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3ème trimestre 2011 4,00 euros N°106 FRANCE AMERIQUE LATINE MAGAZINE MAG FAL EN IMAGES CHILI Patagonia sin represas ! ACTUALITÉS ANALYSE PERENCO Mayas empaillés HONDURAS Retour de Zelaya LE DROIT A L’EAU : UNE HOULE QUI NOUS VIENT DE L’AMERIQUE LATINE

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3ème trimestre 20114,00 euros

N°106

F R A N C E A M E R I Q U E L A T I N E M A G A Z I N E

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ES

CHILIPatagonia sin represas !

ACTU

ALITÉS

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ALYSE

PERENCOMayas empaillés

HONDURASRetour de Zelaya

LE DROIT A L’EAU : UNE HOULE QUI NOUS VIENT DE L’AMERIQUE LATINE

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Associationdesolidaritéinternationale,FranceAmériqueLatine(FAL)travailledepuis40ansàdénoncerlesatteintesauxdroitshumainsenAmériquelatineetCaraïbe(ALC),etàconstruireuneréflexionnouvellesurlesalternativesaudéveloppementnéo-libéral.

Notreassociations’efforcedefaireconnaîtrelaculturedespeuplesd’AmériquelatineetdelaCaraïbe,danstoutesleurscomposantes,leursdifférences,leursespoirsetleursélansnovateurs.C’estenfaisantconnaîtreleurscombatsetleurssuccèsdansladéfensedesdroitshumainsetdeladémocratie,pourledéveloppementéconomiqueetleprogrèssocial,quenousleurmanifestonsnotresolidarité.Nousagissonssouslaformed’appels,depétitions,demanifestations,d’interventionsdirectesauprèsdesambassadesetdesgouvernements.FALorganiserégulièrementdesconférences-débats,descolloques,desrencontresavecdesmilitantslatino-américains,desexpositionsthématiques,desprojectionsdefilms.Essencemêmedelacréationdenotreorganisation,untravailenréseaupermanentestincontournablepoursefaireentendresurlascènepolitiqueinternationale.

FALestmembreduCNAJEP(ComitépourlesrelationsNationalesetinternationalesdesAssociationsde Jeunesse et d’Education Populaire), du CRID (Centre de Recherche et d’Informations pour leDéveloppement),duCAL(Collectifpourl’AmériquelatineetlaCaraïbe),del’ACME(AssociationpourleContratMondialdel’Eau),duCollectifHaïtideFrance,duCollectifGuatemala,entreautres.

Pour être membre de FAL, il suffit de vouloir connaître, faire connaître et soutenir les peuples d’Amérique latine et de la Caraïbe !!!

ASSOCIATION FRANCE AMERIQUE LATINE

France Amérique Latine : 37, Boulevard Saint Jacques 75014 ParisTél : (33) 1 45 88 27 04 Fax : (33)1 45 65 20 87

www.franceameriquelatine.org

2 heures de discussion en espagnol Tous les jeudis et mardis 18h30-20h30 à France Amérique Latine, Paris

Prendre de l’aisance à l’oral, perfectionner son apprentissage de la langue espagnole : France Amérique Latine propose toutes les semaines deux heures de

discussions en groupe animées par un professeur hispanophone.

PERFECTIONNER SON ESPAGNOL

Amitié-Découverte-Solidarité avec les peuples d’Amérique latine

et de la Caraïbe

Directeur de Publication : Fabien Cohen

Rédactrices en chef :Renata Molina et Sarah Pick

Comité de rédaction : Anna Bednik, Colette Casado, Fabien Cohen, Danièle Coll-Figueras, Coralie Crivillé, Michel Donabin, Cathy Ferré, Michel Forgeon, Franck Gaudichaud, Cathe-rine Gégout, Patrice Issartelle, Aurélie Philippe, Renata Molina, Braulio Moro, Sarah Pick, Julie Rogani.

FAL Mag est une revue publiée par l'association France Amérique Latine

Diffusion : Départ Presse, Tél. : (33) 1 43 03 17 17, [email protected]

Couverture :Enfants pemons dans la lagune de Canaïma au Venezuela,2007. Photo : Cathy Ferré.

Maquette : Renata Molina

Création de la maquette : Coralie Crivillé

Ont participé à ce numéro : Julien Bigué, Ma-rie-Christine Delacroix, Victor de la Fuente, De-nis Hakenholz, Elif Karakartal, Grégory Lassalle, Bernard Mounier, Hélène Roux.

ISSN : 1957-6668 CPPAP : 0111 G 87915

Impression :LVRI, 44 rue du Maréchal de Lattre de Tassigny,91100 Corbeil-Essonnes

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EDITORIALEDITORIAL

DE LA TUNISIE AU CHILI, EN PASSANT PAR L’EUROPE,l’INDIGNATION SE MONDIALISE !

Depuis le mouvement révolutionnaire du 14 janvier en Tunisie, la contestation de l’ordre capitaliste éta-bli ne cesse de susciter un mouvement d’indignation qui prend des formes diverses selon les pays et les continents.

La période estivale n’a pas eu raison de ces Indigné-e-s, qui de Grèce ou d’Espagne en passant par Lon-dres, ne veulent admettre la légitimité d’un système qui a déclenché une des plus graves crises économi-ques de l’histoire et nous promet déjà que la suivante sera plus violente. « Nos gouvernants ont décidé de mettre à genoux les peuples au lieu de faire payer les banques », dénoncent les Indignés. « Nous ne paierons pas la crise », clament les salariés européens avec leurs syndicats.

L’Amérique latine n’est pas en reste, après le changement politique au Pérou qui affaiblit le camp libéral, la protestation a pris une dimension formidable au Chili avec le Mouvement de contestation étudiant. L’effervescence sociale qui secoue ce pays, initiée depuis avril par les étudiants et les élèves du secon-daire, relayée par des grèves générales lancées par la Centrale Unitaire des Travailleurs (CUT) et qui vient après l’action des mineurs du cuivre ou le rejet du projet HidroAysén, est le mouvement politique et social le plus fort depuis la fin de la dictature. Le « concert de casseroles » qu’il occasionne, entendu dans tout le pays, fragilise le tout nouveau président, Sebastián Piñera, et relève le niveau d’exigence. Ce n’est pas seulement la gratuité de l’Education qui vient aujourd’hui à l’ordre du jour, mais bien la mise en cause du modèle ultralibéral ainsi que le rejet de la Constitution de 1980 du dictateur Pinochet. C’est aussi l’exigence d’une réforme du système de retraite, largement privatisé et inégalitaire, de changements du code du travail pour protéger davantage les travailleurs, d’une réforme fiscale pour plus et de meilleurs services publics comme l’Education et la Santé.

La vrai question, en Amérique latine et Caraïbe comme en Europe, c’est bien le poids des multinationales, et une redistribution des richesses plus équitables des fruits de la croissance.Celle-ci est particulièrement florissante en Amérique latine, qui a su résister à ce jour à la crise qui secoue les pays du Nord. Une raison supplémentaire, pour les Chefs d’États de l’Union des Nations Sud-améri-caines (UNASUR) d’aller plus loin dans l’intégration latino-américaine, pour cette organisation politique créée il y a trois ans.

L’UNASUR qui est intervenue dans le conflit entre la Colombie et le Venezuela pour soutenir la démocra-tie en Équateur et en Bolivie, veut aujourd’hui amplifier son intervention dans le domaine de l’économie. Elle a créé le 12 août dernier à Buenos Aires le Conseil sud-américain de l’économie, dont l’objectif est de coordonner les politiques anticrises des pays de la région. Il devrait coordonner, notamment, l’utilisation des réserves monétaires, une montée en puissance du Fonds latino-américain de réserve (FLAR), l’élimi-nation du dollar du commerce régional, la relance de la Banque du Sud, créée en 2007, au détriment de la Banque Interaméricaine de Développement (BID), dominée par les Etats-Unis.

France Amérique Latine n’est pas en reste dans toute cette mobilisation, elle est aux côtés des étudiants et élèves chiliens, attentive aux évolutions au Pérou comme en Amazonie, vigilante sur tous les sujets comme dans ce numéro de FAL Mag consacré au droit à l’Eau. Nous souhaitons approfondir le parte-nariat engagé dans le cadre du réseau Europe/Amérique latine et Caraïbe, dont nous sommes les co-fondateurs, avec la tenue en mai 2012 à Santiago du Chili, du 5ème Sommet des Peuples Enlazando Alternativas.

Le printemps des peuples, des pays arabes à l’Europe en passant par l’Amérique latine et Caraïbe, nous prévient déjà que rien n’est écrit, et en France non plus.

Fabien COHENSecrétaire général de FAL

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SOMMAIRE

ACTUALITES

L’art Maya au Quai Branly, la culture à quel prix ? p. 5Mobilisations étudiantes au Chili : En finir (vraiment) avec l’ère Pinochet ! p. 8

EN IMAGES

CHILI : Patagonia sin represas !

LE DROIT A L’EAU : une houle qui nous vient de l’Amérique latine

P. 22

P. 10DOSSIER

L’eau : une richesse en Amérique latine, mais pour qui ? p. 11Une vague de privatisations tous azimuts p. 12Les projets de privatisation prennent l’eau ! p. 14Hydroélectricité alternative en Equateur p. 16Mégabarrage sur le Xingu, un désastre programmé p. 17Gestion citoyenne : l’expérience des « mesas técnicas de agua » p. 18Gestion communautaire, exemples dans les Andes et au Salvador p.19Bolivie : le droit à l’eau en pratique p. 20Un droit inscrit dans les nouvelles constitutionsd’Amérique latine p. 21

CULTURE(S)

Les Honduriens ne veulent plus qu’on décide à leur place p. 26

ANALYSE

Blessure ouverte de Mirta Yañez p. 29

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ACTUALITES

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L’ART MAYA AU QUAI BRANLY,LA CULTURE à QUEL PRIx ?

A l’occasion de l’ouverture de l’exposition « Mayas, de l’aube au crépuscule », sponsorisée par l’entre-prise pétrolière Perenco, le Collectif Guatemala rendait public le rapport « Perenco, exploiter le pé-trole coûte que coûte » et, avec le soutien d’autres associations, dont France Amérique latine, lançait une campagne pour dénoncer les activités de cette entreprise franco-britannique au Guatemala. Un retour sur les principaux enjeux.

Le 20 juin dernier, s’inaugurait à Paris, au Mu-sée du Quai Branly (MQB), l’exposition «Mayas, de l’aube au crépuscule». Dans la mezzanine-est du musée, suivis par une cohorte de jour-nalistes, les ministres et diplomates français et leurs homologues guatémaltèques, accom-pagnés par le directeur du musée, Stéphane Martin, découvraient avec enthousiasme les vestiges archéologiques du site El Mirador, pour la première fois présentés en France. Se-lon Richard Hansen, l’archéologue en charge du projet El Mirador, les récentes découvertes réalisées dans le « Los Angeles des Mayas » of-frirait un nouvel éclairage sur « la plus grande civilisation que l’humanité ait connue*» .

Cet engouement pour les Mayas préhispani-ques contraste avec le peu d’attention portée à leurs descendants. Le MQB, qui se reven-dique comme un « lieu de dialogue entre les cultures » a d’ailleurs oublié de les inviter à Paris. « Il y en avait un », se défend la directrice de communication du musée : « il me semble que le ministre de la culture guatémaltèque est un Maya, non ? ». L’anthropologue français Jean-Loup Amselle commente: « Une véritable archéologie décolonisée serait une archéologie où on demanderait leur avis aux descendants de ces civilisations ». Si les populations locales du Guatemala n’ont pas été conviées, c’est aussi parce qu’elles en auraient profité pour évoquer la grave crise sociale et politique que vit leur pays.Dans le cadre d’un véritable «dialogue» entre les peuples, un témoignage de populations vivantes aurait-il été apprécié par les visi-teurs ? Amselle en doute : « Ce qui intéresse le public aujourd’hui, c’est le côté new age, la spi-ritualité. Les gens se foutent de ce que vivent les populations locales. Ils ne veulent plus entendre parler de luttes sociales.»

