les négociations sur l’agriculture après bali le défi de mise à jour des règles...

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 NOTE D’INFORMATION, OCTOBRE 2014 Les négociations sur l’agriculture après Bali : le déf de mise à jour des règles internationales de commerce Lors de la neuvième Conférence ministérielle de l’OMC à Bali, les ministres se sont engagés à prépare r un programme de travail « clairement défini » sur les questions restantes du Programme de Doha pour le développement (PDD). Cependant, la situation des échanges agricoles internationaux a beaucoup évoluée depuis le gel des négociations en 2008 et encore plus depuis le lancement de Doha en 2001. Alors que les membres de l’OMC commencent à élaborer les contours d’un programme potentiel après Bali, il est essentiel de bien comprendre cette nouvelle réalité internationale et ce qu’elle implique pour les disciplines multilatérales agricoles à venir. Cette note d’information résume quelques unes des conclusions du livre électronique de l’ICTSD Tackling Agriculture in the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays » , édité par Ricardo Meléndez- Ortiz, Christophe Bellmann et Jonathan Hepburn 1 . Ce livre s’appuie sur les analyses les plus récentes des tendances internationales et des réformes politiques internes pour éclairer les négociations après Bali. Il comprend une série d’articles non techniques, concis et orientés vers la recherche de solutions qui ont été écrits par des experts et des penseurs réputés. Ces articles couvrent de façon systématique tous les éléments des négociations agricoles concernant l’accès au marché, le soutien interne et la concurrence à l’exportation. Introduction 1 Pour plus d’informations sur cet ouvrage, rendez-vous sur http://www.ictsd.org. Tackling  Agriculture in the Post-Bali Context A collection of short essays Edited by RicardoMeléndez-Ortiz Christophe Bellmann and Jonathan Hepburn October 2014 ICTSD Programme onAgricul tureTrade and Sustainabl eDevelopment

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7/21/2019 Les Négociations Sur l’Agriculture Après Bali Le Défi de Mise à Jour Des Règles Internationales de Commerce

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NOTE D ’ INFORMATION, OCTOBRE 2014

Les négociations sur l’agricultureaprès Bali : le déf de mise à jourdes règles internationales decommerce

Lors de la neuvième Conférence ministérielle de l’OMC à Bali,les ministres se sont engagés à préparer un programme de travail« clairement défini » sur les questions restantes du Programmede Doha pour le développement (PDD). Cependant, la situationdes échanges agricoles internationaux a beaucoup évoluéedepuis le gel des négociations en 2008 et encore plus depuis lelancement de Doha en 2001. Alors que les membres de l’OMC

commencent à élaborer les contours d’un programme potentielaprès Bali, il est essentiel de bien comprendre cette nouvelleréalité internationale et ce qu’elle implique pour les disciplinesmultilatérales agricoles à venir.

Cette note d’informationrésume quelques unesdes conclusions du livreélectronique de l’ICTSDTackling Agriculture in

the Post-Bali Context: A

Collection of Short Essays »,édité par Ricardo Meléndez-Ortiz, Christophe Bellmannet Jonathan Hepburn1.Ce livre s’appuie sur lesanalyses les plus récentes destendances internationaleset des réformes politiquesinternes pour éclairer lesnégociations après Bali. Il

comprend une série d’articlesnon techniques, concis et orientés vers la recherche de solutionsqui ont été écrits par des experts et des penseurs réputés. Cesarticles couvrent de façon systématique tous les éléments desnégociations agricoles concernant l’accès au marché, le soutieninterne et la concurrence à l’exportation.

Introduction

1 Pour plus d’informations sur cet ouvrage, rendez-vous sur http://www.ictsd.org.

Tackling Agriculturein the Post-BaliContextA collection of short essays

Edited by

Ricardo Meléndez-Ortiz

Christophe Bellmann

and Jonathan Hepburn

October 2014

ICTSD ProgrammeonAgricultureTradeand SustainableDevelopment

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2 Les négociations sur l’agriculture après Bali : Octobre 2014le déf de mise à jour des règles internationales de commerce

Au cours des décennies à venir, avec la croissancede la population urbaine et les changementsde régimes alimentaires associés, l’évolutionde la demande risque d’avoir encore plusd’impact sur l’orientation et la géographie desux commerciaux. On estime qu’un milliard de

personnes supplémentaires rejoindront la « classemoyenne » en 2020, s’ajoutant aux 1,8 milliardsde 20103. D’après les Perspectives agricoles de

l’OCDE et de la FAO, les Amériques vont renforcerleur position de principale région d’exportation,à la fois au niveau de la valeur et du volume. Lacroissance est surtout alimentée par l’augmentationdes exportations de marchandises de hautevaleur comme la viande, l’éthanol, le sucre, lesoléagineux et le coton, en réponse aux uctuations

de la demande. L’Europe de l’ouest aura, enmoyenne, un décit des échanges commerciaux

avec des exportations stables. La forte croissancede la population en Afrique donnera lieu à uneaugmentation des importations d’aliments, mais lademande la plus importante viendra d’Asie où ons’attend à voir un décit des échanges pour toutes

les marchandises sauf le riz, les huiles végétaleset le poisson en 2023. L’Inde continuera d’être undes principaux exportateurs de céréales et de rizet le sera probablement aussi pour la viande et le

coton ; elle continuera donc d’avoir un surplus deséchanges pour les produits agricoles.

Ces tendances pourraient créer de nouvelles tensionscommerciales et, dans l’ensemble, accentuerle besoin d’un système commercial multilatéralfort, prévisible et équitable. Elles montrentégalement une tendance à l’augmentation desux commerciaux, en particulier les exportations

1. Le nouveau contexte international

Un paysage commercial qui évolue rapidement

Au cours des quinze dernières années environ, lecommerce international de l’agriculture, hors ux

intra-européens, a presque triplé pour atteindre mille

milliards de dollars américains. Bien que le commercesoit surtout concentré autour de six acteurs clés(l’Europe, les États-Unis, le Japon, l’Inde, la Chine

et le Brésil), leur importance collective décroît,entre autres à cause du dynamisme des marchésd’importation en Afrique (cf. tableau 1). Les paysémergeants ont également gagné en importanceavec la croissance des importations chinoises, lerenforcement du Brésil en tant qu’exportateur cléet la participation accrue de l’Inde dont la part des

importations internationales a doublé au cours de lamême période et dont l’excédent commercial netétait de 9 milliards de dollars américains2.

Moyenne annuelle des échangesagricoles internationaux (horscommerce intra-européen).

Millions de USD.

2002-04 :325 914

2011-13 :907 507

PART DES EXPORTATIONSINTERNATIONALES

Part des exportations

internationales

Part des importations

internationales

2002–04 2011–13 2002–04 2011–13

BRÉSIL 6.9% 9.0% 1.0% 1.2%

CHINE 4.8% 4.3% 5.3% 11.1%

EU28 16.3% 15.1% 22.3% 16.1%

INDE 1.7% 2.9% 1.0% 2.0%

JAPON 0.5% 0.4% 11.6% 7.1%

ÉTATS-UNIS 18.8% 15.8% 16.8% 12.3%

SOUS-TOTAL 49.0% 47.5% 58.0% 49.9%

Tableau 1. Les échanges agricoles internationaux : évolution au cours des dix dernières années

Source : Laborde, D. 2014. « Implications of the Draft Market Access Modalities on Bound and Applied Tariffs » dans Agriculturein the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays.

2 Cf. Laborde, D. 2014. « Implications of the Draft Market Access Modalities on Bound and Applied Tariffs » dans l’ouvrage de l’ICTSDTackling Agriculture in the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays.

3 Cf. Ernst & Young. 2013. « Hitting the sweet spot. The growth of the middle class in emerging markets » http://www.ey.com/Publication/vwLUAssets/Hitting_the_sweet_spot/$FILE/Hitting_the_sweet_spot.pdf.

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provenant de pays émergents, quelles que soient lesconditions d’accès au marché. En effet, les régionsqui verront une augmentation assez importantede leur classe moyenne sont aussi celles quiaugmenteront signicativement leurs importations

nettes pour la plupart des marchandises.

