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LIAISON ÉNERGIE-FRANCOPHONIE • N° 44 / 3e TRIMESTRE 1999

DANS CE NUMÉRO

Face à l’endettement desÉtats, le financement publicdes investissements élec-triques, dans les pays endéveloppement, a connu unetrès forte réduction durantla dernière décennie.

Les organisations finan-cières internationales ont,par ailleurs, fortement limité

leurs contributions au financement des projetsélectriques, conditionnant celles-ci à la miseen place de systèmes institutionnels attractifs,propres à encourager l’intervention d’entre-prises privées nationales ou internationales.

De ce fait, partout les processus de restruc-turation des secteurs électriques s’avèrent deplus en plus irréversibles. Ces processus déjàlargement engagés dans un certain nombre denos pays membres connaîtront à l’évidenceune accélération au cours des années à venir.

L’IEPF place au centre de ses priorités cesrestructurations, l’électrification rurale s’im-posant comme l’autre face d’une réforme éner-gétique réussie.

L’Institut accompagne les pays membresdans les réflexions menées à cet égard, notam-ment par la formation et l’information visant l’aideà la décision au moment d’adopter des réformeset de les mettre en œuvre. La présente livraisonde Liaison Énergie-Francophonie se veut unecontribution dans ce sens.

Présentant l’analyse à plusieurs voix decette problématique, y compris les espoirs sus-cités et les contraintes rencontrées, s’appuyantsur des études de cas multiples et variés, cenuméro de LEF constitue un moment d’échanged’expériences, une plate-forme de départ. Resteraà approfondir un débat qui connaîtra indubi-tablement des prolongements dans toutes lessphères de nos sociétés et à travers les expé-riences diverses qui se feront jour aux quatrecoins de l’espace francophone.

J’aimerais remercier M. Jean-David Bilé,(Directeur des Études générales, Sonel) qui,en assumant la rédaction en chef de cette livrai-son, a permis que ces voix multiples reflètentla variété des vécus au sein de notre commu-nauté et d’ailleurs.

El Habib BENESSAHRAOUI

Le mot du directeur Les réformesinstitutionnelles en AfriqueCas du secteur de l’électricité

Le mouvement de libéralisation du sec-teur de l’électricité a eu beaucoup de malà se développer en Afrique après la pre-mière opération de réforme qui a été réa-lisée en 1990 en Côte-d'Ivoire, en raisonde la contestation des privatisations parla plupart des entreprises publiques quidominent le secteur.

Il connaît cependant aujourd’hui une grande accélé-ration, due aux nombreux forums organisés pour examinerles divers aspects des problèmes que posent ces réformeset aux pressions des bailleurs de fonds.

Ces derniers ont tous, en effet, progressivement adoptéle point de vue de la Banque Mondiale dont le conseil d’ad-ministration a décidé, en novembre 1992, de ne plus prê-ter aux entreprises d’électricité non performantes qui ne seseraient pas engagées dans un programme de réforme ins-titutionnelle, c’est-à-dire à la quasi-totalité des entreprisespubliques qui assureraient la gestion du secteur.

Les réformes institutionnelles sont devenues l’une desconditions du FMI pour le déblocage de fonds destinés auxprogrammes d’ajustement structurel des économies. Enconséquence, par conviction ou par réalisme, plus aucunpays ne se situe en dehors de ce courant de réforme.

Les modifications demandées sont :

– la révision du rôle de l’État dans le secteur ;

– l’implication des opérateurs privés dans les activités ;

– la mise en place de systèmes de régulation indépendantset transparents ;

– l’introduction de la concurrence dans le secteur ;

– l’adoption de règles de gestion fondées sur des considé-rations commerciales.

Le principal problème pour les entreprises et les États estalors de rechercher les modes d’organisation qui s’adaptentle mieux à leur contexte socio-économique, à leurs res-sources économiques et humaines, ainsi qu’au potentielde leur marché de l’électricité.

DANS CE NUMÉRO DANS CE NUMÉROÉDITORIAL

(suite à la page 4)

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LIAISON ÉNERGIE-FRANCOPHONIE • N° 44 / 3e TRIMESTRE 1999

INSTITUT DE L’ÉNERGIE ET DE L’ENVIRONNEMENT DE LA FRANCOPHONIE (IEPF)

LLIIAAIISSOONNNuméro 44,

3e trimestre 1999est publié trimestriellement par l’Institut de l’énergie et de l’environnement de laFrancophonie (IEPF).56, rue Saint-Pierre, 3e étageQuébec G1K 4A1 Canada Téléphone: 1 (418) 692-5727Télécopie : 1 (418) 692-5644Courriel : [email protected] Internet : www.iepf.org

Directeur de la publication:El Habib Benessahraoui

Comité éditorial : El Habib BenessahraouiSibi BonfilsFrançois DorlotDibongué A. KouoBoufeldja BenabdallahJean-Pierre NdoutoumSory I. DiabatéCarole Grass-Ramalingum

Édition et réalisation graphique :Communications Science-Impact

Design de la couverture :Gérard Beaudry

ISSN 0840-7827

Tirage : 4000 exemplaires

Dépôt légal :Bibliothèque nationale du QuébecBibliothèque nationale du Canada

Les textes et les opinions n’engagentque leurs auteurs. Les appellations,les limites, figurant sur les cartes de LEF n’impliquent de la part del’Institut de l’énergie et de l’environ-nement de la Francophonie aucunjugement quant au statut juridique ouautre d’un territoire quelconque, ni lareconnaissance ou l’acceptationd’une limite particulière.

Énergie-Francophonie

SOMMAIRE

LES RÉFORMES INSTITUTIONNELLES DU SECTEUR ÉLECTRIQUE

ARTICLESLES RÉFORMES: POURQUOI ET COMMENT?

LES MOTIVATIONS DES RÉFORMES ET LES PROBLÈMES QUE POSE LEUR MISE EN ŒUVREYves MBELLE 5

LES RÉFORMES INSTITUTIONNELLES DU SECTEUR ÉLECTRIQUE:LE POINT DE VUE DES EXPLOITANTSFrançois OMBANDA 7

LE POURQUOI ET LE COMMENT DES RÉFORMES:LE POINT DE VUE D’UN OPÉRATEURKofi Asante OKAI 11

LES INVESTISSEURS ET LES RÉFORMES

LES INVESTISSEURS ET LES RÉFORMES: ATTENTES, MODALITÉS ET CONTRAINTES. L’EXPÉRIENCE D’ÉLECTRICITÉ DE FRANCEJean JAUJAY 14

LES RÉFORMES DU SECTEUR ÉLECTRIQUE

LES RÉFORMES DU SECTEUR ÉLECTRIQUE : LE CAS DE LA CÔTE D’IVOIREGaston VEI 17

LES RÉFORMES INSTITUTIONNELLES DU SECTEUR ÉLECTRIQUE.PANORAMA LE CAS DU GABONJean-Pierre LASSENI DUBOZE 24

LA DÉRÉGULATION DE L’INDUSTRIE ÉLECTRIQUE SÉNÉGALAISE ET LE NOUVEAU MODÈLE CONCURRENTIEL DE LA SENELECLatsoucabé M. FALL 28

LES RÉFORMES DU SECTEUR ÉLECTRIQUE: LE CAS DU MAROCDriss BENHIMA 33

LES RÉFORMES INSTITUTIONNELLES DU SECTEUR ÉLECTRIQUE:LE CAS DE LA TUNISIEHédi TURKI 36

LES DEUX DIMENSIONS DE LA RESTRUCTURATION DES INDUSTRIESÉNERGÉTIQUES EN AMÉRIQUE LATINEHelder Queiroz PINTO Junior 39

LES PERSPECTIVES

LES RÉFORMES INSTITUTIONNELLES DU SECTEUR ÉLECTRIQUE:PROBLÈMES TARIFAIRES ET FISCAUX, ET COUVERTURE DES RISQUESPhilippe OSSOUCAH 46

LES RÉFORMES DU SECTEUR ÉLECTRIQUE ET L’ÉLECTRIFICATION RURALEVincent MAINSAH 50

RESTRUCTURATION DES SECTEURS ÉLECTRIQUES EN AFRIQUE :UN CHAMP D’ACTION ÉCONOMIQUE POUR LA FRANCOPHONIEEl Habib BENESSAHRAOUI 56

CHRONIQUES• L’IEPF A ORGANISÉ 13, 38, 45

• BRÈVES 49, 55

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LIAISON ÉNERGIE-FRANCOPHONIE • N° 44 / 3e TRIMESTRE 1999

L’ambition de ce numéro spécial du LEF est d’ap-porter aux personnes intéressées l’information surles tendances les plus récentes de ces réformes afinde les aider à trouver leur propre voie.

La première partie est consacrée aux attentesdes diverses parties prenantes, gouvernants, opéra-teurs et investisseurs. Les articles du Ministre desMines, de l’Eau et de l’Énergie du Cameroun, duPrésident de la SEEG du Gabon, et du Directeur dela programmation de la VRA du Ghana montrentque, malgré quelques nuances d’un pays à un autre,les gouvernants et les opérateurs nationaux cher-chent, à travers les programmes de réforme, à réali-ser les investissements qui devraient permettre desoutenir la croissance économique, d’accroître l’ac-cès des populations à l’électricité, et d’améliorer lagestion et la cohérence des décisions dans le secteur.

Mais ces acteurs ont des appréhensions en ce quiconcerne l’évolution des tarifs dans un contexte degestion privée et la capacité de l’appareil administratifde maîtriser les nouveaux contextes institutionnelsqui deviennent complexes.

Cette première partie se termine par l’article duDirecteur Afrique de EDF. Celui-ci souligne les pointsessentiels qu’examine un investisseur avant de s’en-gager dans un pays et montre les limites de ce qu’ilest possible de réaliser.

Un niveau de rentabilité raisonnable, la perti-nence du schéma institutionnel pour l’exercice nor-mal du métier, les capacités de développement dusecteur, l’existence de solutions de production à courtterme pour couvrir la demande et la qualité du per-sonnel y tiennent une bonne place.

Dans la seconde partie, sont présentés des casqui montrent comment, dans la période récente,divers pays ont mis en œuvre des réformes.

L’une des catégories concerne les pays dont lesbesoins de développement se limitent à l’accroisse-ment des capacités de production.

Ce sont les cas de la Tunisie et des zonesurbaines du Maroc, présentés par les Directeursdes stratégies de ces entreprises. Ces cas montrentcomment, à travers des contrats de financement,de construction, d’exploitation et de concession, laproduction indépendante est mise en œuvre avecle souci de maîtriser les prix et l’évolution des acti-vités.

Dans une seconde catégorie de cas se placent lespays qui ont à la fois besoin de développer les réseauxet les moyens de production et d’améliorer la ges-tion du système électrique.

Les cas de la Côte d’Ivoire, du Gabon et duSénégal, présentés par le Directeur général adjoint dela CIE (Compagnie Ivoirienne d’Électricité) et lesDirecteurs des études de la SEEG (Gabon) et de laSENELEC (Sénégal), permettent de voir la place pré-pondérante que tendent à prendre la concession etla production indépendante dans l’évolution des sys-tèmes.

Des différences tenant aux spécificités des paysapparaissent dans l’introduction de la concurrence,la dé-intégration des activités, le mode de régulationdu secteur et le traitement de l’électrification rurale.Mais on voit apparaître et s’imposer un schéma oùinterviennent un opérateur concessionnaire, un régu-lateur, un organe chargé de la gestion des mouve-ments d’énergie et un organe chargé de promouvoirl’électrification.

Dans la troisième partie, un article présente uneréflexion sur les solutions envisageables pour don-ner une impulsion à l’électrification rurale dans lecadre libéral. Il propose l’utilisation de techniques allé-gées, la promotion des usages productifs et l’interventionde collectivités décentralisées.

La revue se termine par un article qui présenteune réflexion sur le processus de réforme en Amériquelatine et les rapports existant entre les politiques destabilisation et de réforme.

Globalement, il apparaît qu’après la phase derésistance et de rejet le processus d’appropriationdes réformes par les pays africains progresse.

Des efforts de formation et d’information impor-tants restent cependant nécessaires si l’on veut dis-poser en qualité et en quantité de ressources humainescapables de maîtriser les processus et de procéderaux réorientations éventuellement nécessaires.

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LES MOTIVATIONS

Moderniser le système électrique au service de la croissance et du développement économiqueDepuis la fin des années 1970, les industries élec-triques africaines éprouvent de sérieuses difficultésà trouver les fonds nécessaires au financement deleur développement. Cette situation est due non seu-lement à la crise économique mais aussi aux mau-vaises performances des sociétés. La réforme du sec-teur de l’électricité apparaît comme un moyend’intéresser les investisseurs et les opérateurs qua-lifiés à la gestion du secteur électrique africain. Lacroissance de la demande et l’arrêt des investisse-ments ont entraîné une inadéquation entre l’offre

et la demande d’électricité. Ainsi, les pays qui ontpris du retard dans le processus de réforme connais-sent, presque à coup sûr, des périodes de déficitd’énergie électrique.

Le renforcement du service public de l’électricité et le maintien des tarifsLa nouvelle organisation du secteur électrique doit toutà la fois conforter le service public de l’électricité et,par le biais de l’introduction de la concurrence, abais-ser les coûts pour les consommateurs et les entre-prises, et contribuer au développement de la com-pétitivité nationale.

Yves MBELLE est ministre des Mines,de l’Eau et de l’Énergie au Cameroun.

Les motivations des réformes et les problèmes que pose leur mise en œuvre

Yves MBELLE

Les réformes institutionnelles dans le secteur électrique africain, et notamment la privatisationdes entreprises publiques d’électricité, suscitent beaucoup d’interrogations.

Ces réformes apportent des changements fondamentaux au rôle des États dans le secteur élec-trique. En ce qui concerne le Cameroun, des trois fonctions de définition de la politique secto-rielle, de principal investisseur et de contrôle réglementaire du secteur, l’État ne gardera, à terme,que la première et en partie la troisième, pour laquelle il devra céder une partie de ses pouvoirsà l’Agence de Régulation du secteur de l’électricité.

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La desserteEn dépit des nombreux efforts consentis pour déve-lopper la desserte du pays en énergie électrique, lesbesoins d’électrification demeurent importants. AuCameroun, le nombre de localités électrifiées est del’ordre de 2 000 sur les 13 000 que compte le pays.Dans la plupart des pays en cours de réforme, lerythme d’électrification a substantiellement baissé,quand il n’est pas tout simplement resté stationnaireen raison notamment de l’arrêt des investissements.L’attente légitime des pays en développement, en cequi concerne les programmes de réforme, est la garan-tie de l’accès aux services électriques d’un plus grandnombre de populations, où qu’elles soient, dans desmeilleures conditions de coût et de qualité et dansun avenir prévisible.

La qualité et le prix des services électriquesLa qualité et le prix de l’électricité sont des élémentsimportants dans les décisions d’investissement et decréation d’emplois. Les attentes relatives à la qualitédes services concernent plus précisément l’amélio-ration de la fourniture d’électricité aux usagers et desrelations avec la clientèle.

Au cours des dernières années, l’accroissementde la demande et le vieillissement de l’appareil de pro-duction ont induit des dysfonctionnements dans laproduction, le transport et la distribution de l’éner-gie électrique. La qualité de fourniture des servicesà la clientèle a connu une sérieuse détérioration. Lenombre d’interruptions de fourniture de services élec-triques subséquentes aussi bien que leur durée onttrès rapidement augmenté. De même, les fluctua-tions de tension des réseaux se sont amplifiées, entraî-nant d’importants dommages matériels, aussi bien dansle secteur résidentiel que dans l’industrie et le sec-teur tertiaire, et une perte de productivité préjudi-ciable à l’économie.

Sur le plan des relations avec la clientèle, lesdélais entre la souscription d’un abonnement et le bran-chement effectif des abonnés se sont allongés. D’autrepart, les délais de rétablissement de service consé-cutif aux ruptures attribuables aux sinistres ou aunon-respect des termes contractuels sont tout aussilongs.

Sur le plan des tarifs, il va sans dire que lesconsommateurs (domestiques et industriels) devront,à terme, bénéficier de la baisse des coûts consécu-tive aux améliorations technologiques et organisa-tionnelles apportées par les nouveaux opérateurs, etaux mécanismes de concurrence qui auront été ins-taurés. Aussi, cette mutation devra se traduire in fine,pour les consommateurs, par la baisse de leurs fac-tures d’électricité. Plus particulièrement, les indus-triels, pour qui le prix de l’électricité représente unélément important du coût de revient, doivent pou-voir obtenir les meilleurs prix possibles à travers la

possibilité de choisir de leur fournisseur en faisant jouerla concurrence.

En tout état de cause, il est clair que les pou-voirs publics, assistés de l’Agence de régulation dusecteur de l’électricité, devront accorder la plus grandeattention aux tarifs afin que les gains de productivitése répercutent sur les consommateurs.

Développer la fourniture d’électricitépour favoriser la croissance économique et la création de l’emploi

Enfin, compte tenu de l’importance des ressourcesnaturelles que possède le Cameroun, notammentdans le domaine de l’hydroélectricité, il est à espé-rer que la mise en place du marché intérieur per-mettra de développer la fourniture d’électricité à l’ex-portation et de créer ainsi des investissements et desemplois au niveau national.

L’électrification ruraleLes sociétés d’électricité, à leur création, avaient pourmission, entre autres, d’électrifier l’ensemble du pays.Par conséquent, ces sociétés ont souvent servi d’ins-truments essentiels de politique énergétique et dedéveloppement des gouvernements. La préoccupationdes dirigeants était de mettre l’énergie à la disposi-tion des zones rurales permettant d’y améliorer laqualité de vie des ménages et de créer les conditionsnécessaires au développement des activités généra-trices d’emplois et de revenus. Les objectifs de des-serte assignés aux opérateurs, de même que les méca-nismes spécifiques mis en place dans le cadre de laréforme, notamment l’Agence de l’ÉlectrificationRurale, devraient permettre de satisfaire les attentesdes populations rurales en matière d’électrification.

LES APPRÉHENSIONSMalgré tout le bien que nous attendons de la réformedu secteur de l’électricité, nous avons de sérieuses appré-hensions sur deux points : la maîtrise du nouveaucontexte institutionnel par l’appareil administratif etl’évolution des tarifs.

L’environnement institutionnel de l’électricitéconnaîtra de profonds changements avec le passagede la société nationale aux mains d’un opérateurprivé, qui non seulement dispose des qualificationspour œuvrer dans le domaine de l’électricité, maispossède ou peut mobiliser n’importe quelle compé-tence pour résoudre ses problèmes, en face d’un appa-reil administratif insuffisamment outillé.

En ce qui concerne les tarifs, on s’attend à ce quela valorisation des gisements de productivité dans lasociété puisse permettre des baisses. Cependant, ilsera aussi nécessaire de procéder à des augmenta-tions tarifaires pour permettre le redressement de lasociété. Cette phase pourrait être difficile à négocier.

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Cette privatisation, encore appelée mise en conces-sion privée, marque le terme du processus de réformedu secteur électrique engagé par la République gabo-naise à la fin des années 1980.

Le présent article se propose de retracer les moti-vations de cette réforme et d’en décrire les princi-pales étapes. Auparavant, un bref rappel historiquepermettra de faciliter la compréhension des diffé-rentes évolutions.

RAPPEL HISTORIQUELa distribution de l’électricité voit le jour au Gabon,en 1935, à Libreville, sous la forme d’une concessionmunicipale, accordée à une société concessionnaireprivée.

En 1950, un autre concessionnaire privé, la SEPG,s’installe à Port-Gentil, deuxième ville du pays, pourassurer la distribution de l’électricité d’une partie de

la ville. C’est ce concessionnaire qui donnera suiteaux sollicitations du gouvernement pour assurer lapremière distribution à l’intérieur du pays, en 1962.

En août 1963, la SEPG devient la SEEG. Lerachat, en 1964, de la concession de Libreville confirmele caractère national de la SEEG, qui se voit confé-rer le monopole de fait de la distribution de l’électri-cité sur l’ensemble du territoire national. L’État endevient l’actionnaire majoritaire, avec 64 % des parts,aux côtés d’industriels et de banquiers.

François OMBANDA est Présidentdu Conseil d’administration de la Société d’Énergie et d’Eau du Gabon (SEEG).

Les réformes institutionnelles du secteur électrique:LE POINT DE VUE DES EXPLOITANTS

François OMBANDA

Le 13 juin 1997, la Société d’Énergie et d’Eau du Gabon (SEEG) est privatisée. La Républiquegabonaise, précédent actionnaire principal (64%), cède l’ensemble du capital de la société, moinsune action, à la Compagnie Générale des Eaux (CGE) (aujourd’hui Vivendi), candidat retenuà la suite d’un appel d’offres. Cette dernière procède, par la suite, à une augmentation de capi-tal, dont 49 % est réservé aux investisseurs gabonais. Un contrat de concession est concluentre la République gabonaise et la SEEG, pour une durée de 20 ans. L’action conservée parla République gabonaise est transformée, par décret, en action spécifique qui confère à l’Étatcertaines prérogatives (représentation au conseil d’administration avec voix consultative, préservation des intérêts patrimoniaux du pays en assemblée générale, etc.).

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Description de l’environnement et du contexteLe Gabon couvre un territoire de près de 270000 km2,qui abrite une population d’un peu plus d’un milliond’habitants (recensement de 1993), dont 73 % enmilieu urbain. Trois agglomérations concentrent plusde la moitié de la population: Libreville avec 420000habitants; très loin derrière, Port-Gentil, avec 79000habitants, et Franceville, avec 31000.

La faible densité de population, le mauvais étatdes voies de communication, ainsi que la forêt denseet des reliefs difficiles rendent impossible l’intégrationdes réseaux électriques. Sur le plan économique, lesactivités génératrices de ressources sont regroupéesautour des pôles précédemment cités. Le pétroleapporte l’essentiel des ressources de l’État.

L’ensemble de ces données met en lumière lesfaiblesses du système: marché très étroit et relative-ment dispersé, intégration des exploitations élec-triques impossible, ressources largement tributairesdu marché pétrolier international.

Évolution du secteur électriqueGrâce à ses ressources pétrolières, le pays se doted’un équipement remarquable en électricité. Le tableauci-dessous fournit un certain nombre d’indicationssur l’évolution de la distribution d’électricité au Gabon.

LES MOTIVATIONS DES RÉFORMESCependant, cette évolution, apparemment favorable,se produit dans un contexte «euphorique», concer-nant notamment la gestion de l’exploitation, avecdes taux annuels d’accroissement de l’activité dépas-sant souvent les 10 %. La crise qui frappe le pays en1986 (baisse drastique des ressources, du fait de ladiminution du prix du pétrole et du cours du dollar)jette une lumière crue sur les insuffisances. Ainsi,alors que l’évolution des recettes se ralentit, lesdépenses d’exploitation, elles, continuent d’augmentercomme dans les années de forte croissance.

Par ailleurs, le cadre juridique de l’activité pré-sente de nombreuses incohérences : la SEEG estconcessionnaire face à plusieurs autorités concé-dantes (deux municipalités et la République gabo-naise). Chacune de ces autorités peut prendre desdécisions, en matière d’investissements notamment,sans toujours en supporter les conséquences. Ainsi,une municipalité peut décider de réaliser des exten-sions de réseaux, sans se préoccuper des consé-quences sur la production, dont la charge du renfor-

cement incombe au concessionnaire. Ce dernier n’apas la latitude d’augmenter les tarifs pour faire faceaux nouvelles charges, l’État, en sa qualité de puis-sance publique, s’y opposant régulièrement, pourdes raisons essentiellement sociales. Il en résulte desincohérences, dans un système tarifaire, par ailleursobsolète, certains tarifs de la moyenne tension deve-nant quelquefois supérieurs à des tarifs en basse ten-sion. Ces incohérences tarifaires ont également desconséquences sur l’équilibre des centres isolés, dontles recettes ne couvrent pas les dépenses.

Enfin, la crise a pour conséquence d’aggraverles difficultés de paiement des clients, et en particu-lier de l’État, principal client de la Société (plus de20 % du chiffre d’affaires).

Ce diagnostic de la situation, établi à la suited’un audit entrepris en 1988, conduit l’État à envi-sager la réforme du secteur. Les objectifs poursuivissont les suivants :

– Mettre en place un cadre juridique du secteur quiassure la cohérence de la gestion;

– Assurer le financement des déficits des centresisolés, si nécessaire par les tarifs ;

– Redonner aux instances de direction de la Société(conseil d’administration et direction générale) lesmoyens nécessaires pour assumer leurs respon-sabilités en matière de gestion;

– Faire le nécessaire pour que l’État règle ses facturesd’électricité.

LES DIFFÉRENTES ÉTAPES DE LA RÉFORMEÀ l’époque où ce constat est établi et les orientations,fixées, il n’est pas question de privatisation. Le sujetest sensible, notamment à partir de l’ouverture démo-cratique de 1990 et de l’apparition d’une oppositionpolitique.

Le contrat programmeL’option retenue est l’établissement d’un contrat pro-gramme. Au terme de celui-ci, l’État prend un cer-tain nombre d’engagements: instauration du cadre juri-dique, adoption d’une tarification plus cohérente,règlement de ses factures. Il fixe à la SEEG des objec-tifs d’amélioration de la gestion : augmentation desrecettes, maîtrise des dépenses, amélioration du recou-vrement, réalisation de l’entretien et du renouvelle-ment, développement de l’exploitation grâce auxmarges reconstituées.

Années Exploitations Ventes Chiffre d’affaires Abonnements EffectifsNombre GWh kFCFA Nombre Nombre

1970 13 85 2 000 000 * 9 000 * 5721990 34 745 35 000 000 * 79 175 * 1 9911998 40 972 50 800 000 * 117 610 * 1 508

* Chiffres approchés ou reconstitués

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Signé en 1991 pour une durée de trois ans, cecontrat ne permet cependant pas d’atteindre l’en-semble des objectifs poursuivis. Un cadre juridiqueest certes adopté en 1993, limitant notamment lenombre des acteurs (l’État, en qualité d’autorité concé-dante unique, et la SEEG, comme concessionnaire).De son côté, la société met en place un plan d’ac-tions pour améliorer son efficacité (diminution des sur-effectifs, maîtrise des dépenses, amélioration de lafacturation et du recouvrement). Toutefois, la nouvelletarification n’est pas adoptée, laissant en l’État laquestion des déficits des centres isolés. De plus, l’É-tat continue d’accumuler des impayés, préjudiciablesau financement de l’exploitation.

Le mandat de gestionDans le même temps, l’idée de la privatisation faitson chemin, notamment après le précédent, en 1990,de la Côte d’Ivoire. Toutefois, les esprits n’étant pasencore mûrs, il est décidé, en juin 1993, de confierun mandat de gestion à un consortium de sociétés fran-çaises et canadienne. Sous le contrôle du conseild’administration, ce consortium est chargé d’amé-liorer l’efficacité de l’exploitation, avec pour objectif,le cas échéant, la privatisation de la gestion.

En dépit de l’absence de tarification adaptée,l’étape du contrat de gestion conduit à une amélio-ration sensible des indicateurs de gestion : la factu-ration et le recouvrement sont quelque peu amélio-rés et les dépenses d’exploitation, maîtrisées (personnelet consommations intermédiaires). Mais, une partsubstantielle des facturations à l’État demeure impayée.

