l'agriculture familiale, une opportunite de …...m e m o i r e de stage de s8 dominante giap...
TRANSCRIPT
Ministère de l’Agriculture de l’alimentation, de la Pêche, de la Ruralité et de
l’aménagement du Territoire
Ecole nationale supérieure des sciences agronomiques de Bordeaux Aquitaine
1, cours du Général de Gaulle - CS 40201 - 33175 GRADIGNAN cedex
M E M O I R E DE STAGE DE S8 DOMINANTE GIAP
DE BORDEAUX SCIENCES AGRO
L'AGRICULTURE FAMILIALE, UNE OPPORTUNITE DE
DEVELOPPEMENT AGRICOLE POUR LA GUYANE
FERNANDEZ AURELIE
OPTION AGROGER:
ETUDE REALISEE A : LA REGION GUYANE, SERVICE INNOVATION
- 2 0 1 4 -
Remerciements
Je souhaiterais tout d’abord remercier mon maître de stage Marc Sagne pour son soutien, son
encadrement de qualité mais aussi sa gaité et ses anecdotes quotidiennes qui m’ont enrichie et
amusée.
Je remercie également Yann Reinette et Line Raphaël de l’association ADAG qui m’ont aidé dans les
différents travaux que j’ai effectué pendant le stage.
Je remercie Jack Arthaud et Patrice Pierre de l’EPAG sans qui je n’aurais jamais pu trouver ce stage en
Guyane française.
Je remercie mon tuteur de stage Jean-Philippe Fontenelle pour son encadrement à distance et son
intérêt pour le stage que j’ai effectué à la Région.
Je remercie toutes les personnes qui m’ont permis de découvrir la Guyane, la « vraie » Guyane,
notamment Josette Vaillant pour sa générosité, Marc-Alexandre Tareau pour sa connaissance en
botanique, Solange pour son aide mais surtout Steward Ouadi et toute sa famille pour m’avoir fait
découvrir le fleuve et l’agriculture bushinengée de façon unique.
Je remercie ma famille pour m’avoir soutenu et permis de faire ce stage si loin.
Résumé
La Guyane connaît une croissance démographique très forte qui l'oblige dès à présent à anticiper les
défis alimentaires, humains et sanitaires auxquels elle devra faire face. L'agriculture familiale est
envisagée comme une des solutions par la Région pour répondre aux besoins alimentaires et limiter
l'exode rural. Pourtant, l'agriculture familiale, composée par les agriculteurs qui n'emploient pas de
salarié permanent, reste peu reconnue alors qu'elle est majoritaire. L'objectif de ce travail est de
proposer des pistes d'actions pour développer l'agriculture familiale guyanaise en tenant compte des
points de blocage qui empêchent son progrès. Une étude bibliographique ainsi que les enquêtes
réalisées auprès de différentes institutions et des agriculteurs, nous ont permis de comprendre les
raisons des décisions politiques qui ont toujours privilégié l'agriculture de filière, la divergences des
recensements et les difficultés d'organisation de la filière agricole dans sa globalité. De plus, l'accès au
statut d'agriculteur est contraint par les exigences législatives nationales et européennes difficilement
applicables. Aussi, les connaissances techniques caractéristiques de la Guyane sont faibles. Le
développement de l'agriculture familiale devra passer par la collecte de données fiables, la mise en
place de programmes de recherche, la formation et l'encadrement des agriculteurs et des techniciens
pour s'adapter au contexte de forte demande alimentaire et d'emploi. La démarche devra aller vers
une reconnaissance du statut de ces agriculteurs voire d'aménagements législatifs.
Abstract
French Guyana is experiencing high population growth that forces now to anticipate food, human and
health challenges which it will face. Family farming is considered as a solution by the Region to meet
food needs and reduce rural-urban migration. Yet, family farming, made by farmers who do not employ
permanent employee, is little known even if it represents the majority. The objective of this work is to
propose courses of action to develop the Guyanese family farming from bottlenecks that impede its
progress. A literature study and the surveys of different institutions and farmers, have enabled us to
understand the importance of policy decisions that always favored intensive agriculture sector, the
differences census and organizational difficulties of the agricultural sector. In addition, access to the
farmer status is constrained by legislative requirements impractical. Also, technical knowledge
characteristics of Guyana are low. The development of family farming will involve the creation of
reliable data, the development of research programs, training and support for farmers and technicians
to fit the context of high food demand and employment. The process will go towards a recognition of
the status of these farmers or legislative developments.
« Aujourd'hui l'agriculture familiale est plus nécessaire que jamais.
D'abord parce qu’investir en elle c'est la meilleure façon de faire ré-
duire la pauvreté rurale et donc de faire reculer la faim [...],
Ensuite parce que l'agriculture familiale permet de profiter aussi aux
autres secteurs de l'économie en augmentant le pouvoir d'achat d'une
grande partie de la population qui dépend de la petite agriculture [...].
On a des effets multiplicateurs très importants pour l'économie locale.
C'est donc une manière intéressante pour un pays d'investir dans son
avenir.
Enfin, l'agriculture familiale est mieux placée pour gérer les écosys-
tèmes, pour pratiquer une agriculture plus diversifiée qui préserve la
santé des sols.
Malheureusement par le passé, au cours des 30 dernières années, on a
très peu investi dans l'agriculture familiale. On a essentiellement voulu
miser sur l'agriculture d'exportation, sur les cultures de rente et sur les
plus grandes plantations plutôt que sur les petites exploitations. Et
donc, c'est aujourd'hui urgent de réinvestir ces agricultures trop long-
temps négligées avec les conséquences que l'on voit dans les chiffres
de la pauvreté rurale. »
Olivier de Schutter, rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à l'alimentation
Pourquoi les Nations Unies ont-elles proclamé 2014 "Année Internationale de l'Agriculture
Familiale" ?, Reportage AFD 2014
INTRODUCTION ....................................................................................................................................... 1
Présentation de la Guyane ...................................................................................................................... 2
I - L’agriculture familiale et ses enjeux en Guyane .................................................................................. 4
A – Définition de l’agriculture familiale ............................................................................................... 4
B – Typologie des agricultures guyanaises .......................................................................................... 5
C – Les défis de l’agriculture familiale ................................................................................................. 8
II – Les points de blocage au développement de l’agriculture familiale ............................................... 12
A – Absence de l’agriculture familiale dans les politiques locales et régionales............................... 12
B – Les difficultés liées à la législation ............................................................................................... 13
C – Difficultés liées au contexte local ................................................................................................ 17
III – Pistes d’action à mettre en place ................................................................................................... 22
A – Leviers d’action............................................................................................................................ 22
B – Effets économiques attendus d’une meilleure intégration de l’agriculture familiale ................. 29
C – Effets sociaux à envisager ............................................................................................................ 31
CONCLUSION ......................................................................................................................................... 34
Bibliographie .......................................................................................................................................... 36
Liste des illustrations
Liste de figures
Figure 1 : Carte de la Guyane (La Région Guyane, 2013)
Figure 2 : Photos d’un abattis de riz pluvial dans la commune de Maïman (source personnelle)
Figure 3 : Photos d’un abattis de riz pluvial dans la commune de Maïman (source personnelle)
Figure 4 : Recensement des agriculteurs guyanais par commune
Figure 5 : Enfant bushinengé se rendant à l’abattis, Maïman (source personnelle)
Figures de la page de garde (de la gauche vers la droite) :
- Photo d’abattis sédentarisé, Maïman, source personnelle
- Photo d’un campou sur le fleuve Maroni, source personnelle
- Photo lors de la cuisson du couac, Maïman, source personnelle
- Photo d’une femme qui rape les racines de manioc, Camopi, source personnelle
- Photo d’un abattis prêt à être planté, Camopi, source personnelle
- Photo d’un abattis de manioc, Apatou, source personnelle
Liste des tableaux
Tableau 1 : Principaux types d’exploitations agricoles (CIRAD, 2013)
Tableau 2 : Evolution des montants investits par l’Europe et de la production agricole
P a g e 1 | 35
INTRODUCTION
La Guyane est un département français et européen qui doit faire face à des problématiques humaines,
territoriales et alimentaires de pays en voie de développement. La faiblesse et l’inégalité de son
peuplement, la diversité des situations sociales et économiques de sa population et l’étendue
considérable de son territoire font de la Guyane Française une terre de contrastes. L’agriculture
guyanaise est également contrastée avec une agriculture de filière développée essentiellement sur le
littoral alimentant les marchés locaux gérée par 10% des agriculteurs face à l’agriculture familiale
présente sur tout le territoire. L’agriculture familiale en Guyane désigne les abattis et les jardins créoles,
décrits dans ce mémoire, installés le plus souvent sur les rives des fleuves jusque dans les écarts de tous
les villages. Ces agriculteurs consacrent souvent une part importante de leur production à de
l’autoconsommation.
Les réalités du monde rural sont encore mal connues, tant du point de vue social, qu’économique, et les
politiques rurales ne peuvent de ce fait qu'être mal évaluées, ou inadaptées. C'est ainsi que, depuis plus
de quarante ans les plans de développement agricoles se tournent exclusivement vers l’agriculture de
filière alors que le taux de couverture des besoins ne cesse de décroître et que la production locale
progresse peu.
L’agriculture familiale est laissée à l’écart des politiques locales et nationales alors que la Guyane doit
faire face à de nombreux défis liés à l’augmentation démographique, à l’augmentation de besoins
alimentaires mais aussi à l’exode rural et aux pressions qui en découlent. Il est aujourd’hui nécessaire
de changer de stratégie de développement car celles mises en place jusqu’à présent ne sont pas efficaces
et l’agriculture familiale est une nouvelle piste prometteuse qui n’a jamais été envisagée jusqu’ici.
La Région souhaite aujourd’hui initier un développement de l’agriculture familiale durable et profitable
à tous.
L'agriculture familiale, une opportunité de développement agricole pour la Guyane
Cette question nécessite tout d’abord de définir l’agriculture familiale en Guyane et préciser les défis
auxquels elle devra répondre dans le futur. Nous analyserons par la suite quels sont les points de blocage
à la prise en compte de cette agriculture dans les programmes de développement locaux. Enfin, nous
déterminerons les facteurs et les actions à mettre en place au profit du développement de cette
agriculture prometteuse pour l’avenir de la Guyane.
P a g e 2 | 35
Présentation de la Guyane
La Guyane est le seul département français situé en
Amérique latine, voisine du Surinam à l’ouest et du Brésil au sud
et à l’est. Reconnue depuis 1946 comme Département d'Outre-
Mer, c'est un territoire de 84 000 km² situé au niveau de
l’équateur et recouvert à 95% par la forêt tropicale
amazonienne (PDRG, 2014).
La Guyane possède une biodiversité très riche tant en flore
qu’en faune. On estime qu’un hectare de forêt guyanaise
correspond à l’équivalent de la biodiversité de l’Europe. La forêt
est en partie protégée et à 99% propriété de l’Etat français
(PDRG, 2014).
La répartition de la population est très inégale car elle concentre 250 000 habitants sur la bande
littorale et le long des deux fleuves (fleuve Maroni à l’Ouest et fleuve Oyapock à l’Est) soit sur 10 % du
territoire. La densité de la population est d'environ 3 habitants par km². La croissance démographique
est très importante (3,5% soit environ le double de celle de métropole – Source INSEE) notamment à
cause de l'immigration et de l'importance culturelle des familles nombreuses (PDRG, 2014 ; interviews
La Région).
La Guyane est un département d'Outre-Mer et fait donc partie du système administratif français. La
population et les cultures présentes en Guyane sont très diverses et métissées comportant une trentaine
de groupes ethniques et culturels distincts et avec des poids politiques différents. C’est ainsi que : se
côtoient des populations amérindiennes, créoles, noirs-marrons ou bushinengés, hmong, brésiliennes,
« coolies » (indiens), métropolitaines, etc possédant chacun une langue propre. Les noirs-marrons ou
bushinengés sont les descendants d’esclaves africains ayant fui l’esclavage avant son abolition (bushi
signifiant forêt et nenge signifiant noir traduit littéralement noir vivant dans la forêt) (Mam Lam Fouck,
2007). Ils sont originaires de Guyane ou du Surinam suite à la guerre civile où de nombreux noirs-
marrons ont cherché asile sur la rive française du Maroni (Assemat, 2014 ; Redon, 2013).
Malgré cette richesse ethnique et culturelle, la prise en compte de l’autochtonie est difficile au niveau
législatif et réglementaire. Dans ce cadre-là, l’exploitation de la forêt est difficile à réglementer et faire
Figure 1: Carte de la Guyane
P a g e 3 | 35
accepter auprès des populations autochtones et traditionnelles qui y vivent depuis avant l’occupation
française du département. Il faut souligner la présence de chefs coutumiers pour les populations
amérindiennes et les bushinengés qui sont des instances très importantes dans l'organisation des
populations originelles de Guyane.
