sÉcucitÉs villes contre le...

101
AVEC LE SOUTIEN DE LA COMMISSION EUROPENNE SCUCITS VILLES CONTRE LE TERRORISME

Upload: others

Post on 26-Jun-2020

1 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

AVEC LE SOUTIEN DE LA COMMISSION EUROPÉENNE

S É C U C I T É S

V I L L E S

C O N T R E L E

TERRORISME

Page 2: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

1

Forum Européen pour la Sécurité Urbaine

SÉCUCITÉSVILLES CONTRE LE TERRORISME

AIDER LES AUTORITÉS LOCALES

À FAIRE FACE AU TERRORISME

Écrit par :Frédéric Esposito

avec la collaboration de Justyna Kułach-Aris et Roxana Calfa

Page 3: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

2

Avec le soutien de la Commission Européenne, DG Justice, Liberté et SécuritéProjet pilote Victimes des Actes Terroristes, 2005.

Imprimé en France par les Éditions Lalosur les presses de l�Imprimerie Rochelaise

ISBN : 2-913181-32-5 - EAN : 9782913181328Dépôt Légal : octobre 2007

FORUM EUROPÉEN POUR LA SÉCURITÉ URBAINE38, rue Liancourt 75014- Paris- France

Tél : +33 (0) 1 40 64 49 00; fax : +33 (0) 1 40 64 49 10Internet : http://www.fesu.org

E-mail : [email protected]

Page 4: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

3

REMERCIEMENTS

Le projet �Villes contre le terrorisme� a été mené à bien grâce à l�implication des universités partenaires et notamment des coordinateurs de ce projet : le Professeur Henry Shaftoe et la Dr Sara-Jayne Williams de l�Université de West of England à Bristol ; le Professeur Nelson Lourenço, Maria da Graça Frias et Patrícia Melo de l�Universidade Nova de Lisbonne et Universidade Atlântica ; le Professeur Hans-Jürgen Kerner, Marc Coester et Klaus Bott de l�Institut de Criminologie de Tübingen ; le Dr Jacek Barcik et Ilona Topa de l�Université de Katowice. Nous les remercions tous d�avoir contribué à la réussite de ce projet.

La dimension européenne de ce projet fut l�occasion de bénéÞ cier du soutien de l�équipe du Comité Permanent de Surveillance des Services de la Police Belge, et notamment de Gil P. Bourdoux, Lieutenant-colonel de gendarmerie et maître de conférences à l�Université de Liège, qui, par sa disponibilité et son implication a fait de la conférence Þ nale un succès. Nous tenons à le remercier chaleureusement, tout comme le personnel du Parlement Fédéral Belge et de la Police de Bruxelles Capitale - Ixelles pour le soutien apporté lors de l�organisation de cette conférence.

La participation de plus de quarante experts disposés à confronter leurs expériences et leurs analyses avec les participants présents à nos séminaires et lors de la conférence de dissémination, ont contribué au succès de ce projet ; nous les remercions sincèrement.

Page 5: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

4

SOMMAIRE

1. INTRODUCTION

1.1 Le contexte du projet1.2 Les objectifs du projet1.3 Partenaires du projet1.4 Approche et public concerné

2. TERRORISME AU NIVEAU LOCAL : NOUVEAUX DÉFIS POUR LES VILLES

2.1 Qu�est-ce que le terrorisme ?2.2 Pouvoir locaux : leur pertinence dans l�action contre le terrorisme

2.2.1 Faire face au terrorisme à l�échelon local : champs d�action a. Le cas Britannique b. Le cas Portugais c. Le cas Polonais d. Le cas Allemand2.2.2 La lutte antiterroriste : le poids de l�expérience

3. PREVENTION DU TERRORISME : DE LA COOPÉRATION AU PARTENARIAT

3.1 Prévention et communication3.1.1 Prévention plutôt que réaction a. Qui sont les terroristes ? b. Les acteurs de la prévention c. Le partenariat collaboratif comme base pour la prévention3.1.2 Stratégie globale de communication a. Développement d�un système d�information homogène pour le

grand public b. Un système d�information coordonné entre tous les acteurs

3.2 Gestion de crise3.2.1 Une approche multiservices : le cas Britannique

7

8

9

11

13

17

18

23

26

33

39

40

40

48

52

53

Page 6: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

5

3.2.2 Un cas spéciÞ que : la croix rouge allemande3.2.3 La gestion de crise en Pologne : la pertinence du niveau régional

3.3 Mesures rétablissant la conÞ ance3.3.1 Aux sources du phénomène de radicalisation de la violence : le cas

de la communauté pakistanaise en Angleterre3.3.2 Coopération entre les minorités et la police : le cas des Musulmans

en Allemagne3.4 Le soutien aux victimes

3.4.1 Organiser l�aide aux victimes3.4.2 Aide aux victimes : la réponse psychologique

4. CONSÉQUENCE POUR LES AUTORITÉS LOCALES

4.1 Lignes directrices pour un référentiel de formation4.2 Axe Introductif �Le terrorisme : du global au local�4.3 Axe thématique I �Prévention et communication�4.4 Axe thématique II �Gestion de crise�4.5 Axe thématique III �Dialogue intercommunautaire�4.6 Axe thématique IV �Aide aux victimes�

5. CONCLUSIONS

5.1 La lutte antiterroriste : un enjeu local5.2 La reconnaissance de l�acteur local au niveau national5.3 Les politiques de lutte antiterroriste sous le signe de la coordination5.4 Les villes, acteurs de la lutte antiterroriste sur le plan international

6. BIBLIOGRAPHIE

55

56

59

60

64

67

67

71

75

76

76

78

80

83

85

89

90

91

92

94

95

Page 7: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

6

Page 8: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

7

1INTRODUCTION

Page 9: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

8

1. INTRODUCTION

1.1 Le contexte du projet

Le terrorisme est une réalité dans de nombreux pays européens et un grand nombre de villes européennes sont confrontées à une menace continue. Il constitue une menace sérieuse à la sécurité et aux valeurs des États démocratiques et aux droits et libertés dont jouissent les citoyens. Alors que les idéologies communistes s�effondraient et que les pays européens aboutissaient à une égalité en matière de développement des droits de l�homme et des formes d�expression de la démocratie, le terrorisme est devenu une catégorie de crime à part entière, qui ne comporte aucune justiÞ cation quelles que soient les circonstances.

En tentant d�exploiter les inégalités sociales et culturelles qui existent au sein des sociétés, le terrorisme risque de provoquer des réponses favorisant les actions discriminatoires et d�encourager des attitudes racistes ou agressives.1

Les actes de terrorisme entraînent des effets négatifs à long terme pour les villes et des coûts sociaux élevés, non seulement du point de vue Þ nancier, mais également psychologique, en raison des traumatismes individuels subis par les victimes et de l�expérience générale des habitants confrontés aux périls du terrorisme.

Suite à la résolution du Conseil de l�Europe2, le projet Villes Contre le Terrorisme (Cities against Terrorism - CAT) explore le rôle des pouvoirs locaux et régionaux dans le traitement de la menace terroriste en Europe : �les pouvoirs locaux et régionaux, aux côtés des gouvernements nationaux et des organisations internationales, sont clairement responsables de la protection de leurs citoyens contre les attentats terroristes et contre les menaces faites à un style de vie démocratique.�

Même en présence d�un soutien public global et renforcé, la lutte contre le terrorisme exige un grand courage, de la détermination et de l�engagement de la part des pouvoirs responsables. Le terrorisme est devenu une priorité publique et politique, plus pertinente que jamais, bien que le terrorisme n�ait pas commencé le 11 septembre 2001. Il exige une �vigilance poussée et de tous les instants, une coordination entre tout un ensemble de partenaires, une législation efÞ cace contre la violence et une approche judiciaire et politique déterminée et active vis-à-vis de l�intolérance et de l�extrémisme religieux et raciaux.�3

Les villes du Forum Européen pour la Sécurité Urbaine ont longtemps été impliquées dans la lutte contre toute atteinte à la sécurité de leurs habitants, une lutte fondée sur

1 Forum Européen pour la Sécurité Urbaine. Saragossa Manifesto. Conférence de Saragosse, les 2, 3 et 4 novembre 2006.2 Conseil de l�Europe. Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux. Résolution 159 (2003) sur le traitement du terrorisme � rôle et responsabilités des autorités locales.3 Ibid.

Page 10: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

9

la promotion d�un système social respectueux du droit des citoyens, particulièrement les plus faibles, et sur la tolérance de la diversité. Il incombe aux villes d�empêcher le terrorisme de se nourrir des situations d�exclusion, des divergences entre les cultures et les religions, du désespoir des marginalisés et de toute forme d�injustice.

En traitant le problème du terrorisme, les élus locaux et les autorités locales jouent un rôle clé en termes d�intervention immédiate lors d�un attentat terroriste, de gestion de crise, de développement de la solidarité publique et des relations communautaires, comme l�ont démontré les expériences les plus récentes de New York, Madrid ou Londres. Il leur incombe de sensibiliser la population à la menace du terrorisme, tout en évitant les mouvements de panique et la confrontation entre les différents groupes de la population. Ils doivent agir en tant que médiateurs entre les problématiques globales à partir desquelles le terrorisme se développe et les préoccupations locales des populations confrontées à une menace, qu�elle soit réelle ou perçue. C�est pourquoi le sujet de la communication autour du terrorisme est particulièrement sensible pour les élus.

La richesse des expériences et des pratiques qui existe au sein des villes européennes peut aider les élus à faire face à la menace d�attentats terroristes, à prévenir les risques futurs, à mobiliser la population contre les menaces à la sécurité et à contribuer à la réhabilitation des victimes grâce à diverses initiatives de soutien social et psychologique fournies par les pouvoirs locaux.

1.2 Les objectifs du projet

Le projet Villes contre le Terrorisme (Cities against Terrorism � CAT), coordonné par le Forum Européen pour la Sécurité Urbaine de 2006 à 2007 et mené avec le soutien de la Commission européenne4, a proposé d�élaborer un cursus de formation destiné aux représentants locaux aÞ n de les aider à améliorer leur capacité à faire face publiquement aux menaces terroristes, à développer la solidarité publique, à construire des partenariats avec la société civile, à mener des campagnes d�information sur le soutien aux victimes et plus généralement, à mobiliser l�opinion publique contre le terrorisme sous toutes ses formes.

L�objectif principal du projet consistait à créer un cursus de formation se déroulant au cours de quatre séminaires impliquant des experts en communication, des spécialistes de la sécurité et la recherche contemporaine concernant la menace terroriste.

Les quatre séminaires avaient pour objectif principal de fournir des réponses aux quatre déÞ s thématiques relevés par le projet :

- l�intervention d�urgence immédiate suite à un attentat terroriste,- la gestion de crise et la communication,- le développement de la solidarité et du soutien public,- la prévention du terrorisme et le développement de relations communautaires.

4 DG Justice, Liberté et Sécurité, Projet Pilote Victimes des Actes Terroristes, 2005

Page 11: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

10

Chacun des séminaires a été organisé selon la même méthodologie, rassemblant des représentants municipaux, des universitaires et des experts de chacun des domaines thématiques.

Le canevas devant permettre l�élaboration d�un cursus de formation a été construit au Þ l des séminaires du projet, puis distribué au réseau de villes du FESU et enÞ n présenté lors de la conférence Þ nale impliquant les plus grandes villes et universités européennes, ainsi que des représentants de l�Union européennes et d�autres organisations européennes (Conseil de l�Europe, OTAN notamment)

Outre les lignes directrices de ce canevas de formation continue, les objectifs plus larges du projet comprenaient :

- l�amélioration de l�expertise politique et professionnelle des élus, et- le renforcement de l�expertise universitaire et locale dans le domaine du traitement des menaces terroristes.- le développement d�un transfert de connaissances entre les deux. Le développement d�une coopération avec les centres universitaires pour

l�élaboration d�un cursus de formation est apparu comme un avantage crucial et une contribution importante au projet, grâce à leur expertise universitaire dans le domaine du terrorisme, expertise qui fait souvent défaut au niveau local mais également à différents niveaux du gouvernement. AÞ n de faire face au problème du terrorisme et de le traiter, il apparaît de plus en plus nécessaire que les universités fournissent des connaissances plus approfondies ainsi que les moyens de mieux utiliser ces connaissances dans le cadre d�une coopération entre les universités et l�ensemble des acteurs impliqués.

Dans le domaine de l�enseignement, l�un des autres objectifs était la création d�un nouveau module de formation intégré au diplôme de Master de Sécurité Urbaine Européenne et traitant de l�action face aux menaces terroristes. Cet objectif est étroitement lié à la coopération continue du FESU avec les universités européennes dans le cadre du Réseau de Formation en Sécurité Urbaine en Europe5, visant à établir une coopération conjointe pour l�identiÞ cation des éléments de dimension européenne dans le domaine de la sécurité urbaine et pour le développement de programmes conjoints et d�enseignements spécialisés dans la perspective de la création du Master Européen de Sécurité Urbaine.

Pendant plusieurs mois, les partenaires du projet ont participé à la mise en �uvre des activités du projet, qui ont permis l�organisation de la conférence Þ nale où les résultats du projet furent débattus en présence de nombreux participants. Finalement, une série de lignes directrices universelles pour la formation a été élaborée et vise à aider les villes à faire face au terrorisme sous toutes ses formes, dans le respect des droits de l�homme et des différences culturelles.5 http//urbansafetytraining.fesu.org

Page 12: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

11

Malheureusement, il s�est révélé trop ambitieux de créer un réel cursus de formation ainsi que le module d�enseignement pour le Mastère Européen en l�espace de 15 mois. La durée n�est pas seule en cause, car il a été difÞ cile de rassembler sufÞ samment de données auprès des villes pour permettre d�aborder la problématique de la lutte antiterroriste sur le plan local. À l�exception des grandes capitales européennes, la majorité des villes ne se sont pas beaucoup penchées sur le problème de la formation des acteurs impliqués dans ce domaine et sur la question de la lutte antiterroriste sur le plan local en général. Par conséquent, l�intérêt de ce projet réside d�une part dans le fait de souligner la dimension locale de la lutte antiterroriste et d�autre part, la nécessité pour les autorités locales de développer une approche préventive.

Même si au terme de ce projet un module de formation continue complet n�a été formellement constitué, le processus de réß exion initié lors des séminaires et de la conférence Þ nale a permis au FESU de poursuivre sa réß exion sur la place des villes en matière de lutte antiterroriste et notamment sous l�angle de la prévention.

1.3 Partenaires du projet

Les principaux partenaires du projet sont les quatre universités européennes suivantes, qui ont détaché des coordinateurs universitaires ainsi que leurs assistants aÞ n d�aider le FESU dans la mise en �uvre des activités du projet et qui se sont chargés de la rédaction des rapports de séminaires.

1. Université de l�Ouest de l�Angleterre - Département de Sécurité Communautaire et de Prévention de la Criminalité, Bristol, Royaume-Uni

Personnes impliquées : Henry Shaftoe, maître de conférence (coordinateur), Dr Sara-Jay Williams (assistante)

2. Nouvelle Université de Lisbonne - SociNova, Centre de Recherches en Sociologie Appliquée, Lisbonne, Portugal.

Personnes impliquées : Prof. Nelson Lourenço (coordinateur), Maria da Graça Frias (assistante)

3. Université de Silésie - Service Juridique et Administration, Katowice, Pologne

Personnes impliquées : Dr Jacek Barcik (coordinateur), Ilona Topa (assistante)

4. Université de Tübingen - Institut de Criminologie, Tübingen, Allemagne.Personnes impliquées : Prof. Hans Jürgen-Kerner (coordinateur), Marc Coester (assistant), Klaus Bott (assistant)

Page 13: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

12

Chaque université avait ses propres intérêts et motivations pour la mise en �uvre conjointe du projet, mais elles se sont unies aÞ n de partager leur expertise et de fournir une contribution scientiÞ que pour le développement de directives pratiques destinées aux autorités locales.

Le département de Sécurité Communautaire et de Prévention de la Criminalité de l�Université de l�Ouest de l�Angleterre dispose d�une longue expérience de l�enseignement et de la formation dans le domaine de la prévention de la criminalité. Elle s�est notamment intéressée à la comparaison des approches de différents pays européens visant à créer des environnements urbains plus sûrs. Ainsi, l�analyse des problèmes ayant trait au terrorisme leur a semblé être la suite logique de leur travail ainsi que la recherche visant à établir si les outils disponibles pour la prévention de la criminalité peuvent être utilisés ou adaptés aÞ n de réduire le risque d�incidents terroristes. Ce département a continuellement soutenu l�idée selon laquelle les autorités locales ont un rôle crucial à jouer dans l�amélioration de la sécurité des communautés et considère que l�éventail des services fournis par les autorités locales peut également avoir un impact sur l�amélioration de la sécurité des communautés face au terrorisme.

SociNova (Universidade Nova de Lisbonne, Centre de Recherches en Sociologie Appliquée) porte depuis déjà quelques années un intérêt scientiÞ que aux questions relatives à la criminalité, à la violence et à la sécurité. Les chercheurs de ce centre ont travaillé à des projets ayant trait aux crimes ayant fait l�objet d�une déposition auprès des forces de police (PSP � Police de Sécurité Publique ; GNR - Garde Républicaine Nationale - PJ - Police Judiciaire), à la gestion de la sécurité urbaine, aux représentations de la violence, au �sentiment d�insécurité� des jeunes, à la délinquance et aux stupéÞ ants, en partenariat avec des institutions telles que le Ministère de l�Intérieur, le Centre d�Etudes Judiciaires du Ministère de la Justice, la Municipalité d�Oeiras et l�Institut des Drogues et des Addictions aux Drogues. Le département de sociologie de l�Universidade Nova de Lisbonne propose également un cursus de Master dédié à la Violence, la Criminalité et la Sécurité Intérieure, des thèmes étroitement liés au terrorisme. En participant à ce projet, le Centre a pu améliorer ses compétences en matière de terrorisme, un thème qui se situe au c�ur des préoccupations des sociétés contemporaines.

Pour l�Université de Silésie à Katowice, il était crucial d�établir une étroite coopération entre les institutions de recherche et les autorités locales, particulièrement en vue de la mise en place d�un système de gestion de crise efÞ cace. La possibilité de partager les expériences et d�apprendre auprès d�autres États européens constituait la pierre angulaire de cette coopération dans le cadre du projet Villes contre le Terrorisme. Depuis maintenant de nombreuses années, l�Université de Silésie a tissé des liens étroits avec les responsables locaux de la sécurité. Parmi ses cursus d�enseignement, l�université propose un cursus d�enseignement supérieur intitulé �Sécurité en Zones Urbaines� destiné aux professionnels des autorités locales, des services de police, de pompiers et aux personnes impliquées dans le traitement de la menace terroriste. Le thème du soutien aux victimes dans le cadre de catastrophes

Page 14: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

13

a revêtu une grande importance. Pour cette raison, l�université a mis en place un Centre de Soutien Psychologique pour les Situations de Crise.

L�Institut de Criminologie de Tübingen est le plus grand et le plus ancien Institut Universitaire de Criminologie en Allemagne. Depuis 1962, il est reconnu en Allemagne et mondialement, comme un centre de recherche éminent dans les domaines de la criminalité et des comportements déviants. L�un de ses plus importants sujets d�analyse au Þ l des ans a été la criminalité motivée par des considérations politiques, ainsi que la période de terrorisme qui a frappé l�Allemagne du temps de la Faction de l�Armée Rouge (RAF) dans les années 1970. À l�aune de la nouvelle menace terroriste du 21e siècle, et parce que l�Allemagne - comme les pays les plus importants économiquement de par le monde � constitue une cible potentielle pour les attentats terroristes, ce sujet revêt une importance croissante pour la recherche en criminologie. En outre, la coopération entre les instituts de recherche et les autorités locales est devenue de plus en plus importante depuis que les soldats allemands interviennent non seulement en Afghanistan, mais également dans d�autres régions dangereuses. Ceci étant, il est extrêmement important pour l�Université de Tübingen de garantir que la science et la recherche alimentent ces sujets aÞ n de contribuer à la compréhension et à la prévention des attentats terroristes à l�avenir.

Outre les universités citées précédemment, des orateurs externes, tels que des représentants et experts municipaux dans le domaine du terrorisme et provenant des États membres voisins, ont été encouragés à venir partager leurs connaissances. L�objectif était d�aboutir à une large représentation européenne et de garantir la dimension européenne nécessaire aÞ n de mettre en place des actions concertées en vue de fournir un soutien aux victimes d�attentats terroristes et une assistance à long terme aux représentants des gouvernements locaux. Des informations détaillées concernant le projet Villes contre le Terrorisme ont été mises à disposition sur le site web du FESU6, où toute personne intéressée peut télécharger la documentation à n�importe quel stade d�un projet.

1.4 Approche et public concerné

Dans le cadre des mois de travail alloués à ce projet, quatre séminaires de travail ont été organisés au sein des pays d�origine des universités partenaires, suivis d�une conférence Þ nale, visant à la diffusion des résultats du projet. Concernant le contenu des séminaires, ils ont abordé les quatre thèmes principaux traités par le projet, à savoir :

- l�intervention d�urgence immédiate suite à un attentat terroriste ;- la gestion de crise et la communication ;- le développement de la solidarité et du soutien public ;- la prévention du terrorisme et le développement de relations inter-communautaires.

6 http://www.fesu.org

Page 15: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

14

Cependant, les sujets d�intérêts spéciÞ ques ont différé d�une université à l�autre, en fonction de leur spécialisation et des aspects du terrorisme que les coordinateurs et leurs assistants ont jugé plus utile de traiter selon leurs degrés d�importance dans leurs pays d�origine respectifs.

Le premier séminaire a eu lieu à Bristol (Royaume-Uni) les 28 et 29 septembre 2006 et a rassemblé environ 30 personnes, parmi lesquelles des représentants de la police, des responsables de la planiÞ cation d�urgence municipale, des spécialistes de la sécurité et des universitaires. Ce séminaire, intitulé Réduire le risque & les impacts du terrorisme - le rôle des pouvoirs locaux et co-organisé par l�Université de l�Ouest de l�Angleterre, s�est concentré sur les actions possibles permettant de prévenir le terrorisme, en se concentrant sur la minimisation des souffrances et des perturbations provoquées par les incidents terroristes (traités lors d�un exercice de simulation). Une attention particulière a été portée au travail en partenariat avec les communautés locales pour la prévention de l�émergence et de la menace terroriste et la promotion d�interventions sociales et sur le terrain aÞ n d�aboutir à une réduction durable du terrorisme. Le séminaire au Royaume-Uni a également constitué une bonne occasion de discuter de l�impact des attentats de Londres sur la sécurité des villes dans les transports suite au 7 juillet 2005.

Le second séminaire à Lisbonne, co-organisé par l�Universidade Nova de Lisbonne7 en coopération avec l�Universidade Atlântica, a eu lieu les 26 et 27 octobre 2006. Il visait à débattre des sujets de la réduction des risques et de la gestion de crise en cas d�attentat terroriste. Les quatre thèmes principaux ayant fait l�objet d�une attention particulière étaient : l�action à long terme pour le traitement du terrorisme, la gestion de crise et l�intervention d�urgence, le soutien aux victimes du terrorisme et le rôle des pouvoirs locaux face à la menace terroriste. Bien que le Portugal n�ait pas eu d�expérience directe du terrorisme, le public a été très réceptif à la discussion, comme en témoigne le grand nombre de participants. Avec plus d�une centaine de personnes présentes, le public comptait des représentants des forces de police portugaises, des universitaires, des représentants des municipalités, du gouvernement, des institutions ainsi que des spécialistes internationaux de la sécurité.

Le troisième séminaire, organisé à Katowice, s�intitulait : Les communautés locales face à la menace terroriste ; confrontation des expériences européennes et leçons pratiques pour les pouvoirs locaux. Il a été co-organisé par l�Université de Silésie les 13 et 14 novembre 2006. L�objectif principal de ce séminaire était d�élaborer, au travers du partage d�expériences de plusieurs pays européens, un mécanisme de défense approprié en cas d�attentat terroriste, particulièrement dans les domaines de la prévention, de l�intervention d�urgence et de la coopération avec les pouvoirs locaux, ainsi que le développement de la solidarité publique avec les victimes d�attentats terroristes. Comme le Portugal, la Pologne n�a pas fait l�expérience d�attentats terroristes 7 Par le biais de SociNova, Gabinete de Investigação em Sociologia Aplicada (Centre de Recherches en Sociologie Appliquée), TIRAR Faculdade de Ciências Sociais e Humanas.

Page 16: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

15

signiÞ catifs, mais le pays est une cible potentielle pour les islamiques radicaux et les organisations terroristes en raison de sa politique extérieure. Le séminaire a rassemblé plus de 30 personnes, parmi lesquelles des représentants des pouvoirs locaux et régionaux, des universitaires et des spécialistes responsables de la sécurité des municipalités.

Le dernier séminaire, co-organisé par l�Université de Tübingen, s�est déroulé à Tübingen du 27 au 28 novembre 2006. Son titre Comment faire face aux menaces terroristes ? Problématiques majeures et possibilités de traitement pour les pouvoirs locaux, reß ète les objectifs du séminaire ainsi que l�audience à laquelle il était destiné : représentants des pouvoirs locaux et élus, employés des services de police, des ministères et des services de gestion d�urgence. L�Allemagne a déjà été la cible d�attentats manqués à la valise piégée dans deux trains régionaux, le 31 juillet 2006. Ainsi, le débat autour de la prévention du terrorisme au sein des villes s�est révélé très constructif et inspirant. Pendant deux jours, environ 50 participants ont débattu d�un grand nombre de sujets, y compris la prévention, les stratégies à long terme contre le terrorisme ainsi que les mesures antiterroristes concrètes du point de vue des villes.

Outre les séminaires précités, deux réunions de coordination avec les universités ont été organisées par le FESU. La première, organisée au début du projet à Paris, a été dédiée à l�explication du projet, ses objectifs, les activités, le Þ nancement et la préparation des séminaires. La deuxième a été organisée à Saragosse les 2 et 3 novembre 20068, et a permis de tirer les conclusions des séminaires de Bristol et de Lisbonne, de débattre des résultats à mi-parcours, d�effectuer un suivi du déroulement du projet et de jeter les bases du rapport Þ nal.

La dernière étape du projet fut la conférence de Bruxelles organisée du 10 au 11 septembre 2007, par le FESU, le Comité permanent de Contrôle des Services de police belge et le corps de police de Bruxelles-Capitale-Ixelles. Cela a permis de diffuser le rapport Þ nal, constitué des résultats du projet élaborés au cours des quatre séminaires locaux précédents. Ce rapport comprenait les recommandations à l�intention des villes ainsi que les directives de formation destinées aux autorités locales aÞ n de contribuer à leurs stratégies de prévention et de traitement du terrorisme. Cet événement a également permis de partager et d�analyser les expériences et les attentes d�autres villes, qui n�étaient pas auparavant familiarisées avec le projet, et de comparer les directives élaborées par les partenaires initiaux du projet.

Ce rapport présente les résultats des quatre séminaires et de la conférence de diffusion, qui a permis de Þ naliser les directives de formation destinées aux villes. Suivant l�introduction de la Partie I, la deuxième partie du rapport présente le

8 La 2ème réunion de coordination du projet Villes contre le Terrorisme s�est déroulée au cours de la conférence de Saragosse et a été organisée par le FESU les 2, 3 et 4 novembre 2006. Site web de la conférence : http://zaragoza2006.fesu.org

Page 17: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

16

terrorisme comme un phénomène multidimensionnel et décrit la pertinence d�un traitement du terrorisme au niveau local. La troisième partie rassemble les débats qui se sont tenus au cours des quatre séminaires. Ceux-ci ont été classés selon les thèmes principaux du projet et sont appuyés par des exemples de mesures pratiques et concrets. Les résultats du projet Villes contre le Terrorisme, s�adressant aux municipalités, sont présentés en quatrième partie et la cinquième partie comprend les conclusions qui Þ nalisent le rapport.

Page 18: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

17

2TERRORISMEAU NIVEAU LOCAL :

NOUVEAUX DEFISPOUR LES VILLES

Page 19: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

18

2. TERRORISME AU NIVEAU LOCAL : NOUVEAUX DEFIS POUR LES VILLES

Le lancement de ce projet devait impliquer d�une part, une clariÞ cation de la notion de terrorisme et d�autre part, de celle du niveau local. En effet, au cours des deux premières conférences, c�est-à-dire à Bristol et à Lisbonne, nous avons relevé, entre autres, deux difÞ cultés majeures :

1. Comment déÞ nir le terrorisme ?2. Qu�est-ce que le niveau local ?

Préalablement, nous nous sommes penchés sur l�expression �guerre contre le terrorisme�, laquelle induit une approche que l�on pourrait qualiÞ er de brutale de cette problématique. En effet, l�utilisation du terme �guerre� dans ce contexte renvoie principalement à une politique répressive, cette dernière pouvant engendrer un cycle de la violence entre les terroristes et les autorités, où chacun souhaite répondre aux actions de l�autre, par effet de débordement. Le débat au cours du séminaire de Bristol fut l�occasion de souligner la position du gouvernement britannique qui dénonce un risque d�attiser le feu en qualiÞ ant la lutte antiterroriste de �guerre�. Dans cette logique, le gouvernement britannique a demandé à ses employés de cesser toute référence au terrorisme en utilisant le vocable de �guerre�9.

Dans ce rapport, nous adoptons une approche similaire aÞ n d�éviter tout débat autour de l�utilisation du terme �guerre�.

