depression et islam

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 Psychologie Traitement de la dépression chez le musulman  de Soulaimane Chemlal

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Psychologie

Traitement de la

dépression chezle musulman

 de Soulaimane Chemlal

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 As salamu ‘alaykum wa rahmatullahi wa barakatuh,

Cet article vise à apporter, avec l’aide d’Allâh, des cléspratiques pour aider nos frères et nos sœurs qu’Allâh, parsagesse et bonté, a décidé d’éprouver par la dépression.

Introduction 3

Connaître les caractéristiques de la maladie 3

La fragilité en question 3

Les besoins psychologiques fondamentaux et la

Révélation 3

Les caractéristiques psychologiques

fondamentales touchées dans la dépression 3Lutter contre la dépression : les deux niveaux

d’action 3

Mes conseils à la personne dépressive 3

Le plus important est d’invoquer Allâh, pour la guérison,

l’aide et le secours et pour Son pardon 3

Il faut lire le Coran 3

Il faut aller voir le médecin 3

Il faut envisager une psychothérapie 3

Il ne faut pas chercher à travailler sur son problème à

n‘importe quel moment 3

Il faut parler à Allâh 3

Dans les périodes où rééchir est possible 3

Il faut d’abord rétablir l’espoir, car l’espoir aide à patienter 3

Puis il faut s’attaquer à la question de la culpabilité 3

Il faut ensuite travailler sur son estime de soi et

la conance en soi 3

Il faut éviter les gens moroses 3

La mort spirituelle du coeur du serviteur indigne 3

Quelques conseils aux proches d’une personne

dépressive 3

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Introduction

En résumé, il s’agit d’analyser la dégradation de ce qu’onappelle l’estime de soi, de l’intérêt qu’on « pense » re-présenter pour soi-même et pour les autres. Ce sont dessentiments qu’on trouve dans les déprimes, au point qu’onles considère comme l’un des signes caractéristiques destroubles de l ’humeur.

Par troubles de l’humeur, je précise qu’on parle ici de lagrosse déprime, de l’état dépressif ou de la dépressionplus ou moins passagère, qui se répète ou pas, mais pasde la dépression extrême. Car cette dernière, pour êtreun trouble de l’humeur poussé à l’extrême, a atteint untel niveau qu’elle en devient une maladie d ’une naturecomplètement diérente, avec le tableau clinique typiqued’un autre type d ’atteinte psychologique. Et ce qui va êtredit dans cet article ne vaut qu’en partie pour ce genre dedépression.

 Je parle donc ici du mal-être plus ou moins permanent,plus ou moins profond, du sentiment que rien ne va, querien chez soi n’intéresse, qu’on intéresse personne, que rienn’est intéressant, qu’on rate tout, qu’on est nul et inutile,que le cœur est mort et que rien, pas même la religion, nepourra le faire revivre.

Connaître les caractéristiquesde la maladie

C’est important pour la personne dépressive de savoirqu’elle soure d’une maladie, que ce n’est pas un capriceou du chichi et que cette maladie, qui lui semble impal-pable et mal circonscrite, possède des caractéristiques biendénies. J’aborderai ici, in châ Allâh, les trois principales,qui sont étroitement liées les unes aux autres.

• « Techniquement », si on veut caractériser cet état, on va dire que c’est un problème de l’humeur, la persistanced’une humeur négative et triste, un problème qui serenforce de lui-même par les idées noires, une anxiété etune culpabilité importantes, ou plutôt par le côté noir,attristant et anxiogène de toutes les idées, de tous les

événements et de toutes les situations. C’est ce qu’onappelle « voir la vie en noir ». Dans ce cas, même s’il n’estpas aussi atteint que dans la dépression extrême et dans lamélancolie, le système de réexion, de raisonnement et depensée est largement atteint. Il en devient dicile de voirce qui va bien dans la vie et, même quand il arrive qu’ons’en rende compte, c’est une prise de conscience intellec-tuelle et factuelle qui ne sut pas pour contrebalancer cequi va mal émotionnellement. Par contre, ce qui est bienactivé dans le système de traitement de l’information et lesystème conceptuel chez l’individu ce sont les mauvaiseschoses. Ces mauvaises choses attirent les bonnes dans lesens où même les bonnes choses, ou les choses qui de-

 vraient l’être, vont être vues sous le prisme des mauvaises,par un côté noir, le plus souvent infondé. Le mal est là.

• Une deuxième caractéristique est que cet état n’est passtable dans le temps. Il dépend bien sûr de ce qui se passedans l’environnement et de l’évolution de l’état d’espritdu patient, contrairement à la dépression extrême, danslaquelle le malade peut-être complètement hermétique àson environnement au cours des phases aiguës.

Ainsi, les périodes de doute, de mauvaise image de soi, de

désespoir, de culpabilité vont laisser place plus ou moinssouvent à des périodes où l’on va pouvoir accepter quecertaines choses sont meilleures que l ’on pense. Et lespériodes d’apathie et de mal-être vont laisser parfois placeà des périodes où l’on a assez d’énergie pour se bougerdavantage et pour savoir, mais sans véritablement ressen-tir, qu’on pourrait espérer aller mieux.

• Une troisième caractéristique est que ce mal-êtreempêche d’appréhender la réelle cause du problème et saréelle nature. Ne pas comprendre ce qu’on a exactement,avoir des certitudes erronées sur son problème sont desobstacles à la guérison. Dans ce cas précis, le malade al’impression, sinon la conviction, que les causes de sonmal sont multiples, si nombreuses même, que l’espoirde guérison est ténu, voire inexistant. Et cela désespèred’autant plus la personne déprimée. En réalité cela vientd’un problème de raisonnement, d’erreurs de réexion quiconsistent à confondre les causes et les conséquences. Seconsidérer inutile et nul, penser que son cœur est mort,qu’on ne ressent plus rien émotionnellement, notammentsur le plan de la religion, que la vie est triste et n’apporterien ne sont que les conséquences du problème, non pasles causes.

Les causes sont la déprime, la tristesse généralisée, lesraisonnements et les émotions erronés - à la fois ceux quiconcernent l’attribution d’une nature négative à tout etceux qui consistent à prendre les conséquences pour descauses. En gros, on ne déprime pas parce que tout est noiret déprimant. Mais tout est noir parce qu’on déprime. Onne déprime pas parce qu’on a découvert qu’on était nulet vide dans son cœur. C’est le contraire. C’est le fait dedéprimer, d’être triste et angoissé qui fait baisser l’estimede soi et fait que l ’on se voit sous un jour dégradé.

Bien sûr, et c’est typique des troubles de l’humeur,tout ce que la déprime fait imaginer va renforcer la

déprime. C’est une boucle. Et c’est cette boucle qu’ilfaut casser.On ne déprime donc pas parce qu’on a compris qu’on étaitnul, on se croit nul parce qu’on déprime. C’est comme celaque fonctionne ce dérèglement de l’humeur. Connaître lesrouages de la maladie, du mal-être, est indispensable pours’en débarrasser. Avec l’aide d’Allâh.

Par contre, pour traiter ces troubles, l’identication deson origine n’est pas obligatoire, d’autant qu’elle n’est pasforcément clairement identiable. Dans certains cas, ellen’existe même pas. De plus quand elle existe et qu’elle estidentiée dans un événement éprouvant (une épreuve),

elle ne sut pas pour comprendre le processus qui a ap-porté la dépression. La dépression n’est pas qu’une simpleréaction de tristesse à une épreuve. C’est au-delà de cela.