Si la voix des communautés est passée sous silence, le MQB a par contre élaboré un pro-gramme sur mesure pour les opérateurs des projets archéologiques. Le gouvernement guatémaltèque est venu pour vendre le pro-duit touristique « Guatemala, le cœur du mon-de Maya », basé sur les forêts vierges, les sites archéologiques et le folklore local. Également présents à Paris, l’oligarchie guatémaltèque et les multinationales, qui investissent dans le tourisme corporatif, la restauration de sites et l’administration des zones protégées. Pour Fernando Paiz, le président de Walmart Amé-rique centrale, cette exposition est l’occa-sion « d’organiser des cocktails afin de trouver des financements », comme celui réalisé avec Albert de Monaco, le 21 juin. Pour Hansen, El Mirador, «le projet privé le plus cher de l’his-toire», recevra l’appui nécessaire : « Je ne me fais aucun souci. Vendre El Mirador, c’est comme vendre le grand canyon ou la Tour Eiffel, le site parle de lui-même ».

Sur toutes les affiches de l’exposition appa-raît l’hermine du drapeau breton : le logo de l’entreprise pétrolière franco-britannique Pe-renco, qui est le mécène de l’exposition avec une participation de 125 000 euros. À l’ori-gine une petite entreprise familiale, Perenco produit aujourd’hui 250.000 barils de pétrole brut dans 9 pays, qu’elle vend ensuite pour qu’il soit raffiné. La majeure partie de la plus-value pétrolière se réalisant dans les activités amont de la filière, Perenco enregistre de très bons résultats financiers : la famille Perrodo, propriétaire de Perenco, serait ainsi devenue, selon le mensuel « Challenge », la 40ème fortu-ne française en 2010. Discrète mais reconnue par les spécialistes, Perenco base son modèle de développement sur le rachat de puits en fin de vie qu’elle ré-rentabilise en baissant les

* Entretien avec Richard Hansen, 20 juin 2011.

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coûts de production et en réalisant de nouvel-les explorations. C’est ce même modèle qu’a suivi Perenco au Guatemala en rachetant les installations d’une entreprise américaine im-matriculée aux Bahamas : BASIC Ressources.

BASIC fut fondée par John Park, un avocat qui a co-rédigé en 1955 le code du pétrole gua-témaltèque destiné à faire revenir les multi-nationales qui avaient fui le régime « socia-liste » d’Arbenz. Pour exploiter les gisements qu’il avait découverts, Park s’associa à James Goldsmith et Gilberte Beaux, alors à la tête du Holding de la Générale Occidentale et qui investirent dans BASIC avec la sécurité de « gagner beaucoup d’argent*». Gilberte Beaux fut la dirigeante de BASIC Guatemala jusqu’en 1997, lorsque BASIC fut vendu à Noranda (Ca-nada). Dans ses mémoires, Beaux ne cache pas sa réussite dans le business des hydrocar-bures guatémaltèques : « un accroissement de fortune de plus de 20 fois en huit ans ». Une des clefs de la réussite de Beaux est de s’être entourée de personnalités capables de négocier avec les dictateurs militaires au pou-voir : Vernon Walters (CIA), Julio Duchez (mi-nistre de l’économie de Rios Montt), Manuel Ayau (ultra libéral membre du parti d’extrême droite MLN)...

À l’instar de BASIC, Perenco a aussi recruté chez l’oligarchie guatémaltèque : Antonio Ayau, le neveu de l’ex-directeur de BASIC, Ma-nuel Ayau, est porte-parole de Perenco Gua-temala. Si la liste des actionnaires de Perenco Guatemala est protégée jusqu’en 2012 par la loi sur l’accès à l’information, le controversé renouvellement du contrat 2-85 en 2010 prouve que l’entreprise franco-britannique a su trouver l’appui d’alliés nationaux stratégi-ques. Cette concession, qui produit 95% du cru national était frappée d’une interdiction de renouvellement puisque située dans la La-guna del Tigre, une zone considérée comme la plus grande zone humide d’Amérique cen-trale et déclarée protégée en 1989. Mais une loi votée « sur mesure** » a permis au gouvernement de contourner l’interdiction et de renouveler pour 15 ans ce contrat à Pe-renco, sans même lancer d’appel d’offre.

Pour pénétrer dans la Laguna del Tigre, il faut traverser la rivière la Pasion en utilisant un ferry administré par Perenco. Avant d’embar-quer, des militaires et des travailleurs du CO-NAP (Conseil National des Aires Protégées) contrôlent les paysans puisqu’il est interdit d’y introduire du matériel de construction. Seule Perenco est autorisée à en acheminer afin d’y forer ses nouveaux puits. De chaque côté de la route qui s’enfonce dans la zone protégée, des propriétés utilisées par les narcotrafi-quants pour la réception et l’acheminement de drogue. Puis viennent les communautés paysannes et les puits de Perenco. Une pay-sanne raconte : « L’entreprise nous interdit d’utiliser l’eau de la lagune car elle serait polluée par le puits qui est juste à côté ». D’autres dé-noncent les promesses non tenues: « L’entre-prise nous avait promis des postes de santé et des écoles. Mais le poste de santé n’ouvre qu’une fois par semaine et les docteurs nous donnent seulement du paracétamol ». Plus loin, une zone de jungle où l’entreprise va forer « sans avoir demandé la permission à personne ». Les paysans, qui assurent que cette terre appar-tient à un des leurs, ne possèdent pas de titre de propriété. Dans les années 80, ils se sont engouffrés dans la brèche ouverte par BASIC. Aujourd’hui, la zone est protégée et ils sont menacés d’expulsion. L’avocat Ramon Cadena explique : « Les communautés n’ont pas le droit

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* Gilberte Beaux, une femme libre. Édition Fayard. 2006.** FONPETROL

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ACTUALITES

d’être là, mais les narcotrafiquants ont des titres de propriété et Perenco vient d’obtenir le droit de forer de nouveaux puits ». Les communau-tés voudraient protester, mais un important dispositif militaire les intimide. En effet, dans le cadre du renouvellement du contrat 2-85, Perenco finance 6 bataillons militaires dans la zone. Officiellement destinés à la lutte contre le narcotrafic et les « paysans envahisseurs », ces militaires sont positionnés près de l’en-trée des installations de Perenco « pour proté-ger les intérêts de l’entreprise*».

Grégory LassalleCollectif Guatemala

* Entretien avec un paysan de la Laguna del Tigre, mars 2011.** Collectif Guatemala, Une seule Planète, FAL

À Paris, le 20 juin, lors de l’inauguration de l’ex-position au MQB, un groupe de manifestants s’était réuni devant le musée afin de protester contre l’hypocrisie du mécénat de Perenco. Derrière une banderole titrant : « Perenco préfère les Mayas empaillés », un des mani-festants s’insurge : « Comment se fait-il qu’une entreprise pillant un pays, finançant l’armée et piétinant les droits des populations locales se ra-chète une image en s’affichant en France com-me le défenseur des Mayas?». Plus tôt dans la journée, un collectif d’associations**, accom-pagné par le député guatémaltèque Anibal Garcia dénonçait devant les médias les consé-quences de l’activité pétrolière sur les popu-lations locales. Interrogé par France culture, le patron du MQB y voyait une fausse polé-mique : « Nous faisons attention dans le choix des mécènes. Cette société, nous l’avons trouvée

par l’intermédiaire des archéologues français et guatémaltèques et tous nous ont dit : c’est une entreprise qui fait travailler les Mayas ». Si le soutien de la diplomatie française à Perenco était attendu, celui des archéologues est plus surprenant. Le 27 juin, lors de la soirée privée organisée par Perenco dans les locaux du mu-sée, Philippe Nondédéo et Hansen, respecti-vement responsables des fouilles Naachtum et El Mirador, ont même cru bon de faire du zèle pour défendre l’image de l’entreprise qui les finance. L’archéologue américain allant même jusqu’à affirmer que « les écologistes du Guate-

mala et les populations pauvres détruisent la forêt, alors que Perenco protège la nature. C’est l’exemple à suivre ».

Si Perenco sort pour l’instant indemne de cette polémique, ses méthodes sont doréna-vant connues et les dé-nonciations enfleront à mesure que l’informa-tion sur ses activités au Pérou, en Équateur ou encore en Républi-que Démocratique du Congo se fera connaî-tre. En attendant, Pe-renco a son nom accro-

ché au tableau d’honneur des bienfaiteurs du MQB, un musée - qui dans le cas de l’expo-sition sur les Mayas - prouve que nous som-mes encore dans un schéma de domination culturelle où, « l’instance suprême occidentale fait dialoguer les autres cultures » et où les po-pulations locales, comme le souligne M. Han-sen, sont surtout considérées comme «des données ethnographiques qui nous servent à mieux comprendre les Mayas anciens».

Pour consulter le rapport :http://collectif-guatemala.chez-alice.fr/campagnes/rapport_perenco.pdf

Se joindre à la campagne :http://collectif-guatemala.chez-alice.fr

© Anna Bednik

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ACTUALITES

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MOBILISATIONS ÉTUDIANTES AU CHILI,EN FINIR (vRAIMENT) AvEC L’èRE PINOCHET !

Des centaines de milliers de personnes dans les rues des grandes villes du pays, et ce depuis plusieurs mois ; un maire, ce-lui de Santiago, qui suggère de faire appel à l’armée pour éviter que la commémora-tion du 11 septembre 1973 (date du coup d’Etat contre le président Salvador Allen-de) ne fasse l’objet de débordements : le Chili vit une période inédite.Jamais, depuis la fin de la dictature, en 1990, le pays n’avait connu d’aussi impor-tantes mobilisations. Jamais, depuis 1956, un gouvernement démocratique n’avait fait face à une telle contestation popu-laire.A l’origine de ce mouvement, les étudiants ont placé le gouver-nement de M. Sebastián Piñera (droite) dans une position délicate : sa côte de popularité – 26 % – fait d’ores et déjà de lui le président le moins populaire depuis le retour à la dé-mocratie.

Réunissant 8 000 personnes, la première manifestation d’avril ne semble pas, a priori, promise à un quelconque avenir. Elle vient néanmoins gonfler un peu plus le fleuve de la protestation sociale, déjà nourri par diverses mobilisations à tra-vers le pays. En juin, la mobilisation étu-

diante atteint sa vitesse de croisière : le 16 se produit la première manifestation de 200 000 personnes – la plus grande de-puis la période de la dictature. Organisant des grèves massives et bloquant des ly-cées, les manifestants dénoncent la « mar-chandisation de l’éducation » et exigent « un enseignement gratuit et de qualité » : une revendication qui remet en cause les fondations mêmes du « modèle chilien », hérité de la dictature. Dans les rues, les étudiants ne s’y trompent pas, qui scan-dent « Elle va tomber, elle va tomber, l’édu-cation de Pinochet ! », en référence aux slogans entendus lors des manifestations

contre la dictature, il y a plus de vingt ans (« Elle va tomber, elle va tomber la dictature de Pinochet ! »). Les manifestants n’hésitent pas, d’ailleurs, à réha-biliter la figure de l’ancien pré-sident, Salvador Allende. Cette

clarté politique n’a pas affaibli le mou-vement étudiant – bien au contraire. Ils ont reçu le soutien des universitaires, des enseignants du secondaire, des associa-tions de parents d’élèves, de différentes personnalités et de syndicats importants (professeurs, fonctionnaires, personnels de santé, etc).Alors, pourquoi maintenant ? Certes, le

« L’éducation estune marchandise

comme une autre »Sebastián Piñera,président du Chili

Université du Chili à Santiago, juillet 2011.