D’un système d’échanges agricoles limité par lademande vers un système limité par l’offre ?

Par le passé, les marchés agricoles ont étécaractérisés par une tendance sur le long terme

vers la baisse des prix réels. Les avantages del’augmentation de la productivité et de la baissedes frais de production étaient transmis aux clients,augmentant ainsi la consommation de calories parpersonne et réduisant le pourcentage, voire lenombre absolu, de personnes souffrantes de la faimchronique. Cette abondance de l’offre exerçait unepression descendante sur les prix des aliments et,ainsi, sur les revenus des fermiers. En réaction, lesdécideurs politiques, en particulier dans les paysde l’OCDE, ont eu recours à différentes formes de

soutien des prix, de programmes de stock régulateurou de programmes de mise en gel des terres. Bienque ces mesures aient atteint leurs objectifsrecherchés au niveau national, l’emploi constantde soutien interne ayant un effet de distorsionassocié à une protection élevée des frontières aexercé encore plus de pressions descendantes surles prix internationaux et les a rendus encore plusvolatiles. Cela a également créé des surplus qu’il

a fallu éliminer sur les marchés internationaux,souvent avec l’aide de subventions à l’exportationqui ont eu pour effet de contribuer à renforcer labaisse des prix internationaux4.

Dans les pays en développement, le faible niveauet la volatilité des prix ont eu un effet dissuasif surl’investissement agricole, ce qui a souvent donnélieu à une baisse de la production agricole internetout en faisant évoluer les modes de consommationvers des aliments moins chers bénéciant de

subventions à l’importation. En général, ces

politiques ont aidé les pays importateurs nets dedenrées alimentaires ayant une capacité d’offreinterne limitée, un faible niveau de devisesétrangères disponibles et d’importantes populationsurbaines. Cependant, elles ont affaibli la capacitédes exportateurs agricoles efcaces ainsi que des

pays avec un potentiel de production alimentairenon exploité (surtout en Afrique subsaharienne)à nourrir leurs propres populations et, sur lelong terme, elles ont étouffé la croissance de laproductivité interne5.

Au cours des cinq dernières années, en revanche,plusieurs marchandises agricoles ont vu uneambée des prix et de la volatilité. On peut soutenir

que les marchés pour certaines marchandisesagricoles ont toujours fait preuve d’une volatilitéimportante6. Cependant, l’échelle et la fréquencedes ambées de prix qui ont eu lieu en 2007-08 et

se sont reproduits en 2010-11 et 2012 étaient telles

4 Cf. Schmidhuber, J. et Meyer, S. 2014. « Has the Treadmill Changed Direction? WTO Negotiations in the Light of a Potential New Global

Agricultural Market Environment » dans Tackling Agriculture in the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays.5 Ibid .6 Cette tendance est encore plus prononcée pour les marchandises dont les marchés internationaux ont tendance à être « étroits » et

ne représentent qu’un faible pourcentage de la production internationale.

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qu’elles ont attiré beaucoup d’attention politique,jusqu’au plus haut niveau du gouvernement. Cesambées semblent être la conséquence immédiate

des baisses de production liées à la météo dans lesprincipales régions de production, dans un contextede prix élevés de l’énergie, d’une demande encroissance continue du fait de l’augmentation des

revenus moyens et du niveau de croissance deproductivité faible dans de nombreuses régions dumonde. Bien que l’on ne puisse pas nécessairementconsidérer que des cas isolés de phénomènesmétéorologiques extrêmes fassent partie d’unetendance sur le long terme, il est aussi clair que lechangement climatique risque de faire augmenterl’incidence de tels événements à l’avenir, ce quisuggère que les marchés pourraient continuer àêtre caractérisés par des prix volatiles et assez

élevés. Par ailleurs, le niveau constamment élevédes prix de l’énergie et les politiques promouvantl’emploi de produits agricoles pour la productionde biocombustibles ont créé un lien direct entre leprix de l’énergie et le prix des denrées alimentaires,transformant ainsi la dynamique du commerce etde la production alimentaire7.

Sur le court terme, les pays à décit alimentaire

et à faibles revenus souffrent particulièrementdes conséquences de ces ambées. Par le

passé, l’augmentation du coût des importationsalimentaires venait surtout de l’augmentation desquantités importées. Au contraire, au cours desdernières années, l’augmentation des prix a euencore plus d’effet sur les factures d’importationsalimentaires8. Sur le long terme, si cette tendancevers un monde plus limité par l’offre se conrme,

cela pourrait avoir des conséquences encore plusprofondes pour la gouvernance du commerceagricole international. Pour l’essentiel, lesnégociations du PDD se concentrent surtout sur la

protection des producteurs, tandis que les mesuresde protection des consommateurs n’ont pas encorereçu l’attention qu’elles méritent peut-être avec lepassage à un nouveau contexte de marché. Comptetenu de cette situation, on peut se demander

s’il faut réexaminer le programme négocié dansle cadre du PDD non seulement an de traiter

les distorsions commerciales qui exercent unepression descendante sur les prix internationauxmais également pour introduire des disciplinescontraignantes pour aider à réduire la hausse desprix internationaux et la volatilité excessive des

prix.

L’évolution des politiques internes

Les politiques internes ont également évoluéen réponse aux changements internationauxau niveau du système d’alimentation mondial.Comme le décrivent Hepburn et Bellmann, desgroupes environnementaux dans l’UE ont menéune campagne tenace pour réformer la Politiqueagricole commune (PAC) an de fournir « de

l’argent public pour les marchandises publiques ».La nouvelle PAC obligerait les agriculteurs àrespecter de nouvelles règles environnementaless’ils veulent recevoir des aides. Cependant, bienque le bloc ait réussi à orienter les politiques versdes aides agricoles qui ont un effet de distorsionplus réduit, les circonscriptions qui ont cherchéà inverser la tendance de « découplage » mise enplace par une série de réformes précédentes n’ontobtenu qu’un demi-succès, notamment à cause

des pressions scales sur les membres de l’UE à lasuite du ralentissement économique de 2008 et dela crise dans la zone euro9. En effet, Tangermannsoutient que la réforme de la PAC en 2013 avaittrès peu, voire rien, à voir avec les négociations encours au niveau du système d’échanges multilatéral,contrairement aux autres réformes depuis 1992qui ont toutes contenu des éléments cherchant àaméliorer la participation constructive de l’UE dansles négociations du GATT et de l’OMC. L’accès aumarché n’a vu aucune amélioration. La subvention

des exportations est toujours possible, bien qu’ellene soit pas utilisée actuellement. En ce qui concernele soutien interne, les réformes passées de la PACavaient créé tellement de possibilités pour l’UE quel’on ne ressent aucune pression de ce côté.

7 Cf. Schmidhuber, J. et Meyer, S. 2014. « Has the Treadmill Changed Direction? WTO Negotiations in the Light of a Potential New GlobalAgricultural Market Environment » dans Tackling Agriculture in the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays.

8 Cf. Konandreas, P. 2014. « Challenges Facing Poor Food-importing Countries: Can WTO Disciplines Help » dans Tackling Agriculture

in the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays. En ce qui concerne les PMA, bien que le volume agrégé des importationscommerciales de céréales ait presque triplé entre le début des années 1990 et le début des années 2010, la facture des importationsde céréales a été multipliée par six au cours de la même période. Les PDINPA ont également vu la facture des importations de céréales

augmenter soudainement, puisque le volume a augmenté de près de 70 pourcent et que la facture des importations de céréales apresque quadruplé.

9 SCf. Tangermann, S. 2014. « The EU CAP Reform: Implications for Doha Negotiations » dans Tackling Agriculture in the Post-Bali

Context: A Collection of Short Essays.

