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Num´ ero d’ordre : 74/1998 Universit´ e de Limoges TH ` ESE de Doctorat de l’Universit´ e de Limoges Sp´ ecialit´ e Math´ ematiques et Applications pr´ esent´ ee par Abdelkader Necer Suites r´ ecurrentes lin´ eaires et s´ eries formelles en plusieurs variables Directeur de th` ese : Guy Robin Soutenue le 17 d´ ecembre 1998 devant le Jury compos´ e de : Rapporteur D. Barsky Universit´ e de Paris 13 Rapporteur G. Christol Universit´ e de Paris 6 Examinateur T. Berger Universit´ e de Limoges Examinateur G. Rhin Universit´ e de Metz Examinateur G. Robin Universit´ e de Limoges Examinateur A. Salinier Universit´ e de Limoges

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Numero d’ordre : 74/1998 Universite de Limoges

THESE

de Doctorat de l’Universite de Limoges

Specialite Mathematiques et Applications

presentee par

Abdelkader Necer

Suites recurrentes lineaires et seriesformelles en plusieurs variables

Directeur de these :Guy Robin

Soutenue le 17 decembre 1998 devant le Jury compose de :

Rapporteur D. Barsky Universite de Paris 13Rapporteur G. Christol Universite de Paris 6Examinateur T. Berger Universite de LimogesExaminateur G. Rhin Universite de MetzExaminateur G. Robin Universite de LimogesExaminateur A. Salinier Universite de Limoges

Resume : La premiere partie de ce travail est consacree a l’etude de certaines proprietesalgebriques des suites recurrentes lineaires a coefficients constants ou polynomiaux sur desmodules sur des anneaux commutatifs unitaires. D’abord, nous etendons aux anneauxde Fatou (ou completement integralement clos), un resultat concernant les familles desuites recurrentes lineaires annulees par un ideal de type fini de l’anneau des polynomes.Ensuite, nous etablissons, par des moyens elementaires d’algebre commutative, que lesensembles de suites recurrentes lineaires sur des modules sont stables par decimation etemboıtement et que si les suites sont a valeurs dans une algebre alors la stabilite, pourla produit de Hadamard, est assuree. Nous caracterisons egalement dans cette partie lesanneaux dans lesquels les suites recurrentes lineaires sont les suites periodiques et nousmontrons que sur ces anneaux l’etude de certaines suites recurrentes lineaires a coefficientspolynomiaux se ramene a celle des suites recurrentes lineaires a coefficients constants.La deuxieme partie de ce travail a pour objet l’etude des proprietes, liees essentiellementau produit de Hadamard, des multi-suites recurrentes lineaires et des series rationnelles enplusieurs variables. Nous donnons quelques caracterisations des series reconnaissables etnous nous interessons a l’analogue de la conjecture de Pisot sur le quotient de Hadamarddans le cas de plusieurs variables.

Abstract : We are interested, in the first part of this work, in algebraic properties oflinear recurring sequences with constant or polynomial coefficients over modules over com-mutative and unitary rings. In particular, we extend a result about families of sequencesannihilated by a finitely generated ideal of polynomials over the ring of rational integerto the completely integrally closed rings. We show that the module of linear recurringsequences is invariant by entrelacment and decimation (or extraction) and, in the casewhen the sequences are in a algebra, then we rediscover, by elementary methods, that theset of linear recurring sequences over commytative rings is closed under the Hadamardproduct. We caracterize also the rings on which every linear recurring sequence has a pe-riod and show that on those rings the study of certain P -recursive sequences is equivalentto the study of linear recurring sequences.In the second part of this work we study some properties of multi-sequences and rationalseries in several variables. We give some caracterizations of recognized series and we obtainsome partial ansewrs to the Pisot conjecture of Hadamard quotient in several variables.

i

RemerciementsMes remerciements vont d’abord a G. Robin qui m’a convaincu de (re)commencer mes etudesdoctorales. Il m’a beaucoup encourage et a su m’ecouter lors de la preparation de cette these.

J’exprime ma gratitude la plus sincere a D. Barsky et G. Christol qui m’ont fait l’honneurd’accepter la tache d’etre rapporteurs. Je les remercie egalement pour leur soutien et l’amitiequ’ils m’ont prodigues depuis longtemps.

L’interet de T. Berger pour mon travail, sa diponibilite et son amitie me touchent beaucoup.Il a accepte d’etre le president du jury. J’en suis honore.

Je remercie sincerement G. Rhin d’avoir accepte de faire partie du jury ainsi que pour sonaccueil chaleureux a l’universite de Metz.

Mes remerciements vont egalement a A. Salinier pour son invitation a Limoges, sa gentillesseet sa participation au jury.

Merci a B. Benzaghou qui le premier m’a initie a la recherche en Mathematiques.

A J.-P. Bezivin pour son aide precieuse et ses conseils judicieux.

A J.-P. Allouche pour son amitie et toutes les enrichissantes discussions que nous avons eues.

A Dominique et Marie pour leur generosite, leur hospitalite et leurs encouragements.

A tous les collegues du departement de Mathematiques de l’universite de Limoges. Par leurserieux, leur disponiblite et leur joie de vivre ils ont su instaurer, avec beaucoup d’intelligence,d’agreables conditions de travail au sein du departement.

A M. Guerletin, N. Tchefranoff et Y. Pinol. Leur devouement n’a d’egal que leur gentillesse etleur bonne humeur.

Qu’il me soit permis de saluer ici mes proches et mes amis. La presence chaleureuse de certainsparmi eux et le soutien, qui ignore les distances, des autres, a des moments pas toujours faciles,m’ont beaucoup aide.

Merci a Djahida. Elle a su m’aider a aller de l’avant avec beaucoup de patience et de courage.

ii

TABLE DES MATIERES iii

Table des matieres

Notations v

Introduction vii

1 Suites recurrentes lineaires sur un module et systemes recursifs 11.1 Definitions et exemples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.2 Resultats preliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41.3 Familles de suites et anneaux de Fatou . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61.4 Systemes recursifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91.5 Algebre de Hadamard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151.6 Decimation et emboıtement de suites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171.7 Series formelles et suites recurrentes lineaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

2 Periodes et suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux 232.1 Periodes de suites sur un module . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 242.2 Anneaux localement finis et suites periodiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262.3 Suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux . . . . . . . . . . . . . . 292.4 Systemes periodiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

2.4.1 Suites regulieres sur un corps commutatif . . . . . . . . . . . . . . . . . 352.4.2 Exemples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36

3 Multi-suites recurrentes et series rationnelles 393.1 Definitions et notations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 403.2 Caracterisations des k-suites recurrentes lineaires . . . . . . . . . . . . . . . . 433.3 Series rationnelles et series reconnaissables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48

3.3.1 Proprietes de base . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 483.3.2 Elements Hadamard-inversibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56

4 Quotient de Hadamard 634.1 Rappels et enonces des resultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 644.2 Demonstrations des resultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

Bibliographie 75

iv TABLE DES MATIERES

Notations v

Notations

A Anneau commutatif unitaireA[x1 . . . , xk] Algebre des polynomes en les variables commutatives x1 . . . , xkA[[x1 . . . , xk]] Algebre des series formelles en les variables commutatives x1 . . . , xkAlk(A) Algebre des series algebriques en les variables commutatives x1 . . . , xkLM(f) Ensemble des suites sur M annulees par fLM(f) Ensemble des suites P-recursives sur M annulees par fM Un A-moduleMh(A) Algebre des matrices carrees d’ordre h sur AMh,r(A) Algebre des matrices h× r sur AR Anneau unitaire (non commutatif)Rk(A) Ensemble des series rationnelles en k variables surARsk(A) Ensemble des series semi-simples en k variables surARrk(A) Ensemble des series reconnaissables en k variables surAS(M) Ensemble des suites a valeurs dans MSk(M) Ensemble des suites indexees par Nk a valeurs dans MSp(M) Ensemble des suites periodiques a valeurs dans MSPU(M) Ensemble des suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux

unitaires a valeurs dans MSR(M) Ensemble des suites recurrentes lineaires a valeurs dans MSRk(M) Ensemble des k-suites recurrentes lineaires a valeurs dans Mδdu La suite (u(dn))n≥0

Ed(u0, . . . , ud−1) Emboıtement des suites u0, . . . , ud−1

M ⊗A N Produit tensoriel sur A des modules M et Nf ¯ g Produit de Hadamard des series f et gf ∗ g Produit de Cauchy (usuel) des series f et gu¯ v Produit de Hadamard des (multi)-suites u et vτu La suite (nu(n))n≥0

Xu La suite (u(n+ 1))n≥0

vi

Introduction vii

Introduction

Leur age, leur richesse ainsi que la diversite de leurs champs d’application font des suitesrecurrentes lineaires un sujet tellement vaste et si riche en resultats qu’il faudrait plusieurs ou-vrages, en plus de ceux qui existent deja, pour faire le tour de toutes leurs proprietes. On trouvedans [9] une tres bonne introduction aux suites recurrentes lineaires ainsi qu’une bibliographiequi, jointe a celle qu’on trouve dans [20], interessera certainement tous ceux qui voudront ensavoir plus sur ce passionnant sujet. Notre principal interet ici est d’etudier quelques aspects dedeux differentes generalisations de la notion de suite recurrente lineaire. La premiere est cellequi consiste a considerer des suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux (ou suitesP -recursives) sur des modules. La seconde generalisation, consiste, partant du constat que lestermes d’une suite recurrente lineaire sur un corps sont des coefficients d’une serie rationnelle,a etudier les multi-suites formees des coefficients de series rationnelles en plusieurs variables.

La premiere partie de ce travail (chapitres 1 et 2) est consacree a l’etude de quelques proprietesalgebriques des suites recurrentes lineaires a coefficients constants ou polynomiaux sur lesmodules sur un anneau commutatif unitaire. La seconde (chapitres 3 et 4) traite des multi-suites (k-suites) dont les series generatrices sont des fractions rationnelles et surtout des multi-suites recurrentes lineaires qui constituent un cadre ou beaucoup de resultats, connus dansl’etude classique des suites recurrentes lineaires, sont encore valides.

Chapitre 1

Soient A un anneau commutatif unitaire, M un A-module et S(M) le A-module des suitessur M , c’est-a-dire le A-module des applications de N dans M . Grace a l’application de decalage(le shift) qui a tout element (u(n))n∈N de S(M) associe l’element (u(n + 1))n∈N, que l’onidentifie a la multiplication par l’indeterminee x, on munit de maniere standard S(M) d’unestructure de A[x]-module. Ceci permet de definir SR(M), le A[x]-module des suites recurrenteslineaires comme etant le sous-module du module de torsion de S(M) forme des elements dontl’annulateur est un ideal cofini (ou encore un ideal contenant un polynome de A[x] de coefficientdominant inversible).On trouve dans Kurakin et al ([20]) un bon historique et une etude approfondie des suitesrecurrentes sur un module. En particulier, etant donne un ideal I de type fini de A[x], lesauteurs se posent la question de savoir a quelles conditions le sous-module LM(I) des suitesannulees par I n’est pas trivial. Ils donnent une reponse dans le cas ou l’anneau A est l’anneaudes entiers rationnels. Soit, par exemple, I = < p1, . . . , pr > ou r ∈ N. Pour que LZ(I) soit nontrivial, il faut et il suffit que p1, . . . , pr aient une racine (un entier algebrique) commune dansQ, la cloture algebrique de Q.

viii

Dans ce chapitre on etend ce resultat aux anneaux de Fatou (ou completement integralementclos). L’apport le plus important dans ce chapitre est, cependant, de retrouver certains resultatsconnus dans le cas ou A est un corps commutatif et lies a la stabilite de SR(M) pour lesoperations d’emboıtement, de decimation et pour le produit de Hadamard (si on suppose queM est une A-algebre associative, commutative et unitaire). Soient r un entier naturel positifet C(x) un element de Mr(A[x]), l’algebre des matrices d’ordre r a coefficients dans A[x]. Enconsiderant le systeme C(x)U = V dans S(M r), on montre que, si le determinant de C(x)a un coefficient dominant inversible dans A (ce qui se traduit par le fait qu’un determinantd’une matrice explicite a coefficients dans A est inversible dans A), alors les solutions sontdans SR(M r). Ce resultat est ensuite applique pour prouver, par des methodes elementaires,la stabilite de l’ensemble des suites recurrentes lineaires sur un module par decimation, paremboıtement et, sur un anneau, pour le produit de Hadamard. On retrouve, par exemple, quecertaines suites de vecteurs definies par des recurrences dont les coefficients sont des matricessont en fait des suites recurrentes lineaires. Dans cette partie on a renonce, volontairement, autiliser l’ecriture explicite du terme general des suites recurrentes lineaires et ce pour au moinsdeux raisons. C’est, d’abord, dans l’espoir que les methodes utilisees pourraient servir a l’etudede suites dont on ne connaıt pas l’ecriture du terme general, et ensuite, pour la raison, quidu reste implique la premiere, et qui reside dans la conviction que la recurrence, elle meme,(( exprime beaucoup de proprietes de facon bien plus simple qu’une formule opaque )) 1.

Chapitre 2

En pratique, par exemple dans la theorie des codes correcteurs d’erreurs ou la generation denombres pseudo-aleatoires, on s’interesse a une classe importante de suites recurrentes lineaires,a savoir la classe des suites periodiques sur un corps commutatif ou encore sur des espacesvectoriels et plus recemment sur des modules.Dans ce chapitre, apres une etude sommaire du A[x]-module Sp(M) des suites periodiques, ons’interesse aux anneaux (et modules) dans lesquels toute suite recurrente lineaire est periodique.On etablit qu’un anneau A dans lequel toute suite recurrente lineaire est periodique est unanneau localement fini, c’est-a-dire que tout sous-anneau de A de type fini sur le sous-anneauengendre par 1 est fini (ou encore dans l’anneau A les elements reguliers sont des racines del’unite dans A). Ces anneaux constituent en un sens une generalisation des algebres associativeslocalement finies (sur des corps commutatifs). Des exemples de tels anneaux sont fournis parles anneaux finis, les sous-corps de la cloture algebrique d’un corps fini ou des produits finis deces derniers anneaux.On s’interesse ensuite au sous-module SPU(M) de S(M) forme des suites recurrentes lineairesa coefficients polynomiaux unitaires c’est-a-dire, les suites u de M telles que :

P0(n)u(n+ h) + · · ·+ Ph(n)u(n) = 0 ∀n ∈ N,

ou h est dans N∗ et, pour tout i ∈ {0, . . . , h}, Pi est dans A[x] ; avec, pour tout n ∈ N,l’element P0(n) inversible dans A. On montre en particulier que SPU(A) est une A-algebrepour le produit de Hadamard et que les suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux

1. D. Ferrand dans [16]

Introduction ix

unitaires sont, sous certaines conditions, periodiques et que le calcul de leur periode se rameneau calcul de la periode d’une suite recurrente lineaire.

Chapitre 3

Dans ce chapitre on se place, pour k dans N∗, dans Sk(M), le A-module des multi-suitesa valeurs dans M et on presente quelques concepts fondamentaux et resultats de base desk-suites recurrentes lineaires. Ce sont les suites indexees par Nk et dont l’annulateur dansA[x1, . . . , xk] contient des polynomes unitaires de la forme q1(x1), . . . , qk(xk). On etudie, laencore sans recourir a la formule explicite du terme general, les proprietes liees au produit deHadamard, a l’emboıtement et a l’operation inverse et on retrouve des resultats concernantles periodes de ces suites. On montre, en particulier, que les valeurs des k-suites recurrenteslineaires sont grosso-modo les valeurs prises par les iteres d’endomorphismes de modules etqu’une k-suite u de S(A) est lineaire si et seulement si elle verifie :

u(n1, . . . , nk) =∑

(i1,...,ik)∈Fvi1(n1) · · · vik(nk), ∀(n1, . . . , nk) ∈ Nk,

ou F est un sous-ensemble fini de Nk.Dans une seconde partie de ce chapitre, on s’interesse d’abord aux series generatrices dessuites de Sk(A) et surtout aux series rationnelles et on etablit la correspondance entre k-suitesrecurrentes lineaires et series reconnaissables. Ensuite, dans le cas ouA est un corps commutatif,on montre que les elements Hadamard-inversibles de l’algebre des series reconnaissables sontles emboıtements de series super-geometriques. Ce qui se traduit sur les k-suites recurrenteslineaires par : une k-suite recurrente lineaire u est Hadamard-inversible si et seulement si ilexiste d dans N∗ et une extension algebrique L de A tels que

u(dn1 + i1, . . . , dnk + ik) = ci1,...,ikαn1i1· · ·αnkik , ∀(n1, . . . , nk) ∈ Nk,

ou∀(i1, . . . , ik) ∈ Nk, ci1,...,ik ∈ L∗ et (αn1

i1. . . αnkik ) ∈ L∗k.

Chapitre 4

Le dernier chapitre a pour objet l’etude du probleme du quotient de Hadamard. Soient K uncorps commutatif de caracteristique nulle et B un sous-anneau de K de type fini sur Z. Soientf et g deux series rationnelles a k variables sur K (k ∈ N∗). On suppose que les coefficients duquotient de Hadamard h de f et g sont dans B. La serie h est-elle alors rationnelle?Dans le cas d’une variable, le theoreme de van der Poorten fournit une reponse affirmative acette question (voir [34]). Si k > 1 on donne suivant une idee de J.-P. Bezivin, des reponses acette question dans les cas suivants :

– la serie f est rationnelle et la serie g est une serie (reconnaissable) dont les coefficients sontdes produits de suites recurrentes lineaires,

– la serie f est reconnaissable et g est une serie reconnaissable dont les coefficients sont les valeurssur Nk d’un polynome.

x

On generalise egalement, au cas de plusieurs variables, le theoreme de Bezivin de la versionapprochee de la conjecture de Pisot ([5]) : si les coefficients de la serie h sont decomposes enune somme d’elements entiers et d’elements dont la croissance est geometrique, alors la seriedont les coefficients sont entiers est rationnelle.

Note.— La derniere partie du deuxieme chapitre et le dernier chapitre ont deja ete publies,voir [22] et [23].

1

Chapitre 1

Suites recurrentes lineaires sur unmodule et systemes recursifs

Apres la definition et l’etude de certaines proprietes algebriques des suites recurrentes lineairessur des anneaux commutatifs, nous demontrons, dans une premiere partie de ce chapitre, desresultats qui generalisent ceux plus connus dans le cas de corps commutatifs. Nous caracteri-sons, en particulier, les suites recurrentes lineaires sur un module en termes d’endomorphismede modules (proposition 1.2.1 et son corollaire) et nous generalisons un resultat concernant lesfamilles de suites recurrentes lineaires sur Z aux anneaux de Fatou (proposition 1.3.4). Il s’agitde savoir a quelle condition l’ensemble des suites annulees par un ideal de type fini de l’algebredes polynomes est non trivial.

Dans la seconde partie du chapitre, nous nous interessons aux systemes recursifs que nousappliquerons pour demontrer des proprietes de stabilite. Nous generalisons, dans le theoreme1.4.1 et son corollaire 1.4.1, les resultats obtenus, dans le cas particulier ou l’anneau de baseest R, par B. Zay dans [36] au cas d’un anneau commutatif unitaire et a des systemes nonhomogenes. Ces resultats sont ensuite appliques pour retrouver, sans passer par l’algebre uni-verselle d’un polynome et sans utiliser le produit tensoriel, la stabilite du module des suitesrecurrentes lineaires sur un module par decimation et emboıtement (voir la proposition 1.6.2et le corollaire 1.6.1). Nous retrouvons, egalement, dans le theoreme 1.5.1, le resultat obtenudans [11] et qui etablit la stabilite, pour le produit de Hadamard, de l’ensemble des suitesrecurrentes lineaires, sur un anneau commutatif unitaire.

2 Chapitre 1. Suites recurrentes lineaires sur un module et systemes recursifs

1.1 Definitions et exemples

Dans ce chapitre, on notera A un anneau commutatif unitaire d’element neutre 1. Son groupedes elements inversibles sera note U(A) et M designera un module sur A.On notera S(M) l’ensemble des suites a valeurs dans M . Un element u de S(M) sera note(u(n))n≥0.On designera par P , l’algebre A[X] des polynomes a coefficients dans A. Pour d ∈ N, p(X) =∑d

i=0 piXi ∈ P , u = (u(n)) ∈ S, et pour tout n ∈ N, on pose

(p(X)u)(n) =d∑i=0

piu(n+ i).

Muni de l’addition usuelle des suites et de cette multiplication par les scalaires, notee pu, S(M)a alors une structure de P-module qui prolonge celle de A-module.

Soit u ∈ S(M). On designe par Iu l’ideal annulateur de u dans P . i.e.,

Iu = {p ∈ P ; pu = 0}.

DefinitionsSoit u ∈ S(M). On dit que u est une suite recurrente lineaire (sur M) si Iu contient un poly-nome unitaire.L’ideal Iu est alors appele ideal caracteristique de u et les polynomes unitaires de Iu des po-lynomes caracteristiques de u.Un polynome caracteritique de degre minimal d est appele polynome minimal de u. On ditalors que la suite u est de longueur (ou d’ordre) d.

NotationL’ensemble des suites recurrentes lineaires sur M sera note SR(M).

Proposition 1.1.1 ([20]) Soient A un anneau commutatif unitaire et M un A-module.

a) L’ensemble SR(M) des suites recurrentes lineaires sur M est un P-module.

b) Soit u ∈ S(M). Pour que u soit une suite recurrente lineaire il faut et il suffit que sonannulateur Iu dans P soit cofini (ou encore que le A-module Pu soit de type fini).

