail. Elles
peuvent toutefois se trouver quelque peu complexifiées en matière d’activité publique dans la mesure
où un paramètre supplémentaire peut se faire jour, celui de la nature publique de l’opérateur
économique reprenant en charge l’activité.
Sous l’influence des juridictions communautaires148, le Conseil d’Etat s’est prononcé à
l’occasion d’un célèbre avis Jean-Louis Bernard Consultants du 18 novembre 2000149 prononcé en
faveur de l’intervention des personnes publiques en qualité d’opérateur économique au même titre
que les personnes privées, consacrant par là-même un véritable principe d’égale concurrence entre
les opérateurs économiques, quelque soit leur nature150. Les personnes publiques peuvent en
conséquence soumissionner, sous la réserve toutefois de ne bénéficier d’aucun avantage fiscal ou
social en lien avec leur nature publique, à une consultation publique lancée par une autre personne
publique agissant quant à elle en qualité de pouvoir adjudicateur ou d’entité adjudicatrice. Dès lors,
une telle faculté de participation d’un opérateur économique de droit public n’est pas sans soulever la
question, en cas d’attribution d’une activité publique à un opérateur de cette nature, de l’applicabilité
de l’article L.1224-1 du code du travail aux personnels transférés d’un opérateur privé à un opérateur
public.
L’activité économique, industrielle et commerciale des personnes publiques est d’ailleurs un
phénomène ancien, dont l’ampleur va grandissante eu égard au développement de
l’intercommunalité et à la spécialisation des établissements publics de coopération intercommunale,
notamment dans les secteurs de l’eau, de l’assainissement ou des transports. Les principales
réticences opposées à l’admission d’une participation des acteurs publics à la vie économique
portaient justement sur l’inégalité de traitement « social » des agents employés par les opérateurs
publics. Le troisième considérant de l’avis du 8 novembre 2000 s’est attaché à examiner cette
problématique et à en déterminer la portée pour la préservation d’une égale concurrence entre les
opérateurs : « les agents des établissements publics administratifs qui, lorsqu’ils sont comme c’est le
cas en principe, des agents publics, sont soumis, en ce qui concerne le droit du travail et la sécurité
sociale, à une législation pour partie différente de celle applicable aux salariés de droit privé.
Toutefois les différences qui existent en cette matière n’ont ni pour objet ni pour effet de lacer les
148 J. CAILLOSSE, « Le droit administratif français saisi par la concurrence ? », AJDA 2000. p. 99 149 CE Avis, 8 novembre 2000, Société Jean-Louis Bernard Consultants, Rec. p. 492, RFDA 2001 p. 112, concl. C. BERGEAL C. ; C. et MP. 2000, comm. 8, chron. 2, LPA 9 novembre 2000, n°224, p. 3, BJCP 2001, p. 111. 150 Voir supra, introduction.
49
établissements publics administratifs dans une situation nécessairement plus avantageuse que celle
dans laquelle se trouvent les entreprises privées et ne sont pas de nature à fausser la concurrence
entre ces établissements et ces entreprises lors de l’obtention d’un marché public ou d’une
délégation de service public ».
Egale concurrence et difficile comparaison des coûts sociaux privés et publics. La position
adoptée par le Conseil d’Etat vise donc à considérer comme neutre la circonstance que l’opérateur
public relève, en matière sociale, d’une législation différente. Selon la Haute juridiction, si la
comparaison des législations sociales de droit privé et de droit public implique nécessairement des
différences, il n’est pas pour autant possible de déterminer catégoriquement lequel de ces régimes
sociaux est le plus avantageux en termes de coûts sociaux. Cette analyse rejoint celle du Conseil de
la concurrence, qui, saisi d’une demande d’avis de l’association française des banques concernant le
fonctionnement des services financiers de la Poste au regard du droit de la concurrence, a considéré
« qu’aucune étude ne permet de dire de façon indiscutable si l’emploi d’un personnel fonctionnaire
plutôt que salarié de droit privé représente pour la Poste, du point de vue des coûts globaux, un
avantage ou un handicap »151.
A l’instar de l’indifférence que revêt le caractère public de l’activité transférée, la nature
publique de l’opérateur économique titulaire d’un contrat public n’emporte, dans la majeure partie
des hypothèses, aucun obstacle de principe à l’applicabilité du dispositif translatif légal.
Application des dispositions L. 1224-1 du code du travail en raison de la qualité de salariés
de droit privé sous l’empire du gestionnaire d’origine. Là encore, ce n’est pas la nature du
repreneur de l’activité qui va conditionner l’applicabilité du dispositif légal de transfert, mais bien la
nature des agents dont le transfert est envisagé dans le cadre de la succession de prestataires ou de
délégataires d’une activité publique. Or, dans l’hypothèse d’un renouvellement de contrat auparavant
conclu avec un opérateur économique privé et désormais confié à un opérateur économique public,
les agents affectés à l’activité publique en cause par le passé employés par une personne morale de
droit privé revêtent quasiment tous, par principe, une nature privée152 et sont donc éligibles à une
mise en œuvre des dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail. Au demeurant, les difficultés
d’une reprise de salariés de droit privé dans le cadre des dispositions de l’article L.1224-1 du code du
travail par un opérateur économique de droit public résideront davantage dans la gestion sociale par
le nouvel attributaire des contrats de travail, et commandera pour la personne publique agissant en
qualité d’opérateur économique, d’une part, de mettre en œuvre une structure autonome de gestion
de l’activité permettant de maintenir la nature privée des salariés transférés si l’activité revêt la
151 Cons. conc., avis n°96-A-10 du 25 juin 1996 relatif à une demande d’avis de l’Association française des banques concernant le fonctionnement des services financiers de la Poste au regard du droit de la concurrence, p. 25. 152 A l’exception notable déjà évoquée du directeur et du comptable public en matière d’activités publiques ayant le caractère d’un service public industriel et commercial : CE, 8 mars 1957, Jalenques de Labeau, Rec. p. 158, D. 1957, jurispr. p. 378, JCP G 1958, II, 1987, note DUFAU.
50
nature d’un service public industriel et commercial et, d’autre part, de confronter le régime de droit
privé de ces salariés repris à ses propres règles de recrutement et de ressources humaines si l’activité
revêt la nature d’un service public administratif.
Il en va cependant autrement dans l’hypothèse - extrêmement rare en pratique quoique
théoriquement envisageable - où un opérateur économique public viendrait à reprendre une activité
publique déjà confiée à un autre opérateur public : la nature de droit privé des agents à transférer
n’est alors pas forcément acquise et doit faire l’objet d’une appréciation au cas par cas selon les
missions confiés à chacun de ces agents et la nature de service public industriel et commercial et/ou
de service public administratif de l’activité exercée153. Notons toutefois sur ce point que fort
heureusement, la plupart des activités publiques pour lesquelles des collectivités publiques sont
susceptibles de se positionner lors de consultations publiques concernent des activités de service
public industriel et commercial : le transport urbain154, la distribution de l’eau155 ou l’assainissement
de l’eau156, les communications électroniques, les remontées mécaniques157, les infrastructures
aéroportuaires158 ou portuaires159… Mais la qualification de la nature du service public n’est pas
toujours aisée, et une même activité peut relever de l’une ou l’autre qualification selon ses conditions
d’exercice. Il en va notamment ainsi en ce qui concerne le service public d’enlèvement des ordures
ménagères. Lorsque le service est financé par la redevance pour l'enlèvement des déchets160, il n'y a
pas d'obstacle à considérer que le service a un caractère industriel et commercial161. En revanche,
lorsqu'il est financé par la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, il est considéré comme un
service public administratif162. Au demeurant, dans une telle hypothèse, d’autres fondements
153 Certains établissements publics, dits « à deux visages », peuvent ainsi gérer des activités de service public industriel et commercial en dépit de leur caractère d’établissement public administratif, et inversement. Il en va ainsi par exemple des chambres de commerce et d’industrie, établissements publics de l’Etat, exploitant des aérodromes ou des ports présentant le caractère d’activités de services publics industriels et commerciaux. 154 Loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, dite LOTI (J.O. du 31 Décembre 1982, p. 4004) qui précise clairement en son article 7-II que « l'exécution du service est assurée soit en régie par une personne publique sous forme de service public industriel et commercial, soit par une entreprise ayant passé à cet effet une convention à durée déterminée avec l'autorité compétente ». 155 CE, 10 février 1928, Chambre syndicale des propriétaires marseillais, Rec. p. 222 ; CE, 13 janvier 1961, Département du Bas-Rhin, Rec. p. 235 ; TC, 19 février 1990, Époux Laperrouze et MAIF c/ Sté urbaine de Lyon et GAN, Rec. p. 393, Dr. adm. 1990, comm. 385 ; TC, 22 juin 1992, Berger, Rec. p. 840, Dr. adm. 1992, comm. 444 ; TC, 19 janvier 1998, Association syndicale des propriétaires du lotissement Erima c/ Commune d’Arue, Rec. p. 777. 156 CE, 17 décembre 1982, Préfet de la Charente Maritime, Rec. p. 427 ; TC, 12 janvier 1987, Cie des eaux et de l'ozone c/ SA Établissements Vetillard, Rec. p. 442. ; CE, 20 janvier 1988, SCI La Colline, Rec. p. 21. 157 Art. L. 342-13 et s. du code du tourisme ; TC, 20 mars 2006, A., req. n° 3487. 158 TC, 13 décembre 1976, Époux Zaoui, Rec. p. 706. 159 TC, 12 janvier 1987, Société navale de chargeurs Delmas-Vieljeux, D. 1987, jurispr. p. 207 ; CE, 25 avril 1952, Boglione, Rec. p. 155 ; CE Sect., 15 décembre 1967, Level, Rec. p. 501, AJDA 1968, II, p. 230, concl. Braibant, D. 1968, jurispr. p. 387, note LECLERCQ ; CE, 26 juin 1982, Ministre du budget, Rec. p. 293, D. 1983, p. 273, obs. DELVOLVE. 160 Art. L. 2333-76 du code général des collectivités territoriales 161 TC, 7 octobre 1996, Breton c/ Commune de Gennes, Rec. p. 754 ; TC, 15 mars 1999, Faulcon c/ Commune de Châtellerault, Rec. p. 442 ; CAA Douai, 28 octobre 1999, Berrier c/ Commune de Saint-Martin-au-Laert, Rec. p. 665. 162 TC, 28 mai 1979, Syndicat d'aménagement de la ville nouvelle de Cergy Pontoise c/ Cie générale d'entreprise automobile, Rec. p. 658 ; TC, 13 février 1984, Commune de Pointe à Pitre c/ Martin, Rec. p. 523.
51
juridiques s’offrent aux acteurs de l’évolution de l’activité publique pour assurer la continuité
d’emploi des agents présentant la qualité d’agent public163.
∴
Il apparaît ainsi que l’applicabilité des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail
aux hypothèses de succession d’opérateurs économiques dans la gestion d’activités publiques ne
semble plus aujourd’hui soulever de difficultés juridiques, tout du moins une fois la question
liminaire de l’incidence de la nature publique de l’activité résolue. Il suffit pour s’en convaincre
d’observer la constance et la récurrence des décisions des juridictions sur ce point particulier pour
admettre que la problématique du transfert de personnels entre opérateurs économiques à l’occasion
d’activités publiques est désormais parfaitement appréhendée et maîtrisée par les juridictions.
L’admission d’une telle applicabilité du dispositif translatif légal aux hypothèses de reprise en régie
de l’activité par la puissance publique est aujourd’hui également acquise, au terme d’une
jurisprudence quelque peu mouvementée.
N*S*/@*E:=E6?:*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=E6>8*=@E*;@*=:E?344:*=7B;6C7:*T*74:*@==;6A@5634*9:>:47:*A;@??6C7:*
La gestion d’une activité publique est par essence susceptible d’évolutions constantes, sous
l’influence combinée des contingences politiques, des contraintes économiques et juridiques. Au
choix d’une délégation pourra succéder celui d’une reprise en régie de l’activité, de même qu’à une
externalisation pourra par la suite être préférée une « ré-internalisation » de l’activité, et inversement.
Cette réversibilité de la gestion des activités publiques est une réalité pratique à laquelle les élus sont
particulièrement sensibles. La Charte des services publics locaux164, signée le 16 janvier 2002 par
l'Association des maires de France, l'Assemblée des départements de France et l'Association des
régions de France sous l'égide de l'Institut de la gestion déléguée, qui souligne la nécessité de
« favoriser le libre choix par les élus du mode de gestion et sa réversibilité »165, en est la parfaite
traduction.
La faculté pour les collectivités publiques de recourir au mode de gestion qui leur paraît le
plus adapté à l’activité en cause est certes une liberté consacrée par les juridictions administratives
dans sa dimension « politique ». Sa mise en œuvre n’en demeure pas moins source de difficultés au
plan social. Il est vrai que le sort des personnels affectés aux activités reprises en régie a longtemps
souffert d’appréciations différentes selon que l’activité concernée était assimilable à un service
163 Voir infra, chapitre 2. 164 S. BRACONNIER et J.-B. MOREL, « La réversibilité en matière de gestion des services publics locaux », C. et MP. 2006, n°3. 165 http://www.fondation-igd.org/html/publ/.
52
public industriel et commercial (1) ou administratif (2), solutions fort heureusement aujourd’hui
harmonisées.
UV /@*E:=E6?:*:4*E8\6:*9074*?:E>6A:*=7B;6A*6497?5E6:;*:5*A3<<:EA6@;*=@E*74:*=:E?344:* =7B;6C7:*T* 74:* 3B;6\@5634* 9:* 5E@4?[:E5* 9:=76?* ;34\5:<=?*@9<6?:*=@E*;:?*`7E696A5634?*9:?*9:7Z*3E9E:?*
Service public industriel et commercial et agents de droit privé. Consacrée par le Tribunal
des conflits dans le fameux arrêt du 22 janvier 1921 Société commerciale de l’Ouest Africain166, les
services publics à caractère industriel et commercial renvoient à l’exploitation d’une activité
économique susceptible d'être exercée par une entreprise privée. Rien d’étonnant dès lors qu’ils
soient soumis « en bloc » à la compétence des juridictions judiciaires et au droit privé, exceptées
parcertaines caractéristiques liées à la part irréductible de droit public qui subsiste en eux167.
Illustration symbolique de la dimension « privée » dans laquelle se trouvent incontestablement
inscrits cette typologie de services publics, les personnels affectés à l’exercice d’une mission de
service public industriel et commercial par une personne publique relèvent de plein droit du champ
du code du travail, en application des dispositions de l’article L. 1111-1 de ce même code, à
l’exception notable du directeur et du comptable public, considérés comme des agents publics eu
égard à la nature des missions administratives qu’ils exercent168.
Réticences des juridictions à tirer l’ensemble des conséquences issues de l’application des
dispositions du code du travail aux personnels des SPIC. En dépit d’une rédaction non équivoque
des dispositions de l’article L. 1111-1 du code du travail soumettant de jure les personnels des SPIC
au champ d’application dudit code, les juridictions administratives ont par le passé fait montre de
réticences à tirer l’ensemble des conséquences de l’application des dispositions du code du travail à
ces personnels. Il en allait ainsi des règles liées aux institutions représentatives du personnel qui
constituent à l’égard des salariés de droit privé un élément essentiel de garantie des droits protégés
par le code du travail. Ainsi, si le Conseil d’Etat accordait le bénéfice des dispositions de
l’ordonnance du 22 février 1945 donnant naissance aux comités d'entreprise et de la loi du 16 avril
1946 instituant les délégués du personnel169 aux entreprises nationales170, il se refusait en revanche à
la différence de la Cour de Cassation171 à en étendre l’application aux agents employés par les
166 TC, 22 janvier 1921, Société commerciale de l’Ouest Africain dit Bac d’Eloka, D. 1921, III, p. 1, concl. MATTER ; M. LONG, P. WEIL, G. BRAIBANT, P. DELVOLVE et B. GENEVOIS, Les grands arrêts de la jurisprudence administrative, Dalloz, 18ème éd., 2011 p. 183.! 167 B. PLESSIX, « L'établissement public industriel et commercial au cœur des mutations du droit administratif », JCP A n° 13, 26 Mars 2007, p. 2077. 168 CE, 8 mars 1957, Jalenques de Labeau, Rec. p. 158, D. 1957, jurispr. p. 378, JCP G 1958, II, 1987, note DUFAU, op. cit. 169 Ordonnance n°45-280 du 22 février 1945 donnant naissance aux comités d'entreprise (J.O. du 23 février 1945, p. 954) ; loi n° 46-730 du 16 avril 1946 portant statut des délégués du personnel (J.O. du 17 avril 1946, p. 3224). 170 CE Sect., 2 mai 1959, Syndicat général du personnel d’Air France, Rec. p. 282, Dr. soc. 1959, p. 553, concl. J. CHARDEAU ; AJDA 1959, p. 366 ; AJDA 1959, p. 177, chron. M. COMBARNOUS et J.-M. GALABERT. 171 Cass soc., 2 mars 1977, Bull. civ. V, n° 156 p. 124, D. 1977, jurispr. p. 550.
53
établissements publics industriels et commerciaux172. Le législateur a depuis clarifié le champ
d'application de l'institution des délégués du personnel et du comité d'entreprise par la loi du
28 octobre 1982 relative au développement des institutions représentatives du personnel173 en
précisant que les dispositions concernant les délégués du personnel et le comité d'entreprise « sont
applicables aux établissements publics à caractère industriel et commercial, également aux
établissements publics déterminés par décret qui assurent tout à la fois une mission de service public
à caractère administratif et à caractère industriel et commercial, lorsqu'ils emploient du personnel
dans des conditions de droit privé ».
Application ancienne des mécanismes légaux de transfert des contrats à cette typologie
d’agents. Les dispositions de l’article L. 1224-1 ne se sont pas heurtées à de telles réserves, et ont
depuis longtemps fait l’objet d’une application pleine et entière par les juridictions judiciaires
compétentes en la matière. Il est en effet de jurisprudence constante que l'article L. 1224-1 du code
du travail qui impose la continuation des contrats de travail en cas de changement de statut juridique
de l'entreprise s’applique au cas de la reprise en régie d'un service public industriel et commercial
personnalisé, dès lors que ce service continue d'être exploité par la collectivité publique sous la
forme industrielle et commerciale. Seule l’hypothèse où la reprise en régie marquait l’évolution de la
nature de l’activité d’un service public industriel et commercial à un service public administratif
suscita davantage de difficultés. Dans une telle hypothèse en effet, la Cour de Cassation considérait
par le passé que la circonstance que la reprise en régie emporte mutation du service industriel et
commercial en service public administratif faisait obstacle à l’application de l’article L. 122-12 du
code du travail à défaut d’identité d’activité, l’entreprise initiale étant considérée comme avoir
disparue174. Sous l’empire de cette jurisprudence désormais abandonnée175, il incombait aux juges du
fond de vérifier la qualification du service public industriel et commercial, compte tenu de son objet,
de l'origine de ses ressources et des modalités de son fonctionnement176. La présomption de caractère
administratif n'était renversée que par la réunion simultanée des trois conditions177. La loi pouvait
d'ailleurs trancher d'elle-même le débat en indiquant expressément la nature de service public
industriel et commercial178. Dans le silence de la loi, la jurisprudence du Conseil d'État ou celle du
Tribunal des conflits constituaient d'utiles instruments d’éclaircissements.
172 CE Ass., 13 juillet 1966, Syndicat unifié des techniciens de la radiodiffusion française, Rec. p. 495, AJDA 1966, p. 615. 173 Loi n°82-915 du 28 octobre 1982 relative au développement des institutions représentatives du personnel (J.O. du 29 octobre 1982, p. 3255). 174 Cass soc., 8 novembre 1978, Bull. soc. n°743, p. 559 ; TC, 15 mars 1999, Faulcon c/ Commune de Châtellerault, op. cit. ; CE, 23 octobre 1987, Siguier, Rec. p. 324 ; Cass soc., 2 mars 1999, AGS c/ Mignot,, Bull. civ. V n° 86, p. 63, D. 1999, jurispr. p. 98. 175 Cass soc., 14 janvier 2003, Commune de Théoule-sur-mer , D. 2003, p. 311 ; JCP A 2003, n° 1238, note S. CREVEL. 176 CE, 16 novembre 1956, USIA, Rec. p. 434 ; Cass soc., 7 octobre 1992, op. cit. ; Cass soc., 3 mars 1993, Bull. civ. V, n° 75, pour la reprise par un nouveau concessionnaire d'installations communales de distribution d'eau. 177 Cass soc., 6 décembre 1995, RJS 1996, n° 250, à propos de la reprise d'un établissement thermal par une régie municipale. 178 Cass soc., 7 avril 1998, Bull. civ. V, n° 200, RJS 1998, n° 569, à propos du service public des abattoirs ; solution confirmée par TC, 15 mars 1999, Faulcon c/ Commune de Châtellerault, op. cit., JCP G 1999, IV, 2198, obs. M.-Ch.
54
WV /@* E:=E6?:* :4* E8\6:* 9074* ?:E>6A:* =7B;6A* @9<646?5E@56[*T* 74:* @AA:=5@5634*=;7?* ;:45:*97* 5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=E6>8*>:E?* ;@* ?5E7A57E:*=7B;6C7:*9:*E:=E6?:*
@R /064A3G8E:4A:*9:*;@*?3;75634*64656@;:**
Assimilation à une modification substantielle de la situation juridique de l’agent. La
distinction classique entre service public administratif et service public industriel et commercial
figure parmi les axes directeurs du droit administratif, dont la portée est essentielle dans la
détermination du régime juridique des activités publiques. La nature du service public détermine
ainsi la nature des règles juridiques applicables, droit public pour le service public administratif,
droit privé pour le service public industriel et commercial, et plus spécifiquement la compétence des
juridictions en cas de litiges de l’organisme en charge du service dans ses relations tant avec les tiers
qu’avec ses agents. Longtemps cette distinction s’est avérée essentielle dans la gestion de la
problématique des transferts de contrats de travail en cas de reprise en régie du service public.
L’avocat général Yves Chauvy soulignait ainsi dans ses conclusions sous l’arrêt de la Chambre
sociale de la Cour de Cassation du 10 juillet 1995179 que, « capitale à de nombreux titres, dont celui
de la compétence administrative ou judiciaire, de la nature de droit public ou de droit privé des
contrats, de l’emploi ou non de prérogatives de puissance publique […], la qualification du service
public éclaire aussi le problème des transferts d’entreprise et par là-même celui du sort des contrats
liant employeur et salariés ». La solution des juridictions tant judiciaires qu’administratives fut ainsi
pendant longtemps des plus simples : dès lors que l’activité en présence était érigée en service public
administratif lors de la reprise en régie, les dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail se
trouvaient privées d’effet. A l’inverse, elles trouvaient pleine application dans les hypothèses de
reprise en régie d’un service industriel et commercial. Le raisonnement dégagé par les juges
consistait à considérer la mutation de l’activité, auparavant gérée par une entité privée, en un service
public administratif, relevant désormais d’une personne publique, comme une modification sensible
lui faisant perdre son identité, condition essentielle à l’application du dispositif translatif légal.
L’on ne peut s’empêcher ici de formuler plusieurs remarques sur la cohérence d’une telle
solution au regard, d’une part, de la rigueur toute relative d’un tel raisonnement au regard de la
notion d’entité économique développée par la jurisprudence et, d’autre part, au regard de
l’importance - selon nous exagérée - conférée à la nature du service public dans un contexte général
d’atténuation de celle-ci.
ROUAULT ajoutant toutefois qu' « en raison des prérogatives dont dispose une personne publique à l'égard des services publics placés sous son autorité, le maintien de l'intéressé à un poste de responsabilité requiert la mise en oeuvre d'un régime de droit public ». 179 M. BAZEX, note sous l’arrêt : Cass soc., 10 juillet 1995, Compagnies des eaux et de l’Ozone, AJDA 1996, p. 396.
55
Incompatibilité de l’interprétation de modification substantielle de l’activité au regard de
la jurisprudence sociale en la matière. En premier lieu, l’argument tiré d’une modification
substantielle de l’activité qui aurait impliqué la disparition de son identité ne pouvait être
favorablement accueilli eu égard à la jurisprudence développée en la matière par les juridictions
judiciaire au travers de la notion d’entité économique autonome. Pour les juridictions sociales,
faisant à cet égard une stricte application de la position dégagée par les juridictions communautaires,
la modification de l’entité gestionnaire ne doit en effet pas conduire à une évolution sensible des
éléments corporels et incorporels qui y sont attachés, de son périmètre ou encore de l’objectif
poursuivi180. C’est dont à une approche matérielle extrêmement pragmatique que s’attache les
juridictions dans le secteur privé classique. Dès lors, le seul fait que la personne publique confère au
service public un caractère administratif ne pouvait selon nous caractériser à lui seul une
modification substantielle de l’activité. S’il ne saurait ainsi être nié que le basculement d’un service
public industriel et commercial à un service public administratif emporte des évolutions en
profondeur dans le régime juridique de l’activité, la définition matérielle de cette activité n’en
souffre pas pour autant de modifications. L’appréciation de l’évolution de l’activité doit ainsi
strictement porter sur la consistance de cette activité, et non sur son régime juridique qui n’en est que
la résultante.
Incohérence des solutions jurisprudentielles. Sur les conséquences relativement
« schizophréniques » d’une telle solution en second lieu. En conditionnant l’applicabilité du
dispositif légal de transfert à la nature industrielle et commerciale de l’activité, les juridictions
judiciaires comme administratives dégageaient des solutions diamétralement opposées selon la seule
nature du service. Ainsi, si le service public repris revêtait une nature industrielle et commerciale, les
agents qui y étaient affectés étaient transférés sur le fondement des dispositions du code du travail. A
l’inverse, si le service public était administratif, les agents n’étaient pas transférés, alors même que
l’activité pouvait se poursuivre dans les mêmes conditions matérielles, mais plus juridiques, par la
personne publique. Au surplus, le refus antérieur des juridictions judiciaires de faire application des
dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail aux évolutions rencontrées par les activités de
service public administratif n’était pas sans complexifier l’examen des litiges portant sur des
activités publiques. Il imposait en effet aux juridictions de vérifier au préalable, pour déterminer
l’applicabilité du dispositif translatif légal, que l’activité concernée par un changement d’employeur
revêtait bien la nature d’un service public industriel et commercial. Le juge judiciaire s’attachait
donc à identifier la nature d’une service public avant de se prononcer sur l’applicabilité de l’article
180 Voir à ce sujet les jurisprudences précitées : CJCE, 14 avril 1994, Schmidt, aff. C-392/92, Rec. CJCE p. I- 1311 ; CJCE, 19 septembre 1995, Rygaard, aff. C-48/94, Rec. CJCE p. I-2745 ; CJCE, 26 septembre 2000, Mayeur, aff. C-175/99, Rec. CJCE, p. I-7755 ; CJCE, 18 mars 1986, Spijkers, aff. C-24 /85, Rec. CJCE 1986, p. I-1119 ; CJCE, 11 mars 1997, Ayse Süzen, aff. C-13/95, Rec. CJCE, p. I-1259, D. 1997. IR. 84 ; CJCE, 10 décembre 1998, Hernandez Vidal e.a., aff. C-127/96, C-229/ 96 et C-74/97, Rec. CJCE p. I-8179 ; CJCE, 10 décembre 1998 ; CJCE, 2 décembre 1999, Allen e. a., aff. C-234/98, Rec. p. I-8643.
56
L.1224-1 du code du travail, et recourait pour ce faire à la technique du faisceau d’indices dégagée
par le juge administratif dans l’arrêt Union syndicale des industries aéronautiques181 du 16 novembre
1956, à savoir l’objet du service, l’origine des ressources, les modalités de son fonctionnement.
Un exemple de l’incohérence qui résultait de cette dichotomie artificielle érigée entre
services publics industriel et commercial et service public administratif est sans conteste le litige
dont eut à connaître en 1995 la chambre sociale de la Cour de Cassation182. Après avoir confié à la
Compagnie des Eaux et de l'Ozone le service de distribution d'eau potable et d'assainissement de la
ville dans le cadre d’un contrat d’affermage, la commune de Soulac-sur-Mer, en Gironde, en avait
par la suite repris directement l'exploitation. Plusieurs salariés demandèrent alors à la commune de
les conserver à leur service en application des dispositions de l'article L. 122-12 alinéa 2 du code du
travail. Par deux arrêts, contradictoires, rendus à six mois d'intervalle, et cassés le 7 octobre 1992 par
la Chambre sociale pour défaut de base légale, la Cour d'appel de Bordeaux considéra d’abord que la
reprise d'une activité privée par un service public administratif était exclusive de l'application de
l'article L. 122-12 alinéa 2 code du travail183, puis que la reprise par une commune sous la forme d'un
service public industriel et commercial, d'une entité économique autonome conservant son identité
entraînait cette application184. Ces solutions opposées s’expliquaient par la difficile qualification du
service public de distribution185 et d’assainissement de l’eau186, et en l’espèce l’absence de recherche
appropriée de l'objet du service, de l'origine de ses ressources et des modalités de son
fonctionnement. Le litige s’acheva finalement par un arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 26
novembre 1993 sur renvoi de cassation qui déclara inapplicable l'article L. 122-12 alinéa 2, excluant
ainsi la poursuite des contrats de travail avec la commune.
Absence de pertinence de l’appréciation de la nature juridique du nouveau gestionnaire de
l’activité sur l’applicabilité des dispositions translatives des contrats de travail. Enfin et surtout, la
solution de l’applicabilité ou non du dispositif légal de transfert ne saurait reposer sur la nature de la
personne qui reprend l’activité mais au contraire sur la nature de la personne initialement en charge
du service. Le principe est bien en effet que le code du travail trouve à s’appliquer dès lors que
l’employeur initial est lié à ses salariés par des liens de droit privé. La nature des liens de l’entité
nouvellement en charge du service est en revanche indifférente sur l’applicabilité du code du travail,
et n’a d’implication que dans un second temps, celui relatif à la détermination des modalités du
transfert.
181 CE, 16 novembre 1956, Union syndicale des industries aéronautiques. Rec. p.434, AJDA 1956, II, p. 489 ; voir également TC, 20 janvier 1986, SA Roblot, Rec. p. 298, AJDA 1986, p. 267, obs. L. RICHER. 182 Y. CHAUVY, « Transfert d’entreprise et service public : le sort des contrats de travail », concl. sur Cass soc. 10 juillet 1995, M. Lazareff c/ Commune de Soulac-sur-Mer, arrêt précité, RFDA 1997, p.403. 183 Cass soc., 10 juillet 1995, Lazareff c/ Mairie de Soulac, Bull. Civ. V n° 499, p. 316. 184 Cass. soc., 10 juillet 1995, Compagnie des Eaux et de l'Ozone c/ Elie et autres, Bull. Civ. V, n° 500, p. 317. 185 Cass. civ., 16 juillet 1986, Bull. civ. I n° 211, p. 202 et Cass. civ., 16 juin 1992, Bull. civ. I, n° 188, p. 126. 186 Pour une appréciation de l’application de l’article L. 1224-1 du code du travail à la reprise en régie de l’activité d’assainissement qualifié de service public administratif, voir : Cass. civ., 9 juillet 1974, Bull. civ. I, n° 226, p. 194 ; qualifié de service public industriel et commercial : Cass. com. 12 décembre 1991, Bull. civ. IV, n° 341, p. 237.
57
Une telle position n’était d’ailleurs pas sans susciter de critiques de la part de la doctrine.
Notamment Michel Bazex187 exhortait les juridictions à « dépasser la summa divisio entre le droit
public et le droit privé », rappelant les termes du Président Odent dans son cours de contentieux
administratif : « il n’y a pas un droit public et un droit privé, mais il y a un ordre juridique ;
autrement dit, le droit public et le droit privé sont distincts, mais ne s’opposent pas ; ils ont avec la
morale et l’économie politique des liens de même nature ; ils puisent leurs inspirations essentielles
aux mêmes sources ; ils ont à résoudre les mêmes problèmes ; ils appliquent les mêmes normes
juridiques […] ».
BR !4:*8>3;75634*9:*;@*`7E6?=E79:4A:*B6:4>:47:*
Les critiques se multipliant, la jurisprudence communautaire se précisant dans le sens d’une
indifférence de la nature de la structure de reprise de l’activité, le droit interne et par là-même les
juridictions nationales se devaient de faire évoluer leur position en la matière. Si désormais la
position des juridictions judiciaires et administratives est unanime et considère désormais que la
circonstance que l’entité économique autonome soit administrée par une personne morale de droit
public dont le personnel relève d'un statut de droit public n'est pas de nature à faire obstacle à
l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail, l’évolution n’a pas été concomitante devant les
deux ordres de juridictions. L’admission de l’applicabilité des dispositions de l’article L1224-1 du
code du travail a été initiée dans un premier temps par les juridictions judiciaires avant d’être
appropriée par les juridictions administratives.
- Le revirement de jurisprudence opérée par les juridictions judiciaires
La Cour de Cassation considérait par le passé que l’identité d’une activité économique
disparaissait lorsque cette dernière venait à être exploitée sous la forme d’un service public
administratif par une collectivité territoriale ou un établissement public à caractère administratif.
Cette position jurisprudentielle fréquemment réaffirmée188 par les juridictions judiciaires devait
néanmoins se trouver, à partir du début des années 2000, en contradiction avec celle des juridictions
communautaires sur la problématique du transfert des contrats de travail en cas d’évolution de la
structure d’emploi, le droit communautaire ayant lui aussi élaboré sa propre législation protectrice
des droits des travailleurs en matière de transferts d’entreprise par l’adoption d’une Directive
77/187/CEE189.
187 M. BAZEX, note sous l’arrêt Cass soc., 10 juillet 1995, Compagnies des eaux et de l’Ozone, arrêt précité, AJDA 20 mai 1996, p. 396. 188 Voir par exemple : Cass soc. 7 février 1980, Bull. civ. V, n°115, JCP CI 1980, I, 8846, n°12, obs. B. TEYSSIE ; Cass soc., 30 juin 1983, Dr. soc. 1984, p. 99 et p. 91, note H. BLAISE ; Cass soc. 24 octobre 1989, Bull. civ. V, n°609. 189 Modifiée par la directive 98/50/CE du 29 juin 1998, elle-même recodifiée par la directive 2001/23/CE du 12 mars 2001 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises, d'établissements ou de parties d'entreprises ou d'établissements (J.O.C.E. du 22 mars 2001)
58
Contrariété de la solution initiale avec le droit communautaire. La question de la
compatibilité de la jurisprudence judiciaire devenait d’autant plus sensible que le litige à l’occasion
duquel la Cour de justice fut amenée à se prononcer sur l’indifférence de la nature du cessionnaire
quant à l’applicabilité de l’obligation de transfert des contrats de travail intéressait un cas d’espèce
français. Par une décision Mayeur contre Association Promotion de l’information messine du 26
septembre 2000190, la Cour de justice fut ainsi appelée à se prononcer en application de l’article 234
du traité CE, sur deux questions préjudicielles posées par le Conseil des Prud’hommes de Metz et
relatives à l’interprétation de l’article 1er paragraphe 1 de la directive du 14 février 1977. En
l’espèce, la dissolution d’une association crée à l’initiative de la Ville de Metz avait conduit cette
dernière à reprendre en régie sous la forme d’un service public administratif l’activité de promotion,
diffusion et communication de l’attractivité de la commune. S’en était suivi le licenciement pour
motif économique de l’ensemble des salariés de l’association, qui au regard de la jurisprudence
classique de la Cour de Cassation ne pouvaient bénéficier de l’application des dispositions de
l’article L.122-12. L’un des salariés, Monsieur Mayeur, contesta alors son licenciement devant les
juridictions prud’homales, et, élément de droit nouveau, souleva à l’appui de sa requête la contrariété
de la jurisprudence française tant « à la lettre qu’à la finalité de la directive du 14 février 1977 ». La
recevabilité d’un tel argument trouvait un écho d’autant plus raisonnant que la Cour de Cassation
avait depuis 1998 pris l’habitude d’appréhender les dispositions nationales de l’article L.122-12 à la
lumière des textes communautaires, en faisant expressément référence à « l’article L.122-12 du code
du travail tel qu’interprété au regard de la directive 77/187 du 1’ février 1977 »191. Précisant au
préalable qu’ « il y a lieu de relever que la notion de «service public administratif» constitue une
notion de droit administratif français que la Cour, statuant dans le cadre de l'article 234 CE, n'est
pas compétente pour interpréter192 », la Cour de Justice rappela que « la notion d'entreprise au sens
de l'article 1er, paragraphe 1, de la directive 77/187 comprend toute entité économique organisée de
manière stable, c'est-à-dire un ensemble structuré de personnes et d'éléments permettant l'exercice
d'une activité économique qui poursuit un objectif propre193 . Une telle notion est indépendante du
statut juridique de cette entité et de son mode de financement194 », et en déduisit dès lors que « les
articles 1er, paragraphe 1, et 2, sous b), de la directive 77/187 ne permettent dès lors pas d'exclure
du champ d'application de celle-ci le transfert d'une activité économique d'une personne morale de
droit privé à une personne morale de droit public, en raison du seul fait que le cessionnaire de
l'activité est un organisme de droit public. Seule la réorganisation de structures de l'administration
publique ou le transfert d'attributions administratives entre des administrations publiques en est
190 CJCE, 26 septembre 2000, Mayeur contre Association Promotion de l’information messine, Rec. p. I-07755 191 Cass soc.,7 juillet 1998, Mutuelle générale de l’éducation nationale c/ CPAM de Paris et autres, pourvoi n°96-21451, Dr . soc. 1998, p. 948, note A. MAZEAUD. 192 Ibid, n°22. 193 CJCE du 2 décembre 1999, Allen e.a., C-234/98, op. cit., point n°24. 194 Ibid, n°32.
59
exclu, conformément à l'arrêt Henke195 ». Au cas d’espèce, elle considéra alors qu’ « il y (avait) lieu
de répondre aux questions posées que l'article 1er, paragraphe 1, de la directive 77/187 doit être
interprété en ce sens que cette dernière est applicable en cas de reprise par une commune, personne
morale de droit public agissant dans le cadre des règles spécifiques du droit administratif, des
activités de publicité et d'information sur les services qu'elle offre au public, exercées jusqu'alors,
dans l'intérêt de cette commune, par une association sans but lucratif, personne morale de droit
privé, pour autant que l'entité cédée conserve son identité 196».
Une évolution inéluctable. Au vu d’une telle décision de principe des juridictions
communautaires, l’évolution de la jurisprudence nationale devenait inexorable. Ce fut chose faite par
l’arrêt AGS de la Cour de Cassation du 25 juin 2002197 qui posa le principe selon lequel « la seule
circonstance que le cessionnaire soit un établissement public à caractère administratif lié à son
personnel par des rapports de droit public ne peut suffire à caractériser une modification dans
l’identité de l’entité économique transférée ». Le revirement de jurisprudence opéré par la Cour de
Cassation était d’autant plus symbolique qu’il intéressait l’hypothèse d’une reprise en régie par un
hôpital de l’activité d’une clinique privée, hypothèse à maintes reprises examinée par la Cour de
Cassation et toujours par le passé considérée comme exclue du champ d’application de l’article
L. 122-12 du code du travail198.
Aussi attendu qu’il fut, ce revirement impliquait en pratique des conséquences importantes
pour les collectivités territoriales, et le respect de l’obligation de transfert des contrats de droit privé
n’était pas sans contradiction avec les règles classiques de recrutement au sein de la fonction
publique. L’enjeu d’une telle obligation était, et demeure, d’autant plus important que les
collectivités territoriales ont dans de nombreux domaines pris l’habitude de confier à des associations
la gestion d’activités de service public administratif. Or la question de la remunicipalisation de telles
activités se pose désormais en des termes non plus simplement politiques mais sociaux, et par la-
même financiers199.
Bien qu’attendu, l’évolution amorcée par les juridictions sociales demeurait pour autant
partielle. Car si la Cour de Cassation s’était rangé à la position de la jurisprudence communautaire, le
Conseil d’Etat et plus généralement les juridictions administratives firent davantage montre de
195 Ibid, n°33. 196 Ibid, n°57. 197 Cass soc., 25 juin 2002, Association pour la garantie des salaires (AGS) de Paris et autre c/ M. Hamon et autres, Bull. civ. V, n° 209 p. 202. 198 Ainsi, dans deux arrêts du 7 février 1980 (Cass soc., 7 février 1980, pourvoi n°78-41168 ; Cass soc., 7 février 1980, pourvoi 78-41172, Bull. Civ. V, n°115, JCP 1980 I p. 8846, chron. B. Teyssié, n°12.), la Cour de Cassation avait clairement précisé qu’il ne pouvait y avoir continuation de la même entreprise et application de l’article L. 122-12 du code du travail à l’occasion d’une cession d’une clinique privée exploitée sous la forme de société anonyme à un centre hospitalier ayant la nature d’établissement public à caractère administratif (S. PUGEAULT, « L’application de l’article L.122-12 du code du travail aux services publics administratifs », AJDA 2002, p. 695, note sous l’arrêt AGS op.cit) 199 Nous y reviendrons plus avant dans le cadre de la deuxième partie de cette étude.
60
réticences à mettre fin au principe d’exclusion des hypothèses de reprise en régie des services publics
administratifs du champ d’application de l’article L.1224-1 du code du travail.
- Le ralliement du juge administratif à la solution dégagée par les juridictions sociales et communautaires
« Si votre réponse sur cette question est attendue avec une certaine impatience200, c’est
parce que sous l’influence de la Cour de justice des communautés européennes, le paysage juridique
en ce domaine a très sensiblement évolué depuis quatre ans 201». C’est en ces termes que le
commissaire du gouvernement Emmanuel Glaser invitait les juges du Conseil d’Etat à examiner,
dans une nouvelle perspective, la problématique classique de la continuité des contrats de travail lors
de la reprise par une collectivité publique, sous la forme d’un service public administratif, d’une
entité économique autonome au regard des dispositions du second alinéa de l’article L. 122-12 du
code du travail. La conformité de la jurisprudence nationale à la jurisprudence Mayeur de la CJCE,
une fois l’évolution de la position de la Cour de Cassation acquise, impliquait nécessairement
l’alignement de la jurisprudence du Conseil d’Etat sur cette question. D’autant que le Tribunal des
conflits avait quant à lui franchi le cap. Par un arrêt du 19 janvier 2004202, il s’était à son tour
prononcé en faveur de l’applicabilité des dispositions légales de transfert aux hypothèses de reprise
en régie d’un service public administratif à l’occasion d’un litige portant sur la reprise en régie du
service municipal des abattoirs par la commune de Châtellerault. Le tribunal jugeait ainsi que « (…)
la commune de Châtellerault, qui a repris en régie directe l’exploitation des abattoirs municipaux
antérieurement affermée à une société, doit, pour l’exploitation du même service public industriel et
commercial être considérée comme un nouvel employeur au sens de l’article L. 122-12 du code du
travail, tenu en conséquence de respecter les contrats de travail en cours ».
Il fallut pourtant près de deux ans pour que le Conseil d’Etat prenne position à la suite de la
Cour de Cassation en faveur de l’applicabilité des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du
travail à la reprise en régie de services publics administratifs par un arrêt de Section Lamblin en date
du 22 octobre 2004. Ce délai s’explique tant par les réticences théoriques du juge administratif à
admettre l’obligation pour des personnes publiques de reprendre des personnels de droit privé que
par le manque d’occasion pour procéder à une évolution de la jurisprudence en la matière. Force est
de constater en effet que l’essentiel du contentieux en la matière ressort des juridictions judiciaires,
et que les juridictions administratives sont peu confrontées à cette problématique. Il s’avère en effet 200 P. MOUDOUDOU, « Service public et changement d’employeur », AJDA 1996, p. 339 ; J. MARTIN, « A propos du maintien des contrats de travail en cas de reprise en régie d'un service public », AJDA 2003, p. 768 ; S. PUGEAULT, op. cit. 201 E. GLASER, concl. sur l’arrêt CE Sect., 22 octobre 2004, M. Lamblin, Rec. p. 382, BJCL n°1/05, p. 37. 202 TC, 19 janvier 2004, Devun et autres c./ Commune de Saint-Chamond, req. n°3393, Rec. p. 509, Dr. soc. 2004, p. 433, note A. MAZEAUD ; JCP. A. 2004, p. 1238, note M.-C. ROUAULT ; AJDA 2004, p. 432, chron. F. DONNAT et D. CASAS ; confirmé par TC, 21 juin 2004, Commune de Saint-Léger-sur-Roanne c/ Mmes Desbordes, req. n°3415, inédit ; TC, 29 décembre 2004, Mme Durand c./ Centre hospitalier régional de Metz-Thionville, Rec. p. 524, Coll. Terr. Interco. 2005, n°3, commentaire G. PELISSIER n°44
61
que le Conseil d’Etat et les juridictions administratives ne sont que très rarement saisies de la
question du sort des contrats de travail lors de reprise en régie de services publics administratifs,
dans la mesure où leur compétence est conditionnée par l’existence d’un lien de droit public entre les
agents et la collectivité publique203. Le juge administratif ne devient compétent que lorsque
l’administration a pris un acte positif plaçant les salariés sous un régime de droit public. Aussi, seule
une décision datant de 1987204 fait état de l’examen par le Conseil d’Etat de l’application de l’article
L. 1224-1 à la reprise en régie d’un service public administratif, décision ponctuée par le refus de la
Haute juridiction, en conformité avec la jurisprudence d’alors des juridictions judicaires.
C’est donc par un considérant de principe, qui n’a pas manqué de diviser la doctrine205, que
le Conseil d’Etat a consacré l’applicabilité des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail
aux hypothèses de reprise en régie d’un service public administratif par une personne publique en
déclarant que : « lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est
reprise par une personne publique gérant un service public administratif, il appartient à cette
dernière, en l'absence de dispositions législatives spécifiques, et réserve faite du cas où le transfert
entraînerait un changement d'identité de l'entité transférée, soit de maintenir le contrat de droit
privé des intéressés, soit de leur proposer un contrat de droit public reprenant les clauses
substantielles de leur ancien contrat dans la mesure [...] où des dispositions législatives ou
réglementaires n'y font pas obstacle [et] que, dans cette dernière hypothèse, le refus des salariés
d'accepter les modifications qui résulteraient de cette proposition implique leur licenciement par la
personne publique, aux conditions prévues par le droit du travail et leur ancien contrat ».
L’option ouverte par le Conseil d’Etat entre maintien du contrat de droit privé et proposition
d’un contrat de droit public est certainement la dimension de l’arrêt qui a suscité les plus vifs émois
en doctrine. Mais c’est là s’interroger sur les effets mêmes de l’arrêt, et occulter selon nous
l’innovation majeure qui en résulte quant à la perception même de la notion de service public
administratif et son assimilation, sous l’influence des juridictions communautaires, à l’acception de
la notion d’entreprise de la directive 2001/23/CE206. Pourtant, il nous semble que la position du
Conseil d’Etat dans l’arrêt Lamblin marque une véritable avancée sur l’interprétation de la notion
d’entité économique autonome en matière de service public administratif. Les conclusions du
203 En application de la jurisprudence Faulcon du Tribunal des Conflits203, il est en effet jugé que l’article L.1224-1 du code du Travail n’a pas pour effet de transformer la nature juridique des contrats, qui demeurent de droit privé « tant que le nouvel employeur public n’a pas placé les salariés sous un régime de droit public ; […] le juge judiciaire est, par suite, seul compétent pour statuer sur les litiges nés du refus de l’un ou l’autre des deux employeurs successifs de poursuivre l’exécution du contrat de travail qui ne mettent en cause, jusqu’à la mise en œuvre d’un régime de droit public […] que des rapports de droit privé »: TC, 15 mars 1999, Faulcon, Rec. p. 442, Dr. soc. 1999.673, concl. J.-L. SAINTE-ROSE. 204 CE, 2 octobre 1987, Siguier, Rec. p. 324. 205 G. CLAMOUR, « Plaidoyer pour l’arrêt Lamblin », AJDA 2005, p. 1205 ; D. JEAN-PIERRE, « L’article L. 122-12 du code du travail et le droit de la fonction publique : quand l’incompréhensible se conjugue à l’inapplicable », JCP G n°52, II 10200 ; Europe 2005, n°44, obs. CASSIA, op. cit. 206 Notre propos n’est pas d’évacuer d’un revers de main la question des modalités de mise en œuvre de l’application du mécanisme légal de transfert des contrats de travail en cas de reprise en régie d’un service public administratif. C’est là une question essentielle au débat, qui explique les réticences des juridictions administratives à admettre l’application du code du travail à ce type d’hypothèse, mais qui sera traitée dans le détail dans la deuxième partie de la présente étude.
62
commissaire du gouvernement se révèlent à ce titre des plus lucides en ce qu’elle rappelle qu’ « il
n’est (…) plus possible de se rattacher à la spécificité du régime de droit public propre aux services
publics administratifs, pour considérer qu’il n’y avait pas cession mais disparition de l’activité en
cause »207. Recourant à la technique de l’interprétation conforme de la directive 2001/23/CE dont les
dispositions sont suffisamment claires, précises et inconditionnelles pour être d’effet direct, le
Conseil d’Etat retient une nouvelle lecture des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail
en centrant son analyse sur le critère décisif dans la jurisprudence communautaire que représente le
maintien de l’identité de l’entité économique transférée. Citant ainsi expressis verbis dans les motifs
l’arrêt Didier Mayeur rendu dans l’affaire C-175/99208, le Conseil d’Etat fait sienne l’interprétation
de la notion autonome d’ « entreprise » dégagée par les juridictions communautaires, abandonnant
par là-même la distinction entre service public industriel et commercial et service public
administratif qui axait jusqu’alors son raisonnement, pour assimiler l’activité de vaccination reprise
en régie au cas d’espèce en une activité économique au sens du droit communautaire. Il faut dire
qu’une telle notion reçoit, en droit communautaire, une acception des plus extensives, puisque
recouvrant « toute activité consistant à offrir des biens et des services sur un marché209 ». Peu
importe dès lors que l’activité soit exercée dans un but non lucratif ou dans l’intérêt public210. Il est
d’ailleurs à noter que des activités publiques non lucratives exercées par des associations avaient
déjà été reconnues comme entrant dans le champ d’application de la notion d’entité économique
autonome211. Dans ce contexte, la jurisprudence administrative, ne pouvant plus se réfugier derrière
des considérations de service public administratif dénuées de dimension lucrative pour écarter
l’application des dispositions protectrices de la directive 2001/23/CE et du code du travail se devait
d’évoluer.
∴
Consacré à l’égard des activités confiées à des tiers opérateurs économiques comme à
l’égard de celles reprises en régie, l’applicabilité des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du
travail aux « modifications dans la situation juridique d’employeur » exerçant une activité publique
n’emporte pour autant pas nécessairement l’application de ces dispositions aux évolutions
rencontrées en pratique par les activités publiques. Il faut encore que les circonstances de l’espèce
réunissent les conditions d’application posées par le législateur telles qu’interprétées par les
juridictions sociales et administratives, qui peuvent sensiblement différer selon le mode de
dévolution de l’activité.
207 Ibid., paragraphe 3.4. 208 Op. cit. 209 CJCE, 16 juin 1987, Commission c./ Italie, aff. C-118/85, Rec. 1987, page 2599. 210 CJCE, 8 juin 1994, Commission c./ Royaume-Uni, aff. C-382/92, Rec. 1994 p. I-2435. 211 CJCE, 19 mai 1992, Redmond Stichting, aff. C-29/91 concernant l’aide apportée par une association sans but lucratif à des toxicomanes ; CJCE, 10 décembre 1998, Hidalgo, aff. C- 173/96 et C-247/96 à propos de l’activité d’aide à domicile de personnes défavorisées.
63
,@E@\E@=G:*WR*/0@==;6A@5634*9:?*96?=3?65634?*9:*;0@E56A;:*/R*UWW^LU*97*A39:*97*5E@>@6;*?:;34*;:*<39:*9:*98>3;75634*9:*;0@A56>658*!
L’applicabilité des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail aux activités
publiques jouit aujourd’hui, nous l’avons vu, d’une consécration unanime par les juridictions
judiciaires et administratives. Elle n’en implique cependant pas nécessairement une application
systématique à toute hypothèse d’évolution d’entité économique en charge d’une activité publique.
L’évolution amorcée au profit des entités privées et poursuivie au bénéfice des entités publiques ne
vise ainsi qu’une acceptation par le juge judiciaire ou administratif d’examiner au cas par cas
l’existence d’une obligation de transfert en application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code
du travail, selon une grille de lecture identique, celle d’un entité économique autonome consistant en
un ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels et incorporels permettant l’exercice
d’une activité économique poursuivant un objectif propre212.
La problématique de l’existence d’une obligation de transfert des personnels en cas de
changement de gestionnaire d’une activité publique n’amène donc pas une réponse unique, mais
appelle bien au contraire une réponse circonstanciée pour chaque cas d’espèce. A l’instar des
activités économiques classiques, les activités publiques conduisent les juridictions à s’interroger sur
la réunion des conditions posées par le législateur à l’effet translatif des contrats de travail. Il en
résulte des situations contrastées en fonction, de manière générale, du schéma juridique retenu et, de
manière particulière, du contexte dans lequel survient la modification. Ainsi, s’il ne s’avère pas
possible de donner une réponse de principe, il n’en demeure pas moins qu’il se dégage de certains
modes de dévolution de la commande publique des indices d’application. Le mécanisme contractuel
des délégations de service public présente, en ce sens, un certain nombre d’analogies avec les
évolutions juridiques des entités économiques de droit privé, de telle sorte que sans pouvoir affirmer
une obligation « systématique » de transfert, on peut néanmoins tendre vers « une présomption de
transfert » (A). Il en va autrement des marchés publics. Si ces derniers bénéficiaient par le passé
d’une « présomption de non transfert »213, il nous semble qu’une telle affirmation doit véritablement
être nuancée et être appréhendée en fonction de la nature de la prestation confiée à l’opérateur
économique par le pouvoir adjudicateur (B). Les autres contrats publics ne réunissent quant à eux
que très difficilement les conditions d’application des dispositions légales de transfert des contrats de
travail (C).
*
212 Pour une application de la notion par les juridictions administratives, voir par exemple : CE, 1er juin 2011, SA Bureau Véritas, req. n°341423, mentionné aux tables. 213 Cass soc. 12 juin 1986, op.cit ;
64
-* S* !4:* @==;6A@5634* @6?8:* :4* <@56aE:* 9:* A345E@5?* 9:* 98;8\@5634* 9:*?:E>6A:*=7B;6A**
Parmi l’ensemble des mécanismes contractuels permettant à une personne publique de
confier la gestion d’une activité publique à un opérateur économique public ou privé, la délégation
de service public apparaît a priori comme celui le plus à même de remplir les conditions posées par
l’article L. 1224-1 du code du travail214. Comme le souligne fort justement Laurent Richer, « il existe
une harmonie certaine entre la notion d’entreprise utilisée pour l’application de l’article (L.1224-1
du code du travail) et la notion de délégation de service public »215.
L’objet même des délégations de service public, qui consiste aux termes de l’article L. 1411-
1 du code général des collectivités territoriales pour une personne publique à confier « la gestion
d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la
rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service »216, semble en
adéquation avec le concept travailliste d’entité économique autonome. Ce dernier, défini par la
directive du 12 mars 2001217 comme un « ensemble organisé de moyens, en vue de la poursuite
d’une activité économique, que celle-ci soit essentielle ou accessoire », est en effet au cœur de
l’analyse juridictionnelle opérée par le juge prudhommal dans l’examen de l’applicabilité de l’article
L. 1224-1 du code du travail. La Cour de Cassation a d’ailleurs dégagé de la directive sa propre
vision de la notion, en précisant qu’une entité économique autonome doit s’entendre comme « un
ensemble organisé de personnel et d’éléments corporels ou incorporels permettant l’exercice d’une
activité économique qui poursuit un objectif propre »218. Or la confrontation des notions d’entité
économique autonome et de délégation de service public amène sans conteste à identifier certaines
similitudes dans leurs composantes, qui participent par là-même d’une obligation de transfert des
personnels dans la majeure partie des successions de délégataires de service public. Il en va ainsi, en
premier lieu, des éléments corporels et incorporels (1), tels que les bâtiments et les biens
mobiliers219, qui constituent un indice fort de l’existence d’une entité économique autonome objet du
transfert220. Il en va de même de l’activité objet du contrat de délégation de service public qui se voit
qualifiée d’activité économique par le juge communautaire national (2). *
214 CE, 24 octobre 2008, Syndicat intercommunal d’eau et d’assainissement de Mayotte, req. n°300034. 215 L. RICHER, « La fin de la convention de délégation », AJDA 1996, p. 651. 216 Issu de l’article 38 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite Loi SAPIN (J.O. du 30 janvier 1993, p. 1588), op. cit. 217 Directive 2001/23/CE du Conseil du 12 mars 2001 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises, d'établissements ou de parties d'entreprises ou d'établissements (J.O.C.E. n° L 082 du 22/03/2001 p. 16) 218 Cass soc., 7 juillet 1998, Bull. Civ. V, n°363. ; Cass soc., 24 novembre 2004, pourvoi n°02-44.880. 219 CJCE, 18 mars 1986, aff. C 24/85, Spijkers, Rec. CJCE 1986, p. 1119. 220 CJCE, 11 mars 1997, aff. C 13/95, Ayse Süzen, op. cit., point 15 : « une entité ne saurait être réduite à l'activité dont elle est chargée. Son identité ressort également d'autres éléments tels que le personnel qui la compose, son encadrement, l'organisation de son travail, ses méthodes d'exploitation ou encore, le cas échéant, les moyens d'exploitation à sa disposition »
65
UV /:* 5E@4?[:E5* 908;8<:45?* A3E=3E:;?* :5* 64A3E=3E:;?* 9@4?* ;@* =;7=@E5* 9:?*E:437>:;;:<:45?*9:*98;8\@5634?*9:*?:E>6A:*=7B;6A**
La notion d’éléments corporels et incorporels en matière de délégation de service public doit
selon nous être appréhendée de manière différente selon les typologies de contrat et les missions de
service public confiées au délégataire par convention. Les délégations de service public recouvrent
en effet des visages différents selon le degré de délégation confiée au cocontractant. Dans le cadre
d’une convention d’affermage, par laquelle le fermier se verra attribuer par la collectivité publique
délégante la gestion d’équipements ou ouvrages publics existants, à charge pour lui d’en assurer
l’entretien tout au long de la durée du contrat, il ne fait pas de doute que la notion d’éléments
corporels et incorporels trouvera plus facilement à s’appliquer. Il conviendra en revanche, en matière
de délégations de service public consistant en une concession de service public – contrat par lequel le
concessionnaire a pour mission de construire et financer de nouveaux équipements et ouvrages – de
distinguer si cette obligation à la charge du cocontractant constitue simplement l’accessoire d’une
mission générale d’entretien d’un ouvrage existant ou si, à l’inverse, elle revêt un caractère principal
en dehors de tout ouvrage existant. Si dans la première hypothèse, le concessionnaire recevra de la
collectivité délégante un certain nombre d’ouvrages et équipements existants, et se verra dès lors
transférés des éléments corporels ou incorporels à l’occasion de l’attribution de la mission de service
public, cette condition fera en revanche défaut dans la seconde hypothèse de telle sorte que
l’obligation de transfert ne trouvera pas en l’espèce application.
Au-delà des catégories de délégations de service public, la recherche d’un transfert
d’éléments corporels ou incorporels lors de la succession de cocontractants à une délégation de
service public doit également être différenciée selon la nature même de la mission de service public
objet du contrat. Le critère d’éléments corporels ou incorporels, s’il n’est qu’un indice parmi d’autres
de l’existence d’un transfert d’une entité économique autonome, revêt néanmoins une importance
plus ou moins grande dans l’analyse opérée par le juge communautaire selon la nature de la mission
de service public. Le juge communautaire considère ainsi que dans des secteurs « où les éléments
corporels contribuent de manière importante à l'exercice de l'activité, l'absence de transfert à un
niveau significatif […] de tels éléments, qui sont indispensables au bon fonctionnement de l'entité,
doit conduire à considérer que cette dernière ne conserve pas son identité »221. Au surplus, le fait
que les éléments corporels appartenant au donneur d'ordre soient repris par un nouvel adjudicataire,
sans que ces éléments lui aient été cédés aux fins d'une gestion économique propre, ne suffit
221 CJCE, 25 janvier 2001, Oy Liikenne Ab, aff. C 172/99, Rec. CJCE, p. I-745 ; RJS mai 2001, n° 690 : dans cette espèce, la cour de justice a estimé que le transport public régulier par autobus « ne peut être considéré comme une activité reposant essentiellement sur la main-d'œuvre ».
66
d’ailleurs pas pour exclure ni l'existence d'un transfert des éléments d'exploitation ni l'existence d'un
transfert d'entreprise222.
WV /@* C7@;6[6A@5634* 90@A56>658* 8A343<6C7:* ;0@A56>658* 9:* ?:E>6A:* =7B;6A*A34?@AE8:*=@E*;:*`7\:*A3<<74@75@6E:*:5*4@5634@;**
Il faut au surplus que les éléments incorporels et corporels transférés « permettent l’exercice
d’une activité économique qui poursuit un objectif propre ». Là encore les concepts d’entité
économique autonome et de délégation de service public semblent se rencontrer. La délégation de
service public consiste pour la collectivité publique concédante à confier l’exploitation d’un service
public à un tiers. Or la notion de service public, pierre angulaire du droit administratif français, est
désormais appréhendée par le droit national, sous l’influence certaine du droit communautaire, dans
sa dimension économique. En effet, dès l'adoption de l'ordonnance du 1er décembre 1986, le droit de
la concurrence a été considéré comme applicable aux activités publiques. En effet, l'article 53 de
l'ordonnance, codifié désormais à l'article L. 410-1 du code de commerce, indique que les règles de
concurrence « s'appliquent à toutes les activités de production, de distribution et de services, y
compris celles qui sont le fait de personnes publiques, notamment dans le cadre de conventions de
délégation de service public ». Le droit communautaire quant à lui n'a jamais opéré de distinction, à
propos des activités économiques, entre personnes publiques et personnes privées : le principe de
neutralité, visé à l'article 295 du Traité instituant la Communauté Européenne, selon lequel « le
présent traité ne préjuge en rien le régime de la propriété dans les États membres », empêche certes
que le droit et les institutions communautaires remettent en cause le statut public de certains
opérateurs économiques mais aussi, à l'inverse, que ces opérateurs échappent aux règles
communautaires de concurrence. Ainsi, le principe de neutralité s'interprète comme signifiant que
« toutes les règles du traité doivent s'appliquer de la même manière à toutes les entreprises tant
privées que publiques dans tous les États membres et que, à cet égard, les entreprises publiques dans
les différents États ne doivent pas être soumises à un traitement préférentiel »223. La notion
d’entreprise est définie par le juge communautaire comme « toute entité exerçant une activité
économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement224.
Une remarque terminale doit ici être formulée. Certains auteurs225 ont pu se prononcer en
faveur d’une assimilation de l’entité économique telle que définie par l’article 1-b de la directive
2001/23 à l’activité déléguée par voie contractuelle, ou tout au moins en faveur d’une présomption
222 CJCE, 15 décembre 2005, aff. C-232/04 et C-233/04, Nurten Güney-Görres et Gul Demir c./ Securicor Aviation (Germany) Ltd et Kötter Aviation Security GmbH & Co. KG, Rec. p. I-11237. 223 J. REISCHL, concl. sur l’arrêt CJCE, 6 juillet 1982, aff. C-188 et 190/80, Rép. française c/ Comm., Rec. CJCE p. 2545. 224 CJCE, 23 avril 1991, aff. C-41/90, Klaus Höfner et Fritz Elser c/ Macroton GmbH, Rec. CJCE p. 1979. 225 A. MAZIERES, « Succession de délégataires de service public et article L.122-12 du code du travail : rencontre ou coexistence ? », note sous les arrêts : Cass soc. 9 novembre 2005, Société Rémy Loisirs c/ M. Caillet, pourvoi n°03-47.188 et TA Clermont-Ferrand, 9 mars 2006, M. Lassri et autres, req. n°0401747, AJDA 2006, p. 1230.
67
simple d’application des dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail, présomption qui
tomberait dès lors que serait démontrer l’insuffisance des transferts corporels et incorporels associés.
Si une telle convergence systématique des deux notions tendrait à offrir un pôle de stabilité juridique
tant pour les délégants que pour les délégataires qui n’auraient plus à se préoccuper de critères
d’application d’un maniement parfois délicat, elle conférerait néanmoins un pouvoir excessif à la
collectivité publique, qui par le seul choix du mode contractuel pourrait décider de l’application ou
non des dispositions du code du travail à l’activité publique qu’elle entend confier à un tiers. Les
frontières souvent ténues entre délégations de service public et marchés publics226, au regard
principalement du critère de la rémunération, sont à ce titre un argument supplémentaire pour exclure
une détermination de l’application du L.1224-1 du code du travail en fonction du schéma contractuel
retenu, et lui préférer une application circonstanciée au cas d’espèce, conformément à la lecture
actuelle des juridictions judiciaires et administratives.
∴
A la présomption d’application des dispositions de l’article L. 1224-1 aux transferts d’activité
intervenant dans le cadre d’une convention de délégation de service public semble à l’inverse
répondre une présomption d’inapplication dans le cadre des marchés publics. Une telle présentation
ne nous semble pas traduire la réalité, qui se révèle bien plus nuancée.
N*S*!4:*@==;6A@5634*A345E@?58:*:4*<@56aE:*9:*<@EAG8*=7B;6A**
Longtemps, la jurisprudence communautaire comme celle des juridictions sociales a fait
montre de réticences à reconnaître dans la succession de prestataires d’un marché privé une entité
économique autonome emportant transfert corrélatif des contrats de travail. Les marchés publics
n’ont pas échappé à ce mouvement, à telle enseigne qu’il a parfois été évoqué l’existence d’une
présomption d’inapplication des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail aux marchés
publics. Une telle affirmation doit à notre sens être nuancée, aucun élément intrinsèque des marchés
publics ne s’opposant par principe à une telle application (1). En réalité, l’application des
dispositions diffère fortement selon les catégories de marchés, obligeant à une analyse in concreto
pour chaque cas d’espèce (2) et selon les conditions de recours au marché (3).
*
226 CE, 7 avril 1999, Commune de Guilherand-Granges, Rec. p. 878, Dr. adm. 1999, comm. 159, concernant les contrats de gérance dans lesquels le cocontractant n'assure aucun risque lié à l'exploitation du service et dès lors qualifiés de marchés publics ; CE, 20 octobre 2006, Commune d’Andeville, req. n° 289234, JCP A 2006 p.1301, note F. LINDITCH ; AJDA 2006, p. 2340, concl. D. CASAS, indiquant que, dans un contrat de délégation de service public, une subvention peut être intégrée aux recettes tirées de l'exploitation du service dans la mesure où cette dernière varie en fonction de la fréquentation du service.
68
UV !4:*=E8?3<=5634*9064@==;6A@5634*Y*47@4A:E*
La question de l’application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail en
matière de marchés publics est sans conteste l’hypothèse, parmi les différents modes de dévolution
d’activités publiques, qui a pu nourrir le débat le plus intense et le plus passionné. Trois raisons
peuvent être ici avancées.
D’abord, ce mode contractuel permettant à une personne publique de confier à un tiers
l’exécution d’une prestation qui répond à un besoin public apparaît comme le plus connu des contrats
administratifs, tant par les professionnels que les justiciables dans leur ensemble.
Sans doute ensuite l’importance quantitative de ce mode contractuel ne doit pas être
négligée. En ce qu’il peut porter sur des prestations de travaux, de fournitures que de services, le
marché public est susceptible d’intéresser la majorité des secteurs d’activités.
Enfin et avant tout par les difficultés théoriques engendrées par la question de l’application
des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail aux marchés publics. En effet, l’exécution
d’une prestation, quelque soit son objet, a vocation, dans le cadre d’un marché public, à répondre à
un besoin particulier d’une personne publique et se caractérise bien souvent par son caractère
ponctuel et éphémère. A l’inverse des contrats de délégation de service public, qui s’inscrivent par
nature dans une durée plus ou moins longue en fonction de la durée d’amortissement des
investissements nécessaires à l’exploitation du service227, les contrats de marchés publics se
caractérisent ainsi par une durée relativement courte. Le pouvoir adjudicateur ou l’entité
adjudicatrice doit ainsi prendre en compte le temps d'exécution de la prestation et l'importance des
moyens qu'elle mobilise au regard en particulier de leur temps d'amortissement228. La nature des
prestations se combine ainsi avec les impératifs de la concurrence pour aboutir à une durée adéquate
du marché229. L’exigence de permanence d’une entité économique autonome, placée au cœur du
raisonnement des juridictions pour la reconnaissance d’une poursuite de l’activité et dès lors des
contrats de travail afférents, apparaît ainsi a priori absente des marchés publics.
Cette impression est encore renforcée par la « présomption de non applicabilité des
dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail » dont semble souffrir les marchés publics. La
Cour de Cassation considère ainsi que « l’exécution d’un marché de prestations de service par un
227 Article L. 1411-2 du CGCT au termes duquel : « Les conventions de délégation de service public doivent être limitées dans leur durée. Celle-ci est déterminée par la collectivité en fonction des prestations demandées au délégataire. Lorsque les installations sont à la charge du délégataire, la convention de délégation tient compte, pour la détermination de sa durée, de la nature et du montant de l'investissement à réaliser et ne peut dans ce cas dépasser la durée normale d'amortissement des installations mises en œuvre ». 228 Rép. min. n° 28612 (J.O.A.N. Q du 12 février 1996, p. 768). 229 Article 16 du code des marchés publics issu du décret n° 2006-975 du 1er août 2006 portant code des marchés publics (J.O. du 4 août 2006, p. 11627).
69
nouveau titulaire ne réalise pas, à elle seule, le transfert d’une entité économique230 » et qu’« il n'y a
pas de modification dans la situation juridique de l'employeur au sens de la loi dans le cas de la
seule perte de marché »231. En d'autres termes, une entreprise prestataire qui se voit attribuer un
marché retiré à une autre n'est pas tenue de poursuivre les contrats de travail des salariés employés
par son prédécesseur232. La jurisprudence de la Cour de Cassation233 converge ainsi avec celle de la
Cour de justice des communautés européennes234 pour exclure l’obligation de reprise du personnel en
cas de simple perte d’un marché235.
Il convient pourtant de nuancer ce constat a priori défavorable aux marchés publics sur la
question de savoir si les dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail leur sont applicables.
Selon la jurisprudence consacrée par l’Assemblée de la Cour de Cassation, il est aujourd’hui admis
que « les articles premiers et trois de la directive du 14 février 1977 et L. 122-12, alinéa 2 du code
du travail s’appliquent, même en l’absence d’un lien de droit entre les employeurs successifs, à tout
transfert d’une entité économique conservant son identité et dont l’activité est poursuivie ou
reprise »236. Par cet arrêt de principe, la Cour de Cassation a mis fin à l’exigence de l’existence d’un
lien de droit entre les deux prestataires successifs qui excluaient, de jure, les marchés publics du
champ d’application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail237. S’il n’y a pas
d’application évidente de l’article L.1224-1 du code du travail aux marchés publics, ce n'est donc pas
pour autant que l'attribution ou la reprise d'un marché soit nécessairement exclue des dispositions du
code du travail relatives au transfert des contrats : l'article L. 1224-1 s'applique, dans ce type
d'opération comme dans d'autres, dès l'instant « où se trouve caractérisé le transfert d'une entité
économique autonome ayant conservé son identité et poursuivant son activité »238. Au juge de
rechercher si tel est bien le cas, en se référant au faisceau d'indices suivant : activité autonome, dotée
de moyens et d'un personnel qui lui est propre et après le transfert, continuation de la même activité,
230 Cass soc., 6 novembre 1991, Société de nettoyage des villes, Bull. civ. V , n°473, p. 194, op. cit. ; Cass soc., 6 novembre 2002, n°00-43.487 ; Cass soc., 18 février 2004, Sodexho France contre Vivancos, RJS mai 2004, n°507. 231 Cass. Ass. Plén., 16 mars 1990, op. cit. ; Cass soc., 27 juin 1990, Bull. Civ. V, n° 317 ; Cass soc., 18 décembre 2000, Bull. civ. V, n° 423 p. 324 ; Cass soc., 15 janvier 2003, n° 00-46.416 ; Cass soc., 12 novembre 2008, n° 07-16.799. 232 Cass soc., 26 janvier 2005, RJS avril 2005, n° 346 ; Cass soc., 8 mars 2005, RJS mai 2005, n° 484 ; Cass soc., 31 mai 2005, RJS septembre 2005, n° 807. 233 Cass soc., 6 novembre 1991, Société de nettoyage des villes, Bull. civ. V, n°473, p. 194, op. cit. . 234 CJCE, 11 mars 1997, Ayse Süzen, aff. C 13/95, op. cit. 235 E. SAGALOVITSCH, « Les obligations de reprise du personnel dans le droit des marchés publics et des délégations de service public », BJCP n°28, p. 175, op. cit. 236 Cass. Ass. Plén. 16 mars 1990, op. cit. 237 Voir par exemple, Cass soc., 24 octobre 1989, SDE, req. n°84-44476, à propos du refus de la Chambre sociale de la Cour de Cassation de faire application de l’article L.122-12 entre l’ancien et le nouveau titulaire du marché ayant pour objet le transport en ambulance de malades pour le compte du Centre hospitalier intercommunal de Montfermeil, en raison de l’absence de l’existence d’un lien de droit entre les deux employeurs successifs, cité par E. SAGALOVITSCH, « Les obligations de reprise du personnel dans le droit des marchés publics et des délégations de service public », BJCP n°28, p. 175. 238 Cass soc., 6 novembre 1991, op. cit ; Cass soc., 21 juillet 1993, n° 91-43.543 ; Cass soc., 21 novembre 2000, pourvoi n° 98-45.837.
70
continuité des emplois et des conditions d'exploitation239. Tout dépend donc des conditions du
changement. D'un cas d'espèce à l'autre, la conclusion pourra être différente.
WV !4:*@==;6A@5634*A6EA34?5@4A68:*?:;34*;@*4@57E:*97*<@EAG8*
Des plus rares en matière de marchés publics de travaux et sans objet en matière de marchés
publics de fournitures (a), l’application de l’article L. 1224-1 du code du travail peut en revanche se
révéler décisive en matière de marchés publics de services (b).
@R !4:* @==;6A@5634* 9:?* =;7?* E@E:?* :4* <@56aE:* 9:* <@EAG8?* =7B;6A?* 9:*5E@>@7Z*
Contrats par nature limités dans leur objet et leur durée. Absence de continuité et
d’identité d’activité. Les marchés publics de travaux sont, au terme de l’article 3 du code des
marchés publics, « les marchés conclus avec des entrepreneurs, qui ont pour objet soit l'exécution,
soit conjointement la conception et l'exécution d'un ouvrage ou de travaux de bâtiment ou de génie
civil répondant à des besoins précisés par le pouvoir adjudicateur qui en exerce la maîtrise
d'ouvrage. Un ouvrage est le résultat d'un ensemble de travaux de bâtiment ou de génie civil destiné
à remplir par lui-même une fonction économique ou technique »240. Ils répondent donc par nature à
un besoin spécifique de la personne publique portant sur un ouvrage déterminé et ont vocation à
s’inscrire dans un contexte particulier, limité dans son objet et sa durée. La notion de continuité et
d’identité d’activité, qui sous-tend l’application des dispositions de l’article L.1224-1, semble dès
lors faire défaut pour cette catégorie de marchés publics241. La rareté des recours contentieux portés
devant les juridictions sociales en est une preuve manifeste : le marché public de travaux ne soulève
que très marginalement la question du transfert des contrats de travail. Les seuls cas examinés par les
juridictions concernent ainsi la succession d’entreprises dans l’exécution d’un même marché public
de travaux, hypothèse rare en pratique puisque limitée aux défaillances d’un entrepreneur auquel
succède un nouvel entrepreneur. Or, dans un arrêt en date du 19 septembre 1995 concernant ce type
d’hypothèse, la Cour de justice des communautés européennes a écarté l’application des dispositions
de la directive 77/187/CE sur le maintien des droits des travailleurs. La question préjudicielle
soulevée par les juridictions sociales allemandes portait sur le point de savoir si la reprise, en vue de
terminer, avec l’autorisation du maître de l’ouvrage, un chantier commencé par une autre entreprise,
de deux apprentis et d’un employé ainsi que du matériel qui y avaient été affectés, constituait un
transfert d’entreprise, d’établissement ou d’une partie d’établissement au sens de l’article 1er du
239 Cass soc., 9 février 1994, Bull. Civ. V, n° 47 ; Cass soc., 18 juillet 2000, pourvoi n° 99-13.976. 240 Article 1, III, du code des marchés publics, Décret n° 2006-975 du 1er août 2006 portant code des marchés publics 241 E. SAGALOVITSCH, « Les obligations de reprise du personnel dans le droit des marchés publics et des délégations de service public », BJCP n°28, p. 175, op. cit.
71
paragraphe 1 de la directive 77/187/CE242. En l’espèce, le chantier en cause, qui concernait la
construction d’une cantine, avait été commencé par une entreprise qui, en cours de contrat, avait
confié à une nouvelle entreprise, avec l’accord du maître de l’ouvrage, le soin de terminer les
travaux. Le projet fut donc achevé par la nouvelle entreprise, avec le matériel et le personnel de
l’entreprise initialement titulaire du contrat.
Transfert d’une entité économique autonome et exigence de stabilité de l’activité exercée.
Dans cette affaire, l’avocat général Cosmas avait conclu à l’application de la directive au motif que
le transfert du marché qui impliquait le transfert d’éléments matériels et deux apprentis et un
employé avait engendré « une concrétisation de la relation de travail des travailleurs concernés
dans le cadre des travaux cédés243 ». Le raisonnement développé par l’avocat général reposait sur
une interprétation volontairement large de la notion d’entité économique, se fondant sur la finalité
sociale de la directive et consistant à rechercher si le transfert s’est concrétisé sur le plan
organisationnel. Selon lui, dès lors que peut être démontrée l’autonomie organisationnelle d’une
activité, même isolée et limitée dans le temps, les salariés dont la relation de travail se rattache
organiquement à l’exercice de l’activité concrète jouissent de la protection offerte par la directive. La
Cour n’a pas retenu ce raisonnement et a, au contraire, considéré que « le transfert doit porter sur
une entité organisée de manière stable et dont l'activité ne se borne pas à l'exécution d'un ouvrage
déterminé. Est étrangère à cette hypothèse la situation d’une entreprise qui transfère à une autre
entreprise l’un de ses chantiers en vue de son achèvement. Un tel transfert ne pourrait relever de la
directive que s'il s’accompagnait du transfert d'un ensemble organisé d'éléments permettant la
poursuite des activités ou de certaines activités de l'entreprise cédante de manière stable. Tel n’est
pas le cas lorsque, comme en l’espèce au principal, cette dernière entreprise se limite à mettre à la
disposition du nouvel entrepreneur certains travailleurs et du matériel destinés à assurer la
réalisation des travaux en cause 244». Le critère de stabilité de l’entité économique est donc placé au
cœur du raisonnement de la Cour pour l’application des dispositions protectrices de l’article 1er de la
directive 77/187/CE. Non seulement l’entité économique doit être reprise ou poursuivie avec les
mêmes activités économiques ou des activités analogues, mais elle doit aussi permettre une
exploitation durable des activités concernées245. La position adoptée par la CJCE en matière de
transferts des contrats de travail dans le cadre de marchés publics de travaux se justifie d’autant
mieux qu’elle apparaît en parfaite en adéquation avec les notions de marchés de travaux développées
tant au niveau communautaire que national. La définition des marchés publics de travaux donnée par
le troisième alinéa de l’article 1er du code des marchés publics formalise ainsi une approche bien
242 CJCE, 19 septembre 1995, Ryggard, aff. C-48/94, Rec. p. I-2745, point n°14, JCP 1995, p. 1270, op. cit. 243 G. COSMAS, concl. sur l’arrêt précité. 244 Ibid., n°20 à 22. 245 L. FELTZER, Transfert conventionnel d’entreprises, Coll. Etudes pratiques de droit social, Ed. Kluwer, 2006, p. 60.
72
établie par la Haute juridiction du Luxembourg246 et les juridictions nationales247, selon laquelle il y a
opération de travaux lorsque le maître d'ouvrage prend la décision de mettre en œuvre, dans une
période de temps et un périmètre limité, un ensemble de travaux caractérisé par son unité
fonctionnelle, technique ou économique248. Chaque opération de travaux a donc sa propre identité249,
organisée autour d’un projet spécifique, et n’a pas vocation à perdurer dans le temps ou être
« conservée » pour reprendre les termes de la cour de justice des communautés européennes.
BR !4:*@==;6A@5634*98A6?6>:*9@4?*A:E5@64?*<@EAG8?*=7B;6A?*9:*?:E>6A:?*
« Marchés conclus avec des prestataires de services qui ont pour objet la réalisation de
prestations de services »250, les marchés publics de service représentent, à n’en pas douter, la
catégorie de marchés qui appelle le plus de commentaires dans le cadre de la présente étude.
En effet, alors que les marchés de travaux ou de fournitures se caractérisent par leur nature
ponctuelle et éphémère, les marchés de services sont davantage susceptibles de s’inscrire dans une
certaine permanence. La plupart des besoins en service des personnes publiques se caractérisent
d’ailleurs par leur récurrence, accentuée encore par la durée des contrats nécessairement limitée pour
assurer une remise en concurrence fréquente. Ce phénomène de récurrence se vérifie d’autant plus
que de nombreux marchés de services passés par des personnes publiques s’inscrivent dans une
politique d’externalisation des compétences. Le besoin est donc permanent, puisqu’inhérent à la
personne publique, mais constamment renouvelé en raison de l’impératif concurrentiel posé par le
droit communautaire.
Dans cette perspective, la problématique du transfert des contrats de travail peut se poser en
terme accru, eu égard à l’objet même des contrats de marchés publics de service, qui peut porter sur
un service public délégué au même titre qu’un contrat de délégation de service public. Il convient en
effet ici de replacer la problématique dans son contexte, celui de la qualification juridique des
contrats administratifs en droit interne, et plus particulièrement celui de la distinction entre marchés
publics et délégations de service public. Ces deux contrats, qui recouvrent a priori des objets et des
finalités différentes, ne reposent parfois que sur une différence infime, tenant simplement dans le
mode de rémunération du cocontractant, critère décisif retenu par la jurisprudence administrative
pour déterminer la qualification du contrat depuis l'arrêt du Conseil d'État du 15 avril 1996 Préfet des
246 CJCE, 5 octobre 2000, Comm. CE c/ République française, aff. C-16/98, Rec. CJCE, p. I-665, à propos d'une série de 37 avis publiés par un Syndicat départemental d'électrification pour l'attribution de marchés portant sur des travaux d'électrification ou d'éclairage public, à réaliser au cours d'une période triennale 247 CE Sect., 26 juillet 1991, Commune Sainte-Marie de la Réunion, Rec. p. 302, RFDA 1991, p. 966, concl. H. LEGAL, AJDA 1991, p. 693, chron. C. MAUGUE et R. SCHWARTZ ; CE, 26 septembre 1994, Préfet d'Eure-et-Loir, req. n° 122759, inédit ; CE, 8 février 1999, Syndicat intercommunal eaux Gâtine, req. n° 156333, inédit ; CE, 8 février 1999, Préfet Seine-et-Marne c/ EPA marne, req. n° 150919, inédit. 248 V. HAÏM, « Marchés fractionnés – Marchés à bons de commande », J.-Cl. Contrats et Marchés Publics, Fasc. 67-10, 2012, n°10. 249 CJCE, 11 mars 1997, Ayse Süzen, aff. C 13/95, op. cit., point n°15. 250 Article 1er du code des marchés publics.
73
Bouches-du-Rhône c/ Commune de Lambesc251 et dont, on l’imagine, le bien-fondé a pu être discuté
en doctrine252. Certaines activités de service public peuvent ainsi être confiées à un tiers par une
personne publique dans le cadre d’une délégation de service public, mais également dans le cadre
d’un marché public de service253. Tout dépendra donc du mécanisme financier mis en place
contractuellement : à une rémunération « substantiellement liée aux résultats d'exploitation du
service » et un risque d'exploitation assumé par le cocontractant254 correspondra un contrat de
délégation de service public255 ; à une rémunération fixe consistant dans le paiement d’un prix
notamment en raison de l’absence d’aléa correspondra un marché public de service256.
Notre propos n’est pas ici de revenir sur le débat quant la pertinence du critère financier dans
la qualification des contrats et la dualité de procédure de passation qui en découle257, mais bien de
mettre en lumière combien la problématique du transfert des personnels concerne les marchés
publics de service autant qu’elle intéresse les délégations de service public. Le recours à
l’externalisation d’activités de service dans le cadre de marchés publics, loin d’être un
épiphénomène, concerne ainsi de nombreux secteurs d’activités où, eu égard à l’importance de la
main d’œuvre dans l’exercice même de l’activité, la problématique sociale engendrée par le
renouvellement de contrat revêt un enjeu majeur. Prestations de sûreté et de sécurité dans les
aéroports, de restauration dans les établissements scolaires ou hospitaliers258, de nettoyage en tout
lieu public, etc., sont autant d’activités exercées dans le cadre de marchés publics de service et
susceptibles de recevoir application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail. La
distinction entre les secteurs qui reposent ou non essentiellement sur la main-d'œuvre est ici
primordiale. Ainsi, « dans la mesure où, dans certains secteurs dans lesquels l'activité repose
essentiellement sur la main-d'œuvre, une collectivité de travailleurs que réunit durablement une
activité commune peut correspondre à une entité économique, force est d'admettre qu'une telle entité
est susceptible de maintenir son identité par-delà son transfert quand le nouveau chef d'entreprise ne
251 CE, 15 avril 1996, Préfet des Bouches du Rhône, Rec. 1996, p. 137, concl. Ch. CHANTEPY ; DA.1996, comm. 355, RFDA 1996, p. 611 et p. 714 ; AJDA 1996, p. 729 et p. 806, CJEG 1996, p. 267 et p. 270. 252 E. DELACOUR, La notion de convention de délégation de service public, Th. Paris 2, 1997, vol. II, p. 494 et s. 253 TA Toulouse, 11 juillet 2002, Société méridionale des eaux c./ Commune de Balma, BJCP 2003, p. 36, concl. D. ZUPAN, obs. R. SCHWARTZ, concernant la possibilité qu'un contrat ayant pour objet la gestion d'un service public puisse être soit un marché public, soit une DSP. Dans de telles hypothèses, le contrat a pu recevoir la dénomination de « marché public de gestion déléguée » (N. SYMCHOWICZ, « La notion de délégation de service public, critique des fondements de la jurisprudence « Préfet des Bouches-du-Rhône », AJDA 1998, p. 195) ou de « marché de service public (D. MOREAU, « Marchés de services publics ; identification d'une catégorie de marchés à part », CP-ACCP n° 32/2004, p. 66). 254 CE, 5 juin 2009, Société Avenance Enseignement et Santé, Rec. p. 826, AJDA 2009, p. 1129. 255 Selon l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales255, « une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. Le délégataire peut être chargé de construire des ouvrages ou d'acquérir des biens nécessaires au service » ; CE, 7 novembre 2008, Département de la Vendée, Rec. p. 805, C. et MP. 2008, comm. 296, note G. ECKERT ; AJDA 2008, p. 2454, note L. RICHER.. 256 L’article 1er-I du code des marchés publics dispose que « les marchés publics sont les contrats conclus à titre onéreux entre les pouvoirs adjudicateurs définis à l'article 2 et des opérateurs économiques publics ou privés, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services ». 257 N. SYMCHOWICZ, op. cit.. 258 L. PECAUT – RIVOLIER, « Chronique annuelle de droit du travail », RJEP n°675, mai 2010, chron. 2.
74
se contente pas de poursuivre l'activité en cause, mais reprend également une partie essentielle, en
termes de nombre et de compétences, des effectifs que son prédécesseur affectait spécialement à
cette tâche »259 .
XV !4:*@==;6A@5634*A6EA34?5@4A68:*?:;34*;:*A345:Z5:*9:*E:A37E?*@7*<@EAG8*=7B;6A*
Variable selon l’objet même du contrat de marché public, l’application des dispositions de
l’article L. 1224-1 diffère également sensiblement selon le contexte dans lequel s’inscrit le recours à
ce mécanisme contractuel par la personne publique. Selon que l’attribution du marché au prestataire
fera suite à un précédent contrat (b) ou à l’exécution antérieure de l’activité par la personne publique
elle-même (a), l’appréciation de l’application du L. 1224-1 sera différente.
@R /@*A34A;7?634*9074*<@EAG8*Y* ;@*?765:*9074:*98A6?634*90:Z5:E4@;6?@5634*9:*;0@A56>658*=@E*;@*=:E?344:*=7B;6C7:*
L'externalisation, qui peut être définie comme l'opération par laquelle une personne publique
confie à un opérateur extérieur une activité ou un service qu'elle prend normalement elle-même en
charge, consiste donc pour une personne publique à confier à un tiers une partie d'une mission plus
globale afin de pouvoir se « recentrer » son activité originelle, son cœur de métier260. D’un mode
d’organisation interne, la personne publique se tourne alors vers un opérateur économique spécialisé,
dédié à la gestion d’une activité délimitée. Une telle mutation n’est pas des moindres pour la
personne publique, ne serait-ce qu’au plan purement organisationnel. Sa confrontation à l’application
des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail implique en tout état de cause une
appréciation des plus circonstanciées : il convient, préalable indispensable, que l’activité externalisée
puisse être assimilée à un « ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels
permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre » ; il faut encore que
cet ensemble conserve son identité à l’occasion du changement de gestionnaire.
Il apparaît que la jurisprudence de la chambre sociale de la cour de cassation, et par suite
celle de la cour de justice des communautés européenne qui s’y est ralliée261, a considérablement
259 CJCE, 11 mars 1997, Ayse Süzen, op.cit, point 21 ; Voir également : CJCE 24 janvier 2002, Temco Service Industries, aff. C 51/00, Rec. CJCE 2002, p. 969 ; RJS avril 2002, n° 511, concernant une activité de nettoyage de locaux. 260 P. JOXE, L'efficacité de l'Etat in La France du nouveau siècle, PUF, 2002. 261 Le juge communautaire affirme à présent que « peut entrer dans le champ d'application de la directive 77/187 une situation dans laquelle un donneur d'ouvrage, qui avait confié le nettoyage de ses locaux à un premier entrepreneur, résilie le contrat qui le liait à celui-ci et conclut, en vue de l'exécution de travaux similaires, un nouveau contrat avec un second entrepreneur » : CJCE, 10 déc. 1998, aff. C 127/96, C 229/96 et C 74/97 ; voir dans le même sens : CJCE, 24 janv. 2002, aff. C 51/00, Temco Service Industries, Rec. CJCE 2, p. I-969, RJS avril 2002, n° 511 ou encore : CJCE, 10 décembre 1998, aff. C 173/96 et C 247/96, à propos de la « situation dans laquelle un organisme public, qui avait concédé son service d'aide à domicile auprès de personnes défavorisées ou attribué le marché de surveillance de ses locaux à une première entreprise, décide, à l'échéance ou après résiliation du contrat qui le liait à celle-ci, de concéder ce service ou d'attribuer ce marché à une seconde entreprise, pour autant que l'opération s'accompagne du transfert d'une entité économique entre les deux entreprises » .
75
évolué. La chambre sociale considérait ainsi par le passé que l'externalisation d'une activité gérée
auparavant de manière directe ne tombait pas, à elle seule, sous l'emprise de l’article L. 1224-1 du
code du travail à défaut de transfert d'une entité économique autonome. Pour preuve, la seule
conclusion d'un contrat d'entreprise avec une société de nettoyage n'emportait pas modification dans
la situation juridique de l'employeur au sens de l'article L. 122-12, alinéa 2 du code du travail262 en
l’absence, selon l’interprétation de la chambre sociale, de transfert d'une entité économique ayant
conservé son identité dans la mesure où la prestation de nettoyage dévolue par marché « ne
constituait pas à elle seule un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou
incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre »263.
Comme l’expliquait le Professeur Morvan264, l'externalisation d'une activité n'emportait pas
application de l'article L. 1224-1 dès lors que le service transféré n’était considéré que comme un
« démembrement des services centraux » de l'entreprise, dépourvu d'une organisation propre et de
moyens – en personnel notamment – spécifiquement affectés à la poursuite d'une finalité
économique propre265.
Une telle interprétation a peu à peu disparu. La chambre sociale assimile désormais
l’exercice d’une activité « accessoire » à une activité principale en une entité économique autonome
au sens de la directive 2001/23/CE de sorte que la seule externalisation de cette activité secondaire
peut emporter transferts des contrats de travail qui y sont attachés, au même titre que l’activité
principale. C’est ainsi que le transfert du service de restauration d'un établissement de santé peut
aujourd’hui être soumis aux dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail. Par un arrêt en date
du 27 mai 2009266, la chambre sociale de la cour de cassation a en effet opéré un revirement de
jurisprudence aux fins de se conformer à la position retenue par cour de justice des communautés
européennes267 selon laquelle la directive 2001/23/CE du 12 mars 2001 s'applique au transfert d'une
entité intégrée au sein d'un établissement de santé, dès lors que le transfert inclut d'importants
éléments d'actif corporels précédemment utilisés par l'ancienne entité. Alors qu’elle considérait
traditionnellement que les différents services d'un établissement de santé participaient tous à la prise
en charge globale des malades, et qu'aucun d'entre eux ne pouvait donc constituer une entité
économique autonome268, elle considère désormais, après avoir constaté, au cas d’espèce, que
l’entreprise bénéficiait dans le cadre de l'externalisation du matériel du centre hospitalier, de la mise
262 Cass. soc., 9 février 1994, Bull. civ. V, n° 47, RJS 1994, n° 225 263 Cass. soc., 18 décembre 2000, Bull. civ. V, n° 423 264 P. MORVAN, « TRANSFERT D'ENTREPRISE. – Domaine », J.-Cl. Travail Ttraité, Fasc. 19-50, n°29. 265 Cass. soc., 18 juillet 2000, Dr. soc. 2000, p. 845, note G. COUTURIER ; Semaine sociale Lamy 31 juillet 2000, n° 992, p. 5, chr. B. BOUBLI ; Semaine sociale Lamy 25 septembre 2000, n° 996, p. 7, chr. P.-H. ANTONMATEI ; Semaine sociale Lamy 16 octobre 2000, n° 999, p. 7, chr. Ph. Waquet, approuvant CA Nîmes, 14 mai 1998, RJS 1998, n° 1179 ; JCP E 1998, p. 1635, note P.-H. ANTONMATEI ; Semaine sociale Lamy, 22 juin 1998, n° 892, p. 5, note E. PAOLINI ; Cass. soc., 24 octobre 2000, Bull. civ. V, n° 342 ; CA Paris, 13 sept. 2000, D. 2001, inf. rap. p. 267, sur l'externalisation de prestations techniques ou administratives très diverses, indissociables du fonctionnement général de l'entreprise et sans finalité économique propre. 266 Cass. soc., 27 mai 2009, Bull. civ. V, n° 138. 267 CJCE, 20 novembre 2003, Abler, aff. C 340/01, RJS avril 2004, n° 474. 268 Cass. soc., 24 octobre 2000, Bull. civ. V, n° 342 p. 263.
76
à disposition d'un personnel spécialisé de l'hôpital, que « le personnel chargé de ces tâches, les
locaux et les éléments d'exploitation, formaient une entité économique autonome, qui avait conservé
son identité » à la suite du transfert de marché.
Il en résulte que l’application des dispositions légales de transfert aux agents affectés à une
activité de service public externalisée pour la première fois par la personne publique est, au plan des
principe, désormais envisageable si les missions confiées au nouveau prestataire sont assimilables,
par elles-mêmes, à une entité économique autonome. Relevons cependant qu’il existe en matière de
marchés publics une condition préalable essentielle à remplir pour pouvoir conduire à une telle
application, celle de la nature privée des agents à transférer. En conséquence, les dispositions de
l’article L. 1224-1 du code du travail ne semblent pouvoir être mises en jeu que dans l’hypothèse de
l’externalisation d’une activité de service public gérée par la personne publique dans le cadre d’une
régie personnalisée ou, et c’est là les principaux cas d’application en pratique, dans l’hypothèse
d’une externalisation d’une activité « accessoire » de service public industriel et commercial par un
délégataire de service public en charge d’une mission de service public « principale ». Nous pensons
ici notamment à toutes les activités de nettoyage ou de restauration rarement exercées directement
par les délégataires de service public eux-mêmes et externalisées dans le cadre de marchés, publics
ou privés269.
BR /:* E:437>:;;:<:45* 9074* <@EAG8* =7B;6A* A34[6@45* ;0:Z:EA6A:* 9074:*@A56>658*=7B;6C7:*Y*74*56:E?*
Le renouvellement se révèle a priori plus propice à l’application des dispositions de l’article
L. 1224-1 du code du travail. Selon nous, dès lors que l’activité publique en cause fait d’ores et déjà
l’objet d’une externalisation dans le cadre d’un précédent contrat, il paraît des plus probables que la
permanence de son identité – indispensable à la caractérisation d’une entité économique autonome –
soit assurée sous l’empire du nouveau contrat. En effet, sauf à ce que la personne publique délégante
ou pouvoir adjudicateur décide, à l’occasion du renouvellement du contrat, de modifier le périmètre
ou les modalités d’exercice de l’activité, la continuité de l’activité devraient pouvoir être caractérisée
et les dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail trouver à s’appliquer.
∴
Le droit de la commande publique s’est enrichi sous la plume du législateur de plusieurs
instruments contractuels, offrant aux personnes publiques un arsenal juridique sans précédent pour
mener à bien leurs projets. De par leur objet même, qui vise notamment à assurer la réalisation
d’équipements publics par des opérateurs privés qui en assument le financement et non à confier la
gestion d’une activité publique, ces contrats échappent en réalité à la problématique du sort des
269 Relevant du code des marchés publics ou de l’ordonnance du 6 juin 2005 suivant la nature du délégataire et l’objet de l’activité exercée.
77
personnels de la présente étude, qui ne semblent s’imposer à eux que dans des cas résolument
marginaux.
2* S* !4:* @==;6A@5634* 96[[6A6;:* 9@4?* ;:* A@9E:* 9:?* @75E:?* A345E@5?* 9:* ;@*A3<<@49:*=7B;6C7:*
Relativement fréquente en matière de délégations de service public et de marchés publics de
service public, l’application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail se révèle
manifestement hypothétique dans les contrats de partenariats (1) et tout aussi circonstanciée dans les
contrats d’occupation du domaine public (2).
UV !4:*@==;6A@5634*GI=35G856C7:*:4*<@56aE:*9:*A345E@5?*9:*=@E5:4@E6@5*
Introduit en droit interne par l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de
partenariat270 à la suite de l'adoption de la loi du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à
simplifier le droit271, dont l'article 38 habilitait le Gouvernement notamment « à créer de nouvelles
formes de contrats conclus par des personnes publiques ou des personnes privées chargées d'une
mission de service public pour la conception, la réalisation, la transformation, l'exploitation et le
financement d'équipements publics, ou la gestion et le financement des services, ou une combinaison
de ces différentes missions », le contrat de partenariat est devenu en seulement huit ans un instrument
privilégié d’externalisation d’activité publique par les collectivités publiques.
Il a pu être regretté272 à ce sujet que les évolutions législatives récentes concernant les
contrats de partenariat aient occulté la question sociale soulevée par cet instrument contractuel, ou
tout au moins qu’elles n’aient pas rappelé les conditions juridiques qui accompagnent l’affectation
des personnels poursuivant leur activité dans le cadre de la mission externalisée par contrat de
partenariat. Le silence observé par le législateur en la matière, loin de traduire une minimisation de la
problématique, s’explique aisément par la portée même des dispositions de l’article L.1224-1 et
suivants du code du travail qui sont, rappelons-le, d’ordre public et s’imposent à toute activité,
quelque soit sa nature ou son mode de dévolution. La résolution des questions sociales engendrées
par le recours au contrat de partenariat par une personne publique renvoie donc aux solutions
juridiques traditionnelles encadrant les activités publiques confiées à des opérateurs privés ou
publics, notamment en ce qui concerne la situation spécifique des agents publics.
Deux hypothèses sont alors envisageables : soit l’activité confiée au partenaire fait d’ores et
déjà l’objet d’un contrat de dévolution à un tiers – marché public de service ou délégation de service
270 Ordonnance modifiée n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat (J.O. du 19 Juin 2004, p.10994). 271 Loi n°2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit (J.O. du 3 Juillet 2003, p. 11192). 272 E. MARC, « Contrats de partenariat et personnels territoriaux : quelques repères pour le passage de la gestion publique à la gestion partenariale », Revue Lamy des coll. terr. octobre 2008, p. 89.
78
public – et il convient alors d’examiner suivant les critères classiques précédemment évoqués si les
éléments corporels et incorporels caractérisant l’existence d’une entité économique autonome sont
transférés vers le partenaire dans un cadre contractuel identique pour s’assurer de l’application de
l’article L. 1224-1du code du travail ; soit à l’inverse l’activité était jusqu’alors assurée en régie par
la personne publique cocontractante et il convient alors d’examiner la nature des agents affectés à
cette activité pour vérifier qu’ils sont des salariés de droit privé pouvant relever des dispositions de
l’article L. 1224-1 du code du travail avant de pouvoir, là-encore, identifier le transfert d’une entité
économique autonome en fonction des critères jurisprudentiels dégagés à cet égard273.
Au demeurant, la problématique sociale à l’égard des contrats de partenariat devrait
demeurer résiduelle, eu égard à la faible importance de la mission d’exploitation dans la qualification
du contrat de partenariat au regard du droit communautaire. S’il ressort effectivement des termes
combinés des articles 1 et 14 de l’ordonnance du 17 juin 2004 désormais codifié à l’article L. 1414-1
du code général des collectivités territoriales274 que le contrat de partenariat peut inclure une mission
d’exploitation, il convient cependant de préciser que cette circonstance n’est, d’une part, pas
systématique, d’autre part, pas essentielle au regard de l’économie globale du contrat. Précisons ainsi
qu’à l’origine qualifiés de contrats sui generis par le droit interne, les contrats de partenariat n’ont
pas tardé à recevoir, à l’instar des autres contrats de la commande publique, le qualification de
marchés publics de travaux au sens du droit communautaire dont il a pu être relever plus haut
l’absence d’application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail. Une telle
qualification a d’ailleurs été corroborée par l’analyse du Conseil d’Etat, amené à examiner la légalité
de l'ordonnance du 17 juin 2004, qui a ainsi précisé que « si les personnes publiques en cause sont
des pouvoirs adjudicateurs, compte tenu de leur montant et de leur objet, les contrats de partenariat,
qui ont vocation à être passés avec un ou plusieurs opérateurs économiques et en vertu desquels la
rémunération du cocontractant fait l'objet d'un paiement par la personne publique, constituent des
marchés publics [au sens du droit communautaire] »275.
Au surplus, la question du sort des contrats de travail des salariés de droit privé dans les
contrats de partenariat n’intéresse en tout état de cause que les évolutions d’activités conduisant à la
conclusion d’un tel contrat, compte tenu du caractère relativement récent de cette catégorie de
contrats et de leur durée relativement longue au regard de l’ampleur des missions confiées au
partenaire. Une telle situation devrait perdurer dans la mesure où le contrat de partenariat, en ce qu’il
revêt un caractère intrinsèquement dérogatoire de par la globalité des missions qu’il comprend, n’a 273 Voir supra, p. 74. 274 « Le contrat de partenariat est un contrat administratif par lequel l'État ou un établissement public de l'État [une collectivité territoriale ou un établissement public local] confie à un tiers, pour une période déterminée en fonction de la durée d'amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues, une mission globale ayant pour objet la construction ou la transformation, l'entretien, la maintenance, l'exploitation ou la gestion d'ouvrages, d'équipements ou de biens immatériels nécessaires au service public, ainsi que tout ou partie de leur financement à l'exception de toute participation au capital ». 275 CE, 29 octobre 2004, M. Sueur et a., Rec. p. 392 ; C. ET MP. 2004, comm. 249 ; RFDA 2004, p. 1103, concl. D. CASAS ; AJDA 2004, p. 2384, chron. Cl. LANDAIS et F. LENICA.
79
pas vocation à être reconduit sur un même ouvrage. Une fois l’ouvrage construit, seule la mission
d’exploitation devra faire l’objet d’un renouvellement contractuel dans le cadre des mécanismes
classiques de délégation de service public, voire de marchés publics de service.
WV !4:*@==;6A@5634* E8?697:;;:*9@4?* ;:?* A345E@5?*903AA7=@5634*97*93<@64:*=7B;6A*
A l’inverse des autres contrats publics, la problématique de l’application des dispositions de
l’article L. 1224-1 du code du travail ne saurait recevoir en matière de conventions d’occupation du
domaine public une réponse unanime, dans un sens positif comme négatif. Chaque contrat appelle sa
propre réponse, en fonction des circonstances dans lesquelles la succession – par définition fréquente
au regard du caractère précaire et révocable de ce type de convention – d’occupants du domaine
public intervient. Tout dépendra ainsi essentiellement de savoir si l’activité exercée sur l’emprise du
domaine public privativement dédiée à un occupant pour une durée limitée perdure après
l’attribution à un nouvel occupant. Rien n’est moins sûr tant l’objet de l’occupation peut varier selon
les titulaires de contrats d’occupation du domaine public. Il convient en effet de prendre ici la mesure
de la différence fondamentale entre les conventions d’occupation du domaine public et les autres
contrats publics précédemment examinés, différence qui tient dans l’origine même de l’activité.
Ainsi, alors que dans le cadre des délégations de service public ou des marchés publics de service,
l’activité est définie par la personne publique qui décide d’en confier la gestion à un tiers, dans le
cadre des conventions d’occupation du domaine public l’activité est, dans la majeure partie des
hypothèses,276 déterminée par l’occupant lui-même, sous la réserve essentielle pour être autorisée par
la personne publique d’être compatible avec l’affectation à l’utilité publique du domaine public
concerné conformément aux dispositions de l’article L. 2121-1 du code général de la propriété des
personnes publiques. L’activité peut ainsi parfaitement ne pas survivre au changement de
cocontractants, soit que le nouveau titulaire de l’autorisation d’occupation du domaine public décide
de changer radicalement l’affectation des lieux, soit qu’il modifie sensiblement le mode
d’organisation et de gestion de l’activité de sorte que l’existence d’une entité économique autonome
ayant conservé son identité ne pourra être caractérisée. A chaque contrat correspondra alors une
réponse selon les mêmes critères précédemment évoqués et exigés par la jurisprudence
communautaire pour caractériser le transfert d’une entité économique autonome277.
276 Nous faisons ici référence aux utilisations privatives d’occupation du domaine public dites compatibles autorisées dans une volonté de valorisation du domaine public, et non bien évidemment aux autorisations conformes pour lesquelles la latitude pour modifier un tant soit peu l’activité est quasi inexistante pour la personne publique propriétaire du domaine public comme pour l’occupant. Par exemple une station carburant sur une aire d’autoroute ou sur une plateforme aéroportuaire. 277 Voir pour un exemple d’application : Cass. soc., 17 décembre 2008, pourvoi n° 07-42.839, F-D, Desvages c/ SA HFP Phenix, Inédit, note J.-Y. KERBOUC’H, « Effet d'un transfert partiel d'activités sur les mandats du salarié protégé », JCP S
n° 11, 10 Mars 2009, p. 1117 ; ou encore CA Pau, ch. soc., 31 Août 2004, PAYET / SARL CASA JUAN PEDRO, n° 02/02017.
80
Au demeurant, il convient de préciser que la personne publique ne peut se voir opposer les
dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail en cas de carence du titulaire d’une autorisation
du domaine public278, ou en l’absence de renouvellement de la convention d’occupation279, sauf à ce
qu’elle ait décidé de reprendre en régie l’activité exercée par ce dernier. La précision peut paraître
superfétatoire tant il paraît évident qu’aucun transfert d’activité ne peut, dans de telles hypothèses ,
être caractérisé. Les contentieux en la matière démontrent la nécessité d’un tel rappel.
∴
Si le transfert des salariés de droit privé dispose d’une assise légale particulièrement établie,
il ne saurait être appréhendé de ce point de vue unique. A l’instar du cadre juridique des salariés de
droit privé dans son ensemble, la continuité de l’emploi dans les activités publiques est largement
irriguée par les accords collectifs, conclus par les différentes branches d’activité. Les conventions
particulières occupent elles-aussi, notamment en matière d’évolutions d’activités publiques, une
place non négligeable. Le législateur s’est préoccupé dès 1928 du sort des personnels de droit privé
lors des mutations, nombreuses, de la vie de l’entreprise et s’est attaché à dégager des règles de
transfert assurant la pérennité du contrat de travail aux évolutions économiques et juridiques de
l’entreprise. La loi constitua ainsi l’instrument précurseur de la préservation des relations sociales
par l’édiction de l’article L.122-12, devenu L. 1224-4-1 du code du travail. Sa pertinence demeure,
comme en atteste la permanence de ses dispositions depuis près d’un siècle, dans un contexte
normatif d’habitude si propice aux modifications textuelles...
#$%&'()! *! +! ,$! &-.)/0$-&! 1$/! 2$-/())$3/! 1$! 1-('&! 2-'45! /6-! 3.! 7./$! 186)!
0()1$9$)&!%()4$)&'())$3!(6!%()&-.%&6$3**
En dépit d’une rédaction volontairement générique permettant d’embrasser une multitude de
« modification(s) dans la situation juridique de l’employeur » et d’une interprétation par les
juridictions communautaires et internes résolument extensive, l’article L. 1224-1 du code du travail
ne saurait offrir à lui seul de réponse à l’ensemble des acteurs souhaitant bénéficier d’un transfert des
contrats à l’occasion de l’évolution d’une activité publique, soit qu’il ne recouvre pas l’hypothèse en
jeu, soit encore qu’il n’y réponde que partiellement ou à l’inverse de manière trop globale. Dès lors,
se sont peu à peu développés, en parallèle du dispositif légal et à l’initiative des acteurs concernés
par la problématique sociale des transferts d’activités, un certain nombre d’instruments de transfert
des contrats de travail reposant sur un fondement conventionnel ou contractuel.
278 Cass. soc., 29 Avril 2009, pourvoi° 07-45.509, 07-45.566, Inédit. 279 TC, 18 juin 2007, Préfet de l'Isère c/ Université Joseph Fourier, Rec. p. 602, JCP S n°29, 17 juillet 2007, act. 356.
81
Mus par une ambition commune d’instaurer une alternative efficiente au dispositif translatif
légal (paragraphe 1), ces dispositifs diffèrent cependant sensiblement de ce dernier en ce qu’il
repose sur un fondement par essence contractuel et couvrent dès lors des champs d’intervention
différents (paragraphe 2).
,@E@\E@=G:* UR* * +:?* 96?=3?656[?* 96>:E?6[68?* C76* AG:EAG:45* Y* 64?5@7E:E* 74:*@;5:E4@56>:*:[[6A6:45:*@7*96?=3?656[*;8\@;**
Le droit social apparaît certainement comme l’une des matières juridiques où la pluralité des
sources normatives s’exprime avec le plus d’acuité. La problématique du sort des personnels de droit
privé à l’occasion d’une activité publique en est l’illustration manifeste. Plusieurs dispositifs
contractuels ont ainsi pris soin de l’envisager indépendamment du dispositif légal du code du travail.
Si la pertinence d’un traitement spécifique de la question sociale induite par le transfert
d’activité par les acteurs confrontés aux conditions restrictives de mise en jeu des dispositions de
l’article L. 1224-1 du code du travail se justifiait tant par une nécessité sociale qu’économique, sa
validité n’en était pas pour autant acquise. Fort heureusement, la chambre sociale s’est exprimée
favorablement à l’endroit de tels dispositifs, en admettant qu’il puisse être procédé à une application
volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail280 par les parties à un transfert d’activité,
consacrant ainsi la liberté d’envisager contractuellement le transfert des contrats de travail en dehors
du cadre légal.
Les partenaires sociaux n’ont pas manqué de saisir l’opportunité offerte par les juridictions
sociales en formalisant l’obligation de transfert des contrats de travail au sein des conventions
collectives par l’insertion de dispositifs dédiés, et ce tout particulièrement dans les secteurs
d’activités régulièrement et massivement concernés par la problématique de successions d’opérateurs
en matière d’activités publiques (A). Pertinent à l’échelle d’un secteur ou d’une branche d’activité, le
fondement contractuel se révèle assurément tout aussi approprié pour régler le sort des personnels de
manière bien plus circonstanciée au travers de conventions particulières (B).
-* S* /:?* A34>:45634?* A3;;:A56>:?H* 74* 3756;* E8A7EE:45* 9:* \:?5634* 97*5E@4?[:E5*9:?*A345E@5?*9:*5E@>@6;*9@4?*;:?*<@EAG8?*=7B;6A?*9:*?:E>6A:**
Accord conclu entre des employeurs ou une organisation patronale et un ou plusieurs
syndicats représentatifs de salariés en vue de déterminer les conditions d'emploi des travailleurs et
les garanties sociales qui y sont attachées, la convention collective a vocation à traiter l'ensemble des
problématiques sociales au profit de toutes les catégories professionnelles concernées. Dispositif à
280 Cass. soc. 17 mars 1993, Bull. civ. V, n° 88, RJS 1993, p. 231, n° 377, D. 1993, IR 94.
82
l’origine conçu pour compenser au niveau collectif l’inégalité inhérente au rapport individuel du
travail entre le salarié et l’employeur281, elle occupe incontestablement une place centrale en droit
social. La principale manifestation de cette vocation protectrice des conventions collectives réside
dans les avantages supplémentaires ou nouveaux octroyés par les accords collectifs par rapport aux
dispositions législatives. L'article L. 2254-1 du code du travail282 prévoit d’ailleurs, dans ces
hypothèses plus favorables, une application immédiate et impérative de la convention collective aux
rapports individuels de travail: les dispositions de la convention collective se substituent de plein
droit à celles, moins favorables, du contrat de travail et ne peuvent être écartées par la volonté des
parties tant que le contrat est en cours. Les règles posées par la convention collective peuvent donc
s’affranchir des règles de droit commun posées par le législateur et énoncées par le code du travail,
jugées peu adaptées aux salariés des secteurs d’activité concernés. Un véritable pouvoir normatif est
ainsi reconnu aux partenaires sociaux pour définir les règles applicables aux salariés de la branche
concernée.
La problématique de la continuité de l’emploi en cas d’évolutions dans la situation juridique
de l’entreprise n’échappe pas à la règle. La dualité des règles, légales et conventionnelles, apparaît
dans sa pleine mesure principalement dans des secteurs d’activité régulièrement confrontés à une
évolution des entités prestataires. Une attention particulière a ainsi été portée par certains secteurs
d’activités, particulièrement concernés par l’enjeu social d’évolutions d’activités publiques, et a
conduit à la mise en place de dispositifs conventionnels translatifs des contrats de travail en cas de
succession d’opérateurs. L’ambition de tels dispositifs conventionnels peut être double. Les
dispositifs conventionnels présentent avant tout un intérêt dans l’hypothèse d’une inapplicabilité des
règles légales en tentant de s’ériger en véritable alternative aux dispositions de l’article L.1224-1 du
code du travail pour opérer eux-mêmes le transfert (1). Ils n’en demeurent pas moins utiles dès lors
que les dispositions légales de l’article L.1224-1 du code du travail s’avèrent applicables, en
permettant une simplification bienvenue du transfert (2).
UV !4*64?5E7<:45*6496?=:4?@B;:*[@A:*Y*;@*=E8?3<=5634*9064@==;6A@B6;658*97*96?=3?656[* ;8\@;* 9345* ?37[[E:* \848E@;:<:45* ;:?* <@EAG8?* =7B;6A?* 9:*?:E>6A:*
Historiquement, l’émergence au milieu des années 1980 et jusqu’au milieu des années 1990
de dispositifs conventionnels de transfert des contrats de travail résulte d’une volonté des partenaires
sociaux d’assurer la stabilité de l’emploi en dépit des changements de prestataires fréquents dans
certains secteurs, en « contournant » l’inapplicabilité du dispositif légal par l’insertion de clauses de
transfert dans les conventions collectives applicables aux entreprises d’une même branche d’activité.
HIL
!X. CARSON, « La convention collective source de sujétions pour le salarié », JCP S. 2007, n° 1015. 282 Ancien article L. 135-2 du code du travail.
83
Le recours à l’instrument contractuel avait ainsi vocation à substituer au fondement légal, inopérant
dans de nombreuses situations pourtant sensibles en termes sociaux, un fondement conventionnel,
assis sur la volonté des partenaires sociaux des secteurs d’activités concernés.
Ce phénomène se vérifie principalement dans le domaine des prestations de service, les
marchés de prestations de service souffrant en effet d’une présomption d’inapplicabilité des
dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail tant devant les juridictions nationales que
communautaires. Cette présomption, non-irréfragable malgré certaines présentations en ce sens283,
fut notamment corroborée par plusieurs jugements déniant l’application des dispositions légales de
transfert dans des cas d’espèces intéressant en particulier des marchés de gardiennage ou de
nettoyage284. Plusieurs conventions collectives appréhendèrent donc à partir des années 1980 la
question du sort des personnels soulevée par le renouvellement des marchés en procédant par voie
d’avenants négociés par les partenaires sociaux.
Si l’établissement, dans le cadre de la présente étude, d’une liste exhaustive de ces
conventions collectives ne présenterait aucune pertinence, il pourra en revanche être dressé un
constat : les secteurs d’activité qui ont usé de la négociation collective en la matière sont sans nul
doute ceux qui se révèlent le plus fréquemment confrontés à la problématique du sort des personnels
soulevée par le renouvellement de contrats de prestation, eu égard à l’importance de la main d’œuvre
nécessaire à l’exercice de ce type d’activité. Entreprises de manutention ferroviaire, entreprises de
restauration collective, entreprises de nettoyage des locaux et de propreté, entreprises de prévention
et de sécurité, ou encore entreprises de traitement des déchets285, autant d’entités exerçant des
prestations de service au profit de personnes publiques dans le cadre de marchés publics de service,
démontrant s’il en était encore besoin, l’enjeu d’un fondement conventionnel pour assurer le transfert
de personnels de droit privé à l’occasion de l’évolution de gestion d’une activité publique prenant la
forme du renouvellement d’un contrat de marché public de service.
283 P. MORVAN, « Application conventionnelle de l’article L.122-12 et accord du salarié : plaidoyer pour un revirement », JCP S. n°49, 5 décembre 2006, p. 1964, op. cit. 284 Ainsi, par exemple, la résiliation par une société d'un contrat de prestation de services de gardiennage ensuite attribué à un autre prestataire n’a pas été considéré par les juridictions sociales comme entraînant la poursuite de l’activité de l’entreprise, en l'absence de transfert des moyens d'exploitation et d'entité économique conservant son identité dont l'activité est poursuivie ou reprise : Cass soc., 13 décembre 1995, Dr. soc. 1996, p. 429, obs. A. MAZEAUD ; RJS 1996, n° 99. Voir également pour un nouvel exemple d’hostilité des juridictions sociales à faire application des dispositions de l’article L. 1224- 1 du code du travail aux marchés de service : Cass soc., 26 septembre 1990, RJS 1990, n° 841 ; Cass soc., 16 novembre 1993, op.cit ; CA Paris, 24 mai 1995, RJS 1995, n° 1094 285 Voir respectivement : Avenant du 24 février 1986 à la convention collective nationale du personnel des entreprises de manutention ferroviaire du 6 janvier 1970 (A. extension, 13 mai 1986), dite convention « manuferro » (art. 15 ter) ; Avenant n° 3 du 26 février 1986 à la CCN du personnel des entreprises de restauration de collectivités du 20 juin 1983 (A. extension, 6 juin 1986) ; Avenant n° 1 à l'annexe VII du 29 mars 1990 de la CCN des entreprises de nettoyage de locaux (A. extension, 6 juin 1990, puis modifié et toujours en vigueur sous l'empire de la CCN des entreprises de propreté du 1er juillet 1994 ; accord du 16 juin 1987 modifiant la convention collective régionale (région parisienne) concernant le personnel de l'industrie, de la manutention et du nettoyage sur les aéroports ouverts à la circulation publique du 1er octobre 1985 (A. extension, 12 nov. 1987) (art. 38 bis) ; Avenant du 18 octobre 1995 à la CCN des entreprises de prévention et de sécurité (A. extension, 29 avr. 1996), auquel a succédé un nouvel accord du 5 mars 2002 (A. extension, 10 déc. 2002)] ; Avenant n° 44 du 12 juillet 1993 à la CCN des activités du déchet du 25 mars 1957 (A. extension, 18 nov. 1993 modifié A. 21 févr. 1994 pour exclure les entreprises d'assainissement), remplacé en dernier lieu par l'accord n° 15 du 13 décembre 2005 (A. extension, 19 juin 2006) sous l'empire de la nouvelle CCN du 11 mai 2000.
84
Permettant de régler la situation de l’ensemble des personnels d’une entreprise dès lors que
celle-ci exerce à titre principal ou, du moins, dans un centre d'activité autonome, la profession visée
par l'accord286, la convention collective présentait un réel intérêt alternatif aux dispositions légales
de transfert. Force est de constater cependant que l’interprétation de la valeur juridique des
dispositifs conventionnels par les juridictions sociales a sensiblement atténué la portée translative de
ces dispositifs, conventionnels comme contractuels287 en conditionnant l’effectivité du transfert à
l’accord du salarié concerné contrairement au mécanisme légal s’imposant sans formalité à
l’ensemble des acteurs en raison de son caractère d’ordre public288.
∴
Si l’ambition première des conventions collectives présentant un dispositif conventionnel de
transfert des contrats de travail est bien celle d’élaborer un mécanisme alternatif à la non-application
des dispositions du code du travail, la portée simplificatrice de ce type de dispositif n’est pas pour
autant étranger à leur multiplication.
WV !4*64?5E7<:45*>6?@45*Y*[@A6;65:E*;:?*5E@4?[:E5?*:4*A@?*90@==;6A@B6;658*9:?*96?=3?65634?*9:*;0@E56A;:*/R*UWW^LU*97*A39:*97*5E@>@6;*
L’article L.1224-1 du code du travail adopte une rédaction résolument générique visant à
intégrer la pluralité des hypothèses de modifications qu’une entreprise est susceptible de connaître
tout au long de sa vie économique : vente, fusion, scission, etc. Une telle énumération s’attache à
prendre en compte les principales modifications classiquement rencontrées par les opérateurs
économiques qui sont les premiers concernés par ces dispositions, sans être nullement exhaustive.
D’autant qu’il ne suffit pas que la modification affectant l’activité figure dans cette liste pour se voir
appliquer les dispositions translatives des contrats de travail, il faut encore et surtout qu’elle réponde
aux exigences constamment rappelées par les juridictions sociales internes et le juge communautaire
tenant à l’existence d’une entité économique autonome conservant son identité à l’issue du transfert
d’activité… Dès lors, la rédaction des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail
s’apparente davantage à une « grille de lecture » des modifications juridiques d’entreprises
susceptibles d’entraîner un transfert des contrats de travail plutôt qu’à une identification précise des
modifications entraînant de plein droit leur transfert. Au demeurant, chaque évolution est susceptible
d’interprétation et demeure soumise, en cas de litige, à l’appréciation in concreto des juridictions
286 La convention collective est en effet déterminée par l'activité réelle de l'entreprise et non par les mentions contenues dans les statuts de la personne morale dont elle dépend. 287 Le raisonnement opéré à l’égard des conventions collectives est, comme on le verra dans la deuxième partie de la présente étude, parfaitement transposable à l’endroit des accords contractuels au regard de la théorie de l’absence d’effet relatif des contrats envers les tiers. 288 Voir infra, partie II.
85
sociales, dont la richesse et l’abondance de la jurisprudence concernant la notion d’entité
économique autonome telle que visée par l’article L.1224-1 du code du travail témoignent de
l’importance de l’analyse prétorienne en matière d’application du dispositif légal de translation des
contrats de travail.
Si elle fait l’objet d’une lecture pragmatique par le juge, puisqu’elle implique une
appréciation selon les circonstances de chaque opération impliquant une modification de l’entreprise,
la rédaction de l’article L.1224-1 du code du travail ne saurait en revanche être pleinement
satisfaisante pour les opérateurs économiques régulièrement confrontés de manière récurrente à des
évolutions de gestion. La volonté d’anticiper les conséquences de modifications des structures,
notamment dans les secteurs de prestations de service, a ainsi motivé les partenaires sociaux de ces
secteurs à déterminer eux-mêmes les règles de transfert des contrats de travail. Les dispositifs
conventionnels organisant le transfert des contrats de travail poursuivent dans cette perspective une
finalité simplificatrice : faciliter la succession de prestataires en précisant par avance que les contrats
de travail attachés à l’activité concernée accompagnent l’évolution de celle-ci vers un nouveau
prestataire. Les entreprises parties à la convention collective qui prévoit un tel dispositif
conventionnel s’accordent ainsi pour reprendre les contrats de travail des salariés, sans avoir à
procéder à l’analyse de l’applicabilité du dispositif légal à l’opération qui les concerne.
Utile à l’égard des opérateurs économiques eux-mêmes, la convention collective présente, en
outre, une dimension pédagogique essentielle pour la gestion du climat social de l’opération, en
favorisant la connaissance des règles de transfert par les salariés. La convention collective, par
essence propre à chaque branche d’activité, représente en effet la norme sociale la plus « proche » du
salarié, que ce dernier s’approprie souvent bien davantage que le code du travail289, par définition
général et impersonnel. La circonstance que le transfert du contrat de travail trouve directement son
fondement dans la convention collective, ou plus précisément avec son soutien, présente ainsi un
avantage certain pour mener à bien la succession d’entités gestionnaires ou prestataires d’activités
publiques et le transfert des contrats de travail qui en découle.
∴
Sans qu’elle se caractérise par une telle récurrence, la question du transfert de personnels est,
par principe, susceptible de se poser à tout type de secteur d’activité, avec la même acuité, sans
qu’au préalable les partenaires sociaux ne l’aient véritablement envisagé et donc anticipé. L’intérêt
de régler pour les seules circonstances de l’espèce cette question peut alors se présenter. Dans cette
289 L’appropriation de la convention collective par le salarié se trouve grandement facilitée par l’obligation instaurée par la plupart des conventions collectives à la charge de l’employeur de communiquer au salarié, au moment de son embauche, la convention collective dont il relève. En outre, aux termes de l’article R. 3243-1 du code du travail relatif au bulletin de paie, interprété à la lumière de la directive européenne n°91/533/CEE du Conseil, du 14 octobre 1991, l'employeur est tenu de porter à la connaissance du salarié la convention collective applicable.
86
perspective, l’instrument contractuel peut se révéler un instrument des plus pertinents pour organiser
au cas par cas le transfert des personnels à l’occasion du transfert d’une activité publique.
N* S* /:?* A34>:45634?* =@E56A7;6aE:?H* 74* 3756;* .1! :(%* 9:* \:?5634* 9:?*5E@4?[:E5?*9:*=:E?344:;*9:*9E365*=E6>8**
La convention collective n'épuise pas le genre des dispositifs de transfert des contrats de
travail imaginés par les acteurs d’évolutions de gestion d’activités publiques en marge des
dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail. Elle n'en est que la « variété la plus
répandue »290 et la plus connue. Le recours à la voie contractuelle pour organiser le transfert des
contrats de travail, et assurer par là même la préservation de la stabilité de l’emploi dans le cadre
d’activités publiques peut ainsi être le fait des opérateurs économiques eux-mêmes (1), directement
intéressés au transfert des salariés, au travers des accords très classiques de cession d’entreprise,
mais également le fait de la personne publique qui cherche alors à maîtriser les conséquences
sociales de sa politique de gestion des activités dont elle a la compétence (2).
UV /0@==;6A@5634*>3;345@6E:*9:*;0@E56A;:*/RUWW^LU*97*A39:*97*5E@>@6;*:4*A37E?*90:Z8A75634*9074*A345E@5*=7B;6A*=@E*;0645:E>:45634*9074*@A5:*9:*A:??634*90:45E:=E6?:*
La Cour de cassation admet, de manière générale, que les parties à la cession d’une
entreprise puissent convenir d'une application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du
travail291. L'existence de cet accord se déduit de l'examen de la volonté des contractants, notamment
d'une clause du contrat aux termes de laquelle le cessionnaire « fera son affaire des problèmes de
personnel ». Cette faculté, reconnue sans difficulté par les juridictions sociales à l’égard des
opérateurs économiques intervenant dans la sphère économique « traditionnelle », l’est-elle
également pour les cessions d’entreprises dans le secteur économique public, où les acteurs
économiques – cédant comme cessionnaire – n’agissent qu’en raison de la volonté de la personne
publique compétente pour l’exercice d’une activité d’en confier la gestion à un tiers par contrat,
principalement dans le cadre d’un marché public ou d’une délégation de service public ?
La question mérite d’être posée, eu égard notamment à l’obligation d’exécution personnelle
du contrat par le cocontractant de l’administration qui revêt le caractère d’un principe général des
contrats administratifs292. L’importance de la notion d’intuitu personae, qui sous-tend ce principe,
implique en effet que le cocontractant, choisi en raison de ses qualités et capacités professionnelles,
290 J-P. CHAUCHARD, « Conventions et accords collectifs de travail, régime juridique : conclusion, application, sanctions », Rép. Dalloz, avril 1997, par analogie à la présentation des conventions collectives au regard de la catégorie plus générales des accords collectifs. 291 Cass soc. 17 mars 1993, Bull. Civ. V, no 88, RJS 1993, p. 231, no 377, D. 1993, IR 94. 292 LAUBADERE A. de, MODERNE F. et DELVOLVE P., Traité des contrats administratifs, LGDJ, 1983, n°804
87
assume lui-même l’exécution du contrat qu’il se voit confier. Il n’en demeure pas moins qu’à l’instar
des contrats « privés », l’exécution de tout contrat administratif peut se voir mise en cause à
l’occasion de diverses circonstances susceptibles d’entraîner un changement dans la personne du
cocontractant, et notamment par cession ou sous-traités293. Dès lors, sans interdire totalement une
telle évolution qui rythme la vie des entreprises et permet en outre que des entreprises accèdent à
certains contrats grâce à la sous-traitance d’une partie des missions qui leur sont confiées, la
personne publique en conditionne l’opposabilité à une autorisation expresse de sa part. Ainsi, la
cession – partielle ou totale – des droits tirés d’un contrat par son titulaire ne peut intervenir sans que
la personne publique autorité contractante y ait consenti.
Au demeurant, l’application volontaire des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du
travail par le cocontractant de l’administration à un tiers, en cours d’exécution du contrat, ne devrait
principalement trouver à s’appliquer que dans les hypothèses de cession véritable du contrat qui
marque la substitution d’un tiers au cocontractant de l’administration pour l’exécution totale du
contrat294, et non dans les hypothèses de sous-traités où, d’une part, seule une partie des missions se
voit transférée à un tiers et, d’autre part, la nature des missions se prêtent peu à la question du
transfert des personnels295.
En tout état de cause, il convient de préciser que l’application volontaire de l’article L.1224-
1 du code du travail ne résulte pas nécessairement d’une formalisation par écrit de la reprise des
personnels dans l’acte de cession d’entreprise et peut se déduire du seul comportement du repreneur
en pratique. La chambre sociale de la Cour de cassation296 considère en effet que, dès lors que le
repreneur a poursuivi son activité avec les salariés précédemment affectés à l’entreprise en dépit de
l’absence d’une telle obligation faute pour les conditions d’application des dispositions de l’article
L.1224-1 du code du travail d’être réunies, il a entendu faire une application volontaire du dispositif
légal de transfert des contrats de travail. Il est d’ailleurs intéressant de noter que le fait que le
repreneur n’ait pas sollicité l’accord des salariés pour la poursuite de leur contrat de travail, exigence
pourtant requise en cas d’application volontaire de l’article L. 1224-1 du code du travail, ne suffit à
priver l’application volontaire d’effet, mais permet simplement de la rendre inopposable au salarié
qui peut, dès lors, demander sa réintégration dans les conditions contractuelles antérieures. Un tel
raisonnement apparaît tout à fait cohérent, dès lors que, comme le souligne la cour de cassation, « le
principe selon lequel, lorsque les conditions d'application de l'article L. 122-12, alinéa 2, du code du
travail ne sont pas réunies, le transfert du contrat de travail du salarié ne peut s'opérer qu'avec son
293 Disparition du cocontractant ou encore faillite par règlement judiciaire ou liquidation de biens. 294 Ibid., n°808. 295 Voir supra, à propos des marchés publics de travaux. Il doit cependant être évoqué certaines exceptions, telles que les sous-traités de gestion des aires d’autoroutes, pour lesquels la question d’un transfert d’activité et du transfert corrélatif des personnels peut trouver toute sa pertinence : CE, avis du 16 mai 2002, req. n° 366305, EDCE 2003, p. 202. 296 S. BEAL, « Application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail (ex L. 122-12) », sous l’arrêt Cass soc., 10 avril 2008, Libouton c/ Janvier et a., pourvoi n° 06-45.839, JCP E 2008, n° 1953.
88
consentement exprès, ayant été édicté dans le seul intérêt, sa méconnaissance ne peut être invoquée
que par celui-ci ».
WV /0@==;6A@5634*>3;345@6E:*9:*;0@E56A;:*/RUWW^LU*97*A39:*97*5E@>@6;* ;3E?*9:*;0@55E6B75634* 9074* A345E@5* =7B;6A* =@E* ;064?:E5634* 9074:* A;@7?:* ?3A6@;:*9@4?*;:?*93A7<:45?*9:*A34?7;5@5634*
Dans un contexte marqué par le recours grandissant à des tiers pour assurer l’exercice
d’activités publiques dans le cadre de contrats publics, la problématique du transfert des personnels
de droit privé en matière d’activités publiques revêt désormais une pertinence accrue. Cette
problématique ne concerne pourtant qu’à la marge la personne publique agissant en qualité d’autorité
concédante ou de pouvoir adjudicateur : le transfert des personnels de son précédent cocontractant
aura en effet vocation à s’effectuer au profit du nouvel attributaire du contrat sans qu’à aucun
moment la personne publique n’intervienne à l’égard des salariés. Son rôle est ainsi à la fois majeur
et extérieur : il ne s’exerce qu’à la périphérie de l’opération de transfert. La personne publique n’est
« que » le déclencheur du transfert puisque c’est elle qui décide de continuer de confier une activité
publique à un tiers et conditionne alors l’existence d’une identité d’activité, indispensable comme on
l’a vu à l’applicabilité des dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail. Mais son rôle s’arrête
là : le transfert s’opère ensuite entre les entreprises elles-mêmes. Si elle n’est donc pas directement
intéressée à la question du transfert, la personne publique pourra pourtant souhaiter évoquer, si ce
n’est régler, cette problématique dans le cadre des documents de consultation remis aux candidats.
Loin d’être systématique, mais néanmoins de plus en plus fréquente297, cette mention spéciale
concernant les aspects sociaux liés à l’attribution du contrat se retrouve principalement dans les
consultations où le transfert du personnel est susceptible de se poser, sans bien sûr que la rédaction
du cahier des charges par la personne publique ne puisse préjuger de l’application ou non des
dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail. La rédaction de telles clauses peut revêtir une
ambition plus ou moins affirmée.
