analyse de la réception de back to the future 2 (1989)
DESCRIPTION
Retour vers le Futur II En 1985, le film Retour vers le futur, récolte un succès monstre et un boxoffice mondial totalisant les 381 millions de dollars, soit 473 millions en dollars ajustés avec l’inflation, ce qui équivaut au prix de 10 000 De Lorean de 1981. À sa sortie en VHS, Bob Gale et Robert Zemeckis, les créateurs du film, décident de rajouter la mention « to be continued… » à la fin de leur montage, en blague. Le public, pas encore vraiment habitué aux fins en suspens, bombarde le studioTRANSCRIPT
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Retour vers le Futur IIEn 1985, le film Retour vers le futur, récolte un succès monstre
et un box-office mondial totalisant les 381 millions de dollars, soit 473
millions en dollars ajustés avec l’inflation, ce qui équivaut au prix de
10 000 De Lorean de 1981. À sa sortie en VHS, Bob Gale et Robert
Zemeckis, les créateurs du film, décident de rajouter la mention « to
be continued… » à la fin de leur montage, en blague. Le public, pas
encore vraiment habitué aux fins en suspens, bombarde le studio de
lettres pour savoir ce qui arrive avec les protagonistes. Même Michael
J. Fox, en voyant la fin, appelle son agent pour savoir ce qu’il en est et
pourquoi on ne l’a pas rappelé pour la suite.
De cette petite phrase nait Back to the Future part II (1989),
une nouvelle aventure rocambolesque remplie de gags. Le film débute
où son prédécesseur termine; Marty doit aller en 2015 avec Doc
Brown pour sauver sa future famille. Dans le futur, Biff dérobe la
Delorean en cachette et retourne en 1955 pour se donner un
almanach sportif relatant des résultats de séries sportives entre 1950
et 2000. En revenant en 1985, Doc et Marty découvrent un nouveau
Hill Valley où Biff contrôle tout. Les deux amis doivent retourner en
1955 pour empêcher Biff de se donner le livre. La suite de ce texte
analysera la production et la réception du long métrage. Le tout
commencera par une biographie des créateurs, suivi d’une histoire de
2
l’œuvre. Ensuite, la réception du film sera analysée puis une
interprétation sera suggérée.
De Chicago à Hollywood.Biographie de Robert Zemeckis
Robert Zemeckis nait d’un père lituanien et d’une mère italienne
le 14 mai 1952, à Chicago dans l’Illinois. À la fin de l’adolescence, il
développe un grand intérêt pour le cinéma. En finissant le secondaire,
il veut absolument aller étudier à la University of Southern California,
mais ses notes ne lui permettent pas d’être admis. Il passe donc deux
années à la Northern Illinois University avant d’y entrer; le film qu’il
soumet lui ouvre les portes de l’Université tant convoitée. Il partage
les bancs avec George Lucas et son éternel collaborateur : Bob Gale.
Dans le cadre d’un cours, Steven Spielberg vient enseigner à
Zemeckis. À la fin de celui-ci, il reste afin de regarder un film de
l’étudiant Zemeckis. Spielberg adore. De là nait une amitié qui dure
toujours.
En 1977, c’est grâce à cette amitié que Zemeckis réalise son
premier film, I Wanna Hold Your Hand que Spielberg finance
entièrement. Bob Gale est toujours de la partie; il coproduit et écrit le
script. En 1981, la coopération Spielberg/Zemeckis revient à la charge
avec Romancing the Stone (1984), le premier succès commercial de
Robert. Cette fois-ci, c’est Michael Douglas qui l’avait approché pour
3
réaliser un script qui lui tenait à cœur. Déjà, on observe dans ses films
un goût prononcé pour les effets spéciaux; selon Zemeckis, il est
mieux de sauver des vies avec la magie des ordinateurs que de mettre
celle d’un cascadeur en péril.
