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Discours d’ouverture de Jean-Luc Rigaut
30e Convention nationale de l’intercommunalité
Monsieur le président délégué de la métropole de Nice, cher Louis Nègre
Madame la ministre, chère Jacqueline Gourault
Madame la secrétaire d’Etat, chère Emmanuelle Wargon,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Monsieur le président délégué du MEDEF,
Mesdames et Messieurs les présidents,
Mesdames et messieurs les directeurs généraux de services,
Mesdames et Messieurs,
Chers amis,
Je souhaite à mon tour me féliciter de votre présence, en très grand
nombre, à la convention nationale de l’AdCF, organisée en cette
magnifique ville de Nice. Pour la première fois.
Monsieur le président délégué de la Métropole, cher Louis, je tiens à te
remercier triplement.
D’une part pour avoir accepté d’intervertir ton intervention avec Christian
Estrosi, qui sera parmi nous demain.
En second lieu, pour nous accueillir dans cette splendide métropole, à la
fois méditerranéenne et alpine, baignée de soleil, de mer mais aussi de
nature et de neige. Nous admirons depuis hier la beauté des lieux et la
qualité des équipements que porte la métropole.
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Je rappelle que Nice a été la première agglomération française à se
transformer en métropole, à la suite de la loi de 2010.
Mes troisièmes remerciements s’adressent à toi personnellement, cher
Louis, en tant que président du groupement des autorités responsables
des transports : le GART.
C’est l’un des principaux partenaires de l’AdCF. Nos deux associations
ont créé à Paris le « pôle Joubert », un plateau commun où sont réunies
une quinzaine de fédérations et d’instituts qui oeuvrent au service de nos
territoires : de France urbaine aux agences d’urbanisme, de notre
association de directeurs et directrices (l’ADGCF que je salue ici) aux
fédérations des SCOT ou des pays et pôles d’équilibre ruraux… Il y a une
indéfectible amitié entre l’AdCF et le GART. Je voulais, cher Louis, te le
dire publiquement. Sur ton territoire.
Nous sommes réellement heureux de nous réunir à Nice car, outre la
qualité de l’accueil, l’AdCF n’avait jamais organisé son congrès dans la
région Provence Alpes Côte d’Azur, devenue récemment région Sud.
Alors, de grâce, ne dites plus jamais la région « PACA » !
Certes, nous y organisons régulièrement des rencontres régionales de
nos adhérents, comme récemment à Manosque, ou aux Sorgues du
Comtat, mais notre Convention nationale n’était jamais venue ni au pays
de Mistral et de Giono ni dans la cité natale de Masséna et Garibaldi.
Alors, c’est fait, et nous nous en réjouissons.
L’AdCF célèbre cette année son trentième anniversaire ! C’est l’âge de la
pleine vigueur. Ce congrès doit en être l’image. Nous avons commémoré
nos 30 ans il y a quelques mois à l’hôtel de Lassay, à l’invitation du
président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand. Tous les anciens
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présidents de notre association étaient de la fête, notamment le premier
d’entre eux, notre fondateur : Marc Censi. Plusieurs ministres, également,
dont vous-même chère jacqueline Gourault. Mais aussi Jean-Pierre
Chevènement, le père de la loi de 1999 qui a si puissamment accéléré la
réorganisation de nos territoires.
Je vous rassure, je ne vais pas me lancer dans une longue narration
historique. Je voudrais néanmoins situer notre congrès dans le temps
long pour prendre un peu de recul avec l’actualité immédiate et les
agitations du moment.
Le poète René Char, qui est né et a vécu à l’Isle-sur-Sorgue près
d’Avignon, et qui a combattu dans les maquis de Haute Provence, pas
très loin d’ici, avait cette belle formule : « L’essentiel est sans cesse
menacé par l’insignifiant ». Faisons nôtre cette formule pour nos deux
jours ! Allons à l’essentiel et ne nous laissons pas contaminer par
l’insignifiant.