Durant le mandat de gestion (jusqu’en juin 1995),que le personnel assimile d’ailleurs à une privatisa-tion, ce qui entraîne des mouvements de grève, laquestion finit par être abordée de façon directe. Lessyndicats sont invités à faire part des préoccupationsqu’ils souhaitent voir prises en compte, au cas où laprivatisation serait décidée par le pouvoir politique.Au-delà de la réaction quelque peu vive de certains,l’exercice permet de sensibiliser le personnel et de lepréparer à cette éventualité. Au demeurant, vis-à-visde l’aspect qui suscite le plus d’inquiétude, c’est-à-dire l’emploi, le résultat des actions entreprises depuisquelques années permet de rassurer le personnel :des licenciements massifs ne peuvent être envisagés,l’effectif étant passé de près de 2 100 collaborateurs,en 1988, à 1 680 à la fin de 1994.

La privatisationÀ la suite de la dévaluation du franc CFA, en janvier1994, il est de plus en plus question de privatisation.Les bailleurs de fonds placent désormais cette évo-lution au premier plan de leurs recommandations àl’État.

Ainsi, une loi fixant les conditions de privatisa-tion des entreprises du secteur public est votée en

janvier 1996. Parmi les modalités de privatisation estprévue la mise en concession privée, sans transfertde la propriété des actifs. Une action détenue par l’É-tat peut être transformée, par décret, en action spé-cifique, pour assurer la protection des intérêts natio-naux. Enfin, lors de toute privatisation, des titres sontréservés aux porteurs gabonais et, en priorité, auxsalariés des entreprises concernées.

Après sa promulgation, en février 1996, le gou-vernement procède au lancement de la premièrephase du programme de privatisation, qui concerne,entre autres, la mise en concession privée des ser-vices d’électricité. Le public en est informé par com-muniqué de presse, en avril 1996. Les objectifs pour-suivis sont mentionnés, de même que le choix de laSFI en qualité de conseiller du gouvernement danscette opération. Il est prévu, pour la réaliser, de lan-cer un appel d’offres international. Le calendrier fixela fin de l’opération pour la fin de 1996.

Modalités de l’opérationPour le gouvernement, la privatisation poursuit deuxcatégories d’objectifs : politiques et sociaux (étendreet améliorer les services, désengager l’État de la ges-tion de la Société, faire participer les Gabonais aucapital) ; économiques et financiers (désengager l’É-tat du financement des infrastructures, attirer desinvestisseurs stratégiques internationaux, réduire lecoût des services et mettre en place une tarificationconforme aux objectifs).

Par ailleurs, le gouvernement décide de mainte-nir le régime de concession, au détriment de l’affer-mage, pour un périmètre défini et une durée de 20 ans.Des obligations de résultats sont prévues, en termesd’augmentation de la desserte et d’amélioration de laqualité des services.

L’État vendra l’ensemble du capital de la SEEGau repreneur, après avoir racheté la part des action-naires minoritaires. Une augmentation de capital seraeffectuée après restructuration financière. Au stadefinal, 49% du capital sera réservé aux investisseursgabonais. Le personnel participera, au minimum, àhauteur de 5%.

Déroulement de l’appel d’offresSur ces bases, des critères sont définis pour le choixdes candidats, fondés sur leur capacité à assurer leservice et à apporter les capitaux nécessaires. Plusde soixante entreprises du monde entier sont pres-senties par la SFI. Quatorze demandent et reçoiventle mémoire d’information. Quatre seulement font partde leur intérêt, quatre sont préqualifiées pour prendrepart à l’appel d’offres.

Celui-ci est lancé fin septembre 1996. Le docu-ment de base de l’appel d’offres est un projet decontrat de concession définissant les conditions tech-niques et financières de la concession. Les offres des

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candidats doivent comporter deux parties : l’une,technique, décrivant le projet industriel des candi-dats, l’autre, financière, proposant un rabais tarifaireconforme au projet industriel.

La remise des offres (trois seulement, l’un descandidats s’étant désisté) a lieu le 20 mars 1997.C’est celle de la CGE qui est retenue, le rabais pro-posé étant le plus important (17,25%, contre 11,5%et 5,8% pour les deux autres candidats).

Finalisation de la privatisationUne fois le repreneur choisi, les conditions de réali-sation de la privatisation sont mises en place. D’abordles actes réglementaires : décrets autorisant la ces-sion des actions de l’État et désignant la SEEG enqualité de concessionnaire. Cette étape se réalisedans l’intervalle entre la désignation de la CGE et ladate retenue pour la réalisation de la privatisation.

Le 13 juin 1997, les organes sociaux de la SEEG(assemblée générale et conseil d’administration) seréunissent pour, d’une part, procéder à la restructu-ration financière (apurement des pertes cumulées etdes dettes croisées État/SEEG) et consacrer le chan-gement d’actionnaire majoritaire et, d’autre part, déci-der de l’augmentation de capital, qui passe de 7 mil-lions (valeur résiduelle après restructuration du bilan)à 15 milliards de FCFA. La convention de cessiondes actions de l’État au sein de la SEEG est signéele même jour, entre l’État et la CGE, ainsi que laconvention de concession liant l’État à la SEEG pourune durée de 20 ans, à compter du 1er juillet 1997.Le 1er juillet, le nouveau contrat entre en vigueur. Lestarifs des services offerts par la SEEG baissent de17,25 %. Le 28 juillet, la CGE, après les formalitésd’usage, libère sa part de capital, 51%, soit un peumoins de 7,650 milliards de FCFA.

Un appel public à l’épargne est lancé le 31 octobre,réservé aux investisseurs gabonais, en vue de l’aug-mentation de capital représentant 49%, soit environ7,35 milliards de FCFA. L’offre est répartie de lamanière suivante :

– 5% pour le personnel de la SEEG (actions de caté-gorie C’). Les actions seront réparties à parts égalesentre l’ensemble des candidats. Un prêt plafonnéà 400 000 FCFA, remboursable entre 12 et 48 moisselon les catégories, est consenti à ceux qui le sou-haitent ;

– 24% aux personnes physiques gabonaises ou rési-dant au Gabon (actions de catégorie C) ;

– 20 % aux personnes morales de droit gabonais(actions de catégorie D).

Au terme de cette opération, le 31 décembre, lesrésultats sont enregistrés tel que dans le tableau ci-dessus.

CONCLUSIONLa réforme du secteur de l’électricité, au Gabon, s’estétalée sur près de dix ans, de l’établissement du diagnostic en 1988, à la privatisation proprement dite,en 1997.

Ce délai peut paraître long. Mais, s’agissant d’unchangement aussi profond et se rapportant à un sec-teur si éminemment sensible, ce qui importe, c’estl’aboutissement et les conditions de déroulement duprocessus. En l’occurrence, en dehors des réactionsde certaines catégories de personnels enregistrées en1993 et 1994, réactions compréhensibles au demeu-rant, le processus s’est déroulé dans de bonnes condi-tions. Dès le moment où il a été lancé, les pouvoirspublics ont régulièrement pris les décisions qui per-mettaient son bon déroulement.

Il reste à faire en sorte que le changement inter-venu permette d’atteindre les objectifs poursuivis,notamment l’amélioration des services et leur exten-sion à un plus grand nombre d’habitants du pays.

Nombre Catégories Titres Titres Valeur Titres Valeur d’opérations offerts demandés (MFCFA) attribués (MFCFA)

2 443 C 359 999 310 915 3 109 150 310 915 3 109 1501 323 C 75 000 135 523 1 354 300 124 084 1 240 840

70 D 300 000 653 205 6 532 050 300 000 3 000 00013 836 TOTAL 734 999 1 099 643 10 995 500 734 999 7 349 990

La jouissance des actions devient effective le 1er janvier 1998.

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L’énergie électrique provenant de ces centrales apermis de réaliser l’adéquation entre l’offre et lademande, sur le plan national, jusqu’au milieu de ladécennie 1980. Par la suite, du fait de la sécheresse,les insuffisances ont commencé à s’accumuler.

La demande d’électricité a crû de manière conti-nue, passant d’un niveau de 2% à une moyenne de10 à 15%, à partir de 1985. Cet aboutissement capi-tal des succès de la politique de redressement duGhana a permis une expansion des activités socioé-conomiques. Il y a néanmoins une forte proportionde la population qui n’est pas raccordée, en raisondu taux de croissance annuel de 3%.

MOTIVATION RATIONNELLE DES RÉFORMESLe gouvernement du Ghana, sans cesse désireux desoutenir le développement, s’est imposé un calen-drier pour faire passer le statut socioéconomique dupays, à l’horizon 2020, au stade d’économie à revenuintermédiaire. La justification essentielle de cettevision tient à la volonté de rendre accessible à lamajorité de la population une énergie fiable et

Kofi Asante OKAI est Directeur p.i., Planification etProgrammation, Volta River Authority au Ghana.

Le pourquoi et le comment des réformes:LE POINT DE VUE D’UN OPÉRATEUR

Kofi Asante OKAI

L’énergie électrique a été et continue d’être le catalyseur fondamental de toute économie moderne,le Ghana ne faisant pas exception. Le développement socioéconomique du Ghana a connu uneimpulsion avec la construction des barrages hydroélectriques d’Akosombo, en 1965, et de Kpong,en 1982.

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adéquate, ainsi qu’un approvisionnement en éner-gie électrique permettant de réaliser le développe-ment socioéconomique de la nation.

Pour le gouvernement du Ghana, l’enjeu majeurde la réforme du secteur électrique est de briser leschéma traditionnel de dépendance à l’égard desorganismes multilatéraux pour le financement desentreprises en charge du service de l’électricité. Parconséquent, la stratégie principale du gouvernementconsiste à concentrer l’essentiel de son activité surla gouvernance, de façon à créer ainsi un environ-nement propice à l’émergence d’un secteur privé,moteur de croissance économique. Le gouvernementvise donc, à travers la réforme du secteur électrique,à attirer des capitaux privés pour financer les pro-jets énergétiques, puisqu’il ne sera pas en mesurede fournir des garanties souveraines pour de telsprêts. Il aimerait mieux affecter les rares ressourcespubliques au secteur social (éducation, santé, etc.).

Par cette réforme, le gouvernement tient à pré-parer et à positionner l’industrie électrique du Ghanade manière à pouvoir jouer un rôle de premier planau sein du pool de l’électricité ouest-africain actuel-lement en gestation.

Désormais, le cadre juridique et réglementaire aété mis en place par le biais des différentes lois etdes documents de politique générale, à savoir :

– la loi PURC (Commission de réglementation desentreprises en charge du service de l’électricité),

– la loi sur la Commission de l’Énergie,

– la déclaration de politique de développement dusecteur électrique.

PROBLÈMES CONCERNANT LA MISE EN APPLICATIONToutefois, certains points sensibles, tels que le niveauactuel des tarifs, inadéquat, rendent difficile l’appli-cation de la réforme, ce qui constitue, à n’en pointdouter, une situation dissuasive pour les investis-seurs qui aimeraient s’impliquer dans l’industrie élec-trique. Il apparaît utile de souligner que, du fait, prin-cipalement, des bas revenus, les tarifs ont été geléspendant de nombreuses années et n’ont, par consé-quent, pas reflété les coûts économiques. Cette mesurea largement affecté les activités des entreprises encharge du service de l’électricité.

Les institutions de régulation, qui ont été crééespour servir de bras armé au gouvernement, doiventtrouver les moyens de se procurer les ressourceshumaines nécessaires à l’exercice de leurs activités,face aux entreprises en charge du service de l’élec-tricité existantes telles que :

– l’Autorité du fleuve Volta (Volta River Authority,VRA),

– la Compagnie Électrique du Ghana (ElectricityCorporation of Ghana, ECG).

De plus, ces institutions sont encore à un stadeembryonnaire. Dans ces conditions, la célérité aveclaquelle ces organes arriveront à développer des com-pétences qui soient à même de répondre aux exi-gences conditionnera la dynamique de mise en œuvrede la réforme.

Il y a également la tâche colossale de sensibili-sation de la population et des industries pour qu’ellesacceptent de payer des tarifs qui tiennent comptedes coûts économiques. Ce changement de menta-lité est absolument nécessaire si l’on veut rendre lemarché attrayant pour les investisseurs. Le marchéde l’électricité, au Ghana, n’a pas progressé au pointde laisser émerger une demande industrielle addi-tionnelle sur le marché déréglementé. Actuellement,la demande du marché, pour les entreprises de dis-tribution réglementées, s’élève à 4 115 GWh (50,8 %),sur une demande totale de 8 100 GWh. Ceci pour-rait dissuader les producteurs indépendants d’élec-tricité d’entrer sur ce marché, qui est actuellementdominé par les entreprises existantes.

Les entreprises en charge du service de l’élec-tricité et la Commission de l’Énergie sont sur le pointd’arriver à un consensus quant au processus et auxmodalités de définition des caractéristiques des clientséligibles et des distributeurs autorisés. Ce qui revientà préciser la démarcation entre le marché réglementéet le marché déréglementé.

La question de l’élaboration de directives trans-parentes pour les taux applicables aux services élec-triques, reste en suspens, bien que les entreprises deservice public et d’autres opérateurs aient transmisleurs commentaires sur les directives établies par laPURC sur la fixation des tarifs.

Parallèlement, l’un des paramètres clés de laréforme concerne la séparation comptable du sec-teur électrique actuel, verticalement intégré, et laséparation institutionnelle, ainsi que la privatisationsubséquente. Ceci aura pour conséquence l’émer-gence d’une activité de coordination autonome pourl’instauration d’un réseau à accès ouvert aux tiers.Il ne fait aucun doute que des fonds sont nécessairespour assurer le succès de la mise en application decet aspect des choses. Les entreprises, de même quele ministère des Mines et de l’Énergie sont actuelle-ment à la recherche de fonds auprès de la Banquemondiale pour mettre en œuvre le libre accès auréseau national de transport.

LE POINT DE VUE DES FOURNISSEURS DE SERVICELes entreprises en charge du service de l’électricité,au Ghana, sont généralement favorables aux mesuresdécoulant de la réforme, puisqu’elles autoriserontdes tarifs plus en adéquation avec leur exploitation.Les initiatives de la réforme vont également assurerun approvisionnement en électricité adéquat pen-

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dant que la concurrence qui en résultera va stimu-ler l’innovation et l’efficacité. Les entreprises n’ontpas bénéficié de tarifs adéquats depuis longtemps,ce qui a entraîné de sérieux problèmes de cash-flowet, partant, l’incapacité de financer leurs programmesde développement.

Les entreprises en charge du service de l’élec-tricité pourraient être en désaccord avec le gouver-nement quant au chronogramme défini par ce der-nier. Ceci résulte principalement du manque decommunication adéquate quant aux intentions dugouvernement et, plus fondamentalement, de l’in-disponibilité des fonds, pour mettre en applicationleurs propres plans de restructuration.

Les réformes sont cependant perçues par lesentreprises de service public comme une occasionde repositionner leurs activités au niveau de l’effi-cacité et de la fourniture d’un meilleur service. Et, danscette optique, elles ne ménageront aucun effort pourréussir.

CONCLUSIONTout en réformant le secteur électrique pour redy-namiser le développement socioéconomique du pays,il est important de noter que cette initiative placeral’industrie électrique du Ghana en conformité avecla tendance mondiale en matière d’énergie. Ceci per-mettra de promouvoir le développement du secteurau Ghana et dans l’ensemble de la sous-région. Lamise en application a également été ralentie parce queles organes de régulation et les autres entreprises encharge du service de l’électricité sont en train des’équiper et d’acquérir des compétences pointues,pour être effectivement à même de fonctionner dansle nouveau cadre réglementaire. Celui-ci est com-posé du marché réglementé et du marché dérégle-menté concurrentiel.

• 19 au 29 septembre : Ateliers Biodiversité, à Libreville (Gabon).

Depuis 1997, les préoccupations des pays membres ont été identifiées, en matière de biodiversité,et un programme de formation a alors été adopté afin de :

– faciliter l’identification de besoins pour la mise en œuvre effective de la Convention sur la biodiversité(réunion tenue en marge de la 3e session de l’Organe subsidiaire chargé de fournir des avis scientifiques,techniques et technologiques (SBSTTA) ;

– favoriser la tenue d’ateliers préparatoires pour l’élaboration et les négociations d’un protocole sur lesrisques biotechnologiques.

Le module de formation mis en œuvre au Mali et en Guinée en 1998 a été reconduit en Tunisie etau Maroc en juillet 1999, puis au Gabon en septembre.

Ce module type de séminaire-atelier national permet de former, dans chaque pays, un noyau de 25à 30 personnes selon une approche didactique prenant en compte l’adaptation du contenu aux spécifi-cités des pays et l’intervention de noyaux de formateurs du Nord et du Sud.

• 21 au 24 septembre: Réunion d’experts sur les axes d’intervention pour une gestion durablede l’eau, à Ouagadougou (Burkina Faso).

Atelier de réflexion regroupant les spécialistes des pays membres et portant notamment sur :

– l’état de la question et le partage des expériences,

– des travaux/études de cas en groupes restreints,

– une séance plénière d’échanges et de discussions.

• 27 septembre au 2 octobre : Atelier sur les études d’impact environnemental (EIE), à Cotonou(Bénin).

Réunion du groupe de travail pour la validation du rapport sur la phase pilote de l’étude relative àl’analyse des besoins et l’élaboration d’un programme pluriannuel en matière d’étude d’impact environ-nemental. Conjointement, une formation est dispensée concernant les outils d’application de l’EIE etprésentant des études de cas sur les ouvrages hydroélectriques.

DANS CE NUMÉROL’IEPF A ORGANISÉ

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Au-delà des querelles d’économistes sur le rôle del’État dans les services publics, c’est bien l’accrois-sement fort de la demande, après une longue périodede stagnation et d’absence d’investissement, qui a incitéles États, actionnaires aux capacités d’investisse-ment limitées (et consommateurs parfois impécu-nieux), à faire appel au secteur privé pour consoli-der puis développer le secteur électrique par la miseen œuvre d’investissements importants. Le finance-ment de ces investissements doit dès lors être assurépar les capacités d’emprunt de l’opérateur et garantipar la qualité de sa gestion.

Ainsi, la plupart des États d’Afrique subsaha-rienne sont concernés par une évolution à court termede leur secteur électrique. À partir de l’expériencede la Côte d’Ivoire, pionnière en Afrique francophone,le consensus s’est – aujourd’hui – établi autour d’unmodèle qui s’appuie sur :

– une autorité de régulation, indépendante dans lestextes ;

– un opérateur exploitant le patrimoine production,transport et réseaux de l’État, et impliqué, par lebiais d’une vraie concession, dans le développe-ment des réseaux et de la clientèle ;

– des producteurs indépendants, liés par contratavec le secteur ou l’opérateur ;

– la satisfaction des demandes (qualité, prix) desclients finals ;

– la recherche des solutions spécifiques aux enjeuxde l’électrification rurale.

Jean JAUJAY, diplômé de l’ÉcolePolytechnique et Ingénieur enChef du Génie Rural, des Eaux et des Forêts, est DirecteurAfrique à la Direction des AffairesInternationales, d’Électricité de France.

Les investisseurs et les réformesAttentes, modalités et contraintes;l’expérience d’Électricité de France

Jean JAUJAY

Depuis 1990, date à laquelle le gouvernement de Côte d’Ivoire a pris la décision de confier l’ex-ploitation du secteur électrique à un opérateur privé, la réforme en profondeur des secteurs élec-triques est devenue un point obligé de l’agenda africain des institutions financières et des gou-vernements dans leur recherche d’investissements productifs. En effet, la fourniture d’électricitéest un bien et un service qui constitue un préalable indispensable au développement, et la crois-sance attendue génère une augmentation de la demande qui requiert des financements impor-tants dans la production, le transport et la distribution de ce bien et service social et économique.

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C’est ainsi que:

– la Côte d’Ivoire a refondé, en 1999, l’organisa-tion, qui était devenue inadaptée, des deux socié-tés de Patrimoine et d’Exploitation;

– le gouvernement gabonais a conclu un véritablecontrat de concession avec la SEEG et l’opéra-teur retenu après appel d’offres, VIVENDI;

– les autorités camerounaises préparent, dans lecadre de l’ouverture du capital de la SONEL, uneréforme en profondeur du secteur électrique.

Électricité de France, qui fait partie des acteursindustriels qui investissent en Afrique, est considéréecomme un candidat « naturel » aux appels d’offresde privatisation lancés par les gouvernements afri-cains, car elle possède les ressources humaines et finan-cières pour s’engager dans la durée. Compte tenu del’implication récente d’EDF dans le redressement etl’exploitation de sociétés d’électricité et de son retourd’expérience dans la préparation d’offres, il apparaîtun certain nombre d’invariants dans son approched’investisseur potentiel et son analyse des modali-tés et contraintes que présentent de telles opérations.

Les critères premiers de l’intérêt pour l’opérateur-investisseur sont:

� Un retour sur investissement raisonnable, pre-nant en compte les différents risques encourus,dont on cherchera la couverture ou le partage parun partenariat, permettant d’associer des com-pétences complémentaires, tout en préservantl’unité de pilotage indispensable. Il peut être utilede rappeler ici que la valeur d’une entreprise n’estpas fondée sur ses performances passées mais surles résultats futurs escomptés.

� La pertinence du schéma institutionnel retenu,qui doit permettre à l’opérateur l’exercice normalde son métier d’industriel et de ses responsabili-tés d’exploitant, dans un cadre juridique clair etadapté, incluant entre autres des clauses d’arbi-trage indépendant. L’ouverture des secteurs à desopérateurs privés et à une concurrence «régulée»est une nécessité, mais il ne faut pas oublier qu’enphase de développement une logique libérale àoutrance ne peut garantir l’accès de tous à l’électricitéet l’égalité de traitement, composantes essentiellesdu service public.

� Les capacités de développement du secteur parle biais d’une demande solvable, appuyée sur lacroissance de l’économie, ainsi qu’une taille suf-fisante (nombre de clients domestiques raccor-dés), permettant une forte implication d’équipesde l’opérateur pendant la phase transitoire de prisede service.

� L’existence à court terme (deux ans) de solutionstechniquement et financièrement adaptées pourque la production puisse répondre effectivementà la demande.

� La qualité, la formation et les capacités d’évolutiondu personnel, qui forme le tissu humain et le poten-tiel de progrès de l’entreprise, ainsi que l’existenced’une véritable culture d’entreprise, que le parte-naire étranger pourra enrichir et développer, par lebiais de formations et de transferts de savoir-faireportant sur des technologies adaptées et innovantes.

Évidemment, la qualité de l’environnement desaffaires est un préalable sans lequel aucun investis-seur ne saurait s’engager : stabilité politique, bonnegouvernance, état de droit juridique et fiscal… Laclause d’arbitrage, en particulier, doit être établie surdes bases internationalement reconnues.

Cela étant, il est nécessaire d’étudier plus endétail certains aspects primordiaux du secteur élec-trique concerné.

– Comment, à moyen et long terme, assurer à moindrecoût l’adéquation offre-demande? L’existence deressources naturelles hydrauliques, gaz ou char-bon, leur proximité des lieux de consommation etl’existence d’interconnexions avec les pays voi-sins sont évidemment des facteurs favorables. Demême, la possibilité de mettre au point des cen-trales produisant de l’énergie à un coût inférieurau coût moyen actuel.

– Les capacités et la volonté de paiement des clientsdoivent faire l’objet d’une approche spécifique,tant sont variées les expériences.

Phambili Nombane, filiale d’Eskom, EDF etPowerGen, a su transformer radicalement les relationsentre les habitants du bidonville de Khayelitsha et leservice public de l’électricité, en raccordant 32 000clients en deux ans avec des compteurs à prépaie-ment et en mettant en place une politique de suivirapproché de la clientèle, avec ligne d’appels 24 heuressur 24. Le taux estimé des pertes techniques et nontechniques était de 12,5 % en juillet 1999.

A contrario, la SOGEL, filiale de HQI, EDFI etSAURI, n’a pas encore atteint un niveau satisfaisantde facturation, compte tenu de l’importance desfraudes.

– L’évolution possible et souhaitable de la tarifica-tion est un élément critique de la constitution duplan d’affaires (business plan). Si toutes les par-ties, État, clients et opérateur trouvaient leur inté-rêt dans une baisse des tarifs, tout irait pour lemieux. La réalité est souvent bien différente : lesretards dans les ajustements tarifaires, l’impor-tance des investissements d’entretien et d’exten-sion des réseaux et de maintenance des ouvragesde productions impliquent, bien souvent, des révi-sions tarifaires drastiques.

– Enfin, les rôles de l’État en tant que consomma-teur et (mauvais ?) payeur, actionnaire de la sociétéd’électricité et régulateur doivent faire l’objet d’ana-lyses spécifiques et d’accords préalables clairs,protégeant l’intérêt des parties.

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– La clarté et la transparence des Termes de référencedes Appels d’Offres à Opérateurs-investisseursainsi que la qualité des informations et documentsmis à disposition sont primordiaux. À cette condi-tion, les candidats peuvent préparer un véritableplan d’entreprise prenant en compte la réalité phy-sique, économique et humaine de la société, garan-tissant un engagement à long terme. En occultantles difficultés, les véritables dettes, le passif, on risquefort de placer le repreneur en situation difficile,au moment de la prise de service, quand il aurabesoin de mobiliser toutes ses forces vives versl’avenir et l’apuration des «placards»; il est cer-tainement plus pertinent de «vendre mieux» quede «vendre cher».

Ces quelques réflexions ne sauraient cependantprétendre à l’exhaustivité.

Dans un contexte d’évolution forte et rapide dessystèmes électriques africains, Électricité de France estprête à s’engager à fournir capitaux et techniques, dansle cadre de participations, de contrats de concessionsou d’affermage, et dans une logique de partenariatindustriel appuyée sur des rapports équilibrés avec lespartenaires nationaux.

En Afrique comme en Europe, tournés vers leclient, EDF et ses partenaires se doivent de «construireet réussir ensemble».

Électricité de France aujourd’huiAvec 460 milliards de KWh produits,

EDF est le leader européen de l’exportation d’électricité et l’un des plus grands producteurs

d’énergie au monde.

Nucléaire : 368 KWhHydraulique : 60 KWhThermique classique : 32 KWh

Clients : 30 millions en France et 15 millions à l’étranger

Capacité installée : 100 000 MW en France et 14 500 MW à l’étranger

Montant des investissements cumulés à l’international : 25 milliards de FF

Électricité de France en Afrique

Investisseur-opérateur en production:AZITO (Côte d’Ivoire) : 300 MW

Co-investisseur-opérateur en distribution:PHAMBILI NOMBANE (RSA): 43000 clients en prépaiement(EDF-ESKOM-POWERGEN)

SOGEL (Guinée): 40 000 clients (HQI-SAUR-I-EDF)

Actionnaire de SAUR, dont la filiale SAUR-Iest majoritaire dans

CIE et CIPREL (Côte d’Ivoire)

Assistant à l’exploitation: CIE (Côte d’Ivoire), SEEG (Gabon), EED (Djibouti)

En électrification rurale, promoteur-investisseur auMali, au Burkina, au Bénin, au Zimbabwe (projet E7)

et en Afrique du Sud

DANS CE NUMÉRONOS PARTENAIRES ORGANISENT

L’ADEME (Agence de l’environnement et de la Maîtrise de l’énergie – France) organise, les 8 et 9 mars2000, à Sophia-Antipolis (Alpes maritimes) les Journées RDT 2000, séminaire sur les thèmes de la régu-lation, de la commande des systèmes énergétiques, des systèmes de télégestion, de gestion techniquedes bâtiments et d’immotique. Pour plus d’information, contacter Didier Chérel à l’ADEME, DépartementBâtiments et collectivités, Sophia-Antipolis, 500 route des Lucioles, 06560 Valbonne – France. Téléphone:(33) 0 (04) 93 95 79 01; télécopie : (33) 0 (04) 93 65 31 96; courriel : [email protected]

Le 21e Congrès mondial du Gaz, organisé par l’Union internationale de l’industrie du Gaz, se tiendradu 6 au 9 juin 2000, à Nice (France). Pour toute information, écrire à l’adresse suivante :

CMG/WGC 2000 c/o Association technique de l’industrie du gaz en France, 62 rue de Courcelles, 75008Paris, France.

