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Commission européenne numéro spécial septembre 2007 research eu magazine de l’espace européen de la recherche La Terre, une œuvre d’art ISSN 1830-799X Satellite © ESA

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Commission européenne

numéro spécial – septembre 2007

researcheumagazine de l’espace européen de la recherche

La Terre, une œuvre d’art

ISSN 1830-799X

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[email protected]• par fax (+32-2-295 82 20).

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research*eu

Rédacteur en chefMichel Claessens

Relecteurs versions linguistiquesJulia Acevedo (ES), Stephen Gosden (EN),Régine Prunzel (DE)

Coordination généraleJean-Pierre Geets, Philippe Gosseries

Coordination rédactionnelleJean-Pierre Geets, Philippe Gosseries

JournalistesDelphine d’Hoop, Christian Dubreuil,Carlotta Franzoni

TraductionsAndrea Broom (EN), Martin Clissold (EN),Silvia Ebert (DE), Consuelo Manzano (ES)

GraphismeGérald Alary (chef de projet),Gregorie Desmons (création),François Xavier Pihen (mise en page),Gaëlle Ryelandt Yaël Rouach (coordination et suivi de production), Daniel Wautier (correction des épreuves)

Version Web Pierre-Vincent Ledoux, Katherine O’Loghen

En couvertureL’embouchure du fleuve Betsiboka,Madagascar© Association Helmholtz

Production généralePubliResearch

ImpressionEnschedé/Van Muysewinkel, Bruxelles

Ce numéro a été tiré à 118 000 exemplaires.Toutes les éditions de research*eu sontconsultables en ligne surhttp://ec.europa.eu/research/research-eu

Éditeur responsableMichel ClaessensTél. : +32 2 295 99 71Fax : +32 2 295 82 20Courriel : [email protected]

© Communautés européennes, 2007Reproduction autorisée,moyennant mention de la source

Ni la Commission européenne ni aucunepersonne agissant au nom dela Commission ne sont responsables del’usage qui pourrait être fait desinformations contenues dans cettepublication ou des erreurs éventuelles qui,malgré le soin apporté à la préparationdes textes, pourraient y subsister.

Demande d’abonnement à la version imprimée de research*eu

Vues de TerreLa Terre, une œuvre d’art? Les photographies de ce numéro nous incitent, en effet, à(re)découvrir une planète toute en beauté, riche et fragile à la fois. Mais, dans les pagesqui suivent, c’est aussi la science qui fait œuvre d’art. Car l’iconographie de ce numéron’a pas été composée pour le plaisir des sens : elle est un pur produit de recherchepointue et de haute technologie. Les images présentées, sublimes en effet, nousrappellent que l’observation de la Terre, développée au départ dans un but militaire,a donné à la société de nombreuses applications civiles. Celles-ci ont révolutionné lamétéorologie et bouleversé tous ses modèles. En traquant cyclones, ouragans et autres tsunamis, les satellitesalertent les populations menacées. À partir des données venues d’en-haut, les scientifiques anticipent l’apparitionet l’évolution des épidémies, sauvant ainsi des vies humaines. Ils suivent l’évolution du climat et surveillent l’étatde la couche d’ozone. Et ce n’est pas tout : les radars embarqués sur les satellites cartographient les fonds marinset les courants, permettant d’optimiser le routage maritime, la pêche ainsi que l’aménagement des côtes et desplates-formes off-shore.Vue de la Terre, l’activité qui se développe dans le ciel donne la mesure du marché que représentent les applicationsspatiales. Aujourd’hui, quelques 3 100 satellites gravitent autour du globe, sans compter les satellites militairessecrets et les débris ignorés en tout genre! Mais alors que, sur terre, l’Europe se construit lentement, celle-ci est déjà une réalité dans notre ciel ! Et, les yeux dansl’espace, je vous invite à découvrir, dans ce numéro, les coopérations et les visages de cette Union «réenchantée»,ainsi que les multiples facettes d’une planète qui exhibe les stigmates de l’occupation humaine.

Michel ClaessensRédacteur en chef

Magazine de l’Espace européen de la recherche, soucieux d’élargir le débat démocratique entre science et société,research*eu est rédigé par des journalistes professionnels indépendants. Il présente et analyse des projets, des résultatset des initiatives dont les acteurs, hommes et femmes, contribuent à renforcer et à fédérer l’excellence scientifique et technologique de l’Europe. Publié en anglais, français, allemand et espagnol, à raison de dix numéros par an,research*eu est édité par l’Unité Communication de la DG Recherche de la Commission européenne.

Les opinions présentées dans cet éditorial, de même que dans les articles de ce numéro, n’engagent pas la Commission européenne.

Exposition 4 La Terre, une œuvre d’art!

Retour sur les tenants et les aboutissants del’exposition La Terre, une œuvre d’art avecSusan Kentner qui a coordonné l’événementpour l’association allemande Helmholtz.

Science et Art 6 Subjectivité de l’objectif

Réflexion sur l’esthétique abstraite qui reliel’imagerie satellite et l’art moderne.Conversation avec Ralph Dekoninck, historien de l’art au FNRS.

Télédétection8 Les yeux rivés sur l’orange bleue

Initiation à la télédétection, ou commentprocède-t-on à l’observation de la Terre au moyen d’engins à résolution dite spatialeou spectrale.

10 Surveillance militaireLa télédétection spatiale s’avère un outilindispensable à la surveillance militaire.Présentation des satellites « espions », des engins à la mission strictement confidentielle.

Excellence12 L’Europe à la pointe

Histoire de l’excellence européenne enmatière de télédétection civile, un talent quin’est pas prêt de s’essouffler.

Charte internationale14 Urgences planétaires

Pour mieux réagir aux catastrophes naturelles qui secouent la planète, lesgrandes agences spatiales se mobilisentautour de la Charte internationale « Espace et catastrophes majeures ».

CAHIER SPÉCIALPhotos satellites

Portrait15 Profession : chercheur en télédétection

Gros plan sur le chercheur belge AlexandreCarleer, spécialiste en images satellitaires de haute définition.

Florilège16 Des applications aussi variées

qu’insoupçonnéesTour d’horizon des applications pratiques de l’observation de la Terre qui ne serventpas uniquement à prévoir la pluie et le beau temps.

Earth Explorers18 Six explorateurs au service de la planète

L’Agence spatiale européenne vient de lancer le programme Earth Explorers : six satellites qui se penchent chacun sur un aspect particulier de la biosphère.

research*eu SPÉCIAL SATELLITE I AOÛT 2007 15

Ce numéro, réalisé en collaboration avecl’Association Helmholtz, combine Art et Science en une série d’images satellitaires étonnantes. Un tour du monde haut en couleur…

La Terre, une œuvre d’art

Collaborations internationales

20 Une multitude d’engins en orbiteComment l’observation de la Terre se passe-t-elle au niveau international ?Présentation (non exhaustive) des satelliteset engins de télédétection les plus remarquables à l’heure actuelle.

Économie22 Un marché florissant et décentralisé

Coup de projecteur sur la vocation économique de l’imagerie satellitaire. La commercialisation de ce type de données profite de plus en plus aux petiteset moyennes entreprises.

Météorologie24 Eumetsat, L’AUTRE agence spatiale

européennePuisque les conditions météorologiques ontun impact direct sur notre vie, il s’avèrenécessaire de fournir des données, imageset produits satellitaires 24 heures sur 24, 365 jours par an. Tel est le rôle d’ Eumetsat,agence spatiale européenne opérationnelle.

Débris spatiaux 26 Les traces de l’homme dans l’espace

Arrêt sur une problématique peu connue : la menace des débris spatiaux. État des lieuxavec Heiner Klinkrad, Président du Bureaudes débris spatiaux à l’ESOC.

GMES27 Un environnement sous haute surveillance

Le programme GMES est le fruit d’une collaboration entre l’ESA et l’Union européenne. Objectif : garder un œil sur l’environnement mondial au sens largedu terme pour le bien-être socio-économique des Européens et leur sécurité.

Image de science28 Mosaïque du Nord-Est de la Chine

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SOMMAIRE

4 research*eu SPÉCIAL SATELLITE I SEPTEMBRE 2007

EXPOSITION

L’exposition La Terre, une œuvre d’artprésentait, du 7 mars au 24 avril 2007,les sciences de la télédétection spa-tiale sous l’angle esthétique. 26 images

satellites de 12 m² coloraient l’esplanade duBerlaymont à Bruxelles, siège de la Commissioneuropéenne. Susan Kentner a coordonnél’événement pour l’association allemandeHelmholtz, qui représente 15 instituts allemandsimpliqués dans six domaines de recherche, dontl’aéronautique et l’espace.

D’un regard à la curiositéEn plus de faire connaître ses membres, l’as-sociation se donne pour mission de mettre enévidence les problématiques scientifiquesactuelles comme celles liées au climat et àl’énergie. « L’idée de l’exposition est apparueaprès le succès inattendu d’un livre d’imagessatellites réalisé par GEO et le Centre aérospatialallemand (DLR), membre de l’associationHelmholtz. Dans le contexte de la présidenceallemande, l’association Helmholtz a pris lerelais pour mettre en valeur, à Bruxelles, nosactivités de recherche», explique Susan Kentner.«Nous voulons rendre la science accessible et

proche des individus. Les photographies etdonnées obtenues grâce aux satellites ont cepouvoir de séduire le regard et d’éveiller lacuriosité du public. »Les images présentées ont toutes été produitesdans un but scientifique et proviennent dessatellites d’Europe et de pays partenaires. LeDLR, qui rassemble et traite quotidiennement cetype de données, a sélectionné pour l’expositionles photographies sous un angle esthétique touten balayant différentes applications. « Chacunpeut découvrir les nombreuses fonctions queremplissent les satellites. Les outils de télé- détection, par exemple, révèlent les caractéris-tiques de la surface et de l’atmosphère terrestreet modifient radicalement notre perception dumonde. Depuis les premières prises de vue dela Terre réalisées en 1946, les techniques ontévolué vers plus de précision et une meilleurecompréhension de nos milieux de vie.»

De nombreux desseinsLes outils de télédétection sont presque tousissus de l’activité militaire. Les techniques desurveillance nocturne des missiles, par exem-ple, permettent aujourd’hui d’étudier la réparti-

tion de l’électricité consommée. La surveil-lance, dont les militaires améliorent sans cessela précision, trouve aussi des applicationsciviles. Celles-ci ont d’abord révolutionné lamétéo rologie et bouleversé tous ses modèles.Les satellites traquent les cyclones, les oura-gans, les tsunamis, ainsi que l’apparition etl’évolution des épidémies, fortement liées auxconditions météo, et sauvent ainsi des vieshumaines. Ils permettent aussi d’étudier le cli-mat dans son approche globale et à long terme.Les scientifiques surveillent la couche d’ozoneet mesurent les conséquences du réchauffe-

La Terre, une œuvre d’art !La Terre vue de l’espace fascine sous tous sesangles, toutes ses coutures. Les photographiesprises depuis les satellites forcent l’admiration.Notre monde et ses richesses surprennent, car les données scientifiques qui les décrivent en révèlent aussi toute la beauté.

© Philippe Gosseries

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EXPOSITION

ment climatique en observant les concentra-tions des différents gaz présents dans l’atmo-sphère, chacun d’eux reflétant une partiedéterminée du spectre magnétique.Les radars embarqués sur les satellites carto-graphient également les fonds marins pourdécrire les mouvements des masses d’eau etles phénomènes dans les profondeurs océa-niques. Ces observations recueillies sur lescourants ou la topographie marine permettentégalement d’optimiser le routage maritime, lapêche, l’aménagement des côtes et des plates-formes off-shore. Enfin, la cartographie s’est élargie dans plusieursdirections grâce à la couverture instantanée devastes superficies. Les ONG s’en servent pourorganiser l’aide et la coopération lors de catas-trophes naturelles. Dans les pays industrialisés,les relevés satellites facilitent la gestion desespaces et l’installation d’infrastructures. Lesapplications de la cartographie sont toujoursplus variées et plus utiles, repérant les minéraux,le sol propice à l’agriculture, le stade des pro-ductions agricoles, la déforestation, les eauxsouterraines… «C’est fascinant, car les imagesissues de toutes ces activités suscitent vraiment

l’intérêt du public pour la recherche scienti-fique! », relève Susan Kentner.