@R /:?* 93A7<:45?* 9:* A34?7;5@5634* [3E<7;@45* 74* ?6<=;:* E@==:;* 9:?*96?=3?65634?*;8\@;:?*
C’est là sans aucun doute l’hypothèse la plus fréquente. C’est d’ailleurs la raison pour
laquelle, la plupart du temps, les personnes publiques se gardent bien d’affirmer ou d’imposer
l’obligation de reprise des personnels par le nouvel attributaire et préfèrent recourir à une rédaction
générique, sinon approximative, pour évoquer cette question. L’ambition de telles clauses est
297 Le recours à de telles clauses n’est en tout état de cause pas nouveau. Voir par exemple : Cass. soc., 22 mars 1995, pourvoi n°93-44156, où la cour de cassation a déduit l'application volontaire du texte de la signature par le nouveau concessionnaire du service extérieur des pompes funèbres d'un cahier des charges l'obligeant à reprendre le personnel.
89
d’ailleurs claire et mesurée : il ne s’agit que de rappeler aux candidats qu’une telle problématique est
susceptible de se poser à eux dans le cadre du contrat qui pourrait leur être confié et que, dans cette
hypothèse, il conviendra de rechercher si les conditions de transfert au sens de la loi sont réunies. La
clause des documents de consultation relative aux aspects sociaux a ici une finalité purement
pédagogique et une rédaction simplement énonciatrice des conditions légales de transfert.
BR /:?*93A7<:45?*9:*A34?7;5@5634*64?5@7E@45*74:*>8E65@B;:*3B;6\@5634*9:*5E@4?[:E5*Y*;@*AG@E\:*97*[757E*A3A345E@A5@45*
A l’inverse, la personne publique pourra chercher par la rédaction même de ses documents
de consultation à réellement organiser le transfert des personnels. La rédaction de la clause relative
aux aspects sociaux poursuit alors une finalité beaucoup plus ambitieuse : celle de prévoir le transfert
vers le nouvel opérateur des agents du précédent cocontractant. Le contexte qui préside à l’insertion
de telle clauses est souvent différent des clauses classiques de rappel précédemment évoquées, et
s’inscrit en général dans le cadre d’une non-application des dispositions légales de l’article L.1224-1
du code du travail pour une partie, tout au moins, du personnel affecté à l’activité concernée. Deux
types de personnels peuvent ici être concernés : en premier lieu, les salariés de droit privé dès lors
que l’attribution du contrat confiant l’activité publique à un tiers ne serait pas assimilable au transfert
d’une entité économique autonome conservant son identité et n’entrerait dès lors pas dans le champ
d’application du dispositif translatif légal ; en second lieu bien évidemment, les agents publics, qui
ne relèvent pas du code du travail en matière de transfert d’activité298.
Consciente d’une telle inapplicabilité et soucieuse de la préservation de l’emploi à l’occasion
des contrats qu’elle conclut avec ses différents prestataires ou délégataires, la personne publique
recherchera alors à imposer à son cocontractant la reprise de l’ensemble des contrats de travail,
indépendamment des dispositions légales et de leurs conditions d’application299.
L’insertion de telles clauses dans les documents de consultation a suscité des interrogations
sur le respect du principe de l’égalité de traitement des candidats. La portée de telles clauses sur la
légalité de la consultation menée par la personne publique est en réalité fonction de la rédaction
retenue et des contraintes qui peuvent en découler pour les candidats. La personne publique ne peut,
au prétexte de régler le sort des personnels à l’occasion d’une procédure de mise en concurrence
imposer des obligations de nature à rompre l’égalité de traitement entre les candidats. Dans le cadre
d’une procédure de passation d’un contrat public, les pouvoirs adjudicateurs doivent en effet, à peine
de nullité, veiller au principe d’égalité de traitement des candidats. Cette obligation, issue des
298 Voir infra, p. 99 et s. 299 Voir par exemple CE, 1er juillet 2005, Commune de Saint Paul, req. n°269342, inédit.
90
principes fondamentaux du Traité de la Communauté européenne, est d’ailleurs élevée au rang de
principe général du droit par le Conseil d’Etat300.
C’est ainsi que le juge administratif a été amené à censurer, en référé301 et au fond302, une
stipulation du cahier des charges rédigée dans le cadre de la procédure d’attribution de la délégation
de service public d’un aéroport303 dont les effets différaient sensiblement selon que le candidat retenu
serait un opérateur public ou un opérateur privé, eu égard à la qualité d’agent public de certains des
personnels. En l’espèce, la Région Lorraine, autorité concédante, avait ainsi prévu à l’article 15 du
document programme, qu’« en application de la Directive 2001/23/CEE du 12 mars 2001, […], le
futur délégataire devra assurer la reprise de l’ensemble du personnel de l’actuel délégataire. […]Il
incombera au futur délégataire de procéder et de financer, à ses frais, le coût de son licenciement
selon les règles applicables au contrat d’origine. Ce coût ne pourra en aucun cas être pris en
compte pour le calcul de la contribution de la Région au déficit ». En introduisant une telle clause
dans le cahier des charges, la Région souhaitait s’assurer de la reprise de l’ensemble des personnels
affectés par l’ancien exploitant, le GIGAL, opérateur économique public regroupant les chambres de
commerce et d’industrie de la région lorraine, dont certains revêtaient la nature d’agents publics et ne
pouvaient, en ce sens, être transférés sur le fondement de l’article L.1224-1 du code du travail,
inapplicable de droit à cette catégorie d’agents304. Une telle rédaction poursuivait une double
ambition : veiller, d’une part, à ce que les candidats reprennent l’ensemble des agents, même ceux
pour lesquels le bénéfice du dispositif légal de transfert ne pouvait être invoqué ; faire supporter,
d’autre part, la charge du licenciement de ces agents, dans l’hypothèse d’un refus de leur part du
contrat proposé par le repreneur de l’activité, au délégataire en lieu et place de l’ancien délégataire
juridiquement « compétent » pour ce faire.
Or, c’est ce deuxième élément qui suscitait des difficultés dans la mesure où une telle
disposition engendrait incontestablement une véritable rupture d’égalité entre un candidat privé et un
candidat public d’une part, et un candidat privé et le délégataire sortant, le Groupement GIGAL,
d’autre part. Par ordonnance du 13 juillet 2007, le juge des référés – sans se prononcer sur
l’applicabilité du L. 1224-1 mais simplement sur les conséquences sur les obligations de publicité et
de mise en concurrence – a supprimé les dispositions de l’article 15 du document programme
considérant que « les sociétés SNC LAVALIN et PINGAT INGENIERIE [étaient] fondées à soutenir
que les candidats n’ont pas été placés dans une même situation et que les dispositions en cause de
l’article 15 du document programme sont de nature à porter atteinte à l’égalité de traitement entre
300 CE Avis, 29 juillet 2002, Société MAJ Blanchisseries de Pantin, Rec. p. 297, AJDA 2002, p. 755, note J.-D. DREYFUS, BJCP 2002, n° 25, concl. D. PIVETEAU. 301 TA Strasbourg, 13 juillet 2007, SNC Lavalin c. GIGAL. 302 CE, 26 novembre 2008, Région Lorraine c. SNC Lavalin, req. n°308053, inédit. 303 En l’occurrence, contrat de délégation de service public pour la gestion et l’exploitation de l’aéroport Metz-Nancy-Lorraine. 304 Voir infra, p. 100 et s.
91
les candidats »305. Le Conseil d’Etat n’a pas manqué en cassation de confirmer l’analyse du juge des
référés en estimant que « la collectivité publique ne pouvait en tout état de cause, sauf à méconnaître
ses obligations de mise en concurrence, exclure d'en assurer les conséquences financières »306.
∴
Aussi ambitieux qu’ils soient pour pallier les carences du dispositif translatif légal, les divers
fondements imaginés par les acteurs de transferts d’activités publiques ne s’inscrivent pas moins
dans une perspective bien différente tenant à leur nature contractuelle, qui se révèle être à la fois un
atout et un inconvénient.
,@E@\E@=G:* WR* +:?* 96?=3?656[?* 96>:E?6[68?* 9345* ;@* 4@57E:* A345E@A57:;;:* :?5*A3<<74:**
Nombre de conventions collectives et de contrats ont entendu prévoir un mécanisme de
transfert des contrats de travail de leurs personnels, indépendamment de l’absence d’obligation
légale en la matière. La volonté des opérateurs économiques, et parfois même des collectivités
publiques, est donc claire : préserver l’emploi en cas de modification dans la situation juridique de
l’employeur, en toute situation, même lorsque les conditions prévues par le législateur ne seraient
pas réunies. Mais le consentement des acteurs du transfert de l’activité en la matière est-il suffisant
pour assurer l’opposabilité du dispositif ainsi établi aux personnels dont le transfert est envisagé ?
La réponse réside dans la nature des divers fondements imaginés par les acteurs de transferts
d’activités publiques, qualifiée de contractuelle par les juridictions sociales. Conformément au
principe d’absence d’effet relatif des contrats à l’égard des tiers, le transfert des contrats de travail
organisé par la volonté des partenaires sociaux ou des parties à un contrat de cession ou au contrat
public lui-même ne s’oppose aux salariés de droit privé qu’après leur accord (A). Les dispositifs
contractuels et conventionnels, dont la portée s’en trouve sensiblement atténuée, n’en demeurent
cependant pas totalement dénués d’intérêt en bénéficiant d’une souplesse parfaitement étrangère au
dispositif légal (B).
*
305 Ibid. 306 CE, 26 novembre 2008, Région Lorraine c. SNC Lavalin, req. n°308053, inédit.
92
-*S*+:?*96?=3?656[?*A345E@A57:;?*=@E*:??:4A:*98=37E>7?*90:[[:5*E:;@56[*Y*;08\@E9*9:?*=:E?344:;?*
Texte fondamental, inchangé depuis 1804307, l’article 1134 du code civil dispose que « les
conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ». Elles ne peuvent dès
lors, et a contrario, porter préjudice ni bénéficier à autrui : « res inter alios acta aliis neque nocere
neque prodesse potest ». Principe majeur de droit positif donc, le principe de l’absence d’effet relatif
des contrats ne souffre que de rares exceptions308, expressément prévues par le législateur. Les
dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail, en prévoyant le transfert de plein droit des
contrats de travail en cas de modification dans la situation juridique de l’employeur, figurent parmi
les plus notables de ces dérogations, en produisant leur principal effet à l’égard des salariés qui sont
pourtant tiers à l’opération conclue entre deux entités économiques, ou entre la puissance publique et
un opérateur économique. Il en résulte que les transferts opérés sur un fondement légal s’imposent
aux salariés sans que l’accord de ces derniers ne soit requis.
Les transferts opérés sur le fondement des divers dispositifs conventionnels ou contractuels
ne bénéficient pas d’une telle portée dérogatoire, la dérogation à l’absence d’effet relatif des contrats
ne pouvant s’exercer par voie contractuelle. Les juridictions sociales se sont en effet
catégoriquement prononcées en faveur d’une nature contractuelle de ces fondements soumis de plein
droit aux dispositions de l’article 1134 du code civil309. Si la nature contractuelle des accords de
cession de contrats publics conclus entre un titulaire d’un contrat public et un autre opérateur
économique ou des contrats conclu par la puissance publique avec un opérateur économique aux fins
de lui confier la gestion d’une activité publique ne soulevait bien évidemment aucune difficulté (2),
celle des conventions collectives paraissait bien moins évidente eu égard à leur caractère parfois
hybride, relevant à la fois du contrat et du règlement (1).
UV /@* 4@57E:* A345E@A57:;;:* A345:?58:* 9:?* 96?=3?656[?* 5E@4?;@56[?* 64?5@7E8?*=@E*;:?*A34>:45634?*A3;;:A56>:?*
Issue d’un compromis social entre les partenaires sociaux, la convention collective a
vocation à s’imposer aux salariés de manière unilatérale, générale et impersonnelle. C’est ainsi que
le salarié ne peut renoncer dans son contrat de travail, sauf disposition contractuelle plus favorable,
à l'application du statut collectif, lequel peut d’ailleurs résulter d'un engagement unilatéral de
307 Solange BECQUE-ICKOWICZ, « Contrats et obligations. – Effets des conventions à l'égard des tiers. – Distinction entre les effets entre les parties et à l'égard des tiers », J. –Cl. Civil code, Fasc. 10, 2009, n°1. 308 Il en ainsi notamment de la stipulation pour autrui expressément prévue à l’article 1165 du code civil. 309 Cass soc. 7 novembre 1989, Bull. Civ. V, n°644 ; Cass. soc., 2 avril 1998, RJS 1998, p. 372, n° 572
93
l'employeur en vigueur dans l'entreprise et qui résulte, de jure, de la conclusion du contrat de
travail310.
En France, le droit des salariés à la négociation collective311 se relie au droit des salariés de
participer à la détermination de leurs conditions de travail, qui est inscrit dans le Préambule de la
Constitution de 1946312. Le droit social présente une différence majeure par rapport aux autres
sources de droit qui s’imposent aux justiciables : il est à la fois le résultat du travail parlementaire et
règlementaire et le fruit des négociations sociales menées par les partenaires sociaux, représentants
du patronat et des syndicats salariés. Cette dualité d’origine marque sans conteste une réelle
dimension pragmatique des règles sociales, dont la définition doit répondre au plus près aux réalités
pratiques auxquelles sont confrontés les salariés. Elle n’est pourtant pas sans soulever de questions
quant à la valeur juridique – contractuelle ou règlementaire – accordée aux accords collectifs. Or, il
s’avère que si la négociation collective revêt, en matière de droit social, une importance qui n’a cessé
de croître depuis la première reconnaissance d’un statut légal propre aux conventions collectives par
la loi du 25 mars 1919313, sa portée normative est variable. Certes, elle exerce parfois un véritable
rôle normatif, soit qu’elle anticipe les avancées sociales car étant au cœur des préoccupations de la
société qu’elle est la plus à même de traduire, soit qu’elle influence le législateur dans un sens ou un
autre, soit encore, mais de manière exceptionnelle314, qu’elle suspende l’intervention du législateur.
Conventionnelle par sa formation qui repose sur un accord de volontés, la convention ou l’accord
collectif est aussi un acte d’origine privée à vocation règlementaire par son effet normatif à
destination d’une collectivité identifiée315.
La nature juridique des conventions collectives apparaît donc marquée par un véritable
dualisme, contractuel et règlementaire316. En réalité, il convient de distinguer le fondement de
l’accord collectif, qui réside dans l’accord de volontés des partenaires sociaux et revêt dès lors un
caractère contractuel, de la nature même de l’accord collectif qui a vocation à s’imposer aux salariés
`LK
!Cass soc., 18 octobre 2006, D. 2006. IR. 2751, RJS 2006, no 1339. 311 Art. L. 2221-1 du code du travail. 312 J. MOULY, « Sur la bilatéralisation des droits sociaux », Dr. Soc. 2002, p. 804. 313 La loi du 25 mars 1919, qui avait marqué le renforcement de l’efficacité des conventions collectives par la substitution des stipulations des conventions aux clauses contraires du contrat de travail réputées non écrites, a amorcé une évolution dans la consécration de la négociation collective, poursuivie par la loi du 24 juin 1936, la loi du 23 décembre 1946 instituant une conception étatique de la négociation collective, la loi du 13 novembre 1982 consacrant le rôle des organisations syndicales représentatives, la loi du 12 novembre 1996 portant sur la négociation dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux, et de manière plus récente, les lois du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, et du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail. 314 Par exemple, la loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques a suspendu temporairement toute réforme législative relative à la prévention des licenciements pour motif économique, à la consultation des institutions représentatives du personnel et au plan de sauvegarde de l'emploi à l'initiative des partenaires sociaux : P.-H. ANTONMATEI, « Licenciements économiques et négociation collective, un nouvel accord collectif de travail est né », Dr. soc. 2003, p. 486 ; A. SAURET, « Les modalités négociées de l'article 2 de la loi du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciement économique », LPA 2003, n° 204, p. 3 315 Y. CHALARON, « Négociations, conventions et accords collectifs – Qualification, nature juridique », J.-Cl. Travail Traité, Fasc. 1-30, 2012, n°22. 316 P. DURAND, « Le Dualisme de la convention collective du travail », RTD civ. 1939, p. 353.
94
en dehors de tout consentement, et participe d’un caractère réglementaire. La nuance est importante
pour le sujet qui nous intéresse. Car la question qui se pose à l’égard des mécanismes conventionnels
de transfert des contrats de travail est bien celle de savoir s’ils s’imposent unilatéralement aux
salariés ou, au contraire, s’ils nécessitent l’accord du salarié pour s’appliquer. La question n’est pas
simple et a pu susciter de vifs débats au sein de la doctrine317. Il ressort de la jurisprudence que
même prévu par une convention collective, le transfert des contrats de travail ne semble pas pouvoir
être imposé au salarié sans son accord, lorsque les conditions d'application de l'article L. 1224-1 du
code du travail ne sont pas réunies318. Dans tous les cas, la convention conclue entre les deux
employeurs ne peut s'imposer au salarié que s'il a donné son accord à cette application extra-légale
de la transmission des contrats et des dettes319, qu’il a « déclaré vouloir en profiter ». Il n'est ainsi
pas possible à un employeur, nonobstant la convention collective, de transférer contre son gré un
représentant du personnel à l'entreprise qui a repris le marché320. En revanche, les salariés qui ont
accepté le transfert conventionnel des contrats ne peuvent agir contre leur ancien employeur à la
suite de la modification de ceux-ci par le nouvel employeur321.
L’opposabilité du dispositif translatif instauré par la convention collective est ainsi
simplement d’ordre collectif, et non individuel, comme l’illustre par exemple un arrêt de la chambre
sociale de la Cour d’Appel de Bordeaux en date du 30 octobre 2008322 qui rappelle que « lorsque la
perte d'un service de transport scolaire s'analyse en une simple perte de marché, lequel ne constitue
pas une entité économique autonome, et qu'en ce cas, les dispositions de l'article L. 1224-1 du code
du travail ne trouve pas à s'appliquer de plein droit, un accord collectif, qui a pour objectif précis la
garantie d'emploi et la continuité du contrat de travail et vise à améliorer, renforcer la garantie
d'emploi offerte aux salariés affectés à un marché faisant l'objet d'un changement de prestataire et
assurer la continuité du contrat de travail, et qui a été décidé en toute connaissance de cause, par
les organisations représentatives des salariés, de l'intérêt de ces derniers, impose, du fait de son
caractère plus favorable aux salariés, une extension conventionnelle des dispositions de l'article ci-
dessus mentionné. Dès lors, un tel accord demeure opposable aux salariés en ce qu'il entraîne de
plein droit, dans la limite des conditions qu'il pose, le transfert du contrat de travail des salariés
concernés ».
317 P. MORVAN, « Application conventionnelle de l’article L.122-12 et accord du salarié : plaidoyer pour un revirement », JCP soc. n°49, 5 décembre 2006, p. 1964, op. cit. ; et pour une réponse à cet article, Y. CHAGNY, « La continuité des contrats de travail du personnel d’un marché de prestations de services », RDT 2007, p. 78. 318 Cass soc., 2 avril 1998, D.1999 IR 33 note de M.C. ESCANDE-VARNIOL ; RJS 1998, p. 372, n° 572 ; M. MORAND, « Le transfert conventionnel des contrats de travail s'impose-t-il aux salariés ? », Dr. soc. 1990, p. 776. 319 Cass soc. 7 novembre 1989, Bull. Civ. V, n°644 ; Cass. soc., 2 avril 1998, RJS 1998, p. 372, n° 572, op. cit. 320 Cass. crim. 26 novembre 1996, Bull. crim., n°428, RJS 1997, p. 204, n° 304 ; CA AIX, 10 décembre 1996, RJS 1997, p. 204, n° 304. 321 Cass soc. 17 mars 1993, Bull. Civ. V, no 88, op. cit., RJS 1993, p. 231, no 377, D. 1993, IR 94. 322 CA BORDEAUX, Ch. Soc., 30 octobre 2008, RG n°07/3755, Bull. info. Cass. n° 698 du 15 mars 2009.
95
Au demeurant, cette condition supplémentaire n’est pas sans conséquence sur les modalités
mêmes du transfert323, comme nous l’aborderons plus avant dans la seconde partie de cette étude.
WV /@* 4@57E:* A345E@A57:;;:* =@E[36?* 37B;68:* 9:?* 96?=3?656[?* 5E@4?;@56[?*64?5@7E8?*=@E*;:?*A34>:45634?*=@E56A7;6aE:?**
Le raisonnement opéré par le juge judiciaire quant à l’impossibilité d’imposer le transfert
prévu par une convention collective au salarié peut aisément être transposé aux hypothèses de
transfert résultant de l’application d’un contrat de cession d’entreprise ou du cahier des charges
rédigé par une personne publique. Au surplus, l’argument tiré de l’absence d’effet relatif des contrats
soulevé en matière de conventions collectives trouve un écho supplémentaire en matière de contrats
ponctuels instituant un mécanisme de transfert, pour lesquels n’existe aucun débat sur la nature
réglementaire ou contractuelle qui a pu nourrir les controverses en matière de conventions
collectives.
Il en résulte que la personne publique, autorité délégante ou pouvoir adjudicateur, qui entend
organiser le transfert des contrats de travail à l’occasion du renouvellement du contrat par lequel elle
confie une activité publique à un tiers ne dispose du pouvoir d’imposer l’obligation de reprise des
contrats qu’à son seul cocontractant, et non aux personnels affectés à cette activité si ces derniers ne
relèvent pas de l’article L. 1224-1 du code du travail. A l’instar de certaines conventions collectives,
le cahier des charges de la consultation qui entend se placer en alternative au dispositif légal sur la
question du transfert des contrats de travail peut alors s’avérer d’une effectivité relative. La clause
sociale prévue par la puissance publique ne pourra ainsi imposer au candidat attributaire que la seule
obligation de proposer un nouveau contrat à l’ensemble des agents et non l’obligation de reprendre
l’ensemble des personnels. La nuance est importante puisqu’en tout état de cause, la reprise des
personnels dépendra en définitive de leur seule volonté si ces derniers ne sont pas transférables de
plein droit en application de l’article L. 1224-1 du code du travail.
N*S*+:?*96?=3?656[?*A345E@A57:;?*=@E*4@57E:*=3E5:7E?*9:*?37=;:??:*
En contractualisant le transfert des contrats de travail, les parties contractantes, d’une part,
limitent les désaccords qui pourraient naître d’une interprétation des dispositions de l’article L. 1224-
1 du code du travail, aménagement, d’autre part, le périmètre – en convenant quels seront les salariés
concernés par l’opération de transfert – les modalités et effets de ce transfert. Fruit d’un accord de
volontés des acteurs du transfert d’une activité publique, les différents mécanismes imaginés
présentent ainsi l’atout majeur de pouvoir définir très précisément leur périmètre d’application,
conformément au principe de liberté contractuelle. La dimension globale des dispositions légales,
323 Voir infra, Partie II, Section 1, paragraphe 2.
96
indifférente à la nature des contrats – déterminée ou indéterminée, à temps complet ou à temps
partiel, à la qualification des agents, ou encore à l’ancienneté acquise par les salariés324– échappe en
effet aux dispositifs conventionnels mis en place par la plupart des conventions collectives, des
accords de cession d’entreprise ou des documents de consultation. Il en résulte des dispositifs
particulièrement pertinents puisque précisément adaptés à chaque cas d’espèce.
Les conventions, collectives comme particulières, délimitent en général avec précision les
catégories de salariés et les caractéristiques du marché de prestations de services susceptibles de
donner lieu au transfert contractuel ou conventionnel des contrats de travail. Ainsi, par exemple, la
convention collective du nettoyage ne prévoit le maintien des contrats que si le marché de nettoyage
concerne les mêmes locaux325. Mais plus encore que les conditions matérielles du transfert, les
restrictions portent souvent sur des catégories entières de salariés exclus de la poursuite des relations
de travail par les accords de branche. L’exclusion peut, en premier lieu, porter sur les fonctions
exercées par les agents. Une distinction est ainsi opérée par de nombreuses conventions selon que les
salariés sont attachés à des missions « techniques » ou « administratives ». L’exclusion peut, en
second lieu, dépendre plus directement de la nature du contrat qui lie l’entité, à durée déterminée ou
indéterminée. La convention collective peut également envisager un dispositif de transfert des
contrats assorti de conditions, telle que l’affectation exclusive ou à plus de 50 % du salarié à un
marché dont le périmètre doit lui-même rester identique.
∴
324 Y. CHAGNY, « La continuité des contrats de travail du personnel d’un marché de prestations de services », RDT 2007, p. 78, op. cit. 325 Cass soc. 26 mai 1998, RJS 1998, p. 536, no 828.
97
Inhérente à la vie économique de toute entreprise, la problématique du transfert des salariés
jalonne la vie des salariés comme celle de leurs employeurs. Le recours au législateur pour organiser
et systématiser le transfert des salariés trouve donc toute sa pertinence en droit privé, et a depuis
longtemps fait montre de son efficacité. L’intégration de dispositifs spécifiques dans les conventions
collectives de certains secteurs d’activités participe encore de cette « démocratisation » du
mécanisme de transfert des salariés institué par le code du travail, et de son appréhension facilitée
par l’ensemble des acteurs de la vie économique. D’autant que la circonstance que la question du
transfert des salariés de droit privé se pose à l’occasion de l’exercice d’une activité publique s’avère
sans incidence sur son traitement, et ne soulève plus désormais de difficultés théoriques. Les
interrogations qui peuvent éventuellement naître dans la mise en œuvre du dispositif légal en matière
d’activités publiques ne résultent ainsi pas de la nature publique de ces activités, mais du contexte de
l’évolution qui justifie le transfert et de la nécessaire appréciation in concreto des conditions posées
par le code du travail pour l’application de ses dispositions. L’analyse juridique qui préside alors est
identique à celle qui s’effectuerait dans le cadre d’une activité économique « classique ».
La récurrence, la relative stabilité et le caractère commun de la question du sort des
personnels de droit privé en cas d’évolutions d’activités publiques ne doit pas pour autant occulter la
complexité et la pluralité des hypothèses susceptibles d’entrer en jeu dans le cadre de la
problématique plus globale du sort des personnels dans le cadre d’évolutions d’activités publiques.
La problématique du sort des salariés de droit privé employés n’apparaît ainsi que comme la « pointe
immergée de l’iceberg ». Les personnels publics employés par des personnes publiques et affectés à
des activités publiques sont également confrontés, au même titre que les salariés de droit privé, à la
question sensible de leur transfert à l’occasion d’évolutions dans la gestion d’activités publiques.
Identique dans son objet – le transfert des personnels – la question du sort des agents des personnes
publiques se pose pourtant en des termes sensiblement différents. *
98
2G@=65E:* W* L* /:* [349:<:45* `7E696C7:* =:E<:55@45* 90@??7E:E* ;@*A345647658*9:*;0:<=;36*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*
Un chapitre dédié, articulé principalement autour de deux dispositions complémentaires, une
rédaction résolution générique, et marquée par une relative stabilité… Le dispositif de transfert des
contrats de travail institué par le code du travail ressort certainement comme l’un des mécanismes
juridiques les plus aboutis de transfert des agents, aujourd’hui complété par des mécanismes
« miroirs » que représentent les conventions collectives, et plus ponctuellement les conventions
particulières. Cette maturité apparaît comme le résultat combiné de trois phénomènes : l’ancienneté
de la question du sort des personnels de droit privé en cas d’évolution dans la situation juridique de
la structure qui les emploie, sa permanence en dépit des évolutions sociales et sociétales, son lien
intrinsèque à la vie de toute entreprise.
Si la question du transfert des personnels se pose aujourd’hui avec la même acuité à
l’encontre des personnels de droit public, elle répond en revanche à un constat indéniablement
différent tenant, d’une part, en la nature même des agents concernés et, d’autre part et avant tout, en
la multiplicité et la particularité des hypothèses d’évolutions d’activités publiques dans laquelle elle
est amenée à être soulevée. Ainsi, si la problématique de la continuité d’emploi dans les activités
publiques n’intéresse en matière de personnels de droit privé véritablement que deux hypothèses
dont les contours juridiques se révèlent désormais relativement bien balisés, celle d’une succession
de cocontractants dans le cadre d’une activité publique et celle de la reprise en régie d’un service
public ; elle s’inscrit à l’égard des personnels de droit public dans un contexte bien plus éclaté, et
marqué par une évolution profonde du paysage administratif français au cours des trente dernières
années, sous l’effet conjoint de divers phénomènes, politiques, juridiques mais également financiers :
volonté politique de limiter le centralisme administratif qui avait caractérisé pendant plusieurs siècles
l’Etat français, confrontation des modes de gestion « service public » à la vision pragmatique et
économique du droit de la concurrence communautaire, rationalisation des modes d’organisation de
l’administration dans un contexte budgétaire déficitaire, etc.
La fonction publique, élaborée dans une certaine idée de permanence, s’est donc vue
confrontée aux mêmes problématiques que le secteur privé, à savoir régler le sort des personnels
confrontés à l’évolution de leurs structures d’affectation. Mais, à l’instar des opérateurs économiques
privés ou des personnes publiques reprenant en régie une activité de service public, les personnes
publiques agissant en qualité d’autorité administrative disposeraient-elle des instruments juridiques
pour appréhender efficacement la dimension sociale qu’impliquait toute réforme d’ampleur ?
Comme le soulignait le Ministre de la fonction publique, de la Réforme de l’Etat et de la
Décentralisation, Emile Zuccarelli, à l’occasion d’un colloque en 2000, « le statut de la fonction
publique n’est pas, comme on le croit encore parfois, un carcan inamovible qui briderait toute
99
initiative de l’employeur et qui freinerait toute évolution des structures administratives ; […]la
gestion des ressources humaines n’est plus, pour l’administration, un domaine étranger strictement
réservé à l’entreprise privée ». Nombre de réorganisations administratives majeures ont ainsi été
rendues possible sur le fondement du seul statut général de la fonction publique, fondement légal
général par excellence, grâce à la mise en œuvre des mécanismes de mobilité (Section 1). De tels
mécanismes n’ont cependant pas manqué de montrer leur limites au cours du premier acte de la
décentralisation, démontrant par là même que le législateur n’avait certainement pu anticiper, lors de
l’avènement du statut, l’ensemble des effets d’un transfert de personnels entre personnes publiques,
tout du moins pas dans une perspective aussi globale que celle dans laquelle se sont inscrits les
multiples transferts de compétences entre personnes publiques au cours de la dernière décennie. Face
un tel constat, le législateur s’est donc attaché à organiser spécifiquement chaque transfert de
personnels dans le dispositif même de mutation de l’activité (Section 2).
':A5634* U* S* /:* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =7B;6A* ?7E* 74*[349:<:45*;8\@;*=E8:Z6?5@45!
Les évolutions d’activités publiques susceptibles d’affecter l’emploi des agents publics
recouvrent des hypothèses des plus variées, dont les réalités économiques et juridiques sont souvent
bien différentes, allant des réorganisations administratives au sein d’une même fonction publique ou
entre fonctions publiques, aux privatisations et autres externalisations. Dans ce contexte, les
dispositions légales de l’article L. 1224-1 du code du travail ne se révèvent d’aucune utilité pour
assurer la continuité d’emploi des agents publics (paragraphe 1), et obligent les structures
gestionnaires à se tourner vers le cœur même du droit applicable à cette typologie spécifique de
personnels, à savoir le statut de la fonction publique (paragraphe 2).
,@E@\E@=G:* UR* /064@==;6A@B6;658* 9:?* Ea\;:?* A3<<74:?* 9:* 5E@4?[:E5* 9:?*A345E@5?*=3?8:?*=@E*;0@E56A;:*/R*UWW^LU*97*A39:*97*5E@>@6;**
Le dispositif de transfert des salariés en cas de changement dans la situation juridique de
l’employeur repose donc pour les salariés de droit privé sur le code du travail, d’origine législative.
La question qui se pose alors est donc celle de savoir si ce dispositif a vocation à s’étendre aux
relations sociales des personnes publiques avec leurs agents publics. Cette problématique peut a
priori étonner tant il semble que le droit privé du travail et le droit de la fonction publique soient des
dispositifs juridiques s’excluant l’un de l’autre. Le statut général législatif qui régit la situation des
fonctionnaires apparaît ainsi à l’égard du droit du travail comme « un système distinct de droit
public, (marqué par des) fonctions permanentes, (une) détermination unilatérale du salaire, (des)
systèmes rigides d’indemnités et de promotion, (une) augmentation automatique du salaire en
100
fonction de l’ancienneté, (un) régime légal de pensions »326. C’est cette situation particulière dans
laquelle se trouve placés les agents de droit public qui justifie une exclusion de ces derniers du
champ de protection du droit commun du travail, qu’il soit interne (A) ou communautaire (B), et
oblige à se tourner directement vers le cœur des règles de la fonction publique, applicables de droit
aux agents publics, pour régler leur situation en cas d’évolution dans la gestion d’une activité par une
personne publique. L’inapplicabilité des dispositions du code du travail aux agents de droit public
quant à la question spécifique du transfert des contrats de travail trouve pleinement sa justification
dans la philosophie même des textes communautaires dont la finalité est la protection des travailleurs
placés de facto dans une situation inégalitaire à l’égard de l’employeur, circonstance qui est
considérée faire défaut pour les agents publics.
-*S*/0:ZA;7?634*9:?*@\:45?*=7B;6A?*97*AG@<=*90@==;6A@5634*9:*;0@E56A;:*/RUWW^LU*97**A39:*97*5E@>@6;*:4*9E365*645:E4:
Léon Duguit l’affirmait : « les agents participant à un service public ne sont jamais dans la
même situation que les employés d’une entreprise privée ; ils ne peuvent lui être assimilés à aucun
point de vue »327. Les agents de droit privé relèveraient donc du code du travail, les agents publics du
droit de la fonction publique, sans que jamais ces deux mondes ne se rencontrent… Derrière cette
frontière apparemment infranchissable se cache une réalité plus nuancée, qui traduit l’évolution
croissante de ces deux droits, respectivement dévolus pour l’un à la sphère privée, pour l’autre à la
sphère publique, vers une rencontre pour ne pas dire une assimilation des principes. La situation
juridique des agents de droit public ne saurait en effet se résumer à l’affirmation selon laquelle ces
agents seraient de jure exclus du champ d’application du droit du travail. Il est indéniable que le
droit privé du travail a depuis longtemps pénétré les relations sociales des agents publics avec leur
employeur personne publique, soit par une application directe de certaines dispositions du code du
travail à cette typologie d’agents, soit par l’application indirecte de principes généraux du droit
élaborés par le juge administratif à partir du droit commun du travail328. Un certain nombre de
dispositions du nouveau code du travail intéressent ainsi les personnels des personnes publiques au
même titre que tout salarié de droit privé classiquement employé par un opérateur économique de
droit privé. Sans procéder à une énumération exhaustive, on pourra citer les dispositions relatives au
droit de grève dans les services publics qui valent nonobstant la nature juridique de l’employeur et
celle du lien juridique l’unissant à son personnel329, les principes relatifs à l’égalité de rémunération
326 D. BOASSAERT, C. DEMMKE et M.-L. ONNEE-ABBRUCIATI, « L’évolution des fonctions publiques en Europe : une approche comparée des développements récents » ; in M.–L. ONNEE-ABBRUCIATI [ss. dir.], Le fonctionnaire est-il un salarié comme les autres ?, Bruylant, 2003, p.26 et suiv. 327 L. DUGUIT, Traité de droit constitutionnel, t. 3, Ed. de Boccard, 1930, 3éd., p. 13-14. 328 F. MELLERAY, C. MAUGUE, A. COURREGES, « code du travail et personnes publiques », AJDA 2008, p. 855. 329 L’article L. 2512-1 du code du travail prévoit ainsi que « les dispositions du présent chapitre s'appliquent : 1° Aux personnels de l'Etat, des régions, des départements et des communes comptant plus de 10 000 habitants ; 2° Aux
101
entre les femmes et les hommes330, ou encore les règles relatives aux frais de transport applicables
« aux employeurs du secteur public »331.
Ces exemples particuliers démontrent toute l’ambigüité et les difficultés pratiques qui
résultent du caractère « isolé » et parcellaire de l’application du code du travail aux agents de droit
public. L’absence d’homogénéité est certaine, et rend par là même peu lisible le régime juridique
applicable aux personnels de droit public. Dans ce contexte, se pose la question de savoir si les
dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail, qui pose l’obligation de transfert des contrats
de travail en cas de changement dans la situation juridique de l’employeur, ont vocation à
s’appliquer aux agents de droit public au même titre que pour les agents de droit privé.
Une réponse négative ne peut qu’être apportée à cette interrogation.
Les dispositions du code du travail envisageant le transfert de personnels entre entreprises en
cas de changement d’employeurs ne figurent pas parmi les quelques dispositions dont relèvent
expressément les agents des personnes publiques. Le législateur n’a donc pas entendu transposer ce
mécanisme translatif des contrats de travail aux agents de droit public employés par des personnes
publiques.
Au demeurant, l’article L.1224-1 du code du travail pose une condition sine qua none à son
applicabilité : l’existence d’un contrat de travail entre l’agent et son employeur. Il ne s’applique ainsi
qu’aux agents dont la relation avec leur employeur résulte d’un contrat de travail (1), et qui plus est
un contrat de travail de droit privé (2). La précision est importante dans le contexte actuel de la
fonction publique. !
UV /0@B?:4A:*9:* ;6:4*A345E@A57:;*37>E@45*9E365*Y* ;0@==;6A@5634*97*A39:*97*5E@>@6;*=37E*;:?*@\:45?*?5@575@6E:?*9:*9E365*=7B;6A**
Une analyse exégétique du texte même des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du
travail du code du travail suffit à mettre en lumière leur inapplicabilité aux agents de droit public.
Elles disposent ainsi que « lorsque survient une modification dans la situation juridique de
l'employeur […], tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le
nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ». L’application du mécanisme légal suppose donc
l’existence d’un contrat de travail entre l’employeur originel et son salarié.
Or, par principe, la relation qui unit l’agent public à son employeur personne publique est
dénuée de tout caractère contractuel. Il doit cependant être rappelé à cet égard que si la nature du lien
unissant les personnes publiques à leurs agents statutaires ne souffre aujourd’hui plus d’objections
personnels des entreprises, des organismes et des établissements publics ou privés lorsqu'ils sont chargés de la gestion d'un service public » 330 Articles L. 3221-2 à L.3221-7 du code du travail. 331 Article L. 3261-1 du code du travail.
102
théoriques, elle a pourtant longtemps nourri un vif débat en doctrine sur la nature de ce lien,
contractuel ou règlementaire332.
L’article 4 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, sur les droits et obligations des
fonctionnaires consacre en effet le caractère légal et règlementaire de la situation des fonctionnaires.
Les agents qui ont été titularisés dans un emploi permanent possèdent ainsi la qualité d'agents
publics fonctionnaires et sont soumis aux droits et obligations résultant des lois et règlements333. Le
régime juridique auquel est soumis l’agent public apparaît alors comme fortement « exorbitant de
droit commun » pour reprendre la formule classique en droit administratif334. En premier lieu, la
situation de l’agent résulte des règles générales du statut fixé par la loi ou le règlement, et non d’un
contrat passé entre l’administration et lui. La principale manifestation apparaît dans la nomination du
fonctionnaire qui résulte d’un acte de nomination qui revêt un caractère unilatéral de
l’Administration et non contractuel. En deuxième lieu, le statut fait l’objet d’une application
objective. Dès lors, la situation résultant du statut doit être la même pour tous les agents se situant
dans la même catégorie, et les conventions particulières passées par l’Administration et un de ses
agents en vue d’établir une situation spéciale sont illégales335. L’objectivité du statut transparaît
jusque dans le contentieux de la fonction publique qui est un contentieux objectif, un contentieux de
la légalité336. Dans le même sens, les fonctionnaires ne peuvent renoncer à aucun élément de leur
statut, une telle renonciation serait sans valeur juridique337. Enfin, le statut est par définition
modifiable : il en résulte que les fonctionnaires ne peuvent invoquer aucun droit acquis au maintien
de leur situation338.
Les juridictions, confrontées à la question du transfert des agents publics sur le fondement de
l’article L. 122-12 devenu L. 1224-1 du code du travail ont d’ailleurs confirmé une telle analyse à
l’occasion d’un litige porté devant le juge des référés par le directeur d’un port de plaisance dont
l’activité de service public auparavant gérée par une chambre de commerce et d’industrie venait de
faire l’objet d’une reprise en régie par une commune. Eu égard à la nature de service public
industriel et commercial que revêt l’activité portuaire339, les agents de la chambre de commerce
332 Ce débat a pris fin après la seconde guerre mondiale. Par le passé, existait une controverse entre les partisans d’une définition unique, contractuelle ou légale et réglementaire, et les partisans d’une définition double reposant notamment sur les fonctions exercées par les agents entre fonctions d’autorité, d’une part, et fonctions de gestion, d’autre part. 333 Voir supra la définition d’agent public et les nuances qui peuvent exister avec la notion de fonctionnaire couramment employée. 334 J.-M. AUBY, J.-B. AUBY, D. JEAN-PIERRE, A. TAILLEFAIT, Droit de la fonction publique, Paris, Dalloz, 6e édition, 2009, p. 49. 335 CE, 25 octobre 1929, Portebois, Rec. p. 950, DP 1929, III, 57, note R. BIENVENUE ; CE, 5 juin 1946, Henry, Rec. p. 411. 336 Il peut cependant être un contentieux subjectif lorsque le fonctionnaire défend un droit personnel, mais là encore la jurisprudence l’autorise même dans ce cas à utiliser le recours pour excès de pouvoir. 337 Par exemple, un fonctionnaire ne peut renoncer à son traitement : CE, 7 mai 1955, Dame Lamaison, Rec. p. 552. 338 CE, 2 décembre 1956, Plessy, Rec. p.1051 ; CE, 24 mars 1944, Toutée, Rec. p. 104 ; CE, 19 décembre 1980, Denis, Rec. p. 566 ; CE, 14 mai 1980, Dessambre. 339 TC, 12 janvier 1987, Société navale chargeurs Delmas-Vieljeux, D. 1987, jurispr. p. 207 ; CE, 25 avril 1952, Boglione, Rec. p. 155 ; CE, 23 mai 1960, CCI de La Rochelle, Rec. p. 356 ; CE, 15 décembre 1967, Level, Rec. p. 50, AJDA 1968, II,
103
affectés à l’exercice de cette mission avait classiquement été transféré dans les effectifs de la
commune par application du dispositif translatif du code du travail. La difficulté résidait dans la
circonstance que la mesure de transfert ait concerné, sans distinction, l’ensemble des agents et
notamment le directeur de l’établissement. Ce dernier ne manqua pas de faire valoir devant la
juridiction administrative saisie en référé qu’il ne pouvait lui être opposé les dispositions de l’article
L. 122-12 du code du travail, alors en vigueur, en raison de sa qualité d’agent public340. Le juge du
référé, rappelant que l'article L. 122-12 du code du travail tel qu’interprété à la lumière des directives
communautaires ne pouvait s'appliquer qu'aux agents bénéficiant effectivement d'un contrat de
travail au moment de la reprise en régie, fit droit à sa demande et fit injonction à la chambre de
commerce et d’industrie « de réexaminer, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la
présente décision, la situation de M. X aux fins de le placer dans une position régulière au regard
tant des règles statutaires applicables que des besoins du service et de ses aptitudes
professionnelles »341.
∴
Il apparaît ainsi que les dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail sont privées
d’effet à l’égard des agents publics statutaires de la fonction publique, en l’absence d’existence de
contrat de travail les liant à leur employeur public. Il en résulte une exclusion de principe des
fonctionnaires du champ d’application du dispositif légal de reprise des personnels. Mais si le
principe du recrutement dans la fonction publique reste la voie du concours, l’intégration d’agents
par la voie contractuelle est désormais une réalité incontournable, concernant des effectifs parfois
significatifs. L’examen de la situation de ces agents est donc des plus essentiels pour appréhender
dans sa globalité la question du sort des personnels de droit public en cas d’évolution de la structure
juridique d’emploi.
WV /0@B?:4A:*9:*;6:4*9:*9E365*=E6>8*37>E@45*9E365*Y*;0@==;6A@5634*97*A39:*97*5E@>@6;*=37E*;:?*@\:45?*A345E@A57:;?*9:*9E365*=7B;6AR*
L’évolution récente du droit de la fonction publique a conduit à l’émergence d’une catégorie
nouvelle d’agents publics, les agents contractuels de droit public. Associer les termes d’agents
contractuels et la qualité d’agent public fut pendant longtemps antinomique. L’existence d’un
contingent considérable d’agents publics contractuels342 est aujourd’hui une réalité assumée par les
pouvoirs publics. Après une longue période de déni - et de précarisation - le temps semble
aujourd’hui venu de tirer les conséquences des dérives passées, par une vague de titularisation sans
p. 230, concl. BRAIBANT, D. 1968, jurispr. p. 387, note Leclercq , CE, 26 juin 1982, Ministre du budget , Rec. p. 293, D. 1983, inf. rap. p. 273, obs. DELVOLVE. 340 CE, 8 mars 1957, Jalenques de Labeau, Rec. p. 158, op. cit. 341 CE, 14 mai 2003, CCI Nîmes Uzès Bagnols Le Vigan, req. n° 245628, note G. LE CHATELIER Dr. adm, juillet 2003, p.17. 342 891 000 agents recensés en janvier 2012 d’après le site service public.fr, soit 16,8 % des agents publics.
104
précédent, menée en parallèle d’une action de redéfinition des conditions de recours aux agents
contractuels343.
Il apparaît donc que certains agents employés par des personnes publiques peuvent
désormais, par exception, être liés à ces dernières par un contrat de travail. La question de
l’applicabilité des dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail se pose à leur égard en de
nouveaux termes, en présence d’un contrat de travail entre l’agent public et la personne publique qui
l’emploie. Néanmoins, l’existence d’un lien de subordination contractuel entre la personne publique
et ses agents contractuels est une condition nécessaire mais non suffisante pour soumettre ces agents
aux dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail : il faut encore que ce lien présente un
caractère de droit privé. L’identification de la nature du lien contractuel, privé ou public, entre
l’agent et la personne publique qui l’emploie est donc cruciale pour déterminer le fondement
permettant d’assurer la continuité d’emploi de l’agent public en cas de transfert d’une activité
publique.
La réponse n’est pas aisée, et a nécessité une clarification par la jurisprudence, afin de pallier les
difficultés pratiques engendrées par les positions antérieures des juridictions administratives. A
l’origine, un contrat conclu aux fins de recruter un agent affecté à un service public administratif
était réputé de droit public au motif qu’il impliquait une participation à l’exécution du service
public344. Cette interprétation jurisprudentielle n’était pas sans soulever de difficultés de qualification
des contrats dans la mesure où il en résultait une dualité de régime peu satisfaisante tant au regard
des intérêts même de l’agent que de la gestion sociale des agents345. Etaient ainsi qualifiés d’agents
publics les agents contractuels, c’est-à-dire non titulaires, qui participaient directement au
fonctionnement du service public ou à l'exécution d'une mission de service public administratif346. En
revanche, dès lors que cette condition faisait défaut, l’agent, bien qu’employé dans le cadre d’un
service public administratif, perdait la qualité d’agent public. L’exemple le plus illustratif de la
complexité inhérente à ce raisonnement réside à n’en pas douter dans l’arrêt bien connu du Tribunal
des Conflits en date du 25 novembre 1963347 qui avait conduit la juridiction a considéré qu’un même
agent revêtait, d’une part, la qualité d’agent public lorsqu’il assurait la surveillance des élèves dans la
mesure où il participait alors directement au service public administratif de l’éducation, d’autre part,
la qualité d’agent privé dans ses tâches purement fonctionnelles consistant à nettoyer les salles de
343 Loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique (J.O. du 13 mars 2012, p. 4498). 344 CE Sect., 4 juin 1954, Affortit et Vingtain, Rec. p. 342, concl. CHARDEAU, AJDA 1954.II.6 bis, chron. GAZIER et LONG, op. cit. 345 TC, 25 novembre 1963, Dame Veuve Mazerand, Rec. p. 792. 346 TC, 19 décembre 1988, Ville Cannes c/ Ponce, Rec. p. 497 ; CE Sect., 20 mars 1959, Lauthier, Rec. p. 198 ; RDP 1959, p. 770, concl. M. BERNARD ; D. 1960, jurispr. p. 280, note De LAUBADERE ; AJDA 1959, I, p. 68, chron. COMBARNOUS et GALABERT. 347 TC, 25 novembre 1963, Dame Veuve Mazerand, op. cit.
105
classe. Ces solutions « byzantines » 348 ne pouvaient perdurer. Aussi, par l’arrêt du 25 mars 1996, dit
Berkani349, le Tribunal des Conflits a-t-il écarté le critère de la participation directe au service public
administratif dans le travail d’analyse, au profit d’un raisonnement simplifié consistant à considérer
que « les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'un service public à caractère
administratif sont des agents contractuels de droit public, quel que soit leur emploi ». La solution
retenue aujourd’hui par l’ensemble des juridictions350 repose ainsi non plus sur un critère fonctionnel
fondé sur la participation directe de l’agent au service public administratif, mais sur un critère
organique, la nature juridique de la personne morale qui emploie l’agent. Dès lors, si l’agent affecté à
un service public administratif est employée par une personne publique, son contrat sera de droit
public ; à l’inverse, si son employeur est une personne morale de droit privé, son contrat présentera
un caractère de droit privé, à l’exception des contrats qualifié de « transparents », notamment en
matière d’associations, qui conduisent le juge à considérer que la personne publique est en réalité le
véritable employeur351 de telle sorte que le contrat est requalifié en contrat de droit public, et de
manière encore plus résiduelle des contrats aidés, destinés à favoriser l’emploi des jeunes352.
Il en résulte que les agents publics, c’est-à-dire l’ensemble des personnels, statutaires et
contractuels, employés par des personnes publiques, et à l’exception notable des agents contractuels
affectés à un service public industriel et commercial, ne peuvent être repris par un nouvel employeur
sur le fondement des dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail.
Il suffit pour s’en convaincre de procéder à une analyse a contrario du raisonnement opéré
par les juridictions sociales en matière de reprise en régie d’un service public administratif : selon
une jurisprudence désormais constante353, les contrats de travail en cours doivent être maintenus, y
compris dans le cas où l'entité économique transférée constitue un service public administratif dont
la gestion, jusqu'ici assurée par une personne privée, est reprise par une personne morale de droit
public normalement liée à son personnel par des rapports de droit public. Or, dans une telle
hypothèse, les contrats en cause sont réputés demeurer de droit privé tant que le nouvel employeur
public n'a pas placé les salariés dans un régime de droit public. Ainsi, seul le juge judiciaire est
348 J.-F. LACHAUME, « Régie », J.-Cl. administratif, fasc. 126-10, 2008, n°78. 349 TC, 25 mars 1996, Préfet de la Région Rhône-Alpes, dit Berkani, Rec. p. 535 ; RFDA 1996, p. 819, concl. Ph. MARTIN ; AJDA 1996, p. 354, chron. J.-H. STAHL et D. CHAUVAUX ; D. 1996, jurispr. p. 598, note Y. SAINT-JOURS ; Dr. soc. 1996, p. 735, obs. J.-Y. PRETOT ; CJEG 1997, p. 35, note J.-F. LACHAUME ; Gaz. Pal. 10-11 juillet 1996, note PETIT ; JCP G 1996, II, 22664, note P. MOUDOUDOU, op. cit. 350 CE, 26 juin 1996, Commune de Céreste, Rec. p. 246 ; Dr. adm. 1996, comm. 536 ; RFDA 1997, p. 851 ; Cass soc., 18 juin 1996, Gonin, Dr. adm. 1996, comm. 536. 351 Cass soc., 26 juin 1991, Mescle, D. 1991. IR. 220 ; CE, 19 juin 1996, Syndicat général CFDT des affaires culturelles, Dr. adm. 1996, n°383. 352 Bien que ce type de contrat évolue constamment au fil des gouvernements, et tendent aujourd’hui à disparaître, on peut tout de même citer en ce sens la loi n° 97-940 du 16 octobre 1997, relative au développement d'activités pour l'emploi des jeunes. 353 Cass soc., 25 juin 2002, AGS Paris, AJDA 2002, p. 695, note S. PUGEAULT ; JCP E 2002, act. 28 ; Gaz. cnes 4 novembre 2002, p. 54, note C. PICHON ; Cass soc., 14 janvier 2003, pourvoi n° 01-43.676, Commune de Théoule-sur-Mer ; TA Poitiers, 14 mai 2003, Coindre, AJDA 2003, p. 1280, concl. ARTUS ; TC, 19 janvier 2004, Devun c/ Commune de Saint-Chamond, AJDA 2004, p. 43, op. cit.
106
compétent pour statuer sur les litiges nés d'un refus, de l'un ou l'autre des deux employeurs
successifs, de poursuivre l'exécution du contrat de travail, qui ne mettent en cause, jusqu'à la mise en
œuvre d'un régime de droit public, que des rapports de droit privé. Il en résulte, a contrario, que dès
lors que ces agents sont placés dans un régime de droit public par la personne publique, par la
proposition d’un contrat de droit public et son acceptation par l’agent de droit privé, alors ils
deviennent de plein droit des agents de droit public, relevant des juridictions administratives dans
leurs relations avec l’Administration.
L’observation de la jurisprudence administrative témoigne elle-aussi de l’exclusion des
agents publics du champ d’application des dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail. Le
juge administratif354 considère ainsi d’une part qu’ « [les dispositions] de l’article L.122-12, alinéa
2, du code du travail ne s’appliquent pas aux agents soumis à un statut de droit public » et que
d’autre part « sauf dispositions législatives contraires, les personnels non statutaires travaillant
pour le compte d’un service public à caractère administratif géré par une personne publique sont
des agents contractuels de droit public, quelque soit leur emploi ». Il est d’ailleurs à noter que le
raisonnement opéré par les juridictions nationales est en parfaite adéquation avec la position du juge
communautaire, et repose sur une analyse des dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail
« interprétées au regard de la directive n°2001/23/CE du Conseil du 12 mars 2001 laquelle ne fixe
d’objectifs que s’agissant des travailleurs régis par le droit du travail ».
∴
Le législateur français s’est très tôt attaché à limiter les effets d’un transfert d’entreprise sur
la rupture des contrats de travail liés. Dès la loi du 19 juillet 1928 était ainsi institué en droit interne
un dispositif de transfert des contrats de travail, dispositif par la suite codifié à l’article L.122-12,
alinéa 2, du code du travail. Ce précepte, peu à peu érigé au rang de principe général de droit du
travail355, a inspiré le législateur communautaire qui l’a intégré dans l’ordre juridique communautaire
par la directive 77/187/CEE du 14 février 1977 profondément remaniée en 1998 avant d’être abrogée
et remplacée par la directive 2001/23/CE du 12 mars 2001 relative au maintien des droits des
travailleurs en cas de transfert d’entreprises, d’établissements ou de parties d’entreprises ou
d’établissements. L’objectif de cette directive communautaire est identique à celui poursuivi par le
dispositif légal français, à savoir garantir aux salariés la stabilité de leur emploi, en oscillant entre
d’un part, un souci de protection des travailleurs et, d’autre part, la volonté de ne pas imposer à
l’employeur substitué des contraintes telles qu’il renoncerait à une reprise qui constitue parfois le
seul espoir de survie de l’entreprise. Eu égard à la finalité protectrice de la directive, les juridictions
354 Voir par exemple : CAA Versailles, 8 novembre 2007, req. n° 05VE0192. 355 B. TEYSSIE, « Union Européenne. – Extinction des relations de travail », J.-Cl. Europe Traité, fasc. 610.
107
communautaires en ont adopté une lecture résolument extensive de son champ d’application. Il en
résulte néanmoins, à l’instar du droit interne, une exclusion générale des agents publics.
N* S* /0:ZA;7?634* A34[6E<8:* 9:?* @\:45?* 9:* 9E365* =7B;6A* 97* AG@<=*90@==;6A@5634* 9:?* 96E:A56>:?* A3<<74@75@6E:?*T* ;@* A34[6E<@5634* .!%()&-.-'(!=@E*;0@EE]5*9:*;@*2F!%*#%.&.33()*97*b*?:=5:<BE:*WcUU**
Protection des salariés initialement instaurée par le législateur allemand, l’obligation de
transfert des contrats de travail en cas de modification dans la situation juridique de l’employeur a
dès les années 1970 fait l’objet d’une véritable appropriation par le droit de l’Union européenne.
Loin de l’image libérale qui lui sied d’ordinaire, le législateur communautaire s’est efforcé, depuis
l’adoption de la directive, d’adopter une démarche clairement finaliste, largement servie par
l’interprétation pour le moins extensive de son champ d’application par la Cour de justice au travers
des notions de « travailleur » et d’ « entreprise » qui en sont le socle. Un tel volontarisme n’est
cependant pas sans limite. L’appréhension des hypothèses d’évolutions d’activités publiques
soulevant la question du sort de personnels de droit public en est l’illustration manifeste. Dans une
telle perspective, le droit communautaire se refuse à faire application du dispositif translatif des
contrats de travail aux agents de droit public, tant au regard des droits spécifiques qui leur sont
d’ores et déjà octroyés par leur statut protecteur en droit interne (1), qu’en raison de la nature même
des évolutions d’activités qui les affectent principalement à savoir les réorganisations
administratives, considérées expressis verbis comme hors du champ économique dévolu à la
directive (2). !
UV !4:* :ZA;7?634* 9:?* @\:45?* =7B;6A?* `7?56[68:* =@E* ;0:Z6?5:4A:* 9:* 9E365?*?=8A6[6C7:?*E:A3447?*Y*A:55:*5I=3;3\6:*90@\:45?*
Exclusion des agents publics de la notion de « travailleur » au sens du droit de l’Union
européenne. Texte d’ordre public, la directive 2001/23/CE impose, à l’instar de toute directive
communautaire, que les Etats introduisent dans leur ordre juridique interne les mesures nécessaires
pour permettre à leurs salariés et à leurs représentants de faire valoir les droits qu’ils tirent de ce
texte. Elle renvoie néanmoins à chaque Etat le soin de définir la notion de travailleur dont elle a pour
objet d’assurer la protection des droits. Les juridictions communautaires précisent ainsi de manière
constante, et conformément à l’article 2 de la Directive, que la notion de travailleur « doit être
entendue en ce sens qu’elle vise toute personne qui dans l’Etat membre concerné, est protégé en tant
que travailleur au titre de la législation nationale en matière de droit du travail »356 et qu’ « il
356 Article 2 de la directive 2001/23/CE du 12 mars 2001concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises, d'établissements ou de parties d'entreprises ou d'établissements, op. cit.
108
appartient au juge national de déterminer si tel est le cas pour chaque cas d’espèce357 ». L’objectif
de protection de la directive ne doit pas avoir pour effet de porter atteinte au droit national en ce qui
concerne la définition du contrat ou de la relation de travail. Cette liberté de définition laissée aux
Etats membres, certes sous certaines réserves, est au cœur de l’analyse de l’applicabilité de la
Directive 2001/23/CE aux agents publics tels que définis par le droit interne.
Or, il ressort sur ce point de la jurisprudence communautaire une exclusion des agents publics
de la notion de « travailleur » et par là même d’obligation de transfert de cette typologie d’agents en
cas d’évolution juridique dans la structure d’emploi. Par un arrêt Collino et Chiappero en date du 14
septembre 2000, la Cour de justice des communautés européennes a ainsi clairement affirmé que :
« l'article 1er, paragraphe 1, de la directive 77/187/CEE du Conseil, du 14 février 1977, […], doit
être interprété en ce sens que cette dernière est susceptible de s'appliquer à une situation dans
laquelle une entité assurant l'exploitation de services de télécommunications à l'usage du public et
gérée par un organisme public intégré dans l'administration de l'État fait l'objet, à la suite de
décisions des pouvoirs publics, d'un transfert à titre onéreux, sous la forme d'une concession
administrative, à une société de droit privé constituée par un autre organisme public qui en détient
l'intégralité du capital. Il convient cependant que les personnes concernées par un tel transfert
aient été initialement protégées en tant que travailleurs au titre de la législation nationale en
matière de droit du travail» 358
. La position des juridictions communautaires à l’encontre des agents
publics est donc des plus claires : si la directive du 14 février 1977, reprise par celle du 12 mars
2001, s'applique de manière étendue aux transferts d’entreprise impliquant des organismes publics,
elle est cependant inapplicable aux personnels qui ne sont pas protégés initialement en tant que
« travailleurs » au titre de la législation nationale en matière de droit du travail, indépendamment de
la nature des fonctions qu'ils exercent. Les agents publics, statutaires ou contractuels, échappent dès
lors sans aucun doute au champ d’application de la directive 2001/23/CE, de par la spécificité même
du régime juridique qui leur est assigné en droit national.
Agents publics et personnel considéré par le droit de l’Union européenne comme
bénéficiant d’ores et déjà d’une protection. La perception européenne de la situation privilégiée des
fonctionnaires se conçoit parfaitement eu égard au statut des agents publics en France placés dans un
cadre règlementaire, et rejoint ainsi la position de la doctrine française359 qui a pu souligner qu’ « en
donnant au fonctionnaire une situation statutaire, le législateur a entendu opposer cette condition à
celle du travailleur privé placé dans une situation contractuelle. La situation statutaire est réglée
dans le cadre d’une loi, ou par la loi elle-même, à laquelle s’ajoute des […] décrets. Théoriquement,
la situation statutaire offre des garanties que risquerait de ne pas présenter une situation résultant
du simple accord des parties. Le contrat peut être modifié par la volonté des deux, imposant d’une
357 CJCE, 11 juillet 1985, A/S Danmols Inventar, op. cit. 358 CJCE, 14 septembre 2000, Collino et Chiappero, aff. C 343/98, Rec. CJCE p. 6659 ; RJS décembre 2000, n° 1308. 359 M. PIQUEMAL, Le fonctionnaire. Droits et garanties, Berger-Levrault, 2ème éd., 1979, p. 43.
109
façon directe ou indirecte ses choix à l’autre. En outre, une situation statutaire se définit par
l’existence de règles générales, impersonnelles et abstraites qui s’appliquent à des situations
juridiques objectives et non point à une situation propre à telle personne déterminée ».
La protection des agents publics en droit interne a d’ailleurs fait l’objet d’une consécration
jurisprudentielle par l’arrêt d’Assemblée du Conseil d’Etat du 29 janvier 1965 qui garantit le
maintien du statut des agents quelque soit le changement de nature de l’employeur360. L’article 12 du
statut général de la fonction publique dispose ainsi qu’ « en cas de suppression d'emploi, le
fonctionnaire est affecté dans un nouvel emploi dans les conditions prévues par les dispositions
statutaires régissant la fonction publique à laquelle il appartient »361. En outre, l’article 97 de la loi
du 26 janvier 1984 impose aux collectivités territoriales la mise en œuvre de cette garantie : « la
qualité de fonctionnaire statutaire l’emporte sur la nature de leur service d’affectation ».
Le champ d’application volontairement restrictif des directives européennes sur la protection
des salariés à l’endroit des fonctionnaires s’explique par la perception même des Etats européens
quant à la spécificité des agents publics au regard des travailleurs de droit commun. Le droit
communautaire, qui n’est que le reflet des positions de ses Etats membres, traduit ainsi la distinction
fondamentale qui existe dans les Etats européens entre les fonctionnaires et les salariés de droit
privés362. Cette vision spécifique des agents publics est des plus classiques en France, elle l’est donc
également pour l’Europe. La concordance des positions françaises et communautaires a le mérite
d’assurer l’homogénéité des solutions à l’égard du sort des agents publics dans l’hypothèse de
changements dans les structures de gestion. Elle n’était pourtant pas évidente tant la notion d’agent
public et par là même le modèle de gestion des personnels du secteur public est un domaine propre à
chaque Etat, qui relève de sa souveraineté. Comme le relève Laurent Lamblin363, certains Etats ont
ainsi adopté un système de gestion de leurs personnels fortement éloigné du modèle français de la
fonction publique, à l’instar des Etats-Unis où « l’idée que les fonctionnaires puissent être titulaires
de droits particuliers opposables à un employeur qui n’est autre que le peuple souverain apparaît
choquante à beaucoup d’américains […] La conception américaine du libéralisme condamne non
seulement l’idée d’un droit propre et privilégié de la fonction publique, mais rejette également l’idée
plus concrète de droits particuliers des fonctionnaires et d’une protection juridique des agents
publics en tant que tels »364.
Agents publics et protection par le droit communautaire. Cela ne signifie pas pour autant
que le droit communautaire ignore les droits des agents publics et que la présomption de protection
360 CE Ass., 20 janvier 1965, AJDA 1965, p. 103, concl. J. RIGAUD. 361 Article 12 de la loi précitée n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat. 362 R. CHAPUS, Droit administratif général, Montchrestien,15 éd., t. 2, p.20. 363 L. LAMBLIN, La fonction publique de l’Etat confrontée à la concurrence, Th. Paris II, 2007, op. cit. 364 G. CONAC, La Fonction publique aux Etats-Unis. Essai sur le régime du Civil Service fédéral, Armand Colin, 1958, p. 15.
110
dont bénéficient ces agents en droit communautaire conduise en définitive à refuser l’octroi de droits
fondamentaux à cette typologie d’agents. L’interprétation opérée par le juge communautaire de la
directive concernant la protection des salariés en cas de transfert d’entreprise ne doit en effet pas
occulter une réelle prise en compte des intérêts des fonctionnaires, sous l’influence grandissante du
phénomène d’échanges entre les fonctions publiques nationales et communautaires. A titre
d’exemple, la Cour de justice est venue rappeler qu'un agent de la fonction publique communautaire
doit se voir conférer les mêmes droits qu'un travailleur national ayant usé de sa liberté de circulation
pour travailler dans un autre État membre. En définitive, la perception du régime juridique des agents
publics par les juridictions communautaires est ici identique à celle des juridictions nationales quant
à l’applicabilité des dispositions de l’article L.1224-1, qui transposent la directive 2001/23/CE.
WV !4:* :ZA;7?634* 9:?* GI=35Ga?:?* 9:* E83E\@46?@5634?* @9<646?5E@56>:?* 97*AG@<=*90@==;6A@5634*9:*;@*96E:A56>:*WccUdWXd2%**
L’inapplicabilité de la directive à la réorganisation de ses services par une personne publique
est sans conteste la branche du dispositif qui devrait soulever le moins de difficulté,
puisqu’expressément exclue par le texte même de la directive. L’article 1er paragraphe 1 c) précise
ainsi que :
« la présente directive est applicable aux entreprises publiques et privées exerçant une
activité économique, qu’elles poursuivent ou non un but lucratif. Une réorganisation
administrative d’autorités administratives publiques ou le transfert de fonctions
administratives entre autorités administratives publiques ne constitue pas un transfert au
sens de la présente directive ».
Les choses ne s’avèrent cependant pas aussi simples qu’elles n’y paraissent. La finalité
protectrice des dispositions de la directive conduit parfois la Cour de justice à opérer une
interprétation dans un sens résolument favorable au travailleur, à laquelle n’échappe pas les
hypothèses de restructurations administratives en dépit d’une rédaction manifestement exclusive. Par
un arrêt Scattalon en date du 6 septembre 2011365, la Cour de justice de l’Union européenne a ainsi
considéré que la reprise par une autorité publique du personnel employé par une autre autorité
publique chargé de la fourniture à des écoles de services auxiliaires constituaient un transfert
d’entreprise lorsque le personnel est constitué d’un ensemble structuré d’employés protégés en tant
que travailleurs. Dans une telle espèce, le transfert de personnels intervenant entre autorités
publiques, on aurait valablement pu penser qu’il relevait sans difficulté d’une restructuration
365 CJUE, 6 septembre 2011, aff. C-108/10, Ivana S. c/ Ministero dell’Istruzione dell’Università e della Ricerca, note E. JEANSEN, « Caractérisation d’un transfert d’entreprise entre autorités publiques », JCP S n°40, 4 octobre 2011, p. 1444 ; RDT 2011, p. 701
111
d’administrations publiques. La cour écarte pourtant une telle qualification et n’hésite pas à conclure
à l’inverse à l’existence d’une « entreprise », impliquant l’application de la directive 2001/23/CE.
La position extensive du juge communautaire ne remet pour autant pas en cause
l’inapplicabilité des dispositions translatives de la directive aux hypothèses de réorganisations
administratives françaises, dès lors que le critère préalable, tenant à la qualification de travailleur des
agents concernés par le transfert dont il vient d’être précisé qu’elle ne pouvait être retenue à l’égard
des agents publics français en raison de leur régime juridique particulier, fait défaut en droit interne.
Elle met toutefois en lumière les frontières souvent ténues qui peuvent exister entre notion
d’entreprises et de restructurations administratives en pratique. L'avocat général Mayras relevait
d’ailleurs dans ses conclusions sur l'arrêt Sotgiu du 12 février 1974366 qu'entre l'idée classique
d'administration renvoyant à l'Etat puissance publique et les services publics industriels et
commerciaux, il existe un grand nombre de situations intermédiaires. De la même manière, dans ses
conclusions du 11 juin 1996 dans l’affaire Henke, l'avocat général Lenz relevait que « le critère de
l'exercice de la puissance publique est très difficile à définir puisqu'il est sujet à des modifications
constantes. Des activités considérées aujourd'hui comme relevant exclusivement de la puissance
publique seront peut-être exercées, dans quelques années à peine, dans un but lucratif par une
entreprise privée. On ne peut pas exclure non plus que des tâches effectuées par une entreprise
privée seront à nouveau considérées, dans quelque temps, comme des fonctions relevant de
l'exercice de la puissance publique » 367.
Au demeurant, les hypothèses d’intercommunalité en droit interne ou de réorganisation d’un
service entre administrations ne sauraient relever du champ de la directive communautaire et
impliquer dès lors un transfert automatique des agents vers la nouvelle structure en charge de la
compétence à laquelle se rattache les fonctions de l’agent. La jurisprudence communautaire a, à de
nombreuses reprises, confirmée ce principe posé par la directive en considérant que cette dernière
devait « être interprété(e) en ce sens qu'elle ne s'applique pas au transfert d'attributions
administratives d'une commune à un groupement intercommunal »368. Dans le même sens, la CJCE a
considéré « qu’un organisme de l’Etat qui cède son établissement ne pas invoquer les articles 3,
paragraphe 1, et 1er, paragraphe 1, sous c), de la directive 2001/23 à l’encontre d’un travailleur en
vue de lui imposer la poursuite de sa relation de travail avec un cessionnaire »369.
∴
Les agents de droit public, qu’il soient placés dans une situation statutaire et réglementaire à
l’égard de la personne publique employeur, ou dans une situation contractuelle de droit public, ne
366 CJCE, 12 février 1974, Sotgiu c/ Deutsche Bundespost, aff. 152/73, Rec CJCE., p. I- 153. 367 CJCE, 15 octobre 1996, Henke, aff. C-298-94, Rec. CJCE, p. I-4989, Dr. adm. 1997, comm. 44. 368 Ibid. 369 CJCE, 26 mai 2005, aff. C-297/03, Sozialhilfeverband Rohrbach contre Arbeiterkammer Oberösterreich et Österreichischer Gewerkschaftsbund (J.O.C.E. n° C 182, 23 juillet 2005, p. 19).
112
peuvent donc se voir opposer les dispositions du code du travail transposant la directive 2001/23/CE
concernant le transfert des contrats de travail en cas de changement dans la situation juridique de leur
employeur. Si le raisonnement opéré par les juridictions administratives et communautaires sur ce
point est parfaitement cohérent en droit, il laisse pourtant en suspens la question du sort des agents
publics affectés à une activité publique en cas de changement de gestionnaire. Il convient alors de
rechercher des solutions dans le droit applicable à cette catégorie particulière d’agents, à savoir le
droit de la fonction publique. Les voies qui s’offrent aux structures gestionnaires d’activités
publiques sont ici multiples, la réponse apportée à cette question relevant selon les hypothèses de
législations et règlementations différentes.
En effet, alors que les règles de droit commun applicables aux agents de droit privé
apparaissent relativement homogènes, organisées autour des dispositions centrales du code du travail
et de la question essentielle de leur application, les règles dont relèvent les personnes publiques
diffèrent selon le contexte dans lequel intervient le changement de gestionnaire. Le législateur est
ainsi intervenu pour organiser le transfert de ces personnels en cas de modifications dans
l’organisation administrative d’activités publiques. Les dispositifs législatifs ainsi élaborés ont
vocation à répondre à des nécessités pratiques propres aux collectivités publiques et générées par les
réformes successives, notamment de transferts de compétences. Le transfert des personnels de droit
public s’inscrit donc dans un cadre législatif spécifique, indépendant du droit commun du travail.
,@E@\E@=G:* WR* * /0@==;6A@B6;658* 9:?* Ea\;:?* A;@??6C7:?* 97* ?5@575* E:;@56>:?* Y* ;@*<3B6;658**
L’agent public, ou le fonctionnaire de manière générale, apparaît dans l’inconscient collectif
comme un travailleur placé dans une situation d’emploi immuable, occupant le même poste tout au
long de sa carrière professionnelle. Derrière cette idée commune, qui traduit en réalité bien plus la
sécurité de l’emploi dont bénéficient les agents publics, se cache une réalité plus contrastée marquée
par des possibilités de modifications significatives de la situation d’emploi des agents publics, par
changements de corps ou cadre d’emploi et changements d’affectation, par concours en cours de
carrière ou par intégration, reclassement, mutation d’office dans l’intérêt du service ou à la demande
du fonctionnaire, permutation ou mobilité interne ou externe. La notion de mobilité professionnelle
fait en effet partie intégrante du régime juridique applicable aux agents publics, chacun des statuts
s’attachant à prévoir un ensemble de mécanismes de nature à permettre le passage de l’agent
publique d’une fonction publique à une autre, d’un corps ou cadre d’emploi à l’autre (A). Un tel
arsenal juridique s’est à ce titre révélé d’un réel intérêt pour les personnes publiques dans
l’appréhension et la résolution des problématiques sociales inévitablement induites par les réformes
structurelles de l’administration (B).
113
-*S*+:?*<8A@46?<:?*9:*<3B6;658*64G8E:45?*Y*;@*[34A5634*=7B;6C7:*
Erigée en garantie fondamentale par le statut général des fonctionnaires370, la mobilité des
fonctionnaires constitue un mécanisme d’évolution de la carrière des agents publics inscrit dans le
statut général dès son avènement et repris par l’ensemble des statuts des différentes fonctions
publiques (1). Mécanisme des plus classiques donc, la mobilité est en outre devenue ces dernières
années sous l’effet de la réforme de l’Etat l’un des thèmes centraux de la gestion des ressources
humaines des employeurs publics (2).
UV +:?*96?=3?656[?*3E6\64:;;:<:45*64?AE65?*9@4?*;:*?5@575*
Faculté pour un fonctionnaire d’évoluer au sein d’une autre fonction publique ou à l'intérieur
de chacune des fonctions publiques en passant d'un corps ou cadre d'emploi à un autre, la mobilité
peut être assurée par la mise en œuvre d’un panel étendu de mécanismes amenés à jouer en fonction
des circonstances et répartis en deux catégories : au sein d’un même corps ou cadres d’emplois par la
voie de la mutation, ou entre corps ou cadres d’emploi par la voie du détachement ou de la mise à
disposition.
Les évolutions structurelles d’institutions administratives, qui intéressent la présente étude au
titre de la problématique du transfert des fonctionnaires et agents publics non titulaires, visent
cependant avant tout le basculement d’activité d’une structure à une autre. Dès lors, c’est davantage
vers la mobilité s’exerçant entre corps ou cadres d’emplois, voire entre fonctions publiques, qu’il
convient de se tourner, et plus particulièrement vers la mise à disposition et le détachement371. La
première traduit la situation de l'agent qui travaille au sein d'une administration autre que son
administration employeur, tout en restant dans son corps ou cadre d'emplois d'origine, en étant réputé
occuper son emploi d'origine et en continuant à percevoir la rémunération correspondante à cet
emploi. Le second consiste quant à lui dans la position du fonctionnaire placé hors de son corps ou
370 Article 14 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dite loi Le Pors (J.O. du 14 juillet 1983 p. 2174) qui dispose que « L'accès des fonctionnaires de l'Etat, des fonctionnaires territoriaux et des fonctionnaires hospitaliers aux deux autres fonctions publiques, ainsi que leur mobilité au sein de chacune de ces trois fonctions publiques, constituent des garanties fondamentales de leur carrière. A cet effet, l'accès des fonctionnaires de l'Etat, des fonctionnaires territoriaux et des fonctionnaires hospitaliers aux deux autres fonctions publiques s'effectue par la voie du détachement suivi, le cas échéant, d'une intégration, ou par la voie de l'intégration directe. Les statuts particuliers peuvent également prévoir cet accès par voie de concours interne et, le cas échéant, de tour extérieur. En outre, la mobilité des fonctionnaires entre les trois fonctions publiques peut s'exercer par la voie de la mise à disposition ». 371 Le placement en position hors cadre, qui permet à un fonctionnaire de servir dans une administration ou une entreprise publique, dans un emploi ne conduisant pas à pension du régime général ou de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, ou dans un organisme national, sans bénéficier de ses droits à l’avancement et à la retraite dans son corps ou cadre d’emplois d’origine, ou la disponibilité, qui est la position du fonctionnaire placé hors de son administration ou service d’origine, sans bénéficier de ses droits à l’avancement et à la retraite dans son corps ou cadre d’emplois d’origine, n’ont par essence pas vocation à répondre aux nécessités de gestion des ressources humaines des autorités administratives à l’occasion des restructurations administratives. Ils sont, bien à l’inverse, une faculté offerte aux fonctionnaires pour une période donnée de mettre entre parenthèse leur carrière, au prix de l’abandon provisoire de leurs droits à pension et à l’avancement.
114
cadre d’emplois d’origine, mais continuant à bénéficier de ses droits à l’avancement et à la retraite
dans ce corps ou cadre d’emplois. Il convient toutefois de relever que si l’éventail des positions est le
même dans les trois fonctions publiques, en revanche, leur régime n’y est pas exactement le
même372.
Marcel Pochard373, évoquant le caractère statutaire et réglementaire du régime applicable aux
agents publics, traduit parfaitement les raisons du particularisme du régime social de ces agents, de
son exorbitance de droit commun. Selon lui, « le principe vraiment fondateur de notre système de
fonction publique repose sur l'idée qu'il appartient à la seule puissance publique - sans négociation
préalable avec les représentants des agents, compte tenu de la nature particulière du lien qui unit
l'Etat à ses agents374 et de la nécessité de préserver en permanence les prérogatives de la puissance
publique, - de fixer unilatéralement le statut de ceux-ci. Il en résulte que l'Etat doit pouvoir, d'une
part, modifier et faire évoluer en permanence ce statut en fonction des intérêts supérieurs du pays et,
d'autre part, prendre à l'égard des agents individuellement toute mesure nécessaire sans leur
consentement »375.
∴
Un certain paradoxe peut néanmoins se fait jour : le statut général de la fonction publique,
fait montre à l’égard de la carrière des agents publics d’une véritable souplesse, en ce qu’il prévoit
un certain nombre de mécanismes de nature à permettre la mobilité des agents entre et au sein de
l’administration. Mais la pratique révèle une rigidité réelle dans la mise en œuvre de ces dispositifs
variés, qui aboutit au final à les priver d’effets. La mobilité entre fonctions publiques concerne
aujourd’hui peu de fonctionnaires et essentiellement des agents de catégorie A, en raison d’un certain
nombre de « freins statutaires »376. Le législateur a pris acte de ces lacunes et multiplié ces dernières
années les dispositifs législatifs pour renforcer la mobilité au sein et entre les fonctions publiques :
d’abord par la loi du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique377 et la loi du 19 février
372 J.-M. AUBY et a. op. cit.,, p. 76 -77. 373 M. POCHARD, « Quel avenir pour la fonction publique ? », AJDA 2000, p. 3. 374 Voir le rapport présenté à l'Assemblée nationale constituante par Yves Fagon, député MRP : « La fonction publique n'est pas un métier, une profession, comme les autres. Des intérêts publics, supérieurs aux intérêts privés sont ici en cause. L'Etat, au regard de ses employés, n'est pas un simple patron. Il est en droit de réclamer de ses agents une discipline plus suivie », Rev. adm. 1996, n° spécial op.cit, annexes établies par Jeanne Siwek-Pouydesseau 375 Le « particularisme » qui marque la fonction publique a été très « poussé » et ne concerne pas seulement le régime de carrière, mais aussi les droits sociaux et singulièrement le régime de retraite, qui constitue un régime spécial bâti sur l'analyse fictive, chère aux organisations syndicales, que la pension de retraite n'est qu'un salaire différé, d'où son inscription au grand livre de la dette publique et sa prise en charge sur le budget de l'Etat 376 S. VALLEMONT, La gestion des ressources humaines, Rapp. Doc. Fr. 1998 ; Commissariat au plan, Gestion dynamique de la fonction publique : une méthode, Rapport mai 2000, notamment annexe 6. 377 Loi n°2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique (J.O. du 6 février 2007).
115
2007 relative à la fonction publique territoriale378, puis plus récemment par la loi du 3 août 2009
relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique379.
WV +:?* 96?=3?656[?* <39:E46?8?* =37E* <:4:E* :[[6A@A:<:45* ;:?* E8[3E<:?*E8A:45:?*:5*Y*>:46E*9:?*64?56575634?*@9<646?5E@56>:?*[E@4_@6?:?*
Bien que consacrée par chacun des statuts de la fonction publique, et de surcroît érigée en
garantie fondamentale de la carrière du fonctionnaire par l’article 14 de la loi du 13 juillet 1983
portant droit et obligations du fonctionnaire, la mobilité se heurtait dans sa définition initiale à de
nombreux obstacles, tant juridiques que pratiques, qui en annihilait sensiblement la portée380. La
force de certains usages ne fut pas non plus totalement étrangère aux difficultés de mise en œuvre de
la mobilité des fonctionnaires, qu’ils soient liés tant à l'exercice du pouvoir hiérarchique qu'aux
structures corporatives intrinsèques à l'organisation de la fonction publique381. Dans un contexte
marqué par la « modernisation » de l’Etat, les mécanismes de mobilité ne pouvaient cependant
souffrir plus longtemps de tels freins à leur mise en œuvre.
Témoignant de l’enjeu pour chaque fonction publique de disposer de mécanismes de
mobilité pertinents pour affronter efficacement les réformes structurelles qui s’engageaient au sein
des institutions administratives françaises, plusieurs lois sont donc intervenues au cours des cinq
dernières années pour modifier, sinon perfectionner, les mécanismes de mobilité dans la fonction
publique. C’est ainsi que la loi du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique382 a opéré
de substantielles modifications des règles de mise à disposition, en étendant notamment le champ
d’application de cette pratique aux fonctions publiques territoriale et hospitalière, marquant selon
l’expression de la doctrine « une nouvelle étape vers une fonction publique ouverte383 » (a). La loi du
3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique a, quant à
elle, modifié en profondeur les règles relatives au détachement et à l’intégration directe afin de
promouvoir la mobilité entre les fonctions publiques384 (b).
*
378 Loi n°2007-209 du 19 février 2007 de la fonction publique territoriale (J.O. du 21 février 2007). 379 Loi n°2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique territoriale (J.O. du 6 août 2009). 380 Certaines évolutions de carrière exigent par exemple un minimum d’ancienneté dans un poste ou un grade. 381 E. MATUTANO, « La mobilité d'emploi dans les fonctions publiques : entre textes incitateurs et pratiques restrictives », AJFP 2009, p 19. L’auteur dresse ici un constat rare et édifiant de la conception de la mobilité par les collectivités territoriales avant l’intervention du législateur en 2007 et 2009. 382 Loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique (J.O. du 6 février 2007, p. 2160). 383 P. LAGRANGE, « La réforme de la mise à disposition : nouvelle étape vers une fonction publique ouverte ? », AJDA 2007, p. 524 384 D. JEAN-PIERRE, « La loi relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique », JCP A 2009, n° 2232.
116
@R !4:*<6?:*Y*96?=3?65634**9:?*[34A56344@6E:?*A;@6E:<:45*85:497:*
Sensiblement modifiée une première fois par la loi du 2 février 2007, le régime de la mise à
disposition des fonctionnaires de l'État a une nouvelle fois été modifié par la loi du 3 août 2009. Il en
résulte un régime de la mise à disposition redéfini dans un sens volontairement extensif. La mise à
disposition des fonctionnaires d’Etat, à l’instar de ce qui existait pour la fonction publique
territoriale, est désormais possible auprès des administrations de l'État et de ses établissements
publics, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, des établissements publics
hospitaliers, des organisations internationales intergouvernementales, d'un État étranger et des
organismes contribuant à la mise en œuvre d'une politique de l'État, des collectivités territoriales ou
de leurs établissements publics administratifs, pour l'exercice des seules missions de service public
confiées à ces organismes385. En outre, la mise à disposition d’un fonctionnaire de l’Etat peut n’être
que partielle, ou selon les termes de la loi de 2007 « à temps partagé », à l’instar de la possibilité qui
existait pour les agents de la fonction publique territoriale. Cela présente l'avantage d'introduire plus
de souplesse dans la gestion des ressources humaines, de permettre une « pluriactivité » ou en tout
cas une diversification des activités de l'agent, d'encourager et de rendre plus aisée la mobilité386.
Enfin, la mise à disposition doit désormais obligatoirement faire l’objet d’un remboursement
par l’organisme d’accueil de la rémunération versée par l’administration d’origine. La loi n° 2007-
148 du 2 février 2007 pose ainsi un principe général d'obligation de remboursement, qui doit être
rappelé dans la convention. Le décret n° 2007-1542 du 26 octobre 2007 précise que « l'organisme
d'accueil rembourse à l'administration d'origine la rémunération du fonctionnaire mis à disposition
ainsi que les cotisations et contributions y afférentes »387. Il s’agit là d’une innovation majeure, et
devenue impérative face aux reproches exprimés par les juridictions financières à cet égard. En effet,
si le principe de la compensation financière existait auparavant, il ne figurait cependant pas dans la
législation. Le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ne faisait ainsi mention de cette exigence tout
en permettant une exonération partielle ou totale, temporaire ou permanente du remboursement, sans
qu’aucune justification n'ait à être apportée. Désormais, il ne peut être dérogé à la règle du
remboursement que pour une période d’un an au maximum et sur la moitié au plus de la dépense de
personnel afférente afin de favoriser par une subvention la mise à disposition de ces agents auprès
d'autres personnes publiques avec une incitation financière à la clé388.
*
385 L’affectation à une mission d’intérêt général n’est désormais plus suffisante. 386 H. PAULIAT, « Carrière des fonctionnaires », J.-Cl. Fonct. pub., Fasc. 250, 2011, n°11. 387 En cas de pluralité d'organismes d'accueil, ce remboursement est dû au prorata de la quotité de travail dans chaque organisme. 388 Une telle dérogation a pu être qualifiée de « prime à la mise à disposition » par la doctrine, et notamment D. JEAN-PIERRE, op. cit.
117
BR !4* 985@AG:<:45* @??37=;6* :5* 98=@??8* =@E* ;06458\E@5634* :5*;0@AAa?*96E:A5*Y*;@*[34A5634*=7B;6C7:*
L’article 13 bis de la loi du 13 juillet 1983 tel que modifié par la loi relative à la mobilité et
au parcours professionnels dans la fonction publique pose le principe de l'accès par voie de
détachement éventuellement suivi d'une intégration ou par voie d'intégration directe à tous les corps
et cadres d'emplois. Ce principe d'ouverture générale prime désormais toutes les dispositions
contraires pouvant être contenues dans les décrets portant statuts particuliers. Si l’impact pratique
d’une telle mesure ne peut encore être mesuré, il ne saurait cependant être nié une évolution sensible
du droit de la fonction publique sur cet aspect dès lors que le fonctionnaire détaché se voit désormais
reconnu, au terme d’un délai de cinq ans, un véritable droit à l’intégration directe dans tous les corps
et cadres d'emplois comparables à celui auquel il appartient originellement389, et ce dans les trois
fonctions publiques. Comme le souligne fort justement Didier Jean-Pierre, il est certain qu’un tel
droit trouve son origine « dans la volonté du gouvernement d’accompagner, sans l’afficher
officiellement, le départ de nombre de fonctionnaires d’Etat vers les rangs de la fonction publique
territoriale, déjà largement pourvus par les dernières réformes de décentralisation ». Les critiques
récurrentes adressées à l’endroit des collectivités territoriales quant au nombre croissant d’agents
territoriaux recrutés éludent souvent cet aspect pourtant quantitativement indéniable.
Enfin, il convient de noter une véritable évolution des règles du détachement. Sans mettre fin
au principe de la double carrière, l'article 5 de la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 en a sérieusement
nuancé la rigueur en ajoutant dans les trois fonctions publiques civiles qu'il est tenu compte, lors de
la réintégration à l'issue d'un détachement, du grade et de l'échelon atteints dans le corps ou cadre
d'emplois de détachement sous réserve naturellement qu'ils soient plus favorables à l'intéressé. Dans
le même esprit, le fonctionnaire intégré dans un corps ou cadre d'emplois d'accueil doit voir le grade
et l'échelon de son corps ou cadre d'emplois d'origine pris en compte.*
N* S* !4* [349:<:45* A:45E@;* 9@4?* 9:* 43<BE:7?:?* GI=35Ga?:?*908>3;75634?*90@A56>658?*=7B;6C7:?*
Les autorités administratives ont ainsi eu recours à de nombreuses reprises aux mécanismes de
mobilité pour organiser la transition sociale des évolutions structurelles qu’elles ont mené à bien. Le
premier acte de la décentralisation (1) et la réforme actuellement en cours de « révision générale des
politiques publiques » (ci-après RGPP) en sont deux exemples manifestes (2). Mais les mécanismes
classiques de mobilité du statut de la fonction publique peuvent également s’avérer d’une pertinence
essentielle pour la résolution de situations plus ponctuelles qui, bien que d’une ampleur sans
389 Notons toutefois que les corps qui comportent des attributions d'ordre juridictionnel ne sont pas concernés par cette réforme (corps des membres du Conseil d'État, des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; membres de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes).
118
commune mesure avec des réformes aussi profondes que la décentralisation ou la RGPPP, n’en
demeure pas moins tout aussi sensibles d’un point de vue social (3).
UV !4* 96?=3?656[* e*A;8*f* ;3E?* 9:*<6?:* :4*g7>E:* 9:* ;@* 98A:45E@;6?@5634* 9:*UhiW*
La décentralisation de compétences de l’Etat au profit de collectivités territoriales amorcée
au début des années 1980 a constitué à n’en pas douter une des réorganisations administratives les
plus marquantes, tant de par son ampleur que par la révolution juridique qu’elle impliquait. L’Acte I
de la décentralisation, qui a englobé en pratique une quarantaine de lois et 300 décrets qui ont été
adoptés de 1981 à 1986390, s’est ouvert avec la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des
communes des départements et des régions391. Cette loi, qui a marqué le point de départ de ce
processus, a ainsi apporté trois bouleversements majeurs : la transformation de la tutelle
administrative a priori en contrôle a posteriori392, la consécration de la Région au rang de
collectivité territoriale dont l’exécutif est élu au sein du conseil régional, en vertu du principe de libre
administration des collectivités393 et le transfert de l’exécutif départemental et régional au profit
d’un élu, le président du conseil général et celui du conseil régional, ce transfert marquant la fin du
dédoublement fonctionnel en vigueur depuis 1871, le préfet n’étant plus que le représentant de l’Etat
dans le département.
La décentralisation des institutions a donc conduit à une évolution sensible du mode
d’organisation de l’Etat unitaire français, mais n’a pour autant fait l’objet d’aucune définition
textuelle, ni constitutionnelle ni législative. Il ressort néanmoins de la doctrine contemporaine un
essai de définition reposant sur trois conditions de la décentralisation pour donner de celle-ci une
définition juridique394. En premier lieu, la reconnaissance d’une personnalité juridique des
collectivités territoriales, les collectivités décentralisées étant titulaires de droits et d'obligations, et
bénéficiaires de l'autonomie financière grâce à un patrimoine propre et à l'adoption d'un budget
distinct. La décentralisation présuppose donc aussi des organes distincts de ceux de l'État mais aussi
des moyens de toutes natures, personnels, financiers et matériels suffisants et qui ne dépendent pas
totalement de l'État. La seconde condition tient à la libre administration de ces collectivités, principe
directement garantit par la Constitution et assurant ainsi l’élection des organes des collectivités
390 La décentralisation en France: rétrospective historique, 31 mai 2007, Carrefour local, SENAT, http://carrefourlocal.senat.fr/dossiers/decentralisation_france_retrospective_historique/index.html,**391 Loi n°82-813 relative aux droits et libertés des communes des départements et des régions, dite loi Defferre (J.O. du 3 mars 1982, p. 730). 392 Et dont les modalités seront précisées par la loi du 22 juillet 1982 modifiant et complétant la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions et précisant les nouvelles conditions d'exercice du contrôle administratif sur les actes des autorités communales, départementales et régionales (J.O. du 23 juillet 1982, p. 2347). 393 Les premières élections des conseillers régionaux eurent lieu en 1986. 394 M. VERPAUX, « Principes d’organisations administratives », J.- Cl. Coll. Terr., 2012, Fasc. 10.
119
territoriales. Reprenant l'essentiel de l'article 87, alinéa 1er de la Constitution du 27 octobre 1946 qui
disposait que « les collectivités territoriales s'administrent librement par des conseils élus au
suffrage universel direct », l'article 72, alinéa 3 de la Constitution de 1958 pose la règle selon
laquelle les collectivités territoriales s'administrent librement par des conseils élus. L'élection de ces
derniers est d'ailleurs la seule condition concrète posée par la Constitution pour que la libre
administration soit effective.
Il ne s’agit cependant pas ici de retracer les origines et les évolutions de la décentralisation,
qui ont fait l’objet de développements des plus riches et abondants395, mais d’envisager plus
spécifiquement l’impact de ce processus inédit dans l’histoire française sous l’angle social. Car
l’avènement d’une existence juridique et d’une fonction centrale accordée aux collectivités
territoriales a supposé la mise en place de moyens financiers, matériels et humains de nature à
permettre aux collectivités d’assumer ce nouveau rôle prépondérant dans la conduite des politiques
au niveau local. Comment dès lors l’affectation de personnels dédiés aux collectivités territoriales
nouvellement compétentes s’est-elle opéré ?
La loi Defferre en accordant des droits et libertés aux communes, départements et régions, a
posé le principe d’un transfert corrélatif des moyens nécessaires à l’exécution des missions
décentralisées au profit des collectivités territoriales. Un premier constat s’impose : des trois aspects
qui devaient ainsi être pris en compte - dotations financières, biens et personnels –, l’aspect financier
fut sans nul doute celui auquel l’ensemble des acteurs attachaient la plus grande importance, et dont
la gestion devait conditionner sans nul doute la réussite d’une réforme aussi profonde des institutions
administratives françaises. La révision constitutionnelle du 28 mars 2003 a d’ailleurs traduit l’enjeu
de la question financière de la décentralisation des compétences en inscrivant dans la Constitution le
principe de l’autonomie financière des collectivités territoriales396. Il s’agissait en effet, au-delà de la
reconnaissance d’une existence juridique des collectivités, de définir les compétences nouvellement
confiées aux collectivités locales, et d’y attacher l’ensemble des ressources nécessaires à leur
exercice. À la loi portant droits et libertés des communes, des départements et des régions a donc
395 Voir notamment : La Décentralisation, Doc. Fr., coll. Regards sur l’actualité, n° 286, décembre 2002, 84 p. ; J.-B. AUBY et B. FAURE [ss. dir.], Les collectivités et le droit – Les mutations actuelles , Actes du colloque tenu à Pau du 24 au 25 juin 1999 organisé par l’association française de droit des collectivités locales, Dalloz, coll. Thèmes et commentaires, 2001, 285 p. ; .J.-M. PONTIER, « Décentralisation – La deuxième loi relative à la répartition des compétences entre l’Etat et les collectivités territoriales », AJDA 1983, p. 466 ; du même auteur : « La décentralisation territoriale en France au début du XXIe siècle », RGCT 2002, p. 87 ; B. FLAMAND-LEVY, « Nouvelle décentralisation et forme unitaire de l’Etat », RFDA 2004, p. 59 ; R.HERTZOG, « Décentralisation : de l’organisation, de la gestion ou du pouvoir administratif ? », AJDA 2002, p.1149 ; J.-F. BRISSON, « La France est une République indivisible … son organisation est décentralisée ! », RDP 2003, p. 111 ; R. NOGUELLOU, « La conduite par l'État de la décentralisation », AJDA 2009, p. 3 ; Voir également « Dossier spécial : Trente ans de décentralisation », AJDA 2012, p. 457. 396 L’article 72-2 de la Constitution est ainsi rédigé désormais qu’il prévoit que : « tout transfert de compétences entre l’Etat et les collectivités territoriales s’accompagne de l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice » et que « toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi ». Au surplus, l’article 72-2 précise que les collectivités territoriales doivent bénéficier d’une « part déterminante » de recettes fiscales et de ressources propres dans l’ensemble de leurs ressources.
120
succédé la loi relative à la répartition des compétences de celles-ci397 qui a permis d’établir les
modalités d’exercice des missions relevant désormais des institutions locales en lieu et place de
l’Etat.
L’aspect social présentait à n’en pas douter une importance certaine, tant en termes
d’effectifs que d’enjeu sur la réussite de la réforme. Mais à la différence des volets financiers et
matériels, son appréhension ne pouvait se résumer à un transfert pur et simple des personnels vers les
nouvelles collectivités territoriales. Car il faut bien avoir à l’esprit que si les communes,
départements, et régions étaient des institutions administratives qui préexistaient à la réforme de
1982, la tutelle dont elles étaient l’objet transcendait l’ensemble des domaines, dont celui des
services eux-mêmes. Ces collectivités étaient ainsi dépourvues de personnels propres, les agents
affectés à ces entités étant mis à disposition par l’Etat. Il suffit pour illustrer ce constat de reprendre à
titre d’exemple le dispositif élaboré par la loi du 5 juillet 1972 portant création et organisation des
régions françaises398 et précisé à l’article 16 selon lequel : « pour les attributions de la présente loi,
le Préfet de Région utilise les services de l’Etat dans la Région. Il n’est pas créé à cette fin de service
de la Région ». Dès lors, l’octroi d’une « autonomie » administrative aux collectivités territoriales
commandait l’avènement d’un corps spécifique aux collectivités. Les propos du Président du Centre
national de la fonction publique territoriale399, Pierre Tabanou, lors d’un colloque sur l’avenir de la
fonction publique territoriale à l’Ecole nationale d'application des cadres territoriaux d'Angers en
1985, se voulaient incantatoires : « la fonction publique territoriale existe, je l'ai rencontrée »400. Ils
se révèlent plus de vingt cinq après prémonitoires.
L’ampleur de l’évolution organisationnelle engendrée par la décentralisation des
compétences aux collectivités territoriales ne pouvait donc raisonnablement s’opérer sans délai de
mise en œuvre. Le dispositif de gestion des ressources humaines nécessaires à l’accomplissement de
la décentralisation fut donc progressif. La loi du 2 mars 1982, après avoir énoncé en préambule
l’édiction à venir d’une loi déterminant les garanties statutaires accordées aux personnels des
collectivités locales, institua « jusqu’à la publication de la loi […] relative à la répartition des
compétences entre les communes, les départements, les régions et l’Etat », un régime de mise à
disposition « des services extérieurs de l’Etat » dont les conseils généraux pouvaient disposer « en
tant que de besoin », « pour la préparation et l’exécution des délibérations du conseil général ». La
loi ainsi visée fut adoptée le 7 janvier 1983401 et posa en son article 7 le principe clair selon lequel
« tout transfert de compétences de l’Etat au profit des départements et des régions s’accompagne du
transfert des services correspondants ». Dans l’attente de l’intervention d’une loi portant statut de la
397 Loi n°83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions (J.O. du 9 janvier 1983, p. 215). 398 Loi n°72-619 portant création et organisation des régions (J.O. du 9 juillet 1972, p. 7176). 399 Etablissement qui était encore le Centre de formation des personnels communaux. 400 J. BOURDON, « La fonction publique territoriale, 20 ans d'évolution permanente », AJDA 2004 p. 121 401 Loi précitée n°83-8 du 7 janvier 1983. .
121
fonction publique et de la signature des conventions tripartite pour les régions et les départements, le
législateur étendit le mécanisme de mise à disposition élaboré pour les départements par loi du 2
mars 1982. L’extension ainsi opérée concerna également les communes, non visées à l’article 7
précité. L’article 10 de la loi du 7 janvier 1983 précisa ainsi que « les services de l'Etat dans les
régions et les départements autres que ceux mentionnés à l'article 7 ci-dessus402 et qui sont
nécessaires à l'exercice des compétences transférées aux communes, aux départements et aux
régions, sont mis à la disposition, en tant que de besoin, de la collectivité territoriale concernée, dans
les conditions prévues aux articles 27 et 74 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 précitée. Il en est de
même, jusqu'à la conclusion de la convention prévue à l'article 8 de la présente loi, des services de
l'Etat qui doivent être transférés au département ou à la région ».
WV !4* 96?=3?656[* =;@A8* @7* Ag7E* 9:* ;@* E8>6?634* \848E@;:* 9:?* =3;656C7:?*=7B;6C7:?***
« L’administration ne doit plus pouvoir s’opposer à la mobilité d’un agent qui souhaite aller
vers un autre emploi, dans une autre administration ou dans le secteur privé […]. Il faut faire
circuler les hommes, les idées, les compétences. C’est une idée totalement étrangère à notre
tradition administrative, à son organisation verticale, à sa gestion par corps, à ses cloisonnements
statutaires ». Ce discours, prononcé par le Président de la République à l’occasion d’un déplacement
à l’Institut régional d’administration de Nantes le 19 septembre 2007, s’inscrit dans le cadre d’une
évolution amorcée ces dernières années tendant à réformer la gestion des ressources humaines dans
la fonction publique, et érigeant la mobilité en instrument de politique structurante pour l’allocation
et la gestion de ces ressources humaines publiques. Plusieurs lois se sont ainsi succédées ces
dernières années pour tenter de faciliter la mobilité, au sein et entre fonctions publiques403. La loi
n°2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction
publique marque le point d’orgue de cette évolution404. Elle poursuit deux objectifs, qui sans être
contradictoires peuvent s’avérer plus ou moins favorables aux agents et expliquent les vifs débats qui
ont pu animé son adoption, tant au niveau parlementaire que syndical : d’une part, instaurer pour le
fonctionnaire un véritable droit à la mobilité au sein de la fonction publique en supprimant tous les
obstacles à son effectivité ; d’autre part, favoriser la restructuration des administrations de l’Etat
issue de la révision générale des politiques publiques (RGPP) en plaçant le cas échéant l’agent en
situation de « réorientation professionnelle »405. Ce deuxième aspect, certainement le plus polémique,
traduit selon nous l’enjeu patent que représentent les mécanismes de mobilité et de mutation pour
402 C'est-à-dire la région et le département. 403Loi précitée n°2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique (J.O. du 6 février 2007, p. 2160) ; Loi précitée n°2007-209 du 19 février 2007 de la fonction publique territoriale (J.O. du 21 février 2007, p. 3041). 404 Loi précitée n°2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique territoriale (J.O. du 6 août 2009, p. 13116). 405 O. DORD, « La loi Mobilité ou l’adaptation du statut par une gestion rénovée des personnels », AJDA 2010, p. 193.
122
l’Administration dans sa volonté, et sa nécessité, de réorganisation. Cet objectif de restructuration de
l’Administration, poursuivi au travers de ce que le gouvernement a appelé « la révision générale des
politiques publiques », ci-après la RGPPP, a ainsi été placé au cœur du programme gouvernemental
et se traduit aujourd’hui par l’adoption de 374 décisions, organisées autour de 6 axes de
modernisation, qui ont été adoptées lors des 3 conseils de modernisation des politiques publiques qui
ont eu lieu entre décembre 2007 et juin 2008. Le défi auquel se trouve confronté les pouvoirs publics
est le résultat des réformes institutionnelles majeures qui sont intervenues au cours des vingt
dernières années, à l’origine avec l’Acte I de la décentralisation puis les transferts ultérieurs et enfin
la montée en puissance du phénomène d’intercommunalité. Ainsi, plus de 25 ans après l’acte I de la
décentralisation, quelques années après de nouveaux transferts de compétences de l’Etat vers les
collectivités territoriales, après les profondes modifications de frontières entre prérogatives de
puissance publique et domaine des activités privées ou commerciales, les évolutions de
l’organisation territoriale de l’Etat étaient restées trop modestes aux yeux du gouvernement mis en
place par le Président de la République Nicolas Sarkozy lors de son investiture406.*
XV !4*96?=3?656[*6496?=:4?@B;:*:4*<@56aE:*9:*A3<<@49:*=7B;6C7:*
Décentralisation, réforme générale des politiques publiques, autant de réformes pour ne pas
dire « révolutions » dans l’organisation administrative française dont la mise en œuvre et la réussite
reposent sur les mécanismes classiques de mobilité de la fonction publique. Mais ces mécanismes
peuvent également s’avérer d’une pertinence réelle dans la résolution du sort d’agents publics dans
des opérations beaucoup plus ponctuelles, mais aussi plus fréquentes, où la question sociale appelle
une réponse des plus efficaces. C’est ainsi le cas des transferts d’activités publiques opérés par
attribution ou renouvellement d’un contrat public par lequel la personne publique confie une activité
de service public à un tiers. La présence d’agents publics dans le contingent des agents à transférer
vers le nouvel opérateur désigné à l’issue de la consultation publique résulte alors de la combinaison
de deux facteurs : d’une part, la nature publique du précédent prestataire, que la personne publique
ait alors agi comme opérateur économique de droit public – à l’instar des chambres de commerce et
d’industrie gestionnaires d’aéroports ou de ports ou de syndicats mixtes gestionnaires de réseaux
d’eau et d’assainissement sur le territoire de communes voisines – ou comme gestionnaire en régie
du service, et d’autre part la nature publique des agents eu égard aux fonctions exercées. Sur ce
dernier point, le nombre d’agents publics à transférer diffèrera sensiblement selon la nature de
service public administratif ou de service public industriel et commercial de l’activité confiée à un
nouvel opérateur : si dans la première hypothèse, l’ensemble des agents affectés à l’activité pourra
revêtir la qualité d’agents publics, dans la seconde hypothèse ne seront potentiellement concernés
406 D. JEAN-PIERRE, « La loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique », JCP A 2009, n°2232.
123
que peu d’agents, principalement le directeur et le comptable public, et de manière encore plus
résiduelle certains agents exerçant des missions spécifiques407.
Au demeurant, quelque soit le nombre d’agents publics dont le transfert ne pourra s’opérer
par la voie classique des dispositifs légaux ou conventionnels du droit du travail, la résolution de la
question de leur passage au service du nouvel opérateur pourra être déterminante pour la bonne
conduite de l’évolution de l’activité publique et sa gestion sereine par les acteurs en présence. Elle ne
doit donc en aucun cas être négligée, et le choix de la mise à disposition peut alors participer d’une
mise en œuvre du changement facilité. En effet, deux solutions s’offrent alors aux acteurs en
présence pour assurer le transfert de ces agents publics vers le nouveau délégataire de service public
entreprise privée : la proposition d’un contrat de droit privé par le nouvel employeur et son
acceptation par l’agent, ou la mise à disposition par l’opérateur économique de droit public
employeur originel de l’agent public au profit de la nouvelle entité privée. Ce dernier aspect
concentre à n’en pas douter les faveurs des agents publics, en ce qu’il permet, du moins dans un
premier temps, de conserver le statut d’agents publics, nous y reviendrons plus amplement dans le
cadre de la deuxième partie de cette étude408.
∴
Aussi générales et étendues soient-elles, les voies classiques de mobilité s’avèrent souvent
insuffisamment pertinentes pour encadrer la gestion sociale de réformes administratives ou
d’entreprises publiques d’ampleur. Les mécanismes de mise à disposition ou de détachement
apparaissent ainsi davantage comme des instruments de gestion individuelle de la carrière de l’agent
plutôt que comme de véritables outils de gestion des effectifs de la fonction publique lors
d’opérations affectant un contingent important de personnels de droit public. Ils s’inscrivent au
surplus dans une perspective nécessairement temporaire sinon transitoire, peu satisfaisante pour
conduire des évolutions d’activités publiques difficilement réversibles, et assurément projetées sur le
long terme. L’ensemble de ces raisons a conduit le législateur à organiser spécifiquement le transfert
des agents publics dans de telles hypothèses. !
*
407 On pourra citer à titre d’exemple les agents affectés au SSLIA (service de sécurité et de lutte contre l’incendie d’aéronef). 408 Voir infra, p. 199.
124
':A5634* W* S* /:* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =7B;6A* ?7E* 74* [349:<:45*;8\@;*?=8A6[6C7:<:45*@93=58*!
La multiplication et la diversité des hypothèses d’évolutions d’activités publiques ont
conduit le législateur à s’emparer progressivement de la question sociale induite par chacune d’elle.
Il en résulte des dispositifs légaux très divers, tant au regard des profils des agents concernés que des
mécanismes instaurés. Ont ainsi été adoptées des dispositions d’application très marginales à l’image
des dispositions de l’article L. 1224-3-1 du code du travail (paragraphe 1) ou bien, à l’inverse, des
dispositions centrales dans des mouvements structurels d’ampleur comme le phénomène
d’intercommunalité (Paragraphe 2) ou encore de dispositions spécifiques à la privatisation du
régime juridique d’entités publiques (Paragraphe 3).
,@E@\E@=G:*U*L*/064?5@7E@5634*Y*;0@E56A;:*/R*UWW^LXLU*97*A39:*97*5E@>@6;**9074*96?=3?656[*?=8A6[6C7:*@7Z*@\:45?*434*5657;@6E:?*9:*9E365*=7B;6A*E:=E6?*=@E*74:*=:E?344:*<3E@;:*9:*9E365*=E6>8*37*=@E*74*3E\@46?<:*9:*9E365*=7B;6A*\8E@45*74*',#2**
La loi n° 2009-972 du 3 août 2009 a introduit à l’article L. 1224-3-1 du code du travail des
dispositions relatives aux effets sur les contrats de travail des agents publics non titulaires de la
reprise d'une activité constitutive d'une entité économique exploitée par une personne privée ou un
organisme de droit public. Visant à pallier les insuffisances de la loi du 26 juillet 2005 qui était restée
silencieuse sur ce point, les articles 24 et 25 de la loi du 3 août 2009 adoptent des dispositions
symétriques pour toutes les évolutions d’activités en rédigeant les deux premiers alinéas du nouvel
article L. 1224-3-1 par véritable transposition de l’article L. 1224-3 du code du travail :
« Sous réserve de l'application des dispositions législatives ou réglementaires spéciales, lorsque l'activité d'une personne morale de droit public employant des agents non titulaires de droit public est reprise par une personne morale de droit privé ou par une organisme de droit public gérant un service public industriel et commercial, cette personne morale ou cet organisme propose à ces agents un contrat régit par le présent code.
Le contrat proposé reprend les clauses substantielles du contrat dont les agents sont titulaires, en particulier celles qui concernent la rémunération. »
Les hypothèses d’application de ces dispositions apparaissent clairement circonscrites dès
lors que ne sont visés, d’une part, que les seuls agents publics non titulaires et, d’autre part, que les
cas de reprise de l’activité par une personne morale de droit privé ou par un organisme de droit
public gérant un service public industriel et commercial. D’autant que la loi réserve le cas des
dispositions législatives ou réglementaires spéciales qui s'opposeraient à la perte de leur statut de
droit public par les agents de la personne morale de droit public, conformément au droit
communautaire.
125
Le caractère résiduel des cas d’application de l’article L. 1224-3-1 du code du travail ne doit
cependant pas occulter l’enjeu de ces dispositions pour une appréhension globale de la
problématique sociale de l’évolution d’une activité publique, souvent marquée par l’hétérogénéité
des personnels concernés. Il est ainsi indispensable que chacune des catégories de personnels, même
si elle ne concerne quantitativement que peu d’agents, puisse disposer d’un mécanisme de transfert
permettant d’assurer la continuité de la relation d’emploi en dépit du transfert de l’activité. La
création de plusieurs établissements publics contribuant à l’action extérieure de la France à l’étranger
par la loi du 27 juillet 2010409 en est la parfaite illustration. Etablissements publics créés par un
décret en Conseil d'Etat410 et ayant pour mission de promouvoir la présence et l'influence de la
France à l'étranger et de participer à l'action extérieure de l'Etat, notamment par la mise en œuvre à
l'étranger d'actions culturelles, de coopération et de partenariat et par la gestion de moyens
nécessaires à cette action411 sous la tutelle de l'Etat412, Campus France, l’Institut Français et France
Expertise Internationale ont pour point commun d’avoir été créés pour se substituer à l’action
jusqu’alors exercée par des associations ou des groupements d’intérêt public. C’est ainsi que Campus
France s’est substitué à l'association Egide et au groupement d'intérêt public Campus France,
l’Institut Français à l’association Cultures France et France Expertise Internationale au groupement
d'intérêt public France coopération internationale. Ces divers établissements publics industriels et
commerciaux, ayant vocation à recruter des salariés de droit privé, ont dû intégrer dans leurs effectifs
les personnels – aux profils et natures multiples - des entités auxquelles ils se sont substitués. Pour
Campus France et l’Institut Français, émanation d’association employant pour partie des agents non
titulaires de droit public, le jeu de l’article L. 1224-3-1 du code du travail, d’ailleurs expressément
visés par le législateur et le pouvoir réglementaire, a permis de résoudre la question du sort de ces
agents de manière tout à fait complémentaire avec les dispositions de l’article L. 1224-1 du code du
travail pour les salariés de droit privé. Il est d’ailleurs notable que la loi du 27 juillet 2010 ait pu
traiter la question du sort des personnels au sein d’une seule et même disposition à l’image de
l’article 9-IV relatif à l’Institut Français, indifféremment de la nature des agents :
« L'Institut français est substitué à l'association CulturesFrance à la date d'effet de sa dissolution, pour les personnels titulaires d'un contrat de travail de droit public ou de droit privé conclu avec cet organisme en vigueur à cette date. Il leur propose un contrat régi par le code du travail. Ce contrat reprend les clauses substantielles du contrat dont les agents
étaient titulaires antérieurement au transfert, en particulier celles qui concernent la rémunération. Les agents concernés disposent d'un délai de trois mois pour accepter le contrat qui leur est proposé à la suite du transfert d'activité. En cas de refus de ces agents, leur contrat prend fin
409 Loi n° 2010-873 du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'Etat (J.O. du 28 juillet 2010, p. 13921). 410 Décret n°2011-2048 du 30 décembre 2011 relatif à Campus France (J.O. du 31 décembre 2011, p. 22971) ; Décret n°2010-1695 du 30 décembre 2010 relatif à l'Institut français (J.O. du 31 décembre 2010, p. 23341) ; Décret n°2011-212 du 25 février 2011 relatif à France expertise internationale (J.O. du 27 février 2011, p. 3599). 411 Ibid., article 1er. 412 Respectivement sous la tutelle du ministre des affaires étrangères et du ministre chargé de l'enseignement supérieur pour Campus France, tutelle du ministre des affaires étrangères pour l’Institut Français et France Expertise Internationale.
126
de plein droit et l'Institut français applique les dispositions de droit public relatives aux agents licenciés. Les salariés dont le contrat de travail est transféré demeurent à titre transitoire régis par la convention ou l'accord collectif qui leur est applicable ».
La dimension générique d’une telle disposition témoigne là encore de la pertinence de la symétrie
déjà relevée des dispositions du code du travail à l’égard des transferts des contrats de travail des
agents privés comme publics.
∴
Au-delà de ce dispositif très spécifique et qui n’a vocation à intervenir que dans des cas
résiduels, le législateur est intervenu pour traiter d’hypothèses où l’ampleur des contingents
concernés et la récurrence de la survenance de la question de la continuité d’emploi commandait
d’être très précisément envisagées, à l’instar des transferts de compétences entre collectivités
publiques dans le cadre de l’intercommunalité.
,@E@\E@=G:* WR* /:* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?H* A3E3;;@6E:* 97* 5E@4?[:E5* 9:*A3<=85:4A:?*9@4?*;:*A@9E:*9:*;0645:EA3<<74@;658**
Marqué au début de la Cinquième République par un centralisme étatique hérité de la
révolution française, le paysage administratif français a connu depuis près de trente ans de profonds
bouleversements sous l’effet combiné deux mouvements majeurs de transferts de compétence. A la
décentralisation « verticale » des compétences de l’Etat vers les collectivités territoriales amorcée à
partir de 1982 et poursuivie de manière constante a ainsi succédé le mouvement d’intercommunalité
d’une ampleur tout aussi, sinon plus, remarquable.
Phénomène des plus anciens413 opérant le transfert « horizontal414 » de compétences de
plusieurs communes vers un établissement public de coopération intercommunale (ci-après EPCI)
pouvant recouvrir plusieurs visages selon l’échelle retenue – communautés de communes,
communautés d’agglomération, communautés urbaines et depuis peu métropoles415 - ou le schéma
juridique établi – syndicat d’initiative à vocation multiple, syndicat mixte ouvert ou fermé -, la
coopération intercommunale a connu au cours de la dernière décennie une réelle accélération416 à
telle enseigne que quasiment l’intégralité du territoire français relève désormais d’un EPCI417. Le
413 Loi du 22 mars 1890 sur les syndicats de communes ajoutant un titre 8 (articles 169à180) à la loi du 5 avril 1884 relative à l’organisation municipale (J.O. du 6 mars 1890, p. 91). 414 Comme l’explique Benjamin Meunier dans sa thèse relative aux transferts de compétences vers les collectivités territoriales, les termes de transferts horizontaux et verticaux, s’ils sont perfectibles, sont désormais repris par la doctrine. L. TESOKA retrace l’origine de l’utilisation de ces expressions. Selon lui, l’apparition de ces termes remonte au début des années quatre-vingt dix. L. TESOKA, Les rapports entre les collectivités territoriales, PUAM, 2004, p. 19. 415 Loi n°2010-1563 du 16 décembre 2010, op. cit. 416 Le nombre d’EPCI à fiscalité propre est ainsi passé de 124 500 à 190 700 agents entre 1999 et fin 2004, soit en seulement cinq ans. 417 94,8% des communes représentant 89,1% de la population française au 1er janvier 2010.
127
processus amorce à présent son achèvement sous la volonté du législateur d’assurer sa
systématisation avant l’échéance des mandats municipaux au 1er juin 2013418.
L’accroissement des compétences à la charge des collectivités territoriales, lié à la
décentralisation massive des compétences de l’Etat ainsi qu’au morcellement administratif419 qui
caractérise la France, figurent sans nul doute parmi les principales raisons qui ont présidé à une telle
accélération du mouvement. Il traduit la volonté des collectivités territoriales de se rapprocher aux
fins de pallier les inconvénients - matériels comme financiers - de l’exercice des compétences qui
leur sont assignées par la loi. En confiant à un établissement unique l’exercice d’une compétence
intéressant l’ensemble des collectivités d’un même territoire, l’intercommunalité ambitionne en effet
d’assurer la rationalisation des moyens matériels, financiers et humains affectés à cette activité.
Ainsi, quelque soit la configuration dans lequel intervient le transfert de compétences d’une
commune vers un EPCI – création dudit établissement comme extension de son périmètre matériel
par l’octroi d’une nouvelle compétence ou de son périmètre géographique par intégration d’une
nouvelle commune –, celui-ci soulève la question du fondement juridique du transfert des personnels
qui en est le corollaire. Il apparaît que le fondement retenu a clairement évolué au fil des évolutions
législatives qui ont peu à peu dessiné le cadre juridique de l’intercommunalité, le législateur n’ayant
perçu que tardivement la nécessité d’instaurer une obligation de transfert des personnels corrélative
au transfert des compétences (A). Il demeure à notre sens insuffisant pour appréhender pleinement la
problématique du sort des personnels communaux transférés aux établissements intercommunaux
(B).
-*S*!4:*48A:??658*5@E96>:<:45*=:E_7:*=@E*;:*;8\6?;@5:7E*
Dans la continuité de l’Acte I de la décentralisation opérée au début des années quatre vingt
en France, la coopération intercommunale fut initialement mise en œuvre dans des conditions
identiques au transfert de compétences accompli de l’Etat vers les collectivités territoriales (1), à
savoir par le recours aux règles du statut général et aux mécanismes de mobilité de ce dernier. D’un
formalisme contraignant, un tel mécanisme montra très vite ses limites. Dès lors, les phases suivantes
s’inscrivirent dans une perspective spécifiquement appréhendée, le législateur ayant pris soin à partir
de 2002 de régler directement la question du sort des personnels transférés à l’occasion du transfert
de compétences (2).
*
418 Loi n°2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales (J.O. du 17 décembre 2010, p. 22146). 419 En effet, la France compte plus de 36700 communes (36677 selon l’INSEE), ce qui représentait plus de 40 % de l’ensemble des communes de l’Union européenne à 25, sources. http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/institutions/collectivites-territoriales/intercommunalite/intercommunalite-pour-quoi-faire.html.
128
UV !4* 96?=3?656[* 64656@;:<:45* <7:5* ?7E* ;:?* C7:?5634?* ?3A6@;:?*:4\:49E8:?*=@E*;:*5E@4?[:E5*9:*A3<=85:4A:?*
Le transfert de compétence d’une commune au profit d’un établissement public de
coopération intercommunale, en confiant la responsabilité d’une compétence auparavant assurée par
une collectivité territoriale, commande nécessairement que la structure nouvellement compétente
dispose non seulement des moyens matériels et financiers indispensables mais également humains.
Pourtant, alors que la dévolution des biens, équipements et contrats nécessaires à l’exercice des
compétences d’un EPCI avait fait l’objet dès la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la
simplification de la coopération intercommunale de dispositions expresses420, la problématique du
transfert des personnels se caractérisait en revanche par l’absence de toute règle spécifique. Avant
l’intervention du législateur par la loi 27 février 2002421, les différentes législations intervenues en
matière d’intercommunalité n’évoquaient nullement la question sociale liée au transfert des
compétences et se gardaient de prévoir tout transfert obligatoire des personnels lors de la création
d’un EPCI ou de l’extension de son périmètre. La loi précitée du 12 juillet 1999 n’apportait ainsi
aucune précision sur le régime juridique des personnels : le transfert n’était ni obligatoire ni
automatique et les agents pouvaient s’y opposer. Dès lors, le passage des agents de leur collectivité
d’origine à la structure intercommunale impliquait le plus souvent un double mouvement de
créations de postes au sein de l’établissement public de coopération intercommunale et de
suppression de postes dans les collectivités membres.
Lors de la création ex nihilo d’un EPCI, les questions relatives au transfert étaient ainsi
réglées par le statut général de la fonction publique territoriale et par le code général des collectivités
territoriales. L’article L. 5211-5 prévoyait que ces questions devaient être soumises à délibération
préalable des collectivités concernées. Les agents visés devaient demander leur nomination dans les
emplois créés par le nouvel EPCI en choisissant l’une ou l’autre des possibilités offertes par le statut,
c’est-à-dire la mutation, le détachement, la mise à disposition ou l’inscription sur une liste d’aptitude
établie après le concours, dès lors que leur emploi d’origine pouvait être supprimé. Et en application
de l’article 97 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction
publique territoriale l’agent dont l’emploi avait été supprimé et qui refusait une affectation dans le
nouvel EPCI était maintenu en surnombre pendant un an dans la collectivité ou l’établissement
d’origine suivi d’une prise en charge par le Centre national de la fonction publique territoriale ou le
centre de gestion. Cette situation pouvait alors conduire à un accroissement du nombre de personnels
communaux et intercommunaux. En effet, certaines communes transféraient des compétences en
conservant leur personnel, et inversement les EPCI recrutaient à l’extérieur des communes membres
les agents nécessaires à l’accomplissement de leur mission. Par ailleurs, le système a entraîné une 420 Loi n°99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, dite loi Chevènement (J.O. du 13 juillet 1999, p. 10361). 421 Loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité (J.O. du 28 février 2002, p. 3808).
129
importante disparité dans le statut des agents des EPCI, leurs conditions d’exercice et leurs
rémunérations.
Il en résultait ce qui a pu être dénoncé comme « un doublon » des emplois territoriaux, les
communes conservant leurs personnels en dépit de la perte de la compétence au profit de l’EPCI. La
Cour des comptes, dans son rapport L’intercommunalité en France422, évoque ainsi le chiffre de
50 % des cas dans lesquels le transfert de moyens n'est pas réalisé correctement. Aussi, loin de
conduire à la réduction du nombre de fonctionnaires qu’elle aurait dû entraîner par le basculement
des personnels communaux dans les effectifs communautaires, la mutualisation des moyens humains
dans le cadre de l’intercommunalité s’est en réalité accompagnée d’une augmentation relative des
effectifs globaux de la fonction publique territoriale et d’une progression des frais de fonctionnement
liés à l’emploi des personnels, et a dès lors concentré les plus vives critiques423. Comme le soulignait
fort justement le délégué général des communautés de France Nicolas Portier dans un article paru en
2007, « aux satisfecit qui ont escorté la « révolution silencieuse » initiée par les lois de 1992 et 1999
a soudainement succédé un cycle de turbulences et de critiques, sur fond de désenchantement à
l'égard de l'acte II de la décentralisation. En dix-huit mois, pas moins de six rapports publics424, de
teneur et de retentissements très inégaux, ont ébranlé le consensus qui régnait jusque-là ». Là n’est
d’ailleurs pas la seule critique adressée à l’endroit de la coopération intercommunale. Le rapport
d’information présenté en octobre de 2008 par les députés Didier Quentin et Jean-Jacques Urvoas425
soulignait ainsi l'alourdissement de l'organisation territoriale depuis plus de 25 ans par la
multiplication des niveaux d'administration territoriale et l'enchevêtrement combiné et croissant de
leurs compétences, participant selon eux de la perte de pertinence de la décentralisation et de
l’éloignement du citoyen de la démocratie locale426. Dans ce contexte, et à l’initiative du Président
Jean-Luc Warsmann, la commission des lois a alors décidé la création d’une mission d’information
sur la clarification des compétences des collectivités territoriales427, composée de députés de la
majorité et de l’opposition. Présidé par M. Édouard Balladur, ancien Premier ministre, le comité fut
chargé d’étudier les mesures propres à simplifier les structures des collectivités locales, à clarifier la
répartition de leurs compétences et à permettre une meilleure allocation de leurs moyens financiers,
ainsi que de formuler toute recommandation utile à la réforme des collectivités locales. 422 C. comptes, L'intercommunalité en France, Doc. Fr, 2005. 423 Plusieurs parlementaires se sont ainsi exprimés au travers de questions minitérielles. Voir par exemple Rép. min. n°116916 (J.O.A.N du 15 mai 2007) ou encore Rép. min. n°1183S (J.O. Sénat du 7 février 2007). 424 CES, Intercommunalités : quel devenir , 2005 ; H. MARITON, « Rapport de la commission d'enquête sur l'évolution de la fiscalité locale - Quand le contribuable se rebiffe », 2005 ; P. PEMEZEC et P. BAUDOIN, « Le Livre noir de l'intercommunalité », 2005 ; C. Comptes, « Rapport public », 14 novembre 2005, Mon. TP 28 juillet 2006, cahier détaché n° 2, p. 53 ; P. DALLIER, « Bilan et perspectives de l'intercommunalité », rapport de l'Observatoire de la décentralisation du Sénat, soulignant que le coût du regroupement de communes pour la gestion des services publics ; P. RICHARD, « Rapport sur la performance locale et la maîtrise des dépenses publiques ». 425 http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/decentralisation.asp 426 Selon eux, « les acteurs sont mal identifiés, les cofinancements dispersent les responsabilités, la technicité des décisions s'accroît, les structures de coordination prolifèrent. La mission d'information s'est efforcée de repenser l'architecture des responsabilités locales pour renouer avec l'objectif d'une décentralisation intelligible et ordonnée ». 427 Décret n° 2008-1078 du 22 octobre 2008 portant création du comité pour la réforme des collectivités locales (J.O. du 24 octobre 2008, p.16202).
130
Soumis à l’épreuve de l’intercommunalité428, dont les effectifs ont augmenté de près de 40%
entre 1984 et 1998, le droit de la fonction publique territoriale a dû s’adapter afin de rassurer les
personnels des collectivités locales concernés par des transferts vers l’échelon supra-communal429.
La loi sur la proximité du 27 février 2002 a donc fixé un cadre juridique au transfert des personnels
des communes aux EPCI. Ce dispositif marque une véritable avancée pour la gestion sociale des
transferts de compétences mais reste perfectible pour appréhender l’ensemble des contraintes et
réalités pratiques auxquelles sont confrontées les communes dans le cadre de l’intercommunalité.
WV !4* 5E@4?[:E5* `7?56[68* =@E* ;@* 48A:??658* 903A5E3I:E* ;:?* <3I:4?*48A:??@6E:?*Y*;0:Z:EA6A:*9:*;@*A3<=85:4A:*5E@4?[8E8:*@7Z*%,2#*
La loi « Chevènement » du 12 juillet 1999, à l’origine du mouvement d’intercommunalité, en
occultant la question pourtant essentielle du personnel des établissements publics de coopération
intercommunale430 avaient créé des conditions de création des établissements publics de coopération
intercommunale peu satisfaisante pour les collectivités territoriales. La loi précitée du 27 février
2002 est donc intervenue pour remédier à ces difficultés en posant le principe d’un transfert des
personnels corrélatif au transfert de compétence d’une collectivité territoriale à une autre collectivité
ou un de ses établissements publics.
Instituant l’article L. 5211-4-1 du code général des collectivités territoriales, elle disposait
que :
« I. Le transfert de compétences d'une commune à un établissement public de coopération intercommunale entraîne le transfert du service ou de la partie de service chargé de sa mise en œuvre
Les fonctionnaires territoriaux et agents territoriaux non titulaires qui remplissent en totalité leurs fonctions dans un service ou une partie de service transféré en application de l'alinéa précédent sont transférés dans l'établissement public de coopération intercommunale. Ils relèvent de cet établissement dans les conditions de statut et d'emploi qui sont les leurs.
(…) ».
L’obligation de principe instaurée par le législateur de 2002 n’a cependant pas perduré dans son
application pleine et entière. Près de quatre modifications des dispositions de l’article L. 5211-4-1 du
CGCT sont ainsi intervenues en seulement huit ans431. Sans remettre en cause le transfert de principe,
elles l’ont aménagé en fonction, d’une part, de l’ampleur du transfert au regard du service et, d’autre
part, de la polyvalence éventuelle des agents concernés. Si une telle versatilité du législateur nous
428 E. AUBIN, « Caractères généraux et tendances actuelles de la fonction publique territoriale », Rép. Dalloz, n°87. 429 J. BAZIN, « Intercommunalité et transferts de personnels », Gaz. Cnes, 29 octobre 2001, p. 80 430 C. DEBOUY, « La communauté d'agglomération : moyens », Cah. dr. interco. 2008, n° 1, p. 77 et s. 431 Cet article a successivement été modifié par l’article 46 de la loi n°2002-276 du 27 février 2002, l’article 166 de la loi n°2004-809 du 13 août 2004, l’article 60 de la loi n°2007-209 du 19 février 2007, l’article 35 de la loi n°2010-751 du 5 juillet 2010 et enfin l’article 65 de la loi n°2010-1563 du 16 décembre 2010.
131
semble peu satisfaisante pour répondre à l’objectif assigné aux dispositions de l’article L. 5211-4-1
du CGCT, elle témoigne cependant à n’en pas douter de la difficulté – nous en avons pleinement
conscience – de définir un dispositif de transfert permettant de satisfaire l’ensemble des collectivités
concernées et d’envisager la problématique du transfert des personnels à l’échelon supra-communal
dans sa globalité.
Il convient effet de garder à l’esprit tant la diversité des collectivités concernées par les
transferts de compétences vers un EPCI - notamment en termes de tailles - que le caractère parfois
contradictoire des intérêts des parties en présence. En effet, à la nécessité pour l’établissement
intercommunal nouvellement compétent de disposer des effectifs qualifiés, expérimentés et
suffisants pour l’exercice de la compétence transférée peut parfois s’opposer l’existence d’un
impératif identique pour la commune initialement compétente de conserver son personnel, constat
d’autant plus vrai pour les « petites » collectivités au sein desquelles la polyvalence des agents est
souvent de mise, pour ne pas dire de rigueur. Le transfert corrélatif des personnels ne peut ainsi
trouver de pertinence que jusqu’à un certain seuil critique, en deçà duquel la commune ne saurait
raisonnablement fonctionner. C’est bien le principe, pris a contrario, de l’économie d’échelle où la
rationalisation ne s’avère bénéfique que dans un schéma exponentiel, et non proportionnel. D’autant
que les collectivités territoriales demeurent en tout état de cause pourvues d’une compétence
générale432 à l’inverse des EPCI qui ne sont détenteurs quant à eux, à l’instar de tout établissement
public, que d’une compétence spéciale. On comprend dès lors dans un tel contexte que la rédaction
de la loi du 27 février 2002, en ce qu’elle instituait une mutation obligatoire des agents affectés à la
compétence transférée et pouvait dès lors conduire à des situations particulièrement difficiles pour
certaines collectivités, ait pu concentré de si vives oppositions. Plusieurs élus locaux s’étaient
d’ailleurs émus de cette situation auprès des parlementaires, à travers de nombreuses questions
ministérielles.
En définitive, et en dépit des évolutions législatives qui en ont modifié la rédaction, l’article
L. 5211-4-1 prévoit un transfert des personnels corrélatif au transfert des compétences en matière
d’intercommunalité. Loin d’être une faculté laissée à leur appréciation, il s’agit là d’une véritable
obligation pour les collectivités auxquelles il est rappelé, compte-tenu des enjeux financiers en
présence, de faire une stricte application. Par circulaire du 21 décembre 2006 relative au bilan et aux
perspectives de 1'intercommunalité à l'horizon 2008, le ministre délégué aux collectivités territoriales
soulignait ainsi que « le mouvement intercommunal devait être porteur d'économies d'échelle et
vecteur de gestion rigoureuse. Les préfets ont […] reçu pour instruction de s'assurer que le transfert
432 F. SEMPE, « Réforme des collectivités territoriales : en finir avec quelques dogmes », AJDA 2009 p. 281.
132
effectif des compétences est réalisé par les EPCI et que celui-ci s'accompagne bien du transfert réel
des moyens et personnels devant y être consacrés »433.
∴
Il convient cependant de regretter que le législateur n’ait envisagé les conséquences sociales
de l’intercommunalité que dans une dimension unique, celle de la création d’un établissement public
intercommunal, sans appréhender sa suppression ou la modification de son périmètre devrait
accentuer encore les critiques adressées à l’endroit de l’intercommunalité.
N* L*!4* 96?=3?656[* 64@B3756*T* ;0@B?:4A:* 9:* E8A6=E3C7:* :4* A@?* 9:* E:5E@65*9074:*A3;;:A56>658*=7B;6C7:*9:*;0%,2#**
Si le code général des collectivités territoriales prévoit désormais que « le transfert de
compétences d'une commune à un EPCI entraîne le transfert du service ou de la partie de service
chargé de sa mise en œuvre »434, il reste en revanche silencieux quant aux conséquences du retrait de
la commune de la structure intercommunale pour ce personnel transféré. Aucun article de loi ni
aucun décret ne traite spécifiquement de ce cas de figure. Se pose alors la question de savoir si la
commune sortante est tenue de réintégrer dans son personnel communal les fonctionnaires
territoriaux et agents territoriaux non titulaires qui ont été transférés. Loin d’être théorique, cette
problématique est en pratique fortement susceptible de se présenter puisqu’à la liberté d’adhérer à un
groupement intercommunal s’accompagne bien évidemment la liberté de s’en retirer, dans les
conditions prévues à l'article L. 5211-25-1, et dès lors que le consentement de l'organe délibérant de
l'établissement est recueilli435.
