Download - Projet de thèse Adrien Doron
Candidature au contrat doctoral SMS 2012
LabEx SMS
Ecole doctorale TESC
PROJET DE THESE
Territoires et réseaux de l'échange du « made in China »
en Méditerranée
Présenté par Adrien DORON
Dirigé par Olivier PLIEZ
Domaine scientifique principal de la thèse : Sciences humaines et sociales
Domaine scientifique secondaire : Géographie
Titre proposé : Territoires et réseaux de l’échange du « made in China » en Méditerranée
Nom, prénom et courriel du directeur de thèse : PLIEZ, Olivier ; [email protected]
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Le projet de thèse proposé s’inscrit dans la continuité d’un parcours d’initiation à la
recherche commencé en 2006 dans un mémoire de Master 1 (U. Lyon2) envisageant en Egypte
les activités d’import-export dans les villes du Caire et d’Alexandrie. Ce travail a été poursuivi
et affiné au plan conceptuel et méthodologique en 2009 par un mémoire de Master 2 Recherche
(UTM, LISST-CIEU) intitulé : La mondialisation en interactions : économie, territoires et
réseaux d’une chaîne d’approvisionnement de la Chine à l’Egypte. Ces travaux, questionnant
la présence dense et intense des marchandises importées de Chine dans les arrière-boutiques
des quartiers commerçants du Caire et d’Alexandrie, dessinent l’armature du présent projet de
thèse sur les territoires et réseaux de l’échange du « made in China » en Méditerranée.
I- Présentation générale du projet
- Objet et thématiques
L’objet du projet de thèse est la diffusion de babioles ou menus objets fabriqués en Chine en
direction des marchés de consommation notamment à faibles revenus. Il s’agit de comprendre
et d’expliquer la diffusion du « made in China » sur des terrains méditerranéens, favorisant
l'observation des circulations Nord-Sud, en analysant les transformations spatiales qui en
découlent le long d’une chaîne d’approvisionnement. L’objectif de ce projet de thèse est de
contribuer à la compréhension du succès de la diffusion des marchandises fabriquées en Chine,
non par l’étude du dispositif industriel chinois, mais par l’analyse et la spatialisation d’une
structure de commercialisation originale qui se construit dans des espaces de la mondialisation,
à proximité des gratte-ciels de Shanghai ou de Dubaï (Battegay, 2004) autant que dans les
souks du Caire (Pliez, 2007) et jusque dans les centralités immigrées (Bredeloup, 2007) des
métropoles européennes du bassin méditerranéen.
Partant d’objets aussi banals que les boîtes de punaises, les accessoires de beauté et les jouets
en plastique bon marché, ce projet s’inscrit dans les questionnements sur la mondialisation par
le bas, thématique englobante et bien analysée en contexte méditerranéen et/ou postcolonial à
la fin des années 1990 (Portes, 1999 ; Péraldi (dir.), 2001 ; Tarrius, 2002). Il s'agit de
privilégier une approche territorialisée de ces réalités économiques en analysant les réseaux
transnationaux qui les animent, à la fois ceux, sociaux, que tissent les multiples acteurs
impliqués dans cette économie transnationale, et ceux, urbains, qui lient des places marchandes
entre lesquelles circulent les marchandises et les personnes.
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- Cadre théorique
Le projet de thèse cherche donc à s’inscrire dans une lecture renouvelée de la mondialisation
par le bas, attentive aux liens et aux connexions, cherchant à saisir les indispensables
interactions entre acteurs et entre lieux hétérogènes de l’échange qui se jouent dans les espaces
transnationaux du « made in China ». Mise en perspective par les socio-anthropologues (Portes,
1999 ; Péraldi (dir.), 2001 ; Tarrius, 2002 ; Bertoncello et al, 2009), celle-ci demeure encore
peu développée en géographie. Cette lecture par les interactions entre les territoires et les liens
sociaux constitue une approche stimulante pour comprendre comment se redéfinissent ces
activités commerciales transnationales depuis une dizaine d’années.
Cette lecture territoriale de l’activité commerciale mondialisée s’intéressera à des territoires
commerçants. L’analyse de l’ancrage territorial des réalités économiques (Grossetti et al.,
2006 ; Guillaume, 2008) doit permettre d’envisager les places marchandes où les acteurs
mobilisent les ressources relationnelles nécessaires pour inscrire leurs activités dans la
mondialisation, malgré un capital financier limité et une concurrence vive. Il s’agira donc de
questionner l’insertion des acteurs et des lieux de l’échange dans la ville, en interrogeant au
cœur de ces nœuds sur les routes transnationales, les interactions entre gouvernance
métropolitaine, stratégie d’insertion dans les réseaux commerciaux, et territoires commerçants.
