l'urgence de la misère

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UNIVERSITE DE REIMS CHAMPAGNE-ARDENNE FACULTE DES SCIENCES ECONOMIQUES, SOCIALES ET DE GESTION Institut Régional Universitaire de Sciences Sociales Appliquées (IRUSSA) L’URGENCE DE LA L’URGENCE DE LA MISERE MISERE SDF ET SAMU SOCIAL Stéphane RULLAC –1985 Les quatre chemins Gwenaël BERRANGER 05 Janvier 2009 CTR : HENRI JORDAS Licence professionnelle en intervention sociale, Année 2008-09 Option métiers de l’urgence sociale (MUS) 1 / 7

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Page 1: L'Urgence de la Misère

UNIVERSITE DE REIMS CHAMPAGNE-ARDENNE

FACULTE DES SCIENCES ECONOMIQUES, SOCIALES ET DE GESTION

Institut Régional Universitaire de Sciences Sociales Appliquées (IRUSSA)

L’URGENCE DE LAL’URGENCE DE LA MISEREMISERE

SDF ET SAMU SOCIAL

Stéphane RULLAC –1985Les quatre chemins

Gwenaël BERRANGER 05 Janvier 2009 CTR : HENRI JORDAS

Licence professionnelle en intervention sociale, Année 2008-09

Option métiers de l’urgence sociale (MUS)

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Page 2: L'Urgence de la Misère

SOMMAIRE

Introduction ............................................................................................................................. 3 Stéphane Rullac ....................................................................................................................... 4 Le SAMU Social de Paris ....................................................................................................... 4 Paradoxes ................................................................................................................................ 5 Un dispositif qui soulage ! ...................................................................................................... 6 La question SDF ...................................................................................................................... 6 Conclusion .............................................................................................................................. 7 Commentaires ........................................................................................................................ 7

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Introduction

Ceux que l’on appelle « les clochards, sans abri, sans domiciles fixe (SDF) » ont toujours fait

l’objet d’un traitement particulier et parfois contradictoire. Réprimés pendant des siècles par

les différents régimes qui se succèderont, ils sont aussi l’objet d’élans de charité émanant

principalement de la bourgeoisie chrétienne. Si la loi d’interdiction de vagabondage est retirée

du code pénal au cours de l’année 1994, des arrêts municipaux anti-mendicité verront le jour

dans quelques grandes villes de France. Considéré trop souvent comme un groupe homogène,

cette « catégorie » désigne des gens aux profils aussi divers que variés. En augmentation ces

dernières années, la « question SDF1 » est devenue une « question de société problématique ».

Les politiques se saisiront de cette question et chacun ira de son slogan : Jacques Chirac en

1995, engagé dans la course à l’Elysée, empruntera à Emmanuel Todd2 le concept de

« fracture sociale ». Lionel Jospin, s’était engagé à atteindre « Zéro SDF » en 2007 si il avait

gagné les élections de 2002.

De plus en plus de littérature voient le jour sur ce sujet. Stéphane Rullac, qui « cherche à

participer au débat sur l’assistance » avec ce livre, fait beaucoup référence à Patrick

Declerck et Julien Damon, respectivement auteur de « les naufragés » et de « la question

SDF »3, pour appuyer son propos.

Le 22 novembre 1993, Xavier Emmanuelli, médecin, humanitaire, urgentiste, homme

politique et animé d’une foi revendiquée, a créé, sous l’égide de Jacques Chirac alors Maire

de Paris, le service d’aide mobile d’urgence sociale de Paris (SAMU Social ou SSP). Ce

dispositif d’aide aux sans domicile fixe (SDF) vient remplacer la brigade d’assistance pour les

personnes sans abri (BAPSA). Le SSP refoulera les méthodes répressives utilisées par la

BAPSA que Patrick Declerck avait dénoncé trois ans plus tôt. Le SSP propose une nouvelle

méthode d’intervention : l’assistance et marque ainsi un changement de cap historique.

C’est dans ce contexte que Stéphane Rullac a mené une enquête de type ethnographique sur la

relation entre le SSP et les SDF. Après avoir détaillé le fonctionnement et l’organisation du

SAMU Social de Paris, l’auteur nous fait part de ses réflexions quant à l’institution avec

laquelle il a passé deux années à « marauder » dans la capitale.

1 Titre d’un ouvrage de Julien Damon.2 Anthropologue, démographe et historien. Il dira, dans le monde du 17 septembre 2001 : « j’ai de quoi être honteux de ce que Jacques Chirac a fait de mes idées ».3 Patrick Declerck « Les naufragés » : 2001, ed. Plon, col. Terre humaine-Poche. Julien Damon, « La question SDF » : 2002, ed. PUF, coll. Le lien social.

