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l’EnassEcole nationale d’assurances
Perspectives d’évolution du pilotage stratégique et de la performance desentreprises d’assurance à l’aune de Solvabilité II
Guillaume LEMOINE
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Remerciements Je souhaite particulièrement remercier Monsieur Guy LALLOUR, qui a accepté d’être mon
tuteur. Il m’a accompagné tout au long de cette aventure vers le pilotage de la performance
des entreprises d’assurance.
Merci Guy pour votre disponibilité, vos conseils, votre aide dans mes recherches, réflexions
et dans la rédaction de cette thèse.
Je tiens également à remercier Laurent DHERBECOURT, Partner Sopra Consulting qui m’a
permis de suivre ce cursus et prodigué de précieux conseils.
Mes remerciements vont aussi à tous les professionnels et spécialistes qui ont eu la
gentillesse de me recevoir et de me faire bénéficier de leurs expériences et compétences :
Pierre DARBRE, Contrôleur des Assurances - Autorité de Contrôle Prudentiel
Bruno FOURNET, Directeur Analyse Gestion, Méthodes et Procédures – SCOR Global P&C SE
Pauline GAUTIER, Consultant / Manager en gestion des risques – ERNST & YOUNG FS Risk
Philippe PICAGNE, Professeur Associé au CNAM-ENASS, responsable Finance du MBA
Aurélien SIGNORINI, Directeur de la Planification et de la Performance – CNP Assurances
Jean Philippe THIERRY, Vice président de l’Autorité de Contrôle Prudentiel
Je remercie également Anne RAMIN et Martine MAILLARD pour leur grand professionnalisme
dans l’organisation de ce programme et pour leur soutien sans faille.
J’ai une pensée particulière pour toute la promotion avec qui j’ai vécu d’excellents moments
de partage et d’échange.
Enfin, je tiens à remercier particulièrement mon épouse pour son soutien.
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Sommaire Remerciements .................................................................................................... 2
Sommaire ............................................................................................................ 3
Résumé ............................................................................................................... 4
Introduction ......................................................................................................... 5
1 Dynamique du pilotage de la performance des entreprises d’assurance ............. 7
1.1 Création de valeur en assurance ............................................................................................. 7
1.2 Enjeux des assureurs en termes de pilotage de leur performance ......................................... 8
1.3 Influence de la culture d’entreprise sur le pilotage de l’activité ........................................... 11
1.4 Principaux constats sur les modes de pilotage des assureurs .............................................. 13
1.5 Cycle de pilotage de la performance d’une entreprise d’assurance ..................................... 16
1.6 Pilotage de la performance en assurance non vie ................................................................ 21
1.7 Pilotage de la performance en assurance vie........................................................................ 29
1.8 Influence des cycles de l’assurance sur les modes de pilotage ............................................. 30
1.9 Synthèse du premier chapitre ............................................................................................... 36
2 Opportunités offertes par la nouvelle marge de solvabilité Européenne en de
pilotage de la performance ................................................................................. 37
2.1 De l’analyse de la solvabilité au pilotage de l’allocation de capital ajustée des risques ...... 37
2.2 Mise à profit des outils de calcul d’exigences en fonds propres du pilier 1 dans le cadre du pilotage de la performance ............................................................................................................... 42
2.3 Apports du pilier 2 en matière de gouvernance stratégique ................................................ 48
2.4 Limites de l’approche du pilotage par les modèles actuariels .............................................. 54
2.5 Synthèse du deuxième chapitre ............................................................................................ 56
3 Conception d’un dispositif de pilotage de la performance s’appuyant sur une
gouvernance des risques de type Solvabilité II ..................................................... 57
3.1 Élaboration d’une stratégie de risques et implémentation des outils de pilotage associés . 59
3.2 Conception du tableau de bord de pilotage .......................................................................... 62
3.3 Construction de la structure organisationnelle ..................................................................... 65
3.4 Définition des processus de décisions et de reporting ......................................................... 67
Synthèse du troisième chapitre ......................................................................................................... 69
Conclusion ......................................................................................................... 70
Sommaire détaillé ............................................................................................... 72
Table des illustrations ......................................................................................... 74
Bibliographie ...................................................................................................... 76
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Résumé Face à un environnement en mutation rapide et à une concurrence accrue, les entreprises d’assurance pourront de moins en moins se permettre d’adopter une approche défensive visant à garantir la pérennité de leur activité en essayant de défendre des positions déjà acquises. Pour passer à une approche offensive, en acceptant un niveau de prise de risque maitrisé ayant une probabilité raisonnable d’être convenablement récompensée, les entreprises vont devoir s’appuyer sur des dispositifs de pilotage plus sophistiqués et performants que ceux dont elles disposent actuellement. La réforme réglementaire Solvabilité II constituera-t-elle une opportunité d’optimisation du pilotage de la performance ? C’est ce que nous allons essayer d’éclaircir.
1. Nous commencerons cette étude par un état des lieux. En matière de pilotage de la performance des entreprises d’assurance, les situations sont très différentes selon les acteurs, mais le sentiment de pouvoir mieux faire est partagé par tous. Les structures les plus petites sont peu acculturées et globalement peu outillées alors que les organisations les plus importantes ont mis en place des dispositifs très, voire parfois trop, sophistiqués qui ont tendance à leur faire perdre de vue l’essentiel de leur métier. En tout état de cause, nous verrons au travers de quelques chiffres, que les assureurs utilisent davantage leurs systèmes de pilotage pour analyser le passé que pour anticiper leur développement…
2. Sur le papier, nous percevrons que Solvabilité II devrait constituer une véritable
opportunité d’optimisation du pilotage stratégique des entreprises d’assurance à plus d’un titre. En effet, la réforme devrait être un catalyseur de l’intégration de la gestion des risques et du coût du capital. Les outils mis en œuvre pour répondre aux exigences réglementaires permettront notamment de déterminer le montant des capitaux pondérés des risques à allouer à chacune des activités de l’entreprise. Ces outils, utilisés de manière dynamique, pourront être très utiles pour piloter l’équilibre entre les objectifs de développement économique de l’entreprise et le montant du risque encouru pour les atteindre. Solvabilité II encouragera également les assureurs à clarifier leur stratégie des risques acceptés. Le pilotage de cet appétit aux risques, garantira un alignement entre la stratégie et l’activité opérationnelle de l’entreprise. Par l’intermédiaire du pilier 2, en imposant la mise en place d’un système de gouvernance, Solvabilité II fera en sorte que l’ensemble des fonctions et processus de l’entreprise concourent de manière globale à la maîtrise des risques, cœur de métier de l’assureur. Enfin, le processus d’analyse interne « ORSA », devrait avoir un rôle clé en termes de pilotage de la performance en réalisant un lien prospectif entre appétence aux risques et capital management sur l’horizon du plan stratégique de l’entreprise.
3. En pratique, nous verrons que la mise en œuvre d’un véritable dispositif de gouvernance
prenant en compte le paramètre risques est à la portée de la plupart des petites structures d’assurance. La définition d’une stratégie de risques et la mise en place de tableau de bord de pilotage incluant l’appétit au risque peuvent en effet être conduites relativement simplement sur deux à trois dimensions fondamentales de l’entreprise et à peine plus du double d’indicateurs. La mise en œuvre d’un tel dispositif de gouvernance reposant sur les concepts et outils de Solvabilité II, puis son amélioration continue conduira les petites entreprises d’assurance à transformer la maîtrise du risque en un paramètre de décision et une opportunité d’optimisation du pilotage de leur performance.
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Introduction
La performance d'une entreprise est communément appréciée par sa capacité à « créer de la
valeur » pour ses actionnaires et pour ses clients, cette création de valeur étant elle-même
conditionnée par l’aptitude de l'équipe dirigeante à définir une stratégie efficiente et à piloter
sa bonne exécution. En assurance, cette notion de performance est totalement indissociable
de la notion de risque.
La création de valeur d’une entreprise résulte de l'alchimie complexe d'un ensemble de
facteurs techniques, financiers, organisationnels et humains, qu'il faut pouvoir évaluer,
comparer, expliquer.
En assurance, des incertitudes inhérentes à la profession (prise de risque, cycle inversé
donc prix de revient connu a posteriori…) rendent l’exercice de pilotage stratégique encore
plus difficile.
Néanmoins, ces dernières années, le degré de connaissance de ces facteurs et plus
généralement de l’environnement dans lequel évoluent les sociétés d’assurance s’est
considérablement affiné.
Ce développement s’est tout d’abord initié sous l’influence des investisseurs qui du fait de
leurs difficultés à valoriser les entreprises et leur potentiel de création de valeur, ont incité
les assureurs à étayer leurs analyses et leur communication financière en y faisant apparaître,
entre autres, une valeur à long terme.
Par ailleurs, les agences de notation ont commencé, il y a une quinzaine d’années, à imposer
progressivement la notion d’allocation de capital au sein des entreprises.
D’autre part, la pression concurrentielle due à la maturité des marchés de l’assurance a incité
les compagnies à faire évoluer leurs fonctions de contrôle de gestion et à mettre à
disposition des managers opérationnels des moyens d'évaluer la performance de leurs
entités : analyse des coûts, refacturations internes et externes …
Par conséquent, les dirigeants d’entreprises d’assurance peuvent désormais s’appuyer sur
des informations et des indicateurs internes et externes de plus en plus nombreux, variés et
sophistiqués.
Malgré toutes ces évolutions, ces mêmes dirigeants reconnaissent qu’ils rencontrent des
difficultés à disposer des informations essentielles pour orienter leurs prises de décisions
stratégiques.
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L’application prochaine de la directive Solvabilité II, contraindra les assureurs à affiner
l’évaluation et la gestion des risques qu’ils encourent pour répondre aux nouvelles exigences
demandées en termes de capital réglementaire. Cette réforme pourrait constituer une réelle
opportunité d’amélioration de la gouvernance de l’activité des entreprises d’assurance.
Partant de cette hypothèse, la présente étude vise à objectiver comment les
assureurs et réassureurs pourraient mettre à profit cette transformation exigée
par le régulateur à des fins prudentielles pour mieux piloter la performance de
leur activité.
Nous essaierons d’apporter la réponse à cette question au travers de l’étude des sujets
suivants :
1. Comprendre la dynamique : dans une première partie, nous conduirons une analyse
des enjeux des entreprises d’assurance en termes de pilotage de leur performance,
puis nous étudierons l’influence de la culture d’entreprise sur le pilotage de son
activité. Nous poursuivrons par un constat sur les modes de pilotage des sociétés
d’assurances et sur les méthodes / outils de pilotage de la performance actuellement
en place. Nous étudierons ensuite le cycle de pilotage d’une entreprise d’assurance et
la nature des principaux indicateurs utilisés par les assureurs vie et non vie. Pour
conclure cette première partie, nous étudierons l’influence des cycles de l’assurance
sur le pilotage stratégique des entreprises.
2. Une fois ce cadre posé, nous analyserons dans une seconde partie, l’influence de la
nouvelle réglementation Solvabilité II sur le pilotage stratégique des entreprises
d’assurance, ou comment la modélisation de l’activité par la formule standard ou les
modèles internes pourrait permettre d’optimiser les politiques d’allocation de capital
compte tenu de la stratégie de l’entreprise et de sa tolérance au risque. Nous
étudierons ensuite les opportunités d’amélioration des processus de décisions offertes
par la définition d’une stratégie de risque acceptés et par l’ORSA. Nous investiguerons
enfin les limites de cette approche du pilotage par les modèles actuariels.
3. A la lumière des opportunités identifiées précédemment, nous illustrerons dans une
troisième partie, la conception d’un dispositif de pilotage de la performance
s’appuyant sur une gouvernance des risques de type Solvabilité II.
Nous conclurons cette étude en réaffirmant qu’il est opportun de capitaliser sur les
contraintes imposées par Solvabilité mais rappellerons l’importance de conserver de
la hauteur de vue et de piloter avec une vision globale.
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1 Dynamique du pilotage de la performance des entreprises d’assurance
1.1 Création de valeur en assurance Depuis son apparition au XIXème siècle, la création de valeur s’est imposée comme l’unité de
mesure incontournable des performances de l’ensemble des entreprises, de tous secteurs.
Elle désigne la richesse économique produite par l'entreprise à partir des capitaux investis.
Le modèle économique de l’assurance a ceci de particulier que cette création de valeur
repose à la fois sur la gestion d’un risque et sur celle d’un taux.
- L'assuré cède un risque, par définition aléatoire, à son assureur, qui l’accepte en
contrepartie du versement d’une prime. De par sa maîtrise statistique, en souscrivant des
risques similaires auprès d’autres clients, l’assureur mutualise les risques entre les assurés de
son portefeuille, et dans le temps. Le résultat de souscription de cette activité d’assurance se
mesure en mettant en perspective les primes acquises par l’entreprise sur la période
considérée au regard des sinistres survenus et des coûts d’administration de l’activité.
- La prime versée par l’assuré à la souscription du contrat est elle-même investie par
l’assureur, en fonction d’une stratégie d’investissement, et donc d’un taux de revenus,
correspondant à son profil de risque, dans l’attente de la survenance d’un sinistre.
La création de valeur économique pour l’entreprise d’assurance est donc résultante des
valeurs crées par l’activité technique d’assurance et par l’activité d’investissement.
Du fait de ce cycle de production inversé (vente d'une garantie à un prix prédéterminé, et
connaissance du coût a posteriori lors du règlement éventuel du sinistre avec un délai plus
ou moins long entre le fait générateur et le décaissement), la création de valeur pour
l’assureur ne peut être mesurée qu’à la fin de l’exercice. Le schéma ci-dessous illustre cette
dynamique particulière de construction du résultat financier d’une entreprise d’assurance.
Figure 1 - Vue synthétique de la construction du compte de résultat d'un assureur
+ Primes acquises brutes / nettes de réassurance • Primes émises • Variation de primes non acquises
- Charges de Sinistres (Sinistres payés + Provisions de sinistres)
- Coûts • Frais de gestion (salaires, loyers, IT…) • Coûts d’acquisition et d’administration
= Résultat technique + Résultat net financier
• Produits financiers (dividendes, coupons, + ou - values…) • Charges
+ Résultat exceptionnel
- Impôts
= Résultat net après IS
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L’activité de souscription créée par ailleurs de la valeur au-delà des frontières de l’entreprise
d’assurance. En transférant, le risque qu’un assuré ne pourrait pas supporter seul aux autres
assurés de son portefeuille, l’assureur crée de la valeur auprès de l’assuré au travers de la
protection qu’il lui offre face aux aléas qui pourraient compromettre ses objectifs.
L’assurance incite ainsi à entreprendre et créée indirectement mais durablement de la
richesse.
Par ailleurs, l’assurance du fait de son fonctionnement en cycle inversé, joue un rôle majeur
de financeur de l’économie mondiale, par les montants colossaux de primes perçues et
investis par les entreprises sur les marchés financiers.
1.2 Enjeux des assureurs en termes de pilotage de leur performance En détruisant en quelques mois et de manière durable la valeur de très nombreux actifs
financiers, dont certains étaient jusqu’alors jugés sans risque comme les obligations d’états,
la récente crise financière a placé la solidité des établissements financiers, comme un sujet
de préoccupation majeure des acteurs de l’économie mondiale.
Les entreprises d’assurances, certainement plus prudentes que les banques dans leurs
stratégies d’investissement, ont néanmoins été placées sous surveillance par les agences de
notation financière.
