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Projet d’activités agroforestières de Mampu (RDC, Province de Kinshasa) Sites web : http://www.delcod.ec.europa.eu/
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Entreprise agroforestière individuelle
Mots-clés : Valeur nette actualisée, taux interne de rentabilité,
analyse de sensibilité, leviers.
Introduction
Cette note poursuit un objectif spécifique : établir un mode de calcul
de la rentabilité financière d’une exploitation agroforestière
individuelle d’une superficie de 25 ha.
Dans cette optique, il ne s’agit pas d’une exploitation moyenne dont
les caractéristiques et les performances financières pourraient être
prises comme unitaires et dont le produit par le nombre
d’exploitations suffirait à donner la rentabilité de l’ensemble du
système agroforestier de Mampu.
Il s’agit plutôt d’une analyse financière qui permet de dégager deux
indicateurs pertinents, la valeur nette actualisée (VNA) et le taux
interne de rentabilité (TIR) afin d’étudier quels sont les leviers au sein
de l’entreprise qui permettent d’améliorer la performance de
l’entreprise.
Car dans cet exercice, l’exploitation agroforestière est regardée
comme le serait une PME en milieu rural.
Le thème de la note est décrit et illustré dans la section suivante
(description). Des réponses aux questions-clés sont apportées dans la
section analyse. Il est fortement recommandé de lire la note # 1
préalablement.
Questions-clés
1) Quelles sont les hypothèses de calcul? 2) L’exploitation
individuelle est-elle rentable? 3) Quels sont les principaux
leviers de la rentabilité d’une entreprise agroforestière ? 4)
Quelle stratégie d’amélioration peut-on en déduire?
Description
Lorsque la gestion du site forestier de Mampu a été confiée à la
Fondation Hanns Seidel (FHS) et à son partenaire local CADIM1, la
surface boisée a connu une transition progressive d’un projet
forestier pilote vers un centre agroforestier. L’implantation
successive de plusieurs dizaines de familles représente un élément
très important de cette conversion.
Les personnes physiques qui s’occupent actuellement des surfaces
boisées et cultivées de Mampu n’étaient pas, pour la plupart, des
paysans mais des cadres, des techniciens, et même des
fonctionnaires congolais.
La grande diversité de la dimension humaine de Mampu imprime la
variabilité des styles de gestion rencontrés sur le site, allant de
1 CADIM signifie Centre d’Appui au Développement Intégral /
Mbankana.
l’agroforesterie de subsistance à l’agroforesterie professionnelle,
novatrice et commercialement proactive.
Photo 1 – L’exploitant agroforestier.
Crédit photographique : M. Téchy
Il ne faut pas s’y méprendre… un exploitant agroforestier n’est pas
un simple paysan mais un véritable chef d’entreprise, polyvalent et
opportuniste.
Ce sont les gens qui font le lieu. Mampu ne doit pas être regardé en
tant que succès forestier… en réalité, Mampu n’est pas un succès
forestier mais une expérience socio-économique prometteuse,
financièrement viable. La qualité de l’exploitant agroforestier réside
dans les aptitudes suivantes :
• La motivation, la capacité de travail, le courage et la
débrouillardise.
• Le sens des affaires, le pouvoir de décision et l’esprit critique.
• Le talent d’entretenir de bonnes relations avec le voisinage.
• La capacité à planifier et organiser les activités, à gérer des
équipes de coopérants, partager équitablement les revenus et
limiter les coûts.
Avant tout, l’exploitant agroforestier doit vivre sur place !
Photo 2 – La concession de l’exploitant agroforestier.
Crédit photographique : M. Téchy
Les habitations principales des exploitants agroforestiers sont
réalisées à l’aide de matériaux durables (ciment, tuiles) et de
techniques éprouvées. Le coût d’une telle habitation et de la citerne
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pour l’eau de pluie revient approximativement à € 3.5002. Souvent,
des constructions connexes sont réalisées à l’aide de matériaux
locaux (bois, paille et terre) ; il s’agit essentiellement de hangars,
cuisine, toilette, aire surélevée de séchage pour les macrocossettes
de manioc, et parfois des habitations qui abritent les membres de la
famille étendue ou encore des coopérants sédentaires.
