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Quel avenir pour l'emballage ? Grownplast - Une recherche autour de la cellulose bactérienne Marilys Tran The Tri - La Cambre ENSAV

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Quel avenir pour l'emballage ?

Grownplast - Une recherche autour de la cellulose bactérienne

Marilys Tran The Tri - La Cambre ENSAV

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Marilys Tran The TriTravail de fin d’études

2019-2020 La Cambre ENSAV

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Remerciements

Pour commencer, je voulais remercier Janine Benyus d'avoir Ă©crit un livre si inspirant. Je voulais aussi remercier mes pro-fesseurs Giampiero Pitisci, Thomas Billas, JudicaĂ«l Cornu, Jean Paternotte, Marianne Bernecker et Marion Beernaerts qui m’ont accompagnĂ©e avec bienveillance durant tout mon parcours de formation. Merci aux gens de mon entourage qui ont soutenu chacun le projet Ă  leur maniĂšre et qui m'ont ac-compagnĂ© dans tous le processus. Enfin je voudrais remer-cier Henri et la brasserie de l'Ermitage pour avoir collaborer sur mon projet en me fournissant leurs eaux usĂ©es.

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Table des matiĂšres

INTRODUCTION..................................................................................10

PARTIE I : Quels substituts peut-on trouver au plastique dans l'emballage ?

1. BiopolymÚres et bioplastiques..............................................15 1.1. Structure moléculaire 1.2. Biodégradabilité des polymÚres 1.3. Bioplastique, une vraie solution ? 1.3.1. Bioplastiques à base d'algues 1.4. BiopolymÚre de masse : la cellulose

2. La cellulose bactérienne.........................................................21 2.1. Origine biologique 2.2. Caractéristiques physico-chimiques 2.3. Culture bactérienne 2.3.1. Scoby, mÚre de Kombucha 2.3.2. Recette de cellulose à base de Kombucha 2.3.1. Recette de cellulose à base de bactérie pure

3. Eco-matériaux : matériaux biofabriqués.......................26 3.1. Mycelium composites 3.2. Biocouture et innovations médicales 3.3. Culture bactérienne 2.3.1. Scoby, mÚre de Kombucha 2.3.2. Recette de cellulose à base de Kombucha 2.3.1. Recette de cellulose à base de bactérie pure 4. Fabriquer à la maniÚre du vivant ?...................................30 4.1. Cellulose bactérienne versus plastique 4.2. Cellulose bactérienne versus papier 4.3. Exemples industriels 4.4. Valoriser les déchets localement

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PARTIE 2 : Grownplast : PolymÚre cultivé à partir de déchets organiques

1. Introduction..............................................................................38

2. Co-produits et déchets organiques belges................38 2.1. Industrie de la pomme de terre 2.1.1. Procédé industriel 2.1.2. Les co-produits de la fabrication de pomme de terre 2.2. Les brasseries 2.2.1. Procédé industriel 2.2.2 Les co-produits et déchets de brasserie

3. Expérimentation d'une nouvelle recette.....................43 3.1. Premiers tests 3.1.1. Résultats 3.1.2. Conclusion 3.2. Expérimentation autour des pelures de pomme de terre 3.3. Expérimentation autour des eaux usées de brasserie 3.4. Comparaison et conclusion

3.5. Biodégradation de la cellulose bactérienne 3.6.1. Expérience de biodégradation sur Grownplast

4. Perspectives...........................................................................54

BIBLIOGRAPHIE.............................................................................56

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IntroductionCOMMENT LE VIVANT PEUT-IL NOUS INSPIRER FACE A LA PROBLEMATIQUE ACTUELLE DE L’EMBALLAGE ?

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« AprĂšs 3,8 milliards d'annĂ©es de recherche et dĂ©veloppement, ce qui a Ă©chouĂ© est devenu fossile, et ce qui nous entoure est le secret de la survie. Plus notre monde se rap-prochera de la nature, plus nous aurons de chances d'ĂȘtre acceptĂ©s sur cette Terre dont nous ne devons jamais oublier que nous ne sommes pas les seuls propriĂ©taires ».

Janine Benyus, Biomimétisme, quand la nature inspire des inno-vations durable.

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C’est l’engendrement grandissant des dĂ©chets gĂ©nĂ©rĂ©s par le secteur industriel - un problĂšme intimement liĂ© au mĂ©tier de designer industriel - qui m’a poussĂ©e Ă  entreprendre ce pro-jet. Le fait est que notre maniĂšre de produire et de consom-mer impacte fortement les autres formes de vie sur terre. Et mon Ă©veil particulier Ă  la nature m’a amenĂ©e Ă  penser qu’il Ă©tait crucial de la respecter, de l’observer, de la comprendre, mais aussi et surtout de s’en inspirer. Je souhaite participer Ă  un design qui avance avec son temps et avec les muta-tions de notre sociĂ©tĂ©, qui tend Ă  rĂ©soudre des problĂšmes actuels et futurs, un design responsable. Le designer est Ă  la source de ce qui est produit. Il dĂ©cide des matĂ©riaux utilisĂ©s et indirectement de leur provenance, il imagine l’assemblage d’un produit, sa nature, son usage. Et je considĂšre que nous avons aussi notre part de responsabilitĂ© dans ce que devient ce produit en fin de vie.

A l’heure actuelle, les plastiques reprĂ©sentent le plus gros dĂ©chet jamais conçu par l’homme. Chaque annĂ©e, leur pro-duction mondiale s’élĂšve Ă  plus de 4 milliards de tonnes. RĂ©-sistants, imputrescibles, peu chers et faciles Ă  produire, ils sont devenus indispensables dans beaucoup de secteurs. Pourtant, l’élimination des dĂ©chets plastiques est devenue extrĂȘmement problĂ©matique. En effet, le taux de recyclage mondial ne dĂ©passe pas 14%, 40 % Ă©tant incinĂ©rĂ© ou mis en dĂ©charge, le reste finissant dans la nature, dans les cours d’eau et dans le sol, sur le bord des routes et particuliĂšre-ment au sein des Ă©cosystĂšmes marins.

Parmi ces dĂ©chets, on compte les emballages plastique Ă  usage unique. Ils reprĂ©sentent environ 40% de l’industrie plasturgique. En plus d’ĂȘtre des dĂ©chets non recyclables et non valorisables, leur production reprĂ©sente elle aussi un im-pact environnemental non nĂ©gligeable. Il faut en effet passer par plusieurs Ă©tapes de transformation du pĂ©trole pour obte-

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nir les molĂ©cules qui serviront Ă  la fabrication de la matiĂšre plastique. Ces Ă©tapes nĂ©cessitent de grandes quantitĂ©s d’énergie pour monter Ă  des hautes tempĂ©ratures situĂ©es entre 400°C et 800°C. L’ironie est telle que les emballages ont une durĂ©e de vie trĂšs limitĂ©e dans l’usage, par rapport Ă  la quantitĂ© d’énergie utilisĂ©e pour les produire et Ă  la pollution qu’ils reprĂ©sentent en fin de vie pour l’humain et les Ă©cosys-tĂšmes.

Pourtant, de l’autre cĂŽtĂ©, la nature regorge de systĂšmes et de modĂšles biologiques inspirants, tant comme alternative aux matĂ©riaux Ă  base de pĂ©trole, qu’au niveau de sa propre ges-tion ses dĂ©chets. En effet, dans le monde du vivant, chaque dĂ©chet d’une espĂšce est une ressource pour d’autres. Ils sont recyclĂ©s localement par des dizaines d’espĂšces de mi-cro-organismes (bactĂ©ries, champignons ou actinomycĂštes) et macroorganismes (insectes, vers, crustacĂ©s ou gastĂ©ropo-des) qui s’en nourrissent. C’est en les digĂ©rant que ces orga-nismes vont produire de nouvelles matiĂšres qui seront aptes Ă  une nouvelle utilisation. Et tout ce systĂšme ne fonctionne qu’avec l’énergie disponible sur place
 La nature possĂšde l’art de l’économiser. Comment pourrait-on s’inspirer de ce modĂšle biologique pour rĂ©pondre Ă  la problĂ©matique liĂ©e Ă  l’emballage Ă  usage unique ? Et comment le monde du vivant pourrait-il nous inspirer de nouvelles maniĂšres de fabriquer, Ă  un moindre coĂ»t Ă©nergĂ©tique ? Est-il possible de fabriquer un biopolymĂšre Ă  partir de dĂ©chets issus de l’industrie agro-ali-mentaire, capable de se substituer aux matiĂšres actuelle-ment utilisĂ©s dans l’emballage jetable ?