2.1 Qu�est-ce que le terrorisme ?

Historiquement, le terrorisme décrit un régime révolutionnaire, La Terreur, qui Þ t rage de septembre 1792 (La première Terreur) à juillet 1794 (La grande Terreur) et qui prit Þ n avec la Convention Thermidorienne. Le mot est Þ gé dans le supplément de 1798 du Dictionnaire de l�Académie Française (Silvia Ciotti Galetti, 2007). Bien que le terme n�apparaisse qu�à la Þ n du 18ème siècle, des expériences précédentes ont émergé. Par exemple, deux organisations terroristes religieuses, les Zélotes Sicarii (1er siècle) et les Assassins (XIe et XIIe siècles) sont particulièrement intéressantes car elles étaient actives à l�échelle internationale et très destructrices (Arnaud Blin 2007; Jessica Stern 2003). Bien que les Zélotes utilisaient des technologies primitives (dagues et épées) aÞ n de soulever une révolte contre les Romains et leur culte impérial, ils ont perpétré des meurtres et conduit des campagnes dévastatrices telles que la destruction du Temple de Massada. Plus tard, pendant environ deux siècles, les Assassins ont promu une version �pure� de l�Islam qu�ils ont tenté d�imposer en assassinant des croisés, mais également des musulmans. Nous pouvons comparer ces actions avec celles des kamikazes d�aujourd�hui. Ils visaient des individus tels que des personnalités politiques ou des chefs religieux mais menaçaient également les gouvernements de plusieurs États, tels que l�Empire Ottoman.

9 Rapport de l�Université de Bristol, p.5

Page 20: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

19

Aujourd�hui, l�activité des groupes terroristes ne semble pas si éloignée de celle des Zélotes et des Assassins étant donné qu�elle se caractérise par un retour de la sainte terreur. En outre, leurs attentats frappent au hasard et visent des innocents, exactement comme les actes de leurs prédécesseurs.

L�importance du terrorisme religieux ne doit pas faire oublier les spéciÞ cités du terrorisme dans son ensemble, et particulièrement la violence politique. En effet, nous distinguons le terrorisme d�autres formes de violences et de conß its10, sur la base des caractéristiques formulées par Wilkinson (2006: 1-2) :

- il enfreint les normes de résolution des litiges, des protestations et des dissensions- il est prémédité et vise à fomenter un climat de peur extrême- il vise une cible plus large que les victimes immédiates- il implique des attentats dirigés contre des cibles aléatoires ou symboliques, y compris des civils- il est considéré par la société où il frappe comme �extra-ordinaire�, c�est-à-dire, au sens littéral, qu�il enfreint les normes qui sous-tendent la résolution de litiges, de protestations et de dissensions- il est principalement, mais non exclusivement, utilisé aÞ n d�inß uencer le comportement politique des gouvernements, communautés ou groupes sociaux spéciÞ quesAinsi, les activités terroristes du 21ème siècle se rapprochent des actions des Zélotes et

des Assassins. Plutôt qu�une déÞ nition, quelles sont plus précisément les caractéristiques du terrorisme contemporain ? Historiquement, le terrorisme international moderne est ancré dans l�émergence de l�organisation terroriste à la Þ n des années 60 et au début des années 70, avec les factions de l�Organisation de la Libération de la Palestine (OLP), telles que l�Al Fatah mais également la faction de l�Armée Rouge, l�Armée Rouge japonaise, les Brigades rouges mais également des groupes animés de desseins nationalistes tels que l�IRA ou l�ETA par exemple. Pour ceux qui vivent au sein de pays démocratiques et libéraux, les libertés civiles, et particulièrement la liberté d�expression, sont un élément clé leur permettant de promouvoir leurs actions et de consolider leur réseau. L�utilisation des médias est également cruciale aÞ n de fomenter un climat de peur au sein de la population et de la communauté internationale.

Dans ce contexte, les pays n�ont pas attendu les attentats du 11 septembre pour déÞ nir leurs cadres juridiques et promouvoir une coopération internationale, dans le but de favoriser la prévention et la suppression des crimes terroristes. Ainsi, la législation nationale anti-terroriste a été élaborée, de même que les lois internationales contre les crimes terroristes. Néanmoins, peu de législations proposent une déÞ nition

10 Au cours du projet Villes contre le Terrorisme, un débat a eu lieu à propos de la catégorisation des actes terroristes. Dans ce rapport, nous considérons le terrorisme comme un type de crime spéciÞ que bien qu�il n�existe aucune déÞ nition consensuelle. Pour accéder à une perspective alternative, consulter, par exemple, le rapport de Bristol (http://www.fesu.org).

Page 21: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

20

de ce qu�est un attentat terroriste. Les législations se concentrent principalement sur les moyens de lutte contre le terrorisme, et plus précisément, sur la façon de trouver un équilibre entre politiques répressives et préventives.

Cependant, la loi britannique propose une déÞ nition du terrorisme :(1) Cette loi déÞ nit le �terrorisme� comme l�utilisation ou la menace d�action selon laquelle :

(a) l�action correspond à la déÞ nition de l�alinéa (2),(b) l�utilisation ou la menace vise à inß uencer le gouvernement ou à intimider la population ou une partie de la population, et(c) l�utilisation ou la menace vise à faire progresser une cause politique, religieuse ou idéologique.

(2) L�� action� correspond à cette déÞ nition si celle-ci :(a) implique une violence sérieuse faite à une personne,(b) implique une détérioration grave de biens,(c) met en danger la vie d�une personne autre que la personne perpétrant l�action,(d) engendre un risque sérieux pour la santé ou la sécurité de la population ou d�un groupe de population, ou(e) vise à interférer avec ou à corrompre gravement un système électronique.

(3) L�utilisation ou la menace d�action correspondant à la déÞ nition de l�alinéa (2) impliquant l�utilisation d�armes à feu ou d�explosifs constitue un acte de terrorisme, que l�alinéa (1)(b) s�applique ou non.

Loi sur le Terrorisme, 2000, Chapitre 1 Terrorisme : interprétation

Au plan international, le Conseil de Sécurité des Nations Unies (CSNU) a voté deux résolutions importantes. La résolution 1373 (2001) rappelle aux membres des Nations Unies la nécessité de lutter collectivement contre le terrorisme alors que la Résolution 1566 (2004) du CSNU votée à l�unanimité, présente une déÞ nition du terrorisme en déclarant que les actes terroristes ne peuvent en aucun cas être pardonnés ou excusés pour des raisons politiques ou idéologiques.

�(�) 3. Rappelle que les actes criminels, notamment ceux dirigés contre des civils dans l'intention de causer la mort ou des blessures graves ou la prise d'otages dans le but de semer la terreur parmi la population, un groupe de personnes ou chez des particuliers, d'intimider une population ou de contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir un acte ou à s'abstenir de le faire, qui sont visés et érigés en infractions dans les conventions et protocoles internationaux relatifs au terrorisme, ne sauraient en aucune circonstance être justiÞ és par des motifs de nature politique, philosophique, idéologique, raciale, ethnique, religieuse ou similaire, et demande à tous les États de prévenir ces actes et, à défaut, de faire en sorte qu'ils soient réprimés par des sanctions à la mesure de leur gravité.�

Page 22: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

21

La résolution du CSNU, comme la Charte des Nations Unies, fait partie des directives politiques destinées à l�action des États et des autres organisations internationales suite aux attentats aux États-Unis (11.09.2001), en Grande-Bretagne (07.07.2005) et en Espagne (11.03.2004). En effet, ces deux documents servent de référence pour la lutte antiterroriste et lui confèrent une dimension plus internationale que jamais. Néanmoins, les attentats se déroulent principalement dans de grandes villes et transforment le caractère international du terrorisme en un problème local. Les villes sont ciblées car d�une part, elle symbolisent la civilisation occidentale et sa modernité et d�autre part, elles représentent une grande densité de population. Ainsi, les villes sont une cible idéale aÞ n de détruire un système de valeurs en plein c�ur ainsi que les personnes qui permettent à ce système de fonctionner. Nous reviendrons sur cet aspect au prochain chapitre.

La proposition émise par le Conseil européen suite aux attentats de Madrid d�organiser une journée européenne de commémoration des victimes du terrorisme conÞ rme le poids de ce sujet dans l�agenda politique international et local. En outre, le Conseil européen établit un lien direct entre les attentats locaux et les préoccupations mondiales en afÞ rmant que ce sont l�ensemble des pouvoirs à l�échelle mondiale qui sont menacés.

�Le Conseil européen, profondément choqué par les attentats terroristes perpétrés à Madrid, exprime sa sympathie et sa solidarité aux victimes, à leurs familles et au peuple espagnol. Ces attentats barbares et lâches nous ont rappelé de manière terrible la menace que le terrorisme fait peser sur notre société. Les actes terroristes sont des attaques contre les valeurs sur lesquelles est fondée l'Union. L'Union et ses États membres s'engagent à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour combattre le terrorisme sous toutes ses formes, dans le respect des principes fondamentaux de l'Union, des dispositions de la Charte des Nations Unies et des obligations énoncées dans la résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité des Nations Unies. La menace du terrorisme nous touche tous. Quand un attentat terroriste est perpétré contre un pays, c'est la communauté internationale tout entière qui est frappée. Il n'y aura ni faiblesse, ni compromis de quelque nature que ce soit à l'égard des terroristes. Aucun pays dans le monde ne peut s'estimer à l'abri. Le terrorisme ne sera vaincu que par la solidarité et l'action collective. Le Conseil européen approuve la proposition du Parlement européen de déclarer le 11 mars journée européenne de commémoration des victimes du terrorisme.�

Conseil européen, Plan d�Action pour la Lutte contre le Terrorisme 10586/04 du 15 juin 2004

Selon l�Union européenne et les Nations Unies, le terrorisme est un phénomène mondial qui génère un appel à la solidarité entre tous les États et organisations. En conséquence, l�UE envisage la lutte contre le terrorisme comme une implication de

Page 23: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

22

l�ensemble des acteurs, depuis le sommet de l�État jusqu�aux citoyens, y compris les pouvoirs régionaux et locaux et les associations. Le nouvel aspect du terrorisme n�est pas tant le phénomène en lui-même, mais les techniques et les moyens utilisés qui doivent amener à repenser l�approche mondiale de la lutte anti-terroriste, comme le déclare la communication suivante émise par la Commission à destination du Conseil et du Parlement européens :

�Les droits à la vie, à la liberté et à la sûreté Þ gurent parmi les droits de l'homme les plus importants. Le terrorisme les menace tous. La préservation de ces droits est une tâche fondamentale, qui appelle dans nos sociétés démocratiques la participation de tous les acteurs sociaux. Il ne sufÞ t donc pas que les politiques européennes soient intégrées, elles doivent également être globales et associer les parlements, les agents économiques, les organisations de la société civile ainsi que l'ensemble des citoyens européens. La protection de la vie, de la sécurité et de la liberté requiert, à notre époque, des solutions, des moyens et des approches d'un genre nouveau. Si l'on veut priver les terroristes du droit de tirer parti de la liberté pour porter atteinte à la liberté elle-même, l'ensemble de la société devra participer à la déÞ nition et à la mise au point de nouveaux outils plus efÞ caces pour lutter contre le terrorisme mondial, ainsi que de nouveaux dispositifs de contrôle pour maintenir l'équilibre entre sécurité collective et liberté individuelle. Les objectifs en matière de sécurité doivent néanmoins rester compatibles avec les principes des libertés fondamentales et les règles internationales afférentes à l'esprit d'entreprise et aux échanges commerciaux. La conÞ dentialité des données à caractère personnel et commercial recueillies à des Þ ns sécuritaires doit absolument être respectée dans l'UE et par nos partenaires commerciaux�

Attaques terroristes : prévention, préparation et réponses. Bruxelles, 20.10.2004, COM(2004) 698 Þ nal

Ce document souligne deux aspects fondamentaux de la lutte contre le terrorisme pour les démocraties libérales. Le premier aspect est la nécessité de maintenir l�équilibre entre sécurité collective et libertés individuelles. Il n�est pas possible de chercher à atteindre l�objectif sécuritaire au détriment des libertés qui sont au c�ur des démocraties occidentales. Cependant, l�expérience a montré que l�appréciation de ce principe peut varier d�un État à l�autre et que cette ligne rouge était presque une ligne de charge qui varie en fonction du niveau d�insécurité réel et perçu par la classe politique et les citoyens.

Le second aspect fondamental concerne des éléments plus concrets de la lutte contre le terrorisme à l�échelle mondiale, exprimés en termes de besoin de nouveaux outils et approches. Cela n�implique pas que le terrorisme soit un phénomène nouveau ou que cette déÞ nition ait changé, mais il a évolué dans sa forme. D�une part, le terrorisme international tel que pratiqué par Al-Qaïda démontre sa capacité

Page 24: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

23

à organiser son réseau par le biais de cellules indépendantes, ce qui rend difÞ cile leur détection par les services de police et de renseignements. D�autre part, l�organisation d�attentats spectaculaires ouvre la porte à toutes les spéculations concernant les objectifs ciblés et les moyens dont pourraient disposer les groupes terroristes (armes conventionnelles, biologiques et chimiques, bombes atomiques).

En conséquence, et sans sous-estimer l�importance du débat théorique dans la déÞ nition du terrorisme, l�enjeu porte sur les moyens de lutter et les acteurs impliqués, le but étant de proposer une réponse acceptable à la menace terroriste.

Le premier constat de cette recherche est justement d�observer que les événements du 11 septembre ont agi comme un catalyseur incitant à introduire ou à accélérer les modiÞ cations structurelles et organisationnelles des plans anti-terroristes, des politiques et des législations de l�État, comme nous le verrons au chapitre suivant. Il semble en particulier que le poids des acteurs locaux s�est renforcé, pour au moins deux raisons. Tout d�abord, les villes, en tant que cibles potentielles, vont devenir des acteurs du système international � individuellement, ou par le biais du sommet de leur organisation � aux côtés des États ou d�autres organisations internationales. Cette évolution concerne plus particulièrement les grandes mégalopoles telles que New York, Londres et Madrid, ainsi que d�autre capitales, notamment en Europe. Cependant, évoquer l�importance croissante des villes revient également à évoquer le rôle des acteurs locaux en général. Il s�agit là précisément de l�une des premières difÞ cultés rencontrées dans ce projet, à savoir déÞ nir ce que nous entendons par niveau local. Jusqu�à 4 déÞ nitions différentes ont été proposées par 4 universités partenaires. Ces déÞ nitions correspondent à autant de modèles différents d�organisation de l�État (centralisé et fédéral).

2.2 Pouvoirs locaux : leur pertinence dans l�action contre le terrorisme

Le rôle du niveau local revêt une importance cruciale dans le cadre du projet Villes contre le Terrorisme en raison de l�implication directe des pouvoirs locaux en cas d�attentat terroriste, comme l�ont démontré les expériences de Londres, Madrid ou New York. Les villes constituent sans nul doute un point central stratégique pour les attaques terroristes. Selon Arnaud Blin11, �(...) c�est dans les villes que les poseurs de bombes de toutes sortes vont faire leur propagande et où les terroristes espèrent semer la panique au sein des masses aÞ n de les pousser à se révolter. C�est également dans les villes que les personnalités politiques, les membres des familles royales ou les industriels célèbres peuvent devenir les victimes de leurs attentats (...)�. Néanmoins, le rôle des villes dans l�action antiterroriste est rarement reconnu et, en conséquence, les villes manquent fréquemment de légitimité et de compétences pour faire face à la menace du terrorisme.

11 Arnaud Blin. Démocratie, urbanisation et terrorisme � ce que l�Histoire peut nous apprendre. Directeur de Projet de la Fondation Charles- Léopold Mayer (Paris), Chercheur à IFAS � Institut Français d�Analyse Stratégique et ex-Directeur du Centre Beaumarchais de Recherche Internationale (Washington).

Page 25: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

24

La résolution 159 du Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux du Conseil de l�Europe12 reconnaît que les villes ont un rôle important à jouer et demande aux pouvoirs locaux en Europe de prendre un certain nombre de mesures détaillées nécessaires à la protection de leurs citoyens contre des attentats terroristes et les menaces à la démocratie. Parmi ces demandes formulées par le Congrès Þ gurent :

- l�élaboration de politiques visant à favoriser la cohésion sociale et à promouvoir la tolérance au travers de programmes culturels et pédagogiques ;- encourager et promouvoir un dialogue régulier entre les différentes confessions religieuses ;- prendre toutes les mesures nécessaires aÞ n de protéger les populations dans les lieux de rassemblement, en partenariat avec des agences spécialisées et les gouvernements ;- informer le public de toutes les menaces et risques, des mesures d�urgence planiÞ ées et de la gestion de crise qui en découle (�).13

En s�interrogeant sur le rôle des villes face au problème de la lutte antiterroriste, les analyses de nos universités partenaires ont vite démontré une grande hétérogénéité dans le domaine de l�action comme de la prévention. Ce résultat n�est pas surprenant, puisqu�il est le produit d�un mode d�organisation étatique propre à chacun des pays pris en considération (voir 1.4). À ce stade, il est cependant utile de préciser que l�objectif du projet Villes contre le Terrorisme n�est pas d�aboutir à un modèle européen de prévention locale, mais d�offrir des pistes de réß exion ainsi que des éléments concrets permettant la mise en place d�une future formation destinée aux pouvoirs locaux européens en matière de lutte antiterroriste. Préalablement, nous devons nous intéresser à la déÞ nition du concept de �pouvoir local�, aÞ n de comprendre l�origine de ces pratiques hétérogènes.

Par déÞ nition, un pouvoir local est la plus petite unité politique d�un État renvoyant à autant de réalités politiques différentes que la province, la région, le département, le comté, la préfecture, la ville, ou la commune. De plus, et en fonction de l�organisation politique de l�État, les compétences qui leur sont attribuées varient fortement. En Allemagne par exemple, les tâches de sécurité intérieure sont partagées entre le niveau fédéral et les Länder, alors qu�en Belgique, où la gestion des forces de police est répartie entre d�une part, le niveau fédéral et d�autre part, le niveau local sous la houlette des Bourgmestres des villes. Les exemples polonais comme portugais démontrent au contraire une conception centralisée de la gestion des unités de police impliquées dans les tâches de sécurité et de prévention comme nous le verrons au prochain chapitre.

Ainsi, cette réalité fait de la question du terrorisme au niveau local un enjeu d�une rare complexité, puisqu�il y a autant de politiques que d�États européens. Certes, les programmes de coopération policière permettent d�atténuer cet aspect, 12 Conseil de l�Europe. Congrès des Pouvoirs locaux et Régionaux. Résolution 159 (2003) sur le traitement du terrorisme � rôle et responsabilités des autorités locales.13 Ibid. Article 23.

Page 26: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

25

notamment lorsqu�il s�agit d�échanger l�expertise relative à l�organisation de grands événements sportifs (coupe du monde de football en Allemagne) ou politiques (les conseils européens à Bruxelles), mais aussi suite à des événements tragiques comme les attentats de Londres et de Madrid.

Toutefois, un constat s�impose, celui de voir désormais la fonction de l�acteur local en matière de lutte antiterroriste - et ce indépendamment de la déÞ nition que l�on peut en donner - s�afÞ rmer. Depuis deux décennies, la reconnaissance de l�échelon local en matière de gestion des politiques publiques a pris de l�importance, comme le consacre la Charte européenne de l�autonomie locale (art. 3 et 4 notamment) du Conseil européen élaborée en 1985 et ratiÞ ée depuis par 42 États membres. Certes, le rôle des autorités locales en matière de lutte antiterroriste est un terrain d�étude encore en friches et bien que le terrorisme se présente comme un phénomène globalisé, il n�en reste pas moins un enjeu local pour les autorités judiciaires, policières et surtout politiques. Cependant, cette nouvelle réalité n�a pas encore pleinement été intégrée au niveau gouvernemental, comme l�illustre par exemple, le Livre blanc du Gouvernement français sur la sécurité intérieure face au terrorisme. Le rôle des communautés locales n�est pas sufÞ samment reconnu autrement que comme un maillon d�un plan de gestion de crise (plan Vigipirate) et de communication (réseau ACROPOL).

Un des indicateurs permettant de mesurer l�importance de cet enjeu est précisément l�incidence des réformes ou les projets de réformes initiés dans les États membres en matière de lutte antiterroriste, comme ce fut le cas pour les pays de nos Universités partenaires. L�ampleur prise par ce problème agit comme un catalyseur pour lancer des réformes (en France comme en Suisse14 par une restructuration des forces de police) ou accélérer un processus initié avant les attentats du 11 septembre comme en Belgique, conséquence du séisme politique généré par l�affaire Dutroux15.

La grande nouveauté engendrée par le déÞ sécuritaire se situe précisément à ce niveau, soit d�intégrer davantage la dimension locale dans les politiques nationales de prévention, au centre duquel Þ gurent les villes. Ce changement pourrait conduire à une évolution majeure, en faisant des grandes capitales européennes un nouvel acteur du système international à l�image de la ville de New York, symbole autant que leader potentiel de la lutte antiterroriste contemporaine. En d�autres termes, l�enjeu porte désormais sur le rôle et la place des villes et notamment, au sein d�un système onusien forcément rénové.

Depuis sa création en 1987, le Forum Européen pour la Sécurité Urbaine, organisation non gouvernementale rassemblant presque trois cent pouvoirs locaux européens, a soutenu le rôle clé des pouvoirs locaux travaillant dans le domaine de

14 Entretien avec Pascal Riat, Brigade d�investigations spéciales, Police judiciaire de Genève, Suisse.15 Lors du Sommet européen des 8 et 9 mars 2007 organisé à Bruxelles, nous avons pu nous entretenir avec Roland Vanreusel, Chef de Corps de la Police Bruxelles-Capitales-Ixelles, les commissaires Christian De Coninck et Luc Ysebaert et nous rendre sur le terrain aÞ n d�évaluer le dispositif sécuritaire mis en place à cette occasion.

Page 27: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

26

la sécurité. En 2001, les maires du Forum ont exprimé leur compassion envers les citoyens des États Unis touchés par les attaques de 11 septembre et ont demandé la mobilisation à tous les niveaux, en insistant sur le fait que �Les villes ont un rôle a jouer dans la mobilisation globale pour éliminer le terrorisme. Ce rôle ne consiste pas a devenir acteurs d�une guerre mais de lutter pour défendre les valeurs de la démocratie�. Le Manifeste de Saragosse16 a constitué une étape importante dans la reconnaissance de la pertinence d�une action municipale locale contre la criminalité et le terrorisme. AÞ n d�aider les élus à élaborer des politiques complètes et inclusives, le FESU favorise le transfert d�expertise et l�échange d�expériences selon le modèle des �villes qui aident les villes�.

2.2.1 Faire face au terrorisme à l�échelon local : champs d�action

La complexité du niveau local en Europe, en ce qui concerne les compétences, rôles et ressources disponibles pour les pouvoirs locaux, ne simpliÞ e pas leur implication. Quatre partenaires du projet représentent des pays européens différents où les champs d�action des pouvoirs locaux diffèrent plus ou moins. Il est donc nécessaire de présenter les corrélations qui existent entre l�échelon local et les échelons supérieurs dans le domaine de la lutte contre le terrorisme aÞ n de comprendre les principales différences et similitudes et de repérer les possibilités d�élaborer des directives communes pour l�ensemble des pouvoirs locaux en Europe.

a. Le cas britannique17

Au Royaume-Uni, il existe deux types de structures de gouvernement local : une structure à deux niveaux et une structure à un seul niveau. La structure à deux niveaux comprend des conseils de comté qui fournissent, entre autres services, des services d�éducation, des services sociaux et la planiÞ cation d�urgence pour le territoire du comté et des conseils municipaux qui fournissent des services très localisés, tels que la gestion des déchets, la sécurité de la communauté, l�urbanisation et la planiÞ cation d�urgence.

La structure à un seul niveau comprend des conseils unitaires, des conseils métropolitains et des conseils municipaux. Ces conseils disposent du contrôle intégral de la fourniture des services dont ils sont responsables. Le Þ nancement de l�ensemble des services des conseils provient des subventions du gouvernement central et des impôts et charges locaux.

Outre la déÞ nition des services devant être fournis à l�échelle locale, les conseils suivent surtout les initiatives du gouvernement central, qui conseille ou

16 Forum Européen pour la Sécurité Urbaine. Saragossa Manifesto. Conférence de Saragosse les 2, 3 et 4 novembre 2006.17 Le chapitre suivant est principalement inspiré du discours intitulé L�expérience des pouvoirs locaux britanniques dans le domaine de la prévention du terrorisme prononcé par Spencer Webster lors du séminaire de Katowice et du débat tenu lors du séminaire Villes contre le Terrorisme à Bristol. Les rapports détaillés de ces deux séminaires sont disponibles à l�adresse http://www.fesu.org (Secutopic Terrorism)

Page 28: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

27

légifère. Des exemples de conseils et de législations sont disponibles dans la Loi sur les Plans d�Intervention Civile de 2004, dans le guide du Ministère de la Santé déÞ nissant les dispositions en cas de grippe pandémique, auprès du Ministère de l�Intérieur (inß uence qu�il exerce sur l�agenda de sécurité communautaire), auprès du Bureau du Conseil Exécutif et particulièrement de son secrétariat chargé des plans d�intervention civils18. Ce dernier a été établi aÞ n d�améliorer la capacité du Royaume-Uni à se préparer à des situations d�urgence, à intervenir et à rétablir la situation.

AÞ n de fournir un cadre unique de protection civile au Royaume-Uni, la loi sur les Plans d�Intervention Civile de 200419 a été introduite suite à une série d�incidents majeurs d�envergure nationale, c�est-à-dire, les inondations, l�épidémie de Þ èvre aphteuse, les incendies et la crise du pétrole20.

La loi britannique sur la criminalité et le désordre public (Crime and disorder act - 1998) exige (entre autres choses) de l�ensemble des services des pouvoirs locaux qu�ils analysent les implications de la réduction de la criminalité et qu�ils agissent aÞ n d�optimiser les opportunités permettant de garantir la sécurité communautaire de leurs services au quotidien. Le terrorisme étant un crime, les pouvoirs locaux et autres services publics tels que les services de santé ont déjà l�obligation statutaire de jouer un rôle de prévention. Cependant, celui-ci est rarement intégré explicitement à leurs stratégies. Au niveau national, cette séparation des activités de traitement du terrorisme est également visible au sein de l�organisation des départements et des processus des politiques.

Malgré les lacunes citées précédemment, les pouvoirs locaux au Royaume-Uni réalisent un travail important à de nombreux niveaux, directement ou indirectement, aÞ n de contribuer à la prévention et à la réduction des impacts du terrorisme. Il existe d�énormes variations entre les différents pouvoirs locaux en termes d�initiatives menées aÞ n de réduire le risque d�attentats terroristes, mais celles-ci restent totalement adaptées. L�histoire a démontré que les capitales et que les grandes métropoles sont beaucoup plus exposées aux risques que les villes de provinces et que les petites villes. Au cours des quarante dernières années, presque tous les attentats terroristes en Angleterre se sont déroulés à l�intérieur du périmètre de Londres. Les seules exceptions sont les deux attentats dirigés contre les villes de Birmingham et de Manchester respectivement (les deux plus grandes villes d�Angleterre après Londres) et, ce qui est surprenant, une explosion revendiquée par l�IRA à St Helen�s dans le Lancashire, une ville industrielle de taille moyenne.

18 Le secrétariat des Plans d�Intervention Civile (Civil Contingencies Secretariat - CCS) siège au sein du Conseil Exécutif, au coeur du gouvernement central.19 Le texte intégral de la loi sur les Plans d�Intervention Civils est disponible sur le site web britannique : http://www.ukresilience.info20 Une analyse plus détaillée de la loi de 2004 sur les Plans d�Intervention Civile est proposée au chapitre 3.2.1 : Une approche multiservices : le cas britannique.

Page 29: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

28

b. Le cas portugais21

Au Portugal, la loi 169/99 du 18 septembre déÞ nit les compétences des municipalités portugaises. Elle établit également le régime juridique de ses organes et des paroisses civiles. Certaines des responsabilités des municipalités peuvent être similaires à celles de la police administrative. Parmi leurs compétences, elles peuvent décider si elles souhaitent ou non créer un service de police municipale et le Conseil de Sécurité Municipal. En outre, chaque maire est responsable, en étroite collaboration avec l�Autorité Nationale de Protection Civile, du service municipal de protection civile et doit tenir compte de la nécessaire conformité aux plans et programmes précédemment adoptés ainsi que de la coordination nécessaire des interventions dans le domaine de la protection civile (c�est-à-dire, les opérations d�assistance et particulièrement en cas de catastrophes ou de calamités publiques).

En ce qui concerne la Protection Civile, elle est principalement attachée à la gestion d�urgence et intervient essentiellement en cas d�accidents graves et de catastrophes, comme déÞ ni récemment dans la Loi de Protection Civile22. La Protection Civile intervient et minimise les risques naturels et technologiques ainsi que les risques pouvant constituer une menace pour les populations et les biens. Il s�agit donc non seulement des risques d�inondations, de tremblements de terre, d�incendies et d�éruptions volcaniques, mais également des accidents (par exemple, accidents industriels, transport de matières dangereuses et toxiques, pollution toxique). Elle se concentre sur les urgences et les accidents considérés comme identiÞ ables et limités. Généralement, il est possible de prédire l�étendue des urgences : les menaces, vulnérabilités et les risques sont globalement identiÞ és et bien connus. Les plans et moyens d�intervention sont au moins partiellement mis en place. Les partenaires intervenant dans le cadre des opérations d�urgence se connaissent également et connaissent les missions et responsabilités spéciÞ ques respectives des uns et des autres.

Cependant, selon Manuel João Ribeiro, les événements du 11 septembre à New York, ainsi que les attentats du 11 mars à Madrid et du 7 juillet à Londres ont provoqué des changements profonds dans cette approche, et pas seulement au Portugal. Le concept de crise est en voie de reconstruction sociale et s�oppose aux concepts d�accident ou d�urgence.

Au Portugal, l�Autorité Nationale de Protection Civile23 (NACP) est l�organe responsable de l�orientation et de la supervision des activités des Services de Pompiers et de la coordination de l�ensemble des activités de protection civile et de premiers secours à l�échelle nationale.21 Le chapitre suivant est principalement inspiré du discours intitulé Le service national de protection civile et la gestion de crise prononcé par Manuel Joao Ribeiro lors du séminaire Villes contre le Terrorisme à Lisbonne. Le rapport de ce séminaire est disponible à l�adresse http://www.fesu.org (Secutopic Terrorism).22 Loi n. 27/2006, 3 juillet 2006.23 Résultant de la fusion de trois organisations : le Service National des Pompiers, le Service National pour la Protection Civile et la Commission Nationale Spécialisée dans les Incendies de Forêt.