La taille de 25 ha n’a pas été définie en fonction d’une analyse
financière ou socio-économique. Elle ne correspond pas à un
optimum agroforestier, technique ou économique. Cette surface
provient simplement du parcellaire forestier de départ établi selon
une maille carrée de 500 m de côté. La surface nette de la parcelle
vaut (500 m x 500 m) 25 ha et l’emprise des chemins entourant
chaque parcelle, qui font aussi office de pare-feu mitoyen, vaut 3 ha.
La surface nécessaire à l’implantation des bâtiments principaux et
des constructions connexes, verger fruitiers, etc. est variable. Pour
simplifier la description, on considère que cette aire vaut 1 ha, ce qui
laisse une surface agroforestière productive de 24 ha.
La mécanisation complète de l’entreprise n’est pas adaptée au
contexte agroforestier de Mampu. Il en résulte que la force de travail
dont dispose l’exploitant et sa famille ne suffit pas pour réaliser
toutes les activités agroforestières sur une surface totale de 25 ha,
quand bien même seulement une petite fraction seulement de cette
surface est cultivée. En effet, avec une rotation de 12 ans sur les
peuplements d’acacias, et un âge limite de deux ans au-delà duquel
les cultures vivrières ne peuvent plus se développer en association
avec les arbres, la surface maximum à cultiver est de l’ordre de 4 ha,
souvent moins.
Photo 3 – Le coopérant.
Crédit photographique : M. Téchy
Les coopérants constituent la main d’œuvre auxiliaire. Sans eux,
l’exploitant agroforestier ne pourrait pas assumer l’ensemble des
activités de son exploitation. Certains d’entre eux sont sédentaires et
ont établi leur habitation à côté du logement de l’exploitant
agroforestier. La relation entre les coopérants sédentaires et
l’exploitant agroforestier est variable d’une exploitation à l’autre,
dans certains cas, les coopérants sont considérés comme des
proches, presque des membres de la famille de l’exploitant
agroforestier.
L’abattage et le billonnage des arbres se fait soit à la hache soit à la
tronçonneuse. La rémunération de ces tâches peut se faire de
différentes manières.
2 Franck Bisiaux, communication personnelle.
• Pour rémunérer un opérateur travaillant avec une tronçonneuse,
l’exploitant agroforestier paye une somme fixe par litre de
carburant utilisé. Le carburant est aussi à charge de l’exploitant.
• Le travailleur qui utilise une hache sera rémunéré entre
CDF 1.300 et CDF 2.000 par jour.
Le prix de la main d’œuvre, comme tout le reste en RDC d’ailleurs,
est sujet à l’accord négocié dont l’amplitude commune est de
CDF 1.500 à CDF 2.500 / jour. Le travail non qualifié est rémunéré en
espèces ou en nature ou les deux.
Photo 4 – Coopérants réalisant un four de carbonisation.
Crédit photographique : M. Téchy
Le débardage des rondins et le montage des fours de carbonisation
demandent une main-d’œuvre abondante qui est assurée par des
coopérants saisonniers ou sédentaires. Le système agroforestier
offre donc de nombreuses possibilités d’emplois.
Photo 5 – Conditionnement des sacs de charbon de bois.