PreuveLe a) est evident. Montrons le b). Soit u = (un)n≥0 une suite a valeurs dans M . Si la suite uest recurrente lineaire alors l’ideal Iu est cofini : le quotient de P par Iu est un A-module detype fini. En effet, si Iu contient par exemple le polynome p(X) = Xh+ah−1X

h−1 + · · ·+ah deP , alors le module quotient P/Iu est une image homomorphe de P/pP qui est un A-modulede type fini.Inversement, si Iu est cofini alors la suite u est une suite recurrente lineaire. En effet, supposonsque P/Iu soit engendre par g1 + Iu, . . . , gs + Iu ou s ∈ N et g1, . . . , gs sont dans P . Soit

1.1. Definitions et exemples 3

d = max1≤s deg(gi). la famille (X i + Iu)0≤i≤d est alors une famille generatrice de P/Iu et parconsequent, pour n ≥ d, il existe a0, . . . , ad dans A tels que :

Xn + Iu =d∑j=0

aj(Xj + Iu).

Ce qui signifie que le polynome unitaire Xn −∑d

j=0 ajXj est dans Iu. 2

Remarques1. Dans la definition d’une suite recurrente lineaire sur M , on peut remplacer, sans perte degeneralite, polynome unitaire par polynome ayant un coefficient dominant inversible dans A.La proposition precedente est une traduction du fait qu’un ideal de P est cofini si et seulements’il contient un polynome unitaire ou, ce qui revient au meme, un polynome dont le coefficientdominant est inversible.

2- Si on suppose que A est un corps et que M = A, on retrouve la definition classique dessuites recurrentes lineaires sur des corps commutatifs (voir [21] ou [9]).

3- Contrairement au cas ou A est un corps, une suite recurrente lineaire sur M peut possederplusieurs polynomes minimaux unitaires. Soit A un anneau commutatif unitaire dans lequelon peut trouver un element idempotent a different de 1. La suite u de S(A) donnee par :u(n) = a, ∀n ∈ N a pour polynomes minimaux X − 1 et X − a.

4- La multiplication par X n’est autre que l’operation de decalage (le shift) qui a la suiteu(n)n≥0 associe la suite u(n + 1)n≥0. Dire que u est une suite recurrente lineaire de polynomeminimal p(X) = Xh − a1X

h−1 − · · · − ah ∈ P, revient a dire que la suite u est definie par sespremiers termes u0, . . . , uh−1 et la relation

u(n+ h) = a1u(n+ h− 1) + · · ·+ ahu(n), ∀n ∈ N. (1.1)

Exemples

1- La suite recurrente la plus celebre et sans doute la plus ancienne est la suite de Fibonacci.Elle est a valeurs dans Z et est definie par :

u(0) = 0 u(1) = 1 et u(n+ 2) = u(n+ 1) + u(n) ∀n ∈ N.

Le polynome minimal de u dans Z[X] est le polynome X2 −X − 1.

2- La suite congruente (en anglais, congruent sequence) utilisee dans la generation de nombrespseudo-aleatoires a cause de ses bonnes proprietes de distribution est une suite recurrentelineaire. On peut la definir sur un A-module quelconque M par :

∀n ∈ N, u(n+ 1) = au(n) + x ou (u(0), x) ∈M2, et a ∈ A.

4 Chapitre 1. Suites recurrentes lineaires sur un module et systemes recursifs

Le polynome (X − 1)(X − a) est un polynome caracteristique de uLes suites (( arithmetiques )) et (( geometriques )) sur M sont obtenues a partir de la suite u enprenant respectivement a = 1 et x = 0. En pratique on prend pour M des produits de Z/lZou l ∈ N (voir par exemple [25]), ce qui explique l’appellation de ces suites.

3- Soient M un A-module de type fini, φ un endomorphisme de M (φ ∈ EndA(M)) et x unelement arbitraire de M . Soit u = (u(n))n≥0 l’element de S(M) defini par :

u(0) = x et u(n+ 1) = φ(u(n)) ∀n ≥ 0.

La suite u est une suite recurrente lineaire sur M . En effet, comme M est de type fini, φ verifie,une equation de la forme :

φh − a1φh−1 − · · · − ah

ou h ∈ N et (a1, . . . , ah) ∈ Ah (voir par exemple [2]). Ce qui montre que le polynomeXh − a1X

h−1 − · · · − ah de A[X] est un polynome caracteristique de u.

4. Soit A un anneau commutatif unitaire. Soit s ∈ N, p1(X), . . . , ps(X) des polynomes sur Aet soit α1, . . . , αs des elements de A. Pour n ∈ Z, on identifie n et n · 1 et on considere dansS(A) la suite V = (vn)n∈N donnee par :

vn =s∑i=1

pi(n)αni , ∀n ∈ N.

On sait que la suite V est une suite recurrente lineaire sur A, si A est un corps (voir [9]). Enfait, meme si A n’est pas un corps, c’est encore une suite recurrente lineaire sur A (considerecomme A-module) au sens de la definition ci-dessus. En effet, comme l’ensemble des suitesrecurrentes lineaires sur A est un A-module, pour montrer que V est une suite recurrente li-neaire, il suffit de le faire pour la suite V telle que vn = nkαn,∀n ∈ N. Or cette suite est unesuite recurrente lineaire de polynome caracteristique (X − α)k+1.

5- Le A-module des suites recurrente lineaires sur M est un sous-module de TorsP(S(M)), lesous P-module de torsion du P-module S(M). Il est en general, contrairement au cas ou A estun corps, strictement contenu dans celui ci. Pour s’en convaincre, il suffit de prendre A = Z,M le quotient de Z[Xi, i ∈ N] par l’ideal J =< 2Xi+1 −Xi, i ∈ N > et u = (u(n))n∈N ou, pourtout n dans N, u(n) designe la classe de Xn modulo J . On a alors u ∈ TorsZ[X](S(M)) car

AnnZ[X](u) = (2X − 1)Z[X]

mais u n’est pas une suite recurrente lineaire (u /∈ SR(M)).

1.2 Resultats preliminaires

L’exemple 3 ci-dessus est un cas particulier du resultat suivant qui montre qu’en fait les suitesrecurrentes lineaires sur un module sont grosso-modo les valeurs prises par les iteres d’endo-morphismes de modules de type fini. Commencons d’abord par la

1.2. Resultats preliminaires 5

Remarque 1.2.1 Soit u = (u(n))n≥0 un element de SR(M) de polynome caracteristiquep(X) = Xh − a1X

h−1 − · · · − ah ∈ P. La suite u est en fait a valeurs dans un A-moduleM0 de type fini sur A. En effet, grace a l’egalite 1.1 on voit que, pour tout n dans N, u(n) ∈M0 = Au(0) + · · ·+ Au(h− 1). Plus precisemment, soit B le sous anneau de A engendre parles coefficients de p(X). On a alors

u(n) ∈ Bu(0) + · · ·+Bu(h− 1) ∀n ∈ N.

En fait, si m designe la caracteristique de A alors B = Z/mZ[a1, . . . , ah] et les valeurs de lasuite u sont bien evidemment dans un B-module de type fini. Par exemple les valeurs d’unesuite recurrente lineaire sur un corps commutatif K de caracteristique nulle (donc contenantune copie de Z) sont dans un sous-anneau de K, de type fini sur Z. La reciproque n’est pasvraie comme on le voit sur l’exemple de la suite suivante qui n’est pas recurrente lineaire :

0, 1, 0, 0, 1, 0, 0, 0, 1, 0, 0, 0, 0, 1, 0, . . . .

Proposition 1.2.1 Soient A un anneau commutatif unitaire, M un A-module et u un elementde S(M). Les assertions suivantes sont equivalentes :

i) u ∈ SR(M),

ii) il existe un A-module M , un endomorphisme φ de M , un element v0 de M et ψ un mor-phisme de A-modules de M dans M tels que :

u(n) = ψ(φn(v0)) ∀n ∈ N.

Preuve1. Soient u ∈ S(M), p(X) = Xh − a1X

h−1 − · · · − ah ∈ P un polynome caracteristique de uet M0 le A-module Au(0) + · · · + Au(h− 1). On prendra pour M le A-module Mh

0 et pour φl’endomorphisme de M defini par :

φ(x1, . . . , xh) = (x2, x3, . . . ,

h∑i=1

aixh+1−i), ∀(x1, . . . , xh) ∈ M.

Pour v0 = (u0, . . . , uh−1) et ψ la derniere projection de M sur M0, on verifie qu’on a bien :u(n) = ψ(φn(v0)), ∀n ∈ N.

2. Inversement, on sait d’apres l’exemple 3 ci-dessus que la suite (φn(v0))n≥0 est dans SR(M).Il s’ensuit, grace a la linearite de ψ que u est dans SR(M). 2

RemarqueSi le polynome caracteristique de la suite u a un coefficient constant qui est un element inver-sible de A alors l’application φ est en fait un isomorphisme de M dans M .

6 Chapitre 1. Suites recurrentes lineaires sur un module et systemes recursifs

Corollaire 1.2.1 Soit A un anneau commutatif unitaire. La donnee d’une suite recurrentelineaire u sur A est equivalente a la donnee d’un entier positif h, d’une matrice Q dans Mh(A),d’un vecteur colonne v0 dans Mh,1(A), d’un vecteur ligne α ∈M1,h tels que :

u(n) = αQnv0, ∀n ∈ N.

PreuveC’est une simple traduction matricielle de la proposition precedente. Si la suite (u(n))n≥0 estune suite recurrente lineaire sur A de polynome caracteristique p(X) = Xh−a1X

h−1−· · ·−ahalors la matrice Q n’est autre que la matrice compagnon de p(X) (ou de u) :

Q =

0 1 . . . 0...

.... . .

...0 0 . . . 1ah ah−1 . . . a1

;

le vecteur v0 est le vecteur initial, c’est-a-dire le transpose du vecteur (u0, . . . , uh−1) et α =(1, 0, . . . , 0).Inversement, si u est une suite sur A verifiant l’egalite ci-dessus alors le polynome caracteris-tique de Q est un polynome caracteristique de u. 2

RemarqueSi on suppose que A est un corps on retrouve ainsi la proposition 1.1 obtenue par G. Hansel([17]) dans la cas de suites recurrentes sur un corps commutatif.

Corollaire 1.2.2 Soient A un anneau commutatif unitaire, M un A-module, r un entier po-sitif et V = (u1, . . . , ur) un element du P-module S(M)r. On suppose qu’il existe une matriceQ dans Mr(A) telle que XV = QV . Alors les suites u1, . . . , ur sont des suites recurrenteslineaires sur M de polynome caracteristique det(XI −Q).

PreuveElle provient de l’egalite V (n+ 1) = QV (n), ∀n ∈ N et de la proposition ci-dessus. 2

RemarqueCe corollaire est un cas particulier du theoreme 1.4.1 sur les systemes recursifs (voir sectionsuivante).

1.3 Familles de suites et anneaux de Fatou

Soit P un sous-ensemble non vide de P . On designe par LM(P ) le sous ensemble de S(M)forme par toutes les suites annulees par P :

LM(P ) = {u ∈ S(M) ; pu = 0, ∀p ∈ P}.

1.3. Familles de suites et anneaux de Fatou 7

Proposition 1.3.1 ([20]) Soient A un anneau commutatif unitaire, M un A-module et P unsous-ensemble non vide de P. Alors, LM(P ) est un sous-module du P-module S(M). De plussi l’ideal < P > engendre par P dans P est cofini alors LM(P ) ⊂ SR(M). Inversement, siLM(P ) ⊂ SR(M) alors < P > est contenu dans un ideal cofini.

PreuveComme LM(P ) = LM(< P >) on peut supposer que P est un ideal de P .1. Il est facile de verifier qu’un polynome caracteristique d’une combinaison P-lineaire de deuxsuites sur M est le produit des deux polynomes caracteristiques.2. Supposons P cofini et soit p un polynome unitaire dans P . Soit u un element de LM(P ).On alors pu = 0 ou encore u ∈ SR(M). Inversement, supposons que LM(P ) ⊂ SR(M) etmontrons que P est contenu dans un ideal cofini. Soit p ∈ P et u ∈ S(M) tel que pu = 0.Comme u ∈ SR(M), soit pu un polynome minimal de u. La division euclidienne de p par pumontre que pu divise p. Donc P est contenu dans l’ideal engendre par des polynomes minimauxdes elements de LM(P ). 2

Remarques1. On peut avoir LM(P ) ⊂ SR(M) sans que l’ideal < P > soit cofini comme c’est affirme dans[20]. Soit A = M = Z. Considerons l’ideal P de Z[X] engendre par 2X. On a

LZ(I) = {(α, 0, 0, . . .) /α ∈ Z}= LZ(J)

ou J est l’ideal XZ[X]. On a bien LZ(J) ⊂ SR(Z) et I non cofini.

2. Soient A un anneau commutatif unitaire, M un A-module et P un sous-ensemble non videde P . Le sous-module LM(P ) de S(M) peut etre reduit a zero. On a par exemple

LZ(< 2X − 1 >) = {0}.

On sait que sur un corps commutatif K tout sous-espace vectoriel de S(K) de dimension finieet stable par l’operation de decalage est forme de suites recurrentes lineaires sur K. Le resultatsuivant (qu’on trouve egalement dans [20]) en est une generalisation au cas de suites sur desmodules.

Proposition 1.3.2 Soient A un anneau commutatif unitaire, M un A-module et E un sous-module du P-module S(M). Si on suppose que E est un A-module de type fini alors E estcontenu dans SR(M).

PreuveSoit r ∈ N et E = Au1 + · · · + Aur. Comme E est un P-module Xui ∈ E pour tout i dans{1, . . . , r} et donc il existe une matrice carree Q dans Mr(A) telle que :

X

u1...ur

= Q

u1...ur

.

8 Chapitre 1. Suites recurrentes lineaires sur un module et systemes recursifs

Le resultat est donc une consequence du corollaire 1.2.2. 2

Nous aurons besoin dans la suite de la proposition suivante.

Proposition 1.3.3 Soient A un anneau commutatif unitaire, M un A-module, h un entierpositif et f un polynome unitaire de degre h dans P. Soit u ∈ LM(f). On a :

la suite u est completement determinee par son vecteur initial (u(0), . . . , u(h− 1)) ;

1. les suites u1, . . . , ur engendrent le A-module LM(f) si et seulement si les vecteurs initiauxdes suites u1, . . . , ur engendrent le A-module Mh ;

2. si le A-module M est de type fini alors LM(f) l’est aussi ;

3. le A-module LA(f) est un P-module cyclique.

PreuveElle est basee sur l’isomorphisme de A-modules entre LM(f) et Mh et qui a toute suite dansLM(f) associe son vecteur initial. Le generateur du P-module LA(f) est la suite basique (oureponse impulsionnelle) sf ∈ LA(f) dont le vecteur initial est (0, 0, . . . , 1). On trouvera dans[16] une preuve de ces resultats et dans [20] une generalisation du point 4 au cas de LM(f).2

Soit I un ideal non nul de P . On sait, comme le montre la remarque 2 ci-dessus, que LM(I)peut etre nul. A quelles conditions ce sous module de S(M) n’est pas trivial? On trouve dans[20] une reponse a cette question dans le cas ou A = M = Z. L’objet de la proposition (1.3.4)qui suit est de generaliser ce resultat aux anneaux de Fatou.

Definition 1.3.1 Soit A un anneau commutatif unitaire integre de corps des fractions K. Ondit que A est un anneau de Fatou lorsque la propriete suivante est satisfaite : si une u suited’elements de A verifie une recurrence du type

u(n+ h) + a1u(n+ h− 1) + · · ·+ ahu(n) = 0, ∀n ∈ N

ou les coefficients a1, . . . ah sont dans K et ou l’ordre h de la recurrence est minimal alorsa1, . . . ah sont dans A.

Avec nos notations, un anneau A commutatif unitaire integre de corps des fractions K est unanneau de Fatou si la propriete suivante est verifiee : si une suite u ∈ S(A) a pour polynomeminimal p dans K[X] alors p ∈ A[X]. On encore, si u ∈ S(A) et u ∈ SR(K) alors u ∈ SR(A).

Definition 1.3.2 Soit A un anneau commutatif unitaire integre de corps des fractions K. Ondit que A est un anneau completement integralement clos si la condition suivante est verifiee :si x ∈ K, d ∈ A \ {0} et ∀n ∈ N, dxn ∈ A alors x ∈ A.

On trouvera dans [13] la preuve du theoreme suivant ainsi qu’une bibliographie concernantles anneaux de Fatou et leur passionnante histoire :

Theoreme 1.3.1 Les anneaux de Fatou sont les anneaux completement integralement clos.

1.4. Systemes recursifs 9

Revenons maintenant a nos familles de suites. On a la

Proposition 1.3.4 Soient A un anneau de Fatou de corps des fractions K, r un entier positifet I =< f1, . . . , ft > un ideal de type fini de A[X]. Les assertions suivantes sont equivalentes :

i) le A-module LA(I) est non trivial ;

ii) les polynomes f1, . . . , ft ont une racine entiere (algebrique) commune dans une cloturealgebrique K de K. Soient α1, . . . , αr les racines entieres communes de f1, . . . , ft. Soit, pourj ∈ {1, . . . , t},

fj(X) = (X − α1)sj1 · · · (X − αr)sjrgj(X) dans K[X]

ou sji ∈ N∗ ∀i ∈ {1, . . . , r}. Alors LA(I) = LA(f) ou

f(X) = (X − α1)s1 · · · (X − αr)sr dans K[X]

avec si = min1≤j≤t(sji), ∀i ∈ {1, . . . , r}.

PreuveMontrons que i) implique ii). Supposons que LA(I) est non nul. Il existe donc une suite u nonnulle dans S(A) telle que fiu = 0 pour tout i dans {1, . . . , t}. Comme K[X] est principal,il existe un polynome unitaire f ∈ I, de degre minimal k dans K[X] tel que : I = fK[X].On donc fu = 0 et f divise fi dans K[X], pour tout i dans {1, . . . , t}. Or A est un anneaude Fatou, donc, pour tout i dans {1, . . . , t}, f ∈ A[X] et par suite f divise fi dans A[X]. Ils’ensuit que I = fA[X].

En fait f peut etre obtenu comme polynome caracteristique d’une matrice que nous allons ex-pliciter. Soit U1, . . . , Uk une base du A-module LA(I) et V le vecteur transpose de (U1, . . . , Uk).Il existe alors une matrice Q dans Mk(A) telle que XV = QV . On en deduit, d’apres le co-rollaire (1.2.2), que les suites U1, . . . , Uk sont annulees par le polynome caracteristique q(X)de la matrice Q. La famille des suites U1, . . . , Uk etant generatrice on voit que LA(I) ⊂ LA(q).Par consequent f divise q, mais comme ils ont meme degre ils sont egaux. Ce qui acheve lapremiere partie de la proposition. La seconde decoule de la decomposition de f dans K[X].La reciproque est immediate. 2

1.4 Systemes recursifs

Soit r ∈ N∗, I = {1, . . . , r} et m1, . . . ,mr des entiers rationnels strictement positifs. Soituj = (ujn)n≥0, (j ∈ I), une famille de suites de nombres reels de termes initiaux uj0, . . . , u

jmj−1,

(j ∈ I). Soit ci,j,l ( (i, j) ∈ I2 ; 0 ≤ l ≤ mj) des nombres reels. On suppose que les suites

10 Chapitre 1. Suites recurrentes lineaires sur un module et systemes recursifs

u1, . . . , ur verifient le systeme d’equations :

m1∑l=0

c1,1,lu1n+l + · · · +

mr∑l=0

c1,r,lurn+l = 0,

m1∑l=0

c2,1,lu1n+l + · · · +

mr∑l=0

c2,r,lurn+l = 0,

......

...m1∑l=0

cr,1,lu1n+l + · · · +

mr∑l=0

cr,r,lurn+l = 0,

(1.2)

pour tout n ∈ N et que

det((ci,j,mj

))1≤i,j≤r 6= 0 . (1.3)

Dans [36], en reponse a une question de V. E. Hoggat, Jr. (voir [18]), B. Zay demontre queles suites u1, . . . , ur sont des suites recurrentes lineaires reelles et ont toutes le meme polynomecaracteristique. Nous nous proposons, dans cette section, d’etendre son resultat a des systemesrecursifs (homogenes ou non) sur des modules sur des anneaux commutatifs. On appliquera letheoreme principal pour retrouver, dans les deux sections suivantes, des resultats concernantles suites recurrentes lineaires sur des algebres.

Mais auparavant, signalons que, sur un corps commutatif K, le passage des suites a leurs seriesgeneratrices permet de donner une autre demonstration du resultat de B. Zay. Rappelons (voirpar exemple [21]) que si u = (un)n≥0 est un element de KN et si u(X) est sa serie generatricedans K[[X]], alors pour l ∈ N∗, la serie generatrice V (X) de la suite V = (un+l)n≥0, translateede u, est donnee par :

X lV (X) = u(X)−l−1∑i=0

uiXi.

En injectant toutes les series generatrices de u1, . . . , ur et de leurs translatees dans le systeme1.2 on obtient un systeme lineaire de r equations a coefficients dans K[X]. Les solutions de cesysteme sont alors des fractions rationnelles. Ce qui signifie que les suites u1, . . . , ur sont dessuites recurrentes lineaires.

