cours - series numeriques 35

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c  Christophe Bertault - MPSI Séries numériques 1  Définitions et premi ères propriétés 1.1  Définitions nition  (Série numérique)  Soit  ( un) nN  une suite complexe. Pour tout  n ∈  N on pose :  U n  = n k=0 u k  (n ème somme partielle ). La suite  (U n) nN  est alors appelée la  série de terme général  un et notée un.     Explication  Avec cette dénition, une série n’est jamais qu’une suite. Du coup, avec les notations précédentes, dire que la série un converge (resp. diverge) revient simplement à dire que la suite des sommes partielles  ( U n) nN  converge (resp. diverge), et la nature de la série un  est sa convergence ou divergence.  Seule ment voi là, si les séries ne son t que des suites, pourquo i faire une théor ie des séri es ? La théor ie des suites n’est-elle pas susan te? La réponse est non. La grand e question de la théorie des suites est : à quell e conditio n la suit e (un ) nN est- elle conv ergen te ? La grande question de la théorie des séries est quant à elle : à quelle condition sur la suite ( un) nN la  série un  est-elle conv ergente ? Cette question appelle des résultats spéciques qui sont l’objet du chapitre. nition  (Somme d’une séri e)  Soit  ( u n ) nN  une suite complexe. Si la série u n converge, sa limite est notée n=0 u n et appelée la  somme  de la série.     Explication  Comme dans le cas des suite s, les premi ers termes d’une séri e n’ont pas d’inu ence sur sa nature (convergence ou divergence). Ils aectent en revanche la valeur de sa somme lorsqu’elle est convergente. Théorème  (Série géométriqu e)  Soit  q  ∈  C. La série q n , dite  série ométriq ue de ra ison  q , est convergente si et seulement si |q | < 1. Dans ce cas : n=0 q n =  1 1 q . Démonstration  Pour tout n N : n k=0 q k = 1 q n+1 1 q  si  q  = 1 , n + 1  si  q  = 1. Le résultat découle de n os connaissances sur les limites des  suites géométriques.   Exemple  Soit  α R. La série  1 n α , qu’on appelle une  série de Riemann , est convergente si  α 2  et divergente si  α 0. Mais que se passe-t-il si  α  ]0 , 2[ ? Un peu de pati enc e... En eet  Pour tout  n N , posons  U n = n k=1 1 k α .  Supposons  α    2. La suite  ( U n) nN  est croissante car  U n+1 U n = 1 (n + 1) α   0  pour tout  n N . Pour montrer qu’elle converge, i.e. que  1 n α  converge, il nous reste à montrer que  (U n ) nN  est majorée. Or pour tout n 2 :  U n = 1+ n k=2 1 k α α2  1+ n k=2 1 k 2   1+ n k=2 1 k(k 1)  = 1+ n k=2  1 k 1  −  1 k  = 1+ 1  1 n 2.  Supposons  α   0. Pour tout  n ∈  N  :  U n α0 n k=1 1 =  n  et pa r ail leur s  lim n→∞ n  = ∞. Le théorème de minoration montre alors que  lim n→∞ U n = . Comme voulu,  1 n α  diverge. 1

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  • c Christophe Bertault - MPSI

    Sries numriques

    1 Dfinitions et premires proprits

    1.1 Dfinitions

    Dfinition (Srie numrique) Soit (un)nN une suite complexe.

    Pour tout n N on pose : Un =n

    k=0

    uk (nme somme partielle). La suite (Un)nN est alors appele la srie de terme

    gnral un et note

    un.

    Explication

    Avec cette dfinition, une srie nest jamais quune suite. Du coup, avec les notations prcdentes, dire que la srie

    un

    converge (resp. diverge) revient simplement dire que la suite des sommes partielles (Un)nN converge (resp. diverge), et

    la nature de la srie

    un est sa convergence ou divergence.

    Seulement voil, si les sries ne sont que des suites, pourquoi faire une thorie des sries ? La thorie des suites nest-ellepas suffisante ? La rponse est non. La grande question de la thorie des suites est : quelle condition la suite (un)nNest-elle convergente ? La grande question de la thorie des sries est quant elle : quelle condition sur la suite (un)nNla srie

    un est-elle convergente ? Cette question appelle des rsultats spcifiques qui sont lobjet du chapitre.

    Dfinition (Somme dune srie) Soit (un)nN une suite complexe. Si la srie

    un converge, sa limite est note

    n=0

    un

    et appele la somme de la srie.

    Explication Comme dans le cas des suites, les premiers termes dune srie nont pas dinfluence sur sa nature(convergence ou divergence). Ils affectent en revanche la valeur de sa somme lorsquelle est convergente.