L’activité économique en Guyane s’est développée principalement sur la bande côtière où l’on trouve
les villes les plus importantes (Cayenne, Kourou, Saint Laurent du Maroni). Elle tourne autour d’un
secteur traditionnel (bois, pêche, travaux publics, or) et d’un secteur de pointe représenté par le Centre
spatial situé à Kourou. Rappelons la présence de l’orpaillage clandestin important qui, au-delà de la
importante, provoque des pollutions importantes des cours d’eau avec des conséquences inquiétantes
sur les ressources de chasse et de pêche (PDRG, 2014).
P a g e 4 | 35
I - L’agriculture familiale et ses enjeux en Guyane
A – Définition de l’agriculture familiale
L’agriculture familiale est un terme très utilisé mais souvent mal défini. En effet, les définitions varient
en fonction des pays, des contextes agricoles, des époques. Il a donc fallu trouver une définition claire
et adaptée pour délimiter notre sujet d’étude. Dans le cadre de l’Année Internationale de l’Agriculture
Familiale (AIAF) en 2014, des états de l’art et recherches bibliographiques ont permis de synthétiser la
littérature disponible et d’obtenir différentes définitions.
Définition de la FAO dans le cadre de l’AIAF (FAO, L’agriculture familiale, 2014)
« Les exploitations agricoles familiales peuvent cependant contourner certains critères:
La compétence décisionnelle est entre les mains de la famille exploitante.
La famille exploitante assume les risques.
Les membres de la famille accomplissent la plus grande partie du travail.
La famille dispose des terres exploitées, qu’elle en soit propriétaire ou par un bail à ferme.
Le capital financier est en grande partie mis à disposition par la famille ou des bailleurs de fonds classiques, mais pas par des investisseurs institutionnels.
Le revenu de la famille provient en majorité de l’activité agricole.
La vie de famille est mêlée à celle de l’exploitation.
L’exploitation est transmise à un descendant. »
Définition du programme de développement de l’agriculture familiale du Brésil (Ministério do Desenvolvimento Social e Combate à Fome, Agricultura familiar, 2014)
Dans le contexte guyanais, il nous a paru intéressant de prendre en compte la bibliographie brésilienne
disponible car ils sont aujourd’hui les seuls à avoir vraiment réalisé des travaux sur l’agriculture
amazonienne.
« L'agriculture familiale est une forme de production dominée par l'interaction entre la gestion et le travail; Ce sont des agriculteurs familiaux qui dirigent le processus de production, en mettant l'accent sur la diversification et l'utilisation du travail de la famille, éventuellement complétée par le travail salarié. »
Cependant, ces définitions ne permettent pas de caractériser exactement les agricultures familiales dans
notre situation. La définition qui nous a paru la plus complète et la plus « adaptée » aux différents
contextes de la Guyane avec des critères simples à identifier est celle du CIRAD dans le cadre de l’AIAF.
Définition du CIRAD (CIRAD, Les agricultures familiales du monde, 2013)
« L’agriculture familiale désigne une des formes d’organisation de la production agricole regroupant des exploitations caractérisées par des liens organiques entre la famille et l’unité de production et par la mobilisation du travail familial excluant le salariat permanent. Ces liens se matérialisent par l’inclusion du capital productif dans le patrimoine familial et par la combinaison de logiques domestiques et d’exploitation , marchandes et non marchandes, dans les processus d’allocation du travail familial et de sa rémunération, ainsi que dans les choix de répartition des produits entre consommations finales, consommations intermédiaires, investissements et accumulation. »
P a g e 5 | 35
(CIRAD, Les agricultures familiales du monde, 2013)
En appliquant cette définition au territoire guyanais, nous pouvons caractériser de façon
générale la typologie des exploitations présentes en Guyane et définir lesquelles appartiennent, ou non,
à l’agriculture familiale.
B – Typologie des agricultures guyanaises
Les principales agricultures familiales guyanaises regroupent les différentes cultures sur abattis
permanentes ou itinérantes et les jardins de type « créole ».
Définition d’un abattis
L’abattis est un terme généralement utilisé pour définir une surface agricole installée après
défrichage de la forêt. Il peut y avoir brulis ou non des bois et des herbes présentes sur la parcelle après
la coupe (CIRAD, 2013).
Les expressions d'agricultures itinérantes sur brûlis ou abattis-brûlis sont difficiles à décrire de façon
unique car elles représentent de nombreuses variantes au sein même de la Guyane. Héritées d’un
modèle adaptatif amérindien, elles ont ensuite été reprises par les communautés noirs-marrons,
créoles, brésiliennes, etc. qui les ont fait évoluer peu à peu. Pour simplifier, ces pratiques agricoles sont
caractérisées par le défrichement annuel de petites surfaces de forêt (1 à 2 ha), la mise en culture puis
la jachère et l'itinérance des parcelles cultivées. La taille des exploitations, leur utilisation, le type de
cultures installées peuvent varier en fonction de l'appartenance culturelle des exploitants et de l’objectif
d’utilisation de la production. En général, d'après la bibliographie, la durée moyenne d'exploitation
d'une parcelle est de 2 à 3 années consécutives suivi de 2 à 5 ans de jachère (Varin, 2010.- Tsayem
Demaze, 2008). Cependant, les temps de jachère ont tendance à se réduire d’année en année à cause
des contraintes de rendement et de la pression foncière conséquence des difficultés d'acquisition de
terrains forestiers qui sont propriété de l'Etat. La taille d’un abattis est généralement comprise entre 0,1
et 2 ha pour les plus grands.
P a g e 6 | 35
Les abattis sont généralement situés dans un périmètre assez proche des habitations. Cependant, avec
la pression foncière et la recherche de terres de bonnes qualité, les abattis sont progressivement
installés de plus en plus loin des habitations (interview Région ; agriculteurs du fleuve Maroni).
Figures 2 et 3 : Photos d’un abattis de riz pluvial dans la commune de Maïman (source personnelle)
Définition d’un jardin type « créole »
Il est également compliqué de décrire de façon simple les jardins créoles. Ce sont de petites surfaces de
plantes vivrières mais aussi de plantes médicinales et ornementales parfois reposant souvent sur le
principe d’agroforesterie. Généralement les plantations semblent désorganisées mais il y a une logique
d’association de cultures et d’étagement des plantes dans l’espace. Ici encore, les organisations, les
types de plantes peuvent différer suivant les origines des agriculteurs. La pratique du jardin créole est
arrivée avec les différentes vagues d’immigration depuis les Antilles. Cependant, eux aussi pratiquent
aujourd’hui des jachères longues sur les sols guyanais fragiles (INRA, 2014).
Ces agricultures sont très différentes suivant les générations, les groupes ethniques qui les cultivent
(amérindiens, bushinengés, créoles, etc.), les zones géographiques (communes et situations par rapport
aux bourgs et villages), etc. La typologie des exploitations réalisée en amont dans le cadre de ce stage a
quand même permis de dégager des tendances générales communes à toutes les agricultures familiales
guyanaises. Pour réaliser la typologie des exploitations, nous avons pris en compte le type d’exploitation,
leurs surfaces moyennes à partir de la bibliographie, les communautés, les principaux types de
production et les critères de définition de l’agriculture familiale (ANNEXE I).
- Plantes cultivées traditionnelles en cultures associées avec une dominance pour la culture de
manioc amer pour le transformer en farine couac ou galettes kassave ;
- Une part plus ou moins importante est destinée à l’autoconsommation : c’est une agriculture
vivrière (plantes alimentaires destinées prioritairement à l’autoconsommation) ;
- Peu d'intrants utilisés (fertilisation et produits phytosanitaires) ;
P a g e 7 | 35
- Faible mécanisation (le plus souvent tronçonneuses) et faible productivité humaine contre une
productivité de la terre importante ;
- Agriculteurs rarement recensés, en tant que tel, par la DAAF, activité fréquemment informelle
parfois complétée par l’artisanat et l’extractivisme1 ;
- Concerne principalement les communautés amérindiennes et bushinengés. L’abattis est une
coutume traditionnelle et incontournable chez ces deux communautés.
Pour notre étude, nous nous concentrerons essentiellement sur les agricultures familiales de type
abattis. Les cultures type jardins créoles sont souvent situées en zone péri-urbaine sur le littoral. De plus,
il s’agit généralement d’activités cumulées avec un emploi salarié. Le nombre de personnes impliquées
par ce type de culture est moins important que pour les cultures sur abattis établies vers l’intérieur du
territoire (notamment sur les fleuves et les communes isolées).
L’agriculture familiale guyanaise
Sur 6000 agriculteurs recensés par la DAAF (2010), plus de 5000 sont concernés par l’agriculture
familiale ce qui représente 90% de l’agriculture guyanaise. Ces petits agriculteurs produisent 50% de
la PAF (production agricole finale). La Guyane est le seul département français pour lequel la Surface
Agricole Utile (SAU) et le nombre d’exploitations agricoles augmentent (respectivement de 9 et 13%
entre 2000 et 2010). Les exploitations sont principalement implantées le long du fleuve Maroni à l’Ouest
et sur le littoral : plus de 78% sont concentrées dans la Communauté de Communes de l’Ouest Guyanais
(CCOG) (PDRG 2014).
La production issue de l’agriculture familiale est essentiellement destinée à de l'autoconsommation et
transformée sur place même si il y a une tendance évolutive notamment chez les noirs-marrons qui
commercialisent de plus en plus le couac (interviews d'agriculteurs). La communauté bushinengée est
de plus en plus importante à l’ouest guyanais et s’ouvre peu à peu sur de plus grandes villes dont Saint-
Laurent du Maroni notamment grâce à création d’un nouvel axe routier sur l’ouest (PDRG, 2014). Les
agriculteurs bushinengés sont souvent entreprenants et n’hésitent pas à envisager leur production
agricole comme source de revenu complémentaire sans se cantonner à la seule autoproduction familiale
ou villageoise. Pourtant, l’agriculture familiale reste encore trop méconnue et délaissée alors que
différents défis pèsent sur la Guyane.
1 Principe d’exploitation sylvicole qui se résume à la cueillette des ressources naturelles non ligneuses notamment
les fruits et les plantes médicinales de la forêt. Désigne avant tout l’activité spécifique en Amazonie brésilienne
(Emperaire, 1996).
P a g e 8 | 35
C – Les défis de l’agriculture familiale
Le développement agricole et l’augmentation de la précarité du monde rural en Guyane s’alimentent à
plusieurs sources. La pression démographique, les politiques économiques discriminatoires vis-à-vis de
l’agriculture familiale, l’exode entretenu par les politiques d’emploi, les modèles de consommation,
constituent autant de défis posés à l’agriculture familiale guyanaise pour les années à venir.
1. L’augmentation démographique : des besoins alimentaires non couverts
La Guyane connait une pression démographique croissante considérable du fait des nombreuses
naissances et de l'immigration importante depuis ces dernières décennies. Elle continue d’augmenter
dans les milieux ruraux isolés. En effet, la croissance démographique est plus importante à l’Ouest du
département notamment chez les populations vivant sur le fleuve Maroni (PDRG 2014). Rappelons que
suite à la Guerre civile qui a frappé le Surinam en 1986, ce sont entre 9000 et 13 000 réfugiés
bushinengés qui sont venus sur la rive française du Maroni faisant doubler la population rurale guyanaise
(Assemat, 2014). En conséquence, la demande alimentaire augmente alors que la production locale
n’arrive pas à suivre. Il est aujourd’hui nécessaire de pouvoir répondre à la demande alimentaire
actuelle et future mais aussi de stabiliser les populations en milieu rural pour éviter un déséquilibre
trop important du territoire. L’INSEE estime que la population guyanaise devrait passer de 250 000
habitants à 575 000 d’ici 2040 (INSEE).
Malgré une SAU en progression, l’agriculture guyanaise n’arrive pas à couvrir les besoins alimentaires
actuels du département. Le taux de couverture est même en légère baisse dans les filières animales
(couverture de 1% à 20%) (Oréade Brèche, 2014). Avec la croissance démographique actuelle, la
demande alimentaire va augmenter et l’agriculture guyanaise doit y faire face alors que la couverture
de de la demande par la production locale se dégrade depuis ces 20 dernières années.