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Aux États-Unis, la nouvelle loi sur l’agriculturede 2014 supprime les paiements directs auxproducteurs, que beaucoup considéraientimpossibles à justier d’un point de vue politique

puisque les prix élevés ont remonté les revenusdes agriculteurs à des niveaux sans précédent.Pour les remplacer, Washington a introduit desprogrammes d’assurance subventionnés pour leprix et les revenus qui s’inspirent en grande partiedu modèle des anciens paiements contracycliqueset du programme de revenus de l’Average Crop

Revenue Programme qui avait été mis en place dansle cadre de la Farm Bill précédente10. Puisqu’il estfort probable que ces nouveaux programmes soientclassés « oranges » alors que les paiements directsétaient « verts », il semble que le gouvernements’éloigne de la logique d’un découplage progressifdes aides de la production qui avait été inscrità la n du cycle de l’Uruguay dans l’Accord sur

l’Agriculture de l’OMC. Smith soutient que, dansce nouveau contexte, les États-Unis risquentd’avoir des difcultés à garder des paiements liés

à certaines cultures en particulier dans leur limited’exemption de minimis  de 2,5 pourcent aprèsDoha. Par exemple, pour la plupart des cultures,les aides aux primes d’assurance sont d’environ4 pourcent de la valeur marchande totale de laculture.

Les programmes d’aides agricoles chinoises, encroissance rapide, semblent avoir été en partieconçus pour corriger des problèmes causés parun sous investissement traditionnel dans lesecteur agricole hérité d’une tendance à imposerl’agriculture au lieu de la subventionner qui aperduré jusqu’à récemment, comme c’est le cas

pour de nombreux pays en développement. Lesaides semblent aussi se concentrer sur la réductiondes énormes disparités croissantes entre lesrevenus urbains et ruraux. Même si, en termesabsolus, les aides agricoles en Chine sont environ aumême niveau que les aides agricoles européennes,les aides agricoles chinoises sont particulièrementaxées sur le nancement des « services généraux »

comme l’infrastructure. Par ailleurs, une partiedes aides sont également fournies en tant que

paiements découplés sur la base du niveauhistorique des subventions. Puisque les dispositionsprécises pour la prestation de ce type d’aidevarient en fonction des provinces, le niveau réel dudécouplage semble varier, et les aides au niveaudes différentes régions administratives sont liées àla production d’une ou plusieurs cultures stables.

Les aides agricoles internes indiennes ont égalementaugmenté de manière importante au cours desdernières années. Elles mettent particulièrement

l’accent sur les subventions aux intrants et auxinvestissements dans les pays en développement(dans le cadre de l’article 6.2 de l’Accord surl’Agriculture qui protège les subventions pour lesengrais, l’irrigation, l’électricité et les graines).L’achat d’aliments à des prix administrés aégalement une place importante dans le cadre dela politique générale du pays, avec l’augmentationdes risques de dépasser les plafonds des aidesde minimis  ayant un effet de distorsion, commele montre la controverse actuelle sur les stocks

publics.

Des accords commerciaux mégarégionaux posentles bases pour un nouveau développement

Une autre caractéristique marquante destransformations récentes du commerceinternational est l’émergence des négociationssur le libre échange dites « mégarégionales ». Les

10 Cf. Smith, V. 2014. The 2014 US Farm Bill: Implications for the WTO Doha Round in a Post-Bali Context » dans Tackling Agriculture in

the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays.

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6 Les négociations sur l’agriculture après Bali : Octobre 2014le déf de mise à jour des règles internationales de commerce

accords commerciaux régionaux (ACR) ne sontpas un phénomène nouveau, mais les initiativesmégarégionales les plus récentes se font à unetoute autre échelle. Les trois plus grandes « méga »initiatives, le Partenariat transatlantique decommerce et d’investissement (TTIP), l’Accord departenariat transpacique (TPP) et la coopération

régionale en Asie et dans le Pacique (RCEP),

représentent plus de trois quarts du PIB mondial etdeux tiers du commerce international. De ce fait,elles élaborent de façon efcace la feuille de route

pour les régimes de réglementation commercialeà venir, avec des résultats qui comprennent uneintégration plus profonde ainsi que des disciplinesOMC-plus ou la libéralisation.

D’après Ash et Lejarraga, le régionalisme pourraitnaturellement évoluer vers un système multilatéralcomplet. Il pourrait également être souhaitablede mener une étude plus explicite des options quipourraient permettre de faire évoluer certainespratiques émergentes vers un cadre réglementaireplus international. En effet, la promotion del’uniformité et de la cohérence au niveau desnégociations mégarégionales et une étude sur lafaçon d’optimiser les synergies avec le régimemultilatéral pourraient permettre de réduireles coûts de transaction pour les entreprises,

simpliant ainsi le labyrinthe des régimes pour lesdécideurs politiques et maximisant la prospéritémondiale. L’examen des leçons et des meilleurespratiques émergeantes au niveau régional pourraitainsi éclairer des options pour des progrèsmultilatéraux11. Cela ne veut pas dire que cetengagement serait simplement reproduit dans lesystème d’échanges multilatéral. Un tel processusdevrait absolument prendre en compte les intérêtset les préoccupations d’autres membres de l’OMC,en commençant par les pays à faibles revenus qui

ne participent pas à ces négociations.

L’élimination des droits de douane a été au cœurdes efforts de l’OMC-plus en matière d’agriculture,ce qui a permis d’obtenir des progrès importants auniveau de l’élimination des droits sur les produitsagricoles au-delà des concessions multilatéralesexistantes. Il est intéressant de noter que les ACRSud-Sud ont fait plus de progrès, et des progrèsplus rapides, au niveau de la suppression des

droits de douane que les ACR Nord-Sud. Un autredomaine où les mesures OMC-plus les plus étenduesont eu lieu est celui des mesures à l’exportation.En temps voulu, ce domaine pourrait être propiceà la mise en place d’efforts multilatéraux.De nombreux ACR ont pris des engagementsconcernant les taxes à l’exportation qui vont

plus loin que ceux de l’OMC. Ces instrumentss’appliquent souvent aux matières premièreset à d’autres produits agricoles (notammentles céréales de base, les oléagineux...). Ilconvient de noter que l’approche régionale auxexibilités des disciplines a été d’imposer une

série de conditions sur l’emploi d’exceptions an

d’éviter qu’elles ne nuisent aux autres membresou modient les prix internationaux lorsque des

mesures à l’exportation sont mises en place. Un

grand nombre d’ACR contiennent également desdispositions interdisant l’utilisation de subventionsà l’exportation des produits agricoles au niveau ducommerce régional12.

Enn, en ce qui concerne les normes, en

particulier les mesures SPS et OTC, la plupart desexigences de l’OMC concernent l’amélioration dela transparence. Les ACR ont permis d’introduirede nouvelles obligations qui renforcent lesexigences de transparence ex ante et  ex post

pour la conception et l’application de normeset la mise en place de meilleurs systèmesd’information électroniques et de processus deconsultation qui prennent en compte les partiesétrangères intéressées. Puisque la transparencemontre les caractéristiques des marchandisespubliques (la non-exclusion et la non-rivalité),il semble probable que, au moins d’un point devue purement technique, le fait d’étendre cesengagements au niveau multilatéral n’impliquepas de frais économiques supplémentaires pour

les pays qui les ont déjà mis en œuvre au niveauunilatéral ou régional13.

2. Le chemin à suivre : deséléments possibles d’unprogramme après Bali

En gardant en tête ces changements radicaux,on peut envisager plusieurs options pourl’élaboration d’un programme pertinent après

11 Ibid .12 Ibid .13 Ibid .

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Bali. An d’obtenir des résultats plus pertinents

au niveau des négociations agricoles, il ne faut pasoublier qu’il faudra traiter un ensemble importantde questions, y compris dans d’autres domainesde négociation, en commençant par les MAAN.Ensuite, compte tenu des divergences d’opinionsparmi les membres de l’OMC, le partage d’idéeset l’étude de nouvelles options seront nécessaires

pour dépasser l’impasse actuelle. Enn, touteréexion sur le chemin à venir doit prendre en

compte le fait qu’un texte du président actuel està l’examen et qu’un certain nombre de membresveulent le prendre comme cadre de référence alorsque d’autres veulent l’aborder avec exibilité.

Une méthode possible est d’essayer d’identier

les éléments clés à traiter pour apporter unengagement et une dynamique renouvelés auxnégociations14.