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MORT vIOLENTE DE FACUNDO CABRAL

Le chanteur, compositeur argentin, en tournée en Améri-que centrale, a été assassiné le 9 juillet dernier alors qu’il se rendait à l’aéroport de Guatemala City. Militant pour un monde libre, sa chanson : « No soy de aqui ni no soy de alla » l’avait rendu célèbre dans le monde entier. Il était le chantre des opprimés, de la souffrance des peuples latino-américains, il dénonçait la violence, toutes les dic-tatures, dont celle de son pays qui lui avait valu l’exil au Mexique de 1973 à 1983. Il avait été distingué en 1996 par l’UNESCO comme Messager mondial de la paix. Bien au delà de l’Argentine, son pays d’origine, sa disparition a suscité une très vive émotion.

MEMOIRE(S) : 22 AOUT 1972ARGENTINE : LE MASSACRE DE TRELEW

Le 15 août 1972, vingt-cinq prisonniers politiques se sont enfuis de la Prison de Rawson (Patagonie Argentine) ; 6 d’entre eux ont réussi à arriver au Chili et les 19 restants se sont rendus après avoir obtenu des garanties quant à leur intégrité physique. Malgré cela, sept jours après, le pays tout entier tressaillit. Dans une aube glaciale de Pa-tagonie, la Marine Argentine sous le gouvernement du General Lanusse a perpétué le massacre qui allait être la genèse du Terrorisme d’Etat (application du Plan Condor d’élimination physique de tout type d’opposition) et qui trouverait par la suite son aboutissement dans la dispari-tion de trente mille personnes.Ce 22 août 1972 ont été fusillés 19 prisonniers politiques à la Base Aéronavale Almirante Zar de Trelew (Chubut, Patagonie Argentine), 16 sont morts, 3 ont survécu et ont pu raconter les faits au cours d’une entrevue réali-sée dans la prison de Villa Devoto (Buenos Aires), par l’ écrivain Francisco (Paco) Urondo (La Patria fusilada) et dans le cadre d’une plainte contre l’Armée déposée par les familles de fusillés. A peine quelques années après, ils allaient eux aussi disparaître ou être tués, afin de faire oublier l’histoire.Mais il n’en a pas été ainsi ; années après années, sous di-verses formes, mais toujours avec la même fermeté, tous ceux qui refusent l’empire de la mort, du silence et de l’oubli, nous revenons alimenter la Mémoire.A 39 ans de cette exécution qui a été incorporée dans l’inconscient collectif comme “Le Massacre de Trelew”, ren-dons hommage aux militants politiques qui ont donné leurs vies pour ces idéaux de justice et liberté. Pour cela nous disons que nous ne les oublierons jamais, ils sont restés gravés dans notre Histoire pour toujours.Aujourd’hui, une partie des responsables directs et in-directs du Massacre sont en prison, en attente d’y être jugés.

Source : « Collectif Argentin pour la Mémoire ».

BREVES

Chili a déjà connu des mobilisations étu-diantes, notamment la « révolution des pingouins », en 2006, sous la présidence de Mme Michelle Bachelet (centre-gau-che).Toutefois, jamais les manifestations n’at-tirèrent autant de monde : pendant deux décennies, les gouvernements de centre-gauche de la Concertación parvinrent à administrer l’héritage de la dictature tout en réduisant la pauvreté. Mais en accen-tuant les inégalités : à l’heure actuelle, le Chili figure au nombre des quinze pays les plus inégaux de la planète. L’injustice du système est peut-être apparue sous un jour plus cru avec l’arrivée au pouvoir de M. Piñera, lequel s’est vite donné pour mission de renforcer – encore – les logi-ques de marché au sein du système édu-catif. La réponse du gouvernement, pour l’heure, consiste à tenter de criminaliser les manifestants. Le 4 août, estimant qu’il y a « une limite à tout », M. Piñera faisait interdire une manifestation sur l’avenue Alameda : la répression y fut systémati-que, avec plus de 870 interpellations. Mais la violence policière n’a fait qu’accroître le soutien populaire aux manifestants. Avec l’ensemble de leurs soutiens – qui ne se cantonnent plus aux classes moyennes –, ils se joindront à une grève générale les 24 et 25 août, dans l’espoir d’élargir la brè-che ouverte.

Victor DE LA FUENTE,Directeur du Monde diplomatique Chili

Extraits de l’article à lire en version intégrale sur :www.monde-diplomatique.fr/carnet/2011-08-24-Chili

La grève générale de deux jours convoquée par la Centrale Unitaire des Travailleurs (CUT) et soutenue par 80 organisations syndicales, étudiantes, associatives et politiques, a mis des centaines de milliers de personnes dans la rue les 24 et 25 août, à Santiago et d’autres villes du pays. Ce mouvement, commencé de ma-nière festive, s’est soldé par deux nuits de vio-lence, des centaines d’arrestations et la mort d’un adolescent de 14 ans victime d’un tir de la police.

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LE DROIT A L’EAU : UNE HOULE QUI NOUS VIENT DE L’AMERIQUE LATINE

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Dossier coordonné par Daniele Coll-Figueras, Cathy Ferré et Catherine Gégout, membres du Comité Directeur de FAL.

Marseille accueillera en mars 2012 la 6ème édition du Forum Mondial de l’Eau. Le Conseil Mondial de l’Eau, qui organise ce forum avec l’Etat français et la ville de Marseille, est présidé par le PDG de la Société des Eaux de Marseille, filiale de la transnationale française VEOLIA, numéro un mondial de l’eau. Gouvernements, institutions internationales, collectivités locales, certaines ONG et de grandes entreprises privées du secteur viendront y faire leur marché de l’eau tout en préten-dant promouvoir l’accès à l’eau pour tous, et en prônant le nouveau partenariat public-privé.

Or « l’eau, élément constitutif de la vie, est un bien commun de l’humanité et un droit humain. L’eau ne peut être consi-dérée comme une marchandise ou un service marchand. L’accès à tous à une eau de bonne qualité doit être garantie », déclare la Coordination « Eau Bien Commun », constituée afin d’organiser le Forum Alternatif Mondial de l’Eau, parallè-lement au Forum officiel.

FAL y participera aux côtés des peuples d’Amérique latine qui mènent de nombreux combats (exploitations minières et pétrolières, barrages, monocultures, déforestation, etc.) dont le dénominateur commun est la bataille de l’eau.Les trois grandes entreprises (les deux françaises Veolia, Suez et l’allemande RWE) ont essayé d’implanter dans le monde et surtout en Amérique latine, le modèle de marchandisation de l’eau avec l’appui des banques et des Institutions finan-cières internationales (IFI).

Mais les luttes populaires ont mis en échec les projets de privatisation totale des services de l’eau. C’est grâce à la lutte exemplaire du peuple bolivien et à sa requête que l’Assemblée Générale de l’ONU a adopté en 2010 une résolution recon-naissant le droit à l’eau et à l’assainissement comme un droit humain fondamental. Ce droit est maintenant présent dans plusieurs Constitutions nationales d’Amérique latine. Ces avancées remarquables sont une base nécessaire mais non suffisante : il reste aux peuples à construire une gestion transparente et pleinement démocratique de ce bien commun essentiel.

© Cathy Ferré

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LE DROIT A L’EAU : UNE HOULE QUI NOUS VIENT DE L’AMERIQUE LATINE

L’EAU : UNE RICHESSE EN AMERIQUE LATINE,MAIS POUR QUI ?

C’est sur ce continent que coulent 4 des 25 plus grands fleuves du monde : l’Amazone, le Paraná, l’Orénoque et le Magdalena. Quelques-uns des plus grands lacs de la planète sont également situés en Amérique latine : le Maracaïbo au Venezuela, le Titicaca au Pérou et en Bolivie, le Poopó en Boli-vie, et le Buenos Aires, entre le Chili et l’Argentine. Une nappe souterraine, l’aquifère Guarani équi-vaudrait à deux siècles de consommation d’eau mondiale tandis que le bassin amazonien fournit à lui seul 20% des ressources renouvelables en eau douce.

L’Amérique latine détient donc le record mondial de la disponibilité en eau par personne et par an.

Cependant, la plupart des latino-américains sont loin de consommer la totalité de la part qui devrait leur revenir. En effet, 25% des terres sont des zones arides ou semi arides ; la répartition de l’accès à l’eau est la plus inégalitaire au monde ; un cinquième de la population n’a pas accès au réseau d’eau potable ; la ressource n’est pas préservée et est mise en danger par la pollution et la déforestation ; la plupart des eaux usées réintègrent les cours d’eau ; l’extrême surpopulation des mégapoles est un obstacle supplémentaire à l’accès de tous à l’eau et à l’assainissement.

Quelques chiffres :

- 4 milliards de personnes, la moitié de l’humanité, n’ont pas d’ac-cès régulier quotidien à une eau courante vraiment potable.

- 2,6 milliards de personnes ne bénéficient pas d’un assainis-sement « amélioré » et 38 millions de personnes en Amérique latine et Caraïbe, 330 millions en Afrique subsaharienne, 151 millions en Asie Orientale, 884 millions dans le monde n’ont pas accès à un « point d’eau amélioré ».

- Les maladies liées à l’eau tuent un enfant de moins de cinq ans toutes les 20 secondes.

- Les problèmes d’eau sont responsables de 80 % des maladies et décès dans les pays pauvres.

- Il faut 15.000 litres d’eau pour produire 1 kilo de viande de bœuf et 800 litres, voire le double (!), pour produire 1 kilo de blé.

- Il faut 400 litres d’eau/heure, 24h/24h pour faire face aux be-soins alimentaires d’une seule personne vivant en Occident.

- Pour obtenir une tonne de cuivre, il faut utiliser entre 300 000 et 500 000 litres d’eau.

- Le processus complet pour fabriquer un anneau d’or de 10 grammes, nécessite de 7000 à 8000 litres d’eau.

- Le glacier Chacaltaya en Bolivie a officiellement disparu, entiè-rement fondu, en mai 2009, six ans avant la date envisagée par les experts. Cet événement augure mal du rythme auquel dis-paraîtront les autres glaciers du continent. Au début de l’année 2009, un rapport de la Banque Mondiale prédisait que tous les glaciers andins auront disparu d’ici 20 ans, et, avec eux, la sour-ce d’approvisionnement en eau de 77 millions de personnes et l’origine de la moitié de l’électricité consommée en Bolivie, au Pérou et en Équateur.

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UNE vAGUE DE PRIvATISATIONS TOUS AZIMUTSDès les années 80, la Banque Mondiale et le FMI ont imposé aux pays d’Amérique latine (et à l’ensem-ble des pays endettés en Afrique comme en Asie) les fameux ajustements structurels dont fait partie la privatisation des services publics, comme condition au rééchelonnement de leur dette extérieure.

Les années 90 ont vu naître l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et, avec elle, la programmation de la privatisation complète de tous les secteurs de tous les services : c’est l’Accord Général sur le Commerce des Servi-ces (AGCS).

L’Union européenne (UE) joue alors un rôle très agressif comme moteur de la « pétrolisa-tion » de l’eau : l’eau doit être considérée com-me une marchandise traitée sur les marchés à l’instar du pétrole.

En 2000, les Institutions Financières Interna-tionales (IFI) confirment cette vision et esti-ment que le coût de la réalisation des « Ob-jectifs du millénaire » (réduire de moitié le 1,1 milliard de personnes privées d’eau potable et les 2,4 milliards dépourvues de système d’as-sainissement) ne peut être assumée par les seuls Etats.

Bien que la privatisation de l’eau reste en-core marginale, puisqu’elle ne concerne que 8% des habitants de la planète et se canton-ne uniquement aux villes, elle a néanmoins connu une expansion fulgurante : de 90 mil-lions de personnes concernées en 1988 - dont près de la moitié en France - elle est passée à

200 millions dix ans plus tard et à 250 millions en 2000. L’objectif des entreprises privées est d’arriver à couvrir 25% de la population mon-diale.