Face à cette baisse du taux de couverture et à l’augmentation des besoins, différentes études sur
l’agriculture guyanaise privilégient l’agriculture de filière et préconisent des taux de croissance de
production annuels ambitieux. L’absence de l’agriculture familiale dans ces études et dans les
programmes de développement souligne le manque de connaissance de la réalité agricole en Guyane
et le désintérêt pour l’agriculture familiale. Cette agriculture n’a pas été envisagée comme une solution
au problème alimentaire dans les stratégies de développement. Il n’y a jamais eu de lancement de
dynamiques territoriales avec mobilisation des acteurs en jeu et une réelle stratégie de développement
(Oréade Brèche, 2014).
Il est important de souligner également que les zones frontalières au bord des fleuves sont victimes de
la concurrence des produits étrangers. Il n’est pas rare de trouver des produits importés illégalement
sur les marchés des villes bordant le fleuve telles que Saint-Laurent-du-Maroni (visites et rencontres avec
les agriculteurs et les habitants). Il est parfois plus intéressant pour les habitants de traverser le fleuve
P a g e 9 | 35
que de consommer localement. Il sera donc important de soutenir l’agriculture familiale guyanaise, forte
de plus de 5000 agriculteurs.
Il est donc aberrant de bâtir, comme cela a toujours été le cas en Guyane, les programmes de dévelop-
pement agricole uniquement sur les agriculteurs de filières (au nombre de 300) en écartant les 5000
agriculteurs de l’agriculture familiale. Rappelons qu’elle contribue déjà à 50% de la PAF. Le mode de
production traditionnel offre, en effet, un fort potentiel d’augmentation de la production agricole. Il
convient donc de revoir radicalement la stratégie de développement agricole de la Guyane en tenant
compte de la spécificité et de l’opportunité que représente l’agriculture familiale.
2. Réduire le risque sanitaire, une nouvelle priorité en zone isolée
Il est important de valoriser et accompagner les productions locales notamment en zones isolées pour
limiter les risques sanitaires.
A cause de leur sédentarisation progressive et de l’augmentation démographique, les populations
doivent faire face à des difficultés alimentaires. Les populations autochtones et traditionnelles vivaient
essentiellement de la chasse et de la pêche. Cependant, une réduction importante des prises de chasse,
l’interdiction de pêcher les espèces carnassières qui accumulent le mercure ont contribué à une
diminution des ressources protéiques et de la diversité alimentaire des familles.
Pour pallier le manque de protéines, les familles achètent généralement du poulet surgelé.
Malheureusement, lors du transport de ces produits, la chaine de froid est souvent brisée créant un
risque sanitaire non négligeable (interview Département Innovation, Région Guyane).
Enfin, les prix de ces denrées achetées en zones isolées sont souvent élevés et aggravent parfois des
situations de précarité. Par exemple, dans la commune de Trois Sauts à l’extrême opposé du fleuve
Oyapock un poulet surgelé peut être vendu 30€ et 15€ les 6 œufs (enquêtes Conseil Général Camopi).
3. Nécessité de lutter contre l’exode rural et créer des emplois viables
Le développement de l'agriculture familiale pourrait aussi contribuer à la fixation des populations. En
effet, la Guyane connait un exode rural important qui s'accompagne de l’apparition de quartiers
spontanés dans les villes du littoral avec toutes les conséquences sociales et économiques négatives qui
peuvent en découler. Les populations rurales ont souvent tendance à se déplacer dans un premier temps
des zones les plus reculés vers les bourgs puis des bourgs vers les villes du littoral pour trouver un emploi
(interviews Région Guyane).
Il est donc nécessaire de créer des activités économiques viables. Le développement de l’agriculture fait
partie, à court terme, des rares opportunités possibles de développement économique en zones isolées.
Il est important que le développement de l’agriculture familiale puisse aboutir à moyen et long terme à
la création d’emplois stables et rémunérateurs surtout pour les jeunes générations.
P a g e 10 | 35
4. Nécessité de développer l’encadrement et élargir les connaissances techniques
La sédentarisation des populations est un phénomène croissant notamment avec la mise en place des
services de bases dans les bourgs. Il est donc nécessaire d’accompagner la sédentarisation de
l’agriculture qui va de pair. Cependant, il n’existe pas encore d’itinéraires techniques définis pour
répondre aux besoins de ces petits agriculteurs. En effet, à cause du manque de connaissances, il est
nécessaire de commencer par caractériser les besoins et ensuite définir comment accompagner ces
agriculteurs pour pouvoir mettre en place des actions efficaces et réalistes. Rappelons que c’est une
agriculture rarement mécanisée, sans aucun intrant chimique ou organique et où les trajets pour se
rendre à la parcelle sont souvent effectués à pied et de plus en plus éloignés (enquêtes terrain). De plus,
il est nécessaire d’aider les agriculteurs notamment pour l’approvisionnement en semences mais aussi
pour la gestion phytosanitaire des parcelles. Enfin, en zone tropicale humide, le problème de maintien
de la matière organique dans les sols acides est récurrent et doit être une priorité. Dans cette démarche,
il s’agit de répondre aux besoins spécifiques de l’agriculture familiale guyanaise puis d’organiser
l’encadrement correspondant. Un soutien et un encadrement adaptés semblent être des conditions à
ne pas négliger pour pouvoir développer l’agriculture familiale sur le long terme.
5. Dans une démarche globale qui doit respecter le contexte de développement durable
Face à la croissance démographique et aux besoins croissants de terre, c’est aussi l’environnement en
zone rurale qui est touché. L’arrivée massive des réfugiés surinamais n’a pas permis un développement
harmonieux, homogène et progressif de l’agriculture familiale avec le doublement de la population
rurale et donc de l’exploitation de la forêt. Ce sont de plus grandes surfaces agricoles qui sont
développées (Assemat, 2014). Aussi, le problème des besoins alimentaires croissants qui demandent
une exploitation des terres plus importante aboutit au même problème.
L’agriculture itinérante oblige l’agriculteur à défricher de nouvelles surfaces annuellement mais la
croissance démographique joue sur la disponibilité foncière en ayant pour conséquence la réduction des
temps de jachère des abattis et l’éloignement des parcelles. La réduction du temps de jachère provoque
une fatigue des sols plus rapide. Les sols sont appauvris et n’ont plus le temps de se régénérer
totalement. Au sens environnemental, cette agriculture n’est plus durable.
Rappelons que la Guyane s’est engagée dans une démarche de développement durable. Cette démarche
comprend un volet économique, social et écologique. Développer une petite agriculture familiale
respectueuse de l’environnement qui crée une économie locale dynamique en intégrant les populations
des zones isolées et limitant l’impact carbone est un projet qui s’inscrit dans les démarches de
développement durable poursuivies et dans les objectifs de développement agricole recherchés.
P a g e 11 | 35
Enfin, l’Homme est au centre de la démarche de Développement Durable et ici ce sont 4000 personnes
qui sont mises à l’écart d’une démarche commune. Il s’agit d’un enjeu stratégique où il est difficile de
pouvoir concevoir ignorer tant d'acteurs potentiels des plans d’action de développement.
Majoritairement représentée par les systèmes d’abattis, l’agriculture familiale guyanaise représente
90% de l’agriculture en Guyane. Dans un contexte d’augmentation démographique et d’évolution des
sociétés, elle doit aujourd’hui faire face aux défis alimentaires, d’exode mais aussi à un manque
d’encadrement technique qui freine son développement. Exclue des politiques et de la reconnaissance
dans le monde agricole, il s’agit aujourd’hui de reconnaître l’agriculture familiale et de l'intégrer dans
les stratégies de développement pour faire face aux défis futurs de la Guyane.
P a g e 12 | 35
II – Les points de blocage au développement de l’agriculture
familiale
A – Absence de l’agriculture familiale dans les politiques locales et régionales
Depuis la départementalisation de la Guyane en 1946 jusqu’à aujourd’hui, toutes les instances
régionales et départementales politiques françaises ont été installées en Guyane. Chambre
d’agriculture, la Direction de l’Agriculture de l’Alimentation et des Forets (DAAF), Conseil Général et
Régional ont été mis en place pour mener à bien des politiques locales et régionales adaptées au
contexte de la Guyane. Pourtant, jusqu’à présent, l’agriculture familiale n’a jamais été prise en compte
dans les politiques locales.
1. La Guyane s’est privée du potentiel de développement de l’agriculture familiale
jusqu’à aujourd’hui
Face aux problèmes agricoles de la Guyane, c’est en l’agriculture de filière qui a été privilégiée
notamment lors du Plan Vert dans les années 70. Soutien à l’installation d’élevages extensifs de zébus,
mise en place de vergers d’agrumes et soutien à l’installation des agriculteurs Hmongs ont été mis en
place sur le littoral guyanais. La Guyane était considérée comme un territoire sous peuplé où
l’immigration devait être favorisée en installant des agriculteurs métropolitains en difficulté qui ont
cherché à imiter les politiques d’export des autres Départements d’Outre-Mer (Université Lemans,
2014).
Aujourd’hui, les politiques publiques pourraient être évaluées afin d'analyser les résultats d’une
intervention publique pour savoir si celle-ci a atteint les objectifs qui lui étaient assignés. En effet, il n’y
a jamais eu d’évaluation des politiques publiques menées en Guyane et les politiques de soutien exclusif
à l’agriculture de filière ne semblent pas avoir permis d’atteindre les objectifs escomptés tels que
différents seuils de couverture des besoins locaux (Odréade Brèche, 2014). En essayant d’analyser la
proportionnalité entre les montants investis dans l’agriculture guyanaise et la progression de la
production agricole, les résultats semblent stagner ou diminuer alors que les aides augmentent.
Investissement national et
européen pour
l’agriculture
Progression des
fonds alloués
Production Fruits
et légumes
Productions
Animales
1993 - 1999
2000 – 2006 46 millions d’€ + 11 %
2007 - 2013 78 millions d’€ + 69 % + 44 % -43%
Tableau 2 : Evolution des montants investis par l’Europe et de la production agricole
P a g e 13 | 35
Calcul de base à partir des fonds européens alloués et estimés à 60% de l’aide globale publique. (Sources : Programmes de Développement Rural, chiffres DAAF)
Sans analyse critique des programmes de développement passés, il semble logique que ceux-ci aient été
reconduits à chaque nouvelle programmation sans grande modification dans le domaine agricole (PDRG
2006, 2014). Les critères d'évaluations de politiques sont variés : pertinence, efficacité, efficience ou
encore durabilité et permettraient d’améliorer et d’éviter les erreurs passées lors des nouvelles
programmations (Commission Européenne, 2000.- OCDE, 2007). De plus, effectuer une estimation, et
son évolution dans le temps, des quantités d’aliments importées légalement et illégalement permettrait
de souligner la faiblesse de la production alimentaire et l’inefficacité de la stratégie de développement
passée et actuelle.
Il est nécessaire aujourd’hui de trouver une nouvelle piste pour développer l’agriculture guyanaise mais
aussi d'évaluer après chaque politique les actions à reconduire ou abandonner. Dans notre cas,
l’agriculture familiale est un vivier de production dont la Guyane s’est trop longtemps privée.
2. Une tentative de prise en compte
Seule exception la Chambre d’Agriculture a initié un programme de développement agricole dans les
années 2000-2007 en partenariat avec le CIRAD : le Programme d'Encadrement de l'Agriculture
Familiale dans l'Ouest Guyanais (PEAFOG) en faveur des agricultures familiales. Les travaux effectués
étaient surtout axés sur la régularisation, la professionnalisation et le développement (amélioration
connaissances, accès à de nouveaux moyens de production, introduction de l’élevage, transformations
agroalimentaires et structuration des producteurs. Cependant, ce programme a brutalement pris fin en
2009 sans explication (Assemat, 2014).
Enfin, La Maison Familiale et Rurale de Mana (commune de l’Ouest à forte dominance de populations
bushinengées) essaie de mettre en place des travaux d’accompagnement à la sédentarisation des
agriculteurs mais il n’existe pas encore d’évaluation de ses actions (Réunion RITA Guyane, 2014).
B – Les difficultés liées à la législation
1. L'agriculture familiale pour la première fois présente dans le programme de
développement régional
En Guyane, le Conseil Général n'a pas d'action particulière sur l’agriculture car les fonctions sont
réparties et c'est au Conseil Régional que revient cette tâche. Les actions de la Région en faveur de
l’agriculture sont matérialisées au travers du Plan de Développement Régional Guyane (PDRG). Lors de
la programmation 2007-2013 le volet développement de l’agriculture ne mentionnait pas l’agriculture
familiale. Pour la programmation 2014-2020, différentes mesures pourraient permettre de travailler sur
l’agriculture familiale.