Une question de regardLes images exposées montrent aussi une Terreaux couleurs surprenantes, vue avec d’autresyeux que les nôtres. Les systèmes de télédé-tection peuvent, en effet, enregistrer des partiesdu spectre électromagnétique qui ne sont pasdécelables à l’œil nu, comme l’infrarouge. Cesbandes spectrales sont associées à des couleursd’affichage qui révèlent des informations, invisi-bles pour l’œil humain. Les images présentéessont composées de fausses couleurs ou super-posées pour que les chercheurs puissent lesinterpréter.Grâce à ces analyses, des technologies aidentà organiser les actions humaines, à comprendreleurs conséquences – parfois irréversibles – età préserver la Terre. Vitaux pour la survie despopulations ou simplement utiles au dévelop-pement économique d’une région, les outilsde la télédétection répondent à des niveauxd’urgence différents. Les perspectives d’amé-nagement du territoire, par exemple, bénéfi-cient aux pays industrialisés – répartition des

espaces verts au cœur de Madrid en Espagne –comme aux pays en voie de développement –réhabilitation des terres de la frontière irako-iranienne, dévastées par la guerre, en zonesagricoles. Le recul optique des images satellites permet-il aussi un recul réflexif sur notre planète ? « Ilest vrai que nous devrions toujours considérerla dimension holistique de la recherche en inté-grant les autres visions culturelles et les diversesfacettes de la science, sans rester enfermésdans nos laboratoires», conclut Susan Kentner.

Voir cahier spécial

Carte interactive: les stations de La Terre,

une œuvre d’art

www.cdworks.de/entry/kwe/

Helmholtz:

www.helmholtz.de/en/index.html

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6 research*eu SPÉCIAL SATELLITE I SEPTEMBRE 2007

SCIENCE ET ART

Subjectivité de l’objectif

Ce ne sont que de «banales » imagessatellites en HD, produites pour lesbesoins de la science, sans aucuneintention artistique. Pourtant le titrede l’exposition «La Terre, une œuvred’art » n’étonne en rien. Quel regardporterions-nous sur ces «œuvres » si elles étaient signées par un plasticien? Ralph Dekoninck, historien de l’art au Fonds nationalde la recherche scientifique (BE),livre une brève réflexion sur l’inter-pellation esthétique des nouvellesimages du réel offertes par la science.

Victor Vasarely, Folk Toy Object (1969)Victor Vasarely est le père incontestédu « Op art », art cinétique ou artoptique, un mouvement artistiquequi explore la faillibilité de l’oeil à travers des illusions optiques. Ici, c’est un nouveau rapport qui s’installe entre le spectateur et l’oeuvre, en provoquant la participation active de celui qui regarde. Stimuler l’acuité visuellepour mieux comprendre, il n’y a peut-être qu’un pas entre l’art et la science…

Image satellite de l’agriculture dans le Kansas, États-Unis, agrandissement dans le cahier spécial(image complète page 18).

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SCIENCE ET ART

En tant qu’historien de l’art, quelle est votre première réaction face à ces photos satellites?En tant que simple spectateur, on ne peutqu’être fasciné par la beauté de ces images, ouplus précisément par leur côté fantastique, quinous fait oublier qu’il s’agit bien de photos. Lepremier réflexe est de penser à des toilesabstraites. Le spectateur averti peut toutefoiss’interroger sur les effets d’un tel déplacementd’images provenant d’un contexte scientifiquevers un contexte artistique. En effet, cesimages n’ont pas été composées avec uneintention esthétique. Pourtant, ne peut-on pasles approcher en oubliant leur référent pourne porter son attention qu’au jeu des formeset des couleurs ? Quoi qu’il en soit, le faitqu’elles changent de contexte d’expositionmodifie immanquablement le regard qu’onleur porte. Un même objet placé dans un cadrequi n’est pas le sien transforme la perception

que l’on en a. Les surréalistes l’avaient parti-culièrement bien compris.

Dans quelle mesure peut-on parler ici de «Terre comme œuvre d’art » ?Une telle appréhension esthétique provientdirectement de notre culture visuelle occiden-tale, désormais accoutumée à l’abstraction.Des images comme celles-ci n’auraient certai-nement pas retenu l’attention de spectateursdu XVIIIe siècle. La manière d’approcher ainsila réalité qui nous entoure n’est pas aussiancienne qu’on le croit habituellement. Certes,il était d’usage depuis le début de notre ère dereconnaître dans la nature la trace du Créateurdivin, d’ailleurs souvent assimilé à un peintredont l’œuvre serait le monde visible. En revanche, le regard porté sur la naturepour en contempler de manière désintéresséetoute la beauté est le fruit de la peinture depaysage telle qu’elle s’épanouit au XIXe siècle.

À cette époque, les peintres commencent àplanter leur chevalet en plein air, cessant ainside réinventer la nature en atelier. Depuis lesimpressionnistes, qui s’intéressèrent aux seulseffets lumineux, notre rapport au mondeperçu s’est considérablement modifié. Nouspercevons et apprécions souvent la naturecomme on le ferait avec une peinture.

Les sciences exactes peuvent-elles être«abstraites»?Le XXe siècle nous a ouvert des mondes quiétaient jusque-là restés hors de portée denotre regard. L’infiniment grand et l’infinimentpetit, imperceptibles à l’œil nu, nous ont étédévoilés par des techniques d’observationscientifique. Faute de repère, ce monde nousapparaît abstrait, car non ressemblant à laréalité habituellement perçue. En nous faisantde la sorte accéder à l’ « invisible », les sciencesont gagné en pouvoir de fascination, pouvoirquasi magique qui a pour résultat de réen-chanter le monde qui nous entoure et qu’oncroyait si bien connaître.

Comment l’art et la science peuvent-ilss’inspirer mutuellement? Science et art modernes sont presque nésmain dans la main, puisque leur avènementdate de la Renaissance et que la plupart desartistes d’alors se définissaient à la fois commesavants et créateurs. L’exemple emblématiqueest celui de Léonard de Vinci. La science, commel’art, relevait, à ce moment, de l’invention, ausens premier du terme, c’est-à-dire la découverted’une vérité préexistante. Étant donné cetenracinement commun, il est normal que cesdeux domaines n’aient cessé de communiquer.Pourtant, dans l´imaginaire collectif, science etart sont aussi séparés puisque l’un incarnel’objectivité, tandis que l’autre se présentecomme le royaume de la subjectivité. Lesdécouvertes scientifiques les plus récentes,notamment en matière d’astrophysique, nousfont accéder à des univers inconnus tout encontribuant à créer un nouvel imaginaire,assimilé par certains artistes contemporains.En revanche, les hommes de science peuvents’inspirer de l’imaginaire artistique pour penserl’impensable. On pourrait à ce titre parlerd’une inspiration mutuelle…

La télédétection, comme on pourraitl’imaginer, ne fait pas uniquementréférence aux engins spatiaux. Elleporte sur l’ensemble des techniques

permettant d’obtenir des informations sur unobjet via des instruments qui ne sont pas encontact direct avec lui. Ceux qui équipentdivers avions et observent notre planète relèventdonc de la télédétection. Quant aux satellitesd’observation de la Terre, ils regroupent unesérie d’engins aux caractéristiques très diffé-rentes, qui évoluent à des distances variablesde leur objectif.Les premiers satellites d’observation étaientconstitués d’appareils photos munis d’un film«à l’ancienne ». Une fois en orbite, les appareils

prenaient une série de clichés avant d’être rap-pelés au sol, où les images étaient récupérées.Par la suite, des caméras de télévision ont étéexpédiées dans l’espace et ont ainsi permis latransmission des images depuis l’orbite. Enfin,les capteurs se sont affinés et spécialisés.Désormais, place aux capteurs numériquescouvrant le domaine du visible mais aussi del’invisible, comme le rayonnement infrarouge,ainsi qu’aux scanners ou encore aux radars enorbite.

Les orbitesLes orbites sur lesquelles sont placés tous cesengins dépendent de leur finalité. Un satellitemétéorologique géostationnaire tel Météosat-5,

par exemple, « flotte » au-dessus de la Terre àquelque 36 000 km d’altitude. Sa résolution ausol est loin d’être excellente. Il ne distinguepas les détails – mais ce n’est pas ce qu’onattend de lui. À cette altitude, il reste fixé au-dessus d’un même point de la planète surl’équateur et il voit donc en permanence l’en-semble du disque terrestre. Cette stabilitéprésente un grand intérêt pour le suivi del’atmosphère et de ses diverses évolutions.Les satellites de télédétection travaillent géné-ralement sur des orbites plus basses, com-prises entre 450 et 1000 km. À ces altitudes, ilsse déplacent et évoluent sur des tracés qu’ilsbouclent en quelques dizaines de minutes.Ainsi le satellite Spot-4 effectue sa ronde toutes

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TÉLÉDÉTECTION

Les yeux rivés sur

Où évoluent les satellites d’observationde la Terre ? Que voient-ils réellement ? De quoiparle-t-on quand on évoque la résolutionspatiale ou spectraled’un instrument?Télédétection, mode d’emploi.

Les vapeurs d’eaucaptées par Météosat-8, satellite géostationnaire « voyant » l’ensemble du disque terrestre. 6 mars 2004.

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les 101,5 minutes à une altitude moyenne de830 km.Le plan des orbites choisies forme un angleavec le plan de l’équateur. Les satellites peuventse déplacer sur une orbite polaire (passant parles pôles), des orbites directes (le plan estincliné entre 0 et 90° par rapport à l’équateuret le déplacement se fait vers l’Est) ou rétro-grades, quand l’inclinaison est comprise entre90 et 180° (déplacement vers l’Ouest).L’inclinaison du plan de l’orbite d’un satellitedéfinit aussi la partie de la Terre qu’il peutobserver. Placé sur une orbite inclinée de 50°,celui-ci ne circulera qu’entre 50° de latitudeNord et 50° de latitude Sud. Il ne survolera doncjamais Oslo (NO), située à près de 60° Nord.L’orbite dite héliosynchrone constitue un casparticulièrement intéressant car elle estconstante par rapport à la position du Soleil.Tout au long de l’année, le satellite qui la par-court voit donc chaque point du globe à lamême heure. Ceci permet la comparaisond’images prises dans les mêmes conditionsd’illumination. Ce type d’orbite est, notamment,utilisé pour les satellites de la filière Spot.

Résolution spectrale, résolution spatialeLes capteurs des satellites enregistrent lesrayonnements (la lumière dans ses diverseslongueurs d’ondes, visibles et invisibles) réflé-chis ou émis par le sol et les divers objets quiles composent. La résolution spectrale est lacapacité du capteur à distinguer des rayon- nements électromagnétiques de fréquencesdifférentes. Plus le capteur est sensible à desdifférences spectrales fines (intervalles delongueurs d’ondes étroits), plus la résolutionspectrale du capteur est élevée.Deux types d’imagerie en découlent. Toutd’abord l’imagerie panchromatique, obtenue audépart d’un rayonnement unique comprenanttoutes les longueurs d’onde du visible. Lesnuances de l’intensité du rayonnement don-nent en quelque sorte une image en noir et

blanc de ce qui est observé. Ce type d’imagelivre le plus de détails. La résolution spatialedes objets perçus y est importante mais larésolution spectrale y est pauvre. La résolutionspatiale, en télédétection, fait état de la taillede la zone observée couverte par un seul pixelqui équipe les capteurs. Chaque pixel del’image correspond à une partie de la surface dela Terre. Les satellites actuels les plus précis ontune résolution spatiale (en panchromatique) del’ordre de 60 centimètres. D’autre part, les images multispectrales sontdes images en couleur. Elles sont produitespar plusieurs capteurs, chacun étant sensible àune partie du rayonnement électromagnétique(rouge, vert, bleu pour le visible, mais aussil’infrarouge). C’est en combinant les informa-tions de ces diverses bandes spectrales qu’onreconstruit une image colorée.