- Cadre méthodologique
Dans la mesure où le M2 a permis de poser un socle conceptuel large, l’aspect empirique du
projet de thèse constitue aussi un point d’engagement qu’il importe de circonscrire de manière
à pouvoir l’achever dans le cadre du CDU. Il s'agit de développer un territoire d’enquête
multisitué révélateur de l’objet de recherche. Ce territoire d’enquête s’organise selon les
nœuds d'échanges identifiés dans la diffusion du « made in China » :
− Le nœud récepteur méditerranéen, terrain initial, fera l'objet d'une enquête approfondie
à partir des quartiers commerçants de Toulouse (Arnaud Bernard, marché de Bagatelle)
constituant le cœur de ce travail dans la mesure où la globalisation des réseaux
commerçants impulsée par les communautés migrantes peut être saisie dans des espaces
a priori à l'écart de ce processus mondial. Ce terrain sera mis en écho avec des places
marchandes de la rive sud de la Méditerranée, comme la Médina de Tunis, connectées
au terrain toulousain par les réseaux d'entrepreneurs, et plus globalement avec les
enquêtes menées en Égypte dans le cadre du M1 qu'il s'agira de remettre à jour. Ce
terrain toulousain bien circonscrit constitue un cadre de référence de taille modeste qui
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garantit de pouvoir suivre les réseaux de commercialisation et d'explorer les places
marchandes connectées sans se disperser.
− Les places marchandes chinoises comme Ywu (Pliez, 2007), avec une attention pour le
dispositif commercial d’export (Bertoncello et al. 2009) et la place de réexportation de
Dubaï (Battegay, 2004), avec une considération particulière pour l’enjeu d’intégration
dans la chaîne d’approvisionnement (Hall P. V., Jacobs W., 2007), constitueront des
cadres de référence à explorer dans un second temps. L’objectif est de saisir comment
les logiques réticulaires de la mondialisation de ces échanges commerciaux a priori en
marge provoquent la mise en connexion de régions du monde comme la Méditerranée à
un cadre d’échange global.
L’ambition de ce projet est également cartographique. Il s’agit de proposer à la fois une
cartographie des lieux d’enquêtes à une échelle fine, fondée sur des relevés urbains des places
marchandes et territoires commerçants, et une cartographie modélisante des réseaux étudiés
afin de mettre en lumière leur dimension globale, réseaux sociaux-économiques des opérateurs
transnationaux, réseaux d’approvisionnement sur la base d’un objet, d’une marchandise
sélectionnée.
II- Insertion du projet dans le LabEx SMS et ses composantes
- Une double entrée : réseaux et territoires
Le M2 à l’origine de ce projet, encadré par R. Guillaume et O. Pliez, s’est enrichi des
approches et des méthodes développées à Toulouse, comme l’analyse des effets d’encastrement
de l’activité économique dans les réseaux de relations interpersonnelles. Le projet s’est
également appuyé sur les travaux toulousains sur les systèmes productifs locaux, enrichissant la
compréhension des concentrations marchandes et territoires commerçants et sur les recherches
menées sur les mobilités et les circulations, comme sur la territorialisation des réseaux de
mobilités et d’échanges. Le projet de thèse entend approfondir ces apports tant théoriques que
méthodologiques et contribuer à ces réflexions.
- Un projet inséré dans l’opération 2 « Migrations et réseaux » du LabEx SMS
Le projet de thèse s’insère tout particulièrement dans l’opération 2 du LabEx SMS, contribuant
aux recherches en cours dans différentes régions du monde (Algérie, Brésil, Chine, France,
Sénégal) sur la manière dont le réseau de places marchandes, généralement informelles dans 4
leur émergence, sont insérées dans les espaces urbains au sein desquels elles prennent un rôle
croissant. Il s 'agit de contribuer à enrichir les connaissances sur le réseau des places
marchandes et leur fonctionnement, mais aussi au travail de cartographie et de réalisation d’un
« atlas dynamique des mondes transnationaux ».
- Un projet interdisciplinaire en dialogue avec les composantes du LabEx SMS
Les travaux et participations nourrissant ce projet de thèse ont été marqués par l’apprentissage
d’une approche interdisciplinaire grâce à ma participation à l’ANR Migreli1 et à un atelier
doctoral international2. Au sein du LISST, j’ai bénéficié des échanges entre géographes,
sociologues et anthropologues sur ces questions. J’ai aussi pu découvrir les travaux du
LEREPS qui ont été aussi importants pour nourrir ma réflexion sur les rapports entre économie
et territoires.
