introduction À la bibliologie

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BIBLIOLOGIE I SEMINAIRE DE FORMATION D’EDUCATION CHRETIENNE

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Introductions aux livres de la bible

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Page 1: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

BIBLIOLOGIE I

SEMINAIRE DE FORMATION D’EDUCATION CHRETIENNE

Avis,

Page 2: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

Ce présent fascicule est le fruit des recherches combinées en vue d’aider l’étudiant à découvrir l’essentiel de la bibliologie et de l’Ancien Testament. L’étude de la bible est complexe et vaste, en ce sens que des années d’études ne suffisent pas à tout cerner son message vivant et eternel.

La difficulté pour nous était de disposer sur quelques feuilles de papier les différentes idées et concepts des spécialistes de la bible et satisfaire du même coup la compréhension totale de l’étudiant. Nous espérons que cela sera possible grâce à l’aide su Saint Esprit.

Forts de ressources adéquates facilitant la qualité de notre enseignement, nous croyons que chaque étudiant de ce "Séminaire de formation" a en main un outil de grand calibre au point de vue de crédibilité et d’authenticité.

Nous disposons d’une bibliothèque virtuelle afin que l’étudiant puisse faire des recherches appropriées. Cette bibliothèque est munie des centaines de livres relatifs à toutes les facettes d’études de la bible.

Nous espérons que le Seigneur nous utilise par cette entreprise pour l’avancement de son règne et l’édification de son église.

Bonne étude a tous !

La direction.

INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

2 Séminaire de formation d’Education Chrétienne – Evangelical Ministry Vision of Salem 2013©

Page 3: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

(D’après Paul Enns in Introduction a la Théologie, Editions Clé, France, 2009, pp 783)

Signification du mot « Bible »

Le mot bible provient du grec biblion, qui signifie « livre » ou « rouleau ». Ce mot vient de byblos, qui désignait le papyrus, plante qui poussait dans les marais ou sur les berges des rivières et des fleuves, surtout le long du Nil. Le support sur lequel on écrivait était fait de papyrus. On le fabriquait en découpant la moelle de la plante en bandes d’une trentaine de centimètres, qu’on laissait sécher au soleil. Ces bandes étaient ensuite étendues en rangées horizontales, recouvertes de nouvelles rangées verticales, le tout collé pour obtenir un entrecroisement, un peu à la façon dont le contreplaqué est fabriqué de nos jours. Les rangées horizontales étaient plus lisses et elles étaient utilisées pour l’écriture. Les sections de ces bandes étaient ensuite collées ensemble pour former des rouleaux qui pouvaient atteindre neuf mètres de long.

Finalement, la forme plurielle biblia a été utilisée par des chrétiens de langue latine, pour dénoter tous les livres de l’Ancien et du Nouveau Testaments.

Signification du mot « Écriture »

Le mot traduit par « Écriture » vient du mot grec graphe, qui signifie tout simplement « écrit ». Dans l’Ancien Testament, ces écrits jouissaient d’une grande autorité (par ex. 2R 14:6; 2Ch 23:18; Esd 3:2; Né 10:34). Les « écrits » de l’Ancien Testament ont finalement été répartis en trois groupes appelés la Loi, les Prophètes, et les Écrits (ou Psaumes) et ils constituaient les 39 livres de l’Ancien Testament. Ces écrits - l’Écriture - ont été réunis officiellement dans le canon de l’Ancien Testament.

Dans le Nouveau Testament, le verbe grec grapho est utilisé environ 90 fois en rapport avec la Bible, alors que le nom graphe est utilisé 51 fois dans le Nouveau Testament, presque exclusivement pour parler de l’Écriture. Dans le Nouveau Testament les désignations varient : « les Écritures » désignent collectivement toutes les parties de l’Écriture (par ex. Mt 21:42; 22:29; 26:54; Lu 24:27, 32, 45; Jn 5:39; Ro 15:4; 2P 3:16) ou des parties précises de l’Écriture (Mr 12:10; 15:28; Jn 13:18; 19:24, 36; Ac 1:16; 8:35; Ro 11:2; 2Ti 3:16) ; « l’Écriture dit » ce qui revient pratiquement à citer Dieu (par ex. Ro 4:3; 9:17; 10:11; Ga 4:30; 1Ti 5:18). On les appelle aussi les « Saintes Écritures » (Ro 1:2) et « les saintes lettres » (en grec, hiera grammata, 2Ti 3:15). Le passage classique de 2Timothée 3:16 souligne que ces écrits ne sont pas des textes ordinaires mais qu’ils sont réellement « inspirés de Dieu » et en tant que tels, ils sont empreints d’autorité et ce qu’ils enseignent est infaillible

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ORIGINE DIVINE DE LA BIBLE

Revendications de la Bible

Il existe beaucoup de preuves que la Bible est un livre totalement exceptionnel, tout à fait différent des autres ouvrages. Les affirmations uniques qu’on trouve dans la Bible elle-même témoignent de son caractère inhabituel. La Bible déclare environ 3 800 fois : « Dieu a dit » ou « la parole de l’Éternel » (par ex. Ex 14:1; 20:1; Lé 4:1; No 4:1; De 4:2; 32:48; Esa 1:10, 24; Jér 1:11; Ez 1:3 ; etc.). Paul reconnaît aussi que les choses qu’il écrivait étaient les commandements du Seigneur (1Co 14:37), et ils étaient reconnus comme tels par les croyants (1Th 2:13). Pierre proclamait la certitude de l’Écriture et la nécessité de prêter attention à la Parole inaltérable et sûre de Dieu (2P 1:16-21). Jean reconnaissait également que ses enseignements venaient de Dieu ; les rejeter revenait donc à rejeter Dieu (1Jn 4:6).

Continuité de la Bible

L’origine divine de la Bible se voit encore lorsque l’on considère la continuité de ses enseignements, malgré la nature inhabituelle de sa composition. Elle est distincte des autres écrits religieux. Par exemple, le Coran islamique a été compilé par un seul individu, Zaid ibn Thabit, sous la surveillance du beau-père de Mohammed, Abu-Bekr. De plus, en 650 apr. J.-C., un groupe d’érudits arabes en a produit une version unifiée et a détruit les copies différentes pour préserver l’unité du Coran. Au contraire, la Bible a été écrite par 40 auteurs différents qui avaient des vocations différentes. Par exemple, il y avait parmi ces auteurs Moïse, un chef politique ; Josué, un chef militaire ; David, un berger ; Salomon, un roi ; Amos, un gardien de troupeau et un cultivateur de sycomores ; Daniel, un premier ministre ; Matthieu, un percepteur d’impôts ; Luc, un médecin ; Paul, un rabbin et Pierre, un pêcheur.

De plus, la Bible n’a pas été seulement rédigée par différents auteurs mais elle a aussi été rédigée à divers endroits et sous diverses circonstances. En réalité, elle a été écrite sur trois continents : l’Europe, l’Asie, et l’Afrique. Paul a écrit de la cellule d’une prison à Rome et aussi de la ville de Corinthe - toutes les deux en Europe ; Jérémie (et peut-être Moïse) ont écrit d’Égypte, en Afrique ; la plupart des autres livres ont été écrits en Asie. Moïse a probablement écrit dans le désert, David a composé ses psaumes dans la campagne, Salomon a médité ses proverbes dans la cour royale, Jean a écrit alors qu’il avait été banni sur l’île de Patmos ; quant à Paul, il a écrit cinq de ses épîtres en prison.

Il est clair que nombre de ces auteurs ne connaissaient pas les autres auteurs de l’Écriture ni n’étaient familiers des autres écrits, attendu que ces auteurs ont écrit sur une période de plus de 1500 ans ; et pourtant la Bible forme un tout merveilleusement unifié. Il n’y a pas de contradictions ni d’incohérences dans ses pages. Le Saint-Esprit est l’unificateur des 66 livres et

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a présidé à leur cohérence harmonieuse. Ensemble, ces livres enseignent la Trinité de Dieu, la divinité de Jésus-Christ, la personnalité du Saint-Esprit, la chute et la dépravation de l’homme, de même que le salut par la grâce. Il devient vite évident qu’aucun être humain n’aurait pu orchestrer l’harmonie des enseignements de l’Écriture. Seule la paternité divine de la Bible peut expliquer un tel miracle.

RÉVÉLATION DIVINE DE LA BIBLE

Définition de la révélation

Le mot révélation provient du grec apokalupsis, qui signifie « révélation » ou « dévoilement ». Par conséquent, révélation signifie que Dieu s’est dévoilé à l’humanité. Le fait que la révélation ait eu lieu rend possible la théologie ; si Dieu ne s’était pas révélé lui-même, il ne pourrait y avoir aucune déclaration précise sur Dieu. Les passages de Romains 16:25; Luc 2:32 indiquent que Dieu s’est dévoilé lui-même dans la personne de Jésus-Christ. C’est l’apogée de la révélation divine.

La révélation peut se définir comme étant « l’acte de Dieu par lequel il se dévoile lui-même ou communique sa vérité à l’esprit, et par lequel il rend évident à ses créatures ce qui n’aurait pas pu être connu autrement. La révélation peut se produire en un seul acte instantané ou elle peut s’étendre sur une longue période de temps ; et cette communication de Dieu lui-même et de sa vérité peut être perçue par l’esprit humain à différents degrés d’ampleur». Ce qui est important ici, c’est que Dieu a divulgué la vérité sur lui-même que l’homme n’aurait pas pu connaître autrement.

Dans un sens plus large, le terme révélation signifie « la révélation de Dieu de lui-même au travers de la création, de l’histoire, de la conscience de l’homme et de l’Écriture. Elle se manifeste par des événements et des paroles ». Ainsi, la révélation est autant « générale » - Dieu se révélant lui-même dans l’histoire et la nature, que « particulière » - Dieu se révélant dans l’Écriture et dans son Fils.

Révélation générale

La révélation générale, bien qu’inadéquate pour procurer le salut, est néanmoins un antécédent important au salut. La révélation générale est la révélation de Dieu de certaines vérités et de certains aspects de sa nature à toute l’humanité ; cette révélation est essentielle et préliminaire à la révélation particulière de Dieu.

La révélation de Dieu dans la nature est peut-être la démonstration la plus importante de la révélation générale. Psaume 19:1-6 affirme que Dieu se révèle aux hommes dans les cieux et aussi sur la terre. Le psalmiste indique que cette révélation est continuelle - que « le jour en

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instruit un autre jour, la nuit en donne connaissance à une autre nuit » (Psaume 19:2). C’est une révélation incessante. De plus, c’est une révélation muette : « Il n’y a pas de discours, ni de paroles » (Psaume 19:3). Finalement, elle est d’une ampleur universelle : « Leur retentissement parcourt toute la terre » (Psaume 19:4). Personne n’est exclu de cette révélation de Dieu. Partout où l’homme regarde dans l’univers, il n’y constate qu’ordre et beauté. Le Soleil se trouve à une distance de 149 597 870 km de la Terre pour fournir exactement la bonne température qui permet à l’homme d’exister à la surface de la Terre. Si le Soleil était plus près, il ferait trop chaud pour que l’homme puisse survivre ; s’il était plus loin, il ferait trop froid. Si la Lune était à une distance plus courte que les 384 400 km actuels, la force gravitationnelle des marées recouvrirait la surface de la Terre avec l’eau des océans. Partout où l’homme regarde dans l’univers, il y voit l’harmonie et l’ordre. De même, Dieu s’est révélé lui-même sur la Terre (Psaume 19:1). La magnificence du corps humain est peut-être la meilleure preuve de la révélation générale de Dieu. Tout le corps humain - son système cardio-vasculaire, son squelette, son système respiratoire, ses muscles, son système nerveux et notamment le cerveau - révèle un Dieu infini.

Romains 1:18-21 développe davantage le concept de révélation générale. « Les perfections invisibles de Dieu, sa puissance éternelle et sa divinité se voient comme à l’œil nu » (Romains 1:20). La race humaine est coupable et sans excuse en raison de la révélation de Dieu lui-même dans la nature. Cette révélation donne à l’humanité une conscience de l’existence de Dieu mais elle est en elle-même insuffisante pour pourvoir au salut (voir aussi Job 12:7-9; Ps 8:1-3; Esa 40:12-14, 26; Ac 14:15-17).

Révélation particulière.

La révélation particulière implique une perspective plus étroite que la révélation générale et elle est restreinte à Jésus-Christ et à l’Écriture. Bien sûr, tout ce qu’on connaît de Christ se trouve dans l’Écriture, ce qui permet donc de dire que cette révélation est limitée à l’Écriture.

La révélation particulière telle que l’Écriture la reflète est offerte sous la forme de déclarations propositionnelles (ce que nie la néo-orthodoxie) ; en d’autres mots, elle vient de ce qui est extérieur à l’homme et non de lui. De nombreux exemples reflètent la nature propositionnelle de la révélation particulière : « Alors Dieu prononça toutes ces paroles en disant » (Ex 20:1) ; « Voici les paroles de l’alliance » (De 29:1) ; « Lorsque Moïse eut complètement achevé d’écrire dans un livre les paroles de cette loi » (De 31:24) ; « La parole de l’Éternel fut adressée à Jérémie, en ces mots, après que le roi eut brûlé le livre contenant les paroles que Baruc avait écrites sous la dictée de Jérémie : "Prends de nouveau un autre livre et tu y écriras toutes les paroles qui étaient dans le premier livre qu’a brûlé Jojakim, roi de Juda" » (Jér 36:27, Jér 36:28 ;

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voir v. Jér 36:2) ; « L’Évangile qui a été annoncé par moi n’est pas de l’homme ; car je ne l’ai ni reçu ni appris d’un homme, mais par une révélation de Jésus-Christ » (Ga 1:11, 12).

INSPIRATION DE LA BIBLE

Nécessité de l’inspiration

L’inspiration est indispensable pour préserver la révélation de Dieu. Si Dieu s’est révélé lui-même mais que le récit de cette révélation n’est pas exact, alors la révélation de Dieu peut être remise en question. L’inspiration de la Bible est donc garante de l’exactitude de cette révélation.

Définition de l’inspiration.

L’inspiration peut se définir comme étant l’action de supervision exercée par le Saint-Esprit sur les auteurs, qui ont écrit tout en gardant leur propre style et leur personnalité, ce qui a donné comme résultat la Parole écrite de Dieu, empreinte d’autorité, fiable et libre d’erreur dans les autographes originaux. Voici quelques définitions par des théologiens de renom.

Benjamin B. Warfield : « L’inspiration se définit, par conséquent, comme l’influence surnaturelle exercée sur les auteurs sacrés par le Saint-Esprit de Dieu, ce qui confère à leurs écrits une fiabilité divine. »

Edward J. Young : « L’inspiration, c’est la direction de Dieu le Saint-Esprit sur les auteurs de l’Écriture, en vertu de quoi elle possède une autorité et une fiabilité divines et elle est de ce fait, libre de toute erreur . »

Charles C. Ryrie : « L’inspiration … c’est la direction de Dieu sur les auteurs humains de sorte que, tout en utilisant leur propre personnalité humaine, ils ont composé et consigné sans erreur la révélation de Dieu aux hommes dans les mots des autographes originaux. »

Une bonne définition de l’inspiration doit contenir plusieurs éléments importants : 1° l’élément divin - Dieu le Saint-Esprit dirige les auteurs, assurant l’exactitude des écrits ; 2° l’élément humain - des auteurs humains ont écrit selon leur propre style et personnalité ; 3° le résultat de cette paternité à la fois humaine et divine est le récit de la vérité de Dieu sans la présence d’erreurs ; 4° l’inspiration s’étend jusqu’à la sélection des mots par les auteurs ; 5° l’inspiration s’applique aux manuscrits originaux.

Le mot français inspiration dans son usage théologique provient de la Bible latine La Vulgate, dans laquelle le verbe inspiro apparaît dans 2Timothée 3:16 et dans 2Pierre 1:21. Le mot inspiration est utilisé pour traduire theopneustos, un hapax legomenon (signifiant qu’il apparaît une seule fois dans le Nouveau Testament grec) que l’on retrouve dans 2Timothée 3:16.

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Theopneustos signifie « expiré par Dieu » et souligne l’exhalation de Dieu. Par conséquent « expiration » serait un mot plus approprié, car cela souligne que l’Écriture est le produit du souffle de Dieu. L’Écriture n’est pas quelque chose qui a été insufflé par Dieu dans la Bible ; l’Écriture est plutôt sortie de la bouche de Dieu, comme s’il l’avait expirée.

Fausses conceptions de l’inspiration

Inspiration naturelle. Ce point de vue enseigne que l’inspiration biblique ne relève rien de surnaturel ; les auteurs de l’Écriture étaient simplement des hommes aux capacités inhabituelles qui ont écrit les livres de la Bible de la même manière qu’un individu aurait écrit n’importe quel autre livre . Ces auteurs possédaient une perception religieuse extraordinaire, écrivant sur des sujets religieux de la même manière que d’autres personnages tels que Shakespeare ou Schiller ont produit des œuvres littéraires.

Illumination spirituelle. Ce point de vue de l’illumination suggère que certains chrétiens ont joui d’une compréhension spirituelle similaire aux autres chrétiens mais d’un degré supérieur. De ce point de vue, tout chrétien pieux, illuminé par le Saint-Esprit, peut écrire des textes bibliques inspirés. Les tenants de ce point de vue suggèrent que ce ne sont pas les écrits qui sont inspirés mais les auteurs. Schleiermacher enseignait ce point de vue en Europe, tandis que Coleridge le défendait en Angleterre.

Inspiration dynamique ou partielle. La théorie de l’inspiration partielle enseigne que les parties de la Bible traitant des questions de la foi et de la conduite sont inspirées, alors que les questions reliées à la science, à l’histoire, à la chronologie ou à tout autre sujet sans rapport avec la foi, sont susceptibles de contenir des erreurs. D’après cette conception, Dieu a préservé le message du salut au milieu d’autres textes qui pouvaient contenir des erreurs. La théorie partielle rejette l’inspiration verbale (l’inspiration qui concerne les mots de l’Écriture) et l’inspiration plénière (l’inspiration qui s’étend à l’Écriture dans son entier). En dépit de leur enseignement sur la présence d’erreurs dans l’Écriture, les théoriciens de l’inspiration partielle enseignent qu’un moyen imparfait peut quand même être un guide suffisant pour conduire au salut. A. H. Strong faisait partie des défenseurs de cette théorie.

D’épineuses questions se présentent aux tenants de cette opinion : quelles sont les parties de la Bible qui sont inspirées et lesquelles contiennent des erreurs ? Qui peut déterminer quelles sont les parties de la Bible qui sont fiables et quelles sont celles qui contiennent des erreurs ? (Ceux qui soutiennent cette théorie ne sont pas d’accord entre eux quant à la liste des textes qui contiendraient des erreurs.) Comment la doctrine peut-elle être séparée de l’histoire ? (Par exemple, les récits à propos de la naissance virginale de Jésus contiennent autant de doctrines que de faits historiques.) Comment la Bible peut-elle être fiable d’un côté et erronée de l’autre ?

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Inspiration conceptuelle. Ce point de vue suggère que seuls les concepts ou les idées des auteurs sont inspirés, mais non les mots. D’après ce point de vue, Dieu a inspiré une idée ou un concept à un auteur, qui a ensuite rédigé cette idée dans ses propres mots. Selon cette perspective, des erreurs ont pu se glisser dans l’Écriture parce que le choix des mots a été laissé à l’auteur et n’a pas été dirigé par Dieu. Cependant, en réponse à cela, il convient de remarquer que Jésus (Mt 5:18) et Paul (1Th 2:13) ont tous les deux affirmé l’inspiration verbale. Pache conclut à juste titre : « Les idées ne peuvent se concevoir et se transmettre que par des mots. Si le concept communiqué à l’homme est divin et de la nature d’une révélation, la forme dans laquelle elle est exprimée est de la première importance. Il est impossible de dissocier l’un de l’autre. »

Dictée divine. Le point de vue de la dictée déclare que Dieu a dicté les mots de l’Écriture et que les hommes les ont écrits en toute passivité, jouant simplement le rôle d’amanuensis (secrétaires) qui ont seulement écrit les mots qu’ils devaient écrire. Prétendre une chose pareille, c’est mettre la Bible sur un pied d’égalité avec le Coran, qui est censé avoir été dicté en arabe directement du ciel. Bien que certaines parties de la Bible ont été dictées (voir Ex 20:1 : « Alors Dieu prononça toutes ces paroles en disant »), on discerne des contrastes évidents de styles et de vocabulaire parmi les livres de la Bible, ce qui suggère que les auteurs n’étaient pas de simples automates. Même l’étudiant débutant de la langue grecque a tôt fait de découvrir les différences de style entre l’Évangile selon Jean et celui selon Luc. Jean a écrit dans un style simple avec un vocabulaire limité alors que Luc a écrit avec un vocabulaire développé et dans un style beaucoup plus sophistiqué. Si la théorie de la dictée était vraie, tous les styles des livres de la Bible seraient uniformes.

Opinion néo-orthodoxe. Le point de vue néo-orthodoxe souligne qu’on ne peut parfaitement assimiler la Parole de Dieu et la Bible, parce que Dieu ne s’exprime pas en simples propositions. Dieu ne révèle pas de simples faits sur lui-même ; il se révèle lui-même. La Bible n’est pas la substance de la Parole de Dieu, mais plutôt le témoin de la Parole de Dieu. Elle devient la Parole de Dieu au fur et à mesure que le lecteur rencontre Christ au cours de sa propre expérience subjective. De plus, la Bible est ensevelie dans le mythe, nécessitant une démythologisation pour découvrir ce qui s’est vraiment produit. L’historicité des événements n’est pas importante. Par exemple, que le Christ soit ou ne soit pas ressuscité des morts dans le temps et l’espace n’est pas important aux yeux des néo-orthodoxes. Ce qui importe, c’est la rencontre possible résultant de l’expérience même si la Bible est entachée d’erreurs factuelles. D’après ce point de vue, l’autorité est l’expérience subjective de l’individu, plutôt que l’Écriture elle-même.

Le chrétien évangélique répond à ces conceptions avec des éléments contrastants. La Bible est la Parole objective et autoritaire de Dieu, qu’une personne y réponde ou non (Jn 8:47; 12:48).

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De plus, il n’existe pas de critères objectifs pour évaluer ce qui constituerait une rencontre « légitime » avec Dieu. Par ailleurs, qui pourrait prétendre discerner le mythe de la vérité ?

Point de vue biblique de l’inspiration : verbale et plénière

Le point de vue de Christ sur la Bible. En cherchant à déterminer la nature de l’inspiration biblique, rien n’est plus important que de déterminer le point de vue de Christ sur l’Écriture. Certainement, personne ne devrait maintenir un point de vue de l’Écriture inférieur à celui qu’il a lui-même maintenu ; sa vision de l’Écriture devrait donc être déterminante et la norme des points de vue d’autrui. C’est là l’argument fondamental de R. Laird Harris. Pour défendre l’inspiration de l’Écriture, il n’a pas recours à 2Timothée 3:16 ou à 2Pierre 1:21 pour fonder son argumentation (tout en reconnaissant leur validité) ; il argumente plutôt à partir du point de vue de Christ au sujet de l’Écriture.

1° Inspiration de l’ensemble. Dans l’utilisation qu’il a faite de l’Ancien Testament, Christ a donné crédit à l’inspiration de tout l’Ancien Testament. Dans Matthieu 5:17, 18, Christ a affirmé : « il ne disparaîtra pas de la loi un seul iota ou un seul trait de lettre jusqu’à ce que tout soit arrivé. » Au verset Matthieu 5:17, Christ se référait à la loi ou aux prophètes, expression commune pour désigner toute l’Écriture. Dans cette déclaration plutôt solennelle, Jésus a affirmé l’inviolabilité de tout l’Ancien Testament et par conséquent l’inspiration de tout l’Ancien Testament.

Dans Luc 24:44, Jésus a rappelé aux disciples que tout ce qui avait été écrit à son sujet dans la loi de Moïse, dans les prophètes et dans les Psaumes devait s’accomplir. Les disciples n’avaient pas compris les enseignements au sujet de la mort et de la résurrection de Christ dans l’Ancien Testament, mais en raison de l’inspiration de l’Ancien Testament, ces événements qui avaient été prophétisés devaient se réaliser. Par cette triple désignation de l’Ancien Testament, Christ affirmait l’inspiration et l’autorité de tout l’Ancien Testament.

Lorsque Jésus a discuté avec les Juifs incrédules de son droit à être appelé Fils de Dieu, il les a référés au Psaume 82:6 et leur a rappelé que l’Écriture ne pouvait être anéantie (Jn 10:35). « Cela signifie que l’Écriture ne peut pas être vidée de sa force en étant convaincue d’erreurs » Il est intéressant de noter que Jésus a fait référence à un passage plutôt insignifiant de l’Ancien Testament pour indiquer que l’Écriture ne pouvait être mise de côté ni anéantie.

2° Inspiration de chaque partie. Christ citait abondamment et fréquemment l’Ancien Testament. Ses arguments dépendaient de l’intégrité du passage de l’Ancien Testament qu’il citait. Par cette méthode d’argumentation, Christ affirmait l’inspiration des textes ou des livres individuels de l’Ancien Testament. Quelques exemples suffiront. Lorsque Jésus a été envoyé

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dans le désert pour y être tenté par Satan, il a réfuté les arguments de Satan en citant Deutéronome. Dans Matthieu 4:4, 7, 10, Jésus a cité de nouveau le Deutéronome (De 8:3; 6:13, 16), indiquant à Satan qu’il avait tort et soulignant que ces mots écrits dans le Deutéronome devaient s’accomplir. Dans Matthieu 21:42, Jésus a cité Psaume 118:22, où il est dit que le Messie serait rejeté. Dans Matthieu 12:18-21, Jésus a cité Esaïe 42:1-4, montrant que son tempérament pacifique et doux de même que l’inclusion des Gentils avaient été annoncés d’avance dans les écrits prophétiques.

Ce ne sont là que des exemples choisis, qui révèlent que Christ citait toutes les parties de l’Ancien Testament, affirmant leur inspiration et leur autorité.

3° Inspiration des mots. En défendant la doctrine de la résurrection devant les Sadducéens, Jésus a cité Exode 3:6 (ce qui est significatif car les Sadducéens ne reconnaissaient que le Pentateuque), « Je suis le Dieu d’Abraham ». Par cette réponse, toute l’argumentation de Jésus dépendait des mots : « Je suis ». Jésus suppléait apparemment le verbe que le texte hébreu sous-entendait seulement. Ainsi, Jésus soutenait la validité de la Septante, version grecque, laquelle inclut ce verbe. Cette version était tenue en si haute estime par plusieurs des contemporains de Jésus qu’on lui accordait pratiquement la même valeur que l’Écriture originale.

En affirmant la réalité de la résurrection, Jésus a rappelé aux Sadducéens qu’Exode 3:6 dit : « Je suis ». Puis il a continué en disant : « Dieu n’est pas le Dieu des morts mais le Dieu des vivants ». Si les mots de l’Ancien Testament n’avaient pas été inspirés, son argumentation aurait été inutile ; mais si les mots mêmes de l’Ancien Testament étaient vraiment inspirés, alors son argumentation avait beaucoup de poids. En fait, l’argumentation de Jésus dépend du temps présent de la déclaration. Parce qu’il est écrit dans Exode 3:6 « Je suis… », la doctrine de la résurrection pouvait être affirmée ; Dieu est bien le Dieu des patriarches vivants.

Un exemple similaire se trouve dans Matthieu 22:44, où Jésus, lors de sa discussion avec les pharisiens, leur a expliqué que leur concept du Messie était faux. Les pharisiens pensaient que le Messie serait un libérateur politique, mais Jésus leur a montré par une citation de Psaume 110:1 que David, le plus grand roi d’Israël, considérait le Messie comme étant plus grand que lui-même puisqu’il l’appelait Seigneur. Toute l’argumentation de Christ reposait sur l’expression « mon Seigneur ». En citant ce verset, Jésus fondait son argumentation sur l’inspiration des mots précis « mon Seigneur ». Si Psaume 110:1 n’avait pas dit exactement « mon Seigneur », alors l’argumentation de Christ aurait été vaine. Un exemple supplémentaire est l’utilisation que Christ fait du Psaume 82:6 dans Jean 10:34, où toute son argumentation repose sur le mot « dieux ».

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4° Inspiration des lettres. Dans un certain nombre de ses déclarations, Christ révèle qu’il croyait en l’inspiration des lettres de l’Écriture. Dans Matthieu 5:18, Jésus a déclaré : « il ne disparaîtra pas de la loi un seul iota ou un seul trait de lettre jusqu’à ce que tout soit arrivé. » Le terme « iota » se réfère à la plus petite lettre de l’alphabet grec ; elle est l’équivalent de la lettre hébraïque yodh, qui ressemble à une apostrophe (’). Le « trait de lettre » désigne une minuscule distinction entre deux lettres hébraïques. Un équivalent français serait la différence entre O et Q. Ces deux lettres ne diffèrent que par l’absence ou la présence de la petite « queue ». Jésus a souligné que tous les détails des écrits de l’Ancien Testament devaient être accomplis jusqu’à la lettre même !

5° Inspiration du Nouveau Testament. Lors du discours dans la chambre haute, Christ a fait une importante déclaration qui semble pointer vers l’écriture finale et exacte des livres du Nouveau Testament. Dans Jean 14:26, Jésus a indiqué que le Saint-Esprit rappellerait avec précision aux apôtres les mots de l’Écriture qu’ils auraient à écrire, garantissant ainsi leur exactitude (voir Jn 16:12-15). Ceci peut expliquer comment un vieil homme tel que Jean, en écrivant la vie de Christ, a pu décrire les détails exacts des événements qui s’étaient produits des années auparavant. Le Saint-Esprit a donné à Jean et aux autres auteurs un souvenir exact des événements. Ainsi, Jésus a affirmé non seulement l’inspiration de l’Ancien Testament mais aussi celle du Nouveau Testament.

Le point de vue de Paul sur la Bible.

1° Inspiration de l’Ancien et du Nouveau Testaments. Dans 1Timothée 5:18, Paul a fait précéder ses remarques par : « Car l’Écriture dit ». Ensuite, il a cité Deutéronome 25:4; Luc 10:7, attribuant ainsi le statut d’Écriture autant à l’Ancien Testament qu’au Nouveau Testament. Paul disait que le Nouveau Testament était autant la Parole inspirée de Dieu que l’Ancien Testament.

2° Inspiration des mots. Dans la déclaration classique de Paul dans 2Timothée 3:16, l’apôtre rappelle au lecteur que toute l’Écriture est « inspirée de Dieu ». Comme nous l’avons vu plus tôt, « inspiré de Dieu » vient du mot grec theopneustos, signifiant « expiré par Dieu ». C’est vraiment un verset important à considérer au sujet de l’inspiration et de l’inerrance parce qu’il devient la clé du problème lorsqu’il est correctement compris.

Plusieurs éléments devraient être notés. D’abord, puisque l’Écriture est expirée par Dieu, cela souligne son origine : Dieu. Cela est cohérent avec les prophètes de l’Ancien Testament qui ont reçu leurs messages de la bouche de Dieu, comme l’indique cette déclaration fréquente : « Ainsi parle l’Éternel ». Ainsi, le message formulé par les prophètes était le message qui leur avait été communiqué par le Seigneur (voir Ex 4:15; 7:1, 2; Jér 1:9, etc.). Par conséquent, de même que la parole donnée au prophète était digne de confiance et fiable, de même aussi

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l’Écriture, qui était expirée par Dieu, était digne de confiance et exacte parce que les deux communications venaient de la bouche de Dieu. L’accent de Paul, alors, est sur l’origine de l’Écriture : ce qui est expiré par Dieu « est produit par le souffle créateur du Tout-Puissant ». Le fait que le mot theopneustos a un sens passif et non pas actif souligne davantage que Dieu est à l’origine de l’Écriture, et non pas l’homme.

3° Toute l’Écriture est expirée par Dieu. Young clarifie ce point : « Si Paul veut dire "chaque Écriture," il examine les différentes parties de la Bible, c’est-à-dire qu’il considère l’Écriture de façon distributive. Il déclare alors que, quelle que soit la partie de l’Écriture considérée, elle est inspirée de Dieu. D’autre part, s’il veut dire "toute l’Écriture," il est clair qu’il fait référence à l’Écriture dans sa totalité. Dans les deux cas, il dit que tout ce qui peut être appelé "Écriture" est inspiré de Dieu. »

De plus, tout ce qui est expiré par Dieu est également désigné comme étant l’Écriture. Alors que la désignation « l’Écriture » dans le verset 2Ti 3:16 est parfois comprise comme se référant seulement à l’Ancien Testament, on peut affirmer que Paul utilisait la désignation « l’Écriture » non seulement pour l’Ancien Testament mais aussi pour les portions du Nouveau Testament qui étaient déjà écrites à son époque (par exemple, Paul devait considérer l’Évangile selon Luc comme étant canonique (1Ti 5:18), et peut-être même tout le Nouveau Testament, dont certaines parties devaient être écrites plus tard.

Paul conclut que l’Ancien et le Nouveau Testaments sont expirés par Dieu, étant d’origine divine et non humaine. Paul affirme ainsi sa foi en l’inspiration verbale.

Le point de vue de Pierre sur la Bible.

L’enseignement de Pierre concernant l’Écriture coïncide avec celui de Paul. Dans 2Pierre 1:21, Pierre souligne qu’aucune partie de l’Écriture n’est le produit de la volonté humaine ; c’est plutôt le produit de la puissance directrice du Saint-Esprit. Pierre identifie l’Écriture comme étant « la parole prophétique » (2Pierre 1:19), « la prophétie de l’Écriture » (2Pierre 1:20) et la « prophétie » (2Pierre 1:21) ; il déclare que l’Écriture est « quelque chose de totalement fiable ». Au verset 2Pierre 1:21, Pierre explique pourquoi l’Écriture est digne de confiance. Tout comme Paul, Pierre affirme que l’Écriture a son origine en Dieu. Bien que des hommes aient écrit les mots de l’Écriture, ils l’ont fait en étant poussés (du grec pheromenoi) par le Saint-Esprit. Pierre reconnaît donc qu’il croit en l’inspiration verbale dans la mesure où c’est le Saint-Esprit qui dirigeait les auteurs de l’Écriture dans leurs choix des mots. On peut illustrer cette vérité en la comparant à un homme qui va au centre commercial. Comme il est pressé d’arriver au second étage, il monte l’escalier roulant à toute vitesse. Bien que ce soit lui qui marche, l’escalier roulant le transporte à l’étage supérieur. De même, bien que les auteurs de l’Écriture

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aient écrit les mots selon leur niveau d’instruction et leur propre style, le Saint-Esprit les a transportés, assurant l’exactitude de tout ce qu’ils écrivaient.

Dans 2Pierre 3:16, Pierre se réfère aux écrits de Paul et il indique que les faux docteurs déformaient les écrits de Paul comme ils le faisaient d’ailleurs avec les autres Écritures. Par cette déclaration plutôt unique, Pierre place les écrits de Paul à égalité avec l’Écriture de l’Ancien Testament.

INERRANCE DE LA BIBLE

Définition de l’inerrance

Il suffisait jadis de déclarer que la Bible était inspirée ; cependant, il est maintenant devenu indispensable de définir la position évangélique de façon plus précise. Le résultat, comme l’a démontré Charles Ryrie, a nécessité l’inclusion d’un vocabulaire supplémentaire. Pour affirmer le point de vue orthodoxe, il faut maintenant inclure les termes « inspiration verbale, plénière, infaillible, inerrante… » Tout cela à cause de ceux qui conservent des mots tels inspiration, infaillible et même inerrance, tout en niant que la Bible puisse être libre de toute erreur.

E. J. Young propose une définition convenable de l’inerrance : « Par ce mot, nous voulons dire que l’Écriture possède la qualité d’être exempte de l’erreur.

En définissant l’inerrance, il est aussi important de déclarer ce que cela ne veut pas dire. Cela n’exige pas une rigidité de style ni des citations mot pour mot de l’Ancien Testament. « L’inerrance de la Bible signifie simplement que la Bible dit la vérité. La vérité peut inclure des approximations (et elle le fait), des citations libres, un langage de convenance, et différents comptes rendus du même événement - tant qu’ils ne se contredisent pas. » Lors de la Conférence de Chicago en octobre 1978, le Concile international sur l’inerrance biblique a publié la déclaration suivante à propos de l’inerrance : « Puisqu’elle a été entièrement et verbalement donnée par Dieu, l’Écriture est sans erreur ni faute dans tous ses enseignements. C’est aussi vrai dans ce qu’elle déclare à propos de ce que Dieu a fait dans la création, à propos des événements historiques, et à propos de sa propre origine littéraire sous la direction de Dieu, que ce l’est en ce qui concerne son témoignage envers la grâce salvatrice de Dieu dans les vies individuelles ».