Crédit photographique : archives projet
Le makala est conditionné dans des sacs en fibres nylon. Ces sacs
sont achetés à Kinshasa et coûtent approximativement CDF 350
l’unité. Ils ont une durée de vie approximative de quatre ans. Qu’il
s’agisse des exploitants agroforestiers de Mampu ou des
charbonniers œuvrant dans les dernières galeries forestières, les
habitudes sont les mêmes : les sacs sont rehaussés d’une portion,
appelée « tête », confectionnée à l’aide de matériaux naturels :
baguettes, feuillage d’acacia, lianes, herbes sèches, etc. Cette portion
permet de placer entre 30 et 50 % de charbon de bois
supplémentaire par sac. C’est le coût du sac d’une part, et l’effet
commercial d’autre part qui motivent cette pratique. Sur le site
agroforestier de Mampu, le sac moyen pèse 63 kg dont 4 kg pour le
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matériau naturel servant à confectionner la tête. Le sac moyen de
Mampu contient donc 59 kg de makala (poids net). Le nombre de sac
par hectare varie selon la biomasse ligneuse exploitable et, dans une
moindre mesure, du rendement de carbonisation.
La biomasse ligneuse recensée dans les parcelles les plus âgées (19
ans) au cours d’un inventaire forestier récent réalisé par la mission
varie de 187 m³ ha-1 à 339 m³ ha-1, et l’AAM correspondant varie de
10 m³ m³ ha-1 an-1 à 18 m³ ha-1 an-1. Cependant, les résultats
d’inventaire forestier issus des placettes de tous les âges donnent un
AAM de 11,8 m³ ha-1 an-1. Sur la base d’une rotation de douze
années, le peuplement d’acacias peut fournir environ 144 m³ de bois,
soit approximativement 150 tonnes de biomasse ligneuse fraîche qui
est transformée en 30 tonnes de charbon de bois, soit 500 sacs par
hectare. A Kinshasa, le prix du sac fluctue selon la saison mais vaut
approximativement CDF 8.000 avant taxes (CDF 500). Le transport
d’un sac entre Mampu et Kinshasa coûte CDF 3.000.
Lorsque la rémunération en nature intervient, les activités
d’abattage, billonnage, débardage, enstérage, montage du four sont
rémunéré par 45% de la production finale de charbon de bois au
bénéfice de la main d’œuvre auxiliaire (coopérants). Le
défournement et mise en sac du makala est rémunéré contre 10% de
la production finale. La confection des têtes est rémunérée à hauteur
de CDF 150 / sac. Quant au transport des sacs et à leur chargement
sur le camion, il est payé entre CDF 100 à CDF 150 selon la distance.
Le coût de revient du sac à bord du camion à Mampu est donc de
l’ordre de CDF 2.750, soit € 3,32. La tonne nette de charbon de bois
conditionnée en sac, à Mampu vaut donc approximativement € 56.
Photo 6 – Chargement des sacs de charbon de bois sur les camions.
Crédit photographique : archives projet
Le transport entre Mampu et Kinshasa est non seulement coûteux
mais aussi périlleux. Chaque année, plusieurs camions déversent leur
chargement … avant la destination voulue. La tonne de charbon
transportée revient à CDF 51.000, soit environ € 62.
Un camion avec une charge utile de 15 tonnes transporte
généralement 20 tonnes, soit 340 sacs. La recette du transporteur se
monte donc CDF 1.020.000, soit € 1.230. Le voyage Kinshasa-
Mampu-Kinshasa compte 350 km, si le camion voyage à vide pour
aller jusque Mampu, la recette au kilomètre vaut € 1.230 / 350 km =
€ 3,51. La marge bénéficiaire du transporteur est confortable.
L’intégration de l’opération de transport par l’entreprise individuelle
est évidemment impossible car les coûts d’investissement liés à
l’acquisition d’un camion et les coûts de fonctionnement associés
sont élevés. Néanmoins, cette option peut prendre du sens par le
biais d’une coopérative à laquelle appartiendrait l’exploitant
forestier. Cette option est à étudier au cas par cas.
Photo 7 – Croissance des plants d’acacias et du manioc.
