information en finance et assurance

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AVEC LE CONCOURS DE FABIEN GENSBITTEL KERRY BACK PHILIP PROTTER THORSTEN SCHMIDT HANSJÖRG ALBRECHER 20 Février 2016 INFORMATION EN FINANCE ET ASSURANCE

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Page 1: Information en Finance et assurance

Avec le concours de

FAbien GensbittelKerry bAcKPhiliP Protterthorsten schmidthAnsjoumlrG Albrecher

Ndeg20Feacutevrier 2016

InformatIon en fInance et assurance

2 les cahiers louis Bachelier

Comment une information priveacutee impacte le comportement des joueurs

Drsquoapregraves un entretien avec Fabien Gensbittel

Modegravele de Kyle lrsquoimpact de lrsquoinformation sur le prix drsquoeacutequilibre

Drsquoapregraves un entretien avec Kerry Back

Lutter contre le deacutelit drsquoinitieacute gracircce agrave la modeacutelisation

Asymeacutetrie drsquoinformation et assurance

Drsquoapregraves un entretien avec Philip Protter

Drsquohansjoumlrg albrecher

Comment pallier au manque drsquoinformation gracircce au filtrage

Drsquoapregraves un entretien avec Thorsten schmidt

PubLiCAtion de Lrsquoinstitut Louis bACheLierPalais Brongniart28 place de la Bourse75002 ParisTeacutel 01 73 01 93 40wwwinstitutlouisbachelierorgwwwlouisbachelierorg

direCteur de LA PubLiCAtionJean-Michel Beacco

CheF de Projetcyril armange

ContACtcyrilarmangeinstitutlouisbachelierorg

reacutedACtriCe en CheFisaure du Fretayidufretaylacotebleuefr

journAListecoralie Bachcoraliebachinstitutlouisbachelierorg

ConCePtion GrAPhique Couverture et reacuteALisAtionGaeumll Nicoletla cote Bleue 10-12 place Vendocircme75001 ParisTeacutel 01 44 76 85 85wwwlacotebleuefr

iMPriMeurKava 42 rue Danton94270 le Kremlin-BicecirctreTeacutel 06 14 32 96 87

Avec le concours de

FAbien GensbittelKerry bAcKPhiliP Protterthorsten schmidthAnsjoumlrG Albrecher

Ndeg20Feacutevrier 2016

InformatIon en fInance et assurance

Sommaire

les cahiers louis BachelierNdeg20 - feacutevrier 2016

4

6

8

10

12

les cahiers louis Bachelier 3

eacutedito

information en Finance et assurance

la quantification des risques financiers ainsi que lrsquoeacutelaboration de strateacutegies destineacutees agrave les couvrir deacutependent fortement de la perception du risque par un investisseur donneacute ou plus preacuteciseacutement de lrsquoinformation dont il dispose pour lrsquoeacutevaluer lrsquoinformation repreacutesente ainsi un eacuteleacutement cleacute de la modeacutelisation financiegravere Dans la plupart des modegraveles financiers lrsquoaccent est mis sur le choix de la mesure de pricing le marcheacute est supposeacute choisir cette mesure dans un contexte de marcheacute incomplet de faccedilon agrave ne pas geacuteneacuterer des arbitrages et lrsquoinformation est supposeacutee commune et donneacutee agrave lrsquoavance

Peu drsquoeacutetudes ont eacuteteacute conduites pour eacutetudier lrsquoinfluence de lrsquoinformation sur lrsquoeacutevaluation des produits financiers lors de la crise financiegravere il a eacuteteacute mis en eacutevidence que la faillite de grosses compagnies avait un impact important sur les compagnies dont on estimait qursquoelles nrsquoeacutetaient pas ou peu correacuteleacutees agrave lrsquoentreprise faisant deacutefaut et que lrsquoinformation lieacutee agrave ce deacutefaut devait impeacuterativement ecirctre prise en compte il srsquoagit donc bien drsquoune modeacutelisation de lrsquoinformation permettant drsquoatteindre une modeacutelisation drsquoune deacutependance un eacuteveacutenement extrecircme de faible probabiliteacute peut impacter la modeacutelisation avant et apregraves sa venue et lrsquoinformation lieacutee agrave cet eacuteveacutenement est un eacuteleacutement important de la compreacutehension de la dynamique des prix Mettre en valeur ces relations est un enjeu complexe

le semestre theacutematique ldquoinformation en Finance et assurancerdquo fut lrsquooccasion drsquoeacutechanges et de collaborations scientifiques entre chercheurs de diffeacuterents domaines (matheacutematiques financiegraveres eacuteconomie assurance) travaillant sur le sujet il srsquoest articuleacute autour des 5 thegravemes suivants dont les principales contributions sont illustreacutees dans le preacutesent cahier

bull information partielle modeacuteliser via des techniques de filtrage lrsquoimpact drsquoune drsquoinformation incomplegravetebull information priveacutee comprendre comment la connaissance drsquoune information privileacutegieacutee modifie le

comportement drsquoun agentbull Theacuteorie des jeux comprendre comment la connaissance drsquoune information privileacutegieacutee modifie les

interactions possibles entre les agentsbull information asymeacutetrique et assurance confronter les points de vue financiers eacuteconomiques et actuariels

pour mieux identifier les risques de modegravele tant au niveau du choix du modegravele utiliseacute que du choix des informations accessibles

bull Modegraveles drsquoeacutequilibre Kyle et Back eacutetudier lrsquoexistence drsquoeacutequilibres financiers lorsque les agents ont des informations diffeacuterentes qui peuvent ecirctre des informations priveacutees ou partielles

Bonne lecture

Caroline Hillairet et Monique Jeanblanc organisatrices du semestre theacutematique ldquoInformation en Finance et Assurancerdquo

Plus drsquoinformation sur httpwwwinformationinfinanceandinsuranceorg

Monique Jeanblanc

Caroline Hillairet

ParTeNaires

4 les cahiers louis Bachelier

les agents eacuteconomiques ne disposent pas tous du mecircme niveau drsquoinformation les coucircts drsquoinvestissement drsquoune entre-prise par exemple sont connus de cette derniegravere mais pas de ses concurrents De mecircme un employeur ne peut observer en permanence ses salarieacutes il ne connaicirct donc pas parfaitement le niveau drsquoeffort de chaque em-ployeacute srsquoil souhaite creacuteer une in-citation sa seule possibiliteacute est de conditionner le salaire verseacute au reacutesultat

en formalisant les interac-tions entre les agents (appe-leacutes joueurs) les modegraveles de la theacuteorie des jeux cherchent agrave deacutefinir les eacutequilibres dans ce contexte de problegraveme drsquoinfor-mation autrement dit ils visent agrave deacuteterminer la ou les strateacutegies qui permettent de satisfaire au mieux lrsquoensemble des joueurs ces derniers sont en effet strateacute-giques ils cherchent agrave optimiser un certain critegravere (geacuteneacuteralement leur paiement ou utiliteacute espeacutereacutes) et rationnels ils ont la capaciteacute

de reacutesoudre un problegraveme drsquoopti-misation complexe

quelle valeur pour une information priveacutee

lrsquoeacutetude des eacutequilibres dans ces modegraveles est deacutelicate et sou-legraveve plusieurs questions drsquointeacute-recirct pour la recherche Plusieurs drsquoentre elles ont eacuteteacute abordeacutees lors du semestre theacutematique ldquoinformation en Finance et assurancerdquo comme la valeur drsquoune information priveacutee ou lrsquouti-lisation strateacutegique de celle-ci

Jeacuterocircme renault a ainsi eacutetudieacute la valeur drsquoune information pri-veacutee dans un jeu agrave somme nulle crsquoest-agrave-dire un jeu ougrave les inteacute-

comment une information priveacutee impacte le comportement des joueurs

recircts des joueurs sont totalement opposeacutes en situation drsquoinfor-mation incomplegravete la valeur de cette information correspond au paiement optimal que peut se garantir le joueur a dans le jeu cette approche permet drsquoordon-ner diffeacuterentes structures drsquoinfor-mation en fonction de leur qua-liteacute (ou valeur) du point de vue du joueur a mais aussi de les diffeacuterencier de maniegravere quanti-tative crsquoest-agrave-dire de mesurer lrsquoeffet preacutecis drsquoune variation de la structure drsquoinformation sur la valeur du jeu

bluffer pour optimiser son information

au-delagrave de la valeur intrinsegraveque de lrsquoinformation de nombreux travaux srsquointeacuteressent agrave la maniegravere optimale de lrsquoutiliser lrsquoobjectif pour le joueur est de controcircler la maniegravere dont son information est reacuteveacuteleacutee au marcheacute afin de maxi-miser son profit il a donc tout inteacuterecirct agrave ldquoblufferrdquo de maniegravere agrave cacher son information Par exemple si un joueur connaicirct la

Lrsquoobjectif pour le joueur est de controcircler la maniegravere dont son information est reacuteveacuteleacutee

un joueur beacuteneacuteficiant drsquoune information priveacutee a inteacuterecirct agrave ldquoblufferrdquo pour ne pas deacutevoiler son infor-mation aux autres joueurs

il introduit alors un aleacutea dans ses prises de deacutecision

Lrsquoutilisation strateacutegique de lrsquoinformation a des conseacutequences sur le marcheacute que ce soit sur les fluctuations des prix ou sur lrsquoeacutevaluation des actifs

drsquoapregraves un texte de Fabien Gensbittel et les articles citeacutes en reacutefeacuterence

de nombreux travaux acadeacutemiques analysent lrsquoimpact des deacuteseacutequilibres drsquoinformation sur le marcheacute en se basant sur la theacuteorie des jeux ils abordent notamment la question de lrsquoutilisation strateacutegique drsquoune information priveacutee

a retenir

les cahiers louis Bachelier 5

Fabien Gensbittel est maicirctre de confeacuterences en matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoUniversiteacute Toulouse 1 au sein de Toulouse School of Economics depuis sep-tembre 2011 apregraves une thegravese en matheacutematiques agrave lrsquoUniversiteacute Paris 1 obtenue en 2010 Ses travaux de recherche sont centreacutes sur les aspects matheacutematiques de la theacuteorie des jeux et en particulier sur les problegravemes drsquoinformation dans les jeux dynamiques

valeur drsquoune variable X (disons 0 ou 1) qui est positivement cor-reacuteleacutee agrave la qualiteacute drsquoun projet ris-queacute et deacutecide drsquoinvestir dans le projet agrave la premiegravere eacutetape du jeu uniquement si X = 1 lrsquoobserva-tion de son comportement reacutevegravele compleacutetement son information introduire un aleacutea dans la deacuteci-sion drsquoinvestir (par exemple investir avec probabiliteacute 34 si X = 1 et 14 si X = 0) permet de brouiller les cartes et autorise une plus grande marge de ma-nœuvre

lrsquoutilisation strateacutegique des informations priveacutees nrsquoest pas sans conseacutequence pour le mar-cheacute Bernard de Meyer montre ainsi comment ces strateacutegies expliquent en partie les fluc-tuations des prix il considegravere un marcheacute composeacute de deux agents un agent de taille impor-tante qui beacuteneacuteficie drsquoun accegraves privileacutegieacute agrave lrsquoinformation et un acteur plus petit moins bien in-formeacute lrsquoagent principal sait que son comportement est observeacute il va donc instaurer une strateacutegie afin de dissimuler son informa-tion priveacutee et introduire un aleacutea dans ses actions les eacutevolutions du prix sont donc expliqueacutees par le comportement optimal du joueur informeacute et non comme la conseacutequence de chocs aleacutea-toires indeacutependants

Mecircme srsquoil est extrecircmement sim-plifieacute ce modegravele a lrsquointeacuterecirct de prouver lrsquoimpact de lrsquoinformation sur les prix et de proposer une meacutethode drsquoeacutevaluation drsquoactifs baseacutee sur ce constat

evaluer des options avec une information asymeacutetrique

les problegravemes drsquoinformation ont eacutegalement un impact sur lrsquoeacuteva-

luation des actifs et notamment des options Fabien Gensbittel a ainsi eacutetudieacute lrsquoeacutevaluation des op-tions dites israeacuteliennes agrave savoir des options ougrave lrsquoeacutemetteur peut se reacutetracter agrave tout moment sous reacute-serve de verser une indemniteacute agrave lrsquoacheteur il srsquoagit lagrave encore drsquoun jeu agrave somme nulle puisqursquoeacutemet-teur et acheteur ont des inteacuterecircts opposeacutes les deacutecisions des deux parties se reacuteduisent agrave un temps drsquoarrecirct temps drsquoannu-lation pour lrsquoeacutemetteur temps drsquoexercice pour lrsquoacheteur il est assez naturel dans ce type de problegraveme de consideacuterer que lrsquoin-formation sur la qualiteacute de lrsquoactif sous-jacent est asymeacutetrique et lagrave encore les strateacutegies opti-males prescrivent drsquointroduire un aleacutea dans la prise de deacutecision et non plus drsquoexercer au-delagrave drsquoun certain seuil deacutetermineacute comme crsquoest souvent le cas dans les problegravemes drsquoarrecirct agrave information complegravete concregravetement en lrsquoabsence de problegraveme drsquoinfor-mation lrsquoeacutemetteur retire son offre au-delagrave drsquoun certain seuil de prix connu et fixeacute lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation pousse les acteurs agrave bluffer lrsquoeacutemetteur ne srsquoarrecirc-tera pas agrave un seuil de prix fixe mais agrave un ldquoseuil aleacuteatoirerdquo

jeux agrave somme non-nulle agrave information incomplegravete

les probleacutematiques drsquoinforma-tion incomplegravete existent eacutega-lement dans les jeux agrave somme non-nulle autrement dit les jeux ougrave les inteacuterecircts des joueurs ne sont pas forceacutement opposeacutes

Dans ce cas une forme de coo-peacuteration entre les joueurs est possible comment dans ce contexte lrsquoinformation priveacutee est-elle utiliseacutee un reacutesultat clas-sique est lrsquoexistence drsquoeacutequilibres

appeleacutes plan-joints qui srsquoappa-rentent agrave des contrats entre les deux joueurs ougrave lrsquoinformation pri-veacutee nrsquoest utiliseacutee qursquoune fois au deacutebut du jeu

ce type drsquoeacutequilibre fonctionne en quelque sorte sur le prin-cipe de la menace Des regravegles sont deacutefinies au deacutebut du jeu si un joueur ne les respecte pas il sera peacutenaliseacute par les autres joueurs tout au long du jeu

Neacuteanmoins les eacutequilibres plan-joint ne repreacutesentent qursquoune par-tie des eacutequilibres car on peut construire des exemples de nature diffeacuterente ougrave lrsquoinformation est reacuteveacuteleacutee petit agrave petit tout au long du jeu

Fabien Gensbittel

bibliographie

B De Meyer and G Four-nier (2015 ) Price dynamics on a risk averse market with asymmetric information httpshalshsarchives-ou-vertesfrhalshs-01169563

F Gensbittel and cGruumln (2015) Zero-sum stopping games with asymmetric information httparxivorgabs14121412

F Forges (1992) repea-ted games of incomplete information non-zero-sum in r aumann and s hart handbook of Game Theory with economic applica-tions chapter 6

retrouvez lrsquoarticle inteacutegral

de Fabien Gensbittel sur

wwwinformationinfinanceandinsuranceorg

6 les cahiers louis Bachelier

la question du prix drsquoeacutequilibre est fondamentale en eacuteconomie et de nombreux travaux tentent de la formaliser le modegravele de Kyle srsquoinscrit dans cette probleacute-matique en faisant le lien entre la formation du prix eacutetabli par lrsquooffre et la demande et lrsquoinformation dont disposent les agents Tous ne sont pas en possession des mecircmes eacuteleacutements un investisseur local par exemple connaicirctra a priori mieux le marcheacute qursquoun in-vestisseur eacutetrangercomment lrsquoinformation dispo-nible ou les diffeacuterences de niveau drsquoinformation entre les agents peuvent-elles influer sur lrsquoactiviteacute des marcheacutes finan-ciers comment cette infor-mation est-elle inteacutegreacutee dans le prix Quels sont les beacuteneacutefices retireacutes drsquoune information privileacute-gieacutee le prix drsquoeacutequilibre en est-il modifieacute Telles sont quelques-unes des questions auxquelles srsquoattache la theacuteorie de Kyle qui modeacutelise lrsquoimpact de lrsquoinformation sur la liquiditeacute et le prix drsquoun actif

un agent privileacutegieacute et strateacutegique

Kyle considegravere un marcheacute sur lequel est vendu un actif risqueacute Trois types drsquoagents interviennent dans les eacutechanges un trader ldquoprivileacutegieacuterdquo des liquidity traders et un market maker

le trader ldquoprivileacutegieacuterdquo beacuteneacuteficie drsquoune information priveacutee sur la va-leur de lrsquoactif il connaicirct sa valeur agrave la date T1 et donc le prix de vente ou drsquoachat potentiel agrave cette date lrsquoagent informeacute est strateacutegique et cherche agrave maximiser le profit qursquoil peut tirer de son information il prend donc en consideacuteration lrsquoimpact de son ordre sur le prix

Modegravele de Kyle lrsquoimpact de lrsquoinformation sur le prix drsquoeacutequilibre

Certains investisseurs beacuteneacuteficient drsquoinformations privileacutegieacutees leur permettant de mieux eacutevaluer la valeur drsquoun actif Comment cette information influence-t-elle lrsquoeacutequilibre du marcheacute quels avantages offre-t-elle Le modegravele de Kyle fournit des eacuteleacutements de reacuteponse

du marcheacute et effectue ses tran-sactions de sorte agrave ce que son information soit reacuteveacuteleacutee au mar-cheacute le plus tardivement possible il ne vendra pas par exemple lrsquoensemble de ses titres en une seule opeacuteration afin drsquoeacuteviter une chute des cours Toutefois via ses transactions agrave lrsquoachat ou agrave la vente il fournit neacutecessairement un signal au marcheacute une partie de son information eacutetant transmise au prix de lrsquoactif

De leur cocircteacute les liquidity traders ne disposent pas drsquoinformation sur la valeur de lrsquoactif ils fournissent de la liquiditeacute en participant aux eacutechanges mais ne donnent pas de signal au marcheacute et nrsquoont donc pas drsquoimpact sur le prix

enfin le market maker observe les flux de transaction sans dis-tinguer la demande du trader informeacute de celle des liquidity tra-ders il fixe le prix en fonction de la demande globale de lrsquoactif agrave lrsquoinstant T et de lrsquoestimation de sa

Le modegravele de Kyle modeacutelise lrsquoimpact de lrsquoinformation sur la liquiditeacute et le prix drsquoun actif

il permet de calculer agrave partir drsquoun prix agrave lrsquoinstant t lrsquoeacutevolution du prix drsquoeacutequilibre au cours du temps

il montre eacutegalement qursquoune information privileacutegieacutee a drsquoautant plus de valeur lorsque le marcheacute est liquide ou bruiteacute Le profit srsquoaccroicirct eacutegalement lorsque la variance du prix agrave lrsquoinstant t est forte

drsquoapregraves un texte de Kerry back et les articles citeacutes en bibliographie

Plus le marcheacute est liquide plus le profit de lrsquoagent informeacute est important

a retenir

les cahiers louis Bachelier 7

Kerry Back est professeur titulaire de la chaire de Finance J Howard Creekmore agrave la Jones Graduate School of Business et professeur drsquoEacuteconomie agrave la faculteacute de Sciences Sociales de Rice University ougrave il enseigne la theacuteorie de valorisation drsquoactifs Il a eacutegalement enseigneacute agrave Northwestern University Indiana University Washington University in St Louis et Texas AampM University A Washington University in St Louis il a occupeacute le poste de Doyen des Affaires Acadeacutemiques de la Olin School of Business et a reccedilu le titre de ldquoMembre Eacuteminent du corps

professoralrdquo Il a eacuteteacute reacutecompenseacute par plusieurs prix de recherche agrave Texas AampM et agrave Rice University Ses domaines de recherche comprennent les investissements et lrsquoorganisation des marcheacutes Il a eacuteteacute reacutedacteur de la Review of Financial Studies coreacutedacteur de Finance amp Stochastics et reacutedacteur adjoint du Journal of Finance et drsquoautres revues

rentabiliteacute espeacutereacutee il nrsquoy a pas de saut juste avant lrsquoannonce du prix le marcheacute incorpore correcte-ment lrsquoinformation et la formation du prix est juste

deacuteterminer le prix drsquoeacutequilibre

le modegravele de Kyle se distingue ainsi du modegravele de Merton lrsquoune des reacutefeacuterences des modegraveles drsquoeacutequilibre de marcheacute qui lui fait lrsquohypothegravese drsquoune symeacutetrie drsquoin-formation le premier considegravere des agents neutres vis-agrave-vis du risque et ayant un impact sur le marcheacute Drsquoougrave la volonteacute de lrsquoagent informeacute de mener ses transac-tions ldquoen douceurrdquo le second au contraire considegravere des agents averses au risque nrsquoayant aucun impact sur le prix

lrsquoobjectif du modegravele de Kyle est de deacuteterminer comment lrsquoinforma-tion de lrsquoagent privileacutegieacute se trans-met au prix et de deacutefinir ainsi le prix drsquoeacutequilibre V le prix V1 de lrsquoactif agrave lrsquoinstant T1 est en effet connu a partir de cette informa-tion comment estimer le prix V au fil du temps le modegravele montre que lorsque le prix V1 suit une loi dite gaussienne (dont la dis-tribution est donc uniquement deacutetermineacutee par la moyenne et la

le modegravele de Kyle est un modegravele drsquoeacutequilibre ougrave un agent neutre au risque et informeacute crsquoest-agrave-dire qursquoil connaicirct le prix agrave la date terminale exploite cette information afin de maximiser son profit espeacutereacute Par contre le market maker qui fixe le prix de marcheacute dispose de moins drsquoinformation et en particulier ne peut pas observer lrsquoaction de lrsquoagent informeacute car elle est bruiteacutee par les liquidity traders en utilisant des outils de controcircle stochastique et du filtrage on eacutetudie lrsquoeffet de lrsquoinformation sur les prix drsquoeacutequilibre

meacutethodologie

variance) la formule est explicite et facilement calculable

une information plus ou moins valoriseacutee

le modegravele fournit eacutegalement un eacuteclairage sur les beacuteneacutefices ap-porteacutes par lrsquoinformation priveacutee ces derniers peuvent ainsi ecirctre renforceacutes par plusieurs eacuteleacutements

Tout drsquoabord le profit de lrsquoagent informeacute est drsquoautant plus grand que le marcheacute est liquide autre-ment dit plus le marcheacute integravegre rapidement lrsquoinformation plus celle-ci est beacuteneacutefique au trader privileacutegieacute son profit srsquoaccroicirct eacutega-lement avec le bruit du marcheacute Plus le bruit est important plus lrsquoinformation priveacutee sera deacutevoileacutee tardivement au marcheacute et plus lrsquoagent pourra en tirer profit

enfin plus la variance du prix V1 est forte plus les valeurs pro-bables du prix drsquoeacutequilibre V sont larges il est alors plus difficile pour les traders non informeacutes de faire une juste estimation de V le gain pour lrsquoagent privileacutegieacute est donc plus fort

le modegravele de Kyle connaicirct de nombreuses extensions il existe

ainsi des formules qui integravegrent plusieurs agents informeacutes ou un agent informeacute mais ne connais-sant pas exactement le prix V1 Drsquoautres considegraverent un prix V1 qui ne suit pas une loi gaussienne ou encore un marcheacute composeacute drsquoun actif risqueacute ainsi que drsquoun deacuteriveacute Quelles que soient les variations le modegravele de Kyle constitue en tout cas une avanceacutee dans la compreacutehension du rocircle de lrsquoinfor-mation sur les marcheacutes et sur la formation du prix drsquoeacutequilibre

Kerry back

bibliographie

Back K 1992 insider tra-ding in continuous time review of Financial studies 5 387-409

Kyle as 1985 conti-nuous auctions and insider trading econometrica 53 1315-1336

retrouvez lrsquoarticle inteacutegral

de Kerry back sur

wwwinformationinfinanceandinsuranceorg

8 les cahiers louis Bachelier

la sec (securities and exchange commission) lrsquoorganisme feacutedeacuteral ameacutericain de regraveglementation et de controcircle des marcheacutes finan-ciers deacutefinit le deacutelit drsquoinitieacute comme ldquole fait drsquoacheter ou de vendre un titre ou une valeur en violation des obligations fiduciaires etou de confiance tandis que lrsquoon dispose drsquoinformations confidentielles non-publiques concernant ladite valeur le deacutelit drsquoinitieacute peut aussi englober le fait de divulguer des informations confidentielles agrave un tiers le fait pour le tiers de neacutego-cier des titres objets desdites informations confidentielles ainsi que le neacutegoce de titres par toute personne qui deacutetournerait de telles informations agrave son profitrdquo

si ces contours sont clairs le deacutelit drsquoinitieacute demeure difficile agrave prouver et donc agrave sanctionner la modeacuteli-sation matheacutematique pourrait-elle permettre de mieux cerner le com-portement des fraudeurs et ainsi de mieux les deacutetecter Plusieurs travaux de recherche ont eacuteteacute me-neacutes sur ce sujet

Pas de profit sans risque

le processus de modeacutelisation re-pose en effet sur la notion drsquoinfor-mation on peut ainsi consideacuterer qursquoune collection drsquoeacuteveacutenements appeleacutee Ft repreacutesente lrsquoensemble des informations publiques concernant le marcheacute financier et disponibles agrave un moment t un initieacute possegravede par deacutefinition une information priveacutee sur un eacuteveacute-nement ne faisant pas partie de cet ensemble il peut srsquoagir par exemple drsquoun investisseur qui a connaissance de lrsquoavanceacutee des tests cliniques drsquoun nouveau meacute-dicament sa collection drsquoeacuteveacutene-ments observables devient alors plus grande que la collection de reacutefeacuterence Ft

lutter contre le deacutelit drsquoinitieacute gracircce agrave la modeacutelisation

Traditionnellement les modegraveles sont construits sur la notion drsquoab-sence drsquoarbitrage autrement dit ils considegraverent qursquoil est impossible de reacutealiser des profits sans assu-mer une part de risque le risque nul nrsquoexiste pas Mais il arrive qursquoune information priveacutee puisse creacuteer des opportuniteacutes drsquoarbi-trage ou du moins des situations tregraves proches de lrsquoarbitrage en lrsquooccurrence si un investisseur sait agrave lrsquoavance qursquoune compagnie va mettre sur le marcheacute un nouveau meacutedicament ses chances de reacutealiser une plus-value sont tregraves fortes et son risque faiblehellip

tirer profit drsquoune information priveacutee

lrsquoinitieacute peut ainsi tirer avantage de son information de plusieurs ma-niegraveres Dans lrsquoexemple preacutesenteacute la solution la plus simple est eacutevidem-ment drsquoacheter ou de vendre des actions de la compagnie pharma-ceutique selon les reacutesultats du test Mais lrsquoinformation peut aussi gui-der lrsquoachat de produits deacuteriveacutes ou

Un agent initieacute peut reacutealiser des profits sans prendre de risque ou presque

un agent initieacute possegravede une collection drsquoinformations plus grande que celle des autres agents Cette information suppleacutementaire change sa perception du marcheacute et son eacutevaluation du prix drsquoun actif

Le modegravele preacutesenteacute permet drsquooptimiser lrsquoutilisation de cette information priveacutee en analysant les deacuteviations des cours par rapport agrave une valeur de reacutefeacuterence il permet agrave lrsquoagent de savoir si un titre est sous ou sur eacutevalueacute

Le modegravele est eacutegalement utile au reacutegulateur pour mieux cerner le comportement des initieacutes et donc mieux lutter contre ces pratiques

drsquoapregraves un texte de Philip Protter et les articles citeacutes en bibliographie

Gracircce agrave une information priveacutee un agent peut reacutealiser drsquoimportants profits pour un minimum de risque en permettant de mieux comprendre lrsquoutilisation de cette information la modeacutelisation aide agrave lutter contre les deacutelits drsquoinitieacutes

a retenir

les cahiers louis Bachelier 9

Philip Protter est Fellow du IMS (Center for Intelligent Management Systems) reacute-dacteur adjoint de neuf revues scientifiques membre de deux comiteacutes de reacutedaction et a eacuteteacute reacutedacteur en chef de la revue Stochastic Processes and their Applications Ses principaux domaines de recherche comprennent les matheacutematiques finan-ciegraveres (modegraveles de valorisation drsquoactifs modegraveles de valorisation et de couver-ture de deacuteriveacutes problegravemes de liquiditeacute bulles financiegraveres deacutelits drsquoinitieacute trading agrave haute freacutequence risque de creacutedit) la theacuteorie de lrsquointeacutegrale stochastique la theacuteorie des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques les meacutethodes de reacutesolution

numeacuterique des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques la discreacutetisation de processus stochastiques (en tant que branche de la statistique matheacutematique) eacutequations diffeacuterentielles stochastiques et ldquoeacutequations diffeacuterentielles stochastiques retrogradesrdquo les processus de Markov et la theacuteorie du filtrage Il est lrsquoau-teur et co-auteur de deux manuels acadeacutemiques et de deux ouvrages scientifiques

drsquooptions ces derniegraveres donnent le droit drsquoacheter ou de vendre un titre dans le futur agrave un prix fixeacute Bien utiliseacutee une option peut ainsi geacuteneacuterer drsquoimportants profits pour un investissement modeste et ce sur une courte peacuteriode

les informations suppleacutementaires ont en effet un impact sur lrsquoesti-mation du prix drsquoun actif un agent eacutevalue les flux futurs drsquoun actif via la collection drsquoinformations dispo-nibles si sa collection devient plus grande sa perception du marcheacute est modifieacutee lrsquoestimation du prix eacutevolue ainsi que lrsquoeacutevaluation de la probabiliteacute drsquoun eacuteveacutenement comme la survenance drsquoune faillite par exemple

deacutetecter une valeur hors norme

lrsquoauteur eacutetudie ainsi un modegravele qui calcule la ldquojuste valeurrdquo drsquoun actif et ses proprieacuteteacutes (variance eacutecart-type etc) en prenant compte de lrsquoinformation disponible modeacuteliseacutee pour un agent initieacute par un grossis-sement de filtration il est ainsi pos-sible drsquoanalyser les deacuteviations des cours par rapport agrave cette valeur la filtration modeacutelise ici lrsquoinforma-tion de lrsquoinitieacute et permet de montrer comment tirer profit drsquoune infor-mation privileacutegieacutee lrsquoagent est en mesure de savoir si une option est

sous ou sur eacutevalueacutee il ajuste ses investissements en conseacutequence augmentant de ce fait consideacutera-blement ses probabiliteacutes de pro-fits le modegravele permet eacutegalement de quantifier lrsquoavantage obtenu par lrsquoinitieacute gracircce agrave son information privileacutegieacutee

Toutefois comprendre via une analyse matheacutematique comment certains utilisent une information priveacutee peut aider le reacutegulateur agrave deacutetecter les deacutelits drsquoinitieacute et agrave poursuivre les contrevenants en effet en eacutevaluant la valeur normale de lrsquoactif le modegravele quantifie en quelque sorte un niveau drsquoalerte si une transaction srsquoeffectue agrave un prix trop eacuteloigneacute de la valeur nor-male elle peut ecirctre le fruit drsquoun deacutelit drsquoinitieacute

or lutter contre les deacutelits drsquoinitieacute est primordial pour garantir la flui-diteacute des transactions financiegraveres le marcheacute doit apparaicirctre comme juste Dans le cas contraire srsquoil est perccedilu comme deacutefaillant ou cor-rompu peu drsquoinvestisseurs accep-teront de participer aux eacutechanges les agents perdront confiance et la liquiditeacute sera reacuteduite le rocircle de lrsquoetat est donc de garantir le bon fonctionnement du marcheacute en reacute-duisant lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation et en luttant contre les deacutelits drsquoinitieacute

Philip Protter

lrsquoinformation publique disponible au cours du temps sur le marcheacute est repreacutesenteacutee par une filtration lrsquoinformation drsquoun initieacute qui possegravede une information privileacutegieacutee est ainsi modeacuteliseacutee par un grossissement de cette filtration du marcheacute ceci entraicircne une eacutevaluation des probabiliteacutes drsquooccurrence drsquoeacuteveacutenements diffeacuterentes pour un initieacute par rapport agrave un investisseur standard en particulier sa mesure drsquoeacutevaluation (appeleacute mesure risque neutre) des actifs en est modifieacutee

meacutethodologie

bibliographie

roseline Bilina Falafala amp Philip Protter insider Tra-ding and risk preprint 2015

claudio Fontana Monique Jeanblanc amp shiqi song on arbitrages arising with honest times Finance and stochastics July 2014 Vo-lume 18 issue 3 515-543

Younes Kchia amp Philip Prot-ter on Progressive Filtration expansions with a Process applications to insider Tra-ding international journal of theoretical and applied finance- river edge NJ [ua] World scientific issN 0219-0249 ZDB-iD 14289829 - Vol 182015 4 p 1-48

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appareils connecteacutes GPs sys-tegravemes de monitoring meacutedicaux robots mobiles ces technolo-gies se creacuteent une place dans nos quotidiens et leur utilisation devrait ecirctre encore renforceacutee par la numeacuterisation en cours or tous ces objets ont un point commun ils fonctionnent de faccedilon dyna-mique avec une eacutemission de signal qui eacutevolue continuellement au cours du temps la preacutediction du signal est ainsi plus complexe et neacutecessite des outils matheacutema-tiques adapteacutes

la technique du filtrage reacutepond agrave cette probleacutematique Thorsten schmidt professeur agrave lrsquouniver-siteacute de Fribourg fait le point sur cette meacutethodologie aux multiples applications qursquoest-ce qursquoun problegraveme de filtrage comment cette technique srsquoest-elle deacuteve-loppeacutee Quelles solutions peut-elle apporter

contrairement agrave la statistique classique le filtrage vise agrave eacutevaluer

un signal dynamique dont lrsquoobser-vation est perturbeacutee par un bruit comment calculer une estima-tion juste malgreacute une observation bruiteacutee il srsquoagit par exemple de deacutefinir la position drsquoun robot qui se deacuteplace au cours du temps le robot nrsquoest pas dans le champ de vision de son proprieacutetaire il nrsquoest donc pas directement ob-servable Toutefois le proprieacutetaire dispose des donneacutees GPs qui correspondent ici agrave une observa-tion bruiteacutee le but est drsquooptimiser les informations fournies par le GPs afin de calculer la position du robot au cours du temps

comment pallier au manque drsquoinformation gracircce au filtrage

Approche de la statistique moderne le filtrage permet de reacutesoudre de nombreuses probleacutematiques drsquoinformation imparfaite que ce soit dans le cadre des objets connecteacutes de la navigation satellite ou du calcul de risque en finance ses applications sont multiples

Le filtre de Kalman

la theacuteorie du filtrage est neacutee dans les anneacutees 40 sous lrsquoimpul-sion drsquoandrey N Kolmogorov et Norbert Wiener le premier a eacutetu-dieacute la probleacutematique en temps discret tandis que le second lrsquoa abordeacute en temps continu il a en-suite fallu attendre les anneacutees 60 pour connaitre de nouvelles avan-ceacutees avec rudolf e Kalman

lrsquoapproche de Kalman fait office de reacutefeacuterence en matiegravere de fil-trage en se basant sur les lois gaussiennes le modegravele eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal lrsquoinformation corres-pond aux observations bruiteacutees prix donneacutees etc lrsquoavantage principal de cette meacutethode est de donner une formule explicite pour calculer le signal simplifiant ainsi fortement le proceacutedeacute

lrsquoune des utilisations les plus ceacutelegravebres et les plus anciennes du filtre de Kalman remonte agrave la

drsquoapregraves un texte de thorsten schmidt et les articles citeacutes en reacutefeacuterence

Lrsquoavantage principal de la meacutethode de Kalman est de donner une formule explicite et de faible dimension

Le filtrage vise agrave eacutevaluer un signal dynamique dont lrsquoobservation est bruiteacutee

Le modegravele de Kalman eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal il fournit une for-mule explicite et de faible dimension pour calculer le signal simplifiant ainsi le proceacutedeacute

Pour les cas non lineacuteaires des meacutethodes numeacuteriques peuvent ecirctre utiliseacutees

Le filtrage recouvre un large champ drsquoapplication que ce soit en finance dans lrsquoindustrie eacutelectro-nique la robotique ou encore le secteur meacutedical

a retenir

les cahiers louis Bachelier 11

Thorsten Schmidt est professeur de matheacutematiques stochastiques agrave lrsquoUniversiteacute de Fribourg (Allemagne) ougrave il a succeacutedeacute agrave Ernst Eberlein Auparavant il a ensei-gneacute les matheacutematiques financiegraveres agrave lrsquoUniversiteacute de technologie de Chemnitz

Outre son inteacuterecirct pour les matheacutematiques financiegraveres et plus particuliegraverement pour les taux drsquointeacuterecirct les marcheacutes du risque de creacutedit et de lrsquoeacutenergie il a une so-lide expertise en statistique et probabiliteacute Il a reacutecemment co-eacutecrit un ouvrage sur la statistique matheacutematique publieacute chez Springer Sa recherche dans le domaine

du risque de creacutedit porte sur lrsquoimpact de lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation le filtrage non-lineacuteaire les modegraveles drsquoanalyse de risques dynamiques Heath-Jarrow-Morton et les processus affineacutes

mission apollo le modegravele a eacuteteacute utiliseacute pour preacuteparer le voyage de Neil amstrong vers la lune ainsi que son retour notamment pour deacuteterminer agrave quel moment preacutecis la fuseacutee devait rentrer dans lrsquoat-mosphegravere1 il est aujourdrsquohui uti-liseacute dans la plupart des outils de navigation satellite tout comme dans les smartphones ou les jeux videacuteo

le filtre de Kalman ne peut tou-tefois ecirctre employeacute que pour les cas lineacuteaires certains auteurs ont ainsi eacutetendu le cadre lineacuteaire en utilisant des approximations au niveau local

La meacutethode particulaire de filtrage

enfin des meacutethodes numeacuteriques ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees pour les pro-bleacutematiques non lineacuteaires ne pou-vant ecirctre reacutesolues ni par le filtre de Kalman ni par ses extensions Parmi elles figure la meacutethode particulaire de filtrage celle-ci estime la distribution du signal via un proceacutedeacute de reacuteduction sta-tistique dit ldquodiscreacutetisationrdquo qui consiste agrave deacutecouper une seacuterie de donneacutees en un certain nombre de classes repreacutesenteacutees par des particules a lrsquoimage de la meacutethode de Monte carlo cette approche repose sur la loi des grands nombres et la simulation drsquoexpeacuteriences reacutepeacuteteacutees Dans un premier temps les valeurs sont estimeacutees gracircce aux observations disponibles chaque valeur uti-liseacutee est associeacutee agrave un poids de conditionnement Puis agrave chaque simulation les pondeacuterations sont

ajusteacutees en fonction des reacutesul-tats obtenus les particules se deacuteplacent librement agrave partir de lrsquoalgorithme de dynamique du modegravele ce qui est possible dans la mesure ougrave la position exacte de chaque particule est connue on calcule alors la position moyenne pondeacutereacutee des particules agrave partir de leur poids theacuteoriques respec-tifs

un large champ drsquoapplication

les techniques de filtrage consti-tuent des outils preacutecieux afin de pallier aux imperfections de lrsquoinfor-mation ces probleacutematiques sont courantes en particulier dans le domaine financier en effet qursquoil srsquoagisse de calibrer un modegravele de valoriser un portefeuille drsquoac-tifs ou de deacutefinir les strateacutegies de couverture les donneacutees utiliseacutees sont toujours incomplegravetes le fil-trage permet de traiter ce type de question il est notamment employeacute pour calculer le risque de creacutedit une entreprise est en effet reconnue en faillite lorsque sa valeur fondamentale est trop basse Mais cette information nrsquoest eacutevidemment pas connue des acteurs du marcheacute les ob-servations sont bruiteacutees puisque pas entiegraverement disponibles le filtrage peut alors servir agrave estimer le risque de creacutedit agrave partir des diffeacuterentes sources drsquoinformation disponibles croiser les donneacutees des rapports trimestriels du cours des actions ou encore du prix des options permet drsquoeacuteva-luer la probabiliteacute de deacutefaut de la socieacuteteacute

les modegraveles de filtrage ont donc un large champ drsquoapplication et fournissent des eacuteleacutements de reacute-ponse agrave de nombreuses probleacute-matiques Nul doute que les re-cherches vont se poursuivre afin drsquoaccroitre les performances de ces meacutethodes et algorithmes et de faire ainsi face agrave de nouveaux challenges

thorsten schmidt

bibliographieFrey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

Bain a and crisan D (2009) Fundamentals of stochastic Filtering sprin-ger New York

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Del Moral P (1996) `Non-linear Filtering interacting particle solutionrsquo Markov Processes and related Fields 2(4) 555-580

1 Source Faragher (2012)

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asymeacutetrie drsquoinformation et assurance

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Nous et le Monde Naturel Nous avons souvent besoin de quantifier le risque de lrsquoassureur pour deacuteterminer une eacutechelle de primes eacutequitable pour deacutefinir des strateacutegies solides de ges-tion du risque ou pour deacuteterminer les Solvency Capital Requirements le niveau minimum de fonds propres exigeacutes Dans chacune de ces situations les pertes potentielles constituent une issue future incertaine Mettant de cocircteacute la question quasi-philosophique de savoir si lrsquoincertitude (sur lrsquooccurrence et le montant des sinistres futurs pour lrsquoassureur) est due agrave une insuf-

fisance drsquoinformation ou alors si elle est plutocirct lieacutee au caractegravere intrinsegravequement aleacuteatoire des issues nous nous trouvons geacuteneacuteralement face au workflow suivant

INCERTITUDE i RISQUE i DONNEES i MODELES

La diffeacuterence entre lrsquoincertitude et le risque (selon la deacutefinition de lrsquoeacuteconomiste Frank Knight) est que le risque peut ecirctre quantifieacute crsquoest-agrave-dire que lrsquoon peut en principe deacuteterminer la distribution de probabiliteacute pour le risque en question Apregraves avoir deacutetermineacute quelles caracteacuteristiques constituent les risques agrave quan-

Crsquoest la nature mecircme de lrsquoactiviteacute drsquoassurance que de disposer drsquoun niveau drsquoinformation limiteacute agrave propos des risques agrave assurer et les informations suppleacutementaires sont toujours les bienvenues Il en est de mecircme pour lrsquoactiviteacute de la reacuteassurance La reacuteassurance est une opeacuteration par laquelle une socieacuteteacute drsquoassurance (le ldquoceacutedantrdquo) srsquoassure aupregraves drsquoune autre compagnie drsquoassurance (le ldquoreacuteassureurrdquo) pour une partie des risques qursquoelle porte Il srsquoagit donc lagrave avant tout drsquoune activiteacute drsquoassurance Cependant si lrsquoassurance et la reacuteassurance partagent des caracteacuteristiques communes il existe de nombreuses diffeacuterences structurelles notamment en ce qui concerne lrsquoinformation sur les risques inheacuterents aux polices reacuteassureacutees De plus dans la mesure ougrave les opeacuterations de reacuteassurance impliquent de multiples acteurs lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation constitue un eacuteleacutement important agrave prendre en consideacuteration La gestion du risque traite cette asymeacutetrie de diverses maniegraveres que je propose de commenter en fonction du degreacute drsquoinformation disponible

PAr hAnsjoumlrG ALbreCher

Hansjoumlrg Albrecher a eacutetudieacute les matheacutematiques appliqueacutees et lrsquoastronomie agrave Graz Limerick et Baltimore avant de recevoir son doctorat de la Technische Universitaumlt Graz en 2001 Il a ensuite enseigneacute agrave Graz Leuven et Aarhus avant drsquoecirctre nommeacute directeur drsquoeacutequipe en matheacutematiques financiegraveres et directeur adjoint du Johann Radon Institute de lrsquoAcadeacutemie des Sciences de lrsquoAutriche agrave Linz et professeur de matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoassurance agrave la Universitaumlt Linz (JKU) En 2009 il a eacuteteacute nommeacute professeur des sciences actuarielles agrave HEC de lrsquoUniversiteacute de LausanneSes domaines de recherche incluent la theacuteorie du risque la modeacutelisation du risque dans lrsquoassurance et la reacuteassurance la modeacutelisation des catastrophes naturelles les matheacutematiques financiegraveres la simulation stochastique et plus geacuteneacuteralement les applications de la theacuteorie des probabiliteacutes Il a publieacute plus de 100 articles dans ces domaines et est co-auteur de deux ouvrages Ruin Probabilities (deuxiegraveme eacutedition 2010) et Quantitative Methods for Financial Markets (2013)Dr Albrecher est reacutedacteur au sein drsquoInsurance Mathematics and Economics depuis 2010 coreacutedacteur-en-chef du European Actuarial Journal et de la revue Statistics and Risk Modeling depuis 2011 Il siegravege au comiteacute de reacutedaction de plusieurs autres revues scientifiques et collections drsquoouvrages

les cahiers louis Bachelier 13

tifier on cherche la probabiliteacute pour que ces risques se reacutealisent en partant drsquoobservations du reacuteel en geacuteneacuteral de donneacutees historiques Pour chaque risque agrave eacutevaluer le problegraveme classique reacuteside dans la deacutetermination de la pertinence des donneacutees et de leur degreacute de perti-nence Une difficulteacute suppleacutementaire reacuteside dans le fait que la nature des risques peut eacutevoluer dans le temps et que pour appreacutehender cette eacutevolution lrsquoon doit pouvoir faire appel agrave des meacutethodes statistiques capables drsquoidentifier les eacuteleacutements non-stationnaires inclus dans les seacuteries de donneacutees et agrave des informations reacuteelles connexes dont on dispose (modifications des clauses contractuelles contexte environnemental etc)

De longues anneacutees drsquoexpeacuterience nous ont appris agrave qualifier les diffeacuterents types de risque et agrave tirer des re-lations causales entre eux Ainsi nous avons pu deacuteve-lopper les modegraveles qui servent de base agrave lrsquoeacutevaluation de risques associeacutes

Bien qursquoen geacuteneacuteral les modeacutelisateurs soient conscients des limites de la modeacutelisation la principale motiva-tion derriegravere cette approche est la conviction qursquoil est possible de quantifier preacuteciseacutement les risques et que toute imperfection ou lacune dans un modegravele reacutesulte de donneacutees insuffisantes ou plus geacuteneacuteralement drsquoinformations insuffisantes concernant la nature des risques et les relations entre eux On pourrait dire que le deacuteveloppement de modegraveles de risque par les assu-reurs constitue une tentative de reacuteduire lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation en geacuteneacuteral et de lrsquoinformation dispo-nible pour nous

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureacutes et AssureurQuand un assureacute et une compagnie drsquoassurance concluent un contrat au terme duquel lrsquoassureacute paie une prime (baseacutee sur un calcul deacuteterministe) contre des si-nistres speacutecifieacutes dans le contrat il est clair que chaque partie dispose drsquoinformations diffeacuterentes mais dans ce cas lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation existe des deux cocircteacutes En principe la compagnie drsquoassurance dispose de plus drsquoexpeacuterience des risques agrave assurer (modegraveles idoines) ce qui lui permet (en y rajoutant la mutualisation des risques) de geacuterer efficacement les risques agrave assurer bien que pour certains produits les assureacutes preacutefeacutereraient plus de transparence (voir par exemple [12])

Lrsquoassureacute quant agrave lui dispose dans la plupart des sec-teurs de beaucoup plus drsquoinformation concernant son profil de risque que ce qursquoil communique agrave

lrsquoassureur et il pourrait mecircme en influencer le reacutesul-tat par le biais de son comportement Un exemple en est lrsquoassurance maladie ougrave il existe une asymeacutetrie drsquoinformation intrinsegraveque concernant lrsquoeacutetat de santeacute de lrsquoassureacute (cf [22] et [19 21] pour des eacutetudes sur certains types drsquoassurance-vie) Aussi telle asymeacutetrie peut ecirctre la conseacutequence de nouvelles reacuteglementations (cf [23]) Le secteur de lrsquoassurance automobile a une longue pratique de reacuteduction de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation concernant le profil de risque des assureacutes via le systegraveme de bonus-malus qui a lrsquoavantage suppleacute-mentaire drsquoinciter les assureacutes agrave conduire prudemment La tendance actuelle est de pousser le dispositif plus loin encore avec la collecte drsquoinformations reacuteelles sur la conduite des assureacutes via des systegravemes teacuteleacutematiques embarqueacutes(cf [18 6]) Crsquoest une excellente illustra-tion de comment une quantiteacute importante de don-neacutees suppleacutementaires peut ecirctre et sera certainement utiliseacutee pour concevoir les futurs contrats drsquoassurance (une tendance parfois appeleacutee Le Big Data dans lrsquoAs-surance) Lrsquoexploitation des donneacutees inclut lrsquoanalyse approfondie des eacutecarts de comportement des assureacutes (cf [16 20]) et le deacuteveloppement drsquoapplications se servant de ces informations agrave des fins commerciales (cf [17])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et ReacuteassureurComme les assureurs nrsquoaiment pas partager des don-neacutees et statistiques concernant les sinistres dans le cas de nombreux contrats de reacuteassurance non proportion-nels lrsquoassureur ne communique au reacuteassureur qursquoune partie des donneacutees concerneacutees crsquoest-agrave-dire seulement les donneacutees sur les sinistres engageant ou pouvant en-gager la garantie Cette asymeacutetrie drsquoinformation laisse le reacuteassureur dans lrsquoobligation de creacuteer son modegravele preacutedictif avec des donneacutees censureacutees (cf [2]) En pra-tique les reacuteassureurs tentent de compleacuteter les donneacutees censureacutees avec des donneacutees collecteacutees agrave partir de porte-feuilles similaires (parfois obtenues gracircce agrave un contrat de reacuteassurance proportionnelle couvrant des risques similaires drsquoune mecircme importance) Les subtiliteacutes relatives agrave lrsquoeacutevaluation des risques et la deacutetermination des primes de reacuteassurance varient en fonction du type de contrat et la meacutethodologie choisie (meacutethode par expeacuterience vs meacutethode par exposition etc [1]) Une autre source drsquoasymeacutetrie drsquoinformation tient dans le fait que les sinistres passeacutes sont souvent comptabi-liseacutes agrave leur valeur ldquodrsquoengagementrdquo (ie la valeur des indemniteacutes reacuteellement verseacutees plus une estimation rai-sonnable des indemniteacutes restant agrave verser) et celle-ci peut srsquoaveacuterer significativement diffeacuterente de la valeur

14 les cahiers louis Bachelier

finale des indemniteacutes Dans des secteurs drsquoactiviteacute ougrave le regraveglement des sinistres peut prendre de nombreuses anneacutees on comprend facilement que les reacuteassureurs ne peuvent pas compter exclusivement sur les don-neacutees concernant le montant reacuteel final des indemniteacutes verseacutees mais doivent eacutegalement prendre en compte la valeur (estimeacutee) des engagements dans lrsquoeacutelaboration de leurs modegraveles Cette situation pose de reacuteels deacutefis statistiques et peu de recherche theacuteorique existe sur le sujet actuellement (cf [2])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et InvestisseurDes actionnaires actuels ou potentiels des socieacuteteacutes drsquoassurance fondent leurs deacutecisions drsquoinvestir sur les chiffres financiers et commerciaux et des indicateurs de performance mais en geacuteneacuteral ces chiffres ne tra-duisent pas lrsquointeacutegraliteacute de la structure de risque des assureurs et reacuteassureurs Compte tenu des Solvency Capital Requirements une socieacuteteacute doit tenir compte du coucirct de lever et conserver ce capital Ce coucirct aura un impact sur nombre de deacutecisions de strateacutegie et de gestion y compris la deacutecision de recourir agrave la reacuteassu-rance Le taux du coucirct du capital est influenceacute non seulement par le profil du risque mais eacutegalement par la structure de lrsquoinformation Par conseacutequence le taux du coucirct du capital est bien le reacutesultat de lrsquooffre et la de-mande sur le marcheacute mais tient eacutegalement compte de regravegles et directives en matiegravere de reporting financier telle la constitution de reacuteserves pour pertes et pour sinistres survenus mais non encore deacuteclareacutes Pour une discussion drsquoun point de vue actuariel voir [514]

Un autre domaine de recherche qui srsquointeacuteresse acti-vement aux aspects pratiques de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation est la titrisation des risques drsquoassurance en particulier celui de catastrophes naturelles et plus reacutecemment le risque de longeacuteviteacute La titrisation trans-fegravere le risque drsquoassurance aux marcheacutes des capitaux et constitue donc un instrument particuliegraverement utile lorsqursquoil srsquoagit de risques de grande ampleur ayant de fortes correacutelations ougrave les contrats de reacuteassurance tradi-tionnels ne sont pas eacuteconomiquement viables compte tenu du coucirct monumental des capitaux Lrsquohistoire des produits de titrisation illustre parfaitement comment lrsquoeacutevolution des attitudes envers lrsquoasymeacutetrie drsquoinforma-tion (dans ce cas preacutecis entre eacutemetteur et investisseur) a modifieacute les produits et leur attractiviteacute Des deacuteclen-cheurs anciens baseacutes sur lrsquoexpeacuterience effective de pertes des compagnies individuelles et des indices sectoriels ont eacutevolueacute vers des deacuteclencheurs parameacutetriques cal-culeacutes en tenant compte de quantiteacutes physiques lieacutees

aux catastrophes comme la vitesse du vent la pression atmospheacuterique etc Alors que les deacuteclencheurs para-meacutetriques diminuent lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation (qui dans le cas des deacuteclencheurs speacutecifiques agrave chaque en-treprise eacutetait significative) ils augmentent le risque de base crsquoest-agrave-dire le risque que le deacuteclencheur ne reflegravete pas lrsquoexpeacuterience reacuteelle de lrsquoeacutemetteur ce qui reacuteduit lrsquoef-ficaciteacute du produit pour lrsquoeacutemetteur Comme on pou-vait srsquoy attendre lrsquoactiviteacute de ce marcheacute a connu une certaine volatiliteacute dans le temps avec une forte aug-mentation des volumes dans des peacuteriodes ougrave le mar-cheacute traditionnel de la reacuteassurance ne pouvait pas faire face agrave ce type de demande (cf [9 11]) La valorisation de ces produits se situe agrave la frontiegravere entre assurance et finance Crsquoest eacutegalement un sujet de recherche tregraves inteacuteressant sur le plan theacuteorique (cf [7 15 4 8] et [10 24])

Asymeacutetrie drsquoinformation entre Assureurs et ConcurrentsEnfin comme dans toute activiteacute eacuteconomique il existe une concurrence entre assureurs pour un nombre li-miteacute de clients (assureacutes) et il existe eacutegalement une asy-meacutetrie drsquoinformation naturelle entre assureurs concur-rents concernant le profil du risque lrsquoappreacuteciation des conditions marcheacute lrsquoapproche meacutethodologique du risque et la deacutetermination des primes Parmi des approches reacutecentes on peut citer la deacutetermination des primes drsquoassurance via une analyse fondeacutee sur la theacuteo-rie des jeux tenant compte drsquoune preacutevision de la poli-tique des primes des concurrents des comportements agrave risque des assureacutes et des contraintes reacuteglementaires en matiegravere de fonds propres (voir [13]) le tout dans un contexte drsquoinformations incomplegravetes

Lrsquoobjectif de ce court chapitre eacutetait de mettre en lumiegravere plusieurs domaines de recherche dans les sciences actuarielles ougrave lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation joue directement ou indirec-tement un rocircle important Cette liste est forceacutement incomplegravete mais elle souligne lrsquoimportance de la modeacutelisation drsquoinforma-tion dans le secteur de lrsquoassurance et de la reacuteassurance qui est eacutegalement lrsquoobjet de tregraves nombreux projets de recherche en cours

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Page 2: Information en Finance et assurance

2 les cahiers louis Bachelier

Comment une information priveacutee impacte le comportement des joueurs

Drsquoapregraves un entretien avec Fabien Gensbittel

Modegravele de Kyle lrsquoimpact de lrsquoinformation sur le prix drsquoeacutequilibre

Drsquoapregraves un entretien avec Kerry Back

Lutter contre le deacutelit drsquoinitieacute gracircce agrave la modeacutelisation

Asymeacutetrie drsquoinformation et assurance

Drsquoapregraves un entretien avec Philip Protter

Drsquohansjoumlrg albrecher

Comment pallier au manque drsquoinformation gracircce au filtrage

Drsquoapregraves un entretien avec Thorsten schmidt

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Avec le concours de

FAbien GensbittelKerry bAcKPhiliP Protterthorsten schmidthAnsjoumlrG Albrecher

Ndeg20Feacutevrier 2016

InformatIon en fInance et assurance

Sommaire

les cahiers louis BachelierNdeg20 - feacutevrier 2016

4

6

8

10

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les cahiers louis Bachelier 3

eacutedito

information en Finance et assurance

la quantification des risques financiers ainsi que lrsquoeacutelaboration de strateacutegies destineacutees agrave les couvrir deacutependent fortement de la perception du risque par un investisseur donneacute ou plus preacuteciseacutement de lrsquoinformation dont il dispose pour lrsquoeacutevaluer lrsquoinformation repreacutesente ainsi un eacuteleacutement cleacute de la modeacutelisation financiegravere Dans la plupart des modegraveles financiers lrsquoaccent est mis sur le choix de la mesure de pricing le marcheacute est supposeacute choisir cette mesure dans un contexte de marcheacute incomplet de faccedilon agrave ne pas geacuteneacuterer des arbitrages et lrsquoinformation est supposeacutee commune et donneacutee agrave lrsquoavance

Peu drsquoeacutetudes ont eacuteteacute conduites pour eacutetudier lrsquoinfluence de lrsquoinformation sur lrsquoeacutevaluation des produits financiers lors de la crise financiegravere il a eacuteteacute mis en eacutevidence que la faillite de grosses compagnies avait un impact important sur les compagnies dont on estimait qursquoelles nrsquoeacutetaient pas ou peu correacuteleacutees agrave lrsquoentreprise faisant deacutefaut et que lrsquoinformation lieacutee agrave ce deacutefaut devait impeacuterativement ecirctre prise en compte il srsquoagit donc bien drsquoune modeacutelisation de lrsquoinformation permettant drsquoatteindre une modeacutelisation drsquoune deacutependance un eacuteveacutenement extrecircme de faible probabiliteacute peut impacter la modeacutelisation avant et apregraves sa venue et lrsquoinformation lieacutee agrave cet eacuteveacutenement est un eacuteleacutement important de la compreacutehension de la dynamique des prix Mettre en valeur ces relations est un enjeu complexe

le semestre theacutematique ldquoinformation en Finance et assurancerdquo fut lrsquooccasion drsquoeacutechanges et de collaborations scientifiques entre chercheurs de diffeacuterents domaines (matheacutematiques financiegraveres eacuteconomie assurance) travaillant sur le sujet il srsquoest articuleacute autour des 5 thegravemes suivants dont les principales contributions sont illustreacutees dans le preacutesent cahier

bull information partielle modeacuteliser via des techniques de filtrage lrsquoimpact drsquoune drsquoinformation incomplegravetebull information priveacutee comprendre comment la connaissance drsquoune information privileacutegieacutee modifie le

comportement drsquoun agentbull Theacuteorie des jeux comprendre comment la connaissance drsquoune information privileacutegieacutee modifie les

interactions possibles entre les agentsbull information asymeacutetrique et assurance confronter les points de vue financiers eacuteconomiques et actuariels

pour mieux identifier les risques de modegravele tant au niveau du choix du modegravele utiliseacute que du choix des informations accessibles

bull Modegraveles drsquoeacutequilibre Kyle et Back eacutetudier lrsquoexistence drsquoeacutequilibres financiers lorsque les agents ont des informations diffeacuterentes qui peuvent ecirctre des informations priveacutees ou partielles

Bonne lecture

Caroline Hillairet et Monique Jeanblanc organisatrices du semestre theacutematique ldquoInformation en Finance et Assurancerdquo

Plus drsquoinformation sur httpwwwinformationinfinanceandinsuranceorg

Monique Jeanblanc

Caroline Hillairet

ParTeNaires

4 les cahiers louis Bachelier

les agents eacuteconomiques ne disposent pas tous du mecircme niveau drsquoinformation les coucircts drsquoinvestissement drsquoune entre-prise par exemple sont connus de cette derniegravere mais pas de ses concurrents De mecircme un employeur ne peut observer en permanence ses salarieacutes il ne connaicirct donc pas parfaitement le niveau drsquoeffort de chaque em-ployeacute srsquoil souhaite creacuteer une in-citation sa seule possibiliteacute est de conditionner le salaire verseacute au reacutesultat

en formalisant les interac-tions entre les agents (appe-leacutes joueurs) les modegraveles de la theacuteorie des jeux cherchent agrave deacutefinir les eacutequilibres dans ce contexte de problegraveme drsquoinfor-mation autrement dit ils visent agrave deacuteterminer la ou les strateacutegies qui permettent de satisfaire au mieux lrsquoensemble des joueurs ces derniers sont en effet strateacute-giques ils cherchent agrave optimiser un certain critegravere (geacuteneacuteralement leur paiement ou utiliteacute espeacutereacutes) et rationnels ils ont la capaciteacute

de reacutesoudre un problegraveme drsquoopti-misation complexe

quelle valeur pour une information priveacutee

lrsquoeacutetude des eacutequilibres dans ces modegraveles est deacutelicate et sou-legraveve plusieurs questions drsquointeacute-recirct pour la recherche Plusieurs drsquoentre elles ont eacuteteacute abordeacutees lors du semestre theacutematique ldquoinformation en Finance et assurancerdquo comme la valeur drsquoune information priveacutee ou lrsquouti-lisation strateacutegique de celle-ci