P a g e 14 | 35
La mesure 6.3.1 a été ajoutée pour la petite agriculture familiale intitulée « Soutien et accompagnement
des populations rurales pratiquant l’agriculture vivrière
Dans la description des besoins, les freins et enjeux sont pourtant bien explicités
« Les exploitations de moins de 2 ha représentent 52% des exploitations et 16 % de la SAU. Elles correspondent
essentiellement à une agriculture vivrière sur abattis–brûlis. Elles se situent généralement sur des sites isolés où la
commercialisation est limitée et où la vocation de l’agriculture est l’autosubsistance et les échanges de proximité.
Elles sont caractérisées par une forte importance identitaire et culturelle. Elle permet aux personnes sans emploi
salarié, d’assurer leur alimentation et celle de leur famille et freine l’exode rural
Ces exploitations sont jusqu’à présent peu concernées par les aides agricoles. Or, il est estimé qu’environ 10 % de
ces agriculteurs vivriers visent à se professionnaliser, tandis que d’autres souhaitent augmenter leur niveau de
production pour nourrir leur famille élargie. Cependant, ils doivent surmonter de nombreuses contraintes,
notamment une capacité réduite de financement, un accès limité au crédit, un faible niveau de formation initiale,
une faible maîtrise des savoirs de base, des difficultés à régulariser l’usage du foncier, un faible accompagnement
technique et administratif, dû notamment à leur isolement. Les besoins de ces populations sont donc nombreux et
relèvent plus de l’inclusion social que du soutien à la compétitivité : accompagnement dans les processus de
reconnaissance en tant qu’exploitation agricole, acquisition de titres fonciers, soutien à l’investissement dans du
petit matériel, formation aux connaissances de base, accompagnement technique, économique et administratif,
etc. Ces actions permettent aussi de préserver les cultures traditionnelles. » (PDRG 2014).
La mesure 4.4.1 vise à favoriser l’investissement non-productif ce qui avait permis de financer l’achat de
tronçonneuses, de quads ou encore de broyeurs de végétaux. Cette mesure pourrait aussi être à
nouveau mise à profit pour l’agriculture familiale (PDRG 2014).
Il est important de rappeler que les mesures du PDRG ne seront mises en place que chez les agriculteurs
considérés comme éligibles.
En dehors de ces politiques locales, différentes structures telles que le Parc Amazonien de Guyane
mènent également des travaux sur l’agriculture familiale notamment afin de régulariser la situation de
ces agriculteurs. A ce jour peu de travaux ont été publiés sur les actions menées.
A ce propos, il est important de soulever les problèmes de communication pouvant parfois apparaître
entre les différentes structures présentes en Guyane et travaillant sur l’agriculture familiale. Certaines
difficultés ont freiné l’avancement de ce mémoire et laissent supposer le même effet sur la prise en
compte et le développement de l’agriculture familiale en Guyane en fonction des intérêts en jeu.
2. Les exigences de cette législation
A l’échelle européenne, différentes aides sont mises en place pour soutenir l’agriculture. Dans le cadre
du Fonds Européen Agricole pour le DEveloppement Rural (FEADER), le PDRG est rédigé en différentes
mesures pour attribuer des subventions. Alors que la reconnaissance de l’agriculture familiale, du
concept d’itinérance, d’abattis et d’agriculture vivrière commencent seulement à être reconnus, c’est la
première année que l’agriculture familiale trouve une place dans les textes officiels. Cependant, pour
P a g e 15 | 35
pouvoir être éligibles aux aides européennes, les agriculteurs doivent être déclarés comme exploitants
agricoles ce qui est rarement le cas. En effet, l’agriculture familiale guyanaise est souvent caractérisée
par son caractère informel et cela constitue un des freins majeurs à son développement. Ainsi, la mesure
mise en place dans la nouvelle programmation du PDRG pour le soutien de l’agriculture vivrière est
inefficace. Rappelons que jusqu’à aujourd’hui 10% des agriculteurs de Guyane (de filière) perçoivent
100% des fonds attribués car ils sont les seuls à être déclarés et reconnus (Chiffres DAAF, interview DAAF
et Recensement Général Agricole 2010).
La difficulté majeure réside donc dans l’éligibilité des agriculteurs notamment dès l’inscription à la DAAF
en tant qu’exploitants agricoles. C’est la DAAF qui est autorité de gestion des fonds européens jusqu’à
aujourd’hui. Ici encore, les exigences nationales et même régionales sont parfois plus strictes que les
exigences européennes. En effet, différents critères doivent être remplis :
- L’affiliation à l’AMEXA (assurance de protection sociale pour les agriculteurs) rendue obligatoire
par la DAAF de Guyane alors que cette exigence ne figure pas sur les textes officiels nationaux
(article 15 RDR3) (interview téléphonique, DAAF). Cette mesure oblige à verser une indemnité
mais également à :
o Réaliser une estimation de la production et des revenus générés par l’activité agricole
pour déclarer un revenu minimum lié à une activité agricole principale ou secondaire
(au minimum 30% du revenu principal). Cette notion de revenu et d’estimation
d’agriculture marchande est une notion assez cadrée et calquée sur notre modèle de
suivi exigeant une comptabilité et une traçabilité des rendements etc. Dans ce cadre-là,
il est difficile de répondre aux exigences de la DAAF sachant que certains agriculteurs
destinent une partie plus ou moins importante de leur production à
l’autoconsommation (interview téléphonique, DAAF)
- Cette affiliation sous-entend également la nécessité de titre foncier reconnu par la DAAF. Il est
obligatoire de faire une déclaration de foncier avec des surfaces pondérées minimales à
respecter comme l’indiquent les textes officiels,
« Définition des petites exploitations visées à l’article 19() (a) (iii) du règlement UE 1305/2013 et distinction
avec les exploitations des jeunes agriculteurs : Les petites exploitations sont celles exploitant en première
année une superficie supérieure à 0,7 ha de surface pondérée (soit 0,5 ha de cultures vivrières), et inférieure à
2 ha de surface pondérée (soit 1,33 hectares de cultures vivrières au sens de l’AMEXA). Le PDPE doit faire
apparaître une cible minimum de 2,5 ha de surface pondérée (soit 1,66 ha de cultures vivrières). Les
exploitations agricoles des jeunes agriculteurs doivent présenter au démarrage une surface minimale de 2.5
ha pondérée et atteindre une surface minimale de 5 ha à l’issue des 5 ans du programme.» (PDRG, 2014)
Au-delà de la problématique d’itinérance de l’abattis où la surface totale exploitée change dans le temps
et de la difficulté à répondre aux exigences de surface pondérée quand il s’agit de petits abattis en
P a g e 16 | 35
polyculture, il est important de rappeler que peu de petits agriculteurs possèdent des déclarations de
foncier.
Des Zones de Droits d’Usages Collectifs (ZDUC) ont été mises en place en Guyane dans les années 90
mais la DAAF ne reconnait pas ce type d'exploitations du foncier. Pourtant ce dispositif figure dans le
cadre législatif et réglementaire national :
article R170-56 du code du domaine de l'Etat prévoyant la possibilité pour le Préfet de constater par arrêté des droits d'usage collectifs au profit des communautés d'habitants tirant traditionnellement leurs moyens de subsistances de la forêt (ONF, 2014)
article L.172-4 du code forestier prévoyant les modalités de cession ou de concession gratuite des forêts en Guyane à des personnes morales en vue de leur utilisation par les communautés d'habitants tirant traditionnellement leurs moyens de subsistances de la forêt (ONF, 2014)
Ce dispositif est reconnu nationalement mais ne permet pas pour les agriculteurs familiaux d’être
reconnu comme titre foncier pour l’exploitation d’une parcelle car il s’agit de production pour de
l’autosuffisance (DAVY, 2014).
Notons que pour être éligible aux Dotations aux Jeunes Agriculteurs (DJA), les jeunes exploitants doivent
avoir un diplôme niveau 4 soit l’équivalent du baccalauréat (interview téléphonique, DAAF).
Dans ce contexte-là, les mesures mises en place dans le PDRG en faveur de l’agriculture familiale ne
profitent qu’aux agriculteurs qui sont dans une logique de professionnalisation vers une agriculture de
filière. Ils sont environ 1000 agriculteurs souvent situés dans les zones périurbaines du Nord-Ouest
laissant à l’écart des mesures les 4000 agriculteurs qui souhaitent continuer leurs activités d’agriculture
familiale (interview Département Innovation, Région Guyane).
3. Un recensement agricole qui illustre la contradiction avec le nombre d’agriculteurs
soutenus par la DAAF et le recensement agricole
La DAAF a réalisé des Recensements Généraux Agricoles (RGA) tous les dix ans qui ont permis d’estimer
le nombre de personnes concernées par la production agricole en Guyane. A ce jour, la DAAF ne recense
que 560 déclarations de surfaces agricoles alors que le recensement agricole de 2010 approche 6000
agriculteurs ce qui nous laisse constater un problème de titres fonciers important (Chiffres interview
téléphonique DAAF et Recensement Général Agricole 2010). C'est pourquoi, les travaux produits et les
actions mises en place à la suite de ce recensement ne concernent que rarement l’agriculture familiale
qui n’est pas reconnue souvent à cause de son statut informel.
Dans certaines communes les différences entre le recensement général et les agriculteurs reconnus par
la DAAF est criante.
P a g e 17 | 35
Figure 4
C – Difficultés liées au contexte local
1. Contexte agricole
Toute la filière agricole guyanaise connaît des problèmes importants de développement : manque
d'encadrement, problèmes phytosanitaires, coût élevé de l'installation dans une zone de forêt et a subi
aussi les conséquences des difficultés de la Chambre d'Agriculture qui est en phase de redressement.
Aujourd’hui, seul quatre technicien sont disponibles pour tout l’Ouest ce guyanais (Assemat, 2014). Dans
ce contexte, la filière ne dispose ni de l’encadrement ni de l’organisation nécessaires pour pouvoir
développer efficacement l’agriculture familiale.
a. Le problème de l'encadrement
Le manque de connaissances des réalités de l’agriculture familiale, sur le plan des techniques agricoles
et des besoins ne permet pas la diffusion d’itinéraires techniques ou de solutions adaptées (interview
Technicien agricole, 2014). D’après les données du PEAFOG et des enquêtes menées sur le terrain, les
agriculteurs réclament non seulement des aides en termes de conseils mais aussi en matériel. L’exemple
des quads revient souvent qui permettraient de se déplacer sur les abattis situés toujours plus loin
(interviews Département Innovation, Région Guyane, agriculteurs et Technicien agricole). Il est
important de répondre à ces demandes formulées en amont par les villageois. En effet, certains projets
mis en place par différents organismes n’ont pas pu être pérennisés par manque de suivi de la part des
organismes (arrêt brutal du PEAFOG en 2009) mais aussi à cause des difficultés des habitants des villages
à comprendre la logique des projets. Les notions très éloignées, selon le groupe d’acteurs concerné, de
P a g e 18 | 35
besoins, de gestion des cultures, de temps notamment entre les communautés rurales notamment sur
les fleuves d’un côté et les organismes de développement et de recherche de l’autre.
En revanche, pour les jeunes générations il est important à terme de mécaniser l’agriculture afin de
permettre aux jeunes qui le souhaitent, de se lancer dans une agriculture marchande et produire de
façon durable et rentable des produits commercialisables sur les autres communes du département.
b. Une commercialisation difficile et couteuse
Au-delà du problème de la production et de l’encadrement technique ou matériel, la commercialisation
de la production et son transport sont un frein pour le développement. Les coûts de commercialisation
sont élevés à cause de l’absence de transport terrestre, de la distance entre les communes et leur
atomisation puis des intermédiaires. Les communes isolées ne sont pas toutes desservies par des axes
routiers et c'est le réseau fluvial qui est alors utilisé quand celles-ci sont au bord d’un fleuve. Notons
d’ailleurs que le réseau routier n’est pas toujours de bonne qualité et que le réseau fluvial est parfois
dangereux avec les nombreux rapides présents dans les fleuves. Le coût du transport est élevé à cause
de l’atomisation spatiale des villages et rend difficile un approvisionnement régulier et homogène. Les
coûts de commercialisation sont donc élevés quand les agriculteurs intègrent le coût du transport. Nous
pouvons prendre l’exemple du couac commercialisé 1,50€ le kilo dans la commune de Maïman et 5€ le
kilo à Cayenne après avoir parcouru 300 km de route, et moyennant deux intermédiaires, le transporteur
et le revendeur sur le marché (enquêtes terrain).
c. Des filières spontanées organisées au détriment de l’agriculteur
La commercialisation des denrées alimentaires souffre d'un manque de structuration des filières. En
effet, il n’est pas rare d’entendre que les vendeurs sur les marchés s’approvisionnent chez les petits
agriculteurs de bord de route. Examinons le cas du couac guyanais. Cette farine de manioc est
consommée dans tout le département alors qu’elle n’est produite que par la petite agriculture familiale.