    Thorme (Srie gomtrique) Soit q C. La srie

    qn, dite srie gomtrique de raison q, est convergente si et

    seulement si |q| < 1. Dans ce cas :n=0

    qn =

    1

    1 q .

    Dmonstration Pour tout n N :n

    k=0

    qk =

    1 qn+11 q si q 6= 1,n+ 1 si q = 1.

    Le rsultat dcoule de nos connaissances

    sur les limites des suites gomtriques.

    Exemple Soit R. La srie 1

    n, quon appelle une srie de Riemann, est convergente si > 2 et divergente si 6 0.

    Mais que se passe-t-il si ]0, 2[ ? Un peu de patience. . .

    En effet Pour tout n N, posons Un =n

    k=1

    1

    k.

    Supposons > 2. La suite (Un)nN est croissante car Un+1 Un = 1(n+ 1)

    > 0 pour tout n N. Pour

    montrer quelle converge, i.e. que 1

    nconverge, il nous reste montrer que (Un)nN est majore. Or pour

    tout n > 2 : Un = 1+

    nk=2

    1

    k

    >2

    6 1+

    nk=2

    1

    k26 1+

    nk=2

    1

    k(k 1) = 1+n

    k=2

    (1

    k 1 1

    k

    )= 1+

    (1 1

    n

    )6 2.

    Supposons 6 0. Pour tout n N : Un60

    >

    nk=1

    1 = n et par ailleurs limn

    n = . Le thorme de

    minoration montre alors que limn

    Un =. Comme voulu, 1

    ndiverge.

    1

  • c Christophe Bertault - MPSI

    1.2 Divergence grossire

    Thorme (Condition ncessaire de convergence dune srie) Soit (un)nN une suite complexe.

    Si

    un converge, alors limn

    un = 0.

    Dmonstration Pour tout n N, posons Un =n

    k=0

    uk et faisons lhypothse que

    un converge. Alors si S

    dsigne la somme de cette srie : un = Un Un1 n

    S S = 0.

    Dfinition (Divergence grossire) Soit (un)nN une suite complexe.

    On dit que la srie

    un diverge grossirement si limn

    un 6= 0.

    Si

    un diverge grossirement, alors

    un diverge (tout court).

    En pratique Quand on vous demande de dterminer la nature dune srie

    un, commencez tout de suite par

    vous demander si oui ou non limn

    un = 0. Si la rponse est non, cest termin :

    un diverge (grossirement). Si la rponse est

    oui, vous ne pouvez rien en dduire.

    $$$ Attention ! La rciproque de limplication

    un converge = limn

    un = 0 est fausse en gnral : il ne suffit

    pas de montrer que limn

    un = 0 pour montrer que

    un converge. Croire le contraire, cest avouer quon na absolument rien

    compris la thorie des sries, car la thorie des sries na de pertinence qu partir du moment o lon ne peut se contenter dela seule thorie des suites. En rsum : une somme infinie de quantits qui tendent vers 0 peut ne pas converger.

    Exemple La srie de Riemann 1

    n, dite srie harmonique, diverge. Et pourtant lim

    n1

    n= 0.

    En effet (Preuve n 1) Raisonnons par labsurde en supposant la srie 1

    nconvergente de somme S.

    Alors :2n

    k=n+1

    1

    k=

    2nk=1

    1

    k

    nk=1

    1

    kn

    S S = 0.

    Pourtant pour tout n N :2n

    k=n+1

    1

    k>

    2nk=n+1

    1

    2n=

    (2n) (n+ 1) + 12n

    =1

    2. Contradiction !

    En effet (Preuve n 2) La fonction x 7 ln(1 + x) tant concave sur ] 1,[, son graphe est situ sous satangente en 0 dquation y = x. Il en dcoule que pour tout x ] 1,[ : ln(1 + x) 6 x. Du coup, pour toutn N :

    nk=1

    1

    k>

    nk=1

    ln

    (1 +

    1

    k

    )=

    nk=1

    (ln(k + 1) ln k

    )= ln(n + 1). Or lim

    nln(n + 1) = . Le thorme

    de minoration montre alors que limn

    nk=1

    1

    k=, donc comme voulu que

    1ndiverge.

    1.3 Lien suite-srie

    Thorme (Lien suite-srie) Soit (an)nN une suite complexe. Alors la suite (an)nN converge si et seulement si lasrie

    (an+1 an) converge.

    Dmonstration Pour tout n N, par simplification tlescopique :n1k=0

    (ak+1 ak) = an a0. Il en dcouleque le terme de gauche possde une limite finie lorsque n tend vers si et seulement si le terme de droite fait demme.