L’essentiel est pour nous ce qui a été construit en 30 ans depuis la
création de notre association, en 20 ans depuis la loi Chevènement, ou en
10 ans depuis le rapport du comité Balladur. Nous avons désormais
organisé l’ensemble de nos territoires et diffusé la culture du projet qui fait
partie de ce que nous appelons notre « ADN ». Nous avons renforcé nos
compétences et nos équipes sur de nombreux dossiers stratégiques : le
développement économique, l’urbanisme, l’environnement, les
transports… Nous avons accrû nos solidarités financières et fiscales en
réduisant par cinq les disparités entre communes. Je voudrais que nous
soyons collectivement fiers - et même très fiers - de ce parcours
accompli.
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Nos mandats s’achèvent dans quelques mois. Nous aurions pu
consacrer nos deux jours à un exercice de bilan, à regarder dans le
rétroviseur, à voir ce qui a été bien fait et ce qui l’a moins été. Notre choix
est de nous tourner vers l’avenir. De préparer les prochaines échéances
et les défis qui s’annoncent.
Je dirais donc juste un mot sur le passé récent. Les mandats 2014-2020
auront été ceux des vastes réorganisations territoriales, des baisses
brutales de dotations, de la remise à jour de nos documents stratégiques,
de l’optimisation de nos dépenses… Ils auront été éprouvants, parfois peu
gratifiants. Malgré tout, ils laissent à l’immense majorité d’entre nous le
sentiment du travail accompli. Le temps n’a pas été compté. L’énergie des
élus, de nos collaborateurs non plus.
Je veux donc rendre hommage à tous ceux qui auront été les chevilles
ouvrières de ces réorganisations. Je pense notamment à celles et ceux
qui ont d’ores et déjà décidé de transmettre à d’autres les responsabilités
publiques locales. Au sein même de notre bureau et de notre conseil
d’administration plusieurs d’entre nous ont fait ce choix, je pense à notre
président délégué Loïc Cauret, à Jo Spiegel, à Frédéric Sanchez, à
Emmanuel Couet…
Leur ultime mandat n’aura pas été un fleuve tranquille. Mais ils peuvent
se retirer avec le sentiment du devoir accompli. Ils laissent à leurs
successeurs un bel héritage.
En notre nom collectif je tiens à les saluer et les féliciter.
L’AdCF ne joue pas, vous le savez tous ici, dans le registre du lamento et
du chœur des pleureuses. Il y a d’autres Congrès pour cela. Notre
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association existe depuis ses origines pour porter des transformations et
affirmer des valeurs. Pas pour défendre des corporatismes ou des
positions acquises. Nous voulons être en mouvement, nous projeter vers
l’avant, ne jamais jouer en défensif.
L’intercommunalité reçoit à nouveau quelques coups de griffe. Nous le
sentions venir depuis l’an passé. Mais chaque étape nouvelle de
l’intercommunalité a connu des « contre-coups ». Nous savons qu’elle
dérange ! Elle bouscule les habitudes et les petits pouvoirs. Elle émancipe
des tutelles et des vieux systèmes.
A chaque approche des élections municipales et sénatoriales, certains
s’imaginent qu’il est payant de s’en prendre aux intercommunalités, de les
caricaturer en affreuses « cannibales » de communes ou en cause
première du « blues des maires ».
Tout cela est vain. Futile. Irresponsable.
Notre vérité n’est pas celle-là. Notre vérité est que l’intercommunalité a
permis de préserver nos communes, qu’elle démultiplie leurs capacités
d’action, qu’elle permet de concrétiser la décentralisation, qu’elle apporte
partout des ingénieries qui se sont étiolées à toute vitesse dans les
services de l’Etat.
Je ne connais pas en France de territoire qui aille bien sans une
intercommunalité forte, bien organisée.
Toutes fonctionnent-elles bien ? Bien sûr que non. Notre but est bien d’y
parvenir. C’est notre JOB !
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Il reste à perfectionner, améliorer, approfondir. Nous nous y sommes
engagés l’an passé. Nous avons depuis lors conduit un important travail
d’enquête, d’études, de valorisation des meilleures pratiques… sur les
questions de gouvernance, d’implication des maires, des élus municipaux.