Qu’il s’agisse d’assurance vie ou non vie, les clients des compagnies ont également montré
des signes d’inquiétude et un besoin d’être rassurés sur les capacités des entreprises à
respecter leurs engagements.
Du point de vue des investisseurs, les fluctuations considérables de la plupart des actions
cotées illustrent la gigantesque pression qui s’exerce sur les sociétés d’assurance.
Dans ce contexte économique perturbé, les autorités de contrôle veillent au grain : la
solvabilité des sociétés d’assurance est au cœur de leurs préoccupations.
Au-delà d’entrainer une minorité d’assureurs aux limites de leur marge de solvabilité, la
crise économique, au travers de la baisse des rendements sur investissements, a surtout
contraint l’ensemble de la profession à se recentrer sur les fondamentaux du
métier d’assureur pour créer de la valeur : évaluer correctement les risques de ses
clients pour souscrire des affaires rentables, diversifier ses risques dans son
portefeuille et dans le temps, bien gérer ses sinistres…
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Figure 2 - Risques encourus par les entreprises d’assurance
Devant la multiplicité des intérêts des parties prenantes et face à la complexification et la
volatilité croissante de l’environnement économique, les dirigeants des entreprises
d’assurance doivent détenir les bonnes clés, celles qui leur permettront de piloter
plus finement la valeur créée par leur entreprise, de communiquer de manière
plus transparente et plus lisible sur leur situation financière, et de mieux estimer
les risques associés à leurs prises de décisions stratégiques.
Figure 3 – Illustration des intérêts des parties prenantes de l’activité d’assurance
Le pilotage de la performance constitue le dispositif qui doit fédérer ces différents enjeux
stratégiques.
Capital Économique de l’entreprise d’assurance
1. Risque de provisionnement 2. Risque de tarification 3. Risque de crédit (Réassureurs) 4. Risque de marché (Gestion d’actifs) 5. Risque opérationnels (IT, back-office, …)
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En outre, si le dispositif de pilotage de la performance d’une entreprise d’assurance fait
preuve d’efficacité, c’est bien toute son organisation qui en bénéficie, ses objectifs ainsi que
ce de ses parties prenantes étant mieux servis, comme l’illustre la figure ci-dessous.
Figure 4 – Les apports stratégiques et opérationnels du pilotage de la performance
Bien qu’à un niveau macro économique global, les enjeux des entreprises d’assurance soient
similaires, les priorités accordées aux différentes parties prenantes 1 vont dépendre non
seulement du poids relatifs des unes par rapport aux autres, mais aussi de la culture de
l’entreprise, sujet auquel nous allons nous intéresser dans la prochaine section.
1 La stratégie de l’entreprise d’assurance, son l’appétit pour le risque et ses méthodes de pilotage en seront le reflet
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1.3 Influence de la culture d’entreprise sur le pilotage de l’activité Les organismes d’assurance sont extrêmement divers, ils ont des formes juridiques variées,
des tailles très différentes, des modes de distribution et des activités multiples. Dans les faits,
il n’existe pas deux entreprises identiques et bien que les réglementations applicables soient
les mêmes, faire l’exercice de les comparer est toujours délicat. Le plus remarquable dans ce
panorama est qu’il existe de formidables réussites dans presque tous les cas, aussi bien
chez les acteurs de niche au niveau local que chez les grands assureurs et réassureurs
internationaux très diversifiées.
Jean Philippe THIERRY en retraçant son parcours professionnel2, illustre l’influence de la
culture d’entreprise sur le pilotage des entreprises d’assurance.
Jean-Philippe THIERRY – Vice président de l’ACP
Leçon Inaugurale 2011/2012 du MBA de l’ENASS
« J’ai eu la chance de présider aux destinées d’entités aux cultures si différentes,
que la vérité pour l’une était un non sens pour l’autre »
« J’ai commencé ma carrière au GPA, l’ancienne « Populaire », maison totalement centrée
sur son réseau de vente, à actionnariat familial, mais totalement absent : on faisait confiance
au Président. Les critères de jugement sur la performance étaient limités : le
volume d’affaires nouvelles, le chiffre d’affaires – dont on ne savait jamais bien si on
parlait production ou primes émises -, la guerre contre les rachats, la vie et surtout le
moral du réseau. Le résultat de l’entreprise était, au sens premier, un résultat.
Personne ne le connaissait, c’était très secondaire. Sagesse ou inconscience… je ne
jugerai pas.
Athéna, 10 ans de ma vie aussi, cette fédération très réussie de PME françaises avec une
présence européenne et africaine sélective. L’ambition était autre. La performance
globale, technique, commerciale et financière était au cœur de tout. Le système
reposait sur des équipes dotées de patrons responsables et un central léger en soutien. En
réalité, pas de contrôle, mais surtout et avant tout de la confiance entre
dirigeants qui s’estimaient et se disaient la vérité. Avec en réalité, probablement le
meilleur équilibre que j’ai connu : choix stratégiques clairs, qualité des équipes,
culture partagée.
2 Jean-Philippe THIERRY – « Leçon Inaugurale 2011/2012 du MBA de l’ENASS » - Octobre 2011
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Après deux ans et demi chez Generali, j’ai rejoint les AGF où j’ai passé une petite dizaine
d’années. Grande dame publique, les AGF vivaient des chocs de culture à répétition :
privatisation, rapprochement industriel avec Athéna et Allianz France, entrée d’Allianz au
capital et au conseil d’administration. Ces chocs furent difficiles, quasiment sur tous les
sujets. AGF baignait dans le service public, Allianz dans les process et Athéna dans la
performance et les talents…
Arrivé au directoire d’Allianz, je suis rentré dans le monde virtuel. On n’y parlait que
de capitaux alloués et de rendement sur le capital, les modèles ayant pris le
dessus sur le jugement.»
Contrairement aux dispositifs réglementaires qui s’appliquent à l’ensemble des organismes, il
n’existe pas de dispositif type de pilotage de la performance. Les différences de culture entre
les entreprises sont souvent à la base de différences dans les stratégies et les organisations
qui conduisent à adopter des méthodes de pilotage spécifiques.
Ceci nous conduit à nous intéresser aux différents modes de pilotage des entreprises
d’assurance.
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1.4 Principaux constats sur les modes de pilotage des assureurs
Le premier constat que nous pouvons dresser en matière de pilotage de la performance des
sociétés d’assurance est la très forte disparité de maturité des différents acteurs du
secteur sur le sujet. A l’une des extrémités de cette échelle, se situent les grands assureurs
et réassureurs internationaux, qui disposent de dispositifs très (voire parfois trop)
sophistiqués reposant bien souvent sur des modèles internes de risques. A l’autre extrémité,
nous retrouvons les petites mutuelles souvent assez peu familières avec la discipline du
pilotage de la performance et la gestion des risques plus généralement.
Lorsque l’on raisonne de manière globale, au regard de l’ensemble des acteurs européens du
secteur de l’assurance, le constat est sans appel : beaucoup d’assureurs reconnaissent
utiliser des indicateurs de leurs systèmes de pilotage pour constater les dérives, peu pour les
gérer… et encore moins pour les anticiper comme le montre la figure ci-dessous.
Figure 5 - Usage des systèmes de pilotage de la performance des assureurs européens3
« Beaucoup d’assureurs font du reporting mais peu font réellement du pilotage »4
3 Orga Consultants - « Piloter la Performance Économique en Assurance » – Octobre 2010 4 KPMG - Jacques CORNIC, Stéphane BELON – « Assureurs : pourquoi investir dans la transformation de votre fonction finance ? » - Décembre 2012
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La faiblesse du pilotage qui résulte de ce manque d’anticipation est souvent liée à :
• Une trop grande richesse d’information matérialisée par un trop grand nombre
d’indicateurs de pilotage qui nuit à la hauteur de vue ;
• Une visibilité partielle de l’activité de l’entreprise résultant souvent d’une trop
grande complexité de son organisation ;
• Une focalisation trop portée sur la seule dimension financière, représentative
d’une pression très forte des investisseurs, qui relègue bien souvent la qualité du
service rendu au client ou les opérations au second plan. La conséquence est une
déconnexion entre le pilotage et la réalité opérationnelle de l’entreprise qui
conduit à la mise en place de dispositifs de pilotage « virtuels » ;
• Un dispositif de pilotage non aligné à la stratégie.
Le « point de vue » du Dirigeant - Jean-Philippe THIERRY
« Tous ceux qui s’intéressent à Solvabilité II savent bien qu’un des sujets de préoccupation
essentiels des assureurs est la trop grande complexité de leurs systèmes de gestion.
La performance économique a toujours été liée à des approches simples. Le succès
en leur temps des Mutuelles Sans Intermédiaire, de Direct Line au Royaume Uni, aujourd’hui
des comparateurs le démontrent. Le pilotage, le contrôle d’entités trop complexes en termes
d’implantation et de métiers, est clairement un enjeu majeur ».
« La réponse est hélas souvent dans la mise en place de reportings monstrueux
que plus personne n’a le temps d’analyser, alors que les besoins d’information
sont simples ».
Pourtant lorsque l’on interroge les assureurs, les indicateurs qu’ils utilisent semble diversifiés
comme le montrent les chiffres présentés ci-dessous.
Figure 6 – Nature des indicateurs utilisés dans les entreprises d'assurance européennes5
5 Orga Consultants – « Piloter la Performance Économique en Assurance » – Octobre 2010
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Par ailleurs, il existe beaucoup de méthodologies pour concevoir un système de pilotage.
Celle des « tableaux de bords prospectifs » ou « Balanced Scorecard » semble dominer chez
les assureurs sans pour autant que les résultats soient au rendez-vous.
Figure 7 - Principale méthodes de pilotage de la performance utilisées par les assureurs en Europe6
…et ce n’est pas faute de diversifier les techniques pour choisir ses indicateurs !
Figure 8 - Techniques des assureurs européens pour choisir leurs indicateurs7
Au final, ce ne sont ni les méthodes ni les techniques de recueil d’indicateurs qui manquent
mais bien les résultats, alors que le pilotage doit être l’élément fédérateur qui permet de
conduire des actions cohérentes à tous les niveaux de l’entreprise et ce jusqu’au niveau
stratégique, comme nous allons l’illustrer dans la section suivante.
6 Orga Consultants - « Piloter la Performance Économique en Assurance » – Octobre 2010 7 Orga Consultants - « Piloter la Performance Économique en Assurance » – Octobre 2010
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1.5 Cycle de pilotage de la performance d’une entreprise d’assurance « Cap : OK, vitesse : OK … plus que 50 milles avant la sortie du pot au noir… ». Bien que le talent du skipper soit à la base de la performance de son voilier, il est assisté
dans ses prises de décisions tactiques et stratégiques par ses outils météo, sa cartographie
marine et par son routeur, homme clé de l’équipe, resté à terre.
L’analogie entre la course au large et l’entreprise d’assurance a ses limites. Pourtant, elle
montre bien qu’un skipper, aussi talentueux soit-il, ne peut réussir sans un dispositif
pertinent de pilotage, aussi bien à court qu’à plus long terme.
Les méthodologies actuelles de pilotage de la performance, pour peu que l’on s’attache à
identifier leurs limites et à tirer le meilleur parti de leurs grands principes, sont des atouts
précieux pour fournir à l’entreprise les moyens de mesurer la performance économique et
non économique de son organisation, et l’atteinte de ses objectifs stratégiques et
opérationnels au regard des risques pris.
L’objectif de cette section est d’illustrer la dynamique de gestion du cycle de pilotage d’une
entreprise d’assurance présenté ci-dessous, par l’intermédiaire d’un dispositif de pilotage de
type « Balanced Scorecard »8 ou « tableau de bord prospectif ».
Figure 9 - Cycle de pilotage de la performance9
8 Robert S. KAPLAN, David P. NORTON - « Comment utiliser le tableau de bord prospectif », Editions d'Organisation - 2001 9 Deloitte – « Mettre en place un pilotage efficace de la performance » - www.deloitte.com
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Le point de départ du cycle de pilotage de la performance présenté ci-dessus est l’ambition stratégique de l’entreprise d’assurance, formulée en réponse à cinq grandes questions. Figure 10 – Les cinq questions permettant de définir une ambition stratégique Dans la deuxième étape du cycle, cette ambition stratégique est elle-même déclinée en
objectifs opérationnels sur la base de niveaux de performances quantifiés par des indicateurs
clés. Cette approche permet de concilier les horizons moyen/long terme de la stratégie et les
objectifs court terme de la performance collective et individuelle de l’organisation.
Figure 11 - Déclinaison opérationnelle d'une ambition stratégique selon les 4 axes d'un tableau de bord prospectif ou « Balanced Scorecard »
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Pour être pertinents en termes de pilotage de la performance, les indicateurs de
performance afférents à la carte stratégique présentée dans la figure précédente doivent non
seulement être peu nombreux – 2 à 3 par dimension, maximum -, mais également répondre
à des critères discriminants présentés dans la figure ci-dessous.
Figure 12 - Critères de définition des indicateurs de performance
La direction générale et les différents métiers peuvent à partir de ces indicateurs, mettre en
place leurs propres indices de performances en fonction de leurs objectifs respectifs.
Pour cela, il est judicieux de construire des indices à l’image des indices boursiers. Ces
indices de performance sont construits de manière progressive :
• On identifie les indicateurs pertinents au sein de la base d’indicateurs de référence de
l’entreprise ;
• Chaque indicateur identifié est ramené à une valeur indicielle calculée par rapport à
sa valeur d’origine ;
• Chaque indicateur identifié est pondéré par l’une des 3 valeurs suivantes :
• Ces indicateurs sont classés par ordre de priorités grâce à la pondération qui leur est
associée, ce qui donne au final l’indice métier souhaité.
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L’atteinte des objectifs chiffrés de performance définis ci-dessus est garantie par la mise en
œuvre d’initiatives clés définies dans un plan d’actions.
Figure 13 - Élaboration du plan d'action à partir des objectifs
Un suivi de l’atteinte des niveaux de performance sur chacun des objectifs est ensuite réalisé
par l’intermédiaire d’un tableau de bord de pilotage similaire à celui présenté ci après.
L’analyse des données récoltées permettra de mettre en œuvre des actions correctives et
d’affiner le plan stratégique si nécessaire. Le cycle de pilotage de la performance est alors
bouclé.
Figure 14 - Tableau de bord de pilotage de la performance
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Le « point du vue » du Consultant Laurent DHERBECOURT – Partner chez Sopra Consulting
« Le pilotage de la performance à l’épreuve de la communication interne »
« Communiquer sur les projets se révèle assez facile. Il suffit de s’appuyer sur les instances
de discussion prévues et d’extraire les données clés des rapports d’exploitation émis par les
chefs de projet.
Il en va autrement du récurrent. Sur quels indicateurs se fonder ? L’entreprise s’inspirera de
l’approche par tableaux de bord prospectifs (ou Balanced Scorecard), en mixant quatre
dimensions : le financier, l’efficacité opérationnelle, la satisfaction client et les compétences.
Les directions métiers auront tendance à donner un grand nombre d’indicateurs
peu compréhensibles en l’état par la Direction Générale. Il s’agit donc de les
hiérarchiser et de n’en proposer qu’un nombre réduit, qui reprendra les quatre
grandes dimensions, en privilégiant les indicateurs existants, aisément alimentés par le
système d’information.