Rouge, la végétation ?Sur la plupart des images satellitaires à vocationscientifique, la végétation apparaît généralementen rouge. Étonnant pour des forêts, des prairiesou des jardins qui nous semblent plutôt verts…Pourquoi ?La plupart des satellites qui livrent des imagesmultispectrales disposent de capteurs sensiblesà diverses bandes du spectre électromagnétique.Ainsi, dans le domaine du rayonnement visible(qui va du bleu au rouge en passant par le vert),les satellites disposent de capteurs sensibles àtrois bandes spectrales : le bleu, le vert et lerouge. À partir de ces trois bandes, en faisantvarier leur intensité chromatique, il est possiblede reconstituer l’ensemble des couleurs «vraies»d’une image.En télédétection, le bleu est cependant peuintéressant. Cette bande spectrale est trèssensible aux perturbations atmosphériques.On préfère donc priver les satellites de capteursdans ce domaine, et en ajouter d’autres sensiblesà l’infrarouge proche (qui suit le rouge dans lespectre électromagnétique), une «couleur» que

nous ne percevons pas à l’œil nu. Or, le procheinfrarouge est un rayonnement techniquementtrès intéressant, typique de la végétation.Sur les satellites de télédétection, l’attributiondes couleurs des différents capteurs, bande parbande, est ainsi décalée. Aux capteurs sensiblesau vert, les scientifiques attribuent une couleurde restitution bleue sur leurs images. À ceuxqui sont sensibles au rouge, il s’agira de lacouleur verte et ils traduiront en rouge les élé-ments fournis par les capteurs sensibles à l’infra -rouge. Ceux-ci sont donc responsables de lacouleur, qui nous semble aberrante, de lavégétation. D’autres incongruités apparaissentégalement, telles les tuiles rouges des toits quideviennent jaunes et les zones aquatiquesnoires.

L’imagerie hyperspectraleLes images hyperspectrales sont obtenues pardes capteurs capables d’enregistrer l’infor -mation dans une multitude de bandes spec-trales (souvent plus de 200) beaucoup plusétroites dans les portions visibles, procheinfrarouge et infrarouge moyen du spectreélectromagnétique.Tous les objets reflètent, absorbent ou émettentun rayonnement électromagnétique qui cor-respond à leur composition et à leur structure.Les données hyperspectrales fournissent doncune information plus détaillée des propriétésspectrales (signature spectrale) d’une scène etpermettent une identification et une discrimi-nation plus précises des objets que les capteursmultispectraux à larges bandes.Les applications de l’imagerie hyperspectralesont multiples. Parmi les plus importantes, onpeut citer la géologie (identification des miné-raux…), l’agriculture de précision, la foresterie(état sanitaire, identification d’espèces…) ou lagestion des milieux aquatiques (qualité deseaux, composition en phytoplancton…).

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TÉLÉDÉTECTION

l’orange bleue

Image du barrage de Betania et de sesenvirons (Colombie)prise dans le visible et l’infrarouge. La végétation y apparaîten rouge et l’eau en noir.

© Landsat

En matière de renseignement, lesmilitaires sont très discrets. Mais ilest clair que la télédétection spatialeleur est un outil indispensable.

Quasiment dès le début de l’aventure de l’es-pace, il y a 50 ans à peine, les grandes puis-sances (États-Unis et Union soviétique) ontmis au point et lancé des satellites espions.Ceux-ci ont été développés pour observer àde hautes résolutions spatiales et spectralesles activités de pays tiers. Certains de cesengins ont également été mis au point pourdétecter d’éventuelles explosions nucléaires,ou encore pour déceler de manière précoce lelancement de missiles balistiques ennemis.L’armée américaine a été la première à placeren orbite, dès 1959, des engins expérimentauxd’observation de la Terre (Discoverer et Samos).Ces pionniers ont laissé la place à des dizainesde satellites espions de type Key-Hole (KH).L’Union soviétique a suivi, avec son proto-type Kosmos-4 (1962) et de très nombreuxsuccesseurs.

Une mission, un filmCes premiers engins de télédétection militairesse différencient des autres satellites d’observa-tion par leur orbite très basse, leur courtedurée de vie dans l’espace (quelques jours àquelques semaines) et par leur système deprise de vue. Sur le plan technique, ils étaientsimplement dotés d’appareils photogra-phiques sophistiqués. Expédiés sur une orbitechoisie en fonction de l’objectif à étudier, ils

déroulaient leur film et leur mission s’achevaitune fois la bobine terminée. À leur retour surTerre, le film était développé et les clichésinterprétés.Les progrès techniques enregistrés au coursdes quatre dernières décennies ont ensuitepermis aux militaires de disposer d’enginsplus sophistiqués, dotés de capacités numé-riques optiques, infrarouges, mais aussi radar(afin de pouvoir observer de jour comme denuit et quelle que soit la couverture nuageuse)et, surtout, capables de transmettre leurs don-nées depuis l’espace. Plus besoin dès lors d’at-tendre leur retour sur Terre pour découvrir lesinformations recueillies.

Quelle résolution ?La résolution des capteurs utilisés par les satel-lites militaires reste, bien entendu, confidentielle.Tout au plus peut-on aujourd’hui l’estimer auregard des capacités affichées par les satellitescivils les plus performants. «En termes de réso-lution spatiale, certains satellites civils offrentdes données très précises, de l’ordre de 80 cmau sol », explique Volker Liebig, directeur desprogrammes d’observation de la Terre à l’ESA(Agence spatiale européenne). « Il est égale-ment clair que, de plus en plus, le transfert dedonnées et les télécommandes envoyées auxsatellites civils sont cryptées, tout comme pourles satellites militaires. Il s’agit, d’une certainemanière, de se prémunir des hackers ! Néan -moins, les différences entre civils et militaires semarquent encore dans certains domaines, tels

le blindage des satellites contre les radiationsou leur capacité (pour les militaires) à changerrapidement d’orbite suivant les situations decrise. Cela suppose donc que les satellitesmilitaires consomment et disposent de beau-coup plus de carburant, mais aussi qu’ilssoient capables de repasser très fréquemmentau-dessus d’un même point du globe afin desuivre l’évolution d’une situation. »Face à l’hégémonie historique américano-russe dans le domaine de la télédétection,d’autres nations se sont aussi dotées d’enginsd’observation de la Terre.En 1988, Israël a ainsi lancé son premier satelliteOffeq. Plus récemment, la Chine s’est égalementdotée de satellites d’observation de la Terre,des capsules récupérables FSW, et un système àfinalité duale (civile et militaire), le Zi Yuan, aveccapacité de transmission des données au sol.

L’Europe comble son retardEn Europe, la France, en collaboration avecl’Italie et l’Espagne, a conçu les satellitesoptiques Hélios dès 1995. Le programme mili-taire français Hélios-2, toujours dans ledomaine optique (un satellite dérivé de laplate-forme civile Spot) est aujourd’hui enorbite. Le satellite Hélios-2A a été lancé endécembre 2004. Ses images sont exploitéespar les forces armées françaises mais despartenariats ont également été noués avecl’Espagne et la Belgique. Le second satellite decette génération, Hélios-2B, devrait être lancéen 2009, afin de prendre le relai jusqu’en 2014. L’Allemagne, de son côté, mise sur uneconstellation de satellites militaires radar : leprogramme Sar-Lupe. Il s’agit d’une constel- lation de cinq engins dont le premier a étéplacé en orbite en décembre 2006.La France développe pour l’instant deux satel-lites jumeaux d’observation optique : laconstellation Pléiades, comprenant deux petitssatellites (une tonne chacun), dotés d’unerésolution spatiale de 0,7 m et d’un champ devision de 20 km. Pléiades offrira des capacitésd’acquisition stéréoscopique pour répondreaux besoins de la cartographie fine, notam-

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TÉLÉDÉTECTION

Surveillance militaireC’est une évidence : l’Espace est un lieu privilégiépour obtenir des informations à finalité militaire. De nombreux satellites d’observationde la Terre ont, depuis les débuts de l’astronautique, des objectifs bien plus confidentiels que d’autres. Ils se distinguentaussi par leurs caractéristiques techniques et opérationnelles.

ment en zone urbaine, et pouvant interveniren complément de la photographie aérienne.L’Allemagne, la Belgique, l’Italie, l’Espagne, laSuède et l’Autriche se sont associées à ce pro-gramme «dual » (civil et militaire).De son côté, l’Italie met au point un ensemblede quatre satellites radar également à finalitémilitaro-civile les Cosmo SkyMed, appelés àvoler de concert. Cet ensemble (Pléiades etCosmo SkyMed) forme le cœur du projet de coo-pération Musis (Multinational Space basedImaging System for surveillance, reconnaissanceand observation) initié par la France en 2005.Il compte déjà comme partenaires l’Allemagne,la Belgique, l’Italie, l’Espagne et la Grèce. Ceprojet vise à préparer l’après-Hélios. Ce futursystème d’observation de la Terre devrait dis-poser de moyens optiques et radar. Sa mise enservice opérationnelle devrait intervenir avant ladate prévisible de fin de vie d’Hélios-2B, en 2014.L’avenir du renseignement spatial militaireeuropéen se dessine.

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TÉLÉDÉTECTION

Le CSUE de Torrejon

Afin d’exploiter les données issues des satellites d’observation de la Terre, l’Europe s’estdotée de son propre centre d’expertise. Installé à Torrejon de Ardoz, non loin de Madrid(ES), le Centre satellitaire de l’Union européenne (CSUE) s’est ouvert en 2002. Il constitue

une agence chargée de l’exploitation et de la production des informations résultant de l’analysedes images satellitaires de la Terre. Il vise notamment à soutenir le processus de prise de décision de l’Union européenne dans lecadre de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et de la Politique européennede sécurité et de défense (PESD). Son apport concerne notamment les opérations de gestionde crise menées par l’Union, en fournissant des produits résultant de l’analyse de l’imageriesatellitaire et des données collatérales, y compris de l’imagerie aérienne et des servicesconnexes.Les produits et services du CSUE peuvent également être mis à la disposition des États mem-bres, de la Commission, d’éventuels pays tiers, et de diverses organisations internationales(Nations unies, Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, Organisation dutraité de l’Atlantique Nord, etc.).Le CSUE est financé par des contributions des États membres et des paiements effectués enrémunération de services rendus. Ses services sont mis à contribution dans le cadre d’initiativesbien précises, telles des missions de sauvetage ou humanitaires, des opérations de maintien dela paix, la vérification de l’application de traités internationaux, la gestion de situations de crise,le contrôle de non prolifération d’armes stratégiques de destruction massive, ou encore certainesenquêtes judiciaires.

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Préparation de la partie optique desdeux futurs satellitesPléiades dans les sallesblanches de Thales AléniaSpace à Cannes (FR).

www.eusc.europa.eu

L’observation de la Terre, d’un point devue civil, est une discipline spatialequi a très tôt passionné les Européens.Dès 1977, l’ESA lançait Météosat-1, un

premier satellite optique chargé de regardernotre planète depuis une orbite géostation-naire. Consacré à la météorologie, celui-ci a eubeaucoup de petits frères aux regards toujoursplus acérés (nous en sommes à Météosat-7), etce dans toutes les longueurs d’ondes possibles :visible et infrarouge. Cette famille de satellitesest en orbite géostationnaire, à 36 000 kilo- mètres d’altitude. Le satellite paraît fixe parrapport à la région de la Terre qu’il observeen permanence.