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L’État a par conséquent alloué prioritairement desfonds au secteur électrique tandis que l’aide publiqueinternationale massive venait en appui, ce qui aconduit à une croissance remarquable pendant deuxà trois décennies.

Cette période a permis une augmentation impor-tante des capacités de production et une extensionrapide de l’électrification rurale, tout en profitant desprogrès de productivité liés aux économies d’échelleet aux effets de densification. Elle a également conduità la valorisation des ressources énergétiques natio-nales, en particulier l’hydroélectricité.

Les progrès ont été exceptionnels:

• La puissance installée du réseau interconnecté estpassée de 35 MW en 1960 à 937 MW en 1984dont 604 MW d’origine hydroélectrique et 333 MWd’origine thermique;

• Le réseau électrique national s’est densifié parl’interconnexion des lignes 225 kV et 90 kV cou-vrant la majeure partie du territoire ;

• Les réseaux urbains et interurbains se sont agran-dis pour accompagner le développement des villes.

LA CRISE ÉCONOMIQUE DES ANNÉES1980 ET SES CONSÉQUENCESAvec la crise économique des années 1980 et face àun contexte international difficile, le modèle de ges-tion du secteur par une entreprise publique montrerapidement ses limites en raison du ralentissementde la croissance de la demande, des difficultés crois-santes à subventionner les tarifs, à financer les inves-

Gaston VEI est Directeur généraladjoint de la Compagnie Ivoirienned’Électricité.

Les réformes du secteur électrique:le cas de la Côte d’Ivoire

Gaston VEI

Le secteur électrique de la Côte d’Ivoire a joué un rôle essentiel dans le développement écono-mique du pays en assurant les besoins de la croissance industrielle et en répondant à l’aspira-tion au mieux-être des populations. Dès l’accession à l’indépendance politique en 1960, lesgouvernements successifs ont organisé cet instrument privilégié selon la structure publique,monopoliste et verticalement intégrée.

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tissements par des emprunts internationaux et à faireface au service de la dette.

Ainsi, au début des années 1990, la situation dusecteur électrique ivoirien devient extrêmement dif-ficile :

• Le rendement du réseau est médiocre, avec des pertesde l’ordre de 20%.

• Les tarifs sont pour la plupart inadaptés à l’évo-lution des coûts, les objectifs politiques primantsur la rentabilité économique.

• Les résultats financiers sont largement déficitaireset leur accumulation sur plusieurs années faitpeser de lourdes menaces de faillite.

• La trésorerie du secteur est sérieusement com-promise par l’augmentation des impayés.

LES OBJECTIFS VISÉS PAR LA RÉFORME DU SECTEUR ÉLECTRIQUE DE LA CÔTE D’IVOIREAprès diverses tentatives de redressement, notam-ment par les programmes d’ajustement structurelsde la Banque mondiale, la restructuration véritabledu secteur électrique ivoirien s’imposait.

Le gouvernement a choisi, en 1990, d’adopterun nouveau cadre institutionnel sur la base des prin-cipaux objectifs suivants :

• Favoriser le désengagement de l’État et orienter sesinterventions vers les fonctions de régulation dusecteur et de détermination de la politique éner-gétique nationale.

• Améliorer les performances techniques, écono-miques et financières du secteur afin d’en assu-rer l’équilibre financier et d’optimiser l’exploitation.

• Recouvrer les capacités d’autofinancement et definancement externe, national ou internationalpermettant d’assurer le développement des infra-structures.

• Aboutir, à terme, à la baisse des tarifs de l’électricité.

LA RESTRUCTURATION D’OCTOBRE 1990

Le schéma adoptéÀ partir du 1er novembre 1990, l’État décide de sépa-rer l’exploitation, confiée à un professionnel privé, dela gestion du patrimoine, dont il continue d’assumerl’entière responsabilité.

Le schéma mis en place se présente comme suit :

Figure 1Schéma de restructuration d’octobre 1990

Le rôle des acteursOn distingue les ensembles suivants :

L’État

L’État reste propriétaire de l’ensemble des ouvrageset est détenteur exclusif de la politique de dévelop-pement du secteur. Il intervient par le biais des struc-tures spécialisées.

La Compagnie Ivoirienne d’Électricité (CIE)

La CIE, société privée de droit ivoirien, est leConcessionnaire du service public de l’électricité.Son capital est détenu par :

– le Groupement SAUR/EDF (51%),

– la Partie ivoirienne (49%)

La CIE a pour missions principales :

• D’exploiter à ses risques l’ensemble des ouvragesde production, de transport, de distribution, d’im-portation et d’exportation d’électricité ;

• De supporter l’intégralité des charges de fondation,d’entretien courant et de gestion;

• De facturer et d’encaisser les paiements ;

• De réaliser les travaux de branchement ;

• De proposer, dans le cadre des conventions pério-diques, les travaux d’extension et de renouvelle-ment ;

• De réaliser les travaux de renouvellement qui luisont confiés par l’État.

L’Énergie Électrique de Côte d’Ivoire (EECI)

L’EECI, l’ancienne Compagnie d’Électricité, est char-gée de la gestion du patrimoine.

Elle assure principalement :

– la gestion du patrimoine,

– le contrôle technique du Concessionnaire,

– les études prospectives sur l’orientation du secteuret les travaux de développement du secteur,

ÉTAT

Ministère del’Économie etdes Finances

Ministère del’Énergie BNETD

GPEGSPER

FNEE

DEEN EECI

CIE

19

LIAISON ÉNERGIE-FRANCOPHONIE • N° 44 / 3e TRIMESTRE 1999

– la maîtrise d’œuvre des travaux neufs d’extensionet des travaux de renouvellement qui lui sontconfiés par l’État,

– les relations internationales pour le compte dusecteur électrique de la Côte d’Ivoire.

Le Bureau National d’Études Techniques et deDéveloppement (BNETD)

Le BNETD est chargé du contrôle technique et finan-cier de l’ensemble du secteur.

Le Fonds National de l’Énergie Électrique (FNEE)

Le FNEE, placé sous la tutelle du ministère de l’Éco-nomie et des Finances, assure la gestion financièredu secteur.

Le ministère de Tutelle

Le ministère de Tutelle est chargé de la régula-tion et de l’orientation stratégique.

La Convention de ConcessionLa Convention de Concession entre la CompagnieIvoirienne de l’Électricité et l’État de la Côte d’Ivoirea été signée pour 15 ans. Elle peut être reconduitepour deux périodes successives de trois ans chacune.

Les principales particularités de la Conventionsont contenues dans :

• les obligations du Concessionnaire,

• la répartition des ressources,

• le contrôle de la Concession.

Les obligations du ConcessionnaireLes obligations du Concessionnaire stipulées dans laConvention de Concession sont nombreuses. Nousretenons pour l’occasion les deux principales.

Les obligations de communicationPour permettre le contrôle technique et financier, laConvention de Concession impose au Concessionnairede communiquer un grand nombre d’informations àl’Autorité concédante. Certaines de ces informationsdoivent être transmises périodiquement et d’autresà la demande de l’Autorité sans que ses demandesne puissent constituer une ingérence dans la gestiondu Concessionnaire. On peut citer :

– le plan de production,

– l’arrêté du bilan,

– le compte d’exploitation,

– le tableau de financement de l’exercice,

– le compte rendu annuel de gestion,

– le compte rendu technique annuel.

Les obligations d’exécution des travauxL’Autorité concédante est chargée de tous les tra-vaux à caractère de renouvellement, et le Conces-sionnaire de tous les travaux à caractère de répara-tion et d’entretien. Tous ces travaux sont identifiéset consignés dans un document appelé ConventionPériodique.

La Convention Périodique fixe notamment lanature et le montant des travaux devant être finan-cés et réalisés respectivement par l’Autorité concé-dante et le Concessionnaire.

Depuis le début de la Concession l’Autoritéconcédante et le Concessionnaire ont signé troisConventions Périodiques correspondant aux périodes1990-1992, 1992-1996 et 1996-1999.

La répartition des ressourcesLes ressources principales visées par la Conventionde Concession sont constituées par les produits dela vente d’électricité aux abonnés.

Les ressources sont réparties de la manière sui-vante :

1. Les dotations revenant à l’Autorité concédantepour assurer le règlement de la dette du secteur,le financement des investissements et des travauxde renouvellement des ouvrages.

2. La rémunération du Concessionnaire, réputée cou-vrir la totalité des charges d’exploitation et l’en-semble des impôts, taxes, droits et redevancesapplicables au service concédé.

La part rémunérant le Concessionnaire pour sonexploitation est constituée en définitive de quatrecomposantes :

– Une composante R1, qui couvre les charges liéesaux frais de structure, incluant les marges de toutenature du Concessionnaire.

– Une composante R2, directement liée aux chargesdes combustibles des centrales thermiques, exis-tantes au jour de la signature et à construire ainsiqu’aux charges d’importation nette d’électricitévendue.

– Une composante R3, directement liée à l’énergieexportée et qui correspond aux charges addition-nelles pour la production et le transport de cetteénergie.

– Une composante R4, qui a fait son apparitionavec la mise en exploitation des centrales des pro-ducteurs privés indépendants. Cette composanteest directement liée aux réductions de charges duConcessionnaire pour l’énergie électrique livréeau réseau par les producteurs indépendants.

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LIAISON ÉNERGIE-FRANCOPHONIE • N° 44 / 3e TRIMESTRE 1999

Le Contrôle de la ConcessionLes textes stipulent que l’Autorité concédante dis-pose, à l’égard du Concessionnaire, d’un pouvoirgénéral de contrôle économique, financier et tech-nique. Le Concessionnaire s’engage à tout mettre enœuvre spontanément pour assurer à l’Autorité l’exer-cice de son contrôle dans des conditions normaleset s’interdit de l’entraver d’une quelconque manière.

Ce contrôle doit permettre à l’Autorité concé-dante d’évaluer à tout moment :

– l’ensemble des éléments relatifs à l’autofinance-ment et à l’équilibre du secteur,

– l’ensemble des éléments relatifs à l’équilibre duConcessionnaire,

– la situation économique et financière du serviceconcédé,

– les perspectives de développement du secteur etdu service concédé.

Les principaux résultats

Les résultats techniques et financiersEn neuf ans de concession de l’exploitation à laCompagnie Ivoirienne d’Électricité (CIE), le secteurélectrique a connu un rapide redressement :

Équilibre financier du secteur

Au niveau de l’État, le secteur a retrouvé progressi-vement son équilibre financier grâce au paiementd’une redevance régulière et garantie.

Autofinancement du secteur

Au niveau de la collectivité, le secteur dispose aujour-d’hui de moyens financiers permettant le redémar-rage de l’électrification rurale, qui était bloquée en1990.

Le secteur électrique a retrouvé toute sa crédi-bilité auprès des clients et des pouvoirs publics, etjouit dorénavant de la confiance des bailleurs defonds, ce qui permet aujourd’hui le succès des opé-rations de type BOT (CIPREL 1, CIPREL 2 etCINERGY).

Optimisation de l’exploitation et de la maintenance des ouvrages

L’amélioration de la disponibilité des ouvrages deproduction et de transport permet l’exportation versles pays voisins (Ghana, Togo, Bénin et bientôtBurkina Faso). La Côte d’Ivoire, qui importait mas-sivement de l’électricité du Ghana, est devenue expor-tatrice en quelques années.

La clientèle note avec satisfaction l’améliorationcroissante de la qualité du produit. Le temps moyende coupure est passé de 50 h par an, par abonné, à13 h en 1997.

Figure 2Évolution des temps moyens de coupure

Baisse des tarifs de l’électricité

En l’espace de six ans, l’État a pu effectuer deuxbaisses de tarif.

Les investissements du secteurLa bonne tenue du secteur a favorisé de nombreuxinvestissements. Nous avons retenu essentiellement :

La production d’énergie

Ces investissements ont progressé régulièrement etreprésentent un montant cumulé sur la période 1992-2000 de 216 milliards FCFA répartis de la manièresuivante :

Transport et mouvement d’énergie

Ces investissements représentent un montant cumulé,sur la période 1992-2000 de 61 milliards FCFArépartis ainsi :

Tableau 1Investissements en production d’énergie

(en milliards FCFA)

Périodes 1992 1997 19921996 2000 2000

Réhabilitation 5 6 11

Nouveaux ouvrages 65 140 205

Total 70 146 216

Tableau 2Investissements en transport

et mouvements d’énergie

Périodes 1992 1997 19921996 2000 2000

Modernisation 4 5 9

Nouveaux ouvages 2 50 52

Total 6 55 61

Distribution d’énergie

L’extension et la fiabilisation des réseaux HTA ont repré-senté un montant global, sur la période 1992 à 2000,de 11 milliards FCFA, répartis de la façon suivante :

890

10

20

30

40

50Heures

90 91 92 93 94 95 96 97Années

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Électrification rurale

L’ambitieux programme d’électrification rurale décidépar le gouvernement se poursuit normalement grâceà la capacité d’autofinancement du secteur.

Les montants engagés cumulés représentent envi-ron 21 milliards FCFA pour 354 villages électrifiésen 1998.

Les difficultés rencontréesLes difficultés rencontrées lors des premières annéesd’exploitation peuvent être résumées par les diffé-rents points suivants :

• La frontière virtuelle entre les travaux d’entretien etles travaux de renouvellement

La limite entre entretien et renouvellement a étél’une des premières difficultés résultant de l’exécutionde la Convention de Concession. La limite entre cesdeux activités n’étant pas assez concrète, certains tra-vaux qui relevaient d’un renouvellement, pour l’Autoritéconcédante, ont été exécutés par la CIE.

• Les structures d’intervention de l’Autorité concédante

Après l’entrée en vigueur de la Concession, l’État a créé de nouvelles structures de coordination:

– le Groupe Spécial du Programme d’ÉlectrificationRurale (GSPER),

– le Groupe Projet Énergie (GPE),

– la Direction de l’Électricité et des Énergies Nouvelles(DEEN).

Le Concessionnaire s’est trouvé face à une mul-titude d’interlocuteurs, ce qui alourdissait, quelquesfois, la marche quotidienne de l’exploitation du sys-tème. En définitive, les relations entre les partenairesdu secteur sont devenues plus complexes.

• Les renouvellements d’urgence

Le programme de renouvellement d’urgence,basé sur l’état des biens arrêté au moment de l’en-trée en vigueur de la Concession, n’a pas pu être exé-cuté à temps. L’état des ouvrages concernés se dété-riorant, la CIE s’est vue dans l’obligation de sesubstituer à l’État, en réalisant certains travaux pouraméliorer l’exploitation du réseau.

• Les programmes de renouvellement

Le premier programme de travaux correspon-dant à la Convention Périodique 1990-1992, n’avaitpas été totalement exécuté par l’Autorité concédante.Cette situation a conduit l’État, lors des négociations

de la Convention Périodique 1992-1996, à subdivi-ser les travaux en deux catégories selon un critèred’urgence:

– type A : travaux urgents dont la réalisation a étéconfiée à la CIE.

– type B : travaux qualifiés de moins urgents aumoment des négociations que l’Autorité a décidéde réaliser elle-même.

Cette disposition a permis au secteur d’optimi-ser l’exploitation courante, mais a aggravé la situa-tion conflictuelle entre les partenaires du secteur.

En outre, certains travaux que l’Autorité concé-dante avait décidé de réaliser ont accusé des retardsimportants, à tel point que ceux-ci sont devenusextrêmement urgents.

• La rigidité de la gestion des mécanismes du système

Les mécanismes prévus par la Convention deConcession pour réaliser les travaux de renouvelle-ment ou de renforcement des biens concédés man-quent quelque peu de souplesse et ne permettentpas toujours de réagir rapidement face à un événe-ment urgent. Il s’agit principalement :

– des renouvellements d’équipements non prévuspar la Convention Périodique,

– du traitement des dépassements d’enveloppe bud-gétaire accordée par l’Autorité concédante.

LA RESTRUCTURATION DE DÉCEMBRE 1998Grâce aux performances de la CIE, les résultatsfinanciers et techniques du secteur électrique ontconnu des améliorations notables malgré les diffi-cultés évoquées au point 2.5. Cependant, l’État dela Côte d’Ivoire a décidé, le 16 décembre 1998, laréorganisation du secteur en adoptant le schémadécrit au point 3.1.

Le schéma retenu

Figure 3Schéma de la restructuration

de décembre 1998

Tableau 3Investissements en distribution d’énergie

(en milliards FCFA)

Périodes 1992 1997 19921996 2000 2000

Extension-Fiabilisation 4 7 11

ÉTAT

SOPIE

ANARE

SOGEPE

CIE

Ministère de l’Économie

et des Finances

Ministère de l’Énergie

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Les principaux acteurs de la nouvellerestructurationLa nouvelle restructuration fait apparaître lesstructures suivantes :

• le ministère de l’Énergie,

• l’Autorité Nationale de Régulation du secteur del’Électricité (ANARE),

• la Société de Gestion du Patrimoine du secteurde l’Électricité (SOGEPE),

• la Société d’Opération Ivoirienne d’Électricité(SOPIE),

• la Compagnie Ivoirienne d’Électricité (CIE).

Les anciennes structures, telles que FNEE etEECI, ont été dissoutes.

Les rôles des nouveaux acteursLes dispositions générales du décret N° 98-725 du16 décembre 1998 précisent les missions des troisnouvelles structures créées par l’État.

L’Autorité Nationale de Régulation du secteur de l’Électricité (ANARE)

La société d’État ANARE est chargéeprincipalement des actions suivantes :

• suivi du respect de la réglementation et des conven-tions passées par un opérateur,

• arbitrage des conflits entre les opérateurs du sec-teur de l’électricité entre eux ou avec l’État,

• protection des intérêts des usagers du secteur.

La Société de Gestion du Patrimoine du secteurde l’Électricité (SOGEPE)

La SOGEPE est une société d’État chargée de :

• la gestion du patrimoine public et privé de l’État,

• la gestion comptable et financière des investisse-ments de l’État, ainsi que le suivi de la dette dusecteur,

• la tenue des comptes consolidés et le contrôle del’équilibre financier du secteur.

La Société d’Opération Ivoirienne d’Électricité(SOPIE)

La société d’État SOPIE est responsable des activi-tés suivantes :

• la gestion des mouvements d’énergie,

• la planification de l’offre et de la demande en éner-gie, en coordination avec le ministère de l’Éner-gie,

• la maîtrise d’œuvre des investissements en matièred’extension, de renforcement et de renouvelle-ment du réseau de transport et d’électrificationrurale,

• le suivi de la gestion des fonctions d’achat, detransport et de mouvement d’énergie.

La situation transitoire convenueLa nouvelle réorganisation du secteur ne modifie pasavant 2005 le rôle et les responsabilités de la CIEtels que précisés dans la Convention de Concessiondu 25 octobre 1990.

LES PERSPECTIVESDepuis un certain nombre d’années, on assiste à unevague de réforme des secteurs de l’électricité dansle monde. Ces réformes, imposées souvent par lesinstitutions multilatérales, s’orientent vers un modèlede dérégulation totale du secteur électrique, mêmepour les systèmes de petite dimension, tels que lenôtre.

Les principaux avantages attendus d’une telledé-intégration radicale sont évidemment ceux d’unmarché concurrentiel générateur de meilleures per-formances techniques et surtout de coûts de l’éner-gie plus avantageux.

La seconde restructuration du secteur électriqueivoirien, mise en œuvre en décembre 1998, vise detoute évidence à :

– mettre en concurrence un maximum d’opérateursen production et distribution de l’énergie,

– effectuer une dé-intégration verticale de l’ensembledu transport d’énergie.

Il convient d’indiquer que le système électriquede la Côte d’Ivoire, malgré les performances acquisesaprès la restructuration des années 1990, demeureun système de petite dimension, caractérisé par :

• des coûts d’investissement importants,

• une croissance élevée de la demande,

• un développement important de l’électrificationrurale,

• un coût de recouvrement exceptionnellement élevédans les zones rurales,

• un coût de l’énergie relativement élevé par rap-port au produit intérieur brut par habitant,

• une prédominance des zones rurales sur les zonesurbaines.

Ces particularités du marché électrique ivoiriennous incitent à la prudence, car les conditions néces-saires au développement d’une concurrence saineet parfaite nous paraissent difficiles à satisfaire. Iln’est donc pas évident que l’appel massif à la concur-rence, dans les trois segments traditionnels du sec-teur, engendre les effets bénéfiques escomptés de ladé-intégration horizontale et verticale.

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LIAISON ÉNERGIE-FRANCOPHONIE • N° 44 / 3e TRIMESTRE 1999

La concurrence en productionL’ouverture de la production d’électricité aux opéra-teurs privés est acquise depuis la première restruc-turation avec la CIPREL en 1995 et CINERGY en1998.

On constate que les contrats BOOT (Built OwnOperate and Transfer) liant ces deux entités à l’Étatsont assortis de clauses de type «take or pay».

Cette disposition particulière caractérise de touteévidence les systèmes de petite dimension qui consti-tuent des marchés à risque sans ces dispositionscontractuelles de garantie de rentabilité financière.Dès lors, on s’éloigne de l’efficacité productive concur-rentielle, qui va à l’encontre des objectifs initiaux.

La fragmentation du parc de production actuelappartenant à l’État introduira une contrainte sup-plémentaire dans la gestion du système. En effet,chaque opérateur qui se portera acquéreur d’une oude plusieurs centrales de production imposera uncontrat du type take or pay afin de garantir une ren-tabilité minimale.

La concurrence en production, pour notre sys-tème de petite dimension, est foncièrement caduqueet n’apporte aucune efficacité dans la gestion du sys-tème.

La concurrence en distributionLa fragmentation de la distribution, sur notre réseau,n’introduira pas de concurrence réelle et parfaite.

En effet, la fragmentation suppose une combi-naison de consommateurs urbains et ruraux pourgarantir une rentabilité commerciale aux opérateursqui se porteront acquéreurs. Chaque opérateur aurason territoire où il se trouvera en situation de mono-pole. La perte des économies d’échelle conduira irré-médiablement à une hausse des prix de l’énergie età une dégradation de la qualité du service.

La dé-intégration verticale du transportd’énergieLa dé-intégration verticale du secteur électrique estrelative à la gestion séparée des ensembles Production,Transport et Distribution. Le secteur est alors exploitépar trois catégories d’opérateurs, chacune d’ellesœuvrant dans un des départements cités.

La restructuration du 16 décembre 1998 s’orienterésolument vers la dé-intégration verticale de l’en-semble du transport d’énergie. Ainsi, à partir de 2005,le sous-secteur du transport d’énergie sera confié àla SOPIE.

Un des aspects importants de cette dé-intégra-tion réside dans la définition de la frontière de res-ponsabilité entre l’entité chargée du transport d’éner-gie et celle chargée de la distribution. Les enjeux sontà la fois économiques et techniques pour le secteurélectrique.

En effet, l’ossature 90 kV de notre réseau élec-trique comporte encore des antennes qui influencentconsidérablement la qualité du produit. La respon-sabilité de la gestion de ces antennes doit être envi-sagée dans le strict objectif de garantir les acquisactuels en matière de qualité de produit et la maîtrisedes coûts pour le secteur.

Par ailleurs, la conception actuelle des postessources HTB du réseau électrique ivoirien est baséesur une vision intégrée. De ce fait, les fonctions detransport d’énergie, de transformation d’énergie, decontrôle-commande, de protection et de téléconduiteobéissent à une philosophie d’intégration.

Si la stratégie de l’État est de garantir les per-formances techniques actuelles, le meilleur coût del’énergie et la transparence dans les relations entreles deux entités CIE et SOPIE, l’État devra accepterd’investir des sommes considérables pour assurer laséparation véritable des responsabilités des deuxentités et consolider le maillage du réseau de répar-tition 90 kV.

CONCLUSIONLa réforme institutionnelle du secteur électrique effec-tuée en 1990 a permis à l’État de se désengager de lagestion du quotidien et de concentrer son action surla politique générale du secteur, la gestion du patrimoine,les orientations stratégiques et tarifaires, etc.

La Convention de Concession a responsabiliséle Concessionnaire (la CIE) quant à sa gestion, quia produit des résultats positifs pour le secteur élec-trique au point de favoriser l’installation de produc-teurs indépendants privés, tels que CIPREL, CINERGY.

La seconde restructuration, engagée par l’Étaten 1998, vise à séparer les fonctions de régulation etde gestion du service public de l’électricité. Cependant,compte tenu de la petite taille de notre système élec-trique et surtout de l’étroitesse de notre marché élec-trique, des inquiétudes demeurent quant à l’effica-cité réelle de l’introduction de la concurrence enproduction et en distribution.

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Le contrat prévoit une période dite de transition,au cours de laquelle le nouveau concessionnaire,filiale du groupe Société Générale des Eaux (Vivendi),doit engager un certain nombre d’actions en vue,non seulement de remettre à niveau les moyens desservices qui le nécessitent, mais aussi de préciser lesbases et les outils de suivi de la gestion du contrat.

Le présent article se propose de faire le point,au terme de deux années d’exploitation, sur l’évolutiondu secteur, notamment par rapport aux objectifsrecherchés par la privatisation, et sur les relationsavec l’autorité concédante.

RAPPELS SUR LE CONTRAT DE CONCESSIONLe contrat de concession est composé, outre la conven-tion, de trois cahiers des charges qui s’y trouventannexés: l’un, commun aux deux activités, un autre,pour l’électricité, et le dernier, pour l’eau. Ces docu-ments précisent toutes les conditions d’exploitationdes services.

Le contrat de concession présente une particu-larité, soit l’obligation de résultats sur certains points :augmentation de la desserte, qualité des services,montant des opérations de renouvellement. Dans cecas, non seulement des objectifs sont fixés, mais dessanctions, entre autres pécuniaires, sont prévues.

Un périmètre de concession est aussi défini. Ilest constitué par les zones géographiques où la SEEGgère les services concédés au début du contrat. S’yajoutent les localités dont la liste est annexée aucahier des charges – partie commune (21 en électri-cité, 30 en eau).

Jean-Pierre LASSENI DUBOZE est DirecteurPlanification et Stratégies à la Société d’Énergie et d’Eau du Gabon.

Les réformes institutionnelles du secteur électrique.PanoramaLe cas du Gabon

Jean-Pierre LASSENI DUBOZE

La Société d’Énergie et d’Eau du Gabon (SEEG) a été mise en concession privée le 13 juin 1997. Depuisle 1er juillet 1997, un nouveau contrat de concession fixe les conditions de fonctionnement du secteur del’eau potable et de l’énergie électrique. La régulation du secteur s’opère à travers la gestion du contrat deconcession. Le nouveau contrat de concession comporte une obligation de résultats en matière de desserte,sur la qualité des services et sur le montant des opérations de renouvellement.

