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1 Manuel Flexible Assertive Community Treatment Équipe de suivi intensif flexible dans la communauté Conception, modèle, pratique et organisation par: J.R. (Remmers) van Veldhuizen M. (Michiel) Bähler 2013 Groningen, Pays-Bas Manual Flexible ACT (2013) J.R. van Veldhuizen and M. Bähler; www.factfacts.nl , Groningen. Traduction française 2015 // DOI: 10.13140/RG.2.1.3925.1683

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1

Manuel

Flexible

Assertive

Community

Treatment quipe de suivi intensif flexible

dans la communaut Conception, modle, pratique et organisation

par: J.R. (Remmers) van Veldhuizen

M. (Michiel) Bhler

2013 Groningen, Pays-Bas

Manual Flexible ACT (2013) J.R. van Veldhuizen and M. Bhler; www.factfacts.nl , Groningen.

Traduction franaise 2015 // DOI: 10.13140/RG.2.1.3925.1683

http://www.factfacts.nl/

2

Prface

LAssertive Community Treatment (ACT) le intensif dans la communaut a t introduit

dans les annes 1970 par Stein, Test et Marx1 Madison aux .-U.. Dans lACT une quipe

multidisciplinaire compose de 10 EPT effectue une prise en charge partage denviron 100

usagers de sorte que tous les membres de lquipe connaissent tous les usagers. L'approche

met l'accent sur loutreach et sur les soins et le traitement trs intensifs. LACT est indiqu

pour les personnes les plus gravement malades, soit les 20% de la population dans la

communaut ayant une maladie mentale grave (MMG), en particulier les usagers les plus

difficiles engager dans les soins et risque dhospitalisation, de marginalisation et de

ngligence personnelle. LACT a t mis en place trs souvent. Une large recherche sur

limpact a t ralise et des chelles de fidlit au model ont t dveloppes. LACT est

reconnu internationalement comme un type dintervention base sur les donnes probantes

(Evidence-Based Medicine).

Quest- ce que le modle dun ACT flexible (FACT) suivi intensif flexible dans le milieu

dvelopp aux Pays-Bas, peut ajouter un modle ACT largement reconnu et acclam ?

Pourquoi prsentons-nous dans ce manuel la version nerlandaise de lACT un public

international ? La raison en est que le FACT contient des innovations bnfiques. Ces

innovations se manifestent dabord au niveau de lquipe, dans le fonctionnement quotidien

des quipes FACT. Cependant, le modle FACT cre galement des opportunits

dinnovation dans un terrain plus vaste, savoir lorganisation des services de soins de sant

mentale dans la communaut pour des individus aux prises avec une maladie mentale grave.

En moyenne, une quipe FACT multidisciplinaire de 11 12 ETP effectue le suivi de 200

usagers. Le groupe cible se compose du large groupe de tous les individus avec une MMG

dans la rgion desservie: la fois les 20% pour qui lACT est indiqu et les autres 80% de ce

groupe qui ont besoin dun traitement et de soutien moins intensifs. Afin de combiner des

soins pour ces deux groupes, lquipe FACT emploie un systme flexible. Le groupe

ncessitant les soins les plus intensifs est discut quotidiennement et pour ce groupe lquipe

adopte lapproche de prise en charge partage. Les noms de ces usagers sont rpertoris sur

un tableau digital FACT. Pour les usagers ncessitant des soins moins intensifs, la mme

quipe assure une gestion de cas individuelle ( un case manager) avec un traitement et un

soutien interdisciplinaires. Quand les usagers se stabilisent, ils nont pas tre transfrs

(comme dans le modle ACT) une autre quipe ; ils restent avec la mme quipe FACT.

Cette flexibilit de passage entre 2 types de suivis dans la mme quipe amliore la continuit

des soins et rduit les ruptures de soins.

Ce systme permet galement de meilleures possibilits de rtablissement, de soutien en vue

dun rtablissement et de rhabilitation. Ds qu'un usager bnficiant dun case management

individuel est risque d'une psychose rcurrente ou d'hospitalisation, la mme quipe passe

immdiatement vers un ACT intensif. Cette combinaison de flexibilit et de continuit

correspond bien lvolution naturelle des MMG caractrises par des pisodes et rechutes

rcurrents.

1 Test, L.I. & M.A. Stein (eds.) (1978), Alternatives To Mental Hospital Treatment. Plenum Press USA.

3

Lorsque les quipes FACT ont commenc fonctionner, cela a aussi conduit repenser

l'ensemble du systme de soins de sant mentale. Nous avons dvelopp le modle FACT,

avec le but de combiner

* des soins orients vers le rtablissement

* la mdecine base sur les donnes probantes et les meilleures pratiques

* des soins communautaires et hospitaliers intgrs

Dans le concept FACT, le modle bas sur les forces (Strengths model2), des interventions

familiales, le traitement intgr des usagers prsentant un double diagnostic (Integrated Dual

Diagnosis Treatment, IDDT) et le programme individuel de placement et de soutien (IPS)

sont tous incorpors dans un systme offrant un traitement en conformit avec les guidelines

concernant le traitement de la schizophrnie.

Les quipes FACT sont organises en fonction dune rgion: une quipe FACT prend en

charge toutes les personnes avec une MMG dans un quartier ou territoire particulier denviron

40 50.000 habitants. Cela facilite la collaboration avec dautres services sociaux et avec les

mdecins gnralistes. Les quipes fonctionnent selon le modle typiquement hollandais de

Soins trans-muraux3. Lquipe FACT assure non seulement ladmission lhpital, mais

reste galement en contact avec l usager pendant son admission et conserve la coordination

globale de son traitement.

Jusquici, les soins de sant mentale nerlandais ont t relativement bien financs et la

disponibilit des services a t assure. Cest dans ce contexte favorable que nous avons pu

dvelopper FACT, qui est maintenant un modle complet.

Bien que les soins dans le modle FACT soient relativement coteux, ils gnrent des

bnfices sur le plan psychique, social et conomique. Les usagers, les familles et les

partenaires valuent positivement le modle FACT. Les personnes avec une MMG ont la

possibilit dobtenir un travail rmunr, et le nombre de lits dans les hpitaux psychiatriques

peut tre rduit.

Les personnes souffrant de MMG peuvent fonctionner lextrieur de l'hpital psychiatrique,

dans la communaut, quand ils sont correctement pris en charge et traits.

Le modle FACT a t conu aux Pays-Bas par JR van Veldhuizen (psychiatre) (van

Veldhuizen, 20074) et M. Bhler (psychologue). Au sein de GGZ Noord Holland (Alkmaar),

les premires quipes FACT ont t mises en place partir de 2003. Mis en pratique, le

modle FACT sest dvelopp. Actuellement, en 2013, environ 200 quipes sont actives aux

Pays-Bas et certains endroits le modle FACT est totalement implant. Une croissance vers

400-500 quipes FACT est prvue.

Une chelle de fidlit au modle a t lance en 2007 (Bhler et autres). En 2008, le Manuel

FACT (d. Van Veldhuizen, Bhler, Polhuis et van Os) a t publi. Le Centre de

Certification ACT et FACT a certifi 100 quipes (www.ccaf.nl). la fin de 2013 il y aura

150 quipes certifies. Des quipes se mettent en place en Belgique. Hong Kong, en

2 Rapp, C.A. (1998b), The Strengths Model: case management with people suffering from severe and persistent mental illness. New York: Oxford University Press. 3 Soins transmuraux est un concept nerlandais qui sera expliqu plus en dtail dans les chapitres suivants. Le cur du concept est que l'admission la clinique ou l'hospitalisation partielle est toujours considre comme un time-out dans le

cadre plus large des soins ambulatoires fournis par une quipe FACT. 4 Veldhuizen, J. R. van, (2007). FACT: A Dutch Version of ACT, Community Mental Health Journal, (43), 4, 421-433

http://www.ccaf.nl/

4

Norvge, en Sude et au Royaume-Uni, on value les possibilits dintgrer les principes de

FACT aux systmes existants.

Ce manuel donne une description de la conception, du modle en tant que tel ainsi que de la

faon dont il est appliqu au quotidien et de son organisation. Les responsables et les experts

qui souhaitent appliquer le modle FACT y trouveront toutes les informations ncessaires. Il

sagit dun document pratique, avec un nombre limit de donnes de recherche ou de

rfrences bibliographiques. Les modles centraux du Manuel FACT sont prsents avec une

attention particulire aux nouveaux dveloppements.

Ce manuel sadresse un public international de personnes travaillant dans le domaine de la

sant mentale. Bien que des situations spcifiques nerlandaises sont prsentes en exemple,

elles ne sont pas le point central du manuel. Des comparaisons avec dautres pays sont

dcrites. Esprons que, de cette faon, lapproche FACT soit accessible aux collgues

internationaux.

Quatre organisations de soins de sant mentale aux Pays-Bas ont apport une contribution

financire permettant le tlchargement gratuit de ce manuel sur plusieurs sites Web. Pour

cela, nous remercions :

* GGZ Noord Holland Noord : www.ggz-nhn.nl

* GGZ Breburg : [email protected]

* GGZ Mondriaan : www.mondriaan.eu

* VNN (Verslavingszorg Noord Nederland) : [email protected]

Ces quatre organisations sont aussi disponibles pour les contacts internationaux. Les contacts

et les adresses lectroniques figurent au dbut du manuel.

Cela est galement valable pour le Centre de Certification ACT & FACT (www.ccaf.nl) et

pour lassociation des professionnels travaillant dans les quipes ACT et FACT : F-ACT

Pays-Bas.

Le prsent manuel a t prsent la deuxime confrence internationale de lEAOF

(European Assertive Outreach Foundation) Avils, en Espagne, en juin 2013

(www.eaof.org).

Les auteurs esprent que beaucoup de gens pourront en bnficier et nous nous rjouissons de

vos commentaires! Nous vous souhaitons une bonne lecture et beaucoup d'inspiration en vue

damliorer continuellement les soins aux personnes ayant une MMG, partout dans le monde.