Spot, Envisat et les autresDès 1978, un second ensemble de satellitesa vu le jour : la famille Spot (Satellite Pourl’Observation de la Terre), fruit d’une coopé-ration entre la France, la Belgique et la Suède.Cinq exemplaires ont, à ce jour, été lancés.Ceux-ci évoluent sur des orbites plus basses,

circulaires et héliosynchrones, à une altitudede 830 kilomètres. Le dernier né, Spot-5, livredes images affichant des détails de l’ordre de2,5 mètres au sol en noir et blanc (panchro-matique) et de 10 mètres en couleurs (multi -spectral).L’ESA a, par ailleurs, élaboré et mis sur orbiteplusieurs engins scientifiques, dont les satel-lites radars du programme ERS (EuropeanRemote Sensing satellite). Deux satellites decette famille ont été construits dans le cadrede ce programme adopté en 1982. ERS-2 esttoujours opérationnel en orbite. Il a, depuis, étérejoint par le géant Envisat.Mais les ressources de l’ESA en matière d’ob-servation de la Terre ne se limitent pas à cesseuls grands programmes.

Les « missions tierces »L’Agence spatiale européenne met égalementà la disposition de pays tiers ses installations ausol pour la réception, le traitement et l’archivaged’autres engins d’observation de la Terre. C’est

aussi dans ce cadre des «missions tierces »(Third party missions) qu’un satellite expéri-mental de l’ESA, le petit outil belge Proba(Project for on board autonomy), a été lancé.À l’origine, cet engin, placé en orbite en 2001,ne devait pas y subsister plus d’une année.Une fois l’efficacité de ce démonstrateur tech-nologique prouvée, l’engin est devenu à cepoint opérationnel que cette petite plate-forme orbitale (100 kilos à peine) ne cesse delivrer des images toujours plus étonnantes denotre planète grâce à sa caméra à haute réso-lution et à son imageur multispectral compactde facture britannique.

Cap sur l’avenirAujourd’hui, l’attrait pour l’observation de laTerre ne se dément pas. À Paris, siège del’Agence spatiale européenne, comme àFrascati, dans les environs de Rome où sesitue l’ESRIN, le centre de l’ESA en charge desprogrammes d’observation de la Terre, lesprojets fourmillent.

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EXCELLENCE

En matière de télédétectioncivile, l’Europeest aujourd’huile leader mondial incontesté. Un succès quiplonge sesracines dans les années 1970 !Et qui n’est pasprêt de s’essouffler.

L’Europe à la pointe

Image en couleurs de la Terre, prise par le satellite MGS-2 en janvier 2006.

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Cet engouement européen et ses perspectivesd’avenir ne manquent pas de séduire lesscientifiques de tous les continents, États-Uniscompris. «Tout simplement parce que l’Europeen a fait une de ses priorités alors que pourl’instant, aux États-Unis, les budgets consacrésà l’observation de la Terre sont sans cesserabotés », précise Simonetta Cheli, responsa-ble des relations publiques et institutionnellesà l’ESA-ESRIN, Italie. « Les scientifiques amé-ricains, dans ce domaine, sont d’ailleurs deplus en plus nombreux à chercher des colla-borations avec les chercheurs européens pourpouvoir bénéficier de nouvelles données pro-venant de nos instruments en orbite. »

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EXCELLENCE

Profusion d’algues dans la mer Baltique, captée par l’instrument Meris placé sur le satelliteEnvisat (13 juillet 2005).

Envisat, un succès « planétaire »

Le plus ambitieux satellite d’observation de la Terre jamais construit est un « enfant » de l’ESA.Depuis cinq ans, Envisat (ENVIronment SATellite) est une mine d’informations sur notre planète.Lancé en mars 2002, ce mastodonte (huit tonnes et dix instruments scientifiques) produit

chaque jour quelque 280 gigabytes de données.« En avril 2007, lors du symposium scientifique organisé à Montreux (Suisse) à l’occasion du cin-quième anniversaire d’Envisat, plus d’un millier de chercheurs issus de 50 pays différents sont venusprésenter leurs résultats scientifiques obtenus grâce aux données d’Envisat », explique Henri Laur,directeur de la mission Envisat à l’ESA. Quelque 1 200 projets scientifiques ont ainsi été détaillés. Etce n’est pas fini ! » La durée de vie opérationnelle d’Envisat devrait s’étendre jusqu’en 2010. Mais,même bien après la fin des observations en orbite, les données produites tout au long de sa vieactive, resteront une source d’informations de première qualité. Elles continueront à alimenter denouveaux algorithmes et livreront de nouvelles informations sur notre biosphère. « La grandeforce de ce satellite repose sur la multitude de données acquises simultanément en orbite par sesdivers capteurs d’une même région du globe », poursuit Henri Laur. « Des données qui concernentautant les terres émergées que les océans, la cryosphère ou encore notre atmosphère et, bienentendu, les multiples interactions entre ces diverses composantes. C’est ce qui explique que deplus en plus de résultats scientifiques obtenus grâce à lui concernent le climat et son évolution. »Parmi les instruments les plus remarquables du satellite, on peut notamment pointer le radarimageur Asar, le « thermomètre » Aatsr, ou encore Meris, un capteur optique qui s’intéresse autantaux couleurs de l’océan qu’au couvert végétal terrestre avec une précision au sol de l’ordre de300 mètres.

envisat.esa.int

www.miravi.eo.esa.int

Carte de la pollution par le dioxyde d’azote (NO2) établie à partir des données envoyées par Envisat. L’exposition prolongée à ce gaz peut causer des dommages aux poumons et au système respiratoire. Le NO2 joue également un rôle important dans l’atmosphère puisqu’il entraîne la production d’ozone dans la troposphère. Densité de colonne du NO2 exprimée en 1015 molécules/cm2.

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© ESA/Envisat

La Charte internationale offre un sys-tème unifié d’acquisition et de livraisondes données satellites dans les cas decatastrophes d’origine naturelle ou

humaine par l’entremise d’utilisateurs autori-sés. Chaque membre s’est engagé à fournir sespropres ressources à la Charte et contribueainsi à atténuer les répercussions de tellescatastrophes sur la vie des gens et la propriété.La Charte internationale est officiellemententrée en vigueur le 1er novembre 2000.Chaque utilisateur enregistré auprès d’elle peutfaire appel aux partenaires du programme etdemander la mobilisation des ressources spa-tiales et des ressources terriennes connexes(Radarsat, ERS, Envisat, Spot, IRS, SAC-C,satellites NOAA, Landsat, ALOS, satellitesDMC, et autres) des membres de la Charte.«Parmi les utilisateurs autorisés, on retrouve lesorganismes de protection civile, de sauvetage,de défense ou de sécurité du pays de l’un desmembres de la Charte mais aussi les agencesspatiales ainsi que les exploitants de systèmesspatiaux », indique Stephen Briggs, qui coor-donne à l’ESRIN (ESA - Italie), le programmede la Charte. «A titre exceptionnel, la directionde la Charte peut autoriser la livraison de don-nées spatiales à certains organismes tiers. »En pratique, un opérateur est de garde 24 heuressur 24. Il réceptionne les appels des utilisateursautorisés de la Charte via un numéro de télé-phone mondial unique. Après analyse de lasituation d’urgence et des demandes formulées,un plan d’acquisition d’images satellitaires et

d’archive est établi. Les données réclaméessont livrées dans les meilleurs délais, en généralen moins de 24 heures, afin d’informer au plusvite les équipes d’intervention sur le terrain.Les comparaisons avec les images d’archive per-mettent une meilleure évaluation des dégâts.

SOS sur tous les continentsDepuis sa création, la Charte a été activée plusde 130 fois. Rien qu’en 2006, ses moyens ontété sollicités à 25 reprises. Cette année, aucours du premier trimestre 2007, huit catas-trophes ont déjà nécessité son activation. Dèsle 19 janvier, la Charte a été activée pour desinondations en Bolivie, au Paraguay et enArgentine. Trois jours plus tard, c’était pour undéversement accidentel d’hydrocarbures en

Angleterre. Le 9 février, les satellites de laCharte étaient mobilisés pour suivre un nouvelépisode d’inondations au Mozambique. Fin février, ce sont des problèmes de volcanismeen Colombie puis d’inondations en Bolivie quil’ont occupée. En mars 2007, les satellitesd’observation de la Terre ont été sollicités àtrois reprises suite à un tremblement de terreen Indonésie, un cyclone à Madagascar et desinondations suivies de glissements de terrainen Argentine.L’an dernier, ce sont des catastrophes naturelles,notamment au Soudan, au Pakistan, en France,aux Philippines, en Allemagne ou enRépublique tchèque, pour n’en citer quequelques-unes, qui ont été à l’origine de sonactivation.

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CHARTE INTERNATIONALE

Urgences planétaires Tremblements de terre, glissements de terrain, éruptions volcaniques mais aussi inondations, marées noires, incendies de forêts. Quand une catastrophemajeure secoue la planète, il faut pouvoir réagir très vite.Des vies sont en danger. Pour faciliter le travail des équipesde secours, les grandes agences spatiales mobilisent leurs satellites d’observation de la Terre. Un service qui porte un nom: la Charte internationale«Espace et catastrophes majeures ».

Un peu d’histoire

En 2000, suite à la conférence des Nations unies Unispace III qui s'était tenue l’année précédente, les agences spatiales européenne (ESA) et française (CNES) ont fondé laCharte internationale « Espace et catastrophes majeures ». Très vite, l’Agence spatiale

canadienne (ASC) a rejoint cette structure. En septembre 2001, la National Oceanic andAtmospheric Administration américaine (NOAA) en faisait de même, suivie à son tour parl'Organisation indienne de recherche spatiale (ISRO).Aujourd’hui, la Charte compte encore parmi ses signataires l’Agence spatiale argentine(CONAE), l'Agence japonaise d'exploration spatiale (JAXA), l’USGS (United States GeologicalSurvey) et les partenaires britannique et multinationaux BNSC/DMC (British National SpaceCentre et Disaster Management Centre) qui regroupent trois pays tiers dotés de moyenssatellitaires : l’Algérie, le Nigeria et la Turquie sont devenus membres en novembre 2005. Toutrécemment, en mai 2007, la Chine via son agence spatiale CNSA (China National SpaceAdministration), a également rejoint la Charte.

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Stephen Briggs, coordinateur du programme « Charte » à l’ESA.

Sur les murs de son bureau, à l’UniversitéLibre de Bruxelles, les images satelli-taires sont partout. On passe de laville à la montagne, de la campagne

aux zones désertiques. «De belles images »,commente-t-il. «Mais qu’il faut savoir décoder,lire, interpréter. » Quand les régions observées sont vastes etque la définition des images (la résolutionspatiale dans le jargon) est faible, on reconnaîtaisément les grandes structures : une chaînede montagne, un lac, des champs, des forêts.Lorsqu’il s’agit d’aller dans le détail, celadevient une mission quasi impossible.«Sauf depuis 1999», explique cet ingénieur agro-nome qui a ensuite bifurqué vers un doctorat ensciences et la télédétection. «Depuis cettefameuse année, nous disposons d’imagessatellitaires civiles à très haute résolution.Avant cela, nous nous satisfaisions de donnéesissues par exemple des satellites Landsat, dontles premières générations ne distinguaient ausol que des détails de l’ordre de 80 mètres.Par la suite, leur résolution spatiale est passéeà 30 mètres. Avec la famille Spot, on a com-mencé avec des pixels représentant 20 mètres ausol. Puis, avec Spot-5, on est arrivé à 2,5 mètres.»La révolution de 1999 porte un double nom:Ikonos et Quickbird, deux satellites américains

à très haute résolution. «Avec eux, la précisiondes images s’approche de celle des photo -graphies aériennes, précise le chercheur, dequelques dizaines de centimètres à un mètre.Ce qui a débouché sur une explosion desnouvelles données. »Un fouillis qu’il faut identifier, classer, interpréter.Pour les photos aériennes, cette interprétation sefaisait manuellement. Mais sur des territoiresplus vastes et revisités très régulièrement parles satellites, cela devient très long et très coû-teux. Il a donc fallu trouver des méthodesautomatiques.Ce type de méthodes avait, bien sûr, déjà étédéveloppé pour les satellites de moindre réso-lution. Elle se faisait selon une classificationpar pixel.