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LIAISON ÉNERGIE-FRANCOPHONIE • N° 44 / 3e TRIMESTRE 1999

Les tarifs sont fixés dans le cahier des charges,ainsi que les formules de révision trimestrielle. Lescoefficients de variation qui en résultent sont soumisà l’Autorité concédante quinze jours avant l’appli-cation des nouveaux tarifs.

Le contrat de concession ne fait pas explicite-ment obligation au concessionnaire d’investir, exceptépour les opérations de renouvellement. Par contre,l’obligation d’accroître la desserte et de maintenir enbon état les biens de la concession implique la néces-sité d’investir. Une enveloppe de 200 milliards FCFAa été estimée, au moment de l’offre, pour les inves-tissements nouveaux.

L’Autorité concédante assure le contrôle écono-mique, financier et technique de la concession, dansles conditions fixées au contrat, soit elle-même, soiten faisant appel à toute autre personne de son choix.Ce contrôle s’applique également aux comptes de lasociété. Un rapport annuel est produit selon uneforme définie dans le contrat et portant sur les aspectsfinanciers, techniques et de gestion de la concession.

L’augmentation du taux de desserte est un souciconstant de l’Autorité concédante. Un taux a été fixépour chacune des zones géographiques principales(Libreville, Port-Gentil, Franceville et les centres iso-lés). Les objectifs intermédiaires peuvent être ajus-tés à l’occasion des révisions contractuelles quin-quennales.

Les relations avec l’Autorité concédanteL’Autorité concédante est représentée par le ministrechargé de l’Eau potable et de l’Énergie électrique et parle ministre chargé des Finances et de l’Économie.

À l’heure actuelle, la représentation de l’Autoritéconcédante est assurée par un service du ministèrechargé de l’Eau potable et de l’Énergie électrique, laDirection générale de l’Énergie et des Ressourceshydrauliques. C’est elle qui reçoit l’ensemble de lacorrespondance liée aux relations contractuelles etqui est habilitée à saisir le concessionnaire.

Les frais de fonctionnement des services del’Autorité concédante qui assurent le contrôle de laconcession sont financés par le budget de l’État, dansle cadre de la Loi des finances. Pour compléter cefinancement normal, la convention prévoit une contri-bution de la SEEG (0,2 % du chiffre d’affaires).

La nature des engagements contractuelsDes engagements doivent être réalisés dans des délaisconvenus : les procédures internes de passation desmarchés, le projet de règlement des services, l’in-ventaire des biens de retour, etc. À ceux-là s’ajouteun engagement en matière d’effectifs du personnel.

Des engagements périodiques portent sur la pro-duction des comptes rendus annuels sur les pro-grammes prévisionnels et sur la gestion. Il en va de

même des révisions trimestrielles des tarifs et, plustard, du suivi de l’évolution des taux de desserte.

Enfin, il y a des engagements à réaliser en per-manence, dont l’obligation d’assurer les biens de laconcession, le respect des normes de service, la réa-lisation des investissements de renouvellement (aumoins 100 milliards FCFA sur 20 ans).

LES PREMIERS RÉSULTATS DE LA NOUVELLE CONCESSION

Le contexteLes deux premières années de la nouvelle conces-sion se sont déroulées dans un environnement fortcontrasté. La première a enregistré les effets quelquepeu euphorisants d’une conjoncture très favorable,notamment au titre des exportations pétrolières. Enrevanche, la deuxième année a été marquée par lecontrecoup de cette surchauffe sur le plan écono-mique et financier. Les cours du pétrole se sont effon-drés et l’activité d’extraction du minerai d’uraniums’est arrêtée comme prévu. De graves difficultés finan-cières sont apparues au niveau de l’État et, partant,dans l’ensemble de l’économie.

L’organisationAvant d’engager son plan d’actions opérationnelles,le concessionnaire a procédé à une réorganisationdu management.

Les services sont organisés en deux départe-ments. Le Département des opérations couvre lesdirections régionales, la maintenance et la gestionclientèle. Le Département ressources regroupe lesdirections des ressources humaines, de la logistique,de l’équipement et de l’informatique. Enfin, la Directionfinancière et la Direction planification et stratégiessont rattachées à la Direction générale. Ce schémad’organisation vise la réalisation des principaux objec-tifs du contrat, notamment en matière d’investisse-ments (extension de la desserte, renouvellement) etde qualité de service (clientèle, maintenance), etrecherche une efficacité accrue dans la gestion éco-nomique et financière des services. Il est à signalerque des 18 personnes que compte l’actuelle équipedirigeante, onze (Gabonais) sont issus de l’équipeayant précédemment (avant la privatisation) dirigéla SEEG.

L’activitéL’accent a été mis sur le développement de la des-serte. Les trois premiers trimestres de l’année 1998ont été marqués par la réalisation d’extensions deréseau dans les principaux centres. Un programmede l’ordre de 10 milliards FCFA a été réalisé. Le gra-phique qui suit montre l’évolution régulière du nombred’abonnés actifs pour la période (+4,5%).

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Évolution de la desserte

Dans le contexte décrit plus haut, l’activité élec-tricité a connu une croissance très forte en 1998, par-ticulièrement au cours du premier semestre qui, enoutre, a été marqué par un accroissement sensibledes températures.

Évolution de l’activité électrique

Le graphique ci-dessus montre que le rendement(rapport entre les volumes facturés et la production)s’est sensiblement amélioré dans le même temps (de83 à 88 %).

Les tarifsConformément à ses engagements, le 1er juillet 1997,le concessionnaire a baissé uniformément de 17,25 %les tarifs de tous les services. Par la suite, les barèmesont évolué selon le jeu des formules de révisionannexées au contrat. Celles-ci prennent en compteles variations trimestrielles d’indices représentatifsdes principaux coûts des facteurs (combustibles, per-sonnel, biens importés, inflation, taxes d’importa-tion et parité du CFA). Le graphique suivant retracel’évolution des prix de l’électricité livrée en bassetension (1 kW à 3 kW) au cours des deux annéesécoulées.

Après la baisse de 17,25 % de juillet 1997, les tarifsdemeurés sont stables jusqu’à la fin de 1998. Ils ontaugmenté au 1er trimestre 1999, en raison de l’aug-mentation des prix des produits pétroliers (gaz etgazole).

La gestion de la clientèleUne attention toute particulière a été portée à l’amé-lioration des conditions d’accueil des clients, auniveau des agences commerciales, et à la commu-nication. Des enquêtes destinées à mesurer la satis-faction des clients sont conduites périodiquementdans les principaux points d’accueil du pays.

Un règlement des services de distribution d’eauet d’électricité a été élaboré par la SEEG et approuvépar l’Autorité concédante (janvier 1999). Il a récem-ment été diffusé dans les points d’accueil du pays,accompagné de fiches pratiques traitant des princi-pales formalités commerciales.

Des moyens spécifiques ont été mis en placepour le suivi des clients industriels.

Une démarche très volontariste a été engagéeen direction du client État gabonais (20 % du chiffred’affaires). Celui-ci paye désormais (depuis mars1999) sa facture à bonne date, et un moratoire a étésigné pour l’apurement de ses dettes.

Enfin, et plus généralement, la pression en matièrede recouvrement s’est accrue et les actions de contrôlese sont étendues à l’ensemble des exploitations. Letaux de recouvrement de la facturation mensuelle(hors État gabonais) est actuellement supérieur à 90 %.

Les effectifs du personnelLe concessionnaire s’est engagé à maintenir, pourles cinq premières années, l’effectif à un niveau supé-rieur ou égal à 90 % du niveau du début de la conces-sion (1 355 agents). Le graphique suivant montrel’évolution trimestrielle des effectifs du personnel aucours des deux années écoulées.

Évolution trimestrielle des effectifs

2000Branchements neufs

Bran

chem

ents

neu

fs

Abonnés

1500

1000

500

0

106

Abon

nés a

ctifs

104

102

100

981998trim1

1998trim2

1998trim3

1998trim4

1999trim1

1999trim2

200

250

300

350Production Facturation

GWh

Rendement

0,70

0,75

0,80

0,85

0,90

1997trim1

1997trim2

1997trim3

1997trim4

1998trim1

1998trim2

1998trim3

1998trim4

1999trim1

1999trim2

É l d l l

20Avril1997

Juillet1997

Oct.1997

Janvier1998

Avril1998

Juillet1998

Oct.1999

Janv.1999

Avril1999

Juillet1999

30

40

50

60

70

80

3 kW

Social 2

Social 1

F/kW

h

É

1550

1500

1450

1400

1350

1300Janvier1997

Juillet1997

Janvier1998

Juillet1998

Janvier1999

Juillet1999

Seuil

Évolution des prix de l’électricité basse tension

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Il ressort que l’engagement a bien été tenu, maissurtout que l’effectif a légèrement augmenté (+1,3 %).L’accroissement est sensible au niveau des person-nels d’encadrement (+3 % pour la maîtrise, +10 % pourles cadres). La société compte, fin juillet 1999,1 531agents, dont 944 agents d’exécution, 414 agents demaîtrise et 173 cadres.

La qualité des servicesLe contrat prévoit que le concessionnaire proposeraet mettra en place un plan d’amélioration de la qua-lité des services. Dans ce cadre, des indicateurs ontété définis. Leur collecte couvre aujourd’hui 80 % dela clientèle et 90 % des consommations.

La continuité du service de l’électricité est mesu-rée par le temps d’interruption normé par abonné, parsuite d’un incident. Cet indicateur est en constanteamélioration (-25 % au 1er semestre 1999, 430 minutessur le réseau de Libreville). La qualité du service estappréciée également par le nombre de déclenche-ments définitifs et de réenclenchements rapides. Lenombre de ces interruptions diminue régulièrement,mais la marge de progrès reste significative.

Les investissementsPrès de 40 milliards FCFA d’investissements ont étéréalisés et engagés au cours des deux années écou-lées. Les principales opérations concernent des exten-sions de réseaux et la réalisation de branchementsdans les principaux centres (10 milliards), la construc-tion d’une centrale thermique de 30 MW alimentéeau fuel lourd, à Libreville (17 milliards), la remise àniveau de la production et de la distribution dansles centres de l’intérieur, la construction et le réamé-nagement de points d’accueil de la clientèle, etc.

Les travaux d’inventaire des biens de la concession, l’évaluation des taux de desserte

Le contrat prévoit que le concessionnaire feraréaliser, dans les premiers mois de la concession, uninventaire contradictoire des biens de la concession.Les résultats de l’inventaire et de sa valorisation ser-viront ensuite de base pour l’élaboration du plan derenouvellement et pour le calcul des provisions cor-respondantes.

Ce travail, sans précédent à la SEEG, a néces-sité des moyens importants et duré près de 18 mois.L’inventaire physique et sa valorisation sont ache-vés. Les résultats ont révélé des aspects qui néces-sitent une discussion avec l’autorité concédante.

La première étude quinquennale de la dessertedoit fournir une évaluation de la situation actuelle,confirmer les objectifs quinquennaux, préciser lesconditions de mesure de la desserte et indiquer leshypothèses d’évolution des populations de référence.Cette étude est en cours.

La distribution des dividendesÀ la faveur d’une amélioration du résultat net d’ex-ploitation constatée à la fin de 1998, un dividendede 6,5 % par action a pu être distribué aux action-naires de la société. Les dividendes ont été payés enjuillet 1999. Ceci est d’ailleurs conforme à l’annoncefaite au moment de l’appel public à l’épargne.

Les relations avec l’Autorité concédanteLes relations contractuelles avec l’Autorité concé-dante s’inscrivent dans la durée (20 ans) et dans lecadre d’un partenariat qui se veut fort et actif dansla poursuite des objectifs du service public.

Des binômes ont été mis en place pour chaquedomaine du contrat (électricité, eau, finances, etc.).Des rencontres formelles sont organisées à l’initia-tive de l’une ou l’autre des parties. Des contacts infor-mels, aussi fréquents qu’il est nécessaire, ont lieu auniveau des experts.

CONCLUSIONLes deux premières années de la concession ont étémarquées par une forte croissance de l’activité dansun environnement économique et financier fluctuant.La croissance a révélé les faiblesses latentes des ser-vices (équipements, clientèle, etc.) et a conduit à réa-liser rapidement de nombreuses opérations de réha-bilitation ou de remise à niveau.

La société a dû procéder à des recrutements depersonnel en vue de renouveler les populations vieillis-santes, dans certains métiers, ou de renforcer d’autresmétiers. Des moyens importants ont aussi été misen place au niveau logistique (véhicules, outillages,informatique, télécommunications).

L’organisation a été revue avec le souci de pri-vilégier la qualité du service au client, de rechercherconstamment la performance économique en vue defournir un service au moindre coût, et de préserverles intérêts des actionnaires. La majorité des postesde responsabilité est occupée par des nationaux.

Il reste que la mise en place des références indis-pensables à la gestion du contrat, la mutation desmentalités, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’en-treprise, nécessitent du temps.

D’autre part, la réalisation des travaux d’exten-sion de la desserte en électricité et en eau potable,se heurte encore, notamment en milieu urbain, auxlimites des infrastructures urbaines (absence de voiespubliques).

Ainsi, une privatisation menée dans de bonnesconditions, un contrat exprimant clairement les objec-tifs de l’État quant au développement du secteur etla volonté des pouvoirs publics ne suffisent pas.Toutefois, et c’est une des dimensions apportées parla formule de la concession, l’action s’inscrit dans ladurée. Et il reste au moins 18 ans au contrat deconcession!

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LIAISON ÉNERGIE-FRANCOPHONIE • N° 44 / 3e TRIMESTRE 1999

LA PROBLÉMATIQUE DES RÉFORMESDE L’INDUSTRIE ÉLECTRIQUELes experts du secteur énergétique perçoivent dansce mouvement de réformes, une liberté d’actionsaccrue qui favorise un management innovateur,capable :

• de créer de nouvelles opportunités pour l’effica-cité des systèmes économiques ;

• d’assurer une plus grande expansion des systèmesélectriques, en recourant à de nouvelles formesde financement du secteur privé ;

• d’améliorer les services offerts aux clients et à desprix toujours plus compétitifs.

En Afrique et dans la plupart des pays en déve-loppement, l’introduction de la concurrence et lamise en place des réformes dans le secteur de l’éner-gie électrique sont généralement motivées par lescontraintes de financement. Mais elles peuventconcourir, subséquemment, à l’amélioration géné-rale de l’efficacité du secteur électrique.

Par ailleurs, à côté de ces contraintes de finan-cement, le pouvoir de coercition des bailleurs defonds et les attentes des investisseurs privés égale-ment ont joué un rôle important dans la dynamiquedes réformes entreprises.

Également, dans le contexte africain, il s’est avérésouvent nécessaire, à travers les réformes mises enœuvre, de réduire le rôle d’opérateur exercé par l’É-tat et de lui réserver celui de régulateur, afin de lais-ser une marge de manœuvre plus importante auxinvestisseurs privés, ainsi qu’une plus grande ini-tiative aux opérateurs privés.

Latsoucabé M. FALL est Directeur des AffairesInternationales et Institutionnelles à la Sociétéd’Électricité du Sénégal (SENELEC). Il est consultant et auteur pour plusieurs sociétés et organismes et, de plus, chargé de cours à la Faculté des sciences de l’Université de Dakar.

La dérégulation de l’industrie électrique sénégalaise et le nouveau modèle concurrentiel de la SENELEC

Latsoucabé M. FALL

L’industrie électrique mondiale est entrée dans une mouvance générale de réformes, en met-tant en place de nouvelles formes d’organisation dans un environnement libéralisé, favorisantla concurrence, et en remettant en cause le modèle traditionnel de l’intégration verticale et lesmonopoles publics des sociétés d’électricité.

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LIAISON ÉNERGIE-FRANCOPHONIE • N° 44 / 3e TRIMESTRE 1999

LES ENJEUX ET LES OBJECTIFS DESRÉFORMES DU SECTEUR ÉLECTRIQUEAU SÉNÉGALLes efforts déployés, dans le passé, pour améliorerl’offre d’électricité au Sénégal, se sont traduits pardes résultats appréciables, qui ont permis de porterle taux d’accès à l’électricité à une moyenne de 25 %(50 % en zone urbaine et 5 % en zone rurale) et laconsommation d’électricité par habitant à 110 kWh/an.Cependant, ce niveau de consommation est encorerelativement faible, comparativement à une moyennede 418 kWh pour l’Afrique sub-saharienne.

Or, un marché de l’énergie restreint risque defreiner la croissance économique et d’hypothéquerles objectifs de développement durable. Ainsi, l’amé-lioration substantielle de l’accès des populations àl’électricité, dans des délais raisonnables, représentele défi majeur que s’est proposé de relever leGouvernement sénégalais, dans le secteur électrique.

C’est pourquoi, dans une optique volontariste,le Gouvernement a décidé de porter le taux d’élec-trification à un niveau compatible avec ses objectifsde développement socioéconomique (à savoir, pourl’horizon 2005, 70% en zone urbaine et 40 % en zonerurale). Or, ceci implique un effort d’investissementtrès important et qui, combiné aux autres besoinsd’investissement du secteur électrique, est estimé àplus de 5 milliards de FF, d’ici 2005, ce qui dépasselargement la capacité de financement de l’État et dusecteur public de l’électricité.

D’importantes ressources financières provenantdu privé et de l’extérieur sont donc nécessaires, pourassurer le développement du secteur électrique. Maisla mobilisation de ces ressources exige des change-ments institutionnels dans l’organisation et dans larégulation du secteur électrique.

Cependant, pour tenir compte des réalités actuelleset pour pouvoir en contrôler toutes les étapes, lesréformes ont été conçues de façon progressive dansle temps, en fonction du degré de maturité du sec-teur et de l’apprentissage issu de l’expérience.

LES NOUVELLES LOIS SUR LESECTEUR ÉLECTRIQUE AU SÉNÉGALPour se donner les voies et moyens d’atteindre sesobjectifs socioéconomiques, mais aussi pour amé-liorer de manière substantielle l’efficacité et la pro-ductivité du secteur électrique, le gouvernement afait voter, par l’Assemblée nationale, deux nouvelleslois sur le secteur de l’électricité, respectivement enjanvier et en mars 1998.

La loi portant ouverture du capital de la SENELEC, par la cession d’actifs au secteur privéSelon les dispositions de cette loi, l’État détiendra,au plus, 41% des actions de la SENELEC et les tra-

vailleurs, 10 % ; pour les 49 % du capital restants, 33 1/3%, au moins, des actions seront cédées à unopérateur professionnel privé (partenaire stratégiquequi aura la responsabilité d’opérateur), et le resteaux privés (partenaire stratégique et/ou offre publiquede vente).

Les appels d’offres, pour la cession des actions,ont été lancés en septembre 1998 et le choix du par-tenaire stratégique, en l’occurrence le consortiumHydro-Québec International–Élyo, est intervenu àla fin de février 1999.

La nouvelle entreprise privée SENELEC a com-mencé à fonctionner le 1er avril 1999, après la signa-ture, la veille, des nouveaux contrats (pacte d’ac-tionnaires, statuts, contrat de concession et de licence,et cahier des charges) entre ce consortium, constituéen nouvelle société, la Sénégalaise d’Investissement,et le gouvernement du Sénégal.

La loi d’orientation du secteur électriqueCette loi crée un nouveau cadre légal et réglementaire,stable et incitatif, capable d’attirer les financementsprivés importants que requiert le développement dusecteur électrique du Sénégal.

Elle ouvre progressivement la concurrence dansla production, la distribution, la vente en gros etl’achat en gros de l’énergie électrique, en permettantà de nouveaux opérateurs publics et privés d’y inter-venir, sans discrimination, sous un régime de licenceset de concessions.

Désormais, la production, le transport, la distri-bution et la vente d’énergie électrique seront autori-sés aux seuls opérateurs ayant obtenu une licenceou une concession délivrée par le ministre chargé del’énergie. Celui-ci peut également les retirer, le caséchéant, si des manquements et/ou des fautes le jus-tifient.

Une concession accordée dans le domaine dela distribution détermine le champ d’application ter-ritorial (ou périmètre de distribution de la SENE-LEC), les normes de qualité de service et les obliga-tions de service public qui s’imposent à l’entreprisetitulaire de la concession.

Avec la mise en vigueur de la nouvelle loi, laconcession de distribution de la SENELEC comprendtoute l’étendue de ses réseaux de distribution existants.La SENELEC est ainsi habilitée à produire, trans-porter, distribuer et vendre l’énergie électrique danssa concession.

Pour assurer la production dans sa concessiondu réseau interconnecté, la SENELEC pourra recou-rir à ses centrales existantes, à la date de signaturedu contrat de concession et de licence ; mais, dansle futur, il lui sera interdit d’agrandir son parc de pro-duction. Ainsi, toutes les nouvelles capacités de pro-duction seront offertes aux producteurs indépen-dants d’électricité (PIE), par appel d’offres (ceci, une

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LIAISON ÉNERGIE-FRANCOPHONIE • N° 44 / 3e TRIMESTRE 1999

fois la capacité nominale de production de SENELECrétablie).

INNOVATIONS MAJEURES ET CHANGEMENTS PRÉVUS DANS LE CADRE INSTITUTIONNELLa mise en œuvre de ces lois vise à apporter desinnovations majeures dans le cadre institutionnel,dans le but d’améliorer le fonctionnement et le déve-loppement du secteur électrique. À cet égard, on peutciter les changements fondamentaux suivants, pré-vus dans le cadre institutionnel.

Le nouveau modèle structurel de la SENELEC et la transition du secteurélectrique vers un modèle structurel plus concurrentiel

Le modèle structurel choisi par le Sénégal est unmodèle évolutif, qui élargit progressivement la concur-rence, au fil du temps, selon les phases suivantes :

Avec la privatisation de la SENELEC, la structuredu secteur électrique va évoluer, durant la premièreannée, vers la configuration présentée à la figure 1.

Figure 1 Structure actuelle du secteur électrique

au Sénégal

• La SENELEC reste intégrée verticalement et gardeson monopole actuel pour le transport. Pour ladistribution, elle sera le seul distributeur d’élec-tricité dans sa concession et aura le monopole dela vente dans cette concession (définie commeétant l’étendue de son périmètre actuel).

• La production sera assurée par les centrales élec-triques du parc actuel, ainsi que par la centrale BOOTde 50 MW mise en place dans le cadre d’un pro-jet en cours avec un producteur indépendantd’électricité, en l’occurrence Greenwich Turbine Inc.,filiale de General Electric (GE Capital).

• La SENELEC sera l’Acheteur Unique de l’énergieproduite par cette centrale, et cette fonction d’achatsera assurée au niveau du réseau de transport.

• Le tarif de l’électricité restera unique et uniformedans l’étendue de la concession de la SENELEC.

L’option d’Acheteur Unique pour la SENELEC,qui conserve encore le monopole du transport, dansle territoire (pendant la durée de la concession), ainsique le monopole de la distribution (pendant la duréede la concession) et de la vente au détail (pendantdix ans), dans le périmètre, est la première étape versl’introduction d’une plus grande concurrence.

Elle présente de nombreux avantages, qui cadrentavec le système sénégalais, au stade actuel. En parti-culier, le gouvernement sénégalais a encore des objec-tifs socioéconomiques importants à réaliser dans lesecteur de l’électricité (par exemple, l’électrificationrurale et l’expansion des réseaux électriques, notam-ment les réseaux de transport et de distribution péri-urbaine). Il peut ainsi imposer à la SENELEC (mono-pole de service public, donc instrument de la politiquedu secteur de l’énergie) certaines obligations qu’il estdifficile d’imposer aux opérateurs indépendants d’unmarché concurrentiel.

La régulation IPC-X signifie que les haussesde prix ne doivent pas dépasser un certain pla-fond fixé par rapport à l’indice des prix à la consom-mation (IPC), duquel le régulateur déduit un pour-centage X (déterminé pour une période fixe, parexemple, tous les 5 ou 10 ans). X est un paramètred’ajustement correspondant aux gains d’efficacitéattendus de l’entreprise considérée. Cette part Xreprésente le transfert de rente vers les consom-mateurs, le reste des gains revenant alors à l’en-treprise.

Ce type de régulation des revenus autorisésd’une entreprise est appelé régulation avec incita-tion, parce qu’il incite l’entreprise régulée à réali-ser des économies d’efficacité et d’en faire profi-ter les consommateurs, au fil du temps.

Zone du réseau interconnecté

Légende: P= production PIE= producteur indépendantd’électricité PPA= power purchase agreement AU= acheteurunique T= transport D= distribution GC= grosconsommateur V= vente TF= tarif final C= clientèle.

SENELEC

AU et T

D et V

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LIAISON ÉNERGIE-FRANCOPHONIE • N° 44 / 3e TRIMESTRE 1999

À moyen terme (dans un délai de trois ans), lastructure du secteur électrique aura la configurationprésentée à la figure 2.

• Il est ainsi envisagé l’intervention de distributeursou détaillants indépendants d’électricité qui vontopérer dans les zones rurales ne faisant pas par-tie de la concession de la SENELEC.

• La production sera assurée par les centralesactuelles de la SENELEC et, en ce qui concerneles nouvelles acquisitions de capacité, par les pro-ducteurs indépendants d’électricité.

• Au sein de la SENELEC, la fonction d’AcheteurUnique sera séparée de la fonction d’exploitant duréseau de transport. L’Acheteur Unique négociedes contrats d’achat d’électricité (power purchaseagreement) auprès de la Direction de la Productionde la SENELEC et des Producteurs Indépendantsd’Électricité (PIE) et leur achète l’énergie sur labase de ces contrats. Il approvisionne le réseau detransport de la SENELEC qui, à son tour, alimente:

– le réseau de distribution de la SENELEC,

– les distributeurs indépendants raccordés au réseauSENELEC,

– les gros consommateurs industriels.

• La SENELEC aura le monopole de la vente engros sur l’ensemble du territoire, hormis les PIE,qui devront nécessairement lui vendre l’énergieproduite par leurs centrales.

• La SENELEC aura également le monopole de lavente au détail à l’intérieur de son périmètre dedistribution.

• Au niveau tarifaire, les dispositions seront les sui-vantes :

– le tarif de l’électricité ne sera plus un tarif uniquedans l’ensemble du pays, mais il variera d’un dis-tributeur à l’autre, reflétant la variation des coûtsentre les concessions ;

– la régulation des tarifs sera basée sur un systèmede plafonds de prix (price cap), selon la formulebien connue « IPC-X ».

• D’un point de vue organisationnel, la SENELECmettra en place une comptabilité séparée «unbund-ling comptable» de ses principales activités (pro-duction, transport et distribution). Plus précisé-ment, des centres de gestion autonomes seront misen place et seront dotés d’une véritable autonomiefinancière. Un système de tarifs représentant lesprix de transfert des produits et des services serainstitué ; il permettra l’évaluation et le contrôledes performances de chaque centre de gestion.

• Dans un délai de huit ans, fixé dans le nouveaucahier de charge de la SENELEC, chacune de cesactivités (production, transport et distribution)donnera lieu à la création d’une filiale autonome.

À long terme (dans un délai de dix ans), la struc-ture du secteur électrique aura la configuration pré-sentée à la figure 3.

• Toutes les centrales de la SENELEC qui serontdéclassées, entre-temps, seront démantelées ouvendues à des PIE. À plus long terme, la produc-tion d’électricité sera ainsi exclusivement assuréepar les PIE.

