lire la marche du feu

8/18/2019 Lire La Marche Du Feu

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Jean BenoistMédecin et anthropologue

Laboratoire d’Écologie humaine, Université d’Aix-Marseille , !rance"

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()Lire* la marche dans le +eu l.le de la /éunion, ouconstruire le sens par

lentrecroisement des regards0

Un document produit en version numéri1ue par Jean-Marie 2rembla3, bénévole, pro+esseur de sociologie au 4égep de 4hicoutimi

4ourriel5 6ean-marie7trembla38u1ac"ca 9ite :eb pédagogi1ue 5 http5;;:::"u1ac"ca;6mt-sociologue;

1ue numéri1ue +ondée et dirigée par Jean-Marie 2rembla3,

pro+esseur de sociologie au 4égep de 4hicoutimi9ite :eb5 http5;;classi1ues"u1ac"ca;

Une collection développée en collaboration avec la Biblioth>1ue?aul-Émile-Boulet de lUniversité du @uébec 4hicoutimi

9ite :eb5 http5;;bibliothe1ue"u1ac"ca;

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4ette édition électroni1ue a été réalisée par Jean-Marie 2rembla3, bénévole, pro+esseur de sociologie au 4égep de 4hicoutimi partir de 5

Jean Benoist, anthropologue

(«Lire» la marche dans le feu à l'île de la Réunion, ou construire le senspar l'entrecroisement des regards0"

Un texte publié dans De la tradition à la post-modernité. Écrits enhommage à ean !oirier, pp" $&$-$C$" 2extes réunis par A" 4arénini et J"?"Jardel" ?aris Les ?resses universitaires de !rance, $%%&, DEC pp"

M Jean Benoist, anthropologue, nous a accordé le $C 6uillet FFC sonautorisation de di++user toutes ses publications dans Les 4lassi1ues des sciencessociales"

4ourriel 5 o6"benoist8:anadoo"+r

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Jean BenoistMédecin et anthropologue

Laboratoire d’Écologie humaine, Université d’Aix-Marseille , !rance"

()Lire* la marche dans le +eu l.le de la /éunion,ou construire le sens par lentrecroisement

des regards0

Un texte publié dans De la tradition à la post-modernité. Écrits en

hommage à ean !oirier, pp" $&$-$C$" 2extes réunis par A" 4arénini et J"?"Jardel" ?aris Les ?resses universitaires de !rance, $%%&, DEC pp"


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2able des mati>res

ntroduction

Un regard ethnographique

Regard du prêtre

Regard du "marcheur"

Regards des curieux.

D'autres regards

/é+érences


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Jean Benoist

(«Lire» la marche dans le feu à l'île de la Réunion, ou construire le senspar l'entrecroisement des regards0"

Un texte publié dans De la tradition à la post-modernité. Écrits enhommage à ean !oirier, pp" $&$-$C$" 2extes réunis par A" 4arénini et J"?"Jardel" ?aris Les ?resses universitaires de !rance, $%%&, DEC pp"

"ntroduction

/etour la table des mati>res

4omment concilier deux exigences apparemment opposées de larecherche ethnologi1ue 5 le souci du particulier et le++ort en vue dereconna.tre les r>gles éventuelles du collecti+ n sait les exc>s des

positions extrNmes 5 les uns +orce de ne sattacher 1uaux structuresenveloppantes et aux +orces collectives en arrivent réduire les

parcours de vie de lindividu 1uel1ue é1uivalent des tra6ets dune boule de billard 1ui ne se déplace sur le tapis vert 1ue par le++et de+orces extérieures" Les autres soulignent tellement lautonomie dusu6et, lunicité de son point de vue 1uils en arrivent e++acer toutcollecti+, tout social" ls en sont réduits nobserver 1uun lieu oOsexercent des stratégies personnelles" It, entre eux, plus 1ue la raison,ce sont les modes 1ui tranchent, les plaPant tour tour sur le devant dela sc>ne""" 4hacun sait cependant, et le destinataire du volume oO

paraissent ces pages plus 1uaucun autre, 1ue tout exc>s théori1ue est porteur dun abus, car il trahit plus une aspiration démiurgi1ue uneexplication globale 1ue la modestie devant le souci de collecter des+aits, puis de les rendre intelligibles"