Explication de l’inerrance

L’inerrance permet de la variété dans le style. L’Évangile selon Jean a été écrit dans le style simple auquel on pouvait s’attendre de la part d’un pêcheur sans éducation ; l’Évangile selon Luc a été rédigé dans le vocabulaire plus sophistiqué d’une personne instruite ; les épîtres de

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Paul reflètent la logique d’un philosophe. Toutes ces variations sont entièrement compatibles avec l’inerrance.

L’inerrance permet de la variété dans les détails en expliquant le même événement. C’est un phénomène que l’on observe particulièrement dans les Évangiles synoptiques. Il est important de se rappeler que Jésus parlait en araméen et que les évangélistes ont écrit leurs récits en grec, ce qui signifie qu’ils ont dû traduire les mots originaux en grec. Un auteur pouvait utiliser des mots légèrement différents pour décrire le même événement et lui donner pourtant la même signification.

Il existe une autre raison à la variété dans les détails. Il est possible qu’un auteur ait été témoin d’un événement d’un point de vue différent d’un autre auteur, d’où la différence dans les détails. Et cependant, ils sont tous les deux exacts.

L’inerrance n’exige pas que les événements soient rapportés mot pour mot. « Dans l’antiquité, il n’était pas coutume de répéter mot pour mot ce qui avait été écrit. » Une citation mot pour mot ne pouvait pas être exigée, et ce, pour plusieurs raisons. D’abord, comme il a déjà été mentionné, l’auteur devait traduire de l’araméen au grec lorsqu’il citait les mots de Jésus. Ensuite, pour ce qui concerne les références aux textes de l’Ancien Testament, il aurait été impossible de dérouler à chaque fois les longs rouleaux pour produire une citation mot pour mot ; de plus, ces rouleaux n’étaient pas facilement accessibles, d’où les libertés prises avec les citations de l’Ancien Testament.

L’inerrance permet l’écart des formes de base de la grammaire. Il est évidemment incorrect de vouloir forcer les règles de la grammaire française sur l’Écriture. Par exemple, dans #Jean 10:9, Jésus déclare : « Je suis la porte », alors qu’au verset ii il dit : « Je suis le bon berger ». Dans la langue française, il s’agit d’un mélange de métaphores, mais cela ne pose pas problème pour la grammaire grecque ou pour le langage hébraïque. Dans Jean 14:2, 6, Jésus fait référence à l’Esprit (pneuma = neutre) et il se réfère ensuite à l’Esprit avec le pronom « il » (ekeinos = masculin). Cela peut faire sourciller les grammairiens, mais ce n’est pas un problème pour la grammaire grecque.

L’inerrance permet des passages problématiques. Même avec un travail aussi imposant que celui de l’Écriture, il est possible de trouver des solutions à tous les problèmes. Dans certains cas, la solution attend les découvertes du pic de l’archéologue ; dans d’autres cas, elle attend les recherches du linguiste ; dans d’autres cas, la solution peut ne jamais être découverte pour bien des raisons. La solution à certains problèmes doit parfois être maintenue en attente. La réponse, cependant, n’est jamais de suggérer qu’il y a des erreurs ou des contradictions dans l’Écriture. Si l’Écriture a été expirée par Dieu, elle est totalement sans erreur.

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L’inerrance exige que la narration n’enseigne pas d’erreurs ou de contradictions . Dans les déclarations de l’Écriture, tout ce qui est écrit est en accord avec les choses telles qu’elles sont. Certains détails peuvent varier mais ils reflètent malgré tout les choses telles qu’elles sont. Par exemple, dans Matthieu 8:5-13, le centurion qui est venu voir Jésus lui a dit : « Je ne suis pas digne ». Dans le passage parallèle dans Luc 7:1-10, on relève que les anciens sont venus et ont dit au sujet du centurion : « Il mérite que… » Il semble que les anciens sont premièrement venus parler à Jésus, et que le centurion n’a rencontré Jésus que plus tard. Ces deux narrations sont en accord avec les choses telles qu’elles sont.

L’inerrance est reflétée dans les traductions. Grâce à la science de la critique textuelle, et après avoir rassemblé quelque 5 700 manuscrits grecs anciens, nous avons l’essentiel du contenu original de l’Écriture, et nous pouvons utiliser nos traductions avec autorité en proclamant la Parole de Dieu.

Jésus et Paul citaient la Septante - traduction grecque de l’Ancien Testament - et ils basaient leur argumentation contre leurs adversaires sur le texte de la Septante, qui est une traduction. Ils considéraient la traduction comme étant la Parole de Dieu. Quand Jésus a cité l’Ancien Testament dans Matthieu 4:4, il « attachait l’autorité de l’Écriture qu’il avait en main à l’énonciation originale, telle que donnée par inspiration divine. Ce que les gens lisaient comme étant "l’Écriture" dans les livres de Moïse était considéré comme étant "la parole que Dieu leur avait adressée" (Mt 22:29-32; Mr 12:24-26) … . Dans chacun de ces cas, la présence du texte original dans la copie utilisée est assumée … . Les paroles de Moïse dans Genèse 2:24 que Jésus a citées dans Matthieu 19:4 étaient à ses yeux entièrement équivalentes à "Dieu a dit," prononcées par l’auteur original de l’Écriture (Mt 19:4, 5) … . On peut ne pas tenir compte ici de la distance réelle qui sépare les autographes des copies puisque le texte original est présumé apparaître dans ces copies . »

Problèmes reliés au rejet de l’inerrance

Les « errantistes » concluent que l’erreur peut enseigner la vérité. Ils suggèrent qu’il n’est pas important de défendre l’exactitude de la Bible au sujet « de menus détails de chronologie, de géographie, d’histoire ou de cosmologie ou … de prétendues divergences ». Or, les problèmes de chronologie, de géographie, d’histoire, et ainsi de suite, ne sont pas sans importance. Ils sont fréquemment liés à des vérités théologiques essentielles. Par exemple, l’historicité d’Adam et Ève dans Genèse 1; 2 est importante parce que Paul développe une analogie entre Adam et Christ dans Romains 5:12-21. Si Adam n’est pas un personnage historique, l’analogie s’effondre. La chronologie de Matthieu 1 est importante car elle détaille la lignée de Jésus-Christ. Si sa lignée n’est pas exacte, que peut-on dire concernant le récit de sa vie ? La géographie de Michée 5:2, qui annonce la naissance de Christ à Bethléhem est importante parce que le même

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verset enseigne aussi l’éternité de Christ. Si la géographie concernant Christ n’est pas fiable, doit-on dès lors accorder foi à son éternité ?

La conclusion est évidente : si la Bible n’est pas digne de confiance quant à la chronologie, l’histoire ou la géographie, elle ne peut pas être digne de confiance quant au message du salut.

Les « errantistes » contestent le caractère de Dieu. Comme cela a déjà été signalé, l’Écriture provient de l’expiration de Dieu (2Ti 3:16) et de la direction du Saint-Esprit (2P 1:21). Si l’Écriture contenait des erreurs, c’est Dieu qui les aurait commises.

Les « errantistes » ne sont pas d’accord entre eux quant à la liste des erreurs. Les errantistes ont chacun leur propre liste d’erreurs qui diffèrent l’une de l’autre. « Quels sont les critères pour déterminer les domaines dans lesquels les erreurs sont sans importance ? Qui décide où tracer la ligne entre l’erreur admissible et l’inerrance indispensable ? »

CANONICITÉ DE LA BIBLE

Définition de la canonicité

Si l’Écriture est vraiment inspirée par Dieu, cela soulève une question importante : quels sont les livres inspirés ? Historiquement, il était important pour le peuple de Dieu de déterminer quels étaient les livres inspirés par Dieu et lesquels étaient reconnus comme faisant autorité.

Le mot canon est utilisé pour décrire les livres inspirés. Ce mot vient du grec kanon et probablement aussi de l’hébreu qaneh, signifiant « règle de mesure ». Les termes canon et canonique en sont donc venus à être utilisés pour parler des normes selon lesquelles les livres étaient évalués pour déterminer s’ils étaient inspirés ou non. Il est important de signaler que les conciles religieux n’ont jamais eu le pouvoir de faire en sorte que des livres soient inspirés ; au contraire, ils ne faisaient que reconnaître ceux que Dieu avait inspirés au moment même où les livres avaient été écrits.

Les Juifs et aussi les chrétiens conservateurs ont reconnu les trente-neuf livres de l’Ancien Testament comme étant inspirés. Les protestants évangéliques ont reconnu les vingt-sept livres du Nouveau Testament comme étant inspirés. Les catholiques romains ont un total de quatre-vingts livres, parce qu’ils reconnaissent les apocryphes comme étant semi-canoniques.

Canonicité de l’Ancien Testament

Le texte massorétique (texte en hébreu) de l’Ancien Testament divise les trente-neuf livres en trois catégories : la Loi (Pentateuque) ; les Prophètes (Josué, Juges, 1 et 2 Samuel, 1 et 2 Rois, les grands et les petits prophètes) ; et les Écrits (parfois appelés aussi « les Psaumes », ce qui inclut les livres de poésie et de sagesse - Psaumes, Proverbes, et Job ; les Rouleaux - Cantique

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des Cantiques, Ruth, Lamentations, l’Ecclésiaste, et Esther ; les livres historiques - Daniel, Esdras, Néhémie, ainsi que 1 et 2 Chroniques). À l’origine, ces trente-neuf livres étaient répartis en vingt-quatre livres, car on avait alors combiné 1 et 2 Samuel, 1 et 2 Rois, 1 et 2 Chroniques, les petits prophètes, ainsi qu’Esdras et Néhémie. À l’époque du Nouveau Testament, cette division en trois parties était reconnue (Luc 24:44). D’autres désignations telles « l’Écriture » (Jn 10:35) et les « saintes lettres » (2Ti 3:15) suggèrent un canon de l’Ancien Testament qui était généralement reconnu. Cette division en trois parties a aussi été attestée par Josèphe (37-95), l’évêque Méliton de Sardes (vers 170), Tertullien (160-250) et d’autres. Le concile de Jamnia en 90 apr. J.-C. est généralement considéré comme étant l’événement au cours duquel le canon de l’Ancien Testament a été publiquement reconnu (alors que la canonicité de plusieurs livres était débattue).

Il existe des preuves de la façon dont les livres de l’Ancien Testament ont été reconnus comme canoniques. Laird Harris a retracé le parcours de cette reconnaissance. Moïse est reconnu comme ayant écrit sous l’autorité de Dieu (Ex 17:14; 34:27 ; voir Jos 8:31; 23:6). Le critère de reconnaissance du Pentateuque était la paternité de Moïse, le serviteur de Dieu. Après Moïse, Dieu a établi l’institution de la prophétie pour continuer à se révéler lui-même à son peuple (voir De 18:15-19; Jér 26:8-15). Les prophètes auxquels Dieu a parlé ont aussi mis leur révélation par écrit (voir Jos 24:26; 1S 10:25; Esa 8:1; Ez 43:11). Harris conclut en disant : « La loi a reçu le respect de l’auteur et il était connu comme étant le messager de Dieu. De même, les prophètes qui ont suivi ont été reçus à la suite d’une authentification appropriée, et leurs œuvres écrites ont reçu le même respect, ce qui leur a donc valu d’être acceptées comme étant la Parole de Dieu. Pour ce qui est des témoignages contenus dans les livres eux-mêmes, cette acceptation a été immédiate. »

Canonicité du Nouveau Testament

Plusieurs facteurs ont contribué à la reconnaissance du canon du Nouveau Testament. 1° Les faux écrits de même que les attaques contre les écrits authentiques en font partie. Marcion, par exemple, rejetait l’Ancien Testament et aussi les écrits du Nouveau Testament, sauf les lettres de Paul (il a trafiqué l’Évangile selon Luc pour qu’il cadre avec sa doctrine personnelle). 2° Le contenu des écrits du Nouveau Testament a attesté leur authenticité et, naturellement, ils ont été rassemblés, ayant été reconnus comme canoniques. 3° Les écrits apostoliques étaient utilisés dans le culte public. Il était par conséquent indispensable de décider lesquels de ces écrits étaient canoniques. 4° Finalement, l’édit de l’empereur Dioclétien en 303 apr. J.-C., exigeant que tous les livres sacrés soient brûlés, a donné lieu à la formation du Nouveau Testament.

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Le processus de reconnaissance et de formation s’est développé au cours des premiers siècles de l’Église chrétienne. Très tôt, les livres du Nouveau Testament ont été reconnus. Paul, par exemple, a reconnu les écrits de Luc à égalité avec l’Ancien Testament (1Ti 5:18 cite De 25:4; Lu 10:7, et fait référence aux deux textes en disant : « Car l’Écriture dit »). Pierre a aussi reconnu les écrits de Paul comme étant l’Écriture (2P 3:15, 16). Des lettres étaient lues dans les églises et circulaient même dans l’Église (voir Col 4:16; 1Th 5:27).

Durant l’ère postapostolique, Clément de Rome (vers 95 apr. J.-C.) a mentionné au moins huit des livres du Nouveau Testament dans une lettre ; Ignace d’Antioche (vers 115) en a aussi reconnu au moins sept ; Polycarpe, disciple de Jean (vers 108), reconnaissait quinze lettres. Cela ne veut pas dire que ces hommes ne reconnaissaient que ces lettres comme canoniques, mais ce sont celles qu’ils mentionnent dans leurs correspondances. Plus tard, Irénée a écrit (vers 185) et il a reconnu vingt-et-un de ces livres. Hippolyte (170-235) en a reconnu vingt-deux. Les livres problématiques à cette époque étaient Hébreux, Jacques, 2 Pierre, et 2 et 3 Jean.

Le témoignage du Canon de Muratori (170) était encore plus important. C’était une compilation de livres reconnus comme canoniques par l’Église à cette époque primitive. Le Canon de Muratori comprenait tous les livres du Nouveau Testament, sauf Hébreux, Jacques et l’une des épîtres de Jean.

Au quatrième siècle, le canon du Nouveau Testament était grandement reconnu. Lorsque Athanase a écrit en 367, il a cité les vingt-sept livres du Nouveau Testament comme étant les seuls livres authentiques. En 363, le concile de Laodicée a déclaré que seuls les livres de l’Ancien Testament et les vingt-sept livres du Nouveau Testament devaient être lus dans les églises. Le concile de Hippo (393) a reconnu les vingt-sept livres, et le concile de Carthage (397) a confirmé que seuls ces livres canoniques devaient être lus dans les églises.

Comment l’Église a-t-elle reconnu la canonicité de ces livres ? Certains tests étaient appliqués pour répondre à cette question.

1° Apostolicité. L’auteur était-il un apôtre ou était-il en relation avec un apôtre ? Par exemple, Marc a écrit sous l’autorité de Pierre et Luc a écrit sous l’autorité de Paul.

2° Acceptation. Ce livre était-il accepté par l’Église dans son ensemble ? Cette reconnaissance accordée à un livre particulier par l’Église était importante. Avec cette règle, certains livres ont été rejetés (mais elle a aussi retardé la reconnaissance de certains livres légitimes).

3° Contenu. Le livre reflétait-il une cohérence de doctrine avec ce qui avait été accepté comme enseignement orthodoxe ? Le faux « évangile de Pierre » a été rejeté en raison de ce principe.

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4° Inspiration. Le livre reflétait-il la qualité d’un ouvrage inspiré ? Les apocryphes et les pseudépigraphes ont été rejetés après avoir échoué à ce test. Le livre devait contenir l’évidence de hautes valeurs morales et spirituelles qui refléteraient l’action du Saint-Esprit.

COMPOSITION DE LA BIBLE

Fiabilité du texte de l’Ancien Testament

Bien que nous ne possédions pas les manuscrits originaux de l’Ancien ni du Nouveau Testament, nous avons néanmoins un texte biblique fiable. L’historique du développement du texte de l’Ancien Testament l’indiquera. Le travail de copie des anciens manuscrits était un exercice fastidieux, mais les Juifs ont développé très tôt des règles strictes pour ce travail. Ces règles régissaient la sorte de parchemin utilisée, le nombre de lignes qui devaient être écrites, la couleur de l’encre et la méthode de révision {261}. Quand un parchemin commençait à montrer des signes d’usure, les Juifs l’enterraient avec respect. C’est pourquoi, jusqu’à la découverte des Rouleaux de la mer Morte à Qumran, les manuscrits les plus anciens existants encore remontaient à l’an 900 apr. J.-C.

Néanmoins, la fiabilité du texte de l’Ancien Testament se constate par la retranscription scrupuleuse des textes à l’époque d’Esdras et qui s’est poursuivie plus tard par les Massorètes, qui ont développé une tradition de travail soigné et précis en copiant les textes. Ils ont assuré l’exactitude en comptant le nombre de lettres contenues dans un livre, en notant la lettre du milieu, et par d’autres procédures fastidieuses. Par exemple, ils ont noté que la lettre aleph apparaissait 42 377 fois dans l’Ancien Testament. Si le nombre total dans une nouvelle copie ne correspondait pas au nombre total de la copie originale, le manuscrit était recopié. Lorsqu’un mot ou une déclaration paraissaient incorrects (ce qui s’appelait kethib), ils les conservaient dans le texte mais ils incluaient une note de marge comprenant leur suggestion corrigée (ce qui s’appelait qere). Ce sont également les Massorètes qui ont introduit le système de voyelles dans le texte hébreu ; auparavant, le texte hébreu était écrit seulement avec des consonnes.

Plusieurs sources anciennes indiquent la fiabilité du texte de l’Ancien Testament.

Les Rouleaux de la mer Morte. Avant la découverte des rouleaux de Qumran, les plus vieux manuscrits dont on disposait remontaient à l’an 900 apr. J.-C. environ. Certains manuscrits des Rouleaux de la mer Morte, qui incluent des copies d’Ésaïe, d’Habakuk, et d’autres, remontent à 125 av. J.-C., mettant ainsi à notre disposition des manuscrits de mille ans plus vieux que ceux qui étaient disponibles jusque-là. La conclusion majeure suite à l’étude de ces manuscrits est qu’il n’existe aucune différence significative entre le Rouleau d’Ésaïe trouvé à Qumran et les textes hébreux des Massorètes de plus de mille ans postérieurs. Cela confirme la fiabilité du texte hébreu actuel.

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La Septante. La Septante est une traduction grecque de l’Ancien Testament hébreu pour satisfaire les Juifs de la diaspora qui avaient perdu l’usage de la langue hébraïque. La tradition affirme qu’environ soixante-dix érudits hébreux ont traduit le texte hébreu en grec (le nom Septante signifie « 70 », d’où sa désignation LXX). Elle a été traduite peu à peu à Alexandrie, en Égypte, entre l’an 250 et l’an 150 av. J.-C. Elle contient une traduction inégale, mais elle est utile en ce qu’elle est basée sur un texte hébreu de mille ans plus ancien que les manuscrits hébreux existants. De plus, les auteurs du Nouveau Testament citaient parfois la Septante, ce qui nous fournit des indications supplémentaires au sujet du texte de l’Ancien Testament.

Le pentateuque samaritain. Cette traduction des livres de Moïse a été faite pour faciliter le culte des Samaritains au mont Garizim (site rival de Jérusalem). Cette traduction est indépendante du texte massorétique et, parce qu’elle remonte au quatrième siècle av. J.-C., elle est un témoin précieux du texte de l’Ancien Testament. Bien qu’il y ait environ six mille différences avec le texte massorétique, la plupart sont mineures et sont reliées à des questions de grammaire ou d’orthographe.

Les Targums araméens. À la suite du retour du peuple d’Israël de sa captivité à Babylone, les Juifs avaient en général abandonné l’hébreu en faveur de l’araméen. Il était donc nécessaire de leur fournir l’Écriture dans leur langage. Les Targums en sont le résultat. Targums signifie « traductions » ou « paraphrases », et leur présentation des récits bibliques est plutôt libre ; néanmoins, les targums « fournissent un arrière-plan précieux à l’étude du Nouveau Testament, en plus de rendre témoignage au texte de l’Ancien Testament».

Fiabilité du texte du Nouveau Testament

Bien que nous ne possédions pas les autographes (ou écrits originaux) du Nouveau Testament, l’appui textuel aux livres du Nouveau Testament est impressionnant. Par exemple, il existe actuellement quelque cinq mille manuscrits qui contiennent soit le texte en entier soit des portions du Nouveau Testament.

Les manuscrits de papyrus. Ces manuscrits sont anciens et apportent un témoignage important. Par exemple, les Papyrus de la collection Chester Beatty remontent au troisième siècle.

Les manuscrits onciaux. Environ deux cent quarante manuscrits sont appelés manuscrits onciaux et sont écrits en lettres majuscules. Le Codex (qui signifie « livre ») Sinaiticus contient tout le Nouveau Testament et remonte à 331 apr. J.-C. Le Codex Vaticanus contient la plupart des textes du Nouveau Testament, et il remonte au quatrième siècle ; il est considéré comme l’un des plus importants manuscrits. Le Codex Alexandrinus, datant du cinquième siècle, contient tout le Nouveau Testament, sauf des parties de Matthieu ; il est utile pour déterminer

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le texte de l’Apocalypse. Parmi les autres onciaux se trouvent le Codex Ephraemi (Ve siècle), le Codex Bezae (Ve - VIe siècle), et le Codex de Washington (IVe - Ve siècle).

Les manuscrits minuscules. Il n’existe pas moins de 2 800 manuscrits minuscules, écrits en lettres minuscules dans une écriture cursive. Ils ne sont habituellement pas aussi vieux que les manuscrits onciaux. Certains de ces manuscrits minuscules révèlent une similarité de types de textes. C’est pourquoi ils sont regroupés par « familles » de textes.

Les versions. Un certain nombre de versions anciennes du Nouveau Testament contribuent également à la compréhension du texte exact. Plusieurs versions syriaques existent, dont le Diatessaron de Tatien (170 apr. J.-C.), l’Ancienne Syriaque (200 apr. J.-C.), la Peshitta (Ve siècle), et la Syriaque Palestinienne (Ve siècle). La Vulgate latine, traduite par Jérôme (vers 400 apr. J.-C.), a influencé l’Église occidentale. Les traductions coptes (traduites au IIIe siècle), comprenant la version sahidique et la version bohaïrique, ont influencé l’Égypte.

Grâce à l’étude des manuscrits grecs et des versions anciennes, les critiques textuels ont été en mesure de déterminer le texte qui était en grande partie celui des écrits originaux. Il est évident que la main de Dieu a préservé ces textes au travers des siècles pour permettre aux érudits de les rassembler et de reconstruire le texte aussi près que possible des écrits originaux.

ILLUMINATION DE LA BIBLE

Définition de l’illumination

Puisque la Bible a été « expirée » par Dieu et qu’elle est donc d’un genre tout à fait différent des autres œuvres littéraires, il est indispensable pour l’homme qu’il reçoive l’aide de Dieu pour comprendre la Bible (1Co 2:11). De plus, l’esprit de l’homme non régénéré, obscurci par le péché, ne peut pas appréhender les vérités spirituelles (1Co 2:14). L’œuvre d’illumination est donc indispensable pour rendre l’homme capable de comprendre la Parole de Dieu (voir Lu 24:44, 45). L’illumination peut ainsi se définir comme étant « le ministère du Saint-Esprit par lequel il éclaire ceux qui entretiennent une véritable relation avec lui, pour qu’ils comprennent la Parole de Dieu écrite ».

Explication de l’illumination.

On a tendance à confondre illumination avec révélation et inspiration. La distinction est importante : « En référence avec la Bible, la révélation concerne le contenu ou la matière, l’inspiration se rapporte à la méthode pour écrire ce contenu, et l’illumination concerne le sens de ce contenu. » Au moment où le croyant est sauvé, il est habité par le Saint-Esprit, qui lui révèle alors les vérités de Dieu (illumination) (1Co 2:9-13). Puisque Dieu seul connaît « les choses de Dieu », il est donc essentiel que l’Esprit de Dieu instruise le croyant. Ce ministère du

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Saint-Esprit a été annoncé d’avance par Jésus dans le discours de la chambre haute. Jésus a annoncé que l’Esprit les enseignerait (Jn 14:26), les guiderait dans toute la vérité (Jn 16:13), et leur révélerait les vérités de Dieu (Jn 16:14, 15). De plus, ce ministère de l’Esprit touche l’esprit du croyant (Ro 12:2; Ep 4:23; Col 1:9, 10), son cœur et sa volonté (Ac 16:14; Ep 1:18).

Plusieurs principes importants sont fondamentaux dans l’interprétation de l’Écriture.

Interprétation littérale

L’interprétation littérale signifie que les mots et les phrases de l’Écriture sont compris dans leur sens normal - la manière dont les mots sont compris dans une communication normale. C’est le sens littéral ou normal des mots qui forme la base de la communication. Bibliquement parlant, il existe un précédent en faveur de l’interprétation littérale du Nouveau Testament. Les prophéties de l’Ancien Testament, comme celles du Psaume 22, d’Esaïe 7:14; 53:1-12 ou de Michée 5:2, se sont toutes accomplies littéralement.

Relations grammaticales.

Puisque nous reconnaissons l’inspiration verbale (mots) et plénière (dans son entier) de l’Écriture, il nous incombe de porter attention aux mots de l’Écriture. Les liens grammaticaux sont importants à étudier parce que les mots sont en relation les uns avec les autres ; il est par conséquent indispensable d’étudier les temps des verbes, les pronoms, les prépositions, conjonctions et les règles de la syntaxe.

Contexte historique.

Le contexte historique est important en tant que cadre à partir duquel on peut interpréter l’Écriture. Chaque livre de la Bible a été écrit dans un contexte historique qui devrait être compris, et ce, afin de nous aider à interpréter le texte fidèlement.

Contexte littéraire

L’interprétation contextuelle comprend trois étapes principales.

1. L’étude du contexte immédiat . Le contexte immédiat devrait être étudié soigneusement ; plusieurs paragraphes précédents et suivants devraient être étudiés.

2. L’étude du contexte plus éloigné . La section principale du livre (en général 2 ou 3 chapitres) dans laquelle apparaît le passage devrait être étudiée.

3. La considération du contexte du livre entier . L’accent du livre tout entier devrait être étudié.

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Le sujet de l’interprétation est un sujet majeur en soi et qui est extrêmement important pour une juste compréhension de l’Écriture.

ETUDE DE L’ANCIEN TESTAMENT

La Genèse

INTRODUCTION

1. Le contexte historique

On sait peu de choses sur l’origine et sur l’auteur du livre de la Genèse. Il fait partie du Pentateuque que la tradition juive et le N.T. attribuent à Moïse (cf. Jn 1.17; 5.46; 7.19, 23). En général, on aborde la question de l’auteur de la Genèse dans le cadre de théories qui considèrent l’histoire littéraire du Pentateuque comme un ensemble. Il convient de distinguer au moins deux types de contextes historiques dans le livre de la Genèse : 1° celui dans lequel le livre a été rédigé et2° celui dans lequel se sont déroulés les événements qu’il décrit. Le premier se rapporte à un moment et un lieu précis pour la rédaction du livre, tandis que le second couvre toute une série de situations (p. ex. le jardin d’Éden, le déluge, la ville de Babylone, le pays de Canaan et l’Égypte).

2. L’unité

Une unité facilement reconnaissable ainsi qu’un manque évident d’homogénéité, telles sont les deux caractéristiques du livre de la Genèse. L’auteur, de façon assez analogue aux auteurs des Évangiles du N.T. et des derniers livres historiques de l’A.T., semble avoir rédigé son ouvrage en s’inspirant de récits « archivés » des grandes actions de Dieu dans le passé. Nous savons, d’après les références citées dans les premiers livres historiques, que de tels récits sont conservés très tôt dans l’histoire d’Israël (Ex 17.14 ; No 21.14 ; Jos 10.13). Il est donc possible que des récits similaires aient été retenus bien auparavant dans les familles des patriarches et de leurs ancêtres tribaux. Les récits de la Genèse semblent être majoritairement composés d’histoires courtes, sans liens entre elles, imbriquées les unes aux autres pour former de plus grandes unités au moyen de différentes tables géographiques et généalogiques. Entre ces récits distincts, il ne faut donc pas s’attendre à trouver une uniformité absolue dans le style et le vocabulaire, etc., pas plus qu’on en trouvera une dans les derniers livres historiques. En effet, il semble plus probable que l’auteur ait rédigé ses écrits sous la direction de Dieu, exactement comme il les a reçus, sacrifiant l’uniformité à la fidélité historique.

3. L’auteur

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Page 25: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

La question qui se pose tout naturellement est de savoir qui a écrit ou composé la version finale de la Genèse. Qui a assemblé tous ces récits ? L’auteur de la Genèse qui fait partie du Pentateuque, est très certainement celui qui a rédigé le Pentateuque dans son intégralité. Il ne parle jamais de lui-même dans son ouvrage, ni ne dévoile son identité. Une tradition ancienne et fiable a attribué la paternité de ce livre à Moïse. Il est vrai que tout au long des récits du Pentateuque, Moïse est le plus souvent associé à la rédaction des faits qui y sont relatés (Ex 17.14; 20.1 ; cf. aussi Jos 8.31-32). Il ne fait pas de doute que pour Jésus et les auteurs du N.T., Moïse était l’auteur du Pentateuque (p. ex. Jn 5.46).

4. Le but

Pour arriver à la forme finale du Pentateuque canonique, il a fallu sélectionner et mettre en place des passages relevant au moins de quatre types littéraires distincts : narratif, poétique, juridique et généalogique. Les textes généalogiques remplissent une fonction importante dans les premières parties du Pentateuque, surtout dans le livre de la Genèse, mais ne permettent pas d’aboutir à des conclusions probantes quant à la forme ou à la structure du Pentateuque dans son ensemble. Le même verdict s’impose si l’on considère la panoplie de textes juridiques présents dans le Pentateuque. Certes, ces textes sont d’une importance indiscutable, mais ils ne semblent pas avoir servi à structurer tout le Pentateuque.

L’Exode

INTRODUCTION

1. Le titre

« Exode » signifie « sortie », « départ ». Dans la bible hébraïque, ce livre commence avec la conjonction « et » qui met l’accent sur le fait qu’on a considéré l’Exode comme une continuité de la Genèse ainsi que comme une partie intégrale des cinq livres constituant la première division du canon hébreu : la Torah (signifiant « loi », « instruction », « enseignement » . À partir du deuxième siècle apr. J.-C., ces cinq premiers livres seront appelés « le Pentateuque » (c.-à-d. « les cinq livres »).

2. L’auteur

De nombreuses affirmations internes en attribuent directement la paternité à Moïse (17.14; 34.4, 27-29; 24.4; 20.22-23.33). D’autres livres de l’A.T., dans lesquels Moïse est également associé à la rédaction de l’Exode (cf. Jos 1.7; 8.31-32 ; 1R 2.3 ; 2R 14.6 ; et d’autres) le confirment. Les écrivains du N.T. soutiennent également la paternité mosaïque de ce livre (cf. Mr 12.26 et Ex 3.6 ; Lu 2.22-23 et Ex 13.2 ; Mr 7.10 et Ex 20.12; 21.17).

3. La date de rédaction

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Moïse s’est engagé, pour la première fois, à conduire les Israélites après son quatre-vingtième anniversaire (7.7). La date de rédaction de l’Exode se situe probablement entre son quatre-vingtième et cent-vingtième anniversaire, où l’errance dans le désert et sa vie approchent de leur fin (De 34.7). La date approximative de la rédaction repose sur la date fixée pour l’exode hors d’Égypte.

4. La date de l’exode

Le livre de l’Exode n’offre nulle part ailleurs suffisamment de données pour faire correspondre de façon certaine les événements bibliques avec la chronologie égyptienne. Le texte parle seulement « d’un nouveau roi qui n’avait point connu Joseph » (1.8), d’un « Pharaon » anonyme (1.11, 19, 22; 2.15), ou d’un « roi d’Égypte » (1.15; 2.23). Il convient de remarquer que « Pharaon », qui signifie « grande maison » et désigne la résidence du roi et de sa famille, deviendra pour la première fois sous la dix-huitième dynastie d’Égypte, un titre appliqué au roi lui-même. Ainsi, même quand Exode 2.23 dit que le roi ou le « Pharaon » de l’oppression est mort il ne peut s’agir du Pharaon de l’exode (cf. 4.19). Il n’existe pas de preuve interne pour les identifier de façon précise.

Pour déterminer l’identité de ces deux Pharaons, deux points de vue sont fréquemment soutenus : 1° situer l’exode sous les Pharaons de la dix-huitième dynastie (env. 1580-1321 av. J.-C.), et2° le situer sous les Pharaons de la dix-neuvième dynastie (env. 1321-1205 av. J.-C.). Pour tout commentaire sur ce sujet, voir EBC, 2. 288-91 ou ZPEB, 2. 432-36. Généralement, les érudits conservateurs optent en faveur de la date la plus ancienne pour l’exode, la position retenue dans ce commentaire.

5. La théologie

Une partie de la théologie la plus riche de l’A.T. se trouve dans l’Exode. Ce livre pose essentiellement les bases de la théologie de la révélation de Dieu qui dévoile sa personne, sa rédemption, sa loi, et son adoration. Il instaure également la grande institution du sacerdoce et du rôle du prophète, et rend formelle la relation entre Dieu et son peuple dans l’alliance.

L’Exode renferme des révélations détaillées sur la nature de Dieu et la signification de sa présence (comme l’indique son nom Yahvé [« l’Éternel »] et sa gloire). Ses attributs de justice, de véracité, de miséricorde, de fidélité et de sainteté sont mis en exergue. Dieu est aussi le Dieu de l’histoire, car nul n’est comme lui « magnifique en sainteté, digne de louanges, opérant des prodiges » (15.11). Ainsi, ni la détresse d’Israël, ni les plaies d’Égypte ne se trouvent hors de son contrôle. Dans ce livre, Dieu commence à accomplir les promesses qu’il a annoncées des siècles auparavant aux patriarches.

L’Exode insiste particulièrement sur la théologie de la délivrance et du salut. L’essentiel de la théologie de la rédemption telle qu’elle est reconnue dans le N.T. (voir Jn 1.29 ; 1Co 5.7),

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apparaît le plus nettement dans les récits de la Pâque (ch. 12) et de la conclusion de l’alliance (ch. 24).

L’Exode nous enseigne aussi comment vivre. Il expose la base de l’éthique et de la moralité biblique en premier lieu, dans le caractère bienveillant de Dieu, puis dans les dix commandements et les ordonnances du livre de l’alliance.

Le livre s’achève sur un examen élaboré de la théologie de l’adoration. Le tabernacle coûte énormément en temps, en efforts et financièrement. Cependant, sa signification et sa fonction indiquent le but ultime que doivent poursuivre les hommes : glorifier Dieu et jouir à jamais de sa présence.

Le Lévitique

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan historique et le contenu

Le contenu du Lévitique, livre central du Pentateuque, se limite pour une grande part à ce qui est révélé sur le Sinaï après l’Exode et avant l’errance d’Israël dans le désert. Le livre de la Genèse dresse l’arrière-plan patriarcal du peuple d’Israël. Cependant, au temps de l’Exode, le grand législateur Moïse forme ce peuple pour qu’il devienne une nation. Les Israélites quittent l’Égypte le quatorzième jour de Nisan, mois qui marque le début du printemps. Il s’agit d’une date repère : « le premier des mois de l’année » (Ex 12.2b). Le quinzième jour du deuxième mois, les enfants d’Israël parviennent au désert de Sin (Ex 16.1). Le troisième mois (Ex 19.1), ils arrivent au Sinaï et campent en face de la montagne. Ils y resteront près d’une année. La seconde Pâque sera célébrée au Sinaï (No 9.5).

2. La date et l’auteur

Le point de vue adopté pour déterminer la date et la paternité du Lévitique dépend largement de celui retenu pour le Pentateuque tout entier. La tradition d’Israël déclare unanimement que les lois rituelles du Lévitique, ainsi que les autres livres du Pentateuque, ont été donnés par Dieu à travers Moïse. Voir le commentaire à ce sujet dans l’introduction de l’Exode 1.1 "Lé 1:1".