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Stéphane Rullac

Né en 1972, Stéphane Rullac est éducateur spécialisé de formation. Docteur en anthropologie

et ethnologie (EHESS4), il est aujourd’hui directeur de collection des éditions Vuibert et

formateur-chercheur au sein d’un institut régional du travail social. Dans le cadre d’une

conférence de consensus, organisé par la FNARS en 2007, il a été nommé expert dans la

problématique des « Sans Abri ».

« L’urgence de la misère » a été édité en 2004 aux éditions « les quatre chemins ». L’auteur

souhaitait « participer au débat sur l’assistance telle qu’elle est conçue et proposée aux plus

démunis d’entre nous ». Il a essentiellement travaillé autour des questions qui portent sur les

SDF. Sa bibliographie comporte d’autres livres sur le même sujet :

Le péril SDF, assister et punir, éditions l’Harmattan, collection Questions

contemporaines, Paris, 2008.

Et si les SDF n’étaient pas des exclus ? essai ethnologique pour une définition

positive, éditions l’Harmattan, collection Questions contemporaines, Paris, 2005.

Les bons samaritains : avec les équipes mobiles du SAMU Social de Paris, Editions

du labo EMC, collection Ethnologie(s) en herbe, Paris, 2003.

Pendant près de deux ans, de 2001 à 2003, Stéphane Rullac a travaillé comme vacataire au

SAMU Social de Paris. C’est au cours de 150 nuits au sein des équipes mobiles d’aide (EMA)

comme travailleur social, qu’il sera confronté aux paradoxes de « l’urgence sociale » et qu’il

décidera de nous proposer son analyse critique quant à la « fonction sociale » du SSP.

Le SAMU Social de Paris

Pour répondre aux besoins de « ceux qui ne demande plus rien », étendard du SSP, le

dispositif parisien dispose de plusieurs outils : le « 115 » qui permet de « centraliser une

partie des demandes, des offres et des disponibilités des hébergements sur Paris ». Des lits

infirmiers et un centre d’hébergement d’urgence (CHUS) sont accessibles aux personnes

recueillies. Des espaces solidarité insertion (ESI) sont aussi disponibles pour permettre

l’accueil de jour pour les personnes en difficultés sociales. Un observatoire de la grande

précarité à la grande exclusion mène des études statistiques et épidémiologiques afin de

permettre à l’institution d’être une force de proposition dans la lutte contre la précarité. Enfin,

l’hospice Saint Michel qui « symbolise le projet du SAMU Social dans la mesure ou il

accueille des SDF dans un cadre architectural magnifique dont la façade avec ses colonnes

s’apparente au fronton d’un temple ».

4 Ecole des Hautes Etudes de Science Sociale.

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Les équipes mobile d’aide, cœur du dispositif, sont généralement composées d’un chauffeur,

d’un infirmier-chef de bord, d’un travailleur social et d’un samaritain5. Ces équipes

s’organisent autour de 3 missions : le travail des fiches, le signalement de particulier et la

maraude.

Les activités du SSP sont financées par un groupe d’intérêt privé (GIP). Ce dernier alloue des

financements pour une période délimitée. Cette situation, ajoutée à l’empathie « des aidant

pour les aidés », précarise les acteurs de l’assistance. Les salaires sont bas et les contrats sont

à durée déterminée (CDD) ou vacataire. On fait appel à des bénévoles avec tout ce que cela

implique dans le suivi de l’accompagnement et ces « samaritains » ont parfois du mal à

s’intégrer auprès de leurs collègues professionnels. Les moyens techniques, comme le

matériel informatique, sont souvent obsolète et dépassé. Cette pauvreté des moyens humains

et technique est qualifié de « sadisme institutionnel » par l’auteur.

Paradoxes

En s’appuyant sur ses observations, sur les entretiens avec les usagers et les acteurs de

l’assistance, Stéphane Rullac questionne et décèle plusieurs paradoxes sur les raisons d’être et

« la fonction social » du Samu social.

Le Samu Social a pour vocation « d’aider ceux qui ne le demande plus ».Quand un usager

connaît le service et qu’il est lui même demandeur d’hébergement, on l’invite à composer le

115. Mais voilà, l’efficacité de ce dernier est remise en cause par une large majorité des

équipes mobile et ceci crée une zone d’ombre dans l’organisation de l’assistance. « Séduire,

se désintéresser de ceux qui succombent pour mieux se consacrer à ceux qui résistent » est la

définition de ce que l’auteur appelle le « syndrome de Don juan ».

Le mythe du « grand clochard », « figure emblématique de la pauvreté », qu’il faudrait

secourir en priorité, est largement diffusé par le fondateur du Samu Social, Xavier

Emmanuelli. Mais ils arrivent fréquemment que les équipes assistent d’autres profils comme

des travailleurs pauvres, des familles, des jeunes…etc.