J.R. van Veldhuizen, Psychiatre,

[email protected]

www.factfacts.nl

http://www.ccaf.nl/http://www.eaof.org/http://www.factfacts.nl/

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Prface de la traduction franaise du Manuel FACT

Le premier lment, et probablement le plus important, auquel nous souhaitons rendre attentif

le lecteur, est quil sagit dune traduction qui est luvre de personnes de diffrents endroits

de la francophonie. En effet le travail a commenc en Belgique (Patrick van der Jeugt), puis

sest poursuivi au Canada (Sylvie Martin et Lucie Michaud) et en France (Laure Zeltner),

pour se terminer en Suisse. Il a donc fallu trouver des accords et des compromis, notamment

en ce qui concerne les thmes et les mots les plus importants du Manuel.

Nous avons par exemple choisi de traduire client par usager , plutt que par client

ou patient . En effet il nous semblait important dviter le ct trop mercantile de client

ou alors peut-tre paternaliste, mdico-centr ou stigmatisant de patient . Le terme de

usager nous paraissait davantage en accord avec la philosophie oriente vers le

rtablissement et lintgration dans la communaut que porte le FACT. Nanmoins nous

savons que les habitudes diffrent selon les rgions, les pays et galement les sensibilits.

Dans notre traduction, le terme de usager peut donc tre compris et lu comme patient

ou client .

En ce qui concerne le terme de case manager , nous avons prfr le reprendre tel quel. Il

peut tre traduit par gestionnaire de cas ou coordinateur des soins . Il fait le lien avec

les premiers dveloppements du modle ACT aux Etats-Unis. Aux Pays-Bas les auteurs du

Manuel FACT ont galement dcid dintroduire le terme case manager dans la littrature

nerlandaise. Nous avons fait de mme pour le terme guidelines .

Quant au terme dual diagnosis , nous avons choisi de le traduire par double diagnostic .

Mais il est important de spcifier que double diagnostic peut signifier dans certaines

rgions de la francophonie un trouble psychiatrique associ une dficience intellectuelle,

alors que dans dautres il est dfinit comme un trouble psychiatrique associ un trouble d

la consommation dune substance psychoactive. Dans notre traduction nous faisons rfrence

cette dernire dfinition.

Aprs ces quelques prcisions de traduction, nous esprons que ce Manuel pourra satisfaire la

curiosit des soignants francophones intresss au FACT, motiver les changes, et ainsi

participer la promotion des soins de sant mentale pour les patients prsentant des maladies

psychiatriques graves.

Eva de Boer, Lausanne, Suisse, [email protected]

Patrick van der Jeugt, Bruxelles, Belge, [email protected]

Sylvie Martin, Quebec, Canada, [email protected]

Lucie Michaud, Quebec, Canada [email protected]

Laure Zetner, Paris, France, [email protected]

mailto:[email protected]:[email protected]:[email protected]:[email protected]:[email protected]

6

TABLE DES MATIRES

Prface

Prologue A: Le modle FACT en rsum

Prologue B : Une histoire personelle

Prologue C : Une runion matinale dans une quipe FACT

Chapitre 1: Des usagers ayant une MMG, leurs besoins, les soins

1. 1. LACT et le FACT: de quel groupe de patients sagit-il?

1.2. Quels sont les besoins des personnes ayant une MMG?

1.3. Ce qui est ncessaire en termes de soins dans la communaut pour des personnes ayant

une MMG?

1.4. Les Seven Cs : exigences en matire de traitement communautaire des personnes

avec une MMG

1.5. Exigences pour pouvoir dlivrer les Seven Cs

1.6. La force de loutreach

Chapitre 2: FACT en bref, avec les blocs de construction

2.1. Les blocs de construction du FACT

2.2. La composition dune quipe FACT

Chapitre 3: Le mode de travail FACT

3.1. Une esquisse de la situation: tant d usagers, tant de besoins

3.2. La procdure du tableau FACT: la force du FACT

3.3 Les critres pour inscrire les usagers sur le tableau FACT

3.4. Intgrer le traitement, les soins, la rhabilitation et le rtablissement dans le modle

FACT

3.5. Le plan de traitement et le cycle de plan de traitement

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Chapitre 4 : Le modle du sablier

4.1. Les diffrents rles dun intervenant

4.2. Le modle du sablier

4.3. Travailler avec le sablier

4.4. La colonne droite du sablier

Chapitre 5: FACT, en pratique

5.1. Les forces, le rtablissement et la rhabilitation

5.2. Travailler vers lintgration: contribuer la mise en place des systmes de soutien

communautaire

5.3. Des interventions en conformit avec les guidelines

5.4. Un traitement intgr pour les personnes ayant un double diagnostic

5.5. Emploi : le programme individuel de placement et de soutien (Individual Placement and

Support, IPS)

5.6. La sant somatique

5.7. Contrainte et pression

5.8. Larrt des soins FACT

Chapitre 6: Quelques disciplines dans lquipe FACT

6.1 Le pair aidant

6.2 Linfirmier

6.3. Le psychiatre

6.4. Le psychologue

6.5. Le spcialiste en matire demploi

Chapitre 7: Implanter FACT

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7.1 Travailler dans une rgion - rgles gnrales pour la taille dune rgion

7.2 Des services de sant mentale intgrs

7.3 Dmarrer et crer une conception

7.4 Implanter et former les quipes

7.5 Le bureau de lquipe

7.6 Ce qui sest pass avec lACT aux Pays-Bas

Chapitre 8: LACT et le FACT, la fidlit au modle, le FACTs et la

certification

8.1 Les diffrences entre ACT et FACT

8.2. ACT versus FACT

8.3 La fidlit au modle : Le FACTs

8.4 La certification

9

ANNEXE: FACTs version 2010

10

Prologue A: le modle FACT en rsum

Les quipes FACT fournissent des soins psychiatriques de longue dure lextrieur de

l'hpital pour les personnes souffrant de troubles psychiatriques graves. Ces personnes ont,

en plus des problmes psychiatriques graves, de nombreuses difficults dans leur

fonctionnement social, comme le logement, les soins personnels, lemploi et les finances. Il

est difficile pour eux de sintgrer et davoir un sentiment dappartenance. Le systme de

soutien et les contacts sont souvent limits. La famille est d'une grande importance; toutefois,

elle est parfois tenue lcart.

FACT fonctionne en utilisant un modle bio-psycho-social avec (a) la gestion de la maladie et

de ses symptmes (traitement) ; (b) un accompagnement et une aide concrte pour la vie

quotidienne ; (c) la rhabilitation et (d) un soutien au rtablissement. Tout cela est offert par

une seule et mme quipe. FACT vise une continuit des soins, une prvention des admissions

lhpital psychiatrique et un encouragement lintgration : les usagers peuvent ainsi

participer la vie de la communaut. Une quipe FACT suit entre 200-220 usagers dans une

rgion ou dans un quartier comptant 40 50.000 habitants. Cela explique pourquoi nous

parlons dquipes de quartier. Lquipe vise des contacts troits avec la famille et avec

dautres travailleurs du quartier. Lquipe est multidisciplinaire, compose dune varit de

disciplines (avec, entre autre, un psychiatre, des infirmiers, des infirmiers spcialiss en

psychiatrie communautaire, un psychologue, un spcialiste en matire du travail (IPS), et un

pair aidant) ; environ 10 11 ETP.

Lquipe multidisciplinaire peut alterner entre deux niveaux de soins :

1. un case management individuel 2. des soins intensifs (ACT) par une quipe, ce qui signifie que les usagers sont en

contact avec plusieurs membres de lquipe et une concertation quotidienne est

organise devant le tableau FACT afin de dterminer quel type de soins est

ncessaire et qui les offrira.

Tous les deux sont dispenss dune faon doutreach , cest--dire dans le milieu o l usager

rside. Par consquent les soins deviennent plus personnaliss et les demandes de soins plus

concrtes. Ainsi les ressources de la famille ou du quartier sont mieux utilises.

Pour la majorit des usagers un suivi individuel est suffisant (1). Mais dans le cas dune

nouvelle dcompensation psychotique ou dune reprise de consommation de toxiques, ou si

une admission en milieu psychiatrique est imminente, ou encore quand une personne

ncessite des soins supplmentaires, les soins sont intensifis (2). Ceci peut tre long terme,

ou encore court terme.

Lorsque la crise est rsolue lquipe FACT revient des soins individuels (1). Cette

flexibilit dans les soins semble une rponse ncessaire au droulement naturel dune MMG

avec ses rmissions et rechutes.

1. Les usagers qui sont suivis individuellement ne sont pas mentionns sur le tableau FACT. Ils ont toujours un case-manager et un psychiatre. Dautres membres de

lquipe sont consults et /ou impliqus au besoin (par exemple un spcialiste en

addictologie, ou un psychologue pour une thrapie cognitivo-comportementale).

11

2. Au cours des soins intensifs par lquipe le nom de l usager figure sur le tableau FACT. Il sagit dun fichier Excel, projet sur le mur par un vidoprojecteur. Le

tableau FACT est parcouru chaque matin ; lors de ce colloque lquipe sorganise

et dcide quel soignant est responsable pour les visites et laccompagnement de l

usager pour la journe.

Pour tous les usagers, le plan de soins (y compris le plan de crise et le plan de rhabilitation)

est rdig de manire multidisciplinaire, au moins une fois par an, et en consultation avec l

usager. cette occasion les dernires informations disponibles partir du HoNOS et du

MANSA, ou dinstruments similaires, sont utilises.

Les quipes FACT sont oprationnelles pendant les heures de bureau. Certaines quipes

offrent galement des visites domicile pendant le week-end. Chaque rgion des Pays-Bas

dispose dun service de crise accessible 24/7.

Les quipes FACT travaillent en troite collaboration avec les services dadmissions des

hpitaux rgionaux.

12

Prologue B: une histoire personnelle

J'ai 40 ans, je vis seul et depuis lge de 20 ans je souffre de psychose. Au dbut, c'tait

terrible, je ne comprenais pas ce qui se passait. Je mtais loign de ma famille. Enfin, j'ai

t hospitalis suite une ordonnance de la cour. D'autres admissions ont suivit. Ctait

lourd, dans une unit avec d'autres personnes qui ont aussi beaucoup de problmes; jy ai vu

beaucoup de choses, mme des suicides.

Au fil des annes, ils mont expliqu ma maladie et comment je peux la grer. Cela m'a aid

reconnatre que j'ai encore besoin de mdicaments, mme si je naime pas a. Les premiers

10 15 ans de ma maladie, je navais que trs peu de recul . Tout tournait autour de ma

maladie. Jai arrt mes tudes, et je vivais dabord dans un foyer, avec des pisodes

rguliers de rechutes et des radmissions.