3. La théologie

1. Le péché

La doctrine biblique du péché est sous-jacente dans le Lévitique. Cela apparaît clairement à la fois dans le choix de mots précis (p. ex. « iniquité » dans 10.17; 16.22; 18.25b ; « péché » dans 19.22; 22.16 ; « transgressions » dans 16.16; 21 ; le verbe « pécher » dans 4.2-3) ainsi que dans les châtiments prescrits pour punir les offenses commises. Les êtres humains ont un problème

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avec le péché : ils violent la loi de Dieu. Un tel péché doit être expié, c’est-à-dire que la pénalité doit être payée et la culpabilité retirée, afin que la communion entre Dieu et son peuple soit rétablie. Dieu a révélé le système de sacrifices comme moyen d’expiation.

2. Le sacrifice

Le système de sacrifices de l’ancien Israël est le sujet le plus important abordé dans le Lévitique. Ce livre commence par une description des cinq principaux sacrifices et de leurs règles (ch. 1-7). Le chapitre 16 décrit les rituels du grand jour des expiations. Bien qu’aucun passage du Lévitique ne traite de la signification du sacrifice de façon formelle, de nombreux éléments nous offrent des indications considérables. Il est clairement affirmé dans ce même chapitre, que le péché est expié par le sacrifice et que la culpabilité est enlevée (cf. Ps 103.12). Selon la perspective historique du système sacrificiel de l’A.T., la mort de la victime expiatoire représente la justification que Dieu donne de la mort de Christ, et le sang répandu de l’agneau ou de la chèvre annonce le sang de Christ répandu sur le calvaire pour expier nos péchés (voir en particulier Hé 8-10 ; aussi Ro 3.25-26).

3. La pureté

De nombreux passages de ce livre traitent du thème de la pureté et de son lien avec la sainteté. Deux points principaux sont à prendre en considération : le concept de sainteté éthique en tant que séparation du péché et le concept de sainteté rituelle en tant que séparation de différentes souillures. La sainteté de Dieu implique tant la sainteté éthique que la sainteté rituelle. Par rapport à la sainteté éthique, « le code de sainteté » (ch. 17-26) met en exergue plusieurs commandements éthiques appropriés dans de nombreux domaines de la vie des Israélites. Ces commandements se résument tous en un principe général répété dans plusieurs passages du livre : « Soyez saints, car je suis saint, moi, l’Éternel, votre Dieu » (19.2 ; cf. 11.44-45; 20.7-8; 21.8).

Les Nombres

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan historique et le but

Le nom du livre vient du titre Arithmoï de la LXX (la traduction grecque de l’A.T.), qui deviendra Numeris en latin. Ce nom est issu des listes de recensement qui se trouvent aux chapitres 1 à 4 et 26. Dans la bible hébraïque, un terme juif pour désigner le livre s’inspire du quatrième mot du verset 1 qui signifie littéralement « Dans le désert », une description particulièrement

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Page 29: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

adaptée du contenu de Nombres. En effet, cela décrit ce qui est survenu au cours des trente-huit années d’errance dans le désert après l’exode.

Le premier destinataire du livre est le peuple d’Israël de la deuxième génération depuis l’exode, qui attend l’ordre de Dieu de traverser le Jourdain pour conquérir le pays de Canaan. Ce livre décrit la vie du peuple de la première génération, mais son enseignement est destiné à ceux qui sont sur le point d’entrer en Canaan.

Il a pour but de soumettre la nouvelle communauté à l’obéissance envers l’Éternel en lui rappelant le courroux de Dieu sur ses parents à cause de leur non-respect de l’alliance. Il vise aussi à encourager cette nouvelle communauté à croire aux promesses renouvelées de Dieu alors qu’elle le suit dans son héritage en Canaan, et aussi à la pousser à adorer Dieu et à se réjouir de son salut. En d’autres termes, ce livre a été rédigé pour encourager la confiance spirituelle du peuple qui est sur le point de quitter le désert pour passer en Canaan.

2. L’auteur et la date On a traditionnellement attribué le livre des Nombres à Moïse, le grand prophète de Dieu. Cette conclusion s’appuie sur 1° les déclarations concernant l’activité de Moïse en tant qu’écrivain (No 33.1-2 ; Ex 17.14; 24.4; 34.27 ; et d’autres) ;2° la supposition selon laquelle le Pentateuque est une unité et provient du même auteur ;3° l’excellente formation de Moïse en Égypte, qui l’aura préparé à cette grande tâche littéraire (voir Ac 7.22) ;4° la participation de Moïse en tant que principal protagoniste dans le récit de la délivrance et des expériences d’Israël dans le désert ; et5° les citations du N.T. qui parlent de Moïse comme étant l’auteur des livres de la Torah (Mt 19.8 ; Jn 5.46-47 ; Ro 10.5 ; et d’autres).

3. Les thèmes théologiques

a. L’ancien et le nouveau

Le livre des Nombres présente le concept de la colère punitive de Dieu sur son propre peuple désobéissant. Toute la génération qui a été délivrée d’ennemis redoutables par l’intervention directe de l’Éternel, qui a formé une communauté sainte, et qui a été autorisée à participer à la sainte adoration de l’Éternel, perd la jouissance du pays promis à cause de sa rébellion contre la grâce de Dieu ainsi qu’à cause de son refus de croire que la puissance de Dieu puisse délivrer le peuple. Ce livre présente donc une réalité solennelle à faire froid dans le dos. Le Dieu d’Israël est aussi un feu dévorant : son courroux s’abat sur ses enfants égarés comme sur les nations ennemies d’Égypte et de Canaan. Même Moïse, du fait de sa désobéissance, n’échappe pas à la colère de Dieu.

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Cependant, dans sa colère, l’Éternel n’oublie pas sa miséricorde : une nouvelle génération se lève pour hériter du pays. L’association de la colère de Dieu avec sa miséricorde, de son courroux avec son amour, est une caractéristique marquée de ce livre qui fait partie de la Loi et des prophètes.

b. Balaam

Il ne fait aucun doute qu’un peuple qui a fait l’expérience de l’intervention miraculeuse de Dieu, mais qui ressent à présent son courroux, se pose des questions : Dieu en a-t-il vraiment fini avec nous ? En a-t-il fini avec la nation entière ? N’avons-nous plus d’espoir ? Dans l’une des sections les plus remarquables de la Bible, l’Éternel agit de façon providentielle et directe pour proclamer sa fidélité permanente à l’égard de son peuple en dépit de son infidélité constante. Il s’agit de l’histoire de Balaam.

On trouve en Balaam l’homologue païen de Moïse, l’homme de Dieu. Balaam est un prophète connu au niveau international, qui croit que l’Éternel Dieu est semblable à toute autre déité qu’il pense pouvoir manipuler par des actes divinatoires. Toutefois, Balaam apprend qu’une rencontre avec le Dieu d’Israël est fondamentalement différente de ce tout qu’il a connu jusque-là. Quand, il commence à prononcer ses paroles de malédiction contre la nation d’Israël à l’instigation de Balak, roi de Moab, il s’aperçoit que sa bouche est incapable d’exprimer autre chose que des bénédictions sur le peuple de Dieu, et les malédictions les plus dures sur ses ennemis. La bénédiction de Dieu sur Israël se trouve au cœur du livre des Nombres.

c. L’adoration

Le livre des Nombres contribue beaucoup à la théologie de l’adoration. Le concept du N.T. selon lequel, dans l’adoration, tout doit être fait de façon ordonnée et convenable (1Co 14.40) trouve son origine dans les Nombres. Ce livre nous instruit également sur les apparats et les processions, sur les fêtes et les jeûnes, sur les sacrifices obligatoires et les offrandes volontaires, sur les restrictions et les bénédictions. Les desseins continuels de Dieu pour son peuple de l’alliance y sont réaffirmés. Il contient d’importantes informations sur les modèles d’adoration spécifiques d’Israël, tels que la bénédiction aaronique (ch. 6) et les instructions pour la Pâque (ch. 9). Si le peuple de Dieu répond par la fidélité et l’obéissance, Dieu accomplira ses promesses et ses bénédictions.

Mais le livre des Nombres est aussi l’adoration de Dieu par Moïse et par ceux qui se rangent à ses côtés. Avec la grâce de Dieu, il peut également devenir pour nous un livre d’adoration. d. Les Nombres

Ce qui, pour certains, semble être l’élément le plus gênant du livre - les nombres qui paraissent totalement exagérés pour une petite nation au début de son existence - en est sa couronne et sa gloire. Ces nombres sont un témoignage de la bénédiction de Dieu. Ils représentent l’accomplissement de son alliance. Ils annoncent les multitudes qui seront comme les étoiles du

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ciel et comme le sable au bord de la mer. Les nombres font l’éloge de la gloire de Dieu sur son peuple.

4. Les grands nombres

a. Le problème

Le nombre des membres des tribus d’Israël qui est affirmé et sous-entendu dans ce livre semble trop important pour être historiquement crédible. Si le nombre des hommes de plus de vingt ans, rassemblés pour la guerre, s’élève de fait à plus de 600 000, la population totale devrait atteindre au moins deux millions de personnes, si ce n’est beaucoup plus ! Ce chiffre ne semble pas excessivement élevé pour notre société surpeuplée d’aujourd’hui, mais il semble presque impossible pour Israël dans les tout débuts de son existence.

Au premier semestre 1988, l’estimation de la population d’Israël était de 4 400 000, soit environ deux fois la taille de la nation pendant l’exode. Actuellement, la population d’Israël est répartie dans des villages et des hameaux dispersés, des petites villes et trois grandes villes. En observant les villes modernes tentaculaires avec leurs très grands immeubles, on se demande comment les anciennes campagnes, villages et villes ont pu accueillir une telle quantité de gens. Puisque le témoignage des méchants espions israélites est un rapport exagéré sur la taille des villes, leurs remparts imposants et la taille gigantesque des hommes (l’essence même de la peur), il en résulte au moins que la population de Canaan est nettement plus importante et puissante que la population israélite (voir De 4.38; 7.1) qui s’approche d’elle. Plus on y pense, plus ces chiffres nous surprennent. Nous pouvons nous poser des questions sur la population de Canaan pendant la période biblique. Puisqu’elle a probablement la même densité au VIII e siècle sous la colonisation israélite qu’au XV e siècle pendant l’époque cananéenne, il n’est simplement pas possible d’imaginer une force d’invasion israélite susceptible de s’élever à plusieurs millions, qui ait une quelconque raison de se confier en l’Éternel pour la conquête du pays. Par son nombre elle écraserait à elle seule la population native.

Nous nous trouvons face à un problème rebattu en ce qui concerne le grand nombre des familles d’Israël dans le livre des Nombres qui passe d’une croissance de population de soixante-dix personnes à plus de deux millions en quatre siècles seulement. Les Écritures nous assurent que la croissance de la population israélite est une œuvre spectaculaire de la grâce de Dieu et un accomplissement de sa promesse. Le récit de la croissance dans Exode 1.7 est catégorique : « Les enfants d’Israël furent féconds et multiplièrent, ils s’accrurent et devinrent de plus en plus puissants. Et le pays en fut rempli ». Cette croissance sans précédent est un accomplissement des nombreuses promesses de Dieu aux patriarches (voir Ge 17.2, 6; 22.17; 26.4; 28.14; 35.11; 48.4). Moïse peut utiliser la phrase patriarcale de l’abondance lorsqu’il relate son expérience en tant que leader du peuple : « L’Éternel, votre Dieu vous a multipliés, et vous êtes aujourd’hui aussi nombreux que les étoiles du ciel » (De 1.10 ; cf. Ex 32.13).

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Il y a pourtant des indications qui vont à l’encontre de cet énorme accroissement. L’une d’elles mentionne l’existence d’uniquement deux sages-femmes (Ex 1.15), sûrement totalement dépassées par leur travail dans une nation si grande ! Une autre souligne la minimisation rhétorique de la taille de la nation dans Deutéronome 7.7 : « car vous êtes le moindre de tous les peuples ». Une autre encore traite de la logistique pure d’au moins deux millions de personnes qui traversent la mer Rouge en une nuit et de leur organisation et approvisionnement dans le désert pendant une génération.

Ainsi, nous arrivons à cette conclusion : les nombres du livre des Nombres sont simplement trop grands !

Deutéronome

INTRODUCTION

1. Le nom

Le nom Deutéronome vient d’une mauvaise traduction de De 17.18. La LXX et la Vulgate ont traduit l’hébreu « une copie de cette loi » par des termes signifiant « la deuxième loi » ou « une répétition de cette loi ». D’après des informations internes, l’histoire commence dans le désert à l’est du Jourdain à Moab, le premier jour du onzième mois de la quarantième année - quarante années après l’exode hors d’Égypte (1.3). Le livre débute après la victoire de Moïse et des Israélites sur Sihon et Og, rois des Amoréens en Transjordanie (1.4).

2. Le caractère et l’auteur

En plus des nombreuses déclarations qui attestent que Moïse est celui qui a prononcé ces paroles, d’autres contenues dans le livre indiquent que Moïse est bien l’auteur du livre (cf. 1.5; 31.9, 22, 24, 30). D’autres livres de l’A.T. affirment la paternité mosaïque du Deutéronome (1R 2.3; 8.53 ; 2R 14.6; 18.6, 12), comme le font Jésus et les écrivains du N.T. (Mt 19.7-8 ; Mr 10.3-5; 12.19 ; Jn 5.46-47 ; Ac 3.22; 7.37-38 ; Ro 10.19).

Le Deutéronome peut être étudié sous divers angles : 1) comme un « livre de la loi » ; 2) comme une série de discours donnés par Moïse, répétant la plupart des informations légales précédentes du Pentateuque et ajoutant plusieurs autres éléments ; 3) comme une alliance-traité entre le souverain Éternel et son peuple, similaire à la fois dans la forme et le contenu à d’autres alliances-traités qui ont été retrouvées dans l’ancien Proche-Orient (avec un préambule, un prologue historique, différentes lois, une disposition pour remettre les copies des traités et pour une lecture régulière de ces traités, des témoins, et des malédictions et des bénédictions) ; 4) comme un abrégé d’instructions que l’Éternel donne aux Israélites, par l’intermédiaire de Moïse, alors qu’ils sont sur le point d’entrer en Canaan. Sur ces quatre points, il s’agit principalement d’un document renouvelant l’alliance. Ce document vise à préparer la

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nouvelle génération du peuple de Dieu de l’alliance à vivre de façon responsable et joyeuse sous l’autorité de Dieu dans le pays promis (c.-à-d., le troisième point).

3. Le but

Le but du Deutéronome est clairement annoncé par les phrases suivantes : « Maintenant, Israël, écoute » ; « voici les commandements » « vous ferez avec soin » (4.1-2, 5-6, 9-14, et d’autres). De telles exhortations sont souvent suivies des raisons justifiant l’obéissance à l’Éternel. Le motif existentiel fondamental dépasse la simple délivrance du peuple de l’Égypte et sa position à la frontière sud-est de Canaan, sur le point d’entrer dans le pays et de l’occuper comme le sien en accomplissement des promesses faites premièrement à Abraham, Isaac et Jacob, et à présent réitérées aux descendants des patriarches. Il est dans l’intention de Dieu d’éduquer la nation et de lui donner Canaan comme territoire national (cf. 6.18).

4. Les valeurs théologiques

Les valeurs théologiques du Deutéronome peuvent difficilement être exagérées. Ce livre est à l’origine de la révélation biblique historique, et est une source fondamentale pour la théologie de l’A.T. comme de celle du N.T. Quand les prophètes parlent de Dieu, ils parlent du Dieu et du message du Deutéronome, et de la relation incarnée dans cette alliance-traité. Les avertissements de condamnation figurant dans les livres des prophètes (spécialement Jérémie) sont les avertissements et les malédictions du Deutéronome. Les promesses de bénédiction accordées aux Israélites quand ces derniers vivent dans la foi, l’amour et l’obéissance à l’Éternel sont les bénédictions du Deutéronome.

Le mode de vie du peuple de Dieu constitue le fondement de toute révélation ultérieure sur le mode de vie qui est acceptable aux yeux de Dieu. Dieu a racheté son précieux héritage de l’esclavage en Égypte, et il est sur le point d’accomplir la promesse faite à Abraham, Isaac, et Jacob en lui donnant le pays promis. Les enseignements ultérieurs du N.T. sur l’amour de Dieu, la rédemption offerte à travers Christ, les sauvés comme héritage de Dieu, et l’accomplissement des promesses de Dieu aux personnes sauvées comme leur héritage de sa part, reposent sur le Deutéronome.

Dieu, dans ce livre, est personnel, éternel, omnipotent, souverain, déterminé, aimant, saint, et juste. La connaissance de sa personne et de sa volonté est communiquée par une révélation logique, directive, exhortative, informative, et prédictive. Aucun autre dieu n’existe. L’élément le plus important de la théologie subjective du Deutéronome est celui de l’engagement complètement inconditionnel et absolu du peuple de l’Éternel. Rien d’autre n’est acceptable, surtout pas le syncrétisme avec d’autres dieux ou d’autres pratiques religieuses. Le peuple appartient à l’Éternel seul !

JOSUÉ

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INTRODUCTION

1. Le contexte historique

Le Pentateuque fournit l’arrière-plan historique et théologique du livre de Josué. La vocation d’Abraham était la réponse initiale de Dieu à la situation de l’humanité dépeinte dans Genèse 1 à 11. Dieu était en train de préparer un peuple d’où sortirait le Messie. Comme élément de cette préparation, Dieu a promis de donner un pays aux descendants d’Abraham (Ge 12.7; 13.14-17; 15.7 et d’autres). Le livre de Josué se concentre principalement sur la réalisation de cette promesse. L’auteur se donne beaucoup de peine pour démontrer que l’œuvre de Moïse et celle de Josué sont liées l’une à l’autre, la première en tant que préparation, la seconde comme accomplissement.

Le livre de Josué est étroitement lié à celui du Deutéronome ; le langage lui-même est semblable. Deutéronome s’efforce de préparer Israël à l’entrée dans le pays promis ; Josué décrit cette entrée. Autrement dit, dans Exode, Dieu a appelé Moïse à façonner le peuple pour en faire une nation puissante et l’arracher à l’esclavage. La caractéristique centrale de son leadership est la transmission de la loi comme guide pour Israël. Maintenant, Josué est appelé à succéder à Moïse. Comme dans le cas de Moïse, sa position fait de lui le chef religieux, militaire, social et civil du peuple. Les quarante années passées dans le désert l’ont préparé aux aspects variés de son rôle (cf. Ex 17.8-16; 24.12-13 ; No 13.1-25; 32.28-29 ; De 31.1-8).

La date de la conquête continue d’être controversée. La date traditionnelle (vers 1400 av. J.-C.) s’appuie sur 1Rois 6.1 qui précise que la quatrième année du règne de Salomon correspond à « la quatre cent quatre-vingtième année » après l’exode. Il est assez solidement établi que la quatrième année du règne de Salomon se situe vers 966 av. J.-C., ce qui fixerait l’exode vers 1446 av. J.-C. et la conquête quarante ans plus tard. Le nombre total des années où les juges règnent semblent corroborer ces chiffres. D’autres savants évangéliques préfèrent toutefois situer l’exode au XIII e siècle av. J.-C. en faisant de la ville de Ramsès, mentionnée dans Exode 1.11, la ville à laquelle Ramsès II (qui vit autour de 1290 av. J.-C.) donnera son nom. Pour eux, les 480 ans mentionnés dans 1Rois 6.1 représentent douze générations (12 générations de 40 ans pour une génération traditionnelle) ; si une génération couvre plutôt vingt-cinq ans, alors le nombre d’années antérieures au règne de Salomon est ramené à 300 ; il s’ensuit que l’exode aurait lieu en 1260 av. J.-C. et la conquête en 1220.

2. L’auteur

Le Talmud présente Josué comme l’auteur du livre de Josué. Cette idée est séduisante du fait que le livre porte son nom. De plus, elle confère plus de crédibilité aux récits s’ils sont les comptes rendus d’un témoin oculaire. Les partisans de cette thèse attribuent à Éléazar et à Phinées le récit de la mort de Josué et la rédaction de quelques brefs passages que Josué ne peut pas avoir écrits. Le livre lui-même n’indique pas le nom de son auteur ; l’A.T. ne le précise pas non plus.

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Le nom du livre se rattache à son personnage principal, Josué, dont le nom signifie soit : « Sauve Yahvé ! » ou « Yahvé sauve ». C’est un nom que porte à juste titre l’homme que l’Éternel a choisi pour conduire triomphalement son peuple dans le pays promis. « Jésus » est la forme grecque du nom Josué.

3. La date

Si Josué est l’auteur du livre, la date de rédaction est relativement facile à déterminer : avant la mort de Josué et après le dernier événement rapporté dans le livre. Josué a cent dix ans à sa mort (24.29). S’il est sensiblement du même âge que Caleb, sa mort et la rédaction du livre pourraient se situer une trentaine d’années après le début de la conquête, c’est-à-dire vers 1370 av. J.-C. dans l’hypothèse de la datation la plus reculée. Mais d’autres indices font penser à une date plus tardive.

4. L’occasion et le but

L’auteur poursuit visiblement deux buts complémentaires en écrivant :

1° montrer que Dieu a été fidèle dans l’accomplissement de sa promesse à Abraham de lui donner le pays de Canaan ainsi qu’à ses descendants ;

2° démontrer que le Dieu qui garde son alliance est également juste et qu’il bénira le peuple de l’alliance seulement si celui-ci obéit à sa parole.

5. Les richesses théologiques

Comme tous les autres livres de la Bible, le livre de Josué est avant tout un ouvrage de théologie. Dieu y révèle différents aspects de sa personne :

1° Dieu est le Dieu d’Israël. En donnant le pays à Israël, il accomplit la promesse faite à Abraham et réaffirmée au peuple d’Israël lors de l’exode. Il se lie donc par alliance avec certains êtres humains, mais pas avec tous. Nous avons donc déjà là des éléments d’une doctrine de l’élection.

2° Dieu est saint. Il ne tolère pas la méchanceté et la rébellion. Les Cananéens sont chassés à cause de leur péché et de leur méchanceté ; Dieu traite les Israélites selon le même principe (cf. ch. 7 ; cf. aussi De 28-29).

3° Dieu est plein de grâce. Tous ceux qui sont prêts à se détourner de leurs pratiques païennes et à le reconnaître sont épargnés (p. ex. Rahab, les Gabaonites).

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4° Dieu est le Dieu de la création. Toute la création est soumise à son contrôle souverain ; il peut donc opérer des miracles étonnants dans la nature (comme ceux que ce livre rapporte : 3; 6 ; 10.9-14 ; et d’autres).

5° Dieu est le Dieu de l’univers tout entier. Il peut décider d’accueillir dans son peuple la prostituée Rahab sur la base de son témoignage quant à son règne universel (2.11). Le pays lui appartient et il peut le donner à qui il veut. 6° Dieu est un guerrier. Il combat pour Israël en ordonnant l’assaut, élaborant la stratégie, aidant par des actes surnaturels et accordant la victoire à Josué.

6. Les problèmes particuliers

Le plus grand problème que soulève le livre de Josué est l’extermination des Cananéens. Hommes, femmes et enfants figurent parmi les choses qui doivent être dévouées « à l’Éternel par interdit » (6.17). Ce n’est pas la première mention de cette pratique en Israël. Dans Nombres 21.2-3, les Israélites s’engagent à dévouer par interdit les villes cananéennes du Néguev, si Dieu accepte de donner la victoire aux Israélites. Comment justifier ce qui semble un génocide ?

Dieu a pris soin de préciser qu’il ne détruit pas les Cananéens de façon arbitraire dans le seul but de donner le pays aux Israélites. C’est leur méchanceté qui l’incite à les chasser ; si, à leur tour, les Israélites se montrent infidèles, ils seront eux aussi chassés du pays (comme au temps de l’exil ; cf. Ge 15.16 ; 2Pi 2.9).

L’extermination des Cananéens n’est qu’une des nombreuses preuves que le mal est une réalité et que le diable existe bel et bien. Le combat contre lui conduira le Fils de Dieu sur la croix ; c’est uniquement par ses souffrances et sa mort que Dieu vaincra le mal une fois pour toutes. Ceux qui ne veulent pas se séparer de leur péché par la repentance seront détruits avec leur péché (cf. Jn 8.24). La sévérité de Dieu à l’égard du péché et des pécheurs n’est donc que l’envers de sa grâce et de son amour. Le péché et le mal détruisent les gens qu’il aime et empêchent le plein établissement de son royaume glorieux. Dans le Livre de la Sagesse, il est dit que Dieu a fait le choix d’anéantir les Cananéens peu à peu plutôt qu’en une seule fois, pour leur donner l’occasion de se repentir.

Le massacre d’enfants innocents est la chose la plus difficile à comprendre. Mais nous devons nous rappeler que la mort n’est pas l’ultime destinée de la race humaine, ni son plus grand mal. Un jour, Dieu expliquera pleinement ses actions, ce que lui seul peut faire.

JUGES

INTRODUCTION

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1. Le titre

Le titre français du livre correspond aux titres adoptés par le TM, (« Les juges »), la LXX (« Les juges ») et la Vulgate (« Livre des Juges »). Dieu suscite ces « juges » pour délivrer Israël de l’oppression. Bien que revêtus d’autorité divine, les juges ne deviendront pas des chefs héréditaires.

Huit hommes du livre sont clairement présentés comme ayant chacun été « juge en Israël » ou pour avoir « conduit Israël », ou selon d’autres versions pour avoir pris la direction d’Israël ou l’avoir dirigé (3.10; 10.2-3; 12.7, 8-9, 11, 13-14; 15.20; 16.31). Même si d’autres, comme Ehud (3.12-30) et Gédéon (6.1-8.32) font partie des juges, il n’est pas mentionné précisément qu’ils sont « juge en Israël ». Une femme est également « juge en Israël » ; il s’agit de Débora (4.4-5). Ailleurs, l’Écriture appelle « juges » les chefs qui couvrent la période qui s’étend de la mort de Josué jusqu’au roi Saül (Ru 1.1 ; 2S 7.11). Éli et Samuel sont les deux derniers juges. On dénombre ainsi en tout quinze juges en considérant que Barak est juge avec Débora et en incluant Éli et Samuel aux treize juges du livre des Juges.

2. L’arrière-plan historique

Le livre des Juges couvre la période qui va de la mort de Josué aux débuts de la monarchie. Des troubles politiques et religieux accompagnent les efforts d’Israël pour occuper le pays conquis, divisé par tirage au sort sous la conduite de Josué. À part les Cananéens qu’Israël combattra à l’époque de Débora, ses ennemis viennent de l’extérieur. La plupart d’entre eux, comme les Moabites, les Madianites et les Ammonites sont heureux de venir régulièrement piller le pays d’Israël. Par contre les Philistins, qui envahissent en grand nombre la Palestine à cette époque, contestent à Israël la possession permanente du pays. Hélas, il arrive aussi que les Israélites s’entre-déchirent. Manassé ravage Éphraïm (ch. 12) et Benjamin est presque anéanti par les autres tribus (ch. 20-21). Au cours de la période qui s’écoule entre Josué et Samuel, Israël tombe bien bas sur le plan moral et spirituel. Le cycle péché - oppression se répète souvent. Dieu suscite parfois une Débora ou un Gédéon pour ramener le peuple à lui, mais les périodes intermédiaires de réveil spirituel sont toutes de trop courte durée.

Les événements rapportés dans les Juges s’échelonnent sur une période de 410 ans si on considère qu’ils se suivent. Mais un laps de temps aussi long ne cadre avec aucune chronologie acceptée de l’histoire ancienne d’Israël. Il faut donc supposer que les périodes couvertes par certains juges se chevauchent. Il se peut, par exemple, que Samson et Jephthé soient juges en même temps, l’un à l’ouest (en Canaan), l’autre à l’est (en Transjordanie ; 10.7). La plupart des chiffres s’insèrent dans un cadre historique satisfaisant si on accepte la date la plus reculée pour l’exode (vers 1446 av. J.-C.) ainsi que pour la conquête (qui commencera 40 ans plus tard).

3. L’auteur et la date

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On ne connaît pas l’auteur du livre des Juges. C’est peut-être un proche de Samuel mais, contrairement à celui-ci, il n’attire pas l’attention sur les dangers inhérents à la monarchie. Le livre forme un tout uni, qui se divise en trois parties : 1° les succès et les échecs des Israélites en Canaan (1.1-2.5) ;2° la période du gouvernement des juges (2.6-16.31) ;3° deux récits soulignant le péché et la corruption (17.1-21.25).

4. Le but

Le but primordial du livre des Juges est de montrer que la condition spirituelle d’Israël détermine sa situation politique et matérielle. En ayant méprisé les avertissements de Josué et adoré les dieux de Canaan, les Israélites sont tombés sous le coup de la colère d’un Dieu irrité qui a permis que la nation passe sous la domination de tyrans et d’envahisseurs. Peu de livres de la Bible exposent la dépravation humaine comme le fait celui-ci. Quand, du milieu de sa souffrance, la nation se repent de ses péchés, crie à Dieu, implore sa miséricorde et revient à lui en promettant à nouveau de lui obéir, dans sa grâce, il envoie des libérateurs pour arracher le peuple à l’oppression.

Ce livre démontre également que sans un roi, Israël n’est pas capable de se conformer au dessein divin le concernant. Les Israélites sont incapables de se gouverner d’après la loi de Moïse, une preuve qu’ils ont besoin d’un roi. L’auteur considère la monarchie comme indiscutablement meilleure que l’anarchie. Il s’ensuit qu’une nation dirigée par un roi pieux jouira de la prospérité sous la bénédiction de Dieu.

Les événements rapportés dans les Juges servent aussi à combler le fossé entre l’époque de Josué et celle de Samuel.

Ruth

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan

Selon tous les critères, l’histoire de Ruth est une nouvelle classique. Elle a été qualifiée de plus sublime nouvelle jamais écrite pour l’époque. L’intrigue se déroule de façon naturelle au fil des conversations entre les principaux personnages : Ruth, Naomi et Boaz.

Le livre décrit une situation du temps des juges. Mais l’incertitude chronologique est telle qu’il est impossible de dater cette période de façon plus précise que le dernier tiers du deuxième millénaire av. J.-C. Il s’agit de la période qui s’écoule entre le début de la conquête sous Josué et

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l’établissement de la monarchie sous Saül, une période de chaos moral et politique en Israël. Il n’y a pas de gouvernement centralisé fort ni de chef ; le peuple se détourne régulièrement de Dieu, et des peuples voisins viennent constamment harceler la nation désorganisée et l’envahir (Jug 2.14-15; 21.25).

2. L’auteur et la date

La tradition juive dans le Talmud accepte Samuel comme auteur du livre de Ruth. Les ressemblances de langage entre les livres de Ruth, des Juges et de Samuel expliquent le lien avec cet auteur. Mais rien dans le livre lui-même n’aide à l’identifier, même si on sait que c’était un artiste littéraire et un habile enseignant. Il a très certainement écrit le livre durant ou après le règne de David, puisque l’un de ses buts est de montrer que Ruth, une Moabite, est une ancêtre du roi David (4.18-22).

3. Les valeurs théologiques

Le livre de Ruth ne s’intéresse ni aux grands événements ni aux institutions de l’histoire d’Israël, mais aux difficultés et aux préoccupations d’une famille, à Bethléhem. À travers l’histoire des expériences de cette famille, Ruth présente de façon discrète mais puissante le concept de la providence divine. On n’y trouve aucune conversation directe avec Dieu ou appels qui lui soient adressés, bien que Dieu soit mentionné en plusieurs endroits du livre et que le serment solennel : « l’Éternel est vivant » (3.13) soit invoqué. La providence divine est clairement derrière tous les événements de ce livre : la famine, les décès, le choix de Ruth de glaner dans le champ de Boaz, son attirance pour elle et finalement leur mariage.

La relation d’alliance qui lie le peuple d’Israël à Dieu et ses membres les uns aux autres sous-tend une grande partie du livre. Le mot « alliance » ne se trouve pas dans Ruth, mais est un facteur important dans le déroulement de l’intrigue du livre. L’attachement éloquent de Ruth au Dieu de sa belle-mère (1.16-17) exprime son acceptation d’une relation formulée plus tôt par Israël au mont Sinaï (Ex 24.3). Quand Boaz félicite Ruth pour ses tendres soins à l’égard de Naomi (2.12), il se fait l’écho de la théologie du Deutéronome (De 28.2). Même la plainte amère de Naomi (1.21) se fonde sur la présupposition de la fidélité et de la loyauté de Dieu en raison de sa relation d’alliance avec son peuple.

1 Samuel

INTRODUCTION

1. Le titre

Dans le canon juif, les deux livres de Samuel n’en font qu’un à l’origine. Comme les Rois et les Chroniques, légèrement plus longs que Samuel, le rouleau de Samuel est trop encombrant pour être manipulé facilement et sera donc été scindé en deux parties dans les premiers manuscrits

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de la LXX. Ce n’est qu’à partir du XV e siècle de notre ère que le texte hébreu de Samuel sera séparé en deux livres. On comprend fort bien que le livre ait eu « Samuel » pour titre en ancien hébreu, puisque le prophète Samuel en est le personnage principal aux premiers chapitres.

2. L’auteur et la date

D’après le Talmud babylonien, le juge et prophète Samuel a écrit les 24 premiers chapitres de 1 Samuel (1S 25.1 relate sa mort) et le reste du corpus de Samuel est l’œuvre de Nathan et de Gad (une théorie qui s’appuie sur 1Ch 29.29). Nous ne pouvons affirmer cela avec certitude. On a également proposé les sacrificateurs Achimaats (cf. 2S 15.27, 36; 17.17, 20; 18.19, 22-23, 27-29) et Zabud (cf. 1R 4.5), entre autres, comme auteurs possibles. Aucun des arguments concernant l’auteur ne sont convaincants. Bref, contentons-nous de considérer que l’auteur de Samuel est anonyme. Tout compte fait, c’est naturellement le Saint-Esprit qui en est l’Auteur.

3. Le contexte historique

Après la conquête de Canaan par Josué, le peuple d’Israël connaît toute la gamme de problèmes familiers aux colons d’un nouveau territoire occupé. Toutefois, l’aggravation de leur situation est due non seulement à la résistance des habitants de Canaan mais encore aux carences - tant morales et spirituelles que militaires - des conquérants. Leur révolte contre l’alliance que Dieu avait conclue avec eux au Sinaï leur attire le châtiment divin ; la restauration qui suivra leur repentance ne durera que jusqu’à leur révolte suivante (cf. Jug 2.10-19 ; Né 9.24-29). Vers la fin du livre des Juges, la situation dans le pays est devenue insupportable. Israël se trouve dans une situation extrême, et l’anarchie règne (Jug 17.6; 21.25). Plus de trois siècles d’occupation (cf. Jug 11.26) n’ont pas amélioré la position d’Israël sur le plan matériel, et des gens avisés doivent commencer à réclamer un changement.

4. Le but

Dans les livres de Samuel, la monarchie devient une réalité. Trois personnages dominent le livre : Samuel, celui qui oint les rois, Saül, le roi avorté, et David, le roi idéal. Un des buts principaux du livre de Samuel est donc de définir la monarchie comme un don gracieux de Dieu à son peuple élu. Le désir d’Israël d’avoir un roi (1S 8.5) n’est pas inconvenant en soi, malgré le mécontentement initial de Samuel (v. 6). Le peuple n’a pas forcément tort de vouloir un roi « comme toutes les nations » (v. 5, 20). Son péché est de demander un roi qui « nous jugera [et] marchera à notre tête et conduira nos guerres » (v. 20). Il veut échanger l’humble foi dans la protection et la puissance de « l’Éternel des armées » (1S 1.3) contre une confiance mal placée sur la force dépouillée des hommes de combat « du peuple d’Israël » (2S 24.4).

6. Les richesses théologiques

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Sur la scène politique, au début de 1 Samuel, Israël est une fédération faiblement organisée de territoires tribaux fragilisés. Elle arrive à peine à maintenir les Philistins et autres ennemis à distance. Cependant, vers la fin de 2 Samuel, sous le règne de David, Israël deviendra le royaume le plus puissant du bassin méditerranéen oriental, fort à l’intérieur et fiable pour l’étranger. Sur le plan religieux, les premiers chapitres de 1 Samuel présentent Israël qui offre son culte sur un autel quelconque, présidé par des sacrificateurs corrompus. Mais le dernier chapitre de 2 Samuel relate l’acquisition par David d’un site à Jérusalem sur lequel se dressera le Temple de Salomon. Les deux livres de Samuel se caractérisent donc par des changements radicaux, guidés et rendus possibles par l’Éternel lui-même qui se sert d’hommes comme Samuel, Saül et David.

