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Véhiculés autonomes Quels débouchés pour les informaticiens ? La jeune filière du véhicule autonome cherche à recruter des informaticiens mais elle peine à trouver des candidats. La situation devrait néanmoins évo- luer avec des formations attendues en 2019. Tour d'horizon de ce nouveau domaine d'emplois pour l'IT. L es véhicules autonomes sont des tablettes sur quatre roues, avec de l'Intelligence artificielle, du traitement de données massif de capteurs - Big Data -, du calcul parallèle, de la recon- naissance d'images, le tout en réseau embarqué et cyber-sé- curisé. » Ces mots sont ceux de Louis Jouanny, directeur général de l'ESIEA, d'ingénieurs du monde numé- rique : est donc au de ce nouveau domaine industriel et les débouchés pour Les prototypes intègrent pléthore d'équipements IT pour réaliser le traitement de données. les informaticiens sont considé- rables. » Cette école annonçait au dernier Mondial de l'Auto le lancement en 2019 d'une spécialisation «Véhicules autonomes» pour son cursus d'ingénieurs (lire ci-après). » La demande est désormais très forte sur le marché pour des profils informatiques ayant une connaissance du véhicule autonome. Nous entendons répondre à cette demande », poursuit le responsable. Les développements et expéri- mentations autour des voitures ou navettes sans chauffeur, s'ac- célèrent en effet depuis deux à trois ans. Le nombre d'acteurs positionnés sur ce nouveau secteur ne cesse d'augmen- ter. Les constructeurs automo- biles, et leurs équipementiers, sont bien entendu sur les rangs. Renault Nissan, PSA Peugeot Citroën, Volvo, Toyota, Audi, Volkswagen... ont tous faits des annonces en ce sens au dernier salon de l'Auto. Le plus avancé dans le domaine reste Tesla, dont la fonction «Pilote auto- matique »est proposée depuis 2015 sur ses berlines électriques. Il s'agit cependant de véhicules «semi-autonomes», l'IA étant capable de conduire sur cer- taines portions de routes, dont les autoroutes, mais pas encore en zone urbaines denses. Les opérateurs de transport (Transdev, RATP, Keolis...) travaillent également sur ce sujet et mènent déjà des tests de navettes autonomes. Les acteurs de l'IT, dont les Gafa, se sont également emparés de ce nouveau domaine technolo- gique. C'est le cas de Google, Nvidia, ou Intel, sans oublier les acteurs à la convergence de l'automobile et de l'IT, comme Uber. D'autres acteurs tels Amazon, Alibaba ou Apple travaillent quant à eux sur les futurs services et divertisse- ments à bord des véhicules. Maîtriser l'analyse de données et les systèmes embarqués Quelles compétences informa- tiques recherchent ces acteurs? « Nous recrutons des profils capables de travailler sur les systèmes de navigation du véhi- cule, qui exploitent des données de capteurs mais aussi des infor- mations de cartographie ou de localisation. Ils doivent globale- ment disposer de connaissances en mathématiques et statistiques, pour traiter de la donnée, et aussi en programmation de systèmes embarqués, principalement en langage C++ orienté objet », confie Sophie Athlan Gazet, Head ofHuman Resources chez Navya. Cette filiale de Keolis, se présente comme le «leader fran- çais des véhicules autonomes et des nouvelles solutions de mobi- lité intelligente et partagée ».Elle fabrique des navettes autonomes dont plus d'une centaine ont déjà été commercialisées dans Tous droits de reproduction réservés PAYS : France PAGE(S) : 73-75 SURFACE : 225 % PERIODICITE : Mensuel DIFFUSION : (15000) JOURNALISTE : Christophe Guiliemin 1 février 2019 - N°174

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Page 1: Véhiculés autonomes - Laval · 2019-02-06 · Les opérateurs de transport (Transdev, RATP, Keolis...) travaillent également sur ce sujet et mènent déjà des tests de navettes

Véhiculés autonomesQuels débouchés

pour les informaticiens ?La j e u n e filière du véhicule autonome cherche àrecruter des informaticiens mais elle peine à trouverdes candidats. La situation devrait néanmoins évo-luer avec des formations attendues en 2019. Tourd'horizon de ce nouveau domaine d'emplois pour l'IT.

Les véhicules autonomessont des tablettes surquatre roues, avec de

l'Intelligence artificielle, dutraitement de données massifde capteurs - Big Data -, ducalcul parallèle, de la recon-naissance d'images, le tout enréseau embarqué et cyber-sé-curisé. » Ces mots sont ceuxde Louis Jouanny, directeurgénéral de l'ESIEA, École

d'ingénieurs du monde numé-rique : est doncau cœur de ce nouveau domaineindustriel et les débouchés pour

Les prototypes intègrent pléthore d'équipements ITpour réaliser le traitement de données.