• La SENELEC créera en son sein une Centraled’Achat en Gros (CAG), qui achètera l’énergieélectrique produite par les PIE, et elle ne joueraplus le rôle d’Acheteur Unique. En effet, les dis-tributeurs indépendants et les gros consomma-teurs industriels seront autorisés à acheter l’élec-tricité directement auprès des PIE, en accédant,éventuellement, au réseau de transport de la SENE-LEC (modèle de « l’accès des tiers distributeurs auréseau » ou third party access). À cet effet, ceux-ci négocieront et signeront des contrats d’achaten gros avec les PIE.

Cependant, pour pallier les risques d’interrup-tion de leur approvisionnement en électricité par lesPIE, les distributeurs indépendants et les gros consom-mateurs pourront garder un lien commercial avec laSENELEC pour leur alimentation en secours à par-tir de la Centrale d’Achat en Gros.

• La vente au détail aux gros consommateurs, dansle périmètre de distribution de la SENELEC, pourraêtre assurée par la SENELEC ou par toute autreentreprise titulaire d’une licence de vente.

Figure 2Structure du secteur électrique au Sénégal

(dans trois ans)

Zone isolée

Zone du réseau interconnecté

Zone non électrifiéedans la zone du réseau interconnecté

SENELEC

D1

D1

P

D et V

D et V D et V

TAG

PPA1

PPA2

PPA3

Légende: P= production PIE= producteur indépendant d’électricité PPA=power purchase agreement DI= distributeur indépendant AU= acheteurunique T= transport TAG= tarif d’achat en gros D= distribution GC= gros consommateur D= distribution V= vente TF= tarif final C= clientèle.

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• Dans l’optique d’un développement plus impor-tant de la concurrence, à la fin de la concession,dans un délai de 25 ans, on soumettra à un appeld’offres concurrentiel la concession de distribu-tion de la SENELEC. On pourrait également envi-sager d’achever le découpage complet de l’in-dustrie électrique.

La mise en place d’un organe de régulation indépendantDans le but d’attirer et de sécuriser les investisse-ments privés et de rassurer les investisseurs ainsique les prêteurs potentiels, il est apparu nécessairede mettre en place une Commission de Régulationdu Secteur de l’Électricité (CRSE), autorité indé-pendante chargée de la régulation des activités deproduction, de transport, de distribution et de ventede l’énergie électrique.

En matière de décision individuelle, la CRSE a,entre autres, les responsabilités suivantes :

• elle instruit les demandes de licence et de conces-sion;

• elle apporte toute modification d’ordre généralaux licences et concessions ;

• elle assure le respect des normes techniques appli-cables aux entreprises du secteur ;

• elle détermine la structure et la composition destarifs des entreprises titulaires de licence ou deconcession.

La création d’une agence chargée de la promotion de l’électrification ruraleEn vertu de la nouvelle loi, une agence dédiée à l’élec-trification rurale est créée, l’Agence Sénégalaise d’Électrification Rurale (ASER). Sa mission principaleest de promouvoir l’électrification rurale, en appor-tant aux entreprises du secteur et aux particuliers l’as-sistance technique et financière nécessaire pour impul-ser et soutenir les initiatives en la matière.

En matière de financement, l’ASER pourra appor-ter des subventions d’investissement aux opérateurschargés de l’électrification rurale ; elle pourra égale-ment leur accorder des prêts à des taux bonifiés. Enoutre, ses activités pourront s’étendre à d’autresdomaines, par exemple l’octroi de crédits directs à despromoteurs, comme les fournisseurs ou les distribu-teurs de systèmes solaires photovoltaïques domes-tiques.

Sur la base d’un plan directeur d’électrificationrurale défini par le ministère chargé de l’énergie,l’ASER organisera, chaque année, des appels d’offrespour l’octroi de nouvelles concessions aux distribu-teurs indépendants, en milieu rural.

Ces distributeurs indépendants pourront êtredes opérateurs privés, des coopératives d’électrifi-cation ou des collectivités locales.

Figure 3Structure du secteur électrique au Sénégal

(dans dix ans)

Con

trat

s

Con

trat

s

SENELEC

D1

D1

D et V D et V

D et V TAG

Légende: P= production PIE= producteur indépendant d’électricitéPPA= power purchase agreement DI= distributeur indépendant CAG= centrale d’achat en gros T= transport TAG= tarif d’achat en gros GC= gros consommateur D= distribution D= distribution V= vente TF= tarif final C= clientèle.

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Les acteurs du secteur se limitaient alors à l’Officenational de l’électricité et à quelques régies com-munales.

L’Office national de l’électricité a été constitué en1963 par un dahir qui lui confère le monopole de laproduction et du transport de l’énergie électrique. Iln’est pas investi de l’exclusivité de la distributionélectrique. Il a cependant l’obligation d’assurer ceservice dans les communes qui n’en ont pas organiséla gestion. En effet, les textes réglementaires régissantl’organisation communale confèrent à celles-ci lapossibilité de créer des régies d’exploitation du ser-vice public de distribution de l’électricité ou d’encéder la gestion à des concessionnaires. Douze régiesde distribution ont ainsi été constituées et gèrent ladistribution de l’électricité et de l’eau, et, pour quelques-unes, le service d’assainissement dans les grandes villesdu Maroc. Dans le reste du pays, et notamment dansle monde rural, l’ONE se charge de la distributionde l’électricité. L’énergie distribuée par les régies cor-respond à 50 % de la demande nationale.

L’Office national est un établissement public àcaractère commercial et industriel, placé sous latutelle administrative et technique du ministère del’Énergie et des Mines. Sa loi de création lui confèrecependant des prérogatives, en matière d’établisse-ment de projets de textes législatifs et réglementaires,qu’il propose au gouvernement en vue de l’accom-plissement de sa mission.

Les régies municipales et intercommunales, quantà elles, sont placées sous la tutelle du ministère del’Intérieur.

Cette double tutelle, ainsi que le mission accor-dée à l’ONE de proposer les modifications légalespermettent de comprendre le chemin emprunté parle Maroc pour réformer le secteur de l’électricité.

L’ONE, confronté à une pression financière impor-tante pour réaliser les investissements de produc-tion nécessaires à une augmentation de la demandeen croissance annuelle moyenne de 7 %, a intégré dans

Driss BENHIMA est Directeur général de l’Office national de l’électricité,Maroc.

Les réformes du secteur électrique:le cas du Maroc

Driss BENHIMA

La présentation des réformes du secteur de l’électricité, au Maroc, nécessite un bref rappel dela situation antérieure à la survenance de trois événements récents qui l’ont fortement modifié.

sa stratégie le recours àla production privée.Pour cela, l’ONE a pro-posé une modificationde sa loi de création, parun Décret-loi du 23 sep-

tembre 1994 lui permettant de faire appel au secteurprivé pour la production d’énergie électrique d’unepuissance supérieure à 10 MW. Ce décret rompt lemonopole de production d’électricité détenu parl’ONE et instaure le principe d’acheteur unique.L’adoption de cette loi constitue le premier événe-ment contribuant à la réforme du secteur.

Le ministère de l’Intérieur, dans une logique simi-laire de recours au privé pour faire face aux difficul-tés de gestion des régies et aux besoins d’investis-sements en matière d’assainissement, devenus critiquesdans les grandes agglomérations, s’engage dans uneincitation de ces municipalités à confier la gestiondes services publics urbains à des opérateurs privéssous forme de concessions. La communauté urbainede Casablanca décide, ainsi après de longues négo-ciations, de confier à la Lyonnaise des Eaux la ges-tion de la distribution de l’électricité et de l’eau etdu service d’assainissement dans la ville deCasablanca. Cette délégation constitue le secondévénement.

Le troisième événement est relatif à l’électrifica-tion rurale, et en particulier au positionnement stra-tégique de l’ONE en tant qu’électrificateur du monderural. Le PERG, Programme d’Électrification RuraleGlobal piloté par l’ONE, est approuvé le 2 août 1995en Conseil de Gouvernement. Cette posture diffèrede celle du passé, dans laquelle l’ONE ne réalisaitque les électrifications entièrement financées par lescollectivités locales. La faiblesse des ressources descommunes rurales et l’absence d’approche globaleconféraient aux anciens programmes d’électrificationun caractère dérisoire. Le PERG permet d’accélérerl’électrification du monde rural et d’engager l’ONE,jusqu’à l’an 2006, dans cette mission d’assurer l’uni-versalité du service public d’électricité.

C’est ainsi que se dessine le secteur de l’électri-cité. En amont, des producteurs privés mis en concur-rence par des appels d’offres pour des concessionset par la possibilité dont dispose l’ONE de produirelui-même. En aval et dans les zones urbaines, des ges-tionnaires privés, délégataires des services publicsurbains, choisis par les communautés urbaines pourgarantir des performances de gestion et une meilleurequalité de service aux clients, et offrant une solutionmultiservices globale.

Au milieu, l’ONE, acheteur unique, est respon-sable de l’obtention du meilleur prix de productionde l’électricité, de son transport dans les meilleuresconditions techniques et économiques, et de sa four-niture aux différents distributeurs.

Dans le monde rural, l’ONE doit terminer l’élec-trification et continuer à y assurer la distributionsociale de l’électricité non rentable directement.

Cette organisation du secteur implique, pour laprotection des intérêts des clients soumis à la contraintedu monopole et la préservation de l’équilibre finan-cier des différents acteurs, une réglementation natio-nale de la tarification. Elle est assurée par laCommission Interministérielle des Prix, dans laquellesont représentés les différents ministères. Cette régu-lation est d’autant plus nécessaire que subsiste unepéréquation sociale permettant le maintien d’un prixraisonnable d’accès à ce service par les couches lesplus pauvres.

Le recours à la délégation privée de la distribu-tion de l’électricité a rompu en partie ce principe,puisque les prix de distribution de l’électricité sontdirectement négociés dans le cadre de la conventionde gestion déléguée entre la communauté urbaineet le délégataire.

La décentralisation de la fixation d’une compo-sante du tarif de l’électricité présente trois problé-matiques.

L’abandon d’un prix national unique de l’élec-tricité crée des inégalités régionales, l’électricité deve-nant plus cher dans certaines villes que dans d’autres.Cette inégalité est incompatible avec le principe d’éga-lité du service public.

Cette nouvelle configuration ôte à l’État la pos-sibilité d’utiliser la tarification comme outil de ges-tion de la demande afin de lisser la demande d’éner-gie électrique et ainsi de réduire les coûts de sasatisfaction.

Les différences de tarifs existantes entre les dis-tributeurs dépassent largement les variations justifiéeséconomiquement par des structures de distributiondistinctes. Il semble que les majorations supplé-mentaires soient dues à une subvention croisée entrele secteur de l’électricité et les secteurs de l’eau etde l’assainissement. Au-delà des inconvénients deces transferts tarifaires, qui biaisent les décisionséconomiques et handicapent les industriels confron-tés à une concurrence mondiale avec un coût du fac-teur énergie élevé, l’État risque de perdre la maîtrisedu prix de l’électricité. Or, dans un environnementnon libéralisé, où ce n’est pas le marché qui fixe lesprix, l’État doit intervenir pour réguler les tarifs etutiliser ce levier à des fins de développement socialet économique. Ce transfert de compétences auxcommunautés urbaines permet cependant d’appor-ter des solutions globales à la gestion des principauxservices publics urbains.

Le cadre réglementaire ayant été tracé, il est inté-ressant de présenter les résultats de ces réformes,notamment ceux relatifs à l’intervention du secteurprivé dans les infrastructures de production.

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Centrale de productionJorf Lasfar.

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LIAISON ÉNERGIE-FRANCOPHONIE • N° 44 / 3e TRIMESTRE 1999

LA PRODUCTIONCONCESSIONNELLE La modification de la loi réalisée en 1994 permet àl’ONE de recourir au secteur privé sous trois condi-tions : les infrastructures de production restent pro-priété de l’ONE, d’où le terme «concession», le choixde l’opérateur se fait à la suite d’un processus d’ap-pel à la concurrence, et le maintien de l’équilibre ini-tial du contrat est garanti au concessionnaire.

Cette loi, ainsi que l’orientation stratégique despouvoirs publics de recourir au secteur privé pourfinancer les infrastructures, dans une optique dedésengagement de l’État, ont fait en sorte que la partde la production privée concessionnelle, dans l’ali-mentation électrique nationale, a atteint les 40 %,en 1998, grâce au transfert des deux unités de JorfLasfar 660 MW au consortium ABB/CMS. Ce pour-centage devra dépasser les 75 % en 2003, après lesdémarrages successifs de deux autres tranches deJorf Lasfar (660 MW), du parc éolien d’Al Koudia AlBaïda (50 MW) et enfin du cycle combiné deTahaddart. Le Maroc aura alors rejoint le peloton detête des pays ayant privatisé la plus grande part deleur production électrique.

L’ONE, dans ce nouveau contexte, est chargéde piloter les projets de concessions de la produc-tion d’électricité. À cette fin, il a développé quatreaxes d’analyse lui permettant d’optimiser les recoursau secteur privé.

LE FINANCEMENT DEL’INVESTISSEMENT DE PRODUCTIONLe financement classique, sur fonds propres et surcrédits concessionnels, est remplacé par des finan-cements par le capital privé et les emprunts ban-caires commerciaux. On constate alors que le finan-cement, par le privé, des infrastructures des paysémergents est nettement plus cher que le finance-ment traditionnel ou le financement dans les pays indus-triels à risques faibles. L’ONE doit donc mettre aupoint des techniques de financement privé originales,pour se ramener au plus près des conditions qui pré-valent dans les pays industrialisés, en ce qui concernetant la rémunération du capital que les intérêts ban-caires. Deux techniques peuvent être utilisées: l’en-trée directe dans le capital par l’ONE et la recherchede partenaires financiers à même de sécuriser lesbailleurs de fonds.

LE MEILLEUR DIMENSIONNEMENT DE L’INVESTISSEMENTLe coût direct de la construction de l’usine joue unrôle important dans le coût final de production.L’intervention, recherchée par l’ONE, de grandsconstructeurs d’équipements dans le projet garantitl’optimisation de la conception, au plus juste prix, del’usine de production. Pour emporter l’appel d’offres,

les soumissionnairesferont preuve de savoir-faire et d’esprit de com-pétition.

LA GARANTIE,TOUT AU LONG DU CONTRAT, DE PERFORMANCESMINIMALESLe secteur privé est plus apte à garantir la mise en

œuvre des techniques les plus modernes de gestionindustrielle. Ceci, pour deux ensembles de raisons.D’abord, il s’agit de nouvelles techniques, inconnuesde l’ONE. Ensuite, en cas de panne, l’opérateur privéne reçoit rien de l’ONE, et la sauvegarde des flux depaiement impose un niveau de disponibilité élevé. Enfin,au niveau de l’appel d’offres, la maximisation desperformances garanties augmente la capacité de pro-duction, c’est-à-dire le dénominateur dans le calculdu prix d’achat. Or, c’est bien le prix d’achat moyenactualisé qui est le facteur déterminant dans le choixde l’opérateur.

L’ACHAT DES COMBUSTIBLESL’ONE, dès lors qu’il y a marché concurrentiel ducombustible, confiera à l’opérateur privé la respon-sabilité de l’achat de cet intrant essentiel, qui joueun rôle substantiel dans le calcul du prix de revient,sachant que les procédures et règles d’achat par lesecteur public sont longues, tatillonnes et peu per-formantes. L’ONG attribuera à l’opérateur privé unbonus en cas d’achat performant (intensive). Mais,dans le cas où il n’existerait pas de marché concur-rentiel des combustibles, l’ONE n’hésitera pas à reti-rer la responsabilité de l’approvisionnement en com-bustibles à l’opérateur et se chargera lui-même decet achat stratégique auprès du monopole concerné.

En conclusion, on aura constaté que la privati-sation de la production d’électricité n’obéit pas à desdogmes contraignants, mais constitue un processusadaptatif qui répond à une seule exigence, celle del’abaissement des coûts au profit de la collectivité.

On aura constaté aussi que le modèle marocainde privatisation du secteur de l’électricité s’éloignede ce qu’aurait pu être une démarche ultra-libérale,prévoyant la libéralisation des prix de l’électricité etun marché privé de l’électricité. Il a permis, cepen-dant, de transférer au secteur privé une grande par-tie des activités industrielles, tout en maintenantdans la sphère des pouvoirs publics la régulation dusecteur. L’évolution du secteur électrique, élémentessentiel au développement économique et socialdans un pays dénué de ressources énergétiques pri-maires propres, reste ainsi maîtrisée.

Village électrifié dans le cadre du PERG.

Le contexte mondial ayant évolué, la mondialisa-tion de l’économie a accéléré le mouvement de pri-vatisation qui a touché les grands projets capitalis-tiques, et particulièrement la production de l’électricité.Ceci est facilité par le développement rapide du sec-teur électrique, qui nécessitera, durant les vingt pro-chaines années, la mobilisation de ressources finan-cières importantes. Comme ailleurs dans le monde,les moyens classiques de financement des projetsélectriques cèdent la place à des méthodes qui pri-vilégient les capitaux privés.

D’un autre côté, les objectifs de la STEG ont étéatteints, à savoir la couverture quasi totale du payspar le réseau électrique, un taux d’électrificationélevé, en 1999 (urbain, 99%; rural, 86%; et global,94%).

Enfin, il est important de relever, dans le monde,le développement de nouvelles technologies, tellesque le cycle combiné, associé à l’extension du réseaugazier en Tunisie.

Tous ces facteurs sont à l’origine de l’introduc-tion de l’option de la production indépendante pourle développement du secteur électrique en Tunisie.

Le recours à la production indépendante de l’élec-tricité – ou Independent Power Production (IPP) –,en Tunisie, n’est pas dû à l’incapacité de la STEG àassurer le financement de ses investissements, mal-gré la non-disponibilité de financement à taux pré-férentiel. Il s’inscrit dans le cadre d’une mise à niveaunationale et d’une ouverture à la mondialisation del’économie, concrétisée par une politique d’encou-ragement de l’investissement extérieur. Ceci permet

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Hédi TURKI est Directeur des Études et de la Planification de la STEG en Tunisie.

Les réformes institutionnelles du secteur électrique:le cas de la Tunisie

Hédi TURKI

Comme dans plusieurs pays, l’électricité est considérée en Tunisie comme un produit stratégique.C’est pour cette raison que depuis 1962 la production, le transport et la distribution de l’élec-tricité ont été confiés à un service public, la Société Tunisienne de l’Électricité et du Gaz (STEG),après une très longue période durant laquelle ce produit était géré dans le cadre de concessionsaccordées dans l’ensemble du pays.

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à l’État d’améliorer sa capacité d’endettement etd’orienter les capitaux disponibles vers d’autres sec-teurs, moins attractifs pour le secteur privé.

LE PROJET RADÈS IIL’étude de faisabilité de la production indépendante,en Tunisie, a été entamée dès le début de l’année1995 par une équipe de travail rattachée au minis-tère de l’Industrie. Elle portait sur le projet de cen-trale à cycle combiné (350 à 500 MW) programmépar la STEG, en 2001, à Radès: la centrale Radès II.

L’analyse préliminaire du projet Radès II portaitsur trois volets principaux:

– identification des aspects institutionnels,

– évaluation du projet retenu et estimation des avan-tages économiques de l’option production indé-pendante,

– définition de la structure réglementaire et organi-sationnelle nécessaire à la réalisation du projet.

Du point de vue juridique se posait le problèmede la réalisation du projet de production indépen-dante dans le cadre de la loi de création de la STEG.Après analyse des articles de cette loi, il est apparunécessaire de la modifier par la promulgation de laloi n° 96-27 du 1er avril 1996, qui autorise l’État à«octroyer à des personnes privées des concessionsde production de l’électricité ; les modalités d’octroide la concession sont fixées par décret».

Le décret d’application n° 96-1125 du 20 juin1996 stipule que chaque concession fera l’objet d’uneconvention approuvée par décret. Il institue, parailleurs, la Commission Supérieure de la ProductionIndépendante d’Électricité (CSPIE), composée desministres concernés et présidée par le premier ministre,d’une part, et la Commission Interdépartementalede la Production Indépendante d’Électricité (CIPIE),commission technique composée de représentantsdes ministres membres de la CSPIE, d’autre part.

Enfin, le décret définit la procédure de choix dupromoteur indépendant, les procédures existantesde marchés publics n’étant pas adaptées à cet impor-tant projet (Radès II).

Auparavant, fin 1995, une consultation a étélancée auprès de bureaux spécialisés pour la mise aupoint du dossier d’appel d’offres destiné aux pro-moteurs de projets de production indépendante. Lebureau sélectionné avait la tâche d’assister l’équipede projet tunisienne dans la finalisation du projet.

L’appel d’offres de préqualification de promo-teurs de projets de production indépendante a étélancé en avril 1996. Une liste de 10 promoteurs aété retenue pour cet appel d’offres. Les dossiers d’ap-pel d’offres avec toutes ses composantes comportentprincipalement la convention de concession, le contratd’achat d’électricité et le contrat de fourniture de gaz.

Sept principes généraux ont présidé à l’établis-sement de l’appel d’offres :

– la Centrale à cycle combiné d’une puissance com-prise entre 350 et 500 MW fonctionnera au gaznaturel, le gas-oil devant être utilisé comme com-bustible de secours ;

– la fourniture du gaz sera assurée par la STEG;

– la disponibilité du gas-oil et son stockage serontdu ressort du promoteur ;

– l’État tunisien ne fournira pas de garantie ;

– le terrain de la centrale est loué au promoteur ;

– l’appel d’offres est lancé après préqualification de10 candidats ;

– sera retenue l’offre dont le prix moyen actualisésur 20 ans sera le plus bas.

Il a fallu, préalablement à la finalisation descahiers des charges de l’appel d’offres pour la réali-sation du projet Radès II, répondre à bien d’autresquestions juridiques, telles que le statut de la natio-nalité de la société du projet, le régime des changes,le régime d’occupation du terrain, qui appartient auDomaine Public Maritime, les avantages fiscaux attri-buables au projet, les risques, etc. Les réponses àces questions ont permis d’adapter, aux conditionstunisiennes concrètes, les principes généralementretenus dans la mise en place de projets de produc-tion indépendante.

LA STRUCTURE DU PROJETLe modèle de réalisation retenu pour le projet Radès IIcorrespond à la formule BOO (Build-Own-Operate).Dans ce modèle, le plus répandu dans le monde, lepromoteur privé finance et construit lui-même la cen-trale. Il l’exploite ensuite pendant sa durée de vie. Lesmoyens de remboursement sont les recettes et lesgains du projet. Le promoteur est rémunéré par lavente de l’électricité de cette centrale à la STEG, sonacheteur unique.

Le promoteur sélectionné pour réaliser le projetRadès II va constituer une société (la société du pro-jet) dans le cadre de la législation tunisienne, quiconstruira la centrale Radès II, en sera le proprié-taire et l’exploitera pendant 21 ans.

Cette société aura à gérer un certain nombre dedocuments contractuels, dont les plus importantssont :

– La convention de concession. C’est un contrat debail entre le promoteur et le ministère de l’Industriepour la location du site sur lequel sera construitela centrale ;

– Le contrat d’achat d’électricité (PPA, Power PurchaseAgreement). C’est le document qui définit les res-ponsabilités de la société du projet, vendeur del’électricité, et de la STEG, acheteur unique decette électricité ;

– Le contrat de fourniture du gaz naturel. Il définitles conditions d’approvisionnement du projet engaz naturel par la STEG (quantités maximales etminimales, point de livraison, formule de prix) ;

– Les contrats de financement. C’est l’ensemble desdocuments passés entre la société du projet et lesprêteurs, et servant au financement du projet. Ilprécise les termes, montants, taux d’intérêt etéchéancier de remboursement ;

– Les contrats de construction. Ce sont les docu-ments passés entre la société du projet et lesconstructeurs, et définissant les conditions de réa-lisation de la centrale. Ils concernent la fourni-ture du matériel électromécanique, les montagessur site, les travaux de génie civil, les essais et lamise en service ;

– Le contrat d’exploitation. Il est signé entre la sociétédu projet et une entreprise spécialisée dans l’ex-ploitation des centrales électriques.

Pour la réalisation du projet Radès II, c’est leconsortium CEA/Sithe/Marubeni qui a été retenu (fin

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• 18 au 22 octobre: Atelier régional pour les pays des Caraïbes sur les études d’impact environnemental,à Jacmel (Haïti).

Atelier de formation destiné à doter les participants des capacités nécessaires à l’application de l’évalua-tion environnementale et assuré par une équipe de formateurs constituée d’Haïtiens, de Québécois et deFrançais. Chaque participant a présenté une communication sur la problématique de l’évaluation d’impactdans son pays. Des études de cas sur les problèmes liés à l’écotourisme ont également été présentées.

• Séminaire sur la maîtrise de la demande d’électricité (MDE) pour les pays du Maghreb et duMoyen-Orient, à Beyrouth (Liban) et de l’UMOA, Cotonou (Bénin).

Devant la montée de la sensibilité mondiale aux problèmes environnementaux, aux difficultés de développementde nouvelles capacités de production et de transport, et à l’augmentation du coût des fournitures qui en résulte,les sociétés d’électricité des pays du nord (aux États-Unis, notamment), ont imaginé des actions de maîtrise dela demande d’électricité (MDE). Ces contraintes, qui se «mondialisent», apparaissent de plus en plus dans lespays en développement, dont les secteurs électriques sont pour la plupart soumis à des mutations tendant àprivilégier la vérité des coûts/prix. Pour ces pays, la gestion de la charge nécessitera souvent une nouvelleapproche client et parfois la mise en œuvre de mesures d’économies d’électricité. La MDE apparaît donc commeun concept nouveau mais inéluctable, qui nécessite une collaboration franche entre la société d’électricité etl’administration de tutelle, dans le cadre d’une planification intégrée des ressources (IRP). La mission de l’IEPFest d’y préparer et d’y accompagner les pays membres.

C’est dans cette perspective que l’IEPF a mis en place depuis deux biennum maintenant un programmede formation / sensibilisation sur les enjeux, les outils et les méthodes de la MDE. Ce programme a touché lescadres des sociétés d’électricité, des administrations de l’Énergie des pays membres de l’UEMOA (Cotonou,mai 1999) et du Maghreb / Moyen-Orient (Beyrouth, novembre 1999).

août 1997). Deux candidats ont été maintenus enstand-by : National Power/Marathon et Intergen/Endesar.

Avec la société du projet CEA/Sithe/Marubeni,les négociations ont duré 17 mois. La signature desaccords de projet a eu lieu le 24 mars 1999.

L’entrée en vigueur des accords de projet a étéconcrétisée par la parution du décret portant appro-bation de la convention de concession (30-4-1999).

Le bouclage financier, comprenant la signaturedes contrats de financement et la levée des conditionssuspensives, s’est terminé en août 1999.

Les travaux de construction de la centrale ontdémarré en septembre, et la mise en service de lacentrale est prévue pour septembre 2001, ce quiconstitue un retard par rapport aux prévisions initialesde huit mois, mais ce qui peut être considéré commeune grande performance, pour un premier projet deproduction indépendante, dans un pays en déve-loppement.

DANS CE NUMÉROL’IEPF A ORGANISÉ

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De telles considérations soulèvent l’importanced’établir un cadre d’analyse reliant les aspects macro-et microéconomiques, malgré toutes les difficultésd’ordre méthodologique que ce choix impose.

Le présent article n’a bien sûr pas l’ambition decombler ce vide. On a choisi, tout de même, d’ana-lyser les restructurations des industries électriques enmettant l’accent sur l’influence des transformationsmacroéconomiques et institutionnelles sur le moded’organisation industrielle et sur la stratégie des entre-prises.