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Ce qui sut, c’est de savoir qu’il y a une fragilité qui setraduit par une tristesse et perturbe l’humeur et donc lamanière de voir les choses, la manière de les comprendre.

La fragilité en question

Ce qui va contribuer à aider le malade c’est de savoir qu’ilest comme les autres, comme tous les autres humains, etqu’il a les mêmes fragilités. Chez lui, cette fragilité pro- voque des symptômes qui touchent à l’estime de soi, à saplace dans la vie, à la réussite et à l’atteinte des objectifs, àla perte généralisée. Par exemple le fait que la religion ne joue plus son rôle sur le moral sera le signe sans équi- voque, pour la personne déprimée, que son cœur est mort.Mais fondamentalement, il n’est pas à part. Tout commecelui qui s’est cassé une jambe, la personne déprimée estcomme les autres êtres humains.

Pour être convaincu de cela, il faut imaginer l’esprit del’homme, son système psychologique, comme une cordesur laquelle il y a des parties usées qui risquent de serompre. Ces parties usées sont des endroits de fragilitépsychologique pour l’être humain. Ces failles psycho-logiques sont communes à nous tous. Pourquoi ? Parcequ’elles se situent exactement au niveau des caractéris-tiques psychologiques qu’Allâh a données à l’être hu-main justement pour lui permettre de survivre sur Terre.Allâh a créé l’homme avec des besoins psychologiquesinnés. Ce sont les analogues au niveau psychologique desbesoins primaires physiologiques, le besoin de manger,de boire et de respirer. On comprend aisément que cesbesoins physiologiques, qu’Allâh a placés dans chaque êtrehumain, vont garantir sa survie sur Terre et lui permettrede faire ce pourquoi il a été créé. Mais comme ce sont desbesoins, ce sont aussi des failles car tout besoin est unefragilité : on est dépendant et à la merci de ce dont on abesoin. C’est d’ailleurs pour cela qu’ils sont aussi les lieuxdes épreuves (famines, dénuement,…), les lieux des ordreset des interdictions d’Allâh, et les lieux des attaques desdémons.

Et c’est exactement pareil dans le domaine psychologique.Ces caractéristiques innées, oertes par le Créateur pour

nous aider à survivre sur Terre, c’est ce qu’on appelle lesinstincts : l’instinct de survie, l’instinct de reproduction,l’amour, la recherche des biens matériels, la recherche dubonheur et de la protection contre le malheur, le besoinde vivre en société, le besoin de se sentir estimé par soi-même et par les autres, le besoin d’avoir un but et desprincipes de vie, la catégorisation des choses en bien ouen mal, en juste ou en pas juste… Ce sont des endroitsde fragilité parce que ce sont des endroits de besoins.Puisque ce sont des endroits de besoins, ce sont aussi desendroits de frustration psychologique. Et ça, ça concernetout le monde.

Un point qu’il faut préciser à ce niveau, c’est que lesbesoins psychologiques sont basés sur le sens qu’on donneaux situations, aux idées, aux événements, alors que les

besoins physiologiques dépendent de choses concrètes.Le besoin de lipides, de glucides, de protéines, c’est duconcret. Chacun n’a pas sa propre dénition du mot « pro-téines ». Mais prenons la recherche du bonheur. Chacuna sa propre dénition du bonheur. C’est pour cela que jedis que les besoins psychologiques sont fondés sur le sensqu’on donne aux choses. C’est important pour la suite.

Les besoins psychologiquesfondamentaux et

la Révélation

Une grande partie de la Révélation, si ce n’est toute laRévélation, nous enseigne comment assouvir correctementces besoins psychologiques fondamentaux. Allâh nous aoert ces besoins nécessaires à la vie terrestre saine et laperpétuation de l’espèce et Il nous guide pour les utili-ser comme il se doit. Sauf cas extrême, à aucun momentl’islam ne nous demande de les ignorer, et les assouvir estprésenté comme une nécessité. Mais il ne s’agit pas de lesassouvir dans l’excès ni n’importe comment. Il s’agit de lesassouvir en suivant les ordres d’Allâh, qui est Celui quinous les a implantés et qui est Celui qui sait comment lesutiliser. Pour chacun de ces instincts, on trouvera dans laRévélation le moyen d’y répondre de la manière adéquatedans deux domaines complémentaires : les actes concretset la manière de les concevoir.

Pour l’instinct de reproduction par exemple, on trouve

dans la Révélation non seulement les actes qui sontinterdits et ceux qui sont obligatoires, mais on en tireégalement et surtout la manière de concevoir la sexualité,le mariage, la chasteté, le célibat, la gravité de l ’adultère etle fait que la fornication réduit l’honneur de l’être humain,dégrade la progéniture, sème le doute et la corruption,ainsi que l’inuence dans la société de l’expansion despratiques sexuelles libertines, l’inuence de l’adultère surla santé… Bref, quelle place la préoccupation de se repro-duire et la sexualité doivent avoir pour une vie épanouieet qui mène au bonheur dans les deux vies. Ce qu’il fautcomprendre c’est que la Révélation est venue pour nousfaciliter les choses à tous les niveaux, comme le disent les

savants à propos du verset 20 de la sourate 80, ‘Abasa.

Nous faciliter les choses c’est entre autres nous montrercomment proter de notre nature humaine, sans qu’ellene nous fasse sourir. Ainsi ne pas obéir à Allâh, toutautant que ne pas concevoir les besoins psychologiquescomme ils sont conçus dans la Révélation fragilisent leshommes. Cela fragilise psychologiquement les hommes.Commettre l’adultère fragilise l’homme même si on estconvaincu que c’est un acte abject. L’adopter comme unstyle de vie touche le système psychologique, même si onne s’en rend pas compte précisément. Également, ne pasle considérer comme un acte abject et détesté par Allâhfragilise également l’homme sur le plan psychologique,

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même si on ne le commet pas. Le cas le plus dramatiquede tension psychique se produit quand on ne comprendpas que la fornication est un acte grave, qu’on pense mêmeque c’est un acte tout à fait naturel et bon pour l’homme,mais qu’on ne le commet pas parce que c’est interditreligieusement.

Une interdiction arbitraire, pour tester les gens, mais qui

n’apporte rien sur Terre si on la respecte, mais seulementdans l’Au-delà. Cette manière de voir les choses provoquedes tensions énormes au niveau psychique.

Ces tensions-là, celles dont je viens de parler viennent,on le comprend facilement, d’une transgression de laconception islamique. Une transgression par rébellionou par doute. Mais ce n’est pas le seul chemin vers lestensions. L’homme crée des tensions psychologiqueségalement, sans se rebeller ni douter, mais en exagérant,en s’imposant des choses que la conception islamique n’apas mentionnées. En s’imposant le célibat par exemplepour le cas de l’ instinct de reproduction. Ou, si on en resteaux conceptions, à considérer, malgré le fait qu’on soit nesoit pas célibataire, la sexualité et la vie en couple sont deschoses dégradantes et sales.

C’est pour cela que les savants, notamment Ibn Taymiyyah, mentionnent deux types de penchants del’âme vis-à-vis de ce que lui impose Allâh : elle l’aban-donne ou elle exagère son statut. Et c’est sur ces penchantsque le diable exerce son inuence, qu’Allâh nous protège.C’est pour cela que le Prophète, ‘alayhi salâm, a interdità la fois l’adultère et la fornication mais également lecélibat, surtout si on prétend le pratiquer pour préserver

sa chasteté et plaire à Allâh. C’est pour cela également quele Prophète, ‘alayhi salâm, a rangé des détails de la vie encouple et la sexualité dans la catégorie des adorations pourlesquelles l’homme est récompensé par Allâh. L’islamnous apprend là que pour et être équilibré l’homme nedoit pas donner libre cours à son instinct de reproductionmais ne doit pas le réprimer non plus. Il faut concevoir lachasteté comme nous l’a enseignée la Révélation. Ni plusni moins.