Jeacuterocircme renault a ainsi eacutetudieacute la valeur drsquoune information pri-veacutee dans un jeu agrave somme nulle crsquoest-agrave-dire un jeu ougrave les inteacute-

comment une information priveacutee impacte le comportement des joueurs

recircts des joueurs sont totalement opposeacutes en situation drsquoinfor-mation incomplegravete la valeur de cette information correspond au paiement optimal que peut se garantir le joueur a dans le jeu cette approche permet drsquoordon-ner diffeacuterentes structures drsquoinfor-mation en fonction de leur qua-liteacute (ou valeur) du point de vue du joueur a mais aussi de les diffeacuterencier de maniegravere quanti-tative crsquoest-agrave-dire de mesurer lrsquoeffet preacutecis drsquoune variation de la structure drsquoinformation sur la valeur du jeu

bluffer pour optimiser son information

au-delagrave de la valeur intrinsegraveque de lrsquoinformation de nombreux travaux srsquointeacuteressent agrave la maniegravere optimale de lrsquoutiliser lrsquoobjectif pour le joueur est de controcircler la maniegravere dont son information est reacuteveacuteleacutee au marcheacute afin de maxi-miser son profit il a donc tout inteacuterecirct agrave ldquoblufferrdquo de maniegravere agrave cacher son information Par exemple si un joueur connaicirct la

Lrsquoobjectif pour le joueur est de controcircler la maniegravere dont son information est reacuteveacuteleacutee

un joueur beacuteneacuteficiant drsquoune information priveacutee a inteacuterecirct agrave ldquoblufferrdquo pour ne pas deacutevoiler son infor-mation aux autres joueurs

il introduit alors un aleacutea dans ses prises de deacutecision

Lrsquoutilisation strateacutegique de lrsquoinformation a des conseacutequences sur le marcheacute que ce soit sur les fluctuations des prix ou sur lrsquoeacutevaluation des actifs

drsquoapregraves un texte de Fabien Gensbittel et les articles citeacutes en reacutefeacuterence

de nombreux travaux acadeacutemiques analysent lrsquoimpact des deacuteseacutequilibres drsquoinformation sur le marcheacute en se basant sur la theacuteorie des jeux ils abordent notamment la question de lrsquoutilisation strateacutegique drsquoune information priveacutee

a retenir

les cahiers louis Bachelier 5

Fabien Gensbittel est maicirctre de confeacuterences en matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoUniversiteacute Toulouse 1 au sein de Toulouse School of Economics depuis sep-tembre 2011 apregraves une thegravese en matheacutematiques agrave lrsquoUniversiteacute Paris 1 obtenue en 2010 Ses travaux de recherche sont centreacutes sur les aspects matheacutematiques de la theacuteorie des jeux et en particulier sur les problegravemes drsquoinformation dans les jeux dynamiques

valeur drsquoune variable X (disons 0 ou 1) qui est positivement cor-reacuteleacutee agrave la qualiteacute drsquoun projet ris-queacute et deacutecide drsquoinvestir dans le projet agrave la premiegravere eacutetape du jeu uniquement si X = 1 lrsquoobserva-tion de son comportement reacutevegravele compleacutetement son information introduire un aleacutea dans la deacuteci-sion drsquoinvestir (par exemple investir avec probabiliteacute 34 si X = 1 et 14 si X = 0) permet de brouiller les cartes et autorise une plus grande marge de ma-nœuvre

lrsquoutilisation strateacutegique des informations priveacutees nrsquoest pas sans conseacutequence pour le mar-cheacute Bernard de Meyer montre ainsi comment ces strateacutegies expliquent en partie les fluc-tuations des prix il considegravere un marcheacute composeacute de deux agents un agent de taille impor-tante qui beacuteneacuteficie drsquoun accegraves privileacutegieacute agrave lrsquoinformation et un acteur plus petit moins bien in-formeacute lrsquoagent principal sait que son comportement est observeacute il va donc instaurer une strateacutegie afin de dissimuler son informa-tion priveacutee et introduire un aleacutea dans ses actions les eacutevolutions du prix sont donc expliqueacutees par le comportement optimal du joueur informeacute et non comme la conseacutequence de chocs aleacutea-toires indeacutependants

Mecircme srsquoil est extrecircmement sim-plifieacute ce modegravele a lrsquointeacuterecirct de prouver lrsquoimpact de lrsquoinformation sur les prix et de proposer une meacutethode drsquoeacutevaluation drsquoactifs baseacutee sur ce constat

evaluer des options avec une information asymeacutetrique

les problegravemes drsquoinformation ont eacutegalement un impact sur lrsquoeacuteva-

luation des actifs et notamment des options Fabien Gensbittel a ainsi eacutetudieacute lrsquoeacutevaluation des op-tions dites israeacuteliennes agrave savoir des options ougrave lrsquoeacutemetteur peut se reacutetracter agrave tout moment sous reacute-serve de verser une indemniteacute agrave lrsquoacheteur il srsquoagit lagrave encore drsquoun jeu agrave somme nulle puisqursquoeacutemet-teur et acheteur ont des inteacuterecircts opposeacutes les deacutecisions des deux parties se reacuteduisent agrave un temps drsquoarrecirct temps drsquoannu-lation pour lrsquoeacutemetteur temps drsquoexercice pour lrsquoacheteur il est assez naturel dans ce type de problegraveme de consideacuterer que lrsquoin-formation sur la qualiteacute de lrsquoactif sous-jacent est asymeacutetrique et lagrave encore les strateacutegies opti-males prescrivent drsquointroduire un aleacutea dans la prise de deacutecision et non plus drsquoexercer au-delagrave drsquoun certain seuil deacutetermineacute comme crsquoest souvent le cas dans les problegravemes drsquoarrecirct agrave information complegravete concregravetement en lrsquoabsence de problegraveme drsquoinfor-mation lrsquoeacutemetteur retire son offre au-delagrave drsquoun certain seuil de prix connu et fixeacute lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation pousse les acteurs agrave bluffer lrsquoeacutemetteur ne srsquoarrecirc-tera pas agrave un seuil de prix fixe mais agrave un ldquoseuil aleacuteatoirerdquo

jeux agrave somme non-nulle agrave information incomplegravete

les probleacutematiques drsquoinforma-tion incomplegravete existent eacutega-lement dans les jeux agrave somme non-nulle autrement dit les jeux ougrave les inteacuterecircts des joueurs ne sont pas forceacutement opposeacutes

Dans ce cas une forme de coo-peacuteration entre les joueurs est possible comment dans ce contexte lrsquoinformation priveacutee est-elle utiliseacutee un reacutesultat clas-sique est lrsquoexistence drsquoeacutequilibres

appeleacutes plan-joints qui srsquoappa-rentent agrave des contrats entre les deux joueurs ougrave lrsquoinformation pri-veacutee nrsquoest utiliseacutee qursquoune fois au deacutebut du jeu

ce type drsquoeacutequilibre fonctionne en quelque sorte sur le prin-cipe de la menace Des regravegles sont deacutefinies au deacutebut du jeu si un joueur ne les respecte pas il sera peacutenaliseacute par les autres joueurs tout au long du jeu

Neacuteanmoins les eacutequilibres plan-joint ne repreacutesentent qursquoune par-tie des eacutequilibres car on peut construire des exemples de nature diffeacuterente ougrave lrsquoinformation est reacuteveacuteleacutee petit agrave petit tout au long du jeu

Fabien Gensbittel

bibliographie

B De Meyer and G Four-nier (2015 ) Price dynamics on a risk averse market with asymmetric information httpshalshsarchives-ou-vertesfrhalshs-01169563

F Gensbittel and cGruumln (2015) Zero-sum stopping games with asymmetric information httparxivorgabs14121412

F Forges (1992) repea-ted games of incomplete information non-zero-sum in r aumann and s hart handbook of Game Theory with economic applica-tions chapter 6

retrouvez lrsquoarticle inteacutegral

de Fabien Gensbittel sur

wwwinformationinfinanceandinsuranceorg

6 les cahiers louis Bachelier

la question du prix drsquoeacutequilibre est fondamentale en eacuteconomie et de nombreux travaux tentent de la formaliser le modegravele de Kyle srsquoinscrit dans cette probleacute-matique en faisant le lien entre la formation du prix eacutetabli par lrsquooffre et la demande et lrsquoinformation dont disposent les agents Tous ne sont pas en possession des mecircmes eacuteleacutements un investisseur local par exemple connaicirctra a priori mieux le marcheacute qursquoun in-vestisseur eacutetrangercomment lrsquoinformation dispo-nible ou les diffeacuterences de niveau drsquoinformation entre les agents peuvent-elles influer sur lrsquoactiviteacute des marcheacutes finan-ciers comment cette infor-mation est-elle inteacutegreacutee dans le prix Quels sont les beacuteneacutefices retireacutes drsquoune information privileacute-gieacutee le prix drsquoeacutequilibre en est-il modifieacute Telles sont quelques-unes des questions auxquelles srsquoattache la theacuteorie de Kyle qui modeacutelise lrsquoimpact de lrsquoinformation sur la liquiditeacute et le prix drsquoun actif

un agent privileacutegieacute et strateacutegique

Kyle considegravere un marcheacute sur lequel est vendu un actif risqueacute Trois types drsquoagents interviennent dans les eacutechanges un trader ldquoprivileacutegieacuterdquo des liquidity traders et un market maker

le trader ldquoprivileacutegieacuterdquo beacuteneacuteficie drsquoune information priveacutee sur la va-leur de lrsquoactif il connaicirct sa valeur agrave la date T1 et donc le prix de vente ou drsquoachat potentiel agrave cette date lrsquoagent informeacute est strateacutegique et cherche agrave maximiser le profit qursquoil peut tirer de son information il prend donc en consideacuteration lrsquoimpact de son ordre sur le prix

Modegravele de Kyle lrsquoimpact de lrsquoinformation sur le prix drsquoeacutequilibre

Certains investisseurs beacuteneacuteficient drsquoinformations privileacutegieacutees leur permettant de mieux eacutevaluer la valeur drsquoun actif Comment cette information influence-t-elle lrsquoeacutequilibre du marcheacute quels avantages offre-t-elle Le modegravele de Kyle fournit des eacuteleacutements de reacuteponse

du marcheacute et effectue ses tran-sactions de sorte agrave ce que son information soit reacuteveacuteleacutee au mar-cheacute le plus tardivement possible il ne vendra pas par exemple lrsquoensemble de ses titres en une seule opeacuteration afin drsquoeacuteviter une chute des cours Toutefois via ses transactions agrave lrsquoachat ou agrave la vente il fournit neacutecessairement un signal au marcheacute une partie de son information eacutetant transmise au prix de lrsquoactif

De leur cocircteacute les liquidity traders ne disposent pas drsquoinformation sur la valeur de lrsquoactif ils fournissent de la liquiditeacute en participant aux eacutechanges mais ne donnent pas de signal au marcheacute et nrsquoont donc pas drsquoimpact sur le prix

enfin le market maker observe les flux de transaction sans dis-tinguer la demande du trader informeacute de celle des liquidity tra-ders il fixe le prix en fonction de la demande globale de lrsquoactif agrave lrsquoinstant T et de lrsquoestimation de sa

Le modegravele de Kyle modeacutelise lrsquoimpact de lrsquoinformation sur la liquiditeacute et le prix drsquoun actif

il permet de calculer agrave partir drsquoun prix agrave lrsquoinstant t lrsquoeacutevolution du prix drsquoeacutequilibre au cours du temps

il montre eacutegalement qursquoune information privileacutegieacutee a drsquoautant plus de valeur lorsque le marcheacute est liquide ou bruiteacute Le profit srsquoaccroicirct eacutegalement lorsque la variance du prix agrave lrsquoinstant t est forte

drsquoapregraves un texte de Kerry back et les articles citeacutes en bibliographie

Plus le marcheacute est liquide plus le profit de lrsquoagent informeacute est important

a retenir

les cahiers louis Bachelier 7

Kerry Back est professeur titulaire de la chaire de Finance J Howard Creekmore agrave la Jones Graduate School of Business et professeur drsquoEacuteconomie agrave la faculteacute de Sciences Sociales de Rice University ougrave il enseigne la theacuteorie de valorisation drsquoactifs Il a eacutegalement enseigneacute agrave Northwestern University Indiana University Washington University in St Louis et Texas AampM University A Washington University in St Louis il a occupeacute le poste de Doyen des Affaires Acadeacutemiques de la Olin School of Business et a reccedilu le titre de ldquoMembre Eacuteminent du corps

professoralrdquo Il a eacuteteacute reacutecompenseacute par plusieurs prix de recherche agrave Texas AampM et agrave Rice University Ses domaines de recherche comprennent les investissements et lrsquoorganisation des marcheacutes Il a eacuteteacute reacutedacteur de la Review of Financial Studies coreacutedacteur de Finance amp Stochastics et reacutedacteur adjoint du Journal of Finance et drsquoautres revues

rentabiliteacute espeacutereacutee il nrsquoy a pas de saut juste avant lrsquoannonce du prix le marcheacute incorpore correcte-ment lrsquoinformation et la formation du prix est juste

deacuteterminer le prix drsquoeacutequilibre

le modegravele de Kyle se distingue ainsi du modegravele de Merton lrsquoune des reacutefeacuterences des modegraveles drsquoeacutequilibre de marcheacute qui lui fait lrsquohypothegravese drsquoune symeacutetrie drsquoin-formation le premier considegravere des agents neutres vis-agrave-vis du risque et ayant un impact sur le marcheacute Drsquoougrave la volonteacute de lrsquoagent informeacute de mener ses transac-tions ldquoen douceurrdquo le second au contraire considegravere des agents averses au risque nrsquoayant aucun impact sur le prix

lrsquoobjectif du modegravele de Kyle est de deacuteterminer comment lrsquoinforma-tion de lrsquoagent privileacutegieacute se trans-met au prix et de deacutefinir ainsi le prix drsquoeacutequilibre V le prix V1 de lrsquoactif agrave lrsquoinstant T1 est en effet connu a partir de cette informa-tion comment estimer le prix V au fil du temps le modegravele montre que lorsque le prix V1 suit une loi dite gaussienne (dont la dis-tribution est donc uniquement deacutetermineacutee par la moyenne et la

le modegravele de Kyle est un modegravele drsquoeacutequilibre ougrave un agent neutre au risque et informeacute crsquoest-agrave-dire qursquoil connaicirct le prix agrave la date terminale exploite cette information afin de maximiser son profit espeacutereacute Par contre le market maker qui fixe le prix de marcheacute dispose de moins drsquoinformation et en particulier ne peut pas observer lrsquoaction de lrsquoagent informeacute car elle est bruiteacutee par les liquidity traders en utilisant des outils de controcircle stochastique et du filtrage on eacutetudie lrsquoeffet de lrsquoinformation sur les prix drsquoeacutequilibre

meacutethodologie

variance) la formule est explicite et facilement calculable

une information plus ou moins valoriseacutee

le modegravele fournit eacutegalement un eacuteclairage sur les beacuteneacutefices ap-porteacutes par lrsquoinformation priveacutee ces derniers peuvent ainsi ecirctre renforceacutes par plusieurs eacuteleacutements

Tout drsquoabord le profit de lrsquoagent informeacute est drsquoautant plus grand que le marcheacute est liquide autre-ment dit plus le marcheacute integravegre rapidement lrsquoinformation plus celle-ci est beacuteneacutefique au trader privileacutegieacute son profit srsquoaccroicirct eacutega-lement avec le bruit du marcheacute Plus le bruit est important plus lrsquoinformation priveacutee sera deacutevoileacutee tardivement au marcheacute et plus lrsquoagent pourra en tirer profit

enfin plus la variance du prix V1 est forte plus les valeurs pro-bables du prix drsquoeacutequilibre V sont larges il est alors plus difficile pour les traders non informeacutes de faire une juste estimation de V le gain pour lrsquoagent privileacutegieacute est donc plus fort

le modegravele de Kyle connaicirct de nombreuses extensions il existe

ainsi des formules qui integravegrent plusieurs agents informeacutes ou un agent informeacute mais ne connais-sant pas exactement le prix V1 Drsquoautres considegraverent un prix V1 qui ne suit pas une loi gaussienne ou encore un marcheacute composeacute drsquoun actif risqueacute ainsi que drsquoun deacuteriveacute Quelles que soient les variations le modegravele de Kyle constitue en tout cas une avanceacutee dans la compreacutehension du rocircle de lrsquoinfor-mation sur les marcheacutes et sur la formation du prix drsquoeacutequilibre

Kerry back

bibliographie

Back K 1992 insider tra-ding in continuous time review of Financial studies 5 387-409

Kyle as 1985 conti-nuous auctions and insider trading econometrica 53 1315-1336

retrouvez lrsquoarticle inteacutegral

de Kerry back sur

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8 les cahiers louis Bachelier

la sec (securities and exchange commission) lrsquoorganisme feacutedeacuteral ameacutericain de regraveglementation et de controcircle des marcheacutes finan-ciers deacutefinit le deacutelit drsquoinitieacute comme ldquole fait drsquoacheter ou de vendre un titre ou une valeur en violation des obligations fiduciaires etou de confiance tandis que lrsquoon dispose drsquoinformations confidentielles non-publiques concernant ladite valeur le deacutelit drsquoinitieacute peut aussi englober le fait de divulguer des informations confidentielles agrave un tiers le fait pour le tiers de neacutego-cier des titres objets desdites informations confidentielles ainsi que le neacutegoce de titres par toute personne qui deacutetournerait de telles informations agrave son profitrdquo

si ces contours sont clairs le deacutelit drsquoinitieacute demeure difficile agrave prouver et donc agrave sanctionner la modeacuteli-sation matheacutematique pourrait-elle permettre de mieux cerner le com-portement des fraudeurs et ainsi de mieux les deacutetecter Plusieurs travaux de recherche ont eacuteteacute me-neacutes sur ce sujet

Pas de profit sans risque

le processus de modeacutelisation re-pose en effet sur la notion drsquoinfor-mation on peut ainsi consideacuterer qursquoune collection drsquoeacuteveacutenements appeleacutee Ft repreacutesente lrsquoensemble des informations publiques concernant le marcheacute financier et disponibles agrave un moment t un initieacute possegravede par deacutefinition une information priveacutee sur un eacuteveacute-nement ne faisant pas partie de cet ensemble il peut srsquoagir par exemple drsquoun investisseur qui a connaissance de lrsquoavanceacutee des tests cliniques drsquoun nouveau meacute-dicament sa collection drsquoeacuteveacutene-ments observables devient alors plus grande que la collection de reacutefeacuterence Ft

lutter contre le deacutelit drsquoinitieacute gracircce agrave la modeacutelisation

Traditionnellement les modegraveles sont construits sur la notion drsquoab-sence drsquoarbitrage autrement dit ils considegraverent qursquoil est impossible de reacutealiser des profits sans assu-mer une part de risque le risque nul nrsquoexiste pas Mais il arrive qursquoune information priveacutee puisse creacuteer des opportuniteacutes drsquoarbi-trage ou du moins des situations tregraves proches de lrsquoarbitrage en lrsquooccurrence si un investisseur sait agrave lrsquoavance qursquoune compagnie va mettre sur le marcheacute un nouveau meacutedicament ses chances de reacutealiser une plus-value sont tregraves fortes et son risque faiblehellip

tirer profit drsquoune information priveacutee

lrsquoinitieacute peut ainsi tirer avantage de son information de plusieurs ma-niegraveres Dans lrsquoexemple preacutesenteacute la solution la plus simple est eacutevidem-ment drsquoacheter ou de vendre des actions de la compagnie pharma-ceutique selon les reacutesultats du test Mais lrsquoinformation peut aussi gui-der lrsquoachat de produits deacuteriveacutes ou

Un agent initieacute peut reacutealiser des profits sans prendre de risque ou presque

un agent initieacute possegravede une collection drsquoinformations plus grande que celle des autres agents Cette information suppleacutementaire change sa perception du marcheacute et son eacutevaluation du prix drsquoun actif

Le modegravele preacutesenteacute permet drsquooptimiser lrsquoutilisation de cette information priveacutee en analysant les deacuteviations des cours par rapport agrave une valeur de reacutefeacuterence il permet agrave lrsquoagent de savoir si un titre est sous ou sur eacutevalueacute

Le modegravele est eacutegalement utile au reacutegulateur pour mieux cerner le comportement des initieacutes et donc mieux lutter contre ces pratiques

drsquoapregraves un texte de Philip Protter et les articles citeacutes en bibliographie

Gracircce agrave une information priveacutee un agent peut reacutealiser drsquoimportants profits pour un minimum de risque en permettant de mieux comprendre lrsquoutilisation de cette information la modeacutelisation aide agrave lutter contre les deacutelits drsquoinitieacutes

a retenir

les cahiers louis Bachelier 9

Philip Protter est Fellow du IMS (Center for Intelligent Management Systems) reacute-dacteur adjoint de neuf revues scientifiques membre de deux comiteacutes de reacutedaction et a eacuteteacute reacutedacteur en chef de la revue Stochastic Processes and their Applications Ses principaux domaines de recherche comprennent les matheacutematiques finan-ciegraveres (modegraveles de valorisation drsquoactifs modegraveles de valorisation et de couver-ture de deacuteriveacutes problegravemes de liquiditeacute bulles financiegraveres deacutelits drsquoinitieacute trading agrave haute freacutequence risque de creacutedit) la theacuteorie de lrsquointeacutegrale stochastique la theacuteorie des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques les meacutethodes de reacutesolution

numeacuterique des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques la discreacutetisation de processus stochastiques (en tant que branche de la statistique matheacutematique) eacutequations diffeacuterentielles stochastiques et ldquoeacutequations diffeacuterentielles stochastiques retrogradesrdquo les processus de Markov et la theacuteorie du filtrage Il est lrsquoau-teur et co-auteur de deux manuels acadeacutemiques et de deux ouvrages scientifiques

drsquooptions ces derniegraveres donnent le droit drsquoacheter ou de vendre un titre dans le futur agrave un prix fixeacute Bien utiliseacutee une option peut ainsi geacuteneacuterer drsquoimportants profits pour un investissement modeste et ce sur une courte peacuteriode

les informations suppleacutementaires ont en effet un impact sur lrsquoesti-mation du prix drsquoun actif un agent eacutevalue les flux futurs drsquoun actif via la collection drsquoinformations dispo-nibles si sa collection devient plus grande sa perception du marcheacute est modifieacutee lrsquoestimation du prix eacutevolue ainsi que lrsquoeacutevaluation de la probabiliteacute drsquoun eacuteveacutenement comme la survenance drsquoune faillite par exemple

deacutetecter une valeur hors norme

lrsquoauteur eacutetudie ainsi un modegravele qui calcule la ldquojuste valeurrdquo drsquoun actif et ses proprieacuteteacutes (variance eacutecart-type etc) en prenant compte de lrsquoinformation disponible modeacuteliseacutee pour un agent initieacute par un grossis-sement de filtration il est ainsi pos-sible drsquoanalyser les deacuteviations des cours par rapport agrave cette valeur la filtration modeacutelise ici lrsquoinforma-tion de lrsquoinitieacute et permet de montrer comment tirer profit drsquoune infor-mation privileacutegieacutee lrsquoagent est en mesure de savoir si une option est

sous ou sur eacutevalueacutee il ajuste ses investissements en conseacutequence augmentant de ce fait consideacutera-blement ses probabiliteacutes de pro-fits le modegravele permet eacutegalement de quantifier lrsquoavantage obtenu par lrsquoinitieacute gracircce agrave son information privileacutegieacutee

Toutefois comprendre via une analyse matheacutematique comment certains utilisent une information priveacutee peut aider le reacutegulateur agrave deacutetecter les deacutelits drsquoinitieacute et agrave poursuivre les contrevenants en effet en eacutevaluant la valeur normale de lrsquoactif le modegravele quantifie en quelque sorte un niveau drsquoalerte si une transaction srsquoeffectue agrave un prix trop eacuteloigneacute de la valeur nor-male elle peut ecirctre le fruit drsquoun deacutelit drsquoinitieacute

or lutter contre les deacutelits drsquoinitieacute est primordial pour garantir la flui-diteacute des transactions financiegraveres le marcheacute doit apparaicirctre comme juste Dans le cas contraire srsquoil est perccedilu comme deacutefaillant ou cor-rompu peu drsquoinvestisseurs accep-teront de participer aux eacutechanges les agents perdront confiance et la liquiditeacute sera reacuteduite le rocircle de lrsquoetat est donc de garantir le bon fonctionnement du marcheacute en reacute-duisant lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation et en luttant contre les deacutelits drsquoinitieacute

Philip Protter

lrsquoinformation publique disponible au cours du temps sur le marcheacute est repreacutesenteacutee par une filtration lrsquoinformation drsquoun initieacute qui possegravede une information privileacutegieacutee est ainsi modeacuteliseacutee par un grossissement de cette filtration du marcheacute ceci entraicircne une eacutevaluation des probabiliteacutes drsquooccurrence drsquoeacuteveacutenements diffeacuterentes pour un initieacute par rapport agrave un investisseur standard en particulier sa mesure drsquoeacutevaluation (appeleacute mesure risque neutre) des actifs en est modifieacutee

meacutethodologie

bibliographie

roseline Bilina Falafala amp Philip Protter insider Tra-ding and risk preprint 2015

claudio Fontana Monique Jeanblanc amp shiqi song on arbitrages arising with honest times Finance and stochastics July 2014 Vo-lume 18 issue 3 515-543

Younes Kchia amp Philip Prot-ter on Progressive Filtration expansions with a Process applications to insider Tra-ding international journal of theoretical and applied finance- river edge NJ [ua] World scientific issN 0219-0249 ZDB-iD 14289829 - Vol 182015 4 p 1-48

retrouvez lrsquoarticle inteacutegral

de Philip Protter sur

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10 les cahiers louis Bachelier

appareils connecteacutes GPs sys-tegravemes de monitoring meacutedicaux robots mobiles ces technolo-gies se creacuteent une place dans nos quotidiens et leur utilisation devrait ecirctre encore renforceacutee par la numeacuterisation en cours or tous ces objets ont un point commun ils fonctionnent de faccedilon dyna-mique avec une eacutemission de signal qui eacutevolue continuellement au cours du temps la preacutediction du signal est ainsi plus complexe et neacutecessite des outils matheacutema-tiques adapteacutes

la technique du filtrage reacutepond agrave cette probleacutematique Thorsten schmidt professeur agrave lrsquouniver-siteacute de Fribourg fait le point sur cette meacutethodologie aux multiples applications qursquoest-ce qursquoun problegraveme de filtrage comment cette technique srsquoest-elle deacuteve-loppeacutee Quelles solutions peut-elle apporter

contrairement agrave la statistique classique le filtrage vise agrave eacutevaluer

un signal dynamique dont lrsquoobser-vation est perturbeacutee par un bruit comment calculer une estima-tion juste malgreacute une observation bruiteacutee il srsquoagit par exemple de deacutefinir la position drsquoun robot qui se deacuteplace au cours du temps le robot nrsquoest pas dans le champ de vision de son proprieacutetaire il nrsquoest donc pas directement ob-servable Toutefois le proprieacutetaire dispose des donneacutees GPs qui correspondent ici agrave une observa-tion bruiteacutee le but est drsquooptimiser les informations fournies par le GPs afin de calculer la position du robot au cours du temps

comment pallier au manque drsquoinformation gracircce au filtrage

Approche de la statistique moderne le filtrage permet de reacutesoudre de nombreuses probleacutematiques drsquoinformation imparfaite que ce soit dans le cadre des objets connecteacutes de la navigation satellite ou du calcul de risque en finance ses applications sont multiples

Le filtre de Kalman

la theacuteorie du filtrage est neacutee dans les anneacutees 40 sous lrsquoimpul-sion drsquoandrey N Kolmogorov et Norbert Wiener le premier a eacutetu-dieacute la probleacutematique en temps discret tandis que le second lrsquoa abordeacute en temps continu il a en-suite fallu attendre les anneacutees 60 pour connaitre de nouvelles avan-ceacutees avec rudolf e Kalman

lrsquoapproche de Kalman fait office de reacutefeacuterence en matiegravere de fil-trage en se basant sur les lois gaussiennes le modegravele eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal lrsquoinformation corres-pond aux observations bruiteacutees prix donneacutees etc lrsquoavantage principal de cette meacutethode est de donner une formule explicite pour calculer le signal simplifiant ainsi fortement le proceacutedeacute

lrsquoune des utilisations les plus ceacutelegravebres et les plus anciennes du filtre de Kalman remonte agrave la

drsquoapregraves un texte de thorsten schmidt et les articles citeacutes en reacutefeacuterence

Lrsquoavantage principal de la meacutethode de Kalman est de donner une formule explicite et de faible dimension

Le filtrage vise agrave eacutevaluer un signal dynamique dont lrsquoobservation est bruiteacutee

Le modegravele de Kalman eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal il fournit une for-mule explicite et de faible dimension pour calculer le signal simplifiant ainsi le proceacutedeacute

Pour les cas non lineacuteaires des meacutethodes numeacuteriques peuvent ecirctre utiliseacutees

Le filtrage recouvre un large champ drsquoapplication que ce soit en finance dans lrsquoindustrie eacutelectro-nique la robotique ou encore le secteur meacutedical

a retenir

les cahiers louis Bachelier 11

Thorsten Schmidt est professeur de matheacutematiques stochastiques agrave lrsquoUniversiteacute de Fribourg (Allemagne) ougrave il a succeacutedeacute agrave Ernst Eberlein Auparavant il a ensei-gneacute les matheacutematiques financiegraveres agrave lrsquoUniversiteacute de technologie de Chemnitz

Outre son inteacuterecirct pour les matheacutematiques financiegraveres et plus particuliegraverement pour les taux drsquointeacuterecirct les marcheacutes du risque de creacutedit et de lrsquoeacutenergie il a une so-lide expertise en statistique et probabiliteacute Il a reacutecemment co-eacutecrit un ouvrage sur la statistique matheacutematique publieacute chez Springer Sa recherche dans le domaine

du risque de creacutedit porte sur lrsquoimpact de lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation le filtrage non-lineacuteaire les modegraveles drsquoanalyse de risques dynamiques Heath-Jarrow-Morton et les processus affineacutes

mission apollo le modegravele a eacuteteacute utiliseacute pour preacuteparer le voyage de Neil amstrong vers la lune ainsi que son retour notamment pour deacuteterminer agrave quel moment preacutecis la fuseacutee devait rentrer dans lrsquoat-mosphegravere1 il est aujourdrsquohui uti-liseacute dans la plupart des outils de navigation satellite tout comme dans les smartphones ou les jeux videacuteo

le filtre de Kalman ne peut tou-tefois ecirctre employeacute que pour les cas lineacuteaires certains auteurs ont ainsi eacutetendu le cadre lineacuteaire en utilisant des approximations au niveau local

La meacutethode particulaire de filtrage

enfin des meacutethodes numeacuteriques ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees pour les pro-bleacutematiques non lineacuteaires ne pou-vant ecirctre reacutesolues ni par le filtre de Kalman ni par ses extensions Parmi elles figure la meacutethode particulaire de filtrage celle-ci estime la distribution du signal via un proceacutedeacute de reacuteduction sta-tistique dit ldquodiscreacutetisationrdquo qui consiste agrave deacutecouper une seacuterie de donneacutees en un certain nombre de classes repreacutesenteacutees par des particules a lrsquoimage de la meacutethode de Monte carlo cette approche repose sur la loi des grands nombres et la simulation drsquoexpeacuteriences reacutepeacuteteacutees Dans un premier temps les valeurs sont estimeacutees gracircce aux observations disponibles chaque valeur uti-liseacutee est associeacutee agrave un poids de conditionnement Puis agrave chaque simulation les pondeacuterations sont

ajusteacutees en fonction des reacutesul-tats obtenus les particules se deacuteplacent librement agrave partir de lrsquoalgorithme de dynamique du modegravele ce qui est possible dans la mesure ougrave la position exacte de chaque particule est connue on calcule alors la position moyenne pondeacutereacutee des particules agrave partir de leur poids theacuteoriques respec-tifs

un large champ drsquoapplication

les techniques de filtrage consti-tuent des outils preacutecieux afin de pallier aux imperfections de lrsquoinfor-mation ces probleacutematiques sont courantes en particulier dans le domaine financier en effet qursquoil srsquoagisse de calibrer un modegravele de valoriser un portefeuille drsquoac-tifs ou de deacutefinir les strateacutegies de couverture les donneacutees utiliseacutees sont toujours incomplegravetes le fil-trage permet de traiter ce type de question il est notamment employeacute pour calculer le risque de creacutedit une entreprise est en effet reconnue en faillite lorsque sa valeur fondamentale est trop basse Mais cette information nrsquoest eacutevidemment pas connue des acteurs du marcheacute les ob-servations sont bruiteacutees puisque pas entiegraverement disponibles le filtrage peut alors servir agrave estimer le risque de creacutedit agrave partir des diffeacuterentes sources drsquoinformation disponibles croiser les donneacutees des rapports trimestriels du cours des actions ou encore du prix des options permet drsquoeacuteva-luer la probabiliteacute de deacutefaut de la socieacuteteacute

les modegraveles de filtrage ont donc un large champ drsquoapplication et fournissent des eacuteleacutements de reacute-ponse agrave de nombreuses probleacute-matiques Nul doute que les re-cherches vont se poursuivre afin drsquoaccroitre les performances de ces meacutethodes et algorithmes et de faire ainsi face agrave de nouveaux challenges

thorsten schmidt

bibliographieFrey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

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Del Moral P (1996) `Non-linear Filtering interacting particle solutionrsquo Markov Processes and related Fields 2(4) 555-580

1 Source Faragher (2012)

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12 les cahiers louis Bachelier

asymeacutetrie drsquoinformation et assurance

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Nous et le Monde Naturel Nous avons souvent besoin de quantifier le risque de lrsquoassureur pour deacuteterminer une eacutechelle de primes eacutequitable pour deacutefinir des strateacutegies solides de ges-tion du risque ou pour deacuteterminer les Solvency Capital Requirements le niveau minimum de fonds propres exigeacutes Dans chacune de ces situations les pertes potentielles constituent une issue future incertaine Mettant de cocircteacute la question quasi-philosophique de savoir si lrsquoincertitude (sur lrsquooccurrence et le montant des sinistres futurs pour lrsquoassureur) est due agrave une insuf-

fisance drsquoinformation ou alors si elle est plutocirct lieacutee au caractegravere intrinsegravequement aleacuteatoire des issues nous nous trouvons geacuteneacuteralement face au workflow suivant

INCERTITUDE i RISQUE i DONNEES i MODELES

La diffeacuterence entre lrsquoincertitude et le risque (selon la deacutefinition de lrsquoeacuteconomiste Frank Knight) est que le risque peut ecirctre quantifieacute crsquoest-agrave-dire que lrsquoon peut en principe deacuteterminer la distribution de probabiliteacute pour le risque en question Apregraves avoir deacutetermineacute quelles caracteacuteristiques constituent les risques agrave quan-

Crsquoest la nature mecircme de lrsquoactiviteacute drsquoassurance que de disposer drsquoun niveau drsquoinformation limiteacute agrave propos des risques agrave assurer et les informations suppleacutementaires sont toujours les bienvenues Il en est de mecircme pour lrsquoactiviteacute de la reacuteassurance La reacuteassurance est une opeacuteration par laquelle une socieacuteteacute drsquoassurance (le ldquoceacutedantrdquo) srsquoassure aupregraves drsquoune autre compagnie drsquoassurance (le ldquoreacuteassureurrdquo) pour une partie des risques qursquoelle porte Il srsquoagit donc lagrave avant tout drsquoune activiteacute drsquoassurance Cependant si lrsquoassurance et la reacuteassurance partagent des caracteacuteristiques communes il existe de nombreuses diffeacuterences structurelles notamment en ce qui concerne lrsquoinformation sur les risques inheacuterents aux polices reacuteassureacutees De plus dans la mesure ougrave les opeacuterations de reacuteassurance impliquent de multiples acteurs lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation constitue un eacuteleacutement important agrave prendre en consideacuteration La gestion du risque traite cette asymeacutetrie de diverses maniegraveres que je propose de commenter en fonction du degreacute drsquoinformation disponible

PAr hAnsjoumlrG ALbreCher

Hansjoumlrg Albrecher a eacutetudieacute les matheacutematiques appliqueacutees et lrsquoastronomie agrave Graz Limerick et Baltimore avant de recevoir son doctorat de la Technische Universitaumlt Graz en 2001 Il a ensuite enseigneacute agrave Graz Leuven et Aarhus avant drsquoecirctre nommeacute directeur drsquoeacutequipe en matheacutematiques financiegraveres et directeur adjoint du Johann Radon Institute de lrsquoAcadeacutemie des Sciences de lrsquoAutriche agrave Linz et professeur de matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoassurance agrave la Universitaumlt Linz (JKU) En 2009 il a eacuteteacute nommeacute professeur des sciences actuarielles agrave HEC de lrsquoUniversiteacute de LausanneSes domaines de recherche incluent la theacuteorie du risque la modeacutelisation du risque dans lrsquoassurance et la reacuteassurance la modeacutelisation des catastrophes naturelles les matheacutematiques financiegraveres la simulation stochastique et plus geacuteneacuteralement les applications de la theacuteorie des probabiliteacutes Il a publieacute plus de 100 articles dans ces domaines et est co-auteur de deux ouvrages Ruin Probabilities (deuxiegraveme eacutedition 2010) et Quantitative Methods for Financial Markets (2013)Dr Albrecher est reacutedacteur au sein drsquoInsurance Mathematics and Economics depuis 2010 coreacutedacteur-en-chef du European Actuarial Journal et de la revue Statistics and Risk Modeling depuis 2011 Il siegravege au comiteacute de reacutedaction de plusieurs autres revues scientifiques et collections drsquoouvrages

les cahiers louis Bachelier 13

tifier on cherche la probabiliteacute pour que ces risques se reacutealisent en partant drsquoobservations du reacuteel en geacuteneacuteral de donneacutees historiques Pour chaque risque agrave eacutevaluer le problegraveme classique reacuteside dans la deacutetermination de la pertinence des donneacutees et de leur degreacute de perti-nence Une difficulteacute suppleacutementaire reacuteside dans le fait que la nature des risques peut eacutevoluer dans le temps et que pour appreacutehender cette eacutevolution lrsquoon doit pouvoir faire appel agrave des meacutethodes statistiques capables drsquoidentifier les eacuteleacutements non-stationnaires inclus dans les seacuteries de donneacutees et agrave des informations reacuteelles connexes dont on dispose (modifications des clauses contractuelles contexte environnemental etc)

De longues anneacutees drsquoexpeacuterience nous ont appris agrave qualifier les diffeacuterents types de risque et agrave tirer des re-lations causales entre eux Ainsi nous avons pu deacuteve-lopper les modegraveles qui servent de base agrave lrsquoeacutevaluation de risques associeacutes

Bien qursquoen geacuteneacuteral les modeacutelisateurs soient conscients des limites de la modeacutelisation la principale motiva-tion derriegravere cette approche est la conviction qursquoil est possible de quantifier preacuteciseacutement les risques et que toute imperfection ou lacune dans un modegravele reacutesulte de donneacutees insuffisantes ou plus geacuteneacuteralement drsquoinformations insuffisantes concernant la nature des risques et les relations entre eux On pourrait dire que le deacuteveloppement de modegraveles de risque par les assu-reurs constitue une tentative de reacuteduire lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation en geacuteneacuteral et de lrsquoinformation dispo-nible pour nous

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureacutes et AssureurQuand un assureacute et une compagnie drsquoassurance concluent un contrat au terme duquel lrsquoassureacute paie une prime (baseacutee sur un calcul deacuteterministe) contre des si-nistres speacutecifieacutes dans le contrat il est clair que chaque partie dispose drsquoinformations diffeacuterentes mais dans ce cas lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation existe des deux cocircteacutes En principe la compagnie drsquoassurance dispose de plus drsquoexpeacuterience des risques agrave assurer (modegraveles idoines) ce qui lui permet (en y rajoutant la mutualisation des risques) de geacuterer efficacement les risques agrave assurer bien que pour certains produits les assureacutes preacutefeacutereraient plus de transparence (voir par exemple [12])

Lrsquoassureacute quant agrave lui dispose dans la plupart des sec-teurs de beaucoup plus drsquoinformation concernant son profil de risque que ce qursquoil communique agrave

lrsquoassureur et il pourrait mecircme en influencer le reacutesul-tat par le biais de son comportement Un exemple en est lrsquoassurance maladie ougrave il existe une asymeacutetrie drsquoinformation intrinsegraveque concernant lrsquoeacutetat de santeacute de lrsquoassureacute (cf [22] et [19 21] pour des eacutetudes sur certains types drsquoassurance-vie) Aussi telle asymeacutetrie peut ecirctre la conseacutequence de nouvelles reacuteglementations (cf [23]) Le secteur de lrsquoassurance automobile a une longue pratique de reacuteduction de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation concernant le profil de risque des assureacutes via le systegraveme de bonus-malus qui a lrsquoavantage suppleacute-mentaire drsquoinciter les assureacutes agrave conduire prudemment La tendance actuelle est de pousser le dispositif plus loin encore avec la collecte drsquoinformations reacuteelles sur la conduite des assureacutes via des systegravemes teacuteleacutematiques embarqueacutes(cf [18 6]) Crsquoest une excellente illustra-tion de comment une quantiteacute importante de don-neacutees suppleacutementaires peut ecirctre et sera certainement utiliseacutee pour concevoir les futurs contrats drsquoassurance (une tendance parfois appeleacutee Le Big Data dans lrsquoAs-surance) Lrsquoexploitation des donneacutees inclut lrsquoanalyse approfondie des eacutecarts de comportement des assureacutes (cf [16 20]) et le deacuteveloppement drsquoapplications se servant de ces informations agrave des fins commerciales (cf [17])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et ReacuteassureurComme les assureurs nrsquoaiment pas partager des don-neacutees et statistiques concernant les sinistres dans le cas de nombreux contrats de reacuteassurance non proportion-nels lrsquoassureur ne communique au reacuteassureur qursquoune partie des donneacutees concerneacutees crsquoest-agrave-dire seulement les donneacutees sur les sinistres engageant ou pouvant en-gager la garantie Cette asymeacutetrie drsquoinformation laisse le reacuteassureur dans lrsquoobligation de creacuteer son modegravele preacutedictif avec des donneacutees censureacutees (cf [2]) En pra-tique les reacuteassureurs tentent de compleacuteter les donneacutees censureacutees avec des donneacutees collecteacutees agrave partir de porte-feuilles similaires (parfois obtenues gracircce agrave un contrat de reacuteassurance proportionnelle couvrant des risques similaires drsquoune mecircme importance) Les subtiliteacutes relatives agrave lrsquoeacutevaluation des risques et la deacutetermination des primes de reacuteassurance varient en fonction du type de contrat et la meacutethodologie choisie (meacutethode par expeacuterience vs meacutethode par exposition etc [1]) Une autre source drsquoasymeacutetrie drsquoinformation tient dans le fait que les sinistres passeacutes sont souvent comptabi-liseacutes agrave leur valeur ldquodrsquoengagementrdquo (ie la valeur des indemniteacutes reacuteellement verseacutees plus une estimation rai-sonnable des indemniteacutes restant agrave verser) et celle-ci peut srsquoaveacuterer significativement diffeacuterente de la valeur

14 les cahiers louis Bachelier

finale des indemniteacutes Dans des secteurs drsquoactiviteacute ougrave le regraveglement des sinistres peut prendre de nombreuses anneacutees on comprend facilement que les reacuteassureurs ne peuvent pas compter exclusivement sur les don-neacutees concernant le montant reacuteel final des indemniteacutes verseacutees mais doivent eacutegalement prendre en compte la valeur (estimeacutee) des engagements dans lrsquoeacutelaboration de leurs modegraveles Cette situation pose de reacuteels deacutefis statistiques et peu de recherche theacuteorique existe sur le sujet actuellement (cf [2])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et InvestisseurDes actionnaires actuels ou potentiels des socieacuteteacutes drsquoassurance fondent leurs deacutecisions drsquoinvestir sur les chiffres financiers et commerciaux et des indicateurs de performance mais en geacuteneacuteral ces chiffres ne tra-duisent pas lrsquointeacutegraliteacute de la structure de risque des assureurs et reacuteassureurs Compte tenu des Solvency Capital Requirements une socieacuteteacute doit tenir compte du coucirct de lever et conserver ce capital Ce coucirct aura un impact sur nombre de deacutecisions de strateacutegie et de gestion y compris la deacutecision de recourir agrave la reacuteassu-rance Le taux du coucirct du capital est influenceacute non seulement par le profil du risque mais eacutegalement par la structure de lrsquoinformation Par conseacutequence le taux du coucirct du capital est bien le reacutesultat de lrsquooffre et la de-mande sur le marcheacute mais tient eacutegalement compte de regravegles et directives en matiegravere de reporting financier telle la constitution de reacuteserves pour pertes et pour sinistres survenus mais non encore deacuteclareacutes Pour une discussion drsquoun point de vue actuariel voir [514]

Un autre domaine de recherche qui srsquointeacuteresse acti-vement aux aspects pratiques de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation est la titrisation des risques drsquoassurance en particulier celui de catastrophes naturelles et plus reacutecemment le risque de longeacuteviteacute La titrisation trans-fegravere le risque drsquoassurance aux marcheacutes des capitaux et constitue donc un instrument particuliegraverement utile lorsqursquoil srsquoagit de risques de grande ampleur ayant de fortes correacutelations ougrave les contrats de reacuteassurance tradi-tionnels ne sont pas eacuteconomiquement viables compte tenu du coucirct monumental des capitaux Lrsquohistoire des produits de titrisation illustre parfaitement comment lrsquoeacutevolution des attitudes envers lrsquoasymeacutetrie drsquoinforma-tion (dans ce cas preacutecis entre eacutemetteur et investisseur) a modifieacute les produits et leur attractiviteacute Des deacuteclen-cheurs anciens baseacutes sur lrsquoexpeacuterience effective de pertes des compagnies individuelles et des indices sectoriels ont eacutevolueacute vers des deacuteclencheurs parameacutetriques cal-culeacutes en tenant compte de quantiteacutes physiques lieacutees

aux catastrophes comme la vitesse du vent la pression atmospheacuterique etc Alors que les deacuteclencheurs para-meacutetriques diminuent lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation (qui dans le cas des deacuteclencheurs speacutecifiques agrave chaque en-treprise eacutetait significative) ils augmentent le risque de base crsquoest-agrave-dire le risque que le deacuteclencheur ne reflegravete pas lrsquoexpeacuterience reacuteelle de lrsquoeacutemetteur ce qui reacuteduit lrsquoef-ficaciteacute du produit pour lrsquoeacutemetteur Comme on pou-vait srsquoy attendre lrsquoactiviteacute de ce marcheacute a connu une certaine volatiliteacute dans le temps avec une forte aug-mentation des volumes dans des peacuteriodes ougrave le mar-cheacute traditionnel de la reacuteassurance ne pouvait pas faire face agrave ce type de demande (cf [9 11]) La valorisation de ces produits se situe agrave la frontiegravere entre assurance et finance Crsquoest eacutegalement un sujet de recherche tregraves inteacuteressant sur le plan theacuteorique (cf [7 15 4 8] et [10 24])

Asymeacutetrie drsquoinformation entre Assureurs et ConcurrentsEnfin comme dans toute activiteacute eacuteconomique il existe une concurrence entre assureurs pour un nombre li-miteacute de clients (assureacutes) et il existe eacutegalement une asy-meacutetrie drsquoinformation naturelle entre assureurs concur-rents concernant le profil du risque lrsquoappreacuteciation des conditions marcheacute lrsquoapproche meacutethodologique du risque et la deacutetermination des primes Parmi des approches reacutecentes on peut citer la deacutetermination des primes drsquoassurance via une analyse fondeacutee sur la theacuteo-rie des jeux tenant compte drsquoune preacutevision de la poli-tique des primes des concurrents des comportements agrave risque des assureacutes et des contraintes reacuteglementaires en matiegravere de fonds propres (voir [13]) le tout dans un contexte drsquoinformations incomplegravetes

Lrsquoobjectif de ce court chapitre eacutetait de mettre en lumiegravere plusieurs domaines de recherche dans les sciences actuarielles ougrave lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation joue directement ou indirec-tement un rocircle important Cette liste est forceacutement incomplegravete mais elle souligne lrsquoimportance de la modeacutelisation drsquoinforma-tion dans le secteur de lrsquoassurance et de la reacuteassurance qui est eacutegalement lrsquoobjet de tregraves nombreux projets de recherche en cours

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drsquohansjoumlrg Albrecher sur

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les cahiers louis Bachelier 15

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Page 3: Information en Finance et assurance

les cahiers louis Bachelier 3

eacutedito

information en Finance et assurance

la quantification des risques financiers ainsi que lrsquoeacutelaboration de strateacutegies destineacutees agrave les couvrir deacutependent fortement de la perception du risque par un investisseur donneacute ou plus preacuteciseacutement de lrsquoinformation dont il dispose pour lrsquoeacutevaluer lrsquoinformation repreacutesente ainsi un eacuteleacutement cleacute de la modeacutelisation financiegravere Dans la plupart des modegraveles financiers lrsquoaccent est mis sur le choix de la mesure de pricing le marcheacute est supposeacute choisir cette mesure dans un contexte de marcheacute incomplet de faccedilon agrave ne pas geacuteneacuterer des arbitrages et lrsquoinformation est supposeacutee commune et donneacutee agrave lrsquoavance

Peu drsquoeacutetudes ont eacuteteacute conduites pour eacutetudier lrsquoinfluence de lrsquoinformation sur lrsquoeacutevaluation des produits financiers lors de la crise financiegravere il a eacuteteacute mis en eacutevidence que la faillite de grosses compagnies avait un impact important sur les compagnies dont on estimait qursquoelles nrsquoeacutetaient pas ou peu correacuteleacutees agrave lrsquoentreprise faisant deacutefaut et que lrsquoinformation lieacutee agrave ce deacutefaut devait impeacuterativement ecirctre prise en compte il srsquoagit donc bien drsquoune modeacutelisation de lrsquoinformation permettant drsquoatteindre une modeacutelisation drsquoune deacutependance un eacuteveacutenement extrecircme de faible probabiliteacute peut impacter la modeacutelisation avant et apregraves sa venue et lrsquoinformation lieacutee agrave cet eacuteveacutenement est un eacuteleacutement important de la compreacutehension de la dynamique des prix Mettre en valeur ces relations est un enjeu complexe

le semestre theacutematique ldquoinformation en Finance et assurancerdquo fut lrsquooccasion drsquoeacutechanges et de collaborations scientifiques entre chercheurs de diffeacuterents domaines (matheacutematiques financiegraveres eacuteconomie assurance) travaillant sur le sujet il srsquoest articuleacute autour des 5 thegravemes suivants dont les principales contributions sont illustreacutees dans le preacutesent cahier

bull information partielle modeacuteliser via des techniques de filtrage lrsquoimpact drsquoune drsquoinformation incomplegravetebull information priveacutee comprendre comment la connaissance drsquoune information privileacutegieacutee modifie le

comportement drsquoun agentbull Theacuteorie des jeux comprendre comment la connaissance drsquoune information privileacutegieacutee modifie les

interactions possibles entre les agentsbull information asymeacutetrique et assurance confronter les points de vue financiers eacuteconomiques et actuariels

pour mieux identifier les risques de modegravele tant au niveau du choix du modegravele utiliseacute que du choix des informations accessibles

bull Modegraveles drsquoeacutequilibre Kyle et Back eacutetudier lrsquoexistence drsquoeacutequilibres financiers lorsque les agents ont des informations diffeacuterentes qui peuvent ecirctre des informations priveacutees ou partielles

Bonne lecture

Caroline Hillairet et Monique Jeanblanc organisatrices du semestre theacutematique ldquoInformation en Finance et Assurancerdquo

Plus drsquoinformation sur httpwwwinformationinfinanceandinsuranceorg

Monique Jeanblanc

Caroline Hillairet

ParTeNaires

4 les cahiers louis Bachelier

les agents eacuteconomiques ne disposent pas tous du mecircme niveau drsquoinformation les coucircts drsquoinvestissement drsquoune entre-prise par exemple sont connus de cette derniegravere mais pas de ses concurrents De mecircme un employeur ne peut observer en permanence ses salarieacutes il ne connaicirct donc pas parfaitement le niveau drsquoeffort de chaque em-ployeacute srsquoil souhaite creacuteer une in-citation sa seule possibiliteacute est de conditionner le salaire verseacute au reacutesultat

en formalisant les interac-tions entre les agents (appe-leacutes joueurs) les modegraveles de la theacuteorie des jeux cherchent agrave deacutefinir les eacutequilibres dans ce contexte de problegraveme drsquoinfor-mation autrement dit ils visent agrave deacuteterminer la ou les strateacutegies qui permettent de satisfaire au mieux lrsquoensemble des joueurs ces derniers sont en effet strateacute-giques ils cherchent agrave optimiser un certain critegravere (geacuteneacuteralement leur paiement ou utiliteacute espeacutereacutes) et rationnels ils ont la capaciteacute

de reacutesoudre un problegraveme drsquoopti-misation complexe

quelle valeur pour une information priveacutee

lrsquoeacutetude des eacutequilibres dans ces modegraveles est deacutelicate et sou-legraveve plusieurs questions drsquointeacute-recirct pour la recherche Plusieurs drsquoentre elles ont eacuteteacute abordeacutees lors du semestre theacutematique ldquoinformation en Finance et assurancerdquo comme la valeur drsquoune information priveacutee ou lrsquouti-lisation strateacutegique de celle-ci

Jeacuterocircme renault a ainsi eacutetudieacute la valeur drsquoune information pri-veacutee dans un jeu agrave somme nulle crsquoest-agrave-dire un jeu ougrave les inteacute-

comment une information priveacutee impacte le comportement des joueurs

recircts des joueurs sont totalement opposeacutes en situation drsquoinfor-mation incomplegravete la valeur de cette information correspond au paiement optimal que peut se garantir le joueur a dans le jeu cette approche permet drsquoordon-ner diffeacuterentes structures drsquoinfor-mation en fonction de leur qua-liteacute (ou valeur) du point de vue du joueur a mais aussi de les diffeacuterencier de maniegravere quanti-tative crsquoest-agrave-dire de mesurer lrsquoeffet preacutecis drsquoune variation de la structure drsquoinformation sur la valeur du jeu

bluffer pour optimiser son information

au-delagrave de la valeur intrinsegraveque de lrsquoinformation de nombreux travaux srsquointeacuteressent agrave la maniegravere optimale de lrsquoutiliser lrsquoobjectif pour le joueur est de controcircler la maniegravere dont son information est reacuteveacuteleacutee au marcheacute afin de maxi-miser son profit il a donc tout inteacuterecirct agrave ldquoblufferrdquo de maniegravere agrave cacher son information Par exemple si un joueur connaicirct la

Lrsquoobjectif pour le joueur est de controcircler la maniegravere dont son information est reacuteveacuteleacutee

un joueur beacuteneacuteficiant drsquoune information priveacutee a inteacuterecirct agrave ldquoblufferrdquo pour ne pas deacutevoiler son infor-mation aux autres joueurs

il introduit alors un aleacutea dans ses prises de deacutecision

Lrsquoutilisation strateacutegique de lrsquoinformation a des conseacutequences sur le marcheacute que ce soit sur les fluctuations des prix ou sur lrsquoeacutevaluation des actifs

drsquoapregraves un texte de Fabien Gensbittel et les articles citeacutes en reacutefeacuterence

de nombreux travaux acadeacutemiques analysent lrsquoimpact des deacuteseacutequilibres drsquoinformation sur le marcheacute en se basant sur la theacuteorie des jeux ils abordent notamment la question de lrsquoutilisation strateacutegique drsquoune information priveacutee

a retenir

les cahiers louis Bachelier 5

Fabien Gensbittel est maicirctre de confeacuterences en matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoUniversiteacute Toulouse 1 au sein de Toulouse School of Economics depuis sep-tembre 2011 apregraves une thegravese en matheacutematiques agrave lrsquoUniversiteacute Paris 1 obtenue en 2010 Ses travaux de recherche sont centreacutes sur les aspects matheacutematiques de la theacuteorie des jeux et en particulier sur les problegravemes drsquoinformation dans les jeux dynamiques

valeur drsquoune variable X (disons 0 ou 1) qui est positivement cor-reacuteleacutee agrave la qualiteacute drsquoun projet ris-queacute et deacutecide drsquoinvestir dans le projet agrave la premiegravere eacutetape du jeu uniquement si X = 1 lrsquoobserva-tion de son comportement reacutevegravele compleacutetement son information introduire un aleacutea dans la deacuteci-sion drsquoinvestir (par exemple investir avec probabiliteacute 34 si X = 1 et 14 si X = 0) permet de brouiller les cartes et autorise une plus grande marge de ma-nœuvre

lrsquoutilisation strateacutegique des informations priveacutees nrsquoest pas sans conseacutequence pour le mar-cheacute Bernard de Meyer montre ainsi comment ces strateacutegies expliquent en partie les fluc-tuations des prix il considegravere un marcheacute composeacute de deux agents un agent de taille impor-tante qui beacuteneacuteficie drsquoun accegraves privileacutegieacute agrave lrsquoinformation et un acteur plus petit moins bien in-formeacute lrsquoagent principal sait que son comportement est observeacute il va donc instaurer une strateacutegie afin de dissimuler son informa-tion priveacutee et introduire un aleacutea dans ses actions les eacutevolutions du prix sont donc expliqueacutees par le comportement optimal du joueur informeacute et non comme la conseacutequence de chocs aleacutea-toires indeacutependants

Mecircme srsquoil est extrecircmement sim-plifieacute ce modegravele a lrsquointeacuterecirct de prouver lrsquoimpact de lrsquoinformation sur les prix et de proposer une meacutethode drsquoeacutevaluation drsquoactifs baseacutee sur ce constat

evaluer des options avec une information asymeacutetrique

les problegravemes drsquoinformation ont eacutegalement un impact sur lrsquoeacuteva-

luation des actifs et notamment des options Fabien Gensbittel a ainsi eacutetudieacute lrsquoeacutevaluation des op-tions dites israeacuteliennes agrave savoir des options ougrave lrsquoeacutemetteur peut se reacutetracter agrave tout moment sous reacute-serve de verser une indemniteacute agrave lrsquoacheteur il srsquoagit lagrave encore drsquoun jeu agrave somme nulle puisqursquoeacutemet-teur et acheteur ont des inteacuterecircts opposeacutes les deacutecisions des deux parties se reacuteduisent agrave un temps drsquoarrecirct temps drsquoannu-lation pour lrsquoeacutemetteur temps drsquoexercice pour lrsquoacheteur il est assez naturel dans ce type de problegraveme de consideacuterer que lrsquoin-formation sur la qualiteacute de lrsquoactif sous-jacent est asymeacutetrique et lagrave encore les strateacutegies opti-males prescrivent drsquointroduire un aleacutea dans la prise de deacutecision et non plus drsquoexercer au-delagrave drsquoun certain seuil deacutetermineacute comme crsquoest souvent le cas dans les problegravemes drsquoarrecirct agrave information complegravete concregravetement en lrsquoabsence de problegraveme drsquoinfor-mation lrsquoeacutemetteur retire son offre au-delagrave drsquoun certain seuil de prix connu et fixeacute lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation pousse les acteurs agrave bluffer lrsquoeacutemetteur ne srsquoarrecirc-tera pas agrave un seuil de prix fixe mais agrave un ldquoseuil aleacuteatoirerdquo

jeux agrave somme non-nulle agrave information incomplegravete

les probleacutematiques drsquoinforma-tion incomplegravete existent eacutega-lement dans les jeux agrave somme non-nulle autrement dit les jeux ougrave les inteacuterecircts des joueurs ne sont pas forceacutement opposeacutes

Dans ce cas une forme de coo-peacuteration entre les joueurs est possible comment dans ce contexte lrsquoinformation priveacutee est-elle utiliseacutee un reacutesultat clas-sique est lrsquoexistence drsquoeacutequilibres

appeleacutes plan-joints qui srsquoappa-rentent agrave des contrats entre les deux joueurs ougrave lrsquoinformation pri-veacutee nrsquoest utiliseacutee qursquoune fois au deacutebut du jeu

ce type drsquoeacutequilibre fonctionne en quelque sorte sur le prin-cipe de la menace Des regravegles sont deacutefinies au deacutebut du jeu si un joueur ne les respecte pas il sera peacutenaliseacute par les autres joueurs tout au long du jeu

Neacuteanmoins les eacutequilibres plan-joint ne repreacutesentent qursquoune par-tie des eacutequilibres car on peut construire des exemples de nature diffeacuterente ougrave lrsquoinformation est reacuteveacuteleacutee petit agrave petit tout au long du jeu