L’élection est également un thème important dans les livres de Samuel. Le dessein électif de Dieu inclut Samuel (cf. 1.19-20), Saül (cf. 10.20-24) et David (cf. 16.6-13). 2Samuel 7 décrit le choix divin de la dynastie davidique d’où sortiront les futurs rois, y compris le Messie. Dans 2Samuel 7, la royauté et l’alliance ne font qu’un.

Les revers de fortune en tant qu’indices de souveraineté et de grâce divines constituent un autre thème important. Anne, une femme stérile, devient mère de six enfants (cf. ch. 1-2). Des hommes de rang élevé (comme les fils d’Éli) meurent dans la honte (cf. 4.11). Un gardien d’âne inattendu (cf. 9.2-3) et un obscur berger (cf. 16.11) sont oints pour devenir les deux premiers rois d’Israël.

Un thème clé dans les récits de l’arche concerne le refus de Dieu d’être manipulé. Le fait d’apporter l’arche sur le champ de bataille ne garantit absolument pas la victoire à Israël (cf. 4.3-11) ; placer l’arche dans un temple philistin n’assure pas la bénédiction divine (cf. 5.1-6.12) ; et jeter un regard dans l’arche entraîne la mort (cf. 6.19 ; 2S 6.6-7). L’arche contenant les tables de l’alliance rappelle constamment aux Israélites les droits de Dieu sur leur vie.

Le thème du Deutéronome d’être béni pour son obéissance et maudit pour sa désobéissance est développé dans les livres de Samuel. Dans la mesure où David comprend que son rôle de roi humain est de faire appliquer les ordres du Roi divin (le vrai chef d’Israël), il connaît la bénédiction (cf. 2S 6.11-15, 17-19; 7.27-29). Mais lorsqu’il bafoue délibérément la volonté de Dieu, il peut tout autant s’attendre à tomber sous la malédiction (cf. 2S 12.1-18). Si l’alliance davidique est éternelle dans le sens où la lignée de David subsistera éternellement (cf. 2S 7.12-16, 25-29 ; Ps 89.28-30, 34-38), elle est également conditionnelle dans la mesure où les individus impliqués sont punis s’ils pèchent (cf. 1R 2.4; 8.25 ; Ps 89.31-33; 132.12).

Les fonctions de rois et de prophètes apparaissent simultanément en Israël. Saül, le premier roi, est oint par Samuel qui est le chef de file de la lignée prophétique (cf. 9.6-10, 19 ; Ac 3.24; 13.20), comme promis à Moïse (De 18.15-18). Si la tâche du roi consiste à respecter les termes de l’alliance, celle du prophète est d’interpréter ses exigences. Jusqu’à la fin de la monarchie, les prophètes défendront avec un saint zèle leurs droits divins sur les rois.

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2 Samuel

INTRODUCTION

Voir l’introduction à 1 Samuel.

1, 2 Rois

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan historique

Les deux livres des Rois rapportent de manière sélective les événements de l’histoire d’Israël depuis les derniers jours du roi David jusqu’à la prise de Jérusalem en y ajoutant deux appendices, l’un concernant un incident survenu dès le début de l’exil (2R 25.22-26), l’autre relatif à la libération de Jojakin, roi de Juda, après la mort de Nebucadnetsar (2R 25.27-30). L’histoire s’échelonne entre 971 et 562 av. J.-C. La période concernée englobe la fin du royaume uni sous Salomon, une époque de puissance politique et d’abondance et la division du royaume sous Roboam. Elle aborde ensuite le sort des royaumes du Nord et du Sud jusqu’à leur fin, respectivement en 722 et 586 av. J.-C. Le récit inspiré contient de nombreuses références aux puissances politiques et aux peuples étrangers de ce temps-là, comme les Égyptiens, les Philistins, les Phéniciens, les Araméens, les Ammonites, les Moabites, les Édomites, les Assyriens et les Chaldéens. Les Israélites devront en particulier faire face aux menaces araméennes et subir les pressions assyriennes au IX e siècle avant notre ère, puis vivre les grandes invasions assyriennes du VIII e siècle av. J.-C, suivies de la paix assyrienne au VII e av. J.-C., et assister à la chute du nouvel Empire assyrien devant la puissance montante des Chaldéens conduits par le brillant roi Nebucadnetsar II.

Les livres des Rois relatent cependant davantage que l’histoire politique et sociale de cette période. Ils rapportent la réponse spirituelle d’Israël à son Dieu, qui s’est lié au peuple par une alliance (2R 17.7-23) et qui a répandu sur lui de grands privilèges conformément à la promesse faite à David (1R 2.2-4). On y trouvera en conséquence un résumé détaillé des expériences spirituelles de la nation, en particulier celles de ses rois, prophètes et sacrificateurs, dont les activités laissent nettement percer le besoin de la venue de celui qui cumulera en sa personne l’idéal de ces trois offices. 2. L’unité, l’auteur et la date

Le fait que le contenu des deux livres tienne sur un seul rouleau montre que pour les Hébreux, les deux livres des Rois n’en faisaient qu’un. Du point de vue thématique, la continuité de l’histoire d’Élie (1R 17-2R 2) appartenant elle-même à la section prophétique qui domine de 1Rois 16.29 à 2Rois 9.37, ainsi que l’expression récurrente « jusqu’à ce jour » (1R 8.8; 9.13, 21; 10.12; 12.19 ; 2R 2.22; 10.27; 14.7; 16.6; 17.23, 41; 20.17; 21.15), montrent clairement que les deux livres des Rois forment une seule unité littéraire.

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Page 43: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

L’auteur du livre signale qu’il a puisé à la source de différents documents, comme 1° « le livre des actes de Salomon » (1R 11.41), écrit à partir de matériaux biographiques, d’annales et d’archives contemporains de 1Rois 1 à 11;2° « le livre des Chroniques des rois d’Israël » mentionné quelque 17 fois dans 1Rois 14.29 à 2Rois 15.31 et constitué en grande partie de rapports officiels du royaume du Nord consignés par les archivistes de la cour (cf. 2S 8.16; 20.24 ; 1R 4.3 ; 2R 18.18, 37 ; 2Ch 34.8) ;3° « le livre des Chroniques des rois de Juda », mentionné 15 fois (1R 14.29-2R 24.5) et qui relate les événements des règnes des rois du royaume du Sud depuis Roboam jusqu’à Jojakim.

D’autres sources non citées ont également pu être consultées pour la conclusion du livre, comme les mémoires de cour de David (1R 1.1-2.11), un cycle consacré à l’histoire d’Achab et ses démêlés avec les prophètes Élie et Élisée (1R 16.29-2R 9.37), les comptes rendus du prophète Ésaïe (ch. 36-39) et deux résumés historiques de conclusion (2R 25.22-26, 27-30).

3. L’origine, l’occasion et le but

L’origine de la collection de base est clairement Jérusalem. Le livre donne l’impression d’avoir été écrit par un témoin oculaire des événements finaux culminants qui ont marqué les histoires mouvementées d’Israël et de Juda, à l’origine de la raison d’être et du but du livre. Contemplant la tragédie qui se déroule sous ses yeux, l’auteur fournit un récit exact des faits de son époque et de ceux qui se sont produits depuis l’époque glorieuse du roi Salomon. De ce point de vue, le livre des Rois constitue la suite de 1 et 2 Samuel.

Le livre des Rois est cependant davantage qu’une chronique d’événements. Par le choix de ses sources et l’utilisation judicieuse de sa propre connaissance basée sur l’expérience, l’auteur écrit pour démontrer de façon décisive à ses lecteurs, à la fois la nécessité pour les croyants d’être fidèles à l’alliance avec Dieu, et l’histoire des personnes responsables de diriger le peuple de Dieu par leur manière de gérer l’économie divine, à savoir les rois et les prophètes d’Israël. C’est pourquoi le livre porte partout la double empreinte de l’histoire rédemptrice et de la responsabilité personnelle.

4. Les valeurs théologiques

Le principal intérêt théologique est la relation d’un Dieu souverain avec un peuple responsable, Israël. En trouvant un tel équilibre, l’auteur attire particulièrement l’attention sur les alliances mosaïque et davidique. En fait, l’histoire de la rédemption et la perspective théologique des Rois se retrouvent largement dans l’histoire de David et dans l’appropriation par Israël des bénédictions divines conformément à son obéissance aux valeurs de la Loi (cf. 1R 2.4-5).

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Page 44: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

Du premier au dernier chapitre, Dieu est présenté comme contrôlant souverainement les gouvernements du monde. Lui seul est le Dieu vivant, le Créateur de la vie et celui qui l’entretient. À la fois transcendant et immanent, il est le Dieu omniprésent, omnipotent et omniscient que les anges servent et auquel le monde a des comptes à rendre. Dieu d’amour et de bonté, il est également un Dieu de justice et de vertu.

Bien que les êtres humains soient des pécheurs, Dieu est l’auteur de la rédemption et pardonne gracieusement à ceux qui s’humilient devant lui. D’ailleurs, il écoute et répond aux prières, et tient fidèlement ses promesses. Nous devrions l’adorer et le suivre parfaitement. C’est pourquoi une grande place est donnée au temple et à ses institutions. Les croyants devraient centrer leur vie sur la Parole et les normes inviolables de Dieu, et se soucier de la sainte réputation de Dieu.

Dieu s’est révélé de plusieurs façons, mais principalement à Israël, cette nation à laquelle il a fait de grandes promesses d’alliance, notamment par son serviteur David. Bien que Dieu ait racheté Israël, l’ait conduit avec patience, ait pris soin de lui, ait souffert avec lui, le peuple l’a rejeté malgré ses avertissements répétés. Compte tenu de la relation unique d’Israël avec Dieu, le péché d’idolâtrie fait l’objet de sévères accusations. Sur le plan positif, la prophétie occupe une grande place.

Ainsi, le livre des Rois ne relate pas seulement de l’histoire, mais aussi l’histoire de la rédemption, articulée autour des thèmes jumelés de la souveraineté divine et de la responsabilité humaine, en particulier lorsqu’ils concernent Israël, le peuple de l’alliance avec Dieu. De ce point de vue, on peut établir une comparaison entre les livres des Rois, de Samuel et des Chroniques. Alors que 1 et 2 Samuel insistent sur la responsabilité humaine dans l’administration de l’économie divine et que 1 et 2 Chroniques soulignent la souveraineté divine, 1 et 2 Rois tentent d’équilibrer les deux aspects.

1 Chroniques

INTRODUCTION

1. Arrière-plan

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Dieu s’est servi de l’histoire de l’ancien royaume d’Israël pour révéler des vérités sur lui-même et sur sa relation avec l’humanité. S’il a inspiré les écrivains vétérotestamentaires des livres des Rois et des Chroniques pour interpréter cette histoire, leurs messages théologiques sont distincts. Si 1 et 2 Rois, composés après la chute définitive du royaume en 586 av. J.-C. insistent sur la manière dont le péché aboutit à la défaite (2R 17.15, 18), 1 et 2 Chroniques, écrits après les deux retours d’exil de 537 et 458 av. J.-C. racontent, à partir du même récit, comment la foi aboutit au succès (2Ch 20.20, 22). Les lecteurs d’aujourd’hui peuvent donc puiser de la force en Dieu sachant que ses jugements moraux (Rois) sont compensés par son salut providentiel (révélé dans les Chroniques).

2. Date et auteur

Si les Chroniques ne contiennent aucune indication directe sur les circonstances de leur composition, les données bibliques en brossent un tableau assez clair. Le dernier événement rapporté dans 2 Chroniques est le décret de Cyrus en 538 av. J.-C., autorisant les Juifs à rentrer de leur exil à Babylone dans leur pays (2Ch 36.22-23). Une généalogie de 1 Chroniques (3.17-21) inclut Zorobabel, le petit-fils du roi Jojakim, qui a pris la tête du premier convoi de Juifs l’année suivante. Le livre cite même le nom de deux petits-fils de Zorobabel, Pelathia et Ésaïe, qui ont vraisemblablement vécu vers l’an 500 av. J.-C. Les fils de quatre autres hommes sont mentionnés, mais sans indication de leur place dans la généalogie. Le dernier d’entre eux est Schecania dont la lignée compte encore sept arrière-arrière-petits-enfants (3.24). Si Schecania faisait partie de la même génération que le roi Jojakin (né en 616), ces quatre générations successives nous amènent de nouveau vers 500 av. J.-C. comme date la plus reculée possible pour la rédaction des Chroniques.

Les liens entre les livres des Chroniques et celui d’Esdras fournissent l’indice le plus important pour fixer la date de rédaction des Chroniques et le nom de leur auteur. Comme les Chroniques semblent être l’œuvre d’un auteur unique qui était un chef lévitique, l’identification à Esdras, sacrificateur et scribe (Esd 7.1-6), paraît d’emblée possible. Cette conclusion s’impose encore davantage par l’examen des qualités personnelles dont l’auteur fait preuve. Les livres des Chroniques et celui d’Esdras ont un style identique et leur contenu a beaucoup de choses en commun : de nombreuses listes, des généalogies, l’insistance sur l’aspect rituel, un profond attachement à la loi de Moïse. Plus frappant encore, les derniers versets de 2 Chroniques (36.22-23) sont répétés au début d’Esdras (1.1-3a). La tradition juive affirme qu’Esdras est l’auteur des livres des Chroniques et du livre qui porte son nom.

Pour ceux qui acceptent l’historicité des événements relatés dans Esdras - depuis la promulgation du décret de Cyrus en 538 jusqu’à la réforme entreprise par Esdras en 458-457 av. J.-C. - ainsi que la validité de l’écrit autobiographique d’Esdras au cours des années suivantes, la date de composition des livres comme une histoire suivie doit se situer aux alentours de 450 av. J.-C. et le lieu, être Jérusalem.

3. Sources

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Si Esdras est l’auteur présumé des livres des Chroniques, sa formation de scribe explique la connaissance minutieuse des sources historiques qui apparaissent dans les livres. Elles entrent dans trois catégories.

a. Généalogies

Pour la tribu de Siméon, l’auteur des Chroniques explique : « Voici leurs habitations et leur généalogie » (1Ch 4.33) ; pour Gad, il précise davantage ses sources : « Ils furent tous enregistrés dans les généalogies, du temps de Jotham [751-736 av. J.-C.], roi de Juda, et du temps de Jéroboam II [793-753], roi d’Israël » (5.17). Il fait allusion à des généalogies officielles semblables pour Benjamin (7.9), Aser (7.40), « tout Israël » (9.1), « les portiers des seuils » (9.22) et la famille de Roboam (2Ch 12.15) ; la nature même de ce livre donne à penser que l’auteur a puisé dans bien d’autres généalogies, même s’il ne les précise pas.

b. Prophéties

Parmi leurs sources, les Chroniques citent au moins onze livres prophétiques différents : ceux des anciens prophètes Samuel, Gad (1Ch 29.29), Nathan (1Ch 29.29; 2Ch 9.29), Achija (2Ch 9.29), Schemaeja (2Ch 12.15), les révélations de Jéedo (2Ch 9.29), les mémoires du prophète Iddo (2Ch 13.22 ; ceux des prophètes ultérieurs Jéhu, fils de Hanani (2Ch 20.34), d’Ésaïe, comprenant sa « vision » (le livre de l’A.T., 2Ch 32.32), son histoire d’Ozias (2Ch 26.22), celui d’Hozaï (2Ch 33.19, mot qui signifie peut-être tout simplement le livre « des voyants »). 2 Chroniques fait référence à l’accomplissement de Jérémie 29.10 ; de plus l’auteur semble faire des citations de Jérémie 29.13-14 dans 2Chroniques 15.4 (à moins que les deux passages citent De 4.29).

3. Occasion et but

Lorsqu’Esdras revient de Babylone en 458 av. J.-C., son désir ardent est de remettre la loi de Dieu en vigueur parmi la communauté de Juda revenue d’exil (Esd 7.10). Il prend immédiatement les mesures nécessaires pour rétablir le culte au temple (7.19-23, 27; 8.33-34) et rompre un certain nombre de mariages mixtes conclus par des Juifs avec leurs voisins païens (ch. 9-10). Muni des pouvoirs que le roi de Perse lui a conférés (7.18-25), Esdras semble avoir été celui qui a commencé le relèvement des murs de protection de Jérusalem (4.16), même si son œuvre est freinée plus tard par l’opposition farouche des Samaritains (v. 17-23; cf. Né 1.3-4). Il faudra attendre l’an 444 av. J.-C., lorsque Néhémie rejoint Esdras, pour que la muraille soit entièrement achevée (Né 6.15-16) et la loi de Moïse acceptée officiellement par la communauté (ch. 8). Si Esdras est bien le chroniqueur, la publication de ce livre vers 450 s’explique comme un moyen littéraire permettant d’atteindre l’objectif d’Esdras, à savoir le rétablissement de la théocratie (la reconnaissance de Dieu comme roi de la nation).

5. Théologie

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Esdras proclame la majesté transcendante de Dieu (1Ch 29.11) et cite des déclarations de l’histoire antérieure qui décrivent Dieu au-dessus de tous les dieux (2Ch 2.5), ayant sa demeure au ciel (6.18; 7.14) et dominant sur toute la terre (20.6). L’Éternel est donc présent par son « nom » (qui s’accompagne de la force de la personne, 12.13), surtout dans le temple (1Ch 22.7; 29.16), et par son Esprit, surtout pour ses communications (1Ch 12.18; 2Ch 15.1; 24.20). Les anges occupent plus de place dans les Chroniques que dans les autres livres historiques correspondants de l’A.T. (1Ch 21.12 ou 21.18, 20, 27), de même que l’utilisation de Satan par Dieu (21.1).

6. Thèmes et centres d’intérêt théologiques

Une lecture attentive des Chroniques montre que l’auteur cultive certains centres d’intérêt théologiques récurrents et il les rappelle tout au long de son œuvre.

a. Les promesses de Dieu

L’Éternel occupe le centre de la scène et ne laisse planer aucun doute quant à l’identité de celui qui tient les rênes de tout. C’est pourquoi, au lieu de fournir des explications politiques, sociologiques, militaires ou économiques - ou d’indiquer les causes immédiates de tel événement - l’auteur présente Dieu comme le Maître de l’Histoire et la cause de ses événements.

Plusieurs incidents mettent en relief cette importance de Dieu. Dieu fait périr Saül et donne son royaume à David (1Ch 10.14) ; il met en déroute les armées de Jéroboam au moment où celui-ci attaque Abija (2Ch 13.13-16) ; il détruit la puissante armée de Zérach venue attaquer Asa et ses forces numériquement inférieures (2Ch 14.12-13) ; l’Éternel affermit la royauté de Josaphat (2Ch 17.5) et défait l’alliance militaire conclue entre Moab, Ammon et la montagne de Séir, avant même que l’armée des Hébreux ne s’avance pour combattre (2Ch 20.22-23).

Le plus bel exemple de l’intervention directe de Dieu dans l’Histoire est peut-être la destruction totale de la puissante armée de Sanchérib après que ce fier monarque assyrien eut osé défier le pouvoir du Tout-Puissant et le comparer aux dieux des autres nations (2Ch 32.16-22).

b. Rétribution

L’idée de récolter ce qu’on sème n’est pas nouvelle dans les Chroniques, mais elle subit deux modifications.

1° Le poids de l’obéissance repose essentiellement sur les épaules du roi de la nation. 2° Le principe n’agit pas de façon automatique ou mécanique. Le souverain est souvent averti par une parole prophétique ; il peut donc se repentir et éviter ainsi un malheur ou une défaite militaire (cf. 2Ch 7.14).

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c. Vocabulaire

La troisième caractéristique théologique de l’auteur est son usage régulier d’un vocabulaire et d’expressions classiques comme « chercher Dieu », « cœur pur » et « abandonner l’Éternel ». Comme la recherche de l’Éternel et la fidélité envers lui s’accompagnent de bénédictions, il n’est pas surprenant de trouver plusieurs exhortations et injonctions à le faire.

d. Les objets utilisés dans le culte

L’auteur se focalise en quatrième lieu sur l’arche, le temple et le sacerdoce. Il consacre deux chapitres au récit du transport de l’arche à Jérusalem ; huit chapitres sont consacrés aux préparatifs pour la construction du temple. Trois chapitres couvrent la construction proprement dite et trois autres sa dédicace. Par ailleurs, les réformes de Josias occupent trois chapitres également avec une insistance particulière sur le rétablissement du sanctuaire central et son fonctionnement.

e. Culte

Le cinquième centre d’intérêt de l’auteur est intimement lié au culte dans le temple. Le chroniqueur s’intéresse spécialement à la nature du véritable culte qui s’oppose à la simple cérémonie correcte. Ce souci de la bonne disposition du cœur apparaît sous deux formes. Tout d’abord, le mot « cœur » revient une trentaine de fois dans les Chroniques. La recherche de Dieu doit procéder d’une juste attitude intérieure. Ensuite, le souci de l’auteur pour le vrai culte se voit à sa façon de rapporter les réformes d’Ézéchias. Ce roi est dépeint comme l’un des plus pieux des rois de Juda.

f. Royaume

En sixième lieu vient l’intérêt de l’auteur pour la royauté en Israël. Il présente souvent le royaume de Dieu et celui de Juda comme s’ils formaient une seule et même réalité (cf. 1Ch 28.5; 29.23). Le royaume est important parce qu’il est le gardien du temple. Après la division du royaume de Salomon, les rois de Juda ont manifesté leur attachement à Dieu par leurs réformes religieuses (cf. les règnes d’Ézéchias et de Josias). Le vrai culte en Israël n’a pas été préservé par un saint sacerdoce mais par des rois pieux.

g. Histoire

En septième lieu, le chroniqueur a sa façon personnelle de rapporter les événements historiques. Ainsi, il ne lui suffit pas de décrire la construction du temple ; il est poussé à aller au-delà et à souligner les ressemblances frappantes avec la construction du tabernacle dans le désert.

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h. Omissions

Une huitième et dernière caractéristique des Chroniques est la manière dont l’auteur choisit son matériau dans sa présentation de l’histoire d’Israël. Du règne de David, il supprime trois ensembles importants, à savoir les événements rapportés dans 1Samuel 15-31, dans 2Samuel 1-4, ainsi que le péché de David avec Bath-Schéba et les problèmes qui en ont découlé (2S 11- 1R 2, à l’exception du recensement).

Concernant le règne de Salomon, l’auteur omet la rivalité entre Salomon et Adonija pour l’accession au trône, les mesures prises par Salomon pour consolider son règne et tout ce qui gravite autour des nombreuses femmes de Salomon, le développement de l’idolâtrie et le jugement divin qui a frappé le roi pour son péché (1R 11).

Après la division du royaume de Salomon, le chroniqueur ne s’intéresse pas au royaume du nord en tant que tel, mais seulement lorsqu’il interagit avec le royaume de Juda.

L’auteur rapporte une histoire d’Israël dans laquelle il choisit délibérément d’insister sur certains faits et d’en supprimer d’autres. Cela ne s’apparente pas à de l’intrigue ni à l’étouffement de la vérité. En présentant son commentaire théologique sur les événements du passé, il a laissé de côté certains événements qui n’apportaient rien à sa démonstration. Ceux qui veulent une autre perspective de l’Histoire peuvent lire les prophètes antérieurs ou reprendre les faits qui étaient bien connus en Israël.

2 Chroniques

INTRODUCTION

Voir l’Introduction à 1 Chroniques

De même que 1 Chroniques forme un parallèle avec 1 et 2 Samuel (à partir de 1S 31) et s’inspire d’eux, 2 Chroniques forme un parallèle avec 1 et 2 Rois. Ses neuf premiers chapitres constituent la troisième des quatre grandes divisions naturelles du tableau historique que le chroniqueur brosse. Ces chapitres sont consacrés au règne de Salomon (970-930 av. J.-C.), le fils de David, et sont le pendant de 1Rois 1-11. Comparé à 1Rois 5.1-9.9, le livre des Chroniques manifeste pour le temple de Salomon un intérêt plus grand que pour son règne ; il lui consacre six chapitres sur les neuf premiers (ch. 2-7). La troisième partie des Chroniques commence et s’achève (ch. 1 et 8-9) par des faits du règne de Salomon. La dernière partie aborde l’histoire de Juda jusqu’à la destruction de Jérusalem et l’exil.

Esdras

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INTRODUCTION

1. L’arrière-plan

L’exil babylonien au sixième siècle av. J.-C. a été précédé de déportations antérieures, notamment par la déportation assyrienne d’Israël et de Juda au huitième siècle. La déportation a commencé sous Tiglath-Piléser III qui avait attaqué Damas et la Galilée en 732 (2R 15.29), emportant au moins 13 520 personnes en Assyrie. Ensuite, Salmanasar V et Sargon II ont assiégé Samarie en 722 (2R 17.6; 18.10). Sargon se vantait d’avoir déporté 27 290 (ou 27 280) personnes d’Israël et de les avoir remplacées par diverses populations venues de Mésopotamie et de Syrie.

Alors qu’on estimait la population d’Israël entre 500 000 et 700 000 âmes vers la fin du huitième siècle av. J.-C., celle de Juda, entre le huitième et le sixième siècle, était estimée entre 220 000 et 300 000 personnes. La population de Jérusalem était vraisemblablement augmentée par l’apport de réfugiés du nord, lors de la prise de Samarie en 722. Du temps de Néhémie, la population de la ville se réduisait à 6 000 personnes. Juda avait été épargné par les attaques de Tiglath-Piléser III lorsqu’Azaria (Ozias) avait payé un tribut au roi, quand bien même Guézer avait été prise. Mais quand Sanchérib a attaqué Juda en 701 av. J.-C., il a déporté un grand nombre de Juifs, surtout de Lakis. Ses annales affirment qu’il a déporté 200 150 Judéens, mais c’est peut-être une erreur ; il pourrait s’agir de 2 150 captifs.

Les références bibliques concernant le nombre de personnes déportées par les Babyloniens sous Nebucadnetsar sont incomplètes et quelque peu déroutantes. Les chiffres ont donné lieu à des interprétations divergentes quant au nombre de Judéens déportés. Jusqu’en 1956, nous n’avions aucune donnée extérieure à la Bible confirmant l’attaque de Juda par Nebucadnetsar la première année de son règne. C’est cette année ou peu après que Daniel et ses compagnons ont été emmenés à Babylone.

En 597 av. J.-C., Nebucadnetsar « emmena en captivité … tous les chefs et tous les hommes vaillants, au nombre de dix mille exilés » (2R 24.14). D’après le verset 16, le roi de Babylone emmena « tous les guerriers au nombre de sept mille, et les charpentiers et les serruriers au nombre de mille ». Si ces nombres ne s’appliquent qu’aux chefs des différentes maisons, le nombre total d’exilés était certainement proche de trente mille. Mais d’un autre côté, Jérémie n’indique que 3 023 captifs en 597 av. J.-C. (Jé 52.28) et seulement 832 de Jérusalem en 586 (v. 29). En 582, après le meurtre de Guedalia, 745 Juifs ont été déportés sur un total de 4 600 (v. 30). Les nombres, sensiblement inférieurs, de Jérémie ne représentent probablement que les hommes des familles les plus importantes. En fonction du nombre adopté pour les déportés et de celui des exilés qui reviendront au pays, on obtient des chiffres très variables pour la population de Juda après l’exil. Une estimation de 150 000 habitants semble correcte.

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La différence entre les déportations, babylonienne et assyrienne, est importante : les Babyloniens n’ont pas remplacé les populations déportées par des arrivants païens. C’est pourquoi Juda, bien que dévasté, n’a pas été aussi contaminé par le polythéisme qu’Israël.

D’après le récit biblique, les armées babyloniennes ont enfoncé les défenses de Jérusalem (2R 25.10), détruit le temple et les palais (2R 25.9, 13-17; Jé 52.13, 17-23), tué bon nombre de chefs et de sacrificateurs (2R 25.18-21). L’archéologie a amplement confirmé l’étendue de la dévastation opérée par les Babyloniens ; c’est ce que montrent les fouilles effectuées dans des lieux comme Beth-Schémesch, Eglon, En-Guédi, Guibea et Jérusalem. Des milliers de Judéens ont certainement été tués au cours de la bataille ou sont morts de faim (La 2.11-22; 4.9-10). Après les vagues de déportation, seuls les pauvres du pays - des vignerons et des laboureurs (2R 25.12; Jé 39.10; 4.7; 52.16) - sont restés et ont occupé le pays (Jé 6.12). Quelques réfugiés qui s’étaient enfuis dans différentes régions sont revenus (Jé 40.11-12). Au cours des cinquante années qui ont suivi, ces gens ont péniblement survécu sous le joug babylonien (La 5.2-5), soumis à de mauvais traitements et aux travaux forcés (v. 11-13).

Pendant cette période, certaines formes limitées de culte se sont maintenues dans quelques régions dévastées (Jé 41.5). L’Écriture passe sur les développements qui se sont produits en Palestine pour souligner la contribution des Juifs revenus de l’exil babylonien.

Comme les déportés étaient principalement des intellectuels et des chefs religieux, les Écritures doivent refléter cette situation historique. D’après les bas-reliefs et les écrits assyriens, les hommes marchaient probablement enchaînés, les femmes et les enfants portant leurs maigres affaires sur des chariots, en route vers la Mésopotamie. Jojakin, le roi judéen exilé, était à la cour babylonienne et n’a manqué de rien (2R 25.29-30).

Après plusieurs années difficiles, les exilés se sont adaptés et certains ont même prospéré (Jé 29.4-5). Ils étaient répartis dans plusieurs villes, par exemple sur le fleuve Kebar, près de Nippur, à une centaine de kilomètres au sud-est de Babylone (Ez 1.1-3; cf. Esd 2.59; Né 7.61). Lors de leur retour dans le pays de Juda, les exilés ont emmené avec eux de nombreux serviteurs et des animaux ; ils ont été en mesure de participer largement aux frais des services religieux (Esd 2.65-69; 8.26; Né 7.67-72).

Avec la naissance des deuxième et troisième générations, beaucoup de Juifs se sont établis en Mésopotamie et ont préféré y rester. Lui-même exilé en 597 ou en 586, Ézéchiel donne de précieuses indications sur la vie spirituelle de la communauté juive de Mésopotamie. Ezékiel 8.1 décrit le prophète « assis dans [sa] maison, et … les anciens de Juda … assis devant [lui] » (cf. Ez 3.15; 14.1; 20.1; 24.18; 33.30-33). Privés de temple, les exilés attachaient une grande importance au respect du sabbat, des lois relatives à la pureté, de la prière et du jeûne. On a souvent dit que le système des synagogues s’est développé pendant l’exil en Mésopotamie (mais cf. Né 8.18). Les tribulations de l’exil ont purifié et fortifié la foi des Juifs et les a guéris de l’idolâtrie.

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Les exilés qui ont choisi de rentrer chez eux, dans le pays de Juda, ont trouvé leur territoire sensiblement réduit quant à sa superficie. La minuscule enclave de Juda était entourée de voisins hostiles. Au nord de Béthel s’étendait la province de Samarie ; au sud de Beth-Tsur, le territoire judéen avait été occupé par les Iduméens (voir les notes sur Esd 2.22-35). La frontière orientale suivait le cours du Jourdain et la Séphélah (basses collines) constituait la frontière occidentale. La côte philistine avait été répartie entre les colons phéniciens. Les Perses ont fait de Juda une province autonome ayant le droit de frapper sa propre monnaie.

2. L’auteur et la date

Comme dans les livres des Chroniques qui leur sont étroitement associés, on note une abondance de diverses listes dans Esdras/Néhémie. Provenant, selon toute évidence, de sources officielles, elles incluent

1° les ustensiles du temple (Esd 1.9-11) ;

2° la liste des exilés qui reviennent (Esd 2.1-70; Né 7.6-73) ;

3° la généalogie d’Esdras (Esd 7.1-5) ;

4° les chefs de clans (Esd 8.1-14) ;

5° les personnes qui avaient contracté des mariages mixtes (Esd 10.18-43) ;

6° les noms de ceux qui ont relevé les murs (Né 3) ;

7° les noms de ceux qui ont fait alliance (Né 10.1-27) ;

8° les habitants de Jérusalem et d’autres villes (Né 11.3-36) ; et

9° les noms des sacrificateurs et des Lévites (Né 12.1-26).

Le livre d’Esdras inclut également sept documents officiels ou lettres (tous en araméens, à l’exception du premier, en hébreu) :

1° le décret de Cyrus (Esd 1.2-4) ;

2° l’accusation de Rehum et des autres contre les Juifs (4.11-16) ;

3° la réponse d’Artaxerxès I (4.17-22) ;

4° le rapport de Thathnaï (5.7-17) ; 5° le rappel du décret de Cyrus (6.2b-5) ;

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6° la réponse de Darius à Thathnaï (6.6-22) ;

7° l’autorisation du roi à Esdras (7.12-26).

Certaines caractéristiques communes aux Chroniques et à Esdras/Néhémie en ont conduit plusieurs à penser que l’auteur des Chroniques était également l’auteur/compilateur d’Esdras/Néhémie. Les versets qui terminent les Chroniques sont les mêmes que ceux qui ouvrent Esdras .Les Chroniques et Esdras/Néhémie témoignent d’un penchant commun pour les listes, pour la description des fêtes religieuses et pour certaines expressions. Ce qui frappe surtout dans ces livres est l’importance des Lévites et du personnel affecté au service du temple. À cause de cet engouement pour le temple et le culte, on a pensé que le chroniqueur était un Lévite ou même un chantre.

Malgré les relations complexes entre Esdras/Néhémie d’une part, et les Chroniques d’autre part, nous considérons que Néhémie est l’auteur du livre éponyme, qu’Esdras également et qu’un autre disciple d’Esdras est l’auteur des Chroniques. Nous datons le matériau d’Esdras de 440 av. J.-C. environ, les mémoires de Néhémie de 430 et 1 et 2 Chroniques de 400 environ.

4. Le but et les valeurs

Esdras et Néhémie rapportent le retour des exilés juifs de Babylonie, ainsi que la reconstruction du temple et du mur d’enceinte de Jérusalem. Ces récits mettent en lumière l’importance du temple et de son personnel. Les efforts pour conserver le peuple pur de l’influence syncrétiste des voisins qui l’entourent sont d’importance vitale. Dans certains cas, des communautés juives se sont compromises et ont été assimilées jusqu’à disparaître, comme à Éléphantine en Égypte. Les mesures prises par Esdras et Néhémie pour sauvegarder les Juifs et les empêcher de se mélanger avec des non-Juifs peuvent paraître intransigeantes pour la société moderne, mais elles étaient nécessaires à la lumière de l’histoire.

a. Le livre d’Esdras

Le livre d’Esdras révèle l’intervention providentielle du Dieu des cieux en faveur de son peuple. Au chapitre 1, le Seigneur est souverain sur tous les royaumes (v. 2) et incline le cœur d’un roi païen pour accomplir sa volonté (v. 1). Il opère la purification de son peuple au moyen de malheurs et de calamités comme les invasions et l’exil. Il sensibilise le cœur de son peuple pour qu’il réagisse et suscite des hommes de Dieu pour le conduire (v. 11). Esdras 3 rappelle que le service de Dieu impose un effort uni (v. 1), une direction (v. 2a), l’obéissance à la Parole de Dieu (v. 2b), les sacrifices et les offrandes (v. 4-7) ainsi qu’une répartition organisée du travail (v. 8-9). La satisfaction de ces exigences permet de poser de solides fondations pour le travail qu’il faudra accomplir plus tard (v. 11), entraîne des larmes et de la joie (v. 11-12), la louange et la reconnaissance à l’Éternel (v. 11).

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Esdras 4 enseigne que l’accomplissement de l’œuvre de Dieu suscite une opposition qui prend différentes formes : la coopération avec ceux qui ne partagent pas nos convictions théologiques fondamentales (v. 1-2) pour achever un travail qui nous incombe à nous seuls (v. 3) ; différents groupes d’opposants, comme ceux qui cherchent à nous décourager et nous intimider (v. 4) ; des conseillers professionnels qui donnent des avis pour nous égarer (v. 5), de faux accusateurs (v. 6,13) et les autorités séculières (v. 7,21-24). Loin de nous décourager, soyons vigilants et forts, sachant que par la grâce de Dieu nous pouvons triompher de toute opposition et accomplir avec joie la volonté du Seigneur (6.14-16).