Trop souvent, les entreprises passent beaucoup de temps à construire une
mécanique puissante et intelligente, qui meurt de sa belle mort, faute d’être
entretenue et mise à jour.
Les tableaux de bord de Directions Générales totalisent souvent entre vingt et
trente indicateurs, soit cinq à sept par dimension – ce qui est démesuré. C’est plus
que ce que les métiers utilisent pour piloter leur direction. Il faut donc déterminer avec eux
les plus pertinents. On aboutit à un indice unique qui, en fonction de pondérations, variera
d’un métier à l’autre. Derrière, il est possible de dérouler les données qui le bâtissent pour
savoir pourquoi il augmente ou baisse. Bien sûr, un tel indice n’a de valeur que s’il est
commenté. Seules les entreprises les plus avancées travaillent de la sorte. »
Mettre en place une telle dynamique de gestion du cycle de pilotage nécessite donc de ce
concentrer sur un nombre réduit d’indicateurs, en sélection les plus pertinents et les plus
fiables pour mesurer l’atteinte des objectifs stratégiques.
Pour illustrer de manière plus concrète cette approche, la section suivante décrira les
principaux indicateurs propres à l’activité d’assurance.
21/77
1.6 Pilotage de la performance en assurance non vie
Philippe PICAGNE – Professeur Associé au CNAM-ENASS
« Les assureurs non vie utilisent généralement trois grandes familles
d’indicateurs économiques et financiers pour piloter leur performance : revue
d’activité, performance opérationnelle et profitabilité, structure et performance
du capital. »
1.6.1 Indicateurs de revue d’activité 1. Variation des primes
Principal indicateur de revue d’activité, la variation des primes de la période considérée par
rapport à la période précédente matérialise le développement économique (régression,
stagnation, croissance…) de l’entreprise d’assurance sur ses marchés, zones géographique,
segments clients, etc…
Comme les autres indicateurs de revue d’activité, la variation des primes est calculée sur la
base des primes émises par l’assureur en net de réassurance. En effet, ces dernières sont
davantage le reflet d’une vision métier de l’activité l’entreprise que les primes acquises qui
donnent une surtout vision comptable.
Illustration Prime émise le 1er septembre 2013 : 1200 €
Prime acquise sur l’exercice 2012 : 3/12 x 1200 = 400 €
1/01/12 1/09/12 31/12/12
Prime Acquise
1/09/13
Prime Émise
Exercice n Exercice n+1
31/12/13
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2. Variation des provisions techniques nettes de réassurance
Pendant de la variation des primes, la variation des provisions est également un indicateur
déterminant pour une direction générale.
Les provisions techniques (PT) nettes correspondent aux provisions techniques brutes au
passif du bilan auxquelles sont retranchées la part des réassureurs à l’actif.
Les variations de provisions techniques sont généralement analysées au regard des
variations de primes. Des variations de Primes et de PT non cohérentes pourraient être
justifiées par exemple par des reprises de provisions ou encore la clôture d’importants
sinistres.
3. Taux de rétention
Le taux de rétention matérialise le recours à la réassurance
= Primes émises nettes de réassurance Primes émises brutes
1.6.2 Indicateurs de performance opérationnelle et de profitabilité
Les indicateurs de performance opérationnelle et de profitabilité permettent de mesurer
l’atteinte des objectifs métiers et financiers de l’entreprise.
1. Ratio de sinistralité (Loss Ratio) ou S/P = Sinistres nets (payés +/- variation des provisions de sinistres) Primes nettes acquises
Le ratio « sinistres à primes » qui rapporte le total des frais d’indemnités versés sur une
période au total des primes acquises au cours de la même période (en brut ou net de
réassurance) est à la fois le ratio le plus simple et le ratio le plus utilisé par les assureurs
pour mesurer la performance de leur activité de souscription.
2. Ratio de frais (Expense Ratio)
= Fais d’acquisition + coût administratifs Primes émises nettes
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Il n’existe pas de méthode partagée pour calculer un ratio de frais, il y a presque autant de
méthodes que d’assureurs.
Bruno FOURNET, Directeur Analyse Gestion, Méthodes et Procédure – SCOR
Global P&C SE
« Les clés de répartition des frais généraux sont les plus complexes de l’activité
d’assurance. Les pratiques sont de ce fait très hétérogènes entre assureurs »
3. Ratio combiné (Combined Ratio)
= Ratio de sinistralité + Ratio de frais
Le Ratio combiné rapporte les sinistres et les charges de l’année aux primes acquises de
l’année. Il mesure la Rentabilité technique de l’activité d’assurance.
Il peut être calculé en net et en brut de réassurance afin de déterminer l’impact de la
réassurance sur la rentabilité technique.
Lorsque le ratio combiné est de 95 %, pour un 1 € de prime vendue, l’entreprise gagne 5
centimes du point de vue technique, avant revenus financiers.
Du fait de l’intégration des frais d’administration calculés selon des clés de répartition
propres à chaque assureur, la comparabilité du ratio combiné est moins bonne que celle du
ratio de sinistralité.
Normes marché de profitabilité
Pour une société traditionnelle :
Ration de sinistralité : 75 %
Ratio de frais : 25 % dont frais d’acquisition 20 % et coût administratif 5 %
Pour une mutuelle :
Ratio de sinistralité : 90 %
Ratio de frais : 10 %
Pour une société d’assurance internationale
Ratio de sinistralité : 70 %
Ration de fais: 30 %
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4. Net investment income ratio (NIIR)
= Revenus financiers nets de frais financiers Primes acquises nettes
Normes :
Ce ratio varie généralement entre 0 et 5 %
5. Ratio d’exploitation (Operating Ratio)
= CR – NIIR
Le ratio d’exploitation intègre les deux composantes de la création de valeur en assurances.
Lorsque le ratio d’exploitation est de 90 %, pour un 1 € de prime vendue, l’entreprise gagne
10 centimes répartis en 5% de rentabilité financière et 5 % de rentabilité technique.
6. Retour sur Investissement (ROI - Return On Investment)
= Revenus financiers nets de frais de gestion et d’intérêt de dette financière émise Portefeuille d’investissement
Cet indicateur matérialise la rentabilité du portefeuille d’actifs de l’entreprise. Il prend en
compte l’ensemble des revenus financiers issus des portefeuilles par nature investissement.
7. Ratio de rentabilité financière (ROE-Return on Equity) = Résultat net après IS Fonds propres
Le ratio de rentabilité financière ou Return on Equity « ROE » est le rapport entre le résultat
net après impôts et les fonds propres comptables (hors plus-values latentes et emprunts
subordonnés). Ce ratio financier est un ratio suivi avec attention par les actionnaires qui
peuvent ainsi mesurer la rentabilité de leur investissement.
Le ROE indique la capacité de l’entreprise à rentabiliser les capitaux employés pour ses
activités. Le résultat peut être fortement influencé par des facteurs non directement liés à
l’activité (dégagement de plus-value exceptionnelle,..).
Le calcul peut aussi se faire sur le capital économique.
Cependant le ROE ne représente que la performance globale de l’entreprise, il ne
permet pas de mesurer et rentabilité par activité et ne prend pas en compte la
notion de risque.
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Normes :
Assureurs : 9 % à 11 %
Réassureurs : 13 à 16 %
Figure 15 - Illustration des ROE comptables et du taux de croissance des principaux groupes d'assurances (Vie et Non Vie) du marché français
26/77
1.6.3 Indicateurs de structure du capital
Les indicateurs de structure et de performance du capital permettent d’apprécier la solidité
financière de l’entreprise au regard des différents risques qu’elle encourt.
1. Risque de provisionnement ou risque technique
= Provisions Techniques nettes Fonds Propres ou Capital économique
Cet indicateur met en lumière le risque de provisionnement, c'est-à-dire de combien de fonds
propres dispose l’entreprise pour absorber une augmentation des ses provisions techniques.
Si l’assureur augmente de 1 € ses Provisions Techniques, doit-il faire une augmentation de
capitaux ? Ce ratio se calcule séparément en vie et en non vie.
Normes :
Assurance : rapport de 1 à 3
Réassurance : rapport de 1 à 7
2. Risque de tarification
= Primes nettes acquises Fonds propres comptable
Cet indicateur met en lumière le risque de tarification, c'est-à-dire de combien de fonds
propres dispose l’entreprise pour absorber une erreur de tarif. Si l’assureur se trompe d’un
euro dans sa tarification euros, cet indicateur montre combien il consomme de fonds propres.
Norme :
Assurance : 1 € de capital pour 1 à 2 ou 3 € de prime
Réassurance : 1 € de capital pour 5 € de prime
3. Risque de crédit
= Part des réassureurs à l’actif Fonds propres
Norme :
En général la part des réassureurs représente 10 à 15 % des fonds propres, parfois 20 %
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4. Provisions techniques / primes
= Provisions techniques nettes (Stock) Primes émises nettes (Flux)
Cet indicateur mesure la rotation de paiement des sinistres, c'est-à-dire la vitesse à laquelle
l’assureur règle les sinistres.
Norme de la durée moyenne des sinistres :
Assurance santé : 0,1 à 0,3 (soit 2 à 3 mois)
Assurance automobile : 1 à 3 (ans)
Assurance décennale : 3 à 4 (ans)
5. Effet de levier financier (Financial Leverage)
= Dettes subordonnées Capitaux comptables
Norme : 20 % (en Europe)
6. Ratio de solvabilité
En vertu de la réglementation, les sociétés doivent disposer en plus de leurs provisions
techniques, d'un montant minimal de fonds propres appelé marge de solvabilité
réglementaire, qui est déterminé en fonction du niveau de leurs engagements. Cette marge
est destinée à absorber des pertes exceptionnelles au-delà des provisions techniques. Suivre
cet indicateur permet au régulateur de veiller à ce que l’assureur soit en mesure d’honorer
les engagements pris à l’égard des assurés ou bénéficiaires du contrat. Les engagements
sont évalués à partir des cotisations annuelles (ou des sinistres) en assurances de
dommages. Le cadre actuel de Solvabilité I, utilise un modèle à ratio fixe pour calculer les
exigences en capital. Les exigences de solvabilité sont déterminées comme un pourcentage
fixe de la valeur d’une variable fortement corrélée au degré d’exposition au risque de la
compagnie d’assurances. En non-vie : 16% de primes ou 27% des sinistres (on retient le
plus élevé des deux).
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Les indicateurs de structure de capital peuvent être calculés non seulement à partir des
fonds propres comptables, mais également à partir des éléments « durs » ou qualitatif du
capital déterminés ainsi :
Fonds propres comptables
+ Dettes subordonnées Elles sont prises en compte par les régulateurs UE dans la limite de 25 % des FP pour le calcul de la marge de solvabilité.
+ plus/moins values latentes +/- values latentes des portefeuilles d’actifs.
- Value in force en assurance vie Valeur du portefeuille d’assurance vie à un instant donné, va prendre en compte les flux de trésorerie futurs actualisés sur le portefeuille existant.
- Goodwill Écart d’acquisition entre prix d’achat d’une société et le montant de l’actif.
- Value Of Business Acquired Écart d’acquisition qui s’applique à l’achat d’un portefeuille.
- Differed Acquisition Costs Coûts d’acquisition différés pour rémunération des courtiers (surtout en vie).
29/77
1.7 Pilotage de la performance en assurance vie Le pilotage de la performance en assurance Vie repose sur deux indicateurs principaux. 1. Résultat technique des portefeuilles Vie
+ Cotisations + Produits de placements - Charges des sinistres - Charges de provisions d’assurance vie - Participation aux résultats - Frais d’acquisition et d’administration - Charges de placement
Le résultat technique (ou la marge technique le cas échéant) constitue l’indicateur principal de pilotage en assurance Vie. 2. MCEV
L'Embedded Value ou Market Consistant Embedded Value est un instrument de Reporting et de pilotage de la performance utilisé par les compagnies d'assurances (majoritairement Vie) pour mesurer la valeur « économique » des portefeuilles et communiquer aux investisseurs. L’Embedded Value (ou EV) est une approche conventionnelle de cette valeur « économique » : EV = Actif net réévalué + Valeur actuelle du portefeuille de contrats en cours (« stock ») - Coût d’immobilisation des fonds propres alloués L’Embedded Value ne comprend pas la valeur de la production future et le capital immatériel.
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1.8 Influence des cycles de l’assurance sur les modes de pilotage
1.8.1 Comprendre l’environnement du marché de l’assurance
Piloter la performance 10 d’une entreprise d’assurance sans essayer de comprendre son
macro-environnement et les facteurs sur lesquels l’entreprise « n’a pas prise » n’aurait pas
de sens.
L’activité d’assurance s’exerce en effet avec des capacités contraintes, sur des marchés
concurrentiels et réglementés, et dans un macro-environnement complexe.
Figure 16 - Analyse PESTEL du macro environnement du marché de l'assurance
10 Création de valeur pondérée des risques
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1.8.2 Cycles des prix des marchés non vie
Bien qu’il soit très difficile d’analyser l’influence de chacun des différents facteurs externes
identifiés ci dessus, lorsque l’on observe les grandes tendances à l’échelle du marché non vie,
comme par exemple celui de la rentabilité financière ou des prix de l’assurance dommages
aux États-Unis, une forte cyclicité est mise en évidence.
Figure 17 - Évolution des ROEs de l'assurance dommages US entre 1975 et 200811
La littérature montre que cette cyclicité s’observe non seulement à l’échelle des marchés
mais aussi à l’échelle des branches de l’assurance.
Pour savoir comment agir pour créer de la valeur dans cet environnement changeant, il nous
faut tout d’abord comprendre ces cycles perçus comme des fluctuations des primes et des
profits dans le temps.
11 Insurance Information Insitute - 2010
32/77
Figure 18 - Le cycle des prix dans l'assurance12
Nous avons identifié, en nous intéressant à la création de valeur d’une entreprise
d’assurance, que les résultats financiers des placements constituaient l’une de ses deux
composantes en assurance dommages.
Guy LALLOUR décrit « une forte interaction entre les cycles de l’assurance et ceux
de l’économie » et suggère « l’existence d’une corrélation négative entre le
résultat technique et le résultat financier des entreprises d’assurance ».
La dégradation des résultats financiers entraîne une diminution des fonds propres de
l’assureur, donc de ses capacités, qu’il compense par une hausse des primes. En période de
croissance, l’augmentation des fonds propres entraine une surcapacité, compensée par une
pression concurrentielle plus forte dans un marché mature et donc une baisse des primes, ce
qui restaure le rapport sinistres à primes, et ainsi de suite. Guy LALLOUR constate également
« une hausse des sinistre en entrée et en fin de récession». En début et en fin de
période de récession, on constate empiriquement une hausse de la sinistralité, hausse qui
contribue à la diminution de la marge bénéficiaire et donc à la diminution du capital et des
capacités. Il en résulte des prix d’assurance tirés vers le haut. L’effet est inverse en période
de croissance.
12 Guy LALLOUR – Rencontres AMRAE – Janvier 2009
33/77
1.8.3 Prise en compte du cycle des prix dans le pilotage de la performance
Dans cet environnement cyclique, piloter la performance consistera à guider la
création de valeur de manière durable et indépendante des phases du cycle.