Fabien Gensbittel

bibliographie

B De Meyer and G Four-nier (2015 ) Price dynamics on a risk averse market with asymmetric information httpshalshsarchives-ou-vertesfrhalshs-01169563

F Gensbittel and cGruumln (2015) Zero-sum stopping games with asymmetric information httparxivorgabs14121412

F Forges (1992) repea-ted games of incomplete information non-zero-sum in r aumann and s hart handbook of Game Theory with economic applica-tions chapter 6

retrouvez lrsquoarticle inteacutegral

de Fabien Gensbittel sur

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6 les cahiers louis Bachelier

la question du prix drsquoeacutequilibre est fondamentale en eacuteconomie et de nombreux travaux tentent de la formaliser le modegravele de Kyle srsquoinscrit dans cette probleacute-matique en faisant le lien entre la formation du prix eacutetabli par lrsquooffre et la demande et lrsquoinformation dont disposent les agents Tous ne sont pas en possession des mecircmes eacuteleacutements un investisseur local par exemple connaicirctra a priori mieux le marcheacute qursquoun in-vestisseur eacutetrangercomment lrsquoinformation dispo-nible ou les diffeacuterences de niveau drsquoinformation entre les agents peuvent-elles influer sur lrsquoactiviteacute des marcheacutes finan-ciers comment cette infor-mation est-elle inteacutegreacutee dans le prix Quels sont les beacuteneacutefices retireacutes drsquoune information privileacute-gieacutee le prix drsquoeacutequilibre en est-il modifieacute Telles sont quelques-unes des questions auxquelles srsquoattache la theacuteorie de Kyle qui modeacutelise lrsquoimpact de lrsquoinformation sur la liquiditeacute et le prix drsquoun actif

un agent privileacutegieacute et strateacutegique

Kyle considegravere un marcheacute sur lequel est vendu un actif risqueacute Trois types drsquoagents interviennent dans les eacutechanges un trader ldquoprivileacutegieacuterdquo des liquidity traders et un market maker

le trader ldquoprivileacutegieacuterdquo beacuteneacuteficie drsquoune information priveacutee sur la va-leur de lrsquoactif il connaicirct sa valeur agrave la date T1 et donc le prix de vente ou drsquoachat potentiel agrave cette date lrsquoagent informeacute est strateacutegique et cherche agrave maximiser le profit qursquoil peut tirer de son information il prend donc en consideacuteration lrsquoimpact de son ordre sur le prix

Modegravele de Kyle lrsquoimpact de lrsquoinformation sur le prix drsquoeacutequilibre

Certains investisseurs beacuteneacuteficient drsquoinformations privileacutegieacutees leur permettant de mieux eacutevaluer la valeur drsquoun actif Comment cette information influence-t-elle lrsquoeacutequilibre du marcheacute quels avantages offre-t-elle Le modegravele de Kyle fournit des eacuteleacutements de reacuteponse

du marcheacute et effectue ses tran-sactions de sorte agrave ce que son information soit reacuteveacuteleacutee au mar-cheacute le plus tardivement possible il ne vendra pas par exemple lrsquoensemble de ses titres en une seule opeacuteration afin drsquoeacuteviter une chute des cours Toutefois via ses transactions agrave lrsquoachat ou agrave la vente il fournit neacutecessairement un signal au marcheacute une partie de son information eacutetant transmise au prix de lrsquoactif

De leur cocircteacute les liquidity traders ne disposent pas drsquoinformation sur la valeur de lrsquoactif ils fournissent de la liquiditeacute en participant aux eacutechanges mais ne donnent pas de signal au marcheacute et nrsquoont donc pas drsquoimpact sur le prix

enfin le market maker observe les flux de transaction sans dis-tinguer la demande du trader informeacute de celle des liquidity tra-ders il fixe le prix en fonction de la demande globale de lrsquoactif agrave lrsquoinstant T et de lrsquoestimation de sa

Le modegravele de Kyle modeacutelise lrsquoimpact de lrsquoinformation sur la liquiditeacute et le prix drsquoun actif

il permet de calculer agrave partir drsquoun prix agrave lrsquoinstant t lrsquoeacutevolution du prix drsquoeacutequilibre au cours du temps

il montre eacutegalement qursquoune information privileacutegieacutee a drsquoautant plus de valeur lorsque le marcheacute est liquide ou bruiteacute Le profit srsquoaccroicirct eacutegalement lorsque la variance du prix agrave lrsquoinstant t est forte

drsquoapregraves un texte de Kerry back et les articles citeacutes en bibliographie

Plus le marcheacute est liquide plus le profit de lrsquoagent informeacute est important

a retenir

les cahiers louis Bachelier 7

Kerry Back est professeur titulaire de la chaire de Finance J Howard Creekmore agrave la Jones Graduate School of Business et professeur drsquoEacuteconomie agrave la faculteacute de Sciences Sociales de Rice University ougrave il enseigne la theacuteorie de valorisation drsquoactifs Il a eacutegalement enseigneacute agrave Northwestern University Indiana University Washington University in St Louis et Texas AampM University A Washington University in St Louis il a occupeacute le poste de Doyen des Affaires Acadeacutemiques de la Olin School of Business et a reccedilu le titre de ldquoMembre Eacuteminent du corps

professoralrdquo Il a eacuteteacute reacutecompenseacute par plusieurs prix de recherche agrave Texas AampM et agrave Rice University Ses domaines de recherche comprennent les investissements et lrsquoorganisation des marcheacutes Il a eacuteteacute reacutedacteur de la Review of Financial Studies coreacutedacteur de Finance amp Stochastics et reacutedacteur adjoint du Journal of Finance et drsquoautres revues

rentabiliteacute espeacutereacutee il nrsquoy a pas de saut juste avant lrsquoannonce du prix le marcheacute incorpore correcte-ment lrsquoinformation et la formation du prix est juste

deacuteterminer le prix drsquoeacutequilibre

le modegravele de Kyle se distingue ainsi du modegravele de Merton lrsquoune des reacutefeacuterences des modegraveles drsquoeacutequilibre de marcheacute qui lui fait lrsquohypothegravese drsquoune symeacutetrie drsquoin-formation le premier considegravere des agents neutres vis-agrave-vis du risque et ayant un impact sur le marcheacute Drsquoougrave la volonteacute de lrsquoagent informeacute de mener ses transac-tions ldquoen douceurrdquo le second au contraire considegravere des agents averses au risque nrsquoayant aucun impact sur le prix

lrsquoobjectif du modegravele de Kyle est de deacuteterminer comment lrsquoinforma-tion de lrsquoagent privileacutegieacute se trans-met au prix et de deacutefinir ainsi le prix drsquoeacutequilibre V le prix V1 de lrsquoactif agrave lrsquoinstant T1 est en effet connu a partir de cette informa-tion comment estimer le prix V au fil du temps le modegravele montre que lorsque le prix V1 suit une loi dite gaussienne (dont la dis-tribution est donc uniquement deacutetermineacutee par la moyenne et la

le modegravele de Kyle est un modegravele drsquoeacutequilibre ougrave un agent neutre au risque et informeacute crsquoest-agrave-dire qursquoil connaicirct le prix agrave la date terminale exploite cette information afin de maximiser son profit espeacutereacute Par contre le market maker qui fixe le prix de marcheacute dispose de moins drsquoinformation et en particulier ne peut pas observer lrsquoaction de lrsquoagent informeacute car elle est bruiteacutee par les liquidity traders en utilisant des outils de controcircle stochastique et du filtrage on eacutetudie lrsquoeffet de lrsquoinformation sur les prix drsquoeacutequilibre

meacutethodologie

variance) la formule est explicite et facilement calculable

une information plus ou moins valoriseacutee

le modegravele fournit eacutegalement un eacuteclairage sur les beacuteneacutefices ap-porteacutes par lrsquoinformation priveacutee ces derniers peuvent ainsi ecirctre renforceacutes par plusieurs eacuteleacutements

Tout drsquoabord le profit de lrsquoagent informeacute est drsquoautant plus grand que le marcheacute est liquide autre-ment dit plus le marcheacute integravegre rapidement lrsquoinformation plus celle-ci est beacuteneacutefique au trader privileacutegieacute son profit srsquoaccroicirct eacutega-lement avec le bruit du marcheacute Plus le bruit est important plus lrsquoinformation priveacutee sera deacutevoileacutee tardivement au marcheacute et plus lrsquoagent pourra en tirer profit

enfin plus la variance du prix V1 est forte plus les valeurs pro-bables du prix drsquoeacutequilibre V sont larges il est alors plus difficile pour les traders non informeacutes de faire une juste estimation de V le gain pour lrsquoagent privileacutegieacute est donc plus fort

le modegravele de Kyle connaicirct de nombreuses extensions il existe

ainsi des formules qui integravegrent plusieurs agents informeacutes ou un agent informeacute mais ne connais-sant pas exactement le prix V1 Drsquoautres considegraverent un prix V1 qui ne suit pas une loi gaussienne ou encore un marcheacute composeacute drsquoun actif risqueacute ainsi que drsquoun deacuteriveacute Quelles que soient les variations le modegravele de Kyle constitue en tout cas une avanceacutee dans la compreacutehension du rocircle de lrsquoinfor-mation sur les marcheacutes et sur la formation du prix drsquoeacutequilibre

Kerry back

bibliographie

Back K 1992 insider tra-ding in continuous time review of Financial studies 5 387-409

Kyle as 1985 conti-nuous auctions and insider trading econometrica 53 1315-1336

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8 les cahiers louis Bachelier

la sec (securities and exchange commission) lrsquoorganisme feacutedeacuteral ameacutericain de regraveglementation et de controcircle des marcheacutes finan-ciers deacutefinit le deacutelit drsquoinitieacute comme ldquole fait drsquoacheter ou de vendre un titre ou une valeur en violation des obligations fiduciaires etou de confiance tandis que lrsquoon dispose drsquoinformations confidentielles non-publiques concernant ladite valeur le deacutelit drsquoinitieacute peut aussi englober le fait de divulguer des informations confidentielles agrave un tiers le fait pour le tiers de neacutego-cier des titres objets desdites informations confidentielles ainsi que le neacutegoce de titres par toute personne qui deacutetournerait de telles informations agrave son profitrdquo

si ces contours sont clairs le deacutelit drsquoinitieacute demeure difficile agrave prouver et donc agrave sanctionner la modeacuteli-sation matheacutematique pourrait-elle permettre de mieux cerner le com-portement des fraudeurs et ainsi de mieux les deacutetecter Plusieurs travaux de recherche ont eacuteteacute me-neacutes sur ce sujet

Pas de profit sans risque

le processus de modeacutelisation re-pose en effet sur la notion drsquoinfor-mation on peut ainsi consideacuterer qursquoune collection drsquoeacuteveacutenements appeleacutee Ft repreacutesente lrsquoensemble des informations publiques concernant le marcheacute financier et disponibles agrave un moment t un initieacute possegravede par deacutefinition une information priveacutee sur un eacuteveacute-nement ne faisant pas partie de cet ensemble il peut srsquoagir par exemple drsquoun investisseur qui a connaissance de lrsquoavanceacutee des tests cliniques drsquoun nouveau meacute-dicament sa collection drsquoeacuteveacutene-ments observables devient alors plus grande que la collection de reacutefeacuterence Ft

lutter contre le deacutelit drsquoinitieacute gracircce agrave la modeacutelisation

Traditionnellement les modegraveles sont construits sur la notion drsquoab-sence drsquoarbitrage autrement dit ils considegraverent qursquoil est impossible de reacutealiser des profits sans assu-mer une part de risque le risque nul nrsquoexiste pas Mais il arrive qursquoune information priveacutee puisse creacuteer des opportuniteacutes drsquoarbi-trage ou du moins des situations tregraves proches de lrsquoarbitrage en lrsquooccurrence si un investisseur sait agrave lrsquoavance qursquoune compagnie va mettre sur le marcheacute un nouveau meacutedicament ses chances de reacutealiser une plus-value sont tregraves fortes et son risque faiblehellip

tirer profit drsquoune information priveacutee

lrsquoinitieacute peut ainsi tirer avantage de son information de plusieurs ma-niegraveres Dans lrsquoexemple preacutesenteacute la solution la plus simple est eacutevidem-ment drsquoacheter ou de vendre des actions de la compagnie pharma-ceutique selon les reacutesultats du test Mais lrsquoinformation peut aussi gui-der lrsquoachat de produits deacuteriveacutes ou

Un agent initieacute peut reacutealiser des profits sans prendre de risque ou presque

un agent initieacute possegravede une collection drsquoinformations plus grande que celle des autres agents Cette information suppleacutementaire change sa perception du marcheacute et son eacutevaluation du prix drsquoun actif

Le modegravele preacutesenteacute permet drsquooptimiser lrsquoutilisation de cette information priveacutee en analysant les deacuteviations des cours par rapport agrave une valeur de reacutefeacuterence il permet agrave lrsquoagent de savoir si un titre est sous ou sur eacutevalueacute

Le modegravele est eacutegalement utile au reacutegulateur pour mieux cerner le comportement des initieacutes et donc mieux lutter contre ces pratiques

drsquoapregraves un texte de Philip Protter et les articles citeacutes en bibliographie

Gracircce agrave une information priveacutee un agent peut reacutealiser drsquoimportants profits pour un minimum de risque en permettant de mieux comprendre lrsquoutilisation de cette information la modeacutelisation aide agrave lutter contre les deacutelits drsquoinitieacutes

a retenir

les cahiers louis Bachelier 9

Philip Protter est Fellow du IMS (Center for Intelligent Management Systems) reacute-dacteur adjoint de neuf revues scientifiques membre de deux comiteacutes de reacutedaction et a eacuteteacute reacutedacteur en chef de la revue Stochastic Processes and their Applications Ses principaux domaines de recherche comprennent les matheacutematiques finan-ciegraveres (modegraveles de valorisation drsquoactifs modegraveles de valorisation et de couver-ture de deacuteriveacutes problegravemes de liquiditeacute bulles financiegraveres deacutelits drsquoinitieacute trading agrave haute freacutequence risque de creacutedit) la theacuteorie de lrsquointeacutegrale stochastique la theacuteorie des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques les meacutethodes de reacutesolution

numeacuterique des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques la discreacutetisation de processus stochastiques (en tant que branche de la statistique matheacutematique) eacutequations diffeacuterentielles stochastiques et ldquoeacutequations diffeacuterentielles stochastiques retrogradesrdquo les processus de Markov et la theacuteorie du filtrage Il est lrsquoau-teur et co-auteur de deux manuels acadeacutemiques et de deux ouvrages scientifiques

drsquooptions ces derniegraveres donnent le droit drsquoacheter ou de vendre un titre dans le futur agrave un prix fixeacute Bien utiliseacutee une option peut ainsi geacuteneacuterer drsquoimportants profits pour un investissement modeste et ce sur une courte peacuteriode

les informations suppleacutementaires ont en effet un impact sur lrsquoesti-mation du prix drsquoun actif un agent eacutevalue les flux futurs drsquoun actif via la collection drsquoinformations dispo-nibles si sa collection devient plus grande sa perception du marcheacute est modifieacutee lrsquoestimation du prix eacutevolue ainsi que lrsquoeacutevaluation de la probabiliteacute drsquoun eacuteveacutenement comme la survenance drsquoune faillite par exemple

deacutetecter une valeur hors norme

lrsquoauteur eacutetudie ainsi un modegravele qui calcule la ldquojuste valeurrdquo drsquoun actif et ses proprieacuteteacutes (variance eacutecart-type etc) en prenant compte de lrsquoinformation disponible modeacuteliseacutee pour un agent initieacute par un grossis-sement de filtration il est ainsi pos-sible drsquoanalyser les deacuteviations des cours par rapport agrave cette valeur la filtration modeacutelise ici lrsquoinforma-tion de lrsquoinitieacute et permet de montrer comment tirer profit drsquoune infor-mation privileacutegieacutee lrsquoagent est en mesure de savoir si une option est

sous ou sur eacutevalueacutee il ajuste ses investissements en conseacutequence augmentant de ce fait consideacutera-blement ses probabiliteacutes de pro-fits le modegravele permet eacutegalement de quantifier lrsquoavantage obtenu par lrsquoinitieacute gracircce agrave son information privileacutegieacutee

Toutefois comprendre via une analyse matheacutematique comment certains utilisent une information priveacutee peut aider le reacutegulateur agrave deacutetecter les deacutelits drsquoinitieacute et agrave poursuivre les contrevenants en effet en eacutevaluant la valeur normale de lrsquoactif le modegravele quantifie en quelque sorte un niveau drsquoalerte si une transaction srsquoeffectue agrave un prix trop eacuteloigneacute de la valeur nor-male elle peut ecirctre le fruit drsquoun deacutelit drsquoinitieacute

or lutter contre les deacutelits drsquoinitieacute est primordial pour garantir la flui-diteacute des transactions financiegraveres le marcheacute doit apparaicirctre comme juste Dans le cas contraire srsquoil est perccedilu comme deacutefaillant ou cor-rompu peu drsquoinvestisseurs accep-teront de participer aux eacutechanges les agents perdront confiance et la liquiditeacute sera reacuteduite le rocircle de lrsquoetat est donc de garantir le bon fonctionnement du marcheacute en reacute-duisant lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation et en luttant contre les deacutelits drsquoinitieacute

Philip Protter

lrsquoinformation publique disponible au cours du temps sur le marcheacute est repreacutesenteacutee par une filtration lrsquoinformation drsquoun initieacute qui possegravede une information privileacutegieacutee est ainsi modeacuteliseacutee par un grossissement de cette filtration du marcheacute ceci entraicircne une eacutevaluation des probabiliteacutes drsquooccurrence drsquoeacuteveacutenements diffeacuterentes pour un initieacute par rapport agrave un investisseur standard en particulier sa mesure drsquoeacutevaluation (appeleacute mesure risque neutre) des actifs en est modifieacutee

meacutethodologie

bibliographie

roseline Bilina Falafala amp Philip Protter insider Tra-ding and risk preprint 2015

claudio Fontana Monique Jeanblanc amp shiqi song on arbitrages arising with honest times Finance and stochastics July 2014 Vo-lume 18 issue 3 515-543

Younes Kchia amp Philip Prot-ter on Progressive Filtration expansions with a Process applications to insider Tra-ding international journal of theoretical and applied finance- river edge NJ [ua] World scientific issN 0219-0249 ZDB-iD 14289829 - Vol 182015 4 p 1-48

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10 les cahiers louis Bachelier

appareils connecteacutes GPs sys-tegravemes de monitoring meacutedicaux robots mobiles ces technolo-gies se creacuteent une place dans nos quotidiens et leur utilisation devrait ecirctre encore renforceacutee par la numeacuterisation en cours or tous ces objets ont un point commun ils fonctionnent de faccedilon dyna-mique avec une eacutemission de signal qui eacutevolue continuellement au cours du temps la preacutediction du signal est ainsi plus complexe et neacutecessite des outils matheacutema-tiques adapteacutes

la technique du filtrage reacutepond agrave cette probleacutematique Thorsten schmidt professeur agrave lrsquouniver-siteacute de Fribourg fait le point sur cette meacutethodologie aux multiples applications qursquoest-ce qursquoun problegraveme de filtrage comment cette technique srsquoest-elle deacuteve-loppeacutee Quelles solutions peut-elle apporter

contrairement agrave la statistique classique le filtrage vise agrave eacutevaluer

un signal dynamique dont lrsquoobser-vation est perturbeacutee par un bruit comment calculer une estima-tion juste malgreacute une observation bruiteacutee il srsquoagit par exemple de deacutefinir la position drsquoun robot qui se deacuteplace au cours du temps le robot nrsquoest pas dans le champ de vision de son proprieacutetaire il nrsquoest donc pas directement ob-servable Toutefois le proprieacutetaire dispose des donneacutees GPs qui correspondent ici agrave une observa-tion bruiteacutee le but est drsquooptimiser les informations fournies par le GPs afin de calculer la position du robot au cours du temps

comment pallier au manque drsquoinformation gracircce au filtrage

Approche de la statistique moderne le filtrage permet de reacutesoudre de nombreuses probleacutematiques drsquoinformation imparfaite que ce soit dans le cadre des objets connecteacutes de la navigation satellite ou du calcul de risque en finance ses applications sont multiples

Le filtre de Kalman

la theacuteorie du filtrage est neacutee dans les anneacutees 40 sous lrsquoimpul-sion drsquoandrey N Kolmogorov et Norbert Wiener le premier a eacutetu-dieacute la probleacutematique en temps discret tandis que le second lrsquoa abordeacute en temps continu il a en-suite fallu attendre les anneacutees 60 pour connaitre de nouvelles avan-ceacutees avec rudolf e Kalman

lrsquoapproche de Kalman fait office de reacutefeacuterence en matiegravere de fil-trage en se basant sur les lois gaussiennes le modegravele eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal lrsquoinformation corres-pond aux observations bruiteacutees prix donneacutees etc lrsquoavantage principal de cette meacutethode est de donner une formule explicite pour calculer le signal simplifiant ainsi fortement le proceacutedeacute

lrsquoune des utilisations les plus ceacutelegravebres et les plus anciennes du filtre de Kalman remonte agrave la

drsquoapregraves un texte de thorsten schmidt et les articles citeacutes en reacutefeacuterence

Lrsquoavantage principal de la meacutethode de Kalman est de donner une formule explicite et de faible dimension

Le filtrage vise agrave eacutevaluer un signal dynamique dont lrsquoobservation est bruiteacutee

Le modegravele de Kalman eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal il fournit une for-mule explicite et de faible dimension pour calculer le signal simplifiant ainsi le proceacutedeacute

Pour les cas non lineacuteaires des meacutethodes numeacuteriques peuvent ecirctre utiliseacutees

Le filtrage recouvre un large champ drsquoapplication que ce soit en finance dans lrsquoindustrie eacutelectro-nique la robotique ou encore le secteur meacutedical

a retenir

les cahiers louis Bachelier 11

Thorsten Schmidt est professeur de matheacutematiques stochastiques agrave lrsquoUniversiteacute de Fribourg (Allemagne) ougrave il a succeacutedeacute agrave Ernst Eberlein Auparavant il a ensei-gneacute les matheacutematiques financiegraveres agrave lrsquoUniversiteacute de technologie de Chemnitz

Outre son inteacuterecirct pour les matheacutematiques financiegraveres et plus particuliegraverement pour les taux drsquointeacuterecirct les marcheacutes du risque de creacutedit et de lrsquoeacutenergie il a une so-lide expertise en statistique et probabiliteacute Il a reacutecemment co-eacutecrit un ouvrage sur la statistique matheacutematique publieacute chez Springer Sa recherche dans le domaine

du risque de creacutedit porte sur lrsquoimpact de lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation le filtrage non-lineacuteaire les modegraveles drsquoanalyse de risques dynamiques Heath-Jarrow-Morton et les processus affineacutes

mission apollo le modegravele a eacuteteacute utiliseacute pour preacuteparer le voyage de Neil amstrong vers la lune ainsi que son retour notamment pour deacuteterminer agrave quel moment preacutecis la fuseacutee devait rentrer dans lrsquoat-mosphegravere1 il est aujourdrsquohui uti-liseacute dans la plupart des outils de navigation satellite tout comme dans les smartphones ou les jeux videacuteo

le filtre de Kalman ne peut tou-tefois ecirctre employeacute que pour les cas lineacuteaires certains auteurs ont ainsi eacutetendu le cadre lineacuteaire en utilisant des approximations au niveau local

La meacutethode particulaire de filtrage

enfin des meacutethodes numeacuteriques ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees pour les pro-bleacutematiques non lineacuteaires ne pou-vant ecirctre reacutesolues ni par le filtre de Kalman ni par ses extensions Parmi elles figure la meacutethode particulaire de filtrage celle-ci estime la distribution du signal via un proceacutedeacute de reacuteduction sta-tistique dit ldquodiscreacutetisationrdquo qui consiste agrave deacutecouper une seacuterie de donneacutees en un certain nombre de classes repreacutesenteacutees par des particules a lrsquoimage de la meacutethode de Monte carlo cette approche repose sur la loi des grands nombres et la simulation drsquoexpeacuteriences reacutepeacuteteacutees Dans un premier temps les valeurs sont estimeacutees gracircce aux observations disponibles chaque valeur uti-liseacutee est associeacutee agrave un poids de conditionnement Puis agrave chaque simulation les pondeacuterations sont

ajusteacutees en fonction des reacutesul-tats obtenus les particules se deacuteplacent librement agrave partir de lrsquoalgorithme de dynamique du modegravele ce qui est possible dans la mesure ougrave la position exacte de chaque particule est connue on calcule alors la position moyenne pondeacutereacutee des particules agrave partir de leur poids theacuteoriques respec-tifs

un large champ drsquoapplication

les techniques de filtrage consti-tuent des outils preacutecieux afin de pallier aux imperfections de lrsquoinfor-mation ces probleacutematiques sont courantes en particulier dans le domaine financier en effet qursquoil srsquoagisse de calibrer un modegravele de valoriser un portefeuille drsquoac-tifs ou de deacutefinir les strateacutegies de couverture les donneacutees utiliseacutees sont toujours incomplegravetes le fil-trage permet de traiter ce type de question il est notamment employeacute pour calculer le risque de creacutedit une entreprise est en effet reconnue en faillite lorsque sa valeur fondamentale est trop basse Mais cette information nrsquoest eacutevidemment pas connue des acteurs du marcheacute les ob-servations sont bruiteacutees puisque pas entiegraverement disponibles le filtrage peut alors servir agrave estimer le risque de creacutedit agrave partir des diffeacuterentes sources drsquoinformation disponibles croiser les donneacutees des rapports trimestriels du cours des actions ou encore du prix des options permet drsquoeacuteva-luer la probabiliteacute de deacutefaut de la socieacuteteacute

les modegraveles de filtrage ont donc un large champ drsquoapplication et fournissent des eacuteleacutements de reacute-ponse agrave de nombreuses probleacute-matiques Nul doute que les re-cherches vont se poursuivre afin drsquoaccroitre les performances de ces meacutethodes et algorithmes et de faire ainsi face agrave de nouveaux challenges

thorsten schmidt

bibliographieFrey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

Bain a and crisan D (2009) Fundamentals of stochastic Filtering sprin-ger New York

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Del Moral P (1996) `Non-linear Filtering interacting particle solutionrsquo Markov Processes and related Fields 2(4) 555-580

1 Source Faragher (2012)

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12 les cahiers louis Bachelier

asymeacutetrie drsquoinformation et assurance

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Nous et le Monde Naturel Nous avons souvent besoin de quantifier le risque de lrsquoassureur pour deacuteterminer une eacutechelle de primes eacutequitable pour deacutefinir des strateacutegies solides de ges-tion du risque ou pour deacuteterminer les Solvency Capital Requirements le niveau minimum de fonds propres exigeacutes Dans chacune de ces situations les pertes potentielles constituent une issue future incertaine Mettant de cocircteacute la question quasi-philosophique de savoir si lrsquoincertitude (sur lrsquooccurrence et le montant des sinistres futurs pour lrsquoassureur) est due agrave une insuf-

fisance drsquoinformation ou alors si elle est plutocirct lieacutee au caractegravere intrinsegravequement aleacuteatoire des issues nous nous trouvons geacuteneacuteralement face au workflow suivant

INCERTITUDE i RISQUE i DONNEES i MODELES

La diffeacuterence entre lrsquoincertitude et le risque (selon la deacutefinition de lrsquoeacuteconomiste Frank Knight) est que le risque peut ecirctre quantifieacute crsquoest-agrave-dire que lrsquoon peut en principe deacuteterminer la distribution de probabiliteacute pour le risque en question Apregraves avoir deacutetermineacute quelles caracteacuteristiques constituent les risques agrave quan-

Crsquoest la nature mecircme de lrsquoactiviteacute drsquoassurance que de disposer drsquoun niveau drsquoinformation limiteacute agrave propos des risques agrave assurer et les informations suppleacutementaires sont toujours les bienvenues Il en est de mecircme pour lrsquoactiviteacute de la reacuteassurance La reacuteassurance est une opeacuteration par laquelle une socieacuteteacute drsquoassurance (le ldquoceacutedantrdquo) srsquoassure aupregraves drsquoune autre compagnie drsquoassurance (le ldquoreacuteassureurrdquo) pour une partie des risques qursquoelle porte Il srsquoagit donc lagrave avant tout drsquoune activiteacute drsquoassurance Cependant si lrsquoassurance et la reacuteassurance partagent des caracteacuteristiques communes il existe de nombreuses diffeacuterences structurelles notamment en ce qui concerne lrsquoinformation sur les risques inheacuterents aux polices reacuteassureacutees De plus dans la mesure ougrave les opeacuterations de reacuteassurance impliquent de multiples acteurs lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation constitue un eacuteleacutement important agrave prendre en consideacuteration La gestion du risque traite cette asymeacutetrie de diverses maniegraveres que je propose de commenter en fonction du degreacute drsquoinformation disponible

PAr hAnsjoumlrG ALbreCher

Hansjoumlrg Albrecher a eacutetudieacute les matheacutematiques appliqueacutees et lrsquoastronomie agrave Graz Limerick et Baltimore avant de recevoir son doctorat de la Technische Universitaumlt Graz en 2001 Il a ensuite enseigneacute agrave Graz Leuven et Aarhus avant drsquoecirctre nommeacute directeur drsquoeacutequipe en matheacutematiques financiegraveres et directeur adjoint du Johann Radon Institute de lrsquoAcadeacutemie des Sciences de lrsquoAutriche agrave Linz et professeur de matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoassurance agrave la Universitaumlt Linz (JKU) En 2009 il a eacuteteacute nommeacute professeur des sciences actuarielles agrave HEC de lrsquoUniversiteacute de LausanneSes domaines de recherche incluent la theacuteorie du risque la modeacutelisation du risque dans lrsquoassurance et la reacuteassurance la modeacutelisation des catastrophes naturelles les matheacutematiques financiegraveres la simulation stochastique et plus geacuteneacuteralement les applications de la theacuteorie des probabiliteacutes Il a publieacute plus de 100 articles dans ces domaines et est co-auteur de deux ouvrages Ruin Probabilities (deuxiegraveme eacutedition 2010) et Quantitative Methods for Financial Markets (2013)Dr Albrecher est reacutedacteur au sein drsquoInsurance Mathematics and Economics depuis 2010 coreacutedacteur-en-chef du European Actuarial Journal et de la revue Statistics and Risk Modeling depuis 2011 Il siegravege au comiteacute de reacutedaction de plusieurs autres revues scientifiques et collections drsquoouvrages

les cahiers louis Bachelier 13

tifier on cherche la probabiliteacute pour que ces risques se reacutealisent en partant drsquoobservations du reacuteel en geacuteneacuteral de donneacutees historiques Pour chaque risque agrave eacutevaluer le problegraveme classique reacuteside dans la deacutetermination de la pertinence des donneacutees et de leur degreacute de perti-nence Une difficulteacute suppleacutementaire reacuteside dans le fait que la nature des risques peut eacutevoluer dans le temps et que pour appreacutehender cette eacutevolution lrsquoon doit pouvoir faire appel agrave des meacutethodes statistiques capables drsquoidentifier les eacuteleacutements non-stationnaires inclus dans les seacuteries de donneacutees et agrave des informations reacuteelles connexes dont on dispose (modifications des clauses contractuelles contexte environnemental etc)

De longues anneacutees drsquoexpeacuterience nous ont appris agrave qualifier les diffeacuterents types de risque et agrave tirer des re-lations causales entre eux Ainsi nous avons pu deacuteve-lopper les modegraveles qui servent de base agrave lrsquoeacutevaluation de risques associeacutes

Bien qursquoen geacuteneacuteral les modeacutelisateurs soient conscients des limites de la modeacutelisation la principale motiva-tion derriegravere cette approche est la conviction qursquoil est possible de quantifier preacuteciseacutement les risques et que toute imperfection ou lacune dans un modegravele reacutesulte de donneacutees insuffisantes ou plus geacuteneacuteralement drsquoinformations insuffisantes concernant la nature des risques et les relations entre eux On pourrait dire que le deacuteveloppement de modegraveles de risque par les assu-reurs constitue une tentative de reacuteduire lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation en geacuteneacuteral et de lrsquoinformation dispo-nible pour nous

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureacutes et AssureurQuand un assureacute et une compagnie drsquoassurance concluent un contrat au terme duquel lrsquoassureacute paie une prime (baseacutee sur un calcul deacuteterministe) contre des si-nistres speacutecifieacutes dans le contrat il est clair que chaque partie dispose drsquoinformations diffeacuterentes mais dans ce cas lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation existe des deux cocircteacutes En principe la compagnie drsquoassurance dispose de plus drsquoexpeacuterience des risques agrave assurer (modegraveles idoines) ce qui lui permet (en y rajoutant la mutualisation des risques) de geacuterer efficacement les risques agrave assurer bien que pour certains produits les assureacutes preacutefeacutereraient plus de transparence (voir par exemple [12])

Lrsquoassureacute quant agrave lui dispose dans la plupart des sec-teurs de beaucoup plus drsquoinformation concernant son profil de risque que ce qursquoil communique agrave

lrsquoassureur et il pourrait mecircme en influencer le reacutesul-tat par le biais de son comportement Un exemple en est lrsquoassurance maladie ougrave il existe une asymeacutetrie drsquoinformation intrinsegraveque concernant lrsquoeacutetat de santeacute de lrsquoassureacute (cf [22] et [19 21] pour des eacutetudes sur certains types drsquoassurance-vie) Aussi telle asymeacutetrie peut ecirctre la conseacutequence de nouvelles reacuteglementations (cf [23]) Le secteur de lrsquoassurance automobile a une longue pratique de reacuteduction de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation concernant le profil de risque des assureacutes via le systegraveme de bonus-malus qui a lrsquoavantage suppleacute-mentaire drsquoinciter les assureacutes agrave conduire prudemment La tendance actuelle est de pousser le dispositif plus loin encore avec la collecte drsquoinformations reacuteelles sur la conduite des assureacutes via des systegravemes teacuteleacutematiques embarqueacutes(cf [18 6]) Crsquoest une excellente illustra-tion de comment une quantiteacute importante de don-neacutees suppleacutementaires peut ecirctre et sera certainement utiliseacutee pour concevoir les futurs contrats drsquoassurance (une tendance parfois appeleacutee Le Big Data dans lrsquoAs-surance) Lrsquoexploitation des donneacutees inclut lrsquoanalyse approfondie des eacutecarts de comportement des assureacutes (cf [16 20]) et le deacuteveloppement drsquoapplications se servant de ces informations agrave des fins commerciales (cf [17])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et ReacuteassureurComme les assureurs nrsquoaiment pas partager des don-neacutees et statistiques concernant les sinistres dans le cas de nombreux contrats de reacuteassurance non proportion-nels lrsquoassureur ne communique au reacuteassureur qursquoune partie des donneacutees concerneacutees crsquoest-agrave-dire seulement les donneacutees sur les sinistres engageant ou pouvant en-gager la garantie Cette asymeacutetrie drsquoinformation laisse le reacuteassureur dans lrsquoobligation de creacuteer son modegravele preacutedictif avec des donneacutees censureacutees (cf [2]) En pra-tique les reacuteassureurs tentent de compleacuteter les donneacutees censureacutees avec des donneacutees collecteacutees agrave partir de porte-feuilles similaires (parfois obtenues gracircce agrave un contrat de reacuteassurance proportionnelle couvrant des risques similaires drsquoune mecircme importance) Les subtiliteacutes relatives agrave lrsquoeacutevaluation des risques et la deacutetermination des primes de reacuteassurance varient en fonction du type de contrat et la meacutethodologie choisie (meacutethode par expeacuterience vs meacutethode par exposition etc [1]) Une autre source drsquoasymeacutetrie drsquoinformation tient dans le fait que les sinistres passeacutes sont souvent comptabi-liseacutes agrave leur valeur ldquodrsquoengagementrdquo (ie la valeur des indemniteacutes reacuteellement verseacutees plus une estimation rai-sonnable des indemniteacutes restant agrave verser) et celle-ci peut srsquoaveacuterer significativement diffeacuterente de la valeur

14 les cahiers louis Bachelier

finale des indemniteacutes Dans des secteurs drsquoactiviteacute ougrave le regraveglement des sinistres peut prendre de nombreuses anneacutees on comprend facilement que les reacuteassureurs ne peuvent pas compter exclusivement sur les don-neacutees concernant le montant reacuteel final des indemniteacutes verseacutees mais doivent eacutegalement prendre en compte la valeur (estimeacutee) des engagements dans lrsquoeacutelaboration de leurs modegraveles Cette situation pose de reacuteels deacutefis statistiques et peu de recherche theacuteorique existe sur le sujet actuellement (cf [2])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et InvestisseurDes actionnaires actuels ou potentiels des socieacuteteacutes drsquoassurance fondent leurs deacutecisions drsquoinvestir sur les chiffres financiers et commerciaux et des indicateurs de performance mais en geacuteneacuteral ces chiffres ne tra-duisent pas lrsquointeacutegraliteacute de la structure de risque des assureurs et reacuteassureurs Compte tenu des Solvency Capital Requirements une socieacuteteacute doit tenir compte du coucirct de lever et conserver ce capital Ce coucirct aura un impact sur nombre de deacutecisions de strateacutegie et de gestion y compris la deacutecision de recourir agrave la reacuteassu-rance Le taux du coucirct du capital est influenceacute non seulement par le profil du risque mais eacutegalement par la structure de lrsquoinformation Par conseacutequence le taux du coucirct du capital est bien le reacutesultat de lrsquooffre et la de-mande sur le marcheacute mais tient eacutegalement compte de regravegles et directives en matiegravere de reporting financier telle la constitution de reacuteserves pour pertes et pour sinistres survenus mais non encore deacuteclareacutes Pour une discussion drsquoun point de vue actuariel voir [514]

Un autre domaine de recherche qui srsquointeacuteresse acti-vement aux aspects pratiques de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation est la titrisation des risques drsquoassurance en particulier celui de catastrophes naturelles et plus reacutecemment le risque de longeacuteviteacute La titrisation trans-fegravere le risque drsquoassurance aux marcheacutes des capitaux et constitue donc un instrument particuliegraverement utile lorsqursquoil srsquoagit de risques de grande ampleur ayant de fortes correacutelations ougrave les contrats de reacuteassurance tradi-tionnels ne sont pas eacuteconomiquement viables compte tenu du coucirct monumental des capitaux Lrsquohistoire des produits de titrisation illustre parfaitement comment lrsquoeacutevolution des attitudes envers lrsquoasymeacutetrie drsquoinforma-tion (dans ce cas preacutecis entre eacutemetteur et investisseur) a modifieacute les produits et leur attractiviteacute Des deacuteclen-cheurs anciens baseacutes sur lrsquoexpeacuterience effective de pertes des compagnies individuelles et des indices sectoriels ont eacutevolueacute vers des deacuteclencheurs parameacutetriques cal-culeacutes en tenant compte de quantiteacutes physiques lieacutees

aux catastrophes comme la vitesse du vent la pression atmospheacuterique etc Alors que les deacuteclencheurs para-meacutetriques diminuent lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation (qui dans le cas des deacuteclencheurs speacutecifiques agrave chaque en-treprise eacutetait significative) ils augmentent le risque de base crsquoest-agrave-dire le risque que le deacuteclencheur ne reflegravete pas lrsquoexpeacuterience reacuteelle de lrsquoeacutemetteur ce qui reacuteduit lrsquoef-ficaciteacute du produit pour lrsquoeacutemetteur Comme on pou-vait srsquoy attendre lrsquoactiviteacute de ce marcheacute a connu une certaine volatiliteacute dans le temps avec une forte aug-mentation des volumes dans des peacuteriodes ougrave le mar-cheacute traditionnel de la reacuteassurance ne pouvait pas faire face agrave ce type de demande (cf [9 11]) La valorisation de ces produits se situe agrave la frontiegravere entre assurance et finance Crsquoest eacutegalement un sujet de recherche tregraves inteacuteressant sur le plan theacuteorique (cf [7 15 4 8] et [10 24])

Asymeacutetrie drsquoinformation entre Assureurs et ConcurrentsEnfin comme dans toute activiteacute eacuteconomique il existe une concurrence entre assureurs pour un nombre li-miteacute de clients (assureacutes) et il existe eacutegalement une asy-meacutetrie drsquoinformation naturelle entre assureurs concur-rents concernant le profil du risque lrsquoappreacuteciation des conditions marcheacute lrsquoapproche meacutethodologique du risque et la deacutetermination des primes Parmi des approches reacutecentes on peut citer la deacutetermination des primes drsquoassurance via une analyse fondeacutee sur la theacuteo-rie des jeux tenant compte drsquoune preacutevision de la poli-tique des primes des concurrents des comportements agrave risque des assureacutes et des contraintes reacuteglementaires en matiegravere de fonds propres (voir [13]) le tout dans un contexte drsquoinformations incomplegravetes

Lrsquoobjectif de ce court chapitre eacutetait de mettre en lumiegravere plusieurs domaines de recherche dans les sciences actuarielles ougrave lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation joue directement ou indirec-tement un rocircle important Cette liste est forceacutement incomplegravete mais elle souligne lrsquoimportance de la modeacutelisation drsquoinforma-tion dans le secteur de lrsquoassurance et de la reacuteassurance qui est eacutegalement lrsquoobjet de tregraves nombreux projets de recherche en cours

retrouvez lrsquoarticle inteacutegral

drsquohansjoumlrg Albrecher sur

wwwinformationinfinanceandinsuranceorg

les cahiers louis Bachelier 15

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Page 4: Information en Finance et assurance

4 les cahiers louis Bachelier

les agents eacuteconomiques ne disposent pas tous du mecircme niveau drsquoinformation les coucircts drsquoinvestissement drsquoune entre-prise par exemple sont connus de cette derniegravere mais pas de ses concurrents De mecircme un employeur ne peut observer en permanence ses salarieacutes il ne connaicirct donc pas parfaitement le niveau drsquoeffort de chaque em-ployeacute srsquoil souhaite creacuteer une in-citation sa seule possibiliteacute est de conditionner le salaire verseacute au reacutesultat

en formalisant les interac-tions entre les agents (appe-leacutes joueurs) les modegraveles de la theacuteorie des jeux cherchent agrave deacutefinir les eacutequilibres dans ce contexte de problegraveme drsquoinfor-mation autrement dit ils visent agrave deacuteterminer la ou les strateacutegies qui permettent de satisfaire au mieux lrsquoensemble des joueurs ces derniers sont en effet strateacute-giques ils cherchent agrave optimiser un certain critegravere (geacuteneacuteralement leur paiement ou utiliteacute espeacutereacutes) et rationnels ils ont la capaciteacute

de reacutesoudre un problegraveme drsquoopti-misation complexe

quelle valeur pour une information priveacutee

lrsquoeacutetude des eacutequilibres dans ces modegraveles est deacutelicate et sou-legraveve plusieurs questions drsquointeacute-recirct pour la recherche Plusieurs drsquoentre elles ont eacuteteacute abordeacutees lors du semestre theacutematique ldquoinformation en Finance et assurancerdquo comme la valeur drsquoune information priveacutee ou lrsquouti-lisation strateacutegique de celle-ci

Jeacuterocircme renault a ainsi eacutetudieacute la valeur drsquoune information pri-veacutee dans un jeu agrave somme nulle crsquoest-agrave-dire un jeu ougrave les inteacute-

comment une information priveacutee impacte le comportement des joueurs

recircts des joueurs sont totalement opposeacutes en situation drsquoinfor-mation incomplegravete la valeur de cette information correspond au paiement optimal que peut se garantir le joueur a dans le jeu cette approche permet drsquoordon-ner diffeacuterentes structures drsquoinfor-mation en fonction de leur qua-liteacute (ou valeur) du point de vue du joueur a mais aussi de les diffeacuterencier de maniegravere quanti-tative crsquoest-agrave-dire de mesurer lrsquoeffet preacutecis drsquoune variation de la structure drsquoinformation sur la valeur du jeu

bluffer pour optimiser son information

au-delagrave de la valeur intrinsegraveque de lrsquoinformation de nombreux travaux srsquointeacuteressent agrave la maniegravere optimale de lrsquoutiliser lrsquoobjectif pour le joueur est de controcircler la maniegravere dont son information est reacuteveacuteleacutee au marcheacute afin de maxi-miser son profit il a donc tout inteacuterecirct agrave ldquoblufferrdquo de maniegravere agrave cacher son information Par exemple si un joueur connaicirct la

Lrsquoobjectif pour le joueur est de controcircler la maniegravere dont son information est reacuteveacuteleacutee

un joueur beacuteneacuteficiant drsquoune information priveacutee a inteacuterecirct agrave ldquoblufferrdquo pour ne pas deacutevoiler son infor-mation aux autres joueurs

il introduit alors un aleacutea dans ses prises de deacutecision

Lrsquoutilisation strateacutegique de lrsquoinformation a des conseacutequences sur le marcheacute que ce soit sur les fluctuations des prix ou sur lrsquoeacutevaluation des actifs

drsquoapregraves un texte de Fabien Gensbittel et les articles citeacutes en reacutefeacuterence

de nombreux travaux acadeacutemiques analysent lrsquoimpact des deacuteseacutequilibres drsquoinformation sur le marcheacute en se basant sur la theacuteorie des jeux ils abordent notamment la question de lrsquoutilisation strateacutegique drsquoune information priveacutee

a retenir

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Fabien Gensbittel est maicirctre de confeacuterences en matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoUniversiteacute Toulouse 1 au sein de Toulouse School of Economics depuis sep-tembre 2011 apregraves une thegravese en matheacutematiques agrave lrsquoUniversiteacute Paris 1 obtenue en 2010 Ses travaux de recherche sont centreacutes sur les aspects matheacutematiques de la theacuteorie des jeux et en particulier sur les problegravemes drsquoinformation dans les jeux dynamiques

valeur drsquoune variable X (disons 0 ou 1) qui est positivement cor-reacuteleacutee agrave la qualiteacute drsquoun projet ris-queacute et deacutecide drsquoinvestir dans le projet agrave la premiegravere eacutetape du jeu uniquement si X = 1 lrsquoobserva-tion de son comportement reacutevegravele compleacutetement son information introduire un aleacutea dans la deacuteci-sion drsquoinvestir (par exemple investir avec probabiliteacute 34 si X = 1 et 14 si X = 0) permet de brouiller les cartes et autorise une plus grande marge de ma-nœuvre

lrsquoutilisation strateacutegique des informations priveacutees nrsquoest pas sans conseacutequence pour le mar-cheacute Bernard de Meyer montre ainsi comment ces strateacutegies expliquent en partie les fluc-tuations des prix il considegravere un marcheacute composeacute de deux agents un agent de taille impor-tante qui beacuteneacuteficie drsquoun accegraves privileacutegieacute agrave lrsquoinformation et un acteur plus petit moins bien in-formeacute lrsquoagent principal sait que son comportement est observeacute il va donc instaurer une strateacutegie afin de dissimuler son informa-tion priveacutee et introduire un aleacutea dans ses actions les eacutevolutions du prix sont donc expliqueacutees par le comportement optimal du joueur informeacute et non comme la conseacutequence de chocs aleacutea-toires indeacutependants

Mecircme srsquoil est extrecircmement sim-plifieacute ce modegravele a lrsquointeacuterecirct de prouver lrsquoimpact de lrsquoinformation sur les prix et de proposer une meacutethode drsquoeacutevaluation drsquoactifs baseacutee sur ce constat

evaluer des options avec une information asymeacutetrique

les problegravemes drsquoinformation ont eacutegalement un impact sur lrsquoeacuteva-

luation des actifs et notamment des options Fabien Gensbittel a ainsi eacutetudieacute lrsquoeacutevaluation des op-tions dites israeacuteliennes agrave savoir des options ougrave lrsquoeacutemetteur peut se reacutetracter agrave tout moment sous reacute-serve de verser une indemniteacute agrave lrsquoacheteur il srsquoagit lagrave encore drsquoun jeu agrave somme nulle puisqursquoeacutemet-teur et acheteur ont des inteacuterecircts opposeacutes les deacutecisions des deux parties se reacuteduisent agrave un temps drsquoarrecirct temps drsquoannu-lation pour lrsquoeacutemetteur temps drsquoexercice pour lrsquoacheteur il est assez naturel dans ce type de problegraveme de consideacuterer que lrsquoin-formation sur la qualiteacute de lrsquoactif sous-jacent est asymeacutetrique et lagrave encore les strateacutegies opti-males prescrivent drsquointroduire un aleacutea dans la prise de deacutecision et non plus drsquoexercer au-delagrave drsquoun certain seuil deacutetermineacute comme crsquoest souvent le cas dans les problegravemes drsquoarrecirct agrave information complegravete concregravetement en lrsquoabsence de problegraveme drsquoinfor-mation lrsquoeacutemetteur retire son offre au-delagrave drsquoun certain seuil de prix connu et fixeacute lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation pousse les acteurs agrave bluffer lrsquoeacutemetteur ne srsquoarrecirc-tera pas agrave un seuil de prix fixe mais agrave un ldquoseuil aleacuteatoirerdquo

jeux agrave somme non-nulle agrave information incomplegravete

les probleacutematiques drsquoinforma-tion incomplegravete existent eacutega-lement dans les jeux agrave somme non-nulle autrement dit les jeux ougrave les inteacuterecircts des joueurs ne sont pas forceacutement opposeacutes

Dans ce cas une forme de coo-peacuteration entre les joueurs est possible comment dans ce contexte lrsquoinformation priveacutee est-elle utiliseacutee un reacutesultat clas-sique est lrsquoexistence drsquoeacutequilibres

appeleacutes plan-joints qui srsquoappa-rentent agrave des contrats entre les deux joueurs ougrave lrsquoinformation pri-veacutee nrsquoest utiliseacutee qursquoune fois au deacutebut du jeu

ce type drsquoeacutequilibre fonctionne en quelque sorte sur le prin-cipe de la menace Des regravegles sont deacutefinies au deacutebut du jeu si un joueur ne les respecte pas il sera peacutenaliseacute par les autres joueurs tout au long du jeu

Neacuteanmoins les eacutequilibres plan-joint ne repreacutesentent qursquoune par-tie des eacutequilibres car on peut construire des exemples de nature diffeacuterente ougrave lrsquoinformation est reacuteveacuteleacutee petit agrave petit tout au long du jeu

Fabien Gensbittel

bibliographie

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retrouvez lrsquoarticle inteacutegral

de Fabien Gensbittel sur

wwwinformationinfinanceandinsuranceorg

6 les cahiers louis Bachelier

la question du prix drsquoeacutequilibre est fondamentale en eacuteconomie et de nombreux travaux tentent de la formaliser le modegravele de Kyle srsquoinscrit dans cette probleacute-matique en faisant le lien entre la formation du prix eacutetabli par lrsquooffre et la demande et lrsquoinformation dont disposent les agents Tous ne sont pas en possession des mecircmes eacuteleacutements un investisseur local par exemple connaicirctra a priori mieux le marcheacute qursquoun in-vestisseur eacutetrangercomment lrsquoinformation dispo-nible ou les diffeacuterences de niveau drsquoinformation entre les agents peuvent-elles influer sur lrsquoactiviteacute des marcheacutes finan-ciers comment cette infor-mation est-elle inteacutegreacutee dans le prix Quels sont les beacuteneacutefices retireacutes drsquoune information privileacute-gieacutee le prix drsquoeacutequilibre en est-il modifieacute Telles sont quelques-unes des questions auxquelles srsquoattache la theacuteorie de Kyle qui modeacutelise lrsquoimpact de lrsquoinformation sur la liquiditeacute et le prix drsquoun actif

un agent privileacutegieacute et strateacutegique

Kyle considegravere un marcheacute sur lequel est vendu un actif risqueacute Trois types drsquoagents interviennent dans les eacutechanges un trader ldquoprivileacutegieacuterdquo des liquidity traders et un market maker

le trader ldquoprivileacutegieacuterdquo beacuteneacuteficie drsquoune information priveacutee sur la va-leur de lrsquoactif il connaicirct sa valeur agrave la date T1 et donc le prix de vente ou drsquoachat potentiel agrave cette date lrsquoagent informeacute est strateacutegique et cherche agrave maximiser le profit qursquoil peut tirer de son information il prend donc en consideacuteration lrsquoimpact de son ordre sur le prix

Modegravele de Kyle lrsquoimpact de lrsquoinformation sur le prix drsquoeacutequilibre

Certains investisseurs beacuteneacuteficient drsquoinformations privileacutegieacutees leur permettant de mieux eacutevaluer la valeur drsquoun actif Comment cette information influence-t-elle lrsquoeacutequilibre du marcheacute quels avantages offre-t-elle Le modegravele de Kyle fournit des eacuteleacutements de reacuteponse

du marcheacute et effectue ses tran-sactions de sorte agrave ce que son information soit reacuteveacuteleacutee au mar-cheacute le plus tardivement possible il ne vendra pas par exemple lrsquoensemble de ses titres en une seule opeacuteration afin drsquoeacuteviter une chute des cours Toutefois via ses transactions agrave lrsquoachat ou agrave la vente il fournit neacutecessairement un signal au marcheacute une partie de son information eacutetant transmise au prix de lrsquoactif

De leur cocircteacute les liquidity traders ne disposent pas drsquoinformation sur la valeur de lrsquoactif ils fournissent de la liquiditeacute en participant aux eacutechanges mais ne donnent pas de signal au marcheacute et nrsquoont donc pas drsquoimpact sur le prix

enfin le market maker observe les flux de transaction sans dis-tinguer la demande du trader informeacute de celle des liquidity tra-ders il fixe le prix en fonction de la demande globale de lrsquoactif agrave lrsquoinstant T et de lrsquoestimation de sa

Le modegravele de Kyle modeacutelise lrsquoimpact de lrsquoinformation sur la liquiditeacute et le prix drsquoun actif

il permet de calculer agrave partir drsquoun prix agrave lrsquoinstant t lrsquoeacutevolution du prix drsquoeacutequilibre au cours du temps

il montre eacutegalement qursquoune information privileacutegieacutee a drsquoautant plus de valeur lorsque le marcheacute est liquide ou bruiteacute Le profit srsquoaccroicirct eacutegalement lorsque la variance du prix agrave lrsquoinstant t est forte

drsquoapregraves un texte de Kerry back et les articles citeacutes en bibliographie

Plus le marcheacute est liquide plus le profit de lrsquoagent informeacute est important

a retenir

les cahiers louis Bachelier 7

Kerry Back est professeur titulaire de la chaire de Finance J Howard Creekmore agrave la Jones Graduate School of Business et professeur drsquoEacuteconomie agrave la faculteacute de Sciences Sociales de Rice University ougrave il enseigne la theacuteorie de valorisation drsquoactifs Il a eacutegalement enseigneacute agrave Northwestern University Indiana University Washington University in St Louis et Texas AampM University A Washington University in St Louis il a occupeacute le poste de Doyen des Affaires Acadeacutemiques de la Olin School of Business et a reccedilu le titre de ldquoMembre Eacuteminent du corps

professoralrdquo Il a eacuteteacute reacutecompenseacute par plusieurs prix de recherche agrave Texas AampM et agrave Rice University Ses domaines de recherche comprennent les investissements et lrsquoorganisation des marcheacutes Il a eacuteteacute reacutedacteur de la Review of Financial Studies coreacutedacteur de Finance amp Stochastics et reacutedacteur adjoint du Journal of Finance et drsquoautres revues

rentabiliteacute espeacutereacutee il nrsquoy a pas de saut juste avant lrsquoannonce du prix le marcheacute incorpore correcte-ment lrsquoinformation et la formation du prix est juste

deacuteterminer le prix drsquoeacutequilibre

le modegravele de Kyle se distingue ainsi du modegravele de Merton lrsquoune des reacutefeacuterences des modegraveles drsquoeacutequilibre de marcheacute qui lui fait lrsquohypothegravese drsquoune symeacutetrie drsquoin-formation le premier considegravere des agents neutres vis-agrave-vis du risque et ayant un impact sur le marcheacute Drsquoougrave la volonteacute de lrsquoagent informeacute de mener ses transac-tions ldquoen douceurrdquo le second au contraire considegravere des agents averses au risque nrsquoayant aucun impact sur le prix

lrsquoobjectif du modegravele de Kyle est de deacuteterminer comment lrsquoinforma-tion de lrsquoagent privileacutegieacute se trans-met au prix et de deacutefinir ainsi le prix drsquoeacutequilibre V le prix V1 de lrsquoactif agrave lrsquoinstant T1 est en effet connu a partir de cette informa-tion comment estimer le prix V au fil du temps le modegravele montre que lorsque le prix V1 suit une loi dite gaussienne (dont la dis-tribution est donc uniquement deacutetermineacutee par la moyenne et la

le modegravele de Kyle est un modegravele drsquoeacutequilibre ougrave un agent neutre au risque et informeacute crsquoest-agrave-dire qursquoil connaicirct le prix agrave la date terminale exploite cette information afin de maximiser son profit espeacutereacute Par contre le market maker qui fixe le prix de marcheacute dispose de moins drsquoinformation et en particulier ne peut pas observer lrsquoaction de lrsquoagent informeacute car elle est bruiteacutee par les liquidity traders en utilisant des outils de controcircle stochastique et du filtrage on eacutetudie lrsquoeffet de lrsquoinformation sur les prix drsquoeacutequilibre

meacutethodologie

variance) la formule est explicite et facilement calculable

une information plus ou moins valoriseacutee

le modegravele fournit eacutegalement un eacuteclairage sur les beacuteneacutefices ap-porteacutes par lrsquoinformation priveacutee ces derniers peuvent ainsi ecirctre renforceacutes par plusieurs eacuteleacutements

Tout drsquoabord le profit de lrsquoagent informeacute est drsquoautant plus grand que le marcheacute est liquide autre-ment dit plus le marcheacute integravegre rapidement lrsquoinformation plus celle-ci est beacuteneacutefique au trader privileacutegieacute son profit srsquoaccroicirct eacutega-lement avec le bruit du marcheacute Plus le bruit est important plus lrsquoinformation priveacutee sera deacutevoileacutee tardivement au marcheacute et plus lrsquoagent pourra en tirer profit

enfin plus la variance du prix V1 est forte plus les valeurs pro-bables du prix drsquoeacutequilibre V sont larges il est alors plus difficile pour les traders non informeacutes de faire une juste estimation de V le gain pour lrsquoagent privileacutegieacute est donc plus fort

le modegravele de Kyle connaicirct de nombreuses extensions il existe

ainsi des formules qui integravegrent plusieurs agents informeacutes ou un agent informeacute mais ne connais-sant pas exactement le prix V1 Drsquoautres considegraverent un prix V1 qui ne suit pas une loi gaussienne ou encore un marcheacute composeacute drsquoun actif risqueacute ainsi que drsquoun deacuteriveacute Quelles que soient les variations le modegravele de Kyle constitue en tout cas une avanceacutee dans la compreacutehension du rocircle de lrsquoinfor-mation sur les marcheacutes et sur la formation du prix drsquoeacutequilibre

Kerry back

bibliographie

Back K 1992 insider tra-ding in continuous time review of Financial studies 5 387-409

Kyle as 1985 conti-nuous auctions and insider trading econometrica 53 1315-1336

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8 les cahiers louis Bachelier

la sec (securities and exchange commission) lrsquoorganisme feacutedeacuteral ameacutericain de regraveglementation et de controcircle des marcheacutes finan-ciers deacutefinit le deacutelit drsquoinitieacute comme ldquole fait drsquoacheter ou de vendre un titre ou une valeur en violation des obligations fiduciaires etou de confiance tandis que lrsquoon dispose drsquoinformations confidentielles non-publiques concernant ladite valeur le deacutelit drsquoinitieacute peut aussi englober le fait de divulguer des informations confidentielles agrave un tiers le fait pour le tiers de neacutego-cier des titres objets desdites informations confidentielles ainsi que le neacutegoce de titres par toute personne qui deacutetournerait de telles informations agrave son profitrdquo

si ces contours sont clairs le deacutelit drsquoinitieacute demeure difficile agrave prouver et donc agrave sanctionner la modeacuteli-sation matheacutematique pourrait-elle permettre de mieux cerner le com-portement des fraudeurs et ainsi de mieux les deacutetecter Plusieurs travaux de recherche ont eacuteteacute me-neacutes sur ce sujet

Pas de profit sans risque

le processus de modeacutelisation re-pose en effet sur la notion drsquoinfor-mation on peut ainsi consideacuterer qursquoune collection drsquoeacuteveacutenements appeleacutee Ft repreacutesente lrsquoensemble des informations publiques concernant le marcheacute financier et disponibles agrave un moment t un initieacute possegravede par deacutefinition une information priveacutee sur un eacuteveacute-nement ne faisant pas partie de cet ensemble il peut srsquoagir par exemple drsquoun investisseur qui a connaissance de lrsquoavanceacutee des tests cliniques drsquoun nouveau meacute-dicament sa collection drsquoeacuteveacutene-ments observables devient alors plus grande que la collection de reacutefeacuterence Ft

lutter contre le deacutelit drsquoinitieacute gracircce agrave la modeacutelisation