Esdras a fait l’expérience de la bonne main de Dieu. En tant que scribe, il était plus qu’un savant, il exposait l’Écriture (7.6, 12). Il croyait que Dieu pouvait guider et protéger du malheur (8.20-22). En tant que chef inspiré, il enrôlait et confiait des tâches à des hommes fiables (7.27-28; 8.15, 24). Il considérait sa charge comme une mission sacrée (8.21-28). Esdras était avant tout un homme de prière fervente (8.21; 10.1), de piété profonde et un homme humble (7.10, 27-28; 9.3; 10.6).

b. Le livre de Néhémie

Peut-être plus que tout autre livre de l’A.T., le livre de Néhémie résonne de la personnalité de son auteur.

1° Néhémie était un homme de grandes responsabilités ; il faisait fonction d’échanson du roi (1.11-2.1).

2° Néhémie était un homme de vision.

3° C’était un homme de prière (1.5-11; 2.4-5).

4° C’était un homme d’action et de coopération (2.16-18, ch. 3).

5° C’était un homme de compassion (5.8, 18).

6° C’était un homme qui a triomphé de toute opposition.

7° Enfin, Néhémie était un homme animé d’une juste motivation, qui cherchait à plaire à son souverain divin et à le servir.

Néhémie

INTRODUCTION

Voir l’introduction sur Esdras pour les commentaires sur le livre de Néhémie.

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Esther INTRODUCTION

1. L’arrière-plan

Les cinq livres réunis dans la troisième grande partie de la Bible hébraïque (Cantique des Cantiques, Ruth, Lamentations, Ecclésiaste et Esther) forment un tout intitulé les cinq Meguilloth (« Rouleaux »). Le livre d’Esther est généralement le dernier des cinq, probablement parce qu’il était lu pendant la fête de Purim, la dernière de l’année juive. Dans nos Bibles françaises, il fait suite à Esdras et Néhémie, sans doute à cause du rôle joué par la Perse dans ces trois livres.

Le livre d’Esther a fait l’objet de controverses permanentes. Les réactions à ce livre vont du bonheur extatique, lié à la victoire des Juifs sur leurs ennemis, au mépris et au rejet violents causés par l’absence de toute référence à Dieu, ce qui semble moralement indéfendable.

Le livre d’Esther est l’un des deux livres de l’A.T à porter le nom d’une femme, l’autre étant Ruth, et l’un des quelques-uns à ne pas être cité dans le N.T. Comme le Cantique des Cantiques, il ne mentionne pas Dieu ; comme l’Exode, il traite tout particulièrement de la persécution du peuple hébreu.

Esther contient le récit de l’origine de la fête de Purim, l’une des deux fêtes adoptées par la communauté juive d’après l’exil, et qui ne figurent pas dans la loi mosaïque ; l’autre est la fête de Hunnukah, instaurée à l’époque des Maccabées (donc dans la période intertestamentaire). Les événements rapportés dans le livre d’Esther se déroulent à Suse, sous le règne de Xerxès, roi de Perse (486-465 av. J.-C.), dont l’Empire s’étendait de l’Inde à l’Éthiopie. Esther est le seul livre de l’A.T. dont tout le récit se situe en Perse.

2. L’auteur et la date

Le livre d’Esther ne précise ni le nom de l’auteur ni la date de rédaction. La paternité littéraire du livre a souvent été attribuée à Mardochée. Il est cependant peu probable que Mardochée soit l’auteur des louanges en son honneur dans 10.3. Augustin a suggéré Esdras comme auteur. En fait, la seule chose certaine est que l’auteur est inconnu.

3. Le but

De nombreux interprètes estiment que le but principal du livre d’Esther est d’expliquer l’origine de la fête de Purim, de justifier sa célébration (puisqu’elle n’est pas mentionnée dans la Torah) et d’en fixer les rites. Pour certains, le but du livre est de rapporter la remarquable délivrance

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du peuple juif à un moment crucial de son histoire, et de conserver vivant le souvenir de cette délivrance grâce à l’observance annuelle de la fête de Purim, afin d’encourager la ferveur nationaliste. Le livre avait aussi un but plus immédiat : assurer aux Juifs qui n’étaient pas retournés chez eux après l’exil que Dieu les aimait et les délivrerait de l’oppression injuste. La plupart des commentaires passent sous silence ce qui pourrait être la véritable intention du livre, à savoir enseigner les soins providentiels dont Dieu entoure son peuple (voir « Les valeurs théologiques »). Cette omission se comprend d’autant mieux que la doctrine de la providence est présentée de façon très subtile dans le livre d’Esther, au point même que le nom de Dieu n’y figure pas. La partie « Les problèmes particuliers » mentionne une autre suggestion possible : montrer que Dieu peut exprimer son déplaisir par le silence.

4. Les problèmes particuliers

Le livre d’Esther soulève trois problèmes particuliers : l’omission de toute mention du nom de Dieu ; les pratiques morales et éthiques de Mardochée et d’Esther ; un certain nombre d’inexactitudes apparentes.

a. L’absence du nom de Dieu

Le fait que le livre d’Esther omette toute mention du nom de Dieu est frappant. La meilleure façon d’expliquer cette omission est encore de souligner la providence manifeste de Dieu dans le récit et son action cachée (voir « Les valeurs théologiques »). Beaucoup voient cependant une allusion indirecte à la foi d’Esther lorsqu’elle parle de jeûne (4.16 ; cf. 4.3; 9.31). La déclaration : « le secours et la délivrance surgiront d’autre part » ( 4.14) est presque un témoignage discret rendu à Dieu et doit probablement se comprendre ainsi.

b. Les pratiques morales et éthiques

L’esprit nationaliste et vengeur du livre d’Esther a posé de nombreux problèmes aux lecteurs juifs et chrétiens d’autrefois et continue de le faire pour ceux d’aujourd’hui. Les vertus mises en valeur n’ont rien de noble. Xerxès était cruel, sensuel et capricieux. Esther cache son identité pour devenir reine et n’hésite pas à épouser un païen. Mardochée lui conseille de ne pas dévoiler son identité afin d’accéder au rang de reine. Esther ne fait preuve d’aucune compassion lorsque Haman implore la clémence ; elle demande même que ses fils également soient pendus. Non contente de la délivrance de son peuple, Mardochée et elle publient, avec la permission du roi, un décret autorisant le peuple juif à tuer ses adversaires et à les piller. Mardochée refuse de façon insolente de se prosterner devant Haman.

L’auteur ne condamne jamais explicitement les manquements moraux d’Esther ou de Mardochée, mais semble approuver leur réussite. Seul quelqu’un ayant subi une persécution sévère peut comprendre, sans nécessairement l’approuver, la joie débordante des Juifs après leur victoire sur leurs ennemis.

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La meilleure façon d’aborder les problèmes moraux que pose le livre d’Esther n’est ni l’approbation aveugle, ni la condamnation impitoyable. Puisqu’on note des pratiques immorales parmi les Juifs d’avant l’exil (idolâtrie, adultère, mensonge, etc.), pourquoi être surpris de trouver d’autres expressions de conduite impie après l’exil ?

On peut toutefois expliquer à la fois l’omission du nom de Dieu et les problèmes moraux du livre (ainsi que le lien entre les deux). On peut concevoir tout le livre comme un rappel subtil et puissant que le peuple de Dieu oublie parfois de le consulter avant d’agir, fait des choses contraires à sa volonté et subit alors son mécontentement sous forme de silence. Les pratiques morales quelque peu désarmantes d’Esther et de Mardochée ont délivré le peuple d’un terrible pogrom, mais la réussite de leur plan ne prouve pas que Dieu l’ait approuvé. La Bible contient de nombreux exemples d’hommes et de femmes fidèles à Dieu qui ont cependant commis des actes répréhensibles (p. ex. Ge 12.10-20; 19.8, 30-38 ; 2S 11).

Le vrai message du livre d’Esther peut donc être celui-ci : le peuple de Dieu est prompt à utiliser les mêmes moyens que les gens impies pour atteindre ses objectifs, au lieu de croire fermement que Dieu accomplira ses desseins sans l’initiative humaine, surtout si celle-ci implique des actes immoraux dans une situation de crise.

c. Les prétendues inexactitudes historiques

Les savants ont longtemps contesté l’historicité des événements décrits dans le livre d’Esther. Mais un examen sans a priori de tous les arguments incite à conclure qu’il n’existe aucune preuve solide permettant de nier l’historicité des personnages et des faits contenus dans le livre. Il faut reconnaître que l’absence de confirmation de l’existence de personnes comme Vasthi et Esther reste un problème difficile, mais tous les faits ne sont pas dans ce cas. Il n’y a rien dans Esther qui n’ait pu ne pas se produire.

5. Les valeurs théologiques

L’omission du nom de Dieu n’ôte pas toute valeur théologique au livre d’Esther. On peut y voir le désir de Dieu de rester caché tout en accomplissant ses desseins. Ce désir divin peut parfois aussi s’interpréter comme la preuve de son mécontentement. Cette explication est alors la clé pour résoudre les problèmes éthiques qui chagrinent de nombreux exégètes chrétiens sincères. Dans l’A.T., Dieu exprime ouvertement son déplaisir à cause des péchés de son peuple (p. ex. Esa 1.15 ; Jé 17.1 ; Am 6.8). À d’autres moments, il fait connaître son mécontentement en s’éloignant et en gardant le silence (p. ex. Ez 11.23). Les Juifs du temps d’Esther ne méritaient pas sa faveur (comme personne d’ailleurs). Mardochée et Esther n’étaient pas irréprochables.

Le livre d’Esther enseigne implicitement que Dieu entoure son peuple de soins providentiels. La déposition de Vasthi, le choix d’Esther pour lui succéder, la découverte par Mardochée du complot contre le roi et la récompense accordée à Mardochée ne sont que quelques exemples des nombreux événements « heureux », qui s’expliquent mieux par la manière dont Dieu

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délivre son peuple de ses persécuteurs. Le livre laisse entendre que, même lorsque son peuple s’éloigne de lui et vit dans la désobéissance, il reste l’objet des soins attentifs et de l’amour de Dieu, et que celui-ci réalise ses desseins par le moyen des siens (4.14). Il se dégage également la leçon suivante : si une personne refuse d’accomplir le plan de Dieu, il le fera accomplir par quelqu’un d’autre. Les événements de ce récit révèlent implicitement la souveraineté de Dieu. La succession rapide des événements qui semblent commandés par Xerxès et Haman prouve finalement qu’ils étaient dirigés par Dieu pour le bien de son peuple. Même la loi des Mèdes et des Perses, prétendue irrévocable, qui aurait dû aboutir au massacre des Juifs, a été révoquée.

Le livre d’Esther enseigne : 1° la loi de la rétribution du péché, par la pendaison d’Haman sur son propre gibet ;2° la récompense de la fidélité ;3° la valeur de la fermeté à défendre ses convictions même dans une situation dangereuse.

Job

INTRODUCTION

1. Le contexte

Le caractère unique du livre de Job vient de la profondeur et de la minutie avec laquelle il traite de la relation entre la souffrance humaine et la justice divine, communément appelée théodicée (du grec, theos [« dieu »], et dike [« justice »]). De nombreux documents, provenant particulièrement de l’ancienne Mésopotamie et d’Égypte, démontrent que ce type de sagesse écrite était bien répandu dans le monde de l’A.T., mais ces sujets n’ont jamais été abordés de façon aussi éloquente et complète que dans ce livre de l’A.T.

2. L’auteur

Il est fort possible que l’auteur se soit inspiré de documents pour composer le livre de Job et que ce livre ait débouché sur une sorte de développement littéraire. Cependant, toute tentative pour savoir exactement de quoi il s’agissait est pure conjecture. Nous ne savons pas exactement qui a écrit ce livre, mais son œuvre a témoigné aux esprits des fidèles, tout au long des siècles, qu’il était divinement inspiré.

3. La date et l’origine

Comme cela est vrai avec une grande partie de la littérature de sagesse, la composition réelle du livre de Job telle que nous l’avons est difficile à dater avec précision. Il est possible que le livre ou peut-être des parties du livre aient existé en dehors d’Israël pendant longtemps en tant que tradition orale ou peut-être même sous une forme écrite, jusqu’à ce qu’un auteur israélite inconnu lui donne sa présente forme littéraire sous l’inspiration divine. Cela expliquerait

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l’absence de la saveur israélite dans ce livre ainsi que sa place incontestée dans le canon hébreu.

Il semble probable que Job lui-même ait vécu au cours du deuxième millénaire av. J.-C. (2000 à 1000 av. J.-C.), et ait partagé une tradition assez proche de celle des patriarches hébreux. La longévité de 140 ans de Job, sa position en tant qu’homme dont les richesses étaient évaluées en bétail, le fait qu’il agissait comme un sacrificateur pour sa famille et la description des hommes de tribus nomades de Saba et de Chaldée correspondent davantage au deuxième millénaire qu’au premier. Il est possible, cependant, que le livre n’ait pas atteint sa forme finale avant le premier millénaire. Toute date de la période biblique de l’A.T. est envisageable, bien que les tentatives de situer sa rédaction dans le deuxième ou le premier siècle av. J.-C. aient été complètement ébranlées par la découverte de parties d’un Targum de Job parmi les rouleaux de la mer Morte.

Le lieu d’origine exact est aussi difficile à déterminer que la date exacte. Le livre témoigne d’une saveur araméenne considérable, ce qui laisse suggérer que Job et ses amis aient vécu près de centres d’influence araméenne. À la fin du deuxième millénaire, certaines tribus araméennes se sont déplacées au sud et se sont installées aux frontières de Babylone et de la Palestine mais ont continué à contrôler la route des caravanes, le long de la zone du Khabur. À cette époque, Aleppo et Damas sont devenus des centres araméens et les tribus chaldéennes ont envahi Babylone.

Job, lui-même, vivait dans le pays d’Uts (1.1). Genèse 10.23 associe Uts aux Araméens, comme le fait Genèse 22.20-22. Le dernier passage associe aussi Késed (les Chaldéens) aux Araméens et aux Ustites, mais ne les considère pas comme identiques. Ces passages font référence aux nations ou aux tribus qui étaient associées, quelquefois principalement par leur proximité. Le pays d’Uts se situait à l’est de la Palestine, mais son emplacement précis ne peut être déterminé. Job jouissait d’une grande influence dans une ville dont le nom n’est pas donné (29.7). Selon Lamentations 4.21, Édom se trouvait dans le pays d’Uts. Il semble qu’Uts était le nom de la région à l’est de la Palestine qui incluait les Édomites et les tribus voisines.

4. Le but

Le but du livre de Job ne peut être réduit à une simple déclaration. L’auteur semble avoir différentes intentions sous le thème général de l’enseignement de sagesse sur Dieu et la souffrance humaine. Dans les différentes parties du livre, l’auteur écrit en ayant à l’esprit des intentions quelque peu différentes les unes des autres. Le prologue enseigne la sagesse de la soumission totale de la personne à la volonté du Créateur. Les lecteurs voient la scène depuis la perspective divine, où ils apprennent l’intention secrète de Dieu d’exposer le mensonge de l’Accusateur et de prouver la foi de Job. Le dialogue, d’autre part, donne la perspective humaine. Job ne sait rien de ce qui s’est passé dans le conseil céleste. Le but de l’auteur est d’enseigner à la communauté croyante certaines leçons profondes à la fois positives et

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négatives sur l’honnêteté et la réalité dans notre relation avec Dieu et sur la connaissance limitée des desseins divins.

5. Les principaux personnages

a. Job

On ne connaît rien de Job, à part ce qu’il en est dit dans la Bible. Il n’est pas un Israélite et ne montre aucune connaissance de l’alliance entre l’Éternel et son peuple choisi. En effet, il n’existe pas la plus petite allusion dans le livre à une connaissance de l’histoire du peuple hébreu. Il n’y a, cependant, aucune raison valable pour contester l’historicité de Job en tant que patriarche aisé qui a vécu à l’est du Jourdain, à une époque qui se situait avant l’émergence des Hébreux en tant que nation.

Job joue deux rôles. L’auteur le présente comme un homme vraiment pieux, dont l’engagement envers Dieu est total, et qui peut cependant, lutter avec Dieu jusqu’à la fureur au sujet du mystère des voies de Dieu. Job ne sait pas ce que le lecteur, lui, sait - que Dieu l’honore en l’éprouvant, exprimant de la sorte sa confiance totale en Job. Cependant, Job doit rester dans l’ignorance à ce sujet pour que cela soit authentique. Pour le message intentionnel du livre, le Job furieux est aussi important que le Job patient. Dans sa souffrance, Job sert Dieu suprêmement, non comme un homme stoïque, mais comme un homme doté de sentiments qui doit arriver à un accord avec le mystère du divin.

b. Éliphaz

En nous basant sur différents passages, nous avons une bonne raison de croire qu’Éliphaz était un Édomite. Selon Genèse 36.4, un dénommé Éliphaz était le premier-né d’Ésaü, le père des Édomites, et Théman était son fils (v. 11). Un certain nombre de prophètes mentionnent Théman comme une ville ou un district édomite (Jé 49.7, 20 ; Ez 25.13 ; Am 1.12 ; Ab 8-9). Jérémie prétend que Théman était connu pour sa sagesse. Apparemment, Éliphaz était le plus âgé, puisqu’il parle le premier. Tout au long de son discours, du moins jusqu’à son discours final au chapitre 22, il fait preuve d’un esprit plus ouvert que les autres, acceptant Job comme un homme pieux qui s’est égaré. Bien qu’il manque de compassion, il est seul sur les trois à témoigner d’une certaine considération et de respect.

c. Bildad

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Ce nom, qui n’est pas hébreu, n’est mentionné dans aucun autre livre de l’A.T. Bildad considère la lutte de Job avec la justice de Dieu comme un blasphème. Il recourt donc à son érudition et à sa connaissance de l’ancienne tradition de sagesse pour prouver à Job que sa famille a eu le sort qu’elle méritait et l’avertit d’une fin semblable. Genèse 25.2, 6 fournit certaines informations utiles au sujet de sa tribu, les Schuachites. Ils étaient les descendants d’Abraham par Ketura et les habitants du « pays d’Orient ». Mis à part un possible problème phonétique, Genèse 25.3 suggère que cette tribu vivait près de Dedan, située d’après Jérémie près de Théma et de Buz (Jé 25.23), loin de l’Euphrate. Le nom de Bildad est probablement une association de Bil (baal, « Seigneur ») et Adad, dieu bien connu de la tempête (cf. Ben-Hadad, le nom royal araméen, et les noms des rois édomites Hadad, le fils de Bedad (Ge 36.35) et Baal-Hanan.

d. Tsophar

Tsophar est de Naama, mais il ne s’agit pas de la petite ville israélite dans les collines basses à l’ouest (Jos 15.41). Les érudits ne s’accordent ni sur l’origine du nom de Tsophar, ni sur la localisation de la ville. Cette ville devait se situer dans le nord de l’Arabie ou d’Édom. Tsophar est le plus caustique des conseillers. Son message adressé à Job est de se repentir ou de subir la mort horrible que les méchants méritent.

e. Élihu

Élihu apparaît seulement dans les chapitres 32 à 37. Il se distingue par le fait que le nom de son père soit rappelé. « Barakeel de Buz » (32.2) semble désigner Élihu comme celui dont le père était une figure de renom dans un clan plus étroitement associé à Job (Uts et Buz étaient frères ; cf. Ge 22.21). Le nom d’Élihu signifie « Il est mon Dieu » ; c’est le seul nom, sur les cinq personnages, qui était utilisé par les Israélites (cf. 1S 1.1 ; 1Ch 12.20; 26.7; 27.18). Les marques araméennes dans les discours d’Élihu correspondent à la déclaration selon laquelle Buz était le fils du frère d’Abraham, Nahor, et son fils Laban parlait l’araméen (Ge 31.47). Élihu avance sa jeunesse comme la raison pour laquelle il n’a pas osé parler pendant que les autres hommes plus âgés dissertaient.

Les Psaumes

INTRODUCTION

1. Le contexte

La désignation française « psaume » vient du grec psalmos (chansons avec accompagnement musical), une traduction de l’hébreu mizmor ( « une chanson accompagnée par des instruments de musique »). Le titre hébreu (tehillim) donne le contenu du livre : « chansons de louange ». Dans les 150 psaumes, le Saint-Esprit nous donne plus qu’un livre de prière et de louange

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d’Israël. Le livre des Psaumes est un exemple de la révélation de Dieu à Israël et de la réponse de foi de ce dernier à l’Éternel.

Les Psaumes nous invitent à découvrir la façon dont le peuple de Dieu communiquait avec lui dans le passé. Ils témoignent de la gloire de Sion, de l’alliance davidique, de la fidélité de Dieu, des traditions de l’exode et de la conquête, de Dieu le créateur et rédempteur, et de l’Éternel en tant que divin guerrier. Le livre des Psaumes est la prescription de Dieu pour qu’une église soit satisfaite d’elle-même, car au travers de ces psaumes, il révèle combien Dieu est grand, merveilleux, magnifique, et absolument impressionnant.

Si le peuple de Dieu avant l’incarnation pouvait avoir une telle foi en l’Éternel, étant témoin de sa grandeur et de sa promptitude à aider, combien plus cela devrait-il être vrai parmi les chrétiens du vingt et unième siècle ! Le livre des Psaumes peut révolutionner notre vie de piété, nos modèles familiaux, ainsi que la communion et le témoignage de l’Église de Jésus-Christ.

Les valeurs des psaumes pour les personnes en particulier et la communauté chrétienne sont nombreuses.

1° C’est un livre de prières, résultant de la communion d’un être humain avec Dieu.

2° L’homme exprime sa louange à Dieu pour des actes accomplis dans le passé. La bonté de Dieu dans l’accomplissement de ses promesses passées permet d’avoir un plus grand espoir dans le futur.

3° Les psaumes ont une place particulière dans la liturgie chrétienne, ayant été chantés par des chrétiens tout au long des siècles. 4° Les psaumes inspirent le croyant avec l’espérance du royaume de Dieu : le nouvel état de justice, d’équité et de bonheur.

5° Les Psaumes reflètent l’expérience de foi de la « communauté » du peuple de Dieu. Ses expressions de frustration, d’impatience, de colère et de joie reflètent la tension entre la promesse et l’éloignement.

6° Dans les psaumes, Dieu s’adresse aux individus comme à la communauté.

7° La valeur des psaumes réside dans leur lien entre l’A.T. et le N.T. À strictement parler, ils appartiennent à l’A.T. Cependant, les psalmistes languissaient après le jour de la rédemption. Nous avons hérité de l’Église primitive une nouvelle façon de lire les psaumes à la lumière de la mission et de l’œuvre de Jésus.

2. L’étude du livre des Psaumes

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Les livres des Psaumes, de Job, des Proverbes, de l’Ecclésiaste, du Cantique des Cantiques et des Lamentations constituent les livres poétiques dans l’A.T. français. Cependant, des formes poétiques apparaissent tout au long de l’A.T., surtout dans les livres des prophètes.

Les psaumes portent souvent un titre. Le titre ou l’en-tête peuvent ne contenir aucune des catégories suivantes d’informations ou les contenir toutes : l’identification avec une personne, l’association avec un événement historique, les détails musicaux et liturgiques, et le genre ou le type du psaume.

Les psaumes étaient rassemblés dans des collections séparées qui ont été finalement regroupées en une seule sous la conduite du Saint-Esprit. Différentes collections ont surgi au cours des siècles : de plus petites, telles que les psaumes associés aux fils de Koré (42-49; 84-85; 87-88) et à Asaph (50; 73-83), le second psautier davidique (51-71), et les psaumes Hallel (146-150). Les plus grandes collections étaient composées de psaumes associées à David (3-41 ; cf. 72.20) et du psautier élohistique (42-83) lui-même une collection de plus petites collections : les psaumes de Koré (42-49) et de David (51-71), le psautier d’Asaph (73-83) ; et les cantiques des degrés (120-134). Le processus de rassemblement a commencé avec de plus petites collections, auxquelles ont été ajoutés des psaumes individuels ou d’autres collections, ce qui a débouché sur une collection finale de 150 psaumes.

La poésie hébraïque n’a pas de pieds ou de « rime » comme en français. L’hébreu utilise plutôt différents procédés littéraires. Une caractéristique de la littérature hébraïque est le parallélisme. Aujourd’hui, nous faisons une distinction entre le parallélisme synonymique, antithétique, synthétique, climactique et emblématique. Le parallélisme est un procédé littéraire principal dans la littérature hébraïque.

Dans le parallélisme synonymique (identique), les parties d’un vers expriment la même idée fondamentale de différentes façons (1.1). Le parallélisme emblématique est un genre de parallélisme synonymique, dans lequel une partie du vers contient un développement figuré (une métaphore ou une comparaison) de la même pensée (44.20, 23). Dans le parallélisme antithétique, les parties d’un même vers sont opposées les unes aux autres (44.4). Dans le parallélisme synthétique, les parties d’un vers se complètent les unes les autres de façon harmonieuse pour créer l’effet désiré (12.2). Le parallélisme climactique (par étapes ou linéaire) est un développement complémentaire du parallélisme synthétique. Non seulement les parties d’un vers s’harmonisent-elles, mais elles développent la pensée virgule après virgule. Le meilleur exemple de ce genre est le psaume 44 .

Le parallélisme interne est le parallélisme traité en dehors des autres vers. Le parallélisme externe est le genre de parallélisme où deux versets ou plus sont comparés les uns aux autres (Ps 30.9-11). Les phrases standardisées ou les paires de synonymes sont courantes dans la poésie hébraïque. Certains synonymes apparaissent dans un ordre semblable ou différent (cf. 44.25).

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La poésie hébraïque emploie de nombreux procédés littéraires. L’acrostiche fait référence à la pratique poétique d’ouvrir chaque ligne, vers, ou paragraphe avec une lettre différente de l’alphabet (p. ex., 25; 34; 37; 111; 112; 119; 145). L’allitération consiste à répéter des sons similaires au début des mots (p. ex., 22.5). L’apostrophe résulte du développement d’une personnification (voir ci-dessous). Par exemple, dans Psaumes 68.16-17, le psalmiste décrit les montagnes et s’adresse à elles de façon rhétorique. L’assonance est le fait de répéter des sons similaires dans les mots (cf. 44.8). Le chiasme change l’ordre des parties d’un vers. Sa fréquence est si élevée que le commentaire ne peut pas attirer l’attention sur les nombreuses occurrences.

L’ellipse est le fait de laisser quelque chose en dehors du texte qui doit être lu dans les deux points, d’après le contexte. L’ambiguïté qui en résulte force les lecteurs à s’impliquer eux-mêmes dans le texte, du fait qu’ils doivent choisir entre deux options ou plus. L’hendiadys est une figure de style dans laquelle deux expressions doivent être comprises comme une seule. L’hyperbole ou l’exagération crée une image dans l’esprit qui évite le littéralisme (cf. 40.13). L’inclusion est une forme de répétition dans laquelle le début et la fin d’un passage (vers, strophe, ou psaume) encadre l’unité par la réaffirmation du même motif ou des mêmes mots ou par une affirmation contrastée (cf. 70.2, 6). Le mérisme est une coordination de phrases nominales, exprimant une totalité (p. ex., en 105.14 « personne » et « rois » signifie tous et chacun). La métonymie fait référence à la signification par l’association. L’onomatopée décrit un mot dont le son crée l’effet désiré par l’orateur. La paronomasie est un jeu de mots, ou plutôt, l’utilisation de deux mots identiques ou plus ou ayant un son similaire avec des nuances de sens différentes.

Le refrain est une sorte de répétition. La répétition est inhérente au concept de symétrie, selon les mots ou les phrases qui sont répétés de façon identique, synonyme ou antonyme. La répétition est l’élément le plus important dans la poésie hébraïque, car elle transmet la symétrie et l’asymétrie, l’harmonie et la dissonance. La synecdoque est une figure de style dans laquelle une partie représente le tout ou le tout une partie. Par exemple, la « main » de l’Éternel signifie qu’il s’agit de tout son être.

Il existe différentes catégories de psaumes. L’une est celle des psaumes de louange avec deux sous-catégories : la louange descriptive et la déclarative. Il existe également les psaumes de lamentation, dont font partie les psaumes de lamentation individuels et communautaires. Dans cette relation duelle, le palmiste exprime librement sa frustration face à la lenteur avec laquelle Dieu lui répond.

D’autres types de psaumes sont des psaumes de couronnement, qui célèbrent la royauté de l’Éternel, et des psaumes de sagesse, qui présentent de nettes affinités avec la littérature de sagesse. D’autres formes littéraires sont les cantiques de Sion (46; 48; 76; 84; 87), les hymnes de triomphe (68), les cantiques de pèlerinage (120-134) et la louange de la création (8; 104; 139). Plusieurs autres catégories ne relèvent pas de désignations littéraires, mais sont nées de l’utilisation liturgique des Psaumes.

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Les Psaumes Hallel ne doivent pas être confondus avec un genre littéraire. Au contraire, ils forment trois collections séparées : le « Hallel égyptien »’ (113-118) ; le « grand Hallel » (120-136 ou 135-136 ou 136 ; les sources juives varient sur ce point), et les Psaumes Hallel de conclusion (146-150). Les Psaumes Hallel jouent un rôle significatif dans la louange (hallel) de l’Éternel. Le Hallel égytpien et le grand Hallel (la plupart étant des cantiques de pèlerinage : 120-134) étaient chantés pendant les fêtes annuelles. Les Psaumes de conclusion Hallel (146-150) faisaient partie des prières quotidiennes dans les synagogues après la destruction du temple (70 apr. J.-C.).

Proverbes

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan

Le livre des Proverbes est une admirable collection de maximes et d’instructions sages pour mener une vie utile et efficace. La collection fait partie de l’ensemble plus vaste des écrits bibliques regroupés sous le titre de « littérature sapientiale » qui donne des conseils pour bien vivre en réfléchissant aux difficultés de la vie. La sagesse proverbiale se caractérise par des déclarations courtes et lapidaires ; la sagesse spéculative, elle, comme les livres de l’Ecclésiaste ou de Job, se sert de monologues et de dialogues longs pour philosopher sur le sens de la vie, le problème du bien et du mal, et la relation entre Dieu et les êtres humains. Ce type de littérature est très répandu dans tout le Proche-Orient ancien.

2. L’auteur Les indications qui figurent dans 1.1; 10.1 et 25.1 confirment l’opinion traditionnelle qui voit en Salomon l’auteur de tout le livre des Proverbes. D’autre part, Salomon est rempli de sagesse ; il a lui-même composé des proverbes et collecté des maximes d’autres sages (voir 22.17-24.34). Les défenseurs de cette thèse ont généralement admis que les noms Agur (30.1) et Lemuel (31.1) ne sont que des pseudonymes de Salomon.

Cette idée générale mérite cependant d’être révisée. On reconnaît aujourd’hui qu’Agur et Lemuel ne sont pas des pseudonymes de Salomon et que la section 22.17-24.34 constitue une collection de proverbes indépendante, car elle possède une forme distincte, un titre et un but différents, et semble davantage se rattacher à l’« Instruction d’Aménémopé », document égyptien écrit entre 1580 et 1100 av. J.-C. Il est impossible de savoir qui a ajouté ce matériau à la collection du livre des Proverbes. De plus, il se pourrait que le titre de 1.1, qui a souvent été considéré comme s’appliquant à la partie 1.1-9.18, ne se limite pas seulement à cette partie ; ce

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pourrait être le titre du livre tout entier dans sa forme finale sans préciser que seuls les neuf premiers chapitres sont de la plume de Salomon.

On doit à Salomon 10.1-22.16 et peut-être tout ou partie des chapitres 25-29. La plupart des spécialistes, y compris plusieurs conservateurs, voient un certain rapport entre 22.17-24.34 et l’« Instruction d’Aménémopé ». On peut penser que, du temps de Salomon, Israël connaissait ces maximes. La plupart des savants considèrent que les chapitres 30-31 ne sont pas de Salomon et qu’ils seraient plus tardifs et vraisemblablement de la plume d’un contemporain d’Ézéchias. Le prologue du livre (1.8-9.18) aurait été ajouté en guise d’introduction, sans doute à l’époque d’Ézéchias, sans exclure toutefois l’époque de Salomon. Finalement, 1.1-7 sert de titre à l’ensemble de la collection.

3. Les formes littéraires

Une lecture superficielle des Proverbes révèle la forme générale d’un proverbe : une maxime ou une expression brève et incisive dont le sens s’applique dans de nombreuses situations. Une analyse plus poussée montre que ces dictons condensés suivent différents modèles et constructions, qui influent sur leur signification.

Comme tous les discours poétiques hébreux, les proverbes font appel à différents types de parallélisme. Dans le parallélisme synonymique, le deuxième vers exprime la même idée que le premier mais de façon légèrement différente : « La bouche de l’insensé cause sa ruine, / et ses lèvres sont un piège pour son âme » (18.7). Dans le parallélisme antithétique, le deuxième vers s’oppose au premier : « Les pensées des justes ne sont qu’équité, / les desseins des méchants ne sont que fraude » (12.5). Le parallélisme emblématique se sert d’une image dans l’un des vers du parallélisme : « Ce que le vinaigre est aux dents et la fumée aux yeux, / tel est le paresseux pour celui qui l’envoie » (10.26). Une autre catégorie utile est celle du parallélisme synthétique, dans lequel le deuxième vers développe le premier : « L’Éternel a tout fait pour un but, / même le méchant pour le jour du malheur » (16.4). Enfin, lorsque le deuxième vers complète simplement l’idée du premier, on parle de parallélisme formel. Le premier vers peut contenir le sujet, et le second le complément (15.31) ; le premier vers peut affirmer une condition et le second ses conséquences (16.7), ses causes (16.12) ou son but (15.24) ; un vers peut également présenter une valeur ou un type d’action préférable à ce que déclare le second vers : « Mieux vaut peu, avec la crainte de l’Éternel, / qu’un grand trésor, avec le trouble » (15.16).

Les Proverbes sont essentiellement didactiques, qu’ils prennent la forme d’une instruction formelle avec ses impératifs et ses interdictions (16.3; 23.9), qu’ils soient exprimés sous la forme de maximes indiquant les caractéristiques ou d’actions à imiter ou à éviter (14.31),

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rapportent une histoire exemplaire (7.6-23), délivrent un discours de sagesse (8.1-36) ou énumèrent des dictons numériques (6.16-19).

Les instructions s’appuient souvent sur les motivations - les raisons pour les suivre. La forme la plus courante de motivation est une proposition subordonnée qui indique le but, le résultat ou la raison de l’instruction : « Écoute les conseils, et reçois l’instruction, / afin que tu sois sage dans la suite de ta vie » (19.20). La motivation se trouve parfois dans une observation générale : « Mon fils, ne méprise pas la correction de l’Éternel, / et ne t’effraie point de ses châtiments ; / car l’Éternel châtie celui qu’il aime, / comme un père l’enfant qu’il chérit » (3.11-12).

4. Les valeurs théologiques

Cette collection de sages maximes n’est pas exclusivement religieuse ; ses leçons s’appliquent aux problèmes humains en général et pas seulement à ceux de la communauté religieuse ou aux thèmes théologiques fondamentaux tels que l’élection, la rédemption et l’alliance. Le maître s’intéresse aux individus simples et ordinaires qui vivent dans le monde. Il s’ensuit que les maximes présentent différentes caractéristiques. 1° Elles fixent davantage l’attention sur les individus que sur la nation, soulignant les qualités nécessaires et les dangers à éviter pour les gens qui veulent réussir leur vie avec Dieu.2° Elles s’appliquent aux gens de tous les temps qui sont exposés aux mêmes types de dangers et présentent des caractéristiques et des aptitudes identiques (1.20; 8.1-5).3° Elles se fondent sur le respect dû à l’autorité, sur les valeurs traditionnelles et sur la sagesse d’enseignants matures (24.21).4° Elles sont extrêmement pratiques, donnant de bons conseils pour le développement des qualités personnelles nécessaires pour réussir sa vie et éviter l’échec ou la honte ; elles soulignent le fait que la prospérité et le bien-être récompensent la vertu, mais que le vice débouche sur la pauvreté et le désastre.