Certains élus locaux se sont émus de cette situation, qui les concerne directement, et ont dès
lors interrogé le Secrétariat d’Etat à l’Intérieur et aux Collectivités territoriales par le biais d’une
question ministérielle. La réponse du Secrétariat d'Etat436 insiste, en l’absence d’obligation légale de
réintégration des personnels transférés au sein des effectifs de la commune d’origine, sur la nécessité
d’un dialogue entre les collectivités membres de l’EPCI pour la résolution de la dimension sociale du
retrait d’une commune. Rappelant ainsi que les modalités de retrait d'une commune d'un EPCI
prévoient la nécessité du « consentement de l'organe délibérant de l'établissement » et que le retrait
est également subordonné à « l'accord des conseils municipaux exprimé dans les conditions de
433 Circulaire du 21 décembre 2006 relative au bilan et aux perspectives de 1'intercommunalité à l'horizon 2008, Ministre délégué aux collectivités territoriales. 434Article L. 5211-4-1 du code général des collectivités territoriales. 435 Article L. 5211-19 du code général des collectivités territoriales. 436 Rép. min. n°5649 (J.O. Sénat du 19 février 2009).
133
majorité requises pour la création de l'établissement », la réponse ministérielle précise que les
conditions d'emploi de certains personnels de l'EPCI, qu'ils soient transférés de la commune qui
envisage ultérieurement son retrait ou qu'il s'agisse d'agents recrutés par l'EPCI avant la demande de
retrait de la commune, peuvent faire l'objet d'une discussion entre, d'une part, la commune
envisageant son retrait et, d'autre part, l'EPCI et les autres communes membres. « Cette discussion
peut ainsi porter, selon l'importance prise par la compétence en question, sur le transfert d'une partie
ou de la totalité des personnels précédemment employés par la commune ainsi que sur le devenir des
agents recrutés avant l'annonce du souhait de retrait par une des communes membres de l'EPCI ».
Enfin, dans l'hypothèse où un EPCI conserverait un nombre d'agents trop important au regard d'une
activité plus limitée, il convient de signaler que l'article 97 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984
portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale prévoit les modalités selon
lesquelles les collectivités territoriales peuvent être amenées à supprimer des emplois ainsi que les
conditions de reclassement des fonctionnaires territoriaux occupant ces emplois.
∴
Le législateur n’hésite plus à se saisir de la question sociale et à la régler directement dans le
corps même du texte de loi qui opère l’évolution de l’activité concernée. Les évolutions d’activités
publiques ayant conduit à la privatisation du régime juridique de l’entité publique initialement en
charge de l’activité sont à ce titre des plus topiques, que l’intervention directe du législateur consiste
en un simple rappel des principes existants de droit commun du travail ou de la fonction publique
qu’elle s’inscrive dans une perspective plus ambitieuse, celle de régler véritablement la situation de
personnels par l’instauration de dispositifs novateurs.
,@E@\E@=G:*XR* * /:?* 5E@4?[:E5?*90@\:45?*=7B;6A?*96E:A5:<:45*3E\@46?8?*=@E* ;:*;8\6?;@5:7E*Y* ;03AA@?634*9:* ;@*=E6>@56?@5634*97* E8\6<:* `7E696C7:*9074:*:45658*=7B;6C7:*:4*AG@E\:*9074:*@A56>658*9:*?:E>6A:*=7B;6A*
Parmi les évolutions dans la gestion ou l’organisation d’une activité exercée par une
personne publique, la transformation d’établissements publics administratifs en établissements
publics industriels et commerciaux ou la création de sociétés anonymes à capitaux publics à partir
d’établissements publics constituent à n’en pas douter celles où la continuité de l’emploi des agents
publics « historiquement » affectés à l’activité concernée se heurte aux difficultés juridiques les plus
sensibles, en conduisant à la privatisation du régime juridique de la structure gestionnaire de
134
l’activité publique437. Si les développements qui vont suivre traduisent dans ce contexte une
problématique identique à l’endroit des deux manifestations de la privatisation du régime juridique
d’une structure publique, il est toutefois certain que l’actualité est aujourd’hui avant tout marquée par
la transformation des établissements publics en sociétés anonymes qui a profondément contribué à
redessiner le visage des structures en charge d’une activité publique en France ces dernières années.
Erigé en mode de gestion par excellence des grands services publics nationaux au lendemain de la
deuxième guerre mondiale, la forme juridique de l’établissement public s’est peu à peu effacée438,
sous l’effet combiné de l’émergence du droit communautaire et des changements économiques qui
ont accompagné les deux dernières décennies439. Aucun secteur d’activité440, ni aucun « grand »
établissement public industriel et commercial français441, ne semble avoir échappé à un tel
phénomène. Cette évolution notable de la gestion des services publics industriels et commerciaux en
France se révèle des plus emblématiques à divers titres mais elle témoigne avant tout d’une mutation
profonde de la conception même de ce qu’il est coutume d’appeler le « service public à la
française ».
Se pose alors la question de l’adaptation du statut et du régime juridique de ces salariés au
nouveau contexte de droit privé dans lequel s’inscrit désormais la société qui les emploie. Si la
logique commanderait que les agents publics « basculent » directement sous un régime de droit
privé, en prenant la qualité de salarié de droit privé. il est aisément compréhensible qu’une telle
solution ne puisse valablement être imposée, tant pour des raisons évidentes de paix sociale que des
raisons juridiques, le maintien du statut de droit public constituant ainsi un droit garanti par la
jurisprudence442.
Deux options sont alors envisageables : le maintien du statut d’agents publics au sein de la
nouvelle entité gestionnaire aux côtés des salariés recrutés après son évolution, ou la mutation de ce
437 Qui n’est pas nécessairement accompagnée de la privatisation du capital. Voir à ce sujet : S. NICINSKI « La transformation des établissements publics industriels et commerciaux », RFDA 2008, p. 35 438 D. BAILLEUL, « Vers la fin de l’établissement public industriel et commercial ? à propos de la transformation des EPIC en sociétés, RJEP 2006, p. 105 ; M. LOMBARD, « L’établissement public industriel et commercial est-il condamné ?, AJDA 2006, p. 79 ; B. PLESSIX, « L’établissement public industriel et commercial au cœur des mutations du droit administratif », JCP A 2007 n°13, p. 38. 439 Voir en ce sens S. NICINSKI « La transformation des établissements publics industriels et commerciaux », RFDA 2008, p. 35, dont nous partageons la thèse selon laquelle le droit communautaire ne fait aucune obligation de faire évoluer la structure des EPIC elle-même vers une société anonyme, mais implique en revanche de repenser les relations entre la personne publique et la structure gestionnaire pour se mettre en conformité avec les règles communautaires de libre concurrence. Voir également J. CHEVALLIER, « La nouvelle réforme des télécommunications : ruptures et continuités », RFDA 1996, p. 937, où l’auteur soulignait dès 1996 que « le lien entre la nouvelle organisation du marché et le changement de statut de l’opérateur public ne relevait pas de l’évidence (…) : la réglementation européenne est indifférente au statut des opérateurs et elle n’imposait nullement de renoncer au statut de droit public ». 440 Transports, postes et télécommunications, télévision, banques, imprimerie, etc. 441 S. NICINSKI, op. cit. Elle met ainsi en lumière que l'ERAP a transféré ses actifs à Elf Aquitaine et le service des poudres fut transformé en société commerciale dans les années soixante-dix ; Télévision de France (TDF) est transformé en société anonyme en 1986 ; puis la Société d'exploitation industrielle des tabacs et allumettes (SEITA) et la Caisse nationale des marchés de l'Etat (CNME) en 1980, la Caisse d'aide à l'équipement en 1987 (devenue Crédit local de France), l'Imprimerie nationale (anciennement budget annexe) en 1993, les transformations les plus célèbres restant celles de France Télécom en 1996, Electricité de France (EDF) et Gaz de France (GDF) en 2004, et, enfin, Aéroports de Paris en 2005. 442 Article CE Ass., 29 janvier 1965, L'Herbier, Rec. p. 60, AJDA 1965, p. 103, op. cit.
135
statut en régime de droit commun. En réalité, la première solution n’offre pas véritablement
d’alternative. En pratique en effet, en vue de tenir compte de la sensibilité sociale exprimée dans
chacune des opérations de privatisation, un compromis est souvent préféré au choix d’une option qui
modifierait radicalement les conditions d’emploi des employés de l’entreprise, ou au contraire qui les
figeraient dans un carcan désormais déconnecté du contexte d’intervention de l’entreprise. La
privatisation d’une entreprise publique ne passe ainsi pas nécessairement pas par un changement de
statut radical des agents employés par cette entreprise. D’autant que de telles opérations concernent
en général un contingent substantiel de personnels. Plusieurs exemples récents témoignent de cette
problématique. Deux seront ici mis en exergue, tenant pour le premier dans la conduite de
l’évolution de France Télécom (A), pour le second dans la création des sociétés aéroportuaires (B).
-*S*!4:*645:E>:45634*?=8A6[6C7:*97*;8\6?;@5:7E*`7?56[68:*=@E*;@*>3;3458*90@??7E:E*;@*A345647658*=8E:44:*97*?5@575*9:*[34A56344@6E:*T*;0:Z:<=;:*9:*PE@4A:*(8;8A3<*
Les autorités françaises amorcèrent au début des années 90 une modification profonde de la
forme juridique de l’une des administrations françaises les plus emblématiques, l’administration des
postes, télégraphes et téléphones. En créant dans un premier temps un « exploitant public » disposant
d’une personnalité morale propre et en transformant ce nouvel établissement en une véritable société
anonyme, le gouvernement de l’époque ne manqua pas de provoquer une véritable onde de choc et
dut en conséquence multiplier les annonces rassurantes quant aux effets d’une telle mutation. Il
apporta ainsi la garantie, par un engagement solennel, que France Télécom resterait une entreprise
publique dont le capital sera détenu majoritairement par l'Etat. Il promit au surplus que les agents
fonctionnaires conserveraient leur statut de fonctionnaire de l'Etat, bénéficiant ainsi de la garantie de
l'emploi et des droits aux pensions de retraite, acquis ou à acquérir. Il faut dire que ce dernier aspect
ne manquait pas d’enjeu eu égard aux effectifs concernés. Comme le souligne fort justement Laurent
Lamblin, « le cas de la transformation de l’exploitant public France Télécom en société anonyme
confèr(ait) au problème du sort des fonctionnaires dans les établissements transformés une
dimension quantitative sans précédent »443.
La réalisation d’une telle mutation supposa, à chaque stade, de solutionner les
incompatibilités juridiques de l’emploi de fonctionnaires au sein de la nouvelle entité gestionnaire.
La création de l’exploitant public « France Télécom » sous la forme d’un établissement industriel et
commercial obligea dans un premier temps le législateur à intervenir afin d’autoriser le nouvel
établissement à titre dérogatoire l’emploi de fonctionnaires, selon l’avis formulé en ce sens par le
Conseil d’Etat (1). La transformation de l’établissement public en société anonyme sous l’effet de la
loi impliqua une nouvelle fois que le législateur déroge aux principes classiques du statut général des 443 L. LAMBLIN, op. cit. p. 690.
136
fonctionnaires en autorisant l’emploi de fonctionnaires en position d’activité par la société anonyme
de droit privé nouvellement créée (2).
UV !4:* 645:E>:45634* E:497:* 6496?=:4?@B;:* =@E* ;:* <@6456:4* 97* ?5@575* 9:*[34A56344@6E:* ;3E?* 9:* ;@* AE8@5634* 9:* ;085@B;6??:<:45* =7B;6A* PE@4A:*(8;8A3<**
La volonté du gouvernement de conduire l’évolution structurelle du service public des postes
et télécommunications à travers la création dans un premier temps d’un établissement public dédié,
pudiquement qualifié d’« exploitant public » sans que sa nature d’établissement public industriel et
commerciale ne suscite de véritable doute444, ne pouvait raisonnablement emporter la transformation
du statut de fonctionnaires des personnels originellement employés par le service des postes et
télécommunications, eu égard à l’ampleur des effectifs concernés. L’article 44 de la loi du 2 juillet
1990 occulta ainsi les obstacles juridiques en présence en disposant clairement que « les personnels
en activité, affectés au 31 décembre 1990 dans les emplois d’un service relevant de la direction
générale de la Poste ou de la direction générale des télécommunications sont placés de plein droit
respectivement sous l’autorité du président de la Poste et de France Télécom à compter du 1er
janvier 1991, sans changement de leur position statutaire ».
Un tel positionnement ne relevait certainement pas de l’évidence, eu égard au principe
jurisprudentiel de soumission des agents affectés à un service public industriel et commercial au
droit privé dans leurs relations individuelles formulé dès 1923 par le Conseil d’Etat à l’occasion de
l’arrêt Lafrégeyre445. Il faut cependant souligner que le principe de soumission des agents des SPIC
au droit commun souffre nombre d’exceptions, de sorte que sa portée s’en trouve incontestablement
atténuée. Au demeurant, la confrontation des pouvoirs publics à une telle problématique n’était pas
inédite, et le Conseil d’Etat avait dès 1965 précisé par un arrêt d’Assemblée446 que le personnel
fonctionnaire d'un service administratif transformé en une entreprise du secteur public peut conserver
sa qualité d'agent public.
A l’image de la plupart des dispositifs législatifs édictant des mécanismes de transfert
d’agents publics aux principes classiques de la fonction publique, la loi du 2 juillet 1990 relative à
l'organisation du service public de la poste et des télécommunications opéra une distinction au sein
des personnels de la nouvelle entité gestionnaire du service public des télécommunications entre,
d’une part, les agents transférés et, d’autre part, les agents nouvellement recrutés. Elle donna ainsi la
faculté aux agents contractuels recrutés avant le 1er janvier 1991 d'opter soit pour le maintien de leur
contrat de droit public, soit pour le régime de la convention collective prévu à l'article 31 de la loi
444 CE Ass., 13 novembre 1998, Syndicat professionnel des médecins de prévention de La Poste et de France Télécom et autres, Rec. p. 400. 445 CE, 26 janvier 1923, Robert de Lafrégeyre, Rec. p. 67. 446 CE Ass., 29 janvier 1965, op. cit.
137
précitée. Le maintien du statut de fonctionnaire impliqua le transfert par le législateur des corps de
fonctionnaires de la direction chargé des télécommunications447 au nouvel exploitant public. Les
agents contractuels recrutés après le 1er janvier 1991 ont quant à eux tous été soumis au cadre de la
convention collective adoptée à l’issue des négociations entre partenaires sociaux448.
Il nous semble toutefois que ces exceptions, dont on comprend aisément l’enjeu, ne doivent
pas conduire à priver ou à remettre en cause la permanence, et partant la pertinence, d’une
soumission des agents des entreprises publiques au droit privé du travail. Il nous semble en effet
qu’une appréciation objective des missions assignées aux agents affectés à des missions de service
public au sein d’une entité soumise à un régime de droit privé – établissement public industriel et
commercial comme société anonyme de droit privé même à capitaux publics – commandent en effet
que ces agents relèvent du droit commun du travail dans leurs relations individuelles avec leur
employeur. La circonstance que pour des raisons historiques et/ou politiques de nombreux agents
exerçant des missions de service public industriel et commercial se soient vus dotés d’un statut de
fonctionnaire, à l’instar de ceux affectés au service des postes et télécommunications, ne doit pas
conduire à priver d’effet les principes de la jurisprudence Lafreygère, dégagés au terme d’une
analyse pragmatique et rationnelle. Nous rejoignons ici l’avis du Conseil d’Etat rappelé dans son
rapport public pour l’année 2003 selon lequel « le Conseil d’Etat a tiré les conséquences du fait que
lorsque l’Etat, au lieu de concéder à une personne privée l’exploitation d’un service public
industriel et commercial, le prend en charge en créant à cette fin un établissement public à caractère
industriel et commercial, les relations individuelles entre l’établissement public et le personnel, pas
davantage que les relations individuelles entre l’établissement public et ses clients, ne mettent en
cause les principes fondamentaux de l’administration publique, et n’ont pas, dès lors, de motif
légitimes d’être soustraites du droit commun »449.
WV !4:* 645:E>:45634* E:497:* 6496?=:4?@B;:* =@E* ;:* <@6456:4* 9:?*[34A56344@6E:?* :4* =3?65634* 90@A56>658* ;3E?* 9:* ;@* AE8@5634* 9:* ;@* ?3A6858*@434I<:*PE@4A:*(8;8A3<*
Reconnaître la qualité de fonctionnaires à des agents employés dans le cadre d’un
établissement public industriel et commercial représentait déjà une dérogation importante aux
principes jurisprudentiels que seul le législateur était habilité à opérer. Placer ces mêmes
fonctionnaires au service d’une société anonyme constituait à n’en pas douter un exercice juridique
des plus ardus pour le gouvernement souhaitant faire évoluer la nature juridique de l’opérateur
téléphonique historique, une « acrobatie juridique » inédite pour reprendre la métaphore de Jacques
447 Le même processus fut retenu pour la transformation de La Poste. 448 Rép. min. n° 15499 (J.O. Sénat du 4 juillet 1996). 449 Conseil d’Etat, Perspectives pour la fonction publique d’Etat, EDCE n°54, 2003, p. 309.
138
Chevallier450. L’intervention du législateur commanda donc de soumettre à l’avis préalable du
Conseil d’Etat la légalité d’un tel dispositif dérogatoire. Par un avis en date du 18 novembre 1993451,
celui-ci admis l’emploi direct de fonctionnaires par des entités privées en considérant que « la loi
portant création d'une société anonyme France Télécom pourra placer des corps de fonctionnaires
de l'Etat auprès de cette société, et investir le président de celle-ci du pouvoir de nomination et de
gestion de ces agents publics sans méconnaître une règle ou un principe de nature
constitutionnelle ».
Qu’elle soit considérée comme une décision de rupture, ou à l’inverse comme une décision de
synthèse de principes déjà sous-jacents comme nous le pensons452, cette décision adopte
incontestablement une position de principe tendant à l’atténuation croissante du critère organique
dans l’identification de la notion d’agent public, permise par l’absence de principe de valeur supra-
législative prohibant l’emploi de fonctionnaires par une personne morale de droit public investie
d’une mission industrielle et commerciale453. L’arrêt du Tribunal des conflits du 22 octobre 2001454
opère à notre sens la parfaite synthèse du droit positif en indiquant que « sauf dispositions
législatives contraires, les personnels non statutaires travaillant pour le compte d’une personne
publique gérant un service public administratif sont soumis à un régime de droit public quelque soit
leur emploi ». La portée de l’avis du Conseil d’Etat du 18 novembre 1993 ne marque ainsi pas une
remise en cause des principes classiques de détermination de la qualité d’agent public mais une
simple appréciation de l’intensité du pouvoir de dérogation laissée au législateur dans ce domaine,
comme le souligne fort justement Laurent Richer en considérant qu’à la lumière de cet avis « une
société de droit privé ne peut employer de fonctionnaires, mais (que) le législateur (…) peut
apporter une modification à cette solution de principe en donnant le statut de fonctionnaires aux
agents d’une société privée chargée d’une mission de service public»455. *
*
450 J. CHEVALLIER, « La nouvelle réforme des télécommunications : ruptures et continuités », RFDA 1996, p. 909, op. cit. 451 CE Ass. Avis, 18 novembre 1993, n°355 255, France Télécom, EDCE, 1994, n°45, p. 320. 452 Nous nous rangeons ici à l’avis de Laurent LAMBLIN, selon lequel « la Haute Assemblée n’a pas véritablement innové par cet avis, rendu symboliquement par son Assemblée générale. Elle s’est plutôt attachée à un travail de synthèse à partir de ses propres éléments de réflexion, successivement dégagés à l’occasion d’un rapport et d’avis non publiés consacrés au problème du devenir des personnels fonctionnaires lors de la transformation de leur employeur en société de droit privé », in La fonction publique à l’épreuve du droit de la concurrence, op. cit. 453 CE Sect., 15 décembre 1967, Level, Rec. p. 501, op. cit. 454 TC, 22 octobre 2001, Cabanel c. Recteur de l’académie de Grenoble, req. n° 3271. 455 L. RICHER, in Y. GAUDEMET, B. STIRN, T. DAL FARRA, F. ROLLIN, Les Grands avis du Conseil d’Etat, Dalloz 1997, n°40, p. 396.
139
N*S*!4:* 645:E>:45634* ?=8A6[6C7:*97* ;8\6?;@5:7E*@46<8:*=@E* ;@*>3;3458*90@9@=5:E*:5*9:*A;@E6[6:E* ;:*A@9E:* `7E696C7:*@==;6A@B;:*Y* ;08>3;75634*9:*;0@A56>658*T*;0:Z:<=;:*9:?*?3A6858?*@8E3=3E57@6E:?*
La création d’une société publique provoque certes le basculement total de l’établissement
public qui lui préexistait dans la sphère privée. La circonstance que la structure gestionnaire de
l’activité revête à présent une personnalité morale de droit privé et non plus de droit public ne doit
cependant pas être surestimée quant à ses effets, surtout si l’activité se trouve être un service public
industriel et commercial. Il convient ici de rappeler que les services publics industriels et
commerciaux - principalement concernés par le mouvement de « sociétisation » - s’inscrivent de jure
dans un cadre juridique empreint de droit privé, et ce quelque soit la nature juridique de l’entité qui
est gestionnaire. Ainsi, à l'inverse des personnels affectés aux services publics à caractère
administratif qui ont par principe le statut d'agents publics456, les personnels affectés aux services
publics à caractère industriel et commercial sont soumis au droit privé, à l'exception notable du
directeur chargé de l'ensemble du service et du directeur de la comptabilité lorsqu'il possède la
qualité de comptable public457, et relèvent de la compétence des juridictions de droit privé pour la
résolution de leurs litiges d'ordre individuel.
Dans un tel contexte, l’intervention du législateur pour organiser la dimension sociale de la
transformation de la société publique en une société anonyme tend en réalité à clarifier les règles
juridiques qui gouvernent très classiquement le transfert, et par là-même faciliter leur parfaite
appréhension par les acteurs du transfert, employeur comme agents transférés (1). Cette ambition
pédagogique peut toutefois se révéler vaine, comme l’illustre l’exemple de la création des sociétés
aéroportuaires en 2005, démontrant s’il en était encore besoin combien l’aspect social représente un
enjeu fondamental pour toute réforme structurelle d’activité publique (2).
UV !4*96?=3?656[*?=8A6[6C7:*Y*;@*>3A@5634*A;@6E:<:45*?6<=;6[6A@5E6A:*
L’ensemble des secteurs de « réseaux458 » semblent aujourd’hui concernés par le phénomène
de création d’entreprises publiques. Les lois du 20 avril 2005 et du 5 janvier 2006, respectivement
intervenues dans les domaines aéroportuaire et portuaire nous semblent à ce titre parmi les plus
illustratives des dispositifs spécifiquement dégagés par le législateur pour assurer le transfert des
personnels affectés à un établissement public « transformé » en société anonyme. Il convient de
456 TC, 25 mars 1996, B., Rec. p. 535, concl. P.-H. MARTIN. 457 CE, 8 mars 1957, Jalenques de Labeau, Rec. p. 158, D. 1957, jurispr. p. 378, JCP G 1958, II, 1987, note DUFAU, op. cit. 458 Le secteur ferroviaire s’y prépare ardemment, une autorité de régulation des activités ferroviaires ayant d’ores et déjà été instituée : Loi n° 2009-1503 du 8 décembre 2009 relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires et portant diverses dispositions relatives aux transports (J.O. du 9 Décembre 2009, p. 21226).
140
revenir quelques instants sur l’origine même de ces processus, avant d’examiner plus avant la
question sociale qu’ils n’ont pas manqué de soulever.
La réforme des structures de gestion des aéroports français est intervenue dès 2005, du moins
pour les aéroports parisiens et les grands aéroports régionaux, eu égard à leur importance stratégique
pour l’Etat. Le dispositif élaboré par la législateur en la matière, et la mise en œuvre pratique qui
s’en est suivie, témoignent une fois encore de l’enjeu que revêt la question sociale dans la réussite de
telles opérations. En l’espèce, la difficulté résidait dans la pluralité des profils des personnels
employés sur les aéroports et concernés par l’évolution juridique de leur structure d’emploi. Avant la
loi du 20 avril 2005, le paysage aéroportuaire français était marqué par l’organisation suivante :
l’Etat, propriétaire de l’ensemble des emprises aéroportuaires459, avait concédé dès l’origine la
gestion des plateformes aéroportuaires à des Chambres de Commerce et d’Industrie, établissements
publics administratifs de l’Etat, pour des durées souvent très longues.
Suivant l'exemple des aérodromes, des sociétés portuaires ont été créées par la loi du 5
janvier 2006, pour les ports considérés d’intérêt national métropolitain460. Reprenant le schéma
adopté en matière aéroportuaire, l’Etat français a souhaité assurer une certaine continuité dans la
gestion des concessions aéroportuaires en dépit de l’évolution de structure juridique, et n’a pas fait le
choix d’une mise en concurrence des opérateurs comme l’y invitait pourtant les principes de l’Union
européenne461.
Dans ce contexte, et à l’observation des dernières créations de sociétés dans le secteur
aéroportuaire et portuaire, un constat s’impose. Le législateur prend désormais soin d’inscrire
explicitement les règles qui président au transfert dans le dispositif même du texte de loi par lequel
est opéré la création de la société à capitaux publics et personnalité morale de droit privé.
Une telle approche ne peut que recueillir l’adhésion.
Elle participe d’une appréhension des effets de la réforme dans son ensemble, là où le
législateur négligeait par le passé une dimension sociale pourtant fondamentale. Il en résulte que
l’opération de création de la société ne souffre plus désormais aucune incertitude majeure dans sa
459 A de rares exceptions, près, certaines chambres de commerce et d’industrie ayant construit les infrastructures aéroportuaires sur leur propre domaine comme c’est le cas à la Rochelle par exemple. 460 Ainsi que le port de Larivot en Guyane. Il s’agit des ports ont fait l'objet d'un transfert de propriété et de compétence en application de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004, op. cit. 461 L'article 35, II de la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports (J.O. du 6 janvier 2006, p. 217) dispose ainsi que « dans un délai de trois ans à compter de la publication de la présente loi, la collectivité territoriale propriétaire d'un port visé au I de l'article 30 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 précitée peut, à la demande du concessionnaire du port, autoriser la cession ou l'apport de la concession à une société portuaire dont le capital initial est détenu entièrement par des personnes publiques, dont la chambre de commerce et d'industrie dans le ressort géographique de laquelle est situé ce port. Un nouveau contrat de concession est alors établi entre la collectivité territoriale et la société portuaire pour une durée ne pouvant excéder quarante ans. Ce contrat précise notamment les engagements que prend la société portuaire en termes d'investissements et d'objectifs de qualité de service ». L’alinéa 4 de l’article 35 reprend in extenso la rédaction du dispositif instauré par la législateur pour les aéroports.
141
mise en œuvre462, chacun des aspects essentiels qu’il s’agisse des moyens humains, matériels ou
financiers étant envisagé et traité dès l’adoption du texte réformateur. Mais là n’est pas le seul
avantage de la prise en compte spécifique des règles de transfert dans le dispositif global d’évolution
de la structure en charge de l’activité publique.
Elle permet en outre d’assurer aux agents affectés à l’activité la pleine connaissance des règles
qui leur sont applicables, en procédant à une énonciation claire et didactique des règles de transfert
qui gouvernent le transfert des personnels selon leur nature. L’article 7-III de la loi précitée du 20
avril 2005 relative aux aéroports détaille ainsi la situation des agents publics avant d’évoquer celle
des agents privés :
« Les agents publics affectés à la concession transférée sont mis à la disposition de la société pour une durée de dix ans. Une convention conclue entre l'ancien et le nouvel exploitant détermine les conditions de cette mise à disposition et notamment celles de la prise en charge par ce dernier des coûts salariaux correspondants. Pendant la durée de cette mise à disposition, chaque agent peut à tout moment demander que lui soit proposé par le nouvel exploitant un contrat de travail. La conclusion de ce contrat emporte alors radiation des cadres. Au terme de la durée prévue au premier alinéa, le nouvel exploitant propose à chacun des agents publics un contrat de travail, dont la conclusion emporte radiation des cadres. Les agents publics qui refusent de signer ce contrat sont réintégrés de plein droit au sein de la chambre de commerce et d'industrie concernée.
Les dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail sont applicables aux contrats de travail des salariés de droit privé des chambres de commerce et d'industrie affectés à la concession transférée, en cours à la date du transfert de la concession, qui subsistent avec le nouvel employeur ».
Elle permet enfin et surtout une adaptation des mécanismes classiques de mobilité des agents
publics aux contraintes – notamment temporelles – auxquelles se trouve confrontée l’opération de
création de la société publique, ainsi que la modulation de ses effets dans le temps, là aussi dans un
souci constant de conduite du projet dans un climat social serein.
C’est ainsi que le dispositif retenu pour les sociétés aéroportuaires est celui de la mise à
disposition, dispositif classique et expressément prévu par le statut administratif des personnels des
CCI463 mais qui se voit sous la plume du législateur étendu de cinq à dix ans464. Une opération de
création d’une société publique, inscrite par définition dans la durée465, commande en effet que le
sort des personnels qui y sont attachés soit réglé à moyen terme, tant pour assurer la continuité de la
relation d’emploi au bénéfice des agents que garantir la stabilité de l’activité exercée dans un
contexte par ailleurs profondément modifié.
462 Il est certain que notre propos n’est pas d’encenser le travail du législateur, qui est toujours perfectible et pourra souffrir d’autres lacunes. Il s’agit simplement de souligner que dans le cadre qui nous intéresse, celui du sort des personnels à l’occasion de l’évolution d’une activité publique, le doute n’est plus permis à l’endroit de la création des sociétés publiques. 463 Arrêté du 25 juillet 1997 portant statut du personnel de l’Assemblée des chambres françaises de commerce et d’industrie, des chambres régionales de commerce et d’industrie, des chambres de commerce et d’Industrie et des groupements interconsulaires (J.O. du 2 août 1997 pour les titres Ier , III, IV et V). 464 L’apport de la loi doit ici être nuancé dans la mesure où le statut prévoyait certes une durée inférieure de cinq ans, même celle-ci était renouvelable une fois, ce qui n’est pas le cas de la durée instaurée par la loi du 20 avril 2005. 465 Théorique réversible, une telle opération s’inscrit en tout état de cause dans la durée, tout au moins à moyen terme.
142
De manière plus remarquable encore est mise en place la possibilité pour les agents publics de
« basculer » pleinement dans la sphère privée en optant pour le statut de droit privé avant même
l’échéance des dix ans466. Une telle faculté exprime le vœux – pieux selon nous – des autorités
publiques de convaincre les agents publics sur lesquels ne pèse aucune obligation de transfert en
l’absence d’applicabilité des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail de poursuivre
durablement leur activité au sein de la société nouvellement créé, et de préférer ainsi leurs fonctions
au statut public dont il dispose.
WV !4*96?=3?656[*?=8A6[6C7:*@7Z*:[[:5?*>@64?*j*
Dans un souci de clarté et d’intelligibilité, le législateur de 2005 a ainsi pris soin d’organiser
dans une disposition spécifique les règles de transfert propres à chacune de ces catégories. Le 3ème
alinéa de l’article 7 de la loi du 20 avril 2005 instaure, en premier lieu, à l’égard des agents publics
affectés à la concession transférée, un mécanisme de mise à disposition au profit de la nouvelle
société. Quant aux agents de droit privé, qui constituent le contingent principal concernée par la
création des sociétés aéroportuaires, le législateur rappelle enfin de manière très classique que le
transfert des personnels de droit privé relève de plein droit du champ de l’article L. 1224-1 du code
du Travail. Force est de constater cependant que le dispositif de la loi du 20 avril 2005 n’a eu ni les
effets de simplification ni d’incitation que lui avait assigné le législateur.
A un cadre législatif précis, et dont la vocation était d’assurer la continuité sociale, il est en
effet intéressant d’opposer la mise en œuvre pratique. L’exemple aéroportuaire traduit avec acuité les
difficultés à faire admettre l’évolution d’une structure publique vers une entité privée à des agents
qui y sont affectés depuis des années, et qui sont véritablement « empreints » de cette culture
publique. Notre propos n’est aucunement de juger les agents sur les réticences qu’ils peuvent avoir à
voir leur régime social évoluer dans une telle ampleur, ni encore moins d’analyser la légitimité ou
non de telles réticences. Il cherche davantage à démontrer combien la dimension sociale est au cœur
de telles opérations, et pourra parfois conduire à des résultats éloignés des objectifs initiaux de la
puissance publique dans le cadre d’opérations de telle envergure. Dans le cas des aéroports, la
466 Un dispositif identique a été retenu par la loi n° 2009-1503 du 8 décembre 2009 relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires et portant diverses dispositions relatives aux transports (J.O. du 9 décembre 2009, p. 21226) en son article 52 concernant le sort personnels de l’aéroport de Nantes Atlantique dans le cadre de la construction de la nouvelle plateforme de Notre Dame des Landes dans le cadre d’une concession de service public qui sera octroyée à un consortium à capitaux entièrement privés : « À l'échéance de la concession détenue par la chambre de commerce et d'industrie de Nantes pour la construction, l'entretien et l'exploitation des aérodromes de Nantes-Atlantique et de Saint-Nazaire-Montoir, les agents publics affectés à cette concession sont mis, pour une durée de dix ans, à la disposition du délégataire désigné par l'État à cette date pour la concession ayant pour objet les aérodromes de Nantes-Atlantique et de Saint-Nazaire-Montoir ainsi que le nouvel aérodrome du Grand Ouest Notre-Dame-des-Landes. Pendant la durée de cette période de mise à disposition, chaque agent est pris en charge par le nouveau délégataire aux mêmes conditions que celles dont il bénéficiait dans la concession précédente et peut à tout moment demander que lui soit proposé par le nouveau délégataire un contrat de travail. La conclusion de ce contrat emporte radiation des cadres. Au terme de la durée de dix ans prévue au premier alinéa, le délégataire propose à chacun des agents publics un contrat de travail dont la conclusion emporte radiation des cadres. Les agents publics qui refusent ce contrat sont réintégrés de plein droit au sein de la chambre de commerce et d'industrie dont ils relèvent ».
143
réforme a été conduite avec les partenaires sociaux dans un contexte juridique marqué par une
certaine confusion quant à la véritable nature juridique des agents. Ainsi, alors que la plupart des
agents auparavant employés par les CCI et affectés sur les aéroports relevaient d’un régime juridique
de droit privé à l’instar de tout agent affecté à un SPIC et devaient dès lors être transféré de plein
droit dans les effectifs de la société nouvelle créée467, ceux-ci ont simplement été mis à disposition
pour une durée de dix ans. Une telle dissymétrie entre les textes et leur application trouve son origine
dans la confusion née de l’application aux agents des CCI du statut des chambres de commerce et
d’industrie, celui-ci étant perçu comme un véritable « statut » assimilable à celui qui prévaut dans la
fonction publique classique, alors même qu’il a, au terme d’une jurisprudence sans ambiguïté du
Conseil d’Etat, une portée identique à celle d’une convention collective. Il en est résulté une situation
inverse à celle initialement envisagée par l’Etat, à savoir un transfert des personnels majoritairement
opéré par la voie de la mise à disposition, et non sur le fondement du code du travail.
*
* *
467 Les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail sont applicables aux contrats de travail des salariés de droit privé des chambres de commerce et d'industrie affectés à la concession transférée, en cours à la date du transfert de la concession, qui subsistent avec le nouvel employeur.
144
234A;7?634*9:*;@*,@E56:*#*
Au terme de cette première partie relative au fondement du transfert de personnels à
l’occasion de l’évolution d’une activité publique, un premier constat s’impose : les instruments
juridiques sont aussi multiples que les hypothèses d’évolution d’activités dont ils s’emploient à
résoudre la problématique sociale. Les mécanismes législatifs, au premier rang desquels figure fort
logiquement le dispositif translatif prévu à l’article L. 1224-1 du code du travail, y occupent toutefois
une place prégnante, révélant la nécessité de pouvoir déroger profondément aux principes classiques
qui gouvernent l’emploi des personnels de droit privé comme de droit public, pouvoir dérogatoire
souvent conféré au seul législateur.
Un second constat se fait également jour. A la relative homogénéité de la problématique du
sort des personnels de droit privé – homogénéité dans la nature des personnels (salariés de droit
privé) et leur régime juridique (code du travail et convention collective), homogénéité dans les
situations en jeu et les réponses légales ou conventionnelles qui y sont apportées (disposition
relativement générique du code du travail et accords collectifs qui en sont le miroir) – semble
correspondre une véritable hétérogénéité de la problématique du sort des personnels de droit public -
hétérogénéité dans la nature juridique des personnels (statutaires ou contractuels) et leur régime
juridique (statut de la fonction publique d’Etat, des collectivités territoriales ou hospitalière), mais
avant tout hétérogénéité des situations en jeu (création d’entreprises publiques, privatisations,
décentralisation, intercommunalité,…) et de leur fréquence et ampleur quant aux contingents
concernés.
Lorsqu’une activité publique fait l’objet d’une évolution telle que la problématique du
transfert des agents affectés à cette activité vient à se poser, les acteurs doivent répondre à titre
liminaire à la question de l’existence d’une obligation de transfert et de son fondement juridique.
Loin d’être aisée, l’analyse du fondement juridique n’est pour autant qu’une condition préalable à la
réalisation de toute opération de transfert de personnels. Il appartient ensuite aux acteurs en présence
de procéder au transfert lui-même. A une problématique théorique succède alors une préoccupation
pratique, aux enjeux tout aussi essentiels, la résolution de la dimension pratique du transfert.
*
145
!"#$%&'(*
!"#$%&'()*+,#$-./*'*0."#$!"#$"%%&'%()*&++,#"#(-&(
!"#$%#&%$'()*(+,*-.+"%(*#(!/0(),'1"+&$%"#(),&#*(
!"#$%$#&'()*+$,)-
146
*Lors de l’évolution d’une activité publique emportant le transfert corrélatif des personnels
affectés à cette activité, plusieurs exigences peuvent avoir été posées, pour garantir la protection des
droits des salariés mais également les intérêts des opérateurs économiques ou des acteurs publics
concernés. Les conditions assignées au transfert pourront se manifester sous autant de formes que
d’objectifs poursuivis : information préalable et suffisante, individuelle ou/et collective, des salariés
et/ou des employeurs, signature d’un nouveau contrat, autorisation administrative, etc.
La circonstance que le transfert des contrats de travail s’opère dans le cadre d’une activité en
lien avec une personne publique pourra également engendrer des contraintes supplémentaires. Là
encore, les modalités de mise en œuvre du transfert diffèreront sensiblement selon les hypothèses
d’évolution des activités, et résulteront de l’appréciation combinée d’une multitude de facteurs. Les
conditions de mise en œuvre du transfert dépendront ainsi de la nature des agents concernés, privés
ou publics, de la nature de leur nouvel employeur et du contexte juridique dans lequel s’inscrit le
transfert.
On procèdera, en premier lieu, à l’examen des modalités de mise en œuvre du transfert des
agents de droit privé (Chapitre 1) avant de se pencher, en second lieu, sur celui des agents de droit
public (Chapitre 2).
147
2G@=65E:* U* S* /:?* <39@;658?* =:E<:55@45* 90@??7E:E* ;@* A345647658*90:<=;36*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=E6>8*
En matière d’activités publiques, le transfert des personnels de droit privé est susceptible de
s’opérer tant vers des opérateurs économiques de droit privé ou de droit public que vers des
personnes publiques lorsque ces dernières prendront l’initiative de reprendre en régie une activité de
service public auparavant confiée à un tiers. Salarié de droit privé au moment du transfert, l’agent
affecté à une activité publique ne le sera donc pas nécessairement à l’issue de l’évolution juridique
de la structure qui l’emploie, selon que son employeur demeurera ou non un opérateur économique
inscrit dans une dimension privée.
Dans cette première hypothèse, le transfert des contrats de travail se trouvera indéniablement
simplifié dans ses conditions de mise en œuvre (Section 1) : eu égard, d’une part, à la relative
continuité du régime juridique dans lequel s’inscrit alors le contrat de travail ; eu égard, d’autre part,
à la volonté certaine du législateur et des partenaires sociaux ou économiques de faciliter ce transfert
et d’en limiter ainsi l’impact sur la vie économique des opérateurs comme sur les droits des salariés.
A l’inverse, dans la seconde hypothèse, la reprise en régie de l’activité par la puissance
publique, les mutations engendrées par l’évolution du régime juridique dans lequel s’inscrit le
contrat de travail des agents auront inévitablement des conséquences sur les modalités mêmes du
transfert des contrats de travail, en vue d’une adaptation aux nouvelles conditions d’emploi des
personnels (Section 2).
148
':A5634*U*S*!4*5E@4?[:E5*?6<=;6[68*>:E?*;:?*3=8E@5:7E?*8A343<6C7:?*9:*9E365*=E6>8*C76*?345*:4*AG@E\:*9074*?:E>6A:*=7B;6A*
L’instauration par le législateur, dès 1928, de règles de transfert des salariés, aujourd’hui
codifiées dans le code du travail, répondait à une volonté de sécurisation de l’emploi des salariés face
aux évolutions économiques. Aussi, pour faciliter le transfert et limiter les contraintes qui auraient
été de nature à en freiner le déroulement, le juge est venu préciser le cadre juridique du transfert des
personnels : le transfert est quasi automatique des personnels et les formalités particulièrement
réduites dans la majeure partie des cas. Il n’en demeure pas moins que des modalités
supplémentaires peuvent exister dans certaines hypothèses, en raison de la spécificité même des
personnels transférés ou des structures gestionnaires. Là encore, les règles à respecter différeront
selon les hypothèses et on pourra constater que la nature du fondement juridique du transfert influe
fortement sur les exigences posées à la réalisation du transfert des contrats de travail. Ainsi, alors que
le mécanisme translatif des contrats de travail institué par le législateur dans le cadre de l’article
L. 1224-1 du code du travail se caractérise par une mise en œuvre résolument simplifiée (paragraphe
1), le dispositif contractuel ou conventionnel de transfert des contrats de travail prévu par certaines
conventions collectives ou contrats particuliers répond quant à lui à des contraintes juridiques
supplémentaires qui nécessitent, en comparaison, le respect d’un formalisme renforcé (paragraphe
2).
,@E@\E@=G:* U* * S* !4* 5E@4?[:E5* ;8\@;* 9:?* A345E@5?* 9:* 5E@>@6;* 9:?* ?@;@E68?* 9:*9E365*=E6>8*C7@?6L@753<@56C7:**
Le dispositif de transfert des contrats de travail de l’article L. 1224-1 du code du travail a été
conçu dans une double perspective de sécurisation des relations sociales et de stabilité de la vie
économique de l’entreprise. Il en résulte des modalités de transmission des contrats de travail
minimales, voire inexistantes, le transfert s’imposant au salarié comme à son nouvel employeur dès
lors que les conditions d’application de l’article L. 1224-1 du code du travail sont réunies (A). Seule
pèse sur le nouveau gestionnaire de l’activité publique une obligation d’information des
représentants du personnel (B), dont il pourra être relevé le faible caractère contraignant sur la
procédure de transfert des contrats de travail.
Le transfert des contrats de travail des salariés de droit privé procède, dans l’immense
majorité des cas, de l’application des dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail. C’est la
raison pour laquelle les développements qui vont suivre s’attacheront à dégager les caractéristiques
149
du cadre légal de ces transferts. Il convient toutefois de noter que le transfert des personnels de droit
privé peut également, à titre exceptionnel, reposer sur un fondement légal spécifique468.
-*S*!4* 5E@4?[:E5* :[[:A56[* 9a?* ;3E?* C7:* ;:?* A34965634?* 90@==;6A@5634*97*/RUWW^LU*97*A39:*97*5E@>@6;*?345*E8746:?**
En considérant que le transfert des salariés est effectif dès lors que les conditions
d’application de l’article L. 1224-1 du code du travail sont satisfaites, le juge judiciaire a entendu
simplifier le transfert d’une entité économique autonome instauré par le législateur. Il a, par là
même, retiré tout pouvoir d’adaptation aux acteurs en présence (1) et fortement encadré la date
effective du transfert qui ne peut se réaliser que le jour même du transfert, une date différente ne
pouvant être convenue469 (2).
UV !4*5E@4?[:E5*903E9E:*=7B;6A***
Le transfert des contrats de travail posé par l'article L. 1224-1 du code de travail est d'ordre
public470, conformément aux dispositions de l’article 3 de la directive 2001/23/CE selon lesquelles
«les droits et les obligations qui résultent pour le cédant d'un contrat de travail ou d'une relation de
travail existant à la date du transfert sont, du fait de ce transfert, transférés au cessionnaire ». Il en
résulte que, dès que ses conditions d'application sont remplies, le transfert des contrats de travail des
salariés s’impose collectivement à l’ensemble des acteurs en présence (a) et s'opère de plein droit, de
manière impérative et automatique, sans que l’accord du salarié ne soit requis, à l’exception des
salariés protégés ou des transferts emportant une modification de l’un des éléments substantiels du
contrat (b). Le mécanisme légal français de transfert des contrats de travail, en ce qu’il ignore tout
droit d’opposition au transfert au salarié contrairement au dispositif communautaire mise en place
468 La présente étude, qui ne prétend pas à l’exhaustivité, se doit néanmoins d’évoquer l’exemple des personnels de droit privé affectés à l’exploitation d’une installation portuaire. Dans le cadre de la nouvelle réforme des ports maritimes engagée notamment en vue de rationaliser l'organisation de la manutention portuaire, les contrats de travail des salariés affectés à l'exploitation des activités de manutention portuaire sont transférés vers les opérateurs de terminaux. Le législateur, à l’occasion de la création des sociétés portuaires par la loi du 4 juillet 2008 (Loi n° 2008-660 du 4 juillet 2008 portant réforme portuaire, J.O. du 4 juillet 2008, p. 10817), en effet souhaité régler les modalités de ce transfert en envisageant une procédure spécifique. Le cadre légal a ainsi été fixé : « une liste des critères de transfert doit être établie par convention ou accord collectif ; au regard des critères retenus, le président du directoire du port fixe, après consultation des organisations syndicales représentatives des salariés du port, la liste des salariés restant affectés sur des emplois du grand port maritime et, pour chaque terminal, la liste des salariés dont les contrats se poursuivent avec l'opérateur du terminal. En outre, un accord-cadre sur les mesures sociales d'accompagnement des transferts de personnels doit être conclu au plus tard le 1er novembre 2008 et sera rendu obligatoire par un décret pris avant le 1er décembre 2008. À défaut d'accord, ou en cas d'accord non conforme aux prescriptions légales, les contrats de travail des salariés du GPM non maintenus sur des emplois du port sont transférés en vertu d'une convention entre le port et l'opérateur de terminal. Une garantie d'emploi spécifique du salarié transféré, pendant une période de 7 ans suivant le transfert, est également prévue, en cas de suppression du nouvel emploi du salarié transféré consécutive à des motifs économiques de nature à entraîner son licenciement économique. Enfin, des négociations doivent s'ouvrir en vue de la conclusion, avant le 30 juin 2009, d'une nouvelle convention collective ayant pour objet de prendre en compte les caractéristiques communes des activités de manutention, d'exploitation d'outillages et de maintenance des outillages de quai ». 469 Cass soc., 5 mai 1986, Bull. Civ. V, n° 195. 470 Cass soc., 13 juin 1990, Bull. Civ. V, n° 273.
150
par la directive 2001/23/CE apparaît cependant d’une rigueur extrême (c), de sorte qu’il est permis
de s’interroger, à l’instar d’une majeure partie de la doctrine471, sur sa conventionnalité.
@R !4*5E@4?[:E5*?06<=3?@45*Y*;0:4?:<B;:*9:?*@A5:7E?*:4*=E8?:4A:**
L’article L. 1224-1 du code du travail indique que « tous les contrats de travail en cours au
jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ». La
Cour de Cassation en déduit fort logiquement qu’« en cas de modification dans la situation juridique
de l'employeur, c'est par le seul effet de la loi que les contrats de travail en cours subsistent entre le
nouvel employeur et le personnel de l'entreprise et que cette transmission s'impose au salarié comme
à l'employeur ». Elle précise, en outre, que l’obligation de transfert des contrats de travail s’impose
au nouvel employeur qui « ne saurait prétendre être un tiers aux contrats conclus par le précédent
employeur »472 comme à l'ancien, ni l'un ni l'autre ne pouvant s'y opposer ou atténuer certains de ses
effets de leur propre volonté ou par accords de volonté. Les dispositions de l’article L. 1224-1 et
suivants du code du travail sont donc marquées du sceau de l’ordre public par les juridictions
judiciaires. Il en résulte en pratique que toute clause tendant à éluder l'application de ces dispositions
est nulle, qu'elle résulte de l'acte de transfert, d'un contrat de travail ou même d'une convention
conclue directement entre les salariés et le nouvel exploitant.
BR !4*5E@4?[:E5*@753<@56C7:*:4*;0@B?:4A:*9:*<396[6A@5634?*?7B?5@456:;;:?*97*A345E@5*9:*5E@>@6;*37*9:*=E35:A5634*=@E56A7;6aE:*97*?@;@E68*
En pratique, la seule circonstance que les conditions de l’article L. 1224-1 du code du travail
soient réunies suffit à emporter le transfert des contrats de travail, sans qu’aucune formalisation ne
soit requise, notamment par la signature d’un avenant ou d’un nouveau contrat. L’accord du salarié
n’a ainsi pas à être recueilli, le contrat de travail conclu entre l’ancien gestionnaire et le salarié
demeurant en dépit du changement d’employeur.
Le caractère automatique du transfert est cependant susceptible de disparaître dans deux
hypothèses : d’une part, lorsque le nouvel exploitant envisage de modifier un élément substantiel du
contrat de travail dans le cadre de la reprise d’activité, d’autre part, lorsque le salarié bénéficie d’une
protection spécifique au titre de son mandat syndical.
471 A. SUPIOT, « Les salariés ne sont pas à vendre (en finir avec l’envers de l’article L. 122-12 alinéa 2) », Dr. soc. 2006, p. 264 ; J.-F. LHERNOULD, « Etat des relations entre le droit communautaire et le code du travail », RJS 2002, p. 799, n°23 et s.; V. IONESCU, « Le droit d’opposition des salariés eu transfert du contrat de travail : mythe ou réalité », Dr. soc. 2002, p. 507 ; A. MAZEAUD, « Licenciements économiques à l’occasion du transfert d’entreprise : les droits des salariés », Dr. soc. 2003, 482 et du même auteur : « Le sort des contrats de travail lors des transferts d’entreprise », Dr. soc. 2005, p. 737. 472 Cass soc., 13 juin 1990, Bull. civ. V, n° 273.
151
- La nécessaire signature d’un avenant avec le nouvel employeur aux fins d’entériner l’acceptation par le salarié de la modification, le cas échéant, de son contrat de travail
La reprise d’une activité implique, par essence, une évolution de son exploitation. Le nouvel
exploitant apporte avec lui une expérience, des méthodes propres voire parfois même une culture
d’entreprise. Le contexte d’exploitation de l’activité transférée s’en trouve nécessairement modifié,
sans que cette modification n’emporte obligatoirement d’effets sur les salariés473. Tel peut toutefois
être le cas si la nouvelle entité gestionnaire souhaite véritablement adapter l’activité transférée à ses
méthodes d’exploitation et modifier dans cette perspective les conditions de travail des salariés
repris. Une telle faculté lui est offerte en vertu de son pouvoir de direction474, sans que les salariés ne
puissent s’y opposer.
Elle ne peut en revanche modifier unilatéralement le contrat de travail lui-même. A l’instar
de tout contrat, le contrat de travail marque en effet un accord de volontés du salarié et de son
employeur. Le respect de la force obligatoire du contrat commande ainsi que l'acceptation du salarié
soit établie de manière claire et non équivoque475. Dès lors, le nouvel exploitant ne peut envisager la
modification du contrat de travail du salarié sans lui proposer un avenant au contrat de travail
permettant de formaliser son accord. À défaut, la modification intervenue pourra être remise en
cause, voire constituer une rupture fautive imputable à l'employeur qui a modifié unilatéralement le
contrat de travail476.
De plus, rien n’empêche que le nouvel employeur et le salarié ne conviennent d’une véritable
novation du contrat, au sens de l’article L. 1271 du code civil477. Une modification aussi profonde
des relations contractuelles à l’issue du transfert du contrat commande, plus encore que dans le cadre
d’un simple avenant et conformément aux dispositions de l’article 1273 du code civil aux termes
desquelles « la novation du contrat de travail ne se présume point ; il faut que la volonté de l'opérer
résulte clairement de l'acte », que l’accord de volonté du salarié résulte « d'actes manifestant sans
équivoque la volonté des parties de substituer un contrat à un autre478 ».
473 La modification substantielle à laquelle il est ici fait référence, et qui est seule susceptible d’obliger le nouveau gestionnaire de l’activité à recueillir l’accord des salariés dont le transfert est envisagé, est donc bien celle du contrat de travail stricto sensu, et non celle du contexte d’exploitation, sous la volonté du nouveau gestionnaire de faire évoluer les conditions de travail ou de la personne publique elle-même qui peut souhaiter, à l’occasion du renouvellement du contrat par lequel elle confie une activité publique à un tiers, modifier le périmètre de l’activité. Voir sur ce dernier aspect la notion de modification substantielle d’un contrat de la commande publique retenue par la Cour de justice : CJCE, 19 juin 2008, Pressetext Nachrichtenagentur GmbH, affaire C-454/06 , note R. NOGUELLOU, « Modification substantielle du marché et substitution de cocontractant », RDI 2008, p. 501. 474 P. MORVAN, « Transfert d’entreprise – Effets. Relations individuelles », J.-Cl. Travail Traité, fasc. n°19-52, 2010, n° 161. 475 Cass soc., 27 avril 1984, Bull. civ. V, n° 162 ; Cass soc., 1er juillet 1985, Bull. civ. V, n° 377 ; Cass soc., 6 novembre 1985, Bull. civ. V, n° 502. 476 Voir infra, p. 242. 477 Cass soc., 17 septembre 2003, Bull. civ. V, n° 232. 478 Cass soc., 12 janvier 2010, Bull. civ. V, n° 3 ; pour une application récente : Cass soc., 25 mai 2011, pourvoi n° 10-18.994.
152
- L’obtention obligatoire d’une autorisation administrative pour le transfert des salariés protégés en cas de transfert partiel d’activité
Par principe, le transfert des salariés de droit privé résultant de l’application de l’article L.
1224-1 du code du travail s’opère quasi-automatiquement sans aucune contrainte formelle
particulière. Il en va cependant différemment dans le cadre d’un transfert partiel479 de l’entité
économique autonome. Dans cette hypothèse, l’article L. 2414-1 du code du travail institue une
protection spécifique à l’égard des salariés protégés480 consistant en l’obtention d’une autorisation
administrative préalable de l’inspecteur du travail.
La délivrance de cette autorisation est organisée par les dispositions de l'article R. 2421-17 du
code du travail et placée sous le contrôle des juridictions administratives481. La demande
d'autorisation de transfert doit être adressée à l'inspecteur du travail par lettre recommandée avec
demande d'avis de réception au moins 15 jours avant la date du transfert. L'inspecteur du travail
prend sa décision dans un délai de 15 jours aux termes d’une enquête contradictoire au cours de
laquelle le salarié peut, à sa demande se faire assister d'un représentant de son syndicat. Sa décision
doit être motivée et notifiée à l'employeur et au salarié par lettre recommandée avec demande d'avis
de réception482.
Loin d’être une simple formalité, l’obligation de recueillir l’autorisation administrative
conditionne la légalité de la procédure de transfert. En l’absence d’une telle autorisation, le transfert
est considéré comme nul. Le salarié est donc réputé demeurer au service de son précédent
employeur, ce qui implique matériellement de le réintégrer dans les effectifs483 et de l’affecter, à la
suite de la perte de l’activité, à une nouvelle mission étant étendu que celle-ci doit être assortie d’une
rémunération équivalente en application des dispositions de l’article L. 2421- 9 du code du travail.
Au surplus, l’absence d’autorisation, y compris lorsqu’elle fait suite à son annulation par le juge
administratif484, est constitutive d’un délit d’entrave485.
*
479 On comprend fort aisément qu’aucune procédure spécifique ne soit prévue en cas de transfert total de l’entité économique autonome dès lors que, dans une telle hypothèse, les institutions représentatives du personnel ne sont pas affectées par la modification de l’entité qui conserve son autonomie juridique (Cass soc., 3 février 1998, RJS 1998, n° 327). 480 L’article L. 2414-1 du code du travail énumère la liste, sans que celle-ci ne soit exhaustive. La Cour de cassation a ainsi précisé que « la protection exceptionnelle et exorbitante du droit commun dont bénéficient les salariés investis d'un mandat électif ou syndical s'étendait aux candidats aux élections », Cass soc., 8 juin 1999, Bull. civ.V, n° 267, RJS 1999, n° 942. 481 CE Ass., 5 mai 1976, SAFER d'Auvergne et ministre de l’agriculture c/ Bernette , Rec. p. 232, LONG M., WEIL P., BRAIBANT G., DELVOLVE P. et GENEVOIS B., Les Grands arrêts de la jurisprudence administrative, Dalloz, 18ème éd., 2011., p. 662 ; Dr. soc. 1976, p. 345, concl. Ph. DONDOUX ; AJDA 1976, p. 304 ; D. 1976, jurispr. p. 563 ; JCP G 1976 II, 18429 ; Voir également M. MINE, H. ROSE et Y. STRUILLOU, Le droit du licenciement des salariés protégés, Économica, 1996, p. 663. 482 J.-Y. KERBOURC'H, « Protection. – Domaine d'application », J.-Cl. Travail Traité, fasc. n°15-94, 2009, n°211. 483 Cass soc., 7 novembre 1989, RJS 1990, n° 8 ; Cass soc., 26 septembre 1990, RJS 1990, n° 842. 484 Cass soc., 12 janvier 1999, Bull. civ. V, n° 16, RJS 1999, n° 237. 485 Cass crim., 30 janvier 1996, Bull. crim. n° 54, RJS 1997, n° 572.
153
AR !4*5E@4?[:E5*98478*9:*9E365*903==3?65634*97*?@;@E68*:4*9E365*645:E4:**
Obligation nationale et européenne de transfert collectif. L'article L. 1224-1 du code du
travail déroge à l'effet relatif des contrats en imposant une cession de plein droit des contrats de
travail en cours si bien qu’aucune des parties ne peut s’y opposer et qu’il n’est pas nécessaire pour
l’employeur de recueillir ni formaliser l’accord du salarié. Bien qu’instituée dans une finalité
protectrice des droits des salariés, cette disposition souffre parfois de vives critiques de la part des
salariés et de leurs représentants syndicaux qui considèrent que l’article L. 1224-1 du code du
travail conduit à une véritable cession des travailleurs, au même titre que la cession « matérielle »
de l’entreprise. La position adoptée par le juge communautaire, en ce qu’elle conditionne
l’applicabilité de la directive 2001/23/CE à la volonté du salarié de poursuivre son activité au sein
de la nouvelle entité, apparaît en ce sens plus fidèle à l’esprit des dispositions légales protectrices
de la stabilité des relations sociales. Un véritable droit d’opposition est ainsi reconnu au salarié,
qui est libre de refuser son transfert lorsque celui-ci résulte de l’application des dispositions de la
directive 2001/23/CE.
Si le raisonnement retenu par les juridictions nationales et communautaires est, au plan des
principes, identique puisque le juge communautaire considère que lorsqu’existe un transfert
d’entreprise au sens de la directive précitée 2001/23/CE le transfert des contrats de travail n’est
« subordonnée au consentement ni du cédant ni du concessionnaire, ni des représentants des
travailleurs eux-mêmes », il existe en revanche une différence majeure résidant dans
l’appréhension des droits individuels du travail. Si le transfert s’impose collectivement aux
travailleurs de l’entreprise concernée, il peut en revanche être refusé individuellement par chaque
salarié. Les dispositions de l’article 3 de la Directive 2001/23/CE telles qu’interprétées par le juge
communautaire offrent au salarié la possibilité de choisir. Soit le salarié ne s’oppose pas à
l’application de la directive et son contrat est alors automatiquement transféré, sans qu’il puisse
renoncer aux droits garantis par elle ; soit il refuse le transfert et son sort ne relève plus de la
directive dont les dispositions correspondantes sont inapplicables. Le refus du salarié de se voir
transférer au bénéfice du nouvel employeur a ainsi pour effet de faire échec à l’application des
dispositions de la Directive 2001/23/CE à son égard. Le juge communautaire considère en effet
que « dans une telle situation, l’article 3, paragraphe 1, de la directive ne s’applique pas ».
Droit d’opposition individuel en droit de l’Union européenne. Reconnu explicitement à
l’occasion d’un recours préjudiciel de la Cour fédérale allemande du travail et réaffirmé de
manière constante par le juge communautaire, le droit d’opposition du salarié à son transfert trouve
sa source dans la finalité même de la directive qui tend à assurer le maintien des droits des
travailleurs en cas de changement de chef d’entreprise en leur permettant de rester au service du
nouvel employeur dans les mêmes conditions que celles convenues avec le cédant. Les règles
154
applicables en cas de transfert d’une entreprise ou d'un établissement à un autre chef d’entreprise
ont ainsi pour objet de sauvegarder, dans l’intérêt des employés et dans toute la mesure du
possible, les relations de travail existantes qui font partie de l’ensemble économique transféré. La
finalité protectrice de la Directive 2001/23/CE est affirmée dès son Préambule. Après avoir
constaté que « l'évolution économique entraîne sur le plan national et communautaire des
modifications des structures des entreprises qui s'effectuent, entre autres, par des transferts
d'entreprises, d'établissements ou de parties d'entreprises ou d'établissements à d'autres chefs
d'entreprise, résultant de cessions ou de fusions », les institutions de l’Union européenne
soulignent que « des dispositions sont nécessaires pour protéger les travailleurs en cas de
changement de chef d'entreprise en particulier pour assurer le maintien de leurs droits ».
Ordre public de direction et ordre public de protection. Mais la portée d’ordre public de
la protection que la directive tend à assurer aux travailleurs doit être interprétée comme signifiant
qu'il n'est pas permis d' y déroger dans un sens défavorable aux travailleurs : ces derniers n'ont pas
la faculté de renoncer à l’ensemble des droits conférés par la directive. A l’inverse, les dispositions
de l'article 3, paragraphe 1, de la directive n’implique aucunement que le travailleur ne puisse
s'opposer au transfert de son contrat ou de sa relation de travail. La Cour de justice des
Communautés européennes a, au contraire, retenu dans son arrêt du 11 juillet 1985 Danmols
Inventar que la protection que la directive vise à assurer est dépourvue d'objet « lorsque l'intéressé
lui-même, à la suite d'une décision prise par lui librement, décide de ne pas poursuivre après le
transfert, avec le nouveau chef d'entreprise, la relation de travail ». Dès lors, si elle permet au
travailleur de rester au service du nouvel employeur dans les mêmes conditions que celles
convenues avec le cédant, « elle ne saurait être interprétée comme obligeant le travailleur à
poursuivre la relation de travail avec le cessionnaire ». La Cour de justice considère qu’une telle
obligation « mettrait en cause les droits fondamentaux du travailleur », qui doit être libre de
choisir son employeur et ne peut pas être obligé de travailler pour un employeur qu'il n'a pas
librement choisi.
La différence de lecture des dispositions de la Directive 2001/23/CE par les juridictions
sociales nationales et communautaires réside donc dans la faculté laissée au salarié de refuser son
transfert vers un nouvel employeur. La nuance entre les deux analyses, bien que ténue, soulève
néanmoins une problématique de fond relative à la compatibilité des règles internes au droit
communautaire d’une part, et au droit français du travail relatif à la démission d’autre part. Il
apparaît pourtant, au-delà de cette apparente divergence de positions, que, si les dispositions
françaises s’éloignent quelque peu du cadre posé par la directive communautaire, elles lui restent
parfaitement conformes dans la mesure où les quelques différences existantes entrent dans le cadre
de la marge de manœuvre laissée aux Etats pour la transposition de la directive. La Cour de justice
des Communautés européennes a ainsi eu l’occasion de rappeler, à l’occasion de son arrêt Berg
155
que « la directive ne vise pas la poursuite du contrat ou de la relation de travail avec le cédant au
cas où le travailleur employé dans l’entreprise ne souhaite pas rester au service du cessionnaire ».
En déniant tout droit au salarié de s’opposer à son transfert, le droit français use indéniablement de
la marge de manœuvre laissée par le droit communautaire en la matière. Mais cette compatibilité
au droit communautaire ne doit pas occulter un autre problème de conformité, cette fois à l’égard
dès règles relatives à la démission en droit social national. En refusant son contrat de travail, le
salarié exprime en effet sa volonté de ne pas changer de cocontractant et non sa volonté de rompre
le contrat.
WV !4* 5E@4?[:E5* 9:?* A345E@5?* 9:* 5E@>@6;* A34A3<65@45* @7* 5E@4?[:E5*90:45E:=E6?:**
Le caractère automatique du transfert des contrats de travail transparaît également dans la
date à laquelle le transfert des contrats de travail est considéré comme effectif par les juridictions
sociales nationales et européennes, à savoir la date du transfert d’entreprise. La précision est
importante et moins évidente qu’il n’y paraît, notamment en matière d’activités publiques.
Evidemment dans la majeure partie des évolutions juridiques d’une structure, la question du transfert
des contrats de travail se posera au moment même où interviendra le transfert d’entreprise stricto
sensu et ne soulèvera dès lors aucune difficulté. Dans d’autres hypothèses, le transfert d’entreprise
pourra être organisé dans le temps, et ce d’ailleurs principalement en vue d’atténuer les effets
sociaux de ce transfert. Les opérations de privatisations d’entreprises publiques ou, de manière plus
générale d’externalisation d’activités publiques au profit d’opérateurs privés, au cours desquelles,
nous l’avons évoqué à plusieurs reprises, la question sociale s’avère souvent des plus délicates, en
sont un parfait exemple. Dans de telles hypothèses, il n’est pas rare que les entités entre lesquelles
s’organise le transfert envisagent de différer le transfert des personnels par rapport au transfert de
l’activité elle-même, ne serait-ce qu’afin d’assurer une période de transition entre les employeurs et
les régimes sociaux applicables.
Opérateurs économiques et autorités publiques se voient pourtant privés d’une telle faculté
par l’interprétation extrêmement claire et précise par la Cour de justice des communautés
européennes de la notion de « date du transfert » au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive
77/187/CE486. Saisie de plusieurs questions préjudicielles tendant à clarifier les contours de cette
notion, cette dernière a ainsi précisé que la date de transfert « doit être comprise comme visant la
date à laquelle intervient la transmission, du cédant au cessionnaire, de la qualité de chef
d’entreprise responsable de l’exploitation de l’entité en cause »487. Envisageant l’activité et les
486 Remplacée par la directive 2001/23/CE du Conseil du 12 mars 2001 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises, d'établissements ou de parties d'entreprises ou d'établissements du 12 mars 200. 487 Ibid., point 36.
156
contrats de travail qui y sont attachés comme un ensemble indissociable, la Haute juridiction
européenne considère en effet que « les contrats et les relations de travail existant, à la date du
transfert entre le cédant et les travailleurs affectés à l’entreprise transférée sont transmis de plein
droit de ce dernier au cessionnaire du seul fait du transfert de l’entreprise »488. Le transfert des
contrats et des relations de travail, en application de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 77/187,
ayant nécessairement lieu à la même date que celle du transfert de l’entreprise, la Cour de justice des
communautés européennes en déduit qu’il « ne peut être reporté, au gré du cédant ou du
cessionnaire, à une autre date »489. Comme le souligne logiquement la cour, reconnaître à l’un ou
l’autre des exploitants qui se succèdent la faculté de choisir la date à partir de laquelle le contrat ou la
relation de travail sont transférés reviendrait à admettre que les employeurs peuvent déroger, au
moins à titre temporaire, aux dispositions de la directive 2001/23/CE, alors que celles-ci revêtent un
caractère impératif et qu’il ne peut dès lors y être dérogé dans un sens défavorable aux travailleurs490.
Il apparaît ainsi à la lecture de la jurisprudence communautaire que « les contrats et les relations de
travail existant, à la date du transfert entre le cédant et les travailleurs affectés à l'entreprise
transférée sont réputés être transmis, à ladite date, du cédant au cessionnaire, quelles que soient les
modalités qui ont été convenues à cet égard entre ces derniers491.
Appliquée aux hypothèses de succession de cocontractants de la puissance publique, cette
solution conduit à notre sens à fixer la date du transfert de l’entité économique et donc des contrats
de travail à la date d’entrée en vigueur de la convention d’exploitation de l’activité publique – dans
la majeure partie des cas une convention de délégation de service public – et non à sa date de
notification d’attribution ou de signature, la plupart du temps antérieures. Attribuée à l’issue d’une
procédure de publicité et de mise en concurrence préalables, la convention d’exploitation d’une
activité publique est en effet par définition négociée puis signée par les parties – autorité publique
délégante ou pouvoir adjudicateur et opérateur économique de droit privé ou de droit public –
quelques semaines voire quelques mois avant son application effective dans une logique
d’anticipation et de continuité du service public. Sa signature ne marque cependant que l’accord de
volonté des parties sur les conditions d’exécution à venir de l’activité de service public, et n’emporte
pas selon nous par elle-même le transfert de l’entité économique autonome au sens de l’article L.
1224-1 du code du travail. Ce dernier intervient effectivement au moment de l’entrée en vigueur de
la convention, à l’expiration de la précédente convention si l’on se situe dans le cadre d’un
renouvellement de contrat, à la date de délégation fixée par l’assemblée délibérante si l’on se trouve
confronté à une externalisation inédite d’activité publique.
488 CJCE, 25 juillet 1991, D'Urso e.a. / Marelli, aff. C-362/89, Rec. CJCE 1991 p. I-4105, point n°20, et CJCE, 14 novembre 1996, Rotsart de Hertaing, C-305/94, Rec. p. I-5927, point n°18. 489 Ibid. point n°26. 490 Ibid. point n° 17 et n°25. 491 CJCE, 26 mai 2005, Celtec Ltd c/. John Astley e.a, aff. C-478/03, Rec. CJCE p. I-4389.
157
La seule véritable formalité que doivent accomplir les acteurs d’une opération emportant
transfert d’une entité économique autonome au sens des dispositions de l’article L. 1224-1 du code
du travail ne consiste qu’en un simple devoir d’information, dont le contenu et les destinataires
apparaissent au surplus des plus restreints.
N*S*!4*5E@4?[:E5*?37<6?*Y*74:*?6<=;:*3B;6\@5634*9064[3E<@5634*
A l’exception d’hypothèses particulières492, le transfert des salariés de droit privé ne nécessite,
pour être effectif, aucune mesure spécifique. Seule pèse sur l’employeur initial des salariés de droit
privé une obligation d’information des acteurs intéressés par le transfert, à savoir les salariés à
travers leurs représentants syndicaux (1) et la personne publique, détentrice originelle de la
compétence pour exercer l’activité en cause (2).
UV !4:* ?6<=;:* 3B;6\@5634* 9064[3E<@5634* A3;;:A56>:* 9:?* ?@;@E68?* 9:* 9E365*=E6>8*
L’obligation d’information des travailleurs, d’intensité variable selon le fondement juridique
du transfert, s’inscrit dans un contexte général d’inspiration communautaire soucieux des droits
sociaux des travailleurs (a). Il ne saurait cependant être nié que cette information, pour obligatoire
qu’elle soit, n’en demeure pas moins qu’une simple formalité dépourvue de véritable caractère
contraignant sur la procédure elle-même de transfert des contrats de travail (b).
@R !4:* 3B;6\@5634* 6;;7?5E@56>:* 9:?* :Z6\:4A:?* 97* 9E365* ?3A6@;*A3<<74@75@6E:*
Déjà prégnant dans les directives sociales les plus anciennes493, le « droit à l'information et à
la consultation au sein de l'entreprise », désormais solennellement inscrit dans la charte des droits
fondamentaux de l'Union européenne494, occupe aujourd’hui une place centrale dans le droit social
européen. Poursuivant cette orientation, la directive du 11 mars 2002495 s'est donné pour objectif la
mise en place d'un « cadre général » relatif à l'information et à la consultation des travailleurs dans
toutes les entreprises européennes, y compris celles qui ne sont pas transnationales. Cette approche,
492 Notamment en cas de transfert partiel d’activité comme évoqué plus haut. 493 Directive 75/129/CEE devenue la directive 98/59/CE, relative aux licenciements économiques (J.O. L 225 du 12 août 1998, p. 16), Directive 2001/23/CE du 12 mars 2001, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises, d'établissements ou de parties d'entreprises ou d'établissements (J.O.C.E. L 82/16 du 22 mars 2001), op.cit. La directive 94/45/CE du 22 septembre 1994, concernant l'institution d'un comité d'entreprise européen ou d'une procédure dans les entreprises de dimension communautaire et les groupes d'entreprises de dimension communautaire en vue d'informer et de consulter les travailleurs (J.O. L 254 du 30 septembre1994, p. 64), a montré plus nettement encore l'importance que le droit communautaire confère à l'information et à la consultation des salariés dans les entreprises de dimension communautaire. 494 Article 27 de la Charte européenne des droits fondamentaux, n°2000/C 364/01 (J.O.C.E. du 18 décembre 2000). 495 Dir. 2002/14/CE du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l'information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne (J.O. L 080 du 23 mars 2002, p. 29).
158
qui s'efforce de privilégier le dialogue et l'établissement de procédures favorables à la recherche de
solutions négociées, repose sur l'idée d'une conciliation possible entre la protection des travailleurs et
l'adaptation des entreprises aux changements qui les affectent496. L'instauration de procédures
d'information, de consultation et de négociation doit ainsi permettre d'anticiper les restructurations et
la participation des représentants des travailleurs à ces processus doit contribuer à la définition de
mesures d'accompagnement pour les salariés497.
Il n’en demeure pas moins que cette exigence, sans cesse réaffirmée en droit communautaire,
ne trouve, en matière de transfert des contrats de travail à l’issue d’une évolution juridique de la
structure d’emploi, qu’un écho limité. La directive 2001/23/CE relative au maintien des droits des
travailleurs n’impose, en son article 7, qu’une information collective, et non individuelle, des
travailleurs, puisque seule l’information et la consultation des représentants des travailleurs est
envisagée.
Le droit national s’inscrit dans une perspective identique puisqu’aux termes de l'alinéa 1er de
l'article L. 2323-19 du code du travail, « le comité d'entreprise est informé et consulté sur les
modifications de l'organisation économique ou juridique de l'entreprise, notamment en cas de
fusion, de cession, de modification importante des structures de production de l'entreprise ainsi que
lors de l'acquisition ou de la cession de filiales au sens de l'article L. 233-1 du code de
commerce »498. Cet alinéa n'est que l'application du principe général prévu à l'article L. 2323-6 du
code du travail selon lequel « le comité d'entreprise est obligatoirement informé et consulté sur les
questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise et, notamment,
sur les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs, la durée du travail, les
conditions d'emploi, de travail et de formation professionnelle du personnel ». En outre, l'employeur
« consulte également le comité d'entreprise lorsqu'il prend une participation dans une société et
l'informe d'une prise de participation dont son entreprise est l'objet lorsqu'il en a connaissance »499.
L'article 7 de la directive 2001/23/CE du 12 mars 2001500 envisage cependant une obligation
d’information individuelle en cas d’absence de représentants du personnel. Mais dans un arrêt du 18
496 P. LOKIEC et S. ROBIN-OLIVIER, « La transposition de la directive 2002/14 sur l'information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne », RDT 2009, p. 466. 497 S. LAULOM, « Harmonisations législatives et stratégie européenne pour l'emploi », RTD 2007, p. 710. 498 M. BONNECHERE, « Le contrôle par les travailleurs des restructurations et de leurs conséquences sur l’emploi », Dr. ouvrier 1979, p. 273 ; F. FAVENNEC-HERY, « La consultation des représentants du personnel sur le transfert de l'entreprise », Dr. soc. 2005, p. 729 s ; A. LYON-CAEN, « Le comité d'entreprise et les restructurations », Dr. soc. 2005, p. 285 s.; G. LYON-CAEN, « La concentration du capital et le droit du travail », Dr. soc. 1983, p. 287 ; « Le comité d'entreprise et la restructuration de l'entreprise », Dr. soc. n° spécial 1979, p. 23 ; Y. MARTIN-LAVIGNE, « Comment arrêter les termes du contrat de cession d'une société avant d'informer et de consulter son comité d'entreprise ? », D. 2002, chron. p. 1374 s ; P. SOULIER, « Les restructurations : le rôle du comité d'entreprise, aspects pratiques », Dr. soc. 1989, p. 35 ; B. TEYSSIE, « Les restructurations : le rôle du comité d'entreprise », Dr. soc. n° spécial janv. 1989, p. 23. 499 Article. L. 2323-19, alinéa 3 du nouveau code du travail. 500 « Les États membres prévoient que, au cas où il n'y aurait pas dans une entreprise ou un établissement de représentants des travailleurs pour des motifs indépendants de leur volonté, les travailleurs concernés doivent être informés préalablement : de la date fixée ou proposée pour le transfert, du motif du transfert, des conséquences juridiques, économiques et sociales du transfert pour les travailleurs, des mesures envisagées à l'égard des travailleurs »
159
novembre 2009, rendu sous le double visa de l'article 249 du traité CE et de l'article L. 1224-1 du
code du travail, la Cour de cassation souligne que cette disposition n'a pas été transposée en droit
interne, de sorte qu'elle ne peut créer d'obligation à la charge d'un employeur envers ses salariés
compris dans un transfert d'entreprise501.
BR !4:*3B;6\@5634*:<=3E5@45*9:?*A345E@645:?*<646<@;:?*
Certes, l’obligation d’information des représentants du personnel posée à l’article 7 de la
directive 2001/23/CE, et retranscrite en droit interne au travers des dispositions des articles L. 2323-
6 et L. 2323-19 du code du travail, constitue une garantie essentielle des droits des travailleurs, en
leur assurant une pleine connaissance des éléments substantiels de l’opération de transfert : « la date
fixée ou proposée pour le transfert, le motif du transfert, les conséquences juridiques, économiques
et sociales du transfert pour les travailleurs, ainsi que les mesures envisagées à l'égard des
travailleurs ». Elle n’en demeure pas moins des plus minimales tant son champ d’application est
volontairement restreint aux seuls représentants du personnel, et ses effets sur la légalité du transfert
des contrats limités.
- Un champ d’application limité à la seule sphère collective
L’employeur initial n'est pas tenu d’aviser préalablement et individuellement les personnels
concernés502. L'article L. 1224-1 du code du travail produisant un effet translatif de plein droit, les
juridictions sociales considèrent en conséquence que l'employeur n'est pas tenu, par anticipation,
d'avertir les salariés – « protégés dans cette éventualité par une disposition légale d'ordre public » –
de la modification apportée par ce biais à leur contrat503. Et dans l’hypothèse où l'employeur initial
déciderait d’informer ses salariés du transfert de leur contrat de travail vers un nouvel employeur,
cette information n’emporte en aucun cas licenciement des personnels ainsi avisés. Elle demeure une
simple notification de changement d’employeur504. La délivrance d'un certificat de travail et le
versement d'une indemnité de congé, en plus d'une telle notification, n'engendrent pas davantage la
rupture505.
En pratique, cette obligation d’information collective se trouve néanmoins renforcée dès lors
que le transfert engendre des modifications dans la situation juridique des salariés. Cela se traduit par
une consultation préalable à la décision de modification qu’emporte le transfert. L’ancien exploitant
501 P. MORVAN, « Transfert d'entreprise et information individuelle des salariés », JCP S 2010, n°1047, commentaire sous l’arrêt : Cass soc., 18 novembre 2009, SAS Open Cascade c/ Nobre et a., pourvois n° 08-43.397 et n° 08-43.398, inédit. 502 Cass soc., 16 janvier 1974, Bull. Civ. V, n° 41, Dr. soc. 1974, p. 475, obs. J. Savatier. ; Cass soc., 14 décembre 1999. 503 Cass soc., 23 octobre 1968, D. 1969, jurispr. p. 166, JCP G 1969, II, 15755 bis ; Cass soc., 14 décembre 1999, Bull. civ. V, n° 484. 504 Cass soc., 27 janvier 1971, Bull. civ. V, n° 50. 505 Cass soc., 6 mai 1975, Bull. civ. V, n° 232.
160
doit ainsi indiquer, d'une part, les motifs des modifications projetées et, d'autre part, les mesures
envisagées à l'égard des salariés lorsque ces modifications comportent des modifications pour ceux-
ci. Le comité d'entreprise dispose de prérogatives de consultations relatives à toutes circonstances
touchant l'organisation de l'entreprise indépendamment des conséquences que ces évènements
peuvent entraîner sur les conditions de travail et d'emploi. Aucune disposition légale n'impose de
procédure particulière ni de délai entre la phase de consultation et la réalisation de la modification.
L'employeur doit, pour informer et consulter le comité d'entreprise, donner des informations précises
et écrites sur les opérations projetées, les transmettre dans un délai suffisant et organiser la
consultation du comité d'entreprise visant à une délibération de celui-ci. Dès que le nouvel exploitant
élabore le projet de modification, il doit transmettre par écrit, toutes informations pertinentes
susceptibles d'éclairer le sens, la portée, et les motifs des modifications envisagées. L’ancien
exploitant doit quant à lui déclencher la procédure de consultation du comité d'entreprise. Les
informations doivent être communiquées au comité d'entreprise en même temps que la convocation à
la réunion dont l'ordre du jour a prévu l'examen de ces questions.
L’information individuelle du transfert, si elle n’est pas toujours obligatoire, paraît pourtant
d’autant plus essentielle que le transfert du contrat de travail peut résulter de différents fondements,
légaux, conventionnels ou contractuels. Or, dans ces différentes hypothèses, les obligations en
termes d’information des employeurs qui se succèdent diffèrent : l’accord collectif nécessite l’accord
du salarié et, par là même, une information précise sur la situation à venir ; lorsque le fondement du
transfert est légal et repose sur les dispositions de l’article L. 1224-1 et suivants du code du travail, le
transfert s’opère automatiquement sans obligation d’information individuelle préalable. Limiter
l’information pour l’employeur aux seules hypothèses conventionnelles peut parfois s’avérer
insuffisant aux yeux du juge, en raison de la frontière souvent ténue qui peut exister entre les
modifications, légales ou conventionnelles, et l’incompréhension qui peut en résulter pour le salarié.
A ce titre, l’arrêt de la 4ème Chambre sociale de la Cour d’Appel de Montpellier506 illustre la nécessité
d’éclairer le salarié sur son sort, quand bien même aucune information ne pèserait sur l’employeur
initial. En l'espèce, il s’agissait de la cession de l'ensemble des éléments d’un fonds de commerce,
parmi lesquels figuraient les marchés de prestation de service dont la société de gardiennage était
titulaire, laquelle cession entraînait le transfert d'une entité économique à une nouvelle société, en
application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail de sorte que le contrat du
salarié, engagé en qualité d'agent de prévention, s'était opéré automatiquement à la date de la cession
du fonds. La difficulté résidait dans la circonstance que l’agent de prévention, coutumier des
transferts de contrats en application de la convention collective régissant les activités de prévention
et de sécurité, avait refusé son transfert et s’était dès lors vu licencié. Or, en l’espèce, le transfert
intervenait en application du dispositif légal du code du travail, d’ordre public, et s’imposait dès lors
506 CA Montpellier, Ch. soc., 21 novembre 2007, Krastev sarl vigilencia protection privée,
161
au salarié sans que son employeur initial ne soit tenu de l’informer individuellement de l’opération.
La Cour de Cassation a néanmoins considéré que « le licenciement de ce dernier, motivé par son
refus du transfert du contrat de travail, est dépourvu de cause réelle et sérieuse dès lors que
l'avenant qui lui a été soumis par le nouvel employeur mentionnait que le transfert intervenait
conformément à l'accord du 5 mars 2002 de la convention collective régissant les activités de
prévention et de sécurité, lequel accord, applicable en cas de changement de prestataire de services,
permet au salarié auquel une proposition de reprise a été faite de refuser, soit expressément, soit
tacitement, en ne répondant pas à la proposition dans un délai de 4 jours ouvrables, l'accord
disposant qu'il demeure en ce cas salarié de l'entreprise sortante. En effet, rien ne permet d'affirmer
que l'intéressé a été informé de la cession du fonds de commerce emportant de plein droit le transfert
de son contrat de travail et, en l'état dudit avenant, il pouvait légitimement penser que ce transfert
s'effectuait dans le cadre d'une reprise du marché de prestation de services auquel il se trouvait
affecté, excluant l'application de l'article L.122-12 du code du travail et qu’il était en droit de le
refuser ».
- Une contrainte minimale quant à ses effets
Un aspect supplémentaire témoigne de l’absence de formalisme dans la procédure légale de
transfert des contrats de travail et de la volonté du législateur de faciliter au maximum ce transfert : il
porte sur les conséquences, minimales, du non-respect de l’obligation d’information collective qui
pèse sur l’employeur initial. La non-consultation du comité d'entreprise n’est susceptible d’avoir
d’effet qu’à l’égard de l’employeur qui s’expose alors à une action en responsabilité, à une
condamnation pénale pour délit d'entrave ou trouble manifestement illicite.
En revanche, les juridictions sociales considèrent que « le non-respect des dispositions de l'article
L. 2323-19 du code du travail est sans effet sur le transfert d'un contrat de travail opéré de plein
droit ». Il en résulte que ces contrats étant transférés, les salariés ne peuvent se prévaloir de la
violation de l'article L. 2323-19 du code du travail.
WV !4:*?6<=;:*64[3E<@5634*9:*;@*A3;;:A56>658*=7B;6C7:*A345E@A5@45:*
Comme nous l’avons déjà évoqué à plusieurs reprises, le transfert de salariés de droit privé à
l’occasion d’une activité publique est susceptible de se produire principalement dans le cadre de
contrats publics liés à la commande publique et principalement de contrats de marchés publics de
service ou de délégations de service public. Dans ces hypothèses, la personne publique, pouvoir
adjudicateur ou autorité délégante, n’apparaît pas, a priori, directement concernée par le transfert de
l’entité économique qui s’effectue d’un opérateur au profit d’un autre. Elle n’est pourtant pas
indifférente à ce transfert dont elle est en réalité l’instigatrice : c’est en effet l’action de la personne
publique qui déclenche le transfert d’entité économique dans le cadre de l’activité publique, par sa
162
décision d’externaliser ou de déléguer une activité qu’elle assumait directement auparavant, de
renouveler un contrat en l’attribuant à un nouveau cocontractant ou en modifiant son équilibre
initial…
A l’origine du changement qui affecte l’activité publique, la personne publique exerce
également un rôle majeur dans le déroulement même de ce changement, qu’elle doit s’efforcer
d’assurer dans des conditions satisfaisantes. Le principe qui prévaut dans le cadre des procédures de
mise en concurrence et de publicité est bien qu’aucun comportement discriminatoire de la part de la
puissance publique ne puisse conduire à exclure un candidat sur la base d'une condition illégale ou
ne présentant pas de caractère indispensable. L’attribution des contrats publics est ainsi régie par le
principe général d'égalité et son corollaire, la libre et égale concurrence entre les entreprises
privées507, qui implique l'égalité de traitement des candidats508 à laquelle le Conseil constitutionnel
confère d'ailleurs la valeur d’une exigence constitutionnelle509. En application du principe d’égale
concurrence des opérateurs dans le cadre d’une procédure de mise en concurrence d’une activité
publique, un pouvoir adjudicateur ne saurait ainsi écarter un candidat au seul motif qu’il a participé à
la préparation du marché ou à des opérations voisines ou connexes510. Dans le même sens, la
puissance publique doit veiller à rétablir l’égalité des candidats par rapport à l’opérateur économique
en place à l’occasion d’une procédure de renouvellement d’un contrat de commande publique511 en
s’assurant que l’ensemble des candidats disposent des mêmes informations nécessaires à la
formulation de leur offre, et notamment concernant la masse salariale des personnels à reprendre en
application des dispositions du code du travail512.
C’est la raison pour laquelle, lorsqu’une activité publique est affectée par une modification
impliquant son transfert, l’opérateur économique en charge de cette activité en vertu d’un contrat
public se trouve dans l’obligation d’informer la personne publique513, détentrice originelle de
507 CE Sect., 9 mars 1951, Société des concerts du Conservatoire, Rec. p. 151 ; Lamy Droit public des affaires 2004, n° 2427. 508 CE, 20 avril 1981, Lanier, Rec. p. 279 ; CE, 15 octobre 1982, SA Affichage Giraudy, req. n°21609, Dr. adm. 1982, comm. 375 ; CE, 13 mai 1987, Société Wanner Isofi Isolation, Rec. p. 171 ; M. GUIBAL, « L'Égalité entre concurrents dans le droit des marchés publics », Marchés publ., n° 211, p. 31 s ; J. MOLHO, « Concurrence et principe d'égalité dans les achats publics », Marchés publ., n° 212. 509 CC., 26 juin 2003, décision n° 2003-473 DC, Dr. Adm. 2003, comm. 188 et 191, note A. MENEMENIS ; AJDA 2003, p. 1391, note J.-E. SCHOETTL ; Contrats-Marchés publ. 2003, chron. 18, F. LINDITCH, « Les Partenariats public-privé devant le Conseil constitutionnel ». 510 TA Paris, 22 janvier 1996, Société Genicorp, AJDA 1996, p. 166 ; Dr. adm. 1996, commentaire n° 106, confirmé par CE, 29 juillet 1998, Garde des Sceaux, min. justice c/ Sté Genicorp, req. n°177952, Rec. p. 1017, RDI 1999, n° 1, obs. LLORENS et P. SOLER-COUTEAUX ; BJCP, n° 1, 1998, p. 104, Dr. adm. 1998, comm. n° 304, obs. Ph. DELELIS ; Marchés publ., n° 3/1998, p. 19, obs. Ph. DELELIS. 511 La situation plus favorable de l'entreprise déjà titulaire du contrat ne constitue pas par elle-même une rupture de l'égalité : il faut au surplus que la puissance publique ait agi en vue de favoriser l’opérateur en place : TA Rennes, 5 avr. 1995, Préfet Morbihan c/ Synd. Intercommunal Rochefort-en-Terre, cité in Chr. BRECHON-MOULENES [ss dir.], Droit des marchés publics, éd. Moniteur, pt III.430.1. 512 CE, 13 mars 1998, SA Transports Galiero, req. n° 165238, inédit ; CE, 6 juin 1997, Société industrielle de nettoyage, pourvoi n° 129437 ; L. RICHER, « DSP : l'obligation de reprise du personnel et la libre concurrence », CP-ACCP, 2004, n° 30, p. 53. 513 Il convient toutefois de noter que le refus de l'entreprise sortante de communiquer certaines informations, à supposer qu'il soit constitutif d'un abus de position dominante, ne peut pas être invoqué dans le cadre d'un référé précontractuel : CE, 28 juillet 1999, SA Bouygues, Rec. p. 265, CJEG 1999, p. 357, concl. C. BERGEAL ; BJCP 1999, n° 7, p. 620.
163
l’activité publique, des éléments substantiels permettant d’assurer la gestion de l’activité publique
concernée, à savoir les moyens matériels, financiers et humains attachés à cette activité. Cette
obligation, qui ne résulte d’aucun texte légal ou règlementaire, découle directement du principe
d’égale concurrence et est en pratique formalisée par la personne publique et transmise aux candidats
au travers des documents de consultation qui définissent les conditions de déroulement de la
procédure de mise en concurrence. En matière de délégation de service, la personne publique autorité
délégante dispose d’un moyen d’information supplémentaire, le rapport annuel remis par le
délégataire instauré par l’article 40-1514 de la Loi Sapin du 29 janvier 1993. Celui-ci prévoit ainsi que
« le délégataire produit chaque année avant le 1er juin à l'autorité délégante un rapport comportant
notamment les comptes retraçant la totalité des opérations afférentes à l'exécution de la délégation
de service public et une analyse de la qualité de service. Ce rapport est assorti d'une annexe
permettant à l'autorité délégante d'apprécier les conditions d'exécution du service public ».
Mineure dans les contraintes qu’elle emporte pour les opérateurs en présence, l’obligation
d’information de la personne publique nous semble à l’inverse majeure dans les enjeux qu’elle
renferme. La dimension sociale des contrats, au travers notamment des chiffres relatifs aux effectifs
et à la masse salariale de l’activité publique concernée, peut en effet revêtir une importance
primordiale d’un point de vue concurrentiel dans le cadre de l’attribution de contrats de commande
publique, enjeu d’autant plus crucial que l’activité en cause sera « consommatrice » de main
d’œuvre, principalement dans les secteurs du service.
∴
A la simplicité indéniable du transfert légal des contrats de travail s’oppose le formalisme
renforcé des procédures de transfert des contrats de travail opérés sur un fondement contractuel, et
encore plus conventionnel.
,@E@\E@=G:*W**S*!4*5E@4?[:E5*A345E@A57:;*9:?*A345E@5?*9:*5E@>@6;*9:?*?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8*=;7?*:4A@9E8**
Similaire dans sa finalité, le transfert des contrats de travail d’un opérateur économique à un
autre, le transfert contractuel s’éloigne en revanche du transfert légal dans ses modalités de mise en
œuvre qui répondent à un formalisme plus prégnant. Une condition, à laquelle il ne peut être dérogé,
s’impose ainsi à tous les opérateurs économiques qui entendent organiser conventionnellement ou
contractuellement le transfert des contrats de travail : l’accord du salarié à son transfert (A). A cette
contrainte juridique extérieure aux opérateurs économiques peuvent également s’ajouter des
conditions supplémentaires, définies dans l’acte contractuel ou la convention collective emportant le
transfert, traduisant quant à elle la volonté contractuelle des parties en présence (B).
514 Créé par l’article 2 de la loi n°95-127 du 8 février 1995 relative aux marchés publics et délégations de service public (J.O. du 9 février 1995, p. 2186).
164
-*S*!4*5E@4?[:E5*A3496563448*=@E*;0@AA3E9*48A:??@6E:*97*?@;@E68*
Dès lors qu’une substitution d'employeur se produit non par l'effet des dispositions légales
du code du travail mais en vertu d'un contrat ou d’une convention collective, le changement
d'employeur doit impérativement être ratifié non seulement par les deux opérateurs concernés, mais
aussi par les salariés concernés515, a fortiori lorsque le transfert s'accompagne d'une modification des
conditions de travail516 (1). Le respect de cette exigence peut suffire et engendrer la poursuite du
contrat de travail signé avec l’ancien gestionnaire ou, à l’inverse, impliquer la conclusion d’un
avenant entre le nouvel employeur et le salarié transféré (2).
UV !4:*:Z6\:4A:*64A34537E4@B;:*
@R !4:*:Z6\:4A:*6<=8E@56>:*
Application volontaire et application conventionnelle. Il est toujours loisible à deux entités,
entre lesquelles intervient un transfert d’activité ne relevant pas de l’article L. 1224-1 du code du
travail, de convenir d’une application volontaire de ces dispositions517 en prévoyant au sein de l’acte
de cession de l’activité publique ou du contrat public de gestion de l’activité, l’insertion d’une clause
« sociale » de reprise des personnels. De la même manière, les partenaires sociaux peuvent
parfaitement envisager de systématiser l’application volontaire du dispositif légal de transfert des
contrats de travail dans le cadre d’un accord collectif de branche518.
Application stricte du principe de l’absence d’effet relatif des contrats. En toute hypothèse,
une telle volonté de s’accorder sur le transfert corrélatif des contrats de travail attachés à une activité
ne peut cependant, en vertu du principe fondamental de l’absence d’effet relatif des contrats posé par
l’article 1134 du code civil, s’imposer aux salariés concernés. Les juridictions sociales rappellent
ainsi qu’« en dehors du champ légal d'application de l'article (L. 1224-1) du code du travail, le
transfert de contrats de travail ne peut se faire sans l'adhésion des salariés »519 . L’enjeu d’une telle
condition s’avère fondamental pour les acteurs du transfert dans la mesure où le respect de cette
formalité substantielle emporte des conséquences sur l’imputabilité de la rupture du contrat520.
*
515 Cass soc., 17 mars 1993, Bull. Civ. V n° 88, op. cit. 516 Cass soc., 26 septembre 1990, Bull. Civ. V n° 390 ; Cass soc., 2 avril 1998, pourvoi n° 96-40.38. 517 Cass. soc., 17 mars 1993, Bull. civ. V, n° 88, op. cit. ; Cass. soc., 4 mai 1994, Bull. civ. V, n° 160. 518 Voir supra, n° 519 Cass soc., 7 novembre 1989, Bull. Civ. V, n° 644 ; Cass soc., 17 mars 1993, Bull. Civ. V, n° 86. 520 Voir infra, Chapitre 3, Partie 2.
165
BR !4:* :Z6\:4A:* C76* ?06<=3?:* <]<:* :4* =E8?:4A:* 9074:* @753E6?@5634*@9<646?5E@56>:*9:*5E@4?[:E5*9074*?@;@E68*=E358\8*
Accord exprès du salarié même protégé. L’employeur initial ne saurait, en outre, s’exonérer
de cette exigence en aucune manière, quelque soit la qualité du salarié concerné et les autorisations
administratives dont a éventuellement pu faire l’objet l’opération de transfert521. La Cour de
Cassation, par un arrêt du 3 mars 2010522, est ainsi venue étendre aux salariés protégés sa
jurisprudence relative à l’exigence d’un accord exprès du salarié en cas de transfert conventionnel du
contrat de travail. La question de la nécessité d’un tel accord pour les salariés protégés pouvait, en
effet, se poser eu égard au régime spécifique de transfert de cette catégorie de salariés. Dans
l’hypothèse d’un transfert partiel de l’entité économique, les salariés protégés bénéficient d’une
protection renforcée dans la mesure où leur transfert ne peut survenir qu’après autorisation de
l’inspecteur du travail. En l’espèce, le transfert porté devant la Cour de Cassation intervenait en
application de l'annexe V de la convention collective nationale des activités du déchet du 11 mai
2000, étendu par arrêté du 5 juillet 2001, et concernait un salarié élu délégué du personnel chargé de
l'exécution du marché de collecte des ordures ménagères. A la suite de l’attribution de ce marché à
une autre entité, l'inspecteur du travail avait accordé l'autorisation de transférer le contrat du salarié
au sein de la nouvelle structure. Le salarié concerné, après avoir fait valoir son refus de changer
d’employeur, avait saisi les juridictions sociales. Infirmant la décision de la juridiction d’appel, la
Cour de Cassation a consacré le droit des salariés protégés à refuser le transfert de leur contrat de
travail, lorsque ce transfert s’effectue, non pas en application des dispositions de l’article L. 1224-1
du code du travail, mais en application de dispositions conventionnelles suite à une perte de marché.
En outre, la Cour de cassation apporte une précision essentielle en indiquant que la nécessité d’un
accord exprès du salarié « échappe au contrôle de l’inspecteur du travail ». Ainsi, s’il est saisi par le
salarié, le juge judiciaire est donc compétent pour vérifier que l’intéressé a bien consenti au
changement d’employeur et la circonstance que l’inspecteur du travail ait autorisé le transfert
conventionnel est sans effet sur le droit d’opposition du salarié qu’il peut faire valoir devant la
juridiction prud’homale.
Des conditions de validité du transfert cumulatives. En définitive, le transfert d’un salarié
protégé sur un fondement contractuel à l’occasion d’un transfert seulement partiel d’activité se
heurte à la réalisation de deux conditions cumulatives et non alternatives tenant, d’une part, en
l’obtention de l’autorisation administrative de l’inspecteur du travail et, d’autre part, en la
formulation expresse de l’accord du salarié. Dès lors, le transfert partiel d’une activité publique, qui
521 L. DAUXERRE, « Transfert conventionnel du contrat de travail d'un salarié protégé : nécessité de recueillir son accord exprès et absence de contrôle de l'inspecteur du travail », JCP S n° 11, 16 Mars 2010, act. 145, veille sous l’arrêt Cass soc., 3 mars 2010, SA Collectes valorisation énergie déchets (Coved) et a. c/ Helbert et a., pourvois n° 08-41.600 et n° 08-44.120. 522 Ibid.
166
est loin d’être une hypothèse d’école tant il est fréquent que la puissance publique qui en détient le
pouvoir de direction en modifie le mode de gestion en fonction des circonstances économiques,
techniques et/ou politiques, oblige les entités qui se succèdent à une vigilance accrue dans l’examen
des contraintes qui pèsent sur eux dans la mise en œuvre du transfert des personnels.
AR !4:*:Z6\:4A:*?37>:45*[3E<@;6?8:*
La circonstance que le transfert conventionnel d’un salarié de droit privé ne puisse intervenir
qu’après l’accord exprès de celui-ci impose, en pratique, à l’employeur initial des salariés concernés
par le transfert de procéder à des formalités supplémentaires en vue de requérir leur consentement.
Les modalités permettant d’obtenir un tel accord peuvent être définies par le contrat de cession lui-
même ou l’accord collectif. L’accord du salarié peut ainsi être sollicité par l’entité d’origine à travers
l’envoi par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre décharge
d’une demande d'accord du salarié en cas de transfert de contrat prévu par une convention collective,
informant individuellement chaque agent qu'en raison de la reprise par un nouveau prestataire du
marché auquel il est affecté, le contrat de travail se poursuivra avec ce nouveau prestataire dans les
conditions prévues par la convention collective du secteur d’activité concernée, sans affectation des
clauses de son contrat actuel.
La convention collective des entreprises de propreté précise par exemple les modalités du
maintien de l'emploi et de poursuite du contrat de travail 523 et notamment l’établissement d’un
avenant. Elle indique ainsi que : « le maintien de l'emploi entraînera la poursuite du contrat de
travail au sein de l'entreprise entrante ; le contrat à durée indéterminée se poursuivant sans
limitation de durée ; le contrat à durée déterminée se poursuivant jusqu'au terme prévu par celui-ci.
L'entreprise entrante établira un avenant au contrat de travail, pour mentionner le changement
d'employeur, dans lequel elle reprendra l'ensemble des clauses attachées à celui-ci ». La convention
collective des entreprises de prévention et de sécurité524 s’inscrit dans la même perspective mais se
démarque par l’attention particulière attachée aux modalités de transfert des salariés, notamment en
vue de recueillir leur accord. Il en résulte un dispositif très détaillé prévoyant la convocation par
l’entreprise sortante des salariés transférables à un entretien individuel et la signature d’un avenant
par le salarié avec l’entreprise entrante.
En l’absence de précision par le contrat ou la convention collective, la jurisprudence éclaire
sur les conditions à respecter pour s’assurer de la validité de l’accord du salarié. Les juridictions
sociales considèrent ainsi qu’« en tout état de cause, […] l'accord exprès du salarié ne peut résulter
523 Article 2 alinéa 2 de l’accord du 29 mars 1990 fixant les conditions d'une garantie d'emploi et de la continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire (ancienne annexe VII), Convention collective nationale des entreprises de propreté du 1er juillet 1994, étendue par arrêté du 31 octobre 1994 (J.O. du 5 novembre 1994). 524 Accord du 5 mars 2002 relatif à la reprise des personnels, Convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985, étendue par arrêté du 25 juillet 1985 (J.O. du 30 juillet 1985).
167
que d'une volonté claire et non équivoque du salarié qui doit se traduire par des actes certains,
dépourvus d'ambiguïté, et non se réduire à une simple poursuite du travail et des actes
d'abstention »525. L’absence de recours administratif visant à contester valablement l'autorisation de
l'inspecteur du travail, le défaut d'exercice des fonctions de délégué du personnel, l'absence de
protestation sur le changement d'employeur ou la qualité d'employeur dans l'exercice de ses
prérogatives ne sauraient par exemple caractériser l'accord exprès du salarié à son transfert.
Au demeurant, l'application volontaire des dispositions de l'article L. 1224-1 exclut, comme
dans le cas d'une application légale, la possibilité d'imposer une période d'essai526.
∴
Les acteurs économiques entre lesquels le transfert d’activité s’opère, peuvent, au-delà de
l’accord du salarié qui s’impose à eux, entendre régir plus avant le transfert des contrats de travail
des salariés.
N*S*!4*5E@4?[:E5*:4A@9E8*=@E* ;@*A34>:45634*:;;:L<]<:*T* ;:*48A:??@6E:*@AA3<=;6??:<:45*9:*96;6\:4A:?*A345E@A57:;;:<:45*?37?AE65:?*
En accordant la possibilité aux opérateurs économiques de prévoir, contractuellement ou
conventionnellement, le transfert des contrats de travail des salariés affectés à une activité elle-même
transférée mais ne relevant pas des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail, les
juridictions sociales leur offrent une véritable liberté de choix sur le principe même du transfert, loin
du caractère impératif du dispositif légal d’ordre public. Elles accordent, en outre, une marge de
manœuvre aux opérateurs quant aux modalités de mise en œuvre du transfert, ceux-ci étant
parfaitement libres d’en moduler le degré d’intensité. Les exploitants qui se succèdent ou la personne
publique, pouvoir adjudicateur ou autorité délégante, peuvent ainsi choisir d’en faire jouer
l’ensemble des effets, ou seulement certains d'entre eux, l’appliquer à l’ensemble des salariés comme
à des catégories précisément délimitées. Une telle définition des conditions de transferts se traduit
par un formalisme renforcé, permettant principalement à l’entité qui reprend l’activité de disposer
d’une vision précise des éléments sociaux en présence, l’obligation d’information préalable des
salariés (2) comme des opérateurs (1) occupant une place essentielle dans le dispositif conventionnel
ou contractuel de transfert.
525 Cass soc., 3 mars 2010, pourvoi n° 08-40.895. 526 Cass soc., 1er février 1995,pourvoi n°91-42.191.
168
UV !4:*:Z6\:4A:*9064[3E<@5634*97*E:=E:4:7E*9:*;0@A56>658*=E88<64:45:*
Nombre d’accords de cession d’entreprises ou de conventions collectives de secteurs
d’activités employant une part importante de main d’œuvre comportent des dispositifs spécifiques de
transferts de personnels. Ces dispositifs contractuels se démarquent du mécanisme translatif légal en
organisant une information substantielle du repreneur de l’activité par son prédécesseur. Il en va
ainsi, à titre d’exemple, de article 2.3 de l'accord collectif du 18 octobre 1995 relatif à la
conservation des effectifs qualifiés et à la préservation de l'emploi dans le secteur des entreprises de
préventions et de sécurité ou encore de l’avenant n° 1 à l'annexe 7 à la Convention collective
nationale des entreprises de nettoyage de locaux. L’existence d’une telle exigence d’information, qui
permet au nouvel entrepreneur de formuler son accord à la reprise de l’activité en pleine
connaissance de cause, se conçoit aisément dans un dispositif contractuel issu de la seule volonté des
parties de mettre en œuvre le transfert des salariés de droit privé en dehors de toute obligation légale.
Ainsi, au-delà des éléments financiers527 et juridiques528, le périmètre des informations que le
précédent gestionnaire de l’activité se doit de communiquer à son successeur s’étend aux aspects
humains et sociaux. Si, par définition, chaque dispositif conventionnel ou contractuel diffère, il peut
cependant être dressé un constat : l’information prend la plupart du temps la forme d’une liste du
personnel dont le transfert est envisagée. Pour permettre au futur exploitant d’esquisser le tableau de
la masse salariale qu’il s’apprête à reprendre, cette liste doit être étayée par un certain nombre
d’éléments que l’on serait tenté de qualifier « d’incontournables » : détail de la situation individuelle
de chaque salarié et notamment existence d’une garantie d'emploi ; copie du contrat de travail et, le
cas échéant, de ses avenants ; derniers bulletins de salaire et certificats d’aptitude médicale à
travailler. Rien n’empêche en outre les parties au transfert d’être encore plus exigeantes, et de
prévoir, au surplus, une information relative à l’organigramme de l’entité, la nature des contrats et
avantages particuliers consentis telles que les rémunérations variables, la mise en place de contrat
d’intéressement, la mise en place de stock-options, les contrats de retraite ou de prévoyance à la
charge de l’entreprise, les usages en cours dans la société, le climat social ou les instances de
représentation du personnel. En outre, la communication de ces éléments est souvent enfermée dans
un délai assez court, 8 jours pour la plupart des conventions collectives.
En tout état de cause, le respect d’une telle obligation se révèle doublement indispensable
pour garantir la légalité du transfert.
*
527 Bilans, comptes de résultats et annexes des cinq derniers exercices, déclarations fiscales annuelles et détail des comptes, etc. 528 Extrait K bis de l’entreprise, statuts à jour de la société, derniers procès-verbaux des conseils d’administration et assemblées générales
169
@R /:* E:?=:A5* 48A:??@6E:* 9:* ;03B;6\@5634* 9064[3E<@5634* =37E* 3=8E:E* ;:*5E@4?[:E5*:[[:A56[*9:?*A345E@5?*9:*5E@>@6;**
Dans l’hypothèse de l’application d’un dispositif conventionnel ou contractuel, « le transfert
des contrats de travail (…) ne s'opérant pas de plein droit et étant subordonné à l'accomplissement
des diligences prescrites par cet accord (...) », les juridictions sociales considèrent que « le
manquement de l'entrepreneur entrant aux diligences que l'accord met à sa charge fait obstacle au
changement d'employeur »529. Le raisonnement opéré par la Cour de cassation n’en demeure pas
moins empreint de pragmatisme530, en refusant de considérer que la méconnaissance de cette
obligation d'information ne fasse obligatoirement obstacle au transfert. La Haute juridiction exige
encore qu’il soit démontré qu'un tel manquement « mette l'entreprise entrante dans l'impossibilité
d'organiser la reprise effective du marché »531.
Intervenant entre les opérateurs économiques, l’information quant aux aspects sociaux de
l’activité n’en emporte pas moins des conséquences pour le salarié lui-même dont le transfert du
contrat peut se voir refusé, à raison des manquements de l’un ou l’autre de ces acteurs. Dans une
telle situation, le salarié n’est cependant pas démuni et dispose d'une double action indemnitaire,
l’action « contre l'entrepreneur entrant qui a empêché sans raison légitime le changement
d'employeur n'(étant) pas exclusive de celle qu'il peut aussi exercer contre l'entrepreneur sortant qui
a pris l'initiative de la rupture du contrat sans préjudice du recours éventuel de ce dernier contre le
nouveau titulaire du marché, si sa carence a fait obstacle au changement d'employeur »532.
Au demeurant, le contenu de l’information exigée par le nouveau gestionnaire de l’activité à
l’égard de son prédécesseur, dont l’intensité diffère selon les accords conventionnels533 ou
contractuels, porte a minima sur les éléments essentiels de la situation juridique du salarié au
moment de son transfert tels que son ancienneté, sa qualification, son niveau et échelon, son salaire
et, le cas échéant, les avantages sociaux particuliers au salarié.
*
529 Cass. soc., 2 décembre 2009, Bull. civ. V, n° 273, RJS 2010, n° 157 ; Voir également sur ce point P. MORVAN, «Restructurations en droit social, Litec 2007, n° 276 et A. MARTINON, Essai sur la stabilité du contrat de travail à durée indéterminée, Dalloz 2005, n° 488. 530 P.WAQUET, « Transfert conventionnel du personnel et représentants des salariés », RTD 2008 p. 176, à propos de l’arrêt de la Chambre sociale de la Cour de Cassation du 28 novembre 2007 (Cass. soc., 28 novembre 2007, Bull. civ. V, n° 200), affirmant à juste titre selon nous que « C’est donc le réalisme, et non un pur formalisme, qui prévaut ». 531 A .FABRE, « Contre qui le salarié peut-il agir en cas d'obstacle au transfert conventionnel de son contrat de travail ? », RDT 2010, p. 166, sous l’arrêt Cass. soc., 2 décembre 2009, Bull. civ., V, n° 273. 532 Ibid. 533 Article 12 relatif à la modification de la situation juridique de l'employeur, Convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985, étendue par arrêté du 25 juillet 1985 (J.O. du 30 juillet 1985)
170
BR /:* E:?=:A5* [349@<:45@;* 9:* ;03B;6\@5634* 9064[3E<@5634* 97* 437>:;*@55E6B75@6E:*9074*A345E@5*A34[6@45*;0:Z:EA6A:*9074:*@A56>658*=7B;6C7:*
Formalité plus ou moins strictement appréciée par les juridictions sociales au regard du
transfert des salariés, l’obligation d’information de l’entreprise entrante par l’entreprise sortante n’en
conditionne pas moins la légalité du transfert de l’activité publique, dès lors que celui-ci intervient
dans le cadre d’une consultation publique. En effet, à l’instar des transferts légaux, les transferts
conventionnels impliquent que l’opérateur précédemment en charge de l’activité communique à la
personne publique, pouvoir adjudicateur ou autorité délégante, l’ensemble des aspects de gestion des
ressources humaines de l’activité en cause afin de permettre à l’ensemble des candidats en présence
de disposer d’une vision précise du cadre d’exploitation de l’activité et de bâtir leur offre en pleine
connaissance de cause : masse salariale, nature des contrats, etc534. La circonstance que le fondement
du transfert repose sur un accord collectif s’avère ainsi sans incidence sur cet aspect primordial à la
bonne conduite de la consultation publique. En application de la jurisprudence communautaire Oy
Liikenne535, les pouvoirs adjudicateurs sont en effet tenus d’informer les soumissionnaires de toutes
les conditions dont l’exécution d’un contrat sera assortie afin de leur permettre d’établir leurs offres
en pleine connaissance de l’ensemble des coûts liés à l’exécution du contrat. Ainsi, un opérateur doit
pouvoir évaluer si, en cas de succès de son offre, il aura intérêt à racheter des actifs significatifs à
l’actuel titulaire du marché et à reprendre tout ou partie de son personnel ou s’il sera obligé de le
faire, se trouvant le cas échéant dans une situation de transfert d’entreprise au sens de la directive
2001/23/CE536. Fondée sur le principe d’égalité de traitement des candidats, l’obligation
d'information constitue une garantie essentielle pour les candidats entrants puisqu'elle leur permet de
rétablir, au moins pour partie, l'inégalité matérielle au profit du candidat sortant537. Elle permet en
effet aux candidats « d'apprécier les charges du cocontractant et d'élaborer une offre
satisfaisante »538. Pour être valable, l’information sur les données sociales de la consultation ne doit
pas, en outre, être communiquée aux opérateurs de manière tardive ni présenter un caractère
contradictoire539.
Au demeurant, si le coût lié à la reprise des salariés de l’ancien attributaire doit être pris en
compte par les candidats à un marché public lorsqu’ils présentent leur offre, le montant de cette
dernière ne doit pas nécessairement assurer la couverture intégrale de ce coût. Par un arrêt récent du
534 TA Paris, ord. du 29 juin 2009, Société Perfect Nettoyage SA, req. n°0303822, inédit. 535 CJCE, 25 janvier 2001, Oy Liikenne Ab, aff. C 172/99, Rec. CJCE 2001, p. 745 ; RJS mai 2001, n° 690, op. cit., point 23. 536 Comm. Eur., Communication interprétative de la Commission sur le droit communautaire applicable aux marchés publics et les possibilités d’intégrer des aspects sociaux dans lesdits marchés n°2001/C333/08 in fine (J.O.U.E. du 28 novembre 2001). 537 J. DIETENHOEFFER, « Mise en concurrence du candidat sortant : la détermination des obligations de la personne publique », Contrats et Marchés publics n° 5, Mai 2008, étude 5, p. 7. 538 CE, 13 mars 1998, Galiero, req. n°165238, inédit, Gaz. Pal. 1998, n° 168-169, p. 22 ; CJEG 1998, p. 361. 539 CE, 24 octobre 2008, Syndicat intercommunal de Mayotte, req. n° 300034, op. cit.
171
1er mars 2012540, le Conseil d’Etat a ainsi précisé « que si le coût correspondant à la reprise de
salariés imposée par les dispositions du code du travail ou par un accord collectif étendu constitue
un élément essentiel du marché, dont la connaissance permet aux candidats d’apprécier les charges
du cocontractant et d’élaborer utilement une offre, le prix de cette offre ne doit pas nécessairement
assurer la couverture intégrale de ce coût, compte tenu des possibilités pour l’entreprise de le
compenser, notamment par le redéploiement des effectifs en son sein ou, si l’exécution de ce marché
n’assure pas un emploi à temps plein des salariés concernés, de la possibilité de leur donner
d’autres missions et donc de n’imputer, pour le calcul du prix de l’offre, qu’un coût salarial
correspondant aux heures effectives de travail requises par la seule exécution du marché ».
Le maniement de cette obligation n’est, en tout état de cause, pas aisé. S’il peut évidemment
porter préjudice aux « nouveaux entrants », il est également susceptible de léser indirectement le
candidat sortant s’il a pour conséquence une sous-estimation par l’un de ses concurrents des coûts
de main-d’œuvre, permettant à ce dernier de proposer un prix compétitif et d’être déclaré attributaire
à l’issue de la procédure541.
L’évolution de la jurisprudence dans le sens d’une plus grande transparence des éléments
essentiels du contrat, et notamment des éléments relatifs à la masse salariale, semblait inéluctable au
regard des critiques sensibles adressées par les autorités de concurrence à l’encontre de l’application
des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail aux marchés publics. Dans un avis en date
du 24 février 1983542, la Commission de la Concurrence, devenue le Conseil de la Concurrence543
puis aujourd’hui l’Autorité de Concurrence544, soulignait ainsi qu’ « en matière de marchés de
travaux publics, l’application de l’article L. 122-12 fausse les règles d’accès à un marché venant à
renouvellement puisque seul le titulaire de ce marché connaît avec précision l’ensemble des coûts de
personnel constituant l’essentiel du prix de revient du chantier, alors que ses concurrents qui
devront assumer ces coûts n’en ont qu’une connaissance approximative lors de la préparation de
leurs offres ».
*
540 CE, 1er mars 2012, Département de la Corse du Sud c. Autocars Roger Ceccaldi, req. 354159, à paraître. 541 CE, 11 avril 2012, Chambre de commerce et d’industrie de Bastia et de la Haute-Corse, req. n°355183, inédit. 542 Avis du 24 février 1983, BOCCRF du 2 septembre 1983. 543 Articles 5 et 6 de l’ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 modifiée relative à la liberté des prix et de la concurrence, (J.O. du 9 décembre 1986, p. 14773). 544 Articles 95 à 97 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie (J.O. du 5 août 2008, p. 12471) modifiant notamment les dispositions des articles L.461-1 et suivants du code de commerce sur l’Autorité administrative indépendante spécialisée dans le contrôle des pratiques anticoncurrentielles, l'expertise du fonctionnement des marchés et le contrôle des opérations de concentration en France.
172
WV /0:Z6\:4A:* [E8C7:45:* 9074:* 64[3E<@5634* 9:?* ?@;@E68?* :5* 9:* ;:7E?*E:=E8?:45@45?*=@E*;:*437>:;*:<=;3I:7E**
Nombre de conventions collectives545 imposent, pour assurer l’effectivité du transfert, que
les salariés en aient expressément été avisés individuellement. Cette exigence d’information
individuelle se traduit, la plupart du temps, par l’obligation de convocation des salariés à un entretien
individuel par le nouveau gestionnaire de l’activité publique dès réception de la liste des salariés
transférables. Cette convocation, par lettre recommandée avec accusé de réception ou remises en
mains propres contre décharge, qui se trouve enfermée dans des délais relativement courts – une
dizaine de jours en général – doit intervenir dans les jours546 qui suivent la première présentation de
la lettre. L’absence non justifiée du salarié régulièrement convoqué à l’entretien individuel emporte
l’exclusion de ce dernier de la liste du personnel transférable.
Le respect d’une telle obligation conventionnelle a vocation à permettre aux salariés dont le
transfert est envisagé de prendre leur décision en pleine connaissance de cause. Elle constitue ainsi
une garantie de fond dont l'inobservation rend sans cause réelle et sérieuse un licenciement motivé
par le seul refus du salarié de passer au service du nouveau titulaire du contrat547. Elle empêche en
tout état de cause le transfert de s’opérer548.
∴
Relativement simples lorsque le transfert des salariés vers une entité de droit privé s’opère
sur un fondement légal ou contractuel, les modalités de transfert des personnels de droit privé à
l’occasion de l’évolution d’une activité publique apparaissent davantage contraignantes dans
l’hypothèse d’une reprise en régie de l’activité par la personne publique.
*
545 Voir par exemple la convention collective 546 Là encore, les délais approchent la dizaine de jours. 547 Cass. soc., 11 mars 2003, Bull. civ. V, n° 95, à propos de l'accord dans le secteur des entreprises de préventions et de sécurité. 548 Cass. soc., 2 décembre 2009, SARL Intell'sécurité privée c/ SARL Audit sécurité et autres, Bull. civ. V, n°273, op. cit.
173
':A5634*W*S*!4* 5E@4?[:E5*9@>@45@\:* [3E<@;6?8* >:E?* ;:?*=:E?344:?*=7B;6C7:?*C76*E:=E:44:45*:4*E8\6:*74:*@A56>658*9:*?:E>6A:*=7B;6A*
Reprendre en régie une activité de service public procède à l’évidence d’une volonté
politique forte de la collectivité publique. Au choix politique peuvent parfois se heurter des obstacles
juridiques qui sont susceptibles de limiter d’autant l’intérêt d’une ré-internalisation de la gestion de
l’activité. Les activités revêtant le caractère d’un service public industriel et commercial échappent
sans nul doute à de telles considérations dans la mise en œuvre d’une reprise en régie, notamment en
ce qui concerne l’aspect social. Les modalités de reprise des personnels se révèlent en effet, dans une
telle hypothèse, relativement souples, à l’image des modalités exposées plus haut et relatives au
transfert de personnels de droit privé à l’occasion d’une succession de cocontractants de la puissance
publique (A). Les contraintes procédurales de transfert des salariés de droit privé apparaissent en
revanche bien plus importantes lors de la reprise en régie d’une activité de service public
administratif (B) en raison du changement radical de régime juridique des agents qu’emporte une
telle mutation d’activité.
,@E@\E@=G:*U*S*!4*5E@4?[:E5*@7*[3E<@;6?<:*E89765*:4*A@?*9:*E:=E6?:*:4*E8\6:*9074:*@A56>658*9:*?:E>6A:*=7B;6A*6497?5E6:;*:5*A3<<:EA6@;**
Les formalités juridiques à mettre en œuvre pour opérer le transfert des salariés de droit privé
vers la personne publique se révèlent, en matière de service public industriel et commercial, des plus
limitées, tant au plan institutionnel (A) – la forme juridique de la régie est entièrement laissée à la
libre appréciation de la personne publique – qu’au plan strictement social dans la mesure où les
conditions du transfert en cas de reprise en régie d’un SPIC répondent aux mêmes exigences que
celles déjà développées pour les salariés transférés à l’occasion de l’attribution d’un contrat de la
commande publique (B).
-*S*/@*[@A7;58*9:*AE8@5634*9074:*E8\6:*9358:*9:*;@*=:E?344@;658*<3E@;:*:5*9:*;0@75343<6:*[64@4A6aE:**
La reprise en régie d’un service public industriel et commercial par une personne publique
marque le passage d’une gestion par une entité à une gestion de droit privé par une personne
publique. Il ne pèse, à ce titre, sur la puissance publique opérant la reprise en régie d’un service
public industriel et commercial que la seule obligation de conférer une autonomie financière à la
régie (1). Il ne peut cependant qu’être préconisé d’assortir la régie d’une véritable personnalité
morale pour faciliter le transfert des personnels vers leur nouvel employeur personne publique (2). !
*
174
UV /0@B?:4A:*903B;6\@5634*`7E696C7:*Y*;@*AE8@5634*9074:*E8\6:*=:E?344@;6?8:**
Derrière le vocable de régie se cache en réalité trois schémas juridiques distincts, se
caractérisant par un degré d’autonomie d’une intensité croissante : la régie directe, encore appelée
régie simple ; la régie dotée de la seule autonomie financière, ou régie autonome ; la régie dotée de la
personnalité morale et de l’autonomie financière. La régie directe, qui présente la particularité de
confier la gestion du service public à la collectivité territoriale qui prend elle-même en charge
l’ensemble de l’investissement et du fonctionnement liés à l’exécution du service public, est exclue
en matière de services publics industriels et commerciaux en application des dispositions de l’article
L. 2221-1 à L. 2221-4 du code général des collectivités territoriales et conformément au principe de
l’équilibre budgétaire des services publics industriels et commerciaux. Ne s’offre par conséquent que
deux options à la personne publique reprenant en régie le service : la régie dotée de la seule
autonomie financière et la régie dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière549.
La régie dotée de la seule autonomie financière ne diffère de la régie simple que par le fait
qu’elle soit dotée d’un budget annexé à celui de la collectivité de rattachement en vertu de l’article
L. 2221-11 du code général des collectivités territoriales. Elle ne dispose pas de la personnalité
morale, ce qui implique par exemple qu’elle ne puisse ester en justice550, ou que seul le maire dispose
du pouvoir de rompre le contrat de travail d’un des agents de la régie. La régie personnalisée, dotée
de l'autonomie financière et de la personnalité morale, se caractérise, à l’inverse, par sa personnalité
juridique distincte de la collectivité à laquelle elle est rattachée. Elle constitue ainsi un établissement
public local à part entière, habilité par exemple à contracter des emprunts auprès de tous organismes
prêteurs et auprès des particuliers551 ou à recruter et licencier le personnel nécessaire dans la limite
des inscriptions budgétaires.
Si aucune obligation juridique n’est certes mise à la charge de la personne publique qui
reprend en régie un service public industriel et commercial quant à l’existence d’une personnalité
morale de la régie, le choix d’une régie dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière
s’impose cependant en pratique de lui-même, tend il permet de faciliter la transition de gestion des
salariés de droit privé d’un employeur de droit privé vers un employeur personne publique.
*
549 J. FACON [ss. dir.], Gestion et finances des collectivités territoriales, t. 2, Coll. Lamy Collectivités territoriales, 2010, n°509-17 et s. 550 CE Sect., 20 juin 1958, Régie municipale Gaz-électrique de Bordeaux c/ Ville Bordeaux, Rec. p. 371, RDP 1958, n° 297. 551 Article R. 2221-42 du code général des collectivités territoriales.
175
WV /06458E]5*=E@56C7:*:5*=3;656C7:*9:*;@*AE8@5634*9074:*:45658*98968:*@7*?:64*9:*;@*=:E?344:*=7B;6C7:*C76*E:=E:49*:4*E8\6:*;:*?:E>6A:*
La personne publique reprenant en régie un service public industriel et commercial demeure
libre de créer une simple régie autonome financièrement ou d’instituer une véritable entité dédiée à
la gestion de ce service au sein de la collectivité par la création d’un établissement public industriel
et commercial. Force est de constater que cette seconde option présente de nombreux atouts pour
permettre à la personne publique d’assurer la transition entre un employeur de droit privé et un
employeur de droit public dans les meilleures conditions.
L’intérêt de la création d’un établissement dédié ne réside pas dans la possibilité pour la
personne publique de poursuivre la gestion des salariés de droit privé sous l’empire du code du
travail dès lors que cette faculté existe pour la régie autonome comme pour la régie personnalisée. Il
nous semble, à ce titre, réducteur d’affirmer que « la création d’un EPIC, et non la simple mise en
place d’une régie autonome, s’impose d’autant plus que le code du travail ne s’applique qu’aux
EPIC »552. Certes, la rédaction de l’ancien code du travail impliquait, d’une part, une certaine
confusion dans le champ d’application du code du travail aux personnels des employeurs publics553
et, d’autre part, circonscrivait explicitement certaines de ses dispositions aux seuls établissements
publics industriels et commerciaux. Il convient cependant de rappeler que la jurisprudence avait pris
soin d’interpréter de manière extensive le champ d’application du code du travail aux personnels des
entités publiques en y incluant les personnels d’établissements publics administratifs, notamment en
ce qui concerne le droit à la négociation collective554. Au surplus, la recodification du code du travail
intervenue au printemps 2008 a procédé à des réaménagements profonds des dispositions applicables
aux agents des personnes publiques dans le sens d’une harmonisation, à l’ensemble des personnes
publiques, et notamment aux établissements publics administratifs employant des personnels de droit
privé, des règles par le passé applicables aux seuls EPIC555. Le champ d’application du code du
travail aux personnels des entités publiques tel qu’il résulte de l’article L. 1111-1 du code du travail
ne souffre, quant à lui, plus aucune ambiguïté puisqu’il est désormais prévu que « les dispositions du
présent livre sont applicables aux employeurs de droit privé ainsi qu'à leurs salariés. Elles sont
également applicables au personnel des personnes publiques employé dans les conditions du droit
552 G. Le CHATELIER, « Situation des personnels et changement de mode de gestion des services publics », Institut de gestion déléguée, octobre 2007, p. 23. 553 L'ancien article L. 120-1 du code sur le contrat de travail indiquait que les dispositions de plusieurs chapitres du présent titre « sont applicables notamment aux salariés des offices publics et ministériels, des professions libérales, des sociétés civiles, des syndicats professionnels, les associations de quelque nature qu'elles soient » 554 Cass. soc., 29 septembre 2007, Ville de Bitche, Bull. civ. V, n° 133, RJS 2007, n° 1188 : une commune exploitant en régie directe un golf, service public industriel et commercial, est tenue en sa qualité d'employeur de respecter les obligations résultant du code du travail en ce qui concerne les délégués du personnel ; Cass. soc., 28 avril 2006, Commune de Ballaruc-les-Bains, pourvoi n° 04-40.895, inédit : un accord collectif étendu s'applique au personnel d'une régie municipale sans personnalité morale 555 Pour une étude approfondie de ce thème, voir : J. CHORIN, « Le nouveau code du travail et les personnes publiques employant des personnels de droit privé », RJEP 2010, étude n°10.
176
privé, sous réserve des dispositions particulières ayant le même objet résultant du statut qui régit ce
personnel ».
Cette apparente indifférence sur l’application des dispositions du code du travail entre la
régie autonome et la régie personnalisée ne doit pas néanmoins occulter les avantages que présentent
une entité dotée d’une personnalité morale propre. Nous nous rangeons ici à l’avis du groupe
d’études de l’Institut de la gestion déléguée présidé par le Conseiller d’Etat Gilles Le Chapelier556
selon lequel « l’individualisation de l’activité industrielle et commerciale au sein d’une régie dotée
de la personnalité morale permet à la fois de mieux garantir la comparabilité des modes de gestion
et de résoudre l’essentiel des problèmes immédiats de transfert de personnel ».
Au demeurant, l’institution d’une entité dédiée au sein de la collectivité présente à notre sens
un avantage aussi bien « social » que « politique » qui se révèle loin d’être négligeable à court
comme à long terme. L’individualisation du service public en un établissement public juridiquement
et financièrement indépendant participe en effet de la mise en valeur du caractère autonome de
l’activité de service public industriel et commercial par rapport aux autres activités exercées par la
collectivité. Atout social, en premier lieu, dans la mesure où structurellement affichée, la spécialité
de la régie autonome permet de conférer une certaine légitimité à la différence de régimes - droit
privé et fonction publique - qui existe entre les personnels d’une même collectivité. L’acceptation
des différences de statut par l’ensemble des salariés ne peut qu’en être facilitée. Atout politique
ensuite au moment d’un nouveau changement de mode de gestion pouvant notamment conduire à
une externalisation à un prestataire ou délégataire de droit privé. D’ores et déjà déconnecté
structurellement de la collectivité compétente, le service public industriel et commercial confié à un
opérateur de droit privé n’entraînera aucun bouleversement sur la structure elle-même ni sur ses
agents et limitera, sans les éteindre totalement, les critiques pouvant se faire jour quant à une
« privatisation » éventuelle du service public.
N**S*/:*[@6B;:*[3E<@;6?<:*Y*;08\@E9*9:?*?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8**
Les règles qui président au transfert des agents à l’occasion de l’évolution d’une activité
dépendent, en premier lieu, de la qualité de l’agent transféré, agent de droit privé ou agent de droit
public. La nature et la qualité de l’entité vers laquelle le transfert s’opère sont, à ce stade, totalement
indifférentes. Elles différent, en second lieu, en fonction des circonstances de l’espèce, selon que le
transfert relève des dispositions légales de l’article L. 1224-1 du code du travail ou d’un dispositif
contractuel institué par une convention collective ou un contrat particulier conclu à l’occasion du
transfert d’activité.
556 G. Le CHATELIER, « Situation des personnels et changement de mode de gestion des services publics », Institut de gestion déléguée, octobre 2007, p. 23, op. cit.
177
Dès lors, le transfert de salariés de droit privé affectés à l’occasion d’une reprise en régie d’un
service public industriel et commercial par une personne publique s’inscrit dans un cadre juridique
strictement identique à celui qui gouverne classiquement le transfert des salariés de droit privé à
l’occasion d’un transfert d’activité publique557.
Si, en premier lieu, la reprise en régie de l’activité de service public industriel et commercial
par la personne publique est assimilable au transfert d’une entité économique autonome conservant
son identité, le transfert des salariés de droit public s’opèrera en application des dispositions de
l’article L. 1224-1 du code du travail et interviendra de plein droit sans qu’aucun des acteurs,
précédant exploitant comme personne publique et salariés, ne puisse s’y opposer.
Si, en second lieu, la reprise en régie ne relève pas des dispositions précitées du code du travail,
la reprise des contrats de travail des salariés de droit privé affectés au service public industriel et
commercial sera laissée au libre choix de la personne publique. Il lui appartiendra alors de proposer,
si elle l’entend, un contrat de travail de droit privé auxdits salariés, selon les modalités qu’elle
souhaite. Intervenant en dehors de tout cadre formel prédéfini – hors du champ d’application du code
du travail, d’une convention collective, ou de tout contrat négocié avec une autre partie –, la
personne publique sera en effet pleinement libre de procéder, ou non, au transfert et d’en définir les
conditions de mise en œuvre.
∴
A la relative simplicité des modalités de mise en œuvre du transfert des salariés de droit
privé à l’occasion d’une reprise en régie d’un service public industriel et commercial s’oppose
incontestablement le formalisme des modalités de ce même transfert intervenant en matière
d’activité de service public administratif, eu égard au basculement du salarié de droit privé dans la
sphère du droit public qu’implique nécessairement la reprise en régie d’un service public
administratif.
*
557 Nous renverrons en conséquence à la section précédente de ce chapitre pour le détail des modalités de transfert.
178
,@E@\E@=G:*W*S*!4*5E@4?[:E5*48A:??@6E:<:45*A345E@A57@;6?8*:4*A@?*9:*E:=E6?:*:4*E8\6:*9074:*@A56>658*9:*?:E>6A:*=7B;6A*@9<646?5E@56[*
La reprise en régie d’une activité de service public administratif par la personne publique
délégante est désormais une hypothèse classique pour laquelle le juge administratif reconnaît
l’obligation de reprise des personnels de droit privé par la personne publique558. Aux termes d’un
long débat entre les juridictions communautaires, judiciaires et administratives, le principe d’une
obligation de reprise des personnels par la personne publique est donc unanimement admis. Le
principe de la reprise acquis, restait à en préciser les modalités. Sa mise en œuvre apparaît elle aussi
comme une véritable innovation pour les personnes publiques, en conduisant à l’intégration au sein
de leurs effectifs d’un contingent important de contractuels, placés dans une situation dérogatoire par
rapport aux agents statutaires (A). Elle pose, en outre, la question inéluctable de la nature des contrats
des personnels de droit privé repris par la personne publique (B).