Soit donc A un anneau commutatif unitaire et M un A-module. On garde les memes notationsque ci-dessus et on cherche a determiner les suites u1, . . . , ur de M dont les termes initiauxuj0, . . . , u

jmj−1 ( j ∈ I), sont dans M et qui satisfont a :

C11(X)u1 + · · · +C1r(X)ur = 0,...

...Cr1(X)u1 + · · · +Crr(X)ur = 0,

(1.4)

ou

Cij(X) =

mj∑l=0

ci,j,lXl ∈ P, ∀(i, j) ∈ I2. (1.5)

1.4. Systemes recursifs 11

On supposera, en outre, que

det((ci,j,mj

))1≤i,j≤r ∈ U(A). (1.6)

Le resultat de B. Zay, obtenu dans [36], est alors un cas particulier du

Theoreme 1.4.1 Pour toute famille uj0, . . . , ujmj−1, ( j ∈ I) d’elements de M , le systeme 1.4

possede une unique solution u1, . . . , ur ou u1, . . . , ur sont des suites recurrentes lineaires surM de longueur inferieure ou egale a

∑rj=1 mj.

PreuveL’existence et l’unicite d’une solution du systeme 1.4 est assuree par la condition 1.6. Montronsque les solutions sont des suites recurrentes lineaires.

PosonsC(X) = (Cij(X))1≤i,j≤r .

C’est un element de Mr(P). Soit

V =

u1

...ur

.

Le systeme 1.4 est equivalent a : C(X)V = 0.L’anneau P etant commutatif, la matrice C(X) est alors, d’apres le theoreme de Cayley-Hamilton ([7]) , racine de son polynome caracteristique,

P (Y ) = Y r + ar−1(X)Y r−1 + · · ·+ a0(X) ∈Mr(P)[Y ].

On a doncP (C(X))V = 0 et C(X)V = 0.

Par consequent

a0(X)ui = 0 ∀i ∈ I.Remarquons que le determinant de C(X) est, au signe pres, le polynome a0(X). Ce dernier aun coefficient dominant inversible dans A. En effet, si

det(C(X)) =∑σ∈Sr

εσC1σ(1)(X) · · ·Crσ(r)(X),

le coefficient dominant de ce determinant est donne par :∑σ∈Sr

εσC1σ(1)mσ(1)· · ·Crσ(r)mσ(r)

= det(Cijmj) ∈ U(A).

On a montre ainsi, que pour tout i ∈ I, l’ideal Iui contient un polynome unitaire de degreinferieur ou egal a

∑rj=1 mj. Ce qui acheve la demonstration du theoreme. 2

12 Chapitre 1. Suites recurrentes lineaires sur un module et systemes recursifs

Remarques1. Si A[X] est principal (c’est-a-dire si A est un corps), on peut arriver au meme resultat enutilisant la methode des facteurs invariants. La matrice C(X) est equivalente a une matricediagonale, disons

D(X) = diag(D1(X), . . . , Dr(X))

ou Di(X) divise Di+1(X) pour tout i ∈ {1, . . . , r− 1}. Dans ce cas, le polynome Dr(X) est unpolynome caracteristique des suites u1, . . . , ur.

2. Soit M2 = MN2l’ensemble des 2-suites sur le A-module M . Comme dans le cas des suites

sur M , M2 est muni canoniquement d’une structure de A[X, Y ]-module. Pour d ∈ N,

u = (umn)(m,n)∈N2 et p(X, Y ) =∑

0≤i,j≤dpijX

iY j ∈ A[X, Y ],

on pose

(p(X, Y )u)mn =∑

0≤i,j≤dpijum+i,n+j ∀(m,n) ∈ N2.

Soit C(X, Y ) une matrice d’ordre r et a coefficients dans A[X, Y ]. Si on suppose que le systemeC(X, Y )u = 0 possede des solutions u1, . . . , ur dans M2, alors, en remplacant dans la preuvedu thoreme A[X] par A[X, Y ], on voit que ces solutions sont toutes annulees par un memepolynome dans A[X, Y ].Le resultat reste egalement valable si on considere des k-suites, c’est-a-dire des elements duA-module MNk , pour k dans N∗ (voir le chapitre 3).

Corollaire 1.4.1 [Cas non homogene] On utilise les memes hypotheses et notations que ci-dessus. Soient C(X) dans Mr(P), W 1, . . . ,W r des suites recurrentes lineaires sur M et W levecteur transpose de (W 1, . . . ,W r). On suppose que la matrice C(X) verifie la condition 1.6.Alors le systeme

C(X)u = W (1.7)

possede une unique solution u = (u1, . . . , ur) ou les suites u1, . . . , ur sont des suites recurrenteslineaires sur M ayant meme polynome caracteristique.

PreuveSoit, comme ci-dessus, P (Y ) = Y r + ar−1(X)Y r−1 + · · · + a0(X) ∈ Mr(P)[Y ] le polynomecaracteristique de C(X).On a

C(X)ru+ ar−1(X)C(X)r−1u+ · · ·+ a0(X)u = 0. (1.8)

Or C(X)u = W , donc

C(X)r−1W + ar−1(X)C(X)r−2W + · · ·+ a0(X)u = 0. (1.9)

On pose pour tout i dans {1, . . . , r},

Wi = ai(X)C(X)i−1W avec ar(X) = 1.

1.4. Systemes recursifs 13

Comme les suites recurrentes lineaires sur M forment un P-module, les suites Wi, pouri ∈ {1, . . . , r}, sont des suites recurrentes lineaires sur M r dont un polynome caracteristique,disons Q(X), est le produit des polynomes caracteristiques des suites (W 1, . . . ,W r) (voir re-marques du paragraphe precedent).On pose Λ = W1 + · · · +Wr. C’est encore une suite recurrente lineaire sur M r de polynomecaracteristique Q(X).L’egalite 1.9 s’ecrit alors a0(X)u = −Λ ; ou encore :(

a0(X) 10 Q(X)

)(uΛ

)=

(00

).

Ce qui permet, grace au theoreme, de voir que les composantes de u et de Λ sont des suitesrecurrentes lineaires sur M de polynome caracteristique Q(X)a0(X). 2

Remarques1. Soit G le monoıde des matrices de Mr(A[X]) dont le determinant a un coefficient dominantinversible dans A. Le corollaire ci-dessus signifie que, pour tout g dans G et toute suite re-currente lineaire W d’elements de M r, il existe une suite recurrente lineaire u d’elements deM r telle que gu = W . Autrement dit le module des suites recurrentes lineaires sur M r est(( G-divisible )).On retrouve ainsi le lemme 1 de [31] qui assure que, si A est un corps et r = 1 alors leA[X]-module des suites recurrentes lineaires d’elements de A est divisible.

2. Soit R = Mr(A[X]) et Sr = (M r)N. Pour

u = (u1, . . . , ur) dans Sr et C(X) = (Cij(X))1≤i,j≤r,

on pose

C(X)u =

(r∑j=1

C1j(X)uj, . . . ,r∑j=1

Crj(X)uj

).

Muni de l’addition usuelle des suites et de ce produit Sr est alors un R-module a gauche. Soitu dans Sr. La preuve du theoreme ci-dessus montre que si l’ideal a gauche AnnR(u) contientune matrice C(X) alors il contient (detC(X))Ir, ou Ir designe la matrice identite d’ordre r.En particulier si C(X) a un determinant ayant un coefficient dominant inversible dans A alorsu est une suite de M r recurrente lineaire.

ExemplesSoit A un anneau commutatif unitaire et comme ci-dessus soit M un A-module et S(M) l’en-semble des suites sur M .

Exemple 1Soit r ∈ N∗ et (u1

n, . . . , urn) ∈ S(M)r. Designons, pour k ∈ N∗, par Ck = (ckij)1≤i,j≤r une matrice

d’ordre r a coefficients dans A. Soit, pour n ∈ N, Wn le vecteur de M r, transpose du vecteur(u1

n, . . . , urn). On suppose qu’il existe h ∈ N∗ tel que la suite (Wn)n≥0 verifie :

∀n ∈ N Wn+h = C1Wn+h−1 + · · ·+ ChWn,

14 Chapitre 1. Suites recurrentes lineaires sur un module et systemes recursifs

Les suites (ujn)n≥0, pour j ∈ {1, . . . , r}, sont alors des suites recurrentes lineaires ayant le memepolynome caracteristique. En effet, la relation ci-dessus est equivalente au systeme suivant :

ukn+h −h∑i=1

r∑j=1

cikjujn+h−i = 0 , k ∈ {1, . . . , r} ,

qui represente un cas particulier du systeme 1.4. On retrouve ainsi la premiere proposition de[12].

Les exemples donnes par B. Zay sont des cas particuliers des exemples suivants.

Exemple 2On veut determiner les suites (un), (vn) et (wn) dans S(M) telles que : u1, v1, w1 et w2 soientdans M et, pour tout n ∈ N,

un+1 − un − vn − wn+1 = 0,−un+1 + vn+1 − vn = 0,wn+2 − wn+1 − wn = 0.

(1.10)

La matrice C(X) associee a ce systeme est alors

C(X) =

X − 1 −1 −X−X X − 1 0

0 0 X2 −X − 1

;

la matrice des coefficients dominants est la matrice 1 0 0−1 1 00 0 1

.

Son determinant est egal a 1. Le systeme (5) possede donc une solution unique, formee desuites recurrentes lineaires sur M, de polynome caracteristique

det(C(X)) = (X2 − 3X + 1)(X2 −X − 1).

Exemple 3Soit A un anneau commutatif unitaire. Soit s ∈ N, p1(X), . . . , ps(X) des polynomes sur A etsoit α1, . . . , αs des elements de A. On considere dans S(A) la suite V = (vn)n∈N donnee par :

vn =s∑i=1

pi(n)αni , ∀n ∈ N.

Avec les memes notations, soit a determiner les suites u = (un)n≥0 verifiant :

m∑i=0

aium+i +s∑i=1

pi(n)αni = 0, ∀n ∈ N, (1.11)

1.5. Algebre de Hadamard 15

ou m ∈ N, ai ∈ A,∀i ∈ {1, . . . ,m}.La suite V est dans SR(A) (voir la premiere section). Soit Q(X) un polynome caracteristiquede V . Si on suppose que am est inversible dans A alors, grace au corollaire 1.4.1, la solution ude l’equation ci-dessus est une suite recurrente lineaire de polynome caracteristique

(a0 + · · ·+ amXm)Q(X).

1.5 Algebre de Hadamard

On garde les notations des sections precedentes et on suppose de plus que M est une A-algebreassociative, commutative et unitaire.Soient u = (u(n))n≥0 et v = (v(n))n≥0 deux suites a valeurs dans M . Le produit de Hadamardde u et v est la suite w, notee u¯ v, est donnee par :

w(n) = u(n)v(n), ∀n ∈ N.

Muni de ce produit, le A-module S(M) des suites a valeurs dans M est une A-algebre associat-ive, commutative et unitaire. Qu’en est-il du A-module SR(M) des suites recurrentes lineairesa valeurs dans M ?Dans le cas ou A est un corps et M = A, on savait depuis longtemps que SR(M) est unesous A-algebre de S (voir par exemple [21] pour plus de details). En 1995, U. Cerruti et F.Vaccarino montrent, dans [11], que le resultat est vrai sur tout anneau commutatif unitaire.Dans ce qui suit, nous redemontrons ce resultat, en utilisant le theoreme 1.4.1.

Theoreme 1.5.1 Soient A un anneau commutatif unitaire et M une A-algebre.Soit u = (u(n))n≥0 et v = (v(n))n≥0 deux suites recurrentes lineaires a valeurs dans M .La suite w = u¯ v est alors une suite recurrente lineaire.

PreuveQuitte a multiplier par une puissance convenable de X, on peut supposer que les polynomescaracteristiques des suites u et v sont de meme degre, disons s. Soit

p(X) = Xs − a1Xs−1 − · · · − as et q(X) = Xs − b1X

s−1 − · · · − bs

les polynomes caracteristiques des suites u et v respectivement. On a donc, dans les A-modulesA[X]u et A[X]v les egalites :

Xsu =s∑i=1

aiXs−iu et Xsv =

s∑i=1

biXs−iv (1.12)

On designera par J l’ensemble {1, . . . , s− 1}. On pose, pour tout i ∈ J ,

αi = u¯X iv ; βi = X iu¯ v.

16 Chapitre 1. Suites recurrentes lineaires sur un module et systemes recursifs

En utilisant les egalites 1.12, le calcul de la suite Xsw et des suites Xkβs−k, Xkαs−k, pour

k ∈ J , donne :

Xsw =s∑i=1

aibiXs−iw +

s−1∑k=1

s−k−1∑j=0

(as−jbs−k−jX

jαk + bs−jas−k−jXjβk),

Xkβs−k = as−kXkw +

s−k−1∑j=1

ajXkβs−k−j +

k∑j=1

as−k+jXk−jαj ,

Xkαs−k = bs−kXkw +

s−k−1∑j=1

bjXkαs−k−j +

k∑j=1

bs−k+jXk−jβj .

Ces egalites s’ecrivent :

P0,0w + P0,1α1+ · · · +P0,s−1αs−1 + P0,sβ1+ · · · +P0,2s−2βs−1 = 0P1,0w + P1,1α1+ · · · +P1,s−1αs−1 + P1,sβ1+ · · · +P1,2s−2βs−1 = 0

......

...P2s−2,0w + P2s−2,1α1+ · · · +P2s−2,s−1αs−1 + P2s−2,sβ1+ · · · +P2s−2,2s−2βs−1 = 0

ou, si on pose I = {0, . . . , t − 1} et a0 = b0 = 1, les (Pi,j)(i,j)∈I2 sont des polynomes de A[X]donnes par :

a) P0,0 = Xs −s∑i=1

aibiXs−i ;

b) pour (i, j) ∈ {1, . . . , s− 1} × {0, . . . , s− 2},

P0,j = −s−1∑k=1

bkak+jXs−k−1, Pi,0 = −biXs−i,

P0,s+j = −s−1∑k=1

akbk+jXs−k−1, Ps+j,0 = −ajXs−j ;

c) pour (i, j) ∈ {1, . . . , s− 1}2 et (k, l) ∈ {0, . . . , s− 2}2,

Pi,j =

{0 si j > i,−bi−jXs−i sinon

, Pk+s,l+s =

{0 si l > k,−ak−lXs−k−1 sinon

;

d) pour (i, j) ∈ {1, . . . , s− 1}2 et (k, l) ∈ {0, . . . , s− 2} × {1, . . . , s− 1},

Pi+1,j+s =

0 si i+ j > s− 2,−bs si i+ j = s− 2,−bi+j+2X

s−i−j−2 sinon; Ps+k,l =

0 si k + l > s− 1,−as si k + l = s− 1,−ak+l+1X

s−k−l−1 sinon.

Autrement dit, si W designe le vecteur transpose du vecteur (w, α1, . . . , αs−1, β1, . . . , βs−1) etsi on note C(X) la matrice formee des polynomes (Pi,j)(i,j)∈I2 , on a C(X)W = 0. Comme

degPi,i = s− i, degPs+i,s+i = s− i− 1, ∀(i, j) ∈ {0, . . . , s− 1} × {0, . . . , s− 2}

1.6. Decimation et emboıtement de suites 17

et que, pour tout couple (i, j) dans {0, . . . , 2s− 2}2 tel que i 6= j,

degPi, j < degPi,i et Pi,i unitaire,

on deduit que la matrice des coefficiennts dominants est la matrice identite. Ce qui permetde conclure, grace au theoreme 1.4.1 que le vecteurW est forme de suites recurrentes lineaires.2

RemarqueSi on suppose que A est un anneau noetherien, la conclusion du theoreme est triviale. En effet,la suite w = u ¯ v est dans le sous module engendre par les X iu ¯ Xjv, (i, j) ∈ J2 et doncle A-module A[X]w est de type fini sur A. La suite w est alors recurrente lineaire d’apres laproposition 1.1.1.

ExempleSoit a determiner un polynome caracteristique de la suite w = (unvn)n≥0 ou les suites u et v sonta valeurs dans un anneau commutatif unitaire A et de polynomes caracteristiques respectifs :

X2 − aX − b et X2 − cX − d.

La matrice C(X) du theoreme 1.4.1 est donnee par :

C(X) =

X2 − acX − bd −ad −bc−cX −d X−aX X −b

.

Son determinant, donc un polynome caracteristique de w, est egal a

−X4 + acX3 + (2bd+ a2d+ c2b)X2 + acbdX − b2d2.

On retrouve ainsi, a un signe pres, le meme polynome caracteristique que celui obtenu dans[11].

1.6 Decimation et emboıtement de suites

Soit A un anneau commutatif unitaire, M un A-module et S(M) le A[X]-module des suites avaleurs dans M .

Definition 1.6.1 Soit d ∈ N∗ et u = (u(n))n∈N. Les suites uj, pour j ∈ {0, . . . , d−1}, definiespar :

∀n ∈ N, uj(n) = u(nd+ j),

sont appelees les suites d-extraites (ou d-decimations ou encore sections) de u.Inversement, soit d ∈ N et u, u0, . . . , ud−1, (d + 1) suites dans S(M). On dit que u est unemboıtement des suites u0, . . . , ud−1 si l’egalite suivante est verifiee :

∀j ∈ {0, . . . , d− 1}, ∀n ∈ N, u(nd+ j) = uj(n).

18 Chapitre 1. Suites recurrentes lineaires sur un module et systemes recursifs

Soit d ∈ N et J = {0, . . . , d− 1}. Comme dans la situation classique ou M est un corps (pourles anneaux voir [16]), on definit les applications suivantes :

δd : S(M)→ S(M), ∆d : S(M)→ S(M)d, et Ed : S(M)d → S(M)

par :

a. ∀u ∈ S(M), ∀n ∈ N, δd(u(n)) = u(dn) ;

b. ∀u ∈ S(M), ∆du =(δdu, δdXu, . . . , δdX

d−1u)

;

c. ∀(u0, . . . , ud−1) ∈ S(M)d,∀j ∈ J, ∀n ∈ N,

Ed(u0, . . . , ud−1)(dn+ j) = uj(n).

Ces applications sont des morphismes de A-modules avec ∆d−1 = Ed. Si M est une A-algebre

elles sont alors des morphismes de A-algebres relativement au produit de Hadamard.On trouve dans [16] plusieurs proprietes de ces operateurs sur des anneaux commutatifs uni-taires. Elles se generalisent sans peine au cas de modules sur des anneaux commutatifs.

Proposition 1.6.1 Soient A un anneau commutatif unitaire, M un A-module et d un elementde N∗. On a alors :

a. ∀p ∈ A[X], p(X)δd = δdp(Xd) ;

b. ∀(u0, . . . , ud−1) ∈ S(M)d, XEd(u0, . . . , ud−1) = Ed(u1, . . . , ud−1, Xu0) ;

c. ∀(u0, . . . , ud−1) ∈ S(M)d, p(Xd)Ed(u0, . . . , ud−1) = Ed(p(X)u0, . . . , p(X)ud−1).

PreuveLa demonstration de a. et b. est une simple verification et celle de c. se ramene, grace a lalinearite de l’operateur Ed, au cas ou p(X) est une puissance de X. Le resultat s’etablit ensuitepar une simple recurrence et en utilisant b. 2

Corollaire 1.6.1 Soient A un anneau commutatif unitaire, M un A-module et u un elementde S(M). S’il existe d dans N∗ tel que les suites d extraites de u soient dans SR(M) alors uest dans SR(M).

PreuveSi u0, . . . , ud−1 sont des suites d-extraites de u et si p en est un polynome caracteristique com-mun alors, d’apres la proprite c. de la proposition ci-dessus, le polynome p(Xd) est un polynomecaracteristique de u. 2

On trouve dans [9] ou bien dans [16] que, si u est dans SR(A) alors, pour tout d ∈ N∗, lessuites d-extraites sont dans SR(A). La preuve de ce resultat utilise la decomposition, en fac-teurs lineaires, du polynome caracteristique de u. Nous en proposons ici une demonstration,

1.6. Decimation et emboıtement de suites 19

basee sur le theoreme 1.4.1, et qui, outre sa simplicite, donne le polynome caracteristique desd-decimations de facon plus directe et sans passer par le produit tensoriel de matrices et l’ecri-ture explicite du terme general de la suite u.

Proposition 1.6.2 Soit A un anneau commutatif unitaire, M un A-module, u ∈ SR(M) etd ∈ N∗. Les suites d-extraites de u sont alors dans SR(M).

PreuveSoit u = (u(n))n∈N une suite recurrente lineaire a valeurs dans M de polynome caracteristique

p(X) = Xs − a1Xs−1 − · · · − as ∈ A[X],

et soient α0, . . . , αd−1 les suites d-extraites de u.Si d ≥ s, on peut supposer, quitte a multiplier p par Xd−s, que d = s.Dans ce cas, on a :

Xα0 =d∑i=1

aiαd−i et Xαk =k∑i=1

aiXαk−i +d−k∑i=1

ak+iαd−i, ∀k ∈ {1, . . . , d− 1}.

Si on pose :

C(X) =

ad −X ad−1 ad−2 · · · a1

a1X ad −X ad−1 · · · a2...

......