Le suivi en dehors lhpital ntait pas vraiment intensif. Je visitais la polyclinique pour

consulter le mdecin toutes les 4 6 semaines, et discutais de ma mdication. Une infirmire

tait aussi ma disposition. Habituellement je me dplaais son bureau pour mes rendez-

vous. Lorsque je devenais confus, elle venait me visiter chez moi, souvent pour organiser une

hospitalisation.

Au cours des huit dernires annes ce suivi a chang. Maintenant je suis accompagn par

une quipe FACT. Ils viennent plus la maison, ils prfrent vous parler dans votre propre

environnement. Et ils maident maintenant sortir de chez moi, pour faire face aux choses

dune autre manire. Jai mon propre plan de traitement maintenant, avec des rencontres

avec un pair aidant et un spcialiste en matire de travail (IPS)5. Le pair aidant est lui-mme

un usager mais galement un membre de lquipe, qui est bien au courant de ce qui se passe.

a ma beaucoup aid de lui parler de mes hospitalisations, javais vcu des traumatismes.

cette poque le psychologue de lquipe ma trait quelques fois avec une thrapie EMDR

(Eye Movement Desensitization and Reprocessing), et les images ne me drangeaient plus

autant. Le pair aidant a mis en place un groupe de rtablissement. On y discutait de

diffrentes choses quon peut faire pour amliorer nos vies

Le spcialiste en matire de travail ma aid me trouver un emploi, quatre jours par

semaine, 3 heures par jour, dans une entreprise. Ctait difficile au dbut, mais il m'a

vraiment soutenu et maintenant a va bien. Je ne gagne pas beaucoup dargent, mais je me sens beaucoup mieux que quand jallais au centre de jour. Jy participe encore loccasion,

mais surtout pour rencontrer des gens et pour manger.

Linfirmire est toujours mon case manager. Avec elle et le psychiatre jai rdig mon plan

de traitement. Elle est galement en contact avec ma famille et mes voisins. Cest utile, car

jai des habitudes quon peut facilement remarquer quand ma situation se dtriore. Je ferme

les rideaux toute la journe, et je ne salue personne. Si les voisins le constatent, ils appellent

lquipe et puis quelquun arrive. Lanne dernire je me sentais confus nouveau, cause

de diffrentes choses (ma sur tait malade et on ma cambriol), et je commenais

consommer des drogues. Les membres de lquipe FACT venaient chaque jour, apportant des

mdicaments, parlaient de ma sur, et ils se sont occups de signaler le cambriolage la

5 IPS signifie Individual Placement and Support (un programme individuel de placement et de support), une

mthode de support actif pour trouver et conserver un emploi numr pour les personnes vulnrables.

13

police et dorganiser un arrt de travail pendant deux semaines. Et le psychiatre ma aussi

rencontr domicile, et il a rencontr ma mre. Cela fait une grosse diffrence quand vous

tes bien entour. Si vous avez besoin de beaucoup de soins, cest un peu comme une

hospitalisation domicile, dans votre propre environnement et on connat les gens.

Jai me suis sorti de cette priode difficile trs rapidement. Aujourdhui, je ne vois que le

case manager et le groupe de rtablissement. Bientt, nous allons faire un projet de travail

dans la communaut. Dans lensemble je suis trs satisfait maintenant.

14

Prologue C: Une runion matinale dans une quipe FACT

Chaque jour ouvrable, huit heures et quart environ, les membres de l'quipe viennent pour

la runion autour du tableau FACT. Ils prennent une tasse de th ou de caf, font un brin de

causette et ensuite ils sasseoient la table avec leur agenda. Chaque jour que vous

travaillez, vous commencez ici, a fait partie du mtier.

Linfirmier Rick dmarre le tableau FACT digital. Avec le projecteur, le fichier Excel est

projet sur un mur blanc. Aujourdhui Rick prside le tableau FACT. Il est form en la

matire avec deux autres membres de l'quipe, Anna et Hans. Aujourdhui Anna est assise

derrire lordinateur et elle prend des notes sur le tabelau Excel, de sorte que tous les

membres de lquipe peuvent immdiatement voir ce qui a t convenu sur le tableau FACT .

Rick commence. Environ 20 situations, qui sont discutes chaque jour, figurent sur le tableau

FACT. Elles sont rparties dans des groupes, qui indiquent pourquoi ils figurent sur le

tableau : un groupe ayant besoin de soins intensifs pour une courte priode de temps, un

groupe ayant besoin de soins intensifs pour une trs longue priode et ce sur une base

presque quotidienne, des personnes qui sont hospitalises dans un hpital psychiatrique ou

dans un hpital gnral, des personnes qui refusent ou vitent les soins, et les nouveaux

usagers.

Pour chaque usager on trouve sur le tableau : le nom, une brve description du diagnostic, la

raison pour laquelle la personne figure sur le tableau, les objectifs de lusager, les choses

faire pour lquipe, qui est la personne de contact pour lusager, et quels membres de

lquipe vont rendre visite lusager domicile.

La situation d Ella est discute, elle a rcemment commenc bnficier de soins intensifs

par lquipe. Elle souffre dun trouble bipolaire grave et elle sest montre trs impatiene et

stresse la semaine dernire. Elle a eu plusieurs comportements risque, elle sest fche

avec des personnes avec qui elle sentend habituellement bien et elle est risque de spuiser.

Lquipe lui rend visite quotidiennement domicile. Heureusement, elle accepte les

mdicaments et elle sapaise quelque peu. Aujourdhui le psychiatre et le case manager vont

la rencontrer domicile afin de voir si elle a dautres besoins et le case manager va appeler

sa famille. Demain une autre infirmire passera la voir. Elle a besoin dinjections de lithium;

habituellement on lui donne ses injections en clinique, mais pour linstant ce serait prfrable

quelle les reoive domicile. Le psychologue demande si on sait pourquoi elle va moins

bien; le pair aidant a entendu dun autre usager quelle sest sentie trs blesse dernirement.

Elle aurait rencontr quelquun sur internet, mais cette personne aurait cess de lui parler

aprs avoir su quelle avait des problmes psychiatriques. Ceci pourrait expliquer la

situation actuelle et les membres de lquipe vont vrifier ceci avec elle pendant leurs visites.

Il semble aussi quelle avait un faible taux de lithium au cours des dernires semaines. Cela

ncessite galement une attention particulire et devra tre vrifi par linfirmier. Rick

rsume lensemble des choses faire, Anna les inscrit sur le tableau FACT, et demain on

vrifie si les objectifs ont pu tre atteints.

Depuis la semaine dernire, Jeanne a bnfici de soins intensifs pour une dpression

rcurrente avec symptmes psychotiques, associe des ides suicidaires et une difficult

prendre soin delle-mme. Hier matin, lquipe FACT la hospitalise en psychiatrie avec son

consentement. Mme deux visites domicile par jour n'taient pas suffisantes pour assurer

sa scurit, son tat risquait de trop se dtriorer.

15

Jeanne a vcu dautres pisodes similaires par le pass, et dun commun accord on reportait

son admission. Elle se mettait alors en danger suite des tentatives de suicide et la situation

se concluait souvent par une hospitalisation non-volontaire. Maintenant les choses se font

davantage en accord avec elle. Lespace systme de soutien derrire son nom sur le

tableau FACT est vide, ce qui nest pas un bon signe !

Lquipe sorganise pour lhospitalisation. Le psychiatre discutera avec son collgue de la

clinique des mdicaments et des examens de laboratoire appropris. Linfirmire va parler

avec Jeanne nouveau afin didentifier les personnes faisant partie de son rseau de soutien

(famille ou autres); des liens pourraient tre rtablis pendant son hospitalisation. Le case

manager va lui rendre visite la clinique deux fois par semaine et sassurera que sa maison

soit nettoye. Lquipe envisage un sjour de 2 3 semaines. Anne inscrit les objectifs sur le

tableau FACT, ajoutant un rappel dans 2 semaines : sortie de la clinique ?

Tom est un nouvel usager, rfr hier par le Centre de Sant Mentale, un service ambulatoire

offrant des suivis pour divers groupes de diagnostic. Le CSM a essay dinitier un traitement

pour Tom pendant 2 ans. Les diagnostics de trouble de la personnalit et trouble anxieux ont

t retenus. Mais le suivi ne fonctionnait pas, Tom a souvent manqu ses rendez-vous, il y

avait des signes dabus de substances, et maintenant sa situation se pjore sur le plan social,

avec une expulsion imminente de son logement cause de retards dans ses paiements de

loyer. Il ntait pas possible pour une clinique externe de grer lensemble de ces problmes.

Lquipe FACT sorganise. Un case manager a t assign, il va identifier les problmes et,

si ncessaire, consulter linfirmier en psychiatrie. Le psychiatre va rencontrer Tom chez lui,

le psychologue va linviter pour une consultation et le pair aidant lui rendra visite (en vue

dexplorer ses ressources et ce qui le motive). Ceci est not sur le tableau FACT, et dans 3

semaines une runion dquipe aura lieu pour tablir un plan de traitement.

Au total, une vingtaine de situations du tableau FACT sont ainsi discutes.

Ensuite, Anne ouvre le tableau cas discuter . Rick fait le tour et quatre membres de

lquipe mentionnent un nom dusager. Il sagit de personnes qui ne figurent pas sur le

tableau FACT mais qui sont suivies par lquipe. Pour eux une discussion quotidienne nest

pas ncessaire. Leur suivi est assur par le case manager, avec un psychiatre, un

psychologue ou le spcialiste en matire de travail. Leur plan de traitement est valu et

ajust une fois par an (lors de la runion plan de traitement ). Mais parfois il est

souhaitable que lquipe soit informe dune situation, et dautres moments le case

manager a besoin de lavis ou de laide dune autre discipline. Ceci a lieu dans la partie

cas discuter de la runion matinale.

Lusager Max est mentionn par le spcialiste en matire de travail. Cette semaine, il va

commencer un emploi rmunr. Max est fier, et en mme temps il est stress. Si des membres

de lquipe le croisent cette semaine : souhaitez-lui bonne chance !

