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Posies Les trennes des orphelins I La chambre est pleine d'ombre; on entend vaguement De deux enfants le triste et doux chuchotement. Leur front se penche, encore alourdi par le rve, ous le long rideau blanc !ui tremble et se soul"ve... # $u dehors les oiseaux se rapprochent frileux; Leur aile s'engourdit sous le ton gris des cieux; %t la nouvelle $nne, & la suite brumeuse, Laissant tra'ner les plis de sa robe neigeuse, ourit avec des pleurs, et chante en grelottant... II (r les petits enfants, sous le rideau flottant, Parlent bas comme on fait dans une nuit obscure. Ils coutent, pensifs, comme un lointain murmure... Ils tressaillent souvent & la claire voix d'or Du timbre matinal, !ui frappe et frappe encor on refrain mtalli!ue et son globe de verre... # Puis, la chambre est glace...on voit tra'ner & terre, %pars autour des lits, des vtements de deuil) L'*pre bise d'hiver !ui se lamente au seuil ouffle dans le logis son haleine morose+ (n sent, dans tout cela, !u'il man!ue !uel!ue chose... # Il n'est donc point de m"re & ces petits enfants, De m"re au frais sourire, aux regards triomphants, %lle a donc oubli, le soir, seule et penche, D'exciter une flamme & la cendre arrache, D'amonceler sur eux la laine de l'dredon $vant de les !uitter en leur criant) pardon. %lle n'a point prvu la froideur matinale, -i bien ferm le seuil & la bise hivernale,... # Le rve maternel, c'est le ti"de tapis, .'est le nid cotonneux o/ les enfants tapis, .omme de beaux oiseaux !ue balancent les branches, Dorment leur doux sommeil plein de visions blanches+... # %t l&, # c'est comme un nid sans plumes, sans chaleur, (/ les petits ont froid, ne dorment pas, ont peur; 0n nid !ue doit avoir glac la bise am"re... III 1otre coeur l'a compris) # ces enfants sont sans m"re. Plus de m"re au logis+ # et le p"re est bien loin+... # 0ne vieille servante, alors, en a pris soin. Les petits sont tout seuls en la maison glace; (rphelins de !uatre ans, voil& !u'en leur pense 'veille, par degrs, un souvenir riant... .'est comme un chapelet !u'on gr"ne en priant) # $h+ !uel beau matin, !ue ce matin des trennes+

.hacun, pendant la nuit, avait rv des siennes Dans !uel!ue songe trange o/ l'on vo2ait 3ou3oux, 4onbons habills d'or, tincelants bi3oux, 5ourbillonner, danser une danse sonore, Puis fuir sous les rideaux, puis repara'tre encore+ (n s'veillait matin, on se levait 3o2eux, La l"vre affriande, en se frottant les 2eux... (n allait, les cheveux emmls sur la tte, Les 2eux tout ra2onnants, comme aux grands 3ours de fte, %t les petits pieds nus effleurant le plancher, $ux portes des parents tout doucement toucher... (n entrait+... Puis alors les souhaits... en chemise, Les baisers rpts, et la gaiet permise+ I1 $h+ c'tait si charmant, ces mots dits tant de fois+ # 6ais comme il est chang, le logis d'autrefois) 0n grand feu ptillait, clair, dans la chemine, 5oute la vieille chambre tait illumine; %t les reflets vermeils, sortis du grand fo2er, ur les meubles vernis aimaient & tourno2er... # L'armoire tait sans clefs+... sans clefs, la grande armoire+ (n regardait souvent sa porte brune et noire... ans clefs+... c'tait trange+... on rvait bien des fois $ux m2st"res dormant entre ses flancs de bois, %t l'on cro2ait ou7r, au fond de la serrure 4ante, un bruit lointain, vague et 3o2eux murmure... # La chambre des parents est bien vide, au3ourd'hui) $ucun reflet vermeil sous la porte n'a lui; Il n'est point de parents, de fo2er, de clefs prises) Partant, point de baisers, point de douces surprises+ (h+ !ue le 3our de l'an sera triste pour eux+ # %t, tout pensifs, tandis !ue de leurs grands 2eux bleus, ilencieusement tombe une larme am"re, Ils murmurent) 89uand donc reviendra notre m"re,8 ....................................................................... ....... 1 6aintenant, les petits sommeillent tristement) 1ous dirie:, & les voir, !u'ils pleurent en dormant, 5ant leurs 2eux sont gonfls et leur souffle pnible+ Les tout petits enfants ont le coeur si sensible+ # 6ais l'ange des berceaux vient essu2er leurs 2eux, %t dans ce lourd sommeil met un rve 3o2eux, 0n rve si 3o2eux, !ue leur l"vre mi#close, ouriante, semblait murmurer !uel!ue chose... # Ils rvent !ue, penchs sur leur petit bras rond, Doux geste du rveil, ils avancent le front, %t leur vague regard tout autour d'eux se pose... Ils se croient endormis dans un paradis rose... $u fo2er plein d'clairs chante gaiement le feu... Par la fentre on voit lbas un beau ciel bleu; La nature s'veille et de ra2ons s'enivre...