Traditionnellement les modegraveles sont construits sur la notion drsquoab-sence drsquoarbitrage autrement dit ils considegraverent qursquoil est impossible de reacutealiser des profits sans assu-mer une part de risque le risque nul nrsquoexiste pas Mais il arrive qursquoune information priveacutee puisse creacuteer des opportuniteacutes drsquoarbi-trage ou du moins des situations tregraves proches de lrsquoarbitrage en lrsquooccurrence si un investisseur sait agrave lrsquoavance qursquoune compagnie va mettre sur le marcheacute un nouveau meacutedicament ses chances de reacutealiser une plus-value sont tregraves fortes et son risque faiblehellip

tirer profit drsquoune information priveacutee

lrsquoinitieacute peut ainsi tirer avantage de son information de plusieurs ma-niegraveres Dans lrsquoexemple preacutesenteacute la solution la plus simple est eacutevidem-ment drsquoacheter ou de vendre des actions de la compagnie pharma-ceutique selon les reacutesultats du test Mais lrsquoinformation peut aussi gui-der lrsquoachat de produits deacuteriveacutes ou

Un agent initieacute peut reacutealiser des profits sans prendre de risque ou presque

un agent initieacute possegravede une collection drsquoinformations plus grande que celle des autres agents Cette information suppleacutementaire change sa perception du marcheacute et son eacutevaluation du prix drsquoun actif

Le modegravele preacutesenteacute permet drsquooptimiser lrsquoutilisation de cette information priveacutee en analysant les deacuteviations des cours par rapport agrave une valeur de reacutefeacuterence il permet agrave lrsquoagent de savoir si un titre est sous ou sur eacutevalueacute

Le modegravele est eacutegalement utile au reacutegulateur pour mieux cerner le comportement des initieacutes et donc mieux lutter contre ces pratiques

drsquoapregraves un texte de Philip Protter et les articles citeacutes en bibliographie

Gracircce agrave une information priveacutee un agent peut reacutealiser drsquoimportants profits pour un minimum de risque en permettant de mieux comprendre lrsquoutilisation de cette information la modeacutelisation aide agrave lutter contre les deacutelits drsquoinitieacutes

a retenir

les cahiers louis Bachelier 9

Philip Protter est Fellow du IMS (Center for Intelligent Management Systems) reacute-dacteur adjoint de neuf revues scientifiques membre de deux comiteacutes de reacutedaction et a eacuteteacute reacutedacteur en chef de la revue Stochastic Processes and their Applications Ses principaux domaines de recherche comprennent les matheacutematiques finan-ciegraveres (modegraveles de valorisation drsquoactifs modegraveles de valorisation et de couver-ture de deacuteriveacutes problegravemes de liquiditeacute bulles financiegraveres deacutelits drsquoinitieacute trading agrave haute freacutequence risque de creacutedit) la theacuteorie de lrsquointeacutegrale stochastique la theacuteorie des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques les meacutethodes de reacutesolution

numeacuterique des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques la discreacutetisation de processus stochastiques (en tant que branche de la statistique matheacutematique) eacutequations diffeacuterentielles stochastiques et ldquoeacutequations diffeacuterentielles stochastiques retrogradesrdquo les processus de Markov et la theacuteorie du filtrage Il est lrsquoau-teur et co-auteur de deux manuels acadeacutemiques et de deux ouvrages scientifiques

drsquooptions ces derniegraveres donnent le droit drsquoacheter ou de vendre un titre dans le futur agrave un prix fixeacute Bien utiliseacutee une option peut ainsi geacuteneacuterer drsquoimportants profits pour un investissement modeste et ce sur une courte peacuteriode

les informations suppleacutementaires ont en effet un impact sur lrsquoesti-mation du prix drsquoun actif un agent eacutevalue les flux futurs drsquoun actif via la collection drsquoinformations dispo-nibles si sa collection devient plus grande sa perception du marcheacute est modifieacutee lrsquoestimation du prix eacutevolue ainsi que lrsquoeacutevaluation de la probabiliteacute drsquoun eacuteveacutenement comme la survenance drsquoune faillite par exemple

deacutetecter une valeur hors norme

lrsquoauteur eacutetudie ainsi un modegravele qui calcule la ldquojuste valeurrdquo drsquoun actif et ses proprieacuteteacutes (variance eacutecart-type etc) en prenant compte de lrsquoinformation disponible modeacuteliseacutee pour un agent initieacute par un grossis-sement de filtration il est ainsi pos-sible drsquoanalyser les deacuteviations des cours par rapport agrave cette valeur la filtration modeacutelise ici lrsquoinforma-tion de lrsquoinitieacute et permet de montrer comment tirer profit drsquoune infor-mation privileacutegieacutee lrsquoagent est en mesure de savoir si une option est

sous ou sur eacutevalueacutee il ajuste ses investissements en conseacutequence augmentant de ce fait consideacutera-blement ses probabiliteacutes de pro-fits le modegravele permet eacutegalement de quantifier lrsquoavantage obtenu par lrsquoinitieacute gracircce agrave son information privileacutegieacutee

Toutefois comprendre via une analyse matheacutematique comment certains utilisent une information priveacutee peut aider le reacutegulateur agrave deacutetecter les deacutelits drsquoinitieacute et agrave poursuivre les contrevenants en effet en eacutevaluant la valeur normale de lrsquoactif le modegravele quantifie en quelque sorte un niveau drsquoalerte si une transaction srsquoeffectue agrave un prix trop eacuteloigneacute de la valeur nor-male elle peut ecirctre le fruit drsquoun deacutelit drsquoinitieacute

or lutter contre les deacutelits drsquoinitieacute est primordial pour garantir la flui-diteacute des transactions financiegraveres le marcheacute doit apparaicirctre comme juste Dans le cas contraire srsquoil est perccedilu comme deacutefaillant ou cor-rompu peu drsquoinvestisseurs accep-teront de participer aux eacutechanges les agents perdront confiance et la liquiditeacute sera reacuteduite le rocircle de lrsquoetat est donc de garantir le bon fonctionnement du marcheacute en reacute-duisant lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation et en luttant contre les deacutelits drsquoinitieacute

Philip Protter

lrsquoinformation publique disponible au cours du temps sur le marcheacute est repreacutesenteacutee par une filtration lrsquoinformation drsquoun initieacute qui possegravede une information privileacutegieacutee est ainsi modeacuteliseacutee par un grossissement de cette filtration du marcheacute ceci entraicircne une eacutevaluation des probabiliteacutes drsquooccurrence drsquoeacuteveacutenements diffeacuterentes pour un initieacute par rapport agrave un investisseur standard en particulier sa mesure drsquoeacutevaluation (appeleacute mesure risque neutre) des actifs en est modifieacutee

meacutethodologie

bibliographie

roseline Bilina Falafala amp Philip Protter insider Tra-ding and risk preprint 2015

claudio Fontana Monique Jeanblanc amp shiqi song on arbitrages arising with honest times Finance and stochastics July 2014 Vo-lume 18 issue 3 515-543

Younes Kchia amp Philip Prot-ter on Progressive Filtration expansions with a Process applications to insider Tra-ding international journal of theoretical and applied finance- river edge NJ [ua] World scientific issN 0219-0249 ZDB-iD 14289829 - Vol 182015 4 p 1-48

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10 les cahiers louis Bachelier

appareils connecteacutes GPs sys-tegravemes de monitoring meacutedicaux robots mobiles ces technolo-gies se creacuteent une place dans nos quotidiens et leur utilisation devrait ecirctre encore renforceacutee par la numeacuterisation en cours or tous ces objets ont un point commun ils fonctionnent de faccedilon dyna-mique avec une eacutemission de signal qui eacutevolue continuellement au cours du temps la preacutediction du signal est ainsi plus complexe et neacutecessite des outils matheacutema-tiques adapteacutes

la technique du filtrage reacutepond agrave cette probleacutematique Thorsten schmidt professeur agrave lrsquouniver-siteacute de Fribourg fait le point sur cette meacutethodologie aux multiples applications qursquoest-ce qursquoun problegraveme de filtrage comment cette technique srsquoest-elle deacuteve-loppeacutee Quelles solutions peut-elle apporter

contrairement agrave la statistique classique le filtrage vise agrave eacutevaluer

un signal dynamique dont lrsquoobser-vation est perturbeacutee par un bruit comment calculer une estima-tion juste malgreacute une observation bruiteacutee il srsquoagit par exemple de deacutefinir la position drsquoun robot qui se deacuteplace au cours du temps le robot nrsquoest pas dans le champ de vision de son proprieacutetaire il nrsquoest donc pas directement ob-servable Toutefois le proprieacutetaire dispose des donneacutees GPs qui correspondent ici agrave une observa-tion bruiteacutee le but est drsquooptimiser les informations fournies par le GPs afin de calculer la position du robot au cours du temps

comment pallier au manque drsquoinformation gracircce au filtrage

Approche de la statistique moderne le filtrage permet de reacutesoudre de nombreuses probleacutematiques drsquoinformation imparfaite que ce soit dans le cadre des objets connecteacutes de la navigation satellite ou du calcul de risque en finance ses applications sont multiples

Le filtre de Kalman

la theacuteorie du filtrage est neacutee dans les anneacutees 40 sous lrsquoimpul-sion drsquoandrey N Kolmogorov et Norbert Wiener le premier a eacutetu-dieacute la probleacutematique en temps discret tandis que le second lrsquoa abordeacute en temps continu il a en-suite fallu attendre les anneacutees 60 pour connaitre de nouvelles avan-ceacutees avec rudolf e Kalman

lrsquoapproche de Kalman fait office de reacutefeacuterence en matiegravere de fil-trage en se basant sur les lois gaussiennes le modegravele eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal lrsquoinformation corres-pond aux observations bruiteacutees prix donneacutees etc lrsquoavantage principal de cette meacutethode est de donner une formule explicite pour calculer le signal simplifiant ainsi fortement le proceacutedeacute

lrsquoune des utilisations les plus ceacutelegravebres et les plus anciennes du filtre de Kalman remonte agrave la

drsquoapregraves un texte de thorsten schmidt et les articles citeacutes en reacutefeacuterence

Lrsquoavantage principal de la meacutethode de Kalman est de donner une formule explicite et de faible dimension

Le filtrage vise agrave eacutevaluer un signal dynamique dont lrsquoobservation est bruiteacutee

Le modegravele de Kalman eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal il fournit une for-mule explicite et de faible dimension pour calculer le signal simplifiant ainsi le proceacutedeacute

Pour les cas non lineacuteaires des meacutethodes numeacuteriques peuvent ecirctre utiliseacutees

Le filtrage recouvre un large champ drsquoapplication que ce soit en finance dans lrsquoindustrie eacutelectro-nique la robotique ou encore le secteur meacutedical

a retenir

les cahiers louis Bachelier 11

Thorsten Schmidt est professeur de matheacutematiques stochastiques agrave lrsquoUniversiteacute de Fribourg (Allemagne) ougrave il a succeacutedeacute agrave Ernst Eberlein Auparavant il a ensei-gneacute les matheacutematiques financiegraveres agrave lrsquoUniversiteacute de technologie de Chemnitz

Outre son inteacuterecirct pour les matheacutematiques financiegraveres et plus particuliegraverement pour les taux drsquointeacuterecirct les marcheacutes du risque de creacutedit et de lrsquoeacutenergie il a une so-lide expertise en statistique et probabiliteacute Il a reacutecemment co-eacutecrit un ouvrage sur la statistique matheacutematique publieacute chez Springer Sa recherche dans le domaine

du risque de creacutedit porte sur lrsquoimpact de lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation le filtrage non-lineacuteaire les modegraveles drsquoanalyse de risques dynamiques Heath-Jarrow-Morton et les processus affineacutes

mission apollo le modegravele a eacuteteacute utiliseacute pour preacuteparer le voyage de Neil amstrong vers la lune ainsi que son retour notamment pour deacuteterminer agrave quel moment preacutecis la fuseacutee devait rentrer dans lrsquoat-mosphegravere1 il est aujourdrsquohui uti-liseacute dans la plupart des outils de navigation satellite tout comme dans les smartphones ou les jeux videacuteo

le filtre de Kalman ne peut tou-tefois ecirctre employeacute que pour les cas lineacuteaires certains auteurs ont ainsi eacutetendu le cadre lineacuteaire en utilisant des approximations au niveau local

La meacutethode particulaire de filtrage

enfin des meacutethodes numeacuteriques ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees pour les pro-bleacutematiques non lineacuteaires ne pou-vant ecirctre reacutesolues ni par le filtre de Kalman ni par ses extensions Parmi elles figure la meacutethode particulaire de filtrage celle-ci estime la distribution du signal via un proceacutedeacute de reacuteduction sta-tistique dit ldquodiscreacutetisationrdquo qui consiste agrave deacutecouper une seacuterie de donneacutees en un certain nombre de classes repreacutesenteacutees par des particules a lrsquoimage de la meacutethode de Monte carlo cette approche repose sur la loi des grands nombres et la simulation drsquoexpeacuteriences reacutepeacuteteacutees Dans un premier temps les valeurs sont estimeacutees gracircce aux observations disponibles chaque valeur uti-liseacutee est associeacutee agrave un poids de conditionnement Puis agrave chaque simulation les pondeacuterations sont

ajusteacutees en fonction des reacutesul-tats obtenus les particules se deacuteplacent librement agrave partir de lrsquoalgorithme de dynamique du modegravele ce qui est possible dans la mesure ougrave la position exacte de chaque particule est connue on calcule alors la position moyenne pondeacutereacutee des particules agrave partir de leur poids theacuteoriques respec-tifs

un large champ drsquoapplication

les techniques de filtrage consti-tuent des outils preacutecieux afin de pallier aux imperfections de lrsquoinfor-mation ces probleacutematiques sont courantes en particulier dans le domaine financier en effet qursquoil srsquoagisse de calibrer un modegravele de valoriser un portefeuille drsquoac-tifs ou de deacutefinir les strateacutegies de couverture les donneacutees utiliseacutees sont toujours incomplegravetes le fil-trage permet de traiter ce type de question il est notamment employeacute pour calculer le risque de creacutedit une entreprise est en effet reconnue en faillite lorsque sa valeur fondamentale est trop basse Mais cette information nrsquoest eacutevidemment pas connue des acteurs du marcheacute les ob-servations sont bruiteacutees puisque pas entiegraverement disponibles le filtrage peut alors servir agrave estimer le risque de creacutedit agrave partir des diffeacuterentes sources drsquoinformation disponibles croiser les donneacutees des rapports trimestriels du cours des actions ou encore du prix des options permet drsquoeacuteva-luer la probabiliteacute de deacutefaut de la socieacuteteacute

les modegraveles de filtrage ont donc un large champ drsquoapplication et fournissent des eacuteleacutements de reacute-ponse agrave de nombreuses probleacute-matiques Nul doute que les re-cherches vont se poursuivre afin drsquoaccroitre les performances de ces meacutethodes et algorithmes et de faire ainsi face agrave de nouveaux challenges

thorsten schmidt

bibliographieFrey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

Bain a and crisan D (2009) Fundamentals of stochastic Filtering sprin-ger New York

Frey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

Del Moral P (1996) `Non-linear Filtering interacting particle solutionrsquo Markov Processes and related Fields 2(4) 555-580

1 Source Faragher (2012)

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12 les cahiers louis Bachelier

asymeacutetrie drsquoinformation et assurance

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Nous et le Monde Naturel Nous avons souvent besoin de quantifier le risque de lrsquoassureur pour deacuteterminer une eacutechelle de primes eacutequitable pour deacutefinir des strateacutegies solides de ges-tion du risque ou pour deacuteterminer les Solvency Capital Requirements le niveau minimum de fonds propres exigeacutes Dans chacune de ces situations les pertes potentielles constituent une issue future incertaine Mettant de cocircteacute la question quasi-philosophique de savoir si lrsquoincertitude (sur lrsquooccurrence et le montant des sinistres futurs pour lrsquoassureur) est due agrave une insuf-

fisance drsquoinformation ou alors si elle est plutocirct lieacutee au caractegravere intrinsegravequement aleacuteatoire des issues nous nous trouvons geacuteneacuteralement face au workflow suivant

INCERTITUDE i RISQUE i DONNEES i MODELES

La diffeacuterence entre lrsquoincertitude et le risque (selon la deacutefinition de lrsquoeacuteconomiste Frank Knight) est que le risque peut ecirctre quantifieacute crsquoest-agrave-dire que lrsquoon peut en principe deacuteterminer la distribution de probabiliteacute pour le risque en question Apregraves avoir deacutetermineacute quelles caracteacuteristiques constituent les risques agrave quan-

Crsquoest la nature mecircme de lrsquoactiviteacute drsquoassurance que de disposer drsquoun niveau drsquoinformation limiteacute agrave propos des risques agrave assurer et les informations suppleacutementaires sont toujours les bienvenues Il en est de mecircme pour lrsquoactiviteacute de la reacuteassurance La reacuteassurance est une opeacuteration par laquelle une socieacuteteacute drsquoassurance (le ldquoceacutedantrdquo) srsquoassure aupregraves drsquoune autre compagnie drsquoassurance (le ldquoreacuteassureurrdquo) pour une partie des risques qursquoelle porte Il srsquoagit donc lagrave avant tout drsquoune activiteacute drsquoassurance Cependant si lrsquoassurance et la reacuteassurance partagent des caracteacuteristiques communes il existe de nombreuses diffeacuterences structurelles notamment en ce qui concerne lrsquoinformation sur les risques inheacuterents aux polices reacuteassureacutees De plus dans la mesure ougrave les opeacuterations de reacuteassurance impliquent de multiples acteurs lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation constitue un eacuteleacutement important agrave prendre en consideacuteration La gestion du risque traite cette asymeacutetrie de diverses maniegraveres que je propose de commenter en fonction du degreacute drsquoinformation disponible

PAr hAnsjoumlrG ALbreCher

Hansjoumlrg Albrecher a eacutetudieacute les matheacutematiques appliqueacutees et lrsquoastronomie agrave Graz Limerick et Baltimore avant de recevoir son doctorat de la Technische Universitaumlt Graz en 2001 Il a ensuite enseigneacute agrave Graz Leuven et Aarhus avant drsquoecirctre nommeacute directeur drsquoeacutequipe en matheacutematiques financiegraveres et directeur adjoint du Johann Radon Institute de lrsquoAcadeacutemie des Sciences de lrsquoAutriche agrave Linz et professeur de matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoassurance agrave la Universitaumlt Linz (JKU) En 2009 il a eacuteteacute nommeacute professeur des sciences actuarielles agrave HEC de lrsquoUniversiteacute de LausanneSes domaines de recherche incluent la theacuteorie du risque la modeacutelisation du risque dans lrsquoassurance et la reacuteassurance la modeacutelisation des catastrophes naturelles les matheacutematiques financiegraveres la simulation stochastique et plus geacuteneacuteralement les applications de la theacuteorie des probabiliteacutes Il a publieacute plus de 100 articles dans ces domaines et est co-auteur de deux ouvrages Ruin Probabilities (deuxiegraveme eacutedition 2010) et Quantitative Methods for Financial Markets (2013)Dr Albrecher est reacutedacteur au sein drsquoInsurance Mathematics and Economics depuis 2010 coreacutedacteur-en-chef du European Actuarial Journal et de la revue Statistics and Risk Modeling depuis 2011 Il siegravege au comiteacute de reacutedaction de plusieurs autres revues scientifiques et collections drsquoouvrages

les cahiers louis Bachelier 13

tifier on cherche la probabiliteacute pour que ces risques se reacutealisent en partant drsquoobservations du reacuteel en geacuteneacuteral de donneacutees historiques Pour chaque risque agrave eacutevaluer le problegraveme classique reacuteside dans la deacutetermination de la pertinence des donneacutees et de leur degreacute de perti-nence Une difficulteacute suppleacutementaire reacuteside dans le fait que la nature des risques peut eacutevoluer dans le temps et que pour appreacutehender cette eacutevolution lrsquoon doit pouvoir faire appel agrave des meacutethodes statistiques capables drsquoidentifier les eacuteleacutements non-stationnaires inclus dans les seacuteries de donneacutees et agrave des informations reacuteelles connexes dont on dispose (modifications des clauses contractuelles contexte environnemental etc)

De longues anneacutees drsquoexpeacuterience nous ont appris agrave qualifier les diffeacuterents types de risque et agrave tirer des re-lations causales entre eux Ainsi nous avons pu deacuteve-lopper les modegraveles qui servent de base agrave lrsquoeacutevaluation de risques associeacutes

Bien qursquoen geacuteneacuteral les modeacutelisateurs soient conscients des limites de la modeacutelisation la principale motiva-tion derriegravere cette approche est la conviction qursquoil est possible de quantifier preacuteciseacutement les risques et que toute imperfection ou lacune dans un modegravele reacutesulte de donneacutees insuffisantes ou plus geacuteneacuteralement drsquoinformations insuffisantes concernant la nature des risques et les relations entre eux On pourrait dire que le deacuteveloppement de modegraveles de risque par les assu-reurs constitue une tentative de reacuteduire lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation en geacuteneacuteral et de lrsquoinformation dispo-nible pour nous

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureacutes et AssureurQuand un assureacute et une compagnie drsquoassurance concluent un contrat au terme duquel lrsquoassureacute paie une prime (baseacutee sur un calcul deacuteterministe) contre des si-nistres speacutecifieacutes dans le contrat il est clair que chaque partie dispose drsquoinformations diffeacuterentes mais dans ce cas lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation existe des deux cocircteacutes En principe la compagnie drsquoassurance dispose de plus drsquoexpeacuterience des risques agrave assurer (modegraveles idoines) ce qui lui permet (en y rajoutant la mutualisation des risques) de geacuterer efficacement les risques agrave assurer bien que pour certains produits les assureacutes preacutefeacutereraient plus de transparence (voir par exemple [12])

Lrsquoassureacute quant agrave lui dispose dans la plupart des sec-teurs de beaucoup plus drsquoinformation concernant son profil de risque que ce qursquoil communique agrave

lrsquoassureur et il pourrait mecircme en influencer le reacutesul-tat par le biais de son comportement Un exemple en est lrsquoassurance maladie ougrave il existe une asymeacutetrie drsquoinformation intrinsegraveque concernant lrsquoeacutetat de santeacute de lrsquoassureacute (cf [22] et [19 21] pour des eacutetudes sur certains types drsquoassurance-vie) Aussi telle asymeacutetrie peut ecirctre la conseacutequence de nouvelles reacuteglementations (cf [23]) Le secteur de lrsquoassurance automobile a une longue pratique de reacuteduction de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation concernant le profil de risque des assureacutes via le systegraveme de bonus-malus qui a lrsquoavantage suppleacute-mentaire drsquoinciter les assureacutes agrave conduire prudemment La tendance actuelle est de pousser le dispositif plus loin encore avec la collecte drsquoinformations reacuteelles sur la conduite des assureacutes via des systegravemes teacuteleacutematiques embarqueacutes(cf [18 6]) Crsquoest une excellente illustra-tion de comment une quantiteacute importante de don-neacutees suppleacutementaires peut ecirctre et sera certainement utiliseacutee pour concevoir les futurs contrats drsquoassurance (une tendance parfois appeleacutee Le Big Data dans lrsquoAs-surance) Lrsquoexploitation des donneacutees inclut lrsquoanalyse approfondie des eacutecarts de comportement des assureacutes (cf [16 20]) et le deacuteveloppement drsquoapplications se servant de ces informations agrave des fins commerciales (cf [17])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et ReacuteassureurComme les assureurs nrsquoaiment pas partager des don-neacutees et statistiques concernant les sinistres dans le cas de nombreux contrats de reacuteassurance non proportion-nels lrsquoassureur ne communique au reacuteassureur qursquoune partie des donneacutees concerneacutees crsquoest-agrave-dire seulement les donneacutees sur les sinistres engageant ou pouvant en-gager la garantie Cette asymeacutetrie drsquoinformation laisse le reacuteassureur dans lrsquoobligation de creacuteer son modegravele preacutedictif avec des donneacutees censureacutees (cf [2]) En pra-tique les reacuteassureurs tentent de compleacuteter les donneacutees censureacutees avec des donneacutees collecteacutees agrave partir de porte-feuilles similaires (parfois obtenues gracircce agrave un contrat de reacuteassurance proportionnelle couvrant des risques similaires drsquoune mecircme importance) Les subtiliteacutes relatives agrave lrsquoeacutevaluation des risques et la deacutetermination des primes de reacuteassurance varient en fonction du type de contrat et la meacutethodologie choisie (meacutethode par expeacuterience vs meacutethode par exposition etc [1]) Une autre source drsquoasymeacutetrie drsquoinformation tient dans le fait que les sinistres passeacutes sont souvent comptabi-liseacutes agrave leur valeur ldquodrsquoengagementrdquo (ie la valeur des indemniteacutes reacuteellement verseacutees plus une estimation rai-sonnable des indemniteacutes restant agrave verser) et celle-ci peut srsquoaveacuterer significativement diffeacuterente de la valeur

14 les cahiers louis Bachelier

finale des indemniteacutes Dans des secteurs drsquoactiviteacute ougrave le regraveglement des sinistres peut prendre de nombreuses anneacutees on comprend facilement que les reacuteassureurs ne peuvent pas compter exclusivement sur les don-neacutees concernant le montant reacuteel final des indemniteacutes verseacutees mais doivent eacutegalement prendre en compte la valeur (estimeacutee) des engagements dans lrsquoeacutelaboration de leurs modegraveles Cette situation pose de reacuteels deacutefis statistiques et peu de recherche theacuteorique existe sur le sujet actuellement (cf [2])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et InvestisseurDes actionnaires actuels ou potentiels des socieacuteteacutes drsquoassurance fondent leurs deacutecisions drsquoinvestir sur les chiffres financiers et commerciaux et des indicateurs de performance mais en geacuteneacuteral ces chiffres ne tra-duisent pas lrsquointeacutegraliteacute de la structure de risque des assureurs et reacuteassureurs Compte tenu des Solvency Capital Requirements une socieacuteteacute doit tenir compte du coucirct de lever et conserver ce capital Ce coucirct aura un impact sur nombre de deacutecisions de strateacutegie et de gestion y compris la deacutecision de recourir agrave la reacuteassu-rance Le taux du coucirct du capital est influenceacute non seulement par le profil du risque mais eacutegalement par la structure de lrsquoinformation Par conseacutequence le taux du coucirct du capital est bien le reacutesultat de lrsquooffre et la de-mande sur le marcheacute mais tient eacutegalement compte de regravegles et directives en matiegravere de reporting financier telle la constitution de reacuteserves pour pertes et pour sinistres survenus mais non encore deacuteclareacutes Pour une discussion drsquoun point de vue actuariel voir [514]

Un autre domaine de recherche qui srsquointeacuteresse acti-vement aux aspects pratiques de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation est la titrisation des risques drsquoassurance en particulier celui de catastrophes naturelles et plus reacutecemment le risque de longeacuteviteacute La titrisation trans-fegravere le risque drsquoassurance aux marcheacutes des capitaux et constitue donc un instrument particuliegraverement utile lorsqursquoil srsquoagit de risques de grande ampleur ayant de fortes correacutelations ougrave les contrats de reacuteassurance tradi-tionnels ne sont pas eacuteconomiquement viables compte tenu du coucirct monumental des capitaux Lrsquohistoire des produits de titrisation illustre parfaitement comment lrsquoeacutevolution des attitudes envers lrsquoasymeacutetrie drsquoinforma-tion (dans ce cas preacutecis entre eacutemetteur et investisseur) a modifieacute les produits et leur attractiviteacute Des deacuteclen-cheurs anciens baseacutes sur lrsquoexpeacuterience effective de pertes des compagnies individuelles et des indices sectoriels ont eacutevolueacute vers des deacuteclencheurs parameacutetriques cal-culeacutes en tenant compte de quantiteacutes physiques lieacutees

aux catastrophes comme la vitesse du vent la pression atmospheacuterique etc Alors que les deacuteclencheurs para-meacutetriques diminuent lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation (qui dans le cas des deacuteclencheurs speacutecifiques agrave chaque en-treprise eacutetait significative) ils augmentent le risque de base crsquoest-agrave-dire le risque que le deacuteclencheur ne reflegravete pas lrsquoexpeacuterience reacuteelle de lrsquoeacutemetteur ce qui reacuteduit lrsquoef-ficaciteacute du produit pour lrsquoeacutemetteur Comme on pou-vait srsquoy attendre lrsquoactiviteacute de ce marcheacute a connu une certaine volatiliteacute dans le temps avec une forte aug-mentation des volumes dans des peacuteriodes ougrave le mar-cheacute traditionnel de la reacuteassurance ne pouvait pas faire face agrave ce type de demande (cf [9 11]) La valorisation de ces produits se situe agrave la frontiegravere entre assurance et finance Crsquoest eacutegalement un sujet de recherche tregraves inteacuteressant sur le plan theacuteorique (cf [7 15 4 8] et [10 24])

Asymeacutetrie drsquoinformation entre Assureurs et ConcurrentsEnfin comme dans toute activiteacute eacuteconomique il existe une concurrence entre assureurs pour un nombre li-miteacute de clients (assureacutes) et il existe eacutegalement une asy-meacutetrie drsquoinformation naturelle entre assureurs concur-rents concernant le profil du risque lrsquoappreacuteciation des conditions marcheacute lrsquoapproche meacutethodologique du risque et la deacutetermination des primes Parmi des approches reacutecentes on peut citer la deacutetermination des primes drsquoassurance via une analyse fondeacutee sur la theacuteo-rie des jeux tenant compte drsquoune preacutevision de la poli-tique des primes des concurrents des comportements agrave risque des assureacutes et des contraintes reacuteglementaires en matiegravere de fonds propres (voir [13]) le tout dans un contexte drsquoinformations incomplegravetes

Lrsquoobjectif de ce court chapitre eacutetait de mettre en lumiegravere plusieurs domaines de recherche dans les sciences actuarielles ougrave lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation joue directement ou indirec-tement un rocircle important Cette liste est forceacutement incomplegravete mais elle souligne lrsquoimportance de la modeacutelisation drsquoinforma-tion dans le secteur de lrsquoassurance et de la reacuteassurance qui est eacutegalement lrsquoobjet de tregraves nombreux projets de recherche en cours

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drsquohansjoumlrg Albrecher sur

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les cahiers louis Bachelier 15

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Page 5: Information en Finance et assurance

les cahiers louis Bachelier 5

Fabien Gensbittel est maicirctre de confeacuterences en matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoUniversiteacute Toulouse 1 au sein de Toulouse School of Economics depuis sep-tembre 2011 apregraves une thegravese en matheacutematiques agrave lrsquoUniversiteacute Paris 1 obtenue en 2010 Ses travaux de recherche sont centreacutes sur les aspects matheacutematiques de la theacuteorie des jeux et en particulier sur les problegravemes drsquoinformation dans les jeux dynamiques

valeur drsquoune variable X (disons 0 ou 1) qui est positivement cor-reacuteleacutee agrave la qualiteacute drsquoun projet ris-queacute et deacutecide drsquoinvestir dans le projet agrave la premiegravere eacutetape du jeu uniquement si X = 1 lrsquoobserva-tion de son comportement reacutevegravele compleacutetement son information introduire un aleacutea dans la deacuteci-sion drsquoinvestir (par exemple investir avec probabiliteacute 34 si X = 1 et 14 si X = 0) permet de brouiller les cartes et autorise une plus grande marge de ma-nœuvre

lrsquoutilisation strateacutegique des informations priveacutees nrsquoest pas sans conseacutequence pour le mar-cheacute Bernard de Meyer montre ainsi comment ces strateacutegies expliquent en partie les fluc-tuations des prix il considegravere un marcheacute composeacute de deux agents un agent de taille impor-tante qui beacuteneacuteficie drsquoun accegraves privileacutegieacute agrave lrsquoinformation et un acteur plus petit moins bien in-formeacute lrsquoagent principal sait que son comportement est observeacute il va donc instaurer une strateacutegie afin de dissimuler son informa-tion priveacutee et introduire un aleacutea dans ses actions les eacutevolutions du prix sont donc expliqueacutees par le comportement optimal du joueur informeacute et non comme la conseacutequence de chocs aleacutea-toires indeacutependants

Mecircme srsquoil est extrecircmement sim-plifieacute ce modegravele a lrsquointeacuterecirct de prouver lrsquoimpact de lrsquoinformation sur les prix et de proposer une meacutethode drsquoeacutevaluation drsquoactifs baseacutee sur ce constat

evaluer des options avec une information asymeacutetrique

les problegravemes drsquoinformation ont eacutegalement un impact sur lrsquoeacuteva-

luation des actifs et notamment des options Fabien Gensbittel a ainsi eacutetudieacute lrsquoeacutevaluation des op-tions dites israeacuteliennes agrave savoir des options ougrave lrsquoeacutemetteur peut se reacutetracter agrave tout moment sous reacute-serve de verser une indemniteacute agrave lrsquoacheteur il srsquoagit lagrave encore drsquoun jeu agrave somme nulle puisqursquoeacutemet-teur et acheteur ont des inteacuterecircts opposeacutes les deacutecisions des deux parties se reacuteduisent agrave un temps drsquoarrecirct temps drsquoannu-lation pour lrsquoeacutemetteur temps drsquoexercice pour lrsquoacheteur il est assez naturel dans ce type de problegraveme de consideacuterer que lrsquoin-formation sur la qualiteacute de lrsquoactif sous-jacent est asymeacutetrique et lagrave encore les strateacutegies opti-males prescrivent drsquointroduire un aleacutea dans la prise de deacutecision et non plus drsquoexercer au-delagrave drsquoun certain seuil deacutetermineacute comme crsquoest souvent le cas dans les problegravemes drsquoarrecirct agrave information complegravete concregravetement en lrsquoabsence de problegraveme drsquoinfor-mation lrsquoeacutemetteur retire son offre au-delagrave drsquoun certain seuil de prix connu et fixeacute lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation pousse les acteurs agrave bluffer lrsquoeacutemetteur ne srsquoarrecirc-tera pas agrave un seuil de prix fixe mais agrave un ldquoseuil aleacuteatoirerdquo

jeux agrave somme non-nulle agrave information incomplegravete

les probleacutematiques drsquoinforma-tion incomplegravete existent eacutega-lement dans les jeux agrave somme non-nulle autrement dit les jeux ougrave les inteacuterecircts des joueurs ne sont pas forceacutement opposeacutes

Dans ce cas une forme de coo-peacuteration entre les joueurs est possible comment dans ce contexte lrsquoinformation priveacutee est-elle utiliseacutee un reacutesultat clas-sique est lrsquoexistence drsquoeacutequilibres

appeleacutes plan-joints qui srsquoappa-rentent agrave des contrats entre les deux joueurs ougrave lrsquoinformation pri-veacutee nrsquoest utiliseacutee qursquoune fois au deacutebut du jeu

ce type drsquoeacutequilibre fonctionne en quelque sorte sur le prin-cipe de la menace Des regravegles sont deacutefinies au deacutebut du jeu si un joueur ne les respecte pas il sera peacutenaliseacute par les autres joueurs tout au long du jeu

Neacuteanmoins les eacutequilibres plan-joint ne repreacutesentent qursquoune par-tie des eacutequilibres car on peut construire des exemples de nature diffeacuterente ougrave lrsquoinformation est reacuteveacuteleacutee petit agrave petit tout au long du jeu

Fabien Gensbittel

bibliographie

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6 les cahiers louis Bachelier

la question du prix drsquoeacutequilibre est fondamentale en eacuteconomie et de nombreux travaux tentent de la formaliser le modegravele de Kyle srsquoinscrit dans cette probleacute-matique en faisant le lien entre la formation du prix eacutetabli par lrsquooffre et la demande et lrsquoinformation dont disposent les agents Tous ne sont pas en possession des mecircmes eacuteleacutements un investisseur local par exemple connaicirctra a priori mieux le marcheacute qursquoun in-vestisseur eacutetrangercomment lrsquoinformation dispo-nible ou les diffeacuterences de niveau drsquoinformation entre les agents peuvent-elles influer sur lrsquoactiviteacute des marcheacutes finan-ciers comment cette infor-mation est-elle inteacutegreacutee dans le prix Quels sont les beacuteneacutefices retireacutes drsquoune information privileacute-gieacutee le prix drsquoeacutequilibre en est-il modifieacute Telles sont quelques-unes des questions auxquelles srsquoattache la theacuteorie de Kyle qui modeacutelise lrsquoimpact de lrsquoinformation sur la liquiditeacute et le prix drsquoun actif

un agent privileacutegieacute et strateacutegique

Kyle considegravere un marcheacute sur lequel est vendu un actif risqueacute Trois types drsquoagents interviennent dans les eacutechanges un trader ldquoprivileacutegieacuterdquo des liquidity traders et un market maker

le trader ldquoprivileacutegieacuterdquo beacuteneacuteficie drsquoune information priveacutee sur la va-leur de lrsquoactif il connaicirct sa valeur agrave la date T1 et donc le prix de vente ou drsquoachat potentiel agrave cette date lrsquoagent informeacute est strateacutegique et cherche agrave maximiser le profit qursquoil peut tirer de son information il prend donc en consideacuteration lrsquoimpact de son ordre sur le prix

Modegravele de Kyle lrsquoimpact de lrsquoinformation sur le prix drsquoeacutequilibre

Certains investisseurs beacuteneacuteficient drsquoinformations privileacutegieacutees leur permettant de mieux eacutevaluer la valeur drsquoun actif Comment cette information influence-t-elle lrsquoeacutequilibre du marcheacute quels avantages offre-t-elle Le modegravele de Kyle fournit des eacuteleacutements de reacuteponse

du marcheacute et effectue ses tran-sactions de sorte agrave ce que son information soit reacuteveacuteleacutee au mar-cheacute le plus tardivement possible il ne vendra pas par exemple lrsquoensemble de ses titres en une seule opeacuteration afin drsquoeacuteviter une chute des cours Toutefois via ses transactions agrave lrsquoachat ou agrave la vente il fournit neacutecessairement un signal au marcheacute une partie de son information eacutetant transmise au prix de lrsquoactif

De leur cocircteacute les liquidity traders ne disposent pas drsquoinformation sur la valeur de lrsquoactif ils fournissent de la liquiditeacute en participant aux eacutechanges mais ne donnent pas de signal au marcheacute et nrsquoont donc pas drsquoimpact sur le prix

enfin le market maker observe les flux de transaction sans dis-tinguer la demande du trader informeacute de celle des liquidity tra-ders il fixe le prix en fonction de la demande globale de lrsquoactif agrave lrsquoinstant T et de lrsquoestimation de sa

Le modegravele de Kyle modeacutelise lrsquoimpact de lrsquoinformation sur la liquiditeacute et le prix drsquoun actif

il permet de calculer agrave partir drsquoun prix agrave lrsquoinstant t lrsquoeacutevolution du prix drsquoeacutequilibre au cours du temps

il montre eacutegalement qursquoune information privileacutegieacutee a drsquoautant plus de valeur lorsque le marcheacute est liquide ou bruiteacute Le profit srsquoaccroicirct eacutegalement lorsque la variance du prix agrave lrsquoinstant t est forte

drsquoapregraves un texte de Kerry back et les articles citeacutes en bibliographie

Plus le marcheacute est liquide plus le profit de lrsquoagent informeacute est important

a retenir

les cahiers louis Bachelier 7

Kerry Back est professeur titulaire de la chaire de Finance J Howard Creekmore agrave la Jones Graduate School of Business et professeur drsquoEacuteconomie agrave la faculteacute de Sciences Sociales de Rice University ougrave il enseigne la theacuteorie de valorisation drsquoactifs Il a eacutegalement enseigneacute agrave Northwestern University Indiana University Washington University in St Louis et Texas AampM University A Washington University in St Louis il a occupeacute le poste de Doyen des Affaires Acadeacutemiques de la Olin School of Business et a reccedilu le titre de ldquoMembre Eacuteminent du corps

professoralrdquo Il a eacuteteacute reacutecompenseacute par plusieurs prix de recherche agrave Texas AampM et agrave Rice University Ses domaines de recherche comprennent les investissements et lrsquoorganisation des marcheacutes Il a eacuteteacute reacutedacteur de la Review of Financial Studies coreacutedacteur de Finance amp Stochastics et reacutedacteur adjoint du Journal of Finance et drsquoautres revues

rentabiliteacute espeacutereacutee il nrsquoy a pas de saut juste avant lrsquoannonce du prix le marcheacute incorpore correcte-ment lrsquoinformation et la formation du prix est juste

deacuteterminer le prix drsquoeacutequilibre

le modegravele de Kyle se distingue ainsi du modegravele de Merton lrsquoune des reacutefeacuterences des modegraveles drsquoeacutequilibre de marcheacute qui lui fait lrsquohypothegravese drsquoune symeacutetrie drsquoin-formation le premier considegravere des agents neutres vis-agrave-vis du risque et ayant un impact sur le marcheacute Drsquoougrave la volonteacute de lrsquoagent informeacute de mener ses transac-tions ldquoen douceurrdquo le second au contraire considegravere des agents averses au risque nrsquoayant aucun impact sur le prix

lrsquoobjectif du modegravele de Kyle est de deacuteterminer comment lrsquoinforma-tion de lrsquoagent privileacutegieacute se trans-met au prix et de deacutefinir ainsi le prix drsquoeacutequilibre V le prix V1 de lrsquoactif agrave lrsquoinstant T1 est en effet connu a partir de cette informa-tion comment estimer le prix V au fil du temps le modegravele montre que lorsque le prix V1 suit une loi dite gaussienne (dont la dis-tribution est donc uniquement deacutetermineacutee par la moyenne et la

le modegravele de Kyle est un modegravele drsquoeacutequilibre ougrave un agent neutre au risque et informeacute crsquoest-agrave-dire qursquoil connaicirct le prix agrave la date terminale exploite cette information afin de maximiser son profit espeacutereacute Par contre le market maker qui fixe le prix de marcheacute dispose de moins drsquoinformation et en particulier ne peut pas observer lrsquoaction de lrsquoagent informeacute car elle est bruiteacutee par les liquidity traders en utilisant des outils de controcircle stochastique et du filtrage on eacutetudie lrsquoeffet de lrsquoinformation sur les prix drsquoeacutequilibre

meacutethodologie

variance) la formule est explicite et facilement calculable

une information plus ou moins valoriseacutee

le modegravele fournit eacutegalement un eacuteclairage sur les beacuteneacutefices ap-porteacutes par lrsquoinformation priveacutee ces derniers peuvent ainsi ecirctre renforceacutes par plusieurs eacuteleacutements

Tout drsquoabord le profit de lrsquoagent informeacute est drsquoautant plus grand que le marcheacute est liquide autre-ment dit plus le marcheacute integravegre rapidement lrsquoinformation plus celle-ci est beacuteneacutefique au trader privileacutegieacute son profit srsquoaccroicirct eacutega-lement avec le bruit du marcheacute Plus le bruit est important plus lrsquoinformation priveacutee sera deacutevoileacutee tardivement au marcheacute et plus lrsquoagent pourra en tirer profit

enfin plus la variance du prix V1 est forte plus les valeurs pro-bables du prix drsquoeacutequilibre V sont larges il est alors plus difficile pour les traders non informeacutes de faire une juste estimation de V le gain pour lrsquoagent privileacutegieacute est donc plus fort

le modegravele de Kyle connaicirct de nombreuses extensions il existe

ainsi des formules qui integravegrent plusieurs agents informeacutes ou un agent informeacute mais ne connais-sant pas exactement le prix V1 Drsquoautres considegraverent un prix V1 qui ne suit pas une loi gaussienne ou encore un marcheacute composeacute drsquoun actif risqueacute ainsi que drsquoun deacuteriveacute Quelles que soient les variations le modegravele de Kyle constitue en tout cas une avanceacutee dans la compreacutehension du rocircle de lrsquoinfor-mation sur les marcheacutes et sur la formation du prix drsquoeacutequilibre

Kerry back

bibliographie

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de Kerry back sur

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8 les cahiers louis Bachelier

la sec (securities and exchange commission) lrsquoorganisme feacutedeacuteral ameacutericain de regraveglementation et de controcircle des marcheacutes finan-ciers deacutefinit le deacutelit drsquoinitieacute comme ldquole fait drsquoacheter ou de vendre un titre ou une valeur en violation des obligations fiduciaires etou de confiance tandis que lrsquoon dispose drsquoinformations confidentielles non-publiques concernant ladite valeur le deacutelit drsquoinitieacute peut aussi englober le fait de divulguer des informations confidentielles agrave un tiers le fait pour le tiers de neacutego-cier des titres objets desdites informations confidentielles ainsi que le neacutegoce de titres par toute personne qui deacutetournerait de telles informations agrave son profitrdquo

si ces contours sont clairs le deacutelit drsquoinitieacute demeure difficile agrave prouver et donc agrave sanctionner la modeacuteli-sation matheacutematique pourrait-elle permettre de mieux cerner le com-portement des fraudeurs et ainsi de mieux les deacutetecter Plusieurs travaux de recherche ont eacuteteacute me-neacutes sur ce sujet

Pas de profit sans risque

le processus de modeacutelisation re-pose en effet sur la notion drsquoinfor-mation on peut ainsi consideacuterer qursquoune collection drsquoeacuteveacutenements appeleacutee Ft repreacutesente lrsquoensemble des informations publiques concernant le marcheacute financier et disponibles agrave un moment t un initieacute possegravede par deacutefinition une information priveacutee sur un eacuteveacute-nement ne faisant pas partie de cet ensemble il peut srsquoagir par exemple drsquoun investisseur qui a connaissance de lrsquoavanceacutee des tests cliniques drsquoun nouveau meacute-dicament sa collection drsquoeacuteveacutene-ments observables devient alors plus grande que la collection de reacutefeacuterence Ft

lutter contre le deacutelit drsquoinitieacute gracircce agrave la modeacutelisation

Traditionnellement les modegraveles sont construits sur la notion drsquoab-sence drsquoarbitrage autrement dit ils considegraverent qursquoil est impossible de reacutealiser des profits sans assu-mer une part de risque le risque nul nrsquoexiste pas Mais il arrive qursquoune information priveacutee puisse creacuteer des opportuniteacutes drsquoarbi-trage ou du moins des situations tregraves proches de lrsquoarbitrage en lrsquooccurrence si un investisseur sait agrave lrsquoavance qursquoune compagnie va mettre sur le marcheacute un nouveau meacutedicament ses chances de reacutealiser une plus-value sont tregraves fortes et son risque faiblehellip

tirer profit drsquoune information priveacutee

lrsquoinitieacute peut ainsi tirer avantage de son information de plusieurs ma-niegraveres Dans lrsquoexemple preacutesenteacute la solution la plus simple est eacutevidem-ment drsquoacheter ou de vendre des actions de la compagnie pharma-ceutique selon les reacutesultats du test Mais lrsquoinformation peut aussi gui-der lrsquoachat de produits deacuteriveacutes ou

Un agent initieacute peut reacutealiser des profits sans prendre de risque ou presque

un agent initieacute possegravede une collection drsquoinformations plus grande que celle des autres agents Cette information suppleacutementaire change sa perception du marcheacute et son eacutevaluation du prix drsquoun actif

Le modegravele preacutesenteacute permet drsquooptimiser lrsquoutilisation de cette information priveacutee en analysant les deacuteviations des cours par rapport agrave une valeur de reacutefeacuterence il permet agrave lrsquoagent de savoir si un titre est sous ou sur eacutevalueacute

Le modegravele est eacutegalement utile au reacutegulateur pour mieux cerner le comportement des initieacutes et donc mieux lutter contre ces pratiques

drsquoapregraves un texte de Philip Protter et les articles citeacutes en bibliographie

Gracircce agrave une information priveacutee un agent peut reacutealiser drsquoimportants profits pour un minimum de risque en permettant de mieux comprendre lrsquoutilisation de cette information la modeacutelisation aide agrave lutter contre les deacutelits drsquoinitieacutes

a retenir

les cahiers louis Bachelier 9

Philip Protter est Fellow du IMS (Center for Intelligent Management Systems) reacute-dacteur adjoint de neuf revues scientifiques membre de deux comiteacutes de reacutedaction et a eacuteteacute reacutedacteur en chef de la revue Stochastic Processes and their Applications Ses principaux domaines de recherche comprennent les matheacutematiques finan-ciegraveres (modegraveles de valorisation drsquoactifs modegraveles de valorisation et de couver-ture de deacuteriveacutes problegravemes de liquiditeacute bulles financiegraveres deacutelits drsquoinitieacute trading agrave haute freacutequence risque de creacutedit) la theacuteorie de lrsquointeacutegrale stochastique la theacuteorie des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques les meacutethodes de reacutesolution

numeacuterique des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques la discreacutetisation de processus stochastiques (en tant que branche de la statistique matheacutematique) eacutequations diffeacuterentielles stochastiques et ldquoeacutequations diffeacuterentielles stochastiques retrogradesrdquo les processus de Markov et la theacuteorie du filtrage Il est lrsquoau-teur et co-auteur de deux manuels acadeacutemiques et de deux ouvrages scientifiques

drsquooptions ces derniegraveres donnent le droit drsquoacheter ou de vendre un titre dans le futur agrave un prix fixeacute Bien utiliseacutee une option peut ainsi geacuteneacuterer drsquoimportants profits pour un investissement modeste et ce sur une courte peacuteriode

les informations suppleacutementaires ont en effet un impact sur lrsquoesti-mation du prix drsquoun actif un agent eacutevalue les flux futurs drsquoun actif via la collection drsquoinformations dispo-nibles si sa collection devient plus grande sa perception du marcheacute est modifieacutee lrsquoestimation du prix eacutevolue ainsi que lrsquoeacutevaluation de la probabiliteacute drsquoun eacuteveacutenement comme la survenance drsquoune faillite par exemple

deacutetecter une valeur hors norme

lrsquoauteur eacutetudie ainsi un modegravele qui calcule la ldquojuste valeurrdquo drsquoun actif et ses proprieacuteteacutes (variance eacutecart-type etc) en prenant compte de lrsquoinformation disponible modeacuteliseacutee pour un agent initieacute par un grossis-sement de filtration il est ainsi pos-sible drsquoanalyser les deacuteviations des cours par rapport agrave cette valeur la filtration modeacutelise ici lrsquoinforma-tion de lrsquoinitieacute et permet de montrer comment tirer profit drsquoune infor-mation privileacutegieacutee lrsquoagent est en mesure de savoir si une option est

sous ou sur eacutevalueacutee il ajuste ses investissements en conseacutequence augmentant de ce fait consideacutera-blement ses probabiliteacutes de pro-fits le modegravele permet eacutegalement de quantifier lrsquoavantage obtenu par lrsquoinitieacute gracircce agrave son information privileacutegieacutee

Toutefois comprendre via une analyse matheacutematique comment certains utilisent une information priveacutee peut aider le reacutegulateur agrave deacutetecter les deacutelits drsquoinitieacute et agrave poursuivre les contrevenants en effet en eacutevaluant la valeur normale de lrsquoactif le modegravele quantifie en quelque sorte un niveau drsquoalerte si une transaction srsquoeffectue agrave un prix trop eacuteloigneacute de la valeur nor-male elle peut ecirctre le fruit drsquoun deacutelit drsquoinitieacute

or lutter contre les deacutelits drsquoinitieacute est primordial pour garantir la flui-diteacute des transactions financiegraveres le marcheacute doit apparaicirctre comme juste Dans le cas contraire srsquoil est perccedilu comme deacutefaillant ou cor-rompu peu drsquoinvestisseurs accep-teront de participer aux eacutechanges les agents perdront confiance et la liquiditeacute sera reacuteduite le rocircle de lrsquoetat est donc de garantir le bon fonctionnement du marcheacute en reacute-duisant lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation et en luttant contre les deacutelits drsquoinitieacute

Philip Protter

lrsquoinformation publique disponible au cours du temps sur le marcheacute est repreacutesenteacutee par une filtration lrsquoinformation drsquoun initieacute qui possegravede une information privileacutegieacutee est ainsi modeacuteliseacutee par un grossissement de cette filtration du marcheacute ceci entraicircne une eacutevaluation des probabiliteacutes drsquooccurrence drsquoeacuteveacutenements diffeacuterentes pour un initieacute par rapport agrave un investisseur standard en particulier sa mesure drsquoeacutevaluation (appeleacute mesure risque neutre) des actifs en est modifieacutee

meacutethodologie

bibliographie

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appareils connecteacutes GPs sys-tegravemes de monitoring meacutedicaux robots mobiles ces technolo-gies se creacuteent une place dans nos quotidiens et leur utilisation devrait ecirctre encore renforceacutee par la numeacuterisation en cours or tous ces objets ont un point commun ils fonctionnent de faccedilon dyna-mique avec une eacutemission de signal qui eacutevolue continuellement au cours du temps la preacutediction du signal est ainsi plus complexe et neacutecessite des outils matheacutema-tiques adapteacutes

la technique du filtrage reacutepond agrave cette probleacutematique Thorsten schmidt professeur agrave lrsquouniver-siteacute de Fribourg fait le point sur cette meacutethodologie aux multiples applications qursquoest-ce qursquoun problegraveme de filtrage comment cette technique srsquoest-elle deacuteve-loppeacutee Quelles solutions peut-elle apporter

contrairement agrave la statistique classique le filtrage vise agrave eacutevaluer

un signal dynamique dont lrsquoobser-vation est perturbeacutee par un bruit comment calculer une estima-tion juste malgreacute une observation bruiteacutee il srsquoagit par exemple de deacutefinir la position drsquoun robot qui se deacuteplace au cours du temps le robot nrsquoest pas dans le champ de vision de son proprieacutetaire il nrsquoest donc pas directement ob-servable Toutefois le proprieacutetaire dispose des donneacutees GPs qui correspondent ici agrave une observa-tion bruiteacutee le but est drsquooptimiser les informations fournies par le GPs afin de calculer la position du robot au cours du temps

comment pallier au manque drsquoinformation gracircce au filtrage

Approche de la statistique moderne le filtrage permet de reacutesoudre de nombreuses probleacutematiques drsquoinformation imparfaite que ce soit dans le cadre des objets connecteacutes de la navigation satellite ou du calcul de risque en finance ses applications sont multiples

Le filtre de Kalman

la theacuteorie du filtrage est neacutee dans les anneacutees 40 sous lrsquoimpul-sion drsquoandrey N Kolmogorov et Norbert Wiener le premier a eacutetu-dieacute la probleacutematique en temps discret tandis que le second lrsquoa abordeacute en temps continu il a en-suite fallu attendre les anneacutees 60 pour connaitre de nouvelles avan-ceacutees avec rudolf e Kalman

lrsquoapproche de Kalman fait office de reacutefeacuterence en matiegravere de fil-trage en se basant sur les lois gaussiennes le modegravele eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal lrsquoinformation corres-pond aux observations bruiteacutees prix donneacutees etc lrsquoavantage principal de cette meacutethode est de donner une formule explicite pour calculer le signal simplifiant ainsi fortement le proceacutedeacute

lrsquoune des utilisations les plus ceacutelegravebres et les plus anciennes du filtre de Kalman remonte agrave la

drsquoapregraves un texte de thorsten schmidt et les articles citeacutes en reacutefeacuterence

Lrsquoavantage principal de la meacutethode de Kalman est de donner une formule explicite et de faible dimension

Le filtrage vise agrave eacutevaluer un signal dynamique dont lrsquoobservation est bruiteacutee

Le modegravele de Kalman eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal il fournit une for-mule explicite et de faible dimension pour calculer le signal simplifiant ainsi le proceacutedeacute

Pour les cas non lineacuteaires des meacutethodes numeacuteriques peuvent ecirctre utiliseacutees

Le filtrage recouvre un large champ drsquoapplication que ce soit en finance dans lrsquoindustrie eacutelectro-nique la robotique ou encore le secteur meacutedical

a retenir

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Thorsten Schmidt est professeur de matheacutematiques stochastiques agrave lrsquoUniversiteacute de Fribourg (Allemagne) ougrave il a succeacutedeacute agrave Ernst Eberlein Auparavant il a ensei-gneacute les matheacutematiques financiegraveres agrave lrsquoUniversiteacute de technologie de Chemnitz

Outre son inteacuterecirct pour les matheacutematiques financiegraveres et plus particuliegraverement pour les taux drsquointeacuterecirct les marcheacutes du risque de creacutedit et de lrsquoeacutenergie il a une so-lide expertise en statistique et probabiliteacute Il a reacutecemment co-eacutecrit un ouvrage sur la statistique matheacutematique publieacute chez Springer Sa recherche dans le domaine

du risque de creacutedit porte sur lrsquoimpact de lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation le filtrage non-lineacuteaire les modegraveles drsquoanalyse de risques dynamiques Heath-Jarrow-Morton et les processus affineacutes

mission apollo le modegravele a eacuteteacute utiliseacute pour preacuteparer le voyage de Neil amstrong vers la lune ainsi que son retour notamment pour deacuteterminer agrave quel moment preacutecis la fuseacutee devait rentrer dans lrsquoat-mosphegravere1 il est aujourdrsquohui uti-liseacute dans la plupart des outils de navigation satellite tout comme dans les smartphones ou les jeux videacuteo

le filtre de Kalman ne peut tou-tefois ecirctre employeacute que pour les cas lineacuteaires certains auteurs ont ainsi eacutetendu le cadre lineacuteaire en utilisant des approximations au niveau local

La meacutethode particulaire de filtrage

enfin des meacutethodes numeacuteriques ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees pour les pro-bleacutematiques non lineacuteaires ne pou-vant ecirctre reacutesolues ni par le filtre de Kalman ni par ses extensions Parmi elles figure la meacutethode particulaire de filtrage celle-ci estime la distribution du signal via un proceacutedeacute de reacuteduction sta-tistique dit ldquodiscreacutetisationrdquo qui consiste agrave deacutecouper une seacuterie de donneacutees en un certain nombre de classes repreacutesenteacutees par des particules a lrsquoimage de la meacutethode de Monte carlo cette approche repose sur la loi des grands nombres et la simulation drsquoexpeacuteriences reacutepeacuteteacutees Dans un premier temps les valeurs sont estimeacutees gracircce aux observations disponibles chaque valeur uti-liseacutee est associeacutee agrave un poids de conditionnement Puis agrave chaque simulation les pondeacuterations sont

ajusteacutees en fonction des reacutesul-tats obtenus les particules se deacuteplacent librement agrave partir de lrsquoalgorithme de dynamique du modegravele ce qui est possible dans la mesure ougrave la position exacte de chaque particule est connue on calcule alors la position moyenne pondeacutereacutee des particules agrave partir de leur poids theacuteoriques respec-tifs

un large champ drsquoapplication

les techniques de filtrage consti-tuent des outils preacutecieux afin de pallier aux imperfections de lrsquoinfor-mation ces probleacutematiques sont courantes en particulier dans le domaine financier en effet qursquoil srsquoagisse de calibrer un modegravele de valoriser un portefeuille drsquoac-tifs ou de deacutefinir les strateacutegies de couverture les donneacutees utiliseacutees sont toujours incomplegravetes le fil-trage permet de traiter ce type de question il est notamment employeacute pour calculer le risque de creacutedit une entreprise est en effet reconnue en faillite lorsque sa valeur fondamentale est trop basse Mais cette information nrsquoest eacutevidemment pas connue des acteurs du marcheacute les ob-servations sont bruiteacutees puisque pas entiegraverement disponibles le filtrage peut alors servir agrave estimer le risque de creacutedit agrave partir des diffeacuterentes sources drsquoinformation disponibles croiser les donneacutees des rapports trimestriels du cours des actions ou encore du prix des options permet drsquoeacuteva-luer la probabiliteacute de deacutefaut de la socieacuteteacute

les modegraveles de filtrage ont donc un large champ drsquoapplication et fournissent des eacuteleacutements de reacute-ponse agrave de nombreuses probleacute-matiques Nul doute que les re-cherches vont se poursuivre afin drsquoaccroitre les performances de ces meacutethodes et algorithmes et de faire ainsi face agrave de nouveaux challenges

thorsten schmidt

bibliographieFrey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

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1 Source Faragher (2012)

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asymeacutetrie drsquoinformation et assurance

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Nous et le Monde Naturel Nous avons souvent besoin de quantifier le risque de lrsquoassureur pour deacuteterminer une eacutechelle de primes eacutequitable pour deacutefinir des strateacutegies solides de ges-tion du risque ou pour deacuteterminer les Solvency Capital Requirements le niveau minimum de fonds propres exigeacutes Dans chacune de ces situations les pertes potentielles constituent une issue future incertaine Mettant de cocircteacute la question quasi-philosophique de savoir si lrsquoincertitude (sur lrsquooccurrence et le montant des sinistres futurs pour lrsquoassureur) est due agrave une insuf-

fisance drsquoinformation ou alors si elle est plutocirct lieacutee au caractegravere intrinsegravequement aleacuteatoire des issues nous nous trouvons geacuteneacuteralement face au workflow suivant

INCERTITUDE i RISQUE i DONNEES i MODELES

La diffeacuterence entre lrsquoincertitude et le risque (selon la deacutefinition de lrsquoeacuteconomiste Frank Knight) est que le risque peut ecirctre quantifieacute crsquoest-agrave-dire que lrsquoon peut en principe deacuteterminer la distribution de probabiliteacute pour le risque en question Apregraves avoir deacutetermineacute quelles caracteacuteristiques constituent les risques agrave quan-

