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Myopathies métaboliques de l’adulte Prise en charge thérapeutique Centre de Référence de Pathologie Neuromusculaire Paris-Est Institut de Myologie, GH Pitié-Salpêtrière, APHP, Paris Grenoble, SFEIM, 18 juin 2016 Dr Anthony BEHIN

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Myopathies métaboliques de l’adulte

Prise en charge thérapeutique

Centre de Référence de Pathologie Neuromusculaire Paris-Est

Institut de Myologie, GH Pitié-Salpêtrière, APHP, Paris

Grenoble, SFEIM, 18 juin 2016

Dr Anthony BEHIN

Myopathies métaboliques en pratique adulte :

quelles présentations pour quelles pathologies ?

Intolérance à l’effort et

rhabdomyolyses

• Glycogénoses

– maladie de McArdle (GSD V)

– déficit en phosphorylase b kinase

– déficits de la glycolyse

• Anomalies du métabolisme lipidique

– déficit en CPTII

– anomalies de la -oxydation

– déficit en VLCAD

– MADD

– déficit en enzyme trifonctionnelle

• Maladies mitochondriales

Faiblesse musculaire

permanente

• Glycogénoses

– maladie de Pompe (GSD II)

– déficit en enzyme débranchante (GSD III)

• Anomalies du métabolisme lipidique

– MADD

– déficit en triglycéride lipase (maladie de

Chanarin-Dorfmann)

– déficit primaire en carnitine

• Maladies mitochondriales

Traiter les anomalies du

métabolisme lipidique :

Déceptions et succès potentiels

Maladies du métabolisme lipidique : Approche classique

Traitement (éventuelt réanimatoire) des complications aiguës dans les maladies de la bêta-oxydation :

Perfusion IV de glucose (pour prévenir la lipolyse et apporter des substrats énergétiques)

Prise en charge de l’insuffisance rénale aiguë

Evitement des facteurs favorisants (jeûne, exercice intense)

Modifications diététiques :

Régime pauvre en lipides avec triglycérides à chaînes moyennes

Régime riche en glucides

Déficit primaire en carnitine : supplémentation (3-4 g/j)

Déficit multiple en acyl-CoA déshydrogenases

(MADD)

• Présentation : rhabdomyolyse, douleurs abdominales,

vomissements, encéphalopathie, faiblesse musculaire

• Mutations de ETFDH le plus souvent associées

Expérience française : 13 pts (8 hommes/5 femmes)

Amélioration plus ou moins marquée (souvent importante) sous traitement

par l’association riboflavine – coenzyme Q – L-carnitine (dose variable)

• Le bézafibrate (hypolipémiant) est un ligand pharmacologique

des isoformes et des PPAR (Peroxisome Proliferator-

Activated Receptors)

• Les PPAR sont des facteurs de transcription connus pour

induire la prolifération des peroxysomes chez les rongeurs et

pour réguler le métabolisme des acides gras (PPAR , / and )

• PPAR et régulent la -oxydation and PPAR est impliqué

dans la différenciation des adipocytes et le stockage des graisses

• Les PPAR et / sont exprimés dans le muscle squelettique

J-P Bonnefont, J Bastin, A Béhin, F Djouadi

(2009)

Essai utilisant des isotopes stables et une

calorimétrie indirecte

Exercice sur bicyclette ergométrique,

Pas d’amélioration des symptômes ou de

la bêta-oxydation entre les deux groupes (Ørngreen et al., Neurology 2014)

La triheptanoïne

Un effet anaplérotique important

La triheptanoine

(C7TG) permet la

recharge des

stocks de substrats

intermédiaires du

cycle de Krebs,

altérée du fait

d’un déséquilibre

entre réactions

ana- et

cataplérotiques

(Roe et al, Neurology 2008)

BKP : bêta-kétopentanoate

BHP : bêta-hydroxypentanoate

Foie Muscle et tissu

nerveux Formation et export

de corps cétoniques

Krebs Krebs

Bêta-oxydation

Clivage thiolytique

(Vockley et al, Mol Genet Metab 2015)

Intérêt de la triheptanoïne dans les

anomalies de la bêta-oxydation Un intérêt suspecté depuis longtemps

• Amélioration de la cardiomyopathie et de la faiblesse musculaire chez 3 enfants souffrant de déficit en VLCAD traités de 4 à 27 mois

(C Roe et al., JCI 2002)

• Réduction des myalgies et des hospitalisations chez 7 patients souffrant de déficit en CPTII traités de 7 à 61 mois.

(C Roe et al., Neurology 2008)

• Diminution du nombre des hospitalisations et des épisodes d’hypoglycémie dans une série rétrospective de 20 patients US souffrant de diverses anomalies de la bêta-oxydation

(J. Vockley et al., Mol Genet Metab 2015)

Triheptanoïne et anomalies de la

bêta-oxydation

Essai de phase 2 avec UX-OO7 (Ultragenyx)

• Etude ouverte étudiant 29 pts adultes et enfants

(12 VLCAD, 10 LCHAD, 4 CPTII, 3 TFP)

• Suivi sur 24 semaines

• Tolérance : 4 arrêts, dont l’un dû à un effet secondaire

lié au traitement (diarrhée)

• Résultats préliminaires favorables chez les patients

neuromusculaires, tant sur la bicyclette ergométrique

que sur le tests de marche de 12 minutes.