-*L*/@*E:=E6?:*98E3\@536E:*9:*A345E@5?*9:*5E@>@6;*Y*97E8:*64985:E<648:*=@E*9:?*=:E?344:?*=7B;6C7:?**
Par son arrêt du 22 octobre 2004, le Conseil d’Etat s’est attaché à mettre fin aux divergences
des juridictions judiciaires et administratives quant à l’obligation de transfert des personnels de droit
privé en cas de reprise en régie d’un service public administratif et, par là même, à se conformer à la
position de la Cour de justice des Communautés européennes selon laquelle l’article 1er de la
directive 77/187 du Conseil du 14 février 1977 est « applicable en cas de reprise en régie par une
commune, personne morale de droit public agissant dans le cadre des règles spécifiques du droit
administratif »559. La reconnaissance par les juridictions administratives d’une obligation de reprise
des personnels en cas de reprise en régie d’un service par une personne publique était inéluctable.
Les réticences du juge administratif à admettre qu’une telle obligation pesait sur les personnes
publiques au même titre que les opérateurs économiques privés s’expliquaient pourtant par les
obstacles juridiques en présence. Reconnaître l’obligation de transfert de contrats de travail de droit
privé vers une entité publique impliquait en effet l’admission de dérogations importantes au droit de
la fonction publique pour en assurer la mise en œuvre effective. Le transfert du contrat de travail et
de ses clauses et éléments substantiels consiste en effet dans le transfert des « droits et obligations
qui résultent du contrat de travail »560. Or, la reprise des contrats de travail de droit privé à durée
indéterminée par la personne publique se heurtait à deux principes centraux du droit de la fonction
publique en France que sont, d’une part, la soumission des personnels de droit public à un statut de
558 Voir infra, p. 50. 559 CJCE, 26 septembre 2000, Didier Mayeur et Association promotion de l’information messine (APIM), aff. C-175/99, Rec. CJCE I-7755 ; RJS 2001 n°138, Droit du travail et de la Sécurité Sociale, 1er décembre 2000, n°12, note Ph. ANTONMATEI, op.cit 560 CJCE, 6 novembre 2003, Serene Martin et autres, aff. C-4/01.
179
droit public à l’issue d’un recrutement par concours (1), d’autre part, l’interdiction de contrats à
durée indéterminée au sein de la fonction publique (2).
UV /:* E:AE75:<:45* 98E3\@536E:* 9:* =:E?344:;?* A345E@A57:;?* @7* ?:64* 9:* ;@*[34A5634*=7B;6C7:**
Qu’il s’agisse de la fonction publique de l’Etat561 comme de la fonction publique
territoriale562, le principe est identique : les emplois permanents de l’Etat et des collectivités
territoriales ont vocation à être occupés par des fonctionnaires, recrutés principalement563 à l’issue
d’un concours administratif. Cette modalité de recrutement, considérée par le Conseil
Constitutionnel comme une garantie fondamentale de la fonction publique au sens de l’article 34 de
la Constitution564, résulte directement du principe d’égale admissibilité aux emplois publics qui régit
l’accès à la fonction publique et qui trouve son fondement dans l’article 6 de la Déclaration des
Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, selon lequel « tous les citoyens […] sont également
admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leurs capacités sans autre distinction
que celles de leurs vertus et leurs talents » ainsi que dans l’article 25 du Pacte international relatif
aux droits civils et politiques de 1966 qui reconnaît à tout citoyen le droit d’accéder dans des
conditions d’égalité aux fonctions publiques de son pays ».
Le Conseil d'État565 a toujours affiché la même volonté de limiter le recours au contrat dans
la fonction publique et sa réticence à une extension démesurée des hypothèses de recours à ce type
de personnels : « la porte du recours aux contractuels n'est pas totalement fermée » […] mais « la
place dévolue aux non titulaires, ne peut qu'être contingentée et réglementée ». Force est de
constater pourtant, qu’en dépit de l’énoncé de ce principe par la loi du 13 juillet 1983, les personnes
publiques ont largement recouru au contrat pour assurer le recrutement de leur personnel, et tout
particulièrement les collectivités territoriales. Ce recours parfois « quasi rituel »566 aux personnels
561 L'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose que « sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l'État, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics à caractère administratif sont (...) occupés soit par des fonctionnaires (...), soit par des fonctionnaires des assemblées parlementaires, des magistrats de l'ordre judiciaire ou des militaires dans les conditions prévues par leur statut », op. cit. 562 L’article 3 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 précitée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale dans sa rédaction initiale disposait quant à lui « que les collectivités et établissements […] ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents que pour assurer le remplacement momentané de titulaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d’un congé maladie, d’un congés maternité ou d’un congé parental , ou de l’accomplissement du service national, du rappel ou du maintien sous les drapeaux ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d’un an à la vacance qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues par la présente loi ». 563 Plusieurs articles du statut général prévoient des exceptions au concours : l’article 25 du titre II écarte le concours pour la nomination aux emplois supérieurs qui est laissée à la discrétion du gouvernement, l’article 22 concerne quant à lui les emplois réservés pour l’intégration totale ou partielle de fonctionnaires d’un corps dans un autre corps classé dans la même catégorie. De même, le recrutement d’agents peut résulter d’une nomination au tour extérieur, pour certains corps de catégorie A, dont la liste est fixée par décret en Conseil d’Etat. 564 C.C.., 19 février 1963, décision n°63-23 L, Rec. C.C.., p. 29, AJDA 1963, II, p. 159. 565 Rapp. op.cit n° 1, p. 341 566 P. MOREL, Rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république sur le projet de loi, adopté par le sénat portant diverses mesures de transposition du droit
180
non titulaires par les personnes publiques, en contravention avec la logique d'emplois permanents
proclamée dans le statut général, avait d’ailleurs régulièrement amené le législateur à intervenir,
notamment aux fins de procéder à des vagues de titularisations567.
WV /0@9<6??634* 648965:* 9:* =:E?344:;?* 5657;@6E:?* 9:* A345E@5?* Y* 97E8:*64985:E<648:*@7*?:64*9:*;@*[34A5634*=7B;6C7:*
Au principe de la reprise des contrats de travail par le nouvel opérateur lors d’un transfert
d’activité568 s’ajoute son corollaire, le principe selon lequel « le nouvel employeur est tenu, à l'égard
des salariés dont les contrats de travail subsistent, aux obligations qui incombaient à l'ancien
employeur à la date de la modification »569, sauf dans deux hypothèses qui n’ont pas lieu de jouer en
l’espèce570. Le transfert ne saurait ainsi emporter bouleversement des conditions d’emploi du salarié
concerné. Il en résulte qu’un certain nombre d’éléments du contrat, considérés comme essentiels, ne
peuvent faire l’objet d’aménagements à l’occasion du transfert au détriment de l’agent571. La durée
du contrat figure à n’en pas douter parmi les axes directeurs du contrat auquel le nouvel employeur
ne peut apporter de modification substantielle sans recueillir l’accord du salarié.
L’application de l’article L. 1224-1 du code du travail aux hypothèses de reprise en régie
d’une activité par une personne publique conduit donc inéluctablement l’employeur public à accepter
l’intégration de contractuels à durée indéterminée dans ses effectifs, dès lors que ceux-ci étaient
précédemment titulaires d’un contrat à durée indéterminée sous l’empire de l’employeur de droit
privé. L’article L. 1224-3, codifiant les dispositions de l’article 20 de la loi du 26 juillet 2005
modifiées par l’article 24 de la loi du 3 août 2009572, prend acte de la nécessité pour le nouvel
employeur public de maintenir les conditions initiales d’emploi de l’agent, notamment quant à leur
durée. Il précise ainsi que « lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de
droit privé est, par transfert de cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre d'un
service public administratif, il appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés un
contrat de droit public, à durée déterminée ou indéterminée selon la nature du contrat dont ils sont
titulaires ».
communautaire à la fonction publique, n° 2210, 2005. 567 Loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique (J.O. du 13 mars 2012, p. 4498) ; D. JEAN-PIERRE, « La lutte contre la précarité dans la fonction publique territoriale depuis la loi du 12 mars 2012 », JCP A 2012 n°15, p. 9. 568 Article L. 1224-1 du code du travail. 569 Article L. 1224-2 du code du travail. 570 Deux hypothèses sont ainsi successivement visées par l’article L. 1224-2 du code du travail : 1°Procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire ; 2° Substitution d'employeurs intervenue sans qu'il y ait eu de convention entre ceux-ci. 571 Les conséquences du transfert, notamment sur le contrat de travail, feront l’objet de la partie 3 de la présente étude. 572 La précision est importante du point de vue des règles de licenciement de l’agent qui refuse le contrat de droit public que lui propose la personne publique qui sera évoquées à la section 3 du présent chapitre.
181
Cette obligation, longtemps déniée aux personnes publiques, impliquait une adaptation
certaine de la fonction publique, et explique les réticences renouvelées des juridictions françaises et
du législateur français a tiré les conséquences de la directive 2001/23/CE et de la jurisprudence
Mayeur de la Cour de justice des communautés européennes. Cohérente au regard de la philosophie
statutaire de la fonction publique française, l’impossibilité de recruter un agent contractuel pour une
durée indéterminée trouvait pourtant ses limites dans des hypothèses de plus en plus nombreuses,
dont la reprise en régie (a) ne se révèle être qu’une illustration parmi tant d’autres (b).
@R !4:*@9<6??634*98E3\@536E:*@7*=E64A6=:*9:*97E8:* ;6<658:*9:?*A345E@5?*9:*5E@>@6;*9:?*@\:45?*=7B;6A?*
Placés dans une situation dérogatoire au principe de recrutement par voie statutaire, les
agents publics contractuels ne peuvent logiquement occuper des emplois de la fonction publique
légalement dévolus aux fonctionnaires pour une durée indéterminée. Accorder le bénéfice d’un
contrat à durée indéterminée à des agents contractuels aurait ainsi pour effet de pérenniser des
situations en contradiction avec les règles qui président au recrutement des agents de la fonction
publique. C’est la raison pour laquelle les juridictions administratives rappellent régulièrement le
principe d’interdiction des contrats à durée indéterminée dans la fonction publique573, et l’absence de
droit au renouvellement des contrats qui en découle574.
En autorisant la personne publique reprenant en régie une activité à recruter un agent
contractuel pour une durée indéterminée, l’article 20 de la loi du 26 juillet 2005 ouvre donc une
véritable dérogation au principe de la durée déterminée des contrats des agents publics, dérogation
très rarement reconnue par le législateur575 et le pouvoir réglementaire576. Cette innovation du
législateur de 2005 trouve pleinement sa justification dans le cadre d’une reprise en régie d’activité
par une personne publique. En effet, le contexte et la philosophie qui président à l’intégration de
contractuels à durée indéterminée dans les effectifs d’une personne publique reprenant en régie une
activité sont, selon nous, sensiblement différents de ceux qui gouvernent le recrutement des agents
publics dans les hypothèses classiques de la fonction publique. Si le droit de la fonction publique
s’oppose au recrutement à durée indéterminée d’agents publics, c’est au motif qu’un tel recrutement
573 CAA Bordeaux, 23 mai 2002, Madame Morandière, req. 98BX00749 ; CAA Paris 3 juillet 2003, M. Roberty contre Commune de Gennevilliers, req. 99PA02345. 574 CE, 5 septembre 1990, Walmsley, Rec. p. 850. 575 Seules deux lois avaient, avant la loi du 20 juillet 2005, autorisé une telle dérogation : la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (J.O. du 13 avril 2000 p. 5646) par ses dispositions relatives à la jurisprudence Berkani (articles 34 et 35-1) et l'article 3 de la loi n°2002-6 du 4 janvier 2002 relative à la création d'établissements publics de coopération culturelle (J.O. du 5 janvier 2002, p. 309) qui prévoit que les agents employés par une personne morale de droit privé créée avant la date de promulgation de la loi et dont la dissolution résulte du transfert intégral de son objet et de ses moyens à un EPCC à caractère administratif peuvent bénéficier des stipulations de leur contrat précédent, lorsqu'elles ne dérogent pas aux lois et règlements relatifs à la fonction publique, la compatibilité avec ces règles ne concernant pas la durée. 576 L'article 3 du décret précité du 17 janvier 1986 qui offre la possibilité de recruter par contrat à durée indéterminée les agents non titulaires engagés pour occuper des fonctions impliquant un service à temps incomplet en vertu du premier alinéa de l'article 6 de la loi précitée du 11 janvier 1984.
182
aboutirait à priver un agent statutaire d’un emploi qui lui est, par définition, dévolu en vertu du
principe d’égale admissibilité aux emplois déjà évoqué. Or, à l’inverse, lors de la reprise en régie
d’une activité, l’emploi proposé au salarié de droit privé dans le cadre d’un contrat de droit public
n’est pas, par définition, destiné à un agent public statutaire dans la mesure où la circonstance qu’il
ait été antérieurement occupé par ce salarié de droit privé résulte justement de la volonté de la
personne publique de ne pas assumer elle-même l’activité, avec ses moyens matériels, financiers et
humains. Certes, le mode de gestion d’une activité publique constitue une liberté pleine et entière
dont dispose la personne publique qui en est la détentrice originelle. Pour autant cette liberté
politique ne doit pas conduire les agents affectés à cette activité publique à la privation du droit à la
continuité de leur contrat de travail que leur reconnaît l’article L. 1224-3 du code du travail.
BR !4:* 98E3\@5634* @7* =E64A6=:* 9:* 97E8:* ;6<658:* 9:?* A345E@5?* 9:* 5E@>@6;*9:?*@\:45?*=7B;6A?*[E8C7:<<:45*@9<6?:*:4*=E@56C7:*
Les développements qui précèdent nous donnent l’occasion d’aborder une dimension
importante de la loi du 26 juillet 2005 sur le statut des agents contractuels de droit public. En effet,
au-delà de l’hypothèse qui nous intéresse tout particulièrement de reprise des contrats de travail des
salariés, même à durée indéterminée, par une personne publique lors de la reprise en régie d’une
activité, la loi du 26 juillet 2005 a eu le mérite de mettre fin à des situations de véritable précarité des
agents contractuels de la fonction publique. L’illégalité originelle de leur contrat les plaçait de fait
dans une situation de « non droit » vis-à-vis de leur employeur public qui pouvait se satisfaire, des
années durant parfois, d’une souplesse étrangère au statut. Certes, face à des recrutements dont les
conditions de fond et de forme ne respectaient pas la loi, les juges administratifs, s'alignant sur la
législation du travail, admettaient-ils parfois la transformation de certains contrats de ces agents non
titulaires en contrats à durée indéterminée577. Mais cette « régularisation » ne pouvait intervenir qu’à
la marge : d’une part, elle nécessitait que les agents concernés intentent un recours ; d’autre part, et
avant tout, elle ne pouvait concerner que des cas isolés, le juge administratif ne pouvant généraliser
une pratique en contradiction avec les principes du statut. Pourtant, la situation des agents publics
contractuels sans cesse renouvelés ne pouvaient perdurer dans un contexte européen de plus en plus
soucieux du droit des travailleurs, quelque soit leur nature, et impliqué dans une lutte contre la
précarité des droits de ces travailleurs. Les dispositions communautaires résultant de la volonté des
partenaires sociaux européens de limiter le recours aux contrats à durée déterminée et de favoriser le
maintien des droits des travailleurs en cas de cession d'une entité économique à une autre personne
donnent de nouveau l'occasion au législateur de prendre des mesures destinées à lutter contre la
précarité dans la fonction publique.
577 D. KRUST, « Le personnel des collectivités locales - Les agents contractuels - La résorption de l'emploi précaire », Rép. Dalloz, Collect. loc., 2006.
183
N* L* /@* A34A;7?634* 6<=8E@56>:* 9074* A345E@5* 9:* 9E365* =7B;6A* :4* A@?* 9:*E:=E6?:* =@E* 74:* =:E?344:* =7B;6C7:* 9:* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =E6>8*@[[:A58?*Y*74*?:E>6A:*=7B;6A*@9<646?5E@56[**
En posant le principe d’une obligation de reprise des personnels de droit privé par une
personne publique reprenant en régie un service public administratif, le Conseil d’Etat dans son arrêt
de Section Lamblin du 22 octobre 2004 avait laissé les personnes publiques libres « de maintenir le
contrat de droit privé des intéressés (ou) de leur proposer un contrat de droit public reprenant les
clauses substantielles de leur ancien contrat »578. La doctrine, pour la plupart critique579, ne s’y était
pas trompée : la solution dégagée par la Haute juridiction consistait à autoriser le maintien définitif
du contrat de droit privé des personnels de droit privé si la personne publique le souhaitait580.
Une telle solution allait manifestement à l’encontre de l’unité de régimes juridiques des
agents affectés à un service public administratif dégagée par le Conseil d’Etat à l’occasion de l’arrêt
Berkani581 et consistant à exclure du champ d’application du droit du travail les personnels affectés
par une personne publique à une mission de service public administratif582. La dualité de régime ainsi
maintenue par le Conseil d’Etat s’expliquait aisément par la volonté de la juridiction de laisser le
soin au législateur, dont les travaux de transposition de la Directive 1999/70/CEE du Conseil du 28
juin 1999583 étaient en cours584, de trancher la question de la nature des contrats de travail des
personnels de droit privé transférés, et « d’adapter le droit de la fonction publique pour permettre
une mise en œuvre harmonieuse de l’article L.122-12 ainsi interprété585 ».
L’intervention du législateur était donc attendue pour clarifier la situation des personnels de
droit privé repris par une personne publique en cas de reprise en régie d’un service public
administratif. Par son article 20 alinéa 1er, la loi du 26 juillet 2005586 est venue préciser que
« lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert
de cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre d'un service public administratif, il
appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés un contrat de droit public, à durée
déterminée ou indéterminée selon la nature du contrat dont ils sont titulaires ».
578 CE Sect., 22 octobre 2004, Lamblin, Rec. p. 382. 579 M.-C. de MONTECLER, « Questions sur un arrêt surprenant », AJDA 2004, p. 2241 580 « Reprise en régie : le Conseil d'Etat autorise le maintien définitif du contrat de droit privé », AJFP 2005, p.20, veille sur l’arrêt Lamblin précité. 581 TC, 25 mars 1996, Rec. p. 535, RFDA 1996, p. 819, concl. Ph. MARTIN ; AJDA 1996, p. 355, chron. J.-H. STAHL, D. CHAUVAUX ; D. 1996, Jur. p. 598, note Y. SAINT-JOURS ; AJFP 1996, p. 5, obs. P. BOUTELET, op.cit 582 CE, 8 juillet 1959, Section de la Corrèze du Syndicat national de l’apprentissage, Rec., p. 437, D. 1960. jur. p. 280, note A. De LAUBADERE ; CE, 13 janvier 1995, Rec. p. 25. 583 Directive 1999/70/CEE du 28 juin 1999 concernant l’accord cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée (J.O.C.E. du 10 juillet 1999, L175/43)R! 584 Voir en ce sens le Rapport n°2222 de M. Pierre MOREL, sur le projet de Loi adopté par le Sénat (n°2210) portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique. 585 E. GLASER, concl. sous l’arrêt CE Sect., 22 octobre 2004, M. Lamblin, RFDA 2005, p. 187. 586 Loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique (J.O. du 27 juillet 2005, p. 12183), op. cit.
184
En optant pour une nature obligatoirement publique du contrat des agents de droit privé
repris en régie, le législateur a sans nul doute recherché l’homogénéité des situations juridiques des
différentes catégories de personnels employés par des personnes publiques (1). Cohérente au regard
de la jurisprudence Berkani, l’obligation de conclure un contrat de droit public pour la personne
publique avec les agents transférables emporte une conséquence majeure dans le déroulement du
transfert : le passage d’un contrat de droit privé à un contrat de droit public, constituant une
modification substantielle du contrat qui ne peut intervenir qu’avec l’accord du salarié (2).
UV /@* >3;3458* 97* ;8\6?;@5:7E* 90@??7E:E* ;074658* 9:?* E8\6<:?* `7E696C7:?*=:E?344:;?*:<=;3I8?*=@E* ;:?*=:E?344:?*=7B;6C7:?*9@4?* ;:*A@9E:*9074:*@A56>658*9:*?:E>6A:*=7B;6A*@9<646?5E@56[*
La solution retenue par le législateur de placer les salariés de droit privé dans une situation
de droit public à l’égard de leur nouvel employeur personne publique lors de la reprise en régie d’un
service public administratif présente l’avantage certain d’assurer la cohérence des solutions
jurisprudentielles relatives à la nature des agents affectés à un service public administratif (a). Elle
nous semble cependant contestable en pratique, et révèle l’archaïsme de la summa divisio droit privé
/ droit public, en l’occurrence droit du travail et droit de la fonction publique, qui transcende le droit
français (b).
@R !4:*?3;75634*A3G8E:45:*@7* E:\@E9*9:* ;@* `7E6?=E79:4A:*@9<646?5E@56>:*E:;@56>:* Y* ;@* 4@57E:* =7B;6C7:* 9:?* @\:45?* @[[:A58?* =@E* 74:* =:E?344:*=7B;6C7:*Y*74*?:E>6A:*=7B;6A*@9<646?5E@56[*
Elle s’inscrit pleinement dans le sens de la solution dégagée par les juridictions dans
l’hypothèse de reprise en régie de services publics industriels et commerciaux par des personnes
publiques. Certes, dans de telles hypothèses, la solution avait une portée beaucoup plus réduite
puisqu’elle concernait le seul directeur de l’entité reprise en régie, seul agent avec le comptable
public au sein d’un service public industriel et commercial a revêtir la qualité d’agent public, et à
être dès lors exclu du champ d’application de l’article L. 1224.1 du code du travail. Dès 1999, le
Tribunal des conflits dans un arrêt Commune de Châtellerault du 15 mars 1999587 avait posé le
principe selon lequel « en raison des prérogatives dont dispose une personne publique à l'égard des
services publics placés sous son autorité, le maintien de [l’agent chargé de la direction du service] à
ce poste de responsabilité requiert la mise en œuvre d'un régime de droit public ». *
*
587 TC, 15 mars 1999, Faulcon c/ Commune de Châtellerault, Rec. p. 442.
185
BR*!4:*?3;75634*A345:?5@B;:*:4*=E@56C7:*
Il sera toutefois permis de s’interroger sur la pertinence réelle d’une obligation de soumettre
à un régime de droit public les salariés de droit privé affectés à une activité de service public
administratif reprise en régie. Nous ne pouvons sur ce point que nous ranger à l’avis de Marie-
Christine Rouault qui s’interrogeait, avant même l’intervention de l’arrêt Lamblin et de la loi du 26
juillet 2005, sur les justifications d’une telle construction. Elle se demandait ainsi « comment
raisonnablement justifier qu’un service assumé pendant des années par des salariés de droit privé ne
puisse plus l’être que par des agents de droit public, alors qu’il peut l’être par des salariés de droit
privé si l’école est gérée par une association, qui au demeurant reçoit certainement des subventions
de la commune ? ». D’autant que le mode de gestion d’une activité publique, qui relève par essence
de l’entière liberté politique des collectivités publiques, peut évoluer au gré des alternances
politiques et des mouvements de pensée ou des évolutions sociales et économiques. Se dessine alors
un « scenario » – volontairement caricatural mais théoriquement probable – d’une activité de service
public administratif employant les mêmes personnels qui pourra, selon les mandatures et le contexte
économique, être externalisée puis ré-internalisée et inversement, de sorte que son régime juridique
et, par là même, celui de ses personnels alternera entre droit public et droit privé sans pour autant que
ce changement ne trouve d’autres justifications que la nature de l’entité gestionnaire. La permanence
de différenciation des régimes juridiques des agents affectés à l’exercice d’une mission de service
public administratif selon que leur employeur sera une entité de droit privé ou de droit public, qui
trouve certes sa source dans la summa divisio retenue par le droit français entre droit public et droit
privé, se révèle ainsi sur cet aspect des plus archaïques dès lors qu’elle ne repose, dans ce cas
particulier, sur aucune justification décisive ou irrévocable. Elle engendre au demeurant une
complexification du transfert qui en limite l’intérêt pratique.
WV /0@B?:4A:*90@753<@56A658*97*5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=E6>8*:4*98=65*9:*;@*4@57E:*;8\@;:*9:*;03B;6\@5634*9:*5E@4?[:E5**
L’application de l’article L. 1224-1 aux personnels de droit privé en cas de transfert
d’activité vers une personne de droit privé emporte continuité des contrats de travail conclus sous
l’empire du précédent employeur, sans qu’aucune formalité juridique ne vienne s’interposer entre les
salariés et leur nouvel employeur. Le seul changement dans la situation juridique de la structure
d’emploi suffit à opérer le transfert, le consentement des différentes parties, et principalement du
salarié lui-même, n’étant à aucun moment requis588. Dans le même sens, le contrat de travail se
poursuit de jure, sans qu’il ne soit nécessaire de conclure d’avenant pour entériner le changement
d’employeur.
588 Sauf à ce que l’opération en jeu ne consiste en un transfert partiel et concerne des salariés protégés comme il a déjà été évoqué plus haut. Voir sur ce point, Partie 2, chapitre 1.
186
Les règles de l’article L. 1224-3 du code du travail qui gouvernent le transfert de salariés de
droit privé dans l’hypothèse d’une reprise en régie d’un service public administratif envisagent des
modalités sensiblement plus formalistes eu égard aux effets majeurs qu’emportent un tel transfert
pour les agents privés. En effet, la reprise du contrat de travail du salarié par une personne publique
implique une modification substantielle des conditions de travail qui s’exerce désormais sous un
régime de droit public et non plus de droit privé. Il en résulte un certain paradoxe dans l’application
de l’article L. 1224-1 du code du travail à la reprise en régie d’une activité par une personne
publique : le transfert du contrat s’impose ainsi à la personne publique qui ne peut se soustraire à son
obligation de reprise, mais non au salarié qui doit formuler son accord exprès à la mutation de son
contrat de droit privé en contrat de droit public pour être véritablement transféré (a). La
formalisation du transfert du contrat d’un salarié de droit privé vers un employeur public par la
signature d’un contrat de droit public répond en outre à une exigence inhérente au droit de la
fonction publique (b).
@R !4*5E@4?[:E5*A3496563448*=@E*;0@AA3E9*97*?@;@E68**
L’obligation pour la personne publique de reprendre les personnels de droit privé lors de la
reprise en régie d’une activité de service public administratif repose sur un fondement légal, les
dispositions de l’article L. 1224-3 du code du travail, au même titre que l’obligation de reprise qui
pèse classiquement sur les employeurs privés dans le cadre des dispositions de l’article L. 1224-1 du
code du travail. Ces dispositions, d’ordre public, s’imposent, comme nous l’avons précédemment
évoqué dans l’hypothèse classique d’un transfert d’activité vers un employeur privé, aux opérateurs
économiques entre lesquels le transfert d’activité s’opère, mais également aux salariés sans que
ceux-ci ne puissent formuler leur désaccord, sauf à être considéré comme démissionnaire et à en
supporter les conséquences financières.
En matière de transfert de personnels privés à la suite d’une reprise en régie d’un service
public administratif, la portée d’ordre public des dispositions de l’article L. 1224-3 du code du
travail, sans disparaître, doit selon nous être nuancée. En effet, le raisonnement à adopter pour
analyser les modalités de mise en œuvre d’un transfert de salariés de droit privé vers une personne
publique est ici à rapprocher de celui retenu dans l’hypothèse de transferts résultant d’une
application volontaire des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail. Dans ce cadre, la
Cour de Cassation analyse le changement d'employeur qui résulte d’une application volontaire des
dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail en une modification substantielle du contrat,
voir en une « novation du contrat de travail », qui ne peut, sauf dispositions législatives contraires,
187
résulter que d'une « acceptation expresse du salarié »589. Dans le même sens, le changement
d’employeur, initialement de droit privé et par la suite de droit public dans le cadre d’une reprise en
régie constitue incontestablement un véritable bouleversement du contrat initial. En effet, le régime
juridique des contrats de travail de droit public apparaît sans nul doute des plus exorbitants de droit
commun. Derrière « leur apparence contractuelle » 590, les contrats de travail de droit public
s’inscrivent en effet dans une dimension règlementaire indéniable, loin de l’expression de la volonté
des parties, selon les termes retenus par l’article 1134 du code civil pour définir l’essence du contrat.
Certains auteurs évoquent à ce titre la relative similarité des droits et obligations des agents
contractuels de la fonction publique et des agents statutaires591. Le contrat de travail de droit public
ne redevient ainsi une véritable source de droit que dans le silence des textes applicables aux agents
contractuels592, permettant notamment de renvoyer au droit commun du travail593 ou bien à une
convention collective pour déterminer les conditions d’exercice de la fonction de l’agent. Cette
liberté contractuelle est néanmoins limitée par le contrôle des juridictions administratives qui viellent
à ne pas donner une interprétation extensive au contrat594.
C’est la raison pour laquelle le dispositif de l’article L. 1224-3 du code du travail impose,
d’une part, à la personne publique reprenant l’activité en régie de proposer un contrat de droit public
« qui reprend les clauses substantielles du contrat dont les salariés sont titulaires, en particulier
celles qui concernent la rémunération », et reconnaît, d’autre part, un droit d’opposition du salarié
en précisant qu’ « en cas de refus des salariés d'accepter le contrat proposé, leur contrat prend fin
de plein droit ». Soulignons sur ce dernier point un certain paradoxe dans la situation juridique des
salariés de droit privé intégrés dans les effectifs d’une personne publique à l’issue d’une reprise en
régie de l’activité : le droit d’opposition à la modification de son contrat reconnu au salarié de droit
privé disparaît dès lors qu’il a formulé son accord à la transformation de son contrat de travail en
contrat de droit public. En effet, en dépit de l’existence du principe général du droit qui implique que
« toute modification des termes du contrat de travail recueille l'accord à la fois de l'employeur et du
salarié »595, même lorsqu'elle trouve son origine dans un acte réglementaire596, le Conseil d'État n'a
589 Il en résulte que la procédure prévue par l'article L. 1222-6 ne s'applique pas à un transfert volontaire du contrat de travail dans le cadre d'une cession d'activité échappant à l'article L. 1224-1 : Cass soc., 8 avril 2009, Bull. civ. V, n° 104, JCP S 2009, p. 1339, note P. MORVAN ; Dr. soc. 2009, p. 813, note A. MAZEAUD. 590 M. CARIUS, « Agents non titulaires de l’état – Conditions et intégration », J.Cl. Fonct. Pub., Fasc. 320, 2004, n°30. 591 Y. GAUDEMET, « Existe-t-il une « catégorie » d'agents publics contractuels de l'administration ? », AJDA 1977, p. 614 et s. 592 CE Avis, 30 janvier 1997, Régime juridique des agents non titulaires de l’Etat., n° 359964. 593 CE, 5 octobre 1973, Ministre de la défense c/ Gilles, Rec. p. 749. 594 CE, 29 juillet 1994, Ministère de la défense c/ Solatgesn, req. n°119263, inédit ; CE, 17 juin 1996, Ministère de la défense c/ Pélissier, Rec. p. 996. 595 CE Ass., 29 juin 2001, Berton c/ SNCF, Rec. p. 296 , AJDA 2001, p. 651, chron. GUYOMAR et COLLIN ; Dr. soc. 2001, p. 948, concl. BOISSARD. 596 Comme le rappelle M. CARIUS, la doctrine prône l'exclusion des agents contractuels du champ d'application de ce principe général du droit, dans la mesure où l'on peut douter de la nature véritablement contractuelle du lien qui unit l'agent à l'administration: M. GUYOMAR et P. COLLIN, chron. op.cit n° 14, p. 651 ; C.-A. GARBAR, Principes généraux du droit du travail : une nouvelle étape vers la banalisation du droit applicable aux personnels des entreprises à statut, Mélanges B. Jeanneau, Dalloz, 2002, p. 143.
188
pas modifié le considérant classique selon lequel « l'autorité administrative compétente peut, dans le
cadre des dispositions législatives et réglementaires applicables, fixer et modifier les dispositions
réglementaires qui régissent les agents publics, même contractuels »597.
BR !4*5E@4?[:E5*A3496563448*=@E*;@*?6\4@57E:*9074*A345E@5*9:*9E365*=7B;6A*
L’article 20 de la loi du 26 juillet 2005 précise qu’ « il appartient à [la] personne publique
de proposer à ces salariés un contrat de droit public, à durée déterminée ou indéterminée selon la
nature du contrat dont ils sont titulaires ». Le transfert des salariés de droit privé dans les effectifs
d’une personne publique à l’issue d’une reprise en régie ne peut donc survenir qu’une fois la
signature du contrat effective. Notons d’ailleurs que cette formalisation est impérative, en dehors
même de la loi de 2005, et qu’un échange de consentement oral est insuffisant.
En pratique, l’accomplissement de cette formalité n’emporte pas de véritable contrainte pour
la personne publique qui jouit d’une véritable liberté598 pour fixer les modalités de recrutement de
ces agents non titulaires en l’absence de définition précise par les textes. En effet, d'un côté, le décret
n° 86-83 du 17 janvier 1986 fixant les règles générales applicables aux non titulaires de l'État reste
muet sur les procédures d'embauche de ceux-ci. De l'autre, les non titulaires ne sont pas régis par les
dispositions de l'article 16 du titre II du statut général qui imposent l'organisation de concours pour le
recrutement des fonctionnaires, sauf dérogation légale. Aussi, en principe, l'administration peut
procéder à des recrutements aussi bien par acte unilatéral – appelé lettre d'engagement – que par
contrat599, à l’exception des non titulaires visés par les articles 4, 5 et 6 du titre II du statut général
qui sont obligatoirement des « contractuels »600. Le choix de la personne publique doit donc s’opérer
en fonction de la portée et des effets qu’elle entend conférer à ce recrutement, le régime juridique des
actes unilatéraux différant de celui du contrat. L'autorité administrative peut retirer un acte unilatéral,
et non un contrat601. En outre, consensualisme oblige, le contrat ne pourra entrer en vigueur qu'après
l'acceptation de l'agent, alors que la lettre d'engagement constitue un acte unilatéral sous condition
résolutoire du refus d'exercer les fonctions602.
En tout état de cause, quelque soit la forme qu’il revête, unilatérale ou synallagmatique,
l’acte d’engagement de la personne publique envers son agent doit comporter un certain nombre de
mentions obligatoires, conformément aux prescriptions de l’alinéa 2 de l’article 4 du décret n°86-83
597 CE, 5 juin 2002, Compte, Rec. p. 788. 598 Pour exemple, sur les conditions, très souples, de recrutement dans les cabinets ministériels : C. BIGAULT, Les cabinets ministériels, LGDJ, coll. Systèmes, 1997, p. 102 s. 599 CE, 16 novembre 1998, Syndicat départemental CGT de l'équipement et de l'environnement de Corse du Sud, req. n°180015, inédit. 600 Article 4 du Décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 601 TA Versailles, 28 janvier 1999, Syndicat départemental Santé sociaux de l'Essonne, AJFP juin 1999, p. 56. ; CE, 23 février 1966, Brillé, Rec. p. 142 602 M. CARIUS, « Agents non titulaires de l’état – Conditions et intégration », J.Cl. Fonct. Pub., fasc. 320, op. cit.
189
du 17 janvier 1986 : « outre sa date d'effet603 et la définition du poste occupé604, ce contrat ou cet
engagement précise les obligations et droits de l'agent lorsqu'ils ne relèvent pas d'un texte de portée
générale ou d'un statut particulier. Un double est remis à l’agent ». Il est également important de
préciser le motif légal du recours à un non titulaire s'il relève des articles 4, 5 ou 6 du titre II du statut
général. D’un point de vue contentieux, la jurisprudence considère que, l'acte unilatéral de
nomination étant créateur de droit, l'agent peut néanmoins, en l'absence de retrait de l'acte par son
auteur, invoquer le bénéfice des droits et avantages que le droit positif reconnaît aux non titulaires605.
Il est aussi à noter que la jurisprudence administrative admet qu’ « eu égard à la nature particulière
des liens qui s’établissent entre une collectivité publique et ses agents non titulaires, les contrats par
lesquels il est procédé au recrutement de ces derniers sont au nombre des actes dont l’annulation
peut être demandée au juge administratif par un tiers y ayant un intérêt suffisant »606.
En reprenant en régie une activité publique auparavant confiée à un opérateur de droit privé,
la personne publique se voit contrainte d’intégrer dans ses effectifs des personnels initialement
employés dans des conditions de droit privé. Le glissement de la situation juridique des salariés
concernés, d’un régime de droit privé vers un régime de droit public, apparaît sans nul doute comme
le fruit d’un véritable compromis entre les impératifs de la continuité du contrat du travail
commandés par l’article L. 1224-1 du code du travail et la philosophie de la fonction publique. La
personne publique reprenant en régie l’activité se voit ainsi contrainte de consentir de nombreuses
dérogations aux principes fondamentaux de la fonction publique.
∴
Le transfert des personnels de droit privé se caractérise donc pas une certaine automaticité,
corolaire de toute modification dans la situation juridique de l’employeur. Ce mécanisme translatif,
garant de la continuité des contrats de travail des salariés de droit privé, résulte incontestablement de
la volonté du législateur de faciliter le maintien des salariés en cas d’évolution dans la structure
sociale. Cette finalité protectrice, omniprésente dans le dispositif applicable au secteur privé, semble
avoir pendant longtemps échappé au législateur à l’égard des agents publics. La particularité du
statut des personnels publics, mais également la spécificité des hypothèses de transfert, dont
l’ampleur et la fréquence n’ont, il est vrai, aucune mesure comparable avec le secteur privé, a,
semble-t-il, conduit le législateur à occulter jusqu’a récemment la question sociale dans le cadre des
réorganisations administratives. Il en résulte une hétérogénéité certaine des modalités de transfert des
personnels de droit public à l’image des situations et des régimes qui coexistent sous le vocable de
fonction publique.
603 CE, 10 février 1995, Royer, req. n° 78545, Rec. p. 881 : le contrat ne peut comporter une date d’effet rétroactif. 604 CE, 24 juin 1992, Hennon, Rec. p. 1082. 605 CE, 15 mars 2000, Allais, req. n° 189041, inédit ; CE, 1er octobre 2001, Régie autonome sports et loisirs, Rec. p. 793, C. et MP. 2002, comm. 245, obs. P. DELELIS. 606 CE, 30 octobre 1998, Ville de Lisieux, Rec. p. 375, RFDA 1999, p. 128, concl. J.-H. STAHL, note D. POUYAUD, AJDA 1998, p.1041 ; Dr. adm 1999, n°374.
190
2G@=65E:* W* S* /:?* <39@;658?* =:E<:55@45* 90@??7E:E* ;@* A345647658*90:<=;36*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*
L’étude des modalités de transfert des agents publics commande, au préalable et en vue
d’une compréhension optimale, de dégager les spécificités de la situation juridique des agents
publics. Comme il est d’usage de le dire, les agents publics sont en effet placés dans une situation
« légale et règlementaire », ou selon la formule équivalente des statuts généraux de la fonction
publique, « statutaire et règlementaire ». La condition juridique de l’agent public, plus
communément désigné par le terme de fonctionnaire, ne saurait se résumer à la seule circonstance
d’avoir pour employeur une personne publique. Certes, cet élément est essentiel dans la définition du
régime juridique de l’agent public ; il ne constitue pour autant qu’un déterminant très général607
auquel vient s’ajouter un ensemble de paramètres primordiaux établis par le statut général : le grade,
l’échelon, mais surtout le corps608 et le cadre d’emploi609 selon la fonction publique concernée, ainsi
que la position occupée par l’agent. En effet, l’agent public qui intègre la fonction publique à l’issue
d’un concours a vocation à occuper un emploi dans un corps déterminé, au grade correspondant au
concours remporté. La carrière de l’agent public s’inscrit dès lors dans un cadre juridique bien défini,
empreint de hiérarchie, et paraît quelque peu immuable610. Le cadre juridique dans lequel s’intègre la
carrière de l’agent public est ainsi mûe par la volonté générale, et les nécessités du service auquel est
affecté l’agent. Il en résulte que si l’agent public est recruté par voie de concours pour intégrer un
corps déterminé de l’administration, selon un grade et un emploi précisé, sa carrière n’en est pas
pour autant figée, et peut être amenée à évoluer. La mobilité des agents est en ainsi un principe
fondamental du droit de la fonction publique. Elle est un droit mais aussi un devoir, dans la mesure
où l’agent n’a pas de droit acquis à être maintenu dans le poste où il est affecté611.
C’est dans ce contexte que doivent être identifiées les modalités de transfert des personnels
de droit public lors de l’évolution dans la gestion d’une activité publique. L’on comprend fort bien
dès lors que ces modalités se caractérisent par leur formalisme et leur rigidité, en dépit des efforts
récents du législateur612.
On aurait pourtant pu penser que les évolutions d’activités publiques impliquant un transfert
de personnels de droit public d’une personne publique à une autre n’engendreraient aucune difficulté
majeure, eu égard à la similarité de nature des employeurs successifs. Le régime juridique sus-
mentionné des agents publics conduit à écarter cette simplicité, et à mettre en œuvre un certain
607 J.-M. AUBY, J.-B. AUBY, D. JEAN-PIERRE, A. TAILLEFAIT, Droit de la fonction publique, Dalloz, 6e éd., 2009, n°10, p. 70, op. cit. 608 Fonction publique d’état. 609 Fonction publique territoriale. 610 R. CHAPUS, Droit administratif général, t. 2, Montchrestien, 15ème éd., 2001. 611 CE, 13 mars 1985, Mlle Stampf, Rec. p. 664 et p. 778 ; CE, 4 novembre 1996, Mme Le Bihan, req. n°95665 ; CE, 10 novembre 2004, M. Hery, Rec. p. 737. 612 Voir supra.
191
nombre de mécanismes, principalement liés à la position d’activité de l’agent public, pour assurer la
mobilité de l’agent public. Il est d’ailleurs à noter que cette solution peut être retenue tant vers un
nouvel employeur public que vers un organisme de droit privé.
Les statuts des trois fonctions publiques offrent ainsi un certain nombre d’instruments aux
administrations publiques pour exercer la mobilité de leurs agents, instruments qui impliquent la
plupart du temps la conclusion d’une convention entre les « employeurs » successifs. Cette solution
contractuelle (Section 1), bien que demeurant majoritaire, tend néanmoins à s’effacer devant la
volonté croissante du législateur d’organiser lui-même le transfert des personnels de droit public lors
d’évolutions d’activités publiques, et de limiter par là-même la faculté pour les agents d’exprimer
leur désaccord à leur transfert (Section 2).
':A5634* U* S* !4* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =7B;6A* <@`3E65@6E:<:45*A345E@A57@;6?8**
Avant d’évoquer plus avant les modalités de transfert des personnels de droit public opérées
par la voie contractuelle, deux remarques liminaires, d’importance inégale, s’imposent pour une
pleine compréhension des données de cet aspect de l’étude.
Indiquons en premier lieu que le présent développement vise en réalité à traiter les hypothèses de
transfert qui s’opèrent sur un fondement légal général613 : le statut de la fonction publique614 et, en
cela, les transferts opérés en vertu d’un mécanisme de mobilité des agents publics. Une telle
présentation ne pourra, bien évidemment, faire l’économie d’un rappel théorique des mécanismes de
mobilité mis en place par les différents statuts publics, généraux comme spécifiques. Il ne s’agira pas
néanmoins de s’attarder sur ces éléments, bien connus des publicistes comme des agents publics, et
très bien traités par la plupart des manuels de droit de la fonction publique. Il s’agira au contraire
d’en faire un préalable nécessaire à la mise en perspective de leur utilisation dans le cadre de la
problématique qui nous intéresse, à savoir le transfert des personnels provoqués par une évolution
juridique dans la gestion d’une activité publique. Nous nous efforcerons ainsi de dégager les
modalités de mise en œuvre des mécanismes de mobilité de la fonction publique lors d’une mutation
d’activité publique, en fonction des cas où ceux-ci sont amenés à intervenir.
Précisons en second lieu, et de manière plus appuyée, le champ d’application des modalités de
transfert qui vont être évoquées au cours de ce développement. Il sera ainsi successivement abordé
les transferts mis en œuvre par une convention de mise à disposition prévue par le statut de la
fonction publique (paragraphe 1), puis les transferts faisant l’objet d’un contrat de droit privé
613613 Cette section renvoie donc à la 1ère section du chapitre 2 de la première partie. 614 Le terme de statut général de la fonction publique est sciemment utilisé dans son acceptation générique, les différences, parfois non négligeables existants entre les différents statuts des fonctions publiques, n’ayant sur cet aspect aucune incidence.
192
(paragraphe 2). Ce second aspect ne soulève aucune difficulté particulière et parle de lui-même : il
portera bien évidemment sur les transferts de personnels de droit public vers une entité de droit privé,
pour lesquelles les agents de droit public auront fait le choix d’un passage à un régime de droit privé.
Le premier aspect doit quant à lui être clarifié. Certes, il s’agira d’étudier les hypothèses de mobilité
interne à la fonction publique, c’est-à-dire les transferts de personnels de droit public intervenant
entre personnes publiques. Mais il s’agira également d’envisager les hypothèses de transfert de
personnels de droit public vers une entité de droit privé, pour lesquelles les agents de droit privé
n’auront à l’inverse pas fait le choix d’un passage à un régime de droit privé. En définitive, le
premier paragraphe couvrira des hypothèses de transfert de personnels de droit public
incontestablement plus larges que le second.
,@E@\E@=G:* UR* +:?* <8A@46?<:?* 9:* <3B6;658* 9:* ;@* [34A5634* =7B;6C7:* C76*6<=;6C7:45*6<=8E@56>:<:45*;@*A34A;7?634*9074*A345E@5**
Bien qu’envisagé par des textes propres à chaque fonction publique615, le régime de mise à
disposition apparaît tout à fait analogue dans les trois fonctions publiques616, similarité renforcée
depuis la loi n°2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique617 qui a opéré
de substantielles modifications des règles de mise à disposition, en étendant notamment le champ
d’application de cette pratique aux fonctions publiques territoriale et hospitalière, marquant selon
l’expression de la doctrine « une nouvelle étape vers une fonction publique ouverte »618. Ainsi, si!
quelques spécificités existent au sein de chaque statut, elles ne constituent que des aménagements
nécessaires au fonctionnement interne de chaque fonction publique mais n’affectent en rien les
principes fondamentaux de cet instrument de mobilité des agents publics. La mise à disposition ne
peut ainsi être mise en œuvre que selon des modalités organisées autour d’un socle commun aux
trois fonctions publiques, et caractérisées par la conclusion impérative d’une convention,
« tripartite » (A), particulièrement encadrée quant à son contenu (B).
*
615 Décret n°85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions, modifié successivement par les décrets n°2007-1542 du 26 octobre 2007, n°2009-1636 du 23 décembre 2009 et n°2010-467 du 7 mai 2010 ; Décret n°2008-580 du 18 juin 2008 relatif au régime de la mise à disposition applicable aux collectivités territoriales et aux établissements publics administratifs locaux ; Décret n°88-976 du 13 octobre 1988 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires hospitaliers et à certaines modalités de mise à disposition, modifié notamment par les décrets n°2004-449 du 24 mai 2004 et n° 2008-928 du 12 septembre 2008 relatif à la mise à disposition et au détachement 616 P. BANDET et S. SALON, La carrière des fonctionnaires dans les trois fonctions publiques, Berger-Levrault, A. CAVAILLER et V. GALIEZ, « Carrière des fonctionnaires (FPT) », J.-Cl. Fonct. Pub., fasc. 380. 617 Loi n°2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique (J.O. du 6 février 2007), op.cit. 618 P. LAGRANGE, « La réforme de la mise à disposition : nouvelle étape vers une fonction publique ouverte ? », AJDA 12 mars 2007, p. 524, op. cit.
193
-*S**!4:*A34>:45634*e*5E6=@E565:*f*
Le qualificatif « tripartite », sciemment utilisé en vue de mettre en exergue l’implication
conjointe de la collectivité d’origine, de la collectivité d’accueil comme de l’agent public mis à
disposition pour la mise en œuvre de cette position d’activité, est pourtant juridiquement impropre
dans la mesure où l’agent public dont la mise à disposition est envisagée n’est pas, stricto sensu,
partie à la convention de mise à disposition. Celle-ci n’intervient en effet qu’entre la collectivité
publique dont relève l’agent et son organisme d’accueil (1). Pour autant, la mise à disposition
nécessite l’accord exprès de l’agent (2) qui reçoit le projet de convention en vue de formuler, ou non,
son accord.
UV /@* 48A:??658* 9074:* A34>:45634* :45E:* ;@* A3;;:A56>658* 903E6\64:* :5* ;@*?5E7A57E:*90@AA:76;*
La rédaction de l’alinéa 2 de l’article 10 de la loi du 2 février 2007 précisant les modalités de
la mise à disposition ne laisse désormais aucune place au doute : selon ses termes, la mise à
disposition « ne peut avoir lieu qu'avec l'accord du fonctionnaire et doit être prévue par une
convention conclue entre l'administration d'origine et l'organisme d'accueil ». La loi de
modernisation de la fonction publique est ainsi venue simplifier les modalités de mise en œuvre de la
mise à disposition, en instaurant une formalité unique, la conclusion d’une convention, là où le
pouvoir réglementaire619 dissociait auparavant les mises à disposition au profit d’une administration
de l’Etat ou d’un établissement public de l’Etat à caractère administratif620, qui étaient prononcées
par arrêté du ministre dont relevait l’agent et publiées au journal officiel, des mises à disposition au
profit d’un organisme d’intérêt général, public ou privé621, qui faisaient quant à elle déjà l’objet
d’une convention.
La conclusion d’une convention de mise à disposition entre l’administration d’origine et
l’organisme d’accueil est donc désormais requise en toute hypothèse, et revêt la valeur d’une
obligation légale. Cette évolution notable des règles de mise à disposition des agents publics, toutes
fonctions publiques confondues, répond à un véritable souci de pragmatisme du législateur, qui a pris
acte du caractère inopérant du dispositif réglementaire qui prévoyait l’adoption d’un arrêté
ministériel pour la mise en œuvre d’une mise à disposition. Les chiffres avancés par Jacques Alain
Bénisti dans son rapport à l’Assemblée nationale du 26 juin 2006 sur le projet de loi de
619 Décret n°85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions, op.cit. 620 Article 2 du décret n°85-986 op.cit. 621 Article 3 du décret n°85-986 op.cit.
194
modernisation de la fonction publique622 traduisaient en effet les lourdeurs de la procédure
administrative auparavant prévue en matière de mise à disposition : seuls 88% des mises à
disposition faisaient effectivement l’objet d’un arrêté et ce dernier n’étaient publié que dans environ
6% des cas623. Il n’était ainsi pas rare de voir ainsi deux administrations publiques conclurent entre
elles une convention de mise à disposition, en lieu et place d’un arrêté ministériel pourtant exigé624.
Le législateur a donc consacré une pratique empirique, qui a le mérite de la souplesse quant au mode
de formalisation de la mise à disposition. On verra plus loin que la liberté des administrations
publiques est davantage circonscrite quant au contenu de cette convention.
WV /0:Z6\:4A:*9:*;0@AA3E9*9:*;0@\:45*=7B;6A*A34A:E48*
Un fonctionnaire ne peut jamais être mis à disposition contre sa volonté. Là encore, cette
exigence préexistait à l’adoption de la loi de modernisation de la fonction publique de 2007, puisque
la rédaction du décret de 1985 faisant application de la loi de 1984 prévoyait déjà en son article
premier que le fonctionnaire peut être mis à disposition « avec son accord ». Elle se voit en revanche
incontestablement renforcée, sous l’effet de l’abandon de l’exigence d’une nécessité de service pour
pourvoir recourir à la mise à disposition. On ne peut ici que rejoindre Philippe Lagrange qui souligne
que l’administration ne saurait s’affranchir de cet accord, alors même que ne lui est plus imposée
l’obligation de faire valoir l’intérêt du service pour opérer une mise à disposition. D’autant plus que,
rappelons-le, la mise à disposition pouvant être effectuée au bénéfice d’une personne publique
comme d’un organisme de droit privé, telle une association625, elle peut, dans cette hypothèse,
conduire à placer l'agent sous un régime de droit privé dans ses relations avec l'association626 .
En pratique, l’accord doit pouvoir être recueilli expressément par la collectivité publique qui
entend mettre à disposition un de ses agents au profit d’une autre entité, publique ou privée. En effet,
si l’article 61 de la loi du 26 janvier 1984 évoque simplement « l'accord du fonctionnaire » sans plus
de précisions, les juridictions administratives627 ont fait une lecture stricte de cette exigence en
considérant que « la mise à disposition d'un fonctionnaire […] ne peut être décidée qu'avec l'accord
exprès de l'intéressé ». En l’espèce, un syndicat mixte souhaitait mettre à disposition d’une
association plusieurs de ses agents. Néanmoins, aucun des agents en cause n'avait signé la lettre de
622 J. A. BENISTI, Rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République sur le projet de loi n°3134 de modernisation de la fonction publique, Assemblée Nationale, n°3173, 2006, p.56. 623 Cités par P. LAGRANGE, « La réforme de la mise à disposition : nouvelle étape vers une fonction publique ouverte ? », AJDA 12 mars 2007, p. 524, op.cit. 624 CE, 10 novembre 2006, req. n°295631, à propos d’une conclusion conclue entre deux universités mais non approuvée par une autorité de l’Etat et n’ayant pas fait l’objet d’un arrêté ministériel. 625 La mise à disposition constitue, à n’en pas douter ,l’une des principales hypothèses de mise à disposition au profit d’un organisme de droit privé. 626 Cass. Ass. Plén., 20 décembre 1996, Rey-Herme c/ Assoc. Alliance française, Bull. civ. I, n° 10, Dr. Soc. 1997, p. 717 concl. J. SAINTE-ROSE, AJDA 1997, p. 304 note S. SALON ; TC, 10 mars 1997, Préfet de la région Alsace, préfet du Bas-Rhin c/ CA de Colmar, Rec. p. 526 ; TC, 29 septembre 1997, Préfet de l'Isère, Rec. p. 533. 627 CAA Nantes, 30 juin 2000, Syndicat mixte de gestion CMFAO, req. n° 98NT01933.
195
mise à disposition qui était annexée au courrier que le syndicat mixte de gestion lui avait adressé. Au
contraire, chacun d'entre eux avait informé par courrier le syndicat mixte de son refus exprès d'être
mis à disposition de l'association. On ne saurait donc que trop préconiser la formalisation par écrit de
cet accord. Une simple lettre, dûment signée par l’agent, et mentionnant les éléments essentiels de la
mise à disposition, à savoir la collectivité d’origine, l’organisme d’accueil, l’identité de l’agent ainsi
que les principales caractéristiques de ses fonctions et encore la durée de cette mise à disposition,
suffira à entériner l’accord de l’agent et à sécuriser, dès lors, ladite mise à disposition. Il convient de
rappeler que le refus d’un agent public fonctionnaire d’être mis à disposition ne constitue pas, en lui-
même, une faute628.
XV !4*[3E<@;6?<:*E:4[3EA8*=37E*;:*5E@4?[:E5*9:?*@\:45?*=7B;6A?*5:EE653E6@7Z*
En outre, il convient de relever que la mise à disposition d’agents publics de la fonction
publique territoriale implique, au-delà des modalités classiques tenant à l’accord de l'intéressé et du
ou des organismes d'accueil, que l'assemblée délibérante de la collectivité territoriale ou de
l'établissement public administratif gestionnaire ait été informée préalablement du projet de mobilité
de l’agent. Au surplus, « lorsque la mise à disposition est prononcée au profit d'un organisme
mentionné au cinquième alinéa de l'article 61-1 de la loi [n° 84-53] du 26 janvier 1984 susvisée,
d'une organisation internationale intergouvernementale ou d'un État étranger », le pouvoir
réglementaire exige que l'arrêté prononçant la mise à disposition, accompagné de la convention de
mise à disposition qui lui est annexée, soit soumise au contrôle de légalité par transmission au
représentant de l'État dans le département629.
∴
De nombreuses critiques nourrissent depuis longtemps le débat autour du régime de la mise à
disposition. Parmi celles-ci figurent au premier rang celle d’un formalisme réduit facilitant les
dérives, notamment au plan budgétaire. Pourtant, force est de constater que la mise à disposition ne
peut être mise en œuvre que dans le cadre d’une convention au contenu délimité par le législateur et
le pouvoir réglementaire soumis à un contrôle renforcé depuis 2007. *
628 CE, 21 mai 2007, M. M, req. n°299307, E. GLASER, « Dans quelle position l'agent illégalement évincé doit-il être réintégré ? », Dr. adm. 2007, comm. 137. 629 Article 2 du décret n°2008-580 du 18 juin 2008 relatif au régime de la mise à disposition applicable aux collectivités territoriales et aux établissements publics administratifs locaux (J.O. du 28 juin 2008), op.cit
196
N*S*!4:*A34>:45634*:4A@9E8:*
La relative liberté laissée aux collectivités publiques lors de la conclusion de convention de
mise à disposition de personnels est souvent mise en avant par les commentateurs spécialisés de la
fonction publique . Le statut de la fonction publique n’impose à la convention de mise à disposition
qu’un contenu minimal (1), une durée maximale (2), et une obligation de remboursement à la
collectivité d’origine (3). Ces conditions, en apparence peu exigeantes, suffisent pourtant selon nous
à définir un cadre juridique souvent peu adapaté au contexte d’une évolution d’activité publique et,
ce faisant, de la problématique du sort des personnels qui en découle.
UV !4*A345:47*<646<@;*
Le pouvoir réglementaire indique, quelle que soit la fonction publique d’origine de l’agent
public, que la convention de mise à disposition « définit notamment la nature des activités exercées
par le fonctionnaire mis à disposition, ses conditions d'emploi, les modalités du contrôle et de
l'évaluation de ses activités. La convention peut porter sur la mise à disposition d'un ou de plusieurs
agents ».
WV !4:*97E8:*<@Z6<@;:*
Inadéquation avec les durées contractuelles de la commande publique. La durée de toute
mise à disposition est de 3 ans maximum, renouvelable. Il en va ainsi des fonctionnaires de l'État
comme des fonctionnaires territoriaux ou des fonctionnaires hospitaliers. La seule énonciation de
cette durée particulièrement courte, même si elle est renouvelable, suffit à mettre en lumière l’une
des principales limites de la mise en disposition en tant qu’instrument de résolution de la question du
sort des personnels posée par l’évolution d’une activité publique. Que l’activité publique subisse une
mutation en raison d’un transfert de compétence ponctuelle vers une nouvelle collectivité publique
ou d’une externalisation vers un opérateur écononique de droit privé, il est peu probable que cette
évolution n’affecte le personnel que pour une durée de trois ans. Les contrats publics en second lieu
s’inscrivent dans une durée déterminée par l’ampleur de la mission confiée au cocontractant. Ainsi,
en matière de marché public, l’article 16 du code des marchés publics précise que « la durée d’un
marché » est fixée « en tenant compte de la nature des prestations et de la nécessité d'une remise en
concurrence périodique ». Quant aux conventions de délégations de service public, la loi du 23
janvier 1993630, codifiée à l’article L.1411-2 du code général des collectivités territoriales, est venue
précisée que « les conventions de délégation de service public doivent être limitées dans leur
durée ». La règle qui prévaut est ainsi de déterminer la durée de la convention en fonction « de la
630 Loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite Loi Sapin (J.O. du 30 janvier 1993, p. 1588), op.cit.
197
nature et du montant de l'investissement à réaliser », sans « dépasser la durée normale
d'amortissement des installations mises en œuvre ».
Solution transitoire. Dans ce contexte, le recours à la mise à disposition, comme au
détachement, ne revêt qu’un intérêt transitoire pour assurer le passage des agents publics au service
du nouveau gestionnaire. Au terme de la durée normale de la mobilité exercée, agents publics
comme structure d’accueil doivent alors s’interroger sur leur volonté respective de pérenniser
l’emploi de l’agent, en opérant un passage définitif ou en décidant, à l’inverse, de cesser leur
collaboration631.
XV /:* E:<B37E?:<:45* 9:* ;@* E8<748E@5634* 9:* ;0@\:45* Y* ;@* A3;;:A56>658*903E6\64:*
La mise à disposition, variante de la position statutaire d’activité, permet à un fonctionnaire
d’exercer des fonctions dans une autre administration, voire dans d’autres organismes publics ou
privés chargés d’une mission d’intérêt général tout en continuant à demeurer dans son corps
d’origine, à être rémunéré par son administration d’origine, et à y acquérir des droits à l’avancement
et à la retraite. Elle représente donc potentiellement un côut pour la collectivité publique dont il
relève ab initio, puisque celle-ci, bien que ne bénéficiant plus de ses services, continue d’en assumer
la charge financière. C’est la raison pour laquelle le décret de 1985 faisant application de la loi du 26
janvier 1984632 prévoyait le remboursement par l’organisme d’accueil de la rémunération du
fonctionnaire mis à disposition. La pratique a néanmoins démontré l’inapplication patente de cette
disposition, et le recours abusif aux éxonérations ouvertes par le décret de 1985. Selon les chiffres
rapportés par Jacques Alain Bénisti, les mises à disposition de fonctionnaires n’étaient avant
l’adoption de la loi du 2 février 2007 remboursées que dans une très faible proportion, à hauteur de 8
%, soit 20 millions d’euros par an, pour un coût total des personnels mis à disposition de 244
millions d’euros. Le remboursement est enfin conforme à la logique budgétaire qui prévaut depuis
l’adoption de la loi organique relative aux lois de finances. Les dépenses des différents programmes
budgétaires font en effet l’objet d’un suivi d’efficacité, au moyen d’indicateurs de performance. Le
fonctionnaire mis à disposition d’un autre organisme est, en tout état de cause, une charge sans
contrepartie pour son administration d’origine. Il convient donc de neutraliser ce coût, afin de
diminuer l’atteinte portée par les mises à disposition aux autorisations budgétaires.
631 Voir infra. 632 Article 3 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984, dite LE PORS portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale (J.O. du 27 janvier 1984, p. 441), op.cit.
198
Au-delà de cette dimension budgétaire certes non négligeable633, la gratuité de la mise à
disposition des fonctionnaires engendrait de véritables risques contentieux, et notamment dans les
hypothèses d’activités publiques qui nous intéressent où la dimension concurrentielle est prégnante.
En effet, la mise à disposition gratuite d’un fonctionnaire au profit d’un tiers peut, en premier lieu,
caractériser un avantage injustifié pouvant être condamné en raison du préjudice causé aux finances
publiques. Elle peut en outre être assimilée à une aide d’Etat au profit des organismes bénéficiant de
ces mises à disposition gratuites, ou plus simplement conférer à un opérateur en charge d’une activité
publique un avantage injustifié créant une distorsion de concurrence à l’encontre des autres
opérateurs. Cet aspect mérite de s’y attarder quelque peu.
Cherchant à rompre avec ses dysfonctionnements latents, la loi du 2 février 2007 marque
l’affirmation d’un principe de remboursement quasi-systématique. L’article 10 paragraphe 2 érige en
effet en principe le remboursement à la collectivité d’origine de la mise à disposition par
l’établissement d’accueil, en limitant les cas d’exonérations et en renvoyant au pouvoir réglementaire
le soin de définir les modalités de mise en œuvre de ce remboursement. Le rapporteur du projet de
loi à l’Assemblée Nationale préconisait en ce sens que le décret d’application de la loi du 2 février
2007 précise la base de calcul et les modalités de remboursement des mises à disposition, de telle
sorte que le coût pris en charge par l’organisme d’accueil corresponde au coût réel pour
l’administration d’origine634. Le décret du 26 octobre 2007635 est ainsi intervenu, sans apporter
davantage d’élements quant aux modalités de la compensation financière de la mise à disposition.
L’article 2 du décret du 26 octobre 2007 se contente ainsi d’indiquer que « l'organisme d'accueil
rembourse à l'administration d'origine la rémunération du fonctionnaire mis à disposition ainsi que
les cotisations et contributions y afférentes. En cas de pluralité d'organismes d'accueil, ce
remboursement est dû au prorata de la quotité de travail dans chaque organisme », et renvoie en
réalité aux parties à la convention de mise à disposition le soin d’organiser elles-même les modalités
de remboursement de la charge de la rémunération par l’organisme d’accueil636.
Dans les hypothèses de mise à disposition de personnels de droit public au profit d’un
organisme de droit privé en charge d’une mission de service public qui nous intéressent au premier
chef dans le cadre de cette étude, cette obligation sera sans doute davantage respectée eu égard au
633 Le rapport à l’Assemblée nationale soulignait que « le remboursement [représenterait] donc une économie budgétaire substantielle, et [aurait] également sans doute comme effet induit une réduction du nombre de demandes suscitées par la gratuité actuelle de la plupart des mises à disposition ». 634 J.-A. BENISTI, « Rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République sur le projet de loi n°3134 de modernisation de la fonction publique », Assemblée Nationale, n°3173, 21 juin 2006, p.56, op.cit 635 Décret n° 2007-1542 du 26 octobre 2007 relatif à la mise à disposition et modifiant le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat et à certaines modalités de cessation définitive de fonctions (J.O. du 28 octobre 2007), op.cit 636 Les modalités de remboursement de la charge de rémunération par le ou les organismes d'accueil sont précisées par la convention de mise à disposition.
199
risque contentieux que présenterait un non-remboursement par le gestionnaire d’une activité
publique auquel serait mis à disposition un agent public.
∴
Si elle présente la garantie d’une permanence de l’agent dans son corps d’origine, dont il
conserve les droits à la retraite et à l’avancement, la mise à disposition du fonctionnaire place pour
autant l’agent dans une réelle précarité à l’égard de l’exercice de sa mission dans le cadre de
l’activité publique transférée. La dévolution de cette activité à une nouvelle entité, notamment dans
le cadre de la commande publique, s’inscrit dans une durée relativement longue à l’échelle de la
carrière de l’agent, et dépasse dans l’immense majorité des cas la durée de trois ans dans laquelle le
statut de la fonction publique a entendu enfermer la mise à disposition. Dès lors, il appartient à
l’agent qui souhaite poursuivre les fonctions qu’il exécutait avant l’évolution d’activité publique de
réfléchir à une solution davantage pérenne, comme le passage définitif au service du nouveau
gestionnaire. Si ce dernier revêt la qualité d’une personne morale de droit privé, le transfert de
l’agent s’opère par la voie contractuelle, à savoir par la conclusion d’un contrat de travail de droit
privé.
,@E@\E@=G:* WR* !4* 5E@4?[:E5* >:E?* 74* 3=8E@5:7E* 8A343<6C7:* 9:* 9E365* =E6>8*<@EC78*=@E*;@*A34A;7?634*9074*A345E@5*9:*9E365*=E6>8
On a coutume de considérer la situation du fonctionnaire comme immuable : celui-ci
intégrerait la fonction publique pour ne plus la quitter. Certes, la majorité des fonctionnaires, et des
agents publics au sens large, effectuent intégralement leur carrière au sein de la fonction publique, et
souvent au sein d’une même administration. Pour autant, aucun obstacle juridique majeur637 ne
s’oppose à ce que le fonctionnaire quitte ses fonctions pour exercer de nouvelles activités hors du
cadre de la fonction publique. Dans le cadre d’une évolution d’activité publique marquant le passage
d’un gestionnaire de droit public638 à un gestionnaire de droit privé, la volonté de conserver des
fonctions dont l’agent a la maîtrise et l’expérience pourra primer sur la crainte d’abandonner un
statut protecteur. L’agent public pourra alors manifester le souhait d’embrasser une carrière cette fois
637 La plupart des agents publics qui souhaitent quitter la fonction publique après leur titularisation se voient dans l’obligation de rembourser les traitements et indemnités perçues durant la période minimale d’engagement. Il en va ainsi par exemple des fonctionnaires de l’Etat issus des Instituts régionaux administratifs : en application de l'article 28 du décret n°84-588 modifié relatif aux IRA (J.O. du 12 juillet 1984, p. 2231), un élève qui ne termine pas sa formation doit rembourser l'intégralité des traitements et indemnités perçus durant sa formation. De plus, les élèves doivent signer un engagement à servir l'Etat durant une période de 5 ans après leur titularisation ; si cet engagement est rompu, le remboursement des sommes perçues sera aussi exigé. Dans le même sens, l’article 8 du décret n° 2006-8 du 4 janvier 2006 relatif au statut particulier du corps des ingénieurs de l'agriculture et de l'environnement (J.O. du 5 janvier 2006) fixe à 8 ans la durée minimale après titularisation où l’agent s’engage à servir, en activité ou en détachement, dans le corps des ingénieurs de l'agriculture et de l'environnement. Si la rupture de l'un des engagements survient plus de trois mois après la date de nomination en qualité d'élève ingénieur, les intéressés doivent, sauf si la rupture ne leur est pas imputable, rembourser à l'Etat une somme égale à la totalité des traitements et indemnités perçus pendant leur scolarité ainsi qu'une fraction des frais d'études engagés pour leur formation.
200
placée sous le signe du droit privé. Il s’agit là d’un véritable choix laissé à son appréciation pour
lequel il bénéficie d’un certain délai de réflexion (A). La conclusion d’un contrat de travail marque
en tout état de cause le passage de l’agent d’un régime de droit public à un régime de droit privé (B).
-*S*!4*5E@4?[:E5*;@6??8*64?AE65*9@4?*;:*5:<=?**
Toute évolution dans la gestion d’une activité suscite incontestablement un bouleversement
pour les personnels concernés. La multiplicité des dispositifs sociaux existants pour pallier les
difficultés de telles évolutions témoignent de la sensibilité de cette problématique. Un tel constat se
vérifie aisément lorsque l’évolution d’une activité publique marque un changement de régime
juridique des personnels affectés à l’activité en cause, comme c’est le cas de personnels de droit
public ayant vocation à être transférés à une entité de droit privé. La rupture entre la situation qui
préexistait au changement de gestionnaire et celle qui s’offre désormais aux personnels est réelle.
Elle justifie qu’il ne soit pas toujours simple pour les agents publics de se prononcer d’emblée sur
leur choix d’employeur pour l’avenir. Fort heureusement, cette modification étant substantielle, elle
ne peut être imposée à l’agent public sans son accord639. Au surplus, dans l’hypothèse d’un passage
d’un employeur public à un employeur privé, l’agent public peut bénéficier, s’il le souhaite, d’un
délai de réflexion pour opter définitivement pour un exercice de ses fonctions antérieures au profit
d’une entité de droit privé. L’agent public qui se voit proposer la conclusion d’un contrat de travail
de droit privé est libre de se déclarer au moment du changement de gestionnaire (1) tout comme au
cours ou au terme de sa mise à disposition s’il a choisi cette voie dans un premier temps (2).
UV /@*A34A;7?634*9074*A345E@5*9:*5E@>@6;*9:*9E365*=E6>8*9a?*;:*AG@4\:<:45*9:*\:?56344@6E:**
Lorsque l’évolution d’une activité publique tend vers une privatisation du régime social des
agents affectés à son exercice, le nouveau gestionnaire de ladite activité placé dans un régime de
droit privé a l’obligation de proposer aux agents publics un contrat de droit privé. Cette obligation
fait d’ailleurs fréquemment l’objet d’un rappel par l’autorité publique contractante, pouvoir
adjudicateur ou autorité délégante, dans le cadre de la procédure d’attribution du contrat confiant
l’activité à un tiers. Il n’est pas rare en effet que le cahier des charges d’une consultation publique
mentionne expressèment l’obligation faite au repreneur de l’activité de proposer un contrat de travail
à l’ensemble des personnels, qu’ils relèvent du droit privé comme du droit public640. Obligation à
l’égard du cocontractant de l’administration, la reprise des agents publics n’en pas pour autant
impérative pour ces derniers. Il ne s’agit pour eux que d’une simple faculté laissée à leur libre
appréciation, en raison de la modification substantielle que constitue indéniablement le passage 639 CE, 26 novembre 2008, Région Lorraine c. SNC Lavalin, req. n°3080053, inédit, op. cit. 640 Voir supra, Partie 1, Chapitre 1, Section 2.
201
d’une régime de droit public à régime de droit privé au regard de la jurisprudence dégagée par les
juridictions sociales à cet égard.
En tout état de cause, l’agent public peut, s’il le souhaite, intégrer les effectifs du nouveau
gestionnaire dès l’entrée en fonction de ce dernier. Il lui suffit, pour ce faire, de présenter sa
démission auprès de la personne publique initialement gestionnaire et de signer le contrat de travail
de droit privé qui lui est proposé par le nouvel attributaire. Un tel choix, qui traduit la volonté de
l’agent de conserver ses fonctions plutôt que son statut de droit public, est loin d’être anodin.
Substantiel au regard du régime juridique de l’agent, il l’est également de par son caractère définitif.
En effet, en signant un contrat de droit privé, l’agent renonce définitivement au bénéfice du statut
d’agent public.
WV /@* A34A;7?634* 9074* A345E@5* 9:* 5E@>@6;* 9:* 9E365* =E6>8* @7* A37E?* 37* @7*5:E<:*9:*;@*<6?:*Y*96?=3?65634*37*97*985@AG:<:45*
Face à un tel changement, l’agent public bénéficie d’un temps de réflexion en disposant de la
faculté de signer un contrat de travail de droit privé avec le nouveau gestionnaire en cours
d’exécution de la convention par laquelle il est mis à disposition de l’entité de droit privé, ou au
terme de cette convention.
Il est ainsi loisible à chacune des parties à la convention de mise à disposition d’y mettre fin
avant son terme. Dans le cas d’une mise à disposition motivée par l’attribution de l’activité à une
personne morale de droit privé, la rupture anticipée de la mise à disposition devrait être
principalement le fait de l’agent lui-même. Après l’écoulement d’une certaine période de
« reconnaissance » du nouveau gestionnaire privée et de ses méthodes d’exploitation, l’agent peut
parfaitement opter pour une solution d’intégration définitive des effectifs privés de l’organisme
d’accueil. Dans cette perspective, il lui suffit, d’en faire la demande auprès de son administration
d’origine et de solliciter de la part du gestionnaire privé la signature d’un contrat de droit privé.
Il est également parfaitement envisageable pour l’agent de n’intégrer les effectifs du nouveau
gestionnaire en qualité de salarié de droit privé qu’au terme de sa mise à disposition. Notons à titre
exclusif que l’agent public peut également renoncer à exercer ses missions dans le cadre de l’activité
confiée à un gestionnaire privé et souhaiter réintégrer les effectifs de son administration. Il est alors
affecté à des fonctions similaires correspondant à son corps ou son cadre.
∴
L’agent public peut donc faire connaître son choix d’exercer définitivement ses fonctions
au service du nouvel opérateur de droit privé dès le changement de gestionnaire ou à l’issue d’une
période éventuelle de mise à disposition. En tout état de cause, ce choix répond à un certain
formalisme, qui marque le passage d’un régime de droit public à un régime de droit privé.
202
N* S* ;@* [3E<@;6?@5634* 48A:??@6E:* 97* =@??@\:* 98[64656[* 9074* E8\6<:* 9:*9E365*=7B;6A*Y*74*E8\6<:*9:*9E365*=E6>8*=@E*;0@\:45*=7B;6A*5E@4?[8E8*
Les éléments dont il va être fait état dans les développements qui suivent ne figurent certes
pas parmi les plus novateurs de la présente étude. Il ne peut néanmoins être fait l’économie de leur
évocation dans une logique d’appréhension de la globalité des modalités de transferts des agents
publics vers une entité de droit privé. Le transfert d’un agent public vers une entité de droit privé
s’effectue ainsi en deux temps : en premier lieu, l’agent public doit présenter sa démission auprès de
l’administration dont il relève (1). Une fois celle-ci effective, il a alors la liberté de conclure un
contrat de travail, de droit privé, avec le nouveau gestionnaire de droit privé (2).
UV /@*98<6??634*=E8@;@B;:*9:*;0@\:45*=7B;6A**
Il est rare d’évoquer le régime juridique de la démission en droit de la fonction publique. En
comparaison avec le marché « classique » du travail, soumis aux règles de droit privé du code du
travail, peu de fonctionnaires franchissent en effet le pas d’une démission. Il faut dire que ses
conséquences, qui présentent un caractère définitif, marquent la rupture du lien du fonctionnaire avec
son administration : il ne pourra être réintégré que par le fait d'une nouvelle nomination, soumise aux
règles ordinaires641. Il suffit de connaître cette donnée pour comprendre les réticences à abandonner
un poste obtenu à l’issue d’un long parcours : l’obtention d’un concours en premier lieu, la formation
en deuxième lieu, et les efforts d’avancement propres à toute carrière, particulièrement encadrés dans
la fonction publique. D’autant que, compte tenu de la situation statutaire de l'agent au moment de la
sortie du service, des conditions relatives à la réintégration ultérieure éventuelle du fonctionnaire
seraient sans valeur, ne liant aucunement l'administration, libre de ne pas procéder à la
réintégration642.
La démission de l’agent public, qui se définit comme une cessation d'activité résultant de la
volonté de l'agent, traduit donc, à l’instar de la faculté offerte par les dispositions de l’article
L. 1231-1 du code du travail aux salariés de droit privé, la volonté643 de l’agent de quitter ses
fonctions. En droit de la fonction publique, l’unilatéralité de la démission est quelque peu nuancée
par la nécessité d’un assentiment de l’administration. Cet accord, qui trouve sa justification dans la
situation réglementaire, et non contractuelle, du fonctionnaire, conditionne l’effectivité de la
641 CE, 15 mai 1981, Meaux, req. n°15586, Rec. p. 778. 642 CE, 5 juillet 1918, Roy, Rec. p. 676 ; CE, 21 janvier 1921, Joseph Sei, Rec. p. 75. 643 Selon l'article 58 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'État et à certaines modalités de cessation définitive de fonctions (J.O. du 26 Octobre 1985), « la démission ne peut résulter que d'une demande écrite de l'intéressé marquant sa volonté expresse de quitter son administration ou son service ». Il doit donc y avoir, de la part de l'agent, manifestation de la volonté de cesser définitivement ses fonctions. Cette volonté doit être manifestée expressément, elle doit en outre être émise librement. Le juge apprécie, dans chaque cas particulier, la réalité de la manifestation de la volonté de l'agent réputé désireux de démissionner : B. THOMAS-TUAL, « Agents publics – sortie de service », J.-Cl. Adm., fasc. n°191, n°35.
203
démission. L'article 58 du décret n° 85-896 du 16 septembre 1985644 indique ainsi que la démission
« n'a d'effet qu'autant qu'elle est acceptée par l'autorité investie du pouvoir de nomination et prend
effet à la date fixée par cette autorité ».
Point de démission donc sans accord de l’autorité de nomination dans un délai de quatre
mois645. L'administration dispose d'un pouvoir discrétionnaire pour accepter ou refuser les
démissions. Le juge n’exerce sur une telle décision qu’un contrôle minimum en s’assurant de ce que
les refus de démission ont bien été motivés par l'intérêt du service646. Elle ne sanctionne ainsi que le
détournement de pouvoir, l'erreur de fait et l'erreur manifeste d'appréciation647.
Il convient de relever que le fonctionnaire dont la démission est acceptée doit cependant
continuer à exercer ses fonctions jusqu'à la date qui lui est indiquée par l'autorité hiérarchique. À
défaut, il pourrait en application des dispositions de l'article 60 du décret n° 85-986 du 16 septembre
1985, faire l'objet d'une sanction disciplinaire dans la mesure où il serait alors considéré comme
coupable d'un abandon de poste648. Au surplus, en l'absence de service fait, il ne sera pas rémunéré
et, s'il a droit à perception immédiate d'une pension, celle-ci pourra être amputée d'une retenue. En
définitive, tant que sa démission n'a pas été acceptée, le fonctionnaire demeure soumis aux
obligations statutaires de la position d'activité649.
Dans le cadre d’une démission motivée par la volonté l’agent de poursuivre ses fonctions au
service d’un nouvel employeur désormais de droit privé, de telles considérations devront bien
évidemment être prises en compte par l’ensemble des acteurs concernés par l’évolution d’activité et,
au premier rang, l’agent public lui-même pour garantir ses droits. Le contexte qui préside à la
démission de l’agent public devrait néanmoins limiter le risque de contentieux sur les modalités de
présentation de sa démission par l’agent. Dans une telle hypothèse en effet, chacune des « parties »
aura intérêt au bon déroulement du transfert en vue de son aboutissement sans heurts. La personne
publique, en premier lieu, qui est à l’origine du transfert par sa décision de confier à un tiers une
activité dont elle a, par essence, la responsabilité. Animée par une démarche d’ « externalisation des
coûts » ou du moins d’ « externalisation des responsabilités », celle-ci souhaitera, en toute logique,
accompagner le départ d’agents publics afin de ne plus supporter la charge financière de personnels
644 Les règles essentielles régissant la démission figurent aux articles 58 et suivants du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985, op. cit. 645 Ce délai n’a qu’une faible incidence au plan de la légalité dans la mesure où le silence gardé par l'administration pendant les quatre mois ne vaut pas acceptation de la demande de démission mais rejet , et qu’au surplus, si une décision expresse intervient après l'expiration des quatre mois, sa tardiveté ne l'entâche pas d'illégalité. 646 CE, 27 novembre 1959, Crozet, Gaz. Pal. 1960, 1, p. 205 ; CE, 29 juin 1983, Min. budget c/ Le Guelinel, Rec. p. 771. 647 CE, 22 octobre 1980, J.-C. Oswald, req. n° 16609. 648 Les circonstances de l'espèce sont à cet égard fondamentales et autorisent le juge à interpréter une manifestation de volonté par ailleurs équivoque de l'intéressé. Voir en ce sens CE, 29 mai 1942, Baudry, Rec. p. 177 649 Ainsi, il peut faire l'objet de poursuites disciplinaires : CE, 27 mars et 16 octobre 1936, Bonny, Rec. p. 387 et 881 ; S. 1937, 3, p. 89. Et, à l'inverse, il bénéficie des avantages de cette dernière : c'est le cas pour la pension à laquelle a droit la veuve du fonctionnaire décédé entre la présentation de sa démission et l'acceptation de celle-ci : CE, 15 juillet 1932, Jan, Rec. p. 736 ; CE, 5 avril 1946, Rouy, Rec. p. 107.
204
dont l’affectation initiale a disparu. Le repreneur de droit privé de l’activité en second lieu qui
bénéficiera ainsi d’une main d’œuvre qualifiée et expérimentée. L’agent public enfin.
On appelera à davantage de vigileance dans le respect de ces modalités lors de transferts d’activité
résultant non pas d’une externalisation650 inédite au profit d’un tiers opérateur de droit privé, mais
d’une succession d’opérateurs économiques, public puis privé, qui ne devrait pas toujours susciter un
tel consensus.
WV /@*?6\4@57E:*A34?8A756>:*9074*A345E@5*9:*5E@>@6;*9:*9E365*=E6>8*
Une fois l’agent public libéré de tout engagement à l’égard de l’administration auprès de
laquelle il effectuait auparavant sa mission, il peut alors conclure avec l’opérateur de droit privé
nouvellement gestionnaire de l’activité publique un contrat de travail de droit privé. Aucune
formalité particulière ne s’impose aux parties dans le cadre d’une conclusion résultant d’un transfert
d’activité publique. Les règles traditionnelles de droit privé trouvent naturellement à s’appliquer, à
l’instar de tout recrutement « classique ». L’article L. 1221- du code du travail dispose ainsi que « le
contrat de travail est soumis aux règles de droit commun. Il peut être établi selon les formes que les
parties contractantes décident d’adopter ».
∴
Provisoire et réversible, conditionné par l’accord de l’agent public, le mécanisme de mise à
disposition présente incontestablement des lacunes essentielles, qui en atténuent sensiblement la
pertinence pour procéder sereinement au transfert d’agents publics à l’occasion d’une évolution
d’activité publique. Le contrat de travail quant à lui, bien que garantissant davantage de stabilité en
conférant au transfert un caractère définitif, pêche lui-aussi par sa dimension individuelle et la
nécessité, là encore, du consentement de l’agent public à son transfert. Autant de carences que le
législateur a tenté de pallier en intervenant directement pour organiser le processus de transfert de
personnels de droit public dans des opérations d’ampleur.
*
650 Le terme d’externalisation est ici entendu selon son acception la plus large, et couvre ainsi l’ensemble des hypothèses de la commande publique, marchés publics comme délégations de service public, etc.
205
':A5634*W*S*!4* 5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*@7`37E90G76* [@A6;658*=@E*;0645:E>:45634*97*;8\6?;@5:7E*
) L’exposé successif des modalités de transfert des personnels de droit public reposant sur un
fondement légal général, puis sur un fondement légal spécifique, ne doit pas induire en erreur : les
dispositifs spécifiques n’ont pas remplacé les dispositifs généraux. Ils ont simplement pris acte d’un
certain nombre de lacunes de ces derniers pour tenter de s’en extraire dans des hypothèses
d’évolution d’activité où la question sociale, de par l’ampleur des effectifs concernés notamment, ne
pouvait être négligée et nécessitait au contraire de limiter au maximum les difficultés. C’est ainsi que
le législateur est spécialement intervenu dans le cadre de l’intercommunalité (paragraphe 1), de
l’acte II de la décentralisation (paragraphe 2) ou encore à l’occasion de la privatisation d’entreprises
publiques ou la transformation d’établissements publics industriels et commerciaux en sociétés
anonymes (paragraphe 3). Dans chacune de ces hypothèses, que le transfert s’effectue vers une
personne publique comme dans les deux premiers cas ou vers une personne privée comme dans le
dernier cas, les dispositifs instituent des modalités de transfert ad hoc, qui s’inspirent souvent des
mécanismes classiques de mobilité de la fonction publique.
,@E@\E@=G:* UR* !4* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =7B;6A* @7* =E3[65* 9074:*?5E7A57E:*645:EA3<<74@;:*C7@?6L*@753<@56C7:*
La coopération intercommunale, qui « se fonde sur la libre volonté des communes d'élaborer
des projets communs de développement au sein de périmètres de solidarité » selon les termes de
l’article L. 5210-1 du code général des collectivités territoriales651, a connu lors de la dernière
décennie une expansion telle que la majorité de la population française est désormais couverte par un
établissement public de coopération intercommunale. La loi du 16 décembre 2010 participe de ce
mouvement et oblige d’ailleurs chaque collectivité territoriale du territoire française à intégrer un
groupement intercommunal à l’horizon du 1er juin 2013652 tout en contraignant les collectivités à la
rationalisation matérielle de leur territoire intercommunal et des modalités d’exercice de leurs
compétences. Cette structuration administrative entre territoires n’a pas manqué de susciter un vif
débat tant au niveau doctrinal que politique. Mais qu’elle soit désignée sous le vocable de
« décentralisation fonctionnelle »653 ou à travers l’expression de « décentralisation verticale »,
l’intercommunalité marque sans conteste la volonté de collectivités de s’associer en vue d’une
gestion optimisée des compétences dont elles ont légalement la charge. Selon le sénateur Alain
Lambert, « pour une compétence donnée, l'intercommunalité marque à la fois l'apogée et dans une
651 Inséré par la loi d’orientation n°2002-276 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République (J.O. du 8 février 1992, p.3808). 652 Ibid., article 60. 653 C.EISENMANN, Centralisation et décentralisation. Esquisse d'une théorie générale, LGDJ, 1948.
206
certaine mesure, la fin de la mutualisation. En effet, le transfert de compétence, caractéristique de
l'intercommunalité, a vocation à s'accompagner d'un transfert de moyens des communes vers l'EPCI,
si bien que la question de leur mutualisation ne se pose plus : l'EPCI assure alors, avec des moyens
qui sont devenus les siens, l'accomplissement de la compétence, devenue sienne »654. Inhérente à la
notion de transfert de compétences, la notion de transfert des moyens, financiers, matériels et
humains, a bénéficié d’un traitement privilégié par le législateur dans le cadre de la coopération
intercommunale. Par plusieurs interventions successives, le législateur a ainsi tenté de dessiner un
cadre juridique spécifique à la question du transfert des personnels à l’occasion de la création ou de
la fusion d’établissements de coopération intercommunale655 en s’efforçant d’en faciliter la
résolution. La volonté du législateur de s’emparer de la question sociale soulevée par le phénomène
d’intercommunalité souligne, s’il en était encore besoin, la pertinence de cet aspect dans la conduite
et la réussite de cette réforme majeure des institutions locales en France.
Le dispositif de transfert des personnels élaboré dans le cadre de l’intercommunalité
bénéficie ainsi depuis 2002 d’un formalisme réduit (A). Il n’offre cependant pas, à notre sens, une
réponse satisfaisante dans la mesure où le transfert corrélatif des personnels au transfert de
compétence n’est qu’une parmi d’autres offertes aux collectivités territoriales (B). Les modalités de
transfert des personnels vers un établissement de coopération intercommunale s’en trouvent
inévitablement complexifiées, ce que l’on ne pourra que regretter. Les critiques acerbes adressées
aux collectivités territoriales quant à la multiplication des postes liés à l’intercommunalité, et par là-
même des coûts sociaux de ce mode d’administration locale, ne sont donc à notre sens pas prêtes de
cesser.
-*S*!4:*=E3A897E:*Y*;0@<B65634*?6<=;6[6A@5E6A:*
Le transfert de compétence d’une commune au profit d’un établissement public de
coopération intercommunale (EPCI) implique nécessairement un transfert de moyens, non seulement
matériels et financiers, mais également humains656. Pourtant, alors que la dévolution des biens,
équipements et contrats nécessaires à l’exercice des compétences d’un EPCI avait fait l’objet, dans la
loi n°99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération
intercommunale657, de dispositions expresses, la problématique du transfert des personnels se
caractérisait, en revanche, par l’absence de toute règle spécifique (1). Face à l’ampleur du
654 Rapport d'information à l’Assemblée nationale n° 495 de MM. Alain LAMBERT, Yves DÉTRAIGNE, Jacques MÉZARD et Bruno SIDO, fait au nom de la Délégation aux collectivités territoriales, 25 mai 2010, in P. NEVEU, « Contractualisation et mutualisation, outils de l'intercommunalité », JCP A n° 30, 26 juillet 2010, p. 2242. 655 Cette hypothèse est régie par l’article L.5211-43-1 du code général des collectivités territoriales. 656 Guide de l'intercommunalité : Statut du personnel et des élus - Le personnel, DGCL et Minefi-DGCP, 2006. 657 Loi n°99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale (J.O. du 13 juillet 1999, p. 10361), op. cit.
207
phénomène d’intercommunalité658, et eu égard dès lors au nombre de personnels concernés, le
législateur ne pouvait laisser perdurer une telle situation. Par loi du 27 février 2002659 désormais
codifiée à l’article L. 5211-4-1 du CGCT, il a cherché à régler une partie des difficultés, en
prévoyant que le transfert de compétence entraîne un transfert automatique du service ou de la partie
de service chargée de sa mise en œuvre (2)660.
UV +:?*<39@;658?*64656@;:<:45*64?@56?[@6?@45:?*
Jusqu’à l’adoption de la loi n°2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de
proximité, il n’existait pas de dispositif de transfert obligatoire des personnels lors de la création
d’un établissement public de coopération intercommunale. La loi du 12 juillet 1999 n’apportait
aucune précision sur le régime juridique des personnels communaux concernés par les transferts de
compétences en cas de création d’un EPCI ou d’élargissement de son périmètre ou de son champ de
compétences. Le transfert des personnels des communes n’était ni obligatoire ni automatique et les
agents pouvaient s’y opposer. A l’exception des communautés urbaines, la situation des personnels
transférés d’une commune vers un EPCI n’était donc prévue par aucun texte. Lors de la création ex
nihilo d’un EPCI, les questions relatives au transfert de personnels étaient réglées par le statut
général de la fonction publique territoriale et par le code général des collectivités territoriales. Ne
disposant d’aucun personnel propre à l’origine, l’EPCI pouvait ainsi recourir à la mise à disposition
d’agents, avec leur accord, lors du démarrage du groupement, sans toutefois que cette solution ne
soit perçue comme pérenne661. Il ne devait s’agir en effet que d’une solution applicable en attendant
que l’organe délibérant de l’EPCI ait pû créer les emplois permettant le détachement ou la
nomination d’agents662. L’article L. 5211-5 prévoyait ainsi que ces questions devaient être soumises
à la délibération préalable des communes concernées.
Les agents concernés devaient demander leur nomination dans les emplois créés par le
nouvel EPCI en choisissant l’une ou l’autre des possibilités offertes par le statut, c’est-à-dire la
mutation, le détachement, la mise à disposition ou l’inscription sur une liste d’aptitude établie après
658 En dix ans, entre 1999 et 2009, le nombre d’établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre est passé de 1678 à 2601 selon les chiffres de la Direction générale des collectivités locales (Ministère de l'Intérieur), « Le développement de l'intercommunalité : la révolution discrète - Chiffres Clés », Doc. fr., février 2009. 659 Loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité (J.O. du 28 février 2002, p. 3808). 660 La question des « flux » de personnels dans le cadre de l’intercommunalité est désormais largement traitée par le législateur. Preuve en est, l’introduction à l’article L. 5211-4-2 du CGCT par la loi du 16 décembre 2010 d’un dispositif de mise en commun de personnels grâce à la création de services commun entre un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et une ou plusieurs de ses communes membres, et ce en dehors même d’une hypothèse de transfert de compétences. Elle permet donc une mutualisation de services sur une base strictement volontaire pour tout objet intéressant les communes et l’établissement public. Elle réserve toutefois ce mécanisme aux seuls EPCI à fiscalité propre. 661 Rép. Min. n°41043 (J.O.A.N. Q du 15 mai 2000, p. 3018). 662 C. DEBOUY, « Communautés de communes – moyens », J.-Cl. Coll. terr. – Intercommunalité, Fasc. 256, 2005.
208
le concours, dès lors que leur emploi d’origine pouvait être supprimé. La pratique a d’ailleurs montré
que la mutation a été le mode de transfert le plus fréquemment retenu663.
En application de l’article 97 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions
statutaires relatives à la fonction publique territoriale, l’agent dont l’emploi avait été supprimé et qui
refusait une affectation dans le nouvel EPCI, était maintenu en surnombre pendant un an dans la
collectivité ou l’établissement d’origine suivi d’une prise en charge par le Centre national de la
fonction publique territoriale ou le centre de gestion. Cette situation pouvait conduire à un
accroissement du nombre de personnels communaux. En effet, certaines communes transféraient des
compétences en conservant leur personnel, et inversement, les EPCI recrutaient à l’extérieur des
communes membres, les agents nécessaires à l’accomplissement de leur mission. Une étude publiée
en 2001 par la direction générale des collectivités locales révélait ainsi qu'entre 1984 et 1998, les
effectifs des établissements intercommunaux avaient augmenté de 38,4 %. Par ailleurs, le système a
entraîné une importante disparité dans le statut des agents des EPCI, leurs conditions d’exercice et
leurs rémunérations.
Le processus initial de transfert des personnels ainsi décrit aurait pu être qualifié d'idéal664, il
s’est en réalité révélé largement insatisfaisant, en l’absence d’un consensus entre les différents
acteurs (EPCI, communes et agents concernés). La difficulté à parvenir à ce consensus, souvent
rencontrée par les responsables politiques et administratifs, a conduit le législateur à adopter un
dispositif à la fois plus simple et plus autoritaire.
WV +:*437>:;;:?*<39@;658?* 9@4?* ;:* ?:4?* 9074:* ?6<=;6[6A@5634* 97* 5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*:Z:E_@45* ;06458\E@;658*9:*;:7E?*[34A5634?*9@4?*;:*?:E>6A:*5E@4?[8E8*
La loi du 27 février 2002, relative à la « démocratie de proximité » a, au détour d’un simple
article – l’article 46 issu d’un amendement déposé par le sénateur Serge Lagauche – apporté de
sensibles modifications aux règles de transfert des personnels dans le cadre de l’intercommunalité.
Elaboré dans une perspective de « gestion unifiée » des personnels, le dispositif mis en place par le
législateur en 2002 distinguait deux catégories de personnels : ceux exerçant la totalité de leurs
fonctions dans un service ou une partie de service transférés dans un établissement public de
coopération intercommunale, et ceux n’exerçant que pour partie seulement leurs fonctions dans un
service ou une partie de service transférés dans un EPCI.
663 D. JEAN-PIERRE, « Intercommunalité et fonction publique territoriale dans la loi du 27 février 2002 », JCP A 2002, n°1093. 664 A. AMAR, « L'impact de l’intercommunalité sur la gestion des agents transférés des administrations communales », JCP A 2004, n° 1727.
209
C’est incontestablement la première de cette catégorie qui a vu son régime juridique évoluer.
En effet, rompant avec le silence des précédentes législations intercommunales, la loi du 27 février
2002 a précisé que « les fonctionnaires territoriaux et agents territoriaux non titulaires qui
remplissent en totalité leurs fonctions dans un service ou une partie de service transféré en
application de l'alinéa précédent sont transférés dans l'établissement public de coopération
intercommunale », conférant par la même un caractère automatique et obligatoire au transfert des
personnels exerçant en intégralité leurs fonctions dans le service ou la partie de service transférée.
La simplification du passage de personnels de droit public au service d’un établissement
public de coopération intercommunale opérée par la réforme de 2002 s’est traduite en pratique par
des allégements de procédure significatifs : d’une part, l’absence d’obligation de recueillir l’accord
de l’agent à son transfert et, d’autre part, l’absence d’obligation de formalisation du changement
d’employeur public par un quelconque acte juridique. Le formalisme encadrant le transfert de
personnels qui exercent la totalité de leurs fonctions au sein du service concerné par le transfert de
compétences se limitant à une simple décision conjointe de la Commune et de l’EPCI requise pour
entériner le transfert, prise après avis du comité technique compétent pour la commune et, s’il existe,
du comité technique compétent pour l’établissement public.
La circonstance que l’accord de l’agent ne soit plus nécessaire est certainement la modification
apportée par la loi du 27 février 2002 qui a suscité le plus d’interrogations, et forcément de
réticences, de la part des fonctionnaires et agents publics territoriaux665. Il faut dire qu’elle dérogeait
sensiblement aux mécanismes classiques de la fonction publique territoriale, où l’accord du
fonctionnaire est la plupart du temps requis. En l’absence de la mention expresse selon lequel le
transfert s’effectuerait « de plein droit » dans le dispositif législatif, la question tenant à la nécessité
de l’accord de l’agent a mérité des éclaircissements666. En effet, si le transfert de personnels induit
par le transfert de compétences s’analysait en une mutation des agents, alors les règles de la fonction
publique commandaient d’obtenir l'accord de l'agent en vue de son transfert effectif vers le nouvel
établissement public de coopération intercommunale. A l’inverse, si l’on considérait le transfert de
personnel et le changement d’employeur comme intrinsèquement liés au transfert de compétences,
alors le passage des agents au service de l’EPCI n’impliquait nullement leur accord au transfert.
L’enjeu de la nécessité du consentement de l’agent à son transfert, au-delà de la formalité
supplémentaire qui en résulte, est essentiel pour l’employeur public initial de l’agent : selon que
l’accord est nécessaire ou pas, celui-ci aura ainsi l’obligation de reclasser dans ses services l’agent
ayant manifesté son refus au transfert. Par une réponse ministérielle en date du 16 mai 2006, le
ministre délégué aux collectivités territoriales a précisé qu’une « fusion [d’établissements publics de
coopération intercommunale] ne nécessite pas d'acte juridique spécifique opérant le changement
665 Rép. min. n° 84155 (J.O.A.N. du 16 mai 2006, p. 829, à la demande du syndicat CGT des fonctionnaires territoriaux cadres et employés de la ville et du CCAS de Sète). 666 Rép. min. n°15093 (J.O.S. du 15 mars 2007, p. 595).
210
d'employeurs pour les agents des établissements publics de coopération intercommunale appelés à
fusionner. L'acte procédant à la fusion entraîne simultanément, s'agissant de l'autorité d'emploi, la
substitution du nouvel établissement public de coopération intercommunale à ceux qui préexistaient.
Une telle fusion n'emporte donc pas la nécessité de recueillir l'accord de chacun des agents
concernés667 ». Il sera toutefois permis de relever que si le transfert de personnel lié à la création ou
la fusion d’un établissement public de coopération intercommunale ne s’analyse pas stricto sensu en
une mutation d’office de l’agent public, il peut cependant engendrer des effets similaires, et conduire
l’agent à changer de lieu de résidence et voir sa situation modifiée en vue d’une adaptation au nouvel
établissement d’accueil. La question de la nécessité d’une consultation préalable de la Commission
administrative paritaire se pose dès lors avec acuité dans le cadre d’un transfert de personnels vers un
établissement public intercommunal.
∴
Certes, le processus de transfert de personnels à l’occasion de la création d’un établissement
public de coopération intercommunale a évolué dans le sens d’une simplification de ses modalités. Il
souffre néanmoins, selon nous, d’un manque patent d’homogénéité tant les interventions successives
du législateur ont multiplié les dérogations au transfert automatique des personnels, et atténué de ce
fait les principes de l’intercommunalité. L’impression d’un « mille-feuille » administratif, pour
reprendre consacrée dans le langage courant s’en trouve ainsi renforcée.
N*S*!4:*=E3A897E:*<7;56=;:*:4*A34?5@45:*8>3;75634**
L’article L. 5211-4-1 du code général des collectivités territoriales a connu pas moins de
quatre modifications en seulement huit ans. Une telle versatilité du législateur, qui nous semble peu
satisfaisante pour répondre à l’objectif assigné aux dispositions de l’article L. 5211-4-1 du CGCT
témoigne de la difficulté de définir un dispositif de transfert permettant de satisfaire l’ensemble des
collectivités concernées et d’envisager dans sa globalité la problématique du transfert des personnels
à l’échelon supra-communal. Après un retour en arrière regrettable à l’égard du principe de transfert
de plein droit des agents exerçant en totalité leurs fonctions au sein du service transféré (1), l’état du
droit semble aujourd’hui fixé depuis l’intervention de la loi du 16 décembre 2010 (2).
*
667 Rép. Min. n°84155 (J.O.A.N. du 16 mai 2006, p. 5159).
211
UV /@* ;36* 97* UX* @3k5* Wcc^*T* 74* E:537E* :4* @EE6aE:* E:\E:55@B;:* Y* ;08\@E9*97*=E64A6=:*9:*5E@4?[:E5*9:*=;:64*9E365*9:?*@\:45?*:Z:E_@45*:4*535@;658*;:7E?*[34A5634?*@7*?:64*97*?:E>6A:*5E@4?[8E8*
La loi du 13 août 2004 a introduit à l’article L. 5211-1-1 du code général des collectivités
territoriales un nouvel alinéa au deuxième paragraphe, selon lequel « par dérogation au I, les
services d'une commune membre peuvent être en tout ou partie mis à disposition d'un établissement
public de coopération intercommunale pour l'exercice de ses compétences, lorsque cette mise à
disposition présente un intérêt dans le cadre d'une bonne organisation des services ». De la même
manière que les services d’un EPCI pouvaient le cas échéant être en tout ou partie mis à disposition
d’une ou plusieurs communes membres, les services d’une commune peuvent donc se voir mis à
disposition d’un EPCI dont elle relève. Derrière l’apparence d’une simple réciproque entre
collectivités se cache en réalité un véritable bouleversement à la logique simplificatrice de la loi du
27 février 2002. En effet, en autorisant une telle dérogation au principe de transfert de droit des
personnels dans le cadre de l’intercommunalité, le législateur de 2004 a privé d’effet le caractère
obligatoire de ce transfert. Révélée à l’occasion d’une simple question ministérielle, cette atténuation
de l’automaticité du transfert ouvre la voie au transfert des personnels par convention entre la
collectivité d’origine et l’établissement public de coopération intercommunale, qu’il s’agisse
d’agents exerçant une partie seulement de leurs fonctions au sein de cet établissement, comme des
agents intégralement affectés à l’EPCI.
Au-delà de la coexistence, selon nous regrettable, de deux procédures différentes pour
organiser dans le cadre de l’intercommunalité le transfert des personnels de droit public exerçant
l’intégralité de leurs fonctions dans le service concerné, l’article L. 5211-4-1 du code général des
collectivités territoriales dans sa rédaction issue de la réforme de 2004 a introduit une nouvelle
incertitude. L’accord de l’agent est-il requis ? Le doute suscité par la disparition de l’expression de
« plein droit » dans le dispositif de 2004 doit très vite être écarté. « Bien que les conditions de
partage de services aient été assouplies par la loi du 13 août 2004, […] le transfert de compétence
entraîne de plein droit le transfert de service et traduit ainsi la déclinaison sur le plan de la
ressource humaine du principe d'exclusivité qui régit la coopération intercommunale668. Le transfert
de compétence dessaisit la commune de sa compétence et implique que celle-ci se départisse des
moyens humains nécessaires à l'exercice de cette compétence », comme le rappelait Charles-Éric
Lemaignen, Président de la communauté d'agglomération Orléans Val de Loire et membre du bureau
national de l'Assemblée des communautés de France en 2007 lors d’un colloque organisé
conjointement par l'Association des maires de France (AMF) et l'Assemblée des communautés de
France (AdCF) autour du thème de la mutualisation des services entre communes et communautés.
668 « La mutualisation des services entre communes et communautés », Cah. Droit. Interco. n° 1, Janvier 2007, entretien avec Charles-Éric LEMAIGNEN, Président de la communauté d'agglomération Orléans Val de Loire, membre du bureau national de l'Assemblée des communautés de France, chargé des questions financières et fiscales
212
WV /@*;36*97*Ub*98A:<BE:*WcUc*T*74:*5:45@56>:*B6:4>:47:*9:*?6<=;6[6A@5634*:5*?8A7E6?@5634*
Après avoir été modifié à quatre reprises en moins de huit ans, l’article L. 5211-4-1 dans sa
rédaction issu de l’article 65 de la loi du 16 décembre 2010669 dispose désormais que :
« I.- Le transfert de compétences d'une commune à un établissement public de coopération intercommunale entraîne le transfert du service ou de la partie de service chargé de sa mise en œuvre. Toutefois, dans le cadre d'une bonne organisation des services, une commune peut conserver tout ou partie du service concerné par le transfert de compétences, à raison du caractère partiel de ce dernier.
Les fonctionnaires territoriaux et agents territoriaux non titulaires qui remplissent en totalité leurs fonctions dans un service ou une partie de service transféré en application de l'alinéa précédent sont transférés dans l'établissement public de coopération intercommunale. Ils relèvent de cet établissement dans les conditions de statut et d'emploi qui sont les leurs.
Les modalités du transfert prévu aux alinéas précédents font l'objet d'une décision conjointe de la commune et de l'établissement public de coopération intercommunale, prise respectivement après avis du comité technique compétent pour la commune et, s'il existe, du comité technique compétent pour l'établissement public.
Le transfert peut être proposé aux fonctionnaires territoriaux et agents territoriaux non titulaires exerçant pour partie seulement dans un service ou une partie de service transféré. En cas de refus, ils sont de plein droit et sans limitation de durée mis à disposition, à titre individuel et pour la partie de leurs fonctions relevant du service ou de la partie de service transféré, du président de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale. Ils sont placés, pour l'exercice de cette partie de leurs fonctions, sous son autorité fonctionnelle. Les modalités de cette mise à disposition sont réglées par une convention conclue entre la commune et l'établissement public de coopération intercommunale.
Les agents transférés en vertu des alinéas précédents conservent, s'ils y ont intérêt, le bénéfice du régime indemnitaire qui leur était applicable ainsi que, à titre individuel, les avantages acquis en application du troisième alinéa de l'article 111 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.
Il en est de même lorsqu'à l'inverse, par suite de modifications des statuts de la communauté, des personnels de celle-ci sont transférés à des communes.
II.- Lorsqu'une commune a conservé tout ou partie de ses services dans les conditions prévues au premier alinéa du I, ces services sont en tout ou partie mis à disposition de l'établissement public de coopération intercommunale auquel la commune adhère pour l'exercice des compétences de celui-ci ».
Le cadre juridique des mises à disposition de services issu de la loi du 13 août 2004 est donc
revu afin de prévenir le risque contentieux lié aux impératifs du droit de la concurrence670 (a). La
nouvelle rédaction opère en outre une simplification selon nous bienvenue quant aux modalités de
transfert des agents exerçant en totalité leurs fonctions au sein du service transféré ainsi que des
agents exerçant pour partie seulement leurs fonctions au sein dudit service (b).
*
669 Loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales (J.O. du 17 décembre 2010, p. 22146), op. cit. 670 P. TERNEYRE, « Conventions pour la mutualisation de certains services et biens entre collectivités territoriales et leurs regroupements », BJCP 2011, n°74, p. 77.
213
@R !4*96?=3?656[*9:*?8A7E6?@5634*
Reprise partielle de l’ancien dispositif, la nouvelle rédaction marque néanmoins une
importante réécriture du régime de transfert des personnels dans le cadre de l’intercommunalité, aux
fins, selon les termes mêmes du projet de loi, « de sécuriser au regard du droit européen les
conventions par lesquelles les services d’une commune membre d’un EPCI peuvent être mis à
disposition de celui-ci ». En effet, l’article L. 5211-4-1 du CGCT dans sa rédaction issue de la loi du
13 août 2004, en ce qu’il offrait aux communes la possibilité pour des motifs organisationnels de
conserver à leur service une partie de leurs personnels et de les mette ensuite à disposition de l’EPCI
pour l’exercice de ses compétences et de déroger ainsi au principe de transfert de plein droit des
corrélatif au transfert de compétences d’une commune à un EPCI 671 qui n’était pas sans interroger
sur sa compatibilité au droit de la concurrence672. Par un avis motivé du 27 juin 2007673, la
Commission européenne avait d’ailleurs fait valoir qu’elle considérait que le mécanisme
conventionnel de « mutualisation des services » ou « services partagés » entre les structures
intercommunales et leurs membres « revient à attribuer de gré à gré un marché public aux services
communaux ou aux services de la collectivité territoriale sans respecter les procédures de passation
prévues par le droit communautaire des marchés publics ». Par un arrêt du 13 novembre 2008, la
cour de justice des communautés européennes avait toutefois affirmé le principe selon lequel la
participation d’une autorité publique à une entité intercommunale en vue de transférer à cette
dernière la gestion d’un service public peut se réaliser sans mise en concurrence, en raison d’une
présomption d’existence de la condition portant sur le contrôle analogue674.
La loi du 16 décembre 2010 modifie le code général des collectivités territoriales afin de
sécuriser le régime des mutualisations « ascendantes » au regard du droit communautaire, en
maintenant ces mutualisation hors du champ des exigences applicables en matière de mise en
concurrence des marchés publics sous réserve qu’elles répondent à plusieurs conditions. La
conservation par une commune de tout ou partie de ses services concernés par un transfert de
compétences doit satisfaire deux critères cumulatifs. D’une part, le transfert de compétences à
l’EPCI à fiscalité propre doit avoir été partiel. Une commune ne peut donc conserver tout ou partie
d’un service concerné par le transfert de l’intégralité d’une compétence communale à un EPCI à
fiscalité propre. D’autre part, la conservation du service par une commune doit présenter un intérêt
dans le cadre d’une bonne organisation des services.
La mise à disposition au bénéfice de l’EPCI doit, d’une part, concerner des services
communaux qui auraient dû faire l’objet d’un transfert, et, d’autre part, avoir pour objet l’exercice de 671http://manage.dgcl.interieur.gouv.fr/sections/catalogue_des_public/mutualisation_des_se/downloadFile/file/guide_rct_mutualisationcommunal.pdf?nocache=1311861407.96 672 L. RICHER, « Partage de service et prestations de services », CP-ACCP, décembre 2006, p. 26 ; C. RIBOT, « La mutualisation des compétences entre communes et communautés », RLCT 2008, p. 51. 673 Rép. min. n° 3682 (J.O.A.N. du 4 décembre 2007, p. 7700) 674 CJUE, Coditel Brabant SA, 13 novembre 2008, aff. C-324/07, BJCP n° 62, 2009, p. 62.
214
la compétence transférée à l’EPCI.
Dès lors qu’une commune a conservé tout ou partie d’un service concerné par un transfert de
compétences, elle a l’obligation, et non plus la faculté, de le mettre à disposition de l’EPCI pour
l’exercice par celui-ci de ses compétences. Au demeurant, une convention doit fixer, après avis des
comités techniques compétents, les modalités de la mise à disposition, ainsi que les conditions de
remboursement, lesquelles devront correspondre à celles qui seront déterminées par un décret. Un
délai d’un an à compter du 16 décembre 2010, date de la promulgation de la loi, est laissé aux
communes membres qui ont conservé tout ou partie d’un service concerné par un transfert de
compétences pour se mettre en conformité avec le nouveau régime de mise à disposition de service.
BR !4*96?=3?656[*9:*?6<=;6[6A@5634*
La portée simplificatrice de l’article 65 de la loi du 16 décembre 2010 modifiant les
dispositions de l’article L. 5211-4-1 du code général des collectivités territoriales peut ainsi être
résumée.
Elle conserve en premier lieu le principe du transfert du service ou partie de service de la
commune chargée de la mise en œuvre de la compétence transférée, en l’assortissant toutefois d’une
nouvelle exception, en vertu de laquelle, « dans le cadre d'une bonne organisation des services, une
commune peut conserver tout out partie du service concerné par le transfert de compétences, à
raison du caractère partiel de ce dernier » afin d’encadrer ainsi plus strictement l'hypothèse de mise
à disposition que l'ancien alinéa 2 du II du même article autorisait675. La situation juridique des
fonctionnaires territoriaux et agents territoriaux non titulaires remplissant en totalité leurs fonctions
dans un service ou partie de service transféré est ainsi conservée, l’article L. 5211-4-1 précisant
qu’« ils relèvent du groupement de communes dans les conditions de statut et d'emploi qui sont les
leurs ».
Elle maintient en outre la solution qui présidait depuis l’intervention de la loi du 2007676 aux
transferts des fonctionnaires territoriaux et agents territoriaux non titulaires exerçant pour partie
seulement dans un service ou une partie de service transféré tout en la clarifiant. Le nouveau 4°
alinéa du I de l’article L. 5211-4-1 du CGCT précise ainsi désormais que le transfert est « proposé »
et qu’ « en cas de refus, ils sont de plein droit et sans limitation de durée mis à disposition, à titre
individuel et pour la partie de leurs fonctions relevant du service ou de la partie de service transféré,
du président » du groupement de communes.
675 Il ne s'agit plus de n'importe quel service de la commune qui peut être mis à disposition. 676 Comme le souligne fort justement Christian DEBOUY, l'ancien dernier alinéa de l'article L. 5211-4-1 créé en 2007 avait établi une mise à disposition de plein droit afin de vaincre les résistances des agents. Voit en ce sens C. DEBOUY, « COMMUNAUTÉ DE COMMUNES. – Moyens (Mise à jour) », J.-Cl. Coll. Terr., Fasc. n°256, n°35 à 44.
215
En outre, elle marque une profonde rénovation des conditions financières du remboursement
de ces mises à disposition. D’une part, ces flux financiers entre communes et communauté seront
désormais encadrés par décret et, d’autre part, il sera possible, en cas de gestion unifiée des services,
de les imputer directement sur les attributions de compensation. Ces dispositions ont vocation à
renforcer le caractère organique de ces formes d’organisation de services, en les protégeant d’une
éventuelle requalification au regard du droit de la commande publique.
∴
Erigé en corollaire du transfert de compétences à l’échelon intercommunal, le principe de
transfert des personnels dans le cadre de la coopération intercommunale souffre d’un cadre juridique
dispersé, sous l’effet des multiples amendements législatifs intervenus en moins d’une décennie. A
l’inverse, les mécanismes instaurés par le législateur dans le cadre des derniers transferts de
compétence de l’Etat vers les collectivités territoriales se caractérisent par leur automaticité
constante qui participe de leur effectivité. Le choix d’une procédure en deux temps, permettant
d’assurer la transition entre des fonctions publiques différentes est encore un gage de réussite. *
,@E@\E@=G:* WR* * !4* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =7B;6A* e*Y* 937B;:*985:45:*f* bll* *:4*A@?*9:*5E@4?[:E5*9:* ;0@A56>658*9:* ;0%5@5*>:E?*74:*A3;;:A56>658*5:EE653E6@;:*9@4?*;:*A@9E:*9:*;@*;36*97*UX*@3k5*Wcc^
Le transfert de compétences de l’Etat aux collectivités territoriales n’a cessé depuis son
avènement en 1982. Il se poursuit, lentement mais surement, à des degrés et des intensités diverses
selon les législatures, ne manquant pas parfois de susciter de vives critiques de la part des
collectivités territoriales elles-mêmes, fustigeant le « désengagement » de l’Etat. Ce débat politique
se nourrit principalement du manque de moyens, réel ou supposé, associés à cette passation de
pouvoirs des institutions centrales aux institutions locales. L'exercice par les collectivités locales des
compétences transférées pose en effet la question préalable des moyens qui leur sont alloués,
notamment celle du transfert de personnels et de services. Etape fondamentale de par l’ampleur des
compétences transférées, la loi du 13 août 2004678 relative aux libertés et responsabilités locales
illustre une nouvelle fois cette problématique.
Considérée comme l’ « Acte II de la Décentralisation », elle procède au transfert d’une
multitude de compétences de l’Etat vers les collectivités locales679 résultant de la réforme
constitutionnelle relative à l’organisation décentralisée de la République adoptée par le Parlement le
677 J.-F. BRISSON, « Les transferts de compétences de l'État aux collectivités locales », Dr. adm. n° 4, Avril 2008, ét 8. 678 Loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (J.O. du 17 août 2004, p.14545). 679 Régions, départements et groupements de communes.
216
17 mars 2003680. La diversité des compétences transférées681 n’a pas néanmoins suscité le même
enthousiasme de la part de la doctrine. Lors de l’adoption de la loi682 en effet, l’attention des
commentateurs s’est principalement683 focalisée684 sur le transfert aux départements685 et aux
régions686 des missions portant sur « l’accueil, la restauration, l’hébergement ainsi que l’entretien
général et technique, […] dans les collèges », et sur le transfert qui en a résulté des techniciens et
ouvriers de service (TOS) affectés à l’exécution de ces missions. Cet intérêt privilégié pour cet
aspect de la loi de 2004, qui trouve probablement sa justification dans l’ampleur des effectifs
concernés, estimés à près de 100 000 agents687, ne doit pas pour autant occulter le caractère
générique du dispositif de transfert des personnels instauré par la loi du 13 août 2004. Le législateur
consacre en effet un titre entier, en l’occurrence le titre V688, à la définition des modalités
de « transfert de services et aux garanties individuelles des agents », qui a vocation à s’appliquer à
l’ensemble des compétences transférées par la loi du 13 août 2004689, ainsi qu’à un certain nombre de
compétences transférées dans le cadre d’autres dispositifs législatifs expressément énumérés690. Et si
680 Loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République, (J.O. du 29 mars 2003, p. 5568). 681 Les principales compétences transférées concernent : les aides économiques individuelles aux entreprises, la gestion et le pilotage du RMI, ainsi que la gestion de plusieurs fonds sociaux comme le fonds de solidarité logement (FSL), l’essentiel du réseau routier national transféré aux départements, l’Etat ne conservant que la responsabilité des grands itinéraires nationaux, les ports et aéroports transférés aux collectivités locales, à l’exception des plus grands. En Ile-de-France, la région devient majoritaire dans le syndicat des transports de l’Ile-de-France, le logement social pour l’essentiel dévolu à la compétence des départements, les programmes régionaux de santé publique établis par les régions en complément des plans de l’Etat, la gestion des personnels techniques, ouvriers et de service de l’éducation nationale, la gestion du patrimoine culturel. 682 Le transfert des parcs de l’équipement aux départements annoncé par la loi du 13 août 2004 a fait l’objet de commentaires principalement à l’issue de l’adoption de la loi du 26 octobre 2009 qui a effectivement procédé au transfert. Voir sur ce sujet : D. JEAN-PIERRE, « Le transfert de personnels des parcs de l’équipement aux départements », JCP A 2009, n°2296 ; M.-C. de MONTECLER, « Adoption de la loi sur les parcs de l'équipement », AJDA 2009 p. 1864 ; J. COURTIAL, « Les parcs de l’équipement : de curieux services de l’Etat confrontés à la décentralisation », JCP A 2006, n°1265. 683 Le transfert de la grande majorité des aérodromes civils aux collectivités territoriales par l’article 28 a également fait l’objet de développements, mais à un degré bien moindre. Voir par exemple : D. BONNET, « La décentralisation des aérodromes et le nouveau paysage aéroportuaire français », Revue droit des transports 2009, n°1, ét. 2 ; R. REZENTHEL, « La décentralisation et les concessions aéroportuaires », RFDA 2009, p. 1188. 684 Voir par ex. : D. JEAN-PIERRE, « Le transfert des TOS aux départements et régions », JCP A 2006, n°1043 ; R. ALLEMAND et P. TIFINE, « Le transfert aux collectivités territoriales des personnels techniques et ouvriers de service de l’éducation nationale : l’analyse des questions statutaires », AJDA 2006, p. 1260. 685 Article 82-I de la loi n°2004-809 du 13 août 2004, op. cit. 686 Ibid, article 82-III. 687 Didier JEAN-PIERRE fait état de près de 100 000 agents : D. JEAN-PIERRE, « Le transfert des TOS aux départements et régions », JCP A 2006, n°1043, op.cit. La Cour des Comptes rapporte quant à elle qu’à l’issue du processus d’évaluation des effectifs, le nombre « des emplois TOS à transférer aux collectivités territoriales a été arrêté à 93 848 emplois budgétaires, exprimés en équivalent temps plein, dont 89 627 emplois de TOS titulaires, 3 468 emplois de TOS non titulaires et 753 emplois administratifs au titre d’emplois supports : Cour des comptes, La conduite de la décentralisation par l’Etat, Doc. fr., 2009. 688 Ibid., articles 104 à 117. 689 Ibid., article 104-I-1. 690 Ibid., article-II-2 de la loi précitée du 13 août 2004 : « […] services ou parties de services de l’Etat mis à disposition des collectivités territoriales pour l’exercice des compétences transférées dans les domaines des ports, des voies d’eau et des routes départementales en application de la loi n°83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’Etat, de la loi n°83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi n°83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’Etat et de la loi n°92-1255 du 2 décembre 1992 relative à la mise à disposition des départements des services déconcentrés du ministère de l’équipement et à la prise en charge des dépenses de ces services, ainsi qu’aux services ou parties de services mis à disposition de la collectivité territoriale de Corse dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article L. 4422-43 du
217
des différences sont opérées, celles-ci ne reposent aucunement sur la nature de la compétence
transférée, mais au contraire sur la nature du transfert lui-même, la loi de 2004 envisageant dans
certaines hypothèses une simple expérimentation ou délégation de compétence.
Ces précisions apportées, il convient d’appréhender plus avant la spécificité du dispositif de
2004. Allant très au-delà du mécanisme habituel de la mise à disposition, le dispositif de transfert des
personnels instauré par le législateur se démarque en effet des dispositifs antérieurs de par sa
progressivité. Le calendrier de mise en œuvre des transferts de personnel s’inscrit dans une période
relativement longue de trois ans pour les TOS, en vue d’assurer une véritable concertation entre
l’Etat et les collectivités territoriales (A). Cette recherche de consensus justifie que le transfert
s’effectue en deux temps, complémentaires (B).
-*S*!4*=E3A:??7?*9:*5E@4?[:E5*A34A:E58*
Le Premier ministre avait annoncé, en février 2003, le transfert dans la fonction publique
territoriale de 150 000 fonctionnaires d'État appartenant au personnel non enseignant de l'Éducation
nationale accréditant, de façon maladroite691, l'idée que la décentralisation était un moyen pour l'État
de réduire ses dépenses. La réforme engagée par le gouvernement s’amorçait dans un contexte
quelque peu conflictuel. Cherchant à rétablir la sérénité et anticiper les interrogations, mais surtout
les critiques, qui n’allaient pas manquer de se faire jour, le gouvernement avait alors pris soin
d’associer les collectivités à la mise en œuvre de l’acte II de la décentralisation (1). Les oppositions
au processus de transferts des personnels liés aux transferts de compétences furent néanmoins
nombreuses, confrontant l’Etat à de nombreux recours contentieux (2).
UV /0@??3A6@5634*9:?*A3;;:A56>658?*@7*=E3A:??7?*9:*5E@4?[:E5*
La démarche de concertation engagée, inspirée des méthodes d’élaboration des normes en
droit social692, tentait de pallier la faible place accordée traditionnellement au dialogue. Un telle
lacune, loin d’être propre aux lois de répartition des compétences entre l’Etat et les collectivités
locales693, s’inscrivait dans une double perspective : des discussions en amont sur le projet de loi de
décentralisation avec l’ensemble des collectivités territoriales représentées par leurs organismes
code général des collectivités territoriales pour l’exercice des missions d’exploitation et de gestion des routes nationales »,. 691 E. AUBIN, « Caractères généraux et tendances actuelles de la fonction publique territoriale », Rép. Dalloz, 2006, n°80. 692 Le mot « concertation » figure à maintes reprises dans le code du travail. L’article. L. 4611-1 évoque ainsi « la concertation entre CHSCT assurée par un comité interentreprises de santé et de sécurité au travail » ; l’article L. 5313-2 porte sur les missions locales pour l'insertion professionnelle et sociale des jeunes, qui « favorisent la concertation entre les différents partenaires en vue de renforcer ou compléter les actions conduites par ceux-ci [...] » ; l’article. L. 1233-84 relatif au licenciement économique avec intervention de l'État, « en concertation avec les organismes mentionnés à l'article L. 311-1 et, le cas échéant, avec la ou les maisons de l'emploi ». 693 J. BARTHELEMY et G. CETTE, « Le rapport sur la « Refondation du droit social » vu par ses auteurs, Libre propos », JCP S 2010, act. 204, soulignant que « la France se singularise par un droit social d'essence principalement réglementaire et peu conventionnelle ».
218
syndicaux, un dialogue en aval en vue de mettre fin aux éventuelles dissensions nées de l’évaluation
des effectifs à transférer.
Le premier temps de la discussion porta donc sur l’évaluation des effectifs à transférer. Les
négociations, âpres, se déroulèrent sur la base de rapports établis par les services du ministère de
l’éducation nationale, et devaient aboutir à la signature des conventions de mise à disposition.
Toutefois, du fait notamment de l’absence d’un état des lieux précis et fiable des effectifs en place
entre 2002 et 2004, du retard pris dans les décisions réglementaires et de difficultés à répartir les
responsabilités en matière d’hygiène et de sécurité, de nombreuses collectivités refusèrent de les
signer694. En avril 2005, le Gouvernement fut ainsi confronté à la fronde695 des présidents de région
et de département socialistes, rejoints par quatre départements de droite, ces derniers ayant refusé de
signer les conventions provisoires de mise à disposition. Dans un communiqué de presse,
l'Association des régions de France avait signifié que « les présidents de région, dans leur immense
majorité, refusent d'engager leur signature sur des conventions qui n'offrent aucune certitude, aucune
garantie et aucune donnée fiable sur les transferts des personnels ». La Cour des Comptes relève
ainsi qu’à la date limite fixée par la loi, seulement 44 conventions avaient été signées dans les
départements et une en région, pour un total de 122 attendues696. L’échec de la voie conventionnelle
conduisit donc, conformément aux dispositions législatives, à l’adoption de plusieurs arrêtés
interministériels.
Les débats se poursuivirent donc dans un second temps devant la commission nationale de
conciliation, chargée d’émettre un avis sur la liste des services et parties de services mis à disposition
établie par l’arrêté. En outre, l'article 113 de la loi de 2004 avait procédé à la création d'une
commission commune au Conseil supérieur de la fonction publique de l'État et au Conseil supérieur
de la fonction publique territoriale. Initialement instituée en vue d’examiner à titre purement
consultatif le décret approuvant la convention type, cette institution appelée « commission commune
de suivi des transferts de personnels entre l'État et les collectivités territoriales » vit son champ de
compétences étendu à toutes les questions relatives aux conditions du transfert des personnels697 . Par
la suite, ont été mises en place au niveau local des commissions tripartites associant des
représentants des services déconcentrés des administrations de l'État concernées ainsi que des
représentants du département ou de la région et, enfin, des représentants du personnel désignés par le
préfet sur proposition des organisations syndicales698. La commission consultative d’évaluation des
charges s’est réunie à dix reprises au cours de l’année 2005 afin d’examiner l’ensemble des
demandes des collectivités bénéficiaires des transferts de compétence, y compris celles qui
694 Le Monde, 16 avril 2005. 695 D. JEAN-PIERRE, « Le transfert des TOS aux départements et régions », JCP A 2006, n°1043, op.cit. 696 C. Comptes, La conduite de la décentralisation par l’Etat, Doc. fr. 2009, p. 99. 697 Décret n° 2004-1349 du 9 décembre 2004 portant création de la commission commune de suivi des transferts de personnels entre l'Etat et les collectivités territoriales (J.O. du 10 décembre 2004, p. 20902). 698 Décret n° 2005-529 du 24 mai 2005 portant création des commissions tripartites locales (J.O. du 26 Mai 2005).
219
excédaient le strict champ d’application de la loi concernant notamment la référence à la moyenne
triennale ou encore la prise en compte de dépenses hors périmètre du droit à compensation.
En instituant une pluralité d’institutions de concertation, le gouvernement affichait son
ambition de mener rapidement et dans un climat apaisé une réforme d’ampleur dans l’organisation
administrative française. Une partie de la doctrine699 a ainsi pu louer la rapidité avec laquelle les
transferts de personnels et les questions statutaires ont été réglés, illustration selon ces auteurs d'un
changement positif d'image de la fonction publique territoriale chez les fonctionnaires de l'Etat,
malgré les réticences qui s'étaient manifestées à l'annonce de la réforme700. Force est de constater
pourtant qu’en dépit des efforts consentis par le gouvernement pour un transfert, la procédure ne fut
pas exempte d’oppositions. Une enquête réalisée par l’observatoire de la décentralisation du Sénat
auprès des régions et des départements révélait ainsi que près de 57% des collectivités jugeaient
insatisfaisant le nombre de TOS transférés701. Il n’est dès lors pas étonnant que plusieurs actes
réglementaires pris pour la mise en œuvre du transfert de compétences aient fait l’objet de recours
devant la juridiction administrative.
WV /@* A345:?5@5634* 9:?* A3;;:A56>658?* @7* =E3A:??7?* 9:* 5E@4?[:E5* 9:?*=:E?344:;?**
En dépit des efforts de concertation, l’Etat dut faire face à de nombreux recours contentieux
dans le cadre du processus de décentralisation de 2004. Une contestation des collectivités
territoriales au plan contentieux était sans doute inévitable, eu égard à leur nombre, et aussi leurs
divergences politiques, propres à toute démocratie, sur l’opportunité de la décentralisation et de ses
modalités. Deux mesures réglementaires prises dans le cadre de la mise en œuvre de la loi du 13 août
2004 furent ainsi attaquées par plusieurs collectivités territoriales : en premier lieu des arrêtés
interministériels pris pour l’application des dispositions du IV de l’article 104 de la loi du 13 août
2004 (a) ; en second lieu, le décret n°2005-1632 du 26 décembre 2005 fixant les modalités des
transferts définitifs aux départements et régions des personnels techniciens, ouvriers de service, pris
pour l’application de la loi du 13 août 2004702 (b).
*
699 G. MARCOU, « Le bilan en demi-teinte de l'Acte II : Décentraliser plus ou décentraliser mieux ? », RFDA 2008 p. 295. 700 R. ALLEMAND, Y. GRY (dir.), Le transfert des personnels TOS de l'Education nationale, L'Harmattan, coll. « GRALE », 2007 701 C. Comptes, La conduite de la décentralisation par l’Etat, Doc. fr. octobre 2009, p.100, op.cit. 702 Décret n°2005-1632 du 26 décembre 2005 fixant les modalités des transferts définitifs aux départements et régions des personnels techniciens, ouvriers de service, pris pour l’application de la loi du 13 août 2004 (J.O. du 27 décembre 2005, p. 19982).
220
@R /@* A345:?5@5634* 90@EE]58?* 645:E<646?58E6:;?* =E6?* :4* @==;6A@5634* 9:?*96?=3?65634?*97*#$*9:*;0@E56A;:*Uc^*9:*;@*;36*97*UX*@3k5*Wcc^**
Echec de la concertation engagée. A défaut de convention passée entre l’Etat et les
collectivités territoriales dans le délai de trois mois à compter de la publication du décret approuvant
une convention type, le législateur avait prévu à l’article 104-IV l’intervention d’un arrêté conjoint
du ministre chargé des collectivités territoriales et du ministre intéressé après avis motivé d’une
commission nationale de conciliation pour élaborer la liste des services ou parties de service mis à
disposition. Le recours à la voie réglementaire703 marquant l’échec des discussions entre l’Etat et les
collectivités territoriales, il n’est dès lors pas étonnant que plusieurs collectivités aient porté devant
les tribunaux administratifs la question de la légalité de l’arrêté interministériel du 18 mai 2005 pris
en application de l’article 104-IV de la loi du 13 août 2004. Par sept arrêts du 17 octobre 2007704, le
Conseil d’Etat a ainsi eu à connaître en premier et dernier ressort de plusieurs requêtes à l’encontre
de l’arrêté interministériel du 18 mai 2005 et de son annexe. Le nombre de recours pour excès de
pouvoir déposés par les collectivités territoriales apparaît finalement peu important au regard du
nombre d’arrêtés interministériels, en l’occurrence 79, soumis à la Commission nationale de
conciliation.
Sans surprise, l’estimation des effectifs fit l’objet de plusieurs moyens dirigés contre la
légalité de l’arrêté interministériel, ou plus précisément de son annexe. L’ensemble des moyens
dirigés contre cet aspect de l’arrêté furent néanmoins écartés par le juge administratif. Exerçant un
contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation sur le décompte des effectifs mis à disposition, le
Conseil d’Etat écarta en l’espèce une telle qualification, jugeant inopérant le moyen tiré de ce que
l’arrêté n’assure pas l’entière compensation des charges transférées705. Sur le fond, les départements
requérants furent déboutés de leurs demandes, à l’exception notable du Département des Landes qui
obtint partiellement satisfaction sur la légalité interne de l’arrêté, le Conseil d’Etat ayant considéré
« qu'en se fondant sur la circonstance que certains agents contractuels de droit public n'étaient pas
rémunérés sur des emplois budgétaires mais sur des crédits de fonctionnement pour ne pas les
inclure dans le constat des effectifs relevant des services ou parties de services mis à disposition du
département des Landes pour l'exercice des compétences transférées, alors que ces agents
contribuaient à l'exercice de ces compétences, les auteurs de l'arrêté attaqué ont commis une erreur
de droit ».
703 CE Sect., 16 décembre 1966, Syndicat national des fonctionnaires et agents préfectures, Rec. p. 662 ; CE Ass., 20 juin 1975, Société Acli International Commodity Services Ltd, Rec. p. 373 ; CE Sect., 18 mars 1977, CCI La Rochelle, Rec. p. 153, concl. MASSOT. 704 CE, 17 octobre 2007, Département des Landes, req. n° 290009; CE, 17 octobre 2007, Département de la Haute-Garonne, req. n° 290258 ; CE, 17 octobre 2007, Département de la Seine-et-Marne, req. n° 294271; CE, 17 octobre 2007, Département des Bouches-du-Rhône, req. n° 294447 ; CE, 17 octobre 2007, Département des Alpes de Haute Provence, req. n° 290161 ; CE, 17 octobre 2007Département de la Dordogne, req. n° 294178 ; CE, 17 octobre 2007, Département du Cher, req. n° 294282. 705 « Le contentieux de la mise à disposition de services dans le cadre de la décentralisation », veille sur l’arrêt CE, 17 mars 2007, n°294447, Département des Bouches du Rhône, op.cit, AJDA 2007, p. 2006.
221
En revanche, le Conseil d’Etat accueillit favorablement plusieurs moyens de légalité externe
soulevés par les départements requérants.