Crsquoest la nature mecircme de lrsquoactiviteacute drsquoassurance que de disposer drsquoun niveau drsquoinformation limiteacute agrave propos des risques agrave assurer et les informations suppleacutementaires sont toujours les bienvenues Il en est de mecircme pour lrsquoactiviteacute de la reacuteassurance La reacuteassurance est une opeacuteration par laquelle une socieacuteteacute drsquoassurance (le ldquoceacutedantrdquo) srsquoassure aupregraves drsquoune autre compagnie drsquoassurance (le ldquoreacuteassureurrdquo) pour une partie des risques qursquoelle porte Il srsquoagit donc lagrave avant tout drsquoune activiteacute drsquoassurance Cependant si lrsquoassurance et la reacuteassurance partagent des caracteacuteristiques communes il existe de nombreuses diffeacuterences structurelles notamment en ce qui concerne lrsquoinformation sur les risques inheacuterents aux polices reacuteassureacutees De plus dans la mesure ougrave les opeacuterations de reacuteassurance impliquent de multiples acteurs lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation constitue un eacuteleacutement important agrave prendre en consideacuteration La gestion du risque traite cette asymeacutetrie de diverses maniegraveres que je propose de commenter en fonction du degreacute drsquoinformation disponible

PAr hAnsjoumlrG ALbreCher

Hansjoumlrg Albrecher a eacutetudieacute les matheacutematiques appliqueacutees et lrsquoastronomie agrave Graz Limerick et Baltimore avant de recevoir son doctorat de la Technische Universitaumlt Graz en 2001 Il a ensuite enseigneacute agrave Graz Leuven et Aarhus avant drsquoecirctre nommeacute directeur drsquoeacutequipe en matheacutematiques financiegraveres et directeur adjoint du Johann Radon Institute de lrsquoAcadeacutemie des Sciences de lrsquoAutriche agrave Linz et professeur de matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoassurance agrave la Universitaumlt Linz (JKU) En 2009 il a eacuteteacute nommeacute professeur des sciences actuarielles agrave HEC de lrsquoUniversiteacute de LausanneSes domaines de recherche incluent la theacuteorie du risque la modeacutelisation du risque dans lrsquoassurance et la reacuteassurance la modeacutelisation des catastrophes naturelles les matheacutematiques financiegraveres la simulation stochastique et plus geacuteneacuteralement les applications de la theacuteorie des probabiliteacutes Il a publieacute plus de 100 articles dans ces domaines et est co-auteur de deux ouvrages Ruin Probabilities (deuxiegraveme eacutedition 2010) et Quantitative Methods for Financial Markets (2013)Dr Albrecher est reacutedacteur au sein drsquoInsurance Mathematics and Economics depuis 2010 coreacutedacteur-en-chef du European Actuarial Journal et de la revue Statistics and Risk Modeling depuis 2011 Il siegravege au comiteacute de reacutedaction de plusieurs autres revues scientifiques et collections drsquoouvrages

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tifier on cherche la probabiliteacute pour que ces risques se reacutealisent en partant drsquoobservations du reacuteel en geacuteneacuteral de donneacutees historiques Pour chaque risque agrave eacutevaluer le problegraveme classique reacuteside dans la deacutetermination de la pertinence des donneacutees et de leur degreacute de perti-nence Une difficulteacute suppleacutementaire reacuteside dans le fait que la nature des risques peut eacutevoluer dans le temps et que pour appreacutehender cette eacutevolution lrsquoon doit pouvoir faire appel agrave des meacutethodes statistiques capables drsquoidentifier les eacuteleacutements non-stationnaires inclus dans les seacuteries de donneacutees et agrave des informations reacuteelles connexes dont on dispose (modifications des clauses contractuelles contexte environnemental etc)

De longues anneacutees drsquoexpeacuterience nous ont appris agrave qualifier les diffeacuterents types de risque et agrave tirer des re-lations causales entre eux Ainsi nous avons pu deacuteve-lopper les modegraveles qui servent de base agrave lrsquoeacutevaluation de risques associeacutes

Bien qursquoen geacuteneacuteral les modeacutelisateurs soient conscients des limites de la modeacutelisation la principale motiva-tion derriegravere cette approche est la conviction qursquoil est possible de quantifier preacuteciseacutement les risques et que toute imperfection ou lacune dans un modegravele reacutesulte de donneacutees insuffisantes ou plus geacuteneacuteralement drsquoinformations insuffisantes concernant la nature des risques et les relations entre eux On pourrait dire que le deacuteveloppement de modegraveles de risque par les assu-reurs constitue une tentative de reacuteduire lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation en geacuteneacuteral et de lrsquoinformation dispo-nible pour nous

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureacutes et AssureurQuand un assureacute et une compagnie drsquoassurance concluent un contrat au terme duquel lrsquoassureacute paie une prime (baseacutee sur un calcul deacuteterministe) contre des si-nistres speacutecifieacutes dans le contrat il est clair que chaque partie dispose drsquoinformations diffeacuterentes mais dans ce cas lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation existe des deux cocircteacutes En principe la compagnie drsquoassurance dispose de plus drsquoexpeacuterience des risques agrave assurer (modegraveles idoines) ce qui lui permet (en y rajoutant la mutualisation des risques) de geacuterer efficacement les risques agrave assurer bien que pour certains produits les assureacutes preacutefeacutereraient plus de transparence (voir par exemple [12])

Lrsquoassureacute quant agrave lui dispose dans la plupart des sec-teurs de beaucoup plus drsquoinformation concernant son profil de risque que ce qursquoil communique agrave

lrsquoassureur et il pourrait mecircme en influencer le reacutesul-tat par le biais de son comportement Un exemple en est lrsquoassurance maladie ougrave il existe une asymeacutetrie drsquoinformation intrinsegraveque concernant lrsquoeacutetat de santeacute de lrsquoassureacute (cf [22] et [19 21] pour des eacutetudes sur certains types drsquoassurance-vie) Aussi telle asymeacutetrie peut ecirctre la conseacutequence de nouvelles reacuteglementations (cf [23]) Le secteur de lrsquoassurance automobile a une longue pratique de reacuteduction de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation concernant le profil de risque des assureacutes via le systegraveme de bonus-malus qui a lrsquoavantage suppleacute-mentaire drsquoinciter les assureacutes agrave conduire prudemment La tendance actuelle est de pousser le dispositif plus loin encore avec la collecte drsquoinformations reacuteelles sur la conduite des assureacutes via des systegravemes teacuteleacutematiques embarqueacutes(cf [18 6]) Crsquoest une excellente illustra-tion de comment une quantiteacute importante de don-neacutees suppleacutementaires peut ecirctre et sera certainement utiliseacutee pour concevoir les futurs contrats drsquoassurance (une tendance parfois appeleacutee Le Big Data dans lrsquoAs-surance) Lrsquoexploitation des donneacutees inclut lrsquoanalyse approfondie des eacutecarts de comportement des assureacutes (cf [16 20]) et le deacuteveloppement drsquoapplications se servant de ces informations agrave des fins commerciales (cf [17])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et ReacuteassureurComme les assureurs nrsquoaiment pas partager des don-neacutees et statistiques concernant les sinistres dans le cas de nombreux contrats de reacuteassurance non proportion-nels lrsquoassureur ne communique au reacuteassureur qursquoune partie des donneacutees concerneacutees crsquoest-agrave-dire seulement les donneacutees sur les sinistres engageant ou pouvant en-gager la garantie Cette asymeacutetrie drsquoinformation laisse le reacuteassureur dans lrsquoobligation de creacuteer son modegravele preacutedictif avec des donneacutees censureacutees (cf [2]) En pra-tique les reacuteassureurs tentent de compleacuteter les donneacutees censureacutees avec des donneacutees collecteacutees agrave partir de porte-feuilles similaires (parfois obtenues gracircce agrave un contrat de reacuteassurance proportionnelle couvrant des risques similaires drsquoune mecircme importance) Les subtiliteacutes relatives agrave lrsquoeacutevaluation des risques et la deacutetermination des primes de reacuteassurance varient en fonction du type de contrat et la meacutethodologie choisie (meacutethode par expeacuterience vs meacutethode par exposition etc [1]) Une autre source drsquoasymeacutetrie drsquoinformation tient dans le fait que les sinistres passeacutes sont souvent comptabi-liseacutes agrave leur valeur ldquodrsquoengagementrdquo (ie la valeur des indemniteacutes reacuteellement verseacutees plus une estimation rai-sonnable des indemniteacutes restant agrave verser) et celle-ci peut srsquoaveacuterer significativement diffeacuterente de la valeur

14 les cahiers louis Bachelier

finale des indemniteacutes Dans des secteurs drsquoactiviteacute ougrave le regraveglement des sinistres peut prendre de nombreuses anneacutees on comprend facilement que les reacuteassureurs ne peuvent pas compter exclusivement sur les don-neacutees concernant le montant reacuteel final des indemniteacutes verseacutees mais doivent eacutegalement prendre en compte la valeur (estimeacutee) des engagements dans lrsquoeacutelaboration de leurs modegraveles Cette situation pose de reacuteels deacutefis statistiques et peu de recherche theacuteorique existe sur le sujet actuellement (cf [2])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et InvestisseurDes actionnaires actuels ou potentiels des socieacuteteacutes drsquoassurance fondent leurs deacutecisions drsquoinvestir sur les chiffres financiers et commerciaux et des indicateurs de performance mais en geacuteneacuteral ces chiffres ne tra-duisent pas lrsquointeacutegraliteacute de la structure de risque des assureurs et reacuteassureurs Compte tenu des Solvency Capital Requirements une socieacuteteacute doit tenir compte du coucirct de lever et conserver ce capital Ce coucirct aura un impact sur nombre de deacutecisions de strateacutegie et de gestion y compris la deacutecision de recourir agrave la reacuteassu-rance Le taux du coucirct du capital est influenceacute non seulement par le profil du risque mais eacutegalement par la structure de lrsquoinformation Par conseacutequence le taux du coucirct du capital est bien le reacutesultat de lrsquooffre et la de-mande sur le marcheacute mais tient eacutegalement compte de regravegles et directives en matiegravere de reporting financier telle la constitution de reacuteserves pour pertes et pour sinistres survenus mais non encore deacuteclareacutes Pour une discussion drsquoun point de vue actuariel voir [514]

Un autre domaine de recherche qui srsquointeacuteresse acti-vement aux aspects pratiques de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation est la titrisation des risques drsquoassurance en particulier celui de catastrophes naturelles et plus reacutecemment le risque de longeacuteviteacute La titrisation trans-fegravere le risque drsquoassurance aux marcheacutes des capitaux et constitue donc un instrument particuliegraverement utile lorsqursquoil srsquoagit de risques de grande ampleur ayant de fortes correacutelations ougrave les contrats de reacuteassurance tradi-tionnels ne sont pas eacuteconomiquement viables compte tenu du coucirct monumental des capitaux Lrsquohistoire des produits de titrisation illustre parfaitement comment lrsquoeacutevolution des attitudes envers lrsquoasymeacutetrie drsquoinforma-tion (dans ce cas preacutecis entre eacutemetteur et investisseur) a modifieacute les produits et leur attractiviteacute Des deacuteclen-cheurs anciens baseacutes sur lrsquoexpeacuterience effective de pertes des compagnies individuelles et des indices sectoriels ont eacutevolueacute vers des deacuteclencheurs parameacutetriques cal-culeacutes en tenant compte de quantiteacutes physiques lieacutees

aux catastrophes comme la vitesse du vent la pression atmospheacuterique etc Alors que les deacuteclencheurs para-meacutetriques diminuent lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation (qui dans le cas des deacuteclencheurs speacutecifiques agrave chaque en-treprise eacutetait significative) ils augmentent le risque de base crsquoest-agrave-dire le risque que le deacuteclencheur ne reflegravete pas lrsquoexpeacuterience reacuteelle de lrsquoeacutemetteur ce qui reacuteduit lrsquoef-ficaciteacute du produit pour lrsquoeacutemetteur Comme on pou-vait srsquoy attendre lrsquoactiviteacute de ce marcheacute a connu une certaine volatiliteacute dans le temps avec une forte aug-mentation des volumes dans des peacuteriodes ougrave le mar-cheacute traditionnel de la reacuteassurance ne pouvait pas faire face agrave ce type de demande (cf [9 11]) La valorisation de ces produits se situe agrave la frontiegravere entre assurance et finance Crsquoest eacutegalement un sujet de recherche tregraves inteacuteressant sur le plan theacuteorique (cf [7 15 4 8] et [10 24])

Asymeacutetrie drsquoinformation entre Assureurs et ConcurrentsEnfin comme dans toute activiteacute eacuteconomique il existe une concurrence entre assureurs pour un nombre li-miteacute de clients (assureacutes) et il existe eacutegalement une asy-meacutetrie drsquoinformation naturelle entre assureurs concur-rents concernant le profil du risque lrsquoappreacuteciation des conditions marcheacute lrsquoapproche meacutethodologique du risque et la deacutetermination des primes Parmi des approches reacutecentes on peut citer la deacutetermination des primes drsquoassurance via une analyse fondeacutee sur la theacuteo-rie des jeux tenant compte drsquoune preacutevision de la poli-tique des primes des concurrents des comportements agrave risque des assureacutes et des contraintes reacuteglementaires en matiegravere de fonds propres (voir [13]) le tout dans un contexte drsquoinformations incomplegravetes

Lrsquoobjectif de ce court chapitre eacutetait de mettre en lumiegravere plusieurs domaines de recherche dans les sciences actuarielles ougrave lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation joue directement ou indirec-tement un rocircle important Cette liste est forceacutement incomplegravete mais elle souligne lrsquoimportance de la modeacutelisation drsquoinforma-tion dans le secteur de lrsquoassurance et de la reacuteassurance qui est eacutegalement lrsquoobjet de tregraves nombreux projets de recherche en cours

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drsquohansjoumlrg Albrecher sur

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Page 6: Information en Finance et assurance

6 les cahiers louis Bachelier

la question du prix drsquoeacutequilibre est fondamentale en eacuteconomie et de nombreux travaux tentent de la formaliser le modegravele de Kyle srsquoinscrit dans cette probleacute-matique en faisant le lien entre la formation du prix eacutetabli par lrsquooffre et la demande et lrsquoinformation dont disposent les agents Tous ne sont pas en possession des mecircmes eacuteleacutements un investisseur local par exemple connaicirctra a priori mieux le marcheacute qursquoun in-vestisseur eacutetrangercomment lrsquoinformation dispo-nible ou les diffeacuterences de niveau drsquoinformation entre les agents peuvent-elles influer sur lrsquoactiviteacute des marcheacutes finan-ciers comment cette infor-mation est-elle inteacutegreacutee dans le prix Quels sont les beacuteneacutefices retireacutes drsquoune information privileacute-gieacutee le prix drsquoeacutequilibre en est-il modifieacute Telles sont quelques-unes des questions auxquelles srsquoattache la theacuteorie de Kyle qui modeacutelise lrsquoimpact de lrsquoinformation sur la liquiditeacute et le prix drsquoun actif

un agent privileacutegieacute et strateacutegique

Kyle considegravere un marcheacute sur lequel est vendu un actif risqueacute Trois types drsquoagents interviennent dans les eacutechanges un trader ldquoprivileacutegieacuterdquo des liquidity traders et un market maker

le trader ldquoprivileacutegieacuterdquo beacuteneacuteficie drsquoune information priveacutee sur la va-leur de lrsquoactif il connaicirct sa valeur agrave la date T1 et donc le prix de vente ou drsquoachat potentiel agrave cette date lrsquoagent informeacute est strateacutegique et cherche agrave maximiser le profit qursquoil peut tirer de son information il prend donc en consideacuteration lrsquoimpact de son ordre sur le prix

Modegravele de Kyle lrsquoimpact de lrsquoinformation sur le prix drsquoeacutequilibre

Certains investisseurs beacuteneacuteficient drsquoinformations privileacutegieacutees leur permettant de mieux eacutevaluer la valeur drsquoun actif Comment cette information influence-t-elle lrsquoeacutequilibre du marcheacute quels avantages offre-t-elle Le modegravele de Kyle fournit des eacuteleacutements de reacuteponse

du marcheacute et effectue ses tran-sactions de sorte agrave ce que son information soit reacuteveacuteleacutee au mar-cheacute le plus tardivement possible il ne vendra pas par exemple lrsquoensemble de ses titres en une seule opeacuteration afin drsquoeacuteviter une chute des cours Toutefois via ses transactions agrave lrsquoachat ou agrave la vente il fournit neacutecessairement un signal au marcheacute une partie de son information eacutetant transmise au prix de lrsquoactif

De leur cocircteacute les liquidity traders ne disposent pas drsquoinformation sur la valeur de lrsquoactif ils fournissent de la liquiditeacute en participant aux eacutechanges mais ne donnent pas de signal au marcheacute et nrsquoont donc pas drsquoimpact sur le prix

enfin le market maker observe les flux de transaction sans dis-tinguer la demande du trader informeacute de celle des liquidity tra-ders il fixe le prix en fonction de la demande globale de lrsquoactif agrave lrsquoinstant T et de lrsquoestimation de sa

Le modegravele de Kyle modeacutelise lrsquoimpact de lrsquoinformation sur la liquiditeacute et le prix drsquoun actif

il permet de calculer agrave partir drsquoun prix agrave lrsquoinstant t lrsquoeacutevolution du prix drsquoeacutequilibre au cours du temps

il montre eacutegalement qursquoune information privileacutegieacutee a drsquoautant plus de valeur lorsque le marcheacute est liquide ou bruiteacute Le profit srsquoaccroicirct eacutegalement lorsque la variance du prix agrave lrsquoinstant t est forte

drsquoapregraves un texte de Kerry back et les articles citeacutes en bibliographie

Plus le marcheacute est liquide plus le profit de lrsquoagent informeacute est important

a retenir

les cahiers louis Bachelier 7

Kerry Back est professeur titulaire de la chaire de Finance J Howard Creekmore agrave la Jones Graduate School of Business et professeur drsquoEacuteconomie agrave la faculteacute de Sciences Sociales de Rice University ougrave il enseigne la theacuteorie de valorisation drsquoactifs Il a eacutegalement enseigneacute agrave Northwestern University Indiana University Washington University in St Louis et Texas AampM University A Washington University in St Louis il a occupeacute le poste de Doyen des Affaires Acadeacutemiques de la Olin School of Business et a reccedilu le titre de ldquoMembre Eacuteminent du corps

professoralrdquo Il a eacuteteacute reacutecompenseacute par plusieurs prix de recherche agrave Texas AampM et agrave Rice University Ses domaines de recherche comprennent les investissements et lrsquoorganisation des marcheacutes Il a eacuteteacute reacutedacteur de la Review of Financial Studies coreacutedacteur de Finance amp Stochastics et reacutedacteur adjoint du Journal of Finance et drsquoautres revues

rentabiliteacute espeacutereacutee il nrsquoy a pas de saut juste avant lrsquoannonce du prix le marcheacute incorpore correcte-ment lrsquoinformation et la formation du prix est juste

deacuteterminer le prix drsquoeacutequilibre

le modegravele de Kyle se distingue ainsi du modegravele de Merton lrsquoune des reacutefeacuterences des modegraveles drsquoeacutequilibre de marcheacute qui lui fait lrsquohypothegravese drsquoune symeacutetrie drsquoin-formation le premier considegravere des agents neutres vis-agrave-vis du risque et ayant un impact sur le marcheacute Drsquoougrave la volonteacute de lrsquoagent informeacute de mener ses transac-tions ldquoen douceurrdquo le second au contraire considegravere des agents averses au risque nrsquoayant aucun impact sur le prix

lrsquoobjectif du modegravele de Kyle est de deacuteterminer comment lrsquoinforma-tion de lrsquoagent privileacutegieacute se trans-met au prix et de deacutefinir ainsi le prix drsquoeacutequilibre V le prix V1 de lrsquoactif agrave lrsquoinstant T1 est en effet connu a partir de cette informa-tion comment estimer le prix V au fil du temps le modegravele montre que lorsque le prix V1 suit une loi dite gaussienne (dont la dis-tribution est donc uniquement deacutetermineacutee par la moyenne et la

le modegravele de Kyle est un modegravele drsquoeacutequilibre ougrave un agent neutre au risque et informeacute crsquoest-agrave-dire qursquoil connaicirct le prix agrave la date terminale exploite cette information afin de maximiser son profit espeacutereacute Par contre le market maker qui fixe le prix de marcheacute dispose de moins drsquoinformation et en particulier ne peut pas observer lrsquoaction de lrsquoagent informeacute car elle est bruiteacutee par les liquidity traders en utilisant des outils de controcircle stochastique et du filtrage on eacutetudie lrsquoeffet de lrsquoinformation sur les prix drsquoeacutequilibre

meacutethodologie

variance) la formule est explicite et facilement calculable

une information plus ou moins valoriseacutee

le modegravele fournit eacutegalement un eacuteclairage sur les beacuteneacutefices ap-porteacutes par lrsquoinformation priveacutee ces derniers peuvent ainsi ecirctre renforceacutes par plusieurs eacuteleacutements

Tout drsquoabord le profit de lrsquoagent informeacute est drsquoautant plus grand que le marcheacute est liquide autre-ment dit plus le marcheacute integravegre rapidement lrsquoinformation plus celle-ci est beacuteneacutefique au trader privileacutegieacute son profit srsquoaccroicirct eacutega-lement avec le bruit du marcheacute Plus le bruit est important plus lrsquoinformation priveacutee sera deacutevoileacutee tardivement au marcheacute et plus lrsquoagent pourra en tirer profit

enfin plus la variance du prix V1 est forte plus les valeurs pro-bables du prix drsquoeacutequilibre V sont larges il est alors plus difficile pour les traders non informeacutes de faire une juste estimation de V le gain pour lrsquoagent privileacutegieacute est donc plus fort

le modegravele de Kyle connaicirct de nombreuses extensions il existe

ainsi des formules qui integravegrent plusieurs agents informeacutes ou un agent informeacute mais ne connais-sant pas exactement le prix V1 Drsquoautres considegraverent un prix V1 qui ne suit pas une loi gaussienne ou encore un marcheacute composeacute drsquoun actif risqueacute ainsi que drsquoun deacuteriveacute Quelles que soient les variations le modegravele de Kyle constitue en tout cas une avanceacutee dans la compreacutehension du rocircle de lrsquoinfor-mation sur les marcheacutes et sur la formation du prix drsquoeacutequilibre

Kerry back

bibliographie

Back K 1992 insider tra-ding in continuous time review of Financial studies 5 387-409

Kyle as 1985 conti-nuous auctions and insider trading econometrica 53 1315-1336

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8 les cahiers louis Bachelier

la sec (securities and exchange commission) lrsquoorganisme feacutedeacuteral ameacutericain de regraveglementation et de controcircle des marcheacutes finan-ciers deacutefinit le deacutelit drsquoinitieacute comme ldquole fait drsquoacheter ou de vendre un titre ou une valeur en violation des obligations fiduciaires etou de confiance tandis que lrsquoon dispose drsquoinformations confidentielles non-publiques concernant ladite valeur le deacutelit drsquoinitieacute peut aussi englober le fait de divulguer des informations confidentielles agrave un tiers le fait pour le tiers de neacutego-cier des titres objets desdites informations confidentielles ainsi que le neacutegoce de titres par toute personne qui deacutetournerait de telles informations agrave son profitrdquo

si ces contours sont clairs le deacutelit drsquoinitieacute demeure difficile agrave prouver et donc agrave sanctionner la modeacuteli-sation matheacutematique pourrait-elle permettre de mieux cerner le com-portement des fraudeurs et ainsi de mieux les deacutetecter Plusieurs travaux de recherche ont eacuteteacute me-neacutes sur ce sujet

Pas de profit sans risque

le processus de modeacutelisation re-pose en effet sur la notion drsquoinfor-mation on peut ainsi consideacuterer qursquoune collection drsquoeacuteveacutenements appeleacutee Ft repreacutesente lrsquoensemble des informations publiques concernant le marcheacute financier et disponibles agrave un moment t un initieacute possegravede par deacutefinition une information priveacutee sur un eacuteveacute-nement ne faisant pas partie de cet ensemble il peut srsquoagir par exemple drsquoun investisseur qui a connaissance de lrsquoavanceacutee des tests cliniques drsquoun nouveau meacute-dicament sa collection drsquoeacuteveacutene-ments observables devient alors plus grande que la collection de reacutefeacuterence Ft

lutter contre le deacutelit drsquoinitieacute gracircce agrave la modeacutelisation

Traditionnellement les modegraveles sont construits sur la notion drsquoab-sence drsquoarbitrage autrement dit ils considegraverent qursquoil est impossible de reacutealiser des profits sans assu-mer une part de risque le risque nul nrsquoexiste pas Mais il arrive qursquoune information priveacutee puisse creacuteer des opportuniteacutes drsquoarbi-trage ou du moins des situations tregraves proches de lrsquoarbitrage en lrsquooccurrence si un investisseur sait agrave lrsquoavance qursquoune compagnie va mettre sur le marcheacute un nouveau meacutedicament ses chances de reacutealiser une plus-value sont tregraves fortes et son risque faiblehellip

tirer profit drsquoune information priveacutee

lrsquoinitieacute peut ainsi tirer avantage de son information de plusieurs ma-niegraveres Dans lrsquoexemple preacutesenteacute la solution la plus simple est eacutevidem-ment drsquoacheter ou de vendre des actions de la compagnie pharma-ceutique selon les reacutesultats du test Mais lrsquoinformation peut aussi gui-der lrsquoachat de produits deacuteriveacutes ou

Un agent initieacute peut reacutealiser des profits sans prendre de risque ou presque

un agent initieacute possegravede une collection drsquoinformations plus grande que celle des autres agents Cette information suppleacutementaire change sa perception du marcheacute et son eacutevaluation du prix drsquoun actif

Le modegravele preacutesenteacute permet drsquooptimiser lrsquoutilisation de cette information priveacutee en analysant les deacuteviations des cours par rapport agrave une valeur de reacutefeacuterence il permet agrave lrsquoagent de savoir si un titre est sous ou sur eacutevalueacute

Le modegravele est eacutegalement utile au reacutegulateur pour mieux cerner le comportement des initieacutes et donc mieux lutter contre ces pratiques

drsquoapregraves un texte de Philip Protter et les articles citeacutes en bibliographie

Gracircce agrave une information priveacutee un agent peut reacutealiser drsquoimportants profits pour un minimum de risque en permettant de mieux comprendre lrsquoutilisation de cette information la modeacutelisation aide agrave lutter contre les deacutelits drsquoinitieacutes

a retenir

les cahiers louis Bachelier 9

Philip Protter est Fellow du IMS (Center for Intelligent Management Systems) reacute-dacteur adjoint de neuf revues scientifiques membre de deux comiteacutes de reacutedaction et a eacuteteacute reacutedacteur en chef de la revue Stochastic Processes and their Applications Ses principaux domaines de recherche comprennent les matheacutematiques finan-ciegraveres (modegraveles de valorisation drsquoactifs modegraveles de valorisation et de couver-ture de deacuteriveacutes problegravemes de liquiditeacute bulles financiegraveres deacutelits drsquoinitieacute trading agrave haute freacutequence risque de creacutedit) la theacuteorie de lrsquointeacutegrale stochastique la theacuteorie des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques les meacutethodes de reacutesolution

numeacuterique des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques la discreacutetisation de processus stochastiques (en tant que branche de la statistique matheacutematique) eacutequations diffeacuterentielles stochastiques et ldquoeacutequations diffeacuterentielles stochastiques retrogradesrdquo les processus de Markov et la theacuteorie du filtrage Il est lrsquoau-teur et co-auteur de deux manuels acadeacutemiques et de deux ouvrages scientifiques

drsquooptions ces derniegraveres donnent le droit drsquoacheter ou de vendre un titre dans le futur agrave un prix fixeacute Bien utiliseacutee une option peut ainsi geacuteneacuterer drsquoimportants profits pour un investissement modeste et ce sur une courte peacuteriode

les informations suppleacutementaires ont en effet un impact sur lrsquoesti-mation du prix drsquoun actif un agent eacutevalue les flux futurs drsquoun actif via la collection drsquoinformations dispo-nibles si sa collection devient plus grande sa perception du marcheacute est modifieacutee lrsquoestimation du prix eacutevolue ainsi que lrsquoeacutevaluation de la probabiliteacute drsquoun eacuteveacutenement comme la survenance drsquoune faillite par exemple

deacutetecter une valeur hors norme

lrsquoauteur eacutetudie ainsi un modegravele qui calcule la ldquojuste valeurrdquo drsquoun actif et ses proprieacuteteacutes (variance eacutecart-type etc) en prenant compte de lrsquoinformation disponible modeacuteliseacutee pour un agent initieacute par un grossis-sement de filtration il est ainsi pos-sible drsquoanalyser les deacuteviations des cours par rapport agrave cette valeur la filtration modeacutelise ici lrsquoinforma-tion de lrsquoinitieacute et permet de montrer comment tirer profit drsquoune infor-mation privileacutegieacutee lrsquoagent est en mesure de savoir si une option est

sous ou sur eacutevalueacutee il ajuste ses investissements en conseacutequence augmentant de ce fait consideacutera-blement ses probabiliteacutes de pro-fits le modegravele permet eacutegalement de quantifier lrsquoavantage obtenu par lrsquoinitieacute gracircce agrave son information privileacutegieacutee

Toutefois comprendre via une analyse matheacutematique comment certains utilisent une information priveacutee peut aider le reacutegulateur agrave deacutetecter les deacutelits drsquoinitieacute et agrave poursuivre les contrevenants en effet en eacutevaluant la valeur normale de lrsquoactif le modegravele quantifie en quelque sorte un niveau drsquoalerte si une transaction srsquoeffectue agrave un prix trop eacuteloigneacute de la valeur nor-male elle peut ecirctre le fruit drsquoun deacutelit drsquoinitieacute

or lutter contre les deacutelits drsquoinitieacute est primordial pour garantir la flui-diteacute des transactions financiegraveres le marcheacute doit apparaicirctre comme juste Dans le cas contraire srsquoil est perccedilu comme deacutefaillant ou cor-rompu peu drsquoinvestisseurs accep-teront de participer aux eacutechanges les agents perdront confiance et la liquiditeacute sera reacuteduite le rocircle de lrsquoetat est donc de garantir le bon fonctionnement du marcheacute en reacute-duisant lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation et en luttant contre les deacutelits drsquoinitieacute

Philip Protter

lrsquoinformation publique disponible au cours du temps sur le marcheacute est repreacutesenteacutee par une filtration lrsquoinformation drsquoun initieacute qui possegravede une information privileacutegieacutee est ainsi modeacuteliseacutee par un grossissement de cette filtration du marcheacute ceci entraicircne une eacutevaluation des probabiliteacutes drsquooccurrence drsquoeacuteveacutenements diffeacuterentes pour un initieacute par rapport agrave un investisseur standard en particulier sa mesure drsquoeacutevaluation (appeleacute mesure risque neutre) des actifs en est modifieacutee

meacutethodologie

bibliographie

roseline Bilina Falafala amp Philip Protter insider Tra-ding and risk preprint 2015

claudio Fontana Monique Jeanblanc amp shiqi song on arbitrages arising with honest times Finance and stochastics July 2014 Vo-lume 18 issue 3 515-543

Younes Kchia amp Philip Prot-ter on Progressive Filtration expansions with a Process applications to insider Tra-ding international journal of theoretical and applied finance- river edge NJ [ua] World scientific issN 0219-0249 ZDB-iD 14289829 - Vol 182015 4 p 1-48

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10 les cahiers louis Bachelier

appareils connecteacutes GPs sys-tegravemes de monitoring meacutedicaux robots mobiles ces technolo-gies se creacuteent une place dans nos quotidiens et leur utilisation devrait ecirctre encore renforceacutee par la numeacuterisation en cours or tous ces objets ont un point commun ils fonctionnent de faccedilon dyna-mique avec une eacutemission de signal qui eacutevolue continuellement au cours du temps la preacutediction du signal est ainsi plus complexe et neacutecessite des outils matheacutema-tiques adapteacutes

la technique du filtrage reacutepond agrave cette probleacutematique Thorsten schmidt professeur agrave lrsquouniver-siteacute de Fribourg fait le point sur cette meacutethodologie aux multiples applications qursquoest-ce qursquoun problegraveme de filtrage comment cette technique srsquoest-elle deacuteve-loppeacutee Quelles solutions peut-elle apporter

contrairement agrave la statistique classique le filtrage vise agrave eacutevaluer

un signal dynamique dont lrsquoobser-vation est perturbeacutee par un bruit comment calculer une estima-tion juste malgreacute une observation bruiteacutee il srsquoagit par exemple de deacutefinir la position drsquoun robot qui se deacuteplace au cours du temps le robot nrsquoest pas dans le champ de vision de son proprieacutetaire il nrsquoest donc pas directement ob-servable Toutefois le proprieacutetaire dispose des donneacutees GPs qui correspondent ici agrave une observa-tion bruiteacutee le but est drsquooptimiser les informations fournies par le GPs afin de calculer la position du robot au cours du temps

comment pallier au manque drsquoinformation gracircce au filtrage

Approche de la statistique moderne le filtrage permet de reacutesoudre de nombreuses probleacutematiques drsquoinformation imparfaite que ce soit dans le cadre des objets connecteacutes de la navigation satellite ou du calcul de risque en finance ses applications sont multiples

Le filtre de Kalman

la theacuteorie du filtrage est neacutee dans les anneacutees 40 sous lrsquoimpul-sion drsquoandrey N Kolmogorov et Norbert Wiener le premier a eacutetu-dieacute la probleacutematique en temps discret tandis que le second lrsquoa abordeacute en temps continu il a en-suite fallu attendre les anneacutees 60 pour connaitre de nouvelles avan-ceacutees avec rudolf e Kalman

lrsquoapproche de Kalman fait office de reacutefeacuterence en matiegravere de fil-trage en se basant sur les lois gaussiennes le modegravele eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal lrsquoinformation corres-pond aux observations bruiteacutees prix donneacutees etc lrsquoavantage principal de cette meacutethode est de donner une formule explicite pour calculer le signal simplifiant ainsi fortement le proceacutedeacute

lrsquoune des utilisations les plus ceacutelegravebres et les plus anciennes du filtre de Kalman remonte agrave la

drsquoapregraves un texte de thorsten schmidt et les articles citeacutes en reacutefeacuterence

Lrsquoavantage principal de la meacutethode de Kalman est de donner une formule explicite et de faible dimension

Le filtrage vise agrave eacutevaluer un signal dynamique dont lrsquoobservation est bruiteacutee

Le modegravele de Kalman eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal il fournit une for-mule explicite et de faible dimension pour calculer le signal simplifiant ainsi le proceacutedeacute

Pour les cas non lineacuteaires des meacutethodes numeacuteriques peuvent ecirctre utiliseacutees

Le filtrage recouvre un large champ drsquoapplication que ce soit en finance dans lrsquoindustrie eacutelectro-nique la robotique ou encore le secteur meacutedical

a retenir

les cahiers louis Bachelier 11

Thorsten Schmidt est professeur de matheacutematiques stochastiques agrave lrsquoUniversiteacute de Fribourg (Allemagne) ougrave il a succeacutedeacute agrave Ernst Eberlein Auparavant il a ensei-gneacute les matheacutematiques financiegraveres agrave lrsquoUniversiteacute de technologie de Chemnitz

Outre son inteacuterecirct pour les matheacutematiques financiegraveres et plus particuliegraverement pour les taux drsquointeacuterecirct les marcheacutes du risque de creacutedit et de lrsquoeacutenergie il a une so-lide expertise en statistique et probabiliteacute Il a reacutecemment co-eacutecrit un ouvrage sur la statistique matheacutematique publieacute chez Springer Sa recherche dans le domaine

du risque de creacutedit porte sur lrsquoimpact de lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation le filtrage non-lineacuteaire les modegraveles drsquoanalyse de risques dynamiques Heath-Jarrow-Morton et les processus affineacutes

mission apollo le modegravele a eacuteteacute utiliseacute pour preacuteparer le voyage de Neil amstrong vers la lune ainsi que son retour notamment pour deacuteterminer agrave quel moment preacutecis la fuseacutee devait rentrer dans lrsquoat-mosphegravere1 il est aujourdrsquohui uti-liseacute dans la plupart des outils de navigation satellite tout comme dans les smartphones ou les jeux videacuteo

le filtre de Kalman ne peut tou-tefois ecirctre employeacute que pour les cas lineacuteaires certains auteurs ont ainsi eacutetendu le cadre lineacuteaire en utilisant des approximations au niveau local

La meacutethode particulaire de filtrage

enfin des meacutethodes numeacuteriques ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees pour les pro-bleacutematiques non lineacuteaires ne pou-vant ecirctre reacutesolues ni par le filtre de Kalman ni par ses extensions Parmi elles figure la meacutethode particulaire de filtrage celle-ci estime la distribution du signal via un proceacutedeacute de reacuteduction sta-tistique dit ldquodiscreacutetisationrdquo qui consiste agrave deacutecouper une seacuterie de donneacutees en un certain nombre de classes repreacutesenteacutees par des particules a lrsquoimage de la meacutethode de Monte carlo cette approche repose sur la loi des grands nombres et la simulation drsquoexpeacuteriences reacutepeacuteteacutees Dans un premier temps les valeurs sont estimeacutees gracircce aux observations disponibles chaque valeur uti-liseacutee est associeacutee agrave un poids de conditionnement Puis agrave chaque simulation les pondeacuterations sont

ajusteacutees en fonction des reacutesul-tats obtenus les particules se deacuteplacent librement agrave partir de lrsquoalgorithme de dynamique du modegravele ce qui est possible dans la mesure ougrave la position exacte de chaque particule est connue on calcule alors la position moyenne pondeacutereacutee des particules agrave partir de leur poids theacuteoriques respec-tifs

un large champ drsquoapplication

les techniques de filtrage consti-tuent des outils preacutecieux afin de pallier aux imperfections de lrsquoinfor-mation ces probleacutematiques sont courantes en particulier dans le domaine financier en effet qursquoil srsquoagisse de calibrer un modegravele de valoriser un portefeuille drsquoac-tifs ou de deacutefinir les strateacutegies de couverture les donneacutees utiliseacutees sont toujours incomplegravetes le fil-trage permet de traiter ce type de question il est notamment employeacute pour calculer le risque de creacutedit une entreprise est en effet reconnue en faillite lorsque sa valeur fondamentale est trop basse Mais cette information nrsquoest eacutevidemment pas connue des acteurs du marcheacute les ob-servations sont bruiteacutees puisque pas entiegraverement disponibles le filtrage peut alors servir agrave estimer le risque de creacutedit agrave partir des diffeacuterentes sources drsquoinformation disponibles croiser les donneacutees des rapports trimestriels du cours des actions ou encore du prix des options permet drsquoeacuteva-luer la probabiliteacute de deacutefaut de la socieacuteteacute

les modegraveles de filtrage ont donc un large champ drsquoapplication et fournissent des eacuteleacutements de reacute-ponse agrave de nombreuses probleacute-matiques Nul doute que les re-cherches vont se poursuivre afin drsquoaccroitre les performances de ces meacutethodes et algorithmes et de faire ainsi face agrave de nouveaux challenges

thorsten schmidt

bibliographieFrey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

Bain a and crisan D (2009) Fundamentals of stochastic Filtering sprin-ger New York

Frey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

Del Moral P (1996) `Non-linear Filtering interacting particle solutionrsquo Markov Processes and related Fields 2(4) 555-580

1 Source Faragher (2012)

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12 les cahiers louis Bachelier

asymeacutetrie drsquoinformation et assurance

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Nous et le Monde Naturel Nous avons souvent besoin de quantifier le risque de lrsquoassureur pour deacuteterminer une eacutechelle de primes eacutequitable pour deacutefinir des strateacutegies solides de ges-tion du risque ou pour deacuteterminer les Solvency Capital Requirements le niveau minimum de fonds propres exigeacutes Dans chacune de ces situations les pertes potentielles constituent une issue future incertaine Mettant de cocircteacute la question quasi-philosophique de savoir si lrsquoincertitude (sur lrsquooccurrence et le montant des sinistres futurs pour lrsquoassureur) est due agrave une insuf-

fisance drsquoinformation ou alors si elle est plutocirct lieacutee au caractegravere intrinsegravequement aleacuteatoire des issues nous nous trouvons geacuteneacuteralement face au workflow suivant

INCERTITUDE i RISQUE i DONNEES i MODELES

La diffeacuterence entre lrsquoincertitude et le risque (selon la deacutefinition de lrsquoeacuteconomiste Frank Knight) est que le risque peut ecirctre quantifieacute crsquoest-agrave-dire que lrsquoon peut en principe deacuteterminer la distribution de probabiliteacute pour le risque en question Apregraves avoir deacutetermineacute quelles caracteacuteristiques constituent les risques agrave quan-

Crsquoest la nature mecircme de lrsquoactiviteacute drsquoassurance que de disposer drsquoun niveau drsquoinformation limiteacute agrave propos des risques agrave assurer et les informations suppleacutementaires sont toujours les bienvenues Il en est de mecircme pour lrsquoactiviteacute de la reacuteassurance La reacuteassurance est une opeacuteration par laquelle une socieacuteteacute drsquoassurance (le ldquoceacutedantrdquo) srsquoassure aupregraves drsquoune autre compagnie drsquoassurance (le ldquoreacuteassureurrdquo) pour une partie des risques qursquoelle porte Il srsquoagit donc lagrave avant tout drsquoune activiteacute drsquoassurance Cependant si lrsquoassurance et la reacuteassurance partagent des caracteacuteristiques communes il existe de nombreuses diffeacuterences structurelles notamment en ce qui concerne lrsquoinformation sur les risques inheacuterents aux polices reacuteassureacutees De plus dans la mesure ougrave les opeacuterations de reacuteassurance impliquent de multiples acteurs lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation constitue un eacuteleacutement important agrave prendre en consideacuteration La gestion du risque traite cette asymeacutetrie de diverses maniegraveres que je propose de commenter en fonction du degreacute drsquoinformation disponible

PAr hAnsjoumlrG ALbreCher

Hansjoumlrg Albrecher a eacutetudieacute les matheacutematiques appliqueacutees et lrsquoastronomie agrave Graz Limerick et Baltimore avant de recevoir son doctorat de la Technische Universitaumlt Graz en 2001 Il a ensuite enseigneacute agrave Graz Leuven et Aarhus avant drsquoecirctre nommeacute directeur drsquoeacutequipe en matheacutematiques financiegraveres et directeur adjoint du Johann Radon Institute de lrsquoAcadeacutemie des Sciences de lrsquoAutriche agrave Linz et professeur de matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoassurance agrave la Universitaumlt Linz (JKU) En 2009 il a eacuteteacute nommeacute professeur des sciences actuarielles agrave HEC de lrsquoUniversiteacute de LausanneSes domaines de recherche incluent la theacuteorie du risque la modeacutelisation du risque dans lrsquoassurance et la reacuteassurance la modeacutelisation des catastrophes naturelles les matheacutematiques financiegraveres la simulation stochastique et plus geacuteneacuteralement les applications de la theacuteorie des probabiliteacutes Il a publieacute plus de 100 articles dans ces domaines et est co-auteur de deux ouvrages Ruin Probabilities (deuxiegraveme eacutedition 2010) et Quantitative Methods for Financial Markets (2013)Dr Albrecher est reacutedacteur au sein drsquoInsurance Mathematics and Economics depuis 2010 coreacutedacteur-en-chef du European Actuarial Journal et de la revue Statistics and Risk Modeling depuis 2011 Il siegravege au comiteacute de reacutedaction de plusieurs autres revues scientifiques et collections drsquoouvrages

les cahiers louis Bachelier 13

tifier on cherche la probabiliteacute pour que ces risques se reacutealisent en partant drsquoobservations du reacuteel en geacuteneacuteral de donneacutees historiques Pour chaque risque agrave eacutevaluer le problegraveme classique reacuteside dans la deacutetermination de la pertinence des donneacutees et de leur degreacute de perti-nence Une difficulteacute suppleacutementaire reacuteside dans le fait que la nature des risques peut eacutevoluer dans le temps et que pour appreacutehender cette eacutevolution lrsquoon doit pouvoir faire appel agrave des meacutethodes statistiques capables drsquoidentifier les eacuteleacutements non-stationnaires inclus dans les seacuteries de donneacutees et agrave des informations reacuteelles connexes dont on dispose (modifications des clauses contractuelles contexte environnemental etc)

De longues anneacutees drsquoexpeacuterience nous ont appris agrave qualifier les diffeacuterents types de risque et agrave tirer des re-lations causales entre eux Ainsi nous avons pu deacuteve-lopper les modegraveles qui servent de base agrave lrsquoeacutevaluation de risques associeacutes

Bien qursquoen geacuteneacuteral les modeacutelisateurs soient conscients des limites de la modeacutelisation la principale motiva-tion derriegravere cette approche est la conviction qursquoil est possible de quantifier preacuteciseacutement les risques et que toute imperfection ou lacune dans un modegravele reacutesulte de donneacutees insuffisantes ou plus geacuteneacuteralement drsquoinformations insuffisantes concernant la nature des risques et les relations entre eux On pourrait dire que le deacuteveloppement de modegraveles de risque par les assu-reurs constitue une tentative de reacuteduire lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation en geacuteneacuteral et de lrsquoinformation dispo-nible pour nous

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureacutes et AssureurQuand un assureacute et une compagnie drsquoassurance concluent un contrat au terme duquel lrsquoassureacute paie une prime (baseacutee sur un calcul deacuteterministe) contre des si-nistres speacutecifieacutes dans le contrat il est clair que chaque partie dispose drsquoinformations diffeacuterentes mais dans ce cas lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation existe des deux cocircteacutes En principe la compagnie drsquoassurance dispose de plus drsquoexpeacuterience des risques agrave assurer (modegraveles idoines) ce qui lui permet (en y rajoutant la mutualisation des risques) de geacuterer efficacement les risques agrave assurer bien que pour certains produits les assureacutes preacutefeacutereraient plus de transparence (voir par exemple [12])

Lrsquoassureacute quant agrave lui dispose dans la plupart des sec-teurs de beaucoup plus drsquoinformation concernant son profil de risque que ce qursquoil communique agrave

lrsquoassureur et il pourrait mecircme en influencer le reacutesul-tat par le biais de son comportement Un exemple en est lrsquoassurance maladie ougrave il existe une asymeacutetrie drsquoinformation intrinsegraveque concernant lrsquoeacutetat de santeacute de lrsquoassureacute (cf [22] et [19 21] pour des eacutetudes sur certains types drsquoassurance-vie) Aussi telle asymeacutetrie peut ecirctre la conseacutequence de nouvelles reacuteglementations (cf [23]) Le secteur de lrsquoassurance automobile a une longue pratique de reacuteduction de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation concernant le profil de risque des assureacutes via le systegraveme de bonus-malus qui a lrsquoavantage suppleacute-mentaire drsquoinciter les assureacutes agrave conduire prudemment La tendance actuelle est de pousser le dispositif plus loin encore avec la collecte drsquoinformations reacuteelles sur la conduite des assureacutes via des systegravemes teacuteleacutematiques embarqueacutes(cf [18 6]) Crsquoest une excellente illustra-tion de comment une quantiteacute importante de don-neacutees suppleacutementaires peut ecirctre et sera certainement utiliseacutee pour concevoir les futurs contrats drsquoassurance (une tendance parfois appeleacutee Le Big Data dans lrsquoAs-surance) Lrsquoexploitation des donneacutees inclut lrsquoanalyse approfondie des eacutecarts de comportement des assureacutes (cf [16 20]) et le deacuteveloppement drsquoapplications se servant de ces informations agrave des fins commerciales (cf [17])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et ReacuteassureurComme les assureurs nrsquoaiment pas partager des don-neacutees et statistiques concernant les sinistres dans le cas de nombreux contrats de reacuteassurance non proportion-nels lrsquoassureur ne communique au reacuteassureur qursquoune partie des donneacutees concerneacutees crsquoest-agrave-dire seulement les donneacutees sur les sinistres engageant ou pouvant en-gager la garantie Cette asymeacutetrie drsquoinformation laisse le reacuteassureur dans lrsquoobligation de creacuteer son modegravele preacutedictif avec des donneacutees censureacutees (cf [2]) En pra-tique les reacuteassureurs tentent de compleacuteter les donneacutees censureacutees avec des donneacutees collecteacutees agrave partir de porte-feuilles similaires (parfois obtenues gracircce agrave un contrat de reacuteassurance proportionnelle couvrant des risques similaires drsquoune mecircme importance) Les subtiliteacutes relatives agrave lrsquoeacutevaluation des risques et la deacutetermination des primes de reacuteassurance varient en fonction du type de contrat et la meacutethodologie choisie (meacutethode par expeacuterience vs meacutethode par exposition etc [1]) Une autre source drsquoasymeacutetrie drsquoinformation tient dans le fait que les sinistres passeacutes sont souvent comptabi-liseacutes agrave leur valeur ldquodrsquoengagementrdquo (ie la valeur des indemniteacutes reacuteellement verseacutees plus une estimation rai-sonnable des indemniteacutes restant agrave verser) et celle-ci peut srsquoaveacuterer significativement diffeacuterente de la valeur

14 les cahiers louis Bachelier

finale des indemniteacutes Dans des secteurs drsquoactiviteacute ougrave le regraveglement des sinistres peut prendre de nombreuses anneacutees on comprend facilement que les reacuteassureurs ne peuvent pas compter exclusivement sur les don-neacutees concernant le montant reacuteel final des indemniteacutes verseacutees mais doivent eacutegalement prendre en compte la valeur (estimeacutee) des engagements dans lrsquoeacutelaboration de leurs modegraveles Cette situation pose de reacuteels deacutefis statistiques et peu de recherche theacuteorique existe sur le sujet actuellement (cf [2])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et InvestisseurDes actionnaires actuels ou potentiels des socieacuteteacutes drsquoassurance fondent leurs deacutecisions drsquoinvestir sur les chiffres financiers et commerciaux et des indicateurs de performance mais en geacuteneacuteral ces chiffres ne tra-duisent pas lrsquointeacutegraliteacute de la structure de risque des assureurs et reacuteassureurs Compte tenu des Solvency Capital Requirements une socieacuteteacute doit tenir compte du coucirct de lever et conserver ce capital Ce coucirct aura un impact sur nombre de deacutecisions de strateacutegie et de gestion y compris la deacutecision de recourir agrave la reacuteassu-rance Le taux du coucirct du capital est influenceacute non seulement par le profil du risque mais eacutegalement par la structure de lrsquoinformation Par conseacutequence le taux du coucirct du capital est bien le reacutesultat de lrsquooffre et la de-mande sur le marcheacute mais tient eacutegalement compte de regravegles et directives en matiegravere de reporting financier telle la constitution de reacuteserves pour pertes et pour sinistres survenus mais non encore deacuteclareacutes Pour une discussion drsquoun point de vue actuariel voir [514]

Un autre domaine de recherche qui srsquointeacuteresse acti-vement aux aspects pratiques de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation est la titrisation des risques drsquoassurance en particulier celui de catastrophes naturelles et plus reacutecemment le risque de longeacuteviteacute La titrisation trans-fegravere le risque drsquoassurance aux marcheacutes des capitaux et constitue donc un instrument particuliegraverement utile lorsqursquoil srsquoagit de risques de grande ampleur ayant de fortes correacutelations ougrave les contrats de reacuteassurance tradi-tionnels ne sont pas eacuteconomiquement viables compte tenu du coucirct monumental des capitaux Lrsquohistoire des produits de titrisation illustre parfaitement comment lrsquoeacutevolution des attitudes envers lrsquoasymeacutetrie drsquoinforma-tion (dans ce cas preacutecis entre eacutemetteur et investisseur) a modifieacute les produits et leur attractiviteacute Des deacuteclen-cheurs anciens baseacutes sur lrsquoexpeacuterience effective de pertes des compagnies individuelles et des indices sectoriels ont eacutevolueacute vers des deacuteclencheurs parameacutetriques cal-culeacutes en tenant compte de quantiteacutes physiques lieacutees

aux catastrophes comme la vitesse du vent la pression atmospheacuterique etc Alors que les deacuteclencheurs para-meacutetriques diminuent lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation (qui dans le cas des deacuteclencheurs speacutecifiques agrave chaque en-treprise eacutetait significative) ils augmentent le risque de base crsquoest-agrave-dire le risque que le deacuteclencheur ne reflegravete pas lrsquoexpeacuterience reacuteelle de lrsquoeacutemetteur ce qui reacuteduit lrsquoef-ficaciteacute du produit pour lrsquoeacutemetteur Comme on pou-vait srsquoy attendre lrsquoactiviteacute de ce marcheacute a connu une certaine volatiliteacute dans le temps avec une forte aug-mentation des volumes dans des peacuteriodes ougrave le mar-cheacute traditionnel de la reacuteassurance ne pouvait pas faire face agrave ce type de demande (cf [9 11]) La valorisation de ces produits se situe agrave la frontiegravere entre assurance et finance Crsquoest eacutegalement un sujet de recherche tregraves inteacuteressant sur le plan theacuteorique (cf [7 15 4 8] et [10 24])

Asymeacutetrie drsquoinformation entre Assureurs et ConcurrentsEnfin comme dans toute activiteacute eacuteconomique il existe une concurrence entre assureurs pour un nombre li-miteacute de clients (assureacutes) et il existe eacutegalement une asy-meacutetrie drsquoinformation naturelle entre assureurs concur-rents concernant le profil du risque lrsquoappreacuteciation des conditions marcheacute lrsquoapproche meacutethodologique du risque et la deacutetermination des primes Parmi des approches reacutecentes on peut citer la deacutetermination des primes drsquoassurance via une analyse fondeacutee sur la theacuteo-rie des jeux tenant compte drsquoune preacutevision de la poli-tique des primes des concurrents des comportements agrave risque des assureacutes et des contraintes reacuteglementaires en matiegravere de fonds propres (voir [13]) le tout dans un contexte drsquoinformations incomplegravetes

Lrsquoobjectif de ce court chapitre eacutetait de mettre en lumiegravere plusieurs domaines de recherche dans les sciences actuarielles ougrave lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation joue directement ou indirec-tement un rocircle important Cette liste est forceacutement incomplegravete mais elle souligne lrsquoimportance de la modeacutelisation drsquoinforma-tion dans le secteur de lrsquoassurance et de la reacuteassurance qui est eacutegalement lrsquoobjet de tregraves nombreux projets de recherche en cours

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drsquohansjoumlrg Albrecher sur

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les cahiers louis Bachelier 15

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Page 7: Information en Finance et assurance

les cahiers louis Bachelier 7

Kerry Back est professeur titulaire de la chaire de Finance J Howard Creekmore agrave la Jones Graduate School of Business et professeur drsquoEacuteconomie agrave la faculteacute de Sciences Sociales de Rice University ougrave il enseigne la theacuteorie de valorisation drsquoactifs Il a eacutegalement enseigneacute agrave Northwestern University Indiana University Washington University in St Louis et Texas AampM University A Washington University in St Louis il a occupeacute le poste de Doyen des Affaires Acadeacutemiques de la Olin School of Business et a reccedilu le titre de ldquoMembre Eacuteminent du corps

professoralrdquo Il a eacuteteacute reacutecompenseacute par plusieurs prix de recherche agrave Texas AampM et agrave Rice University Ses domaines de recherche comprennent les investissements et lrsquoorganisation des marcheacutes Il a eacuteteacute reacutedacteur de la Review of Financial Studies coreacutedacteur de Finance amp Stochastics et reacutedacteur adjoint du Journal of Finance et drsquoautres revues

rentabiliteacute espeacutereacutee il nrsquoy a pas de saut juste avant lrsquoannonce du prix le marcheacute incorpore correcte-ment lrsquoinformation et la formation du prix est juste

deacuteterminer le prix drsquoeacutequilibre

le modegravele de Kyle se distingue ainsi du modegravele de Merton lrsquoune des reacutefeacuterences des modegraveles drsquoeacutequilibre de marcheacute qui lui fait lrsquohypothegravese drsquoune symeacutetrie drsquoin-formation le premier considegravere des agents neutres vis-agrave-vis du risque et ayant un impact sur le marcheacute Drsquoougrave la volonteacute de lrsquoagent informeacute de mener ses transac-tions ldquoen douceurrdquo le second au contraire considegravere des agents averses au risque nrsquoayant aucun impact sur le prix

lrsquoobjectif du modegravele de Kyle est de deacuteterminer comment lrsquoinforma-tion de lrsquoagent privileacutegieacute se trans-met au prix et de deacutefinir ainsi le prix drsquoeacutequilibre V le prix V1 de lrsquoactif agrave lrsquoinstant T1 est en effet connu a partir de cette informa-tion comment estimer le prix V au fil du temps le modegravele montre que lorsque le prix V1 suit une loi dite gaussienne (dont la dis-tribution est donc uniquement deacutetermineacutee par la moyenne et la

le modegravele de Kyle est un modegravele drsquoeacutequilibre ougrave un agent neutre au risque et informeacute crsquoest-agrave-dire qursquoil connaicirct le prix agrave la date terminale exploite cette information afin de maximiser son profit espeacutereacute Par contre le market maker qui fixe le prix de marcheacute dispose de moins drsquoinformation et en particulier ne peut pas observer lrsquoaction de lrsquoagent informeacute car elle est bruiteacutee par les liquidity traders en utilisant des outils de controcircle stochastique et du filtrage on eacutetudie lrsquoeffet de lrsquoinformation sur les prix drsquoeacutequilibre

meacutethodologie

variance) la formule est explicite et facilement calculable

une information plus ou moins valoriseacutee

le modegravele fournit eacutegalement un eacuteclairage sur les beacuteneacutefices ap-porteacutes par lrsquoinformation priveacutee ces derniers peuvent ainsi ecirctre renforceacutes par plusieurs eacuteleacutements

Tout drsquoabord le profit de lrsquoagent informeacute est drsquoautant plus grand que le marcheacute est liquide autre-ment dit plus le marcheacute integravegre rapidement lrsquoinformation plus celle-ci est beacuteneacutefique au trader privileacutegieacute son profit srsquoaccroicirct eacutega-lement avec le bruit du marcheacute Plus le bruit est important plus lrsquoinformation priveacutee sera deacutevoileacutee tardivement au marcheacute et plus lrsquoagent pourra en tirer profit

enfin plus la variance du prix V1 est forte plus les valeurs pro-bables du prix drsquoeacutequilibre V sont larges il est alors plus difficile pour les traders non informeacutes de faire une juste estimation de V le gain pour lrsquoagent privileacutegieacute est donc plus fort

le modegravele de Kyle connaicirct de nombreuses extensions il existe

ainsi des formules qui integravegrent plusieurs agents informeacutes ou un agent informeacute mais ne connais-sant pas exactement le prix V1 Drsquoautres considegraverent un prix V1 qui ne suit pas une loi gaussienne ou encore un marcheacute composeacute drsquoun actif risqueacute ainsi que drsquoun deacuteriveacute Quelles que soient les variations le modegravele de Kyle constitue en tout cas une avanceacutee dans la compreacutehension du rocircle de lrsquoinfor-mation sur les marcheacutes et sur la formation du prix drsquoeacutequilibre

Kerry back

bibliographie

Back K 1992 insider tra-ding in continuous time review of Financial studies 5 387-409

Kyle as 1985 conti-nuous auctions and insider trading econometrica 53 1315-1336

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8 les cahiers louis Bachelier

la sec (securities and exchange commission) lrsquoorganisme feacutedeacuteral ameacutericain de regraveglementation et de controcircle des marcheacutes finan-ciers deacutefinit le deacutelit drsquoinitieacute comme ldquole fait drsquoacheter ou de vendre un titre ou une valeur en violation des obligations fiduciaires etou de confiance tandis que lrsquoon dispose drsquoinformations confidentielles non-publiques concernant ladite valeur le deacutelit drsquoinitieacute peut aussi englober le fait de divulguer des informations confidentielles agrave un tiers le fait pour le tiers de neacutego-cier des titres objets desdites informations confidentielles ainsi que le neacutegoce de titres par toute personne qui deacutetournerait de telles informations agrave son profitrdquo

si ces contours sont clairs le deacutelit drsquoinitieacute demeure difficile agrave prouver et donc agrave sanctionner la modeacuteli-sation matheacutematique pourrait-elle permettre de mieux cerner le com-portement des fraudeurs et ainsi de mieux les deacutetecter Plusieurs travaux de recherche ont eacuteteacute me-neacutes sur ce sujet

Pas de profit sans risque

le processus de modeacutelisation re-pose en effet sur la notion drsquoinfor-mation on peut ainsi consideacuterer qursquoune collection drsquoeacuteveacutenements appeleacutee Ft repreacutesente lrsquoensemble des informations publiques concernant le marcheacute financier et disponibles agrave un moment t un initieacute possegravede par deacutefinition une information priveacutee sur un eacuteveacute-nement ne faisant pas partie de cet ensemble il peut srsquoagir par exemple drsquoun investisseur qui a connaissance de lrsquoavanceacutee des tests cliniques drsquoun nouveau meacute-dicament sa collection drsquoeacuteveacutene-ments observables devient alors plus grande que la collection de reacutefeacuterence Ft

lutter contre le deacutelit drsquoinitieacute gracircce agrave la modeacutelisation