• Un essai de phase 3 multicentrique est envisagé

Actualités du traitement des

glycogénoses :

maladie de Pompe et maladie de McArdle

Maladie de Pompe :

Homme de 45 ans

Déficit pelvien depuis l’âge de 26 ans

Test de marche de 6 mn = 238 m (n > 600)

CPK = 3000 UI/l

Insuffisance respiratoire :

- CVF assis = 2.00 l (41%)

- CVF couché = 1.35 l (27%)

Alglucosidase alfa (Myozyme®)

Résultats de

l’enzymothérapie

(Toscano et Schoser, Revue de la littérature, J Neurol

2013)

Un effet globalement

favorable sur

l’ambulation

Un effet favorable ou

tout au moins

stabilisant sur la

fonction respiratoire

Résultats à long terme de l’enzymothérapie Deux exemples publiés – la cohorte allemande

(Regnery et al, J Inherit Metab Dis 2012)

38 patients suivis sous enzymothérapie pendant 36 mois

Age moyen aux premiers symptômes 36,2 +/- 10,5 ans

Formes sévères 5

Patients ventilés 13

dont ventilés > 12 h par jour 6

Sous traitement :

• Test de marche de 6 minutes effectué par 21 patients

Distance parcourue au début de l’ER 312 +/- 165 m

Distance parcourue à un an 344 +/- 166 m

Distance parcourue à deux ans 356 +/- 156 m

Distance parcourue à trois ans 325 +/- 174 m

• CVF : données complètes disponibles pour 28 patients

Stabilité des chiffres à un et deux ans, discrète diminution (3%) en

moyenne à 3 ans, non statistiquement significative.

Sous traitement :

• Décision d’interruption 2 pts 5%

« déclin de la situation clinique générale » 1 cas

aggravation malgré le traitement 1 cas

(associé à un taux d’ac anti GAA de 1/819.200)

• Effets secondaires du traitement, modérés 7 pts 18%

érythème au site d’injection

désaturation

prurit

tachycardie

régressifs sous ttt (anti-H1 +/- corticoïdes) => pas d’arrêt de l’ER

• Développement d’auto-anticorps anti-GAA

Tous les patients ont développé des anticorps, deux seulement à un

taux fort, dont l’un justifiant l’arrêt devant le caractère neutralisant

Résultats à long terme de l’enzymothérapie Deux exemples publiés – la cohorte allemande

(Regnery et al, J Inherit Metab Dis 2012)

• 62 patients (83 % des patients anglais)

• 59 patients traités par ERT (âge médian 44 ans à la 1ère perf.)

• Durée sous ERT (Myozyme®) = médiane 1,3 ans (0 à 3.1 ans)

• Paramètres analysés: %FVC, 6MWT (20 patients), testing

musculaire

• Résultats:

- Amélioration significative du 6MWT et de la force

musculaire au cours des 2 premières années

- Pas de corrélation avec l’atteinte respiratoire

(Anderson et al., JIMD, 2014)

Résultats à long terme de l’enzymothérapie Deux exemples publiés – la cohorte anglaise

Effet du Myozyme® sur la cohorte anglaise

Une amélioration suivie d’un déclin

- Objectif : détecter un effet

du temps sur le traitement

- Conclusions : amélioration

maximale de l’atteinte des

membres au cours des

deux premières années de

traitement

(Anderson et al., JIMD, 2014)

Le registre Français de la maladie de Pompe

Etat des lieux en décembre 2015

Durée moyenne

de traitement :

60 mois

> 10 cas/région

14 patients ont

stoppé le

traitement

Réaction

allergique (5)

Maladie

intercurrente…

(5)

Changement de

protocole (1)

Perdu de vue (1)

Le registre Français de la maladie de Pompe

Causes d’arrêt du traitement

(Données du registre français, état des lieux de décembre 2015)

La cohorte parisienne Tendances évolutives

(De Antonio et al, poster WMS Brighton 2015)

- 43 patients du centre parisien

- 31 patients ont un suivi > 4 ans

CVF assis (%)

Test de marche de 6 mn (% pred.)