Juste après cette réussite qui lance sa carrière pour de bon,
Zemeckis entame l’écriture d’un film qu’il mijotait depuis longtemps
avec Bob Gale : Back to the Future (1985). Les voyages dans le temps
l’avaient toujours obsédé. Suite à l’excellente réception du film,
Universal Pictures décide d’en faire une trilogie, avec ou sans
Zemeckis. Même avec quelque réticence, il décide de réaliser les
suites pour en contrôler le contenu. Pour la première fois à
Hollywood, deux suites seront tournées « bac à bac ». Entre temps, il
réalise Who Framed Roger Rabbit (1988), une renaissance du
mélange de dessins animés et de prises de vues réelles, un autre
classique en devenir. Un goût prononcé de Zemeckis pour le
« cartoonesque » se dégage de ces œuvres. Plus tard il en reparle:
pour les personnages, vous devez choisir ceux que vous
allez mettre en avant, auxquels vous allez consacrer le plus de
temps. Les autres doivent être dessinés en quelques traits pour
que l’histoire suive son cours. […] Dans une comédie, cela vous
conduit à leur conférer un caractère de personnage de
« cartoon. »1
1 (Dixit Robert Zemeckis) GAREL, Alain, Gilles Gressard, Olivier Le Guay, « Robert Zemeckis » dans la Revue
4
Une décennie plus tard, il dirige un film qui bouleverse le monde
entier, c’est-à-dire Forest Gump (1994). Ce classique lui a acquis une
grande notoriété à Hollywood et, du coup, un Oscar du meilleur
réalisateur. C’est dans ce film qu’il rencontre Tom Hanks, pour qui il a
beaucoup d’admiration. Zemeckis le choisit plus tard parce qu’il aime
travailler avec cet acteur qui ne lui cause jamais de problèmes.
D’ailleurs le réalisateur choisit méticuleusement son équipe : « C’est
très difficile de faire un film, aussi quand on le fait avec quelqu’un que
l’on apprécie ça supprime bien des problèmes et des difficultés. »2 Les
années 90 marquent aussi le début du Chicagoen dans la production.
En 2000, il réalise Cast Away, l’aventure d’un patron de Fedex.
Ensuite, l’homme renoue avec ses amours du dessin animé avec Polar
Express (2004) puis revient à la charge avec A Christmas Carol
(2009). Ces productions sont caractérisées par le réalisme des
personnages et la capture de mouvement. De plus, l’animation oblige,
il situe ses personnages dans des environnements dignes de rêves.
Dans la même année, Disney, par le biais de sa société de
production, Image Movers Digital, achète les droits de Yellow
Submarine (1968) afin de produire un remake que Zemeckis devrait
réaliser. On peut dire que son amour des Beatles a remporté sur sa
peur des remakes. La production est toujours sur la glace parce que
du cinéma (paris), novembre 1985, numéro 410, pp.60-68.2 (Dixit Robert Zemeckis) GAREL, Alain, Gilles Gressard, Olivier Le Guay, op. cit., pp.60-68.
5
Disney éprouve de la difficulté à acheter les droits de certaines
chansons des Beatles. On connait bien les déboires que certains ont
pu avoir avec la veuve de John Lennon, Yoko Ono. La sortie du dernier
film de Robert Zemeckis, Flight, est prévue pour novembre 2012. Au
Québec, ce film est très attendu, non pas par les admirateurs de
Zemeckis, mais les avocats de Ian Lauzon, le scénariste de Piché :
entre ciel et terre (2010). En effet, le synopsis de Flight ressemble
énormément aux grandes lignes du film de Sylvain Archambault.
Paramount n’aurait pas acheté des droits d’adaptation à Ian Lauzon.
Toutefois, le film n’étant pas encore révélé au grand public, aucune
poursuite ne peut être lancée.
« [Je] n’écri[s] pas avec un stylo, mais avec la pellicule. »
-Robert Zemeckis3
Zemeckis, l’étudiant.Influences
Robert Zemeckis a étudié en cinéma contrairement à plusieurs
autres réalisateurs. Comme beaucoup d’étudiants en cinéma, il a
visionné Hitchcock puis Kubrick; les grands réalisateurs américains.