 Tous les humains sont logés à la même enseigne à ceniveau-là. Désobéir, ne pas adopter la manière de voir del’islam, ou au contraire exagérer et ajouter des contraintes

fragilise les humains car ils ne font pas ce pour quoi ilsont été créés.

Les caractéristiquespsychologiquesfondamentales touchéesdans la dépression

Une fois qu’on a compris comment les choses mar-chent au niveau de ces instincts oerts par Allâh, et dela fragilité qu’ils représentent pour l’homme, on peutbien comprendre le cas de la dépression. Si j’aborde les

choses de cette manière – la dépression sous l’angle descaractéristiques de survie dont Allâh a doté la naturehumaine – c ’est pour trois raisons. D’abord, pour que ceuxqui sourent comprennent que cette maladie a des causesfonctionnelles et qu’on connaît les causes de ce dysfonc-tionnement. Ensuite, pour montrer que les gens qui souf-frent d’une humeur dépressive persistante ou d’un état

dépressif, sont des gens comme vous et moi. Enn, parceque souvent on pense, eux également, que leur désespoiret leur tristesse sont dûs à un manque de foi, à un manquede conance en Allâh, à un manque de compréhension etde connaissance d’Allâh. Plus globalement, à une insatis-faction à l’égard du décret d’Allâh. En réalité les choses,comme on le verra in châ Allâh, ne sont pas si simples. Onpeut déjà redire comme plus haut que la tristesse est lacause, non pas la conséquence.

Donc l’état dépressif touche principalement les besoinscentrés autour de l’estime et de l’image de soi, l’intérêtqu’on a pour soi-même et pour les autres, le besoin de

reconnaissance, l’intérêt et l’amour pour la vie. L’estimede soi est une caractéristique centrale dans la vie de l’êtrehumain et quand elle est perturbée les conséquencestouchent toutes les autres caractéristiques. C’est logiquepuisque c’est la caractéristique qui est au cœur de cequ’éprouve le sujet pour lui-même, pour ce qui lui arriveet pour le monde qui l’entoure. Elle rejaillit sur tout, surtoutes les autres caractéristiques psychologiques fonda-mentales.

C’est donc une vie sans espoir, sans intérêt, pleine deculpabilité, d’errance, d’échec, de déplaisir, d’apathie, par-fois sans désir même de continuer à vivre. Et cela a même

des répercussions sur des caractéristiques physiologiqueset physiques du fonctionnement humain : le sommeil, lecomportement alimentaire, la concentration, l’activité etla réactivité générales. On ne mange plus, on ne dort plus,on est en colère, on ne se concentre plus, on est désor-donné, oscillant entre l’agitation mentale et l ’absence deréactivité.

Lutter contre la dépression :les deux niveaux d’action

Pour améliorer son état et guérir par la grâce d’Allâh, ilfaut comprendre la maladie et avoir conscience de sa réa-lité à deux niveaux distincts puis agir à ces deux niveaux :

1 - Le niveau de la création et de l’acte d’Allâh : la mala-die est une épreuve envoyée par Allâh, pour nous donnerl’occasion de Lui montrer qu’on tient à Lui. Considérer ceniveau permet à la personne déprimée de se situer dansle monde des créatures, et par rapport à son Seigneur,ce qu’elle a des dicultés à faire à cause de la maladie.Cela permet aussi de resituer la personne malade dans letemps. L’épreuve a eu un début, elle peut, par conséquent,

avoir une n. Elle n’est pas un mal conscient et autonomequi décide de lui-même qui, comment et quand frapper.

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C’est à ce niveau également que la signication, dont j’ai parlé plus haut, entre en jeu. Cette maladie est liéeaux signications des choses. Non pas aux choses elles-mêmes. C’est ce qu’Allâh nous dit dans la sourate 54,L’Étoile, qu’Il est celui qui fait que les choses font rire etCelui qui fait que les choses font pleurer. Les choses enelles-mêmes n’ont pas ce pouvoir. D’ailleurs les choses qui

nous rendent tristes ne rendent pas triste tout le monde.Certaines situations, certains échecs peuvent renforcerl’évaluation négative de soi-même, mais pas chez toutle monde. Cela doit donner à la personne déprimée laconviction que la dépression est liée au sens qu’on donneaux choses, aux événements, aux concepts, aux idées, auxsituations. À ce titre, la personne déprimée est sensibleaux interprétations qu’elle va donner aux situations pro-blèmes qu’elle rencontre et également au waswâs de l’âmehumaine, c’est-à-dire au fait qu’elle rumine sans cessequand quelque chose l’inquiète et qu’elle est sensible de cefait aux insuations du diable. Or une interprétation peutêtre fausse. Elle ne peut pas convaincre sans preuve. Lapersonne déprimée doit sortir de ses convictions quandelles ne sont pas prouvées. Elle doit comprendre quandelle extrapole, quand elle invente une explication ou subitles suggestions diaboliques lancinantes, tout ce qui permetà une interprétation particulière d’une situation de passeren force, de s’installer et de renforcer sans aucune raisonla conviction que l’explication qu’on en a, toujours la plusnoire, est la seule possible.

2 - le niveau des symptômes proprement dit, c’est-à-diredu contenu des pensées négatives qui renforcent latristesse et le désespoir.

De cette façon, on agit sur les deux problèmes principauxde la dépression : le mode de pensée (on rumine, on ades réexes dans les relations entre les idées, waswâs) etle contenu des pensées (pensées négatives). La guérison va passer par une bonne compréhension de ce qui sepasse, par le fait de connaître la maladie et de changeractivement la manière de penser et la manière d’aboutirà ces pensées négatives, puis dans un premier temps, d’enminimiser les symptômes et dans un second temps d’enannuler les eets sur l ’humeur. Au nal, on parviendraavec l’aide d’Allâh à contrebalancer les tentatives de latristesse, liée à une personnalité dépressive, de s’installer.

Mes conseils à la personnedépressive

Quelques mots rapides sur la méthode générale. Elle va consister à rompre les liens négatifs entre les pen-sées de la personne déprimée, à adopter de nouvellesroutines de pensée, et forcément des relations nouvellesentre les idées, et des idées nouvelles, positives cette fois.Cela conduira la personne éprouvée à donner aux situa-tions problèmes une nouvelle signication. Sur un plan

pratique, j’insiste sur le fait de faire les choses lente-ment, c’est-à-dire quand ce sera possible et aux meilleursmoments. Rééchir est dicile quand on déprime mais

néanmoins essentiel. Aussi, faudra-t-il rééchir par petitesétapes pour construire ces nouveaux réexes et passer àl’étape suivante quand la précédente sera maîtrisée. Allerdoucement, et consolider ce qu’on a réussi à changer, c’estle cœur de la méthode.