Segmentation d’images«Mais pour les images à très haute définition,cette méthode n’est plus satisfaisante », conti-nue Alexandre Carleer. « Il a fallu passer àautre chose : à la méthode de la classificationpar région. Celle-ci segmente l’image en fonc-tion de la couleur de chaque pixel, mais peutaussi être couplée à des critères de forme del’objet, et même de texture. Les programmesque nous testons tendent finalement à recréerde manière homogène et cohérente les objets

vus au sol. Ainsi, on peut observer/identifierautomatiquement une multitude d’éléments :des maisons, des immeubles industriels, desarbres, des voitures, des routes. Bref, ce qui nese voyait pas avant sur des images ayant unerésolution spatiale moins fine. Le procédé per-met aussi de différencier des objets de mêmecouleur (de même signature spectrale) enfonction de leurs formes. Un exemple : là oùla signature spectrale seule du bitume ne per-mettait pas de dire s’il s’agissait d’un tronçonde route ou d’un toit, la méthode permetaujourd’hui une discrimination. »Ce traitement numérique des données trouve,bien entendu, de nombreuses applications.«Par exemple, pour la vérification des déclara-tions de surfaces cultivées par les agriculteurseuropéens bénéficiant de subsides, la méthodepermet de contrôler et de calculer les surfacesréellement travaillées tout en identifiantd’éventuelles inclusions dans les parcelles (unétang, un bosquet) et en vérifiant les types decultures. Autre exemple où cette méthodes’avère également efficace : la mise à jourrégulière des occupations des sols dans uneprovince, une région, un département »,conclut le chercheur.

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PORTRAIT

Profession : chercheuren télédétectionLes métiers de la télédétection sont multiples. De l’ingénieur au technicien en passant par le gestionnaire de satellites ou le commercial qui distribue les données spatiales. Rencontreavec un chercheur belge qui teste une méthoded’identification automatique d’objets au départd’images satellitaires à très haute définition,Alexandre Carleer.

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Alexander Carleer,chercheur à l’Institut de gestion de l’environnement et d’aménagement du territoire (IGEAT) de l’Université Libre de Bruxelles.

Traquer les vagues géantes Tout le monde se souvient du tsunami meur-trier qui déferla dans l’océan Indien le 26 dé -c embre 2004 et qui résultait d’un mouvementtectonique sous-marin.Mais on oublie trop souvent que, chaqueannée, presque chaque semaine, des vaguesgéantes naissent et meurent dans les diversocéans de la planète à la faveur de conditionsatmosphériques particulières – principalementdes tempêtes.La plupart du temps, ces vagues monstrueuses– parfois appelées « scélérates » (1) – et quipeuvent causer la perte d’imposants naviresmarchands, passent sans laisser de traces. Enmai dernier, un tel «monstre» de près de 11mètres de haut a frappé l’île française de laRéunion, dans l’océan Indien. Malgré sa sur-veillance depuis l’espace, les vagues, qui ontsubmergé le port de Saint-Pierre au sud de l’île,ont causé la disparition de deux pêcheurs,entraîné l’effondrement de plusieurs quais etinondé maisons et locaux commerciaux. Sonintensité avait été sous-estimée.Ces vagues monstrueuses avaient pris naissanceau sud du Cap, en Afrique du Sud, et ontvoyagé vers le Nord-Est sur près de 4 000 kmen trois jours avant d’atteindre l’île. Ellesavaient été détectées et suivies par le satelliteEnvisat de l’ESA et son instrument Asar (radarimageur à ouverture de synthèse), qui permetde recueillir de petites images (10 par 5 km)de la surface de la mer, tous les 100 km, lelong de l’orbite du satellite.Ces « imagettes », fournissent des informationssur la hauteur des vagues individuelles. Ellessont ensuite transformées mathématiquementet décomposées en moyennes d’énergie et dedirection, que l’on nomme spectres de vaguesocéaniques et que l’ESA met à disposition desscientifiques et des centres météorologiques.Sans cette surveillance de routine, il y a fort àparier que le bilan humain de l’événement dela Réunion eut été bien plus lourd.

www.esa.int/esaEO/index.html

Surveiller la cohabitation homme-éléphantAu Botswana (Afrique méridionale), lesmesures de protection et de conservation de lanature portent leurs fruits. L’interdiction totalede la chasse aux éléphants décrétée en 1991

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FLORILÈGE

Des applications aussi variées qu’insoupçonnées

L’observation de la Terre depuis l’espacedébouche sur une fouled’applications pratiques. Celles-ci sontparfois très connues,comme les prévisionsmétéorologiques.D’autres sont nettementmoins médiatisées. Petit tour d’horizon.

Cyclone Gamedepassant au-dessus des îles Maurice et de la Réunion le 23 février 2007. Image Envisat, spectromètre Meris. ©

ESA

(Loxodonta Africana) a eu pour résultat unehausse constante (5% par an) de la populationtotale de ces pachydermes. À tel point quecette région d’Afrique abrite aujourd’hui laplus importante concentration de cette espèce(environ 120 000 bêtes). Cette abondance,couplée au morcellement de leurs territoiresnaturels par les habitants du pays qui ontétendu leurs zones de culture, est une nouvellesource de conflits entre l’homme et l’animal.Les responsables du Centre de protection dela nature local (Center for Conservation ofAfrican resources : animals communities andland use ou Caracal, de Kasane), en collabo-ration avec le King’s College de Londres, ontlancé une vaste étude sur la question, baséenotamment sur l’imagerie satellitaire. Les don-nées servent notamment à déterminer, sur degrandes régions, l’abondance et la distributiondes pachydermes. Après un unique passagedu satellite au-dessus du pays, les spécialistesdisposent d’une vue globale des populationsd’éléphants, suffisante pour prendre d’éven-tuelles mesures de protection des intérêts… del’une ou l’autre des deux populations.

www.dmcii.com

Prévoir l’émergence d’épidémiesGrippe aviaire, choléra, paludisme, méningite…La prévision de l’évolution d’épidémies parsatellites, ou télé-épidémiologie, est aujourd’huiun secteur en progression constante.L’observation spatiale combinée à des don-nées récoltées sur le terrain permet, en effet, deprédire le développement d’épidémies dont lesvecteurs sont, par exemple, des moustiquesou des oiseaux. Ces vecteurs sont sensiblesaux modifications de l’environnement. En ana-lysant certaines données satellitaires (surfacedu sol, végétation, vents, nuages, températurede l’océan, événements météo rologiques,etc.) et en les combinant à diverses mesures deterrain (humaines et animales), les spécialistespeuvent prédire le risque d’extension d’uneépidémie et donc envisager des moyens delutte adéquats. Divers réseaux de télé-épidé-miologie sont actuellement opérationnels enArgentine, au Sénégal, au Niger, en Chine etsur le bassin méditerranéen.Pour Antonio Güell, du CNES (Agence spatialefrançaise), les possibilités offertes par ces tech-niques sont immenses mais leur application

reste encore trop ponctuelle, alors qu’ellespourraient améliorer radicalement la situationsanitaire de beaucoup de régions du monde.

www.cnes.fr

www.cermes.net

Alerter les asthmatiques Dans plusieurs quartiers de Londres, tel celuide Croydon, un système d’alerte à la pollutionatmosphérique en temps réel destiné aux per-sonnes souffrant de problèmes respiratoires aété testé pendant près de deux ans. Fin mars2007, le système développé par l’ESA et uneentreprise de consultance en recherches envi-ronnementales de Cambridge (CambridgeEnvironmental Research Consultants) a étégénéralisé dans la capitale britannique. NickyGordon, député-maire de Londres, a inauguréce nouveau service à la population, baptiséAirtext.Airtext est un service d’alerte qui fonctionne viaSMS, messages vocaux ou courrier électro-nique. Sur base d’observations atmosphériquesréalisées depuis l’espace par le satelliteEnvisat de l’ESA et complétées par desmesures au sol ainsi que des pronostics sur ladensité du trafic routier, le système envoie desalertes à ses abonnés le matin même des picsde pollution prévus, voire déjà la veille au soir.Les abonnés (asthmatiques, bronchiteux, per-sonnes souffrant d’emphysème, de faiblessecardiaque ou d’angine de poitrine) peuventainsi réorganiser leur journée en conséquence.De quoi sauver des vies. Selon Nicky Gordon,un millier de personnes chaque année décé-deraient prématurément à Londres à la suitede problèmes de santé exacerbés par les picsde pollution.

www.airtext.info

Anticiper le « verdissement » du Groenland Si l’ensemble de la calotte glaciaire qui recouvrele Groenland venait à fondre, le niveau moyende toutes les mers du monde augmenterait de7 mètres environ. C’est dire si la surveillancede cette calotte fragile, plus sensible auréchauffement global de notre planète quel’Antarctique, est importante.Le consortium DMC (Disaster MonitoringConstellation), qui regroupe quatre satellites

d’observation de la Terre relevant de l’Algérie(Alsat-1), du Nigeria (Nigeriasat), de laTurquie (Bilsat-1) et du Royaume-Uni (UK-DMC), collabore à l’étude de la fonte de cettecalotte. Les capacités de ces satellites permettentaux chercheurs de l’Université de Swansea demesurer l’amincissement de la couche de glace,les écoulements qu’elle génère en périphérie etplus globalement la dynamique de tous lesflux que cette fonte engendre.

www.dmcii.com

Saumon d’élevage de qualitéLe principal pays producteur de saumond’élevage se trouve… dans l’hémisphère Sud !C’est le Chili et ses nombreuses fermes aqua-coles qui produisent à l’heure actuelle la plusimportante part du saumon d’aquacultureconsommé dans le monde. Mais cette industrieest fragile, à la merci d’une dégradationsoudaine de la qualité des eaux de mer – cequi arrive régulièrement et naturellement, parexemple lors de l’apparition massive de phyto -plancton. Les spécialistes parlent d’effloraisond’algues microscopiques. Quand ce genre demarée verte se produit, elle capte une bonnepartie de l’oxygène disponible dans l’eau, cequi risque de faire périr les saumons. Sansparler de l’émission de composés chimiquesqui peuvent empoisonner d’autres espècesmarines à valeur économique, comme lescoquillages et les moules.Pour prévoir ce type d’événement et le suivrequasi en temps réel, le projet Cap (ChileanAquaculture Project), soutenu par l’ESA a étémis en place. La surveillance de la qualité deseaux et de l’apparition du phytoplancton estréalisée depuis l’espace. Ce sont les satellitesEnvisat (et son radiomètre Meris) et l’instru-ment Modis qui équipe le satellite américainAqua, qui en sont chargés. Ils étudient princi-palement le changement de couleur de l’eau(à cause de la chlorophylle), sa turbidité, lesmatières en suspension et la température desurface. Ces données, couplées à des modèleshydrodynamiques (les courants marins) consti-tuent un nouvel outil de gestion aquacole pourles entreprises chiliennes du secteur.

www.eomd.esa.int

(1) Voir RDT info n°42.