Ces derniers ont d’ailleurs influencé sa manière de réaliser un film et
3 TIRARD, Laurent, « Robert Zemeckis : la leçon de cinéma » dans Studio, No 164 (février 2001), p.109-111.
6
Zemeckis leur rend hommage dans plusieurs plans à travers sa
filmographie. Le petit Zemeckis regardait beaucoup de western,
particulièrement ceux mettant en vedette Clint Estwood. De ce fait, il
fait des clins d’œil à ces films dans le dernier film de la trilogie Retour
vers le Futur qu’il transforme en western spaghetti.
Il porte une affection particulière pour les films de Coppola,
Capra et les dents de la mer (1975) de Steven Spielberg. Les films de
propagande de Leine Riefenstahl l’ont également marqué, ce que peu
de réalisateurs sont capables d’avouer. Lorsque Zemeckis réalise un
film, il travaille toujours de concert avec les scénaristes afin de guider
les tenants et aboutissants du scénario. En tant que producteur, il ne
choisit que les films qu’il aime ou qui l’accroche.
7
Pouvoir.Importance de Robert Zemeckis dans le cinéma
Nul ne peut nier l’importance que Robert Zemeckis a eue dans
le cinéma, pourtant il est beaucoup moins connu que ses films. En
effet, les informations sur Zemeckis sont très précieuses. Seulement
un livre a été écrit sur lui en particulier contrairement à d’autres
réalisateurs contemporains ayant connu un peu moins de succès
relatif comme Tim Burton, qu’on biographe souvent. De plus, son livre
ne fait pas partie des dépôts légaux de la grande bibliothèque du
Québec. Peu de gens peuvent dire qui a réalisé Back to the Future,
mais ils connaissent très bien le film. Malheureusement, on attribue
souvent sa populaire trilogie de voyage dans le temps à son
producteur : Steven Spielberg.
Retour vers le futur est d’ailleurs une œuvre très citée dans
plusieurs médias. À la télévision on peut penser notamment aux
Simpson qui font référence aux films souvent, ainsi que Family Guy
dans un épisode où Stewie crée un paradoxe temporel et il trouve tout
son quartier changé. Futurama fait aussi référence à Back to The
Future lorsque Fry retourne dans le passé et rencontre ses grands-
parents. La DeLorean et le « Hooverboard » sont deux objets qui ont
fait maintes apparitions au cinéma et à la télévision par la suite. En
créant la suite de Back to the Future, Zemeckis a fait naitre un intérêt
cinématographique pour les voyages dans le temps et les paradoxes
8
qu’il peut causer. Dans Harry Potter and the Prisoner of Azkaban
(2004), Alfonso Cuaròn rend hommage aux techniques narratives
utilisées par Robert Zemeckis, le maître des paradoxes, dans le cadre
des voyages temporels d’Harry et Hermione. Dans les deux
documents, on peut observer une récurrence des événements et le
recours à des instances de narration hétérodiégétique. Le film Forest
Gump (1994) a marqué le monde entier et l’Académie des Oscars. Il
occupe d’ailleurs la 76e position dans la liste des 100 meilleurs films
de l’American Film Institute. Une citation du film : « Cours Forest,
cours! » a marqué l’imaginaire d’une génération. Elle a inspiré le titre
du film Cours, Lola, cours (1998) de l’Allemand Tom Tykwer.
Who framed Roger Rabbit (1988) a aussi changé le cours du
cinéma en réintégrant les dessins animés aux prises de vues réelles
d’une manière plus réaliste. Il est le premier film combinant ces deux
techniques à gagner un Oscar depuis Mary Poppins(1964). Après ce
long métrage, d’autres films eurent recours aux mêmes techniques
comme Space Jam (1996), mettant en vedette les Looney Toons. Avec
Boréal Express, Robert Zemeckis a fait un énorme de promotion pour
une technique qui faisait son apparition à Hollywood; la capture de
mouvements. À l’instar de Georges Méliès, il veut toujours aller plus
loin que les autres et c’est ce qui fait le succès de ses films. La société
des effets visuels américaine lui a par ailleurs donné un prix hommage
9
pour l’ensemble de sa carrière en 2005. Depuis 2004, son étoile
éclaire le célèbre Walk of Fame à Hollywood.