    Explication Grce ce thorme, on peut tudier une suite en se servant des techniques spcifiques de la thoriedes sries, ou au contraire tudier une srie au moyen des techniques de la thorie des suites.

    2

  • c Christophe Bertault - MPSI

    Exemple La srie

    ln

    (1 +

    1

    n

    )diverge.

    En effet La suite (lnn)nN diverge, donc la srie(

    ln(n+ 1) lnn)galement.

    1.4 Oprations sur les sries

    Thorme (Oprations sur les sries) Soient (un)nN et (vn)nN deux suites complexes.

    Pour tout C,

    un converge si et seulement si

    (un) converge.

    Si

    un et

    vn convergent, alors

    (un + vn) converge.

    Si

    un converge mais

    vn diverge, alors

    (un + vn) diverge.

    Dmonstration Rien prouver : nous connaissons ce rsultat pour les suites et justement les sries sont dessuites.

    $ $ $ Attention !

    Si

    un et

    vn divergent toutes les deux, on ne peut rien dire en gnral de

    (un + vn). Par exemple 1

    ndiverge

    et 1

    n+ 1

    n= 2

    ndiverge aussi, mais

    1n 1

    n= 0 converge.

    Si

    un et

    vn convergent, on ne peut rien dire en gnral de

    unvn. Nous verrons plus tard que (1)n

    nconverge,

    mais( (1)n

    n (1)

    n

    n

    )= 1

    ndiverge.

    2 Sries numriques termes positifs

    On tudie prsent les sries dont le terme gnral est positif sous-entendu : ou nul. Ce qui est vrai de ces sries seraiten fait vrai des sries dont le terme gnral est ngatif (ou nul). Lessentiel est donc, dans cette section, que le signe du termegnral soit constant.

    $ $ $ Attention ! Quand vous utilisez lun des thormes de cette section, noubliez surtout pas de vrifier et mentionnerla positivit des suites tudies. Hypothse importante !

    2.1 Thorme fondamental des sries termes positifs

    Thorme (Thorme fondamental des sries termes positifs) Soit (un)nN une suite relle positive. On pose,

    pour tout n N : Un =n

    k=0

    uk.

    La suite (Un)nN est croissante et possde donc une limite. La srie

    un converge si et seulement si la suite (Un)nN est majore.

    Dmonstration La suite (Un)nN est croissante car Un+1 Un = un+1 > 0 pour tout n N. Le reste nestquune rcriture du thorme de la limite monotone dans le cas croissant.

    Explication Quand on tudie une srie termes positifs, ce thorme ramne tout problme de convergence unproblme de majoration. La question nest pas dans ce cas : La limite existe-t-elle ? mais : Est-elle finie ? .

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  • c Christophe Bertault - MPSI

    2.2 Critre de condensation

    Thorme (Critre de condensation) Soit (un)nN une suite relle positive dcroissante. Alors

    un et

    2nu2n

    ont mme nature.

    Dmonstration Pour tout n N :

    2n1k=1

    uk =

    1 terme(u1) +

    2 termes (u2 + u3)+

    4 termes (u4 + u5 + u6 + u7)+

    8 termes (u8 + . . .+ u15)+ . . .+

    2n1 termes (u2n1 + . . .+ u2n1) =

    n1k=0

    2k1i=0

    u2k+i.

    Or (un)nN est dcroissante donc u2k+2k 6 u2k+i 6 u2k pour tous k N et i J0, 2k 1K.

    Du coup

    n1k=0

    2k1i=0

    u2k+2k 6

    n1k=0

    2k1i=0

    u2k+i 6

    n1k=0

    2k1i=0

    u2k pour tout n N, et donc :

    1

    2

    nk=1

    2ku2k =

    n1k=0

    2ku2k+1 =

    n1k=0

    2ku2k+2k 6

    n1k=0

    2k1i=0

    u2k+i =

    2n1k=1

    uk 6

    n1k=0

    2k1i=0

    u2k =

    n1k=0

    2ku2k .

    Les sries

    un et

    2nu2n sont termes positifs, donc en vertu du thorme fondamental, elles convergent si

    et seulement si elles sont majores.

    Si la srie

    un est majore, disons par M , alorsn

    k=1

    2ku2k 6 22n1k=1

    uk 6 2M pour tout n N,

    donc

    2nu2n est majore.

    Si la srie

    2nu2n est majore, disons par M, alors

    nk=1

    uk2n1>n6

    2n1k=1

    uk 6

    n1k=0

    2ku2k pour tout

    n N, donc

    un est majore.