Page 30: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

29

La mission principale de sa structure nationale, telle que déÞ nie par la Loi sur la Protection Civile est :

- de prévenir et de réduire les risques associés aux catastrophes et de réduire leurs effets potentiels ;- de coordonner et de superviser toute activité opérationnelle des pompiers portugais ;- d�évaluer les études, projets et plans de prévention des incendies et de vériÞ er et de superviser leur applicabilité in situ ; - de gérer et de coordonner les opérations d�intervention d�urgence au niveau national et local.Au-delà des services centraux (qui intègrent un Commandement National pour

l�Intervention d�Urgence), le NACP est encore aujourd�hui constitué de 18 postes de commandements de districts pour les opérations d�urgence (un pour chacun des 18 districts du territoire national portugais). Au niveau municipal, la responsabilité de la protection civile revient au maire. Chaque municipalité comprend un service municipal responsable de la protection civile habilité à organiser, préparer, déclencher et appuyer l�ensemble des interventions de protection civile.

Le NACP, comme le veut la norme des services de protection civile au niveau international, déploie ses activités dans quatre domaines d�intervention :

- la prévention (analyse de risques, recherche et supervision des problèmes de sécurité, éducation, sensibilisation et sensibilisation du public) ;- la préparation (outils de planiÞ cation pour l�organisation de l�intervention d�urgence dans le cadre de plusieurs menaces et risques) ;- les premiers secours et les interventions d�urgence (incendies de forêt et incendies urbains, accidents, activités pré-hospitalières, missions internationales d�aide humanitaire et technique) ;- la réhabilitation (contribuer à l�organisation territoriale par le biais d�une supervision des Plans de Développement Territoriaux et des Plans Directeurs Municipaux).Concernant la menace concrète et le risque d�attentats terroristes, il est nécessaire

de reconnaître que ce domaine spéciÞ que n�a pas constitué une priorité historique du NACP. Cependant, des évolutions ont permis l�organisation de simulations et d�exercices spéciÞ ques, auxquels le NACP participe. En termes opérationnels, plusieurs interventions se sont principalement déroulées à la suite du 11 septembre en raison de la menace de l�Anthrax (ou la Poudre Blanche).

Ceci étant, il s�agit d�un domaine qui relève de la responsabilité des services de recherche et de sécurité de la police et dans lequel les forces armées jouent également un rôle signiÞ catif. Ainsi, la question de savoir si le NACP peut intervenir dans ce domaine et de quelle manière reste ouverte.

Page 31: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

30

Tout d�abord, il s�agit d�un domaine qui relève de la responsabilité du gouvernement. En conséquence, il est parfaitement logique de tirer proÞ t de l�ensemble des ressources et des moyens disponibles. Deuxièmement, le NACP dispose de tableaux de référence qui, bien que non spéciÞ quement centrés sur les menaces terroristes et les sujets qu�elles soulèvent, peuvent être adaptés facilement aÞ n de s�appliquer à ce domaine. Troisièmement, la nécessité d�adapter toute politique d�intervention et de la centrer sur un concept de menaces multiples plutôt que sur un risque spéciÞ que est de plus en plus acceptée. EnÞ n, la coopération entre tous les participants doit être promue.

En conséquence, en termes de gestion de crise liée aux menaces terroristes, le NACP doit assumer le rôle d�acteur et de partenaire doté de responsabilités spéciÞ ques et ne doit pas interférer avec d�autres organisations. Le NACP peut coopérer en phase de prévention, de formation des populations cibles et de sensibilisation du public, domaines dans lesquels il dispose d�une riche expérience. Il peut aussi contribuer à améliorer l�articulation, la complémentarité et la coordination des plans d�urgence.24 Les simulations et exercices au niveau national et international doivent continuer à être organisés, en se concentrant spéciÞ quement sur la reconnaissance des erreurs et des fragilités aÞ n de les corriger et d�améliorer les performances.

c. Le cas polonais25

La base juridique des niveaux de gouvernement en Pologne a été établie par la Constitution de la République de Pologne (1997). Selon la loi de 1998, qui réforme la division territoriale de l�État, il existe trois niveaux de gouvernement :

1. La Voïvodie - province, unité régionale (il en existe actuellement 16). À ce niveau, l�autogouvernement est représenté par un Marshal et coexiste avec l�administration étatique dirigée par les Voïvodes, qui sont des représentants du gouvernement central au niveau régional. Les Voïvodes sont responsables de la mise en �uvre des politiques étatiques dans leur Voïvodie. En tant que représentant du gouvernement national, le Voïvode peut également émettre des directives contraignantes pour l�ensemble des organes administratifs étatiques et dans les situations d�urgence, ces directives sont également contraignantes pour l�organe administratif local. Le Voïvode, en tant que chef direct de l�administration intégrée étatique (telle que la Police, les services de Pompiers), dirige et coordonne son fonctionnement et garantit les conditions favorables à son efÞ cacité.

24 Le respect de ces exigences était un facteur clé de la réussite des opérations d�intervention d�urgence aux lendemains des attentats de Londres.25 Le chapitre suivant est principalement inspiré du discours Gestion de crise et système de communication prononcé par Grzegorz Kamienowski lors du séminaire Villes contre le Terrorisme à Katowice (le rapport complet est disponible à l�adresse http://www.fesu.org) et des informations fournies par le bureau de la Voïvodie de Silésie. http://www.katowice.uw.gov.pl

Page 32: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

31

Il est responsable des résultats. Il/elle est également habilité(e) à agir au niveau de l�administration étatique non intégrée (directement subordonnée au ministre d�État ou au responsable du bureau central - par exemple le Service de Santé et d�Epidémiologie de la Voïvodie). Le Voïvode supervise le fonctionnement des unités d�administration locales dans le respect des conditions et obligations des réglementations législatives en vigueur.

2. Le Powiat, est une subdivision de l�organisation territoriale, plus petite que la Voïvodie, mais plus grande que les unités de base connues sous le nom de gmina. Le Powiat exécute les tâches publiques de nature trans-municipale. Il entretient et gère les écoles, bibliothèques et clubs à vocation sociale, supervise la construction et la réparation des routes, gère les prestations sociales et lutte contre le chômage. À ce niveau, l�administration locale est assurée par le Conseil du Powiat et l�Assemblée du Powiat dirigée par le Starost (Directeur du Powiat).

3. Gmina (ville, municipalité) - plus petite unité locale de la division territoriale et de l�autogouvernement. La gmina est principalement responsable de la satisfaction des besoins primaires et concrets de ses administrés; elle gère l�urbanisation et la gestion des terrains, la protection de l�environnement, les routes, les ponts, les rues, les transports publics et la fourniture d�électricité et de chauffage aux habitants ; elle assure également l�entretien des espaces publics et la gestion et l�entretien des bâtiments municipaux et des infrastructures publiques.

Actuellement, le système de sécurité civile en Pologne comporte de nombreuses lacunes et des défauts, selon Grzegorz Kamienowski. Cette situation est héritée de la réforme de l�administration publique, de la décentralisation de l�État et de la nouvelle réalité de l�économie de marché qui a mené à un défaut de cohérence dans la réalisation des tâches relatives à la sécurité ainsi qu�à un manque de législations spéciÞ ant le fonctionnement de ce système. Les lois ou amendements émis ad hoc ne font qu�empirer la situation plutôt que de l�améliorer. Le manque de cohérence est provoqué par un foisonnement de lois datant de différentes périodes.

La nature des tâches réalisées au niveau des Voïvodies (le plus bas échelon de l�administration centrale en Pologne) n�est pas fondée sur des normes uniformes ou juridiques, mais sur de nombreuses législations coordonnées par le Ministère de la Défense Nationale (MDN) et par le Ministère de l�Intérieur et de l�Administration (MIA). Dans le cadre de la défense nationale, les tâches sont supervisées par le MDN alors que les tâches ayant trait à la sécurité intérieure sont supervisées par le MIA.

En Pologne, les Voïvodes disposent de certains documents d�urbanisme à partir desquels ils/elles peuvent réaliser les tâches liées à la gestion de crise en cas

Page 33: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

32

d�attentat terroriste. Ces documents (présentés en détail dans le chapitre dédié à la gestion de crise) comprennent :

- le �Plan Opérationnel de Fonctionnement de la Voïvodie�;- le �Système National de Gestion de Crise et d�Urgence�;- le �Plan d�Intervention en cas de Crise de la Voïvodie�.d. Le cas allemand26

Étant donné la structure fédérale de la République Fédérale d�Allemagne, les responsabilités et activités liées au domaine de la prévention de la criminalité sont concentrées au niveau des 16 Länder. En ce qui concerne la prévention et la coopération, un Groupe de Travail de l�État Fédéral (Bund-Länder-Projektgruppe : BLPG) a été mis en place et rassemble des députés du gouvernement fédéral et des gouvernements des 16 États.

Au cours des dernières années, les systèmes de transport publics partout dans le monde ont été la cible d�attentats terroristes. Pour cette raison, le groupe spécial BPLG a travaillé à l�amélioration de la sécurité dans les transports publics. Les employés des transports publics jouent un rôle important dans le domaine de la sécurité. Ils travaillent dans des zones particulièrement �à risques�, sur les itinéraires de circulation et dans les gares. Le BPLG a souligné les nécessaires qualiÞ cations des employés qui doivent avoir appris à gérer les situations dangereuses. Il a souligné la nécessiter d�expliquer la situation actuelle en matière de protection de l�état. Une campagne intitulée Attentifs dans les transports a été lancée aÞ n de sensibiliser les passagers ainsi que les employés aux bagages abandonnés. L�État allemand a mis en �uvre ces mesures issues des résultats du travail du BLPG au niveau local et national.

En outre, un accord de coopération entre la police et l�association d�entreprises de sécurité privées, (Bundesverband Deutscher Wach- und Sicherheitsunternehmen) a été conclu. Il était considéré comme important pour la prévention du terrorisme en Allemagne que les autorités étatiques travaillent en collaboration avec les entreprises de sécurité privées aÞ n d�améliorer les mesures préventives.

Les représentants de tous les niveaux locaux en Allemagne ont l�obligation de préparer et de prendre des mesures aÞ n de minimiser la menace immédiate de terrorisme d�une part et les conséquences négatives d�un attentat, d�autre part.

La nouvelle loi antiterroriste est entrée en vigueur en Allemagne le 1er janvier 2002 et de nouveaux fondements juridiques ont été créés en élargissant les motifs d�expulsion des personnes appartenant aux États dits �voyous�. La classiÞ cation de ces États a été déÞ nie par des règlements administratifs du Ministère Fédéral de l�Intérieur et du Ministère des Affaires Étrangères. Il est désormais possible de mettre en place des 26 Le chapitre suivant est principalement inspiré des discours prononcés par WilÞ ed Blume-Beyerle et Gottfried Stömer lors du séminaire Villes contre le Terrorisme de Tübingen (rapport complet à l�adresse http://www.fesu.org)

Page 34: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

33

mesures de certiÞ cation de l�identité, c�est-à-dire de collecte de données biométriques et d�enregistrements vocaux. En outre, il est possible de coopérer avec d�autres services dans le domaine des procédures de délivrance de visas à des ressortissants d�États voyous ce qui permet, lorsque cela est justiÞ é, de refuser la délivrance d�un visa.

Selon la loi modiÞ ée concernant le lieu de résidence, l�expulsion d�un étranger est désormais possible, s�il est établi que la sécurité ou que l�ordre démocratique libre de l�État sont mis en danger ou si la personne appartient à (ou soutient) une organisation terroriste et/ou prend part à des actes de violence motivés par des considérations politiques. Les crimes contre la paix ou l�humanité, la tentative de recrutement de personnes au sein de groupes terroristes et les actes de déclenchement de troubles sont des motifs valables d�expulsion. Si les étrangers ne quittent pas le pays volontairement ou ne peuvent être expulsés pour différentes raisons, des mesures de suivi extensives peuvent être mises en place et permettent de grandement limiter le champ d�action des personnes concernées. Les autorités étrangères sont responsables de l�exécution des mesures. La loi antiterroriste a été initiée par un groupe de travail spécialisé basé à Münich. Depuis mars 2003, 20000 interrogatoires de sécurité ont été réalisés par les pouvoirs locaux. 2000 cas ont été examinés par d�autres services de sécurité.

Dans le contexte du groupe de travail BIRGIT (identiÞ cation et rapports sur les individus dangereux évoluant dans les groupes terroristes islamistes), de nouvelles formes de coopération entre les autorités sont en cours d�élaboration. L�objectif de ce groupe de travail est d�expulser les islamistes présentant un danger et/ou de limiter leur marge de man�uvre grâce à une application cohérente de la loi en vigueur autant que possible. En ce qui concerne la loi antiterroriste mentionnée, les groupes de travail tels que BIRGIT ont la possibilité de coopérer étroitement avec les autorités étrangères, la police et les autorités constitutionnelles dans un cadre ofÞ ciel simpliÞ é. En Bavière, le groupe de travail BIRGIT a analysé plus de 60 cas individuels, dont la plupart ont abouti à l�expulsion d�individus dangereux. L�application cohérente des lois en vigueur a permis d�inciter l�ensemble des partisans connus du groupe Ansar al Islam de quitter Münich. Ce �modèle bavarois�, articulé autour d�interrogatoires détaillés et d�une coopération intensive avec les autorités de sécurité, a été entre temps repris par d�autres États de la République Fédérale.

2.2.2 La lutte antiterroriste : le poids de l�expérience

La menace terroriste n�a pas la même importance selon qu�il s�agisse d�une capitale, d�une ville à la population cosmopolite, d�une ville située à proximité d�installations stratégiques (terminal pétrolier, centrale nucléaire, barrage etc.) ou d�une petite localité. A cela s�ajoute la variable que nous qualiÞ ons d�historique, dans la mesure où les villes dont les pays ont une tradition en matière de lutte antiterroriste, sont théoriquement mieux préparées à faire face à une telle menace. Parallèlement, la place du niveau local dans la structure étatique constitue une variable tout aussi

Page 35: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

34

importante, car selon qu�il s�agisse d�un État fédéral ou centralisé, les compétences laissées aux autorités locales en matière de lutte antiterroriste varient fortement. Dans ce contexte, la combinaison entre ces trois facteurs - le proÞ l de ville, le poids de l�expérience et la structure étatique- expliquent la très grande hétérogénéité des pratiques locales en matière de lutte antiterroriste, rendant d�autant plus difÞ cile l�élaboration d�un �modèle européen�. Ce premier enseignement sur lequel nous reviendrons tout au long de ce rapport, ne signiÞ e pas pour autant qu�il n�est pas possible d�élaborer des lignes directrices pour les autorités locales européennes en matière de lutte antiterroriste. Dans la partie conclusive, nous avons identiÞ é des initiatives menées par les autorités locales ou policières au sein des États de nos universités partenaires et qui sont susceptibles d�être reproduites ailleurs au niveau local. L�élaboration de ces lignes directrices ne doit cependant pas masquer une réalité, soit de distinguer les pays au bénéÞ ce d�une expérience en matière de lutte antiterroriste de ceux qui n�ont fort heureusement jamais été confrontés à des actions terroristes. Ces expériences au niveau national constituent une base importante pour les autorités locales aÞ n d�élaborer des politiques en matière de lutte antiterroriste, en reprenant les directives développées au niveau national ou en élaborant de nouveaux outils.

L�Angleterre et l�Allemagne sont les seuls pays représentés parmi nos universités partenaires à avoir fait face à des attentats terroristes. Le cas anglais est certainement le plus symptomatique, d�une part par son passé d�empire colonial et d�autre part, avec la gestion de la situation en Irlande du Nord. Dans le premier cas, les autorités anglaises ont dû faire face aux mouvements indépendantistes dans leurs anciennes colonies après la seconde guerre mondiale, et notamment en Palestine et en Crète où et de façon exceptionnelle, des actions terroristes localisées se sont étendues à l�ensemble des pays concernés conduisant au Þ nal à mettre un terme au mandat britannique. En effet, il est très rare que les demandes des terroristes soient satisfaites, qui plus est, lorsqu�elles conduisent au départ d�une puissance occupante. Certes, il s�agit de conditions très particulières qui ont favorisé cette situation, d�une part, les mouvements anticoloniaux bénéÞ ciaient d�un très large soutien politique et logistique auprès de la population et d�autre part, la puissance anglaise voyait sa politique coloniale contestée et perdre ainsi de sa légitimité. Si la période post-coloniale a en général fait du terrorisme une arme auxiliaire, au service de forces insurrectionnelles, on ne peut cependant réduire le terrorisme à cet état de fait, comme nous l�avons montré dans la partie 2.1. Les mouvements anticoloniaux en Palestine et en Crète, sont une forme très spéciÞ que de terrorisme, par ailleurs qualiÞ ée de �terrorisme historique� en opposition au terrorisme moderne que symbolise la situation en Irlande du Nord (Wilkinson 2006: 20-26). Précisément, le terrorisme en Irlande du Nord a servi de matrice à la lutte antiterroriste anglaise et marqué de son empreinte l�émergence du terrorisme moderne. Comme nous l�a rappelé Alan Greer27, l�origine de la menace terroriste de ces cinquante

27 Alan Greer. Northern Ireland: transferable lessons for dealing with other terrorist situations. Chargé de cours en politique publique, University of the West of England,

Page 36: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

35

dernières années pour l�Angleterre était le fait de l�IRA et non d�un groupe islamiste28. Cependant, depuis les attentats des 7 et 21 juillet 2005 à Londres, ainsi qu�après les tentatives manquées du 29 juin dans la capitale et le 30 juin 2007 à l�aéroport de Glasgow, la menace a changé de visage, pour favoriser la piste islamiste. Selon le juge Justice Fulford qui fut chargé d�instruire le procès des quatre protagonistes29 condamnés à 40 ans de prison chacun pour l�attentat du 21 juillet, il ne fait pas de doute qu�il existe un lien avec celui du 7 juillet. Dans les deux cas, il s�agit d�attentats qui furent, selon le juge, inspirés et contrôlés par Al-Qaïda30. Dans ce contexte, on peut alors s�interroger sur la possibilité de transposer l�expérience acquise par les autorités anglaises avec l�Irlande du Nord dans la lutte antiterroriste actuelle en Europe.

Selon Alan Greer et malgré la différence de contexte, il y a des parallèles qui peuvent être tirés entre la situation en Irlande du Nord et des groupes terroristes nationalistes comme c�est le cas en Espagne (Pays Basque) par exemple. Même dans le cas où les motivations d�un groupe terroriste ne sont plus liées à la création d�un État et à la reconnaissance d�une nation, comme l�illustrent les attentats de Londres et Madrid, le succès dans la gestion de la crise irlandaise reste bien évidemment utile. Pour mesurer le chemin parcouru, il est important de rappeler que la culture politique en Irlande du Nord, tant du côté des Républicains que de celui des Loyalistes, la violence politique était une constante dans l�équation du problème nord irlandais. La résolution de ce conß it conduit légitimement à s�interroger sur les facteurs pouvant être repris ou source d�inspiration dans la lutte antiterroriste actuelle.

Globalement, c�est en termes de politique de prévention qu�il existe des parallèles ayant contribués à désamorcer le conß it en Irlande du Nord, et notamment sous trois angles.

1. IdentiÞ cation des besoins sociaux

L�expérience anglaise menée en Ulster a par exemple mis l�accent sur des besoins aussi différenciés que la construction de centres de loisir et la garantie des droits civiques. Dans le premier cas, il s�agissait de garantir un nombre plus important de ces centres que partout ailleurs dans les zones de développement communautaire du Royaume-Uni. Dans le second cas, l�action gouvernementale a cherché à mieux prendre en compte les demandes émanant de la minorité catholique en matière de libertés civiles auxquelles les autorités étaient confrontées.

2. Education

C�est un thème clé de la lutte antiterroriste et dont l�importance va certainement s�accroître en même temps que le paradigme de la politique de prévention. Dans

28 En 29 ans de conß it, 3300 personnes sont décédées. Paul Wilkinson, Terrorism versus Democracy. The Liberal State Response, Routledege, Londond and New York, 2006, p. 27.29 Muktar Ibrahim, Yassin Omar, Ramzi Mohammed, et Hussain Osman30 Dominic Casciani, 21/7: Was it linked to 7/7 ?, BBC News, 11 July 2007, http://www.news.bbc.co.uk.

Page 37: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

36

ce domaine, la réforme de l�éducation mise en place dans le cadre de l�ancien conß it en Irlande du Nord, a insisté sur la nécessité de dispenser les cours aux enfants catholiques et protestants réunis, aÞ n que la culture de la séparation et de la ségrégation n�ait pas sa place à l�école.

3. Communication et dialogue

L�expérience nord irlandaise a démontré toute l�importance de maintenir le dialogue et la communication entre les protagonistes, même lorsqu�aucune négociation n�était ofÞ ciellement en cours. L�existence d�un contact régulier même si parfois de nature ofÞ cieuse, fut essentielle pour préserver les chances de mettre un terme au conß it. Le contexte du terrorisme moderne auquel les autorités gouvernementales comme locales se trouvent désormais confrontées n�a cependant pas cette permanence historique propre au conß it en Irlande du Nord où les protagonistes étaient clairement identiÞ és : l�IRA d�un côté et les autorités anglaises de l�autre. Constitué de cellules autonomes, le terrorisme contemporain à plusieurs visages et à ce titre, il est difÞ cile de pouvoir instaurer un dialogue entre les autorités et ces mouvements, car la structure de ces derniers, comme les protagonistes qui les composent changent rapidement. En d�autres termes, les parallèles éventuels qui peuvent être tirés du cas irlandais concernent davantage le dialogue social et la communication avec les communautés d�où sont originaires les terroristes que l�instauration d�un dialogue direct mené dans le cadre d�une négociation entre protagonistes. En outre, lorsque les objectifs d�un groupe terroriste sont de nature internationale et non limités à un pays ou à une région (demande d�indépendance par exemple), comme les attaques à l�encontre des valeurs occidentales formulées par Al-Qaïda, toute politique de communication devrait se situer au même niveau. Pour les autorités locales, la communication peut alors devenir d�autant plus complexe, car il s�agit d�être en adéquation avec la ligne Þ xée par le gouvernement ou de se voir attribuer une compétence explicite. C�est donc davantage en termes de dialogue intercommunautaire (politique de prévention) que dans une optique de négociation (politique de réaction), que l�expérience en Irlande du Nord est incontournable.

En termes généraux, nous pouvons donc considérer que le dénouement positif de la situation en Irlande du Nord constitue sans aucun doute un élément important dans l�élaboration du dispositif antiterroriste en Angleterre. Cependant, au regard de la spéciÞ cité de la menace terroriste contemporaine, d�une part, sa composante religieuse (islamisme par exemple), et d�autre part, une approche délocalisée des lieux de l�attentat, la transposition du �modèle� de gestion de crise appliquée en Irlande du Nord à la situation actuelle doit être nuancée. Le cadre législatif anglais a précisément évolué pour faire face à ce nouveau déÞ , en se dotant dès 2000 d�une loi antiterroriste (British Terrorist Act, amendé en 2006) proposant une déÞ nition du terrorisme moderne selon un spectre assez large, car il englobe le terrorisme aux motivations politiques, religieuses et idéologiques. Mais c�est véritablement

Page 38: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

37

en 2004, qu�une innovation législative a été introduite avec le Civil Contingencies Act 2004 parce qu�il impose aux autorités locales d�élaborer un dispositif en cas d�attaque terroriste, ce qui n�est pas sans soulever des problèmes de logistique et de Þ nancement. Mais c�est surtout en termes structurels que la différence entre villes expérimentées et non expérimentées s�opère. Au Portugal par exemple, nous avons pu observer que la NACP désormais en charge des questions antiterroristes avait à l�origine une fonction dans l�organisation et la supervision des activités de protection civile et de premiers secours sur le plan national. Après les attentats du 11 septembre 2001, cette nouvelle compétence fut ainsi attribuée au NACP, rappelant que l�émergence d�une menace terroriste sur le continent européen aussi nouvelle soit-elle, ne conduit pas toujours à une création institutionnelle. C�est d�ailleurs essentiellement une politique de réallocation des ressources à disposition qui caractérise la politique des villes dans ce domaine, ce qui n�exclut pas l�élaboration ou le lancement d�initiatives nouvelles dans le domaine de la prévention ou de la communication.

En Allemagne, seul État fédéral représenté dans le projet CAT, les 16 Länder sont au centre du système de prévention et de coopération au sens large. L�élaboration des lignes directrices est conÞ ée à une task force, le BLPG, incluant désormais le problème de la lutte antiterroriste comme au Portugal. Toutefois, et faisant suite à la législation antiterroriste de 2002, une approche spéciÞ que a été mise sur pied, d�une part en augmentant les standards de sécurité au passage de la frontière et d�autre part, au niveau de la collaboration entre les autorités en matière de surveillance de groupes d�individus qualiÞ és de potentiellement dangereux (programme BIRGIT). Ce dernier élément dont l�efÞ cacité a été démontrée dans l�observation des protagonistes constituant la cellule de Munich, a aussi servi de modèle aux autres Länder. Dans ce cas, ce n�est pas seulement l�expérience d�un État sur la question de la lutte antiterroriste, mais aussi celle d�une unité infra étatique, le Land de Bavière, qui pourrait constituer un modèle pour d�autres régions européennes.

L�exemple de la Pologne illustre un autre aspect de cette variable historique, lié non seulement à l�absence de menace terroriste précise, mais aussi à la jeunesse de la démocratie polonaise. Premièrement, et bien que la Pologne participe activement à la lutte antiterroriste sur le plan international et notamment, par l�envoi de soldats au sein de la force multinationale en Irak (comme l�Angleterre et le Portugal), elle semble néanmoins moins exposée à une menace terroriste que l�Angleterre et par voie de conséquence, ces principales villes. Deuxièmement et c�est un élément important, la Pologne est une jeune démocratie qui n�a pas connu de menaces terroristes pendant la période du bloc soviétique, et dont le système de protection civile est encore en phase de consolidation, avec un cadre légal et une direction des opérations établies au niveau gouvernemental (Ministères de la défense, des affaires intérieures et de l�administration). Bien qu�il existe un plan en cas de situation de crise au niveau local, cela s�inscrit dans une perspective encore prospective.

Page 39: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

38

Le poids de cette variable historique qui permet aux villes les plus expérimentées d�anticiper aussi bien des politiques de prévention que des plans en cas de situation de crise au plus près des enjeux actuels, doit cependant être relativisé. Premièrement, les projets de collaboration entre les différents acteurs impliqués dans la gestion du problème du terrorisme au niveau européen (autorités, policiers, juges, formateurs) sont de plus en plus développés, ce qui est une source d�échange importante en termes d�expertise dans ce domaine. Par exemple, en matière de coopération policière (art. 29 et 30 UE) et douanière (art. 135 CE), les accords de Schengen ou la création d�Europol (1995) offrent un cadre adéquat aux États membres de l�Union européenne pour favoriser les échanges et les expériences au niveau européen. Deuxièmement, des événements comme les attentats terroristes de Londres et de Madrid, ainsi que de grandes manifestations culturelles (exposition universelle) et sportives (coupe du monde de football) constituent autant d�occasions et même si parfois tragiques, pour informer, échanger et débattre entre experts européens. Les séances d�information destinées aux représentants des polices européennes après les attentats de Londres illustrent une pratique qui pourrait s�intensiÞ er sur la question du terrorisme, et pas uniquement au lendemain d�événements dramatiques. Présenté comme un problème globalisé, le terrorisme n�en reste pas moins un enjeu local ce qui nécessite de renforcer voire de repenser les composantes de la lutte antiterroriste.

Ainsi, et en absence d�expérience sur le plan national, certains pays disposent désormais de plates-formes de dialogue pour confronter leur politique en matière de lutte antiterroriste et intégrer la dimension locale au sein de leur dispositif. Ce fut aussi la vocation de ce projet que de confronter des experts européens à la réalité de la dimension locale du terrorisme, aÞ n de favoriser les expertises et de mieux comprendre et déÞ nir le rôle de l�échelon local dans la lutte antiterroriste.

Page 40: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

39

3PREVENTIONDU TERRORISME :

DE LA COOPÉRATION AU PARTENARIAT

Page 41: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

40

3. PREVENTION DU TERRORISME : DE LA COOPÉRATION AU PARTENARIAT

3.1 Prévention et communication

La prévention du terrorisme dans les États européens est un domaine en pleine évolution, car les autorités ne s�approprient plus uniquement des outils issus de la prévention criminelle mais elles développent également leurs propres instruments et plus particulièrement dans le domaine du dialogue intercommunautaire. Schématiquement, la ligne directrice des politiques de prévention telle que suivie par les autorités locales, s�inscrit dans le cadre déÞ ni par le Conseil de l�Europe dans sa convention éponyme du 16 mai 200531, lequel s�articule autour de deux axes principaux (art. 2). Premièrement, l�accent est mis sur la formation des autorités répressives (forces de police) et deuxièmement, sur le développement des politiques préventives touchant aussi bien aux domaines de l�éducation, de la culture, de l�information, des médias et de la sensibilisation du public. Agissant en complément avec les mesures répressives, la politique de prévention est devenue un élément clé du dispositif antiterroriste, et ce d�autant plus dans le cadre de nos sociétés multiculturelles où le lien entre les autorités politiques et la société civile doit être renforcé.

Parallèlement, et sans constituer pour autant une sous-catégorie de la politique de prévention, la communication en est un élément indissociable pour favoriser d�une part, l�apprentissage de ce que l�on pourrait qualiÞ er le �vivre ensemble� sur le moyen et long terme et d�autre part, pour diffuser des informations clés aux citoyens en cas d�attentats terroristes. Ces deux notions étant interdépendantes, nous les abordons ainsi comme un binôme.