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Partie 1QUELS SUBSTITUTS PEUT-ON TROUVER AU PLASTIQUE DANS L’EMBALLAGE ?

Au cours des derniĂšres annĂ©es, de nombreuses solutions furent proposĂ©es pour palier Ă  la problĂ©matique des em-ballages plastiques. Sont alors apparus les bioplastiques, des plastiques « vĂ©gĂ©taux » issus de ressources renouve-lables. Que sont-ils exactement ? Et reprĂ©sentent-ils rĂ©el-lement une alternative plus durable ? Pendant ce temps, des organismes vivants fabriquent discrĂštement le bio-polymĂšre le plus abondant sur terre, la cellulose. Dans les cellules des feuilles d’arbres, sur les carapaces des in-sectes ou dans le sol des forĂȘts humides, ce biopolymĂšre croĂźt, sert de structures, puis se dĂ©compose, rythmĂ© par les cycles de la vie.

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1. BIOPOLYMERES ET BIOPLASTIQUES Les polymĂšresÂč sont une classe de matĂ©riaux comprenant d’un cĂŽtĂ© les biopolymĂšres et de l’autre, les matiĂšres plas-tiques. Les biopolymĂšres, comme la cellulose, sont des fibres naturelles issues de la biomasse, c’est-Ă -dire fabriquĂ© par des organismes vivants. Au cours du processus de polymĂ©ri-sation, les monomĂšres s’attachent entre elles par des liaisons covalentes pour former un polymĂšre (figure 1). Par exemple, si le propylĂšne est un monomĂšre, plusieurs chaĂźnes de mo-lĂ©cules de propylĂšne assemblĂ©es forment le polypropylĂšne, un plastique aux propriĂ©tĂ©s multiples. Pour les biopolymĂšres, c’est un peu le mĂȘme principe, sauf que ceux-ci sont en fait des sucres complexes, des polysaccharides, issus de la poly-mĂ©risation d’oses (monosaccharides).

Fig.1

C

C

C

C

C

C

C

C

C

C

C

C

C

C

CC

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C

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C

1.MonomĂšres 2. PolymĂšre

Âč Etymologie : Du grec «polus», plusieurs et «meros», partie SchĂ©ma inspirĂ© de KULA Daniel, TERNAUX Elodie. Plastique. In Materiology. Amsterdam, Basel : Frame Publishers, BirkhĂ€user Verlag, 2013, p.67.

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1.1. Structure molĂ©culaire Il existe deux types d’organisation des chaĂźnes macromolĂ©-culaires qui qualifient la nature d’un polymĂšre : semi-cristal-line ou amorphe. Un polymĂšre possĂ©dant une structure cris-talline ou semi-cristalline possĂšde des propriĂ©tĂ©s chimiques et mĂ©caniques le plus souvent supĂ©rieures Ă  un polymĂšre de structure amorphe. Par exemple, le polyĂ©thylĂšne possĂšde une structure molĂ©culaire plus solide que le polystyrĂšne, ce qui le rend plus rĂ©sistant aux chocs ainsi qu’aux agents chimiques.

1.2. BiodĂ©gradabilitĂ© des polymĂšresAvant d’aller plus loin dans l’analyse, il me semble important de redĂ©finir ce que signifie un matĂ©riau « biodĂ©gradable ». En voici une premiĂšre dĂ©finition : « BiodĂ©gradable ; se dit des produits industriels et des dĂ©chets qu’une action bactĂ©-rienne, naturelle ou induite, dĂ©compose assez rapidement et les fait disparaĂźtre de l’environnement en les convertissant en molĂ©cules simples utilisables par les plantes » (DĂ©finition du Larousse en ligne), autrement dit, un matĂ©riau biodĂ©gra-dable prĂ©sente une aptitude Ă  se dĂ©grader biologiquement, au cours d’une attaque microbienne qui le transforme en une nouvelle biomasse non toxique, en gaz carbonique (C0₂) et en eau (H₂0). Dans l’industrie, pour qu’un matĂ©riau ou produit soit considĂ©rĂ© comme biodĂ©gradable, il doit rĂ©pondre Ă  une sĂ©rie de normesÂČ rĂ©gies par la loi concernant les emballages. L’une de ces normes stipule que le seuil acceptable de bio-dĂ©gradabilitĂ© selon la composition du matĂ©riau varie de 60 Ă  90% sur une pĂ©riode de 60 Ă  90 jours. Cette rĂšgle existe d’autant plus tous les polymĂšres finissent par se dĂ©grader Ă  un moment, mais dans des temporalitĂ©s et conditions bien diffĂ©rentes. A titre de comparaison, une feuille d’arbre par exemple se dĂ©compose au bout

ÂČ La norme NF EN 13432 est une norme europĂ©enne qui dresse les exigences relatives aux emballages valorisables par compostage et biodĂ©gradation

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de quelques semaines dans son milieu naturel, alors qu’une bouteille mettra plus de 400 ans Ă  se dĂ©grader. Il faut savoir que le temps de dĂ©composition ne sera pas le mĂȘme dans la nature que dans un compost industriel, ni le mĂȘme en eau douce et en eau salĂ©e ou dans le sol. Les Ă©cosystĂšmes prĂ©-sentent nĂ©anmoins des limites Ă  absorber des produits bio-dĂ©gradables. À terme, l’accumulation de ces matiĂšres dans le milieu peuvent causer des dommages sur l’environnement comme l’eutrophisationÂł des ocĂ©ans. Au niveau industriel, il existe plusieurs mĂ©thodes entraĂźnant le processus de biodĂ©-gradation : le compost, l’hydrolyse et la dĂ©gradation enzyma-tique. La plupart des bioplastiques ne se dĂ©graderont qu’en compost industriel, et non en milieu naturel ou en compost mĂ©nager.

1.3. Bioplastique, une vraie solution ?Un des grands enjeux actuel est, parallĂšlement au recyclage, de remplacer le pĂ©trole comme constituant de base des ma-tiĂšres plastiques. Notre approche actuelle de la synthĂšse des matĂ©riaux, qui dĂ©pend de l’abondance du pĂ©trole, du gaz et du charbon, est remise en cause par leur limitation dans le temps. Il s’agit de remplacer les molĂ©cules « pĂ©trosourcĂ©es » par des molĂ©cules « biosourcĂ©es ». C’est sur cette idĂ©e que s’est construit le marchĂ© du bioplastique. Ce terme dĂ©signe Ă  la fois les matiĂšres plastiques biosourcĂ©es⁎ et les matiĂšres plastiques biodĂ©gradables, y compris issues de ressources fossiles. Le bioplastique reprĂ©sente, au premier abord, une solution Ă©cologique pour l’emballage. En rĂ©alitĂ©, il n’est in-tĂ©ressant qu’à condition d’exclure totalement l’utilisation de pĂ©trole. Aujourd’hui le terme « bioplastique » dĂ©signe cer-taines matiĂšres pouvant contenir jusqu’à 70% de pĂ©trole. Il arrive aussi qu’il soit directement fabriquĂ© Ă  partir de maĂŻs ou de blĂ©, ce qui le place en concurrence directe avec l'alimen-

Âł DĂ©sĂ©quilibre biologique d’un milieu provoquĂ© par l’augmentation de la concentration d’azote et de phosphore dans celui-ci et caractĂ©risĂ© par une croissance excessive des plantes et des algues due Ă  la forte disponibilitĂ© des nutriments. ⁎ Se dit d’un produit ou d’un matĂ©riau entiĂšrement ou partiellement fabriquĂ© Ă  partir de matiĂšres d’origine biologique.

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tation humaine et animale. En ajoutant Ă  ceci le fait que ces cultures nĂ©cessitent de grandes quantitĂ©s d’énergies fos-siles et de ressources naturelles.