Lusager Bart, un jeune homme qui a connu beaucoup de pertes aprs une premire

dcompensation psychotique, se porte bien. Il parle avec la psychologue des changements au

niveau de ses attentes face son futur, de ses pertes. Des anciens amis et camarades de classe

achvent leurs tudes, tandis que lui La psychologue discute de la possibilit quil

manifeste certains signes de dtresse. Elle indique les choses faire, le cas chant. Ceci est

entendu et not.

Un case manager mentionne un autre jeune homme. Il est relativement stable, mais la

consommation de drogues semble jouer un rle de plus en plus important. Le case manager

16

aimerait que ce jeune homme puisse rencontrer le spcialiste en addictologie de lquipe, et

quune consultation avec le psychiatre ait lieu dans 3 semaines. Ceci est organis.

La dernire patiente est une femme souffrant de schizophrnie et dabus dalcool. Le case

manager rapporte quil y a encore eu des incidents. Les voisins ont appel la police. Rick

dit : on a dj discut de cette patiente deux fois dans les cas discuter la semaine

dernire. Compte tenu de ceci, il semble prfrable quelle figure dans le tableau FACT.

Nous irons lui rendre visite tous les jours et nous devons nous assurer que plusieurs

personnes la voient. La semaine prochaine, nous valuerons si dautres ajustements sont

ncessaires. Lquipe se met daccord et Anne inscrit les noms des membres de lquipe qui

vont lui rendre visite dans les jours qui suivent.

Et enfin, un tour de table a lieu. Une des case manager informe lquipe quelle sera en

cong pour quelques jours. Il est dj prvu que ses usagers figurant sur le tableau FACT

vont tre suivis par dautres membres de lquipe, toutefois elle aurait besoin que quelquun

voit certains usagers domicile, ce qui est organis avec lquipe. De nouvelles brochures

sont disponibles pour diverses activits du quartier. Lquipe numre les noms des

personnes qui pourraient en bnficier. Les case managers leur remettront les brochures.

La direction a envoy un courriel demandant que certains formulaires soient remis dici une

semaine. Les membres de lquipe poussent un soupir, et en prennent note dans leur agenda.

Rick fait le tour de table, et exactement aprs une demi-heure Anne teint lordinateur. Tous

les rendez-vous ont t organiss, lquipe quitte le btiment ; la plupart des membres de

lquipe se rendent aux domiciles des usagers pour des visites.

17

Chapitre : Les usagers ayant une MMG, leurs besoins, les soins

1. 1. LACT et le FACT: de quel groupe dusagers sagit-il?

FACT se base sur le modle de suivi intensif dans la communaut (Assertive Community

Treatment - ACT) dvelopp par Stein et Test aux Etats-Unis. LACT vise le 20 % des plus

vulnrables de la population ayant une maladie mentale grave. Ce groupe prsente un

pourcentage trs lev de personnes ayant des troubles psychotiques, gnralement associ

des problmes de dpendance (double diagnostic). Un grand nombre passe peu de temps hors

de lhpital, a de longue dure dhospitalisation et se retrouve dans un processus de porte

tournante entre lhpital et la communaut. Nombre dentre eux a dimportants problmes

financiers et de logement. Et souvent ils ont trs peu de contact avec leur famille. Les soins

pour les 80% des MMG restants nont pas t dtaills dans le modle ACT, mais on y

mentionne quils seraient offerts par des quipes avec une approche moins intensive.

Avec FACT (lACT flexible, cest--dire le suivi intensif flexible dans la communaut) nous

avons choisi doffrir des services 100% des gens avec une MMG. Ainsi, les quipes FACT

fournissent des soins pour lensemble du groupe de personnes ayant une MMG.

Aux Pays-Bas le groupe de personnes ayant une MMG est dcrit dans un document de

consensus6. Pour faire partie de ce groupe, une personne doit rpondre aux cinq critres

suivants:

avoir un trouble psychiatrique, qui ncessite des soins et un traitement ( nest pas en

rmission symptomatique);

avoir des limitations svres au niveau du fonctionnement social et en communaut ( nest

pas en rmission dans son fonctionnement);

ces deux critres sont relis (les limitations sont la cause et la consquence de la

psychopathologie) ;

ces problmes ne sont pas de nature temporaire (ils se prsentent rgulirement et sur le

long terme) et;

une coordination des soins, soit par un rseau de soins ou des soignants, est ncessaire afin

dimplanter un plan de traitement.

En termes du DSM IV : Un diagnostic grave sur laxe 1, galement frquemment des

troubles de la personnalit (axe 2). Rgulirement des problmes mdicaux et neurologiques

compliqus sur laxe 3 jouent aussi un rle, ainsi que des problmes psychosociaux et

environnementaux sur laxe 4. En outre, les usagers avec une MMG obtiennent un faible

score de fonctionnement (axe 5). Les dficits sont durables et long terme, ce qui ncessite

des soins coordonns. La population ayant une MMG prsente une importante variation

quant lge, les antcdents, les problmes, lhistoire de vie et les conditions sociales et

conomiques.

6 Delespaul, P. A. E. G., & Consensusgroep EPA (Cahn, W. D., G; Drukker, M.; van der Gaag, M.; van Heugten, T.; van Hoof, F.; Keet, R.; Kroon, H.; Mulder, N.; van Os, J.; Slooff, C.J.; Sytema, S.; van Veldhuizen,

R.; van Weeghel, J.; Wiersma, D.; Willemsen, E. & Wunderink, L.),. (2012 (submitted)). Consensus over de

aard en omvang van de EPA populatie. Tijdschrift voor Psychiatrie. Nederland.

18

La partie la plus importante souffre dun trouble psychotique. On retrouve aussi frquemment

des troubles affectifs (dpression, trouble bipolaire), des troubles de la personnalit, des

troubles organiques, l'autisme, le TDAH, des troubles du dveloppement, des problmatiques

de dpendance ou toute combinaison de ceux-ci.

Ces personnes prsentent de graves problmes dans plusieurs domaines comme la sant

somatique, lobtention et le maintien dun travail, lobtention dune formation, le

fonctionnement social et le maintien de relations interpersonnelles.

1.2. Quels sont les besoins des personnes ayant une MMG?

Les profils des personnes avec une MMG sont tout aussi varis que ceux sans une MMG.

Toutefois, nombre dentre eux sont non seulement aux prises avec une psychose ou une

dpression associs des problmes de dpendance, mais prsentent aussi des limitations

spcifiques. Ils ont parfois du mal sorganiser, ils sont parfois plus lents, et ont parfois de la

difficult comprendre les choses. Ils ont souvent des habilets sociales moins bonnes et sont

plus vulnrables. Ils ont du mal avec maintenir une hygine correcte, tant au niveau

personnel que concernant leur domicile. Ils connaissent des priodes danxit. La relation

avec leur famille ou leur rseau de soutien a tendance tre moins stable. Ils ont moins de

contacts sociaux et damis proches. Ils sont moins souvent maris. Peu dentre eux ont un

emploi rmunr. Ils se questionnent beaucoup sur le sens de la vie. Ils ont plus de contact

avec leurs pairs, aussi aux prises avec une maladie mentale. Ils sont ainsi plus confronts

des pertes (des connaissances qui prsentent une nouvelle dcompensation psychotique, des

admissions en hpital psychiatrique, des suicides, etc.). Les personnes ayant une MMG ont

du mal fonctionner dans la socit, et ont rgulirement des problmes professionnels,

financiers, administratifs, et de logement.

En lisant la description ci-dessus, on peut comprendre que les problmes dordre mdical et

psychiatrique des personnes avec une MMG ont comme consquence des problmes dans

presque tous les domaines du fonctionnement social. Ce constat existe depuis le dbut du

XIXe sicle, lorsquon a commenc admettre ces personnes dans des institutions.

Lenvironnement de linstitution tait sens fournir une solution pour tous les problmes sur

le plan social : le logement, lhygine, la gestion des finances, le contrle de labus de

substances. Les mdecins et infirmirs pouvaient ainsi se concentrer sur le traitement

mdical des symptmes psychiatriques. Linstitutionnalisation tait alors considre

comme lexclusion salutaire de la socit .

Initialement, cela semblait une solution humaine. Mais finalement, les personnes ayant une

MMG sont devenues exclusivement des patients dans un systme mdical. Les rles

sociaux (en tant que locataire, employ, membre de la famille, voisin) de linstitution ont

disparu.

Bien que les hpitaux psychiatriques ont continu de se dvelopper au cours du sicle suivant

et que les anciens traitements ont t remplacs par des mdicaments et de l'ergothrapie, la

tendance de lhpital dassumer de nombreux rles et responsabilits sociaux sest maintenue.

Ainsi, lorquils taient hospitaliss, les usagers ne faisaient pas lacquisition dhabilets pour

les aider se dbrouiller en socit suite leur sortie de lhpital. Et une admission devenait

le prdicteur le plus important de radmission.

Autour de 1920 -1930 aux Pays-Bas, lopinion est de plus en plus en faveur de soins

psychiatriques offerts dans un contexte beaucoup plus social. Amsterdam, Querido met en

19

place une quipe de crise, ce qui permet de dmontrer comment prvenir ou raccourcir les

hospitalisations.

Mais en ralit, il a fallu attendre jusquen 1975 avant quil y ait vraiment une alternative

lhospitalisation pour les personnes atteintes dune MMG, lorsque Stein et Test ont commenc

leur programme Training in Community Living aux tats-Unis. Ils nont pas seulement aid

les usagers avec la mdication, mais aussi avec le logement, les finances, le maintien d'un

systme de soutien et les contacts familiaux, etc. Il devient alors vident que le fait daider les

usagers dans leur propre environnement (outreach) semble une condition essentielle. En

outre, laide doit tre dynamique: les fournissseurs de soins doivent tre proactifs avec les

usagers, rechercher activement des solutions avec eux et travailler avec leurs systmes de

soutien. Dans de nombreux cas, la motivation de lusager nest pas suffisamment importante,

et les intervenants doivent se montrer persvrants et persuasifs. Ainsi, l'approche assertive

outreach est ne. Sur la base de ce projet, le suivi intensif dans la communaut (ACT) a t

conu plus tard par Stein et Test. Il est devenu clair que les soins ne peuvent se concentrer

uniquement sur laspect mdical et psychologique. Il est ncessaire dappliquer une forme

dentranement la vie communautaire et de fournir activement du soutien dans un grand

nombre dactivits sociales et communautaires.