Délégation de signature sans fondement. Citons en premier lieu l’annulation par le Conseil
d’Etat des dispositions du troisième alinéa de l'article 3 de l'arrêté qui donnait au président du conseil
général la faculté de déléguer sa signature aux chefs des services de l'État mis à la disposition du
département pour l'exercice des compétences transférées en vertu de l'article 82 de la même loi. Le
juge administratif considéra cette faculté illégale au motif qu’elle ne pouvait légalement, eu égard à
sa généralité, trouver son fondement ni à l'article L. 3221-1 ni à l'article L. 3141-1 du code général
des collectivités territoriales706.
Illégalité d’un avis global, absence de décret d’application et irrégularité de la constitution
nationale de conciliation. Le second moyen retenu par le Conseil d’Etat appelle davantage de
commentaires dans la mesure où il aboutit à l’annulation de l’arrêté en raison de l’irrégularité de la
constitution de la Commission nationale de conciliation, institution clé de la procédure de transfert,
censée incarner la volonté de médiation de l’Etat dans la conduite de l’acte II de la décentralisation.
Le Conseil d’Etat constate à cet égard que « la commission s'est bornée, au terme de sa réunion au
cours de laquelle lui ont été soumis soixante-dix-neuf projets d'arrêtés de mise à disposition de
services du ministère de l'Éducation dans autant de départements ou régions, à émettre sur
l'ensemble de ces projets un avis global. Elle n'a pas examiné la situation propre au département
intéressé ni cherché à rapprocher les points de vue de l'État et de ce département. En outre, l'avis
qu'elle a émis ne peut, en raison de sa motivation générale qui ne s'attache aucunement à la
situation du département, être regardé comme l'avis motivé exigé par la loi ». La censure prononcée
par la haute juridiction à l’égard de la Commission de conciliation présente une haute valeur
symbolique. D’autant qu’elle s’accompagne d’une annulation sur la constitution même de la
Commission. Le juge administratif considère en effet qu’il appartenait au pouvoir réglementaire,
compte tenu de l'imprécision des dispositions du IV de l'article 104 de la loi du 13 août 2004, de
définir la composition précise de la commission nationale de conciliation et les conditions de
désignation de ses membres, ces dispositions n'habilitant pas le ministre des Collectivités territoriales
à fixer ces règles. Faute d'un décret d'application de la loi, la commission n'a pas été régulièrement
constituée et l'arrêté est intervenu au terme d'une procédure irrégulière.
*
706 CE, 17 octobre 2007, Département des Landes, op. cit ; CE, 21 mars 2007, Région des Pays de Loire, req. n°278327, JCP A 2007, act. 357 ; CE, 11 mars 1998, Préfecture des Pyrénées-Orientales, Rec. p. 73 ; JCP G 1998, 2582, obs. M.-C. ROUAULT.
222
BR /@* A345:?5@5634*97*98AE:5*97*Wb*98A:<BE:*Wccm* [6Z@45* ;:?*<39@;658?*97*5E@4?[:E5*98[64656[*9:?*(1'*@7Z*98=@E5:<:45?*:5*E8\634?**
A l’instar des arrêts interministériels, le décret du 26 décembre 2005 qui fixe les modalités
des transferts définitifs des TOS en application du VII de l'article 104 de la loi du 13 août 2004707 ne
manqua pas d’être contesté devant les juridictions administratives au travers de quatre requêtes en
annulation708. Après avoir écarté plusieurs des moyens soulevés709, le Conseil d’Etat a finalement
annulé le décret attaqué en accueillant le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de
l’article 3 du décret. Aux termes de cet article, des commissions tripartites locales, instituées auprès
de chaque préfet de région et auprès de chaque préfet de département à compter de l'entrée en
vigueur des conventions constatant la liste des services ou parties de services mis à disposition des
collectivités territoriales ou des arrêtés interministériels710, devaient être associées aux travaux
préalables à l'élaboration du décret attaqué qui fixe, en application du VII de l'article 104 de la loi,
les modalités du transfert définitif des personnels TOS de l'Éducation nationale. Les requérants
avaient ainsi mis en lumière que ces commissions ne s'étaient pas réunies avant la signature du décret
attaqué et que plusieurs d'entre elles n'avaient d'ailleurs été constituées qu'après la publication dudit
décret711.
Le dispositif retenu par la Haute juridiction appelle deux remarques essentielles.
La première tient dans l’application au cas présent de la jurisprudence A.C. qui permet au
juge administratif de moduler dans le temps les effets des annulations contentieuses qu’il
prononce712. Tirant les conséquences de ce que « le décret attaqué et les arrêtés auxquels il renvoie
ont produit leurs effets ; que le droit d'option entre le statut de fonctionnaire territorial et le maintien
du statut de fonctionnaire d'État ouvert, pour les agents concernés, par les dispositions du I de
l'article 109 de la loi du 13 août 2004, ayant été exercé jusqu'au 31 décembre 2007, les décisions
individuelles d'intégration ou de détachement qui en résultent ont pris effet ou prendront effet au
plus tard le 1er janvier 2009, conformément aux dispositions de l'article 147 de la loi de finances
pour 2006 ; qu'en outre, les lois de finances pour 2007 et pour 2008 ont autorisé le versement aux
collectivités territoriales concernées des compensations financières auxquelles elles ont droit », le
707 Décret n° 2005-1631 fixant les modalités du transfert définitif aux départements et aux régions de services ou parties de services du ministère de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche (J.O. du 27 Décembre 2005, p. 19982). 708 Plus exactement, c’est vers les décisions implicites de refus du Ministre de l’éducation d’abroger le décret n°2005-1631 que les requêtes furent respectivement dirigées par Département de Seine-et-Marne, le Département du Val-de-Marne, le Département de Seine-Saint-Denis ainsi que l'Association des Régions de France. 709 Etaient ainsi invoqués un vice de procédure tiré de ce que le décret aurait été publié avant que le Parlement ait eu communication du rapport prévu au XIII de l'article 82 de la loi du 13 août 2004 ainsi qu’une incompétence négative en ce que le décret n’aurait comporté aucune disposition fixant les modalités de transfert des biens meubles et immeubles nécessaires à l'exercice des compétences transférées. 710 Décret n°2005-529 du 24 mai 2005 portant création des commissions tripartites locales (J.O. du 26 mai 2005). 711 F. SENERS, concl. sur CE, 16 mai 2008, n° 290416, 290723, 290766 et 294677, Département du Val-de-Marne et autres, JCP A 2008, n°2201. 712 CE Ass., 11 mai 2004, Rec. p. 197, concl. C. DEVYS ; JCP A 2004, n°1826, comm. J. BIGOT ; Dr. adm. 2004, comm. n°115, M. LOMBARD ; Dr. adm. 2007, étude 15, O. DUBOS et F. MELLERAY ; LONG M., WEIL P., BRAIBANT G., DELVOLVE P. et GENEVOIS B., Les Grands arrêts de la jurisprudence administrative, Dalloz, 18ème éd., 2011, n° 116.
223
Conseil d’Etat aboutit en toute logique à une annulation du décret pour l’avenir, en l’occurrence à
compter du 1er janvier 2009713.
La seconde remarque résulte de la lecture rigoureuse des dispositions formalistes du décret.
Reprenant le considérant de principe dégagé dans l’arrêt Territoire de la Nouvelle-Calédonie714 au
terme duquel « une autorité administrative est tenue de se conformer aux dispositions réglementaires
légalement édictées qui fixent les règles de forme et de procédure selon lesquelles elle doit exercer
ses compétences », le Conseil d’Etat procède à une juste application d’une jurisprudence établie715
selon laquelle le pouvoir réglementaire ne peut méconnaître, sous peine d’illégalité, une règle de
procédure fixée par un autre décret716. Il s’agit là d’un débat constant en doctrine, entre les
« formalistes » d’une part, et les « pragmatiques » d’autre part, qui vient de recevoir une nouvelle
illustration avec l’arrêt d’Assemblée Danthony du 23 décembre 2011717 par lequel le Conseil d’Etat a
précisé les règles de l'article 70 de la loi du 17 mai 2011718 en considérant « que ces dispositions
énoncent, s'agissant des irrégularités commises lors de la consultation d'un organisme, une règle qui
s'inspire du principe selon lequel, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et
conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement
d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à
entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible
d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés
713 Il convient de souligner les éléments chiffrés donnés par le Ministère de l’éducation lors de l’instruction du recours et rapportés par François Séners dans ses conclusions : « les services en cause, employant environ 85 000 fonctionnaires, ont été transférés aux collectivités territoriales en janvier 2006. Plus de 74 000 des fonctionnaires concernés ont déjà exercé leur droit d'option entre l'intégration dans la fonction publique territoriale et le maintien au sein de la fonction publique de l'État, mais beaucoup d'entre eux ne l'ont fait que récemment puisque le délai dont ils disposaient expirait le 31 décembre 2007. Il est à craindre que de nombreux actes individuels d'intégration n'aient pas encore été pris ou ne soient pas devenus définitifs et la situation des intéressés serait directement affectée par la disparition de la base légale du transfert. Dès lors que la loi fixe les règles relatives à l'évolution statutaire de ces agents par référence à l'entrée en vigueur du décret attaquée, son application serait paralysée par l'annulation du règlement, de sorte que la situation de très nombreux fonctionnaires serait en suspens pour une durée indéterminée. Pour les milliers d'agents qui n'ont pas exercé leur droit d'option au 31 décembre 2007, le dispositif législatif fixé par la loi du 30 décembre 2005 (L. n° 2005-1719 de finances pour 2006 : Journal Officiel 31 Décembre 2005) serait également bloqué ; il prévoit des détachements sans limitation de durée et un droit à compensation financière pour les collectivités ; les agents devraient rester en situation de mise à disposition, jusqu'à l'édiction de nouvelles règles, avec toutes les conséquences financières. L'annulation rétroactive aurait également pour conséquence de bloquer l'emploi d'une part importante des crédits inscrits au budget 2008 de l'État pour la compensation financière due aux collectivités : la loi de finances pour 2006 a lié le versement de cette compensation aux décisions de détachement ou d'intégration des agents, décisions qui sont subordonnées à la mise en oeuvre du décret attaqué. Les crédits inscrits à cet effet au budget 2008 sont supérieurs à 870 000 000 euros et le risque de blocage, pour les collectivités concernées, porte sur des sommes considérables ». 714 CE, 15 mai 2000, Territoire de la Nouvelle Calédonie, Rec., p. 170. 715 CE Ass., 19 mai 1983, Club sportif et familial Fève et a, Rec., p. 205. 716 Comme le rappelle le commissaire François Sénérs dans ses conclusions précitées, « la portée de la jurisprudence Club sportif et familial de la Fève va jusqu'à soumettre un décret en Conseil d'État à une règle de procédure fixée, comme en l'espèce, par un décret simple […] : CE Ass., 26 octobre 1990, Union sté assurances secteur privé, Rec., p. 29 ». 717 CE Ass., 23 décembre 2011, Danthony, req. n°355033, à paraître au Recueil ; Voir notamment : F. MELLERAY, « Précisions sur la neutralisation de certains vices de procédure », Dr. adm. 2012, comm. n°22 ; D. CONNIL, « Vice de procédure et annulation : l'office du juge administratif se précise », JCP G 2012, p. 907 ; X. DOMINO et A. BRETONNEAU, « Le vice : mode d’emploi », AJDA 2012, p. 195. 718 Article 70 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit (J.O. du 18 mai 2011, p. 8537) qui dispose que « lorsque l'autorité administrative, avant de prendre une décision, procède à la consultation d'un organisme, seules les irrégularités susceptibles d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision prise au vu de l'avis rendu peuvent, le cas échéant, être invoquées à l'encontre de la décision ».
224
d'une garantie ; que l'application de ce principe n'est pas exclue en cas d'omission d'une procédure
obligatoire, à condition qu'une telle omission n'ait pas pour effet d'affecter la compétence de l'auteur
de l'acte ».
Il nous semble que, dans le cadre du contentieux introduit à l’encontre du décret du 26 mai
2005, la décision rendue par le Conseil d’Etat dans le sens d’une annulation du décret à défaut de
réunion conforme de la commission tripartite locale pourtant expressément prévue par les textes ne
puisse qu’emporter l’adhésion au regard de la philosophie même de la procédure de transfert des
personnels TOS dans laquelle le texte attaqué s’insérait, basée sur une association des partenaires
pour mener à bien le transfert de compétences de l’Etat vers les collectivités territoriales. Elle nous
paraît au surplus parfaitement conforme au principe récemment dégagé par les juridictions
administratives quant à la portée du non-respect d’une procédure administrative préalable. En effet,
dès lors que le pouvoir réglementaire avait pris soin d’instaurer la consultation d’une commission
tripartite locale719 aux fins de maintenir une certaine concertation qui, dans un premier temps, avait
échoué, celui-ci ne pouvait alors s’en départir sans risquer d’entraîner la nullité de son dispositif. Le
vice tiré du non-respect de la consultation de la commission ne pouvait raisonnablement être placé
parmi ceux qui, au sens de la jurisprudence Danthony précitée, n’ont « pas pour effet d’affecter la
compétence de l’auteur ».
∴
Au-delà de la dimension de dialogue dans laquelle elle a cherché, avec plus ou moins de
succès, à se dérouler, la procédure de transfert des personnels de l’Etat vers les collectivités
territoriales dans le cadre de l’acte II de la décentralisation s’illustre par son caractère progressif. *
N*S*!4*=E3A:??7?*9:*5E@4?[:E5*=E3\E:??6[**
D'une grande complexité, le système mis en œuvre pour les agents techniciens ouvriers de
service de l’éducation nationale et des ouvriers des parcs et ateliers des DDE est à double détente : il
débute d’abord par une phase transitoire durant laquelle les agents sont mis à disposition (1), il se
poursuit ensuite par une phase définitive au cours de laquelle les agents exercent un droit d'option
entre la fonction publique d’état et la fonction publique territoriale (2).
*
719 Notons à cet égard que le décret n°2005-529 du 24 mai 2005 portant création des commissions tripartites locales est intervenu le même jour que le décret attaqué relatif aux modalités de transfert, de sorte que la possibilité pour le second de méconnaître le premier paraît difficilement justifiable.
225
UV /@*<6?:*Y*96?=3?65634*=E8@;@B;:*9:?*=:E?344:;?*
Le dispositif concernant le personnel instauré par la loi du 13 août 2004 diffère selon que la
compétence visée fait l’objet d’une simple expérimentation720 ou délégation ou que cette compétence
est véritablement transférée à une collectivité territoriale, en raison des finalités propres à chacune de
ces mesures. Il suppose pourtant la réalisation d’une première étape commune à l’ensemble de ces
hypothèses : la mise à disposition des services et personnels. A nouveau retenue car elle permet de
garantir l'automaticité du transfert tout en préservant la situation individuelle des agents721, la mise à
disposition telle que définie dans le cadre de la loi du 13 août 2004 déroge sensiblement à la loi
n°84-16 du 11 janvier 1984. De tels aménagements trouvent leur justification dans la finalité même
du recours préalable au mécanisme de mise à disposition, à savoir préparer le transfert définitif des
personnels.
@R !4:*<6?:* Y* 96?=3?65634* 98E3\@536E:* @7* 9E365* A3<<74* 9:* ;@* [34A5634*=7B;6C7:**
A l’image de la plupart des dispositifs de transfert élaborés spécifiquement par le législateur
à l’occasion d’un transfert de compétences ou d’une évolution d’activité publique, le dispositif de la
loi du 13 août 2004 confère à la mise à disposition un caractère profondément dérogatoire au cadre
juridique dans lequel s’inscrit normalement ce mécanisme de mobilité des agents publics en
application des différents statuts de la fonction publique.
La mise à disposition telle que définie par la loi du 13 août 2004 revêt en premier lieu un
caractère automatique. Elle s’effectue de « plein droit » selon les termes retenus par le législateur,
sans que l’administration d’origine n’ait à recueillir l’accord de l’intéressé pour y procéder. Une telle
dispense de consentement de la part des agents publics à leur transfert constitue sans nul doute pour
l’Etat un avantage précieux dans la conduite d’une réforme impliquant près d’une centaine de
milliers de fonctionnaires et d’agents publics. En termes de temps d’une part, puisqu’il s’agit d’une
formalité de moins à accomplir. En termes de contentieux d’autre part, les agents publics ne pouvant
s’opposer à leur transfert.
La deuxième dérogation porte quant à elle sur la collectivité publique d’accueil des agents
publics transférés. La mise à disposition prévue par l'article 105 de la loi du 13 août 2004 déroge à
l'article 41 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 dans sa rédaction antérieure à la loi du 2 février
720 En matière d’expérimentation, la loi du 13 août 2004 marque une avancée majeure dans la mise en œuvre du droit « de » ou « à » l'expérimentation, consacrée par la Constitution tant en ce qui concerne l'État (article 37 de la Constitution) que les collectivités territoriales (article 72-1 de la Constitution), en conférant de manière inédite aux collectivités territoriales les moyens humains pour mener à bien ce projet. 721 E. AUBIN, « Caractères généraux et tendances actuelles de la fonction publique territoriale », Rép. Dalloz, 2006, n°83.
226
2007722 au terme de laquelle un agent de l'Etat ne peut être mis à disposition qu'au profit d'une
administration d'Etat ou d'un établissement public de l'Etat. Or, dans le cas de la loi du 13 août 2004,
les agents concernés sont mis à disposition, à titre individuel, de l'exécutif de la collectivité
territoriale ou du groupement de collectivités et placés sous son autorité.
La dernière caractéristique de la mise à disposition instituée par la loi du 13 août 2004 est
sans nul doute celle qui interpelle le plus et, finalement, celle qui se comprend le mieux. Elle attrait à
l’absence de limite dans la durée de la mise à disposition. Contrainte majeure dans le cadre d’une
évolution d’activité, la durée « classique » de trois ans de la mise à disposition est en effet
certainement le paramètre qui motive dans la majeure partie des hypothèses l’intervention du
législateur en vue de son aménagement, soit qu’elle soit étendue723, soit qu’elle soit prolongée724. Or,
dans le cadre de la loi du 13 août 2004, aucune limite de temps ne vient enfermer la mise à
disposition des personnels. Cette exception, inédite, se justifie en réalité par la finalité même de la
mise à disposition dans le cadre de l’acte II de la décentralisation : donner du temps aux autorités
publiques pour mettre en œuvre le transfert de compétences et le transfert corrélatif de personnels,
sans qu’aucun délai ne vienne faire pression sur les collectivités et limiter dès lors l’intérêt de la
concertation mise en place.
BR !4:*<6?:*Y*96?=3?65634*?6<=;:<:45*5E@4?6536E:*
La mise à disposition instituée par la loi du 13 août 2004 ne constitue cependant qu’un
préalable indispensable à la conduite progressive du transfert des personnels, dont le succès est
conditionné par le temps mis à sa disposition. Indiquer qu’une réforme nécessite du temps peut a
priori relever d’un pléonasme. Il est évident que le temps, synonyme de réflexion et de mesure,
favorise la réussite d’un projet, quel qu’il soit, au-delà même de la sphère politique. Dans le cadre du
transfert de compétences opérées par la loi du 13 août 2004, la dimension temporelle revêtait
néanmoins une importance exacerbée par une pluralité de facteurs.
En premier lieu, en raison des modalités de mise en œuvre retenues par le législateur à la
demande du gouvernement, axées autour de la notion de concertation.
D’un point de vue technique, en second lieu, il est certain que définir des cadres d’emplois en
miroir aux corps de fonctionnaires qui existaient dans la fonction publique d’Etat ne pouvait dès
l’adoption de la réforme.
La mise à disposition des agents publics apparaît donc dans le cadre de la loi du 13 août
2004 comme une solution simplement transitoire. Phase d’ « essai » en matière d’expérimentation,
722 Il convient en effet ici de replacer la loi du 13 août 2004 dans son contexte, antérieur à l’adoption de la loi du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique et l’extension des collectivités pouvant accueillir des fonctionnaires d’Etat dans le cadre d’une mise à disposition. 723 Voir infra, le cas des ports et des aéroports par exemple. 724 Voir infra, le cas de la CNP par exemple.
227
période d’ « organisation des mesures » en matière de transferts de compétences, elle a ainsi vocation
à précéder et accompagner le transfert définitif des services et des personnels.
WV /:*5E@4?[:E5*98[64656[*=E3434A8*Y*;06??7:*9:*;@*=8E639:*5E@4?6536E:*
L’article 104-VII renvoyait à plusieurs décrets en Conseil d’Etat le soin de fixer les
modalités de transferts définitifs. La parution de ces décrets725, qui avaient vocation à déterminer la
partition définitive des services entre l’Etat et les collectivités territoriales sonna donc le glas de la
période transitoire, et ouvrit une nouvelle période, celle du choix par les agents de leur statut. En
effet, le transfert de personnels de l’Etat vers une collectivité territoriale, lié à la décentralisation de
compétences étatiques, ne signifiait pas obligatoirement le transfert de ces personnels vers la
fonction publique territoriale. Le législateur avait ainsi laissé aux agents, au travers des dispositions
de l’article 109-I de la loi du 13 août 2004, le choix d’un maintien du statut de fonctionnaire de l’Etat
(a) ou d’une intégration de la fonction publique territoriale (b). Cette option marquait sans conteste
une volonté de l’Etat de garantir la paix sociale dans la mise en œuvre du deuxième acte de la
décentralisation. Il n’est pour autant pas certain que cet aménagement soit véritablement pertinent à
terme, tant il est susceptible de soulever en pratique des difficultés de gestion sociale pour les
collectivités territoriales nouvellement compétentes. *
@R /:*AG36Z*9074*=@??@\:*Y*;@*[34A5634*=7B;6C7:*5:EE653E6@;:*
Envisager le choix d’un passage à la fonction publique territoriale avant même d’évoquer
la possibilité pour les fonctionnaires affectés à une compétence transférée de conserver leur statut de
fonctionnaire d’Etat relève ici d’un choix délibéré, destiné à mettre en lumière la volonté première
du législateur c’est-à-dire celle de voir les agents publics de l’Etat devenir de véritables agents de la
fonction publique territoriale. Intégrer des agents publics de l’Etat dans la fonction publique
territoriale se heurtait à deux difficultés juridiques, d’importance inégale.
Des règles classiques de nomination des agents publics territoriaux clairement inadaptées.
En vertu du statut général de la fonction publique territoriale726, une collectivité territoriale ne peut
pourvoir un emploi créé ou vacant qu’après en avoir informé le centre de gestion compétent qui
725Décret n° 2005-1631 du 26 décembre 2005 fixant les modalités du transfert définitif aux départements et aux régions de services ou parties de services du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche (J.O. du 27 décembre 2005, p. 19982), op. cit ; Décret n° 2006-1756 du 23 décembre 2006 fixant les modalités du transfert définitif aux régions de services ou parties de services du ministère de l'agriculture et de la pêche (J.O. du 30 décembre 2006, p. 20158) ; Décret n° 2007-20 du 4 janvier 2007 fixant les modalités du transfert définitif aux régions des services régionaux de l'inventaire général du patrimoine culturel (J.O. du 6 janvier 2007, p. 268) ; Décret n° 2007-778 du 10 mai 2007 fixant les modalités du transfert définitif aux régions de services ou parties de services du ministère des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer (J.O. du 11 mai 2007, p. 8498)
726 Article 41 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984.
228
assure la publicité de cette création ou de cette vacance. Elle peut ensuite pourvoir cet emploi en
nommant l'un des fonctionnaires qui s'est déclaré candidat par voie de mutation, de détachement,
d'intégration directe ou, le cas échéant et dans les conditions fixées par chaque statut particulier, de
promotion interne et d'avancement de grade. Elle peut également pourvoir cet emploi en nommant
l'un des candidats inscrits sur une liste d'aptitude. Cette procédure, garante de l’égal accès aux
emplois publics, a fort logiquement été écartée dans le cadre des transferts de personnels liés aux
transferts de compétence de la loi du 13 août 2004, les fonctionnaires de l’Etat dont les services ont
été transférés bénéficiant par exception d’un monopole de nomination dans les emplois
correspondants727.
La nécessité d’adapter les cadres d’emplois de la fonction publique territoriale à des
personnels issus de corps de la fonction publique d’Etat. En ce qui concerne le transfert des TOS,
issus de quatre corps différents, le gouvernement a opéré un choix728 en faveur de la création de trois
cadres d’emplois spécifiques placés principalement au sein de la filière technique de la fonction
publique territoriale729 et l’intégration des techniciens dans le cadre d’emplois déjà existant des
contrôleurs territoriaux. Trois décrets portant statuts particuliers ont ainsi été publiés en décembre
2005 à destination des agents d’entretien et d’accueil730, des agents techniques731, et des agents de
maîtrise732. Sans surprise, la rédaction de ces différents décrets s’apparente à une véritable
retranscription des statuts précédemment applicables aux agents dans le cadre de la fonction publique
d’Etat. De telle sorte que, comme l'explique Pascal Combeau733, les transferts de compétence sont un
facteur de valorisation de la fonction publique territoriale au détriment de la fonction publique d'État
dont les techniques de mise à disposition et de détachement sont détournées de leurs objectifs
initiaux. Il en résulte l'institution d'une « fonction publique territoriale étatisée » qui au nom du
principe de comparabilité sacrifie l'idée de spécificité des fonctions publiques.
*
727 J. FERSTENBERT, « Le transfert des personnels dans la loi relative aux libertés et responsabilités locales », AJDA 2004, p. 1996. 728 D. JEAN-PIERRE explique que l’intégration dans des cadres d’emplois existants de la filière technique fut un temps envisagé et finalement écarté, au motif que la création de cadres sur mesure permettait de garantir l’appartenance des agents à la communauté éducative et le maintien de leurs fonctions au sein des établissements d’enseignement, op.cit 729 Le personnel de gestion a intégré quant à lui la filière administrative mais représente un nombre très limité. 730 Décret n°2005-1482 du 30 novembre 2005 portant statut particulier du cadre d’emplois des agents territoriaux d’entretien et d’accueil des établissements d’enseignement (J.O. du 2 décembre 2005). 731 Décret n°2005-1483 du 30 novembre 2005 portant statut particulier du cadre d’emplois des agents techniques territoriaux des établissements d’enseignement (J.O. du 2 décembre 2005). 732 Décret n°2005-1484 du 30 novembre 2005 portant statut particulier du cadre d’emploi des agents de maîtrise territoriaux des établissements d’enseignement (J.O. du 2 décembre 2005). 733 P. COMBEAU, « Fonctions publiques et transferts des compétences » in J.-F. BRISSON, « Les transferts de compétences de l'État aux collectivités locales », Dr. adm. 2008, étude 8.
229
BR /:*AG36Z*3[[:E5*@7Z*=:E?344:;?*9074*<@6456:4*9@4?*;@*[34A5634*=7B;6C7:*90%5@5**
La mise en œuvre d’une nouvelle forme de détachement. Les fonctionnaires appartenant à
des services définitivement transférés peuvent donc, s’ils le souhaitaient, rester fonctionnaires de
l'Etat. Une telle faculté se traduisit en pratique par le recours au détachement, les fonctionnaires
ayant manifesté leur volonté de conserver leur statut « étatique » étant détachés auprès de la
collectivité ou du groupement bénéficiaire du transfert de compétences. Le détachement, qui est la
position du fonctionnaire placé hors de son corps d'origine mais continuant à bénéficier, dans ce
corps, de ses droits à l'avancement et à la retraite734, doit néanmoins faire l’objet de quelques
aménagements735, en vue de permettre à l’agent public de relever, jusqu’à la fin de sa carrière s’il le
souhaitait, de la fonction publique de l’Etat bien qu’effectuant sa mission au service d’une
collectivité territoriale. Comme l’exprime Jacques Ferstenbert, alors que le détachement était, jusqu'à
présent, prononcé soit à la demande du fonctionnaire, soit d'office736, « un troisième cas est
désormais prévu : le détachement semi-optionnel, soumis à la condition d'un transfert définitif du
service auquel appartient le fonctionnaire et résultant soit d'un choix de ce dernier, soit de l'absence
de choix à l'expiration du délai d'option ».
Un détachement sans limite. La principale dérogation porte à n’en pas douter sur la durée du
détachement. Qu’il soit de courte durée737 ou de longue durée738, le détachement est en temps normal
en tout état de cause enfermée dans une durée limitée. Le dispositif de détachement auprès des
collectivités territoriales ou de leurs groupements instauré par la loi du 13 août 2004 ne repose à
l’inverse sur aucune limitation de durée. Il en résulte que les agents détachés peuvent relever
jusqu’au terme de leur carrière de deux autorités, voir même de trois si l’on y ajoute pour les
personnels TOS le chef d'établissement. Bien que dérogatoire dans sa durée, le détachement prévu
par l’acte II de la décentralisation, n’échappe pas toutefois à l’ensemble des règles qui le gouvernent
classiquement. Il peut ainsi être suspendu à l'initiative du fonctionnaire dès lors que celui-ci souhaite
être placé dans une position statutaire de droit ou encore revenir dans son administration d'origine. Il
convient d’ailleurs de remarquer qu’une telle voie ne demeure envisageable que dans la mesure où
les corps des fonctionnaires transférés n’ont pas été mis en extinction739.
734 Article 45 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984. 735 Il s’agit d’une dérogation à la section 2 du chapitre V de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 relative à la fonction publique de l'Etat. 736 Dans une administration ou un établissement public de l'Etat, après avis des commissions administratives paritaires. 737 Six mois maximum. 738 Cinq ans, renouvelable par périodes n'excédant pas 5 ans, sauf dans l'hypothèse du détachement auprès d'un organisme privé pour y exécuter des travaux de recherche d'intérêt national en application de l'article 26 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985. 739 Une telle possibilité apparaît toutefois illusoire en pratique puisque conditionnée par la vacance de l’emploi. Compte tenu du transfert des compétences et des services correspondants, rien n’est moins sûr.
230
Il faut pour autant percevoir les limites d’un dispositif à l’ambition de compromis. Au plan
théorique en premier lieu, le dispositif d’option instauré visait à concilier à la fois la liberté des
collectivités locales au cours des négociations avec l'État sur les modalités du transfert et la liberté
des agents d'opter entre le détachement définitif ou l'intégration dans la fonction publique territoriale.
Nous nous rangeons néanmoins à l’avis de Jean-François Brisson740 selon lequel ce dispositif est
pourtant clairement dérogatoire tant au regard du principe d'égalité des agents devant la loi que des
règles d'articulation entre les deux fonctions publiques. !
Au plan pratique, en second lieu, certaines collectivités territoriales ont manifesté des
interrogations à l’encontre des conséquences du droit d’option dans la gestion de leurs personnels.
Les principales questions portaient sur l’intérêt véritable des agents concernés à opter entre les deux
régimes, dès lors qu’agent détaché et agent intégré relèvent du même régime indemnitaire. Des
questions se posaient également sur le coût financier pour l’Etat d’une telle mesure. Le ministre des
collectivités territoriales, par une réponse741 quelque peu optimiste742 quant à l’intérêt des agents
transférés d’intégrer la fonction publique territoriale, précisa que « s'agissant de la question
particulière du régime indemnitaire versé aux fonctionnaires transférés aux collectivités
territoriales, qui donne lieu à compensation financière de la part de l'État à hauteur des régimes
indemnitaires actuellement servis, il sera effectivement le même, quelle que soit l'option retenue par
l'agent ».
∴
Définies en vue de faciliter le passage des personnels de la fonction publique d’Etat vers la
fonction publique territoriale, les modalités de transfert des agents publics de l’Etat vers les
collectivités territoriales dans le cadre de l’acte II de la décentralisation se caractérisent par leur
caractère dérogatoire aux règles classiques de la mobilité. Un même constat apparaît à l’endroit des
modalités de transfert des agents publics concernés par une privatisation du régime juridique de
l’entité publique qui les employait originellement, sans pour autant qu’elles y soient totalement
identiques.
740 J.-F. BRISSON, « Les transferts de compétences de l'État aux collectivités locales », Dr. adm. 2008, ét 8. 741 Rép. min. n° 65943 : JOAN Q 27 déc. 2005, p. 12105/12106, « Conséquences du droit d'option, prévu par les lois de décentralisation, pour les personnels qui remplissent les missions transférées aux collectivités territoriales », Collectivités territoriales Intercommunalité n° 2, Février 2006, comm. 26 742 « […] si, dans un premier temps, certains d'entre eux peuvent opter pour un détachement sans limitation de durée, il convient de rappeler que les déroulements de carrière au sein de la fonction publique territoriale étant, au moins aussi favorable qu'à l'État et les perspectives d'exercer des fonctions diversifiées, au sein d'un même cadre d'emplois, plus grandes, ils devraient assez rapidement être amenés à demander à être intégrés dans la fonction publique territoriale ».
231
,@E@\E@=G:* XR* +:?* <39@;658?* 9:* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =7B;6A*=E3[3498<:45* 98E3\@536E:?* @7* ?5@575* 9:* ;@* [34A5634* =7B;6C7:* ;3E?* 9:* ;@*=E6>@56?@5634*97*E8\6<:*`7E696C7:*9074:*:45658*=7B;6C7:**
Spécificité du statut historiquement applicable, importance des effectifs concernés, pluralité
de nature des personnels affectés à l’activité, nécessité d’une autorisation législative à l’emploi de
personnels de droit public par une personne morale de droit privé… autant de contraintes qui
imposaient l’intervention du législateur en vue de régler le sort des personnels de droit public à
l’occasion d’une évolution d’une activité publique, vers une entreprise publique ou une entreprise
privée, et qui conditionnent, sans surprise, le dispositif retenu par le législateur pour opérer leur
transfert.
Qu’elle consiste en une personnalisation d’un service public en établissement public
industriel et commercial ou en entreprise publique, ou en une privatisation d’entreprise publique,
l’évolution juridique d’une activité publique est susceptible d’impliquer, sauf à de très rares
exceptions, un changement de cadre juridique pour ses personnels. La logique juridique du principe
de soumission des agents des établissements publics industriels et commerciaux et des entreprises au
droit privé du travail commanderait en effet que le régime social des personnels de droit public
accompagne la transformation juridique de leur structure d’emploi, en évoluant vers un statut de
droit privé. Une telle adéquation, certes cohérente au plan strictement juridique, se heurte néanmoins
à des considérations davantage sociologiques qui ne doivent pas ici être négligées. Il n’est nul besoin
en effet de préciser qu’une telle évolution, qui s’apparente à un véritable bouleversement de la
situation juridique des personnels de droit public, apparaît d’autant moins admissible pour les
personnels concernés que le statut de droit public des fonctionnaires relève dans l’inconscient
collectif d’un régime protecteur privilégié, en opposition au droit commun du travail davantage
empreint de rapports de force et de précarité. Il ne nous appartient pas dans le cadre de la présente
étude d’apprécier la véracité et la légitimité d’un tel sentiment, mais simplement d’en rapporter la
teneur afin de mieux comprendre les réticences formulées par les fonctionnaires à l’encontre des
réformes qui les affectent. D’autant que l’évolution de la structure publique de gestion de l’activité
résulte, par essence, d’un véritable choix politique des autorités publiques, qui ne manquera pas de
susciter le débat.
Aussi, afin de conduire à son terme dans un climat social relativement serein de telles
réformes, le législateur s’est efforcé, à chaque fois qu’il s’est vu confronté à de telles questions,
d’instaurer des dispositifs permettant de rénover le cadre social de la structure en vue du recrutement
de nouveaux agents, tout en offrant des garanties substantielles aux agents publics en place. Les
modalités de transfert des personnels de droit public mises en place par le législateur, qu’il s’agisse
de la création d’une entreprise publique comme de sa privatisation, traduisent ainsi un effort de
232
compromis du législateur. A une solution radicale de transfert immédiat des personnels dès
l’évolution effective de l’activité est préférée une solution progressive dans le temps, cherchant à
assurer une transition entre le régime initial de l’agent public et le régime applicable dans l’entreprise
d’accueil pour les agents recrutés selon des procédures « classiques ». Aussi, si à chaque évolution
de création ou de privatisation d’entreprise publique correspond un dispositif législatif et
réglementaire spécifique, un schéma procédural répondant à une philosophie identique du législateur
peut être dégagé. Les agents revêtant la qualité d’agents publics se voient ainsi offert la possibilité de
conserver le statut d’agent public, à titre provisoire ou pérenne selon les cas (A). Si les raisons d’un
aménagement dans le temps du transfert des personnels de droit public trouvent donc leur légitimité
dans ce contexte spécifique à la fonction publique, elles s’avèrent selon nous néanmoins
préjudiciables, à terme, à l’efficacité du dispositif de transfert (B).
-*S*/:*AG36Z*9074*<@6456:4*97*?5@575*90@\:45*=7B;6A*
Garantir aux agents publics le maintien de leur statut en dépit de l’évolution vers un régime
de droit privé de leur structure d’emploi constituait sans nul doute la solution la plus confortable
pour le législateur, peut-être même la seule envisageable pour mener à bien des réformes d’une telle
envergure dans le cadre de la mutation d’activités publiques dans le sens de la création ou de la
privatisation d’entreprises publiques. Dans la majeure partie des hypothèses, il convient de préciser
néanmoins que cette garantie présente un caractère nécessairement transitoire, inscrit dans une durée
limitée (1) au terme de laquelle l’agent est contraint de se prononcer sur sa volonté de devenir un
agent de l’entreprise à part entière, et d’accepter dès lors de devenir un salarié de droit privé de
l’entreprise, ou d’être réaffecté au sein de son administration d’origine. A l’inverse, et c’est là
l’exception qui confirme la règle, le législateur a conféré aux agents de l’Imprimerie Nationale et de
France Telecom la possibilité de conserver leur statut de droit public, sans limitation de durée
aucune, en les plaçant directement en position d’activité au sein de l’entreprise nouvellement créée
(2).
UV !4*<@6456:4*5E@4?6536E:*=@E* ;:* E:A37E?*@7*985@AG:<:45*37*Y* ;@*<6?:*Y*96?=3?65634*
Avant même d’exposer les modalités pratiques de mise en œuvre du détachement et de la
mise à disposition, il convient de préciser à titre liminaire les raisons qui motivent, selon nous, le
choix entre l’un ou l’autre de ces mécanismes de mobilité. Disposant d’un effet identique, celui de
permettre l’emploi d’un agent public en dehors de son administration d’origine743, le détachement et
la mise à disposition obéissent en revanche à des logiques, et dès lors des régimes juridiques,
743 Les termes employés ici sont volontairement génériques pour ne pas insister à ce stade sur les différences de régime entre ces deux mécanismes, notamment au regard de la position d’activité.
233
quelque peu différents. Le détachement, qui est la position du fonctionnaire placé hors de son corps
d'origine, mais qui continue à bénéficier, dans ce corps, de ses droits à l'avancement et à la retraite,
apparaît davantage comme un instrument de mobilité ouvert aux agents destinés à mener une carrière
au sens propre du terme. L’agent placé en position de détachement est ainsi rémunéré par
l’organisme d’accueil auprès duquel il effectue son détachement et touche la rémunération afférant à
son nouvel emploi744. Soumis aux règles qui gouvernent la fonction qu’il occupe745 et notamment
aux conventions collectives applicables dans la structure d’accueil, l’agent détaché est assimilé,
lorsqu’il effectue ses fonctions auprès d’un organisme de droit privé746, à un salarié de droit privé. Il
relève par conséquent des juridictions judiciaires dans les litiges susceptibles de naître avec son
employeur747.
La principale raison qui motive le recours majoritaire748 à la mise à disposition plutôt qu’au
détachement réside selon nous dans cette différence, sensible, du régime juridique de l’agent placé
dans l’une ou l’autre de ces positions de mobilité. Dans l’hypothèse où l’évolution juridique d’une
activité publique conduit à une « privatisation » du régime social des agents affectés à cette activité,
et où il est essentiel d’apporter des garanties aux agents concernés quant à la faible incidence de cette
mutation sur leur statut, la mise à disposition apparaît dès lors comme un instrument privilégié de
compromis, permettant au fonctionnaire pour reprendre les termes de la définition légale de
« demeurer dans son corps d’origine, d’[être]réputé occuper son emploi et continuer à percevoir la
rémunération correspondante », tout en effectuant son service dans une autre que la sienne.
Ces éléments précisés, reste à s’interroger sur la nécessité d’un dispositif législatif
spécifique, dès lors que mise à disposition et détachement sont des mécanismes de mobilité
communs à l’ensemble des statuts de la fonction publique, dont les diverses collectivités publiques
ont la maîtrise et l’expérience. L’œuvre du législateur s’explique aisément par le contexte propre à
chaque mutation d’activité publique aboutissant à la soumission de l’entité gestionnaire aux règles du
droit privé dans ses rapports avec ses personnels. Le recours à un dispositif « sur mesure » a en effet
permis de dégager un mécanisme de transfert des agents publics libéré de ses principales contraintes,
à savoir la nécessité de l’accord de l’agent à sa mise en œuvre, sa durée, et le nombre limité d’agents
d’une même administration pouvant en bénéficier.
744 CE, 19 octobre 1956, Guillien, Rec. p. 376. 745 CE Sect., 14 février 1958, Chamley et Perret, Rec. p. 99, RDP 1958, p. 548 ; RFDA 1958, n°118. 746 TC, 24 juin 1996, Préfet du Lot-et-Garonne, Rec. p. 547. Il en résulte que la situation d’un fonctionnaire détaché dans une association, même investie d’une mission de service public et bénéficiant de financements publics, relève du droit privé. Ressortit donc à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire, le litige concernant la remise anticipée du fonctionnaire à la disposition de son administration d’origine et relatif au paiement de diverses indemnités pour rupture du contrat. 747 TC, 7 juin 1999, Centre médico-psycho-pédagogique c/ Mme Héraudet, req. n°3127, AJFP 1999, p.47. 748 Le législateur n’a retenu le détachement qu’à de rares exceptions, comme ce fut le cas pour la Caisse nationale du Crédit Agricole, et lui a préféré dans la majeure partie des hypothèses la mise à disposition, comme ce fut le cas, non exhaustivement, de la Société nationale des poudres et explosifs, des ports et aéroports, ou encore de la Caisse nationale de prévoyance.
234
La première caractéristique des mécanismes de mobilité « refaçonnés » par le travail du
législateur consiste ainsi dans l’automaticité qui leur est insufflée. Car en dépit de
l’assouplissement749 de certaines des conditions de mise en œuvre de la mise à disposition par la loi
du 2 février 2007750, celle-ci demeure subordonnée à l’accord express du fonctionnaire, qu’il s’agisse
du statut de la fonction publique de l’Etat comme de la fonction publique territoriale751. Or une telle
contrainte constituait incontestablement un frein majeur à la conduite de réformes d’activités
publiques dans le sens d’une création ou d’une privatisation d’entreprise publique, eu égard au
nombre d’agents en cause. La marge de manœuvre des autorités publiques apparaissant d’autant plus
réduite que le juge administratif ne considère en aucune manière le refus du fonctionnaire de donner
son accord à une proposition de mise à disposition comme constitutif d’une quelconque faute ou
permettant d’engager sa responsabilité752. Aussi, en conférant au détachement ou à la mise à
disposition un caractère impératif, le législateur a cherché à prémunir l’employeur public dont
l’activité publique évolue de toute objection des agents à leur transfert. A l’image du dispositif
translatif des contrats institué dans le cadre de l’article L.1224-1 du code du travail, le transfert des
agents publics s’impose à eux, sans que leur accord ne soit exigé pour rendre effectif le passage au
service de la nouvelle entité. Pour autant la comparaison avec le dispositif du droit du travail s’arrête
là, dans la mesure où le refus de l’agent public n’est nullement assimilé à une démission de sa part753,
mais conduit simplement à sa réaffectation dans un autre service de son administration d’origine.
L’agent public ne perd dès lors pas le bénéfice de son statut de droit public, il cesse seulement
d’exercer les fonctions auxquelles il était auparavant affecté. Il s’agit là d’une différence appréciable.
Un autre aménagement majeur apporté au cadre classique du détachement ou de la mise à
disposition par le législateur porte sur la durée de ces mécanismes. Conçue comme une solution
transitoire, la mise à disposition ou le détachement de l’agent public sont en effet enfermés dans une
durée redéfinie : suffisamment longue pour ménager la réflexion des agents, suffisamment courte
pour permettre la finalisation de la transformation de l’entité en charge de l’activité publique754.
Œuvre de compromis, la durée diffère donc selon chaque évolution d’activité publique, selon le
contexte et les contraintes propres à chaque projet. Sans procéder à une liste à la « Prévert » des
durées retenues lors d’évolutions d’activités publiques qui ne présenteraient aucun intérêt au plan
intellectuel, on soulignera néanmoins la grande disparité des durées retenues, pouvant aller de
749 La subordination de la mise à disposition aux nécessités de service a disparu, en raison de l'extension du champ des institutions auprès desquelles la mise à disposition peut être effectuée. De même a disparu l'obligation de confier à l'intéressé des fonctions d'un niveau hiérarchique comparable à celui des fonctions exercées dans son administration d'origine, laquelle posait de réelles difficultés pratiques et empêchait certaines mises à disposition auprès d'organisations internationales intergouvernementales ou d'États étrangers. 750 Loi n°2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, op.cit. 751En vertu de l'article 61 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale (J.O. du 27 janvier 1984, p. 441) op.cit : CAA Nantes, 30 juin 2000, CMFAO, n° 98NT01933. 752 CE, 21 mai 2007, req. n° 264174, AJDA 2007, p. 1053, obs. M.-C. de MONTECLER, op.cit 753 Cass soc., 23 octobre 1968, Bull. civ. V, n° 451 ; D. 1969, jurispr. p. 166 ; JCP G 1969, II, 15755 bis, note A. A. ; Cass soc., 24 mars 1969, Bull. civ. V, n° 212 ; Cass soc., 24 novembre 1976, Bull. civ. V, n° 617. 754 Ce délai de réflexion laissé aux agents présente parfois des limites, que nous nous efforcerons de mettre en lumière dans le B de ce paragraphe.
235
seulement 6 mois755 à plus de 12 ans756, illustrant par la même la pertinence d’un « délai sur
mesure ».
Enfin, dernier point expressément abordé par le législateur dans sa refonte des conditions de
mise en œuvre des mécanismes de mobilité : le nombre d’agents pouvant faire l’objet d’une mesure
de mise à disposition ou de détachement. Cet aspect constitue certainement la dérogation la plus
simple à mettre en œuvre, dans la mesure où il suffit de l’énoncer pour la rendre effective. Sa portée
n’en est pas moins essentielle dans la réussite du transfert d’agents publics lors de l’évolution d’une
activité publique impliquant une pluralité d’agents. En ouvrant le recours des mécanismes de
mobilité à l’ensemble des agents publics affectés à une même activité publique, le législateur facilite
ainsi la résolution du sort des personnels, en appréhendant la question sociale dans sa globalité. La
logique de la limite posée par les statuts généraux se comprend aisément : garantir à l’Administration
un maintien minimal de ses effectifs, dans une perspective de continuité de service public. Mais
lorsque l’activité exercée par cette administration rencontre une évolution tendant à une privatisation
du régime social des agents, la logique s’inverse et commande au contraire d’assurer le maintien des
agents au service de cette activité, en dépit de son évolution juridique.
Au demeurant, la mobilité à destination du secteur privé reste incontestablement des plus
limitées comme en témoignent les chiffres indiqués par le Rapport annuel sur l’état de la fonction
publique de 2006 – 2007. En effet, au 31 décembre 2004, seuls 1 027 fonctionnaires civils étaient
placés en détachement ou en disponibilité pour travailler dans un organisme privé. Les passages du
secteur public au secteur privé restent également rares. Entre 1998 et 2004, moins de 4 % des
fonctionnaires ont quitté la fonction publique pour travailler dans le secteur privé et 2,8 % des
salariés du secteur privé sont devenus agents publics.
WV !4*<@6456:4*=8E:44:*=@E*;0:<=;36*96E:A5*:4*=3?65634*90@A56>658*
Les modalités de transfert des personnels de France Telecom retenues par le législateur lors
de la création en 1990757 de l’ « Exploitant public » France Telecom, et reconduites lors de
transformation en société commerciale en 1996758 apparaissent sans nul doute des plus exorbitantes
du droit commun, pour reprendre une expression chère aux publicistes. Si la solution retenue par la
loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 est celle de la continuité759 quant au régime juridique des agents de
France Télécom, elle est à l’inverse celle de la rupture quant à la qualification des agents employés
755 Article 2 de la loi n°89-924 du 23 décembre 1989 (J.O. du 27 décembre 1989, p. 16103), concernant les personnels de l’établissement public du GIAT lors de sa transformation en société (GIAT-Industries). Voir sur ce sujet : A. DELION et M. DURUPTY, « La transformation du Groupement Industriel des Armements Terrestres en société », RFAP 1991, p. 159. 756 Article 10 de la loi n°88-50 du 18 janvier 1988 relative à la mutualisation de la Caisse Nationale de Crédit Agricole (J.O. du 19 janvier1988, p. 879). 757 Loi n°90-1170 du 29 décembre 1990 sur la réglementation des télécommunications (J.O. du 30 décembre 1990, p. 16439). 758 Loi n°96-660 du 26 juillet 1996 relative à l’entreprise nationale France Télécom (J.O. du 27 juillet 1996, p. 11398). 759 D. JEAN-PIERRE, « La Loi France Télécom et la fonction publique », JCP A 2004, n°1256, p. 488.
236
par une entreprise privée en droit interne760. Le choix du législateur d’un maintien des agents publics
en position d’activité, résolument pragmatique eu égard au contingent d’agents concernés par la
transformation de l’opérateur historique de télécommunications761, n’en soulevait pas moins des
interrogations quant à sa réalisation, on serait même tenter de dire son réalisme. En effet, affecter des
fonctionnaires à un établissement public industriel et commercial ou une société commerciale ne
comportait pas seulement des obstacles au plan des principes juridiques, mais également au plan des
modalités pratiques. Comment coïncider en effet deux mondes en diamétrale opposition. La
structuration de la fonction publique, en catégories, corps, grade et emploi, ainsi que la philosophie
qui l’anime, à savoir servir l’intérêt général, semblaient difficilement compatibles avec la liberté
contractuelle du droit du travail, ainsi que la finalité commerciale de toute entreprise.
Le législateur a donc pris le parti de rattacher directement le corps des fonctionnaires de
France Telecom à la nouvelle entité : bien que travaillant dans le cadre d'un service public industriel
et commercial, les fonctionnaires de France Télécom demeurent régis par des statuts particuliers762.
Ces agents sont placés sous l'autorité du président du conseil d'administration investi du pouvoir de
nomination763.
∴
Plusieurs activités publiques ont évolué ces dernières années dans le sens d’une création
d’entité publique ou d’une privatisation d’une telle structure, de telle sorte qu’un premier bilan
semble aujourd’hui pouvoir être dressé. A l’aune de ces exemples de mises à disposition et d’emploi
direct en position d’activité s’impose un constat, celui d’une présence encore conséquente de
personnels de droit public dans des structures relevant pourtant désormais de relations sociales de
droit privé, et sa conséquence, celle d’une complexification certaine de la gestion des ressources
humaines dans ces structures au personnel hétérogène. Si bien qu’il est permis de s’interroger sur
l’efficacité des mécanismes de transfert instaurés par le législateur à l’occasion de la personnalisation
d’un service public industriel et commercial ou de la privatisation d’une entreprise publique.
*
760 J. CHEVALLIER, « La nouvelle réforme des télécommunications : ruptures et continuités », RFDA 1996, p. 909, op. cit. 761 Ce contingent était estimé à 150 000 agents lors de la réforme de 1996. 762 Lois n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et n° 84-16 du 11 janvier 1984 relative à la fonction publique de l'État, soient les Titre Ier et Titre II du statut général de la fonction publique, op.cit 763 Article 44 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom, op.cit
237
N*S*+:?*<39@;658?*9:*5E@4?[:E5*=:7*:[[6A@A:?*j*
Dans une perspective de sauvegarde de la paix sociale, légitime et à notre sens indispensable
à la réussite des réformes intéressant les activités publiques employant des personnels de droit
public, le législateur a recherché des solutions de modération. Le résultat de la mise en œuvre de ces
dispositifs apparaît pourtant aujourd’hui des plus mitigés. Force est de constater en effet que dans les
hypothèses où le législateur a entendu offrir aux agents publics la faculté de conserver à titre
transitoire leur statut de droit public ou d’opter pour un statut de droit privé, le choix d’un maintien
du statut public a le plus souvent été privilégié par les agents. Dans le même sens, les agents de
France Télécom ont dans leur immense majorité préférer poursuivre leur activité au sein de la
nouvelle société commerciale en qualité de fonctionnaire placé en position d’activité ou accepter les
propositions de départ anticipé de la direction plutôt que devenir agent privé de l’opérateur de
télécommunications.
La volonté du législateur en instaurant des dispositifs axés autour de la mise à disposition des
personnels de droit public était claire : amener cette catégorie de personnels à poursuivre, à moyen
terme, leur activité dans un cadre juridique de droit privé. La mise à disposition ne revêtait dans son
esprit qu’un caractère transitoire, destiné à permettre à l’agent de continuer à exercer ses fonctions le
temps de s’adapter aux nouvelles conditions d’exploitation de l’activité. Il est vrai qu’opter pour un
statut de droit privé avant même de connaître le contexte de gestion de la nouvelle entité représentait
pour les agents concernés une évolution probablement trop radicale, et sûrement également trop
risquée. A l’inverse, le choix de la mise à disposition offrait aux agents un temps de réflexion
supplémentaire, permettant d’observer les nouvelles conditions de gestion de l’activité publique, et
les avantages et inconvénients du régime de droit privé des agents nouvellement recrutés. Il n’est pas
étonnant dès lors d’observer que seule une infime minorité se soit prononcée en faveur de l’adoption
d’un régime de droit privé lors du passage en société.
Confrontée à la question de ce contingent de « mis à disposition », et de sa coexistence avec
les effectifs salariés de droit privé, les directions se devaient d’amorcer le plus rapidement possible le
« basculement » de ces agents dans un régime de droit privé. Deux voies furent explorées en ce sens.
Au plan des ressources humaines, des actions d’information à destination des agents mis à
disposition furent ainsi engagées, afin d’exposer les avantages et inconvénients de la convention
collective applicable aux agents privés, notamment par une comparaison point par point avec le
statut précédemment applicable. Au plan financier ensuite, des mécanismes d’incitation, qui ne
résultent pas de la loi mais d’accords d’entreprises, à l’adoption du « statut » de droit privé :
versement d’une prime exceptionnelle dès signature d’un contrat de travail de droit privé, clauses
238
d’intéressement et de participation764… Mais ces multiples efforts semblent aujourd’hui rester vains
tant le nombre d’agents mis à disposition ayant manifesté leur volonté d’intégrer la société en qualité
d’agents privés est resté dérisoire.
Si bien qu’il est permis de s’interroger sur l’avenir de ces personnels au sein de la nouvelle
entité à l’issue de la période dérogatoire de mise à disposition prévue par la loi : les agents mis à
disposition se rangeront-ils au cadre législatif, en renonçant définitivement au bénéfice de leur statut,
ou manifesteront-ils leur opposition à leur assimilation, contraignant dès lors les autorités publiques
à prolonger par un nouveau dispositif législatif765 la durée déjà dérogatoire de mise à disposition, afin
de ménager une fois encore les susceptibilités sociales ? Au surplus, leur situation aura perduré
durant une longue période766, sans difficulté apparente majeure, de telle sorte que l’argument selon
lequel un changement de statut est indispensable perdra nécessairement de sa substance.
Selon toute vraisemblance, ces personnels adopteront, sans conviction certainement, le
régime de droit privé à l’ultime échéance de la durée de mise à disposition. Il n’est pas
inenvisageable pour autant selon nous que dans certains cas où la pression syndicale sera plus forte,
le législateur ne soit pas dans l’obligation de renouveler cette durée de mise à disposition. Notons
toutefois que ces interrogations présentent un intérêt limité eu égard à l’importance quantitative du
contingent concerné : la mise à disposition concernant par définition les agents présents avant
l’évolution juridique de l’activité publique et de surcroît relevant d’un régime de droit public, les
effectifs concernés seront peu nombreux, et devraient encore s’amenuiser au fil de la vie normale de
l’entreprise (départ en retraite, démissions, etc).
Pourtant, loin de constituer une fiction, une telle situation apparaît tout à fait envisageable, à
l’image du cas de la Caisse Nationale de Prévoyance (CNP). Revêtant auparavant la forme d’un
établissement public, la CNP est devenue société anonyme par la loi du 16 juillet 1992767, bénéficiant
à cette occasion de l’apport des biens, droits et obligations de l’ancien établissement public768. Les
fonctionnaires précédemment affectés à l’établissement public, et rattachés au corps de la Caisse des
Dépôts et Consignations, purent poursuivre leur activité au sein de la nouvelle société anonyme par
la voie d’une mise à disposition, dont la durée fut initialement fixée à 6 ans maximum. Néanmoins à
l’échéance de cette période, les fonctionnaires manifestèrent leur opposition à l’intégration de la
société en qualité de salariés de droit privé. A l’issue d’un vif débat entre représentants syndicaux et
764 Le choix du mécanisme de la mise à disposition plutôt que celui du détachement trouve ici un nouvel écho : l’agent mis à disposition continue en effet de percevoir la rémunération qui était la sienne dans le cadre de ses fonctions dans son administration d’origine. 765 CE Avis, section des finances, n°360 829 du 23 septembre 1997, Rapport public 1998, EDCE n° 49, La Documentation Française 1998, p. 196, op.cit : en l’absence d’un nouveau dispositif, les agents réintègrent automatiquement le corps auquel ils sont rattachés. 766 Dix ans si l’on prend l’exemple des agents publics mis à disposition des sociétés aéroportuaires. 767 Loi n°92-665 du 16 juillet 1992 portant adaptation au Marché Unique de la législation applicable en matière d’assurance et de crédit (J.O. du17 juillet 1992, p. 9576). 768 Article 3 de la loi précitée du 16 juillet 1992.
239
autorités publiques, et après la saisine pour avis du Conseil d’Etat769, le législateur intervint à
nouveau par la loi du 2 juillet 1998770 pour prolonger la durée de mise à disposition des
fonctionnaires au service de la société anonyme CNP, pour une nouvelle période de dix ans.
Anticipant de nouvelles objections qui n’auraient pas manqué de se faire jour, le législateur est
revenu une nouvelle fois sur cette durée en 2007 par la loi de modernisation de la fonction
publique771, en ouvrant une nouvelle période de dix ans772. Cette poursuite incessante d’une période
qui se voulait initialement transitoire laisse songeur sur la pertinence de tels dispositifs à terme…
∴
L’examen approfondi de la problématique du sort des personnels lors de l’évolution d’une
activité publique ne saurait se résumer à l’étude des modalités de transfert de ces personnels. Il
impose également d’envisager l’hypothèse où ce transfert n’interviendrait pas du fait des acteurs
eux-mêmes, agents employés comme structures gestionnaires de l’activité. Cette dimension d’un
transfert « négatif » s’avère d’autant plus essentielle qu’elle focalise en pratique toutes les attentions
des parties. Car la question essentielle lors d’une évolution d’activité est bien évidemment celle de
son coût financier pour les différents acteurs concernés par l’opération ne souhaitant pas poursuivre
la relation de travail telle qu’elle existait antérieurement à la modification qui survient.
769 Le Conseil d’Etat préconisait une durée « raisonnable » évaluée à quatre ans afin de permettre la transition du statut de fonctionnaire à celui de salarié de droit privé. Ce délai n’a finalement pas été retenu par le législateur qui a opté pour une durée plus longue de dix ans. 770 Loi n°98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier (J.O. du 15 septembre 1999, p. 13812). 771 Loi n°2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, op.cit 772 Les fonctionnaires de la CNP pourront donc demeurer au service de la société anonyme jusqu’en 2017, au minimum.
240
2G@=65E:* X* S* /:?* A@?* :ZA:=56344:;?* 90@B?:4A:* 9:* A345647658* 9:*;0:<=;36*T*;:?*<39@;658?*9:*E7=57E:*9:*;@*E:;@5634*90:<=;36*
L’évolution de l’activité implique, dans la majeure partie des cas, un passage corrélatif des
personnels qui y sont affectés au service de la nouvelle structure gestionnaire. Il n’est toutefois pas
exclu que l’une ou l’autre des parties concernées par ce transfert – personnels comme gestionnaires
successifs de l’activité – pour des raisons diverses ne souhaitent pas assurer une telle continuité
d’emploi. Il leur appartient dès lors de résoudre la question qui en résulte relative aux modalités de
cessation de la relation d’emploi avec le gestionnaire de l’activité, qui diffèrent fort logiquement
selon la nature des personnels.
L’absence de continuité de la relation d’emploi des salariés de droit privé en raison de
l’évolution d’une activité publique marque en définitive une véritable rupture du lien qui unissait
jusqu’alors le salarié avec son employeur gestionnaire de l’activité (Section 1).
Elle n’analyse différemment à l’endroit des personnels de droit public qui ne poursuivraient
pas leurs fonctions au service de la nouvelle structure gestionnaire. Ceux-ci ne s’exposent ainsi pas
nécessairement à une rupture de leur relation avec leur employeur public initial de sorte que l’on
préfèrera évoquer à leur égard les modalités de gestion de leur relation d’emploi avec
l’administration (Section 2).*
241
':A5634*U*S*/:?*<39@;658?*9:* E7=57E:*97*A345E@5*9:?*?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8*=E3>3C78:*=@E*;:*5E@4?[:E5*90@A56>658*
Qu’une obligation de transfert des contrats de travail existe corrélativement au transfert
d’une activité publique ou que le transfert des contrats procède d’une volonté des acteurs
économiques ou de la personne publique ne signifie pas nécessairement que ce transfert interviendra
pour l’ensemble des contrats de travail signés sous l’empire de l’ancien exploitant de l’activité
publique. Chacun des acteurs, employeurs comme salariés, peut souhaiter rompre le contrat à
l’occasion du transfert de l’activité publique. Se pose alors la question des modalités de mise en
œuvre de cette rupture, et plus encore de son imputabilité. Fondamentale en ce qu’elle détermine
lequel des acteurs devra supporter la charge financière de la rupture, la question des modalités de
rupture du contrat de travail focalise naturellement l’attention des différents acteurs au transfert
d’activité. Son appréhension diffère selon que le transfert de salariés de droit privé s’opère au
bénéfice d’une entité de droit privé (paragraphe 1) ou de droit public (paragraphe 2). La nature
juridique du repreneur de l’activité publique conditionne en effet le cadre juridique dans lequel la
rupture s’inscrit, et par la même la compétence juridictionnelle pour connaître des litiges susceptibles
de naître à l’occasion du transfert des contrats de travail.
,@E@\E@=G:* U* S* /:?* <39@;658?* 9:* E7=57E:* 9:?* A345E@5?* :4* A@?* 9:*5E@4?[:E5*9:*?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8*>:E?*74:*=:E?344:*<3E@;:*9:*9E365*=E6>8*
Dans l’hypothèse où le transfert d’activité publique qui motive le changement d’employeur
intervient d’une entité de droit privé vers une autre, la question de la compétence juridictionnelle se
trouve privée d’enjeu, les juridictions sociales étant par principe compétentes pour connaître des
litiges soulevés à raison du transfert de salariés de droit privé. La principale préoccupation qui anime
les acteurs affectés par un transfert de contrats de travail concomitant à un transfert d’activité
publique réside en revanche dans les modalités de rupture du contrat de travail ayant vocation à être
transféré, et plus encore sur l’imputabilité de cette rupture. Là encore, il convient de distinguer selon
le fondement juridique du transfert, légal (A) ou conventionnel (B).
-*S*/:?*<39@;658?*9:*E7=57E:*97*A345E@5*:4*A@?*9:*5E@4?[:E5*;8\@;**
En dépit de l’obligation légale de transfert des contrats de travail qui s’imposent à eux, les
cocontractants de la personne publique qui se succèdent dans l’exploitation d’une activité publique
peuvent souhaiter ne pas conserver à leur service l’ensemble des salariés initialement affectés à
l’exercice de l’activité concernée (1). Dans le même sens, le salarié dont le transfert est envisagé
peut marquer son opposition au changement d’employeur qui en résulte (2). Dans chacune de ces
242
hypothèses, la jurisprudence a pris soin de déterminer très précisément lequel des acteurs en présence
doit en assumer la responsabilité juridique, et partant financière, et selon quelles exigences
procédurales. *
UV /:?*<39@;658?*9:* ;@* E7=57E:*97* A345E@5* Y* ;064656@56>:*9:* ;074*37* ;0@75E:*9:?*\:?56344@6E:?*9:*;0@A56>658*=7B;6C7:*
L’obligation de reprise des contrats de travail à l’occasion d’une succession de
cocontractants de l’administration dans l’exercice d’une activité publique pèse avant tout sur le
nouvel attributaire de la personne publique qui, s’il entend réduire les effectifs initialement affectés à
l’exploitation de l’activité qui lui est confiée, doit en assumer – juridiquement et financièrement – le
licenciement (b). Il n’est cependant pas totalement exclu que la rupture de la relation d’emploi
provienne de l’employeur initial avant même que le transfert d’activité n’intervienne (a). En tout état
de cause, les contraintes procédurales assignées à chacun d’entre eux par les juridictions sociales
sont des plus nombreuses afin d’assurer la préservation des droits des salariés à défaut de la
continuité d’emploi recherchée.
@R /:?* ;6A:4A6:<:45?* =E3434A8?* =@E* ;:* \:?56344@6E:* 64656@;* 9:* ;0@A56>658*=7B;6C7:*
Nullité du licenciement prononcé en raison du transfert. Les dispositions de l’article
L.1224-1 du code du travail présentent un caractère d’ordre public de telle sorte qu’aucun des acteurs
au transfert d’une activité ne peuvent s’opposer au transfert quasi-automatique des contrats de travail
attachés à l’activité. Le licenciement d’un salarié provoqué par la seule circonstance que celui-ci soit
concerné par la mesure de transfert est ainsi considéré par les juridictions sociales comme intervenu
en l’absence de cause réelle et sérieuse et se trouve dès lors frappé de nullité. Le gestionnaire initial
de l’activité n’en demeure pas moins libre de se séparer d’un salarié avant que son transfert
n’intervienne, dès lors que la volonté de rupture du contrat n’est pas motivée par le transfert mais
repose sur un motif personnel ou résulte d’une faute du salarié.
Légalité du licenciement pour motif personnel ou pour faute sous le contrôle renforcé des
juridictions sociales. Les juridictions sociales ne manquent pas d’examiner avec attention les
motivations du licenciement d’un salarié alors même que celui-ci est concerné par un transfert de
contrat de travail lié à un transfert d’activité, et reconnaissent un véritable droit d’option au salarié
dont le licenciement serait dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Droit à réparation ou réintégration du salarié au sein des effectifs du nouvel exploitant. Le
salarié peut user de son droit à réintégration et demander à poursuivre son contrat de travail, pourtant
rompu, avec le nouvel exploitant de l’activité, qui est dans l’obligation de le réintégrer, ou de lui
243
verser sa rémunération tant que la réintégration n’est pas effective. Il peut également demander la
réparation du préjudice subi773 à l’un ou l’autre des exploitants successifs, sauf évidemment si le
repreneur de l’activité l’a informé de sa volonté de poursuivre son contrat avant l’expiration du
préavis de licenciement774.
BR /:?* ;6A:4A6:<:45?* =E3434A8?* =@E* ;:* 437>:;* :Z=;365@45* 9:* ;0@A56>658*=7B;6C7:*
Reprise de l’activité et réorganisation de l’entreprise. La reprise d’une activité par un
nouvel exploitant marque souvent des changements profonds dans la gestion de l’activité et peut
conduire le repreneur à souhaiter se séparer d’une partie des effectifs qui lui sont automatiquement
transmis dans le cadre d’un transfert légal. Là encore, une telle faculté ne lui est offerte qu’à la
condition sine qua none de reposer sur un motif réel et sérieux. A défaut, le refus du nouvel
exploitant de poursuivre les contrats de travail peut être qualifié de « trouble illicite » par les
juridictions sociales autorisant les salariés à demander et à obtenir en référé une réintégration dans
leur emploi et une indemnisation du préjudice subi775.
Exigence stricte d’un licenciement reposant sur un motif réel et sérieux. Dans ce contexte,
il paraît a priori extrêmement compliqué de fonder le licenciement sur un motif économique. Il est
ainsi acquis que « le transfert d'une entité économique autonome entraîne de plein droit le maintien,
avec le nouvel employeur, des contrats de travail qui y sont attachés et prive d'effet les licenciements
prononcés par le cédant pour motif économique »776. Un tel motif ne semble pouvoir être invoqué
que dans des hypothèses des plus restreintes, pour lesquelles le transfert d’entité économique
autonome se trouve intervenir dans un contexte d’extrêmes difficultés économiques de l’activité en
cause. Les licenciements envisagés par le nouvel opérateur dans le cadre de la gestion d’une activité
publique peuvent d’ailleurs jouer un rôle majeur lors de la consultation qui conduit à l’attribution du
contrat par la personne publique. Les difficultés économiques rencontrées par une activité publique
pourront ainsi parfois conduire la personne publique, soucieuse de conserver l’activité en cause
plutôt que de se résoudre à la voir disparaître, à retenir l’offre d’un opérateur permettant une
optimisation des moyens, voire un véritable redimensionnement des éléments d’exploitation
impliquant notamment une réduction des effectifs. Certes marginales, ces hypothèses qui obligent la
puissance publique à accepter des licenciements peu populaires dans l’opinion publique s’imposent
pourtant en pratique dans certaines situations critiques. L’exemple de l’aéroport de Clermont Ferrand
illustre parfaitement la problématique sociale à laquelle peut se voir confrontée la personne publique
autorité concédante lors de la procédure de mise en concurrence pour la désignation du nouvel
773 Cass soc., 11 mars 2003, Bull. Civ. V n° 86, p. 82. 774 Ibid ; Rappr. Cass. soc., 15 février 2006, RJS 2006, n° 533. 775 Cass. soc., 12 février 2003, pourvoi n° 00-46.187 ; Cass. soc., 5 avril 2005, pourvoi n°03-46.935, RJS juin 2005, n° 604 ; Cass. soc., 2 novembre 2005, pourvoi n° 03-47.215 ; Cass. soc., 15 février 2006, pourvoi n° 04-93.923. 776 Cass. soc., 11 mars, Bull. civ. V, n° 86, RJS 2006, n° 53, op.cit
244
exploitant. En l’espèce, l’aéroport de Clermont Auvergne avait dans les années 1990 fait l’objet
d’agrandissements conséquents en vue d’accueillir le hub777 d’Air France qui devait selon les
estimations apporter plus d’un million et demi de passagers sur la plateforme auvergnate. Dans cette
perspective, de nombreux personnels avaient été recrutés, afin de répondre à la demande sollicitée
par un trafic soutenu. Mais à la suite d’un changement de stratégie de la compagnie nationale sur
l’implantation de son hub, finalement basé à l’aéroport de Lyon Saint Exupéry, l’aéroport de
Clermont Auvergne a du faire face à une chute significative de son trafic, à telle enseigne que ses
infrastructures et ses équipes s’avéraient parfaitement disproportionnées pour assurer l’exploitation
du service public aéroportuaire. Lors du renouvellement du contrat de délégation de service public,
au 1er janvier 2008, le syndicat mixte de l’aéroport de Clermont Ferrand Auvergne devenu autorité
concédante à la suite de la décentralisation des aérodromes en 2007 a retenu l’offre du groupement
constitué par les groupes Keolis et Vinci Aéroport, qui comprenait notamment le licenciement de
dizaines d’agents.
En second lieu, et à l’inverse, en dépit des difficultés économiques rencontrées par une activité
publique, la personne publique pourra s’efforcer de préserver l’emploi et préférer lors d’une
consultation le candidat proposant l’offre la plus « protectrice » d’emplois.
WV /:?*<39@;658?*9:*E7=57E:*97*A345E@5*:4*A@?*9:*E:[7?*97*5E@4?[:E5*=@E*;:*?@;@E68*
Impératif pour les gestionnaires de l’activité publique qui se succèdent, le transfert des
contrats de travail l’est au même titre pour les salariés778. Si ces derniers disposent bien évidemment
de la faculté de mettre fin à leur contrat en déposant leur démission avant que le transfert de l’activité
publique n’intervienne, ils ne peuvent néanmoins exiger leur licenciement une fois le transfert
d’activité opéré (a), sauf à faire valoir une modification importante de leurs conditions de travail779
(b).
@R /:* E:[7?* 97* 5E@4?[:E5* =@E* ;:* ?@;@E68* :4* ;0@B?:4A:* 9:* <396[6A@5634*?7B?5@456:;;:*@==3E58:*Y*?34*A345E@5*9:*5E@>@6;*
Les dispositions de l’article L1224-1 du code du travail présentent un caractère d’ordre
public. Il en résulte que le transfert s’impose au salarié sans que ce dernier ne puisse opposer son
refus sauf à en supporter les conséquences financières. Le refus du salarié de poursuivre son contrat
de travail au sein de la nouvelle entité est ainsi assimilée par les juridictions sociales à une démission
pure et simple, et non à un licenciement aux torts de l’employeur, de telle sorte que le salarié se voit
777 Terme anglo-saxon, traductible en français par l’expression peu usitée de « plateforme de correspondances » 778 Cass soc., 16 janvier 1990, Bull. Civ. V, n° 11. 779 Cass. soc., 26 septembre 1990, Bull. civ. V, n° 236.
245
priver de toute indemnité financière qui lui serait due dans l’hypothèse d’un licenciement. Il s'expose
en outre à des sanctions disciplinaires, son comportement étant assimilé à un acte d'insubordination.
De plus, si son contrat comportait une clause de non-concurrence, il doit, en cas de résiliation du
contrat, la respecter vis-à-vis du nouvel employeur, sauf si celui-ci l'en a délié.
Afin de pallier tout risque de contestation de la démission devant les juridictions sociales et
de caractérisation d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, il apparaît en pratique
indispensable que les gestionnaires qui se succèdent s’assurent d’une formalisation claire et non
équivoque de la volonté du salarié de quitter son emploi à la suite de changement d’entité
économique en charge de l’activité publique. Les juridictions sociales ne manquent pas de rappeler
que « la volonté de démissionner ne se présumant pas et devant découler d'une volonté claire et non
équivoque, le simple désaccord formalisé par un salarié sur ses conditions de rémunération ou
d'indemnisation, suite à la décision de l'employeur de supprimer ses frais de déplacements, ne peut
s'analyser en une démission. Au contraire, la rupture du contrat est imputable à l'employeur et
s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse dès lors que ce dernier, suite au désaccord
du salarié, a décidé de le remplacer »780. L’attention portée par les juridictions sociales à la
formalisation claire et non équivoque du salarié de démissionner de son emploi à l’occasion d’un
transfert d’un transfert d’activité publique se révèle des plus exigeantes781, et qu’en tout état de
cause, le refus éventuel du transfert par un salarié ne peut être qu'individuel782 et s'apprécie au jour
du transfert effectif.
BR /:* E:[7?* 97* 5E@4?[:E5* =@E* ;:* ?@;@E68* :4* E@6?34* 9074:* <396[6A@5634*?7B?5@456:;;:*@==3E58:*Y*?34*A345E@5*9:*5E@>@6;*
La reprise des contrats de travail par le nouvel exploitant peut parfois s’accompagner de
modifications substantielles du contrat. Dans une telle hypothèse, le caractère d’ordre public des
dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail doit être nuancé et le transfert ne peut
effectivement intervenir qu’avec l’accord exprès de chacun des salariés concernés. En cas de refus
du salarié, le nouveau gestionnaire de l’activité ne peut toutefois le licencier pour ce seul motif783.
Les juridictions sociales s’attachent ainsi à vérifier que la cause du licenciement est réelle et sérieuse.
Elles exigent, pour que le licenciement puisse être considéré comme légal, que le nouvel
exploitant « s’il n'est pas en mesure de maintenir les conditions antérieures, (formule) de nouvelles
780 CA Nîmes, ch. soc., 5 Mai 2009, Association Elan 30 c. M. Angelo Perolari, n° 07/03798. 781 Il a ainsi pu être jugé par la chambre sociale de la Cour d’appel de Reims que « n'exprime pas une volonté claire et non équivoque du salarié de démissionner la lettre adressée par ce dernier à l'employeur par laquelle il se contente de demander son solde de tout compte, dès lors que, si cette lettre comporte la mention "objet : lettre de démission", cette mention ne peut constituer cette volonté claire et non équivoque, et que cette lettre intervient dans un contexte particulier, puisque l'employeur vient d'informer le salarié qu'il allait devenir, avec 3 autres salariés, salarié de la société ayant reçu le service livraison de son entreprise », CA Reims, ch. Soc., 10 novembre 1999, n°96/01644, SARL Remoise de transports /Auge. 782 Cass. soc., 10 octobre 2006, pourvoi n° 04-40.325. 783 Cass. soc., 7 juillet 1998, Bull. civ. V, n° 367.
246
propositions, soit (tire) les conséquences de ce refus en engageant une procédure de licenciement » ;
« à défaut, le salarié peut poursuivre la résiliation judiciaire du contrat, laquelle produit alors les
effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans préjudice du recours éventuel entre les
employeurs successifs »784.
N*S*/:?*<39@;658?*9:*E7=57E:*97*A345E@5*9:*5E@>@6;*:4*A@?*9:*5E@4?[:E5*A34>:456344:;*37*A345E@A57:;**
Contrairement au transfert légal des contrats de travail qui s’opère automatiquement sans que
les employeurs successifs ni le salarié ne puisse s’y opposer, le transfert conventionnel ou
contractuel des contrats de travail ne peut s’effectuer sans l’accord exprès du salarié. Il en résulte que
si le salarié a donné sans équivoque son accord, son contrat se poursuit avec le nouvel employeur qui
devient responsable d’un licenciement qui pourrait être ultérieurement décidé. A l’inverse, si le
salarié refuse le transfert, il reste alors employé dans son entreprise d'origine, et c'est à elle qu'il
appartient ou de poursuivre le contrat ou d'assumer les conséquences de sa rupture, en respectant
naturellement la procédure particulière de licenciement s'il s'agit d'un salarié protégé (1).
La rupture du contrat peut également trouver son origine dans le comportement du
gestionnaire initial de l’activité qui, en méconnaissant les formalités de transfert qui s’imposaient en
lui en vertu de l’accord collectif ou du contrat fondant le transfert d’activité, a fait échec au transfert
du contrat de travail du salarié (2).
UV /@* E7=57E:*97*A345E@5* 6??7:*97*E:[7?*97*?@;@E68*9:*>36E*?34*A345E@5*9:*5E@>@6;*5E@4?[8E8*
Refus du salarié et obligation de reclassement avant licenciement par l’exploitant initial.
Le refus du salarié d’être transféré au sein de la nouvelle entité en charge de l’activité publique place
sans nul doute les opérateurs qui ont entendu organiser leur succession dans la gestion de l’activité
dans une situation délicate. L’entreprise initialement en charge de l’activité demeure ainsi
l’employeur du salarié, alors même que l’activité à laquelle était affecté ce salarié aura pu être
confiée à un nouvel opérateur mais sans que l’on puisse parler du transfert d’une entité économique
autonome au sens de l’article L.1224-1 du code du travail. Confrontée à une telle situation, l’entité
précédemment en charge de l’activité publique se trouve dans l’obligation de procéder au
reclassement des salariés ayant manifesté leur souhait de ne pas être transféré vers le nouvel
exploitant, sans pouvoir les licencier, et ce quand bien même l’activité concernée relèverait d’une
784 « Modification du contrat de travail autre que le changement d'employeur : effets de l'opposition du salarié », JCP S. 2010, act. 216, veille sur l’arrêt Cass. soc., 30 mars 2010, SAS Office dépôt c/ Zubiarrain et a., Bull. civ. V, n° 79.
247
convention collective disposant expressément que le refus du salarié ouvre droit au licenciement785.
Adoptant une position résolument protectrice des intérêts des salariés, la Cour de Cassation a ainsi,
par un arrêt du 8 mars 2005786, dénié toute portée aux dispositions conventionnelles relatives au refus
des salariés, et obligé l’entreprise initialement en charge de l’activité à reclasser les salariés
réfractaires au transfert.
L’offre de reclassement peut toutefois ne pas recueillir l’aval du salarié. Dans une telle
hypothèse, l’imputabilité de la rupture dépend alors de la nature de l’activité en cause, et plus
particulièrement de son caractère substantiel au regard du contrat de travail. La Cour de Cassation
considère en effet que « si le refus du salarié de changer d’employeur ne constitue pas en lui-même,
hors le cas du maintien de plein droit du contrat de travail avec le nouvel employeur en application
de l’article L. 122-12 alinéa 2 du code du travail une cause de licenciement, le refus du salarié
d’accepter un changement d’affectation rendu nécessaire par la perte d’un marché, qui ne modifie
pas le contrat de travail, constitue un motif du licenciement »787. Cette position, affirmée à l’occasion
d’un litige opposant une entité assurant des prestations de sécurité pour des centrales nucléaires et un
de ses salariés ayant successivement refusé d’être transféré au service de l’entreprise nouvel
attributaire de contrat de prestations de sécurité puis d’être affecté par son employeur au sein d’un
autre chantier, s’appuie précisément sur le fait que dans ce secteur d’activité, le lieu d’affectation du
salarié n’est pas un élément contractuel comme le prévoit l’article 6 de la convention collective des
entreprises de prévention et de sécurité qui dispose que le salarié est embauché pour un emploi « à
tenir dans un ensemble de lieux et de services correspondant à la nature des prestations
requises »788. Il en résulte que si l’entité qui perd un marché ne peut licencier les salariés qui y
étaient affectés pour ce seul motif, elle peut toutefois procéder à leur licenciement si les propositions
de reclassement789 qu’elles formulent font l’objet d’un nouveau refus.
Licenciement pour motif personnel ou faute. Il s’agira alors d’un licenciement pour motif
personnel, voire pour faute grave, au motif du refus du salarié d’un changement simple de ses
conditions de travail. La qualification de licenciement pour motif économique n’en sera pas autant
totalement exclue mais ne pourra être retenue que dans des hypothèses sensiblement restreintes. Il
pourra en être ainsi dès lors que, compte tenu de l’importance que le marché perdu représentait pour
elle et faute de nouveau client, l’entité précédemment exploitante rencontrerait des difficultés
économiques qui seraient alors de nature à constituer une cause économique de licenciement. De
785 Il en va ainsi de l’accord du 18 octobre 1995 relatif à la reprise du personnel dans le secteur de la prévention et de la sécurité désormais remplacé par l’accord du 5 mars 2002 qui dispose qu’ « en cas de refus de son transfert par le salarié, l’entreprise sortante prendra une mesure de licenciement pour cause réelle et sérieuse fondée sur le refus d’une modification non substantielle du contrat de travail » 786 Cass. soc., 8 mars 2005, pourvoi n° 02-45114, Jurisp. Soc. Lamy 21 juin 2005, n° 170-18 787 Cass. soc. 09 novembre 2005, n°03-45483, Bull. civ. V, n° 315, p. 278. 788 E. SAPENE et C. BOUROUET-AUBERTOT, « Transferts conventionnels : les conventions collectives sont mises à néant par la Cour de cassation », Jurisp. Soc. Lamy 2006, n° 193, p. 4. 789 Il est évident que de telles propositions se doivent d’être conformes à la qualification du salarié et d’être géographiquement raisonnables pour ne pas risquer d’être qualifiées de mutations abusives par les juridictions sociales.
248
même, si le transfert d’activité résulte d’une volonté d’externalisation dans une démarche de
restructuration et de réorganisation de l’entreprise en proie à de profondes difficultés
économiques790. Il convient toutefois de relever que pour être légal, un licenciement pour motif
économique doit en toute hypothèse reposer, pour être fondé, sur une cause économique justificative
exprimant la cause réelle et sérieuse tant au regard des conditions matérielles, telles que la
suppression ou la transformation d'emploi, que des circonstances économiques. Il apparaît dès lors
impératif que l’énonciation des motifs du licenciement obéisse aux prescriptions de l'article L. 1233-
3 du code du travail qui définit le motif économique en précisant, d’une part, l'élément originel ou la
raison économique du licenciement et, d’autre part, la conséquence matérielle de celui ou celle-ci sur
l'emploi ou le contrat de travail791.
La formulation du refus d’un salarié d’être transféré au service d’un nouvel exploitant
d’activité publique dans l’hypothèse d’une application volontaire ou conventionnelle des dispositions
de l’article L. 1224-1 du code du travail ne saurait donc souffrir d’incertitude et oblige chacun des
acteurs au transfert d’activité à en tirer les conséquences. Il incombe ainsi au nouvel exploitant de
prendre acte de l’absence de transfert du contrat de travail et d’inviter le salarié réfractaire à se
rapprocher de son employeur initial pour la poursuite de son contrat ; il appartient ensuite au
précédant exploitant d’assurer le reclassement du salarié, ou à défaut d’acceptation du nouveau poste
de procéder à son licenciement792.
WV /@* E7=57E:* 97* A345E@5* A34?8A756>:* Y* 74* <@4C7:* 9:* 96;6\:4A:* 97*E:=E:4:7E*9:*;0@A56>658*=7B;6C7:*
A l’inverse du caractère d’ordre public des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du
travail, les dispositions d’une convention ou d’un accord collectif prévoyant le transfert des contrats
de travail conditionnent le transfert des contrats de travail au respect de formalités par les opérateurs
économiques qui se succèdent dans l’exercice d’une activité publique. Si ces conditions se trouvent
satisfaites, le nouvel attributaire de la personne publique est alors obligé de reprendre les salariés
affectés à l’activité concernée. En revanche, la question du sort des personnels demeure en suspens
lorsque l’un ou l’autre des opérateurs empêche, par son comportement non diligent, la réalisation de
l’ensemble des conditions exigées. Dans un tel cas, le transfert vers le nouveau gestionnaire de
l’activité ne peut valablement être caractérisé793. Comme nous l’avons toutefois déjà relevé794, la
790 Voir par exemple Cass. soc., 19 décembre 2007, pourvois n° 06-44.379 et n° 06-44.384, Société Polyclinique de Bordeaux Caudéran dite « Clinique des Pins Francs » c/ Dexidour et a., inédit. 791 Ibid, la Cour de Cassation ayant en l’espèce censuré la motivation de la lettre de licenciement d’une clinique se bornant à rappeler le refus du salarié de son transfert sans expliquer l’impossibilité pour elle – pourtant réelle - de le reclasser dans le contexte économique qui était le sien. 792 Ibid., p. 7. 793 La Cour de cassation a rappelé que « si un (accord collectif) met à la charge de l'entreprise entrante l'obligation de se faire connaître auprès de l'entreprise sortante, l'inexécution de cette obligation n'a pas pour effet, en l'absence de
249
Cour de Cassation fait toutefois œuvre de réalisme795 en pareille hypothèse en refusant de considérer
que la méconnaissance de cette obligation d'information fait nécessairement obstacle au transfert796.
Le salarié confronté à une telle situation peut dès lors faire valoir devant les juridictions sociales le
moyen selon lequel la condition non respectée par l’un ou l’autre des exploitants successifs n’est pas
de celle qui puisse s’opposer au transfert effectif de son contrat. Il lui est également possible de
solliciter la réparation du préjudice causé par la perte de son emploi.
Action indemnitaire ouverte à l’encontre de l’un quelconque des exploitants. En effet, le
salarié, qui n’était pourtant pas nécessairement réticent à l’idée de poursuivre ses fonctions au
service du nouveau gestionnaire de l’activité publique, pourra du seul fait du manque de diligence de
son ancien employeur se trouvait privé d’emploi si ce dernier ne peut le reclasser. Dans une telle
situation, contraire à l’esprit des dispositions translatives des contrats de travail instituées dans un but
protecteur des droits du salarié, les juridictions sociales lui reconnaissent la possibilité de demander
l’indemnisation du préjudice ainsi subi, que ce soit auprès de son ancien employeur que du nouveau
gestionnaire de l’activité. Par un arrêt du 2 décembre 2009797, la Cour de Cassation est venue
préciser que « l'action indemnitaire dont dispose le salarié contre l'entrepreneur entrant qui a
empêché sans raison légitime le changement d’employeur n'est pas exclusive de celle qu'il peut aussi
exercer contre l'entrepreneur sortant qui a pris l'initiative de la rupture du contrat, sans préjudice
du recours éventuel de ce dernier contre le nouveau titulaire du marché, si sa carence a fait obstacle
au changement d'employeur ».
Action récursoire de l’exploitant initial contre le nouvel exploitant. A l’inverse de la
solution qui préside en matière de transfert légal où les juridictions sociales offrent au salarié
illégalement licencié la faculté de se retourner contre l’un ou l’autre des gestionnaires successifs798,
le dispositif de réparation retenu en matière de transfert conventionnel semble permettre au salarié
d'agir contre l'une ou l'autre des exploitants, ou contre les deux en même temps, s'il estime que
chacun d’eux a participé pour partie à l’absence de transfert de son contrat. A charge pour chacune
d’entre elles de se retourner contre l’autre, en fonction des responsabilités respectivement imputées
par les juridictions sociales.
∴
disposition conventionnelle réglant les conséquences d'un tel manquement, d'entraîner de plein droit un changement d'employeur » : Cass. soc., 20 mars 2007, pourvoi n° 05-44.962. 794 Voir supra, p. 795 A. FABRE, « Contre qui le salarié peut-il agir en cas d'obstacle au transfert conventionnel de son contrat de travail ? », RDT 2010, p. 166, commentaire sur l’arrêt Cass. soc. 2 décembre 2009, n° 08-43.722, Bull . civ. V, n° 273. 796 Cass. soc., 28 novembre 2007, Bull. civ. V, n° 200, op. cit. 797 Cass. soc. 2 décembre 2009, n° 08-43.722, Bull . civ. V, n° 273. 798 Mais seulement dans l’hypothèse où le salarié a demandé la reprise de son contrat au repreneur et que celui-ci s'y est opposé : Cass. soc., 12 avril 2005, RJS 2005, n° 603.
250
Les modalités de rupture de la relation d’emploi des salariés de droit privé à l’occasion d’une
succession de cocontractants soumis au droit privé du travail se révèlent relativement simples à
mettre en œuvre dès lors qu’elles reposent sur des principes classiques appliqués par les juridictions
sociales aussi bien dans le secteur privé que le secteur public, sans distinction aucune. Il en va
différemment des modalités de rupture des contrats de travail des salariés de droit privé dont l’article
L. 1224-3 du code du travail prévoit normalement le transfert, en raison du particularisme notable de
la procédure instituée par le législateur en une telle hypothèse.
,@E@\E@=G:* WR* /:?* <39@;658?* 9:* E7=57E:* 97* A345E@5* 9:* 5E@>@6;* :4* A@?* 9:*5E@4?[:E5*9:*?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8*>:E?*74:*=:E?344:*=7B;6C7:*
Accepter l’application des dispositions de l’article L.122-12 devenu L. 1224-1 du code du
travail aux hypothèses de reprise en régie d’un service public administratif par la personne publique
ne fut pas chose aisée de la part des juridictions administratives, loin s’en faut. Tirer le plein effet
d’une telle application, notamment sur les règles de licenciement des personnels concernés, ne
suscita pas moins de difficultés. Aux termes d’une construction législative en plusieurs temps et d’un
travail précieux d’interprétation des juridictions sociales, il apparaît désormais possible d’énoncer
avec précision les modalités, manifestement spécifiques, de rupture du contrat de travail en cas de
reprise en régie d’un service public administratif (A). Au-delà des modalités de rupture du contrat
elles-mêmes, la reprise en régie du service public, en ce qu’elle opère un passage d’un régime de
droit privé à un régime de droit public, ne manque pas de soulever des difficultés quant à la
détermination de la compétence juridictionnelle pour connaître des litiges portant sur les contrats nés
de la reprise en régie. Les solutions jurisprudentielles dégagées par le tribunal des conflits demeurent
sur ce point parfaitement stables et s’appuient fort logiquement sur la conclusion effective du contrat
de droit public avec la personne publique nouvel employeur (B).
-* S* +:?* <39@;658?* 9:* E7=57E:* ?=8A6[6C7:<:45* @9@=58:?* =@E* ;:*;8\6?;@5:7E* Y* ;0GI=35Ga?:* 9:* E:=E6?:* :4* E8\6:* 9074* ?:E>6A:* =7B;6A*@9<646?5E@56[*
L’obligation de reprise des contrats de travail en cas de reprise en régie d’un service public
administratif se voit désormais codifiée à l’article L. 1224-3 du code du travail qui dispose qu’« en
cas de refus des salariés d'accepter le contrat proposé, leur contrat prend fin de plein droit. La
personne publique applique les dispositions relatives aux agents licenciés prévues par le droit du
travail et par leur contrat ». Un tel dispositif ne manque pas d’étonner au plan des principes qui
gouvernent normalement la rupture d’un contrat de travail. La seule proposition d’un contrat public
suffit ainsi à opérer une modification substantielle du contrat de nature à permettre au salarié de
251
s’opposer à son changement de statut juridique (1). Mais là n’est pas la seule originalité du dispositif
dans la mesure où le refus du salarié d’accepter le contrat de droit public proposé par la personne
publique marque de jure la rupture du contrat, sans qu’une procédure classique de licenciement n’ait
à être engagée (2).
UV /@*?:7;:*=E3=3?65634*9074*A345E@5*=7B;6A*@??6<6;@B;:*Y*74:*<396[6A@5634*?7B?5@456:;;:*97*A345E@5*37>E@45*9E365*@7*E:[7?*97*?@;@E68**
Avant l’intervention de l’article 25 de la loi n°2009-972 du 3 août 2009, l’article L. 1224-3
du code du travail prévoyait qu’« en cas de refus des salariés d'accepter les modifications de leur
contrat, la personne publique procède à leur licenciement, dans les conditions prévues par le présent
code et par leur contrat ».
Les modifications rédactionnelles ainsi apportées au dispositif s’avèrent en effet majeures,
témoignant d’une volonté du législateur de renforcer les droits du salarié, mais peut être plus encore
de simplifier la gestion d’une reprise en régie par la personne publique799. La modification
substantielle du contrat qui conditionne classiquement le transfert effectif du contrat à l’obtention de
l’accord exprès du salarié800 est ainsi présumée du seul fait du passage du salarié au service d’un
employeur public et de la soumission corrélative à un régime de droit public. Il n’est donc nul besoin
d’apprécier si la rédaction du nouveau contrat de droit public reprend les éléments essentiels du
contrat de droit privé dont relevait précédemment le salarié pour identifier une modification
substantielle du contrat ouvrant droit au refus du contrat par le salarié801. Il en résulte que le salarié
peut parfaitement s’opposer à la conclusion d’un contrat de droit public, quand bien même ce contrat
reprendrait intégralement les stipulations antérieures802. La jurisprudence803 considère ainsi que « le
refus, par le salarié, des conditions d'intégration proposées par la personne publique reprenant
l'entité économique à laquelle il est rattaché, en raison des modifications qu'elles apportent au
contrat de travail en cours au jour du transfert, constitue pour l'employeur public une cause réelle et
sérieuse de licenciement, ne relevant pas des dispositions relatives au licenciement économique, dès
lors qu'il ne lui est pas possible, au regard des dispositions législatives ou réglementaires dont
799 M. MORAND., « Reprise d’une entité économique par un organisme de droit public, sort des contrats de travail », RJS 2011, p. 185 800 Cass soc., 3 mars 2010, n° 08-40.895, op.cit 801 Une telle appréciation s’imposera cependant en cas de contentieux portant sur non pas sur le refus de principe du contrat mais sur le refus pour modification des clauses substantielles du contrat. Dans une telle hypothèse, la procédure différera comme il le sera précisé dans les développements relatifs à la procédure de licenciement qui suivent. 802 M. GARRIGUE-VIEUVILLE M., « Les effets du changement de mode de gestion des services publics sur la situation de leur personnel : mode d'emploi », Dr. adm. 2010, étude 4. 803 P. MORVAN, « Reprise d'activité sous forme de service public », JCP S 2010, n°1056, commentaire sur l’arrêt Cass. soc., 2 décembre 2009, op.cit
252
relève son personnel, de maintenir le contrat de travail de droit privé en cours au jour du transfert
ou d'offrir à l'intéressé un emploi reprenant les conditions de ce contrat » 804.
WV !4:*=E3A897E:*9:*;6A:4A6:<:45*e*/6'!;$)$-'/*f*
L’article L.1224-3 dans sa précédente rédaction évoquait le « licenciement » du salarié
opposant son refus au transfert. Il parle désormais de « rupture de plein droit ». Cette évolution
sémantique illustre à notre sens le caractère inéluctable de la fin du contrat en cas de refus de la part
du salarié de se voir transféré au service d’un employeur public et la spécificité d’une telle rupture
vis à vis des hypothèses classiques de licenciement. En recourant à cette formulation, qui n’est pas
sans rappeler le droit de la fonction publique805, le législateur a certainement cherché à écarter les
doutes suscités quant à la procédure de licenciement applicable dans une telle hypothèse. Le droit du
travail ne connaît en effet que deux types de licenciement : le licenciement pour motif personnel et le
licenciement pour motif économique, chacun disposant d’une procédure spécifique qui en
conditionne la légalité. Par un arrêt du 30 septembre 2009806 fortement attendu tant par la doctrine
que les acteurs d’une reprise en régie d’un service public administratif, la chambre sociale a apporté
de précieux éclaircissements sur l’interprétation à donner à la notion de licenciement telle que prévue
à l’article L.1224-3, et désormais à la notion de rupture de plein droit807, en érigeant le refus du
contrat de droit public en un motif autonome de licenciement808. Elle considère ainsi que « si le
licenciement d’un salarié qui refuse un contrat de droit public doit être prononcé dans les conditions
prévues par le code du travail, le refus de changer de statut opposé par le salarié constitue à lui seul
une cause de licenciement ».
Une telle précision de la part de la Cour de cassation ne fait cependant pas disparaître, à
notre sens, la possibilité d’un licenciement pour cause réelle et sérieuse résultant d’une modification
substantielle des clauses du contrat. Certes, comme nous l’avons précédemment expliqué, il n’est nul
besoin dans le cadre du nouveau dispositif de l’article L. 1224-3 du code du travail d’apprécier si la
rédaction du nouveau contrat de droit public reprend les éléments essentiels du contrat de droit privé
dont relevait précédemment le salarié pour identifier une modification substantielle du contrat
ouvrant droit au refus du contrat par le salarié. Une telle appréciation peut cependant venir à
s’imposer dans l’hypothèse où le salarié n’oppose son refus qu’au motif que le contenu se trouve
profondément bouleversé par la personne publique, et non du seul fait que son nouvel employeur se
804 Cass. soc., 2 décembre 2009, n° 07-45.304, Bernard c/ Communauté d'agglomération Toulon Provence Méditerranée et a., Bull. civ. V, n° 270. 805 D. JEAN-PIERRE, « Le refus des salariés en cas de « remunicipalisation » d’un service public administratif », JCP A 14 mars 2011, n°11, p. 2102. 806 Cass soc., 30 septembre 2009, Fondation santé des étudiants de France, Bull. civ. 2009, V, n° 212. 807 Nous nous rangeons ici à l’avis de nombreux commentateurs selon lequel la portée de l’arrêt du 30 septembre 2009, rendu sous l’empire de la précédente rédaction de l’article L. 1224-3 du code du travail, n’est pas remise en cause par les modifications apportées par la loi du 3 août 2009. 808 S. BEAL et C. TERRENOIRE, « Le sort des salariés transférés à une entité de droit public dans le cadre d’un service public administratif », JCP A 2010, n°1021.
253
trouve être une personne publique. Comme le soulignait le conseiller Bailly, « il subsiste un moyen
de contestation sur la valeur des propositions faites par la personne publique au regard des
possibilités qui s’offrent à elle et des conditions d’engagement antérieurs ». La résolution d’un litige
dans une pareille hypothèse s’avèrera nécessairement plus complexe, et appellera l’intervention à
titre préjudicielle des juridictions administratives809. De la même manière, le licenciement sans cause
réelle et sérieuse devrait également avoir vocation à régir les hypothèses où la personne publique ne
satisfait pas à son obligation de proposition de contrat de droit public au salarié repris.
La mise en œuvre d’une procédure de licenciement en application de l’article L. 1224-3 du
code du travail implique donc d’appliquer « les dispositions relatives aux agents licenciés prévues
par le droit du travail et par leur contrat ». Seuls sont dès lors visés le versement d’une indemnité de
licenciement légale, conventionnelle ou contractuelle et le préavis de licenciement légal,
conventionnel ou contractuel. Toutefois, la réalisation de ce dernier ne devrait selon toute
vraisemblance pas s’imposer si l’on se réfère à la position classiquement adoptée par la Cour de
Cassation en matière de modification substantielle du contrat et selon laquelle la rupture du contrat
né du refus du salarié d’en accepter une modification substantielle dispense le salarié d’effectuer son
préavis810.
Quant au droit à l’allocation d’aide au retour à l’emploi qui n’est en principe ouvert, en
application de la convention Unedic du 19 février 2009, qu’aux salariés involontairement privés
d’emploi, il devrait pouvoir être reconnu aux salariés affectés à une activité de service public
administratif repris en régie en dépit du fait que la rupture du contrat trouve sa source dans leur refus
du salarié de conclure le contrat de droit public proposé par la personne publique. En effet, à l’instar
des transferts conventionnels, un tel refus n’est nullement assimilable à une démission du salarié811.
Comme le souligne fort justement Didier Jean-Pierre, « il paraît difficile d’imputer l’origine de la
rupture du contrat au salarié sans dénier l’un des droits les plus importants qui lui soient reconnus à
savoir celui de refuser la modification de son contrat »812.
∴
Au-delà de la procédure de licenciement stricto sensu, la rupture de la relation d’emploi d’un
salarié de droit privé affecté à une activité de service public administratif repris en régie par la
personne publique impose de s’attarder un instant sur la question essentielle de la compétence
juridictionnelle en cas de litige.
809 Voir supra, p. 286. 810 Cass soc., 5 octobre 1999, Compagnie générale de chauffe c. / Lhomme et a., pourvoi n°97-42.302, JCP G 1999 IV p. 2896, JCP E 1999, p. 1805 ; Cass soc. 29 octobre 2003, Société Tomecanic SA, pourvoi n°01-43.119. 811 Cass soc., 2 décembre 2009, Bull. Civ. V, n° 270. 812 D. JEAN-PIERRE, « Le refus des salariés en cas de « remunicipalisation » d’un service public administratif », JCP A 2011, n° 2102, op.cit.
254
N*S*/@*A3<=85:4A:*`7E696A56344:;;:*=37E*A344@n5E:*9:?*;656\:?*48?*9:*;@*E:=E6?:*:4*E8\6:*985:E<648:*=@E*;@*4@57E:*97*A345E@5*9:*5E@>@6;**
Permanence du lien juridique de nature privée entre l’employeur et le salarié à l’issue de
la reprise en régie La reprise d’une activité de service public administratif par une collectivité
publique implique, selon le souhait du législateur, la conclusion d’un contrat de droit public. De
salarié de droit privé soumis aux dispositions du code du travail et relevant des juridictions
judiciaires pour les litiges relatifs à la conclusion et à l’exécution de son contrat, l’agent devient alors
contractuel de droit public soumis aux dispositions réglementaires applicables aux agents non
titulaires de la fonction publique et relevant de la compétence des juridictions administratives pour
les litiges relatifs à la conclusion et l’exécution de son contrat. La mutation est considérable. Elle
soulève dès lors la question du point de départ du changement de régime et partant de compétence
juridictionnelle. Il résulte des précisions apportées par le tribunal des conflits − fortement sollicité
sur cette problématique − et les juridictions judiciaires et administratives que le salarié demeure lié à
l’employeur public par un contrat de droit privé tant que la conclusion d’un contrat de droit public,
imposée par l’article L. 1224-3 du code du travail, n’est pas effective. L’article L. 1224-3 du code du
travail prévoit en effet que la personne publique « propose » un contrat de droit public. Une telle
proposition n’est pas nécessairement concomitante à la reprise en régie du service par la personne
publique, bien au contraire. Un temps de latence existe évidemment en pratique, durant lequel le
contrat de droit privé subsiste. Au cours de cette période transitoire, le nouvel employeur public
continue cependant « à rémunérer les salariés transférés dans les conditions prévues par leur
contrat de droit privé jusqu’à ce que ceux-ci acceptent le contrat de droit public qui leur sera
proposé ou jusqu’à leur licenciement s’ils le refusent813 ». Si des litiges surviennent à ce stade de la
reprise en régie, ils relèvent, en application d’une jurisprudence abondante et constante814 du tribunal
des conflits, des juridictions judiciaires. La reprise de l’activité de service public administratif par la
personne publique n’emporte en effet pas, par elle-même, modification de la nature juridique du
contrat de travail de l’agent repris.
Conclusion d’un contrat de droit public, point de départ de la compétence des juridictions
administratives. Le Tribunal des conflits, considère ainsi que « tant que le nouvel employeur public
n’a pas placé les salariés dans un régime de droit public ; (…) le juge judiciaire est par suite seul
compétent pour statuer sur les litiges nés du refus de l’un ou l’autre des deux employeurs de
poursuivre l’exécution de ce contrat de travail, qui ne mettent en cause, jusqu’à la mise en œuvre du
régime de droit public (…) que des rapports de droit privé815 ». Compétent pour les litiges antérieurs
813 Cass soc. 1er juin 2010, Bull. Civ. V, n° 120, Sem. Soc. Lamy, 28 juin 2010, n°1452, note M. HAUTEFORT. 814 CE, 4 avril 2005, Commune de Reichshoffen, req. n°258543, Dr. adm. 2005 n°6, comm. E. GLASER n°91 ; Cass soc. 12 juin 2007, Chambre de commerce et d’industrie du Var c./ Jérôme et autres, Bull. Civ. V, n° 96. 815 TC, 19 janvier 2004, Devun et autres c./ Commune de Saint-Chamond, req. n°3393, p. 509, Dr. soc. 2004, p. 433, note A. MAZEAUD ; JCP. A. 2004, p. 1238, note M.-C. ROUAULT ; AJDA 2004, p. 432, Chron. F. DONNAT et D. CASAS ;
255
à la conclusion du contrat de droit public, le juge judiciaire – le juge prud’hommal en l’occurrence –
ne peut néanmoins connaître de la requête d’un salarié de droit privé portant sur l’appréciation de la
proposition de contrat de droit public par la personne publique816. Il ne peut que, et seulement en cas
de difficulté sérieuse, surseoir à statuer en invitant les parties à saisir le juge administratif d'une
question préjudicielle portant sur la conformité des offres faites par le nouvel employeur public aux
dispositions législatives et réglementaires.
∴
Evoquer la rupture de la relation d’emploi d’un agent public à l’occasion de l’évolution
d’une activité publique, dans une volonté de parallélisme des développements, eut pu paraître a
priori quelque peu antinomique. Il est certain en effet que la relation d’emploi de l’agent public se
révèle bien plus pérenne que celle des salariés de droit privé qui se trouvent, par principe et en vertu
des dispositions du code du travail, confrontée à un potentiel licenciement dès lors que les conditions
en sont réunies. Si les agents publics s’inscrivent dans un contexte juridique différent, il ne saurait
pour autant être totalement éludé dans le cadre de la présente étude l’examen des modalités de
gestion des agents publics dont le transfert n’interviendrait pas à l’issue de l’évolution d’une activité
publique, dès lors d’ailleurs que l’hypothèse d’un licenciement n’est pas totalement exclue.
':A5634* W* S* /:?* <39@;658?* 9:* \:?5634* 9:?* @\:45?* =7B;6A?* 434* 5E@4?[8E8?* Y*;06??7:*9:*;08>3;75634*90@A56>658*
A l’instar des salariés de droit privé, les agents publics peuvent ne pas être ou ne pas vouloir
être transférés corrélativement au transfert d’activité à laquelle il était précédemment affecté. Des
questions similaires à celles soulevées à l’égard des salariés de droit privé se font alors jour : qui de
l’entité initialement compétente ou de l’entité nouvellement gestionnaire doit assumer le
reclassement ou le licenciement – qui n’est pas totalement étranger à la fonction publique comme
nous le verrons – de l’agent public concerné ? Elles appellent des réponses différentes selon les
hypothèses en présence.
,@E@\E@=G:* UR* /:?* <39@;658?* 9:* E7=57E:* 9:* ;@* E:;@5634* 90:<=;36* ;3E?* 9074*5E@4?[:E5*9:*A3<=85:4A:?*:45E:*A3;;:A56>658?*=7B;6C7:?*
Les modalités de la rupture de la relation d’emploi consécutive au transfert de compétences
entre collectivités publiques différent sensiblement selon que le transfert des compétences s’opère de confirmé par TC, 21 juin 2004, Commune de Saint-Léger-sur-Roanne c/ Mmes Desbordes, req. n°3415 ; TC, 29 décembre 2004, Mme Durand c./ Centre hospitalier régional de Metz-Thionville, p. 524, Coll. Terr. Interco. 2005, n°3, commentaire G. PELISSIER n°44. 816 Cass soc. 1er juin 2010, pourvois n°09-40.679, op.cit
256
l’Etat vers les collectivités territoriales dans le cadre de la décentralisation ou d’une collectivité
territoriale – ou un établissement public de coopération intercommunale – vers un établissement de
coopération intercommunale. Si dans la première hypothèse, la problématique se révèle sans objet
dans la configuration retenue pour les derniers transferts de compétences opérés, notamment à partir
de l’acte II de la décentralisation (A), la seconde hypothèse appelle des réponses bien plus variées,
témoignant de la disparité des mécanismes de transferts des agents mis en place (B).
-* S* !4:* =E3B;8<@56C7:* ?@4?* 3B`:5* ;3E?* 9:?* 9:E46:E?* 5E@4?[:E5?* 9:*A3<=85:4A:*9:*;0%5@5*>:E?*;:?*A3;;:A56>658?*5:EE653E6@;:?*
Plusieurs lois sont intervenues au cours de la dernière décennie817 pour opérer le transfert de
compétences de l’Etat, au bénéfice - ou au détriment selon les avis - des collectivités locales, en
prenant soin d’organiser concomitamment le transfert des personnels affectés aux services transférés.
Une telle appréhension du transfert de l’activité dans la globalité de ses effets à l’égard des moyens
matériels, financiers et humains, outre la simplicité des modalités de transfert des agents qu’elle
implique, présente au surplus l’avantage pour l’Etat d’emporter le transfert complet et obligatoire de
l’ensemble des agents, rendant dès lors sans objet la problématique des modalités de rupture
éventuelle de la relation d’emploi de ces agents.
Le mécanisme de transfert retenu à savoir la mise à disposition de plein droit des agents au
service de la compétence transférée n’offre ainsi aucune possibilité aux agents dont la compétence
est transférée de s’opposer à leur propre transfert, sauf bien évidemment à présenter leur démission
et ce quelque soit leur statut – fonctionnaire comme agent non titulaire – ou les modalités d’exercice
de leurs fonctions – en totalité ou pour partie seulement – au sein de l’activité transférée. La seule
faculté qui leur est offerte ne porte ainsi que sur la possibilité de choisir leur régime juridique au sein
de la collectivité territoriale nouvellement compétente en optant soit pour le maintien de leur statut
de fonctionnaire ou d’agent non titulaire de l’Etat par la voie du détachement sans limitation de
durée, soit pour le passage au statut de fonctionnaire ou d’agent non titulaire de la fonction publique
territoriale par l’intégration d’un cadre d’emplois volontairement adapté. *
817 On pourra citer, de manière non exhaustive, les lois les plus significatives en termes de compétences et de contingents concernés : loi n°82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions (J.O. du 3 mars 1982, p. 730) ; loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (J.O. du 17 août 2004, p. 14545) ; loi n° 2009-1291 du 26 octobre 2009 relative au transfert aux départements des parcs de l'équipement et à l'évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers (J.O. du 27 octobre 2009, p. 18097).
257
N*S*+:?*?3;75634?*<7;56=;:?*;3E?*9:*5E@4?[:E5?*9:*A3<=85:4A:?*>:E?*74*85@B;6??:<:45*9:*A33=8E@5634*645:EA3<<74@;:*
L’hypothèse d’un transfert de compétences vers un établissement public de coopération
intercommunale figure à n’en pas douter parmi celles où la question du transfert corrélatif des agents
publics affectés à la compétence concernée se révèle la plus délicate. Délicate en ce qu’elle implique
parfois de priver la collectivité d’origine d’effectifs qui lui sont précieux. Délicate ensuite parce
qu’elle traduit en moyens humains la perte d’une compétence par la collectivité d’origine. En
témoignent la pluralité – pour ne pas dire la complexité – des différents dispositifs imaginés par le
législateur depuis 2004. Rien d’étonnant dès lors que les modalités de rupture de la relation d’emploi
des agents publics non transférés à l’issue du transfert de compétence soient elles-aussi très diverses,
selon qu’il existe ou non une obligation de transfert des agents concernés (1) et selon le statut de
l’agent concerné, titulaire ou non titulaire (2).
UV !4*5E@65:<:45*96[[8E:4A68*:4*[34A5634*9:*;0:Z6?5:4A:*9074:*3B;6\@5634*9:*5E@4?[:E5**
En cas de transfert de compétences d’une collectivité territoriale ou d’un établissement
public de coopération intercommunale vers un (autre) établissement de coopération intercommunale,
le législateur a pris soin d’envisager deux catégories de personnels et de leur réserver un sort quelque
peu différent. Aux termes de l’article L. 5211-4-1 du code général des collectivités territoriales, les
agents exerçant en totalité leurs fonctions au sein du service transféré « basculent » ainsi
automatiquement au service de la nouvelle structure intercommunale compétente. En revanche, les
agents exerçant pour partie seulement leurs fonctions au sein du service transféré sont mis à
disposition de la nouvelle structure intercommunale, dans le cadre d’une convention conclue entre
les communes et l’établissement de coopération intercommunale nouvellement compétent.
Dès lors, la question de la rupture de la relation d’emploi des agents publics affectés à une
compétence transférée vers un établissement public de coopération intercommunale n’a vocation à se
poser qu’à l’égard des seuls fonctionnaires territoriaux et agents non titulaires n’exerçant que pour
partie leurs fonctions au service de l’activité transférée, eu égard au droit d’opposition qui leur est
offert par le recours au mécanisme de la mise à disposition. Face au refus de l’agent public concerné,
il appartient alors à la collectivité d’origine – dont l’agent réticent continue de relever faute d’accord
sur son transfert vers la structure intercommunale – de prendre les dispositions nécessaires, en
fonction du statut de l’agent concerné818. L’article L. 5211-4-1 du CGCT prévoit d’ailleurs qu’ « en
cas de refus, (ces agents) sont de plein droit et sans limitation de durée mis à disposition, à titre
individuel et pour la partie de leurs fonctions relevant du service ou de la partie transféré, du
818Bercy colloc Intercommunalité > Guide de l'intercommunalité - Statut du personnel et des élus > Le personnel
258
Président » de l’établissement public de coopération intercommunale. Il précise en outre désormais,
ce qui était implicite, que ces agents sont placés pour l’exercice de cette partie de leurs fonctions,
sous l’autorité fonctionnelle de ce dernier.
WV !4*5E@65:<:45*96[[8E:4A68*:4*[34A5634*97*?5@575*9:*;0@\:45***
Dans la mesure où l’emploi, qui ne correspond plus à son besoin, a vocation à être supprimé,
la collectivité d’origine se doit de régler le sort de l’agent qui dépend de sa qualité de fonctionnaire
ou d’agent non titulaire.
Confronté au refus d’un agent titulaire d’exercer ses fonctions auprès de la nouvelle structure
intercommunale, la collectivité d’origine peut alors proposer, et non imposer, sa mutation à l’agent
titulaire concerné. Elle peut également le placer en surnombre dans ses effectifs pour une période
d’un an, à l’issue de laquelle l’agent relèvera le cas échéant du CNFPT ou du centre de gestion dans
le ressort duquel se trouve la collectivité, conformément aux dispositions de l’article 97 du statut de
la fonction publique territoriale819. Ce n’est qu’à l’issue de trois refus consécutifs d’affectation que la
collectivité se verra dans l’obligation de procéder au licenciement de l’agent, dans le respect des
règles procédurales prévues par le décret n°88-145 du 15 février 1988 relatif aux agents non titulaires
de la fonction publique territoriale820.
La résolution du sort des agents non titulaires sera empreinte d’un plus grand manichéisme.
Soit la collectivité d’origine est en mesure de proposer un autre emploi à l’agent non titulaire non
concerné, soit elle procède au licenciement après avoir pris soin de prononcer par délibération de son
assemblée délibérante, la suppression de l’emploi correspondant821.
∴
A l’instar des modalités de gestion des personnels de droit public en cas de non transfert vers
une autre personne morale de droit public, organisées dans le cadre des règles classiques de la
fonction publique, les modalités de gestion des agents publics en cas de transfert de l’activité
publique vers une entité soumise au droit privé du travail s’inscrivent dans un cadre relativement
similaire.
819 Article 97 de la loi précitée n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale tel que modifié par la loi précitée n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique. 820 Décret n°88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale tel que modifié par le décret n°2007-1829 du 24 décembre 2007 (J.O. du 28 décembre 2007). 821 CAA Versailles, 10 février 2005, Commune de Monfort-l’Amaury, req. n° 02VR01196.
259
,@E@\E@=G:*WR*/:?*<39@;658?*9:*\:?5634*9:?*@\:45?*=7B;6A?*434*5E@4?[8E8*:4*A@?*9:*5E@4?[:E5*9074:*@A56>658*=7B;6C7:*>:E?*74:*=:E?344:*<3E@;:*9:*9E365*=E6>8*
L’absence de transfert d’un agent public vers une personne morale de droit privé reprenant
l’exploitation d’une activité auparavant exercée par une personne publique, qu’elle trouve son
origine dans une modification du périmètre de l’activité confiée au nouvel exploitant ou dans le refus
du salarié de changer d’employeur, implique de s’interroger sur le sort de cet agent une fois l’activité
à laquelle il était affecté transférée. Notons toutefois qu’une telle problématique ne concerne en
pratique que des hypothèses résiduelles, en raison de l’attention accordée par les acteurs – et souvent
entérinée par le législateur – pour limiter les possibilités de refus des agents concernés par une
atténuation sensible des effets du transfert sur les agents et/ou la mise en place de dispositifs d’ordre
public. Seules les hypothèses où le transfert de l’agent public prend la forme d’une mise à disposition
soumise à l’accord de l’agent soulèvent ainsi une telle question (A), les hypothèses où le transfert
s’opère par voie de mise à disposition de plein droit ou en position d’activité étant bien évidemment
dispensées d’une telle préoccupation (B).
-*S*+:?*<39@;658?*9:*\:?5634*9:*;0@\:45*=7B;6A*:4*9:7Z*5:<=?*:4*A@?*9:*434*5E@4?[:E5*>:E?*;:*437>:;*:Z=;365@45*=E6>8**
En ce qu’il emporte une modification substantielle de son contrat, le changement de nature
du gestionnaire de l’activité publique offre la possibilité à l’agent dont le transfert est envisagé de
formuler son désaccord à une telle mutation. Si cet agent présente la qualité d’agent public titulaire,
la personne publique qui l’employait jusqu’alors se doit alors de le réintégrer dans ses effectifs (1).
Ce n’est qu’à défaut d’une possibilité de reclassement ou si l’agent public revêt la qualité d’agent
non titulaire de droit public qu’elle peut mettre un terme à la relation d’emploi avec l’agent concerné
(2).
UV /03B;6\@5634*=E8@;@B;:*9:* E86458\E@5634*9:* ;0@\:45*=7B;6A* 5657;@6E:*9@4?*;:?*:[[:A56[?*9:*;0:45658*=7B;6C7:*903E6\64:**
En prenant la décision de confier à un tiers l’exploitation d’une activité de service public
administratif, ou de renouveler un contrat public portant sur un service industriel et commercial
auparavant détenu par un opérateur économique de droit public – une chambre de commerce et
d’industrie par exemple – employant des agents publics pour les missions de service public
administratif, la personne publique s’expose potentiellement au refus des agents publics de passer au
service du nouvel exploitant. Dans une telle hypothèse, elle ne peut en effet imposer ni même
convenir avec le nouvel exploitant que ce dernier assume la charge de la rupture d’emploi
260
consécutive à ces refus. S’il est ainsi loisible à la personne publique d’introduire par voie
contractuelle au sein des documents de consultation et du contrat une clause dédiée imposant au futur
attributaire de reprendre l’ensemble des personnels de droit privé et de proposer un contrat de droit
privé aux agents publics, il ne lui est ainsi toutefois pas permis d’imposer à son cocontractant la
charge des licenciements des agents publics qui pourraient résulter de leur éventuel refus.
D’une part, parce qu’une telle disposition crée incontestablement une distorsion de
concurrence entre les candidats à l’attribution du contrat, selon leur nature. Si un repreneur de droit
privé peut être confronté au refus des agents publics et devoir supporter le coût de leur licenciement,
il en va bien évidemment différemment d’un opérateur économique de droit public pour lequel le
risque d’avoir à supporter des licenciements est réduit à néant par l’obligation de transfert qui pèsent
sur les agents de droit public au même titre que les agents de droit privé822.
L’obligation de reclassement de l’employeur public précédemment gestionnaire de
l’activité transférée. D’autre part, parce qu’un tel refus n’autorise pas le licenciement des agents
publics réfractaires, à l’instar des salariés de droit privé transférés sur le fondement d’un accord
collectif, mais seulement le reclassement des agents publics concernés823. L'article 97 de la loi n° 84-
53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale
organise en effet l’obligation de reclassement des agents titulaires de la fonction publique territoriale
dont le poste est supprimé. La collectivité d’origine doit s’efforcer, dans la mesure, de proposer un
nouveau poste à l’agent public équivalent à ses précédentes fonctions. Les juridictions
administratives se montrent particulièrement attentives dans l’examen des démarches de
reclassement engagées par la collectivité, qui ne peuvent se solder par une rupture du contrat qu’en
cas d’impossibilité avérée de proposer un nouveau poste824. De la même manière, dans le cas de la
création des sociétés aéroportuaires, l’article 7 de la loi du 20 avril 2005 rappelle que « les agents
publics qui refusent de signer ce contrat sont réintégrés de plein droit au sein de la chambre de
commerce et d'industrie concernée ».
Le recours possible de l’agent public illégalement évincé aux procédures d’urgence pour
faire valoir ses droits au traitement et à la réintégration dans son administration d’origine. Il
convient de surcroît de noter les garanties juridictionnelles conférées à l’agent public qui se trouve
confronté au refus de son employeur de le réintégrer. Les juridictions administratives n’hésitent pas à
retenir la recevabilité des procédures d’urgence en pareille hypothèse. Une procédure de référé
suspension à l’encontre d’une décision de refus de reclassement et de versement de la rémunération
afférente a ainsi toutes les chances d’aboutir, sans évidemment préjuger d’un jugement au fond, dès
lors que les deux conditions cumulatives d’urgence et de doute sérieux quant à la légalité de la
822 CE, 26 novembre 2008, req. n° 308053, Région Lorraine, inédit, op. cit. 823 CAA Nancy, 27 mai 2010, CCI TROYES ET DE L’AUBE, req. n°09NC01384, inédit. 824 CE, 4 mai 2011, Commune de Larmor Plage, req. n°338677, concl. B. DACOSTA, tables.
261
décision peuvent se trouver caractérisées825. En premier lieu, l’absence de versement à l’agent public
justifie incontestablement l’urgence dans laquelle il se trouve. Le doute quant à la légalité de la
décision en second lieu dans la mesure où l’absence d’obligation d’ordre public de transfert des
agents publics sur le fondement des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail repose
désormais sur une jurisprudence bien établie. Pour les mêmes raisons, une procédure de référé
provision est parfaitement envisageable826.
WV /@* =3??6B;:* E7=57E:* 9:* ;@* E:;@5634* 90:<=;36* 9:* ;0@\:45* =7B;6A* 434*5657;@6E:* 37* :4* A@?* 906<=3??6B6;658* 9:* E:A;@??:<:45* 9:* ;0@\:45* =7B;6A*5657;@6E:*
La mise en œuvre d’une procédure de licenciement par la personne publique à la suite d’un
transfert de l’activité exercée est envisageable à l’égard des agents non titulaires dès la suppression
de l’emploi d’un agent public (a). Elle est en revanche conditionnée à l’impossibilité de reclasser
l’agent lorsque ce dernier revêt la qualité d’agent public titulaire (b).
@R /@*=3??6B;:*E7=57E:*9:*;@*E:;@5634*90:<=;36*9:*;0@\:45*434*5657;@6E:*9a?*?7==E:??634*9:*;0:<=;36*:Z:EA8*
Si les agents non titulaires de droit public bénéficient à l’instar des agents titulaires du
principe général du droit à reclassement pour inaptitude827, ils ne disposent cependant pas du droit à
reclassement prévu à l'article 97 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 en cas de cessation de
l’activité à laquelle ils sont affectés828. Une telle situation s’explique par la vocation même des
agents non titulaires, par définition recrutés pour un besoin particulier et une durée déterminée. Ils
n’ont dès lors pas vocation à « survivre » à la disparition au sein de la collectivité qui les emploie de
l’activité à laquelle ils sont affectés.
Dès lors, en cas de transfert vers une entité de droit privé de l’activité à laquelle il est affecté
par la personne publique qui l’emploie, l’agent public non titulaire qui refuse le transfert corrélatif de
son contrat de travail s’expose de facto à son licenciement. Le licenciement d’un agent contractuel
peut en effet être légalement décidé à tout moment « dans l'intérêt du service »829, sous réserve bien
évidemment du respect des règles de préavis et du droit à indemnité de licenciement prévues par le
825 Voir par exemple : TA Châlons-en-Champagne, 7 janvier 2009, M. Bachelier c. CCI de Troyes et Aubes, req. n°0802753, inédit. 826 Voir toutefois pour une décision contraire dont nous ne partageons pas l’analyse : TA Châlons-en-Champagne, 1er décembre 2008, M. Bachelier c. CCI de Troyes et Aubes, req. n°0800445, inédit. 827 CAA Paris, 5 octobre 2004, Makiadi Manza, req. n° 02PA02622. 828 CE, 3 février 2003, req. n° 234156, inédit. 829 CE, 17 octobre 1984, Judlin, Rec. p. 332.
262
décret n°88-145 du 15 février 1988830 relatif aux agents non titulaires de la fonction publique
territoriale.
Outre le respect des droits de l’agent, la légalité de la procédure de licenciement enclenchée
par la personne publique est au surplus conditionnée par le respect des règles « administratives »
prévues par la loi du 26 janvier 1986 relatives à la création et la suppression des emplois par
l’autorité délibérante de la collectivité dont l'article 34 de la loi du 26 janvier 1984 pose le principe
selon lequel « les emplois de chaque collectivité ou établissement sont créés par l'organe délibérant
de la collectivité ou de l'établissement ». Le licenciement d’un agent public non titulaire à la suite de
l’attribution d’un contrat de délégation de service public confiant une activité jusqu’alors assurée en
régie par la personne publique ne peut en conséquence intervenir qu’après que l’autorité délibérante
de la personne publique compétente a préalablement supprimé son poste831.
BR* /@*=3??6B;:* E7=57E:*9:* ;@* E:;@5634*90:<=;36* 9:* ;0@\:45* 5657;@6E:*@=Ea?*5E36?*E:[7?*E8=858?*9:*E:A;@??:<:45*
Si le reclassement n’est pas possible, l’agent est placé en surnombre pendant une durée d’un
an. A l’issue de ce délai, et suivant la catégorie et le cadre d’emploi dont relève l’agent, il est pris en
charge par le centre national de la fonction publique territoriale ou le centre de gestion dans le ressort
duquel se trouve la collectivité. L’agent, qui continue alors à être rémunéré par le CNFPT ou le
centre de gestion pour partie grâce à une contribution de la collectivité d’origine, se voit proposer des
emplois correspondant à son grade, sous réserve que, lorsque l'agent appartient à la catégorie C ou à
la catégorie D, ces emplois doivent se situer dans le département, ou dans un département
limitrophe832. Ce n'est que lorsque le fonctionnaire a refusé trois emplois qui lui étaient proposés,
qu'il peut alors être licencié, ou admis à la retraite s'il peut bénéficier de la jouissance immédiate de
ses droits à pension.
S'inspirant du licenciement pour suppression d'emploi dans la fonction publique territoriale
et dans la fonction publique hospitalière833, le législateur a imaginé une nouvelle procédure qui vise à
accompagner les fonctionnaires dont le service d'affectation fait l'objet d'une restructuration834.
L’article 7 de la loi du 3 août 2009835 a ainsi créé une nouvelle hypothèse de licenciement après une
période de disponibilité : en cas de suppression d'un emploi dans la fonction publique de l'État,
l'Administration pourra engager le fonctionnaire qui occupe cet emploi dans la voie de la
830 Décret n°88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale tel que modifié par le décret n°2007-1829 du 24 décembre 2007 (J.O. du 28 décembre 2007). 831 CAA Versailles, 10 février 2005, Commune de Monfort-l’Amaury, req. n° 02VR01196, op. cit. 832 P. ROUSSELLE, « Fonction publique territoriale - Recrutement et carrière des agents », J.-Cl. Fonction publique, Fasc. 195, n° 212. 833 Statut général, Titre IV, art. 93 834 A. TAILLEFAIT, « RECRUTEMENT ET CESSATION DES FONCTIONS - Cessation des fonctions », J.-Cl. Fonct. Pub., Fasc. 240, n°120. 835 Loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique, op. cit.
263
réorientation professionnelle. Notons que le Conseil Constitutionnel, saisie d’une question prioritaire
de constitutionnalité par décision de renvoi du Conseil d’Etat836 a considéré la réorientation des
fonctionnaires conforme à la Constitution837. Le décret n° 2010-1402 du 12 novembre 2010 relatif à
la situation de réorientation professionnelle des fonctionnaires de l'État838 a quant à lui précisé qu'en
l'absence de possibilité de réaffectation sur un emploi correspondant à son grade, le placement en
réorientation professionnelle oblige le fonctionnaire à suivre l'ensemble des actions
d'accompagnement prévues par son projet personnalisé d'adaptation à l'emploi. Il peut être amené à
refuser trois emplois publics correspondant à son grade et au projet d'évolution professionnelle, c'est-
à-dire ceux d'entre eux qui ont un niveau de qualification comparable et correspondent à l'ancienneté
acquise. Ce n’est qu’alors que l'Administration peut placer l'agent en disponibilité d'office, « pendant
une durée indéterminée ». L’agent perd alors ses droits à rémunération, à avancement et à la
retraite839 et peut être licencié pour suppression d'emploi840.
N* S* !4:* =E3B;8<@56C7:* E8?697:;;:* :4* A@?* 9:* 5E@4?[:E5* :4* =3?65634*90@A56>658*37*<6?:*Y*96?=3?65634*9:*=;:64*9E365*
A l’instar des transferts de compétences de l’Etat vers les collectivités territoriales opérés au
cours de la dernière décennie, la plupart des transferts d’activité d’une personne publique vers une
personne morale de droit privé, et notamment les sociétés à capitaux entièrement ou majoritairement
publics, qui sont intervenus dans le domaine des « grands » services publics industriels et
commerciaux ces dernières années ont emporté le transfert corrélatif des personnels privés et publics
attachés, sans possibilité d’opposition de ces derniers par le recours à des mécanismes de
détachement sans limitation de durée en position d’activité ou de mise à disposition de plein droit.
Qu’il s’agisse des agents de France Télécom ou de la Poste demeurés en position d’activité
au sein des sociétés de droit privé à titre profondément dérogatoire aux règles d’emploi de la
fonction publique ou des agents publics de l’Agence nationale pour l’emploi841 transférés au sein de
Pôle Emploi, le transfert vers l’entité nouvellement compétente a été de droit.
Seules les créations de sociétés aéroportuaires et portuaires se sont accompagnées de
dispositifs ouverts, liés au contexte social de ces deux secteurs et à l’impossibilité pour le législateur
d’opérer de telles réformes sans recueillir l’assentiment des personnels concernés. C’est ainsi que
836 CE, 4 avril 2011, UGS fonctionnaires CGCT, FSU et a., req. n° 345767. 837 CC., 17 juin 2011, déc. n° 2011-134 QPC, UGFF-CGT et a. 838 Décret n° 2010-1402 du 12 novembre 2010 relatif à la situation de réorientation professionnelle des fonctionnaires de l'État (J.O. du 16 Novembre 2010) ; E. MARC, « La fin non assumée de la garantie de l'emploi des fonctionnaires et/ou l'émergence d'un droit individuel à la reconversion professionnelle », AJDA 2011, p. 162 ; A. FITTE-DUVAL, « La situation de réorientation professionnelle, ou les deux visages de Janus », AJFP 2011, p. 156. 839 Ibid., article 10. 840 Ibid., article 10, al. 3. 841 L’article 7 de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi (J.O. du 14 février 2008, p. 2712) prévoit ainsi qu’ : « à la date de création de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail, les agents de l'Agence nationale pour l'emploi sont transférés à celle-ci ».
264
l’article 7 de la loi du 20 avril 2005 portant création des sociétés aéroportuaires a maintenu les règles
classiques de l’obligation de réintégration des personnels réticents à leur transfert. La réforme
portuaire au travers de l’article 9 à 13 de la loi du 4 juillet 2008 s’est également attachée à conserver
la plus grande négociation tout au long du processus de transferts des agents, étant rappelé qu’ils ont
la qualité de salariés de droit privé.
∴
265
21"2/!'#1"*+%*/-*+%!o#%D%*,-&(#%*
Au terme de cette partie, il apparaît que les modalités de transfert des personnels illustrent,
par leur intensité variable, le degré d’intégration de la dimension sociale dans la conduite de
l’évolution de l’activité publique.
A des hypothèses de transfert d’évolution d’activités marquées par leur récurrence, l’ampleur
des effectif concernés et souvent le caractère relativement « balisé » des dispositions qui organisent
le transfert corrélatif des contrats de travail répondent des formalités relativement souples, mues par
une volonté résolument simplificatrice. A l’inverse, les hypothèses de transfert d’évolutions
d’activité inscrites dans un cadre plus ponctuel, et concernant des contingents plus réduits, appellent
un formalisme plus prégnant. Ce constat semble se vérifier quelque soit la nature des agents
concernés, privés comme publics.
L’étude des modalités de transfert des personnels ne constitue cependant qu’une étape
procédurale qui, pour être incontournable, n’en demeure pas moins relativement bien appréhendée et
acceptée par les parties en présence. La question des effets du transfert des personnels provoqué par
l’évolution d’une activité en lien avec une personne publique, que ce soit quant aux effets à l’égard
des personnels eux-mêmes qu’aux effets à l’égard de l’entité qui a vocation à les accueillir, focalise à
n’en pas douter bien davantage l’attention de l’ensemble des acteurs intéressés au transfert de
l’activité. C’est bien en effet dans les conséquences mêmes du transfert des personnels que se
concentrent les enjeux du transfert de l’activité, tant pour la conduite même de l’opération de
mutation dans l’organisation ou la gestion de l’activité en lien avec une personne publique que pour
sa pérennité et la stabilité des relations sociales à long terme pour la nouvelle entité exploitante.
266
!"#$%&'(*
!"#$!"#$%&'(#!($)*'+,-,&'($)-()./)!"#0,#',0%)-()
!"#$%!&'(!"#$%&#'()*+,-./+"#'(-"!#%$./*/.)#
!"#$%&"'*
267
Les conséquences du transfert des personnels focalisent à n’en pas douter l’attention des
acteurs. Les questions de savoir si le transfert des personnels s’impose à l’issue de l’évolution d’une
activité publique et selon quelles modalités ne constituent en réalité qu’un préalableà la résolution de
la question essentielle, celle des conséquences qu’emporte l’évolution de l’activité sur la situation
des acteurs concernés.