1.3.1. Bioplastiques Ă  base d’algues Les algues reprĂ©sentent aujourd’hui une ressource trĂšs intĂ©-ressante pour diffĂ©rents secteurs, dont celui de l’emballage. Qu’elles soient cultivĂ©es dans des fermes aquacoles ou ra-massĂ©es localement, elles se diffĂ©rencient des matiĂšres pre-miĂšres agricoles car elles poussent dans l’eau salĂ©e et n’ont donc besoin d’aucune alimentation supplĂ©mentaire pour croĂźtre. Algopack et Notpla sont deux entreprises d’embal-lages utilisant les algues pour Ă©laborer des matĂ©riaux com-plĂštement biodĂ©gradables. Algopack, une initiative bretonne, transforme les macro-al-gues brunes grĂące Ă  un procĂ©dĂ© thermique et mĂ©canique. Ils commencent par les dĂ©shydrater puis mĂ©langent cette poudre Ă  des adjuvants d’origine naturelle, ensuite, grĂące Ă  un procĂ©dĂ© thermique, forment des granules d’un millimĂštre. Celle-ci seront envoyĂ©es vers des usines d’emballage. Leur technologie permet ensuite, grĂące aux procĂ©dĂ©s industriels classiques de l’industrie plasturgique, d’injecter ou de ther-moformer le bioplastique. Ce procĂ©dĂ©, mĂȘme s’il est rĂ©volu-tionnaire, prĂ©sente un dĂ©savantage majeur. Comme pour les matiĂšres plastiques, pour transformer les granules en objets, il faut monter au-delĂ  de 200°C et utiliser des machines utili-sant de grandes quantitĂ©s d’énergie. IntĂ©ressons-nous maintenant Ă  Notpla. Un projet qui s’adresse Ă  la problĂ©matique des bouteilles en plastique. En effet, cette matiĂšre est composĂ©e exclusivement d’algues, ce qui la rend compostable ou comestible. En d’autres mots, les emballages de Notpla sont de petites poches contenant du liquide qu’on peut boire et manger. Ce concept singulier convient pour des usages particuliers comme le marathon de Londres oĂč les athlĂštes ont pu s’hydrater sans s’encombrer

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Echantillonage - Notpla Crédits image - Notpla

Aquaculture d'algues - AlgopackCrédits image - Algopack

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d’une bouteille d’eau. Dans d’autres contextes d’usage, le projet pose question. Qu’en est-il des normes d’hygiĂšne et de la contenance ? L’idĂ©e est-elle encore pertinente si ces poches nĂ©cessitent elles-mĂȘmes d’ĂȘtre emballĂ©es ?

1.4. BiopolymĂšre de masse : la celluloseLa cellulose est le biopolymĂšre le plus abondant sur Terre. Constituant principale des vĂ©gĂ©taux, du bois, ainsi que des cuticules d’insectes, la cellulose est produite dans les parois de leurs cellules par un phĂ©nomĂšne de polymĂ©risa-tion. Cette famille de matĂ©riau partage une mĂȘme structure composĂ©e de chaĂźnes linĂ©aires de molĂ©cules de D-glucose qui lui confĂšre des caractĂ©ristiques physiques trĂšs recher-chĂ©es par l’industrie du papier, du textile, de l’isolation,... La cellulose vĂ©gĂ©tale, telle que le bois et le coton, est d’ailleurs abondamment utilisĂ©e pour la crĂ©ation de toutes sortes d’objets et de matĂ©riaux. Mais les plantes ne sont pas les seuls organismes vivants Ă  produire de la cellulose. Hor-mis certains macro-organismes comme les insectes et les champignons, certains types de bactĂ©ries produisent de la cellulose extracellulaire dans certaines conditions. Parmi elles, l’Acetobacter xylinium, est capable gĂ©nĂ©rer de la cel-lulose de grande puretĂ©. puretĂ©.

Structure moléculaire de la cellulose

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2. LA CELLULOSE BACTERIENNE La cellulose bactĂ©rienne est une matiĂšre organique de formule (C₆H₁₀O₅) produite par certains types de bactĂ©ries comme l’Acetobacter xylinum. Contrairement Ă  la cellulose vĂ©gĂ©tale, elle ne contient ni hĂ©micellulose ni lignine⁔. La cellulose bactĂ©rienne est chimiquement plus pure car elle rĂ©sulte d’une plus grande quantitĂ© de polymĂ©risation.

2.1. Origine biologique L’Acetobacter xylinium est un type de bactĂ©rie acĂ©tique, appartenant Ă  la famille des AcetobacteraceĂŠ. Ce mĂ©so-phile⁶ non pathogĂšne, dĂ©couvert pour la premiĂšre fois par AJ Brown au 19Ăšme siĂšcle, a Ă©tĂ© le sujet de nombreuses recherches scientifiques en raison de cette capacitĂ© Ă  pro-duire une grande quantitĂ© de cellulose Ă  partir de sources de carbone et d’azote variĂ©es⁷. Dans leur habitat naturel, ces bactĂ©ries synthĂ©tisent des polysaccharides, comme la cellulose, qui forme des enveloppes protectrices autour des cellules. Acetobacter xylinum se retrouve dans le sol ou sur la surface des fruits en dĂ©composition et vit parfois en sym-biose avec des plants de canne ou de cafĂ©. Cette bactĂ©rie possĂšde un mĂ©tabolisme aĂ©robie⁞, et synthĂ©tise la cellulose bactĂ©rienne au cours d’un processus d’oxydorĂ©duction.

⁔ PolymĂšres structuraux prĂ©sents dans les plantes et les algues.⁶ BactĂ©ries vivant Ă  des tempĂ©ratures comprises entre 20°C et 40°C.⁷ Les saccharoses, les lactoses, le glucose, la glycĂ©rine, l’alcool et les acides organiques sont des sources riches en carbone pour l’Acetobacter.⁞ Metabolisme nĂ©cessitant de l'oxygĂšne pour son fonctionnement. L'oxygĂšne lui permet de dĂ©grader les glucides, les lipides et protĂ©ines.

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Paroi cellulaireCytoplasme

RibosomeMembranePlasmique

Nuceloid (ADN)

Flagelles

Capsule Polysaccharides (Glycocalyx)

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2.2. CaractĂ©ristiques physico-chimiquesEn m’appuyant sur la littĂ©rature scientifique et par le biais d’expĂ©rimentations, j’ai identifiĂ© les caractĂ©ristiques spĂ©ci-fiques Ă  cellulose bactĂ©rienne. Elle possĂšde une structure plus cristalline que la cellulose vĂ©gĂ©tale. L’organisation spa-tiale de ses fibres ultrafines lui confĂšre une rĂ©sistance mĂ©ca-nique particuliĂšrement Ă©levĂ©e. Elle est donc capable de rĂ©-sister Ă  des tractions Ă©levĂ©es. La cellulose bactĂ©rienne a des propriĂ©tĂ©s de rĂ©tention d’eau, elle est biocompatible et an-timicrobienne, ce qui la rend intĂ©ressante pour la mĂ©decine rĂ©gĂ©nĂ©rative. Elle a Ă©galement des caractĂ©ristiques plas-tiques intĂ©ressantes : elle est moulable, pliable et collable. A noter que ces caractĂ©ristiques varient selon en fonction de l’épaisseur de la cellulose.

SEM micrographie de cellulose bactérienne - Publiée dans Journal of Functional Biomate-rials (2012) Crédits image - Fernando Gómez Torres, Solene Commeaux, Omar P. Troncoso

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2.3 Culture bactĂ©rienneLa cellulose bactĂ©rienne est un biofilm visqueux poussant Ă  la surface d’une culture symbiotique de bactĂ©ries et de le-vures. Cette feuille de matiĂšre Ă©lastique s’épaissit Ă  la sur-face du milieu aqueux afin de protĂ©ger les micro-organismes des Ă©lĂ©ments extĂ©rieuresâč. Elle peut ĂȘtre cultivĂ©e grĂące Ă  une souche de bactĂ©rie pure ou d’un symbioteÂč⁰ (Scoby). Le dĂ©veloppement de la cellulose prend plusieurs jours, la rapiditĂ© de croissance dĂ©pendant des conditions du milieu. En effet, pour produire de la cellulose, l’Acetobacter a besoin d’un milieu riche en oxygĂšne, ayant une tempĂ©rature com-prise entre 20 et 30 degrĂ©s, avec un PH compris entre 4 et 6. Au plus le milieu sera riche en sucres, au plus la production cellulosique sera efficace et qualitative. Une fois sĂ©chĂ©e, la cellulose prĂ©sente des qualitĂ©s plastiques unique.