En Amérique latine, la privatisation de l’eau sera alors menée par les gouvernements main dans la main avec les IFI. C’est ainsi qu’à partir des années 90, la région a vu affluer des sociétés privées assoiffées de profits rapides et énormes qui ont exacerbé les problèmes de pénurie, d’urbanisation, de pollution et d’accès inéquitable. La plupart de ces sociétés privées étaient des filiales des trois plus gran-des multinationales de l’eau : les trois Grands - Suez et Vivendi (France) et RWE/Thames Wa-ter (Allemagne). Ces fournisseurs d’eau du privé se sont instal-lés ou projettent de s’installer dans les pays de la région : Argentine, Bolivie, Brésil, Chili, Co-lombie, Equateur, Honduras, Mexique, Nicara-gua, Panama, Pérou, République dominicaine, Salvador et Uruguay. Ces transnationales de l’eau bénéficieront dès les années 90, de plu-sieurs des prêts généreux de la BID (Banque Internationale de Développement). Parallèle-ment, la Banque Mondiale décidera de tripler son aide financière annuelle aux projets rela-tifs à l’eau du secteur privé mondial.

Danielle COLL-FIGUERASMembre du Comité Directeur

FAL Marseille

Résolution adoptée par l’Assemblée générale de l’ONUle 28 juillet 2010 : (…)

1. Déclare que le droit à une eau potable salubre et pro-pre est un droit fondamental, essentiel au plein exercice du droit à la vie et de tous les droits de l’homme ;2. Demande aux États et aux organisations internatio-nales de fournir des ressources financières, de renforcer les capacités et de procéder à des transferts de techno-logies, grâce à l’aide et à la coopération internationales, en particulier en faveur des pays en développement, afin d’intensifier les efforts faits pour fournir une eau potable salubre et propre et des services d’assainissement qui soient facilement accessibles et financièrement aborda-bles pour tous…

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Accès à l’eau potable et à l’assainissement dans le monde, où en est-on ?

Selon les chiffres officiels, produits par les agences de l’ONU sur la base des déclarations des gouvernements, plus de 2,6 milliards de personnes n’ont pas accès à un assainissement correct et 884 millions n’auraient pas « accès à un point d’eau amélioré ».Valide pour l’ONU, cet accès ne signifie pas grand-chose pour nous, qui ouvrons le robinet à la maison 24h sur 24, contrairement à 4 milliards d’humains. Il s’agit en fait de bénéficier au minimum d’un puits autour duquel on se sera assuré (en principe) de l’absence de contamination animale et humaine.Quant à « l’accès à l’eau de boisson » (sic) cela signifie que la source est située à moins d’un kilomètre (15 mi-nutes) de l’endroit de son utilisation et qu’il est possible d’obtenir régulièrement au moins 20 litres d’eau par habitant et par jour. Ce sont les femmes et les filles qui sont à 72% de corvée d’eau.En fait, les études ponctuelles indiquent que le nombre de résidents urbains, en particulier des bidonvilles des mégapoles du sud, n’ayant pas un accès adéquat à l’eau serait beaucoup plus important que ce qu’indi-quent les chiffres officiels.

Avancées et ambiguïtés du droit humain à l’eau

Suite à la reconnaissance de l’eau comme un droit humain fondamental, le Conseil des Droits de l’Homme précisait que l’exercice de ce droit devait être opposable aux États, qui devaient le transcrire dans leur législation nationale, mais aussi que les sociétés privées pouvaient jouer un rôle important dans ce cadre, prouvant ainsi l’efficacité du lobbying des transnationales.Se met en place ainsi une pièce importante du dispo-sitif dans les pays pauvres : sécuriser les contrats de partenariat public/ privé (PPP) grâce à des législations sur mesure, tandis que leur périmètre se limiterait aux segments les plus profitables, ceux qui valorisent, sans investissement lourd, leur avance technologique sur la gestion des réseaux et la facturation. Pour le reste, les sociétés publiques de patrimoine et les POP, petits opé-rateurs privés locaux, feront l’affaire.

Crise de la dette et extension de la privatisation

La crise de la dette dans laquelle se débat le capitalisme mondialisé entraîne deux types de stratégies pour les sociétés majors de l’eau.D’un côté, comme Veolia, elles se recentrent sur un plus petit nombre de pays, essentiellement émergents, pour profiter des contractions prévisibles du commerce mondial afin de développer leur marché intérieur. Elles comptent saisir de nouvelles possibilités d’investir, soit par l’intervention des banques européennes ad hoc, comme en Europe centrale, soit par la participation au capital de sociétés d’économie mixte, comme en Chine. D’un autre côté, elles comptent se servir des conditionnalités des prêts comme en Grèce pour racheter au meilleur prix des participations importantes dans les sociétés publiques acculées à la privatisation.

Ces constats viennent mettre à mal les affirmations de ces multinationales et du Conseil Mondial de l’Eau qu’elles dominent, sur leur volonté de participer à la mise en œuvre immédiate et globale du droit humain fondamental à l’eau potable et à l’assainissement. Ces entreprises ne s’intéressent aux « solutions » que si elles rapportent une croissance suffisante de leur rentabilité.Voilà la clé de la compréhension des projets que le Conseil Mondial de l’Eau, présidé par le salarié de Veo-lia, Loïc Fauchon, ne manquera pas de mettre en musique au Forum Mondial de l’Eau à Marseille en mars 2012.

Bernard MOUNIER, membre de la coordination internationale pour le Forum Alternatif de l’Eau

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Forum Social Mondial de Belém, 2009

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LA DEFERLANTE CONTRE LES PRIvATISATIONS

Blocage de route à El Alto, Bolivie, 2005.

Les projets de privatisation prennent l’eau ! Dans de nombreuses régions d’Amérique latine une opposition croissante, d’une grande vivacité contre les grands fournisseurs d’eau pri-vée va se développer.

Des Etats annulent les contrats

En 2005/2006, les Etats mettent fin aux contrats de concession en Argentine et en Bolivie.En Argentine, c’est l’Etat qui directement s’oppose à la multinationale pour manque-ment aux clauses des contrats, alors qu’en Bolivie les fortes mobilisations de la popula-tion conduiront l’Etat à rompre le contrat.Dans les deux cas, on reproche à l’entreprise Suez : l’augmentation démesurée du prix de l’eau (jusqu’à 200% à Cochabamba en Boli-vie), la tarification abusive de l’eau tirée des puits et même de l’eau de pluie, le tarif élevé des connexions au réseau, la cessation des services en cas de non solvabilité des clients, la baisse de la qualité de l’eau, l’absence de critères écologiques, les énormes profits d’in-vestissement réalisés par les corporations, les contrats secrets, les pots-de-vin et la corrup-tion.

En Argentine, en 1993, le président Carlos Menem, aux ordres de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international et des Etats-Unis, privatise le service de l’eau de Buenos Aires. Une concession de trente ans est accordée pour trois fois rien à Aguas Ar-gentinas, un consortium mené par la Lyon-naise des Eaux (Suez).En 2002, son successeur, Nestor Kirchner, en-gage une bataille contre Aguas Argentinas (concession la plus importante du monde, 10 millions d’habitants) une filiale de Suez, pour ne pas avoir tenu ses engagements auprès des populations les plus pauvres de la péri-phérie de la capitale et de l’Etat de Santa Fe. Le groupe Suez lancera des recours auprès du Tribunal international d’Arbitrage (CIADI). Mais après des années de négociations, Nes-tor Kirchner décidera en 2006 de mettre fin au contrat par un décret et donnera naissan-ce à une nouvelle entreprise (90 % à l’Etat et 10 % au syndicat des travailleurs).

En Bolivie, les luttes exemplaires de la popu-lation de Cochabamba et de El Alto dès 1999 ont conduit le président Carlos Mesa en jan-vier 2005 à rompre le contrat avec l’entreprise Suez (voir FAL MAG n° 105).Evo Morales, dès son arrivée au pouvoir en décembre 2005, va chercher à replacer la ges-tion de l’eau sous la responsabilité de l’Etat et des usagers et créera un ministère en charge de cette ressource.

Des référendums pour l’eau, bien public

En Uruguay, la Commission nationale de défense de l’eau et de la vie (CNDAV) a vu le jour en 2002, en réponse à la signature d’un accord avec le FMI, par lequel le gouverne-ment s’engageait à la privatisation de tous les services d’eau potable et d’assainissement du pays. Le prix de l’eau s’en est trouvé considérable-ment augmenté, le réseau et la qualité de l’eau se sont dégradés. Le CNDAV a donc im-pulsé des luttes populaires et organisé un ré-férendum. Le 31 octobre 2004, le jour même où les électeurs uruguayens portaient au pouvoir Tabaré Vazquez, ils se sont donc aussi prononcés par référendum contre l’octroi de

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Danielle COLL-FIGUERASMembre du Comité Directeur

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toute concession d’eau à des opérateurs pri-vés.L’accès à l’eau est désormais inscrit dans la Constitution comme un droit fondamental et comme une richesse publique hors de portée de sociétés à but lucratif.

En Colombie, le 8 mars 2010, plus de deux millions de personnes ont signé une pétition pour la demande d’un référendum afin d’ins-crire dans la Constitution : l’accès à l’eau pota-ble comme un droit humain, la garantie d’un minimum gratuit pour tous, la conservation de l’environnement afin de préserver l’eau pour aujourd’hui et pour les générations sui-vantes dans le respect de la diversité cultu-relle et territoriale de l’eau et par une gestion publique par l’Etat et par les communautés, sans but lucratif. Le parlement a refusé la te-nue du référendum. Ce pays, très riche en cours d’eau et en eau de pluie, dénombre trois millions de person-nes souffrant du manque d’eau potable, des millions d’enfants affectés par la mauvaise qualité de l’eau qu’ils consomment, des cen-taines de milliers de familles déconnectées du réseau d’eau potable à cause de factures trop élevées. Cette année 2011, des inondations catastro-phiques ont causé de nombreux morts et dé-sastres. Et les journaux précisent : « L’eau jus-qu’au cou, la Colombie a soif! ». Le manque d’eau potable et les inondations sont un double désastre et sont des phénomènes intercon-nectés.

Et même si l’Italie n’est pas l’Amérique latine, on inscrit cette belle victoire dans nos pages !

« Le 13 Juin 2011, nous avons écrit une belle page d’histoire. Dans un pays où la démocra-tie est continuellement piétinée, un pays où les médias conditionnent la politique depuis plus de 20 ans, dans un pays où le processus de pri-vatisation des biens communs ne connaissait aucun frein, nous avons réussi à nous réappro-prier nos droits en disant non à la marchandi-sation de l’eau et aux politiques néo-libérales et en disant oui à une démocratie participative et

à la défense des biens communs. » Attac Italie – Comité Référendaire pour l’Eau Bien Com-mun.57% de participation et 95% des votants se sont exprimés pour l’eau bien public. Ils ont voté contre la privatisation obligatoire de 40% du capital des sociétés publiques et contre le profit plancher de 7% assuré au privé.

Pérou :quand c’est la rivière qui apporte l’eau

Des luttes très fortes se développent aussi contre la pollution des eaux, les méga barra-ges hydroélectriques et les projets d’extrac-tion minière ou pétrolière et de déforesta-tion. Au Pérou, par exemple, les populations rurales dans les Andes et en Amazonie, uti-lisent l’eau des puits, des rivières et des lacs alors que cette ressource est très convoitée par les grandes entreprises agricoles, pétro-lières, minières, de production d’énergie. Des luttes aussi sont menées contre SEDAPAL, la principale entreprise d’eau et d’assainis-sement, qui même si elle appartient encore au secteur public, est loin de couvrir tout le territoire et apporte un service de mauvaise qualité. A Lima (1/3 de la population natio-nale) l’eau “potable” a besoin d’être bouillie pour être buvable ; la consommation d’eau en bouteille et de boissons gazeuses aug-mente constamment. Un million d’habitants des quartiers populaires très pauvres ne sont pas connectés au réseau.