La prise en charge de la dépression doit s’articuler autourde ces points :

Le plus important est d’invoquer Allâh, pour la guérison, l’aide et le

secours et pour Son pardon

Un de nos prédécesseurs, Ja’far As-Sâdiq, disait quelorsque le rizq tarde à venir, il faut multiplier les de-mandes de pardon. Ce n’est pas grave de trouver que lerizq ou la guérison tardent à venir. Les croyants sontéprouvés, nous dit le verset 214 de la sourate 2, La Vache,par les dicultés économiques, les exactions, et les ma-ladies, jusqu’au point où ils demandent explicitement lesecours d’Allâh, pour qu’il arrive. Certains savants disentque c’est là la preuve que même les gens dont on ne doute

pas de la piété peuvent ressentir le stress, l’angoisse, quandles épreuves durent et que la promesse d’Allâh semble tar-der. Certains compagnons ont également, dans un hadithauthentique, demandé explicitement au Prophète, ‘alayhi salâm, d’invoquer pour qu’Allâh les soulage parce qu’ilsn’en pouvaient plus. Il faut comprendre de tout cela quel’épreuve est tout aussi inéluctable que le secours d’Allâhquand on se repent et qu’on Le lui demande.

Il faut lire le Coran

Même un peu, régulièrement. Chaque jour. Il y a de quoiguérir l’homme dans le Coran. Une guérison liée à laparole d’Allâh, un de Ses attributs, qui doit susciter plusde conance, doit être vue plus probable qu’un remèdelié aux plantes et aux principes actifs qu’Il a créés. On nepeut espérer guérir en restant loin du Coran. Il faut le lireen arabe, le lire pour se reposer, pour se soigner. Répéterles versets qui traitent de la guérison. Demander qu’onnous lise le Coran, écouter le Coran. Ce qui sera le plusfacile, le moins pénible. C’est un remède qui traite toutesles maladies, les maladies physiques, spirituelles, psycho-logiques. On le lit avec l’intention d’y chercher le remède.L’eet du Coran, tout comme celui des invocations faitpartie du domaine de l’invisible, qu’on ne connaît pas dansles détails. On est persuadé qu’ils ont des eets mais on ne

sait pas lesquels exactement. On peut guérir directementpar le Coran mais l’eet peut aussi être indirect et agir surl’eet d’autres traitements, d’autres thérapies. Seul Allâhsait. Il ne faut donc pas être pressé, croire fermement, etêtre conscient que lire le Coran et invoquer Allâh sontavant tout des actes d’adoration qui ont comme eetprincipal de donner l’espoir qu’Allâh en est satisfait. Et lasatisfaction d’Allâh ne peut que nous soulager.

Il faut aller voir le médecin

Pour traiter la fatigue et les maux de tête ou de ventrequi peuvent faire partie du tableau clinique de la

dépression. Certains patients ont besoin de diminuerl’anxiété et la tristesse, même la fatigue, avant depouvoir effectuer le travail sur la dépression proprement

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dite. Ils vont avoir besoin d’antidépresseurs. Il vautvraiment mieux ne pas se faire prescrire ce genrede médicaments par des médecins généralistes. Unpsychiatre est plus à même de savoir quel médicamentdonner à tel patient, en fonction du mal, en fonctiondu principe actif et en fonction des effets secondaireset des effets indésirables.

Il faut envisager une psychothérapie

Les médicaments seuls ne donnent pas de bonsrésultats. Les éléments que je donne ici sont deséléments de psychothérapie. On peut faire un travailseul, au moins en partie, mais aller voir un spécialistedonne de meilleurs résultats et constitue le plus souventune aide indispensable. Le moindre de ses atouts pourla personne dépressive c’est que le professionnel, s’ilest correct, ne juge pas. Et dans une maladie où leregard de l’autre peut être destructeur, c’est crucial.Quand on dit qu’il ne juge pas, ça ne signie pasqu’il s’abstient de juger par professionnalisme etéthique. Ce n’est pas comme le chirurgien qui ne jugepas le voleur qui s’est cassé la jambe en essayant des’échapper et l’opère comme il opère tout le monde.Le voleur comme le médecin savent que le voleur afait quelque chose de mal. Non, le psychologue ne juge pas parce qu’il n’a pas affaire à une personne quia fait quelque chose de mal, mais à une personne quicroit qu’elle a fait quelque chose de mal et dont lacroyance la fait déprimer.

D’autre part, le professionnel qu’il faut aller voir doit êtremusulman et non psychanalyste. Un musulman car il faut

que la personne déprimée soit comprise d’une part etqu’une psychothérapie digne de ce nom, pour les croyants,est une thérapie qui guide vers Allâh. D’autre part, on l’adit, cette maladie est très dépendante des signicationsqu’on donne aux événements. Aussi, si on ne traite queles signications qui concernent les symptômes (ex : telcomportement montre-t-il réellement que je suis nul,ne puis-je pas le comprendre autrement.. ?) et pas lessignications qui concernent la maladie dans sa globalité(notion d’épreuves, de test de la part du Créateur…), onn’aura pas véritablement traité le problème. Il faut doncun psychothérapeute musulman, qui connaît sa religion, etqui a réussi à adapter sa pratique professionnelle à l’islamet aux musulmans.Pour le choix de la psychothérapie, il faut éviter la psycha-nalyse, pour ce qu’elle s’oppose à l’islam dans ses fonde-ments (ne serait-ce que sa manière d’envisager la religionet Dieu) et également pour ce qui est de sa méthode, ba-sée essentiellement sur l’analyse - dans des termes souventopaques et un niveau de détail aussi inutile qu’impossibleà prouver - de ce qui est passé, de ce qui semble avoirgénéré la dépression. Revivre les traumatismes de sonenfance, de son adolescence, de son âge adulte amène ra-rement à guérir de la dépression. Cela génère au contrairede la dépression.

Il faut préférer les thérapies cognitives et comporte-mentales, qui en plus d’être compatibles avec l’islam et

totalement adaptables à la prise en charge des musulmans,donnent des résultats concrets rapidement. Ces thérapiesne sont pas tournées vers l’hypothétique traumatisme qui,sans que rien ni personne n’ait pu l’en empêcher, a créé ladépression, mais elles sont tournées vers le futur et la pos-sibilité, malgré ce qui s’est passé, de modier ses habitudeset ses réexes. Le principe sera de changer les « habi-

tudes » et les réexes du patient, dans sa manière de pen-ser, dans celle de lier les idées entre elles, et même dansses habitudes alimentaires et son sommeil. Apprendre denouvelles habitudes. C’est une méthode ecace, compa-tible avec l’islam, et qui donne des résultats concrets assez rapidement. Les éléments que je donne ici entrent dans lecadre de cette méthode.

Il ne faut pas chercher à travailler sur son problème à n‘importe

quel moment

Comme on l’a dit, il y a diérentes périodes. Il faut viserles moments où rééchir peut être productif. Dans lespériodes creuses, il faut se contenter de multiplier les in-

 vocations, sans chercher à rééchir davantage. On invoqueAllâh, on lit le Coran si possible, même un peu à la fois,on l’écoute, en attendant que la période de plus grandefacilité arrive. Dans ces moments-là, en général, on nepense pas aux actes surérogatoires et c’est bien compré-hensible. Pourtant, c’est important de ne pas rompre lecontact avec ce genre d’actes. Et justement Allâh nous adonné la possibilité d’eectuer des actes surérogatoires,des actes aimés par Allâh, et qui ne coûtent pas physique-ment ni intellectuellement. Comme le siwâk, ou le dhikr  par des formules courtes aimées par le Rahmâne, commerépéter subhânallâhi wa bihamdihi, subhânallâh-il-‘Adhîm,

la parole de Tawhîd, lâ hawla wa lâ quwwata illâ billâh…Il faut parler à Allâh

Il faut s’adresser à Lui à tout moment, en étant sûr qu’Ilentend et qu’Il sait. S’adresser à Lui donne la conviction(ou la renforce) qu’on n’est jamais seul. Sans compter lefait que s’adresser à Allâh directement ne peut faire quedu bien. Le fait de s’adresser à Celui qui a créé notremal et nous l’a prédestiné et qui est aussi Celui qui peutl’enlever donne à la personne malade la sensation d’êtreréellement pris en charge. Il faut donc parler à Allâh,passer du temps à essayer de s’imaginer qu’Il nous entend,qu’Il est là, proche. Et qu’Il répond. Les grands hommes

de cette communauté, avec à leur tête nos prophètes, onttoujours invoqué Allâh en l’appelant Mujîbu-d-da’awâte ou encore Samî’u-d-du’-â. Il répond de la manière qu’Il veut et quand Il veut. Il peut soit arrêter la maladie, soitla rendre supportable. D’où l’importance de conserver laprière et de L’invoquer au moment où le serviteur est leplus proche de Lui, c’est-à-dire pendant la prosternation.