10
Monsieur Mystère.Bob Gale
Si l’entrée « Robert Zemeckis biography » ne donne pas
beaucoup de résultats pertinents sur les moteurs de recherche, celle
de « Bob Gale » est encore pire. Semble-t-il qu’il n’est pas le seul de
ce nom. Même une grande base de données sur le cinéma comme
celle de la médiathèque de la Cinémathèque québécoise ne contient
que deux entrées à son sujet. Pourtant ses scénarios sont très précis
et bien construits, mais comme dirait la préposée de la
cinémathèque : « Ah! … c’est un scénariste… »
Tout de même, on sait qu’il est né à University City dans le
Missouri. À l’Université, il choisit l’ingénierie, mais après un an, il se
voit comme auteur de scénarios, c’est à ce moment qu’il déménage en
Californie et rencontre Zemeckis. Après les succès des films qu’il fait
avec son ami, il écrit toujours, mais pour la télé. On dit qu’il écrit
maintenant les scénarios de la bande dessinée Daredevil pour Marvel
Comics.
Une blague qui tourne mal.Genèse de l’œuvre
« Le plus grand problème pour les réalisateurs d’Hollywood
demeure dans le succès de leur film. S’ils n’en ont pas, ils ne
travaillent pas »4 dit le réalisateur, on peut dire que les problèmes
4 (Dixit Robert Zemckis) GAREL, Alain, Gilles Gressard, Olivier Le Guay, op. cit., pp.60-68.
11
sont étrangers à ses films. Zemeckis est dans la production de Roger
Rabbit, les studios lui annoncent qu’il y aura une suite à son film. Il
décide qu’il sera de la partie avec son ami Bob; ils avaient eu tant de
plaisir à faire le premier. Les deux collaborateurs avaient eu tant
d’idée pour le premier film qu’ils savaient qu’en produire deux autres
serait assez facile.
Pour le deuxième, un nouveau défi se présente à eux : le futur.
Rendez-vous dans les salles de projection où le duo regarde des films
futuristes comme 2001 : A Space Odissey (1968) et d’autres œuvres
où le voyage dans le temps est de mise. « Watching these films helps
to show us where we might go astray »5 déclare Zemeckis. Après ces
visionnements, Bob Gale résout : « Many science-fiction stories take
the point that the future’s a depressing place, but I’d like to think it’s
going to be a mixture of good and bad, much like today. »6 L’écriture
du scénario débute et, comme pour le premier, les deux coscénaristes
décident d’axer l’histoire sur le protagoniste, sur le même modèle
qu’Alice in Wonderland de Lewis Caroll : « En littérature comme au
cinéma, les meilleurs récits de voyage temporel s’appuient toujours
sur les personnages et non sur l’histoire »7 pense Zemeckis. En même
temps, les Bobs écrivent le scénario de la deuxième suite, un Western.
5 (Dixit Robert Zemckis) PRESS DEPARTMENT, « « Back to the future II » : Robert Zemeckis » dans Universal News (Universal City), 1989.6 (Dixit Bob Gale) PRESS DEPARTMENT, « « Back to the future II » : Bob Gale/Neil Canton » dans Universal News (Universal City), 1989.7 (Dixit Robert Zemckis) GAREL, Alain, Gilles Gressard, Olivier Le Guay, op. cit., pp.60-68.
12
Ensuite, on accorde 40 millions de budget au deuxième volet de
la trilogie et le même montant pour le troisième. Les deux films sont
tournés comme s’ils n’étaient qu’un seul simplement pour réutiliser
les décors et parce que les acteurs étaient tous disponibles pour les
deux. Le public remarque tout de même que le père et l'amoureuse de
Marty ont changé de visage pour les suites. Pour ne pas trop
décontenancer les spectateurs les studios décident de mettre un
masque du visage de Crispin Glover, sur Jeffrey Weissman, le nouvel
acteur jouant George MacFly. Glover qui s’était fait refuser le rôle
dans les suites parce qu’il demandait un trop gros cachet est furieux.
Il poursuit Universal et gagne.