Il y a donc un système de commercialisation parallèle qui parait organisé où les communes
approvisionnent les villes du littoral comme Cayenne ou Saint Laurent du Maroni. Cependant, d'après
les interviews réalisées, il n’est pas rare que des agriculteurs envoient les denrées par des intermédiaires
pour les vendre sur les marchés des grandes villes et qu’ils ne reçoivent jamais leur paiement en retour
(interview chauffeur entre Saint-Laurent-du-Maroni et Cayenne). L’isolement, le manque pouvoir
aboutissent parfois à des injustices dans une filière organisée de façon spontanée au détriment du
producteur. Notons ici que tant que l’agriculture familiale ne sera pas reconnue aux yeux de l’Etat,
aucune action ne pourra être mise en place pour pallier ce manque de structuration sur des filières
d’intérêt comme celle du couac.
2. Un contexte humain, culturel et économique
P a g e 19 | 35
Une importante part des agriculteurs familiaux n’ont pas de situation régulière
Une partie importante des agriculteurs ne possèdent pas de titre de séjour notamment les populations
bushinengées à l'Ouest du territoire (immigration souvent issue des réfugiés de la guerre civile du
Surinam). De plus, l’immigration en Guyane est très importante et l’installation de fait, d’abattis est
inévitable pour subvenir aux besoins des familles (PDRG,2014 ; Une saison en Guyane, 2013).
a. Les revendications du foncier et de son droit d’exploitation par les communautés
autochtones
Dans le contexte guyanais, se pose aussi le problème de certaines communautés notamment les peuples
autochtones et traditionnels (amérindiens et bushinengés) qui réclament leur droit à exploiter la forêt
librement voire même qui revendiquent la propriété foncière de la forêt.
Culturellement, la notion de propriété privée sur la nature n’existe pas chez eux et les démarches
obligatoires n'ont pas toujours de sens dans leur logique (interview Département Innovation, La Région ;
chercheur CNRS ; familles bushinengées ; Mam Lam Fouck, 2007). Rappelons que du point de vue
législatif national, l’Etat possède 95% du territoire dont 99% du couvert forestier (PDRG, 2014). Dans ce
cadre-là, des zones de droits d’usage collectifs avaient été prévues en Guyane pour résoudre ces
problèmes. Cependant, peu de zones ont été mises en place et pas nécessairement dans les zones les
plus concernées par l’agriculture familiale notamment à l’Ouest le long du fleuve (DAVY, 2014). De plus,
comme ces zones ne sont pas reconnues par la DAAF, il n'est pas possible d'être reconnu comme avec
agriculteur avec ce titre de propriété.
b. Des difficultés à communiquer auprès des habitants
A côté de ces critères plutôt historiques, nous devons prendre en compte le fait que l’information n’est
pas toujours bien diffusée à travers tout le département jusque dans les zones isolées. Le manque d'un
personnel de terrain, régulier et stable qui diffuse l’information dans les communes et le faible nombre
d’agriculteurs qui cherchent à mieux connaître leurs droits freine le développement de cette agriculture
(interviews techniciens de terrain ; Assemat, 2014).
De plus, la barrière de la langue pose souvent problème pour toutes les démarches administratives. En
effet, sachant que chaque communauté a sa propre langue et que les adultes ne maîtrisent pas
forcément le français, il est difficile de communiquer efficacement auprès des agriculteurs. De plus,
certaines informations demandées ne correspondent pas aux notions d'organisation de ces populations
et il leur est impossible de donner des réponses précises et exploitables pour les organismes (notions
de surface cultivée, rendement, nombre d’années, etc.) (interview DAAF).
P a g e 20 | 35
Quand le problème de langue et d’information ne se pose pas, c’est alors la difficulté et la lenteur des
démarches à effectuer pour régulariser sa situation qui sont souvent dissuasives pour les agriculteurs
(PDRG, 2014).
c. La concurrence des aides sociales
Enfin, il est important d’ajouter une réticence de la part des agriculteurs à régulariser leur situation. Le
fait de se déclarer à la DAAF risque d’empêcher certaines familles de toucher certaines prestations
sociales comme le Revenu Solidarité Active (interview DAAF). Le Conseil Général de Guyane qui attribue
les aides sociales peut supprimer ces aides aux personnes qui s’inscrivent en tant qu’agriculteurs. En
effet, lorsqu’il y a inscription à la DAAF, le Conseil Général considère qu’il y a perception d’un revenu et
n’autorise pas le cumul d’aides agricoles et d’aides sociales (interview téléphonique Conseil Général).
Des travaux de réflexion sur des autorisations de cumul avaient été lancés avec la Chambre d’agriculture
mais celles-ci n’ont jamais abouti laissant le Conseil Général décider seul. Sachant que ce sont
généralement des exploitations avec de faibles revenus souvent aléatoires, il est parfois plus intéressant
pour l’agriculteur de conserver ses prestations sociales mensuelles et régulières que de toucher une
prime annuelle agricole moins importante. D’autant plus que l’inscription au registre agricole laisse
supposer l'obligation de payer des taxes, de tenir une comptabilité et un enregistrement régulier des
productions.
d. La difficulté de faire reconnaitre l’importance de l’agriculture familiale des
Départements d’Outre-Mer dans l’Hexagone
Enfin, il est difficile pour les organisations métropolitaines d’imaginer le contexte agricole guyanais
avec une part si importante de l’agriculture familiale et autant de caractéristiques spécifiques (cultures,
communautés, etc.) si on ne s’intéresse pas spécialement à cette problématique. Par exemple,
l’Association des Régions de France menait une enquête sur l'agriculture familiale en France pour
l'année 2014 dans le but d'organiser des rencontres entre régions au mois de juillet. Dans ce cadre-là,
des questionnaires ont été envoyés à toutes les régions de France afin de mieux connaître les contextes
de l'agriculture propres à chacune d'entre-elles. Cependant, les questions ne correspondaient pas à la
réalité de la Guyane et il était impossible d'y répondre précisément (chiffres, organisation, etc.). Il a fallu
rédiger une note afin d'expliquer l'agriculture familiale guyanaise et ses réalités dans l'espoir que la
Région soit convoquée au colloque organisé et puisse faire reconnaître l'importance de cette agriculture
dans l'Hexagone.
Dans un contexte régional, national et européen strict, il est difficile de formaliser l’agriculture familiale
pour des raisons à la fois culturelles, historiques mais aussi économiques qui rendent la tâche complexe
pour la Région qui n’a pu la financer officiellement jusqu’à aujourd’hui.
P a g e 21 | 35
Alors qu’aucune politique locale n’a encore été mise en place pour soutenir l’agriculture familiale, divers
point de blocage à son développement existent. Freins liés au manque de personnel attaché à ces
projets, aux difficultés de transport à travers le territoire, à la commercialisation et à tous les aspects
culturels dont il faut tenir compte. S'ajoute le problème législatif lors de l’inscription de l’agriculteur au
registre qui est l'obstacle principal. Les exigences sont parfois compliquées et mal adaptées au contexte
de la Guyane. Dans ce cadre-là, la Région a un rôle à jouer et doit trouver les pistes à suivre pour mieux
intégrer cette agriculture dans sa politique.
P a g e 22 | 35
III – Pistes d’action à mettre en place
A – Leviers d’action
1. Le rôle de la Région
Nous avons vu que la Région souhaite intégrer l'agriculture familiale dans les politiques locales de
développement. Sa mission initiale est de gérer toutes les affaires concernant la région. Dans le contexte
particulier de la Guyane qui est à la fois région et département, tous les domaines d'action sont répartis
entre la Région et le Département. C’est la Région qui s’occupe des problématiques liées à l’agriculture
et à l'innovation.
Sa stratégie est de développer le territoire pour rattraper son « retard » par rapport à l’Hexagone et faire
face aux exigences qui lui sont imposées. Son rôle dans l’agriculture est de développer l’emploi local et
le développement économique endogène. Dans le fascicule « Une stratégie pour la Guyane », la Région
souligne bien sa volonté de « développer une économie adaptée aux réalités de la Guyane de
l’intérieur » ce qui intègre la volonté de cibler le développement de l’agriculture familiale pour les
projets futurs.
a. La Région devient autorité de gestion des fonds européens
Dès 2015 la Région deviendra autorité de gestion du FEADER ce qui signifie qu’elle aura un poids plus
important dans les décisions concernant l’opportunité des projets. Ce sera donc un nouveau moyen
pour soutenir des projets visant à développer l’agriculture familiale de façon générale sans écarter pour
autant l’agriculture de filière. Cette évolution devrait permettre également d'éviter les blocages
politiques qui existaient entre la DAAF et la Région jusqu’à présent.
b. La Collectivité Unique à la tête de la politique locale
La fusion entre la Région et le Département va permettre la formation d’une collectivité unique. Dans
cette mesure, il n’y a plus de répartition des responsabilités entre Région et Département mais autorité
unique et le poids politique de l’ensemble devient plus important.
c. Les principales communautés concernées par l’agriculture familiale soutiennent à
la Région
Depuis la nouvelle présidence de la Région, les peuples autochtones et traditionnels de Guyane
commencent à être reconnus et intégrés dans la politique locale. La plupart des agriculteurs familiaux
sont concentrés sur les bords des fleuves et appartiennent à des communautés bushinengés ou
amérindiennes et la Région bénéficie de l’appui des chefs coutumiers de ces communautés. Or, il est
certain que ces responsables peuvent être des freins comme des facilitateurs lors des interventions dans
les démarches de développement des communes concernées.
P a g e 23 | 35
d. Mises en œuvre des projets de développement
Grâce à cette évolution du pouvoir politique, la Région pourra soutenir les projets qui viseront au
développement de l’agriculture familiale en commençant par les projets portés par les associations ou
les agriculteurs unis. Actuellement nous comptons sur un projet d’audit de l’agriculture familiale porté
par une jeune association Agriculture et Développement en Amazonie Guyanaise (ADAG). Ce stage a
également fait l’objet de la participation à la rédaction d’une demande de subvention FEDER. A ce jour,
c’est la seule association qui affiche clairement le projet de travailler sur l’agriculture familiale ce qui
pourrait paraître insuffisant sachant qu’elle n’a été créée qu’en 2013. Les associations peuvent
bénéficier des fonds européens pour financer indirectement des projets pour l'agriculture familiale.
C'est un moyen de contourner la non-éligibilité de ces agriculteurs et de disposer de fonds pour leur
développement.
2. Actions en cours
Actuellement il existe des projets visant à soutenir l’agriculture familiale indirectement initiés par la
Région (interview Département Innovation, La Région):
a. Développement intégré des villages
Un projet de développement intégré des villages permet de soutenir les familles dans les petites
communes. Sachant que la majorité de ces familles sont concernées par l’agriculture familiale, le projet
a pour mission de mettre à disposition le matériel réclamé par les familles (machines à laver mais
également tronçonneuses, etc.). Lors de la mise en place de ces projets, la simple diffusion
d’informations auprès des familles et l’apport de conseil permettront déjà un premier pas vers l’insertion
de l’agriculture familiale dans une nouvelle logique. En effet, il est important d'expliquer les possibilités
qui peuvent leur être offertes notamment en termes d’appui technique et financier pour qu’ils puissent
y réfléchir et formuler des demandes à la Région.
