organisation du travail intellectuel - r. chavigny
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8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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agrégé
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CgO
rganisation
du
pavai
Intellectuel
LB
-Çj5
etae
lier
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Class
1
3
1
04-7
Book
.G
5
GqpiglttN?.
CflHRIGHT
DEPOSIT.
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Organisation
du
Travail
Intellectuel
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DU
MÊME
AUTEUR
Aide
-Mémoire thérapeutique
du
médecin militaire
(Maloine,
1898).
Diagnostic des
maladies
simulées
(Baillière,
1918),
2
e
édition.
L'Expertise
des
plaies
par
armes
à feu
(Baillière,
1917).
Les
Mutilations
volontaires
par
armes
à feu
(Mémoire
couronné par
l'Institut
:
Prix
Larrey,
1917,
Académie
des
Sciences).
—
Inédit.
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Docteur
P.- CHAVIGNY
MÉDECIN
PRINCIPAL
DE 2
e
CLASSE
PROFESSEUR
AGRÉGÉ
DU VAL-DE-GRACE
Organisation
du
Travail
Intellectuel
RECETTES
PRATIQUES A
L'USAGE
DES
ÉTUDIANTS
DE
TOUTES LES FACULTÉS
ET
DE
TOUS LES TRAVAILLEURS
Préface
de
Ch. ADAM
MEMBRE DE L'iNSTITUT
RECTEUR DE
l'
UNIVERSITÉ
DE
NANCY
PARIS
LIBRAIRIE
DELAaRAYE
15,
RUE
SOUFFLOT,
15
1918
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Os-
Tous
droits
de
reproduction,
de
traduction et
d'adaptation
réservés
pour
tous
pays.
Copyright by
Librairie
Delagrave,
19/8.
JUL
18
1913
<\S
©CLAfoi:15346
d^
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o
PREFACE
La
bibliothèque
de
V
Université de
Nancy
de-
meura
fermée
les
trois
mois d'août,
septembre,
octobre
1914,
Un
moment,
toutefois,
on
pensa
la
rouvrir,
pour
y
installer,
dans les
salles
de
lec-
ture, les
bureaux d'un
état-major d'armée
;
le
9
août, un
officier
du
général
de Castelnau
vint
les
visiter à cette intention.
Mais
un
tel
honneur
devait être
réservé
à
Pont-Saint-Vincent,
où
l'on
était mieux posté
pour diriger
les
opérations
de
guerre en
avant
de
Bayon et de
Charmes,
et
la
résistance
victorieuse
du
Grand-Couronné,
qui,
sauvant
la
capitale de la
Lorraine,
a contribué
à
sauver
aussi
la
France.
La
réouverture
des cours
de
l'enseignement
supérieur,
à Nancy,
comme
dans
toutes
les
villes
d'Université,
se
fit,
à
la
date
ordinaire, les
premiers
jours
de novembre. On
rouvrit
donc
aussi
la
bibliothèque,
pour
les
professeurs
non
mobilisés
et pour les
étudiants qui attendaient,
avec
impatience, soit Vappel
de leur
classe
(classes
1916,
puis
17,
puis
18,
bientôt,
sans
doute,
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6
PRÉFACE
classe
19),
ou
simplement
leurs dix-sept
ans
révolus
afin
de
s'engager
et
de
rejoindre
leurs
camarades
qui avaient
le bonheur
de
se
battre
pour
la France.
Mais
à ces habitués
de
notre bibliothèque
s'a-
jouta
bientôt
une
clientèle
inattendue,
clientèle
militaire,
due
au
Service
de
Santé.
Il
n'y
a
peut-
être
pas
un
seul
Aide-Major,
ou Major,
sans par-
ler
de
plusieurs Médecins
Principaux,
pour
peu
que
leur
séjour
à
Nancy
ou
dans
les
environs
fût
de
quelque
durée,
qui
n'ait
aussitôt
demandé
et
obtenu
V
autorisation
d'user de
la
bibliothèque
universitaire.
Le
Recteur
conserve
précieusement
la
liste
déjà
longue,
et
qui
s'allonge encore
tous
les
mois,
de
ces
nouveaux lecteurs. Et jamais
il
ne
connut
pareille
fréquentation.
Certains
jours,
et
c'était
un
beau
spectacle,
on
ne
voyait que
des
uniformes,
plus
ou moins
usés
pour
avoir
fait
compagne
sur le
front;
la
salle en
était
toute
bleue
ou
de couleur
kaki.
Dans
le
nombre,
le
per-
sonnel
de la
bibliothèque
remarqua bien vite
un
médecin
d
quatre
galons
(il en
a cinq
aujour-
d'hui)
qui,
sans
y
songer
le moins
du
monde
et
venu
là
pour
son
compte
seulement,
donnait
à
tous
ses jeunes
confrères
l'exemple de
l'assiduité
et
du travail.
C'était
le
docteur Chavigny,
pro-
fesseur
agrégé
du
Val-de-Grâce.
Il
voulut
leur
être
plus
utile
encore. Est-ce
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PRÉFACE
7
l'ambiance,
qui
lui
rappelait
les
étudiants
et
la
difficulté
des
premières études
médicales
?
La
bonne
volonté
ne
suffit
pas
:
nos
jeunes gens
n'en
manquent
point.
Mais il
faut
aussi
savoir
tra-
vailler;
et
combien
ne savent pas,
parce
que
(il
faut
bien le confesser)
on ne
le
leur
a
pas
appris.
Le
docteur
Chavigny voulut
précisément
le
leur
apprendre.
De
là
cet
opuscule,
préparé,
médité,
peut-être
écrit
dans
notre
bibliothèque;
c'est
un
manuel
de
travail à
V
usage
des
travailleurs;
et
comme
on
travaille,
en somme, toute
la
vie,
il peut
servir
en
tout
temps
et
à
tout
âge.
Chaque
jour
apporte,
si
Von
veut
bien,
sa
pro-
vision
de
connaissances,
par la
lecture,
Uobser-
vation,
la
réflexion.
Tout
ne
vaut
pas la peine
d'être
conservé, certes;
mais
vraiment
nous
en
laissons
trop
perdre,
par
insouciance
ou
négli-
gence,
faute
de savoir l'utiliser.
Le
gaspillage en
toutes
choses
est un peu notre
défaut
français,
et
l'étranger
nous le
reproche,
non
sans
raison.
Or,
il
faudrait
en
finir
avec ces déperditions de
force
en
tout
genre.
Et
le
docteur
Chavigny
nous
enseigne le bon emploi de nos connaissances, et
comme
V
épargne
et l'économie
que
l'on doit
en
faire;
ce
qui
est,
intellectuellement,
l'art de
capi-
taliser
et
de
s'enrichir.
Les
philosophes
nous
disent
bien
que
la
mémoire conserve
tout;
oui,
mais
à
la
façon
d'un
gouffre
où Von jette
tout
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8
PRÉFACE
pêle-mêle;
on
n'y retrouve
rien.
Il
faudrait
clas-
ser
an
fur
et à mesure
toutes
les acquisitions
nouvelles,
méthodiquement
, et
dans
un
ordre
tel
qu'on
puisse mettre
le
doigt
à l'instant sur
ce
qu'on
demande.
Les
Américains, hommes
d'ordre et
qui
savent
le
prix
du
temps,
ne
veulent pas
le
perdre
en
cherchant
ce
qu'on
a
trop
de
peine
à
trouver.
L'un
d'eux, un
professeur,
parcourant un jour
les
rayons
d'une
bibliothèque,
ouvrait
chaque
livre à
la
dernière
page :
«
Point
d'index, consta-
tait-il,
ouvrage
inutilisable
;
»
et il le
refermait
sans
le
lire.
Les
règles
éprouvées
que
donne
le
docteur
Chavigny
aident
chacun à se
faire
un index,
un
répertoire
commode
de toutes les
connaissances
acquises
au
jour
le
jour,
si
bien que,
sans
grand
effort
de
mémoire, on peut
y
faire
appel en cas
de
besoin,
on
les
a
toujours
à
commandement.
Grand
service
rendu
à nos
jeunes
gens d'abord,
mais
aussi à toutes
les
personnes d'étude,
et
même
aux
hommes
d'action,
qui ne
peuvent plus
se
passer
d'une
documentation
étendue et
précise
pour
agir,
dans
l'industrie, le
commerce,
la
finance,
et
la
politique donc Gambetta ne disait-
il
pas
de
son ami
Spuller
:
«
Feuilletons-le.
Cet
homme est
mon
dictionnaire
vivant.
»
Les
philosophes
encore ont
compris,
à
l'aube
des
temps
modernes, combien
il
était
nécessaire
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PRÉFACE
9
d'organiser
le
travail
intellectuel,
et qu'on
ne
pouvait
se
passer
de
la
mémoire
malgré
ses
fai-
blesses.
C'est
une
faculté
précieuse,
pensait
Des-
cartes,
mais
qui
laisse
glisser
et
échapper
trop
de
choses,
et
n'a
pas
la
force
de
les retenir,
labilis
et
infirma;
et
il
avait
ses
procédés
pour
y
remédier.
Bacon,
avant lui, voulait déjà
que
l'art
vînt
en
aide
à la
nature,
pour
la
mémoire.
Ars
mémorise
est
un
titre que
l'on
retrouve dans
maint
ouvrage
du seizième
et
du dix-septième
siècle.
Puis on
n'en
parla
plus,
sinon
pour
mépriser
cette
faculté,
au
lieu d'y
substituer quelque
chose qui
permet
de
se
passer
d'elle.
Le
docteur
Chavigny
a
voulu
attirer,
à
cet
effet,
l'attention sur une
lacune
grave
de
notre
pédagogie
et essayer
de
la
combler.
Je
souhaite
à
son
opuscule
tout le
succès
qu'il
mérite.
Et je
n'oublie
pas
surtout
le
lieu
où
cet
opuscule
est
né,
ni
la
date,
ni
les
circonstances.
Ce
fut
à
la
bibliothèque
de
l'Université
de
Nancy,
ouverte
aux
travailleurs
pendant la
grande
guerre.
Et
ces pages
furent
écrites
par
le
Médecin-Major,
peut-être
entre
deux
conférences
sur
les
gaz
asphyxiants, ou bien
au
retour
d'une
enquête
aux
tranchées
pour
en
vérifier
sur
place
les
effets
ainsi que
V
efficacité
des
masques
protecteurs;
peut-être une de
ces
journées
ou
le
tocsin
annon-
çait
l'approche
et
la
menace
d'un
taube
avec
ses
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10
PRÉFACE
bombes
trop
souvent
meurtrières, où le
siffle-
ment
sinistre de
la
sirène
prévenait
les
habitants
que le
canon
ennemi allait
lancer
sur
la
ville ses
obus de
380.
Ch.
ADAM,
MEMBRE
DE
L'iNSTITUT,
RECTEUR
DE
L'UNIVERSITÉ DE NANCY.
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Organisation
d
b
U
Travail
Intellectuel
INTRODUCTION
Un
menuisier
qui prétendrait
enseigner
de
suite
à
un
apprenti
comment
on
fait
un
meuble,
sans
lui
avoir
appris d'abord
le maniement de
la
scie
ni
du
rabot,
semblerait, sans conteste
possible,
préparer
à son
élève
bien
des déboires. Ce serait
un
maître
pitoyable,
et
nul
ne
serait surpris
que
son
élève
ne
fît
guère
de
progrès.
A
notre
époque,
les
procédés
d'instruction
se
sont fort
perfectionnés,
à
tel point
qu'on
peut
faire
apprendre au
moins
le rudiment de
toute
science
à
l'élève
le
moins
doué.
Mais,
par
une étrange
lacune
des
programmes
de
l'enseignement,
nulle
part
on
n'indique aux élèves
la
méthode
du
travail
cérébral,
la
technique pra-
tique
de
toute
production
intellectuelle.
Dans les
écoles,
collèges,
lycées, etc.,
le
maître
dirige l'élève,
mais
jamais
ne
le
prépare
aux
mé-
thodes
qui
lui
permettraient
plus tard
de
travailler
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12
ORGANISATION
DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
personnellement,
d'acquérir
des
matériaux,
de
les
ranger,
de
pouvoir
les
retrouver,
et
de
savoir les
utiliser
au
jour
voulu.
Or,
il
existe
des
méthodes
de
travail
intellectuel.
Il
est
facile
de
s'en
rendre
compte
dès
qu'on
y
ré-
fléchit,
aisé
de
les
appliquer
dès
qu'on
les
connaît.
Le
profit
à
en
tirer
est
immense.
C'est
à
démontrer
ces vérités
élémentaires
que
ce
petit
ouvrage
est
consacré.
Souhaitons
que
chacun
y
trouve
les
principes
de
la
méthode
de
travail
personnel
qui
convient
à
son
caractère,
à ses
habitudes
et
à
l'orientation
qu'il
a
donnée à
son
activité productrice.
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CHAPITRE PREMIER
LA
NÉCESSITÉ
D'UNE
MÉTHODE
DE TRAVAIL
INTELLECTUEL
ORIGINES
DE
CETTE
MÉTHODE
Parfois
un
choix
librement
consenti,
plus
sou-
vent
un
hasard,
nous
a
poussés
dans
une
profes-
sion
pour
laquelle nous avions
peut-être quelques
dispositions
spéciales.
Les premières
années
d'ini-
tiation
technique
du
métier
sont
occupées
à s'ins-
truire,
à
s'assimiler le savoir
de ceux qui nous ont
précédés
dans le
métier.
Puis, bientôt, les années
passent,
une
expérience
vécue
se
forme,
et
vient
un
moment où,
étant
arrivés
à
penser
par nous-
mêmes,
à
apprécier
et
à comprendre mieux
notre
profession,
nous
serions
portés
à fixer par écrit
nos
vues
personnelles.
Il
y
aurait
intérêt
à
ce
que
les
générations
sui-
vantes
retrouvent
la trace de
l'effort
de
leurs
pré-^
décesseurs,
quand
bien
même
il
ne
s'agirait que
j
d'y
rencontrer l'histoire
des
erreurs
de l'esprit
humain, ou
que
d'apprendre
à
éviter les pénibles
tâtonnements,
les
écoles infructueuses.
Quand
vient
le
moment
d'établir
ce
bilan
de
ses
connaissances,
un
homme
réfléchi
a
vite fait
de se
rendre compte que.
de
tout
un
passé
laborieux,
il
I
ne
lui reste dans
l'esprit
que
quelques rares
impres-
sions,
à
peine
des
notions
générales vagues. L'ins-
truction
reçue
dans
le
tout
jeune
âge
a
créé
une
aptitude
générale,
sans
rien
de
pins.
Les
lectures
8
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14
ORGANISATION
les plus
fructueuses
ont
frappé sur
le
moment
même
l'esprit
alors
attentif,
on
s'en est
assimilé
les
idées
générales,
mais on
serait fort
en
peine,
an
moment
voulu,
de
retrouver
le
volume intéres-
sant,
surtout
de
pouvoir
remettre la
main
en temps
opportun
sur
la
citation
la plus
typique,
sur
celle
qu'il
faudrait
utiliser et
faire valoir.
La
mémoire
est
un
champ
de
ruines,
dans
lequel
de
loin en
loin, une
sorte
de tumulus
indique
bien
qu'en
tel
ou
tel
endroit
s'est
trouvé
jadis
un
monu-
ment
important,
mais
impossible
d'en préciser
les
détails;
alors,
découragé,
l'homme
d'expérience
se
dit
:
«
Il n'est
plus temps de recommencer
mainte-
nant
toute
mon
instruction;
j'ai
beaucoup
appris,
énormément
lu,
tout
cela évidemment
n'a
pas
été
complètement
perdu,
l'état actuel
de
mon
esprit
en
est
la
résultante
bien directe.
Mais
de toute
docu-
mentation
précise,
sur
ce
que
j'ai
vu, appris
et
lu,
il
ne
me
reste
rien. Quel bénéfice
extraordinaire
ce
serait,
quelle
mine inépuisable
de
documents,
si
j'avais
conservé une
trace
écrite,
évocable
à
volonté,
de
la meilleure
lecture
faite
au
cours
de
chaque
semaine, voire
même
de
chaque mois,
ainsi
que
des
réflexions
personnelles
suscitées
par
les
faits et
par
les
lectures
»
Puis,
lorsqu'il
s'agit de
produire,
de
mettre
au
jour
un
travail
personnel
'
,
on
se voit si nourri de la
pensée
d'autrui par
tous ces
livres
innombrables
et
si
bien
faits, dont nous
disposons
à
notre
époque,
qu'on
craint
bientôt
de
ne
pouvoir
plus distinguer
entre
les
notions
d'emprunt
dont
on
s'est
pénétré,
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
15
qu'on
s'est
assimilées,
et
celles
qui
furent le
résul-
tat
d'une
réflexion personnelle.
Bien souvent
la
trouvaille
la
plus imprévue,
l'idée
la plus
neuve,
est née à
propos
d'une
lecture,
d'une
demande d'explications,
d'un
incident
abso-
lument fortuit.
Lorsque,
plus tard,
on
voudrait
la
développer, et
qu'il
faut
faire
la
part
vraie
de
ce
qui
revient
à
chacun
et
à
soi-même,
on
hésite,
on
ne sait plus. Il semble que toute l'idée
soit
devenue
personnelle, tant elle
a été
ruminée,
et
l'histoire
de sa genèse, des
circonstances
qui
l'ont
préparée,
est presque
incompréhensible,
môme à
celui
qui,
de
la
meilleure
foi
du
monde, ne
cherche
pas
à
s'illusionner
sur ses
propres
mérites.
Tous
ces
regrets
se
traduisent
uniformément
par
la
môme formule
:
Combien la mémoire
est
infidèle
et
on
ajoute
aussitôt
:
Ah
si
j'avais
su,
j'aurais
pris
des
notes sur tout
cela.
Il
n'est
pour
ainsi
dire
personne
qui,
après
s'être
livré
pendant quelques années à des
travaux intel-
lectuels, ne
s'aperçoive que,
faute
d'une
méthode
de
travail, les
efforts
les
plus
méritoires,
môme les
plus
héroïques,
aboutissent
à
un
résultat
insigni-
fiant.
Les tours
de
force
de
mémoire
permettent
par-
fois
de
réussir dans
un
concours,
d'obtenir
môme
des titres
enviés, et
alors ceux qui
sont
honnêtes
vis-à-vis d'eux-mêmes
se
disent
que
de
tout
cet
effort
il
reste
un
titre,
c'est-à-dire presque
rien,
et
on
serait
fort
empêché
de
faire
bénéficier
la
science
et ses
contemporains
d'un
travail
personnel;
rien
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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16
ORGANISATION
n'y
a
préparé,
on
manque
des
documents
les
plus
indispensables.
Pour
obvier
à tous
ces
regrets
si
tardifs,
que
fallait-il?
Il
est aisé
de
s'en
rendre
compte.
11
a
manqué
à
tous
ou à
presque tous
une
méthode
de travail
intellectuel
adaptée aux
circonstances
actuelles.
Une
méthode
de
travail
intellectuel
comporte
à
la
fois
des
préceptes
généraux
et des
procédés
cV
ap-
plication.
Ce sont
les
préceptes de
cette
[méthode
qui
per-
mettent
d'abord
à chacun de
ne
pas
éparpiller ses
forces,
[de restreindre
son travail
au
terrain
sur
lequel il
risque
d'être
profitable, efficace,
puis,
si
la
méthode
est
bonne, les procédés d'application
amè-
nent à
ce que
toute
lecture intéressante, toute
idée
neuve
ou profonde émise devant
nous,
soit notée,
puis classée.
Le
moment venu,
on
sait
retrouver,
sans perdre
de
temps,
la
documentation
que
notre
esprit s'est
faite,
et on
en
bénéficie,
on
peut
même
en
faire
bénéficier
les
autres.
Une
pareille
méthode
de
travail
existe
à
l'heure
actuelle,
et
je n'ai guère la prétention
d'innover
beaucoup
en exposant
le
détail,
les
procédés
d'ap-
plication.
Les
principes
de
cette
méthode
sont
*
empruntés à
diverses
professions,
à
des
systèmes
variés
employés
les
uns
par les
bibliographes,
les
autres
par des historiens,
d'autres
enfin
par
des
comptables de
l'école moderne.
Les comptables
et
les
historiens
ont recours à
la
méthode
des
fiches,
qui,
seule,
permet
l'accu-
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU TRAVAIL
INTELLECTUEL
17
mulation
indéfinie
des
matériaux,
des renseigne-
ments.
Les
bibliographes
ont
d'excellentes
méthodes
de
classement,
entre
autres
l'admirable
système
déci-
mal,
qui
n'en
est
plus
à
faire
ses preuves.
Il
suffit
de
coordonner
ces
méthodes,
d'emprun-
ter à
chacune
ce
qu'elle
a
d'excellent,
pour
en
constituer
un
ensemble
qui
mérite
d'être
vulga-
risé,
d'être
mis
à
la
portée
de
tous,
car
à
tous
il
peut
être
utile.
En
quoi
donc
alors
réside la nouveauté?
^
Elle
consiste à
réunir
toutes
ces notions en
une
sorte
de
doctrine
et à
bien
établir
qu'il
y
a
là
les
éléments
à'une
véritable
science
du
travail
intellec-
tuel.
La place exacte
de
cette science?
C'est
malheu-
reusement une sorte de
produit
hybride, qui siège
aux
confins
de
renseignement
proprement
dit
et
do
l'éducation, dans
cette
zone
frontière
dont
cha-
cun
est
porté
à
se
désintéresser
:
les
professeurs
en
laissent
volontiers
les
soins
aux
familles,
sous
prétexte
qu'il s'agit
plutôt d'une
éducation,
tandis
que
les
familles
comptent
sur les
professeurs, parce
qu'il
leur
semble que
ce
soit bien
plus
du
domaine
de
Y
instruction.
Lorsqu'on
veut
présenter au
public
ef
prôner
auprès de
lui une
science
nouvelle,
il est
indispen-
sable
de
donner
à
cette
science
un
nom
qui
per-
mette
d'en
parler
sans
avoir
recours à
de
Longues
périphrases.