les informaticiens sont considé-rables. » Cette école annonçaitau dernier Mondial de l'Autole lancement en 2019 d'unespécialisation «Véhiculesautonomes» pour son cursusd'ingénieurs (lire ci-après).» La demande est désormaistrès forte sur le marché pourdes profils informatiques ayantune connaissance du véhiculeautonome. Nous entendonsrépondre à cette demande »,poursuit le responsable.Les développements et expéri-mentations autour des voituresou navettes sans chauffeur, s'ac-célèrent en effet depuis deux àtrois ans. Le nombre d'acteurspositionnés sur ce nouveausecteur ne cesse d'augmen-ter. Les constructeurs automo-biles, et leurs équipementiers,sont bien entendu sur les rangs.Renault Nissan, PSA PeugeotCitroën, Volvo, Toyota, Audi,Volkswagen... ont tous faits desannonces en ce sens au derniersalon de l'Auto. Le plus avancédans le domaine reste Tesla,dont la fonction «Pilote auto-matique »est proposée depuis2015 sur ses berlines électriques.Il s'agit cependant de véhicules«semi-autonomes», l'IA étantcapable de conduire sur cer-taines portions de routes, dontles autoroutes, mais pas encoreen zone urbaines denses.

Les opérateurs de transport(Transdev, RATP, Keolis...)travaillent également sur cesujet et mènent déjà des testsde navettes autonomes. Lesacteurs de l'IT, dont les Gafa,se sont également emparés dece nouveau domaine technolo-gique. C'est le cas de Google,Nvidia, ou Intel, sans oublierles acteurs à la convergencede l'automobile et de l'IT,comme Uber. D'autres acteurstels Amazon, Alibaba ou Appletravaillent quant à eux sur lesfuturs services et divertisse-ments à bord des véhicules.

Maîtriser l'analysede données et lessystèmes embarquésQuelles compétences informa-tiques recherchent ces acteurs?« Nous recrutons des profilscapables de travailler sur lessystèmes de navigation du véhi-cule, qui exploitent des donnéesde capteurs mais aussi des infor-mations de cartographie ou delocalisation. Ils doivent globale-ment disposer de connaissancesen mathématiques et statistiques,pour traiter de la donnée, et aussien programmation de systèmesembarqués, principalement enlangage C++ orienté objet »,confie Sophie Athlan Gazet,Head ofHuman Resources chezNavya. Cette filiale de Keolis, seprésente comme le «leader fran-çais des véhicules autonomes etdes nouvelles solutions de mobi-lité intelligente et partagée ».Ellefabrique des navettes autonomesdont plus d'une centaine ontdéjà été commercialisées dans

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PAYS : France PAGE(S) : 73-75SURFACE : 225 %PERIODICITE : Mensuel

DIFFUSION : (15000)JOURNALISTE : Christophe Guiliemin

1 février 2019 - N°174

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le monde. Navya emploie prèsde trois cents collaborateurs enFrance (Paris et Lyon) et auxÉtats-Unis (Michigan), dont unecentaine d'ingénieurs en infor-matique. commençonségalement à recruter des datascientists afin de traiter de grosvolumes de données de circu-lation. Elles vont permettre auxsystèmes de navigation d'appré-hender les comportements desautresautomobilistes, mais aussides piétons, des vélos, etc.-,poursuit-on chez Navya.Chez Intel, on évoque des com-pétences en Deep Learning pourtraiter les données de naviga-tion, en analyse d'images, ensystèmes embarqués, en inté-gration de systèmes complexes,en programmations C, C++,Python, ainsi qu'en sécurité dessystèmes et réseaux. «Il s'agitprincipalement de compétencesrecherchéespar la société israé-lienne MobUeye, que nous avonsracheté en 2017. Mais nousdéveloppons également dansnotre entité Automated DrivingGroup des technologies cloud,des solutions de connectivité oudes plates-formes de gestion deflotte, dédiées au véhicule auto-nome», indique-t-on chez IntelFrance. Rappelonsque Mobileyeest spécialisée dans les techno-logies de vision, de cartographieet de repérage automatique surles routes.Nvidia, qui positionne sesGPUsur l'analyse de données dansles véhicules et aussi dans leCloud, évoque pour sa partdes besoins en 1A, en DeepLearning et autour de Cuda, saplate-forme de calcul parallèlepour GPU. «Avec t'IA déployédans de nombreux secteurs,dont l'automobile, la demandeen informaticiens augmenterapidement. Nous constatonscette demande au sein de notrepropre organisation et recrutonsles meilleurs talents pour sou-tenir nos initiatives autour del'IA »,explique Jaap Zuiderveld,vice-président EMEA1 de