1.3. Ce qui est ncessaire en termes de soins dans la communaut pour des

personnes ayant une MMG?

Le dveloppement du modle FACT est principalement inspir par la littrature amricaine,

anglaise et australienne, et ceci partir des annes 80. Intagliata (1982) a dcrit les lments

du case management personnalis, qui permet lusager de crer un lien avec les soins.

Bachrach (1993) a discut de l'importance de la continuit des soins, y compris la continuit

des soins ambulatoires au cours d'une hospitalisation. Stein et Test (1978) ont dcrit

l'importance de travailler en effectuant une prise en charge partage, o toute l'quipe connat

lusager. Bond et Drake (2001) ont dcrit la formation de modles et ont attir lattention sur

limportance daider les usagers trouver un emploi rmunr, le traitement intgr des

dpendances et les interventions sociales.

Aux Pays-Bas, on a travaill partir des annes 2000 sur les premires Guidelines

Multidisciplinaires (MDR, 2005 / 2012) pour le traitement et le soutien des personnes

atteintes de schizophrnie. Ces guidelines contiennent des interventions bases sur des

donnes probantes et les meilleures pratiques partir des analyses scientifiques. Il est devenu

clair que toute forme de suivi pour les personnes ayant une MMG (incluant FACT) doit tre

en mesure doffrir les interventions indiques dans ces guidelines. Cela signifie par exemple,

que non seulement limplication dun psychiatre est ncessaire, mais aussi celle dun

psychologue afin deffectuer certaines interventions comme une thrapie cognitivo-

comportementale. Ceci signifie que FACT doit tre en mesure de dispenser non seulement

des soins, mais aussi un traitement.

Au cours de la mme priode, les soignants aux Pays-Bas ont commenc se concentrer sur

le rtablissement, les soins orients vers le rtablissement et le modle bas sur les forces.

Aux Pays-Bas, le rtablissement se rfre un courant dans le mouvement de lusager, selon

lequel les gens devraient travailler favoriser leur propre rtablissement. Il ne sagit pas de se

rtablir de la maladie, mais plutt de se rtablir en tenant compte de ses limitations. Les

usagers trouvent leur propre sens leurs limitations, apprennent les grer et dveloppent

leurs propres forces. Ces processus ne devraient pas tre pris en charge ou supprims par un

professionnel. Celui-ci doit accompagner lusager sur sa propre voie, en collaboration avec

20

dautres usagers et des pairs aidants. Le concept de rtablissement est devenu un concept

dominant dans les soins de sant mentale nerlandais et a t incorpor dans FACT.

En dautres mots, une quipe FACT doit dispenser des soins axs sur le rtablissement. Un

lment important afin dy parvenir consiste inclure un pair aidant7 dans chaque quipe. Il

sagit dune personne qui est en mesure de fournir lquipe et aux usagers des informations

bases sur sa propre exprience avec la maladie mentale et le rtablissement. Les pairs aidants

travaillent comme membres de lquipe part entire, et ils sont donc rmunrs.

1.4. Les Seven Cs : exigences en matire de traitement communautaire des

personnes avec une MMG

Le modle FACT a donc t dvelopp en sinspirant de lACT, des MDR (Guidelines

Multidisciplinaires), et de l'approche centre sur le rtablissement. Cest lors de

limplantation du FACT quon a t en mesure didentifier les interventions et les activits

thrapeutiques et de soutien qui devaient tre dveloppes. Ainsi, le dveloppement des 20

30 premires quipes a permis didentifier les aspects essentiels des soins et du traitement des

personnes atteintes dune MMG dans la communaut. Ces exigences sont rsumes dans une

liste de catgories dont chacune commence par la lettre C en anglais: The Seven Cs .

Les Seven Cs :

Exigences en matire de traitement communautaire des

personnes avec une MMG

1. Cure

(Gurison) Un traitement bas sur des donnes probantes, visant la

gurison, la stabilisation ou rendre la situation

supportable, conformment aux guidelines

multidisciplinaires (MDR)

Suivi mdical / infirmier

Suivi psychologique (thrapie cognitivo-comportementale, thrapie mta-cognitive, EMDR, etc.)

Suivi addictologique, traitement intgr des doubles diagnostics (IDDT8)

Contrle / dpistage somatique (suivi mtabolique)

2. Care

(Soins) Soutiens et conseils quotidiens

Suivi infirmier, accompagnement dans les activits de la vie quotidienne, prvention de la ngligence de soi,

attention au niveau de lhygine

Rhabilitation

Soins axs sur le rtablissement

7 Expert dexprience ou travailleur dexprience au Pays-Bas: une personne qui se trouve dans lquipe,

rmunr, une dsignation courante, qui contribue lquipe partir de sa propre exprience avec les soins de

sant mentale. En anglais on trouve des termes comme peer specialist ou consumer worker. 8 IDDT= Integrated Dual Diagnosis Treatment

21

Continuit de soins, prvention de la rupture de soins

3. Crisis

intervention

(Intervention de

crise)

Supervision et soins intensifs au domicile de l usager avec une prise en charge partage

Accessibilit 24/7

Intervention de crise, valuation du risque

Admission durgence, de courte dure, lit sur demande

Implication de la famille / du systme de soutien

4. Patient know-how

(Savoir-faire de l

usager)

Utiliser lexpertise pratique de l usager

Prise de dcision partage (Shared Decision Making -SDM)

Soins axs sur le rtablissement

Responsabilisation empowerment (Modle bas sur les forces)

Interventions dun pair aidant

5. Community-

support

(Soutien

communautaire)

Contacts avec la famille

Systme de soutien communautaire

Soutien au niveau du logement, du travail et du bien-tre

Spcialiste en matire de travail ( IPS ) : soutien individuel dans la recherche et le maintien dun emploi

Promouvoir l'intgration des usagers

Prvention de la nuisance

6. Control

(Contrle) valuation du risque et gestion de la scurit de l usager

et de lenvironnement

Obligation de soins en cas de danger

Mandats mdico-lgaux ( la demande de la Justice)

7. Check

(Vrification) valuation des effets du traitement

Suivi systmatique des rsultats (Routine Outcome Monitoring)

valuation des stratgies de soins et de traitement

Certification

Les sept C constituent un ensemble dexigences ambitieux. Toutes les interventions devraient

tre disponibles tout moment. Pourtant ils ne sont pas proposs un usager en mme temps.

Un plan de traitement est tabli, avec une slection de diffrents lments des Seven Cs. Ces

choix doivent tre faits par les usagers eux-mme ainsi que par les soignants. Cela ncessite

une valuation, une coordination et une planification. Ce processus de slection s'appuie sur

des donnes provenant dchelles dvaluation, qui sont compltes en partie par lusager et

en partie par le case manager. Les chelles qui sont utilises le plus souvent sont le HoNOS9 ,

le Mansa10 et le Cansas11. Ces chelles fournissent des informations sur les diffrents

domaines de la vie, sur les symptmes et sur la satisfaction de lusager quant aux soins

dispenss. En accord avec les objectifs que lusager sest fix, ces rsultats contribuent au

plan de traitement. Ces chelles sont compltes annuellement; cest ce processus qui

compose le suivi systmatique des rsultats (Routine Oucome Monitoring - ROM).

9 Health of Nation Outcome Score (Wing, 1998) 10 Manchester Short Assessment of Quality of Life (Priebe e.a.,1999)

11 Camberwell Assessment of Need Short Appraisal Schedule (Phelan a.o. 1995)

22

Un lment intressant propos des Seven Cs est que certaines de ses exigences semblent

presque incompatibles. Par exemple, soutenir le rtablissement semble en contradiction avec

des soins obligatoires. Ceci amne devoir prendre des dcisions difficiles. Il arrive aussi

parfois que, ce que lusager souhaite va lencontre de ce que sa famille et son

environnement souhaiteraient. Ces contradictions doivent faire lobjet de discussion avec

lusager et sa famille. Ici il est utile que les diffrentes disciplines de lquipe se penchent sur

ces problmes, partir de diffrents point de vue et perspectives. La perspective dun pair

aidant, du psychologue et du travailleur social compltent la perspective du mdecin et de

linfirmier, ce qui peut aider trouver des solutions.

Les Seven Cs montrent quon doit dterminer ce que nous allons faire, quand nous allons le

faire et qui va le faire. Jusqu un certain point, ce sont des dcisions long terme prises lors

de la mise en place du plan de traitement, mais souvent il est ncessaire de sadapter des

changements et donc presque quotidiennement de reformuler qui va faire quoi et quand. Cela

signifie quune quipe doit rpondre certaines exigences organisationnelles, qui sont

identifies ci-dessous.

1.5. Exigences pour assurer les Seven Cs

1.5.1 : Bonne coordination

Le modle FACT est un modle de prestation de soins. Le modle permet lquipe de

proposer les Seven Cs. Toutefois, cela ncessite une quipe bien coordonne. Des dcisions

doivent tre prises au sujet des interventions; ce qui devrait tre fait en premier, ainsi que ce

qui doit tre fait plus tard. Avec le tableau FACT, il est possible de coordonner efficacement

les diffrentes activits au sein dune quipe. Ceci a lieu pendant les discussions matinales

devant le tableau FACT, et lors des discussions de plan de traitement rgulires (1 2 fois par

anne pour chaque usager). Une bonne coordination est essentielle, non seulement pour le

traitement et le suivi, mais galement pour les nombreux contacts que l'quipe doit maintenir:

appeler les membres de la famille, les contacts avec le voisinage, etc.