Zemeckis est très collaboratif et accepte les commentaires des
acteurs et de l’équipe, mais se méfie de ceux du directeur photo; il
accorde plus d’importance à l’histoire. « J’ai été déprimé par ce qui se
passe aux États-Unis où l'on accorde de moins en moins d’attention à
l’histoire. »8 Dans la même optique que Capra, son idole, la trilogie
Back to the Future est remplie de rebondissement et beaucoup
d’importance est accordée au dialogue. Puis, comme dans le film It
Happened One Night (1934), l’histoire repose sur un voyage, le
personnage principal se remet en question et l’intrigue principale est
très marquée. « Le cinéma de Capra est la combinaison de trois
éléments que j’aime le plus dans un film. Les personnages : ce sont les
8 (Dixit Robert Zemckis) GAREL, Alain, Gilles Gressard, Olivier Le Guay, op. cit., pp.60-68.
13
plus importants, tout est centré sur eux; l’histoire : elle est toujours
très imbriquée et contient une pléthore d’informations; la rigueur : il
n’y a rien qui ne soit [pas] nécessaire au récit ou au personnage. »9
Il décide de donner le rôle des enfants de Marty à Fox, ce qu’il
trouve assez amusant. À cause de toutes les représentations
temporelles des protagonistes, les acteurs passent plusieurs heures
au maquillage. Zemeckis s’amuse et sème les gags par-ci et par-là : «
La plupart des films durs le sujet (les voyages dans le temps) sont très
sérieux, traitent de questions sérieuses, alors que l’idée même du
voyage dans le temps est ridicule. » Le film prend l’affiche le 2o
novembre, à Los Angeles, Californie, É.-U.
Consommation du futur.Réception de l’œuvre
Dès le premier weekend, le film récolte 27 835 135 $ de
recettes soit près de deux fois plus que son prédécesseur, ce qui est
compréhensible parce que les gens avaient de hautes attentes après
la vue du premier. Étant donné qu’il fait suite à Back to the Future,
les journalistes n’y accourent pas. En effet, le Citizen d’Ottawa et le
Toronto Star diffusent le même article trois jours avant la sortie du
film ne faisant que résumer les documents de presse envoyés par
9 GAREL, Alain, Gilles Gressard, Olivier Le Guay, Ibid., pp.60-68.
14
Universal. D’ailleurs la plupart des journaux canadiens n’offraient
qu’un résumé eux aussi, donc les critiques sont assez minces.
Tout de même, au Québec le film n’est pas très bien reçu par les
critiques qui l’ont vu. Au jeune journal Voir, Georges Privet reproche,
comme plusieurs autres critiques d’ailleurs, l’utilisation abusive des
placements de produit dans le futur et qualifie le film d’un
« « innocent » divertissement pour toute la famille. »10 Il ajoute que le
film est très manichéen et n’est monté que pour satisfaire une grande
masse.
Christiane Laforge du Quotidien de Chicoutimi a trouvé le film
« quelques fois amusant »11. Le scénario lui déplait complètement et
elle déplore le manque de conclusion. Peut-être n’était-elle pas
habituée à ce que nous appelons le « cliffhanger » dans le jargon
cinématographique, parce que si on considère que la quête de Marty
est de récupérer le fameux almanach ou de revenir à la bonne version
de 1985, il la termine bel et bien et on a même rajouté un épilogue
pour évoquer la suite. Le « cliffhanger » est utilisé pour augmenter les
attentes des spectateurs pour la suite, cette technique est plus utilisée
à la fin des émissions télévisuelles. Peut-être n’était-elle pas habituée
aux mauvaises fins.
10 PRIVET, Georges, « Back to the Future II : Passé simple » dans Voir (Montréal), 30 novembre 1989.11 LAFORGE, Christiane, « « Retour vers le futur II » Scénario peu consistant et sans vrai dénouement » dans Le Quotidien (Chicoutimi), 6 janvier 1990.