Deuxflux de donnéesà traiterLe fonctionnement d'un véhicule autonome exploite différentestechnologies issues de l'informatique et de la robotique. Même s'ilexiste de nombreuses variantes, en voici les grands principes. Tel unhumain, l'IA embarquée commence par analyser son environnementen catégorisant les éléments qui le composent (véhicule, piéton,chaussée, signalisation...). Elle utilise pour cela une multitude decapteurs dont des caméras, des radars et des LiDAR (capteur exploi-tant la technologie laser pour réaliser un nuage de points). C'est lafusion de ces données qui permet de construire virtuellement l'en-vironnement du véhicule.L'IA doit ensuite décider des manœuvres à exécuter. Elle va alorscroiser la perception de son environnement avec d'autres éléments,comme la destination prévue, les règles du code de la route, la sécu-rité de la manœuvre, sans oublier le confort des passagers. Enfin, l'IAexécute la manœuvre en continuant à analyser son environnement eten anticipant les incidents éventuels. Outre les données des capteursembarqués, le véhicule peut recevoir en temps réel des informationsde l'infrastructure routière, par exemple sur la présence d'un véhi-cule engagé dans une rue adjacente, qui n'est pas encore visible.«L'équilibre entre l'exploitation des données issues du véhicule etcelles de l'infrastructure routière fait encore débat. Mais il devraitbien y avoir un traitement des deux flux de données, lorsque celasera possible», indique-t-on chez Vedecom.Notons que si un grand nombre de ces opérations est réalisé enlocal, sur l'informatique embarquée du véhicule, l'apprentissage dela conduite par l'IA est en revanche traité à part, dans le Cloud. Degrandes quantités de données de circulation sont ainsi analyséespour améliorer les capacités de conduite de l'IA, principalementgrâce à du Machine Learning. Au final, le véhicule autonome exploiteaussi bien des technologies embarquées, que du traitement Big Datadans le Cloud.

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Nvidia. Même son de cloches àl'institut français Vedecom, quimène depuis 2014 des travauxde recherche sur le véhiculeautonome. Il compte parmi sesfondateurs les groupes PSA etRenault, ainsi que l'équipemen-tier Valeo. «Nous employons180 personnes dont environ20% d'informaticiens. Leurscompétences couvrent le déve-loppement de logiciels, l'ana-lyse de données mais aussi lasimulation. Nous développonsen effet des logiciels de simu-lation de trafic afin de pouvoirdimensionner une flotte de véhi-cules autonomes en fonctiondu contexte de circulation dela zone concernée », explique

Sylvie Thromas, directricedu programme formation deVedecom.

Développerles compétencesautour du véhiculeautonomeLes informaticiens disposantde connaissances en matièrede véhicule autonome sontencore relativement rare sur lemarché. «Notre première pro-blématique pour l'embaucheest qu'il n'y a pas encore deformation longue spécifique-ment dédiée au véhicule auto-nome. Nous recrutons des

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profils ayant des connais-sances en informatique et enrobotique, que nous formonsensuite en interne pendant 4à 6 mois», explique SophieAthlan Gazet, chez Navya. Lafiliale de Keolis prévoit d'em-baucher 60 personnes pour saR&D en 2019,après avoir déjàdoublé ses équipes entre 2017et 2018.«Nous aimerions recru-ter davantage, mais il reste dif-ficile de trouver des candidats »,précise la responsable.Les formations autour du véhi-cule autonome devraient s'étof-fer en 2019. Navya travaille surune formation avec l'insavalor,le centre de formation continuede l'Insa Lyon. De son côté,l'ESIEA prévoit donc sa spécia-lisation « Véhicules autonomes »au cours de la cinquièmeannée du cursus d'ingénieurinformatique, électronique etautomatique. Une formation decinq mois également ouverteà des professionnels déjà enposte via la VAE (Validationdes acquis de l'expérience).Ce dispositif, encadré par l'État,permet à des personnes ayantau moins un an d'expérience

dans un domaine, de monterun dossier puis de passer unesession d'évaluation pour certi-fier leurs compétences. «Notreformation sera ouverte au VAEet nous pourrons aider au mon-tage du dossier. Il faudra bienentendu déjà disposer d'uneexpérience professionnelle dansdes technologies liées au véhi-cule autonome, comme la BigData, la data science, FIA, lessystèmes embarqués ou mêmela cyber souligneLouis Jouanny.

Qu'il s'agisse de la formationinitiale ou du VAE, la spécia-lisation proposée par l'ESIEAtraitera de la reconnaissanced'images, de l'IA (MachineLearning, Deep Learning,réseaux de neurones), du BigData, de la cyber sécurité, ducalcul massivement paral-lèle, des systèmes embar-qués, des télécommunications(Bluetooth, 5G...), du Cloud etdes aspects juridiques du véhi-cule autonome (responsabilitéen cas d'accident, respect duRGPD...). Cette formation seradispensée par des professeursspécialisés, avec l'intervention

de professionnels externes,notamment en provenancede l'industrie automobile. Elledevrait être proposée aux envi-rons de 10000 euros.De son côté, Vedecom proposeà son catalogue 2019des forma-tions courtes accessibles auxinformaticiens. Un cursus detrois jours donne un tour d'ho-rizon de l'architecture systèmedes véhicules, des techniquesde localisation et de planifica-tion, des télécommunications,du traitement de la data, sansoublier les enjeux humains etsocio-économique du véhiculeautonome. Une formation théo-rique facturée 1900 euros. Uneformation plus pratique sur unejournée, propose de manipulerdes outils et équipements, ainsique faire des tours de pistes àbord d'un véhicule autonome.11en coûte 1500 euros. -Nousrecevons également des infor-maticiens travaillant sur desthèses liées aux véhicules auto-nomes, notamment autour dudéveloppement de logiciels oul'élaborationconclut Sylvie Thromas.O

CHRISTOPHE GUILIEMI N

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