Cette vision, volontairement schématique des données du problème mais loin d’être
caricaturale traduit en réalité l’enjeu de la problématique du transfert des personnels lors d’évolution
d’activités publiques qui repose sur la question de savoir quels effets l’évolution d’activité emporte-
t-elle, tant pour l’agent transféré que pour sa structure d’accueil ?
*
268
2G@=65E:*U*S*/:?*A34?8C7:4A:?*`7E696C7:?*9:*;@*A345647658*90:<=;36*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=E6>8*
Instauré dans l’ordre juridique interne dès la première moitié du vingtième siècle, la
législation française relative à l’obligation de reprise des salariés dans le cadre d’une évolution de la
situation juridique d’une entité économique bénéficie d’un cadre juridique bien défini, marqué par
une relative stabilité, et sans cesse précisé tant par le législateur que par les juridictions judiciaires.
Dès lors, notre propos ne sera pas dans le cadre de la présente étude de répéter des éléments
déjà parfaitement analysés par les auteurs spécialisés. Nombre d’ouvrages et de revues se sont ainsi
attachés avec qualité842 à approfondir la question des effets du transfert des personnels, en examinant
avec précision l’ensemble des aspects de cette problématique. Il s’agira en revanche de tirer les
enseignements de ces études principalement envisagées à l’aune des évolutions d’activités privées
pour, d’une part, dégager les principaux axes à examiner lors d’un transfert de personnels de droit
privé et, d’autre part, appréhender ces conséquences dans le cadre spécifique d’évolutions d’activités
publiques (Section 1).
A l’inverse, l’analyse des conséquences sur la situation des personnels de droit privé
transférés dans les effectifs d’une entité publique à l’occasion de la reprise en régie d’un service
public administratif appellera un constat sensiblement différent, pour des raisons elles-aussi
diamétralement opposées. Imposée aux collectivités publiques reprenant en régie une activité de
service public administratif depuis peu seulement843, l’obligation de reprise des personnels de droit
privé souffre incontestablement d’insuffisances quant à la définition de ses conséquences, que les
interventions ultérieures du législateur et des juridictions administratives s’efforcent de pallier
(Section 2).
Précisons enfin que la présente étude n’a pas la prétention de définir de manière exhaustive
et détaillée l’ensemble des conséquences inhérentes au transfert des personnels dans le cadre
d’évolution d’activités publiques. Une telle étude, eu égard à la multiplicité des hypothèses en
présence (nature des entités d’origine, d’accueil, régime juridique des agents, etc.) et à la variabilité
des données en jeu en fonction des secteurs d’activité (grilles de la fonction publique, cotisations
sociales, etc.), n’aurait au surplus à notre sens aucune pertinence dans la résolution de la
problématique qui nous intéresse. Il s’agira au contraire d’établir une véritable grille de lecture, qui
se voudra précise et opérationnelle afin d’offrir aux acteurs intéressés à l’évolution d’une activité
publique les « clés » nécessaires à l’évaluation des conséquences engendrées par une telle mutation.
842 On notera tout particulièrement l’excellent article du Professeur MORVAN relatif aux effets des transferts d’entreprise et aux régimes de protection sociale et la métaphore spatiale employée par son auteur pour illustrer, avec pertinence, la complexité des règles applicables et leur difficile appréhension tant par les praticiens que par les magistrats : MORVAN P., Les transferts d’entreprise et les régimes de protection sociale, Dr. soc. 2005, p. 772. 843 Voir supra, 1ère Partie.
269
':A5634* U* S* /:?* A34?8C7:4A:?* `7E696C7:?* 97* 5E@4?[:E5* >:E?* 74:* =:E?344:*=E6>8:*37*74:*=:E?344:*=7B;6C7:*@\6??@45*:4*5@45*C703=8E@5:7E*8A343<6C7:
Les dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail prévoient que « lorsque survient une
modification dans la situation juridique de l'employeur, (…), tous les contrats de travail en cours au
jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ».
Destinées par essence à traiter le sort de l’ensemble de la communauté salariale d’une entité soumise
à l’évolution de sa situation juridique, elles instituent dans cette perspective un mécanisme translatif
des contrats de travail. La mention expresse relative aux « contrats de travail en cours au jour de la
modification » ne doit cependant pas être entendue strictement et masquer une réalité bien plus riche
quant aux effets du transfert sur la situation du salarié. Pour reprendre les termes du Professeur
Morvan844, le contrat de travail n’est ainsi que « l’un des multiples concepts juridiques qui gravitent
et se télescopent dans l’espace ténébreux et infini de l’impact des transferts d’entreprise sur le régime
du salarié transféré, notamment sur son régime de protection sociale ».
Plusieurs dispositions du code du travail, telles que celles de l’article L. 2261-14, L. 3313-4 ou
encore L. 3323-8, envisagent ainsi les effets d’une modification dans la situation juridique de
l’employeur sur la situation du salarié. De même, la jurisprudence a enrichi les éléments qui
« subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise » des éléments qui composent
traditionnellement le régime juridique du salarié. En effet, la relation de travail entre l’employeur et
le salarié, loin d’être organisée par le seul contrat de travail, puise sa singularité dans la multiplicité
et la diversité des sources qui lui sont applicables. Le droit du travail marque la réunion de diverses
sources classiques - Constitution, lois et règlements - comme spécifiques. C’est ainsi que le
législateur reconnaît la faculté aux acteurs sociaux d'édicter des normes qui constituent ce qu'il est
coutume d'appeler le statut collectif des salariés. Les principales relèvent de la négociation collective,
d'autres de prérogatives unilatérales de l'employeur. Le mécanisme légal de transfert des salariés à
l’occasion d’une modification dans la situation juridique de l’employeur tel qu’interprété par le juge
judiciaire traduit cette dualité de perspectives dans laquelle s’inscrit la relation de travail du salarié.
La modification dans la situation juridique de l’employeur emporte dès lors par définition des effets
sur la situation individuelle du salarié, matérialisée par le contrat de travail (paragraphe 1) mais
également, et de manière certainement plus notable, d’importants effets sur la situation collective du
salarié (paragraphe 2)845.
844 MORVAN P., « Les transferts d’entreprise et les régimes de protection sociale », Dr. soc. 2005, p. 772, op.cit 845 Les développements de la présente section reprennent l’architecture retenue par Patrick MORVAN dans les fascicules du juris-classeur respectivement dédiés aux effets individuels et collectifs des transferts d’entreprise en ce qu’elle nous semble la plus pertinente pour exposer l’ensemble des conséquences qui affectent l’emploi en cas de transfert de salariés : MORVAN P., « Transfert d’entreprise – Effets. Relations individuelles », J.Cl. Travail Traité, Fasc. 19-52 et du même auteur, « Transfert d’entreprise – Effets. Relations collectives », J.Cl. Travail Traité, Fasc. 19-54.
270
Précisons enfin que les effets du transfert des personnels de droit privé dans le cadre d’une
activité de service public industriel et commercial apparaissent, dans leur grande majorité846,
semblables que le transfert s’opère sur le fondement de l’article L. 1224-1 du code du travail ou
d’une convention collective ou d’un accord collectif, de sorte qu’ils seront envisagés la plupart du
temps sans distinction dans les propos qui vont suivre.
,@E@\E@=G:*UR*/:?*A34?8C7:4A:?*97*5E@4?[:E5*?7E*;@*?657@5634*6496>697:;;:*9:?*=:E?344:;?*
Précisant les effets d’un transfert des contrats de travail en cas de modification dans la
situation juridique de l’employeur, l’article L. 1224-2 du code du travail indique que « le nouvel
employeur est tenu, à l'égard des salariés dont les contrats de travail subsistent, aux obligations qui
incombaient à l'ancien employeur à la date de la modification ». Ces obligations ne portent en réalité
que sur les seules dettes de salaires ou d’indemnités de l’ancien employeur nées avant le transfert et
demeurées impayées par le premier employeur, débiteur principal (B). La définition des
conséquences sur les garanties du salarié en raison de l’application de l’article L. 1224-1 du code du
travail résulte quant à elle directement de l’œuvre de la jurisprudence (A).
-*S*!4:*A:??634*97*A345E@5*9:*5E@>@6;*9@4?*537?*?:?*8;8<:45?*
Par l’effet de l’article L. 1224-1 du code du travail, le contrat subsiste avec le nouvel
employeur « dans les conditions mêmes où il était exécuté au moment du changement
d’exploitation »847. En passant au service du nouvel employeur, le salarié emporte ainsi avec lui son
contrat et l’ensemble des garanties qui y sont attachées (1), les avantages qu’il a individuellement
acquis sous l’empire du précédent employeur (2) mais encore les obligations qui en sont les
accessoires indissociables (3). Comme le souligne le Professeur Gabriel GUERY, « non seulement le
contrat de travail est maintenu, mais il l’est dans son contenu et ses modalités. C’est en effet le
même contrat qui se poursuit avec toutes ses composantes, qu’il s’agisse du salaire et de ses
modalités de paiement, de l’objet même des prestations, de leur volume horaire, de leur lieu
d’exécution, de la durée et des conditions de travail »848.
*
846 Nous relèverons, le cas échéant, les différences qui existent à la marge. 847 Cass soc., 13 mai 1982, Bull. Civ. V , n°302 ; Cass soc., 24 janvier 1990, Bull. Civ. V, n°23. 848 G. GUERY, Restructuration d’entreprise en Europe – dimension sociale, De Boeck université, 1999.
271
UV /:*<@6456:4*9:?*\@E@456:?*;68:?*@7*A345E@5*9:*5E@>@6;*
La rémunération, « partie émergée de l’iceberg » constitue, de manière fort compréhensible,
la préoccupation essentielle du salarié lors de l’évolution de l’activité à laquelle il est affecté. Elle ne
peut faire l’objet de modifications sous l’effet du transfert, que ce soit quant à sa date de versement
qu’à l’égard de sa composition, peu importe que le montant global en demeure globalement
inchangé849. De plus, le salarié concerné par un projet de licenciement économique peut opposer
certains droits au cessionnaire. S'il est licencié pour motif économique par le précédent employeur, il
conserve le droit à la priorité de réembauchage qui est transmise au nouvel employeur850. Seuls les
salariés affectés à l'activité transférée peuvent se prévaloir de ce droit auprès du repreneur851. En
outre, le salarié conserve sa qualification852, sa rémunération853, et les accessoires de son contrat de
travail, tel que son logement de fonction si cela est matériellement possible854.
En outre, les dispositions de l’article L.1226-6 du code du travail, qui prévoient que les règles
protectrices d’un salarié victime d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle ne sont
pas applicables lorsque ces évènements sont survenus au service d’un autre employeur, ne
concernent pas les salariés dont le contrat de travail se trouve transféré en application des
dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail ou d’une application volontaire de ces
dispositions. Notons toutefois que la seule perte de marché n’étant pas assimilée par les juridictions
sociales à une application volontaire des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail, les
dispositions de l’article L. 1226-6 du code du travail trouvent alors à s’appliquer, quand bien même
la convention collective en vigueur oblige le repreneur à conserver les salariés à son service. .
WV /:*<@6456:4*9:?*@>@45@\:?*6496>697:;?*@AC76?*
Il peut a priori être étonnant d’évoquer à ce stade de l’étude le maintien des avantages
conventionnels dès lors que sera spécifiquement traitée la question du sort des conventions
collectives et accords collectifs à l’issue d’une modification dans la situation juridique de
l’employeur855. Une telle distinction trouve cependant pleinement sa justification dans la mesure où
l’accord collectif, convention collective comme accord d’entreprise, produit par définition des effets
collectifs reçus individuellement par chacun des salariés, et appliqués in concreto à la situation
personnelle de chacun. Or, sous l’effet de la mise en cause éventuelle d’un accord collectif et de
l’application à son égard de l’accord collectif du nouvel employeur, le salarié peut se voir priver
849 CJCE, 19 novembre 1992, aff. C 209/91, Rec. CJCE 1992, p. 5755, JCP E 1993 II p. 426, note P. POCHET. 850 Cass soc., 26 février 1992, Bull. Civ. V, no 128 ; Cass soc., 7 juillet 1998, pourvoi no 95-43.678 ; Cass soc., 5 février 2002, pourvoi no 99-46.345. 851 Cass soc., 5 mars 2002, Bull. Civ. V, no 85. 852 Cass soc., 4 avril 1990, Bull. Civ. V, no 155. 853 Cass soc., 31 mai 1978, Bull. Civ. V, no 409. 854 Cass soc., 20 mars 1997, Bull. Civ. V, no 119. 855 Voir infra, paragraphe 2.
272
conventionnellement d’un avantage dont il bénéficiait précédemment. Cet avantage, réputé acquis,
ne peut toutefois être véritablement ôté au salarié, et devient alors un avantage individuel acquis,
intégré directement dans la rémunération. Figure au premier rang de ces avantages l’ancienneté du
salarié, qui traduit son intégration pérenne dans l’entreprise. Elle n’implique cependant pas
nécessairement une traduction pécuniaire pour le salarié : aucun texte d'origine légale ou
réglementaire n'impose ainsi le versement d'une prime d'ancienneté856 ou une quelconque majoration
de rémunération. Celles-ci découlent en réalité essentiellement des conventions collectives, de
branche ou d'entreprise qui tentent par là-même de fidéliser les salariés en leur garantissant une
progression de leur salaire selon des critères objectifs préalablement établis. A l’issue du transfert,
l’ancienneté auprès du précédent employeur reste acquise au salarié transféré pour le calcul du
préavis857 ainsi que de l’indemnité de licenciement858.
XV /:*<@6456:4*9:*A:E5@64:?*3B;6\@5634?*@AA:??36E:?*
La clause de non-concurrence, selon laquelle le salarié s’engage à ne pas exercer d’activité
concurrente à compter de la rupture du contrat, produit par essence des effets de droit au moment où
les obligations contractuelles sont normalement éteintes, sans qu’il soit distingué selon le mode de
rupture du contrat ou son motif859. Elle reste parfaitement valable à l’issue du transfert d’activité,
alors même qu’elle a été conclue avec l’employeur initial, ce dernier ne pouvant plus dès lors en
réclamer l’exécution au salarié puisque le contrat de travail a « cessé de produire des effets » entre
eux860.
N*S*!4:*A:??634*9:?*9:55:?*C76*64A3<B:*Y*;0@4A6:4*:<=;3I:7E*?:;34*;:*<39:*9:*5E@4?[:E5*9:*;0@A56>658**
Le transfert du contrat de travail d’un employeur à l’autre à l’occasion d’une modification
dans la situation juridique de l’employeur emporte certes la fin des relations contractuelles entre le
salarié et son ancien employeur. Il ne marque cependant pas l’extinction totale et définitive des
obligations de ce dernier envers le salarié, certaines dettes pouvant ainsi demeurer, notamment en
matière de salaires861, congés payés862, primes863 ou autres indemnités864.
856 Sauf rares cas de survie de la loi no 50-205 du 11 février 1950 relative aux conventions collectives 857 Cass soc., 12 mars 1987, Bull. Civ. V, n°139. 858 Cass soc., 26 mai 1976, pourvoi n°75-40.472. 859 Principalement démission du salarié, licenciement du salarié, ou encore cessation volontaire d’activité de l’entreprise. 860 Cass soc., 8 décembre 1976, Bull. civ. V n°644 ; Cass soc. , 15 octobre 1997, Bull. Civ. V, n°318 ; Cass soc. 27 mars 1968, pourvoi n°67-40.596. 861 Les créances salariales échues antérieurement au transfert incombent désormais au nouvel employeur qui devient codébiteur solidaire : Cass soc. 7 novembre 2006, pourvoi n°05-41722. 862 L’indemnité de congés payés, qui s’acquiert mois par mois, doit être versée en totalité par l’employeur au service duquel le salarié se trouve au moment où s’ouvre la période des congés annuels. S’il s’agit du nouvel employeur, ce dernier peut réclamer au précédant employeur le remboursement de la part de cette indemnité correspondant à la période de travail antérieure au transfert d’entreprise (Cass soc., 2 février 1984, pourvoi n° 82-17.037)
273
Tirant les conséquences d’une telle situation, l’article L. 1224-2 du code du travail prévoit
ainsi que :
« Le nouvel employeur est tenu, à l'égard des salariés dont les contrats de travail subsistent, aux obligations qui incombaient à l'ancien employeur à la date de la modification, sauf dans les cas suivants :
1° Procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire ;
2° Substitution d'employeurs intervenue sans qu'il y ait eu de convention entre ceux-ci.
Le premier employeur rembourse les sommes acquittées par le nouvel employeur, dues à la date de la modification, sauf s'il a été tenu compte de la charge résultant de ces obligations dans la convention intervenue entre eux ».
La préservation des droits du salarié ainsi organisée dans le cadre d’un dispositif de solidarité
légale865 permet d’assurer le transfert corrélatif des obligations de l’ancien employeur lors d’un
transfert d’activité intervenant dans le champ de l’article L. 1224-1 du code du travail, à deux
exceptions. Si la première exception, relative aux procédures de sauvegarde, de redressement ou de
liquidation judiciaire, prévue par le législateur n’emporte aucune conséquence spécifique liée à la
nature publique de l’activité transférée866, la seconde appelle davantage de remarques dans le cadre
de notre propos.
UV /0@B?:4A:* 903B;6\@5634* 9:* A:??634* 9:?* 9:55:?* 9@4?* ;0GI=35Ga?:* 9074:*?7AA:??634*9:*5657;@6E:?*9074*A345E@5*
En conditionnant l’obligation pour le nouvel employeur d’assumer les dettes de son
prédécesseur à l’existence d’une convention entre les employeurs successifs, le dispositif de l’article
L. 1224-2 du code du travail exclut de facto les hypothèses de perte de marché867. Une telle condition
trouve dès lors un écho particulier dans le cadre des transferts de personnels de droit privé dans les
activités publiques industrielles et commerciales, qui interviennent principalement à l’occasion de la
succession de titulaires de contrats publics tels que les marchés publics et les délégations de service
public868. Dans ces hypothèses en effet, le transfert des personnels résulte de la nouvelle attribution à
l’issue d’une procédure de publicité et de mise en concurrence d’un contrat public entre la personne
publique, pouvoir adjudicateur ou autorité délégante, et le titulaire désigné, opérateur économique.
863 L’employeur débiteur est celui qui est en place au jour de l’ouverture du droit à la prime c’est-à-dire lorsque celle-ci devient exigible par le salarié (Cass soc., 18 novembre 1992, pourvoi n°90-44.392). 864 Sans tendre à l’exhaustivité, on pourra évoquer les créances relatives au repos compensateur ou encore les dommages et intérêts pour manquement du cédant aux obligations résultant du contrat de travail tel que le travail illégal le dimanche par exemple (Cass soc., 14 mai 2008, pourvoi n°07-42.341). 865 Comme l’explique le Professeur Morvan, l’article L. 1224-2 ne réduit pas les droits des salariés et ne produit pas l’effet d’une délégation de créances parfaites, de sorte que le salarié conserve la possibilité d’exercer son action en paiement directement à l’encontre du premier employeur (Cass soc., 3 avril 1991, Bull. civ. V, n°164) 866 Pour une application récente, voir notamment CA Grenoble, Ch. Soc., 12 janvier 2011, n°10/02207, à propos de la reprise de l’activité de remontées mécaniques par la Régie autonome des remontées mécaniques de Chamrousse postérieurement à la liquidation judiciaire du précédent délégataire, la société Chamrousse développement. 867 Et également de rupture d’un contrat de distribution commerciale pour reprendre un exemple fréquent en matière d’activités « purement » privées. 868 Voir supra.
274
Dans ce contexte « triangulaire », le transfert s’opère en dehors de toute relation contractuelle entre
les titulaires successifs, de sorte que les dispositions de l’article L. 1224-2-2° s’avèrent applicables.
Et si un lien contractuel existe bien entre le précédant employeur et la personne publique agissant en
qualité de pouvoir adjudicateur ou autorité délégante puis entre cette même personne publique et le
nouvel employeur, ce lien n’a ni pour objet ni pour effet d’emporter le transfert des personnels vers
la personne publique. Celle-ci ne revêt d’ailleurs à aucun moment la qualité d’employeur. En
conséquence, elle ne peut nullement être considérée comme débitrice des obligations de son
précédant cocontractant au sens de l’article L. 1224-2 du code du travail869.
La notion de « convention » au sens de ces dispositions précitées reçoit en effet une
interprétation extrêmement circonscrite de la part des juridictions sociales et s’entend strictement
d’une convention portant directement870 sur la question du transfert des personnels. La chambre
sociale de la Cour de cassation871 a par exemple écarté l’existence d’une telle qualification, et par là-
même constaté l’absence de cession des obligations au nouvel employeur, à une convention conclue
entre deux concessionnaires de transport urbain qui avait pour seul objet « d’alloue(r) une
indemnisation à la société évincée » et de « (mettre) fin au litige entre les parties » à raison de la
résiliation unilatérale du contrat par l’autorité délégante. Notons toutefois que la Cour de Cassation a
pu reconnaître l’existence d’un lien contractuel « artificiel »872, volontairement instauré par deux
employeurs successifs pour se soumettre aux dispositions précitées de l’article L. 1224-2-2° du code
du travail. Il nous semble cependant peu probable que cette voie soit recherchée par les titulaires
successifs d’un contrat public, et notamment par le nouvel employeur exonéré de jure, sauf à ce
qu’elle présente un intérêt d’apaisement des tensions sociales certes parfois prégnantes en matière
d’activités publiques.
A l’inverse, un tel raisonnement nous semble disparaître dans l’hypothèse d’une reprise en
régie de l’activité présentant le caractère d’un service public industriel et commercial.
WV /03B;6\@5634*9:*A:??634*9:?*9:55:?*:4*A@?*9:*E:=E6?:*:4*E8\6:*9:*;0@A56>658*9:*?:E>6A:*=7B;6A*6497?5E6:;*:5*A3<<:EA6@;*
De simple « spectatrice » en tant qu’autorité délégante ou pouvoir adjudicateur, la personne
publique redevient par définition véritable actrice du transfert lors d’une reprise en régie d’un service
public. Elle devient alors le nouvel employeur des salariés transférés à la suite de son précédant
cocontractant, de sorte que les conditions posées au premier alinéa de l’article L. 1224-2 se trouvent
satisfaites. De plus, si en vertu de la liberté de gestion de ses services publics dont elle dispose, la
personne publique décide après avoir « ré-internaliser » l’activité d’en confier à nouveau l’exercice à
869 CA Montpellier, 4ème Ch. soc., 3 novembre 2010, CCI de Sète Frontignan Mèze, n°10/00840. 870 A notre sens, il n’est pas nécessaire que la convention n’aborde que ce seul aspect. 871 Cass soc. 18 novembre 1992, pourvoi n°89-42281, Bull. civ. V, n°549, RJS 1993 n°9. 872 Cass soc., 22 mars 2007, pourvoi n° 05-42093
275
un opérateur économique par contrat, elle doit alors céder les obligations qui incombait à son
précédant cocontractant en application des dispositions du premier alinéa de l’article L. 1224-1 du
code du travail. Une telle solution a pu être retenue dans les activités « purement » privées à propos
de la reprise de possession d’un fonds de commerce par un bailleur et la conclusion postérieure d’un
nouveau bail de location-gérance873. Elle serait à notre sens parfaitement applicable en matière
d’activités publiques874.
∴
Relativement limitées sur la situation individuelle des personnels de droit privé, les
conséquences de l’évolution d’une activité publique se révèlent à l’inverse bien plus profondes à
l’égard de leur situation collective.
,@E@\E@=G:*WR* /:?* A34?8C7:4A:?*97* 5E@4?[:E5* ?7E* ;@* ?657@5634*A3;;:A56>:*9:?*=:E?344:;?*
« L’entreprise ne se compose pas d’une simple juxtaposition de contrats liant chaque salarié
à un employeur875 », « elle est le lieu de rapport collectifs entre le chef d’entreprise et l’ensemble des
salariés876 ». Ces rapports se trouvent réglés en dehors du contrat de travail lui-même, au travers de
règles extracontractuelles négociées par les partenaires sociaux et les instances dirigeantes, ou
simplement imposées par cette dernière. En ce qu’elles sont intrinsèquement liées à l’entreprise où
elles s’exercent, celles-ci sont dès lors tout particulièrement susceptibles de disparaître sous l’effet
du changement de gestionnaire d’une activité publique (A). A l’inverse, les institutions
représentatives du personnel destinées à assurer la mise en œuvre de ces rapports collectifs
bénéficient d’une relative stabilité en dépit de l’évolution de gestionnaires d’une activité publique
(B).
*
873 Cass soc., 18 juin 2002, pourvoi n°00-44.134, RJS 2002, n°1205. 874 Pour un exemple d’examen de cette problématique n’ayant pas conduit à l’application des dispositions de l’article L. 1224-2 du code du travail en raison d’une évolution sensible de l’organisation de l’activité suite à la reprise en régie : CA de Rouen, 7 Septembre 2010, n° 09/04691, 09/04692, 09/04693. 875 M. DESPAX, L’entreprise et le droit, Th. Toulouse 1956, Paris LGDJ ; LYON-CAEN G., Que sait-on de plus sur l’entreprise ?, Mélanges Despax, PU Toulouse, 2002, p. 33. 876 A. MAZEAUD, Droit du travail, Montchestien, 6ème édition, p. 71.
276
-* S* +:?* 43E<:?* :Z5E@A345E@A57:;;:?* C76* =:7>:45* =@E* :??:4A:* ]5E:*98434A8:?*=@E*;:*437>:;*:Z=;365@45*9:*;0@A56>658*=7B;6C7:*
Ces rapports collectifs se trouvent organisés par la voie de la négociation sociale entre
partenaires sociaux (1) ou unilatéralement par l’employeur lui-même en vertu de son pouvoir de
direction (2). Intrinsèquement liés au précédent gestionnaire, soit en raison de l’activité principale
exercée par ce dernier soit qu’il en soit directement l’auteur, ces normes se révèlent directement
affectées, de manière plus ou moins intense, par l’évolution dans la gestion d’une activité publique.
UV +:?*43E<:?*A3;;:A56>:?*<@645:47:?*Y*565E:*5E@4?6536E:*
La convention collective, dont la vocation est de traiter l'ensemble des conditions de travail
et d'emploi comme des garanties sociales au profit de toutes les catégories professionnelles
concernées diffère de l'accord collectif qui ne vise qu'un ou plusieurs thèmes puisés dans cet
ensemble877. Cette distinction, introduite par la loi du 13 novembre 1982878, demeure cependant
purement matérielle : le régime juridique des accords collectifs étant strictement le même que celui
des conventions collectives. Le transfert de personnels intervenu en application des dispositions de
l’article L. 1224-1 du code du travail soulève dès lors la question essentielle de l’accord collectif
applicable au salarié à l’issue de son transfert. S’agit-il de celui-ci dont il relevait sous l’empire de
son ancien employeur ou au contraire de celui de son nouvel employeur ?
@R !4* AG@4\:<:45* 8>:457:;* 9:* A34>:45634* A3;;:A56>:* 37* 90@AA3E9*A3;;:A56[* =@E56A7;6aE:<:45* :4A@9E8* 9@4?* 74* ?37A6* 9:* =E35:A5634* 9:?*9E365?*97*?@;@E68?*
« Centre de gravité du système conventionnel879 », la convention collective dispose,
conformément aux dispositions de l’article L. 2222-1 du code du travail, d’un champ d’application
professionnel défini « en termes d'activités économiques ». La détermination de la convention
collective dont relève tout salarié réside donc dans l’activité principale exercée par l’entité qui
l’emploie, qui n’est donc pas nécessairement celle dont relèverait l’activité accessoire à laquelle est
affectée le salarié si celle-ci était exercée dans un cadre juridique indépendant. Lors d’une évolution
dans la gestion d’une activité publique, la seule circonstance que l’entité gestionnaire change peut
dès lors suffire à emporter corrélativement un changement de la convention collective dont relève le
salarié, quand bien l’activité de ce dernier demeurerait identique et justifierait l’application des
877 Maladie ou salaires par exemple. 878 Loi no 82-957 relative à la négociation collective et au règlement des conflits collectifs du travail (J.O. du 14 novembre 1982, p. 3414). 879 M.-L. MORIN, Le droit des salariés à la négociation collective, Principe général du droit, préface M. DESPAX, LGDJ 1994.
277
dispositions translatives du code du travail conditionnées par l’existence du transfert d’une entité
économique autonome.
Une procédure de disparition de l’accord collectif précédemment en vigueur protectrice
des intérêts du salarié. Un tel bouleversement est cependant assorti d’un certain formalisme
permettant d’assurer la transition d’application entre les deux conventions collectives dans les
meilleures conditions pour garantir la protection du droit du salarié. L'article 3 de la directive prévoit
à cet égard qu’ : « après le transfert, le cessionnaire maintient les conditions de travail convenues
par une convention collective dans la même mesure que celle-ci les a prévues pour le cédant, jusqu'à
la date de la résiliation ou de l'expiration de la convention collective ou de l'entrée en vigueur ou de
l'application d'une autre convention collective ». Ayant vocation à éviter une « détérioration des
droits que le salarié tient de son contrat de travail et de la convention collective à laquelle était
partie l'employeur cédant, mais non l'employeur cessionnaire de l'entreprise », un tel dispositif est
repris en droit interne à l’article L. 2261-14 du code du travail qui prévoit que « lorsque l'application
d'une convention ou d'un accord est mise en cause dans une entreprise déterminée en raison
notamment d'une fusion, d'une cession, d'une scission ou d'un changement d'activité, cette
convention ou cet accord continue de produire effet jusqu'à l'entrée en vigueur de la convention ou
de l'accord qui lui est substitué ou, à défaut, pendant une durée d'un an à compter de l'expiration du
délai de préavis prévu à l'article L. 2261-9, soit trois mois, sauf clause prévoyant une durée
supérieure ». La disparition définitive de la précédente convention collective n’intervient qu’au
terme de la mise en ouvre d’une procédure de « mise en cause »880 régulière d’une durée prévue par
les stipulations conventionnelles ou à défaut fixée à trois mois par l’article L. 2261-9 du code du
travail commençant à courir à la date du transfert lui-même881. L’accord antérieurement applicable
au salarié transféré est susceptible quant à lui de disparaître sous l’effet de l’adoption d’un accord de
substitution ou en raison de l'expiration du délai fixé par l'article L. 2261-14. Il convient toutefois de
relever que la Cour de cassation fait une stricte interprétation des procédures mises en œuvre par la
structure nouvellement gestionnaire de l’activité en vue de la dénonciation d’un accord collectif. Elle
refuse ainsi à reconnaître la validité « d'une simple opération de réorganisation administrative »882
pour la mise en cause d’un accord collectif et considère fort logiquement que ce dernier se poursuit
tant qu’il n'a pas été dénoncé conformément aux règles précitées.
880 Cass. soc., 25 avril 2001, Bull. civ. V, n°134 ; Cass. soc., 5 mars 2008, pourvoi n°07-40.273, JCP S 2008 p. 1397 ; J. SAVATIER, « Cession d'entreprise et statut collectif du salarié », Dr. soc. 1993, p. 153 ; J. BARTHELEMY, « Restructurations et tissu conventionnel : critique de la jurisprudence », Cahiers DRH, janvier 2007, n° 128, p. 19 ; H.-J. LEGRAND, « La mise en cause d'une convention ou d'un accord collectif en question », RDT 2008, p. 10 ; A. MAZEAUD, « Accords collectifs et restructurations », Dr. soc. 2008, p. 66. 881 Voir sufra n° sur le caractère d’ordre public du mécanisme translatif de la directive et du code du travail et l’impossibilité qui en résulte pour les acteurs d’un transfert de prévoir une date des transferts de contrats de travail différente de celle du transfert effectif de l’entité économique autonome. 882 Cass. soc., 5 mars 2008, Bull. civ. V, n° 54, JCP S 2008, 1397, à propos de la fusion des deux agences de France Télécom.
278
La possible revendication immédiate du bénéfice de l’accord collectif en vigueur chez le
nouvel exploitant. La Cour de cassation a pris soin de préciser la portée de ces dispositions en
reconnaissant que la convention collective en vigueur chez le nouvel employeur s'appliquait
immédiatement883 au salarié.
La possible revendication des dispositions anciennes jusqu’à la disparition du précédent
accord collectif applicable. « Lorsque l'application d'une convention ou d'un accord collectif est
mise en cause dans une entreprise déterminée en raison notamment d'une fusion, d'une cession,
d'une scission ou d'un changement d'activité, ladite convention ou ledit accord continue de produire
ses effets jusqu'à l'entrée en vigueur de la convention ou de l'accord qui lui est substitué ou, à défaut,
pendant une durée d'un an à compter de l'expiration du préavis, sauf clause prévoyant une durée
supérieure ; il en résulte qu'à défaut de convention ou d'accord de substitution, le nouvel employeur
ne peut imposer aux salariés repris l'application immédiate du statut collectif en vigueur dans
l'entreprise, lorsque ce statut est différent de celui dont ils relevaient avant le transfert des contrats
de travail »884.
La possible revendication des dispositions nouvelles et des dispositions anciennes non
encore disparues. En outre, faisant montrant d’une volonté protectrice des intérêts des salariés
manifeste, la Cour de cassation a adopté une interprétation des plus extensives des dispositions
précitées du code du travail en considérant qu’en cas de transfert de son contrat de travail au service
d’un nouvel exploitant disposant d’une convention collective différente, le salarié bénéficie
immédiatement des dispositions de cet accord mais en outre, pendant un certain délai, des
dispositions plus favorables de son ancien accord jusqu'à ce que ce dernier ne soit plus en vigueur à
son égard885. Une telle possibilité de revendiquer l'application immédiate de la convention collective
de l'entreprise cessionnaire dès que le contrat de travail du salarié est transféré – qui n'est en réalité
qu'une simple application des dispositions légales886 – déjà reconnue par la chambre sociale de la
Cour de Cassation887 se voit à présent clairement énoncée par la Haute juridiction dans un arrêt du
10 février 2010888.
Un changement de convention collective rare en matière de succession de cocontractants
dans le secteur public. Pour autant, seuls les accords collectifs spécifiques, dont les principes de
mise en cause obéissent aux règles sus-évoquées, devraient se voir confrontés à une possible
dénonciation à l’occasion d’un changement dans la gestion d’une activité publique. En ce qu’ils sont
883 Cass. soc., 9 octobre 1990, Bull. civ. V, n° 428. 884 Ph. WAQUET, « Mise en cause d'une convention collective ou d'un accord collectif en raison notamment d'une fusion, d'une cession ou d'un changement d'activité », note sous Cass. soc., 13 novembre 2007, pourvoi n° 06-42.090, inédit. 885 Cass. soc., 10 février 2010, Bull. civ. V, n° 36. 886 L. PECAUT-RIVOLIER, « Chronique annuelle 2010 de droit du travail », RJEP n°686, mai 2011, chron. 2. 887 Cass soc., 16 mars 1999, pourvoi n° 06-45.353. 888 Cass. soc., 10 février 2010, Bull. civ. V, n° 36, op. cit.
279
dédiés à un aspect spécifique de la vie de l’entreprise889, ces accords peuvent fortement différer
d’une structure à l’autre. En revanche, les hypothèses dans lesquelles la succession de titulaires de
contrats publics serait susceptible d’avoir des effets sur la convention collective applicable devraient
rester largement minoritaires. En matière de délégations de service public890, il est en effet fréquent
que l’attributaire du contrat constitue une société d’exploitation ad hoc891afin de porter le contrat, dès
lors que le règlement de consultation offrait une telle possibilité892. L’objet social d’une telle société,
déterminé directement par l’activité publique confiée par la personne publique, devrait dès lors
conduire à l’application de la même convention collective que de son prédécesseur, et si l’on retient
une vision à long terme, de celui de son successeur. En matière de marchés publics, les dispositions
de l’article L. 1224-1 du code du travail s’appliquant selon notre conviction à des activités
essentiellement de service893 extrêmement délimitées telles que la restauration, le gardiennage ou
encore la propreté, un raisonnement identique devrait pouvoir être retenu.
BR !4*=3??6B;:*<@6456:4*9:?*@>@45@\:?*6496>697:;?*@AC76?**
Un maintien légalement prévu. A la suite de la disparition d’un accord collectif, les salariés
de droit privé transférés au nouvel exploitant de l’activité publique ne perdent pas pour autant
nécessairement le bénéfice des avantages collectifs instaurés par l’accord précédemment en vigueur.
L’article L. 2261-14 alinéa 2 du code du travail prévoit ainsi que : « lorsque la convention ou
l'accord mis en cause n'a pas été remplacé par une nouvelle convention ou un nouvel accord dans
les délais précisés au premier alinéa, les salariés des entreprises concernées conservent les
avantages individuels qu'ils ont acquis, en application de la convention ou de l'accord, à l'expiration
de ces délais ».
Un maintien pouvant ne pas porter atteinte au principe « à travail, salaire égal ». La
cohabitation de personnels issus de la reprise et de personnels déjà présents dans les effectifs du
nouveau gestionnaire de l’activité ou recrutés après l’attribution du contrat par la personne publique
est dès lors susceptible d’introduire une difficulté au regard de l’hétérogénéité des droits reconnus à
des salariés exerçant des missions identiques. La Cour de cassation considère toutefois qu’une telle
hypothèse n’entre pas en confrontation avec le principe « à travail égal, salaire égal » dans la
mesures où la différence de traitement des salariés engagés avant la dénonciation d'un accord
collectif résultent de la conservation des avantages individuels qu'ils ont acquis qui se trouve
légalement prévue par les dispositions de l'article L. 2261-14 du code du travail. Dans un arrêt du 11
889 Par opposition aux conventions collectives qui n’en sont qu’une typologie particulière et dont l’objet porte sur l’ensemble des aspects du droit du travail. 890 Un tel montage est encore plus commun en matière de contrats de partenariat, typologie de contrat volontairement écartée au cas présent en raison de la non application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail, voir supra. 891 On parle également de « société dédiée » ou de « special purpose vehicle ». 892 CE, 24 juin 2011, Ministère de l’écologie, req. n° 347720 et n° 347779. 893 Voir infra, 1ère Partie, chapitre premier.
280
juillet 2007, la Cour de cassation a ainsi énoncé qu'« au regard de l'application du principe à travail,
salaire égal, la seule circonstance que les salariés aient été engagés avant ou après la dénonciation
d'un accord collectif ne saurait justifier des différences de traitement entre eux, à la seule exception
de celles résultant, pour les salariés engagés avant la dénonciation, des avantages individuels acquis
par ces derniers, conformément à l'article L. (2261-14) du code du travail, lesquels ont pour objet de
compenser, en l'absence de conclusion d'un accord de substitution, le préjudice qu'ils subissent du
fait de la dénonciation de l'accord collectif dont ils tiraient ces avantages »894.
La tolérance des juridictions sociales à l’égard des différences de traitement des salariés
repris des autres salariés de l’entreprise n’est cependant pas sans limite895 et ne doit pas conduire le
nouveau gestionnaire de l’activité publique à priver la communauté de travailleurs dans son
ensemble de droits qu’il reconnait conventionnellement aux salariés repris. Pour être légal, le
maintien des avantages collectifs doit donc clairement, et seulement, viser à compenser le préjudice
subi du fait de la perte des avantages prévus par l’accord disparu. La Cour de cassation a ainsi
censuré le refus du nouveau gestionnaire d’étendre aux salariés recrutés postérieurement à la reprise
une avantage collectif auquel il s’était conventionnellement engagé896.
WV +:?*43E<:?*746;@58E@;:?* 645E64?aC7:<:45*@[[:A58:?*=@E*;:*AG@4\:<:45*90:<=;3I:7E*
En sa qualité de chef d'entreprise, l'employeur se voit reconnaitre un véritable pouvoir normatif897
dont les usages et les engagements unilatéraux constituent deux manifestations particulièrement
concernées par le transfert de personnels à l’occasion d’une modification dans la situation juridique
de l’employeur. A l’instar des normes collectives, les usages en vigueur sous l’empire du précédent
exploitant sont opposables au nouvel employeur898. Ce dernier ne peut ainsi y mettre fin que par une
dénonciation régulière de l'usage en prenant soin de prévenir individuellement les salariés et les
institutions représentatives du personnel dans un délai permettant d'éventuelles négociations899.
∴
894 Cass. soc., 4 décembre 2007, Bull. civ. V, n° 119, D. 2007, p. 2167 ; Semaine sociale Lamy 2007, n° 1334, p. 11, avis J. DUPLAT ; JCP S 2007, 1191, note G. VACHET ; Cass. soc., 19 juin 2007, Semaine sociale Lamy 2007, n° 1314, p. 8; JCP S 2007, p. 1910 ; Cass. soc., 1er juillet 2009, RJS 2009, n° 857. 895 Voir une appréciation critique du contrôle, ou en l’occurrence de l’absence de contrôle, de l’atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » par la reconnaissance du maintien des avantages collectifs : I. MEYRAT, « L'égalité de traitement à la croisée des chemins », RDT 2008, p. 648. 896 Il s’agissait en l’espèce d’une prime de transfert versée aux seuls salariés à temps plein et porteurs d’un contrat de travail à durée indéterminée. 897 A. SUPIOT, « Déréglementation des relations de travail et autoréglementation de l’entreprise », Dr soc. 1989, p. 195 ; M. VERICEL, « Sur le pouvoir normateur de l’employeur », Dr. soc. 1991, p. 120 ; A. SUPIOT, « La réglementation patronale de l’entreprise », Dr. soc. 1992, p. 215. 898 Cass. soc., 23 septembre 1992 : pourvoi n°89-45.656, JCP E 1993, II, 466, note P. POCHET ; Dr. ouvrier 1993, p. 183, note F. SARAMITO ; Cass. soc., 6 avril 1994 , RJS 1994, n° 633 ; Cass. soc., 18 octobre 1995 , JCP E 1996, II, 796, note Ph. COURSIER ; Cass. soc., 7 mai 1996, pourvoi n° 93-44289, RJS 1996, n° 740 ; Cass. soc., 4 février 1997, TPS 1997, comm. 114, obs. P.-Y. VERKINDT ; Cass. soc., 7 octobre. 1997, RJS 1997, n° 1299. 899 Cass. soc., 4 février 1997, op. cit.
281
Lorsque la gestion d’une activité publique est successivement assurée par deux opérateurs
économiques soumis dans leurs relations contractuelles avec leurs salariés au droit commun du
travail, accords collectifs du travail comme usages dans l’entreprise sont susceptibles de disparaître
pour laisser la place à ceux vigueur dans la structure désignée par la personne publique. Les
institutions représentatives bénéficient en revanche d’une certaine stabilité en dépit de l’évolution du
contexte d’exploitation de l’activité.
N* L* +:?* 64?56575634?* E:=E8?:45@56>:?* 97* =:E?344:;* @??7E8:?* 9074:*E:;@56>:*=:E<@4:4A:**
Principe général et absolu consacré par le Préambule de la Constitution de 1946 selon lequel
« tout travailleur participe par l’intermédiaire de ses délégués à la détermination collective des
conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises », le droit à la représentation du personnel
dans toutes les entreprises est dans le système français assuré par une « mosaïque900 » d’institutions
représentatives du personnel (ci-après IRP) imaginées par le législateur à partir de 1936901 et
renforcées à partir de 1945. C’est ainsi que l'ordonnance du 22 février 1945902, la loi du 16 avril
1946903 puis la loi du 27 décembre 1968904se sont attachées à poser les fondements d’une
représentation collective des salariés dans l’entreprise en multipliant les « intermédiaires » qui
agissent pour le compte de tout travailleur. Les institutions représentatives du personnel ainsi
instituées concernent tant les employeurs de droit privé et leurs salariés en vertu de l'article L. 2311-1
du code du travail905 que les établissements publics à caractère industriel et commercial ou aux
établissements publics à caractère administratif lorsqu'ils emploient du personnel dans les conditions
du droit privé en application des dispositions de l’article L. 2321-1 du code du travail906. Qui plus
est, la Cour de Cassation a, par une interprétation large des textes, toujours donné à l'institution des
délégués du personnel un domaine très général qui inclut toutes les entreprises ou établissements de
900 A. MAZEAUD, op. cit. p. 105. 901 Les accords de Matignon de 1936 contenaient des dispositions concernant l’élection de délégués des ouvriers et la loi du 24 juin 1936 en son article 31 rendait obligatoire dans les conventions collectives susceptibles d’extension l’insertion d’une clause relative à l’institution de délégués élus par l’ensemble du personnel. Le décret-loi du 12 novembre 1938 complété en février 1939 étendait quant à lui l’institution à tous les établissements de plus de 10 salariés en définissant les modalités d’élection et de fonctionnement. 902 Ordonnance no 45-280 du 22 février 1945 relative à l’institution de comités d’entreprise (J.O. du 23 février 1945, p. 954). 903 Loi no 46-730 du 16 avril 1946 relative au statut des délégués du personnel dans les entreprises (J.O. du 17 avril 1946, p. 3224). 904 Loi no 68-1179 du 27 décembre 1968 relative à l’exercice du droit syndical dans les entreprises (J.O. du 31 décembre 1968, p. 12403). 905 Cette formule très générale s'est substituée le 1er mai 2008, à l'occasion de l'entrée en vigueur du nouveau code du travail, à la liste des entités visées par l'ancien article L. 421-1, alinéa 1 du code du travail (les établissements industriels, commerciaux ou agricoles, les offices publics et ministériels, les professions libérales, les sociétés civiles, les syndicats professionnels, les sociétés mutualistes, les organismes de sécurité sociale à l'exception de ceux qui ont le caractère d'établissement public administratif, et les associations ou tout organisme de droit privé, quels que soient leur forme et leur objet). 906 Les dispositions du code du travail relatives aux délégués du personnel bénéficient d’un champ d’application des plus étendus.
282
droit privé, y compris des organismes tels que par exemple un groupement d’intérêt économique907
ou encore une fondation908. Ainsi le droit commun s'applique, non sans certaines difficultés909,
notamment à la SNCF910, à la RATP911, à France Télécom912, au port autonome de Marseille913, ou
encore au Centre national d'études spatiales914. La résolution de la question du sort des institutions
représentatives du personnel est dès lors des plus prégnantes en matière d’activités publiques.
Ces institutions, eu égard aux règles de mise en place au sein de l’entreprise qui les
gouvernent et qui se fondent essentiellement sur des conditions de seuil des effectifs employés,
figurent fort logiquement au premier rang des éléments de l’ « entité économique autonome »
susceptibles d’être affectés par l’application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du
travail. Il en va ainsi des délégués du personnel comme du comité d’entreprise ou d’établissement.
Ceux-ci sont en principe maintenus à l’issue du transfert des contrats de travail (1) sauf à ce que le
transfert intervienne par application volontaire – conventionnelle ou contractuelle – des dispositions
de l’article L. 1224-1 du code du travail (2).
UV /:*<@6456:4*=E8?7<8*9:?*<@49@5?*8;:A56[?*Y*;06??7:*9074*5E@4?[:E5*;8\@;*9:*;0@A56>658*=7B;6C7:*
Les dispositions des articles L. 2314-28, L. 2143-10, L. 2324-26 et L. 2327-11 du code du
travail respectivement relatifs aux délégués du personnel, délégués syndicaux, membres élus du
comité d'entreprise et représentants syndicaux, comité central d'entreprise énoncent qu’en cas de
modification dans la situation juridique de l'employeur telle que mentionnée à l'article L. 1224-1 du
code du travail, ou bien, selon la Cour de cassation, en cas de transfert conventionnel par suite de la
perte d'un marché, le mandat des représentants du personnel de l'entreprise ayant fait l'objet de la
modification subsiste lorsque cette entreprise conserve son autonomie juridique. Si cette entreprise
devient un établissement ou si la modification porte sur un ou plusieurs établissements distincts qui
conservent ce caractère, le mandat des représentants du personnel élus dans l'entreprise ou dans
chaque établissement intéressé se poursuit jusqu'à son terme. Le transfert des mandats diffère en effet
selon que l’autonomie matérielle de l’entité économique transférée est maintenue ou qu’à l’inverse le
transfert marque l’existence d’un établissement distinct.
Le critère essentiel retenu par le code du travail interprété par les juridictions sociales pour
déterminer si le mandat perdure à l’issue du transfert d’activité réside donc dans la notion
d’autonomie de l’entité gestionnaire de l’activité par rapport à la structure dont elle est issue. Ainsi, 907 Cass. crim., 29 avril 1986, Bull. crim. 1986, n°147 ; Cass. crim., 14 mai 1991, RJS 1991, n° 1107. 908 Cass soc., 28 avril 1981, Bull. civ. V, n°345. 909 B. BOSSU, « Elections professionnelles – champ d’application », J.Cl. Travail Traité, Fasc. 13-10, sept. 2009. 910 CE, 7 juin 1985, req. n° 55671, 56716, 56717, 57249 et 57250, Dr. soc. 1985, p. 502. 911 CE, 27 mars 1996, req. n°155790, Dr. soc. 1996, p. 938, concl. Ch. MAUGÜE ; Cass soc., 6 juin 2000, RATP. 912 Cass soc., 22 février 1995, pourvoi n°94-60.011, Dr. soc. 1995, p. 394, RJS 1995, n° 390. 913 Cass soc., 29 mai 2001, Bull. civ.V, n° 186, p. 146, RJS 2001, n°1160 concl. J. DUPLAT, p. 755. 914 Cass soc., 30 juin 1988, CNES c/ CFDT, pourvoi n°87-60.155.
283
si l’« entreprise conserve son autonomie juridique », alors « le mandat des délégués du personnel de
l'entreprise ayant fait l'objet de la modification subsiste ». Avant même d’apprécier le dispositif ainsi
institué par le législateur, il convient d’écarter, comme le souligne fort justement le Professeur
Morvan, une interprétation littérale de l’expression « autonomie juridique » retenue de manière
erronée par les dispositions légales, et de lui substituer, conformément au droit communautaire,
l’interprétation dégagée par la jurisprudence à savoir celle d’une « autonomie matérielle de l’entité
économique915 ». En effet, le mandat des représentants des personnels d’une entreprise subsiste dans
tous les cas d’une modification dans la situation juridique de l’employeur au sens de l’article L.
1224-1 du code du travail, dès lors que « cette entreprise conserve son autonomie », qu’importe que
le service transféré n’ait jamais disposé de la personnalité morale916. Le code du travail indique
ensuite que si « cette entreprise devient un établissement (…) ou si la modification (…) porte sur un
ou plusieurs établissements distincts qui conservent ce caractère, le mandat des délégués du
personnel élus dans l'entreprise ou dans chaque établissement intéressé se poursuit jusqu'à son
terme. Toutefois, pour tenir compte de la date habituelle des élections dans l'entreprise d'accueil, la
durée du mandat peut être réduite ou prorogée soit par accord entre le nouvel employeur et les
organisations syndicales représentatives existant dans le ou les établissements absorbés soit, à
défaut, par accord entre l'employeur et les délégués du personnel intéressés ». A l’instar du
dispositif applicable aux délégués du personnel, le dispositif applicable au comité d’entreprise décrit
à l’article L. 2324-36 du code du travail en cas de modification dans la situation juridique de
l’entreprise envisage successivement les hypothèses d’un maintien de l’autonomie matérielle de
l’entité et de continuité de l’existence d’un établissement distinct. Sa rédaction se révèle d’ailleurs
strictement identique à celle du dispositif de l’article L. 2314-28 du code du travail. Constitué
obligatoirement dans toutes les entreprises employant cinquante salariés et plus917 dès lors que
l'effectif de cinquante salariés et plus est atteint pendant douze mois, consécutifs ou non, au cours
des trois années précédentes918, ou par convention ou accord collectif de travail dans les entreprises
de moins de cinquante salariés919, le comité d’entreprise « a pour objet d'assurer une expression
collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions
relatives à la gestion et à l'évolution économique et financière de l'entreprise, à l'organisation du
travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production920 ».
∴
915 P. MORVAN, « Transfert d’entreprise – Effets. Relations individuelles », J.Cl. Travail Traité, Fasc. 19-54, juin 2010. 916 Cass soc., 28 juin 1995, Bull. civ. V n°215, RJS 1995 n°904. En l’espèce, il s’agissait d’une hôtesse d’accueil de la Maison du tourisme Dauphiné-Grenoble dont les fonctions furent transférées à un syndicat d'initiative devenu office du tourisme. 917 Art. L. 2322-1 du code du travail. 918 Art. L. 2322-2 du code du travail. 919 Art. L. 2322-3 du code du travail. 920 Art. L. 2323-1 du code du travail.
284
Les transferts d’activités intervenant à l’issue d’une application volontaire ou
conventionnelle des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail appellent en revanche un
constat différent.
WV /:*<@6456:4* A3496563448* 9:?*<@49@5?* 8;:A56[?* Y* ;06??7:* 9074* 5E@4?[:E5*A345E@A57:;*9:*;0@A56>658*=7B;6C7:*
Un maintien soumis à l’existence de stipulations expresses en ce sens. Il apparaît en
revanche que lorsque le transfert d’activité à l’origine du transfert du contrat de travail intervient sur
le fondement d’une convention collective, les mandats représentatifs ne perdurent qu’à la seule et
unique condition que les stipulations le prévoient expressément921. Tel est par exemple le cas des
entreprises de sécurité et de prévention pour lesquelles un accord national du 18 octobre 1995 prévoit
le transfert au nouveau titulaire du marché non seulement des contrats de travail, mais aussi des
mandats de représentation du personnel. La Cour de cassation a ainsi jugé que lorsque le contrat de
travail d'un délégué syndical est transféré au nouveau titulaire d'un marché de surveillance et de
sécurité en application de l'accord du 18 octobre 1995, le mandat de délégué syndical de l'intéressé
est également transféré922. Il en irait certainement de même s'agissant du mandat des membres du
comité d'entreprise. Dans le même sens, en cas d'application volontaire de l'article L. 1224-1 du code
du travail sur le fondement d’une convention particulière, les mandats représentatifs prennent fin lors
du transfert des salariés, sauf volonté contraire exprimée par les parties. Cette solution, rendue en
matière de délégués du personnel devrait, selon toute vraisemblance, pourvoir être transposée au
mandat des membres du comité d'entreprise923.
Une stipulation expresse du contrat conclu par la personne publique à préconiser. Au vu
de ces éléments, il semble essentiel pour les personnes publiques agissant en qualité de pouvoir
adjudicateur ou d’entité adjudicatrice et soucieuse de préserver l’emploi à l’occasion d’une
consultation publique menée en vue de confier la gestion d’une activité publique à un tiers par la
voie contractuelle de prêter une attention particulière aux conséquences du transfert sur les
institutions représentatives du personnel. Dans l’hypothèse où la puissance publique imposerait à son
cocontractant, alors que cela ne lui serait imposé ni par les dispositions du code du travail ni par les
stipulations de la convention collective dont relève les salariés concernés, la reprise des contrats de
travails par le biais d’une clause contractuelle, il serait des plus pertinents d’assortir une telle clause
de stipulations expresses quant à la volonté des parties de poursuivre les mandats représentatifs des
délégués du personnel et du comité d’entreprise dans le cadre de l’exploitation à venir de l’activité.
921 Cass. soc., 16 mars 1999, Bull. civ. V, n° 124, RJS 1999, n° 699 ; Cass. soc., 20 novembre 2002, RJS 2003, n° 216 ; Cass. soc., 28 mai 2003, pourvoi n°01-40.293, RJS 2003, n°1037. 922 Cass. soc., 10 juillet 2002, Bull. civ. V, n°248 p. 242. 923 Cass. soc., 7 octobre 1992, pourvoi n°91-60.353 ; Cass. soc., 28 novembre 2007, pourvoi no 06-42.379.
285
Sans être indispensables dans la mesure où de nouvelles élections pourraient parfaitement être
conduites sous la direction du nouvel exploitant, de telles stipulations présenteraient cependant
l’avantage d’assurer la stabilité des relations d’emploi dans leur ensemble, à l’image de ce qui
prévaut dans le cadre des transferts légaux et conventionnels des contrats de travail.
∴
Il résulte de ce qui précède que le transfert des contrats de travail des salariés de droit privé à
l’occasion de l’évolution d’une activité publique vers un opérateur économique de droit privé ou de
droit public n’emporte finalement que peu d’évolutions dans la situation juridique du salarié. Celui-
ci continue d’évoluer dans un environnement juridique qui lui est familier et qui demeure irrigué par
des règles stabilisées, celles du droit du travail à la fois d’essence légale et conventionnelle. Un tel
constat disparaît, en revanche, lorsque le transfert des contrats de travail intervient au profit d’une
personne publique reprenant en régie une activité de service public administratif. Dans une telle
hypothèse en effet, le salarié de droit privé est susceptible – dès lors qu’il en formule son accord – de
devenir un agent contractuel de droit public. Les conséquences en sont majeures.
':A5634* W* S* /:?* A34?8C7:4A:?* `7E696C7:?* 97* 5E@4?[:E5* >:E?* 74:* =:E?344:*=7B;6C7:*C76*E:=E:49*:4*E8\6:*74:*@A56>658*9:*?:E>6A:*=7B;6A*@9<646?5E@56[*
C’est au prix de sérieuses dérogations aux principes généraux de la fonction publique que le
Conseil d’Etat s’est finalement résigné à reconnaître l’obligation de reprise des personnels de droit
privé par les collectivités territoriales en cas de reprise en régie d’une activité de service public
administratif. Deux incertitudes majeures demeurent selon nous quant aux effets de l’intégration de
ces personnels dans les effectifs des collectivités publiques en qualité d’agents contractuels de droit
public. Si le législateur de 2005924 s’est prononcé sur la nature de droit public du contrat devant être
proposé par la personne publique au salarié repris, rompant ainsi avec la solution optionnelle retenue
dans un premier temps par le Conseil d’Etat925, il n’en a pas pour autant précisé le contenu de ce
contrat, laissant par là-même perdurer des incertitudes peu satisfaisantes pour l’ensemble des parties
(Paragraphe 1). Ce premier constat ne fait d’ailleurs que traduire un constat plus général sur les
incertitudes quant au régime juridique lui-même de ces agents repris (Paragraphe 2). Notons
d’ailleurs que ces remarques, formulées au sujet de salariés de droit privé devenus contractuels de
droit public à l’issue de la reprise en régie d’une activité de service public administratif, trouvent à
924 Loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique (J.O. du 27 juillet 2005, p. 12183), op. cit. 925 Rappelons que le Conseil d’Etat, dans l’arrêt de Section Lamblin du 22 octobre 2004 avait laissé le choix à la personne publique reprenant en régie une activité de service public administratif la possibilité « soit de maintenir le contrat de droit privé des intéressés, soit de leur proposer un contrat de droit public reprenant les clauses substantielles de leur ancien contrat dans la mesure », op. cit.
286
s’appliquer de manière générale à l’ensemble des agents contractuels de droit public, quelque soit
l’origine de leur intégration dans les effectifs d’une collectivité publique.
,@E@\E@=G:*UR* /:?* 64A:E56579:?*C7@45*@7* A345:47*97*A345E@5*9:*9E365*=7B;6A*9:?*?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8**
Les dispositions de l’article L. 1224-3 du code du travail prévoient, dans l’hypothèse où
l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de cette
entité, reprise par une personne publique dans le cadre d'un service public administratif que « le
contrat qu'elle propose reprend les clauses substantielles du contrat dont les salariés sont titulaires,
en particulier celles qui concernent la rémunération (…) sauf disposition légale ou conditions
générales de rémunération et d'emploi des agents non titulaires de la personne publique
contraires ». Outre que l’application de ces dispositions ne soit pas aisée eu égard aux insuffisances
dont souffre la définition de la notion de « clauses substantielles » telle qu’entendue par le législateur
(A), elle peut de surcroît emporter dans certaines hypothèses une modification de la rémunération du
salarié « fonctionnarisé » en raison des contraintes posées par le statut de la fonction publique en ce
domaine (B).
-*S*/@*96[[6A6;:*985:E<64@5634*9:?*A;@7?:?*?7B?5@456:;;:?*97*A345E@5hWb**
Les dispositions de l’article L. 1224-3 du code du travail prévoient l’obligation pour la
personne publique reprenant en régie une activité de service public administratif de maintenir les
« clauses substantielles du contrat », à l’image de l’obligation imposée aux opérateurs économiques
« classiques » par les juridictions sociales de ne pas modifier de manière substantielle le contrat à
l’occasion du transfert d’activité. Si le législateur a pris soin de traduire cette obligation
jurisprudentielle à l’endroit des personnes publiques reprenant en régie une activité au sein même
des dispositions qui les concernent, force est cependant de regretter que la teneur de cette obligation
ne soit pas davantage définie par le législateur (1) ni précisée par les juridictions compétentes (2).
*
926 V. BOUHIER, « Transfert d’activité : incertitudes sur le contenu des contrats à durée indéterminée de droit public », RFDA 2006, p. 1213.
287
UV /0@B?:4A:*9:*=E8A6?634?*;8\6?;@56>:?*C7@45*Y*;@*98;6<65@5634*9:?*A;@7?:?*?7B?5@456:;;:?*
Une acception des juridictions administratives indifférentes des évolutions
jurisprudentielles des juridictions sociales. En énonçant que la personne publique reprenant en régie
un service public administratif doit maintenir les clauses substantielles du contrat, l’article L. 1224-3
du code du travail n’en précise pas pour autant lesquelles de ces clauses, à l’exception notable de la
rémunération, relèvent de cette catégorie. Renvoyant à la distinction auparavant retenue par les
juridictions sociales quant aux clauses substantielles927 - dont la modification ouvre droit au refus par
le salarié - et celles qui ne le sont pas928, le législateur a clairement pris le parti de se focaliser sur les
seules clauses qui sont le socle du contrat, telles que la fonction, la rémunération, la durée, les
horaires de travail ou la localisation géographique des fonctions929. Il abandonne par là même la
conception objective désormais retenue par les juridictions sociales distinguant selon la nature des
clauses – contractuelles et celles relatives aux conditions de travail renvoyant au pouvoir de direction
de l’employeur930.
Une position contestée. Si une telle position a pu être critiquée931, en ce qu’elle ne tirait pas
les enseignements de la jurisprudence de la Cour de Cassation sur cet aspect et était susceptible
d’interprétations divergentes, elle présente pour autant à notre sens une certaine vertu : celle de
limiter les risques de confrontation de clauses de droit privé au droit de la fonction publique, qui
n’est pas toujours aisée, comme nous l’illustrerons à propos de la rémunération932. Au demeurant, il
nous semble qu’aucune distinction, qu’elle repose sur la nature de la clause ou sur son caractère
substantiel, ne saurait supprimer tout risque d’interprétation, dès lors que chaque contrat obéit par
essence à la volonté des parties expressément définie pour une relation particulière.
En tout état de cause, la jurisprudence ne fournit à ce sujet aucune précision utile en raison
des règles de compétence sen présence qui privent quelque peu d’effet les possibilités de contestation
par les salariés de droit privé.
*
927 Cass. soc., 8 octobre 1987, Raquin et Trappiez, Bull. civ. V, n° 451 ; D. 1988, jurispr. p. 58, note Y. SAINT-JOURS, Dr. soc. 1988, p. 140, note J. SAVATIER. 928 Cass. soc., 24 juin 1992, Bull. civ. V, n°413 ; JCP E 1992, pan. 1096 ; D. 1992, inf. rap. p. 200 ; Cass. soc., 25 juin 1992, Dr. soc. 1992, p. 825. 929 Ibid. 930 Cass. soc., 10 juillet 1996, Bull. civ. V, n°278 ; Dr. soc. 1996, p. 976, obs. H. BLAISE ; Cah. soc. barreau 1996, A 62, p. 317, obs. A. PHILIBERT, RJS 1996, n° 900. 931 Ibid. 932 Voir supra, p. 287.
288
WV /0@B?:4A:*9:*=E8A6?634?*`7E6?=E79:456:;;:?*C7@45*Y*;@*5:4:7E*9:?*A;@7?:?*?7B?5@456:;;:?*
Notion par essence sujette à interprétation, la notion de clause substantielle au sens de l’article
L. 1224-3 du code du travail n’est pas davantage éclairée par la jurisprudence. Le relatif silence des
juridictions à cet égard trouve son origine dans la conjonction de deux facteurs tenant, d’une part, à
la compétence des juridictions administratives pour apprécier la conformité des clauses du contrat de
droit public proposé par la personne publique aux clauses qui prévalaient sous l’empire de
l’employeur de droit privé et, d’autre part, à l’absence de contentieux nourris en la matière.
Des contentieux peu nourris devant les juridictions administratives. Sur ce dernier aspect,
force est de constater que le contentieux porté devant les juridictions tendant à la contestation des
clauses proposées par la personne publique est des plus limités. Les rares décisions portent en effet
principalement sur des aspects qui ne souffrent pas le doute quant à leur caractère substantiel, à
savoir la durée du contrat et la rémunération de l’agent. D’autres encore se contentent de préciser
qu’une fois le contrat accepté, le salarié devenu agent contractuel de droit public n’est plus en
mesure de contester une modification des clauses substantielles933 de sorte que le débat au fond ne
peut avoir lieu.
Une appréciation du caractère substantiel d’une clause d’un contrat de travail de droit privé
soumise à la seule compétence des juridictions sociales sur renvoi préjudicielles des juridictions
administratives. Le premier aspect appelle davantage de remarque et constitue une conséquence
directe de la jurisprudence désormais classique du tribunal des conflits relative à la répartition des
compétences juridictionnelles pour connaître des litiges nés de la reprise en régie d’une activité de
service public administratif, selon laquelle le juge judiciaire demeure compétent tant que le salarié
n’est pas placé dans une relation de droit public à l’égard de la personne publique par la signature
d’un nouveau contrat934. Ainsi les juridictions sociales se déclarent-elles incompétentes pour
apprécier le caractère substantiel de la clause objet d’une éventuelle modification, en considérant
« que si le juge judiciaire est compétent pour statuer sur tout litige relatif à l'exécution et à la
rupture du contrat de travail tant que le nouvel employeur n'a pas placé les salariés dans un régime
de droit public, il ne peut, ni se prononcer sur le contrat de droit public proposé par la personne
morale de droit public au regard des exigences de l'article 20 de la loi du 26 juillet 2005, ni lui faire
injonction de proposer un tel contrat ; qu'il peut seulement, en cas de difficulté sérieuse, surseoir à
statuer en invitant les parties à saisir le juge administratif d'une question préjudicielle portant sur la
conformité des offres faites par le nouvel employeur public aux dispositions législatives et
933 CE, 23 juillet 2010, Selimovic c./ Commune d’Asnières sur Seine, req. n°326643. 934 TC, 15 mars 1999, Faulcon, Rec. p. 442, Dr. soc. 1999.673, concl. J.-L. SAINTE-ROSE, op. cit.
289
réglementaires »935. Cohérente au plan strict du droit, cette position n’en est pas moins source de
difficultés pratiques. Il ne saurait en effet être nié que les juridictions administratives ne sont
certainement pas les mieux placées pour analyser la tenue d’une clause contractuelle et la comparer
avec celle antérieurement en vigueur sous l’empire d’un employeur de droit privé, fusse-t-elle
incluse dans un contrat émanant d’une personne publique. Si le recours au soutien des juridictions
sociales demeure ouvert par la voie d’une question préjudicielle, il peut cependant reporter d’autant
les durées d’instruction et limiter la pertinence pour le salarié de porter le litige devant les tribunaux.
∴
Parmi les clauses substantielles du contrat, la clause relative à la rémunération appelle en
matière de reprise en régie d’une activité de service administratif un approfondissement spécifique
en ce qu’elle peut être remise en cause en raison des règles de détermination de la rémunération
propres à la fonction publique.
N* S* /@* =3??6B;:* E:<6?:* :4* A@7?:* 9:* ;@* E8<748E@5634* 97* ?@;@E68* ?37?*;0:[[:5*9:?*Ea\;:?*?5@575@6E:?*
En imposant à l'article 20 de loi précitée du 26 juillet 2005 à toute personne publique
reprenant en régie une activité de service public administratif l’obligation de proposer au salarié de
droit privé un contrat qui « reprend les clauses substantielles du contrat dont les salariés sont
titulaires, en particulier celles qui concernent la rémunération », le législateur a entendu retenir une
parfaite symétrie dans le maintien du contrat des salariés quelque soit l’hypothèse d’évolution d’une
activité publique concernée. Conformément aux objectifs poursuivis par la directive 2001/23/CE du
12 mars 2001 de maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d’entreprises, le salarié de
droit privé bénéficie ainsi du droit au maintien de sa rémunération en dépit de l’évolution de
l’activité publique à laquelle il est affecté, que celle-ci s’inscrive dans le cadre des dispositions de
l’article L. 1224-1 du code du travail en cas de successions d’opérateurs économiques dans la gestion
de l’activité publique ou dans le cadre des dispositions de l’article L. 1224-3 du code du travail en
cas de reprise en régie d’une activité de service public administratif.
Cette finalité protectrice des droits du salarié peut toutefois entrer en confrontation avec les
principes qui gouvernent la détermination de la rémunération des agents en droit de la fonction
publique. Le traitement des fonctionnaires, régi par les dispositions de l’article 20 du Titre 1er du
statut général936 est fixé en fonction du grade de l’agent et de l’échelon auquel il est parvenu, ou de
935 Cass. soc., 1er juin 2010, Communauté des communes La Domitienne c./ Sté Coved, Bull. civ. V, n° 120, JCP E 2010, n° 1671. 936 Cet article prévoit que « les fonctionnaires ont droit, après service fait à une rémunération comprenant le traitement, l’indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. S’y ajoutent les prestations familiales obligatoires ». Il répond en outre à un principe de parité entre les
290
l’emploi auquel il a été nommé. La rémunération des agents contractuels s’inscrit dans une
perspective identique, les dispositions précitées de l’article 20 du Titre 1er leur étant directement
applicables. A la logique négociée du salaire en droit privé, simplement réglementée par un montant
minima prévu conventionnellement par les partenaires sociaux de chaque secteur d’activité, répond
un encadrement plus fort du traitement dans la fonction publique.
Par un avis contentieux Manolis du 21 mai 2007937, le Conseil d’Etat s’est attaché à préciser
les modalités de conciliation des droits du salarié repris et des règles de la fonction publique. Les
principes d’interprétation dégagés par la Haute juridiction nous semblent à cet égard tout à fait
conformes à la philosophie des textes communautaires comme aux principes qui sous-tendent les
règles de la fonction publique en matière de rémunération. L’avis s’efforce en ce sens de préciser, en
guise de préalable, que la comparaison du salaire initialement perçu par le salarié doit s’effectuer non
pas au regard des rémunérations perçus par « les agents en fonctions dans l'organisme d'accueil à la
date du transfert (…) à niveaux de responsabilité et de qualification équivalents », mais bien au
regard « des règles générales que la personne publique a, le cas échéant, fixées pour la rémunération
de ses agents non titulaires ». Et si de telles règles n’existent pas au sein de la collectivité concernée,
l’avis prend soin d’indiquer que « la reprise de la rémunération antérieure n'est en tout état de cause
légalement possible que si elle peut être regardée comme n'excédant pas manifestement la
rémunération que, dans le droit commun, il appartiendrait à l'autorité administrative compétente de
fixer, sous le contrôle du juge, en tenant compte, notamment, des fonctions occupées par l'agent non
titulaire, de sa qualification et de la rémunération des agents de l'État de qualification équivalente
exerçant des fonctions analogues ».
Il convient de noter que l’impossibilité de reprendre la rémunération d’un salarié de droit
privé ne vise que les seuls cas où la rétribution que se révèlerait « manifestement (excessive) ».
L’avis rendu souligne ainsi volontairement que l’existence de règles relatives à la détermination de la
rémunération dans la fonction publique ne saurait à elle seule fonder une baisse de la rémunération
d’un salarié de droit privé par la personne publique reprenant en régie une activité de service public.
Il ne s’agit là nullement d’un blanc seing donné à la personne publique mais bien simplement d’une
protection contre des rémunérations qui s’avérerait en disproportion totale avec celles pratiquées
dans la fonction publique. La jurisprudence administrative qui s’est dégagée en la matière en
atteste938. En pratique, une telle contrariété ne devrait se trouver caractérisée que dans des hypothèses
restreintes, principalement en matière de personnels attachés à des fonctions d’encadrement et
surtout de direction où une déconnection entre salaires de groupes privés et traitement d’agents
fonctions publiques d’Etat et de la fonction publique territoriale et est en conséquence calculé sur la base d’une grille indiciaire commune aux agents de l’Etat et des collectivités territoriales. 937 CE avis, 21 mai 2007, Mme Manolis, Rec. p. 214, concl. F. SENERS, AJDA 2008 p. 204. 938 CAA Marseille, 16 mars 2010, Communauté d’agglomération dracenoise c. Covino, req. n° 07MA05012, inédit.
291
publics peut se éventuellement se faire jour.
∴
Au-delà du contenu même du contrat de droit public conclu au moment du transfert d’un
salarié de droit privé, contrat qui matérialise la situation de l’agent à un instant «T», se pose la
question plus globale du régime juridique auquel est soumis l’agent devenu contractuel de droit
public. Il convient en effet d’appréhender le sort de l’agent sur le long terme, et les possibilités de
carrière qui lui sont offertes dans le cadre de la fonction publique en qualité d’agent contractuel. Là
encore, la fonction publique a dû faire œuvre d’innovation en adaptant les règles applicables aux
agents contractuels à durée indéterminée au nouveau contexte issu de la loi du 26 juillet 2005. *
,@E@\E@=G:*WR*/:?*64A:E56579:?*;:>8:?*C7@45*@7*E8\6<:*`7E696C7:*9:?*?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8*9:>:47?*A345E@A57:;?*9:*9E365*=7B;6A*Y*;06??7:*9:*;@*E:=E6?:*:4*E8\6:*9074*',-**
En procédant à l’intégration de contractuels de droit public à durée indéterminée dans la
fonction publique à l’occasion de la reprise en régie d’un service public administratif, le dispositif de
la loi du 26 juillet 2005 ne heurtait pas seulement aux règles traditionnelles de recrutement des
agents publics fondées sur le concours et la titularisation, et au caractère dès lors nécessairement
exceptionnel du recours aux contractuels. Il bousculait également la logique de gestion de ces
ressources humaines au sein de la fonction publique et soulignait l’inadaptation du régime juridique
classique des « agents non titulaires » de droit public à cette nouvelle catégorie d’agents de la
fonction publique, ni véritablement fonctionnaires, ni véritablement temporaires dans la conception
ordinairement retenue pour les désigner. Ainsi, nulle évolution de carrière ni possibilité de mobilité
interne ou externe n'était à l’origine envisagée par les textes, nulle augmentation de la rémunération
organisée, à l'exception de l'évolution indiciaire servant de référence à la rémunération
contractuellement prévue939. Les droits sociaux de ces agents n’étaient pas plus encadrés. Jusqu'alors,
l'absence de tels droits était justifiée, selon le juge administratif, par la situation par nature précaire
des agents non titulaires940. Avec l’adoption de la loi du 26 juillet 2005 et l’avènement du contrat à
durée indéterminée dans la fonction publique, cette situation entrait cependant en confrontation avec
une nouvelle réalité. Les nécessités de service, la volonté légitime de progression de l’agent
commandent ainsi de pouvoir organiser l’évolution de la situation de l’agent contractuel à durée
indéterminée, dès lors que celui se voit intégré de manière pérenne dans la fonction publique.
939 D. KRUST, « Le personnel des collectivités locales : Les agents contractuels - La résorption de l'emploi précaire », Rép. Dalloz coll. Terr., 2007. 940 CE, 30 juin 1993, Préfet de la Martinique c. Comme de Sainte maire et commune du Robert, Rec. p. 629, Dr. adm.1993, comm. 381.
292
Devant un tel constat et face aux critiques naissantes941, le pouvoir réglementaire s’est
attaché à tirer les conséquences de l’adoption de la loi du 26 juillet 2005 en envisageant les règles
d’évolution de la situation des agents contractuels de droit public à durée indéterminée. Il en résulte
un régime juridique qui peut être qualifié d’hybride : aux dispositions réglementaires classiquement
applicables aux agents non titulaires et assimilables à un « quasi-statut » (A) s’ajoutent désormais des
règles propres à l’évolution des contractuels à durée indéterminée dont le dispositif n’est pas sans
rappeler les règles « privatistes » de gestion de carrière des salariés (B). *
-*S*/@*?37<6??634*9:?*@\:45?*A345E@A57:;?*Y*74*e*C7@?6L?5@575*f*9:* ;@*[34A5634*=7B;6C7:
La majeure partie des règles applicables aux agents contractuels de droit public préexistait à
la loi du 26 juillet 2005 (1). Il faut dire que l’ampleur des effectifs concernés, avant même la loi
précitée de 2005, impliquait l’existence d’un corpus juridique propre à réglementer cette catégorie
significative d’agents situés « hors du cadre général du statut ». Le régime dévolu aux agents publics
non titulaires de la fonction publique se révèle sur de nombreux aspects proche du statut régissant la
situation juridique des fonctionnaires (2).
UV !4*E8\6<:*=E8:Z6?5@45*Y*;@*;36*97*Wb*`76;;:5*Wccm*
Par dérogation aux dispositions de l’article 3 du premier titre du statut général, l’article 4 de la
loi du 11 janvier 1984, l’article 3 de la loi du 26 janvier 1984 et l’article 9 de la loi du 9 janvier 1986
portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière permettent respectivement
aux administrations de l’Etat, aux collectivités territoriales et aux établissements de santé de recruter
des agents contractuels sur la base d’un contrat à durée déterminée dans des cas limités. Les
hypothèses visées par les textes concernent avant tout l’absence de corps de fonctionnaires
susceptibles d’assurer les fonctions correspondantes, les besoins spécifiques de service, notamment
saisonniers ou occasionnels, ou la nécessité de pourvoir des emplois à temps incomplet ou non
complet942. Pourtant, loin de recouvrir le caractère exceptionnel qui lui était originellement assigné
par le législateur, le contrat a fait l’objet d’un usage massif par l’ensemble des collectivités
publiques, au point que le recours à cet instrument a pu être qualifié de « quasi-rituel » par le
rapporteur devant l’assemblée nationale du projet de loi portant transposition du droit
communautaire à la fonction publique943.
941 Rép. min. no 84 109 (J.O.A.N. du 28 mars 2006, p. 3423) ; Rép. min., (J.O.A.N. du 4 juillet 2006, p. 7043). 942 Pour une vision générale et exhaustive des hypothèses de recrutement d’agents contractuels dans les trois fonctions publiques, voir le tableau de synthèse relatif à l’état du droit dressé par le rapporteur P. MOREL dans le rapport précité n°2222, p. 27 à 29. 943 MOREL P. Rapport n°2222 sur le projet de Loi adopté par le Sénat (n°2210) portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique, avril 2005.
293
Chacune des trois fonctions publiques944 disposent ainsi d’un ensemble de règles applicables
aux agents non titulaires945, par opposition aux agents titulaires soumis au statut. Précisons toutefois
que, contrairement à ce que pourrait le laisser penser l’intitulé de ces décrets relatifs aux dispositions
générales applicables aux agents non titulaires, ces dispositions réglementaires ne s’appliquent aux
agents contractuels de droit public repris en régie qu’en raison de l’insertion expresse de cette
catégorie d’agents dans leur champ d’application. L’article 1er des décrets sus-référencés prend en
effet soin de préciser qu’ils « s’appliquent également aux agents recrutés (…) en application des
deux premiers alinéas de l’article 20 de la loi n°2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses
mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique », étant précisé que la
référence aux dispositions de l’article 20 de la loi du 26 juillet 2005 est désormais obsolète et devrait
être remplacée par le renvoi aux dispositions de l’article L. 1224-3946. Les notions d’agent non-
titulaire et d’agent contractuel ne sont donc pas nécessairement synonymes, notamment en ce qui
concerne les agents devenus contractuels de droit public à l’issue de la reprise en régie d’un service
public administratif sous l’effet de la loi du 26 juillet 2005. Il ne s’agit pas là d’une simple subtilité
rhétorique mais bel et bien d’une différence qui peut être remarquable dans les droits reconnus aux
agents contractuels à durée indéterminée.
WV !4*E8\6<:*`7E696C7:*;@E\:<:45*64?=6E8*97*?5@575*9:?*[34A56344@6E:?*
« Fonctionnaire contractuel947 », « contractuel fonctionnarisé »… autant d’expressions
imaginées par la doctrine pour illustrer le caractère finalement peu conventionnel948 de la relation
d’emploi qui unit l’agent contractuel de droit public à la personne publique qui en est l’autorité
hiérarchique. Déjà en 1977949, le Professeur Gaudemet s’interrogeait-il sur la pertinence de la
qualification d’ « agents contractuels » apportée aux agents recrutés en dehors de la voie classique du
concours, en soulignant l’absence d’originalité du régime juridique de cette catégorie d’agents par
rapport à celui des fonctionnaires. Il est vrai que la plupart des règles applicables aux agents non
944 Décret n°86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; Décret n°88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale ; Décret n°91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière. 945 A l’exception toutefois des agents recrutés pour exécuter un acte déterminé tels que les vacataires ; pour effectuer un service à l’étranger dans la mesure où un texte spécifique leur est applicable ; un établissement public administratif autorisé par la loi à pourvoir ses emplois permanents par des contractuels (cependant, dans ce cas de figure, il est possible qu’un décret en Conseil d’Etat le rende expressément applicable auxdits agents) ; sur des emplois supérieurs dont la nomination est laissée à la décision du gouvernement ; sur des emplois dits de cabinet dès lors qu’ils sont recrutés sur des emplois qui ne sont pas, par nature, des emplois permanents de l’Etat tels que conseiller technique, chargés de mission, etc.!946 L’ordonnance n°2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail (partie législative) a en effet abrogé les dispositions de l’article 20 de loi n°2005-843 du 26 juillet 2005 et les a codifié à l’article L. 1224-3 du code du travail. 947 BRIMO A., « Le fonctionnaire contractuel », RDP 1944, p. 124 ; MELLERAY F., « Nouvelle illustration de la situation « quasi-réglementaire » des agents publics contractuels », Dr. adm. 2009, n°3, comm. 41, p. 128 948 CHAPUS R., Droit administratif général, t. 2, 15 éd., p. 72 949 GAUDEMET Y., Existe t-il une catégorie d’agents publics contractuels de l’administration ?, AJDA 1977, p. 614
294
titulaires sont identiques à celles qui prévalent pour les fonctionnaires. Les similitudes entre agents
statutaires et contractuels transparaissent au stade même des principes législatifs et réglementaires
applicables à chacune de ces catégories. Certaines dispositions du titre 1er du statut général de la
fonction publique sont ainsi rendues applicables d’office par une mention expresse aux agents non
titulaires. Il en va ainsi par exemple de l’article 6 relatif à la liberté d’opinion, de l’article 10 relatif
au droit de grève ou encore de l’article 11 relatif à la protection des agents publics à l’occasion de
l’exercice de leurs fonctions. De plus, l’article 1 du décret précité du 17 janvier 1986950 relatif aux
dispositions générales applicables aux agents non titulaires soumet même expressément ces agents à
certains droits et obligations des fonctionnaires dans les conditions définies par le statut de la
fonction publique territoriale et la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs
relations avec les administrations. Comme le soulignait fort justement le président Genevois dans ses
conclusions sur l’arrêt Rabut du 25 mai 1979, « l’aspect proprement contractuel est illusoire dans la
mesure où le contenu du contrat est le plus souvent prédéterminé par des dispositions qui s’imposent
aux parties. Derrière le contrat il y en fait un statut qui se dessine951 ».
Les principales différences résident en réalité dans deux aspects, évidemment essentiels pour
l’agent, que sont la pérennité de l’agent dans la fonction publique d’une part, et le droit à
l’avancement et au déroulement de la carrière d’autre part. Si pour les salariés à durée indéterminée
repris par une personne publique dans le cadre d’une activité de service public administratif le
premier aspect est quelque peu gommé sous l’effet de l’application des dispositions de la loi du 26
juillet 2005 codifiées à l’article L. 1224-3 du code du travail, le second aspect trouve quant à lui une
résonance particulière dans une telle hypothèse, nous y reviendrons dans le développement qui suit.
Il est enfin certain que l’assimilation des agents contractuels de la fonction publique à des agents
statutaires ne peut être totale, loin s’en faut. Une véritable dissymétrie semble en effet se dessiner
entre les contraintes imposées à l’agent contractuel, qui à l’instar du fonctionnaire se justifient
pleinement au regard de l’intérêt et des besoins du service, et les droits accordés à ce même agent,
qui se révèlent sensiblement différents de ceux consacrés à l’agent fonctionnaire et marqués un
caractère manifestement aléatoire. Une telle dichotomie entre les droits reconnus aux agents
statutaires et ceux consentis aux agents contractuels trouve son origine dans le rôle classiquement
dévolu à chacune de ces catégories d’agents. Ainsi, le fonctionnaire répond à un emploi permanent et
bénéficie à ce titre d’un statut protecteur. L’agent contractuel à l’inverse a vocation à répondre à un
besoin spécifique, habituellement supplétif952 et se voit en conséquence appliquer un régime
logiquement moins protecteur et marqué par davantage d’instabilité. L’introduction d’agents
950 « Les dispositions du présent décret s'appliquent aux agents non titulaires de droit public de l'Etat et de ses établissements publics à caractère administratif ou à caractère scientifique, culturel et professionnel, recrutés ou employés dans les conditions définies aux articles 3 (2e, 3e et 6e alinéa),4,5,6, et 82 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et au I de l'article 34 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, à l'exception des agents en service à l'étranger et des agents engagés pour exécuter un acte déterminé ». 951 GENEVOIS B. concl. sur CE Sect., 25 mai 1979, Rabut, Rec. p. 231, op. cit.. 952S.-J. LIEBER et D. BOTTEGHI, « Le retour du « fonctionnaire contractuel » ? », AJDA 2009, p. 142
295
contractuels à durée indéterminée dans la fonction publique par le législateur en 2005 sous
l’influence du droit communautaire enraille quelque peu les rouages de cette logique implacable.
L’agent contractuel n’est dès lors plus nécessairement affecté à l’exercice d’une mission temporaire
mais peut au contraire parfaitement occuper un poste permanent, pour une durée indéterminée.
L’hypothèse d’une reprise en régie d’un service public administratif par une personne publique en
est l’exemple parfait.
L’agent contractuel de droit public intégré dans les effectifs d’une personne publique à
l’issue de la reprise en régie par cette dernière d’une activité de service public administratif apparaît
au confluent du droit de la fonction publique et du droit du travail. Relevant ainsi de règles
classiques du statut de la fonction publique, il demeure pour autant inscrit dans un régime de gestion
de carrière fortement influencé par le droit du travail auquel il était précédemment soumis.
N* S* !4:* \:?5634* 9:* A@EE6aE:* :<=E:645:* 9:* A34A:=5?* A345E@A57:;?* 9:*9E365*=E6>8*
Le fonctionnaire, recruté par concours pour son aptitude à exercer des attributions
différentes, n’a pas vocation à occuper un emploi déterminé mais bien à évoluer selon les nécessités
du service. Sa situation nécessairement évolutive lui donne par voie de conséquence droit à un
avancement et à la possibilité de se voir confier de nouvelles attributions d’un rang hiérarchique
supérieur. La fonction publique française est en effet de façon très prépondérante organisée selon le
système de la carrière, de manière traditionnelle dans la fonction publique d’Etat et de manière
grandissante dans la fonction publique territoriale. L’agent contractuel s’inscrit quant à lui dans une
perspective sensiblement différente, qui relève davantage du système de l’emploi953, qu’il s’agisse
d’un agent contractuel recruté dans le cadre classique d’un besoin spécifique comme de l’agent
contractuel issu d’une reprise en régie affecté à une activité dédiée. Les perspectives d’évolution de
l’agent contractuel, tant financière que hiérarchique, se trouvent dès lors nécessairement exclues du
système de la carrière appliqué aux fonctionnaires (1). Elles ne sont pas pour autant inexistantes et
s’inscrivent dans un cadre contractuel renforcé par le pouvoir réglementaire qui ne manque pas de
rappeler les règles classiques du droit « commun » du travail (2).
*
953 Le système de l’emploi est notamment pratiqué dans les pays nord-américains (Etats-Unis et Canada) ainsi qu’en Italie.
296
UV /0@B?:4A:*9:*9E365*Y* ;@*A@EE6aE:*:5*Y* ;0@>@4A:<:45*5:;*C7:*E:A3447*@7Z*[34A56344@6E:?*
La rémunération des fonctionnaires est régie par les dispositions de l’article 20 du Titre 1er
du statut général : « les fonctionnaires ont droit, après service fait à une rémunération comprenant le
traitement, l’indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités
instituées par un texte législatif ou réglementaire. S’y ajoutent les prestations familiales
obligatoires ». Le traitement répond à un principe de parité entre les fonctions publiques d’Etat et de
la fonction publique territoriale : il est en conséquence calculé sur la base d’une grille indiciaire
commune aux agents de l’Etat et des collectivités territoriales. Il est fixé en fonction du grade de
l’agent et de l’échelon auquel il est parvenu, ou de l’emploi auquel il a été nommé.
La rémunération des agents contractuels repose sur une structuration identique, les
dispositions précitées de l’article 20 du Titre 1er leur étant directement applicables. Elle présente
cependant une différence majeure tenant aux perspectives d’évolution de carrière et de rémunération
des agents contractuels. La personne publique autorité hiérarchique ne peut ainsi organiser
l’évolution de carrière et de rémunération de l’agent contractuel. Alors que l’évolution du traitement
des fonctionnaires est assurée en fonction du rééchelonnement indiciaire visant à leur attribuer des
points d’indice et en fonction des majorations du point d’indice intervenant par voie décrétale,
l’évolution du traitement des agents contractuels ne peut quant à elle être organisée par voie
réglementaire. La personne publique ne peut ainsi planifier de véritable carrière pour les agents non
titulaires qui dépendent d'elles, en prévoyant des catégories, des échelons, et des durées minimales et
maximales d'occupation de ces derniers954. De même, le Conseil d’Etat a pu considérer que la
délibération fixant la rémunération d’un agent contractuel recruté en raison de l'absence de
candidature de la part des agents du cadre d'emploi intéressé ne pouvait prévoir un déroulement de
carrière sans méconnaître les dispositions de l'article 4 de la loi du 26 janvier 1984955. La situation de
l’agent contractuel n’en est pas pour autant complètement figée. A l’instar de tout contrat, celui de
l’agent contractuel de droit public peut être revu au moyen d’un avenant motivé par le changement
de l'un des critères de rémunération tels que l’accroissement des qualifications professionnelles de
l'agent ou des responsabilités assignées à l’agent956. Cette voie d’évolution, par définition
conditionnée par l’accord de volonté des parties au contrat, n’offrait cependant qu’une réponse
parcellaire à cette problématique. Le pouvoir réglementaire s’est donc attaché à renforcer le droit à
l’évolution des agents contractuels à durée indéterminée par l’introduction de mécanismes
d’inspiration « privatiste » invitant la personne publique à réexaminer périodiquement la situation
des agents contractuels à durée indéterminée.
954 CE, 30 juin 1993, Préfet de la Martinique, Rec., p. 855. 955 CE, 15 janvier 1997, Préfet du Nord c/ Commune de Wattrelos, Rec. p. 911. 956 Rép. min. no 21 953, JO Sénat 25 mai 2006, p. 1450
297
WV /@* <6?:* :4* =;@A:* 9074* 96?=3?656[* 908>3;75634* 9:* A@EE6aE:* :5* 9:*E8<748E@5634* 9:?* @\:45?* A345E@A57:;?* Y* 97E8:* 64985:E<648:*9064?=6E@5634*e*=E6>@56?5:*f**
Face à la généralisation des contrats à durée indéterminée sous l’effet de l’application de la
loi du 26 juillet 2005, l’intervention du pouvoir réglementaire957 était inéluctable pour adapter la
condition des agents non titulaires958 dans chacune des fonctions publiques. L’article 27 de la loi du
19 février 2007959 dispose ainsi qu’ « un décret en Conseil d'Etat détermine […] les conditions dans
lesquelles les agents non titulaires bénéficiant d'un contrat à durée indéterminée sont susceptibles de
voir leur rémunération évoluer au sein de la collectivité territoriale et de l'établissement public […]
qui les emploie ». L’article 2 du décret n°2007-338 du 12 mars 2007 introduit ainsi un article 1-3
dans le décret n°86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents
non-titulaires qui dispose que : « la rémunération des agents employés à durée indéterminée fait
l'objet d'un réexamen au minimum tous les trois ans, notamment au vu des résultats de l'évaluation
prévue à l'article 1-4 ».
En effet, il est ainsi désormais prévu que « les agents employés à durée indéterminée font
l'objet d'une évaluation au moins tous les trois ans ». « Cette évaluation, qui donne lieu à un compte
rendu, comporte un entretien, qui porte principalement sur leurs résultats professionnels au regard
des objectifs qui leur ont été assignés et des conditions d'organisation et de fonctionnement du
service dont ils relèvent. L'entretien peut également être élargi aux besoins de formation des agents
en rapport avec leurs missions, leurs projets professionnels, et notamment leurs projets de
préparation aux concours d'accès aux corps et cadres d'emplois de la fonction publique ».
La notion d’entretien d’évaluation introduite à l’article 1-4 des décrets précités du 17 janvier
1986 et 15 février 1988 émane directement des principes de gestion des ressources humaines qui
irriguent le droit « commun » du travail. En principe facultative pour l’employeur, l’évaluation du
personnel tend en effet à devenir obligatoire en droit social notamment eu égard au principe d’égalité
professionnelle qui impose à l’employeur de justifier les différences de situation entre les salariés.
La plupart des conventions collectives prévoient ainsi une évaluation des salariés, notamment par le
biais d'entretiens individuels, afin de déterminer l'évolution de leur carrière. Le respect d’une telle
obligation par l’employeur lorsqu’elle s’impose à lui revêt un véritable enjeu dans la mesure où les
957 Décret n°2007-338 du 12 mars 2007 portant modification du décret n°86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux agents non titulaires de l’Etat pris pour l’application de l’article 7 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d’Etat, JO du 14 mars 2007 ; Décret n°2007-1829 du 24 décembre 2007 modifiant le décret n°88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale, JO du 28 décembre 2007 ; Décret n° 2010-19 du 6 janvier 2010 portant modification du décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, JO du 8 janvier 2010. 958 JEAN-PIERRE D., Les agents en CDI : du statut à la carrière, JCP A. 16 avril 2007 n°16, p. 2105. 959 Loi n° 2007-209 du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale, JO du 21 février 2007, p. 3041.
298
juridictions sociales sanctionnent l’absence d’organisation d’entretiens individuels d'évaluation au
bénéfice d’un salarié et accordent en conséquence à ce dernier des dommages - intérêts en réparation
de son préjudice résultant de sa perte de chance de voir évoluer sa carrière960.
En s’appuyant sur des mécanismes davantage inspirés du modèle salarial que des règles
classiques du droit de la fonction publique, le pouvoir réglementaire n’opère cependant pas de
rupture fondamentale entre le régime des contractuels de droit public à durée indéterminée et celui
des agents statutaires. Il s’inscrit en effet d’un mouvement général d’évolution des modes
d’évaluation des fonctionnaires amorcé depuis 2002961 et accéléré depuis 2007 par le législateur
tendant à instiller, à titre expérimental dans un premier temps, des notions de performance et de
négociation jusque-là inédites962. De procédure unique, la notation des fonctionnaires est en effet
devenue un élément parmi d’autres d'un processus d'évaluation plus large qui comporte désormais
également un entretien individuel annuel de l'agent avec son supérieur hiérarchique direct963. La loi
n° 2007-148 du 2 février 2007 a franchit une étape supplémentaire en autorisant les administrations
de l'Etat à se fonder sur le seul entretien professionnel annuel pour les avancements d'échelon et de
grade964. A valeur simplement expérimentale dans un premier temps, ce dispositif est aujourd’hui
entré en vigueur965 et fonde l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires sur le seul
entretien professionnel annuel966.
Quelle que soit l’appréciation portée à ces évolutions profondes de la perception classique de
la fonction publique en droit interne, nous ne pouvons que regretter que le pouvoir réglementaire soit
resté muet sur la question du changement d’emploi d’un agent en contrat à durée indéterminée.
Compte-tenu de l’ampleur des contingents concernés, une telle lacune nous paraît peu satisfaisante
pour affronter l’enjeu de la mobilité de l’ensemble des agents.
∴
*
960 Cass soc., 10 novembre 2009, no 08-42.114 961 Décret n° 2002-682 du 29 avril 2002 relatif aux conditions générales d'évaluation, de notation et d'avancement des fonctionnaires de l'Etat 962 Pour une vision générale du phénomène : O. DORD, « La loi Mobilité ou l'adaptation du statut par une gestion rénovée des personnels », AJDA 2010 p. 193. 963 CE Sect., 6 décembre 2006, Corinne T., req. n° 287453, AJDA 2007, p. 605. 964 Article 55 bis du titre II du statut général. 965 La nouvelle rédaction de l'article 55 du titre II du statut général est entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2012. Elle dispose désormais que : « Par dérogation à l'article 17 du titre Ier du statut général, l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires se fonde sur un entretien professionnel annuel conduit par le supérieur hiérarchique direct. Toutefois, les statuts particuliers peuvent prévoir le maintien d'un système de notation. A la demande de l'intéressé, la commission administrative paritaire peut demander la révision du compte rendu de l'entretien professionnel ou de la notation. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article ». 966 JEAN-PIERRE D., « La réforme du statut des agents non titulaires des collectivités territoriales », JCP A, 21 janvier 2008, n°4, act. 65, p. 132.
299
*
300
2G@=65E:*W*S*/:?*A34?8C7:4A:?*`7E696C7:?*9:*;@*A345647658*90:<=;36*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*
A l’instar des salariés de droit privé, les agents publics peuvent se trouver confronter à une
évolution de l’activité publique à laquelle ils se trouvent affectés. Les hypothèses d’évolution se
révèlent cependant, à leur égard, bien plus variées et plus complexes. Plus variées en ce qu’elles
peuvent concerner aussi bien l’organisation de l’activité elle-même que plus simplement sa gestion.
Plus complexes ensuite en ce qu’elles peuvent marquer le passage d’un régime de droit public à un
régime de droit privé.
Dans ce contexte, seront successivement abordées les conséquences du transfert des
personnels de droit public à l’occasion d’un transfert de compétences entre collectivités publiques
(Section 1), d’une privatisation du régime juridique de l’entité gestionnaire de l’activité publique
(Section 2) ou en cas de décision d’externalisation par la personne publique (Section 3).
*
301
':A5634*U* * L*/:?*A34?8C7:4A:?*97*5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*Y*;03AA@?634*9:*5E@4?[:E5*9:*A3<=85:4A:?*:45E:*A3;;:A56>658?*=7B;6C7:?*
Le traitement de la question des conséquences d’un transfert d’agents publics entre
collectivités publiques peut, de prime abord, étonner. Eu égard à la similarité de nature juridique des
employeurs successifs, une collectivité publique succédant à une autre, on serait en effet tenté de
considérer la problématique des conséquences du transfert superfétatoire. Il n’en est pourtant rien.
Derrière le vocable générique de « fonction publique » se cache en réalité des statuts de la fonction
publique. Chaque fonction publique – fonction publique de l’Etat, fonction publique territoriale et
fonction publique hospitalière – disposant, en marge des règles générales applicables à tout
fonctionnaire, de règles spécifiques. Qu’il s’opère d’une fonction publique à l’autre, ou d’une
collectivité territoriale à un établissement public de coopération intercommunale, le transfert des
personnels de droit public à l’occasion d’un transfert de compétences entre collectivités publiques
n’est pas sans conséquences. Deux mouvements seront successivement appréhendés.
La décentralisation, expérience française singulière967, a impliqué dès son avènement le
passage au service de collectivités locales nouvellement compétentes de milliers de personnels
affectés à la compétence décentralisée, sans que le cadre juridique d’évolution de ces agents n’ait été
pensé, et par là-même conçu, dans une perspective de symétrie. Il convient en effet de garder à
l’esprit que la mise en place d’une fonction publique territoriale à même d’assurer un régime
juridique à des milliers d’agents n’a pas été le fruit d’une simple transposition de la fonction
publique d’Etat mais a, à l’inverse, conduit à l’émergence d’une véritable fonction publique
territoriale « autonome ». Il en résulte un transfert des personnels engendrant des conséquences pour
les agents eux-mêmes mais également pour les collectivités, d’origine et d’accueil, dans la gestion de
leurs « ressources humaines » lors de transferts de compétence (paragraphe 1).
Le phénomène d’intercommunalité soulève lui aussi de nombreuses interrogations au plan
des conséquences du transfert des personnels, pour des raisons cette fois davantage circonstanciées
que conceptuelles. La difficulté dans une telle hypothèse réside en effet dans l’hétérogénéité des
profils des agents amenés à être transférés (catégorie d’emploi, etc.) et sa confrontation à la nécessité
d’harmonisation impliquée par le transfert à un établissement public de coopération intercommunale,
par essence objet de rationalisation et d’harmonisation des moyens de ses collectivités membres
(paragraphe 2).
967 La comparaison du modèle français avec les systèmes étrangers n’est pas .V. notamment Rapp. Piron, L'équilibre territorial des pouvoirs, Gaz. cnes, cahier détaché, 24 juill. 2006
302
,@E@\E@=G:*UR*/:?*A34?8C7:4A:?*97*5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*Y* ;03AA@?634* 9:* 5E@4?[:E5* >:E56A@;* 9:* A3<=85:4A:?* :45E:* A3;;:A56>658?*=7B;6C7:?*
Les qualificatifs n’ont pas manqué pour caractériser la décentralisation et ses effets sur
l’organisation administrative française. Derrière la dimension purement institutionnelle, apparaît la
dimension sociale, et plus particulièrement la question des effets de la décentralisation sur les
personnels affectés aux compétences transférées, qui en dépit de son enjeu a été quelque minorée. Le
transfert de milliers de personnels au sein de la fonction publique territoriale n’a pas manqué de
susciter de nombreuses inquiétudes, voire réticences, de la part des intéressés et de leurs
représentants syndicaux. Près de trente ans après ce qu’il est désormais coutume d’appeler l’Acte I
de la décentralisation, et alors que les transferts verticaux de compétence continuent, force est de
constater cependant que les conséquences tant pour les agents eux–mêmes (A) que pour les
collectivités d’accueil (B) n’ont pas, d’un point de vue strictement juridique s’entend, été à la hauteur
des craintes formulées.
-* S* +:?* A34?8C7:4A:?* <646<@;:?* =37E* ;:?* [34A56344@6E:?* 90%5@5*5E@4?[8E8?*@7Z*A3;;:A56>658?*5:EE653E6@;:?**
La conduite de la décentralisation s’est accompagnée au gré de ses différentes étapes de
larges réactions – souvent négatives – de la part des personnels concernés, et matérialisées
principalement par la crainte d’une remise en question profonde de la mission de service public.
Force est de constater cependant qu’à l’évidence, un tel débat illustrait avant tout l’ignorance968
réciproque de la fonction publique d’Etat et de la fonction publique territoriale. L’évolution
engendrée par les transferts verticaux de compétence s’est en effet davantage apparentée à un « choc
culturel » pour les personnels concernés plutôt qu’à une véritable modification de leur situation
juridique. Il faut dire que les mécanismes retenus pour opérer le transfert, mise à disposition
préalable comme maintien du statut de fonctionnaire d’Etat dans le cadre d’un détachement illimité,
ont fortement participé d’un transfert « en douceur » des agents, sans évolutions notables (1).
L’intégration effective des anciens fonctionnaires d’Etat au sein de la fonction publique territoriale
n’a pas davantage engendré de réelles modifications de la situation juridique de ces agents (2) tant
les différences entre les régimes des deux fonctions publiques étaient minimes, et purent facilement
être gommées au moment du transfert. Et contrairement aux inquiétudes manifestés par les agents, le
transfert vers les collectivités territoriales s’est avéré, pour certains agents jusqu’alors inscrits dans
une précarité malheureusement pérenne, à l’image des TOS des lycées, synonyme d’amélioration de
la situation d’emploi sous l’effet combiné d’une titularisation et d’un relèvement de la rémunération.
968 C. DURAND-PRINBORGNE, « Décentralisation et transfert de personnels », AJFP 2003, p. 1
303
Au surplus, il est indéniable que le législateur a fait montre au cours des dernières réformes de
décentralisation, à l’instar du transfert des services de l’équipement vers les départements, d’une
volonté certaine de limiter au maximum les effets du transfert sur les personnels en élaborant des
dispositifs ad hoc facilitant le passage d’une fonction publique à l’autre, notamment par l’élaboration
de cadres d’emploi dédiés directement calqués sur les corps dont étaient issus les fonctionnaires
transférés. !
UV /:* E:;@56[* /&.&6! <6(!649765* =@E* ;:* E:A37E?* Y* ;@*<6?:* Y* 96?=3?65634*37* ;:*AG36Z*9074*<@6456:4*97*?5@575*9:*[34A56344@6E:*90%5@5*
Les transferts de personnels opérés par la voie de la mise à disposition (a) ou du détachement
(b) n’ont eu finalement que peu d’impact pour les agents transférés en ce que ces derniers ont pu
conserver par le recours à ces mécanismes de mobilité l’essentiel de leur régime juridique initial.
@R !4* 98E37;:<:45* 9:* A@EE6aE:* =@E5@\8* :45E:* ;0@9<646?5E@5634* 903E6\64:*:5* ;@* A3;;:A56>658* 5:EE653E6@;:* 90@AA7:6;* 9@4?* ;:* A@9E:* 9074:* <6?:* Y*96?=3?65634*97*[34A56344@6E:*90%5@5*
- Une rémunération quasiment inchangée
Aux termes de l’article 41 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations
des fonctionnaires telle que modifiée par la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la
fonction publique, « la mise à disposition est la situation du fonctionnaire qui demeure dans son
corps d'origine, est réputé occuper son emploi, continue à percevoir la rémunération
correspondante, mais qui exerce des fonctions hors du service où il a vocation à servir ». Le
fonctionnaire mis à disposition continue ainsi de percevoir la rémunération correspondant à son
grade ou à l’emploi qu’il occupait dans son administration d’origine969.
L’effet du transfert de compétence de l’Etat vers une collectivité territoriale ne se révèle
cependant pas parfaitement neutre en termes financiers pour le fonctionnaire d’Etat mis à
disposition. L’agent mis à disposition ne bénéficie ainsi plus des primes et indemnités qui y sont
liées970. L’obligation de l’administration d’origine est en effet limitée au versement du traitement, de
l’indemnité de résidence et, le cas échéant, du supplément familial de traitement. Le décret n°2010-
467 du 7 mai 2010971 en tire les conséquences et organise les conditions de versement d’un
complément éventuel de rémunération lié aux nouvelles conditions d’exercice de ses fonctions par le
fonctionnaire. L’article 7 du décret n°85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de
969 CE, 25 juillet 2001, Mme de Bosson, req. n° 206907, AJFP 2002, p.45, concl. A.-F. ROUL. 970 CE, 10 juin 1991, Bonneville de Marsangy, req. n° 89037, Dr. adm. 1991, n°373. 971 Article 7 du décret n° 2010-467 du 7 mai 2010 modifiant le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat et à certaines modalités de mise à disposition et de cessation définitive de fonctions, JO du 11 mai 2010.
304
certaines positions des fonctionnaires de l’Etat, à la mise à disposition, à l’intégration et à la
cessation définitive de fonctions prévoit ainsi désormais que « sans préjudice d'un éventuel
complément de rémunération dûment justifié, versé selon les règles applicables aux personnels
exerçant leurs fonctions dans l'organisme d'accueil, le fonctionnaire mis à disposition peut être
indemnisé par le (ou les) organisme (s) d'accueil des frais et sujétions auxquels il s'expose dans
l'exercice de ses fonctions suivant les règles en vigueur dans ce (ou ces) organisme (s) ».
- Un pouvoir disciplinaire et de notation conservée par l’administration d’origine
Bien qu’exerçant ses fonctions au sein de la collectivité territoriale nouvellement
compétente, le fonctionnaire d’Etat mis à disposition demeure sous l’autorité disciplinaire de son
administration d’Etat d’origine. Cette dernière continue en outre de procéder à la notation du
fonctionnaire d’Etat, sur la base d’un rapport qui lui est toutefois remis par la collectivité territoriale
d’accueil972.
- Une intervention de la collectivité territoriale d’accueil limitée aux décisions relatives aux congés annuels ou de maladie
Innovation notable introduite par le décret du 7 mai 2010973, lorsque le fonctionnaire de l'État
est mis à disposition pour une quotité de temps de travail égale ou supérieure au mi-temps, les
décisions afférentes aux congés annuels et aux congés de maladie sont prises par la collectivité
d'accueil. Mais les décisions relatives au droit individuel à la formation restent de la compétence de
l'administration d'origine.
BR !4*985@AG:<:45* e*6493;3E:*f* 9:?* [34A56344@6E:?* 90%5@5* @7*=E3[65* 9:?*A3;;:A56>658?*5:EE653E6@;:?*
Position du fonctionnaire placé hors cadre de son corps d’origine mais qui continue de
bénéficier dans ce corps de ses droits à l’avancement et à la retraite, le détachement est régi par les
articles 45 à 48 du titre II du statut et par le décret du 16 septembre 1985974. Les dispositions
classiques applicables au détachement découlent ainsi directement des conséquences de
l’intervention de la décentralisation dans l’administration française. Elles ne se révèlent cependant
applicables qu’aux agents de l’Etat transférés dans le cadre de l’acte I de la décentralisation, des
dispositions spécifiques étant intervenues pour organiser le détachement des agents transférés dans le
cadre de l’acte II de la décentralisation. Dans la première hypothèse, les fonctionnaires d’Etat
détachés ont été soumis aux règles régissant la fonction qu'ils exerçaient par la voie du
972 CAA Nancy, 6 décembre 2007, Bonato, req. n°06NC01512 ; Article 11 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat et à certaines modalités de mise à disposition et de cessation définitive de fonctions tel que modifié par l’article 17 du décret n°2010-888 du 28 juillet 2010. 973 Article 7 du décret précité n° 2010-467 du 7 mai 2010. 974 Articles 14 à 39.
305
détachement975 et continuaient à bénéficier dans leur corps d'origine des leurs droits à l'avancement
et à la retraite. Il était tenu compte, lors de leur réintégration, du grade et de l'échelon qu'ils avaient
atteint dans le corps ou cadre d'emplois de détachement, sous réserve qu'ils leur soient plus
favorables976. Mais cela ne s'applique pas aux fonctionnaires dont le détachement dans un corps ou
cadre d'emplois pour l'accomplissement d'un stage ou d'une période de scolarité n'est pas suivi de
titularisation. Lorsque le fonctionnaire est intégré dans le corps ou cadre d'emplois de détachement, il
est tenu compte du grade et de l'échelon atteints dans le corps d'origine, sous réserve là encore, qu'ils
lui soient plus favorables. Toutefois, des dispositions spécifiques régissent la situation des
fonctionnaires de l'État détachés auprès d'une collectivité territoriale suite à un transfert de
compétences : l'acte II de la décentralisation a ainsi créé une hypothèse particulière de détachement
qui déroge aux règles habituelles.
WV +:?* <396[6A@5634?* =7E:<:45* @==@E:45:?* :4* A@?* 906458\E@5634* 9:* ;@*[34A5634*=7B;6C7:*5:EE653E6@;:*
Lorsqu’ils font le choix d’intégrer directement la fonction publique territoriale, les
fonctionnaires d’Etat dont l’activité est transférée à une collectivité territoriale sont placés dans un
cadre d'emplois et classés à l'échelon comportant un indice égal, ou a défaut immédiatement
supérieur à celui qu'ils détenaient dans leur grade ou emploi d'origine. A cette fin, des tableaux de
correspondance entre la fonction publique d'État et la fonction publique territoriale ont été établis par
décrets977. Il en résulte une volontaire symétrie entre les règles qui présidaient à l’avancement du
fonctionnaire sous l’empire de l’Etat et celles qui lui sont désormais applicables dans le cadre de la
collectivité territoriale nouvellement compétente. Ce constat se vérifie d’autant mieux dans le cadre
des derniers transferts de compétences intervenus entre l’Etat et les collectivités territoriales, à
l’image du transfert des parcs et ateliers de l’équipement vers les départements. Dans cette hypothèse
par exemple, le législateur a pris le parti de créer au sein de la fonction publique territoriale des
cadres d’emplois précisément aux fins de recevoir les personnels des anciennes directions
départementales de l’équipement. « Calqués » sur les corps d’origines de ces personnels, les cadres
d’emplois ont permis d’atténuer au maximum les effets sur les personnels transférés. *
975 CE, 26 novembre 1997, Tallec, req. no 122242, Dr. adm. 1998, comm. no 96 976 Cela ne s'applique toutefois pas aux fonctionnaires dont le détachement dans un corps ou cadre d'emplois pour l'accomplissement d'un stage ou d'une période de scolarité n'est pas suivi de titularisation. 977 Décret nº 2005-1727 du 30 décembre 2005 fixant les conditions d'intégration dans les cadres d'emplois de la fonction publique territoriale des fonctionnaires de l'Etat en application des dispositions de l'article 109 de la loi nº 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, (J.O. du 31 décembre 2005); Décret n° 2008-1457 du 30 décembre 2008 relatif aux conditions d'intégration, de détachement et de classement dans les cadres d'emplois de la fonction publique territoriale des fonctionnaires de l'Etat en application des dispositions de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (J.O. du 31 décembre 2008).
306
N*S*!4:*\:?5634*9:?*E:??37EA:?*G7<@64:?*9:?*A3;;:A56>658?*5:EE653E6@;:?*90@AA7:6;* E:4[3EA8:* ?37?* ;0:[[:5* 9:* ;06458\E@5634* 9:?* =:E?344:;?*98A:45E@;6?8?*!
Les conséquences du transfert de personnels étatiques dans les effectifs des collectivités
locales à l’occasion de la décentralisation se sont finalement révélées relativement limitées, du moins
d’un point de vue strictement juridique. Les transferts verticaux de compétence n’ont cependant pas
été sans effet sur les collectivités territoriales. Ils ont en effet conduit ces entités nouvellement
étoffées quant à leurs domaines d’intervention et aux moyens humains attachés à repenser leur
gestion des ressources humaines quelque peu embryonnaire pour se structurer sensiblement sur ces
aspects. En effet, selon les domaines de compétences transférées, les collectivités territoriales ont
parfois dû faire face à l’intégration d’un contingent important de catégories de personnels dont elles
étaient à l’origine peu familières, eu égard à leur domaine d’intervention traditionnel. C’est ainsi par
exemple que les régions habituées par définition à gérer des personnels majoritairement très
qualifiés, et relevant de ce fait de la catégorie A, ont du s’adapter à la gestion de personnels de
catégorie B, voire C. Ces collectivités territoriales se sont dès lors trouvées dans l’obligation de
repenser la gestion de leurs ressources humaines, en procédant à une véritable structuration de cette
fonction en leur sein.
∴
Si le transfert d’agents publics de l’Etat vers les collectivités territoriales a pu, dans un
premier temps du moins, emportait des conséquences d’ordre essentiellement « sociologiques », en
raison de la méconnaissance de la fonction publique territoriales par les agents de l’Etat, il semble
aujourd’hui relativement bien perçu par ces derniers en raison des faibles conséquences auxquelles
ils se voient exposés. L’assimilation de ces contingents par les collectivités territoriales apparaît
également bien appréhendée au plan organisationnel978. Les conséquences du transfert des personnels
de droit public à l’occasion d’un transfert horizontal de compétences entre collectivités territoriales
s’inscrit dans un contexte relativement similaire, le passage s’opérant qui plus est au sein d’une
même fonction publique : la fonction publique territoriale.
*
978 La principale difficulté étant d’ordre financier en raison des compensations financières jugées insuffisantes.
307
,@E@\E@=G:*WR**/:?*A34?8C7:4A:?*97*5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*Y* ;03AA@?634* 9:* 5E@4?[:E5* G3E6M345@;* 9:* A3<=85:4A:?* :45E:* A3;;:A56>658?*5:EE653E6@;:?*
En intégrant les effectifs d’une structure intercommunale sous l’effet d’un transfert de
compétences, l’agent public précédemment employé par une collectivité territoriale ou un de ses
établissements publics poursuit sa carrière dans un environnement juridique connu, et ne s’expose à
aucun bouleversement majeur. Il demeure soumis au statut de la fonction publique territoriale et à
l’ensemble des règles qu’il édicte, tant au regard de sa situation individuelle que collective.
Un seul élément, relatif à sa situation individuelle, apparaît en réalité susceptible d’évoluer
pour l’agent à l’issue de son intégration dans une structure intercommunale : le régime indemnitaire
auquel il peut prétendre. Il convient en effet de rappeler qu’aux termes des dispositions de l’article
20 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, la
rémunération des fonctionnaires est un agrégat de divers éléments que sont le traitement, l’indemnité
de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte
législatif ou réglementaire. Ces indemnités, communément désignées sous le vocable de « régime
indemnitaire », constituent un complément du traitement distinct des autres éléments de
rémunération, qui demeure facultatif et dont le montant est librement déterminé par chaque
collectivité territoriale en application du principe constitutionnel de libre administration des
collectivités territoriales. En théorie, il peut dès lors y avoir autant de régimes indemnitaires
différents que de collectivités territoriales.
Dans ce contexte, se pose la question de la permanence du régime indemnitaire dont relevait
l’agent public transféré sous l’empire de la collectivité d’origine une fois l’établissement public
intercommunal intégré. Si le législateur prévoit désormais que l’agent public transféré conserve le
bénéfice du régime indemnitaire s’il y a intérêt, neutralisant par la même les effets du transfert sur la
rémunération de l’agent (A), il offre également la possibilité à l’établissement public de coopération
intercommunale d’harmoniser les régimes indemnitaires de l’ensemble de ses personnels, dans un
souci évident de respect de l’égalité de traitement des agents et de simplification de la gestion des
ressources humaines (B), et de neutraliser à son tour les effets du transfert des agents publics.
-*S*+:?*A34?8C7:4A:?*4:75E@;6?8:?*=37E*;0@\:45*=7B;6A*@7*<3<:45*9:*?34*5E@4?[:E5*
L'article 64 de la loi du 12 juillet 1999, relative au renforcement et à la simplification de la
coopération intercommunale, a ouvert la possibilité pour les établissements publics de coopération
intercommunale de décider du maintien, à titre individuel, des avantages acquis, en application de
l'article 111, alinéa 3, de la loi du 26 janvier 1984, par les agents, au titre de l'emploi qu'ils
308
occupaient auparavant dans la collectivité membre de l'EPCI. L’article 46 de la loi du 27 février
2002 relative à la démocratie de proximité a complété ce dispositif en prévoyant que les agents
transférés conservent, s'ils y ont intérêt, le bénéfice du régime indemnitaire qui leur était applicable.
Il faut dire que la prise en compte des avantages acquis antérieurement par les personnels dans leur
précédente collectivité sous l’empire des dispositions initiales de la loi du 12 juillet 1999 restait
conditionnée par l’intervention d'une délibération en ce sens de l'organe délibérant de l’EPCI. Le
résultat pouvait alors faire apparaître des disparités entre les agents d’un même établissement en
fonction de leur collectivité d'origine979. La loi du 27 février 2002 s’est efforcée d’y mettre fin en
supprimant l’exigence d’une délibération particulière.
D’une faculté laissée à la discrétion de l’établissement public de coopération
intercommunale d’accueil, le maintien du régime indemnitaire est donc aujourd’hui de droit, pour les
fonctionnaires comme pour les agents non titulaires. L’article L. 5211-4-1 du code général des
collectivités territoriales dispose ainsi que :
« Les agents transférés en vertu des alinéas précédents conservent, s'ils y ont intérêt, le bénéfice du régime indemnitaire qui leur était applicable ainsi que, à titre individuel, les avantages acquis en application du troisième alinéa de l'article 111 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ».
Sont ainsi concernés les avantages « ayant le caractère de complément de rémunération »,
tel le treizième mois. Le régime indemnitaire visé à l’article L. 5211-4-1 du code général des
collectivités territoriales est en effet constitué de l'ensemble des primes et indemnités obtenues par
les fonctionnaires au titre de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984, c'est-à-dire l'ensemble des
primes et indemnités attribuées sur décision de l'assemblée délibérante de la collectivité territoriale.
Cette dernière précision est essentielle. Pour être maintenus980, il est en effet nécessaire que leur
existence repose sur un acte juridique et non pas seulement sur une situation de fait. La position des
juridictions administratives se révèle sur ce point des plus exigeantes et des plus formalistes, en
déniant par exemple le droit au maintien d'une prime de fin d'année à un agent public transféré à une
communauté de communes au motif que le contrat qui le liait à une commune membre n'incluait pas
cette prime et en dépit de la circonstance que cette commune lui avait effectivement versé cette
prime981. Elle s’écarte au surplus de la position plus favorable adoptée par les juridictions judiciaires
quant aux avantages conservés par les salariés de droit privé dans la mesure où la Cour de Cassation
reconnaît quant à elle l’existence d’un avantage individuel acquis dès lors que le salarié en a déjà
bénéficié982. Notons enfin que les avantages collectivement acquis sont également maintenus à titre
individuel.
979 Rép. min. n° 5807 : JOAN Q, 20 janv. 2003, p. 375 ; Rép. min. n° 71965 : JOAN Q, 7 mars 2007, p. 2496 980 Lamy droit public des affaires, Ed. 2011, n° 962. 981 CAA Marseille, 8 mars 2005, Communauté de Marseille Provence Métropole, req. n° 01MA01037 . 982 Cass soc., 23 mai 2006, RJS 2006, n°985
309
N*S*+:?*A34?8C7:4A:?*4:75E@;6?8:?*=37E*;@*A3;;:A56>658*90@AA7:6;*@=Ea?*;:*5E@4?[:E5*
Le transfert des personnels d’une collectivité territoriale à un établissement de coopération
intercommunale engendre inéluctablement de sensibles conséquences au plan de l’organisation
même de l’établissement public d’accueil983. L’intégration de personnels des collectivités membres
par un établissement public de coopération intercommunale à l’issue d’un transfert de compétence
conduit ainsi à la coexistence au sein d’une même entité de deux catégories de personnels – les
agents transférés et les agents nouvellement recrutés – qui pour relever du statut de la fonction
publique territoriale, pourront cependant, nous l’avons vu, disposer de régimes indemnitaires
différents (1). Confronté à une telle dualité de régimes - qui semble être le propre de toute structure
publique affectée par une évolution dans sa situation juridique même si, au cas présent, la dualité est
minime puisqu’elle ne porte que sur le seul régime indemnitaire - l’établissement public de
coopération intercommunal peut vouloir y mettre fin tant pour des raisons évidentes d’organisation
interne que pour des raisons d’égalité entre les agents employés au sein d’une même entité. La
jurisprudence lui offre cette faculté, en lui permettant de procéder à l’harmonisation des régimes
indemnitaires de l’ensemble des agents (2).
UV /@*A3:Z6?5:4A:*90@\:45?*=7B;6A?*9:*E8\6<:?*649:<465@6E:?*96?564A5?*?37?*;0:[[:5* A3<B648*9:* ;06458\E@5634*90@\:45?* 5E@4?[8E8?*:5*9:* E:AE75:<:45*9074**=:E?344:;*=E3=E:*
La reprise d’une compétence par un établissement public de coopération intercommunale,
que celui-ci préexiste à cette évolution ou qu’il apparaisse à cette occasion, implique au plan social
une dualité de personnels, issus à la fois du recrutement d’un personnel propre par la structure
intercommunale (a) et de l’intégration des personnels transférés (b).
@R /@*;6B:E58*8>69:45:*=37E*;0%,2#*9:*?:*935:E*9:*?34*=E3=E:*=:E?344:;*
« Contraint » d’intégrer les personnels des collectivités membres affectés à une compétence
qui lui est transférée, l’établissement public de coopération intercommunale n’en dispose pas moins
de la liberté de recruter son propre personnel, dans le respect des principes posés par la loi du 26
janvier 1984. Il peut ainsi créer les emplois, dans les filières qui correspondent à sa compétence, afin
de recruter les agents dont ils ont besoin. Les règles qui président au recrutement sont alors pour
l’EPCI sensiblement les mêmes que pour toute collectivité publique. Les recrutements doivent être
983 Nous renverrons sur ces aspects à l’excellente étude de E.AMAR qui souligne ainsi les raisons des difficultés d'intégration des personnels au sein de l’EPCI tenant notamment à la différence des processus décisionnels. L'intercommunalité se différencie de la gestion communale par un double aspect : l’inopérance du clivage politique traditionnel au niveau intercommunal et l’appui technique sur des organismes institutionnalisés en matière de transports et d’urbanisme notamment.
310
effectués selon les mécanismes prévus par la loi du 26 janvier 1984 et ses décrets d’application, et
conformément au principe posé par le statut général selon lequel les emplois permanents des
collectivités territoriales sont occupés par des fonctionnaires. Ainsi, les agents peuvent être recrutés
par voie de concours, sur titres, promotion interne, mutation, mise à disposition ou détachement. Les
agents employés à temps complet, peuvent occuper leur emploi à temps plein ou à temps partiel.
L’EPCI peut également créer des emplois à temps non complet suivant les règles définies par le
décret n°91-298 du 20 mars 1991. Il peut également recruter des agents non titulaires dans les cas
définis par la loi du 26 janvier 1984, pour remplacer des agents titulaires momentanément
indisponibles, ou pour faire face à la vacance d’un emploi qui ne peut être pourvu immédiatement984,
pour exercer un emploi occasionnel ou saisonnier985, pour exercer des fonctions pour lesquelles il
n’existe pas de cadre d’emplois986, pour les emplois de catégorie A, lorsque la nature des fonctions
ou les besoins du service le justifient987, pour occuper un emploi à temps non complet dans un EPCI
de moins de 1000 habitants pour une durée inférieure ou égale au mi-temps988, pour pourvoir un
emploi fonctionnel de directeur de l’EPCI989, pour pourvoir un ou plusieurs emplois de cabinet du
président de l’EPCI990.
BR !4:* A3<=;:Z6[6A@5634* =35:456:;;:* 9:* ;@* \:?5634* 9:?* E:??37EA:?*G7<@64:?*9:*;0%,2#*
En offrant la possibilité aux établissements de coopération intercommunale de conserver les
avantages acquis des agents communaux transférés en son sein, le dispositif de l’article 64 de la loi
du 12 juillet 2009 a certes assuré le maintien des droits des agents transférés. Il n’en a pour autant
simplifié la gestion des ressources humaines pour l’EPCI. En plus de ses propres règles internes
applicables aux agents directement recrutés par lui, l’EPCI, « réceptacle » des différents régimes
indemnitaires précédemment applicables aux agents dans chacun des communes dont ils émanent, se
trouve confronté à la gestion de statuts parfois aussi variés que le nombre de communes dont il
marque la réunion991. La disparité des régimes indemnitaires des personnels travaillant pour les
communautés d'agglomération, selon qu'ils sont des agents communaux transférés ou des agents
engagés directement par ces communautés, induite par le dispositif de l'article 46 de la loi n° 2002-
276 du 27 février 2002, ne manque dès lors pas de soulever la question des modalités
d’harmonisation offertes aux EPCI pour y pallier.
984 Ibid., article 3 alinéa 1. 985 Ibid., article 3 alinéa 2. 986 Ibid., article 3 alinéa 4. 987 Ibid., article 3 alinéa 5. 988 Ibid., article 3 alinéa 4. 989 Ibid., article 47, dans le respect des conditions de seuils démographiques définis par cet article. 990 Ibid., article 110. 991 E. LANDOT, « Quel statut pour les agents « intercommunalisés » ? », RLCT n°20, janvier 2007, p.37.
311
WV /@*[@A7;58*98468:*90G@E<346?:E*;:?*E8\6<:?*649:<465@6E:?*9:*;0:4?:<B;:*9:?*@\:45?*
Par un arrêt Syndicat force ouvrière du personnel territorial de l’agglomération Val de Seine
en date du 19 février 2009, la Cour administrative d’appel de Versailles992 a considéré que les
dispositions d'une délibération par laquelle le conseil d'une communauté d'agglomération, usant de la
faculté conférée par l'article 64 de la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la
simplification de la coopération intercommunale, a décidé de maintenir les avantages acquis,
présentaient un caractère réglementaire, et qu’en conséquence elles pouvaient être modifiées ou
abrogées pour l'avenir sans que l’agent ne puisse se prévaloir d'un droit acquis à leur maintien.
L’arrêt de la cour administrative de Versailles confère ainsi la faculté aux établissements publics de
coopération intercommunale de remettre en cause les avantages collectifs acquis par le personnel
transféré d'une commune membre en application des dispositions de l’article. 111 de la loi du 26
janvier 1984. Le régime indemnitaire auquel pouvait prétendre l’agent public transféré ne se trouve
ainsi maintenu de droit que provisoirement, tant que l’EPCI d’accueil ne décide pas d’une
harmonisation des régimes indemnitaires de l’ensemble de ses agents. A l’instar des avantages
individuels acquis des salariés de droit privé, il peut disparaître sous l’effet de l’adoption de
nouvelles règles collectives. La position ainsi adoptée par la Cour revenait finalement à considérer
qu'il n'y a donc pas de droit au maintien d'un régime indemnitaire, ni – et cela peut apparaître comme
plus étonnant – au maintien des avantages collectivement acquis.
La décision de la Cour administrative d’appel de Versailles, qui tend à considérer que la
délibération de l’EPCI se prononçant sur le maintien du régime indemnitaire des agents transférés est
dépourvue de tout caractère individuel, procèdait à notre sens d’une analyse juridique tout à fait
cohérente au plan des principes. L’objet d’une telle délibération est en effet bien d’appréhender la
situation des agents transférés in abstracto, et non pas nominativement. La dimension individuelle
relève en réalité de l'autorité de nomination qui fixe par arrêté individuel, pris sur le fondement de
cette délibération, le taux applicable à chaque agent993.
Elle s’avérait, en second lieu, particulièrement rationnelle en pratique pour assurer une
gestion simplifiée des ressources humaines par les établissements publics de coopération
intercommunale. Nous nous rangeons ainsi à l’avis de Patrick Frydman et Emmanuelle Saulnier-
Cassia994 selon lequel « à l'heure où il est question d'achever la carte de l'intercommunalité, et peut-
être plus encore de la simplifier, une telle solution paraît des plus raisonnables ». Elle contribue à
clarifier un paysage juridique des plus confus sans nécessairement heurter l'intérêt des agents, donc
992 CAA Versailles, 19 février 2009, Syndicat force ouvrière du personnel territoriale de l’agglomération Val de Seine, req. n° 07VE01097, JCP A 2010, p. 2000 ; JCP A 2009, n° 2212. 993 P. FRYDMAN et E. SAULNIER-CASSIA, « Cour administrative d’appel de Versailles – décisions de février à juin 2009 », JCPA 2009, p. 2212, op. cit. 994 Ibid.
312
leur nécessaire motivation : en effet, la pratique démontre que l'harmonisation des régimes
indemnitaires des agents intercommunaux se réalise en principe par un alignement « vers le haut »,
c'est-à-dire sur le régime communal le plus avantageux. Ce dernier point appelle quelques
remarques. L’atout que revêt une telle uniformisation «par le haut » en terme de paix sociale ne doit
cependant pas occulter les obstacles juridiques, et les conséquences financières, qui s’y opposent. En
effet, bien que souvent pratiquée par le passé par certaines communautés face à des pressions fortes
des organisations syndicales995, elle ne peut toutefois être envisagée au regard des dispositions des
articles 88 et 111 de la loi du 26 janvier 1984 selon lesquelles un EPCI ne peut créer de nouveaux
avantages collectivement acquis sauf à ce que ces avantages soient égaux ou inférieurs à ce dont
bénéficiaient les agents. « Dans les faits, pour éviter les disparités de rémunération entre les agents
communaux transférés, une harmonisation des régimes indemnitaires est généralement intervenue à
la hausse, en appliquant à tous le régime le plus favorable. Les transferts ont donc été
particulièrement coûteux. Il est vrai que quand des inégalités de traitement subsistent entre les
agents d’une même communauté et plus spécialement entre les nouvelles recrues qui ne bénéficient
pas d’avantages acquis et les agents issus des communes membres, elles créent des tensions et
risquent d’être difficiles à gérer dans la durée »996.
Aussi, et dans un tel contexte, la possibilité de remettre en cause le régime indemnitaire des
agents offerte par la jurisprudence ne doit pas nécessairement se traduire par une uniformisation par
le haut mais simplement tendre à la suppression des disparités indemnitaires entre les agents997 pour
pallier les difficultés de gestion qui en résulteraient 998.
Force est de constater cependant qu’une telle décision n’a pas reçu l’adhésion des
collectivités territoriales et que le législateur y a mis fin par la loi du 16 décembre 2010 qui a précisé
que « les agents conservent, s'ils y ont intérêt, le bénéfice du régime indemnitaire qui leur était
applicable ainsi que, à titre individuel, les avantages acquis en application du troisième alinéa de
l'article 111 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la
fonction publique territoriale».
∴
995 Ibid., soulignant que le les services de contrôle de légalité font montre d’une plus grande vigilance dans ces domaines qu’ils ne le firent immédiatement après l’adoption de la loi n°99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale ; Voir également pour un constat identique : Maires de France septembre 2002, p. 42 et novembre 2003, p. 72 996 C. Comptes, L’intercommunalité en France, rapport, novembre 2005, p. 129 997 CAA Versailles, 19 février 2009, n° 07VE01097, Syndicat FO personnel territorial agglomération Val-de-Seine, JCP A 2009 n° 4, obs. S. MANSON, p. 2212 ; BJCL 2009, n° 7, p. 460, concl. S. DAVESNE ; JCP A 2010, n°2000, obs. M. PLANCKE et D. CHRISTIANY. 998 Question écrite n° 16625, 3 mars 2011 (J.O. Sénat du 23 décembre 2010, p. 3294).
313
En assurant le maintien de la qualité d’agent public en toute hypothèse tout en s’effectuant
entre des personnes publiques qui, pour parfois relever de fonctions publiques différentes n’en
obéissent pas moins à des principes directeurs identiques, le transfert d’agents publics dans le cadre
de transfert de compétences entre personnes publiques emporte finalement peu de conséquences tant
pour les agents que les personnes publiques elles-mêmes. Le transfert d’agents publics vers une
personne morale de droit privé en raison de la privatisation du régime juridique d’une structure
gestionnaire d’une activité publique s’expose, a priori, à des bouleversements plus profonds de part
et d’autre des acteurs concernés. *
':A5634*W**L*/:?*A34?8C7:4A:?*97*5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*;3E?*9:*;@*=E6>@56?@5634*97*E8\6<:*`7E696C7:*9074:*:45658*=7B;6C7:**
Transformation d’un établissement public administratif en établissement public industriel et
commercial, création d’une entreprise publique en lieu et place d’un établissement public… autant
de configurations pour un constat unique : la privatisation du régime juridique de l’entité publique en
charge d’une activité publique à l’issue de l’évolution dans la situation juridique de l’entité. Il s’agit
là, à n’en pas douter, de l’hypothèse pour laquelle le changement opéré apparaît le plus manifeste.
Remarquable par l’évolution qu’elle marque, la privatisation du régime juridique d’une entité
publique en charge d’une activité publique l’est également par les difficultés qu’elle soulève.