Face aux cycles, deux stratégies extrêmes et opposées peuvent être caractérisées. Une
première stratégie que l’on pourrait qualifier de passive consisterait à suivre le cycle, c'est-à-
dire à souscrire un volume d’affaires de manière indifférenciée en fonction de la phase du
cycle. Cela consisterait à suivre le marché en matière de tarification dans l’objectif de
maintenir ses positions faces à la concurrence, quitte à dégrader sa rentabilité opérationnelle.
Une stratégie antagoniste consisterait à souscrire très peu en bas de cycle quand la
profitabilité est faible et au contraire à souscrire le plus d’affaires possibles en haut du cycle.
Dans la pratique, les directions générales des assureurs et réassureurs doivent piloter entre
ces deux bornes, en planifiant et en suivant les cycles comme l’explique Christophe
GIMOND13 .
Figure 19 - Processus de gestion du cycle en quatre phases
1. Intégrer la gestion du cycle dans son dispositif de pilotage de la performance consistera,
en amont de la définition de l’ambition stratégique, à identifier la position du cycle dans
laquelle l’entreprise se trouve à partir d’indicateurs de différentes natures.
13 Christophe GIMOND – « Le cycle de l’assurance non vie, une opportunité stratégique »
34/77
Figure 20 - Indicateurs de positionnement sur le cycle des prix14 Indicateurs macro économique et financiers Indicateurs « Marchés financiers » - Rendement des produits financiers (obligation, action, immobilier) - Analyse des perspectives des Agences de notation - Indicateurs « Économiques » - Cycle économique : évolution du PIB, indicateurs avancés Ocde - Suivi de l’activité industrielle (IPI, nombre de défaillances d’entreprise, …) Indicateurs du marché de l’assurance Indicateur « Résultats » - Suivi du niveau des tarifs de souscription des affaires nouvelles (par secteur d’activité, par branche, par pays) - Suivi des budgets de défense des affaires en portefeuille - Évolution de la fréquence et du coût des sinistres sur le marché - Suivi des sinistres graves (nombre et coût) - Suivi des taux de réalisation et des taux de rétention des affaires - Rentabilité des opérations (S/C, ratio combiné, RoE) Indicateur « Capacité » - Évolution de la capacité disponible sur le marché (cédantes et réassureurs) - Évolution de la sinistralité catastrophique (naturelle et technologique) - Évolution du marché du transfert alternatif de risques (ART) : « cat bonds »,…. - Analyse du jeu des acteurs : Ex. nouveaux entrants, retrait de Compagnie, fusion et acquisition, politique de rachat d’actions, augmentation de capital, etc… Indicateurs « Réassurance » - Suivi de la rentabilité et de la solvabilité des réassureurs - Évolution des prix de la réassurance (traité et facultative), « ROL »: analyse des conditions de renouvellement (prix, termes et conditions) Indicateurs « Intermédiaires » - Bilan activité– (Défense de leur portefeuille, prospection) - Réorganisation/fusion - Regroupement des cabinets de courtage : moins d’intermédiaires Indicateurs « Marché » - Tendance tarifaire du marché - Analyse des stratégies des concurrents : conditions de renouvellement des affaires en portefeuille et « appétit » en affaires nouvelles, benchmark des nouveaux produits et services - Suivi du nombre de saisines et de réalisations - Suivi du taux de rétention des affaires - Existence de difficulté / échec de placement de certaines affaires - Suivi de l’efficacité des actions de surveillance portefeuille
Ce positionnement doit idéalement être décliné par marché, par région géographique
voire par segment de clientèle.
14 Christophe GIMOND – Le cycle de l’assurance non vie, une opportunité stratégique
35/77
2. A partir de ce constat, selon une approche stratégique classique telle que nous l’avons
illustrée plus haut, l’entreprise d’assurance fera une analyse prospective des segments de
marchés qu’elle juge à potentiel au regard de ses forces, ses faiblesses et des
opportunités et menaces qu’elle aura identifié. Cette analyse se traduira par un plan
stratégique et la définition d’objectifs chiffrés en termes de politique d’allocation de
capital et de politiques de souscription (développement ou réduction de part de
marchés en fonction de la profitabilité prévue des affaires).
3. A l’issue de cette phase stratégique, les directions concernées proposerons des
approches tactiques sous forme d’un Marketing Mix (produits, prix communication,
distribution) et d’un budget pour chaque segment.
4. Les résultats seront pilotés comme nous l’avons illustré lors de la description du cycle de
pilotage de la performance, en analysant les écarts sur chaque segment entre les
objectifs planifiés et les performances réalisées au travers d’indicateurs appropriés et en
mettant en place des actions correctives ou en ajustant la stratégie si nécessaire.
36/77
1.9 Synthèse du premier chapitre En matière de pilotage de la performance des entreprises d’assurance, les situations sont
très différentes selon les acteurs, mais les constats sont globalement les mêmes. Les
structures les plus petites sont peu acculturées et globalement peu outillées alors que les
organisations les plus importantes ont mis en place des dispositifs très, voire parfois trop,
sophistiqués qui ont tendance à leur faire perdre de vue l’essentiel de leur métier. En tout
état de cause, les quelques études disponibles sur le marché montrent que les assureurs
utilisent davantage leurs systèmes de pilotage pour analyser le passé que pour anticiper leur
développement.
Pour peu que l’on s’attache à identifier leur limites et à tirer le meilleur parti de leurs grands
principes, les méthodologies structurées de pilotage de la performance - telle la démarche de
type tableaux de bords prospectif « Balanced Scorecard » qui nous a servi à illustrer notre
propos - permettent d’articuler l’ambition de l’entreprise avec le pilotage opérationnel de
l’activité d’assurance. Les bénéfices d’une telle démarche sont l’intégration d’une politique
qualité dans un cadre stratégique, la mobilisation des énergies et des moyens sur les enjeux
clés et l’anticipation des évolutions.
Le pilotage de la performance d’une entreprise d’assurance n’est pas qu’un sujet technique, il
s’inscrit avant tout dans une dynamique d’entreprise matérialisée par un cycle d’amélioration
continue et doit permettre de comprendre et d’appréhender les facteurs environnementaux à
l’origine des cycles de l’assurance.
« Piloter la performance d’une entreprise d’assurance consiste donc à analyser, simuler et prévoir l’activité, avec un haut niveau d’intégration »
37/77
2 Opportunités offertes par la nouvelle marge de solvabilité Européenne en de pilotage de la performance
2.1 De l’analyse de la solvabilité au pilotage de l’allocation de capital ajustée des risques
2.1.1 Portée de la réglementation actuelle Pour bien appréhender les évolutions liées à la mise en œuvre de la future directive, il
convient tout d’abord de comprendre la réglementation actuelle.
Les premières Directives de règlementation prudentielle en assurance datent de 1973 pour
l'assurance non-vie et 1979 pour l'assurance vie. Cette réglementation, appelée Solvabilité I,
qui s’est enrichie au fil des années, est toujours en vigueur. Elle définit trois niveaux
d’exigence quantitative vis-à-vis des sociétés d’assurance :
1. Des provisions techniques suffisantes ou prudentes
2. Des placements sûrs et liquides
3. Des fonds propres jugés suffisants au regard d’une exigence de marge de Solvabilité.
Il s’agit d’une approche simple et forfaitaire du risque qui s’appuie sur les données des
comptes sociaux des entreprises. La marge de solvabilité est déterminée en fonction de
pourcentages sur les primes en assurance vie et non-vie et sur les sinistres en assurance
non-vie.
Depuis 2004, l’exigence de marge obligatoire de solvabilité est requise à tout moment, ce qui
a conféré à Solvabilité I, un rôle d'instrument de pilotage des risques.
Du fait de sa relative simplicité, et du fait qu’elle constitue une obligation de moyens en non
pas de résultats, cette approche montre rapidement ses limites, de surcroît dans un contexte
de complexification croissante des risques. En effet, contrairement à d’autres normes plus
complètes telles le « Risk Based Capital » ou « RBC » en vigueur aux Etats-Unis, Solvabilité I
n’identifie pas « séparément » les risques qu’encourt l’assureur. De ce fait, elle ne prend pas
en compte l’intégralité des risques auxquels sont soumises les entreprises d’assurance (par
exemple le risque de défaut de contrepartie).
D’autre part, Solvabilité I tout comme RBC n’impose pas de norme de calcul des provisions
techniques, une grande liberté est laissée à l’assureur dans ce domaine. Rien ne sert de
vouloir mettre sous contrôle un calcul de la marge de Solvabilité si les provisions techniques
sur lequel il s’appuie sont erronées. En effet, des provisions techniques insuffisantes
constituent le risque principal en assurance non vie.
38/77
2.1.2 Principes directeurs et enjeux de la nouvelle directive
Par rapport à la directive existante, Solvabilité II introduit tout d’abord un calcul capital
réglementaire basé sur le profil de risque de l’organisme.
Sous Solvabilité II, deux niveaux de capital réglementaire sont exigés par le régulateur :
- Le « Minimum Capital Requirement » - MCR - ou Capital Minimum Requis pour exercer
une activité d’assurance. Ce niveau de fonds propres (excédent des actifs par rapport
aux passifs et passifs subordonnés) correspond à une probabilité pour la compagnie de
faire face à une ruine économique dans l’année à venir avec une probabilité 85% ;
- Le « Solvability Capital Requirement » - SCR - ou Capital Cible, montant de capital
permettant à la compagnie de faire face à une ruine économique avec une probabilité de
99,5% sur un horizon de temps d’un an. Ce niveau de risque de défaut équivaut au
rating BBB de la notation de l’agence Standard and Poor’s. Dès lors que l’organisme ne
couvrira plus son SCR, le superviseur devra établir un plan de redressement en
concertation avec ce dernier.
Le SCR « formule standard » est calculé selon une approche modulaire des risques. Cette
approche est ascendante : des risques, tel que le risque de mortalité ou le risque de
longévité, sont regroupés en modules de risques, eux-mêmes agrégés en classe de risques,
tel le risque de souscription vie.
Figure 21 - Modules de risques de la formule standard
39/77
Le capital réglementaire requis sous Solvabilité II (SCR) est calculé à partir de la somme du
capital requis au titre du risque opérationnel « procédures internes inadaptées ou
défaillantes, du personnel ou des systèmes, ou d’événements extérieurs »15, d’ajustements
(participations futures aux bénéfices…) et du capital requis de base (BSCR), lui-même
constitué en intégrant cinq autres risques :
- Risque de souscription vie ;
- Risque de souscription non vie ;
- Risque de souscription sante ;
- Risque de marché ;
- Risque de contrepartie (issu de pertes résultant de la défaillance d’une contrepartie ou de
la dégradation de la note de crédit de cette dernière).
La probabilité de survenance simultanée de tous ces événements étant faible, la formule
standard s’appuie sur une matrice de corrélations entre ces différents risques. Cette
corrélation permet aussi à l’organisme de constater des bénéfices de diversification.
Le SCR reflète le profil de risque réel de l’entreprise, compte tenu de tous les risques
quantifiables pris en compte.
Figure 22 – Décomposition du SCR de la formule standard
« Le périmètre de calcul de l’exigence de capital est considérablement élargi puisque tous les risques supportés par l’organisme sont inclus »16.
15 ACP - « QIS 4 » - 2008 16 ACAM - « Analyse & Synthèse du QIS4 » - déc.2008
40/77
Du point de vue des exigences quantitatives, Solvabilité II propose donc une approche
affinée de la solvabilité par rapport à Solvabilité I. L’approche par type de risques doit
permettre la prise en compte de la nature, des spécificités et de l’importance de chacune des
catégories de risques auxquels est exposée l’entreprise.
Par rapport à la directive actuelle, Solvabilité II introduit ensuite une uniformisation du calcul
des provisions qui repose sur la valorisation économique des éléments de bilan pour les
besoins prudentiels. Les postes du bilan sont valorisés « en cohérence avec le marché » sur
la base d’une approche unique : la valeur de transfert immédiate. Il s’agit d’une méthode de
valorisation proche des normes comptables IFRS, mais permettant des ajustements
prudentiels (ex : participations, écarts d’acquisition…). L’approche est similaire à la
valorisation en « Fair Value » au risque de crédit propre près.
La valorisation du bilan prudentiel est « Market Consistent » sur l’Actif mais également sur le
Passif.
« Les actifs sont valorisés au montant pour lequel ils pourraient être échangés dans le cadre d’une transaction conclue, dans des conditions de concurrence normales, entre des parties informées et consentantes ».
- Les actifs incorporels et frais d’acquisition reportés sont évalués à zéro ;
- Les placements sont évalués à leur valeur de marché ;
- Les provisions cédées obéissent aux mêmes règles de calcul que les provisions
techniques, et sont corrigées du risque de contrepartie sur les réassureurs.
« Les passifs sont valorisés au montant pour lequel ils pourraient être transférés ou réglés dans le cadre d’une transaction conclue, dans des conditions de concurrence normales, entre des parties informées et consentantes ».
- Les fonds propres sont classés selon trois niveaux qui déterminent les limites de leur
éligibilité pour couvrir les exigences de capital ;
- Les provisions techniques des passifs dont les flux de trésorerie ou « cash flows » sont
réplicables par un portefeuille d’actifs investis (contrats en unités de compte sans option
ou garantie…) sont valorisées en valeur de transfert ;
- Les provisions techniques des passifs non réplicables sont calculées en « Best Estimate »
qui correspond à la valeur actuelle probable des flux de trésorerie futurs, actualisés, qui
seront requis pour honorer les obligations d’assurance ou de réassurance sur toute leur
durée de vie, y compris toutes les dépenses, primes discrétionnaires à venir ou garanties
41/77
financières et options contractuelles incluses. Une marge pour risques garantit que le
montant global des provisions techniques sera équivalent à la somme que les entreprises
d'assurance ou de réassurance s'attendraient à devoir payer aujourd'hui si elles
transféraient sur le champ leurs droits et obligations contractuels à une autre entreprise.
Elle représente le coût additionnel, par rapport au Best Estimate, induit par
l’immobilisation de capital en couverture des exigences de capital jusqu’à l’extinction des
engagements pris par l’assureur. Elle représente donc le coût du capital immobilisé par
l’acquéreur éventuel du portefeuille.
Ce cadre réglementaire étant désormais posé, nous allons nous intéresser dans la
prochaine section aux apports de ces évolutions en matière de pilotage de la
performance.
42/77
2.2 Mise à profit des outils de calcul d’exigences en fonds propres du pilier 1 dans le cadre du pilotage de la performance
L’approche quantitative définie dans le Pilier 1 de la Directive Solvabilité II repose sur des
modèles mathématiques de calcul de capital réglementaire qui mesurent la résistance de
l’entreprise face à des conditions difficiles.
Les assureurs auront tout d’abord recours à la « formule standard » que nous avons
présentée dans le chapitre précédent, formule définie dans le cadre prudentiel Solvabilité II
et applicable à l’ensemble des acteurs du secteur. Devant être appliquée à des groupes
d’assurance internationaux comme à des petites mutuelles d’assurance locales ou
spécialisées sur une branche d’activité, cette formule générique par nature ne pourra
donnera qu’une vision imparfaite du profil de risque de l’organisme.
Aussi, le régulateur a laissé la possibilité aux entreprises de développer en parallèle leur
propre « modèle interne » (sur la base de la formule standard ou non) reflétant mieux leurs
propres profil de risques.