Dans le cadre des prochains Programmes Opérationnels (PO) 2014-2020, la Communauté Européenne
a mis en place des Investissements Territoriaux Intégrés (ITI). Un ITI est un outil de développement
territorial commun aux cinq fonds proposés par l’Europe pour les projets à stratégie intégrée et
multisectorielle. En d’autres termes, c’est un instrument qui permet de mettre en œuvre des actions de
développement qui recoupent plusieurs axes prioritaires des PO car les budgets peuvent être couplés,
et le financement en est simplifié (Commission Européenne, 2011). Les ITI peuvent être attribués à dix
régions de France dont la Guyane fait partie. Pour bénéficier d’un ITI, il faut un territoire défini et une
stratégie territoriale intégrée de développement avec une série d’actions à mettre en œuvre et des
dispositions en matière de gouvernance pour gérer l’ITI (AFCCRE, 2014 ; Commission Européenne,
2011). Ce fonds commun aurait pu être la réponse idéale pour la Région car, au niveau stratégique, le
fonds supportait un même projet global de développement intégré des villages et de l’agriculture
P a g e 24 | 35
familiale en zones isolées. Le financement n’a pas été accordé car il manquait l'accord de l’Etat. La Région
a donc dû utiliser, de façon éclatée en une dizaine de mesures, les différents fonds du PO FEADER, du
PO FEDER et du Fonds Social Européen (interview Département Innovation, La Région).
b. Mise en place d’une ferme pilote à Camopi
Il est dans les priorités de la Région de développer des productions de protéines animales et de denrées
souvent importées par les familles en zones isolées telles que les fruits voire les légumes. Camopi est
une petite commune amérindienne de l’est de la Guyane où il est question d’installer une ferme pilote
de démonstration pour les petits agriculteurs. Lors de ce stage, une mission sur le terrain a été réalisée
pour prévoir quelles informations devaient être récoltées sur le terrain (acteurs-décideurs, projets déjà
en cours dans la commune, types de projets réalisables), quels acteurs seront intéressés par la mise en
place de fermes de pilotes. Différents agriculteurs sont d’ores et déjà intéressés par ce projet pour la
mise en place de cultures diversifiées, notamment des amérindiens. Ces fermes permettraient de
développer des productions mais aussi de diffuser des techniques agricoles.
c. Développement de productions à forte valeurs ajoutées
La Région cherche également à valoriser des projets de production de denrées à forte valeur ajoutée
telles que le café, le cacao, le miel, la vanille, etc. en soutenant dès à présent la création de variétés
propre à la Guyane avec le CIRAD. Bien que l’agriculture familiale soit aujourd’hui orientée en grande
partie vers l'autoconsommation, il faudrait donner la possibilité d'accéder à des échanges marchands
rentables pour développer l'emploi.
Afin de développer et soutenir l’agriculture familiale, La Région a souhaité formuler des propositions
d’actions à mettre en place, ce à quoi le présent mémoire de stage contribue.
3. Actions à mettre en place
a. Une meilleure connaissance de l'agriculture familiale et de ses besoins
Avant tout, il est impératif de réunir toute la bibliographie existante et de réaliser un audit approfondi
de l’agriculture. Sachant que les connaissances sont peu nombreuses, il est important d’identifier à la
fois les besoins des agriculteurs en les interrogeant directement et en rendant compte des différences
géographiques qui peuvent exister entre communes mais aussi entre les bourgs-les écarts des villages
etc. Si jusqu’à aujourd’hui de nombreux projets ont échoué, c'est que les besoins doivent remonter de
la part des agriculteurs eux-mêmes vers les décideurs et non l'inverse. Il est également nécessaire de
bien se faire comprendre et d'être sûr d'avoir une communication adaptée aux populations ciblées.
Selon le sociologue Friedberg, la notion de système d’action concret suppose un minimum
d’interconnaissance, de circulation d’informations et de connaissances communes permettant des
P a g e 25 | 35
anticipations correctes des comportements des autres ainsi qu’un minimum d’inter-contrôle (Friedberg,
1992).
De plus, il sera nécessaire sur le long terme de recenser réellement les agriculteurs concernés pour
pouvoir prévoir un accompagnement adapté et à la mesure de la demande locale. Cette mission serait
éventuellement sous-traitée à l’association ADAG qui vient de déposer sa demande d’aides pour réaliser
un audit de l’agriculture familiale.
b. Mises en place d’ateliers pilotes chez les agriculteurs
Les fermes de démonstration sont le meilleur outil possible pour impliquer les agriculteurs. Les
habitudes des agriculteurs ne peuvent être modifiées brutalement et il faut tenir compte d'une méfiance
certaine lors de changements radicaux de pratiques : passage de l’abattis itinérant à la sédentarisation
ou encore élevage de poulet hors-sol, etc. Les fermes pédagogiques ou pilotes permettraient de faire
des démonstrations et de former les agriculteurs directement par la pratique. Ils pourraient aussi voir
concrètement ce qui leur est proposé, constater l'efficacité des projets proposés et enfin, d'apprendre
avec des techniciens les méthodes à employer. Il est déjà question aujourd’hui de mettre en place des
fermes pilotes avec des ateliers de production directement chez les agriculteurs. De plus, la Maison
Familiale et Rurale de Mana a proposé d’accompagner la pratique d’abattis sédentaires en plus des
abattis itinérants pour ne pas « bousculer » le changement et laisser les agriculteurs expérimenter eux-
mêmes ce système de culture.
Au travers de ces ateliers pilotes, ce sont des expérimentations qui sont menées dont les deux axes
principaux axes sont la sédentarisation et la mécanisation des abattis.
c. Encadrement et formations agricoles
– les agriculteurs
Après interviews auprès d’agriculteurs, de techniciens et d’agents de développement local, de
nombreux agriculteurs souhaitent être encadrés et que l’on puisse répondre à leurs questions. Il est
important de mettre en place dans la démarche de développement un accompagnement et un suivi
régulier. Pour motiver et intégrer l’agriculteur à la démarche active de développement, il semble
important qu’il se sente soutenu mais aussi qu’il voit une finalité concrète dans son travail. Il est
nécessaire de former les agriculteurs pour qu’ils puissent suivre les évolutions de l’agriculture
notamment s’il s’agit de la sédentarisation des parcelles ou de la mise en place de productions à forte
valeur ajoutée. Il est important de diffuser des savoirs pour que l’agriculteur puisse non seulement
utiliser son propre savoir mais aussi les nouvelles connaissances, être autonome dans ses décisions et
se sentir impliqué dans l’évolution.
- les techniciens
P a g e 26 | 35
Recruter des techniciens locaux ou formés aux us et coutumes seront plus à même pour faire l’interface
entre les objectifs de la Région et les besoins des agriculteurs ou même de faire remonter des problèmes
qui échappent aux personnes extérieures. C’est pourquoi, la formation des techniciens notamment pour
l’apprentissage des langues des communautés avec lesquelles ils échangeront est importante pour
pouvoir réaliser un accompagnement en interaction avec les agriculteurs et aboutir à des solutions
consenties. Cependant, il faut savoir que le turn-over des techniciens est important notamment dans
les communes isolées et constitue un réel handicap. Les difficultés d’adaptation, les trajets, etc. sont des
facteurs qui découragent vite les techniciens. Nous pouvons supposer que si l’appui est donné à des
agricultures plus variées et plus nombreuses le travail pourra être plus intéressant et motivant pour les
techniciens.
L’encadrement devra être organisé dans le cadre des villages car il est impossible de réaliser des
déplacements pour voir individuellement tous les agriculteurs. Il faudra organiser des sessions
d’encadrements communes ou proposer des suivis à l’aide d’agriculteurs relais. Dans le département du
Nord-Pas-de-Calais, le système des agriculteurs-relais a été mis en place pour faire le lien entre les
agriculteurs et la commission agricole du Parc Naturel Régional Scarpe-Escaut. Ces agriculteurs ont pour
rôle de faire remonter des propositions d’actions, faire entendre les préoccupations des agriculteurs
mais aussi favoriser la mise en place d’actions concrètes. Le parc est divisé en secteurs représentés par
1 à 2 agriculteurs relais. Ils participent aux commissions des parcs et des commissions agricoles. Cette
situation pourrait se rapprocher de celle de la Guyane avec les parcs forestiers abritant de nombreux
agriculteurs familiaux. Ceci permettrait aux agriculteurs de s’organiser et de faire entendre leur voix
(Parc Naturel Régional Scarpe-Escaut, 2011).
d. Utilisation des habitudes de l'action collective dans les familles et les villages
L’agriculture de filière guyanaise a rencontré de nombreuses difficultés à se structurer en raison de
l’individualisme des agriculteurs. A ce jour, la Guyane ne compte que quatre coopératives actives et deux
CUMA. D’après les études sur les concepts d’intelligence collective et son influence sur la coopération
collective, plusieurs conditions sont nécessaires au fonctionnement durable d’organisations collectives
(Zara, 2006). Au niveau individuel les membres d’un même groupe doivent avoir un sentiment de
communauté, partager une culture commune pour que l’action puisse aller dans un sens défini et voulu.
De plus, avoir des références communes, une estime entre les membres et si possible un vécu commun
sont des facteurs qui peuvent permettre une meilleure synergie entre les membres et donc un meilleur
fonctionnement de l’intelligence collective. Dans cette optique, les communautés autochtones et
traditionnelles sont déjà organisées de façon collective (Mam Lam Fouck, 2006). De nombreuses actions
de la vie quotidienne dont l’agriculture, font ainsi l’objet de formes de mobilisation collective inititée
dans le cadre de la famille puis des villages (travail à l’abattis, cuisson du couac, tâches quotidiennes,
P a g e 27 | 35
etc.) (Interview Département Innovation, La Région et agriculteurs). Ces modalités d’organisation
collective de certaines activités semblent constituer des bases solides sur lesquelles pourraient
s’appuyer des actions visant à soutenir l’émergence d’organisation collective des producteurs. Nous
faisons l’hypothèse que la familiarité culturelle des populations aux formes d’action collective, facilitera
d’autant la structuration des filières.
e. Travaux de recherche et d’expérimentation
Il est important d'ajouter aux savoirs traditionnels des travaux de recherche et d’expérimentation. En
effet, au cours de certaines missions passées, il y a une mauvaise appréhension de la réalité locale et les
essais d'introduction de techniques nouvelles n'ont pu réussir. Les itinéraires techniques appliqués en
Guyane étaient calqués sur ceux de l'Hexagone ou des Antilles alors que le contexte ne le permettait
pas. A ce jour, peu de travaux ont été menés sur les plantes guyanaises endémiques qui ont pourtant un
fort potentiel à exploiter (richesses des variétés d'ananas, vanille, etc.). A titre d’exemple, la Guyane
possède de nombreuses variétés d’ananas, de vanille, de cacaos endémiques, dont le potentiel n’a pas
été exploité.
Enfin, le contexte de sol forestier pauvre est très différent des sols des Antilles ou de l’Hexagone. Il est
important que les agriculteurs puissent utiliser des techniques et des plantes adaptées au climat et aux
sols locaux.
Concernant la sédentarisation de l’agriculture itinérante, ce thème a été abordé dans différents travaux
menés en Afrique de l’Ouest et centrale, plutôt autour de la problématique du pastoralisme, qui est très
différente de celle à laquele la Guyane se trouve aujourd’hui confrontée (DONGMO, 2007). Le
pastoralisme permet d’utiliser les fumiers pour recycler la manière organique dans les sols, ce qui
semble très compliqué à mettre en œuvre en Guyane de par l’éloignement des élevages avec les zones
forestières. Des travaux ont été menés par le CIRAD au nord du Brésil entre 2006 et 2009 lors du projet
Floagri sur la gestion participative des forêts et la récupération des sols forestiers dégradés (CIRAD,
2010). Les agriculteurs s’y engagaient à conserver une part de leur exploitation couverte par de la forêt
pour permettre le restockage de la matière organique grâce aux débris végétaux issus de cette zone
forestière. Les travaux ont été satisfaisants au Brésil aux vues des retours des agriculteurs (CIRAD, 2010).
Pourtant, il semble important de préciser un point important : les agriculteurs n’étaient pas issus de
communautés traditionnelles. De nombreux agriculteurs installés en Amazonie ont été encouragés par
l’Etat à se déplacer dans ces zones là, sur 6,5 millions d’agriculteurs en Amazonie brésilienne, seulement
210 000 sont amérindiens et donc autochtones (Amazônia Brasil, 2014). Nous pourrions donc nous
interroger si les populations autochtones guyanaise accepteront et l’assimileront de façon similaire ces
changement radicaux de gestions dans des cultures. C’est pourquoi, sachant qu’aucun travail de
recherche n'a jamais été mené sur la sédentarisation des parcelles en Guyane, il semble important de
P a g e 28 | 35
mettre en place des programmes d'expérimentation pour élaborer des itinéraires techniques adaptés à
cette forme d'exploitation. Enfin, un agriculteur est déjà recensé et travaille sur la gestion de la matière
organique sur son exploitation (interview La Région). Ici encore, l’implication des agriculteurs dans les
travaux de recherche et d’expérimentation est importante et pourrait permettre d’avancer plus vite sur
certaines questions.
f. Structuration des filières existantes, développement de filières de niche et offre de
financement
D'après des estimations de la Région (interview Département Innovation, La Région), c’est environ un
millier d’agriculteur familiaux qui souhaite se diriger vers une agriculture de filière. Il est important de
préparer leur entrée dans le marché et d’anticiper les débouchés possibles. Il existe déjà des filières
agricoles mais elles manquent de soutien et ne sont pas structurées. Les productions sont très aléatoires
et les prix suivent ces variations. Il est donc non seulement nécessaire de structurer les filières actuelles
existantes mais également d’en développer de nouvelles. La structuration de certaines filières comme
celle du couac, de la kassav ou d’autres produits artisanaux et à forte valeur ajoutée constitue une
opportunité pour l’Etat mais aussi pour les agriculteurs, qui mériterait d’être valorisée pour pouvoir
favoriser l’émergence d’une nouvelle dynamique économique.