    Les sries

    un et

    2nu2n sont finalement bien de mme nature.

    Explication La preuve prcdente repose sur lide que pour sommer tous les un, n dcrivant N, on peut les sommer

    de manire condense par paquets de tailles 1, 2, 4, 8 . . . Il se trouve alors, grce lhypothse de dcroissance, que le paquet u2n + u2n+1 + u2n+2 + . . .+ u2n+11 de 2

    n termes compte autant que la quantit 2nu2n .

    Thorme (Srie de Riemann) Soit R. La srie 1

    n, quon appelle une srie de Riemann, converge si et

    seulement si > 1.

    Dmonstration Nous avons dj trait le cas 6 0. Supposons donc > 0. La suite

    (1

    n

    )nN

    est alors

    positive et dcroissante. En vertu du critre de condensation, les sries 1

    net 2n

    (2n)=(

    21)n

    ont

    donc mme nature. Or la srie(

    21)n

    est gomtrique et converge si et seulement si21 < 1, i.e. > 1.

    Cest le rsultat voulu.

    2.3 Comparaison au moyen dingalits

    Thorme (Comparaison au moyen dingalits) Soient (un)nN et (vn)nN deux suites relles positives. On supposeun 6 vn partir dun certain rang.

    (i) Si

    vn converge, alors

    un converge aussi.

    (ii) Si

    un diverge, alors

    vn diverge aussi.

    4

  • c Christophe Bertault - MPSI

    Dmonstration Notons N un rang partir duquel un 6 vn et posons : Un =

    nk=0

    uk et Vn =

    nk=0

    vk pour

    tout n N. Alors pour tout n > N : Un UN =n

    k=N+1

    uk 6

    nk=N+1

    vk = Vn VN (ingalit ).

    (i) On suppose

    vn convergente. Alors (Vn)nN est majore donc (Un)nN aussi en vertu d. Comme vouluun converge.

    (ii) On suppose

    un divergente. Alors limn

    Un = donc limn

    Vn = en vertu d et du thorme deminoration. Comme voulu

    vn diverge.

    Exemple La srie 1

    n2(2 + sinn)est convergente.

    En effet Pour tout n N : 0 6 1n2(2 + sinn)

    61

    n2. En particulier

    1n2(2 + sinn)

    est une srie termes

    positifs et comme nous savons que 1

    n2converge, il en est de mme de cette srie.

    2.4 Comparaison au moyen de grands O ou petits o

    Thorme (Comparaison au moyen de grands O ou petits o) Soient (un)nN et (vn)nN deux suites relles positives.On suppose un =

    nO(vn) ou bien que un =

    no(vn), mais dans ce cas on a aussi la relation grand O .

    (i) Si

    vn converge, alors

    un converge aussi.

    (ii) Si

    un diverge, alors

    vn diverge aussi.

    Dmonstration Puisque un =n

    O(vn), il existe un rang N et un un rel K > 0 tels que pour tout n > N :

    |un| 6 K|vn|, i.e. ici un 6 Kvn. Utiliser ensuite le thorme de comparaison au moyen dingalits.

    Exemple La srie necos n

    n3 n converge.

    En effet Pour commencer la suite

    (necos n

    n3 n

    )nN

    est positive. Par ailleurs

    necosn

    n3 n necos n

    n52

    ,

    donc

    necos n

    n3 n =n O(

    1

    n2

    ). Comme la srie de Riemann

    1n2

    converge (2 > 1), cela montre bien que necos nn3 n converge aussi.

    Thorme (Srie de Bertrand) Soient , R. La srie 1

    n(lnn), quon appelle une srie de Bertrand, converge

    si et seulement si : soit > 1, soit = 1 et > 1.

    Dmonstration

    Si > 1, posons = + 12

    > 1. Alorsn

    n(lnn)=

    1

    n1

    2 (lnn)n

    0 car 12

    > 0. Ainsi

    1

    n(lnn)=

    nO

    (1

    n

    ). Or la srie de Riemann

    1n

    converge car > 1. Par ailleurs la srie 1

    n(lnn)

    est termes positifs. Cette srie est donc convergente par comparaison.

    Si < 1, posons = + 12

    < 1. Alorsn(lnn)

    n= n

    12 (lnn)

    n0 car

    12

    < 0. Ainsi

    1

    n=

    nO

    (1

    n(lnn)

    ). Or la srie de Riemann

    1n

    diverge car < 1. Par ailleurs la srie 1

    n(lnn)

    est termes positifs. Cette srie est donc divergente par comparaison.