Dans les périodes où rééchir est possible

Il faut y aller progressivement, étape par étape, et identi-er clairement le domaine sur lequel on travaille. Il fauttravailler tour à tour sur quatre grandes questions. Toutesces questions sont liées à l’image de soi-même dans ladéprime : la perte de conance et d’estime de soi (je suisnul, sans intérêt), la perte d’espoir (rien ne pourra jamais

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s’améliorer dans ma vie), la culpabilité (je suis respon-sable de mon état, je suis à blâmer), et la mort du cœur(je ne ressens rien pour ma religion, ni pour mon Dieu,mon cœur est vide, même la religion ne m’apporte aucunsoulagement, je ne mérite aucun soulagement). À chaquefois, il faudra viser les deux niveaux dont nous avons parléet avec l’objectif lié à la méthode des thérapies cognitives

et comportementales.Il faut d’abord rétablir l’espoir, car l’espoir aide à patienter

Quand on a un problème, quel qu’il soit, c’est plus facilede patienter quand on sait que le problème ne va pas du-rer. Dans le cas de la dépression, c’est bien sûr un combatde tous les jours, non seulement parce qu’on ne sait pasquand cela va se terminer, mais aussi parce que dans ladépression c’est la capacité de voir les choses en positif quiest altérée. Il faut d’abord se convaincre et apprendre àconsidérer que le problème est provisoire. Il faut rééchirà la nature de sa fragilité. On reviendra sur ce point, inchâ Allâh. C’est une fragilité qui fait imaginer des choses,

qui ne sont pas réelles, qui oriente la compréhension deschoses d’une certaine manière, mais pas forcément vers laréalité, et qui fait exagérer l’importance des choses néga-tives. Il faut comprendre aussi que cette fragilité est parta-gée, d’une manière plus ou moins forte, par tous les êtreshumains. Puis il faut mettre Allâh au cœur de ses eortspour guérir. Il faut essayer d’évaluer dans quelle mesure onconsidère qu’Allâh est responsable de son problème.

La réponse du croyant est inévitablement que seul Allâhpeut donner une maladie et que si on est malade c’est qu’Ill’a voulu. C’est Allâh qui fait que les événements et lessituations lui sont pénibles, qu’il les vit mal, qu’il les voit

en noir, à un moment donné de sa vie. À partir de là, ilfaut utiliser toutes les connaissances qu’on a sur Allâh – etcelles qu’on apprend si on le peut –, sur Ses noms et Sesattributs, sur les histoires des prophètes et des hommes debien lorsqu’ils souraient – et combien ils souraient –pour parvenir à garder à la conscience en permanence quesi la dépression n’est pas encore partie, c’est uniquementparce qu’Il ne l’a pas encore voulu.

Garder en tête et se répéter dans les situations de doute, jusqu’à ce que cela devienne un mode de réexion, querien de ce qu’Il ne veut pas n’existera jamais et que rien dece qu’Il veut ne peut disparaître. Quand on est persuadéde cela, il est probable qu’on se pose la question du pour-quoi. Pourquoi cette maladie ? Pourquoi moi ? C’est unequestion qui vient naturellement chez l’être humain et quele diable utilise pour le tromper. Cette question ne fait paspeur au croyant. Lui, il ne la refoule pas et y répond car laréponse renforce encore sa conviction. Alors que le diablecherche à faire en sorte que l’être humain, par ces ques-tions, demande des comptes à Son créateur pour Ses actes,le croyant ne tombe pas dans le piège et sait que c’est luiqui rend des comptes au Créateur. Le diable prote desquestionnements naturels de l’être humain, notammentles plus fragiles, sur les actes d’Allâh pour lui faire croire

qu’Allâh l’a abandonné et que cette maladie en est lapreuve. Or pour le croyant c ’est le contraire.

S’il est croyant déjà, c’est qu’Allâh l’a guidé. Et le fait qu’ilsoit éprouvé ne change rien à cela. Et ensuite la manièrede rééchir et de se questionner sur les actes d’Allâhprend toujours en compte la perfection d’Allâh. On doitse rappeler quand on est éprouvé que chaque acte d’Allâh,si on ne le comprend pas en tant que faible créature igno-rante, on peut comprendre (on a toutes les preuves autour

de nous pour cela) que chacun de Ses actes, chacune deSes décisions est plein de bonté, de science, de sagesse, de justice, de force et de toute-puissance.

C’est comme cela que l’espoir peut être entretenu. Lamaladie est sous le contrôle sage et savant d’Allâh. Elle estlà par sagesse et par miséricorde, et non pas comme unepreuve de Son abandon. Elle peut disparaître quand Allâhle veut et s’Il ne le veut pas, ou pas tout de suite, c’est parsagesse et par miséricorde. La maladie m’est bénéque,qu’elle parte ou reste encore. Il faut mettre en place cestypes de raisonnements, progressivement, étape aprèsétape, et les répéter le plus souvent possible, à voix basse

ou même à haute voix.Puis il faut s’attaquer à la question de la culpabilité

Il faut traiter cette question toujours par étapes, progressi- vement, et dans les moments où rééchir est possible pourla personne. Essayer de voir les choses de la manière sui- vante. La vie est dure c’est une réalité. Elle est jalonnée dedicultés, de nœuds, et les choses sont rarement commeon le veut. La personne déprimée comprend bien cela. Etce dont il faut se convaincre c’est que dans ce domaine,tout le monde est logé à la même enseigne. Le « sort » nes’acharne pas sur les personnes déprimées. Les personnesdéprimées le ressentent diéremment, plus durement,

plus vivement. Armé de ses réexions sur le but de la viesur Terre et sur les raisons d’être des épreuves que sontles maladies, en particulier la dépression, il faut ensuiteessayer de concevoir ce qui justie la pire culpabilité quepeut ressentir l’homme. Et pour un croyant, un acte quirend coupable c’est une faute, un péché vis-à-vis d’Allâh.

C‘est la seule chose qui mérite qu’on se sente coupable enréalité. Car c’est la seule chose qui mérite une sanction.Et la culpabilité implique une sanction. On ne peut sesentir coupable de ce qu’on ne contrôle pas, ou quand onn’a pas fait de mal. L’importance de la culpabilité dépendde l’importance du péché. La culpabilité la plus impor-tante qu’on puisse ressentir est pour le plus grand péché,associer des divinités à Allâh, mécroire. Un croyant, qui nepratique pas le chirk, culpabilise, se sent mal, s’en veut dèsqu’il sait qu’il désobéit à Allâh, et néglige ses devoirs. Quedire quand le péché est grave et qu’il a des conséquencessur les autres ? S’il y a un péché qui pourrait provoquerune culpabilité profonde, c’est bien la désobéissance deÂdam, notre père, au Paradis qui a abouti à son expulsionet à celle de sa descendance jusqu’à la n du monde, puisqui aboutira à sa réintégration ainsi qu’à celle d’une partieseulement de sa progéniture.