3.1.1 Prévention plutôt que réaction

La politique de prévention renvoie à autant d�éléments aussi différents que complémentaires que sont le renseignement, l�inÞ ltration, le dialogue social et intercommunautaire notamment. En s�inscrivant sur le moyen et long terme, ces actions cherchent à se pencher sur les origines du terrorisme qui conduisent des individus à commettre des attentats et pour certains, à le faire consciemment au péril de leur vie. Comme le souligne Henry Shaftoe32, le seul recours aux actions dites répressives, ce qu�il nomme la menace par la sanction, est non seulement insufÞ sant, mais n�a pas démontré son efÞ cacité. L�élaboration de dispositifs législatifs plus contraignants aux États-Unis33 comme en Europe et dont l�objectif est de dissuader toute tentative d�action terroriste, sont prioritairement des actions symboliques censées illustrer l�engagement des autorités politiques dans cette lutte. A l�inverse, en stigmatisant un certain groupe de population, ce dispositif normatif 31 Convention du Conseil de l�Europe pour la prévention du terrorisme (STCE no 196), in Conseil de l�Europe, La lutte contre le terrorisme. Les normes du Conseil de l�Europe, Strasbourg, Editions du Conseil de l�Europe, 4ème édition, 2007, pp. 165-183.32 Henry Shaftoe, Report from the 1st local seminar in Bristol, CAT�s programme, 28-29 septembre 2006.33 Henry Shaftoe, ibidem, p. 9.

Page 42: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

41

peut produire un effet contraire à celui initialement recherché, en aliénant plutôt qu�en favorisant la coopération avec les groupes dont le rôle est essentiel en matière de lutte antiterroriste. D�ailleurs, les condamnations prononcées à l�encontre d�un des auteurs des attentats du 9/11 aux États-Unis, Zacarias Moussaoui, comme celle de Abu Hamza en Grande-Bretagne pour incitation au meurtre relatif aux prêches prononcées dans le cadre de la Mosquée de Finsbury Park, furent basées sur l�ancienne législation et non pas sur les récentes lois antiterroristes adoptées dans chacun des deux pays. Dans ce contexte, si la dissuasion telle que pratiquée par le système judiciaire reste une composante importante de la lutte antiterroriste, elle doit être complétée par une politique de prévention visant d�une part, à réduire l�opportunité d�organiser une action terroriste (prévention de situation) et d�autre part, à supprimer toute motivation menant à cette action (prévention sociale). Le fait de renforcer la prévention en matière de lutte antiterroriste n�est contesté par aucun gouvernement bien au contraire, mais c�est au niveau de l�approche utilisée que se situe l�enjeu. Précisément, et bien que les méthodes utilisées proviennent de la prévention criminelle, n�existe-t-il pas une spéciÞ cité propre à la lutte antiterroriste ? Les experts étant intervenus tout au long de ce projet ne furent pas unanimes sur cette question. Tout en reconnaissant les caractéristiques du terrorisme moderne et qui ont été mises en exergue dans la partie introductive de ce document, un acte terroriste est selon eux avant tout un acte criminel justiÞ ant de recourir aux méthodes utilisées en matière de prévention criminelle. Si l�on ne peut nier la nécessité de s�appuyer sur les pratiques actuelles et passées empruntées à la prévention criminelle, il faut cependant reconnaître que l�organisation en réseaux ou la dimension religieuse du terrorisme contemporain conduit à des démarches spéciÞ ques. Par exemple, dans le domaine du dialogue intercommunautaire, Mounir Azzaoui34 rappelle que le simple fait de nouer le dialogue entre des représentants de différentes associations musulmanes réunis au sein du Conseil national des musulmans allemands et les autorités allemandes, peut être source de tensions au sein de cette même communauté par ailleurs loin d�être homogène. Car bien que la démarche des autorités allemandes ne soit pas alimentée par une quelconque suspicion à l�égard de la communauté religieuse islamique35, les membres de cette communauté pourraient se sentir trahis par leurs propres représentants par le simple fait qu�ils participent à la mise en place d�un dialogue. L�explication réside dans le caractère international de la lutte antiterroriste. Le soutien allemand à l�intervention américaine en Irak a pour certains des musulmans allemands, �disqualiÞ é� l�autorité allemande. Par conséquent, toute institutionnalisation d�un rapprochement apparaît comme politiquement sensible autant pour les acteurs ofÞ ciels que pour des membres de la communauté musulmane. Dans ce contexte, la politique préventive doit prendre en considération cette dimension internationale,

34 Il fut porte-parole du Conseil national des musulmans allemands jusqu�en décembre 2006 et est intervenu comme expert lors des conférences organisées dans le cadre du projet CAT (Tübingen et Bruxelles).35 Bundeskriminalamt, Common Dialogue between Muslim Organisations and Security Authorities - Programme for "ConÞ dence-Building Measures", 19.12.2005, p.3.

Page 43: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

42

même lorsque le terrain de l�action est local. Ainsi, le risque de stigmatisation de la communauté musulmane peut être potentiellement élevé lorsque des programmes portant sur le dialogue intercommunautaire ne tiennent pas sufÞ samment compte du caractère éminemment politique et même identitaire de la lutte antiterroriste.

Cet exemple permet d�aborder l�objectif central de la prévention : quelles sont les motivations qui conduisent une personne ou un groupe de personnes à commettre un acte terroriste et quels sont les facteurs permettant d�établir le proÞ l d�un terroriste ? En d�autres termes, dans quelles directions les actions préventives doivent-elles être menées ?

a. Qui sont les terroristes ?

La tâche est complexe car il n�existe pas de proÞ l type de terroriste. Le cas des quatre Britanniques à l�origine des attentats de Londres du 7 juillet 200536 illustre parfaitement cela et plus particulièrement celui considéré comme le leader du groupe, Mohammed Sidique Khan. Ressortissant britannique né à Leeds de parents pakistanais, son parcours révèle une personnalité parfaitement intégrée n�ayant pas souffert de racisme, ni d�un endoctrinement religieux pendant la période où il fréquentait le lycée, selon le témoignage de ses proches tout du moins37. Son basculement dans le terrorisme alors même que son proÞ l ne le prédisposait pas, démontre toute la difÞ culté des politiques de prévention, car il est impossible d�élaborer le proÞ l type d�un terroriste.

Malgré tout et comme le souligne Jean-Claude Salomon38, il y a quelques éléments qui permettent d�élaborer quelques pistes d�une part, quant au contexte favorisant l�opportunité de l�action terroriste et d�autre part, sur les terroristes eux-mêmes. Préalablement, un premier constat s�impose : il est important de ne pas oublier l�apparente �normalité� des terroristes, dans le sens où il s�agit d�individus intégrés dans nos sociétés, même s�ils sont en totale opposition avec les valeurs constitutives de celles-ci. C�est précisément une des conclusions principales de la recherche menées par Jessica Stern en interrogeant des terroristes religieux (chrétiens, juifs et musulmans) emprisonnés au Liban, Pakistan et aux États-Unis. Leur motivation principale était d�imposer de nouvelles normes morales, politiques et religieuses au reste du monde au prix de leur vie, tout en poursuivant leur activité régulière au sein de leur communauté39.

Ce constat d�apparente normalité des terroristes est un préalable nécessaire à l�élaboration de toute politique de prévention destinée à permettre l�identiÞ cation des

36 Mohammed Sidique Khan, Shehzad Tanweer, Germaine Lindsay, Hasib Mir Hussain.37 ProÞ le Suicide Bombers, site internet de BBC News (www. news.bbc.co.uk), 30 avril 2007.38 The Mind of the Terrorist, document présenté à l�occasion du 1er séminaire du projet CAT, Université de Bristol, 28-29 septembre 2006.39 Jessica Stern, Terror in the name of God. Why religious militants kill ?, New York, HarperCollins, 2003.

Page 44: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

43

facteurs conduisant des individus à commettre des attentats. Dans cette perspective, Jean-Claude Salomon dresse une liste de points clés susceptibles de mieux cerner le proÞ l du terroriste et dont nous reproduisons les éléments les plus saillants dans l�optique de l�élaboration d�une grille d�analyse à destination des autorités locales:

- la violence des terroristes est davantage ciblée et organisée que celle des jeunes impliqués dans la violence urbaine ou la criminalité. Cependant l�origine de ces violences est la même. (The violence of terrorists is simply more focused and organized then that of youths engaged in urban violence or crime. The root causes are basically the same)- les objectifs sont autant symboliques que portant sur des questions politique et religieuse, identitaire ou ethnique. (The goals are symbolic as well as political/religious, identity or ethnic issues.)- les terroristes sont comme vous et moi, au sens qu�ils ont les mêmes besoins, émotions et aspirations. (Terrorists are the same as you and I, with the same basic needs, emotions, feelings and aspirations.)- les terroristes ne sont pas fous ou souffrant de désordres pathologiques même si quelques-uns peuvent souffrir de syndromes de stress post-traumatique ou de troubles de la personalité. (Terrorists are not mad, insane or suffering from pathological disorders though some may be suffering from the results of past PTSD or personality disorders.)- les terroristes sont le produit d�une combinaison de trois facteurs : individuel, organisationnel et contextuel. (Terrorists are the result of three factors; individual, organizational and environmental)- il est important de prendre en compte certains mots-clé pour expliquer des aspects de la personnalité des terroristes : identiÞ cation, estime de soi, frustration, réaction, reconnaissance, désaffection, enjeu, honneur, colère, griefs, conß it, ressentiment. (One has to take into strong account several key words which explain in part terrorist personality; identiÞ cation, self esteem, revenge, frustration, reaction, renown, disaffection, challenge, honour, anger, grievances, conß ict, resentment.)- les terroristes ne fonctionnent pas en vase clos ou en solitaire, mais ils font partie d�un réseau. (Today�s terrorists do not function in a vacuum or alone but rather are part of networks.)- les réseaux terroristes sont des organismes actifs animés par une dynamique de groupe. (Terrorist networks are living organisms fuelled by group dynamics.)- la mise en réseau est ce qui distingue la violence terroriste de la violence urbaine ou d�activité criminelle. (Networking is the key to the difference between terrorists and urban violence or some criminal activity.)- de la sélection au recrutement, de la préparation jusqu�à l�attaque elle-même, le réseau est l�élément clé. (From selection, through recruitment training preparation and committing attacks, the network is the key.)

Parmi les éléments de cette grille qui apparaissent comme essentiels, la diversité des personnes impliquées dans l�organisation d�un attentat est cruciale. En effet, la participation au sein d�un réseau terroriste ne se limite pas exclusivement au

Page 45: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

44

poseur de bombe. Le recrutement des membres du réseau, la mise en place du réseau, son Þ nancement, puis l�organisation et enÞ n l�attentat lui-même exigent des compétences très différenciées, rendant d�autant plus complexe la tâche de prévention. Une difÞ culté supplémentaire s�ajoute dans la mesure où des attentats peuvent être commis par des personnes non résidentes et qui séjournent le temps d�organiser leur attaque. Ce fut le cas avec les tentatives d�attentats sur deux trains à Dortmund et Koblenz (31 juillet 2006), dans lequel furent impliqués cinq libanais et un syrien et dont seulement deux d�entre-eux résidaient en Allemagne40. Par conséquent, la politique ou plutôt les politiques de prévention doivent embrasser toutes ces spéciÞ cités et agir dans ces différentes directions.

Le problème posé aux autorités locales est donc double :1. il faut pouvoir disposer de l�expertise nécessaire pour affronter toutes les exigences du terrorisme moderne ;2. la diversité des actions préventives nécessite une excellente coordination entre tous les agents impliqués que ce soit au sein du même corps administratif - coopération horizontale - , mais aussi avec d�autres niveaux de l�État, voire avec des partenaires étrangers - coopération verticale.Ce constat n�est d�ailleurs pas propre à la seule politique de prévention, mais

à l�ensemble des domaines concernés par la lutte antiterroriste sur le plan local (gestion de crise, dialogue intercommunautaire et aide aux victimes). Ce projet conclu que la lutte antiterroriste sur le plan local agit comme un catalyseur et contraint les autorités à modiÞ er et/ou à réformer le cadre légal à l�intérieur duquel prend place la lutte antiterroriste aÞ n d�autoriser la coopération entre les agents concernés et donc de légitimer leur action sur le terrain.

b. Les acteurs de la prévention

La reconnaissance du caractère multidimensionnel de la lutte antiterroriste nécessite d�élargir le champ des acteurs impliqués dans les politiques de prévention ce qui n�est pas sans soulever un déÞ organisationnel. Pour appréhender cette complexité, Henry Shaftoe41 a développé un diagramme à partir du contexte anglais composé de 3 cercles concentriques qui sont autant de niveaux illustrant les inß uences auprès des terroristes que les différents niveaux de l�action préventive.

Le premier cercle d�inß uence contribuant à des changements de comportement et d�attitude des terroristes est la sphère communautaire qui se compose de la famille et des amis principalement. Le second cercle regroupe à la fois le canevas général des services fournis par les autorités locales (éducation, santé, sécurité, police), les représentants religieux ainsi que les associations travaillant sur les

40 Rapport du 4ème séminaire organisé dans le cadre du projet CAT, Université de Tübingen,27-28 novembre 2006, pp.19-20. 41 Henry, Shaftoe, ibidem, p.17.

Page 46: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

45

questions sociales. L�action de ces acteurs est primordiale en termes démarche préventive sur le long terme. EnÞ n, le dernier cercle est de nature transnationale, car il implique aussi bien les services de renseignements nationaux et internationaux, le gouvernement central, les représentants locaux et les services de sécurité mais aussi la Commission européenne.

Si la pertinence de l�échelon local en matière de lutte antiterroriste n�est pas contestée42, son rôle en matière de prévention apparaît intrinsèquement lié et selon des degrés divers, à un faisceau d�acteurs, comme l�illustre parfaitement le schéma précédent. Dans le cas anglais, ce lien aurait dû être d�autant plus fort que les autorités locales font face depuis 1998 à une obligation législative suite à l�élaboration du Crime and Disorder Act43. Ce cadre légal leur demande ainsi qu�aux autres agences publiques (les services de la santé par exemple), de renforcer leur action en matière de prévention criminelle, que l�on peut extrapoler aux questions

42 Frédéric Esposito, 7 septembre 2007, Peur sur la ville: comment les autorités locales font face à la menace terroriste ?, Le Temps ; Nick Tilley et Gloria Laycock, Working out what to do: Evidence-based crime reduction, Report produced in conjunction with the National Institute of Justice Washington D.C., Crime Reduction Research Series Paper 11, British Home OfÞ ce, 2002.43 OfÞ ce of Public Sector Information, Crime and Disorder Act 1998, site internet (www.opsi.gov.uk).

Page 47: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

46

terroristes. En réalité, la mise en place d�actions préventives pour réduire le risque terroriste44 existe sur le plan national, alors qu�elles sont encore rares au niveau local. Cela ne signiÞ e pas pour autant que les autorités locales n�agissent pas en matière de prévention, mais l�existence d�un canevas explicitement consacré à la lutte antiterroriste sur le plan local fait défaut, du moins en-dehors des grands centres urbains. C�est essentiellement dans les villes de Londres, Birmingham et Manchester que de tels dispositifs préventifs existent, conséquence des attentats passés organisés par l�IRA durant ces quarante dernières années.

Le poids de l�histoire dans la lutte antiterroriste est précisément un élément important car non seulement, le passé est source d�enseignement quant à certaines politiques préventives, mais surtout, il nous rappelle que son actualité est toute relative, car ce phénomène n�a malheureusement jamais cessé d�exister, comme le souligne Adam Roberts45.

c. Le partenariat collaboratif comme base pour la prévention

La prévention nécessite une approche politique qui soit en adéquation avec tous les domaines concernés par son champ d�action. En d�autres termes, la compétence dévolue à un seul type d�agent n�étant plus envisageable, il paraît nécessaire d�envisager la prévention sous l�angle de la coopération entre les différents acteurs du niveau local et national. Toutefois, sa réalisation ou plutôt sa faisabilité se heurte à un obstacle institutionnel dans la mesure où l�organisation politique de chaque État varie fortement � du centralisme français au fédéralisme allemand. Ainsi, le rôle accordé à l�échelon local en matière de prévention et plus particulièrement dans le domaine de la lutte antiterroriste est tout aussi variable. Néanmoins, nous avons pu observer dans le cadre de ce programme, plusieurs initiatives conÞ rmant les potentialités de doter les politiques de prévention d�un caractère collaboratif fort.

En Allemagne46, un groupe de travail composé de représentants du gouvernement fédéral et des gouvernements des 16 Länder s�est constitué au niveau fédéral (Bund-Länder-Projektgruppe, BLPG), aÞ n de se pencher sur le risque de menace terroriste dans le domaine des transports publics. La protection des infrastructures de transport est devenue d�autant plus cruciale après les attentats de Madrid et de Londres. L�objectif du BLPG est de se pencher sur trois axes importants de la prévention :

1. identiÞ cation des dangers potentiels au sein du réseau autoroutier et ferroviaire allemand ;

44 OfÞ ce of Public Sector Information, Prevention of Terrorism Act 2005,site internet (http://www.opsi.gov.uk).45 Adam Roberts, The �War on Terror� in historical perspective, papier présenté lors de la conférence Þ nale du projet CAT, Bruxelles, 10-11 septembre 2007. 46 Gerald Störmer, Police terrorism prevention in the state of Hesse on local level, présenté lors du 4ème séminaire du projet CAT, Université de Tübingen, 27-28 novembre 2006.

Page 48: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

47

2. doter les employés de l�État (conducteur de bus, train et métro notamment) d�une formation leur permettant de réagir en cas d�attentats;3. lancement d�une campagne de sensibilisation intitulée Attention sur la route (Aufmerksam unterwegs), aÞ n de sensibiliser autant les passagers que les employés, quant aux bagages laissés sans surveillance principalement.Les résultats de ce groupe de travail furent mis en place sur le plan fédéral ainsi

que sur le niveau local, c�est-à-dire dans les Länder, concrétisant une approche de haut en bas (top-down approach). La présence de représentants des gouvernements des Länder explique ce transfert entre deux niveaux du système politique allemand, mais il traduit aussi la reconnaissance du rôle crucial que jouent désormais les autorités locales en matière de lutte antiterroriste.

Selon une logique inverse, soit du bas vers le haut (bottom-up approach), les autorités du Land de Bavière47, se sont basées sur une nouvelle norme fédérale en matière de lutte antiterroriste pour renforcer l�identiÞ cation des individus qualiÞ és de potentiellement dangereux dans les réseaux islamistes. Cette politique de prévention très ciblée s�est développée au sein d�un groupe de travail dénommé �BIRGIT� (Beschleunigte IdentiÞ zierung und Rückführung von Gefährdern aus dem Bereich des Islamistischen Terrorismus/Extremismus), regroupant différents acteurs locaux impliqués dans la lutte antiterroriste (police et autorités politiques). Concrètement, ce groupe a évalué le proÞ l de 60 individus qualiÞ és de dangereux, avant d�en expulser la grande majorité d�entre-eux du territoire allemand, conformément aux dispositions Þ gurant dans la loi précitée. Un des résultats les plus visibles fut le départ des membres du groupe islamiste Ansar al Islam de la ville de Munich. Cet exemple qualiÞ é de �modèle bavarois� par les autorités fédérales allemandes a permis le développement de la coopération sur le plan local entre les acteurs impliqués dans l�identiÞ cation d�islamistes qualiÞ és de dangereux. Il fut également un modèle de prévention face à la menace d�une forme de terrorisme religieux pour d�autres länder allemands, dont certains ont repris le mode de fonctionnement du groupe de travail BIRGIT.

Dans le contexte politique de l�Angleterre, la situation est très différente car le rôle des autorités n�est pas clairement précisé, rendant d�autant plus difÞ cile toute forme de coopération. Ainsi, l�attribution de compétences en matière de prévention oscille entre le département de la sécurité (community safety unit) et celui en charge de la planiÞ cation des mesures d�urgence (emergency planning). A la lumière des débats organisés lors des conférences du projet CAT, la coordination des activités de prévention entre ces deux départements serait opportune. Effectivement, le premier est en contact direct avec la population alors que le second dispose d�une meilleure expertise technique en matière de prévention. Parallèlement, il faudrait que la politique de prévention du terrorisme soit intégrée au sein de la stratégie

47 Rapport du 4ème séminaire organisé dans le cadre du projet CAT, Université de Tübingen, 27-28 novembre 2006, pp. 24-28

Page 49: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

48

locale de sécurité, à l�image des initiatives menées par les autorités de Westminster48 ou du comté de Halton49. C�est précisément dans le cadre du comté de Halton que fut élaboré un �partenariat collaboratif �, impliquant tous les acteurs locaux, aÞ n d�élaborer une stratégie locale sécurité. Cela constitue par une ailleurs un des rares exemples mis en place sur le plan local en Angleterre, à l�exception des programmes de prévention développés dans les grands centres urbains.

3.1.2 Stratégie globale de communication

La communication est un instrument de la lutte antiterroriste qui comporte deux volets bien distincts. Le premier concerne la diffusion d�information à la population, que ce soit dans le cas d�un attentat ou de façon plus générale, en matière de prévention. Le second volet concerne la transmission d�informations entre les agents directement impliqués dans la lutte antiterroriste. Dans la mesure où la communication va être façonnée à partir des domaines couverts par la lutte antiterroriste, l�élaboration d�une stratégie de communication globale nécessite préalablement que l�ensemble des mesures antiterroristes - de la prévention au dialogue intercommunautaire - bénéÞ cient d�une excellente coordination.

La difÞ culté d�élaborer une stratégie globale provient du manque de coordination entre les différents acteurs impliqués dans la lutte antiterroriste et dont les effets se font ressentir directement dans l�élaboration des politiques de communication. Parallèlement et aÞ n que la communication reste intelligible, pour les autorités locales comme pour la population, les émetteurs doivent être clairement identiÞ ables (qui communique ?) et le contenu des messages compréhensible et homogène (entre les émetteurs). En tenant compte de cet impératif de contenu (l�homogénéité de l�information) et de forme (la coordination entre tous les acteurs de la lutte antiterroriste), une stratégie de communication peut être formulée.

a. Développement d�un système d�information homogène pour le grand public

Depuis plusieurs années, tout voyageur transitant par un aéroport ou un hall de gare est généralement attentif à toute valise laissée sans surveillance. Ce résultat est la conséquence d�une communication développée par les autorités en Europe comme dans la grande majorité des pays désormais, aÞ n de déjouer tout attentat à la �valise piégée�, comme nous l�avons évoqué avec l�exemple allemand du BLPG. Cette transformation du passager et du citoyen plus généralement, en �watch dog� est d�ailleurs entretenue par les États eux-mêmes, par le renforcement de leur dispositif sécuritaire dans les aéroports notamment, par l�imposition du passeport biométrique, d�une fouille systématique des passagers et de leurs affaires personnelles, lesquelles font d�ailleurs l�objet d�une réglementation de plus en plus stricte.

48 John Baradell and Dean Ingledew, Working together in partnership to prevent emergence of threat of terrorism, papier présenté lors du 1er séminaire du projet CAT, Université de Bristol, 28-29 septembre 2006.49 Spencer Webster, British local authorities' experience at prevention of terrorism, papier présenté lors du 1er séminaire du projet CAT, Université de Bristol, 28-29 septembre 2006.

Page 50: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

49

Le passage d�une frontière ou plutôt d�un espace de sécurité à l�autre (conséquence des accords de Schengen), devient un moyen très subjectif pour les individus de mesurer et de comparer le niveau de sécurité et donc le degré potentiel de la menace. Cet exemple permet d�illustrer précisément, comment un dispositif de sécurité et la politique d�information qui l�accompagne, peut contribuer à déÞ nir le sentiment de sécurité ou d�insécurité des individus. Pour les autorités, il est crucial que la communication ne produise pas l�effet inverse à celui recherché et plus particulièrement en matière de prévention, soit de renforcer un sentiment de sécurité et non l�inverse. L�homogénéité des informations communiquées, c�est-à-dire, la garantie que les émetteurs (autorités, agents etc.) diffusent le même message, est important. Toutefois, un message peut être adapté et donc différencié d�un message global, dès le moment où les autorités cherchent à cibler un groupe spéciÞ que.

Dans le cadre d�un exercice de simulation d�une attaque terroriste dans un centre commercial présenté dans le cadre du projet CAT, Richard Flynn50 a abordé le cas d�une politique de communication ciblée, en l�occurrence destinée à des commerçants. Le choix de ce public se justiÞ e par le fait qu�un centre commercial constitue une cible potentielle, nécessitant d�être protégé, sans pour autant que le dispositif mis en place ne transforme ce lieu de vie en bunker. Dans cette optique, les commerçants deviennent un élément dans le dispositif de sécurité d�une part, en étant attentifs aux colis suspects et d�autre part, en ayant connaissance du protocole à suivre en cas d�attaque (gestes de premier secours, regroupement des blessés par exemple). Ainsi, une communication est spécialement conçue pour accompagner cette politique de prévention auprès des commerçants.

Toutefois, une communication ciblée doit être en adéquation avec celle dispensée à l�ensemble de la communauté. Cette cohérence doit aussi se reß éter dans la communication au sein de l�État, entre le niveau local et le niveau national principalement. La simulation d�un attentat dans un centre commercial révèle ce problème de cohérence, soit que les consignes données aux commerçants ne contribuent au développement d�un sentiment de paranoïa qui pourrait ensuite être perceptible par les clients, voire se diffuser au sein de la population. L�importance d�une communication homogène est déterminante, car elle permet de sensibiliser la population aux indicateurs potentiels de la menace terroriste (colis suspects, etc.), sans créer une inquiétude trop vive au sein de celle-ci. Cet aspect est d�autant plus visible après un attentat ou une tentative d�attentat où la crainte générée localement se diffuse sur l�ensemble du territoire.

50 Richard Flynn, National Counter Terrorism Security OfÞ ce (NaCTSO), Simulation exercise - a terrorist attack in a crowed place , Þ lm présenté lors du 1er séminaire du projet CAT, Université de Bristol, 28-29 septembre 2006. Le NaCTSO a développé des guides regroupant différentes mesures pour assurer la sécurité dans les lieux publics très fréquentés, comme les stades, pubs, clubs et attractions touristiques (site internet : http://www.nactso.gov.uk).

Page 51: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

50

Une communication homogène est d�autant plus importante lorsqu�elle vise un groupe se déÞ nissant par des critères religieux ou ethniques, contrairement à l�exemple précédent et qui portait sur des commerçants. Comme cela fut évoqué par Mounir Azzaoui, le simple fait de réunir des représentants de la communauté musulmane allemande et des représentants des autorités ne signiÞ e pas que les premiers puissent être suspectés d�être des terroristes potentiels par les seconds. Dans ce cas, la stratégie de communication développée sur le plan fédéral est politiquement sensible, car elle doit montrer la volonté gouvernementale de renforcer le dialogue intercommunautaire, sans stigmatiser la communauté concernée. Dans la perspective d�une reprise de cette stratégie par les autorités locales, elles devront respecter cette ligne directrice aÞ n que l�homogénéité du contenu de l�information garantisse la cohérence de la politique préventive.

Le respect d�une information homogène entre les acteurs de la lutte antiterroriste est tout aussi crucial que celle destinée au public. C�est principalement dans la gestion de crise et l�aide aux victimes que cet aspect apparaît fondamental, car les effets peuvent affecter directement la vie des gens. En matière de gestion de crise, la diffusion d�informations contradictoires, peut altérer l�efÞ cacité des actions entreprises en étant par exemple inadaptée à la situation réelle. Concernant l�aide aux victimes et en particulier aux familles, il est crucial de pouvoir accéder à des informations facilement et que ces informations aient été vériÞ ées, aÞ n d�éviter de rendre des situations initialement difÞ ciles encore plus tragiques. Ainsi, pour les acteurs de première ligne, la question d�une information homogène est intrinsèquement liée au dispositif de communication mis en place et à la coordination entre tous les acteurs impliqués.

b. Un système d�information coordonné entre tous les acteurs

La communication est au c�ur de la démocratie contemporaine et très certainement un de ses symboles, construit autour d�un idéal, celui du rapprochement entre les individus, et conçu comme un catalyseur du multiculturalisme. Le haut degré de technicité des systèmes de communication et surtout leur accès facilité pour la population, a laissé entrevoir de façon un peu naïve, un moyen de développer de nouvelles formes de solidarité. En réalité, Dominique Wolton51 souligne que cette révolution technologique permanente n�a fait que creuser un fossé numérique entre les régions les plus riches et les plus pauvres de la planète. Surtout, il constate que les vertus positives attribuées aux techniques de la communication se font au détriment de la dimension humaniste. Le résultat se mesure selon lui par une prise de distance des acteurs mêmes de cette communication, vis-à-vis de cette technicité. C�est précisément tout l�enjeu d�une stratégie globale de communication dans la lutte antiterroriste, soit de coordonner l�information entre tous les acteurs et entre toutes les techniques utilisées.

51 Dominique Wolton, Sauver la communication, Paris, Flammarion, 2007.

Page 52: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

51

La coordination de l�information conduit à se pencher préalablement sur les acteurs de la communication et qui sont en réalité tous les acteurs de la lutte antiterroriste : agent de l�État (polices, pompier, médecin), autorité politique, éducateur, leader des communautés politiques et religieuses. Chacun à son niveau joue un rôle clé en fonction de la nature de l�information qu�il doit transmettre, soit comme émetteur principal ou comme relais. Ainsi en matière de politique préventive, nous avons souligné l�importance d�intégrer les représentants des communautés étrangères en évoquant notamment les projets menés en Allemagne ou en Angleterre. Dans ce cas, il est d�autant plus important de s�appuyer sur leurs réseaux d�une part, pour diffuser et de façon coordonnée des messages d�apaisement lors de tension intra et intercommunautaire et d�autre part, pour diffuser des informations pouvant contribuer à aider les agents en charge de la lutte antiterroriste.