La compréhension d’ensemble des traits princi-paux des restructurations et de la dynamique à longterme de ces industries requiert un cadre d’analyseintégrant deux dimensions interdépendantes: appe-lons-les macro-institutionnelle et micro-organisa-

tionnelle, pour bien distinguer leurs traits saillants.C’est précisément autour de cette double dimensionque s’inscrit le sujet de cet article.

La deuxième partie dresse un bilan rapide destransformations structurelles en Amérique latinedepuis l’essor des plans de stabilisation macroéco-nomiques, en mettant en relief la question relativeà la vulnérabilité de l’équilibre macroéconomiquevis-à-vis de la régularité des flux financiers interna-tionaux.

Helder Queiroz PINTO Junior est professeur au Groupe Énergie / Institut d’économieindustrielle / Université Fédérale de Rio de Janeiro.

Les deux dimensions de la restructuration des industries énergétiques en Amérique latine

Helder Queiroz PINTO Junior

Les industries énergétiques d’Amérique latine connaissent d’importantes mutations au coursde cette deuxième moitié des années 1990. Néanmoins, il importe de souligner d’emblée quele processus de réforme de ces industries, spécialement dans la filière électrique, est étroitementlié à des changements profonds d’une autre nature. Dans les pays industrialisés, les restructu-rations sont commandées par la recherche d’une plus grande efficacité économique, ce qui exigela correction urgente des défauts de réglementation afin de permettre l’absorption rapide du chan-gement technique et la réorientation des décisions d’investissement et de financement des entre-prises. Dans les pays latino-américains, d’une manière générale, tous ces facteurs jouent un rôlenon négligeable, mais les restructurations se justifient également par la nécessité de stabiliserl’économie.

Dans la troisième partie, nous tentons d’interpréterles conséquences de ces transformations sur la dimen-sion micro-organisationnelle. Nous illustrons cettedémarche par le bilan du processus de transition desindustries électriques dans un certain nombre depays d’Amérique latine. Nous nous efforçons demettre en évidence les traits communs des réformeset les difficultés concernant la création d’un envi-ronnement institutionnel permettant simultanémentd’attirer de nouveaux entrants et d’assurer les mis-sions de service public.

Même si les pays suivent à peu près les prin-cipes généraux de ces réformes, le rythme d’intro-duction de changements et le cadre institutionnelsont très différents. Compte tenu des comportementsstratégiques des opérateurs, qui cherchent des oppor-tunités de diversification et d’internationalisation, lerôle des nouvelles autorités de réglementation, récem-ment créées, deviennent encore plus complexes.

La dernière partie résume les principales conclu-sions.

LA DIMENSION MACRO-INSTITUTIONNELLELes années 1980 ont marqué l’échec des programmesd’ajustement structurel proposés par le FMI et laBanque mondiale. Dans de nombreux pays, on aobservé la persistance du déséquilibre macroécono-mique, de la récession et des taux d’inflation élevés.

Depuis le début des années quatre-vingt-dix, lastabilisation macroéconomique est devenue la prio-rité absolue de la politique économique de la plu-part des pays. Comme nous le verrons plus loin, cettepriorité relègue au deuxième plan les préoccupationsconcernant le développement économique. Il sembleclair que la stabilisation macroéconomique a misé avanttout sur la maîtrise de l’inflation. Notre but n’étantpas de discuter « l’architecture» des plans de stabi-lisation, nous allons simplement souligner les aspectsles plus importants de la politique macroéconomique:

1. Politique monétaire fondée sur des taux d’intérêtréels très élevés, afin d’attirer des flux de capitauxinternationaux;

2. Surévaluation du taux de change;

3. Ouverture commerciale (libéralisation des impor-tations) ;

4. Programmes globaux de privatisations ;

5. Libéralisation financière.

Soutenus par l’augmentation des réserves inter-nationales attribuable au retour des capitaux étran-gers, les programmes de stabilisation ont engendrédes transformations profondes dans le comporte-ment des principales variables macroéconomiques.

Il est indispensable d’observer que ces diversaspects ont pour objectif d’assurer la régularité des

flux financiers internationaux et des investissementsétrangers directs (IED). La vulnérabilité structurellevis-à-vis de l’épargne étrangère, l’absence de méca-nismes de financement interne pour les investisse-ments à long terme et le risque chronique lié auxtaux de change demeurent pourtant les traits essen-tiels des économies latino-américaines.

Comme nous l’avons mentionné, ces transfor-mations sur le plan macroéconomique ne sont passans conséquences sur le cadre institutionnel. Ellesimposent l’adaptation des institutions et la révisionde la constitution des pays. Aux programmes de sta-bilisation sont associées les réformes institution-nelles. Celles-ci marquent un tournant dans la tra-jectoire des politiques de développement inspirées destravaux des économistes « structuralistes » des années1960 et 1970, qui attribuaient à l’État une partici-pation indispensable dans la formation brute du capi-tal fixe, ce qui renforçait le dirigisme économique etfinancier des gouvernements.

Les réformes institutionnelles entraînent desrépercussions à court terme et à long terme. À courtterme, elles visent à réduire le déficit public par le biaisde la vente des compagnies publiques. À long terme,elles ont pour but d’encourager la participation descapitaux privés dans les investissements nécessairesau développement des infrastructures. C’est préci-sément sur ce dernier point que nous allons concen-trer notre analyse.

Face aux problèmes de mobilisation de l’épargnenationale, on attend, selon cette optique, que les capi-taux privés étrangers jouent un rôle moteur dans la crois-sance et le développement économique. Sur cettebase, deux hypothèses principales sous-tendent lanouvelle approche du développement. La premièretient à ce que la restructuration productive et lesdécisions d’investissement des entreprises transna-tionales, dans un contexte de mondialisation éco-nomique et financière, ouvrent des perspectives d’ac-croissement des capitaux privés1.

La deuxième hypothèse veut que les contoursde cette nouvelle conception de développement parl’IED soit tributaire des réformes institutionnelles.

Ces deux arguments concourent-ils à expliquerle retour durable des investissements et de la crois-sance économique? Rien n’est moins sûr2.

Il semble que cette conception du développe-ment ne fait que renforcer la vulnérabilité structu-relle vis-à-vis de la dépendance des flux financiersinternationaux pour l’équilibre de la balance despaiements.

En dépit de leur volatilité, le gouvernement consi-dère que les capitaux à court terme sont égalementindispensables à l’équilibre macroéconomique ducourt terme. Selon cette approche, pour les rendre moinsvolatils et attirer des investissements à long terme,

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il importe de créer un environnement économiquesusceptible d’engendrer des opportunités.

Malgré la « mise en garde » faite ci-dessus, il estindéniable que cette stratégie est, pour l’instant, por-teuse de résultats qui vont dans le sens des objectifsgouvernementaux. Le potentiel de croissance des mar-chés intérieurs des économies latino-américaines attiresûrement certains groupes industriels étrangers ayantdes objectifs de diversification et d’expansion de leursactivités. Les gouvernements veulent alors assurerdes conditions attractives pour l’entrée de ces capi-taux, particulièrement dans le secteur des infrastuc-tures, où les opportunités d’affaires sont fort inté-ressantes. On note ainsi une convergence d’intérêtsentre les objectifs du gouvernement et d’un nombrenon négligeable de groupes industriels concernantles investissements dans les infrastructures.

Dans ce nouveau contexte, les réformes insti-tutionnelles se traduisent par la fixation de nouvellesrègles du jeu visant à créer un nouvel environne-ment économique, plus favorable aux investisseurs.Ceci implique la suppression des barrières institu-tionnelles à l’entrée des capitaux privés.

Ces réformes institutionnelles dépassent ainsiles cadres strictement sectoriels. Il s’agit désormaisde créer de nouvelles conditions de fonctionnementet de régulation des marchés.

LA DIMENSION MICRO-ORGANISATIONNELLECette dimension comprend le mode d’organisationdes industries énergétiques, c’est-à-dire les aspectsrelatifs aux structures industrielles, les degrés d’in-tégration et les mécanismes de réglementation sec-torielle. Ces aspects se rapportent à la caractéris-tique qu’on appelle ici « organisationnelle ». La partie« micro » est liée aux décisions des firmes, en termesde technologie et de financement, face à la façon demener la politique macroéconomique et face auxréformes institutionnelles. Nous n’allons évidem-ment pas aborder ici, d’une manière exhaustive, tousces aspects.

L’hypothèse de travail est la suivante: d’un côté,le plan de stabilisation macroéconomique et lesréformes institutionnelles changent profondémentl’environnement économique et, par conséquent, lemode d’organisation des industries énergétiques. Lesdécisions microéconomiques et les stratégies desentreprises traversaient également une nouvelle phased’adaptation. Il convient de souligner que le contextemacroéconomique instable des années 1980 a façonnéles comportements microéconomiques. L’expositionprolongée à une très longue période d’instabilité etd’incertitude avait déjà imposé des essais d’adapta-tion afin de faire face aux changements fréquentsdans les règles du jeu des politiques fiscales, dechange, du travail...

Le jeu des impacts des transformations macro-institutionnelles sur la dimension micro-organisa-tionnelle peut être appréhendé de la façon suivante.Du point de vue des décisions microéconomiques desfirmes, la période de transition actuelle est marquéepar :

1. La cohabitation des entreprises publiques et des nou-veaux entrants privés, ce qui rend plus complexela définition des mécanismes de réglementationsectorielle ;

2. La difficulté d’évaluation des risques – L’incertitudequant à l’évolution des réformes institutionnelles,du mode d’organisation industrielle et des méca-nismes de réglementation se répercutent sur lafaçon dont les agents économiques tentent de maî-triser les risques économiques, technologiques etfinanciers. Pour les nouveaux entrants et pour lesgroupes intéressés à la privatisation, cet aspect setraduit par une augmentation substantielle destaux d’actualisation, indiquant des valeurs de mar-ché faibles pour les entreprises inscrites dans leprogramme de privatisation. Pour les opérateursactuels, il est plus compliqué de prendre des déci-sions d’investissement sans pour autant diminuerleur part de marché à long terme;

3. La préférence pour les décisions à court terme –Ce troisième aspect est la conséquence la plusdirecte du deuxième. Le comportement et la stra-tégie des entreprises sont commandés par ce prin-cipe fondé sur des décisions à court terme. Entermes concrets, dans un contexte combinant unprocessus de stabilisation macroéconomique etdes réformes institutionnelles, il devient plus com-plexe pour les entreprises installées et pour lesnouveaux entrants de prévoir la demande et lastructure futures des marchés énergétiques.

Dans un contexte de transformations si profondes,la question qui se pose est celle de l’articulation desinnovations technologiques, institutionnelles et orga-nisationnelles. La réponse n’est guère évidente, car lestrois aspects mentionnés ci-dessus jouent dans le sensinverse des comportements innovateurs. Il semblenéanmoins clair que la logique de planification desinvestissements et les conditions requises pour gérerla sphère énergie changent de manière radicale.

Du point de vue organisationnel, il paraît clair queles industries énergétiques passent par un processusd’abandon de l’ancien mode d’organisation, dont lescontours sont fort bien repérés par Finon (1995, p. 13). Cette approche met l’accent sur les modalitésde l’interaction entre institutions et organisations,tout en rappelant que la période de transition est mar-quée par :

– un processus irréversible de changements succes-sifs de règles ;

– une déformation progressive des structures indus-trielles et des formes de marché, avec l’entrée denouveaux acteurs ;

– un « ajustement final » des règles de marché parle régulateur, pour recréer des incitations à contrac-ter à plus long terme.

Comme nous le verrons par la suite, ces deuxapproches de la transition des modes d’organisationsont très utiles pour l’interprétation des transforma-tions en cours, dans les industries électriquesd’Amérique latine.

LE POINT SUR LE PROCESSUS DE RESTRUCTURATION DES INDUSTRIES ÉLECTRIQUES

En dépit des différences nationales concernantles spécificités des systèmes électriques, les principesde base guidant les réformes sectorielles s’articulentautour des diverses mesures suivantes :

– introduction de la concurrence dans le segment dela production électrique;

– dé-intégration verticale des activités de produc-tion, de transport, de distribution et de commer-cialisation;

– ouverture des réseaux et introduction des méca-nismes de libre accès des tiers ;

– définition de nouveaux mécanismes de régle-mentation;

– création des nouvelles agences de réglementation ;

– privatisation partielle ou totale des compagniespubliques.

Compte tenu de l’objectif d’attirer de nouveauxopérateurs et capitaux dans l’industrie électrique,cet éventail de mesures réduit les barrières institu-tionnelles à l’entrée. Ceci implique la révision descomportements stratégiques des opérateurs, car cesnouvelles conditions de base de l’industrie imposentde nouveaux modes de gestion des compagnies élec-triques.

Nonobstant la tentative d’orienter le cours desréformes selon ces principes, les difficultés d’appli-cation des changements structurels sont très impor-tantes et varient d’un pays à l’autre.

La vague de restructuration de l’industrie élec-trique a commencé au Chili dans les années 1980,avec pour objectif principal de privatiser les compa-gnies électriques. Après la restructuration financièredes entreprises électriques, le gouvernement a pro-gressivement créé un nouvel environnement insti-tutionnel, structuré autour de la CNE (ComisiónNacional de Energia).

En Argentine, la réforme de l’industrie électriquea commencé en 1992 et a avancé rapidement dansle sens du démantèlement et de la privatisation desmonopoles publics. La réforme a donné lieu à une

réorganisation industrielle, avec plus de 30 compa-gnies de production, une douzaine de compagnies detransport, 25 compagnies de distribution et à la dé-intégration verticale et horizontale ainsi qu’à la pri-vatisation.

Deux importantes institutions ont été créées :l’ENRE (Ente Nacional Regulador de Electricidad), auto-rité de réglementation sectorielle, et la CAMMESA, orga-nisme ayant les responsabilités suivantes : 1) la sécu-rité des approvisionnements ; 2) l’optimisation desflux d’électricité dans le système; 3) le calcul des tran-sactions commerciales entre les opérateurs; 4) la coor-dination du fonctionnement du marché à terme.

Au Brésil, sous la pression des difficultés macroé-conomiques des premiers mois de l’année 1995, legouvernement Cardoso a annoncé un programmede privatisation globale de l’industrie électrique. Leproblème qui s’est posé à l’époque a été de choisirentre accélérer les privatisations pendant le proces-sus de restructuration ou conclure la restructuration.Ceci constitue une illustration de la prise en comptesimultanée des questions concernant la dimensionmacro-institutionnelle et la dimension micro-organisationnelle.

Étant donné la taille du système électrique bré-silien, les réformes entamées en 1995 ne sont tou-jours pas achevées. L’industrie électrique est certai-nement la plus influencée par la dimension macro-institutionnelle. Le besoin de coordination, la spécificitédes actifs et, spécialement, la part de l’hydraulique(environ 90 %) de la capacité de production rendentplus complexe la question de la privatisation totalede l’industrie électrique. Plus d’une vingtaine de com-pagnies de distribution ont été privatisées, mais lesenjeux les plus importants des réformes – la privati-sation des compagnies de production et la définitiondes règles de commercialisation permettant l’éta-blissement des relations contractuelles entre les dif-férents opérateurs – nécessitent toujours l’approba-tion d’un ensemble de dispositifs réglementaires.

L’entrée des nouveaux opérateurs rend égale-ment plus difficiles la tâche de l’autorité de régle-mentation (ANEEL-Agence Nationale d’Énergie Élec-trique). Au contraire de ce qui se passe dans la plupartdes pays, l’ANEEL est aussi responsable de la défi-nition des conditions régissant les contrats de conces-sion. Compte tenu du fait que la nouvelle loi électriquede 1997 ne fixe que le cadre général de fonctionne-ment de l’industrie, le contexte juridique brésilienrend les autorités sectorielles de réglementation res-ponsables de l’élaboration d’un ensemble de dispo-sitifs réglementaires.

Au Mexique, les réformes électriques, pour l’ins-tant, ont été moins importantes. On a prévu la sépa-ration comptable des activités verticales et monopo-listiques de la CFE (Comisión Federal de Electricidad),avec l’introduction de la concurrence dans la pro-duction. Il semble que le transport demeurera sous

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la responsabilité de l’État, tandis que le segment dela distribution devra donner lieu à la naissance d’unedouzaine de compagnies de distribution. Désormais,la responsabilité de la réglementation économique desindustries énergétiques mexicaines est une attribu-tion de la CRE (Comisión Reguladora de Energia).

L’ADAPTATION DE LA RÉGLEMENTA-TION FACE AUX COMPORTEMENTSSTRATÉGIQUES DES OPÉRATEURSComme nous l’avons mentionné ci-dessus, la réduc-tion des barrières institutionnelles à l’entrée et lesprogrammes de privatisation ont engendré des chan-gements importants dans les droits de propriété del’industrie électrique en Amérique latine. De leurcôté, les compagnies européennes et nord-améri-caines ont entrepris des stratégies de diversificationet d’internationalisation. Ce mouvement s’expliqueégalement par la réduction du taux de croissance dela demande dans leur pays d’origine (tableau 1). Or,en Amérique latine, il reste des efforts d’investisse-ment à faire, dans le but de conclure l’interconnexiondes réseaux, alors que les ménages peuvent êtreconsidérés comme sous-équipés. À moyen terme,donc, le rythme de croissance de la demande élec-trique en Amérique latine (environ 5 % par an) resteune variable importante et explique l’intérêt des com-pagnies des pays industrialisés. Ces comportementsstratégiques diffèrent largement de ceux observésdepuis la Deuxième Guerre mondiale, quand lescompagnies électriques n’avaient pour but que d’as-surer les missions de service public dans leur pays(tableau 2).

Les pays latino-américains doivent faire face àdes problèmes liés à leur faible expérience de régle-mentation, dans un contexte de changements profondsde l’organisation industrielle et des comportementsstratégiques des opérateurs. La tradition nord-américaine de réglementation des industries de réseauxa certainement influencé l’application des disposi-tifs institutionnels et la création des nouvelles agencesen Amérique latine. Néanmoins, les instrumentsthéoriques et les pratiques de réglementation desÉtats-Unis sont adaptés à la réglementation desmonopoles publics.

Il importe de rappeler que l’un des objectifs desréformes est l’introduction de la concurrence et l’en-trée de nouveaux opérateurs. Associées à la faibleexpérience en la matière, les activités multiservicesrendent encore plus complexe la réglementation.D’une part, les modes d’organisation industriellerequièrent des instruments de réglementation desmonopoles, pour le transport et la distribution d’élec-tricité, avec des innovations institutionnelles concer-nant le libre accès aux réseaux. D’autre part, faceaux comportements stratégiques des compagnies, ilimporte d’adapter des mécanismes de droit à laconcurrence afin d’éviter la mainmise de certainsacteurs sur le marché.

Ce dernier aspect n’est pas spécifique au caslatino-américain, car les stratégies d’internationali-sation et de diversification conduisent à la forma-tion d’un oligopole international des industries deréseaux.

Dans les industries énergétiques, le rapproche-ment des marchés du gaz et de l’électricité, s’expli-quant par l’essor de la production thermique avecdes turbines à gaz, impose le développement de nou-veaux arrangements institutionnels visant la coopé-ration, voire la fusion des compétences des agencessectorielles de réglementation (tableau 3)3. En Bolivie,par exemple, toutes les activités des industries d’in-frastructure sont soumises à une autorité de régle-mentation unique (SIRESE), intégrée par départe-ments sectoriels spécifiques. Ce genre de solution al’avantage de faciliter la coordination des instrumentsde réglementation.

Tableau 3Agences de réglementation –

Amérique latine

Pays Agences de réglementation

Argentine ENAGAS (gaz), ENRE (électricité)

Brésil Gouvernement fédéral : ANP (pétrole,gaz) et ANEEL (électricité) ;

Gouvernements des États : São Paulo :CSPE (électricité, gaz) et processusen cours de création d’agences multiservices (États de Rio deJaneiro, de Bahia, de Ceará, de Rio Grande do Sul)

Bolivie SIRESE (hydrocarbures, électricité,télécommunications, eau, transports)

Colombie CREG (électricité, gaz)

Mexique CRE (électricité, hydrocarbures)

Face aux changements des modes d’organisa-tion industrielle du secteur électrique et aux nou-veaux comportements stratégiques des acteurs, ilsemble clair que les questions concernant la régle-mentation demeurent le défi le plus important desréformes des industries électriques en Amériquelatine.

CONCLUSIONLes réformes toujours en cours dans le secteur élec-trique en Amérique latine sont liées, sur le plan sec-toriel, aux besoins de flux financiers pour l’expan-sion des réseaux. Compte tenu des problèmesmacroéconomiques des années 1980, ce processusa été orienté vers l’attraction des nouveaux entrants.La participation du capital privé dans l’industrie élec-trique exige des transformations profondes de la

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Tableau 1Évolution de la demande électrique en Amérique latine

(millions de MWh) Taux de croissance annuelle

Pays 1980 1985 1990 1997 1997 19971980 1980

Canada 314,9 374,4 435,1 475,1 2,45 1,26Mexique 59,7 86,6 107,1 154,3 5,75 5,36États-Unis 2 094,4 2 324,0 2 816,8 3 278,5 2,67 2,19Amérique du Nord 2 469,5 2 785,4 3 359,7 3 908,6 2,74 2,19Argentine 38,9 42,2 45,7 65,4 3,11 5,27Bolivie 1,4 1,4 1,9 3,1 4,64 6,67Brésil 128,5 179,7 228,6 322,6 5,56 5,04Chili 10,9 12,9 18,7 30,1 6,13 7,03Colombie 18,1 27,3 33,1 41,4 4,99 3,24Costa Rica 2,0 2,5 3,5 4,5 4,93 3,81Cuba 8,7 10,7 12,1 12,2 2,02 0,12Équateur 3,0 4,4 5,8 9,4 6,97 7,16El Salvador 1,4 1,6 2,1 3,8 6,06 9,18Guatemala 1,5 1,5 2,1 3,0 4,37 5,16Guyane 0,4 0,2 0,3 0,3 -0,77 2,10Haïti 0,3 0,5 0,4 0,7 4,97 6,31Honduras 0,8 1,0 2,1 2,7 7,10 3,50Nicaragua 0,9 1,1 1,4 2,1 4,88 5,68Panama 1,6 2,3 2,6 4,3 5,92 7,30Paraguay 0,7 3,7 0,3 1,5 4,97 28,40Pérou 9,2 11,1 12,6 16,3 3,45 3,79Uruguay 3,1 3,4 5,6 6,2 4,19 1,48Venezuela 29,7 43,0 53,7 69,4 5,11 3,72Amérique centrale et du Sud 284,7 374,7 461,7 640,8 4,89 4,79Europe occidentale 1 712,1 1 958,2 2 187,4 2 425,7 2,07 1,49

Tableau 2Principaux opérateurs étrangers dans les industries de réseaux en Amérique latine

Activités Pays hôtes

EDF (France) Électricité Brésil, ArgentineENRON (EUA) Pétrole, gaz et électricité Brésil, Argentine, Colombie,

Guatemala, Trinidad, BolivieSOUTHERN (EUA) Électricité BrésilCSW / AEP (EUA) Électricité, gaz, télécommunications BrésilTRACTBEL (Belgique) Électricité, gaz, télécommunications Argentine, Pérou, Brésil ENDESA (Espagne) Électricité, gaz, eau, télécommunications, Brésil, Argentine, Chili,

énergies renouvelables Colombie, PérouHOUSTON (EUA) Gaz et électricité Colombie, Argentine, Brésil, MexiquePSEG (CEA) (EUA) Électricité et gaz Argentine, Brésil, VenezuelaIBERDROLA (Espagne) Électricité, gaz, eau, télécommunications Chili, Brésil, Argentine,

Bolivie, ColombieCMS (EUA) Pétrole, gaz, électricité Argentine, Chili, Pérou, Colombie,

Équateur, Brésil, Mexique

EDP (Portugal) Électricité, gaz, télécommunications Brésil, Guatemala

AES (EUA) Électricité Brésil, Argentine, République Dominicaine

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réglementation et du mode d’organisation indus-trielle. D’une part, le passage des monopoles publicsaux monopoles privés (dans la distribution, parexemple) impose des réglementations strictes, pouréviter les pratiques monopolistiques et permettrel’amélioration de la qualité du service. D’autre part,lorsque l’introduction d’un plus grand degré de concur-rence devient prioritaire, l’intégration verticale estremise en cause.

Ceci a engendré l’ouverture et le démantèlementprogressif des structures monopolistiques et vertica-lement intégrées. En dépit de la convergence des payslatino-américains vis-à-vis des principes majeurs desréformes, il est à noter que les nouvelles structuresorganisationnelles et institutionnelles présentent defortes disparités. Ceci justifie un cadre d’analyse pre-nant en compte les interactions entre les dimensionsmacro-institutionnelle et micro-organisationnelle dela restructuration de ces industries.

Deux aspects rendent plus complexe l’achève-ment de ce processus. En premier lieu, la faible expé-rience de la plupart des pays latino-américains enmatière de réglementation. On constate que lesréformes ont donné lieu à la création d’un grandnombre d’institutions pour coordonner l’entrée denouveaux opérateurs et assurer les missions de coor-dination des systèmes électriques. En deuxième lieu,les entrants ont des comportements stratégiques cen-trés sur la diversification et l’internationalisation deleur core business, ce qui requiert la mise en place denouveaux instruments de réglementation.

Comme dans n’importe quel processus d’ap-prentissage institutionnel, certaines solutions ont,pour l’instant, un caractère transitoire qui s’expliquepar la dépendance des réglementations sectoriellesà l’égard des ajustements macroéconomiques.

BIBLIOGRAPHIECEPAL, Notas de la Cepal, janvier 1999, Santiago.

Fanelli, J. et Frenkel, R., « Macroploicies for the tran-sition from stabilisation to growth », DocumentoCedes, no 87, Buenos Aires, 1994.

Finon, D., « Variété et dynamique d’organisation desindustries de réseaux énergétiques: le rôle des ins-titutions », Séminaire inter-laboratoires, CRISTO-IEPE-IREPD-INRA, Grenoble, 31 mai-1er juin 1995.

Gonçalves, R., O Abre-Alas: a nova inserção do Brasilna economia mundial, Relume Dumará, Rio deJaneiro, 1994.

Oliveira, A. et Pinto Junior, H.Q., «Les réformes desindustries électriques en Amérique latine: vers unnouveau mode d’organisation? », dans Revue del’Énergie, numéro spécial « Les changements del’industrie électrique», no 465, janvier-février, 1995,p. 23-31.

Oliveira, A. et Pinto Junior, H.Q. (Orgs.) Financiamentodo Setor Elétrico Brasileiro : Inovações Financeirase Novo Modo de Organização Industrial. Rio deJaneiro, Ed. Garamond, 1998.

Notes :1. Pour l’instant, les résultats encouragent les gouvernements

à poursuivre cette voie: les IED (investissements étrangersdirects) nets ont dépassé les 57 milliards US$ en 1997 et1998. Il faut tenir compte du fait qu’environ 50 % du totalconcerne les opérations de privatisation des compagniespubliques. (Source : CEPAL, 1999.)

2. Selon Gonçalves (1994), ces arguments doivent être relati-visés, car les études menées par l’UNCTC (United NationsCentre of Transnational Corporations) montrent que les déci-sions d’investissement des firmes transnationales dépendentmoins des changements normatifs et fiscaux que de laperception du risque lié aux conditions macroéconomiquesmondiales.