    Si = 1 et < 0, limn

    n(lnn)

    n= 0 donc

    1

    n=

    nO

    (1

    n(lnn)

    ). Or la srie harmonique

    1ndiverge et 1

    n(lnn)est termes positifs, donc cette srie diverge.

    5

  • c Christophe Bertault - MPSI

    Supposons enfin que = 1 et > 0. Dans ces conditions la suite(

    1

    n(lnn)

    )n>2

    est positive et dcroissante.

    Le critre de condensation nous permet den dduire que les sries 1

    n(lnn)et 2n

    2n(ln(2n)

    ) ontmme nature. En dautres termes, les sries

    1n(lnn)

    et 1

    nont mme nature. Nous savons quelles

    convergent si et seulement si > 1. Cest justement le rsultat souhait.

    2.5 Comparaison au moyen dquivalents

    Thorme (Comparaison au moyen dquivalents) Soient (un)nN et (vn)nN deux suites relles positives. On supposeun

    nvn. Alors

    un et

    vn ont mme nature.

    Dmonstration Puisque un n

    vn, on a aussi un =n

    O(vn) et vn =n

    O(un). Utiliser alors le thorme de

    comparaison au moyen de grands O.

    Exemple La srie 1

    n2(n+

    n) converge.

    En effet Cette srie est termes positifs et1

    n2(n+

    n)

    n1

    n3. Comme la srie de Riemann

    1n3

    converge

    (3 > 1), cest aussi le cas de 1

    n2(n+

    n) .

    Exemple Il existe un rel , appel la constante dEuler, tel que :n

    k=1

    1

    k=

    nlnn+ + o(1).

    En effet Posons, pour tout n N : an =n

    k=1

    1

    k lnn. Nous souhaitons prouver que la suite (an)nN

    converge. En vertu du lien suite-srie, il nous suffit pour cela de montrer que la srie

    (an+1 an) converge.Cest ce que nous allons faire. Pour tout n N :

    an+1 an =(n+1k=1

    1

    k ln(n+ 1)

    )(

    nk=1

    1

    k lnn

    )=

    1

    n+ 1 ln(n+ 1) + lnn = ln

    (1 1

    n+ 1

    )( 1n+ 1

    )

    n 12(n+ 1)2

    n

    12n2

    .

    Ceci prouve pour commencer que la srie

    (an+1 an) est termes ngatifs partir dun certain rang en faitds le rang 1. Mais par ailleurs la srie de Riemann

    1n2

    converge (2 > 1) donc par comparaison

    (an+1 an)aussi. Comme voulu (an)nN converge, et si nous notons sa limite cest termin.

    3 Convergence absolue et sries alternes

    3.1 Convergence absolue

    Dfinition (Convergence absolue) Soit (un)nN une suite complexe. On dit que la srie

    un est absolument convergente

    ou quelle converge absolument si la srie

    |un| converge.

    Exemple La srie (1)n

    n2est absolument convergente car la srie de Riemann

    1n2

    converge (2 > 1).

    Bien sr, tout le monde sinterroge : une srie absolument convergente est-elle convergente ? La rponse est oui. Pour leprouver, introduisons quelques notations.

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  • c Christophe Bertault - MPSI

    Dfinition (Parties positive et ngative dun rel) Soit x R.

    On pose x+ = max{x, 0

    }et x = max

    { x, 0

    }. Le rel x+ est appel la partie positive de x et x est appel sa

    partie ngative.

    |x| = x+ + x et x = x+ x.

    Explication Les graphes suivants illustrent cette dfinition. Notez bien que la partie ngative dun rel est. . . positive !

    y = x+ y = xy = |x|= x+ + x

    y = x

    = x+ x

    Thorme (La convergence absolue implique la convergence) Soit (un)nN une suite complexe. Si

    un converge

    absolument, elle converge (tout court).

    En pratique Ce thorme ramne dans de nombreux cas ltude de la nature dune srie quelconque ltude dela nature dune srie termes positifs pour laquelle nous avons tout un tas de thormes de comparaison. Quand voustudiez la nature dune srie quelconque, commencez donc par vous demander si elle converge absolument.

    Dmonstration Traitons dabord le cas des suites relles, le cas des suites complexes en gnral en dcoulera.

    Supposons dabord que (un)nN est une suite relle et que

    |un| converge. Comme 0 6 u+n 6 |un| et0 6 un 6 |un| pour tout n N, le thorme de comparaison au moyen dingalits montre que

    u+n et

    un convergent toutes les deux. Par diffrence,

    un =

    (u+n un ) converge comme voulu.