Il est intéressant de développer de nouvelles filières de niche. Les premières études du CIRAD soutenu
par la Région ont confirmé la possibilité de trouver des débouchés dans des filières de luxe pour le cacao
ou le café de Guyane (conférences La Région-CIRAD sur le cacao et conférence La Région-CIRAD sur le
café, 2014). Il s’agirait donc de produire sur des gammes de luxe notamment en misant sur les qualités
organoleptiques des produits. Les autres produits qui mériteraient confirmation de leur potentiel sont
la vanille et le miel. Enfin, sur le long terme il serait intéressant de valoriser des produits issus de la forêt
(de l’activité d’extractivisme) intéressants pour la santé comme le fait déjà le Brésil (camu-camu comme
dynamisant-vitamines C, huile de carapa pour tous les traitements cutanés, etc.).
Si les filières sont développées pour les agriculteurs, ceux-ci doivent pouvoir disposer de moyen suffisant
pour investir et se développer. Pourtant, l’agriculture familiale se heurte à trois difficultés pour son
financement. Tout d’abord, elle n’est pas éligible aux subventions proposées par les politiques de
soutien. De plus, les banques octroient difficilement des prêts dans le domaine agricole et seront
d'autant plus réticentes à financer des projets s'ils ne sont pas dans un cadre professionnel reconnu
(interview DAAF, Région Guyane). Ainsi, il ne reste aux agriculteurs familiaux que le recours à
l’autofinancement pour développer leurs activités. L’importance de cette capacité d’autofinancement
est faible et limite les possibilités des agriculteurs.
g. Reconnaissance et prise en compte de l’agriculture familiale
P a g e 29 | 35
Actuellement, l'absence de statut d'agriculteurs familiaux constitue un blocage important pour
l'évolution de l'agriculture familiale. Cependant, il est clairement impossible de déclarer tous ces
agriculteurs. Le défi ne concerne pas que la Région mais aussi les autres instances publiques voire l’Etat
français lui-même car le blocage est essentiellement législatif. La reconnaissance nécessaire du statut
d’agriculteur familial ne pourra qu’être progressive et accompagnée d’une adaptation des dispositions
réglementaires nationales et européennes pour rendre éligible l’agriculture familiale aux différentes
aides publiques disponibles. Il s’agira de mettre en place d’une part une adaptation pour les revenus
minimums issus de l’activité agricole et d’autre part un accord pour la gestion du foncier. Le problème
foncier, via l’utilisation pour l'agriculture de la forêt propriété de l'Etat, devra être géré de façon adaptée
aux populations concernées. La prise en compte des caractéristiques de la Guyane est nécessaire. En
effet, les aspects culturels et historiques propres à la Guyane ne permettent pas l'application stricte de
la législation nationale et européenne malgré la présence d'instances locales (DAAF, ONF, Région). Des
dérogations ou des adaptations telles que la reconnaissance des ZDU par la DAAF pourraient permettent
de « régulariser » la situation des agriculteurs tout en ne bousculant pas des habitudes culturelles
difficiles à faire évoluer mais qui constituent une des richesses de la Guyane à préserver.
B – Effets économiques attendus d’une meilleure intégration de l’agriculture
familiale
1. Augmentation globale de la production agricole
a. Une sédentarisation progressive des parcelles et des itinéraires techniques
adaptés
Le fait de s’intéresser à l’agriculture familiale de façon structurée et en coopération avec les agriculteurs
permettra la mise en place d’itinéraires techniques adaptés et une meilleure connaissance de
l'agriculture en Amazonie. Après avoir rencontré des agriculteurs de différentes communautés, de
différentes générations et dans des communes différentes, nous remarquons que les pratiques et les
approches changent et cela même au sein d’une même famille.
Les itinéraires techniques doivent être adaptés et surtout en accord avec la culture et les pratiques des
agriculteurs (type de plantes cultivées –exemple des amérindiens qui ne mangent quasiment pas de
légumes verts (Interview CNRS)-, fréquence des travaux sur la parcelle –s’adapter aux périodes de
fréquentations des abattis notamment lorsque la famille est au complet pendant les vacances scolaires ?
(interview agriculteurs bushinengés)-, lieu d’implantation des parcelles –exemple des abattis qui ne sont
pas implantés sur des sols où des ancêtres ont vécu (interview Département Innovation La Région)-,
etc.). Il sera très intéressant d’échanger les savoirs entre agriculteurs, souvent issus de savoirs transmis
de générations en générations, tout en apportant les connaissances agronomiques des techniciens
P a g e 30 | 35
pensées en fonction du nouveau contexte. Même sans espérer une augmentation très importante des
rendements, l’objectif du conseil technique est de conseiller utilement les agriculteurs pour la
sédentarisation des parcelles et la gestion du sol qui en découle principalement.
b. Une multitude de petites productions pour répondre à une demande globale
croissante
Le fait de soutenir quelques 5000 agriculteurs au niveau financier et technique permettra d’augmenter
le potentiel agricole guyanais. En effet, en soutenant l’investissement, la mécanisation ou le conseil
technique régulier, on peut espérer augmenter la production agricole et ainsi faire diminuer la
dépendance alimentaire des familles dans les zones isolées. De plus, parmi ces agriculteurs, certains se
dirigeront vers une agriculture marchande et viendront soutenir l’agriculture non-familiale pour
répondre à la demande croissante de denrées alimentaires.
c. Développement et structuration de filières à fort potentiel
Le potentiel économique de l’agriculture familiale est non négligeable. En effet, d’après une étude
actuelle menée par la DAAF, on évalue la récolte de manioc à 24 000 tonnes ce qui représente environ
8 000 tonnes de couac. Le kilo de couac est vendu entre 4 et 5 € sur les marchés mais bien moins cher
en vente directe en commune. En retenant le prix de 4€ du kilo le potentiel économique total s’élève à
32 millions d'euros. Une fois encore, l’agriculture familiale représente un grenier alimentaire très
important pour la Guyane sans compter les plantes médicinales et les produits dérivés liés à l’agriculture
qui pourraient être valorisés également. Bien que nous ne sachions pas quelle est la demande
potentielle en couac sur tout le département, rappelons que c’est une denrée de base qui est
aujourd’hui devenue un produit de luxe dans des communes comme Cayenne vu son coût élevé au kilo
(interview La Région). Nous supposons que si le couac était une filière organisée qui pouvait contrôler
ses coûts de transport, les cayennais, par exemple, pourraient privilégier ce féculent au riz. Enfin, après
avoir enquêté auprès de différentes marchandes sur le marché d’Albina au Surinam, le couac vendu sur
ce marché provient de Guyane française ce qui laisse supposer une demande en couac au-delà des
frontières françaises.
2. Création d’un dynamisme économique local en zones isolées débouchant sur de
l’emploi
L’agriculture familiale représente un potentiel d’emploi dans les zones isolées. Le fait qu’il y ait un
dynamisme économique avec création d’emplois peut permettre de diminuer l’exode rural. Suite aux
études souvent réalisées sur le littoral, les jeunes générations ne rentrent que rarement pour s’installer
dans les communes isolées car il y a moins de perspectives d’avenir et l’agriculture reste trop peu
P a g e 31 | 35
attractive. Si cette activité venait à garantir des revenus en étant soutenue par la Région, il sera possible
pour les jeunes de reprendre confiance dans l’avenir et se lancer dans ces métiers.
Le fait d’accompagner des jeunes agriculteurs dès le début de leur installation permettra de régulariser
leur situation voire même de les intégrer dans les filières agricoles marchandes.
Si l'encadrement des agriculteurs et des fermes pilotes viennent à être mis à place, ce sont également
d'autres métiers qui seront sollicités lors des missions. Au-delà des postes de traducteurs et guides pour
les techniciens non-locaux, nous pourrions espérer sur le long terme la formation de techniciens locaux.
Aujourd’hui déjà, différents étudiants de communes rurales telles que Camopi étudiant en lycée agricole
ont été sollicités pour retourner chez eux après leur diplôme. Dans une telle perspective, ce sont des
techniciens locaux avec les savoirs agronomiques et techniques qui peuvent travailler avec les
agriculteurs dans la langue locale et anticiper les blocages culturels auxquels leurs savoirs scolaires
peuvent être confrontés.
Des changements économiques importants sont attendus suite au développement de l'agriculture
familiale. Ces évolutions nous laissent supposer qu’il y aura également des effets sociaux qu'il est
préférable d’anticiper dès à présent.
C – Effets sociaux à envisager
1. Une production locale pour une qualité de vie meilleure
De plus, arriver à développer l’agriculture familiale à l’échelle locale des villages pourra permettre une
amélioration du niveau de vie et de qualité de vie. Nous avons souligné les coûts inacceptables de
certaines denrées telles que la viande de poulet dans la commune de Trois Sauts. Notons que dans cet
exemple, les amérindiens finissent parfois par troquer leur pirogue ou leurs biens contre des denrées
alimentaires (interview Communauté de Communes l’est, Camopi). La précarité actuelle pourrait être
évitée si les productions locales étaient valorisées et soutenue pour alimenter les villages à des prix
raisonnables sachant qu’il n’y aurait plus de coût de transport, moins d’intermédiaires et plus de risques
sanitaires liés à la chaine du froid.
2. L'exode rural
Toutes les conséquences économiques attendues contribuent à fixer les populations à leur
environnement local. Ainsi, un exode rural modéré permettra de limiter l'apparition des quartiers
spontanés à la périphérie des villes notamment du littoral. Au-delà des problèmes de foncier et
d'aménagement de nouveaux quartiers dans les villes du littoral, l'apparition de quartiers spontanés
provoque parfois des tensions entre groupes culturels voir même au sein de ces groupes. Les
concurrences créées par ces déplacements de populations au niveau du travail, des jardins familiaux ou
P a g e 32 | 35
le simple fait qu'il n'y ait plus de lieux de vie aménagés pour tous contribuent à la création de ces
tensions encore mal appréhendées par les instances d'aménagement (Redon, 2013 ; Interview
Département Innovation, La Région). Il est indispensable de pouvoir limiter cet exode rural et de prouver
aux jeunes notamment que l’agriculture familiale peut être génératrice de revenus. Dans ce cadre-là, le
développement d'une agriculture familiale dynamique et prometteuse pourrait convaincre les
populations qu'il y a un avenir en zone rurale.
3. L’évolution de l’agriculture entraine une évolution des organisations sociales et des
mentalités
Il faudra s’attendre à des changements de niveau de vie et à des modifications des attentes de la part
des familles au fur et à mesure des progrès de l’encadrement et de ses résultats. Développer une activité
économique entraîne logiquement une modification des statuts sociaux et parfois des évolutions au sein
même de la famille. Aussi, avec les progrès de l’encadrement et de ses résultats économiques, faudra-t-
il s’attendre à des changements de niveau de vie et des modifications des attentes de la part des familles.
Ce sont les cadres traditionnels de l'organisation familiale et villageoise, les représentations de l'autorité
qui risquent d'être bouleversés par les nouveaux systèmes d'organisation de l'agriculture. Aussi, vu la
complexité et les freins existants, l'action devra-t-elle être progressive et lente en tenant compte des
différences culturelles. En effet, il se peut que les jeunes choisissant d'autres orientations agricoles avec
l'aide des techniciens acquièrent plus d'autonomie dans leurs prises de décision par rapport aux
autorités traditionnelles. Si les agriculteurs font confiance aux techniciens et suivent leurs conseils, les
savoirs et le pouvoir de prendre les décisions ne seront peut-être plus détenus seulement par les ainés
et les chefs de village.
L’analyse des pratiques culturales actuelles et les échanges de connaissances entre agriculteurs,
techniciens et chercheurs devraient permettre dans un premier temps de conserver les pratiques
traditionnelles car elles seraient répertoriées, étudiées et expliquées. Ensuite, les jeunes agriculteurs
aidés par les techniciens seraient capables de sélectionner eux-mêmes les pratiques traditionnelles et
conventionnelles qu’ils souhaitent utiliser en disposant de deux « catalogues » de pratiques. Dans ce
cas-là, le technicien aurait un rôle de conseil et de suivi pour la mise en place de toutes les pratiques
mais aussi un rôle de formateur pour proposer des pratiques alternatives. Si elle est réussie, la
diffusion réciproque des savoirs peut encourager les échanges entre les générations et les différents
groupes culturels ainsi que des progrès en termes d’ouverture.