3. Par ailleurs, cette dernière solution a été adoptée en Grande-Bretagne avec l’intégration des compétences des agencesOFFER (électricité) et OFGAS (gaz), lesquelles ont servide modèle pour le processus de restructuration dans ungrand nombre de pays.

Ces réformes institutionnelles, dont la forme varie,selon les pays, en fonction du degré d’ouverture ducapital et de la durée des contrats de concession,devraient permettre d’accroître les performances desentreprises d’électricité et, à terme, d’améliorer lefonctionnement du système électrique avec la dis-parition des monopoles publics et l’instauration d’uneconcurrence véritable, l’État ne conservant qu’unrôle de régulation.

Malgré ces avantages, cependant, de nouveauxproblèmes apparaissent et d’autres sont amplifiés,notamment sur le plan tarifaire, au niveau de la para-fiscalité, ainsi qu’en ce qui concerne l’électrificationdes zones périurbaines et des centres secondaires, enrelation avec la couverture des risques des investisseurs.

Pour illustrer ces différentes situations, nousévoquerons principalement la réforme du secteur del’énergie électrique au Gabon, qui a abouti, en juin1997, à la privatisation de la Société d’Énergie etd’Eau du Gabon (SEEG), dont 51 % du capital estdétenu par la Société Générale des Eaux (groupeVivendi).

PROBLÈMES TARIFAIRESParmi les causes des déficits des entreprises publiquesd’électricité, il y a le fait que les tarifs appliqués nereflètent pas le niveau réel des coûts de production.Il est donc nécessaire, pour y remédier, de mettre enplace une tarification adaptée, afin de garantir un

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Philippe OSSOUCAH estingénieur et Directeur général del’Énergie et des Ressourceshydrauliques, ministère desMines, de l’Énergie, du Pétrole etdes Ressources hydrauliques du Gabon.

Les réformes institutionnelles du secteur électrique:problèmes tarifaires et fiscaux,et couverture des risques

Philippe OSSOUCAH

Au regard des mauvais résultats enregistrés par les entreprises publiques opérant dans le sec-teur électrique et des difficultés financières des États, de moins en moins capables de soutenirun secteur public défaillant, un grand nombre de pays d’Afrique ont amorcé des réformes ins-titutionnelles au début des années 1990, sous l’impulsion des bailleurs de fonds. Dans la plu-part des cas, compte tenu des difficultés de gestion et de la mauvaise situation financière résul-tant de l’accumulation de résultats déficitaires sur plusieurs années, il a fallu démarrer leprocessus par une phase de restructuration de ces entreprises. Cette opération de désengage-ment de l’État du secteur électrique a déjà abouti, dans certains pays (Côte d’Ivoire, Gabon,Guinée, Maroc, Tunisie, Ghana, etc.), à la privatisation des sociétés concernées. Dans les autrespays (Algérie, Bénin, Cameroun, Mali, Sénégal, Congo, Tchad, Niger, Mozambique, etc.), lesréformes se poursuivent et se trouvent à un stade relativement avancé.

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meilleur équilibre financier et d’améliorer les per-formances de l’entreprise. Dans de nombreux cas,c’est la tarification au coût marginal qui est adop-tée, ce qui suppose que l’on fait payer au consom-mateur le coût réel des fournitures d’énergie élec-trique.

Mais en pratique, cette «vérité » des coûts s’avèredifficilement applicable car il faut, malgré le nou-veau contexte, concilier les objectifs de rentabilitéfinancière de l’entreprise avec les exigences de lapolitique économique et sociale de l’État. D’où lemaintien de la péréquation de certains tarifs (bassetension, pour le Gabon) et du tarif social pour pré-server le niveau de vie des populations les plus défa-vorisées.

Il y a en outre le problème lié à la révision tari-faire et à sa périodicité. Avant les réformes, l’État pou-vait décider du blocage des tarifs d’électricité pen-dant plusieurs mois pour des raisons économiques ousociales, une subvention d’équipement étant octroyéeà l’entreprise pour compenser le déficit.

Le nouveau système prévoit une révision tri-mestrielle des tarifs, en fonction de l’évolution des para-mètres économiques nationaux et internationaux.De ce fait, la moindre variation des cours du pétrole,par exemple, se répercute sur les prix des produitspétroliers (en raison du mécanisme d’indexation auxcours mondiaux du baril de pétrole) et sur les tarifsde l’énergie électrique, pour tenir compte des chargesliées aux combustibles.

Cette situation n’est pas toujours perçue favo-rablement par les consommateurs habitués à un sys-tème de prix administrés permettant d’amortir ou debloquer temporairement l’évolution de tarifs. Aussi,certains clients (industriels surtout), qui trouvent lestarifs trop élevés et leurs variations trop brutales,menacent parfois de passer à l’autoproduction.

D’où la nécessité de mettre en place un méca-nisme de révision tarifaire susceptible d’amortir lesvariations brutales des prix de l’électricité, par exempleun système dans lequel la variation des différentsindices qui influent sur les tarifs ne serait prise en comptequ’une fois par an. Cette révision annuelle des tarifspourrait avoir un impact positif auprès des consom-mateurs, notamment si les variations sont faibles.

L’entreprise doit désormais être performante nonseulement pour honorer les engagements contrac-tuels avec l’État, entre autres, l’amélioration de ladesserte des populations en électricité, mais aussipour assurer, le plus régulièrement possible, une dis-tribution de dividendes à ses actionnaires.

En outre, l’État n’a plus la possibilité d’octroyerdes subventions, compte tenu des nouvelles condi-tions d’exploitation du service public de l’électricité,qui doivent garantir le libre jeu de la concurrence, eten raison de ses propres difficultés budgétaires consé-cutives à l’alourdissement de la dette et à la baisse

des cours des matières premières exportées. Parailleurs, les bailleurs de fonds sont de plus en plusexigeants dans l’octroi de crédits (conditions finan-cières peu favorables pour l’emprunteur, notammentle niveau relativement élevé des taux d’intérêt).

Dans ces conditions, la hausse des tarifs appa-raît très souvent comme le moyen le plus simple pourpermettre à l’entreprise de dégager une capacité d’au-tofinancement suffisante pour la réalisation des inves-tissements nécessaires.

PROBLÈMES FISCAUXL’une des conséquences de la privatisation est le pas-sage d’un régime fiscal préférentiel à une fiscalité dedroit commun. Ce changement de régime fiscal, quioblige l’entreprise à s’acquitter de tous les impôts,droits, taxes et redevances prévus par les textes envigueur, a naturellement une incidence sur les tarifsd’électricité.

Dans ce sens, quelques problèmes sont à noteraux niveaux fiscal et parafiscal, notamment en cequi concerne la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA) etles contributions spéciales. S’agissant de la TVA, l’in-troduction de cette taxe (18 % au Gabon), en 1995n’a fait qu’alourdir le prix de l’énergie électrique, déjàrelativement élevé par rapport aux autres pays de lasous-région. Le taux de la TVA est identique pourtoutes les activités non exonérées.

Or, l’électricité est non seulement une compo-sante essentielle du bien-être des populations, maisaussi un facteur de production fondamental pour lesentreprises, dans la mesure où il peut influer consi-dérablement sur la rentabilité financière des projetsd’investissement. De ce fait, à défaut d’une exoné-ration, on pourrait envisager d’appliquer un taux deTVA plus faible pour l’énergie électrique, dans le butd’alléger les dépenses des ménages et les chargesd’exploitation des entreprises.

Quant aux contributions spéciales, ce sont descotisations prélevées par la SEEG sur les consom-mations des abonnés (à l’exception des abonnéssociaux) et qui servent à alimenter le Fonds spécialÉlectricité, mis en place pour assurer la couverturedes dépenses des collectivités locales en matièred’éclairage public et d’extension des réseaux d’élec-tricité (la même démarche est appliquée pour lesconsommations d’eau potable). Ces contributionsdoivent être reversées au Trésor Public par la SEEG,ce qui n’est pas sans poser quelques problèmes,notamment lorsque le client État accumule des arrié-rés au titre de ses consommations d’eau et d’élec-tricité, engendrant des difficultés de trésorerie pourl’entreprise.

De plus, les difficultés financières liées à la baissedes cours des matières premières (notamment lepétrole) et à l’alourdissement de la dette, ne per-mettent pas toujours à l’État d’assurer le paiementrégulier de ses factures d’électricité et d’eau, qui

représentaient près de 57 % de l’encours client de laSEEG en 1998, soit environ 11 mois de consomma-tion.

Cette situation est naturellement préoccupantepour l’État, qui doit non seulement préserver l’équi-libre économique et financier de la société d’électri-cité, conformément à la convention de concessionsignée dans le cadre de la privatisation, mais aussifaire face à plusieurs contraintes, notamment le règle-ment de la dette extérieure, qui ne cesse de s’alour-dir, le paiement de la dette intérieure et la résolutiondes problèmes sociaux (éducation, santé, emploi,etc.).

LA DESSERTE DES ZONESPÉRIURBAINES ET DES CENTRESSECONDAIRESLes quartiers situés à la périphérie des grandes villeset les petits centres sont généralement considéréscomme étant structurellement déficitaires, pour diversesraisons, notamment la faiblesse ou la dispersion de lapopulation, le niveau peu élevé des revenus et le carac-tère limité des besoins en électricité. De ce fait, lesentreprises d’électricité ne prennent pas toujours le risqued’alimenter ces localités, compte tenu de la rentabi-lité précaire de l’opération.

Cependant, le nouveau contrat de concessionliant l’État à l’entreprise d’électricité fait générale-ment obligation à cette dernière d’améliorer le tauxde desserte sur la base des objectifs fixés au départde la concession. D’où un certain nombre de pro-blèmes aux niveaux technique, commercial et juri-dique.

Sur le plan technique, il s’agit de trouver le typed’équipements permettant une alimentation opti-male en électricité des populations habitant les zonessituées à la périphérie des grandes villes et dans lescentres secondaires. Plusieurs options sont envisa-gées, entre autres, l’extension des réseaux existants,la construction de centrales thermiques ou hydro-électriques adaptées au niveau de la demande et ledéveloppement des énergies nouvelles et renouvelables(solaire, éolienne, biomasse, etc.).

Le problème se pose aussi bien pour l’entreprised’électricité qui ne peut pas laisser s’échapper unepartie de sa clientèle, bien qu’elle soit marginale(moins de 10 % de son chiffre d’affaires annuel), quepour l’État qui doit améliorer les conditions de vie de

l’ensemble de la population en réalisant le minimumd’infrastructures économiques et sociales nécessaire.

Pour l’entreprise d’électricité, il s’agit essentiel-lement de satisfaire la demande d’énergie électriqueau moindre coût en investissement et en exploita-tion, de manière à garantir la rentabilité financièrede l’opération. Cette condition est difficilement rem-plie dans les zones périurbaines et encore moins bienremplie dans les petits centres (moins de 1 000 habi-tants).

Pour l’État, il s’agit principalement d’atteindre desobjectifs économiques et sociaux, en permettant l’ac-cès du plus grand nombre d’habitants au confort liéà l’utilisation de l’énergie électrique et en facilitantle développement d’activités économiques et socialesdans les centres les plus éloignés du pays (dévelop-pement d’activités industrielles et commerciales,construction d’écoles et de dispensaires modernes).

Le problème majeur, pour l’État, est celui dufinancement nécessaire à la réalisation des différentsprojets d’électrification, notamment en zone rurale.Le second problème est celui de la gestion des équi-pements mis en place.

Un choix doit être fait entre la gestion par unorganisme public, avec des perturbations prévisiblesdans l’alimentation en raison des difficultés finan-cières de l’État, la gestion par une structure privée etla gestion communautaire, par le biais d’une coopé-rative administrée par les bénéficiaires des projets.

Cette dernière option est la mieux adaptée dansde nombreux cas, mais les mentalités des popula-tions ne semblent pas toujours faciliter la mise enplace et le fonctionnement de telles structures. Celanécessite préalablement des actions d’informationet de sensibilisation dont le succès n’est pas garantià très court terme.

Sur le plan commercial, il s’agit de trouver lemécanisme d’abonnement, de relevé et de factura-tion adéquat, ainsi que le mode de tarification appro-prié pour des populations dont les revenus sont géné-ralement bas et les besoins en énergie électriquerelativement limités. Ce qui suppose une consom-mation d’électricité particulièrement faible, surtouten zone rurale.

Sur le plan juridique, il s’agit de trouver une solu-tion idoine au problème d’urbanisation des zones oudes localités à desservir. Le manque d’urbanisation

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Évolution de l’encours client de la SEEG (en milliards de FCFA)

Année 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998

Encours client 18,04 20,62 29,14 26,98 38,34 16,64 23,41

Chiffre d’affaires 44,89 45,82 47,95 57,05 61,58 60,52 63,11

Compte client sur chiffre d’affaires 0,40 0,45 0,61 0,47 0,62 0,27 0,37

Compte client en mois de chiffre d’affaires 4,82 5,40 7,29 5,67 7,47 3,30 4,45

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de nombreuses villes du pays est un sérieux obstacleà la desserte en électricité des populations vivantdans les quartiers populaires et surtout dans les zonessituées à la périphérie des centres urbains. Ces quar-tiers populaires et ces zones périurbaines se développenten effet de manière anarchique, compte tenu de lacroissance rapide de la population et de la complexitédu processus d’obtention des titres de propriété.

Devenir propriétaire d’une parcelle de terrainétant particulièrement difficile en raison des nom-breuses étapes administratives à franchir et de ladurée relativement longue de l’opération, plus de lamoitié des habitations des grands centres urbainsont été construites dans l’illégalité et, souvent, dansdes zones non viabilisées et difficilement accessibles.

Dans ces conditions, la desserte directe des popu-lations vivant dans ces zones est presque impossible,d’où le développement de réseaux pirates (alimen-tation illégale et précaire de plusieurs logements àpartir d’un seul abonnement), qui engendrent despertes considérables sur les réseaux de distribution,notamment des fraudes.

Ce phénomène a pris une telle ampleur qu’uneintervention des pouvoirs publics s’avère indispen-sable, aussi bien pour faciliter les procédures d’ac-quisition de terrains que pour aménager les quar-tiers populaires et les zones périurbaines en créantsuffisamment de voies d’accès pour permettre la des-serte des consommateurs dans des conditions acceptables.

CONCLUSIONLes réformes institutionnelles qui s’opèrent dans lesecteur électrique en Afrique ont pour but d’assurerle redressement et l’amélioration des performancesdes entreprises d’électricité, avec la fin de l’inter-vention de l’État dans la gestion et la mise en placedes outils nécessaires pour assurer l’équilibre éco-nomique et financier du service public, notammentla tarification au coût marginal, qui est censée reflé-ter les coûts réels de production.

Cependant, tous les problèmes ne sont pas réso-lus pour autant, car des difficultés subsistent auniveau tarifaire, en matière fiscale et au niveau de l’élec-trification des quartiers périphériques et des centressecondaires.

En conséquence, des mesures adéquates doiventêtre prises, tant au sein de l’entreprise d’électricité qu’auniveau des pouvoirs publics, afin d’améliorer lesconditions d’exploitation du service public, d’ac-croître les possibilités de desserte des populationset d’alléger le poids de l’énergie électrique dans lebudget des consommateurs.

Concertation francophone à la CdP-5, Bonn (Allemagne)

Dans le cadre de la 5e Conférence des Parties (CdP-5) à la Convention Cadre des Nations Unies sur le ChangementClimatique, qui s’est tenue à Bonn, du 25 octobre au 5 novembre 1999, les pays membres présents ont organiséune série de rencontres au cours desquelles ils se sont donné un plan d’action pour renforcer leurs capacités denégociation. Le plan d’action, qui couvre la période allant de la CdP-5, en novembre 1999, à la CdP-6, en novembre2000, comprend:

• Un atelier sur les communications nationales, financé et organisé en collaboration avec le PNUE et lePNUD, dans la 3e semaine de janvier, à Dakar (Sénégal) ;

• L’atelier bilan post-CdP-5 prévu à Marrakech, du 29 février au 3 mars 2000. Le calendrier des travaux est struc-turé autour de 3 sessions : i) le bilan de la COP-5 ; ii) typologie par secteurs des projets alliant développementdurable et changement climatique; iii) élaboration d’une stratégie de négociation pour la CdP-6.

L’atelier introduit une innovation majeure. Le bilan des négociations sera fait par les négociateurs eux-mêmes.Des tandems de 3 délégués (2 du Sud, 1 du Nord) ont été constitués autour des différents points à l’ordre du jourde la CdP-5. L’idée est que chaque tandem porte son point au cours des prochaines rencontres et en devienne lespécialiste pour les pays membres :

• Des rencontres en marge de la SB-12 et de la SB-13 (session des organes subsidiaires), prévues en mai etseptembre 2000, à Bonn, avec des Side Events et des échanges sur les négociations ;

• Un atelier sur la formulation de projets éligibles au Mécanisme de Développement Propre (MDP) dont lecontenu, la date et le lieu seront définis à l’occasion de l’Atelier de Marrakech et de la SB-12;

• Un atelier préparatoire de la CdP-6 prévue à La Haye, en principe à la fin 2000. L’atelier préparatoire pour-rait être accueilli à Bruxelles, par la Région wallonne.

DANS CE NUMÉROBRÈVES

Plusieurs pays africains sont engagés dans desréformes des entreprises publiques, conformément auxprogrammes d’ajustements structurels du FMI. Cesréformes concernent la commercialisation, la miseen place d’un cadre légal et institutionnel et d’unprocessus transparent de régulation, afin de mini-miser les interventions discrétionnaires des gouver-nements. Elles donnent également aux sociétés d’élec-tricité l’occasion de faire des alliances stratégiquesavec les firmes étrangères afin d’accroître leur efficience.

Des expériences sont déjà engagées ou envisa-gées en Afrique et suivant diverses options: gestiondéléguée, affermage, concession, production indé-pendante, etc., toutes dans l’optique d’améliorer lesperformances des sociétés et d’apporter les ressourcesessentielles au développement du secteur. L’Afrique,comme d’autres pays du Tiers-Monde, se trouve ainsi

engagée dans les grandes mutations du secteur. Laresponsabilité de la fourniture d’énergie électrique,comme dans les pays développés, est en train depasser inexorablement sous le contrôle des sociétésprivées, surtout multinationales.

LES PROBLÈMES DE L’ÉLECTRIFICATION RURALELes mutations, dans le secteur, sont induites par lesbesoins de compétitivité dans un marché électriquelibéralisé, par la recherche de financement de la pro-duction et du transport, nécessaire à l’expansion

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Vincent MAINSAH, Société nationale d’électricitédu Cameroun (SONEL).

Les réformes du secteur électrique et l’électrification rurale

Vincent MAINSAH

Le secteur électrique, jadis cantonné dans les frontières nationales, est en train de se mondia-liser grâce à la libéralisation et à l’introduction de la compétition en son sein. Ces facteurs ontinduit progressivement de nouvelles structures autour des concepts de dé-intégration (unbund-ling), d’accès des tiers au réseau de production indépendante (IPP), et d’acheteur unique, etun vaste mouvement de privatisation du secteur. Certaines sociétés, ainsi que de nouveauxacteurs se sont lancés dans la compétition, mondialement, avec de nouveaux types de finan-cements (BOT, BLT, ROT…) pour satisfaire la forte demande des pays nouvellement indus-trialisés ou pour acquérir des sociétés d’électricité dans le cadre de privatisations et de contratsde gestion.

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économique surtout des pays nouvellement indus-trialisés, et par la nécessité de préserver l’environ-nement.

En Afrique, on procède surtout à la privatisationde la gestion pour retrouver le potentiel financierperdu dans plusieurs sociétés à la suite de la mau-vaise gestion et de la productivité insuffisante dessystèmes énergétiques. On espère ainsi garantir lasécurité d’alimentation des pays concernés, y appor-ter les technologies nécessaires et les pratiques de bonnegestion. Les réformes en cours ne semblent pas tenircompte, à une échelle appréciable, des problèmesd’expansion de l’électrification rurale dans ces pays,dans un contexte où les institutions de financementtraditionnelles ont déjà annoncé l’impossibilité definancer tous les projets du secteur.

Si les investisseurs privés ne peuvent s’intéres-ser qu’aux projets au-dessus d’un taux de rentabilitédonné et si les sociétés d’électricité ne doivent opé-rer, désormais, que selon les lois commerciales du mar-ché, l’électrification rurale pourrait se trouver mena-cée. D’autant que les réformes n’évoluent pas versune prise en compte des spécificités du monde ruralen Afrique.

La nature dispersée des charges, en zone rurale,demande un investissement très lourd pour la construc-tion des réseaux, mais les revenus attendus des pro-jets sont très faibles, eu égard aux faibles consom-mations d’énergie électrique attendues au moinspendant les premières années. Le financement desprojets constitue un obstacle majeur au développe-ment de l’électrification rurale, étant donné une ren-tabilité économique et financière très faible, parfoismême négative.

Le développement de l’électrification rurale setrouve freiné non seulement par les difficultés definancement, mais aussi par d’autres obstacles, telsque le développement anarchique des électrifica-tions sans planification, les ingérences politiques,les mauvaises décisions d’investissements, évidentes,même dans les choix technologiques et de la tarifi-cation, l’absence de données fiables sur le milieurural, et d’une infrastructure technique et de servicepour soutenir l’exploitation des réseaux. D’une manièregénérale, elle est victime de mauvaise gestion dessociétés d’électricité, incapables de mettre en placeun système de gestion clientèle tenant compte descontraintes du milieu rural.

Les communautés rurales peuvent pourtant aspi-rer légitimement à l’accès à l’électricité, qui joue unrôle central dans la satisfaction des besoins essen-tiels pour le développement socioéconomique durabledes populations. L’électrification rurale demeure doncun domaine dans lequel la politique sociale et éco-nomique des gouvernements doit s’exercer de façonprivilégiée, même si les gouvernements ne sont pasen mesure d’assurer directement le financement àun degré appréciable. Le défi est donc de trouver dessolutions aux problèmes posés par l’accélération del’électrification rurale, afin que les populations rurales

puissent entrer dans l’ère de la modernité, malgréun contexte de financement difficile.

LE DÉVELOPPEMENT INTÉGRÉ:UN IMPÉRATIF La vie moderne, à laquelle aspirent les populations,comporte des besoins essentiels: l’eau pour la consom-mation et pour l’irrigation, la santé publique et laprévention des maladies, l’éducation et les infra-structures routières. Si l’éclairage domestique et publicaugmente le confort et la durée utile de la journée,pour les activités productrices et les études le soir, lesmoteurs électriques, les pompes, les réfrigérateurs etles systèmes de contrôles électriques pour le traite-ment des eaux permettent de faciliter l’accès à cesbesoins et créent des possibilités pour le dévelop-pement de l’artisanat et des industries agricoles.L’électricité joue donc un rôle central dans le déve-loppement socioéconomique du monde rural et contri-bue ainsi à freiner l’exode vers les villes.

Dans les divers pays, plusieurs services et orga-nisations non gouvernementales œuvrent en zonerurale, chacun dans le but de contribuer au relève-ment du niveau de vie des populations. Ces inter-ventions ne sont pas toujours coordonnées, et leurefficacité est souvent médiocre. Pour plus d’efficacité,l’électrification rurale devrait être intégrée à d’autresprojets de développement des populations dans lecadre de l’aménagement du territoire.

NÉCESSITÉ DE PLANIFICATIONL’espace rural est vaste, et le développement desréseaux électriques, dans cet espace, demande unedémarche ordonnée. Autant les pressions sont nom-breuses, et les disponibilités financières limitées, parrapport aux besoins, autant la frustration des popu-lations non desservies peut être grande.

Au sein des pays africains, il existe une disper-sion régionale qui reflète un déséquilibre socioéco-nomique important et rend délicates les décisions d’ex-pansion d’électrification. On déplore souvent le manqued’équité dans la distribution des projets d’électrifica-tion, sources de progrès. Ces projets sont souvent réa-lisés au coup par coup et parfois au gré de l’aide bila-térale trouvée. Les dirigeants des sociétés d’État nesont pas en mesure de résister aux pressions d’ordrepolitique dans la réalisation de projets non rentables,au détriment des projets rentables pourtant prévus.C’est la raison pour laquelle les défenseurs de la pri-vatisation soutiennent que quelles que soient les per-formances réalisées par le gouvernement, dans le cadrede la réforme des sociétés d’État, celles-ci finissentpar se dégrader rapidement à cause des interventionsdiscrétionnaires des gouvernants, dont les programmesdépendent des élections.

Pour les raisons d’égalité de traitement, presquetous les gouvernements pratiquent la péréquationdes tarifs à l’échelle nationale. Ces tarifs ne sont pastoujours établis en fonction des coûts réels d’ex-ploitation. On observe dans plusieurs pays, des tarifs

moyens en dessous des coûts moyens du kWh, uneindication que les politiques gouvernementales, enmatière d’électrification, ne peuvent être poursuiviesde manière durable. L’électrification rurale se trouve,à la longue, victime d’une tarification inappropriée.Qui doit payer le coût de l’électrification rurale?

Ces insuffisances procèdent de l’absence d’uneplanification, d’une politique d’électrification d’en-semble bien articulée, de critères bien appliqués, làoù ils existent, et compatibles avec les contraintes desressources.

Elles procèdent également du choix des modèlesd’électrification, étant entendu que l’électrificationrurale sert en même temps à l’amélioration des condi-tions de vie et au développement économique, demême que l’électricité sert aussi bien à la consom-mation qu’à la production. Faut-il électrifier systé-matiquement les localités d’une zone ou d’une régiondonnée, ou faut-il d’abord procéder à une électrifi-cation sélective des localités capables de dégager lecash-flow nécessaire au financement des autres loca-lités, à rentabilité plus faible? Faut-il d’abord satis-faire les besoins des ménages, leur donner le strictnécessaire pour améliorer leurs conditions de vie,pour ensuite développer les ouvrages nécessairesaux besoins de développement économique? La solu-tion réside sans doute dans une électrification éche-lonnée dans le temps pour satisfaire les besoinssociaux et économiques d’une région ou du paysavec les ressources disponibles. Cette satisfactiondépendra de la capacité des populations rurales àpayer les raccordements et leur consommation.

Mais il ne suffit pas de formuler les politiques etles plans de développement de l’électrification rurale.Il faut aussi les rendre opérationnels. Pour cela, il fautdes institutions capables de réaliser ces plans, les-quelles ne sont pas toujours disponibles et doiventêtre créées et constituées de toutes pièces. De plus,les populations concernées doivent être impliquées,afin de rendre les projets durables. C’est le résultatd’une volonté politique.

UN ORGANISME CHARGÉ DE L’ÉLECTRIFICATION RURALELa structure institutionnelle du secteur a un impactconsidérable sur son financement et son dévelop-pement. Si certains gouvernements ont pu s’appuyersur leurs sociétés nationales pour réaliser un tauxd’électrification appréciable (cas de la Tunisie et del’Algérie), d’autres gouvernements africains ont plu-tôt abandonné l’électrification rurale à des sociétésd’électricité sans ressources et souffrant déjà desmaux des sociétés d’État. Cela se traduit par un tauxde desserte très faible des zones rurales dans la plu-part des pays africains. Mais les sociétés d’électri-cité sont de plus en plus pressées de fonctionnercomme des entités commerciales. Elles sont égale-ment pressées par les populations de réaliser l’ex-pansion de l’électrification rurale. Ces deux rôlessont d’une gestion conflictuelle quand on se rappelle

le caractère non rentable de l’électrification rurale.Il faut donc envisager la séparation institutionnellede ces rôles entre :– Une composante, constituée par un ou plusieurs

opérateurs, pour l’exploitation et l’expansion dusystème, des projets dont la rentabilité permetd’attirer le financement commercial ou les capi-taux privés ;

– Un organisme pour assurer l’encadrement et lefinancement des projets d’électrification rurale,socialement nécessaires, mais dont la rentabiliténe permet pas d’attirer les capitaux privés ou lefinancement commercial.