Celles-ci résident, tant pour l’agent transféré que pour l’entité dont il relève désormais, dans
la multiplicité, et par là-même la complexité, des situations juridiques qui résultent de cette
évolution. D’un cadre juridique de droit public où l’ensemble des agents999 se voit soumis au statut
de la fonction publique, l’entité bascule dans un cadre juridique de droit privé1000 qui l’amène à
employer des personnels de droit privé relevant du droit commun du travail, du moins d’un point de
vue juridique stricto sensu. D’un point de vue pratique cependant, cette mutation, en raison même
des bouleversements qu’elle engendre, n’est rarement immédiate pour les personnels de droit public
transférés. Elle s’accompagne la plupart du temps d’une période de transition - qui peut parfois
s’inscrire dans la durée1001- durant laquelle se côtoient agents privés nouvellement recrutés et agents
transférés maintenus sous un statut de droit public par le jeu de mécanismes tels que la mise à
disposition, le détachement voire le maintien en position d’activité. Tentative de neutralisation des
effets du transfert sur les agents publics transférés, le maintien du statut de fonctionnaire – à part
999 Pour des raisons compréhensibles de simplification des données de la problématique, il sera fait abstraction au cas présent de la présence d’agents de droit privé dans des structures publiques tels que les contrats aidés ou de manière plus importante des établissements publics dits « à double visage », coutumiers de la coexistence d’agents de nature différentes. 1000 Il sera toutefois noter que la circonstance que l’entité demeure une entreprise publique implique la soumission à la loi n°83-675 du 26 juillet 1983 de démocratisation du secteur public qui instituent des modalités de gestion spécifiques au regard de la nature publique du capital, telles que sur la composition du Conseil d’administration : Loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public (J.O. du 27 juillet 1983, p. 2326). 1001 Pour prendre le seul exemple de France Télécom, il est estimé que le dernier fonctionnaire quittera ses fonctions à l’horizon 2036.
314
entière ou par la voie d’un mécanisme de mobilité – emporte à l’inverse des effets non négligeables
pour la structure d’accueil dans la gestion au quotidien de personnels à double visage. Elle oblige
ainsi l’entité à repenser la gestion de ses ressources humaines dans un souci évident de cohérence et
de souplesse comme de paix sociale (paragraphe 2). Au surplus, force est de constater que, loin de
marquer la permanence d’une « bulle » de droit public au sein d’une immensité de droit privé, la
privatisation du régime de droit public de l’entité rejaillit incontestablement sur le statut même des
agents publics transférés, dont l’effacement1002 du régime de la fonction publique est patent
(paragraphe 1).
,@E@\E@=G:*UR*/0@??6<6;@5634* ;@5:45:*97*[34A56344@6E:*5E@4?[8E8*Y*74*?@;@E68*9:*9E365*=E6>8**
En retenant le choix d’un maintien de son statut de droit public, l’agent public ne demeure
cependant pas totalement étranger au régime juridique de l’entité qu’il intègre. Quelque soit la forme
qu’il revête, mise à disposition ou détachement, le recours à un mécanisme de transfert aboutit en
effet inévitablement à placer l’agent dans une position quelque peu schizophrénique. Plus
véritablement fonctionnaire (A) ni complètement salarié de droit privé (B), l’agent transféré évolue à
la frontière des deux régimes, selon les éléments en jeu. Il en résulte des situations juridiques
extrêmement atypiques, et conditionnées par les exigences de chaque évolution.
-* S* /0@??6<6;@5634*<@46[:?5:* 9:?* @\:45?* =7B;6A?*<6?* Y* 96?=3?65634* 37*985@AG8?*5E@4?[8E8?*Y*74*?@;@E68*9:*9E365*=E6>8**
D’un régime de droit public structuré autour du statut de la fonction publique, l’agent affecté
à une activité publique se retrouve, du seul fait de l’évolution juridique de l’organisme qui l’emploie,
projeté dans un contexte de droit privé. Sa qualité de fonctionnaire s’efface alors quelque peu si
l’agent intègre la structure soumise à un régime de droit privé dans le cadre d’un contrat de mise à
disposition (1), et tend à véritablement disparaître dans le cadre d’un détachement (2).
UV /:*[34A56344@6E:*<6?*Y*96?=3?65634*T*74*@\:45*=3;I<3E=G:*
La situation de l’agent public mis à disposition à l’issue de la transformation en
établissement public et industriel et commercial ou en société anonyme de sa structure d’origine est
certainement la plus paradoxale, et s’explique par le simple fait que la mise à disposition n’est autre
qu’une des positions d'activité du fonctionnaire, qui se trouve simplement exercée hors du cadre
normal de son activité. Le fonctionnaire mis à disposition ne mène en effet pas l'activité du service
1002 LAMBLIN L., La fonction publique de l’Etat confrontée à la concurrence, Th. Paris II, 2007, p. 694, op. cit.
315
auquel il est rattaché. Comme le souligne très justement Gilles Bouscharain1003, « le fonctionnaire
mis à disposition n'entend pas quitter la fonction publique, mais seulement exercer une activité autre
que celle poursuivie par l'administration dans laquelle il travaille ».
Illustration manifeste de la permanence du lien de l’agent public avec la fonction publique
dont il est issu, le maintien de la rémunération du fonctionnaire dans son principe et son montant
puisqu’aux termes de l’article 12 du décret du 16 septembre 19851004 « le fonctionnaire mis à
disposition (…) continue à percevoir la rémunération correspondant à l'emploi qu'il occupe. Le
fonctionnaire mis à disposition dans les cas prévus aux 2° et 3° de l'article 1er [...] ne peut percevoir
aucun complément de rémunération1005 ». Au-delà du droit au traitement, l’agent mis à disposition
conserve l’intégralité des garanties fondamentales tirées de son statut et notamment le droit à
l’avancement et à la retraite.
Pour autant, bien qu'il demeure dans son corps d'origine, l’agent public peut voir évoluer sa
situation statutaire évoluer du seul fait de son intégration dans les effectifs d’une entité soumise aux
règles de droit privé, dès lors que la modification apportée ne va pas à l'encontre des prescriptions
législatives et réglementaires1006 notamment en ce qui concerne l'exercice de l'autorité à son égard. Il
est d’ailleurs remarquable que la plupart des aménagements du statut de l’agent public résultent du
statut lui-même. Il en va ainsi de l’autorité hiérarchique qui est partagée entre l'administration
d'origine et l'organisme d'accueil, la première conservant le pouvoir hiérarchique en application des
articles 9et 10 du décret du 16 septembre 1985. Un tel partage apparaît pleinement dans les modalités
de notation ainsi réparties aux termes de l’article 11 du même décret : l'administration ou le
responsable de l'organisme d'accueil établit un rapport sur le fondement duquel est noté le
fonctionnaire mis à disposition par son administration d’origine.
Au demeurant, l’assimilation croissante de l’agent public mis à disposition à un salarié de
droit privé ne saurait désormais être niée. Considéré aux termes de la jurisprudence du tribunal des
conflits1007 comme de la Cour de cassation1008 lié à l’organisme d’accueil par un contrat de travail en
droit privé, l’agent public mis à disposition d’un organisme privé « contribuant à la mise en œuvre
d’une politique de l’Etat (…) pour l’exercice des missions de service public confiées à cet
organisme » bénéficie aujourd’hui d’une validation législative par l’intervention de la loi du 2 février
1003 G. BOUSCHERAIN, « Le statut du fonctionnaire mis à disposition d’une association », AJFP 2001, p. 41 1004 Décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 modifié relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat et à certaines modalités de mise à disposition et de cessation définitive de fonctions (J.O. du 20 septembre 1985, p. 10813). 1005 Toutefois, cette disposition ne fait pas obstacle à l'indemnisation des frais et sujétions auxquels il s'expose dans l'exercice de ses fonctions 1006 CE 1er décembre 1997, Syndicat national des inspecteurs des affaires sanitaires et sociales, Rec. p. 453. 1007 TC, 15 mars 1999, Faulcon c/ Commune de Châtellerault, Rec. p. 442, op. cit. 1008 Cass. Ass . Plén., 20 décembre 1996, Rey-Herme c. Association l’Alliance Française, Dr. Soc. 1997, p. 717, note J.-F. LACHAUME ; D. 1997, p. 275, note Y. SAINT-JOURS ; AJDA 1997, p. 304, obs. S. SALON ; AJFP 1997, p. 35 ; confirmé par Cass. soc. 11 octobre 2000, Besland c. Association Département des pupilles de l’Enseignement public et Cass. soc., 13 mars 2001, Fraysse c. Association District Aveyron football.
316
20071009 qui tend encore à banaliser le recours à une telle modalité de transfert de personnels en cas
d’évolution d’activités publiques. D’autant que la Cour de cassation opère à l’endroit des agents
publics mis à disposition, comme des agents détachés, une interprétation assimilatrice au salariés de
droit privé en les considérant éligibles comme électeurs au comité d’entreprise1010, ce qui n’est pas
sans conséquence au plan des institutions représentatives, nous y reviendrons1011.
WV /:* [34A56344@6E:*985@AG8*T*74*?@;@E68*9:*9E365*=E6>8*C76*4:*965*=@?* ?34*43<*
« Position du fonctionnaire placé hors de son cadre d'emplois, emploi ou corps d'origine
mais continuant à bénéficier, dans ce cadre d'emplois, emploi ou corps, de ses droits à l'avancement
et à la retraite »1012, le détachement apparaît parmi les différents mécanismes de mobilité comme le
dernier rempart avant le basculement total de l’agent dans la sphère du droit privé. Le statut de la
fonction publique1013 en révèle toute l’ampleur en énonçant clairement que « le fonctionnaire détaché
est soumis aux règles régissant la fonction qu'il exerce par l'effet de son détachement ». Ces deux
alinéas posent le principe de la double carrière applicable au fonctionnaire détaché. Si le
fonctionnaire détaché conserve son droit à avancement et à la retraite, il est cependant assimilé à un
salarié de droit privé lorsqu’il accomplit ses fonctions auprès d’un organisme de droit privé et soumis
aux règles qui régissent la fonction qu'il occupe1014. Par conséquence, il relève, à l’instar de
l’ensemble du personnel de cet organisme, de la convention collective applicable au secteur
d’emploi, et de manière encore plus notable de la compétence des juridictions judiciaires pour tout
litige l’opposant à son employeur. Ainsi, aux termes d’une jurisprudence constante et déjà
ancienne1015, les juridictions sociales et administratives comme le tribunal des conflits considèrent
que « [...] nonobstant le fait que le détachement de (l’agent) ait été décidé dans le cadre de
dispositions régissant la fonction publique territoriale et que l'intéressé ait continué à bénéficier des
avantages liés à son statut de fonctionnaire pendant la durée de son détachement, le contrat qui l'a
uni à la société (d’accueil) est un contrat de droit privé ; qu'il en résulte que la demande [...] relève
de la compétence du juge judiciaire ».
Une telle position des juridictions ne fait que traduire le lien étroit qui existe entre le
fonctionnaire détaché et son organisme d'accueil. Ce dernier, à l’inverse de la mise à disposition,
1009 Loi n°2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique (J.O. du 6 février 2007). 1010 Cass. soc., 23 mai 2006, Bull. civ. V, n°182, p. 176. 1011 Voir infra, p. 318. 1012 Article 64 alinéa 1er de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale. 1013 Ibid., alinéa 3. 1014 CE, 14 févier 1958, Chamley et Perret, RFDA 1958, p. 118. 1015 Cass. soc. 4 novembre 1960, AJDA 1961, p. 358 ; TA Paris, 22 mars 1977, Melle Marcotte, Rec. p. 869 ; TC, 24 juin 1996, Préfet du Lot et Garonne c. Fraysse, Dr. adm. 1996, comm. N°537 ; Cass.soc., 27 juin 2000, D. 2000 inf. rap. p. 203 ; TC, 18 juin 2001, Potreau c/ Société de transports de la vallée de la Basse-Seine, req. n°3248.
317
procède ainsi au versement de la rémunération afférant à son nouvel emploi1016. Il convient d’ailleurs
de noter que la mesure de détachement de l’agent public prononce la libération de l’emploi
budgétaire correspondant à son emploi d'origine, témoignant par là-même de l’éloignement
grandissant du fonctionnaire. Au surplus, le pouvoir d'ordonner la suspension d'un fonctionnaire en
position de détachement appartient à l'autorité de l'organisme d'accueil1017.
L’assimilation de l’agent détaché à un salarié de droit privé est encore illustrée par le fait que
le code du travail trouve à s'appliquer à l’égard de l’agent détaché en matière d'assurance
chômage1018. En application des dispositions de l’article L.5422-13 et L. 5424-1 et suivants du code
du travail1019, les personnes publiques ou privées employant des fonctionnaires en détachement sont
en effet tenues au versement des contributions au régime d'assurance chômage1020. Il en résulte que le
pouvoir réglementaire peut valablement exonérer ces fonctionnaires détachés du versement de la
contribution exceptionnelle de solidarité au Fonds de solidarité dès lors que leur employeur relève du
régime d'assurance chômage1021. De même, lorsque l'employeur de l'entreprise d'accueil décide la
fermeture temporaire de l'établissement qui emploie l'agent détaché, celui-ci peut bénéficier du
régime du chômage partiel.
N*S*/0@55847@5634*?:4?6B;:*9:?*Ea\;:?*97*?5@575*9:*;@*[34A5634*=7B;6C7:*Y*;08\@E9*9:?*@\:45?*5E@4?[8E8?*:4*=3?65634*90@A56>658*
« Si l’on voulait faire une analogie avec le monde animal, on pourrait dire que le statut de la
Poste et de France Télécom est au statut général des fonctionnaires ce que l’ornithorynque […] est
à la classe des mammifères ». C’est en ces termes que Michel DEYDIER qualifiait le régime
extrêmement atypique élaboré lors de la réforme des PTT en France1022, mettant ainsi en lumière que
le maintien du statut des fonctionnaires des PTT au sein de la nouvelle entité France Télécom en
apparence identique ne devait certainement pas occulter des adaptions profondes de celui-ci pour
pallier les difficultés juridiques et pratiques inhérentes à la rigidité du statut.
Il est certain que l’intégration de fonctionnaires en position d’activité sans limitation de
durée au sein d’une société anonyme, qui ne manquait pas d’originalité ni d’audace de la part du
législateur, se heurtait à de nombreux obstacles non seulement pour assurer le transfert lui-même
mais également pour gérer de manière convenable et rationnelle, dans une perspective d’entreprise
des milliers de fonctionnaires demeurés en position d’activité. La circonstance que le premier
1016 CE, 19 octobre 1956, Guillien, Rec., p. 376 1017 CE, 14 novembre 1957, Leblanc, req. n° 16577. 1018 J. FIALAIRE, « Fonction publique - Positions, temps de travail, congés », J.-Cl. Adm., Fasc. 181-5, n°45. 1019 Anciens articles L. 351-4 et L. 351-12 du code du travail. 1020 Directive UNEDIC n°12-03 du 26 février 2003, AJFP 2003, p. 41. 1021 CE, 5 novembre 2004, SA Intermatique, req. n° 261523. 1022 M. DEYDIER, « La nouvelle situation des fonctionnaires des PTT dans la fonction publique de l’Etat », Juris PTT n° spécial 1990 La réforme des PTT, p. 42.
318
ministre de l’époque, Alain Juppé, se soit engagé à ce que « les agents de France Télécom qui sont
fonctionnaires (conservent) leur statut de fonctionnaires de l’Etat et les garanties associées, en
particulier la garantie de l’emploi et les droits aux pensions de retraite, acquis ou à acquérir, dont
l’exécution est garantie par l’Etat » n’excluait en effet pas qu’il soit procédé à certains
aménagements – indispensables - de ce statut. La transformation de France Télécom en un
établissement public puis d’une société anonyme ne fut dès lors pas sans conséquences pour les
fonctionnaires transférés, en dépit du maintien de leur statut.
Une première adaptation ambitieuse1023 consista ainsi en un vaste mouvement de
simplification des corps et grades des fonctions, passant respectivement de 40 à 6 et de 110 à 11, par
une reclassification intervenue par décrets1024 et opérée en partenariat avec les fonctionnaires grâce à
l’établissement d’une commission paritaire spéciale d’intégration. Il en résulte qu’en application de
la loi du 26 juillet 19961025, les corps de fonctionnaires restent en dehors des catégories hiérarchiques
établies par le statut général des fonctionnaires et les statuts particuliers de ces corps toujours
dérogatoires. Deux catégories de corps de fonctionnaires soumis à des statuts particuliers pris en
application du statut général des fonctionnaires de l'État relèvent directement de société : les corps de
« reclassement » et les corps de « reclassification ». Une telle mesure n’a pas été sans susciter un
riche contentieux. Il convient à ce titre de noter que par un arrêt Mothais du 5 juillet 2010 relatif aux
fonctionnaires reclassés de la Poste, le Conseil a considéré que la Poste, en refusant de prendre toute
mesure de promotion interne en faveur des fonctionnaires reclassés, a commis une faute de nature à
engager sa responsabilité, sans pouvoir utilement se prévaloir, pour s'en exonérer, ni de la
circonstance que les décrets statutaires des corps de reclassement auraient interdit ces promotions, ni
de la circonstance qu'aucun emploi ne serait vacant au cours de la période, pour procéder à de telles
promotions. À ce titre, dans cet arrêt, le Conseil d'État a estimé que le salarié ayant exercé le recours,
au vu des documents évaluant sa manière de servir, a été privé d'une chance sérieuse d'être promu à
une date antérieure à celle où il a pu bénéficier d'une promotion. Au demeurant, cette évolution
jurisprudentielle ne devrait vraisemblablement pas se traduire par un dispositif législatif de
reconstitution de carrière et oblige chaque agent d’exercer un recours contentieux pour faire
reconnaître les droits dont il a pu, le cas échéant, être privé illégalement, sur le seul terrain de la
responsabilité pour faute1026.
Une deuxième évolution remarquable concerne le régime de la notation des fonctionnaires
maintenus en position d’activité au sein d’une société anonyme. Face aux insuffisances du décret du
1023 L. LAMBLIN, La fonction publique de l’Etat confrontée à la concurrence, Th. Paris II, 2007, op. cit. 1024 Notamment par la voie du décret n°93-706 du 26 mars 1993 relatif aux dispositions applicables aux emplois supérieurs de France Télécom (J.O. du 28 mars 1993, p. 5447). 1025 Loi n°96-660 du 26 juillet 1996 relative à l’entreprise nationale France Télécom (J.O. du 27 juillet 1996, p. 11398), op. cit. 1026 Rép. Min. n° 89942 et 88949 (J.O.A.N. du 10 janvier 2012).
319
14 février 1959 relatif aux conditions générales de notation et d’avancement des fonctionnaires1027
pour assurer une gestion optimale de ressources humaines dans un contexte sociétal, le pouvoir
réglementaire élabora un dispositif spécifique1028, notamment en vue de favoriser la motivation des
fonctionnaires au même titre que les salariés pour lesquels la direction disposait d’outils incitateurs,
et basé sur des critères indéniablement novateurs1029 tenant à la maîtrise des missions et des activités
professionnelles confiées, la réalisation des objectifs et les moyens mis en œuvre pour les atteindre,
l’exercice des compétences correspondantes et l’aptitude à exercer des fonctions différentes de même
niveau ou d’un niveau supérieur.
Enfin, il convient de relever que les fonctionnaires placés en position d’activité au sein de la
société anonyme France Télécom sont placés « sous l'autorité de son président qui dispose des
pouvoirs de nomination et de gestion à leur égard »1030. La gestion de carrière des fonctionnaires s’en
trouve sensiblement modifiée. Ce transfert de compétence vers le Président, aussi dérogatoire qu’elle
soit au regard des règles classiques de la fonction publique, n’en demeure pas moins parfaitement
logique, et ce à double titre : il est en premier lieu légitime que les fonctionnaires relèvent
hiérarchiquement de l’autorité en charge de la direction de l’entité à laquelle ils sont rattachés ; il est
en second lieu cohérent que les fonctionnaires relèvent de la même autorité que les salariés de droit
privé aux côtés desquels ils exercent leurs fonctions et qui ne diffèrent d’eux que par leur régime
juridique. Une dissociation du pouvoir de gestion, et notamment du pouvoir disciplinaire1031, eut été
un artifice juridique difficilement compréhensible. Ce pouvoir de gestion conféré à l’exécutif de la
société, défini par le pouvoir réglementaire, est d’autant plus dérogatoire qu’il peut être délégué,
voire subdélégué1032, à l’instar des règles qui prévalent classiquement en matière de délégation de
pouvoir et de signature dans les entreprises.
∴
L’assimilation latente des fonctionnaires mis à disposition ou détachés dans le cadre d’une
société privée gestionnaire d’une activité publique ne doit pas conduire à occulter les effets, réels, du
transfert d’agents publics au sein d’une entité placé dans un contexte de gestion salariale de droit
privé. Les ressources humaines d’une telle structure doivent faire l’objet d’une réflexion, et partant
d’une gestion, consciente de la dualité de régimes des personnels affectés à l’activité publique.
1027 Décret n°59-308 du 14 février 1959 relatif aux conditions générales de notation et d’avancement des fonctionnaires (J.O. du 20 février 1959 p. 2153). 1028 Décret n°2001-614 du 9 juillet 2001 relatif à la notation des fonctionnaires de la Poste et des fonctionnaires de France Télécom (J.O. du 12 juillet 2001 p. 11135) et arrêté du 9 juillet 2001 déterminant la liste des éléments à prendre en compte dans l’appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de France Télécom. 1029 L. LAMBLIN, La fonction publique de l’Etat confrontée à la concurrence, Th. Paris II, 2007, op. cit. 1030 CE, 8 février 1999, Union syndicale des fonctionnaires reclassés de la Poste et des télécoms, req. n° 185839. 1031 Seules les sanctions relevant du 4ème groupe (révocation et mise à la retraite d’office) continue de relever du ministre chargé des télécommunications. 1032 Article 29-1 de la loi n°90-568 du 2 juillet 1990 modifiée par la loi du 31 décembre 2003.
320
,@E@\E@=G:*WR*/03B;6\@5634*9:*E:=:4?:E*;@*\:?5634*9:?*E:??37EA:?*G7<@64:?*Y*;06??7:*9:*;@*=E6>@56?@5634*97*E8\6<:*9:*;0:45658*\:?56344@6E:*
Intégrer des agents publics dans les effectifs d’une entité ayant à présent vocation à relever
du droit privé du travail conduit la nouvelle entité gestionnaire à héberger en son sein une dualité de
personnels. Cette cohabitation, inhérente à l’origine hybride de la structure, à la fois émanation d’une
précédente entité dont elle conserve les agents et à la fois entité à part entière disposant désormais de
son propre personnel, n’est pas sans conséquence au quotidien au plan de la gestion des ressources
humaines. Elle engendre d’abord des difficultés techniques, liées à la nécessité de jongler sans cesse
selon la nature de l’agent entre les règles de droit public et celles de droit privé ; elle implique
ensuite des difficultés sociales, tenant à l’importance d’assurer une relative homogénéité dans le sort
attribué à chacune de ces catégories, et d’éviter par là-même un clivage inégalitaire source de
tensions au sein de l’entité voire de contentieux devant les juridictions compétentes. Dès lors, chaque
évolution d’entité publique conduisant à une privatisation du régime juridique doit s’accompagner
d’une réflexion approfondie sur ses effets au plan collectif tant du point de vue de la représentation
des personnels (A) que de la gestion de carrière des agents (B).
-*S*+:?*64?56575634?*E:=E8?:45@56>:?*97*=:E?344:;*A34[6\7E8:?*=37E*37*=@E*;06458\E@5634*9:?*@\:45?*A3<=3?@45*;:?*:[[:A56[?*9:*;0:45658***
Commissions administratives paritaires et comités techniques paritaires, règles statutaires
quant au régime disciplinaire ou encore à l’avancement de carrière d’un côté ; comités d’entreprise et
d’établissement, délégués syndicaux et code du travail de l’autre… Agents publics et salariés de droit
privé relèvent ainsi de mode de représentation qui, pour répondre à une finalité unique d’expression
des droits individuels et collectifs des personnels, n’en revêtent pas moins des formes différentes.
Un tel risque d’existence parallèle d’institutions représentatives du personnel en fonction de
la nature juridique des personnels disparaît fort heureusement dans les entités où l’intégration des
agents publics prend la forme d’une mise à disposition ou d’un détachement, traduisant une fois
encore l’assimilation latente des agents publics à des salariés de droit privé sous l’effet de l’exercice
des fonctions au sein d’une entité inscrite dans un régime de droit privé (1). Il apparaît bien plus
prégnant dans les entités où l’affectation d’agents publics s’exerce à titre dérogatoire en position
d’activité et justifie l’intervention louable du législateur pour instaurer un mode unique de
représentation du personnel (2) indifférent de leur dualité de régimes.
!
321
UV /0@9@=5@5634* 9:?* @\:45?* =7B;6A?* <6?* Y* 96?=3?65634* 37* 985@AG8?* @7Z*64?56575634?* E:=E8?:45@56>:?* 97* =:E?344:;* 9:* ;@* ?5E7A57E:* =E6>@56?8:*64G8E:45:*Y*A:?*<8A@46?<:?*9:*<3B6;658*
Les mécanismes de mobilité de la mise à disposition et du détachement présentent l’avantage
de permettre à des agents publics de conserver leur statut public tout en poursuivant l’exercice de
leurs fonctions au sein d’une entité en dépit de l’évolution juridique rencontrée par cette dernière et
conduisant à une privatisation de son régime juridique. Dispositifs pertinents de transfert, la mise à
disposition et le détachement se révèlent en outre des instruments particulièrement utiles pour assurer
un gestion des ressources humaines facilitée par la structure gestionnaire d’accueil. Les dispositions
du code du travail et l’interprétation qu’en adoptent les juridictions sociales procèdent ainsi à l’égard
des agents publics mis à disposition ou détachés à une appréhension assimilatrice aux salariés de
droit privé, au travers respectivement des notions de « salariés mis à la disposition de l’entreprise par
une entreprise extérieure» et de « communauté des travailleurs ».
L’article L. 1111-21033 du code du travail dispose ainsi que :
« Pour la mise en œuvre des dispositions du présent code, les effectifs de l'entreprise
sont calculés conformément aux dispositions suivantes :
1° les salariés mis à la disposition de l'entreprise par une entreprise extérieure qui
sont présents dans les locaux de l'entreprise utilisatrice et y travaillent depuis au
moins un an (…) sont pris en compte dans l'effectif de l'entreprise au prorata de leur
temps de présence au cours des douze mois précédents ».
La Cour de cassation considère en outre ces personnels, mis à disposition1034 comme
détachés, comme pleinement intégrés dans « la communauté des travailleurs de l’entreprise »,
pouvant à ce titre se prévaloir de la qualité de salarié pour l'expression au sein de l'entreprise des
droits qui y sont attachés. Agents mis à disposition ou détachés sont ainsi électeurs comme éligibles
aux élections des membres du comité d'entreprise.
La logique juridique qui sous-tend la position adoptée par les juridictions sociales ne peut
qu’emporter l’adhésion. Comme le souligne Jean-Yves Kerbouc’h1035, la Cour de cassation fait
preuve à l’égard des situations juridiques d’un véritable pragmatisme et réalisme et « récuse ainsi les
séparations juridiques qui tendent à dissocier artificiellement la collectivité de travail ». Une telle
1033 Ancien article L. 620-10 du code du travail. 1034 Cass. soc., 23 mai 2006, Société Ixis Investor Services, pourvoi n°05-60.160, AJDA 2006, p. 1857 ; Cass. soc., 1er avril 2008, Société Théâtre des Salins c/ Syndicat Synptac CGT et autres, pourvoi n° 07-60.283, Bull. civ.V, n° 76. ; sur le cas particulier des agents exerçant une activité du ministère de la Défense confiée par contrat à un organisme de droit privé ou à une filiale d'une société nationale, Décret n° 2010-1109, 21 septembre 2010 (J.O. du 23 Septembre 2010). 1035 Jean-Yves KERBOUC’H, « Les fonctionnaires mis à disposition d'une entreprise doivent être inclus dans le calcul des effectifs », JCP S 2008, n°1308.
322
interprétation illustre ainsi selon nous l’absence grandissante de pertinence à la permanence d’une
distinction de régimes entre les agents, qui se révèle ici purement artificielle.
Il est d’ailleurs à noter que le réalisme retenu en droit privé du travail à l’égard de la
communauté des travailleurs a pris une nouvelle mesure en 2008, avec pas moins d’une loi1036, d’une
circulaire et de trois arrêts1037 qui sont venus préciser les conditions de l'intégration des salariés mis à
disposition1038. !
WV /0@9@=5@5634* 6496?=:4?@B;:* 9:?* 64?56575634?* E:=E8?:45@56>:?* 97*=:E?344:;* 9@4?* ;:?* :45658?* A34?:E>@45* 9:?* [34A56344@6E:?* :4* =3?65634*90@A56>658**
La coexistence au sein d’une même structure d’agents de droit privé nouvellement recrutés et
d’agents publics transférés peut en pratique conduire à une complexité certaine, chacune de ces deux
catégories relevant d’un régime de représentation et de participation propre et exclusif de l’autre. A
une telle gestion parallèle d’institutions représentatives de droit privé et de droit public, source
potentielle de contradictions ou d’inégalités, est heureusement préféré et mis en place par le
législateur pour chaque réforme d’ampleur un mode unique de représentation ayant vocation à
couvrir l’ensemble des personnels d’une même entité. Nous récusons en ce sens l’idée parfois
avancée par les organisations syndicales d’un traitement des institutions représentatives du personnel
par collèges constitués selon la nature des personnels1039. Il nous semble en effet qu’une gestion
unifiée de l’ensemble des personnels, indifféremment de la nature juridique de chacun, participe d’un
climat social apaisé et contribue de surcroît à l’égalité de traitement des agents, quelque soit leur
nature et leur statut, au sein d’une même structure.
Sans tendre à l’exhaustivité, il sera mis en exergue quelques exemples qui nous semblent les
plus pertinents, sinon les plus illustratifs, pour traduire les conséquences du transfert des personnels
de droit public sur les règles de représentation collective des personnels lors de la création ou de la
privatisation d’une entreprise publique et les deux options qui s’offrent aux entités publiques dans
cette perspective. La première option consiste à créer des organismes sui generis, ayant vocation à
régir les deux catégories de personnels en lieu et place des institutions représentatives normalement
1036 Loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail (J.O. du 21 août 2008, p. 13064). 1037 Cass. soc., 13 novembre 2008, pourvoi n°07-60.434; Cass. soc., 13 novembre 2008, pourvoi n°08-60.331 et n° 08-60.332, Bull. civ. V, n° 220 ; Cass. soc., 13 novembre 2008, Bull. civ. V, n°218. 1038 Voir sur cette question centrale : Y. PAGNERRE et G. SAINCAIZE, « L’intégration des salariés mis à disposition : nouvelles conditions, nouveaux effets », JCP S 2009, n°1368. 1039 Voir en ce sens la question prioritaire de constitutionnalité portée devant le Conseil Constitutionnel par la Fédération nationale CGT des personnels des organismes sociaux relative à la conformité de l’article L. 1432-11 du code de la santé publique aux droits et libertés que la Constitution garantit, en général, et au principe de participation des travailleurs à la détermination des conditions du travail en particulier (C.C.., décision n°2010-91 QPC du 28 janvier 2011, Fédération nationale CGT des personnels des organismes sociaux, J.O. du 29 janvier 2011, p. 1894). En l’espèce, l’organisation syndicale requérante faisait grief à l’article précité de ne pas imposer des conditions de consultation des représentants du personnel différenciées selon les questions posées touchent des salariés de droit privé ou des agents de droit public.
323
compétentes (a). La seconde option procède à l’inverse d’un choix entre l’un des deux régimes
applicables, pour l’étendre à l’autre catégorie de personnels et couvrir par là-même les effectifs de
l’entité dans leur ensemble (b). A cet égard, doit être souligné le recours fréquent, et logique, aux
comités d’hygiène et de sécurité tels que prévus par le code du travail (c).
@R /:*AG36Z*903E\@46?<:?*/6'!;$)$-'/*=37E* ;:?*=:E?344:;?*9:*/@*,3?5:*:5*9:*PE@4A:*(8;8A3<*
Avec l’avènement d’établissements publics et plus encore de sociétés anonymes quelques
années plus tard, le législateur a été dans l’obligation d’opérer une véritable refonte des institutions
représentatives du personnel de France Télécom et de la Poste. Des organismes sui generis
transversaux aux deux droits concurrents de la fonction publique et du code du travail ont alors été
imaginés1040.
L’exemple de la Poste est à cet égard particulièrement topique. L’article 8 de la loi n°2005-
516 du 20 mai 20051041 relative aux activités postales a ainsi renvoyé à un décret en Conseil d'Etat le
soin de déterminer « les conditions dans lesquelles les agents de La Poste sont représentés dans des
instances de concertation chargées d'assurer l'expression collective de leurs intérêts, notamment en
matière d'organisation des services, de conditions de travail et de formation professionnelle. Il
précise en outre, en tenant compte de l'objectif d'harmoniser au sein de La Poste les institutions
représentatives du personnel, les conditions dans lesquelles la représentation individuelle des agents
de droit privé est assurée, et établit les règles de protection, au moins équivalentes à celles prévues
par le code du travail pour les délégués du personnel, dont bénéficient leurs représentants. ».
Les règles de représentation de l’ensemble des personnels de la Poste résultent ainsi d’un
décret du 29 décembre 1998 non modifié depuis lors1042. a représentation collective des personnels
est ainsi assurée par, d’une part, des comités techniques mis en place au niveau des « niveaux
opérationnels de déconcentration »1043 qui constituent un découpage territorial particulier à la Poste
et qui sont compétents en matière d’organisation des services et de formation pour l’ensemble des
agents et, d’autre part, des comités d’hygiènes et de sécurité mis en place au niveau des NOD et de
certains sites de production et compétents là-encore pour l’ensemble des agents1044. La représentation
individuelle est quant à elle assurée par des commissions consultatives paritaires compétentes pour
les agents contractuels de droit privé et des commissions administratives paritaires compétentes pour
les fonctionnaires. Enfin, un conseil d'orientation et de gestion a été créé en vue de définir la
1040 A. TAILLEFAIT, « SERVICES POSTAUX - La Poste, prestataire du service universel - Statut et organisation - Statut du personnel », J.-Cl. Adm., Fasc. 151. 1041 Loi n° 2005-516 du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales (J.O. du 21 mai 2005 p. 8825). 1042 Décret n°98-1241 du 29 décembre 1998 relatif aux comités techniques paritaires de La Poste (J.O. du 30 décembre 1998 p. 19919). 1043 Ci-après NOD. 1044 Instruction de la Direction générale du travail en date du 29 septembre 2011 relative à la mise en œuvre du décret n°2011-619 du 31 mai 2011 relatif à la santé et la sécurité au travail à la Poste.
324
politique et d'assurer la gestion et le contrôle des activités sociales qu'assume la Poste.
En ce qui concerne France Télécom, les fonctionnaires participent désormais avec les
salariés de l’entreprise à l’organisation et au fonctionnement de leur entreprise ainsi qu’à la gestion
de son action sociale grâce aux institutions représentatives du personnel définies par le code du
travail que sont les délégués du personnel et comité d’entreprise par dérogation à la représentation
dans le cadre des organismes représentatifs de la fonction publique de l’Etat1045. Les modalités de
cette participation ont été précisées par le décret du 6 juillet 2004 relatif aux délégués du
personnel1046, au comité d’entreprise et aux délégués syndicaux de France Télécom. Ces adaptations
permettent notamment aux délégués du personnel, en complément de leurs attributions issues du
code du travail de présenter toutes les réclamations individuelles ou collectives relatives à
l’application des dispositions du statut des fonctionnaires de France Télécom. Il en résulte que les
fonctionnaires de France Télécom exercent leur droit syndical en application des dispositions du
code du travail et de l’accord d’entreprise portant sur les moyens des organisations syndicales et
l’exercice du droit syndical à France Télécom entré en vigueur le 1er janvier 2005. *
BR /@*?7B?56575634*9:?*64?56575634?*E:=E8?:45@56>:?*=E8>7:?*=@E*;:*A39:*97*5E@>@6;* @7Z* 3E\@46?<:?* E:=E8?:45@56[?* 9:* ;@* [34A5634* =7B;6C7:* =37E*;0:4?:<B;:*9:?*=:E?344:;?*T*;0:Z:<=;:*9:*,3;:*%<=;36*
Créé par la loi du 13 février 20081047 en vue de simplifier les relations des chômeurs avec les
administrations compétentes par la concentration au sein d’une entité unique des missions
d'enregistrement de la demande d'emploi et d’appui à la recherche d'emploi et les missions
d'indemnisation1048, l’organisme « Pôle emploi » marque la fusion d’un établissement public
administratif employant des personnels sous un régime contractuel de droit public1049 – l’ANPE – et
d’une entité de droit privé chargée d’une mission de service public relevant du code du travail et
d’une convention collective1050 - l'UNEDIC et son réseau d'ASSEDIC. La gestion des ressources
humaines de l’entité nouvellement créée prend le parti d’adopter pour l’ensemble des personnels le
régime juridique qui prévalait sous l’empire des ASSEDIC en s’inscrivant dans une perspective de
droit privé dont l’adoption d’une convention collective propre apparaît comme la pierre
d’achoppement.
1045 Article 29-1 de la loi précitée n°90-568. 1046 Décret n° 2004-662 du 6 juillet 2004 relatif aux délégués du personnel, au comité d'entreprise et aux délégués syndicaux de France Télécom (J.O. du 8 juillet 2004 p. 12321). 1047 Loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi (J.O. du 14 février 2008, p. 2712) ; articles L. 5312-1 à L. 5312-14, R. 5312-1 à R. 5312-31du code du travail. 1048 D. TIAN, Rapport à l’Assemblée nationale n° 600, 15 janvier 2008 ; Y. ROUSSEAU, « Sur la fusion de l'ANPE et des ASSEDIC », Dr. soc. 2008, p. 151 ; M. VERICEL, « La loi du 13 févr. 2008 et la nouvelle réforme de l'organisation du service de l'emploi », Dr. soc. 2008, p. 406 ; C. WILLMANN, « Fusion ANPE-UNEDIC et nouveaux droits et devoirs du demandeur d'emploi : deux lois pour une même logique », JCP S 2008, p. 1475. 1049 Décret n°2003-1370 du 31 décembre 2003 fixant les dispositions applicables aux agents contractuels de droit public de Pôle emploi (J.O. du 1 janvier 2004 p. 33). 1050
325
La représentation des personnels, envisagée à l’article 1er de la convention collective1051, en
est l’illustration manifeste, en assurant de manière très pragmatique l’unité de représentation de
l’ensemble des personnels. Ainsi, après avoir délimité dans un premier paragraphe de manière très
classique les limites de son champ d’application, portant par principe sur les seules relations de Pôle
Emploi avec ses personnels de droit privé1052, la convention collective s’attache en son second
paragraphe à exclure de cette sphère purement privée « les clauses relatives au droit syndical et aux
instances représentatives du personnel (art. 40 à 43) qui s'appliquent à l'ensemble des personnels de
Pôle emploi indépendamment de leur statut » ainsi que « les dispositions (…) concernant la
formation professionnelle (…) et les activités sociales et culturelles » en vue d’appliquer ces règles
dans les mêmes conditions à l'ensemble des personnels, indépendamment de leur statut et dès la date
d'entrée en vigueur de la présente convention collective. Comme le souligne très clairement l’article
44 de la convention collective relatif aux activités sociales et culturelles1053, « l'objectif des parties
signataires est de permettre la mise en place d'une gestion des activités sociales et culturelles unifiée
pour les agents de droit privé et les agents de droit public et comportant un niveau national assurant
la mutualisation des ressources et un niveau géré par les comités d'établissement ».
En dépit de sa cohérence juridique, une telle harmonisation n’a pas manqué de susciter les
critiques des personnels issus de l’ANPE. Saisi de la légalité de la suppression de la consultation du
comité consultatif paritaire national de l'ANPE fixant les dispositions applicables aux agents
contractuels de droit public de l'ANPE, et son remplacement par un comité central d'entreprise
transitoire pour les agents de Pôle emploi, au regard du droit de la représentation du personnel1054, le
Conseil d’Etat a cependant confirmé le dispositif instauré en considérant que les agents contractuels
de droit public de Pôle emploi peuvent parfaitement participer, dans le cadre des institutions
représentatives du personnel mises en place, à la détermination collective de leurs conditions de
travail conformément aux dispositions du huitième alinéa du préambule de la Constitution de
19461055.
AR /:* E:A37E?* [E8C7:45* :5* ;3\6C7:* @7Z* 64?5@4A:?* 8E6\8:?* =@E* ;:* 9E365* 97*5E@>@6;*:4*<@56aE:*90GI\6a4:*:5*9:*?8A7E658**
Organes constitués aux termes des dispositions du code du travail dans tous les
établissements employant au moins cinquante salariés1056, les « comités d’hygiène, de sécurité et des
1051 Annexe 1 de l’arrêté du 21 décembre 2009 portant agrément de la convention collective nationale de Pôle emploi du 21 novembre 2009 (J.O. du 27 décembre 2009, p. 22442 à 22464). 1052 « §1. La présente convention collective règle les rapports entre l'institution nationale publique mentionnée à l'article L. 5312-1 du code du travail, dénommée Pôle emploi, et le personnel de droit privé qu'elle emploie en France métropolitaine, dans les départements, territoires et collectivités d'outre-mer, y compris Saint-Pierre-et-Miquelon ». 1053 Ces modalités de gestion font l'objet d'un accord annexé à la convention collective. 1054 CE, 7 avril 2011, Syndicat national unitaire travail-Emploi-Formation-Insertion, req. n° 333917. 1055 C. WILLMANN, « Pôle emploi : entre droit privé et droit public », JCP S n°46, novembre 2011, p. 1524. 1056 Articles L. 4523-1 à L. 4523-17, L. 4611-1 à L. 4614-16, R. 4523-1 à R. 4523-17 et R. 4612-1 à R. 4615-21 du code du travail.
326
conditions de travail » (ci-après CHSCT) ont pour mission de contribuer à la protection de la santé et
de la sécurité des travailleurs ainsi qu’à l’amélioration des conditions de travail1057, les CHSCT
constituent à n’en pas douter l’une des pierres angulaires de protection des salariés au sein de
l’entreprise.
Rien d’étonnant dès lors que la plupart des entités ou sociétés du secteur public aient préféré
recourir à de tels organismes plutôt qu’aux instances de la fonction publique qui en sont le pendant.
Sans tendre à l’exhaustivité, pourront être cités la Poste1058, ou encore.
Un tel constat ne fait en réalité que traduire le caractère précurseur du droit du travail en la
matière, et l’exemple que ce dernier a représenté pour la fonction publique qui s’en est largement
inspiré. Illustration symbolique s’il en est, la loi du 5 juillet 20101059 a d’ailleurs érigé dans les
administrations de l'État et dans la fonction publique territoriale des Comités d'hygiène, de sécurité et
des conditions de travail qui remplacent les anciens comités d'hygiène et de sécurité. Mesure
annoncée dans l'accord du 20 novembre 2009 sur la santé et la sécurité au travail dans la fonction
publique1060, la loi a également défini de nouveaux périmètres au dialogue social en étendant les
champs d'intervention des différentes instances et en ouvrant la voie à ce qui sera sans doute un jour
la validité juridique des accords collectifs dans la fonction publique. Comme le souligne fort
justement le professeur Didier Jean-Pierre1061, « c'est là probablement en germe que se trouve
l'innovation la plus remarquable pour un droit d'origine statutaire et réglementaire et qui illustre
une nouvelle fois l'influence grandissante du droit du travail sur celui de la fonction publique ».
∴
La privatisation du régime juridique de l’entité gestionnaire d’une activité publique rejaillit
également au niveau même de la gestion de la carrière des agents publics maintenus en cette qualité
dans les effectifs de la structure privatisée. En effet, s’il est certain que certains aspects demeurent
intrinsèquement conditionnés par la nature publique en raison de la permanence d’un lien – même
atténué – avec la fonction publique, d’autres en revanche se révèlent directement affectés par la
dimension privée dans laquelle s’inscrit à présent l’entité gestionnaire.
1057 En l’absence de CHSCT, ce sont les délégués du personnel qui exercent les attributions normalement dévolues au comité. 1058 Validant sur ce point aussi l'accord du 21 juin 2004, la loi n° 2005-516 fait prévaloir, pour l'ensemble de ses agents, les dispositions du code du travail en matière d'hygiène et de sécurité. 1059 Loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique (J.O. du 6 juillet 2010 p. 12224). 1060 Dans les collectivités territoriales, les conditions de création de ces comités sont déterminées au niveau législatif et non réglementaire, la loi prévoyant la présence d'un tel comité pour les collectivités ayant au moins 50 agents alors que le seuil à atteindre pour les CHS était de 200 (pour les SDIS, la création d'un CHSCT est obligatoire sans condition d'effectifs à satisfaire). Dans les collectivités employant moins de 50 agents, ce sont les comités techniques qui exerceront les missions des CHSCT. Ces comités comprendront des représentants de l'Administration ou des collectivités selon les fonctions publiques concernées et des représentants des organisations syndicales de fonctionnaires sans que l'égalité numérique soit à respecter. Pour la fonction publique de l'État, seules les organisations syndicales voteront alors que dans la territoriale, si une délibération de la collectivité le prévoit, le collège employeur pourra également rendre un avis. 1061 D. JEAN-PIERRE, « DIALOGUE SOCIAL - Modifications des institutions des fonctions publiques relatives au dialogue social - Nouvelle institutionnalisation du dialogue social », J.-Cl. Fonc. Pub., Fasc. 18, n°24.
327
N* S* !4:* \:?5634* 9:?* A@EE6aE:?* 6458\E8:* 9@4?* 74:* =:E?=:A56>:*90:45E:=E6?:*
Source de complexités au niveau des institutions représentatives du personnel, la dualité de
nature des personnels au sein d’une même entité gestionnaire d’une activité publique peut également
entraîner certaines rigidités dans la gestion des carrières des personnels de sorte qu’une
harmonisation des modalités de gestion des carrières des deux catégories peut s’avérer souhaitable,
pour placer l’ensemble des personnels quelque soit leur statut dans une même dynamique, celle
d’une entreprise soumis au droit privé. Dans cette perspective, le législateur a pris soin, dans la
plupart des entreprises de droit privé créées en vue d’exercer une activité publique, d’adapter les
règles de notation et d’avancement des fonctionnaires détachés ou mis à disposition (1) et d’accorder
le bénéfice de la participation et de l’intéressement (2).
UV /0@9@=5@5634*9:?*Ea\;:?*9:*435@5634*:5*90@>@4A:<:45**
Inadéquation des règles classiques et du nouveau contexte d’exploitation. Déjà ancien1062,
le débat relatif à la réforme de la notation des fonctionnaires a pris avec la multiplication de sociétés
privés gestionnaires d’activités publiques une nouvelle ampleur, qui a aboutit pour les fonctionnaires
détachés de La Poste et de France Télécom à l’adoption du décret du 2 avril 19961063. Initiée dans un
premier temps pour ces seuls personnels, la réforme des règles de notation et d’avancement a depuis
pénétré la fonction publique de l’Etat dans son ensemble avec l’adoption du décret n°2002-682 du 29
avril 2002 relatif aux conditions générales d'évaluation, de notation et d'avancement des
fonctionnaires de l'Etat1064. Comme le rapporte Jacques Fialaire, « devant l'importance des
inconvénients présentés par les règles classiques du statut1065, un consensus assez large (s'était) fait
jour en faveur d'une réforme qui s'inspirerait des principes suivants : la suppression de la note
chiffrée qui serait remplacée par un système de niveaux de valeur ; l'abandon de l'appréciation
générale à laquelle se substituerait un tableau permettant de dégager une courbe de profil du
fonctionnaire à partir de critères établis ; le recours à un entretien systématique entre le notateur et
l'agent noté »1066.
1062 La question était déjà abordée par le Conseil d'État dans une étude intitulée « Gestion moderne et fonction publique », publiée en 1977. 1063 Décret n° 96-285 du 2 avril 1996 relatif à la notation des fonctionnaires de La Poste et des fonctionnaires de France Télécom (J.O. du 4 avril 1996, p. 5219) modifié par le décret n°2001-614 du 9 juillet 2001 relatif à la notation des fonctionnaires de La Poste et des fonctionnaires de France Télécom (J.O. du 12 juillet 2001, p. 11135) lui-même modifié par le décret n° 2011-184 du 15 février 2011 relatif aux comités techniques dans les administrations et les établissements publics de l'Etat (J.O. du17 février 2011 p. 2963). 1064 Décret n°2002-682 du 29 avril 2002 relatif aux conditions générales d'évaluation, de notation et d'avancement des fonctionnaires de l'Etat (J.O. du 2 mai 2002, p. 7995). 1065 Loi précitée n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires, ensemble la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat. 1066 J. FIALAIRE, « Fonction publique. – Notation, formation, avancement, changement de corps et affectation », J.- Cl. Fonct. pub., Fasc. 187, 2005, n°46.
328
Evolution notable des règles de notation et d’avancement. Au-delà de ce contexte général
d’évolution, la réforme opérée par le pouvoir réglementaire à l’égard des personnels de La Poste et
de France Télécom apparaissaient au demeurant comme une nécessité pour permettre à ces entités
nouvellement « privatisées1067 » de disposer des moyens de faire face au quotidien, d’une part, à une
gestion de ressources humaines d’horizons divers et, d’autre part, selon certains auteurs1068, aux
enjeux d’un marché concurrentiel. La dualité de régimes, en ce qu’elle risquait « de créer des
distorsions peu compatibles avec la paix sociale entre des fonctionnaires peu incités à l’efficacité et
des salariés dont les performances guideraient la carrière »1069, ne pouvait demeurer. Les
aménagements effectués par le pouvoir réglementaire ne sont, à cet égard, pas négligeables dès lors
que le décret va jusqu'à prévoir la suppression de la note chiffrée et son remplacement par un
classement sur une échelle de valeur à quatre niveaux. Les critères retenus s’avèrent, de surcroît,
particulièrement novateurs en intégrant dans la notation des notions de maîtrise des missions et
activités professionnelles confiées, de comparaison par rapport aux années précédentes ou encore
« d’aptitude à exercer, dans l'immédiat ou dans l'avenir, au besoin après une formation appropriée,
des fonctions différentes de même niveau ou d'un niveau supérieur »1070.
La rémunération des fonctionnaires détachés a également été l’objet d’aménagements par le
législateur en vue d’une harmonisation des rétributions de chacune des catégories de personnels des
entreprises nouvellement créées1071. C’est ainsi que le président de France Télécom peut instituer des
indemnités spécifiques, dont le montant peut être modulé pour tenir compte de l’évolution des autres
éléments de la rémunération des fonctionnaires de France Télécom1072.
WV /:* B848[6A:* 9:* ;@* =@E56A6=@5634* :5* 9:* ;06458E:??:<:45* A3496563448*=@E*;0645:E>:45634*:Z=E:??:*97*;8\6?;@5:7E**
En pénétrant la sphère sociétale, toute entité passant d’un statut juridique d’établissement
public à une forme juridique de société anonyme doit également s’approprier l’ensemble des
principes de gestion de la carrière qui gouvernent cette dernière typologie, parmi lesquels figurent en
bonne place la participation et l’intéressement qui lui étaient jusqu’à présent totalement étrangères.
1067 Il n’est ici bien évidemment question que du seul régime juridique de l’entité et non de son capital qui peut parfaitement demeurer public. 1068 Jacques Chevallier mettait ainsi en exergue, sans que l’on partage nécessairement ses propos, que « l’existence d’une masse de fonctionnaires soumis à un statut dérogatoire au droit commun (risquait) d’être rapidement considéré comme un boulet, interdisant à l’opérateur de faire preuve de la flexibilité imposée par la concurrence ». 1069 L. LAMBLIN, op. cit., p. 701. 1070 Article 1-1 du décret n° 96-285 précité tel que modifié par le décret n° 2011-184 du 15 février 2011 relatif aux comités techniques dans les administrations et les établissements publics de l'Etat (J.O. du17 février 2011 p. 2963). 1071 D. JEAN-PIERRE, « La loi France Télécom et la fonction publique », JCP A 2004, p. 599. 1072 Article 29-1 de la loi n° 2003-1365 du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom (J.O. du 1er janvier 2004, p. 9) aux termes duquel « Le président de France Télécom peut tenir compte des indemnités spécifiques, dont le montant peut être modulé pour tenir compte de l’évolution des autres éléments de la rémunération des fonctionnaires de France Télécom, tels qu’ils résultent de l’article 20 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 précitée ».
329
La circonstance que la société évolue dans le secteur public eu égard à la nature de l’activité exercée
se révèle en effet sur ces aspects totalement indifférente, le législateur ayant pris soin d’étendre le
bénéfice de ces avantages sociaux aux personnels de sociétés du secteur public1073.
Cela ne signifie pas pour autant que les agents publics d’une société en charge d’une activité
publique puissent y prétendre. En effet, outre les conditions légales posées par le code du travail à
l’égard de la société elle-même1074, l’intéressement et la participation ne s’avèrent applicables aux
agents publics employés par une société du secteur public qu’à la seule et unique condition que le
législateur l’ait autorisé. Par principe, de tels avantages sociaux ne concernent en application des
dispositions du code du travail que les seuls salariés de droit privé de ces sociétés.
En conséquence, si les fonctionnaires placés en position d’activité se voient la plupart du
temps étendre le bénéfice de l’intéressement et de la participation, à l’image des agents publics de
France Télécom et de la Poste1075, il en va différemment des agents publics mis à disposition ou
détachés. Il convient d’ailleurs de noter que la perspective du bénéfice de tels éléments en qualité de
salariés de droit privé est souvent mise en avant par les entités « sociétisées » pour inciter le
basculement des fonctionnaires mis à disposition dans un régime de droit privé à travers la
conclusion d’un contrat de travail.
∴
Au-delà des hypothèses majeures de transfert de compétences enter personnes publiques et
de privatisations du régime juridique d’une entité gestionnaire d’une activité publique, majeures
quant aux contingents concernés et aux évolutions qu’elles marquent, il convient d’appréhender les
effets du transfert de personnels de droit public en cas d’externalisation d’une activité par une
personne publique. Bien que moins emblématique dans les évolutions qu’elle emporte, une telle
hypothèse se révèle tout aussi essentielle en raison de sa fréquence.
* *
1073 Loi modifiée n°87-588 du 30 juillet 1987 portant diverses mesures d’ordre social (J.O. du 31 juillet 1987 p. 8574) 1074 L’intéressement est ainsi un droit facultatif reposant sur l’existence d’un accord collectif ; La participation aux résultats est quant à elle conditionnée à l’existence de bénéfices imposables de la société et la présence d’effectifs de plus de 50 salariés. 1075 Article 32 alinéa 1er de la loi n°90-568 du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications.
330
':A5634*X**L*/:?*A34?8C7:4A:?*97*5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*:4*A@?*9:*98A6?634*90:Z5:E4@;6?@5634*9074:*@A56>658*=@E*74:*=:E?344:*=7B;6C7:
La décision d’une personne publique d’externaliser l’une de ses activités procède par essence
d’un libre choix politique sur lequel le juge veille à n’opérer qu’un stricte contrôle de la légalité en
dehors de toute appréciation d’opportunité1076. Elle implique, à l’instar de l’hypothèse
symétriquement inverse où une personne privée ou une personne de droit public gérant un service
public industriel et commercial est amenée à poursuivre l’activité d’une personne de droit public, de
reprendre les agents publics non titulaires affectés à cette activité de reprendre les agents publics
affectés à cette activité conformément aux dispositions de l’article L. 1224-3-11077.
Le passage pour les agents d’un statut de droit public à statut de droit privé dans le cadre des
dispositions de l’article L. 1224-3-1 du code du travail s’avère en revanche bien plus simple au plan
du droit que dans la situation inverse. Certes, la privatisation inéluctable du régime juridique de
l’agent public emporte-t-elle en apparence de sensibles modifications pour l’agent transféré
(paragraphe 1). L’agent public « salarisé » pénètre ainsi un monde empreint d’un vocabulaire propre
(salaire, comité d’entreprise, etc.) et obéissant à des logiques a priori diamétralement opposées
(revalorisation négociée, licenciement, etc.). Sur le fond cependant, il nous semble que les évolutions
soient en revanche tout à fait mesurées (paragraphe 2), témoignant à notre sens une fois encore des
similarités grandissantes entre droit de la fonction publique et droit commun du travail. *
,@E@\E@=G:* UR* +:?* A34?8C7:4A:?* @==@E:<<:45* =E3[349:?* ?7E* ;:* E8\6<:*`7E696C7:*9:*;0@\:45*=7B;6A*9:>:47*?@;@E68*9:*9E365*=E6>8*
En passant d’un statut d’agent public non titulaire à celui de salarié de droit privé, l’agent
transféré au service d’une personne morale de droit privé ou d’une personne publique agissant en
qualité d’opérateur économique bascule incontestablement dans une nouvelle sphère, régie par des
sources a priori diamétralement opposées – le code du travail et les conventions collectives – (A) et
animée par des modes de représentation différents (B).
1076 Voir pour une décision récente à ce sujet : CE, 3 février 2012, Commune de Veyrier du lac, req. n° 353737, à paraître. Voit pour une appréciation critique de celle-ci : L. RICHER, « Un contrat d'entente intercommunale n'est pas une délégation de service public », AJDA 2012 p. 555, note sous l’arrêt précité. On notera toutefois que la solution dégagée par le Conseil d’Etat dans l’arrêt Commune de Veyrier du Lac n’emporte aucune incidence sur le traitement de la question qui nous intéresse ici relative au sort des personnels. La réponse à cette question renvoie aux règles classiques que nous avons déjà évoqué et qui diffèrent selon la nature des personnels à transférer. 1077 L’article L. 1224-3-1 du code du travail apparaît comme une disposition « miroir » de l’article L. 1224-3 du code du travail Notons d’ailleurs qu’en raison de l'identité des termes employés, les interprétations jurisprudentielles de l'article L. 1224-3, retenues tant par la Cour de cassation que par le Conseil d'État, sont parfaitement transposables à l'article L. 1224-3-1du code du travail.
331
-*S*!4*AG@4\:<:45*A3<=;:5*9:*?37EA:?*@==;6A@B;:?*
Statut de la fonction publique d’une part, code du travail et accords collectifs d’autre part, il
est certain que le basculement de l’agent public non titulaire de la sphère du droit public vers celle du
droit privé marque un changement complet des sources applicables aux agents, tant ces régimes
juridiques apparaissent a priori exclusifs l’un de l’autre (1). Il convient toutefois de nuancer quelque
peu ce constat au vu des similitudes croissantes qui existent entre droit privé du travail et droit de la
fonction publique, qui plus est entre agents non titulaires de droit public et salariés de droit privé (2).
UV +:?*E8\6<:?*.!2-'(-'*:ZA;7?6[?*;074*9:*;0@75E:*
En dépit de leur présence dérogatoire au sein des effectifs de personnes publiques exerçant
une activité de service public administratif1078, les agents non titulaires de droit public se voient
qualifier par la doctrine de « fonctionnaire(s) contractuel(s)1079 », « contractuel(s)
fonctionnarisé(s) »1080. Une telle assimilation rhétorique traduit la soumission des agents non
titulaires de droit public à des règles proches de celles dont relèvent les fonctionnaires. Le décret
susvisé du 17 janvier 1986, intervenu sur le fondement de l’article 7 de la loi du 11 janvier 19841081,
est à ce titre particulièrement explicite en ce qu’il prévoit « compte tenu de la spécificité des
conditions d’emploi des agents non titulaires, des règles de protection sociale équivalentes à celles
dont bénéficient les fonctionnaires, sauf en ce qui concerne les régimes d’assurance maladie et
d’assurance vieillesse »1082. Certaines dispositions du titre 1er du statut général de la fonction
publique sont d’ailleurs rendues applicables d’office par une mention expresse aux agents non
titulaires. Il en va ainsi par exemple de l’article 6 relatif à la liberté d’opinion, de l’article 10 relatif
au droit de grève ou encore de l’article 11 relatif à la protection des agents publics à l’occasion de
l’exercice de leurs fonctions. De plus, l’article 1 du décret précité du 17 janvier 19861083 relatif aux
dispositions générales applicables aux agents non titulaires soumet même expressément ces agents à
certains droits et obligations des fonctionnaires dans les conditions définies par le statut de la
1078 Dérogation aux dispositions de l’article 3 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 aux termes desquelles les emplois civils permanents de l’Etat et de ses établissements publics à caractère administratif sont par principe occupés par des fonctionnaires pour la fonction publique d’Etat ; aux dispositions de l’article 3 1079 BRIMO A., « Le fonctionnaire contractuel », RDP 1944, p. 124 ; MELLERAY F., « Nouvelle illustration de la situation « quasi-réglementaire » des agents publics contractuels », Dr. adm. 2009, n°3, comm. 41, p. 128 1080 CHAPUS R., Droit administratif général, t. 2, 15 éd., p. 72 1081 Décret n°86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat (J.O du 19 janvier 1986 p. 953). 1082 Décret n°88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale (J.O. du 16 février 1988 p. 2176). 1083 « Les dispositions du présent décret s'appliquent aux agents non titulaires de droit public de l'Etat et de ses établissements publics à caractère administratif ou à caractère scientifique, culturel et professionnel, recrutés ou employés dans les conditions définies aux articles 3 (2e, 3e et 6e alinéa),4,5,6, et 82 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et au I de l'article 34 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, à l'exception des agents en service à l'étranger et des agents engagés pour exécuter un acte déterminé ».
332
fonction publique territoriale et la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs
relations avec les administrations.
Comme l’a toutefois rappelé le Conseil d’Etat dans un avis d’assemblée du 30 janvier 1997
relatif au régime juridique des agents non titulaires1084, « il n’existe aucun principe général du droit
imposant de faire bénéficier les agents non titulaires de règles équivalentes à celles applicables aux
fonctionnaires. Sauf dispositions législatives contraires, telles par exemple celles énoncées à
l’article 7 précité de la loi du 11 janvier 1984, le Gouvernement dispose donc d’une grande liberté
d’appréciation pour définir, compte tenu des besoins du service public, les règles applicables aux
agents contractuels ».
WV +:?* ?6<6;6579:?* \E@496??@45:?* :45E:* 9E365* 97* 5E@>@6;* :5* 9E365* 9:* ;@*[34A5634*=7B;6C7:*
Le clivage entre droit du travail et droit de la fonction publique ne saurait cependant marquer
une totale exclusivité des principes qui irriguent chacun de ces deux droits, qui pour répondre à une
philosophie différente ont pour autant un objet commun : celui de régir les droits et les obligations
d’agents placés dans une situation d’emploi à l’égard d’une entité en charge d’une activité dédiée.
L’interpénétration de leurs règles est réelle et n’a de cesse de s’accentuer notamment sous l’effet
d’une évolution du droit de la fonction publique dans le sens d’une « modernisation » dans un
contexte économique contraint ayant conduit à une révision générale des politiques publiques.
L’assimilation des principes protecteurs du droit du travail par le droit de la fonction
publique résulte à l’origine d’une œuvre jurisprudentielle par le recours au mécanisme des principes
généraux du droit. Sans retenir un principe général du droit de très grande ampleur suivant lequel
« lorsque les nécessités propres du service public n'y font pas obstacle et lorsqu'aucune disposition
législative ne l'exclut expressément, les agents de l'Etat et des collectivités et organismes publics
doivent bénéficier quelle que soit la nature juridique du lien qui les unit à leur employeur, de droits
équivalents à ceux que la législation du travail reconnaît à l'ensemble des salariés » comme l’y
invitait le commissaire du gouvernement Suzanne Grévisse1085, le Conseil d’Etat a dégagé à
l’occasion du célèbre arrêt d'Assemblée Dame Peynet de 1973 un principe général du droit dont
« s'inspirent les dispositions [...] du code du travail »1086 portant sur l’ interdiction de licencier une
femme lors de sa grossesse. Nombre de droits et obligations initialement opposables aux seuls
1084 CE Ass. Avis, 30 janvier 1997, n° 359964, Avis relatif au régime juridique des agents non titulaires de l’Etat. 1085 S. GREVISSE, concl. sous CE Ass. 8 juin 1973, Dame Peynet, Rec. p. 406. Voir également sur la position minimaliste du Conseil d’Etat à cet égard : J.-F. LACHAUME, « Les non-principes généraux du droit », in Mélanges en l'honneur de Benoît Jeanneau, Dalloz, 2002, p. 161, spéc. p. 168-17. 1086 Formulation qualifiée de « coquetterie autonomiste » par Benoît PLESSIX : « L'utilisation du droit civil dans l'élaboration du droit administratif », Editions Panthéon-Assas, 2003, p. 809.
333
salariés de droit privé ont ainsi été étendus aux agents publics1087, principalement aux non
titulaires1088. Il en va ainsi de l’interdiction de cumuler l'indemnité de congés payés avec le salaire
perçu si le travail n'a pas été interrompu1089, du droit pour un agent suspendu, dès lors qu'aucune
sanction pénale ou disciplinaire n'a été prononcée à son encontre, au paiement de sa rémunération
pour la période correspondant à la durée de la suspension1090, du droit pour un agent, dont il a été
médicalement constaté qu'il se trouve de manière définitive atteint d'une inaptitude physique à
occuper son emploi, au reclassement dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, droit à être
licencié1091.
Il apparaît ainsi qu’avant même d’intégrer directement la sphère du droit privé du travail,
l’agent public transféré vers une personne morale de droit privé ou un opérateur économique de droit
public en qualité de salarié se voit appliquer des principes directement issus du droit du travail. Dans
ce contexte, le constat dressé à l’endroit des effets du changement de situation juridique d’un agent
non titulaire de droit public en application des dispositions de l’article L. 1224-3-1 du code du travail
participe à notre sens du débat porté autour de la permanence d’une dualité de régimes sociaux en
droit interne1092.
∴
Désormais soumis aux règles du code du travail et des conventions et accords collectifs qui
s’appliquent à son entreprise et son secteur d’activité, l’agent public non titulaire devenu salarié de
droit privé relève de surcroît désormais d’institutions représentatives du personnel sensiblement
différentes de celles de la fonction publique.
1087 Un tel constat est également valable pour les agents publics des entreprises publiques pour lesquels un certain nombre de PGD ont pu être dégagés par les juridictions administratives. Voir pour une analyse approfondie de ce sujet : MELLERAY F., MAUGUE C., COURREGES A., « code du travail et personnes publiques », AJDA 2008, p. 855, op. cit. 1088 On pourra toutefois noter la reconnaissance d’un droit à percevoir une rémunération au moins égale au SMIC pour les agents titulaires comme non –titulaires : CE Sect. 23 avril 1982, Ville de Toulouse c/ Mme Aragnou, Rec. p. 151, concl. D. LABETOULLE. 1089 CE 16 février 1994, Bureau d'aide sociale de Pontenx-les-Forges c/ Mme Labat, Rec. p.. 764 1090 CE Ass. 29 avril 1994, Colombani, Rec. p. 209 ; RFDA 1994. 479, concl. S. FRATACCI ; AJDA 1994 p. 409, chron. C. MAUGÜE et L. TOUVET. 1091 CE 2 octobre 2002, CCI de Meurthe-et-Moselle, Rec. p. 319 ; AJDA 2002 p. 1294, concl. D. PIVETEAU et note M.-C. DE MONTECLER. 1092 E. MARC et Y. STRILLOU, « Droit du travail et droit de la fonction publique : des influences réciproques à l'émergence d'un droit de l'activité professionnelle », RFDA 2010, p. 1169 ; Y. STRUILLOU, « Droit du travail-droit public : des interactions aux effets paradoxaux », in 13 paradoxes du droit du travail, sous la direction de P. WAQUET, supplément n° 508 du 10 oct. 2011 de la Semaine sociale Lamy.
334
N*S*!4:*<396[6A@5634*?:4?6B;:*97*<39:*9:*E:=E8?:45@5634*?I496A@;:*
La gestion de la fonction publique obéit à une logique propre : elle est ainsi assurée dans le
cadre des structures administratives et dans le respect du principe hiérarchique1093. Ses contraintes
sont donc bien différentes de celles qui gouvernent la gestion des ressources humaines en droit privé
du travail. Pour autant, la notion de participation du personnel à la gestion, bien que difficilement
conciliable avec la notion de hiérarchie1094, n’est pas absente du droit de la fonction publique, et les
fonctionnaires bénéficient du droit à la participation tel qu’il est défini par le Préambule de la
Constitution de 19461095 au même titre que tout salarié de droit privé en application de la
jurisprudence administrative1096, et désormais du Conseil Constitutionnel qui l’a étendu à la fonction
publique1097. Le principe de participation implique en pratique l’existence d’un certain nombre
d’organes consultatifs où siègent des délégués de fonctionnaires qui donnent leur avis sur
« l’organisation et le fonctionnement des services publics, l’élaboration des règles statutaires et
l’examen des décisions individuelles relatives à la carrière »1098. Si la présente étude n’a pas
vocation à énumérer l’ensemble des instances compétentes en la matière, elle précisera toutefois que
figurent parmi ces différentes commissions les commissions administratives paritaires1099,
compétentes notamment1100 en matière de recrutement, de propositions de titularisation ou de refus
1093 S. BOISSARD, « Le pouvoir hiérarchique au sein de l’Administration française », Cah. Fonct. Publ. mai 2003, p. 4. 1094 J.-J. RIBAS, Les services de la fonction publique dans le monde, Bruxelles 1956, p. 8 ; M. POCHARD, « La négociation interministérielle, une nouvelle voie pour le dialogue social ? », RFDA, octobre 1996, p. 653 et « La place donnée au contrat dans l’organisation de la fonction publique », AJDA 2003, p. 991 ; J. SIWEK-POUYDESSEAU, « Pouvoir hiérarchique, concertation et contractualisation », Cah. Fonct. Publ. mai 2003, p. 8. 1095 « Tout travailleur participe par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises ». 1096 CE, 9 juillet 1986, Syndicat des commissaires de police et des hauts fonctionnaires de la police nationale, RDP 1987, p.250. 1097 Une partie de la doctrine avait pu voir une telle consécration dans la décision du Conseil Constitutionnel du 20 juillet 1977 relative au service fait (C.C.., décision n°77-83 DC du 20 juillet 1977, Loi modifiant l’article 4 de la loi de finances rectificative pour 1961), en déduisant de la décision par une interprétation a contrario que « le Gouvernement aurait violé le huitième alinéa en ne consultant pas le Conseil supérieur si la loi avait effectivement modifié les conditions de travail (des fonctionnaires) » (R. DENOIX de SAINT-MARC, « Les retenues sur traitement pour absence ou insuffisance de service fait », AJDA 1977, p. 600). Par une décision du 28 janvier 2011 (C.C.., décision n°2010-91 QPC du 28 janvier 2011, Fédération nationale CGT des personnels des organismes sociaux, J.O. du 29 janvier 2011, p. 1894, op. cit.) portant sur la conformité de l’article L. 1432-11 du code de la santé publique aux droits et libertés que la Constitution garantit, en général, et au principe de participation des travailleurs à la détermination des conditions de travail, en particulier, le Conseil a reconnu le caractère opérant du grief tiré de la méconnaissance du principe de participation à la détermination des conditions de travail s’agissant de personnels soumis, pour partie, à un régime de droit public. 1098 J.-M. AUBY, J.-B. AUBY, D. JEAN-PIERRE, A. TAILLEFAIT, Droit de la fonction publique, Paris, Dalloz, 6e édition, 2009, n°195, p.121. 1099 Article 25 du décret n°82-451 du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires modifié par le décret n°84-955 du 25 octobre 1984, art. 6 (J.O. du 27 octobre 1984, p. 3363). 1100 Elles connaissent également des décisions refusant le bénéfice du congé prévu au 7° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 précitée. Elles sont saisies, à la demande du fonctionnaire intéressé, des décisions refusant l'autorisation d'accomplir un service à temps partiel, des litiges d'ordre individuel relatifs aux conditions d'exercice du temps partiel et des décisions refusant des autorisations d'absence pour suivre une action de préparation à un concours administratif ou une action de formation continue. Elles peuvent enfin être saisies dans les conditions prévues à l'article 32 du présent décret de toutes questions d'ordre individuel concernant le personnel.
335
de titularisation, mais également pour toute question d'ordre individuel1101, et les comités
techniques1102 chargés d'examiner toute question relative à l'organisation de la collectivité.
Il nous sera toutefois permis de penser qu’en dépit de leur spécificité, qui transparaît au stade
même de leur intitulé, ces instances ne sont pas si éloignées de celles qui président à la
représentation des salariés de droit privé.
∴
En passant de la fonction publique au secteur « privé » du travail, l’agent public non titulaire
transféré poursuit sa carrière dans un contexte juridique renouvelé, soumis à des règles générales et
syndicales qui lui sont propres, du moins en apparence. Il bénéficie en revanche d’une pleine
continuité du contrat de travail qui le liait jusqu’alors à une personne publique. A l’instar des
dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail qui prévoient le maintien des contrats de travail
de droit privés entre opérateurs économiques, l’article L. 1224-3-1 du code du travail assure la
permanence du contenu du contrat de travail de droit public qui peut sans difficulté être « basculé »
sous un régime de droit privé sans qu’aucun obstacle juridique ne s’y oppose.
,@E@\E@=G:* WR* +:?* A34?8C7:4A:?* E8?3;7<:45*<646<@;:?* ?7E* ;:* A345:47* 97*A345E@5*9:*5E@>@6;*
A l’instar de tout dispositif translatif des contrats de travails reposant sur un fondement
législatif, l’article L. 1224-3-1 du code du travail impose au nouvel employeur plaçant l’agent sous
un régime de droit privé de reprendre « les clauses substantielles du contrat ». En ce qui concerne la
rémunération, clause qui cristallise généralement les principales difficultés lors d’un transfert entre
entités de natures juridiques différente, une telle obligation peut facilement être satisfaite par le
nouvel employeur en l’absence d’obstacle juridique au maintien de la rémunération (A). De manière
générale, le nouvel employeur, qu’il soit un opérateur économique de droit privé ou une personne
publique en charge d’un service public industriel et commercial, n’éprouve aucune difficulté à mettre
en œuvre un dispositif qui n’est que le reflet de l’article L. 1224-1 du code du travail dont il maîtrise
parfaitement les mécanismes (B). *
*
1101 C’est ainsi par exemple qu’en vertu des articles 60 du titre II (fonction publique d’Etat) et 52 du titre III (fonction publique territoriale) du statut général, toute mutation qui comporte changement de résidence ou modification de la situation de l'intéressé est soumise à l'avis de la commission administrative paritaire. 1102 La loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 précitée relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique a modifié le fonctionnement de ces comités auparavant dénommés « comités techniques paritaires ». Il convient de préciser que la répartition des sièges aux comités techniques doit obligatoirement refléter l'influence des organisations syndicales tant auprès des titulaires que des non-titulaires. Le juge administratif rappelle au demeurant que les agents non-titulaires peuvent également être membres de ces instances (CAA Bordeaux, 30 décembre 2003, Michel Alcamo, req. n° 00BX01804, AJDA 2004, p. 679).
336
-*S*/0@B?:4A:*903B?5@A;:*@7*<@6456:4*9:*;@*E8<748E@5634*
En opérant le transfert d’un salarié de droit privé vers une personne publique, l’article L.
1224-3 du code du travail est susceptible de se heurter aux règles de fixation du traitement dans la
fonction publique pour garantir la rémunération du salarié transféré. Une telle difficulté disparaît
cependant dès lors que l’on se place du point de vue inverse, et que l’agent public non titulaire
bascule d’un régime de droit public à un régime de droit privé, dans lequel la fixation de la
rémunération est librement fixée par l’employeur et le salarié, en vertu de la liberté contractuelle
appliquée au contrat de travail1103.
Quelle que soit la rémunération initialement perçue par l’agent non titulaire de droit public
sous l’empire de la personne publique précédemment gestionnaire de l’activité transférée, la
personne privée ou publique en charge d’un service public industriel et commercial pourra
parfaitement assurer sa continuité dans le nouveau contexte d’exploitation. Et si la notion de grille de
rémunération n’est pas totalement absente du droit commun du travail, chaque convention collective
disposant de grilles de salaires minima selon la fonction et le coefficient de chaque salarié, elle
répond en droit du travail à une logique parfaitement inverse des grilles indiciaires de la fonction
publique : alors que ces dernières définissent le traitement strictement applicable à chaque
fonctionnaire appartenant au corps, à l’emploi et à l’échelon dédié, les grilles des conventions
collectives ne marquent quant à elle qu’un seuil minimal de rémunération que les parties peuvent
librement choisir de franchir.
En pratique, l’existence d’une grille de rémunération lors d’un transfert d’agent public non
titulaire vers une personne privée pourra dès lors impliquer une adaptation du traitement initial de
l’agent en vue de se conformer le cas échéant au minima conventionnel fixé dans la branche
d’activité professionnelle concernée, étant précisé que cette hypothèse devrait somme toute rester
relativement théorique. En tout état de cause, une telle situation ne pourra qu’être plus favorable à
l’agent transféré et s’inscrire dans le respect des dispositions de l’article L. 1224-3-1 alinéa 2 du code
du travail aux termes desquelles « le contrat proposé reprend les clauses substantielles du contrat
dont les agents sont titulaires, en particulier celles qui concernent la rémunération ».
∴
Si le maintien de la rémunération de l’agent public non titulaire ne soulève aucune difficulté
une fois celui-ci devenu salarié de droit privé, la reprise du contrat de travail dans son entier s’avère
relativement aisée pour le nouveau gestionnaire d’une activité de service public industriel et
1103 A l’exception notable du SMIC – salaire minimum interprofessionnel de croissance – prévu à l’article L. 3232-1 du code du travail qui dispose que « tout salarié dont l'horaire de travail est au moins égal à la durée légale hebdomadaire, perçoit, s'il n'est pas apprenti, une rémunération au moins égale au minimum fixé dans les conditions prévues à la section 2 », section 2 consacrée au SMIC.
337
commercial, coutumier de la mise en œuvre des dispositions légales comme conventionnelles de
reprise des contrats de travail.
N* S* !4:* E:=E6?:* 9:?* A345E@5?* 9:* 5E@>@6;*<@n5E6?8:* =@E* ;:?* 3=8E@5:7E?*8A343<6C7:?*=E6>8?*
Il convient toutefois d’apporter une nuance à cette relative maîtrise des données sociales du
transfert par les opérateurs économiques de droit privé, au regard de la notion de « clause
substantielle » mentionnée à l’article L. 1224-3-1 du code du travail. En énonçant que la personne
morale de droit privé reprenant l’activité d’une personne morale de droit public doit maintenir à
l’égard des agents non titulaires de cette dernière les clauses substantielles du contrat, l’article L.
1224-3-1 du code du travail renvoie, à l’instar des dispositions de l’article L. 1224-3, à la distinction
auparavant retenue par les juridictions sociales quant aux clauses substantielles1104 - dont la
modification ouvre droit au refus par le salarié - et celles qui ne le sont pas1105 et rompt avec la
conception objective désormais retenue par les juridictions sociales distinguant selon la nature des
clauses – contractuelles et celles relatives aux conditions de travail renvoyant au pouvoir de direction
de l’employeur1106.
Une telle position, déjà critiquée1107 en matière d’activités de service administratif repris en
régie par une personne publique en ce qu’elle ne tirait pas les enseignements de la jurisprudence de
la Cour de Cassation sur cet aspect et conduisait à un risque d’interprétation source de litiges, nous
semble au surplus contestable en ce qu’elle oblige une même personne morale de droit privé à
adapter son analyse des clauses des agents transférés en fonction de la nature du gestionnaire de
l’activité auquel elle succède. En effet, si la personne morale de droit privé reprend l’activité exercée
jusqu’alors par une autre entité de droit privé, ce sont alors les dispositions de l’article L. 1224-1 du
code du travail qui présideront au transfert des contrats de travail telles qu’interprétées par les
juridictions sociales au regard de la nature des clauses dites contractuelles et celles relatives au
conditions de travail. Si à l’inverse, cette même personne morale de droit privé prend la suite d’une
personne morale de droit public employant des agents non titulaires de droit public, le transfert des
contrats de travail de ces derniers reposera sur le fondement des dispositions de l’article L. 1224-3-1
du code du travail et la distinction antérieurement retenue par les juridictions sociales entre clauses
substantielles et clauses non substantielles. C’est là entretenir une dichotomie peu satisfaisante pour
1104 Cass. soc., 8 octobre 1987, Raquin et Trappiez, Bull. civ. V, n° 451 ; D. 1988, jurispr. p. 58, note Y. SAINT-JOURS, Dr. soc. 1988, p. 140, note J. SAVATIER, op. cit. 1105 Cass. soc., 24 juin 1992, Bull. civ. V, n°413 ; JCP E 1992, pan. 1096 ; D. 1992, inf. rap. p. 200 ; Cass. soc., 25 juin 1992, Dr. soc. 1992, p. 825, op. cit. 1106 Cass. soc., 10 juillet 1996, Bull. civ. V, n° 278 ; Dr. soc. 1996, p. 976, obs. H. BLAISE ; Cah. soc. barreau 1996, A 62, p. 317, obs. A. PHILIBERT, RJS 1996, n° 900, op. cit. 1107 Ibid.
338
la lisibilité des règles de transfert des contrats de travail dans les activités en lien avec une personne
publique.
*
234A;7?634*9:*;@*=@E56:*###*
Au terme de cette troisième et dernière partie est apparue la nécessité de penser les effets de
l’évolution pouvant affecter l’organisation ou la gestion d’une activité publique dans leur globalité,
matérielle comme temporelle.
Dans sa globalité matérielle d’abord, en raison de la diversité des effets de l’évolution dans
l’organisation ou la gestion d’une activité publique. La continuité de l’emploi – qu’ils l’appellent de
leurs vœux ou qu’ils y soient à l’inverse réticents –, concerne ainsi aussi bien les structures
gestionnaires que les agents eux-mêmes. Dès lors, la question sociale inhérente à toute évolution
d’activité publique doit être appréhendée dans sa dimension individuelle comme collective. Au-delà
du simple transfert du contrat de travail souvent évoqué en pareil sujet, doivent être pris en compte
l’ensemble des aspects du régime juridique des agents transférés, et leur impact sur le
fonctionnement même de la structure gestionnaire.
Dans sa globalité temporelle ensuite. Il s’agit ici d’anticiper des rigidités sociales et
structurelles qui pourraient difficilement être corrigées une fois la mutation de l’activité achevée et
dont les conséquences, financières ou organisationnelles par exemple, pourraient limiter d’autant la
pertinence de la réforme initialement recherchée. Il s’agit également de rendre compatible les intérêts
des personnels avec les nécessités d’une gestion optimale de l’activité publique, par principe inscrite
dans le temps.
*
339
234A;7?634*\848E@;:*
*
« Les choses qui sont semblables doivent être traitées semblablement alors qu’il faut traiter des choses dissemblables en proportion de leur dissemblance »
ARISTOTE
Ethique à Nicomaque.
En retenant un angle d’attaque volontairement large, la présente étude a mis en lumière la
transversalité de la problématique sociale à l’ensemble des hypothèses d’évolutions dans
l’organisation ou la gestion d’activités en lien avec une personne publique. Elle a également révélé la
pluralité, et par là-même la complexité, des règles juridiques applicables aux transferts des
personnels, que ces règles portent sur le fondement même de ce transfert, ses modalités ou ses
conséquences. Ce constat nous amène à exprimer une conviction d’une part, à formuler quelques
réflexions d’autre part.
Une conviction, d’abord.
Loin d’être un aspect accessoire dans la conduite de tout projet de réforme dans
l’organisation ou la gestion d’une activité en lien avec une personne publique, la dimension sociale
apparaît bien à l’inverse comme une variable fondamentale, à laquelle il convient d’attacher la plus
grande importance. En témoigne l’implication croissante du législateur dans la mise en œuvre de
transferts des personnels corrélatifs à l’évolution dans l’organisation ou la gestion d’activités en lien
avec une personne publique, dans une démarche résolument simplificatrice. Simplification, d’abord,
au stade même de l’examen du fondement du transfert des personnels, pour pallier tout risque
d’interprétation quant à la portée de l’obligation de transfert. Simplification, ensuite, dans la
définition des modalités de mise en œuvre du transfert des personnels, pour limiter les contraintes du
transfert et renforcer par-là même l’intérêt de l’évolution de l’activité. Simplification, enfin, quant
aux conséquences du transfert des personnels sur les agents eux-mêmes comme sur les structures
nouvellement compétentes pour la gestion de l’activité concernée, pour faciliter l’adaptation de
chacun des acteurs au nouveau contexte d’exercice de l’activité.
Au demeurant, la dimension sociale de toute évolution d’activité publique se révèle un enjeu
majeur pour la réussite d’une telle mutation, tant au moment même où elle intervient qu’après son
achèvement. Il convient dès lors de l’appréhender dans une vision à court mais aussi long terme, afin
d’éviter d’introduire des rigidités qui, pour être légitimement motivées par des raisons de paix
340
sociale au moment du transfert, n’en seront pas moins de nature à complexifier le fonctionnement de
la structure nouvellement compétente.
Quelques pistes de réflexion, ensuite.
Parmi la diversité des dispositifs juridiques de transfert de personnels lors d’évolutions dans
l’organisation ou la gestion d’activités publiques, l’alternance de structures gestionnaires de droit
privé et de droit public constitue incontestablement l’hypothèse où cette diversité engendre la
complexité la plus prégnante. La dévolution à un tiers d’une de ses activités par une personne
publique, et la reprise en régie par cette même personne publique d’une activité exercée
précédemment par un tiers qui en est l’exacte symétrie, se heurte ainsi directement à la dualité des
régimes juridiques des personnels qui prévaut en droit interne, entre droit social d’une part, et droit
de la fonction publique d’autre part. A une même activité publique pourront être affectés, selon la
nature juridique de l’employeur, des salariés de droit privé ou des agents de droit public. La seule
circonstance que les personnels de l’activité relèveront désormais directement de la personne
publique sous l’effet de la reprise en régie du service commandera leur soumission à un régime de
droit public, en lieu et place d’un régime de droit privé applicable sous l’empire d’un gestionnaire de
droit privé, et inversement. Une telle mutabilité, potentiellement exacerbée par la liberté de choix
des modes de gestion de leurs activités par les personnes publiques, ne nous semble nullement
satisfaisante, tant du point de vue des agents eux-mêmes, confrontés à une évolution substantielle de
leur régime juridique sans modification corrélative des missions qui leur assignées, que de celui des
gestionnaires successifs, opérateurs économiques de droit privé comme personne publique,
contraints de s’adapter à un contexte qui n’est pas le leur. Le critère organique se voit selon nous
conféré dans une telle hypothèse une valeur sans lien avec la nécessité réelle d’assujettir les
personnels d’une même activité à un statut de droit public ou de droit privé selon le choix de la
personne publique de gérer directement ou par la voie déléguée une activité relevant de sa
compétence.
Au travers de cet exemple volontairement mis en exergue, le débat ouvert depuis quelques
années autour de la légitimité et partant la pertinence du maintien en droit interne de la dichotomie
droit social/droit de la fonction publique prend ici selon nous tout son sens. Notre propos ne tend
cependant pas à mettre à mal une architecture séculaire, érigée en vertu de considérations historiques,
sociologiques et politiques dont les fondements demeurent à bien des égards. Il plaide en revanche
pour une rationalisation des règles applicables à certaines activités, par la voie d’une harmonisation
ou a minima d’une relative homogénéisation des règles « sociales » applicables aux personnels
affectés à des activités relevant de droit de la compétence d’une personne publique et amenées à être
confiées à des tiers personnes morales de droit privé principalement par la voie contractuelle. Le
critère déterminant pour identifier quelles activités devraient bénéficier d’une telle appréhension
rationnalisée nous semble en effet pouvoir être fixé en fonction du caractère délégable ou non de
341
l’activité concernée. En effet, dès lors que la personne publique est potentiellement amenée à confier
à une personnalité privée une activité qui lui incombe originellement et qu’elle peut à ce titre lui
octroyer des prérogatives de puissance publique pour mener à bien cette mission.
L’harmonisation du régime juridique des personnels affectés à des activités de service
publique délégable que nous appelons de nos vœux ne doit cependant pas nécessairement conduire à
retenir comme variable d’ajustement le droit social et conduire à l’ « éradication » des principes du
statut de la fonction publique. L’interpénétration croissante de ces deux droits témoignent au
demeurant de la possibilité d’instituer des principes communs aux personnels de droit privé et de
droit public affectés à une même activité1108.
A l’instar des processus d’adaptation retenus lors des dernières évolutions d’activités
publiques emblématiques intervenus au cours des cinq dernières années, une négociation pourrait
ainsi intervenir entre les différents acteurs en vue de l’adoption d’un « statut » propre aux personnels
affectés à des activités délégables, qui emprunterait à chacun des régimes classiques dans une
logique consensuelle et pragmatique. Elle aurait pour vertu essentielle de définir un régime juridique
commun à l’ensemble des personnels affectés à une activité publique indépendamment de la nature
juridique de l’entité gestionnaire de cette activité. Le critère matériel prévaudrait ainsi sur le critère
organique. Si nous avons parfaitement conscience des difficultés juridiques – et sociologiques – que
l’élaboration d’un tel socle commun de règles serait susceptible de susciter tant les obstacles en
présence seraient nombreux et les arbitrages indispensables, nous sommes cependant convaincus de
son intérêt, tant pour les agents eux-mêmes que pour la personne publique et ses cocontractants
privés.
A bordeaux, le 25 mai 2012
* *
1108 M. POCHARD, « La récente loi de modernisation de la fonction publique va-t-elle dans le bon sens ? », JCP A n°12, 19 mars 2007, n°2070. Pour une appréciation contraire de ce mouvement : A. Le PORS, « Une loi de dénaturation de la fonction publique », JCP A n°12, 19 mars 2007, n°2069. Le conseiller d’Etat Marcel POCHARD saluait en ces termes l’adoption de la loi du 2 février 2007 dite de « modernisation de la fonction publique » : « les dispositions législatives s’inscrivent, sans le dire, consciemment ou inconsciemment, dans une perspective de meilleure articulation entre le droit de la fonction publique et le droit commun du travail. Et fait à souligner, cette meilleure articulation est réalisée par emprunt par le secteur public au secteur privé,
342
N6B;63\E@=G6:*
La présente bibliographie ne prétend pas être exhaustive. Par ailleurs, elle ne reprend pas l’ensemble des références citées dans les notes de bas de page de cette étude.
*
1!$&-J%'H*&-,,1&('H*(O%'%'*%(*D%D1#&%'*
ALLEMAND R., GRY Y. [ss dir.], Le transfert des personnels TOS de l'Education nationale, L'Harmattan, coll. « GRALE », 2007.
AUBY J.-B., AUBY J.-F. et NOGUELLOU R., Droit des collectivités locales, PUF, coll. Thémis, 2004.
AUBY J.-M., AUBY J.-B. ; JEAN-PIERRE D. et TAILLEFAIT A., Droit de la fonction publique, Dalloz, 6ème édition, 2009.
BENISTI J. A., Rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République sur le projet de loi n°3134 de modernisation de la fonction publique, Assemblée Nationale, n°3173, 21 juin 2006, p.56.
BENOIT F.-P., Collectivités locales, tome 1, Dalloz, p. 322.
BIGAULT C., Les cabinets ministériels, LGDJ, coll. Systèmes, 1997.
B. CASTAING, R. NOGUELLOU, et C. PREBISSY-SCHNALL, Les marchés publics, Notion, Modalités de gestion, Exécution, éd. Litec 2003.
CHAPUS R., Droit administratif général, tome 1, Montchrestien, 15ème édition, 2001. - Droit administratif général, tome 2, Montchrestien, 15ème édition, 2001
CONSEIL D’ETAT, Perspectives pour la fonction publique, Rapport public, 2003, La documentation française, 2003. EDCE n°54, p. 309.
CORNIER LE GOFF A. et IENARD E., Restructurations et droit du travail, Coll. Aspects juridiques et pratiques, Ed. Liaisons sociales, 2006.
COUR DES COMPTES, L'intercommunalité en France, La documentation française, novembre 2005. COUR DES COMPTES, La conduite de la décentralisation par l’Etat, La documentation française, octobre 2009. DELACOUR E., La notion de convention de délégation de service public, Th. Paris 2, 1997, vol. II, p. 494 et s. DESPAX M., L’entreprise et le droit, Th. Toulouse 1956, Paris LGDJ. DOUENCE J.-C., Réflexions sur la vocation générale des collectivités territoriales à agir dans l'intérêt public local in Quel avenir pour l'autonomie des collectivités locales, Éd. de l'Aube, 1999, p. 317
343
EISENMANN C., Centralisation et décentralisation. Esquisse d'une théorie générale, LGDJ, 1948. FAURE B., Droit des collectivités territoriales, Dalloz, 2009, p. 479 s. FELTZER L., Transfert conventionnel d’entreprises, Coll. Etudes pratiques de droit social, Ed. Kluwer, 2006, p. 60.
GAUDEMET Y., STIRN B., DAL FARRA T., ROLLIN F., Les Grands avis du Conseil d’Etat, 3ème éd., Dalloz 2008. GUERY G., Restructuration d’entreprise en Europe – dimension sociale, De Boeck université, 1999. INSTITUT DE GESTION DELEGUEE, Situation des personnels et changement de mode de gestion des services publics, octobre 2007. p. 23. JOXE P., L'efficacité de l'Etat in La France du nouveau siècle, PUF, 2002. KADA N. [ss dir.], L'intérêt public local, regards croisées sur une notion juridique incertaine, PUG, 2009 ;
LAUBADERE A. de, MODERNE F. et DELVOLVE P., Traité des contrats administratifs, LGDJ, 1983.
LAMBLIN L., La fonction publique de l’Etat confrontée à la concurrence, Th. Paris II, 2007.
LONG M., WEIL P., BRAIBANT G., DELVOLVE P. et GENEVOIS B., Les Grands arrêts de la jurisprudence administrative, Dalloz, 18ème édition, 2011.
MARTINON A., Essai sur la stabilité du contrat de travail à durée indéterminée, Dalloz 2005.
MAZEAUD A., Droit du travail, Montchrestien, 6ème édition, 2008.
MELLERAY F., Droit de la fonction publique, Economica, 2ème édition, 2010.
MINE M., ROSE H. et STRUILLOU Y., Le droit du licenciement des salariés protégés, Économica, 2 éd. 2002. MORIN M.-L., Le droit des salariés à la négociation collective, Principe général du droit, préface M. DESPAX, LGDJ 1994. MORVAN P., «Restructurations en droit social, Litec 2007.
NOGUELLOU R. La transmission des obligations en droit administratif, LGDJ, 2004.
NICINSKY S., - Droit public des affaires, Montchrestien, 2010.
PIQUEMAL M., M. PIQUEMAL, Le fonctionnaire. Droits et garanties, Berger-Levrault, 2ème éd., 1979, p. 43 ;
- « Le fonctionnaire et l’agent des services publics », Les non-titulaires, t. 3, Berger Levrault, 1981.
RAPP L., TERNEYRE P., SYMCHOWICZ N. et LEGROS B., Droit public des affaires, LAMY, 2012.
RIBAS J.-J., Les services de la fonction publique dans le monde, Bruxelles 1956, p. 8.
344
RICHER L. Droit des contrats administratifs, LGDJ, 6ème édition, 2008.
ROUAULT M.-C., L'intérêt communal, Presses univ. Lille, 1991, p. 276.
SILICANI J.-L., Livre blanc sur l'avenir de la fonction publique : faire des services publics et de la fonction publique des atouts pour la France, Doc. fr., 2008, 240 p. VEDEL G., DELVOLVE P., Droit administratif, Thémis, PUF, 1992, tome 2, p. 742.
-&(#2/%'*%(*21"(&#N!(#1"'*
ALLEMAND R. et TIFINE P., « Le transfert aux collectivités territoriales des personnels techniques et ouvriers de service de l’éducation nationale : l’analyse des questions statutaires », AJDA 2006, p. 1260.
AMAR A., L'impact de l’intercommunalité sur la gestion des agents transférés des administrations communales, JCP A n° 46, 8 Novembre 2004, 1727
ANTONMATEI P.-H. , « Licenciements économiques et négociation collective, un nouvel accord collectif de travail est né », Dr. soc. 2003, p. 486. BAILLEUL D., « Vers la fin de l’établissement public industriel et commercial ? à propos de la transformation des EPIC en sociétés », RJEP 2006, p. 105. BARTHELEMY J., « Restructurations et tissu conventionnel : critique de la jurisprudence », Cahiers DRH, janvier 2007, n° 128, p. 19. BARTHELEMY J. et CETTE G., « Le rapport sur la « Refondation du droit social » vu par ses auteurs, Libre propos », JCP S n° 15, 13 Avril 2010, act. 204. BAZEX M., « Le statut des entreprises publiques en Europe : la justice européenne donne son analyse sur le concours financier accordé par l’autorité publique pour permettre le changement de statut du personnel », Les échos, 10 juin 2004. BAZIN J., « Intercommunalité et transferts de personnels », Gaz. Cnes, 29 octobre 2001, p. 80. BEAL S. et TERRENOIRE C., « Le sort des salariés transférés à une entité de droit public dans le cadre d’un service public administratif », JCP A janvier 2010 n°1, p. 1021. BENTOLIA P., « La jurisprudence Bayeux et la place des droits acquis dans le droit applicable aux non-titulaires », AJFP 2009, p. 43. BLAISE H., obs. sous Cass. soc., 10 juillet 1996, Bull. civ. V, n° 278, Dr. soc. 1996, p. 976. BLANC P., « Les entreprises publiques face à la concurrence », Revue concurrence consommation 2002, n° 125, p. 5. BONICHOT J.-Cl., « Les incidences de la construction communautaire sur la fonction publique », Cah. Fonct. Publ., Actes du colloque sur les perspectives d’évolution de la fonction publique, n° spécial, juin 2003, p. 31.
345
BONNECHERE M., « Le contrôle par les travailleurs des restructurations et de leurs conséquences sur l’emploi », Dr. ouvrier 1979, p. 273. BOASSAERT D., DEMMKE C. et ONNEE-ABBRUCIATI M.-L., « L’évolution des fonctions publiques en Europe : une approche comparée des développements récents » ; in M. –L. ONNEE-ABBRUCIATI [ss. dir.], Le fonctionnaire est-il un salarié comme les autres ?, Bruylant, 2003, p.26 et suiv. BOISSARD S., « Le pouvoir hiérarchique au sein de l’Administration française », Cah. Fonct. Publ. mai 2003, p. 4. BONNET D., « La décentralisation des aérodromes et le nouveau paysage aéroportuaire français », Revue droit des transports n° 1, Janvier 2009, étude 2. BOUSCHERAIN G., « Le statut du fonctionnaire mis à disposition d’une association », AJFP 2001, p. 41. BOUHIER V., « Transfert d’activité : incertitudes sur le contenu des contrats à durée indéterminée de droit public », RFDA 2006, p. 1213. BOULEY F., « Vers une généralisation de la mutualisation des services entre collectivités locales ? », AJDA 2012, p. 468. BOURDON J., « La fonction publique territoriale, 20 ans d'évolution permanente », AJDA 2004, p. 121 ;
- « Vers une banalisation du droit de la fonction publique », AJFP 2005, p. 284. BRACONNIER S., « La nouvelle régulation postale issue de la loi n°2005-516 du 20 mai 2005 », Revue Lamy de la concurrence n°4, 1er août 2005, p.97. BRACONNIER S. et MOREL J.-B., « La réversibilité en matière de gestion des services publics locaux », C. ET MP. 2006, n°3. BRECHON-MOULENES C., « Le juge administratif et le contentieux économique », AJDA 2000, p. 679 et s.
BRIMO A., « Le fonctionnaire contractuel », RDP 1944, p. 124.
BRISSO J.-F., « Les transferts de compétences de l'État aux collectivités locales », Dr. adm. n° 4, Avril 2008, étude 8.
BROUSSOLE D., « Les privatisations locales », AJDA 1993, p. 323.
CAILLOSSE J., « Le statut de la fonction publique et la division de l’ordre juridique français », in A. SUPIOT (dir.), Le travail en perspectives, LGDJ 1998, p. 347 ;
- « Le droit administratif français saisi par la concurrence ? », AJDA 2000, p. 99. - « Repenser les responsabilités locales. Du débat sur la "clarification des compétences" et la
"clause générale de compétence" à celui d'un changement de modèle territorial », Cah. Institut Décentralisation 2006, 8-II, p. 5 ;
CARSON X., « La convention collective source de sujétions pour le salarié », JCP S. n° 3, 16 Janvier 2007, p. 1015.
CASAS D., « La mission d’appui aux contrats de partenariat exerce-t-elle une activité sur un marché pertinent », BJCP n°47, septembre 2006, p. 295.
346
CHAGNY Y., « La continuité des contrats de travail du personnel d’un marché de prestations de services », RDT 2007, p. 78.
CHAPUISAT J., « La répartition des compétences, commentaire de la loi du 7 juin 1983 », AJDA 1983, p. 81.
CHEROT J.-Y., « Nouvelles observations sur la régulation par le Conseil d’Etat de la concurrence entre publiques et personnes privées », in Mouvements du droit public, Mélanges Moderne, Dalloz 2004, p. 94. CHEVALLIER J., « La nouvelle réforme des télécommunications : ruptures et continuités », RFDA 1996, p. 937. CHORIN J., « Les entreprises à statut, le code du Travail et le principe de séparation des pouvoirs », Dr. soc. 1993, p. 953.
- « Les établissements publics employant simultanément des personnels de droit public et de droit privé », AJDA 2000, p. 382 ;
- « Le nouveau code du travail et les personnes publiques employant des personnels de droit privé », JCP S n°45, 9 novembre 2010, p. 10.
CLAMOUR G., « Qui peut le moins peut le plus… ! Ou la liberté économique des personnes publiques », Actes du colloque Dix ans après l’arrêt Million et Marais : et après, JCP A n°44, novembre 2007, p. 48 ;
- « Plaidoyer pour l’arrêt Lamblin », AJDA 2005, p. 1205. - « Entre audace jurisprudentielle et confusion des genres : une application directe du droit de
la concurrence par le juge administratif », Revue Lamy concurrence n°6, 1er janvier 2006, p. 43.
COSSALTER P., « Le droit de l'externalisation des activités publiques dans les principaux systèmes européens », Chaire MADP, Sciences-po, séminaire 27 mars 2007, disponible sur : chaire madp.sciences-po.fr ; Les délégations d'activités publiques dans l'Union européenne, LGDJ, 2007. COURTIAL J., « Les parcs de l’équipement : de curieux services de l’Etat confrontés à la décentralisation », JCP A n°46, 13 novembre 2006, 1265. CROUZATIER-DURAND, « Performance, efficience : le personnel de la fonction publique en mutation », Dr. adm. Mars 2012, étude 5. DEBORD F., « Droit du travail dans le secteur public », RDT 2010, p. 690. DEFELIX C., « Entreprises de service public : une seule gestion des ressources humaines ? », Revue française de gestion n°115, septembre-octobre 1997, p. 130.
DELION A. et DURUPTY M., « La transformation du Groupement Industriel des Armements Terrestres en société », RFAP 1991, p. 159.
DEYDIER M., « La nouvelle situation des fonctionnaires des PTT dans la fonction publique de l’Etat », Juris PTT n° spécial 1990 La réforme des PTT, p. 42. DIETENHOEFFER J., « Mise en concurrence du candidat sortant : la détermination des obligations de la personne publique », C. ET MP. n° 5, Mai 2008, étude 5, p. 7. DORD O., « La loi Mobilité ou l’adaptation du statut par une gestion rénovée des personnels », AJDA 2010, p. 193.
347
DREYFUS J.-D., « L'externalisation, éléments de droit public », AJDA 2002, p. 1214 ; - « L'immixtion du droit privé dans les contrats administratifs », AJDA 2002, p. 1373 ; - « Externalisation et liberté d’organisation du service », AJDA 2009, p. 1529.
DUBOUIS L., « La notion d’emploi dans l’administration publique (art. 48 §4 du traité CEE) et l’accès des ressortissants communautaires aux emplois publics », RFDA 1987, p. 952. DUPRILOT J.-P., « Les modifications du statut des établissements publics et leurs conséquences sur le régime juridique de leur personnel » ? AJDA 1972, p. 603. DURAND P., « Le Dualisme de la convention collective du travail », RTD civ. 1939, p. 353. DURAND-PRINBORGNE C., « Décentralisation et transfert de personnels », AJFP 2003, p. 1. FATOME É., « La détermination du caractère des établissements publics », AJDA 2001, p. 222.
FATOME É. et MENEMENIS A., « Concurrence et liberté d’organisation des personnes publiques : éléments d’analyse », AJDA 2006, p. 67.
FATOME É. et MOREAU J., « L'établissement public territorial. Mode de gestion du service public ? », AJDA 1988, p. 699.
FAVENNEC-HERY F. , « La consultation des représentants du personnel sur le transfert de l'entreprise », Dr. soc. 2005, p. 729 s. FERRARI-BREEUR C., « La loi du 26 juillet 2005 ou le droit communautaire cause réelle et prétexte à une modification du droit français de la fonction publique », JCP A n°5, 29 août 2005, p. 1297. FERRARY M., « Les conséquences de la dérégulation d’un monopole sur sa politique d’investissement en capital humain : le secteur des télécommunications », Revue d’économie industrielle n°100, 3ème trimestre 2002, p. 63. FERSTENBERT J., « Accès des fonctionnaires à l’entreprise publique : sa relation au marché est-elle déterminante ? », AJFP 1999, p. 32 ;
- « Le transfert des personnels dans la loi relative aux libertés et responsabilités locales », AJDA 2004, p. 1996.
FITTE-DUVAL A., « Contrat à durée déterminée dans la fonction publique : les risques d'une transposition inadaptée », AJFP 2007, p. 4 ;
- « La situation de réorientation professionnelle, ou les deux visages de Janus », AJFP 2011, p. 156.
FOURNIER J., « Le devenir des entreprises publiques dans le droit et la pratique de l'Union Européenne », RJEP 2005, p. 135.
GABORIAU V., « La mutualisation dans les services publics, nouvel enjeu de coopération », Rev. de droit sanitaire et social 2012 p. 45.
GARBAR C.-A., « Statuts en droit commun: les incertitudes des relations individuelles du travail dans les entreprises publiques », CJEG 1994, p. 295 ;
348
- Principes généraux du droit du travail : une nouvelle étape vers la banalisation du droit applicable aux personnels des entreprises à statut, Mélanges B. Jeanneau, Dalloz, 2002, p. 143 ;
- « Les relations du travail dans les entreprises publiques à statut peuvent-elles servir de modèle à la Fonction publique ? », Rev. adm. 2004, p. 189 ;
- « Quelle(s) réforme(s) pour la fonction publique : statut et/ou contrat ? », AJFP 2005, p. 281 ;
- « Les EPIC face à leurs personnels. De la différenciation à l'indifférenciation », JCP A n°31, 27 juillet 2009, p. 27.
GARRIGUE-VIEUVILLE M., « Les effets du changement de mode de gestion des services publics sur la situation de leur personnel : mode d'emploi », Dr. adm. n° 2, février 2010, étude 4. GAUDEMET Y., « Existe-t-il une « catégorie » d'agents publics contractuels de l'administration ? », AJDA 1977, p. 614 et s. GUIBAL M., « L'Égalité entre concurrents dans le droit des marchés publics », Marchés publ., n° 211, p. 31. IDOT L., « Droit social et droit de la concurrence : confrontation ou cohabitation ? », Europe n°1, 1er janvier 2005, p. 15. IONESCU V., « Le droit d’opposition des salariés eu transfert du contrat de travail : mythe ou réalité », Dr. soc. 2002, 507. JEAN-PIERRE D., « Les propositions du Livre blanc sur l'avenir de la fonction publique », JCP A 2008, act. 403 ;
- « L’article L. 122-12 du code du travail et le droit de la fonction publique : quand l’incompréhensible se conjugue à l’inapplicable », JCP G n°52, II 10200 ;
- « Intercommunalité et fonction publique territoriale dans la loi du 27 février 2002 », JCP A n° 3, 28 Octobre 2002, 1093 p. 89.
- « La Loi France Télécom et la fonction publique », JCP A n° 14, 29 Mars 2004, 1256, p. 488 ;
- « Le transfert des TOS aux départements et régions », JCP A n°8, 20 février 2006, 1043 ; - « Les agents en CDI : du statut à la carrière », JCP A n°16, 16 avril 2007, p. 2105. - « La loi relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique »,
JCP A n°40, 28 septembre 2009, p. 2232 ; - « Le refus des salariés en cas de « remunicipalisation » d’un service public administratif »,
JCP A 14 mars 2011, n°11, p. 2102. - « La lutte contre la précarité dans la fonction publique territoriale depuis la loi du 12 mars
2012 », JCP A n°15, 16 Avril 2012, p. 2107. KADA N., « Emploi public et transfert de personnel », RDP 2002, p. 847. KARPENSCHIF M., « Vers une définition communautaire du service public ? », RFDA 2008, p. 62. KERBOUC’H J.-Y., « Les fonctionnaires mis à disposition d'une entreprise doivent être inclus dans le calcul des effectifs », JCP S n°22, 27 mai 2008, p. 1308. LACHAUME J.-F., « Sur le critère de l’agent public », Dr. soc. 1986, p. 44.
- « Evaluation et permanence dans l’identification de l’agent public non statutaire », CJEG 1997, p. 35 ;
- « La situation du fonctionnaire mis à disposition d’un organisme privé », Dr. soc. n°7, juillet 1997, p. 710 ;
349
- « L’identification d’un service public industriel et commercial : la neutralisation du critère fondé sur les modalités de gestion du service », RFDA 2006, p. 119 ;
LAFARGE P., « L’article L.122-12 du code du travail est-il compatible avec le régime des marchés publics ? », Conférence prononcée le 25 mai 1985 devant l’Association pour le droit public de l’entreprise, Marchés publics, la revue de l’achat public.
LANDOT E., « Quel statut pour les agents « intercommunalisés » ? », RLCT n°20, janvier 2007, p.37.
LAUBADERE de A., « Vicissitudes actuelles d'une distinction classique : établissement public et collectivité territoriale. À propos des groupements des collectivités territoriales », Mélanges Couzinet, 1974, p. 411.
LAGRANGE P., « La réforme de la mise à disposition : nouvelle étape vers une fonction publique ouverte ? », AJDA 2007, p. 524.
LAULOM S., « Harmonisations législatives et stratégie européenne pour l'emploi », RTD 2007 p. 710.
LEGRAND H.-J., « La mise en cause d'une convention ou d'un accord collectif en question », RDT 2008, p. 10. Le PORS A., « La conception française de la fonction publique », table ronde, Actes du colloque du 28 novembre 2002, « Quel avenir pour la fonction publique ? », Cah. Fonct. Publ. n°3, mars 2005, p. 24 ;
- « Une loi de dénaturation de la fonction publique », JCP A n°12, 19 mars 2007, n°2069. LHERNOULD J.-F., « Etat des relations entre le droit communautaire et le code du travail », RJS 10/02, p. 799, n°23 et s.
LIEBER S.-J. et BOTTEGHI D., « Le retour du « fonctionnaire contractuel » ? », AJDA 2009, p. 142. LINGIBE P., « Résorption de la précarité dans la fonction publique territoriale », AJCT 2012, p. 164. LOKIEC P. et ROBIN-OLIVIER S., « La transposition de la directive 2002/14 sur l'information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne », RDT 2009, p. 466. LOMBARD M., « L’établissement public industriel et commercial est-il condamné ? », AJDA 2006, p. 79. LYON-CAEN A., « Le comité d'entreprise et les restructurations », Dr. soc. 2005, p. 285 s. LYON-CAEN G., « La concentration du capital et le droit du travail », Dr. soc. 1983, p. 287. MARC E., « Contrats de partenariat et personnels territoriaux : quelques repères pour le passage de la gestion publique à la gestion partenariale », Revue Lamy des coll. terr., octobre 2008, p.89 ;
- « La fin non assumée de la garantie de l'emploi des fonctionnaires et/ou l'émergence d'un droit individuel à la reconversion professionnelle », AJDA 2011, p. 162.
MARC E. et STRILLOU Y., « Droit du travail et droit de la fonction publique : des influences réciproques à l'émergence d'un droit de l'activité professionnelle », RFDA 2010, p. 1169.
350
MARCOU G., « Le bilan en demi-teinte de l'Acte II : Décentraliser plus ou décentraliser mieux ? », RFDA 2008 p. 295. MARTIN J., « A propos du maintien des contrats de travail en cas de reprise en régie d'un service public », AJDA 2003, p. 768. MARTIN-LAVIGNE Y., « Comment arrêter les termes du contrat de cession d'une société avant d'informer et de consulter son comité d'entreprise ? », D. 2002, chron. p. 1374 s. MATUTANO E., « La mobilité d'emploi dans les fonctions publiques : entre textes incitateurs et pratiques restrictives », AJFP 2009, p 19 MAZEAUD A., « Licenciements économiques à l’occasion du transfert d’entreprise : les droits des salariés », Dr. soc. 2003, 482
- « Le sort des contrats de travail lors des transferts d’entreprise », Dr. soc. 2005, p. 737 ; - « Accords collectifs et restructurations », Dr. soc. 2008, p. 66.
MELLERAY F., MAUGUE C., COURREGES A., « code du travail et personnes publiques », AJDA 2008, p. 855. MELLERAY F., « Une profonde rupture intellectuelle avec la conception française de la fonction publique (questions à...) », AJDA 2008, p. 900 ;
- Nouvelle illustration de la situation « quasi-réglementaire » des agents publics contractuels, DA 2009, n°3, comm. 41, p. 128.
MEYRAT I., « L'égalité de traitement à la croisée des chemins », RDT 2008, p. 648 MONTECLER de M.-C., « Quarante propositions pour transformer la fonction publique », AJDA 2008, p. 836 ; MORAND M., « Reprise d’une entité économique par un organisme de droit public, sort des contrats de travail », RJS mars 2011, p. 185. MOREAU D., « Marchés de services publics ; identification d'une catégorie de marchés à part », CP-ACCP n° 32/2004, p. 66. MORVAN P., « Les transferts d’entreprise et les régimes de protection sociale », Dr. soc. 2005, n°7/8, p. 772. MOUDOUDOU P., « Service public et changement d’employeur », AJDA 1996, p. 339. MOLHO J., « Concurrence et principe d'égalité dans les achats publics », Marchés publ., n° 212. MOULY J., « Sur la bilatéralisation des droits sociaux », Dr. Soc. 2002, p. 804. NEVEU P., « Contractualisation et mutualisation, outils de l'intercommunalité », JCP A n° 30, 26 juillet 2010, p. 2242. NICINSKI S., « Les établissements publics en quête d’identité sur le marché concurrentiel », ACCP n°5, novembre 2001, p. 7.
- « Les conditions de création d’un service public dans un environnement concurrentiel », AJDA 2005, p. 2130.
- « La transformation des établissements publics industriels et commerciaux », RFDA 2008, p. 35.
351
- « La loi du 28 mai 2010 pour le développement des sociétés publiques locales », AJDA 2010, p. 1759.
NICINSKI S. et CLAMOUR G., « Intérêt public local et insuffisance de l’initiative privée : histoire d’une dissociation en cours … », Revue Lamy concurrence n°1, janvier 2006, n°446. NOGUELLOU R., « La cession de contrat », RDC 2006, p. 966
- « La fin du contrat, Eléments de comparaison entre le droit public et le droit privé », in Mélanges Michel Guibal, 2006, p. 341 ;
- « Les entreprises publiques sous le feu du droit communautaire », Dr. adm. n° 11, Novembre 2007, alerte 32.
ORSINI G., « Extension d’une convention collective : compatibilité avec le droit de la concurrence », RTD Com. 2003, p. 490. PAGNERRE Y. et SAINCAIZE G., « L’intégration des salariés mis à disposition : nouvelles conditions, nouveaux effets », JCP S. n°36, 1er septembre 2009, p. 1368. PEYRICAL J.-M., « De nouvelles voies pour la gestion des services publics locaux, Services d'intérêt économique général, partenariats public-privé institutionnalisés et sociétés publiques locales », AJDA 2011, p. 934. PLESSIX B., « L'établissement public industriel et commercial au cœur des mutations du droit administratif », JCP A n° 13, 26 Mars 2007, p. 2077. POCHARD M., « La négociation interministérielle, une nouvelle voie pour le dialogue social ? », RFDA, octobre 1996, p. 653 ;
- « Quel avenir pour la fonction publique ? », AJDA 2000, p. 3 ; - « La place donnée au contrat dans l’organisation de la fonction publique », AJDA 2003, p.
991 ; - « La récente loi de modernisation de la fonction publique va-t-elle dans le bon sens ? », JCP
A n°12, 19 mars 2007, n°2070.
PONTIER J.-M., « Sur une clause générale de compétence » RDP 1984, p. 1443.
RAPP L., « La privatisation de France Télécom : « de l’exemple français » à l’ « exception culturelle », CJEG 1994, p. 356 ; REZENTHEL R., « La décentralisation et les concessions aéroportuaires », RFDA 2009, p. 1188. RICHER L., « Le statut des agents de France Télcom », AJDA 1994, p. 463 ;
- « La fin de la convention de délégation », AJDA 1996, p. 651 ; - « DSP : l'obligation de reprise du personnel et la libre concurrence », CP-ACCP, 2004,
n° 30, p. 53. - « Partage de service et prestations de services », CP-ACCP, décembre 2006, p. 26 ; - « Un contrat d'entente intercommunale n'est pas une délégation de service public », AJDA
2012 p. 555, note sous CE, 3 février 2012, Commune de Veyrier du lac, req. n° 353737. RIBOT C., « La mutualisation des compétences entre communes et communautés », RLCT mars 2008, p. 51. ROUYERE A. et SUDRE F., « La loi relative aux libertés et responsabilités des universités et les garanties statutaires des enseignants-chercheurs », JCP G 2008, I 153. ROUSSEAU Y., « Sur la fusion de l'ANPE et des ASSEDIC », Dr. soc. 2008, p. 151.
352
SAGALOVITSCH E., « Les obligations de reprise du personnel dans le droit des marchés publics et des délégations de service public », BJCP n°28, p. 175. SALIOU F., « L’externalisation permet-elle une réduction des dépenses publiques ? - L’exemple du ministère de la défense », JCP A 2012, p. 2141. SAPENE E. et BOUROUET-AUBERTOT C., « Transferts conventionnels : les conventions collectives sont mises à néant par la Cour de cassation », Jurisp. Soc. Lamy, n° 193, 12 juillet 2006, p. 4. SAURET A., « Les modalités négociées de l'article 2 de la loi du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciement économique », LPA 2003, n° 204, p. 3 SAVATIER J., « Cession d'entreprise et statut collectif du salarié », Dr. soc. 1993, p. 153. SEMPE F., « Réforme des collectivités territoriales : en finir avec quelques dogmes », AJDA 2009 p. 281. SILICANI J.-L., « Faire cohabiter la fonction publique de carrière avec une gestion moderne des ressources humaines (questions à...) », AJDA 2008, p. 1020 ;
- « Il nous faut construire la fonction publique des vingt prochaines années : soyons ambitieux ! (entretien avec...) », JCP A 2008, p. 2142
SIWEK-POUYDESSEAU J., « Pouvoir hiérarchique, concertation et contractualisation », Cah. Fonct. Publ. mai 2003, p. 8. SOULIER P., « Les restructurations : le rôle du comité d'entreprise, aspects pratiques », Dr. soc. 1989, p. 35. SUPIOT A., « Déréglementation des relations de travail et autoréglementation de l’entreprise », Dr soc. 1989, p. 195 ;
- « La réglementation patronale de l’entreprise », Dr. soc. 1992, p. 215 ; - « Les salariés ne sont pas à vendre (en finir avec l’envers de l’article L. 122-12 alinéa 2) »,
Dr. soc. 2006, p. 264. STRUILLOU Y., « Droit du travail-droit public : des interactions aux effets paradoxaux », in 13 paradoxes du droit du travail, sous la direction de P. WAQUET, supplément n° 508 du 10 oct. 2011 de la Semaine sociale Lamy. SYMCHOWICZ N., « La notion de délégation de service public, critiques des fondements de la jurisprudence Préfet des Bouches-du-Rhône », AJDA 1998, p. 195. TERNEYRE P., « Conventions pour la mutualisation de certains services et biens entre collectivités territoriales et leurs regroupements », BJCP n°74, 2011, p. 77. TEYSSIE B., « Les restructurations : le rôle du comité d'entreprise », Dr. soc. n° spécial janv. 1989, p. 23.
TRUCHET D., « Unité et diversité des « grands principes » du service public », AJDA 1997, n° spécial, p. 38. VERICEL M., « Sur le pouvoir normateur de l’employeur », Dr. soc. 1991, p. 120 ;
- « La loi du 13 févr. 2008 et la nouvelle réforme de l'organisation du service de l'emploi », Dr. soc. 2008, p. 406 ;
353
WILLMANN C., « Fusion ANPE-UNEDIC et nouveaux droits et devoirs du demandeur d'emploi : deux lois pour une même logique », JCP S 2008, p. 1475.
*
21"2/!'#1"'**
BERGEAL C., concl. sur CE, 2 juillet 1999, SA Bouygues, CJEG 1999, p. 357.
BERGEAL C., concl. sur CE, 16 octobre 2000, Compagnie méditerranéenne d’exploitation des services d’eau, req. n° 212054, BJCP 2001, p.105.
BERGEAL C., concl. sur CE Avis, 8 novembre 2000, Société Jean-Louis Bernard Consultants, RFDA 2001 p. 112.
- concl. sur CE, 2 juillet 1999, SA Bouygues, CJEG 1999, p. 357, BJCP 1999, n° 7, p. 620.
BERNARD M., concl. sur CE Sect., 20 mars 1959, Lauthier, Rec. p. 198, RDP 1959, p. 770.
BOISSARD S. concl. sur CE Ass., 29 juin 2001, Berton c/ SNCF, req. n°222600, Rec. p. 296 , AJDA 2001, p. 651, chron. GUYOMAR et COLLIN ; Dr. soc. 2001, p. 948.
BRAIBANT G., concl. sur CE, 15 décembre 1967, Level, Rec. p. 501, AJDA 1968, II, p. 230 ; - concl. sur CE, 29 avril 1970, Société Unipain, Rec., p. 280 ; AJDA 1970, p. 340 ; RDP 1970,
p. 423, note M. WALINE.
CASAS D., concl. sur CE Ass., 31 mai 2006, Ordre des avocats du barreau de Paris, req. n°275531, Rec., p. 272 ; CJEG 2006, p. 430, AJDA 2006, p. 1584, chron. LANDAIS et LENICA.
CASAS D., concl. sur CE, 20 octobre 2006, Commune d’Andeville, req. n° 289234, JCP A 2006 p.1301, note F. LINDITCH ; AJDA 2006, p. 2340.
CHARDEAU J., concl. sur CE sect., 4 juin 1954, Affortit et Vingtain, Rec. p. 342, AJDA 1954.II.6
bis, chron. GAZIER et LONG*; *
CHAUVY Y., concl. sur Cass soc. 10 juillet 1995, M. Lazareff c/ Commune de Soulac-sur-Mer, RFDA 1997, p.403.
COSMAS G., concl. sur CJCE, 19 septembre 1995, Ryggard, aff. C-48/94, Rec. p. I-2745, point n°14, JCP 1995, p. 1270.
DACOSTA B., concl. sur CE, 4 mai 2011, Commune de Larmor Plage, req. n°338677.
DANDELOT M., concl. sur CE Sect., 12 octobre 1984, Chambre syndicale des agents généraux d’assurances des Hautes-Pyrénées, RFDA 1985, p. 13.
354
DAVESNE S., concl. sur CAA Versailles, 19 février 2009, n° 07VE01097, Syndicat FO personnel territorial agglomération Val-de-Seine, JCP A 2009 n° 4, obs. S. MANSON, p. 2212, BJCL 2009, n° 7, p. 460.
DUPLAT J., concl. sur Cass soc., 29 mai 2001, RJS 2001, n° 1160, p. 755.
GENEVOIS B., concl. sur CE Sect., 25 mai 1979, Rabut, req. n°6436, Rec. p. 231.
GLASER E., concl. sur l’arrêt CE Sect., 22 octobre 2004, M. Lamblin, req. n°245154, BJCL n°1/05, p. 37.
QUESTIAUX N., concl. sur CE, 1er mars 1968, Syndicat unifié des techniciens de la RTF, req. n°64975 et 64976, Dr. soc. 1966, n° 33.
LEGAL H., concl. sur CE Sect., 26 juillet 1991, Commune Sainte-Marie de la Réunion, Rec. p. 302, RFDA 1991, p. 966, AJDA 1991, p. 693.
MARTIN P., concl. sur TC, 25 mars 1996, Préfet de la Région Rhône-Alpes, dit Berkani, Rec. p. 535 ; RFDA 1996, p. 819.
MASSOT J., concl. sur CE Sect., 18 mars 1977, CCI La Rochelle, Rec. p. 153.
MATTER P., concl. sur TC, 22 janvier 1921, Société commerciale de l’Ouest Africain dit Bac d’Eloka, D. 1921, III, p. 1, GAJA n°37.
MAUGÜE C., concl. sur CE, 27 mars 1996, req. n°155790, Dr. soc. 1996, p. 938 ; - concl. sur CE, 27 mars 1996, req. n°155790, Dr. soc. 1996, p. 938.
RIGAUD J., concl. sur CE Ass., 29 janvier 1965, L'Herbier, req. n° 56015, Rec. p. 60, AJDA 1965, p. 103.
RIVET C.-R., concl. sur CE, 26 janvier 1923, De Robert Lafreygère, req. n° 62529, Rec. 1923, p. 67, RDP 1923, p. 224.
ROUL A.-F., concl. sur CE, 25 juillet 2001, Mme de Bosson, req. n° 206907, AJFP 2002, p.45.
SAINTE-ROSE J.-L., concl. sur TC, 15 mars 1999, Faulcon, Rec. p. 442, Dr. soc. 1999.673.
SAINTE-ROSE J.-L., concl. sur Cass. Ass. Plén., 20 décembre 1996, Rey-Herme c/ Assoc. Alliance française, pourvoi n°92-40641, Bull. civ. I, n° 10, Dr. Soc. 1997, p. 717.
SENERS F., concl. sur CE, 6 avril 2007, Commune d’Aix en Provence, req. n°284736, BJCP 2007, n°53, p. 283, concl., AJDA 2007, p. 1020.
355
STAHL J.-H., concl. sur CE, 30 octobre 1998, Ville de Lisieux, req. n° 149662, Rec. p. 375, RFDA 1999, p. 128.
STAHL J.-H., concl. sur CE Sect., 30 avril 2003, Syndicat professionnel des exploitants indépendants des réseaux d’eau et d’assainissement, Rec. p. 189, RJS 8-9/03, n°1043.
STAHL J.-H., concl. sur CE 16 juin 2004, Mutuelle générale des services publics, Rec. p. 611, AJDA 2004. 1508, obs. N. CHARBIT ; BJCP 2004 p. 367.
VEROT C., concl. sur CE Sect., 22 février 2007, Association du personnel relevant des établissements pour inadaptés dit APREI, req. n° 264541, Rec. p. 92, AJDA 2007, p. 793.
"1(%'H*2O&1"#Q!%'*%(*21DD%"(-#&%'*
ANTOINE A., « Droit social, droit de la concurrence et juge administratif, à propos de la décision du Conseil d’Etat du 21 mai 2008, Société nouvelle du remorquage du Havre », AJDA 2008, p. 1689. ANTONMATEI P.-H., chron. sous Cass. soc., 18 juillet 2000, Semaine sociale Lamy 25 septembre 2000, n° 996, p. 7 ;
- note sous CJCE, 26 septembre 2000, Didier Mayeur et Association promotion de l’information messine (APIM), aff. C-175/99, Rec. CJCE I-7755 ; RJS I/0I n°138, 1er décembre 2000, n°12.
BAZEX M., note sous l’arrêt Cass soc., 10 juillet 1995, Compagnies des eaux et de l’Ozone, AJDA 1996, p. 396. BAZEX M. et BLAZY S., comm. sous CE Sect., 30 avril 2003, Syndicat professionnel des exploitants indépendants des réseaux d’eau et d’assainissement, Dr. adm. 2003, comm. 123. BEAL S., note sous l’arrêt Cass soc., 10 avril 2008, pourvoi n° 06-45.839, Libouton c/ Janvier et a., « Application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail (ex L. 122-12) », JCP E n° 28, 10 juillet 2008, p. 1953. BIENVENUE R., note sous CE, 25 octobre 1929, Portebois, Rec. p. 950, DP 1929, III, 57. BLAISE H., note sous Cass soc., 30 juin 1983, Dr. soc. 1984, p. 99. BOUBLI B., chron. sous Cass. soc., 18 juillet 2000, Semaine sociale Lamy 31 juillet 2000, n° 992, p. 5.
CONNIL D., « Vice de procédure et annulation : l'office du juge administratif se précise », JCP G 2012, p. 907, note sous CE Ass., 23 décembre 2011, Danthony, req. n°355033, à paraître au Recueil. CHORIN J., « Les conséquences pour les personnels d'une fusion-absorption entre une entreprise dotée d'un statut réglementaire du personnel et une entreprise sous convention collective », note sous l’arrêt Cass, soc., 17 mai 2005, Syndicat Sud Aérien SNPNC et UGICT-CGT c. Air-France, LPA n°21, 30 janvier 2006, p. 7. COMBARNOUS M. et GALABERT J.-M., chron. sous CE Sect., 20 mars 1959, Lauthier, Rec. p. 198, AJDA 1959, I, p. 68 ;
356
- note sous CE, 2 mai 1959, Dr. soc. 1959, p. 553, AJDA 1959, p. 177.
COUTURIER G., note sous Cass. soc., 18 juillet 2000, Dr. soc. 2000, p. 845.
CREVEL S., note sous Cass soc., 14 janvier 2003, Commune de Théoule-sur-mer , D. 2003, p. 311 ; JCP A 2003, n° 1238. DAUXERRE L., veille sous l’arrêt Cass soc., 3 mars 2010, n° 08-41.600 et n° 08-44.120, SA Collectes valorisation énergie déchets (Coved) et a. c/ Helbert et a., « Transfert conventionnel du contrat de travail d'un salarié protégé : nécessité de recueillir son accord exprès et absence de contrôle de l'inspecteur du travail », JCP S n° 11, 16 Mars 2010, act. 145. DEBORD F., note sous Cass. soc., 11 mai 2011, « France Télécom : application cumulée à une même relation de travail d'un statut de fonctionnaire et du code du travail... suite » , RDT 2011 p. 496. DECOCQ G., « Abus de position dominante à l'occasion d'un appel d'offres », CCC n° 8, Août 2006, comm. 163. DELACOUR E., obs. sous CE, 27 novembre 2002, SICAE de la région de Péronne et SICAE du secteur de Roisel, req. n° 246764, C. et MP. 2003, comm. 33. DELELIS P., obs. sous CE, 1er octobre 2001, Régie autonome sports et loisirs, C. et MP. 2002, comm. 245 ;
- obs. sous CE, 29 juillet 1998, Garde des Sceaux, min. justice c/ Sté Genicorp, Dr. adm. 1998, comm. n° 304.
DONNAT F. et CASAS D., chron. sous CE Sect., 30 avril 2003, Syndicat professionnel des exploitants indépendants des réseaux d’eau et d’assainissement, Rec. p. 189; AJDA 2003, p. 1150 ;
- chron.* sous TC, 19 janvier 2004, Devun et autres c./ Commune de Saint-Chamond, req. n°3393, p. 509, AJDA 2004, p. 432.
DREYFUS J.-D., note sous CE Avis, 29 juillet 2002, Société MAJ Blanchisseries de Pantin, Rec. p. 297, AJDA 2002, p. 755. DUFAU J., note sous CE, 8 mars 1957, Jalenques de Labeau, Rec. p. 158, D. 1957, jurispr. p. 378, JCP G 1958, II, 1987. ECKERT G., note sous CE, 7 novembre 2008, Département de la Vendée, req. n° 291794, C. et MP. 2008, comm. 296. ESCANDE-VARNIOL M.C., note sous Cass soc., 2 avril 1998, D.1999 IR 33. FABRE A., note sous l’arrêt Cass. soc. 2 décembre 2009, n° 08-43.722, Bull. civ., V, n° 273, « Contre qui le salarié peut-il agir en cas d'obstacle au transfert conventionnel de son contrat de travail ? », RDT 2010, p. 166. FRYDMAN P. et SAULNIER-CASSIA E., « Cour administrative d’appel de Versailles – décisions de février à juin 2009 », JCP A 2009, p. 2212. GLASER E., note sous CE, 4 avril 2005, Commune de Reichshoffen, req. n°258543, Dr. adm. 2005 n°6, comm. n°91 ;
- note sous CE, 21 mai 2007, M. M, req. n°299307, « Dans quelle position l'agent illégalement évincé doit-il être réintégré ? », Dr. adm. n° 10, Octobre 2007, comm. 137.
357
GUYOMAR M. et COLLIN P., chron. sous CE Ass., 29 juin 2001, Berton c/ SNCF, req. n°222600, Rec. p. 296, AJDA 2001, p. 651. HAUTEFORT M., note sous Cass soc. 1er juin 2010, pourvoi n°09-40.679, Bull. Civ. V, n° 120, Sem. Soc. Lamy, 28 juin 2010, n°1452. KERBOUC’H J.-Y., note sous Cass. soc., 17 décembre 2008, pourvoi n° 07-42.839, F-D, Desvages c/ SA HFP Phenix, « Effet d'un transfert partiel d'activités sur les mandats du salarié protégé », JCP S n° 11, 10 Mars 2009, p. 1117. LACHAUME J.-F., note sous TC, 25 mars 1996, Préfet de la Région Rhône-Alpes, dit Berkani, Rec. p. 535, CJEG 1997, p. 35 ;
- note sous Cass. Ass . Plén., 20 décembre 1996, Rey-Herme c. Association l’Alliance Française, Dr. Soc. 1997, p. 717.
LANDAIS C. et LENICA F., chron. sous CE Ass., 31 mai 2006, Ordre des avocats du barreau de Paris, req. n°275531, Rec., p. 272, AJDA 2006, p. 1584 ;
- chron. sous CE, 29 octobre 2004, M. Sueur et a., Rec. p. 392 ; AJDA 2004, p. 2384.
LAUBADERE (de) A., note sous CE Sect., 20 mars 1959, Lauthier, Rec. p. 198 D. 1960, jurispr. p. 280.
LE CHATELIER G., note sous CE, 14 mai 2003, CCI Nîmes Uzès Bagnols Le Vigan, req. n° 245628, Dr. adm, juillet 2003, p.17. LECLERC J.-P., note sous CE Sect., 15 décembre 1967, Level, Rec. p. 501, D. 1968, jurispr. p. 387. LINDITCH F., note sous CE, 20 octobre 2006, Commune d’Andeville, req. n° 289234, JCP A 2006 p.1301 ;
- chron. sous CC., 26 juin 2003, décision n° 2003-473 DC, AJDA 2003, p. 1391, note J.-E. SCHOETTL, « Les Partenariats public-privé devant le Conseil constitutionnel », Contrats-Marchés publ. 2003, chron. 18.
LLORENS F. et SOLER-COUTEAUX P., obs. sous CE, 29 juillet 1998, Garde des Sceaux, min. justice c/ Sté Genicorp, RDI 1999, n° 1. LOMBARD M., NICINSKI S. et GLASER E., étude sous Cons. const. 5 août 2011, Société Somodia [Interdiction du travail le dimanche en Alsace-Moselle], n° 2011-157 QPC, AJDA 2011, p. 1590. LYON – CAEN A., note sous Cass. ass. plén., 16 mars 1990, pourvois n° 85-44.518 et 86-40.686, Bull. civ. ass. plén. 1990, n° 3 et 4., D. 1990, jurispr. p. 305, MAGINA X., note sous CE, 24 février 2011, req. n° 335453, « Le statut protecteur du fonctionnaire représentant du personnel à France Télécom », Semaine sociale Lamy, 12 septembre 2011, p. 197. MALAURIE-VIGNAL M., « Avenant à un contrat de travail comportant des clauses drastiques destinées à entraver le bon fonctionnement de la concurrence lors d'un appel d'offres », CCC n° 11, novembre 2006, comm. 236. MANSON S., obs. sous CAA Versailles, 19 février 2009, n° 07VE01097, Syndicat FO personnel territorial agglomération Val-de-Seine, JCP A 2009 n° 4, p. 2212.