Nous avons inspiré les « pactes de gouvernance » que le projet de loi
Engagement et proximité, actuellement en débat, propose de généraliser
au début des prochains mandats. Nous y sommes prêts ! C’est cet
exercice qui doit nous permettre d’engager nos prochains mandats dans
la confiance et le respect des uns et des autres.
La ligne rouge
En revanche, nous l’avons expliqué à plusieurs reprises, nous sommes
radicalement opposés à ce que s’ouvre un nouveau cycle de débats sans
fin sur les compétences ou les périmètres. Notre demande de stabilité
avait été entendue en 2016-2017. Le chef de l’Etat s’y était lui-même
engagé dès la première conférence nationale des territoires. Nous
rappelons aujourd’hui le gouvernement et le Parlement à cet engagement.
La véritable attente des élus de France, c’est la STABILITE ! Nos irritants
à nous, c’est que l’on modifie sans cesse les règles, que l’on détricote les
textes comme Pénélope le manteau d’Ulysse, que l’on fasse deux pas en
avant puis un pas en arrière.
Arrêtons ce « yo-yo » !
L’AdCF a d’ores et déjà rencontré les députés pour expliquer ce qui ne va
pas, après l’examen du projet de loi au Sénat. Ce texte doit demeurer
centré sur son objectif initial : faciliter l’engagement dans la vie publique
locale. Pense-t-on sérieusement que cet engagement sera motivé par le
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projet de tout déconstruire ? Ce ne sont plus les supposés « irritants » de
la loi NOTRe qui sont visés, mais carrément 20 ans de coopération
intercommunale. Il faut dire stop !
A quelques mois des prochaines échéances électorales, les futurs
candidats mais aussi les électeurs doivent savoir dans quelle
intercommunalité sera leur commune au cours du prochain mandat et
quelles en sont les compétences. Je rappelle qu’il faudra aussi, dès 2021,
transférer de nouvelles recettes fiscales au profit des communes et de
leurs intercommunalités. Ce n’est pas en de tels moments que l’on doit
faire croire que tout va changer.
Nous savions que le projet de loi, et la manière de l’annoncer, risquait
d’ouvrir une « boite de Pandore » pour tous les amendements de
circonstances. Cela n’a pas manqué. Le texte comprenait une trentaine
d’articles, il en comprend plus de 100. 32 dispositions concernent
l’intercommunalité. Stop à l’inflation ! Il est temps de fixer des lignes
jaunes.
Notre assemblée générale a pris une résolution solennelle hier soir en ce
sens. Nous disons en substance « feu vert » pour les « pactes de
gouvernance » mais « feu rouge » pour tout ce qui touche aux
compétences ou aux modifications de périmètres. Nous proposerons, dès
la semaine prochaine, à tous les présidents des intercommunalités de
France d’adopter une résolution nationale qui sera adressée à tous les
parlementaires et au gouvernement.
2ème partie : « Le temps des territoires »
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Nous l’avions déjà expliqué lors de nos Congrès précédents : notre priorité
est désormais consacrée à nos projets de territoires et à nos politiques
publiques.
Depuis notre dernier congrès, un évènement majeur a eu lieu, une crise
sociale et territoriale majeure, qui n’est éteinte qu’en surface.
Le grand débat a permis d’apaiser un peu les choses mais il ne faut pas
s’aveugler.
Notre pays est inquiet, tendu, enclin au pessimisme. L’actualité
internationale, la crise climatique et écologique, l’environnement
économique… n’invitent pas, il est vrai, à l’exaltation. Mais c’est justement
parce que nous entrons dans une période d’incertitudes qu’il est
indispensable de retrouver de la sérénité et de la capacité d’agir
collectivement. De reprendre possession de notre destin.
Nous avons placé ce 30ème congrès sous le thème « Le temps des
territoires ».
J’y vois deux raisons.
L’une est liée au sentiment de plus en plus partagé qu’il faut « penser
global et agir local ». La formule n’est pas de moi. Elle date même du
XIXème siècle. Elle était inscrite sur le fronton, à Montpellier, de la maison
d’un grand urbaniste d’origine écossaise. Elle reste plus vraie que jamais.