    Cas gnral : (un)nN est prsent une suite complexe et

    |un| converge. Comme 0 6Re(un) 6 |un|

    et 0 6Im(un) 6 |un| pour tout n N, le thorme de comparaison au moyen dingalits montre queRe(un) et Im(un) convergent toutes les deux. A fortiori, en vertu du premier point, Re(un) et

    Im(un) convergent galement. Par somme enfin,

    un =(

    Re(un) + i Im(un))converge.

    $ $ $ Attention ! La rciproque du thorme prcdent est fausse ! Une srie peut converger sans tre absolumentconvergente. Nous verrons des exemples de telles sries dans le paragraphe sur les sries alternes. En attendant, nous pouvonsau moins donner une dfinition.

    Exemple La srie (1)n

    n2 + 1converge.

    En effet Pour obtenir cette convergence, il nous suffit dtablir la convergence absolue de (1)n

    n2 + 1, i.e.

    la convergence (tout court) de 1

    n2 + 1. Or cette srie termes positifs est convergente car

    1

    n2 + 16

    1

    n2pour

    tout n N et car la srie de Riemann 1

    n2converge (2 > 1).

    Dfinition (Semi-convergence) Soit (un)nN une suite complexe. On dit que la srie

    un est semi-convergente si elle

    est convergente mais pas absolument convergente.

    7

  • c Christophe Bertault - MPSI

    3.2 Rgle de dAlembert

    Thorme (Rgle de dAlembert) Soit (un)nN une suite complexe. On suppose un 6= 0 partir dun certain rang.

    (i) Si limn

    un+1un < 1, la srie un converge absolument, donc converge (tout court).

    (ii) Si limn

    un+1un > 1, la srie un diverge grossirement, donc diverge (tout court).

    $ $ $ Attention ! Rien ne garantit en gnral que la limite limn

    un+1un existe. Par ailleurs la rgle de dAlembert ne

    nous dit rien si limn

    un+1un = 1. Ce cas limite est appel souvent le cas douteux de la rgle de dAlembert.

    Dmonstration Supposant que limn

    un+1un existe, notons cette limite. La preuve qui suit consiste comparer

    la srie

    un une srie gomtrique dont nous matrisons parfaitement la nature.

    (i) Supposons dabord < 1 et posons =1 2

    . Alors > 0 et 0 6 + < 1. Par dfinition de , il existe

    donc un rang N partir duquel un 6= 0 et 0 6un+1un

    < + . Dans ces conditions, pour tout n > N + 1 : unuN = n1

    k=N

    uk+1uk 6 ( + )nN , donc 0 6 |un| 6 K( + )n o K = |uN |(+ )N ne dpend pas de n.

    Conclusion : |un| =n

    O((+ )n

    ). Or la srie gomtrique

    (+ )n converge car 0 6 + < 1, donc

    la srie termes positifs

    |un| aussi par comparaison. Comme voulu,

    un converge absolument.

    (ii) Supposons maintenant > 1 et posons = 12

    . Alors > 0 et > 1. Par dfinition de , il existe

    donc un rang N partir duquel un 6= 0 etun+1un

    > . Dans ces conditions, pour tout n > N + 1 : unuN = n1

    k=N

    uk+1uk > ( )nN , donc |un| > K( )n o K = |uN |( )N ne dpend pas de n. Comme

    > 1, le thorme de minoration montre que limn

    |un| = . En particulier limn

    un 6= 0, donc

    un

    diverge grossirement.

    En pratique Le calcul de limn

    un+1un est plus facile faire si la suite (un)nN est dfinie laide de produits et

    de quotients. On peut notamment esprer des simplifications au numrateur et au dnominateur dans ce cas.

    Exemple La srie n4

    3nconverge car :

    (n+ 1)4

    3n+1

    n4

    3n

    =1

    3

    (1 +

    1

    n

    )4n

    1

    3et

    1

    3< 1.

    Exemple La srie zn

    n!converge pour tout z C. On dfinit gnralement la fonction exponentielle comme la somme de

    cette srie, de sorte que pour tout z C : ez =n=0

    zn

    n!. Nous comprendrons mieux la raison de cela la fin du chapitre.

    Remarquez bien que nous sommes ici en train de parler dune dfinition de lexponentielle sur C dfinition unique ! Quandnous avons dfini lexponentielle complexe en dbut danne, notre dfinition supposait connues lexponentielle relle et les

    fonctions sinus et cosinus, via la formule : z C, ez = eRe(z)(cos Im(z) + i sin Im(z)

    ). Au contraire, quand on dfinit

    lexponentielle complexe comme la somme dune srie, ce sont lexponentielle relle et les fonctions sinus et cosinus qui sendduisent.