358
MAUGUE C. et SCHWARTZ R., chron. sous CE Sect., 26 juillet 1991, Commune Sainte-Marie de la Réunion, Rec. p. 302, RFDA 1991, p. 966, concl. H. LEGAL, AJDA 1991, p. 693. MAZEAUD A., note sous Cass soc.,7 juillet 1998, Mutuelle générale de l’éducation nationale c/ CPAM de Paris et autres, pourvoi n°96-21451, Dr . soc. 1998, p. 948 ;
- note sous TC, 19 janvier 2004, Devun et autres c./ Commune de Saint-Chamond, req. n°3393, p. 509,*Dr. soc. 2004, p. 433.
- obs. sous Cass soc., 13 décembre 1995, Dr. soc. 1996, p. 429 ; - note sous Cass soc., 8 avril 2009, Dr. soc. 2009, p. 813.
MAZIERES A., « Succession de délégataires de service public et article L.122-12 du code du travail : rencontre ou coexistence ? », note sous les arrêts : Cass soc. 9 novembre 2005, Société Rémy Loisirs c/ M. Caillet, pourvoi n°03-47.188 et TA Clermont-Ferrand, 9 mars 2006, M. Lassri et autres, req. n°0401747, AJDA 2006, p. 1230 MELLERAY F., « Précisions sur la neutralisation de certains vices de procédure », Dr. adm. 2012, comm. n°22, note sous CE Ass., 23 décembre 2011, Danthony, req. n°355033, à paraître au Recueil. MENEMENIS A., obs. sous CE, 5 octobre 2007, Société UGC-Ciné-Cité, req. n° 298773, Rec. p. 418, Dr. adm. 2007, n°165 ;
- CC., 26 juin 2003, décision n° 2003-473 DC, Dr. Adm. 2003, comm. 188 et 191. MOREAU D., note sous CE, 3 décembre 2003, Houte, JCP A 2004, p. 1146 ;
- note sous CE, 5 octobre 2007, Société UGC-Ciné-Cité, req. n° 298773, Rec. p. 418, RJEP avril 2008, p. 27.
MORVAN P., comm. sous l’arrêt Cass soc., 18 novembre 2009, n° 08-43.397 et n° 08-43.398, FS-P+B, SAS Open Cascade c/ Nobre et a. « Transfert d'entreprise et information individuelle des salariés », JCP S n° 5, 2 Février 2010, p. 1047 ;
- note sous Cass soc., 8 avril 2009, JCP S 2009, p. 1339. MOUDOUDOU P., note sous TC, 25 mars 1996, Préfet de la Région Rhône-Alpes, dit Berkani, Rec. p. 535, JCP G 1996, II, 22664 NEAU-LEDUC C., étude sous Conseil de la Concurrence, décision n°06-MC-02, 27 juin 2006 relative à une demande de mesures conservatoires présentée par la Commune de Bouc Bel Air, « Contrats de travail et pratiques anticoncurrentielles : liaisons dangereuses », Revue Lamy concurrence 2006 n°9, p. 23 ;
- « Fusion GDF-Suez : rôle renforcé du comité d'entreprise européen », note sous Cass. soc., 16 janvier 2008, pourvoi n°07-10.597, CEE contre GDF, BMIS 2008, p. 562.
NICINSKI S.et GLASER E., étude sous CE sect. 3 déc. 2010, Ville de Paris c. Association Paris Jean-Bouin, req. n° 338272, AJDA 2010 p. 2343 et 2011 p.18 ;
- étude sous CE 5 juill. 2010, Syndicat national des agences de voyages, req. n° 308564, AJDA 2011, p. 18.
NOGUELLOU R., « Remise du Livre blanc sur l'avenir de la fonction publique », Dr. adm. 2008, alerte 37 ;
- « L’emploi public en France », Dr. adm. 2011, alerte 22 ; - « Modification substantielle du marché et substitution de cocontractant », RDI 2008, p. 501,
note sous CJCE, 19 juin 2008, Pressetext Nachrichtenagentur GmbH, affaire C-454/06. PECAUT-RIVOLIER L., « Chronique annuelle de droit du travail », RJEP n°675, mai 2010, chron. 2.
359
PELISSIER G., comm. sous TC, 29 décembre 2004, Mme Durand c./ Centre hospitalier régional de Metz-Thionville, Rec. p. 524, Coll. Terr. Interco. 2005, n°3, commentaire n°44. PHILIBERT A., obs. sous Cass. soc., 10 juillet 1996, Bull. civ. V, n° 278, RJS 1996, n° 900. PLANCKE M. et CHRISTIANY D., obs. sous CAA Versailles, 19 février 2009, n° 07VE01097, Syndicat FO personnel territorial agglomération Val-de-Seine, JCP A 2010, p. 2000, n° 13. POCHET P., note sous CJCE, 19 novembre 1992, aff. C 209/91, Rec. CJCE 1992, p. 5755, JCP E. 1993 II p. 426. PRETOT X., obs. sous TC, 25 mars 1996, Préfet de la Région Rhône-Alpes, dit Berkani, Rec. p. 535, Dr. soc. 1996, p. 735. PRETOT X. et CHELLE D., note sous CE Sect., 30 avril 2003, Syndicat professionnel des exploitants indépendants des réseaux d’eau et d’assainissement, Rec. p. 189, D. 2004 SC. P. 1702. PUGEAULT S., « L’application de l’article L.122-12 du code du travail aux services publics administratifs », AJDA 2002, p. 695, note sous l’arrêt Cass soc., 25 juin 2002, Association pour la garantie des salaires (AGS) de Paris et autre c/ M. Hamon et autres, pourvoi n°01-43.467 et 01-43.477 à 01-43.499. RICHER L., obs. sous TC, 20 janvier 1986, SA Roblot, Rec. p. 298, AJDA 1986, p. 267 ;
- note sous Cass soc. 12 juin 1986, Contrats publics 2003, n°24, p.71. - note sous CE, 7 novembre 2008, Département de la Vendée, req. n° 291794, AJDA 2008,
p. 2454. ROUAULT M.-C., note sous CE Sect., 6 janvier 1995, Ville Paris, Rec. p. 3, JCP G 1995, IV, p. 104 ;
- note sous CE Sect., 6 janvier 1995, Synd. nat. personnels techniques administratifs et service équipement CGCT, Rec. p. 5, JCP G 1995, IV, p. 9 ;
- obs. sur CE, 11 mars 1998, Préfecture des Pyrénées-Orientales, Rec. p. 73 ; JCP G 1998, 2582.
- note sous TC, 19 janvier 2004, Devun et autres c./ Commune de Saint-Chamond, req. n°3393, p. 509, JCP. A. 2004, p. 1238.
SAINT-JOURS Y., note sous TC, 25 mars 1996, Préfet de la Région Rhône-Alpes, dit Berkani, Rec. p. 535, D. 1996, jurispr. p. 598 ;
- note sous Cass. soc., 8 octobre 1987, Raquin et Trappiez, Bull. civ. V, n° 451 ; D. 1988, jurispr. p. 58
- note sous Cass. Ass . Plén., 20 décembre 1996, Rey-Herme c. Association l’Alliance Française, D. 1997, p. 275.
SALON S., note sous Cass. Ass. Plén., 20 décembre 1996, Rey-Herme c/ Assoc. Alliance française, pourvoi n°92-40641, Bull. civ. I, n° 10, AJDA 1997, p. 304.
SAVATIER J., obs. sous Cass soc., 16 janvier 1974, Bull. Civ. V, n° 41, Dr. soc. 1974, p. 475 ; - note sous Cass. soc., 8 octobre 1987, Raquin et Trappiez, Bull. civ. V, n° 451, Dr. soc. 1988,
p. 140.
SCHOETTL J.-E., note sous CC., 26 juin 2003, décision n° 2003-473 DC, AJDA 2003, p. 1391. SCHRAMEK O., comm. sous CC., 23 juillet 1996, décision n° 96-380 DC, Loi relative à l'entreprise France Télécom, AJDA 996, p. 692.
360
SCHWARTZ R., obs. sous TA Toulouse, 11 juillet 2002, Société méridionale des eaux c./ Commune de Balma, BJCP 2003, p. 36. STAHL J.-H., et CHAUVAUX D., chron. sous TC, 25 mars 1996, Préfet de la Région Rhône-Alpes, dit Berkani, Rec. p. 535, AJDA 1996, p. 354. TCHEN V., note sous CE Ass., 26 octobre 2011, Association pour la promotion de l'image et a., req. n° 317827, 317952, 318013 et 318051, Rec. 2012, n°4, « La base de données du passeport biométrique », Dr. adm. n° 1, janvier 2012, comm. 1. TEYSSIE B., obs. sous Cass soc. 7 février 1980, Bull. civ. V, n°115, JCP CI 1980, I, 8846, n°12 ;
- chron. sous Cass soc., 7 février 1980, pourvoi n°78-41168 ; Cass soc., 7 février 1980, pourvoi 78-41172, Bull. Civ. V, n°115, JCP 1980 I p. 8846, chron. n°12.
TOUZEIL-DIVINA M., « Extension de la convention collective nationale de Pôle Emploi : validation sans réserve », JCP A 2012, actualité 45, veille sous CE, 30 décembre 2011, SNU-TEFI et CGT-FNPOS, req. n° 338903.
WALINE M., note sous CE, 29 avril 1970, Société Unipain, Rec. p. 280, RDP 1970, p. 1423.
WAQUET Ph., chron. sous Cass. soc., 18 juillet 2000, Semaine sociale Lamy 16 oct. 2000, n° 999, p. 7 ;
- note sous Cass. soc., 28 novembre 2007, pourvoi n° 06-42.379, « Transfert conventionnel du personnel et représentants des salariés », RTD 2008 p. 176.
361
P-'2#2!/%'**
AUBIN E., « Caractères généraux et tendances actuelles de la fonction publique territoriale », Rép. Dalloz, n°87, 2006.
B. BOSSU, « Elections professionnelles – champ d’application », J.Cl. Travail Traité, Fasc. 13-10.
BRISSON J.-F., « La loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 portant réforme territoriale ou le droit des collectivités territoriales en miettes, J.-Cl. Adm., Fasc. 116-50.
CARIUS M., « Agents non titulaires de l’état – Conditions et intégration », J.Cl. Fonct. Pub., Fasc. 320.
CAVAILLER A. et GALIEZ V., « Carrière des fonctionnaires (FPT) », J.-Cl. Fonct. Pub., Fasc. 380.
CHAUCHARD J-P., « Conventions et accords collectifs de travail, régime juridique : conclusion, application, sanctions », Rép. Dalloz, avril 1997
DACOSTA B., CE, 4 mai 2011, Commune de Larmor Plage, req. n°338677, aimablement communiquées par leur auteur.
DEBOUY C., « Communautés de communes – moyens », J.-Cl. Coll. terr. – Intercommunalité,
Fasc. 256R
ECKERT G., « Notion et choix du contrat », J.-Cl. Contrats et Marchés Publics, Fasc. 400.
FIALAIRE J., « Fonction publique - Positions, temps de travail, congés », J.-Cl. Adm., Fasc. 181-5.
HAÏM V., « Marchés fractionnés – Marchés à bons de commande », J.-Cl. Contrats et Marchés Publics, Fasc. 67-10.
JEAN-PIERRE D., « DIALOGUE SOCIAL - Modifications des institutions des fonctions publiques relatives au dialogue social - Nouvelle institutionnalisation du dialogue social », J.-Cl. Fonc. Pub., Fasc. 18, n°24
KERBOURC'H J.-Y., « Protection. – Domaine d'application », J.-Cl. Travail Traité, Fasc. n°15-94.
KRUST D., « Le personnel des collectivités locales : Les agents contractuels - La résorption de l'emploi précaire », Rép. Dalloz, 2007.
LACHAUME J.-F., « Régie », J.-Cl. administratif, Fasc. 126-10.
MORVAN P., « TRANSFERT D'ENTREPRISE – Conditions d'application », J. Cl. Travail Traité, Fasc. 19-50.
MORVAN P., « Transfert d’entreprise – Effets. Relations individuelles », J.Cl. Travail Traité, Fasc. 19-54.
PAULIAT H., « Carrière des fonctionnaires », J.-Cl. Fonct. pub., Fasc. 250.
362
REISCHL J., concl. sur l’arrêt CJCE, 6 juillet 1982, aff. C-188 et 190/80, Rép. française c/ Comm., Rec. CJCE p. 2545.
ROUSSELLE P., « Fonction publique territoriale - Recrutement et carrière des agents », J.-Cl. Fonction publique, Fasc. 195.
TAILLEFAIT A., « RECRUTEMENT ET CESSATION DES FONCTIONS - Cessation des fonctions », J.-Cl. Fonct. Pub., Fasc. 240.
TAILLEFAIT A., « SERVICES POSTAUX - La Poste, prestataire du service universel - Statut et organisation - Statut du personnel », J.-Cl. Adm., Fasc. 151.
TEYSSIE B., « Union Européenne. – Extinction des relations de travail », J.-Cl. Europe Traité, fasc. 610.
THOMAS-TUAL B., « Agents publics – sortie de service », J.-Cl. Adm., Fasc. n°191.
VERPAUX M., « Principes d’organisations administratives », J.- Cl. Coll. Terr., Fasc. 10.
* *
363
(@B;:?*9:?*<@56aE:?*
#45E397A5634*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Uc!*#R*/:*AG@<=*9:*;08579:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*UW!
*-*S*/@*435634*90@A56>658*=7B;6C7:*T*;:*;6:4*@>:A*74:*=:E?344:*=7B;6C7:*RRRRRRRRRRRRRRRRRR*UW!! L\!$:G9D?8E>87.!GB77B:E7!A8!78<QB>8!9;C=B>7!8?!@>?BQB?D7!A87!98<7:EE87!!! 9;C=BF;87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LH!
@R! $:G9D?8E>87!8?!@>?BQB?D7!A87!98<7:EE87!9;C=BF;87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!L`!CR! #>?BQB?D7!A8!78<QB>8!9;C=B>!8?!@>?BQB?D7!A87!98<7:EE87!9;C=BF;87!RRRRRRRRRRRRRR!Lb!
! H\!#>?BQB?D7!A87!98<7:EE87!9;C=BF;87!8?!A<:B?!A8!=@!>:E>;<<8E>8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lc!! `\!#>?BQB?D7!<8=8Q@E?!8?!@G8ED87!_!<8=8Q8<!A/;E8!98<7:EE8!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRR!LI!N*S*/@*435634*908>3;75634*90@A56>658*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Uh!! L\!%E8!@>>89?B:E!@;S!>:E?:;<7!9<D>B7DG8E?!ADNBEB7!9@<!=8!A<:B?!7:>B@=!RRRRRRRRRRRR!Ld!! H\!M<:9:7B?B:E!A/;E8!@>>89?B:E!=@<Y8!8E!A<:B?!9;C=B>!D>:E:GBF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HL!
2*S*/@*435634*9:*A345647658*9:*;0:<=;36*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*WX*! L\!&@!NBE@=B?D!9<:?8>?<B>8!A87!AB79:7B?BN7!=DY@;S!A8!<D7:=;?B:E!A;!7:<?!A87!!! 98<7:EE8=7!8E!A<:B?!9<BQD!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hb!! H\!&87!A8;S!QB7@Y87!A87!98<7:EE8=7!>:E>8<ED7!9@<!=87!DQ:=;?B:E7!A/@>?BQB?D7!!! 9;C=BF;87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!He!
@R! 3@=@<BD7!A8!A<:B?!9<BQD!8?!@>?BQB?D7!9;C=BF;87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!He!CR! #Y8E?7!9;C=B>7!8?!@>?BQB?D7!9;C=BF;87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hf!
*##R*/06458E]5*9:*;08579:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wh!
*-* S* /@* E8A7EE:4A:* 9:?* 8>3;75634?* 9@4?* ;03E\@46?@5634* :5* ;@* \:?5634* 9:?* @A56>658?*=7B;6C7:?*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wh!! L\!)8!=/8NN8?!A;!=BC<8!>5:BS!A87!G:A87!A8!Y87?B:E!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`K!! H\!)8!=@!N@>;=?D!A;!9:;Q:B<!9:=B?BF;8!A8!9<:>DA8<!_!A87!<DN:<G87!A@E7!!! =/:<Y@EB7@?B:E!8?!=@!Y87?B:E!A87!GB77B:E7!F;B!=;B!BE>:GC8E?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`H!! `\!)8!=/BEN=;8E>8!A;!A<:B?!A8!=@!>:E>;<<8E>8!7;<!=87!@>?BQB?D7!9;C=BF;87!RRRRRRRRRR!`H!! b\!)8!=@!<D:<Y@EB7@?B:E!9<:N:EA8!A87!BE7?B?;?B:E7!@AGBEB7?<@?BQ87!N<@E]@B787!R!`b!N*S*/0:4`:7*9:*;@*96<:4?634*?3A6@;:*9:?*8>3;75634?*9@4?*;03E\@46?@5634*:5*;@*\:?5634*9:?*@A56>658?*=7B;6C7:?*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Xm!! L\!%E!@798>?!N:EA@G8E?@=!A8!=@!<D;77B?8!A8!?:;?8!DQ:=;?B:E!A/@>?BQB?D!9;C=BF;8!! !RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`e!! H\!%E8!>:EN<:E?@?B:E!9:?8E?B8==8!A87!BG9D<@?BN7!9<:?8>?8;<7!A87!?<@E7N8<?7!A8!!! 98<7:EE8=!@;!A<:B?!A8!=@!>:E>;<<8E>8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`c!
*###R*/03B`:5*9:*;08579:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Xl!
******
364
**,@E56:*#*/:* [349:<:45* `7E696C7:* =:E<:55@45* 90@??7E:E* ;@* A345647658* 9:* ;0:<=;36* :4*A@?*908>3;75634*9074:*@A56>658*=7B;6C7:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Xh*
*2G@=65E:*U*S*/:*[349:<:45*`7E696C7:*=:E<:55@45*90@??7E:E*;@*A345647658*9:*;0:<=;36*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=E6>8*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*̂ U!
*':A5634*U*S*/:* 5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=E6>8*?7E* ;@*B@?:*9p74* [349:<:45*;8\@;*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*^X!
*,@E@\E@=G:*UR* /0@==;6A@B6;658*9:?*96?=3?65634?* ;8\@;:?*9:* 5E@4?[:E5* @7Z* ?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8*@[[:A58?*Y*74:*@A56>658*=7B;6C7:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*^^!#! P! &@! <89<B78! A87! 98<7:EE8=7! A8! A<:B?! 9<BQD! 9@<! ;E! :9D<@?8;<! D>:E:GBF;8! 9;C=B>! :;!9<BQD!a!;E8!@99=B>@?B:E!A8!9<BE>B98!A87!9=;7!>=@77BF;87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!bb!
! L\!&/BEABNND<8E>8!A8!=@!E@?;<8!9;C=BF;8!A8!=/@>?BQB?D!7;<!=/@99=B>@CB=B?D!A;!!! AB79:7B?BN!=DY@=!@;S!?<@E7N8<?7!A8!7@=@<BD!A8!A<:B?!9<BQD!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!bb!! H\!&/BEABNND<8E>8!A8!=@!E@?;<8!J;<BABF;8!A8!=/:9D<@?8;<!D>:E:GBF;8!<89<8E@E?!!! =/@>?BQB?D!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!bI!
T!P!&@!<89<B78!A87!98<7:EE8=7!A8!A<:B?!9<BQD!9@<! =@!98<7:EE8!9;C=BF;8!a!;E8!@99=B>@?B:E!A8Q8E;8!>=@77BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!eL!
! L\!&@!<89<B78!8E!<DYB8!A/;E!78<QB>8!9;C=B>!BEA;7?<B8=!8?!>:GG8<>B@=!9@<!;E8!!! 98<7:EE8!9;C=BF;8!a!;E8!:C=BY@?B:E!A8!?<@E7N8<?!A89;B7! =:EY?8G97!@AGB78!9@<!
=87!J;<BAB>?B:E7!A87!A8;S!:<A<87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!eH!! H\!&@!<89<B78!8E!<DYB8!A/;E!78<QB>8!9;C=B>!@AGBEB7?<@?BN!a!;E8!@>>89?@?B:E!9=;7!!! =8E?8!A;!?<@E7N8<?!A87!98<7:EE8=7!A8!A<:B?!9<BQD!Q8<7! =@!7?<;>?;<8!9;C=BF;8!A8!
<89<B78!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!eb!@R! &/BE>:5D<8E>8!A8!=@!7:=;?B:E!BEB?B@=8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!eb!CR! %E8!DQ:=;?B:E!A8!=@!J;<B79<;A8E>8!CB8EQ8E;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!ef!
*,@E@\E@=G:* WR* /0@==;6A@5634* 9:?* 96?=3?65634?* 9:* ;0@E56A;:* /R* UWW^LU* 97* A39:* 97*5E@>@6;*?:;34*;:*<39:*9:*98>3;75634*9:*;0@A56>658*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*bX!#!P!%E8!@99=B>@?B:E!@B7D8!8E!G@?B6<8!A8!>:E?<@?7!A8!AD=DY@?B:E!A8!78<QB>8!9;C=B>!RRRRRRRRR!cb!
! L\!&8!?<@E7N8<?!A/D=DG8E?7!>:<9:<8=7!8?!BE>:<9:<8=7!A@E7!=@!9=;9@<?!A87!!! <8E:;Q8==8G8E?7!A8!AD=DY@?B:E7!A8!78<QB>8!9;C=B>!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!ce!! H\!&@!F;@=BNB>@?B:E!A/@>?BQB?D!D>:E:GBF;8!=/@>?BQB?D!A8!78<QB>8!9;C=B>!>:E7@><D8!!! 9@<!=8!J;Y8!>:GG;E@;?@B<8!8?!E@?B:E@=!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!cc!
T!P!%E8!@99=B>@?B:E!>:E?<@7?D8!8E!G@?B6<8!A8!G@<>5D!9;C=B>!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!cf!! L\!%E8!9<D7:G9?B:E!A/BE@99=B>@?B:E!_!E;@E>8<!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!cI!! H\!%E8!@99=B>@?B:E!>B<>:E7?@E>BD8!78=:E!=@!E@?;<8!A;!G@<>5D!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!fK!
@R! %E8!@99=B>@?B:E!A87!9=;7!<@<87!8E!G@?B6<8!A8!G@<>5D7!9;C=B>7!A8!?<@Q@;SfK!CR! %E8!@99=B>@?B:E!AD>B7BQ8!A@E7!>8<?@BE7!G@<>5D7!9;C=B>7!A8!78<QB>87!RRRRRRRR!fL!
! `\!%E8!@99=B>@?B:E!>B<>:E7?@E>BD8!78=:E!=8!>:E?8S?8!A8!<8>:;<7!@;!G@<>5D!9;C=B>!! !RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!fb!
@R! &@! >:E>=;7B:E! A/;E!G@<>5D! _! =@! 7;B?8! A/;E8! AD>B7B:E! A/8S?8<E@=B7@?B:E! A8!=/@>?BQB?D!9@<!=@!98<7:EE8!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!fb!CR! &8! <8E:;Q8==8G8E?! A/;E! G@<>5D! 9;C=B>! >:ENB@E?! =/8S8<>B>8! A/;E8! @>?BQB?D!9;C=BF;8!_!;E!?B8<7!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!fc!
365
$!P!%E8!@99=B>@?B:E!ABNNB>B=8!A@E7!=8!>@A<8!A87!@;?<87!>:E?<@?7!A8!=@!>:GG@EA8!9;C=BF;8!!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!ff!
! L\!%E8!@99=B>@?B:E!5W9:?5D?BF;8!8E!G@?B6<8!A8!>:E?<@?7!A8!9@<?8E@<B@?!RRRRRRRR!ff!! H\!R!%E8!@99=B>@?B:E!<D7BA;8==8!A@E7!=87!>:E?<@?7!A/:>>;9@?B:E!A;!A:G@BE8!9;C=B>!! !RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!fd!!
':A5634*W*S*/:* 5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=E6>8*?7E* ;@*B@?:*9p74* [349:<:45*A34>:456344:;*37*A345E@A57:;*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*ic!
*,@E@\E@=G:* UR* * +:?* 96?=3?656[?* 96>:E?6[68?* C76* AG:EAG:45* Y* 64?5@7E:E* 74:*@;5:E4@56>:*:[[6A6:45:*@7*96?=3?656[*;8\@;*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*iU!#!P!&87!>:EQ8E?B:E7!>:==8>?BQ87.!;E!:;?B=! <D>;<<8E?!A8!Y87?B:E!A;!?<@E7N8<?!A87!>:E?<@?7!A8!?<@Q@B=!A@E7!=87!G@<>5D7!9;C=B>7!A8!78<QB>8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!IL!
! L\!%E!BE7?<;G8E?!BEAB798E7@C=8!N@>8!_!=@!9<D7:G9?B:E!A/BE@99=B>@CB=B?D!A;!!! AB79:7B?BN!=DY@=!A:E?!7:;NN<8!YDED<@=8G8E?!=87!G@<>5D7!9;C=B>7!A8!78<QB>8!RRRRRR!IH!! H\!%E!BE7?<;G8E?!QB7@E?!_!N@>B=B?8<!=87!?<@E7N8<?7!8E!>@7!A/@99=B>@CB=B?D!A87!!! AB79:7B?B:E7!A8!=/@<?B>=8!&R!LHHbXL!A;!>:A8!A;!?<@Q@B=!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Ib!
T!P!&87!>:EQ8E?B:E7!9@<?B>;=B6<87.!;E!:;?B=!!"#$%&!A8!Y87?B:E!A87!?<@E7N8<?7!A8!98<7:EE8=!A8!A<:B?!9<BQD!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Ic!
! L\!&/@99=B>@?B:E!Q:=:E?@B<8!A8!=/@<?B>=8!&RLHHbXL!A;!>:A8!A;!?<@Q@B=!8E!>:;<7!!! A/8SD>;?B:E! A/;E! >:E?<@?! 9;C=B>! 9@<! =/BE?8<Q8E?B:E! A/;E! @>?8! A8! >877B:E!
A/8E?<89<B78!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Ic!! H\!&/@99=B>@?B:E!Q:=:E?@B<8!A8!=/@<?B>=8!&RLHHbXL!A;!>:A8!A;!?<@Q@B=!=:<7!A8!!! =/@??<BC;?B:E! A/;E! >:E?<@?! 9;C=B>! 9@<! =/BE78<?B:E! A/;E8! >=@;78! 7:>B@=8! A@E7! =87!
A:>;G8E?7!A8!>:E7;=?@?B:E!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!II!@R! &87! A:>;G8E?7! A8! >:E7;=?@?B:E! N:<G;=@E?! ;E! 7BG9=8! <@998=! A87!AB79:7B?B:E7!=DY@=87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!II!CR! &87! A:>;G8E?7! A8! >:E7;=?@?B:E! BE7?@;<@E?! ;E8! QD<B?@C=8! :C=BY@?B:E! A8!?<@E7N8<?!_!=@!>5@<Y8!A;!N;?;<!>:>:E?<@>?@E?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Id!
*,@E@\E@=G:* WR* +:?* 96?=3?656[?* 96>:E?6[68?* 9345* ;@* 4@57E:* A345E@A57:;;:* :?5*A3<<74:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*hU!#! P! )87! AB79:7B?BN7! >:E?<@>?;8=7! 9@<! 8778E>8! AD9:;<Q;7! A/8NN8?! <8=@?BN! _! =/DY@<A! A87!98<7:EE8=7!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!dH!
! L\!!R!&@!E@?;<8!>:E?<@>?;8==8!>:E?87?D8!A87!AB79:7B?BN7!?<@E7=@?BN7!BE7?@;<D7!9@<!=87!!! >:EQ8E?B:E7!>:==8>?BQ87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!dH!! H\!&@!E@?;<8!>:E?<@>?;8==8!9@<N:B7!:;C=BD8!A87!AB79:7B?BN7!?<@E7=@?BN7!BE7?@;<D7!!! 9@<!=87!>:EQ8E?B:E7!9@<?B>;=B6<87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!de!
T!P!)87!AB79:7B?BN7!>:E?<@>?;8=7!9@<!E@?;<8!9:<?8;<7!A8!7:;9=8778!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!de!
*2G@=65E:*W*L*/:*[349:<:45*`7E696C7:*=:E<:55@45*90@??7E:E*;@*A345647658*9:*;0:<=;36*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*hi!
*':A5634* U* S* /:* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =7B;6A* ?7E* 74* [349:<:45* ;8\@;*=E8:Z6?5@45*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*hh!
*,@E@\E@=G:*UR*/064@==;6A@B6;658*9:?*Ea\;:?*A3<<74:?*9:*5E@4?[:E5*9:?*A345E@5?*=3?8:?*=@E*;0@E56A;:*/R*UWW^LU*97*A39:*97*5E@>@6;*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*hh!
366
#!P!&/8S>=;7B:E!A87!@Y8E?7!9;C=B>7!A;!>5@G9!A/@99=B>@?B:E!A8!=/@<?B>=8!&RLHHbXL!A;!!>:A8!A;!?<@Q@B=!8E!A<:B?!BE?8<E8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LKK!
! L\!!&/@C78E>8!A8!=B8E!>:E?<@>?;8=!:;Q<@E?!A<:B?!_!=/@99=B>@?B:E!A;!>:A8!A;!?<@Q@B=!!! 9:;<!=87!@Y8E?7!7?@?;?@B<87!A8!A<:B?!9;C=B>!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LKL!! H\!&/@C78E>8!A8!=B8E!A8!A<:B?!9<BQD!:;Q<@E?!A<:B?!_!=/@99=B>@?B:E!A;!>:A8!A;!!! ?<@Q@B=!9:;<!=87!@Y8E?7!>:E?<@>?;8=7!A8!A<:B?!9;C=B>R!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LK`!
T! P! &/8S>=;7B:E! >:ENB<GD8! A87! @Y8E?7! A8! A<:B?! 9;C=B>! A;! >5@G9! A/@99=B>@?B:E! A87!AB<8>?BQ87!>:GG;E@;?@B<87!a! =@!>:ENB<G@?B:E!!#&%'()!)*%#9@<!=/@<<U?!A8!=@!$O%*!+&!(!,,%'!A;!c!789?8GC<8!HKLL!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LKf!
! L\!%E8!8S>=;7B:E!A87!@Y8E?7!9;C=B>7!J;7?BNBD8!9@<!=/8SB7?8E>8!A8!A<:B?7!!! 79D>BNBF;87!<8>:EE;7!_!>8??8!?W9:=:YB8!A/@Y8E?7!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LKf!! H\!%E8!8S>=;7B:E!A87!5W9:?56787!A8!<D:<Y@EB7@?B:E7!@AGBEB7?<@?BQ87!A;!>5@G9!!! A/@99=B>@?B:E!A8!=@!AB<8>?BQ8!HKKLgH`g$*!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LLK!
*,@E@\E@=G:* WR* * /0@==;6A@B6;658* 9:?* Ea\;:?* A;@??6C7:?* 97* ?5@575* E:;@56>:?* Y* ;@*<3B6;658*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*UUW!#!P!)87!GD>@EB7G87!A8!G:CB=B?D!BE5D<8E?7!_!=@!N:E>?B:E!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LL`!
! L\!)87!AB79:7B?BN7!:<BYBE8==8G8E?!BE7><B?7!A@E7!=8!7?@?;?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LL`!! H\!)87!AB79:7B?BN7!G:A8<EB7D7!9:;<!G8E8<!8NNB>@>8G8E?!=87!<DN:<G87!<D>8E?87!!! 8?!_!Q8EB<!A87!BE7?B?;?B:E7!@AGBEB7?<@?BQ87!N<@E]@B787!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LLe!
@R! %E8!GB78!_!AB79:7B?B:E!!A87!N:E>?B:EE@B<87!>=@B<8G8E?!D?8EA;8!RRRRRRRRRRRR!LLc!CR! %E!AD?@>58G8E?!@77:;9=B!8?!AD9@77D!9@<!=/BE?DY<@?B:E!8?!=/@>>67!AB<8>?!_!=@!N:E>?B:E!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LLf!
T! P! %E! N:EA8G8E?! >8E?<@=! A@E7! A8! E:GC<8;787! 5W9:?56787! A/DQ:=;?B:E7! A/@>?BQB?D7!9;C=BF;87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LLf!
! L\!%E!AB79:7B?BN!h!>=D!i!=:<7!A8!GB78!8E!j;Q<8!A8!=@!AD>8E?<@=B7@?B:E!A8!LdIHLLI!! H\!%E!AB79:7B?BN!9=@>D!@;!>j;<!A8!=@!+2MM!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LHL!! `\!%E!AB79:7B?BN!BEAB798E7@C=8!8E!G@?B6<8!A8!>:GG@EA8!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRR!LHH!*':A5634* W* S* /:* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =7B;6A* ?7E* 74* [349:<:45* ;8\@;*?=8A6[6C7:<:45*@93=58*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*UW^!
*,@E@\E@=G:* U* L* /064?5@7E@5634* Y* ;0@E56A;:* /R* UWW^LXLU* 97* A39:* 97* 5E@>@6;** 9074*96?=3?656[* ?=8A6[6C7:* @7Z* @\:45?* 434* 5657;@6E:?* 9:* 9E365* =7B;6A* E:=E6?* =@E* 74:*=:E?344:*<3E@;:*9:*9E365*=E6>8*37*=@E*74*3E\@46?<:*9:*9E365*=7B;6A*\8E@45*74*',#2*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*UW^!*,@E@\E@=G:* WR* /:* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?H* A3E3;;@6E:* 97* 5E@4?[:E5* 9:*A3<=85:4A:?*9@4?*;:*A@9E:*9:*;0645:EA3<<74@;658*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*UWb!#!P!%E8!ED>877B?D!?@<ABQ8G8E?!98<];8!9@<!=8!=DYB7=@?8;<!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LHf!
! L\!%E!AB79:7B?BN!BEB?B@=8G8E?!G;8?!7;<!=87!F;87?B:E7!7:>B@=87!8EY8EA<D87!9@<!=8!!! ?<@E7N8<?!A8!>:G9D?8E>87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LHI!! H\!%E!?<@E7N8<?!J;7?BNBD!9@<!=@!ED>877B?D!A/:>?<:W8<!=87!G:W8E7!ED>877@B<87!_!!! =/8S8<>B>8!A8!=@!>:G9D?8E>8!?<@E7ND<D8!@;S!*M$-!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!L`K!
T! X!%E!AB79:7B?BN! BE@C:;?B!a! =/@C78E>8! A8! <D>B9<:F;8! 8E! >@7! A8! <8?<@B?! A/;E8! >:==8>?BQB?D!9;C=BF;8!A8!=/*M$-!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!L`H!*,@E@\E@=G:* XR* * /:?* 5E@4?[:E5?* 90@\:45?* =7B;6A?* 96E:A5:<:45* 3E\@46?8?* =@E* ;:*;8\6?;@5:7E* Y* ;03AA@?634* 9:* ;@* =E6>@56?@5634* 97* E8\6<:* `7E696C7:* 9074:* :45658*=7B;6C7:*:4*AG@E\:*9074:*@A56>658*9:*?:E>6A:*=7B;6A*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*UXX!
367
#! P! %E8! BE?8<Q8E?B:E! 79D>BNBF;8! A;! =DYB7=@?8;<! J;7?BNBD8! 9@<! =@! Q:=:E?D! A/@77;<8<! =@!>:E?BE;B?D!9D<8EE8!A;!7?@?;?!A8!N:E>?B:EE@B<8!a!=/8S8G9=8!A8!"<@E>8!'D=D>:G!RRRRRRRRRRRR!L`e!
! L\!%E8!BE?8<Q8E?B:E!<8EA;8!BEAB798E7@C=8!9@<!=8!G@BE?B8E!A;!7?@?;?!A8!!! N:E>?B:EE@B<8!=:<7!A8!=@!><D@?B:E!A8!=/D?@C=B778G8E?!9;C=B>!"<@E>8!'D=D>:G!R!L`c!! H\!%E8!BE?8<Q8E?B:E!<8EA;8!BEAB798E7@C=8!9@<!=8!G@BE?B8E!A87!N:E>?B:EE@B<87!8E!! 9:7B?B:E!A/@>?BQB?D!=:<7!A8!=@!><D@?B:E!A8!=@!7:>BD?D!@E:EWG8!"<@E>8!'D=D>:GL`f!
T! P! %E8! BE?8<Q8E?B:E! 79D>BNBF;8! A;! =DYB7=@?8;<! @EBGD8! 9@<! =@! Q:=:E?D! A/@A@9?8<! 8?! A8!>=@<BNB8<! =8! >@A<8! J;<BABF;8!@99=B>@C=8! _! =/DQ:=;?B:E!A8! =/@>?BQB?D!a! =/8S8G9=8!A87! 7:>BD?D7!@D<:9:<?;@B<87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!L`d!
! L\!%E!AB79:7B?BN!79D>BNBF;8!_!=@!Q:>@?B:E!>=@B<8G8E?!7BG9=BNB>@?<B>8!RRRRRRRRRRRRRRRR!L`d!! H\!%E!AB79:7B?BN!79D>BNBF;8!@;S!8NN8?7!Q@BE7!k!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LbH!
*,@E56:*W*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*U^m*/:?*<39@;658?* `7E696C7:?* =:E<:55@45* 90@??7E:E* ;@* A345647658* 9:* ;0:<=;36* :4*A@?*908>3;75634*9074:*@A56>658*=7B;6C7:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*U^m*
*2G@=65E:* U* S* /:?* <39@;658?* =:E<:55@45* 90@??7E:E* ;@* A345647658* 90:<=;36*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=E6>8*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*U^l!
*':A5634*U*S*!4* 5E@4?[:E5* ?6<=;6[68* >:E?* ;:?*3=8E@5:7E?* 8A343<6C7:?*9:*9E365* =E6>8*C76*?345*:4*AG@E\:*9074*?:E>6A:*=7B;6A*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*U^i!
*,@E@\E@=G:*U**S*!4*5E@4?[:E5*;8\@;*9:?*A345E@5?*9:*5E@>@6;*9:?*?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8*C7@?6L@753<@56C7:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*U^i!#!P!%E!?<@E7N8<?!8NN8>?BN!A67!=:<7!F;8!=87!>:EAB?B:E7!A/@99=B>@?B:E!A;!&RLHHbXL!A;!>:A8!A;!?<@Q@B=!7:E?!<D;EB87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lbd!
! L\!%E!?<@E7N8<?!A/:<A<8!9;C=B>!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lbd!@R! %E!?<@E7N8<?!7/BG9:7@E?!_!=/8E78GC=8!A87!@>?8;<7!8E!9<D78E>8!RRRRRRRRRRRRRR!LeK!CR! %E!?<@E7N8<?!@;?:G@?BF;8!8E!=/@C78E>8!A8!G:ABNB>@?B:E7!7;C7?@E?B8==87!A;!>:E?<@?!A8!?<@Q@B=!:;!A8!9<:?8>?B:E!9@<?B>;=B6<8!A;!7@=@<BD!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LeK!>R! %E!?<@E7N8<?!ADE;D!A8!A<:B?!A/:99:7B?B:E!A;!7@=@<BD!8E!A<:B?!BE?8<E8!RRRRR!Le`!
! H\!%E!?<@E7N8<?!A87!>:E?<@?7!A8!?<@Q@B=!>:E>:GB?@E?!@;!?<@E7N8<?!A/@>?BQB?D!RRR!Lee!T!P!%E!?<@E7N8<?!7:;GB7!_!;E8!7BG9=8!:C=BY@?B:E!A/BEN:<G@?B:E!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lef!
! L\!%E8!7BG9=8!:C=BY@?B:E!A/BEN:<G@?B:E!>:==8>?BQ8!A87!7@=@<BD7!A8!A<:B?!9<BQD!Lef!@R! %E8!:C=BY@?B:E!B==;7?<@?BQ8!A87!8SBY8E>87!A;!A<:B?!7:>B@=!>:GG;E@;?@B<8Lef!CR! %E8!:C=BY@?B:E!8G9:<?@E?!A87!>:E?<@BE?87!GBEBG@=87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Led!
! H\!%E8!7BG9=8!BEN:<G@?B:E!A8!=@!>:==8>?BQB?D!9;C=BF;8!>:E?<@>?@E?8!RRRRRRRRRRRRRR!LcL!*,@E@\E@=G:*W**S*!4*5E@4?[:E5*A345E@A57:;*9:?*A345E@5?*9:*5E@>@6;*9:?*?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8*=;7?*:4A@9E8*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*UbX!#!P!%E!?<@E7N8<?!>:EAB?B:EED!9@<!=/@>>:<A!ED>877@B<8!A;!7@=@<BD!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lcb!
! L\!%E8!8SBY8E>8!BE>:E?:;<E@C=8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lcb!@R! %E8!8SBY8E>8!BG9D<@?BQ8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lcb!CR! %E8! 8SBY8E>8! BE>:E?:;<E@C=8! GUG8! 8E! 9<D78E>8! A/;E8! @;?:<B7@?B:E!@AGBEB7?<@?BQ8!A8!?<@E7N8<?!A/;E!7@=@<BD!9<:?DYD!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lce!
! >R!!!!!%E8!8SBY8E>8!7:;Q8E?!N:<G@=B7D8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lcc!T!P!%E!?<@E7N8<?!8E>@A<D!9@<! =@!>:EQ8E?B:E!8==8XGUG8!a! =8!ED>877@B<8!@>>:G9=B778G8E?!A8!AB=BY8E>87!>:E?<@>?;8==8G8E?!7:;7><B?87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lcf!
! L\!%E8!8SBY8E>8!A/BEN:<G@?B:E!A;!<89<8E8;<!A8!=/@>?BQB?D!9<DDGBE8E?8!RRRRRRRR!LcI!
368
@R! &8! <8798>?! ED>877@B<8! A8! =/:C=BY@?B:E! A/BEN:<G@?B:E! 9:;<! :9D<8<! =8!?<@E7N8<?!8NN8>?BN!A87!>:E?<@?7!A8!?<@Q@B=!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lcd!CR! &8! <8798>?! N:EA@G8E?@=! A8! =/:C=BY@?B:E! A/BEN:<G@?B:E! A;! E:;Q8=!@??<BC;?@B<8!A/;E!>:E?<@?!>:ENB@E?!=/8S8<>B>8!A/;E8!@>?BQB?D!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRR!LfK!
! H\!&/8SBY8E>8!N<DF;8E?8!A/;E8!BEN:<G@?B:E!A87!7@=@<BD7!8?!A8!=8;<7!<89<D78E?@E?7!! 9@<!=8!E:;Q8=!8G9=:W8;<!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LfH!*':A5634* W* S* !4* 5E@4?[:E5* 9@>@45@\:* [3E<@;6?8* >:E?* ;:?* =:E?344:?* =7B;6C7:?* C76*E:=E:44:45*:4*E8\6:*74:*@A56>658*9:*?:E>6A:*=7B;6A*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*UlX!
*,@E@\E@=G:* U* S*!4* 5E@4?[:E5* @7* [3E<@;6?<:* E89765* :4* A@?* 9:* E:=E6?:* :4* E8\6:*9074:*@A56>658*9:*?:E>6A:*=7B;6A*6497?5E6:;*:5*A3<<:EA6@;*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*UlX!#!P!&@!N@>;=?D!A8!><D@?B:E!A/;E8!<DYB8!A:?D8!A8!=@!98<7:EE@=B?D!G:<@=8!8?!A8!=/@;?:E:GB8!NBE@E>B6<8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lf`!
! L\!&/@C78E>8!A/:C=BY@?B:E!J;<BABF;8!_!=@!><D@?B:E!A/;E8!<DYB8!98<7:EE@=B7D8!R!Lfb!! H\!&/BE?D<U?!9<@?BF;8!8?!9:=B?BF;8!A8!=@!><D@?B:E!A/;E8!8E?B?D!ADABD8!@;!78BE!A8!=@!!! 98<7:EE8!9;C=BF;8!F;B!<89<8EA!8E!<DYB8!=8!78<QB>8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lfe!
T!!P!&8!N@BC=8!N:<G@=B7G8!_!=/DY@<A!A87!7@=@<BD7!A8!A<:B?!9<BQD!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lfc!*,@E@\E@=G:*W*S*!4*5E@4?[:E5*48A:??@6E:<:45*A345E@A57@;6?8*:4*A@?*9:*E:=E6?:*:4*E8\6:*9074:*@A56>658*9:*?:E>6A:*=7B;6A*@9<646?5E@56[*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Uli!#!X!&@!<89<B78!AD<:Y@?:B<8!A8!>:E?<@?7!A8!?<@Q@B=!_!A;<D8!BEAD?8<GBED8!9@<!A87!98<7:EE87!9;C=BF;87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LfI!
! L\!&8!<8><;?8G8E?!AD<:Y@?:B<8!A8!98<7:EE8=7!>:E?<@>?;8=7!@;!78BE!A8!=@!N:E>?B:E!!! 9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Lfd!! H\!&/@AGB77B:E!BEDAB?8!A8!98<7:EE8=7!?B?;=@B<87!A8!>:E?<@?7!_!A;<D8!BEAD?8<GBED8!!! @;!78BE!A8!=@!N:E>?B:E!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LIK!
@R! %E8!@AGB77B:E!AD<:Y@?:B<8! @;!9<BE>B98!A8!A;<D8! =BGB?D8!A87! >:E?<@?7! A8!?<@Q@B=!A87!@Y8E?7!9;C=B>7!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LIL!CR! %E8! AD<:Y@?B:E! @;! 9<BE>B98! A8! A;<D8! =BGB?D8! A87! >:E?<@?7! A8! ?<@Q@B=! A87!@Y8E?7!9;C=B>7!N<DF;8GG8E?!@AGB78!8E!9<@?BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LIH!
T! X! &@! >:E>=;7B:E! BG9D<@?BQ8! A/;E! >:E?<@?! A8! A<:B?! 9;C=B>! 8E! >@7! A8! <89<B78! 9@<! ;E8!98<7:EE8!9;C=BF;8!A8!98<7:EE8=7!A8!A<:B?!9<BQD!@NN8>?D7!_!;E!78<QB>8!9;C=B>!@AGBEB7?<@?BN!!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LI`!
! L\!! &@!Q:=:E?D!A;!=DYB7=@?8;<!A/@77;<8<!=/;EB?D!A87!<DYBG87!J;<BABF;87!98<7:EE8=7!! 8G9=:WD7!9@<! =87!98<7:EE87!9;C=BF;87!A@E7! =8!>@A<8!A/;E8!@>?BQB?D!A8!78<QB>8!
9;C=B>!@AGBEB7?<@?BN!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LIb!@R! %E8! 7:=;?B:E! >:5D<8E?8! @;! <8Y@<A! A8! =@! J;<B79<;A8E>8! @AGBEB7?<@?BQ8!<8=@?BQ8!_!=@!E@?;<8!9;C=BF;8!A87!@Y8E?7!@NN8>?D7!9@<!;E8!98<7:EE8!9;C=BF;8!_!;E!78<QB>8!9;C=B>!@AGBEB7?<@?BN!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LIb!CR!%E8!7:=;?B:E!>:E?87?@C=8!8E!9<@?BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LIe!
! H\!!&/@C78E>8!A/@;?:G@?B>B?D!A;!?<@E7N8<?!A87!98<7:EE8=7!A8!A<:B?!9<BQD!8E!AD9B?!!! A8!=@!E@?;<8!=DY@=8!A8!=/:C=BY@?B:E!A8!?<@E7N8<?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LIe!
@R! %E!?<@E7N8<?!>:EAB?B:EED!9@<!=/@>>:<A!A;!7@=@<BD!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!LIc!CR! %E!?<@E7N8<?!>:EAB?B:EED!9@<!=@!7BYE@?;<8!A/;E!>:E?<@?!A8!A<:B?!9;C=B>!RR!LII!
***
369
2G@=65E:* W* S* /:?* <39@;658?* =:E<:55@45* 90@??7E:E* ;@* A345647658* 90:<=;36*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Uhc!
*':A5634*U*S*!4*5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*5Ea?*?37>:45*A345E@A57@;6?8*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*UhU!
*,@E@\E@=G:* UR* +:?* <8A@46?<:?* 9:* <3B6;658* 9:* ;@* [34A5634* =7B;6C7:* C76*6<=;6C7:*;@*A34A;7?634*6<=8E@56>:*9074*A345E@5*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*UhW!#!P!!%E8!>:EQ8E?B:E!h!?<B9@<?B?8!i!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Ld`!
! L\!&@!ED>877B?D!A/;E8!>:EQ8E?B:E!8E?<8!=@!>:==8>?BQB?D!A/:<BYBE8!8?!=@!7?<;>?;<8!!! A/@>>8;B=!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Ld`!! H\!&/8SBY8E>8!A8!=/@>>:<A!A8!=/@Y8E?!9;C=B>!>:E>8<ED!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Ldb!! `\!%E!N:<G@=B7G8!<8EN:<>D!9:;<!=8!?<@E7N8<?!A87!@Y8E?7!9;C=B>7!?8<<B?:<B@;S!R!Lde!
T!P!%E8!>:EQ8E?B:E!8E>@A<D8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Ldc!! L\!%E!>:E?8E;!GBEBG@=!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Ldc!! H\!%E8!A;<D8!G@SBG@=8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Ldc!! `\!&8!<8GC:;<78G8E?!A8!=@!<DG;ED<@?B:E!A8!=/@Y8E?!_!=@!>:==8>?BQB?D!A/:<BYBE8!! !RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Ldf!
!
,@E@\E@=G:* WR* !4* 5E@4?[:E5* >:E?* 74* 3=8E@5:7E* 8A343<6C7:* 9:* 9E365* =E6>8*<@EC78*=@E*;@*A34A;7?634*9074*A345E@5*9:*9E365*=E6>8qqqqqqqRRqqqqqRUhh #!P!%E!?<@E7N8<?!=@B77D!@;!=BC<8!>5:BS!A8!=/@Y8E?!9;C=B>!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HKK!
! L\!%E!9@77@Y8!7:;GB7!_!=/@>>:<A!9<D@=@C=8!A8!=/@Y8E?!9;C=B>!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HKK!! H\!%E!>5:BS!A8!=/@Y8E?!9;C=B>!BE7><B?!A@E7!=8!?8G97!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HKL!
@R! &@!>:E>=;7B:E!A/;E!>:E?<@?!A8!?<@Q@B=!A8!A<:B?!9<BQD!A67!=8!>5@EY8G8E?!A8!Y87?B:EE@B<8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HKK!CR! &@!>:E>=;7B:E!A/;E!>:E?<@?!A8!?<@Q@B=!A8!A<:B?!9<BQD!@;!>:;<7!:;!@;!?8<G8!A8!=@!GB78!_!AB79:7B?B:E!:;!A;!AD?@>58G8E?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HKL!
T! P! =@! N:<G@=B7@?B:E! ED>877@B<8! A;! 9@77@Y8! ADNBEB?BN! A/;E! <DYBG8! A8! A<:B?! 9;C=B>! _! ;E!<DYBG8!A8!A<:B?!9<BQD!9@<!=/@Y8E?!9;C=B>!?<@E7ND<D!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HKH!
! L\!&@!ADGB77B:E!9<D@=@C=8!A8!=/@Y8E?!9;C=B>!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HKH!! H\!&@!7BYE@?;<8!>:E7D>;?BQ8!A/;E!>:E?<@?!A8!?<@Q@B=!A8!A<:B?!9<BQD!RRRRRRRRRRRRRRRRR!HKb!*':A5634* W* S* !4* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =7B;6A* @7`37E90G76* [@A6;658* =@E*;0645:E>:45634*97*;8\6?;@5:7E*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wcm!
!
,@E@\E@=G:* UR* !4* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =7B;6A* @7* =E3[65* 9074:*?5E7A57E:*645:EA3<<74@;:*C7@?6L*@753<@56C7:qqqqqqqqqqqqqqqqqWcm*#!P!%E8!9<:>DA;<8!_!=/@GCB?B:E!7BG9=BNB>@?<B>8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HKc!
! L\!)87!G:A@=B?D7!BEB?B@=8G8E?!BE7@?B7N@B7@E?87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HKf!! H\!)8!E:;Q8==87!G:A@=B?D7!A@E7!=8!78E7!A/;E8!7BG9=BNB>@?B:E!A;!?<@E7N8<?!A87!!! 98<7:EE8=7!8S8<]@E?!=/BE?DY<@=B?D!A8!=8;<7!N:E>?B:E7!A@E7!=8!78<QB>8!?<@E7ND<DHKI!
T!P!%E8!9<:>DA;<8!G;=?B9=8!8E!>:E7?@E?8!DQ:=;?B:E!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HLK!! L\!!&@!=:B!A;!L`!@:l?!HKKb!a!;E!<8?:;<!8E!@<<B6<8!<8Y<8??@C=8!_!=/DY@<A!A;!9<BE>B98!!! A8! ?<@E7N8<?! A8! 9=8BE! A<:B?! A87! @Y8E?7! 8S8<]@E?! 8E! ?:?@=B?D! =8;<7! N:E>?B:E7! @;!
78BE!A;!78<QB>8!?<@E7ND<D!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HLL!! H\!RRRR!!&@!=:B!A;!Lc!AD>8GC<8!HKLK!a!;E8!?8E?@?BQ8!CB8EQ8E;8!A8!7BG9=BNB>@?B:E!8?!!! 7D>;<B7@?B:E!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HLH!
@R! %E!AB79:7B?BN!A8!7D>;<B7@?B:E!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HL`!CR! %E!AB79:7B?BN!A8!7BG9=BNB>@?B:E!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HLb!
370
!
,@E@\E@=G:*WR**!4*5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*e*Y*937B;:*985:45:*f*:4*A@?*9:*5E@4?[:E5*9:*;0@A56>658*9:*;0%5@5*>:E?*74:*A3;;:A56>658*5:EE653E6@;:*9@4?*;:*A@9E:*9:*;@*;36*97*UX*@3k5*Wcc^q**qqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqRRWUm
#!P!%E!9<:>877;7!A8!?<@E7N8<?!>:E>8<?D!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HLf!! L\!&/@77:>B@?B:E!A87!>:==8>?BQB?D7!@;!9<:>877;7!A8!?<@E7N8<?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HLf!! H\!&@!>:E?87?@?B:E!A87!>:==8>?BQB?D7!@;!9<:>877;7!A8!?<@E7N8<?!A87!98<7:EE8=7HLd!
@R! &@! >:E?87?@?B:E! A/@<<U?D7! BE?8<GBEB7?D<B8=7! 9<B7! 8E! @99=B>@?B:E! A87!AB79:7B?B:E7!A;!-m!A8!=/@<?B>=8!LKb!A8!=@!=:B!A;!L`!@:l?!HKKb!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HHK!CR! &@! >:E?87?@?B:E! A;! AD><8?! A;! Hc! AD>8GC<8! HKKe! NBS@E?! =87!G:A@=B?D7! A;!?<@E7N8<?!ADNBEB?BN!A87!',3!@;S!AD9@<?8G8E?7!8?!<DYB:E7!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HHH!
T!P!%E!9<:>877;7!A8!?<@E7N8<?!9<:Y<877BN!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HHb!! L\!&@!GB78!_!AB79:7B?B:E!9<D@=@C=8!A87!98<7:EE8=7!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HHe!
@R! %E8! GB78! _! AB79:7B?B:E! AD<:Y@?:B<8! @;! A<:B?! >:GG;E! A8! =@! N:E>?B:E!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HHe!CR!! %E8!GB78!_!AB79:7B?B:E!7BG9=8G8E?!?<@E7B?:B<8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HHc!
! H\!&8!?<@E7N8<?!ADNBEB?BN!9<:E:E>D!_!=/B77;8!A8!=@!9D<B:A8!?<@E7B?:B<8!RRRRRRRRRRRRRR!HHf!@R! &8!>5:BS!A/;E!9@77@Y8!_!=@!N:E>?B:E!9;C=BF;8!?8<<B?:<B@=8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HHf!CR! &8! >5:BS! :NN8<?! @;S! 98<7:EE8=7! A/;E! G@BE?B8E! A@E7! =@! N:E>?B:E! 9;C=BF;8!A/*?@?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HHd!
*,@E@\E@=G:* XR* +:?* <39@;658?* 9:* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =7B;6A*=E3[3498<:45* 98E3\@536E:?* @7* ?5@575* 9:* ;@* [34A5634* =7B;6C7:* ;3E?* 9:* ;@*=E6>@56?@5634*97*E8\6<:*`7E696C7:*9074:*:45658*=7B;6C7:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*WXU!#!P!&8!>5:BS!A/;E!G@BE?B8E!A;!7?@?;?!A/@Y8E?!9;C=B>!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!H`H!
! L\!%E!G@BE?B8E!?<@E7B?:B<8!9@<!=8!<8>:;<7!@;!AD?@>58G8E?!:;!_!=@!GB78!_!!! AB79:7B?B:E!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!H`H!! H\!%E!G@BE?B8E!9D<8EE8!9@<!=/8G9=:B!AB<8>?!8E!9:7B?B:E!A/@>?BQB?D!RRRRRRRRRRRRRRRRR!H`e!
T!P!)87!G:A@=B?D7!A8!?<@E7N8<?!98;!8NNB>@>87!k!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!H`f!
*2G@=65E:* X* S* /:?* A@?* :ZA:=56344:;?* 90@B?:4A:*9:* A345647658*9:* ;0:<=;36*T*;:?*<39@;658?*9:*E7=57E:*9:*;@*E:;@5634*90:<=;36*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*W^c!
*':A5634* U* S* /:?* <39@;658?* 9:* E7=57E:* 97* A345E@5* 9:?* ?@;@E68?* 9:* 9E365* =E6>8*=E3>3C78:*=@E*;:*5E@4?[:E5*90@A56>658*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*W^U!
!,@E@\E@=G:*U*S*/:?*<39@;658?*9:*E7=57E:*9:?*A345E@5?*:4*A@?*9:*5E@4?[:E5*9:*?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8*>:E?*74:*=:E?344:*<3E@;:*9:*9E365*=E6>8*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*W^U*#!P!&87!G:A@=B?D7!A8!<;9?;<8!A;!>:E?<@?!8E!>@7!A8!?<@E7N8<?!=DY@=!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HbL!
! L\!&87!G:A@=B?D7!A8!=@!<;9?;<8!A;!>:E?<@?!_!=/BEB?B@?BQ8!A8!=/;E!:;!=/@;?<8!A87!!! Y87?B:EE@B<87!A8!=/@>?BQB?D!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HbH!
@R! &87! =B>8E>B8G8E?7! 9<:E:E>D7! 9@<! =8! Y87?B:EE@B<8! BEB?B@=! A8! =/@>?BQB?D!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HbH!CR! &87!=B>8E>B8G8E?7!9<:E:E>D7!9@<!=8!E:;Q8=!8S9=:B?@E?!A8!=/@>?BQB?D!9;C=BF;8!! !RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hb`!
! H\!!&87!G:A@=B?D7!A8!<;9?;<8!A;!>:E?<@?!8E!>@7!A8!<8N;7!A;!?<@E7N8<?!9@<!=8!!! 7@=@<BD!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hbb!
@R! &8! <8N;7! A;! ?<@E7N8<?! 9@<! =8! 7@=@<BD! 8E! =/@C78E>8! A8! G:ABNB>@?B:E!7;C7?@E?B8==8!@99:<?D8!_!7:E!>:E?<@?!A8!?<@Q@B=!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hbb!
371
CR! &8! <8N;7! A;! ?<@E7N8<?! 9@<! =8! 7@=@<BD! 8E! <@B7:E! A/;E8! G:ABNB>@?B:E!7;C7?@E?B8==8!@99:<?D8!_!7:E!>:E?<@?!A8!?<@Q@B=!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hbe!
T!P!&87!G:A@=B?D7!A8!<;9?;<8!A;!>:E?<@?!A8!?<@Q@B=!8E!>@7!A8!?<@E7N8<?!>:EQ8E?B:EE8=!:;!>:E?<@>?;8=!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hbc!
! L\!&@!<;9?;<8!A;!>:E?<@?!B77;8!A;!<8N;7!A;!7@=@<BD!A8!Q:B<!7:E!>:E?<@?!A8!?<@Q@B=!!! ?<@E7ND<D!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hbc!! H\!&@!<;9?;<8!A;!>:E?<@?!>:E7D>;?BQ8!_!;E!G@EF;8!A8!AB=BY8E>8!A;!<89<8E8;<!!! A8!=/@>?BQB?D!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HbI!
*,@E@\E@=G:*WR*/:?*<39@;658?*9:*E7=57E:*97*A345E@5*9:*5E@>@6;*:4*A@?*9:*5E@4?[:E5*9:*?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8*>:E?*74:*=:E?344:*=7B;6C7:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wmc!#!P!)87!G:A@=B?D7!A8!<;9?;<8!79D>BNBF;8G8E?!@A@9?D87!9@<! =8! =DYB7=@?8;<!_! =/5W9:?5678!A8!<89<B78!8E!<DYB8!A/;E!78<QB>8!9;C=B>!@AGBEB7?<@?BN!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HeK!
! L\!&@!78;=8!9<:9:7B?B:E!A/;E!>:E?<@?!9;C=B>!@77BGB=@C=8!_!;E8!G:ABNB>@?B:E!!! 7;C7?@E?B8==8!A;!>:E?<@?!:;Q<@E?!A<:B?!@;!<8N;7!A;!7@=@<BD!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HeL!! H\!%E8!9<:>DA;<8!A8!=B>8E>B8G8E?!h!-.*#/0'0)*-!i!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HeH!
T!P!&@!>:G9D?8E>8!J;<BAB>?B:EE8==8!9:;<!>:EE@n?<8!A87! =B?BY87!ED7!A8! =@!<89<B78!8E!<DYB8!AD?8<GBED8!9@<!=@!E@?;<8!A;!>:E?<@?!A8!?<@Q@B=!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Heb!
*':A5634*W*S*/:?*<39@;658?*9:*\:?5634*9:?*@\:45?*=7B;6A?*434*5E@4?[8E8?*Y*;06??7:*9:*;08>3;75634*90@A56>658*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wmm!
*,@E@\E@=G:* UR* /:?* <39@;658?* 9:* E7=57E:* 9:* ;@* E:;@5634* 90:<=;36* ;3E?* 9074*5E@4?[:E5*9:*A3<=85:4A:?*:45E:*A3;;:A56>658?*=7B;6C7:?*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wmm!#!P!%E8!9<:C=DG@?BF;8!7@E7!:CJ8?! =:<7!A87!A8<EB8<7!?<@E7N8<?7!A8!>:G9D?8E>8!A8!=/*?@?!Q8<7!=87!>:==8>?BQB?D7!?8<<B?:<B@=87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hec!T!P!)87!7:=;?B:E7!G;=?B9=87!=:<7!A8!?<@E7N8<?7!A8!>:G9D?8E>87!Q8<7!;E!D?@C=B778G8E?!A8!>::9D<@?B:E!BE?8<>:GG;E@=8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hef!
! L\!%E!?<@B?8G8E?!ABNND<8E>BD!8E!N:E>?B:E!A8!=/8SB7?8E>8!A/;E8!:C=BY@?B:E!A8!!! ?<@E7N8<?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hef!! H\!%E!?<@B?8G8E?!ABNND<8E>BD!8E!N:E>?B:E!A;!7?@?;?!A8!=/@Y8E?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HeI!
*,@E@\E@=G:*WR*/:?*<39@;658?*9:*\:?5634*9:?*@\:45?*=7B;6A?*434*5E@4?[8E8*:4*A@?*9:* 5E@4?[:E5* 9074:* @A56>658* =7B;6C7:* >:E?* 74:*=:E?344:*<3E@;:* 9:*9E365* =E6>8*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wbc!#!P!)87!G:A@=B?D7!A8!Y87?B:E!A8! =/@Y8E?!9;C=B>!8E!A8;S! ?8G97!8E!>@7!A8!E:E!?<@E7N8<?!Q8<7!=8!E:;Q8=!8S9=:B?@E?!9<BQD!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HcK!
! L\!&/:C=BY@?B:E!9<D@=@C=8!A8!<DBE?DY<@?B:E!A8!=/@Y8E?!9;C=B>!?B?;=@B<8!A@E7!=87!!! 8NN8>?BN7!A8!=/8E?B?D!9;C=BF;8!A/:<BYBE8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HcK!! H\!&@!9:77BC=8!<;9?;<8!A8!=@!<8=@?B:E!A/8G9=:B!A8!=/@Y8E?!9;C=B>!E:E!?B?;=@B<8!!! :;!8E!>@7!A/BG9:77BCB=B?D!A8!<8>=@778G8E?!A8!=/@Y8E?!9;C=B>!?B?;=@B<8!RRRRRRRRRRRR!HcH!
@R! &@! 9:77BC=8! <;9?;<8! A8! =@! <8=@?B:E! A/8G9=:B! A8! =/@Y8E?! E:E! ?B?;=@B<8! A67!7;99<877B:E!A8!=/8G9=:B!8S8<>D!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HcH!CR! &@! 9:77BC=8! <;9?;<8! A8! =@! <8=@?B:E! A/8G9=:B! A8! =/@Y8E?! ?B?;=@B<8! @9<67! ?<:B7!<8N;7!<D9D?D7!A8!<8>=@778G8E?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hc`!
T! P!%E8! 9<:C=DG@?BF;8! <D7BA;8==8! 8E! >@7! A8! ?<@E7N8<?! 8E! 9:7B?B:E! A/@>?BQB?D! :;!GB78! _!AB79:7B?B:E!A8!9=8BE!A<:B?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hce!
** *
372
,@E56:*X*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wbb*/:?*A34?8C7:4A:?*`7E696C7:?*9:*;@*A345647658*9:*;0:<=;36*:4*A@?*908>3;75634*9074:*@A56>658*=7B;6C7:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wbb*
*2G@=65E:* U* S* /:?* A34?8C7:4A:?* `7E696C7:?* 9:* ;@* A345647658* 90:<=;36* 9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=E6>8*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wbi!
*':A5634*U*S*/:?*A34?8C7:4A:?* `7E696C7:?*97*5E@4?[:E5*>:E?*74:*=:E?344:*=E6>8:*37*74:*=:E?344:*=7B;6C7:*@\6??@45*:4*5@45*C703=8E@5:7E*8A343<6C7:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wbh!
*,@E@\E@=G:* UR* /:?* A34?8C7:4A:?* 97* 5E@4?[:E5* ?7E* ;@* ?657@5634* 6496>697:;;:* 9:?*=:E?344:;?*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wlc!#!P!%E8!>877B:E!A;!>:E?<@?!A8!?<@Q@B=!A@E7!?:;7!787!D=DG8E?7!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HfK!
! L\!&8!G@BE?B8E!A87!Y@<@E?B87!=BD87!@;!>:E?<@?!A8!?<@Q@B=!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HfL!! H\!&8!G@BE?B8E!A87!@Q@E?@Y87!BEABQBA;8=7!@>F;B7!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HfL!! `\!&8!G@BE?B8E!A8!>8<?@BE87!:C=BY@?B:E7!@>>877:B<87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HfH!
T!P!%E8!>877B:E!A87!A8??87!F;B!BE>:GC8!_!=/@E>B8E!8G9=:W8;<!78=:E!=8!G:A8!A8!?<@E7N8<?!A8!=/@>?BQB?D!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HfH!
! L\!&/@C78E>8!A/:C=BY@?B:E!A8!>877B:E!A87!A8??87!A@E7!=/5W9:?5678!A/;E8!!! 7;>>877B:E!A8!?B?;=@B<87!A/;E!>:E?<@?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hf`!! H\!&/:C=BY@?B:E!A8!>877B:E!A87!A8??87!8E!>@7!A8!<89<B78!8E!<DYB8!A8!=/@>?BQB?D!!! A8!78<QB>8!9;C=B>!BEA;7?<B8=!8?!>:GG8<>B@=!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hfb!
*,@E@\E@=G:* WR* /:?* A34?8C7:4A:?* 97* 5E@4?[:E5* ?7E* ;@* ?657@5634* A3;;:A56>:* 9:?*=:E?344:;?*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wlm!#! P! )87! E:<G87! 8S?<@>:E?<@>?;8==87! F;B! 98;Q8E?! 9@<! 8778E>8! U?<8! ADE:E>D87! 9@<! =8!E:;Q8=!8S9=:B?@E?!A8!=/@>?BQB?D!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hfc!
! L\!)87!E:<G87!>:==8>?BQ87!G@BE?8E;87!_!?B?<8!?<@E7B?:B<8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hfc!@R! %E! >5@EY8G8E?! DQ8E?;8=! A8! >:EQ8E?B:E! >:==8>?BQ8! :;! A/@>>:<A! >:==8>?BN!9@<?B>;=B6<8G8E?!8E>@A<D!A@E7!;E!7:;>B!A8!9<:?8>?B:E!A87!A<:B?7!A;!7@=@<BD7!Hfc!CR! %E!9:77BC=8!G@BE?B8E!A87!@Q@E?@Y87!BEABQBA;8=7!@>F;B7!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hfd!
! H\!)87!E:<G87!;EB=@?D<@=87!BE?<BE76F;8G8E?!@NN8>?D87!9@<!=8!>5@EY8G8E?!!! A/8G9=:W8;<!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HIK!
T!X!)87!BE7?B?;?B:E7!<89<D78E?@?BQ87!A;!98<7:EE8=!@77;<D87!A/;E8!<8=@?BQ8!98<G@E8E>8HIL!! L\!&8!G@BE?B8E!9<D7;GD!A87!G@EA@?7!D=8>?BN7!_!=/B77;8!A/;E!?<@E7N8<?!=DY@=!!! A8!=/@>?BQB?D!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HIH!! H\!&8!G@BE?B8E!>:EAB?B:EED!A87!G@EA@?7!D=8>?BN7!_!=/B77;8!A/;E!?<@E7N8<?!!! >:E?<@>?;8=!A8!=/@>?BQB?D!9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HIb!*':A5634*W* S* /:?* A34?8C7:4A:?* `7E696C7:?*97* 5E@4?[:E5* >:E?*74:*=:E?344:*=7B;6C7:*C76*E:=E:49*:4*E8\6:*74:*@A56>658*9:*?:E>6A:*=7B;6A*@9<646?5E@56[*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wim!
!
,@E@\E@=G:*UR*/:?*64A:E56579:?*C7@45*@7*A345:47*97*A345E@5*9:*9E365*=7B;6A*9:?*?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Wib*#!P!&@!ABNNB>B=8!AD?8<GBE@?B:E!A87!>=@;787!7;C7?@E?B8==87!A;!>:E?<@?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HIc!
! L\!&/@C78E>8!A8!9<D>B7B:E7!=DYB7=@?BQ87!F;@E?!_!=@!AD=BGB?@?B:E!A87!>=@;787!!! 7;C7?@E?B8==87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HIf!! H\!&/@C78E>8!A8!9<D>B7B:E7!J;<B79<;A8E?B8==87!F;@E?!_!=@!?8E8;<!A87!>=@;787!!! 7;C7?@E?B8==87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HII!
373
T! P! &@! 9:77BC=8! <8GB78! 8E! >@;78! A8! =@! <DG;ED<@?B:E! A;! 7@=@<BD! 7:;7! =/8NN8?! A87! <6Y=87!7?@?;?@B<87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HId!*,@E@\E@=G:*WR*/:?*64A:E56579:?*;:>8:?*C7@45*@7*E8\6<:*`7E696C7:*9:?*?@;@E68?*9:*9E365*=E6>8*9:>:47?*A345E@A57:;?*9:*9E365*=7B;6A*Y*;06??7:*9:*;@*E:=E6?:*:4*E8\6:*9074*',-*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*WhU!#!P!&@!7:;GB77B:E!A87!@Y8E?7!>:E?<@>?;8=7!_!;E!h!F;@7BX7?@?;?!i!A8!=@!N:E>?B:E!9;C=BF;8!RR!!!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HdH!
! L\!%E!<DYBG8!9<D8SB7?@E?!_!=@!=:B!A;!Hc!J;B==8?!HKKe!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!HdH!! H\!%E!<DYBG8!J;<BABF;8!=@<Y8G8E?!BE79B<D!A;!7?@?;?!A87!N:E>?B:EE@B<87!RRRRRRRR!Hd`!
T!P!%E8!Y87?B:E!A8!>@<<B6<8!8G9<8BE?8!A8!>:E>89?7!>:E?<@>?;8=7!A8!A<:B?!9<BQD!RRRRRRRRRR!Hde!! L!&/@C78E>8!A8!A<:B?!_!=@!>@<<B6<8!8?!_!=/@Q@E>8G8E?!?8=!F;8!<8>:EE;!@;S!!! N:E>?B:EE@B<87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!Hdc!! H\!&@!GB78!8E!9=@>8!A/;E!AB79:7B?BN!A/DQ:=;?B:E!A8!>@<<B6<8!8?!A8!<DG;ED<@?B:E!!! A87!@Y8E?7!>:E?<@>?;8=7!_!A;<D8!BEAD?8<GBED8!A/BE79B<@?B:E!h!9<BQ@?B7?8!i!RRR!Hdf!
*2G@=65E:* W* S* /:?* A34?8C7:4A:?* `7E696C7:?* 9:* ;@* A345647658* 90:<=;36* 9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Xcc!
*':A5634* U* * L* /:?* A34?8C7:4A:?* 97* 5E@4?[:E5* 9:?* =:E?344:;?* 9:* 9E365* =7B;6A* Y*;03AA@?634*9:*5E@4?[:E5*9:*A3<=85:4A:?*:45E:*A3;;:A56>658?*=7B;6C7:?*RRRRRRRRRRRRRRRRRR*XcU!
*,@E@\E@=G:*UR*/:?*A34?8C7:4A:?*97*5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*Y*;03AA@?634*9:*5E@4?[:E5*>:E56A@;*9:*A3<=85:4A:?*:45E:*A3;;:A56>658?*=7B;6C7:?*XcW!#! P! )87! >:E7DF;8E>87! GBEBG@=87! 9:;<! =87! N:E>?B:EE@B<87! A/*?@?! ?<@E7ND<D7! @;S!>:==8>?BQB?D7!?8<<B?:<B@=87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`KH!
! L\!&8!<8=@?BN!-(!(.#1.%#BEA;B?!9@<!=8!<8>:;<7!_!=@!GB78!_!AB79:7B?B:E!:;!=8!>5:BS!!! A/;E!G@BE?B8E!A;!7?@?;?!A8!N:E>?B:EE@B<8!A/*?@?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`K`!
@R! %E!AD<:;=8G8E?!A8!>@<<B6<8!9@<?@YD!8E?<8! =/@AGBEB7?<@?B:E!A/:<BYBE8!8?! =@!>:==8>?BQB?D! ?8<<B?:<B@=8! A/@>>;8B=! A@E7! =8! >@A<8! A/;E8! GB78! _! AB79:7B?B:E! A;!N:E>?B:EE@B<8!A/*?@?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`K`!CR! &8!G@BE?B8E!A;!7?@?;?!A8!N:E>?B:EE@B<8!A/*?@?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`Kb!
! H\!&87!G:ABNB>@?B:E7!9;<8G8E?!N:<G8==87!BEA;B?87!9@<!=8!9@77@Y8!_!=@!N:E>?B:E!!! 9;C=BF;8!?8<<B?:<B@=8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`Ke!
T! P! %E8! Y87?B:E! A87! <877:;<>87! 5;G@BE87! A87! >:==8>?BQB?D7! ?8<<B?:<B@=87! A/@>>;8B=!<8EN:<>D8!7:;7!=/8NN8?!A8!=/BE?DY<@?B:E!A87!98<7:EE8=7!AD>8E?<@=B7D7!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`Kc!*,@E@\E@=G:*WR**/:?*A34?8C7:4A:?*97*5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*Y*;03AA@?634* 9:* 5E@4?[:E5* G3E6M345@;* 9:* A3<=85:4A:?* :45E:* A3;;:A56>658?*5:EE653E6@;:?*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Xcl!#!P!)87!>:E7DF;8E>87!E8;?<@=B7D87!9:;<!=/@Y8E?!9;C=B>!@;!G:G8E?!A8!7:E!?<@E7N8<?!!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`Kf!T!P!)87!>:E7DF;8E>87!E8;?<@=B7D87!9:;<!=@!>:==8>?BQB?D!A/@>>;8B=!@9<67!=8!?<@E7N8<?!RRRRR!`Kd!
! L\!&@!>:8SB7?8E>8!A/@Y8E?7!9;C=B>7!A8!<DYBG87!BEA8GEB?@B<87!AB7?BE>?7!7:;7!=/8NN8?!!! >:GCBED! A8! =/BE?DY<@?B:E! A/@Y8E?7! ?<@E7ND<D7! 8?! A8! <8><;?8G8E?! A/;E!!
98<7:EE8=!9<:9<8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`Kd!@R! &@!=BC8<?D!DQBA8E?8!9:;<!=/*M$-!A8!78!A:?8<!A8!7:E!9<:9<8!98<7:EE8=!RRRRR!`Kd!CR! %E8!>:G9=8SBNB>@?B:E!9:?8E?B8==8!A8!=@!Y87?B:E!A87!<877:;<>87!5;G@BE87!A8!=/*M$-!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`LK!
374
H\!&@!N@>;=?D!ADEBD8!AV5@<G:EB78<!=87!<DYBG87!BEA8GEB?@B<87!A8!=V8E78GC=8!A87!
@Y8E?7oooooooooooooooooooooooooooooooooooooooo`LL!
*':A5634*W**L*/:?*A34?8C7:4A:?*97*5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*;3E?*9:*;@*=E6>@56?@5634*97*E8\6<:*`7E696C7:*9074:*:45658*=7B;6C7:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*XUX!
*,@E@\E@=G:*UR*/0@??6<6;@5634*;@5:45:*97*[34A56344@6E:*5E@4?[8E8*Y*74*?@;@E68*9:*9E365*=E6>8*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*XU^!#!P!&/@77BGB=@?B:E!G@EBN87?8!A87!@Y8E?7!9;C=B>7!GB7!_!AB79:7B?B:E!:;!AD?@>5D7!?<@E7ND<D7!_!;E!7@=@<BD!A8!A<:B?!9<BQD!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`Lb!
! L\!&8!N:E>?B:EE@B<8!GB7!_!AB79:7B?B:E!a!;E!@Y8E?!9:=WG:<958!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`Lb!! H\!&8!N:E>?B:EE@B<8!AD?@>5D!a!;E!7@=@<BD!A8!A<:B?!9<BQD!F;B!E8!AB?!9@7!7:E!E:G!RRR!!! !RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`Lc!
T! P! &/@??DE;@?B:E! 78E7BC=8! A87! <6Y=87! A;! 7?@?;?! A8! =@! N:E>?B:E! 9;C=BF;8! _! =/DY@<A! A87!@Y8E?7!?<@E7ND<D7!8E!9:7B?B:E!A/@>?BQB?D!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`Lf!*,@E@\E@=G:* WR* /03B;6\@5634* 9:* E:=:4?:E* ;@* \:?5634* 9:?* E:??37EA:?* G7<@64:?* Y*;06??7:*9:*;@*=E6>@56?@5634*97*E8\6<:*9:*;0:45658*\:?56344@6E:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*XWc!#!P!)87! BE7?B?;?B:E7!<89<D78E?@?BQ87!A;!98<7:EE8=!>:ENBY;<D87!9:;<!:;!9@<! =/BE?DY<@?B:E!A87!@Y8E?7!>:G9:7@E?!=87!8NN8>?BN7!A8!=/8E?B?D!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`HK!
! L\!&/@A@9?@?B:E!A87!@Y8E?7!9;C=B>7!GB7!_!AB79:7B?B:E!:;!AD?@>5D7!@;S!!! BE7?B?;?B:E7!<89<D78E?@?BQ87!A;!98<7:EE8=!A8!=@!7?<;>?;<8!9<BQ@?B7D8!BE5D<8E?8!_!
>87!GD>@EB7G87!A8!G:CB=B?D!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`HL!! H\!&/@A@9?@?B:E!BEAB798E7@C=8!A87!BE7?B?;?B:E7!<89<D78E?@?BQ87!A;!98<7:EE8=!!! A@E7!=87!8E?B?D7!>:E78<Q@E?!A87!N:E>?B:EE@B<87!8E!9:7B?B:E!A/@>?BQB?D!RRRRRRRRRRR!`HH!
@R! &8! >5:BS! A/:<Y@EB7G87! -.*# /0'0)*-! 9:;<! =87! 98<7:EE8=7! A8! &@! M:7?8! 8?! A8!"<@E>8!'D=D>:G!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`H`!CR! &@! 7;C7?B?;?B:E! A87! BE7?B?;?B:E7! <89<D78E?@?BQ87! 9<DQ;87! 9@<! =8! >:A8! A;!?<@Q@B=!@;S!:<Y@EB7G87!<89<D78E?@?BN7!A8! =@!N:E>?B:E!9;C=BF;8!9:;<! =/8E78GC=8!A87!98<7:EE8=7!a!=/8S8G9=8!A8!M:=8!*G9=:B!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`Hb!>R! &8!<8>:;<7!N<DF;8E?!8?!=:YBF;8!@;S!BE7?@E>87!D<BYD87!9@<!=8!A<:B?!A;!?<@Q@B=!8E!G@?B6<8!A/5WYB6E8!8?!A8!7D>;<B?D!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`He!
T!P!%E8!Y87?B:E!A87!>@<<B6<87!BE?DY<D8!A@E7!;E8!98<798>?BQ8!A/8E?<89<B78!RRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`Hf!! L\!&/@A@9?@?B:E!A87!<6Y=87!A8!E:?@?B:E!8?!A/@Q@E>8G8E?!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`Hf!! H\!&8!CDEDNB>8!A8!=@!9@<?B>B9@?B:E!8?!A8!=/BE?D<8778G8E?!>:EAB?B:EED!9@<!!! =/BE?8<Q8E?B:E!8S9<8778!A;!=DYB7=@?8;<!8E!>8!78E7!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!`HI!
*':A5634*X**L*/:?*A34?8C7:4A:?*97*5E@4?[:E5*9:?*=:E?344:;?*9:*9E365*=7B;6A*:4*A@?*9:*98A6?634*90:Z5:E4@;6?@5634*9074:*@A56>658*=@E*74:*=:E?344:*=7B;6C7:qqqqqqqRXXc*
,@E@\E@=G:* UR* +:?* A34?8C7:4A:?* @==@E:<<:45* =E3[349:?* ?7E* ;:* E8\6<:*`7E696C7:*9:*;0@\:45*=7B;6A*9:>:47*?@;@E68*9:*9E365*=E6>8*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*XXc!#!P!%E!>5@EY8G8E?!>:G9=8?!A8!7:;<>87!@99=B>@C=87!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!``L!
! L\!)87!<DYBG87!!#2)*%)*!8S>=;7BN7!=/;E!A8!=/@;?<8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!``L!! H\!)87! 7BGB=B?;A87! Y<@EAB77@E?87! 8E?<8! A<:B?! A;! ?<@Q@B=! 8?! A<:B?! A8! =@! N:E>?B:E!
9;C=BF;8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!``H!T!P!%E8!G:ABNB>@?B:E!78E7BC=8!A;!G:A8!A8!<89<D78E?@?B:E!7WEAB>@=8!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!``b!,@E@\E@=G:*WR*+:?*A34?8C7:4A:?*E8?3;7<:45*<646<@;:?*?7E* ;:*A345:47*97*A345E@5*9:*5E@>@6;*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*XXm*
375
!
,@E@\E@=G:* WR* +:?* A34?8C7:4A:?* E8?3;7<:45* <646<@;:?* ?7E* ;:* A345:47* 97*A345E@5*9:*5E@>@6;qqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqqXXm*#!P!&/@C78E>8!A/:C7?@>=8!@;!G@BE?B8E!A8!=@!<DG;ED<@?B:E!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!``c!T!P!%E8!<89<B78!A87!>:E?<@?7!A8!?<@Q@B=!G@n?<B7D8!9@<!=87!:9D<@?8;<7!D>:E:GBF;87!9<BQD7!!RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR!``f!
*234A;7?634*\848E@;:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*XXh!*#49:Z*9:?*98A6?634?*`7E696A56344:;;:?*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Xlb!*#49:Z*5G8<@56C7:*RRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR*Xii!
* *
376
#49:Z*9:?*98A6?634?*`7E696A56344:;;:?*****
(Les numéros renvoient aux pages)
Juridictions judiciaires
CA Paris, 1ère chbre, 15 mai 1985, Desquenne et Giral, n° 31 497, 31 498, 35871 .......... 46
CA Paris, 24 mai 1995, RJS 1995, n° 1094 . 83 CA AIX, 10 décembre 1996, RJS 1997,
p. 204, n° 304 ........................................... 94 CA Pau, ch. soc., 31 août 2004, n° 02/02017,
PAYET / SARL CASA JUAN PEDRO .. 79 CA Nîmes, ch. soc., 5 mai 2009, Association
Elan 30 c. M. Angelo Perolari, n° 07/03798 ............................................................... 245
CA Montpellier, 4ème Ch. soc., 3 novembre 2010, CCI de Sète Frontignan Mèze, n°10/00840 ............................................ 274
CA Grenoble, Ch. Soc., 12 janvier 2011, n°10/02207 ............................................ 273
Cass soc., 17 novembre 1955, Bull. civ. IV,
n° 828 ....................................................... 42 Cass soc., 27 mars 1968, pourvoi n°67-40.596
............................................................... 272 Cass soc., 23 octobre 1968, Bull. civ. V, n°
451 ................................................. 159, 234 Cass soc., 24 mars 1969, Bull. civ. V, n° 212
............................................................... 234 Cass soc., 27 janvier 1971, Bull. civ. V, n° 50
............................................................... 159 Cass soc., 16 janvier 1974, Bull. Civ. V, n° 41
............................................................... 159 Cass. civ., 9 juillet 1974, Bull. civ. I, n° 226,
p. 194 ....................................................... 56 Cass soc., 6 mai 1975, Bull. civ. V, n° 232 159 Cass soc., 26 mai 1976, pourvoi n°75-40.472
............................................................... 272 Cass soc., 24 novembre 1976, Bull. civ. V, n°
617 ......................................................... 234 Cass soc., 8 décembre 1976, Bull. civ. V
n°644 ...................................................... 272 Cass soc., 2 mars 1977, D. 1977, jurispr.
p. 550 ....................................................... 52 Cass soc., 31 mai 1978, Bull. Civ. V, no 409
............................................................... 271 Cass soc., 8 novembre 1978, Bull. soc. n°743,
p. 559 ....................................................... 53 Cass soc., 7 février 1980, pourvoi n°78-41168
................................................................. 59 Cass soc., 7 février 1980, pourvoi 78-41172,
Bull. Civ. V, n°115 ............................. 57, 59
Cass soc., 28 avril 1981, Bull. civ. V, n°345. ............................................................... 282
Cass soc., 13 mai 1982, Bull. Civ. V n°302 270 Cass soc., 30 juin 1983, Dr. soc. 1984, p. 99
et p. 91 ...................................................... 57 Cass soc., 2 février 1984, pourvoi n° 82-
17.037 .................................................... 272 Cass soc., 27 avril 1984, Bull. civ. V, n° 162
............................................................... 151 Cass soc., 1er juillet 1985, Bull. civ. V, n° 377
............................................................... 151 Cass soc., 6 novembre 1985, Bull. civ. V, n°
502 ......................................................... 151 Cass. crim., 29 avril 1986, Bull. crim. 1986,
n°147 ...................................................... 282 Cass soc., 5 mai 1986, Bull. Civ. V, n° 195 149 Cass. civ., 16 juillet 1986, Bull. civ. I n° 211,
p. 202 ....................................................... 56 Cass soc., 12 mars 1987, Bull. Civ. V, n°139
............................................................... 272 Cass. soc., 8 octobre 1987, Raquin et
Trappiez, Bull. civ. V, n° 451 ......... 287, 337 Cass soc., 30 juin 1988, pourvoi n°87-60.155,
CNES c/ CFDT ...................................... 282 Cass soc., 24 octobre 1989, Bull. civ. V, n°609
................................................................. 57 Cass soc. 7 novembre 1989, Bull. Civ. V,
n°644 .......................................... 92, 94, 164 Cass soc., 16 janvier 1990, Bull. Civ. V, n° 11
............................................................... 244 Cass soc., 24 janvier 1990, Bull. Civ. V n°23
............................................................... 270 Cass. ass. plén., 16 mars 1990, pourvois
n° 85-44.518 et 86-40.686, D. 1990, jurispr. p. 305, note A. LYON – CAEN ; Bull. civ. ass. plén. 1990, n° 3 et 4 .......................... 20
Cass soc., 4 avril 1990, Bull. Civ. V, no 155 ............................................................... 271
Cass soc., 13 juin 1990, Bull. Civ. V, n° 273 ....................................................... 149, 150
Cass soc., 27 juin 1990, Bull. Civ. V, n° 317 69 Cass. soc., 26 septembre 1990, Bull. civ. V,
n° 236 ..................................................... 244 Cass soc., 26 septembre 1990, Bull. Civ. V
n° 390 ..................................................... 164 Cass soc., 26 septembre 1990, RJS 1990, n°
841 ........................................................... 83
377
Cass soc., 3 avril 1991, Bull. civ. V, n°164 273 Cass soc., 26 juin 1991, Mescle, D. 1991. IR.
220 ......................................................... 105 Cass soc., 6 novembre 1991, Société de
nettoyage des villes, Bull. civ. V , n°473, p. 194 ........................................................... 69
Cass. com. 12 décembre 1991, Bull. civ. IV, n° 341, p. 237 ........................................... 56
Cass soc., 26 février 1992, Bull. Civ. V, no 128 ............................................................... 271
Cass. civ., 16 juin 1992, Bull. civ. I, n° 188, p. 126 ........................................................... 56
Cass. soc., 24 juin 1992, Bull. civ. V, n°413 ....................................................... 287, 337
Cass. soc., 23 septembre 1992, n°89-45.656, Bull. civ. V, n°479 .................................. 280
Cass. Soc. 27 septembre 1992, Bull. civ. V, n°363 ........................................................ 20
Cass. soc., 7 octobre 1992, pourvoi n°91-60.353 .................................................... 284
Cass soc., 18 novembre 1992, pourvoi n°90-44.392 .................................................... 273
Cass soc., 18 novembre 1992, pourvoi n°89-42281, Bull. civ. V, n°549 ...................... 274
Cass soc., 3 mars 1993, Bull. civ. V, n° 75 .. 53 Cass. soc. 17 mars 1993, Bull. civ. V, n° 88 81 Cass soc., 17 mars 1993, Bull. Civ. V, n° 86
............................................................... 164 Cass soc., 17 mars 1993, Bull. Civ. V, no 88 94 Cass soc., 21 juillet 1993, n° 91-43.543 ...... 69 Cass soc., 9 février 1994, Bull. Civ. V, n° 47
........................................................... 70, 75 Cass. soc., 4 mai 1994, Bull. civ. V, n° 160 164 Cass soc., 1er février 1995, pourvoi n°91-
42.191 .................................................... 167 Cass soc., 22 février 1995, pourvoi n°94-
60.011 .................................................... 282 Cass. soc., 22 mars 1995, pourvoi n°93-44156
................................................................. 88 Cass. soc., 10 juillet 1995, Compagnie des
Eaux et de l'Ozone c/ Elie et autres, Bull. Civ. V, n° 500, p. 317 ......................... 54, 56
Cass soc., 10 juillet 1995, Lazareff c/ Mairie de Soulac, Bull. Civ. V n° 499, p. 316 ..... 56
Cass soc., 6 décembre 1995, RJS 1996, n° 250 ................................................................. 53
Cass soc., 13 décembre 1995, Dr. soc. 1996, p. 429 ....................................................... 83
Cass. soc., 7 mai 1996, pourvoi n° 93-44289 ............................................................... 280
Cass. soc., 10 juillet 1996, Bull. civ. V, n° 278 ....................................................... 287, 337
Cass. crim. 26 novembre 1996, Bull. crim., n°428 ........................................................ 94
Cass. Ass. Plén., 20 décembre 1996, Rey-Herme c/ Assoc. Alliance française, Bull. civ. I, n° 10 ............................................. 194
Cass soc., 20 mars 1997, Bull. Civ. V, no 119 ............................................................... 271
Cass soc., 15 octobre 1997, Bull. Civ. V, n°318 ...................................................... 272
Cass soc., 3 février 1998, RJS 1998, n° 327 ............................................................... 152
Cass soc., 2 avril 1998, pourvoi n° 96-40.38 ............................................................... 164
Cass soc., 2 avril 1998, D.1999 IR 33 ......... 94 Cass. soc., 2 avril 1998, RJS 1998, p. 372,
n° 572 ....................................................... 94 Cass soc., 7 avril 1998, Bull. civ. V, n° 200,
RJS 1998, n° 569 ...................................... 53 Cass soc., 7 juillet 1998, Mutuelle générale de
l’éducation nationale c/ CPAM de Paris et autres, pourvoi n°96-21451 ..................... 58
Cass soc., 7 juillet 1998, Bull. Civ. V, n°363 ... ........................................................... 20, 64
Cass. soc., 7 juillet 1998, Bull. civ. V, n° 367 ............................................................... 245
Cass soc., 26 mai 1998, RJS 1998, p. 536, no 828 ....................................................... 96
Cass soc., 12 janvier 1999, Bull. civ. V, n° 16 ............................................................... 152
Cass soc., 2 mars 1999, Bull. civ. V n° 86, p. 63, AGS c/ Mignot ................................... 53
Cass. soc., 16 mars 1999, Bull. civ. V, n° 124 ............................................................... 284
Cass soc., 16 mars 1999, pourvoi n° 06-45.353 .................................................... 278
Cass soc., 8 juin 1999, Bull. civ.V, n° 267 . 152 Cass soc., 5 octobre 1999, Compagnie
générale de chauffe c. / Lhomme et a., pourvoi n°97-42.302 .............................. 253
Cass soc., 14 décembre 1999, Bull. civ. V, n° 484 ..................................................... 159
Cass. Soc. 18 juillet 2000, pourvoi n°97-20535 ....................................................... 20
Cass soc., 18 juillet 2000, pourvoi n° 99-13.976 ...................................................... 70
Cass. soc., 18 juillet 2000, Dr. soc. 2000, p. 845 ....................................................... 75
Cass. soc., 24 octobre 2000, Bull. civ. V, n° 342 ....................................................... 75
Cass soc., 21 novembre 2000, pourvoi n° 98-45.837 ...................................................... 69
Cass. soc., 18 décembre 2000, Bull. civ. V, n° 423 ................................................. 69, 75
Cass. soc., 25 avril 2001, Bull. civ. V, n°134 ............................................................... 277
Cass soc., 29 mai 2001, Bull. civ.V, n° 186 282
378
Cass soc., 5 février 2002, pourvoi no 99-46.345 .................................................... 271
Cass soc., 5 mars 2002, Bull. Civ. V, no 85 271 Cass soc., 18 juin 2002, pourvoi n°00-44.134
............................................................... 275 Cass soc., 25 juin 2002, AGS Paris, AJDA
2002, p. 695 ..................................... 59, 105 Cass. soc., 10 juillet 2002, Bull. civ. V, n°248
p. 242 ..................................................... 284 Cass soc., 6 novembre 2002, n°00-43.487 .. 69 Cass soc., 14 janvier 2003, Commune de
Théoule-sur-mer , D. 2003, p. 311 .. 53, 105 Cass soc., 15 janvier 2003, n° 00-46.416 .... 69 Cass. soc., 12 février 2003, pourvoi n° 00-
46.187 .................................................... 243 Cass soc., 11 mars 2003, Bull. Civ. V n° 86,
p. 82 ....................................................... 243 Cass. soc., 11 mars 2003, Bull. civ. V, n° 95
............................................................... 172 Cass. soc., 28 mai 2003, pourvoi n°01-40.293
............................................................... 284 Cass soc., 17 septembre 2003, Bull. civ. V, n°
232 ......................................................... 151 Cass.soc. 29 octobre 2003, UD Mutuelles de
Meurthe et Moselle c. Gillot, RJS 1/04, n°7 ................................................................. 21
Cass soc., 29 octobre 2003, Société Tomecanic SA, pourvoi n°01-43.119 .... 253
Cass soc., 18 février 2004, Sodexho France contre Vivancos, RJS mai 2004, n°507 ... 69
Cass soc., 24 novembre 2004, pourvoi n°02-44.880 ...................................................... 64
Cass. Soc., 15 décembre 2004, Roudil c. Alsthom Power turbomachines, RJS 2/05, n°124 ........................................................ 20
Cass soc., 26 janvier 2005, RJS avril 2005, n° 346 ....................................................... 69
Cass soc., 8 mars 2005, RJS mai 2005, n° 484 ................................................................. 69
Cass. soc., 8 mars 2005, pourvoi n° 02-45114 ............................................................... 247
Cass. soc., 5 avril 2005, pourvoi n°03-46.935 ............................................................... 243
Cass soc., 31 mai 2005, RJS septembre 2005, n° 807 ....................................................... 69
Cass. soc., 2 novembre 2005, pourvoi n° 03-47.215 .................................................... 243
Cass. soc. 09 novembre 2005, n°03-45483, Bull. civ. V, n° 315, p. 278 ..................... 247
Cass soc. 9 novembre 2005, Société Rémy Loisirs c/ M. Caillet, pourvoi n°03-47.188 ................................................................. 66
Cass. soc., 15 février 2006, pourvoi n° 04-93.923 .................................................... 243
Cass. soc., 28 avril 2006, Commune de Ballaruc-les-Bains, pourvoi n° 04-40.895 ............................................................... 175
Cass. soc., 23 mai 2006, Bull. civ. V, n°182, p. 176 ......................................................... 316
Cass. soc., 23 mai 2006, Société Ixis Investor Services, pourvoi n°05-60.160, ............. 321
Cass. soc., 10 octobre 2006, pourvoi n° 04-40.325 .................................................... 245
Cass soc., 18 octobre 2006, D. 2006. IR. 2751, RJS 2006, no 133993Cass soc. 7 novembre 2006, pourvoi n°05-41722 .... 272
Cass soc., 22 mars 2007, pourvoi n° 05-42093 ............................................................... 274
Cass soc., 12 juin 2007, Chambre de commerce et d’industrie du Var c./ Jérôme et autres, Bull. Civ. V, n° 96 ................... 254
Cass. soc., 29 septembre 2007, Ville de Bitche, Bull. civ. V, n° 133 ..................... 175
Cass. soc., 28 novembre 2007, Bull. civ. V, n° 200 ................................................. 169, 249
Cass. soc., 28 novembre 2007, n° 06-42.379 ............................................................... 284
Cass. soc., 5 mars 2008, pourvoi n°07-40.273 ............................................................... 277
Cass. soc., 1er avril 2008, Société Théâtre des Salins c/ Syndicat Synptac CGT et autres, pourvoi n° 07-60.283, Bull. civ.V, n° 76 321
Cass soc., 14 mai 2008, pourvoi n°07-42.341 ............................................................... 273
Cass soc., 12 novembre 2008, n° 07-16.799 69 Cass. soc., 13 novembre 2008, Bull. civ. V,
n°218 ...................................................... 322 Cass. soc., 13 novembre 2008, pourvoi n°07-
60.434 .................................................... 322 Cass. soc., 13 novembre 2008, pourvoi n°08-
60.331 et n° 08-60.332, Bull. civ. V, n° 220 ............................................................... 322
Cass. soc., 17 décembre 2008, pourvoi n° 07-42.839, F-D, Desvages c/ SA HFP Phenix ................................................................. 79
Cass. soc., 27 mai 2009, Bull. civ. V, n° 138 ... ................................................................. 75
Cass soc., 10 novembre 2009, no 08-42.114 ............................................................... 298
Cass soc., 30 septembre 2009, Fondation santé des étudiants de France, Bull. civ. 2009, V, n° 212 ...................................... 252
Cass soc., 18 novembre 2009, n° 08-43.397 et n° 08-43.398, FS-P+B, SAS Open Cascade c/ Nobre et a ........................................... 159
Cass. soc. 2 décembre 2009, n° 08-43.722, Bull . civ. V, n° 273 ................................ 249
Cass. soc., 2 décembre 2009, n° 07-45.304, Bernard c/ Communauté d'agglomération
379
Toulon Provence Méditerranée et a., Bull. civ. V, n° 270 ......................................... 252
Cass. soc., 2 décembre 2009, pourvoi n°08-43.722 .................................................... 169
Cass soc., 12 janvier 2010, Bull. civ. V, n° 3 ............................................................... 151
Cass. soc., 10 février 2010, Bull. civ. V, n° 36 ............................................................... 278
Cass soc., 3 mars 2010, pourvoi n° 08-40.895 ............................................................... 167
Cass soc., 3 mars 2010, SA Collectes valorisation énergie déchets (Coved) et a. c/ Helbert et a., pourvois n° 08-41.600 et n° 08-44.120 .......................................... 165
Cass. soc., 30 mars 2010, SAS Office dépôt c/ Zubiarrain et a., Bull. civ. V, n° 79 ........ 246
Cass soc., 1er juin 2010, Communauté des communes La Domitienne c./ Sté Coved, Bull. Civ. V, n° 120 ........................ 254, 289
Conseil Constitutionnel
CC, décision n°77-83 DC du 20 juillet 1977, Loi modifiant l’article 4 de la loi de finances rectificative pour 1961 ............ 334
CC, 18 septembre 1986, déc. n° 86-217 DC, Rec. CC., p. 141 ....................................... 31
CC, 23 juillet 1996, déc. n° 96-380 DC, Loi relative à l'entreprise France Télécom, AJDA 996, p. 692 ..................................... 32
CC, 26 juin 2003, décision n° 2003-473 DC, ............................................................... 162
CC, décision n°2010-91 QPC du 28 janvier 2011, Fédération nationale CGT des personnels des organismes sociaux, J.O. du 29 janvier 2011, p. 1894 ................ 322, 334
CC, 17 juin 2011, déc. n° 2011-134 QPC, UGFF-CGT et a ..................................... 263
Juridictions administratives
TA Paris, 22 mars 1977, Melle Marcotte, Rec. p. 869 ..................................................... 316
TA Paris, 22 janvier 1996, Société Genicorp ............................................................... 162
TA Toulouse, 11 juillet 2002, Société méridionale des eaux c./ Commune de Balma, BJCP 2003, p. 36, concl. D. ZUPAN ............................................... 73
TA Poitiers, 14 mai 2003, Coindre, AJDA 2003, p. 1280 ......................................... 105
TA Paris, ord. du 29 juin 2009, Société Perfect Nettoyage SA, req. n°0303822, inédit. ..................................................... 170
CAA Nantes, 30 juin 2000, Syndicat mixte de gestion CMFAO, req. n° 98NT01933 .......... ....................................................... 194, 234
CAA Bordeaux, 23 mai 2002, Madame Morandière, req. 98BX00749 ................ 181
CAA Bordeaux, 30 décembre 2003, Michel Alcamo, req. n° 00BX01804 ................. 335
CAA Marseille, 8 mars 2005, Communauté de Marseille Provence Métropole, req. n° ............................................................... 308
CAA Paris 3 juillet 2003, M. Roberty contre Commune de Gennevilliers, req. 99PA02345 ..................................... 181
CAA Paris, 5 octobre 2004, Makiadi Manza, req. n° 02PA02622 ................................. 261
CAA Versailles, 10 février 2005, Commune de Monfort-l’Amaury, req. n° 02VR01196 ............................................................... 258
CAA Nancy, 6 décembre 2007, Bonato, req. n°06NC01512 ........................................ 304
CAA Versailles, 19 février 2009, Syndicat force ouvrière du personnel territoriale de l’agglomération Val de Seine, req. n° 07VE01097 ............................................ 311
CAA Nancy, 27 mai 2010, CCI Troyes et de l'Aube, req. n°09NC01384 ..................... 260
CE, 6 février 1903, Terrier, Rec. p. 94, concl. J. ROMIEU, S. 1903, III, p. 25, concl. J. ROMIEU et note Maurice HAURIOU .... 28
CE, 5 juillet 1918, Roy, Rec. p. 676 .......... 202 CE, 26 janvier 1923, De Robert Lafreygère,
req. n° 62529, Rec. 1923, p. 67 ................ 41 CE, 10 février 1928, Chambre syndicale des
propriétaires marseillais, Rec. p. 222 ....... 50 CE, 25 octobre 1929, Portebois, Rec. p. 950
............................................................... 102 CE, 15 juillet 1932, Jan, Rec. p. 736 .......... 203 CE, 27 mars et 16 octobre 1936, Bonny, Rec.
p. 387 et 881 ........................................... 203 CE, 24 mars 1944, Toutée, Rec. p. 104 ...... 102 CE, 5 avril 1946, Rouy, Rec. p. 107 .......... 203 CE, 5 juin 1946, Henry, Rec. p. 411 .......... 102 CE Sect., 9 mars 1951, Société des concerts
du Conservatoire, Rec. p. 151 ................ 162 CE, 25 avril 1952, Boglione, Rec. p. 155 .... 50 CE Sect., 4 juin 1954, Affortit et Vingtain,
Rec. p. 342 ............................................. 104 CE, 19 octobre 1956, Guillien, Rec., p. 376
............................................................... 317 CE, 16 novembre 1956, Union syndicale des
industries aéronautiques. Rec. p.434 .. 53, 56 CE, 2 décembre 1956, Plessy, Rec. p.1051 102 CE, 8 mars 1957, Jalenques de Labeau, Rec.
p. 158 ....................................................... 29
380
CE, 14 novembre 1957, Leblanc, req. n° 16577 ..................................................... 317
CE Sect., 14 février 1958, Chamley et Perret, Rec. p. 99, .............................................. 233
CE Sect., 20 juin 1958, Régie municipale Gaz-électrique de Bordeaux c/ Ville Bordeaux, Rec. p. 371 ............................ 174
CE Sect., 20 mars 1959, Lauthier, Rec. p. 198 ............................................................... 104
CE, 2 mai 1959, Dr. soc. 1959, p. 553 ........ 52 CE, 27 novembre 1959, Crozet, Gaz. Pal.
1960, 1, p. 205 ....................................... 203 CE Ass., 20 janvier 1965, AJDA 1965, p. 103,
concl. RIGAUD ..................................... 109 CE, 23 février 1966, Brillé, Rec. p. 142 .... 188 CE, 13 juillet 1966, AJDA 1966, p. 615 ...... 53 CE Sect., 16 décembre 1966, Syndicat
national des fonctionnaires et agents préfectures, Rec. p. 662 ......................... 220
CE Sect., 15 décembre 1967, Level, Rec. p. 501, AJDA 1968, II, p. 230, concl. Braibant, D. 1968, jurispr. p. 387, note LECLERCQ .............................. 29, 50, 138
CE, 1er mars 1968, Syndicat unifié des techniciens de la RTF, req. n°64975 et 64976, Dr. soc. 1966, n° 33, concl. QUESTIAUX .......................................... 42
CE, 6 janvier 1971, SA L'indépendante, DA. 1971 ......................................................... 31
CE, 5 octobre 1973, Ministre de la défense c/ Gilles, Rec. p. 749 ................................ 187
CE Ass., 20 juin 1975, Société Acli International Commodity Services Ltd, Rec. p. 373 ............................................. 220
CE Ass., 5 mai 1976, SAFER d'Auvergne et ministre de l’agriculture c/ Bernette , Rec. p. 232152CE Sect., 18 mars 1977, CCI La Rochelle, Rec. p. 153 ............................. 220
CE, 14 mai 1980, Dessambre .................... 102 CE, 22 octobre 1980, J.-C. Oswald, req. n°
16609 ..................................................... 203 CE, 19 décembre 1980, Denis, Rec. p. 566 102 CE, 20 avril 1981, Lanier, Rec. p. 279 ...... 162 CE, 15 mai 1981, Meaux, req. n°15586, Rec.
p. 778 ..................................................... 202 CE Sect. 23 avril 1982, Ville de Toulouse c/
Mme Aragnou, Rec. p. 151 .................... 333 CE, 26 juin 1982, Ministre du budget, Rec.
p. 293 ....................................................... 50 CE, 15 octobre 1982, SA Affichage Giraudy,
req. n°21609 .......................................... 162 CE, 17 décembre 1982, Préfet de la Charente
Maritime, Rec. p. 427 ............................. 50 CE, 29 juin 1983, Min. budget c/ Le Guelinel,
Rec. p. 771 ............................................. 203
CE, 17 octobre 1984, Judlin, Rec. p. 332 ... 261 CE, 13 mars 1985, Mlle Stampf, Rec. p. 664
............................................................... 190 CE, 7 juin 1985, req. n° 55671, 56716, 56717,
57249 et 57250 ....................................... 282 CE, 23 octobre 1987, Siguier, Rec. p. 324 ... 53 CE, 20 janvier 1988, SCI La Colline, Rec.
p. 21 ......................................................... 50 CE, 18 mars 1988, Loupias, Rec. p. 975 ...... 31 CE, 5 septembre 1990, Walmsley, Rec. p. 850
............................................................... 181 CE, 10 juin 1991, Bonneville de Marsangy,
req. n° 89037 .......................................... 303 CE Sect., 26 juillet 1991, Commune Sainte-
Marie de la Réunion, Rec. p. 302 ............. 72 CE, 10 janvier 1992, Association des usagers
de l'eau de Peyreleau, Rec. p. 13 .............. 31 CE, 24 juin 1992, Hennon, req. n°120060 . 189 CE, 7 décembre 1992, Synd. du commerce
moderne de l'équipement de la maison [SYCOMEN] et Société Conforama, Rec. p. 782 ....................................................... 33
CE, 30 juin 1993, Préfet de la Martinique c. Comme de Sainte maire et commune du Robert, Rec. p. 629 ......................... 291, 296
CE 16 février 1994, Bureau d'aide sociale de Pontenx-les-Forges c/ Mme Labat, Rec. p.. 764 ......................................................... 333
CE Ass. 29 avril 1994, Colombani, Rec. p. 209 ......................................................... 333
CE, 29 juillet 1994, Ministère de la défense c/ Solatgesn, req. n°119263 ....................... 187
CE Sect., 6 janvier 1995, Synd. nat. personnels techniques administratifs et service équipement CGCT, Rec. p. 5, JCP G 1995, IV, p. 94, note M.-C. ROUAULT ................................................................. 19
CE Sect., 6 janvier 1995, Ville Paris, Rec. p. 3, JCP G 1995, IV, p. 104 ................... 19
CE, 10 février 1995, Royer, req. n° 78545, Rec. p. 881 ............................................. 189
CE, 7 juin 1995, Comité mixte de la SEML Gaz de Bordeaux, Rec. p. 226 .................. 31
CE, 27 mars 1996, req. n°155790 .............. 282 CE, 15 avril 1996, req. n° 168325, Rec. 1996,
p. 137 ....................................................... 73 CE, 17 juin 1996, Ministère de la défense c/
Pélissier, Rec. p. 996. ............................. 187 CE, 19 juin 1996, Syndicat général CFDT des
affaires culturelles, Dr. adm. 1996, n°383 ............................................................... 105
CE, 26 juin 1996, Commune de Céreste, Rec. p. 246 ..................................................... 105
CE, 4 novembre 1996, Mme Le Bihan, req. n°95665 .................................................. 190
381
CE, 15 janvier 1997, Préfet du Nord c/ Commune de Wattrelos, Rec. p. 911 ..... 296
CE, 6 juin 1997, Société industrielle de nettoyage, pourvoi n° 129437 ................ 162
CE Sect., 3 novembre 1997, Société Million et Marais, Rec. p. 406 .............................. 33
CE, 26 novembre 1997, Tallec, req. no 122242 ............................................................... 305
CE 1er décembre 1997, Syndicat national des inspecteurs des affaires sanitaires et sociales, Rec. p. 453 .............................. 315
CE, 11 mars 1998, Préfecture des Pyrénées-Orientales, Rec. p. 73 ............................. 221
CE, 13 mars 1998, Galiero, req. n°165238 ...... ....................................................... 162, 170
CE, 29 juillet 1998, Garde des Sceaux, min. justice c/ Sté Genicorp, req. n°177952 .. 162
CE, 30 octobre 1998, Ville de Lisieux, Rec. p. 375 ......................................................... 189
CE Ass., 13 novembre 1998, Syndicat professionnel des médecins de prévention de La Poste et de France Télécom et autres, Rec. p. 400 ............................................. 136
CE, 16 novembre 1998, Syndicat départemental CGT de l'équipement et de l'environnement de Corse du Sud, req. n° 180015 ............................................... 188
CE, 8 févr. 1999, Préfet Seine-et-Marne c/ EPA marne, req. n° 150919 ..................... 72
CE, 8 février 1999, Syndicat intercommunal eaux Gâtine, req. n° 156333 .................... 72
CE, 8 février 1999, Union syndicale des fonctionnaires reclassés de la Poste et des télécoms, req. n° 185839 ....................... 319
CE, sect., 26 mars 1999, Sté EDA : Rec. CE 1999, p. 107 ............................................. 33
CE, 7 avril 1999, Commune de Guilherand-Granges, Rec. p. 878 ................................ 67
CE, 15 mai 2000, Glaise, Rec. p. 897 .......... 42 CE, 15 mars 2000, Allais, req. n° 189041 . 189 CE Ass., 29 juin 2001, Berton c/ SNCF, req.
n°222600, Rec. p. 296 ........................... 187 CE, 25 juillet 2001, Mme de Bosson, req. n°
206907 ................................................... 303 CE, 1er octobre 2001, Régie autonome sports
et loisirs, Rec. p. 793 ............................. 189 CE 2 octobre 2002, CCI de Meurthe-et-
Moselle, Rec. p. 319 .............................. 333 CE, 3 février 2003, req. n° 234156 ............ 261 CE Sect., 30 avril 2003, Syndicat
professionnel des exploitants indépendants des réseaux d’eau et d’assainissement, Rec. p. 189 ....................................................... 36
CE, 14 mai 2003, CCI Nîmes Uzès Bagnols Le Vigan, req. n° 245628 ...................... 103
CE, 3 décembre 2003, Houte, JCP A 2004, p. 1146 ......................................................... 29
CE 16 juin 2004, Mutuelle générale des services publics, Rec. p. 611 .................... 36
CE Sect., 22 octobre 2004, M. Lamblin, req. n°245154, BJCL n°1/05, p. 37 ................. 60
CE, 29 octobre 2004, M. Sueur et a., Rec. p. 392 ....................................................... 78
CE, 5 novembre 2004, SA Intermatique, req. n° 261523 ............................................... 317
CE, 10 novembre 2004, M. Hery, Rec. p. 737 ............................................................... 190
CE, 4 avril 2005, Commune de Reichshoffen, req. n°258543 ......................................... 254
CE, 1er juillet 2005, Commune de Saint Paul, req. n°269342, inédit ................................ 89
CE, 20 octobre 2006, Commune d’Andeville ................................................................. 67
CE 6 décembre 2006, Corinne T., req. n° 287453 ................................................... 298
CE Sect., 22 février 2007, Association du personnel relevant des établissements pour inadaptés dit APREI, req. n° 264541, Rec. p. 92, concl. C. VEROT, AJDA 2007, p. 793 ....................................................... 15
CE, 6 avril 2007, Commune d’Aix-en-Provence, req. n°284736, BJCP 2007, n°53, p. 283, concl. F. SENERS, AJDA 2007, p. 1020 ......................................................... 16
CE, 17 octobre 2007, Département de la Haute-Garonne, req. n° 290258 ............. 220
CE, 17 octobre 2007, Département de la Seine-et-Marne, req. n° 294271 ............. 220
CE, 17 octobre 2007, Département des Alpes de Haute Provence, req. n° 290161 ....... 220
CE, 17 octobre 2007, Département des Bouches-du-Rhône, req. n° 294447 ....... 220
CE, 17 octobre 2007, Département des Landes, req. n° 290009 .......................... 220
CE, 17 octobre 2007, Département du Cher, req. n° 294282 ........................................ 220
CE, 17 octobre 2007, Département de la Dordogne, req. n° 294178 ..................... 220
CE, 21 mars 2007, Région des Pays de Loire, req. n°278327 ......................................... 221
CE, 21 mai 2007, M. M, req. n°299307 .... 195 CE, 21 mai 2007, req. n° 264174 .............. 234 CE, 24 octobre 2008, Syndicat intercommunal
d’eau et d’assainissement de Mayotte, req. n°300034. .......................................... 64,170
CE, 26 novembre 2008, req. n° 308053, Région Lorraine ..................................... 260
CE, 5 juin 2009, Société Avenance Enseignement et Santé, req. n° 298641, AJDA 2009, p. 1129 ................................. 73
382
CE, 23 juillet 2010, Selimovic c./ Commune d’Asnières sur Seine, req. n° ................. 288
CE, 3 décembre 2010, Ville de Paris et autre, req. n° 338272, Rec. p. 472 ..................... 15
CE, 4 avril 2011, UGS fonctionnaires CGCT, FSU et a., req. n° 345767 ...................... 263
CE, 7 avril 2011, Syndicat national unitaire travail-Emploi-Formation-Insertion, req. n° 333917 ................................................... 325
CE, 4 mai 2011, Commune de Larmor Plage, req. n°338677 ........................................ 260
CE, 1er juin 2011, SA Bureau Véritas, req. n°341423, mentionné aux tables .............. 63
CE, 24 juin 2011, Ministère de l’écologie, req. n° 347720 et n° 347779 ......................... 279
CE Ass., 26 octobre 2011, Assoc. pour la promotion de l'image et a., req. n° 317827, 317952, 318013 et 318051, Rec. 2012, n°4 ................................................................. 31
CE, 3 février 2012, Commune de Veyrier du lac, req. n° 353737 ................................. 330
CE, 1er mars 2012, Département de la Corse du Sud c. Autocars Roger Ceccaldi, req. 354159 ................................................... 171
CE, 11 avril 2012, Chambre de commerce et d’industrie de Bastia et de la Haute-Corse, req. n°355183, inédit. ............................ 171
Cour de justice CJCE, 6 juillet 1982, aff. C-188 et 190/80,
Rép. française c/ Comm., Rec. CJCE p. 2545 ..................................................... 66
CJCE, 18 mars 1986, Spijkers, aff. C-24 /85, Rec. CJCE 1986, p. I-1119 ................ 47, 55
CJCE, 16 juin 1987, Commission c./ Italie, aff. C-118/85, Rec. 1987, page 2599 ....... 62
CJCE, 21 septembre 1988, C-267/86, Van Eycke, Rec. CJCE 1988, p. 4769 ............. 32
CJCE, 23 avril 1991, aff. C-41/90, Klaus Höfner et Fritz Elser c/ Macroton GmbH, Rec. CJCE p. 1979 ................................... 66
CJCE, 25 juillet 1991, D'Urso e.a. / Marelli, aff. C-362/89, Rec. 1991 p. I-4105 ........ 156
CJCE, 19 mai 1992, Redmond Stichting, aff. C-29/91 .................................................... 62
CJCE, 14 avril 1994, Schmidt, aff. C-392/92, Rec. CJCE p. I- 1311 ......................... 47, 55
CJCE, 8 juin 1994, Commission c./ Royaume-Uni, aff. C-382/92, Rec. 1994 p. I-2435 .. 62
CJCE, 19 septembre 1995, Rygaard, aff. C-48/94, Rec. CJCE p. I-2745 ........ 47, 55, 71
CJCE 16 novembre 1995, FFSA, aff. C-244/94, Rec. CJCE I-4013 ....................... 36
CJCE, 15 octobre 1996, aff. C-298-94, Henke : Dr. adm. 1997, comm. 44 ; Rec. CJCE 1996, I, p. 4989 ............................ 111
CJCE, 11 mars 1997, Ayse Süzen, aff. C-13/95, Rec. CJCE, p. I-1259 ........ 20, 47, 55
CJCE, 10 décembre 1998, Hidalgo, aff. C- 173/96 et C-247/96 .................................. 62
CJCE, 10 décembre 1998, Hernandez Vidal e.a., aff. C-127/96, C-229/ 96 et C-74/97, Rec. CJCE p. I-8179 .......................... 47, 55
CJCE 21 septembre 1999, Albany International BV, aff. C-67/96, Rec. CJCE I-5751 ....................................................... 36
CJCE, 2 décembre 1999, Allen e. a., aff. C-234/98, Rec. CJCE p. I-8643 ............. 47, 55
CJCE 12 septembre 2000, Pavlov et autres, aff. C-180/98 à C-184/98, Rec. CJCE I-6451 ......................................................... 36
CJCE, 14 septembre 2000, Collino et Chiappero, aff. C 343/98, Rec. CJCE p. 6659 ............................................. 46, 108
CJCE, 26 septembre 2000, Mayeur contre Association Promotion de l’information messine, Rec. p. I-07755 .......................... 58
CJCE, 25 janvier 2001, Oy Liikenne Ab, aff. C 172/99, Rec. CJCE 2001, p. 745 .... 46, 65
CJCE 24 janvier 2002, aff. C 51/00, Temco Service Industries, Rec. CJCE 2002, p. 969 ................................................................. 74
CJCE, 6 novembre 2003, Serene Martin et autres, aff. C-4/01 .................................. 178
CJCE, 20 novembre 2003, Abler, aff. C 340/01, RJS avril 2004, n° 474 ............ 75
CJCE, 26 mai 2005, aff. C-297/03, Sozialhilfeverband Rohrbach contre Arbeiterkammer Oberösterreich et österreichischer Gewerkschaftsbund (J.O.C.E. n° C 182, 23 juillet 2005, p. 19 .............................. 111
CJCE, 26 mai 2005, Celtec Ltd c/. John Astley e.a, aff. C-478/03, Rec. p. I-4389 156
CJCE, 15 décembre 2005, aff. C-232/04 et C-233/04, Nurten Güney-Görres et Gul Demir c./ Securicor Aviation (Germany) Ltd et Kötter Aviation Security GmbH & Co. KG, Rec. p. I-11237 .......................... 66
CJUE, Coditel Brabant SA, 13 novembre 2008, aff. C-324/07, BJCP n° 62, 2009, p. 62 ........................................................... 213
CJUE, 6 septembre 2011, aff. C-108/10, Ivana S. c/ Ministero dell’Istruzione dell’Università e della Ricerca ............... 110
383
Autorité de la concurrence Cons. conc., avis n°96-A-10 du 25 juin 1996
relatif à une demande d’avis de l’Association française des banques concernant le fonctionnement des services financiers de la Poste au regard du droit de la concurrence .......................................... 49
Cons. conc., avis n° 99-A-21, 8 déc. 1999 relatif à l'intervention des parcs départementaux de l'équipement dans le secteur de la production d'émulsions de bitume et des travaux routiers, BOCC 31 mars 2000 ; Mon. TP 5 mai 2000, n° 5032, suppl. TO, p. 412 ....................... 31
Cons. conc., 27 juin 2006, déc. n° 06-MC-02, Commune de Bouc Bel Air ..................... 37
Tribunal des conflits TC, 22 février 1921, Société commerciale de
l’Ouest Africain, D. 1921, III, p. 1, concl. Paul MATTER ......................................... 28
TC, 25 novembre 1963, Dame Veuve Mazerand, Rec. p. 792 ................ 104
TC, 13 décembre 1976, Époux Zaoui, publié au Recueil ................................................ 50
TC, 28 mai 1979, Syndicat d'aménagement de la ville nouvelle de Cergy Pontoise c/ Cie générale d'entreprise automobile, Rec. p. 658 ....................................................... 50
TTC, 13 février 1984, Commune de Pointe à Pitre c/ Martin, Rec. p. 523 ...................... 50
TC, 20 janvier 1986, SA Roblot, Rec. p. 298 ................................................................. 56
TC, 12 janvier 1987, Société navale de chargeurs Delmas-Vieljeux, D. 1987, jurispr. p. 207 ........................................... 50
TC, 12 janvier 1987, Cie des eaux et de l'ozone c/ SA Établissements Vetillard, Rec. p. 442 ....................................................... 50
TC, 19 décembre 1988, Ville Cannes c/ Ponce, Rec. p. 497 ................................ 104
TC, 22 juin 1992, Berger, Rec. p. 840 ......... 50 TC, 25 mars 1996, B., Rec. p. 535 ............. 139 TC, 7 octobre 1996, Breton c/ Commune de
Gennes, Rec. p. 754 ................................. 50 TC, 25 mars 1996, Préfet de la Région Rhône-
Alpes, dit Berkani, Rec. p. 535 ; RFDA 1996, p. 819, concl. MARTIN ; AJDA 1996, p. 354 ............................................. 16
TC., 24 juin 1996, Préfet du Lot-et-Garonne, Rec. p. 547 ............................................. 233
TC, 10 mars 1997, Préfet de la région Alsace, préfet du Bas-Rhin c/ CA de Colmar, Rec. p. 526 ..................................................... 194
TC, 29 septembre 1997, Préfet de l'Isère, Rec. p. 533 ..................................................... 194
TC, 19 janvier 1998, Association syndicale des propriétaires du lotissement Erima c/ Commune d’Arue, Rec. p. 777 ................ 50
TC, 15 mars 1999, Faulcon c/ Commune de Châtellerault, Rec. p. 442 ......... 50, 315, 316
TC, 7 juin 1999, Centre médico-psycho-pédagogique c/ Mme Héraudet, req. n°3127 ............................................................... 233
TC, 18 juin 2001, Potreau c/ Société de transports de la vallée de la Basse-Seine, req. n°3248 ............................................. 316
TC, 22 octobre 2001, Cabanel c. Recteur de l’académie de Grenoble, req. n° 3271 ..... 28, 138
TC, 19 janvier 2004, Devun et autres c./ Commune de Saint-Chamond, req. n°3393, Rec. p. 509 ............................................... 60
TC, 21 juin 2004, Commune de Saint-Léger-sur-Roanne c/ Mmes Desbordes, req. n°3415 ...................................................... 60
TC, 29 décembre 2004, Mme Durand c./ Centre hospitalier régional de Metz-Thionville, Rec. p. 524 ............................. 60
TC, 18 juin 2007, Préfet de l'Isère c/ Université Joseph Fourier, JCP S n°29, 17 juillet 2007, act. 356 ................................ 80
!
384
#49:Z*5G8<@56C7:*
*
-*
Accord collectif : 91 et s., 164, 276 Accord :
− du salarié : 94, 149, 160, 164 et s., 180, 186.
− de l'agent : voir mise à disposition Activité publique : 12 Administration ou collectivité d'origine : 116, 193, 260, 303 et s. Agent public :
− agent contractuel de droit public : 293 et s.
− fonctionnaire de droit public : 27, 102 et s.
Agent non titulaire: − avancement et déroulement de
carrière : 296 et s. − évaluation : 297 et s.
Application conventionnelle des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail : 164, 284. Application volontaire des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail : 81, 86 et s., 164, 186 et 284. Association : 59 et s., 105. Autorisation administrative de transfert : voir salarié protégé Avantage individuel acquis : 271 et s., 279, 308.
N*
Biens : 35, 64, 119, 128, 206, 238.
2*
Clause substantielle : 288, 337. Comité technique : 209, 212. Commission administrative paritaire : 210, 298, 335. Compétence juridictionnelle : 241, 250, 254 et s. Convention collective : 24, 36, 42, 81 et s., 92, 94 et s., 136 et s., 144, 160 et s., 176, 177,
187, 237, 247, 270 et s., 279, 284, 316, 324 et s. Continuité de l'emploi : 23, 44, 80, 133, 338. Contrat de travail :
- de droit privé : 24, 41, 87, 92 et s., 149 et s., 159, 160 et s., 174, 199 à 204, 241, 242, 244 à 254, 270 et s.
- de droit public à durée indéterminée : 181, 291, 297, 298.
- de droit public à durée déterminée : 292.
Contrats publics : − convention d'occupation du domaine
public : 10, 26, 79, 80. − contrat de partenariat : 77 et s. − délégation de service public : 15, 42,
49, 64 et s. − marché public : voir marché public.
Coopération intercommunale : voir établissement public de coopération intercommunale.
+*
Décentralisation : 34, 37, 98, 117 et s., 127 et s., 144, 205, 215, 217 et s., 256, 301 et s. Délégation de service public : voir contrats publics. Démission :
− agent public : 202 et s., 256. − salarié : 159, 244 et s., 253.
Détachement : voir mobilité Dettes (cession de) : 94, 270, 272 et s. Documents de consultation : 88 et s., 96, 163, 260. Droit de la concurrence : 16 et s., 32 et s., 36, 66, 98, 212. Droit d'opposition : 149, 153, 165, 187, 257.
%**
Egalité de traitement des candidats (principe d') : 89, 90, 162, 170, 307. Egalité de traitement "social" : 48, 322. Entité économique autonome : 19, 20, 47, 56, 57, 60 à 79, 84, 85, 89, 94, 149, 152, 156, 157, 177, 243, 246, 277, 282.
− éléments corporels et incorporels : 55, 63, 65, 78.
− identité d'activité : 20, 21, 47, 53 à 62, 65, 66, 69, 70 à 79, 84, 88, 89, 177.
− stabilité de l'activité : 71.
385
Etablissement public : - création : 32, 125, 136, 173 et s. - établissement public administratif :
193, 313. - établissement public industriel et
commercial : 26, 134, 136 et s., 175, 231, 236, 313.
- privatisation du régime juridique : 26, 124, 133, 134, 230, 231, 300, 313 et s., 320, 326.
Etablissement public de coopération intercommunale :
− création : 30, 128, 130, 132, 206, 207, 210.
− extension : 127, 128. − fusion : 206, 209, 210. − retrait d'une commune : 132, 133.
Externalisation : voir mode de gestion d'une activité publique
P*
Fonction publique : − droit de la fonction publique : 99 et s.,
112, 130, 133, 191, 202, 252, 285, 287 et s., 298, 330, 332.
− notion de fonction publique : 27, 59, 120, 179 et s., 189.
− statut de la fonction publique : 42, 98, 109, 114 et s., 121 et s., 128, 144, 191, 196, 199, 207, 208, 225, 227 et s., 232, 258, 260, 291 et s., 307, 309, 313 et s.
J*
Garantie d'emploi : 43, 94, 168. Garantie fondamentale : 113, 115, 179.
O*
Hygiène et sécurité : voir comité d'hygiène et sécurité.
#*
Information : 146.
− information des candidats : 161 et s., 168 et s.
− information des personnels : 148, 157 et s., 172, 237, 249.
Institutions représentatives du personnel : 52 et s., 275, 280, 281 et s., 320 et s., 333. Intégration : 103, 117, 127, 178, 181, 201, 227 et s., 238, 256, 272, 285, 291, 302, 305 et s., 309, 315, 317 et s., 320 et s. Intéressement : 168, 238, 327 et s.
F*
Juridictions : voir compétence juridictionnelle
/**
Licenciement : 58, 61, 90, 159, 161, 172, 242 et s., 260 et s.
− Licenciement économique : 251, 271.
− Licenciement pour faute : 242, 247.
− Licenciement sui generis : 252. Lien contractuel : voir contrat de travail
D*
Marché public : 37, 42, 49, 67 et s., 94, 96, 151, 162, 165, 169 et s., 196, 202, 213, 247, 271, 284.
- marché de travaux : 70. - marché de "service public" ou marché
public de service : 10, 37, 73, 96. Mise à disposition :
− accord de l'agent : 194 et s., 209 et s. − convention : 191, 193 et s., 196, 198,
201. − de plein droit : 214, 263. − durée : 196, 234. − remboursement : 116, 197 et s., 214,
215. − transitoire : 197, 224, 226, 227, 232,
237. Mode de gestion d'une activité publique :
− libre choix : 30 et s., 51, 177, 330. − réversibilité : 51. − reprise en régie : 10, 23, 30, 37, 51 à
62, 98, 102, 103, 105, 147, 172 à
386
188, 250 et s., 274, 285, 288, 289, 291, 295.
− externalisation : 23, 26, 30, 37, 51, 72 à 77, 99, 155, 156, 176, 196, 203 et s., 300, 329, 330.
Modification substantielle : − de l'activité : 23, 54 et s., − des clauses du contrat : 180, 186, 200,
244 et s., 251 et s. Mobilité : 112 et s., 127, 141, 190 et s., 205, 225, 230, 232 et s., 251 et s., 291, 292, 298, 303, 314, 321.
− Mise à disposition : voir sous ce terme
− Position de détachement : 113, 117, 123, 128, 197, 201, 207, 222, 228, 229 et s., 256, 263, 302, 303 et s., 313 et s., 230, 321.
− position hors cadre : 113, 304.
"**
Négociation collective : 93, 137, 158, 175, 269, 276, 280, 341. Notification :
− d'attribution d'un contrat public : 156 − de changement d'employeur : 159.
Nullité : − procédure de publicité et mise en
concurrence : 89. − procédure de licenciement : 242.
1*
Ordre public de direction et ordre public de protection : 154 Opérateur économique : 24, 44, 63, 74, 92, 156, 162, 269, 273, 275, 285, 330, 335.
− de droit privé : 42, 49, 100, 147, 199. − de droit public : 48, 49, 50, 90, 122,
123, 259, 260, 333. Organisme d'accueil : voir mise à disposition ou détachement. Organisme de droit public gérant un service public industriel et commercial : 58, 124, 251.
,*
Participation à l'exécution d'une mission de service public administratif (critère de) : 28, 104 et s. Participation aux bénéfices de l'entreprise : 238, 327 et s. Participation des travailleurs (principe de) : 158, 322, 334. Pouvoir de direction de l'employeur : 151, 276, 287, 337. Pouvoir disciplinaire : 304, 319. Proposition d'un nouveau contrat : 61, 106, 123, 250 et s.
Q*
Question préjudicielle : 70, 255, 288 et s. Question prioritaire de constitutionnalité : 263.
&*
Reclassement : 246 et s., 259 et s., 318, 333. Reclassification : 318. Refus du transfert : 61, 90, 125, 153, 161, 165, 172, 182, 187, 195, 209, 234, 243, 244 et s., 259 et s., 287. Réintégration :
− salarié de droit privé : 87, 242 et s. − agent public : 117, 259 et s.
Régie : − régie simple : 174. − régie autonome dépourvue de
personnalité morale : 26, 175 et s. − régie autonome avec personnalité
morale : 26, 175 et s. Rémunération :
− traitement : 260, 289. − régime indemnitaire : 230, 307 et s. − avancement : 114, 197, 199, 202, 228
et s., 233, 263, 294 et s., 298, 304 et s., 315 et s., 327 et s.
Renouvellement de contrat public : 10, 16, 33, 36, 49, 65, 73, 76, 79, 83, 95, 122, 156, 162, 171, 244. Reprise en régie : voir mode de gestion d'une activité publique. Réorganisation administrative : 11, 110, 277.
387
Révision générale des politiques publiques : 117, 121 et s., 332. Rupture du contrat de travail : 241, 246, 250, 288.
'*
Salarié protégé : 165, 246. Société anonyme à capitaux publics : 10, 29, 135 et s., 238, 239, 239, 314, 214, 317 et s. Société dédiée : 279. Suppression d'un emploi : 248, 258, 261 et s.
(*
Transfert d'entreprise : 11, 20, 21, 24, 46, 66, 70, 106, 110, 153, 155, 159, 170, 289.
− transfert partiel : 152, 165.
− transfert d'ordre public : 40, 77, 84, 107, 149 et s., 186 et s., 244 et s.
Transfert de compétences : 34, 206.
− horizontal : 126, 306 et s.
− vertical : 126, 205, 302 et s. Travailleur (notion de) : 107 et s., 153 et s., 157 et s., 182.
*