Souvent
aussi le mol
bien
implanté
dans
un
esprit
crée
l'idée,
la
rappelle
par
une
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8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
19
minent
tous
les
modes
de
l'activité
intellectuelle,
toutes
leurs
applications.
Peut-être
ceux
qui
auront
parcouru
ce
volume
seront-ils
tentés
de
dire
que
c'est là un terme bien
ambitieux,
bien
savant,
pour être appliqué
à des
notions
presque
banales,
car,
en
somme,
ce
ne
sont,
si
l'on
veut, que
des conseils
d'ordre,
et
c'est
un
bien
long et
bien minutieux
commentaire de
cette
formule
si
simple
:
une
place
pour chaque
chose,
chaque
chose
à
sa
place.
Assurément, nom-
breux
seront ceux
qui croiront retrouver
des
idées
courantes,
presque
indiscutables,
et
dont chacun
a la
notion vague,
comme
innée.
Mais
alors,
si
tout
cela
était
si
simple,
si
naturel,
pourquoi donc
n'est-ce pas en
usage
depuis
long-
temps déjà?
Je
ne
m'imagine nullement présenter
ici
une
idée
entièrement neuve, c'est tout simplement
l'a-
daptation
d'une
méthode générale
à
des cas
spé-
ciaux.
En
industrie,
l'ordre,
la
méthode, sont
devenus
la
loi
de la
productivité,
du
travail. Il
faut avoir
visité un
certain
nombre
d'usines
modernes pour
bien
comprendre quel est
le bénéfice
de
l'ordre.
Dans
ces
usines,
tout
est classé,
tout
est
métho-
dique.
D'un
coup
d'œil,
chaque
chef d'atelier
sait
quelle
est
la
production, à quel
point en
est la
fabrication.
La
comptabilité
matières,
la comptabi-
lité
ouvriers,
la comptabilité
bureaux,
sont exactes,
toujours
immédiatement contrôlables. C'est
dans
les
maisons
de
ce genre que
le
débit
général est
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 24/140
20
ORGANISATION
assez
bien
réglé
pour
que les
objets
manutention-
nés
passent,
sans
s'arrêter jamais,
entre
les
mains
de
tous
les
ouvriers
qui
doivent
les
façonner.
Jamais
il n'y
a une
lacune dans
le
travail,
jamais
un
retard, jamais
une
accumulation.
Même
cette
méthode
des aleliers
a
été
l'objet
de
recherches
approfondies
et
profitables
1
.
Bien
rares
sont
ceux qui, travaillant
de
l'esprit,
pourraient
se vanter
d'avoir
appliqué
à
leurs
occu-
pations
spéciales
des
méthodes
aussi
parfaites,
sur-
tout
aussi
productives.
Quelques-uns
cependant,
devançant leur
époque,
eurent
l'intuition
de
ces
systèmes
en
quelque
sorte
industriels,
des
produc-
tions
de
l'esprit.
Ce
fut,
par
exemple,
un
littérateur
qui
sut
diriger
une
équipe de
littérateurs
et de
collaborateurs
scientifiques.
A
chacun
il
attribuait
sa
part
dans
l'œuvre générale.
11
savait
donner à
cette
œuvre
composite une
unité
de
facture
qui
valait
que
son
nom
y
fût attaché.
Un
autre
était
un
dessinateur
qui
faisait
préparer
par
des
sous-ordres
des
documents
en
nombre
illi-
mité,
ou qui leur
donnait
à
étudier
dans
tous
les
détails
les
personnages d'une scène
dont
il
crayon-
nait
l'ensemble.
Celui-là encore
savait
donner
la
marque
de
son
talent
personnel
à
cette
sorte
de
mosaïque
élaborée
par ceux
qui
l'aidaient.
Le
pu-
blic,
ignorant
de
ces
façons de
faire,
s'étonne
alors,
presque
à
bon droit, d'une
productivité
qui
est
1.
Labry,
le
Système Taylor
et
la
physiologie
du
travail
profes-
sionnel
(Masson,
1916).
Taylor, Principes
d'organisation
scientifique
des
usines,
préface
de
Le Chatelier
(Dimod
et
Pinat,
Paris, 1911).
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
21
infiniment
supérieure
à
la
moyenne.
On
peut
seu-
lement
regretter
que
la
besogne
des
sous-ordres
paraisse
quelque
peu
exploitée
par
celui
qui
signe
ces
productions
collectives.
On
doit
seulement
se
dire
:
«
Ceux-là
savaient
travailler,
ils
avaient
une
méthode
de
production.
»
\
Avoir
une méthode,
c'est
toujours
une
économie
de
force,
toujours
une économie
de
temps,
et,
en
somme,
c'est
une
économie
véritable,
car
il
en
résulte
tou-
jours
une
économie
d'argent.
C'est,
en
industrie,
ce qui
a été
le
facteur
le
plus
décisif
d'adoption
de
ces
méthodes
nouvelles.
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8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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CHAPITRE
II
INSTRUCTION
PRÉPARATOIRE,
INSTRUCTION
PROFESSIONNELLE,
INSTRUCTION
PERSONNELLE
Ce
n'est
pas
ici
le
lieu d'aborder
ni même
de
rappeler
toutes
les
discussions de
ces
dernières
années
sur
les
buts
et
les résultats
de
l'enseigne-
ment
primaire
ou
secondaire,
sur
leurs
lacunes.
A
un
point
de
vue
général,
le seul qui
doive
nous
préoccuper
ici,
il
faut distinguer
:
1°
\1
instruction
préparatoire
(enseignement
pri-
maire
ou
secondaire),
qui
n'a
eu
pour
but
que
de
développer
les
dispositions
communes
des sujets
(Hanotaux)
soit
dans
leur
rudiment
(enseignement
primaire),
soit
dans
leur
culture
plus
affinée
déjà
(enseignement
secondaire).
2°
\J
instruction
professionnelle ,
dominée
par
la
spécialisation
définitive de
l'élève.
Elle
peut
com-
mencer
dès
l'école
primaire, être
donnée
au col-
lège,
même
par
les
facultés,
les écoles supérieu-
res.
Elle est
définie
par
son
but
utilitaire.
3°
U
instruction
personnelle,
que
le
sujet
est
ca-
pable
d'acquérir
seul,
lorsque,
livré
à
lui-même,
il
en
a
fini
avec
les années d'écoles, surtout
des
écoles
des
degrés
inférieurs.
C'est
le savoir
le
plus profitable, et les
éludes
antérieures auraient
dû
mettre
chacun
à même
de
l'acquérir,
d'en avoir
l'appétence,
d'en
profiter.
Ce
résultat
si souhaitable
est pourtant
bien loin
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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24
ORGANISATION
d'être
assuré,
d'être
même
entrevu. C'est
cette
sorte
^instruction
personnelle
que nous
avons
sur-
tout
ici
en
vue,
bien
que
les
méthodes du
travail
intellectuel,
de
la
propédeutique
générale,
soient
applicables
à tous
les
degrés
de
l'enseignement,
de
l'instruction.
Après
l'enseignement
primaire
ou
secondaire,
lorsqu'un élève
passe
à
une école
professionnelle,
à un
apprentissage ou
à
l'une quelconque
des
fa-
cultés ou des
écoles de
l'enseignement
supérieur,
il
arrive
sans
transition dans
un
milieu
où
rien
encore
ne l'avait
préparé à
profiter de
l'instruction
spéciale
qu'il
va
recevoir.
Jusque-là,
c'était
une
instruction globale,
com-
posée
d'une
quantité de notions
générales
qui
ont
assurément concouru
à préparer la
maturation
de
l'esprit,
mais de toutes ces notions,
qu'en
restera-
t-il
plus
tard?
Une
sorte
de
teinte
vague,
un sim-
ple
vernis, tandis qu'au
contraire
la
véritable
édu-
cation
professionnelle
commence au
delà.
Pendant
tout le
cours
de
l'instruction
primaire
ou
secondaire,
l'élève
n'a
eu
qu'une
besogne
:
s'assimiler
le
plus
vite
possible
des
notions
qu'un
maître
lui
débitait
par
tranches
toutes
préparées,
toutes
mises
au
point.
Nul
ne
lui disait,
ne
lui
a
laissé
deviner
d'où
ce
savoir
était né,
comment
il
s'était
formé.
Tous
les
jours, un
professeur
lui
présente le
frag-
ment
ultérieur
de cette
science,
l'élève
l'inscrit
à
la suite dans un
cahier.
Si
la
même
année
com-
porte
plusieurs
professeurs,
plusieurs
cours,
il
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DU TRAVAIL
INTELLECTUEL
25
suffit
à
l'élève
d'avoir
autant
de
cahiers
distincts
que
de professeurs. En fin
d'année
le
cours
est
complet,
coordonné,
l'écolier
sait
par
cœur
ce
que
ces
cahiers
contiennent,
il peut
affronter, sans
crainte
aucune,
tout
examen.
Toute
différente devient
la
vie
intellectuelle
de
celui
qui passe à
l'atelier
ou
à
la
faculté
et
aborde
la
vie
professionnelle.
Il
devient
alors maître,
pour
une
grande part,
de la direction
de ses études,
mais
comment
saura-
t-il
en
profiter?
Bien
trop
nombreux
sont ceux
qui
répondent
à
la
définition
donnée
par
Lavisse
:
I
«
Le
bachelier
est
ignorant, la
chose
est
certaine,
mais
malheureusement
il
est
encore
beaucoup
plus
inapte
à
s'instruire.
»
Voilà donc
cet
élève livré
à
lui-même. De divers
côtés, par des maîtres différents,
lui
arrivent des
renseignements
d'ordre technique,
parfois
même
contradictoires,
qui
auront
à
être
contrôlés,
con-
frontés,
qu'il
serait
souvent
utile
de retrouver
plus
tard
au
moment
opportun, puis des
lectures
per-
sonnelles apportent
leur
appoint
d'enseignement.
Tout cela
doit
être
groupé,
classé,
assimilé, c'est
le
début
du
véritable
travail
personnel.
Ce
travail
personnel
est
le
plus
important
de
tous
:
«
Ce
que nous
apprenons
par
nous-même,
dit
Lubbock',
fait
plus
essentiellement
partie
de
notre
être
que
ce
que
les
autres
nous
enseignent.
»
i.
Lubbock,
Emploi
de
la vie,
2
e
édition,
1897,
p.
.
Voir
aussi
La
visse,
Questions
d'enseignement
national,
Ins. .
,
p,
126.
Allocu-
tion aux
étudiants
de
la
Faculté
des
lettres de
i'.
3
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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,26
ORGANISATION
Or,
rien au
cours
de ses
années
antérieures
d'école n'a
préparé
l'élève
à
savoir user
des
res-
sources
qui
lui
sont
offertes
et
à
coordonner
sage-
ment
entre
elles, de
façon
profitable,
les
multiples
sources d'instruction
qui
vont
s'offrir
à lui.
On peut
hautement
affirmer,
pour le déplorer,
que
jamais
aucune
préparation à
l'enseignement
supérieur,
à
l'instruction
professionnelle,
ne
fut
prévue aux
divers
échelons
de
notre
enseignement.
Non
pas
que
le
besoin
ne
s'en
soit fait
sentir,
mais
bien
probablement
sans
doute, nul
n'a
jamais
su
encore
comment le
réaliser.
Nous
sommes
pourtant arrivés
actuellement
à
une
période
où,
en
toute
spécialité,
la
technicité
s'est
perfectionnée, où
elle
a
ses lois
invariables,
.
aussi
précises
que
productives.
Seuls,
les
travaux
de
l'esprit
semblent
avoir
échappé à
cette
loi
iné-
luctable
du
perfectionnement
et
de
la
spécialisa-
tion. Sans
méthode de travail, sans
notions
préci-
ses
du
but
à
atteindre,
nos
étudiants
des
facultés
portent leurs
efforts
à
l'aventure,
et nul
ne songe
à leur
apprendre
quelles
sont les
méthodes
de
travail
auxquelles
ils
devraient
s'astreindre
pour
profiter de
l'enseignement
qu'ils
reçoivent.
Comment
alors
les
étudiants
de
toutes
catégo-
ries
s'adaptent-ils aux
nécessités
de
l'heure? La
plupart
d'entre
eux
restent
forcément des primai-
res
dans
l'enseignement
supérieur;
bien
docile-
ment
ils
continuent à
apprendre par cœur
le
cours
des
professeurs,
par
cœur
encore
ils
s'assimilent
les
manuels
en
vogue;
sans
aucun
doute
ils
réussi-
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL 27
ront
dans
les
examens,
peut-être
même dans les
concours,
mais,
toujours
restés des élèves
dociles,
ils
seront
ultérieurement
incapables
de
toute
étude
scientifique
personnelle.
Ce qui est
surtout regrettable,
c'est que, mal
préparés
dès le
début,
beaucoup d'élèves
des étu-
des
supérieures
resteront,
pour
toute
leur exis-
tence,
des
désorientés
de
la science; ce
seront
fatalement des
improductifs,
quelles
que soient par
ailleurs
les autres
qualités
de
leur
esprit.
Aussi,
combien
de
fois n'a-t-on pas
occasion
d'entendre
ceux-là
se
lamenter,
combien
de
tra-
vailleurs
intellectuels qui
répètent
encore
cette
même
plainte
:
«
Ab
si
j'avais
su
mieux
profiter
de
mon temps,
de
tous
les
matériaux
qui
me
sont
passés
par les mains
»
Tous
ceux
qui
se
plaignent
ainsi
sont
ceux
qui
n'ont
pas
su
se
créer
une
méthode de
travail.
Si
intelligents qu'ils
soient,
si
heureusement
doués
de mémoire
qu'ils
puissent
être,
ils reste-
ront des
désordonnés.
Quelques-uns
d'entre ceux-là
trouveront
ingé-
nieux
de s'en
faire
gloire;
hautement
ils
procla-
meront
que la méthode,
l'ordre
méticuleux,
sont
le
fait
des
petits
esprits,
tandis
que
le
talent,
le
génie,
sont
surtout
bohèmes.
Eu
cela,
erreur
absolue;
le
génie,
a-t-on
dit,
est
une
longue
patience,
il
est
tout
autant le produit
d'une
parfaite
méthode
de
travail,
d'organisation
intellectuelle.
Parcourez
l'atelier
des maîtres
de
la
peinture
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28
ORGANISATION
ou
de
la
sculpture
modernes, et
vous
ne
constate-
rez nullement chez tous
ce
taudis
qui
constitue
l'unique preuve
de
talent
de
certains
rapins
aux
longs
cheveux.
De
même, bien
des
littérateurs
en
renom
et
des
plus
féconds
ne
se
croient
nullement
obligés de rechercher, à
l'aventure,
leurs docu-
ments
au
milieu
d'un
fouillis
de
papiers
qui
en-
combrent
aussi
bien
les
sièges
que
le
plancher.
Pénétrez
clans
des
laboratoires
de
recherches
des
maîtres
de la
chimie
ou de
la
bactériologie.
L'ordre
qui
y
règne
est
l'indice
et
la mesure
de
leur
productivité scientifique. L'étudiant
qui
y
arrive
ne sera
pas étonné qu'on
l'initie
à
la technique
spéciale
du
laboratoire,
qu'on
l'astreigne
à
Tordre
et
à
la
méthode
des recherches
d'ordre scientifique.
Pourquoi
s'étonner
alors
qu'il
existe
des
métho-
des
techniques
du travail
intellectuel,
que
l'ordre,
qu'un
ordre spécial
même
doive
le
dominer?
Pourtant
le
même
étudiant qui veut bien
s'as-
treindre
à
l'apprentissage
minutieux
pendant
des
semaines
ou des
mois,
du travail
de
laboratoire,
cet étudiant
rentre
chez
lui,
s'installe
à sa table
de
travail,
trouve
naturel d'y manier
des
outils
et
un
matériel
dont
la
technique
ne
lui
a
jamais
été
indiquée.
Bien
rares
sont
les
esprits
qui
d'eux-
mêmes
auront
perçu
cette
contradiction
flagrante,
cette
antithèse.
Si
l'ordre
est nécessaire, il
ne
doit pas cependant
tenir
une
place
telle
qu'il
devienne
l'unique
préoc-
cupation
du
travailleur
de
l'esprit. L'ordre
peut
être
un
défaut
quand
il en vient à prévaloir sur
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
29
toutes
les
facultés
de
l'esprit
el
à les
annihiler.
Certains
collectionneurs
eu
arrivent
à se laisser
entièrement
dominer
par
cette manie
de
l'ordre,
toutes
leurs
facultés
sont
absorbées par
la
préoccu-
pation du
rangement,
du classement
de
leurs
docu-
ments.
Ces
documents
sont assurément
tout
prêts
à
être
utilisés, et
cependant
ils
ne
serviront
à
rien.
Ce
défaut, cet
excès
de
l'ordre, est un écueil
dont
il
faut
savoir
se
garer,
mais
ce
n'est
en
rien
un
argument
dont
on doive faire état à rencontre
de
la
nécessité de l'ordre.
La
méthode et
l'ordre que
je
conseille,
ceux
dont
je
vante
les avantages,
sont
destinés
à
faciliter
la
tache du
travailleur
intellectuel, ce n'est pas
un
but,
c'est
un moyen, mais
c'est
un
moyen
auquel
on
ne
peut
se
dispenser
d'avoir
recours.
Ces
sortes de préoccupations
ne
sont
nullement
déplacées
à une époque
où
on a commencé à
s'a-
percevoir
que
les
préceptes
familiaux
et
tradition-
nels
d'économie
domestique
1
ou
de
cuisine
étaient
loin
de correspondre
aux
nécessités
présentes.
Les
écoles
ménagères,
écoles
de cuisine,
etc.,
sont
d'excellentes
institutions qui
rendent
de
signa-
lés services
aux
personnes
assez
avisées
pour
y
avoir recours.
La
propédeutique générale, l'enseignement
des
méthodes
des
travaux
intellectuels, sont
encore
à
créer;
ils
sont
tout
aussi nécessaires
2
que ces
autres
sortes d'enseignement
pratique.
i.
Bergeret, l'Ordre
à
la maison
(Paris,
Mendel, 1890).
2.
Guyot-Daubes,
l'Art
déclasser
les
notes
(Paris,
Guyot,
1890).
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32
ORGANISATION
ble
que
c'est
par
suite
des défauts
de
notre
instruc-
tion
(culture
intensive
de
la
forme
littéraire
ancienne
sans
guère
de
soucis
des
idées)
que
si
peu
de
gens
continuent à
poursuivre
leur éducation
en
sortant
de
l'école
1
.
»
Pour
en
rester
à des
constatations
précises,
in-
discutables,
on
peut
surtout
dire que
l'éducation
donnée aux enfants
ne
s'est
guère
inspirée
des né-
cessités
que
la
vie
leur
imposera;
même
et
sur
un
terrain
beaucoup plus restreint,
l'instruction
qui
leur
est
donnée
ne prévoit
pas
l'usage
pratique
qu'ils auront
à en faire. Il semblerait
que
l'instruc-
tion
primaire
n'ait en
vue
que de
former
des
insti-
tuteurs,
que l'enseignement secondaire ne
vise qu'à
préparer des
professeurs.
Ce
sont des
filières qui
n'aspirent
qu'à
se
continuer,
à
se
perpétuer
elles-
mêmes. Toute autre
carrière
est,
semble-t-il,
un
accident, un imprévu.
Bien
certainement,
la vie exige des
qualités
pratiques
dont
l'instruction
habituelle
n'a
guère
préparé
le
développement.
Gardons-nous
bien
de
nous
égarer
dans
ces
con-
sidérations
générales,
et revenons-en
à
notre
sujet
précis.
En
ce
qui
nous concerne ici,
le
but
de la vie
consiste
dans le
développement de
l'individualité
intellectuelle
de
chacun,
et,
sans
nier
nullement
la
question
de
la
valeur
morale,
complément
indispen-
sable des
qualités
viriles
nécessaires,
nous
dirons
seulement
que le but 'pratique de
la
vie
comporte
le
plein
épanouissement
d'une
valeur
professionnelle.
1.
Lubbock,
Emploi
de
la
vie,
2
e
édition, 1897,
p.
75.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL INTELLECTUEL
33
Dans
chaque
profession,
à l'époque
actuelle,
cha-
cun
ne
vaut
que
par une
spécialisation
bien précise,
car
un
savoir
encyclopédique
dépasse
maintenant
les limites
de
l'intelligence la
plus
vive
et la
plus
vaste.
En
toute
spécialité, un sujet
d'élite susceptible
des
inventions
les
plus remarquables
n'atteindra
à
sa
véritable
valeur
productive
que
si ses
facultés
de
spontanéité
ont
pour
base,
pour
point
de
départ,
une documentation
aussi
complète
que
possible.
D'après
les
méthodes en
honneur dans Y
Université,
toute documentation
repose exclusivement
sur
la
mémoire.
Au cours des
études,
la
mémoire
joue
un rôle
prépondérant
en
effet,
mais
en est
-il
de
même
dans la vie? Que
vaut
pratiquement
la mé-
moire?
Peut- on compter sur elle
pour assurer
le
succès
dans l'existence?
La
mémoire,
bien certainement,
joue un
rôle
prépondérant,
presque
exclusif au
début
de
pres-
que
toutes
les
professions,
dans
la
période
où
les
examens
décident
de
l'accès aux diverses
carrières;
aussi
bien,
la mémoire est encore la faculté
maî-
tresse
qui
décide
de
la plupart
des concours
même
des
plus
difficiles, et,
malgré
les
critiques
acerbes
par
lesquelles
on a
prétendu déconsidérer
ces
exa-
mens
ou
ces concours,
il faut
avouer
qu'on
n'est
guère
arrivé
encore
à les améliorer,
ni
surtout
à
les
remplacer.
Leurs
adversaires les
plus
décidés
ne
savent
guère
quoi
y
substituer,
ou
bien
les
modifications
qu'ils
proposent
n'aboutissent
encore
qu'à surchar-
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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34
ORGANISATION
ger
les programmes,
et
par conséquent augmentent
d'autant
la part réservée à
la mémoire pure
1
.