L’accès au marché

Depuis le début du Cycle de Doha, les conditionsd’accès au marché ont été caractérisées parla baisse des droits de douane appliqués, lerésultat de la libéralisation unilatérale ainsi quedes accords commerciaux régionaux. À l’échellemondiale, les droits NPF sont passés de 24,6

pourcent en moyenne en 2001 à 18,7 pourcenten 2010, et les droits de douane appliqués (ycompris les droits préférentiels) sont passés de15,8 pourcent à 13,8 pourcent. Cette baisse desdroits NPF appliqués était particulièrement fortepour les pays en développement, passant de 31,1pourcent en moyenne à 23,2 pourcent, alors queles droits préférentiels appliqués sont descendus à

19,8 pourcent en 201015

.

Malgré cela, Laborde pense que 50 pourcentdes acquis internationaux en matière d’accèsau marché et de réformes du PDD sur le soutieninterne viendront du secteur agricole. Grâce auprocessus de réforme de l’agriculture, 89 pourcentdes acquis viendront de l’échange de concessionsconcernant l’accès au marché à travers une baissedes droits de douane.

La Déclaration de Doha adoptée en 2001 présenteclairement un programme ambitieux pour répondreaux principales distorsions du commerce mondial,en particulier pour les marchés agricoles16. Siles formules étaient appliquées sans exception,les taux appliqués baisseraient de plus de 50pourcent, passant de 15,5 pourcent à 7,5 pourcentpour les pays développés et de 13,3 pourcent à

14 Cf. Singh, H. V. 2014. « WTO Agriculture Negotiations: The Way Ahead » dans Tackling Agriculture in the Post-Bali Context: A Collection

of Short Essays.

15 Cf. Bureau, J-C et J. Sébastien. 2013. « Do Yesterday’s Disciplines Fit Today’s Farm Trade? Challenges and Possible Adjustments forthe Multilateral Trading System ». Article écrit pour l’Initiative E15 de l’ICTSD.

16 Cf. Laborde, D. 2014. « Implications of the Draft Market Access Modalities on Bound and Applied Tariffs » dans Tackling Agriculture

in the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays.

Figure 1. Conséquences des modalités du PDD sur les tarifs douaniers agricoles de l’OMC

Conséquences possibles des taux appliqués pondérés par les échanges sur les importations (y compris lesrégimes préférentiels)

Source : Laborde, D. 2014. « Implications of the Draft Market Access Modalities on Bound and Applied Tariffs » dans Agriculture

in the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays.

7/21/2019 Les Négociations Sur l’Agriculture Après Bali Le Défi de Mise à Jour Des Règles Internationales de Commerce

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8 Les négociations sur l’agriculture après Bali : Octobre 2014le déf de mise à jour des règles internationales de commerce

11,3 pourcent pour les pays en développement quine font pas partie des « pays les moins avancés »(PMA)17. En revanche, cette même ambition arendu les négociations plus compliquées que prévu.Poussés par le besoin de trouver un accord qui soitaccepté par les parties intéressées nationales,les négociateurs ont atténué les disciplines enintroduisant des exibilités qui ont éliminé la

motivation pour conclure rapidement le Cycle.Ces exibilités (c’est-à-dire les produits sensibles

et les produits spéciaux) divisent plus de deux foisles réductions internationales des droits de douaneet touchent particulièrement les pays industrielsoù les réductions passent de 8,0 à 4,4 points depourcentage. Au contraire, pour les pays à revenusfaibles et moyens qui ne font pas partie des PMA,les réductions baissent de 2,0 à 0,1 points de

pourcentage. En revanche, la moyenne des droitsagricoles appliqués de l’UE, les États-Unis et leJapon baisse quand même de 26 pourcent, un chiffreimpressionnant si on considère qu’une grande partiedes importations se font dans le cadre d’accordspréférentiels. Bien que le Brésil et l’Inde n’aient pasà mettre en place des réductions effectives, la Chine(qui n’a presque pas d’excédent de consolidation)devra quand même baisser les taux appliqués, mêmeaprès avoir utilisé toutes les exibilités18.

Dans l’ensemble, il n’est pas facile de trouver unjuste milieu entre les contraintes politiques etl’ambition originale du Cycle. Laborde considèreque l’on pourrait beaucoup réduire le coûtpolitique d’un accord pour augmenter l’accès aumarché en utilisant une approche proportionnelleau lieu des formules de réduction progressive

des droits de douane. Comme le souligne Singh,la note 2 du bas de page du texte du présidentd’août 2007 contenait déjà une approche similaireen suggérant une réduction générale de 36pourcent avec une baisse minimum de 15 pourcentpour chaque ligne, selon le modèle du Cycle del’Uruguay19. Sinon, Singh soutient qu’accomplirplus de progrès au niveau des mégas ALE pourraitfaciliter un engagement plus poussé, en particuliersi on prend en compte les tendances attendues au

niveau des importations à la suite de la croissancede la classe moyenne dans les pays émergeants.Si les membres de l’OMC prenaient en comptecette réalité et s’en servaient pour développer cequi semble avoir été un consensus précédent surdes questions comme les concessions d’accès aumarché de l’Inde, ils pourraient peut-être mettreen place une base de départ leur permettantd’aller plus en avant, par exemple en étudiant lapossibilité d’introduire des contingents tarifaires

17 C’est en partie à cause des caractéristiques principales de la formule elle-même (c’est à dire des réductions moins importantes etdes limites de niveau plus élevées) et de l’excédent de consolidation de nombreux pays en développement (l’écart entre le tauxmaximal des droits « consolidés » et le taux réel appliqué).

18 Cf. Laborde, D. 2014. Implications of the Draft Market Access Modalities on Bound and Applied Tariffs » dans Tackling Agriculture in

the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays.

19 La note de bas de page disait : « En attendant l’accord nal sur cet aspect des modalités, les Membres souhaiteront peut-êtrecontinuer d’examiner l’approche à laquelle il est fait allusion dans le document du Président sur les dés, selon laquelle une approche

fondamentale analogue au Cycle d’Uruguay pourrait être un abaissement global pour les pays en développement Membres de 36 pourcent avec un abaissement minimal de 15 pour cent pour chaque ligne... »

Figure 2. Les aides qui ne relèvent pas de la catégorie verte sont en baisse pour les grands pays

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pour certains produits en Chine dans le cadre d’unaccord plus large.

Une autre question essentielle concerne le

mécanisme de sauvegarde spéciale (MSS). Ici,Morrison et Mermigkas montrent que la fréquencedes « pics d’importation » a beaucoup changédepuis le début des années 2000, reétant le

passage d’un contexte de prix bas et assez stablesà un nouveau contexte de marché avec des prixplus élevés et peut-être plus volatiles. Bien que,comme on pouvait s’y attendre, les baisses de prixsoient revenues à zéro pour la plupart des groupesde marchandises étudiés entre 2004 et 2011, onremarque que la fréquence des pics de volumea également beaucoup baissée. Cependant, labaisse de la fréquence des pics de volume reète

une augmentation importante des importations àun taux plus constant et ne vient pas des niveauxd’importation ou des taux de croissance desimportations plus faibles20. Néanmoins, cetteréalité ne doit pas suggérer que l’on n’a pasbesoin de MSS. Comme nous l’avons dit plus tôt,les prix d’aujourd’hui ont tendance à être plusvolatiles et on s’attend à ce que cela perdure,

ce qui renforce les demandes pour le maintiend’un instrument simple, robuste et efcace

dans le cadre d’un éventuel accord de Doha. Parailleurs, les prix pourraient baisser à l’avenir ;

il serait donc important pour de nombreux paysen développement de garder un tel « mécanismed’assurance ». Cette analyse suggère que les prols

d’importation, et par là l’efcacité des différents

seuils, peuvent beaucoup varier en fonctiondes groupements de pays. Compte tenu de leurdépendance assez importante sur l’importation deproduits alimentaires en tant que proportion de laconsommation totale, des pics au niveau des PMAou des « petites économies vulnérables » (PEV)

risquent moins de créer une déviation importantepar rapport à la moyenne mobile. Pour ces pays,un seuil de volume plus sensible (plus bas) pourraitêtre mieux adapté21.