La coordination de l�information entre différents types d�acteurs est précisément un des éléments qui a été développé suite aux attentats de Londres de juillet 2005. Selon John Strutton52, les tragiques attaques du métro londonien ont mis en exergue le besoin d�une meilleure réactivité dans la gestion de crise à court terme, mais aussi et à plus long terme, sous l�angle de la prévention. La mise sur pied d�un groupe d�étude sur les transports à Londres Þ n 2005 (Transport for London, TfL), a déÞ ni des actions prioritaires à mener, selon cet objectif de court et long terme, dans 3 domaines clés : engagement sur le terrain, éducation et gestion de l�environnement urbain.

Pour le TfL, la communication apparaît à la fois comme un objectif d�ordre éducatif, sous la forme d�une sensibilisation destinée aux passagers concernant les colis suspects, mais également comme un objectif lié à l�environnement urbain. Pour ce dernier objectif, la priorité est mise sur une meilleure interopérabilité des systèmes de communication entre le TfL, la police et les acteurs clés, en d�autres termes, de garantir une meilleure coordination. La prise en compte des médias dans ce dispositif est cruciale, aÞ n de garantir une information homogène et coordonnée dans le domaine de la lutte antiterroriste. En effet, l�impact des informations transmises par les médias sur le public peut non seulement contribuer à renforcer ou atténuer un sentiment d�insécurité, mais aussi à promouvoir une vision réductrice du terrorisme, surtout lorsque des ressortissants d�une communauté étrangère sont impliqués. La création d�un centre unique d�information sur le plan local et diffusant des informations par l�intermédiaire d�unités décentralisées permettrait de garantir le contrôle sur le contenu de l�information et une certaine ß exibilité d�accès, que ce soit pour le public ou les médias. C�est précisément un des résultats du projet mené par l�ONG Impact aux Pays-Bas, soit de mettre en évidence l�importance d�un centre unique d�informations53.

52 John Strutton, The effects of the London bombings on transport safety, document présenté lors du 1er séminaire du projet CAT, Université de Bristol, 28-29 septembre 2006.53 Voir notamment le document suivant : Community-based interventions. Working draft, Impact, Netherlands, 2006 (http://www.impact-kenniscentrum.nl). Projet pilote Victimes des Actes Terroristes, 2005.

Page 53: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

52

L�élaboration d�une stratégie globale de communication en matière de lutte antiterroriste doit donc reposer sur cette double composante, soit le caractère homogène des informations transmises, ainsi que sur une coordination entre tous les acteurs impliqués dans le système d�information. Par conséquent, une approche coordonnée de la lutte antiterroriste est une condition préalable pour développer un système d�information intégré et jeter les bases d�une stratégie de communication globale.

3.2 Gestion de crise

Les villes peuvent faire l�expérience de crises générées non seulement par des attaques terroristes, mais également par des phénomènes sociaux ou des catastrophes naturelles, qui forcent les villes et les pouvoirs locaux à faire de la prévention, de l�atténuation et de l�adaptation des thèmes centraux de leurs plans de sécurité locaux aÞ n de gérer les risques de manière proactive. L�anticipation de la gestion de crise et la réduction des risques de catastrophes deviennent une priorité absolue, non seulement dans le cadre des politiques nationales, mais également locales, ces dernières devant être à la mesure des capacités et ressources disponibles.

Dans différents pays européens, le retour à la normale après une catastrophe peut se développer de différentes manières, mais les méthodes les plus efÞ caces comprennent probablement : des systèmes d�alerte précoce centrés sur la population, des évaluations de risques ainsi que d�autres approches intégrées et multisectorielles au sein du cycle de réduction des catastrophes, qui comprend la prévention, la préparation, l�intervention d�urgence ainsi que le rétablissement et la réhabilitation.54

Cependant, la menace d�une crise urbaine telle qu�une catastrophe naturelle devrait-elle être traitée par les pouvoirs locaux en exploitant les mêmes méthodes et en appliquant les mêmes procédures légales qu�en cas d�attentat terroriste ?

Aujourd�hui, différentes organisations européennes et internationales ont tendance à établir une distinction claire entre les différents risques mondiaux induits par des crises telles que les catastrophes naturelles ou le terrorisme. En conséquence, les interventions d�urgence, les responsabilités, les capacités et les limites d�interventions au cours de catastrophes naturelles ou d�événements terroristes font l�objet de débats et d�analyses au cours de sessions distinctes.

Toutefois, les pouvoirs locaux ne disposent pas de ressources humaines, Þ nancières ou logistiques différentes et pouvant être mobilisées distinctement en cas de catastrophe naturelle ou d�actes de violence humaine d�une part et d�attentats terroristes d�autre part. Les exemples suivants présentent les différences qui existent dans les approches mises en �uvre par les pays des partenaires du projet.

54 Conseil de l�Europe. Rapport de la Conférence mondiale pour la prévention des catastrophes naturelles. EUR-OPA Convention sur les Risques Majeurs. AP/CAT. 2005

Page 54: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

53

3.2.1 Une approche multiservices : le cas britannique

La gestion d�urgence intégrée (Integrated Emergency Management - IEM) est utilisée depuis de nombreuses années au Royaume-Uni. Ce concept permet d�appliquer une approche multiservices pour la planiÞ cation d�urgence aÞ n d�anticiper, d�évaluer, de prévenir, de préparer, d�intervenir et de se remettre de tous types d�incidents. Il s�agit d�une approche adaptée à tous types de risques. Ce concept permet d�intégrer la Loi de 2004 sur les Plans d�Intervention Civile à l�ensemble des dispositifs des services et des partenariats. Il a permis un véritable remaniement �en profondeur� de la manière dont la planiÞ cation d�urgence (Protection Civile) était organisée.

La Loi sur les Plans d�Intervention Civile a été conçue aÞ n de relever les déÞ s du 21ème siècle. Ainsi, les services ont été divisés en deux groupes, les services d�intervention de catégorie 1 et de catégorie 2.

Services d�intervention de catégorie 1 : pouvoirs locaux, services de police, services de pompiers, ambulanciers, services de santé, services environnementaux, services maritimes et gardes-côtes.Services d�intervention de catégorie 2 : entreprises de services publics, aéroports, exploitants ferroviaires, Network Rail, ports, société de gestion autoroutière, responsable de l�hygiène et de la sécurité.En bref, les services d�intervention de catégorie 1 sont les organisations qui se

situent au c�ur de l�intervention d�urgence et qui doivent remplir l�ensemble des devoirs de protection civile. Ils doivent :

- évaluer le risque de la survenue d�urgences (probabilité et impact) et utiliser cette évaluation aÞ n d�informer la planiÞ cation d�urgence (Forums Locaux de Résilience, LRF) ;- mettre en place des plans d�urgence ;- mettre en place des dispositions pour la gestion de la continuité des services (aÞ n de garantir que des plans ont été élaborés et testés) ;- communiquer avec la population (rendre l�information disponible concernant les sujets de protection civile, alerter, informer et conseiller la population en cas d�urgence) ;- promouvoir la gestion de la continuité des services auprès des entreprises et du secteur du bénévolat (obligatoire uniquement pour les conseils locaux) ;- coopérer avec les autres groupes d�intervention locaux aÞ n d�améliorer la coordination et l�efÞ cacité.Avant l�introduction de la loi, la planiÞ cation d�urgence n�était pas considérée

par certaines agences comme un service nécessaire exigeant l�allocation de ressources, de temps et d�énergie. Lorsqu�un incident se produisait, les services le traitaient généralement de manière satisfaisante. Peu d�attention était accordée aux problématiques de rétablissement, l�intervention de nombreux services était surtout de nature réactive. La loi a permis de renforcer la fonction de planiÞ cation

Page 55: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

54

d�urgence au sein de l�ensemble des services, particulièrement depuis qu�il s�agit d�une obligation d�origine législative et que la menace du terrorisme et des attentats fait partie de la vie quotidienne au Royaume-Uni.

De nombreux groupes de travail dédiés à la planiÞ cation d�urgence se sont formés sous la houlette des forums de résilience locaux. Outre le travail centré sur la résilience locale, les guides émis par le gouvernement et distribués par le biais des forums de résilience régionaux ont eu une inß uence constante. Ces guides comprennent des éléments de planiÞ cation pour les dispositions mortuaires temporaires, les décès et les évacuations de masse. En conséquence, les plans existants ont été révisés et de nouveaux plans ont été élaborés. La formation, les exercices et les régimes de tests ont été renforcés. Lorsque des incidents se sont produits, l�intervention multiservices a été améliorée grâce à l�existence de plans robustes, de connaissances et d�expertise en termes de rôles et de responsabilités.

Il est sans nul doute essentiel de garantir que les intervenants de catégorie 1 et 2, les entreprises et les associations de bénévoles continuent à travailler en partenariat. L�utilisation de Partenariats de Réduction de la Criminalité et des Troubles est vitale dans le cadre de ce processus, de même que le soutien et les conseils provenant du Ministère de l�Intérieur. Le Plan National de Sécurité Communautaire 2006-0955 établit des normes, initiatives et objectifs pour les services. Ce plan n�intègre pas encore à ce jour la mention de planiÞ cation d�urgence. Cependant, il est désormais possible, à l�aide de la loi de 2004 sur les Plans d�Intervention Civile, d�échanger des informations, de planiÞ er, d�intervenir, de se rétablir et d�apporter une assistance dans toute problématique de sécurité communautaire. Ceci doit encourager l�utilisation partagée des ressources et un soutien accru à la communauté grâce à une approche plus cohésive, à des visions et des priorités partagées ainsi qu�à des connaissances partagées.

En octobre 2006, le Livre Blanc des Pouvoirs Locaux intitulé Des communautés fortes et prospères56 a été publié et ouvert à la consultation. Les thèmes principaux intéressant les pouvoirs locaux sont la production d�une Stratégie Communautaire, la mise en �uvre de Partenariats Stratégiques et la mise en place d�Accords Locaux. Ce livre blanc vise à remettre en phase les services fournis par les administrations sur des sujets tels que la sécurité des villes, la santé et la cohésion sociale. Il constitue également une occasion de responsabiliser les communautés et pose les fondements nécessaires à une collaboration entre la sécurité civile et la planiÞ cation d�urgence, non seulement dans le domaine de la prévention du terrorisme mais également dans l�amélioration de l�intervention et des plans de récupération lorsque le terrorisme frappe.

55 Cellule de sécurité civile et de gouvernement local, Ministère de l�Intérieur. Plan national de sécurité civile 2006-2009. 200556 Service des communautés et du gouvernement local. Des communautés fortes et prospères. Livre Blanc du gouvernement local. Octobre 2006. Disponible à l�adresse : http://www.communities.gov.uk

Page 56: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

55

3.2.2 Un cas spéciÞ que : la Croix Rouge allemande57

La Croix Rouge allemande ne joue pas uniquement le rôle d�une organisation non gouvernementale dotée d�une mission humanitaire. Contrairement aux autres pays européens représentés dans le cadre du projet Villes contre le Terrorisme, la Croix Rouge allemande joue un rôle central dans la gestion de crise et des situations d�urgence.

Ces dernières années, suite aux évolutions politiques en Allemagne (relations est-ouest et réuniÞ cation), des changements radicaux sont intervenus au niveau des systèmes de sécurité civile et de contrôle des catastrophes, particulièrement au niveau des structures d�assistance. Dans ce contexte, le fonctionnement et la structure de la Croix Rouge ont également évolué.

Des cellules multifonctions d�emploi ont été créées. Celles-ci peuvent être rapidement et aisément coordonnées avec les services d�urgences et les brigades de pompiers. Au sein de la Croix Rouge, la connexion directe établie entre le groupe médical de la cellule d�emploi et le service d�urgence ainsi que l�intégration du groupe de soins dans le dispositif d�assistance ont permis de combler le déÞ cit qui existait entre les services d�urgence et les services de régulation des catastrophes.

Les Länder allemands sont dotés des compétences et des fondements juridiques qui sous-tendent les services d�urgence. Les services de secours généraux sont réglementés par la législation sur les services d�urgence qui déÞ nit les équipements des ambulances, le matériel médical et autres fournitures nécessaires en cas d�urgence. Les garants de la fourniture des services d�urgence doivent s�acquitter de la tâche cruciale et urgente de la déÞ nition des professions et qualiÞ cations des médecins, personnels soignants, aides-soignants, équipes de premiers secours et des services d�aide volontaires.

Les services d�urgences et brigades de pompiers allemands ne disposent pas d�une expérience sufÞ sante des procédures à suivre en cas d�attentat terroriste. Le manque d�expérience apparaît comme évident lorsque se pose le problème de la mise en danger des intervenants en raison de la présence d�explosifs, d�armes chimiques ou biologiques ou dans le cas de blessures spéciÞ ques, telles que des amputations, qui ont la spéciÞ cité de provoquer des troubles de stress post-traumatique chez les victimes comme chez les secouristes. D�autres problèmes se posent dans les situations où existent plusieurs scènes de déploiement, lorsque des infrastructures sont détruites, les communications sont difÞ ciles et que les voies de circulation sont bloquées.

Selon M. Wizenmann, les mesures nécessaires à la compensation de ce manque d�expérience doivent passer par la concentration des forces disponibles pour le déploiement et la formation des secouristes dans le cadre d�exercices proches de

57 Ce chapitre est inspiré du discours prononcé par Rainer Wizenmann lors du séminaire Villes contre le Terrorisme à Tübingen. Le rapport complet est disponible à l�adresse http://www.fesu.org

Page 57: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

56

la réalité. La qualiÞ cation des équipes d�intervention constitue une autre mesure, particulièrement pour ceux qui ne sont pas régulièrement actifs au sein des services d�urgence. Une coordination constante des stratégies de déploiement avec l�ensemble des organisations responsables de la sécurité permet d�apporter une assistance visant à éviter des pertes au sein même des équipes de secours.

Des problèmes peuvent se poser si les secouristes présents sur la scène ainsi que les aides profanes non formés sont trop nombreux. Ce problème peut être évité simplement en sélectionnant les assistants véritablement nécessaires. AÞ n de mettre ce concept en pratique, les aides devraient se présenter au centre de gestion des opérations avant de se rendre sur le terrain.

En cas d�accumulation massive de personnes blessées (AMPB) suite à des attentats terroristes, il est primordial de disposer d�une meilleure coordination des différentes organisations, particulièrement les services d�urgence, de régulation des catastrophes et les forces armées fédérales allemandes. Les hôpitaux doivent être équipés et formés selon les plans d�urgence aÞ n de faire face à un cas d�AMPB. Les civils doivent être régulièrement formés aux règles des premiers secours en cas d�accident.

Il convient de ne pas omettre la question de la protection des secouristes eux-mêmes ainsi que la capacité des civils à prodiguer les premiers soins et à adopter des règles de comportement simples en situation d�urgence. Les médias doivent recevoir la consigne de ne pas communiquer d�informations non coordonnées aÞ n d�éviter toute désinformation ou mouvement de panique de masse. Il est urgent d�agir, particulièrement à la lumière du changement d�attitude adopté par les services de sécurité vis-à-vis des attentats terroristes. En bref, la préparation et les exercices sont plus que nécessaires et doivent s�accompagner d�actions de prévention.

3.2.3 La gestion de crise en Pologne : la pertinence du niveau régional 58

Il existe de nombreuses réglementations en Pologne qui obligent les organes publics, les institutions et les entreprises à élaborer divers plans d�intervention aÞ n de faire face à des situations potentielles ou les biens, la santé et la vie humaines sont en danger. La planiÞ cation de la sécurité publique au niveau national, au sein des Voïvodies et des communautés locales (voir Tableau N°1) est une tâche complexe, comme le démontre le tableau ci-dessous. Le rôle des bureaux des Voïvodies (au plus bas échelon de l�administration gouvernementale centrale en Pologne59, situées au niveau régional) est essentiel à cet égard.

58 Ce chapitre est principalement inspire du discours de Grzegorz Kamienowski prononcé lors du séminaire Villes contre le Terrorisme de Katowice. Le rapport complet est disponible à l�adresse : http://www.fesu.org59 Seule l�administration locale et municipale fonctionne sous leur égide.

Page 58: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

57

Tableau n°1

Selon M. Kamienowski, Directeur du Centre de Gestion de Crise de Silésie, la création d�un système de gestion de crise efÞ cace et efÞ cient doit être fondée sur les principes suivants :

- la primauté de la structure territoriale,- le leadership et la responsabilité individuelle,- la gestion et la responsabilisation accrue des organes individuels exerçant le pouvoir de l�administration générale,- l�adéquation,- l�universalité,- l�élaboration d�un système de préparation civil distinct du système de préparation militaire, la compatibilité de la coopération entre ces deux systèmes devant être garantie par un individu.En analysant le principe de séparation du système de protection civile et

du système de protection militaire, il serait possible de penser qu�il s�agit d�une séparation formelle, dont la nature n�est pas totalement autonome et indépendante. Faisant partie intégrante du système global assurant la sécurité du pays, ces deux

Page 59: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

58

systèmes doivent conserver des liens fonctionnels entre eux. Cela implique la coopération entre certains organes et certaines structures de l�administration militaire et non militaire.

Il convient de souligner, au vu du périmètre de l�application pratique des réglementations juridiques en vigueur, qu�en Pologne un Voïvode dispose d�une documentation de planiÞ cation sur laquelle il s�appuie aÞ n de réaliser les tâches relatives à la gestion de crise en cas d�attentat terroriste. Cette documentation comprend :

1. Le �Plan Opérationnel de Fonctionnement de la Voïvodie�

L�objectif stratégique que la République de Pologne, dans le cadre de sa défense, est de maintenir des conditions sûres pour la protection des intérêts nationaux contre les crises extérieures et les menaces de guerre. L�un des facteurs contribuant à atteindre cet objectif est la planiÞ cation défensive, c�est-à-dire la déÞ nition de méthodes permettant aux organes de l�administration gouvernementale et locale de réaliser des tâches défensives et d�utiliser les forces et ressources nécessaires aÞ n de réaliser ces tâches, y compris la planiÞ cation opérationnelle et défensive.

2. Le �Système National de Gestion des Urgences et des Crises� (NSCE)

Le Système National de Gestion des Urgences et des Crises est une liste de procédures et d�actions mises en �uvre aÞ n de maintenir l�état de préparation général des forces militaires et civiles du pays et visant à garantir une protection efÞ cace contre les situations de crise, y compris la préparation à la mise en �uvre d�actions militaires.

3. Le �Plan d�Intervention en situation de Crise de la Voïvodie�

Le plan d�intervention en cas de crise spéciÞ e la liste des actions à mettre en �uvre en cas de catastrophes naturelles, notamment :

- les tâches relatives au suivi de la menace ; - l�équilibre des forces de secours et des ressources techniques nécessaires aÞ n d�évacuer les effets des menaces ; - les procédures de déclenchement des tâches comprises dans le plan et les principes de coopération, ainsi que les méthodes permettant de limiter l�ampleur des pertes et d�évacuer les effets des menaces60.

Comme le montre la présentation ci-dessus, le rôle de la Voïvodie revêt une importance stratégique dans la planiÞ cation de la gestion de crise et la réaction immédiate aux attaques terroristes dans la région.

60 § 9 alinéa 2 de la Réglementation du Conseil des Ministre date du 3 décembre 2002 concernant la méthode de création d�une équipe d�intervention municipale, de l�équipe d�intervention du poviat et de la voïvodie ainsi que l�équipe gouvernementale de coordination des situations de crises et leur fonctionnement (Journal OfÞ ciel 02.215.1818)

Page 60: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

59

Cependant, en cas d�attentat terroriste, les équipes de premiers secours en Pologne ne sont pas les unités régionales, mais les services de pompiers locaux, les services de répression et les équipes médicales d�urgence. Au fur et à mesure de la mise en �uvre des interventions, les services locaux de gestion des urgences et les services de santé contribuent à coordonner les services requis. Les obligations principales des services locaux, tels que les services de pompiers, de répression, les services locaux de gestion des urgences et les services de santé, doivent être minutieusement décrites dans leurs plans opérationnels d�urgence respectifs.

3.3 Mesures rétablissant la conÞ ance

La gestion du problème du terrorisme nécessite une double approche, reposant d�une part, sur une expertise théorique des groupes terroristes et de leurs méthodes et d�autre part, sur une approche de terrain pour valider cette connaissance technique. Ces deux sphères de compétences � théorique et pratique - sont en interaction et contribuent à l�élaboration d�une politique en matière de lutte antiterroriste.

Parmi les différents terrains d�expérimentation, celui relatif à la mise en place de mesures de conÞ ance constitue un des champs prioritaires pour les gouvernements et autorités locales, notamment lorsqu�il s�agit de développer le dialogue intercommunautaire. L�importance de cette question est une des conséquences des attentats (Madrid, Londres) et des tentatives d�attentats (Copenhague, Dortmund, Koblenz, Glasgow, Londres61) perpétrés sur le territoire européen et qui ont mis en exergue, l�appartenance religieuse des personnes impliquées. Car bien que la majorité des individus impliqués soient des ressortissants européens, en l�occurrence allemands et anglais, le caractère religieux des attentats (par leur revendication et leurs liens avec des réseaux existants) ont contraint les autorités politiques européennes à se pencher sur le renforcement du dialogue avec les communautés étrangères, au premier rang duquel, la communauté musulmane. Depuis les attaques menées sur le sol américain en septembre 2001, la médiatisation des protagonistes appartenant au réseau Al-Qaïda, a fait craindre un risque de stigmatisation par une partie de la population des musulmans dans la responsabilité des attentats. Ce constat oblige les responsables politiques européens à agir, d�une part pour éviter que des tensions naissent entre communautés et d�autre part, pour que les phénomènes de radicalisation de la violence ne soient pas assimilés au développement du terrorisme.

Le renforcement ou le développement du dialogue culturel avec la communauté musulmane constitue un des axes prioritaires de la lutte antiterroriste et une mesure importante pour développer sur le long terme, des mesures visant à consolider la conÞ ance entre les communautés au sein de la population.

61 A noter également l�arrestation de trois terroristes présumés le 4 septembre 2007 à Medebach-Oberschledorn, lesquels prévoyaient selon le procureur fédéral Monika Harms, des attentats à la voiture piégée contre des installations fréquentées par des Américains (discothèques, pubs et aéroports). Le matériel saisi correspondait à celui utilisé pour les attentats de Madrid et Londres. L�express, Allemagne: des terroristes prêts à agir, 5 septembre 2007 (http://www.lexpress.fr).

Page 61: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

60

3.3.1 Aux sources du phénomène de radicalisation de la violence : le cas de la communauté pakistanaise en Angleterre

La problématique de la radicalisation de la violence notamment chez les jeunes, est un phénomène préoccupant pour les autorités européennes et plus particulièrement lorsque cette violence possède une dimension religieuse. Le danger est d�analyser cette problématique exclusivement sous ce facteur religieux, en faisant abstraction du contexte socio-économique. A un moment où la communauté musulmane voit certains de ses ressortissants impliqués dans des attentats terroristes, il est important d�éviter tout risque d�amalgame entre une communauté et le risque terroriste, rendant d�autant plus important de se pencher sur les mécanismes conduisant à l�avènement de cette violence radicale.

La recherche menée par Asima Shaikh62 au sein de la communauté musulmane pakistanaise dans le sud-est de l�Angleterre porte précisément sur le phénomène de la radicalisation de la violence auprès des jeunes musulmans. Partant du constat que les autorités locales sont démunies face à cette question, elle s�est intéressée aux facteurs conduisant à l�augmentation de la religiosité et de la politisation auprès de jeunes musulmans et qui contribuent au développement de la radicalisation au sens large.

Les recherches menées jusqu�ici et auxquelles se réfère Asima Shaikh ont permis de mettre en évidence toute une série de facteurs et notamment : l�exclusion socio-économique, le conß it intergénérationnel, l�islamophobie locale et globale, la politique étrangère anglaise et américaine, la crise d�identité, l�endoctrinement mené par certains groupes de religieux radicaux. L�identiÞ cation de ces facteurs renvoie à cinq grands domaines de recherche, soit :

1) La dimension socio-économique ;2) Le leadership et la gouvernance ;3) La pratique de la religion ;4) Les proÞ ls des jeunes individus ;5) Elaboration d�un agenda pour prévenir la radicalisation de la violence.Sur la base de ces cinq domaines, la recherche conduite par Asima Shaikh s�est

articulée en deux parties ; la première partie identiÞ e les facteurs socio-économiques de la radicalisation de la violence alors que la seconde partie l�a conduite à étudier la communauté musulmane sur la base de l�ensemble des domaines identiÞ és. Les résultats de cette recherche sont très innovants en matière de lutte antiterroriste, puisqu�ils combinent des éléments d�ordre sociologique avec des aspects plus politiques et qui concernent les rapports entre les autorités politiques et musulmanes.

En matière socio-économique, la communauté pakistanaise fait face à différents niveaux de privation sur le plan local, qui ne sont pas sans conséquences sur les

62 Asima Shaikh, Local level research with muslim communities in towns in the south East of England, document présenté lors de la conférence Þ nale du projet CAT, Bruxelles, 10-11 septembre 2007.

Page 62: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

61

jeunes et sur leur rapport à la violence. Plus précisément, la combinaison entre un faible niveau d�études et un accès difÞ cile au marché du travail conduit à décourager la jeune génération et à nourrir un sentiment de désaffection vis-à-vis de leur engagement citoyen. Cette double expérience négative peut les amener à percevoir une forme de racisme institutionnel. Ce sentiment de mise à l�écart n�est pas propre à une communauté en particulier, et est susceptible de s�appliquer aux jeunes en général confrontés à ce même type de difÞ cultés. Le risque est que ce contexte les expose aux inß uences externes de gangs ou de groupes criminels. Cependant et en fonction de leur appartenance ethnique, raciale ou communautaire, ce rapport à la violence est articulé de façon différente, comme c�est le cas pour les ressortissants de la communauté pakistanaise, où la variable religieuse est, dans ce contexte, importante.

Toutefois, il est essentiel de préciser que la privation économique et éducative n�est pas le seul facteur explicatif du phénomène de la radicalisation des jeunes et leur participation à des actions de violence politique en relation avec le terrorisme. Asima Shaikh63 rappelle que les recherches menées sur cet aspect et en particulier sur le proÞ l socio-économique des poseurs de bombe, révèle des résultats contrastés. Premièrement, ceux dont les revendications nationalistes (Palestiniens du Hamas ou les Tigres Tamoul par exemple) s�inscrivent dans un combat plus global comme Al-Qaïda appartiennent à une classe moyenne-supérieure. Deuxièmement, d�autres recherches menées en Europe de l�Ouest auprès de poseurs de bombe originaires du Maghreb ont révélé à l�inverse du cas précédent, leur appartenance à la classe ouvrière. Si le proÞ l socio-économique des terroristes n�est donc pas la seule variable explicative, il indique cependant un sentiment d�appartenance communautaire très fort. En effet, dans le cas d�individus originaires de milieux favorisé, comment expliquer leur participation à des actes violents, voire meurtriers ? La perception par les jeunes d�un malaise au sein des de leur communauté, les amène à s�identiÞ er au problème posé même s�ils ne sont pas touchés directement. Cette solidarité avec d�autres musulmans de leur communauté démontre que les seuls facteurs socio-économiques doivent être combinés avec une approche centrée sur l�identité et le sentiment d�appartenance, aÞ n de comprendre la frustration et les revendications exprimées par certains musulmans pakistanais provenant de milieux favorisés.

Les jeunes Pakistanais britanniques de la 2ème et 3ème génération semblent précisément faire face à une crise identitaire, conséquence du double phénomène socio-économique et éducatif que nous avons souligné précédemment. Cette crise peut s�illustrer par l�utilisation du qualiÞ catif de �Paki� parfois employé par de jeunes Anglais pour interpeller des Pakistanais. L�usage de ce terme suggère en réalité qu�ils ne sont plus vraiment anglais et que leur seul référentiel communautaire est celui d�être musulman. Le sentiment d�appartenance à la communauté musulmane ou à un autre groupe (gang par exemple) devient la réponse à la quête identitaire

63 Asima Shaikh, op. cit., p.5.

Page 63: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

62

et ce dans des proportions d�autant plus forte, que la perception d�être en marge de la société grandit. En d�autres termes, et pour les jeunes Pakistanais ayant fait partie de l�échantillon étudié, c�est la religion et non leur origine d�Asie du Sud qui représente le véhicule devant les conduire à développer leur identité, du moment où leur nationalité britannique est remise en cause par autrui. Cela signiÞ e que d�autres véhicules identitaires comme des bandes organisées ou des gangs, assument également cette fonction.

Précisément, la perte de l�identité nationale est un argument récurrent dans le discours des nationalistes. Comme l�a souligné Christina Schori Liang64, un parallélisme existe entre les mouvements islamistes et nationalistes car ils partagent une vision commune du proÞ l de l�ennemi : antiaméricain, antisioniste, anti-mondialisation. De ce constat, des pratiques communes pourraient donc émerger, et donner naissance à un �pacte infernal� entre acteurs à l�opposé sur l�échiquier des valeurs, mais partageant une même vision du pire.

La jeune génération de musulmans et en parallèle, de jeunes occidentaux chrétiens est donc devenue une cible toute désignée des groupes islamistes radicaux pour l�une et des nationalistes pour l�autre. Ainsi, et malgré les efforts consentis par de jeunes musulmans anglais, français ou allemands pour être socialement intégrés, certains ne leur concèdent pas ce statut social. Cette situation génère un ressentiment envers la société occidentale, que cherchent à instrumentaliser les groupes radicaux pour promouvoir et diffuser une approche intégriste de l�Islam. Un indicateur de cette radicalisation est le fait de voir certains membres de cette jeune génération reprocher à leurs parents une pratique de l�Islam jugée trop conciliante avec les valeurs occidentales d�une part, et encore trop marquées par des pratiques culturelles et traditionnelles en provenance de leur pays d�origine d�autre part65. Car cette vision de l�Islam préconisée par ces jeunes musulmans est de se détacher de toute inß uence même culturelle pour promouvoir une conception universelle de la foi.