5. Le contenu

La section Proverbes 1.8-9.18 sert d’introduction structurée au livre ; elle contient beaucoup d’exhortations et d’interdictions, ainsi que des histoires exemplaires et un discours tenu par la Sagesse personnifiée. Elle se déroule en cycles : le but des proverbes est de communiquer de la sagesse (1.1-7) mais la folie peut contrecarrer ce dessein (1.8-33) ; la recherche de la sagesse procure des avantages (2.1-4.27) mais la folie peut empêcher de la rechercher (5.1-6.19) ; la découverte de la sagesse s’accompagne d’avantages (6.20-9.12) mais la folie peut s’opposer à cette découverte (9.13-18).

Proverbes 10.1-22.16 constitue une collection d’environ 375 proverbes sans liens les uns avec les autres. Après les proverbes sur le modèle de l’« Instruction d’Aménémopé » (22.17-24.22), le livre inclut une autre collection de proverbes (ch. 25-29). Les deux dernières sections comprennent entre autres les maximes numériques du sage (30.10-33) et le poème acrostiche sur la sagesse (31.10-31).

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Le livre des Proverbes couvre une vaste variété de sujets, dont la plupart traitent de la vie de tous les jours. Parmi les thèmes abordés, mentionnons la sagesse en général, la conduite personnelle, les attitudes humaines (risques liés aux attitudes négatives et valeur de celles qui sont positives), l’éducation des enfants, les relations conjugales, le comportement dans les affaires, l’usage de l’argent, l’amitié, des instructions à l’intention des rois et des juges et l’usage de l’alcool.

L’Ecclésiaste

INTRODUCTION

1. Le contexte historique L’Ecclésiaste est l’un des livres les plus curieux de la Bible. Ses déclarations apparemment non orthodoxes et son pessimisme extrême ont provoqué un débat concernant son inclusion dans le canon des Écritures. Cependant, puisqu’il était historiquement admis comme étant l’œuvre de Salomon (voir auteur), sa place y a été communément assurée

2. L’auteur et la date

La paternité du livre est traditionnellement attribuée à Salomon. Cette paternité est sous-entendue dans le verset d’ouverture. L’auteur, « l’Ecclésiaste » (héb. : Qoheleth ), y est décrit comme le « fils de David, roi de Jérusalem ». En 1.12, il affirme à nouveau : « Moi, l’Ecclésiaste, j’ai été roi d’Israël à Jérusalem ». La tradition selon laquelle David était chanteur et psalmiste est confirmée par une première référence à Amos 6.5 et mise sérieusement en lumière avec la lamentation sur Saül et Jonathan (2S 1.17-27). Nous devrions regarder la réputation de sagesse de Salomon avec le même sérieux et considérer sa cour comme le pôle d’attraction des sages du monde entier, pour discuter des problèmes de la vie dans un monde difficile (1R 4.34).

Salomon maîtrisait le commerce et la culture. Ses contacts avec l’Égypte étaient importants, il avait aussi une femme égyptienne. L’Égypte possédait une abondante littérature de sagesse, comprenant des poèmes qui traitent des problèmes de la vie. D’autres écrits connus du même genre viennent de Babylone. Salomon a probablement écouté, rassemblé et ajouté à la littérature en affrontant les réalités de la vie et en montrant le chemin à celui qui craint Dieu. Une étude approfondie du livre de l’Ecclésiaste révèle qu’aucun passage n’exclut définitivement la possibilité que Salomon en ait été l’auteur (en attribuer toutefois la paternité à quelqu’un d’autre est une position que les évangéliques peuvent défendre).

Si Salomon est l’auteur, ce livre a alors été écrit au cours de sa vie, vraisemblablement dans ses dernières années. Certaines des expressions de ce livre semblent indiquer une époque ultérieure à celle de Salomon. Il n’est donc pas exclu que ses paroles, conservées par des sages à travers les siècles, aient été finalement consignées par un nouvel enseignant dans son propre dialecte ou dans l’hébreu de son époque.

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3. Le but

Le thème du livre apparaît dans le prologue : « Vanité des vanités ! ( … ) Vanité des vanités ! Tout est vanité ! » La conclusion générale est donnée dans l’épilogue : craindre l’Éternel et garder ses commandements car nous devrons un jour lui rendre compte de notre vie. La signification et le but de ce livre doivent être découverts dans ce cadre. La vie dans le monde est soumise à la frustration, mais les hommes peuvent néanmoins accepter leur situation, voire l’apprécier, et trouver la force de vivre la vie comme elle vient.

4. Les richesses théologiques

L’Ecclésiaste encourage le lecteur à avoir une vision du monde centrée sur Dieu plutôt que d’être la proie des frustrations et des questions sans réponse. Rien dans son contenu ne doit être rejeté par rapport au N.T. Bien que la révélation du N.T. soit bien plus grande que celle de l’Ecclésiaste, les deux ne sont pas sans similitudes (p. ex. Ja 4.13-17). Comme le peuple de Dieu à l’époque de Salomon, les croyants sont aujourd’hui soumis à des changements inattendus et à des hasards inhérents à l’humanité. Cependant, ils savent que Dieu œuvre au travers de chaque vicissitude de la vie. En ce qui concerne le futur, pour lequel Salomon était plongé dans l’obscurité, les chrétiens ont le glorieux espoir d’être dans la présence de Christ lui-même (2Co 5.6 ; Ph 1.23).

L’écrivain de l’Ecclésiaste n’était pas un humaniste. Il nomme Dieu une quarantaine de fois et parle six fois de la crainte de Dieu (3.14; 5.6; 7.18; 8.12-13; 12.15). Il utilise le nom général Élohim et non Yahweh « l’Éternel » ; le nom d’alliance de Dieu, peut-être parce qu’il parle de lui par rapport à l’humanité entière. Il est possible également que la période de l’A.T. approchant de son terme, il y ait eu une réticence croissante à utiliser le nom sacré dans le discours quotidien. Donc, quand le livre de l’Ecclésiaste a atteint sa forme finale, même si Salomon en est l’auteur et a utilisé le nom de l’alliance, le respect a requis l’utilisation d’Élohim.

En ce qui concerne la position d’une personne devant Dieu, le livre oppose deux catégories d’humanité. L’une comprend ceux qui craignent Dieu (3.14; 5.6; 7.18; 8.12-13; 12.15), qui sont justes (3.17; 7.15-16, 20; 8.14; 9.2), bons (9.2) et sages (fréquemment mentionnés, p. ex. 10.2). L’autre comprend les pécheurs (2.26; 7.26; 8.11; 9.2, 18) et les méchants (3.17; 7.15b ; 8.10, 12-14; 9.2). De même, il est fréquemment fait mention des insensés (p. ex. 5.4), terme qui ne désigne pas un plaisantin ou seulement une personne manquant de sagesse, mais quelqu’un d’impie et de méchant (cf. Ps 14.1; 53.2). Ce terme décrit tout particulièrement ceux qui agissent mal parce qu’ils ne font aucun effort pour découvrir la volonté de Dieu. Le livre reconnaît en même temps que la perfection sans péché n’existe pas (7.20).

Le Cantique des cantiques

INTRODUCTION

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Page 70: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

L’introduction du Cantique des cantiques est peut-être plus importante que celle de tout autre livre de la Bible, du fait de la difficulté rencontrée par l’église pour en interpréter la signification. Manifestement, le Cantique des cantiques est un recueil d’anciens poèmes d’amour, hébraïques, célébrant les expériences d’un amant et de sa bien-aimée alors qu’ils goûtent à la beauté, à la puissance, à la souffrance et aux joies de l’amour sexuel humain. Est-ce alors approprié, pour un livre qui fait partie des Écritures ?

1. Le contexte historique

Pourquoi le Cantique des cantiques est-il inclus dans les Écritures ? Ses quelques références à une personne historiquement identifiable (Salomon) et à des lieux connus (Jérusalem, En-Guédi, Thirsta) attestent de son origine juive. Toutefois, les caractéristiques habituelles de la littérature biblique, thèmes religieux, institutions et expériences, sont absentes. Nulle référence n’est faite à la loi, à la grâce, au péché, au salut ou à la prière. En fait, on ne trouve pas la moindre référence incontestable à l’Éternel Dieu dans le texte.

Cependant, synagogues et églises affectionnent particulièrement le Cantique des cantiques. En Israël, ce livre a fini par être associé à la plus grande fête hébraïque et est lu lors du huitième jour de la Pâque. Au cours des quinze premiers siècles de l’église chrétienne, la plupart des écrivains chrétiens se sont penchés sur ce petit ouvrage. Ni les Juifs, ni les Chrétiens n’ont pu l’ignorer.

2. L’interprétation

Puisque le Cantique des cantiques fait partie du canon sacré, comment doit-il être interprété ? Aucun livre dans les Écritures n’a fait l’objet de tant d’interprétations. Selon un commentateur juif du Moyen-Âge, ce livre est comme une serrure dont on aurait égaré la clé.

a. allégorique

Selon la plus ancienne interprétation consignée, le Cantique des cantiques serait une allégorie. L’allégorie est le développement d’une métaphore. Normalement, elle ne s’inspire pas de l’histoire ou du monde réel, mais est le fruit de l’esprit et de l’imagination de l’auteur. Elle ne sert pas à présenter des événements réels relatifs à des lieux et des personnes connus, mais plutôt à communiquer une vérité spirituelle de nature abstraite. L’allégorie est une ancienne technique dans laquelle une rupture se produit entre la signification évidente littérale et le message spirituel élevé. Les Juifs considèrent que ce livre, en tant qu’allégorie, est la description de la relation entre l’Éternel et son peuple choisi, Israël. Un grand nombre de chrétiens ont considéré et considèrent encore que ce cantique est avant tout l’affirmation de la relation d’amour entre Christ et l’église, son épouse.

b. naturelle

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Au cours de l’histoire, certains se montrent parfois insatisfaits de l’interprétation allégorique et élèvent leur voix en faveur d’une approche plus naturelle, qui restitue au texte tout son sens. Jusqu’à l’ère moderne, une telle bravoure a un prix. Au premier siècle, certains lecteurs juifs comprennent apparemment le Cantique des cantiques littéralement. Certains passages servent même de chanson dans les débits de boissons, provoquant la colère de Rabbi Aqiba qui prononce un anathème contre de telles pratiques.

Au XVIII e siècle, un évêque anglican suggère que ce livre nous raconte vraiment la fête de mariage de Salomon. L’épouse peut très bien être la fille de Pharaon. Cet évêque accepte que le Cantique des cantiques soit historique, mais est disposé à y voir quelque chose de typologique. Salomon, roi d’Israël, prend une épouse parmi les païens et la fait entrer dans le peuple de Dieu. De cette façon, il annonce un autre roi, le prince de la paix, qui va prendre une épouse parmi les païens, l’église. Cette approche contribue à ouvrir la voie du rejet presque universel de l’approche allégorique en faveur de la position plus couramment soutenue parmi les commentateurs bibliques de notre époque.

3. Le but et le message

Pourquoi ce petit livre apparemment érotique fait-il partie du canon sacré ? La Bible ne considère pas le mariage comme un état inférieur, une concession accordée à la faiblesse humaine. Elle ne considère pas non plus l’amour physique normal vécu dans cette relation comme impur. Le mariage a été institué avant la chute par Dieu, avec le commandement que le premier couple devienne une seule chair (Ge 2.24). En conséquence, l’amour physique dans le cadre de cette union conjugale est bon. Il répond à la volonté de Dieu et devrait être un délice pour les deux partenaires (Pr 5.15-19 ; 1Co 7.3).

La perspective d’avoir des enfants n’est pas nécessaire pour justifier l’amour sexuel dans le mariage. Fait important, le Cantique des cantiques ne fait pas référence à la procréation. Rappelons-nous que ce livre a été écrit dans un monde qui attache une grande importance aux premiers-nés et où la valeur d’une femme est souvent mesurée au nombre de ses enfants. La sexualité est souvent considérée par rapport à la procréation. Cependant, rien de tout cela ne transparaît dans le livre. Ce Cantique est un cantique qui loue l’amour pour l’amour et uniquement pour l’amour. Cette relation se justifie par elle-même.

Le Cantique des cantiques, cependant, ne se contente pas de déclarer que l’amour sexuel humain est bon en lui-même. L’utilisation de la métaphore du mariage pour décrire la relation de Dieu avec son peuple est presque universelle dans les Écritures. A partir du moment où Dieu a choisi Israël pour lui appartenir, l’alliance est représentée par l’image du mariage. L’idolâtrie est assimilée à l’adultère (Ex 34.10-17). L’Éternel est un Dieu jaloux. La monogamie est la norme pour dépeindre la relation de l’alliance tout au long des Écritures, relation qui culmine avec le repas de noces de l’Agneau.

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Page 72: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

4. L’auteur

Traditionnellement, la paternité du Cantique des cantiques est attribuée à Salomon, en partie à cause du titre, des six autres références explicites à Salomon (1.5; 3.7, 9, 11; 8.11, 12) et des trois références à un roi anonyme (1.4, 12; 7.6). Les arguments en faveur de la paternité de Salomon ne sont pas absolus, mais les arguments contre sont tout aussi loin d’être sûrs. Heureusement, connaître l’auteur n’est essentiel ni à son interprétation, ni à l’appréciation de son contenu. Oeuvre de littérature d’une beauté et d’une puissance particulières, ce livre est un tout. Comme d’autres ouvrages de la Bible, il suffit de savoir qu’il fait partie de notre canon sacré.

Ésaïe

INTRODUCTION La prophétie d’Ésaïe est l’entité littéraire complète la plus longue de la Bible après Jérémie et les psaumes. Mais le livre des Psaumes entre dans une catégorie à part, comme collection d’unités littéraires séparées.

1. L’arrière-plan a. Les sources d’information

Le livre d’Ésaïe lui-même constitue la principale source d’information. 2Rois 15-21 et 2Chroniques 26-33 apportent des données complémentaires et qui le confirment. Parmi les autres prophètes, contemporains ou qui ont vécu à une époque proche, signalons Amos et Osée qui ont tous deux prophétisé dans le royaume du nord, et Michée qui, comme Ésaïe, a communiqué la parole de Dieu à Juda. Outre l’A.T., des tablettes d’argile assyriennes constituent une source majeure d’information.

b. La vie d’Ésaïe Le titre qui ouvre le livre (1.1) situe le ministère d’Ésaïe sous les règnes d’Ozias (ou Azaria, son nom dans 2 Rois), Jotham, Achaz et Ézéchias. Son ministère s’est vraisemblablement prolongé sous le règne de Manassé. On ne sait rien d’Amots, le père d’Ésaïe. Selon la tradition juive, il serait de descendance royale. Même si rien ne vient étayer cette hypothèse, il semble tout de même qu’Ésaïe ait appartenu à l’aristocratie, car il avait facilement accès aux rois (7.3; 37.21-22, et d’autres). Sa femme est appelée « la prophétesse » (8.3), ce qui peut tout simplement signifier qu’elle était femme de prophète. Elle est cependant la mère de deux enfants connus d’Ésaïe, qui portent tous deux des noms avec une signification symbolique (7.3; 8.3, 18). Ésaïe semble avoir exercé son ministère prophétique essentiellement - sinon exclusivement - à Jérusalem et ses environs. Esaïe 8.16-17 donne à penser que le rejet de ses avertissements

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Page 73: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

concernant le roi Achaz a conduit le prophète à se retirer momentanément de son ministère public pour se consacrer à ses disciples. Ses derniers oracles datés remontent à 701 av. J.-C. Le livre apocryphe Ascension d’Ésaïe affirme que le prophète a été martyrisé (cf. Hé 11.37) sous le règne de Manassé (monté sur le trône en 687 av. J.-C.).

c. La scène internationale Israël et Juda - sous les règnes respectifs de Jéroboam II et d’Ozias - jouissent d’une période de prospérité pendant l’enfance d’Ésaïe et n’ont que peu de démêlés avec les puissances voisines. L’Égypte traverse une période de faiblesse et l’Assyrie règle ailleurs d’autres problèmes. Tiglath-Piléser III (connu sous le nom Pul à Babylone), l’agressif bâtisseur d’Empire, monte sur le trône assyrien en 745 av. J.-C. et la situation change alors rapidement. L’Égypte estime que les petits royaumes de Palestine et de Syrie font partie de sa sphère d’influence, mais l’Assyrie commence à repousser ses limites dans cette même direction. Damas (732 av. J.-C.) et une grande partie de la Galilée passent sous le contrôle de Tiglath-Piléser ; puis, Salmanasar V (727-722 av. J.-C.) et Sargon II (722-705 av. J.-C.) attaquent Samarie. Sargon II s’en empare en 722 ou 721 av. J.-C. Vers la dernière décennie de ce siècle, l’Égypte relève la tête et Babylone crée quelques problèmes à l’Assyrie, ce qui incite Juda et d’autres états voisins à se révolter contre elle. Sanchérib (705-681 av. J.-C.) envahit Juda en 701 et l’assujettit ; Dieu épargne Jérusalem qui ne tombera qu’un siècle plus tard sous les assauts de Babylone, la nouvelle puissance montante.

d. Les règnes d’Ozias et de Jotham

La datation des règnes des rois de Juda entre Ozias et Ézéchias rencontre quelques difficultés. La mort d’Ozias oscille, selon les analyses, entre 747 et 735, la date la plus vraisemblable se situant autour de 740. Jotham semble avoir déjà régné avant cette date et, clairement, plusieurs années avant sa propre mort (731), il transmet les rênes du pouvoir à son fils Achaz. À part la vision inaugurale rapportée au chapitre 6 du livre, rien ne peut être daté avec précision à partir des règnes d’Ozias ou de Jotham. Ozias a été un roi fidèle jusqu’à ses dernières années de règne où il succombe à l’orgueil (2Ch 26.16-21), mais ni lui ni Jotham ne font disparaître les hauts lieux d’idolâtrie. e. La guerre entre la Syrie et Éphraïm

La menace que fait peser Tiglath-Piléser conduit la Syrie et Israël à s’associer, vers 734, et à convaincre Juda de les rejoindre. Achaz est alors sur le trône. Ésaïe l’exhorte à placer sa confiance dans l’Éternel (ch. 7) ; mais Achaz demande l’aide de l’Assyrie. Les Assyriens s’emparent de Damas, capitale de la Syrie, en 732 et soumettent une grande partie de la Galilée (2R 15.25-29). Pékach, roi d’Israël, est assassiné par Osée qui prend sa place et règne comme homme de paille assyrien. Pékach, roi d’Israël, et Retsin, roi de Syrie, avaient déjà causé du tort à Juda avant que les Assyriens ne volent au secours d’Achaz (2R 16.5-9), mais les conséquences religieuses de l’appel à l’Assyrie ont été beaucoup plus désastreuses (2R 16.10-20).

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f. La chute de Samarie

La mort de Tiglath-Piléser, en 727 av. J.-C., suscite de faux espoirs de liberté pour les petits royaumes en bordure de Méditerranée. À la mort d’Achaz un an plus tard, Ésaïe prononce une prophétie avertissant la Philistie des conséquences d’une révolte ; par la même occasion, le prophète conseille à Juda de ne pas s’associer à la Philistie (14.28-32). Un peu plus tard, Osée cesse de payer le tribut à Salmanasar V qui assiège Samarie pendant trois ans, avant que la ville tombe entre les mains de Sargon, son successeur. D’après les Assyriens, plus de 27 000 Israélites sont déportés à cette occasion et sont installés dans les régions septentrionales de l’Empire assyrien. Pendant une dizaine d’années, la région est relativement calme, Sargon étant occupé à faire la guerre ailleurs. L’Égypte en profite pour encourager les Philistins et d’autres à former une nouvelle coalition contre l’Assyrie. Sargon l’écrase en 711, lors d’une bataille sur la frontière égyptienne. Écoutant les conseils d’Ésaïe (20.1-6), Ézéchias et Juda restent en dehors de ce conflit.

g. Ézéchias et Sanchérib

Sargon meurt autour de 705 av. J.-C. et laisse le pouvoir à Sanchérib. Immédiatement, l’Empire assyrien voit éclore plusieurs foyers de troubles. Les monarques éthiopiens, qui insufflent une nouvelle vigueur à l’Égypte, et Merodac-Baladan, de Babylone, encouragent ces insurrections. Cette fois-ci, malgré les mises en garde d’Ésaïe (ch. 30-31), Ézéchias est impliqué et Jérusalem se prépare à subir un siège (22.8-11). L’armée assyrienne envahit Juda, s’empare de 46 villes fortifiées et détruit une grande partie du pays. Elle assiège Jérusalem, mais Ésaïe encourage Ézéchias à placer sa confiance en l’Éternel. Et la ville est délivrée (37.36).

h. Babylone

Merodac-Baladan, un prince chaldéen, prend le pouvoir à Babylone en 721 av. J.-C. et proclame son indépendance de l’Assyrie. Sargon entre dans Babylone en 711 ou 710, sans avoir à combattre. Mais, après la mort de Sargon, Merodac-Baladan se pose en meneur des mouvements insurrectionnels contre Sanchérib et cherche même à entraîner Ézéchias (39.1-2). Sanchérib bat Merodac-Baladan et le destitue. Au cours du septième siècle, Babylone reprend de l’ascendant pour devenir la puissance mésopotamienne dominante jusqu’à la fin du siècle. Cette puissance montante asservit Juda et entraîne la chute de Jérusalem en 587. L’exil qui en découle accomplit l’avertissement de Dieu à Ézéchias par l’entremise d’Ésaïe (ch. 39) et constitue l’arrière-plan des prophéties suivantes. Cependant, au moins une partie des chapitres 56-66 suppose l’écoulement d’un temps plus long, avec un exil appartenant au passé et les habitants de nouveau installés dans Juda. Les chapitres 44-45 font référence au Perse Cyrus, l’instrument humain du retour d’exil des Juifs.

2. L’auteur, l’unité et la date

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a. L’histoire de la critique

Le livre d’Ésaïe nous est parvenu comme une unité, et le nom d’Ésaïe, fils d’Amots, est le seul qui lui soit associé dans tous les manuscrits hébreux et les versions anciennes. Il faudra attendre la fin du dix-huitième siècle pour qu’un auteur se demande si Ésaïe a vraiment écrit la totalité du livre. Cet auteur prétendra que les chapitres 40 à 66 sont l’œuvre d’un prophète ayant vécu vers la fin de l’exil babylonien. À la fin du dix-huitième siècle, peu après que la critique des sources concernant le Pentateuque a atteint sa vitesse de croisière, la nouvelle école critique s’intéressera à Ésaïe et attribuera les chapitres 44-66 à un prophète de l’exil, baptisé « deutéro-Ésaïe ». Cette idée se répand alors largement dans les sphères intellectuelles. Plus tard, les chapitres 55-66 seront attribués à un autre auteur, le « trito-Ésaïe » ; d’autres critiques scinderont le livre en encore davantage de parties, jusqu’à le fragmenter.

b. Les preuves en faveur de l’unité du livre

Les Juifs ont manifestement accepté la paternité littéraire d’Ésaïe sur les derniers chapitres du livre bien avant la venue de Christ. Le passage d’Ecclésiastique 48.24, livre deutérocanonique écrit au début du deuxième siècle avant notre ère, fait visiblement référence à Esaïe 61.3. Le rouleau d’Ésaïe trouvé à Qumran et répertorié 1QIsa a contient le texte intégral du livre. Mais plus important encore est le témoignage du N.T. qui cite nommément Ésaïe - et notamment différentes parties (p. ex. Jn 12.37-41) - plus souvent que tous les autres écrits prophétiques combinés.

3. La théologie

La vision qu’a Ésaïe du Dieu trois fois saint dans son temple (ch. 6) influence profondément toute sa carrière prophétique et sa théologie. Cette vision révèle au prophète certaines choses concernant la sainteté de Dieu, son altérité transcendante, sa majesté et sa nature incomparables. Ésaïe confère à Dieu vingt-cinq fois le titre de « Saint d’Israël ».

Ésaïe découvre que Dieu est Roi, au-dessus de tous, éternel et immortel, contrairement à Ozias et aux autres monarques terrestres. Il est également l’Éternel Tout-Puissant, si bien que l’autorité du Roi suprême, associée à l’omnipotence, lui permet de réaliser chacun de ses projets. C’est pourquoi il a pu se servir de l’Assyrie et de Babylone comme instruments de ses desseins punitifs tout en frappant ces empires des châtiments qui s’abattront sur toutes les nations (ch. 13-23). En fait, le monde entier sera jugé (ch. 24). Ésaïe reçoit également la sublime vision d’un grand Roi pour le peuple de Dieu, un Roi qui porte le nom de « Dieu puissant » (9.5).

Ésaïe voit « toute la terre pleine de sa gloire » (6.3) ; il peut donc parler de Dieu comme Créateur de l’univers (40.26; 42.5; 48.12-13) et d’Israël, son peuple (43.1, 15). Il a encore la vision de la terre remplie de la connaissance de l’Éternel (11.9) et même des nouveaux cieux et d’une nouvelle terre (65.17; 66.22).

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Comme ce grand Dieu est saint, la rencontre d’Ésaïe avec lui communique au prophète un sentiment très fort de son péché. Il devra être le porte-parole de Dieu mais ses lèvres sont impures. Les lèvres du peuple aussi sont impures ; en effet, tout en adorant son Dieu par les rites (1.10-17), le jeûne (58.1-5) et les paroles (29.13), le peuple est en réalité rebelle (1.2-6; 30.1-5 ; et d’autres). Les véhémentes dénonciations de l’idolâtrie (ch. 40-48) révèlent non seulement que, pour le prophète, il n’y a qu’un seul Dieu mais de plus que sa sainteté ne tolère pas le péché d’idolâtrie. Ésaïe condamne tout particulièrement deux péchés, l’orgueil et l’incrédulité (p. ex. 2.6-22; 7.1-9). Il dénonce aussi l’injustice (1.16-17; 58.6-12 ; et d’autres).

Mais Ésaïe apporte également l’espérance. Son nom même (qui signifie « l’Éternel est salut ») suggère que nous devons nous attendre à une issue positive. Le prophète réitère constamment l’assurance du pardon pour celui qui se repent (1.18-19; 12.1; 30.18-19; 3.24 ; et d’autres) ; le sacrifice ultime qui procure le pardon est suggéré dans 6.6-7 et il s’appuie sur les souffrances sacrificielles du Serviteur de l’Éternel (52.13-53.12). Le but de Dieu concerne l’individu, certes, mais aussi la nation ; la doctrine du reste est la garantie de la vérité de Dieu. L’enseignement d’Ésaïe à propos du reste contient en germe tout ce que le prophète déclare sur la gloire future de Sion (voir la section suivante).

4. L’eschatologie

Le message d’Ésaïe est fortement eschatologique. Le prophète aborde souvent la destinée future d’Israël et des autres nations. Comme d’autres écrits prophétiques de l’A.T., celui-ci a été compris de plusieurs manières quant à son eschatologie. Il va de soi qu’une saine doctrine de l’Écriture requiert de prendre au sérieux l’étude de chacune de ses parties ; elle exige aussi de tenir compte de la manière dont les auteurs du N.T. les ont comprises.

5. Le messianisme et les chants du Serviteur

Chaque partie de l’A.T. possède ses propres témoins du Christ annoncé. À part peut-être le psautier, aucun livre de l’A.T. ne contient un témoignage aussi complet, aussi varié et aussi bien intégré que le livre d’Ésaïe. De nombreux thèmes de cette littérature prophétique sont messianiques au sens large, c’est-à-dire qu’ils rendent témoignage du Christ présenté dans les pages du N.T. Les thèmes du germe ou du rameau (cf. 4.2; 11.1 ; et d’autres), de la pierre (cf. 8.14; 28.16-17 ; et d’autres) et de la lumière (9.1; 42.6 ; et d’autres) sont des concepts importants du livre d’Ésaïe. Les Chants du Serviteur, qui forment des ensembles clairement identifiables, n’ont pas été placés arbitrairement dans leur contexte. En effet, le thème du Serviteur est important dans le livre à partir du chapitre 41, et s’applique souvent à Israël (41.8-9; 43.10; 44.1-2, 21). Cyrus, bien qu’il ne soit pas appelé serviteur de l’Éternel, est aussi à son service (44.28-45.7) ; Ésaïe prédit aussi la venue des serviteurs de l’Éternel (44.26) et annonce le bien de son serviteur Israël (45.4) comme toile de fond et but de son œuvre.

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Jérémie

INTRODUCTION 1. Les généralités

Jérémie est le plus autobiographique de tous les prophètes. Il est devenu, avec la survie de son peuple après la chute de Jérusalem en 586 av. J.-C., un véritable sauveteur pour les Juifs. Cet homme de Dieu est cependant l’un des moins bien compris des grands chefs de l’A.T.

Le livre de Jérémie est plus long que ceux d’Ésaïe ou d’Ézéchiel ; sa longueur équivaut à une longueur et demie de l’ensemble des douze petits prophètes. Si on considère que 1 et 2 Samuel, 1 et 2 Rois et 1 et 2 Chroniques sont des livres distincts, Jérémie est le livre le plus long de la Bible. Ce livre jette une lumière appréciable sur le déclin et la chute du royaume de Juda et a influencé la réflexion théologique des siècles suivants.

2. La personne de Jérémie

a. Son arrière-plan

Le sens du nom « Jérémie », qui est assez répandu en Israël, reste controversé. S’il exprime l’espoir de ses parents pour lui-même et pour la nation, il signifierait « l’Éternel élève », traduction préférable à « l’Éternel jette » ou « l’Éternel établit ». Jérémie est présent dans tellement d’événements politiques que l’absence de son nom dans les livres des Rois ou des Chroniques paraît étrange. Il est né en 646 av. J.-C. dans le village lévitique d’Anathoth, dans le territoire de Benjamin. Il est mort vraisemblablement en Égypte, peu après 586. Jérémie est incontestablement la personnalité spirituelle la plus importante de son temps en Israël. Sa vie n’a pas été heureuse ; ses manifestations de tristesse sont classiques. De tous les prophètes, il est le seul à avoir montré ses sentiments personnels en proclamant le message de Dieu. Prophète en vertu de la grâce, les épreuves de la vie ont fait de lui un rempart de la vérité de Dieu ; par son vécu spirituel quotidien, il est l’un des plus grands apôtres de la foi prophétique dans sa relation avec Dieu ; gentil et doux de nature, il lutte constamment contre les forces du péché ; par désir personnel, il aurait souhaité l’amour d’une compagne, de sa famille, de ses amis et, par-dessus tout, de son peuple, mais il en a été privé.

Le livre de Jérémie étale la vie privée et publique du prophète : ses actions courageuses, sa tendresse à l’égard de ses coreligionnaires, ses luttes émotionnelles et spirituelles intenses avec Dieu. Ses déceptions et ses souffrances sont indéniablement aussi poignantes que celles de n’importe quel autre prophète juif. Sa vie n’a été qu’un long martyre.

Jérémie, fils de Hilkija, est issu d’une famille sacerdotale, mais rien n’indique qu’il a lui-même exercé la fonction de sacrificateur. Il est possible que son père soit le Hilkija qui a découvert « le livre de la loi » dans le temple (2R 22.8). Il est probablement un descendant d’Abiathar, le seul survivant des sacrificateurs de Nob (1S 22.20). Après avoir exercé le sacerdoce sous David,

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Abiathar a été exilé par Salomon à Anathoth où il avait des terres (1R 2.26). Le fait d’être originaire d’Anathoth explique mieux pourquoi, du temps de Josias, Jérémie est moins connu que la prophétesse Hulda (2R 22.14-20). L’achat d’un champ (Jé 32.6-20) permet de déduire que Jérémie jouit d’une certaine aisance financière.

Il est appelé à l’office prophétique la treizième année du règne de Josias (1.2 ; c.-à-d. en 626 av. J.-C.) ; il a alors environ vingt ans et exercera son ministère pendant plus de quarante ans. L’Éternel ne lui a pas permis de se marier (16.2). Bien que son ministère public soit long et connaisse des hauts et des bas, il ne semble pas que le prophète ait eu des disciples ; son compagnon le plus proche était son secrétaire et scribe Baruc, fils de Nérija.

Jérémie prêche à Jérusalem jusqu’à la chute du royaume de Juda en 586 (cf. 7.2; 22.1; 27.1-2; 32.1). Il exerce ensuite son ministère un certain temps parmi les survivants de Juda et plus tard parmi les Juifs qui ont fui en Égypte (ch. 40-44). Sa mission concerne à la fois Israël et les autres nations de son temps (1.10). Sa vocation est aussi simple que directe (1.4-5), mais la réaction du prophète diffère de celle d’Ésaïe (Esa 6) et d’Ézéchiel (Ez 1).

b. Son ministère public

Son ministère se situe à une époque chaotique sur les plans politique, social, moral et spirituel. Les jours bénis des grandes réformes sous Ézéchias au huitième siècle ont été éclipsés par le règne long et impie de Manassé qui, en raison de sa fidélité aux monarques assyriens, a imposé à son peuple un culte syncrétiste. Jérémie ne cache pas sa haine de l’apostasie et des injustices sociales de Manassé. Les sacrificateurs et les prophètes participent à ce déclin spirituel.

Lorsque Jérémie commence à prêcher, le pieux Josias a déjà lancé son train de réformes pour extirper l’idolâtrie de son royaume. Le contenu de la prédication du prophète confirme qu’il appuie pleinement les réformes du roi et qu’il appelle le peuple à revenir de tout son cœur à l’Éternel. Les habitants de Juda ont malheureusement atteint un tel niveau d’impiété qu’ils ne réagissent plus à cet appel. Dans sa grâce, l’Éternel continue cependant de supplier Juda par l’entremise de Jérémie. Dès le début de son ministère, Jérémie ne dévie jamais d’un pouce dans sa prédication en affirmant que Juda et Jérusalem seront détruits par une nation venant du nord, et que les habitants seront emmenés en captivité (4.5-9; 6.22-26). La menace de l’invasion de l’ennemi du nord confère à ses avertissements une note d’urgence particulière.

Sous le règne de Jojakim (608 av. J.-C.), Jérémie exerce à nouveau un ministère public. Dans la célèbre proclamation au temple (ch. 7; 26), il indique que seule la fidélité à Dieu est en mesure de garantir la sécurité de la nation ; en cas de refus, le temple sera détruit. Jérémie suscite une violente opposition contre sa personne et son message de la part de toutes les couches de la population, y compris sa propre famille. Attristé et désespéré par le rejet de son message, Jérémie continue d’aimer son peuple, de prier et de se tourmenter pour lui. Aucun patriote juif plus grand et plus sincère n’a prêché la vérité aux Israélites. Même lorsque l’Éternel lui interdit

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de prier pour le peuple, il continue d’intercéder en sa faveur. À certains moments, il a le sentiment que Dieu l’a abandonné. Il maudit même le jour de sa naissance.

Les messages dénonciateurs de Jérémie mettent Jojakim tellement en rage qu’il taille le manuscrit en pièces et le jette au feu. Jérémie est alors contraint de fuir pour échapper à la colère du roi. La quatrième année du règne de Jojakim (selon la chronologie hébraïque [25.1], ou la troisième année selon la chronologie babylonienne [Da 1.1]), Nebucadnetsar, de Babylone, envahit d’abord Juda. Il a déjà vaincu le pharaon égyptien Néco à la bataille de Carkemisch (605 av. J.-C.) ; cet événement revêt une très grande importance, car il règle la question de la domination mondiale à cette époque. Après la défaite de l’Égypte, Jérémie déclare qu’il est inutile et même contraire à la volonté de Dieu de s’opposer à Nebucadnetsar. On imagine sans peine la nature impopulaire de ce message. À partir de là, la vie de Jérémie n’est qu’une succession ininterrompue de malentendus et de persécutions.