Crédit photographique : archives projet
Le rendement du manioc (en tubercules frais) a été observé au cours
d’un échantillonnage. Sur la base des pesées réalisées sur les
placettes d’échantillonnage, le rendement en tubercules frais varie
de 10 T ha-1 à 68 T ha-1 avec une moyenne de 38 T ha-1 et un écart-
type de 20 T ha-1. Ces rendements sont des rendements au terme de
la campagne ; ils doivent donc être diminués lorsqu’ils sont ramenés
à l’année. La moyenne mondiale pour les rendements en tubercules
frais (9 T ha-1) reste très modeste par rapport aux potentialités de la
plante (90 T ha-1) [CIRAD-GRET, 2006].
Photo 8 – Tâche collective : épluchage du manioc.
Crédit photographique : M. Téchy
L’épluchage de manioc est une tâche qui requiert beaucoup de main-
d’œuvre. Cette activité est souvent organisée collectivement, parfois
par le biais de tontines de travail. Les tubercules de manioc frais
donnent environ 80% de cossettes épluchées.
Le tubercule épluché doit encore être fendu en quatre afin de
faciliter son rouissage et par la suite son séchage. La décomposition
enzymatique des glucosides du manioc forme de l’acide
cyanhydrique (extrêmement toxique) ; le rouissage et le séchage
favorise l’élimination de ce poison.
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Photo 9 – Séchage des cossettes de manioc.
Crédit photographique : M. Téchy
Le maïs offre un rendement de 1.500 kg à 1.700 kg de grains par
hectare dans le système agroforestier de Mampu. Des ruches bien
conduites peuvent produire 15 kg ruche-1 an-1. La moyenne à Mampu
est cependant inférieure à 10 kg ruche-1 an-1.
Analyse
1) Hypothèses de calcul
Les calculs financiers reposent sur le jeu de données et d’hypothèses
suivantes :
Par convention et pour adhérer à la réalité observée sur le site de
Mampu, la contenance totale nette de la ferme est fixée à 25 ha dont
24 ha pour les spéculations principales, les 4 Ms et 1 ha pour les
spéculations connexes comme par exemple l’élevage de case
(volaille, porcs, lapins, caprins, ovins, bovins), l’arboriculture fruitière
(avocatiers, safoutiers, goyaviers, manguiers, palmiers, etc.)
Afin de déterminer le cadre de calcul, on pose les hypothèses
suivantes :
• La situation de départ est celle d’un peuplement régulier
d’acacias distribué en douze parcelles de deux hectares âgées de
1 à 12 ans, soit une surface totale nette de 24 ha.
• L’exploitant et sa famille vivent à la ferme. La main-d’œuvre de
l’exploitant équivaut à 286 journées de labeur. La main-d’œuvre
du reste de la famille équivaut à 1.027 journées de labeur.
• L’exploitant a recours à la main d’œuvre des coopérants. La
répartition de la force de travail externe (coopérants) peut être
simplifiée en deux groupes de prestations. Les prestations qui
sont rémunérées en espèces et nourritures, à la tâche ou à la
journée. Les prestations qui sont rémunérées en nature, c’est-à-
dire en échange d’une fraction de la production. Etant donné la
grande variété des situations, une répartition moyenne a été
retenue.
• A des fins de calculs, on fixe la valeur de la journée de travail à
3.000 CDF pour l’exploitant agroforestier et à 500 CDF pour les
membres de la famille et 2.500 CDF les coopérants.
• L’investissement principal consiste à construire l’habitation et sa
citerne (3.500 €) ; la mécanisation étant réduite, peu de charges
d’amortissement entrent en compte.
• Les productions agroforestières connexes sont considérées
autoconsommées et une fraction est commercialisée.
• Les analyses porteront sur des durées de 5 ans ou 10 ans au
cours de laquelle les rendements, les coûts et les prix sont
constants.