En suivant un Islam différent de celui de leurs parents, les jeunes Pakistanais désertent les mosquées traditionnellement fréquentées par la communauté musulmane au proÞ t de mosquées alternatives au discours radical, où l�accent est mis sur l�Islam politique et non sur l�Islam religieux. Quant au recrutement, il s�effectue dans des milieux plutôt défavorisés mais aussi au sein même de structures étatiques comme les prisons. Le fait que les prisonniers puissent dans certains cas, se regrouper par ethnie ou confession, constitue un terreau favorable pour convertir ou amener certains jeunes sur le chemin de l�Islam radical.

La radicalisation des jeunes est un processus connu ce qui soulève toute une série de questions quant au rôle des parents et des autorités en termes de prévention. 64 Christina Schori Liang, From Nationalism to International Terrorism: A New Threat for the City ?, document présenté lors de la conférence Þ nale du projet CAT, Bruxelles, 10-11 septembre 2007.65 Asima Shaikh, op. cit., p.7.

Page 64: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

63

L�étude d�Asima Shaikh révèle précisément une rupture générationnelle entre parents et enfants. En effet, le style de vie des parents contraste avec celui de leur progéniture, car il est encore marqué par le référentiel culturel de leur pays d�origine. Ce décalage conduit les parents à une forme de déni de la réalité, face aux dangers que représentent la criminalité et le traÞ c de drogue. Ces problèmes sont considérés comme tabous, rendant impossible toute politique de prévention parentale, laquelle est en réalité laissée aux représentants de la communauté religieuse au sein de la Mosquée.

La fonction des leaders religieux est donc sujette à débat et notamment le fonctionnement de la communauté elle-même. Les critiques soulevées au sein de la communauté pakistanaise à l�égard de leur représentant portent sur une vision conservatrice culturellement encore enracinée au Pakistan plutôt que de prendre en considération les enjeux locaux. A cela s�ajoute un élément de politique interne, car pour que les leaders locaux puissent conserver leur position, ils maintiennent une ligne religieuse volontairement traditionnelle basée sur celle de leurs représentants sur le plan national. Par conséquent, les leaders religieux sur le plan local se préoccupent davantage de la situation des habitants des villages au Cashmere que des membres de la communauté pakistanaise locale. Le décalage avec les aspirations des jeunes Pakistanais s�en trouve renforcé.

Dans ce contexte, le rôle des autorités locales apparaît primordial pour prévenir la radicalisation des jeunes musulmans. Selon Asima Shaikh, les tentatives d�instaurer un dialogue communautaire ont produit l�effet inverse, en accentuant le sentiment de victimes des ressortissants de la communauté musulmane. Bien que les facteurs de la radicalisation aient été identiÞ és - éducation, contexte socio-économique - c�est principalement sur le niveau politique que le gouvernement s�est focalisé en se concentrant sur les enjeux idéologiques de l�Islam. Paradoxalement, c�est l�approche politique du gouvernement anglais et des autorités locales qui a fait prendre conscience à la communauté pakistanaise sa dimension politique. Pourtant, c�est sur d�autres plans que la radicalisation de la violence s�est construite et pour laquelle, les autorités locales n�ont pas encore donné de réponse satisfaisante.

Le phénomène de la radicalisation violente auprès des jeunes tel qu�il a été analysé par Asima Shaikh auprès de la communauté pakistanaise, révèle deux éléments essentiels. Premièrement, le fait que de plus en plus de jeunes Britanniques musulmans se tournant vers un Islam intégriste sont motivés par la recherche d�une identité. Cet Islam peut revêtir une dimension politique ou non politique, mais il n�est pas forcément radical. Deuxièmement, il existe au sein d�une frange radicale de la communauté musulmane, des islamistes qui tentent d�endoctriner de jeunes musulmans dont l�action à terme peut mener à des actions terroristes. En d�autres termes, il est important de distinguer ces deux processus, celui qui conduit les jeunes à l�Islam pour des raisons identitaires, de celui pratiqué par des extrémistes dans le but d�endoctriner de jeunes musulmans au proÞ t d�une pratique radicale de l�Islam.

Page 65: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

64

3.3.2 Coopération entre les minorités et la police : le cas des Musulmans en Allemagne

Nous avons eu l�occasion d�évoquer le cas des musulmans allemands dans la partie consacrée à la prévention, puisque le dialogue intercommunautaire est désormais un outil incontournable pour tenter de maintenir et de développer un lien entre la communauté musulmane et les autorités.

A l�inverse de l�exemple précédent et qui portait sur des musulmans pakistanais, la communauté des musulmans en Allemagne est composée majoritairement de ressortissants turques qui ont émigré dans les années 60 et 70. Aujourd�hui, cette communauté comprend 3.2 millions d�individus dont 500 000 personnes sont des ressortissants allemands. En tant que troisième religion en Allemagne, l�Islam s�est solidement implanté et a conduit à la construction de Mosquées et à la dispense de cours religieux auprès de la jeune génération de musulmans. La présence de cette importante communauté musulmane en Allemagne a soulevé, comme tout phénomène d�immigration de cette ampleur, quelques problèmes d�intégration, à l�image du débat soulevé par le port du foulard sur le lieu de travail par exemple.

Les attentats aux États-Unis, mais également en Europe à partir de 2001, ont mis en lumière la place des musulmans dans les sociétés européennes. Le débat a gagné en intensité pour se focaliser sur le dialogue communautaire entre les autorités et les musulmans. Ce dialogue revêt cependant un cadre différent selon qu�il s�agisse de l�Angleterre ou de l�Allemagne pour ne prendre que ces deux pays analysés dans le projet CAT.

Dans le cas anglais, la dimension sociale est en arrière-plan comme nous l�avons mentionné dans la partie précédente, au proÞ t d�une approche plus sécuritaire et plus politique du dialogue communautaire. L�élément central de toute tentative de dialogue est la conÞ ance entre partenaires, en l�occurrence entre les membres de la communauté pakistanaise et la police métropolitaine et les services de sécurité plus particulièrement. Selon Asima Shaikh, les relations entre ces protagonistes ont toujours été problématiques. La raison incombe au manque de conÞ ance réciproque que se voue représentants de la police métropolitaine et pakistanais. Pour ces derniers, la mauvaise connaissance du contexte socio-économique, culturel et religieux au sein de cette communauté combinée à des arrestations passées jugées comme injustes, ne permet pas d�offrir de cadre à l�intérieur duquel puisse s�installer un dialogue constructif. Dès lors, les informateurs potentiels hésitent à livrer des informations à la police et ce d�autant plus qu�ils ne se sentent pas protégés en retour, en cas de représailles en provenance de membres de leur communauté. Des initiatives ont précisément été prises dans ce sens. Ainsi, dans le comté de Somerset au sud-ouest de l�Angleterre, le projet Minority Faith Protective

Page 66: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

65

Security Initiative66, a cherché à mettre l�accent sur la protection des lieux de cultes des minorités répertoriées (mosquées et synagogues prioritairement). Ce programme prévoit par exemple d�affecter un policier au dialogue avec les représentants de ces communautés, aÞ n d�identiÞ er d�une part, les besoins de cette communauté sur le lieu de culte et le cas échéant faire le lien avec les agences locales spécialisées et d�autre part, d�anticiper toute source de conß it potentiel avec les autorités comme avec le reste de la population avec la création de postes mobiles pour recevoir et traiter les plaintes. L�objectif est de faire baisser la tension entre la population majoritaire et certaines communautés souvent stigmatisées, lors de nouveaux attentats sur le territoire anglais comme à l�étranger, tout en leur assurant une protection plus importante et qui soit visible pour la population. De cette façon, en garantissant une sécurité renforcée aux communautés minoritaires, ce programme espère pouvoir renforcer leur conÞ ance auprès des autorités.

La question de la conÞ ance est donc au centre du dialogue communautaire, d�où l�importance de la renforcer ou de tenter de la rétablir, comme c�est le cas auprès de la communauté pakistanaise en Angleterre. Sur ce point, les investigations menées en août 2006 par la police métropolitaine dans le contexte de la lutte antiterroriste auprès de cette communauté, n�a pas atténué ce sentiment de méÞ ance. Car même si le risque d�une action terroriste justiÞ e bien évidemment une démarche proactive de la part des forces de sécurité, Asima Shaikh estime que l�approche suivie à conforté l�idée selon laquelle tout musulman est un terroriste potentiel. Or, cela peut constituer une motivation supplémentaire auprès de certains jeunes membres de cette communauté, de choisir une voie plus radicale. Cette situation devient d�autant plus compliquée, que l�action de la police métropolitaine affecte la bonne image dont jouit en revanche la police locale auprès de cette communauté. De plus, sachant que la communauté d�Asie du sud n�a jamais par le passé, collaboré de façon régulière en particulier sur des affaires criminelles avec la police, l�établissement d�un dialogue communautaire s�avère compliqué à établir.

Selon Mounir Azzaoui67, le contexte allemand est totalement différent dans la mise en place du dialogue avec les autorités, même si l�impact de ses mesures auprès de la communauté musulmane, n�est pas sans évoquer le cas anglais. A l�origine, c�est à l�initiative des organisations musulmanes que le dialogue a été instauré. En réponse à leur demande de renforcer leur sécurité au sein de la société allemande, les services de sécurité fédéraux ont invité deux organisations à une table ronde en septembre 2005 : l�organisation turco-musulmane (Türkisch-Islamische Union der Anstalt für Religion) et le Conseil National des Musulmans d�Allemagne 66 Pete Nash et Dylan Aplin, Minority Faith Protective Initiative, document présenté lors du 1er séminaire du projet CAT, Université de Bristol, 28-29 septembre 2006.67 Il fut porte-parole du Conseil national des musulmans allemands jusqu�en décembre 2006 et est intervenu comme expert lors des conférences organisées dans le cadre du projet CAT (Tübingen et Bruxelles). Nous nous référons principalement au document suivant : Mounir Azzaoui, Vertrauensbildende Maßnahmen � Zusammenarbeit zwischen Muslimen und Sicherheitsbehörden in Deutschland , 4ème séminaire du projet CAT, Université de Tübingen, 27-28 novembre 2006.

Page 67: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

66

(Zentralrat der Muslime in Deutschland, ZMD). Cette réunion a permis la création d�un groupe de travail sur �la mise en place de mesures de conÞ ance� articulé autour de 5 axes avec une orientation tournée vers la pratique :

1. nommer des personnes de contact au service des musulmans et des services de sécurité, aÞ n de faciliter la mise en place des mesures de conÞ ance et l�organisation des activités entre eux.2. favoriser le dialogue et la communication pour diffuser les objectifs des services de sécurité auprès de la communauté musulmane et réciproquement, permettre au service de sécurité de mieux connaître cette communauté par un échange d�informations.3. dans le prolongement du point précédent, diffuser auprès de la communauté musulmane les objectifs et moyens utilisés par les services de sécurité en matière de lutte antiterroriste et notamment sur l�Islam et le terrorisme, ainsi que des problèmes plus societaux comme la délinquance juvénile, le traÞ c de drogues et la violence dans le mariage. En parallèle, des informations sur l�Islam, la vie des musulmans en Allemagne et le travail des fédérations de musulmans doivent être distribuées au sein des services de sécurité.4. améliorer la formation des agents des services de sécurité sur l�Islam par la dispense de cours donnés par des scientiÞ ques musulmans.5. mise en place de numéros de téléphone assurant la conÞ dentialité des appels, aÞ n de permettre la transmission d�informations sensibles aÞ n de prévenir l�organisation d�attentats en Allemagne.Ces mesures très orientées vers la pratique apparaissent comme une réponse

possible aux problèmes soulevés par Asima Shaikh dans son étude, que ce soit par la mise en place d�un cadre pour favoriser le dialogue communautaire ou la diffusion d�information entre les partenaires pour améliorer la connaissance de l�autre. Elles portent sur un volet plus social et humain de la lutte antiterroriste qui complète par ailleurs l�action menée au sein du groupe de travail Sécurité et Islamisme, lancé la même année par le Ministre de l�Intérieur Wolfgang Schäuble68.

Toutefois, la mise en place de telles mesures a provoqué la méÞ ance d�une partie de la communauté musulmane à l�égard des autorités, car bien que ce dialogue ait été initié par des organisations musulmanes, le résultat Þ nal donne l�impression d�une stigmatisation, plutôt que d��uvrer à une meilleure intégration. Dans le cas allemand, le décalage semble surtout provenir entre la communauté musulmane et l�opinion publique pour qui, le simple fait d�être de confession musulmane, est susceptible vous rendre suspect. Dès lors et en complément aux moyens développés dans le domaine social et économique, il est nécessaire de renforcer la dimension culturelle de la politique de prévention. A ce titre, le concept de �dialogue des cultures�, tel que déÞ ni par Denis de Rougemont69 pourrait constituer une piste 68 Rapport du 4ème séminaire organisé dans le cadre du projet CAT, Université de Tübingen, 27-28 novembre 2006, p. 18.69 Denis de Rougemont, L�aventure occidentale de l�homme, Paris, Albin Michel, 1957.

Page 68: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

67

de réß exion salutaire pour promouvoir la compréhension la plus large possible, entre les grandes civilisations mondiales et notamment, entre le monde chrétien et musulman en Europe. L�objectif très sécuritaire qui domine aujourd�hui les initiatives politiques de dialogue avec la communauté musulmane doit avoir, parmi ses nombreuses balises, une balise culturelle. En effet, cela constitue une des seules garanties pour éviter les risques de discrimination et de stigmatisation de la communauté musulmane par le reste de la société. Par conséquent, c�est par la mise en place de mesures concrètes, comme celles Þ gurant au programme du groupe de travail allemand, que ce dialogue pourrait s�instaurer. Il s�agirait également d�un moyen pour atténuer la dimension émotionnelle forte qui caractérise la lutte antiterroriste et qui conduit à ne voir de solutions que dans la seule approche sécuritaire.

3.4 Le soutien aux victimes

Les victimes sont le visage de l�attentat, celles et ceux pour qui les souffrances physiques et psychologiques rappellent inlassablement aux autorités politiques, le besoin d�intégrer la dimension humaine dans la lutte antiterroriste. Cela concerne autant la politique préventive comme le dialogue communautaire que la période à court et long terme qui suit l�attentat, par un soutien aux victimes. La très forte médiatisation du problème du terrorisme, conséquence des attentats et des tentatives d�attentats sur le sol américain et européen depuis 2001, a suscité la condamnation internationale en rappelant qu�aucun motif d�ordre politique ou idéologique ne permet d�excuser ou de pardonner une action terroriste. Ces événements ont remis en lumière la question de l�aide aux victimes et de leur statut au sein des ordres juridiques nationaux et internationaux. Ainsi, dans le concert des condamnations unanimes du terrorisme, le Conseil européen de l�Union européenne a proposé, après les attentats du 11 mars 2004 à Madrid, de faire de cette date, une journée commémorative en souvenir des victimes d�actes terroristes. Au-delà du symbole, le concept d�aide aux victimes doit aujourd�hui être repensé et développé en fonction des expériences passées et des caractéristiques du terrorisme moderne, dont les attentats de ce début de millénaire constituent un développement singulier.

3.4.1 Organiser l�aide aux victimes

L�élaboration d�une réponse adéquate aux victimes du terroriste nécessite préalablement de s�interroger sur le proÞ l des victimes. Dans le cadre de la recherche menée par Lina Kolesnikova70 et présentée au sein du projet CAT, trois types de victimes sont identiÞ és: victime primaire, secondaire et tertiaire. Cette catégorisation s�effectue en fonction de leur présence sur les lieux de l�attentat et des blessures (physiques ou psychologiques) occasionnées.

70 Lina Kolesnikova, Managing assistance to the Victims of Terrorist Act. The European experience, document présenté lors de la conférence Þ nale du projet CAT, Bruxelles, 10-11 septembre 2007.

Page 69: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

68

a. Les victimes primaires sont celles qui sont à proximité directe de l�attentat. Cela intègre les personnes mortellement blessées, les survivants physiquement touchés et les personnes ayant assistées à l�attentat. Ce groupe de victimes est en général très limité, sauf lorsqu�il s�agit d�attentats perpétrés sur une large échelle, comme ceux du 11 septembre 2001 par exemple.

b. Les victimes secondaires sont les personnes faisant partie de l�entourage immédiat des victimes primaires, que ce soit la famille, les amis, les collègues de travail et les connaissances proches. La violence inhérente à tout acte terroriste combiné à l�objectif de faire un maximum de victimes occasionne des troubles psychologiques auprès de ce cercle de proches, mais pas uniquement. Les acteurs de première ligne qui interviennent après un attentat (forces spéciales, police, pompier, militaire, personnel médical, secouristes, psychologues) subissent également un choc psychologique en secourant et organisant l�aide aux victimes. Les acteurs associatifs également impliqués dans les secours (Croix-Rouge par exemple) appartiennent aussi à cette catégorie.

c. Les victimes tertiaires, de loin la catégorie la plus nombreuse, sont tous les individus qui se sentent directement touchés par les attentats, alors même qu�ils n�étaient pas présents sur les lieux, ni même dans la ville ou le pays visé. La médiatisation de l�attentat par ailleurs recherchée par les terroristes, a suscité un sentiment de solidarité envers les victimes mais aussi d�identiÞ cation, comme l�illustre pleinement les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis. La condamnation unanime par une grande partie de la communauté internationale, combiné à l�expression d�une empathie collective pour ces événements tragiques a contribué au développement de ce processus d�identiÞ cation. Un quotidien français l�a exprimé de façon plus explicite: �Nous sommes tous Américains�71. Le caractère spectaculaire de ces attaques que ce soit par le nombre de victimes et les dégâts occasionnés, peut aussi amener les victimes tertiaires à souffrir comme des victimes primaires et secondaires, ce qui peut nécessiter une prise en charge médicale et psychologique. La crainte d�un nouvel attentat peut générer un état de stress auprès de la population, justiÞ ant ce statut de victime tertiaire. C�est, et il faut le rappeler, un des objectifs des terroristes : diffuser au sein de la société un sentiment d�insécurité conduisant à changer le mode de vie de la population. D�une certaine façon, les victimes tertiaires sont les catalyseurs involontaires des transformations sociétales visées par les terroristes.

La variable temporelle est un autre paramètre de l�équation en matière d�aide aux victimes, car la réponse à une attaque terroriste comporte différents processus d�action, que l�on peut identiÞ er en trois groupes :

1. le premier groupe de processus s�inscrit dans l�immédiateté et concerne la phase avant et pendant l�attentat, jusqu�à l�arrivée des premiers secours;

71 Jean-Marie Colombani, Nous sommes tous Américains, Le Monde, 13 septembre 2001.

Page 70: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

69

2. le second groupe s�inscrit dans le court terme et porte sur la phase après l�attaque, avec l�arrivée des équipes de secours sur zone pour commencer à soigner et évacuer les blessés vers les hôpitaux ;

3. le troisième groupe de processus porte sur le long terme et vise d�une part, à prendre en charge les personnes ayant subi des traumatismes suite aux attaques, et d�autre part à adapter si nécessaire le cadre général de l�aide aux victimes sur la base de la gestion de l�attentat.

Ce cadre général permet de préciser les acteurs et le type de processus généré dans le cadre d�une attaque en matière d�aide aux victimes. La combinaison de ces éléments permet d�aboutir à un scénario général tenant compte de tous ces éléments et qui s�articule prioritairement autour de la variable temporelle puis en fonction du proÞ l des victimes.

A : Avant l�événement

Cette étape est celle de la prévention pour les autorités ; il s�agit de réduire le risque d�un attentat terroriste par le biais de politiques préventives auprès des populations mais aussi d�anticiper ce risque pour les acteurs de première ligne, en testant la planiÞ cation et les protocoles de gestion de crise.

B : Réponse immédiate sur le lieu de l�attentat

La majorité des attaques terroristes sont imprévisibles et il n�est pas facile de donner une réponse adéquate à un attentat, dans la mesure où la durée et le type d�attaque n�est pas toujours connue. Le cas d�une prise d�otage ou d�un détournement d�avion par exemple, est cependant spéciÞ que, et peut suivre des protocoles bien établis. Dans le cas d�une prise d�otages, il est par exemple nécessaire d�assurer l�approvisionnement des équipes sur place (eau, nourriture et médicaments entre autres) et ne pas transmettre d�informations sensibles sur les otages (confession, nationalité et fonction principalement). Cette étape marquée du sceau de l�immédiateté comporte 4 types de victimes que nous présentons brièvement.

1. Les témoins et les personnes sur place doivent être évacués (en fonction du type d�attentat) et éventuellement faire l�objet d�une assistance médicale et psychologique. Un minium d�information sur l�opération en cours est diffusée, aÞ n d�éviter toute forme de spéculation.

2. La famille et les proches sont informés dans la mesure du possible si un des leurs a été blessé dans l�attentat. Le soutien psychologique et médical est absolument nécessaire. Si la situation d�urgence se prolonge, comme dans le cas d�une prise d�otage, les familles doivent être divisées en petits groupes et encadrées par un psychologue, aÞ n d�éviter un phénomène d�attroupement sur le théâtre des opérations. Pour les autorités locales, cela signiÞ e qu�il faut anticiper sur le

Page 71: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

70

nombre de collaborateurs pour répondre à cette exigence. Cette infrastructure doit aussi être envisagée pour un cercle de connaissances plus vaste (collègues, voisins, amis). Dans ce cas, c�est par le biais d�un réseau de communication et d�un numéro téléphonique d�urgence plus particulièrement, que des informations sont transmises sur les événements en cours. Une assistance psychologique par téléphone est également souhaitable pour ce cercle de connaissances.

3. Les acteurs de premières lignes et les professionnels engagés comme les ONG, doivent être parfaitement informés de la situation et prêt à anticiper toute demande supplémentaire d�ordre médical et psychologique.

4. La population civile doit être tenue informée des événements en lui garantissant un accès à un dispositif d�information efÞ cace qui a été présenté lors de la phase préventive (ligne téléphonique par exemple). Cet élément est particulièrement important dans le cas d�une attaque biologique ou chimique, aÞ n d�éviter tout mouvement de panique.

C : Réponse en cas d�attaque (court terme)

Ce type d�attaque conduit à l�élaboration de deux plans d�action selon qu�il s�agit de victime primaire ou secondaire. Nous distinguons les deux cas.

1. Victimes primaires- traitement et évacuation sur place ;- diagnostic des blessés et médicalisation sur le site de l�attentat ;- tri et évacuation des blessés ;- hospitalisation des blessés puis sortie des blessés une fois le traitement appliqué (en fonction de l�état des victimes);- réhabilitation des victimes et des proches après les événements;- mise en place du programme de protection des témoins si nécessaire.

L�importance du soutien psychologique aux victimes primaires est essentiel car Lina Kolesnikova souligne que dans le cas de l�attaque au gaz Sarin par la secte �Aum Shinrikyo� dans le métro de Tokyo (20 mars 1995), le risque d�un traumatisme psychologiques était plus grand (80%) que celui des personnes effectivement contaminées (20%)72.

2. Victimes secondaires- diffuser de l�information sur le lieu et l�état des proches ;- déplacer sur le site de l�attentat si nécessaire ;- assurer l�intendance (couverture et nourriture) ;- rendre accessible les soins médicaux et l�assistance psychologique ;- offrir un soutien administratif et Þ nancier en cas de décès d�un des leurs;- offrir une assistance juridique et Þ nancière aux enfants devenus orphelins suite à l�attentat.

72 Lina Kolesnikova, op. cit., p.4.

Page 72: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

71

Dans le prolongement du protocole destiné aux victimes primaires, une cellule d�aide psychologique doit être mise sur pied pour les victimes secondaires, conÞ rmant une fois encore la nécessité d�avoir à toutes les étapes qui précèdent et qui suivent l�attentat, ce type de soutien. La réalisation de ces étapes nécessite de la part des autorités, de disposer d�une série d�informations comme le nombre de victimes, les contacts pour prévenir les proches, un historique du traitement suivi pendant et après l�attentat notamment. L�aide aux victimes primaires et secondaires est d�une extrême complexité car elle ne dépend pas seulement de l�impact de l�attentat sur la population (nombre de victimes) mais aussi du lieu (accès au site) et de la nature de l�attaque (conventionnelle, gaz, etc.). Mais la plus grande difÞ culté est d�offrir une réponse adéquate sur le long terme aux victimes primaires, aÞ n qu�elles puissent retrouver leur place au sein de la société.

D : Réponse sur le long terme (retour à la vie �normale�)

Les personnes ayant survécu à un attentat n�ont pas toutes les mêmes questions à adresser aux autorités, car elles n�ont pas les mêmes besoins. Pour certains, la réponse recherchée sera plutôt médicale en cas de traitement lourd, alors que pour d�autres elle sera sociale et psychologique comme pour des orphelins par exemple. Dans tous les cas cependant, les victimes continuent à s�interroger sur les motifs ayant amené des individus à perpétrer un attentat. Pour que ce processus de victimation cesse, les gouvernements pourraient rendre accessibles au grand public les informations - sauf celles qui relèvent de la sécurité nationale - relatives à ces attentats dans le cadre des enquêtes en cours.

Plus fondamentalement, il apparaît aujourd�hui nécessaire que toutes les victimes d�attentats puissent être regroupées au sein d�une même banque de données qui permettrait aux autorités nationales et locales de regrouper les services et les prestations qui leur sont destinées : aide juridique, Þ nancière, médicale et psychologique. Cette démarche soulève en réalité la question du statut des victimes d�actes terroristes, car la législation européenne est loin d�être homogène73.

3.4.2 Aide aux victimes : la réponse psychologique

L�action sur le long terme est certainement la composante la plus faible en matière d�aide aux victimes comme l�a souligné Anabela Rodrigues74, car il n�est pas toujours possible pour les autorités de connaître les victimes d�actes terroristes et surtout, la dimension médicale et psychologique n�intègre plus les dispositifs antiterroristes une fois l�urgence passée. Cet aspect est lié aux acteurs en charge de superviser l�aide aux victimes et qui sont principalement la police et les forces

73 Voir à ce sujet le document élaboré par le European Forum for Victim Services, regroupant 20 organisations de soutien aux victimes intitulé Declaration concerning the Victim Statute during the Mediation Process (http://www.euvictimservices.org).74 Anabela Rodrigues Victim�s right and restorative justice � A complex relationship, document présenté lors du 2ème séminaire du projet CAT, Université nouvelle de Lisbone/Université Atlantique, Lisbonne, 26-27 octobre 2006.

Page 73: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

72

spéciales. La gestion médicale et psychologique des victimes d�actes terroristes n�apparaît alors plus comme une de leurs compétences et ce d�autant plus que la période pris en compte est le long terme. Ainsi, l�action en faveur des victimes d�actes terroristes sur le long terme est déconnectée du dispositif général en matière de lutte antiterroriste.

Toutefois, l�exemple donné par la Garde Nationale Républicaine portugaise (GNR), constitue un exemple intéressant d�une force militaire ayant intégrée, à côté de ces missions de protection et de défense des citoyens, une activité de soutien psychologique. Comme le rappellent Galvão da Silva et Bruno Brito75, la gestion des accidents critiques à l�origine ne disposait pas d�un cadre spéciÞ que et les missions n�étaient pas conduites par des professionnels. Bien que l�émergence d�une menace terroriste sur le continent européen n�est pas nouvelle, les attentats aux États-Unis ont favorisé la création d�un département en charge précisément de la gestion des incidents critiques. Cette création institutionnelle a favorisé la mise à disposition de ressources provenant d�autres unités administratives et plus particulièrement de la GNR et dont les compétences portent sur différents domaines : soutien psychologique, services sociaux, assistance religieuse, relations publiques, média, gestion et coordination en cas d�incidents critiques.

Le rôle des forces de sécurité dans le domaine du soutien pédagogique est un enjeu important, car elles sont souvent le premier acteur en contact direct avec les victimes sur le lieu de l�attentat. Cette présence ne limite pas toute forme de coopération avec d�autres acteurs, bien au contraire. La recherche menée par Galvão da Silva et Bruno Brito (coordinateurs d�un autre projet Þ nance sous la même ligne budgétaire) précise que les attentats terroristes sont abordés de la même façon qu�une catastrophe naturelle, dans la mesure où la réponse donnée par les autorités nécessite une mobilisation humaine et technique très proche. Ainsi, les agents de sécurité et de premiers secours ont adopté des protocoles de coopération impliquant plusieurs institutions. Ce nouveau paradigme déÞ ni et adopté par le service général de sécurité et d�urgence aux États-Unis a été repris dans la législation portugaise. Or, un des éléments de ce nouveau paradigme est précisément le soutien et la protection aux victimes. Le rôle du GNR dans ce domaine couvre les domaines d�action évoquée par Lina Kolesnikova et notamment : l�évacuation et la protection des victimes ; la mise en contact avec leurs proches ; la gestion des informations concernant les blessés et les disparus avec la famille ; le soutien psychologique direct aux victimes, ou indirectement en coordonnant le travail d�équipes de psychologues.

75 Galvão da Silva et Bruno Brito Victims of Terrorism: the Psychosocial Response of the Security Forces, résumé du projet Þ nancé sous la même ligne budgétaire, Victimes des Actes Terroristes, 2005, DG Justice, Liberté et Sécurité et présenté lors de la conférence Þ nale du projet CAT, Bruxelles,10-11 septembre 2007.

Page 74: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

73

Le modèle de soutien psychologique mis en place par le GNR traduit une nouvelle approche plus réactive et surtout mieux intégrée à la chaîne de commandement mis en place en cas de gestion de catastrophes et d�attentats terroristes en particulier. Le gain se mesure en termes d�efÞ cacité sur le terrain mais aussi sous l�angle de la légitimité, en renforçant le lien entre les forces de sécurité et la population par cette aide directe apportée aux victimes. Toutefois, l�activité du GNR s�inscrit principalement dans le court terme et nécessiterait d�être développée sur le long terme, en assurant un suivi psychologique des victimes du terrorisme. Plus généralement, c�est effectivement à ce niveau que le travail le plus conséquent reste à faire, aÞ n que les victimes du terrorisme ne conservent pas intérieurement ce sentiment d�insécurité et d�angoisse.