La terre, demie#nue, heureuse de revivre, $ des frissons de 3oie aux baisers du soleil... %t dans le vieux logis tout est ti"de et vermeil) Les sombres vtements ne 3onchent plus la terre, La bise sous le seuil a fini par se taire... (n dirait !u'une fe a pass dans cela+... # Les enfants, tout 3o2eux, ont 3et deux cris... L&, Pr"s du lit maternel, sous un beau ra2on rose, L&, sur le grand tapis, resplendit !uel!ue chose... .e sont des mdaillons argents, noirs et blancs, De la nacre et du 3ais aux reflets scintillants; Des petits cadres noirs, des couronnes de verre, $2ant trois mots gravs en or) 8$ -(5;% 6%;%+8 ....................................................................... ......... ensation Par les soirs bleus d't, 3'irai dans les sentiers, Picot par les bls, fouler l'herbe menue) ;veur, 3'en sentirai la fra'cheur & mes pieds. ?@. Le bal des pendus $u gibet noir, manchot aimable, Dansent, dansent les paladins,

Les maigres paladins du diable, Les s!uelettes de aladins. 6essire 4el:buth tire par la cravate es petits pantins noirs grimaCant sur le ciel, %t, leur cla!uant au front un revers de savate, Les fait danser, danser aux sons d'un vieux -oLl+ %t les pantins cho!us enlacent leurs bras grles) .omme des orgues noirs, les poitrines & 3our 9ue serraient autrefois les gentes damoiselles, e heurtent longuement dans un hideux amour. Durrah+ les gais danseurs, !ui n'ave: plus de panse+ (n peut cabrioler, les trteaux sont si longs+ Dop+ !u'on ne sache plus si c'est bataille ou danse+ 4el:buth enrag racle ses violons+ ( durs talons, 3amais on n'use sa sandale+ Pres!ue tous ont !uitt la chemise de peau; Le reste est peu gnant et se voit sans scandale. ur les cr*nes, la neige appli!ue un blanc chapeau) Le corbeau 0n morceau (n dirait, Des preux, fait panache & ces ttes fles, de chair tremble & leur maigre menton) tourno2ant dans les sombres mles, raides, heurtant armures de carton.

Durrah+ la bise siffle au grand bal des s!uelettes+ Le gibet noir mugit comme un orgue de fer+ Les loups vont rpondant des forts violettes) $ l'hori:on, le ciel est d'un rouge d'enfer... Dol&, secoue:#moi ces capitans fun"bres 9ui dfilent, sournois, de leurs gros doigts casss 0n chapelet d'amour sur leur p*les vert"bres) .e n'est pas un moustier ici, les trpasss+ (h+ voil& !u'au milieu de la danse macabre 4ondit dans le ciel rouge un grand s!uelette fou %mport par l'lan, comme un cheval se cabre) %t, se sentant encor la corde raide au cou, .rispe ses petits doigts sur son fmur !ui cra!ue $vec des cris pareils & des ricanements, %t, comme un baladin rentre dans la bara!ue, ;ebondit dans le bal au chant des ossements. $u gibet noir, manchot aimable, Dansent, dansent les paladins, Les maigres paladins du diable, Les s!uelettes de aladins. Le ch*timent de 5artufe

5isonnant, tisonnant son coeur amoureux sous a chaste robe noir, heureux, la main gante, 0n 3our !u'il s'en allait, effro2ablement doux, ?@. La maline Dans la salle & manger brune, !ue parfumait 0ne odeur de vernis et de fruits, & mon aise ?@. L'clatante victoire de arrebrQcN

;%6P(;5%% $0R .;I D% 1I1% L'%6P%;%0;+ Fravure belge brillamment colore, se vend & .harleroi, MK centimes. $u milieu, l'%mpereur, dans une apothose 4leue et 3aune, s'en va, raide, sur son dada Elambo2ant; tr"s heureux, # car il voit tout en rose, Eroce comme Heus et doux comme un papa;

%n bas, les bons Pioupious !ui faisaient la sieste Pr"s des tambours dors et des rouges canons e l"vent gentiment. Pitou remet sa veste, %t, tourn vers le .hef, s'tourdit de grands noms+ $ droite, Dumanet, appu2 sur la crosse De son chassepot, sent frmir sa nu!ue en brosse, %t) 81ive l'%mpereur+++8 # on voisin reste coi... 0n schaNo surgit, comme un soleil noir... # $u centre, 4o!uillon rouge et bleu, tr"s na7f, sur son ventre e dresse, et, # prsentant ses derri"res #) 8 De !uoi,...8

(ctobre =>?@. Le buffet .'est un large buffet sculpt; le chne sombre, 5r"s vieux, a pris cet air si bon des vieilles gens; Le buffet est ouvert, et verse dans son ombre .omme un flot de vin vieux, des parfums engageants; 5out plein, c'est un fouillis de vieilles vieilleries, De linges odorants et 3aunes, de chiffons De femmes ou d'enfants, de dentelles fltries, De fichus de grand#m"re o/ sont peints des griffons; # .'est l& !u'on trouverait les mdaillons, les m"ches De cheveux blancs ou blonds, les portraits, les fleurs s"ches Dont le parfum se mle & des parfums de fruits. # ( buffet du vieux temps, tu sais bien des histoires, %t tu voudrais conter tes contes, et tu bruis 9uand s'ouvrent lentement tes grandes portes noires.