1.5.2 : quipe intgre

Avec FACT la plupart des interventions sont effectues par les membres de lquipe. Un

minimum de prestations sont fournies par dautres quipes ou institutions. Cest pourquoi on

lappelle une quipe intgre . Cette vision provient dimportantes leons apprises au

cours des annes 90 aux Etats-Unis : les modles selon lesquels un seul case manager

coordonne des prestations en provenance dautres instances ne se sont pas avrs aussi

efficaces que le travail dune quipe intgre. Dans une quipe intgre, les interventions

ncessaires sont rparties entre les membres de lquipe. Cela se fait lors de la discussion

devant le tableau FACT, ce qui permet d'conomiser beaucoup d'appels tlphoniques et de

coordination avec les autres services. De plus, la personne qui va effectuer une intervention

23

est prsente lors de la discussion et a donc une meilleure comprhension du but de son

intervention.

quipes unidisciplinaires et case management

Dans les annes 90 dans plusieurs rgions aux Pays-Bas, les infirmiers travaillent en

tant que case manager auprs des personnes ayant une MMG. Les charges de travail

sont leves (1 : 40 60). Les infirmiers travaillent dans une quipe, mais dans cette

quipe chaque membre travaille individuellement. Quand un usager vit une situation

de crise, le case manager peut seulement effectuer un maximum de deux visites

domicile par semaine, et il ny a aucun soins dispens par d'autre membre de lquipe.

cette poque les quipes sont de type monodisciplinaire. Le psychiatre travaille dans

la consultation ambulatoire. Le dlai pour obtenir une valuation mdicale par le

psychiatre est souvent trop long. Lorsque le case manager estime que des soins

supplmentaires sont ncessaires, il doit s'organiser pour que ces prestations soient

dispenses par dautres institutions. Cela exige beaucoup de temps pour se

coordonner.

Dans de nombreux cas, les besoins des usagers pour des soins plus intensifs mne

une hospitalisation ou parfois un traitement de jour aigu (hospitalisation partielle, de

jour).

En outre il y a un manque de coordination et de continuit entre les soins

ambulatoires et hospitaliers. Les intervenants travaillant en ambulatoire ne sont pas

impliqus dans le traitement de l usager lorsqu'il est hospitalis et simpliquent

uniquement lorsquun suivi post-hospitalisation doit tre mis en place.

Ce modle a donc t mis de ct, car il ne fonctionnait pas bien. Les infirmiers

occupant ces postes passaient d'avantage de temps au tlphone avec dautres

services quils n'en passaient visiter les usagers. De plus, ceci les plaait dans une

position difficile, car il y avait peu de possibilits de collaboration et de soutien avec

les autres membres de l'quipe.

1.5.3 : quipe multidisciplinaire

Les Seven Cs peuvent seulement tre offerts lusager par une quipe multidisciplinaire

intgre. Le psychiatre, linfirmier, le travailleur social, le psychologue, le spcialiste en

matire de travail (IPS) et le pair aidant ont leur propre expertise et point de vue. Puisquils

travaillent en collaboration quotidiennement, ils dveloppent aussi une vision partage et un

style commun. Les diffrentes disciplines apportent chacune diffrents types de solutions aux

problmes quotidiens; au cours de la runion matinale lquipe discute des diffrentes

interventions possibles, et dtermine lordre selon lequel ces interventions seront offertes.

1.5.4 : Prise en charge partage si ncessaire

La prise en charge partage a t dveloppe avec le modle ACT. Au lieu dune charge de

travail individuelle, lensemble de lquipe se partage les cas ; ainsi, plusieurs membres de

lquipe rencontrent les usagers domicile ou leur fournissent du soutien de diffrentes

faons. En dautres termes, cette prise en charge partage signifie que lusager reoit des soins

et un traitement intensifs de la part de plusieurs ou de tous les membres de lquipe. La

runion matinale permet aux diffrentes disciplines de dvelopper et de mettre en application

le plan de traitement ensemble, permettant chaque discipline dy apporter sa propre

24

contribution. FACT a repris lapproche de prise en charge partage pour le groupe des usagers

ayant besoin temporairement de soins intensifs.

1.5.6 : Flexibilit

Ce ne sont pas tous les usagers qui ncessitent une prise en charge partage. Pour beaucoup

dentre eux, un contact individuel avec leur case manager est suffisant, s'accompagnant

ponctuellement dune rencontre avec le psychiatre, le pair aidant ou le spcialiste en matire

de travail (IPS).

Cest pour cette raison que les usagers sont diviss en deux groupes : (1) le groupe de soins

intensifs et (2) le groupe de soins moins intensifs. La distinction entre ces deux groupes est en

partie conforme la distinction introduite par lACT entre les 20% (les cas les plus graves) et

les 80% (les cas les moins graves). La diffrence rside dans le fait que (a), dans FACT, les

deux groupes sont suivis par la mme quipe et (b) les usagers peuvent parfois faire partie du

premier groupe, et dautres moments du deuxime groupe. En fonction de la situation, un

usager peut faire partie du groupe 1 ou du groupe 2, toutefois il recevra toujours des soins de

la mme quipe.

Pour bien rpondre aux besoins des deux groupes, une seule quipe doit tre en mesure

doffrir la fois le case management individuel et lACT. Cest pourquoi FACT s'organise

autour d'un dispositif permettant d'alterner des soins moins intensifs et des soins trs intensifs.

Lquipe se runi chaque jour. Les usagers qui ont besoin de soins intensifs ( 20% du

groupe) sont inscrits sur le tableau FACT. Leur situation est value quotidiennement et ils

reoivent des soins par lquipe sous forme dune prise en charge partage. Chaque jour

lquipe peut vrifier si un usager doit tre inclus dans le groupe des 20% ou dans le groupe

des 80%. Dans ce dernier cas, l usager nest pas mentionn sur le tableau FACT et son case

manager soccupe de la majorit des soins. Ce mcanisme d'alternance entre lune ou lautre

forme dintensit de soins compose llment la base du Flexible ACT 12.

1.5.7 : Travailler avec un modle clairement dfini

Le modle FACT offre une structure et une approche claires. Toutefois le modle nest pas

contraignant. Les quipes disposent de suffisamment despace pour dvelopper leur propre

style. Ce qui est cohrent avec la faon nerlandaise de favoriser lautogestion des quipes,

avec suffisamment de possibilits pour se dvelopper dans le cadre dun modle clairement

dfini.

La cohrence du modle est galement importante pour ladministration et le financement,

tant donn que souvent une organisation peut disposer de plusieurs quipes FACT. D'un

autre ct, lidentit distincte de lquipe est importante afin d'utiliser au mieux lexpertise et

les forces spcifiques des membres de lquipe. Une quipe FACT doit aussi tre en mesure

de crer des liens avec la communaut ou la rgion quelle dessert : il faut rpondre des

problmes locaux et tre en mesure de travailler en collaboration avec les services rgionaux.

Les quipes peuvent valuer la fidlit au modle avec un instrument de mesure : lchelle

FACT, qui comprend 60 items portant entre autres sur la composition, la faon de procder et

lorganisation de lquipe. Ceci est dcrit ailleurs dans ce manuel.

12 Au dbut labrviation FACT signifiait Fonction ACT (des quipes pouvaient combiner plusieures

fonctions). Mais il a t constat que ce terme tait difficile expliquer au niveau international. Nous avons

donc opt plus tard pour Flexible ACT.

25

1.6. La force de loutreach

Nous estimons que le FACT a permis de redcouvrir la force dun suivi et dun traitement du

type outreach. Outreach veut dire : des soins en dehors de linstitution ou du bureau.

Outreach signifie des visites domicile, des soins ou un suivi en lien avec les activits

sociales de lusager, aller le visiter au poste de police, et si ncessaire dispenser des soins dans

la rue pour les sans-abris.

Un accompagnement offert partir dun bureau ou dune polyclinique est bien ambulatoire,

mais pas du type outreach. Aux Pays-Bas le suivi de type outreach tait auparavant utilis

lors de situation de crise: une valuation domicile tait effetue pour vrifier la ncessit

dune admission. Lorsque lusager ntait pas en crise, il se rendait la polyclinique ou au

centre de jour pour ses consultations.

Dans le modle FACT une visite domicile de type outreach est la procdure

habituelle pour prendre contact avec lusager. Donc, pas uniquement lorsque

lusager est en crise, mais galement au cours dun suivi lors de phases plus stables.

Plus de 80% des contacts des case managers et des pairs aidants ont lieu lextrieur

des bureaux de lquipe. Quant aux psychiatres, ils sont au moins familiers avec la

situation au domicile de lusager et ils accompagnent rgulirement le case manager

lors de visites domicile. Le psychologue peut offrir un suivi domicile et le

spcialiste en matire de travail (IPS) travaille habituellement en outreach avec

les usagers et les employeurs.

Inspire par lACT et par le modle bas sur les forces (Strengths Model), la visite domicile

est devenue la procdure habituelle du FACT. Cela s'applique aussi bien dans une situation

de crise que lors des suivis individuels long terme des usagers en dehors des priodes de

crise. Il a t dmontr que cela avait un impact majeur sur le contact entre les professionnels

et les usagers.

Lvaluation diagnostique et les autres types dvaluation sont modifies avec loutreach. Le

professionnel parle avec lusager dans son environnement, il a plus de chances de rencontrer

sa famille et il a aussi plus dopportunits davoir des contacts avec son voisinage. Dans son

propre environnement lusager peut clairement montrer ce quil peut bien grer et ce quil

peut moins bien grer, ainsi que le type daide dont il pourrait avoir besoin. Les talents de

lusager, ses passe-temps, ses forces ainsi que le type de soutien dont il bnficie dans son

environnement sont beaucoup plus visibles. De cette manire les professionnels trouvent des

solutions avec lusager qui cadrent bien avec son environnement. Les rsultats des recherches

indiquent que lentranement sur place, dans lenvironnement naturel, est plus efficace que

lentranement dans un centre de jour.

La visite domicile et loutreach ont galement une grande importance pour la relation entre

lusager et le professionnel. Le professionnel doit sintgrer dans l'environnement de lusager.

Lusager n'est plus pris en charge (comme il l'est l'hpital); le professionnel s'introduit dans

le territoire de lusager, ce qui permet plus facilement ce dernier d'accepter la prsence du

soignant, et ce qui conduit un diffrent type de dialogue.

26

Loutreach donne galement des informations sur les points forts de lusager : le

professionnel peut observer de quelle faon lusager gre les choses - dans sa vie en gnral,

la maison, dans son environnement social, dans les contacts quil entretient avec son

voisinage ; il voit ce que lusager aime, ses intrts, peut-tre des signes d'aptitudes

particulires qui ont t ngliges et qui pourraient tre mis en vidence. Ces lments

peuvent tre valoriss dans le suivi.