...ad−1X ad−2X ad−3X · · · ad −X

et si on designe par W le vecteur transpose du vecteur (α0, . . . , αd−1), on obtientC(X)W = 0. Comme le determinant de la matrice C(X) est unitaire (son coefficient dominantest egal a (−1)d), on en deduit que les suites d-extraites de u sont recurrentes lineaires, depolynome caracteristique det(C(X)).Si d < s on peut, ici encore, supposer que s est un multiple de d et on va donner une autrepreuve legerement differente de celle donnee ci-dessus et qui conduit aux memes calculs.Soit donc u = Ed(α0, . . . , αd−1) et f(X) =

∑si=0 fiX

i un polynome caracteristique de u avecfs = 1 et s = dq. En utilisant la proposition 1.6.1 et le fait que

si Ed(u1, u2, . . . , ud) = 0 alors u1 = u2 = · · · = ud = 0 ;

l’egalite f(X)Ed(α0, . . . , αd−1) = 0 entraıne l’existence d’une matrice C(X) dans Md(A[X])telle que C(X)α = 0. Ici α designe le transpose de (α0, . . . , αd−1) et si on pose

Ai(X) =∑

j≡i (mod d)

fjX(j−i)/d, ∀i ∈ {0, . . . , d− 1}

alors la la matrice C(X) est donnee par :

C(X) =

A0(X) A0(X) . . . Ad−2(X) Ad−1(X)

XAd−1(X) A0(X) . . . Ad−3(X) Ad−2(X)...

......

...XA1(X) XA2(X) . . . XAd−1(X) A0(X)

.

20 Chapitre 1. Suites recurrentes lineaires sur un module et systemes recursifs

Remarquons que, pour i ∈ {0, . . . , d− 1}, on passe de la ligne, disons (Li,1, . . . , Li,d), a la lignesuivante en posant

Li+1,1 = XLi,n et Li+1,k = Li,k−1, ∀k ∈ {2, . . . , n}.

La matrice des coefficients dominants est alors une matrice triangulaire inferieure dont leselements diagonaux sont tous egaux a fs. Comme fs est egal a 1, le theoreme 1.4.1 conduitalors au resultat. 2

1.7 Series formelles et suites recurrentes lineaires

Soient A un anneau commutatif unitaire et M un A-module. On identifie naturellement A[X]a une sous-algebre de A[[X]]. Ceci permet d’identifier M [X] = A[X]⊗AM a un sous-modulede M [[X]] = A[[X]]⊗AM .L’application G{·} de S(M) dans M [[X]], qui a une suite u(n)n≥0 associe sa serie generatriceGu(X) =

∑n≥0 u(n)Xn est alors un isomorphisme de A-modules. On a alors la caracterisation

suivante des suites recurrentes lineaires.

Proposition 1.7.1 Soit u ∈ S(M). Les assertions suivantes sont equivalentes :

1. la suite u est dans SR(M) ;

2. Il existe un polynome q de degre h dans A[X] tel que : q(0) = 1 et q(X)Gu(X) soit unpolynome de M [X] de degre inferieur ou egal a h− 1.

PreuveElle est analogue a celle donnee dans [11] dans le cas ou M = A.Soit u ∈ SR(M) de polynome caracteristique p(X) = Xh− a1X

h−1− · · · − ah dans A[X]. Soitq(X) = 1− a1X − · · · − ahXh. On a alors : q(X)Gu(X) = Pu(X) ou

Pu(X) = u(0) + (u(1)− a1u(0))X + · · ·+ (u(h− 1)− a1u(h− 2)− · · · − ah−1u(0))xh−1.

Inversement, si pour u dans S(M), il existe un polynome dans A[X] de degre h tel que

q(X) = 1− q1X − · · · − qhXh et deg(q(X)Gu(X)) ≤ h− 1

alors, par identification, on voit que le polynome Xh − q1Xh−1 − · · · − qh est un polynome

caracteristique de la suite u. 2

Soit d ∈ N∗ et (u, u0, . . . , ud−1) ∈ S(M)d+1. On verifie que, pour que la suite u soit un emboı-tement des suites u0, . . . , ud−1, il faut et il suffit qu’on ait l’egalite

Gu(X) =d−1∑i=0

X iGui(Xd).

Ce qui permet, grace a la proposition precedente de voir d’une autre maniere, que si les suitesu0, . . . , ud−1 sont dans SR(M) il en va de meme de leurs emboıtemets.

1.7. Series formelles et suites recurrentes lineaires 21

RemarqueSi on suppose que M est une A-algebre alors on peut definir le produit de Cauchy (ou deconvolution), de deux suites u et v par :

∀n ∈ N (u ∗ v)(n) =n∑i=0

u(n− i)v(i).

On munit ainsi S(M) d’une structure de A-algebre et on a un isomorphisme de A-algebre entreS(M) et M [[X]] muni du produit naturel des series formelles.La proposition ci-dessus entraıne alors que SR(M) est une sous algebre de (SR(M),+, ∗).Signalons que dans [11] les auteurs montrent qu’il n’existe aucun isomorphisme entre l’algebre(SR(M),+,¯) et une sous-algebre de (SR(M),+, ∗).

22 Chapitre 1. Suites recurrentes lineaires sur un module et systemes recursifs

23

Chapitre 2

Periodes et suites recurrentes lineairesa coefficients polynomiaux

L’etude des suites periodiques sur les corps (finis) et accessoirement sur des anneaux (de Ga-lois par exemple) est tres riche en resultats. Ceci est du probablement a la diversite des do-maines d’applications de ces suites : codes correcteurs d’erreurs et cryptographie, generationde nombres pseudo-aleatoires, arithmetique. . . . Il arrive, de plus en plus, en pratique qu’onait besoin d’objets plus generaux que les corps ou les espaces vectoriels (voir par exemple lescodes sur des modules dans [20]). Ce qui, entre autres choses, motive l’etude approfondie dessuites periodiques sur des modules.

Apres le rappel de la notion de periode de suites recurrentes lineaires sur un module ainsi quequelques proprietes connues, liees a cette notion, nous nous interessons, dans une premierepartie de ce chapitre, a la question de savoir sur quels types d’anneaux commutatifs unitaires,il y a identite entre suites recurrentes lineaires et suites periodiques. Nous montrons que surun anneau commutatif unitaire pour que toute suite recurrente lineaire soit periodique il fautet il suffit que l’anneau soit localement fini (propositions 2.2.1 et 2.2.2).

Dans la deuxieme partie de ce chapitre nous etablissons, d’abord, quelques proprietes dessuites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux (ou suites P -recursives) sur les modulessur des anneaux commutatifs (propositions 2.3.1 et 2.3.2). Nous montrons egalement que lessuites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux sur un anneau noetherien forment unealgebre pour le produit de Hadamard (proposition 2.3.3). Nous nous interessons, ensuite, a laperiode de certaines suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux et a des systemesles generalisant (proposition 2.4.1).

24 Chapitre 2. Periodes et suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux

2.1 Periodes de suites sur un module

Dans cette partie A designe un anneau commutatif unitaire d’element neutre 1 et M un modulesur A. On continuera a noter A[X] par P et l’ensemble des suites sur M par S(M).

Definition 2.1.1 Soit u ∈ S(M). On dit que u est une suite periodique (ou ultimementperiodique) de periode T et de numerique (ou defaut) n0 si AnnP(u) contient le polynomeXn0(XT − 1) ; c’est-a-dire :

Xn0(XT − 1)u = 0.

On dit que la suite u est purement periodique si n0 = 0.Si u est une suite periodique, sa plus plus petite periode est appelee periode primitive et le pluspetit numerique de u est appele numerique primitif.Remarque1. Soit u ∈ S(M). Dire que u est periodique c’est dire qu’il existe (n0, T ) ∈ N2 tel que :

u(n+ T ) = u(n) ∀n ≥ n0.

2. Soit u dans S(M) periodique. Une simple division euclidienne montre que la periode primi-tive de u est un diviseur de toute autre periode de u.

NotationOn designe par SP (M) le sous-ensemble de S(M) forme des suites periodiques.

Proposition 2.1.1 Soient A un anneau commutatif unitaire et M un A-module. L’ensembleSP (M) est un sous-module du P-module SR(M) des suites recurrentes lineaires de M .

PreuveUne suite u periodique est dans SR(M) car elle est annulee par un polynome unitaire.Soient u et v de suites periodiques de periodes et numeriques respectifs (T1, n1) et (T2, n2).Soient a(X) et b(X) deux elements de P et w la suite a(X)u + b(X)v. alors la suite w estperiodique de periode T et de numerique n0 donnes par :

T = ppcm (T1, T2) et n0 = max (n1, n2).

Ce qui signifie que SP (M) est un sous-module du P-module SR(M). 2

Il existe, bien entendu des suites recurrentes lineaires qui ne sont pas periodiques commele montre, par exemple, la suite des entiers dans Z qui est recurrente lineaire de polynomecaracteristique (X − 1)2.

Proposition 2.1.2 Soient A un anneau commutatif unitaire M un A-module et u un elementde SR(M) de polynome caracteristique Xh− a1X

h−1− · · · − ah. Si on suppose que u prend unnombre fini de valeurs alors u est periodique. De plus si ah est inversible dans A alors u estpurement periodique.

2.1. Periodes de suites sur un module 25

PreuveElle est analogue a celle qu’on trouve dans [9] et qui concerne les suites sur des anneaux.On peut egalement l’etablir en utilisant la proposition 1.2.1 et sa remarque. Soit V0 le vecteurinitial de u et φ le morphisme defini dans la proposition 1.2.1. La suite φn(V0) prend un nombrefini de valeurs et donc, il existe T et n0 dans N tels que :

φn0+T (V0) = φn0(V0) et par suite φn0+n+T (V0) = φn0+n(V0),∀n ∈ N

en composant par φn. Si ah est inversible dans A alors φ est bijectif et donc, en composantavec φ−n0 , on obtient : φT (V0) = V0, ce qui implique que

φn+T (V0) = φn(V0) ∀n ∈ N.

Par consequent u est purement periodique. 2

Corollaire 2.1.1 Soient A un anneau commutatif unitaire fini et M un A-module de type fini.Alors SR(M) = SP (M).

PreuveElle provient du fait que si M est un A-module de type fini alors il est fini. 2

Proposition 2.1.3 Soient A un anneau commutatif unitaire, M un A-module et SP (M) le P-module des suites periodiques de M . Soit P (M) (respectivement N(M)) l’ensemble des suitespurement periodiques (respectivement nulles a partir d’un certain rang). Alors P (M) et N(M)sont des P-modules et

SP (M) = P (M)⊕A N(M).

PreuveSoit u dans SP (M) de periode T et de numerique n0. Soit k le plus petit entier naturel tel quekT > n0 et soit l = kT . La suite V = X lu est purement periodique car (XT − 1)(Xn0u) = 0.De plus la suite w = u− v est nulle a partir de l. L’unicite de l’ecriture provient du fait que laseule suite qui est a la fois nulle a partir d’un certain rang et periodique est la suite nulle. 2

RemarqueSoit u dans SP (M). On sait d’apres la proposition 1.2.1 qu’il existe un A-module de type finiM , un endomorphisme φ de M , un morphisme ψ de M dans M et un element v0 de M telsque :

∀n ∈ N u(n) = ψ(φn(v0)).

Si on suppose que A est un corps alors il existe un entier naturel r (le caractere de φ) tel que :

M = Kerφr ⊕A Imφr

avec φ|Kerφr nilpotent et φ|Imφr bijectif. Ce qui montre que l’on a SP (M) = P (M) ⊕A N(M)et de plus r est un majorant du numerique de u.

26 Chapitre 2. Periodes et suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux

Proposition 2.1.4 Soient A un anneau commutatif unitaire, M un A-module et d un entiernaturel positif. Le A-module des suites periodiques sur M est stable par emboıtement et pardecimation.PreuveSoit u dans S(M) et d dans N∗. Soit u0, . . . , ud−1 les suites d-extraites de u. Rappelons, voirproposition 1.6.1, que pour j ∈ {0, . . . , d− 1}, on a : uj = δdX

ju ou δd est l’endomorphisme deS(M) defini par : δdu(n) = u(dn), pour tout n dans N. De plus, on a u = Ed(u0, . . . , ud−1) ouEd est le morphisme d’emboıtement.Supposons les suites u0, . . . , ud−1 periodiques. On peut supposer, grace a la proposition 2.1.1,qu’elles ont le meme numerique et la meme periode. Ce qui signifie qu’il existe un polynomec(X) de la forme c(X) = Xn0(XT − 1) tel que :

∀i ∈ {0, . . . , d− 1} c(X)ui = 0.

Or on a, d’apres la proposition 1.6.1

c(Xd)E(u0, . . . , ud−1) = (c(X)u0, . . . , c(X)ud−1),

donc c(Xd)u = 0 et par consequent u est periodique de periode dT .Inversement, supposons qu’il existe un polynome c(X) de la forme c(X) = Xn0(XT − 1) telque : c(X)u = 0 (c’est-a-dire u periodique). Comme XT − 1 divise XdT − 1, on a egalementc(Xd)u = 0. Ce qui implique δdc(X

d)u = 0. Mais comme δdc(Xd) = c(X)δd, il vient c(X)u0 = 0.

Autrement dit la restriction du A-endomorphisme δd a SP (M) est en fait un endomorphismede SP (M).Pour j ∈ {1, . . . , d − 1}, la suite Xju est periodique. Par consequent, la suite uj = δdX

ju estperiodique. 2

2.2 Anneaux localement finis et suites periodiques

La proposition 2.1.1 suscite la question suivante : sur quels type d’anneaux (de modules) a lieul’egalite SR(M) = SP (M)? Nous donnons, dans cette section, une reponse a cette question.

Proposition 2.2.1 Soit A un anneau commutatif unitaire. On suppose que A est integre et quetoute suite recurrente lineaire sur A est une suite periodique (SR(A) = SP (A)). Alors il existeun nombre premier p tel que A soit isomorphe a un sous-corps de la cloture algebrique Fp de Fp.

PreuveSoit dans S(A) la suite u definie par u(n) = n.1, ∀n ∈ N. La suite u est recurrente lineaire depolynome caacteristique pu(X) = (X − 1)2. Comme p(0) est inversible dans A, u est purementperiodique. Ceci signifie tout simplement que la caracteristique de A est non nulle. Or A estintegre, donc sa caracteristique est un nombre premier, disons p. On peut supposer maintenantque A contient Fp.Si A = Fp c’est fini ; sinon soit a ∈ A \ Fp. La suite v de S(A) definie par

v(n) = an, ∀n ∈ N

2.2. Anneaux localement finis et suites periodiques 27

etant une suite recurrente lineaire de polynome caracteristique X−a, elle est alors periodique.Il existe donc N et T dans N tels que

aN(aT − 1) = 0.

L’integrite de A implique que aT = 1 et par consequent a inversible et a algebrique sur Fp. L’an-neau A est donc un corps algebrique sur Fp et s’identifie, par consequent a un sous corps de Fp.2

RemarqueLa preuve de la proposition montre que si l’anneau A commutatif unitaire n’est pas integre etest tel que SR(A) = SP (A) alors A est de caracteristique non nulle et tout element regulier(non diviseur de zero) de A est une racine de l’unite. Ce qui entraıne, par exemple, que si Aest local alors A est la reunion de U(A) qui est forme des racines de l’unite et de l’ideal formedes elements nilpotents.

Theoreme 2.2.1 Soit A un anneau commutatif unitaire. Une condition necessaire et suffis-ante pour que toute suite recurrente lineaire sur A soit une suite periodique est que A soit decaracteristique non nulle et que les elements reguliers de A soient les racines de l’unite.

PreuveOn vient de voir que la condition est necessaire. Montrons qu’elle est suffisante. Soient m lacaracteristique de A et u une suite recurrente lineaire sur A. Les valeurs de la suite u sontalors dans un sous-anneau B de A de type fini sur Z/mZ. Autrement dit, il existe s ∈ N etα1, . . . , αs dans A tels que :

B = Z/mZ[α1, . . . , αs] et u(n) ∈ B, ∀n ∈ N.

On va montrer que B est un anneau fini.1. Supposons d’abord que m = pr ou p est un nombre premier et r est dans N.Soit φ le morphisme canonique d’anneaux de Z/mZ[X1, . . . , Xs] dans B defini par

φ(Xi) = αi, ∀i ∈ {1, . . . , s}.

L’anneau B est alors isomorphe au quotient de Z/mZ[X1, . . . , Xs] par le noyau de φ.Comme Z/mZ[X1, . . . , Xs] est local d’unique ideal maximal M =< p,X1, . . . , Xs >, B estaussi local d’unique ideal maximal φ(M).Soit b ∈ B. Si b est regulier alors, par hypothese, c’est une racine de l’unite. Donc b est entiersur Z/mZ.Si b est un diviseur de zero alors il est dans φ(M) car B est local. Mais dans ce cas (voir [2])1 + by est inversible dans B pour tout y dans B. En particulier, 1 + b est inversible dans B etdonc c’est une racine de l’unite. Ce qui implique que b est entier sur Z/mZ.On a donc montre que B est entier sur Z/mZ. Comme tout anneau entier et de type fini surun anneau fini est fini. Il en resulte que l’anneau B est fini.

28 Chapitre 2. Periodes et suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux

2. Soitl ∈ N∗, (r1, . . . , rl) ∈ N∗l et m = pr11 · · · prll

la decomposition de m en nombres premiers.Posons, pour tout i ∈ {1, . . . , l}, Bi = Z/prii Z[α1, . . . αs]. On a alors l’isomorphisme d’anneauxB ' B1 × · · · × Bl. On identifie B1, . . . , Bl a des sous anneaux de B. Comme, pour touti ∈ {1, . . . , l}, tout element de Bi est soit diviseur de zero, soit une racine de l’unite, Bi est finid’apres le 1. On a donc B fini.En conclusion, la suite u est periodique. 2

Remarques1. La preuve de la proposition, jointe a celle du theoreme, montre qu’une condition necessaireet suffisante pour qu’une suite recurrente lineaire soit periodique est que les suites geometriqueset arithmetiques soient periodiques.

2. Il existe des anneaux non integres infinis et tels que SR(A) = SP (A). Soit m un entier naturelcompose et B l’anneau des polynomes sur Z/mZ a une infinite denombrable d’indetermineescommutatives :

B = Z/mZ[Xi ; i ∈ N].

Soit N ∈ N \ {0, 1} et J l’ideal de B engendre par l’ensemble {XNi − 1 ; i ∈ N}. Posons

A = B/J et αi = Xi + J, ∀i ∈ N.

Alors A est un anneau isomorphe a Z/mZ[αi ; i ∈ N]. Une suite recurrente lineaire u sur A estalors dans un sous anneau A0 de A de la forme

Z/mZ[β1, . . . , βs] ou s ∈ N et {β1, . . . , βs} ⊂ {αi ; i ∈ N}.

Comme tout element de A0 est entier sur Z/mZ (racine d’un polynome de la formeXn0+T −Xn0) l’anneau A0 est de type fini sur Z/mZ et est donc fini et par consequent, la suiteu est periodique.

Definition 2.2.1 Soit A anneau commutatif unitaire. On dira que A est localement fini sitout sous-anneau de A de type fini (sur le sous anneau de A engendre par 1) est fini.

La preuve du theoreme ci-dessus montre que si A est localement fini alors toute suite recurrentesur A est une suite periodique. En fait, la reciproque est encore vraie.

Proposition 2.2.2 Soit A anneau commutatif unitaire. Pour que A soit localement fini il fautet il suffit que toute suite recurrente lineaire sur A soit periodique.

PreuveMontrons que la condition est suffisante. D’abord, comme on l’a deja vu, la caracteristique deA est non nulle. Soit, comme ci-dessus, m cette caracteristique et soit B un sous anneau de A

2.3. Suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux 29

type fini sur Z/mZ. Supposons que B = Z/mZ[a1, . . . , as] ou s est dans N et a1, . . . , as sontdans A. Comme les suites geometriques sont periodiques on deduit que a1, . . . , as sont entierssur A et donc B est fini.

RemarquesSoit A anneau commutatif unitaire. Si A est localement fini alors les sous-anneaux et les imageshomomorphes de A sont localement finis.Remarquons egalement qu’un produit fini d’anneaux localement finis est un anneau localementfini.Signalons aussi que si B est un anneau entier et de type fini sur A et si A est localement finialors B l’est egalement. En particulier, soient h un entier naturel positif et φ (resp. Q) unendomorphisme (resp. une matrice ) de Ah (resp. dans Mh(A)). Si l’anneau A est localementfini alors A[φ] (resp. A[Q]) est un anneau localement fini. Ceci est une consequence du theoremede Cayley-Hamilton sur des anneaux commutatifs (voir [7]).

Proposition 2.2.3 Soient A un anneau commutatif et M un A-module. Les suites recurrenteslineaires sur M sont les suites periodiques sur M dans les cas suivants :

1. A est localement fini,

2. tout sous module de type fini de M est fini.

PreuveElle decoule du fait que toute suite recurrente u sur M est en fait dans un sous-module M0 deM de type fini. Si on est dans la situation du 2. de la proposition alors M0 est fini et donc,comme on l’a vu, u est periodique.Si on est dans la situation 1 de la proposition, la suite u est, d’apres la propostion 1.2.1, donneepar :

u(n) = ψ(φn(v0)) ∀n ∈ N.ou ψ est une forme lineaire, φ un endomorphisme de Mh

0 et v0 un element de Mh0 , pour

un certain h dans N. Or, d’apres la remarque ci-dessus, A[φ] est localement fini, donc u estperiodique. 2

2.3 Suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux

On garde les memes notations que dans la section precedente et on identifie, pour n ∈ N,l’element n · 1 et n.