    En effet Soit z C. Si z = 0, la convergence de zn

    n!est vidente. Supposons donc z 6= 0. Alors :

    zn+1

    (n+ 1)!

    zn

    n!

    =|z|

    n+ 1n

    0. La rgle de dAlembert montre que zn

    n!converge absolument, donc converge.

    8

  • c Christophe Bertault - MPSI

    3.3 Sries alternes

    Dfinition (Sries alternes) On appelle srie alterne toute srie

    (1)nan o (an)nN est une suite relle positive.

    Exemple Les sries (1)n

    n, (1)nen

    n2 + 1et (1)nn2

    1 + n2nsont alternes.

    Thorme (Thorme des sries alternes) Soit (an)nN une suite relle positive dcroissante de limitenulle. Alors la srie alterne

    (1)nan converge.

    $ $ $ Attention ! Lhypothse de dcroissance nest pas l pour dcorer !

    Dmonstration Posons, pour tout n N : Sn =n

    k=0

    (1)kak. Nous allons montrer que les suites (S2n)nNet (S2n+1)nN sont adjacentes. Cela montrera quelles sont convergentes de mme limite en vertu du thorme dessuites extraites, et donc que la suite (Sn)nN converge daprs le thorme des suites extraites. Comme voulu onaura prouv la convergence de

    (1)nan.

    Par hypothse : S2n+1 S2n = (1)2n+1a2n+1 = a2n+1 n

    0. Ensuite la suite (S2n)nN est dcroissante

    car pour tout n N : S2(n+1) S2n = (1)2n+1a2n+1 + (1)2n+2a2n+2 = a2n+2 a2n+1 6 0, la suite (an)nNtant dcroissante. Pour une raison analogue la suite (S2n+1)nN est croissante.

    Thorme (Srie de Riemann alterne) Soit R. La srie (1)n

    n, quon appelle une srie de Riemann alterne,

    converge si et seulement si > 0.

    Explication Pour ]0, 1], la srie (1)n

    nest semi-convergente : elle converge, mais pas absolument.

    Dmonstration Si 6 0, la srie (1)n

    ndiverge (grossirement). Si au contraire > 0, la suite positive(

    1

    n

    )nN

    est dcroissante de limite nulle, donc (1)n

    nconverge daprs le thorme des sries alternes.

    En pratique Il ne faut pas toujours vouloir tout prix appliquer le thorme des sries alternes directement. Unmlange de techniques est souvent prfrable. Etudiez attentivement lexemple qui suit.

    Exemple La srie (1)n

    n34 + n

    14 sin

    (n2) converge.

    En effet La monotonie de la suite positive

    (1

    n34 + n

    14 sin

    (n2))

    nNne semble pas simple tudier. Le

    thorme des sries alternes ne nous sera donc pas utile directement. Commenons par effectuer un dveloppement

    limit on rappelle que1

    1 + u=

    u01 u+ o(u) =

    u01 +O(u).

    (1)nn

    34 + n

    14 sin

    (n2) = (1)n

    n34

    1

    1 +sin

    (n2)

    n12

    =n

    (1)nn

    34

    [1 +O

    (1

    n12

    )]=

    n(1)nn

    34

    +O

    (1

    n54

    ).

    Intrt de cette mthode base de dveloppement limit : le problme initial compliqu est dcompos en sous-

    problmes lmentaires. La srie de Riemann alterne (1)n

    n34

    converge car3

    4> 0, et la srie de Riemann

    1n

    54

    aussi car5

    4> 1, donc par somme, grce au thorme de comparaison au moyen de grands O et au fait que la

    convergence absolue implique la convergence (tout court), la srie (1)n

    n34 + n

    14 sin

    (n2) converge.

    9

  • c Christophe Bertault - MPSI

    4 Rcapitulatif des preuves de convergence

    En pratique

    Le schma ci-dessous rassemble et ordonne les rsultatsde convergence tablis dans ce chapitre. Comme souventen mathmatiques, les mthodes qui en sont issues nepermettent pas de conclure dans tous les

    cas. Il nen demeure pas moins que ce schma mrite unsrieux coup dil.

    limn

    un 6= 0(divergence

    grossire)

    limn

    un = 0

    un a un

    signe

    constant

    un na pas

    un signe

    constant

    Techniques

    de

    comparaison

    un

    converge

    absolument

    un est

    alterne

    (thorme

    des sries

    alternes)

    5 Produit de Cauchy

    Dfinition (Produit de Cauchy) Soient (un)nN et (vn)nN deux suites complexes. On appelle produit de Cauchy des

    sries

    un et

    vn la srie de terme gnral

    06p,q6np+q=n

    upvq =

    nk=0

    ukvnk.