« Le SCR peut être calculé de plusieurs façons différentes : soit par une formule standard calibrée uniformément sur le marché européen, soit par un modèle interne développé par l’assureur et après autorisation par le superviseur, soit par une combinaison de ces deux méthodes »17 « Le projet Solvabilité II prévoit d’autoriser l’utilisation d’indicateurs internes de risque, pour justifier le caractère suffisant de la capitalisation des assureurs, voire le niveau de prudence dans leurs réserves. Les conditions seraient d’une part que les modèles soient reconnus pertinents du point de vue de l’Actif / Passif et du besoin en capital, et d’autre part qu'ils soient effectivement utilisés par le management pour éclairer des décisions opérationnelles »18.
Quelques grands assureurs et réassureurs leaders sur leurs marchés (AGF, CNP, SCOR…)
avaient au début des années 2000, avant qu’on ne parle de Solvabilité II, déjà mis en place
des modèles de gestion interne, outils qu’ils ont perfectionné au fil des ans.
Partant du postulat que les fonds propres n’étaient pas une ressource gratuite, ils
ont souhaité intégrer leur coût dans la mesure de la profitabilité de leur activité.
17 ACP – « Principaux enseignements de la cinquième étude quantitative d’impacts QIS 5 » 18 Charles DESCURE & Cristiano BOREAN - Generali France – « Gestion Actif Passif et Solvabilité »
43/77
Jusqu’alors la performance se mesurait principalement en termes de marge opérationnelle ou
de poids du chiffre d’affaires de chacune de leurs activités par rapport à leur chiffre d’affaires
global, ce qui reste le cas dans beaucoup de sociétés.
Ces modèles baptisés de « capital économique » reposent sur une allocation des
fonds propres de base entre les différentes activités selon leur contribution au
risque total de l’entreprise.
En d’autres termes, ils déterminent pour chacune des activités de l’entreprise, le
montant de capital que l’entreprise estime nécessaire pour couvrir les risques
associés.
Ces modèles internes permettent ainsi de piloter de manière prospective
l’équilibre entre les objectifs de développement économique de l’entreprise et le
montant du risque encouru pour les atteindre.
Cette analyse prospective des besoins en fonds propres ou planification stratégique du
capital est l’essence même du processus « ORSA » que nous détaillerons dans le troisième
chapitre.
Chez les assureurs les plus avancés, l’utilisation de ces modèles pour évaluer la portée des
décisions stratégiques concerne aussi bien le lancement de produits, la tarification, la
modification de la politique de souscription, l’ALM et la politique de placements, la
réassurance, que la définition de la stratégie de risques.
Au niveau opérationnel ces modèles permettent d’organiser la gestion des différentes
activités (définition des limites, diversification) et créent un langage commun de la mesure
de la performance.
Bruno FOURNET, Directeur Analyse Gestion, Méthodes et Procédure – SCOR
Global P&C SE
« Le pilotage de la performance débute dès le processus de souscription. Pour
chaque traité, le souscripteur effectue, grâce à notre modèle interne, un calcul
de rentabilité économique au regard du coût en capital ajusté des risques »
44/77
Figure 23 - Illustration du périmètre d'un modèle interne par PWC19
Ces modèles de gestion interne n’avaient initialement pas vocation à déterminer un capital
réglementaire mais un capital économique. Avec Solvabilité II, les deux approches ont
néanmoins tendance à converger.
« La connexion du modèle de capital économique et de Solvabilité II réside dans la détermination des capitaux alloués pondérés du risque »20
Il est probable que les assureurs disposant d’un modèle de capital économique le feront
évoluer à la marge afin qu’il corresponde à une modélisation et une calibration des risques
compatible avec les exigences de Solvabilité II, pour qu’il soit validé par l’autorité de contrôle
et utilisé dans le cadre prudentiel pour la détermination du capital réglementaire.
Il est également très probable, qu’en imposant un calcul sophistiqué du capital réglementaire,
Solvabilité II incite les assureurs qui n’ont pas encore développé ce type de modèle interne à
franchir le pas, non seulement pour leurs besoins de calcul de capital réglementaire mais
aussi de capital économique (avec des modèles certainement assez simples dans un premier
temps).
19 PriceWaterhouseCoopers - « Solvabilité II – Livre Blanc » 20 Philippe FOULQUIER - « Solvabilité II : une opportunité de pilotage de la performance »
45/77
2.2.1 Illustration des apports d’un modèle d’allocation du capital par activité pondéré des risques
Que l’assureur utilise un modèle standard ou un modèle interne, ce dernier lui
permettra de déterminer, en fonction de son profil de risque (de souscription de
l’activité considérée, de marché financiers, des risques de crédit et de ses risques
opérationnels), le montant des capitaux pondérés des risques à allouer à cette
activité.
• Du point de vue capital réglementaire ce montant correspondra au SCR Solvabilité II
de l’activité ;
• Du point de vue capital économique, il correspondra au « Risk Adjusted Capital » ou
« RAC » de l’activité.
Pour cette illustration, afin de simplifier les choses, considérons une convergence totale entre
les modèles de capital réglementaire et de capital économique, soit SCR = RAC.
Prenons l’exemple de la compagnie fictive ci-dessous
Figure 24 – Données d’une société fictive (source EDHEC Business School)
Pour notre exemple, si nous retenons l’activité Responsabilité Civile générale de la société, la
détermination du capital alloué à l’aide du modèle standard se décompose ainsi.
Activité
Primes
EURm
Primes
%
Résultat net
EURm
RC générale 1456 10,40% 95
Risques d'entreprise 897 6,40% 36
Dommages aux bien des particuliers 4951 35,30% 149
Assistance 745 5,30% 26
Assurance Automobile 5963 42,60% 149
Somme 14012 100,00% 454
Excédents 45
TOTAL 14012 499
46/77
Figure 25 – Détermination des capitaux pondérés des risques (en %) à allouer à l’activité RC de la société fictive
Nous obtenons une allocation en capital pondéré du risque de 80% sur l’activité RC qui
correspond à la fois au SCR et au RAC. Pour 100 euros de primes souscrites dans le cadre de
son activité RC générale, la société fictive devra disposer de 80 euros de fonds propres.
Nous pouvons à partir de ce RAC déterminer par un calcul simple la rentabilité financière de
cette activité pondérée des risques, appelée Return on Risk Adjusted Capital « RoRAC ».
RoRAC = Résultat net soit dans notre exemple = 95 = 8,10%
Primes x RAC (%) 1456 X 80%
Ce calcul de RoRAC est bien plus puissant qu’un calcul de ROE qui comme nous
l’avons vu dans le premier chapitre, ne permet pas de mesurer et rentabilité par
activité et ne prend pas en compte la notion de risque
Philippe FOULQUIER, Directeur de l’EDHEC Financial Analysis and Accounting
Research Centre a réalisé l’exercice à partir de cette même société d’assurance fictive, de
comparer une méthode classique d’analyse des résultats (fondée sur la marge nette) avec
une méthode de capital économique.
47/77
Figure 26 - Analyse des résultats de la société fictive
Philippe FOULQUIER constate que de nombreux assureurs pourraient s’identifier à cette
entreprise fictive en termes de profil et de stratégie. Selon une approche classique, reposant
sur l’analyse du chiffre d’affaires et des marges, la stratégie de cette entreprise semble
pertinente et cohérente à la fois en termes de risques et de marge. Cette société prudente
créée de la valeur avec une marge technique nette moyenne de 3,5%. La société fictive
souscrit en effet principalement des risques automobiles et dommages aux biens des
particuliers qui constituent activités courtes et peu risquées. La responsabilité civile, activité
la plus risquée ne représentant que 10% de l’activité en volume. L’assurance RC génère une
marge de 6,5%, plus de 2,5 fois supérieure à la marge de l’assurance Auto.
Toutefois, lorsqu’il prend en considération le coût des ressources dans son analyse, Philippe
FOULQUIER fait un constat bien différent du premier. L’approche par le capital économique
consistant à allouer du capital (RAC) par activité selon leurs risques (80% en responsabilité
civile, 12% en assurance automobile, chiffres issus du modèle interne d’un assureur
européen que nous avons décomposé plus haut), met tout d’abord en lumière que
l’assurance RC a un poids bien plus important dans l’activité globale de société. En effet, elle
représente près d’un tiers des capitaux alloués pondérés du risque (1165 / 3911), contre
10% si l’on raisonne classiquement en termes de poids par rapport au chiffre d’affaires.
Par ailleurs Philippe FOULQUIER démontre également que la marge nette de 6,5% ne suffit
pas à compenser le niveau de capital exigé.
Compte tenu de l’hypothèse initiale d’un coût du capital à 8,5%, et du RoRAC calculé à 8,2%
selon ce modèle, l’activité RC détruit de la valeur avec un résultat de RoRAC – Coc de -
0,40% alors que l’assurance automobile, alors en dépit de sa faible marge nette dégage un
résultat positif de +12,7 % et créée donc de la valeur. Philippe FOULQUIER conclut que le
constat résultant de ce type d’analyse par capital économique de l’activité inciterait un tel
assureur à revoir sa stratégie selon plusieurs axes non exclusifs : réallocation des capitaux
Activité
Primes
EURm
Primes
%
RAC
%
RAC
EURm
Marge nette
%
Résultat net
EURm
RoRAC
%
Cost of
Capital
RoRAC-CoC
RC générale 1456 10,40% 80% 1165 6,50% 95 8,10% 8,50% -0,40%
Risques d'entreprise 897 6,40% 40% 359 4,00% 36 10,00% 8,50% 1,50%
Dommages aux bien des particuliers 4951 35,30% 30% 1485 3,00% 149 10,00% 8,50% 1,50%
Assistance 745 5,30% 25% 186 3,50% 26 14,00% 8,50% 5,50%
Assurance Automobile 5963 42,60% 12% 716 2,50% 149 20,80% 8,50% 12,30%
Somme 14012 100,00% 3911 454 11,60% 8,50% 3,10%
Excédents 1000 4,50% 45 4,50%
TOTAL 14012 4911 499
48/77
alloués entre les activités, cession ou renforcement dans l’assurance RC pour atteindre une
taille critique, redéfinition de la politique de réassurance afin de réduire son risque et donc
son allocation du capital.
Cet exemple montre que la prise en compte du coût des fonds propres par activité
pondérés des risques dans l’analyse économique bouleverse les conclusions d’une
analyse classique. Dans le cas présent, démonstration à l’appui, l’apport d’un modèle de
capital économique en matière de pilotage de la performance parait indéniable.
2.3 Apports du pilier 2 en matière de gouvernance stratégique Le pilier 1 de la réforme Solvabilité II concentre toujours à lui seul la majorité des
investissements des entreprises d’assurance. Bien que les travaux de modélisation
économique des engagements et d’évaluation de capital réglementaire apportent une
certaine valeur ajoutée, leur intérêt en termes de pilotage stratégique reste partiel.
2.3.1 Détermination du cadre de prise de risques Au sein de ce corpus réglementaire du pilier 2, les articles 44 et 45 de la directive
imposent que la gouvernance des risques de l’entreprise d’assurance s’appuie
tout d’abord sur une stratégie des risques acceptés. Cette stratégie des risques
est communément publiée dans un document cadre ou « Risk Appetite
Statement ».
Comme nous l’avons développé dans la première partie, le métier de l’assureur consiste à
prendre des risques, à les mutualiser et à les gérer dans un objectif de profitabilité et de
pérennité. Ainsi, une entreprise d’assurance acceptera de supporter un risque
seulement si elle considère que cette prise de risque a une probabilité
raisonnable d’être convenablement récompensée. Les compagnies d’assurances
doivent avoir donc une vision claire des de risques qu’elles souhaitent souscrire.
Définir un cadre de prise de risque est une activité stratégique qui revient pour la Direction
d’une entreprise d’assurance à conclure un pacte avec ses actionnaires. Une entreprise
d'assurances a besoin de fonds propres pour exercer sur le long terme son activité de « prise
de risques » et satisfaire à tout moment ses engagements vis-à-vis des assurés. En
contrepartie de cette immobilisation de capital, l’actionnaire et la Direction de l’entreprise
49/77
s’accordent sur une rentabilité cohérente avec le niveau de prise de risque qu’implique
l’activité d’assurance.
L’histoire récente montre que ses principes pourtant simples peuvent rapidement être oubliés
et plaide pour que les différentes parties prenantes du monde de la banque et de l’assurance
apportent une attention supérieure à la définition et à la compréhension des cadres de
tolérance aux risques des entreprises. En effet, la récente crise financière a notamment mis
en lumière que de nombreux investisseurs s’étaient focalisés sur des objectifs très élevés de
rentabilité de leur capital sans considération claire du niveau de prise de risque que cela
pouvait impliquer pour l’entreprise.
La définition d’un cadre de prise de risque compatible avec les objectifs de l’entreprise
d’assurance est donc un élément clé pour une gestion efficiente de son activité.
Cet appétit ou appétence au risque est propre à chaque assureur, il peut aussi bien être
imputables aux caractéristiques de la compagnie (culture, capacités, expertise technique,
implantations géographiques …) qu’à à ses bonnes ou mauvaises expériences passées.... Il
prend en compte les facteurs macroscopiques de l’environnement tels que la réglementation,
les spécificités métiers, la concurrence. Il doit en tout cas être matérialisé par des limites de
risque cohérentes avec le niveau de capital de la compagnie… et la rentabilité attendue du
capital par les actionnaires, elle-même proportionnelle à la prise de risques.
Ces grandes limites de risques constituent à titre d’illustration ainsi un excellent critère de
segmentation des acteurs de l’univers de l’assurance et de la réassurance. Les assureurs
privilégieront les sinistres de fréquences alors que les réassureurs couvriront davantage les
sinistres de gravité.
Le cadre de prise d’une entreprise d’assurance se décline en plusieurs strates
implémentées en cascades :
Le risque maximal acceptable est le niveau le plus agrégé de la stratégie de prise de
risques. Il représente le montant maximum de risque qui peut être supporté par l’Entreprise,
exprimé en montant agrégé de capital.
L’appétit pour le risque, sera systématiquement mis en perspective de cette capacité
maximale de prise de risque. En d’autres termes, le montant du Capital Économique
(typiquement le Capital-at-Risk à 99,5%) devra être inférieur au montant maximum défini.
L’approche de définition du risque maximal acceptable répond à la question « Où pouvons
nous nous positionner en termes de risques ? ».
50/77
La définition du risque maximal acceptable est descendante. Elle est généralement portée
par le Comité Exécutif (COMEX) et validée le Conseil d’Administration (CA).
La capacité de prise de risque maximale est déterminée au regard :
- Du montant du capital disponible en vision économique ;
- De la liquidité du capital ;
- De la qualité du capital (Tier 1, Tier 2 et Tier 3) ;
- De la solidité des résultats financiers (prise en compte de bénéfices futurs).
Le capital disponible représente l’amortisseur final contre les scénarios adverses. Le calcul du
capital disponible correspond à la différence entre les actifs et les passifs en base
économique afin de les ressources financières réellement disponibles.
L’appétence au risque ou appétit au risque est représentée par la nature et la
quantité de risques que l’Entreprise est prête à accepter ou tolérer afin
d’accomplir sa mission et ses objectifs stratégiques, en tenant compte des attentes
des parties prenantes (actionnaires, détenteurs de la dette, assurés, management,…) et
leurs représentants (régulateurs, agences de notation, …).
La tolérance au risque est souvent définie comme une répartition à un niveau plus fin de
l’appétit aux risques. Portée par le COMEX de l’entreprise, cette déclinaison peut être réalisée
aussi bien sur des grandes familles de risque que des entités ou des périmètres
géographiques.