Definition 2.3.1 Soient A un anneau commutatif unitaire, M un A-module et u une suiteS(M). On dit que u est une suite recurrente lineaire a coefficients polynomiaux (ou suiteP -recursive) s’il existe h ∈ N et des polynomes P0(X), . . . , Ph(X) dans P tels que :

P0(n)u(n+ h) =h∑i=1

Pi(n)u(n+ h− i) ∀n ≥ 0. (2.1)

30 Chapitre 2. Periodes et suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux

Si, pour tout n dans N, l’element P0(n) est egal a 1, on dit que la suite u est une suite recur-rente lineaire a coefficients polynomiaux unitaire.

NotationL’ensemble des suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux unitaires est note SpU(M).

Dans le cas ou A est un corps de caracteristique nulle beaucoup de resultats concernant lastructure de Sp(A) (cloture pour differentes operations, lien avec les series D-finies et les sys-temes holonomes,. . . ) sont connus. Le lecteur desireux d’en savoir plus pourra consulter [4],[14], [24] ou bien [32].

Remarques1. On a SR(M) ⊂ SpU(M).2. Soient h ∈ N∗ et u une suite recurrente lineaire a coefficients polynomiaux unitaire (P0 = 1)verifiant 2.1. Posons, pour tout n ≥ 0,

U(n) = (u(n), u(n+ 1), ..., u(n+ h− 1))t,

ou wt designe le transpose de w, pour tout vecteur w de Ah. La suite U = (U(n))n≥0 de S(Mh)verifie U(n+ 1) = Q(n)U(n), ∀n ∈ N avec

Q(n) =

0 1 0 . . . 00 0 1 . . . 0...

...... . . .

...Ph(n) Ph−1(n) Ph−2(n) . . . P1(n)

∈Mh(A), ∀n ≥ 0. (2.2)

Si les polynomes P1, . . . , Ph sont constants on retrouve la matrice compagnon d’une suite recur-rente lineaire.3. Les resultats qui suivent seront valables si on remplace, dans le definition des suitesP -recursives, polynomes par fraction rationnelle dont le denominateur ne s’annule pas en n · 1quand n parcourt N.

Soit dans EndA(S(M)), l’algebre des endomorphismes de S(M), le morphisme τ defini, pourtout u dans S(M), par :

τ(u)(n) = nu(n), ∀n ∈ N.On identifie, comme d’habitude A au sous anneau de EndA(S(M)) forme par les homothetieset le morphisme de decalage avec l’action du polynome X et on considere la sous algebreR = A[τ,X] de EndA(S(M)) engendree sur A par X et τ . Cette algebre n’est pas commutativemais on a :

Xτ = (τ + 1)X.

Soitu ∈ S(M) et P (τ,X) = p0(τ) + p1(τ)X + · · ·+ ph(τ)Xh ∈ R.

La suite v = Pu de S(M) est donnee par :

v(n) = p0(n)u(n) + p1(n)u(n+ 1) + · · ·+ ph(n)u(n+ h), ∀n ∈ N.

2.3. Suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux 31

On definit ainsi une structure de R-module a gauche sur S(M).

Nous donnons, ci-apres, quelques proprietes qui generalisent dans un sens celles connues dansle cas ou A est un corps commutatif et donc A[τ,X] est un anneau de Ore. Rappelons (voir parexemple [14]) qu’un anneau non nul est dit de Ore a gauche (resp. a droite) si deux quelconquesde ses elements non nuls admettent un multiple commun non nul a gauche (resp. a droite).

Proposition 2.3.1 Soit u un element de S(M). Les assertions suivantes sont alors equi-alentes :

1. la suite u est dans SpU(M),

2. l’annulateur de u dans A[τ ][X] contient un polynome unitaire (en X),

3. le R-module a gauche Ru est un A[τ ]-module de type fini.

PreuveLe 2 de la proposition est une simple traduction de l’egalite 2.1. Il reste a montrer que 1 ou 2est equivalent a 3.Supposons que u ∈ SpU(M) et verifie l’egalite :

u(n+ h) =h∑i=1

Pi(n)u(n+ h− i) ∀n ≥ 0.

Ceci signifie que :

Xh+nu =h∑i=1

Pi(τ)Xn+h−iu ∀n ∈ N.

On a donc Ru = A[τ ]u+ · · ·+ A[τ ]Xh−1u.Inversement, supposons que :

Ru = A[τ ]u1 + · · ·+ A[τ ]us ou s ∈ N et (u1, . . . , us) ∈ S(M)s.

Pour i ∈ {1, . . . , s} la suite ui est dans Ru ; il existe donc Pi(τ,X) dans R tel que ui = Piu.Soit d le maximum des degres en X des polynomes P1, . . . , Ps. Les elements u,Xu, . . . , Xduforment alors une famille A[τ ]-generatrice de Ru. Maintenant si on prend h dans N tel queh > d alors Xhu s’ecrit comme combinaison A[τ ]-lineaire de u,Xu, . . . , Xdu et donc AnnA[τ ](u)contient un polynome unitaire en X. 2

Proposition 2.3.2 Soient A un anneau commutatif, M un A-module et P (τ,X) = p0(τ) +p1(τ)X + · · ·+Xh ∈ R. On a :

– si A est noetherien alors l’ensemble SpU(M) des suites recurrentes lineaires a coefficientspolynomiaux unitaires est un sous-module du R-module S(M) ;

32 Chapitre 2. Periodes et suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux

– si M est de type fini alors LM(P ), l’ensemble des elements de S(M) annules par P , est unsous-module de type fini du A-module SpU(M). De plus si M est libre de rang r alors LM(P )est libre de rang rh.

Preuve1. Supposons que A est noetherien. Soient u et v deux elements de SpU(M) et a et b dans R.On a R(au + bv) est contenu dans Ru + Rv. Comme Ru et Rv sont de type fini sur A[τ ], lemodule Ru + Rv est donc de type fini sur A[τ ]. Or A[τ ] est noetherien car A l’est, donc toutsous module de Ru + Rv est de type fini. En particulier R(au + bv) est de type fini sur A[τ ],ce qui veut dire, compte tenu de la proposition precedente, que la suite au+ bv est recurrentelineaire a coefficients polynomiaux unitaire.2. La seconde assertion de la proposition decoule du fait que l’application φ de LM(P ) dansMh definie par :

φ(u) = (u0, . . . , uh−1), ∀u ∈ LM(P )

est un isomorphisme de A-modules. 2

Proposition 2.3.3 Soient A un anneau commutatif unitaire noetherien et Sp(A) le A-moduledes suite recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux unitaires sur A. Muni du produit deHadamard Sp(A) est une A-algebre associative commutative et unitaire.

PreuveIl suffit de montrer que le produit de Hadamard de deux suites recurrentes lineaires a coefficientspolynomiaux unitaires u et v est une suite recurrente lineaire a coefficients polynomiaux.Soient

p(τ,X) = Xh − ph−1(τ)Xh−1 − · · · − p0(τ) et q(τ,X) = X t − qt−1(τ)X t−1 − · · · − q0(τ)

dans R tels que : pu = 0 et qv = 0. On a :

R(u¯ v) ⊂h−1∑i=0

t−1∑j=0

A[τ ](X iu¯Xjv).

Comme A[τ ] est noetherien R(u¯ v) est donc un A[τ ]-module de type fini et par consequentu¯ v est une suite recurrente lineaire a coefficients polynomiaux unitaire. 2

2.4 Systemes periodiques

On s’interesse ici a des systemes generalisant les suites recurrentes lineaires a coefficients po-lynomiaux. On montre, en particulier, que les suites recurrentes lineaires a coefficients polyno-miaux unitaires sur un anneau de caracteristique non nulle, sont des suites recurrentes lineaires.

2.4. Systemes periodiques 33

Soient A un anneau commutatif , M un A-module, h un entier naturel non nul et E = Mh.Soit J = {1, . . . , h}. On se donne, pour tout (i, j) dans J2, une application fij de A dans A.On pose, pour tout x dans A,

Q(x) = (fij(x)) ∈Mh(A).

On s’interesse aux elements de S(E) qui sont solutions du systeme :

U(n+ 1) = Q(n)U(n), ∀n ∈ N. (2.3)

Les suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux unitaires verifient, comme on l’a vuci-dessus, un systeme analogue.

On fait egalement la supposition suivante :

(∃q ∈ N∗) (∀n ∈ N) Q(n+ q) = Q(n). (2.4)

Ceci est le cas par exemple si A est un anneau localement fini ou plus generalement de carac-teristique non nulle.

Definition 2.4.1 Avec les memes notations, on appelle q-matrice initiale du systeme 2.3 lamatrice Q de Mh(A) donnee par :

Q = Q(q − 1) · · ·Q(1)Q(0).

NotationPour i ∈ {1, . . . , q − 1} la matrice

Q(i− 1) · · ·Q(1)Q(0)

de Mh(A) sera notee Q∗(i).

Proposition 2.4.1 Soit U = U(n)n≥0 un element de S(E). On suppose que U est solutiondu systeme 2.3 et la condition 2.4 satisfaite. Soient U0, . . . , Uq−1 les suites q-extraites de U .Alors :

1. U0(n) = QnU(0) ∀n ≥ 0 ;

2. Ui(n) = Q∗(i)QnU(0) ∀n ≥ 0, ∀i ∈ {1, . . . q − 1}.

Preuve.Elle s’etablit par recurrence sur n.1) C’est clair pour n = 0 et n = 1. Supposons donc que U(qn) = QnU(0) on a alors

U(q(n+ 1)) = Q(qn+ q − 1)...Q(qn)U(qn)= Q(q − 1)...Q(0)U(qn) ( car Q(qk + n) = Q(n), ∀(k, n) ∈ N2)= Qn+1U(0).

34 Chapitre 2. Periodes et suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux

2) La deuxieme partie de la proposition resulte de ce qui precede et des egalites

U(qn+ i) = Q(qn+ i− 1)U(qn+ i− 1)= Q(qn+ i− 1)...Q(qn)U(qn)= Q(i− 1)...Q(0)U(qn)= Q∗(i)U(qn), ∀n ≥ 0, ∀i ∈ {1, . . . , q − 1}. 2

Remarque.Cette proposition constitue une generalisation des premiers resultats de Polosuev obtenus dans[27].

Corollaire 2.4.1 Soit U = U(n)n≥0 un element de S(E). On suppose que U est solution dusysteme 2.3 et la condition 2.4 satisfaite. Alors U est une suite recurrente lineaire sur E depolynome caracteristique le polynome caracteristique P (Xq) ou P (X) est le polynome caracte-ristique de la q-matrice initiale Q.En particulier, si A est de caracteristique non nulle alors toute solution, dans S(E), du systeme2.3 est une suite recurrente lineaire.

PreuveSi U est solution du systeme 2.3 alors les suites U0, . . . , Uq−1 sont, en vertu des propositions2.4.1 et 1.2.1, des suites recurrentes lineaires de meme polynome caracteristique (le polynomecaracteristique de Q). Or un emboıtement de suites recurrentes lineaires est une suite recurrentelineaire. On a donc U ∈ SR(E). 2

Corollaire 2.4.2 Soient A un anneau localement fini et M un A-module. On a :

1. toute solution dans S(E) du systeme 2.3 est periodique,

2. le A-module des solutions de 2.3 est somme directe du sous-module des suites nulles a partird’un certain rang et du sous-module des suites purement periodiques.

En particulier toute suite recurrente lineaire a coefficients polynomes unitaire sur M est pe-riodique.

PreuveSi A est localement fini alors la condition 2.3 est verifiee ; le reste decoule des proprietes dessuites recurrentes lineaires (voir le corollaire 2.1.1). 2

ExempleSoient A un anneau commutatif unitaire de caracteristique 3 et E = A2.Soit U la suite de E donnee par :

U(0) ∈ E et U(n+ 1) =

(n2 + 1 n3

n− 1 n+ 1

)U(n), ∀n ∈ N.

Ici, pour reprendre les notations ci-dessus, q = 3 et la matrice q-initiale est

Q =

(1 01 1

).

2.4. Systemes periodiques 35

Les suites U(3n)n∈N, U(3n+ 1)n∈N, U(3n+ 2)n∈N sont alors des suites recurrentes lineaires surE, de polynome caracteristique :

det(XI −Q) = X2 +X + 1.

Par consequent la suite U est une suite recurrente lineaire de polynome caracteristique :

X6 +X3 + 1.

Soit B le sous-anneau de A engendre, sur Z/3Z, par les coefficients de Q. En considerant lasuite U sur B, qui est localement fini (ici il est egal a Z/3Z), on se rend compte que U estperiodique de plus petite periode divisant 9.

2.4.1 Suites regulieres sur un corps commutatif

Soit u une suite recurrente lineaire a coefficients polynomiaux unitaire sur A (u ∈ Sp(A)). Onsuppose que u verifie 2.1 et qu’il existe q ∈ N∗ tel que :

Pi(n+ q) = Pi(n), ∀n ≥ 0, ∀i ∈ {1, . . . , h}.La suite U definie par U(n) = (u(n), . . . , u(n+ h− 1))t , ∀n ∈ N est alors une solution dusysteme 2.3 avec Q comme en 2.2.

Definition 2.4.2 On dit que la suite u est une suite reguliere si le determinant de la matricesuivante est inversible dans A.

∆ =

u(0) u(q) . . . u((h− 1)q)u(1) u(q + 1) . . . u((h− 1)q + 1)

......

...u(h− 1) u(q + h− 1) . . . u((h− 1)q + h− 1)

.

Proposition 2.4.2 Soit u comme ci-dessus et Q = Q(q − 1) · · ·Q(0) la matrice q-initiale dusysteme 2.3. On suppose que A est un corps. Alors la suite u est une suite reguliere si etseulement si les polynomes caracteristique et minimal de Q sont egaux.

Preuve.Soit Φ un endomorphisme associe a Q relativement a la base canonique de Ah et soit u0 la suiteδqU , c’est-a-dire u0(n) = U(qn), ∀n ∈ N. On a vu (proposition 2.4.1) que u0(n) = Φn(u0(0))∀n ≥ 0.Dire que le determinant de ∆ est non nul revient a dire que

{u0(0),Φ(u0(0)), ...,Φh−1(u0(0))

}est une base de E = Ah ou que u0(0) est un vecteur cyclique ; ce qui equivaut a l’egalite despolynomes caracteristique et minimal. 2

Remarques.1. En utilisant cette caracterisation des suites regulieres il vient rapidement que, si la suite uest reguliere, alors les suites (ui(n))n≥0 , (0 ≤ i ≤ p − 1) ont toutes meme longueur et memeperiode.2. La proposition donne une C.N.S. d’existence de suites regulieres et constitue une reponse ala question posee dans [26].

36 Chapitre 2. Periodes et suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux

2.4.2 Exemples

Soient A un anneau commutatif unitaire et ℘ un ideal maximal de A tel que A/℘ soit fini. Onpose K = A/℘. Les exemples les plus courants d’une telle situation sont :

a) A = Z, ℘ = pZ ou p est premier ;

b) A est l’anneau d’entiers d’un corps de nombres et ℘ maximal dans A ;

c) A = Zp l’anneau des entiers p−adiques et ℘ = pZp.

Soit s une suite recurrente lineaire a coefficients polynomiaux unitaire a valeurs dans A. Ons’interesse a la periode de s modulo ℘ c’est a dire a la periode de l’image u de s par le morphismecanonique de AN dans KN. La suite u est dans SpU(K). Elle verifie la meme recurrence acoefficients polynomiaux que s mais consideres sur K.L’image (U(n))n≥0 de la suite U est alors dans (Kh)N et verifie la relation 2.1 avec

Q(n) ∈Mh(K), ∀n ∈ N.

On applique les resultats de la premiere partie de cette section pour avoir des informations surla periode de (U(n))n≥0 et par consequent sur la periode de s modulo ℘.On remarquera que les resultats restent valables si les P1(X), . . . , Ph(X) sont dans K (X) ettels que leurs denominateurs ne soient pas nuls en n.1K , pour tout n dans N.

Exemple 1.Soit s = (s(n))n≥0 l’element de S(Z) donne par :

s(n+ 2) = ns(n+ 1) + (n2 + 1)s(n), ∀n ≥ 0 avec s(0) = 0 et s(1) = 1.

Calculons par exemple la periode de la suite s modulo 3.Ici q = 3 et, pour n ∈ N,

Q(n) =

(0 1

n2 + 1 n

).

Donc

Q = Q(2)Q(1)Q(0) =

(1 21 1

).

Le polynome caracteristique de Q est le polynome X2 +X − 1. Il est irreductible sur F3 et estdonc egal au polynome minimal de Q. On en deduit :1. l’existence de suites regulieres ;2. que la suite s est un emboıtement de (s(3n))n≥0 , (s(3n+ 1))n≥0 et (s(3n+ 2))n≥0 ;3. et qu’enfin, comme toute racine α de X2 + X − 1 est primitive, 8 est une periode de(s(n), s(n+ 1))n≥0 (voir par exemple [21]) et donc, d’apres la proposition 2.1.4, 24 = 3× 8 estune periode de s modulo 3.

2.4. Systemes periodiques 37

Exemple 2.Soit s = (s(n))n≥0 la suite definie sur Z par :

s(n+ 2) = (4n+ 5)s(n+ 1) + 2s(n), ∀n ≥ 0, avec s(0) = s(1) = 1.

On veut calculer sa periode modulo 21. Dans [35] on lit que Lehmer a conjecture que la periodeprimitive de cette suite appartient a l’ensemble {21, 42, 63, 84, 126, 252}. Comme dans le casdes suites recurrente lineaires (voir [21]) la periode T de s modulo 21 est alors le ppcm desperiodes modulo 3 et modulo 7.

Periode modulo 3.Avec les notations des paragraphes precedents, on a ici q = 3 et pour n ≥ 0,

Q(n) =

(0 12 4n+ 5

)et Q =

(0 21 0

).

Le polynome caracteristique de Q sur F3 est X2 + 1. Il est irreductible sur F3. Par ailleurstoute racine α de X2 + 1 verifie α4 = 1. D’ou T1 la periode de s modulo 3 est donnee par

T1 = q × ord(α) = 3× 4 = 12.

Periode modulo 7.Soit T2 cette periode. Un calcul analogue donne T2 = 42.Donc T = ppcm(42, 12) = 84.

38 Chapitre 2. Periodes et suites recurrentes lineaires a coefficients polynomiaux

39

Chapitre 3

Multi-suites recurrentes et seriesrationnelles

L’etude des k-suites recurrentes lineaires ou tableaux recurrents est relativement recente. Ontrouvera dans Kurakin et al ([20]) un historique de la question et un bon nombre de resultatssur ce sujet et ses differentes applications.

Nous nous interessons essentiellement aux proprietes des k-suites recurrentes lineaires sur unanneau commutatif unitaire, liees au produit de Hadamard et aux operations de decimationet d’emboıtement de suites. Nous donnerons quelques nouvelles caracterisations de ces multi-suites en termes de matrices et comme sommes de suites recurrentes lineaires (voir la proposi-tion 3.2.2 et le corollaire 3.2.2). Nous montrons egalement que les k-suites recurrentes lineairessur un anneau commutatif unitaire forment une algebre pour le produit de Hadamard, stablepar decimation et emboıtement (voir le theoreme 3.2.1).

Nous utiliserons ces resultats pour approfondir l’etude de certains sous-ensembles de l’algebredes series formelles ; en particulier l’algebre des series reconnaissables (les series rationnellesdont les coefficients sont des k-suites recurrentes lineaires). Apres avoir donne quelques proprie-tes des series rationnelles reconnaissables (propositions 3.3.2, 3.3.4 et 3.3.5), nous demontrons,en particulier que sur un corps commutatif, les series reconnaissables Hadamard-inversiblessont les emboıtements de series super-geometriques (theoreme 3.3.2).

40 Chapitre 3. Multi-suites recurrentes et series rationnelles

3.1 Definitions et notations

Soient k ∈ N∗ et A un anneau commutatif unitaire.On designe par Sk(A) le A-module des multi-suites de A. C’est-a-dire l’ensemble

{u : Nk → A}

muni de l’addition et du produit par les scalaires usuels.Un element (n1, . . . , nk) ∈ Nk est note simplement n.Soit n ∈ Nk et m ∈ Nk. On pose

|n| = n1 + · · ·+ nk,

n+m = (n1 +m1, . . . , nk +mk),

n ·m = (n1 ·m1, . . . , nk ·mk).

L’ecriture n < m (resp. n ≤ m ) veut dire :

∀i ∈ {1, . . . , k}, ni < mi (resp. ni ≤ mi).

Dans toute la suite l’algebre des polynomes en les variables commutatives x1, . . . , xk sera noteeA[x] ou Pk et pour n = (n1, . . . , nk) ∈ Nk, le monome xn1

1 · · ·xnkk sera designe par xn.

Definition 3.1.1 Les elements de Sk(A) sont appeles des k-suites sur A.Soient u = (u(n))n∈Nk et v = (v(n))n∈Nk deux elements de Sk(A). Le produit de Hadamard deu et v est la k-suite u¯ v donnee par :

(u¯ v)(n) = u(n)v(n), ∀n ∈ Nk.

Muni de ce produit Sk(A) est une A-algebre associative, commutative et unitaire d’elementneutre pour le produit la k-suite e definie par e(n) = 1, ∀n ∈ Nk.

On aura besoin dans la suite de la notion d’emboıtement des k-suites.

Definition 3.1.2 Soit

q ∈ N∗, I = {0, . . . , q − 1}, u ∈ Sk(A) et {ui : i ∈ Ik} ⊂ Sk(A).

On dit que u est un emboıtement des k-suites ui (i ∈ Ik) si

u(qn+ i) = ui(n), ∀i ∈ Ik ∀n ∈ Nk.