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Mais les contradictions entre théories nous désignent-ellesseulement les +ailles du savoir constitué, les 1uestions mal résolues u bien nexpriment-elles pas une réalité plus pro+onde 5 1uil n3 a

pas une seule intelligibilité pour les mNmes +aits Aussi est-il +écondde tenter de suivre un autre chemin, un chemin 1ui nest cependant pasun mo3en terme, mais plutQt le dépassement des contradictions par une approche 1ui en enveloppe les termes"

ntelligibilités multiples, attachées des situations elles-mNmesmultiples et irréductibles les unes aux autres 5 un +ait socialapparemment uni1ue nappartient 6amais un seul scénario" l est lelieu de lentrecroisement de scénarios divers, au long des itinéraires de

partenaires 1ui le pensent chacun partir de son propre pro6et R lasé1uence 1uobserve lethnologue est le lieu oO se croisent leurs routeset létape 1ui les rassemble un moment prend pour chacun un sens 1uilui est propre, en ré+érence son propre itinéraire"

# # #

L.le de la /éunion permet mieux 1ue bien dautres terres de

décr3pter de tels entrecroisements de regards, tant ceux-ci 3 sont porteurs din+ormations diverses, 1ui leur +ont interpréter di++éremment ce 1uils perPoivent" It, sil est une =vérité=ethnologi1ue, elle nest accessible partir daucun regard particulier,mais de leur combinaison 5 cest une =métavérité= 1ui enveloppe dune+aPon pirandelienne la vérité de chacun"

Lire la =marche dans le +eu= l.le de la /éunion nous permet de

saisir sur le vi+ combien un mNme +ait social, visible, circonscrit danslespace et le temps, +ait dune sé1uence rituelle clairement construiteest multiple du +ait de cet entrecroisement des regards 1ui se posentsur lui, et comment cette multiplicité lancre plus solidement dans lasociété et lui donne plus sens 1ue les discours explicites"


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@uen est-il en e++et de ce rituel originaire de lnde du sud,introduit par les premiers immigrants, travailleurs engagés souscontrat par les plantations sucri>res, et 1ui attire, étonne, +ascine

létranger 9ur sa terre dorigine, il se tient au sein de populations 1uien connaissent le déroulement et les principaux messages du +ait dunhindouisme partagé, dune 1uotidienneté oO les divinités de lnde etles récits 1ui les animent sont présents dans les paroles 1uotidiennes,sur les +aPades des temples et dans les images des +ilms" S la /éunion,la marche dans le +eu est immergée dans une société multiple, oOlhindouisme est +amilier aux uns et inconnu aux autres, et oO lamigration a retenu certains de ses traits, de ses dieux , de ses cultes eten a aboli dautres" Aussi, plus 1uailleurs, est-il nécessaire de tenir compte du =point de vue du su6et=, et les =su6ets = étant si divers, est-ilmNme possible de dégager 1uel1ue =+ait social= 1ui soit leur dénominateur commun u bien +aut-il procéder autrement

# # #

La sc>ne se déroule 1uel1ue part, dans une Tone 1ui +ut 6us1u unedate récente le territoire celle dune grande plantation sucri>re" Une

grande partie des terres a été lotie au cours des années $%CF-$%EF,tandis 1uun 1uartier densément peuplé sédi+iait l oO étaientdispersées les cases des travailleurs de la canne et de petits planteursindépendants"

La marche dans le +eu aura lieu un dimanche de 6anvier"


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$n regard ethnographi%ue


rVce dexcellentes descriptions de 4hristian Barat $, La /éuniondispose de documents tr>s précis sur la marche dans le +eu, dont ilconte la chroni1ue telle 1uil la suivie dans l.le" l a pris la précautionde +aire son relevé ethnographi1ue dans deux temples, lun de lest etlautre de louest de l.le, et le lecteur peut 6uger 1ue les di++érences derituel entre ces temples nentament en rien leur structure commune,

1ui est de loin lessentiel"

l est inutile de redire ici les détails de ces cérémonies R les a3antvécues plusieurs reprises dans trois autres temples #La ?laine 9t-?aul, 9aline les Wauts, 2rois-Bassins' et a3ant également plusieurs+ois participé toute la cérémonie de 9t illes les Wauts 1ue décritBarat, 6ai recueilli des observations 1ui recoupent largement ce 1uiappara.t sa lecture R on rel>ve certes des variations, dans laccent

plus ou moins grand mis sur tel ou tel aspect de la cérémonie, danslimportance des +aits de possession, ou dans le nombre des participants, mais il en ressort surtout une remar1uable constance dansla structure" Les variations ne dépassent pas celles 1uun chrétien

pourrait constater entre des messes dites dans des églises di++érentes,et comme dans ce cas, la structure, les sé1uences, les moments +ortssont aisément reconnaissables" n perPoit ainsi la solidité du mod>leapparemment in+ormel au1uel se ré+>rent les divers prNtres, mod>le1ui ne prend pas sa source dans un code explicité ou dans des textes

prescripti+s, mais dans ce 1ui appara.t aux cro3ants comme lesnécessités intrins>1ues dun culte, dune sé1uence 1uil sagit de ne pasnégliger, tant len6eu est grand"