Soutien interne

Après leur diminution, les versements de soutieninterne qui ne relèvent pas de la catégorie verteen Europe, aux États-Unis et au Japon se trouventà présent entre 5 et 8 pourcent de la valeur de la

20 Cf. Morrison, J. et Mermigkas, G. 2014 « Import Surges and the Special Safeguard Mechanism in a Changing Global Market Context »dans Tackling Agriculture in the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays.

21 Ibid .

Figure 3. En revanche, les aides qui ne relèvent pas de la catégorie verte ont augmenté au Brésil,en Chine, en Inde et en Indonésie

Source : Brink, L. 2014. « Evolution of Trade-distorting Domestic Support » dans Tackling Agriculture in the Post-Bali Context:

 A Collection of Short Essays.

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10 Les négociations sur l’agriculture après Bali : Octobre 2014le déf de mise à jour des règles internationales de commerce

22 Cf. Brink, L. 2014 « Evolution of Trade-distorting Domestic Support » dans Tackling Agriculture in the Post-Bali Context: A Collectionof Short Essays.

23 Cf. Smith, V. 2014. « The 2014 US Farm Bill: Implications for the WTO Doha Round in a Post-Bali Context » dans Tackling Agriculture

in the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays.

production, un niveau bien plus bas que celui dela période de base 1986-88 du Cycle de l’Uruguay(cf. gure 2). D’après Brink, les baisses au niveau

des aides qui ne relèvent pas de la catégorie verte

s’expliquent par des changements politiques,certains au niveau des prix administrés, ce qui aréduit le soutien mesuré (ex. le Japon) ou l’a faitpasser dans la catégorie verte (ex. l’UE), tandis quecertains versements ont baissé avec la hausse desprix du marché (ex. les États-Unis). Au contraire,le Brésil, la Chine, l’Inde et l’Indonésie ont unschéma récurrent d’augmentations sur le longterme. Cependant, au cours des deux dernièresannées communiquées, le Brésil, l’Inde et

l’Indonésie ont enregistré des chutes importantes.Toutes les aides indonésiennes qui ne relèventpas de la catégorie verte, presque toutes cellesde l’Inde et un tiers de celles du Brésil sont dessubventions dans le cadre de l’article 6.2. Il s’agitde subventions aux intrants (Indonésie), surtoutde subventions aux intrants (Inde) ou surtout desubventions aux investissements (Brésil). La Chinene peut pas bénécier de l’exemption de l’article

6.2. En 2008, le Brésil, la Chine et l’Indonésie

avaient augmenté les aides qui ne relèvent pas dela catégorie verte pour atteindre 2 à 4 pourcentde la valeur de la production agricole, et l’Indeétait passée à 16 pourcent (cf. gure 3). Le niveau

du Brésil a atteint les 5 pourcent en 2010 avant debaisser. En raison de cette évolution, Brink penseque le niveau des aides qui ne relèvent pas dela catégorie verte exprimés en pourcentage de lavaleur de la production se recoupe maintenantbeaucoup pour les grands pays développés et lesgrands pays en développement22.

Comme nous l’avons souligné ci-dessus, à cause dumarché et de la situation politique actuelle, lesÉtats-Unis pourraient fournir un niveau de soutienplus élevé que celui débattu précédemment lorsdes négociations23. Cependant, certains paysexportateurs agricoles sont réticents à l’idéed’alléger les projets de disciplines proposés pourles États-Unis ; ils aimeraient également voirdes exigences plus sévères mises en place pourle soutien interne en Chine et en Inde. En mêmetemps, ces pays et d’autres pays en développements’opposent à d’autres changements qui réduiraient

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11

24 Cf. Singh, H. V. 2014. « WTO Agriculture Negotiations: The Way Ahead » dans Tackling Agriculture in the Post-Bali Context: A Collection

of Short Essays.

25 DS161. Corée — Mesures affectant les importations de viande de bœuf fraîche, réfrigérée et congelée.26 Cf. Montemayor, R. 2014. « Market Price Support in Large Developing Countries » dans Tackling Agriculture in the Post-Bali Context:

 A Collection of Short Essays.

27 Ibid .

les options de politique interne dont ils peuventproter dans le cadre du projet de texte actuel24.

Pour concilier ces points de vue, il faudraitdes approches innovantes. En ce sens, Singhpropose certaines pistes, dont la possibilité dechangements au niveau de la période de référence

pour le soutien interne ayant un effet de distorsion(SIED). Ces changements pourraient être associésà une quantité de SIED qui augmenterait si lepays qui fournit le soutien doit faire face àune augmentation des importations (commeun mécanisme de sauvegarde). D’autres pistespourraient s’inspirer des idées (pas des disciplinesen particulier) qui soutiennent les exibilités

contenues dans l’annexe VII et l’article 27.4de l’accord sur les subventions et les mesurescompensatoires. Par exemple, les négociateurspourraient rééchir à la possibilité d’un consensus

autour d’un modèle qui garderait les niveaux de

minimis proposés dans le dernier projet de textepour les plus grands pays en développement tantqu’un certain seuil, déni en termes absolus,

n’est pas franchi. Cela pourrait être associé à unelongue période de mise en œuvre et la suppressionprogressive du soutien ayant un effet de distorsionpour atteindre un niveau convenu plus bas. Cesexibilités pour les pays émergeants pourraient

être associées à une augmentation du SIED pourles pays développés. Par exemple, si le projet detexte augmente le SIED des pays développés de 10pourcent, les conditions actuelles du soutien de

minimis ne changeraient pas pour les grands paysen développement. Cependant, si le SIED des paysdéveloppés n’augmente pas, on pourrait envisagerune baisse de 10 pourcent du niveau de minimis du soutien des pays en développement si cesmembres franchissent un seuil déni en termes

absolus.

En ce qui concerne l’emploi de prix administréspour l’achat de produits alimentaires pour lesstocks publics, Montemayor étudie les optionspossibles pour une solution permanente quipourrait répondre aux préoccupations des paysqui risquent de dépasser leurs plafonds de minimis ainsi que celles de leurs partenaires commerciaux.

S’appuyant sur une série de simulations quicouvrent un groupe de pays utilisant actuellementde telles méthodes, son analyse semble indiquerque les pays pourraient xer une limite à la portée

de leur programme de soutien des prix, commele suggère la décision du tribunal d’appel dansle cas du bœuf coréen25. Cela pourrait être une

approche pratique à adopter si les pays veulentmaintenir leurs programmes de soutien des prixmais n’ont pas l’intention d’absorber une grandepartie de leur production interne. Ce faisant,les pays pourraient ne prendre en compte que laquantité réellement achetée de manière légitimeet ainsi maintenir leur mesure globale de soutien(MGS) en deçà du plafond de minimis  de 10pourcent. Cette option n’obligerait pas à modier

les règles existantes et permettrait même aux

pays d’augmenter leur volume d’achats26

.

Si cette option ne répond pas aux préoccupationsde certains pays, une des alternatives les moinscontroversées serait de permettre l’emploi dedollars américains pour communiquer les prix etles valeurs monétaires pour le calcul de la MGS etde ne faire correspondre la production « éligible» qu’à la partie de la production locale qui estvraiment mise sur le marché. Une troisième optionserait d’exempter certains pays en développement

des plafonds de minimis  si leurs achats réelsne dépassent pas un certain pourcentage de laproduction locale. Cela pourrait permettre derépondre aux préoccupations des pays avec depetits programmes d’achat qui ne contribuent pasbeaucoup aux distorsions du marché. Enn, on

pourrait aussi étudier d’autres possibilités, commeredénir le prix de référence extérieur (ex. en

utilisant une moyenne mobile sur trois ou cinqans pour les prix internationaux) ou prendre encompte l’ination à travers l’emploi d’indices de

prix à la production. Cependant, ce chemin risqued’être difcile à suivre puisqu’il est contraire à

la nature « xe » des prix de référence. Enn,

les pays en développement ont la possibilité deconvertir leurs programmes d’achats en mesuresrelevant de la catégorie verte en supprimant lesprix administrés et en se contenant d’acheter lesproduits alimentaires au prix du marché27. Les

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12 Les négociations sur l’agriculture après Bali : Octobre 2014le déf de mise à jour des règles internationales de commerce

28 Par exemple, une grande partie du soutien de l’UE se fait sous forme de versement direct, surtout à travers l’aide découplée aurevenu, tandis que les États-Unis privilégient l’aide alimentaire intérieure, notamment à travers leur programme de bons alimentaires.La Chine, en revanche, met beaucoup plus l’accent sur les services d’infrastructure, les services d’extension, la recherche et la luttecontre les animaux nuisibles et les maladies, tandis que l’Inde donne la priorité aux stocks publics pour la sécurité alimentaire.

membres de l’OMC pourraient aussi décider que, sile prix administré se trouve au même niveau ou endessous du prix du marché, il ne sera pas considérécomme étant un soutien de prix et pourra ainsiêtre considéré comme étant compatible avec lacatégorie verte.