2.3.1. Scoby, mĂšre de Kombucha Scoby est l’acronyme anglais de « Symbiotic Culture of Bac-teria and Yeast » est une souche de bactĂ©ries de l’espĂšce Acetobacter (Gluconacetobacter, Acetobacter xylinium et Lactobacillus) et de levures (Saccharomyces) qui vivent en symbiose l’une avec l’autre sous la forme d’un disque de matiĂšre, aussi appelĂ© « mĂšre de Kombucha » Ă  l’instar d’une «mĂšre de vinaigre ». La souche mĂšre flotte dans le milieu aqueux et permet aux cellules de remonter Ă  la surface d’un milieu riche en oxygĂšne en formant une nouvelle couche de cellulose. A l’origine, le Scoby est utile Ă  la fermentation de boisson Ă  base de thĂ© sucrĂ© tel que le KombuchaÂčÂč. D’autres aliments et boissons fermentĂ©s – comme le kĂ©fir, la biĂšre au gingembre et le pain au levain – nĂ©cessitent ce type de cultures symbiotiques pour fermenter. Les ferments trans-forment les glucides tels que le sucre ou l’amidon en alcool et/ou en acide acĂ©tique.

âč D’autres bactĂ©ries, microbes ou insectes peuvent polluer le bassin de culture de cellulose. Il faut pour cette raison, le recouvrir d’un tissu. Âč⁰ Ensemble formĂ© par un ou deux organismes vivant en symbiose. ÂčÂč Boisson acidulĂ©e obtenue grĂące Ă  une culture symbiotique de bactĂ©rie et de levures dans un milieu sucrĂ©. 23

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2. 2.4. Recette de cellulose Ă  base de Kombucha

IngrĂ©dients : ThĂ© vert (10g), 1l d’eau, 80 gr de sucre, un SCO-BY (Culture de Kombucha)

Étape 1 Faire bouillir l’eau. Ajouter le thĂ© et le sucre et laissez infuser 5 min. Laissez-le refroidir Ă  moins de 30 ° Celsius, n’utilisez pas de thĂ© chaud dans la prĂ©paration (au-dessus de 35 ° C), car cela peut tuer la culture bactĂ©rienne de dĂ©part. Lorsque la tempĂ©rature du mĂ©lange de thĂ© est infĂ©rieure Ă  30 degrĂ©s Celsius, versez dans un bocal en conserve stĂ©rilisĂ©. N’utilisez pas de rĂ©cipient en cĂ©ramique ou mĂ©tallique (si vous voulez boire le Kombucha).

Étape 2Ajoutez la culture de dĂ©part : une autre boisson au Kombu-cha, la pellicule de kombucha ou du vinaigre de pomme bio-logique. Couvrir avec un chiffon ou une serviette en papier ; il est important de laisser l’échange gazeux se produire, mais nous devons Ă©viter la contamination de la culture. Laisser fermenter Ă  une tempĂ©rature de 25 Ă  28 degrĂ©s Celsius en Ă©vitant la lumiĂšre. La croissance de la mĂšre Kombucha, ou « Scoby », est un processus de croissance s’étalant sur sept Ă  quatorze jours (Ă  partir d’une culture de dĂ©marrage) en fonction des conditions environnementales, atteignant une Ă©paisseur de sept Ă  douze millimĂštres.

Étape 3 RĂ©coltez la pellicule de culture Scoby du pot, lavez-la soi-gneusement Ă  l’eau du robinet en Ă©liminant la levure (brins bruns) et laissez-la tremper dans l’eau pendant quelques jours si vous voulez vous dĂ©barrasser de l’odeur d’acide acĂ©-tique. Puis placez-le sur un morceau de bois ou un autre type de surface oĂč il sĂšche en Ă©vitant la lumiĂšre directe du soleil.

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2. 2.5. Recette de cellulose à base de bactérie pure (Aceto-bacter)

IngrĂ©dients : 5g de Peptone, 5g de extraits de levures, 1,15g d’acide citrique, 6,8g d’HydrogĂ©nophosphate de sodium (Na₂HPO₄), 20g de glucose, 800ml d’eau, 200ml d’eau

Étape 1 Dans un rĂ©cipient, prĂ©parez le peptone avec les extraits de levures, l’acide citrique et le Na₂HPO₄. Rajoutez-y 800ml d’eau et mĂ©langez bien.

Étape 2 Dans un autre rĂ©cipient, mĂ©langez 20g de glucose dans 200 ml d’eau.

Étape 3 Placez les deux rĂ©cipients dans le stĂ©rilisateur rĂ©glĂ© Ă  120°C et laissez stĂ©riliser pendant 20 minutes. Ensuite laissez re-froidir.

Étape 4 Ajoutez quelques micro-grammes de bactĂ©ries pures que vous aurez cultivĂ©es au prĂ©alable dans de l’agar-agar. Lais-sez fermenter dans un incubateur Ă  30°C pendant 3 Ă  4 jours. Vous obtiendrez un film de cellulose bactĂ©rienne transpa-rente.

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3. ECO-MATERIAUX : matĂ©riaux biofabriquĂ©sCes derniĂšres annĂ©es, le milieu du design a vu apparaĂźtre une tendance reposant sur la crĂ©ation de nouvelles matiĂšres. Ces matĂ©riaux, faits de fibres naturelles et biodĂ©gradables, s’adressent Ă  la problĂ©matique de la gestion des dĂ©chets plastiques, intrinsĂšquement liĂ©e Ă  la pratique du design in-dustriel. FabriquĂ©s par des micro-organismes comme du my-celium ou des bactĂ©ries, Ă  la frontiĂšre entre conception et expĂ©rimentation scientifique, ces matĂ©riaux conçus par des micro-organismes remettent en cause notre maniĂšre de per-cevoir la matiĂšre ou de fabriquer un objet.

3.1. Mycelium Composites Le mycelium est l’appareil vĂ©gĂ©tatifÂčÂČ des champignons. Il est formĂ© par un ensemble de filaments appelĂ©s hyphes qui s’étend comme une toile autour du champignon, sur et dans le sol et participe Ă  la dĂ©composition des matiĂšres orga-niques. Il est, depuis quelques annĂ©es, trĂšs recherchĂ© pour ses propriĂ©tĂ©s cohĂ©sives. En l’additionnant Ă  des dĂ©chets agricoles comme des restes de cĂ©rĂ©ales ou de chanvre, il est possible d’en mouler des formes. Les dĂ©chets nĂ©cessitent d’ĂȘtre stĂ©rilisĂ©s puis placĂ©es dans l’obscuritĂ© pendant cinq jours. Pendant ce temps le mycelium formera un rĂ©seau de microfibres blanches entre et autour du substrat en se nour-rissant sur celui-ci. Une fois dĂ©moulĂ©, la forme est recuite afin de stopper la croissance du mycelium et d’éviter l’apparition de champignons et de spores. Cette technologie pourrait remplacer la totalitĂ© des packagings en polystyrĂšne expansĂ© grĂące Ă  ses propriĂ©tĂ©s plastiques et sa facultĂ© Ă  amortir les chocs. Ces propriĂ©tĂ©s s’avĂšrent utiles Ă  protĂ©ger diffĂ©rents types de produits pendant le transport comme des appa-reils Ă©lectroniques, bouteilles en verre, ect. Les composites Ă  base de mycelium sont aussi testĂ©s pour remplacer certains matĂ©riaux de construction.

ÂčÂČ Ensemble des organes d'un organisme vĂ©gĂ©tal qui assure sa croissance.

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Jonas Edvard - Myx Lamp

David Benjamin - Living Matter

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3.2. Biocouture et innovations mĂ©dicalesA ce jour, la cellulose bactĂ©rienne est testĂ©e et utilisĂ©e dans diffĂ©rents domaines et sous diffĂ©rentes formes : en mĂ©decine, dans la mode et le design d’objet et dans l’industrie agro-ali-mentaire. Pour la mode et le textile, le projet « Biocouture » de Suzanne Lee : au lieu d’exploiter les plantes comme le coton ou d’utiliser des matiĂšres dĂ©rivĂ©es du pĂ©trole, Lee pro-pose d’utiliser des bactĂ©ries pour faire pousser un matĂ©riau plus Ă©thique et plus Ă©cologique capable de se substituer au cuir animal. Peu aprĂšs, une Ă©tudiante diplĂŽmante du Royale Collage of Art a exploitĂ© la bactĂ©rie k.rhaeticus en dĂ©velop-pant une nouvelle forme de « tissage microbien ». Elle met notamment cette approche biotechnologique en Ɠuvre dans la confection d’une chaussures ultra futuriste. Dans le design de produit, la cellulose bactĂ©rienne a Ă©tĂ© utilisĂ©e pour ses propriĂ©tĂ©s acoustiques dans le projet d’un nouveau casque audio aux matiĂšres renouvelables. En mĂ©decine interne et rĂ©gĂ©nĂ©ratrice, la cellulose bactĂ©rienne reprĂ©sente de nom-breuses pistes d’avenir : dĂ©jĂ  utilisĂ©e comme compresse hy-dratante pour grand brĂ»lĂ©s et testĂ©e dans le remplacement de vaisseaux sanguins, elle a plus rĂ©cemment fait l’objet de recherches biomĂ©dicales dans la crĂ©ation de tissus cartila-gineux (oreille et nez) grĂące au dĂ©veloppement d’une impri-mante 3D capable pour nanocellulose.