15
De ce fait, certains critiques accusent les deux Bobs de n’avoir
fait ce film que pour promouvoir le troisième volet. Le titre de la
chronique de John Griffin est éloquent : « Back to the Future : Part II
a hi-tech tease ». Il n’apprécie pas trop « the déjà vu-doo plot »12. Il a
quand même aimé voir le futur coloré. Chez Maclean’s, on réserve
une meilleure critique à l’œuvre et l'on salue les innovations
technologiques commises par Zemeckis. On apprend dans l’article
« Using a computerized camera Vista Glide, shots featuring the
differrent characters [joués par le même acteur] were seamlessly
combined, without using the old split-screen technique. »13
En France et dans le reste de l’Europe, on attend ce film avec
impatience. Ainsi, contrairement à Retour vers le futur, le film a
récolté plus au box-office international, 213 500 000 $, que
domestique, 118 450 000 $. Le total, 331 950 000 $, est moins que
son prédécesseur, mais les recettes sont quand même appréciables.
Cela dit, dans son pays d’origine, Back to the Future part II, obtient
des commentaires négatifs aussi. Au Chicago Sun-Times, on trouve
que le document « lacks the genuine power of the original »14 et qu’il
est très dur à suivre. On concède toutefois que l’intrigue est
entrainante et amusante. Dans la capitale nationale, Rita Kempley
12 GRIFFIN, John, « Back to the Future : Part II a hi-tech tease » dans The Gazette (Montréal), 22 novembre 1989.13 JOHNSON, Brian D., « 21st-century Fox : Hollywood’s time-travelling hero returns» dans Maclean’s (Toronto), 4 décembre 198914 EBERT, Roger, « Back To The Future Part II » dans Chicago Sun-Times (Chicago), 22 novembre 1989.
16
détruit totalement le film en le traitant de « crass, calculating feature-
lenght billboard. »15 Selon elle, le film est de piètre qualité puisqu’il
est réalisé pour plaire aux masses. Elle trouve aussi l’intrigue trop
compliquée et décevante. Bref, on ne peut pas dire que Back to the
Future II est un succès critique. Le site internet Rotten Tomatoes
signale que 64 % des critiques ont aimé le film basé sur 42 critiques,
d’un autre côté, 80 % du public l’a aimé, basé sur 674 994 avis16.
À la cérémonie des Oscars de 1989, l’œuvre aspire au prix des
meilleurs effets spéciaux, mais c’est finalement Abyss (1989) qui rafle
le prix. Le film se rattrape tout de même à l’Académie des films de
science-fiction, fantastique et horreur, où il gagne le prix Saturne des
meilleurs effets spéciaux et le même prix au BAFTA. Le magasine
Empire le place 498e dans son palmarès des 500 meilleurs films,
devant Saw (2004). Aujourd’hui, la trilogie Back To the Future est
vendue tout ensemble comme si elle ne représentait qu’un film en
trois volets. Si on regarde les œuvres comme un tout, le travail est
plus appréciable.
Je, Marty.Interprétations de l’œuvre.
15 KEMPLEY, Rita, « Back to the future II » dans The Washington Post (Washington), 22 novembre 1989.16 Rotten Tomatoes, Back to the Future Part II (1989), http://www.rottentomatoes.com/m/back_to_the_future_2/
17
Évidemment, le thème le plus frappant quand on regarde Back
to the Future II est les paradoxes temporels. D’ailleurs, le titre de
travail du film était Paradox. En effet, Marty et Doc retouchent 5 fois
la ligne du temps et ce phénomène a perturbé l’audience des années
80. Tous ces changements rendaient l’histoire compliquée pour eux.
D’un autre côté, ce sont les paradoxes qui ont attiré les spectateurs
au cinéma. En voyant la deuxième version de 1985 où Biff est roi, on
voit bien pourquoi Doc veut détruire sa machine. Les interventions
temporelles des deux amis n’amènent pas toujours au meilleur des
mondes.
Si on observe bien les différents voyages, on se rend compte
qu’un d’eux est impossible. Lorsque le vieux Biff de 2015 retourne en
1955, il aurait dû revenir dans un 2015 alterné, sauf que 2015 ne
change pas du tout. Les deux bobs expliquent par après que Biff serait
mort en 2015 et c’est pour cette raison qu’il ne se sent pas bien en
sortant de la Delorean; la scène de la mort de Biff a été supprimée.