Le profil de risque de l’entreprise matérialise les capacités de l’entreprise à réagir face à un
stress. Il est déterminé à l’aide des modèles de risques par la réaction d’agrégats financiers
à un choc d’une variable sous-jacente. La mesure est réalisée sur un périmètre donné, à une
date fixée. Cette mesure peut être réalisée sur des périmètres très restreints comme le
risque de mortalité pour un produit spécifique d’une filiale. Elle peut également être réalisée
à tous les niveaux d’agrégation possibles jusqu’au périmètre intégral de l’entreprise.
Le budget de risque constitue la mesure du niveau anticipé d’exposition aux risques à un
horizon donné, sur un périmètre donné. Cette mesure est une mesure du profil de risque sur
une projection de l’entreprise, avec des niveaux de granularité identiques.
51/77
Les limites de risques sont définies comme les limites opérationnelles en cohérence avec
le budget de risque et / ou l’appétit aux risques. Ces limites sont applicables aux différents
métiers et spécifiques au processus auquel elles se rapportent. Elles sont ainsi représentées
par les enveloppes et les niveaux cibles de risques adaptées à la volonté de prise de risque
de l’entreprise découlant de sa stratégie de risques. Néanmoins, la réflexion stratégique peut
est nourrie de manière ascendante par les remontées opérationnelles.
La valeur apportée par la définition d’une stratégie des risques réside donc dans
l’opportunité de faire travailler de concert l’ensemble des niveaux
organisationnels de l’entreprise à une meilleure connaissance des risques
auxquels chacun s’expose. Elle va ainsi garantir un alignement entre stratégie et activité
opérationnelle des métiers, au travers de limites clairement définies, contribuant ainsi à la
performance collective.
La directive prévoit que cette stratégie de prise de risque soit mise en œuvre par
l’intermédiaire d’un processus interne de prise de décision, l’Own Risk and Solvabilité
Assessment, processus que nous allons étudier dans la section suivante.
2.3.2 Own Risk and Solvabity Assessment L’Own Risk and Solvability Assessment ou ORSA est un processus d’analyse interne à
l’entreprise qui devra faire partie intégrante de ses prises de décisions stratégiques. Ce
processus doit permettre l’évaluation régulière :
- Des besoins globaux de solvabilité (politique en matière de capital) à court et long terme,
compte tenu de la stratégie de l’entreprise et sa tolérance au risque ;
- Du respect permanent du SCR, du MCR et des provisions techniques (l’entreprise doit
justifier que le calcul de SCR qu’elle propose au travers de l’ORSA est adéquat) ;
- Des déviations éventuelles du profil de risque par rapport aux hypothèses sous-jacentes.
Pour les assureurs en phase de constitution d’un modèle interne, certains aspects propres au
pilier 1 de Solvabilité II brident leur intérêt en termes de pilotage de la performance.
52/77
« C’est bien par l’intermédiaire du pilier 2 de la réforme et notamment de l’Own
Risk and Solvabilité Assessment , que les assureurs vont être amenés à élaborer
un modèle prospectif dans un objectif de pilotage de la performance »21
Les différences d’approche entre Solvabilité II pilier 1 et ORSA sont notables. Le pilier 1
repose sur une approche court-terme de la solvabilité. L’horizon d’un an retenu pour le
modèle Solvabilité II pilier 1 ne permet pas aux assureurs de piloter leur activité sur une
période compatible avec leur horizon de gestion. En pilotant son activité avec ce type de
modèle, un assureur privilégiera très certainement les stratégies de gestion reposant sur
risques courts au détriment des risques longs tels la retraite.
Prenons l’exemple d’un produit d’épargne retraite de type PERP.
Figure 27 – Quelques caractéristiques d'un produit épargne retraite
Du fait de l’horizon temporel d’un an, un modèle Solvabilité I pilier 1 ne sera pas adapté au
pilotage d’un portefeuille constitué de ce type de produits, aux spécificités très marquées.
L’ORSA a pleinement vocation à répondre à ces problématiques, en incitant les assureurs à
gérer leur activité sur un horizon compatible avec leur horizon de gestion. L’ORSA doit en
effet permettre de démontrer que l’entreprise d’assurance est capable de mobiliser le capital
nécessaire pour couvrir le besoin en marge de solvabilité non pas sur un horizon d’un an,
mais sur l’horizon de sa planification stratégique (3 à 5 ans en général). Ce principe sous
entend une approche prospective du pilotage de la solvabilité avec la prise des
stratégies commerciales, de réassurance, de gestion actif / passif, de la
spécificité des produits.
L’ORSA doit donc représenter la position de l’entreprise sur l’ensemble de ses
risques sur l’horizon de son plan stratégique. Seront non seulement pris en compte les
risques de la formule standard (risques opérationnels, de marché, de souscription, de crédit),
21 Gildas ROBERT – « Comment intégrer les modèles prospectifs dans le pilotage de l’activité d’assurance »
53/77
mais également les facteurs externes susceptibles d’impacter la solvabilité sur le moyen /
long terme : risque stratégique, risque business, risque de réputation…
Dans cette perspective, la prise en compte du profil de risque spécifique de l’entreprise tel
que nous l’avons présenté au paragraphe précédent est un aspect essentiel de l’ORSA.
Bien que séduisante, cette approche semble délicate à mettre en œuvre. Les travaux à
mener sont assimilables au calibrage d’un modèle interne, mais avec un niveau de
complexité bien supérieur lié à l’élargissement du périmètre de risques et à la prise en
compte de la dimension prospective.
L’exemple ci-dessous illustre bien la complexité de l’exercice de modélisation.
Figure 28 - Hausse des taux d’intérêts et impacts sur un fonds en euros
Les entreprises vont en effet être confrontées à plusieurs types de difficultés :
• Appréciation du poids de chacun des risques ;
• Existence de liens étroits pouvant provoquer des réactions en chaînes ;
• Impacts simultanés dont l’effet global n’est pas forcément prévisible a priori.
Aussi la mise en place d’un processus ORSA devra se faire par étape, de manière progressive,
avec un niveau d’ambition mesuré dans un premier temps.
Malgré cette complexité de mise en œuvre, l’ORSA, en faisant un lien prospectif entre
appétence aux risques et capital management, devra être envisagé comme une réelle
opportunité d’éclairer les prises de décisions stratégiques.
54/77
2.4 Limites de l’approche du pilotage par les modèles actuariels
Tout n’est pourtant pas si simple. Pour tenter de reproduire l’activité de l’entreprise,
les modèles sont fondés sur nombre d’hypothèses (endogènes et exogènes)
toujours discutables et utilisent des paramètres très sensibles dont le poids peut
influencer de manière considérable le résultat.
Cette difficulté se traduit tout d’abord au niveau de la modélisation des risques pris de
manière individuelle.
« L’épineux problème des « branches longues », dont les exigences de
capital sous Solvabilité II semble notoirement prohibitives aux assureurs reste
entier à ce jour22 ».
Le risque souverain est un autre exemple représentatif. L’une des hypothèses retenues dans
le cadre de la définition du modèle standard Solvabilité II était que la dette souveraine était
un placement sans risque. Un placement en dette souveraine ne coûte pas de fonds propres
dans le modèle standard Solvabilité II… alors que leurs placements en dette souveraine
grecque auront bel et bien couté cher aux assureurs ces dernières années.
Les difficultés de prise en compte dans les modèles d’hypothèses complexes telles des lois
de rachats de contrats Vie, d’adéquation des horizons de gestion des actifs et des passifs
sont encore autant d’autres exemples qui montrent les limites de la modélisation des risques
pour la constitution d’indicateurs de pilotage.
Un deuxième niveau de complexité apparaît lorsqu’il s’agit de modéliser l’activité d’assurance
manière globale.
Pierre DARBRE, Commissaire Contrôleur de l’Autorité de Contrôle Prudentiel nous
indique que « l’agrégation des risques est très délicate à calibrer dans les modèles
internes. La modification des poids des paramètres de diversification
géographique et par branche d’activité pouvant faire varier très significativement
les résultats ».
22 L’Argus de l’assurance - « Solvabilité II : 2016… au mieux » - 21 novembre 2012
55/77
« Il en est de même pour les paramètres d’allocation qui sont très difficiles à
expliquer mathématiquement » confirme Aurélien SIGNORINI, Directeur de la
Planification et de la Performance – CNP Assurances
Une autre difficulté à laquelle sont confrontés les assureurs est la cohérence des
résultats issus de leurs différentes modèles.
Pierre DARBRE nous rappelle que les modèles internes Solvabilité II seront nécessairement
contraints par la référence à la formule standard alors que l’ORSA permettra aux assureurs
d’augmenter ou de diminuer le nombre de risques pris en compte pour correspondre
davantage à leur profil de risque.
Du fait de la prise en compte des primes futures dans le référentiel EV pour le calcul de la
MCEV, des écarts seront nécessairement constatés avec le référentiel Solvabilité II.
Enfin la réconciliation des IFRS 4 Phase II avec Solvabilité II n’a rien d’évidente.
Bien qu’il s’agisse de processus ayant des objectifs distincts, il serait bienvenu que les
tendances dégagées par ces différents modèles convergent.
« Pour y parvenir, les assureurs devront procéder à des investissements
importants car faire tourner un modèle interne et réfléchir à ce qu’il faut modifier
pour le rendre plus pertinent n’a rien d’anodin »
« J’ai connu la caricature en payant ma dîme au modèle » atteste Jean-Philippe
THIERRY :
« Ainsi, un jour, m’a-t-on annoncé que l’on pourrait économiser un montant
significatif de capital et ainsi augmenter notre ROE en s’assurant contre certains
risques extrêmes. Nous avons payé cette prime, coûteuse et inutile, mais le
résultat net ne comptait plus, seul comptait le retour sur capital alloué ».
« Piloter à l’aide de modèles mathématiques nécessitera beaucoup de prise de
recul de la part des assureurs » concluent Aurélien SIGNORINI et Pierre DARBRE.
Aussi, même à l’aune de Solvabilité II, le « pilotage aux instruments » reposant sur des
modèles actuariels de risques ne remplacera pas totalement un mode de pilotage plus
empirique, reposant davantage sur l’expérience que sur les outils de modélisation.
56/77
2.5 Synthèse du deuxième chapitre Ce deuxième chapitre est la preuve que Solvabilité II élargira le panorama du pilotage de
la performance au travers d’outils qui intégreront la notion de ségrégation entre activités
et la notion de risques. La nouvelle directive constituera ainsi une excellente opportunité de
mettre à profit des investissements réalisés à des fins réglementaires pour mieux piloter la
performance.
Solvabilité II jouera tout d’abord le rôle de catalyseur de l’intégration de la gestion des
risques et du coût du capital dans le pilotage de la performance. L’utilisation de modèles
actuariels internes permettra notamment de déterminer le montant des capitaux pondérés
des risques à allouer à chacune des activités de l’entreprise. Ces outils, utilisés de manière
dynamique, permettront également de piloter à court terme l’équilibre entre les objectifs de
développement économique de l’entreprise et le montant du risque encouru pour les
atteindre.
De plus, Solvabilité II incitera les assureurs à définir leur propre stratégie des risques
acceptés. Le pilotage de l’appétit aux risques de l’organisme, garantira un alignement entre
le plan stratégique et l’activité opérationnelle des métiers, contribuant ainsi à la performance
collective de l’organisation.
Enfin, un processus d’analyse interne, l’ORSA, permettra de réaliser un lien prospectif entre
appétence aux risques et capital management sur l’horizon du plan stratégique de
l’entreprise. Ce processus devra être envisagé comme une réelle opportunité d’éclairer les
prises de décisions.
Cependant qu’il s’agisse de calcul de capital réglementaire ou de processus ORSA, les risques
de modèles sont à considérer au regard du rôle stratégique qu’ils vont jouer à l’avenir.
Tenter de reproduire la réalité économique nécessite de construire des modèles très
complexes, difficiles à calibrer. Ces modèles internes auront toujours des limites liées à
l’environnement dans lequel ils sont appliqués, limites qui ne sont pas facile de cerner et qui
nécessiteront beaucoup de prudence et de prise de recul de la part de leur utilisateur.
57/77
3 Conception d’un dispositif de pilotage de la performance s’appuyant sur une gouvernance des risques de type Solvabilité II
A la lumière des opportunités identifiées précédemment, l’objectif de ce chapitre
est d’illustrer la conception d’un système de pilotage de la performance moderne,
reposant les concepts et outils de gouvernance des risques de Solvabilité II.
Solvabilité II a bel et bien l’ambition d’installer dans les entreprises d’assurance, un
« système de gouvernance » qui prendra en compte les risques, avec pour objectif principal
de garantir une gestion saine, prudente et efficace de leur activité. Le « système de
gouvernance » que nous construirons ci après, couvrira l’ensemble du fonctionnement de
l’entreprise comme illustré ci-dessous.
Figure 29 - Illustration d'un système de gouvernance intégrant l’ORSA
En l’état du processus législatif, les textes du pilier 2 de Solvabilité II ne posent que des
principes généraux d’organisation et de gouvernance. Ce socle réglementaire minimal est
décliné en fonctions et objectifs, que des mesures de niveau 2 et recommandations de
niveau 3 viendront préciser.
58/77
Cependant, l’esprit de la directive et notamment du « principe de proportionnalité » est
bien de laisser libre choix aux assureurs de définir leur modèle organisationnel et de
gouvernance en fonction des caractéristiques qui leur sont propres : taille, profil de
risques…
Ainsi, la directive nous laisse des marges de manœuvre intéressantes à exploiter en
matière de gouvernance.
Solvabilité II constitue donc une excellente opportunité de transformer en profondeur
la gouvernance de l’entreprise en faisant en sorte que l’ensemble des fonctions et
processus de l’entreprise concourent de manière globale à leur maîtrise.
Nous allons illustrer la mise en œuvre d’un tel « système de gouvernance » dans une
entreprise virtuelle, en décomposant les travaux à mener en trois étapes :
• Élaboration d’une stratégie des risques et implémentation d’outils de pilotage de
performance intégrant les notions de prise de risques et de ségrégation entre
activités ;
• Construction d’une structure organisationnelle qui définira de manière transparente
les fonctions et responsabilités de chacun ;
• Définition des règles de prise de décision, de fonctionnement, de reporting interne,
de coopération et de supervision.
59/77
3.1 Élaboration d’une stratégie de risques et implémentation des outils de pilotage associés
3.1.1 Définition de l’appétit aux risques C’est en formulant notre stratégie des risques, par l’intermédiaire de la définition d’un risque
maximal acceptable et de notre appétit aux risques, que nous préciserons le cadre de prise
de risque dans lequel notre entreprise d’assurance souhaite exercer son activité.
Nous exprimerons notre appétit au risque sous la forme d’un niveau de déviation
acceptée « d’agrégats clés » ou « de dimensions de l’entreprise » par rapport à
une situation espérée.
Il est essentiel que nous définissions cette politique de risque en cohérente avec les objectifs
stratégique de notre entreprise : développement de l’activité, de création de valeur, de
rentabilité du capital…
Ainsi, la définition de cet appétit nécessite que nous nous focalisions tout d’abord sur les
dimensions fondamentales de l’entreprise que nous souhaitons piloter :
• Résultat financier
• Capital
• Solvabilité
• Niveau de rating
• Réputation…
Il convient de ne retenir qu’un nombre limité de 3 à 4 dimensions, représentatif des enjeux
de pilotage de l’entreprise.