Une
fois
cette
phase des examens
et des concours
franchie,
quel
va
donc être
le
rôle
vrai
de
la mé-
moire
dans
la
vie? Là, à notre
avis,
pas
d'hésitation
possible, la mémoire
n'a
plus
qu'un
rôle
secondaire
;
elle doit fournir à
notre
esprit
des documents dont
on
se
servira
après
réflexion,
le
jugement
étant
alors
la
qualité maîtresse
qui
confronte
les
données
directes
de
l'expérience, de
la
vie, fait
appel
aux
souvenirs, simples
éléments
de comparaison, et
éla-
bore
sur toutes ces
données
une
décision
qui, bien
réfléchie,
va être le
plus
légitime
point
de
départ
de
l'action.
Le
sujet
dî
élite
est
alors celui
dont
le
jugement
est
bien
net,
bien droit,
celui
qui
se décide toujours
en
sachant
tenir compte des données
les
mieux
choi-
sies;
c'est l'esprit
judicieux
par
excellence.
Non
seulement le
rôle
de la
mémoire
est alors assez
restreint,
mais
on
peut
même
soutenir,
sans
crainte
du
paradoxe,
que
la mémoire
peut
être
nuisible.
Une
mémoire trop
vive, trop prompte
à fournir
à
l'esprit
des
données
du
déjà vu, peut
favoriser la
paresse
naturelle,
la
tendance à
éviter
la
peine
de
juger
les
faits.
Il
n'est
pas
rare,
en
effet,
de
rencontrer
des
sujets
qui,
doués
d'une
mémoire
excellente,
remarquable,
sont cependant
fort
médiocres
soit
comme savants,
1.
Extrêmement curieux
de
lire à ce sujet,
daus les
ouvrages
si
intéressants
de
Lavjssb, les
efforts
tentés
pour
éviter
que l'agréga-
tion
d'histoire
ne soit
qu'un
exercice
de
mémoire.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
35
soit
môme
comme
hommes pratiques.
Sans
qu'ils
le
veuillent, sans
qu'ils
y
fassent
attention,
ils
décident en
toute chose non
d'après
les
faits
ou
les
conditions
présentes, mais
d'après
la
formule
suivie
jadis
en
une
autre
circonstance
analogue
et
que
leur mémoire leur
rappelle
immédiatement.
A
ce
titre
on
peut réellement
dire
que
la
mémoire
peut
être
mauvaise
conseillère, que
trop
de
mémoire
nuit
au
développement
des
qualités
intellectuelles
supé-
rieures.
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8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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CHAPITRE
IV
ACQUÉRIR.
ACCUMULER
La
mémoire ne
peut
donc
être la
source
unique
de
toute
documentation;
elle
n'y
suffirait
pas,
ou
bien
on
risquerait
de
lui assigner dans
notre
vie
cérébrale
une
place
trop
prépondérante.
La
mémoire
doit
forcément
être
soulagée
et
complétée
par une
collection
de
notes
auxquelles
on
puisse
et
on
sache
se
reporter
au
moment
voulu.
Schopenhauer
a
dit
que
les
livres
étaient
la
mé-
I
moire en
papier
de
l'humanité.
Ils sont
la
mémoire
collective,
le fond
inépuisable,
mais
chacun
doit
aussi
savoir
se
constituer son
trésor
individuel,
«
sa
personnelle mémoire en papier
».
L'individu qui
saura accumuler
clans
ses
notes
tous
les
souvenirs
intéressants
qu'il
peut
tirer
de
ses
lectures,
ainsi que de
toutes
les
circonstances
de
la
vie,
aura
bientôt à sa disposition
les
plus
riches
matériaux.
Lorsqu'on
veut
se
constituer
ce
trésor
inestimable, il faut
savoir
profiter
de
toutes
les
occasions.
Assurément
il ne
faut pas
tomber dans
l'excès
et
noter
indistinctement tout
ce
que
l'on
observe,
car
on
serait
vite
submergé
par
un
amas de noies
bientôt
inutilisables,
mais
il
est
indispensable
de
noter au
moins
d'une
façon
sommaire
tout
ce
qui
se
rapporte
au
mode
principal
de
notre
activité
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38
ORGANISATION
intellectuelle, à
notre vie
professionnelle.
Telle
notion
qui,
à
un moment donné,
avait
pu
nous
paraître
insignifiante,
peut
devenir
plus
lard,
si
nous
la
retrouvons à propos,
le
point de
départ
de
réflexions intéressantes,
même
parfois
de
réelles
découvertes.
Lorsqu'on
veut,
en
une
partie quelconque
des
sciences humaines, se
perfectionner, devenir
un
être
marquant
ou
tout au
moins
utile
par son
savoir,
et
c'est
le minimum
d'ambition'
que
tout
homme
doit
s'imposer,
il
faut que
l'esprit
soit
toujours
tendu
d'abord à l'état conscient,
puis
bientôt
sub-
conscient
même,
à observer, à emmagasiner
tout
fait,
toute
notion
profitable.
Lorsque
l'esprit
est ainsi
en éveil,
tout
devient
occasion d'apprendre
:
conversations,
voyages,
visites,
lectures,
même la
plus
insignifiante.
Par-
tout
peut
surgir
et très
à
l'improviste,
soit
direc-
tement,
soit
par
association,
une idée
féconde.
Pour
acquérir ainsi,
il
faut
:
Savoir
écouter.
—
Savoir
lire.
—
Savoir
voir.
—
Savoir
réfléchir.
—
Savoir
se
documenter.
Savoir
écouter.
—
En
toute
langue,
un
proverbe
dit
qu'il est
plus profitable
d'écouter
que
de
par-
ler. Celui
qui sait écouter
une conversation
n'en
est pas
pour
cela forcément
le
témoin muet,
car
savoir
en
profiter, c'est aussi
savoir la faire
naître
à propos,
la
susciter, l'orienter.
Le
secret,
en effet,
des
personnes
dont
la
conversation
est
le
plus
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8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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40
*
ORGANISATION
qu'il
s'agit
d'un
cours
doctrinal
continu
qui
se
poursuit
au
cours
de
plusieurs
semestres.
Au
contraire,
bien
plus
difficile
est
de
savoir
noter
ces
renseignements
d'ordre
professionnel
qui
se
donnent
au
jour
le
jour suivant
les
hasards
des
occupations,
et
dont
l'enseignement
clinique
au
lit
des
malades est le type.
Un professeur
à
la
Sorbonne,
qui fit
tardive-
ment
ses études
médicales, confessait
qu'il
fut
longtemps
avant
de
comprendre
comment toutes
ces bribes
d'enseignement
données au
lit
des
ma-
lades
pouvaient
finir
par se
constituer,
dans l'es-
prit
des
élèves,
en
un
corps
de
doctrines
utilisa-
bles,
profitables
par
la
suite.
Pourtant
ces
renseignements
d'ordre
profession-
nel
vrai
sont
ceux qui
ont le
plus
hesoin d'être
notés,
mais
notés
intelligemment, en
les
assimi-
lant
à
son propre
esprit,
en
mentionnant
aussi
quelle
était
l'orientation
psychique
de celui qui
les
a fournis.
Alors c'est
plus qu'une
note,
c'est
une
appréciation.
Quels
trésors
ne se
constituerait
pas celui
qui
serait
capable
de
retrouver
toutes les
notes
pro-
fessionnelles
qu'il
aurait
ainsi
accumulées,
par
exemple
tous
les
documents
cliniques des
malades
qui lui
auraient
été
montrés
pendant
ses
études
Ultérieurement,
nous
montrerons
comment
ces
documents
se
classeront,
comment
on
pourra
les
retrouver.
Pour
le
moment,
nous
insistons seu-
lement
sur
la
multiplicité
des
occasions
dans les-
quelles
on
peut
se
les
procurer.
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DU
TRAVAIL INTELLECTUEL
41
Savoir
écouter,
c'est
encore,
par
exemple,
dans
un autre
ordre
d'idées,
savoir
suivre
l'exposé
d'une
affaire
quelconque.
L'industriel,
le commerçant
qui
sait
écouter
le
client
venu
pour
lui
apporter
une commande
importante,
aura plus de
chances
qu'un
concurrent
bavard
de
pouvoir
lui
donner
satisfaction,
et
c'est
un élément
de
succès.
Savoir lire.
—
Savoir
écouter est
un
don pré-
cieux
;
il
se
traduit
en
pratique
par
des notes
qui
entreront
aux
souvenirs
et se
classeront
à la
col-
lection.
Savoir
lire
est peut-être
une
qualité
plus
enviable
encore,
mais
peut-être plus rare
aussi.
C'est,
en
effet,
surtout
par les lectures que
l'adulte
s'instruit.
Qui
ne sait
pas
lire
et
ne
sait
pas
profi-
ter
de
ses
lectures
est
un
imperfectible
qui de
toute
son existence n'acquerra
que peu ou
rien.
Savoir lire,
c'est
d'abord savoir orienter le
choix
de
ses
lectures.
Bien
entendu,
la
place
principale
doit
être
tenue
par
des
ouvrages
d'instruction
spéciale
corres-
pondant à notre
orientation
professionnelle,
mais
il
ne faut
cependant
pas
négliger les
lectures
^instruction
générale qui tiennent
au
courant
de
l'évolution des
sciences
en
général,
et
surtout
des
sciences
connexes
à celles
qui nous occupent
par-
ticulièrement.
Il
y
a
[une façon pratique de
savoir juger
d'em-
blée d'un livre,
surtout lorsque
par
profession
on
est
obligé à
lire
beaucoup,
*à lire
rapidement. Tout
livre
a sa
physionomie,
et
il se
juge
un
peu par
son
titre,
par
sa
préface,
mais
surtout
par
sa
table
des
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DU
TRAVAIL INTELLECTUEL 43
continuité
de
l'ouvrage dont
les
feuillets
sont
dis-
persés.
Quelques
grands esprits
ont
employé
ce
système,
qu'il
faut
cependant
vigoureusement
proscrire.
C'est
une
lamentable habitude.
Mauvais
procédé
aussi
celui
qui consiste
à
souli-
gner
les passages
intéressants
des
livres qu'on
par-
court.
C'est
encore
un moyen de
rendre
illisible
à
autrui
tout
livre
ainsi
défiguré.
Tout
au
plus
cette
méthode est-elle pardonnable
aux
écoliers
qui
doi-
vent
fixer
dans leur
mémoire les faits les
plus sail-
lants,
et
qui
aident
ainsi
le
travail
d'assimilation
en
appelant
l'attention
des yeux sur
les
mots
soulignés.
Depuis
des années
déjà,
les
éditeurs
ont
su
ren-
dre
ce
système
inutile
en
améliorant
la
composition
typographique
des
livres d'enseignement.
La
variété
des
caractères typographiques,
l'abon-
dance des titres,
des sous-titres, divisions,
la
pré-
sence
de titres
de marge,
évitent
aux
écoliers
d'a-
voir
à
souligner
les
livres
mis
entre
leurs
mains.
Le
travail
est
d'ailleurs
mieux
fait
que par
eux,
car il
correspond à
la
pensée de Fauteur.
Savoir
voir.
— Il
semblerait
tout d'abord que
cette
qualité doive être
des plus banales;
il
n'en
est
pour-
tant
malheureusement
rien, et
le
nombre
des
esprits
observateurs
est,
dans la vie
courante,
des
plus
res-
treints.
C'est
une éducation
de
l'intelligence
qu'il
faut
entreprendre
dès
le
plus
jeune âge,
et
certaine-
ment
beaucoup
de personnes
traversent
la
vie
sans
jamais
rien
oberver
autour
d'elles.
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44
ORGANISATION
Voir,
dans le
sens
où
nous
l'employons
ici,
c'est
faire
œuvre
d'acuité
intellectuelle
en
même temps
que
d'acuité
de
l'œil.
C'est
chercher
à
se
rendre
compte
de ce
que l'on
voit,
de
ses
raisons
'd'être,
de
ses
relations
avec ses
causes, etc.
Newton
avait
su
voir lorsqu'une pomme
était
tombée
devant
lui.
Innombrables
étaient
ceux qui
avant lui
avaient
assisté
à ce
fait
en apparence
insignifiant,
ils
n'a-
vaient
pas
su
voir,
c'est-à-dire
observer,
compren-
dre,
interpréter.
Celui
qui
sait
voir
devient vite
professionnelle-
ment
supérieur à
tous
ceux qui
l'entourent.
C'est
lui
seul
qui
découvrira
des
faits
restés
jusque-là
inaperçus, et
qui
saura
en
tirer
parti
pour
son
ins-
truction,
peut-être pour une
découverte.
Celui
qui
sait
voir
et qui
devient
vite un chercheur, un nova-
teur, a
intérêt
à noter brièvement les faits qui ont
particulièrement attiré son attention.
Savoir
voir
est
précieux
pour
ceux
qui
parcou-
rent
un
musée,
une
ville,
une
usine.
Celui
qui
sait
voir
profitera
toujours
d'une visite
de
ce genre,
il
aura
appris, il aura
au
moins
acquis
des impres-
sions
intéressantes,
vivantes,,
durables.
Si nous
savions
«
voir
»,
serait-il
nécessaire
d'al-
ler si
loin pour
satisfaire
une
curiosité inquiète,
toujours
inassouvie?
Les
Français finiraient
par
découvrir
la France, ses curiosités, ses. beautés, s'ils
savaient voyager,
regarder,
«
voir
»
enfin.
Celui
qui
ne
sait pas voir
mérite
d'être
conduit
par
une
agence
de
voyages,
et à son retour
il
en
sera réduit
à
réciter
quelques pages
de
Baedecker,
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 49/140
DU
TRAVAIL INTELLECTUEL
45
cet
étranger qui
a
chez
nous trop bien
su
regarder.
Un
littérateur, un artiste, ne
profitent
réellement
que
de
ce
qu'ils
ont
su
«
voir
».
Savoir
réfléchir.
—
Savoir réfléchir
dans
le
sens
où
nous employons
ce terme ici,
c'est simplement
cette
qualité d'esprit
de
ceux qui
savent profiter
de
leurs
propres
réflexions
à mesure
que celles-ci
sur-
gissent;
c'est
savoir
choisir
entre les
multiples
idées
que
suscitent
les
circonstances
de la
vie
courante,
celles
qui
méritent d'être
retenues,
notées.
La
plu-
part
des
grandes
découvertes
résultent
de
la coïnci-
dence,
d'une
confrontation
faite
à
propos,
entre
deux
faits
ou
deux
idées
qui
d'ordinaire
sont
toutes
deux
du
domaine public.
Les
grands
inventeurs
ont,
le
plus
souvent,
pour
mérite
d'avoir
su
sentir une
relation,
restée insoup-
çonnée jusque-là, entre des notions presque
bana-
les
à
l'époque
à
laquelle ils vivaient.
Il
faut
donc
savoir noter l'idée
qui passe dans notre
cerveau,
car elle peut
être
plus
tard l'occasion
d'un
travail
intéressant.
Bien
des
personnes ont remarqué que des
asso-
ciations
d'idées assez
imprévues
et
parfois
fort
fruc-
tueuses
surviennent
volontiers
dans
la
période de
demi-sommeil
qui, le
matin, précède
le
lever.
Il
semble
que
l'esprit
ait
continué
à travailler
auto-
matiquement sur les
données
des
jours
précédents,
et
on
est souvent
étonné
de
voir
surgir
la
solution
très
simple
d'un
problème
qu'on avait
inutilement
médité
la
veille. D'autres
fois,
c'est pendant
une
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 50/140
46
ORGANISATION
insomnie
de
quelques
instants,
dans
le
courant
de
la
nuit,
qu'on
a
semblable
surprise.
Si
l'on ne
pro-
fite
pas
de
ces quelques minutes
de
lucidité
pour
fixer
l'idée
par
une note,
on
peut
regretter
de
ne
plus
se rappeler,
lorsque,
toilette
faite, on se met
au
labeur,
l'idée
si
juste
qui
s'était présentée
en une
lueur
fugitive.
Ceux qui sont
sujets
à cette
sorte
de
méditation
intellectuelle
nocturne
se
trouvent
bien
d'avoir
à portée
de
la main, près
de
leur
lit,
un
bloc-notes
avec un crayon.
Un
mot,
un
signe, tracés
même
dans l'obscurité
sans
interrompre le
repos
de la nuit,
suffit à
fixer
le souvenir et
à
le
retrouver
le
lendemain
avec
toute
sa
précision.
Savoir
se documenter.
—
Savoir
se
documenter
est
un
art,
un art
compliqué,
car
il comporte de
savoir
se
servir
des
bibliothèques.
Tout
d'abord,
il
faut
savoir découvrir
les
biblio-
thèques
;
il
n'est
pour
ainsi
dire
si
petite
ville
qui
n'en
ait
plusieurs.
À
Paris,
où
quatre-vingt-cinq
sont
publiques,
il
existe encore
des
bibliothèques
municipales
de
quartier, les
bibliothèques
privées,
etc.,
soit
au
total trois
cent
six bibliothèques
1
. Sou-
vent
certains
particuliers
peuvent
être
spéciale-
ment fournis
en livres
sur une question
déterminée.
On
trouvera
la
liste
des
bibliothèques
publiques
dans
des
annuaires,
dans
le
Bottin,
dans
des
guides.
Lorsqu'on
a fait
choix de
celle
à
laquelle
on
s'a-
dressera, il
faut
encore
se
renseigner
sur son règle-
ment
particulier,
obtenir
parfois
l'autorisation
d'y
1.
Eugène
Mokel,
la
Librairie
publique
(1910,
A.
Colin,
Paris),
p.
148.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 51/140
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 52/140
48
ORGANISATION
Si l'on arrive
dans une
bibliothèque
sans
avoir
notion des ouvrages
se
rapportant à
la
question
sur
laquelle
on
vent
être
renseigné,
il
faut
d'emblée
r
chercher
dans
le
catalogue
méthodique
ou dans
un
dictionnaire encyclopédique
l'indication
du
livre le
plus
récent
paru
sur
la
matière.
En
effet, lorsqu'on
compose
un
travail, on
pré-
sente
obligatoirement
la
bibliographie
dans
son
ordre
naturel, descendant,
de
façon
à
faire,
au
tra-
vers des années,
un
exposé
méthodique
des
modi-
fications
successives de
la question,
de
l'idée.
Au
contraire, les
recherches
bibliographiques
doivent
être
faites
dans un
ordre
précisément
inverse
:
d'em-
blée
on
s'adresse
à
l'ouvrage
le
plus
récent,
on
note
/
les
sources
bibliographiques dont
il
fait mention,
puis on les
contrôle,
on
lit
les
ouvrages qui
y
sont
cités,
et
ceci
de
proche en proche dans
une
biblio-
graphie
complète.
Traduction pratique
:
/ Les
recherches
bibliographiques
se
font
par
voie
I
ascendante.
Un
excellent moyen
de recherches
bibliographi-
ques
consiste à
consulter
tout
d'abord
les
ouvrages
généraux,
puis les
publications
périodiques,
les
revues
bibliographiques,
les
journaux
et les thèses.
Les
publications
périodiques,
et
on
en
trouve
de
spécialisées en toutes
matières,
sont
toujours
obli-
gées à
présenter
à
leurs
lecteurs une
mise
au point
moderne
des
principales
questions,
avec
indication
des
auteurs
qui
ont
traité
ce
sujet.
Aussi
faut-il
s'habituer
de
bonne
heure à savoir chercher
dans
les
tables
annuelles
des publications
périodiques.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 53/140
DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
49
Ce
n'est pas une
chose
facile, si l'on
n'est
pas
pré-
venu d'avance des
difficultés
particulières à
ce
genre
de recherches,
le
dispositif
des
labiés
pério-
diques
étant,
en
effet,
très
varié.
Pour
quelq
uns,
la
reliure réunit
tous
les numéros
d'une
année,
et,
à la
fin
du
volume,
on trouve les
tables
géné-
rales
méthodiques et
alphabétiques.
Mais,
pour bon
nombre
de
ces
journaux, l'unité
de
publication
est
le
semestre,
parfois
môme
le
trimestre,
bien
que
la
reliure
réunisse tous
les numéros
de Tannée.
Alors, dans un
môme
lome, il
y
a
deux
ou
qua-
tre
tables
et parfois plus
:
les
tables
du
premier
semestre
se rencontrent
en
tête
de volume,
quel-
quefois
au
milieu,
ou
môme
toutes
les
tables
sont
reliées
en fin
du
livre les unes à la
suite des
autres.
Souvent
il
arrivera
qu'on
s'imagine
avoir
consulté
la
table
générale
de
l'année, tandis
que l'on
n'a
parcouru seulement
que
l'une
de
ces
multiples
ta-
bles.
D'autres fois
encore,
la table des travaux ori-
ginaux
est
différente
de
celle
des analyses;
enfin
tel
journal
qui,
pendant une
série
d'années, avait donné
une
table globale
annuelle, modifie
subitement
son
système,
adoptant celui des
tables semestrielles.
Le
chercheur
qui,
dans
la
série
des
volumes d'un
journal, a
commencé
par
essayer
de
se
rendre
comple
de
la
texture
de
la publication,
poursuit
sans s'en
apercevoir
jusqu'au
bout
ses
rechen
suivant
le môme manuel opératoire
qu'au
début,
sans
se
douter
qu'à
partir
d'une
année
déterminée
il
n'a
réellement
consulté
que
la
table
du
second
semestre,
môme
d'un
trimestre.
5
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 54/140
50
ORGANISATION
Là,
encore,
c'est
bien
un
conseil
pratique
que
d'engager
les
chercheurs à
commencer
la
biblio-
graphie
des
tables
des
journaux
par
les
dernières
années
publiées. Presque
toujours
c'est
dans les
années
les
plus récentes que
les
tables
des
matières
ont
acquis
leur
complexité maxima
:
en
remontant
le
cours des
années
on
verra
fatalement
à
quel
moment
le
fractionnement des
tables
des
matières
s'est
produit, et
l'on risquera
moins
de
négliger
toute une
partie
des
sources dont
on
aurait
pu pro-
fiter.
Les
revues
bibliographiques
sont
nombreuses
en
toutes
spécialités;
naturellement,
de
telles
pu-
blications
ne peuvent
espérer
enregistrer
l'énorme
quantité
de
travaux
parus,
sans
adopter
une
clas-
sification
rigoureuse
;
mais
chaque revue
a mal-
heureusement
un
type différent,
et pour
chacune
d'elles c'est
une
étude préalable
à faire
que de
savoir
les consulter.