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Jen Keane- This is grown

Suzanne Lee - Biocouture

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4. Fabriquer Ă  la maniĂšre du vivant ? Dans le monde du vivant, Ă©conomiser les ressources et l’énergie est primordiale pour assurer la survie des Ă©cosys-tĂšmes. De la mĂȘme maniĂšre, en limitant les dĂ©penses d’éner-gie et de ressources dans la fabrication des matĂ©riaux desti-nĂ©s Ă  l’emballage, on diminue leur impact environnemental. Cette analyse met en Ă©vidence l’étendue de ce qu’implique la fabrication et la transformation de ces matĂ©riaux au regard de l’élaboration d’un nouveau matĂ©riau.

4.1. Cellulose bactĂ©rienne versus plastique Les plastiques, principaux constituants des emballages, sont obtenus par le biais de nombreuses transformations. En effet, AprĂšs le raffinage de pĂ©trole vient la polymĂ©risation, puis aux polymĂšres sont ajoutĂ©s des adjuvants et des additifs. On ob-tient alors la matiĂšre plastique. Celle-ci sera ensuite façonnĂ©, moulĂ©, extrudĂ©, injectĂ© ou thermoformĂ©e. Tout ce processus nĂ©cessite l’utilisation d’énergie fossile et gĂ©nĂšre des gazs carboniques. La Commission europĂ©enne estime ainsi que la production et l’incinĂ©ration du plastique est responsable de l’émission 400 millions de tonnes de CO₂ dans le monde chaque annĂ©e. DĂ©sormais, la production de plastique ne se calque plus sur un besoin rĂ©el mais sur la disponibilitĂ© de ma-tiĂšres fossiles Ă  bas prix. Quant Ă  la cellulose bactĂ©rienne, elle est produite comme dans la nature Ă  des tempĂ©ratures modĂ©rĂ©es, dans l’eau et Ă  un rythme respectant les res-sources disponibles. Cette production n’est cependant pas exempte de consommation d’énergie ou de ressources. Pour fabriquer de la cellulose Ă  base de Kombucha, nous avons vu qu’il faut porter une certaine quantitĂ©

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d’eau Ă  Ă©bullition pour pouvoir y infuser le thĂ©. La recette nĂ©-cessite Ă©galement l’ajout de quantitĂ© considĂ©rable de sucre et de vinaigre. La croissance de la cellulose peut, elle, se faire Ă  tempĂ©rature ambiante, entre 20°C et 30°C.

4.2. Cellulose bactĂ©rienne versus papierSur le plan environnemental, la cellulose bactĂ©rienne semble plus intĂ©ressante que la cellulose vĂ©gĂ©tale autant au ni-veau de sa consommation de ressources que d’énergie. La cellulose bactĂ©rienne est produite Ă  partir d’une souche de bactĂ©ries non pathogĂšnes et les produits chimiques requis dans l'entiĂšretĂ© du processus sont naturels et ne sont pas toxiques.La fabrication de la pĂąte Ă  papier, elle, nĂ©cessite de monter Ă  des tempĂ©ratures comprises entre 100 et 175°C et l’utilisation de produits chimiques comme le bisulfite (acide) et le chlore ou dioxyde de chlore, parfois dangereux, pour blanchir le papier. Ces produits sont toxiques et leur rejet dans l’environnement fait l’objet de contrĂŽles. Au niveau de sa consommation en eau, la cellulose bactĂ©rienne est net-tement plus intĂ©ressante que la cellulose vĂ©gĂ©tale. En effet, fabriquer une feuille de papier de format A4 nĂ©cessite l'utili-sation d'environ 5l d’eau. Alors que la fabrication d'une feuille de cellulose bactĂ©rienne nĂ©cessite deux voir trois fois moins d'eau. C'est Ă  dire qu'on utilise 1 Ă  2 l d’eau par feuille de ma-tiĂšre.

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4.3. Exemples de productions industriellesLes Ă©co-matĂ©riaux sont Ă  bien des Ă©gards enthousiasmants.Mais l’aspect expĂ©rimental de ces procĂ©dĂ©s laisse des inter-rogations quant Ă  la rationalisation de leur production. Ces derniĂšres annĂ©es, quelques productions de ce type se sont mises en place. Comment passer de l’expĂ©rimentation Ă  la production? Est-il envisageable de produire la cellulose bac-tĂ©rienne Ă  plus grande Ă©chelle ? Quels sont les exemples in-dustriels existants et que nous apprennent-ils ? La cellulose bactĂ©rienne peut se cultiver dans toutes sortes de rĂ©cipients, dans une solution aqueuse et sucrĂ©e, Ă  tempĂ©rature ambiante. Les cultures doivent ĂȘtre protĂ©-gĂ©es des facteurs extĂ©rieurs comme les insectes et autres microbes et bactĂ©ries. Ce type de culture bactĂ©rienne est dĂ©jĂ  utilisĂ© dans la fabrication de produits agro-alimentaire comme le thĂ© kombucha et la nata de coco. Le thĂ© kombu-cha est une boisson acidulĂ©e originaire de Chine et de Rus-sie, traditionnellement prĂ©parĂ© Ă  base de thĂ© vert ou noir et obtenue grĂące Ă  la fermentation de thĂ© et de sucre par une culture symbiotique de bactĂ©rie et de levures (Scoby). Cette boisson est produite dans des grandes cuves ou des petites jarres en verre entreposĂ©es sur de grandes Ă©tagĂšres dans des hangars. Dans la production de Nata de coco, une cellulose gĂ©-latineuse et comestible Ă  base d’eau de coco originaire des Philippines, les bacs de culture sont entreposĂ©s les uns sur les autres. Les feuilles de nata sont rĂ©coltĂ©es au bout de en-viron sept jours. Elles sont ensuite rincĂ©es, et dĂ©coupĂ©es en petits cubes pour ĂȘtre ensuite cuisinĂ©es puis conditionnĂ©es. Ces deux exemples nous montrent que cultiver de la cellu-lose bactĂ©rienne Ă  plus grande Ă©chelle est possible, en ima-ginant une infrastructure adaptĂ©e aux besoins de la produc-tion, traversant toutes les Ă©tapes de la culture du biofilm Ă  sa mise en forme.

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4.4. Valoriser les dĂ©chets localementAu sein de l’écosystĂšme des dĂ©composeurs,les dĂ©chets or-ganiques sont recyclĂ©s localement par des dizaines d’es-pĂšces de micro et macro-organismes. De cette maniĂšre, les dĂ©chets deviennent des ressources. A l’heure d’une Ă©cono-mie mondialisĂ©e et basĂ©e sur la productivitĂ©, dans laquelle la plupart des emballages et produits que nous consom-mons viennent d’ailleurs, il est plus qu’important de ques-tionner le modĂšle de production actuel. Et si on utilisait les ressources et dĂ©chets locaux pour produire des matĂ©riaux ? Cette approche systĂ©mique inspirĂ©e par la nature et pour une Ă©conomie localisĂ©e est de plus en plus prĂ©sente dans le domaine du design de produit. J'ai retenu quatre matĂ©-riaux innovants et trĂšs actuels qui reflĂštent cette volon-tĂ© de mettre la valorisation locale au centre de la question. Ecor est un matĂ©riau composite, alliage de fibres de cel-lulose et assemblĂ© grĂące Ă  la pression de l’eau et de la cha-leur. Les panneaux peuvent ĂȘtre fabriquĂ©s Ă  partir de diffĂ©-rentes dĂ©chets comme du vieux papier, du carton, du marc de cafĂ©, du chanvre, du coton, des pailles de riz ou n’im-porte quel matĂ©riau Ă  base de plantes. En fonction des ac-teurs du territoire, le sourçage des matiĂšres premiĂšres varie. MycoComposite se base sur le mĂȘme principe de valori-sation de dĂ©chets locaux. Ce matĂ©riau utilise des sous-pro-duits agricoles comme le chanvre, en les assemblant entre eux grĂące au mycelium, structure filamenteuse provenant du champignon, dans des moules prĂ©vu Ă  cet effet. Au bout de quelques jours, cet appareil vĂ©gĂ©tatif aura consolidĂ© l’en-semble en Ă©pousant les formes du moule. Ce composite concurrence avec les packaging en PolystyrĂšne expansĂ© et rempli sa fonction de callage. Une fois servi, il se dĂ©compose en un peu plus d’un mois dans la terre.