Soit F un sous-ensemble fini de Nk, f(x) =∑

i∈F aixi un element de Pk et u = (u(n))n∈Nk

une k-suite. On definit, comme dans le cas des 1-suites, le produit de f par u comme etant lasuite v donnee par :

v(n) =∑i∈F

aiu(n+ i), ∀n ∈ Nk.

3.1. Definitions et notations 41

On munit ainsi Sk(A) d’une structure de Pk-module et l’on a :

∀f ∈ Pk, ∀(u, v) ∈ Sk(A)2, f(u¯ v) = fu¯ fv.

RemarqueSoit

q ∈ N∗, I = {0, . . . , q − 1}, u ∈ Sk(A) et {ui : i ∈ Ik} ⊂ Sk(A).

Si u est un emboıtement des suites u0,...,0, . . . , uq−1,...,q−1 alors ui = xiu0,...,0 ∀i ∈ Ik.

Afin d’introduire la notion de k-suite recurrente lineaire on a besoin de la definition suivante.

Definition 3.1.3 ([20]) Soit I un ideal de Pk. On dit que I est unitaire s’il contient despolynomes unitaires en une variable de la forme p1(x1), . . . , pk(xk).

On peut supposer, quitte a multiplier par un element inversible de A, que les polynomesp1(x1), . . . , pk(xk) ont des coefficients dominants inversibles.

Proposition 3.1.1 Soient A un anneau commutatif unitaire et I un ideal de l’algebre Pk despolynomes sur A. On suppose que A est noetherien. Une condition necessaire et suffisante pourque I soit unitaire est que I soit cofini.

Preuve1. Montrons que la condition est necessaire. Supposons donc que I contient les polynomesunitaires q1(x1), . . . , qk(xk) de degres respectifs d1, . . . , dk.Soit J l’ideal de Pk engendre par q1(x1), . . . , qk(xk). Le A-module Pk/J est alors un A-modulede type fini engendre par

{xi11 xi22 · · ·xikk + J : 0 ≤ ij ≤ dj, 1 ≤ j ≤ k}.

Comme J ⊂ I, le A-module Pk/I est un quotient de Pk/J et est donc de type fini.2. Montrons, moyennant l’hypothese sur A, que la condition est suffisante. Supposons donc que

Pk/I = Ag1 + · · ·+ Ags

ou s ∈ N∗ et pour tout i ∈ {1, . . . , s}, gi ∈ Pk et gi designe gi + I.Designons par t une indeterminee quelconque parmi x1, . . . , xk et par t sa classe modulo I.Comme A est noetherien, tout sous module de Pk/I est de type fini. En particulier le sousmodule engendre par {tn / n ∈ N} est de type fini. Ce qui signifie que I contient un polynomeunitaire en t. 2

RemarqueSi on se place dans la situation ou k est different de 1 et A non noetherien alors les ideauxcofinis ne sont pas forcement unitaires.Soit K un corps commutatif, A = K[ti, si / i ∈ N∗] l’algebre des polynomes en une infinite

42 Chapitre 3. Multi-suites recurrentes et series rationnelles

denombrable d’indeterminees commutatives et I l’ideal de A[x, y] engendre par x2y2 − xy etles elements de la forme xi − sixy et yi − tixy pour i ∈ N \ {0}. L’ideal I est cofini :

A[x, y]/I = A(1 + I) + A(xy + I),

mais il n’est pas unitaire. Pour le voir, il suffit de supposer le contraire et comparer les coeffi-cients des monomes de meme degre pour arriver a une contradiction.

Definition 3.1.4 Soient A un anneau commutatif unitaire et Pk l’algebre des polynomes enles indeterminees x1, . . . , xk. Soit u une k-suite. On dit que u est une k-suite recurrente lineairesi l’ideal AnnPk(u) de Pk est un ideal unitaire.Si q1(x1), . . . , qk(xk) sont des polynomes unitaires dans l’ideal AnnPk(u) alors on dira que cesont des polynomes caracteristiques de u et l’ideal qu’ils engendrent sera appele ideal caracte-ristique de u.

Exemples1. Les suites recurrentes lineaires sur A sont les 1-suites.

2. Soient s un entier naturel positif et U1, V1, . . . , Us, Vs des suites recurrentes lineaires sur A.Soit u = (u(m,n))(m,n)∈N2 la 2-suite d’elements de A donnee par :

∀(m,n) ∈ N2 u(m,n) =s∑i=1

Ui(m)Vi(n).

C’est une 2-suite recurrente lineaire. Son annulateur dans P2 = A[x, y] contient les polynomesunitaires q1(x) et q2(y) ou q1(x) (resp. q2(x)) est le produit des polynomes caracteristiques deU1, . . . , Us (resp. V1, . . . , Vs) dans A[x] ( resp. A[y]).

3. Soit k ∈ N∗, (a1, . . . , ak) ∈ Ak et b ∈ A. La k-suite u de Sk(A) definie par :

u(n1, . . . , nk) = ban11 · · · ankk ∀(n1, . . . , nk) ∈ Nk (3.1)

est une k-suite recurrente lineaire. Son ideal caracteristique contient les polynomes

x1 − a1, . . . , xk − ak.

On l’appelle suite super-geometrique.

NotationL’ensemble des k-suites recurrentes lineaires sur A sera note SRk(A).

Proposition 3.1.2 ([20]) Soient A un anneau commutatif unitaire et k un entier naturel po-sitif. On a :1. SRk(A) est un Pk-module ;

3.2. Caracterisations des k-suites recurrentes lineaires 43

2. soit u dans Sk(A). Si u est dans SRk(A) alors Pku est un A-module de type fini. Inverse-ment, si A est noetherien et Pku est de type fini sur A alors u est dans SRk(A).

Preuve1. Les polynomes caracteristiques de combinaisons Pk-lineaires de k-suites reecurrentes lineairessont obtenus en prenant les produits des polynomes caracteristiques.

2. Soient u ∈ Sk(A) et φu l’application de Pk dans Pku definie par φu(p) = pu, pour tout pdans Pk. Cette application est un morphisme de Pk-modules de noyau l’ideal AnnPk(u) et on aPk/AnnPk(u) ' Pku. Le point 2. est alors une traduction en termes de k-suites de la proposition3.1.1. 2

3.2 Caracterisations des k-suites recurrentes lineaires

Pour plus de clarte et afin d’alleger les notations on ne considerera que des 2-suites (k = 2).On notera A[x, y] l’algebre des polynomes sur A. Un element u de S2(A) sera note u =u(m,n)(m,n)∈N2 . Les resultats qui vont suivre sont, sauf mention expresse du contraire, va-lables pour tout k ∈ N∗.

Proposition 3.2.1 ([19]) Soient A un anneau commutatif unitaire et u une 2-suite sur A.Les assertions suivantes sont equivalentes :

1. la 2-suite u est recurrente lineaire ;

2. il existe (d, e) ∈ N∗2 et des constantes a1, . . . , ad, b1, . . . , bd dans A tels que :

∀(m,n) ∈ N2

{u(m+ d, n) = a1u(m+ d− 1, n) + · · ·+ adu(m,n)u(m,n+ e) = b1u(m,n+ e− 1) + · · ·+ beu(m,n).

(3.2)

PreuveOn verifie que les egalites 3.2 sont equivalentes a xd−a1x

d−1−· · ·−ad et xe− b1xe−1−· · ·− be

sont dans l’ideal annulateur de u. 2

Une autre caracterisation des k-suites recurrentes lineaires est la generalisation de la proposi-tion 1.2.1 qui permet de voir les suites recurrentes lineaires comme des iteres de morphismesde modules.

Proposition 3.2.2 Soient A un anneau commutatif unitaire et u une 2-suite sur A. Les as-sertions suivantes sont equivalentes :

1. la suite u est dans SR2(A) ;

44 Chapitre 3. Multi-suites recurrentes et series rationnelles

2. il existe des A-modules E1 et E2 libres de rang finis, des applications lineaires φ ∈ EndA(E1),ψ ∈ EndA(E2) et f ∈ EndA(E1, E2) ; une forme lineaire α de E1 dans A et un vecteur v0 ∈ E1

tels que :u(m,n) = αψmfφn(v0), ∀(m,n) ∈ N2.

Preuve1. L’assertion 2 implique l’assertion 1. Ceci provient du fait que tout endomorphisme g d’unA-module de type fini est solution d’une equation de la forme P (g) = 0 ou P est un polynomeunitaire a coefficients dans A. Ce qui equivaut d’ailleurs au fait que toute matrice carre acoefficients dans A est racine de son polynome caracteristique (voir [7]). Les polynomes ca-racteristiques de la suite u sont ici les polynomes caracteristiques des matrices associees auxapplications φ et ψ.2. Inversement, soit u ∈ SR2(A). Elle verifie donc une recurrence comme en 3.2. Posons, pouri ≤ e,

v(m, i) = (u(m, i), . . . , u(m+ d− 1, i)t

ou wt designe le transpose du vecteur w. On a alors :

v(m+ 1, i) = Q1v(m, i), ∀m ∈ N

ou Q1 est la matrice compagnon du polynome xd − a1xd−1 − . . . − ad. ce qui signifie que

v(m, i) = Qm1 v(0, i) ∀m ∈ N.

Soit maintenant dans Ae, pour (j, n) ∈ N2,

U(j, n) = (u(j, n), . . . , u(j, n+ e− 1)).

On a alors :U(j, n)t = Qn

2U(j, 0)t, ∀(j, n) ∈ N2,

ou Q2 est la matrice compagnon du polynome xe − b1xe−1 − . . .− be.

Soient ψ (resp. φ1) l’endomorhisme de Ad (resp. Ae) qui correspond a la matrice Q1 (resp. Q2)relativement aux bases canoniques.Soit f0, . . . , fd−1 les applications de Ae sur A donnees par :

fj((x0, x1, . . . , xd−1)) = xj, ∀j ∈ {0, . . . , d− 1} ∀(x0, x1, . . . , xd−1) ∈ Ad.

On a donc, pour j ∈ {0, . . . , d− 1} et n ∈ N,

u(j, n) = fjφn1 (U(j, 0)).

Soient f : (Ae)d → Ad et Φ : (Ae)d → Ae les applications lineaires definies par :

f((Y0, . . . , Yd−1)) = (f0(Y0), . . . , fd−1(Yd−1)), Φ((Y0, . . . , Yd−1)) = (φ1(Y0), . . . , φ1(Yd−1)),

pour tout (Y0, . . . , Yd−1) ∈ (Ae)d. En posant :

E1 = (Ae)d, E2 = Ad, et α = pr1(Ad, A),

3.2. Caracterisations des k-suites recurrentes lineaires 45

on obtient, pour (m,n) ∈ N2, u(m,n) = αψmfφnU ou U est le vecteur de (Ae)d donne par :

U = (U(0, 0), . . . , U(d− 1, 0))t.

On a en fait le diagramme :

(Ae)d → (Ae)d → Ad → Ad → AU → φnU → v(0, n) → ψm(v(0, n)) → u(m,n).

(3.3)

ouv(0, n) = (u(0, n), . . . , u(d− 1, 0))t,φnU = (φnU(0, 0), . . . , φnU(d− 1, 0)).

Ce qui acheve la demonstration. 2

RemarqueEn termes de matrices la proposition veut dire qu’une 2-suite u est recurrente lineaire s’il existedes matrices Q1,Q2, P , un vecteur colonne U et un vecteur ligne a tels que :

u(m,n) = aQm1 PQ

n2U, ∀(m,n) ∈ N2.

Corollaire 3.2.1 Soient A un anneau commutatif unitaire et u une 2-suite recurrente lineairesur A. On suppose que A est localement fini et que les polynomes caracteristiques de u ont descoefficients constants inversibles dans A. Alors la 2-suite u est periodique : il existe deux entiersnaturels T1 et T2 tels que :

u(m,n) = u(m+ T1, n) = u(m,n+ T2), ∀(m,n) ∈ N2.

PreuveSoient Q1 et Q2 comme dans la remarque ci-dessus. Comme les polynomes caracteristiques deu ont des coefficients constants inversibles dans A, il s’ensuit que les matrices Q1 et Q2 sontinversibles et donc (voir remarques sur les anneaux ou les elements reguliers sont inversibles(section 2.2)) il existe T1 et T2 tels que : QT1

1 = Q2T2 = 1. Par consequent

u(m,n) = u(m+ T1, n) = u(m,n+ T2), ∀(m,n) ∈ N2. 2

On retrouve ainsi par une autre methode le theoreme 1 de [19].

Corollaire 3.2.2 Soient A un anneau commutatif unitaire et u une 2-suite sur A. Les asser-tions suivantes sont equivalentes :

1. u est une 2-suite recurrente lineaire ;

2. il existe t dans N∗ et des 1-suites u1, v1, . . . , ut, vt recurrentes lineaires sur A tels que :

u(m,n) =t∑i=1

ui(m)vi(n), ∀(m,n) ∈ N2. (3.4)

46 Chapitre 3. Multi-suites recurrentes et series rationnelles

PreuveOn a deja vu que des sommes de la forme 3.2.2 sont des 2-suites recurrentes lineaires (voir lesexemples de la definition 3.1.4). Montrons la reciproque.Soit u dans SR2(A). On a alors, avec les notations de la proposition 3.2.1,

u(m,n) = αψmfφn(v0), ∀(m,n) ∈ N2.

Soient {e1, . . . , en1} et {f1, . . . , fn2} des bases de E1 et E2 respectivement.Si v0 = λ1e1 + · · ·+ λn1en1 , on a, pour tout (m,n) dans N2,

u(m,n) = αψm

(n1∑i=1

λifφn(ei)

)= αψm (

∑n1

i=1 λiXi(n))

ou, pour tout n ∈ N et tout i dans {1, . . . , n1} , Xi(n) = fφn(ei) est un vecteur de E2 formede suites recurrentes lineaires (voir proposition 1.2.1).

Soit, pour tout i dans {1, . . . , n1},

Xi(n) =

n2∑j=1

vi,j(n)fj.

On a donc, pour tout (m,n) dans N2,

u(m,n) = α∑n1

i=1 λi∑n2

j=1 vi,j(n)ψm(fj)

=

n1∑i=1

n2∑j=1

vi,j(n)Yj(m)

ou, pour tout j ∈ {1, . . . , n2}, la suite (Yj(m))m≥0 = (αψm(fj))m≥0 est une suite recurrentelineaire. Ce qui acheve la demonstration. 2

Theoreme 3.2.1 Soit A un anneau commutatif et unitaire. L’ensemble des 2-suites recur-rentes lineaires sur A est une A-algebre pour le produit de Hadamard stable par emboıtementet decimation.

Preuve1. On sait que l’ensemble SR2(A) des 2-suites recurrentes lineaires sur A est un A-module.Montrons qu’il est stable pour le produit de Hadamard.Soient u et v deux elements de SR2(A). Il existe, compte tenu du corollaire 3.2.2, des entiersnaturels positifs p et q et des suites recurrentes lineaires u1, v1, . . . , up, vp et s1, t1, . . . , sq, tq telsque :

∀(m,n) ∈ N2, u(m,n) =

p∑i=1

ui(m)vi(n) et v(m,n) =

q∑i=1

si(m)ti(n).

3.2. Caracterisations des k-suites recurrentes lineaires 47

Soit w = u¯ v. Alors, pour tout (m,n) ∈ N2,

w(m,n) = u(m,n)v(m,n)

=

p∑i=1

ui(m)vi(n)

q∑i=1

si(m)ti(n)

=∑i,j

ui(m)vi(n)sj(m)tj(n)

Or on a vu que le produit de deux suites recurrentes lineaires sur A est une suite recurrentelineaire. On a donc :

∀i ∈ {1, . . . , p}, ∀j ∈ {1, . . . , q},(ui(m)sj(m))m≥0 ∈ SR(A) et (vi(n)tj(n))n≥0 ∈ SR(A).

Par consequent w ∈ SR2(A).

2. Soit d ∈ N∗ et I = {0, . . . , d − 1}. Soient u et ui,j ((i, j) ∈ I2) des 2-suites sur A telles queu soit un emboıtement des ui,j pour (i, j) ∈ I2.Suppposons que u est recurrente lineaire. Pour montrer que les 2-suites ui,j ((i, j) ∈ I2) le sontaussi, il suffit de montrer que la suite u0,0 est recurrente lineaire car

ui,j = xiyiu0,0 ∀(i, j) ∈ I2.

On a :

∀(m,n) ∈ N2, u(m,n) =

p∑i=1

ui(m)vi(n),

ou les suites u1, v1, . . . , up, vp sont recurrentes lineaires. Donc

∀(m,n) ∈ N2, u(dm, dn) =

p∑i=1

ui(dm)vi(dn).

Comme les d-decimations de suites recurrentes lineaires sont des suites recurentes lineaires, ilvient u0,0 est une 2-suite recurrente lineaire.Inversement, supposons que les suites u0,0, . . . , ud−1,d−1 sont des 2-suites recurrentes lineaires.Soient q1(x) et q2(y) des polynomes caracteristiques communs a toutes ses suites. On verifiealors que, si on pose u = Ed(u0,0, . . . , ud−1,d−1), ou Ed est l’operation d’emboıtement, alors

xdu = Ed(xu0,0, . . . , xud−1,d−1),ydu = Ed(yu0,0, . . . , yud−1,d−1).

Par consequent, les polynomes q1(xd) et q2(yd) sont des polynomes caracteristiques de u. 2

48 Chapitre 3. Multi-suites recurrentes et series rationnelles

3.3 Series rationnelles et series reconnaissables

3.3.1 Proprietes de base

Comme dans les sections precedentes A est un anneau commutatif unitaire. On designera parA[[x, y]] l’algebre des series formelles en les variables commutatives x et y. On identifiera A[x, y]a la sous-algebre de A[[x, y]] formee des series ayant un nombre fini de coefficients non nuls.Le groupe des elements inversibles de A sera note U(A).Si A est integre on notera K son corps des fractions et on designera par K((x, y)) le corps desfractions de A[[x, y]].Les resultats de cette section sont valables si on considere un nombre fini arbitraire d’indeter-minees.

A toute suite a = a(m,n)(m,n)∈N2 de S2(A) on associe sa serie generatriceGa(x, y) dans A[[x, y]] :

Ga(x, y) =∑

(m,n)∈N2

a(m,n)xmyn.

On definit ainsi un isomorphisme de A-modules G{·} de S2(A) dans A[[x, y]].Si on definit le produit de Hadamard de deux series quelconques Ga et Gb de A[[x, y]] par

Ga ¯Gb = Ga¯b,

alors G{·} est un isomorphisme de A-algebres.

Definition 3.3.1 Soient A un anneau commutatif et

f(x, y) =∑

(m,n)∈N2

a(m,n)xmyn ∈ A[[x, y]].

On dit que f est une serie rationnelle s’il existe p et q dans A[x, y] tels que :

q(0, 0) ∈ U(A) et qf = p. (3.5)

NotationL’ensemble des series rationnelles est note R2(A) ou tout simplement R(A) si aucune confusionn’est a craindre.

Exemples1. L’ensemble R(A) contient A[x, y].

2. L’ensemble R(C) est tout simplement l’ensemble des series formelles sur C qui represententle developpement en series de Taylor au voisinage de zero des fractions rationnelles dont ledenominateur a un coefficient constant non nul.

Remarques1. Soient A un anneau commutatif et S le sous-ensemble de A[x, y] forme des polynomes dont

3.3. Series rationnelles et series reconnaissables 49

le coefficient constant est inversible dans A. S est une partie multiplicative dans A[[x, y]]. Ona alors

R2(A) = S−1A[x, y]

et l’egalite 3.5 devient

f = p/q dans S−1A[[x, y]].

2. Dans le cas des 1-suites recurrentes lineaires sur un anneau commutatif unitaire, on saitqu’une suite est recurrente lineaire si et seulement si sa serie generatrice est rationnelle (voir[21]). On verra dans la suite que dans le cas des k-suites (k ≥ 2) la situation est differente.

3. L’ensemble R(A) des series rationnelles est manifestement un sous-module du A-module desseries formelles sur A. Cependant il n’est pas toujours stable pour le produit de Hadamardcomme le montre l’exemple standard suivant (voir [1] ou [24]) :La serie

f(x, y) =∑

(m,n)∈N2

(m+ nn

)xmyn

est dans R2(A) car (1− x− y)f = 1, mais (voir par exemple [1]) son carre de Hadamard n’estpas dans R2(A)

(f ¯ f)(x, y) =∑

(m,n)∈N2

(m+ nn

)2

xmyn

=((1− x− y)2 − 4xy

)− 12

4. Le A-module des series rationnelles est cependant une A-algebre pour le produit de Cauchy(le produit usuel des series).Si f et g sont deux series telles que :

q1f = p1, q2g = p2, (q1(0), q2(0)) ∈ U(A)2,

alors

q1q2gf = p1p2 q1(0)q2(0) ∈ U(A).

Proposition 3.3.1 Soient A un anneau commutatif unitaire et A0 le sous anneau de A en-gendre par 1 (il est isomorphe a Z/lZ pour un certain l dans N). Soit

f(x, y) =∑

(m,n)∈N2

a(m,n)xmyn

un element de R2(A). La 2-suite a est alors a valeurs dans un sous anneau de type fini sur A0.PreuveEn effet, supposons que f verifie 3.5. Posons :

p(x, y) =∑

0≤i≤dx

∑0≤j≤dy

pijxiyj et q(x, y) =

∑0≤i≤ex

∑0≤j≤ey

qijxiyj

50 Chapitre 3. Multi-suites recurrentes et series rationnelles

ou dx, dy, ex, ey sont dans N et q(0, 0) ∈ U(A). On obtient, par identification,si 0 ≤ m ≤ dx et 0 ≤ n ≤ dy alors :

a(m,n) = pm,n +∑−qija(m− i, n− j) ;

sinon :a(m,n) =

∑−qija(m− i, n− j)

ou les differentes sommes sont prises sur les couples (i, j) tels que

(i, j) 6= (0, 0), 0 ≤ i ≤ min(ex,m) et 0 ≤ j ≤ min(ey, n).