L'étude
des
principales
sources
bibliographiques
est
vite
touffue,
bientôt inextricable
à
qui
n'est
pas
bien
guidé
dès
le
début dans leur
emploi.
On
se
rappellera,
par exemple,
qu'au commen-
cement
du
siècle
dernier le
bibliographe
Achard,
prétendant mettre
aux
mains
des
élèves
un
Manuel
de
bibliographie,
avait
écrit
sous
ce
titre
trois
gros
volumes
(1806-1807).
Dans
la grande
Encyclopédie, la
rubrique
«
mé-
decine
»
de
la
Bibliographie
des
bibliographies
com-
porte
la mention de
cent vingt-neuf
ouvrages
de
bibliographie
médicale.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 55/140
DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
51
La thèse
do Ilahn (Paris.
1896-1897) a
donné
le
catalogue
détaillé complet
de
tous les répertoires
de
bibliographie
médicale
de
L'époque.
Depuis,
ils
se
sont
multipliés
encore.
Comme
amorce
des
recherches
de
bibliographie
générale,
on
peut utilement
recourir à
l'ouvrage
de
II.
Stein (Manuel
de
bibliographie
générale, Paris,
A. Picard,
1897).
Les
diverses
catégories
de
sources
sont
bien
classées, mais l'ouvrage
a déjà
quelque
peu vieilli.
Le P
r
Gavet, dans ses Sources
de
l'histoire
des
institutions
et
du
droit
français
(Manuel
de
biblio-
graphie historique,
Paris,
Larose,
1889),
a
fourni de
bons
documents
qui
sont
correctement
présentés.
Surtout
au
milieu
de
ce
flot toujours montant
et
qui
risque
de
submerger
un
chercheur
novice, il
y
a
fort
à
souhaiter,
pour
les débuts,
d'être
guidé
par
quelqu'un
d'expérimenté
et de
bienveillant
qui
aura
bientôt
fait
de
donner au
néophyte
une orien-
tation
précise, une
méthode
profitable,
méthode
qui
varie
un
peu
suivant le
milieu
dans
lequel on
évolue.
Pour
des
débuts,
il
est
presque
préférable
de
s'exercer
dans une bibliothèque
qui
ne
soit
pas
trop
richement
pourvue.
On
risque
de
se
perdre
si
l'on
fait
son
apprentissage
dans une bibliothèque
con-
sidérable.
D'ailleurs,
si
la
bibliographie est
nécessaire,
il
faut
savoir
choisir
et ne
pas
croire
qu'une
biblio-
graphie
complète
dispense
de
toul
efforl de création.
On
en
arrive
assez
vite,
<
i
n
ell'et,
à
partager, au
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 56/140
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
53
dont
on
ignore
trop
généralement
l'existence,
est
une source
extrêmement
fructueuse
de
documenta-
tion. Il est
muni
d'une
table par noms
d'auteurs,
et
surtout
d'une
table
méthodique
fort
soigneusement
établie.
CONGRÈS
La mode
est
aux congrès, leur
popularité
résulte
peut-être
de
quelques considérations
accessoires
trop
aisées
à
plaisanter.
Pourtant,
les
congrès
ont
leur
utilité.
Ils
donnent
périodiquement, en toutes
matières,
une
mise
au
point des
questions d'actua-
lité.
Les
rapporteurs,
choisis
parmi
les
personnali-
tés
les
mieux
documentées,
fournissent
des comptes
rendus,
des
revues
générales,
des
travaux
qui,
sans
être
toujours
d'une grande
originalité, ont au
moins
le
mérite
de
constituer
une
analyse très
bien
faite,
très
complète,
d'une
question,
de
ses
difficultés
et
des
solutions
qui
s'y
adaptent.
Aussi dans
les
biblio-
thèques,
lorsqu'on
fait
une
recherche,
ne
doit-on
jamais
manquer
de
consulter
les comptes rendus
des
congrès.
D'après
ces quelques renseignements,
on
se
ren-
dra
compte
aisément
que
les
recherches
bibliogra-
phiques constituent
réellement
un
art
qui comporte
ses
règles
ainsi que
ses secrets.
On
ne
saurait
pré-
tendre à
y
exceller
d'emblée,
en
quelque spécialité
que
ce
soit,
mais
un
peu
de persévérance,
un
peu
de
méthode dans
les
recherches assureront
un
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 58/140
54
ORGANISATION
résultat
fructueux. Même les
recherches
bibliogra-
phiques
deviennent
intéressantes
par
elles-mêmes;
lorsqu'on
est
rompu
à
leurs
méthodes,
de
nom-
breuses
trouvailles
récompensent
le travail
du
chercheur,
et
on
en arrive
vile à
connaître toutes
les
découvertes
récentes,
importantes.
On
évite
alors
d'inventer
des
notions déjà
presque
tombées
dans
le
domaine
public;
parfois
même
on a
la
sa-
tisfaction
d'exhumer
d'un
auteur
ancien des
idées
qui
paraîtront
neuves à force qu'elles
ont
été
oubliées;
ou
encore on
en
trouve
qui
comportent
des
déductions
nouvelles
et pratiques,
parce
que
les sciences
ont
progressé
depuis
le
moment
où
elles
avaient
été
émises.
Parfois
un
vieil
auteur
très
inconnu
a eu
des
vues dont la justesse ne
sera
reconnue que plus tard; ni
ses
contempo-
rains
ni
lui-même
souvent
n'en avaient
prévu
la
portée. Ces
sortes de
trouvailles
sont la
joie
des
chercheurs
dans
les
bibliothèques.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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56
ORGANISA
TION
méthode
nouvelle,
qui
heurte les anciens
préjugés
et
les
habitudes
acquises,
a beaucoup
de
peine à
s'implanter.
Il
est
indispensable
pourtant
que
tous
les
travailleurs
de
l'esprit
se
familiarisent,
dès
le
début de
leurs
études,
avec
ce
procédé
nouveau,
qui est
le
système
des
fiches.
La
fiche.
—
Le principe en
est
simple,
Futilité
incontestable;
tous
les
renseignements,
tous
les
documents qu'on
réunira,
tous
ceux qu'on
pourra
avoir
à
classer,
s'inscriront chacun
sur
une
fiche
d'un
modèle
uniforme. La fiche est
indispensable
dans
toute
situation
où
les éléments d'un travail
sont appelés
à
être
modifiés,
augmentés,
diminués,
classés,
manipulés.
Il
semble
bien
que
ce
soit un
Français,
l'abbé
Rozier,
membre
de
l'Académie
des
Sciences,
qui ait
eu
le premier,
vers
la
fin du
xviii
6
siècle,
l'idée
de se servir
de
cartes
mobiles,
de
fiches.
Il les
utilisa
pour
établir
la table
des
matières des
travaux
de
l'Académie
des
Sciences.
Depuis
un
siècle
environ,
ce système
des
fiches
s'est
peu à
peu
imposé
en raison de
ses
avantages
inappréciables.
Des administrations,
des maisons
de
commerce,
des
banques,
des
bibliothèques,
etc.,
l'ont
adopté,
pour
leur
plus
grand
bénéfice.
C'est
à son
emploi
habituel,
universel,
dans les
métho-
des
de
travail de l'esprit que
l'on
doit viser
aujour-
d'hui.
G'est le
progrès nécessaire à réaliser.
Dans
les
bibliothèques
publiques
les
catalogues
par fiches
se sont
presque partout
substitués
aux
catalogues
inscrits
dans
des
registres,
parce
que,
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
57
seul,
le
répertoire
par fiches permet
l'extension
indéfinie
de ces
catalogues, sans que
jamais
l'or-
dre
général
en
soit
ni
modifié
ni
troublé.
Il
en
sera
exactement
de même pour
le
classe-
ment
des
idées,
des
notions qu'on
aura recueillies
sur
un
point
déterminé des sciences, sur une
ques-
tion
professionnelle
:
Inscrivez chaque
idée,
cha-
que
notion,
sur
une
fiche
séparée,
et il
vous
sera
facile,
lorsque
vous
vous
serez
constitué
un
ordre
de
classement
méthodique,
d'aller
placer
cette
fiche
dans
le
groupe
naturel auquel
elle
appartient.
Presque
indéfiniment, ces fiches
pourront
augmen-
ter
en
quantité sans que
l'ordre
général
en
soit
troublé;
leur
nombre
se
multipliera,
certaines
sec-
tions
verront leur
série
de
fiches
s'accroître
pres-
que
indéfiniment
;
d'autres,
au
contraire,
en
rece-
vront
peu ou
pas.
Si
l'on s'était imaginé de
constituer
un
registre
dans lequel
on
eût réservé
un
nombre
de
pages
blanches proportionné
à
l'im-
portance
relative
et
prévue
des
questions,
on
aurait
été
vite
débordé
et déçu. Certaines
sections
se
seraient trop
remplies,
tandis que
les
autres
conti-
nuent
à
ne
présenter
que
des pages
blanches.
Avec
le système
des
fiches,
au
contraire,
jamais
de pa-
ges
inemployées,
jamais
de
prévisions
dépassées
:
les
fiches
nouvelles viennent s'intercaler d'emblée
à
leur
place exacte.
Il
n'en
est
aucune
qui reste
blanche,
en
position
d'attente.
Si,
à
un
moment
donné quelconque, on
se dé-
cide
à modifier
le mode de
groupement
des
fiches,
à créer
des
chapitres
nouveaux,
rien
n'est plus
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 62/140
58
ORGANISATION
aisé,
puisque
ce sont tous
des feuillets
mobiles
qui
viendront
se
placer
les
uns
à
côté des
autres
pour
former
un
ensemble
toujours
homogène
et
tou-
jours
aussi
parfaitement
rangé.
Choix
du modèle
de
fiches.
—
Lorsqu'on
veut
se
constituer une
collection
de
notes
par
la
méthode
des
fiches,
il
faut
savoir
choisir
d'emblée,
clés
le
début,
un modèle
de fiches
qui
convienne
au
genre
de
travaux auquel
on se
livre,
modèle
que
l'on
puisse
suivre,
pour
ainsi
dire,
de façon indé-
finie. Le
système
le
plus simple,
le plus
économi-
que
assurément,
consiste
à
utiliser
comme
fiches
la
feuille
de
papier blanc
découpée
soit
en
quart de
feuille, soit
en
huitième
de
feuille,
selon l'abon-
dance des notes que
l'on
est
habitué
à
prendre
sur
un
même
sujet, sur
une même
lecture
ou
sur
un ouvrage. Cette
sorte de
fiche,
si elle
a l'avan-
tage
d'être fort
économique,
a,
par
contre, l'incon-
vénient d'être
peu
résistante,
de
s'abîmer, de
se
détruire
avec
le
temps.
Elle
est pourtant
la
moins
encombrante
et
la
plus
maniable
pour les travail-
leurs
soigneux.
Lorsqu'il
s'agit
de
notes à
con-
server
longtemps,
à
consulter
souvent, on a
profit
à
utiliser
des
fiches
en
carton
mince.
Certaines
maisons
qui
se
sont
fait
une
spécialité
de ces
fiches,
les livrent
toutes
préparées à des
prix
assez
modiques.
Suivant la
résistance
nécessaire,
suivant
aussi
les
manipulations
auxquelles elles
seront
soumises
et
selon
la durée
qu'on
en
exigera,
les
fiches
se
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
59
font
soit
en
papier
bulle
fort,
'soit
en bristol
sou-
ple,
soit
en
carte
blanche.
Elles
sont
livrées
en
blanc,
réglées
ou
quadrillées,
au
gré de
l'acheteur.
En
raison
de
la
forme
générale
des
mentions qu'on
aura
à
y
inscrire,
les
.fiches
s'établissent
soit dans
le
sens
vertical,
soit
dans
le
sens
horizontal.
Dans
les
fiches
du
modèle
vertical,
six types
cou-
rants
sont
à la
disposition
de
l'acheteur
:
Hauteur
Largeur
95
mm.
60
mm.
105
—
68
—
125
—
80
—
150
—
95
—
170
—
120
—
202
—
120
—
Dans
les
fiches
du
modèle
horizontal,
les
formats
courants
dits
formats
internationaux
sont
les
sui-
vants
:
Hauteur
Largeur
7 cm. 5 12
cm.
5
10
—
15
—
12
—
20
—
Nous
aurons occasion de
voir plus
loin
que
l'on peut
demander
que
ces
fiches soient
ou
ne
soient pas
munies d'une encoche, d'un trou
ou
d'un
onglet à
leur
base, toutes
particularités
qui
varient
selon la
nature
et
la
forme des meubles
ou casiers
dans lesquels les fiches
seront
ultérieu-
rement
rangées (Voir
p.
89-91).
Tels
sont les
modèles
courants
des
fiches. Com-
ment
doit-on
les
utiliser,
que doit-on
y
inscrire?
En
principe,
une
fiche
doit
contenir
des renseigne-
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 64/140
60
ORGANISATION
ments
exacts,
concis
,
se
rapportant
à
un
sujet
bien
déterminé.
Il faut
s'efforcer
de n'inscrire
sur
une
fiche
qu'une
idée
complète,
ou
que
des
idées
d'une
seule
catégorie
bien
délimitée.
Le
classe-
ment
ultérieur
n'est,
en effet,
possible
qu'à cette
condition.
Une
fiche qui
contient
deux idées
diffé-
rentes
devrait,
en effet,
être
classée
en deux
en-
droits,
il faut
alors
la répéter.
Lorsqu'une
fiche est destinée
à conserver
la
trace
d'une
lecture,
il
est
toujours
indispensable
de
noter
très
soigneusement
toutes les
indications
biblio-
graphiques
:
nom d'auteur,
litre
exact,
nom
de
l'éditeur
,
année
de
la
publication,
désignation
même
de
l'édition
et
numéro
de
la
page.
Souvent,
il est bon
de
mentionner
dans quelle
bibliothèque
on
a
eu
l'occasion
de
consulter
l'ouvrage.
Des
ren-
seignements
aussi précis
peuvent,
parfois,
sem-
bler
superflus;
ils
éviteront
pourtant
souvent
des
recherches
ultérieures.
Lorsque
JTon
prépare des recherches
bibliogra-
phiques
et qu'on
veut
recourir
soi-même
aux textes
des
ouvrages
cités
dans
un ouvrage
ou
dans un
catalogue,
on
note
sur une
fiche
l'indication
biblio-
graphique
telle
qu'on
la
trouve.
Il
est
sage
de
toujours
inscrire
au
bas
de
chaque
fiche
de
quel
ouvrage
l'indication bibliographique
est
tirée.
On
peut,
en
effet, commettre
des
erreurs
de
transcrip-
tion,
et avoir
besoin plus
tard
de
contrôler l'indi-
cation
dans
l'ouvrage
même
qui
l'a
fournie. Quand
les
fiches se
sont
multipliées, il serait impossible
souvent
de
se
souvenir
de
l'ouvrage
clans
lequel
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 65/140
DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
61
on a
puisé
les
indications.
Surtout
lorsqu'on
n'a
pas
la
possibilité
de
contrôler
soi-même
les
travaux
cités,
il
est
à
la
fois
honnête
et
prudent
de
toujours
indiquer à
quel auteur
on
a emprunté
l'indication
que
l'on
donne,
car elle peut
être
fausse
ou
tronquée,
et ce
fait
est
moins
rare
qu'on
ne
pourrait
se
l'imaginer.
Voilà
donc
les
fiches
préparées;
le
matériel
lui-
même,
les
fiches
ont
été
choisies
dans
leurs
mo-
dèles,
dans
leurs
dimensions.
Sur
ces
fiches,
nous
avons
inscrit,
soit une idée,
soit
un
renseignement,
soit
le
résultat
d'une
lecture;
il
va
falloir
mainte-
nant
les
classer,
c'est-à-dire
leur
assigner une
place
à
laquelle
on
puisse
sûrement,
promptement,
les
retrouver
toutes les fois qu'on en
aura
besoin.
Il
faut
même,
si
l'on
veut
que
l'outillage
soit
réellement
pratique,
que
toutes ces
fiches
portent
mention
de
la
place
qui leur
est assignée
dans le
rangement,
de
telle façon qu'on
puisse,
au
besoin,
les
sortir
pour
s'en
servir
et
qu'elles
retrouvent
ensuite
presque
automatiquement
leur
place.
Qualités
indispensables du système
:
permettre
de
retrouver
rapidement
la
fiche
voulue,
pouvoir
ensuite
tout
aussi
rapidement
la
remettre
à
sa
place.
C'est
donc
la
méthode
de
classement
qu'il
nous
faut
maintenant choisir.
Tout
le succès
du
système
dépend
du choix (['une
bonne
méthode
de
classement.
Classer.
—
Si encore,
à
l'heure
actuelle,
diver-
ses
méthodes
de classement
se
partagent
la
faveur
6
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 66/140
62
ORGANISATION
du
public,
c'est non pas parce que toules
les
mé-
thodes
indifféremment sont
bonnes,
mais
bien
parce
que
l'on
ne s'est pas encore entendu sur les
qualités auxquelles la
méthode
type doit
répondre.
D'instinct,
on
est
porté
à s'imaginer que la
mé-
thode préférable
doit
se
présenter
sous
un
type
tout à
fait simple;
aussi
la méthode
alphabétique
est-elle
celle
qui
réunit
les
suffrages
de
toutes
les
personnes
encore
peu au
courant de ces
questions
de
classification.
Rien
n'est
plus
attrayant à première
vue,
car
les
recherches semblent
particulièrement
faciles
entre des
fiches classées par
ordre alphabé-
tique,
lorsqu'on
a
dans
chacune de
celles-ci mis
en
vedette
le
mot
essentiel
qui
en
constitue,
pour
ainsi dire, le
titre
de
chapitre
et qui
en
donne
la
caractéristique.
Malheureusement, cette méthode si
séduisante
à
première
vue
est passible
de
graves
objections,
objections
si capitales,
qu'elles
comportent
pres-
que
sans restrictions,
et
dans
la
plupart
des
cas,
le
rejet du
système.
Tout
d'abord,
il
est beaucoup
moins
simple
qu'on
ne
croirait
de
trouver le
mot
qui,
dans une
note,
dans
une
fiche,
dans
un
titre,
caractérise
l'idée
principale.
Supposez
que nous
ayons à
classer
une
fiche
mentionnant
la
référence
bibliographique
d'une
brochure
récemment
parue
:
Pourquoi
les
Alle-
mands
seront
vaincus?
Aucun des mots
dont
se
compose
ce
titre ne
contient l'idée principale
sur
laquelle
il
évolue.
Des
cas de
ce
genre
se
présentent
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 67/140
DU TRAVAIL
INTELLECTUEL
63
souvent et
suffisent
déjà
à mettre le
système
en
défaut.
En
effet,
si,
plus
tard,
on
venait
à
se
rap-
peler
le
titre
exact
et qu'on veuille
relire
la
fiche
prise
à
son sujet,
il
faudra,
par
un
effort
de
mé-
moire,
se
rappeler le
mot
caractéristique
qu'on
lui
aura
attribué
et qui pourra
être
:
guerre,
ou vic-
toire,
ou
motifs,
ou
raisons,
ou
causes
de la
victoire,
etc.
Le
classer
au
mot
pourquoi
eût
été
le
moyen
le
plus
sûr que
la mention
de
cette
brochure
ne
pût
jamais
se
rapprocher
du
groupe
de
celles
qui
traitent
de
sujets
analogues.
Surtout
comme
la
langue
française
est
riche
en
synonymes, il
arrivera
souvent
qu'on
attribuera
à une
portion
des
notes sur
un
même
sujet l'un
des
noms
entre
lesquels on
peut
choisir, tandis
que tout
un
autre
groupe
sera
indexé
par
l'autre
synonyme.
Si
l'on
fait
une
classification d'anatomie
en suivant
l'or-
dre
alphabétique,
il
sera,
par exemple,
à
craindre
que
certains
travaux
soient
catalogués
au
mot
cerveau, tandis que
d'autres
très
analogues
seront
classés
à
encéphale
ou à lobes cérébraux,
etc.
N'y
a-t-il pas à supposer encore
que
certaines
publi-
cations
de même sorte concernant
les
centres ner-
veux
n'aillent
créer
un troisième
groupe
du
clas-
sement
alphabétique?
D'autre part,
certaines
catégories
du classement
par
mois risqueront
de
réunir
des
matières
bien
hétéroclites
:
canal rachidien
ne
risqiic-t-il
pas
de
se
trouver bien
incidemment
rapproché
de
canal
de
l'urètre
ou
canal
lacrymal?
Trompe
uté-
rine
et
trompe
d'Euslache
n'ont
d'autre
rapport
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 68/140
64 ORGANISATION
qu'un
rapprochement
alphabétique
bien
fortuit.
Songera-t-on
successivement
à
chercher
aux
mots
tuberculose, bacillose, phtisie etphymathose, etc.?
En
un autre
ordre
d'idées,
pensera-t-on
à se
reporter successivement aux
mots
amitié, attache-
ment, affection
et sympathie
,
sous
lesquels
des
documents très analogues
pourraient
être classés?
Un
exemple absolument
typique
des
inconvé-
nients
du classement
alphabétique est
fourni
par
un
ouvrage
aussi répandu qu'utile, le
Bot
tin.
Le
volume
des
professions
est
classé par catégories
alphabétiques.
Ce système
oblige
à d'innombrables
répétitions
et
difficultés
de
recherches.
Qui
se
douterait,
par
exemple,
que
l'on
trouve
des
indications
similaires
sous les
rubriques
:
reliure
automatique,
reliure
mobile,
biblor
aptes
et
classeurs
?
Que,
d'autre
part,
il faut
chercher
obligatoire-
ment
et
pour le
même
sujet aux
chapitres
:
poly-
copie
et
mullicopie .
Le
défaut est si
réel
et
si
apparent,
que ce
même
volume
du
Bottin
comporte
en
tête une table
mé-
thodique
des
professions.
Quelques
personnes
pensent
obvier
à
cet
incon-
vénient
en
intercalant
des
fiches
de
renvoi
aux
divers
synonymes de
chaque
terme;
mais
cette
complication
ne
remédie
que
très
imparfaitement
à un défaut
fondamental,
car
le
synonyme a un
champ
pour ainsi
dire
illimité.