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Denis HAKENHOLZAssociation « A la Source… »

L’Intag est la partie s u b - t r o -picale du canton de Cotacachi, E q u a t e u r (40 000 hs sur un ter-

ritoire grand comme un département fran-çais).Les politiques équatoriennes de dérégula-tions successives des années 90 et notam-ment le projet de «développement minier et de contrôle environnemental», financé par un prêt de la Banque mondiale et de donations étrangères, facilitent l’installa-tion des multinationales. La Loi Minière de 1999 met en place les conditions pour «attirer les investissements privés» et trans-forme les ressources naturelles en objets de spéculation.L’étude d’impact socio-environnemental conduite par l’Agence Japonaise pour la Coopération Internationale (JICA) révèle aux habitants d’Intag les dommages irré-parables pour l’environnement d’une mine de cuivre à ciel ouvert : pollution des eaux et des sols, déforestation, disparition d’es-pèces... et le déplacement de 100 à 200 fa-milles de 4 communautés.Depuis 1997 la population d’Intag s’est en-gagée dans une résistance acharnée aux projets japonais et canadiens en dépit des menaces physiques sur les leaders et des tentatives nombreuses de corruption des

populations. La municipalité de Cotacachi de cette époque, qui a mis en œuvre une dyna-mique très radicale de démocratie participa-tive a fortement soutenu ce combat.Les projets hydro-électriques sont marqués par ce contexte de lutte et par la volonté de maitriser un développement respectueux de l’environnement et bénéfique pour les popu-lations. Ils sont une alternative durable à l’ex-ploitation minière.L’Intag est une zone de forêt équatoriale de moyenne altitude (entre 500 m et 2500 m) sillonnée de multiples rivières au débit abon-dant et plutôt régulier grâce à l’effet éponge des forêts. Elle se prête tout particulièrement à des aménagements hydroélectriques de toutes dimensions.La population d’Intag a fortement conscien-ce de la valeur de son environnement (zone de biodiversité d’intérêt mondial) et de sa fragilité. La préservation des forêts est perçue comme une nécessité vitale ne serait-ce que pour sauvegarder la ressource en eau.Une société d’économie mixte, HidroIntag, a été créée réunissant 4 associations de dé-veloppement local du secteur (coopérative des caféiculteurs, groupement des femmes, association de défense de l’environnement, coopérative artisanale).Son objectif est de réaliser des aménage-ments hydroélectriques à très faible impact sur l’environnement et d’en mettre les bé-néfices au service du développement local (tarif social pour les plus démunis, réinvestis-sement sur des programmes sociaux...). Pour en arriver là, les organisations d’Intag se sont opposées aux projets gouvernementaux de mise en concession des ressources hydrau-liques au profit de groupes énergétiques multinationaux. Ils ont démontré grâce aux études menées par des techniciens cubains de Cuba Solar puis français d’Energies sans Frontières et d’A la Source la pertinence de solutions alternatives.

HYDROELECTRICITE ALTERNATIvE EN EQUATEUR

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enis Hakenholz

VOIR AUSSI:http://alasource.fr

http://www.aldeah.org/fr/intag-equateur-canton-ecologique-contre-mine-cuivre-ciel-ouvert

http://hidrointag.org

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Le projet de mégabarrage de Belo Monte, à Alta-mira, au cœur de l’Amazonie brésilienne, qui se-rait le troisième barrage du monde, se heurte aux résistances acharnées des riverains, des peuples indigènes, des associations. Etudes d’impact par-tiales, criminalisation des opposants, méthodes expéditives n’ont pas empêché les résistances de croître. Manifestations, délégations, débats à la commission des droits humains de la chambre des députés, mission de rapporteurs sur place, la liste serait longue des luttes menées.Dernière en date, la pétition adressée à Dilma Rousseff, nouvelle présidente du Brésil*. Logique productiviste, modèle de développement bien loin des intérêts de l’Amazonie et de ses habitants, en violation du droit constitutionnel qui garantit la consultation des peuples indigènes.

MEGABARRAGE SUR LE xINGU,UN DESASTRE PROGRAMME

Les impacts du projet de Belo Monte

- Belo Monte est « d’une viabilité douteuse ». Cette série de grands barrages et digues « interrompra le flux des eaux sur une aire énorme, nécessitant le dépla-cement d’un volume de terre et de roches similaire à celui de la construction du Canal de Panama ». De plus il génèrera peu d’énergie pendant 3 ou 4 mois par an, à la période de basses eaux.

- la Grande Boucle du Xingu souffrirait, sur près de 100km, d’une réduction de plus de 80% du flux et d’un abaissement de la nappe phréatique, avec divers impacts biologiques et sociaux : ce serait l’équivalent d’une sécheresse permanente et en plus du manque d’eau, des problèmes pour la navigation (seul moyen de transport pour de nombreux riverains), la destruction de forêts inondables, ainsi qu’une augmentation des maladies comme la malaria, la leishmaniose et des arboviroses inconnues et la prolifération de moustiques agressifs.

- le bassin du Xingu représente une des richesses majeures de la planète en espèces de poissons, avec environ quatre fois le total des espèces rencontrées dans toute l’Europe. La faune aquatique et terrestre subirait d’immenses pertes, la mort de millions de poissons, et des disparitions d’espèces. L’Etude officielle d’Impact Environnemental (EIA-RIMA) n’aborde même pas l’évaluation des impacts sur les poissons, ni sur le milieu dans lequel ils vivent.

- un chaos social serait provoqué par la migration de plus de 100.000 personnes vers la région, et par le déplacement forcé de 20.000 personnes. Tous les principaux ouvrages sont prévus à la limite des terres indigènes, sujettes aux impacts physiques et surtout aux impacts sociaux et culturels entraînés par la proximité des chantiers ainsi qu’à la propagation des maladies contagieuses qui font des ravages parmi les indiens isolés. De plus, les travailleurs migrants, avec ou sans emploi, introduits au cœur de la forêt, avanceront après les travaux dans le territoire, provoquant davantage de déforestation et de destruction.

- malgré de si graves conséquences, les indiens, riverains et travailleurs de la Grande Boucle n’ont jamais été considérés par l’EIA comme directement impactés et elle n’envisage de dédommagements que pour une faible partie d’entre eux.

- de plus l’EIA considère seulement le méthane émis à la surface du lac lui-même, un gaz à effet de serre avec 25 fois plus d’impact sur le réchauffement global par tonne de gaz que le gaz carbonique. Elle en sous évalue gravement l’impact en ne mentionnant pas les émissions des turbines, dans lesquelles passe, dans le cas de Belo Monte, un très grand volume d’eau.

D’après le rapport réalisé par un panel de 40 spécialistes en octobre 2009.

1er avril 2011, la Commission interaméricaine des Droits Humains demande au gouvernement brésilien de suspendre le projet et de consulter les communautés. Celui-ci refuse et retire sa par-ticipation à la Commission.Juin 2011 : L’agence environnementale IBAMA donne feu vert au Consortium Norte Energia pour démarrer les travaux. Les résistances continuent, mais la situation est critique**.

Catherine GEGOUTMembre du Comité Directeur

FAL Paris

* www.avaaz.org/po/pare_belo_monte/?fpla ** pour suivre les infos : www.xinguvivo.org.br (Movimento Xingu vivo para sempre) et www.mabnacional.org.br (Mouvement des victimes de barrages)

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Cathy FERREMembre du Comité Directeur - FAL Marseille

GESTION CITOYENNE : L’ExPERIENCE DES« MESAS TECNICAS DE AGUA » AU vENEZUELA

Cristóbal Francisco, vice-ministre vénézuélien de l’environnement et président de Hidroven (entreprise publique de distribution d’eau et d’assainissement), affirme que le Venezuela a atteint avec 10 ans d’avance l’objectif de l’ONU de réduire de moitié la population sans accès à l’eau potable. « Nous traitons 100 000 litres d’eau chaque seconde, afin de fournir de l’eau aux 26 millions d’habitants de ce pays. Dans les villes, 94% des habitants reçoivent de l’eau courante potable. Dans les campagnes, 78%. La couverture de collecte des eaux usées est de 84%. Sous le gouvernement bolivarien, le Venezuela a augmenté le nombre de person-nes ayant accès à l’eau courante potable de 3,5 millions. Dans les cinq dernières années, nous avons construit 150 usines de traitement des eaux ».Le vice ministre rappelle que l’objectif de la révolution bolivarienne est d’atteindre 100% de distribution d’eau potable et attribue les succès remportés au travail des communau-tés organisées autour des «Mesas técnicas» et des Conseils Communaux qui ont mis à exé-cution 1500 projets où ont été investis plus de 200 millions de dollars.

Dès l’entrée en fonction du Président Hugo Chávez, en logique avec les principes partici-patifs de la nouvelle Constitution, une équi-pe de professionnels et de militants sociaux élabore une proposition d’organisation com-munautaire avec la formation de « conseils

communautaires de l’eau » qui participent à la gestion des réseaux de distribution dans cha-que quartier ou village. Ces conseils fixent les priorités, le programme de travaux, assurent le suivi et le contrôle social. En son sein, les responsables de l’entreprise publique, techni-ciens et représentants de la communauté se rencontrent autour des « tables techniques de l’eau » afin de partager les informations et de mobiliser les compétences nécessaires pour résoudre les problèmes.En cassant le schéma paternaliste de l’État qui prend la place des citoyens, les « tables tech-niques de l’eau » et les « conseils communau-taires de l’eau » intègrent la participation po-pulaire et la responsabilité collective en coor-donnant les savoirs de la communauté avec les ressources humaines, techniques et finan-cières de l’entreprise publique de l’eau. Les communautés qui, au début du processus, ne faisaient que décrire leur réalité, peuvent maintenant formuler leurs besoins en rapport à la situation hydrologique de leur milieu et exercent un contrôle croissant sur les services de base. Les entreprises publiques de l’eau ont également été transformées au contact de leurs véritables propriétaires, les citoyens. En particulier, l’organisation des travailleurs en coopératives, en augmentation, permet un meilleur contrôle des travailleurs sur les missions de planification.Bien sûr les problèmes de distribution et d’as-sainissement d’eau ne sont pas tous résolus. Il faudrait installer encore de nombreuses conduites. Dans les quartiers populaires, des égouts se déversent encore dans les rues. Mais on peut affirmer que les citoyennes et citoyens vénézuéliens disposent aujourd’hui d’un service d’eau qui leur appartient davan-tage, et est soumis à leur contrôle.

Réunions dans la rue de Consejo comunal à Caracas.

© Cathy Ferré

Pour en savoir plus :http://www.partagedeseaux.info/article480.html

http://www.hidroven.gov.ve/ls_mta_4.php

«Seis años después: mesas técnicas y consejos comunitarios de aguas » Santiago Arconada Rodríguez, Revista Venezo-lana de Economía y Ciencias Sociales.

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GESTION ANCESTRALE DE L’EAU DANS LES ANDES

La gestion communautaire de l’eau dans les communautés andines du Pérou, d’Equateur et de Bolivie pro-vient d’une tradition ancestrale rejouée au quotidien.

A Ayacucho, il s’agit d’une gestion entièrement portée par les habitants, physiquement et politiquement. Les comuneros sont impliqués dans les travaux d’entretien des canaux –c’est une obligation pour bénéfi-cier du service de l’eau-. Mais ce devoir octroie aussi le droit à la participation aux prises de décisions sur la gestion du service. Tout se décide en assemblée, via consensus et vote à main levée.

Chacun des hommes de la communauté est de même sollicité une fois dans sa vie pour exercer une année durant le service de la distribution de l’eau. C’est une charge, qui procure un prestige et un pouvoir im-portant dans la communauté et dont personne n’est exclu. Tout un chacun aura donc une fois dans sa vie l’expérience du pouvoir et de la responsabilité.

Ce mode de gestion a permis d’assurer l’acheminement de l’eau et sa distribution de manière écologique-ment soutenable et de forger socialement la maille communautaire. Mais aujourd’hui les communautés sont fortement sollicitées par « l’extérieur », avec l’avancée des permis d’extractions minières, les volon-tés étatiques d’homogénéisation des politiques des ressources naturelles, les changements internes ; des scissions sont fréquentes et des modèles de gestion hybrides se mettent en place où la gestion coutumiè-re côtoie et s’accommode ou non des réorganisations venues du haut qui, quant à elles, s’imposent sans égard pour ce qu’elles jugent comme dépassé, sans comprendre la portée sociale, écologique durable de ce mode de gestion.