La 2-suite est donc dans le sous anneau de A engendre par 1, les coefficients des polynomes pet q et les premiers termes. 2

RemarqueLes egalites ci-dessus montrent que si f est rationnelle alors il existe r dans N tel que :

1. pour tout i ∈ {0, . . . , r} la suite a(i, n)n≥0 est recurrente lineaire ;

2. pour tout j ∈ {0, . . . , r} la suite a(m, j)m≥0 est recurrente lineaire ;

3. pour tout (m,n) dans N2 tel que m > r ou n > r :

a(m,n) =∑

0≤i≤min(m,r)

∑0≤j≤min(n,r)

−qija(m− i, n− j).

Definition 3.3.2 Soient A un anneau commutatif unitaire et f un element de A[[x, y]]. On ditque f est une serie reconnaissable s’il existe des polynomes q1(x), q2(y) et p(x, y) dans A[x, y]tels que :

q1q2f = p, (q1(0), q2(0)) ∈ U(A)2, deg p < degx q1, deg p < degy q2. (3.6)

NotationL’ensemble des series reconnaissables sera note Rr2(A) ou bien Rr(A).

Remarques1. Dans le cas d’une variable (k = 1) les series reconnaissables sont les series rationnelles. Sik ≥ 2, l’inclusion Rr(A) ⊂ R(A) peut etre stricte : soit A = Q, par exemple, et f la serie deA[[x, y]] associee a la suite u definie par

∀(m,n) ∈ N2 u(m,n) =

{1 si m = n ;0 sinon.

La serie f est rationnelle car (1−xy)f = 1, mais elle n’est pas reconnaissable puisque (1−xy)est irreductible dans A[x, y].

3.3. Series rationnelles et series reconnaissables 51

2. Dans ([17]) l’auteur appelle serie reconnaissable, toute serie a une variable dont les coefficientsforment une suite recurrente lineaire, c’est-a-dire une serie rationnelle. Nous adoptons cetteterminologie, dans le cas de plusieurs variables, pour des series dont les coefficients sont desk-suites recurrentes lineaires comme le montre la proposition ci-dessus.

Proposition 3.3.2 Soient A un anneau commutatif unitaire et a un element de S2(A). Lesassertions sont equivalentes :

1. La 2-suite a est recurrente lineaire.

2. La serie generatrice Ga(x, y) est reconnaissable.

Preuve1. Soit a = a(m,n)(m,n)∈N2 une 2-suite recurrente lineaires de polynomes caracteristiques :

q1(x) = xd − a1xd−1 − · · · − ad et q2(y) = xe − b1x

d−1 − · · · − be dans A[x, y].

Posons :

q∗1(x) = 1− a1x− · · · − adxd et q∗2(y) = 1− b1x− · · · − bexe dans A[x, y].

On a alors q∗1(0) = q∗2(0) = 1. Si f designe la serie generatrice de a alors :

q∗1(x)f = q∗1(x)∑n≥0

yn∑m≥0

a(m,n)xm

=∑n≥0

yn

(q∗1(x)

∑m≥0

a(m,n)xm

)

=∑n≥0

yn

(d−1∑j=0

b(j, n)xj

)

ou, pour j ∈ {0, . . . , d− 1},

b(j, n) = a(j, n)− a1a(j − 1, n)− · · · − aja(0, n),

car q1a = 0. La multiplication par q∗2(y) donne :

q∗2(y)q∗1(x)f = q∗2(y)∑n≥0

yn

(∑n≥0

ynd−1∑j=0

b(j, n)xj

)

=d−1∑j=0

xj∑n≥0

b(j, n)yn

=d−1∑j=0

xje−1∑i=0

cjiyi

ou, pour i ∈ {0, . . . , e− 1},

cji = b(j, i)− b1b(j, i− 1)− · · · − bib(j, 0),

52 Chapitre 3. Multi-suites recurrentes et series rationnelles

car q2a = 0.Finalement, q∗2(y)q∗1(x)f est un polynome de degre en x (resp. en y) au plus egal a d− 1 (resp.e− 1).

2. Inversement, soit f =∑

m,n a(m,n)xmyn dans A[[x, y]]. On suppose que f verifie 3.6. Onpeut supposer que q1(0) = q2(0) = 1. Soit donc

q1(x) = adxd + · · ·+ 1 et q2(y) = bey

e + · · ·+ 1.

En identifiant les coefficients des series interveant dans l’egalites on se rend compte que lespolynomes xd+ad−1x

d−1+· · ·+ad et ye+be−1ye−1+· · ·+be sont des polynomes caracteristiques

de a. 2

Corollaire 3.3.1 Soit A un anneau commutatif unitaire. L’ensemble des series reconnais-sables sur A est une sous-algebre de l’algebre A[[x, y]] munie du produit de Hadamard.

PreuveElle decoule de la structure de A-algebre de SR2(A) . Voir la proposition 3.2.1. 2

Remarques1. Soit a = a(m,n)(m,n)∈N2 un element de SR2(A). Supposons qu’il existe d dans N∗ tel que asoit un emboıtement des 2-suites aij, ((i, j) ∈ {0, . . . , d− 1}2). Alors ceci se traduit sur la seriegeneratrice de a par :

Ga(x, y) =d−1∑j=0

d−1∑i=0

xiyjGaij(xd, yd).

On dit, dans ce cas, que la serie Ga est un emboıtement des series Gaij , pour

(i, j) ∈ {0, . . . , d− 1}2.

2. La proposition precedente, jointe au theoreme 3.2.1, montre que l’algebre des series recon-naissables est stable par emboıtement et decimation.

Soient ∂∂x

et ∂∂y

les derivations habituelles sur A[[x, y]]. On pose

D1 = x∂

∂xet D2 = y

∂y.

La A-algebre A [D1, D2] opere alors naturellement sur A [[x, y]].

Soitf =

∑(m,n)∈N2

a(m,n)xmyn ∈ A[[x, y]] et P (D1, D2) ∈ A [D1, D2] .

On a alors :P (D1, D2)f =

∑(m,n)∈N2

P (m,n)a(m,n)xmyn

3.3. Series rationnelles et series reconnaissables 53

Autrement dit la multiplication de la 2-suite a par la 2-suite (minj)(m,n)∈N2 est equivalente a

l’application de Di1D

j2 a la serie f .

On alors la

Proposition 3.3.3 Les sous-ensembles R2(A) et Rr2(A) sont stables par derivation.

PreuveSoit f(x, y) =

∑(m,n)∈N2 a(m,n)xmyn dans A[[x, y]] et P (D1, D2) un element de A [D1, D2].

Pour montrer que Pf est un element de R2(A) (resp. Rr2(A)) si f est un element de R2(A)(resp. Rr2(A)), il suffit de le faire pour P = D ou D ∈ {D1, D2}.Supposons que qf = p ou p et q sont dans A[x, y]. On a alors : D(qf) = D(p) ou encore

q2D(f) = qD(p)−D(q)p.

Ce qui montre que si f est un element de R2(A) (resp. Rr2(A)) alors D(f) est un element deR2(A) (resp. Rr2(A)). 2

Cas ou A est un corps algebriquement clos

Proposition 3.3.4 Soit K un corps commutatif algebriquement clos. Alors toute serie recon-naissable sur K est une combinaison K-lineaire de series de la forme :

1

(1− αx)s× 1

(1− βx)tou (α, β) ∈ K∗2 et (s, t) ∈ N2.

PreuveSoit f =

∑(m,n)∈N2 a(m,n)xmyn dans Rr(K). On sait qu’il existe t dans N∗ et des suites

recurrentes lineaires u1, v1, . . . , ut, vt tels que :

∀(m,n) ∈ N2 a(m,n) = u1(m)v1(n) + · · ·+ ut(m)vt(n).

Il suffit donc d’etablir la proposition pour des series Gw telles que :

w(m,n) = u1(m)v1(n), ∀(m,n) ∈ N2.

Or K est algebriquement clos, donc les suites u1, v1 sont telles que (voir par exemple [9]) :

u1(m) =r∑i=1

Ai(m)αmi , v1(n) =s∑i=1

Bi(n)αni , ∀(m,n) ∈ N2,

ou r et s sont dans N, A1, . . . , Ar, B1, . . . , Bs sont dans K[x] et α1, . . . , αr, β1, . . . , βs sont dansK∗. La 2-suite w est donc une combinaison lineaire de 2-suites de la forme mknlαmβn ou k et

54 Chapitre 3. Multi-suites recurrentes et series rationnelles

l sont dans N et α et β sont dans K.Soit g(x, y) =

∑(m,n)∈N2 mknlαmβnxmyn. On a :

g(x, y) = Dk1D

l2

(1

1− αx ×1

1− βy

)=

Pk(x)

(1− αx)k+1× Ql(y)

(1− βy)l+1

ou Pk, Ql sont des polynomes tels que : 0 ≤ degPi ≤ i; 0 ≤ degQj ≤ j.Ce qui acheve la demonstration. 2

Proposition 3.3.5 Soient K un corps commutatif algebriquement clos de caracteristique nulleet f =

∑(m,n)∈N2 a(m,n)xmyn dans K[[x, y]]. Les assertions suivantes sont alors equivalentes :

1. f est une serie reconnaissable ;

2. il existe s dans N, P1, . . . , Ps dans K[x, y], α1, . . . , αs, β1, . . . , βs dans K∗ tels que :

a(n,m) =s∑j=1

Pj(n,m)αnj βmj , ∀(n,m) ∈ N2. (3.7)

Avec (αj, βj) 6= (αi, βi) pour i et j distincts dans {1, . . . , s}. De plus, si f est donnee l’ecritureci-dessus est unique.

Preuve1. Montrons que 2 implique 1. L’egalite 3.7 montre que la 2 suite est somme de 2-suites de laforme mknlαmβn qui sont des recurrentes lineaires car de la forme (mkαm) · (nlβn). Donc a estreconnaissable d’apres la proposition 3.2.2.

2. Inversement, soit f une serie reconnaissable. Elle est donc, d’apres la proposition 3.3.4,combinaison lieaire d’elements de la forme 1

(1−αx)r· 1

(1−βx)set donc de series generatrices de la

forme ∑(m,n)∈N2

A(m)B(n)αmβnxmyn,

ou A et B sont des polynomes. Ce qui entraıne que les coefficients de f ont la forme demandee.2

Dans [29] l’auteur appelle serie semi-simple toute serie rationnelle (en une variable) dont lescoefficients forment une suite recurrente lineaire dont le polynome caracteristique n’a que deszeros d’ordre de multiplicite egal a 1. On a un analogue dans le cas de plusieurs variables.

Definition 3.3.3 Soient K un corps commutatif et f =∑

(m,n)∈N2 a(m,n)xmyn dans K[[x, y]].

On dit que f est une serie semi-simple si pour tout (m,n) dans N2, a(m,n) est de la forme

3.3. Series rationnelles et series reconnaissables 55

3.7 dans K avec Pi constant pour tout i dans {1, . . . , s}.

NotationL’ensemble des series semi-simples sur K sera note Rs2(K).

RemarqueL’ensemble des series semi-simples est une sous-algebre pour le produit de Hadamard deRr2(K).

Proposition 3.3.6 Soit K un corps commutatif de caracteristique non nulle algebriquementclos. Alors toute serie reconnaissable sur K est un emboıtement de series semi-simples.

PreuveElle est analogue a celle donnee par Reutenauer dans [29].Soit f une serie reconnaissable sur K que l’on supposera de caracteristique p. Comme f estcombinaison lineaire d’elements de la forme 1

(1−αx)s· 1

(1−βx)t, il suffit de demontrer la proposition

pour de telles series.On peut supposer que s ≥ 1 et t ≥ 1 (si s = 0 ou r = 0, c’est la proposition 3 de [29]. Il existealors r,, s, et k dans N tels que : r + r, = s + s, = pk. (On peut supposer r ≤ s. Soit k le pluspetit entier tel que s ≤ pk. On prend alors s, = pk − s et r, = pk − r).Soit q = pk on a :

1

(1− αx)r(1− βy)s=

(1− αx)r′(1− βy)s

(1− αx)q(1− βy)q

=(1− αx)r

′(1− βy)s

(1− (αx)q)(1− (βy)q)

= (1− αx)r′∑n≥0

(αqxq)n × (1− βy)s′∑n≥0

(βqyq)n

= (∑i≤r′

∑j≤s′

cijxiyj)(∑m,n

αqnβqmxqnyqm)

= (∑i≤r′

∑j≤s′

xiyj)(∑m,n

cijαqnβqmxqnyqm).

Soit fij(x, y) =∑

m,n cijγnδmxnym ou γ = αq et δ = βq. On a alors

f(x, y) =∑

0≤i≤r′≤q

∑0≤j≤s′≤q

xiyjfij(xq, yq).

Avec fij semi-simple, ∀(i, j) ∈ {0, . . . , q}2. On pose fij = 0 si i > r′ ou j > s′. Ce qui achevela demonstration. 2

RemarqueOn suppose que K est de caracteristique nulle. Soit (α, β) ∈ K2, (k, l) ∈ N2 et f(x, y) =

56 Chapitre 3. Multi-suites recurrentes et series rationnelles

∑a(m,n)xmyn ∈ K[[x, y]]. La serie∑

(m,n)∈N2

mknlαmβna(m,n)xmyn

n’est autre que la serie Dm1 D

n2f(αx, βy). Ce qui montre que si un sous-ensemble E de K[[x, y]]

est stable par derivation et les substitutions x → αx et y → βy alors E est stable pour leproduit de Hadamard par les series reconnaissables.

Quelques questions

Soient k un entier naturel positif, K un corps commutatif algebriquement clos, E une partienon vide de K[[x1, . . . , xk]] et

M(E) = {f ∈ K[[x1, . . . , xk]] ; f ¯ g ∈ E ∀g ∈ E}

l’ensemble des multiplicateurs de E .

On verifie que M(E) est une K-algebre pour le produit de Hadamard.

Si k = 1, il est evident que M(R1(K)) = R1(K). Si en outre on suppose que K est le corpsdes nombres complexes, J.-P. Bezivin montre dans ([6]) que Rk(K) =M(Al1(K)) ou Al1(K)designe le sous-ensemble de K[[x]] forme des series algebriques, c’est-a-dire les elements deK[[x]] qui sont algebriques sur K(x).La question de savoir si on a toujours l’egalite est encore ouverte (voir [6]).

Maintenant si k ≥ 2 et K de caracteristique nulle on a, en vertu de la remarque ci-dessus,

Rrk(K) ⊂M(E), pour E = Rk(K) ou E = Alk(K),

Les inclusions ci-dessus sont-elles des egalites?

3.3.2 Elements Hadamard-inversibles

Soient K un corps commutatif, A une des parties Rrk(K), Rk(K) et f(x) =∑

n∈Nk a(n)xn unelement de A.

Definition 3.3.4 On dit que f est Hadamard-inversible dans A si

∀n ∈ Nk, a(n) 6= 0 et∑n∈Nk

1

a(n)xn ∈ A.

Si A = Rrk(K) l’ensemble des elements Hadamard-inversibles est donc le groupe des elementsinversibles de l’algebre (A,¯).

Dans le cas d’une variable et quelle que soit la caracteristique de K, les series rationnellesHadamard-inversibles sont les emboıtements de series geometriques. Plus precisemment, on ale

3.3. Series rationnelles et series reconnaissables 57

Theoreme 3.3.1 ([29] ou [3]) Si k = 1, les series rationnelles Hadamard-inversibles sontles series dont les coefficients sont non nuls et qui s’ecrivent

f(t) = A(t) +d−1∑j=0

cjtj

1− αjtd,

ou

d ∈ N, (c0, . . . , cd−1) ∈ L∗d, (α0, . . . , αd−1) ∈ L∗d et A(t) ∈ L[t].

Ici L designe une extension de degre fini de K.

On montre dans cette section, en s’inspirant des resultats en un variable dus a Reutenauer([29]), que les elements Hadamard-inversibles de l’algebre Rrk(K) des series reconnaissablessont les emboıtements de series super-geometriques ; c’est-a-dire, en continuant a ne traiter quele cas k = 2, les series de la forme : ∑

(m,n)∈N2

aαmβnxmyn

ou a, α, β sont dans K∗.On aura besoin de la proposition suivante :

Proposition 3.3.7 Soient A un anneau commutatif unitaire integre, G un groupe abelien detype fini et A [G] l’algebre de G sur A. On a alors :

1. l’anneau A [G] est integre si et seulement si G est libre ;

2. si le groupe G est libre alors le groupe des elements inversible de A[G] est l’ensemble

{ag/a ∈ K∗, g ∈ G} .

La preuve de cette proposition, donnee par P. M. Cohn dans [15], dans le cas ou A est uncorps, s’etend sans peine au cas ou l’anneau A est integre. 2

Soient t1 et t2 deux nouvelles indeterminees commutatives. On designe par G le groupe multi-plicatif K∗ ×K∗ et par A la K-algebre de G definie sur K [t1, t2]. Les elements de A sont dela forme :

s∑i=1

Pi(t1, t2)(αi, βi)

ou s est dans N, P1, . . . , Ps sont dans K[t1, t2] et (α1, β1), . . . , (αs, βs) sont des elements distinctsde G.

On a alors la

58 Chapitre 3. Multi-suites recurrentes et series rationnelles

Proposition 3.3.8 Soit K un corps commutatif de caracteristique nulle et algebriquementclos. Alors Rr2(K) et A sont isomorphes en tant que K-algebres.

PreuveSoit Φ l’application de A dans R0(K) definie par :

Φ

∑(α,β)∈G

Pα,β(t1, t2)(α, β)

=∑

(n,m)∈N2

a(n,m)xnym, (3.8)

ou

a(n,m) =∑

(α,β)∈GPα,β(n,m)αnβm, ∀(n,m) ∈ N2.

L’application Φ est K-lineaire est bijective grace a la proposition 3.3.5.Montrons que Φ est un morphisme d’anneaux. Soient E et F dans A tels que

E =t∑

j=1

Pj(t1, t2)(αj, βj) et F =s∑j=1

Qj(t1, t2)(δj, γj).

On a alors

EF =s∑j=1

t∑j=1

Pj(t1, t2)Qi(t1, t2)(αjδi, βjγi).

Par consequent :

Φ(EF ) =∑

(n,m)∈N2

(∑i,j

Pj(n,m)Qi(n,m)(αjδi)n(βjγi)

m

)xnym

=

(∑j

Pj(n,m)αnj βmj

)(∑i

Qi(n,m)δni γmi

)xnym.

C’est-a-dire : Φ(EF ) = Φ(E)¯ Φ(F ). 2

Proposition 3.3.9 Soit K un corps commutatif algebriquement clos et de caracteristique quel-conque. L’application φ de K[G] dans l’algebre des series semi-simples Rs2(K) definie par :

φ

(s∑i=1

ci(αi, βi)

)=

∑(m,n)∈N2

(s∑i=1

ciαmi β

ni

)xmyn,

pour tout∑s

i=1 ci(αi, βi) dans K[G], est un isomorphisme de K-algebres.

PreuveL’application φ n’est autre que la restriction du morphisme Φ de la proposition precedente.

3.3. Series rationnelles et series reconnaissables 59

Son image est Rs(K). 2

Proposition 3.3.10 Soient K un corps commutatif, q un entier naturel et (i, j) ∈ N2. L’ap-plication K-lineaire Ψq,i,j de K [t1, t2] [G] dans K [t1, t2] [G] definie sur les monomes par :

Ψq,i,j (P (t1, t2)) (α, β) = αiβjP (qt1 + i, qt2 + j)(αq, βq)

est un morphisme de K-algebres.

PreuveIl suffit de travailler sur les monomes et de montrer que Ψ = Ψq,i,j conserve les produits.Soit P (t1, t2)(α, β) et Q(t1, t2)(α1, β1) dans K [t1, t2] [G] . On a :

Ψ (P (t1, t2)(α, β)Q(t1, t2)(α1, β1)) = Ψ (PQ(t1, t2)(αα1, ββ1))

= PQ(qt1 + i, qt2 + j)(αα1)i, (ββ1)j ((αα1)q, (ββ1)q)

= P (qt1 + i, qt2 + j)αiβj(αq, βq).

Q(qt1 + i, qt2 + j)αi1βj1(αq1,β

q1)

= Ψ (P (t1, t2)) (α, β).Ψ (Q(t1, t2)) (α1, β1).

2

Theoreme 3.3.2 Soit K un corps commutatif. Les elements Hadamard-inversibles de l’algebreRr2(K) des series reconnaissables sont les emboıtements des series super-geometriques.

Preuve1. Soit f =

∑m,n aα

mβnxmyn une serie super-geometrique. Son inverse au sens de Hadamardest la serie ∑

m,n

a−1α−mβ−nxmyn.

L’inverse d’un emboıtement de telles series est la serie emboıtement des series inverses.2. Montrons la reciproque.a. Supposons d’abord, afin d’utiliser l’isomorphisme de la proposition 3.3.8, que la caracteris-tique de K est nulle.Soit, dans K [t1, t2] [G] ,

E =r∑j=1

Pj(t1, t2)(αj, βj) ; F =s∑j=1

Qj(t1, t2)(α′j, β′j).