Mesures relevant de la « catégorie verte »

Comme nous l’avons souligne ci-dessus, depuis

la n du Cycle de l’Uruguay, les fournisseurstraditionnels de soutien agricole ont réduitle soutien ayant un effet de distorsion, unedécision qui est souvent accompagnée par uneaugmentation proportionnelle des subventionsrelevant de la catégorie verte. En même temps, lesoutien relevant de la catégorie verte augmente demanière constante pour un certain nombre de pays« émergeants » comme la Chine ou l’Inde. Ainsi,les versements relevant de la catégorie verte sontaujourd’hui de loin la partie la plus importante

des aides agricoles, bien que la composition desversements varie fortement entre les membres del’OMC28. Puisque de plus en plus de subventionssont classées comme relevant de la catégorieverte, le fait que la catégorie n’ait pas d’effet dedistorsion est devenu plus important. Alors que lesarchitectes de l’Accord sur l’Agriculture voulaientvisiblement encourager les gouvernements à laisser

de côté les mesures ayant un effet de distorsion,les études ont montré que même les politiquesqui semblent le plus « découplées » ont tout demême un effet sur le commerce. Par ailleurs, avecl’augmentation rapide des dépenses relevant de lacatégorie verte dans certaines parties du monde,même un faible impact commercial par dollar

risque de ne plus être faible s’il est multiplié parune importante quantité de dollars.

Le projet de texte « sur les modalités » de 2008contient un certain nombre de propositions visantà renforcer ou à redénir les critères existants

en fonction de l’expérience accumulée jusqu’ici.Il faudrait les poursuivre et les mettre en œuvredans un ensemble de Doha possible. Cependant,la question de savoir si une mesure en particuliera un effet plus que minime sur le commerce et laproduction est une question empirique que l’onne peut pas évaluer ex ante. Sur le long terme, ilserait peut-être utile d’envisager des approchesdifférentes. Comme l’ont souligné Hepburn etBellmann, une approche possible serait de faire ladifférence entre des « versements pour des bienspublics » et un « soutien au revenu ». Les mesures quicherchent à corriger des défaillances persistantesdu marché ou à assurer la provision de bienspublics, comme la conservation de la biodiversité,

l’atténuation du changement climatique, ledéveloppement de l’infrastructure ou la rechercheet le développement, pourraient demander uneintervention du gouvernement sur le long terme.Même si ces politiques n’avaient qu’un effet limitésur la production et le commerce, il n’y auraitaucune logique évidente pour les contraindre tantque ces défaillances du marché persistent. D’unautre côté, les mesures qui cherchent surtout àapporter un soutien au revenu aux agriculteurspourraient avoir besoin d’une forme de limite ou

de plafond. Bien qu’elles puissent jouer un rôleclé pour faciliter les réformes en compensant leseffets négatifs sur le revenu causés par la baissedes mesures ayant le plus d’effet de distorsion,elles ne devraient probablement pas être fourniesde manière permanente mais plutôt être limitéesdans le temps. Limiter ces versements permettraitd’atténuer les préoccupations concernant le

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29 Cf. Hepburn, J. et Bellmann C. 2014. « The Future of Green Box Measures » dans Tackling Agriculture in the Post-Bali Context: A

Collection of Short Essays.

30 Les pays avec le plus d’ECE étaient la Chine (25), l’Inde (14) et la Colombie (14).31 Le projet de texte de 2008 sur les modalités permettrait aux pays en développement de garder des ECE ayant un monopole « pour

préserver la stabilité des prix à la consommation intérieurs et assurer la sécurité alimentaire ». Si ce ne sont pas les objectifs,

elles pourraient quand même garder leur statut de monopole si leur part des exportations mondiales du/des produit(s) agricole(s)concerné(s) est de moins de 5 pourcent sur trois années consécutives. Cependant, ce pourcentage semble être assez important.

32 Cf. Diaz-Bonilla, E. et Harris, J. 2014. « Export Subsidies and Export Credits » dans Tackling Agriculture in the Post-Bali Context: A

Collection of Short Essays.

transfert d’une catégorie à l’autre tout enapportant plus de parité entre les gouvernementsqui ont des recettes budgétaires importantes etceux qui n’en ont pas29.

La concurrence à l’exportation : un compromispossible

D’après Diaz Bonilla et Harris, en général, lessubventions à l’exportation sont en baisse, mêmesi près de 500 millions de dollars américains desubventions à l’exportation étaient encore en placeen 2001-12, surtout dans l’UE, au Canada et enSuisse. En même temps, 20 membres de l’OMC ontsignalé l’existence de 77 entreprises commercialesd’État (ECE)30. Alors que certaines des grandesECE d’exportation agricole qui étaient exploitéespar les pays développés ont été réformées ou sonten train d’être réformées (comme la Commissioncanadienne du blé), il semble y avoir plus d’ECEdans les pays en développement.

La baisse de l’utilisation de subventions àl’exportation offre visiblement la possibilitéd’harmoniser enn le traitement des subventions

à l’exportation, en éliminant le traitementspécial de l’Accord sur l’Agriculture. Le projetde texte de 2008 « sur les modalités » offre un

modèle pour ce faire. Il faudrait supprimer lessubventions à l’exportation pour l’agriculture etharmoniser le système dans le cadre de l’Accordsur les subventions et les mesures compensatoires(ASMC). Le texte de 2008 fournit également unmodèle pertinent pour les crédits à l’exportation,les garanties à l’exportation et l’assurance.Cependant, d’après Diaz Bonilla et Harris, ilfaudrait peut-être rééchir encore plus au

traitement des ECE dans le projet de texte de 2008.Tout d’abord, les ECE des pays développés sont

exonérées de l’obligation d’arrêter le monopolesi le produit exporté représente moins de 0,25 ducommerce mondial total des produits agricolespour la période de base 2003-05. Le pourcentagesemble faible, mais cela peut représenter entre 8et 12 pourcent du commerce mondial de produits

en particulier comme le blé, le maïs ou le soja.D’autres modications pourraient être nécessaires

pour les ECE des pays en développement31. Ilfaudrait peut-être également mettre en placedes réformes pour augmenter la transparence etaméliorer les notications à l’OMC pour les ECE

qui ne sont pas exploitées selon des modalités

commerciales mais qui revendiquent quandmême le « secret commercial ». Enn, il faudrait

également étudier plus en profondeur le besoin decouvrir les ECE importatrices32.

En ce qui concerne l’aide alimentaire, Clay parlede l’émergence d’un nouvel environnementpolitique pour l’aide et l’assistance alimentaireinternationale puisque les pays développés et lespays en développement continuent à reformuler leprogramme de la sécurité alimentaire après la crisemondiale. Cependant, l’aide alimentaire sembleêtre de moins en moins capable de répondre auxrisques graves d’insécurité alimentaire ou de lesgérer, notamment à cause de son déclin. Dans cecontexte, Clay suggère qu’une « catégorie sûre »simpliée pourrait permettre d’éviter une aide

humanitaire urgente imminente. Deuxièmement,il faut trouver un juste milieu entre faciliter lasécurité alimentaire nationale, surtout pour lesPMA, et éviter les restrictions à l’exportation

pour l’aide humanitaire. L’OMC, à l’instard’autres forums pertinents comme le G-20, doitpoursuivre ses efforts pour obtenir un accord surles principes volontaires avec des évaluationsrégulières réalisées par des pairs an d’éviter

les restrictions sur l’aide humanitaire. Enn, le

projet de disciplines du PDD (annexe L) est encorepertinent, car il peut servir de pièce maîtressepour la gouvernance future de l’aide alimentaireinternationale, dans la mesure où on reconnaîtqu’il est nécessaire de réduire le plus possible le

risque que l’aide alimentaire devienne un véhiculepour la gestion des excédents temporaires.