• L’enzymothérapie semble retarder

la perte motrice, qui demeure

toutefois inéluctable à terme.

pente de perte

– 1,08%/an gain initial

+ 3%/an

perte par la suite

– 5,86%/an

Autres essais cliniques en cours Enzymothérapie de nouvelle génération « neoGAA » (Genzyme)

– Amélioration du processus de glycosylation

– Étude de phase 1 : doses croissantes de 5, 10 et 20 mg/kg/15 jrs

• Inclusion de 10 patients naïfs et 14 déjà traités par Myozyme

• Traitement pendant 24 semaines (13 injections)

• Résultats (mars 2016) :

– arrêt chez 3 pts, dont un lié au ttt (dyspnée + « chest discomfort »)

– résultats prometteurs, surtout chez les patients naïfs : CVF, MEP et MIP,

test de marche de 6 minutes généralement améliorés ou stables chez

les patients traités à 25 semaines du début de traitement

– Étude de phase 2/3 : en cours

Autres essais cliniques en cours Enzymothérapie par reveglucosidase (BioMarin)

– BMN-701 (GILT = glycosylation-independent lysosomal targeting)

– Amélioration du ciblage de l’enzyme (+ peptide dérivé de l’IGF2)

– Essai ouvert, multicentrique, international POM-001 : 22 patients naïfs

traités, dont 16 à 20 mg/kg/15 jrs, pendant 60 semaines

Effets secondaires : hypoglycémie (16/22), allergie (5/22, arrêt du

traitement dans 3 cas)

Résultats : encourageants, amélioration de MIP et MEP chez presque

tous les patients

– Etude d’extension POM-002 : maintien aux mêmes doses que pendant

POM-001, 19 patients

– Étude de phase 2 « INSPIRE » : relais Myozyme par (objectif : 50

patients traités par Myozyme > 48 mois). Premiers résultats prometteurs

: amélioration MIP/MEP/6MWT chez 18 pts traités à 24 semaines (source : press release de Biomarin – janvier 2016)

Ciblage hépatique

d’un vecteur AAV

codant l’enzyme déficiente

Hépatocyte

Noyau

Correction de

l’accumulation,

de glycogène sur

le corps entier

(“cross-

correction”)

Transduction

Sécrétion de l’enzyme

Induction d’une

tolérance

Immunitaire (foie)

Mise au point de thérapeutiques innovantes Approche de thérapie génique dans les glycogénoses musculaires de

type II et III

Mise au point de vecteurs AAV au Généthon, avec stratégie de transfert

de gène à ciblage hépatique (Federico Mingozzi, Pascal Laforêt)

• Essais cliniques : petits effectifs (presque tous < 12 pts)

• Pas de réponse avec

– vitamine B6, régime hyperprotéiné...

• Effet favorable :

– de l’administration de créatine à faibles doses (60 mg/kg/j) ; aggravation

des douleurs à fortes doses (Vorgerd et al., 2000)

– de l’administration de sucrose oral avant exercice (Vissing and Haller, NEJM 2003)

• Effet également favorable de l’exercice physique régulier :

– Diminution de la sensation de douleuur lorsque l’activité physique de loisir

est augmentée (Ollivier et al., 2005)

Maladie de McArdle

Où en sommes-nous ?

Maladie de McArdle

Intérêt de la triheptanoïne ?

Objectifs de l’étude

• Primaires – Rythme cardiaque durant un effort sur bicyclette (HRconst).

– Capacité oxydative maximale (VO2max).

• Secondaires

30 minutes avant le test sur bicyclette ergométrique

– Auto-évaluation de la sévérité de la fatigue (échelle FSS)

– Concentration urinaire en acides organiques

(3OH-propionate, heptanoate, methylmalonate, pimelate methylcitrate).

Avant et pendant le test sur bicyclette ergométrique

– Augmentation de la capacité maximale de travail (Wmax).

– Changement de la concentration plasmatque en métabolites :

lactates, ammoniémie, glycémie, AGL, acyl-carnitines et malate, CPK.

– Niveau d’exercice perçu à charge de travail constante (RPEconst).

Sujets à inclure

Danemark : 10 patients

France : 11-18 patients

Critères d’inclusion - patients McArdle âgés de 18-65 ans - y compris les femmes en âge de

procréer sous contraception

Critères d’exclusion - Traitement par bêta-bloquants - Maladie cardiaque ou respiratoire

significative - Grossesse - Incapacité à effectuer les exercices

sur bicyclette

Design de l’étude

Triheptanoin treatment

Placebo treatment (safflower oil)

Protocoles d’exercice

Régime

Période de traitement de 14 jours :

• One week of titration dose : 0.3 mL/kg/j

• One week full dose : 1.0 mL/kg/j

Le traitement remplace les apports lipidiques habituels du patient et couvre à pleine dose 25-35% des apports caloriques quotidiens. Le traitement est divisé en quatre prises par jour

Effets secondaires attendus : diarrhée, ballonnement, flatulences...

Conclusions (1)

• Maladie de Pompe :

– des résultats concordants en faveur d’un déclin après

un effet favorable initial de l’enzymothérapie

classique

– importance ++ d’approches complémentaires

– rôle de l’autophagie ?

• Intérêt potentiel important de la triheptanoïne

dans plusieurs maladies métaboliques (anomalies

de la bêta-oxydation, maladie de McArdle)

• Intérêt persistant des mesures classiques (évitement

du jeûne,…)

• Utilité de l’association riboflavine + coenzyme Q +

L-carnitine dans les MADD

• Intérêt de la supplémentation en L-carnitine dans

les déficits primaires en carnitine

• Le traitement des mitochondriopathies reste

décevant.

Conclusions (2)