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FLORILÈGE

18 research*eu SPÉCIAL SATELLITE I SEPTEMBRE 2007

EARTH EXPLORERS

Six explorateurs au service de la planèteLe programme Earth Explorers constitue la nouvelle initiative de l’ESA en matière desatellites scientifiques d’observation de la Terre.Six satellites qui s’intéressent chacun à un aspect bien précis de notre biosphère.

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EARTH EXPLORERS

L’Agence spatiale européenne (ESA)a changé de stratégie en ce quiconcerne l’observation de la Terre.Plutôt que concentrer tous ses

moyens dans la réalisation d’un satelliteimposant et très complet, comme ce fût le casavec Envisat, elle mise désormais sur des mis-sions plus restreintes.«Des missions plus modestes, plus spécialiséesmais aussi plus rapides à mettre en œuvre »,commente Jérôme Benveniste, du départe-ment des applications de l’observation de laTerre à l’ESRIN (ESA –Italie). Les EarthExplorers se concentrent sur l’atmosphèrede notre planète, sa biosphère mais aussil’hydrosphère, la cryosphère (glaces) et bienentendu sa « face cachée », l’intérieur mêmede notre Terre. Le but est d’en apprendredavantage sur les interactions entre cesdiverses «sphères» et l’impact de nos activitéshumaines.»Deux catégories de satellites cohabitent ausein de ce programme. D’une part, les satel-

Le satellite SMOS (Soil Moisture and OceanSalinity) plonge au cœur du cycle de l’eausur Terre. Prévu pour l’année 2008, SMOSmesurera l’humidité du sol à grande échelle(de quoi, par exemple, prévenir par uneamplification des arrosages, des pertes derendements agricoles dues à la sécheresse,etc.). Il s’intéressera aussi à l’évolution de lasalinité des mers et des océans. Cryosat-2sera l’outil de de la cryosphère. Les glaces demer mais aussi les vastes glaciers terrestres,comme ceux de l’Antarctique et duGroenland, seront les cibles privilégiées dece satellite dont le lancement est prévu en2009. ADM-Aeolus (Atmospheric DynamicsMission) analysera les profils de vents danstoute l’épaisseur de l’atmosphère. Départprévu : 2009. Swarm étudiera le champmagnétique et son évolution dans le temps.Cette mission est dotée de trois satellites etdevrait démarrer en 2010. Enfin, la missionEarthcare (Earth Clouds Aerosols andRadiation Explorer), menée en partenariatavec le Japon, visera à améliorer nosconnaissances sur l’équilibre radiatif de laTerre (effet de serre, importance des aéro-sols, des poussières dans l’atmosphère, etc.).De quoi améliorer les modèles de prévisionsnumériques du temps (lancement en 2013).

Prochaines missions

Le programme des Earth Explorers ne s’ar-rête pas aux missions décrites ici. Un appelà nouveaux projets a été lancé par l’ESA àla communauté scientifique. Il a suscité24 propositions. Six projets sélectionnésfont aujourd’hui l’objet d’études de faisa-bilité. Il s’agit de Biomass (biomasseforestière), Traq (transport aérien surlongues distances des polluants), Premier(relations entre les gaz à l’état de tracedans l’atmosphère, le rayonnement et lachimie de l’atmosphère), Flex (étude dela photosynthèse par des mesures defluorescence), A-Scope (cycle global ducarbone) et enfin CoReH2O (cycles de l’eauen phases neigeuse et glacée). Les premierssatellites de cette seconde sélection pour-raient décoller d’ici 2010.

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lites relevant des missions « de base », quis’intéressent à un domaine de recherchebien précis, sont d’un grand intérêt scienti-fique et poursuivent les objectifs à longterme de l’Agence. D’autre part, ceux quisont centrés sur des missions dites «d’oppor-tunité», de moindre envergure, qui ne sontpas nécessairement dirigées totalement parl’ESA, et qui répondent, par exemple, à denouvelles questions sensibles concernantnotre environnement pour lesquelles lacommunauté scientifique aimerait disposerrapidement de nouvelles données.

Sur la ligne de départSur les six satellites actuellement en prépa-ration, trois sont destinés à accomplir unemission de base (GOCE, ADM-Aeolus etEarthcare) et trois autres répondent à desmissions d’opportunité (SMOS, CryoSat-2 etSwarm).La mission GOCE (Gravity field and steady-state Ocean Circulation Explorer) prévuepour 2008, va s’intéresser au champ gravita-tionnel de la Terre. Ses données serviront àaffiner les modèles dans ce domaine, à amé-liorer nos connaissances de « l’intérieur » denotre planète mais aussi à préciser la formedu géoïde terrestre.

20 research*eu SPÉCIAL SATELLITE I SEPTEMBRE 2007

COLLABORATIONS INTERNATIONALES

De tout un peuAlos – Ce satellite japonais d’observation de laTerre a été placé en orbite en janvier 2006. Ilscrute la planète jour et nuit quelles que soientles conditions atmosphériques, grâce à sonradar à synthèse d’ouverture Palsar et à sondétecteur panchromatique stéréographiquePrism.Quikscat – Lancé en 1999 par la Nasa, son ins-trument principal, un diffusomètre (Scattero -meter) fournit des informations sur les vents desurface de la planète, sur le sol et au-dessus desocéans. De quoi étudier diverses interactionsentre l’atmosphère et la Terre. IRSP6 – Également désigné sous l’appellationResourcesat-1, cet engin de télédétection a étélancé par l’ISRO (Indian Space ResearchOrganization). L’agence spatiale indienne aégalement placé en orbite, dès 1996, IRS-P3.Ce satellite d’observation de la Terre est doté

Plus que jamais, l’étude de notre planèteest une préoccupation globale. Chacun despays disposant de moyens d’observationdepuis l’espace met ses données à la disposition des chercheurs étrangers. Ce qui n’empêche pas des collaborationsprivilégiées de s’organiser. Outre les vedettes historiques (1999) de la très haute résolution civile, Quickbird et Ikonos, en voici une sélection (très) partielle.

Le Mont Fuji, première image envoyée par le satellite japonais Alos, en 2006. Au bas de l’image, on peut voir les routes et les rivières du bassin du Kofu et le lac Motusu.

Une multitude d’engins

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de l’instrument MOS (Modular OptoelectronicScanner). Terra Sar X – Ce satellite radar de l’entrepriseInfoterra (DE) doit être opérationnel en 2007.Kompsat-1 – Premier d’une filière d’observa-tion optique à haute résolution, ce satellite dela Corée du Sud a été mis sur orbite en 1999.Kompsat-2 (KOrean MultiPurpose SATellite),un engin à très haute résolution du Kari(Korean Aerospace Research Institute) a étélancé avec succès le 28 juillet 2006. Il fournitdes images d’une précision d’un mètre.Formosat-2 – Ce satellite taiwanais du NationalSPace Organization (NSPO) est de conceptioneuropéenne. Il a été fabriqué par Eads-Astriumet permet des observations à haute résolution(2 mètres) avec une capacité de revisite quoti-dienne !Scisat – Cet outil aide une équipe de cher-cheurs canadiens et internationaux à mieux

comprendre le problème de la réduction de lacouche d’ozone en s’attardant particulièrementaux changements qui se produisent au-dessusdu Canada et dans l’Arctique. Il est en orbitedepuis 2003.Terra – Lancé en 1999, cet engin américaincomporte cinq instruments scientifiques dontun spectroradiomètre co-réalisé avec le Canada.Il est le pendant « du matin » du satelliteaméricain Aqua, qui fait partie du A-Train(voir ci-dessous).

Un « train spatial »Six satellites scientifiques d’observation de laTerre issus de la collaboration de trois pays(États-Unis, France et Canada) défilent l’unaprès l’autre sur une même orbite héliosyn-chrone. Ce train spatial a été baptisé A-Train(Afternoon-train) parce que ses six satellitesfranchissent l’équateur avec quelques minutes

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COLLABORATIONS INTERNATIONALES

en orbite

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Calipso, l’un des six satellitesd’observation de pointe de l’Afternoon-train, aux technologies particulièrementpointues, qui devraient faireprogresser la compréhensiondes mécanismes climatiques.

d’écart (aux environs de 13h30, heure locale).Il constitue un observatoire spatial exceptionnelassociant toutes les techniques de mesureactives et passives afin de mieux comprendreles différents rouages de la machine climatique.Ses composants : Aqua (Nasa, 2002), Aura(Nasa, 2004), Parasol (CNES, 2004), Calipso(Nasa/CNES) et Cloudsat (Nasa/ASC), lancésen 2006 et Oco (Nasa), prévu pour 2008.

Cap sur les nouvelles générationsLa télédétection du futur devra répondre àtrois impératifs : plus de résolution (spatiale etspectrale); plus d’agilité des satellites capablesde pointer rapidement vers un objectif ; untaux de revisite plus élevé afin de permettreun suivi quotidien de l’évolution d’une situa-tion au sol. D’ici fin 2008, Digitalglobe devrait disposerd’un nouvel engin rassemblant toutes cesqualités. Worldview-1 sera d’une agilité enorbite encore jamais atteinte. Il sera apte àrevoir un même site au sol chaque 1,7 jourtout en fournissant des images d’une précisionde 50 centimètres. Une première pour unsatellite civil…

L’observation de la Terre est, bienentendu, une vaste aventure scienti-fique et technologique. C’est aussidevenu, au fil des années, un important

secteur à vocation économique.Tout d’abord via l’exploitation des satellites,leur contrôle en orbite, leur gestion, la récep-tion et l’acheminement des données. Autant dedomaines qui génèrent de l’emploi hautementqualifié. En aval, la commercialisation des informationspar les grands opérateurs et leurs relaiscommerciaux, mais aussi via une multituded’entreprises de services, apporte à cesconnaissances une importante valeur ajoutéecomplémentaire. Sans compter l’impact directde certaines applications, par exemple, lesprévisions météorologiques, sur toutes lesautres activités humaines sur terre, en mer etdans les airs.

La commercialisation des donnéesAcquérir une image satellitaire a un prix. Il afallu concevoir et construire le satellite, le lanceret ensuite l’exploiter pendant de longuesannées. Au final, c’est le client qui règle géné-ralement la note. Quiconque veut acquérir desdonnées issues des satellites d’observation dela Terre doit généralement passer à la caisse !

Les opérateurs commerciaux sont bien présentssur le marché. Spot Image commercialise, parexemple, les données issues de ses propressatellites, mais également des images de laTerre provenant de satellites tiers dont la gestioncommerciale lui a été confiée (tels Envisat,ERS, Radarsat, etc.). Parmi les autres grands opérateurs dans lemonde, notons plus particulièrement les entre-prises DigitalGlobe et Geo Eye. Elles proposentdes images, les plus précises sur le marché, àtrès haute résolution, issues respectivement deleurs satellites Quickbird (résolution de 60 cen-timètres) et Ikonos (résolution d’1 mètre).

Côté factureChez DMC International Imaging, l’addition estfixée en fonction de la zone d’intérêt de l’imagedemandée. Le prix minimum d’une image de160 km2 avec une résolution de 32 mètres, quia nécessité trois passages de satellites, est de2 240 €. Une somme forfaitaire de 614 € est, enoutre, destinée à couvrir les frais de paramétragedu satellite. Spot Image propose, pour sa part,ses clichés couleurs Spot-5 standards de mini-mum 60 km2 avec une résolution de 2,5 mètres,au prix de 8 900 €, auquel s’ajoutent 3 100 € defrais de programmation prioritaire.Quant aux images en très haute définition, parexemple celles issues du satellite Quickbird,

elles sont proposées par le revendeur euro-péen Eurimage au prix de 25 dollars le kilomè-tre carré. Le coût minimum porte, en effet, surune scène complète prise par le satellite, soitune surface de 272 km2 – soit environ 6 800 €l’image et quasiment le double pour des com-mandes « en urgence »).