$ 4"Barat , $%E%, pp $%F &"


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Les phases de la +Nte méritent dNtre présentées avec un peu plus dedétails, ce 1ui +ait ressortir leur succession en une sé1uencesigni+icative 5

Le premier soir ouvre le c3cle cérémoniel" Le prNtre et tous ceux1ui passeront sur le +eu, ainsi 1ue ceux 1ui, sans aller 6us1ue l, ont+ait la promesse de suivre toute la cérémonie, commencent leur carême, +ait de privations alimentaires et dune certaine austérité decomportements" l durera vingt-cin1 6ours, 6us1uau remerciement 1uisuit dune semaine la marche dans le +eu

n désigne cette ouverture du nom dune phase de la cérémonie1ui est la mar1ue essentielle de la 6ournée 5 l=ama-kap=, cest--dire le

passage dun bracelet #kap, tamoul kappou' au bras droit de cha1uemarcheur, pr>s dun point deau au cours dune procession" 4e 6our estaussi celui oO lon a con+ectionné les carlons" ?etits édi+ices destinés Ntre portés sur la tNte de certains marcheurs, ils sont le signe de la

présence de lune des trois déesses"

S compter de ce premier 6our, se déroulent des cérémonies

1uotidiennes dans la chapelle oO les +uturs marcheurs viennent le soir apr>s leur 6ournée de travail et restent dormir la nuit" Une cérémonie alieu cha1ue soir , avant tout mar1uée par le récit dépisodes duMahabharata par le prNtre, épisodes 1ue bien des marcheursdécouvrent cette occasion, surtout lors1uils ne viennent pas dunmilieu religieux, voire hindou" l sagit l de lun des nombreuxespaces de transmission des héritages hindous aupr>s de la populationréunionnaise"

Une semaine avant la marche dans le +eu, donc en général dix 6oursapr>s lama-kap a lieu une cérémonie importante, la sortie dAlvan,

Alvan-atapouli 4e 6our inaugure la série de représentations

?our une description tr>s détaillée de tous ces épisodes, voir Barat #$%E%', pp $%-&" on sattachera ici mettre en relie+ la structure générale de lacérémonie et de dégager le sens de ses phases"


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publi1ues de sc>nes du Mahabharata, aux1uelles participentactivement les marcheurs sous la conduite du prNtre" 4ette cérémonie1ui se déroule le soir, est accompagnée de la représentation de

1uel1ues épisodes légendaires rattachées la +igure dAlvan " Alvan,+igure nécessaire la marche, en raison de son rQle légendaire, entreainsi en sc>ne" l entre voilé, et apr>s avoir été honoré, par larrosagede lait, son voile est retiré, et lon découvre 1uil sagit dune tNte sanscorps, tr>s grande, 1ui se retrouvera +ace aux marcheurs, lextrémitéde laire de marche, le 6our du passage dans le +eu"

La nuit 1ui préc>de la marche est celle de lun des épisodes les plusimportants, 1ue lon désigne généralement par la phase oO il culmine,le mariage !on-Dieu cest--dire le mariage dAd6ounin et de


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pri>re conduite par le prNtre" Kient alors le temps dun premier partagede nourriture végétarienne, tandis 1ue les statues sont transportéessous un dais construit dans la cour du temple" +ace au public, droite,

se trouve Xali, gauche Mariémin R entre elles Ad6ounin et dent des o++randes de+leurs, puis la pri>re autour dun +eu 1ui servira plus tard allumer la+lamme, entretenue 6us1uau lendemain 1ue lon conduira vers le

bYcher préparé pour devenir le lit de cendres ardentes"