Traditionnellement les modegraveles sont construits sur la notion drsquoab-sence drsquoarbitrage autrement dit ils considegraverent qursquoil est impossible de reacutealiser des profits sans assu-mer une part de risque le risque nul nrsquoexiste pas Mais il arrive qursquoune information priveacutee puisse creacuteer des opportuniteacutes drsquoarbi-trage ou du moins des situations tregraves proches de lrsquoarbitrage en lrsquooccurrence si un investisseur sait agrave lrsquoavance qursquoune compagnie va mettre sur le marcheacute un nouveau meacutedicament ses chances de reacutealiser une plus-value sont tregraves fortes et son risque faiblehellip

tirer profit drsquoune information priveacutee

lrsquoinitieacute peut ainsi tirer avantage de son information de plusieurs ma-niegraveres Dans lrsquoexemple preacutesenteacute la solution la plus simple est eacutevidem-ment drsquoacheter ou de vendre des actions de la compagnie pharma-ceutique selon les reacutesultats du test Mais lrsquoinformation peut aussi gui-der lrsquoachat de produits deacuteriveacutes ou

Un agent initieacute peut reacutealiser des profits sans prendre de risque ou presque

un agent initieacute possegravede une collection drsquoinformations plus grande que celle des autres agents Cette information suppleacutementaire change sa perception du marcheacute et son eacutevaluation du prix drsquoun actif

Le modegravele preacutesenteacute permet drsquooptimiser lrsquoutilisation de cette information priveacutee en analysant les deacuteviations des cours par rapport agrave une valeur de reacutefeacuterence il permet agrave lrsquoagent de savoir si un titre est sous ou sur eacutevalueacute

Le modegravele est eacutegalement utile au reacutegulateur pour mieux cerner le comportement des initieacutes et donc mieux lutter contre ces pratiques

drsquoapregraves un texte de Philip Protter et les articles citeacutes en bibliographie

Gracircce agrave une information priveacutee un agent peut reacutealiser drsquoimportants profits pour un minimum de risque en permettant de mieux comprendre lrsquoutilisation de cette information la modeacutelisation aide agrave lutter contre les deacutelits drsquoinitieacutes

a retenir

les cahiers louis Bachelier 9

Philip Protter est Fellow du IMS (Center for Intelligent Management Systems) reacute-dacteur adjoint de neuf revues scientifiques membre de deux comiteacutes de reacutedaction et a eacuteteacute reacutedacteur en chef de la revue Stochastic Processes and their Applications Ses principaux domaines de recherche comprennent les matheacutematiques finan-ciegraveres (modegraveles de valorisation drsquoactifs modegraveles de valorisation et de couver-ture de deacuteriveacutes problegravemes de liquiditeacute bulles financiegraveres deacutelits drsquoinitieacute trading agrave haute freacutequence risque de creacutedit) la theacuteorie de lrsquointeacutegrale stochastique la theacuteorie des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques les meacutethodes de reacutesolution

numeacuterique des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques la discreacutetisation de processus stochastiques (en tant que branche de la statistique matheacutematique) eacutequations diffeacuterentielles stochastiques et ldquoeacutequations diffeacuterentielles stochastiques retrogradesrdquo les processus de Markov et la theacuteorie du filtrage Il est lrsquoau-teur et co-auteur de deux manuels acadeacutemiques et de deux ouvrages scientifiques

drsquooptions ces derniegraveres donnent le droit drsquoacheter ou de vendre un titre dans le futur agrave un prix fixeacute Bien utiliseacutee une option peut ainsi geacuteneacuterer drsquoimportants profits pour un investissement modeste et ce sur une courte peacuteriode

les informations suppleacutementaires ont en effet un impact sur lrsquoesti-mation du prix drsquoun actif un agent eacutevalue les flux futurs drsquoun actif via la collection drsquoinformations dispo-nibles si sa collection devient plus grande sa perception du marcheacute est modifieacutee lrsquoestimation du prix eacutevolue ainsi que lrsquoeacutevaluation de la probabiliteacute drsquoun eacuteveacutenement comme la survenance drsquoune faillite par exemple

deacutetecter une valeur hors norme

lrsquoauteur eacutetudie ainsi un modegravele qui calcule la ldquojuste valeurrdquo drsquoun actif et ses proprieacuteteacutes (variance eacutecart-type etc) en prenant compte de lrsquoinformation disponible modeacuteliseacutee pour un agent initieacute par un grossis-sement de filtration il est ainsi pos-sible drsquoanalyser les deacuteviations des cours par rapport agrave cette valeur la filtration modeacutelise ici lrsquoinforma-tion de lrsquoinitieacute et permet de montrer comment tirer profit drsquoune infor-mation privileacutegieacutee lrsquoagent est en mesure de savoir si une option est

sous ou sur eacutevalueacutee il ajuste ses investissements en conseacutequence augmentant de ce fait consideacutera-blement ses probabiliteacutes de pro-fits le modegravele permet eacutegalement de quantifier lrsquoavantage obtenu par lrsquoinitieacute gracircce agrave son information privileacutegieacutee

Toutefois comprendre via une analyse matheacutematique comment certains utilisent une information priveacutee peut aider le reacutegulateur agrave deacutetecter les deacutelits drsquoinitieacute et agrave poursuivre les contrevenants en effet en eacutevaluant la valeur normale de lrsquoactif le modegravele quantifie en quelque sorte un niveau drsquoalerte si une transaction srsquoeffectue agrave un prix trop eacuteloigneacute de la valeur nor-male elle peut ecirctre le fruit drsquoun deacutelit drsquoinitieacute

or lutter contre les deacutelits drsquoinitieacute est primordial pour garantir la flui-diteacute des transactions financiegraveres le marcheacute doit apparaicirctre comme juste Dans le cas contraire srsquoil est perccedilu comme deacutefaillant ou cor-rompu peu drsquoinvestisseurs accep-teront de participer aux eacutechanges les agents perdront confiance et la liquiditeacute sera reacuteduite le rocircle de lrsquoetat est donc de garantir le bon fonctionnement du marcheacute en reacute-duisant lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation et en luttant contre les deacutelits drsquoinitieacute

Philip Protter

lrsquoinformation publique disponible au cours du temps sur le marcheacute est repreacutesenteacutee par une filtration lrsquoinformation drsquoun initieacute qui possegravede une information privileacutegieacutee est ainsi modeacuteliseacutee par un grossissement de cette filtration du marcheacute ceci entraicircne une eacutevaluation des probabiliteacutes drsquooccurrence drsquoeacuteveacutenements diffeacuterentes pour un initieacute par rapport agrave un investisseur standard en particulier sa mesure drsquoeacutevaluation (appeleacute mesure risque neutre) des actifs en est modifieacutee

meacutethodologie

bibliographie

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claudio Fontana Monique Jeanblanc amp shiqi song on arbitrages arising with honest times Finance and stochastics July 2014 Vo-lume 18 issue 3 515-543

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10 les cahiers louis Bachelier

appareils connecteacutes GPs sys-tegravemes de monitoring meacutedicaux robots mobiles ces technolo-gies se creacuteent une place dans nos quotidiens et leur utilisation devrait ecirctre encore renforceacutee par la numeacuterisation en cours or tous ces objets ont un point commun ils fonctionnent de faccedilon dyna-mique avec une eacutemission de signal qui eacutevolue continuellement au cours du temps la preacutediction du signal est ainsi plus complexe et neacutecessite des outils matheacutema-tiques adapteacutes

la technique du filtrage reacutepond agrave cette probleacutematique Thorsten schmidt professeur agrave lrsquouniver-siteacute de Fribourg fait le point sur cette meacutethodologie aux multiples applications qursquoest-ce qursquoun problegraveme de filtrage comment cette technique srsquoest-elle deacuteve-loppeacutee Quelles solutions peut-elle apporter

contrairement agrave la statistique classique le filtrage vise agrave eacutevaluer

un signal dynamique dont lrsquoobser-vation est perturbeacutee par un bruit comment calculer une estima-tion juste malgreacute une observation bruiteacutee il srsquoagit par exemple de deacutefinir la position drsquoun robot qui se deacuteplace au cours du temps le robot nrsquoest pas dans le champ de vision de son proprieacutetaire il nrsquoest donc pas directement ob-servable Toutefois le proprieacutetaire dispose des donneacutees GPs qui correspondent ici agrave une observa-tion bruiteacutee le but est drsquooptimiser les informations fournies par le GPs afin de calculer la position du robot au cours du temps

comment pallier au manque drsquoinformation gracircce au filtrage

Approche de la statistique moderne le filtrage permet de reacutesoudre de nombreuses probleacutematiques drsquoinformation imparfaite que ce soit dans le cadre des objets connecteacutes de la navigation satellite ou du calcul de risque en finance ses applications sont multiples

Le filtre de Kalman

la theacuteorie du filtrage est neacutee dans les anneacutees 40 sous lrsquoimpul-sion drsquoandrey N Kolmogorov et Norbert Wiener le premier a eacutetu-dieacute la probleacutematique en temps discret tandis que le second lrsquoa abordeacute en temps continu il a en-suite fallu attendre les anneacutees 60 pour connaitre de nouvelles avan-ceacutees avec rudolf e Kalman

lrsquoapproche de Kalman fait office de reacutefeacuterence en matiegravere de fil-trage en se basant sur les lois gaussiennes le modegravele eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal lrsquoinformation corres-pond aux observations bruiteacutees prix donneacutees etc lrsquoavantage principal de cette meacutethode est de donner une formule explicite pour calculer le signal simplifiant ainsi fortement le proceacutedeacute

lrsquoune des utilisations les plus ceacutelegravebres et les plus anciennes du filtre de Kalman remonte agrave la

drsquoapregraves un texte de thorsten schmidt et les articles citeacutes en reacutefeacuterence

Lrsquoavantage principal de la meacutethode de Kalman est de donner une formule explicite et de faible dimension

Le filtrage vise agrave eacutevaluer un signal dynamique dont lrsquoobservation est bruiteacutee

Le modegravele de Kalman eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal il fournit une for-mule explicite et de faible dimension pour calculer le signal simplifiant ainsi le proceacutedeacute

Pour les cas non lineacuteaires des meacutethodes numeacuteriques peuvent ecirctre utiliseacutees

Le filtrage recouvre un large champ drsquoapplication que ce soit en finance dans lrsquoindustrie eacutelectro-nique la robotique ou encore le secteur meacutedical

a retenir

les cahiers louis Bachelier 11

Thorsten Schmidt est professeur de matheacutematiques stochastiques agrave lrsquoUniversiteacute de Fribourg (Allemagne) ougrave il a succeacutedeacute agrave Ernst Eberlein Auparavant il a ensei-gneacute les matheacutematiques financiegraveres agrave lrsquoUniversiteacute de technologie de Chemnitz

Outre son inteacuterecirct pour les matheacutematiques financiegraveres et plus particuliegraverement pour les taux drsquointeacuterecirct les marcheacutes du risque de creacutedit et de lrsquoeacutenergie il a une so-lide expertise en statistique et probabiliteacute Il a reacutecemment co-eacutecrit un ouvrage sur la statistique matheacutematique publieacute chez Springer Sa recherche dans le domaine

du risque de creacutedit porte sur lrsquoimpact de lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation le filtrage non-lineacuteaire les modegraveles drsquoanalyse de risques dynamiques Heath-Jarrow-Morton et les processus affineacutes

mission apollo le modegravele a eacuteteacute utiliseacute pour preacuteparer le voyage de Neil amstrong vers la lune ainsi que son retour notamment pour deacuteterminer agrave quel moment preacutecis la fuseacutee devait rentrer dans lrsquoat-mosphegravere1 il est aujourdrsquohui uti-liseacute dans la plupart des outils de navigation satellite tout comme dans les smartphones ou les jeux videacuteo

le filtre de Kalman ne peut tou-tefois ecirctre employeacute que pour les cas lineacuteaires certains auteurs ont ainsi eacutetendu le cadre lineacuteaire en utilisant des approximations au niveau local

La meacutethode particulaire de filtrage

enfin des meacutethodes numeacuteriques ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees pour les pro-bleacutematiques non lineacuteaires ne pou-vant ecirctre reacutesolues ni par le filtre de Kalman ni par ses extensions Parmi elles figure la meacutethode particulaire de filtrage celle-ci estime la distribution du signal via un proceacutedeacute de reacuteduction sta-tistique dit ldquodiscreacutetisationrdquo qui consiste agrave deacutecouper une seacuterie de donneacutees en un certain nombre de classes repreacutesenteacutees par des particules a lrsquoimage de la meacutethode de Monte carlo cette approche repose sur la loi des grands nombres et la simulation drsquoexpeacuteriences reacutepeacuteteacutees Dans un premier temps les valeurs sont estimeacutees gracircce aux observations disponibles chaque valeur uti-liseacutee est associeacutee agrave un poids de conditionnement Puis agrave chaque simulation les pondeacuterations sont

ajusteacutees en fonction des reacutesul-tats obtenus les particules se deacuteplacent librement agrave partir de lrsquoalgorithme de dynamique du modegravele ce qui est possible dans la mesure ougrave la position exacte de chaque particule est connue on calcule alors la position moyenne pondeacutereacutee des particules agrave partir de leur poids theacuteoriques respec-tifs

un large champ drsquoapplication

les techniques de filtrage consti-tuent des outils preacutecieux afin de pallier aux imperfections de lrsquoinfor-mation ces probleacutematiques sont courantes en particulier dans le domaine financier en effet qursquoil srsquoagisse de calibrer un modegravele de valoriser un portefeuille drsquoac-tifs ou de deacutefinir les strateacutegies de couverture les donneacutees utiliseacutees sont toujours incomplegravetes le fil-trage permet de traiter ce type de question il est notamment employeacute pour calculer le risque de creacutedit une entreprise est en effet reconnue en faillite lorsque sa valeur fondamentale est trop basse Mais cette information nrsquoest eacutevidemment pas connue des acteurs du marcheacute les ob-servations sont bruiteacutees puisque pas entiegraverement disponibles le filtrage peut alors servir agrave estimer le risque de creacutedit agrave partir des diffeacuterentes sources drsquoinformation disponibles croiser les donneacutees des rapports trimestriels du cours des actions ou encore du prix des options permet drsquoeacuteva-luer la probabiliteacute de deacutefaut de la socieacuteteacute

les modegraveles de filtrage ont donc un large champ drsquoapplication et fournissent des eacuteleacutements de reacute-ponse agrave de nombreuses probleacute-matiques Nul doute que les re-cherches vont se poursuivre afin drsquoaccroitre les performances de ces meacutethodes et algorithmes et de faire ainsi face agrave de nouveaux challenges

thorsten schmidt

bibliographieFrey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

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12 les cahiers louis Bachelier

asymeacutetrie drsquoinformation et assurance

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Nous et le Monde Naturel Nous avons souvent besoin de quantifier le risque de lrsquoassureur pour deacuteterminer une eacutechelle de primes eacutequitable pour deacutefinir des strateacutegies solides de ges-tion du risque ou pour deacuteterminer les Solvency Capital Requirements le niveau minimum de fonds propres exigeacutes Dans chacune de ces situations les pertes potentielles constituent une issue future incertaine Mettant de cocircteacute la question quasi-philosophique de savoir si lrsquoincertitude (sur lrsquooccurrence et le montant des sinistres futurs pour lrsquoassureur) est due agrave une insuf-

fisance drsquoinformation ou alors si elle est plutocirct lieacutee au caractegravere intrinsegravequement aleacuteatoire des issues nous nous trouvons geacuteneacuteralement face au workflow suivant

INCERTITUDE i RISQUE i DONNEES i MODELES

La diffeacuterence entre lrsquoincertitude et le risque (selon la deacutefinition de lrsquoeacuteconomiste Frank Knight) est que le risque peut ecirctre quantifieacute crsquoest-agrave-dire que lrsquoon peut en principe deacuteterminer la distribution de probabiliteacute pour le risque en question Apregraves avoir deacutetermineacute quelles caracteacuteristiques constituent les risques agrave quan-

Crsquoest la nature mecircme de lrsquoactiviteacute drsquoassurance que de disposer drsquoun niveau drsquoinformation limiteacute agrave propos des risques agrave assurer et les informations suppleacutementaires sont toujours les bienvenues Il en est de mecircme pour lrsquoactiviteacute de la reacuteassurance La reacuteassurance est une opeacuteration par laquelle une socieacuteteacute drsquoassurance (le ldquoceacutedantrdquo) srsquoassure aupregraves drsquoune autre compagnie drsquoassurance (le ldquoreacuteassureurrdquo) pour une partie des risques qursquoelle porte Il srsquoagit donc lagrave avant tout drsquoune activiteacute drsquoassurance Cependant si lrsquoassurance et la reacuteassurance partagent des caracteacuteristiques communes il existe de nombreuses diffeacuterences structurelles notamment en ce qui concerne lrsquoinformation sur les risques inheacuterents aux polices reacuteassureacutees De plus dans la mesure ougrave les opeacuterations de reacuteassurance impliquent de multiples acteurs lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation constitue un eacuteleacutement important agrave prendre en consideacuteration La gestion du risque traite cette asymeacutetrie de diverses maniegraveres que je propose de commenter en fonction du degreacute drsquoinformation disponible

PAr hAnsjoumlrG ALbreCher

Hansjoumlrg Albrecher a eacutetudieacute les matheacutematiques appliqueacutees et lrsquoastronomie agrave Graz Limerick et Baltimore avant de recevoir son doctorat de la Technische Universitaumlt Graz en 2001 Il a ensuite enseigneacute agrave Graz Leuven et Aarhus avant drsquoecirctre nommeacute directeur drsquoeacutequipe en matheacutematiques financiegraveres et directeur adjoint du Johann Radon Institute de lrsquoAcadeacutemie des Sciences de lrsquoAutriche agrave Linz et professeur de matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoassurance agrave la Universitaumlt Linz (JKU) En 2009 il a eacuteteacute nommeacute professeur des sciences actuarielles agrave HEC de lrsquoUniversiteacute de LausanneSes domaines de recherche incluent la theacuteorie du risque la modeacutelisation du risque dans lrsquoassurance et la reacuteassurance la modeacutelisation des catastrophes naturelles les matheacutematiques financiegraveres la simulation stochastique et plus geacuteneacuteralement les applications de la theacuteorie des probabiliteacutes Il a publieacute plus de 100 articles dans ces domaines et est co-auteur de deux ouvrages Ruin Probabilities (deuxiegraveme eacutedition 2010) et Quantitative Methods for Financial Markets (2013)Dr Albrecher est reacutedacteur au sein drsquoInsurance Mathematics and Economics depuis 2010 coreacutedacteur-en-chef du European Actuarial Journal et de la revue Statistics and Risk Modeling depuis 2011 Il siegravege au comiteacute de reacutedaction de plusieurs autres revues scientifiques et collections drsquoouvrages

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tifier on cherche la probabiliteacute pour que ces risques se reacutealisent en partant drsquoobservations du reacuteel en geacuteneacuteral de donneacutees historiques Pour chaque risque agrave eacutevaluer le problegraveme classique reacuteside dans la deacutetermination de la pertinence des donneacutees et de leur degreacute de perti-nence Une difficulteacute suppleacutementaire reacuteside dans le fait que la nature des risques peut eacutevoluer dans le temps et que pour appreacutehender cette eacutevolution lrsquoon doit pouvoir faire appel agrave des meacutethodes statistiques capables drsquoidentifier les eacuteleacutements non-stationnaires inclus dans les seacuteries de donneacutees et agrave des informations reacuteelles connexes dont on dispose (modifications des clauses contractuelles contexte environnemental etc)

De longues anneacutees drsquoexpeacuterience nous ont appris agrave qualifier les diffeacuterents types de risque et agrave tirer des re-lations causales entre eux Ainsi nous avons pu deacuteve-lopper les modegraveles qui servent de base agrave lrsquoeacutevaluation de risques associeacutes

Bien qursquoen geacuteneacuteral les modeacutelisateurs soient conscients des limites de la modeacutelisation la principale motiva-tion derriegravere cette approche est la conviction qursquoil est possible de quantifier preacuteciseacutement les risques et que toute imperfection ou lacune dans un modegravele reacutesulte de donneacutees insuffisantes ou plus geacuteneacuteralement drsquoinformations insuffisantes concernant la nature des risques et les relations entre eux On pourrait dire que le deacuteveloppement de modegraveles de risque par les assu-reurs constitue une tentative de reacuteduire lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation en geacuteneacuteral et de lrsquoinformation dispo-nible pour nous

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureacutes et AssureurQuand un assureacute et une compagnie drsquoassurance concluent un contrat au terme duquel lrsquoassureacute paie une prime (baseacutee sur un calcul deacuteterministe) contre des si-nistres speacutecifieacutes dans le contrat il est clair que chaque partie dispose drsquoinformations diffeacuterentes mais dans ce cas lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation existe des deux cocircteacutes En principe la compagnie drsquoassurance dispose de plus drsquoexpeacuterience des risques agrave assurer (modegraveles idoines) ce qui lui permet (en y rajoutant la mutualisation des risques) de geacuterer efficacement les risques agrave assurer bien que pour certains produits les assureacutes preacutefeacutereraient plus de transparence (voir par exemple [12])

Lrsquoassureacute quant agrave lui dispose dans la plupart des sec-teurs de beaucoup plus drsquoinformation concernant son profil de risque que ce qursquoil communique agrave

lrsquoassureur et il pourrait mecircme en influencer le reacutesul-tat par le biais de son comportement Un exemple en est lrsquoassurance maladie ougrave il existe une asymeacutetrie drsquoinformation intrinsegraveque concernant lrsquoeacutetat de santeacute de lrsquoassureacute (cf [22] et [19 21] pour des eacutetudes sur certains types drsquoassurance-vie) Aussi telle asymeacutetrie peut ecirctre la conseacutequence de nouvelles reacuteglementations (cf [23]) Le secteur de lrsquoassurance automobile a une longue pratique de reacuteduction de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation concernant le profil de risque des assureacutes via le systegraveme de bonus-malus qui a lrsquoavantage suppleacute-mentaire drsquoinciter les assureacutes agrave conduire prudemment La tendance actuelle est de pousser le dispositif plus loin encore avec la collecte drsquoinformations reacuteelles sur la conduite des assureacutes via des systegravemes teacuteleacutematiques embarqueacutes(cf [18 6]) Crsquoest une excellente illustra-tion de comment une quantiteacute importante de don-neacutees suppleacutementaires peut ecirctre et sera certainement utiliseacutee pour concevoir les futurs contrats drsquoassurance (une tendance parfois appeleacutee Le Big Data dans lrsquoAs-surance) Lrsquoexploitation des donneacutees inclut lrsquoanalyse approfondie des eacutecarts de comportement des assureacutes (cf [16 20]) et le deacuteveloppement drsquoapplications se servant de ces informations agrave des fins commerciales (cf [17])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et ReacuteassureurComme les assureurs nrsquoaiment pas partager des don-neacutees et statistiques concernant les sinistres dans le cas de nombreux contrats de reacuteassurance non proportion-nels lrsquoassureur ne communique au reacuteassureur qursquoune partie des donneacutees concerneacutees crsquoest-agrave-dire seulement les donneacutees sur les sinistres engageant ou pouvant en-gager la garantie Cette asymeacutetrie drsquoinformation laisse le reacuteassureur dans lrsquoobligation de creacuteer son modegravele preacutedictif avec des donneacutees censureacutees (cf [2]) En pra-tique les reacuteassureurs tentent de compleacuteter les donneacutees censureacutees avec des donneacutees collecteacutees agrave partir de porte-feuilles similaires (parfois obtenues gracircce agrave un contrat de reacuteassurance proportionnelle couvrant des risques similaires drsquoune mecircme importance) Les subtiliteacutes relatives agrave lrsquoeacutevaluation des risques et la deacutetermination des primes de reacuteassurance varient en fonction du type de contrat et la meacutethodologie choisie (meacutethode par expeacuterience vs meacutethode par exposition etc [1]) Une autre source drsquoasymeacutetrie drsquoinformation tient dans le fait que les sinistres passeacutes sont souvent comptabi-liseacutes agrave leur valeur ldquodrsquoengagementrdquo (ie la valeur des indemniteacutes reacuteellement verseacutees plus une estimation rai-sonnable des indemniteacutes restant agrave verser) et celle-ci peut srsquoaveacuterer significativement diffeacuterente de la valeur

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finale des indemniteacutes Dans des secteurs drsquoactiviteacute ougrave le regraveglement des sinistres peut prendre de nombreuses anneacutees on comprend facilement que les reacuteassureurs ne peuvent pas compter exclusivement sur les don-neacutees concernant le montant reacuteel final des indemniteacutes verseacutees mais doivent eacutegalement prendre en compte la valeur (estimeacutee) des engagements dans lrsquoeacutelaboration de leurs modegraveles Cette situation pose de reacuteels deacutefis statistiques et peu de recherche theacuteorique existe sur le sujet actuellement (cf [2])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et InvestisseurDes actionnaires actuels ou potentiels des socieacuteteacutes drsquoassurance fondent leurs deacutecisions drsquoinvestir sur les chiffres financiers et commerciaux et des indicateurs de performance mais en geacuteneacuteral ces chiffres ne tra-duisent pas lrsquointeacutegraliteacute de la structure de risque des assureurs et reacuteassureurs Compte tenu des Solvency Capital Requirements une socieacuteteacute doit tenir compte du coucirct de lever et conserver ce capital Ce coucirct aura un impact sur nombre de deacutecisions de strateacutegie et de gestion y compris la deacutecision de recourir agrave la reacuteassu-rance Le taux du coucirct du capital est influenceacute non seulement par le profil du risque mais eacutegalement par la structure de lrsquoinformation Par conseacutequence le taux du coucirct du capital est bien le reacutesultat de lrsquooffre et la de-mande sur le marcheacute mais tient eacutegalement compte de regravegles et directives en matiegravere de reporting financier telle la constitution de reacuteserves pour pertes et pour sinistres survenus mais non encore deacuteclareacutes Pour une discussion drsquoun point de vue actuariel voir [514]

Un autre domaine de recherche qui srsquointeacuteresse acti-vement aux aspects pratiques de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation est la titrisation des risques drsquoassurance en particulier celui de catastrophes naturelles et plus reacutecemment le risque de longeacuteviteacute La titrisation trans-fegravere le risque drsquoassurance aux marcheacutes des capitaux et constitue donc un instrument particuliegraverement utile lorsqursquoil srsquoagit de risques de grande ampleur ayant de fortes correacutelations ougrave les contrats de reacuteassurance tradi-tionnels ne sont pas eacuteconomiquement viables compte tenu du coucirct monumental des capitaux Lrsquohistoire des produits de titrisation illustre parfaitement comment lrsquoeacutevolution des attitudes envers lrsquoasymeacutetrie drsquoinforma-tion (dans ce cas preacutecis entre eacutemetteur et investisseur) a modifieacute les produits et leur attractiviteacute Des deacuteclen-cheurs anciens baseacutes sur lrsquoexpeacuterience effective de pertes des compagnies individuelles et des indices sectoriels ont eacutevolueacute vers des deacuteclencheurs parameacutetriques cal-culeacutes en tenant compte de quantiteacutes physiques lieacutees

aux catastrophes comme la vitesse du vent la pression atmospheacuterique etc Alors que les deacuteclencheurs para-meacutetriques diminuent lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation (qui dans le cas des deacuteclencheurs speacutecifiques agrave chaque en-treprise eacutetait significative) ils augmentent le risque de base crsquoest-agrave-dire le risque que le deacuteclencheur ne reflegravete pas lrsquoexpeacuterience reacuteelle de lrsquoeacutemetteur ce qui reacuteduit lrsquoef-ficaciteacute du produit pour lrsquoeacutemetteur Comme on pou-vait srsquoy attendre lrsquoactiviteacute de ce marcheacute a connu une certaine volatiliteacute dans le temps avec une forte aug-mentation des volumes dans des peacuteriodes ougrave le mar-cheacute traditionnel de la reacuteassurance ne pouvait pas faire face agrave ce type de demande (cf [9 11]) La valorisation de ces produits se situe agrave la frontiegravere entre assurance et finance Crsquoest eacutegalement un sujet de recherche tregraves inteacuteressant sur le plan theacuteorique (cf [7 15 4 8] et [10 24])

Asymeacutetrie drsquoinformation entre Assureurs et ConcurrentsEnfin comme dans toute activiteacute eacuteconomique il existe une concurrence entre assureurs pour un nombre li-miteacute de clients (assureacutes) et il existe eacutegalement une asy-meacutetrie drsquoinformation naturelle entre assureurs concur-rents concernant le profil du risque lrsquoappreacuteciation des conditions marcheacute lrsquoapproche meacutethodologique du risque et la deacutetermination des primes Parmi des approches reacutecentes on peut citer la deacutetermination des primes drsquoassurance via une analyse fondeacutee sur la theacuteo-rie des jeux tenant compte drsquoune preacutevision de la poli-tique des primes des concurrents des comportements agrave risque des assureacutes et des contraintes reacuteglementaires en matiegravere de fonds propres (voir [13]) le tout dans un contexte drsquoinformations incomplegravetes

Lrsquoobjectif de ce court chapitre eacutetait de mettre en lumiegravere plusieurs domaines de recherche dans les sciences actuarielles ougrave lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation joue directement ou indirec-tement un rocircle important Cette liste est forceacutement incomplegravete mais elle souligne lrsquoimportance de la modeacutelisation drsquoinforma-tion dans le secteur de lrsquoassurance et de la reacuteassurance qui est eacutegalement lrsquoobjet de tregraves nombreux projets de recherche en cours

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drsquohansjoumlrg Albrecher sur

wwwinformationinfinanceandinsuranceorg

les cahiers louis Bachelier 15

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Page 8: Information en Finance et assurance

8 les cahiers louis Bachelier

la sec (securities and exchange commission) lrsquoorganisme feacutedeacuteral ameacutericain de regraveglementation et de controcircle des marcheacutes finan-ciers deacutefinit le deacutelit drsquoinitieacute comme ldquole fait drsquoacheter ou de vendre un titre ou une valeur en violation des obligations fiduciaires etou de confiance tandis que lrsquoon dispose drsquoinformations confidentielles non-publiques concernant ladite valeur le deacutelit drsquoinitieacute peut aussi englober le fait de divulguer des informations confidentielles agrave un tiers le fait pour le tiers de neacutego-cier des titres objets desdites informations confidentielles ainsi que le neacutegoce de titres par toute personne qui deacutetournerait de telles informations agrave son profitrdquo

si ces contours sont clairs le deacutelit drsquoinitieacute demeure difficile agrave prouver et donc agrave sanctionner la modeacuteli-sation matheacutematique pourrait-elle permettre de mieux cerner le com-portement des fraudeurs et ainsi de mieux les deacutetecter Plusieurs travaux de recherche ont eacuteteacute me-neacutes sur ce sujet

Pas de profit sans risque

le processus de modeacutelisation re-pose en effet sur la notion drsquoinfor-mation on peut ainsi consideacuterer qursquoune collection drsquoeacuteveacutenements appeleacutee Ft repreacutesente lrsquoensemble des informations publiques concernant le marcheacute financier et disponibles agrave un moment t un initieacute possegravede par deacutefinition une information priveacutee sur un eacuteveacute-nement ne faisant pas partie de cet ensemble il peut srsquoagir par exemple drsquoun investisseur qui a connaissance de lrsquoavanceacutee des tests cliniques drsquoun nouveau meacute-dicament sa collection drsquoeacuteveacutene-ments observables devient alors plus grande que la collection de reacutefeacuterence Ft

lutter contre le deacutelit drsquoinitieacute gracircce agrave la modeacutelisation

Traditionnellement les modegraveles sont construits sur la notion drsquoab-sence drsquoarbitrage autrement dit ils considegraverent qursquoil est impossible de reacutealiser des profits sans assu-mer une part de risque le risque nul nrsquoexiste pas Mais il arrive qursquoune information priveacutee puisse creacuteer des opportuniteacutes drsquoarbi-trage ou du moins des situations tregraves proches de lrsquoarbitrage en lrsquooccurrence si un investisseur sait agrave lrsquoavance qursquoune compagnie va mettre sur le marcheacute un nouveau meacutedicament ses chances de reacutealiser une plus-value sont tregraves fortes et son risque faiblehellip

tirer profit drsquoune information priveacutee

lrsquoinitieacute peut ainsi tirer avantage de son information de plusieurs ma-niegraveres Dans lrsquoexemple preacutesenteacute la solution la plus simple est eacutevidem-ment drsquoacheter ou de vendre des actions de la compagnie pharma-ceutique selon les reacutesultats du test Mais lrsquoinformation peut aussi gui-der lrsquoachat de produits deacuteriveacutes ou

Un agent initieacute peut reacutealiser des profits sans prendre de risque ou presque

un agent initieacute possegravede une collection drsquoinformations plus grande que celle des autres agents Cette information suppleacutementaire change sa perception du marcheacute et son eacutevaluation du prix drsquoun actif

Le modegravele preacutesenteacute permet drsquooptimiser lrsquoutilisation de cette information priveacutee en analysant les deacuteviations des cours par rapport agrave une valeur de reacutefeacuterence il permet agrave lrsquoagent de savoir si un titre est sous ou sur eacutevalueacute

Le modegravele est eacutegalement utile au reacutegulateur pour mieux cerner le comportement des initieacutes et donc mieux lutter contre ces pratiques

drsquoapregraves un texte de Philip Protter et les articles citeacutes en bibliographie

Gracircce agrave une information priveacutee un agent peut reacutealiser drsquoimportants profits pour un minimum de risque en permettant de mieux comprendre lrsquoutilisation de cette information la modeacutelisation aide agrave lutter contre les deacutelits drsquoinitieacutes

a retenir

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Philip Protter est Fellow du IMS (Center for Intelligent Management Systems) reacute-dacteur adjoint de neuf revues scientifiques membre de deux comiteacutes de reacutedaction et a eacuteteacute reacutedacteur en chef de la revue Stochastic Processes and their Applications Ses principaux domaines de recherche comprennent les matheacutematiques finan-ciegraveres (modegraveles de valorisation drsquoactifs modegraveles de valorisation et de couver-ture de deacuteriveacutes problegravemes de liquiditeacute bulles financiegraveres deacutelits drsquoinitieacute trading agrave haute freacutequence risque de creacutedit) la theacuteorie de lrsquointeacutegrale stochastique la theacuteorie des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques les meacutethodes de reacutesolution

numeacuterique des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques la discreacutetisation de processus stochastiques (en tant que branche de la statistique matheacutematique) eacutequations diffeacuterentielles stochastiques et ldquoeacutequations diffeacuterentielles stochastiques retrogradesrdquo les processus de Markov et la theacuteorie du filtrage Il est lrsquoau-teur et co-auteur de deux manuels acadeacutemiques et de deux ouvrages scientifiques

drsquooptions ces derniegraveres donnent le droit drsquoacheter ou de vendre un titre dans le futur agrave un prix fixeacute Bien utiliseacutee une option peut ainsi geacuteneacuterer drsquoimportants profits pour un investissement modeste et ce sur une courte peacuteriode

les informations suppleacutementaires ont en effet un impact sur lrsquoesti-mation du prix drsquoun actif un agent eacutevalue les flux futurs drsquoun actif via la collection drsquoinformations dispo-nibles si sa collection devient plus grande sa perception du marcheacute est modifieacutee lrsquoestimation du prix eacutevolue ainsi que lrsquoeacutevaluation de la probabiliteacute drsquoun eacuteveacutenement comme la survenance drsquoune faillite par exemple

deacutetecter une valeur hors norme

lrsquoauteur eacutetudie ainsi un modegravele qui calcule la ldquojuste valeurrdquo drsquoun actif et ses proprieacuteteacutes (variance eacutecart-type etc) en prenant compte de lrsquoinformation disponible modeacuteliseacutee pour un agent initieacute par un grossis-sement de filtration il est ainsi pos-sible drsquoanalyser les deacuteviations des cours par rapport agrave cette valeur la filtration modeacutelise ici lrsquoinforma-tion de lrsquoinitieacute et permet de montrer comment tirer profit drsquoune infor-mation privileacutegieacutee lrsquoagent est en mesure de savoir si une option est

sous ou sur eacutevalueacutee il ajuste ses investissements en conseacutequence augmentant de ce fait consideacutera-blement ses probabiliteacutes de pro-fits le modegravele permet eacutegalement de quantifier lrsquoavantage obtenu par lrsquoinitieacute gracircce agrave son information privileacutegieacutee

Toutefois comprendre via une analyse matheacutematique comment certains utilisent une information priveacutee peut aider le reacutegulateur agrave deacutetecter les deacutelits drsquoinitieacute et agrave poursuivre les contrevenants en effet en eacutevaluant la valeur normale de lrsquoactif le modegravele quantifie en quelque sorte un niveau drsquoalerte si une transaction srsquoeffectue agrave un prix trop eacuteloigneacute de la valeur nor-male elle peut ecirctre le fruit drsquoun deacutelit drsquoinitieacute

or lutter contre les deacutelits drsquoinitieacute est primordial pour garantir la flui-diteacute des transactions financiegraveres le marcheacute doit apparaicirctre comme juste Dans le cas contraire srsquoil est perccedilu comme deacutefaillant ou cor-rompu peu drsquoinvestisseurs accep-teront de participer aux eacutechanges les agents perdront confiance et la liquiditeacute sera reacuteduite le rocircle de lrsquoetat est donc de garantir le bon fonctionnement du marcheacute en reacute-duisant lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation et en luttant contre les deacutelits drsquoinitieacute

Philip Protter

lrsquoinformation publique disponible au cours du temps sur le marcheacute est repreacutesenteacutee par une filtration lrsquoinformation drsquoun initieacute qui possegravede une information privileacutegieacutee est ainsi modeacuteliseacutee par un grossissement de cette filtration du marcheacute ceci entraicircne une eacutevaluation des probabiliteacutes drsquooccurrence drsquoeacuteveacutenements diffeacuterentes pour un initieacute par rapport agrave un investisseur standard en particulier sa mesure drsquoeacutevaluation (appeleacute mesure risque neutre) des actifs en est modifieacutee

meacutethodologie

bibliographie

roseline Bilina Falafala amp Philip Protter insider Tra-ding and risk preprint 2015

claudio Fontana Monique Jeanblanc amp shiqi song on arbitrages arising with honest times Finance and stochastics July 2014 Vo-lume 18 issue 3 515-543

Younes Kchia amp Philip Prot-ter on Progressive Filtration expansions with a Process applications to insider Tra-ding international journal of theoretical and applied finance- river edge NJ [ua] World scientific issN 0219-0249 ZDB-iD 14289829 - Vol 182015 4 p 1-48

retrouvez lrsquoarticle inteacutegral

de Philip Protter sur

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10 les cahiers louis Bachelier

appareils connecteacutes GPs sys-tegravemes de monitoring meacutedicaux robots mobiles ces technolo-gies se creacuteent une place dans nos quotidiens et leur utilisation devrait ecirctre encore renforceacutee par la numeacuterisation en cours or tous ces objets ont un point commun ils fonctionnent de faccedilon dyna-mique avec une eacutemission de signal qui eacutevolue continuellement au cours du temps la preacutediction du signal est ainsi plus complexe et neacutecessite des outils matheacutema-tiques adapteacutes

la technique du filtrage reacutepond agrave cette probleacutematique Thorsten schmidt professeur agrave lrsquouniver-siteacute de Fribourg fait le point sur cette meacutethodologie aux multiples applications qursquoest-ce qursquoun problegraveme de filtrage comment cette technique srsquoest-elle deacuteve-loppeacutee Quelles solutions peut-elle apporter

contrairement agrave la statistique classique le filtrage vise agrave eacutevaluer

un signal dynamique dont lrsquoobser-vation est perturbeacutee par un bruit comment calculer une estima-tion juste malgreacute une observation bruiteacutee il srsquoagit par exemple de deacutefinir la position drsquoun robot qui se deacuteplace au cours du temps le robot nrsquoest pas dans le champ de vision de son proprieacutetaire il nrsquoest donc pas directement ob-servable Toutefois le proprieacutetaire dispose des donneacutees GPs qui correspondent ici agrave une observa-tion bruiteacutee le but est drsquooptimiser les informations fournies par le GPs afin de calculer la position du robot au cours du temps

comment pallier au manque drsquoinformation gracircce au filtrage

Approche de la statistique moderne le filtrage permet de reacutesoudre de nombreuses probleacutematiques drsquoinformation imparfaite que ce soit dans le cadre des objets connecteacutes de la navigation satellite ou du calcul de risque en finance ses applications sont multiples

Le filtre de Kalman

la theacuteorie du filtrage est neacutee dans les anneacutees 40 sous lrsquoimpul-sion drsquoandrey N Kolmogorov et Norbert Wiener le premier a eacutetu-dieacute la probleacutematique en temps discret tandis que le second lrsquoa abordeacute en temps continu il a en-suite fallu attendre les anneacutees 60 pour connaitre de nouvelles avan-ceacutees avec rudolf e Kalman

lrsquoapproche de Kalman fait office de reacutefeacuterence en matiegravere de fil-trage en se basant sur les lois gaussiennes le modegravele eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal lrsquoinformation corres-pond aux observations bruiteacutees prix donneacutees etc lrsquoavantage principal de cette meacutethode est de donner une formule explicite pour calculer le signal simplifiant ainsi fortement le proceacutedeacute

lrsquoune des utilisations les plus ceacutelegravebres et les plus anciennes du filtre de Kalman remonte agrave la

drsquoapregraves un texte de thorsten schmidt et les articles citeacutes en reacutefeacuterence

Lrsquoavantage principal de la meacutethode de Kalman est de donner une formule explicite et de faible dimension

Le filtrage vise agrave eacutevaluer un signal dynamique dont lrsquoobservation est bruiteacutee

Le modegravele de Kalman eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal il fournit une for-mule explicite et de faible dimension pour calculer le signal simplifiant ainsi le proceacutedeacute

Pour les cas non lineacuteaires des meacutethodes numeacuteriques peuvent ecirctre utiliseacutees

Le filtrage recouvre un large champ drsquoapplication que ce soit en finance dans lrsquoindustrie eacutelectro-nique la robotique ou encore le secteur meacutedical

a retenir

les cahiers louis Bachelier 11

Thorsten Schmidt est professeur de matheacutematiques stochastiques agrave lrsquoUniversiteacute de Fribourg (Allemagne) ougrave il a succeacutedeacute agrave Ernst Eberlein Auparavant il a ensei-gneacute les matheacutematiques financiegraveres agrave lrsquoUniversiteacute de technologie de Chemnitz

Outre son inteacuterecirct pour les matheacutematiques financiegraveres et plus particuliegraverement pour les taux drsquointeacuterecirct les marcheacutes du risque de creacutedit et de lrsquoeacutenergie il a une so-lide expertise en statistique et probabiliteacute Il a reacutecemment co-eacutecrit un ouvrage sur la statistique matheacutematique publieacute chez Springer Sa recherche dans le domaine

du risque de creacutedit porte sur lrsquoimpact de lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation le filtrage non-lineacuteaire les modegraveles drsquoanalyse de risques dynamiques Heath-Jarrow-Morton et les processus affineacutes

mission apollo le modegravele a eacuteteacute utiliseacute pour preacuteparer le voyage de Neil amstrong vers la lune ainsi que son retour notamment pour deacuteterminer agrave quel moment preacutecis la fuseacutee devait rentrer dans lrsquoat-mosphegravere1 il est aujourdrsquohui uti-liseacute dans la plupart des outils de navigation satellite tout comme dans les smartphones ou les jeux videacuteo

le filtre de Kalman ne peut tou-tefois ecirctre employeacute que pour les cas lineacuteaires certains auteurs ont ainsi eacutetendu le cadre lineacuteaire en utilisant des approximations au niveau local

La meacutethode particulaire de filtrage

enfin des meacutethodes numeacuteriques ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees pour les pro-bleacutematiques non lineacuteaires ne pou-vant ecirctre reacutesolues ni par le filtre de Kalman ni par ses extensions Parmi elles figure la meacutethode particulaire de filtrage celle-ci estime la distribution du signal via un proceacutedeacute de reacuteduction sta-tistique dit ldquodiscreacutetisationrdquo qui consiste agrave deacutecouper une seacuterie de donneacutees en un certain nombre de classes repreacutesenteacutees par des particules a lrsquoimage de la meacutethode de Monte carlo cette approche repose sur la loi des grands nombres et la simulation drsquoexpeacuteriences reacutepeacuteteacutees Dans un premier temps les valeurs sont estimeacutees gracircce aux observations disponibles chaque valeur uti-liseacutee est associeacutee agrave un poids de conditionnement Puis agrave chaque simulation les pondeacuterations sont

ajusteacutees en fonction des reacutesul-tats obtenus les particules se deacuteplacent librement agrave partir de lrsquoalgorithme de dynamique du modegravele ce qui est possible dans la mesure ougrave la position exacte de chaque particule est connue on calcule alors la position moyenne pondeacutereacutee des particules agrave partir de leur poids theacuteoriques respec-tifs

un large champ drsquoapplication

les techniques de filtrage consti-tuent des outils preacutecieux afin de pallier aux imperfections de lrsquoinfor-mation ces probleacutematiques sont courantes en particulier dans le domaine financier en effet qursquoil srsquoagisse de calibrer un modegravele de valoriser un portefeuille drsquoac-tifs ou de deacutefinir les strateacutegies de couverture les donneacutees utiliseacutees sont toujours incomplegravetes le fil-trage permet de traiter ce type de question il est notamment employeacute pour calculer le risque de creacutedit une entreprise est en effet reconnue en faillite lorsque sa valeur fondamentale est trop basse Mais cette information nrsquoest eacutevidemment pas connue des acteurs du marcheacute les ob-servations sont bruiteacutees puisque pas entiegraverement disponibles le filtrage peut alors servir agrave estimer le risque de creacutedit agrave partir des diffeacuterentes sources drsquoinformation disponibles croiser les donneacutees des rapports trimestriels du cours des actions ou encore du prix des options permet drsquoeacuteva-luer la probabiliteacute de deacutefaut de la socieacuteteacute

les modegraveles de filtrage ont donc un large champ drsquoapplication et fournissent des eacuteleacutements de reacute-ponse agrave de nombreuses probleacute-matiques Nul doute que les re-cherches vont se poursuivre afin drsquoaccroitre les performances de ces meacutethodes et algorithmes et de faire ainsi face agrave de nouveaux challenges

thorsten schmidt

bibliographieFrey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

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1 Source Faragher (2012)

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12 les cahiers louis Bachelier

asymeacutetrie drsquoinformation et assurance

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Nous et le Monde Naturel Nous avons souvent besoin de quantifier le risque de lrsquoassureur pour deacuteterminer une eacutechelle de primes eacutequitable pour deacutefinir des strateacutegies solides de ges-tion du risque ou pour deacuteterminer les Solvency Capital Requirements le niveau minimum de fonds propres exigeacutes Dans chacune de ces situations les pertes potentielles constituent une issue future incertaine Mettant de cocircteacute la question quasi-philosophique de savoir si lrsquoincertitude (sur lrsquooccurrence et le montant des sinistres futurs pour lrsquoassureur) est due agrave une insuf-

fisance drsquoinformation ou alors si elle est plutocirct lieacutee au caractegravere intrinsegravequement aleacuteatoire des issues nous nous trouvons geacuteneacuteralement face au workflow suivant

INCERTITUDE i RISQUE i DONNEES i MODELES

La diffeacuterence entre lrsquoincertitude et le risque (selon la deacutefinition de lrsquoeacuteconomiste Frank Knight) est que le risque peut ecirctre quantifieacute crsquoest-agrave-dire que lrsquoon peut en principe deacuteterminer la distribution de probabiliteacute pour le risque en question Apregraves avoir deacutetermineacute quelles caracteacuteristiques constituent les risques agrave quan-

Crsquoest la nature mecircme de lrsquoactiviteacute drsquoassurance que de disposer drsquoun niveau drsquoinformation limiteacute agrave propos des risques agrave assurer et les informations suppleacutementaires sont toujours les bienvenues Il en est de mecircme pour lrsquoactiviteacute de la reacuteassurance La reacuteassurance est une opeacuteration par laquelle une socieacuteteacute drsquoassurance (le ldquoceacutedantrdquo) srsquoassure aupregraves drsquoune autre compagnie drsquoassurance (le ldquoreacuteassureurrdquo) pour une partie des risques qursquoelle porte Il srsquoagit donc lagrave avant tout drsquoune activiteacute drsquoassurance Cependant si lrsquoassurance et la reacuteassurance partagent des caracteacuteristiques communes il existe de nombreuses diffeacuterences structurelles notamment en ce qui concerne lrsquoinformation sur les risques inheacuterents aux polices reacuteassureacutees De plus dans la mesure ougrave les opeacuterations de reacuteassurance impliquent de multiples acteurs lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation constitue un eacuteleacutement important agrave prendre en consideacuteration La gestion du risque traite cette asymeacutetrie de diverses maniegraveres que je propose de commenter en fonction du degreacute drsquoinformation disponible

PAr hAnsjoumlrG ALbreCher

Hansjoumlrg Albrecher a eacutetudieacute les matheacutematiques appliqueacutees et lrsquoastronomie agrave Graz Limerick et Baltimore avant de recevoir son doctorat de la Technische Universitaumlt Graz en 2001 Il a ensuite enseigneacute agrave Graz Leuven et Aarhus avant drsquoecirctre nommeacute directeur drsquoeacutequipe en matheacutematiques financiegraveres et directeur adjoint du Johann Radon Institute de lrsquoAcadeacutemie des Sciences de lrsquoAutriche agrave Linz et professeur de matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoassurance agrave la Universitaumlt Linz (JKU) En 2009 il a eacuteteacute nommeacute professeur des sciences actuarielles agrave HEC de lrsquoUniversiteacute de LausanneSes domaines de recherche incluent la theacuteorie du risque la modeacutelisation du risque dans lrsquoassurance et la reacuteassurance la modeacutelisation des catastrophes naturelles les matheacutematiques financiegraveres la simulation stochastique et plus geacuteneacuteralement les applications de la theacuteorie des probabiliteacutes Il a publieacute plus de 100 articles dans ces domaines et est co-auteur de deux ouvrages Ruin Probabilities (deuxiegraveme eacutedition 2010) et Quantitative Methods for Financial Markets (2013)Dr Albrecher est reacutedacteur au sein drsquoInsurance Mathematics and Economics depuis 2010 coreacutedacteur-en-chef du European Actuarial Journal et de la revue Statistics and Risk Modeling depuis 2011 Il siegravege au comiteacute de reacutedaction de plusieurs autres revues scientifiques et collections drsquoouvrages

les cahiers louis Bachelier 13

tifier on cherche la probabiliteacute pour que ces risques se reacutealisent en partant drsquoobservations du reacuteel en geacuteneacuteral de donneacutees historiques Pour chaque risque agrave eacutevaluer le problegraveme classique reacuteside dans la deacutetermination de la pertinence des donneacutees et de leur degreacute de perti-nence Une difficulteacute suppleacutementaire reacuteside dans le fait que la nature des risques peut eacutevoluer dans le temps et que pour appreacutehender cette eacutevolution lrsquoon doit pouvoir faire appel agrave des meacutethodes statistiques capables drsquoidentifier les eacuteleacutements non-stationnaires inclus dans les seacuteries de donneacutees et agrave des informations reacuteelles connexes dont on dispose (modifications des clauses contractuelles contexte environnemental etc)

De longues anneacutees drsquoexpeacuterience nous ont appris agrave qualifier les diffeacuterents types de risque et agrave tirer des re-lations causales entre eux Ainsi nous avons pu deacuteve-lopper les modegraveles qui servent de base agrave lrsquoeacutevaluation de risques associeacutes

Bien qursquoen geacuteneacuteral les modeacutelisateurs soient conscients des limites de la modeacutelisation la principale motiva-tion derriegravere cette approche est la conviction qursquoil est possible de quantifier preacuteciseacutement les risques et que toute imperfection ou lacune dans un modegravele reacutesulte de donneacutees insuffisantes ou plus geacuteneacuteralement drsquoinformations insuffisantes concernant la nature des risques et les relations entre eux On pourrait dire que le deacuteveloppement de modegraveles de risque par les assu-reurs constitue une tentative de reacuteduire lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation en geacuteneacuteral et de lrsquoinformation dispo-nible pour nous

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureacutes et AssureurQuand un assureacute et une compagnie drsquoassurance concluent un contrat au terme duquel lrsquoassureacute paie une prime (baseacutee sur un calcul deacuteterministe) contre des si-nistres speacutecifieacutes dans le contrat il est clair que chaque partie dispose drsquoinformations diffeacuterentes mais dans ce cas lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation existe des deux cocircteacutes En principe la compagnie drsquoassurance dispose de plus drsquoexpeacuterience des risques agrave assurer (modegraveles idoines) ce qui lui permet (en y rajoutant la mutualisation des risques) de geacuterer efficacement les risques agrave assurer bien que pour certains produits les assureacutes preacutefeacutereraient plus de transparence (voir par exemple [12])

Lrsquoassureacute quant agrave lui dispose dans la plupart des sec-teurs de beaucoup plus drsquoinformation concernant son profil de risque que ce qursquoil communique agrave

lrsquoassureur et il pourrait mecircme en influencer le reacutesul-tat par le biais de son comportement Un exemple en est lrsquoassurance maladie ougrave il existe une asymeacutetrie drsquoinformation intrinsegraveque concernant lrsquoeacutetat de santeacute de lrsquoassureacute (cf [22] et [19 21] pour des eacutetudes sur certains types drsquoassurance-vie) Aussi telle asymeacutetrie peut ecirctre la conseacutequence de nouvelles reacuteglementations (cf [23]) Le secteur de lrsquoassurance automobile a une longue pratique de reacuteduction de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation concernant le profil de risque des assureacutes via le systegraveme de bonus-malus qui a lrsquoavantage suppleacute-mentaire drsquoinciter les assureacutes agrave conduire prudemment La tendance actuelle est de pousser le dispositif plus loin encore avec la collecte drsquoinformations reacuteelles sur la conduite des assureacutes via des systegravemes teacuteleacutematiques embarqueacutes(cf [18 6]) Crsquoest une excellente illustra-tion de comment une quantiteacute importante de don-neacutees suppleacutementaires peut ecirctre et sera certainement utiliseacutee pour concevoir les futurs contrats drsquoassurance (une tendance parfois appeleacutee Le Big Data dans lrsquoAs-surance) Lrsquoexploitation des donneacutees inclut lrsquoanalyse approfondie des eacutecarts de comportement des assureacutes (cf [16 20]) et le deacuteveloppement drsquoapplications se servant de ces informations agrave des fins commerciales (cf [17])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et ReacuteassureurComme les assureurs nrsquoaiment pas partager des don-neacutees et statistiques concernant les sinistres dans le cas de nombreux contrats de reacuteassurance non proportion-nels lrsquoassureur ne communique au reacuteassureur qursquoune partie des donneacutees concerneacutees crsquoest-agrave-dire seulement les donneacutees sur les sinistres engageant ou pouvant en-gager la garantie Cette asymeacutetrie drsquoinformation laisse le reacuteassureur dans lrsquoobligation de creacuteer son modegravele preacutedictif avec des donneacutees censureacutees (cf [2]) En pra-tique les reacuteassureurs tentent de compleacuteter les donneacutees censureacutees avec des donneacutees collecteacutees agrave partir de porte-feuilles similaires (parfois obtenues gracircce agrave un contrat de reacuteassurance proportionnelle couvrant des risques similaires drsquoune mecircme importance) Les subtiliteacutes relatives agrave lrsquoeacutevaluation des risques et la deacutetermination des primes de reacuteassurance varient en fonction du type de contrat et la meacutethodologie choisie (meacutethode par expeacuterience vs meacutethode par exposition etc [1]) Une autre source drsquoasymeacutetrie drsquoinformation tient dans le fait que les sinistres passeacutes sont souvent comptabi-liseacutes agrave leur valeur ldquodrsquoengagementrdquo (ie la valeur des indemniteacutes reacuteellement verseacutees plus une estimation rai-sonnable des indemniteacutes restant agrave verser) et celle-ci peut srsquoaveacuterer significativement diffeacuterente de la valeur

14 les cahiers louis Bachelier

finale des indemniteacutes Dans des secteurs drsquoactiviteacute ougrave le regraveglement des sinistres peut prendre de nombreuses anneacutees on comprend facilement que les reacuteassureurs ne peuvent pas compter exclusivement sur les don-neacutees concernant le montant reacuteel final des indemniteacutes verseacutees mais doivent eacutegalement prendre en compte la valeur (estimeacutee) des engagements dans lrsquoeacutelaboration de leurs modegraveles Cette situation pose de reacuteels deacutefis statistiques et peu de recherche theacuteorique existe sur le sujet actuellement (cf [2])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et InvestisseurDes actionnaires actuels ou potentiels des socieacuteteacutes drsquoassurance fondent leurs deacutecisions drsquoinvestir sur les chiffres financiers et commerciaux et des indicateurs de performance mais en geacuteneacuteral ces chiffres ne tra-duisent pas lrsquointeacutegraliteacute de la structure de risque des assureurs et reacuteassureurs Compte tenu des Solvency Capital Requirements une socieacuteteacute doit tenir compte du coucirct de lever et conserver ce capital Ce coucirct aura un impact sur nombre de deacutecisions de strateacutegie et de gestion y compris la deacutecision de recourir agrave la reacuteassu-rance Le taux du coucirct du capital est influenceacute non seulement par le profil du risque mais eacutegalement par la structure de lrsquoinformation Par conseacutequence le taux du coucirct du capital est bien le reacutesultat de lrsquooffre et la de-mande sur le marcheacute mais tient eacutegalement compte de regravegles et directives en matiegravere de reporting financier telle la constitution de reacuteserves pour pertes et pour sinistres survenus mais non encore deacuteclareacutes Pour une discussion drsquoun point de vue actuariel voir [514]

Un autre domaine de recherche qui srsquointeacuteresse acti-vement aux aspects pratiques de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation est la titrisation des risques drsquoassurance en particulier celui de catastrophes naturelles et plus reacutecemment le risque de longeacuteviteacute La titrisation trans-fegravere le risque drsquoassurance aux marcheacutes des capitaux et constitue donc un instrument particuliegraverement utile lorsqursquoil srsquoagit de risques de grande ampleur ayant de fortes correacutelations ougrave les contrats de reacuteassurance tradi-tionnels ne sont pas eacuteconomiquement viables compte tenu du coucirct monumental des capitaux Lrsquohistoire des produits de titrisation illustre parfaitement comment lrsquoeacutevolution des attitudes envers lrsquoasymeacutetrie drsquoinforma-tion (dans ce cas preacutecis entre eacutemetteur et investisseur) a modifieacute les produits et leur attractiviteacute Des deacuteclen-cheurs anciens baseacutes sur lrsquoexpeacuterience effective de pertes des compagnies individuelles et des indices sectoriels ont eacutevolueacute vers des deacuteclencheurs parameacutetriques cal-culeacutes en tenant compte de quantiteacutes physiques lieacutees

aux catastrophes comme la vitesse du vent la pression atmospheacuterique etc Alors que les deacuteclencheurs para-meacutetriques diminuent lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation (qui dans le cas des deacuteclencheurs speacutecifiques agrave chaque en-treprise eacutetait significative) ils augmentent le risque de base crsquoest-agrave-dire le risque que le deacuteclencheur ne reflegravete pas lrsquoexpeacuterience reacuteelle de lrsquoeacutemetteur ce qui reacuteduit lrsquoef-ficaciteacute du produit pour lrsquoeacutemetteur Comme on pou-vait srsquoy attendre lrsquoactiviteacute de ce marcheacute a connu une certaine volatiliteacute dans le temps avec une forte aug-mentation des volumes dans des peacuteriodes ougrave le mar-cheacute traditionnel de la reacuteassurance ne pouvait pas faire face agrave ce type de demande (cf [9 11]) La valorisation de ces produits se situe agrave la frontiegravere entre assurance et finance Crsquoest eacutegalement un sujet de recherche tregraves inteacuteressant sur le plan theacuteorique (cf [7 15 4 8] et [10 24])

Asymeacutetrie drsquoinformation entre Assureurs et ConcurrentsEnfin comme dans toute activiteacute eacuteconomique il existe une concurrence entre assureurs pour un nombre li-miteacute de clients (assureacutes) et il existe eacutegalement une asy-meacutetrie drsquoinformation naturelle entre assureurs concur-rents concernant le profil du risque lrsquoappreacuteciation des conditions marcheacute lrsquoapproche meacutethodologique du risque et la deacutetermination des primes Parmi des approches reacutecentes on peut citer la deacutetermination des primes drsquoassurance via une analyse fondeacutee sur la theacuteo-rie des jeux tenant compte drsquoune preacutevision de la poli-tique des primes des concurrents des comportements agrave risque des assureacutes et des contraintes reacuteglementaires en matiegravere de fonds propres (voir [13]) le tout dans un contexte drsquoinformations incomplegravetes

Lrsquoobjectif de ce court chapitre eacutetait de mettre en lumiegravere plusieurs domaines de recherche dans les sciences actuarielles ougrave lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation joue directement ou indirec-tement un rocircle important Cette liste est forceacutement incomplegravete mais elle souligne lrsquoimportance de la modeacutelisation drsquoinforma-tion dans le secteur de lrsquoassurance et de la reacuteassurance qui est eacutegalement lrsquoobjet de tregraves nombreux projets de recherche en cours

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drsquohansjoumlrg Albrecher sur

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les cahiers louis Bachelier 15