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Chaque jour 19 000 tonnes de marc de cafĂ© sont produites dans le monde et finissent pour la plupart en dĂ©charges. Kaf-feeform est une entreprise allemande qui rĂ©cupĂšre ce marc pour fabriquer des gobelets rĂ©utilisables. Ceux-ci se com-posent de copeaux de bois et de marc de cafĂ© assemblĂ©s grĂące Ă  une rĂ©sine naturelle. Kaffeeform collabore avec des acteurs et producteurs locaux. Enfin, voici un dernier exemple de matĂ©riau issu de va-lorisation de dĂ©chets. MarinaTex est le projet de fin d'Ă©tude d'une Ă©tudiante anglaise. Chaque annĂ©e, l'Angleterre produit quelques 172,000 tonnes de dĂ©chets de pĂȘche. Lucy Hu-ghes a eu l'idĂ©e de combiner ces dĂ©chets avec des algues pour fabriquer des films de bioplastique transparents. Ce matĂ©riau innovant prĂ©sente de nombreuses propriĂ©tĂ©s com-munes avec la plastique sans ĂȘtre issu du pĂ©trole. Il se dĂ©-grade simplement en quelques semaines dans un compost mĂ©nager. Ce projet fais l'objet de recherches plus poussĂ©es, pour peut-ĂȘtre Ă  l'avenir remplacer une partie des matiĂšres plastiques dans l'emballage. La seule critique qu'on pourrait y trouver, est que ce projet se base sur la pĂȘche intensive qui a des consĂ©quences dĂ©sastreuses sur la biodiversitĂ© marine. Autrement dit ce projet, mĂȘme si il est inspirant, se calque sur un modĂšle tout aussi problĂ©matique que le plastique, la surexploitation des ocĂ©ans.

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Material made from coffee grounds Crédits image - Kaffeeform

Ecovative - Mycocomposite Crédits image - Mycocomposite

Bioplastic bag - Marina TexCrédits image - Lucy Hugues

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Partie 2Grownplast : polymĂšre cultivĂ© Ă  base de dĂ©chets organiquesLa Belgique est l’un des plus gros producteur de frites et de biĂšres au monde. Ce patrimoine, bien qu’unique, gĂ©-nĂšre Ă©galement une grande quantitĂ© de sous-produits et dĂ©chets. Le projet s’articulera autour ces ressources belges, et plus particuliĂšrement autour des brasseries, en asso- ciant la dimension locale Ă  la crĂ©ation d’un matĂ©-riau Ă©co-logique : Grownplast, une cellulose Ă©laborĂ©e par des micro-organismes Ă  partir de dĂ©chets organiques.

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1. INTRODUCTIONNous l'avons vu, la cellulose bactérienne est une matiÚre aux qualités nombreuses et fabriquée naturellement grùce à l'action de micro-organismes. Comment s'emparer de cette technologie de la nature pour concevoir un nouveau maté-riau répondant à la problématique actuelle de l'emballage ? Et comment intégrer la dimension locale dans un projet d'emballages ?

2. CO-PRODUITS ET DECHETS ORGANIQUES BELGESDans cette premiĂšre phase de recherche, j'ai menĂ© une Ă©tude de contexte sur les dĂ©chets organiques et sous-produits de l'industrie agro-alimentaire belge. Ceci dans le but de pro-duire un nouveau matĂ©riau pour l'emballage, basĂ© sur les ressources du territoire. Dans un premier temps, j'ai identifiĂ© deux secteurs trĂšs prĂ©sents en Belgique : le secteur brassi-cole et le secteur de la pomme de terre. Plus prĂ©cisĂ©ment, ces secteurs correspondent Ă  deux produits trĂšs particuliers Ă  la Belgique : la biĂšre et les frites. En effet, ces produits consti-tuent une partie du patrimoine belge. Mais la production de biĂšre et de frites gĂ©nĂšre inĂ©vitablement des co-produits et dĂ©chets organiques. On estime Ă  environ 450 000 tonnesÂčÂł par an la quantitĂ© d'Ă©pluchures de pomme de terre gĂ©nĂ©rĂ© Ă  cause de la production de frites industrielles. Tandis que le secteur brassicole, sur la totalitĂ© de la Belgique, Ă©liminerait plusieurs millions de litres d'effluents sur une annĂ©e.

2.1.Industrie de la pomme de terre La pomme de terre est un tubercule trĂšs cultivĂ© en Belgique. On estime la production Ă  environ 5 millions de tonnes pour l'annĂ©e 2019Âč⁎. Le pays exporte et consomme Ă©normĂ©ment de pomme de terre et est aussi trĂšs prĂ©sent dans le secteur de la transformation. La pomme de terre se consomme sous toutes ses formes : purĂ©e, chips, croquettes et frites. Environ ÂčÂł Estimation personnelle selon les chiffres annuels de production de pomme de terre Âč⁎Statistiques de Belgapom 10/04/2020

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2,3 millions de tonnes de frites sont produites chaque annĂ©e par l'industrie belge. Cette transformation gĂ©nĂšre deux types de dĂ©chets principaux : des pelures et des effluentsÂč⁔ d'eau et d'amidon. Il existe dĂ©jĂ  certaines filiĂšres de valorisation pour ces co-produits. Ils sont utilisĂ©s soit pour l'alimentation animale ou pour l'Ă©pandageÂč⁶des cultures.

2.1.1. ProcĂ©dĂ© industrielÀ leur arrivĂ©e, les pommes de terre sont contrĂŽlĂ©es et celles qui ne sont pas conformes sont Ă©cartĂ©es de la production. Elles passent ensuite au triage oĂč elles sont calibrĂ©es et triĂ©es de maniĂšres Ă  rĂ©server Ă  chaque fabrication (frites et grenailles) le calibre qui convient le mieux. Enfin, elles sont lavĂ©es et Ă©pierrĂ©es. Les pommes de terre sont soit Ă©pluchĂ©es par une Ă©plucheuse abrasive, puis par une Ă©plucheuse Ă  cou-teaux ou par une injection de vapeur qui dĂ©tachera leur peau. Les pelures sont en gĂ©nĂ©ral rĂ©coltĂ©es via un autre circuit et utilisĂ©es dans l'alimentation animale. Toutes ces Ă©tapes gĂ©-nĂšrent des effluents qui se composent d'eau, d'amidon et de matiĂšres organiques en suspension. Ces eaux doivent ĂȘtre filtrĂ©e avant d'ĂȘtre rejetĂ©es dans les Ă©gouts.

Âč⁶ Technique agricole consistant Ă  rĂ©pandre divers produits sur des zones cultivĂ©es, forĂȘts, voies ferrĂ©es et marais.L'Ă©pandage de dĂ©chets organique contribue Ă  fertili ser les sols cultivable.

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2.1.2. Les co-produits de la fabrication de pomme de terre

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2.2. Les brasseriesLa Belgique ne compte pas loin de 300 brasseries. Annuel-lement, environ 2,3 milliards de litres de biĂšre sont produits dans le pays. La fabrication nĂ©cessite l'utilisation de grandes quantitĂ©s d'eau et en rejette Ă©galement une quantitĂ© consi-dĂ©rable. Selon plusieurs sources, la production de 100 litres de biĂšre gĂ©nĂšrerait, suivant les infrastructures, entre 200 Ă  600 litres d’eaux rĂ©siduelles. Ces eaux sont principale-ment des eaux de rinçage des drĂšchesÂč⁷. Elles sont riches en sucres et contiennent des matiĂšres en suspension. Ces eaux sont sujettes Ă  des traitements avant d'ĂȘtre rejetĂ©es dans les Ă©gouts.

2.2.1. ProcĂ©dĂ© industrielL’empĂątage est la deuxiĂšme Ă©tape dans la production de biĂšre, elle suit l’étape de concassage du malt et consiste Ă  extraire les sucres prĂ©sents dans les cĂ©rĂ©ales. L’empĂątage consiste Ă  mĂ©langer les grains de malt concassĂ©s Ă  de l’eau chaude pour obtenir une pĂąte qu’on appelle la maĂŻsche ou brassin. Ce mĂ©lange est ensuite amenĂ© Ă  diffĂ©rentes tem-pĂ©ratures afin d’activer le travail de certains enzymes qui contribueront, au cours d’une rĂ©action biochimique, Ă  trans-former l’amidon en sucres simples. A la fin de l’étape d’em-pĂątage, on obtient un jus de cĂ©rĂ©ales sucrĂ©, appelĂ© le moĂ»t, qui contient des matiĂšres fermentescibles par des levures. AprĂšs le trempage des cĂ©rĂ©ales dans la cuve d’empĂątage pour en extraire le sucre, les drĂšches sont rincĂ©es pour en dĂ©gager les derniers sucres. La cuve est ensuite vidĂ©e, avec elle les restes de drĂšches et l’eau de rinçage.