4ommence alors la double narration du récit m3thi1ue 5 orale par le prNtre, mais surtout théVtrale par les marcheurs 1ui incarnent divers

personnages et vivent certains des épisodes du Mahabharata 1ui préc>dent ou 1ui suivent le mariage de re phase peut commencer, mais il +aut encore pr>s dunedemi-6ournée" avant la marche proprement dite" La matinée et le débutde lapr>s-midi sont dévolus dautres pri>res, une longue

procession 1ui conduit nouveau tout le monde, mais cette +ois de+aPon publi1ue et avec laccompagnement de tous ceux 1ui ont participé au mariage !on-Dieu pr>s de leau, au lieu oO avait été prislengagement initial" 4eux 1ui portent sur la tNte un carlon pour unedivinité le gardent durant toute la procession, et ils traverseront aussila braise avec ce poids sur eux" @uand la procession revient, laire dela marche est prNte" n 3 a apporté, de bon matin, le +eu 1ue lon a


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placé sous le tas de bYches" ?lus tard on a étalé les braises et lescendres et en+in on a ratissé le tout" Laire rectangulaire, sept grands

pas de long sur trois ou 1uatre de large, a été préparée R le prNtre a

installé toutes les protections indispensables 5 saclons enterrés cha1ue coin, au dessus des1uels une tou++e de lilas & est déposée apr>sune pri>re, mise en place dAlvan, creusement au long du petit cQtéopposé celui oO pénétreront les marcheurs du +ossé empli deau oOdes +emmes verseront du lait lors de leur passage"

?eu avant le soleil couchant, la procession arrive devant laire" Ille3 trouve la +oule, curieux, touristes, voisins, tous tendus vers lespectacle" Mais la tension des marcheurs et des +emmes 1ui

participeront la cérémonie est, elle aussi, mani+este" @uand les premiers passages commencent, les deux tensions sunissent, dans unsilence attenti+, oO le caract>re irré+utable de lexploit +rappe tous lesassistants" Apr>s 1ue les marcheurs soient passés trois +ois, des+emmes 1ui ont +ait cette promesse, vNtues en 6aune sa+ran, se 6ettent+ace contre terre"


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récup>re les pi1uets posés aux 1uatre coins et les saclons 1uil avaitenterrés" 4eux-ci sont recueillis avec respect et déposés dans un pot decuivre empli deau" 4ertains ramassent de la cendre pour lemporter

cheT eux" Les +leurs, recueillies dans des sacs seront déposées au bordde leau, l oO avait eu lieu lama-kap.

Une semaine plus tard, le remerciement ne regroupe gu>re 1ue lesmarcheurs, leurs +emmes et leurs proches" 4est le 6our oO cesse lacarNme C"" l est mar1ué par le démontage du 2avesi, et par unecérémonie asseT br>ve suivie dun repas 1ui ach>ve le c3cle +esti+""

Regard du pr&tre


l insiste tou6ours sur 1uel1ues points essentiels 5 le nombre desmarcheurs, 1ui doit Ntre aussi grand 1ue possible, le +ait 1ue tous aient=bien marché, cest--dire 1uils naient pas hésité, 1uils naient pasmani+esté de douleur, 1uils ne se soient pas brYlés, et en+in la 1ualité

du public 1ui assiste la marche" l insiste aussi sur la diversité desorigines des marcheurs 5 =des 4a+res, des Blancs, pas seulement desMalbars="

l ne donne pas nécessairement dexplication du sens de lacérémonie ceux 1ui 3 participent, sau+ sils le lui demandent, etaussi, certains soirs, lors1uil parle du Mahabharata, mais le sensreligieux des rituels est pour lui une évidence" Le kap est une allianceavec la déesse, et partir du moment oO cette union est devenue

C 4ertains prNtres dissocient le remerciement de lensemble cérémoniel" ls lecél>brent plusieurs semaines plus tard, en présence de tous les marcheurs,apr>s un nouveau carNme de huit 6ours" 4ela permet de reccourcir la p>riodede carNme directement liée la +Nte et d3 mettre +in d>s le lendemain de lamarche" ls craignent en e++et 1ue certains marcheurs, apr>s avoir passé sur le+eu avec succ>s et +atigués dun si long sacri+ice ne respectent plus lesinterdits, ce 1ui aurait des consé1uences imprévisibles"


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+ormelle, lhomme 1ui la contractée doit demeurer chaste, et le rester 6us1u sa sortie du cercle m3thi1ue, lors1ue la rupture du kapmar1uera sa réintégration dans la vie de tous les 6ours" 4est le

commencement de son carême, signe de son engagement envers ladéesse et de celui du prNtre 1ui porte lui aussi le kap" Allégeance,sacri+ice et o++rande de la part du marcheur, protection de la part de ladéesse =pour 1ui= lon marche et 1ui peut Ntre