Aurélien SIGNORINI – Directeur de la planification et de la performance – CNP
Assurances
« Nous réalisons notre Dashboard selon 3 dimensions : résultat, création de
valeur et besoins en fonds propres »
Pour chaque dimension retenue dans la définition de l’appétit pour le risque, nous
choisirons tout d’abord un niveau de probabilité de risque. Pour cela, nous prendrons
en compte l’ensemble de la distribution des probabilités de résultats.
La figure ci-dessous illustre la déviation acceptée ou limite de tolérance sur la dimension
« résultat financier » et les conséquences d’une déviation plus grande que celle espérée.
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Figure 30 – Illustration d’une loi de distribution sur la dimension « Résultat financier »23
Il est intéressant de noter que nos différentes parties prenantes ne sont pas intéressées par
les mêmes régions de la distribution comme l’illustre la figure précédente. En effet, nos
actionnaires seront davantage intéressés par la variabilité des résultats autour des valeurs
centrales (l'espérance de résultats) alors que nos assurés et les régulateurs se concentreront
sur les valeurs extrêmes de la queue de distribution.
Nous associerons ensuite la probabilité de risques par dimension à un horizon de
temps cohérent, communément situé entre an et la durée du plan stratégique de
l’entreprise.
Enfin nous définirons des limites ou seuils de tolérance aux risques qui traduisent notre
appétit pour le risque sur chacune des dimensions. Ces limites n’ont de sens que si elles sont
associées à un dispositif de mesure adéquat du risque, qui reposera idéalement sur des
outils de type « Économiques » issus des modèles Solvabilité II.
Appliquons cette méthode de définition de l’appétit pour le risque et de ses tolérances
associées sur trois dimensions fondamentales de notre entreprise. Nous obtenons le tableau
ci-dessous.
23 Xavier AGENOS – « Appétit pour le risque et gestion stratégique d’une société d’assurance non-vie »
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Figure 31 - Illustration de la définition d’un appétit aux risques sur les dimensions résultat, capital et solvabilité
Dimension Seuil de tolérance Type de mesure ProbabilitéHorizon
temporel
Le potentiel de baisse des Résultats IFRS du Groupe doit rester
inférieur à 40% des Résultats IFRS Attendus dans le Plan
Stratégique dans au moins 90% des cas à l'horizon d'un anEarnings at Risk 90% 1an
Montant minimum de Résultats que l'entreprise souhaite
atteindre avec une probabilité de 3% à l'horizon 5 annéesEarnings at Risk 80% 5 ans
Probabilité de Résultats à zéro ou négatifs _ 5 % Probabilité 5% 5 ans
Le risque en capital de l’entreprise doit rester inférieur à 20% du
Capital Disponible dans au moins 90 % des cas à l’horizon 1 an Capital at Risk 90% 1 an
La Rentabilité du Capital sera supérieure ou égale à 10 %
dans 99,5 % des cas à l'horizon d'un an
Return on
Economic Capital90% 1 an
Le Capital Disponible sera supérieur au Capital Economique
dans au moins 99,97 % des cas à l'horizon d'un anCapital Economique 99,97% (AA) 1 an
La probabilité de rester au dessus des exigences de
solvabilité règlementaire est de 95 % à l'horizon d'un anSCR 95% 1 an
Résultat
Capital
Solvabilité
Caractérisons par exemple notre appétit au risque de Solvabilité au travers de l’analyse de la
première ligne de la dimension Solvabilité du tableau.
Sous Solvabilité II, la réglementation impose à notre entreprise d'assurance de détenir
suffisamment de fonds propres pour rester solvable dans au moins 99,5% des cas à un
horizon d'un an. Néanmoins, conformément à notre plan stratégique, nous souhaitons nous
positionner à un niveau de notation cible « AA ». Ainsi, pour répondre à ce niveau d’exigence
des agences de notation, nous avons décidé sur la dimension Solvabilité, de nous fixer une
limite de tolérance encore plus stricte que celle de la nouvelle directive : détenir
suffisamment de fonds propres pour rester solvable dans au moins 99,97 % des cas à un
horizon d'un an, correspondant à cette notation « AA ».
Dès lors que nous avons défini notre appétit pour le risque, nous pouvons définir son
dispositif de pilotage, ce qui constituera l’objet de la section suivante.
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3.2 Conception du tableau de bord de pilotage C'est par l’intermédiaire du tableau de bord de pilotage de l’appétit aux risques
que nous allons mesurer l’atteinte de nos objectifs stratégiques sur la base de
critères de rendements / risques et vérifier que nos prises de risques sont
cohérentes avec le cadre d'appétit de notre entreprise.
Ce tableau de bord ou « Risk Appetite Dashboard » consolidera les indicateurs de pilotage de
chacune des dimensions retenues plus haut.
Pilotage sur la dimension Résultat
Exemple de mesure applicable : tolérance aux variations de résultats ou «Earnings at Risk».
Enjeu : piloter l'atteinte d’un niveau de résultats comptables ajusté des risques dans le cadre
de tolérance du Plan Stratégique.
Destinataires : dirigeants et investisseurs.
Description : pour un niveau de probabilité souhaité, «l’EaR » mesure le potentiel de
diminution des résultats comptables par rapport aux résultats attendus sur un horizon donné.
Exemple : notre entreprise d'assurances définit son appétit pour le risque sur la variation de
résultats IFRS pour des scénarios de stress « modérés » (1 cas sur 10) de la façon suivante :
« A un horizon d'un an, le potentiel de baisse des Résultats IFRS de l’entreprise doit rester
inférieur à 40% des Résultats IFRS attendus dans le Plan Stratégique dans au moins 90%
des cas ». Nous allons contrôler cet objectif en calculant périodiquement le niveau des
Earnings at Risk pour un quantile de 90%. Nous comparerons le niveau courant avec la
limite de 40% des bénéfices attendues.
Figure 32 – Illustration d’un tableau de bord de pilotage des Earnings at Risk24
24 Xavier AGENOS – « Appétit pour le risque et gestion stratégique d’une société d’assurance non-vie »
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Pilotage sur la dimension Capital
Exemple de mesures applicable : tolérance sur les variations du capital ou « Capital at Risk ».
Enjeux : piloter les variations de fonds propres dans le cadre de la gestion courante de
l’entreprise.
Destinataires : dirigeants, investisseurs.
Description : pour un niveau de probabilité souhaité, le « CaR » mesure le potentiel de
diminution de la valeur de l'Actif Net du bilan par rapport à sa valeur attendue sur un horizon
donné.
Exemple : notre entreprise définit aussi son appétit pour le risque sur la variation de son
capital pour des scénarios de stress « modérés » (1 cas sur 10) de la façon suivante :
« le risque en capital de l’entreprise doit rester inférieur à 20% du Capital Disponible dans au
moins 90% des cas à l’horizon 1 an ». Nous comparerons le niveau du Capital at Risk pour
un quantile de 90% avec la limite de 20% du Capital Disponible.
Figure 33 – Illustration d’un tableau de bord de pilotage du Capital at Risk25
Il peut être intéressant de mesurer la contribution de chaque type de risque (Marché, Crédit,
Souscription,...) sur les variations de fonds propres par Business Unit. Pour cela, il suffit de
calculer les Capital at Risk appliqués à chaque catégorie de risque.
Le tableau ci-dessous met en lumière le Capital Économique par type de risque au regard
des limites de tolérance de l’entreprise.
25 Xavier AGENOS – « Appétit pour le risque et gestion stratégique d’une société d’assurance non-vie »
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Figure 34 – Illustration d’un tableau de bord de pilotage du capital économique par catégorie de risque26
Pilotage sur la dimension Solvabilité
Exemple de mesures applicable : tolérance sur les variations de solvabilité ou « ratio de
solvabilité économique ».
Enjeu : respect des marges de solvabilité, rating, capitalisation optimale.
Destinataires : régulateurs, agences de notation, investisseurs.
Description : ratio entre le Capital Disponible et le Capital Économique.
Exemple : notre entreprise d’assurances définit son appétit pour le risque sur la variation de
son capital pour des scénarios de stress « extrêmes » (1 cas sur 200 dans notre exemple). Il
s'exprime de la façon suivante : « le ratio de solvabilité économique de l’entreprise doit
rester à un niveau supérieur à 100% dans au moins 99,5% des cas, à un horizon d'un an ».
Cet indicateur de performance, que nous avons largement détaillé dans le chapitre 2, est
remarquable car il contribue à faire converger les approches de l’actionnaire et du régulateur.
26 Xavier AGENOS – « Appétit pour le risque et gestion stratégique d’une société d’assurance non-vie »
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Figure 35 – Illustration d’un tableau de bord de pilotage du ratio de capital économique
3.3 Construction de la structure organisationnelle
En matière de pilotage de la performance, l’aspect qualitatif demeure indissociable du
quantitatif : les outils de pilotage et les organisations sont étroitement liés.
Pour mettre en place la structure organisationnelle de notre « système de gouvernance » en
capitalisant sur les concepts Solvabilité II, nous devrons tout d’abord identifier et décrire les
périmètres des fonctions de l’entreprise qui vont porter un rôle majeur dans la gouvernance
des risques.
La directive défini quatre « fonctions clés » (fonction gestion des risques, fonction actuarielle,
fonction conformité et fonction audit interne) que nous pouvons compléter par toute autre
fonction que nous considérons également comme clé.
Figure 36 - Articulation entre systèmes et fonctions Solvabilité II 27
27 ACP – conférence « Solvabilité II, pilier II » - avril 2011
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La « fonction » au sens Solvabilité II représente une « capacité administrative à accomplir
des tâches ». La directive laisse une liberté d’organisation à l’entreprise, au travers d’entités
organisationnelles de son choix voire même d’instances, pour implémenter ces fonctions.
L’indentification des fonctions impliquées dans la gestion des risques nous conduira ensuite à
clarifier leur rôle dans le système de gouvernance.
Ces rôles sont généralement déclinés en trois niveaux :
• Prise de risque opérationnelle ;
• Coordination de la prise de risque ;
• Supervision de la prise de risque.
La figure ci après illustre les conclusions de ces travaux.
Figure 37 – Illustration de l’articulation des fonctions et responsabilités dans un « système de gouvernance» type Solvabilité II
La définition des fonctions et la clarification des périmètres impliquées dans la gouvernance
des risques n’est pas un exercice facile. Les frontières sont parfois minces entre « prise de
risque » et « coordination de la prise de risque ».
Par ailleurs, la fonction gestion des risques peut avoir des responsabilités différentes en
fonction du type de risques qu’elle adresse. Généralement coordinateur, elle peut prendre
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une responsabilité directe sur certains risques sur lesquels elle est légitime comme référents
tels les risques opérationnels.
Ainsi, le positionnement de la fonction risque est propre à chaque entreprise et dépendra
fondamentalement de sa stratégie vis-à-vis du risque.
Une entreprise à l’approche conservatrice aura pour objectif principal de garantir la
pérennité de son activité au détriment de la performance. Sa fonction risque s’intéressera
principalement à mieux maitriser les processus opérationnels et sera généralement
assez peu impliquée dans les processus de décision.
Une approche plus agressive du risque consistera à s’appuyer sur la fonction risque pour
éclairer les décisions stratégiques et opérationnelles, notamment via l’ORSA. La
connaissance et la maîtrise du risque deviendra une opportunité d’optimisation de la
performance, elle sera souvent outillé à l’aide d’un modèle interne.
3.4 Définition des processus de décisions et de reporting L’organisation la plus aboutie ne fonctionnera pas sans la mise en place de processus prises
de décisions stratégique et opérationnels fluides et de reporting fiables alimentant des
instances de décisions efficaces.
Les instances que nous définirons devront couvrir l’ensemble des types de risques auxquels
est exposée notre entreprise et permettront la coordination entre les niveaux stratégiques et
opérationnels de l’organisation comme illustré ci-dessous.
Figure 38 - Instance de gouvernance des risques
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Consolider les trois composantes que nous venons de décrire, nous permettra de représenter
le système de gouvernance dans sa globalité.
Figure 39 - Illustration d'un schéma de gouvernance reposant sur les concepts Solvabilité II par PWC28
Un système de gouvernance tel qu’il est décrit ci dessus peut être qualifié de « monument ».
Il est le reflet d’un très haut niveau de maturité et constitue l’aboutissement d’une recherche
d’optimisation de l’efficacité dans la maitrise de risques portés par l’entreprise d’assurance.
Bien évidemment, la mise en œuvre d’un système de gouvernance devra se faire de façon
itérative. Il est donc essentiel d’associer la notion de « premiers résultats rapides » à celle de
« produit non fini » afin de pouvoir intégrer progressivement des améliorations et
compléments.
28 Eric DUPONT - PriceWaterhouseCoopers – « Solvabilité II – Livre Blanc - Le Pilier 2, enjeux opérationnels de la gestion des risques»
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Synthèse du troisième chapitre
Ce troisième chapitre montre qu’avec quelques outils et principes d’organisation relativement
simples, la mise en place d’un véritable dispositif de gouvernance prenant en compte le
paramètre risques est à la portée de la plupart des petites structures d’assurance et
notamment des mutuelles. La définition d’une stratégie de risques et la mise en œuvre du
tableau de bord de pilotage associé peuvent en effet être implémentés sur deux à trois
dimensions fondamentales de l’entreprise et à peine plus du double d’indicateurs.
Cet exercice montre également que Solvabilité II contribuera non seulement au pilotage
de la performance par l’adoption d’outils novateurs, mais également par la mise en place
d’une véritable gouvernance des risques reposant sur une organisation et des processus
décisions prenant en compte le risque, c'est-à-dire en faisant en sorte que l’ensemble des
fonctions et processus de l’entreprise concourent de manière globale à la maîtrise des
risques, cœur de métier de l’assureur.
L’utilisation d’un tel dispositif de gouvernance et son amélioration continue conduira les
petites entreprises d’assurance à transformer la maîtrise du risque en une opportunité
d’optimisation du pilotage de la performance de leur activité. En effet, il les incitera très
certainement à passer d’une approche conservative du risque fondée sur un mode de
management empirique, à une approche plus agressive dans laquelle le risque constituera un
paramètre de décision.
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Conclusion Face à un environnement en mutation rapide et à une concurrence accrue, les
entreprises d’assurance pourront de moins en moins se permettre d’adopter une approche
défensive visant à principalement à garantir la pérennité de leur activité en essayant de
défendre des positions déjà acquises.
Pour passer à une approche offensive, en acceptant un niveau de prises de risque maitrisé
ayant une probabilité raisonnable d’être convenablement récompensée, les entreprises vont
devoir s’appuyer sur des dispositifs de pilotage plus sophistiqués et performants que ce dont
elles disposent actuellement.
En effet, les quelques études disponibles sur le marché montrent que les assureurs utilisent
davantage leurs systèmes de pilotage pour analyser le passé que pour anticiper leur
développement. Aussi, le pilotage de la performance représentera sans doute dans les
prochaines années, un enjeu majeur des entreprises d’assurance.