Page 75: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

74

Page 76: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

75

4CONSÉQUENCES POUR LES

AUTORITÉS LOCALES

Page 77: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

76

4. CONSÉQUENCES POUR LES AUTORITÉS LOCALES

4.1 Lignes directrices pour un référentiel de formation

L�objectif de ce projet était initialement de poursuivre la réß exion sur la problématique du terrorisme pour les autorités locales et d�aboutir à l�élaboration d�un kit pédagogique, aÞ n de mettre en place une formation continue pour les acteurs de première ligne, les policiers et les travailleurs sociaux notamment. L�élaboration de lignes directrices plutôt que d�un canevas pédagogique se justiÞ e par l�extrême hétérogénéité des expériences au niveau local - quand elles existent - en matière de lutte antiterroriste. Ainsi, les mesures proposées se présentent comme les éléments d�un cadre général pouvant conduire à l�élaboration d�un programme de formation continue.

Nous avons conçu ce cadre avec quatre axes thématiques que nous considérons comme essentiels, précédés par un rappel du contexte dans lequel s�insère la problématique des villes contre le terrorisme. Chacun de ces axes thématiques se compose d�une présentation synthétique des enjeux, tels qu�ils ont été développés dans le cadre de ce rapport. Une série de questions directrices conclut ce programme potentiel, lesquelles peuvent être utilisées pour initier une séquence de formation continue et pour débattre et confronter les connaissances entre experts.

4.2 Axe introductif �Le terrorisme : du global au local�

► Pourquoi le niveau local est-il concerné par le terrorisme international ?Le terrorisme moderne a toujours revêtu une dimension internationale,

même lorsque les revendications étaient délimitées à un territoire (IRA, ETA). Le Þ nancement des activités terroristes au sens large (matériel, personnes) a souvent utilisé des réseaux Þ nanciers internationaux. La nouveauté introduite avec l�évolution actuelle du terrorisme moderne est sa caractéristique d�extraterritorialité. L�objectif n�est plus seulement un pays, un gouvernement ou des responsables politiques localisés à l�intérieur d�un territoire, mais un système de valeurs. Par conséquent, tout élément constitutif de ce système de valeurs, des individus aux réalisations humaines, devient une cible potentielle. Dans ce contexte, les villes et plus particulièrement celles dont les caractéristiques sont d�être cosmopolites ou au bénéÞ ce d�une fonction politique (capitales), sont particulièrement exposées. Cet élément se combine bien évidemment avec la politique étrangère menée par le gouvernement, avec comme effet de renforcer ou d�atténuer le degré de menace pour les autorités locales.

► Comment les villes font face à ces nouvelles formes de menaces ?La gestion de la menace terroriste au niveau local soulève toute une série de

questions d�ordre politique et technique.a) Les autorités sont-elles compétentes pour gérer politiquement cette menace ?Cette question porte sur la structure organisationnelle de l�État. Dans un État

fédéral, un poids important est donné aux autorités locales, sachant que l�unité locale

Page 78: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

77

peut prendre les aspects d�un Land (Allemagne) ou d�une Région (Belgique) alors que dans un État centralisé, il n�y a pas de modèle qui puisse s�appliquer en-dehors des prérogatives données aux capitales en général. Toutefois, les implications du terrorisme international au niveau local contribuent à faire progressivement évoluer cette équation, car l�échelon local est de fait connecté au dispositif international. Le renforcement de la coopération policière au niveau européen comme l�échange d�expertise en matière de politiques de prévention devrait contribuer à renforcer politiquement le rôle des autorités locales. Ceci est particulièrement vrai dans les rapports entre les autorités et les communautés étrangères où le niveau local reste le plus adapté politiquement, pour analyser l�importance du fait religieux chez les jeunes musulmans par exemple. Les autorités locales ont besoin d�un cadre légal à l�intérieur duquel doit être précisée leur action en matière de lutte antiterroriste. C�est aussi un moyen pour garantir l'efÞ cacité de leur action, en identiÞ ant précisément le rôle et les fonctions entre les acteurs et les différentes strates de l�État (national, local).

b) Les autorités sont-elles compétentes pour gérer techniquement cette menace ?La menace terroriste au niveau local a longtemps été abordée sous l�angle de

la prévention criminelle pour l�aspect individuel et de la protection civile pour les dégâts matériels. L�explosion d�un véhicule ou d�un immeuble ne permet pas dès l�origine de connaître son origine criminelle ou accidentelle, à moins d�une revendication immédiate, expliquant une approche dite conventionnelle. Dans ce cas, la gestion d�une menace terroriste apparaît comme le prolongement d�une gestion de crise liée à des événements naturels ou accidentels. Cependant, l�émergence d�un terrorisme moderne contraint désormais les autorités locales à faire évoluer l�ensemble de leur dispositif, que ce soit en termes de prévention ou d�aide aux victimes comme nous le verrons au point suivant. La gestion de cette menace n�est pas seulement dans le court terme, mais aussi dans le moyen et long terme, en offrant aux acteurs concernés des formations et aux autorités locales des moyens Þ nanciers.

Questions directrices:- Qu�est-ce que le terrorisme ?- Quelles sont les autorités impliquées dans la gestion d�une menace terroriste (court, moyen et long terme) ?- Quels sont les moyens à disposition en cas d�attaque terroriste (unités mobilisées, matériel)?- Quelles sont les dispositions légales en matière de lutte antiterroriste, quand elles existent ?- Selon vous, est-ce que les mesures antiterroristes sont sufÞ samment dissuasives ?

Page 79: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

78

4.3 Axe thématique I �Prévention et communication�

► Faut-il privilégier les politiques de prévention plutôt que la seule réaction à la menace terroriste ?La complémentarité entre une approche préventive (renseignement, inÞ ltration,

dialogue social et intercommunautaire) et réactive (contrôles et renforcement des mesures de protection des lieux sensibles- ambassades, aéroports, gares, bâtiments publics entre autre), est évidente et rendue nécessaire notamment, par la dimension sociale que revêt le problème du terrorisme aujourd�hui. Le fait de poser cette question permet de souligner cette évolution, celle où le tout-sécuritaire laisse désormais la place à une approche centrée plutôt sur les facteurs socio-économiques et religieux des individus impliqués dans les attentats terroristes. En d�autres termes, en rappelant le fait que les individus engagés dans des réseaux et des actions terroristes soient précisément des individus identiÞ ables et non un ennemi sans visage, justiÞ e le renforcement de l�approche préventive en complément à celle dite réactive. Cette évolution n�est pas sans soulever des problèmes de méthode. Le fait que les acteurs impliqués dans des actions terroristes aient des proÞ ls proches de ceux impliqués dans les phénomènes de violence urbaine peut conduire à réduire cette question à un problème de prévention criminelle. Or, l�existence de réseaux très structurés, l�utilisation de moyens techniques et Þ nanciers importants et surtout, la convergence de tous ces éléments vers un objectif Þ nal, soit la réalisation d�un attentat, nécessite une approche préventive différenciée. En outre, le fait que des individus soient prêts à sacriÞ er leur vie pour une cause, justiÞ e pour les autorités locales de se pencher sur les motifs de cet engagement. Ceci est d�autant plus important que le proÞ l des individus impliqués est très hétérogène, car l�élaboration d�un attentat nécessite des compétences complémentaires (recruteur, Þ nancier, planiÞ cateur, poseur de bombe). Dans cette perspective, les éléments constitutifs de cette politique de prévention sont d�ordre éducatif (encadrement scolaire et suivi ; respect des valeurs constitutives de l�État), mais aussi socio-économiques et politiques (intégration économique et politique dans la société ; instauration d�un dialogue intercommunautaire avec les autorités).

► Comment déÞ nir une stratégie de prévention au niveau local en matière de lutte antiterroriste ?La menace terroriste nécessite une approche globale dite à multi-niveaux où

l�ensemble des domaines clés doivent être interconnectés : prévention, gestion de crise, dialogue intercommunautaire et aide aux victimes. L�interconnexion de ces quatre piliers est une question centrale, qui nécessite au préalable un cadre légal précisant la mission de chacun des acteurs concernés et ce à chacun des niveaux de l�État: policiers (locaux, fédéraux, nationaux), secours (pompiers, médecins), psychologues et travailleurs sociaux notamment. Une fois les acteurs identiÞ és, la mission peut être déÞ nie précisément en tenant compte de la durée (terme court, moyen ou long) et de la spéciÞ cité de la menace (conventionnelle, chimique, biologique, nucléaire). Une fois ce cadre général posé, il est alors possible d�envisager pour chacun de ces quatre piliers, une stratégie.

Page 80: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

79

En termes de prévention, l�objectif est double : 1) il s�agit d�instaurer un dialogue permanent entre les autorités et les citoyens, en les informant régulièrement du niveau d�alerte, des protocoles d�aide et d�évacuation en cas d�attaque ; 2) il faut que la politique de prévention et celle de communication ne contribuent pas à renforcer un sentiment d�insécurité, mais au contraire à contenir un climat apaisé au sein de la communauté. Ce partenariat collaboratif entre les autorités et les citoyens est la clé de voûte de cette stratégie de prévention. La conséquence de cette stratégie coopérative est le renforcement du rôle des acteurs locaux sur le terrain et celui des polices locales notamment. AÞ n que la prévention au niveau local soit effective, le niveau local doit être renforcé de deux façons. Premièrement, il faut introduire ou développer la décentralisation aÞ n de reconnaître l�importance de l�échelon local dans le système de prévention du pays considéré en lui octroyant des compétences exclusives. Deuxièmement, l�implication des acteurs locaux doit s�accompagner d�un renforcement de leur pouvoir et notamment dans la prise de décision. La combinaison de ces deux éléments permet d�augmenter la responsabilité des acteurs et de facto leur degré d�implication que ce soit en matière de prévention ou de gestion de crise plus généralement. Cette reconnaissance formelle de leur fonction a aussi une implication sur le territoire local au sein duquel ils agissent, car ils deviennent plus visibles pour les citoyens et les représentants des communautés étrangères, favorisant ainsi le dialogue intercommunautaire.

► Quels sont les éléments constitutifs d�une politique de prévention ?La politique de prévention englobe des domaines aussi variés que la récolte

d�information, la diffusion d�information au grand public, la protection des bâtiments, le dialogue avec les citoyens et l�éducation. Ces deux derniers éléments constituent par ailleurs les plus récents pôles thématiques en matière de lutte antiterroriste et ce, plus particulièrement dans des sociétés multiculturelles. Bien que le multiculturalisme génère des éléments positifs, il peut aussi être source de tensions entre différents groupes ethniques, nationalistes ou religieux. Ces tensions peuvent être exacerbées par des problèmes socio-économiques, tel que le chômage, un haut niveau d�immigration, un faible niveau d�éducation et une méconnaissance de certaines valeurs et pratiques au sein de la société européenne. Le risque de marginalisation peut constituer un terreau favorable pour la diffusion de la propagande terroriste ou la mise en place des activités terroristes. Dans ce contexte, les outils empruntés à la prévention criminelle peuvent s�avérer utiles pour que les autorités locales puissent intégrer ou assimiler les immigrés et ce, selon une triple perspective : mise en place d�un processus d�intégration culturelle ; amélioration de la cohésion sociale ainsi que des relations intercommunautaires (apprendre à vivre ensemble) ; soutien des autorités sous la forme d�une médiation en cas de conß it intercommunautaire et mise en place de programmes de discrimination positive. L�éducation comme outil de prévention est dans ce cas un élément visant à faire partager et à échanger des expériences de vie, pour que les différences culturelles ne soient pas un détonateur, mais plutôt un liant entre les différentes communautés.

Page 81: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

80

Si le contact entre les autorités locales et ces communautés est essentiel au bon fonctionnement de cette politique préventive aux accents éducatifs, il est tout aussi important de pouvoir identiÞ er un leader au sein de celles-ci avec lequel les autorités seront en contact de façon régulière (voir axe thématique III).

► Comment les autorités doivent-elles communiquer sans favoriser un climat de peur dans la ville ?La communication sur les questions de sécurité et plus particulièrement lorsque

cela concerne le terrorisme est une tâche complexe, car l�information contient les germes propres à créer un climat de peur auprès de la population. Les appels au calme après l�explosion d�une bombe ou la transmission de consignes de sécurité dans un aéroport sont autant d�éléments qui peuvent générer une situation de stress ou de grande confusion pour les individus. Ces éléments peuvent encore s�accroître si la source comme le contenu du message sont discordants. Si le succès de la lutte contre le terrorisme dépend d�une excellente coordination entre le niveau local et national, mais aussi entre les communautés locales, la communication doit épouser ce même type de schéma. En effet, il est très important d�assurer l�existence d�un système d�information Þ able, c�est-à-dire qui permette à l�information de circuler auprès de tous les acteurs impliqués aÞ n de favoriser la coordination de leurs actions, que ce soit en matière de prévention, de gestion de crise ou pour le dialogue intercommunautaire. Car bien que le contenu de la communication varie en fonction du type d�action, la coordination entre les sources d�information est essentielle que ce soit pour les autorités locales ou la population.

Questions directrices:- Comment déÞ nir une �bonne� politique de prévention ? - Quel est le préalable à la déÞ nition d�une stratégie de prévention ?- Pourquoi faut-il renforcer le rôle des autorités locales en matière de politique préventive ? - Pourquoi le caractère multiculturel de nos sociétés renforce l�intérêt de la prévention ? - En quoi la prévention de la criminalité peut-elle être utile en matière de lutte antiterroriste ?- Quels sont les objectifs d�une politique de communication ?- Quelles sont les différences entre une communication préventive et en cas de gestion de crise ?- Selon vous, est-on bien informés des risques d�une menace terroriste ?- Que faut-il communiquer à la population sur le terrorisme ?

4.4 Axe thématique II �Gestion de crise�

► Est-ce que le terrorisme doit faire l�objet d�une gestion de crise spéciÞ que ?La notion de crise englobe toute une série de catastrophes, qu�elles soient d�origine

naturelle ou humaine, renvoyant aussi bien à des catastrophes environnementales

Page 82: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

81

qu�à des attentats terroristes. La gestion de crise a pour objectif de faire face à toute sorte de crise indépendamment de son origine, en mobilisant toute l�expertise humaine et technique nécessaire. Les attentats du 9 septembre 2001 sur le territoire américain, comme ceux du 11 mars 2004 à Madrid et des 7 et 21 juillet 2005 à Londres, ont fait de la question du terrorisme une question prioritaire de l�agenda politique international et national. La mise en lumière du problème du terrorisme qui n�est pas foncièrement nouvelle a conduit au développement et au renforcement des moyens de lutte antiterroriste dans tous les États européens.

Pour les autorités locales, la question posée est de savoir si la lutte antiterroriste bénéÞ cie d�une approche spéciÞ que ou si elle est intégrée à la gestion de crise en général. La plupart des organisations européennes et internationales ont tendance à faire la distinction entre le terrorisme et les autres types de crise, conduisant à des actions diversiÞ ées. En revanche, pour les autorités locales, c�est une question à la fois d�ordre politique et logistique. Sur le plan de la logistique, il est Þ nancièrement coûteux et administrativement complexe d�avoir un canevas d�intervention et de gestion spécialement destiné à la seule lutte antiterroriste. Dans la mesure où les bases de la politique antiterroriste proviennent de l�expertise acquise dans le domaine de la criminalité (pour la prévention) et la gestion de crise (planiÞ cation et logistique), la problématique terroriste est généralement intégrée au sein du dispositif existant.

La spéciÞ cité du terrorisme contemporain et notamment sa dimension globalisante, conduit au développement de nouvelles stratégies comme le renforcement de la coordination entre tous les acteurs impliqué dans la lutte. Politiquement, les autorités nationales comme locales, font face à un devoir de réaction pour montrer aux citoyens l�importance que revêt la lutte antiterroriste pour les politiques et surtout pour consolider leur légitimité auprès d�électeurs potentiels. Le traitement politique de la lutte antiterroriste pourrait alors donner à penser à une gestion séparée de ce type de conß it par rapport aux autres types de crise, alors que la pratique montre un développement certes spéciÞ que, mais à l�intérieur d�un cadre connu.

► Comment améliorer la gestion de crise en matière de lutte antiterroriste ?La gestion de crise s�effectue en fonction du canevas organisationnel de

chaque État et des compétences octroyées aux autorités locales, rendant difÞ cile l�élaboration d�un modèle européen. Toutefois, nous avons pu observer tout au long de ce projet un trait commun aux différents processus et agents impliqués dans la gestion de crise : la nécessité de développer la coordination entre chaque sphère de compétences d�une part, sur le plan horizontal et d�autre part, sur le plan vertical entre les différents niveaux de l�État (local, régional et national). Cependant la mise en place de cercles de coopération exige un cadre légal autorisant des transferts de compétences nécessaires au bon fonctionnement de l�ensemble.

Page 83: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

82

Le modèle anglais illustre parfaitement cette nouvelle exigence en matière de gestion de crise. Pendant longtemps, celui-ci a fonctionné sur la base d�une gestion dite d��urgence intégrée� (Integrated Emergency Management, IEM) chargée d�anticiper, d�évaluer, de prévenir, de répondre et de couvrir tous les types d�incidents. Ce modèle d�une essence plutôt dépendante des événements que proactive, a pu servir de plate-forme pour la mise en place dès 2004, d�une loi en matière d�incidents civils (Civil Contingencies Act). La particularité de ce nouveau cadre légal est de rendre obligatoire l�existence d�un plan de gestion de crise au niveau local. Jusqu�à présent, la gestion de crise portait principalement sur des actions de court terme, alors que désormais les autorités locales doivent également prendre en charge la gestion de crise selon une perspective de plus long terme. Concrètement, la majorité des plans de gestion de crise ont été revus, en mettant l�accent sur une approche dite de multi agences impliquant tous les acteurs de première ligne ou de première catégorie (selon la catégorisation anglaise) et de deuxième catégorie (unités de transport terrestre et aérien mais aussi la direction des services sanitaires). AÞ n de tester ce nouveau cadre, au centre duquel Þ gure l�approche multi-agences, des exercices sur le terrain ont été multipliés. Toutefois, cette nouvelle disposition n�a pas encore trouvé d�écho au niveau national puisqu�elle ne Þ gure pas dans le plan national de sécurité 2006-2009, lequel Þ xe les standards, les politiques et les objectifs pour les agences impliquées dans les politiques de sécurité. C�est donc aux autorités locales d�utiliser la loi en matière d�incidents civils de 2004, pour contribuer plus directement à la politique nationale de sécurité, par le biais d�échanges d�information et d�expertise notamment. Le rôle des autorités locales anglaises pourrait être prépondérant dans l�amélioration de la gestion de crise sur le plan national, ce qui n�est pas sans rappeler le cas allemand où le projet de prévention de la ville de Munich (BIRGIT) fut repris par les autres villes et Länder allemands.

L�approche multi-agences ou multi-unités, est une des caractéristiques du modèle de gestion de crise allemand. Cependant un rôle spéciÞ que est attribué à un acteur qui se déÞ nirait statutairement comme une ONG, mais dont l�action est dans ce contexte para-étatique : la Croix-Rouge. Contrairement à ses homologues européens, la Croix-Rouge allemande joue un rôle clé dans le dispositif de gestion de crise, conséquence de la réuniÞ cation allemande. La gestion générale des crises est assurée par les Länder selon une approche permettant de coordonner rapidement les services d�urgence médicale et les pompiers notamment. Ces services sont ensuite rattachés directement à la Croix-Rouge, lui conférant ainsi un poids important dans le dispositif. Face à l�avènement de la menace terroriste et des dégâts que pourraient occasionner certaines armes (biologiques, chimiques), les services de gestion de crise ont constaté un manque d�expertise. Par conséquent, et comme pour le cas anglais, des exercices sur le terrain sont nécessaires en mettant plus particulièrement l�accent sur la coordination entre les différentes unités intervenant dans la gestion de crise, des pompiers à la Croix-Rouge.

Page 84: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

83

Questions directrices:- Qu�est-ce que la gestion de crise ?- Quels sont les acteurs intervenant dans la gestion de crise ?- Quels sont les éléments clés pour assurer une gestion de crise efÞ cace ?- Est-ce que la gestion de crise dépend de l�organisation centralisée ou décentralisée de l�État? - Est-ce que les autorités locales doivent gérer de la même façon une crise urbaine conséquence d�une catastrophe environnementale qu�une attaque terroriste ?- Quels sont les points communs et les différences entre la gestion de crise en Allemagne et en Angleterre ?- Dans votre collectivité, en quoi consiste l�approche multi-agences ? - Selon vous, est-ce que la gestion de crise est sufÞ samment efÞ cace ?

4.5 Axe thématique III �Dialogue intercommunautaire�

► Pourquoi le dialogue intercommunautaire est-il un instrument important de la lutte antiterroriste ?

Les sociétés européennes sont devenues de plus en plus multiculturelles et le besoin de maintenir le lien entre les autorités et les différentes communautés étrangères est primordial pour garantir une certaines cohérence dans la société. Depuis la vague d�attentats suivant le 11 septembre 2001, la place des communautés étrangères est devenue une question sensible au fur et à mesure que la nationalité ou la confession des terroristes n�étaient respectivement pas européenne ou chrétienne. En parallèle, les revendications des groupes terroristes ont focalisé l�attention de l�opinion publique sur un conß it de valeurs, cristallisant le débat sur la question de l�appartenance à la communauté musulmane. AÞ n d�éviter tout amalgame possible entre les membres d�une communauté, musulmane en l�occurrence, et le problème du terrorisme, un des outils à disposition des autorités est le dialogue intercommunautaire. Par leur proximité avec les communautés étrangères, les autorités locales sont les acteurs clés du dialogue intercommunautaire.

Le problème est d�autant plus important que de jeunes musulmans sont de plus en plus sollicités pour pratiquer un islam intégriste, que certains voient comme les prémisses à des actions de violence radicale. Dans cette optique, il est essentiel d�identiÞ er les facteurs conduisant à ces deux processus distincts � intégrisme et violence radicale � avant de se pencher scrupuleusement sur leurs liens éventuels.

► Pourquoi les jeunes musulmans d�Europe sont-ils intéressés par un Islam plus conservateur ?En se basant sur le cas de la communauté pakistanaise dans le sud est de l�Angleterre,

on observe un contexte socio-économique défavorable pour la jeune génération et qui se traduit par une scolarisation insufÞ sante et un accès au monde du travail rendu d�autant plus difÞ cile. Ces éléments peuvent amener ces jeunes à nourrir un sentiment d�exclusion voire ressentir une forme de racisme institutionnel. Toutefois, le contexte

Page 85: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

84

socio-économique n�est pas la seule variable permettant d�expliquer pourquoi les jeunes seraient amenés à pratiquer un Islam intégriste. Un autre paramètre intervient et concerne l�identité même de ces jeunes Pakistanais. Ceux qui sont de nationalité anglaise souffrent de n�être pas perçus comme tels, ce qui les conduit à penser que seule leur identité de musulman ne peut pas être contestée.

Le sentiment d�appartenance à un groupe est un élément important et plus particulièrement pour des jeunes qui se sentent exclus de la vie économique, culturelle et sociale de leur pays. Ce contexte n�explique pas pour autant leur passage à une pratique fondamentaliste de leur religion. Ils pourraient très bien se laisser tenter par des gangs ou des groupes criminels au sein desquels, leur identité pourrait être afÞ rmée.

Le processus les conduisant à embrasser une lecture fondamentaliste de l�Islam se produit par l�intermédiaire de membres de leur communauté, c�est-à-dire des Imams appartenant à un courant radical de l�Islam. Ainsi, de jeunes Britanniques d�origine pakistanaise vont pratiquer une lecture très conservatrice de l�Islam au point de reprocher à leurs propres parents, une approche encore trop empreinte de la culture et des pratiques de leur région d�origine ou d�accueil.

► Pourquoi, dans le cas de l�Angleterre, par exemple, les parents et la communauté musulmane pakistanaise sur le plan local ne réagissent-ils pas face à la radicalisation des jeunes ?

Politiquement, la communauté musulmane pakistanaise est régie localement par des leaders qui préservent la ligne conservatrice développée par les leaders nationaux, aÞ n de conserver leur position. Concrètement, leur action reste principalement orientée vers l�extérieur, par la mise en place d�actions au Pakistan plutôt que vers les membres de leur communauté vivant en Angleterre. Cette situation produit un décalage entre les besoins et les problèmes réels de la jeune génération et l�écoute promulguée par les leaders de leur communauté. Sur le plan familial, ce décalage s�opère de la même façon rendant d�autant plus difÞ cile le dialogue entre les jeunes de la 2ème et 3ème génération avec leurs parents. Face aux problèmes de délinquance, drogue et criminalité, les parents laissent aux représentants de leur communauté le soin de se charger de la prévention, sachant que pour eux, cela reste une question taboue.

Toutefois, en épousant les thèses d�un Islam conservateur, les jeunes n�en deviennent pas des terroristes pour autant. La défense de leurs valeurs par une action violente comme l�organisation d�un attentat terroriste, n�a pas de lien avec le processus d�islamisation en soi.

► Quels rôles pour les autorités locales ?Le phénomène de la radicalisation auprès des jeunes est une préoccupation

majeure des services de sécurité anglais et plus particulièrement depuis les attentats et les tentatives d�attentats sur le sol anglais. Cependant, le manque de conÞ ance entre la police métropolitaine (et non locale) et la communauté pakistanaise rend

Page 86: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

85

difÞ cile toute tentative dialogue. A l�origine de cette difÞ culté de dialogue, il y a des investigations menées sur une large échelle par la police métropolitaine auprès de la communauté pakistanaise complétées par un manque de connaissance de cette même communauté et de l�Islam en particulier. Si les autorités locales sont peu actives sur cette question, laissant à l�échelon national cette compétence, des initiatives ont cependant été menées localement. Ainsi, dans le comté de Somerset au sud-ouest de l�Angleterre, le projet Minority Faith Protective Security Initiative, met l�accent sur la protection des lieux de culte des minorités répertoriées. Cependant, le rôle des autorités locales doit être développé en Angleterre aÞ n de permettre de véritablement initier un dialogue intercommunautaire avec la communauté pakistanaise.

En Allemagne, la situation est complètement différente, car le cadre d�un dialogue communautaire a été mis sur pied sur le plan fédéral et à l�initiative de deux associations musulmanes. C�est sous la forme d�un groupe de travail que différentes mesures ont été proposées et notamment : nommer des personnes de contact pour permettre de coordonner les futures activités entre les autorités et les communautés musulmanes ; améliorer la connaissance entre les partenaires en échangeant des informations (objectifs des services de sécurité, Islam). Si la création de ce groupe de travail peut jeter les bases d�un futur dialogue intracommunautaire, une certaine méÞ ance subsiste au sein la communauté musulmane. Elle craint que cette démarche ne renforce, plutôt qu�elle n�atténue la stigmatisation de la communauté musulmane.

Questions directrices:- Pourquoi le dialogue intercommunautaire est-il un outil incontournable de la lutte antiterroriste ?- Quels sont les problèmes auxquels font face les jeunes musulmans ?- Pourquoi sont-ils attirés par un Islam radical ?- Quelle est la réaction de la famille ? Des autorités religieuses ? Des autorités locales ?- Quelles sont les différences entre la pratique allemande et anglaise ?- Quelles sont les difÞ cultés pour les autorités locales d�établir un dialogue communautaire ? - Selon vous, est-ce que le dialogue intercommunautaire est efÞ cace ?

4.6 Axe thématique IV �Aide aux victimes�

► Quels sont les proÞ ls des victimes ?On distingue trois grandes catégories de victimes en fonction d�une part, de la

gravité de leurs blessures physiques et morales et d�autre part, de leur proximité avec l�attentat. La première catégorie, la moins nombreuse est constituée par les victimes primaires se trouvant à proximité directe de l�attentat, soit les personnes mortellement blessées, les survivants physiquement touchés et les personnes ayant

Page 87: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

86

assisté à l�attentat. Le second groupe, les victimes secondaires, est constitué de l�entourage immédiat des victimes primaires. EnÞ n le groupe le plus important est celui des victimes tertiaires, car il regroupe tous les individus qui se sentent directement touchés par les attentats, même s�ils n�étaient pas présents sur les lieux, que ce soit la conséquence du nombre important de victimes et/ou la forte médiatisation de l�attentat.

► Quelles sont les mesures à prendre ?La nature des mesures à prendre pour les victimes dépend de toute une série de

facteurs mais principalement du cadre temporel à l�intérieur duquel s�inscrit l�attentat. La gestion des victimes dans un attentat se découpe en 4 phases. La première phase est dite préventive, où les autorités diffusent les consignes de sécurité que ce soit vis-à-vis de la présence de colis suspects jusqu�aux protocoles d�évacuation d�un métro par exemple. La seconde phase porte sur l�attentat proprement dit et sur l�immédiateté des réponses à donner lorsque l�attentat n�est pas encore terminé. Des distinctions doivent être opérées en fonction de la nature de l�attentat. Pour une prise d�otage, des mesures précises peuvent être prises par rapport à la famille présente et aux équipes de sécurité par exemple. En revanche, lors d�une explosion ou l�effondrement d�une tour, les protocoles d�aide aux victimes sont plus difÞ ciles à respecter, car le théâtre des opérations n�est pas connu et maîtrisé. La troisième phase est limitée au court terme et concerne d�un côté l�identiÞ cation et l�évacuation des victimes primaires et de l�autre côté, le soutien et l�information aux victimes secondaires. Dès cet instant, le soutien psychologique à l�ensemble des catégories de victimes est crucial et se prolonge précisément dans la quatrième et dernière phase.

► Pourquoi le soutien psychologique est-il fondamental ?L�impact d�un attentat terroriste n�est pas seulement physique, mais aussi

psychologique. L�émotion suscitée par la mort de centaines de personne, la destruction de bâtiments qui dans certains cas sont le symbole de la société occidentale, peut conduire à une forte identiÞ cation à l�événement et générer du stress et un traumatisme important. Dans la lutte antiterroriste, les autorités cherchent à ce que les mesures de sécurité prises n�altèrent pas le mode de vie des gens et de ce fait, la population ne doit pas se faire le véhicule des peurs générées par les menaces de groupes terroristes. Dans ce contexte, le soutien psychologique est doublement important, d�une part pour le bien-être des personnes concernées et d�autre part, pour maintenir le sentiment d�insécurité au plus bas au sein de la population.