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marche sera terminée" La marche dans le +eu puise l sa cautiondivine 5 elle sinscrit au sein dune série de réactualisations du m3the1ui se succ>dent durant toute cette période" Les agents acti+s de ces

rituels sont tous ceux, prNtres et marcheurs, 1ui, grVce au port du kapne sont pas des acteurs pro+anes mais les membres dun univers sacré"4hacun est lié cet univers oO le +eu peut laisser indemne lNtre 1uiest con+ronté lui" 4ette pénétration sans médiation dans le sacré nesaccompagne pas de possession de la part des marcheurs" 9eul le

prNtre, diverses reprises, sera possédé durant le c3cle cérémoniel,cest--dire 1uil rendra visite au divin, ou le recevra sur lui" Mais toutle c3cle du théVtre sacré 6oue lun des rQles essentiels 1uont les

possessions au cours des rituels religieux 5 attester de la présenceréelle du divin" n ne repr#sente pas ce 1ui va suivre #les combats, lemariage divin, lascension dAr6una sur lWimala3a' 5 on le r#incarne"It cest parce 1ue la cro3ance en la présence réelle du divin est

partagée, évidente, du moins pour le prNtre et lui donne son assurance1ue les marcheurs pourront entreprendre lépreuve +inale avec la

protection divine" La participation au mariage de la déesse, relie lavictoire de


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Regard du marcheur


La structure générale de la cérémonie contribue éclairer les deuxt3pes de rapports 1ue lhindouisme réunionnais met en 6eu 5 celui desindividus au divin, et celui dune institution la société oO ellesinscrit"

La marche dans le +eu est la plus importante de toutes les

=promesses= 1uun individu puisse +aire +ace au malheur" Mais cette promesse elle-mNme na pas tou6ours la mNme signi+ication selon lesmarcheurs" Les uns, nés et édu1ués dans la tradition indienne rurale, 3voient une des grandes cérémonies religieuses annuelles du temple deleur région" reinvisible au-del de la1uelle tout ce 1ui touche aux cultes indiens estmalé+i1ue peuvent sNtre tenus prudemment lécart, dans unsentiment mNlé de crainte et de mépris" 2alonnés par des di++icultés,

ils peuvent avoir demandé secours un pusari et ils +ranchissent cette+ronti>re 1uand, en garantie et en remerciement, ils décident de=passer dans le +eu="

l sagit avant tout de la rencontre avec un pouvoir, de lattestationdun pouvoir 1ue chacun peut constater lors de la cérémonie" Mais leschoses vont ensuite plus loin" La longue préparation de la marche etlasc>se 1uelle impli1ue, la camaraderie 1ui peut na.tre entre les +utursmarcheurs, les explications du pusari, leur +ont alors découvrir un

univers de m3thes et de rites au1uel ils participent" 2out bascule alorset les phénom>nes diaboli1ues se rév>lent comme une autre +aPon de

prier !on-Dieu, un !on-Dieu 1ui accorde souvent mieux 1ue le !on- Dieu cr#ole, celui des églises 1ui on avait vainement +ait auparavantdes promesses" n rép>te la marche durant , & voire % ans, etlintégration se ren+orce" ?eu peu certains deviennent des +id>les tr>s


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attenti+s" La consultation aupr>s du pusari a été le prélude unvéritable apprivoisement 1ui assure aux cultes indiens un pointdancrage dans la société 1ui les entoure"

Regards des curieu(.


Un autre versant doO la société regarde la marche dans le +eu esttr>s +ré1uenté, depuis 1ue les Métropolitains sont nombreux dansl.le 5 cest celui du spectacle" ?eu sensibles aussi bien au caract>rereligieux 1uau contexte médico-magi1ue, ils viennent en +oule aux

temples voir un spectacle 1ui tient de lexploit sporti+ et du cir1ue, touten se teintant vaguement de pouvoirs surnaturels émanés dune ndem3thi1ue" Attitude 1ui est par+ois mise pro+it par les pusari commeun mo3en de montrer leur public combien des gens importants etinstruits sont +ascinés par leurs pouvoirs" It, bien 1ue les participants,+id>les ou prNtres, ne se laissent pas entra.ner du coté du spectateur incro3ant, il semble samorcer P et l un processus de sécularisationde la +Nte, proche de celui 1ue !irth a décrit en Malaisie $F" La +Nte a

lieu mais, mNme si la +oi persiste enti>re, on tol>re dans certainescirconstances 1uelle ne soit 1ue spectacle, ou du moins accepte-t-onceux pour 1ui elle lest""" /egards curieux des touristes, oO lexoti1uese mNle un certain sadisme, mais 1ui, au constat dun exploitinexplicable, se tourne vers des essais dinterprétation, voire vers uneadhésion"