A cet gard, une approche centre sur lautonomie reprsente un mouvement nouveau et

important dans lequel lusager se fixe de nouveaux objectifs en lien avec son environnement

et son travail, avec le soutien des professionnels

27

2. FACT en bref, avec les blocs de construction

2.1 Les blocs de construction du FACT

FACT est parfois difficile expliquer, tant donn quil combine plusieurs composantes

diffrentes. La figure ci-dessus, Les blocs de construction du FACT , illustre ces lments

importants:

Bloc 1: Aller o lusager veut aller pour russir

Nous voulons tre l'coute des souhaits et des objectifs de lusager. Nous allons domicile,

sur le lieu de travail, dans la famille, ou dans tout autre endroit o lusager souhaite participer

avec succs la communaut (outreach). En mettant laccent sur la russite, nous avons

confiance dans les forces des personnes et dans leur rtablissement. Ce bloc est cohrent avec

lobservation de Test et Stein que la formation de comptences dans lenvironnement artificiel

de lhpital produit peu deffets.

Bloc 2: Soutenir lintgration par le rseautage social

FACT a pour but de contribuer lintgration sociale des usagers psychiatriques. Ceux-ci ne

devraient pas seulement vivre en dehors de lhpital, mais galement participer la vie de la

communaut. cette fin, lexistence dun systme de soutien social propre lusager est

ncessaire. Laccent est mis sur lusager et sur ce qui est important pour lui. En outre, la

famille joue un rle important, comme les voisins, les bnvoles et diverses organisations

dans la communaut: des organisations daide sociale, des quipes sociales, des propritaires

de logement, la police du quartier.

Lquipe FACT ne peut pas prendre le contrle du processus dintgration, mais doit valoriser

les rseaux sociaux et cooprer avec eux. Les quipes FACT sont bien intgres dans la

communaut, ils sont des partenaires fiables, ils respectent leurs engagements. Ceci implique

dtre conscient de la scurit et, si ncessaire, avoir recours des interventions plus

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contraignantes; parce que la tolrance par la communaut peut rapidement diminuer lors de

nuisance ou lorsque la scurit est mise en pril.

Bloc 3: Reconnatre les gens avec des MMG et les mettre en contact avec des services de

sant mentale intgrs

Dtecter les usagers est trs important, d'autant plus que les personnes avec une MMG ont

quelquefois une faible comprhension de leur maladie et ne sont pas la recherche daide.

Les mdecins gnralistes, mais aussi la police ou les services dans la communaut peuvent

faire des demandes lquipe FACT. De faon informelle, FACT peut effecuter un premier

contact, explorer ce qui est possible de faire et ce qui est ncessaire.

Ltape suivante consiste crer un lien avec ces personnes. On ne peut pas prendre pour

acquis que les usagers vont maintenir leurs suivis; souvent, ils nen voient pas la ncessit.

Les mdicaments que nous leur conseillons ne leur plaisent pas. Nous devons donc

galement offrir des aspects positifs aux soins, de sorte que les usagers y trouvent des choses

qui leur plaisent, comme le soutien en lien avec leurs objectifs de rtablissement. Nous avons

comme but de dispenser des soins qui motiveront lusager accepter le suivi.

FACT vise prvenir ou raccourcir les hospitalisations, mais nous sommes conscients

quune admission en milieu hospitalier est parfois utile et ncessaire. Lors des sjours

hospitaliers nous travaillons en troite collaboration avec lhpital. Au Pays-Bas, les services

de sant mantale travaillent de manire intgre, c'est--dire que les soins hospitaliers et

ambulatoires sont intgrs dans un systme avec des rles et des engagements clairement

dfinis. Une admission reprsente toujours un incident dans un trajet de soins ambulatoires.

Par consquent les intervenants ambulatoires restent impliqus dans le traitement lhpital et

participent la dcision de la date de la sortie. Nous restons en contact avec lusager et, si

possible, nous laccompagnons de temps en temps la maison, pendant ses congs lors de son

sjour hospitalier; dans un tel systme intgr il y a des arrangements pour un traitement

hospitalier de courte dure et partiel, ainsi que des admissions trs courtes13. En collaboration

avec lhpital nous pouvons galement organiser une accessibilit 24/7. Des contatcs vido

peuvent tre utiliss; en utilisant un cran tactile, lusager peut tre en contact direct avec

lquipe FACT pendant la journe et avec lhpital le soir, la nuit et le week-end.

Bloc 4: Si ncessaire, offrir des soins ACT

En plaant lusager sur le tableau FACT, lquipe peut immdiatement dbuter des soins

intensifs avec une prise en charge partage. On peut parler dune admission sur le tableau,

au lieu dune admission dans une unit de soins psychiatriques aigus. Ceci arrive si

ncessaire ; il existe des critres pour le recours aux soins intensifs et pour revenir aprs

stabilisation aux soins individuels et moins intensifs.

Le fait que lensemble de ces soins est assur par une mme quipe constitue lessence du

FACT14 . FACT met fin au phnomne de la porte tournante , dans les bons et les mauvais

13 Aux Pays-Bas nous travaillons avec un lit sur demande. Cela veut dire quun usager peut demander une

admission pour une nuit, selon des critres peu exigent, afin de s'organiser avec ses propres intervenant

ambulatoires le lendemain. 14 Dans les quipes ACT aux Etats-Unis il est habituel de transfrer un usager une forme de soins moins intensifs. Cest ce quon appelle graduation . L usager a de nouveaux intervenants, avec des nouvelles

ides et mthodes de contact (principalement des consultations dans les bureaux plutt que des visites

domicile). Cela conduit d'avantage de rechutes et des ruptures de soins (on quitte compltement les soins).

Ou alors lusager est adress nouveau lquipe ACT : ceci est une forme psychiatrie porte tournante .

29

moments lusager est en contact avec la mme quipe, le mme case manager et le mme

psychiatre. Il y a donc une continuit dans les soins.

Bloc 5: offir un traitement en conformit avec les Guidelines (bas sur les donnes

probantes et selon les meilleures pratiques)

Au Pays-Bas le travail est guid par les Guidelines multidisciplinaires (MDR) pour la

schizophrnie. Au niveau international on trouve le NICE et par exemple le SAMHSA

(toolkits). Ce sont des sources qui donnent des indications sur les traitements qui devraient

tre dispenss. Beaucoup de ces traitements sont difficiles implenter dans une clinique

ambulatoire traditionnelle parce que les usagers peuvent arrter le suivi, oublier des rendez-

vous, avoir une mauvaise semaine, etc. En utilisant loutreach et la continuit des soins, il est

plus probable qui ces traitements puissent tre entirement appliqus.. Rcemment les quipes

FACT ont commenc utiliser le processus de prise de dcision partage (shared decision

making - SDM) ; lusager dcide de son traitement, conjointement avec le professionnel

traitant, en fonction de ses propres connaissances, lexpertise du psychiatre et une information

structure.

Bloc 6: Soutenir la rhabilitation et le rtablissement

FACT a pour but de soutenir le rtablissement et de mettre laccent sur les objectifs de

rtablissement. Le pair aidant de lquipe apporte une contribution essentielle, partir de sa

propre perspective. Il peut organiser des groupes de rtablissement (comme le Wellness Rec

overy Action Plan, WRAP Cook et al., 2012) et favoriser des contacts entre pairs. En outre,

une expertise sur le rtablissement est disponible au sein des quipes et le spcialiste en

matire de travail (IPS) soccupe de chercher un emploi rmunr.

2.2 La composition dune quipe FACT

La composition en personnel soignant des quipes FACT est adapte pour environ 200

usagers. Cela ncessite quil y ait suffisamment de gestionnaires de cas et un psychiatre.

Lquipe comprend aussi un psychologue, un spcialiste en matire de dpendances, un

spcialiste en matire de travail et un pair aidant. Voici la composition idale dune quipe

FACT:

1 ETP psychiatre

0,5 ETP chef dquipe (qui ne participe pas ncessairement aux suivis des usagers)

7 ETP case managers dont:

o 4- 5 ETP infirmiers en psychiatrie

o 1- 2 ETP infirmiers en psychiatrie communautaire

o 0,8 ETP travailleur social

0,8 ETP psychologue

0,6 ETP pair aidant

0,5 ETP un spcialiste en matire de travail (IPS - Individual Placement and Support)

Expertises requises dans cette quipe:

* expertise au niveau des dpendances dans les disciplines mentionnes ci-dessus (au

minimum 2 ETP)

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* une large expertise en rhabilitation et rtablissement

* 2-3 prsidents du tableau FACT

et facultatif:

* Plusieurs quipes FACT offrent des soins pour les personnes vivant en dehors de

lhpital dans des dispositifs dhabitations protges (sheltered accommodation), et

ainsi des conseillers en logement peuvent tre membre de lquipe FACT

* Parfois d'autres spcialits sont ajoutes lquipe, comme par exemple un

thrapeute systmique dans des quipes ciblant des personnes ayant un premier

pisode psychotique.

Le rle du case manager individuel peut tre rempli par diffrentes disciplines (infirmier,

travailleur social, parfois par un psychologue). Dans les quipes FACT nerlandaises on

trouve beaucoup dinfirmiers. En Grande-Bretagne on trouve plus de travailleurs sociaux

(social workers) et dergothrapeutes (occupational therapists) au sein dquipes similaires.

Aux tats-Unis, nous retrouvons beaucoup de travailleurs sociaux parmi les case managers.

Le choix nerlandais pour les infirmiers s'est fait en partie en raison de leur rle important

dans les hpitaux psychiatriques dautrefois. Beaucoup d'entre eux ont t forms lhpital

et ont fait la transition vers le travail ambulatoire avec une formation supplmentaire FACT.

En plus des infirmiers en psychiatrie, chaque quipe comprend au moins un infirmier en

psychiatrie sociale ou infirmier en psychiatrie communautaire ( Community

Psychiatric Nurse, CPN ). Lexpertise ajoute par un CPN en comparaison linfirmier en

psychiatrie peut inclure les domaines comme le diagnostic et lvaluation des besoins de

soins, lintervention de crise, la gestion des systmes complexes et les troubles de la

personnalit.

Les quipes FACT des autres pays devront dcider quelles disciplines seront reprsentes

dans le groupe des case managers. Une bonne repartie entre infirmiers et travailleurs sociaux

(avec une spcialisation dans les dpendances) semble importante.