Paradoxalement, le soutien psychologique est très présent dans les premières phases de l�attentat, mais cette prestation n�est que rarement offerte par les autorités médicales à plus long terme. Effectivement, il manque fondamentalement une approche concertée de tous les acteurs quant au suivi des victimes. La création

Page 88: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

87

d�un statut de victimes dans les législations européennes, comme la mise en place d�une banque de données regroupant les victimes d�attentats terroristes sont autant d�outils contribuant à l�équilibre des victimes. Le soutien psychologique direct n�est pas sufÞ sant et il doit aussi intégrer le traitement juridique, politique et médiatique car tous ces éléments contribuent également au soutien psychologique et au retour des victimes d�actes terroristes à une vie normale.

Questions directrices:- Quels sont les différents types de victimes d�actes terroristes ?- Faut-il traiter différemment les victimes selon qu�il s�agit d�un acte terroriste ou d�une catastrophe naturelle ?- Quelles sont les différentes phases dans la gestion de l�attentat du point de vue des victimes ?- Quelles sont les mesures à prendre pour les victimes primaires et secondaires ?- Quelles sont les mesures à prendre pour les victimes tertiaires ?- Pourquoi le soutien psychologique est-il fondamental ?- Quelle place occupe la famille dans la gestion des victimes ?- Selon vous, est-ce que le soutien aux victimes est efÞ cace ?

Page 89: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

88

Page 90: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

89

5CONLUSIONS

Page 91: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

90

5. CONCLUSION

5.1 La lutte antiterroriste : un enjeu local

La problématique de la lutte contre le terrorisme au niveau local, telle qu�elle a été abordée dans le cadre du projet Les Villes Contre le Terrorisme, a soulevé deux problèmes importants auxquels nous nous sommes attelés préalablement à l�étude proprement dite. Le premier concerne la déÞ nition de l�échelon local, car la réalité européenne embrasse toute une série d�acteurs locaux dont les compétences, le statut, la dénomination varie fortement d�un État à l�autre. Il s�agit bien évidemment d�une conséquence de l�organisation politique interne de chaque État et l�hétérogénéité du contexte local a rendu difÞ cile toute approche comparative. Cependant, et à partir de chacune des situations analysées par les universités partenaires, des parallèles ont pu être établis, aÞ n de faire ressortir les enjeux mais aussi les éléments clés des politiques développées par les autorités locales dans chacun des quatre domaines de la lutte antiterroriste que sont la prévention, la communication, le dialogue communautaire et l�aide aux victimes. Loin de contribuer à l�émergence d�un modèle européen en matière de lutte antiterroriste sur le plan local, ces analyses se présentent avant tout comme des lignes directrices. L�absence d�approche comparée n�est pas seulement due à la difÞ culté de déÞ nir l�acteur local, mais également au caractère très novateur de cette problématique. De façon paradoxale, bien que le rôle des autorités locales dans la lutte antiterroriste apparaisse comme essentiel, c�est un sujet politiquement sensible, car il soulève des questions liées à l�organisation interne de l�État, en redéÞ nissant les relations entre le centre et la périphérie.

Cette considération d�ordre méthodologique nous a conduit à nous pencher sur un second problème, celui de la pertinence de l�acteur local et des villes en particulier, en matière de lutte antiterroriste. Depuis l�Antiquité, les villes jouissent d�un caractère cosmopolite et assurent pour les plus importantes d�entre elles, une fonction politique et économique parfois liée à la taille de leur population. Ces différentes caractéristiques font des villes des cibles de choix pour les terroristes, comme nous le rappelle Arnaud Blin. Mais la ville est également un lieu stratégique pour les terroristes eux-mêmes, car elle est une base favorable pour le recrutement de nouveaux membres, et constitue ainsi une plate-forme organisationnelle technique et Þ nancière pour mettre sur pied un attentat. De plus, la densité des grandes villes peut également offrir une stratégie de repli pour les groupes terroristes, comme l�illustre le repli du commando soupçonné d�avoir orchestré les attentats de Madrid en 2005 dans un immeuble madrilène, qu�ils ont par ailleurs fait exploser. EnÞ n, la reconnaissance de l�importance de l�acteur local dans la stratégie de lutte antiterroriste par des ONG comme le FESU, mais aussi des organisations internationales comme le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l�Europe, conforte l�idée selon laquelle les villes sont ou vont devenir des acteurs majeurs de la lutte antiterroriste. A cette composante politique s�ajoute un aspect symbolique lorsque des villes comme New York, Madrid ou Londres sont

Page 92: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

91

touchées par des attentats. Leur caractère cosmopolite, leur poids économique, culturel et désormais politique au côté des États, en font des symboles de cette lutte, nécessitant de repenser leur rôle au sein de la communauté internationale sur cette question.

La pertinence de l�acteur local dans la lutte antiterroriste est donc incontestable. Ce fut précisément l�un des objectifs du projet Villes contre le Terrorisme : identiÞ er d�une part, la fonction des acteurs locaux dans le contexte national, local et international et d�autre part, de proposer des pistes de réß exion pour développer leur action pour chacun des domaines retenus (pour mémoire : prévention, communication, gestion de crise, dialogue intercommunautaire et soutien aux victimes).

5.2 La reconnaissance de l�acteur local au niveau national

La reconnaissance tant sur le plan politique que théorique de l�acteur local comme acteur de la lutte antiterroriste, nécessite obligatoirement l�élaboration ou le renforcement d�un dispositif législatif sur le plan national et local, qui identiÞ e et déÞ nisse le rôle des acteurs locaux impliqués dans la lutte antiterroriste. L�exemple de l�Angleterre et de sa loi intitulée Civil Contingencies Act 2004 est une piste intéressante, car elle rend obligatoire l�existence d�un plan de gestion de crise au niveau local, incluant la menace terroriste. Toutefois, les conséquences qui conduisent à renforcer le poids de l�échelon local sont très importantes, car cela implique nécessairement de favoriser la décentralisation des processus décisionnels, ce qui n�est pas sans soulever des problèmes politiques importants, puisque chaque État repose sur une organisation politique spéciÞ que. Pour les États marqués par une forte centralisation du pouvoir, cette évolution prend alors des allures de révolution.

Précisément, l�évolution des législations nationales dans le sens d�une meilleure reconnaissance de l�échelon local est d�autant plus importante, que les expériences sur le terrain démontrent la nécessité de renforcer la coordination des actions d�une part, entre les autorités locales et nationale (dimension verticale) et d�autre part, entre les autorités locales (dimension horizontale). Ce dernier aspect est par ailleurs fondamental, notamment pour intégrer la prévention du terrorisme au sein de la stratégie locale de sécurité, comme c�est le cas dans le comté de Halton, au Nord Ouest de l�Angleterre, où un �partenariat collaboratif �, permet d�impliquer tous les acteurs locaux à l�élaboration de la stratégie locale de sécurité.

Le développement de cette coordination verticale et horizontale n�est à terme pas viable sans l�existence d�un cadre légal. Cet aspect se trouve renforcé par la nature même de l�approche antiterroriste que l�on peut qualiÞ er de multi-niveaux, car elle doit idéalement regrouper l�ensemble des acteurs concernés aux différents échelons de l�État, mais aussi intégré tous les domaines pertinents. Ainsi, cette exigence fonctionnelle doit obligatoirement s�accompagner d�un développement du dispositif législatif pour être effective.

Page 93: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

92

5.3 Les politiques de lutte antiterroriste sous le signe de la coordination

Les politiques analysées dans le cadre du projet Villes contre le terrorisme, couvrent quatre domaines prioritaires que sont la prévention et la communication, la gestion de crise, le dialogue intercommunautaire et le soutien aux victimes. Suite aux travaux menés par nos universités partenaires dans chacun des pays concernés il est apparu comme une évidence qu�il faille corréler l�ensemble de ces champs dans la mesure du possible. En effet, la gestion de crise doit intégrer la question du soutien aux victimes dans ses protocoles d�actions, alors que le dialogue intercommunautaire s�inscrit indiscutablement comme une politique de prévention. Une fois encore, la coordination entre tous les agents impliqués dans la lutte antiterrorisme vaut également pour les politiques antiterroristes.

La première d�entre-elle, la politique préventive constitue l�élément moteur de la lutte antiterroriste en Europe aujourd�hui, en complément des approches mettant davantage l�accent sur la sécurité. Cette évolution n�est pas nouvelle car elle traduit le besoin d�être au plus près des réseaux terroristes, en empruntant des outils à la prévention criminelle. Son inscription à l�agenda politique de façon plus explicite, démontre le besoin d�élargir la palette d�action pour prévenir une menace terroriste au caractère aussi imprévisible que complexe dans sa déÞ nition. En cherchant à mieux comprendre les causes du terrorisme, les autorités politiques sont contraintes de faire de l�échelon local un maillon essentiel dans la lutte antiterroriste, expliquant l�importance que revêt la prévention et le fait qu�il s�agisse d�une mesure de politique effective.

Dans l�arsenal des mesures préventives, il ressort un besoin de renforcer la dimension socio-culturelle, que ce soit pour mieux cerner et ce, malgré toutes les difÞ cultés que cela représentent, le proÞ l d�un terroriste, mais également dans la mise en place du dialogue communautaire. C�est particulièrement pertinent dans ce dernier cas et en particulier dans les relations entre les autorités locales et la communauté musulmane. Loin de stigmatiser cette communauté en particulier, le dialogue semble d�autant plus nécessaire, comme l�a montré Asima Shaikh dans sa recherche menée au sein de la communauté musulmane pakistanaise dans le sud-est de l�Angleterre sur le phénomène de la radicalisation de la violence auprès des jeunes musulmans. Son constat est sans appel : les autorités locales se sentent démunies pour tenter d�enrayer l�augmentation de la religiosité et de la politisation de ses jeunes musulmans et dont une des conséquences est le développement de la radicalisation violente au sens large. Les facteurs socio-économiques, autant que le conß it intergénérationnel, mêlés à une crise d�identité de cette jeune génération sont autant de facteurs expliquant ce phénomène.

Pour les autorités locales, le dialogue avec des membres et des représentants de la communauté musulmane est donc un enjeu déterminant. Il nécessite d�une part, le renforcement du pouvoir des autorités locales dans un souci d�efÞ cacité et de légitimité

Page 94: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

93

et d�autre part, une connaissance du monde musulman. Dans le premier cas, l�évolution du cadre législatif permet de reconnaître aux autorités locales cette compétence, ce qui leur confère la légitimité nécessaire pour instaurer et maintenir le dialogue avec les représentants de la communauté musulmane. Le second aspect est davantage une question d�expertise et nécessite la mise en place de modules de formation continue notamment pour les acteurs de première ligne en charge du dialogue communautaire. C�est précisément une des cinq mesures suggérées par le groupe de travail portant sur �la mise en place de mesures de conÞ ance� entre les autorités fédérales allemandes d�une part et l�organisation turco-musulmane (Türkisch-Islamische Union der Anstalt für Religion) et le Conseil National des Musulmans d�Allemagne (Zentralrat der Muslime in Deutschland, ZMD) d�autre part.

La formation des agents ne doit pas se limiter au seul dialogue intercommunautaire, mais à l�ensemble des personnes impliquées dans la lutte antiterroriste, conformément aux lignes directrices déÞ nies dans le cadre de ce projet Villes contre le Terrorisme. L�amélioration de la formation des acteurs locaux impliqués dans la prévention, par exemple, doit porter à la fois sur le contexte socio-économique ainsi que sur les us et coutumes des communautés étrangères et notamment, celles de la communauté musulmane en particulier. La dispense de cours de formation continue aÞ n d�assurer une meilleure connaissance des enjeux géopolitiques liés au terrorisme semblent tout aussi nécessaire, même pour des agents locaux.

Dans ce contexte, un renforcement de la communication entre autorités locales et représentants des communautés étrangères, sous la forme d�un échange d�informations, est un élément incontournable. Pour les autorités policières locales, il pourrait s�agir d�un moyen de se rapprocher de certains groupes de population, pour qui la fonction policière est exclusivement répressive. Une meilleure communication de leurs objectifs et activités pourrait ainsi constituer le socle sur lequel viendrait se Þ xer le dialogue intercommunautaire, soulevant une fois encore la question de la coordination avec les autres agents en charge de ce dialogue.

Mais le domaine où la nécessité de développer la coordination entre chaque sphère de compétences apparaît de la façon la plus explicite, est très certainement la gestion de crise. L�autorité politique semble avoir pris la pleine mesure de cette évolution à l�image du modèle anglais. Celui-ci a fonctionné jusqu�à récemment sur la base d�une gestion dite d��urgence intégrée� (Integrated Emergency Management, IEM) de nature plutôt proactive, englobant tous les aspects de la gestion de crise pour tous les types d�incidents. Dès 2004, avec l�introduction de la loi en matière d�incidents civils (Civil Contengencies Act), la gestion de crise à permis d�intégrer une perspective à plus long terme et surtout, de mettre l�accent sur une approche dite multi-agences, impliquant tous les acteurs de première ligne. Bien que spéciÞ que à l�organisation administrative anglaise, il s�agit d�une piste à explorer pour d�autres autorités locales européennes, qui comme l�Allemagne ont

Page 95: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

94

déjà intégré ce modèle avec une spéciÞ cité pour cette dernière, un rôle particulier attribué à la Croix-Rouge allemande.

La différence principale qui est apparue entre les villes dans le cadre de cette recherche en matière de gestion de crise est très certainement la façon d�intégrer la menace terroriste aux dispositifs existants. Pour les villes bénéÞ ciant d�une expérience, conséquence d�attentats passés ou récents, le terrorisme est abordé de façon différenciée par rapport à une catastrophe d�origine naturelle, comme un tremblement de terre ou une inondation. Certes, la gestion d�un attentat terroriste ou d�une catastrophe fait appel à certaines compétences et protocoles identiques, mais des distinctions s�opèrent. Par exemple, en matière de soutien aux victimes, Lina Kolesnikova a montré l�importance d�offrir un soutien psychologique sur le court, moyen et long terme que ce soit aux victimes ayant directement été touchées par l�attentat, comme aux proches et moins proches de l�attentat. La prise en charge médicale et sociale des victimes sur une aussi longue période, implique un dispositif permettant de les identiÞ er et de les suivre localement. En d�autres termes, cela nécessite la création d�une base de données qui ne se limite pas au seul territoire national, mais à l�ensemble des États européens. Parallèlement, la création d�un statut juridique européen pour les victimes du terroriste, en complément des dispositions nationales - lorsqu�elles existent - , pourrait constituer un pas supplémentaire en direction d�une européanisation plus développée de la lutte antiterroriste. Ce processus pourrait s�accompagner aussi de la création d�un système européen de protection civile s�appuyant sur les structures existantes dans l�UE et la constitution d�un pôle d�experts européens disposés à soutenir les autorités locales dans la mise en place de leur dispositif de lutte antiterroriste.

5.4 Les villes, acteurs de la lutte antiterroriste sur le plan international

La grande nouveauté engendrée par le déÞ sécuritaire que constitue la lutte antiterroriste et sur lequel le projet Villes contre le Terrorisme s�est penché, se situe précisément à ce niveau, soit d�intégrer davantage la dimension locale dans les politiques nationales de lutte antiterroriste, au centre duquel les villes. Cette évolution pourrait conduire à une évolution majeure, en faisant des grandes capitales européennes un nouvel acteur du système international à l�image de la ville de New York, symbole autant que leader potentiel de la lutte antiterroriste contemporaine. En d�autres termes, l�enjeu porte désormais sur le rôle et la place des villes et notamment, au sein d�un système onusien forcément rénové.

Dans cette optique, l�élaboration d�une directive européenne renforçant le rôle des autorités locales en matière de lutte antiterroriste dans l�Union européenne, pourrait constituer une étape importante sur le chemin de la reconnaissance de l�acteur local comme étant incontournable à la lutte antiterroriste. A moins que ce soit aux villes elles-mêmes de s�approprier ce nouveau statut et de l�afÞ rmer au sein de la communauté internationale.

Page 96: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

95

6BIBLIOGRAPHIE

Page 97: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

96

6. BIBLIOGRAPHIE

SOURCES

Organisations européennesCONSEIL DE L�EUROPE, La lutte contre le terrorisme. Les normes du Conseil de l�Europe, Strasbourg, Editions du Conseil de l�Europe, 4ème édition, 2007.

CONSEIL DE L�EUROPE, Congrès des Pouvoirs locaux et Régionaux, Résolution 159 (2003) sur le traitement du terrorisme - rôle et responsabilités des autorités locales, Strasbourg, 2003.

CONSEIL DE L�EUROPE, Rapport de la Conférence mondiale pour la prévention des catastrophes naturelles, Convention sur les Risques Majeurs, AP/CAT, Strasbourg 2005

FORUM EUROPÉEN POUR LA SÉCURITÉ URBAINE, Saragossa Manifesto, document Þ nal de la Conférence de Saragosse Sécurité, démocratie, villes, 2-4 novembre 2006.

Sites internet BIBLIOTHÈQUE JEANNE HERSCH, Les instruments internationaux relatifs à la prévention et à la repression du terrorisme (http://www.aidh.org/Biblio/Txt_trait-terr/HP_trait-terr.htm).

CONFÉRENCE INTERNATIONALE DE JURISTES (http://www.icj.org).

CONSEIL DE L�EUROPE, Affaires juridiques, Comité d�Experts sur le Terrorisme (CODEXTER) (http://www.coe.int/t/f/affaires_juridiques/coop%C3%A9ration_juridique/Lutte_contre_le_terrorisme/).

DEUTSCHLAND, BUNDESKRIMINALAMT, Common Dialogue between Muslim Organisations and Security Authorities - Programme for ConÞ dence-Building Measures, 19 December 2005 (http://www.bka.de).

EUROPEAN FORUM FOR VICTIM SERVICES, Declaration concerning the Victim Statute during the Mediation Process (http://www.euvictimservices.org).

EUROPEAN UNION, Fighting against terrorism website (http://ec.europa.eu/justice_home/fsj/terrorism/fsj_terrorism_intro_en.htm).

FORUM EUROPÉEN POUR LA SÉCURITÉ URBAINE (http://www.fesu.org).

ORGANISATION DES NATIONS UNIES, Action de l�ONU contre le terrorisme (http://www.un.org/french/terrorism/index.shtml).

OTAN, Lutte contre le terrorisme (http://www.nato.int/issues/terrorism/index-fr.html).

UNITED KINGDOM RESILIENCE WEBSITE (http://www.ukresilience.info)

UNITED KINGDOM, OfÞ ce of Public Sector Information, Crime and Disorder Act 1998 (http://www.opsi.gov.uk).

UNITED KINGDOM, OfÞ ce of Public Sector Information, Prevention of Terrorism Act 2005 (http://www.opsi.gov.uk).

UNITED KINGDOM, National Counter Terrorism Security OfÞ ce (http://www.nactso.gov.uk).

Page 98: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

97

TRAVAUXRapports

BARCIK, Jacek, Report from the 3rd local seminar at The University of Silesia in Katowice, Cities against Terrorism Program, 13-14 November 2006.

KERNER, Hans-Jürgen, COESTER, Marc et BOTT, Klaus, How to deal with the terroriste threats ?, Report from the 4th local seminar at the University of Tübingen, Cities against Terrorism Program, 27-28 Novembre 2006.

LAYCOCK, Gloria, Working out what to do: Evidence-based crime reduction, Report produced in conjunction with the National Institute of Justice Washington D.C., Crime Reduction Research Series Paper 11, British Home OfÞ ce, 2002.

IMPACT, Community-based interventions. Working draft, Netherlands, 2006(http://www.impact-kenniscentrum.nl)

LOURENÇO, Nelson et FRIAS, Graça, Report from the 2nd local seminar at The University of SociNova and Universidade Atlântica in Lisbon, Cities against Terrorism Program, 26-27 October 2006.

SHAFTOE, Henry et TURKSEN, Umut, Report from the 1st local seminar at The University of the West of England in Bristol, Cities against Terrorism Program, 28-29 September 2006.

Monographies et ouvrages collectifsADAM, Alexandre, La lutte contre le terrorisme : étude comparative Union Européenne - Etats Unis, Paris, L�Harmattan, 2006.

ADDICOTT, Jeffrey F., Terrorism law : the rule of law and the war on terror, 2nd ed, Lawyers & Judges, 2004.

BANNELIER, Karine et al. (eds.), Le droit international face au terrorisme, Paris, Pedone, 2002.

BONO, Giovanna (ed.), The Impact of the 9/11 on European Foreign and Security Policy, Brussels, Brussels University Press, 2006.

BIANCHI, Andrea (ed.), Enforcing International Law Norms Against Terrorism, Oxford, Hart Publishing, 2004.

CAVALERI, David P., The law of war : can 20th century standards apply to the global war on terrorism ?, Combat Studies Institute Press, 2005.

CHADWICK, Elizabeth, Self-Determination, Terrorism and the International Humanitarian Law of Armed Conß ict, The Hague, Martinus Nijhoff, 1996.

COLE, David, Enemy Aliens : Double Standards and Constitutional Freedoms in the War on Terrorism, New York, New Press, 2005.

COMBS, Cindy, C., Terrorism in the twenty-Þ rst century, 3rd ed, Prentice Hall, 2003.

COOLEY, John, K., et SAID, Edward W., Unholy wars : Afghanistan, America and International Terrorism, 3rd ed., London, Pluto Press, 2002.

EVANS, Alona et, MURPHY, John (eds.), Legal Aspects of International Terrorism, Lexington MA, Lexington Books, 1978.

Page 99: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

98

FURET, François, LINIERS, Antoine et RAYNAUD, Philippe, Terrorisme et démocratie, Paris, Fayard, 1985.

HEERE, Wybo, P. (ed.), Terrorism and the Military : International Legal Implications, The Hague, T.M.C Asser Press, 2003.

HEYMANN, Philip, B., Terrorism and America : A Commonsense Strategy for a Democratic Society, Cambridge, Massachusetts, MIT Press, 1998.

HIGGINS, Rosalyn, et FLORY, Maurice (eds.), Terrorism and International Law, London, Routledge, 1997.

HOFFMAN, Bruce, Inside Terrorism, Columbia University Press, 2005.

HOGE, James, F. et ROSE, Gideon (eds), How Did This Happen ? Terrorism and the New War, New York , Public Affairs, 2001.

HOGE, James, F. et ROSE, Gideon (eds), Understanding the War on Terror, New York, Foreign Affairs/Council on Foreign Relations, distributed by W. W. Norton, 2005.

HUNTINGTON, Samuel, Clash of Civilizations and the Remaking of World Order, New York, Touchstone Publishing, 1996.

LAQUER, Walter, The age of terrorism, Boston, Little, Brown & Company, 1987.

LEWIS, Bernard. The Crisis of Islam : Holy War and Unholy Terror, New York, Random House, 2003.

MARTIN, Gus, Understanding Terrorism : Challenges, Perspectives, Issues, California, Sage Publications, 2003.

NANDA, Ved P. (ed.), Law in the war on international terrorism, Transnational, 2005.

NATIONAL COMMISSION ON TERRORIST ATTACKS, The 9/11 Commission Report, New York, W. W. Norton, 2004.

PAPE, Robert, Dying to Win : The Strategic Logic of Suicide Terrorism, New York, Random House Publishing, 2005.

RISEN, John, State of War : The Secret History of the CIA and the Bush Administration, New York, Free Press, 2006.

ROSAS, Allan, The legal status of prisoners of war : a study in international humanitarian law applicable in armed conß icts , Institute for Human Rights, Åbo Akademi University, 2005.

ROUGEMEONT, Denis de, L�aventure occidentale de l�homme, Paris, Albin Michel, 1957.

STERN, Jessica, Terror in the name in the God. Why religious militants kill, New York, HarperCollins Publishers, 2003.

VAN KRIEKEN, Peter (ed.), Terrorism and the International Legal Order : with special reference to the UN, the EU and cross-border aspects, The Hague, T.M.C. Asser Press, 1999.

WILKINSON, Paul, Terrorism versus Democracy. The Liberal State Response, Routledege, Londond and New York, 2006.

Page 100: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

99

WIPPMAN, David et EVANGELISTA, Matthew, New Wars, New Laws ? Applying the Laws of War in 21st Century Conß ict, New York, Transnational publishers, 2005.

WOLTON, Dominique, Sauver la communication, Paris, Flammarion, 2007.

ArticlesAZZAOUI, Mounir Vertrauensbildende Maßnahmen � Zusammenarbeit zwischen Muslimen und Sicherheitsbehörden in Deutschland, document présenté lors du 4ème séminaire à l�Université de Tübingen, projet Villes contre le Terrorisme , 27-28 Novembre 2006.

BARADELL, John et, INGLEDEW, Dean, Working together in partnership to prevent emergence of threat of terrorism, papier présenté lors du 1er séminaire à l�Université de West of England, projet Villes contre le terrorisme, Bristol 28-29 septembre 2006.

BLIN, Arnaud, Démocratie, urbanisation et terrorisme - ce que l�Histoire peut nous apprendre, document présenté lors de la conférence Þ nale du projet Villes contre le Terrorisme, Bruxelles, 10-11 septembre 2007.

BBC News, ProÞ le Suicide Bombers, site internet de BBC News, 30 avril 2007(http://www. news.bbc.co.uk).

BLUME-BEYERLE, WilÞ ed et STÖMER, Gottfried, Safety and order in the Þ eld of non-police danger prevention in the city (Munich), document présenté lors du 4ème séminaire à l�Université de Tübingen, projet Villes contre le Terrorisme , 27-28 Novembre 2006.

CASCIANI, Dominic, 21/7: Was it linked to 7/7 ?, BBC News, 11 July 2007(http://www.news.bbc.co.uk).

COLOMBANI, Jean-Marie, Nous sommes tous Américains, Le Monde, 13 septembre 2001.

ESPOSITO, Frédéric, Peur sur la ville : comment les autorités locales font face à la menace terroriste ?, Le Temps, 7 septembre 2007.

L�EXPRESS, Allemagne : des terroristes prêts à agir, 5 septembre 2007 (http://www.lexpress.fr).

FLYNN Richard, Simulation exercise - a terrorist attack in a crowed place, Þ lm présenté lors du 1er séminaire du projet CAT, Université de Bristol, 28-29 septembre 2006

GREER, Alan, Northern Ireland: transferable lessons for dealing with other terrorist situations, document présenté lors du 1er séminaire à l�Université de West of England, projet Villes contre le Terrorisme, Bristol 28-29 septembre 2006.

JASCH, Hans-Christian, State-Dialogue with Muslim Communities in Italy and Germany - The Political Context and the Legal Frameworks for Dialogue with Islamic Faith Communities in Both Countries, German Law Journal, No. 4, April 2007 (http://www.germanlawjournal.com/article.php?id=812).

KAMIENOWSKI, Grzegorz, Crisis managment and communication network , document présenté lors du 3ème séminaire à l�Université de Silésie, projet Villes contre le terrorisme, Katowice 13-14 Novembre 2006.

KOLESNIKOVA, Lina, Managing assistance to the Victims of Terrorist Act. The European experience, document présenté lors de la conférence Þ nale du projet Villes contre le Terrorisme, Bruxelles, 10-11 Septembre 2007.

Page 101: SÉCUCITÉS VILLES CONTRE LE TERRORISMEefus.eu/files/fileadmin/efus/secutopics/Villes_Contre_le... · 2010-08-03 · terroristes et contre les menaces faites à un style de vie dØmocratique

100

LIANG SCHORI, Christina, From Nationalism to International Terrorism: A New Threat for the City ?, document présenté lors de la conférence Þ nale du projet Villes contre le Terrorisme, Bruxelles, 10-11 Septembre 2007.

NASH, Pete et APLIN, Dylan, Minority Faith Protective Initiative, document présenté lors du 1er séminaire à l�Université de West of England, projet Villes contre le Terrorisme, Bristol 28-29 septembre 2006.

RIBEIRO, Manuel Joao, Le service national de protection civile et la gestion de crise, document présenté lors de la 2ème conférence du projet « Villes contre le Terrorisme, Lisbonne, 26-27 octobre 2006.

ROBERTS, Adam, The �War on Terror� in historical perspective, document présenté lors de la conférence Þ nale du projet Villes contre le Terrorisme, Bruxelles, 10-11 Septembre 2007.

RODRIGUES, Anabela, Victim�s right and restorative justice - A complex relationship, document présenté lors du 2ème séminaire à l�Université SociNova et Universidade Atlântica, projet Villes contre le Terrorisme, Lisbonne, 26-27 October 2006.

SALOMON, Jean-Claude, The Mind of the Terrorist, document présenté lors du 1er séminaire à l�Université de West of England, projet Villes contre le Terrorisme, Bristol 28-29 septembre 2006.

SHAIKH, Asima, Local level research with muslim communities in towns in the south East of England, document présenté lors de la conférence Þ nale du projet Villes contre le Terrorisme, Bruxelles, 10-11 Septembre 2007.

SILVA, Galvão da et BRITO, Bruno, Victims of Terrorism: the Psychosocial Response of the Security Forces, document présenté lors de la conférence Þ nale du projet Villes contre le terrorisme, Bruxelles, 10-11 Septembre 2007.

STÖRMER, Gerald, Police terrorism prevention in the state of Hesse on local level, document présenté lors du 4ème séminaire à l�Université de Tübingen, projet Villes contre le terrorisme, 27-28 Novembre 2006.

STRUTTON, John, The effects of the London bombings on transport safety, document présenté lors du 1er séminaire à l�Université de West of England, projet Villes contre le Terrorisme, Bristol 28-29 septembre 2006.

WEBSTER, Spencer, British Local Authorities experience at prevention of Terrorism, document présenté lors de la conférence Þ nale du projet Villes contre le Terrorisme, Bruxelles, 10-11 Septembre 2007.