Nous sentons partout autour de nous une aspiration à relocaliser les
sujets, notre alimentation, notre industrie, nos productions énergétiques.
Il y a une demande de retrouver du collectif, de l’entraide, de l’échange.
Or c’est dans nos territoires, dans nos communes, nos intercommunalités,
nos bassins de vie… que cela est possible.
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L’autre raison du « Temps des territoires », c’est aussi pour nous l’arrivée
à une certaine forme de maturité et de force tranquille. Pour qu’un espace
donné se mue en « territoire », il faut qu’une organisation collective lui
donne forme. Qu’elle l’institue en une capacité d’action.
C’est l’intercommunalité, j’en suis convaincu, qui donne ce visage
nouveau à nos territoires, les met en mouvement.
Nos projets de territoire prennent une importance nouvelle dans ce
contexte. Ils nous aident à fédérer et rassembler, les élus en premier lieu,
mais aussi nos partenaires, le monde associatif, les acteurs économiques,
les institutions locales et surtout les habitants. Nos projets de territoires
sont des réducteurs d’incertitudes. Ils donnent de la visibilité de long
terme.
Les présidents de communautés et métropoles confirment, dans notre
enquête, le rôle central qu’ils accordent à cet exercice.
Il reste pour autant des progrès à accomplir pour aller vers des démarches
plus participatives. Nous avons encore beaucoup de à faire pour que ces
documents stratégiques fassent sens pour un public plus large que les
seuls élus. Environ 20% des présidents nous disent être parvenus, plutôt
avec succès, à impliquer les habitants dans leur projet de territoire.
Beaucoup d’autres s’y sont essayés sans vraiment y parvenir. Il faut que
nous trouvions les bonnes méthodes. Nous aurons des débats sur ce sujet
durant nos deux jours. Nous publions également un guide sur la
concertation intercommunale qui devrait vous aider.
Un proverbe africain dit « Ce que tu fais pour moi mais sans moi, tu le fais
contre moi ». Il y a du vrai. Nous n’impliquerons peut-être pas tout le
monde mais il faut que cela soit possible pour celles et ceux qui le
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souhaitent. Cet effort demande des méthodes exigeantes, mais aussi
d’autres manières de parler des politiques publiques. Il faut retrouver une
simplicité de langage.
Il faut que nos règles de fonctionnement soient simplifiées, stabilisées,
appropriées.
Besoin de retrouver la confiance
Nous l’avions vu l’an passé à travers notre grand sondage :
l’intercommunalité a gagné en notoriété et en visibilité partout en France.
Elle n’est pas encore assez intelligible. Il nous reste quelques mois pour
accomplir des progrès significatifs, faire de nos élections municipales et
intercommunales un grand rendez-vous civique. Nos réformes territoriales
n’ont jamais été réellement expliquées à nos concitoyens. Nous parlerons
dans les prochains mois à nouveau de décentralisation, de
déconcentration, de différenciation, Madame la Ministre, chère
Jacqueline, mais est-ce que nos concitoyens parviennent à nous suivre ?
Nous avons adopté hier une résolution pour que les pouvoirs publics
nationaux engagent une vaste campagne nationale d’information sur nos
institutions locales et sur nos intercommunalités, leurs compétences, leurs
ressources. Le grand débat national a révélé l’intérêt des Français pour
ces sujets.
Nous ne savons pas encore avec précision, à l’heure qu’il est, la place
que prendra l’intercommunalité dans les futurs scrutins locaux de mars
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prochain. Nous sommes en revanche certains qu’elle sera plus importante
qu’en 2014. Ce n’est pas difficile tant l’intercommunalité fut peu visible.
Pour la deuxième fois, le scrutin fléché se traduira par une élection directe
d’une part très importante de conseillers intercommunaux et
métropolitains. Il faudra qu’il soit mieux expliqué aux Français, que les
candidats fassent connaître leur ambition et leurs priorités pour
l’intercommunalité. Dans notre sondage de l’an passé, les Français
demandaient cela à plus de 90%. Ils veulent de la transparence et un
langage de vérité.