Par
synonymie
approchée,
on
peut
faire
le
tour
complet
du
dic-
tionnaire
d'une langue.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 69/140
D
U
TUA
T
A
IL
LY
TEL
LEC
TVEL 65
La
création
si
fréquente
de
termes
profession-
nels
nouveaux
oblige
à
une
révision
constante
de
la
table
des
synonymes.
Le vocabulaire spécial
de
chaque
auteur accentue
encore cet
inconvénient.
D'autre
part, une homonymie
toute
fortuite
peut
créer
les
rapprochements
les plus
imprévus.
Une
erreur
de
ce
genre, devenue
déjà
classique,
est
celle
de
cet
Allemand
qui,
faisant
la
bibliographie
des
modifications de
la
forme
des
cellules
en
botanique
et
en
zoologie, avait
intercalé dans sa
nomenclature
la mention du
livre
de
Baillaut
:
Impressions
cellulaires. Les
notes
prises
par
le
pensionnaire
de
la prison
de la
Santé
n'avaient
cependant
aucun
rapport
avec
des questions de
micrographie,
de microscope.
Si
même on
arrivait
à
obvier à
ces
inconvénients
du
classement
alphabétique,
une autre
objection
fondamentale
subsisterait
tout
entière
:
lorsqu'on
veut
rapidement faire dans
ses
propres
notes
une
revision
d'un
chapitre
déterminé,
les
diverses
fiches
qui
le
concernent
sont
réparties
au
gré de
l'alpha-
bet,
en
des parties
fort
éloignées
les unes des
autres.
Toute
recherche
globale
constitue
donc
un
travail
réellement compliqué,
souvent impossible.
Autre
inconvénient
encore :
un
môme
mot
peut
servir
de
terme
général
pour
classer
un très
grand
nombre
de
fiches,
comme,
par
exemple,
le
mot
encéphale.
Si l'on
s'est spécialisé
[dans
les
études
du
système
nerveux central,
comment
vont
alors
se
créer les
subdivisions
dans
ce
groupe
devenu
exubérant,
pléthorique?
On
va
peut-être
alors
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 70/140
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 71/140
DU
TRAVAIL INTELLECTUEL
67
phie
générale,
de
sciences,
et
plus
particulière-
ment
de
toutes
les
générations des
bibliothécaires,
libraires,
etc.
Un
ouvrage
resté
classique
en
la
matière,
le
Manuel
du
libraire et
de
l'amateur
de
livres de
Brune
1
,
a
donné
un
historique des
méthodes
de
classement
bibliographiques et
a
proposé
une
table de classification
en
forme de
catalogue
méthodique, il établit
des
divisions
par
grands
chapitres,
avec
subdivisions
en
sec-
tions,
sous-sections,
etc.
Le
gros inconvénient
d'un catalogue méthodi-
que,
si
détaillé
qu'il
soit,
c'est
qu'il
est, dès
sa
création,
à la
fois
définitif
et immuable,
même
s'il
a
la
bonne
fortune
d'être
complet,
et
de
n'être
pas
déjà
en
retard
au
moment
où
il
est
publié.
Mais,
à
quelques années
de
distance,
nos
connais-
sances
générales
se modifient, et
tel chapitre
qui
jadis
n'avait
qu'une place minime
prend, au con-
traire,
soudainement
une importance
aussi
consi-
dérable
qu'imprévue;
tel
sera
le
chapitre
de
la
radiologie,
qui
a
surgi
ces
années dernières dans
le
territoire
de
la
physique médicale.
Il
est
indispensable
que
le catalogue
général de
classement
des
sciences
ou
de
nos
études
reste
dans
toutes
ses
parties
indéfiniment
extensible,
qu'on
puisse
à tout moment
y
créer,
y
introduire
des
chapitres,
des subdivisions
même, sans
modifier
en
rien
l'ordre
qu'on
avait suivi
jusque-là.
Donc,
qualités
maîtresses
à
exiger
d'une
classi-
fication
:
1. Firinin-Didot,
1865.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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68
ORGANISATION
être
complète,
être
indéfiniment
perfectible.
Le
perfectionnement
indéfini
ne
doit,
en
plus,
provoquer
aucun
bouleversement
fondamental
pé-
riodique.
Notation
des fiches.
—
Dans
le classement
des
fiches,
lorsque
celles-ci
deviennent
nombreuses
il
faudra,
en
outre,
que
Ton
puisse
inscrire
sur cha-
cune
d'elles,
d'une
façon
tout
à
fait
simple,
l'indi-
cation
du
chapitre
dans lequel
cette
fiche
doit
être
rangée. C'est
la
notation
de
la
fiche,
son
numéro
de
classe.
S'il
fallait
écrire
en
toutes
lettres,
sur
chaque
fiche,
le
nom
des
groupe, sous-groupe,
division,
section,
sous-section,
auxquels
chaque
fiche
appartient, on aboutirait
à
un
système
d'écri-
tures
si compliqué
qu'il
serait
inapplicable.
On
avait
songé, dans un
but de
simplification,
à
attribuer
à
chaque groupe du
catalogue
un
numéro
d'ordre
et
à
reporter
ensuite
sur chaque fiche
l'in-
dication
de ce
numéro.
Ce système
de
numérotage
tout
d'abord
paraît
séduisant
par
sa
simplicité,
mais
on
se
trouve bientôt
aux
prises
avec
une
dif-
ficulté
inextricable.
Si,
en
un
point
quelconque
du
catalogue,
un
chapitre
vient
à
se
subdiviser,
com-
ment
chiffrera-t-on
ces diverses subdivisions?
On
pourrait, à la rigueur,
créer
les
chapitres
94
bis
et
94
ter,
etc.
Mais
si
le chapitre
94 bis
veut
lui-même
se
subdiviser,
impossible
de compliquer
encore
ce
système
de
numération,
et la difficulté
peut
se
re-
produire
plusieurs
fois
de
suite.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 73/140
DU
TRAVAIL INTELLECTUEL 69
Existe-t-il une
classification
qui satisfasse
à tou-
tes
les
nécessités?
Classification
décimale.
—
On
est en possession,
depuis
d'assez nombreuses
années
déjà,
d'un
sys-
tème
de classification décimale qui
répond
à tous
les
desiderata
formulés
précédemment, et
qui
n'a
aucun des
inconvénients
des
méthodes
qui
ont
été
précédemment
passées
en
revue.
Cette
méthode
décimale,
inventée
par Melvil
Dewey,
fut
appliquée
pour
la première
fois
à
la
Bibliothèque de
l'Amherst
Collège
(Massachusets).
Présentée
d'abord
en
1873,
elle
a
été
exposée
au
complet
en
1891
4
par
son
auteur.
En
189o
et
1897,
elle fut adoptée
par les
Confé-
rences
internationales
réunies
à
Bruxelles,
par
l'ini-
tiative
de
l'Institut
international
de
bibliographie
de
Bruxelles.
ce
Ce
système
est
destiné
à
servir
de base
au ré-
pertoire
bibliographique
universel
de
bibliographie
par
matières,
et
à créer un
lien
entre
les
travaux
bibliographiques
particuliers qui peuvent,
s'ils
se
conforment
à
cette
classification,
être considérés
comme
des
contributions
à la
bibliographie
univer-
selle.
»
Conçu,
comme nous
venons de
le
voir
ici, comme
méthode
bibliographique,
il
est d'une portée
géné-
rale.
Sans
modifier
ni
de
ses
principes
ni de
ses
1. .Melvil
Dewey,
Décimal
Classification
and
relativ index
for
arranging,
cataloguing
and indexing
public
and
private
libraries,
Boston.
Une
édition
parue en 1891.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 74/140
70
ORGANISATION
détails,
il
peut
tout
aussi
bien
être employé
pour
classer
des
notes,
voire
même
la simple
mention
d'idées
quelconques.
C'est
précisément
l'utilisation
de
ce
système
dé-
cimal
dans
un
but
très
particulier
qui est
le
pivot
du présent
ouvrage
de
Propédeutique générale.
La méthode
décimale,
nous l'empruntons
sans
même
la
modifier
à
son
auteur;
mais
cette
mé-
thode
avait
été conçue
dans
un but particulier,
exclusivement
en
vue de
la bibliographie
:
nous
proposons
de
l'employer
comme
méthode générale
de travail.
C'est
probablement
une
de
ses
applications
les
plus
fécondes,
plus
intéressante
même
que
son
uti-
lisation
dans les bibliothèques, où
des difficultés
pratiques
se
sont
rencontrées
et
en
ont
retardé la
généralisation.
Pratiquement,
nous
l'appliquons pour
notre
pro-
pre
compte
depuis
une
quinzaine
d'années
environ,
elle
nous
a
toujours
donné
satisfaction;
c'est à
ce
titre
que
nous
la recommandons.
Toujours
il
nous
a
été
possible,
et
pour ainsi
dire
instantanément,
en
quelques
minutes,
de
réunir
toutes les
notes
prises
à
une
époque
quelconque
sur
un sujet
donné,
d'en
disposer
soit
à
propos
d'une
conférence
à
faire,
soit
pour
préparer
une
publication;
même
parfois
elles
ont
pu
être prêtées à
quiconque,
et,
reve-
nues
ensuite,
elles
retrouvaient
instantanément
leur
place
dans
le
classement.
En
quoi
donc
consiste
cette
méthode
décimale?
Elle
repose
tout entière
sur
une
convention
qu'on
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 75/140
DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
71
peut,
il
est
vrai,
considérer
comme
arbitraire
1
,
mais
qui
aboutit
à
des
résultats
absolument
pratiques.
Dans
ce
système
décimal
on
divise
l'ensemble
des
connaissances
humaines
en
dix
parties
numé-
rotées
de
à
9.
Chaque
branche est,
elle-même,
numérotée
de
à 9.
Suivant
le
même
principe,
on
poursuit
les
subdivisions
pour
ainsi
dire
à l'infini,
en
restant
toujours
dans
le
même
cadre
de
subdivi-
sions
par
dix.
La
première
division
générale
des
sciences
hu-
maines
a
été
ainsi
établie
:
Ouvrages
généraux.
1
Philosophie.
2
Religion.
3
Sociologie.
4
Philologie.
5
Sciences
pures.
6
Sciences appliquées.
7
Beaux-arts.
8
Littérature.
9
Histoire.
Une
des conventions de
ce système
est
que
les
chiffres
par lesquels on
catalogue
un ouvrage,
ou
une
note, ou
une
fiche,
ne
se
lisent
pas
comme
des
nombres
entiers,
[mais
bien comme
des chiffres
décimaux
:
la
première
tranche,
le premier
chiffre
d'un
nombre
par
la
gauche,
désigne
les
classes
du
premier
ordre;
le
second chiffre
indique
une
subdi-
vision
du
chiffre
qui
le
précède
à
gauche, et ainsi
1.
Toute
classification est
arbitraire,
car
c'est uue forme
de caté-
gorie
de
l'esprit.
Les
objets de
notre
connaissance
constituent
dans la nature des
séries
continues; la
classification
est
une
des
conditions indispensables
pour
que
nous
en
puissions
l'aire
l'étude.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 76/140
72
ORGANISATION
de
suite. C'est
ainsi,
par
exemple, que
si
l'on
ren-
contre
dans la classification
des
notes portant
les
index
6150
—
689
—
et
61,
il
ne
faut
pas
classer
ces notes comme
s'il
s'agissait
de
nombres
entiers.
Si
c'étaient des nombres
entiers
quelconques,
il
semblerait
qu'on
doive
suivre
l'ordre
numérique
simple
et
qu'on doive
classer
dans
l'ordre
:
61
689
6150
Or, il
n'en
est
rien,
la classification se fait d'abord
par
le
premier chiffre
à
gauche,
les
trois notes ci-
dessus
appartiennent
donc
au
même
nombre
initial 6.
On
considère
ensuite
le
deuxième
chiffre, et
on
voit
alors
que
61 et
6150 sont du même
groupe,
tandis
que
689
par
son
chiffre
8
appartient
à
un groupe
d'un
ordre
suivant. 61 et
6150 sont donc
rappro-
chés l'un de
l'autre,
puisque
leurs
deux
premières
subdivisions
sont
communes.
Ensuite, pour
les
classer
l'un
par
rapport
à l'autre,
on
considère
la
troisième
tranche du chiffre,
et
on
voit
alors
que
6150
est
une subdivision ultérieure
du groupe 61.
La
comparaison des
chiffres
se
fait
donc
d'après le
tableau
:
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 77/140
DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
73
ta
a
O Q
'M
O
h
a
6
c£
es —
o
~
H
CS
-<:
m
CS
11
II
1
8
9
1
et le classement
s'impose
alors
dans
l'ordre
suivant
:
1°
61
2°
6150
3
689
Si
nous
prenons
comme exemple le
groupe
6,
celui
des
sciences
appliquées,
celui-ci
se
subdivi-
sera
en
dix
parties,
médecine, art
de
l'ingénieur,
industrie,
etc.
La
médecine
deviendra
donc
61,
l'art
de
l'ingénieur,
62,
etc.
Le
groupe
61,
celui
des
sciences
médicales,
se répartit
en
:
/
010.
—
Sciences
médicales.
611
.
—
Anatomie.
-
612.
—
Physiologie.
Généralités.
61.
Sciences
médicales.
Histologie.
613.
614.
615.
616.
on.
618.
619.
—
Hygiène
privée.
—
Hygiène
publique.
—
Matière
médicale
et
thérapeutique.
—
Pathologie
interne.
—
Pathologie
externe
opératoire.
et
médecine
Gynécologie
obstétrique
et
pé-
diatre.
Médecine
vétérinaire.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 78/140
616
616
:(0).
616
.
0.
616 01.
616 02.
74
ORGANISATION
puis chacune de
ces
branches
elle-même
se
subdi-
vise
encore
suivant
le
mode
décimal.
Yoici,
à titre
d'exemple
détaillé, une
page
ex-
traite
d'un
répertoire
médical
décimal
:
Pathologie interne.
Maladies et leur
traitement.
Généralités.
Pathologie
générale (médicale).
Anatomie
et
histologie pathologiques
générales.
Bactériologie et
pathologie
générales.
616
: 022.
Bactériologie
générale.
616
:
022-0. Généralités.
Laboratoire.
616 :
022-1.
Structure et
biologie des
mi-
crobes.
616 :
022-5.
Coccus
associés,
staphylocoques,
streptocoques.
616
:
022-6.
Bactéries.
616
:
022-96.
Microbes
pathogènes.
616
:
03.
Sémiologie
générale.
616
:
04.
Autopsies.
616
:
07.
Diagnostic
médical
général.
616
:
1.
Maladies
du
système
circulatoire.
616
:
10.
Généralités.
616 : 11.
Péricarde.
616
:
12.
Cœur
(angine
de poitrine,
endocar-
dite).
Troubles
valvulaires.
616
:
13.
Artères.
616 :
14.
Veines.
616
:
15.
Sang.
616
: 2.
Maladies
du
système
respiratoire.
616
:
20.
Généralités.
616
:
201.
Croup.
616
:
202. Asthme.
616
:
203.
Iniluenza
ou grippe.
616
: 204.
Coqueluche.
Nez.
Naso-pharynx.
Larynx.
Trachée.
Bronches
(Bronchite,
asthme).
Poumons.
016
:
240.
Généralités.
616 21.
616 22.
616 23.
616
24.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 79/140
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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76
ORCAyiSATION
rare
[qu'une même
personne
ait
couramment
l'oc-
casion
d'utiliser
une classification
s'étendant
à
plus
d'une
ou
deux
branches
des
sciences, c'est-à-
dire
exigeant
plus d'un
ou
deux
de
ces catalogues.
2°
Lorsqu'on
s'occupe d'une question
spéciale,
il
est extrêmement
simple
d'en
établir
presque
instantanément
soi-même
le
catalogue
décimal
de
la
façon
suivante
:
on
prend
un
traité
général
concernant
cette
question,
et
on va
tout droit
à
la
table
des matières. Rien
de
plus
aisé, en
y
réflé-
chissant
quelques instants,
que
de
répartir
les
cha-
pitres
de
cette
table
en
10 numéros, soit
qu'on
en
groupe
deux
ou
trois
ensemble
au
besoin, soit
au
contraire
qu'on en
dissocie quelques-uns qui paraî-
traient
trop
chargés.
Toujours
en
travaillant
sur
cette
même
table
des
matières,
on crée
soi-même
les subdivisions
de
deuxième
ordre,
puis
de troi-
sième
ordre,
et
on
remarquera de
suite
qu'il
suffit
d'indexer
la
table
jusqu'au
troisième
chiffre
pour
créer
mille
catégories,
mille chapitres
entre
les-
quels
se répartiront
les
notes à classer.
C'est,
en
quelque
sorte, comme
si
l'on avait
créé
un meuble
classeur
comprenant
mille
casiers,
et
cela sans
aucun
frais,
sans que cette
organisation
tienne
la
moindre
place.
Il n'est
nullement
indis-
pensable,
en
effet,
que
chacun
travaille
sur
une
classification
qui
soit absolument
conforme à
celle
de
l'Institut
international de
bibliographie.
Il
peut
sible
qu'en
raison des
conditions
actuelles
on
ait quelque peine
à
se
les
procurer.
11
est
vraisemblable
pourtant
que
ces
publica-
tions
seront
ou
continuées ou
rééditées.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL 77
être
pins
commode,
surtout
au début, d'utiliser
les
divisions
établies
par des
personnes
rompues à
ces
recherches,
mais
ce
n'est
nullement
nécessaire,
et l'on
peut
fort
bien
travailler
une vie
entière
avec
le
catalogue
que l'on
s'est soi-même
dressé.
D'ailleurs,
rien
n'empêche,
à un
moment
donné,
de
changer complètement
le
catalogue
de
classifi-
cation. Sur
les
fiches, il
suffit de barrer
les
chiffres
précédemment
inscrits
et
de
leur attribuer
ceux
du nouveau catalogue.
Savoir se
créer
une
classification
de
ce genre
est obligatoire
pour
ceux
qui veulent
s'occuper
d'une
science encore peu connue ou qui
font
des
recherches
personnelles
en
vue
d'une invention.
C'est
surtout la méthode à conseiller aux
débu-
tants,
qui
feront
ainsi
leur
classement
aussi
simple
qu'ils
pourront
le
souhaiter.
Signalons
à
l'avance,
pour éviter les
tâtonne-
ments
en pure perte,
que
la
méthode
décimale,
étant
absolument
générale,
est
susceptible
d'appli-
cations
variées
en apparence,
mais
identiques
au
fond.
Ainsi, certains
inventeurs
de
systèmes
se
sont ingéniés à
utiliser,
par exemple,
un
index
à
numération
alphabétique
absolument
décalqué
d'ailleurs sur l'index
décimal,
mais
alors
le
pre-
mier groupement
comporte
25 divisions
catalo-
guées
par
les
lettres
A
àZ.
Les subdivisions
se
font
de
la même
façon,
et chaque
index
par
lettre
d'une
fiche
quelconque
se
classera d'abord
par la
première
lettre
à
gauche,
puis la
deuxième
lettre,
puis
par
la
troisième
lettre,
tout
comme
un
dictionnaire.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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78
ORGANISATION
Quelques
autres
auteurs se
sont imaginé
être
originaux
(surtout dans les pays
où
les unités
de
mesure
ont
continué
d'appartenir
au
système
duo-
décimal)
en proposant une
classification cataloguée
à
indexation
duodécimale
(Perkins et Schwartz,
B.
Pickmann).
Mais
ce
système
ne
serait
accep-
table
que si l'on
faisait
usage
couramment d'une
numérotation
duodécimale,
ce
qui
n'est
le
cas
chez
aucun peuple
civilisé.
Ce qui fait
le
mérite
réel
de
toute classification
du
type
décimal
normal,
c'est
qu'elle est
réelle-
ment
universelle, applicable aux métiers, aux
spé-
cialités
les plus
diverses.
Grâce
à
elle,
un
musicien
pourra
classer
les
do-
cuments
provenant
de
ses recherches, il
rangera
dans
un
ordre
naturel
et retrouvera
en
temps
opportun
ses
improvisations,
quelle
que soit leur
diversité.
Un
littérateur
saura retrouver à
point
nommé
les
mille
notes qui
représentent
son
labeur
quoti-
dien
d'observations
sur le
vif,
ou
de
lectures.
Un
dessinateur,
toujours
par
la même
méthode,
arrivera à
classer
ses
croquis
d'une
façon
pratique
t
au
lieu
d'être obligé
à chercher
dans d'innombra-
bles
albums où
le
seul
lien
est
l'ordre
chronolo-
gique,
quand
celui-ci a
été,
même
par hasard,
observé.
Tout
pareillement,
un
théologien
retrouvera,
et
tout aussi
aisément, les
éléments
d'un
sermon
ou
les arguments
d'une
controverse.
On
peut
donc
dire et
affirmer
qu'une
méthode
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
79
utilisable
en des
cas
aussi divers a
bien
réelle-
ment
une
portée
universelle.
Comment
se
fait-il, dira-t-on,
qu'un
système
aussi parfait
ne
se soit
pas encore
généralisé
et
qu'il
soit
relativement
peu connu?
On
pourrait
peut-être
d'abord répondre
que
le
public
est
peu
porté
à
apprécier
les
nouveautés
les
plus pratiques
r
que
l'engouement
se
porte plutôt
sur
des
vérités
absolument
transitoires,
et
Parmentier
a
rencontré
beaucoup
plus
de résistance
durable
que n'en
saurait
trouver
l'inventeur d'une
mode
féminine.
D'autre
part,
jamais, à
notre
connaissance,
ce
système
décimal
n'a
été présenté
au
public comme
méthode
pratique
de
travail
personnel. C'était
une
notion
réservée
aux
seuls
bibliothécaires, donc
tout
à
fait
spécialisée.
Enfin,
une
autre raison
sans
doute plus
valable
encore
mérite
d'être retenue
: ce
n'est
pas
d'or-
dinaire
au
début
de
ses études
personnelles
qu'on
regrette
d'avoir
manqué
de
méthode
de
travail
et
d'ordre de
classement.