• Le rendement de manioc (tubercules frais) est fixé à 30 tonnes
ha-1 campagne-1. La durée de la campagne est fixée à 18 mois,
soit un rendement annuel de 20 tonnes ha-1 an-1. Le rendement
de maïs est fixé à 1,5 tonne ha-1 an-1, une seule campagne par
an. L’AAM des peuplements d’acacias est de 12 m³ ha-1 an-1, et la
rotation est de 12 ans. L’exploitation annuelle porte sur une
contenance de 2 ha.
• La diversification se met progressivement en place. Ce n’est qu’à
partir de la deuxième année que l’exploitant produit du miel et à
partir de la quatrième année qu’il commercialise une partie de
ses fruits et de ses productions animales.
• Le choix du taux d'actualisation est fixé à 10%.
• Le Les taux de change (Inforeuro, octobre 2008) suivants sont
utilisés : € 1 = USD 1,4349 = CDF 828,29.
Certaines de ces hypothèses sont discutables. La construction du
tableur représente un modèle qui ne capture qu’une partie de la
réalité. Le but de ce modèle n’est pas de représenter la réalité
moyenne de la parcelle agroforestière moyenne de Mampu mais de
comprendre les implications financières liées à des décisions de
gestion.
2) Analyse financière
L’analyse financière portant sur une période de dix ans et de cinq ans
présente les indicateurs suivants, la VNA et le TIR :
• VNA (dix ans) = € 8.201 et TIR (dix ans) = 29 %
• VNA (5ans) = € 1.392 et TIR (5 ans) = 16 %
L’activité de l’entreprise agroforestière s’avère rentable à moyen et à
long termes, la rentabilité augmentant même avec le temps et la
diversification. Cela signifie que € 1.000 investi dans cette entreprise
va générer annuellement € 160 si on considère les cinq premières
années et € 290 si on considère une période de dix années.
3) Analyse de sensibilité
L’analyse de sensibilité consiste à faire varier les valeurs des leviers
afin d’observer leur impact sur les performances de l’entreprise. Elle
permet ainsi de dégager le point mort, par exemple le seuil minimum
en-dessous duquel une variable induit une VNA nulle. Plus
intuitivement peut-être, l’analyse de sensibilité permet de
comprendre l’importance relative des activités agroforestières. Le
lecteur peu familier avec l’analyse financière trouvera des
explications utiles dans Rubin [2004].
L’analyse de sensibilité porte sur les leviers suivants en leur
conférant alternativement une valeur pessimiste (basse) et optimiste
(élevée). Les indicateurs sont calculés pour une période de cinq ans.
• Rendement de manioc : 20 T ha-1 par campagne et 40 T ha-1 par
campagne. La VNA est positive pour les deux scénarios, le TIR
prend les valeurs 11% et 20 % respectivement.
• AAM des peuplements d’acacias :pour des scénarios de 9 m³ ha-1
an-1 et 15 m³ ha-1 an-1. La VNA est négative et le TIR passe sous le
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taux d’actualisation pour atteindre une valeur proche de 0%.
Dans le cas du scénario optimiste, le TIR vaut 16%.
• Transformation du manioc en micro-cosettes. Les scénarios
portent sur les rendements en tubercules dont 100% sont
ensuite transformés en microcossettes. La VNA reste positive et
le TIR vaut 22% et 33% respectivement.
• Remboursement des coûts d’installation des peuplements
d’acacias (€ 363 ha-1) à charge de l’exploitant agroforestier. Les
deux scénarios portent sur la durée de l’analyse, 5 ans et 10 ans.
La VNA est négative dans le premier cas et positive dans le
second, les TIR valant respectivement -1% et 15%.
• Intensité de la diversification. Aucune diversification ou une
diversification deux fois plus intense que le scénario de base. La
VNA reste positive. Le TIR vaut 13% et 19% respectivement.
La rentabilité de l’exploitation agroforestière est fortement tributaire
du remboursement de l’implantation des peuplements d’acacias.
C’est la transformation du manioc en microcossettes et
l’augmentation de la production du charbon de bois qui sont les
leviers les plus importants. Vient ensuite le rendement en tubercules
de manioc. La diversification a relativement peu d’impacts.