En général, comme l’observe Singh, le projet demodalités existant dans ce domaine n’est pasvraiment remis en question, même s’il faudrait

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14 Les négociations sur l’agriculture après Bali : Octobre 2014le déf de mise à jour des règles internationales de commerce

33 Cf. Clay, E. J. 2014. « Trade Policy Options for Enhancing Food Aid Effectiveness: Revisiting the Draft Doha Deal » dans Tackling

 Agriculture in the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays.

34 Cf. Anania, G. 2014. « Export Restrictions and Food Security » dans Tackling Agriculture in the Post-Bali Context: A Collection of

Short Essays.35 Ibid.36 Dans certaines circonstances, les pays pourraient ne pas remplacer une restriction à l’exportation existante par une taxe à l’exportation

équivalente ; cependant, dans ce cas, le minimum de volumes exporté devra être plus important.

peut-être le peauner. Il faut donc ramener

la concurrence à l’exportation sur le devant dela scène et mettre en œuvre des efforts pour yrépondre. Cela créerait une dynamique importantepour la création d’un nouvel engagement et d’uneconance renouvelée en un système qui en manque

actuellement33.

Les restrictions à l’exportation : les disciplinespourraient limiter les dégâts

Même si elles sont souvent utilisées en cas depénurie alimentaire, les restrictions à l’exportationpeuvent beaucoup augmenter les effets négatifsdes ambées de prix sur la sécurité alimentaire en

réduisant la capacité des consommateurs pauvresdes pays importateurs de denrées alimentairesà accéder à une nourriture adaptée à des prixabordables. À moyen terme, ces restrictionsnuisent également à la conance accordée aux

marchés internationaux en tant que source able

de denrées alimentaires. Elles réduisent aussila tendance à investir dans l’agriculture dansles pays exportateurs où il existe un avantageconcurrentiel au niveau de la production. Enn,

en l’absence de coopération internationale, leurseffets concurrentiels s’annulent en partie, ce quiréduit énormément la capacité de ces instruments

politiques à maintenir des prix internes bas34

.

Les restrictions à l’exportation pour l’agriculturesont un secteur qui est « sous-réglementé »dans le cadre de l’OMC. En même temps, il estparticulièrement difcile d’obtenir un consensus

politique dans ce domaine. En prenant en comptecette réalité et des progrès possibles au niveau desnégociations après Bali, Anania soutient qu’il estpossible d’introduire des changements au niveaudes règles, même pour un accord de l’OMC assez

peu ambitieux. Dans ce contexte, deux optionssemblent réalistes, compte tenu des positions denégociation observées. Comme le suggère Clay,la première étape pourrait être de s’assurerque les denrées alimentaires soient exemptéesdes restrictions à l’exportation ou des taxeslorsqu’elles sont achetées par des organisations

internationales pour être distribuées sur une basenon commerciale pour des raisons humanitaires.L’impact sur les volumes vendus et les prix dumarché serait minime, tandis que les avantages auniveau de la quantité de nourriture que de tellesorganisations pourraient distribuer dans le cadrede leurs contraintes nancières assez rigides

seraient énormes. Une autre option, un peu plusambitieuse, consisterait à ne pas modier les

disciplines actuelles mais à rendre leur applicationobligatoire en clariant certaines des principales

expressions utilisées comme « temporairement »,« empêcher », « atténuer », « pénurie critique »ou « essentiel » et en les soutenant par unetransparence et une obligation de notier plus

strictes35.

Sur le long terme, des réformes plus ambitieusespourraient tout simplement interdire lesrestrictions à l’exportation et les taxes avant dedénir une série d’exceptions réservées aux pays

en développement, limitées en matière de duréeet de produits concernés, et reposant sur desseuils de déclenchement transparents (ex. uneaugmentation importante du prix interne et uneaugmentation importante des exportations). Enn,

une option maximaliste serait d’introduire une« symétrie » parfaite entre les disciplines de l’OMC

qui règlementent les restrictions à l’exportationet à l’importation. Cela comprendrait une« taxication » des restrictions existantes outre les

droits de douane, c’est-à-dire leur remplacementpar des taxes à l’exportation « équivalentes »associées à des engagements de réduction.Une clause spéciale de sauvegarde permettraitd’introduire une taxe à l’exportation qui dépassele niveau maximum permis, pour une durée limitéeet dans des circonstances exceptionnelles. An

de garantir un minimum de volumes exportés, on

pourrait introduire des contingents d’exportationà des taux d’imposition réduits dénis en part

de la production interne pour une période deréférence et administrés sur une base NPF36. Enn,

le traitement spécial et différencié s’appliqueraitaux pays en développement (des périodes demise en œuvre plus longues, l’exonération de

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15

37 Cf. Anania, G. 2014. « Export Restrictions and Food Security » dans Tackling Agriculture in the Post-Bali Context: A Collection of

Short Essays.

38 Les pays du coton-4 : Bénin, Burkina Faso, Tchad et Mali. Initiative lancée en 2003.39 Cf. Imboden, N. 2014. « How to Re-invigorate the Cotton Issue at the WTO: Generate Ideas, Spin Proposals, Weave Solutions and Avoid

Stocks » dans l’ouvrage de l’ICTSD Tackling Agriculture in the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays.

40 Ibid .

la réduction des taxes remplacée par des tauxde droits consolidés, et des contingents de tauxd’imposition plus bas)37.

Le coton : il faut changer d’approche

Le coton reste un symbole de la dimensiondéveloppement du PDD. Cependant, d’aprèsImboden, il faudrait peut-être adopter unenouvelle approche après Bali, à la fois pour

redynamiser les négociations et pour tenircompte des modications importantes du marché

international du coton tout en gardant les objectifsde l’initiative du C-438. Tout d’abord, depuis lelancement de l’initiative sur le coton, les prixont plus que doublés, et on s’attend à ce qu’ilsrestent à des niveaux assez acceptables à l’avenir.Ensuite, les acteurs du marché international ducoton ont beaucoup changé : l’Inde, qui étaitun importateur net de coton brut en 2002, estmaintenant le deuxième plus grand exportateur

du monde ; la Chine a consolidé sa position decelui qui xe les prix du marché international du

coton et est devenue le premier producteur decoton du monde ; les États-Unis sont touchés parun déclin sur le long terme de la productivité etde la production du coton, tout en continuant àêtre le principal exportateur de coton brut ; et laproduction de l’UE est devenue négligeable, même

si elle accorde toujours le plus de subventions parunité39.

Les politiques du coton ont également évolué. Deschangements récents au niveau de la politique del’UE ont accordé plus de exibilité pour permettre

aux états membres de réintroduire des versementsliés à la production. D’un autre côté, la nouvelleFarm Bill  des États-Unis risque de réduire lessubventions accordées au coton. Ajouté aux

prix élevés de certains produits concurrents (enparticulier les biocarburants), cela suggère quela production du coton aux États-Unis risque decontinuer à baisser. La Chine, en revanche, estdevenue le pays qui accorde le plus de subventionsau coton en termes absolus. Même si on ne saitpas vraiment quelle proportion de ces subventionsrelève de la « catégorie verte », la productionchinoise de coton continue à être en grande partieséparée des prix internationaux40.