Plus
habituellement,
c'est
au
moment
où,
l'âge étant
venu,
on
voudrait
utili-
ser
ses
documents. Alors seulement
on
s'aperçoit
que
les notes
forment
un
fouillis
inextricable, que
beaucoup
h
d'entre
elles ont
disparu.
Adopter
de
nouvelles
méthodes de
travail
devient
plus
difficile
lorsqu'on a franchi-la
trentaine, et
à
plus forte
rai-
son plus
tard;
^rompre
avec
ses habitudes, même
si
elles
sont
mauvaises,
et
pourrait-on
dire
sur-
tout si
elles
sont
mauvaises,
constitue
un sacri-
fice
auquel
beaucoup
ne
sauraient
se
résoudre.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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80
ORGANISATION
Donc,
commencez
de
bonne
heure
à
vous
faire
une
bonne
méthode de classement
et à
vous
y
astreindre.
C'est
tout
un
avenir
que
vous
vous
assurez.
Le
cahier
-répertoire de
la
classification.
—
Lorsqu'on
adopte
la
classification
décimale,
il
est,
bien
entendu,
indispensable d'avoir toujours
sous
la main
soit l'une
des
brochures
de
l'Institut
biblio-
graphique
dont
il
a
été parlé
(page
75),
soit le
cahier-
répertoire
qu'on
s'est
soi-même créé
sur
un
modèle
analogue,
et
dressé
comme il
a
été
indiqué
(page
76).
Quel
qu'en
soit
le
modèle adopté,
ce
cahier-
répertoire
est
la
table
des
matières
de
la
collection
de
fiches.
C'est
à
lui
qu'on
a
recours
lorsque,
au
moment
d'introduire
des fiches
nouvelles
dans îa
série,
on
va
leur attribuer le
numéro
indicateur
de leur groupe de
classement.
Le
cahier-répertoire
sert
encore
lorsqu'on se
dis-
pose à
faire
une
recherche dans
la
collection.
De
temps en temps on est amené
à modifier
ce
cahier,
pour
y
ajouter mention de
subdivisions
nouvelles.
Il
est
prudent, au début,
de l'écrire en
laissant
des
blancs
assez
nombreux
à
la
suite
des
divers
alinéas,
ou
encore
de
conserver en blanc
le
verso
de
chaque page du cahier pour
y
inscrire
les
addi-
tions
devenues
indispensables.
Les
erreurs à
éviter.
—
La méthode
décimale
est
excellente.
Il
ne
faudrait
pas
lui
imputer
quel-
1
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 85/140
DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
81
ques
inconvénients
qui ne tiennent
d'ailleurs
nul-
lement
au
système
lui-même,
mais
tout
unique-
ment
à
des erreurs
de
ceux
qui
l'emploient.
jre
erreur
:
ne pas
savoir
se
limiter.
—
Si
par-
faite
que
soit la classification
adoptée, il
ne faut
pas
prétendre
y
faire
entrer
toutes les
notes
qu'on vou-
drait recueillir
sur
des
questions
trop vastes
ou
trop nombreuses. //
est
nécessaire
de savoir
res-
treindre,
délimiter le
champ de son
activité : si
l'on
prétend toucher
à de
multiples
questions
impor-
tantes,
il faut
s'en
tenir
aux
généralités,
ne
pas
croire
qu'on
peut approfondir toutes les
questions
qu'on
aborde.
Une
activité
humaine
n'y
suffit
pas,
ou
bien
on devrait
s'adjoindre
des
aides,
se créer
un bureau
de documentation.
La
sagesse consiste à savoir borner
ses
désirs,
ne conserver
et
classer que des
notes
d'une
certaine
valeur.
Si,
en
un
point
donné,
on
aspire
à être
com-
plet, on
se
trace
alors
un
champ
très
restreint, et
on peut, à cette
condition,
y
exceller.
2
e
erreur
:
multiplier à 1/
extrême
les
subdivisions.
—
Dans
la
méthode
décimale, la facilité
extrême
de
créer
des
subdivisions
peut
devenir
un
inconvé-
nient
:
des
esprits
trop
méticuleux
en exagéreront
le nombre, et
le
chiffre
des
cases
de classement tend
à
devenir presque
égal à
celui
des objets,
des
fiches
à
classer.
On
en
arrive à
chiffrer
en
quelque
sorte
le
titre
entier
de
la
fiche à
classer,
le
nombre
qu'on
y
ins-
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 86/140
82 ORGANISATION DU TRAVAIL INTELLECTUEL
crit n'est
plus
qu'une traduction
numérique.
On
voit
alors
apparaître des
indexations
par
douze,
quinze
chiffres
et
plus, nombres
qui
deviennent
de
véritables
hiéroglyphes incompréhensibles.
On
peut
admettre qu'un individu quelconque, si
occupé
soit-il,
aura
réellement
mis de l'ordre
dans
ses
notes lorsqu'il les
aura réparties
en dix
mille
et
même
cent
mille
groupes
entre lesquels
il
évo-
lue aisément,
avec
méthode et
promptitude.
Or,
cela
représente
au
maximum
un repérage
par
des nombres de
cinq
chiffres.
C'est suffisant
pour l'immense
majorité
des cas.
Qui
aura
besoin
d'en
arriver
à un
million
de
divisions?
Une
administration
peut-être,
presque
jamais
un
particulier.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 87/140
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 88/140
84
ORGANISATION
industrieux sauront
en tirer
un excellent
parti,
et
d'emblée
ils auront choisi un modèle
de
fiche
et
une
sorte
de
boîte
s'adaptantbien
l'un
à
l'autre.
Un
peu
de peinture,
ou
bien
du papier collé
sur les
faces
de la boîte,
lui donneront
sans
grande
peine
un aspect
fort convenable,
presque
élégant, si
l'on
est
un
peu
habile.
Les
appareils spéciaux
sont pourtant
recomman-
dables,
les
modèles
en
ont
été
étudiés,
ils
ont
été
modifiés
d'après
les
nécessités
que
la
pratique a
indiquées,
et
il
est bon
de
les connaître
quand bien
même ce ne
serait que
pour
se livrer à
des impro-
visations
similaires.
L'idée
générale
qui
a
présidé
à
l'établissement
de
la
plupart
des meubles,
casiers,
etc.,
est celle
du
classement vertical.
Autrefois, avec le
système
des
dossiers,
des lias-
ses
et des
papiers,
on
couchait
à
plat
dans
un
car-
ton ou
sur
un
rayon une
pile
de
ces
papiers,
et,
lorsqu'on
voulait
consulter
une
des
pièces
quelcon-
que
du dossier, on était
toujours obligé
à
mobiliser
la
pile entière, à
la déplacer,
à la
manipuler; on
risquait
fort
d'en
troubler
l'ordre
si jamais
au
préa-
lable celui-ci
avait
pu
y
être
introduit :
c'était
le
système
du
classement horizontal avec
tous
ses
inconvénients.
L'adoption
du
système des
fiches
a
conduit
à un
système
tout
différent, le
classement vertical.
Les
fiches
(fig.
1)
sont toujours
ou presque
toujours
cons-
tituées
par un
papier
fort
ou
du
carton,
et
suscep-
tibles
d'être
placées
debout
dans
des
boîtes
ou
des
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 89/140
DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
85
tiroirs spéciaux,
sans
courir
le
risque
de se
défor-
mer,
de
se
replier sur
elles-mêmes.
Ces
sortes
de
boîtes
(fig\
2),
de
tiroirs,
permettent
de
classer
à la
suite
les
unes
des
autres
ioules
les fiches
dans
l'ordre
vertical;
l'avan-
tage
de
ce
système saute
aux
yeux.
Lorsque, en
effet,
des
fiches
ou
des
documents
sont
classés de
cette façon,
il
est
Fig.
1.
—
Fiche
ordinaire.
tOUJOUrS
possible de les COll-
(Peut
s'employer,
à
volonté,
comme
fiche
horizontale
ou verticale.)
sulter,
même
de
les parcourir
en
entier, sans
cependant
les
sortir
de la boîte,
du
casier
qu'ils occupent.
Avec un peu
d'habitude,
on
Boîtes pour
classement
vertical
des
fiches.
retrouve instantanément
dans
un classement
ver-
tical le
feuillet qu'on
souhaite
consulter,
on le
lit,
on
le
copie
même
sans
le
déplacer.
Si
môme
on
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 90/140
So
ORGANISATION
Fig.
3.
—
Fiche
échancrée
(modèle
horizontal).
est obligé à
sortir
cette
fiche,
on
la
remettra
ensuite
instantanément
à
la
place
exacte
qu'elle
occupait
précédemment.
Lorsqu'il
s'agit
d'une
col-
lection
de
fiches
personnel-
les,
on ne compte
qu'avec
soi-même,
et l'on
ne risque
jamais qu'une
fiche
soit
sortie
indûment
ou
qu'elle
ne
rentre
pas à la collection.
Lorsque, au contraire,
on
constitue
un
réper-
toire
public
:
catalogue
de
bibliothèque,
répertoire
mis à
la
disposition
d'étudiants,
il
faut absolument
que
les
fiches
soient
fixées
dans
le
tiroir qui
les contient
et
n'en
puissent sortir;
cependant
le
bi-
bliothécaire
doit
pouvoir,
lors-
qu'il en
a
besoin, réintroduire
à
tout moment
les
fiches
nou-
velles
dans
la
série.
Pour
satisfaire
à ces condi-
tions
,
on
a
créé
soit la
fiche
échancrée
(fig.
3)
ou
perforée
(fig.
4)
,
soit
la fiche articulée
(fig.
S).
Fig.
4.
—
Tvpe
de
fiche
Ces
sortes
de fiches
se pla-
er
îf
ale
(modèle
per
*
fore).
cent dans
des cartons
ou
dans
des
tiroirs dans lesquels
une
tringle
métallique
inférieure
les
maintient
(fig.
6).
On
peut
aisément
les consulter,
les
parcourir,
sans
qu'on risque
jamais,
quelle
que
soit la
négligence de
celui
qui
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 91/140
DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
87
s'en
sert, de
les
mélanger
ou
d'en
intervertir
Tordre.
A
ce
point
de
vue,
la fiche
articulée répond
à tous
les
desiderata
possibles.
Cette
fiche se
compose
d'un
:
Fig.
5.
—
Fiches
verticales
articulées
(modèle Borgeaud).
A, passage de
la
tige
Oxalrice.
talon échancré,
d'une sorte
de
charnière
montée sur
toile
de façon
à lui
assurer
une
solidité
particulière,
et,
au-dessus,
la
fiche
elle-même
se
présente avec
son
aspect habituel.
Des
tiroirs ou
des
meubles
spéciaux
sont destinés
à
recevoir
ces
fiches
arti-
culées
(fig.
7).
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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88
ORGANISATION
Quel
que
soit
le
système
de
fiches
adoptées,
fiches
simples
,
échan
crées
,
perforées
ou
ar-
ticulées
,
il est
toujours
avan-
tageux,
pour
consulter
rapi-
dement
la
col-
lection,
d'inter-
caler
de place
Fig.
6.
—
Tiroir classeur
pour
fiches
perforées
-,
(modèle
à
tige
mobile
svslème
Borgeaud).
en
place,
par
v
groupes,
des fiches
ou
des
guides
subdivisionnaires
(fig.
8)
qui, dépassant
l'alignement
des
autres
fiches,
Yi
G
.
7.
—
Table-meuble
pour
classement
des
fiches
articulées
(modèle
Borgeaud).
permettent
d'arriver
instantanément
à
la première
fiche d'un
groupe,
d'une
subdivision.
Si
l'on
a
adopté
le
système
décimal,
les
fiches
subdivisionnaires
mentionneront
les
chiffres
principaux
des groupes.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
89
En certaines
sciences,
dans
certaines
affaires,
il
peut être
intéressant
de distinguer
instantanément
/
>t~ï~~<~w~\
'xyX
z
FFREbi
K
X
L
\J±_}
1
t
°
'
A
f
5
t
C
\
L°
v
E
o
SL SI
Fig.
8.
—
Guides ou
fiches subdivisionnaires destinées
à être
intercalées
entre
les fiches
et
faciliter
les recherch
,
entreles références
anciennes
et
des
références
plus
récentes.
Suivant
la
rapidité
avec
laquelle
les
no-
tions
nouvelles
se
succèdent,
on
souhaite,
par
exem-
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 95/140
DU TRAVAIL
INTELLECTUEL
91
les
manipuler par
groupes
avec
la
plus
grande
promptitude.
D'ailleurs
ces
cavaliers
peuvent
eux-
mêmes
recevoir
en
tête
des
inscriptions
numéri-
ques
ou
alphabétiques
indicatrices
de
groupes
ou
subdivisions.
Les
collections
relativement
restreintes
de
fiches
peuvent
prendre place
dans de
simples
cartons
spé-
ciaux
(fig.
2,
p.
85).
Lors-
que
la
collection
augmente
d'importance,
on peut
uti-
liser
les
meubles que
l'on
trouve
dans
le commerce,
meubles
de
dimensions
fixes
ou
meubles
extensibles
(fig.
11 et
12).
Ces
meubles
exten-
sibles
se
composent
d'élé-
ments
tous
semblables
par
leurs
dimensions
générales
et
qui
peuvent
se superposer
FlG
-
1L
~
Meubl
e
classeur
.
l
i
pour fiches (modèle
Bor-
les
uns
aux
autres,
consti-
geauci).
tuant
dans
leur
ensemble
un
appareil
relativement
homogène et
qui peut même
avoir
une
esthétique
presque satisfaisante.
En
somme,
qu'on
puisse
acheter
dans
le
com-
merce
les appareils
les
plus
perfectionnés,
ou
que,
plus
modeste,
on
veuille
arriver
à les
improviser,
à
les
construire
soi-même,
on
a,
par
les descrip-
tions
précédentes, toutes
les
indications
voulues
pour
se
créer
un
matériel classeur
dans
lequel,
quel
que
soit
le
nombre
de ses
notes,
on
puisse
se
retrouver
instantanément
et
mettre
la
main,
sans
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 96/140
92
ORGANISATION
recherches
inutiles,
sans
mouvements
d'impa-
tience,
sur
tout
document
qu'on
aura
antérieure-
ment
mis
de
côté.
Le
résultat,
si
merveilleux
dans
son
utilisation
cou-
rante,
vaut
hien
as-
surément
qu'on
ait
pris
la
peine
de
le
préparer,
de
l'orga-
niser,
d'en
assurer
l'installation.
Organisation
d'un
bureau.
Installation
de
travail.
—Depuis
quelques
années,
certains
fabricants
se
sont
fait
une
spé-
cialité de
l'installa-
tion
de
bureaux
administratifs
o
u
industriels.
On
s'est
rendu
compte
qu'un
bu-
reau
gagnait
en
productivité
à
béné-
ficier
des
méthodes
les
plus
parfaites,
des
perfectionnements
pratiques
apportés
dans
la technique
des
installations.
Natu-
rellement
ces
installations
ont été
prévues
coûteu-
ses,
et
les
plus
commodes
sont,
au
catalogue,
celles
dont
le
prix
est
le
plus
élevé.
Socle
Fig.
12.
—
Meuble
extensible
pour clas-
sement
des
fiches
(modèle Borgeaud).
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 97/140
DU TRAVAIL
INTELLECTUEL
93
Il n'est
pourtant
pas
vrai
que
la
capacité
pro-
ductive
d'un
bureau soit
fonction directe
du
prix
que
celui-ci
a
coûté
lors
de
son
installation,
mais,
toutes
les
fois qu'on
le
pourra,
il
est
cependant
bon,
vraiment
pratique, de
faire
bénéficier
ce bu-
reau
des
divers perfectionnements
matériels
qu'on
pourrait utiliser
en vue
d'une productivité
plus
complète. La
formule typique
d'un
bureau,
c'est
l'ordre,
et
tout
doit
y
être,
sans
hésiter,
subor-
donné
à cette
nécessité
imprévue.
Chaque
objet
doit
y
avoir
sa place
;
chaque
dossier,
chaque
objet,
doit
retrouver
,
pour ainsi dire automatiquement
,
l'emplacement
qui
lui
est
assigné.
Un
coup
d'œil
sur un bureau
permet de
juger
celui
qui
l'occupe et de
jauger immédiatement
ses
habitudes intellectuelles,
sa productivité
effec-
tive. Sur
une
table où
les
dossiers
s'accumulent
pêle-mêle
en un enchevêtrement
indéchiffrable,
vous
pouvez
être assuré
que sur ce
bureau
tra-
vaille
quelqu'un
qui
peut
être
un
laborieux,
mais
dont
la
productivité
est
relativement
restreinte.
Une
table
bien rangée,
où
chaque
objet
occupe
sa
place,
est
l'indice d'un
esprit
d'ordre.
Il
est
fâcheux
cependant qu'un
bureau puisse
avoir
exac-
tement
le
même
aspect
lorsque
celui
qui
s'y
ins-
talle
est un
esprit
inerte,
qui, ne faisant rien,
ne
dérange rien;
mais
ceux-là se jugent bien
vite
à
leur
véritable
valeur.
Ce serait
sortir
de
notre
cadre que
de donner
une
description détaillée
des
divers appareils
ou
accessoires
de
bureau
qui
permettent,
à l'heure
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 98/140
94
ORGANISATION
actuelle,
d'augmenter
la
productivité
administra-
tive
ou
créatrice.
C'est faire
preuve
d'une initiative
louable
que
de
savoir
recourir
à
toutes
les
mé-
thodes
nouvelles
de
production.
Un
homme de
bureau
qui
peut
produire
beaucoup
n'hésitera pas
à employer
la
machine
à
écrire,
les appareils,
à
polycopier;
au
besoin
il
saura
utiliser
les
res-
sources
que lui
offrent
la
sténographie,
la
sténo-
dactylographie,
les
machines
à
sténographier
,
et
même
les
machines
à
dicter
(ronéophone
ou
appa-
reils
similaires
:
dictograph, parlograph, etc.).
Quelques-uns
de
ces
appareils
sont
déjà
bien
connus,
d'autres
méritent une mention quelque
peu
détaillée
1
.
Pour
tous,
sans exception, i est bon
d'insister
sur
leurs
avantages,
car
bien
des
esprits
encore
restent
réfractaires
et,
de
parti
pris,
pour
ne
pas
changer
leurs
habitudes,
se
refusent
à en
tolérer
l'usage.
La
machine
à
écrire
a
encore,
qui
le
croirait?
ses
détracteurs
On
ne
peut
cependant nier
à
l'heure
actuelle
que
la
machine
à
écrire
soit
l'outil
indispensable
de
tout
individu
dont
la production
intellectuelle
doit
être
quelque
peu
abondante.
En
notre
pays,
il
est
encore
admis
qu'un
jeune
homme
puisse
avoir
passé
un ou
plusieurs
bacca-
lauréats
et
ne
pas savoir
se
servir
couramment
de
cet
appareil.
C'est
un
archaïsme
impardonnable.
\.
Nous
laissons volontairement
de
côté
les
machines plus
spé-
cialement
commerciales
ou
administratives
:
machines
à
copier^
à
ouvrir
le courrier,
à
fermer
les
enveloppes,
à
affranchir les
cor-
respondances,
machines à
calculer,
les
caisses
payeuses, etc.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL INTELLECTUEL
95
Tout
sujet
instruit, et qui cependant
débute
dans
la vie en
y
apportant
cette
inexcusable
ignorance,
celui-là est
réellement
un
infirme,
un
être
non
adapté
aux luttes
auxquelles
il
devra
forcément
prendre part.
Tout homme
d'esprit
cultivé
doit
couramment
se
servir
de
la machine à
écrire.
Non
seulement
il
faut
pouvoir
en
user
pour faire
une copie
nette,
propre,
lisible,
il
est
surtout
nécessaire
de
savoir
composer directement à
la machine,
c'est-à-dire
écrire une
lettre, un
travail,
un
article,
en
l'impro-
visant
au
fur
et à
mesure.
C'est un
degré
d'entraî-
nement
un
peu
plus difficile à acquérir,
mais
auquel
toute
personne
un peu intelligente
doit
prétendre.
Lorsqu'on
compose
directement
à la
machine
un
travail
qui
doit être revu
de
très
près,
il
est
bon de
le
taper
immédiatement en
double.
La
cor-
rection
successive
de
ces
deux
épreuves
facilite
beaucoup
les
retouches,
les
permet
plus
nombreu-
ses; on
arrive
plus
aisément
à une
forme
plus châ-
tiée,
plus parfaite.
Sténographie.
—
Tous
ceux
qui sont
aptes
à
parler
leur
pensée,
ceux qui
savent
travailler
assez
vite
pour
être
gênés
par
la
lenteur
de
transcrip-
tion avec
la
plume,
tous
ceux-là
ont
avantage à
recourir aux
facilités
que leur
offre
la
sténographie.
Il
ne
s'agit
pas de sténographie
directe.
Abso-
lument
exceptionnels
sont
les
individus
qui
peu-
vent
sténographier
eux-mêmes
leur
propre
pensée-
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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96
ORGANISATION
La
sténographie
est
un
métier
d'auxiliaire.
Les
difficultés techniques
de la
transcription
absorbent
l'esprit
et
ne
permettent
pas
de
réfléchir,
de
com-
poser en même
temps
qu'on
sténographie.
Jusqu'à
une
époque
toute
récente,
la
sténogra-
phie
était
réservée
à
des
cas
particuliers,
presque
exceptionnels.
Avoir
recours
à
un
sténo-
graphe
était
un luxe
qu'on ne
pouvait
se
permettre
qu'en
des
circonstances
peu
fré-
quentes.
Une
bonne
sténo
-
dactylographe
était
aussi
presque
une rareté,
donc
exi-
geait
des
appointe-
ments
assez élevés,
et
la grande
difficulté
était
de
l'employer
Fig.
13.
—
Machine
à
sténographier,
assez
SOUVent
et
à des
modèle
Grandi ean. .
,
1T
intervalles assez
ré-
guliers pour
qu'elle fût d'un rendement
vraiment
productif,
rémunérateur
de
ses émoluments.
Dans
ces
dernières
années,
des
perfectionnements
et
modifications
apportés
dans
la
construction
des
machines sont
venus
presque
révolutionner la
sté-
nographie
et
en changeront
certainement
les
statuts.