Plus encore que pour le manioc, l’accroissement des arbres a un
impact sur la rentabilité financière de l’exploitation agroforestière.
Cet impact plus important des arbres vient du ratio d’emprise
productive. La surface dévolue aux arbres est six fois plus importante
que la surface dévolue aux cultures vivrières. Pendant une grande
partie du cycle de production (et donc de création de la valeur) les
surfaces boisées n’impliquent absolument aucun coût direct.
Une analyse de sensibilité intéressante à effectuer porte sur le
rendement de carbonisation. Toutes autres choses étant égales dans
l’exploitation forestière, une amélioration absolue de 4% du
rendement de carbonisation fait passer le TIR (10 ans) de 40% à 51%
et la VNA (10%, 10 ans) de € 14.005 à € 19,533! Dans le même ordre
d’idée, la sensibilité des indicateurs financiers à la transformation du
manioc en microcossettes est révélatrice de la stratégie à adopter.
La figure 1 exprime l’impact relatif des leviers sur la VNA dans les
différents scénarios. Le scénario de base correspond à la VNA
moyenne de € 1.392 pour une analyse portant sur 5 ans.
-4.000
-2.000
0
2.000
4.000
6.000
8.000
10.000
12.000
VN
A (€)
Leviers
VNA moyenne
VNA pessimiste
VNA optimiste
Figure 1 – Evolution de la VNA en fonction des leviers.
4) Stratégie d’amélioration
Sur la base de l’analyse financière couplée à l’analyse de sensibilité, il
est possible d’envisager l’amélioration des performances financières.
La stratégie vise donc à créer de la valeur ajouté par une
augmentation de qualité des produits agroforestiers et non pas à
accroître les rendements des produits bruts, c’est-à-dire non
transformés. Pratiquement, il vaut mieux augmenter le rendement
de carbonisation de 2% que d’augmenter l’AAM des peuplements de
1 m³. Il s’avère plus rentable de transformer le manioc en
microcossettes plutôt que d’augmenter le rendement des tubercules
frais de 10 tonnes ha-1. Augmenter les rendements des cultures
vivrières à la fois crée et détruit de la valeur ajoutée.
Conclusion
L’entreprise agroforestière individuelle est rentable dans un bon
nombre de configurations, même lorsque l’exploitant forestier
supporte les coûts liés à l’habitation. Cependant, l’exploitation
agroforestière est particulièrement sensible à l’AAM des
peuplements d’acacias. La transformation du manioc en
microcossettes permet la meilleure amélioration des performances
financières.
Il est aussi envisageable d’augmenter plusieurs leviers dans une
même direction. Il va sans dire que ces scénarios tendent vers la
maximisation de la VNA. Il est dangereux de combiner trop de
facteurs de succès en même temps (excès d’optimisme).
Un enseignement précieux à tirer de ces analyses de sensibilité,
outre l’importance relative des leviers, c’est de comprendre que la
parcelle individuelle moyenne de 25 ha dans le système agroforestier
de Mampu est certainement sous-optimale. Beaucoup de parcelles
du système agroforestier ont été surexploitées en ce qui concerne les
acacias. Cette surexploitation grève largement les performances
financières compte tenu de l’importance de le l’AAM dans la
rentabilité. Ainsi, même en cultivant deux ou trois fois plus de
manioc, il s’avère très difficile de corriger un manque d’arbres dans
le système agroforestier. La seule solution durable passe alors par
des regarnissements et des plantations forestières d’enrichissement
afin d’accroître la matériel sur pied.
Références
CIRAD-GRET [2006] – Memento de l’Agronome. Paris, Centre
de Coopération International en Recherche Agronomique pour le
Développement, Groupe de recherche et d’échanges technologiques,
Ministère français des Affaires étrangères, 1691 p.
Rubin J. [2004] - Analyse financière et reporting avec Excel.
Eyrolles, 278 p.