    Thorme (Convergence absolue dun produit de Cauchy) Soient (un)nN et (vn)nN deux suites complexes. On

    pose, pour tout n N : pn =n

    k=0

    ukvnk.

    Si

    un et

    vn convergent absolument, alors

    pn galement et de plus :

    n=0

    pn =

    n=0

    un n=0

    vn.

    Dmonstration Posons U =

    n=0

    un, V =

    n=0

    vn, U =

    n=0

    |un| et V =n=0

    |vn|.

    Commenons par prouver la convergence absolue de

    pn. La srie

    |pn| tant termes positifs, il noussuffit de montrer quelle est majore, ce qui rsulte du calcul suivant. Pour tout n N :

    nk=0

    |pk| =n

    k=0

    k

    i=0

    uivki

    Ingalit6triangulairen

    k=0

    ki=0

    |ui| |vki| Interversion=des sommes

    ni=0

    nk=i

    |ui| |vki|

    =ni=0

    (|ui|

    nk=i

    |vki|)

    j=ki=

    ni=0

    (|ui|

    nij=0

    |vj |)6

    ni=0

    |ui|V 6 U V .

    Si nous posons pn =

    nk=0

    |uk| |vnk| pour tout n N, nous venons dtablir au passage quen

    k=0

    pk 6 U V

    pour tout n N, donc que la srie termes positifs

    pn converge. Posant P =

    n=0

    pn, on a : P 6 U V .

    10

  • c Christophe Bertault - MPSI

    Prouvons prsent quen fait P = U V . Pour tout n N :ni=0

    |ui| n

    j=0

    |vj | =

    06i,j6n

    |ui| |vj | 6

    06k62n06i,j62ni+j=k

    |ui| |vj | =2nk=0

    ki=0

    |ui| |vki| =2nk=0

    pk.

    Pour la majoration centrale, remarquez simplement quon somme des rels positifs et que la somme de droitecontient tous les termes de la somme de gauche. Faisant tendre n vers, nous obtenons lingalit U V 6 P ,et donc lgalit souhaite.

    Calculons enfin la somme P =n=0

    pn. Nous voulons montrer que P = UV . Pour tout n N :

    ni=0

    ui n

    j=0

    vj n

    k=0

    pk

    =

    06i,j6n

    uivj

    06k6n06i,j6ni+j=k

    uivj

    =

    06i,j6nn+16i+j62n

    uivj

    6

    06i,j6n

    n+16i+j62n

    |ui| |vj | =

    06i,j6n

    |ui| |vj |

    06k6n06i,j6ni+j=k

    |ui| |vj | =ni=0

    |ui| n

    j=0

    |vj | n

    k=0

    pk.

    Comme le terme extrme droite tend vers U V P = 0 lorsque n tend vers , le thorme des gendarmesmontre que le terme extrme gauche tend lui aussi vers 0. Mais il tend aussi vers UV P . Comme vouluP = UV .

    $$ $ Attention ! Malheur vous si vous oubliez lhypothse de convergence absolue ! On peut montrer que le rsultat

    est faux en gnral sans cette hypothse. Posons par exemple un =(1)n

    npour tout n N. Comme nous lavons vu, la srie

    un est semi-convergente. Que dire alors de son produit de Cauchy par elle-mme ? Pour tout n > 2 :n1k=1

    ukunk

    =n1k=1

    (1)kk

    (1)nk

    n k

    =n1k=1

    1k(n k)

    k(nk)6n2>

    n1k=1

    1

    n=

    n 1n

    n

    1.

    Ce calcul montre que le produit de Cauchy de

    un par elle-mme diverge (grossirement).

    Exemple Pour tous z, z C :n=0

    (z + z)n

    n!=

    n=0

    zn

    n!

    n=0

    zn

    n!. Ce rsultat justifie quon dfinisse lexponentielle au

    moyen de la formule ez =n=0

    zn

    n!, car il scrit dans ces conditions : ez+z

    = ezez

    .

    En effet Soient z, z C. Posons, pour tout n N : pn =n

    k=0

    zk

    k! z

    nk

    (n k)! . Nous avons dj vu que

    les sries zn

    n!et zn

    n!convergent absolument. Le thorme prcdent montre dans ces conditions que

    pn

    converge et quen=0

    pn =n=0

    zn

    n!

    n=0

    zn

    n!. Mais que vaut pn ? Pour tout n N :

    pn =n

    k=0

    zk

    k! z

    nk

    (n k)! =1

    n!

    nk=0

    n!

    k!(n k)! zkznk =

    1

    n!

    nk=0

    (n

    k

    )zkznk =

    (z + z)n

    n!.

    11