Tout d'abord, c'est l'apparition des
machines
à
sténographier.
Nous avons en France deux mo-
dèles sensiblement équivalents
:
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU TRAVAIL
INTELLECTUEL 97
Machines à sténographier
Grandjean
et
sténophile
Bivort
(fîg.
13
et
14).
—
Ces
appareils
sont
d'un
apprentissage
plus
aisé
que
la
sténographie
directe
écrite,
mais
surtout l'immense avantage résultant
de
leur
emploi,
c'est
que la
bande
imprimée
sur
la-
Fig. 14.
—
Slénophile
Bivorl
(appareil
à
sténographier).
quelle
la
sténographie
s'est
frappée peut
être
lue
sans la
moindre
difficulté
par
une
dactylographe
quelconque.
Il
n'est
plus
nécessaire
que
la
sténo-
dactylographe
perde,
comme jadis,
la
majeure
par-
tie
de son
temps
à
déchiffrer
son brouillon,
qu'elle
seule
était
capable de
relire.
Une sténographe
uti-
lisant
une machine
à
sténographier
est
donc cons-
tamment
disponible
pour
la
dictée,
et
c'est
une
spé-
o
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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98
ORGANISATION
cialisation
qui
rend
le
travail
infiniment
plus
pro-
ductif. Puis
le
brouillon
même,
le sténogramme,
peut
directement
être
conservé
à
titre
de
document.
Dans
beaucoup
de
cas,
on
se
dispensera
de le
reproduire
en
écriture courante,
on ne
le
trans-
crira
que plus tard,
lorsque
l'usage
en
deviendra
nécessaire.
On
peut
se
relire
sur
le
sténogramme
et
y
faire
les
corrections
nécessaires
avant
la
mise
au
net.
Plus
nouveau venu
encore, est un
appareil
qui
permet
de se
passer
d'une
sténographe,
et
avec
l'aide
duquel
on
peut
cependant
enregistrer
direc-
tement
la
parole,
sous
la
vitesse
normale
de son
débit.
Cet
instrument,
c'est
la
machine à dicter, dont
l'un
des
types les plus
répandus est
le
ronéophone
(fig.
1S).
'
Le
principe
en
est assez simple
:
un
phonogra-
phe dont
le disque
est mis
en
mouvement ou s'ar-
rête
à volonté
enregistre
la
parole. Ultérieurement,
une
dactylographe coiffe
le casque
des
écouteurs
de
l'appareil
et
fait
tourner
le
disque
d'un mou-
vement
lent qui
lui
dicte les
paroles
inscrites sur
le
disque..
Une
pédale
permet
d'arrêter
le
débit du
disque
et
même
de
lui
faire
reprendre,
répéter
les
derniers
mots qu'on
a pu mal entendre ou
oublier.
Les
disques
sont
épais
et
peuvent
enregistrer
sur
leurs
deux
faces. Après
usage,
on
les
passe à
la
raboteuse
et
ils
resservent
comme
neufs.
Le
même
disque
est
susceptible
de
servir
ainsi jusqu'à deux
cent cinquante
fois.
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
99
Un
tel
appareil, c'est la
suppression
de la
sténo-
;raphe.
Surtout
on
ne se trouve
plus
l'esclave
des
Fig.
J5.
—
Le ronéophone
(appareil
à
dicter).
heures
de présence ou
des
heures
libres
de
la
sténo-
dactylographe. On
dicte son
courrier
ou
on
débite
sa
pensée
au
ronéophone à
tout
moment
libre.
Les
disques s'accumulent,
on
les
met
de
côté;
on
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DU
TRAVAIL INTELLECTUEL
101
ruptions,
à
des
périodes
d'attente faute d'occupa-
tion.
C'est
une règle formelle
dans
les
usines,
les
ateliers.
Il
est
tout
aussi
obligatoire
de
s'y astrein-
dre
dans
un
bureau.
Le
calcul
du prix de revient
du
travail
de
bu-
reaux
est difficile
à établir.
Il
est d'autant plus
nécessaire
d'y
apporter
attention.
Pour
l'outillage
il
comporte
:
1°
le
prix
d'achat;
2°
le
prix
d'entretien
;
3°
la
consommation des
accessoires
divers.
Pour
ce
qui est des
appareils
multiplicateurs,
on
calculera
aisément quelle est
la
quantité d'exem-
plaires
au-dessus de
laquelle
il
est
plus
avantageux
d'avoir
recours
à
un
imprimeur.
Surtout,
ce
qu'il
faut
savoir
comprendre,
c'est
l'avantage
immense
pour
un ingénieur,
pour un
directeur
d'une
entreprise
importante
et
pour
bien
d'autres
encore,
à
être doublé,
secondé
en quantité
suffisante
par
des
manœuvres
de
la
production
intel-
lectuelle,
manœuvres pourvus
d'un
bon
outillage
de
production.
Rien
n'est
plus désastreux
que
de
voir, à l'heure
actuelle,
des
hommes
d'une haute
valeur
intellec-
tuelle,
susceptibles
de
beaucoup produire,
être
astreints
aux
besognes
secondaires
du
bureau,
écrire
eux-mêmes
des
lettres,
souvent
même les
recopier. C'est
du
temps
perdu,
c'est de
la
force
intellectuelle
gâchée.
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CHAPITRE VII
LES
INSTITUTS
DE
BIBLIOGRAPHIE
Depuis quelques années,
et
dans
la
plupart des
pays,
des
Instituts
de
Bibliographie
ont
été
fondés,
et
presque
tous
sont
des
filiales de
Y
Institut
inter-
national
bibliographique
de
Bruxelles.
Si
tous
n'en
dépendent
pas directement,
ils
se
sont
au
moins
constitués
sur son
modèle et
se
sont
inspirés
de son
but et
de ses méthodes.
Peut-être
certains esprits
chagrins
sont-ils
ten-
tés
de
critiquer, par
principe,
l'existence
même
de
semblables
organisations;
il
semble,
en
effet,
natu-
rel
de
proclamer
que
le
bénéfice
des
travaux
de
l'esprit doit
être strictement
réservé
à
ceux
qui
peuvent
s'y livrer
personnellement.
Cependant,
de
la
façon
la
plus
honnête,
la
plus
logique,
ces sortes
d'Instituts
viennent
à
l'aide
de
ceux
qui,
de par leurs conditions
mêmes
d'exis-
tence,
ne
peuvent
absolument
pas
poursuivre
les
recherches
bibliographiques
indispensables
aux
travaux
dont
ils
veulent s'occuper.
Combien
de chercheurs,
de
travailleurs
dans
de
petites
villes,
seront
bien
aises
de
recourir
aux
offices
d'un
institut
de
ce
genre,
qui
pourra
se
charger
de
faire pour
eux toutes
les
fouilles
néces-
saires
dans les
bibliothèques
des
capitales
intellec-
tuelles
de
l'Europe
Parfois
encore,
ce
sera
telle
personnalité
qui,
se
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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104
ORGANISATION
trouvant
même
à portée
des
grandes
bibliothèques,
n'a, du
fait
de
ses
occupations, aucun
loisir
pour
se
livrer
à
ses
recherches
toujours
si
longues.
Pourtant,
à
moins
d'obstacles
invincibles,
on a
toujours
profit à
faire
soi-même
la
bibliographie,
car
l'esprit
de
l'auteur
lui-même,
plus
en
éveil que
celui
d'autrui,
bénéficiera de
la rencontre
toute
fortuite d'un
texte,
d'une citation,
dont
un
auxi-
liaire
même
intelligent
et
bien
rétribué
ne
saisira
souvent pas
l'intérêt.
Le
véritable
centre
de
l'Institut
bibliographique
était
à
Bruxelles.
Qu'en
reste-t-il
actuellement?
Nous
ne
le
savons.
En
France,
diverses tentatives
de
création d'éta-
blissements
analogues n'ont obtenu
qu'un succès
médiocre,
du moins
comme
affaire
commerciale,
mais
peut-être
leur existence même
demeure-t-elle
trop
inconnue à bien
des
personnes
qui
pourraient
bénéficier
de leurs services.
Une
très
large
publicité
eût
été
nécessaire
pour
réussir.
Elle
n'a
jamais
encore été
faite.
Un
bureau
de
l'Institut
de
Bruxelles a
fonctionné
à
Paris,
il
y
a
quelques
années, mais
il
a
disparu
assez
promptement.
En
1894,
le docteur
Marcel
Beaudoin
a fondé à
Paris
un
«
Institut
international
de
bibliographie
»
limité
aux
sciences médicales. Cet
établissement
a
duré
jusqu'à
maintenant, et
il est
actuellement
dirigé
par
M. Guerguy.
Cet
Institut se
charge
:
1°
de
consultations
bibliographiques
(nom d'un
auteur,
titre
et
date
d'un
ouvrage,
lieu
d'édition,
etc.)
;
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DU TRAVAIL
INTELLECTUEL
105
2°
de
recherches
bibliographiques (réunir
l'indi-
cation soit
de
tous les
travaux
paras sur
un
sujet
donné,
soit
de
tous
les
travaux
d'un
auteur
indi-
qué)
;
3°
de
l'analyse
du
résumé en
français
de
travaux
scientifiques
publiés
en toutes
langues;
4°
de fournir
la
copie de divers
articles
ou tra-
vaux
;
5°
de
traductions de
toutes
sortes
et en toutes
langues.
Les
Instituts
bibliographiques spécialisés
ont
un
répertoire
qu'on peut considérer
comme
à
peu près
complet,
en
ce
qui
concerne
les questions
relevant
de
leur
spécialité.
Pour
bénéficier
de
leur usage,
il
est bon
de
con-
naître
la
réelle difficulté qu'on
rencontre
lorsqu'on
veut
y
avoir
recours.
Il
est,
avant
toutes choses,
indispensable
de savoir
très
bien
tracer
les
con-
tours
exacts
de
la
question
dont
on demande la bi-
bliographie,
et
cette
délimitation
est beaucoup
plus
difficile
à
réaliser
qu'on
ne
se
l'imagine
lorsqu'on
n'y
a jamais
réfléchi. Si
soigneuse,
si minutieuse
qu'ait
été la
rédaction
du
texte
d'une question,
il
est rare,
presque
exceptionnel,
qu'on
ait
pu
se
faire
comprendre
très
exactement
de
celui
qui,
en
vos
lieu
et
place, va
procéder
aux
recherches
biblio-
graphiques.
Non
seulement,
en
effet,
on doit
déli-
miter
exactement
le
sujet,
mais
encore
il
faut
bien
indiquer
quelles sont
les
bornes
à
assigner
aux re-
cherches
dans
le
temps
et
clans
l'espace.
Veut-on
connaître
la
bibliographie
complète en
toutes
lan-
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106
ORGANISATION
DU
TRAVAIL INTELLECTUEL
gués?
À quel
pays
veut-on
limiter les
recherches?
A-t-on
l'intention
de
ne
parcourir
que
des
ouvrages
complets,
ou
bien tous les
périodiques,
ou
encore
les
thèses,
et
en
toutes
ces
catégories
dans
quelle
langue?
Il
importe
donc
de
très bien savoir
ce
que
l'on
demande
et de
le définir
d'une
façon très
précise,
car,
faute
de
cette
précaution
si
simple,
on
risque-
rait
fort d'être
entraîné
beaucoup
plus
loin
qu'on
ne le souhaiterait.
On a
fait
remarquer,
non sans quelque
malice,
qu'en
langue allemande, par
exemple,
la
bibliogra-
phie
de
toute question,
fut-elle
la
plus
neuve,
la
plus
simple
et la
plus
inconnue,
comportait
tou-
jours au
moins
un
gros
volume.
On
aura,
par
avance,
le
devoir
de restreindre,
d'empêcher
cette
sorte
de
dévergondage
delà
bibliographie;
on
indiquera
les
dates extrêmes auxquelles
les
recherches
doivent
se
borner.
En
général,
la
seule
bibliographie
profi-
table est
celle
des
années
les
plus récentes.
Une
autre
organisation,
qui peut
dans certains
cas être
utilisée
avec
profit,
est
celle des
Bibliothè-
ques
circulantes,
dont
il
existe
divers
représentants
(littérature,
médecine,
etc.).
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8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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108
ORGANISATION
pour ces
sortes
de
travaux
rendent un
grand
ser-
vice
en
préparant
la
tâche des
historiens
capables
de
faire
œuvre
de
synthèse,
d'écrire
des
chapitres
d'histoire
générale.
Le plus
habituellement,
la
division
du
travail
n'est
pas
poussée
à un
degré
aussi
avancé,
et
tout
homme
instruit
est
amené,
à
un moment
quelcon-
que
de sa
vie,
à
vouloir
produire.
11
voudra
écrire
un
ouvrage,
rédiger une
communication,
une
sim-
ple
note.
Même,
sans
aller
jusqu'à la
publication,
il est
amené
par les
nécessités de la
pratique
jour-
nalière
à
résumer une
question
en quelques
pages,
ou
même en
quelques
lignes,
à rédiger
des
instruc-
tions,
des
ordres
pour
son
personnel,
etc.
On
a
lieu
d'être
surpris
des
difficultés
que
le
sujet
même
le
plus
instruit
rencontre toujours
à ses
débuts
dans
ce genre
de
besogne.
Pourtant,
lorsqu'on
y
réfléchit,
on en
saisit
la raison
:
jamais,
au
cours
des
études
universitaires,
les
questions
n'ont
été
envisagées
sous
cet
aspect.
Tout
l'exercice
de
composition
littéraire
tel
qu'il
est
compris
au
sens
scolaire,
est
un
exercice
de
style. C'est
la
forme
seule qui
est en
jeu.
La
per-
fection
à
apporter
dans
l'expression
des
idées,
dans
le
choix
des
mots,
les
tournures
de
phrases,
fait
entièrement
perdre de
vue
l'importance des
idées
elles-mêmes
qui servent
de canevas
à
la
phrase,
au
« devoir
».
La
pauvreté
intellectuelle
ou
la
bizarre-
rie
des sujets
de
«
composition
française
»
les
plus
courants
en
témoignent
hautement.
Utiliser
la
phrase
pour
la
bourrer
d'idées
fortes,
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
109
précises,
c'est,
semblerait-il,
affaire
d'industriel,
de
commerçant.
Considérer
le style comme
l'obligatoire
vêtement,
mais
comme
le
simple
auxiliaire
de
la
pen-
sée, c'est
une
idée
dont
on voit
peu à
peu
la
justesse
dans
la
vie, mais
qu'on
ne
possédait
pas à
la
sortie
du
collège.
Aussi,
comme
nous
le
disions
il
y
a un
instant,
édifier
sa
pensée,
grouper
les
arguments,
les
faits,
les
preuves,
avant
que de
rédiger,
c'est
une
besogne
à
laquelle
les
études
n'ont
nullement
préparé
les
jeunes
gens.
Quelle
surprise
pour
les bacheliers
quand on
leur
demande
de
bâtir
une lettre
d'affaire
Com-
bien
se
sont
sentis
humiliés
d'en
être
incapables,
tandis
qu'un
vieil
employé
à
peine
instruit,
mais
rompu au
métier, s'amuse de leur
échec
Heureusement
le mal n'est pas
sans
remède,
et
là
encore
la
propédeutique
générale,
la
technique
des
méthodes de
travail
va
venir
en
aide
à
ceux
qui
voudront
refaire
cette partie
trop
négligée
de
leur
instruction
première.
Bien
entendu,
il
ne
s'agit
ici
que de
conseils
pratiques,
d'ordre réellement
technique,
et
il
ne
saurait
être question
de
faire
concurrence
ni
à
un
traité
de
rhétorique
1
ni
à
un
manuel
de
composi-
tion
française,
ni
môme
à
YArt
poétique
de Boileau.
Le
cas
considéré est bien
spécial
:
un
étudiant,
1.
L'ouvrage de
Bezard,
de
la
Méthode
littéraire
{Journal
d'un
professeur
dans
une
classe
de
première)
(Vuibert, Paris,
191
1),
livre
devenu
classique
si
prompte
nient
et
à
si
juste
titre,
démontre
entièrement
la vérité
des
critiques
faites
ici môme.
10
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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110
ORGANISATIOX
un
homme
plus avancé
en
âge,
sait
écrire;
peut-
être
même
est-il
excellent
;
mais,
au
moment
de
traiter une
question
précise,
technique, voilà
notre
homme
bien
embarrassé,
car
il
ne
sait
pas
com-
ment édifier
son sujet,
préparer ses
matériaux,
faire
tout ce
travail
préliminaire qui
l'amènerait
au
moment
où
il
pourrait être
à
l'aise, quand il
ne
s'agira
plus
que
de
rédiger.
Produire.
—
La
production
intellectuelle
com-
porte
soit
des
travaux
provoqués,
imposés,
soit
des
travaux
originaux.
Les
travaux
provoqués,
imposés,
résultent
de
nos
obligations
journalières,
des
multiples
circonstances
de
notre
profession.
C'est
une
lettre
à laquelle
il
faut
répondre,
un rap-
port
à
fournir
sur une
question,
même
une
thèse
de
doctorat
nécessaire
pour en
finir
avec une
pé-
riode
de
scolarité supérieure. Le
sujet
du
travail
est
donc
fourni
à
celui
qui
doit
s'en occuper.
Plus
difficile
est la
production
d'un
travail
'réel-
lement
original,
spontané.
La
question
mérite
cependant
d'être
envisagée.
Certains
auteurs
sont astreints,
soit par
leur
situation,
soit
par quelque
traité
d'édition
ou
de
journalisme,
à
produire
à
une
époque
fixe
des
articles
d'actualité.
Cette
sorte
d'esclavage,
qui
peut
parfois
être avantageuse
en raison
des
béné-
fices
assurés
à
ceux
qui la
contractent, n'en
a
pas
moins
de gros
inconvénients,
en
raison de
l'obliga-
tion dans laquelle
se
trouve l'auteur de
produire
à date fixe un
travail
qui
paraisse
original.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 115/140
DU
TRAVAIL INTELLECTUEL
111
Il suffit
de
rappeler
à
ce
sujet,
pour ceux
qui
en
connaissent
les
détails, l'histoire
de
Berlioz
et
des
chroniques
musicales
périodiques
dont
il
avait
assumé
]a
charge.
Ecrire l'article
hebdomadaire
qu'il
s'était
engagé
à livrer
était
devenu
le
cau-
chemar
de
sa
vie
et provoquait
chaque
semaine
chez lui
de
véritables crises
de
fureur.
L'état
d'es-
prit
où
il
se
trouvait
au
moment
où
il
rédigeait
sa
chronique
musicale
ne
fut
pas
sans doute sans
avoir
quelque
influence sur
l'impartialité
de
ses
jugements;
ce
fut
probablement
]a cause
d'erreurs
marquées d'appréciation
qu'il
n'eût
peut-être
pas
commises
s'il avait
conçu
et rédigé ses articles
de
sano-froid
et
à
loisir.
o
Quelle
est
la genèse
d'un travail original?
—
Il
semblerait
volontiers que
la production
d'un
livre
soit
réservée, en
quelque
sorte, à un nombre res-
treint
d'individus
qui
y
sont
en
quelque
sorte
prédestinés,
et
qu'on
appelle,
avec une nuance
de
respect,
les Auteurs.
Il
est réel que
certaines
personnes ont,
pour
écrire,
beaucoup
plus grande
facilité
que
d'autres,
mais
il
est
à
craindre
que
celles-là précisément
n'abusent de
leurs
dons
naturels
et
que,
n'ayant
aucune idée
originale
à
présenter
ni
à
faire
valoir,
elles
n'écrivent sans
but,
sans
motif,
poussées
par
une
sorte
de manie,
de
besoin
de publier.
Les
bibliothèques s'encombrent
ainsi
d'ouvrages
insi-
gnifiants,
sans
utilité
pour
leurs
lecteurs.
Il
serait
infiniment
préférable
que
la
production
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 116/140
112
ORGANISATION
des
livres,
même
des
articles de
journaux,
fût
réservée
à ceux
qui
ont
quelque
idée
originale à
faire
valoir.
La
littérature,
les périodiques,
n'en
seraient
que
plus
intéressants;
mais
bien
souvent
des
esprits
curieux,
innovateurs,
instructifs à
autrui,
ignorent
trop
les
moyens
de
construire
un
article
ou
un
ouvrage
pour
exposer
leurs
idées.
Ignorants
de
cette
technique
spéciale
des
publi-
cations,
ils
n'osent
affronter les
dangers
d'un
mé-
tier
qui
leur
semble
hérissé
de
secrets;
puis,
disent-
ils,
ils
ne
savent
pas écrire et
craignent
de
se
ridiculiser,
en
exposant gauchement
des
idées
même
de
première
valeur.
Il
est
trop
vrai,
malheureusement,
que,
fort
accessibles
aux
charmes de
la
forme,
nous
dépré-
cions
volontiers
toute
production
même
scientifique
dont
le
fond
seul
est
intéressant,
quand
bien
même
il
serait
réellement
supérieur. C'est
un
travers
de
notre
race.
Tout
esprit sérieux
doit s'en
méfier
et réagir
de
son mieux.
Cependant,
une notion juste
qu'un
esprit
dis-
tingué
saura
mûrir et travailler avec
méthode,
est
pour
ainsi
dire
toujours
susceptible
d'intéresser
les
lecteurs.
Une
idée,
si
originale
qu'elle
soit,
a
d'ailleurs
ses lois
d'apparition.
Elle
résulte
toujours
de ce
que
celui
qui
en
est
l'auteur
a
une
faculté
domi-
nante
:
la
faculté
de
s'étonner.
Pour
l'adulte,
savoir
«
s'étonner
»
à
propos,
de
parti
délibéré,
c'est
avoir
conservé
cet état
d'es-
prit
si
développé
chez les
enfants
et
qui
leur
donne
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
113
cette
curiosité
si
respectable
de
toujours
demander
le
«
pourquoi
».
Une
éducation
dans
un milieu borne,
la
rou-
tine
traditionnelle,
la
paresse
d'esprit,
qui
peu
à
peu
s'installe
dans
une vie dominée par
les
habi-
tudes,
nous
fait
perdre
la curiosité de chercher le
«
pourquoi
».