En réponse à ces changements, Imboden suggèreque des options possibles consisteraient àessayer de consolider les baisses existantesau niveau du soutien européen et américain,à continuer à réduire ce soutien et à essayerd’obtenir la promesse de ne pas introduire denouvelles subventions à l’exportation ou de prêtsà la commercialisation. La Chine limiterait ses

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16 Les négociations sur l’agriculture après Bali : Octobre 2014le déf de mise à jour des règles internationales de commerce

subventions à la quantité moyenne accordée lorsde la période 2000-05 (une période de prix assezbas), quelle que soit leur classication dans le

cadre de l’OMC. L’Inde limiterait ses aides aucoton à la quantité accordée à d’autres culturesconcurrentes et n’imposerait pas de restrictions àl’exportation. Enn, tous les pays accorderaient

un accès au marché sans droits de douane nicontingents aux producteurs de coton des PMA41.

La transparence, le suivi et le rôle du Comité del’agriculture

Le suivi des engagements par le Comité del’agriculture a fourni beaucoup d’informations surles politiques agricoles. Cependant, des annéesd’expérience de mise en œuvre de l’Accord surl’Agriculture ont révélé des incohérences auniveau des notications des membres, le besoin

de clarier certaines normes, le manque de

conformité et des lacunes importantes au niveaudes exigences de transparence. Pour n’en citerque quelques uns, parmi les problèmes identiés

jusqu’ici, on peut parler des aides aux primesd’assurance pour les cultures et d’autres aides quisont classées comme n’étant pas spéciques aux

produits alors qu’elles le sont pour l’agriculteur ;le manque de dénition claire concernant les aides

de l’article 6.2 ; la manière dont le soutien des prixdu marché (SPM) est mesuré, y compris l’emploide prix administrés, de prix de référence et dequantités éligibles ; le fait que, dans la catégorieverte, les pays doivent signaler les dépensesdans le cadre des douze principales rubriques del’annexe 2 mais ne sont pas obligés d’expliquer oude justier leur décision de classication ; et le

suivi des restrictions à l’exportation ou des aidesaux biocarburants42.

D’après Josling, le moyen le plus rapide d’améliorerla transparence serait d’adopter les propositionsde l’annexe M du projet de modalités de Doha.Bien qu’elles soient négociées dans le cadre d’unensemble, elles pourraient également être prisesséparément. La proposition n’implique pas demodications au niveau des règlements nationaux

et ne semble pas favoriser un pays en particulier.Elle ne ferait que remplacer les obligations assezvagues de l’article 18 par des exigences plus

détaillées. Une coordination renforcée à l’intérieurde l’OMC permettrait également d’améliorerla transparence et de réduire les activités quise recoupent. Les notications des subventions

dans le cadre de l’Accord sur les subventionset les mesures compensatoires (ASMC) sont trèsproches de celles concernant le soutien internedans l’Accord sur l’Agriculture. Les notications

de l’ASMC sont plus descriptives et n’ont pastoute la structure des tableaux de l’Accord surl’Agriculture. Il conviendrait peut-être d’associerles deux notications et de permettre à chaque

comité d’étudier le rapport combiné de leurspoints de vue différents.

Au-delà des notications, Ahmad et Bahalim

rappellent la nécessité de renforcer le travaildu Comité de l’agriculture permanent, enparticulier sa fonction délibérante. Outre le suivide la conformité avec les disciplines de l’OMC,le Comité de l’agriculture devrait permettre àtous les membres de l’OMC de consulter d’autresparties sur tous les aspects de l’Accord surl’Agriculture. En tant que lieu de consultation, ilne pourrait pas forcément juger, mais il devraitpermettre aux participants de comprendre leursdés respectifs. Le Comité de l’agriculture a déjà

pour mandat d’être un forum de consultation

tourné vers la mise en pratique. La clause de paixque Bali a offerte aux pays en développement quipourraient avoir violé leurs engagements dansle cadre de la MGS reposait sur la transparence,la responsabilité et l’autorisation expresse duComité de l’agriculture. En termes plus simples, siun membre souhaite violer les règles de l’OMC pourrépondre à des besoins de sécurité alimentaire,il doit alors consulter d’autres membres, fournirbeaucoup d’informations, prévenir à l’avancequ’il a l’intention de ce faire et s’assurer que cela

n’a pas d’effet de distorsion et ne nuit pas à lasécurité alimentaire. Cette série de conditionsassez claires pourrait permettre aux pays des’écarter de la lettre mais non de l’esprit desrèglements de l’OMC. Tout serait surveillé et misen œuvre à travers les organismes et les règlesexistants, ce qui devrait encourager la conformitéavec les exigences de notication. Si ce principe

est encore étendu, dans le cadre de l’Accord surl’Agriculture, cela pourrait permettre à l’OMC

41 Ibid .42 Cf. Josling, T. 2014 « Transparency and Monitoring in Agricultural Trade: Policy Options for the Post-Bali Agenda » dans Tackling

 Agriculture in the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays.

7/21/2019 Les Négociations Sur l’Agriculture Après Bali Le Défi de Mise à Jour Des Règles Internationales de Commerce

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d’aller de l’avant, de renforcer le Comité del’agriculture et de s’attaquer au commerce et àla sécurité alimentaire, tout en évitant qu’ellene soit freinée par les compromis politiques quiaccompagnent les négociations multilatérales43.

3. Conclusion

Les instructions que les ministres du commerceont données aux négociateurs à Bali (préparerun programme de travail « clairement déni sur

les questions restantes du Programme de Dohapour le développement ») créent une opportunitéimportante. Cela pourrait permettre aux membresde l’OMC de prendre les premiers pas hésitantsvers la mise à jour des règlements internationauxsur le commerce an de répondre aux nouveaux

dés auxquels l’alimentation et l’agriculture

doivent faire face dans le monde d’aujourd’hui.Cela permettrait également aux négociateursd’avancer vers une réponse à un certain nombre deproblèmes de longue date qui, au l des décennies,

ont pesé sur l’investissement dans l’agriculture,surtout dans les pays les plus pauvres du monde,avec toutes les conséquences que cela peut avoirpour les revenus agricoles et le développementrural.

Bien qu’il y ait régulièrement des inquiétudesà propos des menaces auxquelles elle doit faireface, l’OMC s’est montrée assez robuste. Le cadrede règles et les mécanismes de règlement desdifférends dont l’organisme est le gardien ont sansaucun doute bien survécu aux bouleversements

du paysage économique des deux dernièresdécennies, tandis que les principaux acteurs desmarchés alimentaires et agricoles comme la Chineet la Russie ont rejoint une queue de pays souventbeaucoup plus petits qui ont exprimé leur souhaitde devenir membres.

Cependant, les négociateurs auraient tort d’êtretrop conants en ce qui concerne la force de

l’organisation et l’ensemble de règlementsqu’elle supervise. Comme pour toute structure degouvernance internationale, il faut sans cesse lamaintenir et investir dans ses règlements et sesprocessus décisionnels an qu’ils continuent à

être considérés comme crédibles et légitimes parla population des pays dont les gouvernementssont membres. En même temps, les marchésagricoles subiront de plus en plus de pressions aucours des années à venir, puisqu’une populationinternationale plus grande et de plus en plusriche a besoin de plus de denrées alimentaireset agricoles (plus variées aussi) alors que lechangement climatique augmente la fréquencede phénomènes météorologiques extrêmesqui touchent l’agriculture et transformentdirectement les capacités de production desdifférentes zones écologiques. Dans ce contexte,des négociations après Bali pourraient permettre

aux gouvernements de faire le premier pas lecas échéant pour s’assurer que le système decommerce international est mieux armé pour faireface aux dés du monde de demain en s’appuyant

sur un cadre de règles sur le commerce agricoleplus efcace, plus équitable et plus durable.

43 Cf. Ahmad, M. et Bahalim, A 2014. « Strengthening the Deliberative Function of the Regular Committee on Agriculture » dans Tackling

 Agriculture in the Post-Bali Context: A Collection of Short Essays.

7/21/2019 Les Négociations Sur l’Agriculture Après Bali Le Défi de Mise à Jour Des Règles Internationales de Commerce

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Citation : ICTSD. 2014. Les négociations sur l’agriculture après Bali : le déf de mettre à jour les règles internationalesde commerce ; Programme de l’ICTSD sur l’agriculture, le commerce et le développement durable ; Note d’information ;Centre international pour le commerce et le développement durable, Genève, Suisse, http://www.ictsd.org.

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