Sous le règne de Sédécias, Jérémie ne connaît pas un sort meilleur, même si le nouveau roi fait preuve à son égard d’une violence moindre que celle de Jojakim. Mais Sédécias est un monarque faible et hésitant qui craint en permanence les nobles puissants de sa cour. Jérémie exerce un certain ministère auprès de ce roi, mais il ne semble pas avoir porté du fruit. Lorsque le royaume de Juda tombe entre les mains de Nebucadnetsar, la onzième année du règne de Sédécias, le roi babylonien nomme Guedalia gouverneur de Juda (40.1-6). Peu après son installation, le gouverneur est assassiné par Ismaël, fils de Nethania, descendant de la dynastie davidique (40.1-2). Le reste qui se trouve à Mitspa s’enfuit en Égypte pour échapper à la colère de Babylone (v. 16-18), contre l’avis de Jérémie qui, en dépit de ses protestations, est obligé d’accompagner les fuyards avec Baruc (42.1-43.7). À la fin de son ministère, Jérémie est à Tachpanès en Égypte, où il prédit la conquête de l’Égypte par Nebucadnetsar (43.8-13) et dénonce l’idolâtrie des Juifs de cette ville (ch. 44). Ensuite, on ne sait plus rien de la vie de Jérémie. Jérémie doit affronter l’opposition de plus d’ennemis que n’importe quel autre prophète de l’A.T. Celle-ci semble n’avoir eu qu’une cause : le prophète n’a qu’un seul sujet de prédication : la reddition inconditionnelle. Si l’Éternel ne l’avait pas protégé, il aurait subi le martyre.

On ignore tout de l’époque, du lieu et des circonstances de la mort de Jérémie. D’après 44.29-30, Jérémie vit encore vers 570 av. J.-C. (Le pharaon Hophra [Apriès] a régné de 588 à 569.) Par une étrange providence, le prophète, qui n’a cessé sa vie durant de prêcher contre l’Égypte, est contraint d’y finir ses jours comme prisonnier. Une tradition tardive et mal attestée affirme que les habitants de Tachpanès ont lapidé Jérémie à mort. D’après un récit rabbinique, Nebucadnetsar aurait déporté Jérémie à Babylone avec Baruc, lorsqu’il a envahi l’Égypte. C’est là que le prophète serait mort. Rien ne vient cependant confirmer cette version des faits.

Curieusement, ce grand serviteur de Dieu, auquel son propre peuple n’a guère prêté attention, a été très respecté après sa mort. Les Juifs d’Alexandrie lui vouaient un profond respect (cf. 2Ma 2.1-8; 15.12-16 ; voir aussi Mt 16.14). Le fait que, bien plus tard, les Juifs l’aient reconnu comme leur intercesseur peut partiellement expliquer cet intérêt.

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3. La date et l’auteur

Les savants ont abondamment discuté l’origine du livre et ont défendu différentes opinions. Ils se divisent grosso modo en deux groupes :

1° ceux qui pensent que Jérémie est l’auteur d’une très petite partie du livre seulement, le reste étant l’œuvre d’autres auteurs ;

2° ceux qui attribuent tout le livre à Jérémie (le ch. 52 est traité séparément) par l’intermédiaire de Baruc (qui a en somme été pour Jérémie ce que Luc était pour Paul). Le premier groupe privilégie trois sources :

1° les messages dictés par Jérémie ;

2° une biographie de Jérémie, vraisemblablement de la plume de Baruc ;

3° différentes contributions d’auteurs et de rédacteurs ultérieurs. La seconde école, celle que nous suivons dans ce commentaire, croit que Jérémie a dicté ses messages à Baruc, son secrétaire (36.17-18; 45.1).

Les passages de Jérémie concernant l’ennemi du nord cadrent bien avec ce que nous savons des Babyloniens. D’après les données internes, les premières parties écrites du livre l’ont été la quatrième année du règne de Jojakim (605 av. J.-C. ; cf. 36.1-2). Par ailleurs, des passages comme 29.1; 30.2 et 51.60 imposent de conclure que les prophéties, autres que celles contenues dans le rouleau de Baruc, ont été consignées sur-le-champ. Le rouleau brûlé par Jojakim a été remplacé et complété (36.32). Il semble que, durant les premières années de son ministère, Jérémie ait conservé des notes de ses messages qui ont été écrites sur l’ordre de Dieu (36.2). Le rouleau consumé par les flammes a été remplacé et les prophéties progressivement reportées sur le nouveau rouleau. On peut raisonnablement penser que Jérémie a publié son ouvrage pendant la captivité. Le livre entier a probablement été réuni peu après la mort du prophète. Une conclusion semble inéluctable : le rouleau réécrit par Baruc a servi de support aux prophéties écrites de Jérémie. Le livre porte les signes d’un ouvrage écrit par une personne à un moment donné.

4. Le cadre historique

a. L’arrière-plan prophétique

Le huitième siècle avant notre ère a vu une galaxie de prophètes en Israël ; il en est de même à la fin du septième siècle et dans la première moitié du sixième. Jérémie a pour contemporains : Sophonie (Sop 1.1), Abdias (Ab 11-14), la prophétesse Hulda (2R 22.11 ; 2Ch 34.22) - tous en Juda, Ézéchiel (Ez 1.1-3) et Daniel (Da 1.1) à Babylone. Les liens entre Jérémie et Ézéchiel sont

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particulièrement étroits. Nahum et Habakuk sont vraisemblablement aussi contemporains de Jérémie. Trois des quatre grands prophètes ont connu la captivité ;

1° Daniel au temps de Jojakim (Da 1.1),

2° Ézéchiel au temps de Jojakin (Ez 1.1-3) et

3° Jérémie au temps de Sédécias (Jé 1.1-3).

b. L’arrière-plan historique

Les événements. Pour bien comprendre la prophétie de Jérémie, il convient de bien examiner son époque à cause

1° des événements critiques dans le monde politique de son temps et qui touchent directement Juda, et

2° du nombre de rois qui règnent sur Juda pendant la carrière du prophète et avec lesquels celui-ci a des contacts étroits. Jérémie est un personnage national et international. Un tableau chronologique d’ensemble permet de mieux visualiser l’arrière-plan historique du livre.

639-609 av. J.-C. : règne de Josias

609 av. J.-C. (3 mois) : règne de Joachaz

609-597 av. J.-C. : règne de Jojakim

597 av. J.-C. (3 mois) : règne de Jojakin

597-586 av. J.-C. : règne de Sédécias

586 av. J.-C. : chute de Jérusalem

586 ( ?) av. J.-C. : assassinat de Guedalia

L’époque de Jérémie est l’une des plus importantes de l’histoire de l’A.T. Par sa portée, elle est la mieux documentée de toute l’histoire d’Israël. Le livre de Jérémie contient tellement de données historiques, biographiques et autobiographiques que sa vie peut être jalonnée de dates et d’événements connus, ce qu’aucun des écrits des autres prophètes ne permet. Parmi les événements significatifs de cette période, mentionnons :

669-630 av. J.-C. : fin de l’Empire assyrien après la mort d’Assurbanipal

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626 av. J.-C. : vocation de Jérémie

612 av. J.-C. : chute de Ninive et de l’Empire assyrien

609 av. J.-C. : mort de Josias à Meguiddo

605 av. J.-C. : bataille de Carkémisch entre l’Égypte et la Babylonie avec la victoire de celle-ci

605 av. J.-C. : premier siège de Jérusalem par Nebucadnetsar (exil de Daniel à Babylone)

597 av. J.-C. : deuxième siège de Jérusalem (exil d’Ézéchiel à Babylone)

588-586 av. J.-C. : siège final de Jérusalem et début de la captivité babylonienne

Nabopolassar, père de Nebucadnetsar et vainqueur de l’Assyrie, vient de Chaldée, province au sud de la Babylonie, et règne de 625 à 605 av. J.-C. Nebucadnetsar (ou, plus correctement, Nebucadretsar), le plus célèbre des monarques babyloniens, a dirigé l’empire de 605 à 562 av. J.-C.

5. Les points forts théologiques

Les éléments dominants du message de Jérémie revêtent une importance capitale aussi bien pour l’époque de Jérémie que pour la nôtre. La confiance inébranlable qu’il a en Dieu et dans ses promesses le soutient durant toute sa vie de chagrin et d’opposition (18.7; 29.14; 32.1-15). Dieu - sa bonté, ses droits sur l’humanité, ses exigences en matière de repentance et de foi - et son peuple égaré - son bien-être physique et spirituel - sont les deux pôles de sa vie et de son ministère.

Jérémie a une haute idée de Dieu en tant que Seigneur de toute la création (27.5). Les dieux de la nation ne sont que du néant (10.11 [le seul verset du livre écrit en araméen], 14; 14.22). Dieu connaît la perversité du cœur humain 17.9-10), ce qui ne l’empêche pas d’aimer profondément son peuple (31.1-3). Il désire ardemment bénir ceux qui se confient en lui (17.7). Le culte idolâtre et le service cruel et impénitent lui sont tous deux en abomination (19.4-6; 14.12). Il n’existe pas d’offense plus grave envers Dieu que de le représenter sous la forme d’idoles mortes. L’idolâtrie est le péché particulier contre lequel Jérémie prêche sans relâche. Trois sortes de mensonges l’indisposent : 1° la fausse sécurité qui s’interdit tous les appels à la repentance ;

2° les faux prophètes qui entraînent le peuple dans une dangereuse suffisance et

3° le faux culte des idoles rendu à Baal, à Moloch, et à la reine du ciel (Ishtar). Des statues de ces divinités se trouvent même dans le temple (32.34 ; cf. 7.31; 19.5; 32.35; 44.18-19).

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L’idolâtrie s’accompagne toujours d’immoralité. Du temps de Jérémie, la corruption morale est très répandue, et les injustices sociales abondent (5.1-9; 7.1-11; 23.10-14). Les sacrificateurs et les prophètes sont aussi coupables que le reste de Juda (6.13-15). Pourtant, la nation accomplit ses rites religieux. Mais ces services purement de façade n’apaisent pas Dieu. Jérémie annonce donc que le jugement est inévitable. Dieu s’est déjà servi de la sécheresse, de la famine et des envahisseurs étrangers (14.1-6; 4.11-22) ; il mettra le comble à sa colère en faisant venir Nebucadnetsar (25.9). Mais l’amour de Dieu et sa fidélité à l’alliance ne permettront pas que le jugement soit fatal ou final. Un espoir subsiste. Jérémie annonce le retour de la captivité babylonienne (25.11; 29.10) ainsi que le malheur sur Babylone (ch. 50-51). Il n’hésite pas à donner une démonstration tangible à l’espoir d’Israël (32.1-15).

Le ministère de Jérémie concerne aussi les nations (1.5, 10). Il voit en Nebucadnetsar l’agent de Dieu dans les événements de ce temps (27.6). Il avertit les autres nations de ne pas résister à Nebucadnetsar (27.1-11). Il demande aux autres nations, de la part de Dieu, de vivre selon la justice (ch. 46-51). Il fait connaître le souci divin concernant le bien-être de tous les peuples (29.1-14, en particulier le v. 7).

Jérémie fait probablement porter l’accent principal de son ministère sur la priorité du spirituel. Il se rend compte combien les caractéristiques temporelles de la religion de Juda sont secondaires. Il constate que ses coreligionnaires placent leur foi

1° dans l’acceptation extérieure de l’alliance de l’Éternel (11.1-5),

2° dans la circoncision (9.25-26),

3° dans le temple (7.1-15),

4° dans le système des sacrifices (6.20; 7.21-23),

5° dans la possession matérielle de la loi de Moïse (8.8),

6° dans la prophétie mensongère (23.9-40),

7° dans la prière (11.14; 15.1),

8° dans le trône (22.1-9) et

9° dans l’arche (3.16). Jérémie prêche la repentance plus qu’aucun autre prophète. Son souci majeur est en permanence la condition du cœur individuel. Sa présentation de la nouvelle alliance est remarquable (31.31-34). Le N.T. nous montre avec quelle profondeur cette vérité fait partie de l’œuvre du Seigneur.

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Dans ses prédictions à long terme, Jérémie annonce qu’Israël reviendra à l’Éternel dans la repentance (32.37-40). Le Messie régnera sur le peuple selon la justice et la droiture (23.5-8). Le reste des nations jouira alors des bénédictions divines (3.17; 16.19).

En ce qui concerne la prophétie messianique, Jérémie ne décrit pas les temps messianiques en détail. La personne du Messie n’apparaît pas de façon claire dans son livre. Mais le prophète écrit quelques passages messianiques importants :

1° la proclamation d’une révélation de Dieu qui fera oublier l’arche de l’alliance (3.14-17) ;

2° la révélation d’une nouvelle alliance (31.31-34) ;

3° l’accomplissement de l’idéal mosaïque (Ex 19.6) avec la réalisation de l’alliance davidique (33.14-26).

Lamentations

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan

Le livre des Lamentations se compose de cinq lamentations ; à l’exception de la troisième, toutes traitent de la destruction de Jérusalem par les Chaldéens en 587 av. J.-C. et de ses conséquences. La clarté des tableaux indique de toute évidence qu’il s’agit de l’œuvre d’un témoin oculaire. Bien que conscient des souffrances imposées aux autres villes de Juda, l’auteur se focalise sur la situation à Jérusalem.

2. L’auteur

Dans la Bible hébraïque, le livre est anonyme (la Septante contient un verset d’introduction qui attribue le livre à Jérémie). Les arguments pour et contre la paternité littéraire de Jérémie s’équilibrent. Nous faisons donc bien de respecter l’anonymat imposé sur le livre par le Saint-Esprit. Les raisons avancées en faveur de la paternité littéraire de Jérémie sont surtout sentimentales. Les ressemblances théologiques avec Jérémie sont normales de la part de tout auteur qui accepte l’enseignement de ce prophète et celui des prophètes majeurs en général.

3. La date

Peu de commentateurs pensent sérieusement que l’une ou l’autre des cinq lamentations ait été écrite en dehors de la période 586-538 av. J.-C. D’ailleurs, l’absence de toute espérance nationale indique un achèvement de l’œuvre avant 562 av. J.-C., date à laquelle le roi Jojakin est sorti de prison (2R 25.27-30). Cette libération a pu réveiller l’espoir que les promesses de Jérémie allaient se réaliser. Tel qu’il est exprimé au chapitre 3, cet espoir concerne davantage

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l’individu que la nation ; ailleurs, l’espoir national ne va guère au-delà de l’attente de voir les nations hostiles connaître le jugement qui vient de frapper Jérusalem.

4. Le but

Déjà dans Zacharie 7.3, 5 et 8.19, on s’aperçoit qu’une fête annuelle commémorait la destruction du temple le septième jour du cinquième mois (2R 25.8-9). (Au deuxième siècle de notre ère, cette commémoration a été reportée au neuvième jour du mois pour regrouper la destruction du temple et l’écrasement de la révolte de Bar Kochba en 135 apr. J.-C.). On peut être certain que ce jeûne a été observé dès le début, très certainement avec des cérémonies, au milieu même des ruines du temple (cf. Jé 41.5 qui présente le pèlerinage sur le site du temple comme un objectif des gens pieux). Aussi loin que remonte la tradition, les Lamentations étaient lues le neuvième jour du cinquième mois ; il est raisonnable de supposer que le livre a été écrit dans ce but dès le début.

5. Les valeurs théologiques

Israël fait face à deux niveaux - national et individuel - au problème de la souffrance. Jérémie montre bien qu’il faut maintenir ces deux niveaux séparés ; alors qu’il annonce et justifie la chute de Jérusalem et de la monarchie davidique, il ne comprend pas pourquoi lui-même doit souffrir, alors qu’en tant que juste, il devrait être épargné par la souffrance, d’après la théologie populaire. Le livre de Job est l’ouvrage classique sur la souffrance du juste. Le livre des Lamentations traite de la souffrance nationale.

Ézéchiel

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan

L’abominable idolâtrie d’Israël est la cause de l’exil des 10 tribus du nord emmenées captives par l’Assyrie en 722 av. J.-C. Le royaume de Juda, encore appelé royaume du sud, est alors épargné à cause de l’influence d’hommes pieux, comme Ésaïe. Sous l’autorité du jeune roi Ézéchias, Juda connait rapidement un réveil spirituel et des temps de rafraîchissement, car le monarque, après avoir tiré les leçons de la décadence d’Israël, trouve un appui dans le ministère du prophète Ésaïe (2R 18-19). Hélas, sa foi et son zèle pour la Loi ne sont même plus un souvenir après que Manassé, son fils, et Amon, son petit fils, aient rejeté les voies du Seigneur. Pendant 55 ans (2R 21.1-18), ces deux hommes détournent le peuple, l’entraînent au mal et à toutes sortes d’idolâtries, et le pervertissent à tel point que la grande majorité rejette la Loi au point d’oublier l’existence même de Dieu.

Le fils d’Amon, Josias, homme pieux, donne à Juda un espoir nouveau bien que tardif. À l’occasion de la réfection du Temple, on découvre une copie de la Loi de Moïse (2R 22). Sa

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lecture bouleverse profondément le roi qui manifeste le désir de lui obéir de tout son cœur (2R 23). Il ordonne la purification du Temple et purge officiellement le pays des abominations de Manassé et d’Amon. Mais pour le gros du peuple, la réforme ne vaut que pour la forme. L’idolâtrie du long règne de Manassé a corrompu les cœurs à tel point que la repentance profonde n’est que le fait d’une minorité (cf. Jé 3.10). La Loi de Moïse avertit la nation d’Israël : si le peuple persiste dans la désobéissance à ses commandements, il partira en captivité et sera dispersé parmi les nations païennes (Lé 26 ; De 28-29). Au fil du temps, la sentence est devenue inéluctable. Seule son exécution pourra extirper d’Israël la méchanceté et décider le peuple à retourner au Seigneur son Dieu.

Pendant ce temps, sur la scène internationale, se noue une lutte pour le pouvoir. Après avoir été la puissance dominante du Proche Orient antique pendant plus de 250 ans, l’Assyrie voit son éclat décliner, en même temps que croît celui de l’Empire néobabylonien sous Nabopolassar. En 612 av. J.-C. Babylone remporte la victoire sur les Assyriens et prend Ninive, leur capitale. Sous la conduite d’Ashuruballit II, les rescapés de l’armée d’Assyrie se replient sur Haran à l’ouest où, épaulés par les Égyptiens, ils s’efforcent de maintenir la résistance en vie.

2. L’auteur et la date

La paternité d’Ézéchiel sur l’ensemble du livre n’a jamais été sérieusement mise en doute avant 1925. Les questions récentes sur son unité se fondent sur l’analyse de la critique littéraire. Même s’il faut admettre que les visions d’Ézéchiel lui ont permis d’être témoin d’événements se déroulant à Jérusalem alors qu’il demeurait physiquement à Babylone, les difficultés rencontrées sont moindres pour ceux qui acceptent l’unité traditionnellement admise que pour ceux qui altèrent le texte ou concoctent toutes sortes d’objections basées sur les différences de style, de lieux ou d’histoire. D’ailleurs, chez Ézéchiel, style et contenu sont remarquablement homogènes. Certains situent la composition du livre en Palestine.

Peu de livres de l’A.T. attachent autant d’importance à la chronologie que celui d’Ézéchiel. Les trois premiers versets du premier chapitre définissent un cadre chronologique. Ils font partir l’ouvrage de la déportation de Jojachin à Babylone en 597 av. J.-C. Le premier oracle est daté de « la cinquième année de la captivité du roi Jojakin » (1.2 ; c.-à-d. 593 av. J.-C.), et le dernier (29.17-30.19) remonte à « La vingt-septième année » (571 av. J.-C.). Le livre contient treize indications chronologiques. Les chapitres 1-24, qui annoncent le jugement sur Jérusalem et sur Juda, et la raison de ce jugement, portent la date de 593-589 av. J.-C. (1.1-3; 8.1; 20.1; 24.1). Les prophéties contre les nations étrangères dans les chapitres 25-32 se situent entre 587 et 585 av. J.-C. (26.1; 29.1; 30.20; 31.1; 32.1, 17), à l’exception de 29.17-30.19. Quant aux messages de bénédiction et d’exhortation des chapitres 33-48, ils ont été délivrés entre 585 et 573 av. J.-C. (33.21; 40.1).

3. Les lieux et le but de la composition

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Les versets 1.1-3 et 3.15 d’Ézéchiel situent globalement le lieu d’origine du ministère du prophète dans le royaume de Babylone, et plus précisément sur le site de Thel-Abib, à proximité du fleuve Kebar et de l’ancien site de Nippur. Beaucoup pensent que ce « fleuve » était en réalité un canal partant de l’Euphrate et y retournant après avoir effectué une boucle au sud-est.

La vie des Juifs pendant la captivité babylonienne n’a rien de pénible. Bien qu’ils soient assignés à la région de Thel-Abib, il semble qu’ils jouissent de la liberté de mouvement à l’intérieur du pays et qu’ils aient la possibilité d’exercer des activités commerciales. Ils sont plutôt considérés comme des colons que comme des esclaves.

4. L’occasion et le but

À la fondation de la nation d’Israël, Dieu donne au peuple la Loi de Moïse (Ex 20-No 9 ; De) comme constitution ; celle-ci détaille par le menu la façon dont il convient de vivre pour le Seigneur. Cette Loi n’est pas donnée comme un boulet à traîner, mais, au contraire, comme un moyen d’accéder à la bénédiction (De 5.28-33). Elle est donnée pour leur bien (De 10.12-13).

Malgré cela, l’histoire d’Israël est caractérisée par la désobéissance à cette alliance. À de multiples reprises, la nation adopte les dieux des peuples environnants. Comme le montre le compte-rendu historique précédent, les royaumes d’Israël et de Juda s’enfoncent dans la corruption jusqu’à en oublier leur constitution. L’alliance elle-même avertit les Israélites que, s’ils s’écartent des voies du Seigneur décrites dans les statuts et les commandements de la Loi, Dieu les disciplinera par la dispersion afin de pouvoir les attirer à nouveau dans son giron.

Ézéchiel s’adresse à ses contemporains ; il leur expose la fidélité de Dieu, sa sainteté et sa gloire. Leur Dieu exécutera le jugement, effectuera la purification et répandra la bénédiction ultime. Ainsi, tous les peuples sauront que lui, le Dieu d’Israël, est le seul véritable Dieu. Le désir du Seigneur est que les exilés se détournent de leurs mauvaises voies et reviennent à lui de tout leur cœur. Le jugement n’est que l’instrument de son amour. Par lui, ils vont réaliser le caractère abominable de leurs actions et la fidélité du Seigneur à ses alliances.

5. Les valeurs théologiques

Cinq notions théologiques importantes transparaissent dans ces pages prophétiques : 1° la nature de Dieu. Les attributs divins sur lesquels l’accent est mis le plus fortement sont ceux relatifs aux promesses de l’alliance.2° la raison d’être et la nature du jugement divin. Le jugement découle logiquement du caractère de Dieu. Le Seigneur aime les Israélites. Il se les est choisi pour peuple afin d’apporter au monde la bénédiction (Ge 12.2-3 ; Ex 19.4-6 ; De 7.6-11

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3° la responsabilité individuelle. Bien que les rapports du Seigneur avec Israël se situent souvent à l’échelle de la nation, Ézéchiel contrebalance ce fait par l’accent placé sur la responsabilité individuelle (cf. De 24.16; 29.17-21).

4° l’histoire éthique, religieuse et morale d’Israël. En plus des jugements annoncés, Ézéchiel proclame la justice du Seigneur par des récits sur l’histoire éthique, morale et religieuse d’Israël.

5° la nature de la restauration d’Israël et du culte pendant le millénium. En dépit de l’idolâtrie constante d’Israël, le Seigneur laisse filtrer un message d’espérance par son prophète. Une des descriptions les plus complètes de la restauration finale d’Israël en Palestine nous est donnée dans les messages d’espérance (33.21-39.29) qui détaillent d’une manière précise la raison, la méthode et les retombées du retour d’Israël dans la Terre Promise.

Daniel

INTRODUCTION

1. Le but

Le livre de Daniel a été écrit dans le contexte de la chute de Jérusalem et de la déportation des Juifs à Babylone. En dépit de décennies d’avertissements de la part de nombreux prophètes, l’apostasie et l’immoralité flagrantes du peuple entraînent finalement la destruction dont Dieu avait menacé Israël depuis l’époque de Moïse (De 28.64; 29.28; 2Ch 36.16).

2. L’auteur et la date

Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui réfutent le fait que le prophète Daniel soit l’auteur de ce livre ; ce scepticisme est particulièrement partagé en ce qui concerne les six derniers chapitres. Le discours le plus fréquent est que les prédictions remarquablement précises qu’il contient (particulièrement celles du chapitre 11) sont le résultat d’une sainte supercherie ourdie par quelques zélés propagandistes du mouvement des Macchabées, désireux d’insuffler un esprit d’héroïsme aux patriotes juifs résistant à Antiochos IV. Beaucoup d’exégètes modernes avancent que toutes les prophéties du livre de Daniel, dont l’exactitude est si troublante, ont été écrites a posteriori, c’est-à-dire du temps de la révolte des Macchabées (168-65 av. J. C.).

Cependant, le livre lui-même proclame sans ambiguïté que Daniel en est bien l’auteur (cf. 8.1; 9.2, 20; 10.2). Il ne fait aucun doute que Jésus le voyait bien ainsi (Mt 24.15; cf. Da 9.27 et d’autres). De plus, une analyse linguistique et historique minutieuse du texte va dans le sens d’une date de rédaction beaucoup plus précoce que le deuxième siècle av. J. C. En ce qui concerne la date de composition, le premier chapitre situe la capture de Daniel en 605 av. J. C. Or, nous savons que Daniel a poursuivi son activité publique jusqu’à la première année de Cyrus (1:21), c’est-à-dire vers l’an 537 av. J. C. Il a probablement terminé la rédaction de son mémoire vers 532 av. J. C., aux environs de sa quatre-vingt-dixième année. La présence de

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termes officiels dérivés de la langue Perse suggère fortement que la rédaction finale du livre a été achevée après l’adoption de cet idiome par les instances dirigeantes. Le texte de Daniel est rédigé en deux langues : l’hébreu (chapitres 1, 8- 12) et l’araméen (chapitres 2-7). Les chapitres écrits dans cette dernière langue concernent l’histoire des empires Perse et Babylonien, alors que les six autres chapitres traitent du plan particulier de Dieu pour le peuple de son alliance.

3. La canonicité

Le livre de Daniel doit être considéré comme authentiquement canonique du début à la fin. Il a été reconnu Parole inspirée par le peuple de Dieu, très peu de temps après sa publication. À cause de ses exhortations à se fier à la constante providence divine lors des éprouvantes premières années de la recolonisation, il rencontra très certainement un écho favorable parmi les exilés rentrés en Judée sous le règne de Zorobabel. La découverte, dans la grotte de Qumran I, de plusieurs fragments d’un manuscrit de Daniel remontant au deuxième siècle indique que les croyants juifs le considéraient comme inspiré et faisant autorité.

4. La valeur théologique

La principale leçon théologique du livre de Daniel porte sur la souveraineté absolue de l’Éternel, le Dieu d’Israël. L’idée que le sort des rois et les affaires des hommes sont soumis aux décrets divins est constamment mise en relief ; le Seigneur est capable d’accomplir sa volonté en dépit de la plus farouche opposition des monarques les plus puissants de la planète. Les miracles traités dans les chapitres 1-6 démontrent clairement l’action souveraine de Dieu en faveur de ses saints.

Une deuxième idée phare met en exergue le pouvoir de la prière persistante. C’est grâce à elle que Daniel et ses compagnons ont été délivrés du danger et tirés de situations inextricables. La prière fervente de Daniel en faveur de sa nation, sa supplique pour que Dieu ramène son peuple sur la terre d’Israël au terme des 70 ans (9.2-19; cf. 10.12-14) est particulièrement émouvante.

Un troisième concept théologique intéressant est l’incidence à long terme de l’extraordinaire plan de Dieu sur l’Histoire. Daniel donne la date précise de la venue de Christ et du commencement de son ministère en 27 apr J. C. (cf. Da 9.25-26). C’est aussi lui qui reçoit la révélation de la 70 e semaine des temps de la fin (9.26-27), semaine que nous attendons également nous-mêmes avec ferveur.

Finalement, le caractère irrésistible de la grâce divine sous-tend le scénario tout entier. Que ce soit devant l’indifférence du peuple pour les mises en garde les plus solennelles des prophètes, ou bien après le terrible jugement de 587 av. J. C. qui faillit anéantir complètement la nation, le Seigneur n’a jamais livré Israël aux conséquences extrêmes de son péché ; dans son amour, il le soumet à une épreuve, très rude certes, mais qui va régler définitivement le problème de l’idolâtrie.

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Osée

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan historique

Osée, prophète dans le royaume du Nord (Israël), exerce son ministère dans la période trouble qui précède la chute de Samarie. Au début de son œuvre, nul ne pense que la fin est si proche. Jéroboam II (793-753 av. J.-C. ; cf. 2R 14.23-29) est le monarque solidement installé sur le trône. Il a pratiquement redonné à l’est et au nord de son royaume les frontières qui étaient les siennes du temps de David et Salomon. Ce succès lui a conféré une remarquable position d’influence sur la côte méditerranéenne. De même, sous Ozias, roi de Juda et contemporain de Jéroboam II pendant trente-sept ans, le royaume du Sud retrouvera son étendue antérieure. Les deux royaumes d’Israël et de Juda réunis occupent sensiblement la même superficie que sous les deux plus grands rois d’Israël d’avant le schisme.

Avant l’accession de Jéroboam II au trône d’Israël, la situation était bien différente. Les attaques assyriennes et syriennes avaient profondément humilié Israël. Sous le règne de Joachaz (le grand-père de Jéroboam), les forces d’Israël avaient été réduites à « cinquante cavaliers, dix chars et dix mille hommes de pied ». Quant au reste, le roi de Syrie « les avait fait périr et les avait rendus semblables à la poussière qu’on foule aux pieds » (2R 13.7). Joas, le père de Jéroboam II, a commencé le relèvement de la nation en battant les Syriens à trois reprises (2R 13.25). Jéroboam poursuit l’œuvre de reconquête amorcée par Joas et redonne de la force au royaume d’Israël.

À cause de cette nouvelle situation, la génération d’Osée n’a connaissance des défaites humiliantes et de l’oppression ennemie que par les récits de ses pères. La paix règne depuis plusieurs années et a entraîné la prospérité économique. Les récoltes sont abondantes (2Ch 26.10), et beaucoup de gens s’enrichissent. Le luxe est devenu courant. Les travaux de construction vont bon train (Os 8.14), faisant naître un sentiment de fierté généralisé (Am 3.15; 5.11 ; cf. Esa 9.10). Les conditions sociales et morales de ce temps sont fausses et avilissantes. L’opulence côtoie l’extrême pauvreté. Par leurs gains malhonnêtement acquis et les balances fausses, les forts exploitent les faibles (Os 12.8 ; cf. Esa 5.8 ; Am 8.5-6). La justice semble inexistante et les tribunaux font apparemment peu pour aider les plus démunis.

La situation religieuse n’est pas meilleure. Bien que le culte païen de Baal, introduit dans le pays sous Omri (1R 16.29-33), ait été grandement éradiqué du pays (2R 10.19-28), plusieurs de ses caractéristiques abominables subsistent (Os 2.8; 11.2; 13.1). Il semble que la prostitution sacrée se pratique encore (4.10-18). De plus, le peuple bâtit encore des « hauts lieux » et fabrique des idoles d’Astarté « sur toute colline élevée et sous tout arbre vert » (2R 17.7-12). 2. L’auteur et la date

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L’auteur de ce premier livre des petits prophètes est Osée, fils de Beéri (Os 1.1). Le livre contient des preuves convaincantes qu’Osée est un prophète en Israël, le royaume du Nord. Même s’ils mentionnent occasionnellement Juda, ses messages s’adressent principalement à Israël. Pour Osée, le souverain installé à Samarie est « notre roi » (7.5). Le prophète utilise en outre plusieurs aramaïsmes, montrant ainsi qu’au nord, la Syrie, de langue araméenne, exerce une influence réelle sur Israël.

Osée date son ministère en énumérant quatre rois de Juda (Ozias, Jotham, Achaz, Ézéchias) et un roi d’Israël (Jéroboam II). Il indique ainsi que pour lui, la lignée davidique en Juda est la seule légitime (2S 7.12-13). Peu d’indices permettent de dater plus précisément ses prophéties. Une chose est sûre : elles ne lui sont pas toutes données en même temps. Les paroles concernant son mariage et les premières prophéties datent d’avant la mort de Jéroboam II, puisqu’Osée parle d’un jour de vengeance sur « la maison de Jéhu », dont Jéroboam est un descendant (1.4). La sanction tombe sur Zacharie, le fils de Jéroboam II, assassiné six mois après le début de son règne (2R 15.8-12). De plus, il est question de contacts avec l’Assyrie (p. ex. 5.13; 8.9; 12.1), noués du temps de Menahem qui négocie avec Pul, appelé aussi Tiglath-Piléser III (2R 15.19-20). Le livre se réfère enfin aux rapports d’Israël avec l’Égypte et l’Assyrie, à une époque où Israël supplie l’Égypte de l’aider à combattre l’Assyrie (7.11).

Osée vit au temps d’Ézéchias (728-686 av. J.-C.). Comme il ne fait pas spécialement mention de la chute de Samarie devant les Assyriens en 722 av. J.-C., il achève probablement son livre avant cette date, mais il est certainement témoin de la fin du royaume du Nord. Comme rien ne laisse supposer qu’il sera emmené captif, il restera vraisemblablement dans le pays. Son ministère est long et s’étend au moins de 753 à 715 av. J.-C.

3. Le mariage d’Osée

Le mariage d’Osée a fait couler beaucoup d’encre. Au premier chapitre du livre, l’Éternel ordonne au prophète de prendre « une femme prostituée et des enfants de prostitution ». Au chapitre 3, l’Éternel demande à Osée d’aimer une femme bien qu’elle soit adultère. Osée s’exécute et paie en argent et en orge. Les interprétations concernant le mariage du prophète se classent en quatre catégories. Les partisans du mariage hypothétique pensent que ce mariage n’a jamais vraiment eu lieu et y voient une vision ou une allégorie symbolique de la relation de Dieu avec l’infidèle Israël. Pour les adeptes du mariage littéral avec l’impudique Gomer, Osée épouse vraiment une femme impudique, peut-être une prostituée sacrée. Les défenseurs de l’idée d’une infidélité spirituelle considèrent que le livre décrit l’infidélité spirituelle plutôt que l’infidélité physique. Gomer est devenue infidèle parce que, comme les Israélites du temps d’Osée, elle a fini par adorer de faux dieux.

L’opinion préférée est celle d’un mariage littéral avec Gomer chaste. Osée épouse vraiment Gomer, mais au moment du mariage, elle est vierge et ne deviendra adultère que plus tard. Lorsque le prophète l’épouse, elle n’est pas encore une prostituée. Cette interprétation supprime le problème d’un mariage avec une prostituée notoire. L’argument le plus

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convaincant en faveur de cette explication est peut-être le parallèle établi entre le mariage d’Osée avec Gomer et l’expérience de Dieu avec Israël (cf. 1.2, 6, 7, 9; 2.4-15). L’A.T. présente Israël comme une vierge lorsque Dieu la prend pour épouse dans le désert (Jé 2.2-3). Dieu manifeste sans cesse son amour à Israël, mais le peuple lui est constamment infidèle.

4. Les valeurs théologiques

L’idée centrale du livre s’articule autour de l’alliance de Dieu avec le peuple, une alliance qu’Israël a rompue. Dieu a aimé ce peuple et l’a appelé son « fils » (11.1 ; cf. Ex 4.22). Mais avec le temps, Israël s’est éloigné de Dieu. Plus l’Éternel a appelé Israël, plus celui-ci s’est éloigné (11.2). Les Israélites se sont enfoncés dans le péché et ont violé l’alliance de grâce que Dieu avait conclue avec eux. Osée décrit sans cesse les péchés du peuple (4.1-2, 9-19; 6.4-11 ; et autres) et des chefs religieux (4.5-10). Il se sert de son mariage malheureux pour imprimer ces vérités dans l’esprit de ses lecteurs.

L’importance primordiale que revêt ce livre réside dans l’appel adressé à Israël à se repentir de ses péchés. D’autres prophètes, comme Élie et Élisée, ont déjà lancé des avertissements. Celui d’Osée est le dernier. Dieu a fait preuve de patience, mais celle-ci arrive à son terme et le châtiment va bientôt devenir nécessaire. La sanction prendra la forme de la désolation pour le pays (4.3; 5.1-15) et de l’exil pour le peuple.

Dans ce tableau plutôt sombre, le prophète inclut cependant une note de joie. La punition future d’Israël ne marquera pas la fin, car elle sera suivie d’un merveilleux temps de restauration. Pour Osée, ce sera un temps de vraie repentance de la part du peuple (6.1-3) et de riche bénédiction de la part de Dieu (cf. 2.1, 16-17).