Joseph Young a analysé la ligne du temps du film et a décelé 5 autres
anomalies temporelles qui conduisent toutes à des boucles
temporelles où le film au complet ne fonctionnerait pas. « To avoid the
awkwardness of these alternatives, we must adopt the theory of
sideways time »17, ce qui contredit la théorie que Doc expose à Marty
17 YOUNG, Joseph. Temporal anomalies in time travel movies unravels problems in time. http://www.mjyoung.net/time/index.htm
18
à la bibliothèque dans laquelle le temps n’est qu’une ligne qu’on peut
alterner.
Le futur et le deuxième 1985 sont de belles occasions pour faire
un hommage à la société de consommation. Zemeckis ne pouvait pas
faire abstraction de la publicité très présente dans le monde réel. Son
futur ne se serait trouvé que moins réaliste s’il n’en avait pas eu. Dans
trois ans, nous serons en 2015 et nous sommes toujours bombardés de
partout par de la publicité. Quant aux produits exposés, les
compagnies se sont données comme défi de les dévoiler en 2015,
même le Hoverboard. Mattel prévoit sortir la planche volante comme
dans le film. Malheureusement elle ne supportera pas le poids d’un
humain. Le 2e 1985 montre les perversions du capitalisme et les
dangers des monopoles. On pourrait aussi dire que 2015 représente
les bons côtés du capitalisme et 1985, les mauvais.
À plus large échelle, dans toute la trilogie, on comprend le
développement personnel de Doc et Marty à la Alice in Wonderland,
mentionné plus tôt. Chez Marty l’exemple le plus frappant est quand
quelqu’un l’appelle « chicken ». À chaque fois, qu’un personnage lui
dit « chicken » il est fâché et fait une action qui le compromet,
résultat : en 2015, il est déchu. Sa mère le mentionne par ailleurs
lorsqu’elle le visite. Elle explique aussi le grand accident d’auto de
Marty qui anéantit son futur. Dans le troisième volet, il apprend à se
19
calmer lorsque quelqu’un l’appelle « chicken », ce qui lui fait rater
son accident. Son voyage en 1955 lui permet aussi d’améliorer sa
relation avec ses parents et embellit sa vision de l’avenir. Doc, de son
côté, découvre l’amour en 1885 dans le far West et améliore ses
connaissances grâce au futur. Si on considérait l’attraction
d’Universal comme une partie du film, on pourrait même dire qu’il est
devenu l’homme le plus intelligent de la planète. D’un autre côté, il a
aussi appris à ses dépens qu’il ne fallait pas changer le passé. Dans le
premier film, le développement personnel est aussi visible chez les
parents de Marty.
Finalement.Conclusion
En terminant, nous aurons vu que le film n’était pas planifié au
départ. Il a été produit en même temps que le numéro III. Les deux
Bob se sont inspirés de plusieurs autres films pour créer le futur.
Dans son film, ils montrent des références à des films qu’ils aiment.
Les effets spéciaux constituent un élément phare dans la production.
Cette dernière a été quand même mal accueillie par la presse, mais
avec les autres œuvres de la trilogie, elles constituent un morceau
colossal de la culture populaire. Certaines erreurs sont perceptibles,
mais on peut les expliquer par la suppression de certaines scènes. Par
contre, pour les trouver, plusieurs visionnements sont nécessaires.
Après une lecture de l’étude de Young, le scénario semble moins bien
20
réfléchi qu’auparavant. D’un autre côté, les créateurs ont
judicieusement choisi d’axer l’histoire autour de Marty. Ses aventures
sont passionnantes, mais Zemeckis a confirmé qu’il n’y aurait jamais
de 4e volet à la saga temporelle. Toutefois, Retour vers le futur
pourrait être adapté sur les planches de Broadway.