Surtout,
nous
nous accoutumons à
nous tenir
pour
satisfaits
d'explications
purement
verbales,
qui
ne sont
que
des mots
sans
signification,
mais
qui
suffisent
à
assoupir les appétences
incertaines
des
esprits
peu novateurs.
Seuls
dans la
vie, seront capables
de
travaux
originaux
ceux
qui, continuant à
savoir
«
s'éton-
ner
»,
sauront
aussi
voir
autour
d'eux,
surtout
regarder.
En
se
promenant,
en
causant,
en
lisant
sans
cesse,
ils
se demanderont
à
eux-mêmes
l'ex-
plication
de
beaucoup de
faits que
le
vulgaire
considère
comme complètement
élucidés.
Certains
rapprochements
seront
féconds,
donneront
nais-
sance à l'idée
neuve dont
la
portée peut,
quelque-
fois,
dépasser
infiniment
la conception
que
l'on
avait
eue dès
le
début.
Ayant
su
s'interroger soi-même avec
impartia-
lité,
on s'aperçoit
qu'on
ne connaissait
pas
la
ques-
tion
la
plus
simple
en
apparence;
on
constate
ensuite que son entourage, que
des
gens
réputés
compétents,
l'ignorent
aussi.
Quelques
recherches
montrent que
la
question
est
neuve, qu'elle
n'a
pas
été
considérée
jusqu'ici
sous
cet
aspect.
Elle
est
mure
pour
être
étudiée.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 118/140
114 ORGANISATION'
Les
résultats
des
recherches
nées
de
cette
façon
mériteront
souvent
d'être
rédigés, puis publiés.
Alors
la
technique
du travail
intervient
à nouveau
et
nous
rentrons
dans notre
sujet.
Un
bon
conseil
au
préalable
:
nous
le
devons au
professeur
Grasset,
qui
y
insiste avec
raison.
Ce
maître
éminent,
quia
énormément
travaillé
et
beau-
coup
produit,
dit
qu
on
?ie
doit
jamais
avoir
sur le
chantier
qu'un
seul
travail
à
la
fois.
On
donne
alors
à son
œuvre toute son
activité, toutes ses
recher-
ches;
sans
cesse on le médite,
on
le
rumine,
toutes
les idées
viennent
se
cristalliser
autour
d'un noyau
central,
et c'est
le
moyen
d'obtenir un
bon
résultat.
Ce
n'est
jamais
de
trop
que
se
donner
tout
entier à
un
ouvrage,
à
un
livre
qu'on prépare.
L'activité
qui
se
diffuse
est
fatalement
brouillonne
et
T
effort
est
incomplet.
Quelle
est
donc
la
technique pratique
d'un
ou-
vrage
mental?
o
v
Technique.
—
1°
Recherche
des documents.
—
Si
spontanée
qu'une idée ait
pu venir
se présenter
à
l'esprit,
il
faut
toujours
se méfier
cependant qu'elle
a
déjà
peut-être
été
rencontrée
par
autrui,
ou
qu'elle
a pu
être l'objet
de
quelque
publication.
On
risquerait,
faute
de
quelques
recherches,
d'un
bref contrôle,
de
passer
pour un
simple
plagiaire.
C'est
donc
le moment de faire
la
bibliographie
tout
au
moins
sommaire du
sujet,
et l'on
sera
bien-
tôt renseigné.
Mais cette bibliographie
ne
doit
ve-
nir
qu'en
second
lieu,
comme
un
contrôle
de
notre
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL INTELLECTUEL
115
pensée,
de
notre
initiative.
Entreprise
trop
tôt,
elle
paralyseT
esprit
d'invention, Venvase
dans
l'érudition.
Nous
ne
revenons
pas
ici
sur la
méthode
pro-
prement
dite de
ces
recherches
bibliographiques,
puisque
nous
l'avons
déjà
exposée
plus
haut
(Voir
page
46).
Cette
bibliographie
fournit
toujours
en
même
temps
quelques
documents,
et,
fidèles
à
nos
principes,
nous noterons
en toute
occasion
ces
ren-
seignements
à
mesure
qu'ils
se
rencontreront.
2°
Délimiter le sujet.
—
Renseigné
par
les
re-
cherches
précédentes sur la
valeur
du
sujet à
trai-
ter,
on
doit
se
livrer
à une
opération
essentielle,
qui
consiste
à
délimiter
avec
précision
le sujet
que
l'on
veut
traiter.
Lorsqu'on
n'a
pas encore
l'habitude des
publica-
tions,
on
est
toujours porté
d'instinct
à
se
livrer à
un
travail
encyclopédique
qui,
prenant
l'idée
à
sa
première
apparition historique,
la conduit jusqu'à
nos jours
en
ne
faisant
grâce
aux
lecteurs
d'aucune
de
ses
modifications.
On
accumule
les
arguments
et
on
risque
de
se
perdre
clans
le
développement
d'idées parasites
qui viennent
se
greffer
inutilement
sur
le sujet
principal,
l'alourdissent sans rien
ajou-
ter à
sa valeur
démonstrative.
Ces
défauts sont
extrêmement
communs
dans les
travaux
scientifi-
ques,
particulièrement,
à
notre
connaissance,
dans
la
thèse
de doctorat
en
médecine.
Un
ouvrage
destiné
au
public
a
pour pivot
une
idée
principale
qui
doit
dominer
tout
le livre,
de
telle
façon
que
le
lecteur,
ayant
achevé de
le par-
courir,
conserve
une
idée
bien
nette,
bien
précise,
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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116
ORGANISATION
'
bien
frappée,
de
l'idée
que
l'auteur
a
voulu
lui
transmettre,
lui
faire
accepter.
Un
ouvrage
bien
fait
ne
peut
avoir
deux
sujets.
3°
Coordonner
les idées
et
les
notes.
Dresser le
plan.
—
Si court
que
soit le
travail que
Ton veut
produire,
il
est
rare
qu'on puisse
se
dispenser
d'en
tracer
le
plan.
Quelques
écrivains rompus
au mé-
tier
semblent
pouvoir s'en
dispenser.
Comptez
sim-
plement
qu'une
gymnastique
constante
leur
per-
met
de
se
tracer
d'emblée le
plan
de
ce
qu'ils vont
écrire, et
lorsqu'ils
commencent
à rédiger,
le
plan
est
présent
à
leur
esprit,
il
est
conçu,
arrêté,
ils
le
voient.
Pour
ceux
qui
débutent,
il
est
indispensable de
se
tracer
un
pian
par écrit, de
le
réfléchir, de
le
méditer, de
le
corriger
souvent, et. on
ne
doit
com-
mencer à
écrire
qu'au
moment
où
le
plan
satisfait
absolument
la pensée, la contient tout entière,
bien
précise,
bien
ordonnée, avec toutes ses mem-
brures,
son
ossature,
chaque
idée
étant
à
sa
place.
Souvent alors, lorsqu'il s'agit
d'un
travail
de
grande
envergure, on risque
de
se
trouver aux pri-
ses
avec
une
difficulté
qui
peut
sembler insurmon-
table
et
à
laquelle les
méthodes de
travail
appor-
tent une solution
absolument simple.
Prenons
le
cas
dans
lequel
le
travail
à
rédiger
comporte
un
certain
nombre de
citations
ou
réfé-
rences.
Citations
^ou
références
ont été notées au
cours des
lectures
préalables,
mais
il faut mainte-
nant
qu'elles
viennent à
propos se présenter sous
notre
main au
moment favorable,
alors
qu'elles
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
http://slidepdf.com/reader/full/organisation-du-travail-intellectuel-r-chavigny 121/140
DU
TRAVAIL INTELLECTUEL
117
vont
servir
de
soutien
à
l'une
des
idées du
texte,
ou
en
constituer
certaines
parties
sous
forme
de
cita-
tions.
C'est
une
sorte
de
travail
de
mosaïque.
Le
nombre
des
notes accumulées
peut
être
considé-
rable,
et
il
n'est pas rare,
lorsqu'on
commence
un
travail de
quelque
importance,
d'avoir
réuni quel-
ques
centaines de
notes.
La mémoire
ne
suffirait
assurément pas à
se
les
rappeler toutes,
et
elles ne
sauraient être toujours et toutes assez
présentes à
l'esprit pour
être
utilisées
au moment
voulu.
Donc, lorsqu'on dispose d'un
très
grand
nombre
de
notes,
il faut
rattacher,
relier
en quelque
sorte
celles-ci
au
plan de telle façon que ces notes vien-
nent presque
automatiquement
se
trouver
sous
la
main
à
l'instant
opportun.
La
technique
de
détail
est
alors celle-ci
:
Rangées
dans
un ordre quelconque,
toutes
les
fiches
sur
lesquelles
ont été notées une référence
ou
une
idée,
reçoivent
un numéro
d'ordre, de
la
première à
la
dernière;
même
si une fiche com-
porte
plusieurs
faits,
ou
citations,
ou
idées,
il
est
avantageux de n
uméroter
à
part
chacune
de celles-ci.
Ce numérotage
effectué,
on
reprend
les
fiches par
la
première,
et,
ayant le
plan
devant
soi,
sur sa table
de
travail,
on
réfléchit
soigneusement
en
quel
point
du
plan la
citation
doit
venir s'introduire, en
quel
endroit
la
note
doit
être
citée.
Sur
le plan,
en
l'en-
droit
voulu,
on
reporte
le
numéro que
porte
la fiche.
On
opère de
la
même
façon
pour
toutes
les
fiches
sans
exception,
et
lorsque
le
travail
de
dépouille-
ment
et
d'inscriptions
est
terminé,
on
constate
que
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118
ORGANISATION
le
plan
est non
seulement
un
répertoire
des idées
principales,
mais
aussi un guide
de
l'emploi
de
tous
les
documents.
Affranchi
alors
des préoccupations de
détail,
certain de
ne
plus
se
trouver
submergé
entre
ces
documents
et
de
ne
pas
risquer
d'autre
part
d'en
omettre
indûment,
l'auteur n'a plus d'autre
souci
que
de
rédiger
son
travail.
4°
Rédaction.
—
Pour
la
rédaction,
je
n'ai
nulle-
ment
la prétention
de donner des
préceptes géné-
raux.
Chacun
rédige
à sa façon,
et le
style
n'est
point objet
dont
il
doive être
question
ici. Cepen-
dant,
en
technique même
de
la
rédaction, les
habi-
tudes individuelles
sont
fort
diverses.
Les uns travaillent
de grand matin, réservant
au
travail
intellectuel les
premières heures
du
jour,
tandis
que
d'autres
sont des
travailleurs du
soir,
même parfois
prolongent le
travail
dans
la
nuit,
estimant
que
c'est
la
période
de
leur
plus
grande
liberté d'esprit.
Là-dessus
pas de
préceptes
à
don-
ner,
c'est
affaire
de préférences
individuelles
et
d'organisation
générale
d'existence. Que
chacun
travaille dans
les
conditions
qui
lui
semblent
les
plus favorables,
mais
surtout qu'il
ne
prétende pas
les
imposer
à
autrui
comme
les
seules
utilisables.
Beaucoup
de
personnes
ne
peuvent
rédiger un
travail quelconque
qu'à
condition
de
l'écrire
elles-
mêmes; c'est le procédé
le
plus
usuel,
et
il
ne
fau-
drait
pas
vouloir
demander
à
tous
d'employer
la
méthode
de
la dictée, qui
est
devenue
la
plus
pro-
ductive
de toutes avec
les
méthodes
modernes.
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
119
Tout
auteur
qui
a
l'habitude
de faire
des
confé-
rences,
de
parler
correctement
sa
pensée,
obtiendra
une
production
infiniment
plus
rapide,
en
dictant
ses
travaux.
La
sténographie,
la
sténo-dactylogra-
phie,
l'emploi
des
appareils
à sténographier,
des
appareils
à
dicter,
sont
des systèmes
fort
en
usage
maintenant,
dans
les
milieux
industriels
et
com-
merciaux,
et
dont
les travaux
de
l'esprit
peuvent
grandement
bénéficier.
Il
est bien
certain
que
tout
système
demande
apprentissage;
on
ne
réussira
pas
d'emblée
à
dicter
aisément et
correctement
sa
pensée
si
l'on
avait été
habitué
jusque-là
à
toujours
écrire;
mais la
réciproque
est
vraie,
et celui qui
s'est
accoutumé
à
dicter
aura
quelque
peine
sans
doute
à
rédiger
lorsqu'il se
trouvera
seul
devant
son
papier.
Exécution
matérielle
du travail.
—
Il
existe
une
véritable
technique pratique
de la
rédaction,
technique
qui
simplifie
extrêmement
le
travail.
Tous,
nous
nous
rappelons sans
doute
ces
travaux
de
rédaction
auxquels nous
nous
sommes
livrés
pendant
nos
classes. Sur un cahier
de
brouillons
on
jetait
les idées
à
la suite
telles
qu'elles
venaient,
puis on
raturait,
biffait,
on
multipliait
les
addi-
tions
en
marge,
les
renvois
en
bas
de
page
ou
à
la page
suivante, et
lorsque
le
travail
s'était
pro-
longé
pendant
un
certain
temps,
on
était
porté
à
se
déclarer
satisfait
au
moment
où
l'on
constatait
l'impossibilité
matérielle
d'ajouter
un
mot
ou
une
rature
nouvelle,
faute
de
place.
Dans
ce
grimoire
malpropre,
le
travail
de
copie
8/18/2019 Organisation Du Travail Intellectuel - R. Chavigny
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120
ORGANISATION
n'était
pas le
moins
malaisé, et
lorsqu'on
réalisait
la copie
définitive,
on
était
fort
étonné
d'y
décou-
vrir encore
des
erreurs
de
rédaction, des
lacunes
considérables ou
des
inversions dans
l'ordre
des
idées,
défauts qui avaient
échappé
sur
le
brouillon
devenu
indéchiffrable.
Il
est
pourtant un
moyen
bien
simple
d'échapper
à
ces
inconvénients.
Lorsque
vous
faites
une
rédac-
tion
un peu
importante,
en
vue
d'une
publication
d'un
ouvrage, ou
pour un
travail
qui
mérite d'être
soigné,
écrivez
sur des
feuillets
séparés,
numéro-
tés.
Chacune
des
feuilles ne sera
jamais
écrite
qu'au
recto,
le
verso
restera non
employé.
Le
pre-
mier
jet
de
la
rédaction
étant
terminé,
on
s'aper-
çoit
qu'on
aurait à
faire en certains
endroits
des
additions
importantes.
Au
lieu
de s'ingénier
à ins-
crire
ces
additions
dans un
coin de
marge,
où elles
ne
sauraient trouver
place,
l'auteur
prend
une paire
de ciseaux
et
coupe
la
page
exactement
au
niveau
de
la
ligne
où
l'addition
doit
se placer.
Il prend
une
page
blanche
et
la
colle
bord
à bord,
en
des-
sous
de la partie
du
texte
que
l'on
veut
continuer,
compléter.
Sur
ce
feuillet
surajouté
(fi
g.
16),
on
écrit
tout ce que
l'on
voulait
intercaler en
cet
en-
droit.
L'addition
terminée,
on
reprend
les
ciseaux
et
on
coupe
le
feuillet
additionnel
en
dessous
de
la
dernière
ligne
qui vient
d'être
inscrite;
on
recourt
de
nouveau à
la
colle,
au
pinceau.
On
rajoute,
on
recolle
en
dessous
de
cette
dernière ligne
toute
la
partie
inférieure
de la
page
qu'on
avait
tout
à
l'heure
découpée.
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
121
Papier
rajouté
pour
contenir une
addition au
texte
primitif
Fig.
16.
—
Les
procédés
pratiques
de
la
rédaction
:
une addition
A.V.
Il
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DU
TRAVAIL
INTELLECTUEL
123
Tous
ces procédés
techniques
dont
il vient
d'être
question
ont
trait surtout
à
la composition môme
du
sujet.
Ils
facilitent
plus
encore
l'élaboration
du
fond
que
la
correction
de
la forme.
Mais la forme
elle-même
en
profitera.
Bien entendu,
ce
système
ne
prétend
pas à
être
bien neuf
ni bien
exceptionnel.
C'était,
par
exem-
ple, la méthode
de
travail de Lamennais,
qui
ne
l'avait
probablement
pas
inventée.
Les
journalistes
l'emploient
couramment.
Il est seulement
regretta-
ble que sa simplicité n'ait pas
séduit
au
point
d'en
assurer la
diffusion partout.
Presque toujours
il
semble
que
ce
soit
une
révé-
lation
pour
ceux
auxquels
on
en
parle.
Une
recommandation
fort
utile
:
il
est bon,
lors-
qu'un travail
paraît
avoir atteint le
plus
haut
degré
de
perfection
auquel nous
puissions
le
porter,
de
le
laisser
reposer
quelques
jours,
quelques
semaines,
de
cesser
même d'y
penser,
puis de
le
reprendre :
les
défauts
sont alors
plus
visibles
et plus facile-
ment
réparables.
Mais
ceci,
c'est presque
de
la
mé-
thode
littéraire.
Une
difficulté
avec laquelle
on
n'est
pas encore
familiarisé,
lorsqu'on
n'a pas
encore beaucoup
publié,
est
celle
que
l'on
rencontre
dans
l'emploi
des
figures
à
annexer
à un
texte.
C'est
un art utile
que de
savoir
à
propos
intercaler
dans
une
démons-
tration
une figure
qui
l'éclairé.
Le
lecteur est
im-
médiatement
saisi, il comprend
de
suite
une
expli-
cation
même
parfois
difficile, lorsque
celle-ci
esl
ap-
puyée,
à
point
nommé,
d'une
figure
démonstrative.
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DU
TRAVAIL INTELLECTUEL
127
au
bouleversement
complet
qu'apporterait
dans
les
habitudes
générales
l'adaptation
d'une méthode
si
fertile
en
résultats,
on se
rend
compte
que nous
proposons
là
une
véritable
révolution dans les
mœurs
éducalrices
et universitaires
de
la
France.
S'imaginer
qu'une
modification si
radicale
puisse
être
réalisée
en
quelques
années,
ce
serait
étran-
gement
méconnaître
l'invincible
obstacle
des
tra-
ditions.
La
psychologie des foules, des peuples, des
ad-
ministrations, est
là
pour attester
que
les transfor-
mations de
coutumes ne peuvent être le
fruit
que
d'efforts
prolongés.
L'organisation méthodique
du
travail intellec-
tuel
ne
peut
être mieux comparée
qu'à
l'organisa-
tion des usines.
Taylor
a
pris
grand
soin de prévenir ses lec-
teurs,
ses admirateurs,
que
la mise
au
point
d'une
usine
exigeait
plusieurs
années
d'un
inlassable
travail
d'organisation.
Un
exemple
bien
typique
est
venu
nous
mon-
trer
récemment
qu'un administrateur
de
génie,
le
général
Gallieni,
avait
connu
son
plus
retentis-
sant
échec
administratif
lorsqu'il avait cru
pou-
voir,
par la
vertu
magique
d'une
circulaire,
modi-
fier
des
méthodes
de
travail
de son
administration.
On
ne
modifie
pas une
administration,
lout au
plus
peut-on la
créer, mais
alors
il
faut
en
prépa-
rer l'éducation;
c'est par ses éléments
jeunes
que
des
méthodes
nouvelles
peuvent
y
pénétrer.
Les
méthodes
nouvelles
du
travail
intellectuel
n'ont
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128
ORGANISATION
chance
d'être adoptées
que par les
jeunes généra-
tions.
C'est
à
celles-ci
qu'il
faut les proposer.
Les
sujets
jeunes
les
plus
intelligents,
surtout
les
plus pratiques,
les plus
aptes
au
combat
de
l'existence, seront les
premiers
à
se
les
assimiler,
et
ceux-là
pourront
parfois
devoir une
situation
de
choix
à
une
augmentation
réelle,
presque
extraor-
dinaire,
de
leur
capacité
de
production
intellec-
tuelle,
c'est-à-dire
de
leur
valeur
sociale
person-
nelle.
Bien
entendu,
on aurait à éviter
que
cette sorte
d'enseignement,
d'ordre
essentiellement
pratique,
ne
devienne
occasion de leçons magistrales
exclu-
sivement
théoriques.
Rester
théorique
estime
ten-
dance absolument néfaste
de
notre
esprit, et
contre
laquelle on ne saurait trop réagir, même
à
l'a-
vance.
Heureusement,
il
apparaît
que
cette science
un
peu
spéciale
ne
peut guère
devenir
^l'objet
d'in-
terrogations,
qu'elle
ne
saurait être introduite
au
programme
d'un
examen
ou
d'un concours.
Par
conséquent,
elle ne risqué
pas
de
créer
une
nou-
velle
surcharge
pour
la
mémoire.
Très
certainement,
c'est
une
méthode
qui devra
se
perfectionner,
se
modifier
suivant
les
progrès
du siècle,
surtout
suivant les inventions
de l'ave-
nir.
Il
sera
intéressant,
par la suite,
de
la
tenir
toujours au courant.
Une partie
de
son
application,
qui
sera
quelque
peu
difficile
et
demandera
de
la
part de
ceux qui
l'enseigneront
un
réel doigté,
ce
sera d'en
adapter
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TABLE
DES
MATIERES
Préface
5
Introduction
11
Chapitre
premier.
Nécessité
d'une
méthode
de
travail
intellectuel.
Origines de
cette mé-
thode
13
—
IL
Instruction
préparatoire.
Instruction
professionnelle.
Instruction
per-
sonnelle
23
—
III.
L'individualité
intellectuelle.
Son
dé-
veloppement.
Rôle de la
mémoire. 31
—
IV.
Acquérir.
Accumuler
37
V.
Technique[des
notes
:
les
inscrire,
les
classer
55
—
VI.
Ordre
matériel.
Rangement
pra-
tique
83
—
VII.
Les
Instituts
de
Bibliographie
103
—
VIII.
Mise
en
œuvre
des
matériaux
107
Conclusion
125
12-17
SOCIÉTÉ
ANON
Y:,]
H
D
IMPRIMERIE
DE VILLEFKANCHE-DE-ROUEKQU]
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g
B
L
2^H*
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LIBRARY
OF
CONGRESS
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337
341
9