Elif KARAKARTAL, réalisatrice du documentaire «L’eau qui nous fait vivre»,sur la gestion de l’eau dans la Communauté de Andamarca, Ayacucho, Pérou.

GESTION COMMUNAUTAIRE : UN EXEMPLEDE COOPERATION POSITIVE AU SALVADOR

Depuis les premiers projets en 1995-96 dans la zone sud de Ju-cuarán (département de Usulután), étendus ensuite au dépar-tement de Ahuachapán, ce sont plus de 8000 personnes qui ont accès à une eau de qualité. C’est sans doute le résultat le plus visible de la coopération entre les communautés rurales de ces régions, les municipalités, une ONG salvadorienne (la Coordina-tion pour la Reconstruction et le Développement) et le Conseil général du Val-de-Marne.

Les différents projets d’adduction d’eau et d’assainissement de base ont été définis, élaborés, menés à bien grâce à l’implication de tous les partenaires (mise à disposition des terrains, mobilisation des bénéficiaires et participation aux travaux principalement pour la partie salvadorienne, assistance technique et finance-ments pour la partie française).

La gestion communautaire de ces infrastructures permet l’accès à l’eau à un moindre coût pour les popula-tions. Elle a été renforcée par un programme d’échanges de compétences (qui a reçu un soutien financier du Ministère français des Affaires étrangères) qui depuis 2008, alternativement au Salvador et dans le Val-de-Marne, fait se rencontrer les responsables des comités de l‘eau chargés de la maintenance des équipe-ments, les techniciens des villes et les personnels des services de l’environnement et de l’assainissement du Conseil général. Une coopération durable, qui génère des résultats concrets, un échange permanent, une connaissance mutuelle.

Marie-Christine DELACROIX, Membre du Comité Directeur

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En Bolivie, la gestion publique de l’eau est ins-crite dans la Constitution. L’Etat s’engage à ga-rantir son usage et à développer l’accès à l’eau et l’assainissement. L’Etat arrive au devant de la scène pour conserver, protéger, gérer, pla-nifier, utiliser le patrimoine naturel.

Ce n’est pas chose facile dans ce pays où la majorité de la population est indigène, où la présence de l’Etat a été historiquement faible et où il existe diverses formes de systèmes communautaires. Par souci de démocratisation, la loi de partici-pation populaire inscrite dans la Constitution reconnaît la participation citoyenne comme un droit (art 271).Pour la gestion de l’eau, le modèle de SA-MAPA, service public de l’eau de la ville de Cochabamba (voir FAL Mag n° 105) sert de référence : les citoyens représentants y sont élus chaque année et sont une majorité à la direction de l’entreprise.Mais, dans la réalité, la participation sociale souffre de trois types de problèmes : les re-présentants sont cooptés par la corruption de l’institution publique ; élus ou non, ils ne rendent pas de comptes à leurs bases et ne communiquent pas d’information sur les ob-jectifs de leurs activités ; les organisations so-ciales participantes sont elles mêmes gérées par des structures autoritaires au fonctionne-ment peu démocratique.

Ces phénomènes restent alimentés par la pression des IFI et autres prêteurs qui n’ac-ceptent pas ce contrôle social et font pression sur l’Etat pour la mise en place d’une gestion privé/public. Car, face à l’échec généralisé de leur modèle de privatisation des services de l’eau potable dans le monde et la résistance sociale, la coopération internationale et les IFI ont été conduites à s’orienter vers la gestion privé/public. Or La Bolivie a besoin de ces fi-nancements pour réaliser les grands projets du Ministère de l’Environnement et de l’Eau.

D’autre part, le passage à une gestion publi-que par l’Etat remet en cause une gestion de l’eau qui appliquait depuis l’époque Inca « les us et coutumes », principes ancestraux où l’usage de l’eau est géré collectivement selon les pluies, les lieux, les besoins.

Carlos Crespo souligne que l’idée occidentale du droit à l’eau rend prioritaire l’utilisation de cette ressource au seul bénéfice de l’être hu-main car l’homme est considéré comme plus important que le reste des êtres vivants. Par contre, les sociétés de type communautaire interagissent, partagent, dialoguent et se considèrent comme un des éléments de la nature.

BOLIvIE : LE DROIT A L’EAU EN PRATIQUECarlos Crespo, sociologue et responsable du secteur Environnement du Centre d’Etudes Supérieu-res à l’Université de Cochabamba, reconnaît la portée internationale de la lutte pour l’eau du peu-ple bolivien mais constate qu’il faut maintenant obtenir localement un fonctionnement démocra-tique et transparent de la gestion de l’eau, et ce quel que soit le type de gestion choisie.

Selon un rapport récent de la Banque Mondiale, les projets de partenariat public/privé (PPP) n’ont per-mis l’installation que d’environ 24 millions de bran-chements supplémentaires en 15 ans, soit moins de 1% de progrès réalisés pour les populations du Sud.

Sources : Publications BM Tendances et orientations N°8, Philippe Marin, Partenariats Public Privé pour les services d’eau urbains (2009) et Revue PROPARCO Secteur Privé et développement.

Danielle COLL-FIGUERASMembre du Comité Directeur - FAL Marseille

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UN DROIT INSCRIT DANS LES NOUvELLESCONSTITUTIONS D’AMERIQUE LATINE

Venezuela : Constitution (1999) article 304 :« Les eaux sont des biens du domaine public de la Na-tion, incessibles et consacrés au développement. La loi garantit leur protection, leur exploitation et leur récu-pération, en respectant les phases du cycle hydrologi-que et les critères d’aménagement du territoire. »Ley de aguas (2007) : « L’eau est un bien social. L’Etat garantira l’accès à l’eau à toutes les communautés ur-baines, rurales et indigènes.»

Uruguay : Réforme de la Constitution (2004) : «L’accès à l’eau potable et à l’assainissement constitue un droit humain inaliénable. La politique nationale est fondée sur la gestion durable, solidaire avec les géné-rations futures, des ressources hydriques. Les usagers et la société civile participeront à toutes les instances de planification, gestion et contrôle. La prestation du service obéira à des raisons d’ordre social et non éco-nomique.»

Equateur : Constitution (2008) chapitre 2 :Droits au bien vivre : « Le droit à l’eau est un droit hu-main fondamental et inaliénable. L’eau est un patri-moine national stratégique d’usage public ».

Bolivie : Constitution de l’Etat Plurinational (2009) :« L’eau est un droit fondamental pour la vie, dans le cadre de la souveraineté du peuple. L’Etat garantira l’usage et l’accès à l’eau sur la base de principes de so-lidarité, complémentarité, réciprocité, équité, diversité et durabilité. Les ressources hydriques ne pourront pas faire l’objet d’appropriations privées. »

Mais l’inscription dans les textes, si elle permet des progrès, ne suffit pas : encore faut-il faire appliquer ce droit. C’est ce à quoi s’emploient les peuples par les luttes locales et les forums sociaux qui permet-tent l’échange d’expériences et l’organisation de campagnes collectives.

La rencontre de Cuenca

En juin 2011, à Cuenca en Equateur, s’est déroulée la Ren-contre Continentale des Peuples d’Abya Yala pour l’Eau et la Pachamamá, dont l’objectif essentiel était la remise en cause des pratiques extractivistes, minières et pétrolières. A cette occasion, des délégations du Canada, des Etats-Unis et des pays d’Amérique latine ont participé à des dé-bats et manifestations. Un tribunal éthique a également rendu un verdict populaire contre la criminalisation des luttes pour le droit à l’eau et les droits de l’eau.

Le Forum mondial alternatif de l’eau

Du 10 au 18 mars 2012, à Marseille, en contrepoint du Forum officiel, essentiellement marchand, se tiendra le Forum alternatif mondial de l’eau (FAME). Déjà, associations, ONG, syndicats, forces politi-ques, élus et citoyens se mobilisent dans la coordination « Eau Bien Commun » pour faire entendre la voix des peuples.Le FAME offrira une plate-forme de convergence des luttes et des ex-périences menées pour un droit effectif à l’eau et à l’assainissement, garanti par une gestion publique, participative, démocratique, transparente, sociale et écologique. De cette expression devront sortir des lignes d’actions pour l’avenir.

Que sera le FAME ?- le rendez-vous de celles et ceux qui se battent pour l’eau bien com-mun, contre son accaparement, contre les pollutions de surface et souterraines, contre la gestion privée technocratique.- l’expression des mobilisations pour l’eau et sa gestion publique directe dans une autre politique mondiale.- des spectacles et créations sur le thème de l’Eau source de vie.- un Tribunal des peuples avec les acteurs des luttes pour l’eau et les victimes de la marchandisation. - l’élaboration d’un programme d’accès à l’eau, global, efficace, fi-nancé. - un forum où les peuples discuteront des affaires publiques.

Pour en savoir plus : Rencontres de Cuenca : www.aguaypachamama.org

FAME : http://www.fame2012.org/fr

Cathy FERREMembre du Comité Directeur - FAL Marseille

Le droit à l’eau s’impose peu à peu en Amérique latine où les textes officiels se multiplient.

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EN IMAGES

PATAGONIA SIN REPRESAS !La Patagonie constitue une des plus grandes réserves d’eau douce de la planète, avec ses magnifiques rivières, lacs, zones humides et glaciers gigantesques.Une mobilisation citoyenne de grande ampleur s’oppose depuis plusieurs mois à un méga projet de 5 centrales hydroélectri-ques en Patagonie chilienne, destiné à augmenter la capacité électrique du Chili et à fournir en énergie plusieurs mines d’ex-traction de cuivre situées jusque dans le désert d’Atacama, à des milliers de kilomètres au nord du pays.Le projet HidroAysén, porté par la multinationale espagnole Endesa (contrôlée par l’italien Enel) et par une filiale du groupe chilien Matte, prévoit la construction de 5 barrages titanesques pour une production totale de 2 750 mégawatts. Ce projet risque de détruire une centaine de sites protégés dont plusieurs réserves de biosphère dans une zone extrêmement riche en biodiversité où se trouvent des écosystèmes uniques au monde.Le Chili est l’un des seuls pays au monde où la ressource en eau est privatisée. 80% de l’eau douce du pays appartient à une dizaine d’entreprises privées. Sous la dictature du général Pinochet, la constitution de 1981 (toujours en vigueur) et le code de l’eau qui en découle ont mis en place un réel marché de l’eau. L’entreprise espagnole Endesa s’est approprié la quasi totalité des droits relatifs aux rivières Pascua et Baker de la région de Aysén.Le 9 mai dernier HidroAysén a obtenu le feu vert officiel, et depuis, des manifestations sans précédent se sont succédé. Selon un sondage IPSOS réalisé en avril 2011, 61% des personnes interrogées se disent opposées à la construction de ces centrales hydroélectriques.Le 21 mai, le président Sebastián Piñera présente son bilan politique annuel au Congrès à Valparaiso. Malgré la forte répres-sion policière, plusieurs milliers de manifestants sortent dans les rues pour exprimer leur mécontentement à l’égard de la politique ultralibérale du président. Les réseaux sociaux, très présents dans la mobilisation ont été très efficaces. Parmi les milliers de personnes présentes ce jour là à Valparaiso, nombreuses sont celles qui sont venues exprimer leur opposition au projet hydroélectrique et réclamer une Patagonie sans barrages.Le 20 juin dernier, la cour d’appel de Puerto Montt a gelé le projet HidroAysén, accédant aux recours de parlementaires et d’associations de défense de l’environnement. Cette décision est une première victoire pour les défenseurs de l’environnement et tous les citoyens chiliens qui se sont battus contre ce projet.