Âč⁷ Les drĂšches sont les rĂ©sidus d'orge cuite qui restent dans la cuve aprĂšs la cuisson de la biĂšre et le soutirage du moĂ»t.

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2.2.2. Les co-produits et déchets de brasserie

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3. EXPERIMENTATION D'UNE NOUVELLE RECETTEComme nous l’avons vu prĂ©cĂ©demment, il existe Ă  ce jour deux maniĂšres de produire de la cellulose bactĂ©rienne : Ă  partir de thĂ© Kombucha ou en cultivant des bactĂ©ries pures dans un mĂ©dium riche en glucose. NĂ©anmoins, ces recettes prĂ©sentent des dĂ©savantages. En effet, la recette de Kom-bucha nĂ©cessite l’utilisation de thĂ© noir ou de thĂ© vert. Or, l’utilisation de thĂ© comme matiĂšre premiĂšre dans l’élabo-ration du biopolymĂšre est source d’émissions de carbone, car il est principalement importĂ© de pays lointains comme la Chine et l’Asie du Sud-Est. Il ne saurait dĂšs lors trouver de sens dans la rĂ©flexion environnementale qui guide ce projet de recherche. Il est Ă©galement possible de synthĂ©tiser de la cellulose bactĂ©rienne en laboratoire, sur base d’un mĂ©lange d’eau, de composĂ©s chimiques (hydrogĂ©nophosphate de sodium, acide citrique, glucose, peptones) et de bactĂ©ries pures. Ce procĂ©dĂ© de fabrication est trop cher et ne reprĂ©-sente pas une piste intĂ©ressante pour produire en quantitĂ©. Ces derniĂšres annĂ©es, plusieurs recherches ont tentĂ© de trouver de nouveaux procĂ©dĂ©s de fabrication de cellulose bactĂ©rienne Ă  partir de dĂ©chets de l'industrie agro-ali-mentaire. Ma recherche s'inscrit dans cette mouvance. L'Ă©laboration d'une recette basĂ© sur l'approvisionnement en dĂ©chet locaux a deux buts principaux. Cela pourrait reprĂ©-senter Ă  la fois une piste plus Ă©cologique mais aussi plus Ă©conomique pour la fabrication de cellulose bactĂ©rienne.

3.1. Premiers testsJ'ai commencé par effectuer des tests sur différents co-pro-duits comme dont le jus de cuisson de betterave, le marc de pomme, de carotte et de raisin, ainsi que les pelures de pommes de terre et les eaux de brasseries. Tous les tests ont été réalisés avec des souches de Scoby. Les cultures ont été mises en fermentation dans un incubateur à 28°C pendant une période d'une semaine. Elles ont ensuite été récoltées et séchées sur une planche de bois durant une journée.

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Petri d'Acetobacter pure dans un médium d'agar-agar

Croissance de la cellulose Ă  la surface du milieu aqueux

Biofilm avant séchage

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Scoby + ... RĂ©sultats

1. Betterave + 1 c.Ă .s de vinaigre

Echec : aucun signe appa-rent de la crĂ©ation d’une couche cellulosique

2.Marc de pomme + 1 c.Ă .s de vinaigre

Une couche de cellulose semble se créer mais elle est trÚs fine et irréguliÚre

3.Marc de carotte + 4 c.Ă .s de vinaigre

Cellulose existante mais trÚs irréguliÚre

4.Marc de raisin Cellulose épaisse de 1 cm environ, relativement régu-liÚre

5.Marc de raisin + 2 c.Ă .s de vinaigre + 1 c.Ă .s de sucre

Cellulose épaisse mais irré-guliÚre

6.MĂ©lasse de canne → 600 ml d’eau dĂ©mi + 4 c.Ă .s de mĂ©lasse

Cellulose épaisse de 1 cm environ et assez réguliÚre

7.MĂ©lasse de canne + 4 c.Ă .s de vinaigre

Cellulose fine mais uniforme

8.Pelures de pomme de terre Cellulose opaque blanchùtre, réguliÚre et lisse.

9.Pelures de pomme de terre + 2 c.Ă .s de vinaigre + 1 c.Ă .s de sucre

Cellulose opaque blanchùtre, réguliÚre et lisse.

10.eaux de brasserie +vi-naigre

Cellulose fine

11.eaux de brasserie + etha-nol 70% (2 sprays) + 1 c.Ă .s de sucre

Cellulose réguliÚre de quelques milimÚtres

3.1.1. RĂ©sultats

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3.1.2. Conclusion Suite aux rĂ©sultats des tests montrĂ©s ci-dessus, j’ai aban-donnĂ© plusieurs pistes : la betterave, la carotte et la pomme n'ont pas montrĂ© assez d’efficacitĂ©. Ces cultures n'ont pas produit de cellulose. La mĂ©lasse de canne, diluĂ©e dans de l'eau, a produit une cellulose dense et solide, mais en sĂ©-chant, l'Ă©chantillon dĂ©gageait une odeur trĂšs forte et un tou-chĂ© collant. Le marc de raisin, lui, produit une cellulose dense et qualitative. Mais en sĂ©chant, la cellulose de marc de raisin est fragile et cassante. Quant aux eaux de brasserie et aux pelures de pomme de terre, elles ont montrĂ© une efficacitĂ© certaine dans la production de cellulose. Je dĂ©cide donc de poursuivre les tests sur ces deux sujets.

3.2. ExpĂ©rimentation autour des pelures de pomme de terreAfin d’extraire les molĂ©cules de sucre (glucose) nĂ©cessaires Ă  la fabrication de cellulose bactĂ©rienne, il faut faire une dĂ©-coction des Ă©pluchures de pomme de terre dans de l’eau : les Ă©pluchures sont plongĂ©es dans l’eau froide jusqu’à at-teindre l’ébullition, celle-ci Ă©tant maintenue pendant 10-15 min. Ensuite on laisse le mĂ©lange refroidir jusqu’à atteindre la tempĂ©rature ambiante. L’eau chargĂ©e en amidon est ensuite mĂ©langĂ©e Ă  du vinaigre acĂ©tique afin d’augmenter l’aciditĂ© du milieu de culture. AprĂšs plusieurs essais-erreurs, j'ai conclu que les cultures contenant le plus sucre et d'amidon produisent une cellulose de qualitĂ© supĂ©rieure. Il faut environ 7 jours pour obtenir une cellulose d'Ă©paisseur suffisante. La recette de cellulose Ă  base de pelures de pommes de terre nĂ©cessite une concentration d'environ 100g/l de pelures. Mais les pelures ne semblent pas suffire Ă  apporter le sucre Ă  la production du biofilm. Il faut donc rajouter envi-ron 80g/l de sucre. Il faut aussi ajouter 100ml/l de vinaigre blanc afin d'Ă©quilibrer le PH du milieu.

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3.3. ExpĂ©rimentation autour des eaux usĂ©es de brasserieLes eaux de brasseries sont riches en sucres. C'est un liquide brun clair ou foncĂ© selon le type de biĂšre. J'ai testĂ© plusieurs effluents issus de la production de diffĂ©rentes biĂšres : biĂšre blanche, biĂšre blonde, biĂšre brune et biĂšre noire. Le liquide nĂ©cessite simplement d'ĂȘtre filtrĂ© avant son utilisation car il contient des rĂ©sidus de drĂšches qui sont pĂ©rissables. Au bout de quelques jours, le mĂ©lange Ă  base des rĂ©sidus de brassage permet de voir pousser une cellulose Ă©paisse et rĂ©guliĂšre de plusieurs milimĂštres Ă  la surface de la culture. La recette semble ĂȘtre trĂšs efficace. La recette de cellulose Ă  base d'eaux usĂ©es de brasseries ne nĂ©cessite aucun ajout de sucre car elle profite des sucres naturellement contenus dans les cĂ©rĂ©ales utilisĂ©es dans la production de biĂšre.