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Page 9: Information en Finance et assurance

les cahiers louis Bachelier 9

Philip Protter est Fellow du IMS (Center for Intelligent Management Systems) reacute-dacteur adjoint de neuf revues scientifiques membre de deux comiteacutes de reacutedaction et a eacuteteacute reacutedacteur en chef de la revue Stochastic Processes and their Applications Ses principaux domaines de recherche comprennent les matheacutematiques finan-ciegraveres (modegraveles de valorisation drsquoactifs modegraveles de valorisation et de couver-ture de deacuteriveacutes problegravemes de liquiditeacute bulles financiegraveres deacutelits drsquoinitieacute trading agrave haute freacutequence risque de creacutedit) la theacuteorie de lrsquointeacutegrale stochastique la theacuteorie des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques les meacutethodes de reacutesolution

numeacuterique des eacutequations diffeacuterentielles stochastiques la discreacutetisation de processus stochastiques (en tant que branche de la statistique matheacutematique) eacutequations diffeacuterentielles stochastiques et ldquoeacutequations diffeacuterentielles stochastiques retrogradesrdquo les processus de Markov et la theacuteorie du filtrage Il est lrsquoau-teur et co-auteur de deux manuels acadeacutemiques et de deux ouvrages scientifiques

drsquooptions ces derniegraveres donnent le droit drsquoacheter ou de vendre un titre dans le futur agrave un prix fixeacute Bien utiliseacutee une option peut ainsi geacuteneacuterer drsquoimportants profits pour un investissement modeste et ce sur une courte peacuteriode

les informations suppleacutementaires ont en effet un impact sur lrsquoesti-mation du prix drsquoun actif un agent eacutevalue les flux futurs drsquoun actif via la collection drsquoinformations dispo-nibles si sa collection devient plus grande sa perception du marcheacute est modifieacutee lrsquoestimation du prix eacutevolue ainsi que lrsquoeacutevaluation de la probabiliteacute drsquoun eacuteveacutenement comme la survenance drsquoune faillite par exemple

deacutetecter une valeur hors norme

lrsquoauteur eacutetudie ainsi un modegravele qui calcule la ldquojuste valeurrdquo drsquoun actif et ses proprieacuteteacutes (variance eacutecart-type etc) en prenant compte de lrsquoinformation disponible modeacuteliseacutee pour un agent initieacute par un grossis-sement de filtration il est ainsi pos-sible drsquoanalyser les deacuteviations des cours par rapport agrave cette valeur la filtration modeacutelise ici lrsquoinforma-tion de lrsquoinitieacute et permet de montrer comment tirer profit drsquoune infor-mation privileacutegieacutee lrsquoagent est en mesure de savoir si une option est

sous ou sur eacutevalueacutee il ajuste ses investissements en conseacutequence augmentant de ce fait consideacutera-blement ses probabiliteacutes de pro-fits le modegravele permet eacutegalement de quantifier lrsquoavantage obtenu par lrsquoinitieacute gracircce agrave son information privileacutegieacutee

Toutefois comprendre via une analyse matheacutematique comment certains utilisent une information priveacutee peut aider le reacutegulateur agrave deacutetecter les deacutelits drsquoinitieacute et agrave poursuivre les contrevenants en effet en eacutevaluant la valeur normale de lrsquoactif le modegravele quantifie en quelque sorte un niveau drsquoalerte si une transaction srsquoeffectue agrave un prix trop eacuteloigneacute de la valeur nor-male elle peut ecirctre le fruit drsquoun deacutelit drsquoinitieacute

or lutter contre les deacutelits drsquoinitieacute est primordial pour garantir la flui-diteacute des transactions financiegraveres le marcheacute doit apparaicirctre comme juste Dans le cas contraire srsquoil est perccedilu comme deacutefaillant ou cor-rompu peu drsquoinvestisseurs accep-teront de participer aux eacutechanges les agents perdront confiance et la liquiditeacute sera reacuteduite le rocircle de lrsquoetat est donc de garantir le bon fonctionnement du marcheacute en reacute-duisant lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation et en luttant contre les deacutelits drsquoinitieacute

Philip Protter

lrsquoinformation publique disponible au cours du temps sur le marcheacute est repreacutesenteacutee par une filtration lrsquoinformation drsquoun initieacute qui possegravede une information privileacutegieacutee est ainsi modeacuteliseacutee par un grossissement de cette filtration du marcheacute ceci entraicircne une eacutevaluation des probabiliteacutes drsquooccurrence drsquoeacuteveacutenements diffeacuterentes pour un initieacute par rapport agrave un investisseur standard en particulier sa mesure drsquoeacutevaluation (appeleacute mesure risque neutre) des actifs en est modifieacutee

meacutethodologie

bibliographie

roseline Bilina Falafala amp Philip Protter insider Tra-ding and risk preprint 2015

claudio Fontana Monique Jeanblanc amp shiqi song on arbitrages arising with honest times Finance and stochastics July 2014 Vo-lume 18 issue 3 515-543

Younes Kchia amp Philip Prot-ter on Progressive Filtration expansions with a Process applications to insider Tra-ding international journal of theoretical and applied finance- river edge NJ [ua] World scientific issN 0219-0249 ZDB-iD 14289829 - Vol 182015 4 p 1-48

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de Philip Protter sur

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10 les cahiers louis Bachelier

appareils connecteacutes GPs sys-tegravemes de monitoring meacutedicaux robots mobiles ces technolo-gies se creacuteent une place dans nos quotidiens et leur utilisation devrait ecirctre encore renforceacutee par la numeacuterisation en cours or tous ces objets ont un point commun ils fonctionnent de faccedilon dyna-mique avec une eacutemission de signal qui eacutevolue continuellement au cours du temps la preacutediction du signal est ainsi plus complexe et neacutecessite des outils matheacutema-tiques adapteacutes

la technique du filtrage reacutepond agrave cette probleacutematique Thorsten schmidt professeur agrave lrsquouniver-siteacute de Fribourg fait le point sur cette meacutethodologie aux multiples applications qursquoest-ce qursquoun problegraveme de filtrage comment cette technique srsquoest-elle deacuteve-loppeacutee Quelles solutions peut-elle apporter

contrairement agrave la statistique classique le filtrage vise agrave eacutevaluer

un signal dynamique dont lrsquoobser-vation est perturbeacutee par un bruit comment calculer une estima-tion juste malgreacute une observation bruiteacutee il srsquoagit par exemple de deacutefinir la position drsquoun robot qui se deacuteplace au cours du temps le robot nrsquoest pas dans le champ de vision de son proprieacutetaire il nrsquoest donc pas directement ob-servable Toutefois le proprieacutetaire dispose des donneacutees GPs qui correspondent ici agrave une observa-tion bruiteacutee le but est drsquooptimiser les informations fournies par le GPs afin de calculer la position du robot au cours du temps

comment pallier au manque drsquoinformation gracircce au filtrage

Approche de la statistique moderne le filtrage permet de reacutesoudre de nombreuses probleacutematiques drsquoinformation imparfaite que ce soit dans le cadre des objets connecteacutes de la navigation satellite ou du calcul de risque en finance ses applications sont multiples

Le filtre de Kalman

la theacuteorie du filtrage est neacutee dans les anneacutees 40 sous lrsquoimpul-sion drsquoandrey N Kolmogorov et Norbert Wiener le premier a eacutetu-dieacute la probleacutematique en temps discret tandis que le second lrsquoa abordeacute en temps continu il a en-suite fallu attendre les anneacutees 60 pour connaitre de nouvelles avan-ceacutees avec rudolf e Kalman

lrsquoapproche de Kalman fait office de reacutefeacuterence en matiegravere de fil-trage en se basant sur les lois gaussiennes le modegravele eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal lrsquoinformation corres-pond aux observations bruiteacutees prix donneacutees etc lrsquoavantage principal de cette meacutethode est de donner une formule explicite pour calculer le signal simplifiant ainsi fortement le proceacutedeacute

lrsquoune des utilisations les plus ceacutelegravebres et les plus anciennes du filtre de Kalman remonte agrave la

drsquoapregraves un texte de thorsten schmidt et les articles citeacutes en reacutefeacuterence

Lrsquoavantage principal de la meacutethode de Kalman est de donner une formule explicite et de faible dimension

Le filtrage vise agrave eacutevaluer un signal dynamique dont lrsquoobservation est bruiteacutee

Le modegravele de Kalman eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal il fournit une for-mule explicite et de faible dimension pour calculer le signal simplifiant ainsi le proceacutedeacute

Pour les cas non lineacuteaires des meacutethodes numeacuteriques peuvent ecirctre utiliseacutees

Le filtrage recouvre un large champ drsquoapplication que ce soit en finance dans lrsquoindustrie eacutelectro-nique la robotique ou encore le secteur meacutedical

a retenir

les cahiers louis Bachelier 11

Thorsten Schmidt est professeur de matheacutematiques stochastiques agrave lrsquoUniversiteacute de Fribourg (Allemagne) ougrave il a succeacutedeacute agrave Ernst Eberlein Auparavant il a ensei-gneacute les matheacutematiques financiegraveres agrave lrsquoUniversiteacute de technologie de Chemnitz

Outre son inteacuterecirct pour les matheacutematiques financiegraveres et plus particuliegraverement pour les taux drsquointeacuterecirct les marcheacutes du risque de creacutedit et de lrsquoeacutenergie il a une so-lide expertise en statistique et probabiliteacute Il a reacutecemment co-eacutecrit un ouvrage sur la statistique matheacutematique publieacute chez Springer Sa recherche dans le domaine

du risque de creacutedit porte sur lrsquoimpact de lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation le filtrage non-lineacuteaire les modegraveles drsquoanalyse de risques dynamiques Heath-Jarrow-Morton et les processus affineacutes

mission apollo le modegravele a eacuteteacute utiliseacute pour preacuteparer le voyage de Neil amstrong vers la lune ainsi que son retour notamment pour deacuteterminer agrave quel moment preacutecis la fuseacutee devait rentrer dans lrsquoat-mosphegravere1 il est aujourdrsquohui uti-liseacute dans la plupart des outils de navigation satellite tout comme dans les smartphones ou les jeux videacuteo

le filtre de Kalman ne peut tou-tefois ecirctre employeacute que pour les cas lineacuteaires certains auteurs ont ainsi eacutetendu le cadre lineacuteaire en utilisant des approximations au niveau local

La meacutethode particulaire de filtrage

enfin des meacutethodes numeacuteriques ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees pour les pro-bleacutematiques non lineacuteaires ne pou-vant ecirctre reacutesolues ni par le filtre de Kalman ni par ses extensions Parmi elles figure la meacutethode particulaire de filtrage celle-ci estime la distribution du signal via un proceacutedeacute de reacuteduction sta-tistique dit ldquodiscreacutetisationrdquo qui consiste agrave deacutecouper une seacuterie de donneacutees en un certain nombre de classes repreacutesenteacutees par des particules a lrsquoimage de la meacutethode de Monte carlo cette approche repose sur la loi des grands nombres et la simulation drsquoexpeacuteriences reacutepeacuteteacutees Dans un premier temps les valeurs sont estimeacutees gracircce aux observations disponibles chaque valeur uti-liseacutee est associeacutee agrave un poids de conditionnement Puis agrave chaque simulation les pondeacuterations sont

ajusteacutees en fonction des reacutesul-tats obtenus les particules se deacuteplacent librement agrave partir de lrsquoalgorithme de dynamique du modegravele ce qui est possible dans la mesure ougrave la position exacte de chaque particule est connue on calcule alors la position moyenne pondeacutereacutee des particules agrave partir de leur poids theacuteoriques respec-tifs

un large champ drsquoapplication

les techniques de filtrage consti-tuent des outils preacutecieux afin de pallier aux imperfections de lrsquoinfor-mation ces probleacutematiques sont courantes en particulier dans le domaine financier en effet qursquoil srsquoagisse de calibrer un modegravele de valoriser un portefeuille drsquoac-tifs ou de deacutefinir les strateacutegies de couverture les donneacutees utiliseacutees sont toujours incomplegravetes le fil-trage permet de traiter ce type de question il est notamment employeacute pour calculer le risque de creacutedit une entreprise est en effet reconnue en faillite lorsque sa valeur fondamentale est trop basse Mais cette information nrsquoest eacutevidemment pas connue des acteurs du marcheacute les ob-servations sont bruiteacutees puisque pas entiegraverement disponibles le filtrage peut alors servir agrave estimer le risque de creacutedit agrave partir des diffeacuterentes sources drsquoinformation disponibles croiser les donneacutees des rapports trimestriels du cours des actions ou encore du prix des options permet drsquoeacuteva-luer la probabiliteacute de deacutefaut de la socieacuteteacute

les modegraveles de filtrage ont donc un large champ drsquoapplication et fournissent des eacuteleacutements de reacute-ponse agrave de nombreuses probleacute-matiques Nul doute que les re-cherches vont se poursuivre afin drsquoaccroitre les performances de ces meacutethodes et algorithmes et de faire ainsi face agrave de nouveaux challenges

thorsten schmidt

bibliographieFrey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

Bain a and crisan D (2009) Fundamentals of stochastic Filtering sprin-ger New York

Frey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

Del Moral P (1996) `Non-linear Filtering interacting particle solutionrsquo Markov Processes and related Fields 2(4) 555-580

1 Source Faragher (2012)

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de thorsten schmidt sur

wwwinformationinfinanceandinsuranceorg

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asymeacutetrie drsquoinformation et assurance

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Nous et le Monde Naturel Nous avons souvent besoin de quantifier le risque de lrsquoassureur pour deacuteterminer une eacutechelle de primes eacutequitable pour deacutefinir des strateacutegies solides de ges-tion du risque ou pour deacuteterminer les Solvency Capital Requirements le niveau minimum de fonds propres exigeacutes Dans chacune de ces situations les pertes potentielles constituent une issue future incertaine Mettant de cocircteacute la question quasi-philosophique de savoir si lrsquoincertitude (sur lrsquooccurrence et le montant des sinistres futurs pour lrsquoassureur) est due agrave une insuf-

fisance drsquoinformation ou alors si elle est plutocirct lieacutee au caractegravere intrinsegravequement aleacuteatoire des issues nous nous trouvons geacuteneacuteralement face au workflow suivant

INCERTITUDE i RISQUE i DONNEES i MODELES

La diffeacuterence entre lrsquoincertitude et le risque (selon la deacutefinition de lrsquoeacuteconomiste Frank Knight) est que le risque peut ecirctre quantifieacute crsquoest-agrave-dire que lrsquoon peut en principe deacuteterminer la distribution de probabiliteacute pour le risque en question Apregraves avoir deacutetermineacute quelles caracteacuteristiques constituent les risques agrave quan-

Crsquoest la nature mecircme de lrsquoactiviteacute drsquoassurance que de disposer drsquoun niveau drsquoinformation limiteacute agrave propos des risques agrave assurer et les informations suppleacutementaires sont toujours les bienvenues Il en est de mecircme pour lrsquoactiviteacute de la reacuteassurance La reacuteassurance est une opeacuteration par laquelle une socieacuteteacute drsquoassurance (le ldquoceacutedantrdquo) srsquoassure aupregraves drsquoune autre compagnie drsquoassurance (le ldquoreacuteassureurrdquo) pour une partie des risques qursquoelle porte Il srsquoagit donc lagrave avant tout drsquoune activiteacute drsquoassurance Cependant si lrsquoassurance et la reacuteassurance partagent des caracteacuteristiques communes il existe de nombreuses diffeacuterences structurelles notamment en ce qui concerne lrsquoinformation sur les risques inheacuterents aux polices reacuteassureacutees De plus dans la mesure ougrave les opeacuterations de reacuteassurance impliquent de multiples acteurs lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation constitue un eacuteleacutement important agrave prendre en consideacuteration La gestion du risque traite cette asymeacutetrie de diverses maniegraveres que je propose de commenter en fonction du degreacute drsquoinformation disponible

PAr hAnsjoumlrG ALbreCher

Hansjoumlrg Albrecher a eacutetudieacute les matheacutematiques appliqueacutees et lrsquoastronomie agrave Graz Limerick et Baltimore avant de recevoir son doctorat de la Technische Universitaumlt Graz en 2001 Il a ensuite enseigneacute agrave Graz Leuven et Aarhus avant drsquoecirctre nommeacute directeur drsquoeacutequipe en matheacutematiques financiegraveres et directeur adjoint du Johann Radon Institute de lrsquoAcadeacutemie des Sciences de lrsquoAutriche agrave Linz et professeur de matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoassurance agrave la Universitaumlt Linz (JKU) En 2009 il a eacuteteacute nommeacute professeur des sciences actuarielles agrave HEC de lrsquoUniversiteacute de LausanneSes domaines de recherche incluent la theacuteorie du risque la modeacutelisation du risque dans lrsquoassurance et la reacuteassurance la modeacutelisation des catastrophes naturelles les matheacutematiques financiegraveres la simulation stochastique et plus geacuteneacuteralement les applications de la theacuteorie des probabiliteacutes Il a publieacute plus de 100 articles dans ces domaines et est co-auteur de deux ouvrages Ruin Probabilities (deuxiegraveme eacutedition 2010) et Quantitative Methods for Financial Markets (2013)Dr Albrecher est reacutedacteur au sein drsquoInsurance Mathematics and Economics depuis 2010 coreacutedacteur-en-chef du European Actuarial Journal et de la revue Statistics and Risk Modeling depuis 2011 Il siegravege au comiteacute de reacutedaction de plusieurs autres revues scientifiques et collections drsquoouvrages

les cahiers louis Bachelier 13

tifier on cherche la probabiliteacute pour que ces risques se reacutealisent en partant drsquoobservations du reacuteel en geacuteneacuteral de donneacutees historiques Pour chaque risque agrave eacutevaluer le problegraveme classique reacuteside dans la deacutetermination de la pertinence des donneacutees et de leur degreacute de perti-nence Une difficulteacute suppleacutementaire reacuteside dans le fait que la nature des risques peut eacutevoluer dans le temps et que pour appreacutehender cette eacutevolution lrsquoon doit pouvoir faire appel agrave des meacutethodes statistiques capables drsquoidentifier les eacuteleacutements non-stationnaires inclus dans les seacuteries de donneacutees et agrave des informations reacuteelles connexes dont on dispose (modifications des clauses contractuelles contexte environnemental etc)

De longues anneacutees drsquoexpeacuterience nous ont appris agrave qualifier les diffeacuterents types de risque et agrave tirer des re-lations causales entre eux Ainsi nous avons pu deacuteve-lopper les modegraveles qui servent de base agrave lrsquoeacutevaluation de risques associeacutes

Bien qursquoen geacuteneacuteral les modeacutelisateurs soient conscients des limites de la modeacutelisation la principale motiva-tion derriegravere cette approche est la conviction qursquoil est possible de quantifier preacuteciseacutement les risques et que toute imperfection ou lacune dans un modegravele reacutesulte de donneacutees insuffisantes ou plus geacuteneacuteralement drsquoinformations insuffisantes concernant la nature des risques et les relations entre eux On pourrait dire que le deacuteveloppement de modegraveles de risque par les assu-reurs constitue une tentative de reacuteduire lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation en geacuteneacuteral et de lrsquoinformation dispo-nible pour nous

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureacutes et AssureurQuand un assureacute et une compagnie drsquoassurance concluent un contrat au terme duquel lrsquoassureacute paie une prime (baseacutee sur un calcul deacuteterministe) contre des si-nistres speacutecifieacutes dans le contrat il est clair que chaque partie dispose drsquoinformations diffeacuterentes mais dans ce cas lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation existe des deux cocircteacutes En principe la compagnie drsquoassurance dispose de plus drsquoexpeacuterience des risques agrave assurer (modegraveles idoines) ce qui lui permet (en y rajoutant la mutualisation des risques) de geacuterer efficacement les risques agrave assurer bien que pour certains produits les assureacutes preacutefeacutereraient plus de transparence (voir par exemple [12])

Lrsquoassureacute quant agrave lui dispose dans la plupart des sec-teurs de beaucoup plus drsquoinformation concernant son profil de risque que ce qursquoil communique agrave

lrsquoassureur et il pourrait mecircme en influencer le reacutesul-tat par le biais de son comportement Un exemple en est lrsquoassurance maladie ougrave il existe une asymeacutetrie drsquoinformation intrinsegraveque concernant lrsquoeacutetat de santeacute de lrsquoassureacute (cf [22] et [19 21] pour des eacutetudes sur certains types drsquoassurance-vie) Aussi telle asymeacutetrie peut ecirctre la conseacutequence de nouvelles reacuteglementations (cf [23]) Le secteur de lrsquoassurance automobile a une longue pratique de reacuteduction de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation concernant le profil de risque des assureacutes via le systegraveme de bonus-malus qui a lrsquoavantage suppleacute-mentaire drsquoinciter les assureacutes agrave conduire prudemment La tendance actuelle est de pousser le dispositif plus loin encore avec la collecte drsquoinformations reacuteelles sur la conduite des assureacutes via des systegravemes teacuteleacutematiques embarqueacutes(cf [18 6]) Crsquoest une excellente illustra-tion de comment une quantiteacute importante de don-neacutees suppleacutementaires peut ecirctre et sera certainement utiliseacutee pour concevoir les futurs contrats drsquoassurance (une tendance parfois appeleacutee Le Big Data dans lrsquoAs-surance) Lrsquoexploitation des donneacutees inclut lrsquoanalyse approfondie des eacutecarts de comportement des assureacutes (cf [16 20]) et le deacuteveloppement drsquoapplications se servant de ces informations agrave des fins commerciales (cf [17])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et ReacuteassureurComme les assureurs nrsquoaiment pas partager des don-neacutees et statistiques concernant les sinistres dans le cas de nombreux contrats de reacuteassurance non proportion-nels lrsquoassureur ne communique au reacuteassureur qursquoune partie des donneacutees concerneacutees crsquoest-agrave-dire seulement les donneacutees sur les sinistres engageant ou pouvant en-gager la garantie Cette asymeacutetrie drsquoinformation laisse le reacuteassureur dans lrsquoobligation de creacuteer son modegravele preacutedictif avec des donneacutees censureacutees (cf [2]) En pra-tique les reacuteassureurs tentent de compleacuteter les donneacutees censureacutees avec des donneacutees collecteacutees agrave partir de porte-feuilles similaires (parfois obtenues gracircce agrave un contrat de reacuteassurance proportionnelle couvrant des risques similaires drsquoune mecircme importance) Les subtiliteacutes relatives agrave lrsquoeacutevaluation des risques et la deacutetermination des primes de reacuteassurance varient en fonction du type de contrat et la meacutethodologie choisie (meacutethode par expeacuterience vs meacutethode par exposition etc [1]) Une autre source drsquoasymeacutetrie drsquoinformation tient dans le fait que les sinistres passeacutes sont souvent comptabi-liseacutes agrave leur valeur ldquodrsquoengagementrdquo (ie la valeur des indemniteacutes reacuteellement verseacutees plus une estimation rai-sonnable des indemniteacutes restant agrave verser) et celle-ci peut srsquoaveacuterer significativement diffeacuterente de la valeur

14 les cahiers louis Bachelier

finale des indemniteacutes Dans des secteurs drsquoactiviteacute ougrave le regraveglement des sinistres peut prendre de nombreuses anneacutees on comprend facilement que les reacuteassureurs ne peuvent pas compter exclusivement sur les don-neacutees concernant le montant reacuteel final des indemniteacutes verseacutees mais doivent eacutegalement prendre en compte la valeur (estimeacutee) des engagements dans lrsquoeacutelaboration de leurs modegraveles Cette situation pose de reacuteels deacutefis statistiques et peu de recherche theacuteorique existe sur le sujet actuellement (cf [2])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et InvestisseurDes actionnaires actuels ou potentiels des socieacuteteacutes drsquoassurance fondent leurs deacutecisions drsquoinvestir sur les chiffres financiers et commerciaux et des indicateurs de performance mais en geacuteneacuteral ces chiffres ne tra-duisent pas lrsquointeacutegraliteacute de la structure de risque des assureurs et reacuteassureurs Compte tenu des Solvency Capital Requirements une socieacuteteacute doit tenir compte du coucirct de lever et conserver ce capital Ce coucirct aura un impact sur nombre de deacutecisions de strateacutegie et de gestion y compris la deacutecision de recourir agrave la reacuteassu-rance Le taux du coucirct du capital est influenceacute non seulement par le profil du risque mais eacutegalement par la structure de lrsquoinformation Par conseacutequence le taux du coucirct du capital est bien le reacutesultat de lrsquooffre et la de-mande sur le marcheacute mais tient eacutegalement compte de regravegles et directives en matiegravere de reporting financier telle la constitution de reacuteserves pour pertes et pour sinistres survenus mais non encore deacuteclareacutes Pour une discussion drsquoun point de vue actuariel voir [514]

Un autre domaine de recherche qui srsquointeacuteresse acti-vement aux aspects pratiques de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation est la titrisation des risques drsquoassurance en particulier celui de catastrophes naturelles et plus reacutecemment le risque de longeacuteviteacute La titrisation trans-fegravere le risque drsquoassurance aux marcheacutes des capitaux et constitue donc un instrument particuliegraverement utile lorsqursquoil srsquoagit de risques de grande ampleur ayant de fortes correacutelations ougrave les contrats de reacuteassurance tradi-tionnels ne sont pas eacuteconomiquement viables compte tenu du coucirct monumental des capitaux Lrsquohistoire des produits de titrisation illustre parfaitement comment lrsquoeacutevolution des attitudes envers lrsquoasymeacutetrie drsquoinforma-tion (dans ce cas preacutecis entre eacutemetteur et investisseur) a modifieacute les produits et leur attractiviteacute Des deacuteclen-cheurs anciens baseacutes sur lrsquoexpeacuterience effective de pertes des compagnies individuelles et des indices sectoriels ont eacutevolueacute vers des deacuteclencheurs parameacutetriques cal-culeacutes en tenant compte de quantiteacutes physiques lieacutees

aux catastrophes comme la vitesse du vent la pression atmospheacuterique etc Alors que les deacuteclencheurs para-meacutetriques diminuent lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation (qui dans le cas des deacuteclencheurs speacutecifiques agrave chaque en-treprise eacutetait significative) ils augmentent le risque de base crsquoest-agrave-dire le risque que le deacuteclencheur ne reflegravete pas lrsquoexpeacuterience reacuteelle de lrsquoeacutemetteur ce qui reacuteduit lrsquoef-ficaciteacute du produit pour lrsquoeacutemetteur Comme on pou-vait srsquoy attendre lrsquoactiviteacute de ce marcheacute a connu une certaine volatiliteacute dans le temps avec une forte aug-mentation des volumes dans des peacuteriodes ougrave le mar-cheacute traditionnel de la reacuteassurance ne pouvait pas faire face agrave ce type de demande (cf [9 11]) La valorisation de ces produits se situe agrave la frontiegravere entre assurance et finance Crsquoest eacutegalement un sujet de recherche tregraves inteacuteressant sur le plan theacuteorique (cf [7 15 4 8] et [10 24])

Asymeacutetrie drsquoinformation entre Assureurs et ConcurrentsEnfin comme dans toute activiteacute eacuteconomique il existe une concurrence entre assureurs pour un nombre li-miteacute de clients (assureacutes) et il existe eacutegalement une asy-meacutetrie drsquoinformation naturelle entre assureurs concur-rents concernant le profil du risque lrsquoappreacuteciation des conditions marcheacute lrsquoapproche meacutethodologique du risque et la deacutetermination des primes Parmi des approches reacutecentes on peut citer la deacutetermination des primes drsquoassurance via une analyse fondeacutee sur la theacuteo-rie des jeux tenant compte drsquoune preacutevision de la poli-tique des primes des concurrents des comportements agrave risque des assureacutes et des contraintes reacuteglementaires en matiegravere de fonds propres (voir [13]) le tout dans un contexte drsquoinformations incomplegravetes

Lrsquoobjectif de ce court chapitre eacutetait de mettre en lumiegravere plusieurs domaines de recherche dans les sciences actuarielles ougrave lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation joue directement ou indirec-tement un rocircle important Cette liste est forceacutement incomplegravete mais elle souligne lrsquoimportance de la modeacutelisation drsquoinforma-tion dans le secteur de lrsquoassurance et de la reacuteassurance qui est eacutegalement lrsquoobjet de tregraves nombreux projets de recherche en cours

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drsquohansjoumlrg Albrecher sur

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[19] T Moenig and D Bauer revisiting the risk-neutral approach to optimal policyholder behavior a study of withdrawal guarantees in variable annuities review of Finance to appear 2015

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[23] h schmeiser T stoumlrmer and J Wagner unisex insurance Pricing consumersrsquo Perception and Mar-ket implications The Geneva Papers on risk and insurance ndash issues and Practice 39(2)322-350 2014

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Page 10: Information en Finance et assurance

10 les cahiers louis Bachelier

appareils connecteacutes GPs sys-tegravemes de monitoring meacutedicaux robots mobiles ces technolo-gies se creacuteent une place dans nos quotidiens et leur utilisation devrait ecirctre encore renforceacutee par la numeacuterisation en cours or tous ces objets ont un point commun ils fonctionnent de faccedilon dyna-mique avec une eacutemission de signal qui eacutevolue continuellement au cours du temps la preacutediction du signal est ainsi plus complexe et neacutecessite des outils matheacutema-tiques adapteacutes

la technique du filtrage reacutepond agrave cette probleacutematique Thorsten schmidt professeur agrave lrsquouniver-siteacute de Fribourg fait le point sur cette meacutethodologie aux multiples applications qursquoest-ce qursquoun problegraveme de filtrage comment cette technique srsquoest-elle deacuteve-loppeacutee Quelles solutions peut-elle apporter

contrairement agrave la statistique classique le filtrage vise agrave eacutevaluer

un signal dynamique dont lrsquoobser-vation est perturbeacutee par un bruit comment calculer une estima-tion juste malgreacute une observation bruiteacutee il srsquoagit par exemple de deacutefinir la position drsquoun robot qui se deacuteplace au cours du temps le robot nrsquoest pas dans le champ de vision de son proprieacutetaire il nrsquoest donc pas directement ob-servable Toutefois le proprieacutetaire dispose des donneacutees GPs qui correspondent ici agrave une observa-tion bruiteacutee le but est drsquooptimiser les informations fournies par le GPs afin de calculer la position du robot au cours du temps

comment pallier au manque drsquoinformation gracircce au filtrage

Approche de la statistique moderne le filtrage permet de reacutesoudre de nombreuses probleacutematiques drsquoinformation imparfaite que ce soit dans le cadre des objets connecteacutes de la navigation satellite ou du calcul de risque en finance ses applications sont multiples

Le filtre de Kalman

la theacuteorie du filtrage est neacutee dans les anneacutees 40 sous lrsquoimpul-sion drsquoandrey N Kolmogorov et Norbert Wiener le premier a eacutetu-dieacute la probleacutematique en temps discret tandis que le second lrsquoa abordeacute en temps continu il a en-suite fallu attendre les anneacutees 60 pour connaitre de nouvelles avan-ceacutees avec rudolf e Kalman

lrsquoapproche de Kalman fait office de reacutefeacuterence en matiegravere de fil-trage en se basant sur les lois gaussiennes le modegravele eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal lrsquoinformation corres-pond aux observations bruiteacutees prix donneacutees etc lrsquoavantage principal de cette meacutethode est de donner une formule explicite pour calculer le signal simplifiant ainsi fortement le proceacutedeacute

lrsquoune des utilisations les plus ceacutelegravebres et les plus anciennes du filtre de Kalman remonte agrave la

drsquoapregraves un texte de thorsten schmidt et les articles citeacutes en reacutefeacuterence

Lrsquoavantage principal de la meacutethode de Kalman est de donner une formule explicite et de faible dimension

Le filtrage vise agrave eacutevaluer un signal dynamique dont lrsquoobservation est bruiteacutee

Le modegravele de Kalman eacutetablit une relation lineacuteaire entre lrsquoinformation et le signal il fournit une for-mule explicite et de faible dimension pour calculer le signal simplifiant ainsi le proceacutedeacute

Pour les cas non lineacuteaires des meacutethodes numeacuteriques peuvent ecirctre utiliseacutees

Le filtrage recouvre un large champ drsquoapplication que ce soit en finance dans lrsquoindustrie eacutelectro-nique la robotique ou encore le secteur meacutedical

a retenir

les cahiers louis Bachelier 11

Thorsten Schmidt est professeur de matheacutematiques stochastiques agrave lrsquoUniversiteacute de Fribourg (Allemagne) ougrave il a succeacutedeacute agrave Ernst Eberlein Auparavant il a ensei-gneacute les matheacutematiques financiegraveres agrave lrsquoUniversiteacute de technologie de Chemnitz

Outre son inteacuterecirct pour les matheacutematiques financiegraveres et plus particuliegraverement pour les taux drsquointeacuterecirct les marcheacutes du risque de creacutedit et de lrsquoeacutenergie il a une so-lide expertise en statistique et probabiliteacute Il a reacutecemment co-eacutecrit un ouvrage sur la statistique matheacutematique publieacute chez Springer Sa recherche dans le domaine

du risque de creacutedit porte sur lrsquoimpact de lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation le filtrage non-lineacuteaire les modegraveles drsquoanalyse de risques dynamiques Heath-Jarrow-Morton et les processus affineacutes

mission apollo le modegravele a eacuteteacute utiliseacute pour preacuteparer le voyage de Neil amstrong vers la lune ainsi que son retour notamment pour deacuteterminer agrave quel moment preacutecis la fuseacutee devait rentrer dans lrsquoat-mosphegravere1 il est aujourdrsquohui uti-liseacute dans la plupart des outils de navigation satellite tout comme dans les smartphones ou les jeux videacuteo

le filtre de Kalman ne peut tou-tefois ecirctre employeacute que pour les cas lineacuteaires certains auteurs ont ainsi eacutetendu le cadre lineacuteaire en utilisant des approximations au niveau local

La meacutethode particulaire de filtrage

enfin des meacutethodes numeacuteriques ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees pour les pro-bleacutematiques non lineacuteaires ne pou-vant ecirctre reacutesolues ni par le filtre de Kalman ni par ses extensions Parmi elles figure la meacutethode particulaire de filtrage celle-ci estime la distribution du signal via un proceacutedeacute de reacuteduction sta-tistique dit ldquodiscreacutetisationrdquo qui consiste agrave deacutecouper une seacuterie de donneacutees en un certain nombre de classes repreacutesenteacutees par des particules a lrsquoimage de la meacutethode de Monte carlo cette approche repose sur la loi des grands nombres et la simulation drsquoexpeacuteriences reacutepeacuteteacutees Dans un premier temps les valeurs sont estimeacutees gracircce aux observations disponibles chaque valeur uti-liseacutee est associeacutee agrave un poids de conditionnement Puis agrave chaque simulation les pondeacuterations sont

ajusteacutees en fonction des reacutesul-tats obtenus les particules se deacuteplacent librement agrave partir de lrsquoalgorithme de dynamique du modegravele ce qui est possible dans la mesure ougrave la position exacte de chaque particule est connue on calcule alors la position moyenne pondeacutereacutee des particules agrave partir de leur poids theacuteoriques respec-tifs

un large champ drsquoapplication

les techniques de filtrage consti-tuent des outils preacutecieux afin de pallier aux imperfections de lrsquoinfor-mation ces probleacutematiques sont courantes en particulier dans le domaine financier en effet qursquoil srsquoagisse de calibrer un modegravele de valoriser un portefeuille drsquoac-tifs ou de deacutefinir les strateacutegies de couverture les donneacutees utiliseacutees sont toujours incomplegravetes le fil-trage permet de traiter ce type de question il est notamment employeacute pour calculer le risque de creacutedit une entreprise est en effet reconnue en faillite lorsque sa valeur fondamentale est trop basse Mais cette information nrsquoest eacutevidemment pas connue des acteurs du marcheacute les ob-servations sont bruiteacutees puisque pas entiegraverement disponibles le filtrage peut alors servir agrave estimer le risque de creacutedit agrave partir des diffeacuterentes sources drsquoinformation disponibles croiser les donneacutees des rapports trimestriels du cours des actions ou encore du prix des options permet drsquoeacuteva-luer la probabiliteacute de deacutefaut de la socieacuteteacute

les modegraveles de filtrage ont donc un large champ drsquoapplication et fournissent des eacuteleacutements de reacute-ponse agrave de nombreuses probleacute-matiques Nul doute que les re-cherches vont se poursuivre afin drsquoaccroitre les performances de ces meacutethodes et algorithmes et de faire ainsi face agrave de nouveaux challenges

thorsten schmidt

bibliographieFrey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

Bain a and crisan D (2009) Fundamentals of stochastic Filtering sprin-ger New York

Frey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

Del Moral P (1996) `Non-linear Filtering interacting particle solutionrsquo Markov Processes and related Fields 2(4) 555-580

1 Source Faragher (2012)

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asymeacutetrie drsquoinformation et assurance

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Nous et le Monde Naturel Nous avons souvent besoin de quantifier le risque de lrsquoassureur pour deacuteterminer une eacutechelle de primes eacutequitable pour deacutefinir des strateacutegies solides de ges-tion du risque ou pour deacuteterminer les Solvency Capital Requirements le niveau minimum de fonds propres exigeacutes Dans chacune de ces situations les pertes potentielles constituent une issue future incertaine Mettant de cocircteacute la question quasi-philosophique de savoir si lrsquoincertitude (sur lrsquooccurrence et le montant des sinistres futurs pour lrsquoassureur) est due agrave une insuf-

fisance drsquoinformation ou alors si elle est plutocirct lieacutee au caractegravere intrinsegravequement aleacuteatoire des issues nous nous trouvons geacuteneacuteralement face au workflow suivant

INCERTITUDE i RISQUE i DONNEES i MODELES

La diffeacuterence entre lrsquoincertitude et le risque (selon la deacutefinition de lrsquoeacuteconomiste Frank Knight) est que le risque peut ecirctre quantifieacute crsquoest-agrave-dire que lrsquoon peut en principe deacuteterminer la distribution de probabiliteacute pour le risque en question Apregraves avoir deacutetermineacute quelles caracteacuteristiques constituent les risques agrave quan-

Crsquoest la nature mecircme de lrsquoactiviteacute drsquoassurance que de disposer drsquoun niveau drsquoinformation limiteacute agrave propos des risques agrave assurer et les informations suppleacutementaires sont toujours les bienvenues Il en est de mecircme pour lrsquoactiviteacute de la reacuteassurance La reacuteassurance est une opeacuteration par laquelle une socieacuteteacute drsquoassurance (le ldquoceacutedantrdquo) srsquoassure aupregraves drsquoune autre compagnie drsquoassurance (le ldquoreacuteassureurrdquo) pour une partie des risques qursquoelle porte Il srsquoagit donc lagrave avant tout drsquoune activiteacute drsquoassurance Cependant si lrsquoassurance et la reacuteassurance partagent des caracteacuteristiques communes il existe de nombreuses diffeacuterences structurelles notamment en ce qui concerne lrsquoinformation sur les risques inheacuterents aux polices reacuteassureacutees De plus dans la mesure ougrave les opeacuterations de reacuteassurance impliquent de multiples acteurs lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation constitue un eacuteleacutement important agrave prendre en consideacuteration La gestion du risque traite cette asymeacutetrie de diverses maniegraveres que je propose de commenter en fonction du degreacute drsquoinformation disponible

PAr hAnsjoumlrG ALbreCher

Hansjoumlrg Albrecher a eacutetudieacute les matheacutematiques appliqueacutees et lrsquoastronomie agrave Graz Limerick et Baltimore avant de recevoir son doctorat de la Technische Universitaumlt Graz en 2001 Il a ensuite enseigneacute agrave Graz Leuven et Aarhus avant drsquoecirctre nommeacute directeur drsquoeacutequipe en matheacutematiques financiegraveres et directeur adjoint du Johann Radon Institute de lrsquoAcadeacutemie des Sciences de lrsquoAutriche agrave Linz et professeur de matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoassurance agrave la Universitaumlt Linz (JKU) En 2009 il a eacuteteacute nommeacute professeur des sciences actuarielles agrave HEC de lrsquoUniversiteacute de LausanneSes domaines de recherche incluent la theacuteorie du risque la modeacutelisation du risque dans lrsquoassurance et la reacuteassurance la modeacutelisation des catastrophes naturelles les matheacutematiques financiegraveres la simulation stochastique et plus geacuteneacuteralement les applications de la theacuteorie des probabiliteacutes Il a publieacute plus de 100 articles dans ces domaines et est co-auteur de deux ouvrages Ruin Probabilities (deuxiegraveme eacutedition 2010) et Quantitative Methods for Financial Markets (2013)Dr Albrecher est reacutedacteur au sein drsquoInsurance Mathematics and Economics depuis 2010 coreacutedacteur-en-chef du European Actuarial Journal et de la revue Statistics and Risk Modeling depuis 2011 Il siegravege au comiteacute de reacutedaction de plusieurs autres revues scientifiques et collections drsquoouvrages

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tifier on cherche la probabiliteacute pour que ces risques se reacutealisent en partant drsquoobservations du reacuteel en geacuteneacuteral de donneacutees historiques Pour chaque risque agrave eacutevaluer le problegraveme classique reacuteside dans la deacutetermination de la pertinence des donneacutees et de leur degreacute de perti-nence Une difficulteacute suppleacutementaire reacuteside dans le fait que la nature des risques peut eacutevoluer dans le temps et que pour appreacutehender cette eacutevolution lrsquoon doit pouvoir faire appel agrave des meacutethodes statistiques capables drsquoidentifier les eacuteleacutements non-stationnaires inclus dans les seacuteries de donneacutees et agrave des informations reacuteelles connexes dont on dispose (modifications des clauses contractuelles contexte environnemental etc)

De longues anneacutees drsquoexpeacuterience nous ont appris agrave qualifier les diffeacuterents types de risque et agrave tirer des re-lations causales entre eux Ainsi nous avons pu deacuteve-lopper les modegraveles qui servent de base agrave lrsquoeacutevaluation de risques associeacutes

Bien qursquoen geacuteneacuteral les modeacutelisateurs soient conscients des limites de la modeacutelisation la principale motiva-tion derriegravere cette approche est la conviction qursquoil est possible de quantifier preacuteciseacutement les risques et que toute imperfection ou lacune dans un modegravele reacutesulte de donneacutees insuffisantes ou plus geacuteneacuteralement drsquoinformations insuffisantes concernant la nature des risques et les relations entre eux On pourrait dire que le deacuteveloppement de modegraveles de risque par les assu-reurs constitue une tentative de reacuteduire lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation en geacuteneacuteral et de lrsquoinformation dispo-nible pour nous

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureacutes et AssureurQuand un assureacute et une compagnie drsquoassurance concluent un contrat au terme duquel lrsquoassureacute paie une prime (baseacutee sur un calcul deacuteterministe) contre des si-nistres speacutecifieacutes dans le contrat il est clair que chaque partie dispose drsquoinformations diffeacuterentes mais dans ce cas lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation existe des deux cocircteacutes En principe la compagnie drsquoassurance dispose de plus drsquoexpeacuterience des risques agrave assurer (modegraveles idoines) ce qui lui permet (en y rajoutant la mutualisation des risques) de geacuterer efficacement les risques agrave assurer bien que pour certains produits les assureacutes preacutefeacutereraient plus de transparence (voir par exemple [12])

Lrsquoassureacute quant agrave lui dispose dans la plupart des sec-teurs de beaucoup plus drsquoinformation concernant son profil de risque que ce qursquoil communique agrave

lrsquoassureur et il pourrait mecircme en influencer le reacutesul-tat par le biais de son comportement Un exemple en est lrsquoassurance maladie ougrave il existe une asymeacutetrie drsquoinformation intrinsegraveque concernant lrsquoeacutetat de santeacute de lrsquoassureacute (cf [22] et [19 21] pour des eacutetudes sur certains types drsquoassurance-vie) Aussi telle asymeacutetrie peut ecirctre la conseacutequence de nouvelles reacuteglementations (cf [23]) Le secteur de lrsquoassurance automobile a une longue pratique de reacuteduction de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation concernant le profil de risque des assureacutes via le systegraveme de bonus-malus qui a lrsquoavantage suppleacute-mentaire drsquoinciter les assureacutes agrave conduire prudemment La tendance actuelle est de pousser le dispositif plus loin encore avec la collecte drsquoinformations reacuteelles sur la conduite des assureacutes via des systegravemes teacuteleacutematiques embarqueacutes(cf [18 6]) Crsquoest une excellente illustra-tion de comment une quantiteacute importante de don-neacutees suppleacutementaires peut ecirctre et sera certainement utiliseacutee pour concevoir les futurs contrats drsquoassurance (une tendance parfois appeleacutee Le Big Data dans lrsquoAs-surance) Lrsquoexploitation des donneacutees inclut lrsquoanalyse approfondie des eacutecarts de comportement des assureacutes (cf [16 20]) et le deacuteveloppement drsquoapplications se servant de ces informations agrave des fins commerciales (cf [17])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et ReacuteassureurComme les assureurs nrsquoaiment pas partager des don-neacutees et statistiques concernant les sinistres dans le cas de nombreux contrats de reacuteassurance non proportion-nels lrsquoassureur ne communique au reacuteassureur qursquoune partie des donneacutees concerneacutees crsquoest-agrave-dire seulement les donneacutees sur les sinistres engageant ou pouvant en-gager la garantie Cette asymeacutetrie drsquoinformation laisse le reacuteassureur dans lrsquoobligation de creacuteer son modegravele preacutedictif avec des donneacutees censureacutees (cf [2]) En pra-tique les reacuteassureurs tentent de compleacuteter les donneacutees censureacutees avec des donneacutees collecteacutees agrave partir de porte-feuilles similaires (parfois obtenues gracircce agrave un contrat de reacuteassurance proportionnelle couvrant des risques similaires drsquoune mecircme importance) Les subtiliteacutes relatives agrave lrsquoeacutevaluation des risques et la deacutetermination des primes de reacuteassurance varient en fonction du type de contrat et la meacutethodologie choisie (meacutethode par expeacuterience vs meacutethode par exposition etc [1]) Une autre source drsquoasymeacutetrie drsquoinformation tient dans le fait que les sinistres passeacutes sont souvent comptabi-liseacutes agrave leur valeur ldquodrsquoengagementrdquo (ie la valeur des indemniteacutes reacuteellement verseacutees plus une estimation rai-sonnable des indemniteacutes restant agrave verser) et celle-ci peut srsquoaveacuterer significativement diffeacuterente de la valeur

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finale des indemniteacutes Dans des secteurs drsquoactiviteacute ougrave le regraveglement des sinistres peut prendre de nombreuses anneacutees on comprend facilement que les reacuteassureurs ne peuvent pas compter exclusivement sur les don-neacutees concernant le montant reacuteel final des indemniteacutes verseacutees mais doivent eacutegalement prendre en compte la valeur (estimeacutee) des engagements dans lrsquoeacutelaboration de leurs modegraveles Cette situation pose de reacuteels deacutefis statistiques et peu de recherche theacuteorique existe sur le sujet actuellement (cf [2])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et InvestisseurDes actionnaires actuels ou potentiels des socieacuteteacutes drsquoassurance fondent leurs deacutecisions drsquoinvestir sur les chiffres financiers et commerciaux et des indicateurs de performance mais en geacuteneacuteral ces chiffres ne tra-duisent pas lrsquointeacutegraliteacute de la structure de risque des assureurs et reacuteassureurs Compte tenu des Solvency Capital Requirements une socieacuteteacute doit tenir compte du coucirct de lever et conserver ce capital Ce coucirct aura un impact sur nombre de deacutecisions de strateacutegie et de gestion y compris la deacutecision de recourir agrave la reacuteassu-rance Le taux du coucirct du capital est influenceacute non seulement par le profil du risque mais eacutegalement par la structure de lrsquoinformation Par conseacutequence le taux du coucirct du capital est bien le reacutesultat de lrsquooffre et la de-mande sur le marcheacute mais tient eacutegalement compte de regravegles et directives en matiegravere de reporting financier telle la constitution de reacuteserves pour pertes et pour sinistres survenus mais non encore deacuteclareacutes Pour une discussion drsquoun point de vue actuariel voir [514]

Un autre domaine de recherche qui srsquointeacuteresse acti-vement aux aspects pratiques de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation est la titrisation des risques drsquoassurance en particulier celui de catastrophes naturelles et plus reacutecemment le risque de longeacuteviteacute La titrisation trans-fegravere le risque drsquoassurance aux marcheacutes des capitaux et constitue donc un instrument particuliegraverement utile lorsqursquoil srsquoagit de risques de grande ampleur ayant de fortes correacutelations ougrave les contrats de reacuteassurance tradi-tionnels ne sont pas eacuteconomiquement viables compte tenu du coucirct monumental des capitaux Lrsquohistoire des produits de titrisation illustre parfaitement comment lrsquoeacutevolution des attitudes envers lrsquoasymeacutetrie drsquoinforma-tion (dans ce cas preacutecis entre eacutemetteur et investisseur) a modifieacute les produits et leur attractiviteacute Des deacuteclen-cheurs anciens baseacutes sur lrsquoexpeacuterience effective de pertes des compagnies individuelles et des indices sectoriels ont eacutevolueacute vers des deacuteclencheurs parameacutetriques cal-culeacutes en tenant compte de quantiteacutes physiques lieacutees

aux catastrophes comme la vitesse du vent la pression atmospheacuterique etc Alors que les deacuteclencheurs para-meacutetriques diminuent lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation (qui dans le cas des deacuteclencheurs speacutecifiques agrave chaque en-treprise eacutetait significative) ils augmentent le risque de base crsquoest-agrave-dire le risque que le deacuteclencheur ne reflegravete pas lrsquoexpeacuterience reacuteelle de lrsquoeacutemetteur ce qui reacuteduit lrsquoef-ficaciteacute du produit pour lrsquoeacutemetteur Comme on pou-vait srsquoy attendre lrsquoactiviteacute de ce marcheacute a connu une certaine volatiliteacute dans le temps avec une forte aug-mentation des volumes dans des peacuteriodes ougrave le mar-cheacute traditionnel de la reacuteassurance ne pouvait pas faire face agrave ce type de demande (cf [9 11]) La valorisation de ces produits se situe agrave la frontiegravere entre assurance et finance Crsquoest eacutegalement un sujet de recherche tregraves inteacuteressant sur le plan theacuteorique (cf [7 15 4 8] et [10 24])

Asymeacutetrie drsquoinformation entre Assureurs et ConcurrentsEnfin comme dans toute activiteacute eacuteconomique il existe une concurrence entre assureurs pour un nombre li-miteacute de clients (assureacutes) et il existe eacutegalement une asy-meacutetrie drsquoinformation naturelle entre assureurs concur-rents concernant le profil du risque lrsquoappreacuteciation des conditions marcheacute lrsquoapproche meacutethodologique du risque et la deacutetermination des primes Parmi des approches reacutecentes on peut citer la deacutetermination des primes drsquoassurance via une analyse fondeacutee sur la theacuteo-rie des jeux tenant compte drsquoune preacutevision de la poli-tique des primes des concurrents des comportements agrave risque des assureacutes et des contraintes reacuteglementaires en matiegravere de fonds propres (voir [13]) le tout dans un contexte drsquoinformations incomplegravetes

Lrsquoobjectif de ce court chapitre eacutetait de mettre en lumiegravere plusieurs domaines de recherche dans les sciences actuarielles ougrave lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation joue directement ou indirec-tement un rocircle important Cette liste est forceacutement incomplegravete mais elle souligne lrsquoimportance de la modeacutelisation drsquoinforma-tion dans le secteur de lrsquoassurance et de la reacuteassurance qui est eacutegalement lrsquoobjet de tregraves nombreux projets de recherche en cours

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drsquohansjoumlrg Albrecher sur

wwwinformationinfinanceandinsuranceorg

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bibliographie[1] h albrecher reinsurance in encyclopedia of Quantitative Finance pages 1539-1543 2004

[2] h albrecher J Beirlant and J Teugels reinsurance actuarial and statistical aspects Wiley chiches-ter in preparation

[3] h albrecher and D Daily-amir on competitive non-life insurance pricing under incomplete informa-tion Proc sixth int conference on risk analysis Barcelona May 26-29 pages 76-812015

[4] h albrecher J hartinger and r F Tichy QMc techniques for caT bond pricing Monte carlo Methods appl 10(3-4)197-211 2004

[5] P artzner and K-T eisele supervisory insurance accounting mathematics for provision| and solvency capital requirements astin Bull 40(2)569-585 2010

[6] G M ayuso M and a Perez-Marin Time and distance to first accident and driving patterns of young drivers with pay-as-you-drive insurance accident analysis and Prevention 73125-131 2014

[7] s h cox J r Fairchild and h W Pedersen economic aspects of securitization of risk astin Bull 30(1)157-193 2000

[8] s h cox Y lin and h Pedersen Mortality risk modeling applications to insurance securitization insurance Math econom 46(1)242-253 2010

[9] c culp structured finance and insurance - the arT of managing capital and risk Wiley chichester 2011

[10] D cummins and P Barrieu innovations in insurance markets hybrid and securitized risk-transfer solutions in handbook of insurance ch20547-602 2013

[11] D cummins and P Trainar securitization insurance and reinsurance Journal of risk and insurance Vol76(3) 463-492 2009

[12] c Donnelly M Guilleacuten and J P Nielsen Bringing cost transparency to the life annuity market insu-rance Math econom 5614-27 2014

[13] c Dutang h albrecher and s loisel competition among non-life insurers under solvency constraints a game-theoretic approach european J oper res 231(3)702-711 2013

[14] K-T eisele and P artzner Multiperiod insurance supervision top-down models eur actuar J 1(1)107-130 2011

[15] P embrechts actuarial versus financial pricing of insurance The Journal of risk Finance 1(1)17-26 2000

[16] s Fier and a liebenberg life insurance lapse behavior North american actuarial Journal 17(2) 153-167 2013

[17] l Guelman M Guilleacuten and a M Peacuterez-Marin a survey of personalized treatment models for pricing strategies in insurance insurance Math econom 5868-76 2014

[18] T ippisch Telematics Data in Motor insurance creating Value by understanding the impact of acci-dents on Vehicle use Dissertation university of st Gallen 2010

[19] T Moenig and D Bauer revisiting the risk-neutral approach to optimal policyholder behavior a study of withdrawal guarantees in variable annuities review of Finance to appear 2015

[20] J Pinquet M Guilleacuten and M ayuso commitment and lapse behavior in long-term insurance a case study Journal of risk and insurance 78(4) 983-1002 2011

[21] N Zhu and D Bauer coherent pricing of life settlements under asymmetric information Journal of risk and insurance 80(3) 827-851 2013

[22] P Zweifel and W Manning Moral hazard and consumer incentives in health care handbook of health economics 1409-459 2000

[23] h schmeiser T stoumlrmer and J Wagner unisex insurance Pricing consumersrsquo Perception and Mar-ket implications The Geneva Papers on risk and insurance ndash issues and Practice 39(2)322-350 2014

[24] J lorson and J Wagner The Pricing of hedging longevity risk with the help of annuity securitiza-tions an application to the German Market Journal of risk Finance 15(4)385-416 2014

Page 11: Information en Finance et assurance

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Thorsten Schmidt est professeur de matheacutematiques stochastiques agrave lrsquoUniversiteacute de Fribourg (Allemagne) ougrave il a succeacutedeacute agrave Ernst Eberlein Auparavant il a ensei-gneacute les matheacutematiques financiegraveres agrave lrsquoUniversiteacute de technologie de Chemnitz

Outre son inteacuterecirct pour les matheacutematiques financiegraveres et plus particuliegraverement pour les taux drsquointeacuterecirct les marcheacutes du risque de creacutedit et de lrsquoeacutenergie il a une so-lide expertise en statistique et probabiliteacute Il a reacutecemment co-eacutecrit un ouvrage sur la statistique matheacutematique publieacute chez Springer Sa recherche dans le domaine

du risque de creacutedit porte sur lrsquoimpact de lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation le filtrage non-lineacuteaire les modegraveles drsquoanalyse de risques dynamiques Heath-Jarrow-Morton et les processus affineacutes

mission apollo le modegravele a eacuteteacute utiliseacute pour preacuteparer le voyage de Neil amstrong vers la lune ainsi que son retour notamment pour deacuteterminer agrave quel moment preacutecis la fuseacutee devait rentrer dans lrsquoat-mosphegravere1 il est aujourdrsquohui uti-liseacute dans la plupart des outils de navigation satellite tout comme dans les smartphones ou les jeux videacuteo

le filtre de Kalman ne peut tou-tefois ecirctre employeacute que pour les cas lineacuteaires certains auteurs ont ainsi eacutetendu le cadre lineacuteaire en utilisant des approximations au niveau local

La meacutethode particulaire de filtrage

enfin des meacutethodes numeacuteriques ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees pour les pro-bleacutematiques non lineacuteaires ne pou-vant ecirctre reacutesolues ni par le filtre de Kalman ni par ses extensions Parmi elles figure la meacutethode particulaire de filtrage celle-ci estime la distribution du signal via un proceacutedeacute de reacuteduction sta-tistique dit ldquodiscreacutetisationrdquo qui consiste agrave deacutecouper une seacuterie de donneacutees en un certain nombre de classes repreacutesenteacutees par des particules a lrsquoimage de la meacutethode de Monte carlo cette approche repose sur la loi des grands nombres et la simulation drsquoexpeacuteriences reacutepeacuteteacutees Dans un premier temps les valeurs sont estimeacutees gracircce aux observations disponibles chaque valeur uti-liseacutee est associeacutee agrave un poids de conditionnement Puis agrave chaque simulation les pondeacuterations sont

ajusteacutees en fonction des reacutesul-tats obtenus les particules se deacuteplacent librement agrave partir de lrsquoalgorithme de dynamique du modegravele ce qui est possible dans la mesure ougrave la position exacte de chaque particule est connue on calcule alors la position moyenne pondeacutereacutee des particules agrave partir de leur poids theacuteoriques respec-tifs

un large champ drsquoapplication

les techniques de filtrage consti-tuent des outils preacutecieux afin de pallier aux imperfections de lrsquoinfor-mation ces probleacutematiques sont courantes en particulier dans le domaine financier en effet qursquoil srsquoagisse de calibrer un modegravele de valoriser un portefeuille drsquoac-tifs ou de deacutefinir les strateacutegies de couverture les donneacutees utiliseacutees sont toujours incomplegravetes le fil-trage permet de traiter ce type de question il est notamment employeacute pour calculer le risque de creacutedit une entreprise est en effet reconnue en faillite lorsque sa valeur fondamentale est trop basse Mais cette information nrsquoest eacutevidemment pas connue des acteurs du marcheacute les ob-servations sont bruiteacutees puisque pas entiegraverement disponibles le filtrage peut alors servir agrave estimer le risque de creacutedit agrave partir des diffeacuterentes sources drsquoinformation disponibles croiser les donneacutees des rapports trimestriels du cours des actions ou encore du prix des options permet drsquoeacuteva-luer la probabiliteacute de deacutefaut de la socieacuteteacute

les modegraveles de filtrage ont donc un large champ drsquoapplication et fournissent des eacuteleacutements de reacute-ponse agrave de nombreuses probleacute-matiques Nul doute que les re-cherches vont se poursuivre afin drsquoaccroitre les performances de ces meacutethodes et algorithmes et de faire ainsi face agrave de nouveaux challenges

thorsten schmidt

bibliographieFrey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

Bain a and crisan D (2009) Fundamentals of stochastic Filtering sprin-ger New York

Frey r and schmidt T (2011) Filtering and in-complete information in T Bielecki D Brigo and F Patras eds `credit risk Frontiersrsquo Wiley

Del Moral P (1996) `Non-linear Filtering interacting particle solutionrsquo Markov Processes and related Fields 2(4) 555-580

1 Source Faragher (2012)

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asymeacutetrie drsquoinformation et assurance

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Nous et le Monde Naturel Nous avons souvent besoin de quantifier le risque de lrsquoassureur pour deacuteterminer une eacutechelle de primes eacutequitable pour deacutefinir des strateacutegies solides de ges-tion du risque ou pour deacuteterminer les Solvency Capital Requirements le niveau minimum de fonds propres exigeacutes Dans chacune de ces situations les pertes potentielles constituent une issue future incertaine Mettant de cocircteacute la question quasi-philosophique de savoir si lrsquoincertitude (sur lrsquooccurrence et le montant des sinistres futurs pour lrsquoassureur) est due agrave une insuf-

fisance drsquoinformation ou alors si elle est plutocirct lieacutee au caractegravere intrinsegravequement aleacuteatoire des issues nous nous trouvons geacuteneacuteralement face au workflow suivant

INCERTITUDE i RISQUE i DONNEES i MODELES

La diffeacuterence entre lrsquoincertitude et le risque (selon la deacutefinition de lrsquoeacuteconomiste Frank Knight) est que le risque peut ecirctre quantifieacute crsquoest-agrave-dire que lrsquoon peut en principe deacuteterminer la distribution de probabiliteacute pour le risque en question Apregraves avoir deacutetermineacute quelles caracteacuteristiques constituent les risques agrave quan-