Pour plus d’informations : http://www.patagoniasinrepresas.cl

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Río Petrohue.Les rivières et fleuves du Chili attirent chaque

année de nombreux touristes.Le río Petrohue comme le río Baker sont des petits

paradis pour le tourisme d’aventure et la pêche sportive. Il est possible d’y pêcher une très grande

variété de salmonidés, parmi euxle fameux Saumon Chinook, la truite Fario, le

Saumon Coho, le Saumon l’Atlantique…

Glacier Grey.Entre la cordillère des Andes et la steppe de Pa-tagonie s’étend le parc national chilien Torres del Paine, déclaré Réserve de biosphère par l’Unesco en 1978.Il s’agit de la troisième calotte glaciaire au monde après l’Antarctique et le Groenland.

Les zones humides sont des milieux de vie remarquables pour leur biodiversité. Elles sont parmi les milieux naturels les plus riches du monde. La région de Aysén possède des caractéristiques environ-nementales exceptionnelles comme le reconnaissent la Banque Mondiale et le WWF. Elle est classée Réserve de biosphère et les autorités locales postulent pour sa reconnaissance au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO. Les centrales hydroélectriques sur les fleuves Baker et Pascua auraient de nombreux impacts sur les écosystèmes et les animaux associés à ces rivières. La première et la plus évidente est la perte d’habitat causée par la défo-restation des plaines inondables.

En Patagonie, les étés sont courts et frais, la végétation se fait discrète et se compose en grande partie d’arbres nains et de steppes propres aux pâturages. Le plus caractéristique de tous les animaux chiliens est le guanaco, un ruminant qui vit à l’état sauvage.Le Chili sert également d’habitat à plusieurs membres de la famille des cerfs, entre autres le huemul et le pudu, le plus petit cerf que l’on connaisse. Le huemul, présent sur l’écu du Chili, est classé en danger d’extinction par l’UICN.Le projet Hidroaysén, s’il se concrétise, menace la survie de cet animal endémique des Andes.

Glacier vu du ciel entre Puerto Aysén et Puerto Montt.Le champ de glace Sud - à cheval sur l’Argentine et le Chili - constitue

la réserve d’eau douce la plus importante d’Amérique du Sud.

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TExTES ET PHOTOS : Julien Bigué

Ces images ont été prises lors de la manifestation du 21 mai 2011 à Valparaíso (jour de la fête nationale).

Malgré les violentes répressions des forces de l’ordre, plusieurs milliers de manifestants sont sortis dans les rues pour exprimer leur opposition au projet HidroAysén et réclamer une Patagonie sans barrages.

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Parmi les nombreux slogans scandés par les manifestants, on pouvait lire sur les pancartes les textes suivants :

« Piñera loue le Chili, eau comprise »,« Notre jeune énergie est chilienne, renou-velable et propre »,« Les Chiliens et le monde disent non à HidroAysen ! »,« Les hommes politiques travaillent pour nous, pas nous pour les hommes politi-ques »,« Endesa est le problème, pas la solution »,« N’offrez pas l’eau à une entreprise ! », « Nous ne sommes pas idiots, vous com-prenez ? »,« Ne détruisez pas la nature pour une poignée de dollars ».

Après dix-sept ans d’un terrorisme d’État qui mit fin à l’expérience de l’Unité Populaire de Salvador Allende, et après deux décennies d’une démocratie néolibérale, c’est la première fois (mais pas la dernière) qu’une mobilisation de cette ampleur s’exprime au Chili.

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LES HONDURIENS NE vEULENT PLUSQU’ON DECIDE A LEUR PLACE

L’accord de Cartagena ouvre une brèche dans l’opposition

Après presque deux ans d’exil forcé, produit du coup d’État du 28 juin 2009, le retour de Mel Zelaya au Honduras le 28 mai dernier a enclenché la procédure de réintégration du pays au sein de l’OEA. Cette mesure entérinée début juin lors d’une session extraordinaire à Washington a été présentée comme une normalisation de la situation politique. Pourtant, cette décision laisse à une partie significative des organisations unies au sein du Front National de Résistance Populaire (FNRP) le sentiment amer qu’une étape importante, celle de la lutte contre l’impunité, est passée à la trappe.

L’accueil triomphal que les Honduriens ont réser-vé à « leur » président de retour d’exil n’était cer-tes pas feint et si tous s’accordaient à y voir une condition indispensable pour rétablir la « norma-lité constitutionnelle », d’aucuns s’interrogeaient sur la pertinence des modalités du processus de négociations, voire prenaient leurs distances par rapport aux autres points mentionnés dans le protocole d’accord.

Mi-avril, alors que le Président Porfirio Lobo (Parti National, conservateur ndlr) – élu à la faveur d’un scrutin organisé à l’ombre du coup d’État – visite son homologue en Colombie, les Honduriens apprennent qu’un contact a été établi avec Mel Zelaya par l’intermédiaire du président du Ve-nezuela. À ce même moment, au Honduras, les syndicats enseignants votent la fin d’une grève entamée depuis plus d’un mois. Durement ré-primée, la mobilisation s’opposait au projet de « municipalisation », une mesure perçue comme une privatisation du système éducatif. En raison du rôle important joué par les enseignants dans la mobilisation contre le Coup d’État – les écoles étaient restées fermées pendant plusieurs mois – leur défaite a été cette fois ressentie comme un essoufflement de la résistance dans son ensem-ble.Dans ce contexte, l’offre de bons offices des pré-sidents colombien et vénézuélien suscite moins d’enthousiasme que de conjectures : les pourpar-lers ont-ils bien pour principal objectif le retour à l’ordre constitutionnel dans le pays ou sont-ils

ANALYSE

un instrument qui sert utilement la normalisation de relations que l’on sait tendues entre Bogotá et Caracas ?

Intervenant à la veille de l’assemblée générale de l’OEA, cet empressement soudain renforce l’idée – persistante depuis le coup d’État – que le destin du pays n’est qu’un sous-produit des conflits géo-politiques qui se jouent à l’échelle du continent. Mené au pas de charge, ce processus de négo-ciations donne l’impression que les échos parfois tonitruants provenant du devant de la scène ont, une fois de plus, éclipsé la complexité des enjeux locaux. Sur place, les porte-paroles du FNRP ont été « informés » des décisions prises, plutôt que consultés.

Si personne ne conteste la légitimité de Mel Ze-laya à négocier en tant que coordinateur du FNRP, la réintégration du Honduras au sein de l’OEA est en revanche loin de faire consensus. Nombreux sont ceux qui estiment que cette mesure aura pour effet de détourner l’attention, déjà minime, que la communauté internationale porte aux atteintes aux Droits Humains. Bien que la dé-cision ait été entérinée quelques jours avant à Washington, deux à trois cent personnes ont tout de même tenu à aller manifester leur désappro-bation à San Salvador, où se tenait l’assemblée générale de l’OEA. De manière significative, plu-sieurs radios communautaires s’étaient jointes à l’initiative. Ne jouissant d’aucun statut légal, celles-ci jouent néanmoins un rôle de premier

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plan dans les mobilisations et sont, à ce titre, particulièrement sujettes à la répression et au harcèlement judiciaire de la part des autorités honduriennes.

Livrée à la voracité des grands producteurs de palme, c’est sans doute la région de l’Aguán, qui connait la situation la plus critique : vingt-cinq paysans organisés* y ont été assassinés entre janvier 2010 et mars 2011 ; neuf de mars à juin et trois autres depuis. Pour dénoncer ces exactions, les organisations paysannes et de défense des Droits Humains n’ont pu compter que sur des soutiens extérieurs**, grâce aux-quels de (petites) victoires ont pourtant pu être obtenues. Ainsi, le 12 avril dernier, la so-ciété financière allemande DEG (liée à la KfW, institution allemande de crédit spécialisée dans le financement des projets de coopéra-tion au développement) retirait à Exportado-ra del Atlántico SA – une entreprise apparte-nant au magnat de la palme, Miguel Facussé Barjum, directement mis en cause dans les assassinats de paysans de l’Aguán – un crédit de vingt millions de dollars destiné à financer la production de biogaz. Cette décision faisait suite à la campagne lancée par l’organisation allemande « Rettet den Regenwald » , visant ini-tialement à faire annuler l’autorisation d’achat de crédits carbone accordée par le gouverne-ment britannique à EDF Trading (succursale britannique du groupe français EDF). Le len-demain, cette dernière mettait également fin au contrat avec Exportadora del Atlántico SA.

Un autre point de l’accord de Cartagena qui menace l’unité du front de résistance, concer-ne les modalités de sa future participation à la vie politique. Celui-ci prévoit d’abord, la

transformation du FNRP en par-ti politique, puis la convocation (soumise à l’approbation des institutions actuelles) d’une as-semblée constituante.

D’un côté, les membres issus de partis politiques ou de leurs organisations satellites – démis-sionnaires du parti libéral après le Coup d’État ou membres de la petite Union Démocratique – voient dans la fusion au sein

d’un nouveau parti une opportunité de rom-pre le schéma, grâce auquel libéraux et na-tionalistes se relaient au pouvoir depuis plus d’un siècle. L’autre camp regroupe un conglo-mérat d’organisations pour qui la dynamique de parti ne constitue pas une option accep-table. Pour des raisons évidentes, c’est le cas d’organisations comme le COPINH (Concejo Cívico de Organizaciones Populares e Indíge-nas de Honduras) ou OFRANEH (Organización Fraternidad Negra Hondureña), qui fédèrent respectivement les populations indigènes et garifuna (afro-descendantes). D’autres grou-pes organisés autour des luttes paysannes, féministes, gays et lesbiennes ou en associa-tions de quartiers ne se reconnaissent pas non plus dans une logique de parti.

Ce désaccord pourrait revêtir une importance mineure, s’il n’influait de façon déterminante sur le mode de représentativité au sein d’une future assemblée constituante. En effet, la dé-signation dans le cadre d’un parti relèguerait au second plan les représentants des organi-sations sectorielles. Certaines ont pourtant une capacité de mobilisation bien supérieure à certaines formations politiques ultra-mi-noritaires. D’autre part, la constituante serait soumise à l’aval de représentants qui, lors du coup d’État, n’ont pas hésité à violer la légalité institutionnelle afin de pérenniser un système politique avec lequel une partie des organi-sations du FNRP souhaitent, par conséquent, rompre une fois pour toutes.

Or, lors du Coup d’État, ce n’est pas tant autour de la personne de Mel Zelaya que s’est joué le véritable bras de fer, qu’autour d’un projet

* Les luttes paysannes dans l’Aguán sont menées principalement par trois organisations : le Mouvement paysan de l’Aguán (MCA pour son sigle en espagnol) ; le Mouve-ment unifié paysan de l’Aguán (MUCA) et le Mouvement Authentique Revendicatif des Paysans de l’Aguán (MARCA).** Voir notamment le rapport d’Amnesty International ainsi que le rapport (publié en juillet 2011) : http://www.rel-uita.org/agricultura/palma_africana/mision_bajo_aguan/presentan_informe_final_bajo-aguan.htm

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Hélène RouxJournaliste

de Constituante, capable de mettre fin à l’hé-gémonie des partis politiques. Une partie de l’oligarchie au pouvoir a d’ailleurs bien com-pris qu’il est parfois nécessaire de proposer des changements pour que tout reste pareil. C’est le sens de l’invitation au « dialogue natio-nal pour réformer la Constitution » lancée par le président Lobo au début de l’année. L’idée lui a été « soufflée » par un de ses principaux assesseurs, Arturo Corrales. À la tête d’une petite formation démocrate-chrétienne qui co-gouverne en alternance avec libéraux et nationalistes, c’est lui qui avait suggéré l’idée de la « quatrième urne » au président Zelaya, lui qui l’avait sorti du pays, lui encore qui fut un des médiateurs lors de l’infructueux dialo-gue de San José - Guaymuras ; et enfin l’un des architectes de l’accord de Cartagena.

Interrogée à l’occasion de la tentative ratée du président Zelaya de revenir par voie terres-tre au Honduras, la coordinatrice du COPINH, Bertha Cáceres, avait déclaré : « le Président Zelaya a son agenda, nous avons le nôtre. » Il ne s’agissait pas là d’un désaveu mais d’une lec-ture lucide d’une réalité nationale que nom-bre « d’observateurs » ont choisi d’ignorer au profit d’une analyse superficielle fondée sur l’affrontement géostratégique des « blocs ».