21
Médiagraphie
Internet
AFI's 100 YEARS...100 MOVIES: 10TH ANNIVERSARY EDITION, http://www.afi.com/100years/movies10.aspx
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Box Office Mojo, Back to the Future Part II, http://boxofficemojo.com/movies/?id=backtothefuture2.htm
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DELMAS, Fabien, Horizons perdus, Contact et autres voyages , Acme, Revue de cinéma numérique, No 1, octobre 2008, p. 22 à 27. http://www.revue-acme.com/docs/revue_acme_numero1_pdf.html
DONAHUE, Jon, (EXCLUSIVE) Beyond the Marquee: The Web-Series (Episode 12): BOB GALE (MATTEL HOVERBOARDS : PART 2), 2012, http://beyondthemarquee.com/5460/.
GALE, Bob, Paradox : Back to the Future II & III, 1989, http://www.imsdb.com/scripts/Back-to-the-Future-II-&-III.pdf.
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IMDb, Bob Gale, http://www.imdb.com/name/nm0301826/
IMDb, Robert Zemeckis, http://www.imdb.com/name/nm0000709/
Rotten Tomatoes, Back to the Future Part II (1989), http://www.rottentomatoes.com/m/back_to_the_future_2/
The 61st Academy Awards (1989) Nominees and Winners, http://www.oscars.org/awards/academyawards/legacy/ceremony/61st-winners.html
22
YOUNG, Joseph. Temporal anomalies in time travel movies unravels problems in time. http://www.mjyoung.net/time/index.htm
Journaux et revues
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Livres
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Films mentionés
2001 : A Space Odissey. Réalisation : Stanley Kubrick, Metro-Goldwyn-Mayer, États-Unis, 1968, 141 min.
Back to the Future. Réalisation : Robert Zemeckis, Universal Pictures, États-Unis, 1985, 116 min.
Back to the Future Part II. Réalisation : Robert Zemeckis, Universal Pictures, États-Unis, 1989, 108 min.
Back to the Future Part III. Réalisation : Robert Zemeckis, Universal Pictures, États-Unis, 1985, 118 min.
Cast Away. Réalisation : Robert Zemeckis, Twentieth Century Fox Film Corporation, États-Unis, 2000, 143 min.
A Christmas Carol. Réalisation : Robert Zemeckis, Walt Disney Pictures, États-Unis, 2009, 96 min.
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Flight. Réalisation : Robert Zemeckis, Paramount Pictures, États-Unis, 2o12. [Durée indisponible]
Forest Gump. Réalisation : Robert Zemeckis, Paramount Pictures, Los Angeles, 1994, 142 min.
Harry Potter and the Prisoner of Azkaban. Réalisation : Alfonso Cuarón, Warner Bros., Royaume-Uni, 2004, 141 min.
It Happened One Night. Réalisation : Frank Capra, Columbia Pictures Corporation, États-Unis, 1934, 105 min.
I Wanna Hold Your Hand. Réalisation : Robert Zemeckis, Universal Pictures, États-Unis, 1978, 104 min.
Jaws. Réalisation : Steven Spielberg, Universal Pictures, États-Unis, 1975, 124 min.
Lola rennt. Réalisation : Tom Tykwer, X-Filme Creative Pool, Allemagne, 1998, 81 min.
Mary Poppins. Réalisation : Robert Stevenson, Walt Disney Productions, États-Unis, 1964, 139 min.
Piché: entre ciel et terre. Réalisation : Sylvain Archambault, TVA Films, Québec, 2010, 107 min.
The Polar Express. Réalisation : Robert Zemeckis, Castle Rock Entertainment, États-Unis, 2004, 100 min.
Romancing the Stone. Réalisation : Robert Zemeckis, Twentieth Century Fox Film Corporation, États-Unis, 1984, 106 min.
Saw. Réalisation : James Wan, Evolution Entertainment, États-Unis, 2004, 103 min.
Space Jam. Réalisation : Joe Pytka, Warner Bros. Pictures, États-Unis, 1996, 88 min.
Who Framed Roger Rabbit. Réalisation : Robert Zemeckis, Touchstone Pictures, New York, 1988, 104 min.
Yellow Submarine. Réalisation : George Dunning, Apple Corps, Royaume-Uni, 1968, 90 min.
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