En bref, la désobéissance de Âdam pourrait bien consti-tuer l’acte à propos duquel on pourrait le plus culpabiliserde toute l’histoire de l’humanité. Chaque sourance de

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l’être humain prend racine dans cet acte de désobéis-sance. Et du point de vue de notre père Âdam, cet acte aabouti au malheur et aux dicultés pour l’ensemble de sesenfants. Notre prophète, ‘alayhi salâm, nous apprend quec’est d’ailleurs ce que lui a reproché l’un de ses enfants, leprophète Mûsâ, ‘alayhi salâm. Mais Âdam a argumentéen disant qu’on ne pouvait lui reprocher un acte qu’Allâh

avait prédestiné bien avant de le créer. Et notre prophète,‘alayhi salâm, a répété plusieurs fois que c’est Âdam quiavait raison dans son argumentation. Âdam a culpabilisé,c’est vrai, quand il a désobéi. Il n’a pas ruminé, n’a pas cédéau désespoir d’avoir commis un acte irréparable, mais ils’est repenti et Allâh lui a pardonné.

Quant aux conséquences de son acte, son irréversibilité,elle ne l’a pas fait déprimer car c’est un acte auquel il nepouvait échapper, selon le destin qu’Allâh avait préparépour lui. Cette argumentation par le destin pour justierles péchés passés, qu’on regrette et qu’on a arrêté de com-mettre, pour lesquels on a demandé pardon, est tout à fait

permise dans l’islam.On ne se sert pas du destin pour justier un péché qu’oncommet ou qu’on est en train de commettre, qu’on n’a pasarrêté ou qu’on a l’intention de réitérer. Ce hadith est trèsimportant pour améliorer le moral des gens qui sourentde dépression car il donne une méthode pour traiter leserreurs passées. Tout le monde commet des erreurs, qui nepeuvent pas être réparées. Des erreurs qui restent et qu’onne peut oublier. Alors elles sont, chez tout le monde, l’ob- jet de regrets, d’un sentiment de culpabilité, qui s’estompenormalement avec le temps.

Chez la personne déprimée, ces erreurs, ces regrets, cesentiment de culpabilité n’ont pas le temps de s’estom-per car ils sont sans cesse ressassés, ruminés et en n decompte loin de disparaître, ils se renforcent. Ils se renfor-cent et sont compris par la personne déprimée, non pascomme des symptômes mais comme la cause de leur dé-pression. Il faut arriver à comprendre que ce raisonnementest faux. C’est la déprime qui provoque ce fonctionnementde ruminement des mauvais souvenirs.

C’est ce qu’on appelle le waswâs, une caractéristique del’esprit humain dont le diable se sert pour préoccuper lesêtres humains et les tenir loin de la sérénité et de l’ado-

ration. Donc en plus de chercher la protection d’Allâhcontre les démons, il faut se servir de ce hadith d’Âdam etMûsâ, qui nous donne une méthode pour lutter contre laculpabilité injustiée. On doit arriver à placer en haut dela hiérarchie les erreurs pour lesquelles on risque de subirle châtiment d’Allâh. Et considérer que les autres erreursne peuvent pas être aussi graves. Quand on commetdes erreurs, il y a donc deux types de comportements àadopter.

Si c’est une erreur qui provoque la colère d’Allâh, on serepent et le pardon d’Allâh est facile à obtenir. La faute deÂdam a été pardonnée, les nôtres peuvent l’être égale-

ment. Si c’est une erreur qui ne provoque pas la colèred’Allâh, il faut faire appel à la notion de destin. On nepeut y échapper et nous ne sommes pas responsables. Ce

qui arrive n’est jamais notre faute, en dehors des désobéis-sances. Pour ce qui est des désobéissances, il sut de serepentir sincèrement et Allâh pardonne.

La personne déprimée doit comprendre, intellectuelle-ment, que tous les êtres humains vivent cela, commettentdes erreurs et les regrettent, parfois même toute leur vie. En ce sens ils ne sont pas diérents des autres. Ils

ressassent, ruminent. Mais chez les gens dépressifs, cetterumination contamine le contenu des autres pensées pourtoucher à leur intégrité en dégradant leur estime de soi.

Il faut ensuite travailler sur son estime de soi et la conance en soi

Rétablir l’espoir et contrôler la culpabilité sont un passageobligé pour rétablir un contenu de pensée sain et positif.Rétablir l’estime de soi relève de ce contenu des pensées.Quand la personne déprimée pense à quelque chose, ellele classe à chaque fois comme une preuve qu’elle est nulleet sans intérêt. « À chaque fois », c’est-à-dire très souventet dans les moments de crise, c’est en permanence à cause

du ruminement. Il faut garder en tête et se répéter que leregret n’est pas une mauvaise chose, qu’il existe chez toutle monde, et permet de ne pas refaire les mêmes erreurs. Ilest là pour nous permettre de progresser et aller de l’avant.

Garder en tête que la maladie est trompeuse et quec’est l’état de tristesse et de morosité qui rend dicile lesouvenir des fautes passées et non pas le contraire. C’estla maladie qui force à donner un sens aux souvenirs et auxpensées actuelles. Un sens négatif. À force de se répéterqu’on est coupable, responsable, qu’un autre que soi auraitsans doute bien mieux réussi, que les conséquences de meserreurs me touchent au quotidien, moi et d’autres… je

 vais nir par être persuadé que c’est parce que je suis nulque j’ai tout raté. Je vais avoir l’impression que ma nullitéa causé ma dépression. En réalité, le sentiment de nullitéest une construction fausse. Il faut que je garde à l’espritet que je me répète que c’est le contraire. J’ai l’ impressionque j’ai tout raté et que je suis nul uniquement parce que je suis en dépression. Mon mal est là. C’est un mal quitouche mon interprétation et ma compréhension deschoses. Il faut que j’interprète les choses autrement.

L’estime de soi est dégradée par des pensées qui se situentprincipalement à deux niveaux : les faits au sens très large(je rate tout, je suis nul) et les relations (je suis seul, je suis

sans intérêt pour les autres). À chacun de ces deux ni- veaux, les regrets, les erreurs, justiées ou absolument pasle plus souvent, sont mis en avant dans la dépression. Il vafalloir déconstruire tout cela en donnant tout le poids auxsouvenirs et les pensées positives et valorisantes, en cor-rigeant les pensées et les souvenirs qui sont injustementconsidérés comme négatifs, en regardant les côtés positifsqui existent toujours dans les pensées et les souvenirsmême ceux qui sont véritablement négatifs.

Le mal-être qu’on ressent est dans la plupart des cas liéaux personnes et aux situations. On ne s’aime pas en grosparce qu’on a l’impression que les autres ne nous aiment

pas, et qu’ils ont raison, et parce qu’on n’arrive à rien,qu’on ne gère rien, qu’on est dépassé et incompétent.

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Donc malgré les erreurs et les échecs (au sens très large,c’est ce qui est considéré par la personne malade commedévalorisant, ce qui est interprété comme négatif et qui joue sur l’estime du malade ; cela peut même concerner lesdéfauts physiques, et psychologiques, et généralement toutce qui est utilisé pour se convaincre qu’on est nul et seul),il faut comprendre que sa valeur n’a pas diminué. Il faut

arriver à rendre ces erreurs et ces échecs négligeables età réduire leur inuence sur l ’estime de soi. Mais il ne faitpas faire comme s’ils n’existaient pas. La politique de l’au-truche, le déni pur et simple, n’est jamais une bonne choseet ce serait même impossible à faire pour la personnedépressive dont les idées et les raisonnements négatifssont envahissants.