Résumé des principaux pointsde l’Accord de Cartagena signé le 22 mai 2011

Retour :1.2.3.4. Retour du président José Manuel Zelaya, dans les conditions prévues par la constitution, garantissant son droit à partici-per à la vie politique en liberté et en sécurité. Cette mesure est étendue aux autres fonctionnaires de son gouvernement ayant été forcés à l’exil. Abandon des poursuites engagées contre José Manuel Zelaya.

Droits Humains :5. Veiller au respect de la Constitution pour ce qui se réfère aux garanties de respect et de protection des Droits Humains. 8. Création d’un secrétariat d’État de la justice et des Droits Humains. Le gouvernement se soumettra périodiquement à l’évalua-tion du respect des Droits Humains par les organisations internationales ad hoc et invitera à l’installation dans le pays d’un bureau dépendant du Haut Commissariat pour la défense des Droits Humains de l’ONU.

Participation politique :6. Inscription du Front National de Résistance Populaire (FNRP) en tant que parti politique, lui attribuant ainsi les garanties pour participer légalement à la vie politique du pays (notamment la participation aux élections). 7. 9. Soumission d’un projet d’Assemblée Nationale Constituante aux dispositions prévues par l’article 5 réformé de la Constitu-tion, qui réglemente les référendums et plébiscites. La conformité avec les principes constitutionnels est soumise à l’appréciation de la Commission de suivi des accords, dont sont membres les présidents colombien et vénézuéliens.

En février dernier, l’assemblée générale du FNRP n’avait pu trancher le vif débat entre partisans de la restructuration en parti et dé-fenseurs d’une Constituante autoconvoquée. L’accord de Cartagena a fait pencher la balan-ce en faveur des premiers. Moins d’un mois après, une assemblée extraordinaire a ratifié la création d’une nouvelle force politique (le Frente Amplio de Resistencia Popular-FARP). Pour autant, les organisations dissidentes ne sont pas à court d’initiatives. Dès la mi-juillet, des milliers de femmes indigènes et afro-descendantes autoconvoquées en assem-blée constituante sur le site maya de Copán, ont débattu de la refondation du pays, de la construction de l’autonomie et d’un Hondu-ras libéré de la domination patriarcale. Encore fallait-il, pour favoriser des délibérations serei-nes, que ce dernier point soit immédiatement suivi d’effet : les hommes ont donc été priés d’assurer le service en cuisine !

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CULTURE(S)

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LES REvES, LES FRUSTRATIONS ETLES RENONCEMENTS DE LA GENERATION

DE LA REvOLUTIONBLESSURE OUVERTE* (Sangra por la herida) est le dernier roman de Mirta Yáñez, il a été présenté à la Casa de las Américas, puis à la Feria del Libro où, après le roman de

Leonardo Padura, El hombre que amaba a los perros, il a créé l’évènement.

C’est à ses amis « qui ont cessé de peindre, de jouer du piano, de faire du théâ-tre…d’échafau-der leurs rêves » qu’elle dédicace ce roman.

Ses personnages, d’origines sociales diffé-rentes, d’âges différents, même si la plu-part appartiennent à la génération des années 60 et 70, vivent à La Havane à la fin du XXème siècle, dans cette ville ma-gnifique, mais de plus en plus délabrée, dans des quartiers aussi différents que le Vedado ou Alamar, dans cette ville qui se vide et « se meurt », et leur vie est empê-trée dans un quotidien difficile, à l’image des difficultés économiques du pays.

Ils ont parfois été broyés par l’Histoire, et leurs souvenirs sont des témoignages des engagements, des passions, parfois de l’intransigeance et de l’intolérance, des utopies, des rêves, des excès, des débor-dements, et aussi des silences coupables et des lâchetés de toute une génération. Toute l’amertume de leurs désillusions nous conduit vers ce présent compliqué, fait de nouveaux défis qu’il faudra relever pour ne pas sombrer, pour que la Révolu-tion n’ait pas été faite pour rien, pour que ses acquis soient sauvés.

La construction chorale de ce récit est ri-goureuse et la multiplicité des histoires apparemment individuelles mais toutes marquées par un évènement tragique du passé, la diversité des points de vue, souvent par des regards de femmes, ou d’hommes peu conformes au modèle vi-ril classique, nous conduit vers l’essentiel, un questionnement sur la mort, le suicide, l’intolérance, la volonté, la responsabilité, la mémoire et l’absence.

Mirta manie toujours l’ironie avec bon-heur, et elle a l’art de présenter les tragé-dies de la vie quotidienne avec beaucoup d’humour, certaines anecdotes n’étant que le fruit d’une grande pénurie maté-rielle. Le transport d’un mort peut devenir une aventure rocambolesque.

La mémoire est centrale, dans ce roman. Mirta a vécu et participé avec passion à la Révolution à Cuba, et a, elle aussi, vécu l’amertume des désillusions, mais lors-qu’on lui demande si ce roman est un règlement de comptes ou un exorcisme, elle s’en défend : « L’acte de création ne doit pas naître d’un règlement de comptes. Et je ne crois pas non plus qu’il soit judicieux en tant qu’exorcisme. Ceci est plutôt réservé à l’acte de lecture. Ce que je revendique est plutôt de laisser ces blessures ouvertes. » C’est ce que dit l’un des personnages à la fin du roman : « Que mon cœur conserve ses blessures ».

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* Blessure ouverte (Mirta Yáñez) est publié chez L’Harmattan dans la collection Lettre des Caraïbes.

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CULTURE(S)

Mirta Yáñez invite sans cesse à l’examen de conscience, met en garde ceux qui condamnent au titre de stupides préju-gés, et elle remet en question la raison des souffrances inutiles « pour que beau-coup de ces souffrances et de ces tragédies personnelles ne tombent pas dans l’oubli, et au moins pour que nous nous demandions quel fut le sens de certains actes. »

Les personnages se souviennent aussi de leur enfance, paradis perdu, dont elle décrit les jeux et les friandises avec ra-vissement et nostalgie. Elle rappelle avec tendresse la vie difficile des ancêtres, ces migrants venus d’Espagne, ces Gallegos qui fuyaient la guerre et la misère et al-laient chercher fortune dans « la perle des Caraïbes », cette île mythique « où les pépites d’or se cueillaient comme des fruits ».

Mais il y a beaucoup d’ab-sents, trop d’absents. A Cuba, personne n’échappe aux séparations douloureu-ses. Tous ont des parents, des enfants, des amis qui sont partis, ou qui ne sont pas rentrés. « Le visage de Sara derrière la vitre de la voiture qui l’emmenait à l’aéroport, lui laissant devi-ner ses plans secrets… Lola sut qu’elle faisait ses adieux à Sara, peut-être pour toujours. » Mirta habite Cojímar, ce très joli petit port, à quelques kilomètres de La Havane, célè-bre grâce à Hemingway, mais tristement célèbre pour avoir vu partir de nombreux « balseros » vers ce nord, jamais nommé, mais toujours aussi fascinant. Le temps passe, le temps perdu, sans doute, où cer-tains sont morts, d’autres sont partis, et il faut « prendre soin de soi car nous, comme je me plais à le dire…nous, les méchants, nous ne sommes plus nombreux. »

Mirta a une œuvre importante et a obtenu de nombreux prix. Elle a écrit des romans, de la poésie, des essais, de la littérature pour enfants et beaucoup de contes et de nouvelles. Elle a beaucoup œuvré, dans ce pays machiste, à la reconnaissance des écrivaines, en participant en particulier à l’élaboration d’une anthologie d’auteures cubaines, de l’intérieur et de l’extérieur, Estatuas de sal. Certaines de ses œuvres ont été publiées en France, en Allemagne et en Angleterre.Elle a été professeur à l’Université de La

Havane et est venue en-seigner à l’université de Poitiers, séjour dont notre comité FAL a profité pour lui faire animer quelques débats, toujours passion-nants et passionnés. Lors-qu’elle parlait de son pays elle était toujours partagée, soutenant et critiquant, elle qui, comme de nombreux jeunes de sa génération, a participé très activement à la Révolution. Au moment de « la période spéciale », elle abrège son contrat et quitte Poitiers pour être parmi les siens.

Lorsque j’ai eu son manuscrit entre les mains, plus je lisais et plus je pensais que cette bombe ne serait pas publiée à Cuba. Elle l’a été, le roman de Padura aussi. Com-me elle a eu raison, alors qu’elle aurait pu faire autrement, de choisir courageuse-ment de rester à Cuba ! Mais il faut « être fidèle à son style, conséquent avec soi-même, c’est le moins que l’on puisse revendiquer lors-qu’on atteint l’âge mythique d’une chanson des Beatles : 64 ».

Colette CASADOMembre du Comité Directeur - FAL Poitiers

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DVD 4 : HUGO BLANCO : LA LUTTE DES PEUPLES INDIGENES D’AMERIQUE LATINE

Avec Hugo Blanco, leader de la confédération des paysans du Pérou.Animé par Sarah Pick, déléguée générale de France Amérique Latine ainsi que Braulio Moro, membre du Bureau National de l’association. Conférence organisée en partenariat avec Les Alternatifs ; Collectif de Péruvien en France ; Nuestra América en Marcha ; Solidai-res ; Radios Latinos ; NPA ; Maison Andine ; MRAP ; Collectif Guatemala ; Colectivo Paraguay ; La Confédération Paysanne ; PCF.Hugo Blanco fut tour à tour militant du Parti Ouvrier Révolutionnaire, dans les années 50, ancien guérillero, dans les années 60-70, prisonnier et exilé politique, membre de la confédération des paysans du Pérou puis, dans les années 90, député de la Gauche Unie péruvienne. Hugo Blanco n’a eu de cesse d’épouser les luttes du mouvement paysan et indigène de son pays et en est devenu une figure Cette conférence nous offre une vision de sa pensée dans un contexte où, depuis maintenant presque deux décennies, le mouvement paysan et indigène est désormais un acteur de premier plan dans les luttes sociales qui traversent l’Amérique latine.

DVD 5 : LUTTE CONTRE L’IMPUNITE EN AMERIQUE LATINE

Avec Louis Joinet, ancien expert des Nations-Unies, Hector Vasquez, Vice-président de l’AEXPPCH, Julie Rogani juriste,Geneviève Jacques auteur du livre Les droits de l’homme et l’impunité des crimes économiques,

Sophie Thonon avocate et présidente de FAL, Franck Gaudichaud maître de conférences et membre du bureau national de FAL.Animé par Renata Molina membre du bureau national de France Amérique Latine et vice présidente de l’AEXPPCH.

Conférence co organisée avec l’AEXPPCH, sous le parrainage de Martine Billard, députée.A l’occasion des 40 ans de l’association France Amérique Latine (FAL) et du procès en France de la junte militaire chilienne aux assises de Paris (8-17 décembre 2010) pour la disparition forcée de quatre franco-chiliens, l’association d’ex prisonniers politiques chiliens (AEXPPCH) et FAL ont souhaité faire un bilan des diverses situations d’impunité en Amérique Latine.A cette occasion, plusieurs intervenants ont été sollicités pour leur expertise et connaissance du terrain (juristes, avocats, militants des droits de l’Homme et universitaires) avec pour objectif d’élaborer une vision commune des diverses formes de luttes contre l’impunité en Amérique Latine : Hier et Aujourd’hui.Ce colloque revient sur plus de 30 années de revendications de « vérité, mémoire et justice » en Amérique du Sud face aux dictatures et aux pratiques de terrorisme d’Etat (chilien et argentin) mais s’intéresse aussi aux mobilisations actuelles en ce qui concerne les viola-tions des Droits Humains dans le contexte du néo-libéralisme et de pratiques prédatrices d’entreprises transnationales.

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sIl y a 20 ans, France Amérique Latines’est dotée d’un service Voyages que nous voulons différent.

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