Dans une quipe idale, la charge de travail moyenne des case managers est denviron 25

usagers par ETP. Le case manager est la premire personne de contact pour lusager et son

rseau ou systme de soutien. Il visite et suit lusager rgulirement. Il s'assure que lusager

dispose dun plan de traitement jour. Il peut impliquer dautres membres de lquipe dans le

traitement, par exemple le psychiatre pour les mdicaments ou le spcialiste en matire de

travail. La disponibilit dun case manager remplaant pour chaque usager est galement

la rgle. Il sagit dune personne qui connat bien lusager, et qui peut prendre la relve en cas

de maladie, vacances, etc. du case manager.

Pour des usagers qui reoivent des soins intensifs par lquipe via le tableau FACT, tous les

membres de lquipe cooprent et se partagent la charge de travail (prise en charge partage).

En dautres termes, tous les membres de lquipe sont engags pour fournir des soins

supplmentaires. Le psychiatre est directement impliqu dans les questions des mdicaments,

dans la prvention des hospitalisations, etc. Le psychologue et le pair aidant participent aussi

la prise en charge partage.

Lquipe FACT possde beaucoup de connaissances diffrentes. En plus du point de vue

mdical et infirmier, le point de vue du travail social est dune grande importance. Le

travailleur social et les spcialistes en matire de rtablissement apportent une perspective

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supplmentaire dans lquipe. En outre, tous les membres de lquipe devraient tre en

mesure de soutenir les processus de rhabilitation.

Dans les processus de rtablissement et de rhabilitation le pair aidant joue un rle important.

De plus en plus de pairs aidants sont employs de faon rgulire et rmunre. Ils ont suivi

des formations en vue de valoriser leur expertise exprientielle dans le processus de soins

directs. Souvent ils entrent en contact avec les usagers dune manire diffrente. Ils sont

parfois linterprte entre lusager et le clinicien. Ils nont gnralement pas une cohorte propre

dusagers, mais ils contribuent activement la prise en charge partage et aident identifier

les personnes aux prises avec des MMG dans la communaut et faire le lien avec le systme

de soins, et participent en outre aux activits de rtablissement.

Le fait que les quipes FACT disposent la fois d'un psychiatre et d'un psychologue donne la

possibilit de poser des diagnostics et d'tablir des plans de traitement appropris. Cela

signifie que les mdicaments, une attention particulire aux symptmes somatiques et au

dpistage mtabolique vont de pair avec la thrapie cognitivo-comportementale.

Dans lquipe, au moins deux personnes devraient possder une expertise jour au sujet des

problmatiques de dpendance. Au Pays-Bas le modle de traitement intgr des doubles

diagnostics (Integrated Dual Diagnosis Treatment - IDDT) est de plus en plus appliqu. Les

membres de lquipe, provenant de diffrentes disciplines, par exemple le case manager, le

psychiatre et le psychologue, ont une formation en traitement intgr des doubles diagnostics

quils peuvent utiliser au sein de l'quipe. Beaucoup dquipes FACT sont formes, en tant

qu'quipe, l'entretien motivationel (Motivational Interviewing).

La gestion quotidienne des soins ncessite une attention particulire. Cest pourquoi les

quipes FACT travaillent de plus en plus souvent avec deux et si possible trois

prsidents de tableau FACT . Ces personnes ne sont pas le gestionnaire ou leader formel

de lquipe. Ce sont des membres de lquipe qui sont forms pour mener la runion du

tableau FACT. Ils font foncionner le tableau digital FACT, ils coordonnent les soins

quotidiens et ils inscrivent les notes dans le dossier lectronique de lusager15. Ce modle

sest avr efficace. Dans chaque quipe il y a donc trois personnes qui connaissent bien le

modle FACT et qui sont formes pour diriger les runions. Il y a un soutien mutuel entre ces

trois personnes, et lun dentre eux est toujours prsent, mme lors des priodes de vacances.

Une quipe FACT ne devrait pas inclure un trop grand nombre de professionnels. On

sassure quil ny a pas trop de membres avec des postes pourcentage faible. Idalement, la

plupart des membres de lquipe sont employs au minimum 4 jours par semaine. Quand il y

a trop de personnes embauches temps partiel, l'organisation est plus complexe et difficile.

Nous avons aussi observ quil y a un nombre maximum dusagers pour que lquipe puisse

fonctionner de faon optimale: ce nombre est denviron 180 220 usagers. Les quipes

ayant une charge de travail de plus de 250 usagers ne peuvent plus offrir des soins sur

mesure .

15 Certaines quipes australiennes fonctionnent de manire similaire avec un gestionnaire de quart (par quart de

travail).

32

CHAPITRE 3: Le mode de travail FACT

3.1. Une esquisse de la situation: tant dusagers, tant de besoins

Lquipe FACT dun quartier dAmsterdam a une charge de travail de 210 usagers. Une

grande partie dentre eux sont relativement stables. Certaines personnes ont un emploi,

beaucoup dentre eux se rendent dans un centre de jour, ou encore participent aux activits

dans un centre de jour. Certaines personnes participent un groupe sur le rtablissement

anim par le pair aidant. Dautres, avec laide de leur case manager, sont la recherche dun

meilleur logement. La psychologue organise, avec une collgue dune autre quipe FACT, un

groupe dentranement aux habilets sociales et elle utilise parfois l' EMDR (Eye Movement

Desensitization and Reprocessing) pour le traitement de traumatismes antrieurs. Le

psychiatre rencontre au moins une fois par an tous les usagers qui sont stables, mais beaucoup

dentre eux mensuellement ou mme sur une base hebdomadaire, en particulier ceux dont la

mdication est plus complexe (comme la Clozapine), avec des risques plus importants deffets

secondaires. Environ 25 usagers sont vus par le spcialiste en matire de travail (IPS); certains

dentre eux travaillent quotidiennement avec ce membre de lquipe lorsqu'ils dbutent un

nouvel emploi. Tous les usagers ont un case manager individuel, habituellement un infirmier

qui visite lusager au moins 2 3 fois par mois domicile. Le case manager a souvent des

contacts avec la famille et parfois il accompagne lusager aux services sociaux. Outre leurs

contacts avec les usagers, plusieurs membres de lquipe sont en contact avec diverses

instances du quartier, dont les mdecins, les propritaires de logement, la police ou autres.

La majorit des usagers mentionns ci-dessus disposent donc dun case manager, ont des

contacts loccasion avec le psychiatre et parfois aussi avec le spcialiste en matire de

dpendances, le pair aidant ou le psychologue. Les membres de lquipe travaillent

individuellement avec lusager. Ils coordonnent leurs tches en fonction du plan de traitement

de lusager, qui est ajust au moins une fois par an. Mais lorsqu'un ajustement additionnel est

ncessaire, celui-ci peut avoir lieu lors de la runion matinale de lquipe. Des interventions

brves dautres disciplines peuvent alors tre considres. En dautres termes, il sagit dun

suivi et d'un traitement individuels qui permettent un accs facilit dautres disciplines.

Environ 20-25 des 210 usagers reoivent un traitement plus intensif de la part de lquipe.

Soit parce quils ne vont pas bien, ou encore parce quils ont besoin dune attention

particulire ou mme de soins intensifs. Quand cela est signal par lquipe, le nom de

lusager est crit sur le tableau FACT. partir de ce moment-l, lquipe discute de la

situation de lusager chaque jour et des soins intensifs peuvent tre dispenss.

Le groupe dusagers sur le tableau FACT est trs htrogne. l'heure actuelle, trois usagers

sont inscrits sur le tableau parce quils sont nouveaux au FACT. Lquipe souhaite mieux les

connatre, cest pourquoi ils sont discuts chaque jour pendant trois semaines; les

informations sont rcoltes par plusieurs membres de lquipe qui les visitent. Neuf usagers

sont sur le tableau depuis un certain temps dj. Ce sont des personnes avec une

schizophrnie dsorganise et des problmes de consommation. Ils peuvent seulement rester

domicile grce un soutient quotidien de lquipe. Deux dentre eux ont une prise de

traitement mdicamenteux obligatoire (impos par un juge et avec un contrle quotidien de la

prise). Pour trois autres personnes il sagit dun dpt mdicamenteux obligatoire. Plus de dix

autres personnes sont inscrites sur le tableau parce quelles sont actuellement risque d'aller

moins bien. Un usager est en crise car il na pas pris ses mdicaments. Un autre prsente un

pisode maniaque. Un autre usager souffre dune tumeur maligne grave, quil considre

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comme une simple bosse , et pour laquelle il refuse un traitement. Une autre dame avec un

trouble de personnalit borderline svre est en conflit avec son entourage, elle a cess de

prendre sa mdication et a renonc sa maison. Dans le groupe sur le tableau FACT on

trouve aussi quelques usagers admis en hpital psychiatrique et deux personnes en dtention.

Pour finir, un certain nombre de personnes en refus de soins figurent sur le tableau : il est clair

quils ont besoin de soins mais ils nont pas le sentiment dtre malade, ils estiment qu'un

traitement est inutile et ils vitent tout contact. Lquipe va tout de mme surveiller ces

situations distance pendant quelques semaines ou quelques mois et va consulter la police sur

ce qui se passe dans le quartier ; si une situation dangereuse devait survenir, lquipe pourrait

alors plus activevement proposer un traitement.

Les personnes sur le tableau FACT ont besoin de soins plus intensifs. Leurs soins ne peuvent

pas tre organiss par une seule personnes; ces personnes doivent tre vues quotidiennement

et parfois mme plusieurs fois par jour, les fournisseurs de soins se basent sur une varit de

sources dinformations provenant de la communaut (plus particulirement lorsquil sagit

dusagers qui vitent les soins), une personne doit aussi rencontrer les autres services, les

familles et le personnel de lhpital, et des dcisions importantes doivent tre prises : cela

ncessite un travail dquipe.

La prise en charge partage

Pour les personnes sur tableau FACT (qui ont besoin de soins intensifs), nous

effectuons une prise en charge partage. Les visites quotidiennes au besoin - sont

effectues par plusieurs membres de lquipe. Ces visites sont parfois brves, par

exemple pour apporter les mdicaments et sassurer que lusager les prenne. Parfois

les visites sont plus longues, par exemple pour aider lusager mettre de lordre son

domicile, complter des documentsou encore pour prendre contact avec les voisins.

La prise en charge partage ncessite une coordination quotidienne des objectifs. Les

pairs aidants se joignent la prise en charge partage, en tant bien informs sur le

traitement et le suivi de lusager. Les points de vue des diffrents membres de lquipe

sont discuts lors de la runion matinale autour