D'autres regards

ls sont nombreux" Beaucoup parmi les regards 1ui se posent sur cette marche dans le +eu lisolent du reste de la cérémonie #1uonignore souvent' et retiennent avant tout le prodige" /egard de certainscro3ants indiens 1ui ont opté pour une religion modernisée et pour 1uila marche représente la +ois un patrimoine et un archa[sme R ils ont

$F /"!irth, $%&&


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souvent les plus grandes di++icultés évaluer clairement silslapprouvent ou sils la re6ettent"""

/egards de crainte, ou du moins regards longtemps crainti+s descréoles 1ui constatent ce prodige et 3 reconnaissent, sous linspirationde leurs curés, la mar1ue du


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Jean Benoist, ()Lire* la marche dans le +eu l.le de la /éunion"""0 #$%%&' F

Le premier 6our, seuls les marcheurs et 1uel1ues proches suiventlama-kap" La sortie dAlvan se +ait devant un public un peu plus large,

venu du voisinage, la +ois pour le spectacle et en raison de sesrelations avec le prNtre et avec les marcheurs" Le nuit du mariage

!on-Dieu engage toute la communauté locale 5 cha1ue groupe demaisonnée simpli1ue dans une procession 1ui conduit au temple des

plateaux do++randes R durant toute la nuit, +emmes et en+ants assistent,dans un emplacement 1ui leur est réservé, au déroulement du culte, et

participent aux pri>res"

Au moment de la marche en+in, cest toute la population insulaire1ui est potentiellement présente, travers les annonces dans la presse"La marche elle-mNme se déroule devant une +oule 1uil +aut contenir 1uel1ue distance de laire sancti+iée, mais de +aPon 1uelle puisse bienvoir la marche" n passe ainsi progressivement de la petitecommunauté de pri>re, limitée au pusari et aux marcheurs, lexpression des liens sociaux au sein dun espace de +ré1uentation1uotidienne puis la convergence de toute la population de l.le"

Mais, mesure 1ue les participants sont plus nombreux, leurs rQleset leurs regards divergent" 2ous ces regards entrecroisés se portentcependant sur la mNme marche dans le +eu R ils la mettent en relie+, etlui donnent une +orce propre" It cest grVce ces sens multiples 1uelle

peut les rassembler" Ille devient un patrimoine commun 6ustement parce 1uelle est un lieu dentrecroisements de regards 1ui en donnentdes interprétations diverses, chacune compatible avec les autres

positions de celui 1ui la regarde"


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soient laise" La cro3ance des marcheurs est con+ortée par le prestigedu prNtre, lui-mNme grandi par la++lux des spectateurs 1ui cautionnentson pouvoir et sa renommée, et apportent un appui +inancier 1ui

rehausse la cérémonie" Le social tout entier sédi+ie ainsi, pi>ce par pi>ce, non la +aPon dun ouvrage plani+ié, mais par une suiteda6ustements, de complémentarités, de contradictions résolues"Lordre de lédi+ice achevé est un ordre a posteriori, n é d etVtonnements" 4e nest pas lintention de chacun, ni limage 1uil croit

percevoir 1ui sont sa base, mais cest linterprétation 1uen +aitlautre" Le su6et nest ni acteur autonome, ni ob6et passi+ dunestructure" l est un acteur dont lintention est bien souvent détournée

par ce 1ue les autres 3 déc>lent"

?rimauté du su6et, de lacteur, ou de la structure La 1uestioninitiale se présentait comme une opposition" Mais nest-ce pas parce1uelle omettait de reconna.tre 1ue les intentions des acteurs ne sont1uune part des liens 1ui sédi+ient entre eux, et des messages 1ue lonentend deux Mais aussi 1ue les structures sont le carre+our deregards croisés plus 1ue des absolus" externes ces regards"

Les +aits sociaux ne sont pas des =choses=""" ls sont des imagesvirtuelles 1ui +ont se mouvoir les acteurs 1ui les dessinent"

Références


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