L’urgence sociale, « concept » créé par Xavier Emmanuelli et Clémentine Frémontier,

« qualifie toutes les opérations entreprises comme des sauvetages, lorsque la personne est

considérée comme une victime en perdition et que sa vie semble en danger, à court ou moyen

terme ». Mais la réalité est tout autre. « L’urgence Chronicisée » prend place à coté du

caractère provisoire du sauvetage proposé et « les SDF » ne sont pas une catégorie homogène

à qui une réponse unique pourrait suffire. Aussi, il est fréquent que le SSP intervienne 2 voir 3 5 Xavier Emmanuelli utilise pour la première fois cette dénomination dans un appel à bénévole pour aider le SSP dépassé par le nombre de prise en charge au cœur de l’hiver 1999-2000.

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heures après l’appel et les « gens de la rue » auront plus de chance d’être hébergé si c’est un

particulier qui appelle le 115.

Un dispositif qui soulage !

« Le dispositif du SAMU social représente une solution visible appliquée à un problème

visible. Ce choix de la mise en scène publique de son action, me semble être un outil de

réparation pour l’image que le corps social se fait de lui-même. En ce sens, la visibilité des

actions contribue à offrir une image de maîtrise de la question SDF. »

L’urgence sociale est une réponse qui satisfait tout le monde. Les politiques répondent

rapidement et dans un moindre coût aux cris d’alarme de l’opinion publique et remettent à

plus tard des projets plus long, plus onéreux. Les associations d’assistance voient leurs

moyens augmentés. Tout le monde, sauf les SDF eux même pour qui une solution de fond à

leurs problème de logement n’est pas proposée.

Malgré la remise en cause que Stéphane Rullac fait de la « fonction sociale » du SSP, il note

une certaine renommée de ce dispositif et il attribue cette notoriété à celle de son fondateur,

Xavier Emmanuelli. Aussi, la visibilité et la « sur-médiatisation » des activités donne le

sentiment que le dispositif parisien « contrôle » ce problème de société qu’est la question

SDF.

La question SDF

Les SDF ont « implantés leur espace privé dans celui du public ». Leur souffrance visible

souligne les dysfonctionnements de notre organisation sociétale et nous montre comment les

frontières de la normalité à la marginalité sont poreuses.

Libre d’aller et venir, sa liberté nous séduit et nous fait peur car elle nous apparaît dangereuse

à la « cohésion sociale ». « L’extrême difficulté d’accès à l’hébergement est le prix à payer

pour la rupture au contrat social dont se rendent coupable les SDF ». Les SDF inspirent à la

fois de la compassion pour leur souffrance et le rejet d’une vie oisive.

Les SDF sont décris comme des individus désocialisés par Xavier Emmanuelli et par Patrick

Declerck. Stéphane Rullac, lui, s’insurge contre cette « soustraction » en y opposant la

théorie moins privative de Julien Damon parlant de déculturation et d’acculturation : un

transfert du savoir vivre dans le monde des gens « normaux » vers des compétences à acquérir

pour pouvoir vivre dans la rue.

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Conclusion

Stéphane Rullac affirme que le SAMU social n’est pas un outil adapté pour répondre aux

besoins des sans domicile fixe. Coincé au cœur de « la question SDF », ce dispositif ne

répond pas aux besoins pourtant nombreux de ces individus que l’on classe sans distinction

dans la case « SDF ».

Le SAMU Social manque de moyens humains pérenne et les budgets doivent s’étendre dans

le temps. Il doit aussi inscrire son action dans le temps et remonter à contre courant des idées

reçues d’une société ou l’exclusion est la punition à quiconque ne respecte pas les normes de

cohésion sociale.

Commentaires

Si l’écriture de ce livre s’est faite dans un sursaut de colère éprouvé par l’auteur au sein des

équipes mobiles d’aide du SAMU Social de Paris, il m’a permis de mûrir ma réflexion. Des

frustrations surviennent dans la confusion des moyens et des discours qui ne font que croiser

les besoins d’une population méconnue et particularisée. Partant de ses « états d ‘âme »,

stéphane Rullac « l’urgence de la misère » effleure une remise en cause de l’organisation

sociale dans laquelle nous vivons en questionnant les paradoxes et la fonction sociale de

l’assistance aux sans-abri.

En me plongeant dans ce récit au cœur des « maraudes » et en questionnant un tel dispositif à

la réputation notoire, ce livre m’amène à repenser la place et l’utilité de chacun dans notre

société et les objectifs cachés des structures censées nous assister et-ou nous gouverner.

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