Le « sur mesures » de l’ESALes gigabytes de données produits chaquesemaine par les dix instruments scientifiquesdu satellite scientifique de l’ESA Envisat sontcommercialisés suivant des règles précises,arrêtées avant même le lancement du satellite.«Cette règle a été décidée par les États membresqui ont financé cette mission », expliqueSimonetta Cheli, responsable des relationspubliques et institutionnelles à l’ESA-ESRIN,Italie. « Trois catégories d’utilisateurs sontdéfinies. Dans la première, on retrouve lesscientifiques. Ceux-ci ont accès gratuitementaux données d’Envisat une fois leur projet derecherche avalisé par leurs pairs dans le cadrede divers comités. Dans la deuxième catégorie,cet accès aux informations est frappé d’undroit d’usage réduit. Les utilisateurs types decette catégorie sont, notamment, les institutionspubliques. Enfin, dans la troisième catégorie,nous retrouvons tous les autres utilisateurs.Pour avoir accès à nos données, ils doiventpasser par les opérateurs commerciaux etpayer les prix du marché. » Ceux-ci fluctuent en fonction de la « fraîcheur »de l’image. Exemple : 400 € pour une imageradar ERS ou ASAR (Envisat) d’archive couvrantune zone de 100 km2 avec une précision de25 m. Pour la même image commandée (faisant

22 research*eu SPÉCIAL SATELLITE I SEPTEMBRE 2007

ÉCONOMIE

Un marché florissant et La qualité sans cesse croissante des images satellitaires, leur disponibilité toujours plusgrande et la multiplication des applications quien découlent font de ce secteur une «aubaine »pour les petites et moyennes entreprises.

Le poids du spatial européen

En 2005, l’industrie spatiale européenne a dégagé un chiffre d’affaires de 4,4 milliards €. Elleemploie 28 000 personnes. Selon une estimation de la Commission européenne, cette industriegénère en aval une activité économique cinq fois plus importante. En dépit d’un investissementpublic relativement réduit dans ce secteur, l’industrie spatiale européenne est extrêmementcompétitive. Elle détient 40% des marchés mondiaux en ce qui concerne la construction, le lancementet l’exploitation des satellites.

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Une industrie « locale » centrée sur des PME

La commercialisation des données satellitaires brutesn’offre cependant guère d’intérêt si celles-ci restent« brutes ». Nombreuses sont donc les entreprises quiproposent des services à valeur ajoutée au départ deces images.Une radiographie du secteur des industries spécialiséesdans ce domaine en Europe et au Canada a été co-réaliséeen 2004 par l’ESA et deux consultants, Vega group etBooz Allen Hamilton. L’étude pointe l’existence dequelque 160 entreprises spécialisées dans ce domaine.Parmi celles-ci, on retrouve une importante fraction dePME : 33 % des entreprises du secteur comptaientmoins de 10 employés, 27 % totalisaient de 11 à 30 col-laborateurs et 15 % de 31 à 60 employés. Seules 9 %d’entre elles employaient plus de 500 personnes.Autre enseignement de ce tour d’horizon : le chiffred’affaire global du secteur était estimé (en 2002) à285 millions € – une somme qui n’inclut pas la ventedes données primaires (les images brutes). Le rapport montre aussi que le marché est essentiel-lement «domestique». Les entreprises du secteur réalisantpour l’essentiel leur chiffre d’affaires auprès de clientsde leur région/pays. « Seule une très faible partie desrevenus du secteur est réalisée en dehors d’Europe(15 %) par les entreprises basées dans l’UE », indique lerapport. L’essentiel des revenus de cette activité estréalisé dans des services concernant l’identification desressources naturelles de la planète, la cartographie etles applications de sécurité.

Source : The state and health of the European and Canadian EO service industry,ESA/ Vega group & Booz Allen Hamilton.

l’objet d’une programmation du satellite), leprix passe à 600 euros. Mais le prix peut chuterà 150 € si on ne désire qu’une précision au solde 150 m.« En ce qui concerne nos futures missions,comme les Sentinelles du programme GMES,la politique commerciale reste à définir »,conclut Simonetta Cheli.

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ÉCONOMIE

décentralisé

Communication de la Commission,

DG Entreprise, IP/07/575

www.eurimage.com

www.spotimage.com

www.dmcii.com

ec.europa.eu/enterprise/

Un satellite « clé en main » ?

Pourquoi les importants consommateurs d’images satellitaires n’opteraient-ils paspour l’achat de leur propre microsatellite d’observation, avec système de réception desdonnées à domicile ? En Europe, la filière des microsatellites Proba, à l’origine conçuscomme un démonstrateur technologique de l’ESA, s’est muée en un véritable produitcommercial. Le consortium industriel le propose désormais sous forme d’un systèmecomplet : satellite, lancement et système au sol associé. Une success story de l’industrieeuropéenne qui intéresse des pays tiers non encore dotés de tels moyens d’observationde la Terre.

www.verhaertspace.com

La Monument Valley,terre des IndiensNavajos aux frontièresde l’Arizona et de l’Utah, vue par le petitsatellite belge Proba.

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En pointe dans l’industrie spatiale, les Européens détiennent 40 % des marchés mondiauxdans la construction, le lancement et l’exploitation des satellites. Ici le décollage d’Ariane V etcertains des travaux qui l’ont préparé.

Un peu de pluie et le trafic routierest perturbé. Un épisode desécheresse, l’agriculture en pâtitet les forêts sont exposées à des

risques accrus d’incendies. Des vents violents,et ce sont les navires marchands et de pêchequi voient leurs activités perturbées. La météo-rologie est devenue une science opérationnelledont on ne peut plus se passer. Les Européensl’ont bien compris. Après l’ESA (1975),Eumetsat, une seconde agence spatiale euro-péenne, opérationnelle avant tout, est établieen 1986.Ses missions consistent à fournir des données,images et produits satellitaires 24 heures sur 24,365 jours par an aux services météorologiquesnationaux de ses États membres, des payscoopérants (voir encadré), ainsi qu’à de nom-breux utilisateurs publics (UNESCO, FAO,PNUE, OMM, NOAA, ECMWF) et privés à tra-vers le monde.

Pour ce faire, l’agence exploite, depuis sonsiège opérationnel en Allemagne, les donnéesde ses propres satellites (Météosat et Metop),mais aussi celles qui proviennent d’une série decentres spécialisés, les Saf (Satellite applicationfacility). Parmi ces centres d’applicationssatellitaires, certains sont dédiés à la prévisionnumérique du temps (coordonnée par le MetOffice britannique), l’hydrologie opérationnelle(gérée par le Service météorologique italien), lesocéans et les glaces de mers (sous la respon-sabilité de Météo-France) ou encore le suivi del’ozone (Service météorologique finlandais), lasurveillance du climat (Service météorologiqueallemand) ou le nowcasting, à savoir la prévisiondu temps immédiate ou à très court terme (coor-donnée par l’Institut météorologique espagnol).

Des outils variés en orbiteOutre les traditionnels satellites météorologiquesplacés en orbite géostationnaire, à 36 000 km

au-dessus du sol (la filière Météosat de pre-mière et de seconde génération) qui permet-tent d’observer la moitié du disque terrestre,Eumetsat dispose depuis l’an dernier d’un pre-mier satellite à orbite polaire, Metop-A. Celui-ciévolue plus près de la Terre (850 km) et four-nit, grâce à ses huit instruments scientifiques,des données beaucoup plus précises sur lesnuages, l’humidité et les températures de l’at-mosphère, la résolution verticale de la tempé-rature de la haute troposphère, la vitesse duvent près de la surface des océans, ou encorel’évolution de l’ozone et d’autres constituantsde la tropo sphère et de la stratosphère.Dans un avenir proche (2008), le satellited’altimétrie océanique Jason-2, fruit d’une col-laboration entre la France et la NASA (USA),sera disponible en orbite. Il alimentera les ordi-nateurs d’Eumetsat de données sur les fluctua-tions de l’élévation des mers et des océans, avecune précision de l’ordre du centimètre.

24 research*eu SPÉCIAL SATELLITE I SEPTEMBRE 2007

MÉTÉOROLOGIE

Eumetsat, L’AUTREagence spatiale européenneLa pluie et le beau temps. D’inépuisables sujetsde conversations… mais aussi de préoccupations.Surtout que les conditions météorologiques ontun impact direct sur les activités économiquesdes Terriens. Il n’est donc pas étonnant qu’unegrande partie des satellites qui étudient notreplanète se concentrent sur son atmosphère, sa composition et son évolution, mais aussi sur ses océans, véritables moteurs du temps qu’il fait – et de celui qu’il fera.

Vingt plus dix

Eumetsat fédère 20 nations : l’Allemagne,l’Autriche, la Belgique, la Croatie, le Danemark, l’Espagne, la Finlande, la France,la Grèce, le Luxembourg, l’Irlande, l’Italie, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal, la Slovaquie, le Royaume-Uni, la Suède, laSuisse et la Turquie. Elle compte également 10 États coopérants : la Bulgarie, l’Estonie, la Hongrie, l’Islande, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la République tchèque,la Roumanie et la Slovénie. Ceux-ci disposentdes mêmes droits et sont soumis aux mêmesobligations que les autres membres en ce quiconcerne l’accès et l’usage des données etservices de l’Agence. Leur contributionindividuelle s’élève cependant à la moitié decelle des États du premier groupe, ce qui lesprive du droit de participer au processus dedécisions, de répondre aux appels d’offres et à leurs ressortissants de poser leur candidatureà un poste à Eumetsat. Le siège de l’agence se situe à Darmstadt (DE).

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research*eu SPÉCIAL SATELLITE I SEPTEMBRE 2007 25

MÉTÉOROLOGIE

EuropeMétéosat-5 sur orbite « cimetière (2 depuis le 16 avril 2007.

Météosat-6 satellite géostationnaire de réserve à 67,5°E depuis

le 26 avril 2007 pour l’acquisition des données DCP

en périodes d’éclipse de Météosat-7.

Météosat-7 assure le service de couverture de l’océan Indien IODC

à 57,5°E (au moins jusqu’à fin 2008).

Météosat-8 satellite de réserve de Météosat-9 à 3,4°O

(orbite géostationnaire).

Météosat-9 satellite géostationnaire principal à 0°.

MSG-3 et MSG-4 lancements prévus respectivement en 2011 et 2013.

Metop-A premier satellite à défilement d’Eumetsat, lancé

le 19 octobre 2006. Déclaré officiellement opérationnel

le 15 mai 2007. Metop-A est le satellite principal en orbite

du milieu de matinée du Système polaire commun initial

(IJPS) depuis le 21 mai. Metop-B et Metop-C sont entreposés

dans l’attente de leur lancement en 2011 et 2015.

Jason-2 succédera à Jason-1 pour assurer la mission de topographie

de la surface des océans. Lancement prévu mi-2008 sur une

orbite non-héliosynchrone circulaire inclinée à 66°.

États-UnisGOES-9 stationné actuellement à 160°E.

GOES-10 positionné à 60°O pour compléter la couverture

de l’Amérique du Sud.

GOES-11 satellite géostationnaire opérationnel à 135°O.

GOES-12 satellite géostationnaire opérationnel à 75°O.

GOES-13 lancé en mai 2006; satellite de réserve à 105°O.

GOES-O, -P, -R, -S lancements prévus respectivement en 2008, 2009, 2014

et 2016 pour assurer le service à 135° ou 75°O.

NOAA-12 satellite en orbite polaire du matin assurant uniquement

la transmission de données en temps réel.

NOAA-14 satellite en orbite polaire du matin assurant uniquement

la transmission de données en temps réel.

NOAA-15 satellite de réserve de NOAA-17

(orbite du début de matinée).

NOAA-16 satellite de réserve de NOAA-18 (orbite de l’après-midi).

NOAA-17 satellite en orbite polaire du matin.