Et puisqu’il s’agit de pensées et de raisonnements réexes,il faut les combattre par des arguments rationnels, qu’on va répéter jusqu’à ce qu’ils deviennent évidents. C’est laméthode générale, contrecarrer les raisonnements négatifspar des raisonnements positifs opposés qui prouvent que

les idées noires n’ont aucun fondement. On va bâtir denouveaux réexes de pensée, avec des nouveaux contenus.Cela fait appel à une gymnastique de l’esprit pour forcerles relations entre les événements et les idées, dicile audébut puis de plus en plus facile avec l’aide d’Allâh.

1 - Le premier réexe

Le premier réexe à construire est celui de se convaincreque malgré les erreurs et les échecs, on n’est pas sansintérêt et qu’on intéresse les autres. Il faut faire sienne cesparoles des salaf à propos du destin : la meilleure preuvedu destin est qu’il n’est pas rare que des idiots réussissent. Tout est une question de destin, pas de valeur person-nelle. Il faut rechercher les preuves concrètes de cela.Rechercher cela de manière systématique. La preuve laplus claire, qu’on doit essayer d’avoir à l’esprit à chaqueinstant, et notamment quand on est assailli de penséesnégatives, c’est que des gens nous aiment, nous appré-cient. On compte pour un certain nombre de personnes.Et ces personnes ne peuvent pas se tromper toutes enmême temps sur nous. Si on est apprécié c’est qu’on n’estpas nul. Les autres en sont la preuve. Leur amitié, leurintérêt, leur attachement doivent être pris en compte dansl’estime de soi. De même, il faut cibler dans ses réexions,ses réussites qui sont les preuves de ses possibilités. On a

tous réussi quelque chose, même si dans l’état actuel, onest morose. Il faut donc garder un œil sur ces réussitesqui prouvent que les échecs ne sont pas une généralitédans notre vie. Il faut contrer les mauvaises idées sur lasignication de ses échecs en méditant la parole d’Allâhaux versets 22 et 23 de la sourate 57, Le Fer, dans lesquelsIl nous informe que tout ce qui nous arrive est écrit paravance, que ce soit les échecs et les réussites et que celadoit avoir comme conséquences de ne pas se jauger soi-même sur la base de ce qu’on a réussi et de ce qu’on a raté.

2 - Le deucième réexe

C’est de mettre en place des raisonnements pour répondreaux contre suggestions de la dépression. La personnedéprimée peut assez facilement arriver à considérer

qu’on l’aime et qu’elle est l’auteur de quelques réussites.C’est évident. Mais ce n’est pas susant car la dépressionamène avec elle une façon de penser propre, une manièrenégative de raisonner et de ne pas accepter l’évidence. Carla dépression déforme tout. Elle crée du doute qui renddicile l’atteinte de la certitude. Elle trouve des parades àtoutes les idées positives que la personne peut avoir et qui

fragilisent ses nouvelles certitudes. D’où l‘importance desarguments et des preuves, de la rationalité, car la dépres-sion n’apporte pas de preuves. Elle en fabrique des fausses.Prenons l’exemple de cette tante qui disait, à propos deson neveu qu’elle aimait beaucoup, que le fait qu’il luirende régulièrement visite n’était pas une preuve qu’il l’ai-mait parce qu’il ne venait chez elle que pour plaire à Allâhen honorant le lien de parenté qui l’unissait à elle. Selonelle, il venait lui rendre visite juste pour plaire à Allâh, cequi constituait à ses yeux une preuve qu’il ne l ’aimait pas !

C’est une des distorsions dont la dépression est respon-sable. Pour ne pas avoir à considérer qu’on est eective-

ment apprécié et l’objet de l ’attention des autres, on vatrouver des raisons négatives dans l’intérêt des autres poursoi. On va penser qu’on est « aimé » par intérêt, par dépit,par obligation, par ennui, par la peur de la solitude et paspour ses qualités propres ou ce qu’on imagine être desqualités. De même pour ne pas avoir à considérer que l’ona à son actif des réussites, on va trouver des raisons né-gatives à ses réussites, comme le fait qu’on ne réussit quequand c’est facile, quand tout le monde réussit, quand celan’a pas beaucoup d’intérêt… C’est là qu’il faut se forcer àdistinguer les preuves et le doute et mettre en place desraisonnements opposés de manière systématique.

3 - Il faut changer de modèles et raisonner dans cesnouveaux modèles

Ce qui fait du mal à la personne dépressive ce sont lesrelations qu’elle fait entre les situations et sa propre valeur.Et ces relations resurgissent dans la vie de tous les jours,face aux paroles des proches et de ceux qu’on aime quiexpriment combien on est nul, quand on voit sa situationactuelle et qu’on pense à celle qu’elle aurait pu être si onavait été moins « nul », quand on assiste à la réussite desautres et qu’on les voit nager dans le bonheur… Toutes cessituations engendrent des pensées négatives centrées surl’estime de soi parce qu’elles sont ancrées dans des modèles

d’explication particuliers.Dans ces modèles, la parole des gens que j’aime et que jerespecte est toujours vraie, la réussite des autres prouvequ’ils sont mieux que moi, mon échec prouve que je suisnul. Il faut changer ces modèles. Pour arriver à changerses critères de réussite, ses critères de bonheur et de bonneestime de soi, et considérer que la parole des autres, lesréexions des autres et leur comportement à notre égardn’ont pas forcément l’objectif qu’on leur attribue. Souventnos proches veulent notre bien, même s’ils sont mala-droits. À ce stade il faut bien intégrer les paroles et lescomportements positifs à notre égard et voir que tout lemonde échoue dans un domaine ou un autre. Changerses critères de réussite, c’est arriver à mettre en avant ce

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qu’on a réussi et à considérer que les choses qui nous sontdiciles à faire ou impossibles ne touchent pas à notre valeur. À terme, penser aux échecs ou recevoir des parolespeu atteuses de la part de nos proches ne feront toujourspas plaisir, mais ne généreront plus de pensées négativessur sa valeur.

On peut tout rater et être quelqu’un de bien. On peut

faire l’objet de critiques de la part des proches et êtrequelqu’un de bien. Les autres peuvent avoir tort dansleur jugement, même nos proches, même notre mère. Etconsidérer que notre mère a tort ne signie pas qu’on luimanque de respect. C’est dans de nouveaux modèles qu’ondoit raisonner, des modèles dans lesquels les conditionspour avoir une bonne estime de soi sont moins draco-niennes et moins nombreuses. Et comme la dépression aapporté avec elle des raisonnements réexes, il faut se for-cer à systématiquement contrer les raisonnements erronéspar des raisonnements corrects et positifs, jusqu’à ce queces derniers prennent toute la place et deviennent réexe.

La dépression ne s’est pas imposée en un jour, elle ne vapas partir en un jour. La combattre c’est lui imposer sespropres règles de pensée. Cela est dicile au début et deplus en plus facile, à condition que les nouveaux raisonne-ments soient bel et bien rationnels.

Il faut éviter les gens moroses

La morosité empêche l’état de la personne dépressive des’améliorer, bien sûr. Dans les moments diciles, il fautse faire violence pour ne pas rester seul. Il faut fréquenterdes gens joyeux, des croyants en priorité, qui nous aiment,qui s’en font pour nous sans que notre état ne les déprime,qui s’intéressent à nous et qu’on aime. Les savants, comme

Ibn-ul-Qayyim, sont d’avis qu’une bonne partie de laguérison est donnée par la bonne ambiance et par l’envi-ronnement non morose.