Soit G1 le sous groupe de G engendre par les (αi, βi) (1 ≤ i ≤ r) et (α′j, β′j) (1 ≤ j ≤ s).

Le groupe G1 etant un groupe abelien de type fini, il existe q ∈ N tel que G2 = Gq1 soit un

groupe libre.Soit (i, j) ∈ N2 et Ψ = Ψq,i,j le morphisme d’anneaux defini ci-dessus (voir proposition 3.3.10).Si on suppose que EF = 1 alors comme Ψ est un morphisme d’anneaux, d’apres la proposition2, on a

60 Chapitre 3. Multi-suites recurrentes et series rationnelles

1 = Ψ(EF ) = Ψ(E)Ψ(F ).

Or Ψ(E) et Ψ(F ) sont dans K [t1, t2] [G2] , donc d’apres la proposition 3.3.7, l’element Ψ(E)est de la forme : a(α, β) ou a ∈ K∗ et (α, β) ∈ G2

Soit maintenant S et T dans Rr2(K) telles que S ¯ T = 1 et soient E et F deux elements deA tels que :

Φ(E) = S et Φ(F ) = T.

On a alorsEF = 1 et Ψ(EF ) = 1.

Si on pose

S =∑n,m

a(n,m)xnym et Sij =∑n,m

a(qn+ i, qm+ j)xnym,

alors : Sij = Φ(Ψ(E)) est super-geometrique car Ψ(E) = a(α, β).De plus, si

E =∑k

Pk(t1, t2)(αk, βk)

alors :Ψ(E) =

∑k

Pk(qt1 + i, qt2 + j)αikβjk(α

qk, β

qk)

et

Φ(Ψ(E)) =∑n,m

b(n,m)xnym,

oub(n,m) = a(qn+ i, qm+ j) ∀(n,m) ∈ N2.

Par consequent E est un emboıtement de series super-geometriques.

b. Enfin, si la caracteristique de K est non nulle alors la proposition 3.3.6 montre que l’onpeut se ramener au cas ou S et T sont dans Rs(K) et on raisonne comme ci-dessus en utilisantl’application φ = Φ |Rs(K) (voir preuve de la proposition 3.3.9). 2

Theoreme 3.3.3 Soient K un corps commutatif,

S =∑n,m

a(n,m)xnym et T =∑n,m

b(n,m)xnym

deux series dans Rr2(K) verifiant S ¯ T = 0.Il existe alors q ∈ N∗ et une partition de {0, ..., q − 1}2,

{0, ..., q − 1}2 = I1 × I2 ∪ J1 × J2

3.3. Series rationnelles et series reconnaissables 61

telle que : {(n,m) ∈ N2/a(n,m) 6= 0

}⊂ (I1 + qN)× (I2 + qN)

et {(n,m) ∈ N2/b(n,m) 6= 0

}⊂ (J1 + qN)× (J2 + qN).

PreuveAvec les memes notations que pour le theoreme 1, soient E et F dans A telles queΦ(E) = S et Φ(F ) = T.Comme Φ(EF ) = 0, il vient EF = 0. Par consequent

Ψ(E)Ψ(F ) = 0.

Or Ψ(E) et Ψ(F ) sont dans K [t1, t2] [G2] et G2 libre donc

Ψ(E) = 0 ou Ψ(F ) = 0.

2

RemarqueDans ([33]), l’auteur arrive au meme resultat en utilisant les proprietes de l’algebre duale del’algebre de Hopf des polynomes. Les elements de Rk(K) sont ici des formes lineaires s’annulantsur un ideal de codimension finie de l’anneau des polynomes. Cette methode a l’avantage d’etreeffective. Pour plus de details concernant les proprietes de l’algebre de Hopf des multi-suites,voir egalement [10].

62 Chapitre 3. Multi-suites recurrentes et series rationnelles

63

Chapitre 4

Quotient de Hadamard

Soit K un corps commutatif algebriquement clos de caracteristique nulle, f et g deux seriesformelles a coefficients dans K. Le quotient de Hadamard, quand il existe, de f par g est laserie, disons h, dont les coefficients sont les quotients (terme a terme) des coefficients de f etde g.

En reponse a une conjecture de Pisot et pour couronner les travaux de Cantor, Pourchet,Bezivin et tant d’autres auteurs, van der Poorten a montre en 1986 (voir [34]) que, si onsuppose que f et g sont des series rationnelles en une variable et si les coefficients de la seriequotient h sont dans un anneau de type fini sur Z, alors la serie h est rationnelle.

Dans ce qui suit on s’interesse a l’analogue en plusieurs variables de cette conjecture (devenuedonc le theoreme de van der Poorten). En utilisant a la fois ce dernier theoreme et un resultat dua Cantor, on donne des reponses partielles a cette question. La premiere proposition concernele cas ou f est rationnelle et g a pour coefficients des produits de suites recurrentes lineaires. Laseconde reponse traite du cas ou f est une serie reconnaissable et g est une serie reconnaissableparticuliere, ses coefficients etant des polynomes.

Dans une autre direction, on generalise au cas de plusieurs variables, le theoreme de Bezivinde la version approchee de la conjecture de Pisot ([5]) : si les coefficients de la serie h sontdecomposes en une somme d’elements entiers et d’elements dont la croissance est geometrique,alors la serie dont les coefficients sont entiers est rationnelle.

64 Chapitre 4. Quotient de Hadamard

4.1 Rappels et enonces des resultats

Dans toute la suite, K designera un corps commutatif, algebriquement clos et de caracteristiquenulle et A un sous anneau de K de type fini sur Z.On ne traitera que le cas de deux variables meme si les resultats restent valables quelque soitle nombre de variables. On garde les notations du chapitre precedent. En particulier,R(K) = R2(K) designe le K-espace vectoriel des series rationnelles et Rr(K) = Rr2(K)designe la K-algebre des series reconnaissables sur K.On s’interesse a la

ConjectureSoit

f(x, y) =∑

(m,n)∈N2

a(m,n)xmyn et g(x, y) =∑

(m,n)∈N2

b(m,n)xmyn

deux elements de R(K).

On suppose que

b(m,n) 6= 0 et c(m,n) =a(m,n)

b(m,n)∈ A ∀(m,n) ∈ N2. (4.1)

Alors

h(x, y) =∑

(m,n)∈N2

c(m,n)xmyn ∈ R(K).

Remarques

(a) Il existe bien entendu des quotients de Hadamard de series rationnelles, a une ou plusieursvariables, qui ne le sont pas comme on peut le voir sur l’exemple suivant : la serie∑

m≥1,n≥1

1

mnxmyn /∈ R(Q),

mais est quotient des series rationnelles∑m≥1,n≥1

xmyn =xy

(1− x)(1− y),∑

m≥1,n≥1

mnxmyn =xy

(1− x)2(1− y)2.

( b) L’hypothese 4.1 est necessaire d’apres la proposition 3.3.1.

Nous demontrons les deux propositions qui vont suivre.

Proposition 4.1.1 Soit

f(x, y) =∑

(m,n)∈N2

a(m,n)xmyn, g(t) =∑n≥0

b(n)tn et h(t) =∑n≥0

c(n)tn

4.1. Rappels et enonces des resultats 65

des series rationnelles a coefficients dans K.

On suppose que

b(n)c(m) 6= 0 ;a(m,n)

b(n)c(m)∈ A, ∀(m,n) ∈ N2.

Alors ∑m,n

a(m,n)

b(n)c(m)xmyn ∈ R(K).

Proposition 4.1.2 Soit

f(x, y) =∑

(m,n)∈N2

a(m,n)xmyn ∈ K[[x, y]] et P (x, y) ∈ K[x, y].

On suppose qu’il existe

t ∈ N∗, (α1, β1), . . . , (αt, βt) dans K2 et P1, . . . , Pt dans K[x, y]

tels que

(1) a(m,n) =t∑

j=1

Pj(m,n)αnj βmj , ∀(m,n) ∈ N2,

(2) P (m,n) 6= 0 et h(m,n) = a(m,n)P (m,n)

∈ A, ∀(m,n) ∈ N2.

Alors

T (x, y) =∑

(m,n)∈N2

h(m,n)xmyn ∈ R(K).

Pour la demonstration de ces deux propositions on aura besoin des resultats suivants :

Theoreme 4.1.1 (Quotient de Hadamard- van der Poorten [34]) . Soit

f(x) =∑n≥0

a(n)xn et g(x) =∑n≥0

b(n)xn dans R1(K).

On suppose que

b(n) 6= 0 et c(n) =a(n)

b(n)∈ A pour tout n ∈ N.

Alors la serie∑n≥0

c(n)xn est dans R(K).

RemarqueCe theoreme, demontre par van der Poorten en 1986, constitue une reponse a la conjecture dePisot (voir [30] pour une redaction de la demonstration). La preuve de ce resultat suit le schemadonne par Pourchet ([28]) et fait notamment appel, dans le cas algebrique, au theoreme 4.1.2

66 Chapitre 4. Quotient de Hadamard

ci-dessous. En utilisant de nouveau le theoreme de van der Poorten, on obtient une version encaracteristique nulle, du theoreme de Cantor.

Theoreme 4.1.2 (Cantor [8]) Soit

f(x) =∑n≥0

a(n)xn dans R1(K) et P (x) dans K [x] .

On suppose que

P (n) 6= 0 eta(n)

P (n)∈ A pour tout n ≥ 0.

Alors ∑n≥0

a(n)

P(n)x n ∈ R1 (K ).

De plus si

a(n) =t∑i=1

Pi(n)αni ,

ou α1, ..., αt sont les frequences de f dans K et P1, ..., Pt des polynomes, alors

P (x) divisePi(x) dans K [x] pour tout i = {1, . . . , t}.

On aura egalement besoin de la proposition suivante dont on trouvera une preuve dans [17].

Proposition 4.1.3 Soient h un entier naturel positif et K un corps commutatif de caracteris-tique nulle. Soient P un element de K[x1, . . . , xh] et E1, . . . , Eh des sous-ensembles de K. Sion suppose que, pour tout i ∈ {1, . . . , h}, Card(Ei) ≥ degxi P et

P (α1, . . . , αh) = 0 ∀(α1, . . . , αh) ∈ E1 × · · · × Eh,

alors P est identiquement nul.

Une version approchee du theoreme 4.1.1 a ete obtenue par Bezivin dans [6]. Elle se generaliseau cas de plusieurs variables. Ici K est le corps des nombres complexes.

Proposition 4.1.4 Soit

g(x, y) =∑

(m,n)∈N2

b(m,n)xmyn ∈ Rr2(K).

Pour tout (m,n) ∈ N2, b(m,n) est donc de la forme (3.7). On suppose que

(1) |α1| > |αi| , |β1| > |βi| ∀i ≥ 2,

4.2. Demonstrations des resultats 67

(2) P1(x, y) = λ1 est une constante non nulle.

Soit f(x, y) =∑

(m,n)∈N2

a(m,n)xmyn ∈ R(K). On suppose encore qu’il existe ρ dans l’intervalle

[0, 1[, c(m,n) dans Z et d(m,n] dans K tels que, ∀(m,n) ∈ N2,

b(m,n) 6= 0 eta(m,n)

b(m,n)= c(m,n) + d(m,n),

avec d(m,n) = O(ρm+n) pour m et n assez grands. Alors∑(m,n)∈N2

c(m,n)xmyn ∈ R(K).

4.2 Demonstrations des resultats

Preuve de la proposition 4.1.1

Soit f(x, y) =∑

(m,n)∈Nna(m,n)xmyn =p(x,y)

q(x,y)ou p et q 6= 0 dans K [x, y] .

a-Quitte a agrandir A , on peut supposer que p et q sont dans A[x, y].

b-Soit

h(m,n) =a(m,n)

b(n)c(m), ∀(m,n) ∈ N2.

Comme h(m,n) ∈ A, ∀(m,n) ∈ N2, les c(m)h(m,n) sont encore dans un anneau de type finisur Z car la serie

∑m∈N

c(m)xm est rationnelle. Il suffit donc de montrer que la proposition est

vraie pour la serie ∑(m,n)∈N2

a(m,n)

b(n)xmyn.

c- La serie f(x, y) peut s’ecrire

f(x, y) =∑

n≥0 ϕ′n(y)xn ou ϕ′n(y) =

∑m≥0 a(m,n)ym.

On a alors∂kf(x, y)

∂xk=∑n≥k

n(n− 1) · · · (n− k + 1)ϕ′n(y)xn−k, ∀k ≥ 0.

Donc∂kf(0, y)

∂xk= k!ϕ′k(y) = k!

∑m≥0

a(k,m)ym, ∀k ≥ 0.

Par consequent

ϕ′k(y) =1

k!× ∂kf(0, y)

∂xk=∑m≥0

a(k,m)ym, ∀k ≥ 0, (2)

68 Chapitre 4. Quotient de Hadamard

et donc ϕ′k(y) ∈ R(K).

d- Comme f(x, y) = p(x,y)q(x,y)

, en derivant par rapport a x et en raisonnant par recurrence sur non obtient

1

n!× ∂nf(x, y)

∂xn=

ψn(x, y)

q(x, y)n+1avec ψn(x, y) ∈ K [x, y] . (3)

e- Soit

h(x, y) =∑

n≥0,m≥0

a(m,n)

b(n)xmyn et ϕn(y) =

ϕ′n(y)

b(n), ∀n ≥ 0.

On a alors grace a (2) et (3) :

ϕn(y) =ψn(0, y)

b(n)q(0, y)n+1, ∀n ≥ 0,

ou encore :

q(0, y)n+1ϕn(y) =1

b(n)ψn(0, y), ∀n ≥ 0.

Comme ψn(x, y) ∈ K [x, y] , 1b(n)

ψn(0, y) ∈ K [y], donc

q(0, y)n+1ϕn(y) ∈ K[y].

Or, d’une part q(0, y)n+1 ∈ A[y] et d’autre part, par hypothese, ϕn(y) ∈ A[[y]]. Donc

q(0, y)n+1ϕn(y) ∈ A [y] .

Sachant que q(0, y)n+1 ∈ A [y], on a

ϕn(y) ∈ A[y, q(0, y)−1

]= B.

Avec q(0, y) 6= 0 car q(0, 0) 6= 0. L’anneau B est bien entendu de type fini sur Z.

f- On a donc

f(x, y) =∑n≥0

ϕ′n(y)xn ∈ K(y)(x)

et aussi ∑n≥0

b(n)xn ∈ K(x) ⊂ K(y)(x) ou ϕn(y) =ϕ′n(y)

b(n)∈ B, ∀n ≥ 0.

Le theoreme 1, applique au corps K(y) et son sous anneau B, permet alors d’ecrire∑(m,n)∈N2

h(m,n)xmyn =∑

n≥0 ϕn(y)xn ∈ K(y)(x).

Ou encore ∑(m,n)∈N2

h(m,n)xmyn ∈ R(K).

4.2. Demonstrations des resultats 69

Preuve de la proposition 4.1.2

Elle utilise les propositions 4.1.1 et 4.1.3.

a- Soit

a(m,n) =t∑i=1

Pi(m,n)αni βmi et h(m,n) =

a(m,n)

P (m,n), ∀(m,n) ∈ N2.

Soit i ∈ {1, . . . , t}. La division euclidienne de Pi(x, y) par P (x, y) dans K(y)[x] donne

(∃B(y) ∈ A [y]) : B(y)Pi(x, y) = P (x, y)Si(x, y) +Ri(x, y) (4)

avec

Si(x, y) ∈ K [x, y] , Ri(x, y) ∈ K [x, y] et Ri(x, y) = 0 ou deg xRi < deg xP .

b- Il suffit de montrer que Ri(x, y) = 0 pour i ∈ {1, . . . , t}.Si c’est le cas on a

B(m)Pi(m,n) = P (m,n)Si(m,n), ∀i ∈ {1, . . . , t}, ∀(m,n) ∈ N2.

En posant : t(m,n) = B(m)a(m,n)P (m,n)

, ∀(m,n) ∈ N2, on obtient

t(m,n) =t∑i=1

Si(m,n)αni βmi , ∀(m,n) ∈ N2,

ce qui signifie ∑(m,n)∈N2

t(m,n)xmyn ∈ R0(K) ⊂ R(K).

La proposition est alors une consequence de la proposition 4.1.1 car, pour (m,n) ∈ N2 avec massez grand,

a(m,n)

P (m,n)=t(m,n)

B(m).

c- Montrons donc que Ri(x, y) = 0 ∀i ∈ {1, . . . , t}.Soit i ∈ {1, 2, ....., t} et soit m ∈ N, l’hypothese h(m,n) ∈ A entraıne, en utilisant le theoreme2, que

P (x,m) divise βmi Pi(x,m).

Soit

βmi Pi(x,m) = P (x, y)ϕi,m(x) , ϕi,m(x) ∈ K[x].

70 Chapitre 4. Quotient de Hadamard

En remplacant dans (4) on obtient

B(m)

βmiP (x,m)ϕi,m(x) = P (x,m)Si(x,m) +Ri(x,m),

c’est-a-dire,

Ri(x,m) = P (x,m)

[B(m)

βmiϕi,m(x)− Si(x,m)

].

Comme deg xRi < deg xP , il vient :

Ri(x,m) = 0 ∀m ∈ N,ce qui n’est possible que si Ri(x, y) = 0 .

On a donc Ri(x, y) = 0 ∀i ∈ {1, . . . , t}.

Preuve de la proposition 4.1.4

a- On a

b(m,n) =t∑

j=1

Pj(m,n)αnj βmj , P1(m,n) = λ1 6= 0, ∀(m,n) ∈ N2

et|α1| > |αi| , |β1| > |βi| ∀i ≥ 2. (5)

b- Pour (m,n) ∈ N2, b(m,n) s’ecrit :

b(m,n) = λ1αn1β

m1 (1−R(m,n))

ou

R(m,n) = −t∑

j=1

Pj(m,n)

λ1

(αjα1

)n(βjβ1

)m.

De (5) on tireR(m,n) = O(εn+m), ou 0 < ε < 1. (6)

c-Pour tout M ∈ N on a

a(m,n)

b(m,n)= λ−1

1 α−n1 β−m1 (1 +R(m,n) + · · ·+R(m,n)M) +a(m,n)

b(m,n)R(m,n)M+1.

Par suite (6) donneR(m,n)M+1 = O(ε(n+m)(M+1)).

d-Comme il existe B ∈ R+ tel que a(m,n) = O(Bn+m) car∑(m,n)∈N2

a(m,n)xnym est rationnelle

4.2. Demonstrations des resultats 71

et que, pour m et n assez grands,

b(m,n) ≥ 1

2| λ1α

n1β

m1 |,

il existe A ∈ R+ tel que

a(m,n)

b(m,n)= O(An+m) pour m,n assez grands.

A partir de maintenant on choisit M de telle maniere que :

εM+1A ≤ ρ < 1,

ce qui donnea(m,n)

b(m,n)R(m,n)M+1 = O(ρn+m). (7)

e-PosonsHM(m,n) = a(m,n)λ−1

1 α−n1 β−m1 (1 +R(m,n) + · · ·+R(m,n)M)

et

SM(m,n) =a(m,n)

b(m,n)R(m,n)M+1.

On a donc ∑m,n

a(m,n)

b(m,n)xmyn =

∑m,n

HM(m,n)xmyn +∑m,n

SM(m,n)xmyn

avecH(x, y) =

∑m,n

HM(m,n)xmyn ∈ R(K)

car H(x, y) est produit de Hadamard d’une serie rationnelle et d’une serie reconnaissable. Deplus d’apres (7)

SM(m,n) = O(ρn+m). (8)

f-Comme par hypothese

a(m,n)

b(m,n)= c(m,n) + d(m,n), ∀(m,n) ∈ N2,

il vientc(m,n) + d(m,n) = HM(m,n) + S(m,n), ∀(m,n) ∈ N2.

On peut donc ecrire

c(m,n) = HM(m,n) + S ′(m,n), ∀(m,n) ∈ N2, (9)

ou (S ′(m,n) = HM(m,n)− d(m,n), ∀(m,n) ∈ N2

).

72 Chapitre 4. Quotient de Hadamard

Comme H(x, y) ∈ R(K), il existe l ∈ N, (e1, ..., el) ∈ Zl, E un sous ensemble fini de N2 et lelements de N2, notes (ni,mi)1≤i≤l tels que :

l∑i=1

eiHM(n− ni,m−mi) = 0, ∀(m,n) ∈ N2 − E.

Ou encore en utilisant (9)

l∑i=1

eic(n− ni,m−mi) =l∑

i=1

eiS′M(n− ni,m−mi), ∀(m,n) ∈ N2 − E.

Posons

X(m,n) =l∑

i=1

eiS′M(n− ni,m−mi), ∀(m,n) ∈ N2.

D’une part X(m,n) ∈ Z car les ei, 1 ≤ i ≤ l, et les c(m,n) sont entiers ; d’autre part c’est unO(ρn+m) ( d’apres l’hpothese sur les d(m,n) et l’equation (9)) donc

X(m,n) = 0, ∀(m,n) ∈ N2 − E ′

ou E ′ est un sous ensemble fini de N2. Par consequent

l∑i=1

eic(n− ni,m−mi) = 0, ∀(m,n) ∈ N2 − E ∪ E ′,

ce qui acheve la demonstration de la proposition.

BIBLIOGRAPHIE 73

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