La discipline d’ancrage de ce projet de thèse est la géographie, avec une lecture spatiale des
dynamiques, des enjeux, des acteurs et des lieux de la diffusion du « made in China ». Il s'agit
d’articuler les territoires locaux aux réseaux transnationaux de l’échange, s’appuyant sur une
pluralité d’échelles, depuis celle de la boutique d’import-export, jusqu’à celle des routes
maritimes mondiales en mobilisant des entrées à la fois « par le haut » et « par le bas ».
Ce projet s’appuie pour cela sur les réflexions, les outils et les méthodes de champs
disciplinaires proches : d’une part l’économie en mobilisant les travaux sur les échanges, les
chaînes de valeur et les stratégies de captation, et sur les questions de régulation et de
coordination des activités économiques ; d’autre part, le projet est profondément imprégné des
réflexions, outils et méthodes de la socio-anthropologie permettant de saisir la dimension
relationnelle des rapports marchands, et d’interroger les pratiques, comme les routes
commerciales.
1 ANR MIGRELI « Instances religieuses et d’origine confessionnelle sur les routes de la migration africaine », dirigée par S. Bava (2009-2012), notamment dans l’axe Commerce et marché des biens religieux.2 Session de formation doctorale pour former des étudiants français et africains aux méthodes d’observation de terrain. Ce stage s’est tenu dans le cadre du FSP n° 2003-74 Migrations internationales, recompositions territoriales et développement.
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III- Calendrier de travail prévisionnel
− 1ère année
Semestre 1 : Approfondissement de l'état de l'art, préparation aux enquêtes de terrain, travail
bibliographique sur les deux terrains méditerranéens, prise de contacts.
Semestre 2 : Enquête approfondie sur les terrains méditerranéens : entretiens et relevés à
Toulouse, puis à Tunis.
− 2ème année
Semestre 3 : A partir des enquêtes menées sur les terrains méditerranéens et des liens établis
avec les places marchandes d'exportation ou de réexportation, mission exploratoire vers les
espaces d'approvisionnement (Dubaï ou Chine).
Semestre 4 : Écriture et première mise en forme cartographique à partir des enquêtes menées.
− 3ème année
Semestre 5 : Retour sur les terrains initiaux : Toulouse et Tunis, confrontation avec les
résultats des enquêtes plus lointaines, questionnement des cohérences.
Semestre 6 : Écriture, finalisation de la thèse.
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Quelques références bibliographiques :
Battegay A., 2004, « Dubaï : économie marchande et carrefour migratoire. Etude de mise en
dispositif. », Mondes en mouvement, migrants et migrations au Moyen Orient au
tournant du XXI° siècle, IFPO-Karthala, pp271-291
Bertoncello B., Bredeloup S., Pliez O., 2009, « Hong Kong, Guangzhou, Yiwu : de nouveaux
comptoirs africains en Chine », Critique internationale, 3 (n° 44), p. 105-121.
Bredeloup S., « A propos des centralités immigrées », Rives nord-méditerranéennes [En ligne],
26 | 2007, mis en ligne le 28 octobre 2010, Consulté le 21 juin 2012. URL :
http://rives.revues.org/881
Grossetti M., Guillaume R. et Zuliani J.-M., 2006, « La spécialisation cognitive : les systèmes
locaux de compétences en Midi-Pyrénées, Anales de la Recherche Urbaine, n° 101, 4e
trimestre 2006
Guillaume R., 2008, « Des systèmes productifs locaux aux pôles de compétitivité : approches
conceptuelles et figures territoriales du développement ». Géographie, économie, société,
Juillet-Septembre 2008, vol. 10, no 3
Hall P. V., Jacobs W., 2007, “What conditions supply chain strategies of ports ? The case of
Dubai. », GeoJournal 68, pp. 327-342
Péraldi M. (dir.), 2001, Cabas et containers, activités marchandes informelles et réseaux
migrants transfrontaliers, Maisonneuve et Larose, Paris, 361 p.
Portes A., 1999, « La mondialisation par le bas, l'émergence de communautés transnationales »,
Actes de la recherche en sciences sociales, 129, septembre, p. 15/25
Pliez O., 2007, « Des jeans chinois dans les rues du Caire ou les espaces discrets de la
mondialisation », Mappemonde, n°88, 2007-4
Pliez O., 2010, « Toutes les routes de la soie mènent à Yiwu (Chine), Entrepreneurs et migrants
musulmans dans un comptoir économique chinois », L’Espace Géographique, 2 (vol. 39),
p. 132-145.
Tarrius A., 2002, La Mondialisation par le bas, Paris, Balland, 169 p
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