(ctobre =>?@. 6a boh"me SEantaisieT ?=. L'orgie parisienne ou Paris se repeuple ( l*ches, la voil&+ Dgorge: dans les gares+ Le soleil essu2a de ses poumons ardents Les boulevards !u'un soir combl"rent les 4arbares. 1oil& la .it sainte, assise & l'occident+ $lle:+ on prviendra les reflux d'incendie, 1oil& les !uais, voil& les boulevards, voil& Les maisons sur l'a:ur lger !ui s'irradie %t !u'un soir la rougeur des bombes toila+ .ache: les palais morts dans des niches de planches+ L'ancien 3our effar rafra'chit vos regards. 1oici le troupeau roux des tordeuses de hanches) o2e: fous, vous sere: drBles, tant hagards+ 5as de chiennes en rut mangeant des cataplasmes, Le cri des maisons d'or vous rclame. 1ole:+ 6ange:+ 1oici la nuit de 3oie aux profonds spasmes 9ui descend dans la rue. ( buveurs dsols, 4uve:+ 9uand la lumi"re arrive intense et folle, Eouillant & vos cBts les luxes ruisselants, 1ous n'alle: pas baver, sans geste, sans parole, Dans vos verres, les 2eux perdus aux lointains blancs, $vale:, pour la ;eine aux fesses cascadantes+ %coute: l'action des stupides ho!uets Dchirants+ %coute: sauter aux nuits ardentes Les idiots r*leux, vieillards, pantins, la!uais+ ( coeurs de salet, bouches pouvantables,

Eonctionne: plus fort, bouches de puanteurs+ 0n vin pour ces torpeurs ignobles, sur ces tables... 1os ventres sont fondus de hontes, B 1ain!ueurs+ (uvre: votre narine aux superbes nauses+ 5rempe: de poisons forts les cordes de vos cous+ ur vos nu!ues d'enfants baissant ses mains croises Le Po"te vous dit) 8( l*ches, so2e: fous+ Parce !ue vous fouille: le ventre de la Eemme, 1ous craigne: d'elle encore une convulsion 9ui crie, asph2xiant votre niche inf*me ur sa poitrine, en une horrible pression. 2philiti!ues, fous, rois, pantins, ventrilo!ues, 9u'est#ce !ue Ca peut faire & la putain Paris, 1os *mes et vos corps, vos poisons et vos lo!ues, %lle se secouera de vous, hargneux pourris+ %t !uand vous sere: bas, geignant sur vos entrailles, Les flancs morts, rclamant votre argent, perdus, La rouge courtisane aux seins gros de batailles Loin de votre stupeur tordra ses poings ardus+ 9uand tes pieds ont dans si fort dans les col"res, Paris+ !uand tu reCus tant de coups de couteau, 9uand tu gis, retenant dans tes prunelles claires 0n peu de la bont du fauve renouveau, ( cit douloureuse, B cit !uasi morte, La tte et les deux seins 3ets verts l'$venir (uvrant sur ta p*leur ses milliards de portes, .it !ue le Pass sombre pourrait bnir) .orps remagntis pour les normes peines, 5u rebois donc la vie effro2able+ tu sens ourdre le flux des vers livides en tes veines, %t sur ton clair amour rBder les doigts glaCants+ %t ce n'est pas mauvais. Les vers, les vers livides -e gneront pas plus ton souffle de Progr"s 9ue les tr2x n'teignaient l'oeil des .ariatides (/ des pleurs d'or astral tombaient des bleus degrs.8 9uoi!ue ce soit affreux de te $insi; !uoi!u'on n'ait fait 0lc"re plus puant & la -ature Le po"te te dit) 8 plendide revoir couverte 3amais d'une cit verte, est ta 4eaut+8

L'orage t'a sacre suprme posie; L'immense remuement des forces te secourt; 5on oeuvre bout, la mort gronde, .it choisie+ $masse les strideurs au coeur du clairon sourd.

Le Po"te prendra le sanglot des Inf*mes, La haine des EorCats, la clameur des 6audits; %t ses ra2ons d'amour flagelleront les Eemmes. es strophes bondiront) 1oil&+ voil&+ bandits+ # ocit, tout est rtabli) # les orgies Pleurent leur ancien r*le aux anciens lupanars) %t les ga: en dlire, aux murailles rougies, Elambent sinistrement vers les a:urs blafards+ 6ai =>?=. Les mains de