NOAA-18 premier satellite du système IJPS, a remplacé NOAA-16

en tant que satellite principal en orbite de l’après-midi.

NOAA-N’ lancement prévu en 2009 pour reprendre le service

en orbite de l’après-midi.

NPP-NPOESS lancement prévu en 2009 pour reprendre le service

en orbite de l’après-midi.

NPOESS-C1 et –C3 lancements prévus en 2013 et 2020 (orbite de l’après-midi).

NPOESS-C2 et –C4 lancements prévus en 2016 et 2022

(orbite du début de matinée).

RussieMeteor-3M N1 exploité sur une orbite héliosynchrone du matin.

GOMS-N1 lancé en novembre 1994, est en mode d’attente à 76° E.

Meteor-M N1 lancement prévu en 2008 et 2009 (orbite du matin).

Electro-L N1 lancement prévu courant 2007 à 76°E.

Electro-L N2 lancement prévu en 2009 à 76°E ou 14,5°E.

ChineFengyun-1D satellite météorologique principal lancé en mai 2002,

(FY-1D) est exploité sur une orbite (polaire) héliosynchrone

de début de matinée.

FY-2C satellite géostationnaire principal à 105° E.

FY-2D lancé en décembre 2006 pour servir de réserve

à FY-2C à 86,5° E.

FY-2E, -2F et -2G lancements respectifs en 2008, 2010 et 2012.

FY-3A premier modèle de la deuxième génération de satellites

météo à défilement de la Chine. Il sera lancé courant 2007

et les deux suivants (FY-3B et FY–3C) en 2009 et 2011.

IndeKALPANA-1 (ex Metsat), posté à 74° E ; premier satellite indien

à vocation exclusivement météorologique.

INSAT-3A exploité à 93,5° E.

INSAT-3D lancement prévu fin 2007 ou début 2008.

Corée du SudCOMS-1 et -2 les lancements de ces deux satellites polyvalents dédiés

à des applications de météorologie, d’observation

océanique et de télécommunications sont prévus en 2008

et en 2014. Ils seront exploités à 116,2 ou 128,2° E.

JaponMTSAT-1R opérationnel à 140° E depuis le 28 juin 2005.

MTSAT-2 lancé le 18 février 2006, est posté à 145° E en mode

d’attente. Les suivants seront lancés en 2013 et 2015.

(1) mai 2007, source Eumetsat(2) Orbite « cimetière » : quand un satellite arrive en fin de vie sur une orbite utile, telle par exemple la très demandée orbite géostationnaire, il est rejeté sur une orbite « cimetière » située à quelques dizaines voire centaines de kilomètres plus haut. Les gestionnaires du satellite épuisent ainsi les dernières gouttes de carburant pour cet ultime voyage. Ce qui présente l’avantage de libérer la place pour un nouveau satellitemais aussi d’éviter que le reliquat de carburant du satellite en fin de vie ne soit à l’origine d’une explosionintempestive en orbite, source de multiples nouveaux « débris ».

Les satellites météorologiques en service dans le monde (1)

DÉBRIS SPATIAUX

«C’est l’événement le plus impor-tant que l’on ait connu quant aunombre de débris engendrés »,commente Heiner Klinkrad.

« Les morceaux repérés à ce jour augmententde 15% le catalogue élaboré en 15 ans». Il sou-ligne qu’« aujourd’hui, les missions peuventencore être effectuées en sécurité. Mais desétudes américaines montrent que, même sinous cessions les activités spatiales, la popula-tion de déchets va croître à certaines altitudes etle risque de collision augmentera. »

Collisions et explosionsLes débris de l’espace ont, en effet, plusieursorigines. Les collisions peuvent être acciden-telles. La plus célèbre est sans doute celle dusatellite français Cerise. «Dix ans après l’ex-plosion de l’étage supérieur de la fusée Ariane,un de ses fragments percuta le satellite françaisen 1996 », explique Heiner Klinkrad. Selon lui,deux autres collisions ont déjà pu être observéesdepuis lors.Les collisions peuvent aussi être délibéréescomme celle provoquée par les Chinois. Ce sont toutefois les explosions qui représen-tent la cause la plus fréquente de production dedébris. «On en dénombre environ 200 depuis ledébut de la conquête spatiale. Mais le phéno-

mène s’accélère ces dernières années. Lamoyenne annuelle de 4 à 5 explosions a dé -sormais doublé. Ces accidents sont dus à deslanceurs largués après la mise en orbite dessatellites ou à d’anciens vaisseaux spatiauxdont le carburant résiduel s’est enflammé.»

Esquiver les projectilesObservable depuis le sol, le nombre degrands fragments – plus de 10 cm – est estiméà 18 000, dont 11 500 sont répertoriés. L’ESOC,basé en Allemagne, gère quotidiennement desmanœuvres d’évitement de ces gros débris.Mais aucune manœuvre n’est possible pourles quelque 550 000 morceaux de 1 à 10 cmqui ne peuvent être repérés. Aux vitesses quisont les leurs (jusqu’à 70 000 km/h), les dégâtssont considérables. Les recherches de l’ESA progressent aussi enmatière de modélisation de trajectoire desdébris et de conception des systèmes de pro-tection avancée, notamment par l’étude desimpacts menée sur les objets retombés surTerre.

Changer les pratiquesMême si ces mesures d’évitement et de protec-tion réduisent les risques générés par l’activitéhumaine, les pratiques actuelles doivent évoluer

pour freiner la propagation des débris parréaction en chaîne. «Nous devons d’abord éviterde larguer des objets si ce n’est pas nécessaireau déroulement de la mission, comme c’est lecas des lentilles optiques éjectées après leurutilisation. Ensuite, il faudrait éviter les explo-sions en délestant le carburant du satellite, dèsla mission achevée. Enfin, le plus efficace rested’éloigner les masses des orbites utiles, commel’orbite géostationnaire dont les places sontcomptées et prisées. À 36 000 km d’altitude, lessatellites sur cette orbite ne peuvent êtreramenés vers l’atmosphère pour provoquerleur destruction par échauffement. Ils sontdonc déviés en fin de vie vers une orbite« cimetière », 300 km plus haut. En revanche, ladésintégration atmosphérique est possiblepour les satellites situés sur les orbites basses »,explique Heiner Klinkrad.À l’heure actuelle, les efforts internationauxont abouti à l’adoption par 67 pays de prin-cipes édictés au sein du Copuos (Committeeon the Peaceful Uses of Outer Space) desNations unies. Mais il n’existe toujours pasd’accord contraignant qui permettrait de lierefficacement les signataires. Et selon HeinerKlinkrad, «Si nous ne changeons pas rapidementnos manières d’agir, dans 50 ans la fréquencedes collisions accidentelles pourrait dépassercelle des explosions. Une législation inter na-tionale dans ce domaine nous aiderait à éviterun tel scénario. »

(1) Centre des Opérations Spatiales Européen de l’Agence spatialeeuropéenne (ESA)

26 research*eu SPÉCIAL SATELLITE I SEPTEMBRE 2007

Problématique peu connue, les débris spatiauxrisquent de rendre les orbites utiles impraticablessi les comportements d’exploitation du cosmosn’évoluent pas. Heiner Klinkrad, Président duBureau des débris spatiaux à l’ESOC (1), fait état de la situation alors que, ce 11 janvier,un missile balistique chinois détruisait le satellite météo hors-service Fenyung 1C, générant au moins 1600 nouveaux débris.

Les traces de l’hommedans l’espace

© CNES/David Ducros

L’Union a décidé, en 2001, de lancerun programme de surveillance de laTerre appelé GMES (Surveillancemondiale pour l’environnement et la

sécurité). Ce puzzle spatial compte une pre-mière série de satellites : les missionsSentinelles de l’ESA, qui impliqueront chacuneun ensemble de satellites opérationnels,dédiés chacun à un type précis d’observations.

De nouveaux satellites d’observation de la Terre entrent dans le cadre du programme GMES, notamment les«Sentinelles» de l’ESA. On parle souventde dualité d’utilisation (militaire et civile) à leur sujet. Par ailleurs, dans le sigle GMES, on retrouve le «S»de sécurité. À quoi fait-on exactementallusion?La technologie duale permet une utilisationtant civile que militaire des nouvelles généra-tions de satellites d’observation de la Terre.On sait, par exemple, que les satellites radaritaliens de la filière Cosmo Sky Med, égalementoutils militaires, pourraient être utilisés à hauteur

de 40% dans le cadre de GMES. Mais dans cecas, il s’agit bien entendu de sécurité civile –surveillance des frontières de l’Union, ou encoredu contrôle de l’immigration clandestine par lamer.À l’ESA, nous avons élaboré un premier pro-totype de produit dans cette perspective : leprojet MARISS (MARItime Security Services). Ilvise entre autres à endiguer l’immigrationclandestine en Europe via la surveillance etl’identification par satellite des navires, notam-ment en Méditerranée. Ou encore à tenter dedéterminer la prise en charge en mer de car-gaisons illégales, des trafics d’armes, etc.

Les services que le programme GMESrendra un jour ne sont-ils pas déjàofferts par la «Charte internationale»?La sécurité porte, bien entendu, aussi sur lasurveillance des catastrophes naturelles et lamise en place rapide de secours. En cas detsunami, par exemple, les images satellitaires,diffusées dans le cadre de la Charte interna-tionale permettent d’apprécier l’étendue desdégâts juste après les cataclysmes grâce à des

comparaisons avec des images d’archive. AvecGMES, ce type de service ne sera pas limitédans le temps – c’est-à-dire aux quelques joursqui suivent la catastrophe. Il s’agit d’un servicede surveillance constant, préventif quand celasera possible, et à haute valeur ajoutée.Toujours dans le cas de l’exemple du tsunami,GMES permettrait, en plus, d’apporter de pré-cieuses informations sur l’état des routes,l’existence ou non de pont après le passage dela vague, l’analyse du site pour la définitiond’un espace optimal d’implantation d’un campde réfugiés ou encore la localisation desources d’eau potable. Cet apport de données satellitaires est doncdoublé d’une large palette de services enaval alors que la Charte, ne fournit queponctuellement des données, sans servicescomplémentaires.

Peut-on dire que le programme GMES a une finalité politique?Tout à fait. GMES poursuit, en réalité, unedouble finalité: opérationnelle et politique.L’Europe veut se doter de ces deux outils.D’une part, en mettant en service un véritablesystème opérationnel fédérateur qui bénéficieà tous les Européens tout en s’affranchissantd’une dépendance vis-à-vis de pays tiers pourl’obtention de données spatiales. Mais aussien fédérant les nations européennes pour leurplus grand bénéfice social et économique.

Quel est le coût de la mise en œuvre de GMES?Si on ne parle que des trois premiers satellites« Sentinelles » et des phases de pré-études pourles Sentinelles 4 et 5, nous avons besoin d’unbudget de 1,17 milliard €. Ce budget estapporté par des investissements de l’ESA et dela Commission européenne. (1) Global monitoring for environment and security

research*eu SPÉCIAL SATELLITE I SEPTEMBRE 2007 27

GMES

Un environnement sous haute surveillanceLe rapprochement entre l’Union européenne et l’ESA (Agence spatiale européenne) passenotamment par le programme GMES (1). Un programme qui porte sur la surveillance de l’environnement mondial au sens large du terme pour le bien-être socio-économique des Européens et leur sécurité. Rencontre avec Volker Liebig, directeur des programmesd’observation de la Terre de l’ESRIN (ESA).

Cette image fractionnée est construite à partir

de la combinaison de données captées par ERS-1

et ERS-2. Les forêts apparaissent en vert,

les zones agricoles en orange et jaune, les taches

vertes au centre correspondent aux surfaces

gelées des lacs Hulun Nur et Buir Nur.

IMAGE DE SCIENCEKI-A

H-07-S02-FR-C

Mosaïque du Nord-Est de la Chine

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