Solvabilité II constitue dores et déjà une véritable opportunité d’optimisation du pilotage
stratégique des entreprises d’assurance. La réforme est en effet un catalyseur de
l’intégration de la gestion des risques et du coût du capital. Les outils mis en œuvre pour
répondre aux exigences réglementaires permettent également de déterminer le montant des
capitaux pondérés des risques à allouer à chacune des activités de l’entreprise. Ces outils,
utilisés de manière dynamique, vont être très utiles pour piloter l’équilibre entre les objectifs
de développement économique de l’entreprise et le montant du risque encouru pour les
atteindre.
Solvabilité II encourage également les assureurs à clarifier leur stratégie des risques
acceptés. Le pilotage de cet appétit aux risques va garantir un alignement entre la
stratégie et l’activité opérationnelle de l’entreprise.
Bien que le pilier 1 ait concentré la majorité de l’attention et des investissements des
entreprises d’assurance, il semble que le pilier 2 soit également à même d’entrainer une
mutation profonde de leurs modes de pilotage de la performance. En effet, par son
intermédiaire, en imposant la mise en place d’un système de gouvernance, Solvabilité II fera
en sorte que l’ensemble des fonctions et processus de l’entreprise concourent de manière
globale à la maîtrise des risques, cœur de métier de l’assureur.
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De plus, le processus d’analyse interne « ORSA », aura un rôle clé en termes de pilotage
de la performance en réalisant un lien prospectif entre appétence aux risques et capital
management sur l’horizon du plan stratégique de l’entreprise. Ce processus sera une réelle
opportunité d’éclairer les prises de décisions stratégiques.
Même si le report de Solvabilité II à 2016 n’a pas été officiellement confirmé par
Bruxelles, Gabriel BERNARDINO, le président de l’EIOPA, a laissé entendre lors de la
dernière conférence annuelle de l’institution que l’application de Solvabilité II ne pourrait
intervenir au plus tôt que dans 4 ans…et que les modalités d’application entre pilier 1 et
pilier 2 pourraient être inversées.
Depuis le vote de la Directive en avril 2009, c’est le Pilier I, c’est-à-dire les exigences
quantitatives du nouveau régime, qui paraissait prioritaire. Or, Gabriel BERNARDINO
paraît plutôt favorable, si le report à 2016 se confirmait, à une « phase de
transition » permettant d’installer certains éléments clefs du dispositif en matière
de gouvernance, comme l’ORSA.
Peut être cette orientation est elle seulement liée aux difficultés à calibrer les modèles
actuariels du premier pilier, mais cette priorité qui pourrait être donnée au pilier 2
semble aller dans le bon sens : faire d’abord de Solvabilité II un outil de gouvernance
avant un outil de contrôle.
Quoi qu’il en soit, et même si Solvabilité II ne voit jamais le jour comme le prédisent
certains, les investissements réalisés ne l’auront pas été en vain.
Toutefois, même s’il est opportun de capitaliser sur les contraintes imposées par
Solvabilité, nous ne rappellerons jamais assez l’importance de conserver de la hauteur de
vue et de piloter avec une vision globale de l’activité. Pour conclure sur l’analogie avec la
course au large initiée auparavant, piloter « aux instruments », au fond du cockpit a ses
limites. Aller sur pont pour piloter « à vue » et se rendre compte de l’état de la mer, de
la position des nuages et de la bonne marche du bateau est tout bonnement essentiel !
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Sommaire détaillé
Remerciements .................................................................................................... 2
Sommaire ............................................................................................................ 3
Résumé ............................................................................................................... 4
Introduction ......................................................................................................... 5
1 Dynamique du pilotage de la performance des entreprises d’assurance ............. 7
1.1 Création de valeur en assurance ............................................................................................. 7
1.2 Enjeux des assureurs en termes de pilotage de leur performance ......................................... 8
1.3 Influence de la culture d’entreprise sur le pilotage de l’activité ........................................... 11
1.4 Principaux constats sur les modes de pilotage des assureurs .............................................. 13
1.5 Cycle de pilotage de la performance d’une entreprise d’assurance ..................................... 16
1.6 Pilotage de la performance en assurance non vie ................................................................ 21
1.6.1 Indicateurs de revue d’activité ...................................................................................... 21
1.6.2 Indicateurs de performance opérationnelle et de profitabilité .................................... 22
1.6.3 Indicateurs de structure du capital ............................................................................... 26
1.7 Pilotage de la performance en assurance vie........................................................................ 29
1.8 Influence des cycles de l’assurance sur les modes de pilotage ............................................. 30
1.8.1 Comprendre l’environnement du marché de l’assurance ............................................ 30
1.8.2 Cycles des prix des marchés non vie ............................................................................. 31
1.8.3 Prise en compte du cycle des prix dans le pilotage de la performance ........................ 33
1.9 Synthèse du premier chapitre ............................................................................................... 36
2 Opportunités offertes par la nouvelle marge de solvabilité Européenne en de
pilotage de la performance ................................................................................. 37
2.1 De l’analyse de la solvabilité au pilotage de l’allocation de capital ajustée des risques ...... 37
2.1.1 Portée de la réglementation actuelle ............................................................................ 37
2.1.2 Principes directeurs et enjeux de la nouvelle directive ................................................ 38
2.2 Mise à profit des outils de calcul d’exigences en fonds propres du pilier 1 dans le cadre du pilotage de la performance ............................................................................................................... 42
2.2.1 Illustration des apports d’un modèle d’allocation du capital par activité pondéré des
risques 45
2.3 Apports du pilier 2 en matière de gouvernance stratégique ................................................ 48
2.3.1 Détermination du cadre de prise de risques ................................................................. 48
2.3.2 Own Risk and Solvabity Assessment ............................................................................. 51
2.4 Limites de l’approche du pilotage par les modèles actuariels .............................................. 54
2.5 Synthèse du deuxième chapitre ............................................................................................ 56
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3 Conception d’un dispositif de pilotage de la performance s’appuyant sur une
gouvernance des risques de type Solvabilité II ..................................................... 57
3.1 Élaboration d’une stratégie de risques et implémentation des outils de pilotage associés . 59
3.1.1 Définition de l’appétit aux risques ................................................................................ 59
3.2 Conception du tableau de bord de pilotage .......................................................................... 62
3.3 Construction de la structure organisationnelle ..................................................................... 65
3.4 Définition des processus de décisions et de reporting ......................................................... 67
Synthèse du troisième chapitre ......................................................................................................... 69
Conclusion ......................................................................................................... 70
Sommaire détaillé ............................................................................................... 72
Table des illustrations ......................................................................................... 74
Bibliographie ...................................................................................................... 76
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Table des illustrations Figure 1 - Vue synthétique de la construction du compte de résultat d'un assureur .............. 7
Figure 2 - Risques encourus par les entreprises d’assurance ............................................... 9
Figure 3 – Illustration des intérêts des parties prenantes de l’activité d’assurance ................ 9
Figure 4 – Les apports stratégiques et opérationnels du pilotage de la performance ........... 10
Figure 5 - Usage des systèmes de pilotage de la performance des assureurs européens ..... 13
Figure 6 – Nature des indicateurs utilisés dans les entreprises d'assurance européennes .... 14
Figure 7 - Principale méthodes de pilotage de la performance utilisées par les assureurs en
Europe ........................................................................................................................ 15
Figure 8 - Techniques des assureurs européens pour choisir leurs indicateurs .................... 15
Figure 9 - Cycle de pilotage de la performance ............................................................... 16
Figure 10 – Les cinq questions permettant de définir une ambition stratégique .................. 17
Figure 11 - Déclinaison opérationnelle d'une ambition stratégique selon les 4 axes d'un
tableau de bord prospectif ou « Balanced Scorecard » ..................................................... 17
Figure 12 - Critères de définition des indicateurs de performance ..................................... 18
Figure 13 - Élaboration du plan d'action à partir des objectifs ........................................... 19
Figure 14 - Tableau de bord de pilotage de la performance .............................................. 19
Figure 15 - Illustration des ROE comptables et du taux de croissance des principaux groupes
d'assurances (Vie et Non Vie) du marché français ........................................................... 25
Figure 16 - Analyse PESTEL du macro environnement du marché de l'assurance ................ 30
Figure 17 - Évolution des ROEs de l'assurance dommages US entre 1975 et 2008 .............. 31
Figure 18 - Le cycle des prix dans l'assurance ................................................................. 32
Figure 19 - Processus de gestion du cycle en quatre phases ............................................. 33
Figure 20 - Indicateurs de positionnement sur le cycle des prix ........................................ 34
Figure 21 - Modules de risques de la formule standard .................................................... 38
Figure 22 – Décomposition du SCR de la formule standard ............................................... 39
Figure 23 - Illustration du périmètre d'un modèle interne par PWC ................................... 44
Figure 24 – Données d’une société fictive (source EDHEC Business School) ....................... 45
Figure 25 – Détermination des capitaux pondérés des risques (en %) à allouer à l’activité RC
de la société fictive ....................................................................................................... 46
Figure 26 - Analyse des résultats de la société fictive ....................................................... 47
Figure 27 – Quelques caractéristiques d'un produit épargne retraite ................................. 52
Figure 28 - Hausse des taux d’intérêts et impacts sur un fonds en euros ........................... 53
Figure 29 - Illustration d'un système de gouvernance intégrant l’ORSA ............................. 57
75/77
Figure 30 – Illustration d’une loi de distribution sur la dimension « Résultat financier » ...... 60
Figure 31 - Illustration de la définition d’un appétit aux risques sur les dimensions résultat,
capital et solvabilité ...................................................................................................... 61
Figure 32 – Illustration d’un tableau de bord de pilotage des Earnings at Risk ................... 62
Figure 33 – Illustration d’un tableau de bord de pilotage du Capital at Risk ....................... 63
Figure 34 – Illustration d’un tableau de bord de pilotage du capital économique par catégorie
de risque ..................................................................................................................... 64
Figure 35 – Illustration d’un tableau de bord de pilotage du ratio de capital économique .... 65
Figure 36 - Articulation entre systèmes et fonctions Solvabilité II .................................... 65
Figure 37 – Illustration de l’articulation des fonctions et responsabilités dans un « système de
gouvernance» type Solvabilité II .................................................................................... 66
Figure 38 - Instance de gouvernance des risques ............................................................ 67
Figure 39 - Illustration d'un schéma de gouvernance reposant sur les concepts Solvabilité II
par PWC ...................................................................................................................... 68
76/77
Bibliographie Ouvrages
• Alain TOSETTI, « Assurance – Comptabilité – Règlementation- Actuariat » - Editions
Economica - 3ème édition - 2011
• Robert S. KAPLAN, David P. NORTON - « Comment utiliser le tableau de bord
prospectif » - Éditions d'Organisation - 2001
Publications
• ACAM – « Analyse & Synthèse du QIS3 » - décembre 2007
• ACAM – « Analyse & Synthèse du QIS4 » - décembre 2008
• ACP – « Analyse & Synthèse du QIS5 » - mars 2011
• EIOPA – « Report on the fifth Quantitative Impact Study (QIS5) for Solvability II »
• EIOPA – « Consultation Paper On the Proposal for Guidelines on Own Risk and
Solvability Assessment » – novembre 2008
• Insurance Information Insitute- « Insurance Cycle » - 2010
• Christophe GIMOND - MBA ENASS – « Le cycle de l’assurance non vie, une
opportunité stratégique » - février 2010
• Orga Consultants – « Piloter la Performance Économique en Assurance » – octobre
2010
• Charles DESCURE & Cristiano BOREAN - Generali France – « Gestion Actif Passif et
Solvabilité »
• Xavier AGENOS – CEA - « Appétit pour le risque et gestion stratégique d’une société
d’assurance non-vie » - 2006
• Eric DUPONT - PriceWaterhouseCoopers – « Solvabilité II – Livre Blanc - Le Pilier 2,
enjeux opérationnels de la gestion des risques»
• Philippe FOULQUIER « Solvabilité II : une opportunité de pilotage de la performance
des sociétés d’assurance » EDHEC Financial Analysis and Accounting Research Centre
– mai 2009
• Judith DOURNEAU - « Solvabilité II : Du risque de marché au modèle interne de
risque » - novembre 2008
• Jeremy SCOTT- PWC – « Effective capital management : Economic capital as an
industry standard ? »
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Conférences
• ACP – conférence « Solvabilité II, pilier II » - avril 2011
• Michel M. DACOROGNA – « A Critical View on the New Solvabilité Regulations :
comparison between Solvabilité II and SST» - avril 2010
• Guy LALLOUR – Rencontres AMRAE – janvier 2009
• Jean-Philippe THIERRY – Leçon inaugurale 2011/2012 du MBA de l’ENASS – octobre
2011
• Gildas ROBERT - Comment intégrer les modèles prospectifs dans le pilotage de
l’activité d’assurance - Université d’Eté de l’Institut des Actuaires – juillet 2012
Articles
• « Solvabilité II : 2016… au mieux » - L’Argus de l’assurance - 21 novembre 2012
• « Dictionnaire de l’Économie de l’assurance » - Revue Risques N°17
• « Des assureurs vie en quête de diversification » - La Tribune de l'assurance –
septembre 2011
• « L'étau se resserre sur les sociétés d'assurance de dommage » - La Tribune – 24
octobre 2011
• « Les gagnants et les perdants » - La Tribune de l’assurance – novembre 2011
• « Groupama en passe de perdre son indépendance » – L’Agefi – 29 septembre 2011
• « Sovabilité II, les enseignements du modèle suisse » - L’Argus de l’assurance – 22
octobre 2012
• « Financement des entreprises : l’épargne des sociétés d’assurances plus que jamais
mobilisée » - ffsa.fr
Sites internet
• Jacques CORNIC et Stéphane BELON - KPMG - « Assureurs : pourquoi investir dans la
transformation de votre fonction finance ? » - décembre 2012
http://www.kpmg.com/FR/fr/IssuesAndInsights/ArticlesPublications/Documents/Assureurs-
pourquoi-investir-dans-la-transformation-de-votre-fonction-finance-122012.pdf
• Deloitte – « Mettre en place un pilotage efficace de la performance »
http://www.deloitte.com/view/fr_FR/fr/vos-enjeux/excellence-operationnelle-maitrise-des-
transformations/transformer-les-fonctions-financieres/mettre-en-place-un-pilotage-efficace-
rde-la-performance/index.htm
Thèse professionnelle soutenue le 18 mars 2013
pour l’obtention du MBA Manager d’entreprise majeure Assurance
Sous la direction de : Guy LALLOUR
Président du Jury : François EWALD
Une école est un lieu de production et de diffusion de connaissances.
L’Ecole nationale d’assurances s’organise pour répondre le mieux possible à cette mission en direction de ses élèves d’abord, mais aussi de la profession de l’assurance et de ses partenaires :
• les « séminaires innovation » animés par les auditeurs du Centre des Hautes Etudes d’Assurance (CHEA), permettent aux professionnels de suivre les grandes innovations en assurance telles qu’on peut les observer à l’étranger ;
• les « dialogues de l’Enass » éclairent l’actualité par le débat avec une personnalité remarquable ;
• « les travaux de l’Enass » sont destinés à faire bénéficier la profession des travaux menés au sein de l’Enass par ses professeurs et ses élèves, à tous les niveaux, dans la mesure où les jurys qui les ont évalués ont noté leur qualité et leur originalité. Ces travaux vous seront adressés par Internet, certains d’entre eux pouvant faire l’objet d’un tirage sur papier ou même, être édités.
Nous souhaitons que toutes ces initiatives vous soient profitables.
François Ewald Président du Conseil scientifique et pédagogique de l’Université de l’Assurance