Face à ces transformations qui paraissent inéluctables à long terme, il est important de faire attention à
effectuer des changement progressifs en veillant à étudier en amont les effets des politiques de
développement de l’agriculture familiale mis en place dans d’autres pays mais aussi en tenant compte
des feed-back réguliers de la réalité sur les abattis et dans les villages. Les retours seront importants
P a g e 33 | 35
pour éviter les heurts entre les générations et les blocages. En effet, nous pouvons imaginer qu’une
transformation trop radicale de l’agriculture se traduise par un rejet des savoirs traditionnels de la part
des jeunes et que les anciens refusent les innovations proposés par peur du changement perçu comme
facteur de perte identitaire. Il semble donc important de faire le lien entre l’agriculture, la culture et
tous les acteurs en jeu. Le développement de l’agriculture familiale guyanaise n’est pas constitué d’un
seul volet technico-économique mais aussi d’un volet culturel et social. Sa réussite sera le défi de
demain. Un point important à retenir des travaux de sédentarisation de l’agriculture familiale en Afrique
est l’impact des rapports à l’espace avec la réorganisation des systèmes de production. Ces changements
n’ont été possibles qu’en passant en premier lieu par la reconnaissance particulière de chaque territoire
villageois étudié, de leur contexte historique et sociopolitique (Denis, 2005).
P a g e 34 | 35
CONCLUSION
Alors que les stratégies de développement local ont souvent délaissé l’agriculture familiale dans leurs
programmes, l’objectif de la Région, qui possède le pouvoir de décision et les fonds, est aujourd’hui de
l’intégrer et d’exploiter son potentiel pour répondre aux défis futurs de la Guyane. Malgré son potentiel,
l’agriculture familiale a toujours été méconnue et il n'y a jamais eu d’études approfondies pour son
développement. L'explication de cette absence de l'agriculture familiale dans les politiques locales et
régionales est liée au fait que l’objectif de développement du département était axée sur les agricultures
de filières. A ce problème s'ajoutent les difficultés de financement, de commercialisation et de transport
du secteur agricole.
Aujourd’hui alors que de nouvelles mesures du PDRG vont dans le sens d’une meilleure intégration de
l’agriculture familiale se pose le problème de l'éligibilité des « agriculteurs familiaux ». En effet, à cause
des textes qui ne reconnaissent pas le statut d’agriculteur familial, les agriculteurs ne peuvent accéder
au statut d’exploitant et être éligible. S'ajoutent différents freins d’ordre culturel qui rendent difficile
l'intégration.
La Région place ses espoirs dans l'agriculture familiale pour répondre aux différents défis liés à
l’augmentation démographique exceptionnelle notamment les besoins alimentaires croissants, la lutte
contre l’exode rural et l'absence d'avenir pour les jeunes générations en commune. A ces
problématiques s’ajoute le fait que les connaissances sur cette agriculture sont minces ce qui rend les
décisions hasardeuses.
La Région souhaite aujourd’hui initier des actions en faveur de l’agriculture familiale. Elle deviendra
prochainement autorité de gestion et ainsi pourra gérer les fonds européens en rééquilibrant les
attributions des aides. Différentes actions sont déjà en cours mais c’est un travail pour le long terme qui
doit être mis en place pour garantir un développement durable et efficace de cette agriculture. Celui-ci
nécessite une étude approfondie de l’agriculture familiale pour déterminer les besoins, suivie de la mise
en place d’ateliers pilotes avec des travaux de recherche et d’expérimentation. Les agriculteurs seront
encadrés par des techniciens et pourront être formés à de nouvelles techniques ou se lancer dans de
nouvelles productions. La Région devra en parallèle initier des démarches vers une meilleure
reconnaissance des statuts d'agriculteurs et la structuration de filières.
Si les pouvoirs publics acceptent enfin de reconnaître l'importance pour le développement de la Guyane
de cette agriculture familiale dont ils se sont privés si longtemps, d’importantes retombées économiques
et sociales seront à envisager. Mais, pour la réussite de cette politique, il est essentiel de prendre en
compte toutes les caractéristiques culturelles, sociales des agriculteurs appartenant aux différentes
communautés et surtout de tenir compte des attentes formulées après l’audit par les agriculteurs eux-
mêmes pour que le développement puisse être durable.
P a g e 35 | 35
Enfin, l’agriculture familiale concerne majoritairement les populations noires-marrons et amérindiennes
qui ont encore aujourd’hui beaucoup de difficultés à être reconnues et faire valoir leurs spécificités au
niveau du patrimoine guyanais et français et d’en défendre la protection par le droit. Le fait d’être
reconnus en tant que créateurs de richesses et acteurs indispensables du développement de la Guyane
pourra peut-être leur permettre d’avoir un pouvoir politique plus important.
Le traitement de la politique de l’agriculture familiale guyanaise est porteur de forts enjeux du fait
qu’elle soit encore mal connue et soutenue. Des travaux de recherche et d’expérimentation sont de ce
fait nécessaires et j’espère que ce mémoire de stage y aura contribué.
Figure 5 : Enfant bushinengés se rendant à l’abattis, Maïman (source personnelle)
Piti piti, toti ka monté montagn – Petit à petit la tortue gravit la montagne
Bibliographie
Amazônia Brasil.- Povos da floresta.- 2014 [en ligne] disponible sur « http://www.amazoniabrasil.org.br/pt/povos.htm »
Assemat Samuel.- Agriculture familiale dans le Nord-Ouest guyanais, Une mutation mal orchestrée.- POUR 2014/2 (N° 222).- GREP.- 314p
CIRAD.- Les agricultures familiales du monde : Définitions, contributions et politiques publiques 2013.- [en ligne] disponible sur « http://www.cirad.fr/publications-ressources/edition/etudes-et-documents/les-agricultures-familiales-du-monde »
CIRAD.- Floagri, quand l’agriculture familiale préserve la forêt amazonienne.- 2010 [en ligne] disponible sur « http://www.cirad.fr/actualites/toutes-les-actualites/articles/2010/science/floagri »
Commission Européenne.- SCE La communication sur l’évaluation SEC 1051 .- 2000.- [en ligne]
disponible sur « http://ec.europa.eu/dgs/connect/ »
Commission Européenne.- Investissement Territorial Intégré.- Politique de cohésion 2014-2020.- [en
ligne] disponible sur
« http://ec.europa.eu/regional_policy/sources/docgener/informat/2014/iti_fr.pdf »
Conseil Régional Guyane.- Programment de Développement Rural de la Guyane version 2.- 2014 / en
cours de finalisation avant sortie officielle
DAVY Damien, FILOCHE Geoffroy.- Zones de Droits d’Usage Collectifs, Concessions et Cessions en
Guyane française : Bilan et perspectives 25 ans après.- 2014 [en ligne] disponible sur
« http://www.guyane.cnrs.fr/pdf/2014_rapport%20ZDUC%20final.pdf »
De Schutter Olivier.- Pourquoi promouvoir l’agriculture familiale ?.- Agence Française de
Développement.- [en ligne] disponible sur « https://www.youtube.com/watch?v=GBX0NImqHMw »
Denis Gautier & al. .- Agriculteurs et éleveurs des savanes d'Afrique centrale : de la coexistence à
l'intégration territoriale.- L’Espace géographique 2005/3 (tome 34).- Belin.- Page 223-236
Dongmo A. L. & al.- L’espace est fini ! Vive la sédentarisation ? Innovations et développement durable
en question chez les pasteurs des zones cotonnières de l’afrique de l’ouest et du centre.- Rencontre
autour des recherches sur les ruminants.- 2007.- p153
Emperaire Laure.- La foret en jeu.- L’extractivisme en Amazonie centrale.- UNESCO/ORSTOM Paris,
1996 [en ligne] disponible sur « http://www.ird.fr/editions/catalogue/ouvrage.php?livre=103 »
FAO.- Agriculture familiale.- [en ligne] disponible sur » http://www.fao.org/family-farming-2014/fr/ »
Friedberg Erhard.- Les quatre dimensions de l’action organisée.- Revue française de sociologie.- Année
1992, volume 33, numéro 33-4.- pp 531-557
INRA.- Le jardin créole, un modèle d’agroécologie.- [en ligne] disponible sur
« http://www.inra.fr/Grand-public/Agriculture-durable/Toutes-les-actualites/Jardin-creole »
INSEE.- Population légale 2010 Guyane.- [en ligne] disponible sur
« http://insee.fr/fr/themes/document.asp?reg_id=25&ref_id=19424#soustitre1 »
Mam Lam Fouck Serge.- Comprendre la Guyane d’aujourd’hui.- Espace Outre-mer.- Ibis Rouge
Editions 2007
Ministère de l’Agriculture.- Fonds européen agricole de développement rural.- [en ligne] disponible
sur « http://agriculture.gouv.fr/pac-developpement-rural-feader »
Ministério do Desenvolvimento Social e Combate à Fome.- Agricultura familiar.- [en ligne] disponible
sur « http://www.mds.gov.br/falemds/perguntas-frequentes/bolsa-familia/programas-
complementares/beneficiario/agricultura-familiar »
Oréade Brèche.- Stratégies de développement agricole de la Guyane.- Présentation diaporama 2014
Parc Naturel Régional Scarpe-Escaut.- 13 agriculteurs relais.- 2011 [en ligne] disponible sur
« http://www.pnr-scarpe-escaut.fr/contenu-standard/13-agriculteurs-relais »
Région Guyane.- La Région.- [en ligne] disponible sur « http://www.cr-guyane.fr/conseil-
regional/lassemblee-regionale/ »
TSAYEM DEMAZE Moïse.- Les cahiers d'Outre-Mer.- L'agriculture itinérante sur brûlis en Guyane
française : la fin des durabilités écologique et socioculturelle ?.- 2008
Redon David.- Kourou Vers l'intégration du village bushinenge.- Une saison en Guyane, n°11, 2013
Université LeMans.- Tourisme, écotourisme, agriculture : Les soutiens à l’agriculture guyanaise.- [en
ligne] disponible sur « https://ressources.univ-
lemans.fr/AccesFedere/UNT/UVED/GuyaneFrancaise/4-
Generation_web/3_tourisme_eco_agri/co/cours_13.html »
VARIN Caroline.- GDA Mana.- Fiche Technique : L'agriculture familiale vivrière guyanaise, l'abattis-
brûlis.- 2010
Interviews, enquêtes, réunions
Agent de Développement Local de l'Est
Association Agriculture et Développement en Amazonie Guyanaise (ADAG)
Association KOUMAKA
Chambre d’agriculture de Guyane
Chauffeur Saint-Laurent Cayenne
CNRS
Conseil Général de l’Est
DAAF
Familles d'agriculteurs à Maïman, Apatou, Papaïchton, Saint-Laurent-du-Maroni, Macouria et Camopi
(sorties dans des communes isolées telles que Papaïchton, Loka, Maïman à l’Ouest dans la culture
noire-marron de l’Ouest guyanais. Interviews d’agriculteurs bushinengés et visites leurs abattis)
Mairie de Matoury
Région Guyane, Service Agriculture
Technicien agricole de l'Est
Région Guyane, Service Innovation
Conférence de réunions des chefs coutumiers et grans Mans de Guyane, La Région, 2014
Conférence sur le café et l’introduction de l’Arabusta, La Région – CIRAD, 2014
Conférence sur le cacao et son introduction, La Région – Cirad, 2014
Réunions RITA, Lycée Agricole de Matiti – CIRAD, 2014
ANNEXE I : Typologie des exploitations
sur-face/par-celle
type de cul-ture
techni-cité
gestion fam.
main d'œuvre familiale
salarié perma-nent
capital productif familial
logique de vente
auto-con-som-mation
déclaré exploi-tant
activité principale
Agricul-ture fami-liale
Abattis
tradition-nel
abattis per-manents
hmong
4/5
polyculture dominance fruitière faible x x x oui oui oui oui oui
créole 0,5 - 3 polyculture faible x x x non oui ? - oui
bushinengé 0,5 - 1 polyculture faible x x x
oui - faible oui peu - oui
amérindien 0,5 - 1 polyculture faible x x x non oui peu - oui
abattis tem-poraires
bushinengé 0,5 - 1 polyculture faible x x x
oui - faible oui peu - oui
amérindien 0,5 - 1 polyculture faible x x x non oui peu - oui
Grandes exploitations du littoral
Cultures Hmong
10 - 30
fruitiers / monoculture
élevée x x x oui
anec-do-
tique oui oui non
Cultures créoles / métros 100 ha
élevage élevée ? x oui
anec-do-
tique oui oui non
Jardins haïtiens et créoles haïtiens 0,1 - 1 polyculture faible x x x non oui non - oui
critère excluant de l'agri. familiale
Sources : Interviews Région Guyane, ADAG ; PDRG 2014, Mam Lam Fouck, 2007