Dans ce dernier, le gouvernement pourrait finan-cer directement les projets, y canaliser les dons etles financements obtenus à conditions acceptableset y utiliser d’autres instruments pour l’accélérationde l’électrification. Ces instruments pourraient êtrechoisis parmi :– le Fonds d’Électrification Rurale,– les subventions de l’État,– le fonds d’amortissement des charges de l’élec-

trification rurale,– le fonds de péréquation pour compenser les tarifs

spéciaux accordés en milieu rural,– les rabais spéciaux pour certains usages en milieu

rural.L’organisme chargé de l’électrification rurale

devrait tirer le meilleur parti des fonds internatio-naux, tels que des fonds pour la promotion des énergies renouvelables – Fonds Mondial pourl’Environnement, crédits spéciaux de la Banque mon-diale et des autres institutions financières de déve-loppement. C’est le Fonds d’Électrification Ruralequi sera privilégié et géré par cet organisme, qui devray canaliser les diverses contributions et dons, à l’ex-ception de l’assistance adressée directement auxcommunautés dont il sera informé, et assurer enmême temps la normalisation des techniques et pra-tiques.

Le monopole de distribution devrait être levédans les zones non encore desservies, et les com-munes, les organisations non gouvernementales, lesopérateurs privés et les bénéficiaires eux-mêmesdevraient avoir toute latitude de s’impliquer dans ladistribution de l’électricité. La multiplicité des inter-venants devrait aider davantage à l’accélération del’électrification rurale. L’organisme chargé de l’élec-trification rurale devrait canaliser les efforts des diversintervenants, rechercher les financements et appor-ter toute l’aide possible.

Ne serait-ce pas l’occasion de privatiser la com-posante qui s’occupera de la partie commerciale-ment viable, dont les redevances pourront contri-buer au financement de la composante sociale ?L’opérateur privé intervenant dans tout projet au-dessus d’un seuil de rentabilité donné prendra encharge l’électrification rurale dont la rentabilité seconformera à ce critère. Ce sera le cas de certainesinitiatives d’électrification régionales, pour lesquelles52

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on ne tiendra pas compte des coûts de productionet de transport dans les calculs de rentabilité, à l’ex-ception du coût du combustible.

Bien que l’organisme chargé de l’électrificationrurale soit public, il devra fonctionner à distance desinterventions discrétionnaires du gouvernement etdes ingérences politiques. Les critères mis en placepour le développement rural seront respectés. Lacomposition de son conseil d’administration com-portera une forte représentation des projets del’Association des Collectivités Locales, qui veilleraà l’équité dans la distribution des projets.

Il faut noter que l’organisme chargé de l’électri-fication rurale ne s’occupera pas directement de lagestion des projets. Il les confiera aux distributeursou aux entreprises qualifiées dans les conditionscommerciales et suivant un processus transparentd’appels d’offres. L’exécution des projets se fera sousle contrôle technique rémunéré des distributeurs, àqui reviendra la charge d’en assurer l’exploitation.

TECHNOLOGIES ALLÉGÉES,BASSES CONSOMMATIONS L’ampleur des réseaux à construire est considérable,étant donné la nature dispersée des charges à ali-menter. Le rendement au kilomètre de réseau desfoyers alimentés est très faible par rapport au ren-dement en secteur urbain, et va en diminuant au furet à mesure que progressent les programmes d’élec-trification. Les localités très éloignées du réseau sontnormalement alimentées par des réseaux classiquesisolés à partir de groupes électrogènes. Ici, le coûtdu combustible pèse considérablement sur le coût d’ex-ploitation, souvent très déficitaire au regard des reve-nus attendus.

Le coût des ouvrages et leur exploitation pour-raient compromettre l’accélération de l’électrifica-tion rurale. D’une manière générale, les caractéris-tiques techniques des réseaux (niveau de tension,distribution triphasée ou monophasée, types deconstruction, sources d’énergie) peuvent déterminerde manière appréciable la viabilité économique etfinancière des projets. On observe couramment queles réseaux ruraux sont établis avec une technologieinappropriée, souvent surdimensionnés et trop sophis-tiqués par rapport à la charge alimentée et à la capa-cité technique des employés.

Des systèmes allégés, moins coûteux mais mal-heureusement moins populaires, existent dans lesecteur et permettent de satisfaire l’essentiel desbesoins des ménages et même de l’artisanat, dansles localités d’un poids économique réduit dont lesbesoins resteront faibles pendant longtemps. Certainspays sont déjà engagés dans l’utilisation de ces sys-tèmes, d’autres en sont encore aux expériences quitentent de réduire les coûts des ouvrages de distri-bution. Il s’agit des solutions allégées ou différen-ciées :

– la distribution à partir des dérivations monopha-sées, (MALT, SWER, 2 phases), avec des écono-mies allant de 10 % à 50 % suivant le cas,

– des branchements à faible consommation, sanscomptages, avec limiteurs de courant (2, 2,5A)aux tarifs forfaitaires,

– comptages à prépaiement,– pour les localités éloignées du réseau, recours à

des technologies alternatives de fourniture d’éner-gie par des micro-réseaux, suivant les conceptsde l’électrification rurale décentralisée (ERD) et ayantcomme source l’énergie solaire, le petit thermiquediesel, les micro-centrales hydroélectriques, l’éner-gie éolienne ou un système hybride utilisant deuxou plusieurs sources.

La rentabilité des micro-réseaux d’énergie élec-trique d’origine solaire ou de la petite thermie estbasée sur leur utilisation pendant une durée limitéeet des récepteurs à basses consommations : éclai-rage CFL, radios, téléviseurs noir et blanc, et éven-tuellement pompage de l’eau et réfrigération. La ren-tabilité repose également sur la prise en charge de lagestion par les associations de consommateurs etpar les opérateurs privés, qui reçoivent parfois dessubventions pour le financement des équipements.Quels que soient les systèmes d’électrification sub-ventionnés (réseaux classiques, réseaux dérivés ouERD), les subventions accordées par un promoteur,même gouvernemental, doivent être « intelligentes ».Si les études, les premiers équipements et certainsintrants peuvent être subventionnés, directement ouindirectement (douanes, taxes, etc.), il est financiè-rement inconcevable d’électrifier à grande échelleles zones rurales dans un contexte d’exploitationdurablement subventionné. Subventionner l’exploi-tation consiste inexorablement à subventionner lamauvaise gestion.

Mais l’articulation du modèle d’électrification etsurtout l’acceptation par les populations concernéessont déterminantes. En effet, qu’il s’agisse de solu-tions allégées du modèle d’expansion du réseau oude solutions de distribution basse consommationisolée, il faut qu’elles soient acceptées par les béné-ficiaires. Au premier abord, ceux-ci ont tendance àpercevoir les solutions comme une forme dégradéed’énergie, comme une autre source de marginalisa-tion qu’il faut combattre. Une stratégie de commu-nication est nécessaire pour rassurer les commu-nautés concernées et les convaincre du bien-fondédu choix et des limites des fournitures.

La distribution basse consommation, aussi néces-saire soit-elle, ne peut servir qu’à la survie d’unepopulation en attendant la véritable source d’éner-gie, qui sera fournie par le réseau pour servir lesbesoins de développement économique. Dans lamesure du possible, les micro-réseaux seront établisde manière à ce qu’ils s’intègrent facilement auxréseaux classiques à venir.

PROMOTION DES USAGESPRODUCTIFSLe niveau de consommation, en milieu rural, estfaible et peut rester ainsi pendant longtemps si rienn’est fait pour encourager l’usage de l’énergie élec-trique dans les activités productrices, en particulierdans l’agriculture ou la petite industrie agricole.Quelques utilisations de l’énergie électrique à fortedemande, dans les localités rurales, où la tarifica-tion est appropriée, sont souvent suffisantes pourrentabiliser l’électrification totale de ces localités.

L’énergie électrique qui arrive en milieu rural pourla première fois est une commodité nouvelle dont lesavantages et multiples possibilités d’usage sont incon-nus des populations. La force musculaire reste pré-pondérante, en milieu rural, malgré la présence dupotentiel que représente la force motrice d’origineélectrique. L’utilisation de l’électricité chez le consom-mateur suppose que celui-ci dispose d’un branche-ment, des installations intérieures et des récepteurs.Ceux-ci doivent être financés par un consommateurrural en général moins nanti que celui de la zoneurbaine. Il y a aussi le danger que l’enthousiasmedes consommateurs ruraux à l’arrivée de l’électricitéles amène à faire des dépenses démesurées pourl’électricité, au détriment d’autres nécessités.

Négocier, donc, le passage du système manuelà l’utilisation de la force motrice d’origine électrique,dans le concassage des grains, la pression de l’huile,le pompage de l’eau pour les ménages et pour l’irri-gation, reste toujours un grand problème. Le laisserà la seule diffusion naturelle dans le milieu rural peutprendre beaucoup de temps avant de bénéficier desavantages économiques de l’énergie électrique. Deplus, l’acquisition en milieu rural des équipementsélectriques demande aussi la mise en place d’uneinfrastructure de maintenance des équipements. Lessociétés d’électricité, en Grande-Bretagne et en Irlande,non seulement maintiennent encore aujourd’hui, enmilieu rural, les magasins pour la vente des équipe-ments à crédit, mais aussi assurent un service d’ins-tallation et de maintenance des équipements électriques,tous introduits depuis plusieurs années.

La transition du monde rural vers une écono-mie électrique serait facilitée par la mise en placed’un organisme de crédit spécialisé dans le finance-ment des branchements, des installations et des équi-pements électriques utilisés en milieu rural. Cette« banque électrique » pourrait même canaliser les fondsmis à la disposition du pays par les ONG et autresorganisations internationales intervenant en milieurural et servir d’instrument de régénération des fondspour rendre leurs interventions durables.

La vitesse de transition vers l’économie élec-trique pourrait bien dépendre des actions de pro-motion, des mesures d’incitation à l’acquisition d’équi-pements électriques. Elle dépendra non seulement

de la seule force du marché, mais aussi d’une certainevolonté politique.

GESTION DÉLÉGUÉE AUX COMMUNAUTÉSL’un des problèmes qui affectent la rentabilité desprojets d’électrification rurale est celui du coût d’ex-ploitation du service à une clientèle dispersée. Plusieursusagers alimentés ne sont pas facturés à cause d’uneorganisation inefficace à laquelle s’ajoutent des pro-blèmes logistiques résultant de la faiblesse des infra-structures routières et des services. Ces derniers rendent toute infrastructure de maintenance coû-teuse et hasardeuse, et le manque d’employés qua-lifiés contribue à diminuer la disponibilité des ouvrageset la qualité du service.

Aux pertes non techniques liées aux problèmesde gestion s’ajoute le risque lié à la manipulation,lors des transferts de fonds. L’organisation classiquedu service à la clientèle en milieu rural pose pro-blème. Il faut donc y associer d’autres institutionspour l’aider, dans la mesure du possible, à réduire lescoûts d’exploitation.

Aux États-Unis, les coopératives de consom-mateurs gèrent depuis de nombreuses années le ser-vice en milieu rural. Les options prises dans l’orga-nisation de la gestion des ERD vont dans ce sens. Lespromoteurs encouragent la participation à la gestionet à la prise en charge partielle de la maintenance parles communautés, dans le cadre des associationsd’usagers. Ce concept de la délégation de l’exploi-tation à une agence nommée par les consommateurset même à un opérateur privé local (artisan ou PME)doit être encouragé et étendu aux localités alimen-tées par les réseaux classiques. Le recouvrement descréances sera ainsi facilité et les pertes non tech-niques seront réduites grâce à une connaissance plusapprofondie du terrain par l’agence de consomma-teurs ou par l’opérateur privé local. La pression socialeet la solidarité entre les membres d’une association,que l’on observe déjà dans les tontines, seront d’unapport appréciable.

L’exploitation des avantages locaux pourraitréduire le coût des facteurs et contribuer d’une manièrenotable à la réduction des coûts de service à la clien-tèle. La mise en place d’une organisation avec délé-gation de l’exploitation même partielle, demandeune réforme institutionnelle qui permette de régulercette activité dans laquelle les achats et ventes d’éner-gie électrique par des tiers sont concernés.

La délégation de l’exploitation locale de certainestâches ne devrait pas diminuer la responsabilité dudistributeur vis-à-vis du suivi des études, de laconstruction et de la maintenance des réseaux. Le dis-tributeur aura tout intérêt à assurer une bonne for-mation des intervenants locaux afin de diminuer sesinterventions chez les usagers et sur le réseau bassetension. Les abonnés se limiteraient aux usagers

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importants et aux agences de coopératives des consom-mateurs, ce qui contribuerait à réduire les charges d’ex-ploitation.

Les distributeurs devront changer leur mentalitépour se libérer de l’emprise d’un style de gestion dutype fonctionnaire et adopter un style commercial.Ils auront à gérer les rapports transactionnels avecles partenaires, rapports qui sont essentiellement dif-férents des rapports hiérarchiques habituels. C’est,en quelque sorte, un ajustement culturel qui s’im-pose.

CONCLUSIONSLes réformes du secteur peuvent constituer une bonneporte de sortie pour le développement de l’électrifi-cation rurale, qui était déjà, en Afrique, menacé parles performances des sociétés et la situation finan-cière des États. Les réformes permettent aux gou-vernements de se décharger des investissementslourds des systèmes électriques au profit des opéra-

teurs privés, pour mieux se concentrer sur le déve-loppement social, dont l’électrification rurale.L’intervention gouvernementale devra se faire à dis-tance, à travers un organisme national chargé del’électrification rurale, qui gérera un fonds d’électri-fication.

L’ouverture du domaine rural à plusieurs inter-venants, dont les communautés concernées, per-mettra l’accélération de l’électrification pour accroîtrele taux d’accès. Le développement du monde ruralpassera par une transition vers une économie élec-trique, laquelle dépendra des mesures incitatives etd’une volonté politique.

Les investisseurs étant peu intéressés par l’Afrique,où l’instabilité politique et les menaces de guerresconstituent un obstacle au développement plus redou-table que la crise économique qui la traverse actuel-lement. La paix est une condition pour le dévelop-pement, y compris le développement de l’électrificationrurale.

DANS CE NUMÉROBRÈVES

L’IEPF a organisé, du 23 au 25 novembre 1999 à Cotonou (Bénin), un atelier international sur la réforme régle-mentaire et les modalités d’organisation des secteurs de l’eau et de l’électricité.

Cette rencontre a réuni une quarantaine de responsables et décideurs du Burkina Faso, du Bénin, de la Guinéeet du Togo. Elle était dirigée et coordonnée par Dibongué KOUO avec la participation de :

Jean-David BILÉ, Président du Comité d’Études Gestion Économique et Financière de l’UPDÉA,

Jacques CORBIN, Vice-Président du Groupe RÉGIE Inc. du Canada,

Alioune FALL, Directeur de l’énergie au ministère des Mines, de l’Énergie et de l’Industrie du Sénégal,

François LABIE, Professeur Agrégé de Droit Public, à l’Université de Toulouse,

François OMBANDA, Président du Conseil d’administration de la société d’Énergie et d’Eau du Gabon,

Érik RICHER LA FLÈCHE, Avocat associé du Cabinet STIKEMAN ELLIOT du Canada.

À la lumière des questions posées par les participants béninois, burkinabè et guinéens, deux thèmes principauxont été abordés et ont constitué l’essentiel des échanges de cet atelier :

Dynamique, contenu et rôle des différents acteurs dans la restructuration de secteurs d’infrastructures tels que l’élec-tricité et l’eau.

Quelles sont les conditions de mise en œuvre et quelles sont les étapes de la dynamique de déroulement de larestructuration de secteurs d’infrastructures aussi capitalistiques que ceux de l’électricité et de l’eau?

– qui fixe les objectifs de la privatisation et sur quelle base le fait-il ?

– qu’en est-il du rôle que jouent les consultants dans ces processus, en particulier en ce qui concerne le conseillerfinancier, le conseiller juridique ou l’Ingénieur?

Les éléments d’un partenariat public-privé et leurs conséquences sur le fonctionnement du secteur réformé.

Dans le processus de privatisation des monopoles publics en charge du service de l’électricité et de l’eau:

Quels sont les types de partenariat public-privé qui existent et comment faire pour préserver les objectifs dedéveloppement des systèmes des pays africains, qui doivent malgré cette réorganisation accroître l’accès des popu-lations à l’énergie électrique et à l’eau potable? Et partant, quel traitement pour l’Électrification rurale?

(Suite à la page 58)

Ainsi le Sommet de Maurice a appelé à un soutienconcret aux efforts de restructuration économiquedes pays du Sud. Il a décidé de faire de la promotiondu partenariat une orientation structurante de lacoopération économique francophone.

Plus récemment, à Hanoï et à Moncton, la dimen-sion économique a été au centre des travaux duSommet de la Francophonie. Il y a été affirmé lavolonté d’inscrire la Francophonie dans la concertationet la coopération économiques internationales, paral-lèlement au renforcement des processus d’intégra-tion régionale au sein de la sphère francophone. Ils’agit notamment d’établir, à l’intérieur de cette sphère,un espace de coopération économique tourné enpriorité vers l’entreprise et son environnement juri-dique, institutionnel et financier, et fondé sur undéveloppement accru de partenariats Sud-Sud etNord-Sud, voire triangulaires Sud-Sud-Nord.

L’ÉNERGIE, UN SECTEUR FONDAMENTAL POUR LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE ET SOCIALPour les pays en développement, il existe une fortecorrélation entre le développement économique etla consommation d’énergie. Cette corrélation estencore plus significative si l’on se limite à la consom-mation des énergies commerciales ou à la consom-mation d’électricité. Il est, en effet, notoire que l’essor de la consommation d’énergie accompagnele processus de développement, voire le conditionne.

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El Habib BENESSAHRAOUI est Directeur exécutif de l’Institut de l’énergie et de l’environnementde la Francophonie.

Restructuration des secteurs électriques en Afrique:un champ d’action économique pour la Francophonie

El Habib BENESSAHRAOUI

Pris en considération par les chefs d’État et de gouvernement francophones dès leur premièreréunion à Paris en 1986, le développement de la coopération économique n’a cessé de s’affir-mer comme une préoccupation majeure des Sommets de la Francophonie.

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De ce point de vue, la situation des pays du Sudde l’espace francophone, notamment en Afrique, estpréoccupante. Elle pose le problème d’un dévelop-pement soutenu du secteur de l’énergie avec undouble enjeu : celui, d’une part, de l’industrialisa-tion et de la croissance économique et celui, d’autrepart, de l’accès des populations à un niveau de vieaccru et à une meilleure qualité de vie. En effet, dansson ensemble, le continent africain, qui compte 13 %de la population mondiale, ne consomme actuelle-ment qu’un peu moins de 3 % de l’énergie commer-ciale mondiale.

Ce chiffre cache, par ailleurs, de grandes dispa-rités: sur les 240 millions de TEP (tonnes équivalentpétrole) consommées par an, 40 % sont consomméespar l’Afrique du Sud et 40 % par l’Afrique du Nord,ce qui laisse à l’Afrique subsaharienne une part d’en-viron 20 %. Ce niveau moyen de consommation,faible, recouvre également de fortes inégalités entrevilles et campagnes.

On peut schématiquement avancer que le déve-loppement de l’énergie commerciale est entravé parle bas niveau de développement économique et socialet donc par un niveau de demande solvable tropréduit pour entraîner l’offre. À l’inverse, le dévelop-pement économique et social se trouve freiné parune offre énergétique faible et de prix élevé.

D’un autre côté, la production ou la mobilisationdes ressources énergétiques, le transport et la distri-bution de l’énergie nécessitent des investissementslourds, que les États ne peuvent plus mobiliser uni-quement sur le plan endogène. En effet, d’après lesprévisions du plan énergétique africain, le continentdevra plus que doubler sa capacité actuelle de pro-duction dans les deux prochaines décennies. Lesbesoins de financement correspondants ont été éva-lués à plus de 150 milliards de dollars américains,que l’épargne intérieure des États ne pourrait finan-cer en totalité.

Le financement interne public par subventionsou apports de capitaux aux entreprises publiquesd’électricité a connu une forte réduction, durant ladernière décennie, en raison de la nécessité de limi-ter les déficits budgétaires des États et de faire faceaux dépenses structurelles de leurs services. Cetteréduction a été aggravée par les politiques d’ajuste-ment structurel mises en œuvre.

Il en va de même pour les sources extérieures definancement par les organismes multilatéraux et lesbanques commerciales qui ont limité de façon dras-tique les prêts aux entreprises publiques, en raisondes performances insuffisantes de ces entreprises etde cadres institutionnels réglementaires, voire poli-tiques, jugés inadéquats et non attractifs.

LA RESTRUCTURATION,UN PROCESSUS IRRÉVERSIBLEFace à cette situation, et plus particulièrement dansle secteur électrique, le recours à des capitaux pri-vés pour le développement des infrastructures éner-gétiques et la mise en place, pour ce faire, de condi-tions attractives pour ce type de financements’imposent donc progressivement comme la voie àsuivre.

C’est l’issue jugée indispensable pour faire faceà la double contrainte du financement et d’unedemande de plus en plus forte d’électrification parles populations et les secteurs économiques. C’estdans ce cadre que beaucoup de pays africains fran-cophones ont mené ou mènent une réflexion appro-fondie sur les modalités d’organisation ou de régle-mentation des grands services publics nationaux engénéral et de celui de l’électricité en particulier.Certains ont déjà réalisé ou entament actuellementdes réformes en vue de restructurer ce secteur.

Il s’agit de créer et de mettre en place des cadresinstitutionnels et réglementaires qui autorisent le jeudes forces du marché et qui fournissent des garan-ties permettant à des entreprises privées ou à uneparticipation privée de se positionner dans un sec-teur jusque-là géré et exploité exclusivement par unestructure publique et d’y injecter des financementsque les pouvoirs publics ne peuvent plus assumer.Ces cadres se fondent également sur la recherche destructures ou de mécanismes plus efficaces et plusperformants, afin d’assurer la rentabilité des capi-taux et de garantir un meilleur service aux consom-mateurs.

LA RESTRUCTURATION:UN CHAMP D’ACTION PRIVILÉGIÉPOUR LA COOPÉRATIONÉCONOMIQUE FRANCOPHONELe processus de réforme du secteur électrique, déjàlargement engagé ou en cours dans beaucoup de paysafricains francophones (Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée,Mali, Maroc, Maurice, Tunisie, etc.), connaîtra, à l’évi-dence, une accélération pendant les prochaines annéesavec les réflexions et les négociations actuellementmenées dans d’autres pays (Cameroun, Centrafrique,Congo, Madagascar, Niger, Togo, etc.). Les types deréformes engagées vont selon le degré d’ouverture aucapital privé, du contrat de service à la privatisationcomplète, en passant par le contrat de gestion délé-guée et l’affermage. Cela constitue un champ d’actiontechnico-économique et financier multiforme pour laFrancophonie, à travers le montage de partenariatsNord-Sud divers et multiples.

Au niveau des gros investissements, c’est déjà uneréalité qu’il s’agira de conforter et de renforcer. En effet,les grosses entreprises francophones du secteur sontdéjà parties prenantes dans les réformes engagées

au niveau de bon nombre de pays du Sud. C’est lecas d’Électricité de France (EDF), d’Hydro-Québecinternational (HQI), de Saur, de la Lyonnaise deseaux et de Vivendi.

Ces investissements ne manqueront pas, parailleurs, d’induire, sous certaines conditions qu’unecoopération réussie permettrait de mettre en place,le développement local de métiers connexes pour lafabrication d’appareillages électriques divers et pourle renforcement des capacités locales d’ingénierie etde maintenance du secteur. Une telle configuration,du reste souhaitable et porteuse de progrès, ouvreégalement la voie à un vaste champ pour le déve-loppement accru de partenariats, particulièremententre les PME locales et les PME de l’espace fran-cophone, au Sud comme au Nord, ces types de par-tenariat constituant à l’évidence le gisement le plusfertile pour la coopération économique francophone.

Sur un autre registre, l’interconnexion des sys-tèmes électriques aux niveaux régional et sous-régional en Afrique, constitue, de l’avis de tous lesobservateurs, une impérieuse nécessité pour l’optimi-sation de la production d’électricité et pour l’amélio-ration de l’accès à celle-ci. En plus de faciliter la mobi-lisation de capitaux multilatéraux privés étrangers, enraison de la taille du marché qu’elle génère, l’inter-connexion constitue un support et un outil irrempla-çable pour l’intégration économique régionale, autreaxe stratégique de l’ambition économique de laFrancophonie. Ce peut être un vecteur attractif departenariats triangulaires Sud-Sud-Nord et une expres-sion concrète de la solidarité francophone.

Par ailleurs, l’électrification rurale, qui s’imposeet s’imposera de plus en plus comme l’autre face d’uneréforme énergétique réussie et comme une nécessitéimpérieuse pour un développement équitable et durable,constitue à son tour un autre vaste champ pour lacoopération économique francophone. En effet, par lanature des projets qu’elle nécessite et par la place qu’yprendront les énergies renouvelables, l’électrificationrurale, et notamment celle dite décentralisée, ouvrela voie à une multitude de partenariats possibles entreentreprises francophones de différentes tailles et dedifférentes formes, tant pour l’élaboration de plans dedéveloppement et de gestion que pour la création etle renforcement de sociétés d’ingénieries et de main-tenance ou de production des équipements et d’adap-tation des technologies.

Il apparaît ainsi que le secteur de l’énergie, etplus particulièrement de l’électricité, en Afrique fran-cophone, révèle une occasion d’envergure pour ledéveloppement de l’espace de coopération écono-mique francophone.

L’exploitation de cette occasion par la mise enplace de conditions susceptibles de favoriser la mul-tiplication de co-entreprises et de partenariats fran-cophones devrait constituer un suivi concret et uneillustration parfaite des décisions et recommanda-tions de nos ministres de l’économie et des finances,lors de leur conférence, à Monaco, pour asseoir lesbases d’un espace de coopération économique fortet dynamique.

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LIAISON ÉNERGIE-FRANCOPHONIE • N° 44 / 3e TRIMESTRE 1999

DANS CE NUMÉROBRÈVES (SUITE)

Dans le nouveau contexte actuel de cession d’une part plus ou moins importante du capital socialde l’entreprise au secteur privé, qu’en est-il de l’accès aux crédits concessionnels ? En d’autres termes,ne va-t-on pas se retrouver avec des fonds mobilisés à des taux forcément plus élevés, qui viendront ren-chérir le coût du kWh d’électricité ou du m3 d’eau potable?

Comment intégrer dans l’analyse la participation du secteur privé national en combinaison avec lesecteur privé étranger dans les processus en cours actuellement?

Est-il possible de «classer» ou de «comparer» les différents régimes juridiques qui sont aujourd’huiconsignés dans les nouvelles lois ou nouveaux codes de l’électricité qui sont adoptés dans les pays, àsavoir le régime de la concession, le régime de l’affermage, etc.?

Compte tenu de l’importance des thèmes traités, nous invitons les lecteurs intéressés à se référer auxactes de cet atelier qui devraient être disponibles dès le 1er trimestre de l’année 2000.