Ils sont pleinement attachés à leur commune de résidence, là où ils
dorment et où ils votent. Mais ils sont de plus en plus mobiles, savent très
bien que les questions de développement économique, de transport, de
logement, de gestion des déchets, d’accès à la santé ou aux services
publics… doivent être traités à une échelle plus large, intercommunale.
Le grand public s’aperçoit bien de l’importance croissante des leviers
d’action dont disposent nos communautés et métropoles. Il sait très bien
que la composition future de leurs exécutifs sera l’un des enjeux des
futures élections locales. Les médias et les leaders d’opinion aussi s’en
rendent bien compte.
Je vous propose de réfléchir, durant nos deux jours, aux moyens de faire
mieux connaître l’intercommunalité. Et surtout de mieux la faire
comprendre. Je vous propose de donner aussi envie à nos concitoyens
de s’engager dans les mandats intercommunaux. Nous avons besoin de
femmes, de jeunes, de compétences et d’expériences diversifiées. Nous
avons besoin de regards originaux, de compétences dans les sujets
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émergents : que ce soit le numérique, les questions de santé, nos
transitions démographiques.
3eme partie : Nouvelle contractualisation
L’intercommunalité est désormais au cœur des politiques publiques. C’est
à son échelle que nombre de programmes, nationaux ou régionaux, ont
vocation à se territorialiser. Des plans climat aux contrats opérationnels
de mobilités, des programmes locaux de l’habitat aux contrats de ville, de
Territoires d’industrie aux contrats de transition écologique, des maisons
France service aux contrats de santé…
Nous appelons à une nouvelle contractualisation globale avec les
territoires. C’est le « pacte girondin » que nous attendons. Nous avons
une opportunité historique pour remettre en cohérence les politiques
publiques, les extraire de leurs silos, améliorer leur atterrissage dans les
territoires. Le moment est venu de tourner la page des appels à projets et
des concours, de la multiplication des agences et des zonages. Il faut
retrouver la grammaire du contrat. Du contrat territorial, transversal,
pluriannuel, global. Ce sera lui le véritable « pacte de confiance » entre
l’Etat et les collectivités.
C’est pour préparer ces contrats territoriaux que la création de la nouvelle
agence nationale de cohésion territoriale a un sens. Sinon à quoi bon ? Il
faut que l’Etat et ses opérateurs se réorganisent et réapprennent à
accompagner les projets.
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Nous avons également besoin de cohérence dans la répartition des
responsabilités et la nature de nos ressources. C’est ce que souhaitait le
Président de la République à la suite du grand débat.
A ce titre, nous ne saisissons pas la logique de la répartition des nouvelles
ressources prévue pour remplacer la taxe d’habitation dans les budgets
locaux.
Pourquoi vouloir faire redescendre toute la taxe foncière aux communes,
au risque de multiplier les inégalités demain ? D’être obligés de recréer
une « usine à gaz » à travers la création d’un « coefficient correcteur »
que personne ne va comprendre ? Et ne compenser les
intercommunalités que par la seule TVA. Un impôt sans assise territoriale,
sans lien avec le développement économique et l’aménagement, qui
évoluera de la même manière, que vous développiez ou non votre
territoire ! Ce n’est pas cohérent. Prenons le temps d’améliorer la réforme
sur ce point majeur. Nous avons encore un an pour parvenir à un partage
intelligent de ces ressources entre communes et intercommunalités.
Ceci est d’autant plus important que nous entrons dans une nouvelle ère ;
dans une transformation de notre manière de penser nos villes et nos
territoires, d’urbaniser, d’aménager. Partout où s’élaborent les plans
locaux d’urbanisme intercommunaux nombre de terrains à bâtir sont
déclassés.
Nous l’avons vu avec les nouvelles instructions sur le « zéro
artificialisation nette ». Le gouvernement, chère Emmanuelle Wargon,
voudrait que nous allions encore plus vite et plus loin.
Mais ce n’est pas en redescendant 15 milliards de taxes foncières à
l’échelle de nos communes que l’on va freiner les concurrences pour
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accueillir des lotissements ou des zones commerciales ? Franchement,
soyons cohérents ! Il faut veiller à ne pas mettre les intercommunalités
devant des arbitrages impossibles. Près de 30% de la taxe foncière
provient des entreprises. Veut-on recréer les mêmes rivalités que dans les
années 1980, avant la taxe professionnelle unique ?