Joël

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan

Joël prophétise sous le règne passionnant et crucial d’Ozias (792-740 av. J.-C.), le dixième monarque du royaume du sud. C’est une période de prospérité incomparable. Au sud, Ozias maintient son contrôle sur Édom, qu’Amatsia avait asservi (2R 14.22 ; 2Ch 26.2) ; il contrôle également les axes caravaniers en provenance d’Arabie (2Ch 26.7). À l’est, il semble avoir imposé un tribut aux régions transjordaniennes (v. 8). À l’ouest, il remporte des succès contre les Philistins, s’empare de Gath et de la plaine côtière, ce qui lui assure le contrôle des routes commerciales importantes (v. 6-7) et met fin aux incursions pour prendre des esclaves dans la partie occidentale de Juda (3.4-8). Grand stratège militaire, Ozias avait préparé ses campagnes en réorganisant de fond en comble la structure et les équipements de son armée (v. 11-15).

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2. L’auteur

En dehors de ce qu’on peut glaner dans le livre, on ne sait pas grand-chose des circonstances personnelles de l’auteur, Joël (« L’Éternel est Dieu »). Fils de Pethuel, Joël vit et prophétise dans le royaume de Juda (cf. 2.32; 3.1, 17-18, 20). Le temple et son service n’ont pas de secrets pour lui (1.9, 13-14, 16; 2.14, 17) ; le prophète connaît également très bien la géographie et l’histoire du pays.

3. La date

En l’absence de dates, les hypothèses vont du neuvième siècle (donc avant l’exil) avant l’ère chrétienne à la période des Maccabées (après l’exil). Notre préférence va à la première.

4. L’occasion et le but

Une invasion sans précédent de sauterelles dans le royaume de Juda détruit toutes les récoltes. Tous les niveaux de la société sont ébranlés. Le pire est que les immenses pertes agricoles menacent même la poursuite des offrandes. Joël voit dans ces circonstances le jugement de Dieu sur Juda. Sous le règne d’Ozias, les habitants considéraient comme un dû la faveur de Dieu et ses bénédictions. La religion avait dégénéré en formalisme vide et la vie des habitants connaissait un déclin moral. Joël voit dans le fléau des sauterelles l’avertissement d’un jugement plus grand qui menace le peuple s’il ne se repent pas et s’il ne renoue pas sa relation avec Dieu. S’il le fait, Dieu pardonnera, rendra la santé au pays et donnera au peuple le nécessaire pour qu’il puisse offrir ses sacrifices.

5. Les valeurs théologiques

Homme de foi en Dieu, Joël enseigne la confiance en la suffisance de Dieu et ses droits fondamentaux sur la vie du croyant. Son dogme de base est que Dieu dirige souverainement les affaires de l’histoire du monde vers le but qu’il a fixé d’avance (1.15; 2.1-4, 25-32; 3.1-21). Lui seul est Dieu (2.13), un Dieu de grâce et de compassion (2.13, 17), d’amour et de patience (2.13), de justice et d’équité (1.15; 2.23; 3.1-8). Il attend un culte authentique des disciples qui ont placé leur confiance en lui pour leur salut par grâce au moyen de la foi (2.32). Il ne suffit pas de rendre à Dieu un culte extérieur (2.13, 18-19, 23, 26-27, 32). Joël enseigne également que, lorsque le péché devient la caractéristique du peuple de Dieu, il doit être châtié (1.15; 2.1, 11-13). Dieu peut se servir de catastrophes naturelles (ch. 1) ou de moyens politiques (2.1-11) pour punir son peuple. Si le peuple se repent (2.12-13), il sera rétabli dans sa communion avec Dieu (2.14, 19, 23), et la nature elle-même connaîtra de nouveau les bénédictions divines (2.23-27).

La théologie de Joël contient aussi un enseignement sur les événements de la fin. Le rôle de Dieu vis-à-vis du peuple d’Israël est central (1.6, 13-14; 2.12-14 et d’autres). Tout en permettant à d’autres nations de punir Israël pour son péché, Dieu s’est réservé un reste (2.28-32) sur

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lequel il répandra son Esprit (2.28-29), auquel il se manifestera par des signes merveilleux (2.30-31), qu’il rassemblera et ramènera dans le pays promis (2.32-3.1). Il rassemblera pour les juger toutes les nations qui auront agi sévèrement avec son peuple (3.2, 12-13) et les convoquera pour une grande bataille près de Jérusalem (3.9-16). En ce jour terrifiant (v. 15), lui-même conduira son peuple au triomphe (v. 16-17) et l’introduira dans une ère de paix et de prospérité sans égale (v. 17-21).

Amos

INTRODUCTION

1. Arrière-plan historique

À bien des égards, le huitième siècle avant notre ère est unique dans l’histoire de Juda et d’Israël. Il est le témoin du basculement du royaume du nord, auréolé de la gloire d’une prospérité économique et d’une influence internationale, dans l’assujettissement à une puissance étrangère. Il voit également le prochain déclin de Juda, retardé par la main du roi Ézéchias, qui l’a retenu mais n’a pu que le freiner vers la ruine certaine.

2. L’auteur et la date

Presque tout le monde s’accorde à reconnaître que la prophétie d’Amos est l’œuvre authentique de l’homme de ce nom. Nous pouvons situer l’activité prophétique d’Amos dans la deuxième partie du règne de Jéroboam II (793-753 av. J.-C. ; cf. 7.10). Il a dû s’écouler un certain temps avant que l’opulence du règne de Jéroboam II ne dégénère en une décadence sociale, très répandue lorsqu’Amos remplit sa mission dans le royaume du nord. Il semble donc raisonnable de situer la prophétie d’Amos peu avant 760 avant notre ère.

3. Les valeurs théologiques

La prédication d’Amos s’articule autour de sa foi en la souveraineté divine. L’Éternel est le Dieu de l’Histoire. Il dirige les mouvements des peuples (9.7) et contrôle la succession ordonnée des phénomènes naturels (4.3; 5.8). Mais à l’intérieur de ce domaine de souveraineté, l’humanité jouit de la liberté de se soumettre à l’Éternel ou de le rejeter.

Amos affirme l’élection historique d’Israël (3.2). Mais il prêche violemment contre la notion pervertie d’une élection dans laquelle Dieu est inconditionnellement obligé vis-à-vis de la nation. L’élection du peuple ne garantit pas automatiquement la bénédiction nationale ; en effet, le Dieu souverain promet que le peuple d’Israël ne lui appartiendra « entre tous les peuples » (Ex 19.5) que s’il lui obéit et garde son alliance.

Un concept unique du livre d’Amos est l’enseignement concernant le jour de l’Éternel. Au lieu d’être un jour de délivrance nationale, ce sera un jour où Dieu jugera tout péché, y compris

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Page 95: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

celui de son peuple. La description sinistre de ce jour, dans ce livre, reflète la situation des auditeurs d’Amos qui étaient coupables de nombreuses transgressions. Mais Amos annonce aussi la venue d’un autre jour marqué par l’espoir d’une glorieuse promesse (9.13-15). Cette promesse davidique se réalisera lorsque le royaume de David sera restauré et que Juifs et non-juifs seront unis dans le royaume du Fils de David.

Abdias

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan

Édom, établi dans la région entourant la montagne de Séir depuis le temps des patriarches (cf. Ge 36), constituait un petit royaume qui occupait les hauts plateaux de la Transjordanie. Au treizième siècle avant notre ère, Édom était solidement implanté au sud et à l’est de la mer Morte. Sous la monarchie israélite, David a assujetti Édom ; depuis lors, Édom et Israël ont souvent entretenu des relations d’hostilité.

2. L’auteur et la date

On ne sait rien de l’auteur du livre d’Abdias. Au moins douze autres personnages de l’A.T. portent ce nom qui signifie « serviteur de l’Éternel ». Mais aucun ne semble être l’auteur cité dans le livre. L’incapacité des savants à dater le livre avec certitude rend vaines la plupart des tentatives pour rattacher le livre à l’un de ces personnages.

La date de rédaction du livre d’Abdias continue de faire débat aujourd’hui. La prophétie correspond visiblement à une époque où Jérusalem était envahie par des armées étrangères, un pillage auquel les Édomites ont pris part d’une manière ou d’une autre (voir le v. 15). S’il s’agit de la destruction de la ville par Nebucadnetsar en 586 av. J.-C., et si Édom est passé sous le contrôle nabatéen au cinquième siècle av. J.-C., le livre pourrait avoir été écrit après l’invasion de Sion en 586.

Jonas

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan

Le livre de Jonas est le cinquième des prophètes mineurs (le livre des Douze prophètes). Jonas, fils d’Amitthaï, de Gath-Hépher, en Galilée (cf. 2R 14.25 ; Jos 19.13), prophétise peu avant, ou pendant, le règne de Jéroboam II (793-753 av. J.-C.). On peut donc presque assurément situer le récit du livre à la période du déclin assyrien, entre la mort d’Adad-nirari III en 782 av. J.-C. et l’accession au trône d’Assyrie de Tiglath-Piléser III en 745 av. J.-C. À cette époque, l’Assyrie est

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Page 96: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

engagée dans un combat sans merci contre les tribus montagnardes ourartéennes et leurs associés mannais ( ?) et mèdes, au nord, qui avaient réussi à repousser leurs frontières jusqu’à environ cent cinquante kilomètres de Ninive. Mais la prise de conscience de sa faiblesse et d’une possible défaite ne suffit pas à expliquer la spontanéité avec laquelle les Ninivites ont accepté le message du prophète.

2. La date et l’auteur

Le contenu du livre doit nécessairement provenir de Jonas lui-même, au huitième siècle avant notre ère. Il n’est cependant jamais présenté en tant qu’auteur et est toujours cité à la troisième personne ; on ne peut donc écarter la possibilité que la forme actuelle du livre soit d’une autre main que la sienne.

3. Le but

Le but de la prédication de Jonas était d’appeler les Ninivites à la repentance. C’est à Jonas, et non à Ninive, que Dieu a fait connaître son amour attentionné (4.11). Dans son ensemble, le livre est une révélation au peuple de Dieu de la puissance divine souveraine et pleine de sollicitude. Ce livre avait une signification particulière pour Israël, sur qui planait l’ombre sinistre de l’Assyrie, et pour Juda, plus tard, exposé à la puissance destructrice des Babyloniens.

Michée

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan

Comme ses contemporains Ésaïe et Amos, Michée prophétise au huitième siècle avant notre ère, alors qu’Israël et Juda connaissent une situation économique florissante, doublée d’une profonde décadence spirituelle. Sous le gouvernement du très compétent Jéroboam II d’Israël (786-746 av. J.-C.) et d’Ozias, roi de Juda (783-742), les deux royaumes ont pratiquement retrouvé les frontières du royaume de Salomon. C’est une période de grande prospérité économique, favorisée par l’absence de crises internationales majeures et par la coopération entre les deux royaumes. Mais si Israël et Juda donnent une impression de puissance extérieure, une corruption intérieure en sape les fondements et menace de détruire le tissu social des deux royaumes. La religion cananéenne a étendu son influence sur certains sujets des deux royaumes. Si Michée combat l’idolâtrie, ce n’est toutefois pas cet aspect de la condition d’Israël qu’il souligne le plus. Il condamne surtout les injustices sociales commises par les classes dirigeantes.

2. L’auteur

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Page 97: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

Le titre de la prophétie (1.1) attribue le livre à Michée. Le prophète qui porte ce nom est originaire de Moréscheth (probablement Gath-Moréscheth) dans le royaume de Juda. Cette ville se situait près de la patrie d’Ésaïe, ce qui peut expliquer certaines similitudes entre les prophéties des deux hommes. On ne sait pas grand-chose de Michée, en dehors de ce qui peut se déduire de la prophétie. Le livre démontre une grande sensibilité de l’auteur aux maux sociaux et religieux de son temps.

3. La date

La suscription (1.1) situe Michée au milieu du prophétisme du huitième siècle avant notre ère. La référence à la destruction de Samarie (v. 6) place le début de la prophétie un peu avant la destruction de cette ville (722/721 av. J.-C.) ; cette donnée s’accorde avec l’indication que le ministère de Michée a débuté sous le règne de Jotham (750-731). Les accusations portées contre la corruption sociale et religieuse cadrent bien avec le temps d’Achaz et pourraient encore convenir à la période qui précède les réformes d’Ézéchias (715-686 av. J.-C.). La référence à la prophétie de Michée dans Jérémie 26.18-19 fixe au moins une partie du message de Michée à l’époque d’Ézéchias.

4. Les valeurs théologiques

Si Michée n’a pas écrit un traité de théologie, il ne fonde pas moins ses appels au peuple sur une solide théologie de Dieu. Le premier point qu’il souligne est la souveraineté de Dieu (1.2). Pour Michée, l’Éternel agit au sein des nations et fixe leur destinée comme il le fait pour son propre peuple. Le prophète interprète la prochaine destruction de Samarie et de Jérusalem comme le résultat du châtiment divin sur ces villes qui abritent la méchanceté et la rébellion contre lui. Toutefois, son action parmi les nations atteindra son point culminant dans les derniers jours. Le triomphe et la justification ultimes du peuple de Dieu auront lieu à ce moment-là (4.11-13), et les nations seront soumises à la domination de l’Éternel.

Michée s’adresse à un peuple que la désobéissance a conduit à l’ignominie et à la ruine. Mais il lui rappelle - ainsi qu’à nous - que l’Éternel est tout-puissant. Et parce qu’il est en harmonie avec sa parole et sa nature, il ne manquera pas de donner au peuple tout ce qu’il lui a promis. Même si nous sommes humiliés aujourd’hui, Dieu nous glorifiera et nous défendra un jour parce que l’Éternel « témoignera de la fidélité à Jacob, de la bonté à Abraham » (7.20).

Nahum

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan

La prophétie de Nahum se situe dans le contexte de l’oppression durable et pénible d’Israël par l’Assyrie, et la perspective divine de sa fin. Bien que Dieu soit l’auteur ultime de la souffrance

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Page 98: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

d’Israël, l’Assyrie, le bâton de la colère divine, en est l’agent ; et la coupe du courroux de Dieu s’apprête à se déverser sur les Assyriens.

2. L’auteur et la date

On ne sait pas grand-chose de Nahum lui-même. D’après 1.1, il est « d’Elkosch ». Une tradition arabe situe ce village près de Mossoul, dans l’Irak actuel. D’anciens auteurs estimaient cependant que la patrie du prophète se trouvait quelque part en Galilée.

Les données internes permettent de dater les principaux ensembles du livre. Comme il s’agit d’un message de jugement, le livre n’aurait eu aucun sens s’il avait été écrit après la chute de l’Empire assyrien en 612 av. J.-C. Par ailleurs, les références à la destruction de Thèbes (No Amon) sur le Nil (3.8) exigent que la prophétie soit postérieure à la reddition de la ville à Assurbanipal en 663 av. J.-C. Un examen de l’état redoutable de la puissance assyrienne, que décrit le livre, veut que l’on en date la rédaction avant le déclin de cet empire qui s’est produit vers 626 av. J.-C.

3. Les valeurs théologiques

Sur le plan théologique, le livre de Nahum rend un témoignage particulier à la justice et au salut de Dieu. Le reste fidèle qui souffrait ne doutait pas un instant que Dieu punirait son propre peuple de l’alliance ; mais il se demandait s’il pouvait et voulait exercer sa justice à l’encontre des puissantes nations païennes qui entouraient Israël. Parmi ces nations, aucune n’était plus cruelle et arrogante que l’Assyrie. Le reste des fidèles était très attentif à la sévérité et à la bonté de Dieu : il voulait savoir si la première s’appliquait seulement de façon sélective à son peuple et si la seconde était conforme à la capacité et au désir de Dieu d’apporter le salut final à ceux qui ont foi en lui.

Habakuk

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan et la date

La prophétie d’Habakuk s’inscrit sur la toile de fond du déclin et de la chute du royaume judéen (vers 626-586 av. J.-C.). Bien que nous ne sachions rien du prophète lui-même en dehors du livre qui porte son nom - le livre n’est pas daté selon la manière habituelle (cf. Am 1.1 ; Sop 1.1 ; et d’autres) - les données internes révèlent le contexte dans lequel s’inscrit Habakuk. Les versets 5-11 s’appliquent à une période antérieure à l’an 605 av. J.-C., celle de l’arrivée au pouvoir des Babyloniens (Chaldéens, 1.6, voir la note de bas de page de la NEG), et même peut-être antérieure à 612, l’année de la destruction de Ninive. En revanche, on pense souvent que

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Page 99: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

les passages de 1.12-17 et 2.6-20 doivent refléter une période postérieure à 612, époque à laquelle la puissance et la rapacité des Babyloniens étaient bien connues du prophète. La meilleure solution est encore de considérer que les sections du dialogue représentent les luttes spirituelles d’Habakuk échelonnées sur une longue période de temps, commençant dès 626 et se poursuivant jusqu’en 590, voire plus tard.

2. L’auteur

D’Habakuk, on ne sait rien, excepté son nom qui ne livre aucun indice le rattachant à une signification hébraïque. Seules nos déductions à la lecture du texte nous permettent de cerner son tempérament et sa situation. Les liens littéraires et la présence précoce de ce livre dans le canon ne laissent planer aucun doute sur le fait que l’œuvre d’Habakuk a circulé et a été acceptée très tôt, mais les détails sont perdus.

3. L’occasion et le but Habakuk occupe une place unique parmi les prophètes. Il ne s’adresse pas au peuple de la part de Dieu, mais à Dieu à propos de son peuple. La ressemblance avec les autres prophètes réside dans le contexte. La violence et les transgressions de l’alliance étaient monnaie courante. L’Éternel aurait dû intervenir pour corriger la situation, mais cela ne s’est pas produit, si bien que les justes semblaient prier en vain.

4. Les valeurs théologiques

Le message d’Habakuk (notamment 2.4) constitue un point fondamental dans trois livres du N.T. (Ro 1.17 ; Ga 3.11-12 ; Hé 10.37-38). Mais la valeur théologique d’Habakuk ne saurait se limiter à trois citations néotestamentaires, aussi fondamentales soient-elles. Le prophète pose quelques questions pertinentes dont les réponses sont essentielles à une bonne compréhension de Dieu et de sa relation à l’Histoire. Si la première réponse divine sonne le glas de toute théologie d’alliance purement nationaliste avec Juda, la deuxième souligne dans un sens positif le fait que toute l’Histoire converge vers une conclusion aussi certaine que satisfaisante. Dans l’intervalle, les justes doivent vivre par la foi. La foi recommandée est également nécessaire pour réagir correctement face aux questions sans réponse qui se posent dans l’univers d’aujourd’hui ; telle est la théologie de la vie qui constitue la contribution la plus importante d’Habakuk.

Sophonie

INTRODUCTION

1. L’auteur et la date

Depuis les premiers pères de l’Église, l’étymologie du nom de Sophonie reste controversée. Selon une explication, le nom serait construit sur la racine saphan (GK 7621 ; « cacher,

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Page 100: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

abriter »). Avec le suffixe yah (pour « Yahweh »), cette étymologie donnerait le sens : « Yah(weh) était caché ». Selon une autre suggestion, « Sophonie » dériverait de la racine sapah ( « veiller ») ; le nom signifierait alors quelque chose comme « sentinelle pour Yah(weh). »

Dans l’A.T., trois autres personnes ont porté le nom Sophonie : un Lévite descendant de Kehath (1Ch 6.36-38) ; le second sacrificateur sous le souverain sacrificateur Seraja, pendant le règne de Sédécias (2R 25.18-21 ; Jé 52.24-27) ; enfin, le père de Josias, exilé revenu de Babylone (Za 6.10, 14).

Le titre du livre indique que Sophonie a prophétisé « au temps de Josias, fils d’Amon, roi de Juda » (640-609 av. J.-C.). Sophonie prédit la destruction de Ninive (2.13-15) qui s’est produite en 612 av. J.-C. La seule question est de savoir si la prophétie a été prononcée au début ou à la fin du règne de Josias. Les savants défendent les deux périodes.

2. L’arrière-plan

Après les mauvais règnes de Manassé (695-642 av. J.-C.) et d’Amon (642-640 av. J.-C.), le roi réformateur Josias (640-609 av. J.-C.) accède au trône. Pendant plus d’un demi-siècle, sous le règne de ses prédécesseurs, l’apostasie a prévalu dans le royaume. C’est sous le règne de Josias que Sophonie commence à avertir le peuple du jugement imminent. La chute de Samarie en 722 av. J.-C. avait été un rappel solennel de la justice et du pouvoir de Dieu.

3. Le message

Le « jour de l’Éternel » est au centre du message de Sophonie. Il utilise cette expression plus souvent que n’importe quel autre prophète. Le jour de l’Éternel sera un jour funeste parce que le peuple a « péché contre l’Éternel » (1.17). Mais il promet aussi un abri pour ceux qui ont « cherché l’Éternel » (2.3). Au chapitre 1, Sophonie se concentre sur la parole divine de jugement contre Juda. Au chapitre 2, il prédit et prononce le jugement contre les voisins de Juda. Au chapitre 3, après une parole destinée à Jérusalem, il promet une gloire future pour le reste fidèle d’Israël.

Aggée

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan

Dans cette courte prophétie, tout s’articule autour d’un impératif : construire la maison de Dieu (1.8) ! Le cadre reflète une grande partie de l’histoire d’Israël : l’époque du tabernacle, les débuts de la monarchie sous Samuel, le désir de David de construire une demeure pour Dieu, la construction effective du temple par Salomon, sa destruction par Nebucadnetsar et le retour

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Page 101: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

des exilés qui entreprennent la reconstruction du temple à Jérusalem en 538 av. J.-C. Le contexte plus immédiat est celui de l’arrivée au pouvoir de Cyrus (1.8).

2. L’auteur

En dehors de ce que révèle son petit livre, Aggée est inconnu ; son nom est cité à deux brèves occasions dans le livre d’Esdras (5.1; 6.14) et par une allusion dans Zacharie 8.9. Le mot « Aggée » semble être l’adjectif d’un mot hébreu signifiant « fête » ; le nom du prophète pourrait donc correspondre à « festif ». Si la dernière lettre du nom hébreu (« y ») suggère une forme abrégée du nom « Yahweh » (traduit par « l’Éternel »), le nom du prophète pourrait signifier « Fête de Yahweh ».

Si 2.3 peut laisser supposer qu’Aggée a vu le temple de Salomon avant sa destruction, le prophète devait alors avoir au moins soixante-dix ans lorsqu’il a prophétisé. Comme il est souvent associé à Zacharie et cité en premier, il était probablement l’aîné des deux. Il est tout à fait possible qu’il ait fait partie du convoi d’exilés rentrés à Jérusalem sous Zorobabel, dix-huit ans plus tôt (en 538).

3. La date et le lieu de rédaction

Aggée date ses prophéties avec précision. Il indique quatre dates particulières (cf. 1.1, 15; 2.1, 10, 20) qui s’échelonnent du 29 août au 18 décembre 520 av. J.-C. Le ministère d’Aggée dure donc à peine quatre mois. Il écrit visiblement de Jérusalem. Son livre se réfère à la maison de Dieu (le temple). L’ordre de se rendre dans les montagnes proches pour y chercher le bois nécessaire à la construction de l’édifice suppose ce lieu (1.8). Comme ni la Babylonie, ni la région contiguë de l’Assyrie ne possèdent de montagnes, le prophète parle des montagnes de Judée.

4. L’occasion et le but

Suivant la manière de les compter, les soixante-dix années de captivité n’étaient peut-être pas terminées en 520 av. J.-C. L’exil commence avec la destruction de Jérusalem en 586 av. J.-C. (2R 25.8-11). En comptant soixante-dix ans à partir de cette date, on arrive à 516 av. J.-C. Il se peut qu’Aggée ait vu cette date approcher rapidement et se soit évertué à convaincre le peuple de reprendre la reconstruction du temple.

5. Les valeurs théologiques

Le temple est au centre de la théologie d’Aggée. À son époque, la maison de Dieu revêtait plus d’importance que le palais royal ; le prophète s’intéresse davantage aux sacrificateurs qu’aux princes. Le temple et la montagne de Sion sur laquelle il était bâti représentaient la demeure de Dieu sur terre. Sa destruction par Nebucadnetsar représentait le blasphème suprême. Le seul moyen de remédier à cette situation était de le reconstruire.

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Page 102: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

Parallèlement à ses préoccupations d’ordre spirituel, Aggée critique vivement la richesse et le confort personnels. Les gens revenus d’exil avaient fini de construire leurs maisons mais ils avaient négligé de rebâtir celle de Dieu. Aggée était convaincu que, si le peuple faisait preuve d’une dévotion sincère à l’Éternel et s’il le servait avec obéissance, Dieu le bénirait en retour en lui accordant de meilleures récoltes (voir 2.10-19).

La prophétie de 2.9 revêt une grande importance théologique. Bien que ce verset ne soit repris nulle part dans le N.T., la plupart des commentateurs y voient une référence à la venue du Messie. Le second temple était moins somptueux que celui de Salomon, mais sa gloire lui sera supérieure parce qu’il va devenir la scène d’une partie du ministère de Christ. La paix que l’Éternel promet dans cette prophétie passera finalement par Christ.

Zacharie

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan historique

Zacharie exerce son ministère prophétique au moment où les exilés reviennent de la captivité babylonienne. Environ soixante-quinze ans se sont écoulés depuis que Jérémie et Habakuk ont prédit l’invasion de Juda par l’armée néo-babylonienne de Nebucadnetsar. Au terme de la « servitude » du peuple en Babylonie (Esa 40.2), Dieu a influencé Cyrus, le roi perse, pour qu’il autorise les Hébreux à retourner dans leur patrie et à rebâtir le temple (Esa 44.28).

2. L’auteur, la date et l’unité du livre

Comme Jérémie et Ézéchiel, Zacharie est non seulement prophète, mais également sacrificateur. Né en Babylonie, il a fait partie de ceux qui sont revenus en Palestine en 538-537 av. J.-C. sous la conduite de Zorobabel et de Josué (cf. Iddo, grand-père de Zacharie, cité dans Né 12.4).

Plus tard, alors que Jojakim était souverain sacrificateur, Zacharie succède apparemment à Iddo (Za 1.1, 7) comme chef de cette famille sacerdotale (Né 12.10-16). Comme ici, le petit-fils succède au grand-père (Iddo), on peut penser que le père (Bérékia, Za 1.1, 7) est mort jeune, avant d’avoir pu succéder à son propre père comme sacrificateur.

Bien que contemporain d’Aggée, Zacharie poursuit son ministère encore longtemps après lui (cf. Za 1.1 et 7.1 avec Ag 1.1 ; voir aussi Né 12.10-16). En supposant que Zacharie était jeune dans la première partie de son ministère (Za 2.4, « jeune homme »), il se peut qu’il l’ait continué jusqu’au règne d’Artaxerxès I (465-424 av. J.-C.).

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Page 103: INTRODUCTION À LA BIBLIOLOGIE

Certains érudits doutent que Zacharie soit l’auteur des chapitres 9-14. Mais toutes les raisons qu’ils avancent sont facilement contrées par des explications satisfaisantes ; d’autres savants défendent de façon convaincante l’unité structurelle du livre. Nous n’avons donc aucune raison de remettre en cause l’unité et l’authenticité du livre.

3. L’occasion et le but

Au moment où il prophétise et où il écrit, Zacharie est manifestement en Palestine et il exerce son ministère auprès des Juifs revenus d’exil (Za 4.8-10; 6.10, 14; 7.2-3, 9 ; cf. Né 12.1, 12, 16). La raison de ce livre est la même que celle qui a poussé Aggée à écrire. Environ cinquante mille anciens exilés étaient revenus à Jérusalem et dans les villes voisines en 538-537 av. J.-C., avec de grands espoirs de repeupler le pays et de reconstruire le temple (Esd 2). Leur zèle initial ne fait pas de doute ; à peine arrivés, ils rebâtissent l’autel des holocaustes (Esd 3.1-6). Ils remettent en vigueur le culte et les sacrifices rituels qui avaient été négligés pendant les soixante-dix ans passés en Babylonie. Les Juifs posent les fondations du temple le deuxième mois de la deuxième année (536 av. J.-C.) après leur retour (Esd 3.8-13). Mais leur ferveur et leur activité rencontrent différentes formes d’opposition (Esd 4.1-5 ; Ag 1.6-11), si bien que les travaux de reconstruction du temple s’arrêtent pour ne reprendre qu’en 520 av. J.-C. (Esd 4.24). Le but de Zacharie (comme celui d’Aggée) est de réprimander le peuple, de le motiver et de l’encourager à achever la reconstruction du temple (Za 4.8-10 ; cf. Ag 1-2) ; ce prophète s’intéresse cependant aussi au renouveau spirituel. Le but des huit visions nocturnes est expliqué dans Zacharie 1.3, 5-6 : l’Éternel demande au peuple de revenir à lui ; à son tour, il reviendra à eux et sa parole continuera de s’accomplir.

4. Les valeurs théologiques

Le livre de Zacharie est sans conteste le plus messianique, le plus apocalyptique et le plus eschatologique de tous les livres de l’A.T. Le prophète prédit la première venue de Christ dans l’humilité (6.12), son humanité (6.12), son rejet et sa trahison pour trente pièces d’argent (11.12-13), l’épée de l’Éternel qui le frappera (13.7), sa divinité (3.4; 13.7), son sacerdoce (6.13), sa royauté (6.13; 9.9; 14.9, 16), sa seconde venue en gloire (14.4), sa construction du temple de l’Éternel (6.12-13), son règne (9.10, 14), son instauration d’une paix et d’une prospérité sans fin (3.10; 9.9-10). Ces passages messianiques renforcent le sens des paroles de Jésus dans Luc 24.25-27, 44.

Dans son aspect apocalyptique (« révélateur ») ou eschatologique, Zacharie prédit le siège final de Jérusalem (12.1-3; 14.1-2), la victoire initiale des ennemis d’Israël (14.2), l’intervention de l’Éternel en faveur de la ville (14.3-4), le jugement des nations (12.9; 14.3), des changements dans la topographie d’Israël (14.4-5), la célébration de la fête des Tabernacles dans le royaume messianique (14.16-19) ainsi que la sainteté finale de Jérusalem et de ses habitants (14.20-21). Par la bouche de Zacharie, Dieu veut que le matériau apocalyptique (principalement 1.7-6.8),

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associé aux oracles de jugement et de salut (ou de délivrance) (principalement les ch. 9-14) serve d’encouragement pour que son peuple achève la construction du temple.

Le nom du prophète lui-même a une portée eschatologique. Il signifie « l’Éternel [Yahweh] se souvient. » « L’Éternel », le nom personnel du Dieu qui fait alliance, témoigne perpétuellement de sa fidélité à ses promesses (voir le commentaire sur Ex 3.14-15 "Ex 3.13"). Il « se souvient » des promesses contenues dans l’alliance et agit pour les accomplir. Dans Zacharie, la promesse divine de délivrance de la captivité babylonienne, d’une communauté théocratique restaurée et d’un temple en état de servir - siège terrestre d’un Souverain divin - débouche sur les tableaux encore plus grandioses d’un salut et d’un rétablissement futurs par l’intermédiaire du Messie.

En fin de compte, le livre dans son ensemble enseigne la souveraineté passée, présente et future de Dieu dans l’Histoire, sur les peuples et les nations. Malachie

INTRODUCTION

1. L’arrière-plan Contrairement à la plupart des autres prophètes, Malachie ne mentionne ni personne ni événement permettant de dater sa brève prophétie. Tout indice relatif à l’origine et à la date de ce livre doit émaner du texte et de ses implications. La tradition fournit cependant quelques informations. Malachie est et a toujours été placé à la dernière place des petits prophètes ; il existe un certain ordre chronologique parmi les trois plus grands prophètes, ainsi que parmi les douze petits. De plus, le Talmud classe systématiquement Aggée, Zacharie et Malachie comme les trois prophètes post-exiliques.

2. L’auteur

En dehors de son livre, on ne sait rien de Malachie. Même son nom suscite des doutes. Pour certains, « Malachie » n’est pas un nom propre ; ils le traduisent par « mon messager » ou « le messager de l’Éternel ». Cette idée trouve un appui dans la LXX. Certains savants considèrent que le livre n’est que la dernière des trois sections de Zacharie ; cette dernière partie aurait été scindée en deux pour que le nombre des petits prophètes atteigne le chiffre sacré de douze. Le nom de l’auteur du livre est d’autant plus obscur que le nom de Malachie ne figure nulle part ailleurs dans la Bible. Même les citations que le N.T. fait de ce livre ne mentionnent pas le nom de l’auteur (Mt 11.10 ; Mr 1.2 ; Lu 7.27).

Or, chacun des autres prophètes écrivains indique son nom dans les premiers versets de son livre. Si un homme appelé Malachie n’a pas écrit le livre portant son nom, il serait la seule exception. De plus, « Malachie » n’est pas un nom improbable pour l’auteur de ce dernier livre prophétique. Après tout, Malachie était bien le messager de l’Éternel. Sa trompette n’a pas rendu un son confus. De façon claire et indubitable, il a repris son peuple et les sacrificateurs à cause de leur péché et il les a exhortés à la justice.

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3. La date

Le livre de Malachie ne peut être antérieur à 516/515 av. J.-C., date de la fin des travaux de reconstruction du temple. Les savants datent le livre de la période où Néhémie a administré Jérusalem. Esdras est revenu d’exil en 458 av. J.-C, et Néhémie en 445 (selon la chronologie traditionnelle).

4. L’occasion et le but

L’indifférence à l’égard des rites du temple et surtout à l’égard de la loi de Moïse a atteint de telles proportions en Juda, après l’exil, que Dieu suscite le prophète Malachie pour réprimander le peuple. Le combat pour la vérité et la justice s’était estompé parce que les ennemis politiques évidents d’autrefois avaient disparu ; ce vide a laissé la place à des ennemis moins évidents, à savoir la suffisance, l’orgueil et les compromissions.

5. La théologie

La personne et l’œuvre de Dieu sont au centre de la théologie. Malachie présente le Seigneur souverain comme le Dieu d’Israël et le Dieu du monde tout entier. Dans 3.6, le prophète n’affirme pas seulement l’immutabilité de Dieu - « Car je suis l’Éternel, je ne change pas » - mais il ajoute le corollaire concernant l’impossibilité que ses promesses soient annulées : « Et vous, enfants de Jacob, vous n’avez pas été consumés. » Dieu a décidé de se conserver un peuple ; ce désir se réalisera, peut-être pas du temps de Malachie, mais en tout cas à une époque ultérieure.

Malachie est dans le même registre que les autres grands prophètes de l’A.T. en rappelant l’universalité de Dieu à ceux auxquels il s’adresse. Dieu s’intéresse à toutes les nations, pas seulement à Israël (cf. 1.5).

Il pourrait sembler que Malachie se préoccupe excessivement du respect des rites dans la religion hébraïque (cf. 1.8, 13; 3.8), mais une lecture plus attentive révèle qu’il se souciait surtout de ce que Jésus appelle « ce qui est plus important dans la loi, la justice, la miséricorde et la fidélité » (Mt 23.23).

Malachie prêche un Dieu de justice qui condamne les pécheurs et récompense les justes. La pratique de la dîme entraîne une bénédiction (3.10) ; les justes seront épargnés en ce « jour » (v. 17). Ceux qui révèrent le nom de Dieu se délecteront au « soleil de justice » (4.2). Malachie est donc un prophète qui annonce à la fois la malédiction et la bénédiction, parce qu’il prêche un Dieu parfaitement juste dans sa façon de traiter les gens.

La contribution la plus notable de Malachie au corpus vétérotestamentaire de la prophétie messianique est sa référence au précurseur. La première allusion se trouve en 3.1. L’expression

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« mon messager » ne peut s’appliquer à Malachie mais à un certain Élie qui annoncera pour la dernière fois dans l’A.T. l’appel divin à la repentance (4.5 ; cf. Mt 11.14; 17.12-13 ; Mr 9.11-13 ; Lu 1.17).

Bibliographie : 1. Andrew E. Hill & John H. Walton. A Survey of the Old testament, Zondervan Publishing House,

1991, USA, pp 461.2. Gleason L. Archer. Introduction a l’Ancien testament, Ed. Emmaüs, 2001, Suisse, pp 640.3. William Dyrness. Théologie de L’Ancien Testament. Ed. Ministères Multilingues, 2001, Canada,

pp253.

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