Crsquoest la nature mecircme de lrsquoactiviteacute drsquoassurance que de disposer drsquoun niveau drsquoinformation limiteacute agrave propos des risques agrave assurer et les informations suppleacutementaires sont toujours les bienvenues Il en est de mecircme pour lrsquoactiviteacute de la reacuteassurance La reacuteassurance est une opeacuteration par laquelle une socieacuteteacute drsquoassurance (le ldquoceacutedantrdquo) srsquoassure aupregraves drsquoune autre compagnie drsquoassurance (le ldquoreacuteassureurrdquo) pour une partie des risques qursquoelle porte Il srsquoagit donc lagrave avant tout drsquoune activiteacute drsquoassurance Cependant si lrsquoassurance et la reacuteassurance partagent des caracteacuteristiques communes il existe de nombreuses diffeacuterences structurelles notamment en ce qui concerne lrsquoinformation sur les risques inheacuterents aux polices reacuteassureacutees De plus dans la mesure ougrave les opeacuterations de reacuteassurance impliquent de multiples acteurs lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation constitue un eacuteleacutement important agrave prendre en consideacuteration La gestion du risque traite cette asymeacutetrie de diverses maniegraveres que je propose de commenter en fonction du degreacute drsquoinformation disponible

PAr hAnsjoumlrG ALbreCher

Hansjoumlrg Albrecher a eacutetudieacute les matheacutematiques appliqueacutees et lrsquoastronomie agrave Graz Limerick et Baltimore avant de recevoir son doctorat de la Technische Universitaumlt Graz en 2001 Il a ensuite enseigneacute agrave Graz Leuven et Aarhus avant drsquoecirctre nommeacute directeur drsquoeacutequipe en matheacutematiques financiegraveres et directeur adjoint du Johann Radon Institute de lrsquoAcadeacutemie des Sciences de lrsquoAutriche agrave Linz et professeur de matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoassurance agrave la Universitaumlt Linz (JKU) En 2009 il a eacuteteacute nommeacute professeur des sciences actuarielles agrave HEC de lrsquoUniversiteacute de LausanneSes domaines de recherche incluent la theacuteorie du risque la modeacutelisation du risque dans lrsquoassurance et la reacuteassurance la modeacutelisation des catastrophes naturelles les matheacutematiques financiegraveres la simulation stochastique et plus geacuteneacuteralement les applications de la theacuteorie des probabiliteacutes Il a publieacute plus de 100 articles dans ces domaines et est co-auteur de deux ouvrages Ruin Probabilities (deuxiegraveme eacutedition 2010) et Quantitative Methods for Financial Markets (2013)Dr Albrecher est reacutedacteur au sein drsquoInsurance Mathematics and Economics depuis 2010 coreacutedacteur-en-chef du European Actuarial Journal et de la revue Statistics and Risk Modeling depuis 2011 Il siegravege au comiteacute de reacutedaction de plusieurs autres revues scientifiques et collections drsquoouvrages

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tifier on cherche la probabiliteacute pour que ces risques se reacutealisent en partant drsquoobservations du reacuteel en geacuteneacuteral de donneacutees historiques Pour chaque risque agrave eacutevaluer le problegraveme classique reacuteside dans la deacutetermination de la pertinence des donneacutees et de leur degreacute de perti-nence Une difficulteacute suppleacutementaire reacuteside dans le fait que la nature des risques peut eacutevoluer dans le temps et que pour appreacutehender cette eacutevolution lrsquoon doit pouvoir faire appel agrave des meacutethodes statistiques capables drsquoidentifier les eacuteleacutements non-stationnaires inclus dans les seacuteries de donneacutees et agrave des informations reacuteelles connexes dont on dispose (modifications des clauses contractuelles contexte environnemental etc)

De longues anneacutees drsquoexpeacuterience nous ont appris agrave qualifier les diffeacuterents types de risque et agrave tirer des re-lations causales entre eux Ainsi nous avons pu deacuteve-lopper les modegraveles qui servent de base agrave lrsquoeacutevaluation de risques associeacutes

Bien qursquoen geacuteneacuteral les modeacutelisateurs soient conscients des limites de la modeacutelisation la principale motiva-tion derriegravere cette approche est la conviction qursquoil est possible de quantifier preacuteciseacutement les risques et que toute imperfection ou lacune dans un modegravele reacutesulte de donneacutees insuffisantes ou plus geacuteneacuteralement drsquoinformations insuffisantes concernant la nature des risques et les relations entre eux On pourrait dire que le deacuteveloppement de modegraveles de risque par les assu-reurs constitue une tentative de reacuteduire lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation en geacuteneacuteral et de lrsquoinformation dispo-nible pour nous

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureacutes et AssureurQuand un assureacute et une compagnie drsquoassurance concluent un contrat au terme duquel lrsquoassureacute paie une prime (baseacutee sur un calcul deacuteterministe) contre des si-nistres speacutecifieacutes dans le contrat il est clair que chaque partie dispose drsquoinformations diffeacuterentes mais dans ce cas lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation existe des deux cocircteacutes En principe la compagnie drsquoassurance dispose de plus drsquoexpeacuterience des risques agrave assurer (modegraveles idoines) ce qui lui permet (en y rajoutant la mutualisation des risques) de geacuterer efficacement les risques agrave assurer bien que pour certains produits les assureacutes preacutefeacutereraient plus de transparence (voir par exemple [12])

Lrsquoassureacute quant agrave lui dispose dans la plupart des sec-teurs de beaucoup plus drsquoinformation concernant son profil de risque que ce qursquoil communique agrave

lrsquoassureur et il pourrait mecircme en influencer le reacutesul-tat par le biais de son comportement Un exemple en est lrsquoassurance maladie ougrave il existe une asymeacutetrie drsquoinformation intrinsegraveque concernant lrsquoeacutetat de santeacute de lrsquoassureacute (cf [22] et [19 21] pour des eacutetudes sur certains types drsquoassurance-vie) Aussi telle asymeacutetrie peut ecirctre la conseacutequence de nouvelles reacuteglementations (cf [23]) Le secteur de lrsquoassurance automobile a une longue pratique de reacuteduction de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation concernant le profil de risque des assureacutes via le systegraveme de bonus-malus qui a lrsquoavantage suppleacute-mentaire drsquoinciter les assureacutes agrave conduire prudemment La tendance actuelle est de pousser le dispositif plus loin encore avec la collecte drsquoinformations reacuteelles sur la conduite des assureacutes via des systegravemes teacuteleacutematiques embarqueacutes(cf [18 6]) Crsquoest une excellente illustra-tion de comment une quantiteacute importante de don-neacutees suppleacutementaires peut ecirctre et sera certainement utiliseacutee pour concevoir les futurs contrats drsquoassurance (une tendance parfois appeleacutee Le Big Data dans lrsquoAs-surance) Lrsquoexploitation des donneacutees inclut lrsquoanalyse approfondie des eacutecarts de comportement des assureacutes (cf [16 20]) et le deacuteveloppement drsquoapplications se servant de ces informations agrave des fins commerciales (cf [17])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et ReacuteassureurComme les assureurs nrsquoaiment pas partager des don-neacutees et statistiques concernant les sinistres dans le cas de nombreux contrats de reacuteassurance non proportion-nels lrsquoassureur ne communique au reacuteassureur qursquoune partie des donneacutees concerneacutees crsquoest-agrave-dire seulement les donneacutees sur les sinistres engageant ou pouvant en-gager la garantie Cette asymeacutetrie drsquoinformation laisse le reacuteassureur dans lrsquoobligation de creacuteer son modegravele preacutedictif avec des donneacutees censureacutees (cf [2]) En pra-tique les reacuteassureurs tentent de compleacuteter les donneacutees censureacutees avec des donneacutees collecteacutees agrave partir de porte-feuilles similaires (parfois obtenues gracircce agrave un contrat de reacuteassurance proportionnelle couvrant des risques similaires drsquoune mecircme importance) Les subtiliteacutes relatives agrave lrsquoeacutevaluation des risques et la deacutetermination des primes de reacuteassurance varient en fonction du type de contrat et la meacutethodologie choisie (meacutethode par expeacuterience vs meacutethode par exposition etc [1]) Une autre source drsquoasymeacutetrie drsquoinformation tient dans le fait que les sinistres passeacutes sont souvent comptabi-liseacutes agrave leur valeur ldquodrsquoengagementrdquo (ie la valeur des indemniteacutes reacuteellement verseacutees plus une estimation rai-sonnable des indemniteacutes restant agrave verser) et celle-ci peut srsquoaveacuterer significativement diffeacuterente de la valeur

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finale des indemniteacutes Dans des secteurs drsquoactiviteacute ougrave le regraveglement des sinistres peut prendre de nombreuses anneacutees on comprend facilement que les reacuteassureurs ne peuvent pas compter exclusivement sur les don-neacutees concernant le montant reacuteel final des indemniteacutes verseacutees mais doivent eacutegalement prendre en compte la valeur (estimeacutee) des engagements dans lrsquoeacutelaboration de leurs modegraveles Cette situation pose de reacuteels deacutefis statistiques et peu de recherche theacuteorique existe sur le sujet actuellement (cf [2])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et InvestisseurDes actionnaires actuels ou potentiels des socieacuteteacutes drsquoassurance fondent leurs deacutecisions drsquoinvestir sur les chiffres financiers et commerciaux et des indicateurs de performance mais en geacuteneacuteral ces chiffres ne tra-duisent pas lrsquointeacutegraliteacute de la structure de risque des assureurs et reacuteassureurs Compte tenu des Solvency Capital Requirements une socieacuteteacute doit tenir compte du coucirct de lever et conserver ce capital Ce coucirct aura un impact sur nombre de deacutecisions de strateacutegie et de gestion y compris la deacutecision de recourir agrave la reacuteassu-rance Le taux du coucirct du capital est influenceacute non seulement par le profil du risque mais eacutegalement par la structure de lrsquoinformation Par conseacutequence le taux du coucirct du capital est bien le reacutesultat de lrsquooffre et la de-mande sur le marcheacute mais tient eacutegalement compte de regravegles et directives en matiegravere de reporting financier telle la constitution de reacuteserves pour pertes et pour sinistres survenus mais non encore deacuteclareacutes Pour une discussion drsquoun point de vue actuariel voir [514]

Un autre domaine de recherche qui srsquointeacuteresse acti-vement aux aspects pratiques de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation est la titrisation des risques drsquoassurance en particulier celui de catastrophes naturelles et plus reacutecemment le risque de longeacuteviteacute La titrisation trans-fegravere le risque drsquoassurance aux marcheacutes des capitaux et constitue donc un instrument particuliegraverement utile lorsqursquoil srsquoagit de risques de grande ampleur ayant de fortes correacutelations ougrave les contrats de reacuteassurance tradi-tionnels ne sont pas eacuteconomiquement viables compte tenu du coucirct monumental des capitaux Lrsquohistoire des produits de titrisation illustre parfaitement comment lrsquoeacutevolution des attitudes envers lrsquoasymeacutetrie drsquoinforma-tion (dans ce cas preacutecis entre eacutemetteur et investisseur) a modifieacute les produits et leur attractiviteacute Des deacuteclen-cheurs anciens baseacutes sur lrsquoexpeacuterience effective de pertes des compagnies individuelles et des indices sectoriels ont eacutevolueacute vers des deacuteclencheurs parameacutetriques cal-culeacutes en tenant compte de quantiteacutes physiques lieacutees

aux catastrophes comme la vitesse du vent la pression atmospheacuterique etc Alors que les deacuteclencheurs para-meacutetriques diminuent lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation (qui dans le cas des deacuteclencheurs speacutecifiques agrave chaque en-treprise eacutetait significative) ils augmentent le risque de base crsquoest-agrave-dire le risque que le deacuteclencheur ne reflegravete pas lrsquoexpeacuterience reacuteelle de lrsquoeacutemetteur ce qui reacuteduit lrsquoef-ficaciteacute du produit pour lrsquoeacutemetteur Comme on pou-vait srsquoy attendre lrsquoactiviteacute de ce marcheacute a connu une certaine volatiliteacute dans le temps avec une forte aug-mentation des volumes dans des peacuteriodes ougrave le mar-cheacute traditionnel de la reacuteassurance ne pouvait pas faire face agrave ce type de demande (cf [9 11]) La valorisation de ces produits se situe agrave la frontiegravere entre assurance et finance Crsquoest eacutegalement un sujet de recherche tregraves inteacuteressant sur le plan theacuteorique (cf [7 15 4 8] et [10 24])

Asymeacutetrie drsquoinformation entre Assureurs et ConcurrentsEnfin comme dans toute activiteacute eacuteconomique il existe une concurrence entre assureurs pour un nombre li-miteacute de clients (assureacutes) et il existe eacutegalement une asy-meacutetrie drsquoinformation naturelle entre assureurs concur-rents concernant le profil du risque lrsquoappreacuteciation des conditions marcheacute lrsquoapproche meacutethodologique du risque et la deacutetermination des primes Parmi des approches reacutecentes on peut citer la deacutetermination des primes drsquoassurance via une analyse fondeacutee sur la theacuteo-rie des jeux tenant compte drsquoune preacutevision de la poli-tique des primes des concurrents des comportements agrave risque des assureacutes et des contraintes reacuteglementaires en matiegravere de fonds propres (voir [13]) le tout dans un contexte drsquoinformations incomplegravetes

Lrsquoobjectif de ce court chapitre eacutetait de mettre en lumiegravere plusieurs domaines de recherche dans les sciences actuarielles ougrave lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation joue directement ou indirec-tement un rocircle important Cette liste est forceacutement incomplegravete mais elle souligne lrsquoimportance de la modeacutelisation drsquoinforma-tion dans le secteur de lrsquoassurance et de la reacuteassurance qui est eacutegalement lrsquoobjet de tregraves nombreux projets de recherche en cours

retrouvez lrsquoarticle inteacutegral

drsquohansjoumlrg Albrecher sur

wwwinformationinfinanceandinsuranceorg

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bibliographie[1] h albrecher reinsurance in encyclopedia of Quantitative Finance pages 1539-1543 2004

[2] h albrecher J Beirlant and J Teugels reinsurance actuarial and statistical aspects Wiley chiches-ter in preparation

[3] h albrecher and D Daily-amir on competitive non-life insurance pricing under incomplete informa-tion Proc sixth int conference on risk analysis Barcelona May 26-29 pages 76-812015

[4] h albrecher J hartinger and r F Tichy QMc techniques for caT bond pricing Monte carlo Methods appl 10(3-4)197-211 2004

[5] P artzner and K-T eisele supervisory insurance accounting mathematics for provision| and solvency capital requirements astin Bull 40(2)569-585 2010

[6] G M ayuso M and a Perez-Marin Time and distance to first accident and driving patterns of young drivers with pay-as-you-drive insurance accident analysis and Prevention 73125-131 2014

[7] s h cox J r Fairchild and h W Pedersen economic aspects of securitization of risk astin Bull 30(1)157-193 2000

[8] s h cox Y lin and h Pedersen Mortality risk modeling applications to insurance securitization insurance Math econom 46(1)242-253 2010

[9] c culp structured finance and insurance - the arT of managing capital and risk Wiley chichester 2011

[10] D cummins and P Barrieu innovations in insurance markets hybrid and securitized risk-transfer solutions in handbook of insurance ch20547-602 2013

[11] D cummins and P Trainar securitization insurance and reinsurance Journal of risk and insurance Vol76(3) 463-492 2009

[12] c Donnelly M Guilleacuten and J P Nielsen Bringing cost transparency to the life annuity market insu-rance Math econom 5614-27 2014

[13] c Dutang h albrecher and s loisel competition among non-life insurers under solvency constraints a game-theoretic approach european J oper res 231(3)702-711 2013

[14] K-T eisele and P artzner Multiperiod insurance supervision top-down models eur actuar J 1(1)107-130 2011

[15] P embrechts actuarial versus financial pricing of insurance The Journal of risk Finance 1(1)17-26 2000

[16] s Fier and a liebenberg life insurance lapse behavior North american actuarial Journal 17(2) 153-167 2013

[17] l Guelman M Guilleacuten and a M Peacuterez-Marin a survey of personalized treatment models for pricing strategies in insurance insurance Math econom 5868-76 2014

[18] T ippisch Telematics Data in Motor insurance creating Value by understanding the impact of acci-dents on Vehicle use Dissertation university of st Gallen 2010

[19] T Moenig and D Bauer revisiting the risk-neutral approach to optimal policyholder behavior a study of withdrawal guarantees in variable annuities review of Finance to appear 2015

[20] J Pinquet M Guilleacuten and M ayuso commitment and lapse behavior in long-term insurance a case study Journal of risk and insurance 78(4) 983-1002 2011

[21] N Zhu and D Bauer coherent pricing of life settlements under asymmetric information Journal of risk and insurance 80(3) 827-851 2013

[22] P Zweifel and W Manning Moral hazard and consumer incentives in health care handbook of health economics 1409-459 2000

[23] h schmeiser T stoumlrmer and J Wagner unisex insurance Pricing consumersrsquo Perception and Mar-ket implications The Geneva Papers on risk and insurance ndash issues and Practice 39(2)322-350 2014

[24] J lorson and J Wagner The Pricing of hedging longevity risk with the help of annuity securitiza-tions an application to the German Market Journal of risk Finance 15(4)385-416 2014

Page 12: Information en Finance et assurance

12 les cahiers louis Bachelier

asymeacutetrie drsquoinformation et assurance

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Nous et le Monde Naturel Nous avons souvent besoin de quantifier le risque de lrsquoassureur pour deacuteterminer une eacutechelle de primes eacutequitable pour deacutefinir des strateacutegies solides de ges-tion du risque ou pour deacuteterminer les Solvency Capital Requirements le niveau minimum de fonds propres exigeacutes Dans chacune de ces situations les pertes potentielles constituent une issue future incertaine Mettant de cocircteacute la question quasi-philosophique de savoir si lrsquoincertitude (sur lrsquooccurrence et le montant des sinistres futurs pour lrsquoassureur) est due agrave une insuf-

fisance drsquoinformation ou alors si elle est plutocirct lieacutee au caractegravere intrinsegravequement aleacuteatoire des issues nous nous trouvons geacuteneacuteralement face au workflow suivant

INCERTITUDE i RISQUE i DONNEES i MODELES

La diffeacuterence entre lrsquoincertitude et le risque (selon la deacutefinition de lrsquoeacuteconomiste Frank Knight) est que le risque peut ecirctre quantifieacute crsquoest-agrave-dire que lrsquoon peut en principe deacuteterminer la distribution de probabiliteacute pour le risque en question Apregraves avoir deacutetermineacute quelles caracteacuteristiques constituent les risques agrave quan-

Crsquoest la nature mecircme de lrsquoactiviteacute drsquoassurance que de disposer drsquoun niveau drsquoinformation limiteacute agrave propos des risques agrave assurer et les informations suppleacutementaires sont toujours les bienvenues Il en est de mecircme pour lrsquoactiviteacute de la reacuteassurance La reacuteassurance est une opeacuteration par laquelle une socieacuteteacute drsquoassurance (le ldquoceacutedantrdquo) srsquoassure aupregraves drsquoune autre compagnie drsquoassurance (le ldquoreacuteassureurrdquo) pour une partie des risques qursquoelle porte Il srsquoagit donc lagrave avant tout drsquoune activiteacute drsquoassurance Cependant si lrsquoassurance et la reacuteassurance partagent des caracteacuteristiques communes il existe de nombreuses diffeacuterences structurelles notamment en ce qui concerne lrsquoinformation sur les risques inheacuterents aux polices reacuteassureacutees De plus dans la mesure ougrave les opeacuterations de reacuteassurance impliquent de multiples acteurs lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation constitue un eacuteleacutement important agrave prendre en consideacuteration La gestion du risque traite cette asymeacutetrie de diverses maniegraveres que je propose de commenter en fonction du degreacute drsquoinformation disponible

PAr hAnsjoumlrG ALbreCher

Hansjoumlrg Albrecher a eacutetudieacute les matheacutematiques appliqueacutees et lrsquoastronomie agrave Graz Limerick et Baltimore avant de recevoir son doctorat de la Technische Universitaumlt Graz en 2001 Il a ensuite enseigneacute agrave Graz Leuven et Aarhus avant drsquoecirctre nommeacute directeur drsquoeacutequipe en matheacutematiques financiegraveres et directeur adjoint du Johann Radon Institute de lrsquoAcadeacutemie des Sciences de lrsquoAutriche agrave Linz et professeur de matheacutematiques appliqueacutees agrave lrsquoassurance agrave la Universitaumlt Linz (JKU) En 2009 il a eacuteteacute nommeacute professeur des sciences actuarielles agrave HEC de lrsquoUniversiteacute de LausanneSes domaines de recherche incluent la theacuteorie du risque la modeacutelisation du risque dans lrsquoassurance et la reacuteassurance la modeacutelisation des catastrophes naturelles les matheacutematiques financiegraveres la simulation stochastique et plus geacuteneacuteralement les applications de la theacuteorie des probabiliteacutes Il a publieacute plus de 100 articles dans ces domaines et est co-auteur de deux ouvrages Ruin Probabilities (deuxiegraveme eacutedition 2010) et Quantitative Methods for Financial Markets (2013)Dr Albrecher est reacutedacteur au sein drsquoInsurance Mathematics and Economics depuis 2010 coreacutedacteur-en-chef du European Actuarial Journal et de la revue Statistics and Risk Modeling depuis 2011 Il siegravege au comiteacute de reacutedaction de plusieurs autres revues scientifiques et collections drsquoouvrages

les cahiers louis Bachelier 13

tifier on cherche la probabiliteacute pour que ces risques se reacutealisent en partant drsquoobservations du reacuteel en geacuteneacuteral de donneacutees historiques Pour chaque risque agrave eacutevaluer le problegraveme classique reacuteside dans la deacutetermination de la pertinence des donneacutees et de leur degreacute de perti-nence Une difficulteacute suppleacutementaire reacuteside dans le fait que la nature des risques peut eacutevoluer dans le temps et que pour appreacutehender cette eacutevolution lrsquoon doit pouvoir faire appel agrave des meacutethodes statistiques capables drsquoidentifier les eacuteleacutements non-stationnaires inclus dans les seacuteries de donneacutees et agrave des informations reacuteelles connexes dont on dispose (modifications des clauses contractuelles contexte environnemental etc)

De longues anneacutees drsquoexpeacuterience nous ont appris agrave qualifier les diffeacuterents types de risque et agrave tirer des re-lations causales entre eux Ainsi nous avons pu deacuteve-lopper les modegraveles qui servent de base agrave lrsquoeacutevaluation de risques associeacutes

Bien qursquoen geacuteneacuteral les modeacutelisateurs soient conscients des limites de la modeacutelisation la principale motiva-tion derriegravere cette approche est la conviction qursquoil est possible de quantifier preacuteciseacutement les risques et que toute imperfection ou lacune dans un modegravele reacutesulte de donneacutees insuffisantes ou plus geacuteneacuteralement drsquoinformations insuffisantes concernant la nature des risques et les relations entre eux On pourrait dire que le deacuteveloppement de modegraveles de risque par les assu-reurs constitue une tentative de reacuteduire lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation en geacuteneacuteral et de lrsquoinformation dispo-nible pour nous

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureacutes et AssureurQuand un assureacute et une compagnie drsquoassurance concluent un contrat au terme duquel lrsquoassureacute paie une prime (baseacutee sur un calcul deacuteterministe) contre des si-nistres speacutecifieacutes dans le contrat il est clair que chaque partie dispose drsquoinformations diffeacuterentes mais dans ce cas lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation existe des deux cocircteacutes En principe la compagnie drsquoassurance dispose de plus drsquoexpeacuterience des risques agrave assurer (modegraveles idoines) ce qui lui permet (en y rajoutant la mutualisation des risques) de geacuterer efficacement les risques agrave assurer bien que pour certains produits les assureacutes preacutefeacutereraient plus de transparence (voir par exemple [12])

Lrsquoassureacute quant agrave lui dispose dans la plupart des sec-teurs de beaucoup plus drsquoinformation concernant son profil de risque que ce qursquoil communique agrave

lrsquoassureur et il pourrait mecircme en influencer le reacutesul-tat par le biais de son comportement Un exemple en est lrsquoassurance maladie ougrave il existe une asymeacutetrie drsquoinformation intrinsegraveque concernant lrsquoeacutetat de santeacute de lrsquoassureacute (cf [22] et [19 21] pour des eacutetudes sur certains types drsquoassurance-vie) Aussi telle asymeacutetrie peut ecirctre la conseacutequence de nouvelles reacuteglementations (cf [23]) Le secteur de lrsquoassurance automobile a une longue pratique de reacuteduction de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation concernant le profil de risque des assureacutes via le systegraveme de bonus-malus qui a lrsquoavantage suppleacute-mentaire drsquoinciter les assureacutes agrave conduire prudemment La tendance actuelle est de pousser le dispositif plus loin encore avec la collecte drsquoinformations reacuteelles sur la conduite des assureacutes via des systegravemes teacuteleacutematiques embarqueacutes(cf [18 6]) Crsquoest une excellente illustra-tion de comment une quantiteacute importante de don-neacutees suppleacutementaires peut ecirctre et sera certainement utiliseacutee pour concevoir les futurs contrats drsquoassurance (une tendance parfois appeleacutee Le Big Data dans lrsquoAs-surance) Lrsquoexploitation des donneacutees inclut lrsquoanalyse approfondie des eacutecarts de comportement des assureacutes (cf [16 20]) et le deacuteveloppement drsquoapplications se servant de ces informations agrave des fins commerciales (cf [17])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et ReacuteassureurComme les assureurs nrsquoaiment pas partager des don-neacutees et statistiques concernant les sinistres dans le cas de nombreux contrats de reacuteassurance non proportion-nels lrsquoassureur ne communique au reacuteassureur qursquoune partie des donneacutees concerneacutees crsquoest-agrave-dire seulement les donneacutees sur les sinistres engageant ou pouvant en-gager la garantie Cette asymeacutetrie drsquoinformation laisse le reacuteassureur dans lrsquoobligation de creacuteer son modegravele preacutedictif avec des donneacutees censureacutees (cf [2]) En pra-tique les reacuteassureurs tentent de compleacuteter les donneacutees censureacutees avec des donneacutees collecteacutees agrave partir de porte-feuilles similaires (parfois obtenues gracircce agrave un contrat de reacuteassurance proportionnelle couvrant des risques similaires drsquoune mecircme importance) Les subtiliteacutes relatives agrave lrsquoeacutevaluation des risques et la deacutetermination des primes de reacuteassurance varient en fonction du type de contrat et la meacutethodologie choisie (meacutethode par expeacuterience vs meacutethode par exposition etc [1]) Une autre source drsquoasymeacutetrie drsquoinformation tient dans le fait que les sinistres passeacutes sont souvent comptabi-liseacutes agrave leur valeur ldquodrsquoengagementrdquo (ie la valeur des indemniteacutes reacuteellement verseacutees plus une estimation rai-sonnable des indemniteacutes restant agrave verser) et celle-ci peut srsquoaveacuterer significativement diffeacuterente de la valeur

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finale des indemniteacutes Dans des secteurs drsquoactiviteacute ougrave le regraveglement des sinistres peut prendre de nombreuses anneacutees on comprend facilement que les reacuteassureurs ne peuvent pas compter exclusivement sur les don-neacutees concernant le montant reacuteel final des indemniteacutes verseacutees mais doivent eacutegalement prendre en compte la valeur (estimeacutee) des engagements dans lrsquoeacutelaboration de leurs modegraveles Cette situation pose de reacuteels deacutefis statistiques et peu de recherche theacuteorique existe sur le sujet actuellement (cf [2])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et InvestisseurDes actionnaires actuels ou potentiels des socieacuteteacutes drsquoassurance fondent leurs deacutecisions drsquoinvestir sur les chiffres financiers et commerciaux et des indicateurs de performance mais en geacuteneacuteral ces chiffres ne tra-duisent pas lrsquointeacutegraliteacute de la structure de risque des assureurs et reacuteassureurs Compte tenu des Solvency Capital Requirements une socieacuteteacute doit tenir compte du coucirct de lever et conserver ce capital Ce coucirct aura un impact sur nombre de deacutecisions de strateacutegie et de gestion y compris la deacutecision de recourir agrave la reacuteassu-rance Le taux du coucirct du capital est influenceacute non seulement par le profil du risque mais eacutegalement par la structure de lrsquoinformation Par conseacutequence le taux du coucirct du capital est bien le reacutesultat de lrsquooffre et la de-mande sur le marcheacute mais tient eacutegalement compte de regravegles et directives en matiegravere de reporting financier telle la constitution de reacuteserves pour pertes et pour sinistres survenus mais non encore deacuteclareacutes Pour une discussion drsquoun point de vue actuariel voir [514]

Un autre domaine de recherche qui srsquointeacuteresse acti-vement aux aspects pratiques de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation est la titrisation des risques drsquoassurance en particulier celui de catastrophes naturelles et plus reacutecemment le risque de longeacuteviteacute La titrisation trans-fegravere le risque drsquoassurance aux marcheacutes des capitaux et constitue donc un instrument particuliegraverement utile lorsqursquoil srsquoagit de risques de grande ampleur ayant de fortes correacutelations ougrave les contrats de reacuteassurance tradi-tionnels ne sont pas eacuteconomiquement viables compte tenu du coucirct monumental des capitaux Lrsquohistoire des produits de titrisation illustre parfaitement comment lrsquoeacutevolution des attitudes envers lrsquoasymeacutetrie drsquoinforma-tion (dans ce cas preacutecis entre eacutemetteur et investisseur) a modifieacute les produits et leur attractiviteacute Des deacuteclen-cheurs anciens baseacutes sur lrsquoexpeacuterience effective de pertes des compagnies individuelles et des indices sectoriels ont eacutevolueacute vers des deacuteclencheurs parameacutetriques cal-culeacutes en tenant compte de quantiteacutes physiques lieacutees

aux catastrophes comme la vitesse du vent la pression atmospheacuterique etc Alors que les deacuteclencheurs para-meacutetriques diminuent lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation (qui dans le cas des deacuteclencheurs speacutecifiques agrave chaque en-treprise eacutetait significative) ils augmentent le risque de base crsquoest-agrave-dire le risque que le deacuteclencheur ne reflegravete pas lrsquoexpeacuterience reacuteelle de lrsquoeacutemetteur ce qui reacuteduit lrsquoef-ficaciteacute du produit pour lrsquoeacutemetteur Comme on pou-vait srsquoy attendre lrsquoactiviteacute de ce marcheacute a connu une certaine volatiliteacute dans le temps avec une forte aug-mentation des volumes dans des peacuteriodes ougrave le mar-cheacute traditionnel de la reacuteassurance ne pouvait pas faire face agrave ce type de demande (cf [9 11]) La valorisation de ces produits se situe agrave la frontiegravere entre assurance et finance Crsquoest eacutegalement un sujet de recherche tregraves inteacuteressant sur le plan theacuteorique (cf [7 15 4 8] et [10 24])

Asymeacutetrie drsquoinformation entre Assureurs et ConcurrentsEnfin comme dans toute activiteacute eacuteconomique il existe une concurrence entre assureurs pour un nombre li-miteacute de clients (assureacutes) et il existe eacutegalement une asy-meacutetrie drsquoinformation naturelle entre assureurs concur-rents concernant le profil du risque lrsquoappreacuteciation des conditions marcheacute lrsquoapproche meacutethodologique du risque et la deacutetermination des primes Parmi des approches reacutecentes on peut citer la deacutetermination des primes drsquoassurance via une analyse fondeacutee sur la theacuteo-rie des jeux tenant compte drsquoune preacutevision de la poli-tique des primes des concurrents des comportements agrave risque des assureacutes et des contraintes reacuteglementaires en matiegravere de fonds propres (voir [13]) le tout dans un contexte drsquoinformations incomplegravetes

Lrsquoobjectif de ce court chapitre eacutetait de mettre en lumiegravere plusieurs domaines de recherche dans les sciences actuarielles ougrave lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation joue directement ou indirec-tement un rocircle important Cette liste est forceacutement incomplegravete mais elle souligne lrsquoimportance de la modeacutelisation drsquoinforma-tion dans le secteur de lrsquoassurance et de la reacuteassurance qui est eacutegalement lrsquoobjet de tregraves nombreux projets de recherche en cours

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drsquohansjoumlrg Albrecher sur

wwwinformationinfinanceandinsuranceorg

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bibliographie[1] h albrecher reinsurance in encyclopedia of Quantitative Finance pages 1539-1543 2004

[2] h albrecher J Beirlant and J Teugels reinsurance actuarial and statistical aspects Wiley chiches-ter in preparation

[3] h albrecher and D Daily-amir on competitive non-life insurance pricing under incomplete informa-tion Proc sixth int conference on risk analysis Barcelona May 26-29 pages 76-812015

[4] h albrecher J hartinger and r F Tichy QMc techniques for caT bond pricing Monte carlo Methods appl 10(3-4)197-211 2004

[5] P artzner and K-T eisele supervisory insurance accounting mathematics for provision| and solvency capital requirements astin Bull 40(2)569-585 2010

[6] G M ayuso M and a Perez-Marin Time and distance to first accident and driving patterns of young drivers with pay-as-you-drive insurance accident analysis and Prevention 73125-131 2014

[7] s h cox J r Fairchild and h W Pedersen economic aspects of securitization of risk astin Bull 30(1)157-193 2000

[8] s h cox Y lin and h Pedersen Mortality risk modeling applications to insurance securitization insurance Math econom 46(1)242-253 2010

[9] c culp structured finance and insurance - the arT of managing capital and risk Wiley chichester 2011

[10] D cummins and P Barrieu innovations in insurance markets hybrid and securitized risk-transfer solutions in handbook of insurance ch20547-602 2013

[11] D cummins and P Trainar securitization insurance and reinsurance Journal of risk and insurance Vol76(3) 463-492 2009

[12] c Donnelly M Guilleacuten and J P Nielsen Bringing cost transparency to the life annuity market insu-rance Math econom 5614-27 2014

[13] c Dutang h albrecher and s loisel competition among non-life insurers under solvency constraints a game-theoretic approach european J oper res 231(3)702-711 2013

[14] K-T eisele and P artzner Multiperiod insurance supervision top-down models eur actuar J 1(1)107-130 2011

[15] P embrechts actuarial versus financial pricing of insurance The Journal of risk Finance 1(1)17-26 2000

[16] s Fier and a liebenberg life insurance lapse behavior North american actuarial Journal 17(2) 153-167 2013

[17] l Guelman M Guilleacuten and a M Peacuterez-Marin a survey of personalized treatment models for pricing strategies in insurance insurance Math econom 5868-76 2014

[18] T ippisch Telematics Data in Motor insurance creating Value by understanding the impact of acci-dents on Vehicle use Dissertation university of st Gallen 2010

[19] T Moenig and D Bauer revisiting the risk-neutral approach to optimal policyholder behavior a study of withdrawal guarantees in variable annuities review of Finance to appear 2015

[20] J Pinquet M Guilleacuten and M ayuso commitment and lapse behavior in long-term insurance a case study Journal of risk and insurance 78(4) 983-1002 2011

[21] N Zhu and D Bauer coherent pricing of life settlements under asymmetric information Journal of risk and insurance 80(3) 827-851 2013

[22] P Zweifel and W Manning Moral hazard and consumer incentives in health care handbook of health economics 1409-459 2000

[23] h schmeiser T stoumlrmer and J Wagner unisex insurance Pricing consumersrsquo Perception and Mar-ket implications The Geneva Papers on risk and insurance ndash issues and Practice 39(2)322-350 2014

[24] J lorson and J Wagner The Pricing of hedging longevity risk with the help of annuity securitiza-tions an application to the German Market Journal of risk Finance 15(4)385-416 2014

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tifier on cherche la probabiliteacute pour que ces risques se reacutealisent en partant drsquoobservations du reacuteel en geacuteneacuteral de donneacutees historiques Pour chaque risque agrave eacutevaluer le problegraveme classique reacuteside dans la deacutetermination de la pertinence des donneacutees et de leur degreacute de perti-nence Une difficulteacute suppleacutementaire reacuteside dans le fait que la nature des risques peut eacutevoluer dans le temps et que pour appreacutehender cette eacutevolution lrsquoon doit pouvoir faire appel agrave des meacutethodes statistiques capables drsquoidentifier les eacuteleacutements non-stationnaires inclus dans les seacuteries de donneacutees et agrave des informations reacuteelles connexes dont on dispose (modifications des clauses contractuelles contexte environnemental etc)

De longues anneacutees drsquoexpeacuterience nous ont appris agrave qualifier les diffeacuterents types de risque et agrave tirer des re-lations causales entre eux Ainsi nous avons pu deacuteve-lopper les modegraveles qui servent de base agrave lrsquoeacutevaluation de risques associeacutes

Bien qursquoen geacuteneacuteral les modeacutelisateurs soient conscients des limites de la modeacutelisation la principale motiva-tion derriegravere cette approche est la conviction qursquoil est possible de quantifier preacuteciseacutement les risques et que toute imperfection ou lacune dans un modegravele reacutesulte de donneacutees insuffisantes ou plus geacuteneacuteralement drsquoinformations insuffisantes concernant la nature des risques et les relations entre eux On pourrait dire que le deacuteveloppement de modegraveles de risque par les assu-reurs constitue une tentative de reacuteduire lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation en geacuteneacuteral et de lrsquoinformation dispo-nible pour nous

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureacutes et AssureurQuand un assureacute et une compagnie drsquoassurance concluent un contrat au terme duquel lrsquoassureacute paie une prime (baseacutee sur un calcul deacuteterministe) contre des si-nistres speacutecifieacutes dans le contrat il est clair que chaque partie dispose drsquoinformations diffeacuterentes mais dans ce cas lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation existe des deux cocircteacutes En principe la compagnie drsquoassurance dispose de plus drsquoexpeacuterience des risques agrave assurer (modegraveles idoines) ce qui lui permet (en y rajoutant la mutualisation des risques) de geacuterer efficacement les risques agrave assurer bien que pour certains produits les assureacutes preacutefeacutereraient plus de transparence (voir par exemple [12])

Lrsquoassureacute quant agrave lui dispose dans la plupart des sec-teurs de beaucoup plus drsquoinformation concernant son profil de risque que ce qursquoil communique agrave

lrsquoassureur et il pourrait mecircme en influencer le reacutesul-tat par le biais de son comportement Un exemple en est lrsquoassurance maladie ougrave il existe une asymeacutetrie drsquoinformation intrinsegraveque concernant lrsquoeacutetat de santeacute de lrsquoassureacute (cf [22] et [19 21] pour des eacutetudes sur certains types drsquoassurance-vie) Aussi telle asymeacutetrie peut ecirctre la conseacutequence de nouvelles reacuteglementations (cf [23]) Le secteur de lrsquoassurance automobile a une longue pratique de reacuteduction de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation concernant le profil de risque des assureacutes via le systegraveme de bonus-malus qui a lrsquoavantage suppleacute-mentaire drsquoinciter les assureacutes agrave conduire prudemment La tendance actuelle est de pousser le dispositif plus loin encore avec la collecte drsquoinformations reacuteelles sur la conduite des assureacutes via des systegravemes teacuteleacutematiques embarqueacutes(cf [18 6]) Crsquoest une excellente illustra-tion de comment une quantiteacute importante de don-neacutees suppleacutementaires peut ecirctre et sera certainement utiliseacutee pour concevoir les futurs contrats drsquoassurance (une tendance parfois appeleacutee Le Big Data dans lrsquoAs-surance) Lrsquoexploitation des donneacutees inclut lrsquoanalyse approfondie des eacutecarts de comportement des assureacutes (cf [16 20]) et le deacuteveloppement drsquoapplications se servant de ces informations agrave des fins commerciales (cf [17])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et ReacuteassureurComme les assureurs nrsquoaiment pas partager des don-neacutees et statistiques concernant les sinistres dans le cas de nombreux contrats de reacuteassurance non proportion-nels lrsquoassureur ne communique au reacuteassureur qursquoune partie des donneacutees concerneacutees crsquoest-agrave-dire seulement les donneacutees sur les sinistres engageant ou pouvant en-gager la garantie Cette asymeacutetrie drsquoinformation laisse le reacuteassureur dans lrsquoobligation de creacuteer son modegravele preacutedictif avec des donneacutees censureacutees (cf [2]) En pra-tique les reacuteassureurs tentent de compleacuteter les donneacutees censureacutees avec des donneacutees collecteacutees agrave partir de porte-feuilles similaires (parfois obtenues gracircce agrave un contrat de reacuteassurance proportionnelle couvrant des risques similaires drsquoune mecircme importance) Les subtiliteacutes relatives agrave lrsquoeacutevaluation des risques et la deacutetermination des primes de reacuteassurance varient en fonction du type de contrat et la meacutethodologie choisie (meacutethode par expeacuterience vs meacutethode par exposition etc [1]) Une autre source drsquoasymeacutetrie drsquoinformation tient dans le fait que les sinistres passeacutes sont souvent comptabi-liseacutes agrave leur valeur ldquodrsquoengagementrdquo (ie la valeur des indemniteacutes reacuteellement verseacutees plus une estimation rai-sonnable des indemniteacutes restant agrave verser) et celle-ci peut srsquoaveacuterer significativement diffeacuterente de la valeur

14 les cahiers louis Bachelier

finale des indemniteacutes Dans des secteurs drsquoactiviteacute ougrave le regraveglement des sinistres peut prendre de nombreuses anneacutees on comprend facilement que les reacuteassureurs ne peuvent pas compter exclusivement sur les don-neacutees concernant le montant reacuteel final des indemniteacutes verseacutees mais doivent eacutegalement prendre en compte la valeur (estimeacutee) des engagements dans lrsquoeacutelaboration de leurs modegraveles Cette situation pose de reacuteels deacutefis statistiques et peu de recherche theacuteorique existe sur le sujet actuellement (cf [2])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et InvestisseurDes actionnaires actuels ou potentiels des socieacuteteacutes drsquoassurance fondent leurs deacutecisions drsquoinvestir sur les chiffres financiers et commerciaux et des indicateurs de performance mais en geacuteneacuteral ces chiffres ne tra-duisent pas lrsquointeacutegraliteacute de la structure de risque des assureurs et reacuteassureurs Compte tenu des Solvency Capital Requirements une socieacuteteacute doit tenir compte du coucirct de lever et conserver ce capital Ce coucirct aura un impact sur nombre de deacutecisions de strateacutegie et de gestion y compris la deacutecision de recourir agrave la reacuteassu-rance Le taux du coucirct du capital est influenceacute non seulement par le profil du risque mais eacutegalement par la structure de lrsquoinformation Par conseacutequence le taux du coucirct du capital est bien le reacutesultat de lrsquooffre et la de-mande sur le marcheacute mais tient eacutegalement compte de regravegles et directives en matiegravere de reporting financier telle la constitution de reacuteserves pour pertes et pour sinistres survenus mais non encore deacuteclareacutes Pour une discussion drsquoun point de vue actuariel voir [514]

Un autre domaine de recherche qui srsquointeacuteresse acti-vement aux aspects pratiques de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation est la titrisation des risques drsquoassurance en particulier celui de catastrophes naturelles et plus reacutecemment le risque de longeacuteviteacute La titrisation trans-fegravere le risque drsquoassurance aux marcheacutes des capitaux et constitue donc un instrument particuliegraverement utile lorsqursquoil srsquoagit de risques de grande ampleur ayant de fortes correacutelations ougrave les contrats de reacuteassurance tradi-tionnels ne sont pas eacuteconomiquement viables compte tenu du coucirct monumental des capitaux Lrsquohistoire des produits de titrisation illustre parfaitement comment lrsquoeacutevolution des attitudes envers lrsquoasymeacutetrie drsquoinforma-tion (dans ce cas preacutecis entre eacutemetteur et investisseur) a modifieacute les produits et leur attractiviteacute Des deacuteclen-cheurs anciens baseacutes sur lrsquoexpeacuterience effective de pertes des compagnies individuelles et des indices sectoriels ont eacutevolueacute vers des deacuteclencheurs parameacutetriques cal-culeacutes en tenant compte de quantiteacutes physiques lieacutees

aux catastrophes comme la vitesse du vent la pression atmospheacuterique etc Alors que les deacuteclencheurs para-meacutetriques diminuent lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation (qui dans le cas des deacuteclencheurs speacutecifiques agrave chaque en-treprise eacutetait significative) ils augmentent le risque de base crsquoest-agrave-dire le risque que le deacuteclencheur ne reflegravete pas lrsquoexpeacuterience reacuteelle de lrsquoeacutemetteur ce qui reacuteduit lrsquoef-ficaciteacute du produit pour lrsquoeacutemetteur Comme on pou-vait srsquoy attendre lrsquoactiviteacute de ce marcheacute a connu une certaine volatiliteacute dans le temps avec une forte aug-mentation des volumes dans des peacuteriodes ougrave le mar-cheacute traditionnel de la reacuteassurance ne pouvait pas faire face agrave ce type de demande (cf [9 11]) La valorisation de ces produits se situe agrave la frontiegravere entre assurance et finance Crsquoest eacutegalement un sujet de recherche tregraves inteacuteressant sur le plan theacuteorique (cf [7 15 4 8] et [10 24])

Asymeacutetrie drsquoinformation entre Assureurs et ConcurrentsEnfin comme dans toute activiteacute eacuteconomique il existe une concurrence entre assureurs pour un nombre li-miteacute de clients (assureacutes) et il existe eacutegalement une asy-meacutetrie drsquoinformation naturelle entre assureurs concur-rents concernant le profil du risque lrsquoappreacuteciation des conditions marcheacute lrsquoapproche meacutethodologique du risque et la deacutetermination des primes Parmi des approches reacutecentes on peut citer la deacutetermination des primes drsquoassurance via une analyse fondeacutee sur la theacuteo-rie des jeux tenant compte drsquoune preacutevision de la poli-tique des primes des concurrents des comportements agrave risque des assureacutes et des contraintes reacuteglementaires en matiegravere de fonds propres (voir [13]) le tout dans un contexte drsquoinformations incomplegravetes

Lrsquoobjectif de ce court chapitre eacutetait de mettre en lumiegravere plusieurs domaines de recherche dans les sciences actuarielles ougrave lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation joue directement ou indirec-tement un rocircle important Cette liste est forceacutement incomplegravete mais elle souligne lrsquoimportance de la modeacutelisation drsquoinforma-tion dans le secteur de lrsquoassurance et de la reacuteassurance qui est eacutegalement lrsquoobjet de tregraves nombreux projets de recherche en cours

retrouvez lrsquoarticle inteacutegral

drsquohansjoumlrg Albrecher sur

wwwinformationinfinanceandinsuranceorg

les cahiers louis Bachelier 15

bibliographie[1] h albrecher reinsurance in encyclopedia of Quantitative Finance pages 1539-1543 2004

[2] h albrecher J Beirlant and J Teugels reinsurance actuarial and statistical aspects Wiley chiches-ter in preparation

[3] h albrecher and D Daily-amir on competitive non-life insurance pricing under incomplete informa-tion Proc sixth int conference on risk analysis Barcelona May 26-29 pages 76-812015

[4] h albrecher J hartinger and r F Tichy QMc techniques for caT bond pricing Monte carlo Methods appl 10(3-4)197-211 2004

[5] P artzner and K-T eisele supervisory insurance accounting mathematics for provision| and solvency capital requirements astin Bull 40(2)569-585 2010

[6] G M ayuso M and a Perez-Marin Time and distance to first accident and driving patterns of young drivers with pay-as-you-drive insurance accident analysis and Prevention 73125-131 2014

[7] s h cox J r Fairchild and h W Pedersen economic aspects of securitization of risk astin Bull 30(1)157-193 2000

[8] s h cox Y lin and h Pedersen Mortality risk modeling applications to insurance securitization insurance Math econom 46(1)242-253 2010

[9] c culp structured finance and insurance - the arT of managing capital and risk Wiley chichester 2011

[10] D cummins and P Barrieu innovations in insurance markets hybrid and securitized risk-transfer solutions in handbook of insurance ch20547-602 2013

[11] D cummins and P Trainar securitization insurance and reinsurance Journal of risk and insurance Vol76(3) 463-492 2009

[12] c Donnelly M Guilleacuten and J P Nielsen Bringing cost transparency to the life annuity market insu-rance Math econom 5614-27 2014

[13] c Dutang h albrecher and s loisel competition among non-life insurers under solvency constraints a game-theoretic approach european J oper res 231(3)702-711 2013

[14] K-T eisele and P artzner Multiperiod insurance supervision top-down models eur actuar J 1(1)107-130 2011

[15] P embrechts actuarial versus financial pricing of insurance The Journal of risk Finance 1(1)17-26 2000

[16] s Fier and a liebenberg life insurance lapse behavior North american actuarial Journal 17(2) 153-167 2013

[17] l Guelman M Guilleacuten and a M Peacuterez-Marin a survey of personalized treatment models for pricing strategies in insurance insurance Math econom 5868-76 2014

[18] T ippisch Telematics Data in Motor insurance creating Value by understanding the impact of acci-dents on Vehicle use Dissertation university of st Gallen 2010

[19] T Moenig and D Bauer revisiting the risk-neutral approach to optimal policyholder behavior a study of withdrawal guarantees in variable annuities review of Finance to appear 2015

[20] J Pinquet M Guilleacuten and M ayuso commitment and lapse behavior in long-term insurance a case study Journal of risk and insurance 78(4) 983-1002 2011

[21] N Zhu and D Bauer coherent pricing of life settlements under asymmetric information Journal of risk and insurance 80(3) 827-851 2013

[22] P Zweifel and W Manning Moral hazard and consumer incentives in health care handbook of health economics 1409-459 2000

[23] h schmeiser T stoumlrmer and J Wagner unisex insurance Pricing consumersrsquo Perception and Mar-ket implications The Geneva Papers on risk and insurance ndash issues and Practice 39(2)322-350 2014

[24] J lorson and J Wagner The Pricing of hedging longevity risk with the help of annuity securitiza-tions an application to the German Market Journal of risk Finance 15(4)385-416 2014

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finale des indemniteacutes Dans des secteurs drsquoactiviteacute ougrave le regraveglement des sinistres peut prendre de nombreuses anneacutees on comprend facilement que les reacuteassureurs ne peuvent pas compter exclusivement sur les don-neacutees concernant le montant reacuteel final des indemniteacutes verseacutees mais doivent eacutegalement prendre en compte la valeur (estimeacutee) des engagements dans lrsquoeacutelaboration de leurs modegraveles Cette situation pose de reacuteels deacutefis statistiques et peu de recherche theacuteorique existe sur le sujet actuellement (cf [2])

Asymeacutetrie drsquoInformation entre Assureur et InvestisseurDes actionnaires actuels ou potentiels des socieacuteteacutes drsquoassurance fondent leurs deacutecisions drsquoinvestir sur les chiffres financiers et commerciaux et des indicateurs de performance mais en geacuteneacuteral ces chiffres ne tra-duisent pas lrsquointeacutegraliteacute de la structure de risque des assureurs et reacuteassureurs Compte tenu des Solvency Capital Requirements une socieacuteteacute doit tenir compte du coucirct de lever et conserver ce capital Ce coucirct aura un impact sur nombre de deacutecisions de strateacutegie et de gestion y compris la deacutecision de recourir agrave la reacuteassu-rance Le taux du coucirct du capital est influenceacute non seulement par le profil du risque mais eacutegalement par la structure de lrsquoinformation Par conseacutequence le taux du coucirct du capital est bien le reacutesultat de lrsquooffre et la de-mande sur le marcheacute mais tient eacutegalement compte de regravegles et directives en matiegravere de reporting financier telle la constitution de reacuteserves pour pertes et pour sinistres survenus mais non encore deacuteclareacutes Pour une discussion drsquoun point de vue actuariel voir [514]

Un autre domaine de recherche qui srsquointeacuteresse acti-vement aux aspects pratiques de lrsquoasymeacutetrie drsquoinfor-mation est la titrisation des risques drsquoassurance en particulier celui de catastrophes naturelles et plus reacutecemment le risque de longeacuteviteacute La titrisation trans-fegravere le risque drsquoassurance aux marcheacutes des capitaux et constitue donc un instrument particuliegraverement utile lorsqursquoil srsquoagit de risques de grande ampleur ayant de fortes correacutelations ougrave les contrats de reacuteassurance tradi-tionnels ne sont pas eacuteconomiquement viables compte tenu du coucirct monumental des capitaux Lrsquohistoire des produits de titrisation illustre parfaitement comment lrsquoeacutevolution des attitudes envers lrsquoasymeacutetrie drsquoinforma-tion (dans ce cas preacutecis entre eacutemetteur et investisseur) a modifieacute les produits et leur attractiviteacute Des deacuteclen-cheurs anciens baseacutes sur lrsquoexpeacuterience effective de pertes des compagnies individuelles et des indices sectoriels ont eacutevolueacute vers des deacuteclencheurs parameacutetriques cal-culeacutes en tenant compte de quantiteacutes physiques lieacutees

aux catastrophes comme la vitesse du vent la pression atmospheacuterique etc Alors que les deacuteclencheurs para-meacutetriques diminuent lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation (qui dans le cas des deacuteclencheurs speacutecifiques agrave chaque en-treprise eacutetait significative) ils augmentent le risque de base crsquoest-agrave-dire le risque que le deacuteclencheur ne reflegravete pas lrsquoexpeacuterience reacuteelle de lrsquoeacutemetteur ce qui reacuteduit lrsquoef-ficaciteacute du produit pour lrsquoeacutemetteur Comme on pou-vait srsquoy attendre lrsquoactiviteacute de ce marcheacute a connu une certaine volatiliteacute dans le temps avec une forte aug-mentation des volumes dans des peacuteriodes ougrave le mar-cheacute traditionnel de la reacuteassurance ne pouvait pas faire face agrave ce type de demande (cf [9 11]) La valorisation de ces produits se situe agrave la frontiegravere entre assurance et finance Crsquoest eacutegalement un sujet de recherche tregraves inteacuteressant sur le plan theacuteorique (cf [7 15 4 8] et [10 24])

Asymeacutetrie drsquoinformation entre Assureurs et ConcurrentsEnfin comme dans toute activiteacute eacuteconomique il existe une concurrence entre assureurs pour un nombre li-miteacute de clients (assureacutes) et il existe eacutegalement une asy-meacutetrie drsquoinformation naturelle entre assureurs concur-rents concernant le profil du risque lrsquoappreacuteciation des conditions marcheacute lrsquoapproche meacutethodologique du risque et la deacutetermination des primes Parmi des approches reacutecentes on peut citer la deacutetermination des primes drsquoassurance via une analyse fondeacutee sur la theacuteo-rie des jeux tenant compte drsquoune preacutevision de la poli-tique des primes des concurrents des comportements agrave risque des assureacutes et des contraintes reacuteglementaires en matiegravere de fonds propres (voir [13]) le tout dans un contexte drsquoinformations incomplegravetes

Lrsquoobjectif de ce court chapitre eacutetait de mettre en lumiegravere plusieurs domaines de recherche dans les sciences actuarielles ougrave lrsquoasymeacutetrie drsquoinformation joue directement ou indirec-tement un rocircle important Cette liste est forceacutement incomplegravete mais elle souligne lrsquoimportance de la modeacutelisation drsquoinforma-tion dans le secteur de lrsquoassurance et de la reacuteassurance qui est eacutegalement lrsquoobjet de tregraves nombreux projets de recherche en cours

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wwwinformationinfinanceandinsuranceorg

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bibliographie[1] h albrecher reinsurance in encyclopedia of Quantitative Finance pages 1539-1543 2004

[2] h albrecher J Beirlant and J Teugels reinsurance actuarial and statistical aspects Wiley chiches-ter in preparation

[3] h albrecher and D Daily-amir on competitive non-life insurance pricing under incomplete informa-tion Proc sixth int conference on risk analysis Barcelona May 26-29 pages 76-812015

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[5] P artzner and K-T eisele supervisory insurance accounting mathematics for provision| and solvency capital requirements astin Bull 40(2)569-585 2010

[6] G M ayuso M and a Perez-Marin Time and distance to first accident and driving patterns of young drivers with pay-as-you-drive insurance accident analysis and Prevention 73125-131 2014

[7] s h cox J r Fairchild and h W Pedersen economic aspects of securitization of risk astin Bull 30(1)157-193 2000

[8] s h cox Y lin and h Pedersen Mortality risk modeling applications to insurance securitization insurance Math econom 46(1)242-253 2010

[9] c culp structured finance and insurance - the arT of managing capital and risk Wiley chichester 2011

[10] D cummins and P Barrieu innovations in insurance markets hybrid and securitized risk-transfer solutions in handbook of insurance ch20547-602 2013

[11] D cummins and P Trainar securitization insurance and reinsurance Journal of risk and insurance Vol76(3) 463-492 2009

[12] c Donnelly M Guilleacuten and J P Nielsen Bringing cost transparency to the life annuity market insu-rance Math econom 5614-27 2014

[13] c Dutang h albrecher and s loisel competition among non-life insurers under solvency constraints a game-theoretic approach european J oper res 231(3)702-711 2013

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[17] l Guelman M Guilleacuten and a M Peacuterez-Marin a survey of personalized treatment models for pricing strategies in insurance insurance Math econom 5868-76 2014

[18] T ippisch Telematics Data in Motor insurance creating Value by understanding the impact of acci-dents on Vehicle use Dissertation university of st Gallen 2010

[19] T Moenig and D Bauer revisiting the risk-neutral approach to optimal policyholder behavior a study of withdrawal guarantees in variable annuities review of Finance to appear 2015

[20] J Pinquet M Guilleacuten and M ayuso commitment and lapse behavior in long-term insurance a case study Journal of risk and insurance 78(4) 983-1002 2011

[21] N Zhu and D Bauer coherent pricing of life settlements under asymmetric information Journal of risk and insurance 80(3) 827-851 2013

[22] P Zweifel and W Manning Moral hazard and consumer incentives in health care handbook of health economics 1409-459 2000

[23] h schmeiser T stoumlrmer and J Wagner unisex insurance Pricing consumersrsquo Perception and Mar-ket implications The Geneva Papers on risk and insurance ndash issues and Practice 39(2)322-350 2014

[24] J lorson and J Wagner The Pricing of hedging longevity risk with the help of annuity securitiza-tions an application to the German Market Journal of risk Finance 15(4)385-416 2014

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bibliographie[1] h albrecher reinsurance in encyclopedia of Quantitative Finance pages 1539-1543 2004

[2] h albrecher J Beirlant and J Teugels reinsurance actuarial and statistical aspects Wiley chiches-ter in preparation

[3] h albrecher and D Daily-amir on competitive non-life insurance pricing under incomplete informa-tion Proc sixth int conference on risk analysis Barcelona May 26-29 pages 76-812015

[4] h albrecher J hartinger and r F Tichy QMc techniques for caT bond pricing Monte carlo Methods appl 10(3-4)197-211 2004

[5] P artzner and K-T eisele supervisory insurance accounting mathematics for provision| and solvency capital requirements astin Bull 40(2)569-585 2010

[6] G M ayuso M and a Perez-Marin Time and distance to first accident and driving patterns of young drivers with pay-as-you-drive insurance accident analysis and Prevention 73125-131 2014

[7] s h cox J r Fairchild and h W Pedersen economic aspects of securitization of risk astin Bull 30(1)157-193 2000

[8] s h cox Y lin and h Pedersen Mortality risk modeling applications to insurance securitization insurance Math econom 46(1)242-253 2010

[9] c culp structured finance and insurance - the arT of managing capital and risk Wiley chichester 2011

[10] D cummins and P Barrieu innovations in insurance markets hybrid and securitized risk-transfer solutions in handbook of insurance ch20547-602 2013

[11] D cummins and P Trainar securitization insurance and reinsurance Journal of risk and insurance Vol76(3) 463-492 2009

[12] c Donnelly M Guilleacuten and J P Nielsen Bringing cost transparency to the life annuity market insu-rance Math econom 5614-27 2014

[13] c Dutang h albrecher and s loisel competition among non-life insurers under solvency constraints a game-theoretic approach european J oper res 231(3)702-711 2013

[14] K-T eisele and P artzner Multiperiod insurance supervision top-down models eur actuar J 1(1)107-130 2011

[15] P embrechts actuarial versus financial pricing of insurance The Journal of risk Finance 1(1)17-26 2000

[16] s Fier and a liebenberg life insurance lapse behavior North american actuarial Journal 17(2) 153-167 2013

[17] l Guelman M Guilleacuten and a M Peacuterez-Marin a survey of personalized treatment models for pricing strategies in insurance insurance Math econom 5868-76 2014

[18] T ippisch Telematics Data in Motor insurance creating Value by understanding the impact of acci-dents on Vehicle use Dissertation university of st Gallen 2010

[19] T Moenig and D Bauer revisiting the risk-neutral approach to optimal policyholder behavior a study of withdrawal guarantees in variable annuities review of Finance to appear 2015

[20] J Pinquet M Guilleacuten and M ayuso commitment and lapse behavior in long-term insurance a case study Journal of risk and insurance 78(4) 983-1002 2011

[21] N Zhu and D Bauer coherent pricing of life settlements under asymmetric information Journal of risk and insurance 80(3) 827-851 2013

[22] P Zweifel and W Manning Moral hazard and consumer incentives in health care handbook of health economics 1409-459 2000

[23] h schmeiser T stoumlrmer and J Wagner unisex insurance Pricing consumersrsquo Perception and Mar-ket implications The Geneva Papers on risk and insurance ndash issues and Practice 39(2)322-350 2014

[24] J lorson and J Wagner The Pricing of hedging longevity risk with the help of annuity securitiza-tions an application to the German Market Journal of risk Finance 15(4)385-416 2014

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