La mort spirituelle du coeur duserviteur indigne

C’est encore une des conséquences de la dépression, sansdoute la pire car elle enlève le dernier espoir que le servi-teur peut avoir : le secours d’Allâh. La malade a la convic-

tion qu’il est un mauvais serviteur, que son cœur ne réagitplus à l’évocation d’Allâh et à ce qu’Il fait. Cela convaincle serviteur malade qu’il ne vaut pas le coup, qu’il n’est pasdigne de l’aide d’Allâh. Il tient pour preuve que la religionne lui apporte aucune aide et que la foi s’enfuit de soncœur. Encore une fois, les doutes sur sa foi et la vitalité desa spiritualité concernent tout le monde, c’est un phéno-mène normal, naturel. La personne dépressive est à cetitre comme les autres croyants. C’est sa manière d ’y réagirqui est diérente. Et encore une fois, le raisonnement n’estpas correct. Ce n’est pas parce que le cœur est mort qu’onest nul et qu’on déprime. C’est parce qu’on déprime qu’on

croit que le cœur est mort et qu’on est nul.Pour tenter de remédier à cela, il faut encore contrecarrerrationnellement les réexes de la pensée dépressive et

changer de modèle. Le modèle général est donné dans laRévélation aux versets 15 et 16 et suivants, de la sourate89, L’Aube. Allâh nous apprend comment Le considérerpar rapport à ce qui nous arrive. Il nous montre que lesgens matérialistes voient dans la richesse et la réussite lasatisfaction d’Allâh et dans la pauvreté et les échecs lacolère d’Allâh. Il nous montre que ces gens ont tort et que

ce matérialisme est la cause de leur manque de générosité,de l’injustice fait aux pauvres et aux orphelins… Ce qu’ilfaut retenir là c’est que le cadre général interdit de voirun lien entre nos réussites et nos échecs et la satisfactiond’Allâh.

La personne malade doit également mettre en avantqu’elle se sent dérangée par cette conviction que son cœurest mort. Si cette conviction parvient à la déprimer encoreplus, c’est qu’elle la dérange. Si elle la dérange, c’est que lecœur n’est pas mort. Un cœur mort n’est dérangé par rien.Il ne fait pas la diérence entre le bien et le mal. Ce quin’est pas le cas de la personne croyante dépressive. Ce qui

se passe c’est qu’il est devenu dicile de méditer, fatigantde penser à Allâh, de ressentir autre chose que la peine,la détresse et la mauvaise estime de soi. Il est égalementdevenu dicile de se concentrer pendant les actes d ’ado-ration. Et forcément, étant donné que l’îmâne dépend del’entraînement du cœur, de la méditation et de la réexion,on a l’impression d’avoir le cœur vide quand on n’arriveplus à rééchir intensément et qu’on n’arrive plus à res-sentir des émotions pendant les actes d’adoration. C’est làque le modèle islamique de l’îmâne est important à mettreen pratique. L’îmâne est composé des croyances qu’on a,des actes qu’on accomplit et des paroles qu’on prononce.

Chacun de ces éléments est en partie dépendant des deuxautres, de sorte qu’il est inuencé par les deux autres.Aussi faire un acte agit sur cœur, dire la parole de tawhîdet faire le dhikr agissent sur le cœur. Tout est lié. Il fautdonc persévérer dans les actes de bien, en particulier lesactes obligatoires et ne pas désespérer de ses actes parcequ’on croit qu’on ne ressent rien. Il faut multiplier les actesd’adoration surérogatoires qui nous sont faciles dans lespériodes aiguës de la dépression. Faire le dhikr agit sur lecœur mais si on ne s’en rend pas compte, invoquer agitsur le cœur, écouter le Coran agit sur le cœur, écouter debonnes paroles agit sur le cœur, fréquenter des personnespieuses agit sur le cœur, prier, faire une aumône, même

utiliser le siwâk, agit sur le cœur. Et quand on le peut,on doit essayer de rééchir et de méditer pour raermirles actes du cœur (intention, amour, crainte…) et mettreen place des réexes pour avoir ces sentiments le plussouvent possibles. On trouvera de grands bénéces, pourmettre en place ces réexes, dans la compréhension, lamémorisation et la répétition des versets que j’ai citésdans ce texte.

 

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Quelques conseils aux prochesd’une personne dépressive

• Le premier conseil à donner à un frère ou à une sœurqui soure de dépression et qui a une estime de soi dé-gradée c’est que la guérison passe en partie par l’aide quele malade reçoit de ses proches. Cela signie les prochesdoivent avoir un comportement particulier et ecace.

• À ces proches, je conseille d’invoquer Allâh pour eux, deleur lire le Coran régulièrement, de faire preuve d’empa-thie, de compréhension et de patience.

• Je leur conseille d’axer les relations avec leurs prochesmalades sur les points que j’ai cité au-dessus.

• Je leur conseille d’être de bons compagnons, de ne pasajouter de morosité à celle que ressent déjà leur proche.

• Je leur conseille d’insister sur les réussites de leur proche,de les aider à mettre en place les réexes et le modèlenouveau.

• Je leur conseille de les aider à garder le contact avec lapratique religieuse et à ne pas reprocher les dicultésressenties à ce niveau.

• Je leur conseille de ne jamais leur laisser penser que vousconsidérez leur maladie comme pas grave, ou comme duchichi, ou encore comme de la faiblesse.

• Je leur conseille de ne pas faire ressentir à leur proche

malade qu’il a un problème de foi, ce n’est pas le cas. Ladépression n’est pas une attitude d’impatience devant unesituation dicile ou une réaction de rébellion face à uneépreuve.

• Je leur conseille dans leur rappel religieux à leur prochede ne pas évoquer les sujets d ’une manière qui pourrait lefaire déprimer davantage ou pire. On ne gagne rien faceà un proche malade qui exprime le fait que la vie ne vautpas d’être vécu, de faire la liste de ce qu’Allâh réserve auxpersonnes qui se suicident.

• Mon dernier conseil s’adresse à nous tous, dans nos

rapports avec les nôtres, même quand nos proches ne sontpas éprouvés par cette maladie. Il ne faut jamais dire nifaire croire à quelqu’un qu’il n’est pas à la hauteur. Ce n’estpas une manière islamiquement acceptable de se compor-ter avec les autres. Je vise particulièrement les parents etsurtout la mère. Je leur conseille de ne jamais faire de leursproches, en particulier les jeunes, les cibles d’un harcèle-ment moral, même involontaire, ce qui pourrait conduireune personne fragile à tomber dans la dépression. Il fautêtre vigilant.

Si je cible les parents et les mères c ’est en rapport auxhadith authentiques qui font de la mère, avant le père,

l’être le plus cher à préserver. Ce droit qu’à la mère estcouplé à sa responsabilité. Si elle a ce droit, c’est justementparce qu’elle est une pierre angulaire de l ’éducation et de

la bonne santé de l’enfant. Elle a un pouvoir unique et soninuence sur la vie de l’enfant est énorme. Aussi, le méritequ’elle a, religieusement, aux yeux de ses enfants va de pairavec sa responsabilité énorme et sa capacité d’en faire desadultes sains.

Qu’Allâh nous pardonne ainsi qu’à nos frères et sœurs maladeset qu’Il les guérisse sans leur laisser aucune séquelle et aucun

 péché.

Wa as-salamu ‘alaykum.