3.4. Comparaison et conclusionLes eaux de brasseries sont intéressantes à bien des égards dans la production de cellulose. Cette formule ne nécessite aucun ajout d'eau, ni de sucre. De plus, la recette à base de biÚre est plus efficace que la cellulose de thé Kombucha. Elle permet d'obtenir de la cellulose quasiment deux fois plus vite. J'ai décidé d'abandonner la production de cellulose à partir de pelures de pommes de terre car celle-ci n'était pas assez efficace et nécessitait trop de transformations du dé-chet et d'adjuvent. Cette recette trouve donc moins son sens dans une logique d'économie de ressources et de moyens.

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Echantillonage des teintes Crédits image - Marilys Tran

Grownplast - Film de biopolymÚreCrédits image - Marilys Tran

Grownplast - Film de biopolymÚre en transparenceCrédits image - Marilys Tran

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3.6. BiodĂ©gradation de la cellulose bactĂ©rienneLa cellulose bactĂ©rienne Ă©tant un biopolymĂšre, elle est bio-dĂ©gradable selon plusieurs Ă©tudes scientifiques. La capacitĂ© des organismes cellulolytiques (bactĂ©ries : Firmicutes, Bac-teroidetes et Actinobacteria) Ă  dĂ©grader la cellulose dĂ©pend des propriĂ©tĂ©s physico-chimique de celle-ci et notamment sa cristallinitĂ© : au plus ses fibres seront cohĂ©sives entre elles (grande cristallinitĂ©), au moins les micro-organismes auront facile Ă  dĂ©grader cette matiĂšreÂč⁷. La cellulose Ă©tant le biopolymĂšre le plus abondant sur terre, on retrouve une grande variĂ©tĂ© de bactĂ©ries cellulolytiques dans la nature, in-dispensable dans les cycles naturels du carbone. On les re-trouve dans le tube digestif des animaux mais Ă©galement en grande quantitĂ© dans le sol. Deux mĂ©thodes ont Ă©tĂ© testĂ©es quant Ă  la dĂ©gradation de la cellulose : la dĂ©gradation enzymatique et par hydrolyse d’eau ou acideÂč⁞. Il existe Ă  ce jour trĂšs peu, voire aucun test menĂ© sur la dĂ©gradation de cellulose bactĂ©rienne en com-post domestique et/ou industriel. Les donnĂ©es expĂ©rimen-tales ont dĂ©montrĂ© que l’hydrolyse acide dĂ©truisait le lien entre les molĂ©cules de cellulose et entrainait la dĂ©gradation du matĂ©riau⁶. Cette Ă©tude montre aussi que les zones amor-phes de la cellulose sont plus facilement dĂ©gradables que les zones cristallines. À noter que ces tests ont Ă©tĂ© menĂ©e sur de la cellulose bactĂ©rienne synthĂ©tisĂ©e en laboratoire.

3.6.1. ExpĂ©rience de biodĂ©gradation sur GrownplastJ’ai moi-mĂȘme menĂ© une expĂ©rience autour de la dĂ©gra-dation de la cellulose bactĂ©rienne en compost. Au cours de l’expĂ©rience, une feuille de cellulose d’une superficie de 25cmÂČ, fabriquĂ©e Ă  partir de dĂ©chets organiques, fĂ»t placĂ©e dans une boĂźte transparente remplie de compost mĂ©nagĂ©. Pendant deux semaines, j’ai photographiĂ© toutes les Ă©tapes de la dĂ©gradation de la cellulose.

Âč⁷Alvarez, Ruseckaite et al.(2006)Âč⁞ W. Park et al. (2003)

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3.6.1..ExpĂ©rience de biodĂ©gradation sur GrownplastDĂšs le deuxiĂšme jour, l’échantillon commence Ă  s’humidi-fier et se ramollir. Durant le troisiĂšme et le quatriĂšme jour, il change de teinte et s’affaisse : les micro-organismes du compost sont dĂ©jĂ  Ă  l’action. On observe qu’à partir du cin-quiĂšme jour, les macro-organismes (insectes et vers)com-mencent Ă  creuser des trous dans l’échantillon de matiĂšre. C’est Ă  partir du septiĂšme jour que le processus de dĂ©com-position s’accĂ©lĂšre. Au bout d'une douzaine de jours, il aura complĂštement disparu.

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« Nous sommes Ă  la veille d’une rĂ©volution des matĂ©riaux compa-rable Ă  ce qu’a Ă©tĂ© la rĂ©volution industrielle par rapport Ă  l’ñge de fer. Nous entrons, et c’est un bon en avant, dans une nouvelle Ăšre des matĂ©riaux. Je pense qu’au cours du 21Ăšme siĂšcle, les biomimĂ©ticiens modifieront significativement notre mode de vie ».

Mehmet Sarikaya, professeur en science et génie des matériaux, université de Washington. Dans Biomimétisme, quand la nature inspire des innovations durable, Janine Benyus.

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4. PerspectivesMon projet questionne donc notre modĂšle actuel de pro-duction dans l’idĂ©e de trouver une alternative durable aux matiĂšres plastiques dans l’emballage. À quoi ressemble-ront les matĂ©riaux de demain ? Ceux-ci seront trĂšs proba-blement amenĂ©s Ă  ĂȘtre fabriquĂ©s sans pĂ©trole et devront ĂȘtre capables, d’une part, de rĂ©pondre aux exigences du secteur de l’emballage, tout en se basant, d’autre part, sur nouveau contexte oĂč l’économie de ressources deviendra primordiale. Le sourçage, l’extraction, la transformation des matiĂšres premiĂšres devront ĂȘtre pris en compte dans une rĂ©flexion Ă©cologique qui favorise l’utilisation de ressources renouvelables ou de dĂ©chets. À savoir qu’un tel changement nĂ©cessite dĂšs Ă  prĂ©sent une prise de conscience des pou-voirs publics, des acteurs du secteur de l’emballage et des consommateurs. AprĂšs avoir explorĂ© diffĂ©rents aspects de cette ques-tion d’alternative au plastique d’emballage et esquissĂ© des pistes de rĂ©ponses, il me semble important de mettre ma proposition en perspective. Grownplast est un matĂ©-riau transparent, souple, rĂ©sistant. Il est fabriquĂ© naturelle-ment par des micro-organismes au cours d’un processus de fermentation ne nĂ©cessitant aucune Ă©nergie fossile. Grownplast convient Ă  fabriquer de l’emballage et du sup-port d’information. À mi-chemin entre le plastique et le pa-pier, il est transparent et permet d’entrevoir le contenu em-ballĂ©. Il se plie comme du papier. Et on peut aussi y imprimer de l’information et le coller de maniĂšre facilement rĂ©versible sur diffĂ©rentes surfaces comme du verre ou du carton. À terme, il se dĂ©compose en quelques jours seulement dans un simple compost mĂ©nager. Cependant, ce matĂ©riau prĂ©-sente aussi des limites. Sa tendance Ă  absorber l’humiditĂ© le rend difficilement impermĂ©able et il n’a pas encore Ă©tĂ© testĂ© pour le contact alimentaire. Il est trĂšs probable que ce matĂ©-riau ne pourrait pas remplacer tous les types d’emballages.

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Concernant le concept, le projet s'intĂ©resse dans un premier temps aux ressources Belges. Des milliers de litres sont rejetĂ©s par les brasseries chaque annĂ©e. Et si on centralisait ces dĂ©chets en vue de les valoriser ? Et si ce gisement de dĂ©chets, une fois transformĂ©, pouvait remplacer une grande partie des emballages utilisĂ©s en Belgique ? Mais le projet pourrait aller encore plus loin. À travers mes recherches, j’ai dĂ©couvert qu’il Ă©tait possible de fabriquer de la cellulose bactĂ©rienne Ă  partir de diffĂ©rents ressources, tout en gar-dant le mĂȘme procĂ©dĂ©. Il serait donc envisageable d’adapter le concept Ă  d’autres rĂ©gions fonctionnant avec d’autres ressources, moyennant en expĂ©rimentation de recettes basĂ©e sur les dĂ©chets locaux disponibles. La production et la distribution d’emballages s’appuierait alors sur la crĂ©ation d’un Ă©cosystĂšme de partenaires et de fournisseurs tout en contribuant Ă  l’économie de locale. Pourra-t-on, Ă  terme, repenser notre conception de la « fabrication » en collaborant avec des micro-organismes, dans le respect du vivant et en s’inspirant de ses cycles ? Les dĂ©fis pour l’humanitĂ© sont nombreux, mais des pistes pour les rĂ©aliser existent !

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