Nous comptons sur vous, Mesdames les Ministres, pour nous rassurer sur
les intentions du gouvernement. Nous avons besoin d’y voir clair. Durant
ces deux journées, nous devons préparer nos prochains mandats et
esquisser notre feuille de route. Nous appelons à une grande politique de
cohésion des territoires, de transition écologique.
La très bonne nouvelle est que l’investissement public repart à la hausse
depuis deux ans. Selon notre baromètre de la commande publique, créé
avec nos amis de la Banque des Territoires, nous revenons en cette fin
2019 au niveau de 2013. C’est bien. Nos investissements se verdissent :
sur les mobilités, les réseaux d’eau, les rénovations énergétiques des
bâtiments ou des logements, l’adaptation au changement climatique, la
dépollution des friches industrielles, les projets alimentaires territoriaux…
Tous ces chantiers sont absolument passionnants. Nous espérons des
appuis financiers importants dans le cadre des futurs programmes
européens et des contrats de plan. Il faut sortir de l’hiver de
l’investissement public en Europe. Le plan de la commission Juncker,
lancé en 2013, n’a eu aucun effet de relance réel. Nous attendons de la
nouvelle Commission européenne, un véritable « New deal » de
l’investissement. Je suis persuadé que nos métropoles et communautés
en seront, en France, des relais majeurs de mise en œuvre.
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Nos partenaires des régions élaborent également leurs SRADDET et les
règles qui s’imposeront demain à nos propres politiques. Nous devons
absolument co-construire ces documents et ces règles. Le lien entre
régions et intercommunalités s’est affirmé au cours de ces mandats. Il
faudra l’approfondir au cours des six années.
J’en viens aussi à nos priorités économiques. C’est sur ce sujet que nos
intercommunalités ont le plus progressé. Les présidentes et présidents le
disent clairement dans notre enquête. Nous nous sommes rapprochés
des organisations patronales, cher Patrick Martin, des institutions
consulaires, des fédérations industrielles. Notre fierté est d’avoir contribué
activement au lancement du programme Territoires d’industrie qui
implique 500 intercommunalités à ce jour, en lien étroit avec les régions.
Nous avions appelé ce programme de nos vœux lors de notre convention
de Nantes, puis dans notre appel à un nouveau « pacte productif » entre
territoires et entreprises du printemps 2018. Nous croyons à notre
réindustrialisation et à ses effets puissants sur nos systèmes productifs,
sur les services qualifiés, la recherche, le design… L’industrie se
transforme, se met au service de notre transition écologique, de
l’économie circulaire ou de la transition numérique, crée beaucoup de
valeur. Elle redonne surtout une personnalité à nos territoires, à travers
des savoir faire, des images de marque, des « champions » locaux qui
redonnent des couleurs au « made in France ». Nous y croyons pour nos
ruralités, nos agglomérations de taille intermédiaire mais aussi dans les
plus grandes villes où émerge une nouvelle industrie,
Ce sera une priorité absolue de conforter cette redynamisation de nos
tissus industriels au cours des prochains mandats.
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Conclusion :
Je voudrais conclure mes propos en vous invitant à prendre durant nos
deux journées un grand bol d’air. Nos congrès sont souvent studieux mais
nous avons aussi nos temps de détente et de convivialité. Nous
conjuguons à notre manière l’utile et l’agréable. Je n’ai qu’un souhait : que
vous puissiez repartir dans vos territoires, qu’ils soient ruraux, urbains,
métropolitains ou ultra-marins, avec des idées et des ambitions
renouvelées. Nos études, nos enquêtes, nos ateliers, forums et
conférences, nos temps régionaux… sont faits pour vous enrichir.
Notre congrès est là pour rappeler la force que nous représentons
désormais avec le millier de communautés, de métropoles qui nous font
confiance. Il faudra compter avec nous. Et de plus en plus.
Je vous remercie.
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